1
: par la nécessité) la plus brûlante : Américains
et
Allemands chez nous. Laissons les Américains. Ils réussissent mal à n
2
Allemand, l’on doit reconnaître qu’il se surpasse
et
qu’il surpasse, mais il y a mis 16 ans — les plus fameux produits des
3
ncore de « faire durer le plaisir » jusqu’au bout
et
à tout prix ? Au niveau de jugement où nous place M. Hermann, tout A
4
crâne rasé, s’appelle Fritz, a volé des pendules
et
violé pour le moins une chaste fille de Montmartre. C’est une concept
5
t une conception de Français né paillard, décoré,
et
qui ne sait pas la géographie. Il faut tout de même que nos camarades
6
entes de l’état d’esprit candidard : les dessins,
et
plus encore les légendes de M. Hermann-Paul sont d’une imbécillité pr
7
Paul sont d’une imbécillité proprement répugnante
et
qu’il faudrait qualifier de criminelle si elle n’était avant tout veu
8
riminelle si elle n’était avant tout veule, plate
et
sénile, au point de perdre toute efficacité dès la 2e page. Il semble
9
nête dans son public soit à coup sûr d’écœurement
et
de mépris, devant cette déjection, grassement payée mais qui peut coû
10
évolutionnaires, c’est de ce point de vue central
et
seul efficacement critique que nous devons envisager les perspectives
11
ons envisager les perspectives de la vie publique
et
privée, dans l’état où se trouve la France en 1932. Est-ce à dire qu’
12
e, à seule fin d’en démontrer l’absurdité latente
et
souvent manifeste ? Ce serait faire la part trop belle au monde, que
13
telle, cette officielle dissociation de la pensée
et
de l’action apparaît particulièrement flagrante. C’est à ce titre et
14
raît particulièrement flagrante. C’est à ce titre
et
sous cet angle que l’affaire Jacques Martin prend pour nous une signi
15
Martin prend pour nous une signification précise,
et
que nous en parlons à cette place. André Bridoux, dans les remarques
16
déjà ! Elle ne l’est guère que dans nos cœurs, —
et
toujours à recommencer. Ce que l’instant commande, dans le monde tel
17
» de nos comportements ? ⁂ Une conviction intime
et
péremptoire s’élabore et s’impose dans le silence d’une vie : la loi
18
⁂ Une conviction intime et péremptoire s’élabore
et
s’impose dans le silence d’une vie : la loi de Dieu s’oppose à cette
19
: elle les juge. (Elle les avait jugés d’avance.)
Et
maintenant ils prennent leur revanche, dans la laideur de cette salle
20
. Une salle carrée, laide de cette laideur pauvre
et
presque abstraite qui symbolise assez bien le régime. Quatre gaillard
21
— maniement d’armes — dépose sur la table sabres
et
képis, s’assied pour écouter : tout est jugé d’avance. Deux heures du
22
é d’avance. Deux heures durant, quelques pasteurs
et
quelques écrivains vont faire appel aux principes suprêmes (c’est-à-d
23
d’ailleurs, sinon par la voix de leur président,
et
la mimique d’un jeune aviateur, dont la mâchoire furieuse remâche une
24
ère de fauve en cage — mais il n’y a pas de cage.
Et
chacun sait qu’au bout du compte il y aura un an de prison pour ce ga
25
il y aura un an de prison pour ce garçon sérieux
et
maître de lui, qui sourit parfois doucement derrière ses lunettes d’é
26
crasse hypocrisie par la bureaucratie bourgeoise
et
militaire qu’ils engendrèrent légitimement. Il fallait voir comment c
27
ette enceinte » un petit air anarcho ou pleurard…
Et
l’on parla pourtant de la conscience morale. On en parla, bien sûr, c
28
n sûr, comme d’une de ces célébrités respectables
et
séniles dont le nom sert encore de recommandation (pour ceux qui croi
29
ui croient aux « relations »). Cette vertu laïque
et
démodée, confectionnée par les idéologues de la Troisième République,
30
quelque prestige. Un je ne sais quoi de rassurant
et
d’avouable, qui fait qu’on invoque son nom dans tous les cas où il s’
31
mêle un jour de s’affirmer par une personnalité,
et
par là même de ne plus coïncider avec les intérêts, les habitudes de
32
er avec les intérêts, les habitudes de la classe,
et
la voilà jugée, raillée, emprisonnée — accusée d’attenter à la « caus
33
les idéaux pour lesquels nous nous ferions tuer,
et
les buts de ceux qui nous feraient volontiers tuer. Jean-Richard Bloc
34
rapport de trahison entre la religion chrétienne
et
la religion de l’Écho de Paris. « Nous avons proposé un maître à ce j
35
« que l’on n’est pas ici pour parler de théologie
et
de subtile philosophie ». André Philip, défenseur de Martin, lui répo
36
nce : « C’est faux ! Vous faites de la théologie,
et
vous ne faites même que cela ; c’est une tout autre théologie que la
37
e lâcheté entre les formes de la justice actuelle
et
les fins que lui assigne l’« ordre » bourgeois. Une manifestation com
38
les témoignages apportés, la plaidoirie puissante
et
prophétique d’André Philip ont posé au régime la question de confianc
39
lip ont posé au régime la question de confiance ;
et
qu’ils l’ont posée sur un plan où nul arrêt de la justice humaine dés
40
1933)d Le faux rapport entre le christianisme
et
le christianisme de la chrétienté réside en ceci, que le christianism
41
l’Éternité, pense continuellement à l’Éternel, —
et
que la chrétienté ensuite parle de la même façon, mais pense à cette
42
siècles de lutte sourde entre ces deux vouloirs,
et
tant que dure la lutte le christianisme vainc : sa victoire est d’êtr
43
nt à croire qu’il est une autre façon de vaincre,
et
que c’est de réduire l’adversaire à une paix avantageuse, à une paix
44
ale, — qu’enfin ils la bénissent, la sanctifient,
et
en son nom rendent grâces au ciel, alors éclate le scandale, car alor
45
la rendormir, mais en vain : elle s’est fait mal,
et
la douleur tient réveillé. On a essayé de nous faire croire que cet «
46
une chrétienté qui, loin d’avoir maudit la guerre
et
surtout ce qui l’a permise, prétend encore dominer sur l’Europe, et n
47
l’a permise, prétend encore dominer sur l’Europe,
et
ne peut maintenir cette apparence de règne qu’en confondant scandaleu
48
ienté ! Car ce cri est le témoignage d’un réveil.
Et
quand bien même il ne serait poussé que par quelques-uns, rien ni per
49
e fois qu’il est porté, rétablit le christianisme
et
sa nouveauté menaçante. ⁂ Que la passion qui nous arrache ce cri, nou
50
qui nous arrache ce cri, nous rende aussi lucides
et
efficaces ! Nous voulons rompre, et nous savons qu’il y faudra de la
51
aussi lucides et efficaces ! Nous voulons rompre,
et
nous savons qu’il y faudra de la violence. Mais où porter le coup ? q
52
r elle n’a pas pu se faire entre le christianisme
et
l’injustice de ce monde, l’un n’existant que pour autant qu’il exclut
53
èrent comme un privilège, le perdent par là même,
et
dérogent, mais s’obstinent à porter un titre désormais irrecevable. C
54
yants, l’élément le plus voyant, le plus officiel
et
le plus puissant de la chrétienté, — il n’est pas le christianisme, e
55
e la chrétienté, — il n’est pas le christianisme,
et
ce n’est pas à lui de rompre avec l’injustice dont il s’est fait le s
56
e avec l’injustice dont il s’est fait le soutien,
et
qui, depuis, assure son succès relatif. Une église « établie » établi
57
établissant à son tour un ordre injuste du monde
et
s’appuyant sur lui, en réalité n’est plus l’Église et n’a plus le dro
58
’appuyant sur lui, en réalité n’est plus l’Église
et
n’a plus le droit de parler ; elle n’est plus qu’une précieuse auxili
59
un appel aux églises en tant que corps constitués
et
officiels1. Non, en présence du scandale de la chrétienté embourgeois
60
e la chrétienté embourgeoisée, patriotarde, riche
et
peureuse, les églises auraient beau multiplier les manifestations pub
61
ues, les vœux, les résolutions, les protestations
et
les collectes, elles ne pourront qu’attester par là même qu’elles ne
62
rupture, qu’elles ont passé au camp de l’ennemi,
et
depuis si longtemps qu’elles parlent maintenant sa langue, adoptent s
63
optent ses préjugés, singent ses pires faiblesses
et
bénissent ses canons. Bien moins encore que tout cela, nous attendons
64
Nous n’attendons rien d’aucun acte délibéré, pesé
et
calculé, tendant à désolidariser la « chrétienté » du désordre établi
65
solidariser la « chrétienté » du désordre établi.
Et
pourquoi ? Parce que c’est tout à fait impossible, parce que la « chr
66
ble, parce que la « chrétienté » est sécularisée,
et
qu’on ne peut demander à ce siècle de rompre avec lui-même, de s’arra
67
t se produire qu’entre le christianisme véritable
et
cette « chrétienté » qui s’en réclame encore au moment où elle le tra
68
oment où elle le trahit. Telle sera donc la forme
et
tel sera le premier lieu de la rupture nécessaire : la dénonciation d
69
aurions mal dirigées, compromises par maladresse,
et
que nous pourrions, par exemple, dégager de leurs complicités avec le
70
? Car d’une part il ne peut pas la compromettre,
et
ce qu’il compromet, c’est toujours autre chose. Mais d’autre part, et
71
t, c’est toujours autre chose. Mais d’autre part,
et
pour la même raison, il ne peut s’en targuer pour fonder un « ordre c
72
s’en targuer pour fonder un « ordre chrétien » ;
et
s’il le fonde, c’est en réalité sur une tout autre force que celle de
73
la foi. Ce peut être sur une éthique de puissance
et
de service ; ou sur une éthique de bonheur ; ou sur un idéal humanita
74
ordre chrétien » ont été plus ou moins réalisées,
et
constituent dans leur ensemble, du Moyen Âge à l’Amérique moderne, la
75
e dont nous avons à dénoncer l’origine permanente
et
les manifestations actuelles. ⁂ Ne nous excusons pas d’avoir recours
76
es, puisque précisément, à l’origine du désordre,
et
plus encore dans son établissement, nous trouvons ce désir trop humai
77
eu de sa décision n’est pas le lieu des décisions
et
des calculs humains ; il est à l’intérieur de la religion. Les église
78
icter un « ordre chrétien », se fondaient toutes,
et
se fondent encore, sur une conception antichrétienne de la foi. La fo
79
force que l’Église aurait, une fois pour toutes.
Et
cette possession serait en quelque sorte garantie par des institution
80
es, se faire un avoir de la Pauvreté évangélique,
et
bientôt ne plus vivre que sur les intérêts de cet avoir. Mais si la f
81
térêts de cet avoir. Mais si la foi, don de Dieu,
et
gratuit — « afin que nul ne se glorifie » — est une participation ins
82
participation instantanée à l’éternel, elle juge
et
condamne ceux-là d’abord qui s’en réclament. Et c’est pourquoi il y a
83
e et condamne ceux-là d’abord qui s’en réclament.
Et
c’est pourquoi il y a un imposteur dans tout homme qui se dit chrétie
84
t son plan sans se soucier de la justice de Dieu.
Et
la voix du prophète s’élève contre l’Église : « Tes amis t’ont jouée,
85
qui mangeaient ton pain t’ont dressé des pièges —
et
tu n’as pas su t’en apercevoir ! — Toi qui t’assieds sur les hauteurs
86
apercevoir ! — Toi qui t’assieds sur les hauteurs
et
qui dis en toi-même : Qui me précipitera jusqu’à terre ? — Quand tu p
87
proche pour toutes les nations. » (Abdias II, 3-4
et
15). Ils ont prétendu rendre à Dieu ce qu’en réalité ils rendaient à
88
théologie se fait servante de la chose publique.
Et
que voit-on dès lors ? Présentement ? — On voit des Georges Goyau et
89
lors ? Présentement ? — On voit des Georges Goyau
et
autres « croyants » décorés, s’indigner de ce que les sans-Dieu parle
90
confisquer à leur profit « la primauté du Christ
et
celle de l’Europe 3 ». L’on voit des von Papen, délégués par l’indust
91
ques asperger des croiseurs, un Te Deum à Londres
et
un autre à Berlin pour célébrer le même massacre. On voit une nuée de
92
r le même massacre. On voit une nuée de piétistes
et
de bigots, demeurer agressifs dans leur volonté de confondre la moral
93
rale petite-bourgeoise avec les ordres de la foi.
Et
l’on a vu Babitt. Mais n’allons pas chercher si loin. Ouvrons un jour
94
sme qu’il décrit ainsi : « Dans cette philosophie
et
cette morale est délibérément supprimée toute idée de liberté, toute
95
, toute idée de propriété, toute idée de patrie… [
et
l’énumération se poursuit jusqu’à ceci ] : Chose plus atroce encore,
96
s nous écrivent des romans contre le bolchévisme,
et
l’on donnera 50 000 fr. au mieux pensant. Et Figaro de conclure : «
97
sme, et l’on donnera 50 000 fr. au mieux pensant.
Et
Figaro de conclure : « En terminant, l’éminent religieux déclara qu
98
r à la sauvegarde des hautes valeurs spirituelles
et
des vérités saintes que l’Académie d’éducation et d’entraide sociale
99
et des vérités saintes que l’Académie d’éducation
et
d’entraide sociale a pour mission de servir et de faire rayonner. » —
100
on et d’entraide sociale a pour mission de servir
et
de faire rayonner. » — L’idée de propriété, l’idée chrétienne5, les h
101
e crois pas à vos paroles, chrétiens menteurs ! —
et
je lui répondrai : Ta révolte est la mienne, mon humaine révolte. Mai
102
’injustice établie. Tu ne crois pas à ces paroles
et
tu fais bien, même si tu en souffres ; mais j’ai encore plus à souffr
103
uelles régions spirituelles dont tout leur être —
et
cette maladie même ! — prouvent l’inexistence ou la disparition. On l
104
re connaissance de l’homme que l’on trahit ainsi,
et
, comment cette tactique, encore qu’inconsciente, lie partie sous-main
105
ion ecclésiastique, qui aujourd’hui prétend durer
et
se défendre contre le monde soulevé. Étrange illusion, certes, puisqu
106
Car le péché n’est pas le dérèglement de la chair
et
du sang, mais le consentement de l’esprit à ce dérèglement8 ». Et pou
107
le consentement de l’esprit à ce dérèglement8 ».
Et
pourtant, nous n’avons jamais à dresser notre christianisme contre le
108
uste. Car ce qui manifeste la foi, c’est le choix
et
non pas le système : il n’est de choix que personnel. Ainsi le rôle d
109
ster de porter sur le monde un jugement permanent
et
destructeur ; tandis que la révolution dans ce qu’elle a de nécessair
110
e véritable nom de la rupture, son lieu, son mode
et
son enjeu total : rétablir à chaque instant le christianisme, dans sa
111
uveauté prophétique, tel est l’Acte — le seul ! —
et
tel est aussi le mystère ; car cette seule Rupture effective surpasse
112
1. L’Église « corps du Christ », en théologie ;
et
en réalité : corps officiellement constitué dans la Troisième Républi
113
ement constitué dans la Troisième République… 2.
Et
non pas au nom d’un « ordre social chrétien qui s’opposerait au désor
114
rien d’autre qu’un événement, un drame entre Dieu
et
l’homme. 6. Parce qu’on ne peut pas le défendre, cela n’a aucun sens
115
’on ne peut pas le défendre, cela n’a aucun sens,
et
ceux qui prétendent le défendre mentent, et ne défendent que leur esp
116
sens, et ceux qui prétendent le défendre mentent,
et
ne défendent que leur esprit. On sait ce que c’est que l’esprit, en c
117
Si le christianisme primitif est une révolution —
et
la plus profonde de toute l’histoire —, le protestantisme se doit d’ê
118
débarrassé de tous les adoucissements dogmatiques
et
compromis ecclésiastiques, sans cesse renaissant dans la chrétienté.
119
nt devenues les officines d’un conformisme social
et
politique plus scandaleux encore que celui des églises catholiques, p
120
il se trouve condamné par la dogmatique réformée,
et
plus encore par la révolte de la foi réformée contre toutes les « syn
121
porte à croire que l’Amérique, demain, l’imitera,
et
même la France, si les questions économiques et sociales y prennent u
122
, et même la France, si les questions économiques
et
sociales y prennent un jour l’acuité qu’elles ont, depuis la guerre,
123
ür den Sozialismus sont des éléments protestants,
et
leur maître, Paul Tillich, exerce par ailleurs une influence intellec
124
ns européennes — dans le domaine du service civil
et
des camps de travailleurs. Mais les tentatives de rupture proprement
125
giques nous paraissent encore plus significatives
et
plus riches de possibilité. On a souvent reproché à la « théologie di
126
oché à la « théologie dialectique » de Karl Barth
et
de ses amis de justifier une sorte de désintéressement radical à l’en
127
ment radical à l’endroit des problèmes politiques
et
sociaux. La parution coup sur coup, de trois livres importants de Gog
128
e trois livres importants de Gogarten, de Brunner
et
de de Quervain sur la « théologie politique » fait justice de ce repr
129
théologie politique » fait justice de ce reproche
et
démontre une fois de plus que le paradoxe de la « politique du pessim
130
e tous les problèmes de l’heure avec une lucidité
et
un courage intellectuel qu’on rencontre rarement chez les écrivains p
131
» que systématique, sa doctrine pourrait éclairer
et
aérer beaucoup de nos polémiques byzantines autour du marxisme. Il le
132
rande majorité des ouvriers parle de Jésus-Christ
et
de l’Église comme de deux choses qui n’ont rien en commun. » Il const
133
promulguant des règles sur le dimanche, l’alcool
et
la moralité, mais qu’elle s’est arrêtée au moment où il semblait qu’e
134
rotestantisme américain de son piétisme optimiste
et
moralisant. Mais qu’entendent-ils par « christianisation, de l’ordre
135
sation de l’Évangile impliqué dans leur attitude,
et
qui les ferait retomber dans les vieilles erreurs du capitalisme puri
136
ement tout récent qui s’intitule Economic Justice
et
à la tête duquel on retrouve Jerome Davis et Francis A. Henson. Le bu
137
tice et à la tête duquel on retrouve Jerome Davis
et
Francis A. Henson. Le bulletin très vivant que publient ces jeunes ho
138
eunes hommes a pris pour tâche de faire connaître
et
de critiquer toutes les tentatives réformistes ou révolutionnaires ch
139
ses collaborateurs des noms d’évêques socialistes
et
d’essayistes à tendances philo-marxistes tels que Reinhold Niebuhr. O
140
l’un des personnages les plus influents du Japon,
et
l’on n’a pas oublié son fameux message aux peuples chinois, publié à
141
blié à Tokyo pendant le bombardement de Shanghai,
et
qui lui valut des menaces de mort. Plus radical que les socialistes,
142
xistes dont il rejette le matérialisme méthodique
et
le goût pour la violence dictatoriale. ⁂ En France, ce mouvement mond
143
otestantisme, s’attarde aux solutions réformistes
et
pacifistes, et n’a pas tenté jusqu’ici d’édifier une doctrine origina
144
’attarde aux solutions réformistes et pacifistes,
et
n’a pas tenté jusqu’ici d’édifier une doctrine originale. Elle semble
145
tendu foncier touchant le problème de la violence
et
que seul parmi ses collaborateurs, André Philip tranche avec netteté,
146
e dans le mince bulletin du groupe Hic et Nunc ,
et
dans certains articles du Semeur , organe de la fédération chrétienn
147
germe d’un mouvement qui demain peut se préciser
et
s’amplifier. Signalons enfin la revue internationale de la Fédération
148
) Carlo Predella (Italie), N. Stufkens (Hollande)
et
F. Heuson (Amérique). C’est un document de premier ordre sur la « rup
149
que le « spiritualisme » du siècle dernier mérite
et
conditionne le « matérialisme » de ce siècle, de même que cette sépar
150
siècle, de même que cette séparation de l’esprit
et
de la matière dénature et dégrade à la fois l’esprit et la matière, e
151
séparation de l’esprit et de la matière dénature
et
dégrade à la fois l’esprit et la matière, et risque, à la limite, de
152
la matière dénature et dégrade à la fois l’esprit
et
la matière, et risque, à la limite, de les priver de toute raison d’ê
153
ture et dégrade à la fois l’esprit et la matière,
et
risque, à la limite, de les priver de toute raison d’être efficace, —
154
s priver de toute raison d’être efficace, — ainsi
et
parallèlement, de la corruption spirituelle des loisirs est née la pr
155
e amère contradiction : labeur forcé ou inaction.
Et
tout devient prétexte à récriminations : « je turbine » ou « je ne fo
156
e qui nous rabat au sol. L’homme dit « j’agis »,
et
il trouve dans l’acte sa mesure, son rythme et sa joie. Une totalité.
157
», et il trouve dans l’acte sa mesure, son rythme
et
sa joie. Une totalité. Et s’il divise alors le temps de ses journées,
158
e sa mesure, son rythme et sa joie. Une totalité.
Et
s’il divise alors le temps de ses journées, c’est pour mieux dominer
159
gagne » ou « Je produis », ou bien « Je chôme »,
et
ce sont autant de ruptures et de séparations hargneuses, de constats
160
bien « Je chôme », et ce sont autant de ruptures
et
de séparations hargneuses, de constats d’injustice, d’isolement et d’
161
hargneuses, de constats d’injustice, d’isolement
et
d’impuissance. La division de nos journées en 8 heures de travail et
162
a division de nos journées en 8 heures de travail
et
8 heures de loisir est une dérision brutale des rythmes créateurs. El
163
oir follement décrétées autonomes : la production
et
la consommation. Cette division n’est pas humaine. Elle nous asservit
164
té du travail Les nécessités anonymes naissent
et
grandissent à la mesure exacte de nos démissions personnelles : genès
165
raît très supérieure. Les singes gagnent leur vie
et
ne font pas d’histoires. Ils ne font pas tant de publicité et de plan
166
as d’histoires. Ils ne font pas tant de publicité
et
de plans quinquennaux. Leurs moyens sont plus simples, plus élégants.
167
icielle de la Troisième République, de l’Amérique
et
des Soviets. Nous croyons ici que la dignité de l’homme consiste à me
168
ituel » n’a pas d’autre sens pour nous. Bourgeois
et
marxistes partent de la nécessité du gain, — gagner sa vie. Nous part
169
ragique l’opposition toute relative du communisme
et
du capitalisme. ⁂ Ils partent donc de la nécessité. Ils n’arriveront
170
eau l’intensifier10 : la tâche grandira d’autant.
Et
la tristesse. « Le temps vuide » Il semble que la condamnation
171
Je gagne mon bifteck » — de la morale bourgeoise,
et
de l’idéalisme socialiste, démocratisation du confort moyen et de la
172
isme socialiste, démocratisation du confort moyen
et
de la TSF dans un monde où le libre divertissement de chacun sera la
173
oisir qui découlent de cette erreur spirituelle ;
et
principalement la conception abstraite et négative qui sévit aujourd’
174
uelle ; et principalement la conception abstraite
et
négative qui sévit aujourd’hui. On peut en dater l’origine. Dans l’En
175
. Mais nous savons le vrai nom du « temps vuide »
et
c’est chômage. Tout le mal est venu d’une séparation, d’une disjoncti
176
ne est symbolisé par cette disjonction du travail
et
du loisir, dont il faut maintenant déceler la lâcheté originelle. Car
177
le loisir est simplement le contraire du travail,
et
son but ; si le labeur et le repos n’ont plus de finalité commune ; s
178
e contraire du travail, et son but ; si le labeur
et
le repos n’ont plus de finalité commune ; s’il n’y a plus de loisir d
179
qui les confronte, il n’y a plus que du désordre
et
des souffrances pour le corps qui les subit. L’acte ordonnateur, o
180
r cartésianiste11, la séparation de la « pensée »
et
de l’« action ». Nous réapprendrons à penser en hommes responsables,
181
ravail, ce n’est pas le loisir, mais la création.
Et
le but du loisir, ce n’est pas la jouissance, mais la création. Nous
182
’avons pas le goût du vide. Par cet acte, travail
et
loisir retrouveront leur commun sens : dans l’actualité de l’être, où
183
homme tendu assume dans ses desseins la nécessité
et
le jeu, les combinant selon sa loi pour créer un risque nouveau. Le t
184
risque nouveau. Le temps de cet homme est plein,
et
nul n’y pourrait distinguer des heures « creuses » ou des efforts sté
185
douleur, non plus que sans volupté. Mais le sens
et
la fin seuls importent, et fondent l’œuvre en dignité. Dignité du tem
186
volupté. Mais le sens et la fin seuls importent,
et
fondent l’œuvre en dignité. Dignité du temps de l’homme. ⁂ Un jour, l
187
be ». — « Il me faut vingt ans », dit le peintre.
Et
pendant vingt ans, l’empereur subvient à l’existence du peintre. Cepe
188
es pinceaux ». On fait cela, on déroule une soie.
Et
d’un seul trait miraculeux… P.-S. — Cette histoire de la Chine se s
189
ordre, immédiatement consécutif, des institutions
et
des lois, je ne vois rien de plus néfaste que la fameuse législation
190
, de satisfaire les exigences artificielles. 11.
Et
non pas cartésienne, comme on le dit souvent. f. Rougemont Denis de
191
ittérature (octobre 1934)g D’un présent confus
et
mauvais, qu’allons-nous tirer, mes amis, sinon la négation d’un mal,
192
nous tirer, mes amis, sinon la négation d’un mal,
et
ce n’est pas encore le bien sauveur ! Voici notre erreur perpétuelle
193
devra son éclat moins à lui-même qu’à nos ombres,
et
moins à sa jeunesse incomparable qu’au souvenir récent de nos décrépi
194
u’anathème au présent, où serait notre création ?
Et
si l’ordre que nous voulons n’était rien d’autre que la subversion du
195
blesses, non point pour les confondre éloquemment
et
périr ensuite avec elles, mais pour restaurer le pouvoir qui nous dés
196
igne en même temps les méfaits du désordre établi
et
le principe vivant du nouvel ordre. Ce pouvoir, nous le connaissons,
197
ns. Mais cette mesure est peut-être assez faible.
Et
c’est pourquoi nous avons tant de peine à définir et nommer clairemen
198
c’est pourquoi nous avons tant de peine à définir
et
nommer clairement les maux dont nous souffrons, et le bien qui nous l
199
t nommer clairement les maux dont nous souffrons,
et
le bien qui nous les révèle. En vérité, nous connaissons bien mieux c
200
usieurs générations mener cette course épuisante,
et
s’abattre à la fin dans les colonnes des magazines de gauche, pâture
201
ue l’on sache d’abord au nom de quoi l’on parle !
Et
qu’on le dise ! Toute la bassesse de la « littérature » moderne se ré
202
en dire. Elle n’est occupée qu’à « bien » dire, —
et
c’est pourquoi elle parle mal. Or ceux qui l’ont attaquée jusqu’ici n
203
ns la fin d’un art au nom de ce qui juge l’art, —
et
le recrée. Nos griefs ne sont pas littéraires ; ils sont, ils veulent
204
ois aime leurs œuvres, parce qu’il s’y retrouve ;
et
le peuple les aime, parce qu’elles décrivent ses désirs réalisés. Cet
205
»12, pour éviter, en fait, de résoudre le drame.
Et
c’est la bonne conscience idéaliste du régime. « Littérature », opium
206
incroyants. Notre troisième espèce est plus rare,
et
vaut un peu mieux, si l’on estime ses seuls moyens. Elle comprend la
207
es, ceux qui méprisent la vie bourgeoise, l’amour
et
le mariage bourgeois, l’idéalisme romantique, la croyance vulgaire au
208
ux qu’il ne saurait le faire ses propres révoltes
et
ses rêves. Ils lui en font une espèce de gloire. Le voilà justifié da
209
igueur obstinée. Nous pourrions simplifier encore
et
dire : il y a d’une part les moralistes bourgeois — mais personne ne
210
nfluencent au hasard, entraînent les jeunes à hue
et
à dia, lancent des modes, les renient, se persuadent de l’importance
211
nne bourgeoisie a perdu tout prestige à nos yeux.
Et
les critères « nouveaux » de l’immoralisme bourgeois trahissent la dé
212
arle plutôt que de celui dont il faudrait parler,
et
qu’on ignore. Elle ne juge plus : elle traduit la rumeur des salons,
213
tère général qui nous permît d’évaluer les œuvres
et
leur influence sur les hommes, je crois bien qu’il faudrait le cherch
214
aujourd’hui dans une science que je n’aime guère,
et
qui s’appelle la sociologie. La grande faiblesse de la littérature ac
215
marxistes. « L’art pour l’art » reste sa méthode,
et
lui tient lieu de justification ; or cette doctrine est proprement bo
216
ce, en fait, des valeurs établies ; liée, en fait
et
par ses conséquences pratiques, à l’établissement des bourgeois. Mais
217
t dire enfin que c’est l’homme en tant qu’homme —
et
pas seulement le non-bourgeois — qui pâtit du désordre établi. Notre
218
ité, tombent sous le coup des lois publicitaires.
Et
la publicité traduit les exigences d’une classe bourgeoise très capri
219
é intérieure, — c’est-à-dire sans message positif
et
populaire — n’ait été finalement utilisée par des puissances qu’elle
220
e visée humaine, elle n’est plus que littérature,
et
les fameuses « valeurs » littéraires, on sait qu’elles sont de peu de
221
l’imprévisible Une littérature n’est valable —
et
son influence efficace — que si elle ordonne ses œuvres à une commune
222
de l’ère finissante ne sont plus que malentendus,
et
la seule convention qui subsiste, c’est de les accepter pour tels. «
223
te, c’est de les accepter pour tels. « Philosophe
et
guerrier, écrit Rudolf Kassner, n’ont presque plus en commun que des
224
ature de ces banalités ? L’aventure du romantisme
et
l’équivoque libérale ayant rapidement achevé de disqualifier l’esprit
225
e reste à nos « hommes d’action » d’autres normes
et
d’autre mesure que l’argent, ce symbole unique de la puissance sans v
226
er qu’il n’y a plus de mesure commune à la pensée
et
à l’action, — hors la monnaie. Un monde sans mesure, comme le nôtre,
227
a mesure de tout soit désormais dans la personne,
et
non plus dans les intérêts d’un pouvoir ou d’une classe, voilà bien l
228
atique, si l’on entend ce terme au sens originel,
et
non point au sens dévié de l’individualisme politique. « Dernière heu
229
connaissent la mesure connaîtront bientôt l’ordre
et
la culture que nous voulons. Nous rejoignons ici le propos de ces pag
230
il se concrétise en relations de responsabilité.
Et
voilà bien le seul fondement d’une communauté vivante. L’écrivain ser
231
tant plus personnel, d’autant plus responsable, —
et
d’autant plus profondément enraciné dans la commune condition humaine
232
littérature rénovée, qu’aurions-nous la témérité
et
la naïveté de prévoir ? On ne prévoit pas un chef-d’œuvre, et la litt
233
é de prévoir ? On ne prévoit pas un chef-d’œuvre,
et
la littérature, c’est d’abord les chefs-d’œuvre. Mais avant l’œuvre,
234
e désir invoque. Je vois un grand dessin véhément
et
humble de Rembrandt, des amas d’ombres grouillants d’êtres révélés et
235
dt, des amas d’ombres grouillants d’êtres révélés
et
saisis par le droit flot de la lumière, les replis de la vie quotidie
236
ouillés comme un cauchemar par le brusque soleil,
et
l’homme au centre, campé dans sa stature réelle, ouvrant les yeux sur
237
unit dans un même regard les apparences actuelles
et
l’ordonnance finale qui les informe et qui les juge. J’imagine d’abor
238
actuelles et l’ordonnance finale qui les informe
et
qui les juge. J’imagine d’abord ce réalisme comme une énorme satire à
239
jaillir à la moindre comparaison de nos coutumes
et
de nos idéaux. Il nous faut une équipe d’écrivains qui entreprennent
240
i avec les buts qu’ils croient viser, d’une part,
et
d’autre part avec les buts qui leur sont réellement assignés par leur
241
ls ont en tête trente-six morales contradictoires
et
autant de modèles qu’ils voudraient égaler, et cependant ils suivent
242
es et autant de modèles qu’ils voudraient égaler,
et
cependant ils suivent la coutume bourgeoise, qui est la négation de t
243
e genre, minutieuse confrontation de l’idéal rêvé
et
du sordide quotidien. Mais Joyce est justement le plus parfait exempl
244
ensée bourgeoise, vice qui le lie au monde ancien
et
le condamne à passer avec lui : il décrit l’anarchie intime de l’homm
245
ature romanesque décrit depuis cent ans nos mœurs
et
nos malheurs avec une croissante application à la stupidité, j’entend
246
a bourgeoisie n’ose plus défendre ses vrais buts,
et
préfère parler d’autre chose. Tous nos romans ne sont que diversions,
247
— erreur soviétique. Mais bien à hauteur d’homme,
et
c’est la vérité personnaliste. Enseigner, c’est rappeler aux hommes l
248
n autant de talent qu’en exige notre littérature,
et
quelques vertus d’homme et de « penseur » en plus. J’indiquerai trois
249
ige notre littérature, et quelques vertus d’homme
et
de « penseur » en plus. J’indiquerai trois de ces vertus qui me parai
250
arne, parce qu’elle tiendra la mesure de l’humain
et
qu’elle créera dans la perspective commune. Restaurer le prestige de
251
engage en puissance notre être tout entier, corps
et
âme sans distinction. Apprenons à penser comme des hommes responsable
252
bscurcissent ou trahissent les buts de l’écrivain
et
le séparent de l’humanité. Une littérature personnaliste rétablira la
253
éveloppera naturellement en un art communautaire,
et
que les moindres œuvres, traduisant même sans talent la vocation auth
254
rendront cette valeur humaine qu’ont les mémoires
et
« livres de raison » rédigés sans littérature. Voilà qui est banal ?
255
a définition de l’homme. Une nouvelle discipline.
Et
une nouvelle aisance. 12. Un éditeur introduit en ces termes une c
256
s’assigner des buts constructifs échoue toujours,
et
fatalement, dans un conformisme nouveau (AEAR). Tout de même qu’une r
257
aphies pauvrettes, des « variétés » publicitaires
et
en général de la littérature de Prisunic ; 3° parce qu’ils flanquent
258
ls flanquent le cafard aux hommes sobres d’esprit
et
passionnent les indiscrets. Je le dis comme je le sens — parce que je
259
e le sens — parce que je les lis, naturellement —
et
je vous laisse le soin de me classer, si vous y tenez. Pour être just
260
qui les conte assez mal — Giono s’en mêle trop —
et
qui a cherché à s’en tirer par ses moyens. Je cite : J’essayai de me
261
disent non à la vie. C’est facile d’être négatif.
Et
je n’avais pas besoin qu’on m’y aide. Pourquoi n’avez-vous jamais eu
262
la vie, c’est surtout une formule nietzschéenne,
et
qui signifie chez Nietzsche à peu près le contraire de ce que cette f
263
losophes sont sans cesse repris par les simples —
et
aussi par les autres, bien sûr — et détournés de leur sens primitif,
264
les simples — et aussi par les autres, bien sûr —
et
détournés de leur sens primitif, de sorte qu’ils trahissent la pensée
265
dette de reconnaissance à payer à M. Johan Bojer,
et
s’il était là, je lui ferais ma belle révérence paysanne et je lui di
266
ait là, je lui ferais ma belle révérence paysanne
et
je lui dirais : — Asseyez-vous. — Et je lui ferais le café, et j’irai
267
nce paysanne et je lui dirais : — Asseyez-vous. —
Et
je lui ferais le café, et j’irais lui chercher mon plus beau pot de c
268
ais : — Asseyez-vous. — Et je lui ferais le café,
et
j’irais lui chercher mon plus beau pot de confitures… Elle voudrait
269
de confitures… Elle voudrait voir aussi Reymont,
et
Gorki. « Dites, monsieur Gorki, comment avez-vous fait pour savoir ?…
270
is vous citer non seulement à cause de sa beauté (
et
parce qu’il faut faire un sort à ces choses-là quand on en trouve), m
271
ient avec des automobiles, des divans, des hommes
et
des femmes qui couchaient tellement ensemble qu’ils en étaient perpét
272
par les pauvres. Non. Vous me laissez désespérée
et
sans secours devant le féroce maraudeur rouge. — D’autres sont venus,
273
res de mon logis, l’autre jour, pressé de rentrer
et
ne disposant d’aucun moyen rapide, je hèle une auto. Le conducteur es
274
e en face l’église du village, vous voyez d’ici !
Et
toutes les combines que ça amène, ah ! mais alors, vous savez, tout y
275
tout y est, c’est attrapé, le curé, la politique
et
tout15 !… » Les éditeurs s’efforcent de répondre à la demande du publ
276
andent. Mais savent-ils bien ce qu’ils demandent,
et
pourquoi ils le demandent ? Est-ce que le rôle des éditeurs, mais sur
277
t ? Est-ce que le rôle des éditeurs, mais surtout
et
d’abord des écrivains, ne serait pas justement de savoir un peu mieux
278
peu mieux que « les gens » de quoi ils ont besoin
et
ce qu’ils demandent réellement ? Car les gens ne demandent pas ce qu’
279
ne demandent pas ce qu’ils ont l’air de demander,
et
ce qu’on se montre si pressé de leur donner à bon marché. Ils s’expri
280
abêtis par l’école, par la presse, par les partis
et
par le cinéma. Mais croyez-vous vraiment que mon bagnolard, mon lecte
281
à sa façon vulgaire, avec son rire insupportable,
et
fallait-il être bien fin pour le comprendre ? 15. Je n’ai pas suivi
282
15. Je n’ai pas suivi le conseil de cet homme,
et
n’ai pas lu le livre. Je lui laisse donc la responsabilité du compte
283
é des idées défendues par les deux groupes cités (
et
qui sont absolument indépendants l’un de l’autre). Cet exposé traduit
284
mer que les objets que nous touchons de nos mains
et
voyons de nos yeux soient du tout plus concrets que l’acte qui consis
285
us concrets que l’acte qui consiste à les toucher
et
à les voir. Car un objet que personne n’a vu ni touché appartient à l
286
her, ou à la connaissance, une réalité suffisante
et
détachée de toute action particulière. (Ainsi rêve l’idéalisme.) Pour
287
tant où elle rencontre une occasion de s’exercer,
et
la saisit. Par ces deux phrases, nous n’avons pas encore défini le co
288
x équations dont le concret constitue l’inconnue,
et
décrit la manière dont l’entendement le prévoit. Peut-on vraiment fai
289
nement seul a la vertu de concrétiser le concret,
et
de manifester à l’évidence son mystère. Or l’événement ne naît jamais
290
cende nos définitions. Elles sont jugées par lui,
et
non point lui par elles. Et c’est de lui qu’elles tirent leur justifi
291
sont jugées par lui, et non point lui par elles.
Et
c’est de lui qu’elles tirent leur justification, et non l’inverse. En
292
c’est de lui qu’elles tirent leur justification,
et
non l’inverse. En d’autres termes, lorsque nous parlons du concret, n
293
poser, transforme l’équation sujet en vrai sujet,
et
l’équation objet en vrai objet. 2. Le concret, c’est la présence d
294
tout au contraire, il les révèle bien distincts,
et
agissant chacun à leur manière ; car autrement, où serait l’événement
295
oquer aucune présence. C’est là le rôle du sujet,
et
sa nature. La manière d’être du sujet est essentiellement provocante.
296
qui lui donne occasion de manifester son pouvoir.
Et
son angoisse est de n’en pas trouver ; sa joie, de provoquer le corps
297
n lui qui le pousse à chercher ce dont il manque,
et
n’a pas d’existence. Il ne devient objet que lorsque j’en fais mon ob
298
’est le moment de la présence de l’homme au monde
et
à soi-même conjointement. Et c’est ainsi que le concret naît d’une dé
299
de l’homme au monde et à soi-même conjointement.
Et
c’est ainsi que le concret naît d’une décision de l’homme provocateur
300
e l’angoisse est le signe de son absence au monde
et
à soi-même. Dire que l’homme est, concrètement, c’est dire qu’il souf
301
homme est, concrètement, c’est dire qu’il souffre
et
qu’il jubile, — qu’il agit. C’est pourquoi ils se trompent du tout, c
302
parlent n’est pas un homme, mais une chose faible
et
petite dont ils ignorent la nature. Ceux qui calculent avec les homme
303
Les lois qu’ils imaginent sont celles de la mort,
et
d’abord de leur propre mort. Car l’essence de l’homme, en tant qu’hom
304
culable, si l’homme est un événement, une rupture
et
une création, un fauteur de nouveauté pure, un poseur de questions, u
305
uté pure, un poseur de questions, un « prochain »
et
non pas un problème à résoudre à distance ; en un mot, si l’homme est
306
ies échouent dans leur effort pour décrire l’acte
et
rendre compte de ses déterminations suffisantes. Ce qui revient à rec
307
gulier, c’est-à-dire de l’inhumain (à la limite),
et
c’est encore à dire qu’une « science de l’homme » qui se veut puremen
308
celle de l’homme abstrait dans l’ordre politique.
Et
l’extension de cette science mesure assez exactement l’ampleur de not
309
exactement l’ampleur de notre défection au monde
et
à nous-mêmes. Dans l’homme entièrement humain, il n’y aurait pas plac
310
e est liée à l’angoisse, c’est-à-dire à l’absence
et
au recul devant l’acte. Dans l’homme entièrement humain, tout serait
311
ain, tout serait histoire, présence, illustration
et
non explication, incarnation et non concept. Mais la psychologie fait
312
nce, illustration et non explication, incarnation
et
non concept. Mais la psychologie fait de l’homme son « objet », et pa
313
ais la psychologie fait de l’homme son « objet »,
et
par là même le déshumanise. Elle pose l’homme comme un problème, et p
314
déshumanise. Elle pose l’homme comme un problème,
et
pour autant elle est bien obligée de prendre du recul par rapport à l
315
omme concret : mais alors il n’est plus concret !
Et
c’est ainsi que l’existence du psychologue repose sur un sophisme qu’
316
un sophisme qu’il faut qualifier d’inversion pure
et
simple de l’humain. Le droit usage de l’entendement n’est pas l’étude
317
pur, il ne sera jamais un objet de l’entendement.
Et
c’est pourquoi rien ne peut l’expliquer. Mais qu’il paraisse, aussitô
318
e, aussitôt les objets s’ordonnent à sa décision,
et
deviennent saisissables pour l’entendement. 5. L’acte est la perso
319
sommes agissants. L’acte seul témoigne de l’acte,
et
joue en nous le rôle de l’homme. C’est lui qui rend l’homme visible à
320
me. C’est lui qui rend l’homme visible à l’homme,
et
nous sculpte un visage lisible. Sur la scène du monde, où nous avons
321
it sont les acteurs qui jouent leur rôle d’hommes
et
qui créent leur destin : ceux-là seuls sont les dramatis personae, ce
322
itions de son apparition, j’entends à la présence
et
à l’engagement : la personne n’est jamais seule, elle est essentielle
323
s l’acteur les provoque autant qu’il leur répond,
et
la même raison qui fait qu’il est lui-même, fait aussi qu’il n’est pl
324
, tout bien compté, est aussi vaste que le monde,
et
qu’il n’est pas de réduit si secret où l’on se cache, qui ne soit jus
325
encore que ce drame puisse être qualifié de jeu,
et
légèrement pris par toute espèce de sceptiques ou d’heureux ignorants
326
ptiques ou d’heureux ignorants, — il est le seul.
Et
l’on n’en peut sortir sans quitter, du même pas, la vie. C’est pourqu
327
as, la vie. C’est pourquoi le drame est sérieux ;
et
notre vie n’est pas une farce, pour la simple raison qu’elle est uniq
328
farce, pour la simple raison qu’elle est unique,
et
qu’on ne peut changer de rôle : on peut seulement refuser de jouer. M
329
igue insaisissable devient tout à coup un acteur,
et
se met à se comporter tout comme s’il connaissait le fil du drame. D’
330
mes résignés, pour revêtir un vrai visage, un nom
et
une autorité, une attitude d’auteur de son propre destin ? C’est ce q
331
personne. Ma personne, c’est ma présence au monde
et
à moi-même conjointement ; aux vrais objets, aux vrais humains, et à
332
jointement ; aux vrais objets, aux vrais humains,
et
à ma vraie responsabilité. C’est à bon droit, nous l’avons vu, que no
333
font figure de coups de force contre toute raison
et
causalité claire. Ils sont là en dépit de la forme du monde, et par e
334
laire. Ils sont là en dépit de la forme du monde,
et
par eux seuls s’opèrent ces transformations qui scandent la durée, qu
335
ité, de cela qui échappe au temps, marque sa fin,
et
le recrée. De ce mystère, je puis seul témoigner dans l’instant où il
336
is seul témoigner dans l’instant où il me saisit,
et
seulement en lui obéissant ; car le connaître, c’est le connaître irr
337
ar le connaître, c’est le connaître irrésistible.
Et
comment ai-je su qu’il venait me saisir ? C’est parce que j’en ai tém
338
alité la raison même, déclare sa permanente crise
et
ses limites humiliantes. L’éternel est dans le présent, et non point
339
mites humiliantes. L’éternel est dans le présent,
et
non point dans l’intemporel, parce que l’éternel vient à nous, dans n
340
pas en dehors de l’appel qu’elle nous adresse ici
et
maintenant, et qui nous meut. Nous avons établi que la présence est l
341
e l’appel qu’elle nous adresse ici et maintenant,
et
qui nous meut. Nous avons établi que la présence est le fait de l’hom
342
el ne touche le temps que par l’individu en acte,
et
qui devient à cet instant une personne. L’homme n’est un vrai sujet q
343
a personne est le témoignage d’une vocation reçue
et
obéie. Je suis personne dans la mesure où mon action relève de ma voc
344
est proprement la sujétion de l’homme à l’éternel
et
de l’objet à l’homme, on peut dire que la personne est l’impensable i
345
personne pure serait ainsi la coïncidence absolue
et
manifeste d’une vocation et d’un individu, dans chaque action de cet
346
a coïncidence absolue et manifeste d’une vocation
et
d’un individu, dans chaque action de cet individu. Ou bien encore l’a
347
u bien encore l’apparition d’une vocation en lieu
et
place d’un individu. La psychologie de la personne parfaite se réduir
348
gie de la personne parfaite se réduirait purement
et
simplement à son histoire, à l’énoncé des témoignages visibles qu’ell
349
roblématique. Or, nous nous connaissons complexes
et
impurs, pleins de problèmes, peuplés de fantômes et séparés par eux d
350
impurs, pleins de problèmes, peuplés de fantômes
et
séparés par eux de nous-mêmes et du monde. Nous nous voyons dominés f
351
plés de fantômes et séparés par eux de nous-mêmes
et
du monde. Nous nous voyons dominés fréquemment par les objets que nou
352
ar les objets que nous imaginons sans les saisir,
et
notre « individu » n’est certes pas le moindre. Dans l’espoir incerta
353
mêmes de notre absence, celles du monde abandonné
et
qui paraît déterminé de soi, puisqu’il est vu précisément comme n’éta
354
a plupart de nos gestes, loin d’être ordonnateurs
et
créateurs, sont simplement déterminés par une mécanique impersonnelle
355
utres, d’un procès anonyme étranger à notre être,
et
que nous baptisons fatalité, parce que nous sommes ses impuissants ob
356
d’hommes, de ce qui nous traite en objets neutres
et
en objets d’autant moins résistants qu’ils ont cru concevoir, dans ce
357
n raison. D’où vient alors l’idée de la personne,
et
ce regret d’une dignité que la raison des peuples et des clercs s’acc
358
ce regret d’une dignité que la raison des peuples
et
des clercs s’accorde à révoquer en doute ? L’imagination de la person
359
le rend concret, c’est-à-dire présent à lui-même
et
aux autres dans un même élan. Tout acte personnel est participation à
360
ist nous est donné, dit Calvin, « comme substance
et
fondement de tout », nous avons à connaître cette vérité de la person
361
etenant avec les autres que des rapports distants
et
virtuels est une contradiction in terminis. L’aspect communautaire d
362
idus libres au terme d’une évolution scientifique
et
organisée (thèse de Marx et de Lasalle) la conception personnaliste o
363
volution scientifique et organisée (thèse de Marx
et
de Lasalle) la conception personnaliste oppose mieux qu’un scepticism
364
l’ordre des valeurs établies par le rationalisme
et
le collectivisme, elle prend pour mesure de tout la présence effectiv
365
mité : l’œuvre, le mariage, la famille, le métier
et
l’éducation. C’est à la sauvegarde de ces réalités prochaines que doi
366
mes yeux la règle d’or de toute doctrine sociale
et
politique. Est-ce à dire que le bien de tous doive être mis au servic
367
nne abritée par la loi perde à la fois son risque
et
son pouvoir de création (démocratie libérale). Le droit de la personn
368
dans l’absolu, mais la fin de tout droit humain,
et
peut-être son contraire. La formule du rapport social ne doit pas con
369
en s’il n’est pas l’extension naturelle du risque
et
du concret de l’homme qui se dépasse. Qu’importe l’honneur d’un pays,
370
ion première de la personne, fondement nécessaire
et
suffisant de toute communauté vivante et progressive. 9. Deux néga
371
cessaire et suffisant de toute communauté vivante
et
progressive. 9. Deux négations de la personne Et maintenant, si
372
ogressive. 9. Deux négations de la personne
Et
maintenant, si nous savons ce que nous appelons : personne, si nous s
373
us savons qu’elle est la lumière de nos lumières,
et
le soleil que rien ne peut décrire, mais qui fait voir le monde et ch
374
rien ne peut décrire, mais qui fait voir le monde
et
chasse nos fantômes, notre devoir n’est pas de revenir vers les ténèb
375
nes humaines qui s’entrebattent dans la confusion
et
nourrissent des haines bavardes. Je veux parler ici de deux d’entre e
376
is qu’on voit partout inséparables : matérialisme
et
spiritualisme. Voici l’aspect de vérité que la personne éclaire en eu
377
me ne se produit en fait qu’au niveau des objets,
et
que tout ce qui est doit pouvoir être vu, être touché, consister sous
378
qu’il est un corps jeté au milieu d’autres corps,
et
que c’est un orgueil assez court que de prétendre l’ignorer ; il a co
379
carnation. Il y a une santé dans le matérialisme,
et
une humilité où la personne retrouve l’un des pôles de sa tension. Pe
380
ritualisme : c’est qu’il nous a fait plus de mal,
et
que l’erreur matérialiste est bâtarde de ses excès. Ceci pourtant doi
381
tre que l’homme est un sujet (au sens initiateur,
et
non pas ironique !) et qu’il dépend de lui que l’objet soit ou non pr
382
sujet (au sens initiateur, et non pas ironique !)
et
qu’il dépend de lui que l’objet soit ou non présent. Mais alors le ma
383
ns des limites objectives. Il veut se garder pur,
et
reste virtuel. Il se croit maître de tous les objets, mais néglige d’
384
témoigner de notre liberté. Dans le plan d’ombre
et
d’abstractions, parfois violentes, où se poursuit ce vieux débat, auc
385
emeure abstrait ou impuissant. Dans l’acte, l’une
et
l’autre se mesurent et se réalisent : la charité de la personne est d
386
issant. Dans l’acte, l’une et l’autre se mesurent
et
se réalisent : la charité de la personne est d’ordonner ce corps-à-co
387
ou plutôt son lieu naturel, en séparant le corps
et
l’âme : c’est qu’il les a mal distingués. Du point de vue de la perso
388
tingués. Du point de vue de la personne, le corps
et
l’âme sont deux aspects de l’homme concret, dont la nature réelle n’a
389
t nos contacts, comme aussi de n’en pas choisir. (
Et
c’est dans ce débat qu’apparaît la conscience.) Mais ni le corps de l
390
stance particulière qui le forme, le tient debout
et
le dirige, ni l’âme n’est humainement imaginable hors de la consistan
391
t imaginable hors de la consistance qui la révèle
et
l’effectue. Corps et âme sont un seul et même être ; ils naissent ens
392
la consistance qui la révèle et l’effectue. Corps
et
âme sont un seul et même être ; ils naissent ensemble et meurent ense
393
a révèle et l’effectue. Corps et âme sont un seul
et
même être ; ils naissent ensemble et meurent ensemble, ils sont une s
394
sont un seul et même être ; ils naissent ensemble
et
meurent ensemble, ils sont une seule et même « chair ». C’est une étr
395
ensemble et meurent ensemble, ils sont une seule
et
même « chair ». C’est une étrange erreur que de nommer « esprit » l’a
396
étrange erreur que de rêver l’âme immortelle19 ;
et
c’est au nom de cette erreur qu’on croit pouvoir séparer l’âme du cor
397
science insinuée comme un retard entre l’individu
et
sa pressante vocation. L’âme immortelle n’est rien que l’illusion d’u
398
que l’esprit ? Cet esprit qui souffle où il veut,
et
nous mourons où nous pouvons, cet esprit qui dansait sur les eaux pri
399
, cet esprit qui dansait sur les eaux primitives,
et
les lois de mon corps sont celles de la poussière ? — Rien, l’esprit
400
la poussière ? — Rien, l’esprit n’est plus rien,
et
comprendre n’est rien qu’envisager les modes de notre esclavage. — Ju
401
t acte, que soudain j’ai fait ! Car je l’ai fait,
et
je ne sais rien d’autre. J’ai reçu l’ordre, et ce pouvoir ordonnateur
402
t, et je ne sais rien d’autre. J’ai reçu l’ordre,
et
ce pouvoir ordonnateur, irréfutablement est là, rendu visible. J’ai f
403
ous, n’est rien — hors la démonstration charnelle
et
déchiffrable d’une action. Jésus-Christ est le verbe incarné, la voca
404
t de l’avoir obéie dans un instant indescriptible
et
manifeste. Au commencement était le Verbe, et il demeure l’initiation
405
ble et manifeste. Au commencement était le Verbe,
et
il demeure l’initiation fondamentale de toute histoire. C’est par le
406
ret cesse d’être une idée, que la personne existe
et
que l’acte transforme. Ce qui témoigne en moi de l’indicible réceptio
407
, cette mort cachée dans la vie, cette insensible
et
peu croyable distraction du monstre moi, qui suffit bien à l’éternell
408
nant quelque chose s’est passé, un risque est là,
et
ma vie est en lui. L’ai-je accepté ? Déjà tout recommence. Car la dur
409
la durée n’ajoute rien à l’éternel. Ce pas petit
et
triomphal à peine fait, je le reperds si je n’en fais pas un second.
410
ait, je le reperds si je n’en fais pas un second.
Et
pourtant mon espoir est gagé sur une promesse aussi certaine que ma m
411
gagé sur une promesse aussi certaine que ma mort
et
que la mort du temps lui-même au Jugement. Ni la foi ne court sur son
412
otalement, parce qu’il est totalement « chair » ;
et
ce ne sont que des morts qui ressusciteront, non pas des endormis ou
413
Le surréalisme s’est présenté comme révolution,
et
comme tel il a bénéficié pendant plusieurs années, auprès de la criti
414
ntion d’autant plus sympathique qu’il criait fort
et
bien, mais mordait peu. C’est le surréalisme, en somme, qui demeure r
415
nc mettre une barre sous la rubrique surréalisme,
et
verser tout cela au compte des profits et pertes d’une « élite » bour
416
alisme, et verser tout cela au compte des profits
et
pertes d’une « élite » bourgeoise en faillite ? Comptabilité bonne pe
417
x — ont certainement connu le désespoir de vivre,
et
c’est cela qu’ils ont voulu traduire. Mais c’est cela aussi que l’hom
418
mer un désespoir décoratif, un désespoir postiche
et
stylisé, à l’abri duquel on pouvait faire encore de la littérature, c
419
est empêtré par le scrupule de ce qu’il se doit !
Et
qu’il est attentif à sa propre démarche ! « Il me paraît absolument n
420
peu. C’est très bien de ne pas faire le modeste,
et
même de prendre de grands airs, si l’on a quelque chose de grand à di
421
par un discours lyrique « sur le peu de réalité »
et
se termine par des considérations décousues sur quelques résultats ré
422
de transcender ? ) « la distinction du subjectif
et
de l’objectif ». Idée platonicienne et surtout romantique, et qui vau
423
subjectif et de l’objectif ». Idée platonicienne
et
surtout romantique, et qui vaut bien qu’on la prenne au sérieux, fût-
424
ctif ». Idée platonicienne et surtout romantique,
et
qui vaut bien qu’on la prenne au sérieux, fût-ce après ce Schelling d
425
désirée revient en dernière analyse au refus pur
et
simple d’agir et de créer, j’entends, de se poser comme auteur respon
426
en dernière analyse au refus pur et simple d’agir
et
de créer, j’entends, de se poser comme auteur responsable de son acte
427
ente son sujet, en partant d’un donné très réduit
et
de quelques rythmes lyriques, son style est large, ses périodes font
428
s données scientifiques ; sa syntaxe s’embarrasse
et
s’alourdit dès qu’il aborde une matière tant soit peu résistante par
429
e matière tant soit peu résistante par elle-même,
et
dont il ne saurait avoir raison en quelques tours de phrases élégants
430
voir raison en quelques tours de phrases élégants
et
péremptoires, et l’on se demande alors si ce bel « abattage » n’a pas
431
elques tours de phrases élégants et péremptoires,
et
l’on se demande alors si ce bel « abattage » n’a pas dissimulé, aux y
432
vont-ils reconnaître le sérieux réel de ce jeu ?
Et
qu’il y va vraiment de tout, c’est-à-dire d’un peu plus que de la plu
433
r 1935)k l L’amour d’un homme de cinquante ans
et
d’une jeune femme forme l’unique sujet de cette méditation. Deux être
434
ous ont révélé des dessins cruellement dépouillés
et
des essais à coup de griffes sur Gide et Balthazar Gracian. La jeune
435
pouillés et des essais à coup de griffes sur Gide
et
Balthazar Gracian. La jeune femme qu’il aime et qu’il entreprend de c
436
e et Balthazar Gracian. La jeune femme qu’il aime
et
qu’il entreprend de conduire à la maîtrise de soi-même, il nous en do
437
inutieux, tendre cette fois, d’un trait classique
et
volontaire. Je ne sais rien de plus émouvant que l’effort vers eux-mê
438
ien de plus émouvant que l’effort vers eux-mêmes,
et
l’un par l’autre, de ces deux êtres dont la vocation paraît inséparab
439
nventé cela. On peut toutefois ne pas les croire,
et
le spectacle d’un pareil tragique ne perdra rien de sa grandeur lucid
440
aisse pas un instant de faire sentir qu’il écrit,
et
l’on aime jusqu’au retors de cette écriture contractée. Dans son prog
441
araudage21. De temps en temps, il change de mèche
et
recommence aux mêmes points, plus avant. Fermeté de la main, regard s
442
eux pôles de l’être, entre l’énergie exploratrice
et
le repliement amer. Enfin, un courage sérieux, nietzschéen sans exalt
443
sans exaltation. La lecture d’un tel livre, lente
et
souvent reprise, donne du cœur à l’intelligence. Et l’austérité tendr
444
souvent reprise, donne du cœur à l’intelligence.
Et
l’austérité tendre de son « inquisition » rend un sens à l’amour huma
445
e d’aujourd’hui par trop d’indiscrétions excitées
et
vulgaires. Que dire encore qui fasse un peu sentir la qualité, voisin
446
l’on apprend comment un nommé Jean aima, de loin
et
à 15 ans, des petites filles ; d’un peu plus près et à vingt ans, une
447
à 15 ans, des petites filles ; d’un peu plus près
et
à vingt ans, une étudiante ; et pour de bon, deux ans plus tard, une
448
’un peu plus près et à vingt ans, une étudiante ;
et
pour de bon, deux ans plus tard, une femme mariée. Enfin il retrouve
449
, une femme mariée. Enfin il retrouve l’étudiante
et
l’épouse en vitesse au dernier paragraphe. Tout cela d’une vérité pro
450
eur a voulu romancer ce documentaire authentique,
et
il en a saboté le rythme. Dès qu’il part dans l’idéologie, la critiqu
451
aiblit, la critique littéraire reprend ses droits
et
proteste une fois de plus contre les poncifs populistes. Ce qui manqu
452
’un sujet impose sa forme propre, ses proportions
et
ses « valeurs », dirait un peintre. Il est remarquable que presque to
453
rlé le mieux, je crois, avec le plus de sympathie
et
de pénétration du deuxième livre de Roger Breuil est Marcel Arland. S
454
x, entre des jeunes bourgeois, des jeunes paysans
et
ouvriers plus ou moins « déclassés » comme le sont aujourd’hui presqu
455
jamais su faire vibrer un tel accord des paysages
et
des êtres — de ces vastes paysages maritimes des Charentes et de ces
456
— de ces vastes paysages maritimes des Charentes
et
de ces âmes et de ces corps tout frémissants de nostalgies naïves et
457
s paysages maritimes des Charentes et de ces âmes
et
de ces corps tout frémissants de nostalgies naïves et de jeunes ruses
458
e ces corps tout frémissants de nostalgies naïves
et
de jeunes ruses. On sent que Breuil est mêlé de très près à l’existen
459
é de très près à l’existence de ses personnages :
et
le « nous » qui apparaît parfois dans certains chapitres lyriques — l
460
tre son que le « je » des Vivants : plus complice
et
plus fraternel. Le défaut de Les Uns les Autres, c’est peut-être qu’i
461
he parfois trop furtive, d’autres fois si précise
et
heureuse, comment ne pas distinguer avec joie la plupart des thèmes h
462
ens du concret spirituel, cette amitié des hommes
et
du pays, qui permettra peut-être un jour prochain, de parler de nouve
463
rie. Il y a vraiment du nouveau dans cette œuvre,
et
c’est à nous plus qu’à quiconque qu’il appartient de le reconnaître.
464
une saison, si j’en crois l’amitié, les visages,
et
les couleurs si pures qu’il laisse dans le souvenir. o. Rougemont
465
e cesserons de protester ici contre la négligence
et
la frivolité désastreuse de la critique littéraire d’aujourd’hui. Voi
466
nne n’en a parlé : on s’occupait du prix Goncourt
et
des travaux d’amateurs de quelques dames lettrées. Pourtant, ce roman
467
passions profondes le mouvement hitlérien est né
et
a pris son élan. C’est une admirable réussite littéraire, c’est aussi
468
ite littéraire, c’est aussi un roman d’aventures,
et
un roman d’idées, et une description étonnante de l’Amérique qu’il no
469
aussi un roman d’aventures, et un roman d’idées,
et
une description étonnante de l’Amérique qu’il nous reste à découvrir
470
que cette patrie pour laquelle ils se sont battus
et
qui n’a plus la force d’utiliser leurs énergies, est incapable de les
471
parler haut. « Nous avons perdu la guerre, Bell,
et
dans la situation où nous sommes, nous ne pouvons plus nous affirmer
472
s nous affirmer que par le sacrifice. » Sacrifice
et
fidélité, voilà ce qui définit leur dernière dignité d’Allemands dans
473
ieuse, profonde, bouleversée, broyée, souffrante,
et
pourtant fière d’être allemand, de garder la tête haute pour l’Allema
474
llemand, de garder la tête haute pour l’Allemagne
et
de participer au destin qui lui était échu pour un temps. » Pour un t
475
s une tranchée sous les murs d’un fort brésilien.
Et
la haute statue de Pillau, le ministre d’Allemagne à La Paz — celui q
476
qui ont écrit les pages héroïques de l’histoire,
et
non les gens âgés qui possédaient tout. Ces jeunes Allemands qui doiv
477
ble. Car voyez-vous, Bell, rien ne rend aussi dur
et
aussi ardent que le malheur. Rien ne rend aussi brave et aussi passio
478
i ardent que le malheur. Rien ne rend aussi brave
et
aussi passionné, aussi modeste et aussi endurant que le malheur. Et r
479
end aussi brave et aussi passionné, aussi modeste
et
aussi endurant que le malheur. Et rien ne fonde une communauté comme
480
, aussi modeste et aussi endurant que le malheur.
Et
rien ne fonde une communauté comme le malheur. La communauté des gens
481
je crois le problème central qu’impose ce livre,
et
l’on admettra bien, quelque opinion qu’on ait sur le point de vue rac
482
lides ; moins intellectuel, moins impressionniste
et
complaisant dans la description des douleurs physiques. Au total, Eds
483
Tristan Tzara, Grains
et
Issues (juin 1935)q Ce livre comporte une partie poétique précieus
484
Ce livre comporte une partie poétique précieuse
et
somnifère, et une partie critique dont l’intérêt dépasse tout ce que
485
porte une partie poétique précieuse et somnifère,
et
une partie critique dont l’intérêt dépasse tout ce que les surréalist
486
é jusqu’ici. Il y a là une puissance de réflexion
et
de synthèse, dont les ouvrages de Breton illustraient glorieusement l
487
271 que « les formes de langage sont… symboliques
et
sont sujettes aux critiques que l’on est en droit de formuler quant à
488
bulaire disparate, faite de grandiloquence imagée
et
de copules et incidences abstraites, s’appelant de proche en proche,
489
ate, faite de grandiloquence imagée et de copules
et
incidences abstraites, s’appelant de proche en proche, mécaniquement.
490
Tzara « l’acte de connaissance, qui est quantité,
et
que nous désignons sous le nom de poésie ». On peut toujours évidemme
491
poétique ne serait plus qu’un vaste télescopage,
et
les livres de M. Tzara se réduiraient peut-être, logiquement et en fa
492
de M. Tzara se réduiraient peut-être, logiquement
et
en fait, à un seul mot. Je force le raisonnement à l’absurde pour fai
493
arisée. Le langage est précisément ce qui sépare,
et
non ce qui confond. C’est le verbe (qui est acte) qui distingue et ca
494
fond. C’est le verbe (qui est acte) qui distingue
et
caractérise les choses et les êtres, dans le magma larvaire de la réa
495
est acte) qui distingue et caractérise les choses
et
les êtres, dans le magma larvaire de la réalité non encore informée p
496
ous ces « barrages », de confondre à nouveau rêve
et
veille, et de ressusciter le type primitif des sociétés irrationnelle
497
arrages », de confondre à nouveau rêve et veille,
et
de ressusciter le type primitif des sociétés irrationnelles, « sous u
498
ue. Cette croyance que la vie se fera toute seule
et
que des « lois » inexorables se chargent de transformer le monde, cet
499
est troublant de constater cette erreur capitale,
et
stérilisante pour l’action, chez un homme dont la pensée paraît souve
500
mme dont la pensée paraît souvent plus audacieuse
et
subversive. Tzara critique avec vigueur la poésie de propagande et le
501
ara critique avec vigueur la poésie de propagande
et
le désir secret de « sécurité » qu’elle trahit. Il veut que l’esprit
502
ahit. Il veut que l’esprit soit un risque (p. 284
et
suiv.). Nous le voulons aussi. Mais ce n’est pas là, n’est-ce pas, ce
503
mné Einstein. Il semble bien que ces « barrages »
et
ce conformisme brutal soient en train de provoquer chez Tzara une pri
504
hez Tzara une prise de conscience toute nouvelle,
et
qu’à cette réflexion, plus réellement dramatique, l’on puisse attribu
505
travers un nouvel ordre économique, c’est l’homme
et
sa libération qui en reste l’enjeu et le but ; il serait donc vain et
506
est l’homme et sa libération qui en reste l’enjeu
et
le but ; il serait donc vain et dangereux qu’au lieu de combattre la
507
en reste l’enjeu et le but ; il serait donc vain
et
dangereux qu’au lieu de combattre la société actuelle, tout en prépar
508
Denis de, « [Compte rendu] Tristan Tzara, Grains
et
Issues », Esprit, Paris, juin 1935, p. 430-433.
509
affirmer sa vitalité, sa puissance d’assimilation
et
de création, le génie de ses ouvriers, de ses artisans, de ses artist
510
rtisans, de ses artistes, de ses « découvreurs »,
et
confronter son effort vers le mieux-être et le mieux-connaître avec l
511
rs », et confronter son effort vers le mieux-être
et
le mieux-connaître avec l’effort des autres peuples. Dans un cadre ch
512
s autres peuples. Dans un cadre chargé d’histoire
et
rayonnant de beauté, au bord de la Seine royale, les enchantements et
513
té, au bord de la Seine royale, les enchantements
et
les tentations feront pâlir les rêves des conteurs. Ce sera, dans la
514
rs. Ce sera, dans la féerie de l’eau des lumières
et
des couleurs, le ballet vertigineux des ondes. Ce sera aussi la fête
515
acre le triomphe des puissances d’audace ordonnée
et
de mesure, celles de l’intelligence… C’est dire que l’esprit créateur
516
rquoi la Commission de coopération intellectuelle
et
la Commission de l’enseignement de l’Exposition demandent que, parmi
517
mmédiat les applications pratiques, la production
et
le gain, qui, par leurs explorations et leurs découvertes dans le dom
518
roduction et le gain, qui, par leurs explorations
et
leurs découvertes dans le domaine de la nature, de la vie, de l’évolu
519
s, forme les esprits aux méthodes de la recherche
et
de la science, qui, au degré supérieur, par ses laboratoires, ses sub
520
ques, des littératures, depuis Lavoisier, Faraday
et
Champollion, jusqu’aux maîtres glorieux d’aujourd’hui, se sont déroul
521
iècles, ont amené au jour les vérités créatrices.
Et
, dans cette présentation sous un même toit de ces activités intellect
522
per à Paris, d’amphithéâtres pour les conférences
et
pour les congrès, il sera, pendant la durée de l’Exposition, le centr
523
hercheurs, toujours prêt à accueillir les savants
et
leurs découvertes, à ajouter des maillons à la chaîne sans fin. Nous
524
fin. Nous le léguerons à l’avenir comme le témoin
et
le symbole de notre génération. I. Résidence de l’Esprit dans la c
525
enfin, poser la question en apparence inoffensive
et
toute pratique, de l’emplacement et de la dotation d’un palais consac
526
e inoffensive et toute pratique, de l’emplacement
et
de la dotation d’un palais consacré à l’esprit, c’est poser en réalit
527
uestion des relations qu’entretiennent notre cité
et
la nation des clercs. C’est mettre en discussion l’un des rapports fo
528
la réponse à ces questions dépendront l’existence
et
l’emplacement du Palais de l’Esprit. Il est clair que de telles quest
529
, dont on sait bien qu’elle est partout chez elle
et
partout reconnue à des signes certains — et qui donc aurait même l’id
530
elle et partout reconnue à des signes certains —
et
qui donc aurait même l’idée d’un pavillon de la Richesse ? ou du Succ
531
ce le veut. Mais pratiquement, mais sérieusement,
et
dans l’intérêt général, ne vaudrait-il pas mieux le mettre à part ? L
532
nt d’une « distinction » tout à la fois flatteuse
et
rassurante. Et qui sait, ce Palais de l’Esprit ne va-t-il pas « réali
533
inction » tout à la fois flatteuse et rassurante.
Et
qui sait, ce Palais de l’Esprit ne va-t-il pas « réaliser » un vieux
534
a-t-il pas « réaliser » un vieux rêve positiviste
et
donner corps à l’utopie d’un sanctuaire de la Pensée laïque ? Il faud
535
hissent un doute infiniment curieux sur la nature
et
sur le rôle de l’esprit qu’on dit créateur ? Serait-ce donc qu’on ne
536
meux romancier —, à sa place qui est la première,
et
de l’y mettre en pleine clarté. Cela dit, tout le monde perçoit l’ext
537
ne faible valeur représentative ou démonstrative.
Et
pourtant, c’est l’esprit qu’il faut honorer, c’est bien à lui qu’il f
538
c’est bien à lui qu’il faut élever un sanctuaire
et
non à telle ou telle de ses extrêmes applications. L’accord parfait
539
out que le romancier se montrât moins littérateur
et
beaucoup plus précis dans ses projets que le politicien, sans doute i
540
éponse est simple. L’esprit s’exprime par l’écrit
et
la parole. Un sanctuaire de l’esprit sera donc un sanctuaire du livre
541
aire de l’esprit sera donc un sanctuaire du livre
et
de la parole. » Il y aurait donc une bibliothèque et un palais de la
542
de la parole. » Il y aurait donc une bibliothèque
et
un palais de la parole. M. Duhamel affirmait au surplus que son « san
543
les idées pures, ce ne serait jamais qu’un musée.
Et
créé par l’État, et contrôlé par lui, ce ne serait jamais qu’un musée
544
ne serait jamais qu’un musée. Et créé par l’État,
et
contrôlé par lui, ce ne serait jamais qu’un musée des lieux communs d
545
fficilement, mais bien de ceux que l’on enseigne,
et
qui composent la notion courante de l’esprit pur : ce sont ces lieux
546
sprit pur : ce sont ces lieux communs inoffensifs
et
soigneusement vidés de toute espèce de « basse » réalité qui alimente
547
éalité qui alimentent les discours des parlements
et
des académies. La bibliothèque-sanctuaire-ruche active offrirait donc
548
ux visiteurs lassés l’œuvre complet de M. Duhamel
et
les articles de M. Ducos, reliés « en dur » probablement25. Quant au
549
er « le triomphe des puissances d’audace ordonnée
et
de mesure » que le Palais-Bourbon, pour les raisons qu’on sait, honor
550
e, sans doute, c’est qu’ils croyaient bien faire.
Et
personne à ma connaissance n’a mis en question leur sérieux, ce qui p
551
aît remarquable. L’accueil flatteur — ou flatté —
et
poli qu’on a coutume de réserver à ces délirants pataquès, voilà le s
552
», d’un abandon, voire d’un mépris de la culture
et
de l’esprit qui marque à son insu l’élite bourgeoise, et confirme sa
553
’esprit qui marque à son insu l’élite bourgeoise,
et
confirme sa décadence. Ils me diraient : « Honorer l’esprit pur ? Quo
554
prie ? Quoi de plus naturel que de le célébrer ?
Et
plutôt que de ricaner, vous que ces problèmes occupent, que ne louez-
555
que ne louez-vous le désintéressement d’un député
et
d’un littérateur qui se consacrent à la défense du spirituel ? La grâ
556
eur ? » — Je réponds simplement que dans l’action
et
les écrits des commissaires susnommés, l’utilitarisme grossier trouve
557
résente de l’esprit comble si bien notre paresse,
et
peut-être certains intérêts, qu’il ne faut pas trop s’étonner de son
558
ont que l’esprit est une espèce de luxe vénérable
et
volatil, une entité qui plane au-dessus de nos vies, abandonnées, il
559
ordre27. L’esprit paraît d’autant plus spirituel,
et
partant, d’autant plus respectable, qu’il est plus dégagé du réel, ou
560
atiques ». Laissant entendre ainsi que la science
et
les arts sont enfermés dans ce dilemme : ou l’esprit pur — comprenez
561
sprit n’est plus que « la poussière des livres »,
et
le « réel », une marchandise. Ils ne voient pas que dès l’instant que
562
prit ne peut être qu’un palais vide, ou un musée.
Et
les objets qu’on y conservera, et les discours qu’on y « diffusera »
563
e, ou un musée. Et les objets qu’on y conservera,
et
les discours qu’on y « diffusera » seront aussi peu de l’esprit que n
564
esprit », dans cette entreprise, soit mis à part,
et
honoré en soi. Un écrivain fameux, gloire du roman français à l’étran
565
it pur ne peut être en réalité qu’un palais vide.
Et
ce vide que d’ailleurs il qualifie de bibliothèque, ne lui paraît pas
566
facile. C’est que la grossièreté même de l’écart,
et
le fait qu’on l’ait négligé, me paraissent propres à fixer l’attentio
567
es vieux artisans passionnés du travail bien fait
et
les conquêtes des humanistes, ouvre les temps modernes et reste la ch
568
onquêtes des humanistes, ouvre les temps modernes
et
reste la charte de la clarté française, de la recherche scientifique
569
la clarté française, de la recherche scientifique
et
de la raison universelle, donnera à notre Exposition son sens et sa p
570
universelle, donnera à notre Exposition son sens
et
sa portée. Je répugne à rendre Descartes responsable de tout le mal
571
ble de tout le mal qu’ont répandu les cartésiens.
Et
je sais bien que de ceux-ci au cartésianisme vulgaire qui traîne dans
572
r initiale des clercs. Descartes revenant à Paris
et
visitant le Palais de l’Esprit ne manquerait pas de redire le mot fam
573
Il n’a jamais voulu cette séparation de la pensée
et
de l’action que le Palais doit célébrer, et que l’on estime conforme
574
ensée et de l’action que le Palais doit célébrer,
et
que l’on estime conforme à la religion de l’esprit. Mais ce que Desca
575
que Descartes a voulu, c’est que l’esprit « clair
et
distinct » fût séparé absolument du corps. Ce que Descartes a proposé
576
iste » de l’esprit. Voilà l’erreur métaphysique —
et
nous y reviendrons plus tard tout à loisir, soit pour marquer les cau
577
n siècle d’enseignement s’est appliqué à le fixer
et
à l’étendre. Mais il demeure certain que l’ouvrier et l’artisan, le p
578
l’étendre. Mais il demeure certain que l’ouvrier
et
l’artisan, le paysan et le boutiquier ont une tendance naturelle à es
579
ure certain que l’ouvrier et l’artisan, le paysan
et
le boutiquier ont une tendance naturelle à estimer que la « pensée »
580
étier, peu soucieux par exemple de qui l’inventa,
et
de la place qui lui revient dans l’économie générale29. De là à se fi
581
ociale privilégiée — le pas est aisément franchi.
Et
Descartes n’y est pour rien. Il faudrait bien plutôt s’en prendre au
582
s, c’est le vouer au culte d’une élite inféconde,
et
au juste mépris des masses. V. Situation faite aux intellectuels
583
s effet. Séparer soigneusement l’esprit du corps,
et
glorifier cet esprit distingué, c’est aussi laisser ce corps à lui-mê
584
s de mains, c’est libérer de son pouvoir arbitral
et
animateur le domaine de l’action quotidienne. Plus on élève le spirit
585
ent consister que dans l’affirmation d’un idéal :
et
rien n’est plus utile aux « réalistes » que la croyance commune à la
586
oite font aux clercs « spiritualistes » l’honneur
et
le crime d’avoir prémédités, avec l’appui des Loges et des Sages de S
587
crime d’avoir prémédités, avec l’appui des Loges
et
des Sages de Sion. Et par exemple, la bonne foi des inventeurs du Pal
588
tés, avec l’appui des Loges et des Sages de Sion.
Et
par exemple, la bonne foi des inventeurs du Palais de l’Esprit me par
589
rop désintéressée de l’esprit, qu’ont les clercs,
et
d’une notion moins désintéressée de l’action, qu’ont les capitaines d
590
complicité. Pour l’instant, négligeant les causes
et
les visées lointaines, observons le présent tel que nous le vivons. D
591
il, les réveiller. Toute notre formation scolaire
et
universitaire repose sur une maxime d’autant plus efficace qu’elle es
592
axime d’autant plus efficace qu’elle est inavouée
et
peut-être inconsciente : l’esprit est une pure description 32. On ass
593
pprime le risque de penser dans la réalité lourde
et
« mal compassée » (Descartes). Et plus rien ne s’oppose alors aux spé
594
réalité lourde et « mal compassée » (Descartes).
Et
plus rien ne s’oppose alors aux spécialisations les plus artificielle
595
x découpages à l’infini de la « matière » vivante
et
organique, à la multiplication des points de vue irréels, mais logiqu
596
lication des points de vue irréels, mais logiques
et
simples. (C’est ainsi que l’on a cru pouvoir « appliquer » la méthode
597
ainsi que l’histoire devient un ensemble de lois,
et
non plus une chronique des actes. On tend à ne garder de ceux-ci que
598
t matérialiste, tantôt idéaliste, tantôt marxiste
et
tantôt hégélienne, mais toujours — après coup ! — déterministe : or,
599
lus propre à nous aveugler sur la réalité absurde
et
magnifique, enseignante et désordonnée des gestes de l’humanité. Pour
600
sur la réalité absurde et magnifique, enseignante
et
désordonnée des gestes de l’humanité. Pour la philosophie, non conten
601
le — par des inventions personnelles, passionnées
et
irréductibles, auxquelles on attribue le rôle d’exceptions malheureus
602
les on attribue le rôle d’exceptions malheureuses
et
légèrement inconvenantes. On cherche à réduire la pensée à des « cour
603
roblèmes : à savoir la physiologie des sensations
et
la classification des maladies nerveuses. Pour la psychologie concrèt
604
lutte contre une réalité qu’il s’agit de modifier
et
non pas seulement de décrire, on fera bien d’aller la chercher à cent
605
disciplines que l’on enseigne aux jeunes clercs :
et
c’est la volonté, consciente ou non, d’esquiver l’engagement pratique
606
sionnaire, de la pensée. La seule critique solide
et
efficace des doctrines intellectualistes, c’est celle qui consisterai
607
e penser le réel pour l’informer. Pour l’informer
et
non pour le décrire ! Pour le gêner, pour l’accuser, pour l’inventer,
608
! Pour le gêner, pour l’accuser, pour l’inventer,
et
non pour constater ces fameuses « lois » qu’on lui attribue après cou
609
fameuses « lois » qu’on lui attribue après coup,
et
qui viennent comme par hasard justifier la noble impuissance de la pe
610
Cette image s’interpose entre la pensée « pure »
et
le réel confus et dangereux qui échappe à ses prises prudentes. Et ce
611
erpose entre la pensée « pure » et le réel confus
et
dangereux qui échappe à ses prises prudentes. Et ces lois confirment
612
et dangereux qui échappe à ses prises prudentes.
Et
ces lois confirment le penseur dans l’idée que l’esprit « distinct »
613
i paraît évident que l’engagement est impossible.
Et
plus il se persuade que sa nature est essentiellement « distinguée »,
614
nes, écrit Renan, sont un à peu près sans sérieux
et
sans précision, c’est un grand résultat pour la philosophie ; mais c’
615
es « choses humaines » — oui, celles-là justement
et
non pas d’autres — ces choses encore informes, difficiles et vivantes
616
d’autres — ces choses encore informes, difficiles
et
vivantes, ces choses « mal compassées » que Descartes déjà méprisait…
617
t là que les rudiments de la morale de leur état.
Et
personne n’a jamais contesté la grandeur d’un désintéressement de cet
618
. C’est affirmer que l’esprit n’est pas du monde,
et
que les intérêts du monde réel sont pour lui comme inexistants. Ce qu
619
Que d’autres, moins désabusés, perdent leur temps
et
leur esprit peu raffiné à combattre des injustices au nom de la justi
620
’adonne au culte solitaire des choses « sérieuses
et
précises ». Et que le monde suive le cours de ses passions ! Pour sa
621
e solitaire des choses « sérieuses et précises ».
Et
que le monde suive le cours de ses passions ! Pour sa part, il s’en l
622
ce gouverneur eût été dans son rôle en agissant,
et
qu’il trahissait sa fonction en alléguant un argument de clerc. Il y
623
le refus de Pilate, chargé d’un pouvoir séculier,
et
le refus de l’intellectuel, dégagé par nature de toute responsabilité
624
ait : car l’intellectuel, comme tout autre homme,
et
parce qu’il est homme, simplement, est bel et bien engagé dans le mon
625
me, et parce qu’il est homme, simplement, est bel
et
bien engagé dans le monde. Supposer un clerc pur, c’est encore une fo
626
rit n’est né dégagé de tous liens, irresponsable.
Et
s’il existe en apparence des êtres qui méritent le nom de clercs parf
627
t trahi leur fonction propre, qui était de juger,
et
de juger effectivement, dans le monde des corps et des sanctions de f
628
t de juger effectivement, dans le monde des corps
et
des sanctions de fait, non pas seulement de « dire le vrai » dans le
629
l’eau, se lava les mains en présence de la foule
et
dit : Je suis innocent du sang de ce juste. Cela vous regarde. » Ne v
630
on déguisée. Le soupçon de Renan trahit un doute,
et
un doute sur la vérité : ce qui est « peut-être triste », insondablem
631
, c’est que « peut-être » la vérité n’existe pas.
Et
si la vérité n’existe pas, comment serions-nous donc fondés à juger,
632
un hochement de tête sur la plèbe qui les admire.
Et
comment cette pauvre plèbe n’aurait-elle pas d’admiration pour la sag
633
s qui se lavent les mains avec tant d’élégance, —
et
l’abandonnent libéralement à sa passion ? Mais en face de Pilate : «
634
on ? Mais en face de Pilate : « Voici l’homme » !
Et
que dit cet homme ? « Je suis né et je suis venu dans le monde pour r
635
i l’homme » ! Et que dit cet homme ? « Je suis né
et
je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité. » Unan
636
e lui des clercs de droite, des clercs de gauche,
et
de la foule. Pourquoi n’a-t-il pas dit seulement : Mon royaume n’est
637
pond plus : il est la vérité, la réponse en chair
et
en os. Il faudrait se « boucher les yeux… » Cet homme est l’Esprit in
638
e ce monde. C’est le royaume des lois « sérieuses
et
précises » que la pensée peut arriver à reconnaître, mais sur lesquel
639
t, déléguant le soin des discours à ces touchants
et
graves coryphées parlementaires ou bicornés dont on vient d’estimer l
640
une sorte d’implacable agencement, celui du doit
et
de l’avoir, contrôlé tôt ou tard par la constatation du rendement ou
641
erte. Le clerc qui ne sert à rien, c’est flatteur
et
c’est distingué, mais il faut encore le nourrir. Une logique vulgaire
642
e cartésien : on admet que l’esprit ne peut rien,
et
on l’en loue, parce que c’est très commode, mais on exige par surcroî
643
de l’art qu’il a sucé. Si l’ouvrage est « sérieux
et
précis » selon les clercs, l’éditeur, le jugeant invendable, exigera
644
arrhes jamais récupérées sur la très maigre vente
et
le mépris du directeur commercial. Je suppose mon clerc peu fortuné.
645
rières s’ouvrent à lui : celle des accommodements
et
celle du chômage. La carrière des accommodements offre à « l’esprit »
646
fre à « l’esprit » des perspectives innombrables,
et
très diversement rétribuées, de démission. Car l’esprit, lui aussi, m
647
quoi s’ajoute depuis peu une possibilité nouvelle
et
symbolique : les licenciés seuls peuvent briguer l’inspectorat de la
648
hebdomadaire, sur un sujet littéraire à la mode,
et
tenant compte de la frivolité du genre, vous serez payé 200 fr. la co
649
ité du genre, vous serez payé 200 fr. la colonne.
Et
si vous descendez jusqu’au journal d’information, les prix seront enc
650
i-heure à l’aide d’un répertoire de lieux communs
et
d’idées fausses mais courantes39. Or il se trouve, par un curieux has
651
e trouve, par un curieux hasard, que l’Esprit pur
et
le Palais de l’Esprit pur ne sont jamais si lyriquement loués que dan
652
agréments, s’il est vrai que la liberté de penser
et
d’écrire à sa guise, la pauvreté, le risque matériel, le nomadisme, l
653
matériel, le nomadisme, le contact avec le peuple
et
ses difficultés souvent sordides et parfois émouvantes, enfin l’espèc
654
vec le peuple et ses difficultés souvent sordides
et
parfois émouvantes, enfin l’espèce d’incertitude insouciante du lende
655
rir de son irréalisme. Une pratique assez longue,
et
d’ailleurs imposée, de cet état me permet d’affirmer sans ironie qu’i
656
qu’on nomme la vie pratique, avec ses résistances
et
ses aspérités, ses rencontres, ses courtes habitudes (louées par Niet
657
inertie fascinante, cette vie faite d’embêtements
et
de fécondes coïncidences est plus conforme aux rythmes de l’esprit cr
658
ement sous la coupe de la publicité capitaliste ;
et
d’autre part, les intellectuels jetés au chômage par la crise — plutô
659
s d’un fascisme culturel, de droite ou de gauche,
et
qui saura leur imposer un conformisme monstrueux, ou le silence. Il n
660
ce goût de positif que mes contemporains, à tort
et
à travers, opposent à toute critique un peu trop perspicace. Ils ont
661
lle créée par le décret de séparation de l’esprit
et
du corps, de la raison pure et de la morale pratique, décret prononcé
662
ration de l’esprit et du corps, de la raison pure
et
de la morale pratique, décret prononcé par Descartes en 1637 — aggrav
663
ique inaugurée par le krach de Wall Street (1930)
et
nommée crise ; vu la commercialisation croissante de l’esprit, condit
664
ée par ladite crise ; vu l’existence de la presse
et
la puissance de la publicité ; vu le chômage des intellectuels et ses
665
de la publicité ; vu le chômage des intellectuels
et
ses suites politiques inévitables et prochaines ; vu la panique natio
666
ntellectuels et ses suites politiques inévitables
et
prochaines ; vu la panique nationaliste dont la culture du dernier si
667
n de l’esprit dans sa charge effective, créatrice
et
régulatrice ; vu les revendications de la jeunesse qui repousse à l’u
668
ture étant responsable de concentrer, d’humaniser
et
de transmettre les doctrines des clercs de tous ordres qui devaient r
669
clercs de tous ordres qui devaient régir la cité
et
qui se vendent ou se désintéressent ; que ce problème n’est plus jama
670
us jamais posé que par des penseurs sans audience
et
sans prestige dans l’État ; — et décide en conséquence : la construct
671
rs sans audience et sans prestige dans l’État ; —
et
décide en conséquence : la construction d’un Palais de l’Esprit desti
672
ntes : a) définition de la culture, de ses moyens
et
de son but final. b) qu’est-elle devenue en théorie et en pratique so
673
son but final. b) qu’est-elle devenue en théorie
et
en pratique sous les divers régimes actuels ? a-t-elle encore un sens
674
r autorité — si elle existe en fait ou en droit —
et
quels doivent être ses moyens ? Les discussions seront introduites ch
675
e plus, chatouiller avec de grands mots dépréciés
et
abstraits la plaque sensible d’un micro devant une foule élégante et
676
que sensible d’un micro devant une foule élégante
et
muette, — c’est une chose, c’est même celle qu’on fera. Mais c’est to
677
e de l’esprit, à poser des questions bien simples
et
bien grossières, celles que les clercs prudents ne posent jamais, cel
678
nécessaires, mais il y a un temps pour les rêver
et
un temps pour les appliquer, un temps pour critiquer finement ce qui
679
temps pour critiquer finement ce qui s’est fait,
et
un temps pour saisir à pleines mains les instruments de construction,
680
voir hic et nunc où peut s’insérer notre action,
et
comment elle doit s’orienter. Je ne nie pas que les interventions pas
681
. Je ne nie pas que les interventions passionnées
et
simplistes du public ne puissent être un puissant rappel à la « réali
682
ir les faits n’est pas tout, il faut voir au-delà
et
plus profond que ne peut voir la foule. Il faut donner un sens à sa v
683
re culture par exemple. C’est croire à cette fin,
et
prouver qu’on y croit. C’est prophétiser pour agir. Seuls les prophèt
684
’est prophétiser pour agir. Seuls les prophètes —
et
non les techniciens — sont en mesure de conduire l’action, si conduir
685
re c’est savoir où l’on va. Seuls les prophètes —
et
non pas les poètes — peuvent en vérité « donner un sens plus pur aux
686
avant de parler il faut savoir le sens des mots.
Et
pour que les mots aient un sens, un sens commun, et entendu de tous,
687
pour que les mots aient un sens, un sens commun,
et
entendu de tous, il faut que le terme — la fin — soit proclamé par de
688
regard de ce qu’ils ont à dire, qui les dépasse,
et
personnes parfaitement responsables de ce qu’elles ont à donner, qui
689
s inutilement la Bibliothèque nationale, ou bien,
et
c’est le plus probable, elle contiendra ce que je dis : les témoignag
690
ission. 26. « Cette façon de dégrader la culture
et
d’en faire une chose à côté, tout en l’“élevant” au rang de suprastru
691
té, tout en l’“élevant” au rang de suprastructure
et
en la privant par là de sa relation essentielle avec la constitution
692
petite 5 chevaux. Quant au salut, il est gratuit.
Et
je ne pense pas que M. Duhamel compte acheter son « immortalité » aca
693
euple, à tous ceux qui ne sont pas intellectuels,
et
qui sont les premiers à souffrir de la carence de l’esprit. 29. De c
694
de l’esprit. 29. De ce mépris de la pensée pure
et
des discours vient l’engouement pour ceux qu’on nomme les « technicie
695
fait sur un malentendu. On respecte le technicien
et
on le pousse dans les conseils de la cité sur la foi du seul nom qu’o
696
e la cité sur la foi du seul nom qu’on lui donne,
et
en vertu du préjugé praticiste : technicien signifiant pour le peuple
697
pour le peuple : homme de métier, esprit pratique
et
informé. Or, la plupart de ceux qu’on nomme ainsi sont justement des
698
ent des théoriciens — ingénieurs ou économistes —
et
de l’espèce la plus amie des abstractions, des solutions mathématique
699
ns, des solutions mathématiques, des statistiques
et
des plans fabuleux. 30. « Ford, c’est Descartes descendu dans la rue
700
Descartes descendu dans la rue », écrivaient Aron
et
Dandieu dans Le Cancer américain. 31. Dans un ouvrage intitulé Pens
701
de nombreuses déclarations l’actualité incessante
et
constitutive de la pensée. Mais le cartésianisme du xviiie siècle a
702
déduit pratiquement de la séparation de l’esprit
et
du corps, la thèse suivante : l’esprit représente dans l’homme la fon
703
de Rauh (Avant-propos des Études de morale). 35.
Et
sans doute d’abord chez les grands convertisseurs chrétiens, — mais c
704
hie, c’est-à-dire la science qui recherche le but
et
les conditions de la société. La révolution de l’avenir sera le triom
705
la vérité contraignante de la foi), l’affirmation
et
la prédication de ce droit n’entraînant aucun risque ni aucune modifi
706
es clercs, « l’esprit » ne passe jamais à l’acte.
Et
le dieu Progrès ne rend plus. Peu à peu, Renan découvre (« grand résu
707
qu’elles joueraient automatiquement en sa faveur.
Et
le peuple qui croit les clercs, croit aussi qu’ils ne peuvent rien fa
708
clercs, croit aussi qu’ils ne peuvent rien faire,
et
bientôt les méprise cordialement, tout en les honorant par habitude,
709
cordialement, tout en les honorant par habitude,
et
pour la même raison : en tant qu’hommes inutiles, distingués, libérés
710
: en tant qu’hommes inutiles, distingués, libérés
et
savants. En tant que saints laïques, inoffensifs. Les clercs savent b
711
ifs. Les clercs savent bien que ce mépris cordial
et
ces honneurs rendus au mythe du Progrès, plus qu’à eux-mêmes, sont au
712
ur leurs privilèges usurpés. 37. « Le difficile
et
l’essentiel pour un philosophe, ce n’est pas d’arriver le plus vite p
713
ire, de la reculer aussi longtemps qu’on le peut,
et
en quelque sorte de se boucher les yeux pour ne la voir pas, mais de
714
ain montre très bien comment le souci d’honnêteté
et
de sérieux de la pensée universitaire aboutit nécessairement à un fau
715
qu’un clerc doit faire, selon nos grands docteurs
et
leurs petits disciples. Mais encore : il a dit le droit en spécifiant
716
ue ce mot soulève chez nos clercs, il traduit bel
et
bien leur attitude de fait devant le monde : s’ils croyaient sérieuse
717
ire les interprètes du public auprès de l’auteur,
et
non l’inverse, qui serait normal. Tout profit commercial se calcule d
718
calcule de la sorte aux dépens de l’intelligence
et
de la valeur créatrice. 40. Formule d’introduction d’usage courant a
719
ntroduction d’usage courant aux environs de 1935,
et
dépourvue de toute signification définie. 41. Et remarquons l’étran
720
t dépourvue de toute signification définie. 41.
Et
remarquons l’étrange accident qu’elle risquerait de provoquer : la la
721
erait de provoquer : la lassitude, le défaitisme,
et
les dégoûts mal formulés qui semblent déprimer depuis deux ans l’inte
722
urraient bien se résoudre, au cours de ces débats
et
sous la pression populaire, en une espèce de nuit du 4 août de la pen
723
ique dans un pays qui a fait la Révolution de 89,
et
qui est déjà une nation. Mais condamner le « fascisme » allemand, et
724
nation. Mais condamner le « fascisme » allemand,
et
fonder sur cette condamnation une politique européenne, c’est à peu p
725
nt que de se déclarer l’adversaire des avalanches
et
des marées, pour des raisons idéologiques. On entend des gens à Paris
726
est qu’une révolution de masses, au sens moderne.
Et
que ça n’a pas le moindre rapport avec la « politique » au sens habit
727
onnu des mouvements aussi totalement « étranges »
et
« profonds », et qui transcendent toutes les catégories de pensée rat
728
ts aussi totalement « étranges » et « profonds »,
et
qui transcendent toutes les catégories de pensée rationnelles, indivi
729
e places assises dans une halle de 30 000 places,
et
qui attendait, massée au fond, dans les travées et les porches, depui
730
t qui attendait, massée au fond, dans les travées
et
les porches, depuis quatre grandes heures, l’arrivée du Führer. Et au
731
epuis quatre grandes heures, l’arrivée du Führer.
Et
au-dehors, battant les murs de la halle, cent-mille hommes et femmes
732
, battant les murs de la halle, cent-mille hommes
et
femmes attendaient sous les haut-parleurs. Et sur toutes les places d
733
mes et femmes attendaient sous les haut-parleurs.
Et
sur toutes les places de la ville, depuis le matin, et dans 45 salles
734
r toutes les places de la ville, depuis le matin,
et
dans 45 salles où les formations d’assaut avaient leur « appel généra
735
r qui des premières galeries menait à la tribune,
et
dans la lueur d’un faible projecteur, il parut. Souriant comme en ext
736
ue les cris de mes voisins sur un fond de tempête
et
de battements sourds — avec des gestes de prêtre, avec une sorte de d
737
, avec une sorte de douceur… Pendant six minutes.
Et
quand ce hurlement d’amour s’apaisa, on entendait encore une rumeur d
738
uple allemand est sans cesse renforcée par la foi
et
la confiance du Peuple en moi ! — un seul cri des masses confessant l
739
ie collective, d’irrationalisme germanique, etc.,
et
représentent Hitler comme un tribun déchaîné exploitant les haines le
740
nables, parfois avec ironie, mais sans amertume ;
et
ses gestes sont souples, n’ont plus rien de la brutalité des années d
741
mais de religion, mais de cérémonies monumentales
et
sacrales en l’honneur d’un Dieu nouveau, l’âme de la masse, l’obscur
742
ur d’un Dieu nouveau, l’âme de la masse, l’obscur
et
puissant esprit de la nation, que le Führer est venu incarner, lui le
743
r est venu incarner, lui le pur, le simple, l’ami
et
le libérateur invincible… « Une ère nouvelle commence ici. » ⁂ Chréti
744
ance à sa fin. On n’imagine pas d’aborder l’œuvre
et
la personne de Ramuz d’une façon systématique. Non que cette œuvre et
745
muz d’une façon systématique. Non que cette œuvre
et
cette personne ne comportent aucun système : mais il est si totalemen
746
feste ; rien ne se manifeste hors d’un mouvement.
Et
tout mouvement provient de la lumière qui crée les formes en même tem
747
us. Non seulement elle doit avoir un commencement
et
une fin, mais des contours, et non seulement des contours, mais un re
748
ir un commencement et une fin, mais des contours,
et
non seulement des contours, mais un relief et un volume. Elle doit no
749
rs, et non seulement des contours, mais un relief
et
un volume. Elle doit non seulement être vue, mais touchée, et puis em
750
. Elle doit non seulement être vue, mais touchée,
et
puis embrassée, puis finalement soulevée, ayant un poids à elle et un
751
, puis finalement soulevée, ayant un poids à elle
et
une densité », écrit Ramuz. Le peuple dit, encore plus simplement : «
752
vrai, ça se verrait. » Telle est la loi nouvelle
et
la réalité d’une ère dominée par ce fait historique : l’Incarnation d
753
Parole. Les grands docteurs chrétiens l’ont su ;
et
Paracelse ; et les poètes du xvie siècle ; puis Goethe et certains r
754
ands docteurs chrétiens l’ont su ; et Paracelse ;
et
les poètes du xvie siècle ; puis Goethe et certains romantiques alle
755
lse ; et les poètes du xvie siècle ; puis Goethe
et
certains romantiques allemands ; puis Rimbaud qui voulait « posséder
756
aud qui voulait « posséder la vérité dans une âme
et
un corps ». Aujourd’hui, c’est un Rilke, un Claudel, un Ramuz qui dét
757
les simples par quoi nous guérirons du platonisme
et
du cartésianisme. Les clercs s’écrient : Esprit ! Esprit43 ! Mais je
758
se manifeste dans la main qui réalise une vision.
Et
dans le visage qui conditionne le regard, et se modèle selon les pris
759
ion. Et dans le visage qui conditionne le regard,
et
se modèle selon les prises du regard. (En allemand, le seul mot Gesic
760
ul mot Gesicht signifie à la fois visage, vision,
et
vue au sens d’idée.) ⁂ Ouvrez un livre de Ramuz : les choses « vienne
761
t », le monde « vient » (à nous), le ciel, le lac
et
les montagnes « viennent » : et on les voit venir ainsi à la rencontr
762
, le ciel, le lac et les montagnes « viennent » :
et
on les voit venir ainsi à la rencontre d’un regard qui les invente et
763
ainsi à la rencontre d’un regard qui les invente
et
les dénombre et les connaît dans leur sens primitif, dans le sens de
764
ontre d’un regard qui les invente et les dénombre
et
les connaît dans leur sens primitif, dans le sens de la création qui
765
tes : elles s’approchaient pour recevoir leur nom
et
leur emploi. Il faut toujours remonter à ce mythe si l’on veut saisir
766
remonter à ce mythe si l’on veut saisir la genèse
et
l’ambition secrète de l’art de Ramuz. Un personnage de Ramuz, c’est d
767
oit sortir des bois dans le rose du lever du jour
et
ils sont roses dans le ciel rose, avec des gouttes de rosée qui leur
768
s gouttes de rosée qui leur pendent à chaque poil
et
des souliers qui brillent. » Il y en a dans presque tous les livres d
769
ait s’amuser à recomposer le pays autour d’eux44.
Et
l’on verrait alors que ces bonshommes ne sont point décrits « de l’ex
770
entique », est microcosme d’un pays, d’un paysage
et
d’un ensemble de coutumes. Les rythmes du temps s’y inscrivent aussi
771
ous porte en arrière, parce qu’on l’a mal calculé
et
il faut d’abord qu’on le corrige. » Et Ramuz ajoute : « C’est comme m
772
al calculé et il faut d’abord qu’on le corrige. »
Et
Ramuz ajoute : « C’est comme moi. » C’est comme lui quand il écrit. C
773
crit. Car sa vision est harmonie avec ces formes,
et
son langage avec les rythmes qu’elles traduisent. ⁂ Une forme, une im
774
n’est ni du dedans ni du dehors, qui est contact,
et
littéralement drame entre la vision et l’objet, entre la position de
775
t contact, et littéralement drame entre la vision
et
l’objet, entre la position de l’homme et la proposition du monde. C’e
776
a vision et l’objet, entre la position de l’homme
et
la proposition du monde. C’est la région de la rencontre et de la for
777
osition du monde. C’est la région de la rencontre
et
de la forme. Et non point de la forme toute faite, cadre imposé aux j
778
. C’est la région de la rencontre et de la forme.
Et
non point de la forme toute faite, cadre imposé aux jeux d’une invent
779
mais de la forme en devenir, expressive du dedans
et
du dehors en même temps, dans le temps de leur lutte. Ici le spiritue
780
e spirituel devient tangible, le matériel lisible
et
significatif. Nous sommes ici au lieu de l’incarnation des images — o
781
es, choisir le moins savant, le moins « lyrique »
et
le plus matériel, parler d’un ciel au bleu de lessive, plutôt que de
782
rculation d’idées qui « représentent » les choses
et
le concret, comme les billets représentent l’or de la réserve. Le mot
783
t décontenancé le langage des hommes de ce temps,
et
par là même, ils nous démoralisent plus sûrement que ne le font les s
784
e fameux « pratique » dont ils s’occupent si mal,
et
de plus en plus mal à mesure que le « pratique » s’éloigne davantage
785
en les hypnotisant sur la possession de l’argent
et
les bienfaits qui en découlent.) Si j’étais dictateur, je nommerais R
786
eur, je nommerais Ramuz président de ce tribunal.
Et
nous aurions enfin un langage « châtié », comme on disait dans les sa
787
peut-elle signifier dans ce monde physionomique,
et
par quoi va-t-elle s’exprimer dans une vision qui ne veut rien connaî
788
de la forme ? La psychologie d’école, qui domina
et
qui domine encore tous les romans à la Bourget, consiste à rattacher
789
tion, presque par accident, une série d’attitudes
et
de causes « morales » à une série parallèle d’attitudes et de faits v
790
ses « morales » à une série parallèle d’attitudes
et
de faits visibles ; l’accent étant porté sur la causalité, et les fai
791
visibles ; l’accent étant porté sur la causalité,
et
les faits se réduisant peu à peu au rôle de simples vérifications d’u
792
anecdotes ou exemples à l’appui d’une laborieuse
et
schématique reconstruction des âmes. Il est entendu désormais qu’un a
793
ie du roman policier : il n’a pas de psychologie.
Et
la critique parle beaucoup de subjectivité et d’objectivité. Dans le
794
ie. Et la critique parle beaucoup de subjectivité
et
d’objectivité. Dans le monde de Ramuz, ces deux mots n’ont plus aucun
795
e par ses relations organiques à d’autres formes.
Et
c’est encore l’office de l’imagination c’est-à-dire de l’activité qui
796
concepts, plus d’idées générales. Tout est images
et
complexes d’images. Tout est mythes 45. ⁂ Ainsi la mythologie, chez R
797
muz, déloge l’analyse abstraite des psychologues.
Et
l’on découvre à chacune de ses œuvres une signification mythologique.
798
ar la souffrance (La Guérison des Maladies), etc.
Et
le roman n’a pas d’autre mouvement que le mouvement même des images p
799
qu’on peut le définir par le divorce de ses idées
et
de ses actes. D’où naît une certaine littérature d’intrigues pour laq
800
e même que revêt chez Ramuz la faculté d’imaginer
et
de penser dans l’ordre de l’incarnation, devait le conduire à créer u
801
ations abstraites inventées par les psychologues,
et
dans lesquelles vit le bourgeois46. Ce milieu, c’est le peuple ramuzi
802
u pays. Il participe de cette lourdeur originelle
et
unanime d’un peuple en communion avec les éléments. Ce n’est point là
803
que, qui s’avance dès le matin à travers le pays,
et
offre à tous la Parole « ayant l’aspect d’une brochure à couverture b
804
e, les maladies, la famine, la révolte, la guerre
et
la mortalité. Caille s’avance dans la journée, et l’angoisse grandit
805
et la mortalité. Caille s’avance dans la journée,
et
l’angoisse grandit autour de lui. De partout l’orage s’amasse. Vers l
806
iquement. Est-ce la Fin ? Grande heure de terreur
et
de prière… Puis, « la page du ciel a été tournée », ils se relèvent :
807
as morts ! » Le monde renaît dans une soirée pure
et
le baiser d’un couple heureux. Rarement la forme authentique de Ramuz
808
t naissant, rugueux, décapé de toute rhétorique47
et
de toute explication intellectuelle, atteignant par là une unité de s
809
et ». Certes, je vois les défauts de cette forme,
et
le poncif qu’elle peut instituer ; ces détails parfois trop volontair
810
est qu’une page de Ramuz — même pas très réussie,
et
il y en a, il faut le dire, qui ont un air raté, un air de pastiche d
811
u’elle impose, nous replace dans la vision grande
et
efficace des gestes les plus simples de la vie. 2. Formule d’une p
812
objet. » Mais on peut dire cela de Goethe aussi ?
Et
de bien d’autres réalistes de la forme ? — De Goethe surtout. Il y a
813
i direct que possible ». Goethe sait mal le grec,
et
connaît les statues par l’estampe. Il lui faut les intermédiaires de
814
entérinée, tout un système délicat de conventions
et
de prudences… Ramuz commence là où tous les intermédiaires sont suppr
815
in mais aussi garantir son unité concrète, esprit
et
corps. Les niveaux respectifs auxquels se placent un Goethe et un Ram
816
niveaux respectifs auxquels se placent un Goethe
et
un Ramuz déterminent deux formes d’expérience apparemment incomparabl
817
elligence sans prises, d’une pensée sans risques,
et
d’un art sans pitié. ⁂ Ramuz en veut à l’école, aux journaux, au lang
818
ir que le « gazouillis » des oiseaux pouvait être
et
était souvent le plus brutal des tintamarres, fait « d’un bruit de vi
819
n caillou, d’un mélange de toux sèches ou rauques
et
de coups de pioche ou de marteau ». Les glaciers ne sont pas « sublim
820
blimes » comme on chante dans les écoles suisses.
Et
il est faux de « chanter » la montagne : les montagnards l’appellent
821
es ne peuvent pas nourrir une réaction créatrice.
Et
ce n’est point en haine de la facilité qu’un homme recherchera jamais
822
s aides tendent à supprimer ce contact le plus nu
et
cette condition la plus humaine : ce contact avec la matière résistan
823
s humaine : ce contact avec la matière résistante
et
ce risque de l’homme créateur de sa forme. Si Ramuz n’aime pas les ma
824
rt est le concret de l’homme49. Saisir les choses
et
les êtres, tels qu’ils sont et tels qu’ils se montrent, dégradés, dés
825
Saisir les choses et les êtres, tels qu’ils sont
et
tels qu’ils se montrent, dégradés, désunis, informes ; et par l’effor
826
qu’ils se montrent, dégradés, désunis, informes ;
et
par l’effort d’une imagination qui retrouve leur raison d’être, les p
827
— c’est le mouvement unique de l’œuvre de Ramuz,
et
la définition de sa personne en exercice. « Je ne distingue l’être qu
828
e que l’homme est le plus humain là où les choses
et
les êtres attendent tout de son pouvoir restaurateur : leur nom, leur
829
son pouvoir restaurateur : leur nom, leur nombre
et
leur emploi. Parce que le sens de tout acte humain, pour autant qu’il
830
ouvé pour un instant) : où on a en commun un Père
et
une Mère, où la grande parenté des hommes est entr’aperçue pour un in
831
cevoir pour un instant que tendent tous les arts,
et
à nulle autre chose ; à quoi tendent les notes et à nulle autre chose
832
et à nulle autre chose ; à quoi tendent les notes
et
à nulle autre chose ; tous les mots qu’on écrit, les tableaux qu’on p
833
ents a comporté ensuite une bifurcation nouvelle,
et
celle-ci une autre, et ainsi de suite à l’infini, de sorte que pour f
834
une bifurcation nouvelle, et celle-ci une autre,
et
ainsi de suite à l’infini, de sorte que pour finir on est chacun tout
835
t chacun tout seul sur son petit bout de sentier.
Et
il y a aussi cette malédiction, où on sent bien qu’on est (car rien a
836
ivre n’est parfait, aucun tableau n’est parfait ;
et
tout travail d’abord est dur, tout travail difficile, tout travail, t
837
pèce de travail se fait d’abord contre nous-mêmes
et
contre Quelqu’un, tout travail est malédiction), jusqu’à ce que tout
838
tion de la personne dans la tension entre l’objet
et
la volonté formatrice. Rédemption par l’effort créateur… Autant de fo
839
tale de sa vie, non point certes aux contingences
et
au décor de son apparition. Aussi bien la suite du passage nous ramèn
840
du confort. J’aime que les choses vous résistent
et
vous contredisent, comme par exemple une maison trop grande, un feu d
841
a fois les lois d’un art, la coutume d’un peuple,
et
l’authentique raison d’être, l’identité d’une personne en communion,
842
se à borner sa vision à son acte. Voilà l’utile ;
et
qu’on taise le reste, tout cela qui échappe à nos prises. Ainsi fait
843
cela qui échappe à nos prises. Ainsi fait Goethe,
et
c’est là sa vertu. Mais notre siècle pose d’autres questions, des que
844
e se voit mis en demeure de déclarer ses origines
et
ses fins. Voici le temps où l’homme est attaqué par des puissances qu
845
prendre cet embrassement, cette saisie des choses
et
des êtres, cette présence au monde et à soi-même, — l’originalité de
846
des choses et des êtres, cette présence au monde
et
à soi-même, — l’originalité de l’homme « radical ». Ramuz l’a fait pl
847
moigner, c’est peut-être risquer en dépit de tout
et
de soi, ce qu’aucune sagesse n’a jamais justifié… 42. Le Grand Pr
848
existante. « La figure a été faite sur la vérité,
et
la vérité a été reconnue sur la figure » (Pascal, cité par Ramuz). 4
849
t polémique, dirigé contre la religion des Grecs,
et
justifié par la seule connaissance qu’on a du premier sens. 46. C’es
850
’est le ton de la musique de Stravinsky, du Sacre
et
des Noces. Le ton de la création du monde. 48. Il dit des personnage
851
sulte d’une mise en présence effective de l’homme
et
de ce qui résiste à l’homme. C’est le contraire de l’activisme au sen
852
Culture
et
commune mesure (novembre 1936)v w I. La culture soviétique Lo
853
ne révolution. Angoissés par la crise occidentale
et
l’isolement où ils se voient ; séduits par certains résultats matérie
854
voient ; séduits par certains résultats matériels
et
même moraux, et par l’euphorie juvénile qui paraît bien s’être emparé
855
par certains résultats matériels et même moraux,
et
par l’euphorie juvénile qui paraît bien s’être emparée d’une partie d
856
; assez ignorants au surplus des théories de Marx
et
de Lénine, ces intellectuels estiment injuste et ridicule de reproche
857
et de Lénine, ces intellectuels estiment injuste
et
ridicule de reprocher au régime des Soviets certaines erreurs d’ordre
858
us avons dit souvent sur quelle notion bourgeoise
et
libérale de l’esprit se fonde une pareille indulgence.) L’important,
859
la prospérité générale, la productivité accrue ;
et
que les ouvriers se mettent à lire leurs livres, et viennent acclamer
860
que les ouvriers se mettent à lire leurs livres,
et
viennent acclamer leurs discours, au lieu de croire aux sornettes des
861
rien ici ne peut donner l’idée ; mais c’est aussi
et
d’une manière fort imprévue, la renaissance d’un certain humanisme, d
862
amis de l’URSS citent souvent Diderot, Helvétius
et
Voltaire, à l’appui de leur foi nouvelle. Ce n’est pas sans raison qu
863
ettent à glorifier les mythes du Progrès indéfini
et
du Bonheur : la révolution russe a eu ce résultat au moins curieux de
864
nel, qu’ils étaient justement en train de perdre.
Et
pourtant Marx avait été un peu plus loin ! Et l’on s’interdirait de r
865
re. Et pourtant Marx avait été un peu plus loin !
Et
l’on s’interdirait de rien comprendre à l’évolution nécessaire de la
866
Ni qu’elles soient actuellement plus importantes
et
plus dignes de nous retenir que l’élan titanique du Troisième Plan. J
867
adés que la critique d’un clerc y perd ses droits
et
n’est plus à l’échelle du phénomène… Raison de plus, chance de plus,
868
ance de plus, d’essayer d’élargir cette critique,
et
notre idée de la culture s’il le faut. Quand l’esprit « perd ses droi
869
it rien qu’un « reflet » du processus économique,
et
de la lutte des classes qui en résulte. De là sa théorie de la cultur
870
ure prolétarienne, censée naître automatiquement,
et
comme un produit accessoire de la dictature économique des prolétaire
871
guration d’une Idée par des hommes qui y croient,
et
qui, à cause de cette foi, voudraient en remplir le prolétariat.53
872
pouvoir créateur d’une élite guidant les masses.
Et
cette évolution s’est trouvée confirmée par les récents congrès d’écr
873
i l’on ordonne les deux tâches, lutte des classes
et
configuration de la vie, sous la même loi supérieure de la fin propos
874
rme commune de la vie, dont l’activité économique
et
politique ne constitue qu’une partie tout comme la production scienti
875
’une partie tout comme la production scientifique
et
artistique »54. Ceci revient à dire que la lutte des classes, — consi
876
classes, — considérée comme symbole de l’action —
et
la configuration de la vie, qui requiert surtout la pensée — doivent
877
nom de cette mesure, son incarnation très visible
et
ses moyens d’action ou même de contrainte : c’est le Plan55. Ainsi do
878
p plus opportuniste que doctrinal, plus « russe »
et
plus léniniste que marxiste, et qui comporte même une négation précis
879
l, plus « russe » et plus léniniste que marxiste,
et
qui comporte même une négation précise de la croyance originelle en l
880
énéralisations de la critique, les rapprochements
et
les oppositions sommaires. Mais un fait demeure hors de doute et surp
881
ons sommaires. Mais un fait demeure hors de doute
et
surpasse l’ordre des erreurs possibles : c’est que le Plan est l’inst
882
ar la dictature communiste pour unifier la pensée
et
l’action du peuple et de ses conducteurs en vue d’une fin à laquelle
883
iste pour unifier la pensée et l’action du peuple
et
de ses conducteurs en vue d’une fin à laquelle tout doit s’ordonner.
884
ut doit s’ordonner. L’assimilation de la culture (
et
donc de sa mesure) au Plan est même si radicale, si naïve, que les So
885
s à confondre sans l’ombre d’un doute « culture »
et
« production » en général. Étonnante réaction contre les conceptions
886
ro de Moscou, le plus beau du monde disaient-ils.
Et
l’on peut lire chaque jour dans la presse russe des déclarations de c
887
’établir un rapport entre la qualité des semelles
et
la culture générale. C’est très bien de pousser jusque-là le fanatism
888
e diraient les nazis — des activités spirituelles
et
pratiques. Mais la conception qui assimile l’élévation du niveau de l
889
si toutefois l’on refuse de confondre révolution
et
stupidité crasse. Or le danger de cette assimilation n’est pas niable
890
s plus tentées de l’opérer, avec une bonne humeur
et
une bonne volonté qui devraient empêcher que l’on en rie… Poursuivons
891
finalité commune à toutes les œuvres spirituelles
et
matérielles ? La réponse me paraît évidente. Tous les témoignages que
892
puissance de l’inquisition intellectuelle, morale
et
policière exercée par ce Parti d’autre part, nous permettent d’affirm
893
is universel. C’est au nom de ces fins dernières,
et
de la conscience aiguë qu’ils en possèdent, que les jeunes komsomols
894
guë qu’ils en possèdent, que les jeunes komsomols
et
brigadiers de choc s’imposent une morale ascétique, acceptent des pri
895
étique, acceptent des privations de toute nature,
et
supportent avec enthousiasme un régime de travail parfois beaucoup pl
896
ndividuelles qu’elle situe dans un tout grandiose
et
coloré ainsi d’héroïsme, éclate alors à tous les yeux. Si les Russes
897
tous les yeux. Si les Russes sont de bonne humeur
et
si nous sommes de mauvaise humeur, c’est qu’ils savent pourquoi ils t
898
eur, c’est qu’ils savent pourquoi ils travaillent
et
que nous l’ignorons généralement ; c’est qu’ils acceptent les buts de
899
c’est qu’ils acceptent les buts de leur travail,
et
que nous nous méfions généralement des buts obscurs, peut-être crimin
900
ellement le tout de l’homme ? Le rappel permanent
et
la conscience actuelle de ce but final suffisent-ils à animer toutes
901
lines fécondes, ou au contraire, des conformismes
et
des poncifs ? Il ressort des aveux mêmes, faits à titre d’autocritiqu
902
is une forme assez basse de propagande politique,
et
de publicité industrielle. La seule littérature digne du nom qu’ait p
903
ression sur les « décrets culturels » de Staline.
Et
je ne dis pas, ou pas encore contre le Plan, mais en vertu de tout au
904
renait à les lire. Cette situation exceptionnelle
et
provisoire a créé une communauté d’intérêts immédiats et vitaux entre
905
isoire a créé une communauté d’intérêts immédiats
et
vitaux entre les producteurs et les consommateurs de la culture. Tant
906
ntérêts immédiats et vitaux entre les producteurs
et
les consommateurs de la culture. Tant qu’il ne s’agissait que de cons
907
construire des tracteurs, les poètes du tracteur
et
ceux qui le conduisaient parlaient naturellement le même langage qui
908
Plan. Mais cet accord était en somme très limité
et
ce langage essentiellement technique. Car le Plan était avant tout, c
909
a naturellement le besoin d’une langue plus riche
et
plus vivante, apte à décrire les passions, et la nature et la diversi
910
che et plus vivante, apte à décrire les passions,
et
la nature et la diversité des êtres. Il fallait désormais recourir à
911
ivante, apte à décrire les passions, et la nature
et
la diversité des êtres. Il fallait désormais recourir à une mesure qu
912
l’exprimer ou l’inventer, on chercha des modèles
et
des trucs dans les littératures bourgeoises, au hasard des tendances
913
r la nouvelle école soviétique, l’unité du peuple
et
des clercs n’est pas « quelque chose de donné »… mais « quelque chose
914
ée nietzschéenne, c’est l’aventure, le romantisme
et
l’utopie, enfin le risque créateur qui reviennent tenter l’esprit. Il
915
t vain de le nier : la mesure imposée par le Plan
et
qui régit encore l’action pratique des communistes, est d’ores et déj
916
ttue par une mesure spirituelle toute différente,
et
à certains égards, contraire. C’est tout le drame de la culture d’opp
917
i d’un principe qu’il tirait logiquement de Marx,
et
dont il entendait faire la mesure commune de la pensée et de l’action
918
il entendait faire la mesure commune de la pensée
et
de l’action : « Donnez d’abord le pain à tous, et le reste viendra pa
919
et de l’action : « Donnez d’abord le pain à tous,
et
le reste viendra par-dessus. » Telle fut la grande maxime du Plan. Ca
920
an. Car, disait-on, il faut parer au plus pressé,
et
la culture ne vient qu’après. Ainsi tout se trouva soumis à des fins
921
une culture populaire. C’était viser trop court,
et
sous-estimer l’ennemi, j’entends la part de l’homme qui résiste, en c
922
de dictature. De cette insuffisance de l’idéal —
et
non pas des moyens mis en œuvre pour l’atteindre — devait résulter un
923
pour l’atteindre — devait résulter une scission,
et
le désir d’une mesure plus vivante. La scission vient de s’opérer, et
924
sure plus vivante. La scission vient de s’opérer,
et
seule l’inquisition intellectuelle exercée par les chefs soviétiques
925
même temps que son déguisement. Mythe plus vaste
et
plus vague que celui des économistes, mythe créé par l’angoisse et l’
926
celui des économistes, mythe créé par l’angoisse
et
l’orgueil des prisonniers d’une raison brutale : il aura sans doute l
927
e la vie dure, comme tout ce qui est irrationnel,
et
c’est la faute de la raison. Car cette raison, simple servante de l’a
928
tout l’homme. Mais l’homme résiste à son emprise
et
à sa prétention totalitaire. Il ne veut pas se laisser mutiler. Fût-c
929
orgueil n’est encore qu’une immense caricature ;
et
que les fins qu’elle lui propose ne valent pas le prix qu’on les paye
930
es conquêtes matérielles. Alors il met son espoir
et
sa foi dans ce miracle qui résoudrait seul le conflit du calcul et du
931
miracle qui résoudrait seul le conflit du calcul
et
du rêve, du matériel et de l’humain, de la nécessité et de l’orgueil5
932
seul le conflit du calcul et du rêve, du matériel
et
de l’humain, de la nécessité et de l’orgueil59 : l’apparition d’un ho
933
rêve, du matériel et de l’humain, de la nécessité
et
de l’orgueil59 : l’apparition d’un homme nouveau au faîte de l’édific
934
uelques milliers de tracteurs, d’avions, de tanks
et
de parachutes, cette illusion philosophique ? Il est vrai que le mond
935
rgeois justement tourmentés dans leur conscience,
et
qui se rassurent en glorifiant l’URSS. Pour moi, je me bornerai à tir
936
incapable de maintenir l’unité vraie de la pensée
et
de l’action. Elle est déjà divisée contre elle-même. Elle n’est plus
937
commune, encore qu’elle soit réellement imposée.
Et
je ne préjuge rien de l’avenir d’un peuple qui dispose de ressources
938
il ne s’agit plus de découvrir les semelles-crêpe
et
le métro. Notre espérance est au-delà de ces réussites utiles. Vis-à-
939
oui à tout ; c’est un devoir de critique lucide,
et
j’ajouterai de critique méfiante, dans la mesure où les jeunes commun
940
cette morgue que l’on disait naguère américaine,
et
qui ressemble à celle des nouveaux riches de tous les temps. Nous avo
941
périences dont ils ne soupçonnent pas la gravité,
et
moins encore la vanité. Ils les feront avant longtemps. Ils retrouver
942
ure De tout ce qui précède, il serait ridicule
et
vain de tirer une « condamnation » des conceptions culturelles russes
943
t consciemment anarchique, en vertu d’une volonté
et
d’un idéal déclaré. Le libéralisme n’a le droit de critiquer la dicta
944
dictature que lorsqu’il assure une liberté réelle
et
plus féconde que la contrainte. Les surréalistes sont fondés à parler
945
emne, facilité qui consiste à assimiler dictature
et
crime, discipline sociale et brutalité, volonté de servir et trahison
946
assimiler dictature et crime, discipline sociale
et
brutalité, volonté de servir et trahison des clercs, etc., tout cela
947
iscipline sociale et brutalité, volonté de servir
et
trahison des clercs, etc., tout cela au nom d’une conception de l’esp
948
Le composé hitlérien d’irrationalisme romantique
et
de positivisme jacobin, et d’autre part les ressources humaines colos
949
ationalisme romantique et de positivisme jacobin,
et
d’autre part les ressources humaines colossales et jamais encore expl
950
t d’autre part les ressources humaines colossales
et
jamais encore exploitées dont dispose l’URSS ; la pression des nouvel
951
mpréhensibles » ; les transformations économiques
et
morales incalculables provoquées par le socialisme d’État ; enfin le
952
er par la force une commune mesure pour la pensée
et
l’action. La démonstration que j’ai esquissée à propos de la tentativ
953
deux régimes, alors que leurs fins sont hostiles
et
leurs situations de départ différentes, prouve que la mesure réelle,
954
fférentes, prouve que la mesure réelle, dans l’un
et
l’autre cas n’est pas la doctrine mais la technique de l’action sur l
955
e l’on veut imposer au tout, y compris la culture
et
la morale. Ce sont les nécessités de la propagande, identiques dans l
956
ien que le but soit ici la société prolétarienne,
et
là la nation allemande, — qui sont censées configurer la culture. 2.
957
st totalement impuissant à provoquer la création,
et
à la régler, étant de par son origine coupé des sources mêmes de tout
958
ersonne, de l’aventure personnelle, de la liberté
et
du risque personnels. 3. La constatation de cet échec s’impose non se
959
faire autre chose. Nos circonstances économiques
et
historiques étaient telles qu’il fallait une dictature pour y mettre
960
it une dictature pour y mettre un minimum d’ordre
et
permettre à la vie de continuer. Il est incontestable que nous avons
961
aille plus dans nos rues, l’État combat la misère
et
le chômage, nous avons supprimé les partis et leurs luttes épuisantes
962
ère et le chômage, nous avons supprimé les partis
et
leurs luttes épuisantes et stériles. Le corps social était malade, il
963
ns supprimé les partis et leurs luttes épuisantes
et
stériles. Le corps social était malade, il fallait l’opérer d’urgence
964
it malade, il fallait l’opérer d’urgence, à chaud
et
nous y avons porté le fer d’une main assurée. Vos critiques ne nous t
965
uffrez vous aussi, dans vos démocraties libérales
et
parlementaires, des maux qui étaient devenus aigus chez nous : luttes
966
miques, décadence d’une culture séparée du peuple
et
divisée contre elle-même, grabuge des factions partisanes, vieillards
967
des grands trusts, anarchie dans l’enseignement,
et
dix morales contradictoires dont aucune ne sait plus, ou n’ose plus a
968
rcés de commencer par rétablir l’ordre extérieur.
Et
vous ferez du collectivisme. C’est la seule « base commune » puissant
969
l’avantage important d’une tradition de liberté.
Et
vos premières expériences nous enseignent. Toute la question est alor
970
de savoir si nous saurons utiliser ces avantages,
et
le temps de réflexion ou de manœuvre qui nous reste, pour calculer et
971
xion ou de manœuvre qui nous reste, pour calculer
et
préparer spirituellement une révolution qui soit nôtre, sans brutalit
972
s voulons rétablir une mesure commune à la pensée
et
à l’action. Car un ordre extérieur n’est solide et fécond que s’il ré
973
t à l’action. Car un ordre extérieur n’est solide
et
fécond que s’il résulte d’un ordre intérieur. Et cet ordre intérieur
974
et fécond que s’il résulte d’un ordre intérieur.
Et
cet ordre intérieur ne se crée pas à coups de décrets d’urgence et de
975
rieur ne se crée pas à coups de décrets d’urgence
et
de propagande de masses. Pas d’ordre spirituel sans un minimum matéri
976
ériel au spirituel. C’est encore là une évidence,
et
qui n’est pas moins actuelle. III. L’appel à la commune mesure, ou
977
ns anciennes fondées sur des mesures déterminées,
et
tirant justement de ces mesures ce que nous appelons leur grandeur. L
978
leur grandeur. L’Inde ancienne, la Grèce d’Homère
et
la Grèce de Périclès, et la Rome des Césars, et la France de Louis XI
979
ienne, la Grèce d’Homère et la Grèce de Périclès,
et
la Rome des Césars, et la France de Louis XIV, et les empires égyptie
980
e et la Grèce de Périclès, et la Rome des Césars,
et
la France de Louis XIV, et les empires égyptiens et aztèques, et la C
981
et la Rome des Césars, et la France de Louis XIV,
et
les empires égyptiens et aztèques, et la Chine des longues dynasties
982
la France de Louis XIV, et les empires égyptiens
et
aztèques, et la Chine des longues dynasties : grands empires et grand
983
Louis XIV, et les empires égyptiens et aztèques,
et
la Chine des longues dynasties : grands empires et grandes cultures q
984
t la Chine des longues dynasties : grands empires
et
grandes cultures qu’un grand dessein pouvait seul maintenir. Mais pou
985
e de ce dessein, il fallait des symboles visibles
et
dont le sens fût reconnu de tous, prince et sujets, clercs, soldats e
986
ibles et dont le sens fût reconnu de tous, prince
et
sujets, clercs, soldats et marchands législateurs et pédagogues. Ains
987
econnu de tous, prince et sujets, clercs, soldats
et
marchands législateurs et pédagogues. Ainsi l’histoire ou l’action de
988
sujets, clercs, soldats et marchands législateurs
et
pédagogues. Ainsi l’histoire ou l’action des « grands desseins » peut
989
signes visibles qui symbolisaient leur grandeur.
Et
l’histoire des mesures communes ordonnées à ces grands desseins et or
990
mesures communes ordonnées à ces grands desseins
et
ordonnant toutes choses à leur service, c’est l’histoire des objets,
991
squels s’incarnèrent des mesures, selon les temps
et
les lieux, ou les astres. Cependant, une mesure n’est rien, et ses sy
992
ou les astres. Cependant, une mesure n’est rien,
et
ses symboles ne signifient rien, si l’on oublie les fins dernières, l
993
, le grand dessein, la religion qui la supportent
et
l’utilisent, qui la créent et qui meurent avec elle. L’Arche d’allian
994
n qui la supportent et l’utilisent, qui la créent
et
qui meurent avec elle. L’Arche d’alliance n’est rien s’il n’y a pas l
995
ncarnation d’une mesure commune à tous les ordres
et
qui les harmonise. La question de la mesure d’une civilisation est sa
996
que plus ou moins fidèle à la fin qu’elle prépare
et
représente. Seul, le jugement porté sur cette fin déterminera notre j
997
e toute mesure : il faudra commencer par la fin !
Et
non pas emprunter ici ou là, dans les temps révolus, ou l’espace étra
998
crois à l’appel des faits. Considérons les temps
et
les lieux où nous vivons, la situation précise qui nous est faite, et
999
vivons, la situation précise qui nous est faite,
et
l’appel concret qui en résulte ; et après cela jugeons, c’est-à-dire
1000
us est faite, et l’appel concret qui en résulte ;
et
après cela jugeons, c’est-à-dire choisissons nos buts prochains au no
1001
ontingences. Voilà la tension créatrice : réalité
et
vérité assumées dans une seule volonté. Il reste à remplacer chacun d
1002
e par un fait ou un nom contemporains. 1. Temps
et
lieux : l’Europe d’aujourd’hui. Dans cette Europe, deux espèces de na
1003
x espèces de nations : celles qu’on dit vieilles,
et
celles qui se disent rajeunies. Les vieilles nations mènent encore un
1004
nent encore une vie à bien des égards plus facile
et
plus libre que les nouvelles. Elles ont gardé un certain nombre de po
1005
ombreuse que la militaire, un gouvernement faible
et
des vieillards puissants. Leur opinion publique est incertaine, facil
1006
de contradictions en apparence mais dans le fond
et
dans l’ensemble cynique, sceptique et pessimiste. Facilités virtuelle
1007
ans le fond et dans l’ensemble cynique, sceptique
et
pessimiste. Facilités virtuelles et pessimisme de fait : ces deux tra
1008
ue, sceptique et pessimiste. Facilités virtuelles
et
pessimisme de fait : ces deux traits définissent l’atmosphère des nat
1009
ait qu’il n’y a plus rien à faire, qu’à attendre.
Et
l’on s’occupe en attendant à critiquer les nations « rajeunies ». C’e
1010
e révolution de masses. Elles mènent une vie dure
et
s’en disent fières. Certes, elles ont sacrifié un certain nombre de p
1011
e d’opposition, ni partis, ni civils indifférents
et
inutilisables, ni chômeurs de profession, ni crises de gouvernement,
1012
jeunesse disciplinée, fanatisée, toute puissante
et
toute dévouée aux seuls intérêts de l’État. (Des « soldats politiques
1013
ne.) Leur opinion publique est dictée par l’État,
et
l’opinion privée, bon gré mal gré, se rapporte à ces seuls décrets. P
1014
e rapporte à ces seuls décrets. Partout des gênes
et
des interdictions, mais toujours présentées aux masses comme les gage
1015
s aux masses comme les gages d’un bonheur à venir
et
d’une grandeur digne de tous les sacrifices. Et comment ne croirait-o
1016
r et d’une grandeur digne de tous les sacrifices.
Et
comment ne croirait-on pas à la grandeur, même ou surtout la plus myt
1017
, en Italie, il n’est question que de renaissance
et
de construction. « Dictature », « tyrannie », « conformisme brutal »,
1018
écessaires pour assurer à chaque homme du travail
et
pour supprimer finalement les raisons matérielles de se plaindre. Et
1019
inalement les raisons matérielles de se plaindre.
Et
après cela, commencera la conquête d’un avenir de joie et de force. O
1020
cela, commencera la conquête d’un avenir de joie
et
de force. On a touché le fond de la misère, on l’a vécue, on a cela d
1021
on apprend à fuir dans les mystiques collectives.
Et
l’on se rassure en attendant par de faciles railleries à l’adresse de
1022
ibéralisme, à l’origine des dictatures, une seule
et
même situation matérielle : la misère. L’un des systèmes la redoute e
1023
érielle : la misère. L’un des systèmes la redoute
et
la prépare, l’autre en résulte et s’en souvient. L’ersatz de commune
1024
èmes la redoute et la prépare, l’autre en résulte
et
s’en souvient. L’ersatz de commune mesure, dans les régimes bourgeois
1025
stes, c’était l’argent. Mais le crédit s’écroule,
et
la mesure devient le manque d’argent. C’est cette angoisse avant tout
1026
où peut-être on retrouvera des raisons sérieuses
et
urgentes, enfin solides de s’aimer ? La commune mesure des États neuf
1027
rrière les grandes façades aux symboles religieux
et
orgueilleux, je retrouve la misère matérielle. Car à toutes les objec
1028
est ce régime qui nous a délivrés de la misère61.
Et
cela suffit à le justifier pour le moment. La misère, dernier argumen
1029
e tous nos drames, de nos pensées, de nos actions
et
même de nos utopies. La dictature de cette crise sur nos esprits et s
1030
pies. La dictature de cette crise sur nos esprits
et
sur nos corps signifie sans erreur possible que toute commune mesure
1031
le que toute commune mesure est morte parmi nous,
et
que nulle mesure vraie n’est encore restaurée. 3. L’appel. De ces
1032
eule crainte qui les unit encore, s’élève un même
et
formidable appel profond des peuples. Il a jailli de la misère, mais
1033
l exige bien davantage que la fin de cette misère
et
de ses causes immédiates. Il n’exige pas seulement le bien-être physi
1034
té sans classe… Si l’on veut comprendre ce temps,
et
l’ère nouvelle, incalculablement, qu’il inaugure, il faut se rappeler
1035
nnal, alors que la famine régnait sur la Russie ;
et
l’écrasante majorité en faveur de l’Allemagne hitlérienne lors du plé
1036
pe moderne ont découvert le sens de leur histoire
et
l’avenir de leur génie. (France de la fin du xviiie , Russie de 1917,
1037
e de la fin du xviiie , Russie de 1917, Allemagne
et
Italie de l’après-guerre.) Ainsi l’opposition des deux Europes se ram
1038
existait déjà, la crise est bien moins virulente,
et
la réponse a plus de peine à se dégager. Pourtant, il faudra bien qu’
1039
ception du monde fondée sur la raison, l’individu
et
la science cartésienne. Nous savons aujourd’hui que la raison n’est p
1040
l’individu n’est rien que la liberté du désespoir
et
qu’il meurt de son isolement, ou du refus de se dépasser ; qu’il n’y
1041
qu’il n’y a pas de lignes droites dans l’univers,
et
qu’une vitesse ou une grandeur quelconques dépendent à la fois des me
1042
ndeur quelconques dépendent à la fois des mesures
et
du lieu et du temps où on les mesure. Seuls donc les groupes de force
1043
onques dépendent à la fois des mesures et du lieu
et
du temps où on les mesure. Seuls donc les groupes de forces ou d’homm
1044
ul l’homme déterminé par ses relations prochaines
et
actives peut se sentir à la mesure des temps nouveaux. Sinon il n’est
1045
re des temps nouveaux. Sinon il n’est qu’angoisse
et
arbitraire, isolement, irréalité. Cette situation cosmique nouvelle e
1046
e dans son actualité (dans son être de relation),
et
la pensée dans ses effets. Elle agit dans la théologie, qui affirme à
1047
l’Église en tant que société de ceux qui croient,
et
qui revient à la doctrine du bien commun. Elle agit dans le mouvement
1048
n commun. Elle agit dans le mouvement œcuménique.
Et
dans le mouvement des Groupes d’Oxford et dans le domaine pédagogique
1049
énique. Et dans le mouvement des Groupes d’Oxford
et
dans le domaine pédagogique. C’est elle enfin qui pousse des milliers
1050
communautaire ont été les révolutions communistes
et
nationalistes. 4. Les premières réponses. C’est pour avoir deviné c
1051
ières réponses. C’est pour avoir deviné cet appel
et
pressenti l’ampleur de l’angoisse qu’il trahit, c’est pour l’avoir ép
1052
’angoisse qu’il trahit, c’est pour l’avoir épousé
et
guidé, et même à demi satisfait, que triomphent les dictateurs. Ils o
1053
qu’il trahit, c’est pour l’avoir épousé et guidé,
et
même à demi satisfait, que triomphent les dictateurs. Ils ont agi au
1054
omme s’éprouve de nouveau réel, actif, nécessaire
et
relié. Tout jugement politique ou idéologique sur les réponses qu’ils
1055
de donner — classe ou nation — reste superficiel
et
arbitraire tant qu’il ne tient pas compte des dimensions profondes du
1056
dimensions profondes du phénomène collectiviste,
et
de la nécessité cosmique qu’il exprime. Les criticailleries libérales
1057
ire. Elles ne sont qu’une tentation superficielle
et
passagère, elles se réduisent à des poussées de fièvre politique ou i
1058
x masses qui les suivent un invincible dynamisme.
Et
dans leur communion avec ces masses, les chefs puisent une énergie oc
1059
sent une énergie occulte, une efficacité d’action
et
d’agression qui désarme instantanément les hommes d’État que nous leu
1060
aires professionnels, coupés de la nation vivante
et
prisonniers d’une tradition qui survit sans grandeur à ses racines. N
1061
munauté libre. Notre chance est dans l’invention,
et
non dans la défense, ou dans l’imitation. À la force vivante de desti
1062
s des droits que justement toute la crise dénonce
et
rend caducs, mais une force nouvelle qui résolve la crise dans le sen
1063
Je parle ici de forces totales, de crise totale,
et
de destins communs : forces, crise et destins qui sont tout à la fois
1064
ise totale, et de destins communs : forces, crise
et
destins qui sont tout à la fois politiques et culturels. L’Europe des
1065
ise et destins qui sont tout à la fois politiques
et
culturels. L’Europe des religions nouvelles nous met au défi de résou
1066
e que voici : — ou bien nous perdrons notre temps
et
notre chance dans l’histoire à critiquer ce que d’autres ont dû faire
1067
stoire à critiquer ce que d’autres ont dû faire ;
et
alors, d’ici vingt ou cent ans, nous serons réduits à l’état de colon
1068
s serons réduits à l’état de colonies économiques
et
culturelles par l’expansion normale de nos voisins ; — ou bien nous r
1069
dre. Mais nous avons surtout des valeurs à créer,
et
que nous seuls pouvons créer. Nous ne sommes pas en retard sur les So
1070
randioses. Ces symboles nous paraissent barbares,
et
cela est juste. Nous pouvons éprouver la puissance de ces nouvelles r
1071
ge, ici règne une nation dont nous ne sommes pas,
et
qui nous est hostile, non point par volonté méchante, ni par avidité
1072
is en être, nous sommes nés sous d’autres astres,
et
notre vocation est différente. Nous ne sommes pas de ces religions. L
1073
emeure impénétrable. Nos fins sont d’autres fins,
et
la mesure qui doit les incarner ne sera inventée que par nous. Non se
1074
’un acte de foi contraire. Elles veulent la force
et
nous voulons la vérité. Elles veulent la force du grand nombre, et no
1075
a vérité. Elles veulent la force du grand nombre,
et
nous voulons la force personnelle, celle que donne la vérité. Notre m
1076
toujours nouvelles le vieux conflit de l’individu
et
de la masse. 6. La violence nécessaire. Car notre force est personn
1077
lence nécessaire. Car notre force est personnelle
et
non pas collective. Elle réside dans les petits groupes, non dans l’É
1078
use encore ce nom — la fédération, non la masse ;
et
non la tyrannie d’un seul, et non le gigantisme national. La société
1079
ion, non la masse ; et non la tyrannie d’un seul,
et
non le gigantisme national. La société doit être un corps, non pas un
1080
tre un corps, non pas une construction mécanisée.
Et
la santé et la force d’un corps supposent l’harmonie de fonctions div
1081
, non pas une construction mécanisée. Et la santé
et
la force d’un corps supposent l’harmonie de fonctions diversifiées, s
1082
sent l’harmonie de fonctions diversifiées, saines
et
fortes. C’est une harmonie « fédérale ». Restaurer, recréer cette for
1083
cette force, bâtir cette fédération de personnes
et
de groupes organiques, c’est obéir à notre vocation présente, mais c’
1084
une polémique antichrétienne. Voir David Strauss
et
L. Feuerbach. 53. De Man, L’Idée socialiste, p. 27-28. 54. Ibid.,
1085
, L’Idée socialiste, p. 27-28. 54. Ibid., p. 29
et
33. 55. Le troisième Plan sera consacré plus spécialement à l’édific
1086
mouvement stakhanoviste. 59. Le conflit de Marx
et
de Nietzsche chez plusieurs jeunes hommes d’aujourd’hui. 60. Dans le
1087
Les Russes ajoutent : de l’oppression tsariste ;
et
les Allemands : du déshonneur. v. Rougemont Denis de, « Culture et
1088
du déshonneur. v. Rougemont Denis de, « Culture
et
commune mesure », Esprit, Paris, novembre 1936, p. 251-273. w. Une n
1089
a provision de bon air contre du papier noirci »,
et
il rapporte 300 pages, qui resteront sans doute comme l’un des docume
1090
comme l’un des documents humains les plus féconds
et
authentiques de ce siècle. J’imagine l’historien futur étudiant l’inv
1091
en plus que des faits : les réactions d’un esprit
et
d’une âme — le corps, ici, a peu de part, nous sommes en France — au
1092
re les deux sens du mot « vivre » : gagner sa vie
et
mériter sa vie ; et peut-être entre les deux sens du mot « gagner » :
1093
mot « vivre » : gagner sa vie et mériter sa vie ;
et
peut-être entre les deux sens du mot « gagner » : gagner le monde ou
1094
s peut-être au contraire parce qu’ici tout porte,
et
nous met du coup en présence du concret d’une vie située. Il faut s’a
1095
longue médiation sur les maîtres d’une génération
et
le passé de la race qu’ils prolongent (Barrès, Péguy, Romain Rolland)
1096
sur le journalisme, la condition du fonctionnaire
et
le « moyen de parvenir » qui parurent ici même l’an dernier ; de cett
1097
ette mesure constamment observée — voilà sa ruse—
et
qui nourrit enfin, comme sans le vouloir, le plus féroce réquisitoire
1098
une critique de l’État — « Le Tous contre un » —
et
de son emprise sur nos vies. Critique dont la portée directe et l’évi
1099
ise sur nos vies. Critique dont la portée directe
et
l’évidence insupportable naissent non point d’une vue théorique sur q
1100
autrement, je n’en finirais pas, dans cette note,
et
j’ignore même si j’en viendrais jamais à bout dans mon esprit. Voici
1101
trésors de la « spiritualité », qu’une dernière,
et
subtile, et modeste défense — la plus orgueilleuse sans doute — contr
1102
la « spiritualité », qu’une dernière, et subtile,
et
modeste défense — la plus orgueilleuse sans doute — contre la questio
1103
e à l’homme pécheur le Dieu-homme. Mais ceci dit,
et
maintenu, — j’admire qu’un incroyant ait su donner à notre position p
1104
monde n’a plus pour moi le caractère intelligible
et
nécessaire qu’il avait pour mes ancêtres », il sait aussi, et il nous
1105
e qu’il avait pour mes ancêtres », il sait aussi,
et
il nous fait savoir, que c’est à nous de recréer un monde où notre vi
1106
. Puis j’ai trouvé ce cri : « Tout me concerne »,
et
ce sous-titre, vers la fin : « Retour à la passion ». Et maintenant n
1107
ous-titre, vers la fin : « Retour à la passion ».
Et
maintenant nos routes se joignent. x. Rougemont Denis de, « [Compt
1108
e social qui l’a laissée devenir ce qu’elle est ;
et
plus encore à chacun de nous dans le cœur duquel ce régime plonge ses
1109
lus aujourd’hui, qu’il faut commencer par refaire
et
qui suppose le développement sur tous les plans de la révolution pers
1110
ré, aux mêmes questions : pourquoi écrivez-vous ?
et
pour quoi, et pour qui ? Or on ne peut poser ces questions-là que si
1111
questions : pourquoi écrivez-vous ? et pour quoi,
et
pour qui ? Or on ne peut poser ces questions-là que si l’on sait, pou
1112
prit gaulois aux conventions de l’amour courtois,
et
à y voir la conception naturaliste de l’amour, en opposition avec la
1113
ylisée. Elle doit représenter la réalité complexe
et
pénible sous une forme simplifiée et illusoire. Tout ce qui constitue
1114
ité complexe et pénible sous une forme simplifiée
et
illusoire. Tout ce qui constitue la gauloiserie : la licence fantaisi
1115
le dédain de toutes les complications naturelles
et
sociales de l’amour, l’indulgence pour les mensonges et les égoïsmes
1116
iales de l’amour, l’indulgence pour les mensonges
et
les égoïsmes de la vie sexuelle, la vision d’une jouissance infinie,
1117
C’est un idéal quand même : celui de la luxure.
Et
c’est encore une évasion, encore un exotisme à l’usage d’une générati
1118
ier de cet objet, je veux dire son message unique
et
par là même généralement humain. Gide retrouve la manière classique d
1119
ne permanente correction que par scrupule humain,
et
par prudence aussi, il oppose à ses entraînements. L’âge venant, je
1120
s de curiosité pour les paysages, beaucoup moins,
et
si beaux qu’ils soient ; mais de plus en plus pour les hommes. Voilà
1121
cepté Saint-Marc. Il y a de quoi faire au-dehors,
et
la foule m’intéresse infiniment… » Goethe poursuit : « Aujourd’hui je
1122
j’ai observé les gens, comment ils marchandaient
et
achetaient avec une convoitise, une attention et une astuce inexprima
1123
et achetaient avec une convoitise, une attention
et
une astuce inexprimables…63 » Mais voici Gide de son côté, observant
1124
s voici Gide de son côté, observant les acheteurs
et
l’étalage du bazar de Moscou : « Les marchandises sont, à bien peu pr
1125
rmandise. » (Il est plaisant de rapprocher Goethe
et
Gide ; mais comparez aussi, Venise et Moscou — 1786 et 1936 —, et ces
1126
cher Goethe et Gide ; mais comparez aussi, Venise
et
Moscou — 1786 et 1936 —, et ces deux peuples : la convoitise et l’ast
1127
de ; mais comparez aussi, Venise et Moscou — 1786
et
1936 —, et ces deux peuples : la convoitise et l’astuce attentive de
1128
omparez aussi, Venise et Moscou — 1786 et 1936 —,
et
ces deux peuples : la convoitise et l’astuce attentive de l’un, la ré
1129
86 et 1936 —, et ces deux peuples : la convoitise
et
l’astuce attentive de l’un, la résignation de l’autre… Nathanaël, gou
1130
connaître Gide, l’avant-propos de son petit livre
et
cette espèce de happy end que figure le dernier paragraphe, il paraît
1131
pilogue : « L’URSS n’a pas fini de nous instruire
et
de nous étonner. » Précautions, je sais bien. Mais ici, sont-elles ef
1132
cela. Mais c’est aussi plus clair que la préface
et
l’épilogue ne le donneraient à penser. Parlons net : il s’agit ici d’
1133
e ce qu’il faut bien appeler le bluff stalinien ;
et
je ne dis pas du tout : d’une critique de ce qu’il y a de profond dan
1134
onciation des slogans d’exportation qui ont fait,
et
font encore, les trois-quarts du succès de l’URSS auprès des intellec
1135
u tout au moins l’indifférence, que ceux qui sont
et
qui se sentent du “bon côté”, marquent à l’égard des “inférieurs”, de
1136
eurs”, des domestiques, des manœuvres, des hommes
et
femmes “de journée”, et j’allais dire : des pauvres. Il n’y a plus de
1137
des manœuvres, des hommes et femmes “de journée”,
et
j’allais dire : des pauvres. Il n’y a plus de classes en URSS, c’est
1138
(en tant que « cellule sociale »), de l’héritage,
et
du legs64, le goût du lucre, de la possession particulière, reprennen
1139
t le pas sur le besoin de camaraderie, de partage
et
de vie commune. » On ricanait quand Berdiaev prophétisait l’apparitio
1140
telle théorie est conforme à cette ligne sacrée.
Et
malheur à qui chercherait à pousser plus loin ! » Je demande alors si
1141
nticlérical. Seulement, la dissociation de la foi
et
des œuvres de l’Église est relativement aisée pour un esprit qui reco
1142
ès lors qu’une doctrine se veut purement humaine,
et
historiquement valable, elle est comptable de ses déviations humaines
1143
le, elle est comptable de ses déviations humaines
et
historiques. Elle est jugée par ces déviations. Elle est jugée par ce
1144
Elle est jugée par ce que les hommes en ont fait,
et
par la réussite ou bien l’échec de ses prévisions pratiques. Gide le
1145
rapport au marxisme] n’est peut-être qu’apparent,
et
si ce qui nous apparaît comme une dérogation n’est pas une conséquenc
1146
r.) C’est ici tout le problème que pose ce livre,
et
qu’il laisse encore en suspens. Les staliniens auront beau jeu : ils
1147
ide de bourgeois libéral, de monsieur susceptible
et
réactionnaire. Si l’on accepte vraiment le marxisme, pourquoi s’indig
1148
toucher le fond réel de la situation historique.
Et
la droite, si elle était honnête, serait encore plus gênée que la gau
1149
que la gauche par ce portrait de l’URSS fascisée
et
embourgeoisée. Mais nous, personnalistes, que dirons-nous ? Le livre
1150
déguisée en nourrice. Elle veut en faire un dieu,
et
pour cela le couche chaque soir sur un lit de braises. « Il supporte
1151
de braises. « Il supporte l’ardeur des charbons,
et
cette épreuve le fortifie. » Mais la mère, Métaneire, fait irruption.
1152
aneire, fait irruption. « Elle repoussa la déesse
et
tout le surhumain qui se forgeait, écarta les braises et, pour sauver
1153
le surhumain qui se forgeait, écarta les braises
et
, pour sauver l’enfant, perdit le dieu. » La légende est belle. C’est
1154
eu qui est en lui, c’est que l’homme est pécheur,
et
ne peut pas outrepasser les limites de sa condition. Qui veut faire l
1155
que nous éprouvons à voir Gide, en dépit de tout,
et
avec tant de courage malgré tant de prudences, persévérer dans une vo
1156
, c’est Gide « qui n’a pas fini de nous instruire
et
de nous étonner ». 63. Journal de voyage en Italie, 29 septembre 17
1157
eptembre 1786. 64. Pends-toi, brave Kérillis ! —
et
si les nazis savaient cela ! 65. Certes, Gide ne se prive pas d’admi
1158
talinisme, ou ce qu’il en admire, ce sont excuses
et
admirations que nous proposent identiquement les régimes fascistes (a
1159
es régimes fascistes (autarchie nécessaire, p. 50
et
51, démocratisation du luxe, p. 60, etc.). aa. Rougemont Denis de,
1160
ducs d’Albe a été détruit par les obus de Franco,
et
Commune, par la voix d’Aragon, exprime sa juste indignation. Crime co
1161
nt restés ici avec les communistes, écrit Aragon.
Et
le petit chien du duc, qui figure sur le portrait du gentilhomme, fai
1162
en France, où rien n’entrave la liberté d’éditer
et
de vendre tout ce que l’on imagine. Ce n’est pas le « fascisme » qui
1163
ien, donner sa feuille de salade verte au canari.
Et
nous ne sommes pas « communistes » pour si peu. Je constate simplemen
1164
ulture, achète des livres, fréquente les théâtres
et
les concerts, bref, se cultive avec cette sorte de passion que le Fra
1165
son régime de liberté, à la lecture de Paris-Soir
et
Paris-Sports, quand ce n’est pas Paris-Soir-Dimanche. Quels chiffres
1166
chert, ont atteint quatre-vingts, soixante-quinze
et
cent-mille. Et c’est un écrivain de classe ! L’essai de Gedat intitul
1167
int quatre-vingts, soixante-quinze et cent-mille.
Et
c’est un écrivain de classe ! L’essai de Gedat intitulé Un chrétien d
1168
trois-centième-mille un an après sa publication.
Et
les poètes ne restent pas en arrière : le jeune Gerhard Schuhmann, qu
1169
mann, qui est nazi, a des tirages de douze-mille,
et
le vieux Ch. Morgenstern, qui ne l’est pas, un tirage de cinquante-mi
1170
ports de la politique, de l’économie de la nation
et
de la culture sont un peu moins simplets que ces partisans ne le croi
1171
u moins simplets que ces partisans ne le croient.
Et
que ce n’est pas d’abord contre le fascisme à l’étranger, mais d’abor
1172
débutant : « Les personnages n’y semblent naître
et
se nourrir que de la fièvre de l’auteur. » N’est-ce pas, en somme, to
1173
omme, toujours ainsi que les personnages naissent
et
se nourrissent ? Mais on a convenu de n’en rien laisser paraître. Oui
1174
oderne nous propose, mais très diversement vêtue,
et
il essaie de nous intéresser d’abord aux vêtements. Il entend bien no
1175
, chargées de nous distraire pendant l’opération,
et
de nous faire croire que ce n’est pas lui qui agit… Pourtant ses pers
1176
Je n’ignore pas que des visions parfois bizarres
et
amusantes, ou émouvantes, souvent fort incertaines et monotones, s’im
1177
musantes, ou émouvantes, souvent fort incertaines
et
monotones, s’imposent de cette manière au déprimé fiévreux. La questi
1178
d’ignorer qu’elles sont anxieusement souhaitées,
et
cultivées avec des soins jaloux, si par hasard on les obtient.) Qu’on
1179
rieux de l’homme contre ses servitudes naturelles
et
les illusions qu’elles entraînent : Goethe ou Balzac n’ont rien fait
1180
, par masochisme. Un jeune mari trouble sa femme,
et
la perd enfin, à force de souffrir d’une infidélité qu’elle pourrait
1181
e détails intimes semblent destinés à faire vrai,
et
à prouver que l’on n’invente rien de ce tourment. Est-ce donc un témo
1182
ien de ce tourment. Est-ce donc un témoignage pur
et
simple — ni si pur ni si simple d’ailleurs, — la relation volontairem
1183
ivre n’est ni passionnant, ni indifférent, habile
et
sensible à la fois. On le lit sans savoir pourquoi ; peut-être pour c
1184
e ou amuser. (Comme on l’exige de nouveau en URSS
et
en Allemagne.) Mais nos romans ne veulent plus de morale — à cause de
1185
e veulent plus de morale — à cause de « l’art » —
et
l’art consiste à vous faire partager des tourments aussi déprimants q
1186
Dos Passos le procédé des biographies parallèles,
et
Franz Lehar les décors d’opérette. Catalogue illustré des vices les p
1187
pectacle où Jaurès, Mussolini, Lénine, d’Annunzio
et
Nietzsche viennent faire de petits sketches non dénués d’à-propos, al
1188
anesques retrouvent enfin leur vérité originelle.
Et
l’on se laisse aller à de vieux trucs trop éprouvés, ahuri et charmé
1189
aisse aller à de vieux trucs trop éprouvés, ahuri
et
charmé de découvrir qu’ils jouent, pour une fois, sans tricher. Mais
1190
ité réelle, c’est-à-dire plus de radicale dureté.
Et
renoncer à la charmer, ou à se laisser charmer — ceci pour moi lecteu
1191
ais, le 16 octobre 1936. C’est donc un manifeste,
et
un texte officiel. Il convient d’en parler avec sérieux. Tout d’abord
1192
bord quelques citations : L’homme ne peut penser
et
créer que s’il est libre. — Nous avons toujours admis la légitimité d
1193
re — ce qu’il y a d’humain dans l’attendrissement
et
dans le besoin de bonté de la charité. — Tout le problème est là : me
1194
irituelle absolue, par suite rejet du capitalisme
et
du fascisme ; liberté nécessaire de la culture ; enfin, subordination
1195
lante, compréhensive, rayonnante, toute de mesure
et
de goût. — Nous sommes attachés à cette sélection de grâce et de mesu
1196
— Nous sommes attachés à cette sélection de grâce
et
de mesure qui s’appelle la politesse française. Ensuite parce que le
1197
résoudre les problèmes de la paix, de la liberté
et
du pain des hommes. » Autant dire qu’il ne fait plus confiance à Marx
1198
attaques marxistes contre les positions d’Esprit
et
de l’ON depuis quatre ans, n’avaient pas même l’excuse de la sincérit
1199
me : étatisme, dictature, déterminisme économique
et
pas un mot de l’oppression stalinienne. Et pas un mot de la « dialect
1200
omique et pas un mot de l’oppression stalinienne.
Et
pas un mot de la « dialectique ». Et puis, qu’est-ce que l’Esprit qu’
1201
stalinienne. Et pas un mot de la « dialectique ».
Et
puis, qu’est-ce que l’Esprit qu’il veut servir ? La majuscule ne suff
1202
de mal au parti stalinien que les livres de Gide
et
de Céline. P.-S. — On a corrigé par un erratum manuscrit la faute d
1203
nt des souvenirs d’enfance, fort bien réinventés,
et
contés dans un style un peu chantant, voilé, énigmatique par endroits
1204
aisse d’idées, carte des vins commentée, bonhomie
et
rosseries négligentes, vagabondages, passages, glissements, liaisons,
1205
venait, où il allait), ce bergsonien pittoresque
et
succulent, devisant à la terrasse des Deux Magots, n’a pas eu le temp
1206
Nietzsche. Nous disons « existence » (dure, naïve
et
banale) quand il parle d’élan vital. (Heidegger succède à Bergson.) N
1207
fournir un « rapprochement », une « référence »,
et
ne sont qualifiés, en passant, que par rapport au snobisme furtif d’u
1208
eux de lire enfin un manuel où Rimbaud, Sénancour
et
Stendhal trouvent leur place. Mais que dire de l’absence de Proudhon,
1209
e de Proudhon, grand écrivain français pourtant ;
et
de celle de Georges Sorel ? Et même de celle de Nietzsche, sans qui G
1210
rançais pourtant ; et de celle de Georges Sorel ?
Et
même de celle de Nietzsche, sans qui Gide et tant d’autres nous demeu
1211
el ? Et même de celle de Nietzsche, sans qui Gide
et
tant d’autres nous demeurent inexplicables ? Ceci dit, l’on pourra d
1212
sujet. Son chapitre sur Balzac a de la grandeur,
et
touche même au délire poétique : reportez-vous à la phrase de 16 lign
1213
la phrase de 16 lignes qui termine la page 229 !
Et
personne n’a jamais manié la métaphore continuée avec une fantaisie (
1214
esquels montent, l’un pinçant l’autre, le calicot
et
la grisette, vers un génie prétentieux qui est lui-même sujet de chan
1215
rtier d’histoire populaire, celui de Juillet 1789
et
de Juillet 1830. » De tels passages — et ils foisonnent — donnent la
1216
let 1789 et de Juillet 1830. » De tels passages —
et
ils foisonnent — donnent la mesure de l’écrivain et de l’artiste, du
1217
ils foisonnent — donnent la mesure de l’écrivain
et
de l’artiste, du conteur, du fabulateur d’idées que reste pour nous T
1218
r. Du point de vue de la tactique révolutionnaire
et
contre-révolutionnaire, je ne connais pas d’ouvrage plus riche et plu
1219
tionnaire, je ne connais pas d’ouvrage plus riche
et
plus précis, sinon les mémoires de Trotski. Deux personnages retiendr
1220
rps francs qui réduisirent les révoltes ouvrières
et
séparatistes, — et Noske, commissaire du peuple devenu ministre de la
1221
isirent les révoltes ouvrières et séparatistes, —
et
Noske, commissaire du peuple devenu ministre de la Guerre, figure cla
1222
l’homme à poigne » touché par la grâce nationale,
et
qui se charge d’écraser la révolution avec une brutalité qu’aucun bou
1223
enne, qui marque un léger retrait dans les revues
et
la librairie — en attendant la publication en volume des importantes
1224
lles précèdent toujours des événements politiques
et
sociaux plus profonds que le jeu apparent et confus des partis ou des
1225
ques et sociaux plus profonds que le jeu apparent
et
confus des partis ou des classes. Si Kierkegaard a été découvert, dan
1226
ur interaction, cependant que leur cause générale
et
commune n’apparaîtra sans doute qu’à nos après-venants. Ce qui semble
1227
ité de l’intelligence étant, à l’époque présente,
et
en France, beaucoup plus vive et juste que celle des masses ou des po
1228
époque présente, et en France, beaucoup plus vive
et
juste que celle des masses ou des politiciens. (Je ne dis pas qu’elle
1229
e, raillé le nationalisme, dénoncé le socialisme,
et
déclaré que l’État est le plus froid des monstres froids. À part cela
1230
n exaltation de la volonté humaine, de l’athéisme
et
de la force, qui sont devenus les valeurs fondamentales du stalinisme
1231
digne de ce nom. « La seule société pleine de vie
et
de force, écrit G. Bataille, la seule société libre est la société bi
1232
ce point, qui est central, l’accord de Nietzsche
et
de ses disciples avec le personnalisme paraît beaucoup plus facile à
1233
te autre doctrine politique66. Mais pour Bataille
et
ses amis, l’« acéphalité » est aussi une doctrine métaphysique antich
1234
nettement des tendances nietzschéennes d’Acéphale
et
de certains membres du groupe d’Inquisitions, comme R. Caillois, c’es
1235
ue, mais « sévissant à travers la terre entière »
et
« portant la vie au comble de la volonté de puissance et de l’ironie
1236
rtant la vie au comble de la volonté de puissance
et
de l’ironie ». Il me paraît que c’est bien à quoi devait aboutir le v
1237
que c’est bien à quoi devait aboutir le véritable
et
intégral nietzschéisme dans le plan politico-social. Historiquement,
1238
masochique volupté les « hommes de quarante ans »
et
certains jeunes qui ne les valent pas. Je ne pressens rien de créateu
1239
études de revues sur Nietzsche : le Zarathoustra
et
la Volonté de Puissance 67. Beaucoup mieux traduites que les œuvres p
1240
8, ces trois volumes donnent une image définitive
et
nouvelle de la pensée nietzschéenne. Ils permettent en particulier de
1241
lace centrale la conception du « retour éternel »
et
de la volonté d’éternisation, qui est le véritable message « religieu
1242
ble message « religieux » de Nietzsche. Les notes
et
aphorismes traduits pour la première fois à la suite du Zarathoustra
1243
leur fait d’être pauvres en amour du prochain » ;
et
: « Toute création est communication. Celui qui connaît, celui qui cr
1244
onté humaine, qui doit vouloir son destin éternel
et
nécessaire… Enfin, dernier événement nietzschéen : L’Introduction à l
1245
unauté unitaire que la personne emprunte sa forme
et
son être. » Les trois derniers mots définissent exactement le pseudo-
1246
À A… (Gard), 15 janvier Matinées d’hiver au midi
Et
voici par la grâce du soleil de janvier qu’un mot devient le plus bea
1247
a dit par les trois syllabes de ce mot qui décrit
et
embrasse les trois dimensions de la joie, est dit aussi par le vallon
1248
la joie, est dit aussi par le vallon des oliviers
et
par sa jeune nudité. Pas une vapeur ne s’élève de l’herbe pauvre des
1249
rbe pauvre des terrasses, ni de ces arbres moirés
et
allègres. Tout est vu du premier regard, doucement compris, approuvé.
1250
ne proximité des choses vues, un langage innocent
et
raisonnable ; voilà le monde à son contentement ; à la mesure de l’am
1251
vant une piste par jeu. Le ciel est d’un bleu sec
et
pur, tranché au sommet du vallon par un cyprès grandiloquent. Et cett
1252
au sommet du vallon par un cyprès grandiloquent.
Et
cette maison couleur de terre et festonnée de tuiles roses, elle est
1253
s grandiloquent. Et cette maison couleur de terre
et
festonnée de tuiles roses, elle est bien à la ressemblance des vieill
1254
blance des vieilles paysannes de par ici, recuite
et
mordue par le temps, sobre et gaie, pauvre et spirituelle… 28 janvier
1255
de par ici, recuite et mordue par le temps, sobre
et
gaie, pauvre et spirituelle… 28 janvier Avoir la veine « J’avais pris
1256
ite et mordue par le temps, sobre et gaie, pauvre
et
spirituelle… 28 janvier Avoir la veine « J’avais pris un billet de la
1257
parce que la gauche, c’est le parti de la Raison
et
du Progrès, qui naît de la Science. C’est ce mari-là qui aura payé le
1258
ondamentales de notre science la plus élémentaire
et
la plus sûre, l’arithmétique. Mais qui s’avise d’une telle contradict
1259
e concevoir la vérité simultanée de notre science
et
de la « veine » individuelle. C’est l’un ou l’autre ; ou mieux, l’un
1260
la veine. Mais notre jacobin ne croit à la Raison
et
à la Science mère du Progrès, que dans la mesure où cela lui permet d
1261
. Ciel gris mouvant, une barre jaune à l’horizon.
Et
sur le petit toit au-dessous de moi, tout près, soudain je vois un pi
1262
appelle, il donne quelques coups de tête furtifs,
et
se détourne. D’où vient-il ? On m’a dit qu’il n’y a pas de pigeons pa
1263
me voir ? Il se tient là des heures, sans bouger,
et
s’envole d’un coup vers le soir. Le lendemain, il est là de nouveau,
1264
tre, au-dessus du poulailler, elle a vu le pigeon
et
m’a appelé. — Il a vraiment l’air de vouloir dire quelque chose ! Il
1265
iver quelque chose par là ? Du côté de Marseille…
Et
soudain je me suis souvenu de la conférence que je dois donner à Mars
1266
demment absurde, cette histoire. Je le vois bien.
Et
en même temps, je vois que je mentirais si j’écrivais que je n’y croi
1267
ns quotidiennes est faite de croyances spontanées
et
absolues en des « raisons » qui n’en sont pas, mais qui m’ont toujour
1268
s qui m’ont toujours convaincu beaucoup plus vite
et
beaucoup mieux que les autres. Tout ce que j’ai fait à cause d’un chi
1269
coïncidence d’un sentiment ou d’un pressentiment
et
d’un hasard tout extérieur, à cause d’un certain jeu que je poursuis,
1270
porte à la défense de mes intérêts « objectifs »…
Et
ce jeu-là, je suis tellement le seul à en connaître les règles et les
1271
suis tellement le seul à en connaître les règles
et
les interdictions que je n’imagine pas pouvoir jamais m’en « rendre c
1272
mais m’en « rendre compte » en langage ordinaire,
et
surtout en français. On admet facilement que les Césars jettent les d
1273
ns profonds qui m’unissent à ce peuple de paysans
et
d’ouvriers, si délibérément superstitieux dans leur conduite et dans
1274
si délibérément superstitieux dans leur conduite
et
dans leurs opinions. On dit bien : l’exception confirme la règle. Oui
1275
n, un type spécial, différent de tous les autres…
Et
ce n’est guère qu’à l’instant où l’on découvre que tous les autres en
1276
ne prendre qu’un seul exemple : que de tourments
et
de secrets désespoirs chez les adolescents troublés par le désir, s’a
1277
ent que leur état jugé par eux « exceptionnel » —
et
dont la honte alors les opprimait — est justement l’état de l’homme v
1278
— est justement l’état de l’homme vraiment homme,
et
le signe d’une accession à la condition générale ! Avouer ses superst
1279
en un éclair, que chaque homme est irréductible,
et
que chaque homme a ses aveux à faire. Et l’on comprend ainsi, soudain
1280
uctible, et que chaque homme a ses aveux à faire.
Et
l’on comprend ainsi, soudain, que l’on est un homme « comme les autre
1281
aint d’ordinaire d’avouer sa réalité individuelle
et
ses superstitions, c’est sans doute en vertu d’une prudence qui est l
1282
qui est le fondement même de toute « politique ».
Et
si j’avoue et légitime la réalité de mes superstitions, il faut tout
1283
dement même de toute « politique ». Et si j’avoue
et
légitime la réalité de mes superstitions, il faut tout de suite que j
1284
e pourrait pas. Ma loi vaut tout juste pour moi. (
Et
s’il fallait tenir compte de toutes les bizarreries auxquelles les ho
1285
it aller à l’encontre de la réalité individuelle,
et
c’est pour elle la seule manière d’être en vérité « réaliste ». Je cr
1286
personne. Elle doit tenir compte de la personne,
et
finalement favoriser son développement, mais d’une manière négative,
1287
st à ce prix qu’elle assurera quelque équilibre —
et
c’est tout ce que je lui demande. Mais ici prenons garde à deux faits
1288
à deux faits, aussi importants l’un que l’autre,
et
qui donnent leur vrai sens aux remarques que je viens de formuler. Pr
1289
e quelque chose de mouvant. Tout équilibre stable
et
sclérosé produirait immédiatement des désordres sans nombre. Une tell
1290
ires qu’il s’agissait de maîtriser — le singulier
et
le général — ont perdu l’une et l’autre leur dynamisme propre. Si l’É
1291
er — le singulier et le général — ont perdu l’une
et
l’autre leur dynamisme propre. Si l’État ne freinait plus, si la pers
1292
ne serait en fait que la limite du pire désordre,
et
c’est la mort. Cas purement idéal bien entendu puisque l’histoire ne
1293
endre, c’est l’anarchie qui renonce à ses droits.
Et
si le cadre de l’État paraît demeurer identique, la démoralisation gr
1294
institutions n’ont guère changé depuis un siècle,
et
c’est pourquoi l’on s’imagine que l’équilibre s’est stabilisé. Au vra
1295
il cesse de se croire des droits « irrationnels »
et
immédiats contre l’État. Le sens de la révolte se perd. Il se sublime
1296
u le plus libre des superstitions que j’ai dites,
et
dont l’éducation se fait très lentement sous l’influence des résistan
1297
venons à la superstition du peuple. Je l’approuve
et
je la partage en fait le plus souvent, quand elle exprime une réalité
1298
pour néfaste quand elle sort du domaine personnel
et
déborde dans la politique. On devine peut-être pourquoi. C’est qu’ell
1299
on, elle se met à jouer au profit de la politique
et
des doctrines d’État qui doivent justement la combattre, le désordre
1300
nt justement la combattre, le désordre s’installe
et
grandit. Dans notre cas, l’État devient totalitaire. « Là où l’homme
1301
e mentionner les causes profondes, cessent d’agir
et
de faire effort contre les lois qui les limitaient normalement. L’hom
1302
les — se met à croire de la même manière aux lois
et
aux pouvoirs qu’il aurait dû combattre. (Volonté et pouvoir des masse
1303
aux pouvoirs qu’il aurait dû combattre. (Volonté
et
pouvoir des masses, fatalités économiques, évolution de l’Histoire, m
1304
ues, évolution de l’Histoire, mythes de la gauche
et
de la droite, divinité du Führer, omniscience du Duce, etc.) Toutes c
1305
nnent l’objet anormal de ses croyances spontanées
et
immédiates. D’où l’empire monstrueux qu’elles prennent sur les esprit
1306
ire monstrueux qu’elles prennent sur les esprits,
et
la réalité de cauchemar qu’elles affectent, — dont les affecte notre
1307
es affectent, — dont les affecte notre démission.
Et
c’est ainsi d’un refoulement, puis d’un transfert fatal de nos supers
1308
ables que naissent par exemple la menace fasciste
et
l’enthousiasme communiste. La plupart des fameuses « lois » économiqu
1309
it : « Voilà ce que je ferai parce qu’il le faut.
Et
que voulez-vous qu’ils y fassent ? » 6 mars (de retour à A…) Contact
1310
paysans, cercles d’hommes, groupant des ouvriers
et
des bourgeois… J’ai parlé en plein air, dans de grandes salles publiq
1311
ui vaut bien les ennuis du voyage, le temps perdu
et
les fatigues, bien qu’elles paraissent souvent vaines, que la joie de
1312
voir son public, de s’entretenir avec ces hommes
et
ces femmes pour qui l’on écrivait sans le savoir. Découverte des dive
1313
tendus ou épanouis dans une compréhension amicale
et
directe. Je vois cette abstraction : le Public, s’évanouir et renaîtr
1314
Je vois cette abstraction : le Public, s’évanouir
et
renaître, incarnée à chaque fois dans une seule figure précise, qui p
1315
découvre que le public, c’est une série d’hommes
et
de femmes isolés, qui ont chacun leurs raisons très concrètes et sing
1316
olés, qui ont chacun leurs raisons très concrètes
et
singulières de lire ce qu’un autre a écrit, d’écouter ce qu’un autre
1317
des questions, celui qui vous attend à la sortie,
et
ne sait trop comment vous aborder, celui qui vous entraîne dans sa ch
1318
jours une raison unique, qui ne vaut qu’entre lui
et
moi, et qui ne prend son vrai sens que dans cette rencontre effective
1319
e raison unique, qui ne vaut qu’entre lui et moi,
et
qui ne prend son vrai sens que dans cette rencontre effective. Ce son
1320
e moralement à la portée de ces esprits, visibles
et
lisibles sur ces visages. Presque nécessairement l’entretien institué
1321
eur, dont il connaissait peut-être déjà la pensée
et
qu’il vient de voir de près une heure durant. Il a pu corriger ses pr
1322
une heure durant. Il a pu corriger ses préjugés.
Et
la première rencontre, sous l’auvent du local que l’on quitte, est en
1323
le contact s’établit normalement, sans surprises
et
sans illusion. Ce n’est plus une pensée lointaine qui anime un rêve,
1324
ncontre un autre homme dans sa situation concrète
et
ses habits de tous les jours, sa maladresse et son étrangeté. Alors s
1325
te et ses habits de tous les jours, sa maladresse
et
son étrangeté. Alors seulement quelque chose peut se passer en vérité
1326
ain dans la plupart de nos habiletés littéraires,
et
au contraire ce qu’il y a d’humain dans certaines imprudences naïves
1327
nos précautions oratoires, logiques ou mondaines,
et
ce qu’il y a au contraire d’efficace dans l’affirmation pure et simpl
1328
a au contraire d’efficace dans l’affirmation pure
et
simple de thèses qui paraîtraient très difficiles au jugement du cler
1329
critiques. Il va tout droit à ce qui le concerne,
et
c’était justement, parfois, cette idée qu’on avait timidement glissée
1330
ve concret ce que le critique aura jugé paradoxal
et
gratuit, il néglige au contraire certaines qualités mineures et curie
1331
néglige au contraire certaines qualités mineures
et
curieuses ou certains ornements de la pensée que le critique, blasé p
1332
le critique, blasé par des lectures trop rapides,
et
plus sensible aux tics qu’à la pensée fondamentale, n’aura pas manqué
1333
ivain, de retrouver une commune mesure de langage
et
de sensibilité avec des hommes de toutes les classes et de tous les m
1334
sensibilité avec des hommes de toutes les classes
et
de tous les métiers. Certes, ce n’est jamais qu’avec des êtres singul
1335
uver, c’est le contact avec l’homme qui réfléchit
et
qui fait la critique des idées non point à l’aide des opinions de son
1336
peut faire sentir à l’écrivain ce qui est solide
et
ce qui est artificiel dans ce qu’il écrit. Et cette critique directe,
1337
ide et ce qui est artificiel dans ce qu’il écrit.
Et
cette critique directe, informulée, parfois dramatique, c’est bien la
1338
ée dans nos villes, au milieu des feuilletonistes
et
des snobs, nous en sommes arrivés à parler dans le vide, à ne parler
1339
ommes normaux chargés d’une vocation d’expression
et
de réflexion. Nous sommes des hommes spéciaux exploitant leur spécial
1340
être classés dans la catégorie des femmes à barbe
et
des veaux à deux têtes qu’on montre aux foires. On dit que nous avons
1341
l’approche de la joie, elle se sent gênée, pauvre
et
maladroite, pareille à cette clarté lunaire incapable d’exalter ce qu
1342
inée du lundi de Pâques, 7 heures Tout est trempé
et
ruisselant de lumière bleue, les feuillages encore translucides au-de
1343
gèreté originelles. Les oliviers sont plus soyeux
et
plus moirés sur le vert plus violent des terrasses, la colline plus r
1344
ent des terrasses, la colline plus riche d’ombres
et
de lueurs doucement étagées. Et les lointains de plaine évoquent l’in
1345
us riche d’ombres et de lueurs doucement étagées.
Et
les lointains de plaine évoquent l’instant de la séparation des eaux
1346
aine évoquent l’instant de la séparation des eaux
et
de la terre, dans un chaos brillant d’où montent des vapeurs d’aube d
1347
Hier il pleuvait. Vendredi, c’était grand soleil.
Et
les bonnes femmes disaient, au seuil du temple : « Voyez-vous ça, com
1348
tres années, il pleut toujours le Vendredi saint,
et
il fait beau le jour de Pâques. » Je leur réponds : « Que voulez-vous
1349
s qu’il fait, occupation fondamentale des paysans
et
des bourgeois, c’est une manière de s’exprimer qui en dit plus long q
1350
us long qu’on ne croirait. « J’ai mes brouillards
et
mon beau temps au-dedans de moi », note Pascal. En sorte que s’étonne
1351
mes conventions, etc. prévoyaient autre chose. »
Et
l’on décrit les croyances de son groupe en « parlant de la pluie et d
1352
croyances de son groupe en « parlant de la pluie
et
du beau temps ». (Je dis bien groupe, car il y a peu de « personnes »
1353
entir le vallon de leurs déchirements wagnériens.
Et
voilà que cela prend les chiens. Toute la nuit, ils se sont battus da
1354
remise qui est juste au-dessous de notre chambre,
et
dans la cour, et sur toutes les terrasses. Avec des cris et des râles
1355
ste au-dessous de notre chambre, et dans la cour,
et
sur toutes les terrasses. Avec des cris et des râles presque humains.
1356
cour, et sur toutes les terrasses. Avec des cris
et
des râles presque humains. Ce matin, j’ai trouvé des traces de sang s
1357
scaliers, redescendaient, parcouraient la prairie
et
les cultures à longues foulées, le nez au sol. Soudain, l’un relevait
1358
s, le nez au sol. Soudain, l’un relevait la tête,
et
s’en allait. Un nouveau faisait son apparition au haut de la colline.
1359
sait son apparition au haut de la colline. Simard
et
moi leur avons lancé quelques pierres, pour voir. Ils s’éloignaient u
1360
oignaient un peu, en se retournant à chaque saut,
et
puis cela revenait bientôt de tous côtés. Haletants, craintifs et obs
1361
enait bientôt de tous côtés. Haletants, craintifs
et
obstinés. Après le déjeuner, flânant au jardin, je me penche par hasa
1362
, je me penche par hasard au bord de la terrasse,
et
voilà que je découvre au-dessous de moi un spectacle étrange et presq
1363
e découvre au-dessous de moi un spectacle étrange
et
presque « atterrant ». La petite chienne est couchée, sur le flanc, h
1364
és au soleil. J’en compte huit, de toutes tailles
et
pelages. La plupart sont beaucoup plus grands que leur Marquise, mais
1365
sont mis. Un vieux mâle coasse des notes basses,
et
le chœur lui répond deux octaves au-dessus. Toujours ces luttes dans
1366
e de l’espèce, tourmente les bêtes, les essouffle
et
les esquinte, les rend craintives et méchantes, lourdes, baveuses et
1367
es essouffle et les esquinte, les rend craintives
et
méchantes, lourdes, baveuses et difformes. Il faut voir les yeux pito
1368
s rend craintives et méchantes, lourdes, baveuses
et
difformes. Il faut voir les yeux pitoyables de ces grands chiens qui
1369
ntière gémit dans les angoisses de l’enfantement.
Et
ce n’est pas elle seulement, mais nous aussi, qui avons les prémices
1370
emander à la Nature la révélation d’une vie saine
et
délivrée de toute contrainte mauvaise, c’est trahir cette « attente a
1371
nte ardente », cette question angoissée des bêtes
et
des plantes que l’apôtre a su percevoir. C’est la nature qui cherche
1372
demander : les prémices d’une nouvelle création,
et
la « révélation des enfants de lumière » ! 21 avril Voici les affiche
1373
eu de choses près, sur les affiches du « centre »
et
sur celles de la gauche. (Car la droite n’ose pas dire son nom dans c
1374
; ouverture d’un chalet de nécessité pour hommes
et
dames sur la place principale. Si c’est cela, l’antifascisme, les fas
1375
tes doivent être de drôles de gens. 6 mai La mort
et
les cérémonies dans le Gard La maison de Simard recèle un effrayant s
1376
stence en même temps que l’imminence de sa mort —
et
voici qui éveillera peut-être des réflexions fécondes dans l’esprit d
1377
r philosophe. Déjà huit mois que nous sommes ici,
et
combien de fois ne sommes-nous pas entrés dans la grande cuisine qui
1378
étaient vides ou ne servaient que de débarras —,
et
rien ne pouvait nous faire soupçonner cette présence, à côté. Hier ma
1379
avez, elle est toute chargée, bou die ! l’estomac
et
tout. — Mais les Simard ne m’avaient jamais parlé d’elle ! — Peuchère
1380
en longtemps. On peut dire que la chose est sûre.
Et
on l’entend ! Trois fois par jour, le bruit d’effroyables discussions
1381
la cuisine des Simard. Un beau-frère est arrivé,
et
on partage. C’est toujours assez compliqué. La nuit, par un dernier r
1382
ns la remise qui est au-dessous de notre chambre,
et
leurs éclats de voix nous ont plusieurs fois réveillés. 7 mai — Alors
1383
sa canne à la main, comme ça, sur la couverture,
et
elle explique que c’est pour monter « là-haut », pour s’aider ! 8 mai
1384
tre. Qu’est-ce que c’est, Simard ? — Il est rouge
et
boursouflé, tremblant de colère et gesticulant. Il crie : « Je l’ai d
1385
— Il est rouge et boursouflé, tremblant de colère
et
gesticulant. Il crie : « Je l’ai dit à madame Calixte, je ne veux pas
1386
le a pleuré, gémi d’une toute petite voix fausse,
et
m’a beaucoup remercié. Bref, il m’a semblé que tout s’était bien pass
1387
dans la maison ? II faut bien continuer à vivre,
et
à manger, et à laver, il me semble ? — Je ne pense pas comme vous, Mo
1388
on ? II faut bien continuer à vivre, et à manger,
et
à laver, il me semble ? — Je ne pense pas comme vous, Monsieur, mais
1389
ient pas à concevoir qu’on puisse même s’étonner.
Et
ne pas croire, surtout, qu’il s’agit là de « préjugés », comme disent
1390
stions d’argent. C’est un fait d’ordre religieux.
Et
la colère de Simard en témoigne. 15 mai Comme l’année dernière, à la
1391
normal — mettons deux à trois heures de marche —
et
vraiment il n’y a guère à signaler. Sinon peut-être les maisons vides
1392
jardin, avec quelques cyprès, une pierre tombale,
et
la margelle d’un puits. La plupart des vitres sont cassées. Une poule
1393
vait servir de communs, de magnanerie, de cellier
et
de grange. Au sud, une tour à cadran solaire, surmontée d’une girouet
1394
vragée, on voit une profusion de fleurs violentes
et
d’orties. L’ensemble est imposant et comme démesuré dans ce paysage d
1395
rs violentes et d’orties. L’ensemble est imposant
et
comme démesuré dans ce paysage de vallons, de collines et de petits s
1396
démesuré dans ce paysage de vallons, de collines
et
de petits sommets rocheux. Soudain la girouette fait entendre un long
1397
maréchaussée ni gabelle. Nous aurions des fusils
et
des bibles, nous serions camisés de rouge, et l’on irait de temps à a
1398
ils et des bibles, nous serions camisés de rouge,
et
l’on irait de temps à autre arraisonner les féodaux d’industrie du pa
1399
e croient qu’à un seul Dieu, s’écriait l’orateur,
et
ils adorent la Trinité ! Ils disent que le Père, le Fils et le Saint-
1400
rent la Trinité ! Ils disent que le Père, le Fils
et
le Saint-Esprit ne font qu’un. Vous voyez que l’Église est réfutée pa
1401
un, plus un, cela fait trois, si je ne me trompe,
et
non pas un », — Prenez la multiplication ! cria l’abbé V. qui était d
1402
« Ce serait si bien si l’on pouvait, chaque soir
et
chaque matin, écrire dans les journaux qui s’impriment quelques heure
1403
longueur. Je crois bien que cela me suffirait. »
Et
quelques pages plus loin : « Écrire ne m’intéresse que si j’ai le sen
1404
’ai le sentiment que ce que j’écris, par la forme
et
par le fond, serait de nature à modifier la conscience humaine, si ce
1405
affreuse vie, où l’on condamne avec indifférence,
et
où tout le monde en fait est coupable de tout : du sort des filles pu
1406
hôpitaux « qui ont des chemises de prisonniers »
et
« n’ont plus guère que le nom de leur mal » et même « du polémiste pr
1407
» et « n’ont plus guère que le nom de leur mal »
et
même « du polémiste prenant son chien à témoin de la lâcheté des homm
1408
st pas un refuge ; elle est un acte d’accusation,
et
un aveu de chaque homme pour tous les autres : « Je suis plus près de
1409
lecteur pour tous les êtres auxquels il est mêlé.
Et
qu’il l’obtienne à cette profondeur, donne la mesure d’un art qui ne
1410
publications que ne marque une invention heureuse
et
une audace très raisonnable. Ils restaurent depuis quelques années le
1411
s, sur la poésie surréaliste, résume tout le vrai
et
tout le faux de ce mouvement. Thème, repris de Lautréamont : « La poé
1412
peut-être, pour celui qui voit, le malheur défait
et
refait sans cesse un monde banal, vulgaire, insupportable, impossible
1413
t donc qu’elle veut instaurer un ordre plus grand
et
pur. « Toutes les tours d’ivoire seront démolies, toutes les paroles
1414
eront démolies, toutes les paroles seront sacrées
et
l’homme, s’étant enfin accordé à la réalité qui est sienne, n’aura pl
1415
s par la grandeur de l’espérance qu’elle proclame
et
par la confusion de sa proclamation. Que « toutes les paroles soient
1416
té proprement eschatologique des poètes chrétiens
et
des romantiques allemands, c’est la volonté de réintégration générale
1417
générale de la création dans son état d’innocence
et
de grâce, et il n’y aurait pas de poésie — ni de prière — s’il n’y av
1418
a création dans son état d’innocence et de grâce,
et
il n’y aurait pas de poésie — ni de prière — s’il n’y avait pas, cons
1419
ination. Qu’il formule cet espoir ou ce désespoir
et
ses rapports avec le monde changeront immédiatement. » Ou encore : «
1420
de « construire un monde à la taille de l’homme »
et
de « mettre l’homme debout », — mais il précise : « à la taille immen
1421
dées de qui ? Si ce sont celles que les bourgeois
et
les staliniens se font de ces réalités, nous combattrons ensemble. Ma
1422
s avec cela nous n’aurons pas liquidé la religion
et
la patrie, nous n’aurons liquidé que leur « ignoble » exploitation, n
1423
ous les sauverons ! (De nous-mêmes s’il le faut.)
Et
enfin : « Voici que les poètes sont des hommes parmi les hommes, voic
1424
parmi les hommes, voici qu’ils ont des frères. »
Et
voici qu’Éluard paraît délivré de l’esthétisme aristocratique des déb
1425
nt les surréalistes devrait impliquer la rigueur.
Et
une exigence d’« évidence ». ao. Rougemont Denis de, « [Compte ren
1426
e, — l’intellectualisme, — la pensée solitaire, —
et
le bonheur. Tandis que les jeunes, les malheureux, respectent la poli
1427
ité qu’au service de l’action, vénèrent la force,
et
pratiquent la religion de la lutte et de la vie dangereuse : en concl
1428
t la force, et pratiquent la religion de la lutte
et
de la vie dangereuse : en conclusion, M. Benda fit observer que les a
1429
server que les anciens étaient « intellectuels »,
et
que les jeunes se voient contraints par la logique des circonstances
1430
eureux, des intellectuels riches, c’est M. Benda,
et
personne d’autre. Et lorsqu’un autre fit observer, en mathématicien,
1431
uels riches, c’est M. Benda, et personne d’autre.
Et
lorsqu’un autre fit observer, en mathématicien, que la gratuité n’est
1432
e la gratuité n’est pas une méthode scientifique,
et
que toute pensée est un acte, M. Benda répliqua qu’il ne s’agissait p
1433
répliqua qu’il ne s’agissait pas du tout de cela,
et
que la pensée des jeunes se veut active en ce sens qu’elle vénère « c
1434
des prétentions de son auteur, purement polémique
et
politique. Ce sophisme consiste à enfermer les intellectuels dans le
1435
personnaliste, déclara notre ami, repousse l’une
et
l’autre de ces trahisons, et affirme que la pensée doit entrer dans l
1436
ami, repousse l’une et l’autre de ces trahisons,
et
affirme que la pensée doit entrer dans l’action, non pas « à son serv
1437
ait en pleine confusion. Les anciens se vantaient
et
accablaient les jeunes. Ceux-ci refusaient de se reconnaître dans le
1438
penseur, mais M. Dekobra est notre maître à tous.
Et
s’il est vrai que celui qui refuse d’endosser les conséquences de sa
1439
e qui a pris pour idéal de « constater » purement
et
simplement ce qui est. Au surplus, M. Benda se trompe quand il croit
1440
qu’anachronique. Partisan qui survit à sa cause ;
et
pensée qui refuse de payer. ap. Rougemont Denis de, « M. Benda nou
1441
us générale, la question de la littérature en soi
et
de la place qu’il conviendrait de lui donner dans la cité, se trouve
1442
cité, se trouve être posée à l’époque. Dans l’un
et
l’autre cas, et pour les mêmes raisons, les réponses varient du tout
1443
être posée à l’époque. Dans l’un et l’autre cas,
et
pour les mêmes raisons, les réponses varient du tout au nul. C’est di
1444
refaire un ordre humain qui soit assez organique
et
complet pour pouvoir s’opposer valablement aux ambitions totalitaires
1445
é par certaines formes, par certains partis pris,
et
par un certain ordre d’objets qu’elle se choisit, est aussi le produi
1446
r nous inséparable de la création, de l’avènement
et
de la durée d’un ordre social personnaliste. Elle se fait en faisant,
1447
hercher qui a commencé, de l’œuf ou de la poule ;
et
qui doit commencer, de la littérature ou de l’ordre social. Notre eff
1448
ité, que sur la réalisation concomitante de l’une
et
de l’autre, de l’une par l’autre. Ce n’est donc pas à une enquête que
1449
s livrer cette année, mais à une réflexion active
et
créatrice sur les conditions actuelles — et actuantes si j’ose dire —
1450
ctive et créatrice sur les conditions actuelles —
et
actuantes si j’ose dire — de l’œuvre littéraire dans la communauté. I
1451
uvre littéraire dans la communauté. Il n’y a pas,
et
il ne peut y avoir encore une école littéraire personnaliste. Pas plu
1452
le littéraire personnaliste. Pas plus qu’il n’y a
et
qu’il ne peut y avoir encore une orthodoxie de la personne, une socié
1453
encore une orthodoxie de la personne, une société
et
une économie qui la soutiennent, et qu’elle maintienne. (La question
1454
, une société et une économie qui la soutiennent,
et
qu’elle maintienne. (La question se posera un jour aussi lointain peu
1455
mbrigadés mais qui savent que toute œuvre engage,
et
qui acceptent cette nécessité comme une des conditions de leur créati
1456
essité comme une des conditions de leur création.
Et
nous pensons qu’il n’est pas vain de le prouver en les réunissant ici
1457
e l’art ; une considération constante des tenants
et
aboutissants de l’œuvre d’art (sources métaphysiques, corrélations sc
1458
sources métaphysiques, corrélations scientifiques
et
psychologiques, influence morale et sociale…), bref : une gravité (un
1459
scientifiques et psychologiques, influence morale
et
sociale…), bref : une gravité (un poids) qui suffit presque à disting
1460
alisme. Littérature présente au monde dans lequel
et
contre lequel elle s’édifie. Je ne pense pas qu’il soit souhaitable d
1461
de la littérature ou ses méthodes. Mises au point
et
illustrations, — ou « signes » simplement, mais qui prendront du fait
1462
ous ne pensons pas que cette limitation normale —
et
normative — doive se traduire par un appauvrissement de notre curiosi
1463
e » — c’est-à-dire sans but, privée de « sens » —
et
n’y réussit que trop bien. Mais cela nous donne justement de la place
1464
spéciaux » que tout le monde passe sous silence,
et
qui se trouvent des plus aptes à illustrer ou élargir notre vision pe
1465
cadémies de son siècle eussent rejeté avec mépris
et
pitié. Mais la gloire posthume est un « titre » ; « l’intérêt » s’acc
1466
valeur intrinsèque de la thèse que défend M. Lamm
et
qui me paraît très convaincante, mais on se demande souvent pourquoi
1467
mais on se demande souvent pourquoi il la défend,
et
pourquoi il s’occupe d’un personnage qui ne semble exciter ni sa répr
1468
er qu’on le connaisse aux spéculations mystiques,
et
aux problèmes théologiques qui s’y rattachent étroitement, c’est cett
1469
angeté même de l’objet qui semble l’avoir retenu,
et
elle lui pose des questions personnelles qu’il formule admirablement
1470
mirable pour résoudre l’antinomie du rationalisme
et
du néo-platonisme sous l’égide de la foi chrétienne. Entreprise en to
1471
te M. Lamm, selon la pure tradition universitaire
et
bourgeoise, me paraît doublement onéreuse pour la vérité, voire pour
1472
surtout lorsqu’il s’agit d’un phénomène spirituel
et
culturel de première importance. Ensuite, cette impartialité ne saura
1473
edenborg, son expression le trahit à chaque page,
et
révèle un parti pris assez brutal de réduction du mystique à l’illuso
1474
xemple, il relate une des premières extases de S.
et
conclut ainsi : « Il est de toute évidence que cet incident ne fut au
1475
e à l’époque de M. Lamm serait plus « objective »
et
« scientifique » que la doctrine de Swedenborg, qu’elle prétend criti
1476
ve »… 2. Les auteurs qui s’occupent des mystiques
et
, en général, d’objets religieux qui leur paraissent inquiétants pour
1477
l’ouvrage paraît. Ainsi M. Lamm, suivant W. James
et
les psychologues d’avant-guerre — son livre est de 1915 — déclare que
1478
inatoire » des plus fréquents chez les mystiques,
et
qui « expliqueraient » physiologiquement le chemin de Damas et beauco
1479
iqueraient » physiologiquement le chemin de Damas
et
beaucoup de « conversions religieuses de notre époque ». Or il se tro
1480
ement différente de ces « visions intérieures » ;
et
cette interprétation rejoint très exactement celle que Swedenborg en
1481
u Suédois, devait apparaître purement fantaisiste
et
périmée à un savant de l’avant-guerre. Swedenborg affirme que l’origi
1482
xact. Les spéculations de Swedenborg sur le temps
et
l’espace « vécu » par les anges relevaient également de la fantaisie
1483
nt justiciable de « la science » d’aucune époque,
et
qu’il se pose au seul jugement métaphysique et théologique de chaque
1484
e, et qu’il se pose au seul jugement métaphysique
et
théologique de chaque génération. 3. Ceci dit, il me paraît utile de
1485
oblème, très brièvement, en termes de philosophie
et
d’éthique personnalistes. On a souvent opposé à notre attitude, et à
1486
onnalistes. On a souvent opposé à notre attitude,
et
à notre conception de la personne, l’idéal de « dépersonnalisation »,
1487
pression radicale de toute conscience personnelle
et
de toute responsabilité, identité, ou vocation distincte. Dans la mes
1488
distincte. Dans la mesure où cet effort est réel
et
aboutit — ce qui est encore une question — il aboutit évidemment à la
1489
re négligeable chez les jeunes écrivains français
et
belges, et s’allie parfois curieusement avec l’éthique collectiviste.
1490
ble chez les jeunes écrivains français et belges,
et
s’allie parfois curieusement avec l’éthique collectiviste. Mais l’ané
1491
le se trouve donnée à cet homme par sa naissance,
et
telle qu’il la développait pour ses fins propres, individuelles, indi
1492
us désormais de sa vie propre, c’est Dieu qui vit
et
agit en elle. » Il s’agit, au vrai, de la lutte entre le vieil homme
1493
s’agit, au vrai, de la lutte entre le vieil homme
et
le nouvel homme, entre l’individu et la vocation qu’il se reconnaît,
1494
vieil homme et le nouvel homme, entre l’individu
et
la vocation qu’il se reconnaît, je dirais volontiers : entre la perso
1495
nnalité, naturelle ou factice (ou « personnage »)
et
la personne. Et nous retrouvons alors ce qu’on pourrait nommer l’ascè
1496
le ou factice (ou « personnage ») et la personne.
Et
nous retrouvons alors ce qu’on pourrait nommer l’ascèse personnaliste
1497
aliste, la tension même qui constitue la personne
et
l’identifie, l’effort de l’homme pour transcender son petit personnag
1498
son petit personnage individuel ou sociologique,
et
se mettre au service de quelque chose qui le dépasse, mais où il trou
1499
nchise, entre croyants de confessions différentes
et
incroyants personnalistes. 71. Cf. Vers une cosmologie, Éditions F.
1500
ne puis m’étendre ici sur les aspects hétérodoxes
et
orthodoxes de son luthéranisme. Il faudrait d’abord expliquer qui éta
1501
her, si mal connu du public « cultivé » français…
Et
préciser mes propres réserves à l’endroit de la mystique. as. Rouge
1502
é, ou par une sorte de prudence, pour voir venir,
et
puis vous vous apercevez que ce sont vos réponses elles-mêmes, celles
1503
rateur, que cette manière de poser des questions,
et
de jouer le scepticisme, dans un pays où tant de choses vont de soi.
1504
lait. Qu’on m’entende bien : nous avons eu Amiel,
et
nous ne manquons pas de douteurs, de tourmentés, de refoulés et d’hés
1505
quons pas de douteurs, de tourmentés, de refoulés
et
d’hésitants fort distingués. Mais ces inquiétudes se limitent au « pl
1506
ons-nous autre chose à dire que propreté, confort
et
instruction ? Avons-nous d’autre but commun que la sécurité et le pro
1507
n ? Avons-nous d’autre but commun que la sécurité
et
le profit ? Pourquoi sommes-nous confédérés ? Et pourquoi, enfin, som
1508
et le profit ? Pourquoi sommes-nous confédérés ?
Et
pourquoi, enfin, sommes-nous neutres ? Je voudrais souligner ceci :
1509
est peut-être que notre lot, en tant que Suisses,
et
non en tant que Vaudois, ou Genevois, ou Zurichois, est d’exister en
1510
ace. (Ramuz, plus dur, parle de portier d’hôtel…)
Et
je ne dis pas que cette interprétation désobligeante soit toujours fa
1511
e soit toujours fausse dans le fait. Mais on peut
et
on doit concevoir une tout autre forme d’existence qui serait « en fo
1512
existence qui serait « en fonction des voisins »,
et
qui serait tout de même, ou par là même, une existence, au sens plein
1513
laçable, de conscience d’une mission à accomplir,
et
que nul autre n’a reçue. La Suisse existe-t-elle ? nous demande Ramuz
1514
paraît le plus fécond non seulement pour l’esprit
et
l’homme en général, mais pour ce pays-ci, tel que l’ont fait sa natur
1515
ais pour ce pays-ci, tel que l’ont fait sa nature
et
sept siècles d’histoire : le point de vue du personnalisme. ⁂ La ques
1516
tiers que la neutralité nous est due, comme l’air
et
les beautés de la nature. Privilège inconditionnel, nous laissant au
1517
toute l’Europe dans les leaders de nos journaux.
Et
cela ne contribue guère à nous donner un sens actif de nos chances et
1518
guère à nous donner un sens actif de nos chances
et
de nos destins, dans une époque où des choses plus anciennes et plus
1519
ins, dans une époque où des choses plus anciennes
et
plus grandes que notre statut se trouvent remises en discussion, boul
1520
llustrer, à incarner aux yeux de tous les grandes
et
fortes raisons de notre neutralité, celle-ci sera balayée un jour pro
1521
aurions voté des milliards de crédits d’armement,
et
des mesures d’instruction militaire prenant les enfants au berceau. C
1522
omme le nôtre, la conscience de sa raison d’être,
et
le prestige qui s’y attache. On croit souvent, surtout chez nous, qu’
1523
naturel. Or on a vu des États minuscules, Venise
et
Berne, les Pays-Bas de Guillaume d’Orange, jouer un rôle de premier p
1524
n rôle de premier plan dans l’équilibre européen.
Et
quand bien même il serait démontré que la Suisse ne peut plus prétend
1525
e dont ce droit représente à la fois la condition
et
la contrepartie. Le droit de propriété, par exemple, est à la fois la
1526
a fois la condition d’une entreprise personnelle,
et
la juste contrepartie des risques qu’on y court, du travail qu’on y d
1527
. Si le propriétaire laisse ses terres en friche,
et
s’enrichit sans rien créer, tout simplement parce qu’il possède des c
1528
émontre l’histoire récente du capitalisme anonyme
et
des révolutions qu’il a fait naître. Or c’est une crise fort analogue
1529
tut dont les commodités sont surtout matérielles,
et
les obligations surtout spirituelles, ils se persuadent petit à petit
1530
ier trop des secondes. Sous prétexte de réalisme,
et
de défense des intérêts économiques, c’est la réalité européenne de l
1531
yons, lui aussi, se transformer d’année en année.
Et
nous voyons que lui aussi dépend d’un équilibre spirituel74 totalemen
1532
d’un équilibre spirituel74 totalement bouleversé
et
réorganisé, au sein duquel il est urgent que nous trouvions une place
1533
ui régissent l’Europe d’aujourd’hui. Notre chance
et
nos risques sont là. Rien ne me paraît plus frappant que la converg
1534
es, des thèses qu’on y a soutenues. La géographie
et
l’histoire, l’agencement de nos institutions, les méfiances de C. F.
1535
de nos institutions, les méfiances de C. F. Ramuz
et
la confiance de Liehburg, tout indique et appelle dans ces pages une
1536
. Ramuz et la confiance de Liehburg, tout indique
et
appelle dans ces pages une seule et même réalité, qui est la réalité
1537
tout indique et appelle dans ces pages une seule
et
même réalité, qui est la réalité fédéraliste. Or il se trouve que not
1538
mentalement liée à une forme fédérative de l’État
et
de la culture, voire même de l’économie. Cette convergence, cette ren
1539
r une Weltanschauung où les droits du particulier
et
les devoirs envers le général se fécondent mutuellement75. Cette conc
1540
que de l’Europe à l’humanité. C’est autour d’elle
et
grâce à elle que l’Occident s’est édifié, et qu’il a dominé le monde.
1541
elle et grâce à elle que l’Occident s’est édifié,
et
qu’il a dominé le monde. Elle n’est nullement, comme certains voudrai
1542
s excès déplorables de l’individualisme bourgeois
et
du collectivisme dictatorial. Elle est la position centrale, à la foi
1543
lle est la position centrale, à la fois naturelle
et
spirituelle, dont l’individualisme et les collectivismes figurent les
1544
s naturelle et spirituelle, dont l’individualisme
et
les collectivismes figurent les déviations morbides. Et dès lors, la
1545
collectivismes figurent les déviations morbides.
Et
dès lors, la mission de la Suisse peut être définie à l’échelle de l’
1546
la gardienne de ce principe central, fédératif ;
et
elle ne peut être autre chose, de par sa nature même, physique et his
1547
être autre chose, de par sa nature même, physique
et
historique. Gardiens des cols, gardiens de la papauté, gardiens du si
1548
rdiens de la papauté, gardiens du siège de la SDN
et
de celui de la Croix-Rouge, gardiens de ce qui est européen et commun
1549
e la Croix-Rouge, gardiens de ce qui est européen
et
commun à toutes les nations ; étant eux-mêmes dans la mesure où ils s
1550
— voilà les Suisses, grands Portiers de l’Europe,
et
mainteneurs de ses communes mesures. Qu’on ne voie pas là je ne sais
1551
ous pour un ». C’est la formule la plus frappante
et
la plus juste de l’esprit fédéral de l’Occident — en même temps que d
1552
l’Occident — en même temps que du personnalisme.
Et
c’est au nom de cette mission de gardienne du principe commun que la
1553
e gardienne du principe commun que la Suisse peut
et
doit maintenant revendiquer face à l’Europe son droit à la neutralité
1554
s grandes civilisations, la germanique, la latine
et
la française. ⁂ De cette mission qui justifie en même temps notre sta
1555
n même temps notre statut européen de neutralité,
et
notre statut intérieur de confédération de cantons, découlent des con
1556
sous trois chefs principaux : opinions, culture,
et
armée. 1. — L’opinion suisse, telle que la traduisent nos journaux —
1557
on suisse, telle que la traduisent nos journaux —
et
spécialement dans les cantons romands — est en contradiction constant
1558
en contradiction constante avec notre neutralité,
et
ce qui est pire, avec la mission même qui justifie cette neutralité.
1559
ment s’exercer au nom d’une vocation bien définie
et
de portée européenne. Quand nos journaux font la leçon à Léon Blum, c
1560
’être — au nom de la démocratie réelle, communale
et
fédéraliste, mais au nom d’intérêts de classe qui ne sont ni démocrat
1561
on Blum pour des raisons symétriquement inverses,
et
par suite non moins étrangères à notre ligne fédérale. Quand nous ver
1562
a dire que la Suisse a retrouvé sa raison d’être,
et
d’être neutre. Quoi de plus comique et de plus irritant que d’admirer
1563
on d’être, et d’être neutre. Quoi de plus comique
et
de plus irritant que d’admirer les fascismes étrangers alors qu’ils s
1564
soient les réserves de fond qu’il y ait à faire,
et
je les fais, sur l’authenticité de ces missions qu’ils proclament à s
1565
on de trompe, il est clair que leur force est là,
et
qu’en les admirant, en les enviant, nous sommes précisément en train
1566
ondition : de savoir au nom de quoi nous parlons.
Et
ce ne peut être qu’au nom de l’avenir de l’Europe, puisque c’est cela
1567
e conscience très forte de la réalité fédéraliste
et
de ce qu’elle implique à la fois de diversités reconnues, totalement
1568
tés reconnues, totalement exprimées comme telles,
et
d’échanges multipliés, d’apports mutuels, de synthèse vivante. Dès qu
1569
se met chez nous à l’école de la droite française
et
de sa politique particulière conditionnée par le nationalisme unitair
1570
culière conditionnée par le nationalisme unitaire
et
antiallemand, l’on voit une méfiance hostile poindre chez nos intelle
1571
ans notre vie confédérale. Réaction de faiblesse,
et
néfaste à un double titre. Car d’une part nous y perdons ce qui fait
1572
leur propre dans la culture de langue française ;
et
d’autre part, en nous refusant aux contacts et aux échanges, nous per
1573
; et d’autre part, en nous refusant aux contacts
et
aux échanges, nous perdons la meilleure occasion de prendre conscienc
1574
ure occasion de prendre conscience de nous-mêmes,
et
de nos singularités sinon latines, du moins romanes. On se découvre e
1575
qu’à la grimace — qu’un Barrès, constamment tenté
et
enrichi par le génie du Rhin ? Pour nous qui n’avons pas les mêmes ra
1576
ce ou de timidité ; dans une volonté de synthèse,
et
non point dans la crainte perpétuelle de n’aboutir qu’à des mélanges
1577
ité existe, mais sur un plan à la fois plus élevé
et
plus vaste que celui de « l’unification » à la mode jacobine ou class
1578
jacobine ou classique. C’est l’unité originelle,
et
peut-être future et finale, des diversités de l’Europe, symbolisées p
1579
ue. C’est l’unité originelle, et peut-être future
et
finale, des diversités de l’Europe, symbolisées par nos trois langues
1580
, nos deux religions, nos vingt-cinq républiques.
Et
surtout qu’on ne déplore pas le fait que les cultures des Suisses ne
1581
’une après l’autre, mais n’ont pas pu synthétiser
et
relier. Elles avaient d’autres choses à faire. Elles ont été grandes
1582
ique ou la peinture, la poésie ou la philosophie.
Et
peut-être ne serons-nous jamais aussi grands qu’aucune d’entre elles
1583
onne », des vocations spéciales d’autres nations.
Et
c’est là notre vocation. Neutralité, sur le plan culturel, ce n’est p
1584
culturel, ce n’est pas mélange, ni accommodation
et
encore moins imitation médiocre. Ce n’est pas forcément cela. C’est a
1585
ments d’un culte, oubliant le dieu qu’il célèbre.
Et
pourquoi n’irais-je pas jusqu’à dire que notre grandeur culturelle es
1586
? On nous a donné par-dessus un Gottfried Keller
et
un Ramuz. Ceux-là ne sont Européens que parce qu’ils sont d’abord, et
1587
ne sont Européens que parce qu’ils sont d’abord,
et
génialement, Suisse allemand et Vaudois rhodanien. Mais deux poètes «
1588
ils sont d’abord, et génialement, Suisse allemand
et
Vaudois rhodanien. Mais deux poètes « enracinés » ne font pas une cul
1589
ture suisse. Ce sont deux vocations personnelles,
et
la culture suppose une tradition, une vocation communautaire. Mais je
1590
n asile provisoire aux grands errants de l’esprit
et
des passions occidentales : Bâle et Genève au temps de la Réforme, Ér
1591
s de l’esprit et des passions occidentales : Bâle
et
Genève au temps de la Réforme, Érasme, Holbein, Calvin et d’Aubigné,
1592
e au temps de la Réforme, Érasme, Holbein, Calvin
et
d’Aubigné, et le fameux docteur Paracelse, entraînant sa suite turbul
1593
la Réforme, Érasme, Holbein, Calvin et d’Aubigné,
et
le fameux docteur Paracelse, entraînant sa suite turbulente de discip
1594
le microcosme de toutes ses grandeurs. Aux xviie
et
xviiie , l’horizon se resserre un peu, on ne voit guère que Berne et
1595
on se resserre un peu, on ne voit guère que Berne
et
le « grand Haller », et ce premier cosmopolite : Béat de Muralt. Puis
1596
n ne voit guère que Berne et le « grand Haller »,
et
ce premier cosmopolite : Béat de Muralt. Puis Zurich et l’hégémonie p
1597
premier cosmopolite : Béat de Muralt. Puis Zurich
et
l’hégémonie passagère de l’École suisse sur la littérature allemande.
1598
es lettres françaises ; après Rousseau : Constant
et
Staël, et toute la petite cour de Coppet, Gibbon, Schlegel et Sismond
1599
françaises ; après Rousseau : Constant et Staël,
et
toute la petite cour de Coppet, Gibbon, Schlegel et Sismondi. Ce foye
1600
toute la petite cour de Coppet, Gibbon, Schlegel
et
Sismondi. Ce foyer s’éteint pour un temps. Il en renaît un autre à Bâ
1601
: Jacob Burckhardt, Overbeck, le jeune Nietzsche.
Et
tout cela fait, par le moyen de la Suisse, une assez belle culture eu
1602
d’une tradition que tout nous pousse à continuer,
et
qui, je le crois, n’a pas encore réalisé ses possibilités extrêmes. N
1603
êmes. Nous avons le goût du moyen, c’est entendu,
et
je l’accorde à Ramuz, et je m’en irrite au moins autant que lui. (Que
1604
du moyen, c’est entendu, et je l’accorde à Ramuz,
et
je m’en irrite au moins autant que lui. (Que serait-ce si je vivais e
1605
er ces gens sérieux que sont les Suisses moyens —
et
même les autres.) 3. — Avec l’armée, je reviens au concret, ou du moi
1606
ins d’action sur la vie politique.) Il est clair,
et
on le dit assez pour que je n’aie pas à insister, que l’armée d’un pe
1607
d’attaquer. Elle ne joue que le rôle d’une garde,
et
par là même, elle est conforme à notre vocation profonde. Garde monté
1608
ervice du principe constituant de la fédération —
et
c’est pourquoi elle appartient à l’État et non pas aux cantons. De pl
1609
tion — et c’est pourquoi elle appartient à l’État
et
non pas aux cantons. De plus, les mesures toutes récentes organisant
1610
caste que forment ailleurs les écoles militaires.
Et
c’est bien ce que devrait être une armée consciente de son rôle parti
1611
Mais je ne sens pas cette conscience très vivace.
Et
dès lors toutes ces belles vertus dévient ou agissent à contre-fin. Q
1612
ublic, voilà l’indice qu’on perd le sens des buts
et
du rôle de l’armée dans la cité. Il ne s’agit ici que de nuances dans
1613
e en soi, si l’on ne croit pas à cette fédération
et
à la tâche qui lui incombe au milieu de voisins redoutables. Il est i
1614
oire parfois que pour être un bon Suisse, il faut
et
il suffit que l’on soit un bon soldat. Peut-être oserons-nous rappele
1615
qu’il existe d’autres manières se servir son pays
et
d’illustrer sa cause. Et que c’est faire grand tort à ce patriotisme
1616
ières se servir son pays et d’illustrer sa cause.
Et
que c’est faire grand tort à ce patriotisme qu’on exalte, que de le c
1617
mée n’est qu’un aspect de notre défense fédérale.
Et
un aspect subordonné. Si l’on néglige à son profit « le reste », on f
1618
ne dis pas de l’instruction, mais de la culture.
Et
je l’appellerais volontiers le budget de la conscience fédérale. Car
1619
citoyens, ont retrouvé le sens de notre destinée,
et
notre chance unique de grandeur. ⁂ Je vois ce que l’on peut m’objecte
1620
tés qui se sont constituées par le jeu d’intérêts
et
de routines médiocres. Vous donnez par exemple une valeur positive à
1621
t la menace extérieure81. » Rien n’est plus vrai,
et
c’est très consciemment que nous opérons ce redressement urgent ! Qu’
1622
ays, d’un certain nombre de structures politiques
et
morales, et d’une tradition fédéraliste, qui se trouvent réaliser, en
1623
rtain nombre de structures politiques et morales,
et
d’une tradition fédéraliste, qui se trouvent réaliser, en théorie, pa
1624
ordre une signification qui le maintienne vivant
et
pur contre les ennemis du dedans, afin d’être fort au-dehors. L’espri
1625
n de copier nos voisins dans les mœurs politiques
et
dans la presse, tout cela menace et compromet non seulement nos chanc
1626
rs politiques et dans la presse, tout cela menace
et
compromet non seulement nos chances à venir, mais les bases politique
1627
nt nos chances à venir, mais les bases politiques
et
morales sur lesquelles nous pouvions compter, et la mission même de l
1628
et morales sur lesquelles nous pouvions compter,
et
la mission même de la Suisse. Tout cela tend à nous réduire à nos pro
1629
aminations multipliées, des inégalités favorisées
et
protégées82.) Seule notre économie cherche à se mettre au pas des gra
1630
s’il l’oublie, il étouffe bientôt dans le confort
et
l’asepsie morale. Mais qu’il reprenne conscience de cette mission, et
1631
Mais qu’il reprenne conscience de cette mission,
et
le grand air de l’Europe et du monde reviendra vivifier nos pays. Il
1632
nce de cette mission, et le grand air de l’Europe
et
du monde reviendra vivifier nos pays. Il y aura de nouveau du jeu, de
1633
rculation des cultures, une respiration des âmes.
Et
ceci qui est le plus important : des possibilités d’imaginer, donc d’
1634
ant : des possibilités d’imaginer, donc d’innover
et
de voir grand. ⁂ Je résumerai tout ce qui précède en une seule phrase
1635
: mais c’est pour assurer la liberté de passage,
et
non pas pour barrer le col sous prétexte de nous mettre à l’abri !
1636
sées, mais des conceptions de l’homme, de l’État,
et
des religions, des partis pris spirituels bien plus puissants que les
1637
rmées. 75. Par exemple : les droits des communes
et
ceux du canton ; les droits des cantons et ceux de la Confédération ;
1638
mmunes et ceux du canton ; les droits des cantons
et
ceux de la Confédération ; les droits de la Suisse et ceux de l’Europ
1639
eux de la Confédération ; les droits de la Suisse
et
ceux de l’Europe ; images et conséquences à la fois de l’équilibre fo
1640
droits de la Suisse et ceux de l’Europe ; images
et
conséquences à la fois de l’équilibre fondamental entre les droits de
1641
libre fondamental entre les droits de la personne
et
ceux de la communauté. 76. On disait en Allemagne, pendant la guerre
1642
te ; laboratoire de pédagogie (Institut Rousseau)
et
de psychanalyse… Mais il ne semble pas que les Genevois aient su reco
1643
je ne demande pas de faire concourir l’éducation
et
l’instruction à notre préparation militaire, comme le réclament déjà
1644
nco-allemandes ne dissocient le lien des cantons,
et
l’on avait par trop souffert de la grande politique des voisins. 82.
1645
d’Esprit intitulé « Le problème suisse : personne
et
fédéralisme », coordonné par Denis de Rougemont et ouvert par une let
1646
t fédéralisme », coordonné par Denis de Rougemont
et
ouvert par une lettre de C. F. Ramuz, que Rougemont commente ici en i
1647
’un ouvrage qui paraîtra sous ce titre : L’Amour
et
l’Occident . Partant d’une analyse approfondie des cinq légendes prim
1648
profondie des cinq légendes primitives de Tristan
et
Iseut, l’auteur a été conduit à rechercher les origines religieuses d
1649
ner. C’est cet Amour mystique, bientôt sécularisé
et
« profané » par la littérature, qui donne naissance, dès le xiie siè
1650
ts, en leur prêtant des « couleurs » religieuses.
Et
cette immense « mystification » de l’instinct faussant ses rythmes na
1651
au Moyen Âge : celle de la société christianisée,
et
celle de la « courtoisie » hérétique. L’une impliquait le mariage, do
1652
age. Le jugement porté sur l’adultère, dans l’une
et
l’autre perspective, caractérise fort bien l’opposition. Aux yeux de
1653
ois un sacrilège, un crime contre l’ordre naturel
et
un crime contre l’ordre social. Car le sacrement unissait tout à la f
1654
s deux âmes fidèles, deux corps aptes à procréer,
et
deux personnes juridiques. Il se trouvait donc sanctifier les intérêt
1655
sanctifier les intérêts fondamentaux de l’espèce
et
les intérêts de la cité. Celui qui contrevenait à ce triple engagemen
1656
a synthèse catholique s’efforçait de marier l’eau
et
le feu, car on pouvait tirer des Écritures et des Pères les thèses le
1657
eau et le feu, car on pouvait tirer des Écritures
et
des Pères les thèses les plus contradictoires sur la sainteté de la p
1658
la sainteté de la procréation — loi de l’espèce —
et
sur la sainteté de la virginité — loi de l’esprit. Pour l’Ancien Test
1659
t enfin à détruire un ordre social qui permettait
et
exigeait la guerre, comme expression du vouloir-vivre collectif84. Ma
1660
t-à-dire de l’Éros divinisant, en conflit éternel
et
angoissé avec la créature de chair et ses instincts asservissants. L’
1661
lit éternel et angoissé avec la créature de chair
et
ses instincts asservissants. L’apparition de la passion d’Amour devai
1662
. Pour l’amateur non initié des poèmes provençaux
et
des romans bretons, l’adultère de Tristan reste une faute parce qu’il
1663
une faute parce qu’il est consommé dans la chair (
et
non point parce qu’il lèse le mariage), mais il se trouve revêtir en
1664
était l’expression dramatique du combat de la foi
et
du monde, devient alors pour le lecteur non averti une « poésie » équ
1665
ur le lecteur non averti une « poésie » équivoque
et
brûlante. Poésie toute profane d’apparences, dont la puissance de séd
1666
ignore la signification mystique de ses symboles,
et
que ceux-ci ne paraissent plus révélateurs que d’un mystère vague et
1667
araissent plus révélateurs que d’un mystère vague
et
flatteur. Comment expliquer autrement qu’à partir du xiie siècle, ce
1668
? Le roi David en volant Bethsabé commet un crime
et
se rend méprisable. Mais Tristan, s’il enlève Iseut, vit un roman, et
1669
e. Mais Tristan, s’il enlève Iseut, vit un roman,
et
se rend admirable… Ce qui était « faute » et ne pouvait donner lieu q
1670
man, et se rend admirable… Ce qui était « faute »
et
ne pouvait donner lieu qu’à des commentaires édifiants sur le danger
1671
es commentaires édifiants sur le danger de pécher
et
le remords, devient soudain vertu mystique (dans le symbole), puis se
1672
rade (dans la littérature) en aventure troublante
et
attirante. ⁂ Je n’entends pas un instant ramener la crise actuelle du
1673
se actuelle du mariage au conflit de l’orthodoxie
et
d’une hérésie médiévale. Car cette dernière, comme telle, n’existe pl
1674
Car cette dernière, comme telle, n’existe plus ;
et
si l’orthodoxie existe encore, il faut avouer qu’elle joue un rôle re
1675
ieuse, mais ne s’appuie plus sur une foi vivante,
et
dont l’autre dérive d’une hérésie dont l’expression « essentiellement
1676
ment lyrique » nous parvient totalement profanée,
et
par suite dénaturée. Voici les forces en présence : d’une part, une m
1677
en présence : d’une part, une morale de l’espèce
et
de la société en général, mais plus ou moins empreinte de religion —
1678
ntretenue par leurs lectures, par les spectacles,
et
par mille allusions quotidiennes, dont le sous-entendu est à peu près
1679
uprême, que tout homme doit un jour la connaître,
et
que la vie ne saurait être à plein vécue que par ceux qui « ont passé
1680
par ceux qui « ont passé par là ». Or la passion
et
le mariage sont par essence incompatibles. Leurs origines et leurs fi
1681
ge sont par essence incompatibles. Leurs origines
et
leurs finalités s’excluent. De leur coexistence dans nos vies surgiss
1682
ies surgissent sans fin des problèmes insolubles,
et
ce conflit menace en permanence toutes nos « sécurités » sociales. En
1683
du mythe85 que d’ordonner cette anarchie latente
et
de la composer symboliquement dans nos catégories morales. Rôle d’exu
1684
e, rôle civilisateur. Mais le mythe s’est déprimé
et
profané en même temps que les formes sociales dont il tirait ses élém
1685
sistances assez solides pour lui servir de masque
et
de prétexte. Une immense littérature paraît chaque mois sur la « cris
1686
fournir à la passion une espèce de modus vivendi,
et
tous ces livres aggravant au contraire notre conscience du problème,
1687
leurs qui lui fournissaient ses « contraintes » —
et
c’est précisément dans le jeu de ces contraintes que le mythe de Tris
1688
éléments : rites de l’achat, du rapt, de la quête
et
de l’exorcisme. Mais de nos jours, la dot perd de son importance, par
1689
mariage, avec échange de visites en haut de forme
et
« déclaration » officielle, est aussi démodée que les crinolines. Et
1690
officielle, est aussi démodée que les crinolines.
Et
la majorité des couples n’éprouve plus même le besoin « superstitieux
1691
questions de rang, de sang, d’intérêts familiaux,
et
même d’argent, sont en train de passer au second plan dans les pays d
1692
asser au second plan dans les pays démocratiques,
et
par suite les problèmes individuels déterminent de plus en plus le ch
1693
eux de noter que des coutumes d’origine lointaine
et
sacrée telles que la quasi-publicité du lit nuptial subsistèrent, dan
1694
e « voyage de noces », pour autant qu’il subsiste
et
garde une signification, représente bien plutôt une volonté de s’évad
1695
ôt une volonté de s’évader de l’ambiance sociale,
et
de souligner le caractère privé de ce qu’on appelle le bonheur des ép
1696
stinguer le christianisme des contraintes sacrées
et
sociales, elle le repousse avec horreur. Car l’engagement religieux e
1697
r l’engagement religieux est pris « pour le temps
et
l’éternité », c’est-à-dire qu’il ne tient aucun compte des variations
1698
variations de tempérament, de caractère, de goûts
et
de conditions externes qui ne manqueront pas de se produire un jour o
1699
rement parler, conflit de deux morales hostiles —
et
par suite plus de mythe possible — mais on approche d’un état de neut
1700
ême, de sentir de quoi il est fait, de l’analyser
et
de le goûter afin de pouvoir l’améliorer par des retouches bien calcu
1701
êches des magazines, dépend de ceci, exige cela —
et
ceci ou cela, c’est toujours quelque chose qu’il faut acquérir, par d
1702
s de nous obséder par l’idée d’un bonheur facile,
et
du même coup de nous rendre inaptes à le posséder. Car tout ce qu’on
1703
saisir. Il ne peut vivre que dans l’acceptation,
et
meurt dans la revendication. C’est qu’il dépend de l’être et non de l
1704
ns la revendication. C’est qu’il dépend de l’être
et
non de l’avoir : les moralistes de tous les temps l’ont répété, et no
1705
: les moralistes de tous les temps l’ont répété,
et
notre temps n’apporte rien qui doive nous faire changer d’avis. Tout
1706
is on pressent que ce serait un malheur plus beau
et
plus « vivant » que la vie normale, plus exaltant que son « petit bon
1707
chevaliers parce qu’ils savaient chanter l’Amour.
Et
c’est pourquoi certains auteurs ont pu parler d’une féodalité démocra
1708
agissait n’était rien d’autre que la foi cathare,
et
l’accession d’un roturier à la chevalerie était un symbole mystique b
1709
, pur symbole de l’Amour, avec telle femme réelle
et
désirable ; la rhétorique de l’Amour cathare servit aux amoureux prof
1710
e l’attrait sexuel, sa transformation en passion.
Et
c’est de là que nous vient, par la littérature, cette idée toute mode
1711
ent, par la littérature, cette idée toute moderne
et
romantique que la passion est une noblesse morale, qu’elle nous met a
1712
personne ne peut plus le croire, à l’âge du film
et
du roman — nous sommes tous plus ou moins intoxiqués, — et cette nuan
1713
an — nous sommes tous plus ou moins intoxiqués, —
et
cette nuance est décisive. Le moderne, l’homme de la passion, attend
1714
orté » ! La sempiternelle illusion, la plus naïve
et
— j’ai beau dire ! — la plus « naturelle » pensera-t-on… Illusion de
1715
« naturelle » pensera-t-on… Illusion de liberté.
Et
illusion de plénitude. Je nommerais libre un homme qui se possède. Ma
1716
sédé, dépossédé, jeté hors de soi, dans l’extase.
Et
de fait, c’est déjà sa nostalgie qui le « démeine » — pour parler com
1717
st l’homme qui veut trouver son « type de femme »
et
n’aimer qu’elle. Souvenez-vous du rêve de Nerval, l’apparition d’une
1718
dans une autre existence peut-être J’ai déjà vue,
et
dont je me souviens… Image de la mère, sans nul doute, et la psychan
1719
e me souviens… Image de la mère, sans nul doute,
et
la psychanalyse nous apprend quels empêchements tragiques cela peut s
1720
ise, c’est la « beauté standard ». De nos jours —
et
ce n’est qu’un début —, un homme qui se prend de passion pour une fem
1721
onnue, développée par tous les moyens techniques,
et
bientôt politiques, en sorte que le choix d’un type de femme échappe
1722
mme échappe de plus en plus au mystère personnel,
et
se trouve déterminé par Hollywood — et bientôt par l’État. Double inf
1723
personnel, et se trouve déterminé par Hollywood —
et
bientôt par l’État. Double influence de la beauté-standard : elle déf
1724
e la passion — dépersonnalisé dans cette mesure —
et
disqualifie le mariage, si l’épouse ne ressemble pas à la star la plu
1725
enfin sur un type, compromis entre ce qu’il aime
et
ce que le film le persuade d’aimer. Il rencontre cette femme, il la r
1726
l la reconnaît. C’est elle, la femme de son désir
et
de sa plus secrète nostalgie88, l’Iseut du rêve ; elle est mariée, na
1727
elle est mariée, naturellement. Qu’elle divorce,
et
il l’épousera ! Avec elle, ce sera la « vraie vie », ce sera l’épanou
1728
ristan qu’il porte en soi comme son génie caché !
Et
plus rien ne compte en regard de la révélation mythique. (Pas même la
1729
ujours l’étrangère, l’étrangeté même de la femme,
et
tout ce qu’il y a d’éternellement fuyant, évanouissant et presque hos
1730
ce qu’il y a d’éternellement fuyant, évanouissant
et
presque hostile dans un être, cela même qui invite à la poursuite et
1731
dans un être, cela même qui invite à la poursuite
et
qui éveille l’avidité de posséder, plus délicieuse que toute possessi
1732
roie au mythe. C’est la femme dont on est séparé,
et
qu’on perd en la possédant. Alors commence une « passion » nouvelle.
1733
» nouvelle. On s’ingénie à renouveler l’obstacle
et
le combat. On imagine différente la femme que l’on tient dans ses bra
1734
femme que l’on tient dans ses bras, on la déguise
et
on l’éloigne en rêve, on s’acharne à dépayser les sentiments qui sont
1735
ui sont en train de se nouer dans une durée étale
et
trop sereine. C’est qu’il faut recréer des obstacles pour pouvoir de
1736
éer des obstacles pour pouvoir de nouveau désirer
et
pour exalter ce désir aux proportions d’une passion consciente, inten
1737
la douleur seule qui rend consciente la passion,
et
c’est pourquoi l’on aime souffrir et faire souffrir. Lorsque Tristan
1738
la passion, et c’est pourquoi l’on aime souffrir
et
faire souffrir. Lorsque Tristan emmène Iseut dans la forêt, où plus r
1739
s corps une épée nue. Descendons quelques siècles
et
toute l’échelle qui va de l’héroïsme religieux à la confusion sans gr
1740
u lieu de l’épée du chevalier, entre le bourgeois
et
sa femme, voici le rêve sournois du mari qui ne peut plus désirer sa
1741
dans sa Physiologie du mariage.) Une innombrable
et
écœurante littérature romanesque nous peint ce type du mari qui redou
1742
t » parce qu’il n’est plus d’obstacles entre elle
et
lui. Pitoyables victimes d’un mythe dont l’horizon mystique s’est ref
1743
e la passion mystique d’être sans fin terrestre —
et
c’est par là que cette passion se détachait des rythmes du désir char
1744
diat, il n’a jamais le temps d’aimer — d’attendre
et
de se souvenir — et rien de ce qu’il désire ne lui résiste, puisqu’il
1745
le temps d’aimer — d’attendre et de se souvenir —
et
rien de ce qu’il désire ne lui résiste, puisqu’il n’aime pas ce qui l
1746
onnaissance du mythe primitif, le succès du roman
et
du film apparaissent comme les signes certains d’une décadence de la
1747
d’une décadence de la personne chez les modernes,
et
d’une espèce de maladie de l’être. Presque toutes les complications q
1748
usie désirée, provoquée, sournoisement favorisée,
et
non plus chez l’autre seulement — la coquetterie est un peu simple —
1749
fidèle pour qu’on puisse de nouveau le poursuivre
et
« ressentir » l’amour en soi… Tout cela signifie, une fois de plus, q
1750
raison, qui est le monde de la jalousie. « Hommes
et
femmes dès qu’ils passent leur seuil souffrent de jalousie », dit un
1751
ssant « leur seuil », sortant de leur être propre
et
du présent tel qu’il leur est donné, incapables d’accepter l’autre te
1752
es à envier, qualités dont ils se sentent privés,
et
motifs de comparaisons qui toujours tournent à leur détriment. Le mar
1753
fre des beautés qu’il aperçoit à d’autres femmes,
et
dont la sienne se trouve privée (même si tous la jugent la plus belle
1754
t l’acceptation décisive d’un être en soi, limité
et
réel, que l’on choisit non comme prétexte à s’exalter, ou comme « obj
1755
lation »90, mais comme une existence incomparable
et
autonome à son côté, une exigence d’amour actif. ⁂ Je n’entends pas i
1756
ci attaquer la passion : je me borne à la décrire
et
à la « réciter » comme dit Montaigne, sachant fort bien que je ne con
1757
n. Bien peu ont assez soif pour boire le philtre,
et
j’en vois moins encore être élus par le sort pour succomber au tourme
1758
tous ou presque tous en rêvent, ou en rêvassent.
Et
si brouillée et défraîchie que soit l’empreinte du mythe primitif, c’
1759
tous en rêvent, ou en rêvassent. Et si brouillée
et
défraîchie que soit l’empreinte du mythe primitif, c’est pourtant là
1760
l’idée d’une limitation volontairement assumée ;
et
rien ne le flatte davantage que le mirage d’infini dépassement entret
1761
érables pour tout ordre social, quel qu’il soit. (
Et
je ne parle même pas du danger spirituel que fait courir à la personn
1762
honorable effort de redéfinition de l’institution
et
des devoirs moraux qu’elle implique91. Les humanistes reprennent les
1763
oir la grande conquête de la culture occidentale,
et
le fondement solide de toute vie personnelle ; selon le second, l’uni
1764
ans une société libérée des contraintes de classe
et
d’argent. D’autres enfin s’efforcent de fonder une science des rappor
1765
jugaux. Jung analyse le « conflit psychologique »
et
les « névroses » qui seraient à l’origine du mal (d’où l’on déduit qu
1766
oient le remède dans une connaissance plus exacte
et
largement vulgarisée des phénomènes sexuels. L’abondance même de ces
1767
nes sexuels. L’abondance même de ces recherches92
et
de ces recettes me rend sceptique quant à leur efficacité : elle révè
1768
er le lecteur dans ses croyances les plus intimes
et
les plus solidement ancrées. On a peur de paraître « puritain ». On s
1769
puritain ». On s’efforce de faire la part du feu,
et
l’on va même parfois jusqu’à ce paradoxe de présenter la passion amou
1770
qu’on l’imagine de nos jours est la négation pure
et
simple du mariage, que l’on prétend fonder sur lui. C’est qu’on ne sa
1771
du problème fondamental. « Il faut se faire lire
et
gagner la confiance ; on ne remonte pas le courant de toute l’époque
1772
n a toujours existé, elle existera donc toujours,
et
nous ne sommes pas des Don Quichotte… » Je le crois bien ! C’est même
1773
cause de cela que vous ne ferez rien de sérieux.
Et
comme il faut pourtant que quelque chose se fasse, la seule question
1774
connut un « déchaînement » sexuel de la jeunesse
et
presque de l’enfance, probablement sans précédent dans notre histoire
1775
ade Zetkin, le chef décrit ce désastre des mœurs,
et
il proteste avec toute l’énergie d’un « révolutionnaire professionnel
1776
nation. Car sans cadres, l’économie périclitait,
et
la « défense nationale » ne pouvait pas s’organiser sans un constant
1777
s bases sociales, c’est-à-dire l’élément statique
et
stabilisateur au premier chef qu’est la famille. Ce fut le mécanisme
1778
rendit extrêmement onéreux), contre l’avortement
et
contre l’abandon des enfants nés hors du mariage. La rigueur subite d
1779
ychologique qu’elles provoquèrent, la propagande,
et
les mesures de contrôle policier de la vie privée, changèrent radical
1780
des bases strictement utilitaires, collectivistes
et
eugéniques, et dans une atmosphère où les problèmes individuels tenda
1781
tement utilitaires, collectivistes et eugéniques,
et
dans une atmosphère où les problèmes individuels tendaient à perdre t
1782
t à perdre toute espèce de dignité, de légitimité
et
de virulence anarchisante. Certes, l’Allemagne de l’après-guerre n’at
1783
s conséquences bien plus complexes que chez nous,
et
d’apparences fort hétéroclites. Le cynisme morbide de l’après-guerre
1784
la Neue Sachlichkeit des avant-gardes littéraires
et
artistiques, l’homosexualité très générale dans les associations secr
1785
ée par la décadence des contraintes matrimoniales
et
du mythe de l’amour mortel. Déjà l’on voyait affleurer le fond de dés
1786
. Déjà l’on voyait affleurer le fond de désespoir
et
d’anarchie intime que suppose toute morale du « bonheur » strictement
1787
qu’elle prétendait se fonder sur une base raciste
et
militaire, devait se donner pour première tâche de surmonter cette cr
1788
a par opposer à l’idéal antisocial de « bonheur »
et
de « vie dangereuse » un idéal collectiviste. Gemeinnutz geht vor Eig
1789
utz ! Le bien commun prime l’intérêt particulier.
Et
par tous les moyens spectaculaires, pédagogiques, voire religieux, on
1790
rt qui consiste à donner pour seul objet légitime
et
possible à la passion : l’idée de nation symbolisée par le Führer. D’
1791
. Ces femmes doivent être blondes, de sang aryen,
et
mesurer au moins 1 m 73. Ainsi le « type de femme » se trouve prescri
1792
oles analogues pour toutes les femmes allemandes,
et
l’on ne manquera pas de les rendre obligatoires à bref délai. Le but
1793
ra sa juste application dans l’esprit de Lycurgue
et
de Sparte : on en fera l’un des chapitres de la préparation militaire
1794
a passion, officiellement éliminée, disqualifiée,
et
définie comme simple déficience sociale (ou sabotage) devra se réfugi
1795
s’exprimer dans un langage symbolique (ésotérique
et
d’extérieur rassurant) les éléments plastiques, militaires et sacrés,
1796
ur rassurant) les éléments plastiques, militaires
et
sacrés, qui lui font aujourd’hui défaut. Sa dialectique mortelle pour
1797
ouveau mimer des intrigues épiques ou politiques.
Et
l’aventure reprendra son départ dans une tension incalculablement plu
1798
e d’une décharge passionnelle au niveau collectif
et
national, paraît aujourd’hui plus probable. Enfin, l’on peut encore i
1799
nt l’effective abolition du besoin « spirituel »,
et
donc artificiel, de la passion. Alors le cycle de l’amour courtois se
1800
soit enfin sur des entretiens de Jésus ressuscité
et
de ses disciples « que les évangélistes et les Actes mentionnent sans
1801
uscité et de ses disciples « que les évangélistes
et
les Actes mentionnent sans les rapporter en détail ». L’auteur n’indi
1802
tains échos de presse sur la vie privée des stars
et
des magnats de la finance. 87. L’aventure fameuse de la princesse de
1803
les au désir — on les invente s’il n’y en a pas —
et
toute la dialectique de la passion qui se distingue de celle du désir
1804
de Lambeth. Les congrès œcuméniques de Stockholm
et
d’Oxford (toutes les églises non romaines) ont également abordé le pr
1805
stes exclus) quand il s’agit de thèses objectives
et
de programmes d’avenir. C’est le ton et les sentimentalismes qui s’op
1806
bjectives et de programmes d’avenir. C’est le ton
et
les sentimentalismes qui s’opposent encore. Mais enfin l’on s’apercev
1807
sme est une doctrine centriste, modérée-radicale,
et
non pas une doctrine de droite. D. Bertin attaque violemment M. Claud
1808
aulnier dénonce les équivoques de l’antisémitisme
et
ose écrire : « Je doute que le prolétariat français éprouve une joie
1809
ses camarades contre « une aventure d’intolérance
et
d’inquisition où nous avons à peu près tout à perdre ». Enfin M. Haed
1810
d par Retz, Bernardin de Saint-Pierre par Laclos,
et
Lamartine par Rimbaud. Un tel « signe » n’est pas négligeable : la vi
1811
s’est toujours définie en termes de littérature,
et
l’Action française a été surtout un mouvement de conservatisme littér
1812
des droits de l’homme, de Jaurès, de la Commune,
et
l’on prend parti contre le racisme et l’étatisme. Il est intéressant
1813
la Commune, et l’on prend parti contre le racisme
et
l’étatisme. Il est intéressant de souligner l’opposition très vive de
1814
e ce Manifeste à l’égard du Parti national Breton
et
de ses doctrines corporatistes et paternalistes. Au total, ce Manifes
1815
national Breton et de ses doctrines corporatistes
et
paternalistes. Au total, ce Manifeste de huit pages, clairement écrit
1816
crit, sans équivoques, intégralement fédéraliste (
et
non régionaliste) doit être considéré comme l’un des premiers actes d
1817
ns ici depuis nos débuts. NRF (mai). — Notes
et
quatrains de Jean Wahl. À retenir cette petite charade : mon premier
1818
Faubourg Saint-Germain (comme on disait naguère)
et
Montparnasse se mêlaient à merveille. Le déhanchement des inversions
1819
aient à merveille. Le déhanchement des inversions
et
l’odeur sournoise de l’opium se faisaient à peine remarquer dans le b
1820
ochelle, rescapé de ce xviiie siècle artificiel,
et
de cette « douceur de vivre », en a gardé — tout au moins dans son st
1821
guë, mais non l’exaltation, le cynisme impuissant
et
lucide, mais non l’air de défi. Cela fait un curieux ricanement, en m
1822
curieux ricanement, en manière d’oraison funèbre.
Et
après ? « Vous n’allez pas me dire que vous êtes fasciste ? — Heu… »
1823
oit par l’argus ou le courrier, renchérit encore,
et
prétend qu’on a tenu au cacho[t], durant près d’un demi-siècle, la po
1824
on comme une entité historique, née dans un temps
et
dans des lieux déterminés, et sous des astres dont le cours est calcu
1825
, née dans un temps et dans des lieux déterminés,
et
sous des astres dont le cours est calculable. (Au xiie siècle). J’ai
1826
une révolte contre la décision dont elle est née.
Et
pour tout dire, j’ignore encore si cela peut avoir un sens : approuve
1827
choisit d’être dans son tort, aux yeux du monde —
et
dans ce tort majeur, irrévocable, que signifie le choix de la mort. E
1828
r, irrévocable, que signifie le choix de la mort.
Et
comment échapper au démon que l’on fixe ? Pour attaquer la passion da
1829
ont la passion sut profiter.) C’est qu’avant tout
et
après tout, à l’origine et à la fin de la passion, il n’y a pas une «
1830
.) C’est qu’avant tout et après tout, à l’origine
et
à la fin de la passion, il n’y a pas une « erreur » sur l’homme ou Di
1831
! En lui opposant toutes les raisons de la terre,
et
les conseils de tous nos arts de vivre, quand c’est la terre qui est
1832
de vivre, quand c’est la terre qui est méprisée,
et
la vie qui est la faute à racheter ! Mais tuer l’homme avant qu’il ne
1833
cheter ! Mais tuer l’homme avant qu’il ne se tue,
et
le tuer autrement qu’il ne veut l’être, c’est bien de cela, de cela s
1834
ir, dans une époque où l’on confond thérapeutique
et
sotériologie (lois de l’hygiène et doctrine du salut). À vues humaine
1835
thérapeutique et sotériologie (lois de l’hygiène
et
doctrine du salut). À vues humaines, la guérison de nos passions vien
1836
onyme qui assumera le poids de toutes nos fautes,
et
de la faute initiale de vivre, pour les glorifier dans la guerre au n
1837
om de l’innocence du Peuple ! Mais pour moi, ici
et
maintenant, le problème ne comporte pas d’échappatoire dans le temps
1838
homme déterminé — de connaître ses propres désirs
et
de sonder en vérité ses préférences les plus secrètes, du moins peut-
1839
secrètes, du moins peut-il connaître ses actions,
et
reconnaître à leurs effets les décisions qu’il a risquées. C’est donc
1840
rsonnel que je vais tenter de définir maintenant,
et
après coup, tel que je le reconnais dans ma vie. Et ce n’est à aucun
1841
après coup, tel que je le reconnais dans ma vie.
Et
ce n’est à aucun degré une solution que je propose. Car outre qu’une
1842
eul : on ne se décide jamais que pour son compte,
et
le reste est indiscrétion. Mais je ne pouvais écrire un livre entier
1843
n dans l’abstrait où la passion ne peut exister —
et
alors en parler n’est qu’une farce — mais dans le choix qui détermine
1844
t guère plus efficace pour légitimer le mariage ;
et
que les arguments les plus divers que lui opposent les meilleurs espr
1845
ante. Tolstoï, lui, la décrit comme un « enfer ».
Et
je lui fais un plus large crédit ! Étant donné que les humains des de
1846
à se justifier. Oui, les romantiques ont raison ;
et
les réalistes ont raison ; et les clercs aussi ont raison, quand ils
1847
tiques ont raison ; et les réalistes ont raison ;
et
les clercs aussi ont raison, quand ils déclarent au nom de leur vocat
1848
enfants : aut liberi aut libri disait Nietzsche.
Et
Kierkegaard a raison plus qu’eux tous, lui qui d’abord exalte la pass
1849
n’ait déjà mieux dit ? Il a su louer le philistin
et
le romantique, et leur donner raison au point de leur faire honte d’a
1850
it ? Il a su louer le philistin et le romantique,
et
leur donner raison au point de leur faire honte d’avoir parfois douté
1851
eur pour Dieu est « essentiellement malheureux »,
et
cette passion chrétienne est la seule vérité, et tous nos « devoirs »
1852
et cette passion chrétienne est la seule vérité,
et
tous nos « devoirs » humains (dont le bonheur) ne peuvent que nous en
1853
pasteurs qui refusaient le célibat ; puis Luther
et
Calvin, tous deux mariés ; puis les Pères pour avoir loué le mariage
1854
oir toléré… (Seul le Christ a vécu en chrétien !)
Et
comment réfuter ce furieux ? Les incroyants sont renvoyés aux argumen
1855
s romantiques, qui valent contre leur moralisme ;
et
les croyants aux arguments de saint Paul, qui valent contre leur huma
1856
our éviter l’impudicité, que chacun ait sa femme,
et
que chaque femme ait son mari… La femme n’a pas autorité sur son prop
1857
torité sur son propre corps, mais c’est le mari ;
et
pareillement, le mari n’a pas autorité sur son propre corps, mais c’e
1858
a figure de ce monde passe. » (I. Cor. 7, 1-32).
Et
voici le coup de grâce : « Celui qui n’est pas marié s’inquiète des
1859
es du Seigneur, des moyens de plaire au Seigneur,
et
celui qui est marié s’inquiète des choses du monde, des moyens de pla
1860
e mariage qu’au-delà des deux premières critiques
et
en chemin vers la troisième, c’est-à-dire en maintenant sans cesse pr
1861
a plus ni hommes ni femmes »), je borne ma vision
et
mon espoir à une perfection relative, à l’équilibre dans l’imperfecti
1862
que la révolte contre ma condition de créature ;
et
au contraire, si je l’atteins trop aisément, je deviendrai le philist
1863
ues, ou l’homme moral pris dans les rets sociaux,
et
incapable désormais de concevoir les vérités « cruelles » de l’esprit
1864
ietzsche. Mais si je sais que l’Apôtre a raison,
et
si je l’accepte, je considère alors l’équilibre imparfait du mariage
1865
imparfait du mariage dans une perspective ouverte
et
dans l’attente — heureuse ou malheureuse — du parfait. Je sais que je
1866
rfait. Je sais que je tente une entreprise folle (
et
en même temps toute naturelle !) pour vivre le parfait dans l’imparfa
1867
une femme, c’est parier. Or la sagesse populaire
et
bourgeoise recommande au jeune homme de « réfléchir » avant de prendr
1868
ttre au départ toutes les chances de votre côté —
et
je suppose que la vie vous laisse le temps de calculer — jamais vous
1869
s vous ne pourrez prévoir votre future évolution,
et
encore moins celle de l’épouse choisie, encore bien moins celle du co
1870
ans le présent (comme si leur nombre était fini),
et
que vous disposiez d’une telle science de l’humain que leurs valeurs
1871
de l’humain que leurs valeurs vous soient connues
et
leur hiérarchie évidente, encore ne sauriez-vous prévoir la fin d’une
1872
tionner les espèces qui nous paraissent adaptées.
Et
nous aurions la prétention de résoudre d’un coup, en une seule vie, l
1873
problème de l’adaptation de deux êtres physiques
et
moraux des plus hautement organisés ! (C’est pourtant à cette utopie
1874
onstituer les premiers éléments, tout balbutiants
et
empiriques, d’une science du « mariage heureux »). Il faut le reconna
1875
4, ces données extérieures perdent en importance,
et
les impondérables deviennent décisifs. Le sophisme est alors du côté
1876
côté du bon sens, qui recommandait un choix mûri
et
raisonné, selon des critères impersonnels. Mais enfin ce n’est pas l’
1877
e que tout se ramène à une sagesse, à un savoir ;
et
non pas à une décision. Or ce savoir ne pouvant être qu’imparfait, et
1878
ision. Or ce savoir ne pouvant être qu’imparfait,
et
provisoire, devrait se doubler d’une garantie. Et la seule garantie c
1879
et provisoire, devrait se doubler d’une garantie.
Et
la seule garantie concevable est dans la force de la décision en vert
1880
u’il serait plus conforme à l’essence du mariage,
et
au réel, d’enseigner aux jeunes gens que leur choix relève toujours d
1881
rrationnel d’une décision prise en dépit de tout,
et
qui fonde une nouvelle existence, initiant un risque nouveau. ⁂ Écart
1882
: « Vous êtes l’idéal de mes rêves, vous comblez
et
au-delà tous mes désirs, vous êtes l’Iseut toute belle et désirable —
1883
là tous mes désirs, vous êtes l’Iseut toute belle
et
désirable — et munie d’une dot adéquate — dont je veux être le Trista
1884
irs, vous êtes l’Iseut toute belle et désirable —
et
munie d’une dot adéquate — dont je veux être le Tristan ». Car ce ser
1885
e veux être le Tristan ». Car ce serait là mentir
et
l’on ne peut rien fonder qui dure sur le mensonge. Il n’y a personne
1886
« c’est vous que je choisis pour partager ma vie,
et
voilà la seule preuve que je vous aime ». (Vraiment, pour dire : Ce n
1887
ivins — il faut n’avoir connu que peu de solitude
et
peu d’angoisse, très peu de solitaire angoisse.) ⁂ Seule une décision
1888
servir de point de départ à une fidélité réelle ;
et
je ne dis pas à une fidélité qui soit une recette de « bonheur », mai
1889
e grandeur. (Comme la passion !) ⁂ Les moralistes
et
certains sociologues (dont Engels) ont essayé de prouver que la monog
1890
essayé de prouver que la monogamie est naturelle,
et
de plus qu’elle est salutaire. Cela se discute à l’infini. Et cela no
1891
u’elle est salutaire. Cela se discute à l’infini.
Et
cela nous sera des plus utile dès que les hommes se régleront sur la
1892
ile dès que les hommes se régleront sur la raison
et
l’intérêt : quand ils n’auront plus de passions, quand ils cesseront
1893
é se définit comme la moins naturelle des vertus,
et
la plus désavantageuse pour le « Bonheur ». À leurs yeux et dans leur
1894
désavantageuse pour le « Bonheur ». À leurs yeux
et
dans leur langage, la fidélité conjugale est le succès d’un effort «
1895
idélité comme une discipline imposée (aux humeurs
et
désirs spontanés) par un absurde et cruel parti pris ; ou comme une a
1896
(aux humeurs et désirs spontanés) par un absurde
et
cruel parti pris ; ou comme une abstention prudente… Ou encore ils y
1897
ivre largement, d’un goût mesquin pour le confort
et
le conforme ; d’un défaut d’imagination ; d’une timidité méprisable ;
1898
se, c’est d’exploiter chaque situation au maximum
et
pour elle-même, sans plus se référer à rien qui « juge » et qui « mes
1899
le-même, sans plus se référer à rien qui « juge »
et
qui « mesure » la jouissance qu’on en tire. Seul un respect acquis de
1900
s, c’est une passade, une erreur sans lendemain »
et
tantôt : « C’est tellement vital pour moi, tellement plus important q
1901
ent plus important que toutes vos petites morales
et
garanties de bonheur bourgeois ! » Du cynisme au tragique romantique,
1902
’absurde, parce qu’on s’y est engagé, simplement,
et
que c’est un fait absolu, sur quoi se fonde la personne même des épou
1903
ance commune en la valeur révélatrice du spontané
et
de la multiplicité des expériences. Elle nie que l’être aimé doive ré
1904
candaleusement que c’est avant tout l’obéissance,
et
en second lieu la volonté de faire une œuvre. Car la fidélité n’est p
1905
la manière d’une œuvre, à la faveur d’une œuvre,
et
aux mêmes conditions, dont la première est la fidélité à quelque chos
1906
n’était pas, mais que l’on crée. Personne, œuvre,
et
fidélité : les trois mots ne sont point séparables ou concevables iso
1907
e sont point séparables ou concevables isolément.
Et
tous les trois supposent un parti pris96, une attitude fondamentale d
1908
de fidélité introduit une chance de faire œuvre,
et
d’accéder au plan de la personne. (À condition bien entendu que cette
1909
héritée, détient sa chance immédiate de grandeur,
et
c’est dans la fidélité « absurde » qu’elle pourra la réaliser : quand
1910
oi, d’une promesse faite à Dieu, gagée par Dieu… (
Et
peut-être, plus tard, après coup, l’homme découvre que la folie du sa
1911
sacrifice consenti était la plus grande sagesse ;
et
que le bonheur qu’il a renoncé lui est rendu, comme Isaac fut rendu à
1912
rendu à Abraham. Mais alors il n’y songeait pas !
Et
il se peut aussi que rien ne compense la perte : nous sommes ici dans
1913
mmes ici dans un ordre de grandeur où nos mesures
et
nos équivalences n’ont plus cours.) Mais savons-nous encore imaginer
1914
giner une grandeur qui n’ait rien de romantique ?
Et
qui soit le contraire d’une ardeur exaltée ? La fidélité dont je parl
1915
é dont je parle est une folie, mais la plus sobre
et
quotidienne. Une folie de sobriété qui mime assez bien la raison — et
1916
folie de sobriété qui mime assez bien la raison —
et
qui n’est pas un héroïsme, ni un défi, mais une patiente et tendre ap
1917
st pas un héroïsme, ni un défi, mais une patiente
et
tendre application. Le contraire absolu de toute littérature, de tout
1918
pas encore clair. Tristan lui aussi fut fidèle !
Et
toute passion véritable est fidèle. (Pour ne rien dire des successive
1919
re des successives fidélités de nos « liaisons »,
et
de tous ces Tristans qui ne sont au vrai que des Don Juan au ralenti.
1920
on Juan au ralenti.) Où est alors la différence ?
Et
le mari fidèle, ne serait-ce pas simplement celui qui a reconnu dans
1921
suis toi-même ! » Ainsi de la fidélité du mythe,
et
de Tristan. C’est un narcissisme mystique, mais qui s’ignore, naturel
1922
sisme mystique, mais qui s’ignore, naturellement,
et
qui croit être un vrai amour pour l’autre. L’analyse des légendes cou
1923
é que Tristan n’aime pas Iseut mais l’amour même,
et
au-delà de cet amour, la mort, appelée comme la délivrance du moi cou
1924
mort, appelée comme la délivrance du moi coupable
et
asservi. Tristan n’est pas fidèle à une promesse, ni à cet être symbo
1925
exte qui s’appelle Iseut, mais à sa plus profonde
et
secrète passion. Le mythe s’empare de l’« instinct de mort » insépara
1926
nstinct de mort » inséparable de toute vie créée,
et
il le transfigure en lui donnant un but essentiellement spirituel. Se
1927
son bonheur, c’est alors une manière de se sauver
et
d’accéder à une vie supérieure, la « joie suprême » d’Isolde agonisan
1928
consume la vie, mais qui consume aussi la faute,
et
divinise un moi purifié, « innocent » ! De ces origines mystiques, la
1929
Religion antérieure à notre « instinct » moderne,
et
qui détient l’intime secret de la passion, au-delà de ce que les psyc
1930
’on veut), indifférente, sinon hostile au bonheur
et
à l’instinct vital, elle exige un retour au monde réel, tandis que la
1931
vasion. Dans le mariage, c’est à l’autre d’abord,
et
non pas à son moi d’abord, que celui qui aime voue sa fidélité. Et ta
1932
moi d’abord, que celui qui aime voue sa fidélité.
Et
tandis que la fidélité de Tristan était un perpétuel refus, une volon
1933
n était un perpétuel refus, une volonté d’exclure
et
de nier la création dans sa diversité, d’empêcher le monde d’envahir
1934
as tromper sa femme serait une preuve d’indigence
et
non d’amour. La fidélité veut bien plus : elle veut le bien de l’être
1935
eut bien plus : elle veut le bien de l’être aimé,
et
lorsqu’elle agit pour ce bien, elle crée devant elle le prochain. Et
1936
pour ce bien, elle crée devant elle le prochain.
Et
c’est alors par ce détour, à travers l’autre, que le moi rejoint sa p
1937
nt de « l’amour-action ». Ce qui niait l’individu
et
son naturel égoïsme, c’est cela qui édifie la personne. À ce terme, o
1938
é dans le mariage est la loi d’une vie nouvelle ;
et
non point de la vie naturelle (ce serait la polygamie) — et non plus
1939
nt de la vie naturelle (ce serait la polygamie) —
et
non plus de la vie pour la mort (c’était la passion de Tristan). ⁂ L’
1940
L’amour fidèle de Tristan détruisait son bonheur
et
sa vie pour témoigner en faveur de la Nuit, c’est-à-dire du moi glori
1941
notre bonheur, est salutaire. L’amour de Tristan
et
d’Iseut c’était l’angoisse d’être deux ; et son aboutissement suprême
1942
istan et d’Iseut c’était l’angoisse d’être deux ;
et
son aboutissement suprême, c’était la chute dans l’illimité, au sein
1943
soit plus, pour qu’il cesse de me faire souffrir,
et
qu’il n’y ait plus que « moi-le-monde » ! Mais l’amour du mariage es
1944
re limité, aimé parce qu’il m’appelle à le créer,
et
qu’il se tourne avec moi vers le Jour afin d’attester notre alliance.
1945
mon bien, parce qu’il est confondu avec le sien :
et
si ce n’était pour toute la vie, ce serait encore une menace. (Il y a
1946
ore la différence entre un destin que l’on assume
et
une obsession que l’on subit ?) 5. Éros sauvé par Agapè Alors l
1947
pleine stature : il est l’affirmation de l’être.
Et
c’est Éros, l’amour-passion, l’amour païen, qui a répandu dans notre
1948
onde occidental le poison de l’ascèse idéaliste —
et
tout ce qu’un Nietzsche absurdement reproche à l’Évangile. C’est Éros
1949
he absurdement reproche à l’Évangile. C’est Éros,
et
non pas Agapè, qui a glorifié notre instinct de mort, et qui a voulu
1950
pas Agapè, qui a glorifié notre instinct de mort,
et
qui a voulu le « spiritualiser ». Mais Agapè se venge d’Éros en le sa
1951
ros en le sauvant. Car Agapè ne sait pas détruire
et
ne veut même pas détruire ce qui détruit. « Je ne veux pas la mort du
1952
exalter la vie au-dessus de notre condition finie
et
limitée de créatures. Ainsi le même mouvement qui fait que nous adoro
1953
apè l’en délivre. Agapè sait que la vie terrestre
et
temporelle ne mérite pas d’être adorée, ni même tuée, mais peut être
1954
sort se joue. C’est sur la terre qu’il faut aimer
et
recevoir le pardon. L’homme naturel ne pouvait pas l’imaginer. Il ét
1955
r le plus puissant, à lui demander la délivrance.
Et
l’Éros ne pouvait le conduire qu’à la mort. Mais l’homme qui croit à
1956
re chose, il sait qu’il est une autre délivrance.
Et
voici que l’Éros à son tour se voit relevé de sa fonction mortelle et
1957
à son tour se voit relevé de sa fonction mortelle
et
délivré de son destin. Dès qu’il cesse d’être un dieu, il cesse d’êtr
1958
esse d’être un dieu, il cesse d’être un démon 97.
Et
il retrouve sa juste place, et vivifiante, dans l’économie provisoire
1959
’être un démon 97. Et il retrouve sa juste place,
et
vivifiante, dans l’économie provisoire de la Création, de l’humain. L
1960
était son pouvoir le plus fort, le plus dangereux
et
le plus mystérieux, le plus profondément lié au fait de vivre. Toutes
1961
es divinisent le Désir. Toutes cherchent un appui
et
un salut dans le Désir, qui devient aussitôt, et par là même, le pire
1962
et un salut dans le Désir, qui devient aussitôt,
et
par là même, le pire ennemi de la vie, la séduction du Rien. Mais dès
1963
Rien. Mais dès lors que le Verbe s’est fait chair
et
qu’il nous a parlé en mots humains, nous avons appris cette nouvelle
1964
rer lui-même, c’est Dieu qui l’a aimé le premier,
et
qui s’est approché de lui. Le salut n’est plus au-delà, toujours plus
1965
e, mais ici-bas, dans l’obéissance à la Parole. ⁂
Et
qu’aurions-nous alors à craindre du désir ? Cela seulement : qu’il no
1966
sance absolue quand nous cessons de le diviniser.
Et
c’est ce qu’atteste l’expérience de la fidélité dans le mariage. Car
1967
fidélité se fonde justement sur le refus initial
et
juré de « cultiver » les illusions de la passion, de leur rendre un c
1968
ns de la passion, de leur rendre un culte secret,
et
d’en attendre un mystérieux surcroît de vie. J’essaierai de le faire
1969
tianisme a proclamé l’égalité parfaite des sexes,
et
cela de la manière la plus précise : La femme n’a pas autorité sur
1970
torité sur son propre corps, mais c’est le mari ;
et
pareillement le mari n’a pas autorité sur son propre corps, mais c’es
1971
égalité ne doit pas être entendue au sens moderne
et
revendicateur. Elle procède du mystère de l’amour, elle n’est que le
1972
de du mystère de l’amour, elle n’est que le signe
et
la démonstration du triomphe d’Agapè sur Éros. Car l’amour réellement
1973
sur Éros. Car l’amour réellement réciproque exige
et
crée l’égalité de ceux qui s’aiment. Dieu manifeste son amour pour l’
1974
eant que l’homme soit saint comme Dieu est saint.
Et
l’homme témoigne de son amour pour une femme en la traitant comme une
1975
ne fée de la légende mi-déesse mi-bacchante, rêve
et
sexe. Mais remontons de ces prémisses générales à la psychologie la p
1976
facultés neuves de jugement, de possession de soi
et
de respect99. Au contraire de l’homme érotique, l’homme de la fidélit
1977
il pressent, à peine tenté, le mystère difficile
et
grave d’une existence autonome, étrangère, d’une vie totale dont il n
1978
sipe, déconcertée, au lieu de se faire obsédante,
et
la fidélité se garantit par la lucidité qu’elle développe. L’emprise
1979
développe. L’emprise du mythe faiblit d’autant ;
et
s’il reste improbable qu’elle s’abolisse jamais sans laisser de trace
1980
e fait qu’elle habitue à ne plus séparer le désir
et
l’amour. Car si le désir va vite et n’importe où, l’amour est lent et
1981
arer le désir et l’amour. Car si le désir va vite
et
n’importe où, l’amour est lent et difficile, il engage vraiment toute
1982
e désir va vite et n’importe où, l’amour est lent
et
difficile, il engage vraiment toute une vie, et il n’exige pas moins
1983
t et difficile, il engage vraiment toute une vie,
et
il n’exige pas moins que cet engagement pour révéler sa vérité. Et c’
1984
moins que cet engagement pour révéler sa vérité.
Et
c’est pourquoi l’homme qui croit au mariage ne peut plus croire série
1985
t plus croire sérieusement au « coup de foudre »,
et
encore moins à la « fatalité » de la passion. Le « coup de foudre » e
1986
de la passion est accréditée par Tristan. Excuse
et
alibi qui ne peuvent tromper que celui qui veut être trompé, parce qu
1987
e son intérêt ; figures de rhétorique romanesque,
et
acceptables à ce titre, mais qu’il serait assez absurde de confondre
1988
sensuelle. Don Juan, l’homme des coups de foudre
et
de la vie « orageuse », serait une sorte de surhomme, de surmâle. Myt
1989
omme, de surmâle. Mythe d’une puissance indéfinie
et
qui domine les contingences morales. Mais alors, on peut être certain
1990
areil mythe est né de la rêverie des impuissants.
Et
en effet, la conduite de Don Juan est bien typique d’une certaine déf
1991
sexuelle. C’est dans l’état de fatigue générale,
et
sexuellement localisée, que le corps se voit porté à ces brusques éca
1992
idiots. Par contre, dans un état normal du corps
et
de l’esprit, le risque de coup de foudre est à peu près éliminé. Il a
1993
plaisir, c’est-à-dire de l’Éros purement charnel,
et
non du tout divinisé100. ⁂ On objecte alors que le mariage ne serait
1994
e mariage est le tombeau de l’amour sauvage »101 (
et
plus communément du sentimentalisme). L’amour sauvage et naturel se m
1995
communément du sentimentalisme). L’amour sauvage
et
naturel se manifeste par le viol, preuve d’amour chez tous les barbar
1996
tant dire qu’il ne sait pas encore aimer. Le viol
et
la polygamie privent la femme de sa qualité d’égale — en la réduisant
1997
de tempérament) mais c’est qu’il aime, justement,
et
qu’en vertu de cet amour, il refuse de s’imposer, il se refuse à une
1998
de s’imposer, il se refuse à une violence qui nie
et
détruit la personne. Il prouve ainsi qu’il veut d’abord le bien de l’
1999
e. On admettra que c’est une révolution sérieuse.
Et
nous pourrons maintenant dépasser la formule toute négative et privat
2000
ons maintenant dépasser la formule toute négative
et
privative de Croce, et définir enfin le mariage comme cette instituti
2001
la formule toute négative et privative de Croce,
et
définir enfin le mariage comme cette institution qui contient la pass
2002
Occident Ces quelques remarques sur la passion
et
le mariage mettent en lumière l’opposition fondamentale de l’Éros et
2003
nt en lumière l’opposition fondamentale de l’Éros
et
de l’Agapè, c’est-à-dire des deux religions qui se disputent notre Oc
2004
ssance de ce conflit, de ses origines historiques
et
psychologiques, de son enjeu spirituel, me paraît devoir entraîner la
2005
ique d’abord, mais aussi dans celui de la culture
et
de sa philosophie. Au terme de cet essai, il suffira sans doute de dé
2006
nnelles. Ils y voient l’héritage du christianisme
et
le secret de notre dynamisme. Et il est vrai que ces trois termes : c
2007
du christianisme et le secret de notre dynamisme.
Et
il est vrai que ces trois termes : christianisme, passion, dynamisme,
2008
esse d’une force que le christianisme a réveillée
et
orientée vers Dieu »102. Il est plutôt le sous-produit de la religion
2009
cette religion avec nos plus vieilles croyances,
et
du conflit de l’hérésie qui en résulta avec l’orthodoxie chrétienne.
2010
st un masque du désir de mort. Dynamisme inverti,
et
autodestructeur. Mais l’autre aspect du dynamisme occidental, j’enten
2011
on de la valeur des choses créées, de la matière,
et
une application de l’esprit au monde visible. La passion ni la foi hé
2012
la maîtrise de la Nature, puisque c’est là le but
et
la fonction originelle du Démiurge, et puisque le salut est justement
2013
là le but et la fonction originelle du Démiurge,
et
puisque le salut est justement d’échapper à sa loi démoniaque.104 Fa
2014
tion chrétienne définie par l’Apôtre (Romains 8),
et
qui tendrait à restaurer le Cosmos dans sa loi primitive, troublée pa
2015
chrétienne de transformer le pécheur dans son âme
et
dans sa conduite a entraîné en Occident l’idée de transformer le mili
2016
celle de passion. Ce qui peut induire en erreur,
et
ce qui a introduit de fait une fatale erreur dans l’activisme moderne
2017
ctivisme moderne, c’est la collusion de la guerre
et
de notre génie technique. À partir de la Révolution, la guerre devena
2018
la collaboration de toutes les forces créatrices,
et
en particulier de la technique. C’est alors la passion nationale et g
2019
de la technique. C’est alors la passion nationale
et
guerrière qui va devenir le principal moteur de la recherche mécaniqu
2020
union tout à fait monstrueuse des forces de mort
et
des forces créatrices va dénaturer à la fois la guerre et le génie te
2021
orces créatrices va dénaturer à la fois la guerre
et
le génie technique. La guerre mécanisée évacue la passion ; et la tec
2022
echnique. La guerre mécanisée évacue la passion ;
et
la technique en devenant mortelle, trahit les ambitions dont elle est
2023
communément ceux qui assimilent le christianisme
et
l’Occident, comme si tout l’Occident était chrétien. Si donc l’Europe
2024
i qu’elle ne s’est développée dans notre histoire
et
nos cultures qu’à partir des xiie et xiiie siècles, et par l’impuls
2025
re histoire et nos cultures qu’à partir des xiie
et
xiiie siècles, et par l’impulsion décisive de l’hérésie méridionale,
2026
cultures qu’à partir des xiie et xiiie siècles,
et
par l’impulsion décisive de l’hérésie méridionale, il apparaît que c’
2027
ridionale, il apparaît que c’est du Proche-Orient
et
de l’Iran, sources certaines de l’hérésie, que nous sont venues nos «
2028
ompte dans l’attitude religieuse des Occidentaux,
et
dans l’institution la plus typique de leur morale : le mariage, qu’il
2029
des de la fidélité, de la personne, du mariage, —
et
du refus de la passion. Elle suppose l’acceptation du différent, et d
2030
passion. Elle suppose l’acceptation du différent,
et
donc de l’incomplet, la prise sur le concret dans ses limitations. Le
2031
ations. Le chrétien prend le monde tel qu’il est,
et
non point tel qu’il peut le rêver. Son activité « créatrice » consist
2032
en profondeur toute la diversité du monde créé ;
et
c’est ainsi que la Renaissance définit l’homme : un microcosme. Tout
2033
nté centrale, ou en dévie, compromet la fidélité,
et
donne des chances nouvelles à la passion. C’est notre vie et notre mo
2034
s chances nouvelles à la passion. C’est notre vie
et
notre mort. Et c’est pourquoi la crise moderne du mariage est le sign
2035
lles à la passion. C’est notre vie et notre mort.
Et
c’est pourquoi la crise moderne du mariage est le signe le moins trom
2036
ersonne. Mais ce sont là des phénomènes complexes
et
collectifs, qui échappent en partie aux vues individuelles. Le « sign
2037
s. Le « signe » de la crise du mariage nous parle
et
nous avertit mieux : aucun autre n’est plus sensible et quotidien, pl
2038
s avertit mieux : aucun autre n’est plus sensible
et
quotidien, plus intimement vérifiable. 7. Au-delà de la tragédie10
2039
cadence : mythe dégradé, mariage en crise, formes
et
conventions décriées, extension du délire passionnel aux domaines où
2040
vilisation. Tout cela est, tout cela nous menace,
et
d’autant plus qu’on voudrait le nier. Cependant, à plusieurs reprises
2041
e peut que l’Europe, après une crise totalitaire (
et
supposé qu’elle n’y succombe point), retrouve le sens d’une fidélité
2042
peut que les excès mêmes de la passion provoquent
et
recréent des résistances, c’est-à-dire des formes nouvelles, ramenant
2043
se fonde. ⁂ Deux thèmes de réflexion, amorcés çà
et
là dans ces pages, pourront en constituer la conclusion ouverte. J’ai
2044
ler certains problèmes posés en termes d’histoire
et
de psychologie : mais les constatations tout objectives auxquelles je
2045
Elles introduisent à une problématique nouvelle,
et
qui n’est pas toujours aussi simpliste que le dilemme passion-fidélit
2046
de dépasser notre dilemme ne saurait être la pure
et
simple négation de l’un de ses termes. Je l’ai dit et j’y insiste enc
2047
imple négation de l’un de ses termes. Je l’ai dit
et
j’y insiste encore : condamner la passion en principe, ce serait voul
2048
ssible. Le philistin qui « condamne » de la sorte
et
à priori toute passion, c’est qu’il n’en a connu aucune, et qu’il est
2049
i toute passion, c’est qu’il n’en a connu aucune,
et
qu’il est en deçà du conflit. Pour cet homme-là le seul progrès conce
2050
c’est « le secret » essentiellement impartageable
et
indicible, qui s’opposait aux yeux de Kierkegaard à un mariage heureu
2051
t d’une nature à tel point subjective, singulière
et
incomparable, qu’on ne saurait en pressentir la gravité sans invoquer
2052
er la foi de Kierkegaard. Selon lui, l’homme fini
et
pécheur ne saurait entretenir avec son Dieu, — qui est l’Éternel et l
2053
ait entretenir avec son Dieu, — qui est l’Éternel
et
le Saint— que des relations d’amour mortellement malheureux. « Dieu c
2054
ellement malheureux. « Dieu crée tout ex nihilo »
et
celui que Dieu élit par son amour, « il commence par le réduire à néa
2055
ar le réduire à néant ». Du point de vue du monde
et
de la vie naturelle, Dieu apparaît alors comme « mon ennemi mortel ».
2056
tué par l’amour infini, devra marcher maintenant
et
vivre dans le monde comme s’il n’avait pas d’autre tâche ni plus urge
2057
n de surhumain : « il ressemble à un percepteur »
et
se conduit comme n’importe quel honnête bourgeois. Et pourtant « il a
2058
e conduit comme n’importe quel honnête bourgeois.
Et
pourtant « il a tout renoncé dans une infinie résignation, et s’il a
2059
« il a tout renoncé dans une infinie résignation,
et
s’il a tout ressaisi par la suite, c’est en vertu de l’absurde (c’est
2060
aut dans l’infini, mais avec une telle correction
et
une telle certitude qu’il retombe sans cesse dans le fini, et qu’on n
2061
certitude qu’il retombe sans cesse dans le fini,
et
qu’on ne remarque en lui rien que de fini108… » Ainsi l’extrême de la
2062
r elle est bien plus que royale, elle est divine.
Et
dans l’analogie de la foi, l’on peut alors concevoir que la passion —
2063
où elle se manifeste — ne trouve son au-delà réel
et
son salut que par cette action d’obéissance qui est la vie de fidélit
2064
as à l’absurde ; mais c’est plus qu’une synthèse,
et
infiniment plus et autre chose qu’une « solution », pour qui croit qu
2065
is c’est plus qu’une synthèse, et infiniment plus
et
autre chose qu’une « solution », pour qui croit que Dieu est fidèle,
2066
« solution », pour qui croit que Dieu est fidèle,
et
que l’amour ne trompe jamais l’aimé. Certes, Kierkegaard ne parvint à
2067
ouvra pas Régine, mais ne cessa jamais de l’aimer
et
de lui dédier toute son œuvre. Et c’est peut-être que cette œuvre éta
2068
mais de l’aimer et de lui dédier toute son œuvre.
Et
c’est peut-être que cette œuvre était le lieu de sa fidélité la plus
2069
es reçoivent une autre vocation, épousent Régine,
et
la passion revit dans leur mariage, mais alors « en vertu de l’absurd
2070
ur mariage, mais alors « en vertu de l’absurde ».
Et
ils s’étonnent chaque jour de leur bonheur. (Ces choses-là sont trop
2071
de leur bonheur. (Ces choses-là sont trop simples
et
totales pour qu’un discours vienne mettre ses délais entre la questio
2072
ses délais entre la question qu’elles nous posent
et
la réponse de notre vie.) ⁂ Le second thème que j’esquisserai n’est p
2073
de présence parfaite à l’objet aimant de l’amour,
et
c’est ce qu’il nomme le mariage mystique. L’âme se comporte alors à l
2074
ifférence quasi divine. Elle est au-delà du doute
et
de la distinction ressentie comme un déchirement ; elle ne désire plu
2075
a dualité, qui n’est plus qu’un dialogue de grâce
et
d’obéissance. Et le désir de la plus haute passion se voit alors comb
2076
est plus qu’un dialogue de grâce et d’obéissance.
Et
le désir de la plus haute passion se voit alors comblé sans cesse dan
2077
désir d’union mystique, ne saurait être dépassée
et
accomplie que par la rencontre d’un autre, par l’admission de sa vie
2078
sible, cessent de souffrir, acceptent notre jour.
Et
alors le mariage est possible. Nous sommes deux dans le contentement.
2079
i de sobriété. Les mariés ne sont pas des saints,
et
le péché n’est pas comme une erreur à laquelle on renoncerait un beau
2080
mes sans fin ni cesse dans le combat de la nature
et
de la grâce. Sans fin ni cesse, malheureux puis heureux. Mais l’horiz
2081
’idéaliser. 96. J’emploie ce terme au sens actif
et
littéral, par opposition au sens devenu courant, de « préjugé », de «
2082
Voir le remarquable essai de R. de Pury : « Éros
et
Agapè », dans le recueil collectif intitulé Problèmes de la sexualité
2083
té (collection « Présences »). « Un chrétien peut
et
doit accepter Éros, en tant qu’Éros, et justement pas en tant qu’Éros
2084
tien peut et doit accepter Éros, en tant qu’Éros,
et
justement pas en tant qu’Éros sublimé. Éros n’est pas le péché ; le p
2085
pendant Novalis renouvelant la mystique courtoise
et
les vieilles traditions celtiques. 99. En quoi consiste le respect,
2086
les croyances courantes, nées du mythe de Tristan
et
de son négatif donjuanesque. Mais cette « raison » est tout à fait in
2087
fait inefficace aux yeux de qui préfère le mythe,
et
veut croire aux révélations de la passion. 101. B. Croce, Etica e P
2088
103. À partir de cette règle commune à la passion
et
à la guerre que fut la chevalerie médiévale. 104. « L’idée antique d
2089
phes qu’elle annonce représentent notre châtiment
et
non pas notre délivrance. Ce n’est pas la mort, la désincarnation, qu
2090
Ce dernier chapitre est la conclusion de L’Amour
et
l’Occident , plus encore que des deux fragments publiés dans Esprit.
2091
n’importe quel malade sans génie. 108. Crainte
et
Tremblement, trad. d’après la version allemande de E. Geismar et R. M
2092
trad. d’après la version allemande de E. Geismar
et
R. Marx. ax. Rougemont Denis de, « Mariage et personne (II) : l’amo
2093
r et R. Marx. ax. Rougemont Denis de, « Mariage
et
personne (II) : l’amour action, ou de la fidélité », Esprit, Paris, n
2094
d’un ouvrage à paraître sous le titre : L’Amour
et
l’Occident . »
2095
de ceux qui se sont attaqués à la fausse passion)
et
la réponse de Rougemont. La voici : Au sujet de la lettre du R. P. La
2096
que stérile (mai 1939)ba Dans un certain sens,
et
aujourd’hui, nul n’est plus mal placé que les personnalistes pour cri
2097
, dès les années 1930 à 1932, avec une pertinence
et
une violence qui alors n’étaient pas sans mérites. Ils ont prédit l’é
2098
surer le « salut » de nos libertés… Ils ont écrit
et
dit tout cela, avant les autres, dans Esprit et dans L’Ordre nouve
2099
et dit tout cela, avant les autres, dans Esprit
et
dans L’Ordre nouveau . Ils étaient les premiers à le dire. Et l’on p
2100
dre nouveau . Ils étaient les premiers à le dire.
Et
l’on pensait qu’ils seraient les premiers à y croire, et à le prouver
2101
pensait qu’ils seraient les premiers à y croire,
et
à le prouver. Or, il ne paraît pas qu’à cette critique ait répondu ju
2102
une intensité comparable. Les partisans de droite
et
de gauche seraient fondés à nous dire aujourd’hui : « Vous avez très
2103
sa critique négative. Mon expérience des groupes
et
des congrès personnalistes m’amène à formuler les thèses suivantes :
2104
ion de ce groupe, après quelques séances d’études
et
de mises au point. 3. Car on ne croit pas suffisamment à ce qu’on aff
2105
n parti vrai, dont la doctrine soit plus complète
et
sympathique que celle des « formations traditionnelles », un parti où
2106
action possible qu’au moyen des partis existants,
et
l’on propose la colonisation du socialisme ou de la CGT — qui pratiqu
2107
par des « isolés ». 7. Ainsi l’écart entre action
et
doctrine s’accentue d’année en année. La doctrine tourne à l’utopie,
2108
essentiel : la création de moyens d’action neufs,
et
qui seraient efficaces justement parce qu’ils ne seraient pas à l’éch
2109
is : elle veut être une action à hauteur d’homme,
et
non pas au niveau de l’opinion. 10. Ceux qui doutent de son efficace
2110
centre sont victimes de l’optique des partis. 12.
Et
de même, ceux qui attendent pour agir que nous soyons « suffisamment
2111
19. Tout parti est totalitaire dans son essence,
et
préfigure l’État totalitaire, brutal et stérilisant. 20. D’où l’incap
2112
essence, et préfigure l’État totalitaire, brutal
et
stérilisant. 20. D’où l’incapacité essentielle des partis à collabore
2113
Autour de L’Amour
et
l’Occident (septembre 1939)bb bc Mon cher Davenson, Votre article
2114
re article brillant, méditerranéen sur mon Amour
et
l’Occident , par sa forme même d’apostrophe amicale et ironique, prov
2115
Occident , par sa forme même d’apostrophe amicale
et
ironique, provoque et engage un dialogue. J’ai d’autant moins envie d
2116
e même d’apostrophe amicale et ironique, provoque
et
engage un dialogue. J’ai d’autant moins envie de m’y soustraire que l
2117
r. Vous me dites (avec une gentillesse désarmante
et
si rare !) que mon livre « est un livre d’histoire » et que je ne sui
2118
rare !) que mon livre « est un livre d’histoire »
et
que je ne suis pas un historien. Je vois bien que vous non plus ne vo
2119
e voulez pas l’être comme tant d’autres le furent
et
le restent. Toutefois, c’est bien comme « historien » que vous m’atta
2120
est bien comme « historien » que vous m’attaquez,
et
certes je ne fais pas de ce mot une injure, mais simplement je consta
2121
de l’histoire comme quelqu’un qui y croit encore,
et
qui escompte que le lecteur y croit. Or moi je n’y crois pas du tout.
2122
roclite de textes, de dates, de noms de personnes
et
de lieux, de chiffres, de relations de gestes et de paroles, matériel
2123
et de lieux, de chiffres, de relations de gestes
et
de paroles, matériel avec l’aide duquel l’historien compose des faits
2124
ur écrire un sonnet ? Des contraintes rhétoriques
et
de la liberté, disons de l’imagination. De même, pour composer un « f
2125
il faut un certain nombre de renseignements fixes
et
une capacité fabulatrice qui leur donne un sens et un nom, comme « vi
2126
t une capacité fabulatrice qui leur donne un sens
et
un nom, comme « victoire » et « bataille de la Marne ». Le sonnet ser
2127
leur donne un sens et un nom, comme « victoire »
et
« bataille de la Marne ». Le sonnet sera critiquable si l’ordre des r
2128
. Le sonnet sera critiquable si l’ordre des rimes
et
des strophes n’est pas strictement respecté. La composition historiqu
2129
er vos critiques dans l’esprit de votre lecteur —
et
du mien. Car en fait, je ne prétends nullement que mon livre soit un
2130
faut une étiquette, un livre de théologie morale,
et
c’est sur ce terrain que je puis le défendre. Malgré toute mon horreu
2131
nements qu’elle authentifie. En tant qu’érudition
et
critique dite « sérieuse », elle se constitue proprement par le refus
2132
reconnaître là où elle est apparue dans le passé,
et
là où elle sévit dans le présent. Croyez bien qu’en tant qu’interprèt
2133
le présent. Croyez bien qu’en tant qu’interprète
et
théologien de l’histoire, je n’ai pas été sans découvrir dans votre a
2134
rit au nom desquelles nous portons nos jugements,
et
qui ne sont autres que les dogmes. — Ça existe, l’amour courtois !… d
2135
« vide de sa riche, émouvante réalité humaine »,
Et
vous citez la légende de Rudel, et vous me reprochez de n’avoir pas r
2136
ité humaine », Et vous citez la légende de Rudel,
et
vous me reprochez de n’avoir pas rêvé là-dessus et de n’en avoir tiré
2137
t vous me reprochez de n’avoir pas rêvé là-dessus
et
de n’en avoir tiré qu’un argument de tortionnaire. Vous ajoutez que j
2138
iens tout cela pour une « conception dépassée » ;
et
que j’en parle enfin comme on peut en parler à l’Université de Halle1
2139
je devrais vous dire que si je n’avais pas rêvé (
et
un peu plus…) sur l’aventure de Rudel, si j’étais insensible à cette
2140
i j’étais insensible à cette éloquence passionnée
et
à cette beauté intérieure, si je croyais cette conception dépassée, j
2141
cause principale de la crise du mariage moderne !
Et
c’est si « beau », si « éloquent », si « intérieur », si « riche », s
2142
modifiées ? J’entends mes conclusions religieuses
et
morales, ma décision, non telle ou telle hypothèse « historique » que
2143
u. Voilà le point. Voilà le terrain de ma défense
et
aussi de ma contre-attaque. « Je ne puis, moi, renoncer à rien de ce
2144
, cela va sans dire, mais ce n’est pas synonyme.)
Et
même dissonant, s’il le faut. Dans ma dissonance obstinée, je considè
2145
chrétien, c’est un homme qui choisit sans retour,
et
qui décide de renoncer, comme malgré lui, à ce qu’il y a de corrompu,
2146
e plutôt, dans tout ce que l’on appelle l’Humain,
et
qui ne l’est plus depuis la Chute d’Adam. Oui certes, rien d’humain n
2147
même temps qu’il sauvera ou restaurera l’humain,
et
comme à travers lui, pour le Cosmos. (Voir Romains 8). Vous estimerez
2148
. Je crois voir la réponse dans votre conclusion.
Et
force m’est alors de reconnaître qu’à l’origine de ce débat il n’y a
2149
nisme. « L’Amour vient de Dieu, appartient à Dieu
et
tend vers Dieu. » Le vieux fou de Transjordanie profère une vérité pr
2150
crit l’Apôtre. Nous trouvons en nous deux amours,
et
même trois. C’est là précisément le sujet de mon livre. Le premier am
2151
c’est le désir, c’est l’amour sensuel, sa fièvre
et
son bonheur, un « aspect éternel du cœur humain » — si vous voulez… (
2152
maladie de l’âme. Mais à partir du xiie siècle,
et
par l’effet de confusions mystiques, l’exaltation de cet amour nature
2153
blissante. C’est en tant que le désir est exalté,
et
d’une certaine manière « chaste » et spirituelle, qu’il devient un sy
2154
est exalté, et d’une certaine manière « chaste »
et
spirituelle, qu’il devient un symbole religieux : et voilà le deuxièm
2155
spirituelle, qu’il devient un symbole religieux :
et
voilà le deuxième amour, l’origine de l’amour-passion. Or cette exalt
2156
de narcissisme. Le seul amour qui tende vers Dieu
et
qui l’atteigne à travers la vraie créature, c’est l’amour qui est ven
2157
r le Christ, cette Agapè qui seule sauvera l’Éros
et
qui, loin de le sublimer, lui redonnera sa juste place dans l’humain.
2158
tre » ? Voilà toute notre opposition : catholique
et
platonisant, vous insistez sur la nécessité d’englober toute réalité
2159
erez de sacrifier la richesse émouvante du réel ;
et
moi, je crains que l’ambition scolastico-mirandolesque d’assumer tout
2160
i lu votre « Tristesse de l’historien ». (Mounier
et
Niklaus, qui sortent de chez moi, peuvent témoigner de l’authenticité
2161
idées de Raymond Aron, que je ne connaissais pas,
et
que vous approuvez ! (C’est aussi, en réalité, le développement de qu
2162
confidence deux phrases d’une lettre reçue hier,
et
relative à mon Amour : « Quand j’étais jeune, j’aurais parfaitement
2163
tion. » — Tristesse de l’historien n’est-ce pas ?
Et
c’est pourtant celui-là même qu’avec combien de raison vous offrez en
2164
modèle à vos disciples. (Mais oui, vous en avez,
et
je les souhaite nombreux : car avec de tels maîtres, ils auront bient
2165
Allemagne qu’on se passionne pour les troubadours
et
qu’on les connaît. » 111. La citation d’Ibn Dawoud que vous m’oppose
2166
lème délicat. Par contre, le paragraphe sur Dante
et
Ibn Arabi, que vous jugez sommaire, ne prétendait qu’à signaler en pa
2167
la thèse d’Asin Palacios que l’on peut discuter —
et
on l’a fait ! — mais que je n’avais pas le droit d’ignorer. bb. Rou
2168
er. bb. Rougemont Denis de, « Autour de L’Amour
et
l’Occident », Esprit, Paris, septembre 1939, p. 760-765. bc. Une no
2169
« Le dialogue qui s’est poursuivi entre Rougemont
et
Davenson, après la note de ce dernier dans Esprit d’avril, nous a par
2170
« Un divorce entre le christianisme
et
le monde ? » (août-septembre 1946)bd be Je ne vois pas le divorce
2171
lle s’arrange trop bien avec le monde (Constantin
et
la suite) c’est qu’elle trahit son état. Quand on croit le fossé comb
2172
n état. Quand on croit le fossé comblé entre elle
et
le monde, c’est qu’on se trompe à la fois sur la fonction de l’Église
2173
n se trompe à la fois sur la fonction de l’Église
et
sur la nature du monde. Le fait que leur incompatibilité se voit mieu
2174
de cesser d’être chrétien, sans s’en apercevoir,
et
c’est le risque qu’il court dans les périodes où les choses ont l’air
2175
questionnaire sur le fossé entre le christianisme
et
le monde romain ; ni les staliniens s’inquiétant du « divorce actuel
2176
’inquiétant du « divorce actuel entre le marxisme
et
le monde moderne », lequel s’est cependant constitué « massivement en
2177
-à-dire sur des bases capitalistes, nationalistes
et
libérales, avec quelques emprunts au christianisme. L’état d’Esprit q
2178
à une enquête] Un divorce entre le christianisme
et
le monde ? », Esprit, Paris, août–septembre 1946, p. 188-189. be. Ro
2179
tion préalable. Un divorce entre le christianisme
et
le monde ? Mais il est de toujours ! Non sans quelque hauteur, Denis
2180
clichés qui n’ont aucun rapport avec la question,
et
des affirmations grandiloquentes d’attachement indéfectible aux princ
2181
e. Posez la question d’une répartition des huiles
et
savons par l’État, et vous serez bientôt en plein délire : tous les p
2182
’une répartition des huiles et savons par l’État,
et
vous serez bientôt en plein délire : tous les partis nommeront des co
2183
question de principe à propos de ce produit utile
et
hygiénique. S’il y a crise dans la fabrication et dans la répartition
2184
et hygiénique. S’il y a crise dans la fabrication
et
dans la répartition de l’article, nous étudions deux questions, et pr
2185
ition de l’article, nous étudions deux questions,
et
prenons les mesures nécessaires pour les résoudre, non pas pour qu’on
2186
tion de la main-d’œuvre aux entreprises publiques
et
privées, celle des matières premières et d’une façon générale toute l
2187
ubliques et privées, celle des matières premières
et
d’une façon générale toute l’économie de guerre, laquelle représentai
2188
production. Le job a été bien fait : l’Allemagne
et
le Japon ont été battus. Et les agences de contrôle des prix, de la m
2189
en fait : l’Allemagne et le Japon ont été battus.
Et
les agences de contrôle des prix, de la main-d’œuvre et des matières
2190
agences de contrôle des prix, de la main-d’œuvre
et
des matières premières se dissolvent l’une après l’autre, sans trop d
2191
(ou plus exactement étatisé) toute son industrie
et
tout son commerce, sans dépense de salive patriotique, pour des raiso
2192
pour des raisons bien évidentes, connues de tous,
et
qui ne relevaient point de la lutte des partis. C’est pourquoi les pa
2193
t pourquoi les partis ne s’en sont point occupés,
et
n’ont point jugé nécessaire de proclamer l’union sacrée, au terme de
2194
ées de pathétiques interventions des vieux chefs,
et
de bouillantes interruptions de la jeune garde. Les partis, dans les
2195
arde. Les partis, dans les commissions du Congrès
et
du Sénat, se sont bornés à des échanges d’arguments souvent brutaux,
2196
tis baissent le nez, font appel à l’union sacrée,
et
délèguent tout pouvoir à l’État, qui est en l’espèce un nouveau chef
2197
ielle, c’est-à-dire vidange des responsabilités —
et
repart dans une politique nécessairement improvisée, puisqu’il a reçu
2198
ouveau venu, encore tout étourdi de sa puissance,
et
qui ne sait pas où l’on cache les dossiers, doit juger plus sagement
2199
ant avec émotion le renvoi de l’ingénieur en chef
et
son remplacement à la dernière seconde soit par un antifasciste conva
2200
ficiaire éprouvé de la tradition dite nationale…
Et
si nous ne sommes pas là pour consentir un prêt, payant la casse, vou
2201
adorons la France comme une femme ! Pour sa grâce
et
pour ses faiblesses de grande coquette blessée, peut-être. Mais aussi
2202
retenue ou rigueur, un certain équilibre élégant
et
hardi, qui nous en imposent encore… Nous faisons à la France un crédi
2203
comme le fut votre Herriot, que nous respectons.
Et
cessez de répéter sur notre compte des sottises pittoresques ou mépri
2204
? Les États scandinaves, la Suisse, la Hollande,
et
la Grande-Bretagne. Ce sont des démocraties en majorité socialistes,
2205
es familles. Quels sont les pays qui marchent mal
et
qui nous créent le plus d’ennuis ? L’Espagne et le Portugal, parce qu
2206
l et qui nous créent le plus d’ennuis ? L’Espagne
et
le Portugal, parce que ce sont des dictatures, et peu importe qu’elle
2207
et le Portugal, parce que ce sont des dictatures,
et
peu importe qu’elles réussissent matériellement, elles n’achèteront j
2208
chèteront jamais notre respect. L’Europe centrale
et
les Balkans, livrés aux Russes, qui les mettent au pillage, ce qui es
2209
nous plaît mieux que la Pologne : pays de blonds
et
les noirs sont suspects, tous les villains de nos films ont les cheve
2210
les cheveux noirs. De plus l’Allemand est propre
et
travailleur, et mon arrière-grand-mère était du Wurtemberg. Les Itali
2211
rs. De plus l’Allemand est propre et travailleur,
et
mon arrière-grand-mère était du Wurtemberg. Les Italiens ? Nous en au
2212
omment traiter ces États turbulents, susceptibles
et
toujours prêts et se battre. Oui, l’Europe, ce sont nos Balkans. Mais
2213
États turbulents, susceptibles et toujours prêts
et
se battre. Oui, l’Europe, ce sont nos Balkans. Mais il y a l’Amérique
2214
y a l’Asie, voilà ce qui compte pour le commerce
et
pour l’avenir de la paix. Vous avez bien envie de savoir ce que je pe
2215
rs sujets, de ce mépris de la vie humaine en gros
et
en détail, de ce refus d’ouvrir leurs frontières, de l’esclavage où i
2216
ères, de l’esclavage où ils tiennent leur presse,
et
de l’orgueil de parvenus de l’industrie et des sciences appliquées do
2217
resse, et de l’orgueil de parvenus de l’industrie
et
des sciences appliquées dont ils font montre même quand ils viennent
2218
nous avons le même goût de la production en masse
et
sans y regarder de trop près, du travail par équipes, pour battre un
2219
pour battre un record, du gaspillage, des chants
et
des beuveries. On dit que c’est la question de l’Asie qui nous sépare
2220
hons à l’Asie. Nous sommes une puissance maritime
et
cela compense la proximité géographique de la Russie. Pourquoi donc a
2221
s organisé, par les soins de la marine de guerre,
et
comme pour démontrer sa force à toute épreuve, les expériences de Bik
2222
evient possible… To sum up : Liberté, Prospérité
et
Poursuite du Bonheur, ce sont là mes trois idéaux. Et je ne les vois
2223
oursuite du Bonheur, ce sont là mes trois idéaux.
Et
je ne les vois réalisés qu’en Amérique. Comment l’Europe peut aide
2224
peut aussi être vrai. Car ces rêveurs sont aussi,
et
souvent, de vieux cornichons à lunettes, aux lèvres minces, sachant c
2225
es, aux lèvres minces, sachant compter leurs sous
et
damner les buveurs de whisky ; ces fils de puritains, de charmants pe
2226
ces « fondamentalistes » des déistes hérétiques ;
et
ces pieux catholiques des amateurs réjouis de confessionnaux climatis
2227
»… Ils sont modernes. Car avec une belle énergie
et
beaucoup moins de naïveté que nous ne le pensons, ils embrassent mieu
2228
fusion du siècle, ils y sont installés carrément,
et
ils l’exploitent non sans une sorte de bon sens pour que le plus gran
2229
n’ai pas su la faire sentir autant que je la sens
et
peut-être n’y parviendrai-je que d’une manière négative : en suggéran
2230
manière négative : en suggérant certaines mesures
et
attitudes spirituelles que l’Europe seule peut opposer ou proposer à
2231
à l’Amérique. Cinq choses témoignent de l’esprit
et
de sa présence active dans une culture. Les meilleurs d’entre nous le
2232
encore, tandis que les masses chez eux les fuient
et
que leurs élites ne s’en approchent qu’en hésitant. Ils nous sont sup
2233
Le sens de l’échec, de sa nécessité métaphysique
et
de sa valeur d’enseignement spirituel. La croyance exclusive et la ré
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r d’enseignement spirituel. La croyance exclusive
et
la réussite est le signe d’une vue bornée de notre condition humaine,
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rt. Le sens des formes, des symboles, des signes
et
des correspondances. On ne peut pas impunément se vêtir de n’importe
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, construire une banque qui a l’air d’une église,
et
une église qui a l’air gothique quand plus rien ne l’est en nous ni a
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, s’il éduque son sens des formes, cesse d’imiter
et
se met à créer. La réduction du fait à une signification. L’Américai
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r comme fer. Il les réduit d’ailleurs en chiffres
et
se sent aussitôt rassuré. Mais un fait n’est qu’un signe dans une équ
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vient les réveiller. Ils le tiennent pour pervers
et
masochiste. Et il est vrai que la conscience s’éveille généralement d
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ller. Ils le tiennent pour pervers et masochiste.
Et
il est vrai que la conscience s’éveille généralement dans la douleur,
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up de paradis artificiels à bon marché : l’alcool
et
Hollywood, les pin-up-girls et le glamour, Superman et les sports à l
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marché : l’alcool et Hollywood, les pin-up-girls
et
le glamour, Superman et les sports à la radio. Et ils s’entourent d’o
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llywood, les pin-up-girls et le glamour, Superman
et
les sports à la radio. Et ils s’entourent d’objets polis, luisants, e
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et le glamour, Superman et les sports à la radio.
Et
ils s’entourent d’objets polis, luisants, emballés dans de la celloph
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de la cellophane, qui n’offrent plus d’aspérités
et
ne posent plus aucune question ; de mécanismes qui répondent à leur p
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tion ; de mécanismes qui répondent à leur place ;
et
de musiques qui empêchent d’entendre le silence. Ils s’imaginent qu’u
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Ils s’imaginent qu’un certain nombre de recettes
et
de martingales, — d’ailleurs communiquées à tous les joueurs — suffir
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pas au Mal… Le krach de 1928, Hitler, la guerre,
et
quelques privations ont causé les premières fissures dans cet édifice
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de l’esprit ne les rend pas d’autant plus fortes
et
fréquentes que les poussées intimes de la conscience sont plus méthod
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c une volonté souriante mais sérieuse d’apprendre
et
de s’améliorer. J’y vois la marque de sa force. Qui n’a pas lu les ér
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in auxquels se livrent avec exubérance les revues
et
les journaux américains ne sait pas ce que c’est que la confiance en
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t, je me retourne vers mes compatriotes européens
et
je leur dis : si vous voulez que l’Europe dure encore — et le reste d
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r dis : si vous voulez que l’Europe dure encore —
et
le reste du monde en a besoin — ne vous contentez pas d’appeler pério
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x à nous donner que des frigidaires, des capitaux
et
des avions. Ils ont libéré nos villages. Libérons-nous à leur contact
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perdre aux élections sans insulter le vainqueur,
et
à gagner sans écœurer le vaincu. Apprenons d’eux à tenir parole, à no
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mie minutieuse des moyens, surestimée par l’École
et
l’État, et par toute la morale bourgeoise, trahit aussi un vice de l’
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use des moyens, surestimée par l’École et l’État,
et
par toute la morale bourgeoise, trahit aussi un vice de l’âme. Appren
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civilisation qui serait perdue, perdue pour tous
et
non seulement pour nous ! Ce n’est donc pas au nom de je ne sais quel
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mais au seul nom de l’humanité la plus consciente
et
la plus créatrice de l’homme. […] Or, il s’en faut de beaucoup que l
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véler dans tout le continent une sorte de clivage
et
un double tropisme. Les masses industrielles, dans leur partie active
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ans leur partie active, regardent vers la Russie,
et
les grands hommes d’affaires regardent vers l’Amérique. À tort ou à r
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notre continent, mais, à leur suite, les espoirs
et
les rêves des plus actifs d’entre nous ont émigré. La bourgeoisie, da
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emble, se contente d’un double refus de la Russie
et
de l’Amérique, se résigne à la décadence, ou la déplore mais sans fai
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vois plus, pour tenir vitalement aux conceptions
et
aux coutumes européennes, que deux classes par ailleurs tout opposées
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ctuels non embrigadés d’une part, les provinciaux
et
campagnards de l’autre. C’est-à-dire les esprits les plus libérés et
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’autre. C’est-à-dire les esprits les plus libérés
et
les plus attachés aux préjugés locaux ; les subversifs et les conserv
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lus attachés aux préjugés locaux ; les subversifs
et
les conservateurs par profession ou position. Ne demandons pas l’inst
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oc opposé aux deux autres. Ce ne serait résoudre,
et
, au contraire, ce serait exalter le nationalisme aux dimensions conti
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sions continentales. Ce qu’il nous faut demander,
et
obtenir, nous tous, c’est que les nations européennes s’ouvrent d’abo
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utres, suppriment, sur tous les plans, frontières
et
visas, renonçant au dogme meurtrier de la souveraineté absolue, créen
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monde, du même coup. Ce qu’il nous faut demander
et
obtenir — obtenir de nous-mêmes tout d’abord — c’est que le génie de
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d’abord — c’est que le génie de l’Europe découvre
et
qu’il propage les antitoxines des virus dont il a infesté le monde en
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n vue d’une fédération mondiale. Il n’y a de paix
et
donc d’avenir imaginable que dans l’effort pour instaurer un vrai gou
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fort pour instaurer un vrai gouvernement mondial.
Et
le monde, pour ce faire, a besoin de l’Europe, j’entends de son espri
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e du monde. La fédération sera l’œuvre de groupes
et
de personnes qui prendront l’initiative de se fédérer en dehors des g
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se fédérer en dehors des gouvernements nationaux.
Et
ce sont ces groupes et ces personnes qui formeront le gouvernement de
2277
s gouvernements nationaux. Et ce sont ces groupes
et
ces personnes qui formeront le gouvernement de l’Europe. Il n’y a pas
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t de l’Europe. Il n’y a pas d’autre voie possible
et
praticable. Les USA ne sont pas dirigés par une assemblée des gouvern
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ations sont gouvernées, au-dessus de leurs États,
et
en dehors d’eux, par un exécutif et un législatif issus des peuples.
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leurs États, et en dehors d’eux, par un exécutif
et
un législatif issus des peuples. […] Seul, le fédéralisme ouvre des v
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Suisse — les vieux conflits de races, de langues
et
de religions sclérosés dans le nationalisme et le problème des minori
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es et de religions sclérosés dans le nationalisme
et
le problème des minorités. Et surtout, il peut dépasser l’opposition
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ans le nationalisme et le problème des minorités.
Et
surtout, il peut dépasser l’opposition chaque jour moins convaincante
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onvaincante d’une gauche qui défend la contrainte
et
d’une droite qui revendique les libertés : le but, l’essence de la pe
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d un régime démocratique tendant vers l’anarchie,
et
débouchant dans le désordre, lequel prépare toujours la tyrannie. À l
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l’homme considéré comme personne, à la fois libre
et
engagé, et vivant dans la tension entre l’autonomie et la solidarité,
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sidéré comme personne, à la fois libre et engagé,
et
vivant dans la tension entre l’autonomie et la solidarité, correspond
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gagé, et vivant dans la tension entre l’autonomie
et
la solidarité, correspond le régime fédéraliste. bi. Rougemont Den
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érents discours prononcés par Denis de Rougemont,
et
réunis dans L’Europe en jeu . Ils sont reproduits ici dans le cadre
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ettre à Jean-Marie Domenach, à propos de « Sartre
et
l’Europe » (mai 1962)bk bl Vous constatez dans votre numéro de mar
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e ». J’avais dit pour ma part deux mois plus tôt,
et
vous me citez : « Quand Sartre écrit Europe il ne pense qu’à la Franc
2292
d Sartre écrit Europe il ne pense qu’à la France,
et
quand il pense France, il ne voit que le drame algérien. » Les deux p
2293
deux millions de personnes déplacées, la torture
et
« notre désastre spirituel » sont sans importance à mes yeux « quand
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it par « la conscience épouvantée d’une déchéance
et
d’un reniement », tandis que je ne m’occupe comme chacun sait que d’u
2295
it que d’une Europe des « règlements de douanes »
et
du « foie gras » : c’est en son nom, dites-vous, que je répondais à S
2296
ais du rôle de l’Europe historique dans le monde,
et
notamment des tâches dont elle est responsable — au sens actif du mot
2297
fet par ces lignes : « Devant la crise économique
et
la fièvre nationaliste du tiers-monde, l’heure n’est pas de cracher s
2298
aleurs, mais de les prendre nous-mêmes au sérieux
et
d’en tirer les conséquences pratiques pour le tiers-monde et pour l’E
2299
er les conséquences pratiques pour le tiers-monde
et
pour l’Europe qui doit l’aider… Ce que nous devons offrir au monde et
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doit l’aider… Ce que nous devons offrir au monde
et
à nos fils, ce n’est pas notre mauvaise conscience, notre rage autopu
2301
ple réussi de dépassement de l’ère nationaliste —
et
donc de l’ère colonialiste — par le moyen d’une grande fédération. Ce
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C’était cela, l’essentiel de ma réponse à Sartre,
et
non ces « additions d’automobiles et de pommes de terre », qu’il vous
2303
se à Sartre, et non ces « additions d’automobiles
et
de pommes de terre », qu’il vous plaît de m’attribuer, et qu’il vous
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mmes de terre », qu’il vous plaît de m’attribuer,
et
qu’il vous est loisible de juger bassement matérialistes, n’étant ni
2305
Lettre à Jean-Marie Domenach, à propos de “Sartre
et
l’Europe” », Esprit, Paris, mai 1962, p. 877-878. bl. La lettre de R
2306
e de la chronique que j’avais consacrée à “Sartre
et
l’Europe” (Esprit, mars 1962), j’ai reçu une lettre de Denis de Rouge
2307
oncerté par certaine psychanalyse des intentions,
et
ne parviens pas à me trouver tant d’astuce. Je me contente donc d’ass
2308
onc d’assurer Rougemont que son article m’a agacé
et
m’a mis en colère, d’où l’interprétation polémique que j’en ai faite.