1 1938, Les Cahiers protestants, articles (1938–1968). La vraie défense contre l’esprit totalitaire (juillet 1938)
1 vénements l’auront fait voir aux plus naïfs. Mais il n’est pas seulement une menace. Il est aussi, et c’est beaucoup plus
2 us naïfs. Mais il n’est pas seulement une menace. Il est aussi, et c’est beaucoup plus grave, une tentation. Il flatte au
3 ssi, et c’est beaucoup plus grave, une tentation. Il flatte au cœur de notre angoisse morale et matérielle le désir lâche
4 sponsables de la cité et de l’État. D’autre part, il nous tente par la promesse d’une communauté restaurée, d’un coude-à-c
5 a triomphé surtout pour deux raisons, me semble-t- il  : D’abord il a utilisé le défaut de civisme qui résultait de la destr
6 rtout pour deux raisons, me semble-t-il : D’abord il a utilisé le défaut de civisme qui résultait de la destruction de tou
7 faut total d’éducation, comme en Russie). Ensuite il a donné une réponse à l’exigence religieuse des peuples, déçue par le
8 qu’une très petite minorité. Comment s’imposèrent- ils  ? Par la terreur. Ils arrivaient dans un village, par petits groupes
9 orité. Comment s’imposèrent-ils ? Par la terreur. Ils arrivaient dans un village, par petits groupes montés sur des camions
10 la, des centaines de fois. Comment ces crimes ont- ils pu se produire ? C’est que la police protégeait les fascistes contre
11 cistes eux-mêmes. Une seule fois, nous apprennent- ils , la police s’opposa aux bandes armées des chemises noires. Ce fut à S
12 avaient débarqué à la gare de cette petite ville. Ils s’y heurtèrent à 8 gendarmes et 3 soldats, qui pour une fois s’avisèr
13 fit à son sujet le chef fasciste de l’expédition. Il écrit en effet à la Centrale du Parti : « L’expédition de Sarzana n’e
14 xpédition de Sarzana n’est qu’un épisode normal : il devait survenir dès que le fascisme aurait trouvé des gens devant lui
15 ort que dans la mesure où le civisme est faible ; il est fort des lâchetés individuelles, répercutées dans le pouvoir étab
16 répercutées dans le pouvoir établi ; et demain, s’ il triomphe chez nous, sa puissance ne sera que la somme exacte de nos l
17 le. Les fascistes ont été arrêtés à Sarzana, mais ils l’ont emporté partout ailleurs, parce qu’ils représentaient une espér
18 mais ils l’ont emporté partout ailleurs, parce qu’ ils représentaient une espérance. Je rejoins ici ma seconde thèse : le to
19 onde thèse : le totalitarisme a triomphé parce qu’ il fut le premier à donner une réponse très grossière, mais enfin une ré
20 duisons maintenant nos principes de conduite : 1° Il nous faut restaurer l’esprit de résistance civique. Et cela suppose q
21 s individuelles, c’est-à-dire de nos égoïsmes. 2° Il nous faut refaire une commune mesure vivante. Si nous ne la faisons p
22 double titre : c’est ma patrie, et d’autre part, il se trouve que sa tradition politique est la plus proche du personnali
23 re. Cette solution est la plus naturelle parce qu’ elle n’est en somme qu’un réflexe. Elle ne suppose aucun effort de l’espri
24 relle parce qu’elle n’est en somme qu’un réflexe. Elle ne suppose aucun effort de l’esprit, aucune espèce d’imagination. Et
25 une espèce d’imagination. Et c’est aussi pourquoi elle est de beaucoup la plus fréquente et la plus populaire. J’ai à cœur c
26 onséquence qui en découle immédiatement, c’est qu’ il faut nous armer jusqu’aux dents. Mais sommes-nous sûrs que le réarmem
27 aux nations pacifiques ? Sommes-nous même sûrs qu’ il soit un avantage certain pour les nations qui glorifient la guerre ?
28 au niveau du voisin, à perdre la mesure de ce qu’ il peut dépenser sans s’affaiblir. Les armements deviennent trop lourds
29 . Les armements deviennent trop lourds pour lui : ils le gêneront bientôt plus qu’ils ne le protégeront. Un officier frança
30 lourds pour lui : ils le gêneront bientôt plus qu’ ils ne le protégeront. Un officier français résumait l’autre jour ce proc
31 « Un 75 est plus puissant qu’un revolver, disait- il , c’est entendu. Mais donnez-moi un revolver, vous m’armez ! Donnez-mo
32 olue au mieux de nos possibilités de vie normale. Il s’agira maintenant d’utiliser les armes. Nul n’ignore que la guerre m
33 derne est devenue la guerre totale. C’est dire qu’ il n’y a plus de distinction entre civils et militaires, selon la doctri
34 our faire bloc contre le fascisme, sur le plan où il veut nous mettre, les démocraties seront contraintes d’adopter peu à
35 révolution religieuse que représente le fascisme, elles auront moins de dynamisme. Ainsi, sous prétexte de vivre, elles perdr
36 oins de dynamisme. Ainsi, sous prétexte de vivre, elles perdront leurs raisons de vivre. Voici donc le dilemme que nous pose
37 pas à faire bloc à la manière fasciste, et alors elle est battue dans la « guerre totale » ; ou bien la démocratie réussit
38 nous puissions commettre en tant que Suisses, car elle menace l’existence même de notre État. Réagir à la menace totalitaire
39 ication totalitaire d’un pays. Ou sinon, c’est qu’ elle est très mal préparée. Or ce processus est radicalement contraire à l
40 équivaut pratiquement à faire du nationalisme. Et il est aisé de voir que le nationalisme, en Suisse, signifierait bientôt
41 e ! Si ce pays a succombé, ce n’est point tant qu’ il ait cédé à la menace militaire, d’ailleurs réelle ; c’est surtout, c’
42 e ; c’est surtout, c’est essentiellement parce qu’ il doutait de sa valeur propre et autonome, parce qu’il doutait de sa vo
43 doutait de sa valeur propre et autonome, parce qu’ il doutait de sa vocation, de sa raison d’être comme État ; parce qu’il
44 cation, de sa raison d’être comme État ; parce qu’ il était miné par une intime tentation de suicide totalitaire. Leçon cap
45 lus à sa valeur spirituelle, ou ne prouve plus qu’ il y croit, puisqu’il se met à copier le voisin, un tel État ne peut pas
46 rituelle, ou ne prouve plus qu’il y croit, puisqu’ il se met à copier le voisin, un tel État ne peut pas compter sur l’aide
47 e où nous sommes pour l’Europe quelque chose dont elle a besoin ; cette chose unique, irremplaçable : un État qui n’est pas
48 dire, vous êtes contre l’armée ? Je serais contre elle si je croyais que dès maintenant nous sommes assez forts moralement d
49 ous passer d’une armée. Ce n’est pas le cas. Mais il n’en reste pas moins que notre tâche est de tout mettre en œuvre pour
50 ’est d’entraîner les démocrates sur un terrain où ils se renient eux-mêmes. Il est donc vital pour nous de refuser ce défi,
51 rates sur un terrain où ils se renient eux-mêmes. Il est donc vital pour nous de refuser ce défi, de déjouer ce calcul, et
52 ns pas le jeu. Imitons les paysans du Morgarten : ils n’avaient pas d’armures ni de lances : ils trichèrent donc au jeu où
53 rten : ils n’avaient pas d’armures ni de lances : ils trichèrent donc au jeu où l’adversaire devait gagner, et se défendire
54 manque d’opposition physique dans le jiu-jitsu : elle fait perdre son équilibre à l’assaillant. Elle lui fait perdre le sou
55  : elle fait perdre son équilibre à l’assaillant. Elle lui fait perdre le soutien que lui donnerait l’opposition violente à
56 ue lui donnerait l’opposition violente à laquelle il s’attend. Il se trouve comme précipité dans un nouveau monde de valeu
57 ait l’opposition violente à laquelle il s’attend. Il se trouve comme précipité dans un nouveau monde de valeurs, où il ne
58 me précipité dans un nouveau monde de valeurs, où il ne sait comment agir, et il y perd son assurance. Représentons-nous c
59 monde de valeurs, où il ne sait comment agir, et il y perd son assurance. Représentons-nous cela : deux hommes se battent
60 Représentons-nous cela : deux hommes se battent. Ils sont apparemment en divergence absolue ; en réalité, ils se battent s
61 t apparemment en divergence absolue ; en réalité, ils se battent sur la base d’un accord fondamental : la croyance à la val
62 cet accord fondamental et prouve par ses actes qu’ il abandonne la méthode de lutte ancestrale, il n’est pas étonnant que l
63 s qu’il abandonne la méthode de lutte ancestrale, il n’est pas étonnant que l’autre soit déconcerté, parce que ses instinc
64 nimaux ne lui dictent plus de conduite immédiate. Il vacille devant l’inconnu… Pour ma part, je ne suis pas adversaire de
65 nce en soi, mais bien de cette forme mécanique qu’ elle revêt dans la guerre moderne. Aussi bien, la page que je viens de cit
66 bien, la page que je viens de citer ne propose-t- elle pas la non-résistance, mais au contraire une forme de lutte nouvelle.
67 qu’on met ordinairement dans le métier des armes, il est certain qu’on obtiendrait des résultats considérables. Il faut ch
68 in qu’on obtiendrait des résultats considérables. Il faut chercher. Et je ne vous dis pas cela seulement comme personnalis
69 abord. Aucune doctrine ne peut être chrétienne si elle ne se fonde pas sur la repentance, qui est une violence faite à notre
70 racistes ont fait ce que nous refusions de faire. Ils l’ont fait mal, et contre nous. Ils représentent notre châtiment, com
71 ons de faire. Ils l’ont fait mal, et contre nous. Ils représentent notre châtiment, comme l’a magnifiquement montré Nicolas
72 aussi bien à la carence des chrétiens. Ceci dit, il nous faut agir. Or agir, ce n’est pas haïr. Je ne veux, sous aucun pr
73 ofonde d’un mouvement comme le nôtre — m’écrivait- il — est irrationnelle. Nous voulions croire à quelque chose. Nous vouli
74 a haine, mais au contraire la compassion, bien qu’ elle l’appelle à son insu. Il faut savoir la deviner sous les rodomontades
75 la compassion, bien qu’elle l’appelle à son insu. Il faut savoir la deviner sous les rodomontades officielles et sous les
76 étiens ne craignaient pas de passer pour athées : ils refusaient le culte de l’idole et s’en moquaient. Nous aussi nous dev
77 otesque leur impossible prétention. Au fanatisme, il convient d’opposer une certaine douceur amusée. Voltaire nous conte l
78 us une anecdote dont j’aime assez l’impertinence. Il imagine un certain oncle à lui, qu’il appelle l’abbé Bazin. « Cet abb
79 pertinence. Il imagine un certain oncle à lui, qu’ il appelle l’abbé Bazin. « Cet abbé mourut, nous dit-il, persuadé que to
80 appelle l’abbé Bazin. « Cet abbé mourut, nous dit- il , persuadé que tous les savants peuvent se tromper et reconnaissant qu
81 Mon oncle en fut affligé, et pour mourir en paix, il dit à l’archevêque d’Astracan : « Allez, ne vous attristez pas. Ne vo
82 les on veut réglementer le tout de l’homme, quand il s’agit en vérité des solutions et des doctrines d’un seul parti, d’un
83 où nous ordonnerons nos vies à cette vérité-là, à elle d’abord, que nous pourrons prétendre apporter une réponse qui satisfa
84 libres et responsables. Libres pour obéir à ce qu’ elles ont accepté pour vocation, et responsables de cette vocation devant l
85 otre chance devant l’Histoire ne l’est pas moins. Il dépend en partie de nous que nous trouvions la solution de l’éternel
86 lution de l’éternel problème individu-communauté. Il dépend en partie de nous de refaire une société vivable, une commune
87 blème social est désormais sur nos épaules, et qu’ ils feront mieux d’avoir peur de nous que du communisme. » a. Rougemont
2 1939, Les Cahiers protestants, articles (1938–1968). Nicolas de Flue et la Réforme (août 1939)
88 atholiques qui ont bien voulu me le faire sentir. Il m’a semblé que je devais aux uns et aux autres une brève explication,
89 e l’espère, débordera cette anecdote personnelle. Il m’est apparu, en effet, à mesure que j’avançais dans mon travail, que
90 é ? Et peut-on le comprendre, hors de son temps ? Il naquit à l’époque du concile de Constance, et mourut à la fin du xve
91 nter sur le bûcher au mépris de la parole donnée. Il semblait que la chrétienté se regroupait, non sans résignation, autou
92 mais avec une conscience bizarrement scrupuleuse. Il ne prend aucune nourriture le vendredi, et peu à peu s’exerce à jeûne
93 ur les ordres. Mais non, parvenu à l’âge d’homme, il s’engage dans les bandes armées qui guerroyaient alors contre les sei
94 expéditions auxquelles on lui fait prendre part, il se retire dans son canton natal pour y exercer les fonctions patriarc
95 apitaine, puis ce juge, puis ce père de famille — il aura dix enfants — n’est pas un type exceptionnel parmi les vieux con
96 quel des ouvrages pieux auraient tourné la tête. ( Il ne sait ni lire ni écrire.) Mais sous cet extérieur équilibré, et mal
97 intime, longuement couvé et mûri. Sans doute a-t- il eu des visions, peut-être a-t-il manqué sa vocation de prêtre, — déçu
98 . Sans doute a-t-il eu des visions, peut-être a-t- il manqué sa vocation de prêtre, — déçu par les exemples qu’il avait sou
99 sa vocation de prêtre, — déçu par les exemples qu’ il avait sous les yeux. Peut-être aussi rêve-t-il comme tout son siècle,
100 qu’il avait sous les yeux. Peut-être aussi rêve-t- il comme tout son siècle, et sans le savoir, d’une piété plus intérieure
101 direct, plus confiant avec Dieu… À cinquante ans, il n’y résiste plus : sa vocation profonde triomphe de tous ses doutes,
102 es, au hasard, abandonnés au souffle de l’Esprit. Il fait part à sa femme de cette terrible décision, et elle l’accepte au
103 it part à sa femme de cette terrible décision, et elle l’accepte au terme d’une lutte héroïque avec elle-même. Alors commenc
104 À une heure de chez lui, dans la gorge du Ranft, il se construit une cellule, auprès d’une minuscule chapelle. Et le mira
105 fance, se réalise : Nicolas s’aperçoit soudain qu’ il peut se passer de manger ! Une fois par semaine il s’en va communier
106 l peut se passer de manger ! Une fois par semaine il s’en va communier dans un des villages voisins, et c’est là toute sa
107 isins, et c’est là toute sa nourriture. Car n’est- il pas écrit, comme il le répétera souvent : « L’homme ne vit pas de pai
108 oute sa nourriture. Car n’est-il pas écrit, comme il le répétera souvent : « L’homme ne vit pas de pain seulement, mais de
109 devant cet « homme de Dieu » fruste et biblique.) Il n’est pas jusqu’aux princes des contrées voisines qui ne délèguent au
110 u’on a coutume de s’adresser d’abord à lui lorsqu’ il faut négocier un traité. C’est ainsi que le solitaire conseille aux S
111 triche et la France complotent de les précipiter. Il voit trop bien à quels dangers leur victoire même les exposera : s’il
112 quels dangers leur victoire même les exposera : s’ ils font la guerre pour s’enrichir, et s’ils apprennent le prix de l’or,
113 sera : s’ils font la guerre pour s’enrichir, et s’ ils apprennent le prix de l’or, c’en sera fait de leur union patriarcale.
114 dant la nuit, le curé de Stans monte au Ranft, et il adjure le solitaire de tenter un dernier effort. On ne sait pas — on
115 nt « politique » dont l’ermite eût donné l’idée ? Il me paraît probable que l’autorité de Nicolas sur ses compatriotes suf
116 oncessions mutuelles parussent possibles. Quoi qu’ il en soit, la Diète proclama que si la paix avait été sauvée, et avec e
117 proclama que si la paix avait été sauvée, et avec elle le sort de la fédération, on le devait par-dessus tout à l’action de
118 onde sache de Nicolas, est en réalité la seule qu’ il n’ait pas faite : sa venue en personne à la Diète, et le discours qu’
119 nous limitons au savoir historique. J’entends qu’ il est très difficile, sur les documents qui nous restent, de nous faire
120 ienheureux. Toutefois, je ne puis me persuader qu’ il ait été décisif dans sa vie. Si l’on considère d’une part la sainteté
121 on considère d’une part la sainteté des œuvres qu’ il pratique et d’autre part les troubles de conscience qui ne cessent de
122 pratiques les plus scrupuleuses : comme Nicolas, il espérait, de toute son âme, s’acquérir la sainteté par les voies qu’o
123 it l’Église ; mais loin d’y trouver l’apaisement, il sentait croître en lui l’inquiétude du salut. J’ai été attaché avec
124 stifier… J’imposais à mon corps plus d’efforts qu’ il n’en pouvait fournir sans danger pour la santé… Tout ce que je faisai
125 n cœur tremblait et s’agitait en songeant comment il pourrait se rendre Dieu favorable. Sur quoi les critiques catholique
126 ans ses pratiques. Mais ce reproche n’atteindrait- il pas davantage un Nicolas de Flue, jeûnant plus que de raison dès son
127 ement, que je ne puis qu’esquisser, nous mettrait- il en mesure de deviner la raison spirituelle des inquiétudes que nourri
128 cinquantième année ? Toutes proportions gardées, il me paraît licite de voir dans le cas du paysan, illettré et simple fi
129 urs catholiques eux-mêmes indiquent en passant qu’ il se montrait des plus sévères pour les abus et les trahisons du clergé
130 on siècle. On cite les répliques assez dures dont il gratifia plus d’un évêque ou supérieur de couvent venu le voir par cu
131 astiques sont choses si courantes au Moyen Âge qu’ il serait imprudent d’y chercher un trait spécifique de la spiritualité
132 ctivité autant que de contemplation3, je pense qu’ il faut la rattacher surtout à une troisième tendance, la plus important
133 ent influencé par ces mêmes doctrines. Cependant, il serait très abusif de ramener à une forme larvée de protestantisme ce
134 e cet environnement spirituel, et des contacts qu’ il dut avoir avec certains Amis de Dieu. Lorsqu’il quitta sa femme et s
135 ’il dut avoir avec certains Amis de Dieu. Lorsqu’ il quitta sa femme et ses enfants, son idée n’était-elle pas de se rendr
136 quitta sa femme et ses enfants, son idée n’était- elle pas de se rendre en Alsace, pour y rejoindre des communautés d’Amis d
137 tinger lui avait parlé ? Et la première visite qu’ il reçut au Ranft ne fut-elle pas précisément celle d’un pèlerin « ami d
138 Et la première visite qu’il reçut au Ranft ne fut- elle pas précisément celle d’un pèlerin « ami de Dieu », peut-être délégué
139 à moi-même et donne-moi tout entier à toi seul ! Il n’est pas facile de caractériser en quelques mots cette « piété germa
140 té germanique », de forme proprement mystique. Qu’ il suffise d’indiquer qu’elle représentait, face à l’Église établie, une
141 proprement mystique. Qu’il suffise d’indiquer qu’ elle représentait, face à l’Église établie, une aspiration vers la vie rel
142 personnelle, par-dessous les pratiques ou malgré elles , une intériorisation de la foi, mais aussi une volonté de communion e
143 e préserva des excès de la secte — c’est ainsi qu’ il ne rompit jamais avec l’Église, tout en gardant ses distances — mais
144 out en gardant ses distances — mais d’autre part, il est indéniable que ses propos et son action relèvent directement de c
145 de Flue par l’Église romaine, la signification qu’ il eut, en fait, pour les premières générations de la Réforme. Ce n’est
146 tait pas à ranger Nicolas du côté de la Réforme). Il n’est peut-être pas sans intérêt de donner ici un aperçu rapide de ce
147 ante de Nicolas, sur le ton le plus enthousiaste. Il est suivi en 1546 par Stumpff, protestant zurichois. En 1556, Matthia
148 Bon berger et les mauvais bergers. Puis en 1524, il rappelle les conseils politiques de l’ermite, ses mises en garde répé
149 ont les véritables disciples du solitaire, puisqu’ ils ont gardé la foi la plus ancienne, celle des Apôtres, et se sont refu
150 etite prière que je citais plus haut (Gebetlein), elle avait été connue et publiée d’abord par des protestants, en 1531 et 1
151 e satire catholique date de 1522. Chose curieuse, elle est extrêmement défavorable au Bienheureux. On y sent l’agacement de
152 er à Bâle, en 1550, le protestant Valentin Boltz. Elle était intitulée Der Weltspiegel (Le Miroir du Monde) et tout y gravit
153 écrite en latin et représentée par des étudiants. Elle n’est pas sans intérêt dramatique ni sans verve, mais on est frappé d
154 Flue à je ne sais quel « parti de la Réforme » ! Elles ne visent qu’à faire mieux connaître une grande figure que trop de pr
155 de figure que trop de protestants ignorent, et qu’ ils ignorent le plus souvent du simple fait que les catholiques l’exalten
156 s chrétiens ! Que de richesses les réformés n’ont- ils pas laissé perdre de la sorte, et n’ont-ils pas laissé dénaturer ! Mo
157 n’ont-ils pas laissé perdre de la sorte, et n’ont- ils pas laissé dénaturer ! Mon désir n’est nullement d’enlever le Frère C
158 lement d’enlever le Frère Claus aux catholiques — il ne peut leur faire que du bien — mais de le rendre aussi aux protesta
159 de où le sens fédéral paraît renaître parmi nous, il m’a semblé que la vie du Frère Claus prenait une valeur de symbole, e
160 ue notre État est d’abord une union, cependant qu’ il rappelle aux « centralistes » que le bien de tous suppose le bien de
3 1940, Les Cahiers protestants, articles (1938–1968). La bataille de la culture (janvier-février 1940)
161 nce en temps de guerre, ce fait est significatif. Il prouve que nous tenons la culture pour quelque chose d’un peu moins s
162 ce soir que cette crise n’est pas théorique ; qu’ elle a des conséquences pratiques ; qu’elle est l’une des origines de la p
163 rique ; qu’elle a des conséquences pratiques ; qu’ elle est l’une des origines de la présente guerre ; et que cette guerre n’
164 es ne sont nullement les actuels belligérants, et il n’est pas question, ici, de confondre l’un des partis avec la cause d
165 onnifier les forces mauvaises qui les menacent. S’ ils sont malades, ils pensent que c’est la faute d’un objet maléfique, ou
166 s mauvaises qui les menacent. S’ils sont malades, ils pensent que c’est la faute d’un objet maléfique, ou d’un sorcier, ou
167 nos malheurs est presque toujours en nous-mêmes. Il faut reconnaître, hélas, que cette éducation n’a pas merveilleusement
168 es petits enfants qui battent la table à laquelle ils se sont heurtés. Il est facile et rassurant de noircir le voisin pour
169 battent la table à laquelle ils se sont heurtés. Il est facile et rassurant de noircir le voisin pour mieux se blanchir s
170 adies imaginables. Et cet ennemi qui nous menace, il ne serait nullement suffisant de l’anéantir pour nous en délivrer. Ca
171 néantir pour nous en délivrer. Car la tendance qu’ il personnifie à nos yeux, elle existe en nous aussi, et elle pourrait f
172 er. Car la tendance qu’il personnifie à nos yeux, elle existe en nous aussi, et elle pourrait fort bien s’y développer un jo
173 onnifie à nos yeux, elle existe en nous aussi, et elle pourrait fort bien s’y développer un jour. Pour la combattre sérieuse
174 érieusement, pour nous défendre, c’est en nous qu’ il s’agit de l’attaquer, et avant tout, de la reconnaître. Disharmoni
175 âce auquel l’industrie pourra faire un grand pas. Il fonde d’autre part, avec l’argent gagné, un prix considérable, destin
176 ise tous les progrès de notre science contribuent- ils à ravager la civilisation qui les produit ? Vous vous êtes tous posé
177 Vous vous êtes tous posé cette question-là. Mais il ne suffit pas de se la poser et ensuite de se lamenter. Il faut voir
178 fit pas de se la poser et ensuite de se lamenter. Il faut voir ce que signifie une si cruelle disharmonie, quelles sont se
179 ruelle disharmonie, quelles sont ses causes, et s’ il existe des remèdes. Car il ne serait pas suffisant de n’accuser que l
180 sont ses causes, et s’il existe des remèdes. Car il ne serait pas suffisant de n’accuser que la méchanceté des hommes : c
181 re. Le but des inventions techniques est double : il est d’une part d’économiser du travail d’hommes par les machines, et
182 jour, devant moi, par un de ses collègues. Était- il vrai, lui demandait-on, que sa banque finançât la guerre des Japonais
183 finançât la guerre des Japonais contre Shanghai ? Il répondit que c’était vrai. — Mais alors, n’êtes-vous pas torturé par
184 e à prolonger un massacre ? — Nullement, répondit- il . Car tout ce que j’ai à voir, ce sont deux colonnes de chiffres, dont
185 atural. Toutefois, je le certifie exact. De plus, il illustre à merveille le vice fondamental de notre société et aussi de
186 qu’on ne la ressent même plus comme un scandale. Elle est devenue toute naturelle. Le banquier dont je viens de vous parler
187 , justifiable en elle-même, pour des raisons dont il ne remarquait pas qu’elles étaient sans commune mesure. Au moraliste
188 me, pour des raisons dont il ne remarquait pas qu’ elles étaient sans commune mesure. Au moraliste qui s’indignait, il aurait
189 ans commune mesure. Au moraliste qui s’indignait, il aurait simplement répondu que les affaires sont les affaires. On ne p
190 t pas additionner des chiffres et des sentiments. Il ne faut pas tout mélanger… Et en effet, nous mélangeons de moins en m
191 si quotidiens, qu’on finit par ne plus les voir. Il est admis, dans notre société, que les hommes de la pensée n’ont rien
192 enue pour nous quelque chose comme une friandise. Elle n’est plus un pain quotidien. Quand on dit de quelqu’un : c’est un in
193 entre la main et le cerveau ? Nous voyons bien où il nous a menés. Essayons de voir d’où il vient. Le phénomène le plus re
194 ns bien où il nous a menés. Essayons de voir d’où il vient. Le phénomène le plus remarquable des débuts du xixe siècle a
195 sés autour de petites entreprises. Les richesses, elles aussi, se sont tant agrandies qu’elles ont échappé aux regards : elle
196 richesses, elles aussi, se sont tant agrandies qu’ elles ont échappé aux regards : elles sont devenues chiffres abstraits, pui
197 tant agrandies qu’elles ont échappé aux regards : elles sont devenues chiffres abstraits, puissances lointaines, dont les éco
198 gurant de l’action ? Et que va faire la culture ? Il semble que la société devienne trop gigantesque pour être dominée d’u
199 moment-là un formidable effort de mise en ordre : ils auraient dû être saisis tout à la fois d’angoisse et d’enthousiasme d
200 n générale de l’homme et des buts de sa destinée, ils pouvaient créer une belle vie ! Mais si ces mêmes pouvoirs étaient ab
201 mêmes pouvoirs étaient abandonnés à l’anarchie, s’ ils se développaient chacun de son côté sans tenir compte d’aucune harmon
202 pte d’aucune harmonie ni d’aucune mesure humaine, ils ne pouvaient créer qu’une vie fausse, une vie mauvaise, antihumaine.
203 s de la pensée que d’avertir les hommes d’action. Ils avaient là une chance et un devoir vital. Or, ils ont perdu cette cha
204 Ils avaient là une chance et un devoir vital. Or, ils ont perdu cette chance. Ils n’ont pas vu le danger, ils ont eu peur d
205 un devoir vital. Or, ils ont perdu cette chance. Ils n’ont pas vu le danger, ils ont eu peur de le prévoir. Et c’est ici q
206 t perdu cette chance. Ils n’ont pas vu le danger, ils ont eu peur de le prévoir. Et c’est ici que nous allons découvrir le
207 e ; c’est chez les philosophes et les penseurs qu’ il s’est d’abord manifesté. Et je le nommerai : l’esprit de démission, d
208 ble, n’ont répondu que par la fuite, et par ce qu’ ils appelaient le désintéressement de la pensée. Ils ont renoncé à leur m
209 ’ils appelaient le désintéressement de la pensée. Ils ont renoncé à leur mission de directeurs spirituels de la cité. Bien
210 on de directeurs spirituels de la cité. Bien sûr, ils n’ont pas dit : notre pensée, à partir d’aujourd’hui, renonce à agir,
211 sée, à partir d’aujourd’hui, renonce à agir, mais ils ont dit : la dignité de la pensée réside dans son détachement de tout
212 e action, dans son désintéressement scientifique. Ils n’ont pas dit : nous ne voulons plus rien faire d’utile, mais ils ont
213 t : nous ne voulons plus rien faire d’utile, mais ils ont dit : on ne peut plus rien faire, car l’histoire et l’économie so
214 développement formidable et angoissant des faits, ils ont opposé des milliers de pages de rhétorique sur le Progrès. Mervei
215 Merveilleuse doctrine que celle-là ! Car en somme elle justifie tout, endort l’esprit et le dispense de toute intervention a
216 croyance au Progrès est l’opium de la culture. S’ il fallait résumer rapidement les caractères généraux par lesquels se tr
217 iques et sérieuses aux penseurs du xixe siècle ! Il n’y eut que Kierkegaard et Nietzsche pour protester du fond de leur s
218 utomobiles, de téléphones et de frigidaires, mais il a aussi produit beaucoup de canons et de masques à gaz. Il a produit
219 i produit beaucoup de canons et de masques à gaz. Il a produit beaucoup de confort, mais il a également produit la lutte d
220 ues à gaz. Il a produit beaucoup de confort, mais il a également produit la lutte des classes et le chômage, et la grande
221 e la culture, mais une action qui ne sait plus où elle va ! Et la société à son tour ne tarde pas à se défaire. Dès que la p
222 le monde, échappe aux prises de l’esprit humain, il ne reste qu’un seul principe pour mesurer la valeur de nos actes : c’
223 la valeur de nos actes : c’est l’Argent. Et quand il n’y a plus d’argent, c’est la misère. Et quand la misère est trop gra
224 base de toute la vie sociale du siècle. Que sont- ils devenus parmi nous ? Prenons trois mots parmi les plus fréquents dans
225 nse. Et quand ces trois pays se feront la guerre, ils la feront tous au nom de la liberté… Et l’ordre enfin signifiera tant
226 nifiera tantôt le statu quo social, si absurde qu’ il soit, tantôt l’établissement d’une hiérarchie nouvelle au prix d’une
227 t. Puis ce furent les écrivains. Mais que peuvent- ils dans notre monde démesuré ? Un Valéry, un Gide ou un Claudel ont quel
228 x incontrôlés. Et plus on y échange de mots, plus ils perdent leur force et leur sens, et leur délicatesse d’appel. Alors l
229 qui compte. Or quand la parole se détruit, quand elle n’est plus le don qu’un homme fait à un homme, et qui engage quelque
230 s d’un mot, dit Humpty Dumpty d’un ton méprisant, il signifie exactement ce que je veux qu’il signifie… ni plus ni moins.
231 prisant, il signifie exactement ce que je veux qu’ il signifie… ni plus ni moins. — La question est de savoir, dit Alice, s
232 nds mouvements collectivistes. Tout leur génie, s’ il faut leur en reconnaître, a consisté à deviner — avant les intellectu
233 appante et concrète. « Tout est en désordre ? ont- ils dit. C’est bien simple. Nous allons proclamer que l’intérêt de l’État
234 s de calcul. Surtout quand on est très pressé. Or il est certain que ces chefs étaient horriblement pressés, à cause de la
235 ent leurs peuples. Et voici la faute de calcul qu’ ils me paraissent avoir commise : ils ont voulu imposer à l’ensemble des
236 te de calcul qu’ils me paraissent avoir commise : ils ont voulu imposer à l’ensemble des principes qui étaient partiels. La
237 t humains. L’appel des peuples reste insatisfait. Il continue à nous poser la plus sérieuse question humaine. Et s’il n’es
238 ous poser la plus sérieuse question humaine. Et s’ il n’est pas encore aussi tragique dans des pays moins menacés par la mi
239 vers une communauté solide et pourtant libérale ? Il nous faut rapprendre à penser, à penser dans le train de l’action, ou
240 train de l’action, oui, à penser avec les mains. Il nous faut voir que tout dépend en premier lieu de notre état d’esprit
241 dépend en premier lieu de notre état d’esprit. S’ il change, tout commence à changer. S’il ne change pas, toutes les réfor
242 d’esprit. S’il change, tout commence à changer. S’ il ne change pas, toutes les réformes matérielles sont inutiles et tourn
243 s calculs, ou bien se sont trompés sur sa nature. Ils ont perdu de vue sa définition même. Leur point de départ est faux, e
244 d’un groupe humain, ni trop vaste ni trop étroit. Il n’est pas bon que l’homme soit seul ; il n’est pas bon non plus que l
245 étroit. Il n’est pas bon que l’homme soit seul ; il n’est pas bon non plus que l’homme soit foule. Le monde rationaliste
246 sme qui les néglige est une doctrine antisociale. Elle a pour effet mécanique de dissocier toute communauté naturelle. Et al
247 se sent plus porté au sein d’un groupe. Déraciné, il flotte, il erre, il n’offre plus de résistance aux courants d’opinion
248 s porté au sein d’un groupe. Déraciné, il flotte, il erre, il n’offre plus de résistance aux courants d’opinion, aux modes
249 u sein d’un groupe. Déraciné, il flotte, il erre, il n’offre plus de résistance aux courants d’opinion, aux modes, à la pu
250 ements menacent aujourd’hui d’anéantir l’Europe ? Il s’agit de résoudre enfin l’éternel problème que nous posent les relat
251 es relations de l’individu et de la collectivité. Il s’agit de voir que l’homme concret n’est pas le Robinson d’une île dé
252 e déserte, ni l’anonyme numéro d’un rang, mais qu’ il est à la fois un être unique et un être qui a des semblables. Rester
253 velle. Voilà l’homme que j’appelle une personne : il est à la fois libre et engagé, et il est libéré par cela même qui l’e
254 e personne : il est à la fois libre et engagé, et il est libéré par cela même qui l’engage envers son prochain, je veux di
255 maladies de la personne. Quand l’homme oublie qu’ il est responsable de sa vocation envers ses prochains, il devient indiv
256 responsable de sa vocation envers ses prochains, il devient individualiste. Et quand il oublie qu’il est responsable de s
257 es prochains, il devient individualiste. Et quand il oublie qu’il est responsable de sa vocation envers lui-même, il devie
258 il devient individualiste. Et quand il oublie qu’ il est responsable de sa vocation envers lui-même, il devient collectivi
259 l est responsable de sa vocation envers lui-même, il devient collectiviste. L’homme complet et réel, c’est celui qui se sa
260 lie à ses prochains. C’est pour cet homme réel qu’ il faut tout rebâtir. Cependant, nous avons montré que c’est justement c
261 e se sente une vocation et décide de la réaliser. Il se trouve en présence d’un monde que l’histoire et la sociologie ont
262 sociologie ont encombré de lois fatales. Que peut- il seul, contre ces lois ? Il faut donc, s’il veut faire quelque chose,
263 lois fatales. Que peut-il seul, contre ces lois ? Il faut donc, s’il veut faire quelque chose, qu’il entre dans un grand p
264 e peut-il seul, contre ces lois ? Il faut donc, s’ il veut faire quelque chose, qu’il entre dans un grand parti, dans une g
265 ? Il faut donc, s’il veut faire quelque chose, qu’ il entre dans un grand parti, dans une grande organisation. Mais alors,
266 parti, dans une grande organisation. Mais alors, il subit une discipline qui ne s’accommode pas du tout de sa vocation pe
267 rien. Conception très lugubre, mais commode, car elle justifiait l’inaction ou la retraite dans les bibliothèques. Or cette
268 de science qui, les premiers, cessent d’y croire. Ils ont reconnu, depuis quelques années, que la notion de lois tout objec
269 l’homme, n’était qu’une illusion rationaliste. Qu’ il me suffise de rappeler ici les découvertes de la physique des quanta 
270 r ici les découvertes de la physique des quanta : elle a prouvé que l’observation microscopique modifie en réalité les phéno
271 e vient nous dire que même dans l’ordre matériel, il n’est plus permis de concevoir une observation impartiale, à combien
272 nt les lois rigides de notre société. En vérité, il n’est de lois fatales que là où l’esprit démissionne. Toute action cr
273 ue dans la mesure où l’homme n’est qu’un mouton ; elles sont fausses et inexistantes dès qu’un homme redevient conscient des
274 vient conscient des vrais besoins de sa personne. Il n’y a de loi, répétons-le, que là où l’homme renonce à se manifester
275 rticulière. Si j’insiste sur cet axiome, c’est qu’ il est particulièrement libérateur pour la pensée et la culture en génér
276 s économiques, ou historiques, ou biologiques. Or il est clair que ces lois ne sont vraies, ou plutôt ne deviennent vraies
277 on de l’esprit civique dans les trop grands pays. Elles ne traduisent en fait qu’un immense affaissement du sens personnel da
278 maintenant comme un programme de parti politique. Ils doivent mûrir, et lentement se dégager de l’ensemble de mille efforts
279 Mais dans l’époque moderne les Églises ont paru, elles aussi, se détourner de toute action régulatrice sur la cité. Elles on
280 étourner de toute action régulatrice sur la cité. Elles ont assisté sans mot dire à l’essor du capitalisme et aux transformat
281 du capitalisme et aux transformations sociales qu’ il provoquait. Comme la culture elles ont renoncé à diriger, à avertir,
282 tions sociales qu’il provoquait. Comme la culture elles ont renoncé à diriger, à avertir, à orienter. Et c’est là le secret d
283 e, a fasciné les masses ouvrières, c’est parce qu’ il s’est chargé de la mission sociale qu’avaient trahie toutes les Églis
284 n christianisme devenu passif devant le monde. Or il me semble que, là encore, un réveil soulève les Églises. Elles ont co
285 le que, là encore, un réveil soulève les Églises. Elles ont compris qu’il ne suffisait pas de dénoncer les doctrines païennes
286 réveil soulève les Églises. Elles ont compris qu’ il ne suffisait pas de dénoncer les doctrines païennes mais qu’il fallai
287 it pas de dénoncer les doctrines païennes mais qu’ il fallait répondre mieux que ces doctrines à la question posée par l’an
288 on. J’ai insisté sur le rôle des Églises parce qu’ elles sont le type même des groupes au sein desquels la culture d’Occident
289 ment, que je vois la commune mesure de la cité qu’ il nous faut rebâtir. Cité solide et pourtant libérale : c’est tout le p
290 ce, vertu qui naît en somme d’un scepticisme, car elle suppose que la pensée de l’autre, qu’on tolère, ne passera jamais dan
291 e suppose des groupes diversifiés, et par là même il offre tous les avantages de la tolérance libérale, mais non pas ses i
292 ses inconvénients : car chacun dans le groupe où il est né, ou dans le groupe qu’il a choisi, peut donner le meilleur de
293 dans le groupe où il est né, ou dans le groupe qu’ il a choisi, peut donner le meilleur de soi-même, aller au terme de sa p
294 u où cet avenir soit, d’ores et déjà, un présent. Il ne s’agit pas de grands mots, de lyrisme ou d’idéalisme. Il s’agit de
295 it pas de grands mots, de lyrisme ou d’idéalisme. Il s’agit de voir qu’en fait, si nous sommes là, au service du pays, ce
296 s pays neutres. Et chez nous tout d’abord, puisqu’ il s’agit en somme d’utiliser notre expérience, et de tirer des leçons n
297 issons mieux que personne. Tout mon espoir est qu’ il se forme ici des équipes de fédérateurs, d’hommes qui comprennent enf
298 le seul espoir qui nous soit accordé. Encore faut- il que cet espoir soit soutenu par tout un peuple, et qu’il ne se laisse
299 cet espoir soit soutenu par tout un peuple, et qu’ il ne se laisse pas décourager par les sceptiques professionnels, par to
300 d’esprit qui se prétendent réalistes. Encore faut- il — et je termine là-dessus — qu’elle ne repose pas sur une erreur prof
301 es. Encore faut-il — et je termine là-dessus — qu’ elle ne repose pas sur une erreur profonde quant aux pouvoirs de l’homme e
302 guerre où tout s’abaisse et s’obscurcit. Mais qu’ elle nous donne au moins la possibilité de rendre un sens aux conflits éte
303 re un sens aux conflits éternels, — un sens, et s’ il se peut, une fécondité… Pendant que les autres font la guerre, ils n’
304 fécondité… Pendant que les autres font la guerre, ils n’ont pas le temps de préparer un monde humain. Mais nous qui avons e
4 1940, Les Cahiers protestants, articles (1938–1968). L’heure sévère (juin 1940)
305 L’heure sévère (juin 1940)e f Il est des pessimistes par tempérament. Leurs propos ne renseignent pas
306 nt sur l’état de leurs nerfs. Sans intérêt. Ce qu’ il nous faut à l’heure que nous vivons, ce sont des pessimistes réfléchi
307 s d’eux-mêmes et objectifs. Je dirai plus : ce qu’ il nous faut, ce sont des pessimistes actifs. Des hommes qui pensent et
308 ant le précipice était prévu. Mais encore fallait- il y croire. Or le matérialisme modéré dans lequel nous étions installés
309 y a incrédulité. Si Dieu existait, pleurons-nous, il ne permettrait pas cela ! Nous oublions que « cela », c’est nous auss
310 heure sévère. Ouvrons les yeux et apprenons ce qu’ il en est de notre châtiment. ⁂ L’Europe est en train de payer le prix d
311 ndon à l’optimisme du Progrès. Pendant un siècle, elle fit la sourde oreille, avec un petit air entendu, quand certains lui
312 L’esprit prévoit le mal et tient compte du péché. Il sait que les inventions humaines peuvent être employées contre l’homm
313 le profit d’argent et l’augmentation du confort. Il refuse de se demander à quoi servira cet argent ou si le confort maté
314 n bien spirituel. À la première de ces questions, il n’oserait pas répondre en toute franchise ; et à la seconde, il press
315 as répondre en toute franchise ; et à la seconde, il pressent bien qu’on ne pourrait que répondre non. D’où sa myopie et s
316 . J’écris ceci pendant la bataille de France. Est- il trop tard pour répéter ces vérités élémentaires, que le sérieux des g
317 in d’adopter « une morale de commerçants », et qu’ il sera vaincu par des ascètes féroces. Vinet prévoit que les libertés s
318 at. Et contre tout l’« économisme » de son temps, il ose écrire : « Si quelque chose aujourd’hui menace la liberté, ce n’e
319 doutons pas, est du côté de la tyrannie. » Et qu’ il suffise enfin d’une allusion aux prophéties de Burckhardt sur les « t
320 ut ailleurs irréductiblement divers, je répète qu’ elle est écrasante. Elle supprime nos dernières excuses. Nous avons été av
321 iblement divers, je répète qu’elle est écrasante. Elle supprime nos dernières excuses. Nous avons été avertis. Nous avons re
322 ertis. Nous avons refusé d’écouter. Et maintenant il faut payer. Non point parce que l’injustice triomphe, non point parc
323 s, mais au contraire parce que Dieu existe, et qu’ il est juste dans son châtiment. Il faut payer. Nous adorions l’idole de
324 eu existe, et qu’il est juste dans son châtiment. Il faut payer. Nous adorions l’idole de la prospérité, et l’idole du con
325 es se révèlent parfaitement « possibles ». Dès qu’ il s’agit de sauver notre peau, dès qu’il s’agit de défense nationale, n
326  ». Dès qu’il s’agit de sauver notre peau, dès qu’ il s’agit de défense nationale, nous acceptons des mesures qui, hier enc
327 peuple. Tout ce que nous jugions impossible quand il s’agissait du vivre, nous le trouvons parfaitement possible quand il
328 vre, nous le trouvons parfaitement possible quand il s’agit du mieux mourir ou du mieux tuer. Eh bien si la peur et la gue
329 sure l’aune. Ces vérités élémentaires sont dures. Elles ne sont pas originales. Elles sont même grossières, et gênantes. Cert
330 ntaires sont dures. Elles ne sont pas originales. Elles sont même grossières, et gênantes. Certains diront encore qu’elles so
331 rossières, et gênantes. Certains diront encore qu’ elles sont inopportunes, à l’heure où nous cherchons des raisons d’espérer 
332 t le mal est venu de les avoir refusées, avant qu’ elles montrent leurs effets aux yeux de tous. « Mea culpa » des pacifistes
333 fistes, qui n’ont pas su imaginer le mal parce qu’ ils croyaient au bien fait de main d’homme. « Mea culpa » des militariste
334 son principe ; ou la conquête, mais qui tue ce qu’ elle conquiert. « Mea culpa » des gens de droite, qui croyaient pouvoir co
335 se — que celui de l’ennemi fasciste contre lequel ils excitaient les masses. « Mea culpa » des Suisses, qui voulaient profi
336 uelque chose de précis, que je veux dire à temps. Ils sont encore à l’écart de la guerre, et peut-être y resteront-ils. Ils
337 à l’écart de la guerre, et peut-être y resteront- ils . Ils ont encore ce bref délai de grâce dont je parlais aux Hollandais
338 écart de la guerre, et peut-être y resteront-ils. Ils ont encore ce bref délai de grâce dont je parlais aux Hollandais, en
339 des spectateurs… Pourtant, si nous en triomphons, elle nous donnera la force de préparer l’avenir. Il est dur de reconnaître
340 elle nous donnera la force de préparer l’avenir. Il est dur de reconnaître ces fautes, parce que nous en sommes les compl
341 es les complices, et que nous aimons les fautifs. Il est dur de les avouer, parce que les fautes contraires des autres, en
342 ace, nous paraissent bien plus effrayantes, et qu’ ils triomphent tout de même, ou à cause de cela même. Il est dur de recon
343 triomphent tout de même, ou à cause de cela même. Il est dur de reconnaître que ce châtiment, qui nous atteint aussi, est
344 iment, qui nous atteint aussi, est mérité ; et qu’ il était logique, inévitable, et qu’il n’y a plus qu’à en tirer les conc
345 érité ; et qu’il était logique, inévitable, et qu’ il n’y a plus qu’à en tirer les conclusions5. Mais nous ne sommes pas ne
346 is pas ce que l’avenir vaudra, mais je sais que s’ il vaut quelque chose, ce sera grâce à l’action personnelle des hommes q
347 vaudra toujours, l’Écriture nous l’apprend lorsqu’ elle dit : « Le ciel et la terre passeront, mais ma Parole ne passera poin
348 : Nubicula est, transibit — c’est un petit nuage, il passera. Ce n’était pas de l’optimisme. Athanase prévoyait qu’avec le
349 ettait à Athanase de dire : c’est un petit nuage, il passera ? La grandeur de cette heure sévère, c’est que par la force d
350  : « L’amour parfait bannit la crainte. » Quoi qu’ il arrive. 4. Le budget annuel de la « défense spirituelle » de la Sui
5 1940, Les Cahiers protestants, articles (1938–1968). L’Église et la Suisse (août 1940)
351 s suggestions, critiques peut-être dures, mais qu’ il est temps de formuler pour préparer la voie d’un renouveau, ou les mo
352 on européenne, la Suisse est réduite à elle-même. Elle n’a plus d’autre garantie humaine que son armée, plus d’autre allié q
353 situation n’est pas nouvelle dans notre histoire. Elle fut celle de nos grandes victoires et de nos grands renouvellements.6
354 ions morales et matérielles sont ébranlées, comme elles le sont depuis quelques semaines, alors sonne une heure favorable pou
355 ormation communautaire. Car c’est bien de cela qu’ il s’agit : fonder à nouveau la cité, pour qu’elle résiste et qu’elle ra
356 qu’il s’agit : fonder à nouveau la cité, pour qu’ elle résiste et qu’elle rayonne encore, quoi qu’il arrive, oui même si le
357 der à nouveau la cité, pour qu’elle résiste et qu’ elle rayonne encore, quoi qu’il arrive, oui même si le pire arrive. Au cœu
358 u’elle résiste et qu’elle rayonne encore, quoi qu’ il arrive, oui même si le pire arrive. Au cœur physique de notre Confédé
359 otre mission politique et de notre sécurité. Et s’ il fallait qu’un jour la Suisse fût envahie, j’imagine qu’elle pourrait
360 it qu’un jour la Suisse fût envahie, j’imagine qu’ elle pourrait garder pendant des mois, peut-être des années, un grand espo
361 s, un grand espoir et une grande fierté, parce qu’ elle saurait que dans cette forteresse du Gothard, que n’atteignent ni cha
362 parole de nos Églises aux catacombes suffiraient- elles à ranimer notre espérance, notre amour et notre foi, comme le canon l
363 animerait nos courages ? Nos Églises trouveraient- elles le moyen de subsister et de s’organiser par l’initiative des laïques,
364 e s’organiser par l’initiative des laïques, comme elles l’ont fait dans un pays voisin ? Je n’oserais pas répondre ce matin.
365 qui était vraiment solide. L’Église de Suisse est- elle vraiment solide ? Saura-t-elle résister comme un roc ? comme une mont
366 lise de Suisse est-elle vraiment solide ? Saura-t- elle résister comme un roc ? comme une montagne vers laquelle nous pourron
367 e ! —, nous nous trouvions aussi bien préparés qu’ il est possible. Inspectons avec soin nos défenses, ayons le courage de
368 sommes encore faibles. C’est ici et c’est là, qu’ il faut porter l’effort. Aujourd’hui ou jamais, notre Église a besoin d’
369 isible, de nos diverses Églises suisses, c’est qu’ elles ont cessé d’être ou n’ont jamais été de véritables communautés. Voilà
370 n de ces communautés souvent persécutées. Certes, il ne faudrait pas s’imaginer que les premiers chrétiens étaient toujour
371 aient toujours des saints, et que les familles qu’ ils formaient ne connaissaient jamais de querelles de familles ! Les épît
372 es de Paul suffiraient à dissiper cette illusion. Il n’en reste pas moins que ces premières Églises ont surmonté toutes le
373 sses actuelles, nos paroisses de Suisse, seraient- elles capables de jouer pareil rôle, de nos jours ? Souvent, en sortant d’u
374 e dispersent, et je me pose cette question : sont- ils prêts à mettre en commun autre chose que la pièce de monnaie qu’ils v
375 en commun autre chose que la pièce de monnaie qu’ ils viennent de déposer dans le « sachet », avec l’air de ne pas y touche
376 « sachet », avec l’air de ne pas y toucher ? Sont- ils prêts à « partager » autre chose que des impressions générales sur le
377 les sur le temps et les tristes événements ? Sont- ils vraiment des frères — et des frères dans l’Église ? Oh ! je ne demand
378 ttéral de ce mot. Mais je me demande seulement si elles sont prêtes à envisager certains actes de solidarité pratique ; si el
379 isager certains actes de solidarité pratique ; si elles acceptent, au moins en théorie, de faire quelque chose dans ce sens,
380 fortement liés aux autres membres de l’Église qu’ ils ne sont liés à leur parti, ou à leur classe, ou à leurs intérêts prof
381 avant tout et pratiquement — songeant au jour où il faudra choisir entre l’Église et nos sécurités. Je vois bien que nos
382 glises constituent des unités administratives, qu’ elles réunissent régulièrement des auditoires assez nombreux, qu’il y a par
383 aie communauté. Des actes isolés, si beaux soient- ils , cela ne fait pas un esprit de corps, — et l’expression « esprit de c
384 lise est rassemblée par l’Esprit saint, et puisqu’ elle est le Corps même du Seigneur. Ceci dit, et notre faiblesse une fois
385 ses redeviennent des communautés véritables. Mais il est trois de ces conditions, entre vingt autres8, qui me paraissent à
386 ses retrouvent le sens et la vertu communautaire, il faut : 1° qu’elles reprennent conscience de la nature éternelle et du
387 e sens et la vertu communautaire, il faut : 1° qu’ elles reprennent conscience de la nature éternelle et du but transcendant d
388 rnelle et du but transcendant de l’Église ; 2° qu’ elles développent ou réveillent en elles le sens missionnaire, à l’intérieu
389 Église ; 2° qu’elles développent ou réveillent en elles le sens missionnaire, à l’intérieur du pays ; 3° qu’elles aient le co
390 sens missionnaire, à l’intérieur du pays ; 3° qu’ elles aient le courage d’être franchement des Églises visibles, organisées,
391 nistration et de ses rapports avec l’État comme s’ il s’agissait d’un parti ou d’une fondation de bienfaisance avec des tra
392 es d’abord, mais les affaires du Royaume de Dieu. Il me paraît profondément indécent que ces affaires soient débattues dan
393 e de Dieu et non pas une Église de l’État suisse. Il est bien vrai que notre État fédéral ne saurait se fonder concrètemen
394 e vis-à-vis de l’Église depuis plus d’un siècle : elle ne s’y sent pas tout à fait chez elle ; elle n’y reconnaît pas son la
395 un siècle : elle ne s’y sent pas tout à fait chez elle  ; elle n’y reconnaît pas son langage. Il y a là certainement quelque
396 le : elle ne s’y sent pas tout à fait chez elle ; elle n’y reconnaît pas son langage. Il y a là certainement quelque chose d
397 ’accent d’un milieu social plutôt que d’un autre. Elle devrait aujourd’hui abandonner résolument cette espèce d’éloquence co
398 ion fâcheuse de démodé, d’inactuel, d’irréaliste. Il n’y a vraiment aucune raison valable pour que notre prédication chrét
399 dans nos petites habitudes du dimanche matin, et il arrive que nous soyons choqués quand un pasteur ne garde pas le ton c
400 ecclésiastiques », mais à tous les hommes d’où qu’ ils viennent, qui ont faim et soif de vérité, sans le savoir le plus souv
401 t soif de vérité, sans le savoir le plus souvent. Il est grand temps que nous fassions en sorte que tous « ceux du dehors 
402 r le sentiment de s’être égarés dans un milieu où ils sont déplacés. Que nos Églises se préoccupent donc davantage d’être v
403 s des idées, des images plus ou moins originales. Elle demande des vérités sûres, les vérités de la Bible, qui sont toujours
404 en partie le problème du samedi soir… Encore faut- il que les paroissiens, à leur tour, acceptent que leur pasteur soit « s
405 d jamais, un pasteur ne sera trop simple ! Jamais il ne pourra se rapprocher assez de la simplicité des paroles de la Bibl
406 tre génération n’est pas si tourmentée de doutes. Elle n’a guère la manie de discuter. Elle attend des directions positives.
407 e de doutes. Elle n’a guère la manie de discuter. Elle attend des directions positives. Elle est prête à croire, et elle dem
408 e discuter. Elle attend des directions positives. Elle est prête à croire, et elle demande à la prédication de parler à sa f
409 directions positives. Elle est prête à croire, et elle demande à la prédication de parler à sa foi, non à son doute, avec la
410 cela étant acquis, pourquoi l’Église se priverait- elle de souligner l’actualité de son enseignement ? Pourquoi ne parlerait-
411 alité de son enseignement ? Pourquoi ne parlerait- elle pas de politique, si elle le fait sur la seule base de la Bible ? On
412 ? Pourquoi ne parlerait-elle pas de politique, si elle le fait sur la seule base de la Bible ? On ne lui demande pas une thé
413 ire, à condition, je le répète et j’y insiste, qu’ il ne s’agisse jamais des idées personnelles du pasteur ou de quelque éc
414 personnelles du pasteur ou de quelque écrivain qu’ il cite, mais du seul et unique point de vue de la Bible. En résumé, la
415 X, pasteur ou même théologien célèbre, — mais qu’ elle parle uniquement et simplement le langage de la Bible, qui appartient
416 me de l’épiscopat, encore que je sois persuadé qu’ il se posera pour nous aussi un jour ou l’autre. Je ne parlerai pas non
417 disant liturgiques sont exactement le contraire : ils sont composés selon les goûts et les idées du pasteur ; ils ne se dér
418 omposés selon les goûts et les idées du pasteur ; ils ne se déroulent pas d’après un plan traditionnel et chargé de sens do
419 ux, de ce même défaut de sens liturgique : lorsqu’ il arrive qu’on lise, au début d’un de nos cultes, une prière liturgique
420 ne vraie liturgie doit être invariable ; de plus, elle doit être prévue par les auditeurs, et pleinement significative en ch
421 einement significative en chacune de ses parties. Elle doit former un ensemble, un tout cohérent et indivisible. Prenons l’e
422 isses devraient se préparer à l’adopter, telle qu’ elle est. Il y a d’abord une raison générale. L’Église visible est aussi u
423 une société humaine. Comme toute société humaine, elle a besoin de signes extérieurs et de symboles collectifs qui manifeste
424 es savent que pour créer une communauté nouvelle, il faut créer des signes et des rites : voyez les régimes totalitaires,
425 jour, et qui seront alors une tentation, parce qu’ elles répondront tant bien que mal à un désir, à un besoin normal, trop lon
426 t plus spécifiquement chrétien. Je dirais même qu’ il est d’ordre sermonnaire. Je m’explique. Imaginez une personne qui n’a
427 imanche, au culte d’une de nos paroisses suisses. Elle sera d’abord, probablement, dépaysée, comme je vous le disais tout à
428 de l’auditoire. Mais cela n’est rien encore : si elle est de bonne volonté et avide de vérité, elle ne se laissera pas arrê
429 si elle est de bonne volonté et avide de vérité, elle ne se laissera pas arrêter par ces détails. Ce qui est plus grave, c’
430 ls. Ce qui est plus grave, c’est que le sermon, s’ il n’est pas exceptionnellement bon, risque bien de la laisser sur sa fa
431 bien de la laisser sur sa faim. En sortant de là, elle ne saura pas exactement ce que nous croyons, elle pourra s’imaginer l
432 elle ne saura pas exactement ce que nous croyons, elle pourra s’imaginer les choses les plus fausses. Ou bien encore, elle a
433 iner les choses les plus fausses. Ou bien encore, elle aura l’impression d’avoir surpris une réunion d’initiés, habitués à u
434 langage, dont personne ne lui aura donné la clef. Il en ira tout autrement, si le culte débute par la liturgie que je vien
435 appante les différents moments du drame du salut. Elle crée le cadre et l’atmosphère spirituelle, elle introduit le sermon d
436 . Elle crée le cadre et l’atmosphère spirituelle, elle introduit le sermon du pasteur, elle le situe dans l’ensemble de nos
437 spirituelle, elle introduit le sermon du pasteur, elle le situe dans l’ensemble de nos dogmes, et elle rappelle notre Credo.
438 , elle le situe dans l’ensemble de nos dogmes, et elle rappelle notre Credo. Bref, quand le sermon commence, tout le monde,
439 e monde, et même un étranger, peut savoir de quoi il s’agit. J’avoue que pour ma part, et je ne pense pas être le seul de
440 ut-être : le peuple suisse souffre d’un défaut qu’ il me faut bien nommer le sans-gêne spirituel. Je ne sais pas si cela pr
441 peu trop facilement du Bon Dieu, chez nous, et qu’ il subsiste dans nos Églises pas mal de traces d’un piétisme affadi. Je
442 é de l’importance à ces choses-là, et je pense qu’ elles avaient de bonnes raisons de le faire. Elles savaient qu’une certaine
443 e qu’elles avaient de bonnes raisons de le faire. Elles savaient qu’une certaine participation personnelle, physique même, au
444 aire et bon d’avoir une liturgie, comment se fait- il que nos Églises suisses soient les seules sur le continent qui croien
445 e ne puis traiter ici : restauration théologique ( elle est en plein essor) ; confession de foi (on en parle beaucoup) ; doct
6 1941, Les Cahiers protestants, articles (1938–1968). Autocritique de la Suisse (février 1941)
446 ué à lui-même et au monde que la Suisse. C’est qu’ il en a besoin plus que nul autre. Sa devise est un paradoxe qu’il n’a p
447 plus que nul autre. Sa devise est un paradoxe qu’ il n’a pas toujours bien compris. Elle exclut en principe toute doctrine
448 un paradoxe qu’il n’a pas toujours bien compris. Elle exclut en principe toute doctrine unitaire et suppose donc la connais
449 e chaque région et ses devoirs envers l’ensemble, il n’est pas absurde de nommer « fédéraliste » un parti qui n’a d’autre
450 tes, nomment « fédéral » ce qui procède de Berne. Il en résulte que leur fédéralisme se résume à combattre tout ce qui est
7 1950, Les Cahiers protestants, articles (1938–1968). Europe unie et neutralité suisse (novembre-décembre 1950)
451 nt pas, et que les Russes n’y croient pas plus qu’ ils ne croient à nos libertés, et vraiment, ce n’est pas beaucoup dire. I
452 ibertés, et vraiment, ce n’est pas beaucoup dire. Il serait donc temps qu’en Suisse au moins, l’on essaie de comprendre un
453 proche d’égoïsme par des œuvres philanthropiques. Il faut bien le reconnaître, ce repliement intéressé, qui tient parfois
454 , sur notre peuple, de ce tour de force prolongé, ils sont hélas plus discutables. Et si vraiment notre neutralité n’était
455 ce que le Suisse moyen semble croire aujourd’hui, il ne faudrait pas s’étonner qu’elle impatiente de plus en plus le reste
456 oire aujourd’hui, il ne faudrait pas s’étonner qu’ elle impatiente de plus en plus le reste du monde. Comment les Suisses, si
457 ent ennemis de privilèges dans leur pays, peuvent- ils prétendre avoir en bloc ce privilège exorbitant ? Pour commencer de r
458 histoire de notre neutralité, car je soupçonne qu’ elle n’est pas bien connue de la plupart de nos contemporains. Aux origine
459 ntré que les cantons ne peuvent rester unis que s’ ils s’abstiennent de prendre part aux guerres entre rois catholiques et p
460 es entre rois catholiques et protestants — puisqu’ ils sont eux-mêmes divisés entre les deux confessions. Mais ce n’est qu’e
461 uissances et déclarée perpétuelle. En même temps, elle prend un aspect positif. On sait en effet que le traité de Vienne dit
462 t. Si la Suisse avait pris parti, à ce moment-là, elle se fût déchirée en deux : une partie tenant pour la France, l’autre p
463 tenant pour la France, l’autre pour l’Allemagne. Il était évident que notre neutralité dépendait donc, au début de ce siè
464 rain redoutable aux divisions blindées. Qu’en est- il aujourd’hui ? Tout est changé. Les conflits qui menacent d’éclater n’
465 opéens à d’autres Européens comme de 1939 à 1945. Il n’est donc plus question pour la Suisse d’essayer de maintenir sa pla
466 et réservée dans le jeu des puissances voisines. Il n’y a plus d’équilibre européen. Il y a l’Europe entière qui essaie d
467 s vrais intérêts de l’Europe entière ». Apporte-t- elle , ou non, une contribution effective à la défense commune de l’Europe 
468 me, les vrais intérêts de l’Europe entière ? Sont- ils les mêmes aujourd’hui qu’il y a cent-cinquante ans, ou même qu’il y a
469 ilibre entre les grandes puissances du continent. Il s’agit aujourd’hui d’autre chose. L’idée d’une guerre prochaine entre
470 tout simplement que l’Europe devienne entière, qu’ elle mette en commun toutes ses forces pour relever son économie, son nive
471 our hâter l’union, mais par intérêt bien compris. Il serait donc un peu excessif de citer nos adhésions tardives et rétice
472 de contributions à l’unité. Sur ce plan général, il semble difficile de soutenir que la neutralité représente un apport p
473 es ou incrédules chez certains de nos voisins. Qu’ ils comptent plutôt leurs divisions ! Nous en avons, je le crains, plus q
474 en avons, je le crains, plus qu’eux tous réunis. Il n’y a qu’un seul coin de l’Europe qui soit sérieusement défendu, et l
475 . Quand l’armée de l’Europe commencera d’exister, il sera temps d’aborder la question d’un plan de défense unifié. Vous le
476 posé, encore moins résolu, dans l’abstrait. Ce qu’ il faut savoir tout d’abord, c’est pour quelle raison grande et forte, c
477 son union fédérale, et de cela seul. Encore faut- il que cette union prenne forme, et qu’en son nom des questions très pré
478 oit les États-Unis, soit le Conseil de l’Europe s’ il sort de son impasse, soit encore une menace de guerre contre le conti
479 out entier, nous poseront ces questions précises. Il faut que notre opinion soit prête à y répondre. Il ne faut pas que no
480 l faut que notre opinion soit prête à y répondre. Il ne faut pas que notre gouvernement se trouve placé devant des options
481 ment se trouve placé devant des options graves qu’ il lui sera difficile de trancher, ne sachant pas ce que pense le peuple
482 er, ne sachant pas ce que pense le peuple suisse. Il ne faut pas que l’histoire nous surprenne, endormis dans la fausse sé
483 urope — comme aujourd’hui sur le plan militaire — il faut la maintenir. Si au contraire elle devient un prétexte à freiner
484 militaire — il faut la maintenir. Si au contraire elle devient un prétexte à freiner l’union de l’Europe et à ne pas y prend
485 ion de l’Europe et à ne pas y prendre notre part, elle est contraire à l’esprit même de son statut, et elle peut donc demain
486 e est contraire à l’esprit même de son statut, et elle peut donc demain devenir une trahison. Car je le répète : notre neutr
487 urope entière », et non pas comme un privilège qu’ il n’y aurait plus à mériter. Elle est relative à l’Europe. Et ceux qui,
488 mme un privilège qu’il n’y aurait plus à mériter. Elle est relative à l’Europe. Et ceux qui, par erreur ou par malice, veule
489 emple — ceux-là sont infidèles à notre tradition. Ils violent notre statut légal, et l’esprit même de nos institutions. Je
490 r. Les efforts pour unir l’Europe se multiplient. Il semble que les obstacles qui s’opposent à une fédération européenne s
491 les, les réponses reçues. Voici le questionnaire. Il est suivi d’une première réponse de M. Denis de Rougemont aux questio
492 — Quelle attitude, selon vous, la Suisse devrait- elle adopter en face de l’Europe unie ? À supposer qu’une fédération europ
493 ans quelle mesure la neutralité helvétique serait- elle un obstacle majeur à notre entrée dans ladite fédération ? Une concep
494 trop restrictive de cette neutralité n’empêche-t- elle pas notre pays d’assumer actuellement la tâche de conciliation qui se
8 1951, Les Cahiers protestants, articles (1938–1968). Réplique à M. Lasserre (mars-avril 1951)
495 ait simplifié ma thèse jusqu’à la déformer, et qu’ il ait apporté à sa réfutation moins de scrupule que d’humeur. J’avais p
496 ent nié ou méconnu l’intérêt propre de la Suisse. Il serait toutefois bien léger de penser, ou de laisser croire, que ce p
497 n union fédérale ; et j’ai ajouté : « Encore faut- il que cette union prenne forme. » Telle est ma thèse principale. Au sur
498 er la Russie de 1815 et l’URSS de Staline, lorsqu’ il s’agit de leurs relations avec l’Europe ; qu’il tienne l’URSS — malgr
499 u’il s’agit de leurs relations avec l’Europe ; qu’ il tienne l’URSS — malgré elle ! — pour une puissance européenne ; qu’il
500 ions avec l’Europe ; qu’il tienne l’URSS — malgré elle  ! — pour une puissance européenne ; qu’il fasse état, très sérieuseme
501 algré elle ! — pour une puissance européenne ; qu’ il fasse état, très sérieusement, de ce que l’OECE « reste ouverte » aux
502 ; et qu’enfin tous les chiffres et proportions qu’ il cite vers la fin de son article soient erronés, — ceci pour deux moti
503 d’interprétation, l’autre de fait. Tout d’abord, il est clair que je n’ai pas pu « confondre systématiquement » le Consei
504 on de M. Lasserre sur le fond du problème, tel qu’ il est défini par les points IV et V de votre questionnaire ?o On voit q
505 a construction de l’Europe. C’est sur ce point qu’ il eût été intéressant d’entendre l’historien respecté de Lausanne. m.
9 1968, Les Cahiers protestants, articles (1938–1968). Pour une morale de la vocation (1968)
506 finies. Mais la morale ! Ce serait peu de dire qu’ elle est en crise : on ne sait même plus très bien ce qu’elle est, ni où e
507 t en crise : on ne sait même plus très bien ce qu’ elle est, ni où elle est, ce qu’elle peut ou doit dire encore, et au nom d
508 ne sait même plus très bien ce qu’elle est, ni où elle est, ce qu’elle peut ou doit dire encore, et au nom de quoi. Le « mor
509 s très bien ce qu’elle est, ni où elle est, ce qu’ elle peut ou doit dire encore, et au nom de quoi. Le « moralisme de grand-
510 généralement bourgeoise-occidentale, que reste-t- il après la triple attaque convergente de la sociologie (surtout marxist
511 , du piétisme et de l’existentialisme, etc. Y a-t- il encore une morale chrétienne ? Osera-t-on encore la prêcher ? Théolog
512 le fondement commun de toutes nos orthodoxies, qu’ elles soient d’empreinte barthienne ou thomiste, et les notions mêmes d’ort
513 le rendement des procédés et des conduites, — qu’ il s’agisse de s’assurer contre l’imprévu ou au contraire de mieux couri
514 xemple.) Les conséquences de cette situation — qu’ il faut imaginer réalisées dans un avenir pas trop lointain (beaucoup so
515 euses et diverses pour que l’on puisse porter sur elles un jugement global. Je me borne à relever ceci : à supposer que demai
516 orer ! Exécuter une prescription médicale, même s’ il s’agit d’une intervention douloureuse comme peut l’être une extractio
517 beaucoup de ces observateurs, c’est l’idée que s’ il devait en aller ainsi demain, les Églises et leurs clergés n’auraient
518 stère tombé en désuétude, les Églises ne feraient- elles pas mieux d’admettre que la compétence des savants et des praticiens
519 a conduite quotidienne des membres d’une société, elles pourront se consacrer d’autant mieux à leur mission proprement spirit
520 e dois m’expliquer maintenant sur ce presque, car il est capital. Supposez, dans x années, une forme d’existence humaine s
521  ; la question de ma relation à la transcendance. Elle demeure sans réponse, non point par accident, mais par nécessité de m
522 ociété que je suppose en parfait ordre de marche, il devient à peu près impossible, parce qu’impensable dans les termes ad
523 hommes leur mode de vie, d’autres s’en chargent. Elle est là pour mettre en question cet ajustement trop parfait, pour l’ex
524 es fins dernières, métaphysiques et spirituelles. Elle est là pour défendre le droit de la personne à différer, le droit à l
525 automatique à des fins purement sociales, fussent- elles déterminées par la plus sûre des sciences. Quant à celui qui veut dev
526 Quant à celui qui veut devenir chrétien, devra-t- il s’exiler moralement de cette société trop bien ajustée, se désadapter
527 ui est réputée nulle et vide. Chrétien en cela qu’ il cherchera ce sens dans les voies de l’amour, qui implique l’existence
528 t à la fois le contenu et les conditions de ce qu’ il nommera sa « liberté ». Cela sera vu et ressenti comme un refus de la
529 essairement sous une forme agressive et violente. Il sera simplement le témoignage permanent (et qui pourra rester sourian
530 égèrement majoritaires) de penser au contraire qu’ elle peut contribuer à débrouiller un peu nos problèmes éthiques, en vue d
531 pte pas modifier dans la version finale du livre. Elles sont intitulées : « De la Visée » : J’ai appris le tir au fusil dan
532 rrassé de tant de recettes et d’ordres assénés qu’ il me semblait, d’un exercice à l’autre, n’avoir fait de progrès que dan
533 un tout jeune lieutenant. « Vous tirez mal », dit- il avec une douceur froide, au moment même où je me félicitais d’avoir e
534 ans la cible. « Voulez-vous apprendre à tirer ? » Il me regarda, et voyant dans mes yeux une bonne volonté en détresse :
535 s moi tandis que je gonflais mes poumons. Soudain il me parut plus large, plus proche, bien mat, et immobile… La détonatio
536 mots de ce jeune officier — « pensez au noir » —, elles ne devaient m’apparaître qu’après bien des années, à l’épreuve de bie
537 t peuvent être nuisibles dans la mesure exacte où ils absorbent l’attention, la détournent du but, ou le font oublier. 2. L
538 cace commence donc par la fin. Avant toute chose, il faut considérer la fin. 4. La fin seule justifie les moyens, dans la
539 fin seule justifie les moyens, dans la mesure où elle est juste, et où ils sont vraiment dictés par elle. (Le fait que l’on
540 s moyens, dans la mesure où elle est juste, et où ils sont vraiment dictés par elle. (Le fait que l’on invoque ce proverbe
541 lle est juste, et où ils sont vraiment dictés par elle . (Le fait que l’on invoque ce proverbe pour couvrir des tricheries év
542 and usage du Tir et de la méditation sur cet art. Il s’agit du tir à l’arc. Le tireur zen doit arriver à s’identifier au b
543 cible), à avoir ce but en soi, de telle sorte qu’ il arrive un jour à mettre une flèche dans le noir les yeux fermés, et u
544 ollectif selon Jung, notamment, et c’est pourquoi il est si difficile de les modifier ; en revanche, quantité de préceptes
545 ionner ici le principe de cette analyse, parce qu’ il autorise quelques conclusions intéressantes pour notre sujet. À parti
546 sens qu’on en a dit seulement du mal, oubliant qu’ elles sont réellement indispensables à toute vie sociale, c’est-à-dire à to
547 d’échecs sont des conventions, c’est clair, mais elles font tout l’intérêt de cette activité. En effet, déplacer un bout de
548 se concentrer avec passion pendant une heure, car il est chargé de sens par les règles du jeu. Quant aux feux verts et aux
549 du jeu. Quant aux feux verts et aux feux rouges, ils sont conventionnels aussi, mais sans eux, c’est l’embouteillage. Ceux
550 morales religieuses ou profanes sous prétexte qu’ elles ne sont que de « simples conventions », se trompent doublement : car
551 sens physico-chimique du terme ; et deuxièmement, il n’y a rien de plus important que les conventions dans une culture, un
552 s hommes, ou même entre deux êtres, si frustes qu’ ils soient. Reconnaître que les normes et prescriptions morales sont des
553 ales sont des conventions ne signifie donc pas qu’ elles soient méprisables ou vaines, bien au contraire. De plus, l’assimilat
554 ales aux règles d’un jeu ne signifie nullement qu’ il faille les prendre à la légère, ni qu’on montre beaucoup d’intelligen
555 n montre beaucoup d’intelligence en trichant avec elles  : aux échecs, par exemple, la moindre tricherie détruit tout l’intérê
556 cet intérêt tient aux règles et à rien d’autre. S’ il est admis que les normes de la morale sont des règles d’un jeu, toute
557 ureusement, comme on le fait des règles d’un jeu, il faut souligner aussitôt que ces conventions ne sauraient être arbitra
558 traire » sont à peu près synonymes.) Par exemple, elles ne doivent être ni contradictoires, ni manifestement impraticables, n
559 st tout encombrée de règles contradictoires entre elles , ou impraticables, ou néfastes, et il est important de les soumettre
560 es entre elles, ou impraticables, ou néfastes, et il est important de les soumettre à une critique systématique et scienti
561 ournir un terrain de choix pour cette confusion : il ne disposait que de la loi mosaïque et de son sommaire, le commandeme
562 qui met notamment sur le même plan d’objets (dont il faut préserver la possession) esclaves, femmes et bétail : on ne pouv
563 ar masochisme ou par une sorte de démagogie, mais il faut bien le reconnaître : ces scandales trop connus tiennent au fait
564 eurs — une stricte obéissance à ces règles, comme il va de soi dans tous les jeux et sports d’équipe ; 3. ceci exclut, du
565 s de jugement sur sa valeur en tant que personne. Il est entendu que si l’on fait une faute, si on touche la balle avec la
566 e trouve posée la question de nos fins dernières. Elle est liée à la vocation. ⁂ On pourrait définir une sorte de vocation g
567 cherche à entendre, à capter de nouveau, pour qu’ il me guide dans l’inconnu, comme ces avions qui dans la nuit suivent la
568 u sonore. Mais ce chemin sans précédent, — puisqu’ il part de moi seul pour me conduire là où convergent tous les chemins d
569 je le découvre ou si je l’invente en le suivant ? Il n’est créé que par l’appel, et n’existe que si je m’y engage, réponda
570 , répondant à l’appel sans penser à rien d’autre. Il n’est pas jalonné, comme les grandes voies publiques, de signes bien
571 puisque personne encore n’a pu le suivre, puisqu’ il n’existe qu’à partir de moi, et pour moi seul ! Cette unicité et sing
572 mettre en doute ou de nier son existence — sauf s’ ils ont fait, eux aussi, l’expérience de cet appel invraisemblable — et i
573 i, l’expérience de cet appel invraisemblable — et ils vont me conseiller « pour mon bien », de m’en tenir aux chemins commu
574 la route, qui est aussi fait pour moi, ajouteront- ils , sévères. Oui, bien sûr, mais ces voies publiques, faites pour tout l
575 es pour tout le monde et personne en particulier, elles me mèneront sans doute aussi loin qu’on voudra et en toute sécurité,
576 is où je dois aller, qui est absolument ailleurs. Elles ne sont pas faites pour cela. Seul pourrait me relier à mon but le se
577 aire mon salut » comme disait la piété classique. Il me faut me risquer dans un monde spirituel qui est peut-être une illu
578 tuel qui est peut-être une illusion, ou le néant. Il me faut affronter l’invraisemblable (dont parlait Kierkegaard), un ri
579 aard), un risque absolument sans précédent puisqu’ il est institué pour moi seul. Et dans tout cela je n’ai d’autre soutien
580 aut… Dans ces moments, le But a dicté ses moyens. Il ne les a pas seulement justifiés, il les a faits et me les a donnés.
581 ses moyens. Il ne les a pas seulement justifiés, il les a faits et me les a donnés. Je disais tout à l’heure que la notio
582 e monde de la vocation. Voici comment je crois qu’ il faut l’entendre. Par rapport à la vocation humaine et générale de l’a
583 t générale de l’amour (sommaire de toute la Loi), il est clair que le péché en général est de faillir à l’amour, de le ble
584 le réduire à un pur sentiment ou désir, alors qu’ il est action. Mais dans le monde de la vocation, mon péché particulier,
585 fait perdre de vue le but, m’en fait douter quand il est invisible, bref, me détourne d’agir ma vocation. Et je découvre,
586 op simplifié, beaucoup trop court pour tout ce qu’ il prétend remuer, sans avoir indiqué au moins les principales objection
587 ion fondamentale et radicale, pour paulinienne qu’ elle soit sans doute — au moins par sa structure dialectique — il est évid
588 s doute — au moins par sa structure dialectique — il est évident qu’elle provoque une série de questions, de doutes et de
589 par sa structure dialectique — il est évident qu’ elle provoque une série de questions, de doutes et de reproches hélas bien
590 ien faciles à prévoir. Le psychologue me dira (et il le dit en moi) : — Êtes-vous sûr que l’appel que vous croyez venu du
591 traception ou de la guerre, je me demande de quoi elles priveraient le monde si elles cessaient de lui prodiguer des conseils
592 me demande de quoi elles priveraient le monde si elles cessaient de lui prodiguer des conseils ou des ordres au moins aussi
593 n me reprochera (et je ne suis pas du tout sûr qu’ il ait tort) d’ouvrir les portes toutes grandes au subjectivisme intégra
594 dont la psychose prend la forme d’une mission qu’ ils affirment reçue de Dieu. — À quoi je pense qu’on doit répondre par un
595 liste. Toute vie spirituelle authentique ne s’est- elle pas toujours jouée entre les deux extrêmes du désert et du déluge, du
596 s docteurs, le critère externe de la Révélation ; elle dit ceci : « Cherchez d’abord le Royaume de Dieu, et le reste vous se
597 vangile ne dit pas : « Voici le code, obéissez. » Il dit : « Cherchez, et osez croire l’invraisemblable. Et c’est ainsi qu
598 ns un individualisme anarchisant, je répondrai qu’ il a bien mal compris la définition de la personne : l’homme chargé par
599 , à faire grandement la moindre des choses, ce qu’ il doit faire lui seul. (Et d’abord, à se faire lui-même, ajouterais-je.
600 celer ma vocation, puisque selon vous le But d’où elle m’est adressée reste invisible, inouï, incalculable, et c’est lui cep
601 or toute vocation est d’abord indicible, parce qu’ elle n’a pas et ne peut avoir de précédent, parce qu’il n’y a pas deux hom
602 e n’a pas et ne peut avoir de précédent, parce qu’ il n’y a pas deux hommes pareils, donc pas deux chemins pareils allant d