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esquiver la question posée par la bombe atomique.
Ils
essaient d’enchaîner le monstre avec des agrafes de dossiers : « C’es
2
que nous gardons, c’est un dépôt sacré », disent-
ils
. Et sans l’avis d’aucun savant autorisé, ils parlent de défenses poss
3
sent-ils. Et sans l’avis d’aucun savant autorisé,
ils
parlent de défenses possibles, si toutefois on leur laisse le command
4
e industrielle de l’Amérique. C’est assez dire qu’
il
n’est que temporaire. Quant au secret technique de la détonation, dan
5
e ? Je n’en jugerais qu’après un essai en Europe.
Il
est clair que l’opinion publique est égarée par sa foi dans la scienc
6
nstant que les projectiles ne viennent de Russie.
Il
est trop tard pour échanger des notes et des coups de chapeau haut de
7
ciel bleu, — l’expression est devenue si vraie qu’
elle
a cessé de nous frapper. Une apathie étrange me semble s’établir dans
8
t gouverné par ceux qu’on nomme les trois Grands.
Ils
se composent d’un loup déguisé en mouton et de deux moutons vêtus de
9
que la Bombe doit être administrée. Notez que, si
elle
ne l’est pas, quelqu’un va nous l’administrer. L’alternative est entr
10
notre sort sont en réalité irresponsables ? Et qu’
ils
usurpent le nom de gouvernants ? J’essaie de me mettre à leur place.
11
ssie blessée doit d’abord être reconstruite, mais
il
ne renonce pas aux plans de Pierre le Grand. Attlee voudrait la paix,
12
blessé est en pleine expérience socialiste, mais
il
ne renonce pas à faire tuer les indigènes qui se révoltent à Java con
13
américains y trouveraient leur espace vital, mais
il
ne renonce pas aux barrières douanières, à la défense du capital d’ab
14
its) d’un conflit avec la Russie. Sans doute sont-
ils
tous les trois convaincus qu’ils aiment la paix en général, et pour e
15
Sans doute sont-ils tous les trois convaincus qu’
ils
aiment la paix en général, et pour elle-même, et qu’ils détestent la
16
ment la paix en général, et pour elle-même, et qu’
ils
détestent la guerre : pourtant, ils s’y préparent. Ce qui domine en f
17
e-même, et qu’ils détestent la guerre : pourtant,
ils
s’y préparent. Ce qui domine en fait leur politique, c’est la vision
18
la vision de la guerre, non pas celle de la paix.
Ils
agissent donc comme des irresponsables, provoquant ce qu’ils veulent
19
t donc comme des irresponsables, provoquant ce qu’
ils
veulent éviter. Et le public a l’air de trouver cela normal, — ou ne
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de les comprendre, avant de les traiter de ce qu’
ils
ont l’air d’être, quand on voit ce qu’ils vont faire ou laisser faire
21
e ce qu’ils ont l’air d’être, quand on voit ce qu’
ils
vont faire ou laisser faire de nos vies. Irresponsables moins par inc
22
e nos vies. Irresponsables moins par incapacité —
ils
suffiraient aux tâches courantes — que par le fait du problème posé,
23
la Bombe dépasse tout. Devant le monde à unifier,
ils
paraissent frappés d’un vertige. Ils ne voient rien. Cette absence de
24
e à unifier, ils paraissent frappés d’un vertige.
Ils
ne voient rien. Cette absence de pensée est plus dangereuse que n’imp
25
rte quelle pensée fausse. Mais comment pourraient-
ils
penser ? Simplement, pratiquement, ils n’ont pas le temps. Pourquoi ?
26
pourraient-ils penser ? Simplement, pratiquement,
ils
n’ont pas le temps. Pourquoi ? J’en vois une raison simple. Parce qu’
27
Pourquoi ? J’en vois une raison simple. Parce qu’
ils
gouvernent leur nation, et que c’est assez ou même trop pour un homme
28
s inaugurations, des banquets et des nominations.
Il
est clair que, pour gouverner les nations, la première condition requ
29
que, pour arbitrer la lutte entre les continents,
il
faut d’autres talents et un autre savoir que pour équilibrer les démo
30
prendre son temps. ⁂ Je les plains. Cependant, s’
ils
s’obstinent, je serai forcé de les traiter d’usurpateurs. L’incompéte
31
urs. L’incompétence des commandants en chef n’est-
elle
pas jugée criminelle par l’opinion publique de leur patrie, et parfoi
32
États de l’Union ? — Ce serait absurde, me disent-
ils
. — Eh quoi, c’est pourtant ce que nous offre, à quelques nuances près
33
disqualifie, en principe, pour l’entreprise dont
ils
se chargent, et les porte à la saboter. Leur métier même les rend ina
34
end inaptes à voir ce que le monde entier attend.
Ils
ne voient rien, c’est évident, car les visions de l’avenir naissent d
35
ons de l’avenir naissent d’un loisir intense. Or,
ils
ont à recevoir des députés… Seule, une cour internationale, formée d’
36
efs d’État… Peut-être l’expérience de Bikini va-t-
elle
donner le choc nécessaire pour alerter enfin une opinion mondiale ? A
37
rands ne pas perdre la boule ! Car le fait est qu’
il
n’y en a qu’une de boule, comme disait à peu près le regretté Willkie
38
te catholique ». (Je le crois seul de son parti.)
Il
avait l’air un peu nerveux. Voici notre conversation : Moi. — Contre
39
ulera donc Crémation, liquidation, évaporation ! (
Il
prononça ces mots d’un ton rageur, qui me fit éclater de rire.) Moi.
40
monde, et la traitaient de « fasciste », parce qu’
elle
répugne, entre autres, à la nationalisation des banques. Peut-être a-
41
, à la nationalisation des banques. Peut-être a-t-
elle
tort, mais on n’a pas manqué de répondre que cette mesure est précisé
42
démocratie » ne signifiera rien du tout. Ou bien
elle
servira d’excuse et de prétexte cousu de fil blanc ou de fil rouge au
43
ussi bien nos marins ou capitaines cochons seront-
ils
revêtus, pour l’occasion, d’uniformes réguliers de la marine, imprégn
44
ge de l’uniforme, symboliquement, qui va sombrer.
Il
vaut la peine de remarquer, enfin, que pas une voix ne s’est élevée,
45
parliez-vous dans vos articles précédents ? Faut-
il
penser que vous vous moquiez du monde ? — J’étais sérieux. Je prenais
46
ous que beaucoup l’ont pensé, sans vous le dire ?
Il
est bien naturel que l’événement d’Hiroshima nous ait jetés pour quel
47
lque amour tardif de notre humanité ? Simplement,
il
a fait son calcul. Les Alliés pouvaient riposter, et la valeur milita
48
de compenser, même à ses yeux, le risque moral qu’
il
eût couru à l’employer. Le cas de la Bombe est différent. Je vous rép
49
cas de la Bombe est différent. Je vous répète qu’
elle
supprimera la possibilité de riposter, c’est-à-dire jouera militairem
50
ra militairement le rôle d’une bataille décisive.
Elle
supprimera donc les scrupules de l’agresseur éventuel. Car nos scrupu
51
e nos actes. Si l’emploi de la Bombe est décisif,
il
n’y a pas de punition à redouter. Il est donc clair qu’on l’emploiera
52
est décisif, il n’y a pas de punition à redouter.
Il
est donc clair qu’on l’emploiera, au risque de faire sauter la Terre.
53
u’on nomme des comités pour la retenir ! Comme si
elle
était tombée du ciel, animée de mauvaises intentions ! C’est d’un com
54
vases de Chine. Si on laisse la Bombe tranquille,
elle
ne fera rien, c’est clair. Elle se tiendra bien coite dans sa caisse.
55
Bombe tranquille, elle ne fera rien, c’est clair.
Elle
se tiendra bien coite dans sa caisse. Qu’on ne nous raconte donc pas
56
Qu’on ne nous raconte donc pas d’histoires. Ce qu’
il
nous faut, c’est un contrôle de l’homme. — Ah ! ça, c’est une autre q
57
Bikini bluff (2 juillet 1946)f g À l’heure qu’
il
est, on ne sait rien des cochons. Peut-être les prières dites en l’ég
58
iés » et « pour alléger leurs souffrances » n’ont-
elles
point été sans effet. Ce qu’on sait, de source officielle, c’est que
59
y se déclare satisfait. « L’expérience, déclare-t-
il
, a répondu à toutes nos espérances. Nous comptons en tirer des rensei
60
Et sa valeur ne saurait être exagérée, encore qu’
elle
soit aisément « estimable » : elle peut se chiffrer assez exactement,
61
rée, encore qu’elle soit aisément « estimable » :
elle
peut se chiffrer assez exactement, si l’on connaît le budget prévu po
62
ences de Bikini. Tout cela n’était, nous disaient-
ils
, qu’un complot pseudo-scientifique pour démontrer la valeur éternelle
63
anger, le vrai danger de l’expérience, c’était qu’
elle
ratât, conformément aux prévisions des amiraux, et qu’elle rassurât f
64
t, conformément aux prévisions des amiraux, et qu’
elle
rassurât faussement les peuples quant aux risques institués par la bo
65
peuples quant aux risques institués par la bombe.
Il
se peut que cette campagne ait été orchestrée par les services de l’A
66
a Marine, sur la question du commandement unique.
Il
est certain que les savants sérieux se sont tous rangés du côté des a
67
iation seule restait indispensable, puisque c’est
elle
qui transporterait la bombe, ou abattrait les bombardiers ennemis. La
68
d match à trois équipes. Mais sans doute ne l’a-t-
elle
gagnée qu’aux yeux de l’opinion publique. Les vrais arbitres restent
69
expérience d’une explosion atomique sous-marine.
Ils
jugent la bombe du type Nagasaki — celle qui fut lancée dimanche soir
70
mille fois surpassée par les récents modèles, qu’
ils
sont seuls à connaître. Et c’est leur point de vue qui m’importe. Les
71
x sont rassurés, conformément à tous les plans qu’
ils
ont tirés, l’humanité en général n’a pas lieu de se réjouir trop bruy
72
’un tel gouvernement — qui pourrait être l’ONU si
elle
existait autrement que sous forme d’initiales — c’est d’augmenter par
73
Les intellectuels sont-
ils
responsables ? (5 juillet 1946)h i Chose étrange, le 6 février 193
74
rier 1934 fut une date de l’histoire littéraire :
elle
inaugura le temps des moutons enragés. Fatigués de leur innocence, vo
75
ue l’herbe se faisait rare sous leurs pieds et qu’
ils
n’avaient plus de berger, aux éclairs de chaleur d’une révolution enc
76
irs de chaleur d’une révolution encore lointaine,
ils
se sont jetés dans le premier parc venu, à gauche ou à droite, et dep
77
euse, tout en signant une quantité de manifestes.
Ils
ont signé pour le négus et contre lui ; pour le chef bien-aimé, Père
78
d’un nom connu, d’un nom à faire connaître… Bref,
il
n’est pas un acte commis dans le monde, depuis quatre ans, qui n’ait
79
’être considérés comme des citoyens responsables,
ils
étaient au moins en accord avec l’esprit général de l’époque : intell
80
rême était de se « distinguer » des contingences,
ils
étaient au moins purs dans leur erreur. Les modalités de leur retrait
81
ne pensée détachée, irresponsable par définition.
Il
n’y a pas que du mal à en dire : cela nous a valu quelques œuvres dur
82
la culture qu’on nous propose de défendre, c’est
elle
, précisément, qui est responsable de la brutalité totalitaire. On nou
83
nc de défendre une maladie contre la mort, à quoi
elle
mène nécessairement. Au lieu de nous refaire une santé. Au lieu de no
84
’hui. ⁂ Pour qu’une pensée s’engage dans le réel,
il
ne faut pas ni ne saurait suffire qu’elle se soumette à des réalités
85
le réel, il ne faut pas ni ne saurait suffire qu’
elle
se soumette à des réalités dont elle ignore ou répudie la loi interne
86
t suffire qu’elle se soumette à des réalités dont
elle
ignore ou répudie la loi interne : la tactique d’un parti par exemple
87
se libérer et assumer les risques de sa liberté.
Il
peut sembler paradoxal de soutenir que l’engagement d’une pensée supp
88
ne devient pas pour si peu un penseur engagé. Et
il
ne faudrait pas que ces trahisons insignes ridiculisent toute espèce
89
nt pas libératrice et responsable du seul fait qu’
elle
se met « au service » d’une doctrine de lutte politique. Faire la rév
90
e élite en est l’ahurissant exemple. Du moins a-t-
elle
eu cela de bon : les écrivains qui ont décidé tout récemment de renon
91
ifeste de Ce Soir) ont exprimé en toute clarté qu’
ils
étaient de vrais libéraux, irresponsables nés2, égarés pour un temps
92
agement » politique, et faisant amende honorable.
Ils
étaient en rupture de bercail. Maintenant, tout est rentré dans l’ord
93
audelaire voulait que la critique des poètes — qu’
il
opposait à celle des philosophes libéraux — fût partiale, pleine de p
94
h. Rougemont Denis de, « Les intellectuels sont-
ils
responsables ? », Combat, Paris, 5 juillet 1946, p. 1. i. Précédé du
95
exprime souvent par des attitudes assez confuses,
il
est vrai néanmoins que les impératifs partisans pèsent de plus en plu
96
ctivité intellectuelle. Aussi avons-nous pensé qu’
il
serait intéressant de demander à un certain nombre d’écrivains leur o
97
lié en 1936), nous envoie l’article suivant, dont
il
est intéressant de souligner qu’il fut écrit et publié dans une revue
98
suivant, dont il est intéressant de souligner qu’
il
fut écrit et publié dans une revue en 1938, sous le titre : « Trop d’
99
de Rougemont me reçoit dans l’agréable maison qu’
il
occupe à la sortie du village de Ferney, désormais et pour toujours,
100
y, désormais et pour toujours, prénommé Voltaire.
Il
me semble que mon hôte n’est pas fâché d’habiter sous cette ombre. Il
101
est le contraire d’un amuseur. Pendant la guerre,
il
a mené le bon combat à l’émission « La voix de l’Amérique », tandis q
102
s étincelantes Lettres sur la bombe atomique où
il
prenait position devant les problèmes mis à l’ordre du jour par la no
103
lle arme. « La bombe n’est pas dangereuse, disait-
il
en substance, mais les hommes qui l’utilisent. Ce sont eux qu’il faut
104
, mais les hommes qui l’utilisent. Ce sont eux qu’
il
faut contrôler ». Je pense à cela tandis que notre entretien prend, c
105
s forces qui aboutissent à la bombe ou à la paix.
Il
n’y a de fatalité que lorsque l’homme démissionne. Et c’est ce qui es
106
plus à la taille de ces géants qui s’affrontent.
Elle
est pauvre aussi et le monde actuel est sans pitié pour les pauvres.
107
ce a besoin des États-Unis pour sa subsistance et
elle
est entravée dans ses démarches par la Russie, c’est-à-dire par son p
108
la Russie, c’est-à-dire par son parti communiste.
Elle
donne ainsi l’impression d’être sous une double dépendance. Ce n’est
109
intellectuelle ? Si on peut dire qu’actuellement
elle
ne l’a pas davantage que l’initiative politique, il faut ajouter auss
110
ne l’a pas davantage que l’initiative politique,
il
faut ajouter aussitôt que personne ne l’a reprise à sa place. Cette i
111
vacant, et seule la France pourra le tenir comme
elle
l’a tenu dans le passé. Mais la France est « en attente ». En attente
112
e paralysée, neutralisée par une double négation.
Elle
se refuse également à chacun des « blocs » mais elle ne sait pas à qu
113
e se refuse également à chacun des « blocs » mais
elle
ne sait pas à quoi elle se donnera. Il faut, précisément, reprend Den
114
chacun des « blocs » mais elle ne sait pas à quoi
elle
se donnera. Il faut, précisément, reprend Denis de Rougemont, que cet
115
s » mais elle ne sait pas à quoi elle se donnera.
Il
faut, précisément, reprend Denis de Rougemont, que cette double négat
116
x « blocs ». C’est une invention des propagandes.
Ils
n’existent que dans la mesure où on veut bien leur accorder du crédit
117
ement circonscrite par la situation dans laquelle
elle
se trouve, et que ses refus mêmes, s’ils n’étaient pas exploités sur
118
aquelle elle se trouve, et que ses refus mêmes, s’
ils
n’étaient pas exploités sur le plan passionnel, définiraient une affi
119
e nous venons de dire, « d’inventer » la paix. Si
elle
ne le fait pas, personne ne le fera à sa place. Mais si elle l’invent
120
fait pas, personne ne le fera à sa place. Mais si
elle
l’inventait pour elle seule — ce qui est d’ailleurs impensable —, ce
121
le fera à sa place. Mais si elle l’inventait pour
elle
seule — ce qui est d’ailleurs impensable —, ce serait comme si elle n
122
i est d’ailleurs impensable —, ce serait comme si
elle
n’avait rien fait. Il n’y a pas d’autarcie de la paix. « Penser franç
123
ble —, ce serait comme si elle n’avait rien fait.
Il
n’y a pas d’autarcie de la paix. « Penser français » comme le voulait
124
aute de méthode mais aussi une faute de français.
Il
faut donc que l’affirmation française, si elle éclate, comme je le so
125
ais. Il faut donc que l’affirmation française, si
elle
éclate, comme je le souhaite, trouve immédiatement son champ d’action
126
ement son champ d’action. Je n’en vois qu’un mais
il
est immense et à sa portée : l’Europe. C’est seulement par l’Europe q
127
ope que nous pourrons agir sur les USA ou l’URSS.
Il
est temps que nous en prenions conscience : nous ne sommes pas des pe
128
ibilités qu’aucun des « colosses » du monde. Mais
il
faut que nous existions et que nous sachions que nous existons. «
129
Napoléon ou de Hitler ? Bien entendu. Aussi n’est-
il
pas question « d’unifier » l’Europe mais de « l’unir ». Seul, le fédé
130
et c’est pourquoi je suis résolument fédéraliste.
Il
est évident que le rôle de la France ne sera pas celui d’un conquéran
131
ce ne sera pas celui d’un conquérant. Le voudrait-
elle
qu’elle n’en a pas les moyens. Ce n’est pas une « francisation » de l
132
ra pas celui d’un conquérant. Le voudrait-elle qu’
elle
n’en a pas les moyens. Ce n’est pas une « francisation » de l’Europe
133
Ce n’est pas une « francisation » de l’Europe qu’
il
s’agit de réaliser, mais que la France devienne et soit la conscience
134
profiter. Quant aux Russes, je suis convaincu qu’
ils
n’ont qu’à y gagner. Mais s’ils persistent dans leur attitude ombrage
135
suis convaincu qu’ils n’ont qu’à y gagner. Mais s’
ils
persistent dans leur attitude ombrageuse, eh bien ! nous nous passero
136
essimisme actif ». Je ne me fais aucune illusion.
Il
n’y aura jamais d’âge d’or. Je demande simplement un monde où les vra
137
ce la vocation de l’Europe se définit clairement.
Elle
est d’unir ses peuples selon leur vrai génie, qui est celui de la div
138
la communauté, afin d’ouvrir au monde la voie qu’
il
cherche, la voie des libertés organisées. Elle est de ranimer ses pou
139
e qu’il cherche, la voie des libertés organisées.
Elle
est de ranimer ses pouvoirs d’invention pour la défense et pour l’ill
140
es, à la séance de clôture du congrès de La Haye.
Il
donne la note la plus juste sur l’atmosphère de ses débats et résume
141
t résume clairement ses volontés. Nous pensons qu’
il
ne laissera pas nos lecteurs indifférents. »
142
le monde croit l’avoir vue et s’en va répétant qu’
il
a fallu plus de cinq-cents ans pour sceller son union fédérale. Tout
143
ller son union fédérale. Tout le monde se trompe.
Il
a fallu neuf mois. En voici le récit exact. Neuf mois pour fédérer
144
n et au-dehors — se réunit pour la première fois.
Elle
décide de siéger à huis clos cinq fois par semaine. Le 8 avril, elle
145
er à huis clos cinq fois par semaine. Le 8 avril,
elle
termine ses travaux, dont elle soumet les résultats aux vingt-cinq Ét
146
maine. Le 8 avril, elle termine ses travaux, dont
elle
soumet les résultats aux vingt-cinq États souverains. Le 15 mai, la D
147
ins. Le 15 mai, la Diète est saisie du projet, qu’
elle
adopte le 27 juin. Pendant le mois d’août le peuple vote dans les can
148
z que l’Europe est plus grande que la Suisse ; qu’
il
fallut une bonne guerre pour briser le tabou des souverainetés canton
149
sublimes des grandes nations contemporaines. Mais
il
n’est pas exact que l’Europe d’aujourd’hui soit plus grande que la Su
150
de Rome, ou même d’Ankara — en moins de temps qu’
il
n’en fallait, il y a cent ans, pour aller de Genève ou des Grisons à
151
mplissaient nos journaux, il y a cent-trois ans :
il
n’en est pas une seule qui se soit vérifiée, mais pas une seule non p
152
aisons de ne rien faire restent les mêmes quoi qu’
il
arrive, c’est qu’elles traduisent une certaine forme d’esprit, une cé
153
ire restent les mêmes quoi qu’il arrive, c’est qu’
elles
traduisent une certaine forme d’esprit, une cécité partielle devant l
154
Messieurs les députés, n’oubliez pas la Suisse :
elle
existe en dépit de tous les arguments qu’on oppose aujourd’hui à l’Eu
155
lques minutes. La Suisse s’est unie en neuf mois.
Il
vaut la peine de s’arrêter devant ce fait, pour mieux se persuader qu
156
us risquez de perdre, cet été, soyez bien sûrs qu’
il
le retrouvera : c’est le temps de modifier non pas des paragraphes, m
157
te ou ne sera pas » savent très bien qu’à ce prix
elle
ne sera pas. Voilà l’ennemi, et non point Vychinski. Et cela vaut pou
158
de droite — ou ne sera pas. Vous êtes là pour qu’
elle
soit, pour qu’elle dure, dans ses diversités de tous les ordres, que
159
sera pas. Vous êtes là pour qu’elle soit, pour qu’
elle
dure, dans ses diversités de tous les ordres, que l’on ne peut préser
160
tratégiques d’intérêts légitimes, sans compromis,
elle
ne sera pas. C’est clair. Vous ignorez l’opinion vraie Seuls ceu
161
obstacles à l’union, perdant de vue sa nécessité,
il
nous reste à leur faire comprendre que le pire obstacle, c’est eux-mê
162
comprendre que le pire obstacle, c’est eux-mêmes.
Ils
nous disent : « Je veux bien, je ne suis pas contre, mais voyez ces d
163
ûre, et chacun sait qu’on ne peut rien faire sans
elle
». C’est qu’ils se prennent pour l’opinion, qu’ils ont négligé d’écou
164
it qu’on ne peut rien faire sans elle ». C’est qu’
ils
se prennent pour l’opinion, qu’ils ont négligé d’écouter. Tous les so
165
le ». C’est qu’ils se prennent pour l’opinion, qu’
ils
ont négligé d’écouter. Tous les sondages précis réfutent leurs craint
166
déclarent pour l’union, lorsqu’on les interroge.
Il
n’en fallut pas plus pour fédérer la Suisse. Mais l’opinion veut qu’o
167
traîne. « On suit ceux qui marchent », dit Péguy.
Elle
ne vous suivra pas si vous êtes daltoniens, et les sceptiques, alors,
168
nt bien dire : j’avais raison, voyez l’obstacle !
Ils
l’auront eux-mêmes suscité. L’œil du sceptique crée les obstacles ins
169
ctement ce que la presse et la radio déclarent qu’
elle
est. Presse et radio voudraient que Dewey soit élu : on dit alors qu’
170
o voudraient que Dewey soit élu : on dit alors qu’
il
a pour lui toute l’opinion. Truman élu, l’opinion c’est Truman. Elle
171
te l’opinion. Truman élu, l’opinion c’est Truman.
Elle
l’était avant cela, bien sûr, mais elle n’a pu parler que dans le sec
172
t Truman. Elle l’était avant cela, bien sûr, mais
elle
n’a pu parler que dans le secret des urnes. L’opinion d’aujourd’hui,
173
n d’aujourd’hui, je la sens, c’est l’Europe. Mais
elle
ne bougera pas, si vous ne faites presque rien. Elle laissera parler
174
e ne bougera pas, si vous ne faites presque rien.
Elle
laissera parler les sceptiques parler « au nom des masses » dans l’in
175
au nom des masses » dans l’indifférence générale.
Elle
laissera le Conseil de l’Europe murmurer pudiquement, chaque année, q
176
e l’Europe murmurer pudiquement, chaque année, qu’
il
reste désireux d’envisager l’étude de quelques mesures préalables ten
177
ortant vers l’union ». Et les Anglais jugeront qu’
ils
ne peuvent s’associer à ces engagements téméraires avant d’avoir pris
178
ne vaut rien en face des Russes qui les assènent.
Il
faut des actes, dit-on. La phrase est vague. Les actes sont parfois p
179
Europe sans informer ses peuples, et du danger qu’
ils
courent, et de la parade puissante que pourrait constituer notre fédé
180
professionnels, syndicats patronaux et ouvriers.
Il
en résultera dans nos provinces une campagne d’agitation, d’émulation
181
le campagne, c’est de faire sentir aux peuples qu’
elle
comporte un enjeu, et que leur sort peut changer, matériellement auss
182
selon l’issue des élections. En d’autres termes,
il
faut que le Parlement issu des élections ait quelque chose à faire. Q
183
ré. Si vous me dites que c’est très joli, mais qu’
il
faut qu’on vous laisse du temps, je vous proposerai de l’obtenir de S
184
proposerai de l’obtenir de Staline. Car en Europe
il
y en a peu. Si vous me dites enfin que c’est plus difficile que je n’
185
rt, on peut penser qu’au point où nous en sommes,
il
n’y a presque plus rien à perdre. Que risquez-vous à tenter l’impossi
186
isquez-vous à tenter l’impossible ? D’autre part,
il
est sûr qu’il y aurait tout à perdre, même l’espoir, à ne point risqu
187
ous la Constitution ! Messieurs les députés, faut-
il
vous dire encore que je ne suis rien qu’une voix presque désespérée,
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faites-vous élire et fédérez l’Europe pendant qu’
il
en est temps. Ferney, 30 juillet-6 août 1950. p. Rougemont Denis