1 1946, Combat, articles (1946–1950). Ni secret ni défense (19-20 mai 1946)
1 t, les généraux et quelques vulgarisateurs en mal d’ idées ont trouvé deux moyens d’esquiver la question posée par la bombe
2 garisateurs en mal d’idées ont trouvé deux moyens d’ esquiver la question posée par la bombe atomique. Ils essaient d’encha
3 uestion posée par la bombe atomique. Ils essaient d’ enchaîner le monstre avec des agrafes de dossiers : « C’est un secret
4 essaient d’enchaîner le monstre avec des agrafes de dossiers : « C’est un secret que nous gardons, c’est un dépôt sacré »
5 ’est un dépôt sacré », disent-ils. Et sans l’avis d’ aucun savant autorisé, ils parlent de défenses possibles, si toutefois
6 sans l’avis d’aucun savant autorisé, ils parlent de défenses possibles, si toutefois on leur laisse le commandement. Je l
7 é dans le New York Times : le seul et vrai secret de la bombe atomique réside dans la puissance industrielle de l’Amérique
8 be atomique réside dans la puissance industrielle de l’Amérique. C’est assez dire qu’il n’est que temporaire. Quant au sec
9 l n’est que temporaire. Quant au secret technique de la détonation, dans quelques mois les Russes l’auront, ou les Anglais
10 tes ou le Sénat, l’existence actuelle ou possible de la moindre défense effective contre un raid atomique par surprise. ⁂
11 d atomique par surprise. ⁂ Voici cependant l’état de l’opinion américaine, avertie par sa presse de tous ces faits. M. Geo
12 at de l’opinion américaine, avertie par sa presse de tous ces faits. M. George Gallup vient d’établir que 71 % des citoyen
13 presse de tous ces faits. M. George Gallup vient d’ établir que 71 % des citoyens de son pays « refusent de livrer le cont
14 orge Gallup vient d’établir que 71 % des citoyens de son pays « refusent de livrer le contrôle de la bombe aux Nations uni
15 blir que 71 % des citoyens de son pays « refusent de livrer le contrôle de la bombe aux Nations unies », cependant que la
16 yens de son pays « refusent de livrer le contrôle de la bombe aux Nations unies », cependant que la même enquête révèle qu
17 t persuadés que « le secret ne peut être gardé ». D’ où je déduis que la proportion des Américains raisonnables (j’entends
18 n des Américains raisonnables (j’entends capables de rapprocher deux idées et d’en tirer une conclusion logique) est au pl
19 s (j’entends capables de rapprocher deux idées et d’ en tirer une conclusion logique) est au plus de 35 %. Est-ce peu ou be
20 et d’en tirer une conclusion logique) est au plus de 35 %. Est-ce peu ou beaucoup pour un peuple ? Je n’en jugerais qu’apr
21 les savants sérieux ne partagent point. On parle de radars omniscients et de rayons qui feraient sauter la bombe tôt aprè
22 artagent point. On parle de radars omniscients et de rayons qui feraient sauter la bombe tôt après son départ, chez l’adve
23 procédés, leur mise en œuvre supposerait un état de mobilisation permanente qui, sous prétexte d’éviter la guerre, tuerai
24 tat de mobilisation permanente qui, sous prétexte d’ éviter la guerre, tuerait la paix. Une partie de la population serait
25 e d’éviter la guerre, tuerait la paix. Une partie de la population serait employée à surveiller le ciel, l’autre partie à
26 t nous sommes sans défense, mais encore le secret de la bombe sera demain celui de Polichinelle, et enfin si quelqu’un nou
27 is encore le secret de la bombe sera demain celui de Polichinelle, et enfin si quelqu’un nous attaque, nous ne saurons pas
28 pays, disons la Suisse, manufacture une douzaine de bombes. Ce n’est pas une question d’argent comme on le croit (les gro
29 une douzaine de bombes. Ce n’est pas une question d’ argent comme on le croit (les grosses dépenses ont été faites par l’Am
30 ites par l’Amérique pendant les recherches), mais d’ ingéniosité et d’équipement technique, et vous savez que la Suisse pos
31 ue pendant les recherches), mais d’ingéniosité et d’ équipement technique, et vous savez que la Suisse possède tout cela. E
32 tout cela. En fait, c’est à l’École polytechnique de Zurich que sont nés les travaux d’Einstein. Supposez maintenant que c
33 polytechnique de Zurich que sont nés les travaux d’ Einstein. Supposez maintenant que ce petit pays, pour se tirer d’un ma
34 posez maintenant que ce petit pays, pour se tirer d’ un mauvais pas, envoie deux ou trois bombes sur New York. (Je prends l
35 st trop tard pour échanger des notes et des coups de chapeau haut de forme. Voilà Moscou et Kiev en ruines dans les trois
36 nt-Louis, et détruisent Londres par simple mesure de précaution. Et ainsi de suite : dans le langage technique, cela s’app
37 Londres par simple mesure de précaution. Et ainsi de suite : dans le langage technique, cela s’appelle chain reaction. En
38 l’expression est devenue si vraie qu’elle a cessé de nous frapper. Une apathie étrange me semble s’établir dans les masses
39 veille sur son « dépôt sacré ». Le monde n’a pas de gouvernement. Je ne suis pas sûr que les nations en aient. Et nous re
40 restons, les bras ballants… a. Rougemont Denis de , « Ni secret ni défense », Combat, Paris, 19–20 mai 1946, p. 1.
2 1946, Combat, articles (1946–1950). Paralysie des hommes d’État (21 mai 1946)
41 ux qu’on nomme les trois Grands. Ils se composent d’ un loup déguisé en mouton et de deux moutons vêtus de leur vraie peau.
42 . Ils se composent d’un loup déguisé en mouton et de deux moutons vêtus de leur vraie peau. C’est donc au nom du Petit Pèr
43 n loup déguisé en mouton et de deux moutons vêtus de leur vraie peau. C’est donc au nom du Petit Père, et du Brave Garçon,
44 donc au nom du Petit Père, et du Brave Garçon, et de l’Esprit bourgeois que la Bombe doit être administrée. Notez que, si
45 eurs paraissent impuissants à décréter les moyens d’ une paix pourtant facile à concevoir : donner la Bombe au gouvernement
46 asses contemporaines : que les chefs responsables de notre sort sont en réalité irresponsables ? Et qu’ils usurpent le nom
47 éalité irresponsables ? Et qu’ils usurpent le nom de gouvernants ? J’essaie de me mettre à leur place. Staline voudrait la
48 qu’ils usurpent le nom de gouvernants ? J’essaie de me mettre à leur place. Staline voudrait la paix, car sa Russie bless
49 re reconstruite, mais il ne renonce pas aux plans de Pierre le Grand. Attlee voudrait la paix, car l’Empire blessé est en
50 apital d’abord, et à la peur (elle-même créatrice de conflits) d’un conflit avec la Russie. Sans doute sont-ils tous les t
51 d, et à la peur (elle-même créatrice de conflits) d’ un conflit avec la Russie. Sans doute sont-ils tous les trois convainc
52 ui domine en fait leur politique, c’est la vision de la guerre, non pas celle de la paix. Ils agissent donc comme des irre
53 ique, c’est la vision de la guerre, non pas celle de la paix. Ils agissent donc comme des irresponsables, provoquant ce qu
54 nt ce qu’ils veulent éviter. Et le public a l’air de trouver cela normal, — ou ne trouve rien. ⁂ J’essaie encore de les co
55 la normal, — ou ne trouve rien. ⁂ J’essaie encore de les comprendre, avant de les traiter de ce qu’ils ont l’air d’être, q
56 ie encore de les comprendre, avant de les traiter de ce qu’ils ont l’air d’être, quand on voit ce qu’ils vont faire ou lai
57 ndre, avant de les traiter de ce qu’ils ont l’air d’ être, quand on voit ce qu’ils vont faire ou laisser faire de nos vies.
58 and on voit ce qu’ils vont faire ou laisser faire de nos vies. Irresponsables moins par incapacité — ils suffiraient aux t
59 Devant le monde à unifier, ils paraissent frappés d’ un vertige. Ils ne voient rien. Cette absence de pensée est plus dange
60 s d’un vertige. Ils ne voient rien. Cette absence de pensée est plus dangereuse que n’importe quelle pensée fausse. Mais c
61 r nation, et que c’est assez ou même trop pour un homme , tandis que le problème est mondial. La Bombe est un cas internationa
62  : or, ces messieurs sont absorbés par la défense d’ intérêts locaux dits nationaux, trente visites par jour, des inaugurat
63 er les nations, la première condition requise est de n’être pas le chef d’une grande nation. Mais qui l’a dit, jusqu’à ce
64 mière condition requise est de n’être pas le chef d’ une grande nation. Mais qui l’a dit, jusqu’à ce jour ? Chacun sait que
65 dit, jusqu’à ce jour ? Chacun sait que l’arbitre d’ un match n’est jamais le capitaine d’une des équipes. Qui l’a rappelé
66 ue l’arbitre d’un match n’est jamais le capitaine d’ une des équipes. Qui l’a rappelé au sujet des trois Grands ? Chacun sa
67 lui, et le voici chargé du monde en plus ! Ainsi d’ Attlee et de Staline, bien que ce dernier me paraisse plus habile dans
68 voici chargé du monde en plus ! Ainsi d’Attlee et de Staline, bien que ce dernier me paraisse plus habile dans le grand ar
69 dernier me paraisse plus habile dans le grand art de prendre son temps. ⁂ Je les plains. Cependant, s’ils s’obstinent, je
70 ins. Cependant, s’ils s’obstinent, je serai forcé de les traiter d’usurpateurs. L’incompétence des commandants en chef n’e
71 s’ils s’obstinent, je serai forcé de les traiter d’ usurpateurs. L’incompétence des commandants en chef n’est-elle pas jug
72 -elle pas jugée criminelle par l’opinion publique de leur patrie, et parfois par les tribunaux ? Je demande à mes amis amé
73 ques nuances près, le plan des Nations unies. Vos États n’ont fait un pays qu’en unissant leurs peuples, et non leurs chefs,
74 au, sorti du peuple… Mais si l’on touche à l’idée de nation, voilà tous les visages qui se ferment, et les esprits en état
75 Allons-nous continuer ce jeu jusqu’à l’explosion de la Terre ? Allons-nous confier le destin de la planète à trois hommes
76 osion de la Terre ? Allons-nous confier le destin de la planète à trois hommes surchargés, débordés, qui n’ont pas une min
77 lons-nous confier le destin de la planète à trois hommes surchargés, débordés, qui n’ont pas une minute pour réfléchir, et qui
78 pour réfléchir, et qui représentent les intérêts de leur nation, alors que c’est précisément aux dépens de ces intérêts q
79 s que l’humanité pourra s’unir ? La fonction même de ces chefs d’État les disqualifie, en principe, pour l’entreprise dont
80 ls ne voient rien, c’est évident, car les visions de l’avenir naissent d’un loisir intense. Or, ils ont à recevoir des dép
81 est évident, car les visions de l’avenir naissent d’ un loisir intense. Or, ils ont à recevoir des députés… Seule, une cour
82 s députés… Seule, une cour internationale, formée d’ hommes désignés par la voie populaire, et qui n’auraient pas d’autre a
83 députés… Seule, une cour internationale, formée d’ hommes désignés par la voie populaire, et qui n’auraient pas d’autre affaire
84 gnés par la voie populaire, et qui n’auraient pas d’ autre affaire que de considérer la Planète, puis de traiter de haut av
85 ulaire, et qui n’auraient pas d’autre affaire que de considérer la Planète, puis de traiter de haut avec les chefs d’État…
86 ’autre affaire que de considérer la Planète, puis de traiter de haut avec les chefs d’État… Peut-être l’expérience de Biki
87 ire que de considérer la Planète, puis de traiter de haut avec les chefs d’État… Peut-être l’expérience de Bikini va-t-ell
88 aut avec les chefs d’État… Peut-être l’expérience de Bikini va-t-elle donner le choc nécessaire pour alerter enfin une opi
89 erter enfin une opinion mondiale ? Avant ce début de juillet, puissent les trois Grands ne pas perdre la boule ! Car le fa
90 la boule ! Car le fait est qu’il n’y en a qu’une de boule, comme disait à peu près le regretté Willkie, et qu’une erreur
91 rendre folle à tout jamais. b. Rougemont Denis de , « Paralysie des hommes d’État », Combat, Paris, 21 mai 1946, p. 1.
3 1946, Combat, articles (1946–1950). Tous démocrates (22 mai 1946)
92 e « un anarchiste catholique ». (Je le crois seul de son parti.) Il avait l’air un peu nerveux. Voici notre conversation :
93 crivez-vous aujourd’hui ? Lui. — Je fais le plan d’ une trilogie sur les trois grands régimes politiques de ce siècle. Je
94 trilogie sur les trois grands régimes politiques de ce siècle. Je vais les caractériser par leurs armes ou leurs méthodes
95 liquidation, évaporation ! (Il prononça ces mots d’ un ton rageur, qui me fit éclater de rire.) Moi. — Quel beau programm
96 me ! Avouez que nous sortons enfin des petitesses de l’ère bourgeoise, succédant aux ténèbres du Moyen Âge. Car ces trois
97 rnes correspondent à trois conceptions grandioses de la vie. La crémation, c’est la purification par le feu ! La liquidati
98 n atomique, eh bien, n’est-ce pas le symbole même de l’idéalisme : tout monte et s’épanouit vers le ciel ! Notez que, dans
99 dans ce siècle trois fois maudit. Je ne vois plus d’ espoir sérieux nulle part. La faillite morale est universelle, chez le
100 démocrates, dans le monde entier, exception faite de deux pays de langue espagnole, que nous appellerons secondaires. Et v
101 ans le monde entier, exception faite de deux pays de langue espagnole, que nous appellerons secondaires. Et voici mon espo
102 ouvoir, entre nous, discuter le contenu véritable de la démocratie, sans passer aussitôt pour des fascistes. Lui. — Autan
103 lus vieille démocratie du monde, et la traitaient de « fasciste », parce qu’elle répugne, entre autres, à la nationalisati
104 . Peut-être a-t-elle tort, mais on n’a pas manqué de répondre que cette mesure est précisément celle qui fut prise en prem
105 ément celle qui fut prise en premier lieu par les États fascistes, aussi bien que par les Soviets et par les socialistes angl
106 e tous sont devenus « démocrates », dans le monde de 1946, nous pouvons parler d’autre chose. Nous pouvons porter notre ef
107 tes », dans le monde de 1946, nous pouvons parler d’ autre chose. Nous pouvons porter notre effort, désormais, non plus sur
108 notre effort, désormais, non plus sur la défense d’ un mot, d’un terme vague que personne n’attaque, mais sur la définitio
109 ort, désormais, non plus sur la défense d’un mot, d’ un terme vague que personne n’attaque, mais sur la définition d’une ré
110 ue que personne n’attaque, mais sur la définition d’ une réalité que ce terme symbolise et parfois dissimule : qu’est-ce qu
111 amènera bientôt à nous demander : qu’est-ce que l’ homme  ? C’est le vrai débat. Si nous le reconnaissons, nous aurons fait un
112 ne signifiera rien du tout. Ou bien elle servira d’ excuse et de prétexte cousu de fil blanc ou de fil rouge aux politique
113 ra rien du tout. Ou bien elle servira d’excuse et de prétexte cousu de fil blanc ou de fil rouge aux politiques les plus c
114 u bien elle servira d’excuse et de prétexte cousu de fil blanc ou de fil rouge aux politiques les plus contradictoires, et
115 ira d’excuse et de prétexte cousu de fil blanc ou de fil rouge aux politiques les plus contradictoires, et parfois les plu
116 La liberté est certainement le problème numéro un de notre temps : car les problèmes se posent quand les choses s’en vont…
117 quand les choses s’en vont… c. Rougemont Denis de , « Tous démocrates », Combat, Paris, 22 mai 1946, p. 1.
4 1946, Combat, articles (1946–1950). Les cochons en uniforme ou le nouveau Déluge (23 mai 1946)
118 annoncer une expérience sensationnelle : au mois de mai ou de juillet, une ou deux bombes seraient jetées sur une flotte
119 une expérience sensationnelle : au mois de mai ou de juillet, une ou deux bombes seraient jetées sur une flotte de cent bâ
120 une ou deux bombes seraient jetées sur une flotte de cent bâtiments de guerre réunie dans la baie de Bikini, Pacifique. Pa
121 seraient jetées sur une flotte de cent bâtiments de guerre réunie dans la baie de Bikini, Pacifique. Parmi tous les détai
122 détails publiés par la presse sur les préparatifs de l’expérience, j’en retiens deux. 1° Une mission de savants américains
123 e l’expérience, j’en retiens deux. 1° Une mission de savants américains formée de quatorze biologistes, botanistes et océa
124 deux. 1° Une mission de savants américains formée de quatorze biologistes, botanistes et océanographes, et de deux commerç
125 orze biologistes, botanistes et océanographes, et de deux commerçants en poissons (mieux payés que les savants, dit-on) vi
126 on) vient de partir pour l’île de Bikini. L’objet de la mission est d’établir un relevé complet de tous les êtres vivants
127 r pour l’île de Bikini. L’objet de la mission est d’ établir un relevé complet de tous les êtres vivants sur l’île. C’est u
128 jet de la mission est d’établir un relevé complet de tous les êtres vivants sur l’île. C’est une mission fort analogue que
129 x seront filmés. 2° Au jour J, les cent bâtiments de la flotte de guerre réunis dans la baie de Bikini pour subir l’épreuv
130 és. 2° Au jour J, les cent bâtiments de la flotte de guerre réunis dans la baie de Bikini pour subir l’épreuve atomique au
131 s. Mais ces équipages seront entièrement composés d’ animaux. Deux-cents chèvres, deux-cents cochons et quatre-mille rats s
132 cochons et quatre-mille rats seront à leur poste de combat, sur les tourelles, dans les chambres de machines et sur les p
133 e de combat, sur les tourelles, dans les chambres de machines et sur les ponts. Et ceci encore nous ramène, irrésistibleme
134 ncore nous ramène, irrésistiblement, à la légende de l’arche de Noé. Une précision supplémentaire, à propos des cochons :
135 ramène, irrésistiblement, à la légende de l’arche de Noé. Une précision supplémentaire, à propos des cochons : l’on a rema
136 ue la peau des cochons est fort semblable à celle de l’homme. La sensibilité de l’une peut renseigner sur celle de l’autre
137 peau des cochons est fort semblable à celle de l’ homme . La sensibilité de l’une peut renseigner sur celle de l’autre. Aussi
138 fort semblable à celle de l’homme. La sensibilité de l’une peut renseigner sur celle de l’autre. Aussi bien nos marins ou
139 La sensibilité de l’une peut renseigner sur celle de l’autre. Aussi bien nos marins ou capitaines cochons seront-ils revêt
140 ines cochons seront-ils revêtus, pour l’occasion, d’ uniformes réguliers de la marine, imprégnés d’une substance capable d’
141 s revêtus, pour l’occasion, d’uniformes réguliers de la marine, imprégnés d’une substance capable d’absorber les rayons ga
142 on, d’uniformes réguliers de la marine, imprégnés d’ une substance capable d’absorber les rayons gamma. Ceux-ci, comme vous
143 s de la marine, imprégnés d’une substance capable d’ absorber les rayons gamma. Ceux-ci, comme vous le savez, sont réputés
144 feu, et savent mourir. Quel que soit le résultat de l’opération, sur lequel nos savants se perdent en conjectures, j’en t
145 rté par des cochons, au sens le plus scientifique de ce terme. Quand je vous disais que la guerre est morte, la guerre des
146 es sont toutes violées sans exception par l’usage de la bombe atomique… J’avoue que je n’avais pas pensé à l’uniforme et a
147 c la flotte sacrifiée à Bikini, c’est le prestige de l’uniforme, symboliquement, qui va sombrer. Il vaut la peine de remar
148 symboliquement, qui va sombrer. Il vaut la peine de remarquer, enfin, que pas une voix ne s’est élevée, du côté des ferve
149 as une voix ne s’est élevée, du côté des fervents de l’Armée, pour protester contre une profanation si littéralement éclat
150 té opposé. C’est la Ligue protectrice des animaux d’ un des États de l’Est de l’Amérique qui a pris l’initiative d’un mouve
151 ts de l’Est de l’Amérique qui a pris l’initiative d’ un mouvement d’opinion contre les essais projetés. Cette Ligue demande
152 l’Amérique qui a pris l’initiative d’un mouvement d’ opinion contre les essais projetés. Cette Ligue demande qu’au lieu de
153 Cette Ligue demande qu’au lieu de sacrifier tant d’ innocentes victimes, et dans une posture si ridicule, on place sur les
154 qui se seront déclarés en faveur de l’expérience de Bikini. d. Rougemont Denis de, « Les cochons en uniforme ou le nou
155 de l’expérience de Bikini. d. Rougemont Denis de , « Les cochons en uniforme ou le nouveau Déluge », Combat, Paris, 23
5 1946, Combat, articles (1946–1950). Post-scriptum (24 mai 1946)
156 n’est pas dangereuse du tout. — Êtes-vous fou ? De quoi donc parliez-vous dans vos articles précédents ? Faut-il penser
157 quoi qu’en pensent quelques généraux. Je parlais de la fin du monde… — Et maintenant vous nous dites : aucun danger ! C’e
158 er ! C’est là sans doute votre manière paradoxale d’ avouer que vous exagériez. Savez-vous que beaucoup l’ont pensé, sans v
159 ous le dire ? Il est bien naturel que l’événement d’ Hiroshima nous ait jetés pour quelque temps dans un état d’esprit d’Ap
160 it jetés pour quelque temps dans un état d’esprit d’ Apocalypse. Mais dix mois ont passé, et rien ne se passe. Dieu soit lo
161 t, vous rappelez-vous ? Dans toutes les capitales d’ Europe, on voyait en 1939 les civils se promener avec leur boîte à mas
162 que personne, même pas Hitler, n’a eu le courage de commencer. À plus forte raison pour la Bombe… — Je ne trouve pas la r
163 dité subite l’ait arrêté, ou quelque amour tardif de notre humanité ? Simplement, il a fait son calcul. Les Alliés pouvaie
164 Alliés pouvaient riposter, et la valeur militaire de cette arme était loin de compenser, même à ses yeux, le risque moral
165 risque moral qu’il eût couru à l’employer. Le cas de la Bombe est différent. Je vous répète qu’elle supprimera la possibil
166 Je vous répète qu’elle supprimera la possibilité de riposter, c’est-à-dire jouera militairement le rôle d’une bataille dé
167 poster, c’est-à-dire jouera militairement le rôle d’ une bataille décisive. Elle supprimera donc les scrupules de l’agresse
168 ille décisive. Elle supprimera donc les scrupules de l’agresseur éventuel. Car nos scrupules naissent, en général, d’une r
169 éventuel. Car nos scrupules naissent, en général, d’ une rapide évaluation des conséquences fâcheuses, pour nous-mêmes, de
170 tion des conséquences fâcheuses, pour nous-mêmes, de nos actes. Si l’emploi de la Bombe est décisif, il n’y a pas de punit
171 euses, pour nous-mêmes, de nos actes. Si l’emploi de la Bombe est décisif, il n’y a pas de punition à redouter. Il est don
172 Si l’emploi de la Bombe est décisif, il n’y a pas de punition à redouter. Il est donc clair qu’on l’emploiera, au risque d
173 ux. ⁂ Ce qui est dangereux, horriblement, c’est l’ homme . C’est lui qui a fait la Bombe, et c’est lui seul qui se prépare à l’
174 enir ! Comme si elle était tombée du ciel, animée de mauvaises intentions ! C’est d’un comique démesuré. Le contrôle de la
175 e du ciel, animée de mauvaises intentions ! C’est d’ un comique démesuré. Le contrôle de la Bombe, que l’on discute à longu
176 ntions ! C’est d’un comique démesuré. Le contrôle de la Bombe, que l’on discute à longueur de colonne, dans toute la press
177 contrôle de la Bombe, que l’on discute à longueur de colonne, dans toute la presse, est la plus belle absurdité de l’Histo
178 dans toute la presse, est la plus belle absurdité de l’Histoire. Comprenez-vous bien de quoi l’on parle ? Contrôler cet ob
179 elle absurdité de l’Histoire. Comprenez-vous bien de quoi l’on parle ? Contrôler cet objet inerte ? C’est comme si tout d’
180 Contrôler cet objet inerte ? C’est comme si tout d’ un coup l’on se jetait sur une chaise pour l’empêcher d’aller casser l
181 oup l’on se jetait sur une chaise pour l’empêcher d’ aller casser les vases de Chine. Si on laisse la Bombe tranquille, ell
182 e chaise pour l’empêcher d’aller casser les vases de Chine. Si on laisse la Bombe tranquille, elle ne fera rien, c’est cla
183 te dans sa caisse. Qu’on ne nous raconte donc pas d’ histoires. Ce qu’il nous faut, c’est un contrôle de l’homme. — Ah ! ça
184 ’histoires. Ce qu’il nous faut, c’est un contrôle de l’homme. — Ah ! ça, c’est une autre question. — C’est la question de
185 oires. Ce qu’il nous faut, c’est un contrôle de l’ homme . — Ah ! ça, c’est une autre question. — C’est la question de l’Autre.
186 ça, c’est une autre question. — C’est la question de l’Autre. C’est la seule. On ne peut plus l’éviter depuis que la Bombe
187 nous oblige à y faire face. e. Rougemont Denis de , « Post-scriptum », Combat, Paris, 24 mai 1946, p. 1.
6 1946, Combat, articles (1946–1950). Bikini bluff (2 juillet 1946)
188 cochons. Peut-être les prières dites en l’église de Carliste, en Angleterre, « pour les animaux sacrifiés » et « pour all
189 n’ont-elles point été sans effet. Ce qu’on sait, de source officielle, c’est que l’amiral Blandy se déclare satisfait. « 
190 rances. Nous comptons en tirer des renseignements d’ une valeur inestimable. » On ne saurait mieux dire, étant un amiral. O
191 e des amiraux du monde entier, qui est, en somme, de rester des amiraux. Et sa valeur ne saurait être exagérée, encore qu’
192 l’on connaît le budget prévu pour le Département de la Marine américaine. Depuis des mois, de nombreux organes de la gran
193 rtement de la Marine américaine. Depuis des mois, de nombreux organes de la grande presse américaine mettaient en garde le
194 américaine. Depuis des mois, de nombreux organes de la grande presse américaine mettaient en garde leurs lecteurs contre
195 nt en garde leurs lecteurs contre les expériences de Bikini. Tout cela n’était, nous disaient-ils, qu’un complot pseudo-sc
196 et porte-avions. Le grand danger, le vrai danger de l’expérience, c’était qu’elle ratât, conformément aux prévisions des
197 ette campagne ait été orchestrée par les services de l’Armée de Terre, pendant le débat qui opposait cette dernière à la M
198 ne ait été orchestrée par les services de l’Armée de Terre, pendant le débat qui opposait cette dernière à la Marine, sur
199 rieux se sont tous rangés du côté des adversaires de l’expérience. Trois jours avant le lancement de la bombe, on annonçai
200 s de l’expérience. Trois jours avant le lancement de la bombe, on annonçait la démission du fameux Dr Oppenheimer, qui fut
201 le ouvrière des expériences du Nouveau-Mexique et de l’ensemble du « Projet Manhattan ». Le Dr Oppenheimer n’a rien voulu
202 hattan ». Le Dr Oppenheimer n’a rien voulu savoir de cette futile grillade de cochons vifs, organisée par les services pub
203 er n’a rien voulu savoir de cette futile grillade de cochons vifs, organisée par les services publicitaires de la Marine.
204 ns vifs, organisée par les services publicitaires de la Marine. Qu’on se rappelle, à ce sujet, les déclarations faites à l
205 ier. « La bombe ne fait que décupler l’importance de l’armée de terre », disait devant le Sénat le général Marshall. « Je
206 ombe ne fait que décupler l’importance de l’armée de terre », disait devant le Sénat le général Marshall. « Je vous abando
207 it. Sur quoi le général Arnold, après des phrases de condoléances sur les fantassins et les marins, suggérait que l’aviati
208 dire des catastrophes continentales, pour le jour de la grande expérience d’une explosion atomique sous-marine. Ils jugent
209 ntinentales, pour le jour de la grande expérience d’ une explosion atomique sous-marine. Ils jugent la bombe du type Nagasa
210 la bombe restent intacts, autant que les palmiers de Bikini. Et si les amiraux sont rassurés, conformément à tous les plan
211 ils ont tirés, l’humanité en général n’a pas lieu de se réjouir trop bruyamment de la survie des deux-cents cochons en uni
212 énéral n’a pas lieu de se réjouir trop bruyamment de la survie des deux-cents cochons en uniformes. Les habitants d’Hirosh
213 es deux-cents cochons en uniformes. Les habitants d’ Hiroshima n’ont pas tenu le coup tout à fait aussi bien, comme le révè
214 iciels publiés la semaine dernière. Les habitants de Londres, de New York, de Leningrad et de Paris ne seront point protég
215 és la semaine dernière. Les habitants de Londres, de New York, de Leningrad et de Paris ne seront point protégés aussi mét
216 dernière. Les habitants de Londres, de New York, de Leningrad et de Paris ne seront point protégés aussi méthodiquement q
217 abitants de Londres, de New York, de Leningrad et de Paris ne seront point protégés aussi méthodiquement que le budget de
218 point protégés aussi méthodiquement que le budget de la Marine américaine. Et le faux soulagement produit par le grand « f
219 le faux soulagement produit par le grand « four » de Bikini ne peut qu’augmenter le danger. La seule défense contre la bom
220 la bombe reste le gouvernement mondial, seul armé de la bombe pour assurer la police parmi les États. Et le seul moyen d’a
221 armé de la bombe pour assurer la police parmi les États . Et le seul moyen d’accélérer l’instauration d’un tel gouvernement —
222 surer la police parmi les États. Et le seul moyen d’ accélérer l’instauration d’un tel gouvernement — qui pourrait être l’O
223 tats. Et le seul moyen d’accélérer l’instauration d’ un tel gouvernement — qui pourrait être l’ONU si elle existait autreme
224 e l’ONU si elle existait autrement que sous forme d’ initiales — c’est d’augmenter parmi les peuples le sentiment de leur i
225 tait autrement que sous forme d’initiales — c’est d’ augmenter parmi les peuples le sentiment de leur interdépendance. Quan
226 c’est d’augmenter parmi les peuples le sentiment de leur interdépendance. Quand nous aurons compris que toute guerre, auj
227  à lui-même », les premières bases psychologiques d’ une paix réelle seront posées. f. Rougemont Denis de, « Bikini bluf
228 paix réelle seront posées. f. Rougemont Denis de , « Bikini bluff », Combat, Paris, 2 juillet 1946, p. 1 et 3. g. Text
7 1946, Combat, articles (1946–1950). Les intellectuels sont-ils responsables ? (5 juillet 1946)
229 Chose étrange, le 6 février 1934 fut une date de l’histoire littéraire : elle inaugura le temps des moutons enragés. F
230 e inaugura le temps des moutons enragés. Fatigués de leur innocence, voyant que l’herbe se faisait rare sous leurs pieds e
231 it rare sous leurs pieds et qu’ils n’avaient plus de berger, aux éclairs de chaleur d’une révolution encore lointaine, ils
232 s et qu’ils n’avaient plus de berger, aux éclairs de chaleur d’une révolution encore lointaine, ils se sont jetés dans le
233 n’avaient plus de berger, aux éclairs de chaleur d’ une révolution encore lointaine, ils se sont jetés dans le premier par
234 nu, à gauche ou à droite, et depuis lors y bêlent d’ une voix aigre et anxieuse, tout en signant une quantité de manifestes
235 x aigre et anxieuse, tout en signant une quantité de manifestes. Ils ont signé pour le négus et contre lui ; pour le chef
236 s deux mains, des quatre pattes, les yeux fermés, d’ une croix, d’une faucille et d’un marteau, ou avec plus ou moins de ré
237 des quatre pattes, les yeux fermés, d’une croix, d’ une faucille et d’un marteau, ou avec plus ou moins de réticences ; d’
238 , les yeux fermés, d’une croix, d’une faucille et d’ un marteau, ou avec plus ou moins de réticences ; d’un nom connu, d’un
239 e faucille et d’un marteau, ou avec plus ou moins de réticences ; d’un nom connu, d’un nom à faire connaître… Bref, il n’e
240 un marteau, ou avec plus ou moins de réticences ; d’ un nom connu, d’un nom à faire connaître… Bref, il n’est pas un acte c
241 vec plus ou moins de réticences ; d’un nom connu, d’ un nom à faire connaître… Bref, il n’est pas un acte commis dans le mo
242 vivre en marge de tous les conflits et refusaient d’ être considérés comme des citoyens responsables, ils étaient au moins
243 étaient au moins en accord avec l’esprit général de l’époque : intelligence d’un côté, action de l’autre, et surtout ne m
244 avec l’esprit général de l’époque : intelligence d’ un côté, action de l’autre, et surtout ne mélangeons rien. Tributaires
245 éral de l’époque : intelligence d’un côté, action de l’autre, et surtout ne mélangeons rien. Tributaires d’une culture don
246 autre, et surtout ne mélangeons rien. Tributaires d’ une culture dont l’ambition suprême était de se « distinguer » des con
247 aires d’une culture dont l’ambition suprême était de se « distinguer » des contingences, ils étaient au moins purs dans le
248 ent au moins purs dans leur erreur. Les modalités de leur retrait ne contredisaient nullement les postulats fondamentaux d
249 ntredisaient nullement les postulats fondamentaux de leur métaphysique inconsciente. Et leur style traduisait fidèlement l
250 . Et leur style traduisait fidèlement les nuances d’ une pensée détachée, irresponsable par définition. Il n’y a pas que du
251 héritées du libéralisme conduisaient à ce régime de faillite qu’on nomme l’État totalitaire. Nous avons constaté que rien
252 onduisaient à ce régime de faillite qu’on nomme l’ État totalitaire. Nous avons constaté que rien, ni la pensée, ni l’acte in
253 lité gratuit. Que tout se paye. Que notre liberté de penser n’importe quoi, sans tenir compte de l’époque, était une illus
254 berté de penser n’importe quoi, sans tenir compte de l’époque, était une illusion entretenue par l’apparente paix sociale,
255 l’esprit ne laissaient même plus une possibilité de concordat. Déjà les dictatures réglaient les comptes. « Lorsque j’ent
256 réglaient les comptes. « Lorsque j’entends parler d’ esprit, je désarme mon revolver », disait un officier nazi. Les stalin
257 s faisaient de même en présence du libéralisme et de la culture « désintéressée ». C’est alors qu’on lança parmi nous le m
258 qu’on lança parmi nous le mot d’ordre : « Défense de la culture ». Toute la confusion vient de là. Car la culture qu’on n
259 on vient de là. Car la culture qu’on nous propose de défendre, c’est elle, précisément, qui est responsable de la brutalit
260 dre, c’est elle, précisément, qui est responsable de la brutalité totalitaire. On nous propose donc de défendre une maladi
261 de la brutalité totalitaire. On nous propose donc de défendre une maladie contre la mort, à quoi elle mène nécessairement.
262 aire une santé. Au lieu de nous proposer une cure de désintoxication énergique. Au lieu de rechercher les moyens de penser
263 ation énergique. Au lieu de rechercher les moyens de penser dans le réel et l’actuel, et de surmonter enfin ce vice qu’est
264 les moyens de penser dans le réel et l’actuel, et de surmonter enfin ce vice qu’est la distinction libérale entre la pensé
265 action. Au lieu de préciser, par exemple, le sens de ce mot d’engagement dont tout le monde abuse aujourd’hui. ⁂ Pour qu’u
266 lieu de préciser, par exemple, le sens de ce mot d’ engagement dont tout le monde abuse aujourd’hui. ⁂ Pour qu’une pensée
267 le ignore ou répudie la loi interne : la tactique d’ un parti par exemple. Ce n’est pas dans l’utilisation accidentelle et
268 pas dans l’utilisation accidentelle et partisane d’ une pensée que réside son engagement. C’est, au contraire, dans sa dém
269 ier, dans sa prise sur le réel et dans sa volonté de le transformer, donc finalement de le dominer. S’engager, ce n’est pa
270 ans sa volonté de le transformer, donc finalement de le dominer. S’engager, ce n’est pas se mettre en location. Ce n’est p
271 pas signer ici plutôt que là. Ce n’est pas passer de l’esclavage d’une mode à celui d’une tactique politique. Ce n’est pas
272 plutôt que là. Ce n’est pas passer de l’esclavage d’ une mode à celui d’une tactique politique. Ce n’est pas du tout deveni
273 ’est pas passer de l’esclavage d’une mode à celui d’ une tactique politique. Ce n’est pas du tout devenir esclave d’une doc
274 e politique. Ce n’est pas du tout devenir esclave d’ une doctrine, mais au contraire, c’est se libérer et assumer les risqu
275 ontraire, c’est se libérer et assumer les risques de sa liberté. Il peut sembler paradoxal de soutenir que l’engagement d’
276 risques de sa liberté. Il peut sembler paradoxal de soutenir que l’engagement d’une pensée suppose sa libération. En véri
277 ut sembler paradoxal de soutenir que l’engagement d’ une pensée suppose sa libération. En vérité, c’est le libéralisme qui
278 t être qu’un esclavage. La liberté réelle n’a pas de pires ennemis que les libéraux ; sinon en intention, du moins en fait
279 bien à définir le sens que nous donnons à ce mot d’ engagement. ⁂ Je l’ai dit ailleurs : un gant qui se retourne ne devien
280 gissante. Un libéral qui se soumet aux directives d’ un parti ne devient pas pour si peu un penseur engagé. Et il ne faudra
281 ces trahisons insignes ridiculisent toute espèce d’ engagement. Une pensée qui, par sa nature et son mouvement originel, e
282 nsable du seul fait qu’elle se met « au service » d’ une doctrine de lutte politique. Faire la révolution, cela demande un
283 fait qu’elle se met « au service » d’une doctrine de lutte politique. Faire la révolution, cela demande un effort un peu p
284 ion, cela demande un effort un peu plus grand, et d’ une autre nature, que l’effort de signer un manifeste ou de s’inscrire
285 u plus grand, et d’une autre nature, que l’effort de signer un manifeste ou de s’inscrire dans les rangs d’une ligue. On r
286 re nature, que l’effort de signer un manifeste ou de s’inscrire dans les rangs d’une ligue. On rougit de rappeler de tels
287 gner un manifeste ou de s’inscrire dans les rangs d’ une ligue. On rougit de rappeler de tels truismes. Mais on y est bien
288 s’inscrire dans les rangs d’une ligue. On rougit de rappeler de tels truismes. Mais on y est bien forcé par le spectacle
289 dans les rangs d’une ligue. On rougit de rappeler de tels truismes. Mais on y est bien forcé par le spectacle de l’intelli
290 uismes. Mais on y est bien forcé par le spectacle de l’intelligentsia française. Précisons donc encore : la première tâche
291 tellectuels qui ont compris le péril totalitaire ( de droite ou de gauche) ce n’est pas « d’adhérer » à quelque antifascism
292 ui ont compris le péril totalitaire (de droite ou de gauche) ce n’est pas « d’adhérer » à quelque antifascisme, mais de s’
293 talitaire (de droite ou de gauche) ce n’est pas «  d’ adhérer » à quelque antifascisme, mais de s’attaquer à la forme de pen
294 st pas « d’adhérer » à quelque antifascisme, mais de s’attaquer à la forme de pensée d’où vont nécessairement sortir le fa
295 elque antifascisme, mais de s’attaquer à la forme de pensée d’où vont nécessairement sortir le fascisme et le stalinisme.
296 fascisme, mais de s’attaquer à la forme de pensée d’ où vont nécessairement sortir le fascisme et le stalinisme. Et c’est l
297 ibérale. Voyez donc comme nos libéraux se mettent d’ eux-mêmes en rangs et marquent le pas dès qu’une menace se précise con
298 es ! Le réflexe du libéral devant le péril, c’est de faire un fascisme. Fût-ce même pour se défendre du fascisme. Et peut-
299 me. Et peut-être surtout dans ce cas ! La panique de « l’union sacrée » qui vient de souffler sur notre élite en est l’ahu
300 t l’ahurissant exemple. Du moins a-t-elle eu cela de bon : les écrivains qui ont décidé tout récemment de renoncer à l’usa
301 bon : les écrivains qui ont décidé tout récemment de renoncer à l’usage de leur pensée devant la menace hitlérienne (voir
302 i ont décidé tout récemment de renoncer à l’usage de leur pensée devant la menace hitlérienne (voir le manifeste de Ce Soi
303 e devant la menace hitlérienne (voir le manifeste de Ce Soir) ont exprimé en toute clarté qu’ils étaient de vrais libéraux
304 Soir) ont exprimé en toute clarté qu’ils étaient de vrais libéraux, irresponsables nés2, égarés pour un temps dans les vo
305 nsables nés2, égarés pour un temps dans les voies de « l’engagement » politique, et faisant amende honorable. Ils étaient
306 faisant amende honorable. Ils étaient en rupture de bercail. Maintenant, tout est rentré dans l’ordre, les moutons se son
307 e des philosophes libéraux — fût partiale, pleine de partis pris, et même politique ! 2. Je fais exception pour deux ou t
308 dance qui est significative. h. Rougemont Denis de , « Les intellectuels sont-ils responsables ? », Combat, Paris, 5 juil
309 . 1. i. Précédé du chapeau suivant : « La notion de l’“engagement” politique connaît depuis quelques mois une extrême fav
310 ur dans les milieux intellectuels et littéraires. De fait, si cette volonté d’engagement s’exprime souvent par des attitud
311 ectuels et littéraires. De fait, si cette volonté d’ engagement s’exprime souvent par des attitudes assez confuses, il est
312 . Aussi avons-nous pensé qu’il serait intéressant de demander à un certain nombre d’écrivains leur opinion sur un problème
313 erait intéressant de demander à un certain nombre d’ écrivains leur opinion sur un problème qui met en cause, non seulement
314 eur rôle dans la société, mais aussi leur manière de s’exprimer. Denis de Rougemont, qui fut un des premiers à soutenir l’
315 envoie l’article suivant, dont il est intéressant de souligner qu’il fut écrit et publié dans une revue en 1938, sous le t
316 ié dans une revue en 1938, sous le titre : « Trop d’ irresponsables s’engagent ».
8 1947, Combat, articles (1946–1950). « La tâche française c’est d’inventer la paix » (26 décembre 1947)
317 « La tâche française c’est d’ inventer la paix » (26 décembre 1947)j k Denis de Rougemont me reço
318 réable maison qu’il occupe à la sortie du village de Ferney, désormais et pour toujours, prénommé Voltaire. Il me semble q
319 ltaire. Il me semble que mon hôte n’est pas fâché d’ habiter sous cette ombre. Il y a quelque chose de voltairien chez lui 
320 d’habiter sous cette ombre. Il y a quelque chose de voltairien chez lui : cette aisance dans l’épigramme, ce ton persifle
321 l Barth, venu conquérir Paris voici une quinzaine d’ années et que des ouvrages brillants et profonds comme Penser avec le
322 irent bien vite au premier rang, est le contraire d’ un amuseur. Pendant la guerre, il a mené le bon combat à l’émission « 
323 e, il a mené le bon combat à l’émission « La voix de l’Amérique », tandis que ses livres et en particulier son Journal d’A
324 ndis que ses livres et en particulier son Journal d’ Allemagne, étaient mis au pilon par les nazis. Mais, bientôt après, éc
325 les nazis. Mais, bientôt après, éclatait la bombe d’ Hiroshima et de Rougemont écrivait aussitôt ses étincelantes Lettres
326 pas dangereuse, disait-il en substance, mais les hommes qui l’utilisent. Ce sont eux qu’il faut contrôler ». Je pense à cela
327 se à cela tandis que notre entretien prend, comme de lui-même, le tour que je désirais lui imprimer. » C’est l’homme qui f
328 , le tour que je désirais lui imprimer. » C’est l’ homme qui fait son destin, me dit avec force de Rougemont. C’est lui et lui
329 qui aboutissent à la bombe ou à la paix. Il n’y a de fatalité que lorsque l’homme démissionne. Et c’est ce qui est grave e
330 ou à la paix. Il n’y a de fatalité que lorsque l’ homme démissionne. Et c’est ce qui est grave en ce moment : on a l’impressi
331 la France ne fait rien et se perd dans une sorte d’ amer byzantinisme. Dans ces conditions, êtes-vous tenté de regarder ai
332 yzantinisme. Dans ces conditions, êtes-vous tenté de regarder ailleurs ? La France « en attente » Ne vous y trompez p
333 Le monde entier, comme nous-mêmes, attend encore de la France une initiative de salut. Sans doute, cette initiative ne sa
334 -mêmes, attend encore de la France une initiative de salut. Sans doute, cette initiative ne saurait être politique : la Fr
335 être politique : la France n’est plus à la taille de ces géants qui s’affrontent. Elle est pauvre aussi et le monde actuel
336 n parti communiste. Elle donne ainsi l’impression d’ être sous une double dépendance. Ce n’est donc pas de ses dirigeants q
337 tre sous une double dépendance. Ce n’est donc pas de ses dirigeants que nous attendons quoi que ce soit. Mais l’initiative
338 . Cette initiative-là, on la perd dès qu’on cesse de la prendre. Ce rôle est donc vacant, et seule la France pourra le ten
339 sé. Mais la France est « en attente ». En attente de quoi ? Du conflit qui « devient » fatal si on ne fait que l’attendre.
340 Mais ne pensez-vous pas alors que la vocation de la France est clairement circonscrite par la situation dans laquelle
341 convaincu. La tâche française — encore une fois, de l’« intelligence » française — c’est dans ces circonstances historiqu
342 constances historiques que nous venons de dire, «  d’ inventer » la paix. Si elle ne le fait pas, personne ne le fera à sa p
343 ait comme si elle n’avait rien fait. Il n’y a pas d’ autarcie de la paix. « Penser français » comme le voulait Barrès, c’es
344 i elle n’avait rien fait. Il n’y a pas d’autarcie de la paix. « Penser français » comme le voulait Barrès, c’est non seule
345 me je le souhaite, trouve immédiatement son champ d’ action. Je n’en vois qu’un mais il est immense et à sa portée : l’Euro
346 garçons, nous sommes aussi forts et aussi riches de possibilités qu’aucun des « colosses » du monde. Mais il faut que nou
347 me actif » Cette Europe unie, sous l’impulsion d’ une nation, n’est-ce pas le rêve de Napoléon ou de Hitler ? Bien enten
348 us l’impulsion d’une nation, n’est-ce pas le rêve de Napoléon ou de Hitler ? Bien entendu. Aussi n’est-il pas question « d
349 d’une nation, n’est-ce pas le rêve de Napoléon ou de Hitler ? Bien entendu. Aussi n’est-il pas question « d’unifier » l’Eu
350 ler ? Bien entendu. Aussi n’est-il pas question «  d’ unifier » l’Europe mais de « l’unir ». Seul, le fédéralisme est capabl
351 n’est-il pas question « d’unifier » l’Europe mais de « l’unir ». Seul, le fédéralisme est capable de réaliser cette unité
352 s de « l’unir ». Seul, le fédéralisme est capable de réaliser cette unité dans la diversité et c’est pourquoi je suis réso
353 ésolument fédéraliste. Il est évident que le rôle de la France ne sera pas celui d’un conquérant. Le voudrait-elle qu’elle
354 vident que le rôle de la France ne sera pas celui d’ un conquérant. Le voudrait-elle qu’elle n’en a pas les moyens. Ce n’es
355 pas les moyens. Ce n’est pas une « francisation » de l’Europe qu’il s’agit de réaliser, mais que la France devienne et soi
356 pas une « francisation » de l’Europe qu’il s’agit de réaliser, mais que la France devienne et soit la conscience d’une Eur
357 mais que la France devienne et soit la conscience d’ une Europe à naître. Voyez ce qui se passe en Suisse : nous autres rom
358 autres romands, nous y sommes dans la proportion d’ un tiers contre deux tiers, et pourtant notre minorité y est particuli
359 fédéraliste. Le fédéralisme n’est pas un système de la quantité, mais de la qualité. Et croyez-vous cette Europe possible
360 ralisme n’est pas un système de la quantité, mais de la qualité. Et croyez-vous cette Europe possible ? Parfaitement. Les
361 ricains ne demandent pas mieux : pour des raisons d’ intérêt, sans doute, mais dont nous devons profiter. Quant aux Russes,
362 ttitude ombrageuse, eh bien ! nous nous passerons de leur consentement. C’est bien dommage, mais nous n’allons quand même
363 ais nous n’allons quand même pas attendre le visa de qui que ce soit pour nous décider à agir. Je crois que l’Europe se fe
364 Je ne me fais aucune illusion. Il n’y aura jamais d’ âge d’or. Je demande simplement un monde où les vrais problèmes soient
365 me fais aucune illusion. Il n’y aura jamais d’âge d’ or. Je demande simplement un monde où les vrais problèmes soient discu
366 où l’on puisse « vivre ». j. Rougemont Denis de , « [Entretien] La tâche française c’est d’inventer la paix », Combat,
367 Denis de, « [Entretien] La tâche française c’est d’ inventer la paix », Combat, Paris, 26 décembre 1947, p. 1-2. k. Propo
9 1948, Combat, articles (1946–1950). Message aux Européens (14 mai 1948)
368 nace vient de ses divisions. Appauvrie, encombrée de barrières qui empêchent ses biens de circuler, mais qui ne sauraient
369 e, encombrée de barrières qui empêchent ses biens de circuler, mais qui ne sauraient plus la protéger, notre Europe désuni
370 éger, notre Europe désunie marche à sa fin. Aucun de nos pays ne peut prétendre, seul, à une défense sérieuse de son indép
371 s ne peut prétendre, seul, à une défense sérieuse de son indépendance. Aucun de nos pays ne peut résoudre, seul, les probl
372 à une défense sérieuse de son indépendance. Aucun de nos pays ne peut résoudre, seul, les problèmes que lui pose l’économi
373 oblèmes que lui pose l’économie moderne. À défaut d’ une union librement consentie, notre anarchie présente nous exposera d
374 n à l’unification forcée, soit par l’intervention d’ un empire du dehors, soit par l’usurpation d’un parti du dedans. L’heu
375 tion d’un empire du dehors, soit par l’usurpation d’ un parti du dedans. L’heure est venue d’entreprendre une action qui so
376 surpation d’un parti du dedans. L’heure est venue d’ entreprendre une action qui soit à la mesure du danger. Tous ensemble,
377 le, demain, nous pouvons édifier avec les peuples d’ outre-mer associés à nos destinées, la plus grande formation politique
378 on politique et le plus vaste ensemble économique de notre temps. Jamais l’histoire du monde n’aura connu un si puissant r
379 u monde n’aura connu un si puissant rassemblement d’ hommes libres. Jamais la guerre, la peur, et la misère n’auront été mi
380 monde n’aura connu un si puissant rassemblement d’ hommes libres. Jamais la guerre, la peur, et la misère n’auront été mises en
381 grand péril et cette grande espérance la vocation de l’Europe se définit clairement. Elle est d’unir ses peuples selon leu
382 ation de l’Europe se définit clairement. Elle est d’ unir ses peuples selon leur vrai génie, qui est celui de la diversité,
383 ses peuples selon leur vrai génie, qui est celui de la diversité, et dans les conditions du xxe siècle, qui sont celles
384 ns les conditions du xxe siècle, qui sont celles de la communauté, afin d’ouvrir au monde la voie qu’il cherche, la voie
385 herche, la voie des libertés organisées. Elle est de ranimer ses pouvoirs d’invention pour la défense et pour l’illustrati
386 rtés organisées. Elle est de ranimer ses pouvoirs d’ invention pour la défense et pour l’illustration des droits et des dev
387 et pour l’illustration des droits et des devoirs de la personne humaine, dont, malgré toutes ses infidélités, l’Europe de
388 eux du monde le grand témoin. La conquête suprême de l’Europe s’appelle la dignité de l’homme, et sa vraie force est dans
389 conquête suprême de l’Europe s’appelle la dignité de l’homme, et sa vraie force est dans la liberté. Tel est l’enjeu final
390 ête suprême de l’Europe s’appelle la dignité de l’ homme , et sa vraie force est dans la liberté. Tel est l’enjeu final de notr
391 force est dans la liberté. Tel est l’enjeu final de notre lutte. C’est pour sauver nos libertés acquises, mais aussi pour
392 mais aussi pour en élargir le bénéfice à tous les hommes , que nous voulons l’union de notre continent. Sur cette union l’Europ
393 éfice à tous les hommes, que nous voulons l’union de notre continent. Sur cette union l’Europe joue son destin et celui de
394 Sur cette union l’Europe joue son destin et celui de la paix du monde. Soit donc notoire à tous que nous, Européens, rasse
395 assemblés pour donner une voix à tous les peuples de ce continent, déclarons solennellement notre commune volonté dans les
396 dans toute son étendue à la libre circulation des hommes , des idées et des biens. 2° Nous voulons une Charte des droits de l’h
397 des droits de l’homme, garantissant les libertés de pensée, de réunion et d’expression, ainsi que le libre exercice d’une
398 de l’homme, garantissant les libertés de pensée, de réunion et d’expression, ainsi que le libre exercice d’une opposition
399 arantissant les libertés de pensée, de réunion et d’ expression, ainsi que le libre exercice d’une opposition politique. 3°
400 nion et d’expression, ainsi que le libre exercice d’ une opposition politique. 3° Nous voulons une Cour de justice capable
401 ne opposition politique. 3° Nous voulons une Cour de justice capable d’appliquer les sanctions nécessaires pour que soit r
402 ique. 3° Nous voulons une Cour de justice capable d’ appliquer les sanctions nécessaires pour que soit respectée la Charte.
403 ropéenne, où soient représentées les forces vives de toutes nos nations. 5° Et nous prenons de bonne foi l’engagement d’ap
404 s vives de toutes nos nations. 5° Et nous prenons de bonne foi l’engagement d’appuyer de tous nos efforts, dans nos foyers
405 ons. 5° Et nous prenons de bonne foi l’engagement d’ appuyer de tous nos efforts, dans nos foyers et en public, dans nos pa
406 nous prenons de bonne foi l’engagement d’appuyer de tous nos efforts, dans nos foyers et en public, dans nos partis, dans
407 dans nos milieux professionnels et syndicaux, les hommes et les gouvernements qui travaillent à cette œuvre de salut public, s
408 t les gouvernements qui travaillent à cette œuvre de salut public, suprême chance de la paix et gage d’un grand avenir, po
409 ent à cette œuvre de salut public, suprême chance de la paix et gage d’un grand avenir, pour cette génération et celles qu
410 e salut public, suprême chance de la paix et gage d’ un grand avenir, pour cette génération et celles qui la suivront. l.
411 et celles qui la suivront. l. Rougemont Denis de , « Message aux Européens », Combat, Paris, 14 mai 1948, p. 1. m. Pré
412 ant au nom de tous les congressistes, à la séance de clôture du congrès de La Haye. Il donne la note la plus juste sur l’a
413 congressistes, à la séance de clôture du congrès de La Haye. Il donne la note la plus juste sur l’atmosphère de ses débat
414 . Il donne la note la plus juste sur l’atmosphère de ses débats et résume clairement ses volontés. Nous pensons qu’il ne l
10 1950, Combat, articles (1946–1950). Messieurs, n’oubliez pas l’exemple de la Suisse (3 octobre 1950)
415 Messieurs, n’oubliez pas l’exemple de la Suisse (3 octobre 1950)n o Messieurs les députés européens, Vou
416 pour faire l’Europe, et nous pour faire semblant de la faire. Faire l’Europe signifie la fédérer, ou bien ne signifie pas
417 ’avoir vue et s’en va répétant qu’il a fallu plus de cinq-cents ans pour sceller son union fédérale. Tout le monde se trom
418 récit exact. Neuf mois pour fédérer vingt-cinq États souverains Au début de 1848, la Confédération n’était qu’un pacte
419 r fédérer vingt-cinq États souverains Au début de 1848, la Confédération n’était qu’un pacte d’alliance entre vingt-cin
420 but de 1848, la Confédération n’était qu’un pacte d’ alliance entre vingt-cinq États absolument souverains. Point de citoye
421 n n’était qu’un pacte d’alliance entre vingt-cinq États absolument souverains. Point de citoyenneté suisse, point de liberté
422 tre vingt-cinq États absolument souverains. Point de citoyenneté suisse, point de liberté d’établissement ou d’échange com
423 nt souverains. Point de citoyenneté suisse, point de liberté d’établissement ou d’échange commercial entre cantons, point
424 ns. Point de citoyenneté suisse, point de liberté d’ établissement ou d’échange commercial entre cantons, point de représen
425 nneté suisse, point de liberté d’établissement ou d’ échange commercial entre cantons, point de représentation des peuples.
426 ment ou d’échange commercial entre cantons, point de représentation des peuples. Un seul organe commun, la Diète, sorte de
427 s peuples. Un seul organe commun, la Diète, sorte de Comité des ministres, composé de plénipotentiaires agissant au nom de
428 la Diète, sorte de Comité des ministres, composé de plénipotentiaires agissant au nom des États et prenant leurs rares dé
429 composé de plénipotentiaires agissant au nom des États et prenant leurs rares décisions à la majorité des trois-quarts. Prat
430 ant l’étranger et même devant la guerre entre les États membres. Niera-t-on que ce fût là, trait pour trait, un état comparab
431 là, trait pour trait, un état comparable à celui de notre Europe, sauf pour le péril extérieur, qui n’était rien au regar
432 au regard de celui que nous courons ? Une partie de l’opinion réclamait une autorité fédérale, dotée de pouvoirs limités
433 l’opinion réclamait une autorité fédérale, dotée de pouvoirs limités mais réels. Rien d’autre, en vérité, ne pouvait assu
434 érale, dotée de pouvoirs limités mais réels. Rien d’ autre, en vérité, ne pouvait assurer l’indépendance du pays. Mais la D
435 ssurer l’indépendance du pays. Mais la Diète, les États et leurs experts voyaient dans le mot « souveraineté » la réponse déc
436 tine rétorquait, chiffres en main, que la liberté d’ échanges ne manquerait pas de causer quelques dommages locaux. C’était
437 main, que la liberté d’échanges ne manquerait pas de causer quelques dommages locaux. C’était répondre aux utopistes qui p
438 x. C’était répondre aux utopistes qui proposaient d’ éteindre l’incendie, que l’eau peut abîmer les meubles. Il y eut une g
439 impuissance du pacte. Il y eut un long branle-bas de sociétés, de mouvements, de projets, de discours et de vœux. À la fav
440 u pacte. Il y eut un long branle-bas de sociétés, de mouvements, de projets, de discours et de vœux. À la faveur de cette
441 ut un long branle-bas de sociétés, de mouvements, de projets, de discours et de vœux. À la faveur de cette agitation, un p
442 ranle-bas de sociétés, de mouvements, de projets, de discours et de vœux. À la faveur de cette agitation, un petit groupe
443 ciétés, de mouvements, de projets, de discours et de vœux. À la faveur de cette agitation, un petit groupe de jeunes chefs
444 , de projets, de discours et de vœux. À la faveur de cette agitation, un petit groupe de jeunes chefs enthousiastes fit ad
445 . À la faveur de cette agitation, un petit groupe de jeunes chefs enthousiastes fit adopter par la Diète le principe d’une
446 nthousiastes fit adopter par la Diète le principe d’ une révision profonde du pacte. En 1847, notons-le, rien ne semblait «
447 année suivante. Le 17 février 1848, la Commission de révision — nommée par la Diète dans son sein et au-dehors — se réunit
448 rs — se réunit pour la première fois. Elle décide de siéger à huis clos cinq fois par semaine. Le 8 avril, elle termine se
449 ux, dont elle soumet les résultats aux vingt-cinq États souverains. Le 15 mai, la Diète est saisie du projet, qu’elle adopte
450 rojet, qu’elle adopte le 27 juin. Pendant le mois d’ août le peuple vote dans les cantons. Le 12 septembre, la Diète procla
451 stitution est acceptée par près de deux tiers des États et plus de deux tiers des citoyens votants. Le 16 novembre, le premie
452 acceptée par près de deux tiers des États et plus de deux tiers des citoyens votants. Le 16 novembre, le premier Conseil f
453 députés, neuf mois avaient suffi pour fédérer 25 États souverains. Pensez-vous que l’Histoire vous en laisse un peu plus, po
454 istoire vous en laisse un peu plus, pour unir vos États dans un plus grand péril ? Vous me direz… Vous me direz que l’E
455 temporaines. Mais il n’est pas exact que l’Europe d’ aujourd’hui soit plus grande que la Suisse d’alors : vous êtes venus d
456 rope d’aujourd’hui soit plus grande que la Suisse d’ alors : vous êtes venus de Stockholm à Strasbourg — ou de Rome, ou mêm
457  : vous êtes venus de Stockholm à Strasbourg — ou de Rome, ou même d’Ankara — en moins de temps qu’il n’en fallait, il y a
458 s de Stockholm à Strasbourg — ou de Rome, ou même d’ Ankara — en moins de temps qu’il n’en fallait, il y a cent ans, pour a
459 asbourg — ou de Rome, ou même d’Ankara — en moins de temps qu’il n’en fallait, il y a cent ans, pour aller de Genève ou de
460 s qu’il n’en fallait, il y a cent ans, pour aller de Genève ou des Grisons à Berne. Pour la guerre entre vos pays, les deu
461 fisent. Vos nations vivent ensemble depuis autant de siècles, et souvent davantage, que nos cantons. Leurs sorts ne sont p
462 ez l’Europe dans l’ensemble du monde. Vos cordons de douanes ne sont pas plus nombreux, ni moins strangulatoires, que ne l
463 économies ne sont pas plus disparates que celles de Zurich, par exemple, et de ses petits voisins paysans. Les sombres pr
464 disparates que celles de Zurich, par exemple, et de ses petits voisins paysans. Les sombres prévisions des réalistes quan
465 sombres prévisions des réalistes quant aux effets d’ une union « trop rapide » remplissaient nos journaux, il y a cent-troi
466 le non plus qui ne reparaisse dans la bouche même de ceux qui affirment que nos réalités sont tellement différentes… Certe
467 paraison n’est pas raison, mais quand les raisons de ne rien faire restent les mêmes quoi qu’il arrive, c’est qu’elles tra
468 ive, c’est qu’elles traduisent une certaine forme d’ esprit, une cécité partielle devant les leçons de l’Histoire, que j’ai
469 d’esprit, une cécité partielle devant les leçons de l’Histoire, que j’ai plus d’une raison de nommer le daltonisme politi
470 le devant les leçons de l’Histoire, que j’ai plus d’ une raison de nommer le daltonisme politique. Messieurs les députés, n
471 leçons de l’Histoire, que j’ai plus d’une raison de nommer le daltonisme politique. Messieurs les députés, n’oubliez pas
472 ratique. C’est assez pour que j’ose vous supplier d’ y réfléchir quelques minutes. La Suisse s’est unie en neuf mois. Il va
473 Suisse s’est unie en neuf mois. Il vaut la peine de s’arrêter devant ce fait, pour mieux se persuader qu’on peut aller tr
474 s n’auriez pas, Staline le prend : c’est le temps de méditer avant d’agir. Mais celui que vous risquez de perdre, cet été,
475 taline le prend : c’est le temps de méditer avant d’ agir. Mais celui que vous risquez de perdre, cet été, soyez bien sûrs
476 méditer avant d’agir. Mais celui que vous risquez de perdre, cet été, soyez bien sûrs qu’il le retrouvera : c’est le temps
477 ez bien sûrs qu’il le retrouvera : c’est le temps de modifier non pas des paragraphes, mais l’ordre de bataille de l’Armée
478 de modifier non pas des paragraphes, mais l’ordre de bataille de l’Armée rouge. n. Rougemont Denis de, « Messieurs, n’
479 non pas des paragraphes, mais l’ordre de bataille de l’Armée rouge. n. Rougemont Denis de, « Messieurs, n’oubliez pas
480 bataille de l’Armée rouge. n. Rougemont Denis de , « Messieurs, n’oubliez pas l’exemple de la Suisse », Combat, Paris,
481 nt Denis de, « Messieurs, n’oubliez pas l’exemple de la Suisse », Combat, Paris, 3 octobre 1950, p. 6. o. Présenté par la
482 ivante : « Nous publions deux importants extraits de cinq lettres que notre ami Denis de Rougemont écrivit à l’intention d
483 ntion des députés réunis à Strasbourg. La session d’ été de l’Assemblée européenne est terminée. Mais ces lettres d’avertis
484 des députés réunis à Strasbourg. La session d’été de l’Assemblée européenne est terminée. Mais ces lettres d’avertissement
485 semblée européenne est terminée. Mais ces lettres d’ avertissement demeurent. Et il y a un redoutable abîme entre les propo
486 il y a un redoutable abîme entre les propositions de Denis de Rougemont et les résultats des travaux de Strasbourg. On tro
487 e Denis de Rougemont et les résultats des travaux de Strasbourg. On trouvera ici, demain, le second extrait de ces lettres
488 bourg. On trouvera ici, demain, le second extrait de ces lettres. »
11 1950, Combat, articles (1946–1950). Messieurs, on vous attend encore au pied du mur ! (4 octobre 1950)
489 e, ou protestante, ou française, ou allemande, ou de gauche, ou de droite — ou ne sera pas. Vous êtes là pour qu’elle soit
490 nte, ou française, ou allemande, ou de gauche, ou de droite — ou ne sera pas. Vous êtes là pour qu’elle soit, pour qu’elle
491 elle soit, pour qu’elle dure, dans ses diversités de tous les ordres, que l’on ne peut préserver que par l’union et que l’
492 t que l’unification tuerait. Mais sans sacrifices d’ amour-propre, sans replis stratégiques d’intérêts légitimes, sans comp
493 crifices d’amour-propre, sans replis stratégiques d’ intérêts légitimes, sans compromis, elle ne sera pas. C’est clair. V
494 itaux. Quant à ceux qui n’ont point cette passion de l’Europe, ceux dont le regard s’attarde aux obstacles à l’union, perd
495 regard s’attarde aux obstacles à l’union, perdant de vue sa nécessité, il nous reste à leur faire comprendre que le pire o
496 ls se prennent pour l’opinion, qu’ils ont négligé d’ écouter. Tous les sondages précis réfutent leurs craintes, démasquent
497 leurs arrière-pensées, dénoncent leur parti pris de scepticisme. Les deux tiers des Européens se déclarent pour l’union,
498 les obstacles insurmontables. Il y a deux sortes d’ opinions : celle que l’on invoque, et la vraie. L’une qui sert d’alibi
499 lle que l’on invoque, et la vraie. L’une qui sert d’ alibi aux démagogues, et l’autre qui les laisse tomber ; l’une qui fai
500 pu parler que dans le secret des urnes. L’opinion d’ aujourd’hui, je la sens, c’est l’Europe. Mais elle ne bougera pas, si
501 r pudiquement, chaque année, qu’il reste désireux d’ envisager l’étude de quelques mesures préalables tendant à renforcer l
502 e année, qu’il reste désireux d’envisager l’étude de quelques mesures préalables tendant à renforcer le sentiment d’une So
503 sures préalables tendant à renforcer le sentiment d’ une Solidarité qui ne saurait nuire à « l’achèvement d’une union plus
504 Solidarité qui ne saurait nuire à « l’achèvement d’ une union plus intime entre ses membres ». Les manchettes des journaux
505 membres ». Les manchettes des journaux parleront d’ un « pas important vers l’union ». Et les Anglais jugeront qu’ils ne p
506 ent s’associer à ces engagements téméraires avant d’ avoir pris le temps d’étudier leur contenu et de s’être assurés qu’en
507 ngagements téméraires avant d’avoir pris le temps d’ étudier leur contenu et de s’être assurés qu’en tous les cas cela ne p
508 t d’avoir pris le temps d’étudier leur contenu et de s’être assurés qu’en tous les cas cela ne peut les conduire absolumen
509 des principes, a fait jusqu’ici pratiquement plus de mal que de bien à notre cause à tous. On me dira que si l’on se conte
510 es, a fait jusqu’ici pratiquement plus de mal que de bien à notre cause à tous. On me dira que si l’on se contente d’affir
511 cause à tous. On me dira que si l’on se contente d’ affirmer des principes sans les mettre en pratique, cela ne fait de ma
512 incipes sans les mettre en pratique, cela ne fait de mal à personne. Mais cela en fait aux principes. Or une Europe qui se
513 européen, ce serait un acte enfin, quelque chose de concret. Et je me garde de sous-estimer la puissance des philatéliste
514 e enfin, quelque chose de concret. Et je me garde de sous-estimer la puissance des philatélistes. Mais si Strasbourg accou
515 ce des philatélistes. Mais si Strasbourg accouche d’ un timbre-poste, nous serons un peu déçus, et Staline très content. Vo
516 les députés, vous le savez bien, vous n’êtes pas de vrais députés, car les vrais sont élus, et vous êtes simplement délég
517 es simplement délégués pour consultation. Décidez de vous faire élire. Un raisonnement très simple appuie cette suggestion
518 rmer ses peuples, et du danger qu’ils courent, et de la parade puissante que pourrait constituer notre fédération. On n’in
519 s une propagande massive. Personne n’a les moyens de la financer. La seule solution concevable, c’est une campagne élector
520 , c’est une campagne électorale organisée par les États , en vue de nommer leurs députés au premier Parlement de l’Europe. Les
521 vue de nommer leurs députés au premier Parlement de l’Europe. Les partis présenteront les candidats. Et les mouvements fé
522 les mouvements fédéralistes aussi. Et les groupes d’ intérêts professionnels, syndicats patronaux et ouvriers. Il en résult
523 . Il en résultera dans nos provinces une campagne d’ agitation, d’émulation, de polémique européenne, que nulle autre métho
524 tera dans nos provinces une campagne d’agitation, d’ émulation, de polémique européenne, que nulle autre méthode ne saurait
525 provinces une campagne d’agitation, d’émulation, de polémique européenne, que nulle autre méthode ne saurait provoquer.
526 La condition à la fois nécessaire et suffisante d’ une telle campagne, c’est de faire sentir aux peuples qu’elle comporte
527 essaire et suffisante d’une telle campagne, c’est de faire sentir aux peuples qu’elle comporte un enjeu, et que leur sort
528 un seul : discuter et voter un projet bien précis de Constitution fédérale de l’Europe. Si vous acceptez cela, vous aurez
529 er un projet bien précis de Constitution fédérale de l’Europe. Si vous acceptez cela, vous aurez avec vous l’opinion vraie
530 s l’opinion vraie dans sa majorité, les militants de l’Europe, la logique de l’Histoire, le réveil de notre espérance. Si
531 a majorité, les militants de l’Europe, la logique de l’Histoire, le réveil de notre espérance. Si vous n’acceptez pas, vou
532 de l’Europe, la logique de l’Histoire, le réveil de notre espérance. Si vous n’acceptez pas, vous ne trouverez derrière v
533 e et l’indifférence ; et devant vous, le rire des hommes d’acier. Si vous me dites que c’est prématuré, je vous supplierai de
534 indifférence ; et devant vous, le rire des hommes d’ acier. Si vous me dites que c’est prématuré, je vous supplierai de déc
535 me dites que c’est prématuré, je vous supplierai de déclarer clairement à quel moment, et sous quelles conditions, cela c
536 moment, et sous quelles conditions, cela cessera d’ être prématuré. Si vous me dites que c’est très joli, mais qu’il faut
537 ut qu’on vous laisse du temps, je vous proposerai de l’obtenir de Staline. Car en Europe il y en a peu. Si vous me dites e
538 laisse du temps, je vous proposerai de l’obtenir de Staline. Car en Europe il y en a peu. Si vous me dites enfin que c’es
539 enfin que c’est plus difficile que je n’ai l’air de le penser dans ma candeur naïve, je vous demanderai si quelque chose
540 ue le maintien du statu quo, que la vie, la durée de notre Europe divisée, devant toutes les menaces que vous savez : un r
541 la ruine à bref délai, les trois-cents divisions de l’armée rouge. D’une part, on peut penser qu’au point où nous en somm
542 oix presque désespérée, et sans autre pouvoir que de vous adjurer de la part des millions qui se taisent mais qui ont peur
543 et qu’une autre ne dit pas non. Dans un mouvement de passion, je m’écriais l’autre jour : si vous ne voulez rien faire, al
544 et je les supplie maintenant, au nom de l’Europe, de rester au contraire, de ne point se séparer avant d’avoir dressé, pou
545 nant, au nom de l’Europe, de rester au contraire, de ne point se séparer avant d’avoir dressé, pour notre espoir, un signe
546 rester au contraire, de ne point se séparer avant d’ avoir dressé, pour notre espoir, un signe ! Des raisons de vivre !
547 ssé, pour notre espoir, un signe ! Des raisons de vivre ! Vous n’êtes pas encore l’espoir des peuples libres, ni des
548 l’espoir des peuples libres, ni des peuples muets de l’Est européen. Mais vous pouvez le devenir et sonner le ralliement.
549 re. Personne ne veut mourir, que pour des raisons de vivre. Mozart n’en est plus une pour les chômeurs. Et ce n’est pas un
550 qui résoudra le problème du chômage, mais l’union de nos sacrifices. Qui peut nous l’imposer ? Qui peut faire reculer les
551 ois légitimes qui se révèlent contraires au salut de l’ensemble ? Je veux avoir parlé pour ne rien dire, si quelqu’un nous
552 que l’Autorité fédérale, souveraine au-dessus des États . Messieurs les députés européens, je vous salue d’un vœu qui voudrait
553 s. Messieurs les députés européens, je vous salue d’ un vœu qui voudrait résumer celui de tous nos peuples aux écoutes de l
554 je vous salue d’un vœu qui voudrait résumer celui de tous nos peuples aux écoutes de l’avenir, un vœu mêlé d’angoisse et d
555 ait résumer celui de tous nos peuples aux écoutes de l’avenir, un vœu mêlé d’angoisse et d’espérance : méritez votre nom,
556 nos peuples aux écoutes de l’avenir, un vœu mêlé d’ angoisse et d’espérance : méritez votre nom, faites-vous élire et fédé
557 ux écoutes de l’avenir, un vœu mêlé d’angoisse et d’ espérance : méritez votre nom, faites-vous élire et fédérez l’Europe p
558 y, 30 juillet-6 août 1950. p. Rougemont Denis de , « Messieurs, on vous attend encore au pied du mur ! », Combat, Paris
559 Combat, Paris, 4 octobre 1950, p. 6. q. Présenté de cette note : « Nous publions aujourd’hui le deuxième extrait des cinq
560 éens que Denis de Rougemont écrivit à l’occasion de la session de Strasbourg. »
561 s de Rougemont écrivit à l’occasion de la session de Strasbourg. »