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mais d’ingéniosité et d’équipement technique, et
vous
savez que la Suisse possède tout cela. En fait, c’est à l’École polyt
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x ? Je demande à mes amis américains : — Imaginez-
vous
ce pays conduit non par un cabinet fédéral, mais par les gouverneurs
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quelques nuances près, le plan des Nations unies.
Vos
États n’ont fait un pays qu’en unissant leurs peuples, et non leurs c
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i notre conversation : Moi. — Contre qui écrivez-
vous
aujourd’hui ? Lui. — Je fais le plan d’une trilogie sur les trois gr
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ieure au soviétisme et à l’hitlérisme. Lui. — Je
vous
entends ! J’entends le diable ! D’ailleurs, on n’entend guère que lui
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! Je distingue un espoir. Des trois régimes dont
vous
parlez, l’un est écrasé. Les deux qui restent, et qui se partagent le
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sitôt pour des fascistes. Lui. — Autant dire que
votre
mot démocratie a perdu tout son pouvoir ! Une étiquette qui s’appliqu
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bien c’est un mensonge et une hypocrisie. Je vais
vous
en donner un exemple. Les Soviets, qui se disent démocrates, dénonçai
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. — Voilà le problème embrouillé à souhait, et je
vous
vois sourire diaboliquement, à votre tour. Mais nous sommes peut-être
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ouhait, et je vous vois sourire diaboliquement, à
votre
tour. Mais nous sommes peut-être d’accord, en réalité. Puisque tous s
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ettre… Lui. — Mais avouez qu’aussi longtemps que
vos
hommes d’État démocratiques n’auront pas abordé ouvertement et sincèr
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pable d’absorber les rayons gamma. Ceux-ci, comme
vous
le savez, sont réputés mortels. On verra bien comment ces cochons-là
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u sens le plus scientifique de ce terme. Quand je
vous
disais que la guerre est morte, la guerre des militaires, la vraie !
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te, la guerre des militaires, la vraie ! Quand je
vous
disais que ses règles sacrées sont toutes violées sans exception par
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!) La Bombe n’est pas dangereuse du tout. — Êtes-
vous
fou ? De quoi donc parliez-vous dans vos articles précédents ? Faut-i
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du tout. — Êtes-vous fou ? De quoi donc parliez-
vous
dans vos articles précédents ? Faut-il penser que vous vous moquiez d
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— Êtes-vous fou ? De quoi donc parliez-vous dans
vos
articles précédents ? Faut-il penser que vous vous moquiez du monde ?
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dans vos articles précédents ? Faut-il penser que
vous
vous moquiez du monde ? — J’étais sérieux. Je prenais au sérieux les
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vos articles précédents ? Faut-il penser que vous
vous
moquiez du monde ? — J’étais sérieux. Je prenais au sérieux les événe
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x. Je parlais de la fin du monde… — Et maintenant
vous
nous dites : aucun danger ! C’est là sans doute votre manière paradox
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s nous dites : aucun danger ! C’est là sans doute
votre
manière paradoxale d’avouer que vous exagériez. Savez-vous que beauco
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sans doute votre manière paradoxale d’avouer que
vous
exagériez. Savez-vous que beaucoup l’ont pensé, sans vous le dire ? I
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ère paradoxale d’avouer que vous exagériez. Savez-
vous
que beaucoup l’ont pensé, sans vous le dire ? Il est bien naturel que
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gériez. Savez-vous que beaucoup l’ont pensé, sans
vous
le dire ? Il est bien naturel que l’événement d’Hiroshima nous ait je
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: la guerre des gaz. Tout le monde s’y préparait,
vous
rappelez-vous ? Dans toutes les capitales d’Europe, on voyait en 1939
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s gaz. Tout le monde s’y préparait, vous rappelez-
vous
? Dans toutes les capitales d’Europe, on voyait en 1939 les civils se
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as eu recours aux gaz, c’est entendu. Mais pensez-
vous
qu’une timidité subite l’ait arrêté, ou quelque amour tardif de notre
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l’employer. Le cas de la Bombe est différent. Je
vous
répète qu’elle supprimera la possibilité de riposter, c’est-à-dire jo
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de faire sauter la Terre. — Alors, pourquoi dites-
vous
: la Bombe n’est pas dangereuse ? — Pour une raison très simple. La B
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la plus belle absurdité de l’Histoire. Comprenez-
vous
bien de quoi l’on parle ? Contrôler cet objet inerte ? C’est comme si
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disait devant le Sénat le général Marshall. « Je
vous
abandonne volontiers l’infanterie, déclarait en substance l’amiral Ki
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te d’amer byzantinisme. Dans ces conditions, êtes-
vous
tenté de regarder ailleurs ? La France « en attente » Ne vous y
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arder ailleurs ? La France « en attente » Ne
vous
y trompez pas. Le monde entier, comme nous-mêmes, attend encore de la
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, sous peine de voir le monde entier sombrer avec
vous
dans le désespoir. Comment ? Je vais d’abord vous confier une chose :
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vous dans le désespoir. Comment ? Je vais d’abord
vous
confier une chose : je ne crois pas aux « blocs ». C’est une inventio
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u mensonge. Inventer la paix Mais ne pensez-
vous
pas alors que la vocation de la France est clairement circonscrite pa
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ème de la quantité, mais de la qualité. Et croyez-
vous
cette Europe possible ? Parfaitement. Les Américains ne demandent pas
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l’Europe se fera, envers et contre tout et tous.
Vous
voyez que ma réponse est optimiste. Dites bien cependant que je reste
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obre 1950)n o Messieurs les députés européens,
Vous
êtes ici pour faire l’Europe, et nous pour faire semblant de la faire
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nt suffi pour fédérer 25 États souverains. Pensez-
vous
que l’Histoire vous en laisse un peu plus, pour unir vos États dans u
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r 25 États souverains. Pensez-vous que l’Histoire
vous
en laisse un peu plus, pour unir vos États dans un plus grand péril ?
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l’Histoire vous en laisse un peu plus, pour unir
vos
États dans un plus grand péril ? Vous me direz… Vous me direz q
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pour unir vos États dans un plus grand péril ?
Vous
me direz… Vous me direz que l’Europe est plus grande que la Suisse
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s dans un plus grand péril ? Vous me direz…
Vous
me direz que l’Europe est plus grande que la Suisse ; qu’il fallut un
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ourd’hui soit plus grande que la Suisse d’alors :
vous
êtes venus de Stockholm à Strasbourg — ou de Rome, ou même d’Ankara —
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nève ou des Grisons à Berne. Pour la guerre entre
vos
pays, les deux dont vous sortez suffisent. Vos nations vivent ensembl
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rne. Pour la guerre entre vos pays, les deux dont
vous
sortez suffisent. Vos nations vivent ensemble depuis autant de siècle
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re vos pays, les deux dont vous sortez suffisent.
Vos
nations vivent ensemble depuis autant de siècles, et souvent davantag
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s cantons. Leurs sorts ne sont pas moins liés, si
vous
regardez l’Europe dans l’ensemble du monde. Vos cordons de douanes ne
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vous regardez l’Europe dans l’ensemble du monde.
Vos
cordons de douanes ne sont pas plus nombreux, ni moins strangulatoire
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strangulatoires, que ne l’étaient les nôtres. Et
vos
économies ne sont pas plus disparates que celles de Zurich, par exemp
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incipe, mais pratique. C’est assez pour que j’ose
vous
supplier d’y réfléchir quelques minutes. La Suisse s’est unie en neuf
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Car le temps fait beaucoup à l’affaire. Celui que
vous
n’auriez pas, Staline le prend : c’est le temps de méditer avant d’ag
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le temps de méditer avant d’agir. Mais celui que
vous
risquez de perdre, cet été, soyez bien sûrs qu’il le retrouvera : c’e
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nde, ou de gauche, ou de droite — ou ne sera pas.
Vous
êtes là pour qu’elle soit, pour qu’elle dure, dans ses diversités de
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sans compromis, elle ne sera pas. C’est clair.
Vous
ignorez l’opinion vraie Seuls ceux qui veulent passionnément le bu
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« On suit ceux qui marchent », dit Péguy. Elle ne
vous
suivra pas si vous êtes daltoniens, et les sceptiques, alors, pourron
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marchent », dit Péguy. Elle ne vous suivra pas si
vous
êtes daltoniens, et les sceptiques, alors, pourront bien dire : j’ava
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ens, c’est l’Europe. Mais elle ne bougera pas, si
vous
ne faites presque rien. Elle laissera parler les sceptiques parler «
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çus, et Staline très content. Voici l’acte que je
vous
propose, au nom de l’opinion qui ne parle pas encore. Messieurs les d
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n qui ne parle pas encore. Messieurs les députés,
vous
le savez bien, vous n’êtes pas de vrais députés, car les vrais sont é
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ncore. Messieurs les députés, vous le savez bien,
vous
n’êtes pas de vrais députés, car les vrais sont élus, et vous êtes si
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pas de vrais députés, car les vrais sont élus, et
vous
êtes simplement délégués pour consultation. Décidez de vous faire éli
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simplement délégués pour consultation. Décidez de
vous
faire élire. Un raisonnement très simple appuie cette suggestion. On
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e nulle autre méthode ne saurait provoquer. Si
vous
me dites… La condition à la fois nécessaire et suffisante d’une te
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n précis de Constitution fédérale de l’Europe. Si
vous
acceptez cela, vous aurez avec vous l’opinion vraie dans sa majorité,
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tion fédérale de l’Europe. Si vous acceptez cela,
vous
aurez avec vous l’opinion vraie dans sa majorité, les militants de l’
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l’Europe. Si vous acceptez cela, vous aurez avec
vous
l’opinion vraie dans sa majorité, les militants de l’Europe, la logiq
70
e de l’Histoire, le réveil de notre espérance. Si
vous
n’acceptez pas, vous ne trouverez derrière vous que le vide et l’indi
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éveil de notre espérance. Si vous n’acceptez pas,
vous
ne trouverez derrière vous que le vide et l’indifférence ; et devant
72
i vous n’acceptez pas, vous ne trouverez derrière
vous
que le vide et l’indifférence ; et devant vous, le rire des hommes d’
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re vous que le vide et l’indifférence ; et devant
vous
, le rire des hommes d’acier. Si vous me dites que c’est prématuré, je
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; et devant vous, le rire des hommes d’acier. Si
vous
me dites que c’est prématuré, je vous supplierai de déclarer claireme
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d’acier. Si vous me dites que c’est prématuré, je
vous
supplierai de déclarer clairement à quel moment, et sous quelles cond
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les conditions, cela cessera d’être prématuré. Si
vous
me dites que c’est très joli, mais qu’il faut qu’on vous laisse du te
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dites que c’est très joli, mais qu’il faut qu’on
vous
laisse du temps, je vous proposerai de l’obtenir de Staline. Car en E
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i, mais qu’il faut qu’on vous laisse du temps, je
vous
proposerai de l’obtenir de Staline. Car en Europe il y en a peu. Si v
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tenir de Staline. Car en Europe il y en a peu. Si
vous
me dites enfin que c’est plus difficile que je n’ai l’air de le pense
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n’ai l’air de le penser dans ma candeur naïve, je
vous
demanderai si quelque chose au monde est plus difficile à concevoir q
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tre Europe divisée, devant toutes les menaces que
vous
savez : un régime social déficient, le chômage étendu, la ruine à bre
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il n’y a presque plus rien à perdre. Que risquez-
vous
à tenter l’impossible ? D’autre part, il est sûr qu’il y aurait tout
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uer la dernière chance européenne. Voilà le pari.
Vous
êtes acculés à l’audace. Donnez-nous la Constitution ! Messieurs les
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la Constitution ! Messieurs les députés, faut-il
vous
dire encore que je ne suis rien qu’une voix presque désespérée, et sa
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presque désespérée, et sans autre pouvoir que de
vous
adjurer de la part des millions qui se taisent mais qui ont peur ? Pa
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nences : comprenez l’anxiété qui les dicte. Je ne
vous
écrirais pas si je ne savais très bien qu’une partie d’entre vous m’a
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s si je ne savais très bien qu’une partie d’entre
vous
m’approuve et qu’une autre ne dit pas non. Dans un mouvement de passi
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vement de passion, je m’écriais l’autre jour : si
vous
ne voulez rien faire, allez-vous-en ! Mais beaucoup d’entre vous veul
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rien faire, allez-vous-en ! Mais beaucoup d’entre
vous
veulent agir et je les supplie maintenant, au nom de l’Europe, de res
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e espoir, un signe ! Des raisons de vivre !
Vous
n’êtes pas encore l’espoir des peuples libres, ni des peuples muets d
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res, ni des peuples muets de l’Est européen. Mais
vous
pouvez le devenir et sonner le ralliement. Tout tient à cela, tout ti
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er le ralliement. Tout tient à cela, tout tient à
votre
sage audace. Car si l’Europe unie n’est pas un grand espoir renaissan
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us des États. Messieurs les députés européens, je
vous
salue d’un vœu qui voudrait résumer celui de tous nos peuples aux éco
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, un vœu mêlé d’angoisse et d’espérance : méritez
votre
nom, faites-vous élire et fédérez l’Europe pendant qu’il en est temps
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goisse et d’espérance : méritez votre nom, faites-
vous
élire et fédérez l’Europe pendant qu’il en est temps. Ferney, 30 jui
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1950. p. Rougemont Denis de, « Messieurs, on
vous
attend encore au pied du mur ! », Combat, Paris, 4 octobre 1950, p. 6