1
ndustrielle de l’Amérique. C’est assez dire qu’il
n’
est que temporaire. Quant au secret technique de la détonation, dans q
2
t, ou les Anglais, ou les Danois peut-être. Et je
ne
connais pas un seul physicien qui n’ait nié expressément, et en toute
3
-être. Et je ne connais pas un seul physicien qui
n’
ait nié expressément, et en toute occasion publique, devant les journa
4
te révèle que 65 % sont persuadés que « le secret
ne
peut être gardé ». D’où je déduis que la proportion des Américains ra
5
35 %. Est-ce peu ou beaucoup pour un peuple ? Je
n’
en jugerais qu’après un essai en Europe. Il est clair que l’opinion pu
6
r sa foi dans la science, que les savants sérieux
ne
partagent point. On parle de radars omniscients et de rayons qui fera
7
nécessaires. Par crainte de mourir, plus personne
ne
vivrait. ⁂ La situation présente, en vérité, est bien plus folle qu’o
8
on présente, en vérité, est bien plus folle qu’on
ne
l’imagine. Car non seulement nous sommes sans défense, mais encore le
9
hinelle, et enfin si quelqu’un nous attaque, nous
ne
saurons pas qui a tiré. Supposez qu’un petit pays, disons la Suisse,
10
la Suisse, manufacture une douzaine de bombes. Ce
n’
est pas une question d’argent comme on le croit (les grosses dépenses
11
nds l’exemple le plus invraisemblable, pour qu’on
n’
aille pas y voir je ne sais quelle allusion à des circonstances trop r
12
invraisemblable, pour qu’on n’aille pas y voir je
ne
sais quelle allusion à des circonstances trop réelles.) L’Amérique ne
13
ion à des circonstances trop réelles.) L’Amérique
ne
doute pas un instant que les projectiles ne viennent de Russie. Il es
14
rique ne doute pas un instant que les projectiles
ne
viennent de Russie. Il est trop tard pour échanger des notes et des c
15
ettes et veille sur son « dépôt sacré ». Le monde
n’
a pas de gouvernement. Je ne suis pas sûr que les nations en aient. Et
16
pôt sacré ». Le monde n’a pas de gouvernement. Je
ne
suis pas sûr que les nations en aient. Et nous restons, les bras ball
17
a Bombe doit être administrée. Notez que, si elle
ne
l’est pas, quelqu’un va nous l’administrer. L’alternative est entre c
18
upprimer les armées et ouvrir les frontières. Qui
ne
partage cette impression, avec les masses contemporaines : que les ch
19
e blessée doit d’abord être reconstruite, mais il
ne
renonce pas aux plans de Pierre le Grand. Attlee voudrait la paix, ca
20
essé est en pleine expérience socialiste, mais il
ne
renonce pas à faire tuer les indigènes qui se révoltent à Java contre
21
ricains y trouveraient leur espace vital, mais il
ne
renonce pas aux barrières douanières, à la défense du capital d’abord
22
Et le public a l’air de trouver cela normal, — ou
ne
trouve rien. ⁂ J’essaie encore de les comprendre, avant de les traite
23
unifier, ils paraissent frappés d’un vertige. Ils
ne
voient rien. Cette absence de pensée est plus dangereuse que n’import
24
. Cette absence de pensée est plus dangereuse que
n’
importe quelle pensée fausse. Mais comment pourraient-ils penser ? Sim
25
raient-ils penser ? Simplement, pratiquement, ils
n’
ont pas le temps. Pourquoi ? J’en vois une raison simple. Parce qu’ils
26
t mondial. La Bombe est un cas international, qui
ne
peut être résolu qu’à une échelle planétaire : or, ces messieurs sont
27
les nations, la première condition requise est de
n’
être pas le chef d’une grande nation. Mais qui l’a dit, jusqu’à ce jou
28
’à ce jour ? Chacun sait que l’arbitre d’un match
n’
est jamais le capitaine d’une des équipes. Qui l’a rappelé au sujet de
29
urpateurs. L’incompétence des commandants en chef
n’
est-elle pas jugée criminelle par l’opinion publique de leur patrie, e
30
uances près, le plan des Nations unies. Vos États
n’
ont fait un pays qu’en unissant leurs peuples, et non leurs chefs, qui
31
planète à trois hommes surchargés, débordés, qui
n’
ont pas une minute pour réfléchir, et qui représentent les intérêts de
32
inaptes à voir ce que le monde entier attend. Ils
ne
voient rien, c’est évident, car les visions de l’avenir naissent d’un
33
e d’hommes désignés par la voie populaire, et qui
n’
auraient pas d’autre affaire que de considérer la Planète, puis de tra
34
nt ce début de juillet, puissent les trois Grands
ne
pas perdre la boule ! Car le fait est qu’il n’y en a qu’une de boule,
35
ds ne pas perdre la boule ! Car le fait est qu’il
n’
y en a qu’une de boule, comme disait à peu près le regretté Willkie, e
36
sèves ! Quant à l’évaporation atomique, eh bien,
n’
est-ce pas le symbole même de l’idéalisme : tout monte et s’épanouit v
37
us entends ! J’entends le diable ! D’ailleurs, on
n’
entend guère que lui dans ce siècle trois fois maudit. Je ne vois plus
38
uère que lui dans ce siècle trois fois maudit. Je
ne
vois plus d’espoir sérieux nulle part. La faillite morale est univers
39
tous les partis et à toutes les nations du globe
ne
signifie plus rien. Ou bien c’est un mensonge et une hypocrisie. Je v
40
ion des banques. Peut-être a-t-elle tort, mais on
n’
a pas manqué de répondre que cette mesure est précisément celle qui fu
41
a défense d’un mot, d’un terme vague que personne
n’
attaque, mais sur la définition d’une réalité que ce terme symbolise e
42
ssi longtemps que vos hommes d’État démocratiques
n’
auront pas abordé ouvertement et sincèrement ces deux questions fondam
43
estions fondamentales, l’étiquette « démocratie »
ne
signifiera rien du tout. Ou bien elle servira d’excuse et de prétexte
44
par l’usage de la bombe atomique… J’avoue que je
n’
avais pas pensé à l’uniforme et au respect que nous lui devions naguèr
45
t que nous lui devions naguère. Les savants, eux,
ne
l’ont pas raté. Ce n’est pas ma faute, c’est fait. Et c’en est fait,
46
naguère. Les savants, eux, ne l’ont pas raté. Ce
n’
est pas ma faute, c’est fait. Et c’en est fait, — même si l’on renonce
47
ut la peine de remarquer, enfin, que pas une voix
ne
s’est élevée, du côté des fervents de l’Armée, pour protester contre
48
mot. (Et dire que j’allais l’oublier !) La Bombe
n’
est pas dangereuse du tout. — Êtes-vous fou ? De quoi donc parliez-vo
49
ortant. La fin des armées, par exemple. Mais cela
ne
serait rien encore, quoi qu’en pensent quelques généraux. Je parlais
50
it d’Apocalypse. Mais dix mois ont passé, et rien
ne
se passe. Dieu soit loué, nous avons repris nos sens. Certains presse
51
masque en bandoulière. Eh bien, la guerre des gaz
n’
a pas eu lieu, parce que tout le monde en avait une peur bleue, et que
52
une peur bleue, et que personne, même pas Hitler,
n’
a eu le courage de commencer. À plus forte raison pour la Bombe… — Je
53
ommencer. À plus forte raison pour la Bombe… — Je
ne
trouve pas la raison bien forte, en vérité. Hitler n’a pas eu recours
54
rouve pas la raison bien forte, en vérité. Hitler
n’
a pas eu recours aux gaz, c’est entendu. Mais pensez-vous qu’une timid
55
os actes. Si l’emploi de la Bombe est décisif, il
n’
y a pas de punition à redouter. Il est donc clair qu’on l’emploiera, a
56
la Terre. — Alors, pourquoi dites-vous : la Bombe
n’
est pas dangereuse ? — Pour une raison très simple. La Bombe est un ob
57
on très simple. La Bombe est un objet. Les objets
ne
sont jamais dangereux. ⁂ Ce qui est dangereux, horriblement, c’est l’
58
de Chine. Si on laisse la Bombe tranquille, elle
ne
fera rien, c’est clair. Elle se tiendra bien coite dans sa caisse. Qu
59
Elle se tiendra bien coite dans sa caisse. Qu’on
ne
nous raconte donc pas d’histoires. Ce qu’il nous faut, c’est un contr
60
C’est la question de l’Autre. C’est la seule. On
ne
peut plus l’éviter depuis que la Bombe nous menace et nous tente à la
61
ff (2 juillet 1946)f g À l’heure qu’il est, on
ne
sait rien des cochons. Peut-être les prières dites en l’église de Car
62
sacrifiés » et « pour alléger leurs souffrances »
n’
ont-elles point été sans effet. Ce qu’on sait, de source officielle, c
63
des renseignements d’une valeur inestimable. » On
ne
saurait mieux dire, étant un amiral. Oui, l’expérience a répondu à l’
64
st, en somme, de rester des amiraux. Et sa valeur
ne
saurait être exagérée, encore qu’elle soit aisément « estimable » : e
65
teurs contre les expériences de Bikini. Tout cela
n’
était, nous disaient-ils, qu’un complot pseudo-scientifique pour démon
66
semble du « Projet Manhattan ». Le Dr Oppenheimer
n’
a rien voulu savoir de cette futile grillade de cochons vifs, organisé
67
ricaines, au cours de l’hiver dernier. « La bombe
ne
fait que décupler l’importance de l’armée de terre », disait devant l
68
s ce grand match à trois équipes. Mais sans doute
ne
l’a-t-elle gagnée qu’aux yeux de l’opinion publique. Les vrais arbitr
69
les plans qu’ils ont tirés, l’humanité en général
n’
a pas lieu de se réjouir trop bruyamment de la survie des deux-cents c
70
s cochons en uniformes. Les habitants d’Hiroshima
n’
ont pas tenu le coup tout à fait aussi bien, comme le révèlent les rap
71
de Londres, de New York, de Leningrad et de Paris
ne
seront point protégés aussi méthodiquement que le budget de la Marine
72
ulagement produit par le grand « four » de Bikini
ne
peut qu’augmenter le danger. La seule défense contre la bombe reste l
73
ous aurons compris que toute guerre, aujourd’hui,
n’
est possible qu’avec toutes nos complicités et ne saurait être qu’une
74
n’est possible qu’avec toutes nos complicités et
ne
saurait être qu’une guerre civile que le genre humain se fait « à lui
75
’herbe se faisait rare sous leurs pieds et qu’ils
n’
avaient plus de berger, aux éclairs de chaleur d’une révolution encore
76
n nom connu, d’un nom à faire connaître… Bref, il
n’
est pas un acte commis dans le monde, depuis quatre ans, qui n’ait été
77
acte commis dans le monde, depuis quatre ans, qui
n’
ait été vertement dénoncé pas des « intellectuels » français. Mais si
78
des « intellectuels » français. Mais si le monde
ne
s’en porte pas mieux, l’intelligence n’y gagne guère. ⁂ Tant que les
79
le monde ne s’en porte pas mieux, l’intelligence
n’
y gagne guère. ⁂ Tant que les écrivains mettaient leur soin à vivre en
80
lligence d’un côté, action de l’autre, et surtout
ne
mélangeons rien. Tributaires d’une culture dont l’ambition suprême ét
81
s dans leur erreur. Les modalités de leur retrait
ne
contredisaient nullement les postulats fondamentaux de leur métaphysi
82
pensée détachée, irresponsable par définition. Il
n’
y a pas que du mal à en dire : cela nous a valu quelques œuvres durabl
83
até que rien, ni la pensée, ni l’acte individuel,
n’
est en réalité gratuit. Que tout se paye. Que notre liberté de penser
84
it. Que tout se paye. Que notre liberté de penser
n’
importe quoi, sans tenir compte de l’époque, était une illusion entret
85
par l’apparente paix sociale, mais que l’échéance
ne
pouvait être indéfiniment repoussée et que les dettes contractées par
86
oussée et que les dettes contractées par l’esprit
ne
laissaient même plus une possibilité de concordat. Déjà les dictature
87
i. ⁂ Pour qu’une pensée s’engage dans le réel, il
ne
faut pas ni ne saurait suffire qu’elle se soumette à des réalités don
88
e pensée s’engage dans le réel, il ne faut pas ni
ne
saurait suffire qu’elle se soumette à des réalités dont elle ignore o
89
interne : la tactique d’un parti par exemple. Ce
n’
est pas dans l’utilisation accidentelle et partisane d’une pensée que
90
mer, donc finalement de le dominer. S’engager, ce
n’
est pas se mettre en location. Ce n’est pas « prêter » son nom ou son
91
S’engager, ce n’est pas se mettre en location. Ce
n’
est pas « prêter » son nom ou son autorité. Ce n’est pas faire payer s
92
n’est pas « prêter » son nom ou son autorité. Ce
n’
est pas faire payer sa prose par Ce Soir plutôt que par l’Intransigean
93
se par Ce Soir plutôt que par l’Intransigeant. Ce
n’
est pas signer ici plutôt que là. Ce n’est pas passer de l’esclavage d
94
igeant. Ce n’est pas signer ici plutôt que là. Ce
n’
est pas passer de l’esclavage d’une mode à celui d’une tactique politi
95
e d’une mode à celui d’une tactique politique. Ce
n’
est pas du tout devenir esclave d’une doctrine, mais au contraire, c’e
96
libéralisme qui a répandu l’idée que l’engagement
ne
peut être qu’un esclavage. La liberté réelle n’a pas de pires ennemis
97
t ne peut être qu’un esclavage. La liberté réelle
n’
a pas de pires ennemis que les libéraux ; sinon en intention, du moins
98
⁂ Je l’ai dit ailleurs : un gant qui se retourne
ne
devient pas pour si peu une main vivante et agissante. Un libéral qui
99
n libéral qui se soumet aux directives d’un parti
ne
devient pas pour si peu un penseur engagé. Et il ne faudrait pas que
100
devient pas pour si peu un penseur engagé. Et il
ne
faudrait pas que ces trahisons insignes ridiculisent toute espèce d’e
101
mouvement originel, est libérale, irresponsable,
ne
devient pas libératrice et responsable du seul fait qu’elle se met «
102
le péril totalitaire (de droite ou de gauche) ce
n’
est pas « d’adhérer » à quelque antifascisme, mais de s’attaquer à la
103
urs, prénommé Voltaire. Il me semble que mon hôte
n’
est pas fâché d’habiter sous cette ombre. Il y a quelque chose de volt
104
l’ordre du jour par la nouvelle arme. « La bombe
n’
est pas dangereuse, disait-il en substance, mais les hommes qui l’util
105
orces qui aboutissent à la bombe ou à la paix. Il
n’
y a de fatalité que lorsque l’homme démissionne. Et c’est ce qui est g
106
ave en ce moment : on a l’impression que personne
n’
est décidé à arrêter la folle machine ou, plutôt, à la remettre sur la
107
nce et nous constatons avec stupeur que la France
ne
fait rien et se perd dans une sorte d’amer byzantinisme. Dans ces con
108
regarder ailleurs ? La France « en attente »
Ne
vous y trompez pas. Le monde entier, comme nous-mêmes, attend encore
109
initiative de salut. Sans doute, cette initiative
ne
saurait être politique : la France n’est plus à la taille de ces géan
110
initiative ne saurait être politique : la France
n’
est plus à la taille de ces géants qui s’affrontent. Elle est pauvre a
111
’impression d’être sous une double dépendance. Ce
n’
est donc pas de ses dirigeants que nous attendons quoi que ce soit. Ma
112
llectuelle ? Si on peut dire qu’actuellement elle
ne
l’a pas davantage que l’initiative politique, il faut ajouter aussitô
113
politique, il faut ajouter aussitôt que personne
ne
l’a reprise à sa place. Cette initiative-là, on la perd dès qu’on ces
114
de quoi ? Du conflit qui « devient » fatal si on
ne
fait que l’attendre. C’est bien l’impression désespérante que nous av
115
refuse également à chacun des « blocs » mais elle
ne
sait pas à quoi elle se donnera. Il faut, précisément, reprend Denis
116
ent ? Je vais d’abord vous confier une chose : je
ne
crois pas aux « blocs ». C’est une invention des propagandes. Ils n’e
117
blocs ». C’est une invention des propagandes. Ils
n’
existent que dans la mesure où on veut bien leur accorder du crédit. V
118
r du crédit. Voilà bien le cercle vicieux et l’on
n’
en sortira qu’en sautant à pieds joints par-dessus la ligne du mensong
119
la ligne du mensonge. Inventer la paix Mais
ne
pensez-vous pas alors que la vocation de la France est clairement cir
120
lle elle se trouve, et que ses refus mêmes, s’ils
n’
étaient pas exploités sur le plan passionnel, définiraient une affirma
121
s venons de dire, « d’inventer » la paix. Si elle
ne
le fait pas, personne ne le fera à sa place. Mais si elle l’inventait
122
enter » la paix. Si elle ne le fait pas, personne
ne
le fera à sa place. Mais si elle l’inventait pour elle seule — ce qui
123
d’ailleurs impensable —, ce serait comme si elle
n’
avait rien fait. Il n’y a pas d’autarcie de la paix. « Penser français
124
—, ce serait comme si elle n’avait rien fait. Il
n’
y a pas d’autarcie de la paix. « Penser français » comme le voulait Ba
125
aite, trouve immédiatement son champ d’action. Je
n’
en vois qu’un mais il est immense et à sa portée : l’Europe. C’est seu
126
est temps que nous en prenions conscience : nous
ne
sommes pas des petits garçons, nous sommes aussi forts et aussi riche
127
Cette Europe unie, sous l’impulsion d’une nation,
n’
est-ce pas le rêve de Napoléon ou de Hitler ? Bien entendu. Aussi n’es
128
ve de Napoléon ou de Hitler ? Bien entendu. Aussi
n’
est-il pas question « d’unifier » l’Europe mais de « l’unir ». Seul, l
129
éraliste. Il est évident que le rôle de la France
ne
sera pas celui d’un conquérant. Le voudrait-elle qu’elle n’en a pas l
130
s celui d’un conquérant. Le voudrait-elle qu’elle
n’
en a pas les moyens. Ce n’est pas une « francisation » de l’Europe qu’
131
e voudrait-elle qu’elle n’en a pas les moyens. Ce
n’
est pas une « francisation » de l’Europe qu’il s’agit de réaliser, mai
132
e nous sommes un pays fédéraliste. Le fédéralisme
n’
est pas un système de la quantité, mais de la qualité. Et croyez-vous
133
te Europe possible ? Parfaitement. Les Américains
ne
demandent pas mieux : pour des raisons d’intérêt, sans doute, mais do
134
fiter. Quant aux Russes, je suis convaincu qu’ils
n’
ont qu’à y gagner. Mais s’ils persistent dans leur attitude ombrageuse
135
leur consentement. C’est bien dommage, mais nous
n’
allons quand même pas attendre le visa de qui que ce soit pour nous dé
136
e fidèle à ma formule du « pessimisme actif ». Je
ne
me fais aucune illusion. Il n’y aura jamais d’âge d’or. Je demande si
137
imisme actif ». Je ne me fais aucune illusion. Il
n’
y aura jamais d’âge d’or. Je demande simplement un monde où les vrais
138
res qui empêchent ses biens de circuler, mais qui
ne
sauraient plus la protéger, notre Europe désunie marche à sa fin. Auc
139
Europe désunie marche à sa fin. Aucun de nos pays
ne
peut prétendre, seul, à une défense sérieuse de son indépendance. Auc
140
e sérieuse de son indépendance. Aucun de nos pays
ne
peut résoudre, seul, les problèmes que lui pose l’économie moderne. À
141
omique de notre temps. Jamais l’histoire du monde
n’
aura connu un si puissant rassemblement d’hommes libres. Jamais la gue
142
s libres. Jamais la guerre, la peur, et la misère
n’
auront été mises en échec par un plus formidable adversaire. Entre ce
143
ésume clairement ses volontés. Nous pensons qu’il
ne
laissera pas nos lecteurs indifférents. »
144
Messieurs,
n’
oubliez pas l’exemple de la Suisse (3 octobre 1950)n o Messieurs le
145
aire. Faire l’Europe signifie la fédérer, ou bien
ne
signifie pas grand-chose. Comment fédérer des nations qui se croient
146
souverains Au début de 1848, la Confédération
n’
était qu’un pacte d’alliance entre vingt-cinq États absolument souvera
147
e notre Europe, sauf pour le péril extérieur, qui
n’
était rien au regard de celui que nous courons ? Une partie de l’opini
148
oirs limités mais réels. Rien d’autre, en vérité,
ne
pouvait assurer l’indépendance du pays. Mais la Diète, les États et l
149
uait, chiffres en main, que la liberté d’échanges
ne
manquerait pas de causer quelques dommages locaux. C’était répondre a
150
ision profonde du pacte. En 1847, notons-le, rien
ne
semblait « praticable » aux yeux des réalistes. (Nous en sommes là en
151
es, aucune des ruines prévues et dûment calculées
ne
se produisirent. L’essor que prit la Suisse, dès cet instant, n’a pas
152
ent. L’essor que prit la Suisse, dès cet instant,
n’
a pas fléchi durant un siècle. Messieurs les députés, neuf mois avaien
153
blèmes économiques sont plus complexes ; et qu’on
ne
peut comparer, sans offense, nos modestes sagesses et les folies subl
154
limes des grandes nations contemporaines. Mais il
n’
est pas exact que l’Europe d’aujourd’hui soit plus grande que la Suiss
155
Rome, ou même d’Ankara — en moins de temps qu’il
n’
en fallait, il y a cent ans, pour aller de Genève ou des Grisons à Ber
156
t souvent davantage, que nos cantons. Leurs sorts
ne
sont pas moins liés, si vous regardez l’Europe dans l’ensemble du mon
157
dans l’ensemble du monde. Vos cordons de douanes
ne
sont pas plus nombreux, ni moins strangulatoires, que ne l’étaient le
158
pas plus nombreux, ni moins strangulatoires, que
ne
l’étaient les nôtres. Et vos économies ne sont pas plus disparates qu
159
es, que ne l’étaient les nôtres. Et vos économies
ne
sont pas plus disparates que celles de Zurich, par exemple, et de ses
160
issaient nos journaux, il y a cent-trois ans : il
n’
en est pas une seule qui se soit vérifiée, mais pas une seule non plus
161
se soit vérifiée, mais pas une seule non plus qui
ne
reparaisse dans la bouche même de ceux qui affirment que nos réalités
162
s sont tellement différentes… Certes, comparaison
n’
est pas raison, mais quand les raisons de ne rien faire restent les mê
163
aison n’est pas raison, mais quand les raisons de
ne
rien faire restent les mêmes quoi qu’il arrive, c’est qu’elles tradui
164
r le daltonisme politique. Messieurs les députés,
n’
oubliez pas la Suisse : elle existe en dépit de tous les arguments qu’
165
tend à nous démontrer que la solution fédéraliste
n’
est pas seulement praticable en principe, mais pratique. C’est assez p
166
e temps fait beaucoup à l’affaire. Celui que vous
n’
auriez pas, Staline le prend : c’est le temps de méditer avant d’agir.
167
ée rouge. n. Rougemont Denis de, « Messieurs,
n’
oubliez pas l’exemple de la Suisse », Combat, Paris, 3 octobre 1950, p
168
Ceux qui disent que « l’Europe sera socialiste ou
ne
sera pas » savent très bien qu’à ce prix elle ne sera pas. Voilà l’en
169
ne sera pas » savent très bien qu’à ce prix elle
ne
sera pas. Voilà l’ennemi, et non point Vychinski. Et cela vaut pour t
170
se, ou allemande, ou de gauche, ou de droite — ou
ne
sera pas. Vous êtes là pour qu’elle soit, pour qu’elle dure, dans ses
171
dans ses diversités de tous les ordres, que l’on
ne
peut préserver que par l’union et que l’unification tuerait. Mais san
172
giques d’intérêts légitimes, sans compromis, elle
ne
sera pas. C’est clair. Vous ignorez l’opinion vraie Seuls ceux q
173
résoudront aux compromis vitaux. Quant à ceux qui
n’
ont point cette passion de l’Europe, ceux dont le regard s’attarde aux
174
t eux-mêmes. Ils nous disent : « Je veux bien, je
ne
suis pas contre, mais voyez ces difficultés ! L’Opinion, par exemple,
175
s voyez ces difficultés ! L’Opinion, par exemple,
n’
est pas mûre, et chacun sait qu’on ne peut rien faire sans elle ». C’e
176
par exemple, n’est pas mûre, et chacun sait qu’on
ne
peut rien faire sans elle ». C’est qu’ils se prennent pour l’opinion,
177
clarent pour l’union, lorsqu’on les interroge. Il
n’
en fallut pas plus pour fédérer la Suisse. Mais l’opinion veut qu’on l
178
e. « On suit ceux qui marchent », dit Péguy. Elle
ne
vous suivra pas si vous êtes daltoniens, et les sceptiques, alors, po
179
man. Elle l’était avant cela, bien sûr, mais elle
n’
a pu parler que dans le secret des urnes. L’opinion d’aujourd’hui, je
180
ujourd’hui, je la sens, c’est l’Europe. Mais elle
ne
bougera pas, si vous ne faites presque rien. Elle laissera parler les
181
c’est l’Europe. Mais elle ne bougera pas, si vous
ne
faites presque rien. Elle laissera parler les sceptiques parler « au
182
ant à renforcer le sentiment d’une Solidarité qui
ne
saurait nuire à « l’achèvement d’une union plus intime entre ses memb
183
nt vers l’union ». Et les Anglais jugeront qu’ils
ne
peuvent s’associer à ces engagements téméraires avant d’avoir pris le
184
tenu et de s’être assurés qu’en tous les cas cela
ne
peut les conduire absolument à rien. Soyons francs : le Conseil de l’
185
r des principes sans les mettre en pratique, cela
ne
fait de mal à personne. Mais cela en fait aux principes. Or une Europ
186
aucoup moins qu’une Amérique qui les professe, et
ne
vaut rien en face des Russes qui les assènent. Il faut des actes, dit
187
acte que je vous propose, au nom de l’opinion qui
ne
parle pas encore. Messieurs les députés, vous le savez bien, vous n’ê
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. Messieurs les députés, vous le savez bien, vous
n’
êtes pas de vrais députés, car les vrais sont élus, et vous êtes simpl
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sonnement très simple appuie cette suggestion. On
ne
fera pas l’Europe sans informer ses peuples, et du danger qu’ils cour
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ante que pourrait constituer notre fédération. On
n’
informera pas les peuples sans une propagande massive. Personne n’a le
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les peuples sans une propagande massive. Personne
n’
a les moyens de la financer. La seule solution concevable, c’est une c
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de polémique européenne, que nulle autre méthode
ne
saurait provoquer. Si vous me dites… La condition à la fois néc
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Qu’un but concret soit assigné à ses travaux. Je
n’
en vois pour ma part qu’un seul : discuter et voter un projet bien pré
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l’Histoire, le réveil de notre espérance. Si vous
n’
acceptez pas, vous ne trouverez derrière vous que le vide et l’indiffé
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de notre espérance. Si vous n’acceptez pas, vous
ne
trouverez derrière vous que le vide et l’indifférence ; et devant vou
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us me dites enfin que c’est plus difficile que je
n’
ai l’air de le penser dans ma candeur naïve, je vous demanderai si que
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on peut penser qu’au point où nous en sommes, il
n’
y a presque plus rien à perdre. Que risquez-vous à tenter l’impossible
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ûr qu’il y aurait tout à perdre, même l’espoir, à
ne
point risquer la dernière chance européenne. Voilà le pari. Vous êtes
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eurs les députés, faut-il vous dire encore que je
ne
suis rien qu’une voix presque désespérée, et sans autre pouvoir que d
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rtinences : comprenez l’anxiété qui les dicte. Je
ne
vous écrirais pas si je ne savais très bien qu’une partie d’entre vou
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iété qui les dicte. Je ne vous écrirais pas si je
ne
savais très bien qu’une partie d’entre vous m’approuve et qu’une autr
202
ne partie d’entre vous m’approuve et qu’une autre
ne
dit pas non. Dans un mouvement de passion, je m’écriais l’autre jour
203
t de passion, je m’écriais l’autre jour : si vous
ne
voulez rien faire, allez-vous-en ! Mais beaucoup d’entre vous veulent
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t, au nom de l’Europe, de rester au contraire, de
ne
point se séparer avant d’avoir dressé, pour notre espoir, un signe !
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oir, un signe ! Des raisons de vivre ! Vous
n’
êtes pas encore l’espoir des peuples libres, ni des peuples muets de l
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t tient à votre sage audace. Car si l’Europe unie
n’
est pas un grand espoir renaissant dans le cœur des masses, aucune arm
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nt dans le cœur des masses, aucune armée du monde
ne
pourra la défendre. Personne ne veut mourir, que pour des raisons de
208
ne armée du monde ne pourra la défendre. Personne
ne
veut mourir, que pour des raisons de vivre. Mozart n’en est plus une
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eut mourir, que pour des raisons de vivre. Mozart
n’
en est plus une pour les chômeurs. Et ce n’est pas une secte politique
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Mozart n’en est plus une pour les chômeurs. Et ce
n’
est pas une secte politique, une doctrine partisane ou une autre, qui
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au salut de l’ensemble ? Je veux avoir parlé pour
ne
rien dire, si quelqu’un nous propose une autre solution que l’Autorit