1 1946, Combat, articles (1946–1950). Ni secret ni défense (19-20 mai 1946)
1 peut-être. Et je ne connais pas un seul physicien qui n’ait nié expressément, et en toute occasion publique, devant les jou
2 oint. On parle de radars omniscients et de rayons qui feraient sauter la bombe tôt après son départ, chez l’adversaire. Mai
3 re supposerait un état de mobilisation permanente qui , sous prétexte d’éviter la guerre, tuerait la paix. Une partie de la
4 in si quelqu’un nous attaque, nous ne saurons pas qui a tiré. Supposez qu’un petit pays, disons la Suisse, manufacture une
5 semble s’établir dans les masses comme chez ceux qui les mènent. Les trois Grands sont presque d’accord pour renouveler le
2 1946, Combat, articles (1946–1950). Paralysie des hommes d’État (21 mai 1946)
6 l, supprimer les armées et ouvrir les frontières. Qui ne partage cette impression, avec les masses contemporaines : que les
7 mais il ne renonce pas à faire tuer les indigènes qui se révoltent à Java contre un impérialisme démodé. Truman voudrait la
8 stent la guerre : pourtant, ils s’y préparent. Ce qui domine en fait leur politique, c’est la vision de la guerre, non pas
9 hes courantes — que par le fait du problème posé, qui les dépasse comme la Bombe dépasse tout. Devant le monde à unifier, i
10 e est mondial. La Bombe est un cas international, qui ne peut être résolu qu’à une échelle planétaire : or, ces messieurs s
11 t de n’être pas le chef d’une grande nation. Mais qui l’a dit, jusqu’à ce jour ? Chacun sait que l’arbitre d’un match n’est
12 atch n’est jamais le capitaine d’une des équipes. Qui l’a rappelé au sujet des trois Grands ? Chacun sait que, pour arbitre
13 le Congrès, les fonctionnaires et la presse. Mais qui l’a dit au sujet de Truman ? L’Amérique est trop grande pour lui, et
14 qu’en unissant leurs peuples, et non leurs chefs, qui se sont effacés devant un pouvoir nouveau, sorti du peuple… Mais si l
15 touche à l’idée de nation, voilà tous les visages qui se ferment, et les esprits en état de siège. Sommes-nous fous ? Allon
16 e la planète à trois hommes surchargés, débordés, qui n’ont pas une minute pour réfléchir, et qui représentent les intérêts
17 rdés, qui n’ont pas une minute pour réfléchir, et qui représentent les intérêts de leur nation, alors que c’est précisément
18 ormée d’hommes désignés par la voie populaire, et qui n’auraient pas d’autre affaire que de considérer la Planète, puis de
3 1946, Combat, articles (1946–1950). Tous démocrates (22 mai 1946)
19 (22 mai 1946)c Je fus hier soir visiter un ami qui aime à se dire « un anarchiste catholique ». (Je le crois seul de son
20 erveux. Voici notre conversation : Moi. — Contre qui écrivez-vous aujourd’hui ? Lui. — Je fais le plan d’une trilogie sur
21 poration ! (Il prononça ces mots d’un ton rageur, qui me fit éclater de rire.) Moi. — Quel beau programme ! Avouez que nou
22 gimes dont vous parlez, l’un est écrasé. Les deux qui restent, et qui se partagent le monde, se déclarent formellement démo
23 parlez, l’un est écrasé. Les deux qui restent, et qui se partagent le monde, se déclarent formellement démocrates. Donc, no
24 mocratie a perdu tout son pouvoir ! Une étiquette qui s’applique à tous les partis et à toutes les nations du globe ne sign
25 . Je vais vous en donner un exemple. Les Soviets, qui se disent démocrates, dénonçaient naguère encore la Suisse, qui est l
26 démocrates, dénonçaient naguère encore la Suisse, qui est la plus vieille démocratie du monde, et la traitaient de « fascis
27 e répondre que cette mesure est précisément celle qui fut prise en premier lieu par les États fascistes, aussi bien que par
4 1946, Combat, articles (1946–1950). Les cochons en uniforme ou le nouveau Déluge (23 mai 1946)
28 c’est le prestige de l’uniforme, symboliquement, qui va sombrer. Il vaut la peine de remarquer, enfin, que pas une voix ne
29 des animaux d’un des États de l’Est de l’Amérique qui a pris l’initiative d’un mouvement d’opinion contre les essais projet
30 ur les navires les membres du Congrès et du Sénat qui se seront déclarés en faveur de l’expérience de Bikini. d. Rougemo
5 1946, Combat, articles (1946–1950). Post-scriptum (24 mai 1946)
31 ais sérieux. Je prenais au sérieux les événements qui nous menacent à bout portant. La fin des armées, par exemple. Mais ce
32 objet. Les objets ne sont jamais dangereux. ⁂ Ce qui est dangereux, horriblement, c’est l’homme. C’est lui qui a fait la B
33 dangereux, horriblement, c’est l’homme. C’est lui qui a fait la Bombe, et c’est lui seul qui se prépare à l’employer. Quand
34 C’est lui qui a fait la Bombe, et c’est lui seul qui se prépare à l’employer. Quand je vois qu’on nomme des comités pour l
35 le. — Un progrès ? — Oui, j’appelle ainsi tout ce qui nous rapproche des vraies questions, et nous oblige à y faire face.
6 1946, Combat, articles (1946–1950). Bikini bluff (2 juillet 1946)
36 épondu à l’espérance des amiraux du monde entier, qui est, en somme, de rester des amiraux. Et sa valeur ne saurait être ex
37 es services de l’Armée de Terre, pendant le débat qui opposait cette dernière à la Marine, sur la question du commandement
38 annonçait la démission du fameux Dr Oppenheimer, qui fut le chef et la cheville ouvrière des expériences du Nouveau-Mexiqu
39 ra prouver sa résistance et sa nécessité ». Voilà qui est fait. Sur quoi le général Arnold, après des phrases de condoléanc
40 n seule restait indispensable, puisque c’est elle qui transporterait la bombe, ou abattrait les bombardiers ennemis. La Mar
41 ine. Ils jugent la bombe du type Nagasaki — celle qui fut lancée dimanche soir — démodée et mille fois surpassée par les ré
42 ont seuls à connaître. Et c’est leur point de vue qui m’importe. Les problèmes que nous pose la bombe restent intacts, auta
43 ’accélérer l’instauration d’un tel gouvernement — qui pourrait être l’ONU si elle existait autrement que sous forme d’initi
7 1946, Combat, articles (1946–1950). Les intellectuels sont-ils responsables ? (5 juillet 1946)
44 un acte commis dans le monde, depuis quatre ans, qui n’ait été vertement dénoncé pas des « intellectuels » français. Mais
45 ous propose de défendre, c’est elle, précisément, qui est responsable de la brutalité totalitaire. On nous propose donc de
46 se sa libération. En vérité, c’est le libéralisme qui a répandu l’idée que l’engagement ne peut être qu’un esclavage. La li
47 ot d’engagement. ⁂ Je l’ai dit ailleurs : un gant qui se retourne ne devient pas pour si peu une main vivante et agissante.
48 si peu une main vivante et agissante. Un libéral qui se soumet aux directives d’un parti ne devient pas pour si peu un pen
49 idiculisent toute espèce d’engagement. Une pensée qui , par sa nature et son mouvement originel, est libérale, irresponsable
50 donc encore : la première tâche des intellectuels qui ont compris le péril totalitaire (de droite ou de gauche) ce n’est pa
51 ut dans ce cas ! La panique de « l’union sacrée » qui vient de souffler sur notre élite en est l’ahurissant exemple. Du moi
52 Du moins a-t-elle eu cela de bon : les écrivains qui ont décidé tout récemment de renoncer à l’usage de leur pensée devant
53 tent d’ailleurs les personnes : c’est la tendance qui est significative. h. Rougemont Denis de, « Les intellectuels sont-
54 n nombre d’écrivains leur opinion sur un problème qui met en cause, non seulement leur responsabilité et leur rôle dans la
55 i leur manière de s’exprimer. Denis de Rougemont, qui fut un des premiers à soutenir l’engagement intellectuel, notamment d
8 1947, Combat, articles (1946–1950). « La tâche française c’est d’inventer la paix » (26 décembre 1947)
56 ngereuse, disait-il en substance, mais les hommes qui l’utilisent. Ce sont eux qu’il faut contrôler ». Je pense à cela tand
57 our que je désirais lui imprimer. » C’est l’homme qui fait son destin, me dit avec force de Rougemont. C’est lui et lui seu
58 it avec force de Rougemont. C’est lui et lui seul qui déchaîne les forces qui aboutissent à la bombe ou à la paix. Il n’y a
59 nt. C’est lui et lui seul qui déchaîne les forces qui aboutissent à la bombe ou à la paix. Il n’y a de fatalité que lorsque
60 lité que lorsque l’homme démissionne. Et c’est ce qui est grave en ce moment : on a l’impression que personne n’est décidé
61  : la France n’est plus à la taille de ces géants qui s’affrontent. Elle est pauvre aussi et le monde actuel est sans pitié
62 t « en attente ». En attente de quoi ? Du conflit qui « devient » fatal si on ne fait que l’attendre. C’est bien l’impressi
63 ce. Mais si elle l’inventait pour elle seule — ce qui est d’ailleurs impensable —, ce serait comme si elle n’avait rien fai
64 oit la conscience d’une Europe à naître. Voyez ce qui se passe en Suisse : nous autres romands, nous y sommes dans la propo
9 1948, Combat, articles (1946–1950). Message aux Européens (14 mai 1948)
65 ses divisions. Appauvrie, encombrée de barrières qui empêchent ses biens de circuler, mais qui ne sauraient plus la protég
66 rrières qui empêchent ses biens de circuler, mais qui ne sauraient plus la protéger, notre Europe désunie marche à sa fin.
67 dans. L’heure est venue d’entreprendre une action qui soit à la mesure du danger. Tous ensemble, demain, nous pouvons édifi
68 lle est d’unir ses peuples selon leur vrai génie, qui est celui de la diversité, et dans les conditions du xxe siècle, qui
69 diversité, et dans les conditions du xxe siècle, qui sont celles de la communauté, afin d’ouvrir au monde la voie qu’il ch
70 commune volonté dans les cinq articles suivants, qui résument les résolutions adoptées par notre Congrès : 1° Nous voulons
71 els et syndicaux, les hommes et les gouvernements qui travaillent à cette œuvre de salut public, suprême chance de la paix
72 ’un grand avenir, pour cette génération et celles qui la suivront. l. Rougemont Denis de, « Message aux Européens », Com
10 1950, Combat, articles (1946–1950). Messieurs, n’oubliez pas l’exemple de la Suisse (3 octobre 1950)
73 ifie pas grand-chose. Comment fédérer des nations qui se croient encore souveraines ? Voyons l’Histoire. Les Suisses ont ré
74 ui de notre Europe, sauf pour le péril extérieur, qui n’était rien au regard de celui que nous courons ? Une partie de l’op
75 s dommages locaux. C’était répondre aux utopistes qui proposaient d’éteindre l’incendie, que l’eau peut abîmer les meubles.
76 eubles. Il y eut une guerre civile entre cantons, qui fit voir l’impuissance du pacte. Il y eut un long branle-bas de socié
77 il y a cent-trois ans : il n’en est pas une seule qui se soit vérifiée, mais pas une seule non plus qui ne reparaisse dans
78 qui se soit vérifiée, mais pas une seule non plus qui ne reparaisse dans la bouche même de ceux qui affirment que nos réali
79 lus qui ne reparaisse dans la bouche même de ceux qui affirment que nos réalités sont tellement différentes… Certes, compar
11 1950, Combat, articles (1946–1950). Messieurs, on vous attend encore au pied du mur ! (4 octobre 1950)
80 core au pied du mur ! (4 octobre 1950)p q Ceux qui disent que « l’Europe sera socialiste ou ne sera pas » savent très bi
81 non point Vychinski. Et cela vaut pour tous ceux qui pourraient déclarer que l’Europe sera toute catholique, ou protestant
82 air. Vous ignorez l’opinion vraie Seuls ceux qui veulent passionnément le but se résoudront aux compromis vitaux. Quan
83 se résoudront aux compromis vitaux. Quant à ceux qui n’ont point cette passion de l’Europe, ceux dont le regard s’attarde
84 s l’opinion veut qu’on l’entraîne. « On suit ceux qui marchent », dit Péguy. Elle ne vous suivra pas si vous êtes daltonien
85 ions : celle que l’on invoque, et la vraie. L’une qui sert d’alibi aux démagogues, et l’autre qui les laisse tomber ; l’une
86 L’une qui sert d’alibi aux démagogues, et l’autre qui les laisse tomber ; l’une qui fait des discours, l’autre qui vote. La
87 agogues, et l’autre qui les laisse tomber ; l’une qui fait des discours, l’autre qui vote. La première est exactement ce qu
88 sse tomber ; l’une qui fait des discours, l’autre qui vote. La première est exactement ce que la presse et la radio déclare
89 tendant à renforcer le sentiment d’une Solidarité qui ne saurait nuire à « l’achèvement d’une union plus intime entre ses m
90 e. Mais cela en fait aux principes. Or une Europe qui se moque des principes vaut beaucoup moins qu’une Amérique qui les pr
91 des principes vaut beaucoup moins qu’une Amérique qui les professe, et ne vaut rien en face des Russes qui les assènent. Il
92 les professe, et ne vaut rien en face des Russes qui les assènent. Il faut des actes, dit-on. La phrase est vague. Les act
93 i l’acte que je vous propose, au nom de l’opinion qui ne parle pas encore. Messieurs les députés, vous le savez bien, vous
94 uvoir que de vous adjurer de la part des millions qui se taisent mais qui ont peur ? Pardonnez mes violences et mes imperti
95 jurer de la part des millions qui se taisent mais qui ont peur ? Pardonnez mes violences et mes impertinences : comprenez l
96 lences et mes impertinences : comprenez l’anxiété qui les dicte. Je ne vous écrirais pas si je ne savais très bien qu’une p
97 e politique, une doctrine partisane ou une autre, qui résoudra le problème du chômage, mais l’union de nos sacrifices. Qui
98 blème du chômage, mais l’union de nos sacrifices. Qui peut nous l’imposer ? Qui peut faire reculer les intérêts puissants e
99 nion de nos sacrifices. Qui peut nous l’imposer ? Qui peut faire reculer les intérêts puissants et parfois légitimes qui se
100 culer les intérêts puissants et parfois légitimes qui se révèlent contraires au salut de l’ensemble ? Je veux avoir parlé p
101 urs les députés européens, je vous salue d’un vœu qui voudrait résumer celui de tous nos peuples aux écoutes de l’avenir, u