1 1945, Carrefour, articles (1945–1947). L’Amérique de la vie quotidienne (19 octobre 1945)
1 ue le pays n’était pas le mien. C’était l’Europe. C’est ici l’Amérique, et je n’ai pas fini de m’en ébahir. Ce Nouveau Monde
2 . New York a les plus hauts gratte-ciel du monde, c’est vrai. Mais Le Corbusier, promené pendant une heure dans la ville par
3 ue pas dans l’ensemble. Elle se sent. L’Amérique, c’est d’abord un sentiment. J’avais, avant d’y venir, vu tant de films et l
4 ux reporters : « Jim est simplement épatant, mais c’est Joe que j’aimais, je l’attends, je vais me séparer de Jim, et je suis
5 cette préface à quelques articles sur l’Amérique. C’est que je crois aux signes plus qu’aux faits ; aux courants de sensibili
2 1945, Carrefour, articles (1945–1947). Le rêve américain (9 novembre 1945)
6 ue n’est pas un pays de rêve quand on y vit, mais c’est un pays de rêveurs. Je vais parfois les regarder dans les grandes sal
7 nnerait, croient-ils. À une aisance qui va venir. C’est là tout le secret de ce que l’on nomme leur optimisme. L’Américain ne
8 L’Américain ne croit pas aux limites. Une limite, c’est toujours la fin d’un rêve. Non seulement les limites le gênent, mais
9 tre qu’elles existent, sinon pour être dépassées. C’est contraire à sa tradition. Ses ancêtres ont été amenés sur les rives d
10 ent plus d’issues prochaines, hésitent… Pourtant, c’est bien le même rêve qui les tourmente et les anime : aller plus loin, v
11 uropéens, ces agités, ces nerveux, ces tricheurs. C’est ainsi, et je ne juge personne. Il faut verser ces injustices flagrant
12 le planétaire. Mais il y a le rêve des civils. Et c’est lui qui va dominer, nécessairement. Les vétérans seront absorbés par
13 . Et ce pressentiment l’inquiète profondément. Or c’est bien cette situation que Cordell Hull, le ministre des Affaires étran
14 ffaires étrangères de Roosevelt, avait prévue. Et c’est elle qu’il avait tenté de prévenir, non sans succès, en particulier p
3 1945, Carrefour, articles (1945–1947). Hollywood n’a plus d’idées (13 décembre 1945)
15 en argent tout ce qu’elle a envie de toucher, et c’est pourquoi son avidité même à se renouveler stérilise instantanément le
16 de poing, de coups de feu et de coups de théâtre. C’est que le public, me disent les producers, n’accepte pas que Hedy Lamarr
17 algré la minceur de ses lèvres. Un peu plus tard, c’est une party de Pâques russe chez une amie. « Venez très tôt, vous aurez
18 minute plus tard, un pas rapide dans l’escalier : c’est elle encore, en robe courte de soie grise, et déjà nous choquons nos
19 ns d’expression radicalement neufs qu’il permet : c’est Walt Disney. Les autres en sont encore à photographier des comédies,
20 améra, et sur les rythmes habituels de notre vie. C’est dire qu’ils oublient ou refusent de prendre avantage des possibilités
21 que rose et violacée de Stokowsky. Par malchance, c’est au lendemain de la première de Fantasia à Buenos Aires que j’ai renco
4 1945, Carrefour, articles (1945–1947). Les enfants américains réclament des bombes atomiques (20 décembre 1945)
22 soie rose feu. — « Papa, me dit mon petit garçon, c’est Miss Hepburn ! » — « C’est moi ! », dit-elle en lui pinçant la joue,
23 dit mon petit garçon, c’est Miss Hepburn ! » — «  C’est moi ! », dit-elle en lui pinçant la joue, et la vendeuse nous planta
5 1946, Carrefour, articles (1945–1947). Deux presses, deux méthodes : l’Américain expose, le Français explique (4 avril 1946)
24 que vous ne verrez jamais, dans ce même journal, c’est une polémique contre un autre journal. Ceci me paraît très important.
25 s’arrêtent. Ce que l’on trouve dans son journal, c’est un débat à propos d’un débat. C’est un torrent de jugements contradic
26 son journal, c’est un débat à propos d’un débat. C’est un torrent de jugements contradictoires, mais trop exactement prévus
27 en ruine, la France en crise pour dire le moins, c’est bien le moment de lire Paul de Kock… Des moyens d’information dign
6 1946, Carrefour, articles (1945–1947). Une bureaucratie sans ronds-de-cuir (23 mai 1946)
28 et de leur budget particulier, mais il avoue que c’est une tâche impossible. Dans le domaine des transports, par exemple, so
29 ec ou sans augmentation de salaire et de rang. Et c’est ainsi que dans le désordre éperdument organisé, la bureaucratie la pl
30 e vienne à l’esprit. J’ai dit désordre, parce que c’est de ce nom que l’on désigne ordinairement une situation dont notre esp
31 upations habituelles. Cet exemple est courant, et c’est pourquoi je le donne. Si vous prenez, au lieu de l’OWI, le NWLB ou l’
32 et de coups de tampon sur des notes de service ? C’est fort possible. Personne au monde n’y comprendra plus rien. Une moitié
33 iseront de travailler. Et cela suffira bien : car c’est , en fait, par très peu d’hommes que les choses marchent. Alors un êtr
34 s, aux frais de l’État qui payera l’assurance. Et c’est la sagesse politique, au siècle du collectivisme. g. Rougemont De
7 1946, Carrefour, articles (1945–1947). L’Amérique est-elle nationaliste ? (29 août 1946)
35 evenir nationalistes à la manière des Européens ? C’est , à mon sens, toute la question. Lorsque nous parlons d’impérialisme,
36 et qu’elle se heurte à des voisins organisés. Or c’est le cas de l’Amérique, virtuellement, depuis que sa mouvante frontier
37 l y a de répugnant dans le nationalisme européen, c’est que l’on y sent une volonté de resserrement, une soif d’imposer au vo
38 y a de rassurant dans le nationalisme américain, c’est qu’on y sent une volonté d’élargissement, une soif de proposer au voi
39 ne peut comprendre. Ce qu’on voudrait, en somme, c’est que les Américains interviennent quand les choses vont très mal — par
8 1947, Carrefour, articles (1945–1947). L’art dirigé [Réponse à une enquête] (23 janvier 1947)
40 es en couleur. Ce qu’ils appellent diriger l’art, c’est d’une part exercer une censure (mais la censure des lettres n’a jamai
41 rhétorique, ses sujets, et peu à peu son public : c’est l’ambition romantique, c’est le destin de l’artiste individualiste, e
42 u à peu son public : c’est l’ambition romantique, c’est le destin de l’artiste individualiste, et c’est trop pour un homme. I
43 , c’est le destin de l’artiste individualiste, et c’est trop pour un homme. Il s’agit pour nous, au xxe , d’appeler et de cré
9 1947, Carrefour, articles (1945–1947). Fédération ou dictature mondiale ? (9 avril 1947)
44 continent à l’autre. Traiter une idée en utopie, c’est en fait déclarer « qu’on est contre », en évitant d’avouer ses raison
45 t pour la mort en grande série ? Ce qui est vrai, c’est qu’on les y prépare de force, quand on a décidé de faire la guerre. M
46 nes. Cette faiblesse taxe identiquement l’ONU, et c’est précisément pour cette raison que beaucoup éprouvent l’urgence d’un g
47 rérogatives de droit divin. Qu’on ne dise pas que c’est une pure rêverie. Tout récemment, nous avons enregistré la première i
48 , nous décidons pour l’autre. Ce qui est certain, c’est que l’une et l’autre ne peuvent plus être désormais qu’aux dimensions
10 1947, Carrefour, articles (1945–1947). La France est assez grande pour n’être pas ingrate (26 novembre 1947)
49 les assurances de notre ingratitude anticipée. » C’est ce qu’il me semble entendre un peu partout depuis que je suis rentré
50 ffrent leur appui ! J’entends dire couramment : «  C’est entendu, ils nous fournissent du blé et de l’argent pour l’acheter, m
51 ils y trouvent d’autre ? L’intérêt de l’Amérique, c’est que l’Europe vive et ne tombe pas aux mains des Russes ; c’est qu’ell
52 urope vive et ne tombe pas aux mains des Russes ; c’est qu’elle soit forte et donc unique, puisque les autres comptent sur sa
53 possible. À croire la propagande des staliniens, c’est nous qui sauverions l’Amérique de la ruine en acceptant qu’elle nous
54 us avance une vingtaine de milliards de dollars ! C’est l’Amérique, dit-on, qui a besoin de l’Europe ! Car elle est à la veil
55 t politique que nous devons affirmer ou regagner, c’est dans l’union fédérative du continent qu’elle trouvera sa seule garant