1 1946, Combat, articles (1946–1950). Ni secret ni défense (19-20 mai 1946)
1 les, si toutefois on leur laisse le commandement. Je leur oppose le meilleur analyste américain des choses militaire dans
2 ront, ou les Anglais, ou les Danois peut-être. Et je ne connais pas un seul physicien qui n’ait nié expressément, et en to
3 suadés que « le secret ne peut être gardé ». D’où je déduis que la proportion des Américains raisonnables (j’entends capab
4 is que la proportion des Américains raisonnables ( j’ entends capables de rapprocher deux idées et d’en tirer une conclusion
5 de 35 %. Est-ce peu ou beaucoup pour un peuple ? Je n’en jugerais qu’après un essai en Europe. Il est clair que l’opinion
6 s pas, envoie deux ou trois bombes sur New York. ( Je prends l’exemple le plus invraisemblable, pour qu’on n’aille pas y vo
7 us invraisemblable, pour qu’on n’aille pas y voir je ne sais quelle allusion à des circonstances trop réelles.) L’Amérique
8 elle a cessé de nous frapper. Une apathie étrange me semble s’établir dans les masses comme chez ceux qui les mènent. Les
9  dépôt sacré ». Le monde n’a pas de gouvernement. Je ne suis pas sûr que les nations en aient. Et nous restons, les bras b
2 1946, Combat, articles (1946–1950). Paralysie des hommes d’État (21 mai 1946)
10 ive est entre ces deux sens du verbe. Et soudain, je me demande pourquoi ces trois messieurs paraissent impuissants à décr
11 est entre ces deux sens du verbe. Et soudain, je me demande pourquoi ces trois messieurs paraissent impuissants à décréte
12 bles ? Et qu’ils usurpent le nom de gouvernants ? J’ essaie de me mettre à leur place. Staline voudrait la paix, car sa Rus
13 ’ils usurpent le nom de gouvernants ? J’essaie de me mettre à leur place. Staline voudrait la paix, car sa Russie blessée
14 ir de trouver cela normal, — ou ne trouve rien. ⁂ J’ essaie encore de les comprendre, avant de les traiter de ce qu’ils ont
15 pratiquement, ils n’ont pas le temps. Pourquoi ? J’ en vois une raison simple. Parce qu’ils gouvernent leur nation, et que
16 Ainsi d’Attlee et de Staline, bien que ce dernier me paraisse plus habile dans le grand art de prendre son temps. ⁂ Je les
17 habile dans le grand art de prendre son temps. ⁂ Je les plains. Cependant, s’ils s’obstinent, je serai forcé de les trait
18 s. ⁂ Je les plains. Cependant, s’ils s’obstinent, je serai forcé de les traiter d’usurpateurs. L’incompétence des commanda
19 ue de leur patrie, et parfois par les tribunaux ? Je demande à mes amis américains : — Imaginez-vous ce pays conduit non p
20 trie, et parfois par les tribunaux ? Je demande à mes amis américains : — Imaginez-vous ce pays conduit non par un cabinet
21 ante-huit États de l’Union ? — Ce serait absurde, me disent-ils. — Eh quoi, c’est pourtant ce que nous offre, à quelques n
3 1946, Combat, articles (1946–1950). Tous démocrates (22 mai 1946)
22 Tous démocrates (22 mai 1946)c Je fus hier soir visiter un ami qui aime à se dire « un anarchiste catho
23 qui aime à se dire « un anarchiste catholique ». ( Je le crois seul de son parti.) Il avait l’air un peu nerveux. Voici not
24 l’air un peu nerveux. Voici notre conversation : Moi . — Contre qui écrivez-vous aujourd’hui ? Lui. — Je fais le plan d’un
25 . — Contre qui écrivez-vous aujourd’hui ? Lui. —  Je fais le plan d’une trilogie sur les trois grands régimes politiques d
26 les trois grands régimes politiques de ce siècle. Je vais les caractériser par leurs armes ou leurs méthodes favorites. Le
27 tion ! (Il prononça ces mots d’un ton rageur, qui me fit éclater de rire.) Moi. — Quel beau programme ! Avouez que nous s
28 ts d’un ton rageur, qui me fit éclater de rire.) Moi . — Quel beau programme ! Avouez que nous sortons enfin des petitesses
29 périeure au soviétisme et à l’hitlérisme. Lui. — Je vous entends ! J’entends le diable ! D’ailleurs, on n’entend guère qu
30 isme et à l’hitlérisme. Lui. — Je vous entends ! J’ entends le diable ! D’ailleurs, on n’entend guère que lui dans ce sièc
31 d guère que lui dans ce siècle trois fois maudit. Je ne vois plus d’espoir sérieux nulle part. La faillite morale est univ
32 z les individus comme sur le plan international. Moi . — Pas d’accord ! Je distingue un espoir. Des trois régimes dont vous
33 sur le plan international. Moi. — Pas d’accord ! Je distingue un espoir. Des trois régimes dont vous parlez, l’un est écr
34 gnole, que nous appellerons secondaires. Et voici mon espoir, dans cette situation : c’est qu’au lieu de défendre la Démocr
35 ien. Ou bien c’est un mensonge et une hypocrisie. Je vais vous en donner un exemple. Les Soviets, qui se disent démocrates
36 par les Soviets et par les socialistes anglais. Moi . — Voilà le problème embrouillé à souhait, et je vous vois sourire di
37 Moi. — Voilà le problème embrouillé à souhait, et je vous vois sourire diaboliquement, à votre tour. Mais nous sommes peut
38 ontradictoires, et parfois les plus tyranniques. Moi . — Je l’avoue. La liberté est certainement le problème numéro un de n
39 ctoires, et parfois les plus tyranniques. Moi. — Je l’avoue. La liberté est certainement le problème numéro un de notre t
4 1946, Combat, articles (1946–1950). Les cochons en uniforme ou le nouveau Déluge (23 mai 1946)
40 ar la presse sur les préparatifs de l’expérience, j’ en retiens deux. 1° Une mission de savants américains formée de quator
41 sur lequel nos savants se perdent en conjectures, j’ en tire une conclusion définitive, quoique préalable. Pour la première
42 , au sens le plus scientifique de ce terme. Quand je vous disais que la guerre est morte, la guerre des militaires, la vra
43 morte, la guerre des militaires, la vraie ! Quand je vous disais que ses règles sacrées sont toutes violées sans exception
44 sans exception par l’usage de la bombe atomique… J’ avoue que je n’avais pas pensé à l’uniforme et au respect que nous lui
45 ion par l’usage de la bombe atomique… J’avoue que je n’avais pas pensé à l’uniforme et au respect que nous lui devions nag
46 Les savants, eux, ne l’ont pas raté. Ce n’est pas ma faute, c’est fait. Et c’en est fait, — même si l’on renonce à l’expér
47 . Au contraire, toute la résistance est venue, si je puis dire, du côté opposé. C’est la Ligue protectrice des animaux d’u
5 1946, Combat, articles (1946–1950). Post-scriptum (24 mai 1946)
48 um (24 mai 1946)e Un dernier mot. (Et dire que j’ allais l’oublier !) La Bombe n’est pas dangereuse du tout. — Êtes-vou
49 Faut-il penser que vous vous moquiez du monde ? — J’ étais sérieux. Je prenais au sérieux les événements qui nous menacent
50 e vous vous moquiez du monde ? — J’étais sérieux. Je prenais au sérieux les événements qui nous menacent à bout portant. L
51 ien encore, quoi qu’en pensent quelques généraux. Je parlais de la fin du monde… — Et maintenant vous nous dites : aucun d
52 e commencer. À plus forte raison pour la Bombe… — Je ne trouve pas la raison bien forte, en vérité. Hitler n’a pas eu reco
53 u à l’employer. Le cas de la Bombe est différent. Je vous répète qu’elle supprimera la possibilité de riposter, c’est-à-di
54 c’est lui seul qui se prépare à l’employer. Quand je vois qu’on nomme des comités pour la retenir ! Comme si elle était to
55 lus sensationnel du siècle. — Un progrès ? — Oui, j’ appelle ainsi tout ce qui nous rapproche des vraies questions, et nous
6 1946, Combat, articles (1946–1950). Bikini bluff (2 juillet 1946)
56  », disait devant le Sénat le général Marshall. «  Je vous abandonne volontiers l’infanterie, déclarait en substance l’amir
57 seuls à connaître. Et c’est leur point de vue qui m’ importe. Les problèmes que nous pose la bombe restent intacts, autant
7 1946, Combat, articles (1946–1950). Les intellectuels sont-ils responsables ? (5 juillet 1946)
58 à les dictatures réglaient les comptes. « Lorsque j’ entends parler d’esprit, je désarme mon revolver », disait un officier
59 les comptes. « Lorsque j’entends parler d’esprit, je désarme mon revolver », disait un officier nazi. Les staliniens faisa
60 . « Lorsque j’entends parler d’esprit, je désarme mon revolver », disait un officier nazi. Les staliniens faisaient de même
61 le sens que nous donnons à ce mot d’engagement. ⁂ Je l’ai dit ailleurs : un gant qui se retourne ne devient pas pour si pe
62 e, pleine de partis pris, et même politique ! 2. Je fais exception pour deux ou trois d’entre eux, tels que Bernanos et S
8 1947, Combat, articles (1946–1950). « La tâche française c’est d’inventer la paix » (26 décembre 1947)
63 aix » (26 décembre 1947)j k Denis de Rougemont me reçoit dans l’agréable maison qu’il occupe à la sortie du village de
64 désormais et pour toujours, prénommé Voltaire. Il me semble que mon hôte n’est pas fâché d’habiter sous cette ombre. Il y
65 our toujours, prénommé Voltaire. Il me semble que mon hôte n’est pas fâché d’habiter sous cette ombre. Il y a quelque chose
66 l’utilisent. Ce sont eux qu’il faut contrôler ». Je pense à cela tandis que notre entretien prend, comme de lui-même, le
67 e entretien prend, comme de lui-même, le tour que je désirais lui imprimer. » C’est l’homme qui fait son destin, me dit av
68 ui imprimer. » C’est l’homme qui fait son destin, me dit avec force de Rougemont. C’est lui et lui seul qui déchaîne les f
69 er sombrer avec vous dans le désespoir. Comment ? Je vais d’abord vous confier une chose : je ne crois pas aux « blocs ».
70 omment ? Je vais d’abord vous confier une chose : je ne crois pas aux « blocs ». C’est une invention des propagandes. Ils
71 e plan passionnel, définiraient une affirmation ? J’ en suis convaincu. La tâche française — encore une fois, de l’« intell
72 ue l’affirmation française, si elle éclate, comme je le souhaite, trouve immédiatement son champ d’action. Je n’en vois qu
73 ouhaite, trouve immédiatement son champ d’action. Je n’en vois qu’un mais il est immense et à sa portée : l’Europe. C’est
74 r cette unité dans la diversité et c’est pourquoi je suis résolument fédéraliste. Il est évident que le rôle de la France
75 mais dont nous devons profiter. Quant aux Russes, je suis convaincu qu’ils n’ont qu’à y gagner. Mais s’ils persistent dans
76 visa de qui que ce soit pour nous décider à agir. Je crois que l’Europe se fera, envers et contre tout et tous. Vous voyez
77 ra, envers et contre tout et tous. Vous voyez que ma réponse est optimiste. Dites bien cependant que je reste fidèle à ma
78 a réponse est optimiste. Dites bien cependant que je reste fidèle à ma formule du « pessimisme actif ». Je ne me fais aucu
79 miste. Dites bien cependant que je reste fidèle à ma formule du « pessimisme actif ». Je ne me fais aucune illusion. Il n’
80 este fidèle à ma formule du « pessimisme actif ». Je ne me fais aucune illusion. Il n’y aura jamais d’âge d’or. Je demande
81 idèle à ma formule du « pessimisme actif ». Je ne me fais aucune illusion. Il n’y aura jamais d’âge d’or. Je demande simpl
82 s aucune illusion. Il n’y aura jamais d’âge d’or. Je demande simplement un monde où les vrais problèmes soient discutés et
9 1950, Combat, articles (1946–1950). Messieurs, n’oubliez pas l’exemple de la Suisse (3 octobre 1950)
83 unir vos États dans un plus grand péril ? Vous me direz… Vous me direz que l’Europe est plus grande que la Suisse ;
84 s un plus grand péril ? Vous me direz… Vous me direz que l’Europe est plus grande que la Suisse ; qu’il fallut une b
85 té partielle devant les leçons de l’Histoire, que j’ ai plus d’une raison de nommer le daltonisme politique. Messieurs les
86 en principe, mais pratique. C’est assez pour que j’ ose vous supplier d’y réfléchir quelques minutes. La Suisse s’est unie
10 1950, Combat, articles (1946–1950). Messieurs, on vous attend encore au pied du mur ! (4 octobre 1950)
87 re obstacle, c’est eux-mêmes. Ils nous disent : «  Je veux bien, je ne suis pas contre, mais voyez ces difficultés ! L’Opin
88 ’est eux-mêmes. Ils nous disent : « Je veux bien, je ne suis pas contre, mais voyez ces difficultés ! L’Opinion, par exemp
89 s, et les sceptiques, alors, pourront bien dire : j’ avais raison, voyez l’obstacle ! Ils l’auront eux-mêmes suscité. L’œil
90 ans le secret des urnes. L’opinion d’aujourd’hui, je la sens, c’est l’Europe. Mais elle ne bougera pas, si vous ne faites
91 plus de mal que de bien à notre cause à tous. On me dira que si l’on se contente d’affirmer des principes sans les mettre
92 erait un acte enfin, quelque chose de concret. Et je me garde de sous-estimer la puissance des philatélistes. Mais si Stra
93 it un acte enfin, quelque chose de concret. Et je me garde de sous-estimer la puissance des philatélistes. Mais si Strasbo
94 déçus, et Staline très content. Voici l’acte que je vous propose, au nom de l’opinion qui ne parle pas encore. Messieurs
95 le autre méthode ne saurait provoquer. Si vous me dites… La condition à la fois nécessaire et suffisante d’une telle
96 re. Qu’un but concret soit assigné à ses travaux. Je n’en vois pour ma part qu’un seul : discuter et voter un projet bien
97 devant vous, le rire des hommes d’acier. Si vous me dites que c’est prématuré, je vous supplierai de déclarer clairement
98 es d’acier. Si vous me dites que c’est prématuré, je vous supplierai de déclarer clairement à quel moment, et sous quelles
99 onditions, cela cessera d’être prématuré. Si vous me dites que c’est très joli, mais qu’il faut qu’on vous laisse du temps
100 joli, mais qu’il faut qu’on vous laisse du temps, je vous proposerai de l’obtenir de Staline. Car en Europe il y en a peu.
101 de Staline. Car en Europe il y en a peu. Si vous me dites enfin que c’est plus difficile que je n’ai l’air de le penser d
102 vous me dites enfin que c’est plus difficile que je n’ai l’air de le penser dans ma candeur naïve, je vous demanderai si
103 lus difficile que je n’ai l’air de le penser dans ma candeur naïve, je vous demanderai si quelque chose au monde est plus
104 je n’ai l’air de le penser dans ma candeur naïve, je vous demanderai si quelque chose au monde est plus difficile à concev
105 ssieurs les députés, faut-il vous dire encore que je ne suis rien qu’une voix presque désespérée, et sans autre pouvoir qu
106 ions qui se taisent mais qui ont peur ? Pardonnez mes violences et mes impertinences : comprenez l’anxiété qui les dicte. J
107 nt mais qui ont peur ? Pardonnez mes violences et mes impertinences : comprenez l’anxiété qui les dicte. Je ne vous écrirai
108 mpertinences : comprenez l’anxiété qui les dicte. Je ne vous écrirais pas si je ne savais très bien qu’une partie d’entre
109 anxiété qui les dicte. Je ne vous écrirais pas si je ne savais très bien qu’une partie d’entre vous m’approuve et qu’une a
110 je ne savais très bien qu’une partie d’entre vous m’ approuve et qu’une autre ne dit pas non. Dans un mouvement de passion,
111 tre ne dit pas non. Dans un mouvement de passion, je m’écriais l’autre jour : si vous ne voulez rien faire, allez-vous-en 
112 ne dit pas non. Dans un mouvement de passion, je m’ écriais l’autre jour : si vous ne voulez rien faire, allez-vous-en ! M
113 s-en ! Mais beaucoup d’entre vous veulent agir et je les supplie maintenant, au nom de l’Europe, de rester au contraire, d
114 i se révèlent contraires au salut de l’ensemble ? Je veux avoir parlé pour ne rien dire, si quelqu’un nous propose une aut
115 essus des États. Messieurs les députés européens, je vous salue d’un vœu qui voudrait résumer celui de tous nos peuples au