1
ande officieuse. M. Marcel Hutin n’a qu’à bien se
tenir
. La réussite est si complète qu’on se sent pris de malaise. Voyons, s
2
Marcel Hutin n’a qu’à bien se tenir. La réussite
est
si complète qu’on se sent pris de malaise. Voyons, sommes-nous encore
3
i complète qu’on se sent pris de malaise. Voyons,
sommes
-nous encore en 1916 ? s’agit-il encore de revanche ? S’agit-il encore
4
s, et plus encore les légendes de M. Hermann-Paul
sont
d’une imbécillité proprement répugnante et qu’il faudrait qualifier d
5
qu’il faudrait qualifier de criminelle si elle n’
était
avant tout veule, plate et sénile, au point de perdre toute efficacit
6
le de tout ce qu’il y a d’honnête dans son public
soit
à coup sûr d’écœurement et de mépris, devant cette déjection, grassem
7
ien notre monde. Mais une pensée qui n’agit pas n’
est
plus de la pensée ; une action qu’on ne « pense » pas ne peut pas êtr
8
e ; une action qu’on ne « pense » pas ne peut pas
être
créatrice. En tant que révolutionnaires, c’est de ce point de vue cen
9
ivée, dans l’état où se trouve la France en 1932.
Est
-ce à dire qu’il faille entreprendre une description méthodique des ci
10
rer l’absurdité latente et souvent manifeste ? Ce
serait
faire la part trop belle au monde, que nous refusons. Mais il peut êt
11
p belle au monde, que nous refusons. Mais il peut
être
utile d’en dégager ce que l’on appellerait l’équation de décadence, d
12
use » des vies privées. Ah oui ! si la Révolution
était
faite déjà ! Elle ne l’est guère que dans nos cœurs, — et toujours à
13
i ! si la Révolution était faite déjà ! Elle ne l’
est
guère que dans nos cœurs, — et toujours à recommencer. Ce que l’insta
14
e que l’instant commande, dans le monde tel qu’il
est
, n’est-ce pas, d’une façon plus urgente, « l’observation révolutionna
15
’instant commande, dans le monde tel qu’il est, n’
est
-ce pas, d’une façon plus urgente, « l’observation révolutionnaire » d
16
ble sabres et képis, s’assied pour écouter : tout
est
jugé d’avance. Deux heures durant, quelques pasteurs et quelques écri
17
son acte. Les autres appliquent un tarif. ⁂ Je ne
suis
pas antimilitariste. Je ne suis même pas pacifiste. Eussè-je été tent
18
un tarif. ⁂ Je ne suis pas antimilitariste. Je ne
suis
même pas pacifiste. Eussè-je été tenté de le devenir qu’il m’eût été
19
itariste. Je ne suis même pas pacifiste. Eussè-je
été
tenté de le devenir qu’il m’eût été difficile de persister après le r
20
ste. Eussè-je été tenté de le devenir qu’il m’eût
été
difficile de persister après le réquisitoire du Commissaire du gouver
21
ssaire du gouvernement. Non pas que ses arguments
fussent
bien neufs, ni même honnêtement choisis. Mais simplement sa conclusio
22
ée de Pascal en l’attribuant à Pasteur. On peut n’
être
pas difficile : on tient tout de même à choisir ses complices. Sans e
23
uant à Pasteur. On peut n’être pas difficile : on
tient
tout de même à choisir ses complices. Sans entrer donc dans le vif du
24
cte la preuve d’une obéissance à Dieu qui devrait
être
celle de tout croyant ; ou s’il a seulement manifesté sa vocation par
25
briqué pour leur usage par les hommes de ce temps
est
à tous points de vue le plus irrespirable à l’homme. 2° Les fondement
26
homme. 2° Les fondements idéologiques de ce monde
sont
morts ou n’en valent guère mieux, tant ils sont enrobés de crasse hyp
27
e sont morts ou n’en valent guère mieux, tant ils
sont
enrobés de crasse hypocrisie par la bureaucratie bourgeoise et milita
28
par accident des principes fondamentaux du régime
sont
en contradiction formelle avec les actes juridiques déduits par voie
29
rtin parce qu’il refuse de faire la guerre. (Ça n’
est
pas tout à fait des mêmes braves gens qu’il s’agit dans les deux cas,
30
it le pasteur Cooreman. C’était le Christ. Martin
est
coupable de l’avoir accepté. » Sur quoi le commissaire du gouvernemen
31
gouvernement croit pouvoir remarquer « que l’on n’
est
pas ici pour parler de théologie et de subtile philosophie ». André P
32
de la rue du Cherche-Midi présente cet avantage d’
être
une véritable « manifestation du régime ». Tout aveu de cet ordre con
33
seul se permit de répondre que toutes les guerres
sont
défensives. Quelqu’un me demandait, à la sortie : « Avez-vous jamais
34
Avez-vous jamais vu un soldat défensif ? Comment
est
-ce que c’est fait ? » 7° Certes, l’on peut tirer de ces débats une co
35
conclusion précise : la question du service civil
est
ouverte. Une carrière pour les réformistes ! Mais il faut rendre à Ma
36
eurer pacifiste. Dans un régime social où tout se
tient
, mais par la seule logique de la décomposition nécessaire de principe
37
rupture consommée. Tout homme qui agit, sa pensée
est
en rupture de bourgeoisie. Jacques Martin, dans sa prison, témoigne p
38
e. Kierkegaard (Journal). La volonté de rupture
est
l’origine même du christianisme ; c’est pourquoi l’apparition d’une v
39
ure la lutte le christianisme vainc : sa victoire
est
d’être éveillé. Tel est pour lui l’ordre, le commandement. Mais que l
40
lutte le christianisme vainc : sa victoire est d’
être
éveillé. Tel est pour lui l’ordre, le commandement. Mais que les chré
41
nisme vainc : sa victoire est d’être éveillé. Tel
est
pour lui l’ordre, le commandement. Mais que les chrétiens, fatigués d
42
ns, fatigués de la lutte, viennent à croire qu’il
est
une autre façon de vaincre, et que c’est de réduire l’adversaire à un
43
tout dit pour la rendormir, mais en vain : elle s’
est
fait mal, et la douleur tient réveillé. On a essayé de nous faire cro
44
mais en vain : elle s’est fait mal, et la douleur
tient
réveillé. On a essayé de nous faire croire que cet « ordre » social q
45
eux qui réellement gouvernent. (On sait ce qu’ils
sont
.) Il faut qu’un cri jaillisse : c’en est fait du christianisme de la
46
qu’ils sont.) Il faut qu’un cri jaillisse : c’en
est
fait du christianisme de la chrétienté ! Car ce cri est le témoignage
47
it du christianisme de la chrétienté ! Car ce cri
est
le témoignage d’un réveil. Et quand bien même il ne serait poussé que
48
témoignage d’un réveil. Et quand bien même il ne
serait
poussé que par quelques-uns, rien ni personne ne pourra faire qu’il n
49
é de rupture, ce témoignage qui chaque fois qu’il
est
porté, rétablit le christianisme et sa nouveauté menaçante. ⁂ Que la
50
pourra s’opérer qu’au lieu même où la collusion s’
est
faite. Or elle n’a pas pu se faire entre le christianisme et l’injust
51
istant que pour autant qu’il exclut l’autre. Ce n’
est
pas le christianisme qui a confondu sa cause avec celle de la bourgeo
52
Mais c’est un parti de gens qui, ayant peut-être
été
chrétiens, veulent en tirer des intérêts, abusent de ce qu’ils consid
53
ter un titre désormais irrecevable. Ce parti peut
être
aussi nombreux que l’on voudra, il peut représenter la grande majorit
54
ciel et le plus puissant de la chrétienté, — il n’
est
pas le christianisme, et ce n’est pas à lui de rompre avec l’injustic
55
étienté, — il n’est pas le christianisme, et ce n’
est
pas à lui de rompre avec l’injustice dont il s’est fait le soutien, e
56
st pas à lui de rompre avec l’injustice dont il s’
est
fait le soutien, et qui, depuis, assure son succès relatif. Une églis
57
uste du monde et s’appuyant sur lui, en réalité n’
est
plus l’Église et n’a plus le droit de parler ; elle n’est plus qu’une
58
l’Église et n’a plus le droit de parler ; elle n’
est
plus qu’une précieuse auxiliaire de la préfecture de police. Qu’on n’
59
s ne pourront qu’attester par là même qu’elles ne
sont
plus le christianisme, qu’elles sont incapables de rupture, qu’elles
60
qu’elles ne sont plus le christianisme, qu’elles
sont
incapables de rupture, qu’elles ont passé au camp de l’ennemi, et dep
61
ut à fait impossible, parce que la « chrétienté »
est
sécularisée, et qu’on ne peut demander à ce siècle de rompre avec lui
62
réclame encore au moment où elle le trahit. Telle
sera
donc la forme et tel sera le premier lieu de la rupture nécessaire :
63
ù elle le trahit. Telle sera donc la forme et tel
sera
le premier lieu de la rupture nécessaire : la dénonciation d’une impo
64
ore au nom du christianisme. ⁂ Le christianisme n’
est
pas une puissance à notre disposition, puissance que les hommes aurai
65
onstituées, existant en elles-mêmes, qui auraient
été
introduites dans le monde par Dieu, que nous aurions mal dirigées, co
66
ne manière imprévisible. La seule liberté qui lui
soit
accordée vis-à-vis de la foi, c’est de la refuser. Comment dès lors l
67
une tout autre force que celle de la foi. Ce peut
être
sur une éthique de puissance et de service ; ou sur une éthique de bo
68
ore. Toutes ces formules d’« ordre chrétien » ont
été
plus ou moins réalisées, et constituent dans leur ensemble, du Moyen
69
e sur son plan réel. Or, le lieu de sa décision n’
est
pas le lieu des décisions et des calculs humains ; il est à l’intérie
70
le lieu des décisions et des calculs humains ; il
est
à l’intérieur de la religion. Les églises qui se crurent en droit d’é
71
ion antichrétienne de la foi. La foi, pour elles,
est
une « force » que l’homme peut se procurer, apprivoiser, réglementer,
72
aurait, une fois pour toutes. Et cette possession
serait
en quelque sorte garantie par des institutions de plus en plus humain
73
u, et gratuit — « afin que nul ne se glorifie » —
est
une participation instantanée à l’éternel, elle juge et condamne ceux
74
hrétien, dans toute politique humaine organisée —
fût
-ce à la gloire de Dieu ! — qui poursuivrait son plan sans se soucier
75
ipiterai, dit l’Éternel… Car le jour de l’Éternel
est
proche pour toutes les nations. » (Abdias II, 3-4 et 15). Ils ont pré
76
ainsi : « Dans cette philosophie et cette morale
est
délibérément supprimée toute idée de liberté, toute idée de propriété
77
hrétienne, l’idée religieuse, l’idée même de Dieu
est
abolie… » Ne pouvant supporter l’idée que cette « idée » soit abolie,
78
» Ne pouvant supporter l’idée que cette « idée »
soit
abolie, le père de la Brière lance un vibrant appel aux écrivains : q
79
ens menteurs ! — et je lui répondrai : Ta révolte
est
la mienne, mon humaine révolte. Mais j’en ai une autre plus profonde
80
uffres ; mais j’ai encore plus à souffrir, car je
suis
encore plus sceptique que toi… Tu ne crois pas, dis-tu à ces docteurs
81
sais quelles régions spirituelles dont tout leur
être
— et cette maladie même ! — prouvent l’inexistence ou la disparition.
82
n leur répond qu’il y a prescription : l’Esprit n’
est
plus avec ceux qui ont intérêt à le défendre. L’Esprit n’est plus ave
83
ec ceux qui ont intérêt à le défendre. L’Esprit n’
est
plus avec ceux qui ont cru pouvoir l’utiliser. L’esprit n’est jamais
84
c ceux qui ont cru pouvoir l’utiliser. L’esprit n’
est
jamais avec ceux qui le défendent6, mais peut-être avec ceux qu’il ex
85
i, c’est faire en sorte simplement, qu’il cesse d’
être
« établi ». Qu’il ait pu l’être, la faute n’en est pas à lui, mais à
86
nt, qu’il cesse d’être « établi ». Qu’il ait pu l’
être
, la faute n’en est pas à lui, mais à la défection du christianisme ;
87
re « établi ». Qu’il ait pu l’être, la faute n’en
est
pas à lui, mais à la défection du christianisme ; à cette défection é
88
la seule force qui le dominait. « Car le péché n’
est
pas le dérèglement de la chair et du sang, mais le consentement de l’
89
déterminations de l’avenir. L’office de l’Église
est
en tout temps de dire au monde : Tu ne dois pas ! Mais c’est à la foi
90
s engager que moi-même, hic et nunc. La politique
est
affaire de systèmes ; mais l’ordre, pour le chrétien, sera toujours d
91
ire de systèmes ; mais l’ordre, pour le chrétien,
sera
toujours de vouloir sur le champ le plus juste. Car ce qui manifeste
92
foi, c’est le choix et non pas le système : il n’
est
de choix que personnel. Ainsi le rôle de l’Église doit-il rester de p
93
ne se confond pas avec l’enjeu de son salut. Tel
est
le paradoxe, qui remonte au cœur même du christianisme, si le christi
94
u cœur même du christianisme, si le christianisme
est
la foi au Christ « éternellement actuel ». Cette foi est inaliénable.
95
foi au Christ « éternellement actuel ». Cette foi
est
inaliénable. Elle ne constitue pas un ordre : elle donne des ordres,
96
ordre : elle donne des ordres, simplement. Elle n’
est
jamais entrée en collusion avec aucune durée, étant la rupture de tou
97
est jamais entrée en collusion avec aucune durée,
étant
la rupture de toute durée. Mais dès lors nous savons le véritable nom
98
christianisme, dans sa nouveauté prophétique, tel
est
l’Acte — le seul ! — et tel est aussi le mystère ; car cette seule Ru
99
prophétique, tel est l’Acte — le seul ! — et tel
est
aussi le mystère ; car cette seule Rupture effective surpasse absolum
100
pitaliste ou marxiste. Car la révolte du chrétien
est
immédiate, indubitable ; mais l’ordre chrétien, dont certains parlent
101
mais l’ordre chrétien, dont certains parlent, où
est
-il aujourd’hui ? Faudrait-il attendre qu’on l’ait trouvé ? 3. Figa
102
e idée fausse, par définition, le christianisme n’
étant
rien d’autre qu’un événement, un drame entre Dieu et l’homme. 6. Par
103
it ce que c’est que l’esprit, en ce siècle ! Il a
été
admirablement défini par la Sorbonne, entre autres. 7. Traité du dé
104
ants (mars 1933)e Si le christianisme primitif
est
une révolution — et la plus profonde de toute l’histoire —, le protes
105
e toute l’histoire —, le protestantisme se doit d’
être
révolutionnaire dans la mesure même où il reste fidèle à lui-même, c’
106
ait, dans certains pays, les églises protestantes
sont
devenues les officines d’un conformisme social et politique plus scan
107
ptio optimi pessima : le conformisme des révoltés
est
le pire. Il ne suit pas de là, contrairement à ce que prétendent cert
108
écrivains marxisants, que le bourgeois protestant
soit
actuellement le type même du capitaliste conservateur. En réalité, da
109
pour attaquer le régime. L’exemple de l’Allemagne
est
pour le moment le plus frappant, mais tout porte à croire que l’Améri
110
squ’au Neue Volk marxiste (Vitus Heller) nombreux
sont
les groupements politiques, résolus à la rupture, qui se réclament ha
111
priment dans les Neue Blätter für den Sozialismus
sont
des éléments protestants, et leur maître, Paul Tillich, exerce par ai
112
xée sans examen de « manœuvre réactionnaire », on
est
surpris de trouver dans le quotidien politique de combat ou dans les
113
e la seule doctrine véritablement révolutionnaire
est
celle qu’on doit tirer de la foi protestante. Il faudrait nommer enco
114
vains politiques. Si certaines de ses conclusions
sont
nettement étatistes, il n’en reste pas moins non conformiste par la f
115
marxisme. Il le rejette en définitive, mais ce n’
est
pas sans avoir reconnu que sa force persuasive vient de ce que seul,
116
d’ailleurs essentiellement chrétienne : « Quelle
est
votre attitude vis-à-vis de votre prochain ? Lui laissez-vous ce qui
117
n’ont rien en commun. » Il constate que l’Église
est
intervenue dans la vie quotidienne en promulguant des règles sur le d
118
dimanche, l’alcool et la moralité, mais qu’elle s’
est
arrêtée au moment où il semblait qu’elle dût s’occuper de la durée du
119
ophe, meneur de grèves, chef syndicaliste, Kagawa
est
l’un des personnages les plus influents du Japon, et l’on n’a pas oub
120
s travaillons tous ici. 9. Son autobiographie a
été
traduite en français sous le titre de Avant l’Aube (Éd. « Je sers »).
121
que, à la limite, de les priver de toute raison d’
être
efficace, — ainsi et parallèlement, de la corruption spirituelle des
122
èlement, de la corruption spirituelle des loisirs
est
née la présente corruption du travail. Notre siècle ne connaît plus n
123
» ou « Je produis », ou bien « Je chôme », et ce
sont
autant de ruptures et de séparations hargneuses, de constats d’injust
124
nées en 8 heures de travail et 8 heures de loisir
est
une dérision brutale des rythmes créateurs. Elle exprime simplement l
125
a production et la consommation. Cette division n’
est
pas humaine. Elle nous asservit. Je veux dire que nous en pâtissons d
126
dire que nous en pâtissons dans une mesure qui n’
est
pas celle de la condamnation portée sur notre race. On peut dire que
127
orsque l’homme renonce à créer, son « travail » n’
est
plus que souffrance. Il ne s’agit plus d’accoucher, mais seulement de
128
publicité et de plans quinquennaux. Leurs moyens
sont
plus simples, plus élégants. Ni plus ni moins efficaces d’ailleurs. ⁂
129
erté du risque, — perdre sa vie. Cette opposition
est
tellement radicale, tellement fondamentale, qu’elle nous interdit de
130
is à la liberté, au loisir plein. Si la liberté n’
est
pas à l’origine d’un système, elle ne s’introduira jamais dans ses ef
131
ans un monde où le libre divertissement de chacun
sera
la condition du libre abrutissement de tous par la propagande élector
132
si l’on convient que la mesure du travail ne peut
être
prise ailleurs que dans la capacité humaine d’utiliser les effets du
133
du « temps vuide » et c’est chômage. Tout le mal
est
venu d’une séparation, d’une disjonction. Ou plutôt, car les choses s
134
ion, d’une disjonction. Ou plutôt, car les choses
sont
toujours plus complexes que nos sommations, tout le mal moderne est s
135
complexes que nos sommations, tout le mal moderne
est
symbolisé par cette disjonction du travail et du loisir, dont il faut
136
sorte que le « temps vuide » de l’Encyclopédie n’
est
au vrai qu’un temps vidé, irréel renversement d’un temps rempli, d’un
137
r un monde impensable, le nôtre. Car si le loisir
est
simplement le contraire du travail, et son but ; si le labeur et le r
138
responsables, à penser dans le risque total de l’
être
, qui est l’acte. Nous penserons avec des mains créatrices. Nous diron
139
les, à penser dans le risque total de l’être, qui
est
l’acte. Nous penserons avec des mains créatrices. Nous dirons : le bu
140
créatrices. Nous dirons : le but du travail, ce n’
est
pas le loisir, mais la création. Et le but du loisir, ce n’est pas la
141
isir, mais la création. Et le but du loisir, ce n’
est
pas la jouissance, mais la création. Nous n’avons pas le goût du vide
142
ouveront leur commun sens : dans l’actualité de l’
être
, où ils ne seront plus que les temps alternés d’une plénitude joyeuse
143
mmun sens : dans l’actualité de l’être, où ils ne
seront
plus que les temps alternés d’une plénitude joyeusement renouvelée. L
144
ur créer un risque nouveau. Le temps de cet homme
est
plein, et nul n’y pourrait distinguer des heures « creuses » ou des e
145
r des heures « creuses » ou des efforts stériles.
Est
-ce un long loisir créateur ? Un long travail d’enfantement ? Cela ne
146
ntemple, il apprend, il calcule. Au terme qu’il s’
était
fixé, le voici devant son seigneur. « Ton tableau ? » — « Qu’on m’app
147
iquerai donc encore : 1° que si l’erreur initiale
fut
bien spirituelle, notre tâche constructive est d’abord d’ordre spirit
148
le fut bien spirituelle, notre tâche constructive
est
d’abord d’ordre spirituel. Qui dit précédence dit primauté. 2° que da
149
non toutefois l’organisation des loisirs, qui lui
sera
tôt ou tard conjointe. 3° que si l’on veut sauvegarder l’acte créateu
150
ure du travail créateur, l’émulation socialiste n’
est
rien d’autre qu’un nouvel opium. Ce bourrage de crâne réalisé sur une
151
r introduire un peu de joie dans une activité qui
est
la négation même de la création ; activité purement « nécessitée » pa
152
er, mes amis, sinon la négation d’un mal, et ce n’
est
pas encore le bien sauveur ! Voici notre erreur perpétuelle : nous pe
153
nous peignons notre état un peu plus noir qu’il n’
est
, afin d’éclairer par contraste un avenir qui devra son éclat moins à
154
t de nos décrépitudes. Si la préface à l’avenir n’
était
qu’anathème au présent, où serait notre création ? Et si l’ordre que
155
ace à l’avenir n’était qu’anathème au présent, où
serait
notre création ? Et si l’ordre que nous voulons n’était rien d’autre
156
notre création ? Et si l’ordre que nous voulons n’
était
rien d’autre que la subversion du désordre où nous sommes nés, d’où v
157
ien d’autre que la subversion du désordre où nous
sommes
nés, d’où viendrait donc l’ordre vivant ? On ne crée pas la vie en in
158
voir, nous le connaissons, dans la mesure où nous
sommes
humains. Mais cette mesure est peut-être assez faible. Et c’est pourq
159
mesure où nous sommes humains. Mais cette mesure
est
peut-être assez faible. Et c’est pourquoi nous avons tant de peine à
160
érature qui aime parler pour ne rien dire. Elle n’
est
occupée qu’à « bien » dire, — et c’est pourquoi elle parle mal. Or ce
161
amusants que les acteurs du jeu classique… Ils n’
étaient
que le non d’un non. Dirons-nous non à notre tour ? Que ce soit le no
162
n d’un non. Dirons-nous non à notre tour ? Que ce
soit
le non décisif de ceux qui savent ce qu’ils affirment ! Que ce soit u
163
f de ceux qui savent ce qu’ils affirment ! Que ce
soit
un non sans pathos, car l’affirmation seule est grave. C’est à l’homm
164
soit un non sans pathos, car l’affirmation seule
est
grave. C’est à l’homme qu’il faut dire oui, à l’homme total, à l’homm
165
ce qui juge l’art, — et le recrée. Nos griefs ne
sont
pas littéraires ; ils sont, ils veulent être humains. Fin d’une lit
166
recrée. Nos griefs ne sont pas littéraires ; ils
sont
, ils veulent être humains. Fin d’une littérature Je me propose d
167
s ne sont pas littéraires ; ils sont, ils veulent
être
humains. Fin d’une littérature Je me propose de simplifier. Dans
168
lifier. Dans la littérature bourgeoise, celle qui
est
née avec le romantisme, il me semble qu’on peut distinguer trois espè
169
qu’on n’atteint pas, pour l’avoir mis trop haut.
Soit
que l’on gruge légalement son prochain, soit que l’on se découvre lég
170
aut. Soit que l’on gruge légalement son prochain,
soit
que l’on se découvre légalement grugé, il est bon de sentir qu’au-des
171
n, soit que l’on se découvre légalement grugé, il
est
bon de sentir qu’au-dessus de cette vie plane une loi meilleure, un e
172
um des peuples incroyants. Notre troisième espèce
est
plus rare, et vaut un peu mieux, si l’on estime ses seuls moyens. Ell
173
de nouvelles. Quelques-uns, deux ou trois, qui ne
sont
pas littérateurs, qui seront la littérature quand tous les autres aur
174
deux ou trois, qui ne sont pas littérateurs, qui
seront
la littérature quand tous les autres auront passé. Mais la conscience
175
s ne vont pas jusqu’au bout de leurs audaces. Ils
sont
sans foi dans leur révolte même. Ils influencent au hasard, entraînen
176
épourvue de critère indépendant de la littérature
est
condamnée à ne plus critiquer que les moyens de cette littérature. El
177
lesse de la littérature actuelle, c’est qu’elle s’
est
rendue justiciable de la critique des marxistes. « L’art pour l’art »
178
i tient lieu de justification ; or cette doctrine
est
proprement bourgeoise ; conservatrice, en fait, des valeurs établies
179
des seules œuvres mineures, toute création réelle
étant
la position d’un acte indépendant des mécanismes de la société. Il no
180
re établi. Notre littérature déshumanise l’homme,
soit
qu’elle refuse de l’enseigner, soit qu’elle enseigne des valeurs hasa
181
nise l’homme, soit qu’elle refuse de l’enseigner,
soit
qu’elle enseigne des valeurs hasardeuses, ou périmées, ou anarchiques
182
deuses, ou périmées, ou anarchiques. Le moralisme
était
populaire, il est mort. L’immoralisme qui lui a succédé reste sans pr
183
ou anarchiques. Le moralisme était populaire, il
est
mort. L’immoralisme qui lui a succédé reste sans prise sur les masses
184
Les œuvres de l’esprit, dès que l’esprit cesse d’
être
autorité, tombent sous le coup des lois publicitaires. Et la publicit
185
se très capricieuse dans ses goûts, parce qu’elle
est
incertaine de sa mission. Cette anarchie ne se développera pas impuné
186
-à-dire sans message positif et populaire — n’ait
été
finalement utilisée par des puissances qu’elle avait négligées ou don
187
puissances qu’elle avait négligées ou dont elle s’
était
faite complice. Nous avons vu déjà que le roman bourgeois servait à t
188
sciste13. Que pourrait-elle lui opposer ? Où donc
est
la mesure de l’homme irréductible, au nom de quoi elle dirait non ? E
189
irait non ? Elle n’a pas de visée humaine, elle n’
est
plus que littérature, et les fameuses « valeurs » littéraires, on sai
190
ameuses « valeurs » littéraires, on sait qu’elles
sont
de peu de poids dans la balance politique. Tout ce qui n’est pas déjà
191
de poids dans la balance politique. Tout ce qui n’
est
pas déjà au service des hommes, est déjà au service de ce qui les opp
192
Tout ce qui n’est pas déjà au service des hommes,
est
déjà au service de ce qui les opprime. Notre individualisme travaille
193
Préface à l’imprévisible Une littérature n’
est
valable — et son influence efficace — que si elle ordonne ses œuvres
194
s à une commune mesure humaine. Mais notre siècle
est
justement le siècle de la décadence des lieux communs. L’Ordre, le Bi
195
ation, — les lieux communs de l’ère finissante ne
sont
plus que malentendus, et la seule convention qui subsiste, c’est de l
196
e plus en commun que des banalités. » Mais quelle
est
la nature de ces banalités ? L’aventure du romantisme et l’équivoque
197
ue de la puissance sans visage. Dire que le monde
est
devenu impensable, c’est avouer qu’il n’y a plus de mesure commune à
198
la monnaie. Un monde sans mesure, comme le nôtre,
est
aussi un monde sans grandeur. Telle est notre médiocrité. La seule me
199
le nôtre, est aussi un monde sans grandeur. Telle
est
notre médiocrité. La seule mesure extérieure qui subsiste est à nos y
200
diocrité. La seule mesure extérieure qui subsiste
est
à nos yeux la plus dégradante qui soit. Il faut donc renoncer à cherc
201
ui subsiste est à nos yeux la plus dégradante qui
soit
. Il faut donc renoncer à chercher dans les choses, dans les partis, d
202
t ou dans la nation un principe de grandeur qui n’
est
plus que dans l’homme. Mais si nous trouvons ce principe, nous aurons
203
trice, — c’est la personne. Que la mesure de tout
soit
désormais dans la personne, et non plus dans les intérêts d’un pouvoi
204
ourraient-ils voir d’autre, dans le monde où nous
sommes
, qu’un désordre impensable, appel aux dictateurs ? Mais ceux qui conn
205
i le propos de ces pages. La littérature nouvelle
sera
le fait de l’homme renouvelé, je ne dis pas de l’homme nouveau — je n
206
ose une liberté, ou plus exactement, créer, c’est
être
libre. Un art nouveau, c’est une liberté nouvelle. Mais c’est aussi u
207
inconditionnée à mon unique raison d’être14. Nous
sommes
ici très loin de la notion bourgeoise de liberté, qui est absence d’o
208
très loin de la notion bourgeoise de liberté, qui
est
absence d’obligations, de repères, de coordonnées. Très loin aussi de
209
ul fondement d’une communauté vivante. L’écrivain
sera
créateur dans la mesure où il obéira à sa seule vocation personnelle
210
ble de Rembrandt, des amas d’ombres grouillants d’
êtres
révélés et saisis par le droit flot de la lumière, les replis de la v
211
’humain ! Initiation au réalisme enfin total, qui
est
celui du combat personnel ; initiation à la vision constituante de no
212
’une part, et d’autre part avec les buts qui leur
sont
réellement assignés par leur raison d’être profonde. C’est un amer di
213
i leur sont réellement assignés par leur raison d’
être
profonde. C’est un amer divertissement que nous offre la vie quotidie
214
cependant ils suivent la coutume bourgeoise, qui
est
la négation de tous leurs idéaux. Certains verront peut-être dans l’U
215
l’idéal rêvé et du sordide quotidien. Mais Joyce
est
justement le plus parfait exemple d’un vice fondamental de la pensée
216
ger, avec le parti pris de n’en jamais avoir, qui
est
sans doute le pire des partis pris. La littérature romanesque décrit
217
tupidité, j’entends à l’absence de jugement. S’il
est
un genre que nos critiques sont unanimes à condamner sans nul recours
218
de jugement. S’il est un genre que nos critiques
sont
unanimes à condamner sans nul recours, c’est celui du roman à thèse.
219
rétexte à n’en point chercher de meilleures. Ce n’
est
pas l’échec de Bourget qui peut expliquer à lui seul un refus aussi o
220
préfère parler d’autre chose. Tous nos romans ne
sont
que diversions, idéalistes ou immoralistes, s’ils ne sont pas les des
221
diversions, idéalistes ou immoralistes, s’ils ne
sont
pas les descriptions désenchantées d’une société en voie de dissoluti
222
avant nous, d’une faim trop facile à tromper. Il
est
bon, il est nécessaire que la littérature enseigne le public. Encore
223
d’une faim trop facile à tromper. Il est bon, il
est
nécessaire que la littérature enseigne le public. Encore faut-il qu’e
224
spect de la culture, tout d’abord. Nos romanciers
sont
très mal cultivés. Ils influencent leurs lecteurs au hasard, aux hasa
225
ittérature nouvelle, couronnant un ordre nouveau,
sera
forcément plus soucieuse des échos qu’elle ébranle, mieux informée de
226
rmée des problèmes qu’elle incarne, parce qu’elle
tiendra
la mesure de l’humain et qu’elle créera dans la perspective commune.
227
dans un monde personnaliste. Les « idées pures »
sont
des cadavres d’idées ; les idées vivantes sont des actes. Apprenons à
228
» sont des cadavres d’idées ; les idées vivantes
sont
des actes. Apprenons à penser en actes, c’est-à-dire à penser avec le
229
à ne rien penser qui n’engage en puissance notre
être
tout entier, corps et âme sans distinction. Apprenons à penser comme
230
e nouveau dans les lettres si tous les essayistes
étaient
tenus à rendre un compte public des fins extrêmes qu’ils escomptent p
231
u dans les lettres si tous les essayistes étaient
tenus
à rendre un compte public des fins extrêmes qu’ils escomptent pour le
232
é de forme. Le raffinement des moyens artistiques
est
toujours un assez mauvais signe dans une société décadente. Il est po
233
ssez mauvais signe dans une société décadente. Il
est
poussé à la manie par les suiveurs des maîtres d’après-guerre. Les ma
234
opier les vices des meilleurs. Les plus primaires
sont
les moins spontanés. Partout, les artifices formels obscurcissent ou
235
expression leur importance de moyens. La personne
est
toujours originale quand elle est. Son seul souci est d’être, le plus
236
ns. La personne est toujours originale quand elle
est
. Son seul souci est d’être, le plus fidèlement. C’est à partir d’elle
237
toujours originale quand elle est. Son seul souci
est
d’être, le plus fidèlement. C’est à partir d’elle seule qu’un art ori
238
rs originale quand elle est. Son seul souci est d’
être
, le plus fidèlement. C’est à partir d’elle seule qu’un art original s
239
s de raison » rédigés sans littérature. Voilà qui
est
banal ? Je n’en suis pas fâché. Aucune révolution n’a jamais inventé
240
s sans littérature. Voilà qui est banal ? Je n’en
suis
pas fâché. Aucune révolution n’a jamais inventé de vertu réellement n
241
vertu réellement nouvelle. Mais toute révolution
est
d’abord un rappel à certaines vertus négligées. Une nouvelle insistan
242
re, l’entraîner loin de son train-train, etc. tel
est
le rôle que se propose de poursuivre (sic) cette collection. » 13. J
243
e renforcé. 14. Pour le chrétien, cette raison d’
être
singulière est la parole que Dieu lui adresse comme un ordre ; pour l
244
Pour le chrétien, cette raison d’être singulière
est
la parole que Dieu lui adresse comme un ordre ; pour l’incroyant, c’e
245
On ne devrait jamais lire les hebdomadaires. Ce
sont
des entreprises de démoralisation : 1° parce qu’ils satisfont à peu d
246
les bourgeois paresseux, vaguement inquiets de se
tenir
au courant de ce qu’ils croient être la chose littéraire ; 2° parce q
247
uiets de se tenir au courant de ce qu’ils croient
être
la chose littéraire ; 2° parce qu’ils incitent les écrivains de métie
248
t je vous laisse le soin de me classer, si vous y
tenez
. Pour être juste, si toutefois le sujet en vaut la peine, je concéder
249
isse le soin de me classer, si vous y tenez. Pour
être
juste, si toutefois le sujet en vaut la peine, je concéderai qu’il ar
250
de Jean Giono intitulée « La femme morte », qui n’
est
pas une nouvelle bien faite, mais qui est un peu mieux que cela, une
251
, qui n’est pas une nouvelle bien faite, mais qui
est
un peu mieux que cela, une présence, une plainte juste, une voix d’ho
252
: J’essayai de me sauver par l’esprit. Vous qui
êtes
Français, dites-moi pourquoi, dans tout votre trésor littéraire, vous
253
us vos livres disent non à la vie. C’est facile d’
être
négatif. Et je n’avais pas besoin qu’on m’y aide. Pourquoi n’avez-vou
254
à un trait juste, de la part du romancier, — s’il
est
voulu. Les mots, les expressions des philosophes sont sans cesse repr
255
voulu. Les mots, les expressions des philosophes
sont
sans cesse repris par les simples — et aussi par les autres, bien sûr
256
reconnaissance à payer à M. Johan Bojer, et s’il
était
là, je lui ferais ma belle révérence paysanne et je lui dirais : — As
257
, qu’on a pu lire ici le mois dernier. Ah ! nous
sommes
loin — (avec ces auteurs-là) — de ceux qui écrivent merde cent fois l
258
merde cent fois la ligne pour faire croire qu’ils
sont
forts. Je n’ai pas besoin que vous me désespériez. Je le suis assez m
259
Je n’ai pas besoin que vous me désespériez. Je le
suis
assez moi-même. — Aidez-moi… — Les uns, avec leurs livres, ont passé
260
emmes qui couchaient tellement ensemble qu’ils en
étaient
perpétuellement imbriqués comme les pièces d’un puzzle. Dès qu’on les
261
vous perdez votre temps, vous autres. Ah ! vous n’
êtes
pas aimés par les pauvres. Non. Vous me laissez désespérée et sans se
262
ours devant le féroce maraudeur rouge. — D’autres
sont
venus, qui ont relevé mon front de la poussière. Ils ont mis leur dou
263
on. Ils m’ont dit : — Fais voir tes yeux ! Ils se
sont
baissés jusqu’à moi. Ils se sont assis à côté de moi. Ils m’ont dit :
264
es yeux ! Ils se sont baissés jusqu’à moi. Ils se
sont
assis à côté de moi. Ils m’ont dit : — Fais voir où tu as mal, petite
265
part des autres, la plupart de nos contemporains,
est
-ce qu’ils ne disent pas plutôt. « Fichez-moi la paix ! Faites-moi rig
266
cun moyen rapide, je hèle une auto. Le conducteur
est
seul. Il me prend volontiers. Nous causons. C’est un commerçant de Ly
267
ez bavard. À certaines allusions, je devine qu’il
est
« seul dans la vie ». Pourtant, il porte une alliance. Pauvre gaieté
268
village. « Je vous dépose ici ? Où voulez-vous ?
Tenez
, on va s’arrêter devant la pissotière, ha ! ha ! ha ! Ça me rappelle
269
nom du type qui a écrit le bouquin. Ah ça alors !
Tenez
, c’est l’histoire d’une municipalité qui fait construire un des trucs
270
que ça amène, ah ! mais alors, vous savez, tout y
est
, c’est attrapé, le curé, la politique et tout15 !… » Les éditeurs s’e
271
qu’ils demandent, et pourquoi ils le demandent ?
Est
-ce que le rôle des éditeurs, mais surtout et d’abord des écrivains, n
272
iteurs, mais surtout et d’abord des écrivains, ne
serait
pas justement de savoir un peu mieux que « les gens » de quoi ils ont
273
ur tête. On les a pris pour ce qu’ils ont l’air d’
être
, ou mieux pour ce qu’ils croient devoir se donner l’air d’être ou de
274
x pour ce qu’ils croient devoir se donner l’air d’
être
ou de n’être pas. Comme si le fin du fin, c’était de prendre au mot l
275
ils croient devoir se donner l’air d’être ou de n’
être
pas. Comme si le fin du fin, c’était de prendre au mot les pauvres ho
276
gaire, avec son rire insupportable, et fallait-il
être
bien fin pour le comprendre ? 15. Je n’ai pas suivi le conseil de c
277
spirituelle. Toutefois, l’exposé qu’on va lire n’
est
pas un résumé des idées défendues par les deux groupes cités (et qui
278
dées défendues par les deux groupes cités (et qui
sont
absolument indépendants l’un de l’autre). Cet exposé traduit au contr
279
nous touchons de nos mains et voyons de nos yeux
soient
du tout plus concrets que l’acte qui consiste à les toucher et à les
280
ient à la connaissance qu’on nomme abstraite, qui
est
la connaissance des choses en tant qu’absentes. Mais c’est une autre
281
il faut que la rencontre d’un sujet avec un objet
soit
attestée par quelque modification sensible. Les objets matériels ne s
282
ue modification sensible. Les objets matériels ne
sont
vraiment objets que si la connaissance d’un homme les saisit. La conn
283
un homme les saisit. La connaissance d’un homme n’
est
réellement sujet que dans l’instant où elle rencontre une occasion de
284
l nous faut pourtant bien admettre que le concret
est
justement ce qui transcende nos définitions. Elles sont jugées par lu
285
ustement ce qui transcende nos définitions. Elles
sont
jugées par lui, et non point lui par elles. Et c’est de lui qu’elles
286
e. Sujet en tant qu’actif, objet en tant qu’agi,
sont
des concepts dont le seul contenu paraît au seul instant de leur prés
287
gissant chacun à leur manière ; car autrement, où
serait
l’événement ? La manière d’être de l’objet lorsqu’il est mis en prés
288
autrement, où serait l’événement ? La manière d’
être
de l’objet lorsqu’il est mis en présence du sujet n’est point passive
289
énement ? La manière d’être de l’objet lorsqu’il
est
mis en présence du sujet n’est point passive ; elle est de résister.
290
l’objet lorsqu’il est mis en présence du sujet n’
est
point passive ; elle est de résister. Mais l’objet ne peut, par lui-m
291
s en présence du sujet n’est point passive ; elle
est
de résister. Mais l’objet ne peut, par lui-même, provoquer aucune pré
292
t là le rôle du sujet, et sa nature. La manière d’
être
du sujet est essentiellement provocante. Il cherche partout un objet
293
u sujet, et sa nature. La manière d’être du sujet
est
essentiellement provocante. Il cherche partout un objet qui lui donne
294
casion de manifester son pouvoir. Et son angoisse
est
de n’en pas trouver ; sa joie, de provoquer le corps-à-corps avec l’o
295
evient objet que lorsque j’en fais mon objet. Tel
étant
le sujet, on peut voir qu’il n’est autre que l’homme. Seul, dans tout
296
n objet. Tel étant le sujet, on peut voir qu’il n’
est
autre que l’homme. Seul, dans tout l’univers connu, l’homme détient l
297
teur de la présence. 3. La présence de l’homme
est
un acte La joie de l’homme, ou sa douleur, tels sont les signes de
298
n acte La joie de l’homme, ou sa douleur, tels
sont
les signes de son existence concrète, cependant que l’angoisse est le
299
son existence concrète, cependant que l’angoisse
est
le signe de son absence au monde et à soi-même. Dire que l’homme est,
300
absence au monde et à soi-même. Dire que l’homme
est
, concrètement, c’est dire qu’il souffre et qu’il jubile, — qu’il agit
301
s de quoi ils parlent, l’homme dont ils parlent n’
est
pas un homme, mais une chose faible et petite dont ils ignorent la na
302
uent dans la précision. Les lois qu’ils imaginent
sont
celles de la mort, et d’abord de leur propre mort. Car l’essence de l
303
mort. Car l’essence de l’homme, en tant qu’homme,
est
à jamais incalculable, si l’homme est un événement, une rupture et un
304
t qu’homme, est à jamais incalculable, si l’homme
est
un événement, une rupture et une création, un fauteur de nouveauté pu
305
ème à résoudre à distance ; en un mot, si l’homme
est
un acte. 4. L’acte est insaisissable, parce qu’il est saisissant
306
; en un mot, si l’homme est un acte. 4. L’acte
est
insaisissable, parce qu’il est saisissant Toutes les psychologies
307
acte. 4. L’acte est insaisissable, parce qu’il
est
saisissant Toutes les psychologies échouent dans leur effort pour
308
gie passe à côté de la fin qu’elle s’assigne, qui
est
l’étude du comportement humain. Il n’est de science que du régulier,
309
gne, qui est l’étude du comportement humain. Il n’
est
de science que du régulier, c’est-à-dire de l’inhumain (à la limite),
310
nce de l’homme » qui se veut purement descriptive
est
exacte dans la mesure où elle décrit notre dégradation. L’erreur est
311
mesure où elle décrit notre dégradation. L’erreur
est
simplement de nommer homme cette dégradation, dont nul ne songe d’ail
312
des psychologues. L’apparition de la psychologie
est
à peu près contemporaine de celle de l’homme abstrait dans l’ordre po
313
’y aurait pas place pour la psychologie, car elle
est
liée à l’angoisse, c’est-à-dire à l’absence et au recul devant l’acte
314
ant l’acte. Dans l’homme entièrement humain, tout
serait
histoire, présence, illustration et non explication, incarnation et n
315
se l’homme comme un problème, et pour autant elle
est
bien obligée de prendre du recul par rapport à l’homme concret : mais
316
l par rapport à l’homme concret : mais alors il n’
est
plus concret ! Et c’est ainsi que l’existence du psychologue repose s
317
le de l’humain. Le droit usage de l’entendement n’
est
pas l’étude de l’homme, mais son éducation. Il n’est pas de décrire,
318
pas l’étude de l’homme, mais son éducation. Il n’
est
pas de décrire, mais d’inventer. L’acte étant sujet pur, il ne sera j
319
Il n’est pas de décrire, mais d’inventer. L’acte
étant
sujet pur, il ne sera jamais un objet de l’entendement. Et c’est pour
320
e, mais d’inventer. L’acte étant sujet pur, il ne
sera
jamais un objet de l’entendement. Et c’est pourquoi rien ne peut l’ex
321
ent saisissables pour l’entendement. 5. L’acte
est
la personne Puisqu’il est manifeste que l’acte est le perpétuel au
322
dement. 5. L’acte est la personne Puisqu’il
est
manifeste que l’acte est le perpétuel auteur de notre humanité, nous
323
la personne Puisqu’il est manifeste que l’acte
est
le perpétuel auteur de notre humanité, nous ne pouvons connaître cett
324
ître cette humanité, sinon dans la mesure où nous
sommes
agissants. L’acte seul témoigne de l’acte, et joue en nous le rôle de
325
age lisible. Sur la scène du monde, où nous avons
été
placés, dans ce drame qu’il nous faut jouer sans le connaître, c’est-
326
ts qui n’ont pas de visage ; mais ceux qu’on voit
sont
les acteurs qui jouent leur rôle d’hommes et qui créent leur destin :
327
’hommes et qui créent leur destin : ceux-là seuls
sont
les dramatis personae, ceux-là seuls sont présents, parce qu’ils repr
328
à seuls sont les dramatis personae, ceux-là seuls
sont
présents, parce qu’ils représentent. À la faveur de cette image, auto
329
rd que de l’individu à la personne, la différence
est
celle du figurant anonyme à l’acteur, de celui qui fait nombre à celu
330
s à la présence et à l’engagement : la personne n’
est
jamais seule, elle est essentiellement en communication. Le figurant
331
engagement : la personne n’est jamais seule, elle
est
essentiellement en communication. Le figurant peut bien ignorer ses v
332
’il leur répond, et la même raison qui fait qu’il
est
lui-même, fait aussi qu’il n’est plus un isolé, mais un prochain.
333
n qui fait qu’il est lui-même, fait aussi qu’il n’
est
plus un isolé, mais un prochain. 6. La personne est une vocation
334
lus un isolé, mais un prochain. 6. La personne
est
une vocation Qu’on n’oublie pas que la scène du drame, tout bien c
335
blie pas que la scène du drame, tout bien compté,
est
aussi vaste que le monde, et qu’il n’est pas de réduit si secret où l
336
compté, est aussi vaste que le monde, et qu’il n’
est
pas de réduit si secret où l’on se cache, qui ne soit justement l’un
337
pas de réduit si secret où l’on se cache, qui ne
soit
justement l’un des lieux où l’action générale avait dessein de nous p
338
us placer. Ainsi donc, encore que ce drame puisse
être
qualifié de jeu, et légèrement pris par toute espèce de sceptiques ou
339
espèce de sceptiques ou d’heureux ignorants, — il
est
le seul. Et l’on n’en peut sortir sans quitter, du même pas, la vie.
340
ter, du même pas, la vie. C’est pourquoi le drame
est
sérieux ; et notre vie n’est pas une farce, pour la simple raison qu’
341
st pourquoi le drame est sérieux ; et notre vie n’
est
pas une farce, pour la simple raison qu’elle est unique, et qu’on ne
342
’est pas une farce, pour la simple raison qu’elle
est
unique, et qu’on ne peut changer de rôle : on peut seulement refuser
343
i vient tout à coup l’assurance que ce qu’il fait
est
dans son rôle ? Pour quelle raison sort-il du chœur des anonymes rési
344
oint que la vraie définition d’un de ces termes n’
est
pas ailleurs que dans son assimilation existentielle à tous les autre
345
es autres. Mais ces concepts, un à un, ne peuvent
être
saisis dans le temps ni dans l’espace conçus par notre entendement, s
346
orce contre toute raison et causalité claire. Ils
sont
là en dépit de la forme du monde, et par eux seuls s’opèrent ces tran
347
t d’en prendre une mesure humaine. Toute présence
est
un éclair d’éternité qui rompt le temps pour initier un temps nouveau
348
témoigner, mais après coup, car les effets seuls
sont
visibles. Le temps nouveau qu’initie l’acte de présence, c’est le tem
349
mon acte. Admirable cercle vicieux ! Oui, rien n’
est
plus vicieux pour la raison que ce beau cercle indivisible, irréfutab
350
le jugement sceptique que la raison impersonnelle
est
incapable de ne pas porter sur le concret, juge en réalité la raison
351
nente crise et ses limites humiliantes. L’éternel
est
dans le présent, et non point dans l’intemporel, parce que l’éternel
352
l’éternel vient à nous, dans notre temps, où nous
sommes
, tout entier. L’éternité pour nous n’existe pas en dehors de l’appel
353
qui nous meut. Nous avons établi que la présence
est
le fait de l’homme sujet à l’instant qu’il rencontre son objet. L’hom
354
, c’est l’homme seul à l’instant qu’il cesse de l’
être
. Ainsi la voie du mystère est visible : l’éternel ne touche le temps
355
t qu’il cesse de l’être. Ainsi la voie du mystère
est
visible : l’éternel ne touche le temps que par l’individu en acte, et
356
qui devient à cet instant une personne. L’homme n’
est
un vrai sujet que parce qu’il est personnellement assujetti à l’impul
357
onne. L’homme n’est un vrai sujet que parce qu’il
est
personnellement assujetti à l’impulsion indescriptible que nous appel
358
iptible que nous appelons l’éternel. La personne
est
le témoignage d’une vocation reçue et obéie. Je suis personne dans la
359
t le témoignage d’une vocation reçue et obéie. Je
suis
personne dans la mesure où mon action relève de ma vocation, fût-ce a
360
ns la mesure où mon action relève de ma vocation,
fût
-ce au prix de la vie de mon individu. 7. Incarnation À la série
361
: c’est le terme d’incarnation. Si toute présence
est
l’événement de l’éternel dans le temps, par le moyen de l’homme, si l
362
s le temps, par le moyen de l’homme, si l’homme n’
est
vraiment homme que dans l’acte qui fonde sa qualité incomparable de s
363
le de sujet ; si l’on admet enfin que la personne
est
proprement la sujétion de l’homme à l’éternel et de l’objet à l’homme
364
e l’objet à l’homme, on peut dire que la personne
est
l’impensable incarnation de l’éternité dans le temps. La personne pur
365
ion de l’éternité dans le temps. La personne pure
serait
ainsi la coïncidence absolue et manifeste d’une vocation et d’un indi
366
maginons sans les saisir, et notre « individu » n’
est
certes pas le moindre. Dans l’espoir incertain de nous munir contre e
367
he à trouver leurs lois. Elle les trouve, mais ce
sont
alors les lois mêmes de notre absence, celles du monde abandonné et q
368
andonné et qui paraît déterminé de soi, puisqu’il
est
vu précisément comme n’étant pas assujetti à notre action. C’est pour
369
miné de soi, puisqu’il est vu précisément comme n’
étant
pas assujetti à notre action. C’est pourquoi la plupart de nos gestes
370
. C’est pourquoi la plupart de nos gestes, loin d’
être
ordonnateurs et créateurs, sont simplement déterminés par une mécaniq
371
os gestes, loin d’être ordonnateurs et créateurs,
sont
simplement déterminés par une mécanique impersonnelle. Ils ne sont pa
372
éterminés par une mécanique impersonnelle. Ils ne
sont
pas les actes d’un auteur, mais les contrecoups nécessaires d’un proc
373
ar d’autres, d’un procès anonyme étranger à notre
être
, et que nous baptisons fatalité, parce que nous sommes ses impuissant
374
e, et que nous baptisons fatalité, parce que nous
sommes
ses impuissants objets. Nous sommes très peu personnels. Nous sommes
375
rce que nous sommes ses impuissants objets. Nous
sommes
très peu personnels. Nous sommes aliénés au monde des objets. Nous so
376
ts objets. Nous sommes très peu personnels. Nous
sommes
aliénés au monde des objets. Nous sommes surtout les jouets humiliés
377
ls. Nous sommes aliénés au monde des objets. Nous
sommes
surtout les jouets humiliés de ce qui nie notre dignité d’hommes, de
378
dans l’Homme, l’humanité parfaite de Jésus-Christ
est
la limite atteinte de la personne dans l’histoire, le fait extrême, l
379
nature actuelle de la personne). La foi au Christ
est
proprement ce qui « personnifie » le solitaire, ce qui le rend concre
380
aux autres dans un même élan. Tout acte personnel
est
participation à l’actualité éternelle du Christ. 8. Communauté
381
ut ainsi que dans la Communion, Jésus-Christ nous
est
donné, dit Calvin, « comme substance et fondement de tout », nous avo
382
à connaître cette vérité de la personne : qu’elle
est
toute dans sa communication, laquelle doit être certifiée par quelque
383
le est toute dans sa communication, laquelle doit
être
certifiée par quelque signe matériel. L’idée d’une personne isolée ou
384
les autres que des rapports distants et virtuels
est
une contradiction in terminis. L’aspect communautaire de la personne
385
assez clairement de nos définitions, mais il peut
être
utile, pour fixer davantage les idées, de l’opposer ici à la notion d
386
opposer ici à la notion de l’individu. L’individu
est
le terme dernier de la division objective d’une société au sens des s
387
me aux yeux des physiciens du dernier siècle : il
est
l’élément insécable qui marque la limite de décomposition d’un corps
388
’un corps quelconque. Autrement dit, l’individu n’
est
conçu qu’à partir de l’ensemble du corps social, comme un élément num
389
que, puisqu’aussi bien la personne en elle-même n’
est
passible d’aucune description objective. Par rapport à l’ensemble hum
390
ive. Par rapport à l’ensemble humain, la personne
est
par excellence le terme premier, dont dépend toute réalité collective
391
re personnel, les relations les plus « valables »
sont
celles qui exigent de l’homme la plus constante proximité : l’œuvre,
392
ègle d’or de toute doctrine sociale et politique.
Est
-ce à dire que le bien de tous doive être mis au service du bien de ch
393
olitique. Est-ce à dire que le bien de tous doive
être
mis au service du bien de chacun ? Prenons garde de retomber ici dans
394
primer sur l’ensemble demeure indéfendable s’il n’
est
pas imposé par le fait humain primordial. Le droit divin n’est pas un
395
é par le fait humain primordial. Le droit divin n’
est
pas un droit humain élevé dans l’absolu, mais la fin de tout droit hu
396
ne position de fait. La voici : le bien de tous n’
est
ni concevable ni réalisable aux dépens du bien de chacun ; il n’est q
397
ni réalisable aux dépens du bien de chacun ; il n’
est
que l’expression, de plus en plus abstraite à mesure qu’on s’élève à
398
grands, du pouvoir prochain de la personne ; il n’
est
rien s’il n’est pas l’extension naturelle du risque et du concret de
399
ir prochain de la personne ; il n’est rien s’il n’
est
pas l’extension naturelle du risque et du concret de l’homme qui se d
400
se dépasse. Qu’importe l’honneur d’un pays, s’il
est
le fruit de la déshumanisation des citoyens ? Qu’importe une « assura
401
ne « assurance-vie », si la seule réalité vivante
est
dans le risque ? Qu’importe la multiplicité des relations, si elle en
402
mmes présents les uns aux autres ? La personne ne
sera
pas au terme d’une société parfaite, pour la simple raison qu’il n’y
403
nous appelons : personne, si nous savons qu’elle
est
la lumière de nos lumières, et le soleil que rien ne peut décrire, ma
404
r le monde et chasse nos fantômes, notre devoir n’
est
pas de revenir vers les ténèbres pour les persuader qu’elles ont tort
405
s ténèbres pour les persuader qu’elles ont tort d’
être
obscures, notre devoir est d’éclairer. À la lumière de la personne, o
406
r qu’elles ont tort d’être obscures, notre devoir
est
d’éclairer. À la lumière de la personne, on voit paraître la vérité d
407
fait qu’au niveau des objets, et que tout ce qui
est
doit pouvoir être vu, être touché, consister sous la main17 ; il a co
408
u des objets, et que tout ce qui est doit pouvoir
être
vu, être touché, consister sous la main17 ; il a compris que l’homme
409
ets, et que tout ce qui est doit pouvoir être vu,
être
touché, consister sous la main17 ; il a compris que l’homme n’est pas
410
ister sous la main17 ; il a compris que l’homme n’
est
pas un ange, qu’il est un corps jeté au milieu d’autres corps, et que
411
il a compris que l’homme n’est pas un ange, qu’il
est
un corps jeté au milieu d’autres corps, et que c’est un orgueil assez
412
retrouve l’un des pôles de sa tension. Peut-être
est
-il plus difficile d’être équitable envers le spiritualisme : c’est qu
413
de sa tension. Peut-être est-il plus difficile d’
être
équitable envers le spiritualisme : c’est qu’il nous a fait plus de m
414
a fait plus de mal, et que l’erreur matérialiste
est
bâtarde de ses excès. Ceci pourtant doit être dit en sa faveur : il a
415
iste est bâtarde de ses excès. Ceci pourtant doit
être
dit en sa faveur : il a compris le fait — sinon l’acte — de la libert
416
— de la liberté. Il a su reconnaître que l’homme
est
un sujet (au sens initiateur, et non pas ironique !) et qu’il dépend
417
as ironique !) et qu’il dépend de lui que l’objet
soit
ou non présent. Mais alors le malheur du spiritualisme fut de se repl
418
n présent. Mais alors le malheur du spiritualisme
fut
de se replier sur cette liberté pour la chérir dans sa précieuse inté
419
Il chante sa grandeur, mais n’en témoigne pas. Il
est
plus dangereux que le matérialisme : il ne nie pas grossièrement notr
420
il ne nie pas grossièrement notre puissance — ce
serait
une manière de la mieux provoquer — mais glorifiant le sujet pur comm
421
ce vieux débat, aucun espoir de solution réelle n’
est
plus permis18. Mais c’est ce plan que nous avons quitté en définissan
422
urent et se réalisent : la charité de la personne
est
d’ordonner ce corps-à-corps. 10. Le spirituel Descartes a détru
423
Du point de vue de la personne, le corps et l’âme
sont
deux aspects de l’homme concret, dont la nature réelle n’apparaît que
424
aît que dans l’acte. L’aspect corporel de l’homme
est
l’expression de notre solidarité avec le monde des objets ; l’aspect
425
rité avec le monde des objets ; l’aspect de l’âme
est
notre orientation, l’originalité essentielle de l’homme au sein du mo
426
conscience.) Mais ni le corps de l’homme ne peut
être
conçu comme réel sans l’insistance particulière qui le forme, le tien
427
l sans l’insistance particulière qui le forme, le
tient
debout et le dirige, ni l’âme n’est humainement imaginable hors de la
428
e forme, le tient debout et le dirige, ni l’âme n’
est
humainement imaginable hors de la consistance qui la révèle et l’effe
429
istance qui la révèle et l’effectue. Corps et âme
sont
un seul et même être ; ils naissent ensemble et meurent ensemble, ils
430
et l’effectue. Corps et âme sont un seul et même
être
; ils naissent ensemble et meurent ensemble, ils sont une seule et mê
431
; ils naissent ensemble et meurent ensemble, ils
sont
une seule et même « chair ». C’est une étrange erreur que de nommer «
432
vidu et sa pressante vocation. L’âme immortelle n’
est
rien que l’illusion d’un égoïsme qui se glorifie dans l’abstrait. Qu’
433
d’un égoïsme qui se glorifie dans l’abstrait. Qu’
est
-ce alors, parmi nous hommes de chair, que l’esprit ? Cet esprit qui s
434
sur les eaux primitives, et les lois de mon corps
sont
celles de la poussière ? — Rien, l’esprit n’est plus rien, et compren
435
sont celles de la poussière ? — Rien, l’esprit n’
est
plus rien, et comprendre n’est rien qu’envisager les modes de notre e
436
— Rien, l’esprit n’est plus rien, et comprendre n’
est
rien qu’envisager les modes de notre esclavage. — Jusqu’à cet acte, q
437
ordre, et ce pouvoir ordonnateur, irréfutablement
est
là, rendu visible. J’ai fait ce pas, je puis le mesurer — mais sa gra
438
je puis le mesurer — mais sa grandeur pourtant n’
est
pas un nombre. J’appelle esprit cette surprise pure de mon corps qui
439
de mon corps qui se voit conduit où rien en lui n’
était
nécessité d’aller. J’appelle esprit la plénitude de l’instant où dans
440
e peux, j’ai franchi l’impossible seuil. L’esprit
est
acte, l’acte est obéissance à la motion de l’éternel. J’ai peut-être
441
chi l’impossible seuil. L’esprit est acte, l’acte
est
obéissance à la motion de l’éternel. J’ai peut-être entendu quelque p
442
qu’un corps en mouvement. C’est parce que Dieu s’
est
révélé dans un corps d’homme que l’esprit, parmi nous, n’est rien — h
443
dans un corps d’homme que l’esprit, parmi nous, n’
est
rien — hors la démonstration charnelle et déchiffrable d’une action.
444
rnelle et déchiffrable d’une action. Jésus-Christ
est
le verbe incarné, la vocation toujours présente, la parole qu’on n’en
445
tant indescriptible et manifeste. Au commencement
était
le Verbe, et il demeure l’initiation fondamentale de toute histoire.
446
evient événement », que l’idée du concret cesse d’
être
une idée, que la personne existe et que l’acte transforme. Ce qui tém
447
n moi de l’indicible réception de la parole, ce n’
est
point une extase, ni une angoisse, ni toujours une plénitude de la jo
448
ours une plénitude de la joie, ni jamais rien qui
fût
à moi tel que j’étais, ni rien que j’aie, mais cet abandon un instant
449
e la joie, ni jamais rien qui fût à moi tel que j’
étais
, ni rien que j’aie, mais cet abandon un instant, cette mort cachée da
450
t calcul, un peu plus près de l’homme que je puis
être
pour les hommes — pour me jeter dans le fait accompli d’une évidente
451
ne évidente nouveauté. Maintenant quelque chose s’
est
passé, un risque est là, et ma vie est en lui. L’ai-je accepté ? Déjà
452
. Maintenant quelque chose s’est passé, un risque
est
là, et ma vie est en lui. L’ai-je accepté ? Déjà tout recommence. Car
453
ue chose s’est passé, un risque est là, et ma vie
est
en lui. L’ai-je accepté ? Déjà tout recommence. Car la durée n’ajoute
454
e n’en fais pas un second. Et pourtant mon espoir
est
gagé sur une promesse aussi certaine que ma mort et que la mort du te
455
nt. Ni la foi ne court sur son erre, ni l’homme n’
est
rien devant sa vocation, qu’un doute ; mais la fidélité de la personn
456
, qu’un doute ; mais la fidélité de la personne n’
est
pas vaine. Dans la très confuse partie que nous menons, ignorants de
457
enjeu admirable ! 16. Matthieu 7:21 : « Ce ne
sont
pas ceux qui me disent Seigneur ! Seigneur !… mais celui qui fait la
458
eux — qui agit sa vocation. 17. Ceci ne doit pas
être
entendu dans le sens restrictif de l’esse est percipi des idéalistes
459
as être entendu dans le sens restrictif de l’esse
est
percipi des idéalistes (on aura vu tout au contraire que l’esse n’exi
460
é seul rend inopérante ; la bonté, par exemple, n’
est
rien si elle n’est pas un acte de miséricorde. 18. Politique : l’Éta
461
nte ; la bonté, par exemple, n’est rien si elle n’
est
pas un acte de miséricorde. 18. Politique : l’État est l’expression
462
s un acte de miséricorde. 18. Politique : l’État
est
l’expression fatale de notre double erreur matérialiste-spiritualiste
463
e de l’âme. L’homme meurt totalement, parce qu’il
est
totalement « chair » ; et ce ne sont que des morts qui ressusciteront
464
, parce qu’il est totalement « chair » ; et ce ne
sont
que des morts qui ressusciteront, non pas des endormis ou des désinca
465
oint du jour (décembre 1934)j Le surréalisme s’
est
présenté comme révolution, et comme tel il a bénéficié pendant plusie
466
réalistes en les prenant pour ce qu’ils croyaient
être
: des novateurs, des créateurs, des révolutionnaires enfin. Le fâcheu
467
rs en une espèce de bavardage lyrique dont Breton
sera
, je crois, le tout premier à reconnaître qu’il sue le plus insupporta
468
face — ce courage que donne seule la foi — ils se
sont
mis à déclamer un désespoir décoratif, un désespoir postiche et styli
469
re, certes, mais on ne pouvait faire que cela. Ce
serait
un jeu que de les classer dans les catégories du désespoir analysées
470
s du désespoir analysées par Kierkegaard, si nous
étions
assez détachés d’eux pour ne plus sentir le tragique que ce faux dése
471
ndré Breton fournit de trop nombreux exemples. On
est
frappé d’abord par une certaine noblesse du port, par une certaine al
472
allure hautaine de la phrase. Mais que cet homme
est
empêtré par le scrupule de ce qu’il se doit ! Et qu’il est attentif à
473
ré par le scrupule de ce qu’il se doit ! Et qu’il
est
attentif à sa propre démarche ! « Il me paraît absolument nécessaire
474
Pour ma part, je me refuse… Je demande à ce qu’on
tienne
pour un crétin celui qui… » Je prends ces trois débuts de phrases dan
475
que, et qui vaut bien qu’on la prenne au sérieux,
fût
-ce après ce Schelling dont, par ailleurs, Breton dit tant de mal (Int
476
e la vie se fasse « toute seule », que l’homme ne
soit
plus rien qu’un spectateur de son angoisse muée en rêve ? Qu’on prenn
477
n tranchant lorsqu’on attaque, lorsqu’on crée, je
serais
le dernier à m’en plaindre. Mais il s’agit ici, tout simplement, de s
478
réduit et de quelques rythmes lyriques, son style
est
large, ses périodes font la roue. Mais il se débrouille mal avec des
479
e et s’alourdit dès qu’il aborde une matière tant
soit
peu résistante par elle-même, et dont il ne saurait avoir raison en q
480
Iront-ils au-delà du romantisme allemand — qu’on
est
heureux pourtant de les voir découvrir, comme l’étymologie de leur pe
481
u marxisme ; ils retombent à l’idéalisme. La voie
est
sans issue, plus que jamais. Mais alors, vont-ils reconnaître le séri
482
me forme l’unique sujet de cette méditation. Deux
êtres
très divers se sont unis dans une passion grave, exigeante, à l’écart
483
et de cette méditation. Deux êtres très divers se
sont
unis dans une passion grave, exigeante, à l’écart d’une société hosti
484
vers eux-mêmes, et l’un par l’autre, de ces deux
êtres
dont la vocation paraît inséparable de l’amour qui les domine. Une an
485
t nous pousser vers cette conclusion. Peut-être n’
est
-ce ici qu’un cri d’appel à rien : les modernes ont inventé cela. On p
486
rase ici, vraiment, réfléchit sous nos yeux. Ce n’
est
pas du récit. C’est une espèce de taraudage21. De temps en temps, il
487
corrosive, toujours tendue entre deux pôles de l’
être
, entre l’énergie exploratrice et le repliement amer. Enfin, un courag
488
-677. l. Le nom de l’auteur de l’ouvrage recensé
étant
mal orthographié (« Ronveyre »), on a corrigé sans signalisation.
489
oulillou, Nitro (février 1935)n Ce livre aussi
est
vrai. À peine moins autobiographique, semble-t-il, que celui du jeune
490
de travail dans l’industrie de la nitrocellulose
sont
précises, acharnées, saisissantes. Vous fermez le livre : vous avez v
491
ortions et ses « valeurs », dirait un peintre. Il
est
remarquable que presque tous les écrivains de ces années éprouvent si
492
demandent trois volumes… Mais Adolphe ou l’Idiot
seraient
aujourd’hui des « compte d’auteur ». n. Rougemont Denis de, « [Com
493
de pénétration du deuxième livre de Roger Breuil
est
Marcel Arland. Sans doute a-t-il reconnu dans ce roman (paru quelque
494
patience ingénieuse dans l’approche du secret des
êtres
, enfin cette qualité de discrétion qui semble ici encore imposée par
495
Breuil nous révèle une espèce de Français dont il
est
, sauf erreur, le premier à parler : une élite, une espèce d’aristocra
496
e, mais dans leur vie intime, leurs relations. On
serait
tenté de dire : dans leur personne. Je connais peu de livres moins co
497
et ouvriers plus ou moins « déclassés » comme le
sont
aujourd’hui presque tous ceux qui entrent dans la vie. Mais en parlan
498
exemple, un chapitre comme la Promenade au marais
est
une merveille de « naturel » dans tous les sens de ce terme ; je ne v
499
su faire vibrer un tel accord des paysages et des
êtres
— de ces vastes paysages maritimes des Charentes et de ces âmes et de
500
ies naïves et de jeunes ruses. On sent que Breuil
est
mêlé de très près à l’existence de ses personnages : et le « nous » q
501
u’il appartient de le reconnaître. Un tel livre n’
est
pas de ceux dont la carrière s’épuise en une saison, si j’en crois l’
502
quelles passions profondes le mouvement hitlérien
est
né et a pris son élan. C’est une admirable réussite littéraire, c’est
503
structeurs de l’armée bolivienne. (On sait que ce
fut
le sort de Röhm, entre autres.) Mêlés à des révolutions, disloqués, e
504
ent surtout que cette patrie pour laquelle ils se
sont
battus et qui n’a plus la force d’utiliser leurs énergies, est incapa
505
qui n’a plus la force d’utiliser leurs énergies,
est
incapable de les protéger à l’étranger, parce qu’elle a perdu son pre
506
rdu la guerre, Bell, et dans la situation où nous
sommes
, nous ne pouvons plus nous affirmer que par le sacrifice. » Sacrifice
507
leversée, broyée, souffrante, et pourtant fière d’
être
allemand, de garder la tête haute pour l’Allemagne et de participer a
508
ur l’Allemagne et de participer au destin qui lui
était
échu pour un temps. » Pour un temps… Il y a dans ces trois mots le se
509
ossède la jeunesse hitlérienne. Leurs épreuves ne
seraient
-elles pas comme le signe de leur élection ? Ne seront-ils pas la race
510
nt-elles pas comme le signe de leur élection ? Ne
seront
-ils pas la race de fer qui sauvera l’Europe menacée par tous les peup
511
tre le sens du sacrifice de « ces jeunes gens qui
sont
entrés dans le malheur la tête haute ». Car ce sont « les jeunes gens
512
nt entrés dans le malheur la tête haute ». Car ce
sont
« les jeunes gens qui ne possédaient rien qui ont écrit les pages hér
513
communauté qui puisse exister pour un peuple. » N’
est
-il point là le vrai tragique de l’Allemagne actuelle, que son destin
514
t de l’homme que sous l’aspect de la nation ? Tel
est
je crois le problème central qu’impose ce livre, et l’on admettra bie
515
it sur le point de vue raciste de l’auteur, qu’il
est
peu de problèmes plus graves pour notre avenir immédiat. Je n’ai rien
516
iption des douleurs physiques. Au total, Edschmid
est
plus fort. Attendrons-nous la prochaine guerre pour lire dans ce Dest
517
tre destin à tous ? L’ostracisme de nos critiques
est
d’ailleurs d’autant plus absurde que ce livre — écrit par un juif ! —
518
us absurde que ce livre — écrit par un juif ! — a
été
condamné en Allemagne. p. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Kas
519
ont il vaudra la peine de chercher l’origine, qui
est
peut-être celle, permanente, de l’erreur hégélo-marxiste. Tzara expli
520
Tzara explique p. 271 que « les formes de langage
sont
… symboliques et sont sujettes aux critiques que l’on est en droit de
521
que « les formes de langage sont… symboliques et
sont
sujettes aux critiques que l’on est en droit de formuler quant à la l
522
mboliques et sont sujettes aux critiques que l’on
est
en droit de formuler quant à la logique dont elles ont l’air de voulo
523
ans le même sens. Suivons-le. La syntaxe de Tzara
est
commandée par des associations verbales d’un type particulier, dont l
524
: un linguiste dirait que la formule de ce style
est
la contagion. Je mets ce phénomène en relation avec la théorie de la
525
on du premier terme d’une métaphore, selon Tzara,
est
« absorbée intégralement » par le second terme, « en vue d’une concil
526
figure selon Tzara « l’acte de connaissance, qui
est
quantité, et que nous désignons sous le nom de poésie ». On peut touj
527
ur la métaphore dans son Proust) que la métaphore
est
un acte, j’entends par acte, justement, la position d’une qualité inc
528
rmes aux noyaux irréductibles. Si l’un des termes
était
réellement « absorbé » par l’autre, le langage poétique ne serait plu
529
t « absorbé » par l’autre, le langage poétique ne
serait
plus qu’un vaste télescopage, et les livres de M. Tzara se réduiraien
530
e de la logique hégélienne vulgarisée. Le langage
est
précisément ce qui sépare, et non ce qui confond. C’est le verbe (qui
531
épare, et non ce qui confond. C’est le verbe (qui
est
acte) qui distingue et caractérise les choses et les êtres, dans le m
532
e) qui distingue et caractérise les choses et les
êtres
, dans le magma larvaire de la réalité non encore informée par la rais
533
mplexe de castration). La cause de cette angoisse
est
dans les refoulements qu’imposent la morale, l’Église, les exploiteur
534
ds pas cette déduction. La revendication de Tzara
est
exactement celle de l’hitlérisme sous ses formes les plus virulentes.
535
Tzara, si j’admets que le complexe de castration
est
la dominante de l’époque, je constate que ce complexe se manifeste ju
536
former le monde, cette démission de la personne23
est
en effet le signe d’une castration psychique caractérisée. Il est tro
537
signe d’une castration psychique caractérisée. Il
est
troublant de constater cette erreur capitale, et stérilisante pour l’
538
« sécurité » qu’elle trahit. Il veut que l’esprit
soit
un risque (p. 284 et suiv.). Nous le voulons aussi. Mais ce n’est pas
539
. 284 et suiv.). Nous le voulons aussi. Mais ce n’
est
pas là, n’est-ce pas, ce qu’on veut à Commune, revue officielle du PC
540
). Nous le voulons aussi. Mais ce n’est pas là, n’
est
-ce pas, ce qu’on veut à Commune, revue officielle du PC. Il veut que
541
ien que ces « barrages » et ce conformisme brutal
soient
en train de provoquer chez Tzara une prise de conscience toute nouvel
542
égage mieux. Quoique toute douleur morale puisse
être
ramenée à un système de coordonnées sociales, on a trop oublié dans l
543
sa libération qui en reste l’enjeu et le but ; il
serait
donc vain et dangereux qu’au lieu de combattre la société actuelle, t
544
« individu », pour des raisons sur lesquelles il
est
inutile de revenir une fois de plus dans Esprit. q. Rougemont Denis
545
à l’Exposition de 1937 L’Exposition de 1937 en
est
au stade des réalisations. Les idées fermentent. Les plans s’ordonnen
546
entations feront pâlir les rêves des conteurs. Ce
sera
, dans la féerie de l’eau des lumières et des couleurs, le ballet vert
547
des couleurs, le ballet vertigineux des ondes. Ce
sera
aussi la fête de l’esprit. Elle doit dépasser en splendeur les manife
548
splendeur les manifestations du même ordre dont s’
est
illuminé le passé. Mais nous entendons lui donner son caractère propr
549
lligence… C’est dire que l’esprit créateur y doit
être
à l’honneur. Voilà pourquoi la Commission de coopération intellectuel
550
la Pensée. Qu’on nous entende bien. La pensée ne
sera
absente nulle part. Mais il faut un endroit où les travailleurs désin
551
ion, jusqu’aux maîtres glorieux d’aujourd’hui, se
sont
déroulées les « chaînes » qui, des profondeurs de la nature ou des si
552
ences, à attacher les foules ? […] Ce Palais doit
être
construit en dur. Il doit survivre à l’Exposition. Pourvu, à côté des
553
tres pour les conférences et pour les congrès, il
sera
, pendant la durée de l’Exposition, le centre de ces « journées », de
554
société. C’est reconnaître enfin que ce rapport n’
est
plus perçu par un chacun comme évident ni comme allant de soi, mais q
555
u à la proposition qu’on vient de lire ne saurait
être
celle d’une société équilibrée. Où est l’esprit ? Quel est son champ
556
e saurait être celle d’une société équilibrée. Où
est
l’esprit ? Quel est son champ d’action ? Doit-il avoir un lieu partic
557
d’une société équilibrée. Où est l’esprit ? Quel
est
son champ d’action ? Doit-il avoir un lieu particulier ? De la répons
558
stence et l’emplacement du Palais de l’Esprit. Il
est
clair que de telles questions sont le fait d’une époque barbare ; d’u
559
de l’Esprit. Il est clair que de telles questions
sont
le fait d’une époque barbare ; d’une époque où l’esprit n’est plus un
560
d’une époque barbare ; d’une époque où l’esprit n’
est
plus un lieu commun, comme la richesse par exemple, dont on sait bien
561
a richesse par exemple, dont on sait bien qu’elle
est
partout chez elle et partout reconnue à des signes certains — et qui
562
at vient au secours d’une religion, c’est qu’elle
est
morte. Ou qu’elle n’en a plus pour longtemps. Lorsque l’État s’avise
563
a nation. « Qu’on nous entende bien. La pensée ne
sera
absente nulle part. Mais il faut un endroit etc. » Mais, il y a un ma
564
Mais, il y a un mais, justement. Certes, l’esprit
sera
partout : une espèce de décence le veut. Mais pratiquement, mais séri
565
e et sur le rôle de l’esprit qu’on dit créateur ?
Serait
-ce donc qu’on ne sait plus le voir dans ses effets ? Mais alors, comm
566
chait en vain parmi les métaphores du député. Il
est
juste, il est nécessaire de mettre l’esprit à sa place — s’écriait le
567
parmi les métaphores du député. Il est juste, il
est
nécessaire de mettre l’esprit à sa place — s’écriait le fameux romanc
568
— s’écriait le fameux romancier —, à sa place qui
est
la première, et de l’y mettre en pleine clarté. Cela dit, tout le mon
569
treprise [c’était là que j’avais buté] : l’esprit
est
à l’origine de tout ; l’exposition elle-même sera, dans toute son amp
570
est à l’origine de tout ; l’exposition elle-même
sera
, dans toute son ampleur, une manifestation sensible de l’esprit ; il
571
il n’en faut pas moins reconnaître que l’esprit n’
est
pas matière exposable : les ouvrages essentiels de l’esprit, précisém
572
essentiels de l’esprit, précisément parce qu’ils
sont
encore peu compromis dans l’univers temporel, ont, en général, une fa
573
ter, comment le hisser sur le pavois ? La réponse
est
simple. L’esprit s’exprime par l’écrit et la parole. Un sanctuaire de
574
r l’écrit et la parole. Un sanctuaire de l’esprit
sera
donc un sanctuaire du livre et de la parole. » Il y aurait donc une b
575
ait au surplus que son « sanctuaire du livre » ne
serait
pas un « musée » mais bien une « ruche active ». Précaution pour le m
576
t éviter à tout prix de prononcer le mot que nous
étions
en train de chercher pour définir notre impression : ce palais, ce «
577
ctive » où bourdonneraient les idées pures, ce ne
serait
jamais qu’un musée. Et créé par l’État, et contrôlé par lui, ce ne se
578
e. Et créé par l’État, et contrôlé par lui, ce ne
serait
jamais qu’un musée des lieux communs de la Troisième République. Non
579
composent la notion courante de l’esprit pur : ce
sont
ces lieux communs inoffensifs et soigneusement vidés de toute espèce
580
nore d’une façon moins directe. III. Le temple
est
vide On ne pouvait mieux se moquer de l’intelligence. Craignons to
581
ns toutefois que l’intention de nos auteurs n’ait
été
pure de toute espèce d’ironie. Le plus grave, sans doute, c’est qu’il
582
ue l’on nous offre d’une réalité — ici l’esprit —
sont
des arguments de misère contre cette réalité tant qu’elle dispense pa
583
pirituel. On dira qu’elles ne l’ont jamais su. Je
serais
prêt à l’accorder. Ce qui est nouveau, c’est qu’elles croient le savo
584
nt jamais su. Je serais prêt à l’accorder. Ce qui
est
nouveau, c’est qu’elles croient le savoir. C’est que la caricature of
585
l’horizon populaire26. Le succès d’une caricature
tient
à ce qu’elle est une simplification. Celle qu’on nous présente de l’e
586
26. Le succès d’une caricature tient à ce qu’elle
est
une simplification. Celle qu’on nous présente de l’esprit comble si b
587
tés ou commissaires, ils croient tous tant qu’ils
sont
que l’esprit est une espèce de luxe vénérable et volatil, une entité
588
s, ils croient tous tant qu’ils sont que l’esprit
est
une espèce de luxe vénérable et volatil, une entité qui plane au-dess
589
uel, et partant, d’autant plus respectable, qu’il
est
plus dégagé du réel, ou comme ils disent avec dégoût, « de ses applic
590
aissant entendre ainsi que la science et les arts
sont
enfermés dans ce dilemme : ou l’esprit pur — comprenez inactif — ou l
591
éel », pour le vénérer dans un temple, l’esprit n’
est
plus que « la poussière des livres », et le « réel », une marchandise
592
truit par l’État, la pensée s’évanouit, le temple
est
vide. Un Palais de l’Esprit ne peut être qu’un palais vide, ou un mus
593
le temple est vide. Un Palais de l’Esprit ne peut
être
qu’un palais vide, ou un musée. Et les objets qu’on y conservera, et
594
conservera, et les discours qu’on y « diffusera »
seront
aussi peu de l’esprit que nos commissaires sont de bons écrivains.
595
seront aussi peu de l’esprit que nos commissaires
sont
de bons écrivains. IV. Le spiritualisme consacre le préjugé utilit
596
proposer que « l’esprit », dans cette entreprise,
soit
mis à part, et honoré en soi. Un écrivain fameux, gloire du roman fra
597
de son côté que ce Palais de l’esprit pur ne peut
être
en réalité qu’un palais vide. Et ce vide que d’ailleurs il qualifie d
598
nsisté sur l’anecdote du Palais de l’Esprit, ce n’
est
point pour me ménager une partie par trop facile. C’est que la grossi
599
ar une sorte de chance, que l’article du député n’
est
pas seulement l’illustration de cette erreur, mais la confirmation to
600
a voulu, c’est que l’esprit « clair et distinct »
fût
séparé absolument du corps. Ce que Descartes a proposé, ce que l’Égli
601
— et nous y reviendrons plus tard tout à loisir,
soit
pour marquer les causes internes de son succès auprès des clercs, soi
602
causes internes de son succès auprès des clercs,
soit
pour rappeler au passage quels intérêts temporels concoururent à cett
603
l’affaire qui nous occupe ici, il me semble qu’il
est
suffisant de relever l’autorité que cette erreur confère au préjugé.
604
e au préjugé. En effet, le succès de l’erreur eût
été
forcément limité, si par malheur elle n’avait pas rejoint d’une maniè
605
doute ce préjugé contre l’esprit n’a pas toujours
été
si fort que nous le voyons aujourd’hui, quand tout un siècle d’enseig
606
ujourd’hui, quand tout un siècle d’enseignement s’
est
appliqué à le fixer et à l’étendre. Mais il demeure certain que l’ouv
607
ne tendance naturelle à estimer que la « pensée »
est
incapable, en fait, de les aider dans l’exercice quotidien de leur tr
608
r, d’ailleurs d’une façon vague, que les penseurs
sont
des gens peu pratiques, par suite, que la pensée n’est guère qu’un lu
609
es gens peu pratiques, par suite, que la pensée n’
est
guère qu’un luxe — « signe extérieur » de la richesse, ou d’une condi
610
, ou d’une condition sociale privilégiée — le pas
est
aisément franchi. Et Descartes n’y est pour rien. Il faudrait bien pl
611
e — le pas est aisément franchi. Et Descartes n’y
est
pour rien. Il faudrait bien plutôt s’en prendre au régime des classes
612
ultat nécessaire de la distinction cartésienne, n’
est
pas demeurée sans effet. Séparer soigneusement l’esprit du corps, et
613
ce qu’il faut au régime des requins. La preuve en
est
administrée chaque fois qu’un député ou un ministre, un directeur de
614
de l’esprit. En effet, l’esprit dont ils parlent
étant
précisément celui que l’on enfermera dans la « cité René Descartes »,
615
ter que dans l’affirmation d’un idéal : et rien n’
est
plus utile aux « réalistes » que la croyance commune à la valeur en s
616
r une situation de fait. Je répète que celle-ci n’
est
devenue possible qu’en vertu d’une certaine attitude des clercs. Ce n
617
n vertu d’une certaine attitude des clercs. Ce ne
sont
pas les bénéficiaires de cette situation, politiciens ou affairistes,
618
ose sur une maxime d’autant plus efficace qu’elle
est
inavouée et peut-être inconsciente : l’esprit est une pure descriptio
619
est inavouée et peut-être inconsciente : l’esprit
est
une pure description 32. On assure ainsi à bon compte la rigueur des
620
! — déterministe : or, le déterminisme se trouve
être
tout justement la doctrine la plus propre à nous aveugler sur la réal
621
on de la science, c’est-à-dire de la description,
est
tellement opposée au véritable esprit philosophique qu’elle conduit f
622
les seuls philosophes de ce temps — Nietzsche en
est
le fameux exemple — sous prétexte qu’ils ne répondent pas au signalem
623
nt du « technicien de la pensée34 ». Quand ils ne
sont
pas historiens, les « philosophes » de l’Université s’occupent de psy
624
able irréalisme de l’étude des « facultés » ayant
été
démasqué par la science dès le début du xxe siècle, on a cru sauver
625
me C. G. Jung35. Des remarques identiques peuvent
être
faites — elles ont été faites mille fois — au sujet de la sociologie
626
arques identiques peuvent être faites — elles ont
été
faites mille fois — au sujet de la sociologie ou de l’histoire de la
627
ment, plus il lui paraît évident que l’engagement
est
impossible. Et plus il se persuade que sa nature est essentiellement
628
impossible. Et plus il se persuade que sa nature
est
essentiellement « distinguée », essentiellement inactuelle. Avoir vu
629
. Avoir vu que les choses humaines, écrit Renan,
sont
un à peu près sans sérieux et sans précision, c’est un grand résultat
630
c’est une abdication de tout rôle actif. L’avenir
est
à ceux qui ne sont pas désabusés36. Entendez que l’avenir appartien
631
on de tout rôle actif. L’avenir est à ceux qui ne
sont
pas désabusés36. Entendez que l’avenir appartient pratiquement aux
632
u rôle actif de l’esprit, n’oublions pas qu’il la
tient
pour le gage du « désintéressement » des clercs parfaits. Mais c’est
633
sent la gloire, ou le pouvoir, ou la richesse qui
seraient
le prix de leur intervention : ce ne sont là que les rudiments de la
634
qui seraient le prix de leur intervention : ce ne
sont
là que les rudiments de la morale de leur état. Et personne n’a jamai
635
taire. Se montrer « désintéressé » pour lui, ce n’
est
pas tout bravement refuser de toucher le prix d’une noire trahison. S
636
il l’entend, c’est nier en principe que l’esprit
soit
responsable de ce qui se passe dans le monde. C’est affirmer que l’es
637
asse dans le monde. C’est affirmer que l’esprit n’
est
pas du monde, et que les intérêts du monde réel sont pour lui comme i
638
t pas du monde, et que les intérêts du monde réel
sont
pour lui comme inexistants. Ce qui revient d’une part à diviniser not
639
ns ! Pour sa part, il s’en lave les mains. Pilate
fut
le premier clerc parfait : le juge refusant de juger. On me dira que
640
fusant de juger. On me dira que ce gouverneur eût
été
dans son rôle en agissant, et qu’il trahissait sa fonction en allégua
641
ellectuel, comme tout autre homme, et parce qu’il
est
homme, simplement, est bel et bien engagé dans le monde. Supposer un
642
utre homme, et parce qu’il est homme, simplement,
est
bel et bien engagé dans le monde. Supposer un clerc pur, c’est encore
643
sprit dégagé de son corps, jamais un tel esprit n’
est
né dégagé de tous liens, irresponsable. Et s’il existe en apparence d
644
s, irresponsable. Et s’il existe en apparence des
êtres
qui méritent le nom de clercs parfaits, c’est qu’en réalité, ils ont
645
réalité, ils ont trahi leur fonction propre, qui
était
de juger, et de juger effectivement, dans le monde des corps et des s
646
vide. La dénonciation des clercs « intéressés » n’
est
valable que si elle concerne ces pharisiens, ces docteurs d’Israël qu
647
ava les mains en présence de la foule et dit : Je
suis
innocent du sang de ce juste. Cela vous regarde. » Ne vient-il pas d’
648
lime de l’esprit ? Ne vient-il pas de dire : « Qu’
est
-ce que la vérité ? » À vingt siècles de là, la voix « désabusée » d’u
649
lui donnera cette réplique fameuse : « La vérité
est
peut-être triste. » Réponse qui n’est encore qu’une question déguisée
650
« La vérité est peut-être triste. » Réponse qui n’
est
encore qu’une question déguisée. Le soupçon de Renan trahit un doute,
651
ahit un doute, et un doute sur la vérité : ce qui
est
« peut-être triste », insondablement triste, c’est que « peut-être »
652
existe pas. Et si la vérité n’existe pas, comment
serions
-nous donc fondés à juger, à risquer en son nom les réalités immédiate
653
: « Voici l’homme » ! Et que dit cet homme ? « Je
suis
né et je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité.
654
mme » ! Et que dit cet homme ? « Je suis né et je
suis
venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité. » Unanimité co
655
urquoi n’a-t-il pas dit seulement : Mon royaume n’
est
pas de ce monde ? Ce royaume n’eût gêné personne, tout semblable à ce
656
n Palais. Mais que vient-il faire parmi nous ? Qu’
est
-ce que la vérité ? demande encore Pilate. (Il lui tend encore cette p
657
cette perche !) Mais l’homme ne répond plus : il
est
la vérité, la réponse en chair et en os. Il faudrait se « boucher les
658
s. Il faudrait se « boucher les yeux… » Cet homme
est
l’Esprit incarné, l’Esprit qui s’est rendu mortel, car c’est ainsi qu
659
» Cet homme est l’Esprit incarné, l’Esprit qui s’
est
rendu mortel, car c’est ainsi qu’il peut changer le monde. Non pas en
660
s clercs, mais au contraire en s’abaissant. Telle
est
la parabole du spirituel. VII. Situation des intellectuels dans la
661
ir. Le royaume de l’esprit — notre Université — n’
est
pas de ce monde. C’est le royaume des lois « sérieuses et précises »
662
e l’impuissance de l’esprit. Mais les hommes, qui
sont
bien méchants, savent à merveille tirer parti contre l’esprit de la l
663
ns les règles de l’art qu’il a sucé. Si l’ouvrage
est
« sérieux et précis » selon les clercs, l’éditeur, le jugeant invenda
664
mais à condition qu’on en sorte : en se vendant,
soit
à l’État, soit aux journaux, soit au public, soit au fascisme ou à l’
665
on qu’on en sorte : en se vendant, soit à l’État,
soit
aux journaux, soit au public, soit au fascisme ou à l’antifascisme. À
666
en se vendant, soit à l’État, soit aux journaux,
soit
au public, soit au fascisme ou à l’antifascisme. À quoi s’ajoute depu
667
soit à l’État, soit aux journaux, soit au public,
soit
au fascisme ou à l’antifascisme. À quoi s’ajoute depuis peu une possi
668
briguer l’inspectorat de la Sûreté nationale. Il
serait
faux de dire qu’on paie l’esprit. C’est bien plutôt l’absence d’espri
669
touchent » les clercs pour leurs écrits se trouve
être
l’inverse exact de la valeur spirituelle de ces écrits. Ce n’est pas
670
xact de la valeur spirituelle de ces écrits. Ce n’
est
pas la création, c’est le rabâchage qui rapporte. Publiez un poème, u
671
e revue « de haute tenue intellectuelle » vous ne
serez
pas payé, ou vous serez payé dix francs, vingt ou trente francs la pa
672
intellectuelle » vous ne serez pas payé, ou vous
serez
payé dix francs, vingt ou trente francs la page au maximum. Publiez u
673
, et tenant compte de la frivolité du genre, vous
serez
payé 200 fr. la colonne. Et si vous descendez jusqu’au journal d’info
674
escendez jusqu’au journal d’information, les prix
seront
encore supérieurs, pour un « papier » bâclé en une demi-heure à l’aid
675
que l’Esprit pur et le Palais de l’Esprit pur ne
sont
jamais si lyriquement loués que dans la presse quotidienne… Quant à l
676
du chômage, je lui vois bien des agréments, s’il
est
vrai que la liberté de penser et d’écrire à sa guise, la pauvreté, le
677
on parvient assez vite à composer son équilibre,
sont
pour l’esprit autant de gains certains lui offrant une chance admirab
678
état me permet d’affirmer sans ironie qu’il n’en
est
pas de plus recommandable pour l’intellectuel soucieux d’agir par sa
679
e faite d’embêtements et de fécondes coïncidences
est
plus conforme aux rythmes de l’esprit créateur que le détachement méd
680
que par leur volonté d’indépendance — dès qu’ils
sont
en assez grand nombre pour constituer un parti, préparent les voies d
681
éché miséricorde, dit le peuple, mais le pardon n’
est
pas l’oubli, il est toujours un acte créateur en même temps qu’une cr
682
t le peuple, mais le pardon n’est pas l’oubli, il
est
toujours un acte créateur en même temps qu’une critique radicale. Je
683
ue nationaliste dont la culture du dernier siècle
est
responsable ; vu l’intérêt que présenterait pour l’humanité d’aujourd
684
nels ; — constate : que le problème de la culture
est
le problème central de notre temps, la culture étant responsable de c
685
st le problème central de notre temps, la culture
étant
responsable de concentrer, d’humaniser et de transmettre les doctrine
686
vendent ou se désintéressent ; que ce problème n’
est
plus jamais posé que par des penseurs sans audience et sans prestige
687
culture, de ses moyens et de son but final. b) qu’
est
-elle devenue en théorie et en pratique sous les divers régimes actuel
688
bases ? c) à quoi servent les clercs ? quel doit
être
leur rôle dans la cité ? à qui s’adressent leurs écrits ? d) quelle e
689
cité ? à qui s’adressent leurs écrits ? d) quelle
est
la source de leur autorité — si elle existe en fait ou en droit — et
690
lle existe en fait ou en droit — et quels doivent
être
ses moyens ? Les discussions seront introduites chaque matin par l’ex
691
t quels doivent être ses moyens ? Les discussions
seront
introduites chaque matin par l’exposé des principales tendances qui s
692
conduit à poser de vraies questions sérieuses. Il
est
donc irréalisable sous un patronage officiel. Exposer les dernières i
693
subversives, ces états généraux de la culture. Ne
serait
-ce pas inaugurer officiellement la révolution véritable ? Faudrait-il
694
tte initiative ?41 Laissons ce jeu. Les utopies
sont
nécessaires, mais il y a un temps pour les rêver et un temps pour les
695
liquer, un temps pour critiquer finement ce qui s’
est
fait, et un temps pour saisir à pleines mains les instruments de cons
696
leines mains les instruments de construction, qui
sont
aussi ceux des démolitions préparatoires. L’important, c’est de voir
697
s passionnées et simplistes du public ne puissent
être
un puissant rappel à la « réalité rugueuse » de ce monde. Mais ce rap
698
réalité rugueuse » de ce monde. Mais ce rappel n’
est
pas suffisant. Voir les faits n’est pas tout, il faut voir au-delà et
699
s ce rappel n’est pas suffisant. Voir les faits n’
est
pas tout, il faut voir au-delà et plus profond que ne peut voir la fo
700
r. Seuls les prophètes — et non les techniciens —
sont
en mesure de conduire l’action, si conduire c’est savoir où l’on va.
701
entendu de tous, il faut que le terme — la fin —
soit
proclamé par des prophètes. Non pas des hommes grandiloquents ou exci
702
ent responsables de ce qu’elles ont à donner, qui
est
à tous. 24. « Pour un Palais de l’Esprit », Nouvelles littéraires
703
populaires ». (L’Idée socialiste, p. 33). Le fait
est
incontestable, mais il faut l’interpréter : cette conception n’est pa
704
, mais il faut l’interpréter : cette conception n’
est
pas seulement spontanée dans le peuple — ce ne serait pas grave — ell
705
st pas seulement spontanée dans le peuple — ce ne
serait
pas grave — elle est inculquée au peuple par les clercs bourgeois, do
706
ée dans le peuple — ce ne serait pas grave — elle
est
inculquée au peuple par les clercs bourgeois, dont l’enseignement con
707
bliothèque. » C’est pourquoi « notre bibliothèque
sera
construite en dur ». — Déclaration fort équivoque. Pour quels ouvrage
708
ssables faudra-t-il réserver son bas de laine ? N’
est
-ce pas pour les plus périssables choses que nous dépensons notre arge
709
cher qu’une petite 5 chevaux. Quant au salut, il
est
gratuit. Et je ne pense pas que M. Duhamel compte acheter son « immor
710
: à la grande masse du peuple, à tous ceux qui ne
sont
pas intellectuels, et qui sont les premiers à souffrir de la carence
711
à tous ceux qui ne sont pas intellectuels, et qui
sont
les premiers à souffrir de la carence de l’esprit. 29. De ce mépris
712
informé. Or, la plupart de ceux qu’on nomme ainsi
sont
justement des théoriciens — ingénieurs ou économistes — et de l’espèc
713
que ces réflexions introduisent. 32. Voilà qui n’
est
pas dans l’esprit de Descartes, lequel défend dans de nombreuses décl
714
a pu que renforcer le préjugé matérialiste. On en
est
venu à concevoir l’action de l’esprit d’une manière purement médiate
715
e l’esprit d’une manière purement médiate : comme
étant
l’application des résultats du raisonnement à notre action. Sur le my
716
s dans la psychologie moderne. 33. Si le concret
est
« ce qui engage », ce qui est soumis aux sanctions de la loi, ce qui
717
33. Si le concret est « ce qui engage », ce qui
est
soumis aux sanctions de la loi, ce qui exige une décision prise par u
718
s philosophiques : la tâche du philosophe sincère
est
, de nos jours, suspendue par un fait, l’existence de la science. » Ce
719
ar un fait, l’existence de la science. » Cet aveu
est
de Rauh (Avant-propos des Études de morale). 35. Et sans doute d’abo
720
aël, t. III, p. 497. Le vieillard qui écrit cela,
est
-ce bien le même homme qui écrivait dans sa jeunesse : « La science ma
721
unesse : « La science maîtresse, le souverain… ce
sera
la philosophie, c’est-à-dire la science qui recherche le but et les c
722
nditions de la société. La révolution de l’avenir
sera
le triomphe de la morale sur la politique » (L’Avenir de la Science).
723
r lesquelles l’esprit ne peut rien. Comme si ce n’
était
pas justement cet « esprit » qui avait fabriqué ces « lois », dans l’
724
rendus au mythe du Progrès, plus qu’à eux-mêmes,
sont
au fond la meilleure protection pour leurs privilèges usurpés. 37.
725
difficile et l’essentiel pour un philosophe, ce n’
est
pas d’arriver le plus vite possible à la conclusion, mais au contrair
726
ucher les yeux »). Elle postule que le philosophe
est
dégagé de toute responsabilité. Qu’il pense dans le vide, hors de tou
727
ors de toute urgence. 38. Le cas de Ponce Pilate
est
en vérité exemplaire. Il résume une fois pour toutes les équivoques d
728
piritualisme. Pilate a dit le droit : « Cet homme
est
juste. » Ayant dit ses raisons, il a fait tout ce qu’un clerc doit fa
729
sabilité. S’il croyait sérieusement que cet homme
est
juste, il le relâcherait. Mais qu’est-ce que la justice ? Qu’est-ce q
730
e cet homme est juste, il le relâcherait. Mais qu’
est
-ce que la justice ? Qu’est-ce que la vérité ? Valent-elles qu’on leur
731
e relâcherait. Mais qu’est-ce que la justice ? Qu’
est
-ce que la vérité ? Valent-elles qu’on leur sacrifie sa situation de g
732
r sacrifie sa situation de gouverneur ? Ces Juifs
sont
en émeute : voilà le fait. J’ai dit ce que je pensais, voilà le droit
733
olérer sereinement l’exaction. 39. Cette échelle
est
aussi valable dans l’édition. Moins un livre comporte d’idées, de cré
734
public auprès de l’auteur, et non l’inverse, qui
serait
normal. Tout profit commercial se calcule de la sorte aux dépens de l
735
d’un parti, d’un dictateur ou d’un soviet. Cela n’
est
pas invraisemblable : abdiquer toute espèce de conscience est une ten
736
aisemblable : abdiquer toute espèce de conscience
est
une tentation fascinante pour l’homme qui a mauvaise conscience. P.-S
737
our l’homme qui a mauvaise conscience. P.-S. Ceci
fut
écrit en mai de cette année ; à ce moment j’ignorais tout du « congrè
738
culture », qui se préparait. Le rôle du public y
fut
d’ailleurs à peu près nul. r. Rougemont Denis de, « L’Esprit n’a p
739
lutte commence là ». « Anti-fascistes », nous le
sommes
tous ici, s’il s’agit de prendre parti, en France, contre un mouvemen
740
ns un pays qui a fait la Révolution de 89, et qui
est
déjà une nation. Mais condamner le « fascisme » allemand, et fonder s
741
gens à Paris, qui soutiennent que le fait-nation
est
une méchante farce inventée par la bourgeoisie, en guise de dernière
742
là des marges du Capital. Si du moins ils avaient
été
en Russie, il y aurait quelques chances de leur faire comprendre ce q
743
Pour autant que l’on peut comparer à quoi que ce
soit
de supposé connu des mouvements aussi totalement « étranges » et « pr
744
énéral », des dizaines de milliers attendaient. J’
étais
venu pour écouter aussi la foule. Je me trouvais au milieu d’ouvriers
745
e que si ma foi puissante dans le Peuple allemand
est
sans cesse renforcée par la foi et la confiance du Peuple en moi ! —
746
caricatures. Il ne s’agit pas d’hystérie : rien n’
est
plus discipliné que ces foules. Il ne s’agit pas d’un tribun déchaîné
747
s avec ironie, mais sans amertume ; et ses gestes
sont
souples, n’ont plus rien de la brutalité des années de combat, avant
748
ur et puissant esprit de la nation, que le Führer
est
venu incarner, lui le pur, le simple, l’ami et le libérateur invincib
749
ns, retournez aux catacombes ! Votre « religion »
est
vaincue, vos cérémonies modestes, vos petites assemblées, vos chants
750
tites assemblées, vos chants traînants, tout cela
sera
balayé. Il ne vous restera que la foi. La vraie lutte commence là.
751
man verstecken. Wo ? An der Oberfläche. (Ce qui
est
profond doit être caché. Où donc ? À la surface.) Hofmannsthal. 1
752
Wo ? An der Oberfläche. (Ce qui est profond doit
être
caché. Où donc ? À la surface.) Hofmannsthal. 1. Ramuz mythologue
753
. 1. Ramuz mythologue Toute méthode féconde
est
basée sur une intuition des faits qu’elle veut appréhender ; dans cet
754
qu’elle veut appréhender ; dans cette mesure, il
est
exact de dire qu’elle s’ordonne par avance à sa fin. On n’imagine pas
755
te personne ne comportent aucun système : mais il
est
si totalement exprimé qu’on ne peut plus le distinguer des formes qu’
756
inguer des formes qu’il propose à notre vue. Il s’
est
transformé en domaine. Il faut le lire comme un visage. Qu’est-ce qu’
757
é en domaine. Il faut le lire comme un visage. Qu’
est
-ce qu’un domaine, qu’est-ce qu’une propriété réelle, sinon l’extensio
758
lire comme un visage. Qu’est-ce qu’un domaine, qu’
est
-ce qu’une propriété réelle, sinon l’extension dans l’espace d’une loi
759
’aille pas chercher derrière les phénomènes : ils
sont
eux-mêmes enseignement », dit Goethe. Il n’y a rien à voir sous les a
760
s formes en même temps que notre œil. « La vérité
est
une pensée matérialisée, la vérité doit exister non seulement en nous
761
s un relief et un volume. Elle doit non seulement
être
vue, mais touchée, et puis embrassée, puis finalement soulevée, ayant
762
ement : « Si c’était vrai, ça se verrait. » Telle
est
la loi nouvelle et la réalité d’une ère dominée par ce fait historiqu
763
, ça se verrait »… Ainsi la clé de toute création
est
dans le visage de l’homme. Qu’un homme détienne un pouvoir créateur,
764
ur voir. Encore faut-il en croire ses yeux…) Il n’
est
d’art que physionomique. Il n’est d’esprit que dans l’action qui sais
765
ses yeux…) Il n’est d’art que physionomique. Il n’
est
d’esprit que dans l’action qui saisit une forme pour la transformer.
766
e. Ni dans le ciel. L’esprit n’a pas de siège. Il
est
passage, prise, saisissement. L’esprit se manifeste dans la main qui
767
tir des bois dans le rose du lever du jour et ils
sont
roses dans le ciel rose, avec des gouttes de rosée qui leur pendent à
768
ux44. Et l’on verrait alors que ces bonshommes ne
sont
point décrits « de l’extérieur » — comme le voudrait certaine formule
769
udrait certaine formule naturaliste — mais qu’ils
sont
décrits dans leur forme, ce qui n’est pas du tout la même chose. La f
770
ais qu’ils sont décrits dans leur forme, ce qui n’
est
pas du tout la même chose. La forme humaine, si l’homme est « authent
771
tout la même chose. La forme humaine, si l’homme
est
« authentique », est microcosme d’un pays, d’un paysage et d’un ensem
772
La forme humaine, si l’homme est « authentique »,
est
microcosme d’un pays, d’un paysage et d’un ensemble de coutumes. Les
773
. » C’est comme lui quand il écrit. Car sa vision
est
harmonie avec ces formes, et son langage avec les rythmes qu’elles tr
774
lles traduisent. ⁂ Une forme, une image vivante :
est
-ce extérieur ou intérieur ? L’artiste répondra : ni l’un ni l’autre.
775
’artiste répondra : ni l’un ni l’autre. Car il se
tient
, avec son imagination, dans cette région qui n’est ni du dedans ni du
776
nt, avec son imagination, dans cette région qui n’
est
ni du dedans ni du dehors, qui est contact, et littéralement drame en
777
e région qui n’est ni du dedans ni du dehors, qui
est
contact, et littéralement drame entre la vision et l’objet, entre la
778
ngible, le matériel lisible et significatif. Nous
sommes
ici au lieu de l’incarnation des images — ou de la création imaginée.
779
ret chez un homme.) ⁂ « Car le phénomène de l’art
est
un phénomène d’incarnation (ce que l’école ne comprend pas). » Toute
780
çais de la tradition des classiques, comme ils le
sont
tous plus ou moins, paraît toujours s’excuser de l’emploi qu’il fait,
781
les duperies qu’ils couvrent. Les mots abstraits
sont
nécessaires à une certaine circulation d’idées qui « représentent » l
782
billets représentent l’or de la réserve. Le mot n’
est
rien qu’un droit aux choses. Mais s’il n’y a plus de choses, c’est un
783
vérité. Contre cette inflation nominaliste, il n’
est
pas de défense plus sûre que le recours à l’étymologie. Car le sens é
784
recours à l’étymologie. Car le sens étymologique
est
toujours lié à une chose (ou à une action sur les choses). Utiliser l
785
à cet état naissant dont la chimie nous dit qu’il
est
l’état de virulence extrême des corps. Les journalistes ont décontena
786
’assises occupée à juger des meurtres dont le vol
est
le mobile. Je dis qu’il ferait un meilleur travail éducatif. Car il p
787
l’argent et les bienfaits qui en découlent.) Si j’
étais
dictateur, je nommerais Ramuz président de ce tribunal. Et nous aurio
788
ait dans les salons, au temps où le seul tribunal
était
celui du goût (c’est-à-dire des poncifs imposés par la cour de Louis
789
ntérieur d’une même phrase. Je ne crois pas qu’il
soit
possible de les ramener à une loi, ni même à un usage régulier ; ou p
790
llèle d’attitudes et de faits visibles ; l’accent
étant
porté sur la causalité, et les faits se réduisant peu à peu au rôle d
791
rieuse et schématique reconstruction des âmes. Il
est
entendu désormais qu’un auteur qui n’utilise que des faits se range d
792
n’y a rien à chercher sous la forme, qui ne peut
être
interprétée que par ses relations organiques à d’autres formes. Et c’
793
ci plus de concepts, plus d’idées générales. Tout
est
images et complexes d’images. Tout est mythes 45. ⁂ Ainsi la mytholog
794
ales. Tout est images et complexes d’images. Tout
est
mythes 45. ⁂ Ainsi la mythologie, chez Ramuz, déloge l’analyse abstra
795
certaine littérature d’intrigues pour laquelle il
est
clair que Ramuz n’est pas doué. La forme même que revêt chez Ramuz la
796
’intrigues pour laquelle il est clair que Ramuz n’
est
pas doué. La forme même que revêt chez Ramuz la faculté d’imaginer et
797
n, devait le conduire à créer un milieu où tout «
être
» se traduisît immédiatement par un « paraître » ; en sorte qu’on pût
798
d’un peuple en communion avec les éléments. Ce n’
est
point là un art « d’après le peuple », mais on dirait plus justement
799
e celle du pays de Vaud : non pas la grecque, qui
est
scolaire — pour eux — mais la biblique, qui est vivante.) Ainsi tous
800
i est scolaire — pour eux — mais la biblique, qui
est
vivante.) Ainsi tous parlent un même langage, qu’ils l’inscrivent sur
801
les événements actuels — cela se passe un jour d’
été
de 1918 — sont expliqués à la lumière des Écritures. La Fin des temps
802
s actuels — cela se passe un jour d’été de 1918 —
sont
expliqués à la lumière des Écritures. La Fin des temps est proche, il
803
qués à la lumière des Écritures. La Fin des temps
est
proche, il faut en témoigner. Caille pénètre dans les cours de ferme,
804
ge s’amasse. Vers le soir il éclate tragiquement.
Est
-ce la Fin ? Grande heure de terreur et de prière… Puis, « la page du
805
e terreur et de prière… Puis, « la page du ciel a
été
tournée », ils se relèvent : « Il paraît bien qu’on n’est pas morts !
806
née », ils se relèvent : « Il paraît bien qu’on n’
est
pas morts ! » Le monde renaît dans une soirée pure et le baiser d’un
807
ante monotonie. Un art dont la mesure ne doit pas
être
cherchée dans le pittoresque, ni dans l’ingéniosité, ni dans l’harmon
808
s du récit, surimpressions, changements de temps,
sont
ici largement mis en œuvre ; mais avec une probité particulière. La s
809
bité particulière. La surimpression par exemple n’
est
jamais pour Ramuz un moyen de créer du mystère en brouillant les plan
810
au sérieux l’intrigue d’un roman bourgeois. On s’
est
trop arrêté à l’insolite du style chez Ramuz. Ce qu’il a d’insolite,
811
du style chez Ramuz. Ce qu’il a d’insolite, ce n’
est
pas tant sa forme que les vertus qu’elle suppose : la sobriété, la so
812
ai dire que là où leur personne prend fin. Elle n’
est
pas dans le contact aussi direct que possible avec l’objet ; elle est
813
act aussi direct que possible avec l’objet ; elle
est
dans la suppression de tout contact avec l’objet. » Ainsi parle Ramuz
814
mirablement pris, d’un portrait de Ramuz, dont il
est
bien facile de tirer une épreuve positive : « Sa poésie commence avec
815
fin là où commence, pour lui, l’impersonnel. Elle
est
dans le contact aussi direct que possible avec l’objet ; elle est dan
816
act aussi direct que possible avec l’objet ; elle
est
dans la volonté, dans l’amour, dans la création du contact avec l’obj
817
différence capitale que chez Goethe le contact n’
est
jamais « aussi direct que possible ». Goethe sait mal le grec, et con
818
ces… Ramuz commence là où tous les intermédiaires
sont
supprimés. Goethe cherche une économie des moyens, qui permette d’all
819
faut pas oublier que la culture de notre temps n’
est
plus du tout ce qu’elle était au temps de Goethe. Plus encore que sa
820
ture de notre temps n’est plus du tout ce qu’elle
était
au temps de Goethe. Plus encore que sa valeur, c’est sa fin qui est c
821
ethe. Plus encore que sa valeur, c’est sa fin qui
est
contestable, dès lors que cette fin n’est plus la plénitude de l’huma
822
fin qui est contestable, dès lors que cette fin n’
est
plus la plénitude de l’humain. Il se peut que l’effort réactionnaire
823
tionnaire de Ramuz, dans les contingences où nous
sommes
, soit, plus qu’il n’y paraît, conforme à l’éducation goethéenne. Il s
824
e de Ramuz, dans les contingences où nous sommes,
soit
, plus qu’il n’y paraît, conforme à l’éducation goethéenne. Il se peut
825
couvrir que le « gazouillis » des oiseaux pouvait
être
et était souvent le plus brutal des tintamarres, fait « d’un bruit de
826
que le « gazouillis » des oiseaux pouvait être et
était
souvent le plus brutal des tintamarres, fait « d’un bruit de vitres c
827
coups de pioche ou de marteau ». Les glaciers ne
sont
pas « sublimes » comme on chante dans les écoles suisses. Et il est f
828
» comme on chante dans les écoles suisses. Et il
est
faux de « chanter » la montagne : les montagnards l’appellent « le ma
829
n réaction contre l’académisme. Si puissantes que
soient
les conventions dans un pays, elles ne peuvent pas nourrir une réacti
830
uvent pas nourrir une réaction créatrice. Et ce n’
est
point en haine de la facilité qu’un homme recherchera jamais l’effort
831
e proprette, leur idéal du bon écolier type, ce n’
est
jamais au nom d’un naturisme romantique48. C’est parce que toutes ces
832
ort même, pour lui, garantit la réalité. L’effort
est
le concret de l’homme49. Saisir les choses et les êtres, tels qu’ils
833
le concret de l’homme49. Saisir les choses et les
êtres
, tels qu’ils sont et tels qu’ils se montrent, dégradés, désunis, info
834
me49. Saisir les choses et les êtres, tels qu’ils
sont
et tels qu’ils se montrent, dégradés, désunis, informes ; et par l’ef
835
fort d’une imagination qui retrouve leur raison d’
être
, les pousser jusqu’à l’expression de leur nature primitive, produire
836
n de sa personne en exercice. « Je ne distingue l’
être
qu’aux racines de l’élémentaire. » Parce que le critère du réel, c’es
837
brute exige le plus dur effort, parce que l’homme
est
le plus humain là où les choses et les êtres attendent tout de son po
838
’homme est le plus humain là où les choses et les
êtres
attendent tout de son pouvoir restaurateur : leur nom, leur nombre et
839
ue le sens de tout acte humain, pour autant qu’il
est
créateur, c’est le retour au Paradis perdu. ⁂ Il faut citer ici une
840
e importance extrême, non seulement parce qu’elle
est
la plus clairvoyante que Ramuz ait écrite sur son art, mais aussi par
841
eu près seule dans son œuvre, une perspective qui
est
, je crois, celle de la plénitude de cette œuvre. Par-delà tous les p
842
Père et une Mère, où la grande parenté des hommes
est
entr’aperçue pour un instant. Car c’est à la ré-apercevoir pour un in
843
i de suite à l’infini, de sorte que pour finir on
est
chacun tout seul sur son petit bout de sentier. Et il y a aussi cette
844
a aussi cette malédiction, où on sent bien qu’on
est
(car rien autour de nous n’est vraiment éclos, vraiment abouti ; aucu
845
on sent bien qu’on est (car rien autour de nous n’
est
vraiment éclos, vraiment abouti ; aucune musique n’est parfaite, aucu
846
raiment éclos, vraiment abouti ; aucune musique n’
est
parfaite, aucun livre n’est parfait, aucun tableau n’est parfait ; et
847
ti ; aucune musique n’est parfaite, aucun livre n’
est
parfait, aucun tableau n’est parfait ; et tout travail d’abord est du
848
faite, aucun livre n’est parfait, aucun tableau n’
est
parfait ; et tout travail d’abord est dur, tout travail difficile, to
849
n tableau n’est parfait ; et tout travail d’abord
est
dur, tout travail difficile, tout travail, toute espèce de travail se
850
ntre nous-mêmes et contre Quelqu’un, tout travail
est
malédiction), jusqu’à ce que tout à coup, par une espèce de renversem
851
(c’est Une Main) je lis ceci : « Certains hommes
tiennent
pour un gain tout ce qui leur apporte une facilité ; moi, je ne tiens
852
out ce qui leur apporte une facilité ; moi, je ne
tiens
pour un gain que ce qui m’apporte un exemple. » Comment, ici encore,
853
une cheminée qui tire mal. J’aime les choses qui
sont
à leur façon, tandis que je suis à la mienne. » ⁂ Je vois, j’ai tenté
854
e les choses qui sont à leur façon, tandis que je
suis
à la mienne. » ⁂ Je vois, j’ai tenté de faire voir comment Ramuz exis
855
Ramuz existe à sa façon. Je vois que son pouvoir
est
sa présence active au monde (« Toute résistance, dit-il, nous oblige
856
monde (« Toute résistance, dit-il, nous oblige à
être
présent »). Je vois ce grand exemple d’une volonté tendue vers l’orig
857
la coutume d’un peuple, et l’authentique raison d’
être
, l’identité d’une personne en communion, je vois, j’apprends, j’enten
858
vois, j’apprends, j’entends la voix d’un homme. N’
est
-ce pas assez ? Cette voix n’est-elle pas émouvante ? — Oui, c’est bea
859
oix d’un homme. N’est-ce pas assez ? Cette voix n’
est
-elle pas émouvante ? — Oui, c’est beaucoup, la voix d’un homme. C’est
860
s origines et ses fins. Voici le temps où l’homme
est
attaqué par des puissances qui veulent son abdication totale, — ou sa
861
enant il y va de notre tout. La question dernière
est
posée : celle de notre destination. Le silence perd alors son pouvoir
862
re chose que de nous. « Tout notre embrassement n’
est
qu’une question51 ». Mais une question ne peut être sérieuse que si l
863
st qu’une question51 ». Mais une question ne peut
être
sérieuse que si l’on sait que la réponse existe… Il fallait nous appr
864
cet embrassement, cette saisie des choses et des
êtres
, cette présence au monde et à soi-même, — l’originalité de l’homme «
865
squ’au terme. Le fondement dernier de la personne
est
témoignage. Témoigner, c’est peut-être risquer en dépit de tout et de
866
détournant l’attention de l’acte — car tout acte
est
particulier — pour la porter sur l’intention qui relève du général. A
867
tention qui relève du général. Ainsi le moralisme
fut
une doctrine abstraite du concret. Mais ses racines plongent dans la
868
ce que l’on fait se voit. L’acte le plus secret,
fût
-il même un silence, laisse une trace au visage de l’homme, modifie sa
869
’homme, modifie sa forme existante. « La figure a
été
faite sur la vérité, et la vérité a été reconnue sur la figure » (Pas
870
figure a été faite sur la vérité, et la vérité a
été
reconnue sur la figure » (Pascal, cité par Ramuz). 44. Comme Ramuz l
871
44. Comme Ramuz l’a fait dans Six Cahiers. 45.
Est
-il nécessaire d’indiquer que rien n’est plus réel qu’un mythe ? Il a
872
ers. 45. Est-il nécessaire d’indiquer que rien n’
est
plus réel qu’un mythe ? Il a fallu les ténèbres du xixe siècle pour
873
l’on prît ce mot pour synonyme de mensonge, qui n’
est
qu’un sens dérivé, purement polémique, dirigé contre la religion des
874
ce qu’il appelle sa « vie intérieure », même s’il
est
résolument laïque. Rien n’est plus facile à concevoir, dans notre éta
875
rieure », même s’il est résolument laïque. Rien n’
est
plus facile à concevoir, dans notre état social, qu’un patriote qui,
876
étranger pour les mettre à l’abri du fisc. Ce qui
est
plus difficile, c’est d’expliquer rationnellement une telle conduite.
877
itifs” comme on semble le croire : il ne faut pas
être
seulement un primitif, il faut être aussi un primitif ». C’est ce que
878
l ne faut pas être seulement un primitif, il faut
être
aussi un primitif ». C’est ce que l’école ne peut pas admettre. 49.
879
aux, et par l’euphorie juvénile qui paraît bien s’
être
emparée d’une partie du peuple russe ; assez ignorants au surplus des
880
olides vertus de la bourgeoisie conquérante. Ce n’
est
point par hasard que ces amis de l’URSS citent souvent Diderot, Helvé
881
et Voltaire, à l’appui de leur foi nouvelle. Ce n’
est
pas sans raison qu’ils se remettent à glorifier les mythes du Progrès
882
rendre à certains clercs bourgeois, honteux de l’
être
, l’orgueil de leurs origines culturelles, la bonne conscience « bourg
883
onscience « bourgeoise » au sens originel, qu’ils
étaient
justement en train de perdre. Et pourtant Marx avait été un peu plus
884
tement en train de perdre. Et pourtant Marx avait
été
un peu plus loin ! Et l’on s’interdirait de rien comprendre à l’évolu
885
se refusait à l’examen critique des doctrines qui
sont
à sa base. Je ne dis pas qu’elles n’aient été souvent trahies. Ni qu’
886
ui sont à sa base. Je ne dis pas qu’elles n’aient
été
souvent trahies. Ni qu’elles soient actuellement plus importantes et
887
qu’elles n’aient été souvent trahies. Ni qu’elles
soient
actuellement plus importantes et plus dignes de nous retenir que l’él
888
que la critique d’un clerc y perd ses droits et n’
est
plus à l’échelle du phénomène… Raison de plus, chance de plus, d’essa
889
ritualiste52, Marx avait affirmé que la culture n’
était
rien qu’un « reflet » du processus économique, et de la lutte des cla
890
ment respectée dans les débuts de l’URSS. Trotski
fut
le premier à s’en apercevoir : on l’exila, quitte à suivre bientôt le
891
e ; on reconnut alors peu à peu que la révolution
est
au fond l’œuvre d’une minorité, que le gouvernement du prolétariat es
892
’une minorité, que le gouvernement du prolétariat
est
au fond un gouvernement pour le prolétariat… Dans la théorie de la cu
893
ant prolétarienne se révéla finalement ce qu’elle
était
dès le début : culture socialiste, configuration d’une Idée par des h
894
ne élite guidant les masses. Et cette évolution s’
est
trouvée confirmée par les récents congrès d’écrivains soviétiques ou
895
obéit pas à la loi de cause à effet. Leur unité n’
est
pas quelque chose de donné, mais quelque chose qu’il faut créer, quel
896
r, quelque chose qu’il faut vouloir. Elle ne peut
être
réalisée que si l’on ordonne les deux tâches, lutte des classes et co
897
e commune en vue de réaliser cette fin commune qu’
est
l’univers socialisé. ⁂ On connaît le nom de cette mesure, son incarna
898
ve à quoi s’ordonne toute la construction russe n’
est
plus la doctrine orthodoxe, dont les marxistes d’Occident se sont fai
899
trine orthodoxe, dont les marxistes d’Occident se
sont
faits les conservateurs. C’est un plan beaucoup plus opportuniste que
900
l’ordre des erreurs possibles : c’est que le Plan
est
l’instrument forgé par la dictature communiste pour unifier la pensée
901
tion de la culture (et donc de sa mesure) au Plan
est
même si radicale, si naïve, que les Soviets en sont venus à confondre
902
st même si radicale, si naïve, que les Soviets en
sont
venus à confondre sans l’ombre d’un doute « culture » et « production
903
s déclarations de ce genre « Le niveau culturel a
été
élevé par le Torgsin (magasin de produits étrangers). Le Torgsin en e
904
dité crasse. Or le danger de cette assimilation n’
est
pas niable. Il est clair que les masses soviétiques sont toujours plu
905
danger de cette assimilation n’est pas niable. Il
est
clair que les masses soviétiques sont toujours plus tentées de l’opér
906
s niable. Il est clair que les masses soviétiques
sont
toujours plus tentées de l’opérer, avec une bonne humeur et une bonne
907
ttent d’affirmer que, de gré ou de force, le Plan
est
bien ce rappel permanent des fins dernières conçues par le Parti : l’
908
ïsme, éclate alors à tous les yeux. Si les Russes
sont
de bonne humeur et si nous sommes de mauvaise humeur, c’est qu’ils sa
909
ux. Si les Russes sont de bonne humeur et si nous
sommes
de mauvaise humeur, c’est qu’ils savent pourquoi ils travaillent et q
910
intrinsèque, cette puissance animatrice qui doit
être
, en tous les domaines, le caractère d’une mesure vivante ? L’idéal du
911
mesure vivante ? L’idéal du Plan soviétique, qui
est
le monde intégralement socialisé, embrasse-t-il réellement le tout de
912
nes imposées par le Plan à la création artistique
sont
-elles vraiment des disciplines fécondes, ou au contraire, des conform
913
ommunistes, que la littérature conforme au Plan n’
est
pas un art, mais une forme assez basse de propagande politique, et de
914
digne du nom qu’ait produite la nouvelle Russie s’
est
développée en marge du Plan, par anticipation ou régression sur les «
915
e conscience du danger. La littérature soviétique
est
née de la révolution. Elle s’est constituée en même temps que son pub
916
ature soviétique est née de la révolution. Elle s’
est
constituée en même temps que son public. Autrement dit, les « écrivai
917
aient parlaient naturellement le même langage qui
était
le langage du Plan. Mais cet accord était en somme très limité et ce
918
age qui était le langage du Plan. Mais cet accord
était
en somme très limité et ce langage essentiellement technique. Car le
919
ce langage essentiellement technique. Car le Plan
était
avant tout, conformément à la doctrine marxiste, un schéma de la prod
920
re les passions, et la nature et la diversité des
êtres
. Il fallait désormais recourir à une mesure qualitative que le Plan n
921
n en tant que tel dans le domaine littéraire n’en
est
pas moins une évidence. ⁂ Les écrivains soviétiques l’ont compris. Au
922
ole soviétique, l’unité du peuple et des clercs n’
est
pas « quelque chose de donné »… mais « quelque chose qu’il faut voulo
923
niste devrait dorénavant s’organiser (le paradoxe
est
d’ailleurs soutenable) se substitue dans les esprits les plus vivants
924
isque créateur qui reviennent tenter l’esprit. Il
serait
vain de le nier : la mesure imposée par le Plan et qui régit encore l
925
i régit encore l’action pratique des communistes,
est
d’ores et déjà combattue par une mesure spirituelle toute différente,
926
t les succès aveuglent la grande masse. Mais elle
est
réfutée dans son principe par la création culturelle, dès lors que ce
927
n à tous, et le reste viendra par-dessus. » Telle
fut
la grande maxime du Plan. Car, disait-on, il faut parer au plus press
928
il aura sans doute la vie dure, comme tout ce qui
est
irrationnel, et c’est la faute de la raison. Car cette raison, simple
929
Car cette raison, simple servante de l’action, s’
est
voulue maîtresse de tout l’homme. Mais l’homme résiste à son emprise
930
n totalitaire. Il ne veut pas se laisser mutiler.
Fût
-ce au prix de salaires merveilleux58. Il découvre que la mesure qu’on
931
e la mesure qu’on voulait imposer à son orgueil n’
est
encore qu’une immense caricature ; et que les fins qu’elle lui propos
932
homme nouveau au faîte de l’édifice matérialiste.
Est
-ce que tout le progrès acquis par une si dure révolution n’aura été q
933
progrès acquis par une si dure révolution n’aura
été
que de donner aux hommes, avec quelques milliers de tracteurs, d’avio
934
de parachutes, cette illusion philosophique ? Il
est
vrai que le monde bourgeois n’a même plus l’énergie de concevoir une
935
tout cela une conclusion concrète, qui peut nous
être
utile pour une future construction : la mesure pseudo-marxiste que le
936
o-marxiste que les Soviets proposent en exemple s’
est
avérée, après quelques années, incapable de maintenir l’unité vraie d
937
r l’unité vraie de la pensée et de l’action. Elle
est
déjà divisée contre elle-même. Elle n’est plus réellement commune, en
938
n. Elle est déjà divisée contre elle-même. Elle n’
est
plus réellement commune, encore qu’elle soit réellement imposée. Et j
939
lle n’est plus réellement commune, encore qu’elle
soit
réellement imposée. Et je ne préjuge rien de l’avenir d’un peuple qui
940
ressources mystiques aussi puissantes. Peut-être
était
-ce inévitable. Peut-être les bienfaits concrets du Plan surpassent-il
941
r les semelles-crêpe et le métro. Notre espérance
est
au-delà de ces réussites utiles. Vis-à-vis de la jeune Russie, notre
942
les. Vis-à-vis de la jeune Russie, notre devoir n’
est
pas de railler des naïvetés plus sympathiques que nos astuces, mais i
943
etés plus sympathiques que nos astuces, mais il n’
est
pas non plus de les admirer ; il n’est pas de dire non à tout, ni oui
944
mais il n’est pas non plus de les admirer ; il n’
est
pas de dire non à tout, ni oui à tout ; c’est un devoir de critique l
945
ront avant longtemps les problèmes spirituels qui
sont
les nôtres. Toute la question est de savoir si nous les aurons résolu
946
spirituels qui sont les nôtres. Toute la question
est
de savoir si nous les aurons résolus, dans nos catégories occidentale
947
olus, dans nos catégories occidentales. Sinon, il
sera
toujours temps d’aller demander là-bas ce qui nous manque. II. Leç
948
Leçon de dictature De tout ce qui précède, il
serait
ridicule et vain de tirer une « condamnation » des conceptions cultur
949
s entreprises, d’une envergure sans précédent, ne
sont
pas justiciables des critiques qu’on leur adresse d’ordinaire en Fran
950
n’a le droit de critiquer l’ordre que lorsqu’elle
est
consciemment anarchique, en vertu d’une volonté et d’un idéal déclaré
951
plus féconde que la contrainte. Les surréalistes
sont
fondés à parler du « vent de crétinisation qui souffle de l’URSS », m
952
l’URSS », mais les magnats de l’industrie lourde
sont
hypocrites quand ils payent des auteurs pour dénoncer le « sans-dieui
953
ine facilité sénile, dont la jeunesse française n’
est
pas toujours indemne, facilité qui consiste à assimiler dictature et
954
ilosophique égale l’hypocrisie pratique. Enfin il
serait
sage de se garder de tout pronostic global quant à l’avenir culturel
955
ination, ou tout au moins de facteurs que nous ne
sommes
pas outillés pour mesurer dès maintenant. Le seul fait qui paraisse d
956
érale, indépendamment de tout jugement politique,
est
aussi celui qui nous intéresse ici directement : les dictatures total
957
œuvre par les deux régimes, alors que leurs fins
sont
hostiles et leurs situations de départ différentes, prouve que la mes
958
que la mesure réelle, dans l’un et l’autre cas n’
est
pas la doctrine mais la technique de l’action sur les masses. C’est u
959
pour la seule action au cours de laquelle elle s’
est
constituée, mais que l’on veut imposer au tout, y compris la culture
960
er au tout, y compris la culture et la morale. Ce
sont
les nécessités de la propagande, identiques dans les deux cas, — bien
961
, identiques dans les deux cas, — bien que le but
soit
ici la société prolétarienne, et là la nation allemande, — qui sont c
962
é prolétarienne, et là la nation allemande, — qui
sont
censées configurer la culture. 2. Or cette mesure partielle ne peut p
963
n’y réussit pas. Le schématisme de la propagande
est
par nature contraire à toute culture imaginable. Il peut au plus favo
964
ser l’instruction élémentaire des masses. Mais il
est
totalement impuissant à provoquer la création, et à la régler, étant
965
puissant à provoquer la création, et à la régler,
étant
de par son origine coupé des sources mêmes de toute création culturel
966
ose non seulement à l’observateur étranger que je
suis
, mais aux chefs des partis dictatoriaux eux-mêmes. De là toute la pas
967
ose. Nos circonstances économiques et historiques
étaient
telles qu’il fallait une dictature pour y mettre un minimum d’ordre e
968
um d’ordre et permettre à la vie de continuer. Il
est
incontestable que nous avons établi cet ordre : on ne se mitraille pl
969
rs luttes épuisantes et stériles. Le corps social
était
malade, il fallait l’opérer d’urgence, à chaud et nous y avons porté
970
craties libérales et parlementaires, des maux qui
étaient
devenus aigus chez nous : luttes sociales, injustices économiques, dé
971
us ne faites rien, que de nous critiquer, vous en
serez
bientôt au point où nous étions quand la révolution a éclaté. Si au c
972
critiquer, vous en serez bientôt au point où nous
étions
quand la révolution a éclaté. Si au contraire vous essayez de surmont
973
re vous essayez de surmonter votre anarchie, vous
serez
bien forcés de commencer par rétablir l’ordre extérieur. Et vous fere
974
à ces deux objections : a) Oui, vos circonstances
étaient
telles que je serais incapable de vous dire ce que vous auriez pu fai
975
: a) Oui, vos circonstances étaient telles que je
serais
incapable de vous dire ce que vous auriez pu faire d’autre. Vous en é
976
dire ce que vous auriez pu faire d’autre. Vous en
étiez
au point où l’homme ayant démissionné, il fallait enregistrer cette d
977
de l’État, de la classe ou de la race. Vous vous
êtes
refait un corps. Mais les problèmes spirituels n’ont pas été résolus
978
un corps. Mais les problèmes spirituels n’ont pas
été
résolus pour autant. Vous avez reculé la question de dix ans ou d’un
979
es expériences nous enseignent. Toute la question
est
alors de savoir si nous saurons utiliser ces avantages, et le temps d
980
er et préparer spirituellement une révolution qui
soit
nôtre, sans brutalités extérieures, sans destructions aveugles, sans
981
n nouveau type de révolution, dont l’exemple vous
sera
certainement plus utile que les critiques de nos vieillards. Dans cet
982
ondement d’une nouvelle culture européenne… b) Il
est
faux que nous soyons obligés de commencer par l’extérieur, si nous vo
983
velle culture européenne… b) Il est faux que nous
soyons
obligés de commencer par l’extérieur, si nous voulons rétablir une me
984
la pensée et à l’action. Car un ordre extérieur n’
est
solide et fécond que s’il résulte d’un ordre intérieur. Et cet ordre
985
spirituel. C’est encore là une évidence, et qui n’
est
pas moins actuelle. III. L’appel à la commune mesure, ou l’Europe
986
il fallait des symboles visibles et dont le sens
fût
reconnu de tous, prince et sujets, clercs, soldats et marchands légis
987
histoire ou l’action des « grands desseins » peut
être
déchiffrée précisément dans l’histoire ou l’action des signes visible
988
les lieux, ou les astres. Cependant, une mesure n’
est
rien, et ses symboles ne signifient rien, si l’on oublie les fins der
989
nt et qui meurent avec elle. L’Arche d’alliance n’
est
rien s’il n’y a pas le messianisme, le latin s’il n’y a pas une catho
990
nise. La question de la mesure d’une civilisation
est
sans nul doute la question mère de toute problématique culturelle. Ma
991
toute problématique culturelle. Mais une mesure n’
est
en soi ni vraie ni fausse ; elle n’est que plus ou moins fidèle à la
992
e mesure n’est en soi ni vraie ni fausse ; elle n’
est
que plus ou moins fidèle à la fin qu’elle prépare et représente. Seul
993
ns signes créés par d’autres pour des fins qui ne
sont
pas les nôtres. On ne refait une culture qu’en retrouvant une foi. Ma
994
iscernant sa vocation concrète. Or toute vocation
est
située en un lieu circonscrit de la terre, en un temps limité de l’Hi
995
eux où nous vivons, la situation précise qui nous
est
faite, et l’appel concret qui en résulte ; et après cela jugeons, c’e
996
e de possibilités dont les nations plus jeunes se
sont
volontairement privées. Elles s’honorent d’avoir une presse d’opposit
997
t des vieillards puissants. Leur opinion publique
est
incertaine, facilement énervée puis indolente, pleine de contradictio
998
rre, en Suisse, en Belgique, en Scandinavie, il n’
est
question que du « désarroi général ». Liberté d’opinion, c’est pratiq
999
de se plaindre sans passion profonde. La misère n’
est
encore qu’à la porte, mais on dirait qu’il n’y a plus rien à faire, q
1000
r lieu commun vivant. Les nations dites rajeunies
sont
celles qui ont fait ou subi depuis la guerre une révolution de masses
1001
es en jugeaient l’usage actuel néfaste, lorsqu’il
était
encore réel. Elles s’honorent de n’avoir plus ni presse d’opposition,
1002
comme on dit en Allemagne.) Leur opinion publique
est
dictée par l’État, et l’opinion privée, bon gré mal gré, se rapporte
1003
n moins. En Russie, en Allemagne, en Italie, il n’
est
question que de renaissance et de construction. « Dictature », « tyra
1004
brutal », tout cela qui épouvante les libéraux n’
est
en fait que l’ensemble des conditions pratiquement nécessaires pour a
1005
resse des États libéraux. 2. Situation qui nous
est
faite. Au terme du libéralisme, à l’origine des dictatures, une seule
1006
dernier fondement de la communauté moderne. Elle
est
la toile de fond de tous nos drames, de nos pensées, de nos actions e
1007
fie sans erreur possible que toute commune mesure
est
morte parmi nous, et que nulle mesure vraie n’est encore restaurée.
1008
est morte parmi nous, et que nulle mesure vraie n’
est
encore restaurée. 3. L’appel. De ces deux Europes d’aujourd’hui, d
1009
ite de la Sarre. Prenons-y garde ! Ces deux faits
sont
spirituels. Ils révèlent l’existence d’un appel que la culture ne peu
1010
pays les plus atteints matériellement. La misère
est
douée d’une mystérieuse propriété : elle agit comme une sorte de révé
1011
, vers une communauté nouvelle. Là où cette crise
était
la plus aiguë, la réponse, qui devait être totale, n’a été que « tota
1012
crise était la plus aiguë, la réponse, qui devait
être
totale, n’a été que « totalitaire ». Là où depuis cent ans ou plus la
1013
us aiguë, la réponse, qui devait être totale, n’a
été
que « totalitaire ». Là où depuis cent ans ou plus la nation existait
1014
ent ans ou plus la nation existait déjà, la crise
est
bien moins virulente, et la réponse a plus de peine à se dégager. Pou
1015
ne à se dégager. Pourtant, il faudra bien qu’elle
soit
donnée partout. Derrière la ruine matérielle, une autre ruine plus gr
1016
e la ruine matérielle, une autre ruine plus grave
est
apparue : celle d’une image du monde, d’une conception du monde fondé
1017
tésienne. Nous savons aujourd’hui que la raison n’
est
pas un idéal, mais un outil ; que l’individu n’est rien que la libert
1018
st pas un idéal, mais un outil ; que l’individu n’
est
rien que la liberté du désespoir et qu’il meurt de son isolement, ou
1019
sentir à la mesure des temps nouveaux. Sinon il n’
est
qu’angoisse et arbitraire, isolement, irréalité. Cette situation cosm
1020
ent, irréalité. Cette situation cosmique nouvelle
est
la vraie cause de la révolution mondiale, de l’appel qui surgit de l’
1021
mmunautaire. La puissance de cet appel ne saurait
être
comparée qu’au soulèvement de la Renaissance, à la montée de la consc
1022
s la philosophie : la ruine des grands idéalismes
est
consommée par le triomphe des philosophes « existentiels » qui cherch
1023
ent à saisir l’homme dans son actualité (dans son
être
de relation), et la pensée dans ses effets. Elle agit dans la théolog
1024
de vacances ou de service civil. Mais tout cela n’
est
encore que prodromes. Les premières grandes apparitions de cette puis
1025
apparitions de cette puissance communautaire ont
été
les révolutions communistes et nationalistes. 4. Les premières répo
1026
s libérales à l’adresse des grandes dictatures ne
sont
dangereuses que pour ceux qui s’y livrent. Ils n’arrêteront pas la te
1027
l’aide de leurs filets à papillons. Par contre il
est
aisé de prévoir à coup sûr qu’une certaine dépression atmosphérique a
1028
s ne sauraient combler l’attente réelle. Elles ne
sont
pas une réponse nécessaire. Elles ne sont qu’une tentation superficie
1029
lles ne sont pas une réponse nécessaire. Elles ne
sont
qu’une tentation superficielle et passagère, elles se réduisent à des
1030
chance de salut, à nous autres nations libérales,
est
dans la création d’une communauté libre. Notre chance est dans l’inve
1031
la création d’une communauté libre. Notre chance
est
dans l’invention, et non dans la défense, ou dans l’imitation. À la f
1032
de destins communs : forces, crise et destins qui
sont
tout à la fois politiques et culturels. L’Europe des religions nouvel
1033
û faire ; et alors, d’ici vingt ou cent ans, nous
serons
réduits à l’état de colonies économiques et culturelles par l’expansi
1034
à créer, et que nous seuls pouvons créer. Nous ne
sommes
pas en retard sur les Soviets ou sur l’Allemagne, tout au contraire.
1035
i fortes que celles qui nous défient là-bas, nous
serons
colonisés, comme la Grèce par Rome. Cessons de loucher avec méfiance
1036
onnaître. Ils ont fondé des religions dont le but
est
la force commune. Ils ont su se créer des symboles grandioses. Ces sy
1037
s. Ces symboles nous paraissent barbares, et cela
est
juste. Nous pouvons éprouver la puissance de ces nouvelles religions,
1038
monde étrange, ici règne une nation dont nous ne
sommes
pas, et qui nous est hostile, non point par volonté méchante, ni par
1039
e une nation dont nous ne sommes pas, et qui nous
est
hostile, non point par volonté méchante, ni par avidité ou jalousie,
1040
is par nature, par le seul fait que sa religion n’
est
pas la nôtre. Étudions les doctrines provisoires ou les tactiques de
1041
amais faire davantage, nous ne pourrons jamais en
être
, nous sommes nés sous d’autres astres, et notre vocation est différen
1042
davantage, nous ne pourrons jamais en être, nous
sommes
nés sous d’autres astres, et notre vocation est différente. Nous ne s
1043
ommes nés sous d’autres astres, et notre vocation
est
différente. Nous ne sommes pas de ces religions. Leur lieu saint nous
1044
astres, et notre vocation est différente. Nous ne
sommes
pas de ces religions. Leur lieu saint nous demeure impénétrable. Nos
1045
ur lieu saint nous demeure impénétrable. Nos fins
sont
d’autres fins, et la mesure qui doit les incarner ne sera inventée qu
1046
utres fins, et la mesure qui doit les incarner ne
sera
inventée que par nous. Non seulement nos meilleures traditions, mais
1047
elle que donne la vérité. Notre mesure commune ne
sera
pas collective, extérieure à notre personne : cela n’a pas de sens po
1048
ersonne : cela n’a pas de sens pour nous. Elle ne
sera
pas non plus individuelle : on ne peut pas ressusciter des mesures mo
1049
as ressusciter des mesures mortes. Je dis qu’elle
sera
personnelle, qu’elle sera la mesure de l’homme en tant qu’il se possè
1050
mortes. Je dis qu’elle sera personnelle, qu’elle
sera
la mesure de l’homme en tant qu’il se possède dans ses relations acti
1051
sse. 6. La violence nécessaire. Car notre force
est
personnelle et non pas collective. Elle réside dans les petits groupe
1052
l, et non le gigantisme national. La société doit
être
un corps, non pas une construction mécanisée. Et la santé et la force
1053
tre action dans la culture européenne. Sinon nous
serons
colonisés, je n’ai pas fini de le répéter. Est-ce à dire qu’affirmer
1054
serons colonisés, je n’ai pas fini de le répéter.
Est
-ce à dire qu’affirmer notre force en face d’impérialismes conquérants
1055
e connaissent plus, seule la violence de l’esprit
est
pacifiante. Notre seule chance de collaboration féconde avec les peup
1056
collaboration féconde avec les peuples impériaux
est
là. L’avenir dira si la révolution des « libéraux » peut influencer,
1057
ligieuses qui dressent leurs monuments sacrés à l’
Est
. Pour le présent, notre devoir européen est d’exercer la vocation de
1058
s à l’Est. Pour le présent, notre devoir européen
est
d’exercer la vocation de vérité qui est la nôtre avec un maximum de v
1059
européen est d’exercer la vocation de vérité qui
est
la nôtre avec un maximum de violence créatrice. 52. C’était, à cet
1060
54. Ibid., p. 29 et 33. 55. Le troisième Plan
sera
consacré plus spécialement à l’édification de la culture. 56. On n’i
1061
d’aujourd’hui. 60. Dans le volume dont ces pages
sont
extraites figure avant ce paragraphe un chapitre sur la culture natio
1062
et d’une âme — le corps, ici, a peu de part, nous
sommes
en France — au fait social de notre époque, affronté dans le détail q
1063
dien d’une profession. Henri Petit voudrait avoir
été
l’ami d’Ulysse. Le bref chapitre où il nous livre cet aveu éclaire un
1064
aveu éclaire une bonne part de son œuvre. Rien n’
est
plus redoutable pour notre société que le regard tranquille, apparemm
1065
dèle légendaire, nous voyons bien que « ses ruses
sont
aussi ses plus chères pensées », celles dont l’aveu lui coûterait ses
1066
l’acceptation virile constitue sa seule raison d’
être
. Tout le débat de ce journal revient à cette scandaleuse opposition,
1067
puleux, trop grave, nourriture trop complexe pour
être
épuisée d’un seul trait : non qu’il faille reprocher à Henri Petit nu
1068
ans mon esprit. Voici : l’homme a tué Dieu. Alors
est
venu l’État, qui n’a plus rien au-dessus de lui pour le juger. Il fau
1069
splendeur, l’arrêter sur le penchant de sa chute,
sont
trois opérations difficiles ; mais la dernière est la plus difficile…
1070
nt trois opérations difficiles ; mais la dernière
est
la plus difficile… On décline par un affaissement général auquel on s
1071
n décline par un affaissement général auquel on s’
est
acheminé par des symptômes imperceptibles répandus sur toute la durée
1072
térature, la traduction des métaphores de Diderot
est
trop aisée. « Affaissement général », symptômes imperceptibles. On n’
1073
on n’aime pas que « l’afflux des jeunes talents »
soit
si visiblement déterminé par les clauses d’un contrat commercial. La
1074
rd’hui pose à chaque instant des questions qui ne
sont
pas du tout littéraires. Le monarque caduc c’est la culture, c’est l’
1075
mal « presque impossible à réparer ». La faute n’
est
pas à la littérature seule, mais à tout un régime social qui l’a lais
1076
régime social qui l’a laissée devenir ce qu’elle
est
; et plus encore à chacun de nous dans le cœur duquel ce régime plong
1077
éatrice. Il faut bien constater d’abord qu’elle n’
est
plus là. Nous ne sommes pas une école littéraire. Nous ne pensons pas
1078
constater d’abord qu’elle n’est plus là. Nous ne
sommes
pas une école littéraire. Nous ne pensons pas que le temps soit venu
1079
cole littéraire. Nous ne pensons pas que le temps
soit
venu d’inventer des canons esthétiques, ni même une rhétorique commun
1080
sais quel sabir personnaliste. Au jour où nous en
sommes
, on ne refait pas un art avec un point de vue d’art, ou de philosophi
1081
ction nécessaire. Toutes les grandes littératures
sont
nées d’une révolution, non d’une émeute dans les lettres. Pour qu’une
1082
partialité » fondamentale dans la critique. Nous
serons
ramenés à tout propos, bon gré mal gré, aux mêmes questions : pourquo
1083
réponses que l’on donne au problème éternel : où
sommes
-nous, d’où venons-nous, où allons-nous ? Alors seulement, après cela
1084
t, après cela seulement, le reste aura le droit d’
être
littérature. y. Rougemont Denis de, « Note sur nos notes », Esprit
1085
(novembre 1936)z Les descendants des puritains
sont
en train de prendre une revanche qui fait pâlir toutes nos petites po
1086
Moyen Âge 62, a là-dessus un passage qui pourrait
être
écrit tout exprès pour l’œuvre de Caldwell : On aime à opposer l’esp
1087
Or la gauloiserie, aussi bien que la courtoisie,
est
une fiction romantique. La pensée érotique, pour acquérir une valeur
1088
otique, pour acquérir une valeur de culture, doit
être
stylisée. Elle doit représenter la réalité complexe et pénible sous u
1089
e, Retour de l’URSS (décembre 1936)aa Quel que
soit
le domaine qu’il aborde, la merveilleuse précision de son vocabulaire
1090
vocabulaire sauvera Gide du journalisme. Car ce n’
est
pas l’actualité toute passagère de son objet qui fait la faiblesse d’
1091
ment objectif, au sens goethéen de ce terme. Ce n’
est
pas là, je crois, sa pente naturelle ; plutôt l’effet d’une permanent
1092
les paysages, beaucoup moins, et si beaux qu’ils
soient
; mais de plus en plus pour les hommes. Voilà bien la vision classiqu
1093
Je me souviens alors de Goethe à Venise : « Je ne
suis
encore entré dans aucun bâtiment, excepté Saint-Marc. Il y a de quoi
1094
finiment… » Goethe poursuit : « Aujourd’hui je me
suis
longuement attardé au marché ; j’ai observé les gens, comment ils mar
1095
l’étalage du bazar de Moscou : « Les marchandises
sont
, à bien peu près, rebutantes. On pourrait croire, même, que, pour mod
1096
nd besoin, mais non jamais par gourmandise. » (Il
est
plaisant de rapprocher Goethe et Gide ; mais comparez aussi, Venise e
1097
réserves. Préface : « Les réalisations de l’URSS
sont
le plus souvent admirables. » Épilogue : « L’URSS n’a pas fini de nou
1098
s étonner. » Précautions, je sais bien. Mais ici,
sont
-elles efficaces ? Empêcheront-elles personne, à droite, d’abuser des
1099
France. Point de départ : « Le sort de la culture
est
lié dans nos esprits au destin même de l’URSS » (discours aux obsèque
1100
? « Je doute qu’en aucun autre pays aujourd’hui,
fût
-ce dans l’Allemagne de Hitler, l’esprit soit moins libre, plus courbé
1101
’hui, fût-ce dans l’Allemagne de Hitler, l’esprit
soit
moins libre, plus courbé, craintif (terrorisé), plus vassalisé. » — D
1102
vassalisé. » — Dictature du prolétariat ? « Nous
sommes
loin de compte. Oui, dictature, évidemment ; mais celle d’un homme, n
1103
important, ici, c’est de persuader aux gens qu’on
est
moins heureux qu’eux partout ailleurs. L’on n’y peut arriver qu’en em
1104
. » — Égalité, société sans classes ? « Comment n’
être
pas choqué par le mépris, ou tout au moins l’indifférence, que ceux q
1105
is, ou tout au moins l’indifférence, que ceux qui
sont
et qui se sentent du “bon côté”, marquent à l’égard des “inférieurs”,
1106
llonger la liste65. Mais en voilà assez, la cause
est
jugée, dira-t-on. Voire ! Gide reproche à la fameuse autocritique sov
1107
e ne consister « qu’à se demander si ceci ou cela
est
dans la ligne ou ne l’est pas. Ce n’est pas elle, la ligne, que l’on
1108
emander si ceci ou cela est dans la ligne ou ne l’
est
pas. Ce n’est pas elle, la ligne, que l’on discute. Ce que l’on discu
1109
i ou cela est dans la ligne ou ne l’est pas. Ce n’
est
pas elle, la ligne, que l’on discute. Ce que l’on discute, c’est de s
1110
savoir si telle œuvre, tel geste ou telle théorie
est
conforme à cette ligne sacrée. Et malheur à qui chercherait à pousser
1111
dissociation de la foi et des œuvres de l’Église
est
relativement aisée pour un esprit qui reconnaît la transcendance de D
1112
purement humaine, et historiquement valable, elle
est
comptable de ses déviations humaines et historiques. Elle est jugée p
1113
e de ses déviations humaines et historiques. Elle
est
jugée par ces déviations. Elle est jugée par ce que les hommes en ont
1114
toriques. Elle est jugée par ces déviations. Elle
est
jugée par ce que les hommes en ont fait, et par la réussite ou bien l
1115
ntation [le stalinisme par rapport au marxisme] n’
est
peut-être qu’apparent, et si ce qui nous apparaît comme une dérogatio
1116
et si ce qui nous apparaît comme une dérogation n’
est
pas une conséquence fatale de certaines dispositions antérieures. » P
1117
ien l’entendra comme une excuse : le changement n’
est
qu’apparent, la ligne sauvée. Mais cela peut signifier aussi : le mal
1118
signifier aussi : le mal qui apparaît maintenant
était
en germe dès le principe. (Ce que nous écrivions ici le mois dernier.
1119
ique qui paraît seule capable de l’imposer ? Ce n’
est
pas là toucher le fond réel de la situation historique. Et la droite,
1120
de la situation historique. Et la droite, si elle
était
honnête, serait encore plus gênée que la gauche par ce portrait de l’
1121
historique. Et la droite, si elle était honnête,
serait
encore plus gênée que la gauche par ce portrait de l’URSS fascisée et
1122
Le livre s’ouvre par une fable. L’enfant Démophon
est
soigné par Déméter, déguisée en nourrice. Elle veut en faire un dieu,
1123
our sauver l’enfant, perdit le dieu. » La légende
est
belle. C’est une légende… Elle traduit à mes yeux ce fait d’expérienc
1124
s, l’expérience marxiste eût réussi ? Sa croyance
est
d’ordre mystique, contredite par les faits connus. C’est une espèce d
1125
e peut le sauver qu’au prix de la vie du Dieu qui
est
en lui, c’est que l’homme est pécheur, et ne peut pas outrepasser les
1126
la vie du Dieu qui est en lui, c’est que l’homme
est
pécheur, et ne peut pas outrepasser les limites de sa condition. Qui
1127
ns une volonté révolutionnaire dont le marxisme s’
est
détourné parce qu’il a fait erreur sur l’homme. La phrase finale de c
1128
propose au stalinisme, ou ce qu’il en admire, ce
sont
excuses et admirations que nous proposent identiquement les régimes f
1129
e (janvier 1937)ab Le palais des ducs d’Albe a
été
détruit par les obus de Franco, et Commune, par la voix d’Aragon, exp
1130
après la fuite du propriétaire. « Les domestiques
sont
restés ici avec les communistes, écrit Aragon. Et le petit chien du d
1131
sa feuille de salade bien verte ? » Si tout cela
est
fini, c’est à cause du fascisme ! Si vous aimez Goya, adhérez au PC !
1132
e ! Si vous aimez Goya, adhérez au PC ! Voilà qui
est
simple. Mais croit-on que la culture vivante soit beaucoup moins mena
1133
est simple. Mais croit-on que la culture vivante
soit
beaucoup moins menacée en France ? Est-ce seulement une question de r
1134
e vivante soit beaucoup moins menacée en France ?
Est
-ce seulement une question de régime ? Est-ce d’abord une question pol
1135
rance ? Est-ce seulement une question de régime ?
Est
-ce d’abord une question politique ? Culture à gauche, brutalité stupi
1136
diter et de vendre tout ce que l’on imagine. Ce n’
est
pas le « fascisme » qui expliquera cela. Nous savons, nous aussi, car
1137
sa feuille de salade verte au canari. Et nous ne
sommes
pas « communistes » pour si peu. Je constate simplement ceci : le peu
1138
lecture de Paris-Soir et Paris-Sports, quand ce n’
est
pas Paris-Soir-Dimanche. Quels chiffres nos éditeurs pourraient-ils o
1139
que en 3 volumes sur Paracelse, coûtant 25 marks,
soit
près de 200 fr., atteint au bout de deux ans le quatre-vingt-treizièm
1140
pas en arrière : le jeune Gerhard Schuhmann, qui
est
nazi, a des tirages de douze-mille, et le vieux Ch. Morgenstern, qui
1141
ouze-mille, et le vieux Ch. Morgenstern, qui ne l’
est
pas, un tirage de cinquante-mille. Repère : le dernier Lagerlöf fait
1142
s, il faudrait en conclure que le régime allemand
est
très supérieur au français. Ce qui est faux. Alors ? Alors on voit qu
1143
e allemand est très supérieur au français. Ce qui
est
faux. Alors ? Alors on voit que les rapports de la politique, de l’éc
1144
ique, de l’économie de la nation et de la culture
sont
un peu moins simplets que ces partisans ne le croient. Et que ce n’es
1145
lets que ces partisans ne le croient. Et que ce n’
est
pas d’abord contre le fascisme à l’étranger, mais d’abord contre l’in
1146
e et se nourrir que de la fièvre de l’auteur. » N’
est
-ce pas, en somme, toujours ainsi que les personnages naissent et se n
1147
ant l’opération, et de nous faire croire que ce n’
est
pas lui qui agit… Pourtant ses personnages ne sont pas plus vrais que
1148
est pas lui qui agit… Pourtant ses personnages ne
sont
pas plus vrais que lui ; le mieux qu’on puisse attendre, c’est qu’ils
1149
; le mieux qu’on puisse attendre, c’est qu’ils le
soient
, à la limite, autant. Il me dira d’une voix que j’entends déjà : « Ma
1150
n’ai rien voulu de tout cela ! Mes personnages se
sont
imposés à moi etc. » Je n’ignore pas que des visions parfois bizarres
1151
de cette manière au déprimé fiévreux. La question
est
ailleurs : va-t-on se vanter d’être si faible que de céder à toutes s
1152
x. La question est ailleurs : va-t-on se vanter d’
être
si faible que de céder à toutes ses obsessions ? (Je feindrai d’ignor
1153
ses obsessions ? (Je feindrai d’ignorer qu’elles
sont
anxieusement souhaitées, et cultivées avec des soins jaloux, si par h
1154
elle pourrait faire. Or elle n’y songeait pas… Qu’
est
-ce que ce livre ? Un document clinique ? Trop d’élégances littéraires
1155
à prouver que l’on n’invente rien de ce tourment.
Est
-ce donc un témoignage pur et simple — ni si pur ni si simple d’ailleu
1156
de ou mon admiration pour son auteur ? Le livre n’
est
ni passionnant, ni indifférent, habile et sensible à la fois. On le l
1157
du récit de M. Blanzat faisait un geste franc, il
est
clair qu’il n’y aurait pas de roman. Mais, nous dit-il : « le plus pe
1158
able — on a bien cru à l’« honneur national » ! —
est
évidemment symbolique. L’on est censé conclure de ce brillant tableau
1159
ur national » ! — est évidemment symbolique. L’on
est
censé conclure de ce brillant tableau des vices de l’aristocratie eur
1160
de l’aristocratie européenne qu’une telle classe
est
la vraie responsable du cafouillage de 1914. Le héros principal — il
1161
e quelques ravages dans le beau monde. L’ensemble
est
assez passionnant. Proust a fourni les personnages, Huxley certain cy
1162
C’est peut-être que le monde décrit par Briffaut
est
en réalité aussi conventionnel qu’on l’imagine. Monde où les clichés
1163
de l’Esprit (février 1937)af Ce « rapport » a
été
approuvé à l’unanimité par le Comité central du Parti communiste fran
1164
tions : L’homme ne peut penser et créer que s’il
est
libre. — Nous avons toujours admis la légitimité de la propriété. — D
1165
personne humaine, cette grande force spirituelle,
est
traquée… — Le capitalisme détruit la famille… ruine les valeurs moral
1166
lent le retour à l’art sain dans la liberté. — Il
est
temps de donner le pas à l’esprit sur les forces de la matière. — Au-
1167
besoin de bonté de la charité. — Tout le problème
est
là : mettre la machine au service de l’homme. — Il s’agit de transfor
1168
on départ, en 1932 (n° de décembre de la NRF). Ce
sont
ces thèses-là, précisément, qui furent alors qualifiées de « fasciste
1169
la NRF). Ce sont ces thèses-là, précisément, qui
furent
alors qualifiées de « fascistes » par les doctrinaires du PC. Mais no
1170
de la volonté française de paix. — Le communisme
est
un moment de la France éternelle. — Nous continuons la France, la Fra
1171
e, rayonnante, toute de mesure et de goût. — Nous
sommes
attachés à cette sélection de grâce et de mesure qui s’appelle la pol
1172
t n’hésite pas à déclarer que « les intellectuels
sont
en quelque sorte (sic) les idées incarnées », se fait par ailleurs du
1173
tivé une idée plus marxiste qu’on ne croyait : ce
serait
le gogo intégral. Ce serait par exemple le lecteur qui n’aurait pas r
1174
qu’on ne croyait : ce serait le gogo intégral. Ce
serait
par exemple le lecteur qui n’aurait pas remarqué, entre autres, que c
1175
Et pas un mot de la « dialectique ». Et puis, qu’
est
-ce que l’Esprit qu’il veut servir ? La majuscule ne suffit pas à le d
1176
. » (Phrase qui aurait pu faire croire que l’URSS
est
pacifiste). Mais on a laissé figurer le nom de Gide parmi « les plus
1177
(février 1937)ag On le dira donc au public. Ce
sont
des souvenirs d’enfance, fort bien réinventés, et contés dans un styl
1178
(mars 1937)ah Comment juger ce qui ne veut pas
être
jugement, mais dégustation, claquements de langue, savoureuse bouilla
1179
, glissements, liaisons, circulation… Thibaudet s’
est
parfaitement défini : « badaud de la République des Lettres, ayant sa
1180
ir un « rapprochement », une « référence », et ne
sont
qualifiés, en passant, que par rapport au snobisme furtif d’une génér
1181
snobisme furtif d’une génération littéraire. Nous
sommes
heureux de lire enfin un manuel où Rimbaud, Sénancour et Stendhal tro
1182
s du livre. Réjouissante désinvolture ! Thibaudet
fut
bien moins critique qu’essayiste, avec tout ce que cela peut comporte
1183
est-à-dire, dans ce cas, ordonnée à une loi qui n’
est
pas celle de l’objet mais du sujet. Son chapitre sur Balzac a de la g
1184
son chapitre sur la Chanson de Béranger : « Elle
est
la colonne de Juillet de la poésie française : une suite de tableauti
1185
cot et la grisette, vers un génie prétentieux qui
est
lui-même sujet de chanson, vers une plate-forme d’où s’étale à la vue
1186
aussi solide qu’inattendue : si l’Allemagne ne s’
est
pas défaite en vingt morceaux, si la révolte spartakiste a pu être ét
1187
en vingt morceaux, si la révolte spartakiste a pu
être
étouffée en quelques semaines, c’est uniquement le fait d’initiatives
1188
ution avec une brutalité qu’aucun bourgeois ne se
serait
permise. Avis à ceux de Saint-Denis ! Noske, Mussolini, Doriot, Stali
1189
onfus des partis ou des classes. Si Kierkegaard a
été
découvert, dans ce pays, très peu de temps avant l’entrée en lice du
1190
mps avant l’entrée en lice du personnalisme, ce n’
est
pas un hasard ni une coïncidence qu’il faut y voir, ni d’ailleurs une
1191
re au politique. La sensibilité de l’intelligence
étant
, à l’époque présente, et en France, beaucoup plus vive et juste que c
1192
masses ou des politiciens. (Je ne dis pas qu’elle
est
plus efficace…) Que nous annonce le renouveau nietzschéen ? On a vite
1193
sme, dénoncé le socialisme, et déclaré que l’État
est
le plus froid des monstres froids. À part cela, il reste son exaltati
1194
olonté humaine, de l’athéisme et de la force, qui
sont
devenus les valeurs fondamentales du stalinisme, au moins autant que
1195
intitulé « Réparation à Nietzsche ». « Acéphale »
est
le signe de l’antiétatisme radical, c’est-à-dire du seul antifascisme
1196
force, écrit G. Bataille, la seule société libre
est
la société bi ou polycéphale qui donne aux antagonismes fondamentaux
1197
iques nous appelons fédération. Sur ce point, qui
est
central, l’accord de Nietzsche et de ses disciples avec le personnali
1198
Mais pour Bataille et ses amis, l’« acéphalité »
est
aussi une doctrine métaphysique antichrétienne — qui, assimilant selo
1199
ascisme ou le stalinisme. Dans ces conditions, je
suis
le premier à me déclarer athée. Mais si l’on veut parler, comme le fa
1200
ur éternel » et de la volonté d’éternisation, qui
est
le véritable message « religieux » de Nietzsche. Les notes et aphoris
1201
u’on ait jamais écrit à l’usage des créateurs : «
Soyez
humains à l’égard des créateurs ! C’est leur fait d’être pauvres en a
1202
mains à l’égard des créateurs ! C’est leur fait d’
être
pauvres en amour du prochain » ; et : « Toute création est communicat
1203
es en amour du prochain » ; et : « Toute création
est
communication. Celui qui connaît, celui qui crée, celui qui aime ne f
1204
i crée, celui qui aime ne font qu’un ». (Les deux
sont
justes.) ⁂ Sur la contradiction fondamentale qui constitue la tension
1205
unitaire que la personne emprunte sa forme et son
être
. » Les trois derniers mots définissent exactement le pseudo-personnal
1206
crit et embrasse les trois dimensions de la joie,
est
dit aussi par le vallon des oliviers et par sa jeune nudité. Pas une
1207
rasses, ni de ces arbres moirés et allègres. Tout
est
vu du premier regard, doucement compris, approuvé. Une familiarité, u
1208
tout simplets, suivant une piste par jeu. Le ciel
est
d’un bleu sec et pur, tranché au sommet du vallon par un cyprès grand
1209
uleur de terre et festonnée de tuiles roses, elle
est
bien à la ressemblance des vieilles paysannes de par ici, recuite et
1210
. Naturellement j’ai perdu ! Moi vous savez… Ce n’
est
pas comme Céline, ah celle-là ! Elle a la veine, que voulez-vous ! À
1211
ans les tombolas des sociétés, n’importe où, elle
est
sûre de gagner quelque chose à tous les coups. » Voilà ce qu’on peut
1212
e la nation la plus raisonnable du monde. Le mari
est
un vieux laïcard, il accuse les curés d’obscurantisme, il ne veut pas
1213
énéfice de la culture de cette superstition. S’il
est
vrai que certains individus « ont la veine » dans ces loteries, notre
1214
age scientifique (physico-mathématique) du monde,
est
fausse. Il est totalement impossible de concevoir la vérité simultané
1215
e (physico-mathématique) du monde, est fausse. Il
est
totalement impossible de concevoir la vérité simultanée de notre scie
1216
vois un pigeon violet immobile. Les plumes du cou
sont
un peu hérissées par le vent. Voici trois jours que je le vois chaque
1217
dre ? Pourquoi feint-il de ne pas me voir ? Il se
tient
là des heures, sans bouger, et s’envole d’un coup vers le soir. Le le
1218
s’envole d’un coup vers le soir. Le lendemain, il
est
là de nouveau, posé sur une tuile ronde. Il y a quelque chose à compr
1219
vraiment l’air de vouloir dire quelque chose ! Il
est
tourné du côté de la plaine. Signe qu’il va nous arriver quelque chos
1220
e par là ? Du côté de Marseille… Et soudain je me
suis
souvenu de la conférence que je dois donner à Marseille dans 15 jours
1221
ne voulais pas la préparer avant le dernier jour.
Est
-ce que cela signifie qu’elle est plus importante que je ne croyais ?
1222
le dernier jour. Est-ce que cela signifie qu’elle
est
plus importante que je ne croyais ? Qu’il y a quelque chose de sérieu
1223
rédaction de ma conférence. Ce matin le pigeon n’
est
pas revenu. C’est évidemment absurde, cette histoire. Je le vois bien
1224
capable de me faire agir, ou plus exactement, je
suis
heureux de l’aveu que je viens de m’en faire. Comment ne l’ai-je pas
1225
te la trame de mes petites décisions quotidiennes
est
faite de croyances spontanées et absolues en des « raisons » qui n’en
1226
pontanées et absolues en des « raisons » qui n’en
sont
pas, mais qui m’ont toujours convaincu beaucoup plus vite et beaucoup
1227
e de mes intérêts « objectifs »… Et ce jeu-là, je
suis
tellement le seul à en connaître les règles et les interdictions que
1228
ent les dés avant leurs grandes décisions, mais n’
est
-ce pas une étrangeté plus aiguë que nous révèle cette foi toute quoti
1229
pe spécial, différent de tous les autres… Et ce n’
est
guère qu’à l’instant où l’on découvre que tous les autres en croient
1230
utres en croient autant, que ces autres cessent d’
être
une menace, une masse abstraite, intimidante ou méprisable. Pour ne p
1231
ionnel » — et dont la honte alors les opprimait —
est
justement l’état de l’homme vraiment homme, et le signe d’une accessi
1232
condition générale ! Avouer ses superstitions, ce
serait
avouer ce qu’on a de plus individuel, de plus irréductible au général
1233
rendre à d’autres, en un éclair, que chaque homme
est
irréductible, et que chaque homme a ses aveux à faire. Et l’on compre
1234
faire. Et l’on comprend ainsi, soudain, que l’on
est
un homme « comme les autres » par cela même que l’on s’éprouve absolu
1235
ons, c’est sans doute en vertu d’une prudence qui
est
le fondement même de toute « politique ». Et si j’avoue et légitime l
1236
aut que je montre aussi les droits du général. Qu’
est
-ce que la politique, sinon le général en tant qu’il s’oppose au réel,
1237
le général en tant qu’il s’oppose au réel, lequel
est
fait de nos monades superstitieuses ? Accorder libre cours à nos supe
1238
superstitions, qui au point de vue psychologique
sont
notre vraie réalité, ce serait jeter la société dans l’anarchie la pl
1239
de vue psychologique sont notre vraie réalité, ce
serait
jeter la société dans l’anarchie la plus sanglante. La politique ne d
1240
dividuelle, et c’est pour elle la seule manière d’
être
en vérité « réaliste ». Je crains d’avoir créé certain malentendu en
1241
e, dialectique, ou mieux encore : pédagogique. Il
est
de l’essence de toute saine politique de s’opposer à la personne, de
1242
itive le réel que nous incarnons. Toute politique
est
normative, mais seulement de l’extérieur. Une politique saine ne saur
1243
formuler. Premier fait : l’équilibre social doit
être
quelque chose de mouvant. Tout équilibre stable et sclérosé produirai
1244
ne ne cherchait plus à triompher de tout ce qui n’
est
pas elle, le simulacre d’équilibre que l’on constaterait alors ne ser
1245
ulacre d’équilibre que l’on constaterait alors ne
serait
en fait que la limite du pire désordre, et c’est la mort. Cas puremen
1246
d’un équilibre apparemment stabilisé, le désordre
est
toujours à sens unique : c’est la personne qui cesse de se défendre,
1247
ent excessif du général dans la vie réelle. Telle
est
notre situation — celle du monde bourgeois-capitaliste, mais aussi ce
1248
t c’est pourquoi l’on s’imagine que l’équilibre s’
est
stabilisé. Au vrai, chacun peut voir que l’homme d’aujourd’hui se dés
1249
re social, pour rester sain, mouvant, tendu, doit
être
orienté constamment par un léger excès de la composante « personnelle
1250
n des personnes au moment où leurs disciplines se
seront
enfin harmonisées. (Dans un temps que j’accorde aussi lointain qu’on
1251
urait se traduire en termes de raison. Mais je la
tiens
pour néfaste quand elle sort du domaine personnel et déborde dans la
1252
l’État devient totalitaire. « Là où l’homme veut
être
total, l’État ne sera jamais totalitaire. » Or l’État, c’est un fait
1253
taire. « Là où l’homme veut être total, l’État ne
sera
jamais totalitaire. » Or l’État, c’est un fait patent, devient partou
1254
on quant-à-soi), vaincues par une crise dont ce n’
est
pas ici le lieu de mentionner les causes profondes, cessent d’agir et
1255
e nous pensons avoir récemment « découvertes » ne
sont
, au sens freudien du terme, que les phantasmes de notre peur de vivre
1256
e voulez-vous que j’y fasse ? » ou encore : « Ils
sont
les plus forts. » Tel est le « moment » de l’angoisse de ce temps. L’
1257
? » ou encore : « Ils sont les plus forts. » Tel
est
le « moment » de l’angoisse de ce temps. L’homme sain dit : « Voilà c
1258
à A…) Contact avec le public Dans le courrier qui
est
arrivé en mon absence, deux nouvelles demandes de « causeries » : l’u
1259
vrai sens que dans cette rencontre effective. Ce
sont
de telles rencontres que je cherche, quand je vais parler dans ces ce
1260
teur, où l’on se voit naturellement contraint, ne
fût
-ce que par la proximité matérielle70, de se mettre moralement à la po
1261
encontre, sous l’auvent du local que l’on quitte,
est
en réalité la suite de quelque chose ; le contact s’établit normaleme
1262
ormalement, sans surprises et sans illusion. Ce n’
est
plus une pensée lointaine qui anime un rêve, dans une chambre nocturn
1263
erc en chambre. Le lecteur réel, l’auditeur réel,
est
toujours autrement intelligent qu’on ne l’imagine quand on écrit sans
1264
agine quand on écrit sans l’avoir jamais vu. Il n’
est
pas arrêté par nos tabous critiques. Il va tout droit à ce qui le con
1265
ccasion de nos prochains écrits. Cette conclusion
est
la suivante : le lecteur en son particulier — précisons : le lecteur
1266
les classes et de tous les métiers. Certes, ce n’
est
jamais qu’avec des êtres singuliers, par le biais de leur singularité
1267
les métiers. Certes, ce n’est jamais qu’avec des
êtres
singuliers, par le biais de leur singularité même, qu’on entre vraime
1268
me, qu’on entre vraiment en contact. Ce public-là
est
relativement restreint. Mais d’autre part il constitue l’élément créa
1269
eur, spirituellement actif du pays. Il ne saurait
être
question de ce cliché importé d’URSS ou d’Allemagne hitlérienne : « r
1270
c les écrivains comme tels, en aucun temps. Ce ne
sont
pas des abstractions qui achètent nos livres. Ce qu’il s’agit de retr
1271
lui-là seul peut faire sentir à l’écrivain ce qui
est
solide et ce qui est artificiel dans ce qu’il écrit. Et cette critiqu
1272
e sentir à l’écrivain ce qui est solide et ce qui
est
artificiel dans ce qu’il écrit. Et cette critique directe, informulée
1273
milieu des feuilletonistes et des snobs, nous en
sommes
arrivés à parler dans le vide, à ne parler qu’à ces lecteurs qui achè
1274
s pour remplir les rayons d’un studio-divan. Nous
sommes
des ingénieux, des amuseurs, des spécialistes, des éléments de public
1275
cité, des académiciens, des journalistes. Nous ne
sommes
plus des gens utiles. Nous ne sommes plus des hommes normaux chargés
1276
tes. Nous ne sommes plus des gens utiles. Nous ne
sommes
plus des hommes normaux chargés d’une vocation d’expression et de réf
1277
d’une vocation d’expression et de réflexion. Nous
sommes
des hommes spéciaux exploitant leur spécialité pour arriver à un succ
1278
ur le marché. Combien de nos romanciers devraient
être
classés dans la catégorie des femmes à barbe et des veaux à deux tête
1279
isible. Matinée du lundi de Pâques, 7 heures Tout
est
trempé et ruisselant de lumière bleue, les feuillages encore transluc
1280
sa densité, sa légèreté originelles. Les oliviers
sont
plus soyeux et plus moirés sur le vert plus violent des terrasses, la
1281
chaos brillant d’où montent des vapeurs d’aube d’
été
. « Un vrai temps de Pâques ! », me crie Simard. ⁂ Hier il pleuvait. V
1282
au seuil du temple : « Voyez-vous ça, comme tout
est
dérangé ! Les autres années, il pleut toujours le Vendredi saint, et
1283
leur réponds : « Que voulez-vous, les saisons ne
sont
plus ce qu’elles étaient »,— pour montrer que je sais vivre… Parler d
1284
voulez-vous, les saisons ne sont plus ce qu’elles
étaient
»,— pour montrer que je sais vivre… Parler du temps qu’il fait, occup
1285
que cela prend les chiens. Toute la nuit, ils se
sont
battus dans la remise qui est juste au-dessous de notre chambre, et d
1286
te la nuit, ils se sont battus dans la remise qui
est
juste au-dessous de notre chambre, et dans la cour, et sur toutes les
1287
range et presque « atterrant ». La petite chienne
est
couchée, sur le flanc, haletant doucement, l’arrière-train tuméfié. A
1288
te huit, de toutes tailles et pelages. La plupart
sont
beaucoup plus grands que leur Marquise, mais il y a aussi un insolent
1289
ssé chez les chiens. Cette nuit, les crapauds s’y
sont
mis. Un vieux mâle coasse des notes basses, et le chœur lui répond de
1290
s dans la remise. La chienne se traîne. La chatte
est
déjà grosse. Une puissance inexorable s’est emparée de l’espèce, tour
1291
hatte est déjà grosse. Une puissance inexorable s’
est
emparée de l’espèce, tourmente les bêtes, les essouffle et les esquin
1292
émit dans les angoisses de l’enfantement. Et ce n’
est
pas elle seulement, mais nous aussi, qui avons les prémices de l’Espr
1293
n de notre corps. Car c’est en espérance que nous
sommes
sauvés » (Romains 8. 22-24). Parler de la Nature comme le firent tant
1294
ettres grasses : « Tout notre programme municipal
tient
en un seul mot : nous sommes antifascistes ! » Après quoi viennent le
1295
e programme municipal tient en un seul mot : nous
sommes
antifascistes ! » Après quoi viennent les revendications pratiques :
1296
c’est cela, l’antifascisme, les fascistes doivent
être
de drôles de gens. 6 mai La mort et les cérémonies dans le Gard La ma
1297
it du lecteur philosophe. Déjà huit mois que nous
sommes
ici, et combien de fois ne sommes-nous pas entrés dans la grande cuis
1298
t mois que nous sommes ici, et combien de fois ne
sommes
-nous pas entrés dans la grande cuisine qui était, pensions-nous, tout
1299
sommes-nous pas entrés dans la grande cuisine qui
était
, pensions-nous, tout leur logis — nous avions cru comprendre que les
1300
nous avions cru comprendre que les autres pièces
étaient
vides ou ne servaient que de débarras —, et rien ne pouvait nous fair
1301
s elle va « passer » cette nuit, vous savez, elle
est
toute chargée, bou die ! l’estomac et tout. — Mais les Simard ne m’av
1302
languir bien longtemps. On peut dire que la chose
est
sûre. Et on l’entend ! Trois fois par jour, le bruit d’effroyables di
1303
parvient de la cuisine des Simard. Un beau-frère
est
arrivé, et on partage. C’est toujours assez compliqué. La nuit, par u
1304
la moribonde qu’ils veillent à tour de rôle, ils
sont
venus discuter dans la remise qui est au-dessous de notre chambre, et
1305
rôle, ils sont venus discuter dans la remise qui
est
au-dessous de notre chambre, et leurs éclats de voix nous ont plusieu
1306
it, qu’elle ne veut pas le lâcher, c’est pour lui
tenir
compagnie… On a été chercher le pasteur. Je le rencontre comme il sor
1307
s le lâcher, c’est pour lui tenir compagnie… On a
été
chercher le pasteur. Je le rencontre comme il sort de sa visite. — El
1308
e le rencontre comme il sort de sa visite. — Elle
est
curieuse, cette vieille, me dit-il. Figurez-vous qu’elle tient sa can
1309
e, cette vieille, me dit-il. Figurez-vous qu’elle
tient
sa canne à la main, comme ça, sur la couverture, et elle explique que
1310
e passent devant la fenêtre. Je me précipite : ce
sont
les deux Simard qui font un grand feu dans la cour. Est-ce qu’ils la
1311
s deux Simard qui font un grand feu dans la cour.
Est
-ce qu’ils la rôtissent ? On distingue des étoffes noires qui se gonfl
1312
ffes noires qui se gonflent sur le brasier… Je me
suis
réveillé tard. Tandis que je me rase, j’entends Simard qui apostrophe
1313
leur dire ! » Je passe la tête par la fenêtre. Qu’
est
-ce que c’est, Simard ? — Il est rouge et boursouflé, tremblant de col
1314
ar la fenêtre. Qu’est-ce que c’est, Simard ? — Il
est
rouge et boursouflé, tremblant de colère et gesticulant. Il crie : «
1315
e veux pas qu’on lave aujourd’hui ! Ma belle-mère
est
morte cette nuit. Il ne faut pas se moquer des gens en deuil ! » — Ma
1316
Mais, monsieur Simard… — Il est parti. Le bassin
est
à 50 mètres de la maison, sur une terrasse qu’on ne peut voir d’ici.
1317
ons avec le beau-frère font toujours rage). Je me
suis
donc borné à exprimer mes « condoléances » à madame Simard, que j’ai
1318
beaucoup remercié. Bref, il m’a semblé que tout s’
était
bien passé. Je me trompais. C’est la mère Calixte qui me l’apprend ce
1319
lixte qui me l’apprend ce matin. Le ménage Simard
est
furieux. Nous n’avons pas du tout fait ce qu’il fallait. Je me récrie
1320
sympathie à Madame Simard. — Je sais, mais vous n’
êtes
pas entré chez eux. — Entré chez eux ? — Il faut que je vous explique
1321
Je le lui ai dit : c’est bien ta fôte ! Ça aurait
été
dans votre maison qu’il y aurait eu un mort, je comprendrais, je n’au
1322
’aurais pas non plus lavé la vaisselle. Mais ce n’
est
pas la même maison. — Je ne comprends pas. Madame Calixte. Pourquoi n
1323
r, mais il a tort pour la lessive. Voyez-vous ils
sont
trop orgueilleux ces gens-là ! S’ils avaient eu toute la peine que j’
1324
toute la peine que j’ai eue dans ma vie, moi, ça
serait
autrement, je vous assure ! Ils sont trop orgueilleux, voilà ! Je me
1325
e, moi, ça serait autrement, je vous assure ! Ils
sont
trop orgueilleux, voilà ! Je me perds dans tout ce protocole. Je sens
1326
perds dans tout ce protocole. Je sens bien qu’il
est
inutile de leur demander de s’expliquer. Tout cela repose sur un vieu
1327
leau. Impécuniosité cyclique. Les dieux locaux me
seraient
-ils donc défavorables ? Je me vengerai d’eux en écrivant ici que leur
1328
et la margelle d’un puits. La plupart des vitres
sont
cassées. Une poule blanche se promène quelquefois dans la cour. Mais
1329
ans la cour. Mais on m’assure que ces habitations
sont
délaissées depuis deux ans. Plus haut, dans la montagne, un autre mas
1330
usion de fleurs violentes et d’orties. L’ensemble
est
imposant et comme démesuré dans ce paysage de vallons, de collines et
1331
long cri presque humain. La maison la plus proche
est
à une bonne demi-heure. Il n’y a pas de route. On imagine de vivre là
1332
elle. Nous aurions des fusils et des bibles, nous
serions
camisés de rouge, et l’on irait de temps à autre arraisonner les féod
1333
ion, n’aurons-nous fait que l’appeler de loin, ne
sera-t
-elle pour nous qu’une évasion hors de cette société maussade, défaite
1334
int-Esprit ne font qu’un. Vous voyez que l’Église
est
réfutée par l’arithmétique. En effet, prenez l’addition : un, plus un
1335
, — Prenez la multiplication ! cria l’abbé V. qui
était
dans la salle. 70. Que ne connaît pas le grand conférencier littérai
1336
t voir le monde pitoyable : sans ajouter à ce qui
est
, dire ce qui est comme un homme l’a senti, — c’est assez rare. « Ce s
1337
itoyable : sans ajouter à ce qui est, dire ce qui
est
comme un homme l’a senti, — c’est assez rare. « Ce serait si bien si
1338
omme un homme l’a senti, — c’est assez rare. « Ce
serait
si bien si l’on pouvait, chaque soir et chaque matin, écrire dans les
1339
enti…, tout ce qui a pu vous frapper, quels qu’en
soient
le sens, l’esprit, le caractère, la longueur. Je crois bien que cela
1340
que ce que j’écris, par la forme et par le fond,
serait
de nature à modifier la conscience humaine, si celle-ci pouvait être
1341
difier la conscience humaine, si celle-ci pouvait
être
modifiée. » Nulle fiction ; un journal de méditations dans la vie, de
1342
ne avec indifférence, et où tout le monde en fait
est
coupable de tout : du sort des filles publiques, des bourgeois endorm
1343
hant le long du quai aux Fleurs. Mais la prière n’
est
pas un refuge ; elle est un acte d’accusation, et un aveu de chaque h
1344
Fleurs. Mais la prière n’est pas un refuge ; elle
est
un acte d’accusation, et un aveu de chaque homme pour tous les autres
1345
aveu de chaque homme pour tous les autres : « Je
suis
plus près de leur erreur que de ma vérité. » Parfois l’on songe au Ri
1346
ile que l’auteur demande au lecteur pour tous les
êtres
auxquels il est mêlé. Et qu’il l’obtienne à cette profondeur, donne l
1347
emande au lecteur pour tous les êtres auxquels il
est
mêlé. Et qu’il l’obtienne à cette profondeur, donne la mesure d’un ar
1348
. Thème, repris de Lautréamont : « La poésie doit
être
faite par tous. Non par un. » On a mis le poète sur un sommet. Mais v
1349
vulgaire, insupportable, impossible. » La poésie
est
chose commune, communautaire. (Éluard dit d’ailleurs : égalitaire, —
1350
« s’applique… à refuser de servir un ordre qui n’
est
pas le sien ». C’est donc qu’elle veut instaurer un ordre plus grand
1351
re plus grand et pur. « Toutes les tours d’ivoire
seront
démolies, toutes les paroles seront sacrées et l’homme, s’étant enfin
1352
ours d’ivoire seront démolies, toutes les paroles
seront
sacrées et l’homme, s’étant enfin accordé à la réalité qui est sienne
1353
, toutes les paroles seront sacrées et l’homme, s’
étant
enfin accordé à la réalité qui est sienne, n’aura plus qu’à fermer le
1354
t l’homme, s’étant enfin accordé à la réalité qui
est
sienne, n’aura plus qu’à fermer les yeux pour que s’ouvrent les porte
1355
sion de sa proclamation. Que « toutes les paroles
soient
sacrées », c’est la volonté proprement eschatologique des poètes chré
1356
quoi retomber dans le poncif onirique 1925 ? Ce n’
était
pas la peine de lire Feuerbach, cité à la page suivante. Voilà qui es
1357
ire Feuerbach, cité à la page suivante. Voilà qui
est
antimarxiste d’une manière plus valable : « C’est l’espoir ou le dése
1358
hangeront immédiatement. » Ou encore : « Le poète
est
celui qui inspire bien plus que celui qui est inspiré. » Mais peu apr
1359
ète est celui qui inspire bien plus que celui qui
est
inspiré. » Mais peu après l’on dénonce les « ignobles appétits » des
1360
e religion, de patrie ». Les idées de qui ? Si ce
sont
celles que les bourgeois et les staliniens se font de ces réalités, n
1361
s’il le faut.) Et enfin : « Voici que les poètes
sont
des hommes parmi les hommes, voici qu’ils ont des frères. » Et voici
1362
les membres avaient environ la trentaine en 1900
fut
une génération heureuse ; la génération d’après-guerre, en appelant a
1363
le des hommes qui ont aujourd’hui de 25 à 40 ans,
est
une génération particulièrement éprouvée par les circonstances. » D’o
1364
conclusion, M. Benda fit observer que les anciens
étaient
« intellectuels », et que les jeunes se voient contraints par la logi
1365
une » fit remarquer que la génération des anciens
est
essentiellement celle de Barrès, de Maurras, de Sorel, de Péguy, de C
1366
fit observer, en mathématicien, que la gratuité n’
est
pas une méthode scientifique, et que toute pensée est un acte, M. Ben
1367
pas une méthode scientifique, et que toute pensée
est
un acte, M. Benda répliqua qu’il ne s’agissait pas du tout de cela, e
1368
ti, nous apprend tout de même quelque chose. S’il
est
vrai que penser, pour les jeunes, équivaut à gagner de l’argent, M. B
1369
s jeunes, équivaut à gagner de l’argent, M. Benda
est
auprès de nous un grand penseur, mais M. Dekobra est notre maître à t
1370
auprès de nous un grand penseur, mais M. Dekobra
est
notre maître à tous. Et s’il est vrai que celui qui refuse d’endosser
1371
mais M. Dekobra est notre maître à tous. Et s’il
est
vrai que celui qui refuse d’endosser les conséquences de sa vérité pr
1372
vérité dont il s’agit ressemble pas mal au néant.
Soyons
sérieux : la majorité des traits que M. Benda attribue à la jeunesse,
1373
al de « constater » purement et simplement ce qui
est
. Au surplus, M. Benda se trompe quand il croit juger de Sirius. Il es
1374
enda se trompe quand il croit juger de Sirius. Il
est
encore en pleine affaire Dreyfus. Il se vante d’être intemporel, mais
1375
t encore en pleine affaire Dreyfus. Il se vante d’
être
intemporel, mais il n’est guère qu’anachronique. Partisan qui survit
1376
Dreyfus. Il se vante d’être intemporel, mais il n’
est
guère qu’anachronique. Partisan qui survit à sa cause ; et pensée qui
1377
onviendrait de lui donner dans la cité, se trouve
être
posée à l’époque. Dans l’un et l’autre cas, et pour les mêmes raisons
1378
personnalisme entend refaire un ordre humain qui
soit
assez organique et complet pour pouvoir s’opposer valablement aux amb
1379
par un certain ordre d’objets qu’elle se choisit,
est
aussi le produit d’une époque. C’est pourquoi la question d’une litté
1380
e l’une et de l’autre, de l’une par l’autre. Ce n’
est
donc pas à une enquête que nous allons nous livrer cette année, mais
1381
ons ces termes au sens le plus large — qui pour n’
être
point asservis aux disciplines extérieures d’un parti, ne considèrent
1382
onséquence. Il existe des jeunes écrivains qui ne
sont
pas embrigadés mais qui savent que toute œuvre engage, et qui accepte
1383
ditions de leur création. Et nous pensons qu’il n’
est
pas vain de le prouver en les réunissant ici, fût-ce par le lien tout
1384
est pas vain de le prouver en les réunissant ici,
fût
-ce par le lien tout provisoire d’une sorte d’anthologie mensuelle. S’
1385
ontre lequel elle s’édifie. Je ne pense pas qu’il
soit
souhaitable d’en dire plus, au seuil de la série de « témoignages » t
1386
nborg (septembre 1937)as Je ne pense pas qu’il
soit
utile de parler dans Esprit de tout ce qui vient de paraître, sous pr
1387
s de la production littéraire. Celle-ci se trouve
être
en fait d’une inquiétante continuité, pour des raisons plus commercia
1388
présentent un sens quelconque pour notre action —
soit
qu’ils militent pour ou contre elle, soit qu’il y ait intérêt à faire
1389
ction — soit qu’ils militent pour ou contre elle,
soit
qu’il y ait intérêt à faire voir que les écrits les plus « indifféren
1390
e curiosité intellectuelle. Bien au contraire. Il
est
totalement inutile de parler du dernier roman, dont tout le monde par
1391
e mois le procès d’une littérature qui se vante d’
être
« insignifiante » — c’est-à-dire sans but, privée de « sens » — et n’
1392
équipe pour les suivre. Le professeur Martin Lamm
est
de l’Académie suédoise ; le préfacier, Paul Valéry, est de l’Académie
1393
l’Académie suédoise ; le préfacier, Paul Valéry,
est
de l’Académie française. Ces deux illustrations officielles exercent
1394
eté avec mépris et pitié. Mais la gloire posthume
est
un « titre » ; « l’intérêt » s’accumule avec le temps ; l’œuvre enfin
1395
l’objectivité » de l’exposé… Le cas de M. Valéry
est
très différent. Si étranger qu’on le connaisse aux spéculations mysti
1396
amment que la doctrine théosophique de Swedenborg
est
le système plus ou moins disparate qu’il a déduit de ses visions fame
1397
raités mystiques de Swedenborg — dont l’influence
fut
si profonde sur les meilleurs esprits de la période goethéenne — sera
1398
les meilleurs esprits de la période goethéenne —
seraient
l’expression d’un effort admirable pour résoudre l’antinomie du ratio
1399
de ce genre extrêmement ennuyeux à lire, quel que
soit
l’intérêt du sujet, donc à son détriment, surtout lorsqu’il s’agit d’
1400
mportance. Ensuite, cette impartialité ne saurait
être
honnête — bien que l’honnêteté soit justement le prétexte qu’elle se
1401
té ne saurait être honnête — bien que l’honnêteté
soit
justement le prétexte qu’elle se donne — s’appliquant à un ordre de s
1402
s premières extases de S. et conclut ainsi : « Il
est
de toute évidence que cet incident ne fut autre chose qu’une perte de
1403
: « Il est de toute évidence que cet incident ne
fut
autre chose qu’une perte de connaissance, etc. » Ailleurs il parle d’
1404
la logomachie particulière à l’époque de M. Lamm
serait
plus « objective » et « scientifique » que la doctrine de Swedenborg,
1405
quer. Exemples : « Les visions dont il s’agit ici
sont
vraisemblablement des hallucinations hypnagogiques, genre de visions
1406
allucinations hypnagogiques, genre de visions qui
sont
loin d’être rares, même dans des états psychiques normaux. » (?) Ou :
1407
s hypnagogiques, genre de visions qui sont loin d’
être
rares, même dans des états psychiques normaux. » (?) Ou : « Il est in
1408
ans des états psychiques normaux. » (?) Ou : « Il
est
infiniment probable que ces visions, de même que celles qu’on note ch
1409
qu’on note chez la plupart des mystiques, doivent
être
considérées comme des pseudo-hallucinations, qui, à la différence des
1410
u non, on nous dit seulement, modestement, que ce
sont
de pseudo-hallucinations. Ce genre de pseudo-explications, édictées a
1411
es et les psychologues d’avant-guerre — son livre
est
de 1915 — déclare que les visions intérieures de Swedenborg « ne sont
1412
re que les visions intérieures de Swedenborg « ne
sont
pas autre chose » que des photismes, « phénomènes d’automatisme senso
1413
wedenborg affirme que l’origine de toute matière,
est
un « point » sans poids ni étendue, point mathématique, donc non maté
1414
athématique, donc non matériel. Cette vue pouvait
être
condamnée en toute tranquillité avant les découvertes de la mécanique
1415
ceci tendait à prouver que le problème mystique n’
est
nullement justiciable de « la science » d’aucune époque, et qu’il se
1416
rsonnalisation », ou d’anéantissement du moi, qui
est
sans conteste celui de tous les mystiques, orientaux ou occidentaux,
1417
éritable opposition. L’anéantissement du moi peut
être
recherché comme la suppression radicale de toute conscience personnel
1418
vocation distincte. Dans la mesure où cet effort
est
réel et aboutit — ce qui est encore une question — il aboutit évidemm
1419
mesure où cet effort est réel et aboutit — ce qui
est
encore une question — il aboutit évidemment à la négation absolue du
1420
solue du personnalisme, chrétien ou humaniste. Ce
serait
— je simplifie — le cas des mystiques orientales, dont l’influence es
1421
le cas des mystiques orientales, dont l’influence
est
loin d’être négligeable chez les jeunes écrivains français et belges,
1422
mystiques orientales, dont l’influence est loin d’
être
négligeable chez les jeunes écrivains français et belges, et s’allie
1423
ctiviste. Mais l’anéantissement du moi peut aussi
être
compris comme un effort de l’homme pour se libérer de sa personnalité
1424
propres, individuelles, individualistes. « Le moi
est
anéanti, écrit M. Lamm, tous les traits de la personnalité sont volon
1425
écrit M. Lamm, tous les traits de la personnalité
sont
volontairement effacés. c’est ce que Madame Guyon appelle “la mort my
1426
mais où il trouve enfin sa plus profonde raison d’
être
. Or il semble bien que la mystique occidentale, catholique ou protest
1427
ccidentale, catholique ou protestante (Swedenborg
était
luthérien72, comme Hamann) ait suivi dans l’ensemble cette deuxième v
1428
a dialectique individu-personnalité-personne, qui
est
fondamentale pour tout notre mouvement. Je me contenterai pour aujour
1429
n luthéranisme. Il faudrait d’abord expliquer qui
était
Luther, si mal connu du public « cultivé » français… Et préciser mes
1430
ur voir venir, et puis vous vous apercevez que ce
sont
vos réponses elles-mêmes, celles que déjà vous étiez prêt à lui donne
1431
nt vos réponses elles-mêmes, celles que déjà vous
étiez
prêt à lui donner, qui se trouvent mises en question par sa méfiance
1432
ises en question par sa méfiance paysanne. Cela n’
est
pas sans irriter certains. Pour moi, je ne sais rien de plus salutair
1433
u « plan moral », comme nous aimons à dire. Elles
sont
d’usage interne, individuel. Les doutes que Ramuz nous proposent touc
1434
ut commun que la sécurité et le profit ? Pourquoi
sommes
-nous confédérés ? Et pourquoi, enfin, sommes-nous neutres ? Je voudr
1435
quoi sommes-nous confédérés ? Et pourquoi, enfin,
sommes
-nous neutres ? Je voudrais souligner ceci : que c’est aux Suisses, f
1436
garde en même temps le souci d’expliquer qui nous
sommes
à nos voisins, c’est peut-être que notre lot, en tant que Suisses, et
1437
n en tant que Vaudois, ou Genevois, ou Zurichois,
est
d’exister en fonction de ces voisins. Je vois l’équivoque de la phras
1438
ne dis pas que cette interprétation désobligeante
soit
toujours fausse dans le fait. Mais on peut et on doit concevoir une t
1439
it concevoir une tout autre forme d’existence qui
serait
« en fonction des voisins », et qui serait tout de même, ou par là mê
1440
ce qui serait « en fonction des voisins », et qui
serait
tout de même, ou par là même, une existence, au sens plein de ce term
1441
amuz. Cela revient à dire : a-t-elle une raison d’
être
? J’essaierai de répondre ici du point de vue qui me paraît le plus f
1442
du personnalisme. ⁂ La question de la neutralité
est
peut-être la plus importante qu’il faille poser à la Suisse. Parce qu
1443
, que l’état de fait créé par le traité de Vienne
est
aussi mal interprété par ses garants que par ses soi-disant bénéficia
1444
l’on considère volontiers que la neutralité nous
est
due, comme l’air et les beautés de la nature. Privilège inconditionne
1445
s et fortes raisons de notre neutralité, celle-ci
sera
balayée un jour prochain avec les vieux chiffons de papier qui sont c
1446
ur prochain avec les vieux chiffons de papier qui
sont
censés la garantir. Quand bien même nous aurions voté des milliards d
1447
pays comme le nôtre, la conscience de sa raison d’
être
, et le prestige qui s’y attache. On croit souvent, surtout chez nous,
1448
dans l’équilibre européen. Et quand bien même il
serait
démontré que la Suisse ne peut plus prétendre à jouer un rôle analogu
1449
analogue, croit-on que son droit à rester neutre
soit
suffisamment garanti du seul fait qu’elle le juge naturel ? La meille
1450
leure garantie d’un droit, la seule peut-être qui
soit
efficace, c’est l’exercice réel de la charge dont ce droit représente
1451
contrepartie. Le droit de propriété, par exemple,
est
à la fois la condition d’une entreprise personnelle, et la juste cont
1452
des coupons de papier dans une banque, ses droits
sont
ressentis comme des abus. Ils cessent dès lors d’être assurés en fait
1453
ressentis comme des abus. Ils cessent dès lors d’
être
assurés en fait ; comme le démontre l’histoire récente du capitalisme
1454
. Trop assurés dans un statut dont les commodités
sont
surtout matérielles, et les obligations surtout spirituelles, ils se
1455
neutralité dans le cadre nouveau de l’Europe. Il
est
fatal que ces dilemmes se multiplient à l’avenir. Le fameux équilibre
1456
ement bouleversé et réorganisé, au sein duquel il
est
urgent que nous trouvions une place nettement redéfinie. Bref, tout n
1457
Europe d’aujourd’hui. Notre chance et nos risques
sont
là. Rien ne me paraît plus frappant que la convergence finale des f
1458
lle dans ces pages une seule et même réalité, qui
est
la réalité fédéraliste. Or il se trouve que notre position personnali
1459
Or il se trouve que notre position personnaliste
est
fondamentalement liée à une forme fédérative de l’État et de la cultu
1460
te convergence, cette rencontre idéale, me paraît
être
la grande leçon qui doit se dégager de notre effort. La mission essen
1461
notre effort. La mission essentielle de la Suisse
est
une mission personnaliste au premier chef : sauvegarder une Weltansch
1462
ndent mutuellement75. Cette conception du monde n’
est
pas nouvelle ; elle constitue l’apport spécifique de l’Europe à l’hum
1463
st autour d’elle et grâce à elle que l’Occident s’
est
édifié, et qu’il a dominé le monde. Elle n’est nullement, comme certa
1464
s’est édifié, et qu’il a dominé le monde. Elle n’
est
nullement, comme certains voudraient le croire, une espèce de juste m
1465
e bourgeois et du collectivisme dictatorial. Elle
est
la position centrale, à la fois naturelle et spirituelle, dont l’indi
1466
rbides. Et dès lors, la mission de la Suisse peut
être
définie à l’échelle de l’Europe : la Suisse doit être la gardienne de
1467
définie à l’échelle de l’Europe : la Suisse doit
être
la gardienne de ce principe central, fédératif ; et elle ne peut être
1468
ce principe central, fédératif ; et elle ne peut
être
autre chose, de par sa nature même, physique et historique. Gardiens
1469
et de celui de la Croix-Rouge, gardiens de ce qui
est
européen et commun à toutes les nations ; étant eux-mêmes dans la mes
1470
qui est européen et commun à toutes les nations ;
étant
eux-mêmes dans la mesure où ils sont cela, dans la mesure où ils exis
1471
s nations ; étant eux-mêmes dans la mesure où ils
sont
cela, dans la mesure où ils existent pour l’ensemble, — voilà les Sui
1472
s là je ne sais quelle manière d’idéaliser ce qui
est
mesquin. Car ce qui est mesquin chez nous, n’est en fait qu’une dégra
1473
anière d’idéaliser ce qui est mesquin. Car ce qui
est
mesquin chez nous, n’est en fait qu’une dégradation de l’idéal qui de
1474
est mesquin. Car ce qui est mesquin chez nous, n’
est
en fait qu’une dégradation de l’idéal qui devrait nous unir. La premi
1475
ait nous unir. La première devise des Suisses, ce
fut
« Un pour tous, tous pour un ». C’est la formule la plus frappante et
1476
face à l’Europe son droit à la neutralité. Elle n’
est
réellement intangible que parce qu’elle est l’expérience témoin, l’an
1477
lle n’est réellement intangible que parce qu’elle
est
l’expérience témoin, l’annonciatrice d’une Europe fédérée dont elle p
1478
naux — et spécialement dans les cantons romands —
est
en contradiction constante avec notre neutralité, et ce qui est pire,
1479
iction constante avec notre neutralité, et ce qui
est
pire, avec la mission même qui justifie cette neutralité. Elle se per
1480
elle y court moins de risques immédiats76. Rien n’
est
plus agaçant pour l’étranger que cette espèce de suffisance moralisan
1481
uand nos journaux font la leçon à Léon Blum, ce n’
est
pas — comme ce pourrait l’être — au nom de la démocratie réelle, comm
1482
n à Léon Blum, ce n’est pas — comme ce pourrait l’
être
— au nom de la démocratie réelle, communale et fédéraliste, mais au n
1483
éraliste, mais au nom d’intérêts de classe qui ne
sont
ni démocratiques ni nationaux. La même critique peut d’ailleurs s’adr
1484
pourra dire que la Suisse a retrouvé sa raison d’
être
, et d’être neutre. Quoi de plus comique et de plus irritant que d’adm
1485
e que la Suisse a retrouvé sa raison d’être, et d’
être
neutre. Quoi de plus comique et de plus irritant que d’admirer les fa
1486
ue d’admirer les fascismes étrangers alors qu’ils
sont
les formes politiques les plus violemment centralistes, les plus cont
1487
but d’exalter leur mission nationale. Quelles que
soient
les réserves de fond qu’il y ait à faire, et je les fais, sur l’authe
1488
es missions qu’ils proclament à son de trompe, il
est
clair que leur force est là, et qu’en les admirant, en les enviant, n
1489
ment à son de trompe, il est clair que leur force
est
là, et qu’en les admirant, en les enviant, nous sommes précisément en
1490
t là, et qu’en les admirant, en les enviant, nous
sommes
précisément en train de perdre ce qu’ils ont trouvé, le sens de la ré
1491
ation. L’autorité qu’une certaine presse suisse s’
était
acquise à l’étranger reposait justement sur le fait que nous étions s
1492
’étranger reposait justement sur le fait que nous
étions
seuls à juger dans une perspective européenne. (Nos trois cultures no
1493
la manière des partisans français ou allemands, n’
est
plus qu’une presse d’intérêt local. Là encore, nos chances sont uniqu
1494
ne presse d’intérêt local. Là encore, nos chances
sont
uniques, nous pourrions être les premiers. Mais à cette seule conditi
1495
encore, nos chances sont uniques, nous pourrions
être
les premiers. Mais à cette seule condition : de savoir au nom de quoi
1496
savoir au nom de quoi nous parlons. Et ce ne peut
être
qu’au nom de l’avenir de l’Europe, puisque c’est cela que nous sommes
1497
l’avenir de l’Europe, puisque c’est cela que nous
sommes
dès maintenant. 2. — La culture. D’autres en ont parlé plus longuemen
1498
ndre chez nos intellectuels à l’endroit de ce qui
est
« germanique » dans notre vie confédérale. Réaction de faiblesse, et
1499
les mêmes raisons de construire des Bastions de l’
Est
, la situation est bien plus favorable. Mais il faudrait savoir l’envi
1500
de construire des Bastions de l’Est, la situation
est
bien plus favorable. Mais il faudrait savoir l’envisager dans sa gran
1501
Elles avaient d’autres choses à faire. Elles ont
été
grandes tour à tour, dans la musique ou la peinture, la poésie ou la
1502
ure, la poésie ou la philosophie. Et peut-être ne
serons
-nous jamais aussi grands qu’aucune d’entre elles dans aucun de ces do
1503
de ces domaines particuliers. Mais notre grandeur
est
ailleurs : elle est dans l’harmonie intime, ou dans l’opposition trag
1504
iculiers. Mais notre grandeur est ailleurs : elle
est
dans l’harmonie intime, ou dans l’opposition tragique à l’intérieur d
1505
vocation. Neutralité, sur le plan culturel, ce n’
est
pas mélange, ni accommodation et encore moins imitation médiocre. Ce
1506
modation et encore moins imitation médiocre. Ce n’
est
pas forcément cela. C’est au contraire (ou plutôt ce doit être) un co
1507
ément cela. C’est au contraire (ou plutôt ce doit
être
) un combat perpétuel, exaltant, le battement du cœur de l’Europe. Vou
1508
’Europe. Vouloir créer une « culture suisse », ce
serait
trahir notre mission, ce serait le péché même d’idolâtrie qui consist
1509
ture suisse », ce serait trahir notre mission, ce
serait
le péché même d’idolâtrie qui consiste dans son principe à adorer les
1510
je pas jusqu’à dire que notre grandeur culturelle
est
de n’avoir pas de culture suisse, mais seulement une culture européen
1511
essus un Gottfried Keller et un Ramuz. Ceux-là ne
sont
Européens que parce qu’ils sont d’abord, et génialement, Suisse allem
1512
Ramuz. Ceux-là ne sont Européens que parce qu’ils
sont
d’abord, et génialement, Suisse allemand et Vaudois rhodanien. Mais d
1513
« enracinés » ne font pas une culture suisse. Ce
sont
deux vocations personnelles, et la culture suppose une tradition, une
1514
, et je m’en irrite au moins autant que lui. (Que
serait
-ce si je vivais en Suisse ?) Mais je pense qu’on n’atteint la grandeu
1515
mais au niveau de la vraie culture, nous pouvons
être
les moyens de la grandeur future de l’Europe. (Il y a là plus qu’un c
1516
ure de l’Europe. (Il y a là plus qu’un calembour,
soit
dit pour essayer de rassurer ces gens sérieux que sont les Suisses mo
1517
dit pour essayer de rassurer ces gens sérieux que
sont
les Suisses moyens — et même les autres.) 3. — Avec l’armée, je revie
1518
ée, je reviens au concret, ou du moins à ce qu’on
tient
pour tel dans un pays où les valeurs intellectuelles passent plus qu’
1519
ns n’ont moins d’action sur la vie politique.) Il
est
clair, et on le dit assez pour que je n’aie pas à insister, que l’arm
1520
as à insister, que l’armée d’un petit pays neutre
est
très facilement justifiable, aux yeux du pacifiste le plus ardent. El
1521
peut livrer qu’une « guerre juste », puisqu’elle
est
incapable d’attaquer. Elle ne joue que le rôle d’une garde, et par là
1522
oue que le rôle d’une garde, et par là même, elle
est
conforme à notre vocation profonde. Garde montée autour des cols, dir
1523
ure des frontières par les habitants de la région
sont
absolument dans la ligne du fédéralisme réel78. Mais que valent dans
1524
s écoles militaires. Et c’est bien ce que devrait
être
une armée consciente de son rôle particulier de garde neutre. Mais je
1525
tus dévient ou agissent à contre-fin. Que l’armée
soit
proche du peuple, cela doit avoir pour effet idéal de « civiliser » l
1526
nuances dans l’atmosphère de notre pays, mais il
est
important de les percevoir avant qu’elles ne deviennent trop frappant
1527
avant qu’elles ne deviennent trop frappantes. Il
est
important de rappeler que l’armée d’une fédération n’a pas de raison
1528
que l’armée d’une fédération n’a pas de raison d’
être
en soi, si l’on ne croit pas à cette fédération et à la tâche qui lui
1529
lui incombe au milieu de voisins redoutables. Il
est
important de rappeler que l’armée étant chose fédérale, ne peut être
1530
utables. Il est important de rappeler que l’armée
étant
chose fédérale, ne peut être l’armée d’une classe, de ses intérêts, d
1531
appeler que l’armée étant chose fédérale, ne peut
être
l’armée d’une classe, de ses intérêts, de son ordre. Il n’y aurait au
1532
t pas toujours proportionné au sens des raisons d’
être
de la Suisse dont témoignent ces mêmes milieux. Ce serait à croire pa
1533
e la Suisse dont témoignent ces mêmes milieux. Ce
serait
à croire parfois que pour être un bon Suisse, il faut et il suffit qu
1534
êmes milieux. Ce serait à croire parfois que pour
être
un bon Suisse, il faut et il suffit que l’on soit un bon soldat. Peut
1535
être un bon Suisse, il faut et il suffit que l’on
soit
un bon soldat. Peut-être oserons-nous rappeler qu’il existe d’autres
1536
r à revêtir l’uniforme. Après tout, notre armée n’
est
qu’un aspect de notre défense fédérale. Et un aspect subordonné. Si l
1537
ne crois pas d’ailleurs que les armes matérielles
soient
pour nous une défense suffisante. Je vois bien qu’elles sont nécessai
1538
ous une défense suffisante. Je vois bien qu’elles
sont
nécessaires. Mais je vois aussi qu’avec la cinquantième partie de l’a
1539
nse nationale dans un pays dont la vraie raison d’
être
est en fin de compte spirituelle, devrait comporter normalement à côt
1540
ationale dans un pays dont la vraie raison d’être
est
en fin de compte spirituelle, devrait comporter normalement à côté du
1541
fications parfois mythiques à des réalités qui se
sont
constituées par le jeu d’intérêts et de routines médiocres. Vous donn
1542
des rangs devant la menace extérieure81. » Rien n’
est
plus vrai, et c’est très consciemment que nous opérons ce redressemen
1543
ment que nous opérons ce redressement urgent ! Qu’
est
-ce donc qu’une révolution, sinon justement un effort pour restaurer l
1544
ivant et pur contre les ennemis du dedans, afin d’
être
fort au-dehors. L’esprit bourgeois, l’économie capitaliste, une pares
1545
à nous réduire à nos proportions matérielles, qui
sont
petites, qui sont médiocres. J’ai cité le cas de la presse, se réduis
1546
os proportions matérielles, qui sont petites, qui
sont
médiocres. J’ai cité le cas de la presse, se réduisant elle-même au r
1547
tent à notre action des objectifs immédiats : ils
seront
révolutionnaires au sens que je viens de définir. Mais avant toute ac
1548
la passion, des communications fécondes entre les
êtres
, une circulation des cultures, une respiration des âmes. Et ceci qui
1549
s cultures, une respiration des âmes. Et ceci qui
est
le plus important : des possibilités d’imaginer, donc d’innover et de
1550
ai tout ce qui précède en une seule phrase : Nous
sommes
chargés symboliquement de la garde du Saint-Gothard : mais c’est pour
1551
la renaissance possible de leur grandeur… 78. Il
est
curieux de noter, à ce propos, que le groupe de L’Ordre nouveau avait
1552
à la hiérarchie des valeurs dans la cité. 81. Ce
fut
le cas en 1814-1815, lorsque les députés de la Confédération demandèr
1553
38)av Avertissement Les pages qui suivent
sont
extraites d’un ouvrage qui paraîtra sous ce titre : L’Amour et l’Occ
1554
gendes primitives de Tristan et Iseut, l’auteur a
été
conduit à rechercher les origines religieuses de ce roman, dont l’inf
1555
xactement assimilable à celle d’un mythe. Tristan
est
un roman « courtois ». La courtoisie est née dans le Midi au xiie si
1556
Tristan est un roman « courtois ». La courtoisie
est
née dans le Midi au xiie siècle, sous l’influence de l’hérésie catha
1557
fluence de l’hérésie cathare ou albigeoise. Or il
est
établi, de nos jours, que les cathares étaient manichéens. Selon leur
1558
Or il est établi, de nos jours, que les cathares
étaient
manichéens. Selon leur foi, le monde de la matière est l’œuvre d’un m
1559
anichéens. Selon leur foi, le monde de la matière
est
l’œuvre d’un mauvais Démiurge, retenant les âmes dans les Ténèbres. L
1560
s dans les Ténèbres. La sexualité, loi des corps,
est
une entrave à l’envol spirituel vers le monde incréé de la Lumière. L
1561
de la Lumière. L’Amour mystique, dont le symbole
était
la « Dame des pensées » dans la lyrique des troubadours, suppose donc
1562
considérée par eux comme une maladie, la passion
sera
désormais le grand sujet d’exaltation de la littérature occidentale.
1563
on de la littérature occidentale. Son vocabulaire
sera
repris par les mystiques orthodoxes. Sa rhétorique, d’origine sacrée,
1564
e) que l’on décrit dans le présent chapitre. On s’
est
efforcé de remédier par quelques notes aux obscurités qu’entraînaient
1565
en l’opposition. Aux yeux de l’Église, l’adultère
était
tout à la fois un sacrilège, un crime contre l’ordre naturel et un cr
1566
Testament, par exemple, une descendance nombreuse
est
signe d’élection, tandis que pour saint Paul, celui qui reste vierge
1567
e, même chrétiennement. L’hérésie manichéenne qui
est
à l’origine de la cortezia du Midi s’opposait au mariage catholique s
1568
er. Elle niait tout d’abord le sacrement, comme n’
étant
établi par aucun texte univoque de l’Évangile83. Elle condamnait la p
1569
collectif84. Mais le fondement de ces trois refus
était
en vérité la doctrine de l’Amour, c’est-à-dire de l’Éros divinisant,
1570
l’adultère de Tristan reste une faute parce qu’il
est
consommé dans la chair (et non point parce qu’il lèse le mariage), ma
1571
que la morale. Ce qui, pour le croyant manichéen,
était
l’expression dramatique du combat de la foi et du monde, devient alor
1572
Iseut, vit un roman, et se rend admirable… Ce qui
était
« faute » et ne pouvait donner lieu qu’à des commentaires édifiants s
1573
e laquelle nous vivons de deux morales dont l’une
est
héritée de l’orthodoxie religieuse, mais ne s’appuie plus sur une foi
1574
ous les adolescents de la bourgeoisie occidentale
sont
élevés dans l’idée du mariage, mais en même temps se trouvent baigner
1575
ille allusions quotidiennes, dont le sous-entendu
est
à peu près que la passion est l’épreuve suprême, que tout homme doit
1576
ont le sous-entendu est à peu près que la passion
est
l’épreuve suprême, que tout homme doit un jour la connaître, et que l
1577
it un jour la connaître, et que la vie ne saurait
être
à plein vécue que par ceux qui « ont passé par là ». Or la passion et
1578
« ont passé par là ». Or la passion et le mariage
sont
par essence incompatibles. Leurs origines et leurs finalités s’exclue
1579
nos « sécurités » sociales. En d’autres temps, ce
fut
la fonction du mythe85 que d’ordonner cette anarchie latente et de la
1580
le d’exutoire, rôle civilisateur. Mais le mythe s’
est
déprimé et profané en même temps que les formes sociales dont il tira
1581
problème, contribuent à le rendre insoluble. Ils
sont
les signes de la crise, mais aussi de notre impuissance à la réduire
1582
s sacrées. Le mariage, chez les peuples païens, s’
est
toujours entouré d’un rituel dont nos institutions gardèrent longtemp
1583
s en haut de forme et « déclaration » officielle,
est
aussi démodée que les crinolines. Et la majorité des couples n’éprouv
1584
de sang, d’intérêts familiaux, et même d’argent,
sont
en train de passer au second plan dans les pays démocratiques, et par
1585
pithalamiques se simplifient ou disparaissent. Il
est
curieux de noter que des coutumes d’origine lointaine et sacrée telle
1586
e siècle, le thème du « Coucher de la mariée » n’
est
plus qu’une occasion d’anodines galanteries picturales. De nos jours
1587
repousse avec horreur. Car l’engagement religieux
est
pris « pour le temps et l’éternité », c’est-à-dire qu’il ne tient auc
1588
r le temps et l’éternité », c’est-à-dire qu’il ne
tient
aucun compte des variations de tempérament, de caractère, de goûts et
1589
Idée moderne du bonheur Le mariage, cessant d’
être
garanti par un système de contraintes sociales, ne peut plus se fonde
1590
conjoints dans le cas le plus favorable. Or s’il
est
assez difficile de définir en général le bonheur, le problème devient
1591
insoluble dès que s’y ajoute la volonté moderne d’
être
le maître de son bonheur, ou ce qui revient peut-être au même, de sen
1592
i revient peut-être au même, de sentir de quoi il
est
fait, de l’analyser et de le goûter afin de pouvoir l’améliorer par d
1593
t le succès caractérise l’état moral de l’époque,
est
à la fois de nous obséder par l’idée d’un bonheur facile, et du même
1594
bonheur ne saurait s’établir, tant que l’homme ne
sera
pas Dieu. Le bonheur est une Eurydice : on l’a perdu dès qu’on veut l
1595
ir, tant que l’homme ne sera pas Dieu. Le bonheur
est
une Eurydice : on l’a perdu dès qu’on veut le saisir. Il ne peut vivr
1596
rt dans la revendication. C’est qu’il dépend de l’
être
et non de l’avoir : les moralistes de tous les temps l’ont répété, et
1597
Tout bonheur que l’on veut sentir, que l’on veut
tenir
à sa merci — au lieu d’y être comme par grâce — se transforme instant
1598
tir, que l’on veut tenir à sa merci — au lieu d’y
être
comme par grâce — se transforme instantanément en une absence insuppo
1599
e morbide — ou l’intention secrète de tricher. Il
est
probable que cette intention, ou cet espoir, d’ailleurs le plus souve
1600
voltes de l’ennui. On n’ignore pas que la passion
serait
un malheur — mais on pressent que ce serait un malheur plus beau et p
1601
ssion serait un malheur — mais on pressent que ce
serait
un malheur plus beau et plus « vivant » que la vie normale, plus exal
1602
onheur »… Ou l’ennui résigné, ou la passion : tel
est
le dilemme qu’introduit dans nos vies l’idée moderne du bonheur. Cela
1603
vre ! » Dès le xiie siècle provençal, l’amour
était
considéré comme noble. Non seulement il ennoblissait mais encore il a
1604
ler d’une féodalité démocratique en Languedoc. Il
est
clair qu’un tel jugement se fonde sur une équivoque : car l’Amour don
1605
une équivoque : car l’Amour dont il s’agissait n’
était
rien d’autre que la foi cathare, et l’accession d’un roturier à la ch
1606
are, et l’accession d’un roturier à la chevalerie
était
un symbole mystique bien plutôt qu’une dérogation aux coutumes du dro
1607
e servit aux amoureux profanes. La conséquence en
fut
l’extravagante idéalisation de l’attrait sexuel, sa transformation en
1608
e idée toute moderne et romantique que la passion
est
une noblesse morale, qu’elle nous met au-dessus des lois. Celui qui a
1609
sur l’ordre social établi. Que la passion profane
soit
une absurdité, une forme d’intoxication, une « maladie de l’âme » com
1610
’âme » comme pensaient les Anciens, tout le monde
est
prêt à le reconnaître, c’est un des lieux communs les plus usés des m
1611
lus le croire, à l’âge du film et du roman — nous
sommes
tous plus ou moins intoxiqués, — et cette nuance est décisive. Le mod
1612
tous plus ou moins intoxiqués, — et cette nuance
est
décisive. Le moderne, l’homme de la passion, attend de l’amour fatal
1613
r ! Je vais y entrer, je vais y monter, je vais y
être
« transporté » ! La sempiternelle illusion, la plus naïve et — j’ai b
1614
Mais l’homme de la passion cherche au contraire à
être
possédé, dépossédé, jeté hors de soi, dans l’extase. Et de fait, c’es
1615
st la « beauté standard ». De nos jours — et ce n’
est
qu’un début —, un homme qui se prend de passion pour une femme qu’il
1616
omme qui se prend de passion pour une femme qu’il
est
seul à voir belle, est présumé neurasthénique. (Dans x années, on le
1617
ssion pour une femme qu’il est seul à voir belle,
est
présumé neurasthénique. (Dans x années, on le fera soigner.) Certes,
1618
ion, de même que chaque époque de la mode préfère
soit
la tête, soit le buste, soit la croupe, soit la ligne sportive. Mais
1619
ue chaque époque de la mode préfère soit la tête,
soit
le buste, soit la croupe, soit la ligne sportive. Mais le panurgisme
1620
e de la mode préfère soit la tête, soit le buste,
soit
la croupe, soit la ligne sportive. Mais le panurgisme esthétique atte
1621
fère soit la tête, soit le buste, soit la croupe,
soit
la ligne sportive. Mais le panurgisme esthétique atteint de nos jours
1622
t au moins tous les six mois. Supposons, comme il
est
probable, qu’il se fixe enfin sur un type, compromis entre ce qu’il a
1623
plus secrète nostalgie88, l’Iseut du rêve ; elle
est
mariée, naturellement. Qu’elle divorce, et il l’épousera ! Avec elle,
1624
Qu’elle divorce, et il l’épousera ! Avec elle, ce
sera
la « vraie vie », ce sera l’épanouissement de ce Tristan qu’il porte
1625
pousera ! Avec elle, ce sera la « vraie vie », ce
sera
l’épanouissement de ce Tristan qu’il porte en soi comme son génie cac
1626
a révélation mythique. (Pas même la couronne s’il
est
roi.) Voilà le vrai « mariage d’amour » moderne : le mariage avec la
1627
fois épousée ? Une nostalgie que l’on chérissait
est
-elle encore désirable une fois rejointe ? Car Iseut, c’est toujours l
1628
t fuyant, évanouissant et presque hostile dans un
être
, cela même qui invite à la poursuite et qui éveille l’avidité de poss
1629
l’homme en proie au mythe. C’est la femme dont on
est
séparé, et qu’on perd en la possédant. Alors commence une « passion »
1630
e combat. On imagine différente la femme que l’on
tient
dans ses bras, on la déguise et on l’éloigne en rêve, on s’acharne à
1631
rêve, on s’acharne à dépayser les sentiments qui
sont
en train de se nouer dans une durée étale et trop sereine. C’est qu’i
1632
es où la femme perd son « attrait » parce qu’il n’
est
plus d’obstacles entre elle et lui. Pitoyables victimes d’un mythe do
1633
les victimes d’un mythe dont l’horizon mystique s’
est
refermé depuis longtemps. Pour Tristan, Iseut n’était rien que le sym
1634
t refermé depuis longtemps. Pour Tristan, Iseut n’
était
rien que le symbole du Désir lumineux : son au-delà, c’était la mort
1635
ient tourmenter sans lui révéler son secret, il n’
est
d’au-delà de la passion que dans une passion nouvelle — dans le tourm
1636
oursuite d’apparences toujours plus fugitives. Il
était
de la nature essentielle de la passion mystique d’être sans fin terre
1637
de la nature essentielle de la passion mystique d’
être
sans fin terrestre — et c’est par là que cette passion se détachait d
1638
la conscience douloureuse — pour le moderne, ce n’
est
plus que le retour sempiternel d’une ardeur constamment déçue. Le myt
1639
où se complaisent les modernes, ne sait plus même
être
fidèle, puisqu’elle n’a plus pour fin la transcendance. Elle épuise l
1640
tion d’un Tristan qui a plusieurs Iseut ? Or ce n’
est
pas lui qu’il convient d’accuser, mais il est la victime d’un ordre s
1641
e n’est pas lui qu’il convient d’accuser, mais il
est
la victime d’un ordre social où les obstacles se sont dégradés. Ils c
1642
la victime d’un ordre social où les obstacles se
sont
dégradés. Ils cèdent trop vite, ils cèdent avant que l’expérience ait
1643
sives. Les catégories se détruisent. L’aventure n’
est
plus même exemplaire. Seul le Don Juan mythique échappait à cette con
1644
ontraire de vivre ! C’est un appauvrissement de l’
être
, une ascèse sans au-delà, une impuissance à aimer le présent sans l’i
1645
Mais nous avons perdu la transcendance. La mort n’
est
plus qu’une métaphore, couvrant une lente consomption, une moindre-vi
1646
hez les modernes, et d’une espèce de maladie de l’
être
. Presque toutes les complications qui servent d’intrigues à nos auteu
1647
non plus chez l’autre seulement — la coquetterie
est
un peu simple — mais on en vient à désirer que l’être aimé soit infid
1648
un peu simple — mais on en vient à désirer que l’
être
aimé soit infidèle pour qu’on puisse de nouveau le poursuivre et « re
1649
mple — mais on en vient à désirer que l’être aimé
soit
infidèle pour qu’on puisse de nouveau le poursuivre et « ressentir »
1650
fois de plus, que le mythe des amants « ravis » s’
est
dégradé en perdant sa mystique. Le ravissement n’est plus qu’une sens
1651
dégradé en perdant sa mystique. Le ravissement n’
est
plus qu’une sensation, — n’aboutit pas. On retombe sans cesse au mond
1652
etombe sans cesse au monde de la comparaison, qui
est
le monde de la jalousie. « Hommes et femmes dès qu’ils passent leur s
1653
’est que, passant « leur seuil », sortant de leur
être
propre et du présent tel qu’il leur est donné, incapables d’accepter
1654
de leur être propre et du présent tel qu’il leur
est
donné, incapables d’accepter l’autre tel qu’il est, parce qu’il faudr
1655
st donné, incapables d’accepter l’autre tel qu’il
est
, parce qu’il faudrait tout d’abord s’accepter, ils ne voient de toute
1656
i la fidélité : c’est l’acceptation décisive d’un
être
en soi, limité et réel, que l’on choisit non comme prétexte à s’exalt
1657
re de fatalités psychologiques dont les effets ne
sont
plus contestables. Que l’on soit partisan de l’une ou de l’autre, il
1658
nt les effets ne sont plus contestables. Que l’on
soit
partisan de l’une ou de l’autre, il faut admettre que la passion ruin
1659
aborées par une éthique de la passion. Certes, il
serait
excessif d’estimer que la plupart de nos contemporains sont en proie
1660
sif d’estimer que la plupart de nos contemporains
sont
en proie au délire de Tristan. Bien peu ont assez soif pour boire le
1661
pour boire le philtre, et j’en vois moins encore
être
élus par le sort pour succomber au tourment exemplaire. Mais tous ou
1662
u en rêvassent. Et si brouillée et défraîchie que
soit
l’empreinte du mythe primitif, c’est pourtant là qu’est le secret de
1663
empreinte du mythe primitif, c’est pourtant là qu’
est
le secret de l’inquiétude qui tourmente aujourd’hui les couples. Rien
1664
t intolérables pour tout ordre social, quel qu’il
soit
. (Et je ne parle même pas du danger spirituel que fait courir à la pe
1665
courir à la personne l’éthique de l’évasion, qui
est
née du mythe.) D’où les multiples tentatives de « restauration » du m
1666
ersonnelle ; selon le second, l’union monogamique
serait
la forme la plus rationnelle des relations entre les sexes, dans une
1667
« conflit psychologique » et les « névroses » qui
seraient
à l’origine du mal (d’où l’on déduit que la médecine mentale guérirai
1668
éments d’une révolution à sa mesure. En outre, il
est
frappant de constater que presque tous ces sages auteurs donnent quel
1669
dire que l’amour tel qu’on l’imagine de nos jours
est
la négation pure et simple du mariage, que l’on prétend fonder sur lu
1670
r sur lui. C’est qu’on ne sait pas au juste ce qu’
est
l’amour-passion, ni d’où il vient, ni où il va. On sent bien qu’il y
1671
s existé, elle existera donc toujours, et nous ne
sommes
pas des Don Quichotte… » Je le crois bien ! C’est même à cause de cel
1672
s notre histoire européenne. Quant au mariage, il
fut
proprement balayé durant la période des Soviets. La morale des intell
1673
gt ans plus tard, le « redressement des mœurs » s’
est
opéré, non par quelque sursaut vertueux, non par l’initiative d’une l
1674
consciente des conditions de sa durée. Staline s’
est
assigné pour but prochain de refaire des cadres à sa nation. Car sans
1675
ment statique et stabilisateur au premier chef qu’
est
la famille. Ce fut le mécanisme de la dictature productiviste qui con
1676
abilisateur au premier chef qu’est la famille. Ce
fut
le mécanisme de la dictature productiviste qui contraignit l’État dit
1677
née incarnant l’idéal racial). Ces femmes doivent
être
blondes, de sang aryen, et mesurer au moins 1 m 73. Ainsi le « type d
1678
de la passion. Alors le cycle de l’amour courtois
sera
fermé. L’Europe de la passion aura vécu. Un Occident nouveau, imprévi
1679
1938, p. 186). Le sacrement catholique reposerait
soit
sur le récit du miracle de Cana (« simple hypothèse », dit l’auteur)
1680
le de Cana (« simple hypothèse », dit l’auteur) ;
soit
sur le passage où Jésus proclame que l’homme ne doit pas séparer ce q
1681
e l’homme ne doit pas séparer ce que Dieu a uni ;
soit
enfin sur des entretiens de Jésus ressuscité et de ses disciples « qu
1682
ont souvent exprimé cette opinion : « Les crimes
sont
un tribut payé à la vie » (Carpocrates, cf. Schultz, Dokumente der Gn
1683
u chauffeur qui « mérite » la fille du patron, il
est
abondamment exploité par le film allemand, depuis l’hitlérisme. 88.
1684
mme que l’on désire, la femme de notre nostalgie)
est
la meilleure définition d’Iseut. C’est la femme que l’on perd du seul
1685
maines) ont également abordé le problème. 92. Il
serait
curieux de retrouver quel est l’auteur — évidemment moderne — qui a p
1686
roblème. 92. Il serait curieux de retrouver quel
est
l’auteur — évidemment moderne — qui a parlé le premier d’un « problèm
1687
Combat (juin). — Un souffle révolutionnaire, ce
serait
trop dire, mais un bon courant d’air passe dans les derniers numéros
1688
enfin l’on s’apercevra bientôt que le capitalisme
est
une doctrine centriste, modérée-radicale, et non pas une doctrine de
1689
nrichir M. Renault ou M. Michelin, Je doute qu’il
soit
assez sot pour se contenter de cette révolution. Je doute que ce qu’i
1690
ette révolution. Je doute que ce qu’il demande ce
soit
l’honneur d’être exploité par ses propres compatriotes. » Robert Fran
1691
Je doute que ce qu’il demande ce soit l’honneur d’
être
exploité par ses propres compatriotes. » Robert Francis, après Bernan
1692
los, et Lamartine par Rimbaud. Un tel « signe » n’
est
pas négligeable : la vieille droite s’est toujours définie en termes
1693
gne » n’est pas négligeable : la vieille droite s’
est
toujours définie en termes de littérature, et l’Action française a ét
1694
en termes de littérature, et l’Action française a
été
surtout un mouvement de conservatisme littéraire (comme l’a fait voir
1695
n prend parti contre le racisme et l’étatisme. Il
est
intéressant de souligner l’opposition très vive des auteurs de ce Man
1696
égralement fédéraliste (et non régionaliste) doit
être
considéré comme l’un des premiers actes du réveil « pluraliste » que
1697
ahl. À retenir cette petite charade : mon premier
est
ce qu’il y a de plus bas ; mon second ce qu’il y a de plus haut ; mon
1698
; mon second ce qu’il y a de plus haut ; mon tout
est
peut-être un attrape-nigaud. Réponse : matérialisme dialectique. (Jui
1699
e. Et après ? « Vous n’allez pas me dire que vous
êtes
fasciste ? — Heu… » C’est la dernière réplique. — Francis Jammes cont
1700
le courrier, renchérit encore, et prétend qu’on a
tenu
au cacho[t], durant près d’un demi-siècle, la poésie de la France »,
1701
n dessein le plus secret m’échappe encore. L’aveu
sera
jugé insolite. Mais je pressens d’assez profondes raisons de le conse
1702
ieux déterminés, et sous des astres dont le cours
est
calculable. (Au xiie siècle). J’ai cru cerner le secret de son mythe
1703
u cerner le secret de son mythe. La découverte ne
serait
pas négligeable. Mais peut-on décrire la passion ? On ne décrit pas u
1704
crit pas une forme d’existence sans y participer,
fût
-ce même par une révolte contre la décision dont elle est née. Et pour
1705
même par une révolte contre la décision dont elle
est
née. Et pour tout dire, j’ignore encore si cela peut avoir un sens :
1706
n sens : approuver ou rejeter la passion. Combien
serait
vaine l’attitude intellectuelle qui se définirait elle-même comme une
1707
cevoir, d’observer que la passion, quelle qu’elle
soit
, ne peut ni ne veut « avoir raison ». Contre elle, on a toujours rais
1708
ant qu’on parle raison. Car l’homme de la passion
est
justement celui qui choisit d’être dans son tort, aux yeux du monde —
1709
e de la passion est justement celui qui choisit d’
être
dans son tort, aux yeux du monde — et dans ce tort majeur, irrévocabl
1710
is encore plus agressive, sans doute, puisqu’il n’
est
plus question pour nous de recourir au bras séculier. (Sans compter q
1711
éculier. (Sans compter que la Croisade, au total,
fut
un échec dont la passion sut profiter.) C’est qu’avant tout et après
1712
is une décision fondamentale de l’homme, qui veut
être
lui-même son dieu93. La passion brûle dans notre cœur sitôt que le se
1713
tous nos arts de vivre, quand c’est la terre qui
est
méprisée, et la vie qui est la faute à racheter ! Mais tuer l’homme a
1714
nd c’est la terre qui est méprisée, et la vie qui
est
la faute à racheter ! Mais tuer l’homme avant qu’il ne se tue, et le
1715
l ne se tue, et le tuer autrement qu’il ne veut l’
être
, c’est bien de cela, de cela seul qu’il s’agit, pour qui veut surpass
1716
ieu culturel où la passion plonge ses racines, il
est
probable que l’État s’en chargera, c’est son hygiène. Il y a toutes l
1717
pas d’échappatoire dans le temps à venir. S’il n’
est
peut-être pas possible à l’homme — à un homme déterminé — de connaîtr
1718
oup, tel que je le reconnais dans ma vie. Et ce n’
est
à aucun degré une solution que je propose. Car outre qu’une telle sol
1719
on probablement n’existe pas, si elle existait ce
serait
pour moi seul : on ne se décide jamais que pour son compte, et le res
1720
se décide jamais que pour son compte, et le reste
est
indiscrétion. Mais je ne pouvais écrire un livre entier sur la passio
1721
la passion ne peut exister — et alors en parler n’
est
qu’une farce — mais dans le choix qui détermine une existence. 2.
1722
que du mariage Si je ne vois pas de raison qui
tienne
contre la passion véritable, il m’apparaît en second lieu que la rais
1723
ble, il m’apparaît en second lieu que la raison n’
est
guère plus efficace pour légitimer le mariage ; et que les arguments
1724
ence devant les ironies du romantique. Mais elles
sont
mises en pleine déroute par la simple véracité. La fameuse « paix du
1725
« enfer ». Et je lui fais un plus large crédit !
Étant
donné que les humains des deux sexes, pris un à un, sont généralement
1726
nné que les humains des deux sexes, pris un à un,
sont
généralement des coquins, pourquoi seraient-ils des anges une fois ap
1727
un à un, sont généralement des coquins, pourquoi
seraient
-ils des anges une fois appariés ? Ignore-t-on la réalité, ou n’a-t-on
1728
la première porte venue ! Ce silence que l’épouse
est
censée ménager autour du vaillant travailleur qui rentre le soir, har
1729
ux tous, lui qui d’abord exalte la passion, comme
étant
la suprême valeur du « stade esthétique » de la vie ; puis la surmont
1730
l’homme pieux qui estimait que la religion devait
être
un amour heureux, un mariage avec sa vertu. Car l’amour du pécheur po
1731
e avec sa vertu. Car l’amour du pécheur pour Dieu
est
« essentiellement malheureux », et cette passion chrétienne est la se
1732
llement malheureux », et cette passion chrétienne
est
la seule vérité, et tous nos « devoirs » humains (dont le bonheur) ne
1733
!) Et comment réfuter ce furieux ? Les incroyants
sont
renvoyés aux arguments des romantiques, qui valent contre leur morali
1734
r humanisme. Que dit l’Apôtre ? « Je pense qu’il
est
bon pour l’homme de ne point toucher de femme. Toutefois, pour éviter
1735
emme. Ne vous privez pas l’un de l’autre, si ce n’
est
d’un commun accord pour un temps, afin de vaquer à la prière ; puis r
1736
un, frères, demeure devant Dieu dans l’état où il
était
lorsqu’il a été appelé (vierge ou marié)… usant du monde comme n’en u
1737
e devant Dieu dans l’état où il était lorsqu’il a
été
appelé (vierge ou marié)… usant du monde comme n’en usant pas, car la
1738
-32). Et voici le coup de grâce : « Celui qui n’
est
pas marié s’inquiète des choses du Seigneur, des moyens de plaire au
1739
r, des moyens de plaire au Seigneur, et celui qui
est
marié s’inquiète des choses du monde, des moyens de plaire à sa femme
1740
32). ⁂ Tout ce qu’on peut dire contre le mariage
est
vrai, par conséquent doit être dit, soit du point de vue des romantiq
1741
e contre le mariage est vrai, par conséquent doit
être
dit, soit du point de vue des romantiques — si l’on croit à Iseut —,
1742
e mariage est vrai, par conséquent doit être dit,
soit
du point de vue des romantiques — si l’on croit à Iseut —, soit du po
1743
de vue des romantiques — si l’on croit à Iseut —,
soit
du point de vue du clerc parfait — si l’on croit à son œuvre —, soit
1744
e du clerc parfait — si l’on croit à son œuvre —,
soit
du point de vue spirituel pur, pour ceux qui croient. Il n’est possib
1745
de vue spirituel pur, pour ceux qui croient. Il n’
est
possible alors d’affirmer le mariage qu’au-delà des deux premières cr
1746
femme dépend d’un certain nombre de raisons qu’il
serait
possible de peser. Cette erreur du bon sens est tout à fait grossière
1747
erait possible de peser. Cette erreur du bon sens
est
tout à fait grossière. Vous aurez beau tenter de mettre au départ tou
1748
ns celle du couple formé. Les facteurs mis en jeu
sont
trop hétéroclites. À supposer que vous puissiez les calculer dans le
1749
es calculer dans le présent (comme si leur nombre
était
fini), et que vous disposiez d’une telle science de l’humain que leur
1750
telle science de l’humain que leurs valeurs vous
soient
connues et leur hiérarchie évidente, encore ne sauriez-vous prévoir l
1751
ne seule vie, le problème de l’adaptation de deux
êtres
physiques et moraux des plus hautement organisés ! (C’est pourtant à
1752
ors que tout nous montre que cent-mille essais ne
seraient
pas encore assez pour constituer les premiers éléments, tout balbutia
1753
le reconnaître honnêtement : le problème qui nous
est
posé par la nécessité pratique du mariage apparaît d’autant plus inso
1754
mariage apparaît d’autant plus insoluble que l’on
tient
davantage à le « résoudre » au sens rationnel de ce terme. Certes, il
1755
es impondérables deviennent décisifs. Le sophisme
est
alors du côté du bon sens, qui recommandait un choix mûri et raisonné
1756
selon des critères impersonnels. Mais enfin ce n’
est
pas l’erreur logique qui est grave, c’est l’erreur morale qu’elle sup
1757
els. Mais enfin ce n’est pas l’erreur logique qui
est
grave, c’est l’erreur morale qu’elle suppose. Lorsqu’on incite les je
1758
t non pas à une décision. Or ce savoir ne pouvant
être
qu’imparfait, et provisoire, devrait se doubler d’une garantie. Et la
1759
r d’une garantie. Et la seule garantie concevable
est
dans la force de la décision en vertu de laquelle on s’engage pour to
1760
’agit avant tout de calcul… D’où je conclus qu’il
serait
plus conforme à l’essence du mariage, et au réel, d’enseigner aux jeu
1761
gent à assumer les suites, heureuses ou non. Ce n’
est
pas là un éloge du « coup de tête » : car tant que l’on peut calculer
1762
: car tant que l’on peut calculer, j’admets qu’il
est
stupide de s’en priver. Mais je dis que la garantie d’une union raiso
1763
garantie d’une union raisonnable en apparences n’
est
jamais dans ces apparences. Elle est dans l’événement irrationnel d’u
1764
apparences n’est jamais dans ces apparences. Elle
est
dans l’événement irrationnel d’une décision prise en dépit de tout, e
1765
Choisir une femme pour en faire son épouse, ce n’
est
pas dire à Mademoiselle Untel : « Vous êtes l’idéal de mes rêves, vou
1766
, ce n’est pas dire à Mademoiselle Untel : « Vous
êtes
l’idéal de mes rêves, vous comblez et au-delà tous mes désirs, vous ê
1767
es, vous comblez et au-delà tous mes désirs, vous
êtes
l’Iseut toute belle et désirable — et munie d’une dot adéquate — dont
1768
able — et munie d’une dot adéquate — dont je veux
être
le Tristan ». Car ce serait là mentir et l’on ne peut rien fonder qui
1769
adéquate — dont je veux être le Tristan ». Car ce
serait
là mentir et l’on ne peut rien fonder qui dure sur le mensonge. Il n’
1770
Untel : « Je veux vivre avec vous telle que vous
êtes
. » Car cela signifie en vérité : « c’est vous que je choisis pour par
1771
e que je vous aime ». (Vraiment, pour dire : Ce n’
est
que cela ! — comme le diront beaucoup de jeunes gens qui s’attendent,
1772
lité réelle ; et je ne dis pas à une fidélité qui
soit
une recette de « bonheur », mais bien à une fidélité qui soit possibl
1773
ette de « bonheur », mais bien à une fidélité qui
soit
possible, n’étant pas compromise en germe par un calcul forcément ine
1774
», mais bien à une fidélité qui soit possible, n’
étant
pas compromise en germe par un calcul forcément inexact. 4. Sur la
1775
érée comme absolue. La problématique du mariage n’
est
pas du cur, mais du quomodo. « L’éthique ne commence pas, dit Kierkeg
1776
s dans un savoir qui exige sa réalisation. » Ce n’
est
pas l’engagement qui est problématique, mais les conséquences qu’il e
1777
e sa réalisation. » Ce n’est pas l’engagement qui
est
problématique, mais les conséquences qu’il entraîne. (De même on faus
1778
ne croyait pas — alors que le seul vrai problème
est
de savoir comment Lui obéir.) Car la fidélité est sans raisons — ou e
1779
est de savoir comment Lui obéir.) Car la fidélité
est
sans raisons — ou elle n’est pas — comme tout ce qui porte une chance
1780
ir.) Car la fidélité est sans raisons — ou elle n’
est
pas — comme tout ce qui porte une chance de grandeur. (Comme la passi
1781
nt Engels) ont essayé de prouver que la monogamie
est
naturelle, et de plus qu’elle est salutaire. Cela se discute à l’infi
1782
ue la monogamie est naturelle, et de plus qu’elle
est
salutaire. Cela se discute à l’infini. Et cela nous sera des plus uti
1783
lutaire. Cela se discute à l’infini. Et cela nous
sera
des plus utile dès que les hommes se régleront sur la raison et l’int
1784
yeux et dans leur langage, la fidélité conjugale
est
le succès d’un effort « inhumain ». Leur revendication fondamentale :
1785
e, en fait, l’idée de fidélité. Mais l’obstacle n’
est
pas sérieux, on le tourne de tous les côtés. Voyez les excuses invoqu
1786
é observée en vertu de l’absurde, parce qu’on s’y
est
engagé, simplement, et que c’est un fait absolu, sur quoi se fonde la
1787
e des époux. Il faut bien voir que cette fidélité
est
à contre-courant des valeurs aujourd’hui vénérées par presque tous. E
1788
e la multiplicité des expériences. Elle nie que l’
être
aimé doive réunir, pour être ou pour rester aimable, le plus grand no
1789
nces. Elle nie que l’être aimé doive réunir, pour
être
ou pour rester aimable, le plus grand nombre de qualités possible. El
1790
ités possible. Elle nie que le but de la fidélité
soit
le bonheur. Elle affirme scandaleusement que c’est avant tout l’obéis
1791
la volonté de faire une œuvre. Car la fidélité n’
est
pas du tout une espèce de conservatisme. Elle est plutôt une construc
1792
est pas du tout une espèce de conservatisme. Elle
est
plutôt une construction. « Absurde » au moins autant que la passion,
1793
r ses rêves, par un besoin constant d’agir pour l’
être
aimé, par une constante prise sur le réel, qu’elle cherche à dominer,
1794
œuvre, et aux mêmes conditions, dont la première
est
la fidélité à quelque chose qui n’était pas, mais que l’on crée. Pers
1795
la première est la fidélité à quelque chose qui n’
était
pas, mais que l’on crée. Personne, œuvre, et fidélité : les trois mot
1796
Personne, œuvre, et fidélité : les trois mots ne
sont
point séparables ou concevables isolément. Et tous les trois supposen
1797
. (À condition bien entendu que cette promesse ne
soit
pas faite pour des « raisons » que l’on se réserve de répudier un jou
1798
paraître raisonnables ! Si la promesse du mariage
est
le type même de l’acte sérieux, c’est dans la mesure où elle est fait
1799
e de l’acte sérieux, c’est dans la mesure où elle
est
faite une fois pour toutes. Seul l’irrévocable est sérieux.) Toute vi
1800
st faite une fois pour toutes. Seul l’irrévocable
est
sérieux.) Toute vie, fût-elle la plus déshéritée, détient sa chance i
1801
utes. Seul l’irrévocable est sérieux.) Toute vie,
fût
-elle la plus déshéritée, détient sa chance immédiate de grandeur, et
1802
homme découvre que la folie du sacrifice consenti
était
la plus grande sagesse ; et que le bonheur qu’il a renoncé lui est re
1803
e sagesse ; et que le bonheur qu’il a renoncé lui
est
rendu, comme Isaac fut rendu à Abraham. Mais alors il n’y songeait pa
1804
onheur qu’il a renoncé lui est rendu, comme Isaac
fut
rendu à Abraham. Mais alors il n’y songeait pas ! Et il se peut aussi
1805
e peut aussi que rien ne compense la perte : nous
sommes
ici dans un ordre de grandeur où nos mesures et nos équivalences n’on
1806
ne grandeur qui n’ait rien de romantique ? Et qui
soit
le contraire d’une ardeur exaltée ? La fidélité dont je parle est une
1807
d’une ardeur exaltée ? La fidélité dont je parle
est
une folie, mais la plus sobre et quotidienne. Une folie de sobriété q
1808
sobriété qui mime assez bien la raison — et qui n’
est
pas un héroïsme, ni un défi, mais une patiente et tendre application.
1809
au sens moderne de ces mots… ⁂ Cependant, tout n’
est
pas encore clair. Tristan lui aussi fut fidèle ! Et toute passion vér
1810
t, tout n’est pas encore clair. Tristan lui aussi
fut
fidèle ! Et toute passion véritable est fidèle. (Pour ne rien dire de
1811
lui aussi fut fidèle ! Et toute passion véritable
est
fidèle. (Pour ne rien dire des successives fidélités de nos « liaison
1812
nos « liaisons », et de tous ces Tristans qui ne
sont
au vrai que des Don Juan au ralenti.) Où est alors la différence ? Et
1813
ne sont au vrai que des Don Juan au ralenti.) Où
est
alors la différence ? Et le mari fidèle, ne serait-ce pas simplement
1814
ù est alors la différence ? Et le mari fidèle, ne
serait
-ce pas simplement celui qui a reconnu dans sa femme une Iseut ? Lorsq
1815
uissante » qui l’accueille par ces paroles : « Je
suis
toi-même ! » Ainsi de la fidélité du mythe, et de Tristan. C’est un n
1816
e, mais qui s’ignore, naturellement, et qui croit
être
un vrai amour pour l’autre. L’analyse des légendes courtoises nous a
1817
délivrance du moi coupable et asservi. Tristan n’
est
pas fidèle à une promesse, ni à cet être symbolique, ce beau prétexte
1818
Tristan n’est pas fidèle à une promesse, ni à cet
être
symbolique, ce beau prétexte qui s’appelle Iseut, mais à sa plus prof
1819
ychologues peuvent y lire. ⁂ « Notre engagement n’
était
pas pris pour ce monde », écrivait Novalis songeant à sa fiancée perd
1820
etour de la vie. Mais la fidélité dans le mariage
est
au contraire un engagement absolument pris pour ce monde. Partant d’u
1821
sa fidélité. Et tandis que la fidélité de Tristan
était
un perpétuel refus, une volonté d’exclure et de nier la création dans
1822
r le monde d’envahir l’âme, la fidélité des époux
est
l’accueil de la créature, la volonté d’accepter l’autre tel qu’il est
1823
créature, la volonté d’accepter l’autre tel qu’il
est
, dans son intime singularité. Insistons : la fidélité dans le mariage
1824
sistons : la fidélité dans le mariage ne peut pas
être
cette attitude négative qu’on imagine habituellement ; elle ne peut ê
1825
ative qu’on imagine habituellement ; elle ne peut
être
qu’une action. Se contenter de ne pas tromper sa femme serait une pre
1826
e action. Se contenter de ne pas tromper sa femme
serait
une preuve d’indigence et non d’amour. La fidélité veut bien plus : e
1827
fidélité veut bien plus : elle veut le bien de l’
être
aimé, et lorsqu’elle agit pour ce bien, elle crée devant elle le proc
1828
e son propre bonheur. Ainsi la personne des époux
est
une mutuelle création, elle est le double aboutissement de « l’amour-
1829
ersonne des époux est une mutuelle création, elle
est
le double aboutissement de « l’amour-action ». Ce qui niait l’individ
1830
me, on découvrira que la fidélité dans le mariage
est
la loi d’une vie nouvelle ; et non point de la vie naturelle (ce sera
1831
e nouvelle ; et non point de la vie naturelle (ce
serait
la polygamie) — et non plus de la vie pour la mort (c’était la passio
1832
nté de Dieu, même quand elle ruine notre bonheur,
est
salutaire. L’amour de Tristan et d’Iseut c’était l’angoisse d’être de
1833
’amour de Tristan et d’Iseut c’était l’angoisse d’
être
deux ; et son aboutissement suprême, c’était la chute dans l’illimité
1834
m qui nous sépare ! » Il faut que l’autre cesse d’
être
l’autre, donc ne soit plus, pour qu’il cesse de me faire souffrir, et
1835
Il faut que l’autre cesse d’être l’autre, donc ne
soit
plus, pour qu’il cesse de me faire souffrir, et qu’il n’y ait plus qu
1836
s que « moi-le-monde » ! Mais l’amour du mariage
est
la fin de l’angoisse, l’acceptation de l’être limité, aimé parce qu’i
1837
iage est la fin de l’angoisse, l’acceptation de l’
être
limité, aimé parce qu’il m’appelle à le créer, et qu’il se tourne ave
1838
r afin d’attester notre alliance. ⁂ Une vie qui m’
est
alliée — pour toute la vie, voilà le miracle du mariage. Une vie qui
1839
ne vie qui ne veut plus que mon bien, parce qu’il
est
confondu avec le sien : et si ce n’était pour toute la vie, ce serait
1840
arce qu’il est confondu avec le sien : et si ce n’
était
pour toute la vie, ce serait encore une menace. (Il y a toujours une
1841
le sien : et si ce n’était pour toute la vie, ce
serait
encore une menace. (Il y a toujours une telle menace dans l’échange d
1842
Alors l’amour de charité, l’amour chrétien, qui
est
Agapè, paraît enfin dans sa pleine stature : il est l’affirmation de
1843
t Agapè, paraît enfin dans sa pleine stature : il
est
l’affirmation de l’être. Et c’est Éros, l’amour-passion, l’amour païe
1844
ans sa pleine stature : il est l’affirmation de l’
être
. Et c’est Éros, l’amour-passion, l’amour païen, qui a répandu dans no
1845
ue la vie terrestre et temporelle ne mérite pas d’
être
adorée, ni même tuée, mais peut être acceptée dans l’obéissance à l’É
1846
mérite pas d’être adorée, ni même tuée, mais peut
être
acceptée dans l’obéissance à l’Éternel. Voilà le sens de la Révélatio
1847
nel. Voilà le sens de la Révélation ; l’au-delà n’
est
pas la mort divinisante, mais le Jugement du Créateur. C’est ici-bas
1848
n. L’homme naturel ne pouvait pas l’imaginer. Il
était
donc condamné à croire Éros, c’est-à-dire à se confier dans son désir
1849
n de l’Agapè voit soudain le cercle s’ouvrir : il
est
délivré par la foi de sa religion naturelle. Il peut maintenant espér
1850
eut maintenant espérer autre chose, il sait qu’il
est
une autre délivrance. Et voici que l’Éros à son tour se voit relevé d
1851
telle et délivré de son destin. Dès qu’il cesse d’
être
un dieu, il cesse d’être un démon 97. Et il retrouve sa juste place,
1852
estin. Dès qu’il cesse d’être un dieu, il cesse d’
être
un démon 97. Et il retrouve sa juste place, et vivifiante, dans l’éco
1853
a séduction du Rien. Mais dès lors que le Verbe s’
est
fait chair et qu’il nous a parlé en mots humains, nous avons appris c
1854
humains, nous avons appris cette nouvelle : ce n’
est
pas l’homme qui doit se délivrer lui-même, c’est Dieu qui l’a aimé le
1855
ême, c’est Dieu qui l’a aimé le premier, et qui s’
est
approché de lui. Le salut n’est plus au-delà, toujours plus haut, dan
1856
premier, et qui s’est approché de lui. Le salut n’
est
plus au-delà, toujours plus haut, dans l’ascension interminable du Dé
1857
orps, mais c’est la femme. (I. Cor. 7.) La femme
étant
l’égale de l’homme, elle ne peut donc être le but idéal de l’homme98.
1858
femme étant l’égale de l’homme, elle ne peut donc
être
le but idéal de l’homme98. En même temps, elle échappe à l’abaissemen
1859
e échappe à l’abaissement bestial qui tôt ou tard
est
la rançon d’une divinisation de la créature. Mais cette égalité ne do
1860
on de la créature. Mais cette égalité ne doit pas
être
entendue au sens moderne et revendicateur. Elle procède du mystère de
1861
ateur. Elle procède du mystère de l’amour, elle n’
est
que le signe et la démonstration du triomphe d’Agapè sur Éros. Car l’
1862
te son amour pour l’homme en exigeant que l’homme
soit
saint comme Dieu est saint. Et l’homme témoigne de son amour pour une
1863
mme en exigeant que l’homme soit saint comme Dieu
est
saint. Et l’homme témoigne de son amour pour une femme en la traitant
1864
moderne — du moins perd-elle son efficace : ce n’
est
plus elle qui détermine la personne. En d’autres termes, on pourrait
1865
Car si le désir va vite et n’importe où, l’amour
est
lent et difficile, il engage vraiment toute une vie, et il n’exige pa
1866
« fatalité » de la passion. Le « coup de foudre »
est
sans doute une légende accréditée par Don Juan, comme la « fatalité »
1867
par Don Juan, comme la « fatalité » de la passion
est
accréditée par Tristan. Excuse et alibi qui ne peuvent tromper que ce
1868
t alibi qui ne peuvent tromper que celui qui veut
être
trompé, parce qu’il y trouve son intérêt ; figures de rhétorique roma
1869
romanesque, et acceptables à ce titre, mais qu’il
serait
assez absurde de confondre avec des vérités psychologiques. Notre ana
1870
voir pourquoi l’on aime croire à la fatalité, qui
est
l’alibi de la culpabilité : « Ce n’est pas moi qui ai commis la faute
1871
alité, qui est l’alibi de la culpabilité : « Ce n’
est
pas moi qui ai commis la faute, je n’y étais pas, c’est cette puissan
1872
« Ce n’est pas moi qui ai commis la faute, je n’y
étais
pas, c’est cette puissance fatale qui agissait en lieu et place de ma
1873
se une « fatalité » ! Quant au coup de foudre, il
est
censé justifier les écarts de Don Juan. Toute la littérature nous eng
1874
me des coups de foudre et de la vie « orageuse »,
serait
une sorte de surhomme, de surmâle. Mythe d’une puissance indéfinie et
1875
ine les contingences morales. Mais alors, on peut
être
certain qu’un pareil mythe est né de la rêverie des impuissants. Et e
1876
is alors, on peut être certain qu’un pareil mythe
est
né de la rêverie des impuissants. Et en effet, la conduite de Don Jua
1877
impuissants. Et en effet, la conduite de Don Juan
est
bien typique d’une certaine déficience sexuelle. C’est dans l’état de
1878
corps et de l’esprit, le risque de coup de foudre
est
à peu près éliminé. Il apparaît ainsi que la monogamie, normalisant l
1879
e la monogamie, normalisant les rapports sexuels,
est
la meilleure garantie du plaisir, c’est-à-dire de l’Éros purement cha
1880
divinisé100. ⁂ On objecte alors que le mariage ne
serait
plus que le « tombeau de l’amour ». Mais c’est encore le mythe, natur
1881
oire, avec son obsession de l’amour contrarié. Il
serait
plus vrai de dire avec Benedetto Croce que « le mariage est le tombea
1882
rai de dire avec Benedetto Croce que « le mariage
est
le tombeau de l’amour sauvage »101 (et plus communément du sentimenta
1883
le viol, comme la polygamie, révèle que l’homme n’
est
pas encore en mesure de concevoir la réalité de la personne chez la f
1884
humaines. Par contre, l’homme qui se domine, ce n’
est
pas faute de « passion » (au sens de tempérament) mais c’est qu’il ai
1885
istianisme et le secret de notre dynamisme. Et il
est
vrai que ces trois termes : christianisme, passion, dynamisme, corres
1886
les conclusions de notre examen du mythe courtois
sont
justes, il faudra corriger sensiblement ce schéma de l’Occident chrét
1887
chéma de l’Occident chrétien. Tout d’abord : ce n’
est
pas le christianisme qui a fait naître la passion, mais c’est une hér
1888
une hérésie d’origine orientale. Cette hérésie s’
est
répandue d’abord dans les contrées les moins christianisées, précisém
1889
enaient encore une vie secrète. L’amour-passion n’
est
pas l’amour chrétien, ni même le « sous-produit du christianisme » ou
1890
anisme a réveillée et orientée vers Dieu »102. Il
est
plutôt le sous-produit de la religion manichéenne. Plus exactement, i
1891
t de la religion manichéenne. Plus exactement, il
est
né de la complicité de cette religion avec nos plus vieilles croyance
1892
e. Première correction d’importance. Ensuite, il
est
urgent de rappeler que le fameux « dynamisme occidental » procède de
1893
re procède d’une conception de la vie ardente qui
est
un masque du désir de mort. Dynamisme inverti, et autodestructeur. Ma
1894
ntal, j’entends notre génie technique, ne saurait
être
un seul instant ramené à la passion. L’attitude humaine qu’il révèle
1895
ené à la passion. L’attitude humaine qu’il révèle
est
l’antithèse exacte de la passion : c’est une affirmation de la valeur
1896
visible. La passion ni la foi hérétique dont elle
est
née ne sauraient proposer comme but à notre vie la maîtrise de la Nat
1897
ction originelle du Démiurge, et puisque le salut
est
justement d’échapper à sa loi démoniaque.104 Faut-il voir à la sourc
1898
s (c’est-à-dire créateurs) du dynamisme européen,
sont
orientés par une volonté exactement contraire à celle de passion. Ce
1899
devenant mortelle, trahit les ambitions dont elle
est
née. Il se peut que l’Occident succombe à ce destin qu’il s’est forgé
1900
peut que l’Occident succombe à ce destin qu’il s’
est
forgé. Mais il est clair que ce n’est pas le christianisme — comme le
1901
t succombe à ce destin qu’il s’est forgé. Mais il
est
clair que ce n’est pas le christianisme — comme le répètent tant de p
1902
tin qu’il s’est forgé. Mais il est clair que ce n’
est
pas le christianisme — comme le répètent tant de publicistes — qui es
1903
sme — comme le répètent tant de publicistes — qui
est
responsable de la catastrophe. L’esprit catastrophique de l’Occident
1904
astrophe. L’esprit catastrophique de l’Occident n’
est
pas chrétien105. Il est tout au contraire manichéen. C’est ce qu’igno
1905
trophique de l’Occident n’est pas chrétien105. Il
est
tout au contraire manichéen. C’est ce qu’ignorent communément ceux qu
1906
stianisme et l’Occident, comme si tout l’Occident
était
chrétien. Si donc l’Europe succombe à son mauvais génie, ce sera pour
1907
Si donc l’Europe succombe à son mauvais génie, ce
sera
pour avoir trop longtemps cultivé la religion antichrétienne de la pa
1908
de la passion. ⁂ Faut-il conclure que la passion
serait
la tentation orientale de l’Occident ? S’il est vrai qu’elle ne s’est
1909
erait la tentation orientale de l’Occident ? S’il
est
vrai qu’elle ne s’est développée dans notre histoire et nos cultures
1910
entale de l’Occident ? S’il est vrai qu’elle ne s’
est
développée dans notre histoire et nos cultures qu’à partir des xiie
1911
l’Iran, sources certaines de l’hérésie, que nous
sont
venues nos « mortelles » croyances. Mais dira-t-on, ces mêmes croyanc
1912
s mêmes obstacles. Ainsi notre chance dramatique
est
d’avoir résisté à la passion par des moyens prédestinés à l’exalter.
1913
ion par des moyens prédestinés à l’exalter. Telle
fut
la tension permanente d’où jaillirent nos plus belles créations. Mais
1914
a plus typique de leur morale : le mariage, qu’il
sera
désormais possible de repérer avec assez de précision ce déplacement
1915
sion ce déplacement d’accent dont tout dépend. Il
est
certain que l’Occidental christianisé se distingue du mystique orient
1916
mystique oriental par son pouvoir d’approfondir l’
être
créé dans ce qu’il a de particulier. C’est tout le secret de notre fi
1917
e du divers. Nous, nous cherchons la densité de l’
être
dans la personne distincte, sans cesse approfondie comme telle. « D’a
1918
limitations. Le chrétien prend le monde tel qu’il
est
, et non point tel qu’il peut le rêver. Son activité « créatrice » con
1919
rt. Et c’est pourquoi la crise moderne du mariage
est
le signe le moins trompeur d’une décadence occidentale. Il en est d’a
1920
moins trompeur d’une décadence occidentale. Il en
est
d’autres, certes, dans les domaines les plus divers : le culte du nom
1921
: tout ce qui tend à ruiner la personne. Mais ce
sont
là des phénomènes complexes et collectifs, qui échappent en partie au
1922
nous parle et nous avertit mieux : aucun autre n’
est
plus sensible et quotidien, plus intimement vérifiable. 7. Au-delà
1923
r la destruction de notre civilisation. Tout cela
est
, tout cela nous menace, et d’autant plus qu’on voudrait le nier. Cepe
1924
menant alors un âge classique… Mais après tout, n’
est
-ce pas encore une tentation de la passion que ce souci des lendemains
1925
la figure de ce monde passe », mais l’obéissance
est
toujours hic et nunc, dans l’acte de l’Éternel où notre espoir se fon
1926
es constatations tout objectives auxquelles je me
suis
vu conduit ne sont pas suffisantes en soi. Elles commandent certaines
1927
ut objectives auxquelles je me suis vu conduit ne
sont
pas suffisantes en soi. Elles commandent certaines décisions. Elles i
1928
troduisent à une problématique nouvelle, et qui n’
est
pas toujours aussi simpliste que le dilemme passion-fidélité peut nou
1929
Or le moyen de dépasser notre dilemme ne saurait
être
la pure et simple négation de l’un de ses termes. Je l’ai dit et j’y
1930
ste encore : condamner la passion en principe, ce
serait
vouloir supprimer l’un des pôles de notre tension créatrice. De fait,
1931
pôles de notre tension créatrice. De fait, cela n’
est
pas possible. Le philistin qui « condamne » de la sorte et à priori t
1932
assion, c’est qu’il n’en a connu aucune, et qu’il
est
en deçà du conflit. Pour cet homme-là le seul progrès concevable est
1933
lit. Pour cet homme-là le seul progrès concevable
est
dans la crise de sa sécurité, c’est-à-dire dans le drame passionnel.
1934
e inhérent à tout exposé. ⁂ Le premier thème peut
être
situé par rapport à un drame personnel dont les données biographiques
1935
ame personnel dont les données biographiques nous
sont
suffisamment connues. On sait que l’événement qui devint pour Kierkeg
1936
kegaard le point de départ de toute sa réflexion,
fut
la rupture de ses fiançailles avec Régine. La cause intime de cette r
1937
monde. Ici l’obstacle indispensable à la passion
est
d’une nature à tel point subjective, singulière et incomparable, qu’o
1938
écheur ne saurait entretenir avec son Dieu, — qui
est
l’Éternel et le Saint— que des relations d’amour mortellement malheur
1939
gine pure de la Passion, — mais du même coup nous
sommes
jetés au cœur même de la foi chrétienne ! Car voici : cet homme mort
1940
initie une vie nouvelle, où la passion ne cesse d’
être
présente, mais sous l’incognito le plus jaloux : car elle est bien pl
1941
, mais sous l’incognito le plus jaloux : car elle
est
bien plus que royale, elle est divine. Et dans l’analogie de la foi,
1942
jaloux : car elle est bien plus que royale, elle
est
divine. Et dans l’analogie de la foi, l’on peut alors concevoir que l
1943
on peut alors concevoir que la passion — quel que
soit
l’ordre où elle se manifeste — ne trouve son au-delà réel et son salu
1944
t son salut que par cette action d’obéissance qui
est
la vie de fidélité. Vivre alors « comme tout le monde », mais « en ve
1945
hose qu’une « solution », pour qui croit que Dieu
est
fidèle, et que l’amour ne trompe jamais l’aimé. Certes, Kierkegaard n
1946
ute son œuvre. Et c’est peut-être que cette œuvre
était
le lieu de sa fidélité la plus réelle. Pourquoi chercher ailleurs que
1947
nnent chaque jour de leur bonheur. (Ces choses-là
sont
trop simples et totales pour qu’un discours vienne mettre ses délais
1948
notre vie.) ⁂ Le second thème que j’esquisserai n’
est
peut-être pas d’une nature essentiellement hétérogène. Peut-être même
1949
ssentiellement hétérogène. Peut-être même doit-il
être
conçu comme un aspect particulier du mouvement de retour de la passio
1950
avec une sorte d’indifférence quasi divine. Elle
est
au-delà du doute et de la distinction ressentie comme un déchirement
1951
e désire plus rien que son amour ne veuille, elle
est
une avec lui dans la dualité, qui n’est plus qu’un dialogue de grâce
1952
lle, elle est une avec lui dans la dualité, qui n’
est
plus qu’un dialogue de grâce et d’obéissance. Et le désir de la plus
1953
cesse dans l’acte même d’obéir, en sorte qu’il n’
est
plus en l’âme de brûlure, ni même de conscience de l’amour, mais seul
1954
née du mortel désir d’union mystique, ne saurait
être
dépassée et accomplie que par la rencontre d’un autre, par l’admissio
1955
uffrir, acceptent notre jour. Et alors le mariage
est
possible. Nous sommes deux dans le contentement. ⁂ Une dernière fois
1956
otre jour. Et alors le mariage est possible. Nous
sommes
deux dans le contentement. ⁂ Une dernière fois pourtant nous reprendr
1957
s reprendrons un parti de sobriété. Les mariés ne
sont
pas des saints, et le péché n’est pas comme une erreur à laquelle on
1958
Les mariés ne sont pas des saints, et le péché n’
est
pas comme une erreur à laquelle on renoncerait un beau jour pour adop
1959
beau jour pour adopter une vérité meilleure. Nous
sommes
sans fin ni cesse dans le combat de la nature et de la grâce. Sans fi
1960
cesse, malheureux puis heureux. Mais l’horizon n’
est
plus le même. Une fidélité gardée au nom de ce qui ne change pas comm
1961
c’est lui qui transforme le monde. 93. Je m’en
tiens
au « cas-limite » de Tristan ; j’ai connu des amants chrétiens qui eu
1962
devient singulier. À cette personnalisation de l’
être
aimé correspond d’ailleurs une spécification croissante de l’instinct
1963
en faveur de la monogamie. 95. La gauloiserie n’
étant
pas moins que la passion une évasion hors du réel, une façon de l’idé
1964
et justement pas en tant qu’Éros sublimé. Éros n’
est
pas le péché ; le péché, c’est la sublimation d’Éros. » 98. Comme le
1965
le prends ici ? En ce que l’on reconnaît dans un
être
la totalité d’une personne. La personne selon la fameuse définition k
1966
ameuse définition kantienne, c’est ce qui ne peut
être
utilisé par l’homme comme une chose, comme un instrument. 100. Je ré
1967
00. Je répète toutefois que le mariage ne saurait
être
fondé sur des « arguments » de ce genre. Il s’agit ici, simplement, d
1968
e son négatif donjuanesque. Mais cette « raison »
est
tout à fait inefficace aux yeux de qui préfère le mythe, et veut croi
1969
eo Ferrero, Désespoirs. Le problème de la passion
est
admirablement défini par ce petit livre, dans ses données actuelles,
1970
tte règle commune à la passion et à la guerre que
fut
la chevalerie médiévale. 104. « L’idée antique du travail indigne de
1971
notre châtiment et non pas notre délivrance. Ce n’
est
pas la mort, la désincarnation, qui est le salut, mais l’acte de la g
1972
nce. Ce n’est pas la mort, la désincarnation, qui
est
le salut, mais l’acte de la grâce, accompli par Dieu seul. 106. Ce d
1973
accompli par Dieu seul. 106. Ce dernier chapitre
est
la conclusion de L’Amour et l’Occident , plus encore que des deux fr
1974
« La passion contre le mariage ». Ces deux essais
sont
extraits d’un ouvrage à paraître sous le titre : L’Amour et l’Occide
1975
nom de Lawrence parmi les premiers de ceux qui se
sont
attaqués à la fausse passion) et la réponse de Rougemont. La voici :
1976
général on l’a compris comme je le pensais : ce n’
est
point le sacrement qui « fait question », selon M. Lavaud, mais bien
1977
ba Dans un certain sens, et aujourd’hui, nul n’
est
plus mal placé que les personnalistes pour critiquer le régime des pa
1978
, avec une pertinence et une violence qui alors n’
étaient
pas sans mérites. Ils ont prédit l’évolution actuelle, l’usure de la
1979
res, dans Esprit et dans L’Ordre nouveau . Ils
étaient
les premiers à le dire. Et l’on pensait qu’ils seraient les premiers
1980
nt les premiers à le dire. Et l’on pensait qu’ils
seraient
les premiers à y croire, et à le prouver. Or, il ne paraît pas qu’à c
1981
comparable. Les partisans de droite et de gauche
seraient
fondés à nous dire aujourd’hui : « Vous avez très bien vu pourquoi no
1982
s erreurs, n’avez rien fait de mieux ? » Certains
seront
tentés de répondre que l’espèce de paralysie dont souffre le mouvemen
1983
: « intellectualiste ». Je ne pense pas que cela
soit
décisif. Je crains bien qu’au contraire le mouvement ait péché par dé
1984
in un vrai parti, un parti vrai, dont la doctrine
soit
plus complète et sympathique que celle des « formations traditionnell
1985
el : la création de moyens d’action neufs, et qui
seraient
efficaces justement parce qu’ils ne seraient pas à l’échelle démesuré
1986
qui seraient efficaces justement parce qu’ils ne
seraient
pas à l’échelle démesurée de l’action des partis politiques. 9. L’act
1987
upes personnalistes, en tant que tels, ne saurait
être
que réduite au regard de l’action des partis : elle veut être une act
1988
uite au regard de l’action des partis : elle veut
être
une action à hauteur d’homme, et non pas au niveau de l’opinion. 10.
1989
e l’opinion. 10. Ceux qui doutent de son efficace
sont
victimes de l’optique des partis. 11. Ceux qui demandent des directiv
1990
. 11. Ceux qui demandent des directives au centre
sont
victimes de l’optique des partis. 12. Et de même, ceux qui attendent
1991
Et de même, ceux qui attendent pour agir que nous
soyons
« suffisamment nombreux ». 13. Pour former une communauté, il vaut mi
1992
. 13. Pour former une communauté, il vaut mieux n’
être
qu’une douzaine. 14. Pour se risquer personnellement, il suffit de cr
1993
ment à ce qu’on affirme. 15. L’attrait du parti n’
est
qu’en apparence l’attrait de la plus grande puissance ; en réalité, i
1994
rait de la plus grande puissance ; en réalité, il
est
la fuite devant la véritable puissance de l’homme, qui est sa respons
1995
ite devant la véritable puissance de l’homme, qui
est
sa responsabilité personnelle. 16. Les partis sont mauvais non point
1996
est sa responsabilité personnelle. 16. Les partis
sont
mauvais non point parce qu’ils sont trop puissants dans l’État, mais
1997
6. Les partis sont mauvais non point parce qu’ils
sont
trop puissants dans l’État, mais parce qu’ils n’ont aucune puissance
1998
des lâchetés de tous les citoyens. 19. Tout parti
est
totalitaire dans son essence, et préfigure l’État totalitaire, brutal
1999
autres groupes. 22. C’est pourquoi le fédéralisme
est
la seule forme humaine de la justice. 23. Le but du personnalisme n’
2000
ine de la justice. 23. Le but du personnalisme n’
est
pas de s’emparer des « centrales » pour établir ensuite un régime per
2001
des réalités que l’on maîtrise. 26. Si peu que ce
soit
, c’est tout ce qu’il y a de réel. 27. Une seule main qui travaille fa
2002
mains qui se lèvent. 28. La critique des partis n’
est
stérile que dans la mesure où elle n’est pas radicale. ba. Rougemo
2003
partis n’est stérile que dans la mesure où elle n’
est
pas radicale. ba. Rougemont Denis de, « D’une critique stérile »,
2004
m’y soustraire que les chapitres de mon livre qui
furent
publiés ici même sont, avec ceux ou plutôt celui que vous critiquez d
2005
hapitres de mon livre qui furent publiés ici même
sont
, avec ceux ou plutôt celui que vous critiquez dans un rapport quelque
2006
tillesse désarmante et si rare !) que mon livre «
est
un livre d’histoire » et que je ne suis pas un historien. Je vois bie
2007
on livre « est un livre d’histoire » et que je ne
suis
pas un historien. Je vois bien que vous non plus ne voulez pas l’être
2008
n. Je vois bien que vous non plus ne voulez pas l’
être
comme tant d’autres le furent et le restent. Toutefois, c’est bien co
2009
plus ne voulez pas l’être comme tant d’autres le
furent
et le restent. Toutefois, c’est bien comme « historien » que vous m’a
2010
victoire » et « bataille de la Marne ». Le sonnet
sera
critiquable si l’ordre des rimes et des strophes n’est pas strictemen
2011
ritiquable si l’ordre des rimes et des strophes n’
est
pas strictement respecté. La composition historique sera critiquable
2012
s strictement respecté. La composition historique
sera
critiquable au même titre : si par exemple on appelle pape un Léon II
2013
: si par exemple on appelle pape un Léon III qui
fut
empereur. Je ne songe pas à défendre l’inexactitude ni les erreurs ty
2014
ou les négligences de copie. Mais ceci dit, il ne
serait
pas « exact » non plus d’appliquer les mêmes critères à ce qui ne rel
2015
r en fait, je ne prétends nullement que mon livre
soit
un livre d’histoire, dans ce sens « critiquable » du terme. Ce n’est
2016
oire, dans ce sens « critiquable » du terme. Ce n’
est
pas même de l’histoire littéraire. C’est bien plutôt, s’il faut une é
2017
ue proprement par le refus d’admettre quoi que ce
soit
de ce genre. Elle se condamne à l’enregistrement sans intervention de
2018
Or seul le créateur connaît la création, seul il
est
en mesure de la reconnaître là où elle est apparue dans le passé, et
2019
eul il est en mesure de la reconnaître là où elle
est
apparue dans le passé, et là où elle sévit dans le présent. Croyez bi
2020
terprète et théologien de l’histoire, je n’ai pas
été
sans découvrir dans votre article une faculté d’interprétation créatr
2021
desquelles nous portons nos jugements, et qui ne
sont
autres que les dogmes. — Ça existe, l’amour courtois !… dites-vous. M
2022
’un argument de tortionnaire. Vous ajoutez que je
suis
insensible à « cette éloquence passionnée, à cette beauté intérieure
2023
e passionnée, à cette beauté intérieure », que je
tiens
tout cela pour une « conception dépassée » ; et que j’en parle enfin
2024
justifier en remarquant que mon objet principal n’
était
pas de décrire les différents aspects de l’amour courtois, mais seule
2025
é (et un peu plus…) sur l’aventure de Rudel, si j’
étais
insensible à cette éloquence passionnée et à cette beauté intérieure,
2026
érieur », si « riche », si « émouvant », que ce n’
était
pas trop de tout un pesant livre pour essayer de formuler ce qu’il y
2027
e, dans la perspective de mon ouvrage, ne pouvait
être
que littérature (la plus belle qui soit, nous le savons à Neuchâtel c
2028
e pouvait être que littérature (la plus belle qui
soit
, nous le savons à Neuchâtel comme à Marseille). C’est à cela, c’est à
2029
out ce reste, mes conclusions, à votre sens, s’en
fussent
-elles trouvées modifiées ? J’entends mes conclusions religieuses et m
2030
on telle ou telle hypothèse « historique » que je
suis
tout prêt à réviser s’il y a lieu. Voilà le point. Voilà le terrain d
2031
e. « Je ne puis, moi, renoncer à rien de ce qui a
été
humain », dites-vous. « Il me faut à tout prix que je puisse l’assume
2032
que je puisse l’assumer. » Eh bien quoi ? Nous en
sommes
tous là ! Mais faut-il vraiment s’en réjouir ? Si l’on appelle cathol
2033
r à rien d’humain, sans distinction, je veux bien
être
appelé sectaire. (Huguenot, cela va sans dire, mais ce n’est pas syno
2034
sectaire. (Huguenot, cela va sans dire, mais ce n’
est
pas synonyme.) Et même dissonant, s’il le faut. Dans ma dissonance ob
2035
ns tout ce que l’on appelle l’Humain, et qui ne l’
est
plus depuis la Chute d’Adam. Oui certes, rien d’humain ne peut m’être
2036
Chute d’Adam. Oui certes, rien d’humain ne peut m’
être
étranger ; reste à savoir si j’ai lieu de m’en vanter ; reste à savoi
2037
j’ai lieu de m’en vanter ; reste à savoir si ce n’
est
pas là, précisément la solidarité dans le péché, l’irrémédiable « con
2038
le reste », m’amène à me demander pourquoi vous y
tenez
tant. Je crois voir la réponse dans votre conclusion. Et force m’est
2039
voir la réponse dans votre conclusion. Et force m’
est
alors de reconnaître qu’à l’origine de ce débat il n’y a pas seulemen
2040
« dissonante » de l’amour courtois tel qu’il put
être
vécu au xiie siècle, mais une certaine compréhension des dogmes esse
2041
ansjordanie profère une vérité première. (J’avais
été
tenté de citer l’anecdote dans mon livre.) Placée comme cela, en conc
2042
e paraît écrasante pour ma thèse. Seulement, nous
sommes
dans le monde concret de la chute, le monde des vérités secondes, équ
2043
, mêlées de mensonge. Dans ce monde concret, il n’
est
pas vrai que tout amour tende vers Dieu. Il n’est pas vrai non plus q
2044
est pas vrai que tout amour tende vers Dieu. Il n’
est
pas vrai non plus que tout l’humain soit humain. « Je trouve deux hom
2045
ieu. Il n’est pas vrai non plus que tout l’humain
soit
humain. « Je trouve deux hommes en moi », écrit l’Apôtre. Nous trouvo
2046
du corps ?) Un amour dont l’exaltation cependant,
était
considérée par les anciens comme une maladie de l’âme. Mais à partir
2047
ions mystiques, l’exaltation de cet amour naturel
est
subitement considérée comme vertueuse, ennoblissante. C’est en tant q
2048
tueuse, ennoblissante. C’est en tant que le désir
est
exalté, et d’une certaine manière « chaste » et spirituelle, qu’il de
2049
s le vrai Dieu, ni vers la créature telle qu’elle
est
, mais vers le moi rêvé de celui qui s’exalte. C’est une espèce de nar
2050
ne à travers la vraie créature, c’est l’amour qui
est
venu de Dieu, rendu aux hommes par le Christ, cette Agapè qui seule s
2051
main. Ma thèse centrale présentée de la sorte — n’
est
-ce pas assez clair dans mon livre ? — me direz-vous encore que vous ê
2052
dans mon livre ? — me direz-vous encore que vous
êtes
« plutôt contre » ? Voilà toute notre opposition : catholique et plat
2053
s dit que si nous la gardons « tout le reste nous
sera
donné par-dessus » ; mais l’inverse n’est pas prévu. Post-Scriptum.
2054
e nous sera donné par-dessus » ; mais l’inverse n’
est
pas prévu. Post-Scriptum. — J’avais commencé de lire le numéro d’Es
2055
tre relative à l’histoire « objective » se trouve
être
un mauvais résumé des idées de Raymond Aron, que je ne connaissais pa
2056
reçue hier, et relative à mon Amour : « Quand j’
étais
jeune, j’aurais parfaitement méprisé votre manière si cavalière d’exp
2057
patience historique ne conduit à la certitude, il
est
peut-être au moins aussi sage de faire confiance à l’intuition. » — T
2058
nce à l’intuition. » — Tristesse de l’historien n’
est
-ce pas ? Et c’est pourtant celui-là même qu’avec combien de raison vo
2059
ravail sur les troubadours, à Francfort, il avait
tenu
à faire deux semestres à Toulouse. Il y arrive tout excité. Le profes
2060
ote précise avant la lettre : « Le dialogue qui s’
est
poursuivi entre Rougemont et Davenson, après la note de ce dernier da
2061
ut qu’il y ait eu mariage. Or l’Église chrétienne
est
l’Épouse du Christ. Quand elle s’arrange trop bien avec le monde (Con
2062
ssurant. Car le pire danger pour le christianisme
serait
de cesser d’être chrétien, sans s’en apercevoir, et c’est le risque q
2063
e danger pour le christianisme serait de cesser d’
être
chrétien, sans s’en apercevoir, et c’est le risque qu’il court dans l
2064
entre le marxisme et le monde moderne », lequel s’
est
cependant constitué « massivement en dehors d’eux », c’est-à-dire sur
2065
christianisme. L’état d’Esprit qui fait enquête n’
est
pas celui d’une conquête. Attention. bd. Rougemont Denis de, « [Ré
2066
thème « Monde chrétien, monde moderne ». Le texte
est
précédé du chapeau suivant : « Certains de nos correspondants ont pos
2067
orce entre le christianisme et le monde ? Mais il
est
de toujours ! Non sans quelque hauteur, Denis de Rougemont pulvérise
2068
artition des huiles et savons par l’État, et vous
serez
bientôt en plein délire : tous les partis nommeront des commissions p
2069
mise moscoutaire. Ces commissions, d’ailleurs, ne
seront
occupées qu’à clamer, la cravate en bataille, des résolutions farouch
2070
udre, non pas pour qu’on en parle. Notre tendance
est
de nous en remettre à une agence d’État, qui généralement fait le tra
2071
ntait environ les 9/10 de la production. Le job a
été
bien fait : l’Allemagne et le Japon ont été battus. Et les agences de
2072
job a été bien fait : l’Allemagne et le Japon ont
été
battus. Et les agences de contrôle des prix, de la main-d’œuvre et de
2073
tte des partis. C’est pourquoi les partis ne s’en
sont
point occupés, et n’ont point jugé nécessaire de proclamer l’union sa
2074
, dans les commissions du Congrès et du Sénat, se
sont
bornés à des échanges d’arguments souvent brutaux, au cours d’enquête
2075
stration de ces agences. Peu importe : le travail
était
fait. En France, les partis s’arrangent en général pour rendre tous l
2076
s aussi insolubles que leurs principes respectifs
sont
incompatibles. Cela conduit à des crises mortelles. Alors les chefs d
2077
n sacrée, et délèguent tout pouvoir à l’État, qui
est
en l’espèce un nouveau chef de gouvernement. Ce dernier pris au dépou
2078
en chef et son remplacement à la dernière seconde
soit
par un antifasciste convaincu, soit par un bénéficiaire éprouvé de la
2079
nière seconde soit par un antifasciste convaincu,
soit
par un bénéficiaire éprouvé de la tradition dite nationale… Et si no
2080
vé de la tradition dite nationale… Et si nous ne
sommes
pas là pour consentir un prêt, payant la casse, vous parlez de notre
2081
er. C’est d’ailleurs très facile, me semble-t-il.
Soyez
honnêtes dans les négociations, comme le fut votre Herriot, que nous
2082
l. Soyez honnêtes dans les négociations, comme le
fut
votre Herriot, que nous respectons. Et cessez de répéter sur notre co
2083
te des sottises pittoresques ou méprisantes. Nous
sommes
adultes. Comment un Américain moyen voit le Monde — Quels sont,
2084
mment un Américain moyen voit le Monde — Quels
sont
, se dit-il, les pays qui marchent le mieux en Europe ? Les États scan
2085
la Suisse, la Hollande, et la Grande-Bretagne. Ce
sont
des démocraties en majorité socialistes, ce qui peut inquiéter, mais
2086
, ceux qui ont fondé nos vieilles familles. Quels
sont
les pays qui marchent mal et qui nous créent le plus d’ennuis ? L’Esp
2087
d’ennuis ? L’Espagne et le Portugal, parce que ce
sont
des dictatures, et peu importe qu’elles réussissent matériellement, e
2088
és aux Russes, qui les mettent au pillage, ce qui
est
peu rationnel : ils feraient mieux de les équiper, puisque ce sont le
2089
l : ils feraient mieux de les équiper, puisque ce
sont
leurs colonies. L’Allemagne nous plaît mieux que la Pologne : pays de
2090
ieux que la Pologne : pays de blonds et les noirs
sont
suspects, tous les villains de nos films ont les cheveux noirs. De pl
2091
s films ont les cheveux noirs. De plus l’Allemand
est
propre et travailleur, et mon arrière-grand-mère était du Wurtemberg.
2092
propre et travailleur, et mon arrière-grand-mère
était
du Wurtemberg. Les Italiens ? Nous en aurons bientôt autant chez nous
2093
i, comme l’ont fait les bourgeois d’Europe : ce n’
était
pas un regular guy. Le Vatican a la plus vieille diplomatie secrète d
2094
et toujours prêts et se battre. Oui, l’Europe, ce
sont
nos Balkans. Mais il y a l’Amérique du Sud, il y a les Russes, il y a
2095
d’ouvrir leurs frontières, de l’esclavage où ils
tiennent
leur presse, et de l’orgueil de parvenus de l’industrie et des scienc
2096
are. Car en réalité, nous touchons à l’Asie. Nous
sommes
une puissance maritime et cela compense la proximité géographique de
2097
était un clair avertissement aux Russes. La Chine
est
un de nos grands marchés, le Japon un de nos gros clients. C’est là q
2098
trois de leurs États, les dernières élections se
sont
passées presque sans coups de fusil. Peut-être atteindront-ils bientô
2099
: Liberté, Prospérité et Poursuite du Bonheur, ce
sont
là mes trois idéaux. Et je ne les vois réalisés qu’en Amérique. Co
2100
rique ! Car le contraire, chaque fois, peut aussi
être
vrai. Car ces rêveurs sont aussi, et souvent, de vieux cornichons à l
2101
haque fois, peut aussi être vrai. Car ces rêveurs
sont
aussi, et souvent, de vieux cornichons à lunettes, aux lèvres minces,
2102
matisés munis d’une « grille désodorisante »… Ils
sont
modernes. Car avec une belle énergie et beaucoup moins de naïveté que
2103
sent mieux que nous la confusion du siècle, ils y
sont
installés carrément, et ils l’exploitent non sans une sorte de bon se
2104
lites ne s’en approchent qu’en hésitant. Ils nous
sont
supérieurs à tant d’autres égards ; saurons-nous garder au moins cela
2105
éométriser, typique d’une civilisation mécanisée,
est
signe de lourdeur d’esprit, de paresse d’âme, d’appauvrissement de la
2106
t spirituel. La croyance exclusive et la réussite
est
le signe d’une vue bornée de notre condition humaine, de même que le
2107
église qui a l’air gothique quand plus rien ne l’
est
en nous ni autour d’elle. Un peuple, s’il éduque son sens des formes,
2108
ffres et se sent aussitôt rassuré. Mais un fait n’
est
qu’un signe dans une équation, une lettre ou une virgule dans une phr
2109
on ne peut le lire qu’avec tout le contexte. S’en
tenir
aux faits seuls, aux faits bruts, c’est une timidité de l’esprit qui
2110
s détestent celui qui vient les réveiller. Ils le
tiennent
pour pervers et masochiste. Et il est vrai que la conscience s’éveill
2111
Ils le tiennent pour pervers et masochiste. Et il
est
vrai que la conscience s’éveille généralement dans la douleur, mais i
2112
’ingéniait à rendre étanche, — inconsciemment. Ce
sont
là des secousses extérieures. Qui sait si une loi de l’esprit ne les
2113
quentes que les poussées intimes de la conscience
sont
plus méthodiquement refoulées ? Qui sait quels malheurs historiques u
2114
gagner sans écœurer le vaincu. Apprenons d’eux à
tenir
parole, à nous laver, à boire du lait, à être à l’heure, à ne pas cou
2115
à tenir parole, à nous laver, à boire du lait, à
être
à l’heure, à ne pas couper les files par principe, à observer les règ
2116
bserver les règles du jeu dans la mesure où elles
sont
raisonnables, à faire crédit, à payer nos impôts, à exiger des foncti
2117
tés de frileux. Enfin, apprenons d’eux le souci d’
être
dignes non seulement d’un passé qui nous a faits, mais surtout d’un a
2118
ttitude détient le secret de la liberté. Car il n’
est
de liberté réelle qu’en avant, dans tous les ordres, à chaque instant
2119
» de l’humain, oui, l’âme d’une civilisation qui
serait
perdue, perdue pour tous et non seulement pour nous ! Ce n’est donc p
2120
erdue pour tous et non seulement pour nous ! Ce n’
est
donc pas au nom de je ne sais quel nationalisme européen qu’il nous f
2121
…] Or, il s’en faut de beaucoup que les Européens
soient
unanimes à tenir activement le parti de cette Europe, de ses complexi
2122
t de beaucoup que les Européens soient unanimes à
tenir
activement le parti de cette Europe, de ses complexités vitales, de s
2123
qu’ils attendent eux-mêmes de la vie. Ainsi ce ne
sont
pas seulement les idéaux de progrès collectiviste ou de progrès capit
2124
lore mais sans faire mieux. Je ne vois plus, pour
tenir
vitalement aux conceptions et aux coutumes européennes, que deux clas
2125
-tampon, ou un bloc opposé aux deux autres. Ce ne
serait
résoudre, et, au contraire, ce serait exalter le nationalisme aux dim
2126
tres. Ce ne serait résoudre, et, au contraire, ce
serait
exalter le nationalisme aux dimensions continentales. Ce qu’il nous f
2127
on sens inventif. […] La fédération européenne ne
sera
pas l’œuvre des gouvernants chargés de défendre les intérêts de leur
2128
ur nation contre le reste du monde. La fédération
sera
l’œuvre de groupes et de personnes qui prendront l’initiative de se f
2129
érer en dehors des gouvernements nationaux. Et ce
sont
ces groupes et ces personnes qui formeront le gouvernement de l’Europ
2130
s d’autre voie possible et praticable. Les USA ne
sont
pas dirigés par une assemblée des gouverneurs des quarante-huit États
2131
uisse par les délégués des vingt-deux cantons. Ce
serait
impraticable. Ces deux fédérations sont gouvernées, au-dessus de leur
2132
ons. Ce serait impraticable. Ces deux fédérations
sont
gouvernées, au-dessus de leurs États, et en dehors d’eux, par un exéc
2133
rtés : le but, l’essence de la pensée fédéraliste
étant
précisément de trouver les moyens d’articuler, d’arranger sans les tu
2134
miques) dans un corps, non dans un carcan. Ce qui
est
la politique par excellence, n’en déplaise aux sectaires de tous bord
2135
Rougemont, et réunis dans L’Europe en jeu . Ils
sont
reproduits ici dans le cadre d’un numéro spécial d’Esprit sur le thèm
2136
acées, la torture et « notre désastre spirituel »
sont
sans importance à mes yeux « quand le foie gras circule » en Europe.
2137
péenne », sens qui me fait évidemment défaut s’il
est
vrai qu’il se définit par « la conscience épouvantée d’une déchéance
2138
s à Sartre. Allons donc ! Je vois bien qu’il vous
est
nécessaire d’un peu me calomnier d’abord pour couvrir vos réserves su
2139
nts d’une certaine gauche, sectaire comme on ne l’
est
qu’à vingt ans. Ceci dit, je voudrais que vos lecteurs sachent aussi
2140
dans le monde, et notamment des tâches dont elle
est
responsable — au sens actif du mot, cette fois — à l’égard des peuple
2141
la fièvre nationaliste du tiers-monde, l’heure n’
est
pas de cracher sur nos valeurs, mais de les prendre nous-mêmes au sér
2142
e nous devons offrir au monde et à nos fils, ce n’
est
pas notre mauvaise conscience, notre rage autopunitive ou l’alliance
2143
x qui perdront la face aux yeux de l’histoire, ce
seront
ceux qui auront dit que l’Europe était finie, quand il s’agissait de
2144
toire, ce seront ceux qui auront dit que l’Europe
était
finie, quand il s’agissait de la faire. » C’était cela, l’essentiel d
2145
», qu’il vous plaît de m’attribuer, et qu’il vous
est
loisible de juger bassement matérialistes, n’étant ni Russe ni du tie
2146
est loisible de juger bassement matérialistes, n’
étant
ni Russe ni du tiers-monde. bk. Rougemont Denis de, « Lettre à Jea
2147
mai 1962, p. 877-878. bl. La lettre de Rougemont
est
précédée de l’introduction suivante de Jean-Marie Domenach : « À la s
2148
péanisme” obsédé par le progrès économique ; je m’
étais
étonné qu’un “Européen” aussi convaincu que D. de Rougemont ne sente
2149
de l’Europe qui inspirait la fureur de Sartre. Je
suis
heureux que Rougemont souligne lui-même ce qui était, effectivement,
2150
is heureux que Rougemont souligne lui-même ce qui
était
, effectivement, un aspect de son article. Pour le reste, il se peut q
2151
j’en ai faite. » L’article de Rougemont auquel il
est
fait allusion, intitulé « Sartre contre l’Europe », paru dans Arts le
2152
re l’Europe », paru dans Arts le 17 janvier 1962,
est
également reproduit dans Les Chances de l’Europe .