1 1932, Esprit, articles (1932–1962). À l’index (Première liste) : Candide (octobre 1932)
1 l croque un Allemand, l’on doit reconnaître qu’il se surpasse et qu’il surpasse, mais il y a mis 16 ans — les plus fameux
2 pagande officieuse. M. Marcel Hutin n’a qu’à bien se tenir. La réussite est si complète qu’on se sent pris de malaise. Voy
3 bien se tenir. La réussite est si complète qu’on se sent pris de malaise. Voyons, sommes-nous encore en 1916 ? s’agit-il
4 de malaise. Voyons, sommes-nous encore en 1916 ? s’ agit-il encore de revanche ? S’agit-il encore de « faire durer le plai
5 s encore en 1916 ? s’agit-il encore de revanche ? S’ agit-il encore de « faire durer le plaisir » jusqu’au bout et à tout p
6 place M. Hermann, tout Allemand a le crâne rasé, s’ appelle Fritz, a volé des pendules et violé pour le moins une chaste f
7 e que nos camarades de la jeunesse allemande, qui s’ en inquiètent à juste titre, sachent ce que nous pensons des manifesta
8 efficacité dès la 2e page. Il semble que M. Paul s’ adresse exclusivement à ce bourgeois au faciès atroce que M. Abel Faiv
9 ut coûter cher à ses producteurs, de la haine qui se bat les flancs. a. Rougemont Denis de, « À l’index (Première liste
2 1932, Esprit, articles (1932–1962). On oubliera les juges (novembre 1932)
10 rtements ? ⁂ Une conviction intime et péremptoire s’ élabore et s’impose dans le silence d’une vie : la loi de Dieu s’oppos
11 Une conviction intime et péremptoire s’élabore et s’ impose dans le silence d’une vie : la loi de Dieu s’oppose à cette loi
12 impose dans le silence d’une vie : la loi de Dieu s’ oppose à cette loi des hommes qui veut qu’on tue. Une décision se form
13 e loi des hommes qui veut qu’on tue. Une décision se formule, peut-être pour la première fois, dans la solitude d’une cham
14 aideur de cette salle que le président de la Cour s’ obstine à nommer pompeusement « cette enceinte ». Une salle carrée, la
15 nt d’armes — dépose sur la table sabres et képis, s’ assied pour écouter : tout est jugé d’avance. Deux heures durant, quel
16 ignent leurs visages anonymes. Ils n’auront pas à s’ exprimer, d’ailleurs, sinon par la voix de leur président, et la mimiq
17 Dieu qui devrait être celle de tout croyant ; ou s’ il a seulement manifesté sa vocation particulière —, on voudrait dégag
18 ait qu’on invoque son nom dans tous les cas où il s’ agit en vérité de conscience de classe, de conscience bourgeoise. Mais
19 de classe, de conscience bourgeoise. Mais qu’elle se mêle un jour de s’affirmer par une personnalité, et par là même de ne
20 ience bourgeoise. Mais qu’elle se mêle un jour de s’ affirmer par une personnalité, et par là même de ne plus coïncider ave
21 n’est pas tout à fait des mêmes braves gens qu’il s’ agit dans les deux cas, mais c’est du même état, qu’ils tolèrent.) 4°
22 guerre ses aînés : c’est pour la même cause qu’il se sacrifie, avec le même courage. On les a décorés, on l’emprisonne. 5°
23 nt à chaque témoin, qu’en faites-vous ? » Un seul se permit de répondre que toutes les guerres sont défensives. Quelqu’un
24 demeurer pacifiste. Dans un régime social où tout se tient, mais par la seule logique de la décomposition nécessaire de pr
25 Martin, détaché de ses considérants individuels, s’ isole comme un signal de rupture consommée. Tout homme qui agit, sa pe
3 1933, Esprit, articles (1932–1962). Comment rompre ? (mars 1933)
26 saire à une paix avantageuse, à une paix dont ils s’ imaginent pouvoir tirer bénéfice pour la foi, — bien plus, que les chr
27 le désordre se trouve « établi ». Notre jeunesse s’ éveille au milieu des statuts de cette confusion. C’est contre eux dès
28 a tout dit pour la rendormir, mais en vain : elle s’ est fait mal, et la douleur tient réveillé. On a essayé de nous faire
29 dénoncer ? au nom de quoi ? La rupture ne pourra s’ opérer qu’au lieu même où la collusion s’est faite. Or elle n’a pas pu
30 e pourra s’opérer qu’au lieu même où la collusion s’ est faite. Or elle n’a pas pu se faire entre le christianisme et l’inj
31 e où la collusion s’est faite. Or elle n’a pas pu se faire entre le christianisme et l’injustice de ce monde, l’un n’exist
32 vilège, le perdent par là même, et dérogent, mais s’ obstinent à porter un titre désormais irrecevable. Ce parti peut être
33 ’est pas à lui de rompre avec l’injustice dont il s’ est fait le soutien, et qui, depuis, assure son succès relatif. Une ég
34 ablissant à son tour un ordre injuste du monde et s’ appuyant sur lui, en réalité n’est plus l’Église et n’a plus le droit
35 demander à ce siècle de rompre avec lui-même, de s’ arracher le cœur. Il n’y a de rupture possible qu’au nom de l’Évangile
36 e possible qu’au nom de l’Évangile2. Elle ne peut se produire qu’entre le christianisme véritable et cette « chrétienté »
37 ristianisme véritable et cette « chrétienté » qui s’ en réclame encore au moment où elle le trahit. Telle sera donc la form
38 d’autre part, et pour la même raison, il ne peut s’ en targuer pour fonder un « ordre chrétien » ; et s’il le fonde, c’est
39 en targuer pour fonder un « ordre chrétien » ; et s’ il le fonde, c’est en réalité sur une tout autre force que celle de la
40 est à l’intérieur de la religion. Les églises qui se crurent en droit d’édicter un « ordre chrétien », se fondaient toutes
41 crurent en droit d’édicter un « ordre chrétien », se fondaient toutes, et se fondent encore, sur une conception antichréti
42 er un « ordre chrétien », se fondaient toutes, et se fondent encore, sur une conception antichrétienne de la foi. La foi,
43 i, pour elles, est une « force » que l’homme peut se procurer, apprivoiser, réglementer, administrer dans la durée. C’est
44 feindre d’accepter la doctrine de ses disciples, se faire un avoir de la Pauvreté évangélique, et bientôt ne plus vivre q
45 foi, don de Dieu, et gratuit — « afin que nul ne se glorifie » — est une participation instantanée à l’éternel, elle juge
46 ternel, elle juge et condamne ceux-là d’abord qui s’ en réclament. Et c’est pourquoi il y a un imposteur dans tout homme qu
47 pourquoi il y a un imposteur dans tout homme qui se dit chrétien. (Je ne dis pas cela d’un point de vue antichrétien.) Ma
48 gloire de Dieu ! — qui poursuivrait son plan sans se soucier de la justice de Dieu. Et la voix du prophète s’élève contre
49 ier de la justice de Dieu. Et la voix du prophète s’ élève contre l’Église : « Tes amis t’ont jouée, t’ont dominée, ceux qu
50 sar. Entraînée dans cette politique, la théologie se fait servante de la chose publique. Et que voit-on dès lors ? Présent
51 des Georges Goyau et autres « croyants » décorés, s’ indigner de ce que les sans-Dieu parlent de confisquer à leur profit «
52 ropriété, toute idée de patrie… [et l’énumération se poursuit jusqu’à ceci ] : Chose plus atroce encore, [sic] l’idée chré
53 rs, mais pourquoi les crois-tu soudain, quand ils se donnent pour chrétiens ? ⁂ Quand, par la maladie du monde, la « chrét
54 dit Kierkegaard7, toute l’extraordinaire sottise ( s’ il faut lui laisser toutefois de l’extraordinaire) de défendre le chri
55 ecclésiastique, qui aujourd’hui prétend durer et se défendre contre le monde soulevé. Étrange illusion, certes, puisque e
56 d’obéissance privilégié pour le chrétien, mais ne se confond pas avec l’enjeu de son salut. Tel est le paradoxe, qui remon
57 t non pas au nom d’un « ordre social chrétien qui s’ opposerait au désordre actuel, capitaliste ou marxiste. Car la révolte
4 1933, Esprit, articles (1932–1962). Protestants (mars 1933)
58 profonde de toute l’histoire —, le protestantisme se doit d’être révolutionnaire dans la mesure même où il reste fidèle à
59 mine, des protestants qui loin de renier leur foi se fondent sur elle pour attaquer le régime. L’exemple de l’Allemagne es
60 groupements politiques, résolus à la rupture, qui se réclament hautement de leur foi. Les éléments extrémistes de la socia
61 éléments extrémistes de la social-démocratie, qui s’ expriment dans les Neue Blätter für den Sozialismus sont des éléments
62 rire le petit-bourgeois « progressiste », ou bien se voit taxée sans examen de « manœuvre réactionnaire », on est surpris
63 urs sur la religion (recueillis par Jerome Davis) se fait l’écho de ces revendications antiecclésiastiques sinon antichrét
64 e dimanche, l’alcool et la moralité, mais qu’elle s’ est arrêtée au moment où il semblait qu’elle dût s’occuper de la durée
65 ’est arrêtée au moment où il semblait qu’elle dût s’ occuper de la durée du travail, de la question des salaires, etc. Cett
66 veulent combattre ? Cette critique semble pouvoir s’ appliquer également au groupement tout récent qui s’intitule Economic
67 appliquer également au groupement tout récent qui s’ intitule Economic Justice et à la tête duquel on retrouve Jerome Davis
68 s réformistes ou révolutionnaires chrétiennes qui se manifestent en Amérique. On remarque dans la liste de ses collaborate
69 Plus radical que les socialistes, labouristes, il se distingue nettement des marxistes dont il rejette le matérialisme mét
70 e l’aile gauche intellectuelle du protestantisme, s’ attarde aux solutions réformistes et pacifistes, et n’a pas tenté jusq
71 il y a là le germe d’un mouvement qui demain peut se préciser et s’amplifier. Signalons enfin la revue internationale de l
72 rme d’un mouvement qui demain peut se préciser et s’ amplifier. Signalons enfin la revue internationale de la Fédération de
5 1933, Esprit, articles (1932–1962). Loisir ou temps vide ? (juillet 1933)
73 pé leurs liens vivants. Nous le voyons lourdement se débattre dans une amère contradiction : labeur forcé ou inaction. Et
74 a mesure, son rythme et sa joie. Une totalité. Et s’ il divise alors le temps de ses journées, c’est pour mieux dominer ses
75 son « travail » n’est plus que souffrance. Il ne s’ agit plus d’accoucher, mais seulement de purger sa peine. C’est alors
76 e du « minimum de vie » que n’importe quel animal s’ assure à moins de frais. Sinistre farce. Morale officielle de la Trois
77 berté n’est pas à l’origine d’un système, elle ne s’ introduira jamais dans ses effets (à moins d’une révolution). Mais il
78 ion, un travail sans loisir, sans liberté, laisse s’ étendre l’empire de la nécessité. On aura beau l’intensifier10 : la tâ
79 pe toutes les règles de vie que l’homme essaie de se donner pour justifier à ses propres yeux, voire pour glorifier ce qu’
80 beur et le repos n’ont plus de finalité commune ; s’ il n’y a plus de loisir dans le travail ni de travail dans le loisir ;
81 ir dans le travail ni de travail dans le loisir ; s’ il n’y a plus rien dans l’un qui permette de saisir la nature de l’aut
82 ent à l’existence du peintre. Cependant l’artiste se promène. Sur les plages, il vagabonde, il contemple, il apprend, il c
83 contemple, il apprend, il calcule. Au terme qu’il s’ était fixé, le voici devant son seigneur. « Ton tableau ? » — « Qu’on
84 miraculeux…   P.-S. — Cette histoire de la Chine se suffit. J’aurais pu faire l’économie du reste. Mais nous vivons dans
85 n en Russie d’une civilisation américaine dont on s’ efforce, à coups de plans, de satisfaire les exigences artificielles.
6 1934, Esprit, articles (1932–1962). Préface à une littérature (octobre 1934)
86 e crée pas la vie en insultant la mort. Il faudra se tourner ailleurs. Il faudra remonter à ce qui juge nos faiblesses, no
87 t blessées. Notre conscience à moitié endormie ne se réveille plus que sous les coups. Il nous faut apprendre le bien par
88 eurs générations mener cette course épuisante, et s’ abattre à la fin dans les colonnes des magazines de gauche, pâture des
89 ! Toute la bassesse de la « littérature » moderne se résume, à mon sens, en une phrase un peu grossière : c’est une littér
90 ntes. Le bourgeois aime leurs œuvres, parce qu’il s’ y retrouve ; et le peuple les aime, parce qu’elles décrivent ses désir
91 l’on gruge légalement son prochain, soit que l’on se découvre légalement grugé, il est bon de sentir qu’au-dessus de cette
92 moyens. Elle comprend la plupart des auteurs qui se gaussent des deux premières, ceux qui méprisent la vie bourgeoise, l’
93 ois émancipé ne pourrait pas « vivre sa vie ». Il se sentirait prisonnier. Il en viendrait peut-être à des actes irréparab
94 là justifié dans sa mauvaise conscience. Jeunesse se passe, anarchie se passe, rougeole se passe, — mais rien de grave ne
95 mauvaise conscience. Jeunesse se passe, anarchie se passe, rougeole se passe, — mais rien de grave ne se passe. C’est com
96 e. Jeunesse se passe, anarchie se passe, rougeole se passe, — mais rien de grave ne se passe. C’est comme au jeu de pigeon
97 passe, rougeole se passe, — mais rien de grave ne se passe. C’est comme au jeu de pigeon vole. Il reste quelques écrivains
98 s à hue et à dia, lancent des modes, les renient, se persuadent de l’importance de leurs caprices, nous persuadent bien da
99 se des influences, elle prévoit des succès ; elle s’ applique à parler du livre dont on parle plutôt que de celui dont il f
100 ’hui dans une science que je n’aime guère, et qui s’ appelle la sociologie. La grande faiblesse de la littérature actuelle,
101 iblesse de la littérature actuelle, c’est qu’elle s’ est rendue justiciable de la critique des marxistes. « L’art pour l’ar
102 ritique « de classe » reste encore négative. Elle se condamne aussi à rendre compte des seules œuvres mineures, toute créa
103 e est incertaine de sa mission. Cette anarchie ne se développera pas impunément : elle va se résoudre en violences. Il n’y
104 archie ne se développera pas impunément : elle va se résoudre en violences. Il n’y a pas d’exemples, dans l’histoire, qu’u
105 s puissances qu’elle avait négligées ou dont elle s’ était faite complice. Nous avons vu déjà que le roman bourgeois servai
106 entraîne des engagements humains ; rapidement il se concrétise en relations de responsabilité. Et voilà bien le seul fond
107 la stupidité, j’entends à l’absence de jugement. S’ il est un genre que nos critiques sont unanimes à condamner sans nul r
108 sont que diversions, idéalistes ou immoralistes, s’ ils ne sont pas les descriptions désenchantées d’une société en voie d
109 onscience commune. Nous voyons aussi le bourgeois s’ émerveiller de ce rajeunissement. Craignons que le fascisme ne tire bé
110 t. C’est à partir d’elle seule qu’un art original se développera naturellement en un art communautaire, et que les moindre
111 loin de son train-train, etc. tel est le rôle que se propose de poursuivre (sic) cette collection. » 13. J’inclus dans « 
112 a révolte surréaliste. Une révolte qui n’a pas su s’ assigner des buts constructifs échoue toujours, et fatalement, dans un
113 rdre ; pour l’incroyant, c’est la mission dont il se sent responsable envers lui-même. g. Rougemont Denis de, « Préface
7 1934, Esprit, articles (1932–1962). Sur une nouvelle de Jean Giono (novembre 1934)
114 is les bourgeois paresseux, vaguement inquiets de se tenir au courant de ce qu’ils croient être la chose littéraire ; 2° p
115 eu des malheurs, qui les conte assez mal — Giono s’ en mêle trop — et qui a cherché à s’en tirer par ses moyens. Je cite :
116 z mal — Giono s’en mêle trop — et qui a cherché à s’ en tirer par ses moyens. Je cite : J’essayai de me sauver par l’espri
117 voilà un trait juste, de la part du romancier, —  s’ il est voulu. Les mots, les expressions des philosophes sont sans cess
118 ahissent la pensée de ceux qui les répètent, mais se chargent alors, parfois, dans la bouche des innocents, d’une humanité
119 te de reconnaissance à payer à M. Johan Bojer, et s’ il était là, je lui ferais ma belle révérence paysanne et je lui dirai
120 enton. Ils m’ont dit : — Fais voir tes yeux ! Ils se sont baissés jusqu’à moi. Ils se sont assis à côté de moi. Ils m’ont
121 r tes yeux ! Ils se sont baissés jusqu’à moi. Ils se sont assis à côté de moi. Ils m’ont dit : — Fais voir où tu as mal, p
122 e vous dépose ici ? Où voulez-vous ? Tenez, on va s’ arrêter devant la pissotière, ha ! ha ! ha ! Ça me rappelle une bien b
123 istoire, vous devriez lire ça, Clochemerle que ça s’ appelle, je ne sais plus le nom du type qui a écrit le bouquin. Ah ça
124 le curé, la politique et tout15 !… » Les éditeurs s’ efforcent de répondre à la demande du public. Il faut des livres facil
125 pas ce qu’ils ont l’air de demander, et ce qu’on se montre si pressé de leur donner à bon marché. Ils s’expriment mal, il
126 montre si pressé de leur donner à bon marché. Ils s’ expriment mal, ils trahissent leur pensée, leurs désirs, ils n’osent p
127 audrait. On ne le leur a pas appris. On a préféré se payer leur tête. On les a pris pour ce qu’ils ont l’air d’être, ou mi
128 ir d’être, ou mieux pour ce qu’ils croient devoir se donner l’air d’être ou de n’être pas. Comme si le fin du fin, c’était
8 1934, Esprit, articles (1932–1962). Définition de la personne (décembre 1934)
129 dans l’instant où elle rencontre une occasion de s’ exercer, et la saisit. Par ces deux phrases, nous n’avons pas encore d
130 u croisement de deux définitions. Les philosophes se résignent très mal à cette limitation de leur pouvoir : il nous faut
131 ue le sujet détient une primauté de fait. Il peut s’ éprouver dans l’angoisse, il y trouve, loin de l’objet, une sorte d’ex
132 s, l’une virtuelle ou distante, l’autre actuelle. S’ il se borne à imaginer l’objet hors de sa prise, comme absent, il ne f
133 une virtuelle ou distante, l’autre actuelle. S’il se borne à imaginer l’objet hors de sa prise, comme absent, il ne fait à
134 et qu’il jubile, — qu’il agit. C’est pourquoi ils se trompent du tout, ceux qui considèrent l’homme, dans leurs calculs, c
135 es hommes ne calculent qu’avec leur angoisse, ils s’ enfoncent dans l’incertain, divaguent dans la précision. Les lois qu’i
136 que la psychologie passe à côté de la fin qu’elle s’ assigne, qui est l’étude du comportement humain. Il n’est de science q
137 t encore à dire qu’une « science de l’homme » qui se veut purement descriptive est exacte dans la mesure où elle décrit no
138 pliquer. Mais qu’il paraisse, aussitôt les objets s’ ordonnent à sa décision, et deviennent saisissables pour l’entendement
139 ui qui fait loi, de celui qui regarde à celui qui s’ engage. Nous pouvons voir ensuite un premier caractère de la personne
140 e, et qu’il n’est pas de réduit si secret où l’on se cache, qui ne soit justement l’un des lieux où l’action générale avai
141 e insaisissable devient tout à coup un acteur, et se met à se comporter tout comme s’il connaissait le fil du drame. D’où
142 ssable devient tout à coup un acteur, et se met à se comporter tout comme s’il connaissait le fil du drame. D’où lui vient
143 up un acteur, et se met à se comporter tout comme s’ il connaissait le fil du drame. D’où lui vient tout à coup l’assurance
144 à en dépit de la forme du monde, et par eux seuls s’ opèrent ces transformations qui scandent la durée, qui marquent nos mé
145 rimé à l’action générale par cette apparition qui s’ y insère. C’est une nouvelle qualité du concret. Mais ce mystère de la
146 individu. La psychologie de la personne parfaite se réduirait purement et simplement à son histoire, à l’énoncé des témoi
147 e dignité que la raison des peuples et des clercs s’ accorde à révoquer en doute ? L’imagination de la personne à l’état pu
148 sauvegarde de ces réalités prochaines que doivent s’ ordonner les relations plus générales. Cette thèse simple constitue à
149 onne à primer sur l’ensemble demeure indéfendable s’ il n’est pas imposé par le fait humain primordial. Le droit divin n’es
150 ression, de plus en plus abstraite à mesure qu’on s’ élève à des nombres plus grands, du pouvoir prochain de la personne ;
151 u pouvoir prochain de la personne ; il n’est rien s’ il n’est pas l’extension naturelle du risque et du concret de l’homme
152 naturelle du risque et du concret de l’homme qui se dépasse. Qu’importe l’honneur d’un pays, s’il est le fruit de la désh
153 e qui se dépasse. Qu’importe l’honneur d’un pays, s’ il est le fruit de la déshumanisation des citoyens ? Qu’importe une « 
154 des hommes reliés ? Qu’importe l’ordre de l’État, s’ il se maintient au prix du désordre privé ? Qu’importe, en fin de comp
155 ommes reliés ? Qu’importe l’ordre de l’État, s’il se maintient au prix du désordre privé ? Qu’importe, en fin de compte, l
156 privé ? Qu’importe, en fin de compte, l’humanité, s’ il n’y a pas d’abord des hommes présents les uns aux autres ? La perso
157 tre la vérité de plusieurs doctrines humaines qui s’ entrebattent dans la confusion et nourrissent des haines bavardes. Je
158 e clercs ; il a compris que le phénomène homme ne se produit en fait qu’au niveau des objets, et que tout ce qui est doit
159 nt. Mais alors le malheur du spiritualisme fut de se replier sur cette liberté pour la chérir dans sa précieuse intégrité.
160 de l’engager dans des limites objectives. Il veut se garder pur, et reste virtuel. Il se croit maître de tous les objets,
161 ives. Il veut se garder pur, et reste virtuel. Il se croit maître de tous les objets, mais néglige d’en choisir aucun. Il
162 -dire qu’il l’atrophie. L’objet pendant ce temps, se dégrade selon ses lois. La révolte matérialiste trouve dans la carenc
163 d’ombre et d’abstractions, parfois violentes, où se poursuit ce vieux débat, aucun espoir de solution réelle n’est plus p
164 rait ou impuissant. Dans l’acte, l’une et l’autre se mesurent et se réalisent : la charité de la personne est d’ordonner c
165 ant. Dans l’acte, l’une et l’autre se mesurent et se réalisent : la charité de la personne est d’ordonner ce corps-à-corps
166 vérité, cette illusion provient d’une pensée qui se refuse à nos limites, faute parfois de les avoir assez sérieusement é
167 rtelle n’est rien que l’illusion d’un égoïsme qui se glorifie dans l’abstrait. Qu’est-ce alors, parmi nous hommes de chair
168 pelle esprit cette surprise pure de mon corps qui se voit conduit où rien en lui n’était nécessité d’aller. J’appelle espr
169 vu qu’un corps en mouvement. C’est parce que Dieu s’ est révélé dans un corps d’homme que l’esprit, parmi nous, n’est rien
170 ’une évidente nouveauté. Maintenant quelque chose s’ est passé, un risque est là, et ma vie est en lui. L’ai-je accepté ? D
9 1934, Esprit, articles (1932–1962). André Breton, Point du jour (décembre 1934)
171 Point du jour (décembre 1934)j Le surréalisme s’ est présenté comme révolution, et comme tel il a bénéficié pendant plu
172 s c’est cela aussi que l’homme ne peut avouer que s’ il connaît un au-delà du désespoir. Faute de le pressentir, ils ont mé
173 en face — ce courage que donne seule la foi — ils se sont mis à déclamer un désespoir décoratif, un désespoir postiche et
174 cet homme est empêtré par le scrupule de ce qu’il se doit ! Et qu’il est attentif à sa propre démarche ! « Il me paraît ab
175 nc, cet homme qui le prend de si haut ? Son livre s’ ouvre par un discours lyrique « sur le peu de réalité » et se termine
176 un discours lyrique « sur le peu de réalité » et se termine par des considérations décousues sur quelques résultats récen
177 outes suspecte, la psychologie de laboratoire. Il s’ agit, dans l’idée de l’auteur, de dévaloriser (ou de transcender ? ) «
178 s pur et simple d’agir et de créer, j’entends, de se poser comme auteur responsable de son acte ? Alors qu’elle ne repose
179 ne repose que sur l’espoir du faible : que la vie se fasse « toute seule », que l’homme ne soit plus rien qu’un spectateur
180 ée, je serais le dernier à m’en plaindre. Mais il s’ agit ici, tout simplement, de s’évader d’une réalité qu’on craint. Le
181 plaindre. Mais il s’agit ici, tout simplement, de s’ évader d’une réalité qu’on craint. Le ton bien plus modeste (trop mode
182 yle est large, ses périodes font la roue. Mais il se débrouille mal avec des données scientifiques ; sa syntaxe s’embarras
183 e mal avec des données scientifiques ; sa syntaxe s’ embarrasse et s’alourdit dès qu’il aborde une matière tant soit peu ré
184 onnées scientifiques ; sa syntaxe s’embarrasse et s’ alourdit dès qu’il aborde une matière tant soit peu résistante par ell
185 ours de phrases élégants et péremptoires, et l’on se demande alors si ce bel « abattage » n’a pas dissimulé, aux yeux des
186 un défaut de culture, au sens banal du terme, qui se trahit ici fâcheusement. Iront-ils au-delà du romantisme allemand — q
10 1935, Esprit, articles (1932–1962). André Rouveyre, Singulier (janvier 1935)
187 sujet de cette méditation. Deux êtres très divers se sont unis dans une passion grave, exigeante, à l’écart d’une société
188 les domine. Une analyse racinienne des sentiments s’ unit ici à la rigueur d’un idéal orgueilleux, ombrageux. Tout cela se
189 ueur d’un idéal orgueilleux, ombrageux. Tout cela se perd d’ailleurs, dans l’amertume « désertique » d’un tête-à-tête de l
11 1935, Esprit, articles (1932–1962). Albert Soulillou, Nitro (février 1935)
190 e ces années éprouvent simultanément le besoin de s’ exprimer par des romans du format standard : 224 ou 600 pages exacteme
12 1935, Esprit, articles (1932–1962). Roger Breuil, Les Uns les Autres (avril 1935)
191 l’importance : c’est la circulation constante qui s’ opère aujourd’hui entre les anciennes catégories sociales, d’ailleurs
192 c’est l’étude concrète de la communauté qui peut s’ instituer par le jeu des passions, ou les liens du métier, ou certains
193 des thèmes humains auxquels Esprit voudrait voir s’ attacher les romanciers de la nouvelle génération : cet appel à la vie
194 . Un tel livre n’est pas de ceux dont la carrière s’ épuise en une saison, si j’en crois l’amitié, les visages, et les coul
13 1935, Esprit, articles (1932–1962). Kasimir Edschmid, Destin allemand (mai 1935)
195 rature d’après-guerre. Personne n’en a parlé : on s’ occupait du prix Goncourt et des travaux d’amateurs de quelques dames
196 re qui mériterait, mieux que celui de Malraux, de s’ intituler : la condition humaine. Craindrait-on par hasard de parler d
197 r un peu l’échelle de nos jugements ? La critique se tait sur Edschmid, l’Académie refuse Claudel. État de l’élite françai
198 de la dernière guerre que le chômage contraint à s’ engager comme instructeurs de l’armée bolivienne. (On sait que ce fut
199 uvrent surtout que cette patrie pour laquelle ils se sont battus et qui n’a plus la force d’utiliser leurs énergies, est i
200 Paz — celui qui n’a pas pu sauver ses camarades — se dresse devant lui dans son délire. Une fois encore, Pillau lui montre
201 s dernières ressources de sacrifice. Mais il faut se représenter un Malraux qui aurait les nerfs solides ; moins intellect
14 1935, Esprit, articles (1932–1962). Tristan Tzara, Grains et Issues (juin 1935)
202 ce imagée et de copules et incidences abstraites, s’ appelant de proche en proche, mécaniquement. On retrouve dans cette sy
203 u’un vaste télescopage, et les livres de M. Tzara se réduiraient peut-être, logiquement et en fait, à un seul mot. Je forc
204 ve se trouve refoulé par le langage rationnel. Il s’ agit donc de faire sauter tous ces « barrages », de confondre à nouvea
205 ominante de l’époque, je constate que ce complexe se manifeste justement par l’adoption des hypothèses du matérialisme his
206 atérialisme historique. Cette croyance que la vie se fera toute seule et que des « lois » inexorables se chargent de trans
207 fera toute seule et que des « lois » inexorables se chargent de transformer le monde, cette démission de la personne23 es
208 e, revue officielle du PC. Il veut que le langage s’ assouplisse au point de pouvoir intégrer les formes nouvelles de pense
209 ’économise pas sur les volutes !). Mais la pensée se dégage mieux. Quoique toute douleur morale puisse être ramenée à un
210 r le solide terrain de l’économie psychique, l’on s’ attaque à un système général de choses en ignorant cette misère morale
211 jet extérieur » (p. 283). Autrement dit, le sujet se désiste de sa responsabilité au profit de l’objet, — d’où l’erreur d’
15 1935, Esprit, articles (1932–1962). « L’Esprit n’a pas son palais » (octobre 1935)
212 au goût de la catastrophe que certains plumitifs se plaisent à entretenir au sein du fameux « désarroi » de l’après-guerr
213  » de l’après-guerre, le grand quotidien parisien s’ empressait d’ailleurs de faire suivre l’annonce du mal de celle de son
214 des réalisations. Les idées fermentent. Les plans s’ ordonnent. Les volontés se tendent. Les chantiers s’ouvrent. Une fois
215 s fermentent. Les plans s’ordonnent. Les volontés se tendent. Les chantiers s’ouvrent. Une fois de plus, la France va affi
216 ordonnent. Les volontés se tendent. Les chantiers s’ ouvrent. Une fois de plus, la France va affirmer sa vitalité, sa puiss
217 n splendeur les manifestations du même ordre dont s’ est illuminé le passé. Mais nous entendons lui donner son caractère pr
218 ollion, jusqu’aux maîtres glorieux d’aujourd’hui, se sont déroulées les « chaînes » qui, des profondeurs de la nature ou d
219 e à l’Exposition. Pourvu, à côté des pavillons où se présenteront les grandes découvertes, de salles destinées aux cherche
220 es aux chercheurs de tous les pays, qui viendront se retremper à Paris, d’amphithéâtres pour les conférences et pour les c
221  bref, d’une époque où ce qu’on nomme l’esprit ne s’ impose plus sans discussion. Lorsque l’État vient au secours d’une rel
222 u’elle n’en a plus pour longtemps. Lorsque l’État s’ avise d’honorer « l’esprit créateur », tremblons pour l’avenir de la n
223 il est nécessaire de mettre l’esprit à sa place — s’ écriait le fameux romancier —, à sa place qui est la première, et de l
224 t d’aise. Mais je goûtai surtout que le romancier se montrât moins littérateur et beaucoup plus précis dans ses projets qu
225 r sur le pavois ? La réponse est simple. L’esprit s’ exprime par l’écrit et la parole. Un sanctuaire de l’esprit sera donc
226 III. Le temple est vide On ne pouvait mieux se moquer de l’intelligence. Craignons toutefois que l’intention de nos
227 intéressement d’un député et d’un littérateur qui se consacrent à la défense du spirituel ? La grâce moscovite vous aurait
228 ut-être certains intérêts, qu’il ne faut pas trop s’ étonner de son triomphe universel. Professeurs, députés ou commissaire
229  » dans un temple construit par l’État, la pensée s’ évanouit, le temple est vide. Un Palais de l’Esprit ne peut être qu’un
230 e nom de « Cité René-Descartes ». L’Exposition va se dérouler sous le patronage du grand génie, savant, philosophe, écriva
231 aujourd’hui, quand tout un siècle d’enseignement s’ est appliqué à le fixer et à l’étendre. Mais il demeure certain que l’
232 er dans l’exercice quotidien de leur travail. Ils s’ estiment à bon droit les seuls juges de l’aspect technique du métier,
233 i lui revient dans l’économie générale29. De là à se figurer, d’ailleurs d’une façon vague, que les penseurs sont des gens
234 cartes n’y est pour rien. Il faudrait bien plutôt s’ en prendre au régime des classes sociales, qui codifia cette distincti
235 et « mal compassée » (Descartes). Et plus rien ne s’ oppose alors aux spécialisations les plus artificielles, aux découpage
236 s. On tend à ne garder de ceux-ci que ce qui peut s’ organiser en belles séries, selon les exigences d’une philosophie tant
237 ontente d’avoir sophistiqué l’histoire, elle veut se réduire à son tour à une histoire des doctrines, à une filiation de s
238 rogrès » continu des « problèmes » où le tragique se résorbe en erreurs. Cette obsession de la science, c’est-à-dire de la
239 s historiens, les « philosophes » de l’Université s’ occupent de psychologie. Mais là encore, ils ont trouvé le biais qui l
240 ut du xxe siècle, on a cru sauver l’apparence en s’ occupant sous le même nom — psychologie : science de l’âme — d’un tout
241 constituée dans la lutte contre une réalité qu’il s’ agit de modifier et non pas seulement de décrire, on fera bien d’aller
242 image épurée d’un monde fait de lois. Cette image s’ interpose entre la pensée « pure » et le réel confus et dangereux qui
243 tinct » reste sans force créatrice. Plus l’esprit se refuse à l’engagement, plus il lui paraît évident que l’engagement es
244 ident que l’engagement est impossible. Et plus il se persuade que sa nature est essentiellement « distinguée », essentiell
245 isait… VI. Le geste de Pilate Lorsque Renan se résigne sans peine à cette « abdication » du rôle actif de l’esprit,
246 x mènent le monde à sa perte ; qu’ils refusent de se faire les complices des folies collectives, des égoïsmes criminels, d
247 endre ces lieux communs de la morale élémentaire. Se montrer « désintéressé » pour lui, ce n’est pas tout bravement refuse
248 refuser de toucher le prix d’une noire trahison. Se montrer désintéressé, au sens subtil où il l’entend, c’est nier en pr
249 principe que l’esprit soit responsable de ce qui se passe dans le monde. C’est affirmer que l’esprit n’est pas du monde,
250 esprit ; d’autre part, à refuser pratiquement de s’ intéresser au sort des hommes. Que d’autres, moins désabusés, perdent
251 . Le clerc spiritualiste, prêtre de l’esprit pur, s’ adonne au culte solitaire des choses « sérieuses et précises ». Et que
252 suive le cours de ses passions ! Pour sa part, il s’ en lave les mains. Pilate fut le premier clerc parfait : le juge refus
253 n’est né dégagé de tous liens, irresponsable. Et s’ il existe en apparence des êtres qui méritent le nom de clercs parfait
254 voyant que le tumulte augmentait, prit de l’eau, se lava les mains en présence de la foule et dit : Je suis innocent du s
255 — tous leurs refus de conclure37, c’est-à-dire de s’ engager, où ils voient le sublime de l’esprit ? Ne vient-il pas de dir
256 e. Les uns trahissant grossièrement, les autres «  se désintéressant » non sans un hochement de tête sur la plèbe qui les a
257 dmiration pour la sagesse des grands docteurs qui se lavent les mains avec tant d’élégance, — et l’abandonnent libéralemen
258 vérité, la réponse en chair et en os. Il faudrait se « boucher les yeux… » Cet homme est l’Esprit incarné, l’Esprit qui s’
259 x… » Cet homme est l’Esprit incarné, l’Esprit qui s’ est rendu mortel, car c’est ainsi qu’il peut changer le monde. Non pas
260 prit « sublime » des clercs, mais au contraire en s’ abaissant. Telle est la parabole du spirituel. VII. Situation des i
261 tuels dans la cité (suite) b) Les réalités qui se payent. Donc, on nous dresse à ne servir à rien. Entendez : à ne rien
262 se. Ils observent une minute de silence. Puis ils s’ occupent de choses « sérieuses » qui, elles, n’ont pas toujours cette
263 gique vulgaire voudrait que l’État, qui l’honore, se charge aussi de l’entretenir. Mais voilà le vice de construction de c
264 Université : que sait-il faire ? C’est tout juste s’ il sait écrire. Il écrira donc un ouvrage dans les règles de l’art qu’
265 mon clerc peu fortuné. Deux espèces de carrières s’ ouvrent à lui : celle des accommodements et celle du chômage. La carri
266 mène à tout, mais à condition qu’on en sorte : en se vendant, soit à l’État, soit aux journaux, soit au public, soit au fa
267 lic, soit au fascisme ou à l’antifascisme. À quoi s’ ajoute depuis peu une possibilité nouvelle et symbolique : les licenci
268 qu’on rétribue, en vertu d’une coutume qui tend à se préciser en loi. L’échelle des valeurs matérielles que « touchent » l
269 rière du chômage, je lui vois bien des agréments, s’ il est vrai que la liberté de penser et d’écrire à sa guise, la pauvre
270 ains certains lui offrant une chance admirable de se guérir de son irréalisme. Une pratique assez longue, et d’ailleurs im
271 té. Numero deus impare gaudet ; le génie créateur se réjouit des impairs que le sort commet dans l’agencement d’une existe
272 sprit ? Commettra-t-on ce Palais de l’Esprit ? S’ ils y parviennent, je demande la parole. Je ne me propose pas du tout
273 de tous ordres qui devaient régir la cité et qui se vendent ou se désintéressent ; que ce problème n’est plus jamais posé
274 s qui devaient régir la cité et qui se vendent ou se désintéressent ; que ce problème n’est plus jamais posé que par des p
275 re un sens dans le monde d’aujourd’hui qui tend à s’ établir sur de tout autres bases ? c) à quoi servent les clercs ? quel
276 s ? quel doit être leur rôle dans la cité ? à qui s’ adressent leurs écrits ? d) quelle est la source de leur autorité — si
277 matin par l’exposé des principales tendances qui s’ affirment dans l’Europe d’aujourd’hui. Ce projet positif présente un g
278 ppliquer, un temps pour critiquer finement ce qui s’ est fait, et un temps pour saisir à pleines mains les instruments de c
279 s. L’important, c’est de voir hic et nunc où peut s’ insérer notre action, et comment elle doit s’orienter. Je ne nie pas q
280 peut s’insérer notre action, et comment elle doit s’ orienter. Je ne nie pas que les interventions passionnées et simpliste
281 témoignages de « l’esprit pur » selon l’idée que s’ en fait la Commission. 26. « Cette façon de dégrader la culture et d’
282 gent pour un ouvrage périssable, surtout quand il s’ agit d’une bibliothèque. » C’est pourquoi « notre bibliothèque sera co
283 — mais cela prête à malentendu : le Saint-Esprit se moque de nos psychologies. 36. Histoire du peuple d’Israël, t. III
284 it de la philosophie au fait de son gouvernement) s’ opérera sans qu’il y mette les mains. Par malheur, le droit dont il se
285 y mette les mains. Par malheur, le droit dont il se targue ne comportant aucune espèce de vérité pratiquement contraignan
286 i longtemps qu’on le peut, et en quelque sorte de se boucher les yeux pour ne la voir pas, mais de continuer à analyser sa
287 universitaire aboutit nécessairement à un faux («  se boucher les yeux »). Elle postule que le philosophe est dégagé de tou
288 qu’il n’assumait aucune espèce de responsabilité. S’ il croyait sérieusement que cet homme est juste, il le relâcherait. Ma
289 l et bien leur attitude de fait devant le monde : s’ ils croyaient sérieusement à la justice, ils feraient tout pour l’impo
290 la justice, ils feraient tout pour l’imposer. Ils se compromettraient pour elle. Mais ils n’y croient qu’en théorie. Si bi
291 te d’idées, de création, d’esprit actif, mieux il se vend. La crise force les éditeurs à se faire les interprètes du publi
292 , mieux il se vend. La crise force les éditeurs à se faire les interprètes du public auprès de l’auteur, et non l’inverse,
293 nverse, qui serait normal. Tout profit commercial se calcule de la sorte aux dépens de l’intelligence et de la valeur créa
294 ans l’intelligentsia parisienne, pourraient bien se résoudre, au cours de ces débats et sous la pression populaire, en un
295 du « congrès pour la défense de la culture », qui se préparait. Le rôle du public y fut d’ailleurs à peu près nul. r. R
16 1936, Esprit, articles (1932–1962). Francfort, 16 mars 1936 (avril 1936)
296 à ». « Anti-fascistes », nous le sommes tous ici, s’ il s’agit de prendre parti, en France, contre un mouvement politico-so
297 « Anti-fascistes », nous le sommes tous ici, s’il s’ agit de prendre parti, en France, contre un mouvement politico-social
298 péenne, c’est à peu près aussi intelligent que de se déclarer l’adversaire des avalanches et des marées, pour des raisons
299 mes mal vêtues : ils ne disaient presque rien. On se passait un journal, une lorgnette. On se demandait l’heure. Des fifre
300 rien. On se passait un journal, une lorgnette. On se demandait l’heure. Des fifres jouaient, accompagnés par le roulement
301 s. La tribune avancée au centre de l’ovale énorme se dressait au-dessus du parterre, violemment éclairée, fascinante. À hu
302 es moins cinq, deux cortèges de bannières vinrent se ranger sur les escaliers de la tribune, aux accents du Deutschland üb
303 ras levé. À huit heures sonnant, les lampes à arc s’ éteignirent. Des flèches lumineuses gigantesques s’allumèrent sur la v
304 ’éteignirent. Des flèches lumineuses gigantesques s’ allumèrent sur la voûte, convergeant vers le couloir qui des premières
305 t comme en extase, saluant lentement, longuement, s’ avançant peu à peu vers la tribune, sous un tonnerre assourdissant de
306 endant six minutes. Et quand ce hurlement d’amour s’ apaisa, on entendait encore une rumeur d’océan au-dehors. Le journal d
307 e journal de ce matin écrit : « Lorsque le Führer s’ écria : Je ne puis vivre que si ma foi puissante dans le Peuple allema
308 s pas loin avec ces innocentes caricatures. Il ne s’ agit pas d’hystérie : rien n’est plus discipliné que ces foules. Il ne
309 rien n’est plus discipliné que ces foules. Il ne s’ agit pas d’un tribun déchaîné ; il élève rarement la voix, sauf à la f
310 brutalité des années de combat, avant 1933. Il ne s’ agit pas de haine : il s’agit d’amour. Il ne s’agit pas de politique,
311 ombat, avant 1933. Il ne s’agit pas de haine : il s’ agit d’amour. Il ne s’agit pas de politique, mais de religion, mais de
312 ne s’agit pas de haine : il s’agit d’amour. Il ne s’ agit pas de politique, mais de religion, mais de cérémonies monumental
17 1936, Esprit, articles (1932–1962). Vues sur C. F. Ramuz (mai 1936)
313 ; dans cette mesure, il est exact de dire qu’elle s’ ordonne par avance à sa fin. On n’imagine pas d’aborder l’œuvre et la
314 stinguer des formes qu’il propose à notre vue. Il s’ est transformé en domaine. Il faut le lire comme un visage. Qu’est-ce
315 les apparences. Car rien n’existe, hors de ce qui se manifeste ; rien ne se manifeste hors d’un mouvement. Et tout mouveme
316 n n’existe, hors de ce qui se manifeste ; rien ne se manifeste hors d’un mouvement. Et tout mouvement provient de la lumiè
317 t, encore plus simplement : « Si c’était vrai, ça se verrait. » Telle est la loi nouvelle et la réalité d’une ère dominée
318 ons du platonisme et du cartésianisme. Les clercs s’ écrient : Esprit ! Esprit43 ! Mais je regarde leur visage. « Si c’étai
319 ais je regarde leur visage. « Si c’était vrai, ça se verrait »… Ainsi la clé de toute création est dans le visage de l’hom
320 ge. Il est passage, prise, saisissement. L’esprit se manifeste dans la main qui réalise une vision. Et dans le visage qui
321 . Et dans le visage qui conditionne le regard, et se modèle selon les prises du regard. (En allemand, le seul mot Gesicht
322 mps, vit « venir à lui » toutes les bêtes : elles s’ approchaient pour recevoir leur nom et leur emploi. Il faut toujours r
323 portent des bonnets de poil de lapin. On pourrait s’ amuser à recomposer le pays autour d’eux44. Et l’on verrait alors que
324 t d’un ensemble de coutumes. Les rythmes du temps s’ y inscrivent aussi bien que l’allure des pentes. « D’où cette démarche
325 ? L’artiste répondra : ni l’un ni l’autre. Car il se tient, avec son imagination, dans cette région qui n’est ni du dedans
326 raduit quelques passages — où toute une théologie s’ exprime entièrement par des choses (s’agît-il du profond mystère de la
327 e théologie s’exprime entièrement par des choses ( s’ agît-il du profond mystère de la liberté des humains en présence de « 
328 e ils le sont tous plus ou moins, paraît toujours s’ excuser de l’emploi qu’il fait, par occasion, d’un terme roturier, com
329 mmun, non littéraire. Ramuz, c’est le contraire : s’ il écrit « Autarchie », il ajoute aussitôt : — « comme ils disent ». I
330  : — « comme ils disent ». Il ne manque jamais de s’ excuser des mots abstraits, des termes nobles auxquels il faut bien re
331 e. Le mot n’est rien qu’un droit aux choses. Mais s’ il n’y a plus de choses, c’est une tromperie. C’est pourquoi nos journ
332 les détournant de ce fameux « pratique » dont ils s’ occupent si mal, et de plus en plus mal à mesure que le « pratique » s
333 de plus en plus mal à mesure que le « pratique » s’ éloigne davantage du concret pour se confondre avec l’artificiel créé
334 « pratique » s’éloigne davantage du concret pour se confondre avec l’artificiel créé par la publicité. (On pousse les gen
335 ur de Louis XIV). ⁂ La même volonté d’incarnation se manifeste dans l’allure de la phrase chez Ramuz. On a pu croire qu’il
336 ête. Presque toutes les singularités de son style s’ expliquent par cette seule intention, de concentrer notre vision sur l
337 ans ce monde physionomique, et par quoi va-t-elle s’ exprimer dans une vision qui ne veut rien connaître hors de la forme ?
338 accent étant porté sur la causalité, et les faits se réduisant peu à peu au rôle de simples vérifications d’une algèbre co
339 e conventionnelle. À mesure que cette psychologie s’ assure davantage de ses lois, elle tend à les substituer à l’imaginati
340 ituer à l’imagination concrète du réel. Les faits se raréfient : anecdotes ou exemples à l’appui d’une laborieuse et schém
341 ésormais qu’un auteur qui n’utilise que des faits se range dans la catégorie du roman policier : il n’a pas de psychologie
342 it le conduire à créer un milieu où tout « être » se traduisît immédiatement par un « paraître » ; en sorte qu’on pût fair
343 comique, loué cet « artiste raffiné » d’avoir su se « ravaler au niveau des simples ». Non, Ramuz ne descend pas au peupl
344 ous parle d’une Antiquité, il faut entendre qu’il s’ agit de celle du pays de Vaud : non pas la grecque, qui est scolaire —
345 une manière exemplaire l’accord des éléments dont se nourrit l’art de Ramuz. Voici Caille, le colporteur biblique, qui s’a
346 Ramuz. Voici Caille, le colporteur biblique, qui s’ avance dès le matin à travers le pays, et offre à tous la Parole « aya
347 uverture bleue » où les événements actuels — cela se passe un jour d’été de 1918 — sont expliqués à la lumière des Écritur
348 ne, la révolte, la guerre et la mortalité. Caille s’ avance dans la journée, et l’angoisse grandit autour de lui. De partou
349 ngoisse grandit autour de lui. De partout l’orage s’ amasse. Vers le soir il éclate tragiquement. Est-ce la Fin ? Grande he
350 ère… Puis, « la page du ciel a été tournée », ils se relèvent : « Il paraît bien qu’on n’est pas morts ! » Le monde renaît
351 e la chose pour toute la chose. C’est pourquoi il s’ attarde à décrire le concret d’une façon concrète ; ainsi le maniement
352 re au sérieux l’intrigue d’un roman bourgeois. On s’ est trop arrêté à l’insolite du style chez Ramuz. Ce qu’il a d’insolit
353 esprit et corps. Les niveaux respectifs auxquels se placent un Goethe et un Ramuz déterminent deux formes d’expérience ap
354 cette fin n’est plus la plénitude de l’humain. Il se peut que l’effort réactionnaire de Ramuz, dans les contingences où no
355 n’y paraît, conforme à l’éducation goethéenne. Il se peut qu’en définitive, Ramuz ait fait, pour la culture, en se donnant
356 n définitive, Ramuz ait fait, pour la culture, en se donnant l’air de l’attaquer, plus que ne font les défenseurs d’une in
357 tend à rejeter tous les intermédiaires culturels, s’ il critique le machinisme, s’il raille le confort de ses concitoyens,
358 médiaires culturels, s’il critique le machinisme, s’ il raille le confort de ses concitoyens, leurs assurances, leur hygièn
359 ur de sa forme. Si Ramuz n’aime pas les machines, s’ il refuse l’économie d’efforts qu’elles représentent, c’est que l’effo
360 ses et les êtres, tels qu’ils sont et tels qu’ils se montrent, dégradés, désunis, informes ; et par l’effort d’une imagina
361 difficile, tout travail, toute espèce de travail se fait d’abord contre nous-mêmes et contre Quelqu’un, tout travail est
362 ateur… Autant de formules d’un art dont la genèse se confond avec celle de la personne. Dans un essai où je crois distingu
363 une maison trop grande, un feu de bois vert qu’on s’ ingénie à allumer dans une cheminée qui tire mal. J’aime les choses qu
364 Certaines paroles dites par cette voix. Celui qui se refuse à poser les questions dernières, s’autorise à borner sa vision
365 ui qui se refuse à poser les questions dernières, s’ autorise à borner sa vision à son acte. Voilà l’utile ; et qu’on taise
366 e veut pas esquiver. Voici le temps où tout homme se voit mis en demeure de déclarer ses origines et ses fins. Voici le te
367 tient plus à l’homme. Au comble de nous-mêmes, il s’ agit d’autre chose que de nous. « Tout notre embrassement n’est qu’une
368 ssité de « faire la volonté de Dieu », au lieu de se contenter de la dire. Mais le kantisme a dévié ce mouvement, détourna
369 « faire ». Nous ajoutons : tout ce que l’on fait se voit. L’acte le plus secret, fût-il même un silence, laisse une trace
370 t là ce qu’il appelle sa « vie intérieure », même s’ il est résolument laïque. Rien n’est plus facile à concevoir, dans not
371 patriote qui, entre deux discours nationalistes, s’ occupe à faire passer ses capitaux à l’étranger pour les mettre à l’ab
18 1936, Esprit, articles (1932–1962). Culture et commune mesure (novembre 1936)
372 es fondements doctrinaux du régime de l’URSS l’on s’ attire d’ordinaire les reproches de tout un groupe d’intellectuels bou
373 és par la crise occidentale et l’isolement où ils se voient ; séduits par certains résultats matériels et même moraux, et
374 oraux, et par l’euphorie juvénile qui paraît bien s’ être emparée d’une partie du peuple russe ; assez ignorants au surplus
375 quelle notion bourgeoise et libérale de l’esprit se fonde une pareille indulgence.) L’important, à leurs yeux, c’est l’en
376 ale, la productivité accrue ; et que les ouvriers se mettent à lire leurs livres, et viennent acclamer leurs discours, au
377 eur foi nouvelle. Ce n’est pas sans raison qu’ils se remettent à glorifier les mythes du Progrès indéfini et du Bonheur :
378 ourtant Marx avait été un peu plus loin ! Et l’on s’ interdirait de rien comprendre à l’évolution nécessaire de la culture
379 ution nécessaire de la culture soviétique si l’on se refusait à l’examen critique des doctrines qui sont à sa base. Je ne
380 argir cette critique, et notre idée de la culture s’ il le faut. Quand l’esprit « perd ses droits », c’est à nous de les lu
381 ns les débuts de l’URSS. Trotski fut le premier à s’ en apercevoir : on l’exila, quitte à suivre bientôt les conseils quali
382 ires » qu’il avait eu le courage de donner. Ainsi se termina, en principe du moins, l’épisode du Proletkult, autrement dit
383 dée de masse. La culture soi-disant prolétarienne se révéla finalement ce qu’elle était dès le début : culture socialiste,
384 ’une élite guidant les masses. Et cette évolution s’ est trouvée confirmée par les récents congrès d’écrivains soviétiques
385 s qui passionnèrent les débats de ces congrès, il se dégage une seule conclusion claire, à vrai dire de première importanc
386 la vie, qui requiert surtout la pensée — doivent s’ ordonner à une mesure commune en vue de réaliser cette fin commune qu’
387 le Plan55. Ainsi donc, la mesure effective à quoi s’ ordonne toute la construction russe n’est plus la doctrine orthodoxe,
388 doctrine orthodoxe, dont les marxistes d’Occident se sont faits les conservateurs. C’est un plan beaucoup plus opportunist
389 conducteurs en vue d’une fin à laquelle tout doit s’ ordonner. L’assimilation de la culture (et donc de sa mesure) au Plan
390 teur distingué. Mais ici l’équivoque matérialiste se manifeste avec une impudeur gênante pour les subtils « dialecticiens 
391 t, que les jeunes komsomols et brigadiers de choc s’ imposent une morale ascétique, acceptent des privations de toute natur
392 e digne du nom qu’ait produite la nouvelle Russie s’ est développée en marge du Plan, par anticipation ou régression sur le
393 érature soviétique est née de la révolution. Elle s’ est constituée en même temps que son public. Autrement dit, les « écri
394 et les consommateurs de la culture. Tant qu’il ne s’ agissait que de construire des tracteurs, les poètes du tracteur et ce
395 re. Car une fois le pain assuré, quand les poètes se virent enfin libres de chanter l’homme tout entier, non plus seulemen
396 e duquel la culture communiste devrait dorénavant s’ organiser (le paradoxe est d’ailleurs soutenable) se substitue dans le
397 organiser (le paradoxe est d’ailleurs soutenable) se substitue dans les esprits les plus vivants à l’idée du Plan scientif
398 e la culture séparée, qui sous nos yeux, vient de se renouer au cœur de la construction socialiste. La théorie économiste
399 ion culturelle, dès lors que cette création vient s’ « insérer de l’extérieur » ; en dépit de la Force des Choses ; en vert
400 r d’une mesure plus vivante. La scission vient de s’ opérer, et seule l’inquisition intellectuelle exercée par les chefs so
401 r son étendue. Le désir d’une mesure plus vivante se manifeste bien souvent à l’insu de ceux qu’il tourmente. C’est ici le
402 n. Car cette raison, simple servante de l’action, s’ est voulue maîtresse de tout l’homme. Mais l’homme résiste à son empri
403 se et à sa prétention totalitaire. Il ne veut pas se laisser mutiler. Fût-ce au prix de salaires merveilleux58. Il découvr
404 justement tourmentés dans leur conscience, et qui se rassurent en glorifiant l’URSS. Pour moi, je me bornerai à tirer de t
405 udo-marxiste que les Soviets proposent en exemple s’ est avérée, après quelques années, incapable de maintenir l’unité vrai
406 malfaisance « culturelle ». Mais pour nous il ne s’ agit plus de découvrir les semelles-crêpe et le métro. Notre espérance
407 e « sans-dieuisme » soviétique. Il faudrait aussi se garder d’une certaine facilité sénile, dont la jeunesse française n’e
408 le l’hypocrisie pratique. Enfin il serait sage de se garder de tout pronostic global quant à l’avenir culturel des régimes
409 la compléter maintenant par trois remarques, qui se dégagent des pages précédentes. 1. La ressemblance formelle entre les
410 le pour la seule action au cours de laquelle elle s’ est constituée, mais que l’on veut imposer au tout, y compris la cultu
411 isque personnels. 3. La constatation de cet échec s’ impose non seulement à l’observateur étranger que je suis, mais aux ch
412 ntestable que nous avons établi cet ordre : on ne se mitraille plus dans nos rues, l’État combat la misère et le chômage,
413 Car un ordre extérieur n’est solide et fécond que s’ il résulte d’un ordre intérieur. Et cet ordre intérieur ne se crée pas
414 e d’un ordre intérieur. Et cet ordre intérieur ne se crée pas à coups de décrets d’urgence et de propagande de masses. Pas
415 angages, des génies ou des organismes en lesquels s’ incarnèrent des mesures, selon les temps et les lieux, ou les astres.
416 meurent avec elle. L’Arche d’alliance n’est rien s’ il n’y a pas le messianisme, le latin s’il n’y a pas une catholicité,
417 ’est rien s’il n’y a pas le messianisme, le latin s’ il n’y a pas une catholicité, le Plan s’il n’y a pas un Paradis à veni
418 le latin s’il n’y a pas une catholicité, le Plan s’ il n’y a pas un Paradis à venir sur cette terre, le Führer s’il n’y a
419 pas un Paradis à venir sur cette terre, le Führer s’ il n’y a pas l’Empire populaire. Le signe irréfutable de la présence d
420 ures d’un ciel unique. C’est là seulement qu’elle se révèle à nous, comme un jugement porté sur cette situation. Je ne cro
421 ations : celles qu’on dit vieilles, et celles qui se disent rajeunies. Les vieilles nations mènent encore une vie à bien d
422 mbre de possibilités dont les nations plus jeunes se sont volontairement privées. Elles s’honorent d’avoir une presse d’op
423 plus jeunes se sont volontairement privées. Elles s’ honorent d’avoir une presse d’opposition, une population civile plus n
424 savent trop que faire de cette liberté dont elles se vantent. Elles s’en vantent d’ailleurs de moins en moins. En France,
425 ire de cette liberté dont elles se vantent. Elles s’ en vantent d’ailleurs de moins en moins. En France, en Angleterre, en
426 Liberté d’opinion, c’est pratiquement liberté de se plaindre, mais de se plaindre sans passion profonde. La misère n’est
427 ’est pratiquement liberté de se plaindre, mais de se plaindre sans passion profonde. La misère n’est encore qu’à la porte,
428 l n’y a plus rien à faire, qu’à attendre. Et l’on s’ occupe en attendant à critiquer les nations « rajeunies ». C’est le de
429 évolution de masses. Elles mènent une vie dure et s’ en disent fières. Certes, elles ont sacrifié un certain nombre de poss
430 ctuel néfaste, lorsqu’il était encore réel. Elles s’ honorent de n’avoir plus ni presse d’opposition, ni partis, ni civils
431 par l’État, et l’opinion privée, bon gré mal gré, se rapporte à ces seuls décrets. Partout des gênes et des interdictions,
432 les n’ont plus de liberté, mais du travail. Elles s’ en plaignent d’ailleurs de moins en moins. En Russie, en Allemagne, en
433 r supprimer finalement les raisons matérielles de se plaindre. Et après cela, commencera la conquête d’un avenir de joie e
434 nd à fuir dans les mystiques collectives. Et l’on se rassure en attendant par de faciles railleries à l’adresse des États
435 s la redoute et la prépare, l’autre en résulte et s’ en souvient. L’ersatz de commune mesure, dans les régimes bourgeois ca
436 is capitalistes, c’était l’argent. Mais le crédit s’ écroule, et la mesure devient le manque d’argent. C’est cette angoisse
437 explique pourquoi la jeunesse bourgeoise hésite à s’ engager dans une révolution spirituelle dont elle redoute l’impuissanc
438 s raisons sérieuses et urgentes, enfin solides de s’ aimer ? La commune mesure des États neufs, c’est au contraire une myst
439 ’hui, de cette seule crainte qui les unit encore, s’ élève un même et formidable appel profond des peuples. Il a jailli de
440 sique, mais aussi une grandeur nouvelle. Même, il se jette d’abord vers cette grandeur, au mépris de la faim ou de la libe
441 uvelle, incalculablement, qu’il inaugure, il faut se rappeler deux faits récents : l’enthousiasme du peuple russe pour le
442 si que cet appel profond du siècle a commencé par se manifester dans les pays les plus atteints matériellement. La misère
443 près-guerre.) Ainsi l’opposition des deux Europes se ramène à l’opposition de deux réponses différentes à l’appel jailli d
444 moins virulente, et la réponse a plus de peine à se dégager. Pourtant, il faudra bien qu’elle soit donnée partout. Derriè
445 r et qu’il meurt de son isolement, ou du refus de se dépasser ; qu’il n’y a pas de lignes droites dans l’univers, et qu’un
446 miné par ses relations prochaines et actives peut se sentir à la mesure des temps nouveaux. Sinon il n’est qu’angoisse et
447 mesure, d’une nouvelle image du monde où l’homme s’ éprouve de nouveau réel, actif, nécessaire et relié. Tout jugement pol
448 dictatures ne sont dangereuses que pour ceux qui s’ y livrent. Ils n’arrêteront pas la tempête à l’aide de leurs filets à
449 u’une tentation superficielle et passagère, elles se réduisent à des poussées de fièvre politique ou idéologique. Mais si
450 ions dont le but est la force commune. Ils ont su se créer des symboles grandioses. Ces symboles nous paraissent barbares,
451 , qu’elle sera la mesure de l’homme en tant qu’il se possède dans ses relations actives avec tous ses prochains. C’est à n
452 es. Contre les brutales poussées de masses qui ne se connaissent plus, seule la violence de l’esprit est pacifiante. Notre
19 1936, Esprit, articles (1932–1962). Henri Petit, Un homme veut rester vivant (novembre 1936)
453 en présence du concret d’une vie située. Il faut s’ arrêter, confronter, se reprendre, aussi se méfier de certaines appare
454 d’une vie située. Il faut s’arrêter, confronter, se reprendre, aussi se méfier de certaines apparences d’intimité qui cac
455 l faut s’arrêter, confronter, se reprendre, aussi se méfier de certaines apparences d’intimité qui cachent sans doute enco
456 qu’il songe que ses pères l’ont eue. Nos lecteurs se souviennent des pages sur le journalisme, la condition du fonctionnai
457 ême, sur la « politique de clocher », où l’auteur s’ efforce de sauver les restes d’un fédéralisme dont il faudrait pourtan
458 d’une vie, c’est aussi le chemin de l’universel. S’ il veut rester vivant, c’est dans un amitié nouvelle. S’il écrit quelq
459 eut rester vivant, c’est dans un amitié nouvelle. S’ il écrit quelque part : « Le monde n’a plus pour moi le caractère inte
460 que c’est à nous de recréer un monde où notre vie s’ accepte. Aux premières pages j’ai pensé : document sur les déceptions
461 « Retour à la passion ». Et maintenant nos routes se joignent. x. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Henri Petit, Un
20 1936, Esprit, articles (1932–1962). Note sur nos notes (novembre 1936)
462 On décline par un affaissement général auquel on s’ est acheminé par des symptômes imperceptibles répandus sur toute la du
463 ccesseur des maux presque impossibles à réparer. S’ il s’agit de littérature, la traduction des métaphores de Diderot est
464 eur des maux presque impossibles à réparer. S’il s’ agit de littérature, la traduction des métaphores de Diderot est trop
465 général », symptômes imperceptibles. On n’a qu’à se baisser, vraiment. Des éditeurs lancent chaque automne leur douzaine
466 en publiaient naguère deux ou trois, la critique se montrait attentive. Mais on n’aime pas que « l’afflux des jeunes tale
467 gime plonge ses dernières racines vivantes. Il ne s’ agit pas de morale ! Ni de condamner pour le mauvais plaisir d’avoir r
468 r pour le mauvais plaisir d’avoir raison. Mais il s’ agit de refaire une amitié humaine d’où jaillisse la joie créatrice. I
469 d’une émeute dans les lettres. Pour qu’une école se crée, il faut qu’une base commune existe, qui n’existe plus aujourd’h
21 1936, Esprit, articles (1932–1962). Erskine Caldwell, Le Petit Arpent du Bon Dieu (novembre 1936)
470 ique française à l’endroit de la gauloiserie : on s’ imagine que c’est du réalisme, que c’est enfin la « vraie » nature dél
22 1936, Esprit, articles (1932–1962). André Gide, Retour de l’URSS (décembre 1936)
471 pour modérer les appétits, étoffes, objets, etc., se fassent inattrayants au possible, de sorte qu’on achèterait par grand
472 figure le dernier paragraphe, il paraîtrait qu’il s’ agit là d’une description un peu plus qu’amicale du régime de l’URSS,
473 ogue ne le donneraient à penser. Parlons net : il s’ agit ici d’un dégonflage impitoyable de ce qu’il faut bien appeler le
474 au moins l’indifférence, que ceux qui sont et qui se sentent du “bon côté”, marquent à l’égard des “inférieurs”, des domes
475 petite-bourgeoise. Mais Gide : « Je crains que ne se reforme bientôt une nouvelle sorte de bourgeoisie ouvrière satisfaite
476 se autocritique soviétique de ne consister « qu’à se demander si ceci ou cela est dans la ligne ou ne l’est pas. Ce n’est
477 ide pratique cette espèce-là d’autocritique, — ou s’ il entend pousser plus loin ? Si Gide reste marxiste en devenant antis
478 Gide reste marxiste en devenant antistalinien, il se met dans une situation qu’on ne peut comparer qu’à celle du chrétien
479 isme lui-même. En effet, dès lors qu’une doctrine se veut purement humaine, et historiquement valable, elle est comptable
480 e. Si l’on accepte vraiment le marxisme, pourquoi s’ indigner d’une tactique qui paraît seule capable de l’imposer ? Ce n’e
481 nous, personnalistes, que dirons-nous ? Le livre s’ ouvre par une fable. L’enfant Démophon est soigné par Déméter, déguisé
482  Elle repoussa la déesse et tout le surhumain qui se forgeait, écarta les braises et, pour sauver l’enfant, perdit le dieu
483 ication (ici, la création d’un « homme nouveau ») se termine par d’horribles brûlures — ou par l’intervention de Staline-M
484 un négatif de l’acte de foi chrétien. Si l’enfant se brûle, ou si Staline ne peut le sauver qu’au prix de la vie du Dieu q
485 dans une volonté révolutionnaire dont le marxisme s’ est détourné parce qu’il a fait erreur sur l’homme. La phrase finale d
486 si les nazis savaient cela ! 65. Certes, Gide ne se prive pas d’admirer bien des choses en URSS (les « parcs d’enfants »
23 1937, Esprit, articles (1932–1962). Défense de la culture (janvier 1937)
487 es, fréquente les théâtres et les concerts, bref, se cultive avec cette sorte de passion que le Français réserve, présente
24 1937, Esprit, articles (1932–1962). La fièvre romanesque (janvier 1937)
488 butant : « Les personnages n’y semblent naître et se nourrir que de la fièvre de l’auteur. » N’est-ce pas, en somme, toujo
489 e, toujours ainsi que les personnages naissent et se nourrissent ? Mais on a convenu de n’en rien laisser paraître. Oui, c
490 je n’ai rien voulu de tout cela ! Mes personnages se sont imposés à moi etc. » Je n’ignore pas que des visions parfois biz
491 mouvantes, souvent fort incertaines et monotones, s’ imposent de cette manière au déprimé fiévreux. La question est ailleur
492 rimé fiévreux. La question est ailleurs : va-t-on se vanter d’être si faible que de céder à toutes ses obsessions ? (Je fe
25 1937, Esprit, articles (1932–1962). Jean Blanzat, Septembre (janvier 1937)
493 mbre (janvier 1937)ad Roman d’une jalousie qui se crée son objet, par masochisme. Un jeune mari trouble sa femme, et la
26 1937, Esprit, articles (1932–1962). Robert Briffaut, Europe (janvier 1937)
494 Robert Briffaut, Europe (janvier 1937)ae On se souvient de la guerre des Balkans. Elle éclata, nous apprend M. Briff
495 le, baisers dans les jardins pendant le bal, — on s’ en veut d’aller jusqu’au bout, mais on y va irrésistiblement. Comment
496 retrouvent enfin leur vérité originelle. Et l’on se laisse aller à de vieux trucs trop éprouvés, ahuri et charmé de décou
497 e radicale dureté. Et renoncer à la charmer, ou à se laisser charmer — ceci pour moi lecteur — par le tableau de sa déchéa
27 1937, Esprit, articles (1932–1962). Paul Vaillant-Couturier, Au service de l’Esprit (février 1937)
498 citations : L’homme ne peut penser et créer que s’ il est libre. — Nous avons toujours admis la légitimité de la propriét
499 à : mettre la machine au service de l’homme. — Il s’ agit de transformer le chômage en loisir. Je résume : primauté du spi
500 achés à cette sélection de grâce et de mesure qui s’ appelle la politesse française. Ensuite parce que les déclarations de
501 ommunistes, à l’expression bonne foi. La brochure se termine ainsi : « C’est à l’Esprit que le Parti communiste français…
502 fait plus confiance à Marx. Autant dire qu’il ne se fait plus confiance à lui-même. Autant dire que toutes les attaques m
503 ont en quelque sorte (sic) les idées incarnées », se fait par ailleurs du Français cultivé une idée plus marxiste qu’on ne
504 m manuscrit la faute de la page 13 : « La paix ne se conçoit pas dans la liberté. » (Phrase qui aurait pu faire croire que
28 1937, Esprit, articles (1932–1962). Albert Thibaudet, Histoire de la littérature française de 1789 à nos jours (mars 1937)
505 es, glissements, liaisons, circulation… Thibaudet s’ est parfaitement défini : « badaud de la République des Lettres, ayant
506 parce qu’elles lui paraissaient peu littéraires, s’ attaquant en effet plutôt au fondement de toute littérature… Célibatai
507 épouser que l’élan vital de la littérature (sans se demander d’où il venait, où il allait), ce bergsonien pittoresque et
508 terrasse des Deux Magots, n’a pas eu le temps de s’ apercevoir que « les grandes questions gisent dans la rue », comme dis
509 icables ? Ceci dit, l’on pourra déguster, car il s’ agit ici de goût, au sens physique. Lanson fournit les dates de naissa
510 ance, les titres d’œuvres, les bibliographies, il s’ occupe de secteur plané de la critique. Thibaudet, lui, s’ébat dans le
511 de secteur plané de la critique. Thibaudet, lui, s’ ébat dans le secteur libre. Il en abuse merveilleusement. C’est le che
512 -même sujet de chanson, vers une plate-forme d’où s’ étale à la vue tout un quartier d’histoire populaire, celui de Juillet
29 1937, Esprit, articles (1932–1962). Jacques Benoist-Méchin, Histoire de l’armée allemande depuis l’armistice (mars 1937)
513 s forces dans le monde présent. Qu’on n’aille pas se figurer qu’il s’agit d’un bouquin d’érudition ou d’un traité classiqu
514 monde présent. Qu’on n’aille pas se figurer qu’il s’ agit d’un bouquin d’érudition ou d’un traité classique d’officier en r
515 la première révolution allemande (1918-1919) qui se recompose autour de l’aventure du GQG prussien, au lendemain de l’arm
516 ît aussi solide qu’inattendue : si l’Allemagne ne s’ est pas défaite en vingt morceaux, si la révolte spartakiste a pu être
517 à poigne » touché par la grâce nationale, et qui se charge d’écraser la révolution avec une brutalité qu’aucun bourgeois
518 volution avec une brutalité qu’aucun bourgeois ne se serait permise. Avis à ceux de Saint-Denis ! Noske, Mussolini, Doriot
30 1937, Esprit, articles (1932–1962). Retour de Nietzsche (mai 1937)
519 ui, c’est que les effets d’une cause de cet ordre se manifestent en premier lieu dans la culture d’avant-garde, avant de d
520 pensée du Retour éternel. Mais en même temps, il s’ acharne à compenser ce fatalisme mécanique par une glorification de la
31 1937, Esprit, articles (1932–1962). Journal d’un intellectuel en chômage (fragments) (juin 1937)
521 liviers et par sa jeune nudité. Pas une vapeur ne s’ élève de l’herbe pauvre des terrasses, ni de ces arbres moirés et allè
522 rasse invisible, au-dessous. Je vois un chien qui se promène de son petit pas élastique sur les restanques étroites, passa
523 entendre dans toutes les épiceries de province où se rencontrent les femmes de la nation la plus raisonnable du monde. Le
524 mari-là qui aura payé le billet, histoire de voir s’ il a la chance. Seulement, avoir la chance, avoir la veine, c’est déme
525 entaire et la plus sûre, l’arithmétique. Mais qui s’ avise d’une telle contradiction ? Le gouvernement de la Troisième Répu
526 rer bénéfice de la culture de cette superstition. S’ il est vrai que certains individus « ont la veine » dans ces loteries,
527 plus naïve, le fanatisme religieux le plus obtus s’ opposent infiniment moins à notre image scientifique du monde que cett
528 inité au nom de l’arithmétique élémentaire69 puis s’ en vont prendre l/10e de billet. Un fort vent doux passe de grandes ca
529 elle, il donne quelques coups de tête furtifs, et se détourne. D’où vient-il ? On m’a dit qu’il n’y a pas de pigeons par i
530 tendre ? Pourquoi feint-il de ne pas me voir ? Il se tient là des heures, sans bouger, et s’envole d’un coup vers le soir.
531 voir ? Il se tient là des heures, sans bouger, et s’ envole d’un coup vers le soir. Le lendemain, il est là de nouveau, pos
532 tion. Car en effet la condition commune, c’est de se sentir une exception, un type spécial, différent de tous les autres…
533 poirs chez les adolescents troublés par le désir, s’ apaisent tout d’un coup le jour où ils découvrent que leur état jugé p
534 homme « comme les autres » par cela même que l’on s’ éprouve absolument distinct de tous les autres. 1er mars Si l’on crain
535 que la politique, sinon le général en tant qu’il s’ oppose au réel, lequel est fait de nos monades superstitieuses ? Accor
536 ourrait pas. Ma loi vaut tout juste pour moi. (Et s’ il fallait tenir compte de toutes les bizarreries auxquelles les homme
537 e de toutes les bizarreries auxquelles les hommes s’ attachent comme à leur bien le plus précieux !) Au contraire, la polit
538 . Il est de l’essence de toute saine politique de s’ opposer à la personne, de limiter son expansion, de combattre en défin
539 ersonne, mais au contraire de l’impersonnel, pour se diriger contre la personne. C’est à ce prix qu’elle assurera quelque
540 en effet que les deux puissances contraires qu’il s’ agissait de maîtriser — le singulier et le général — ont perdu l’une e
541 rs à sens unique : c’est la personne qui cesse de se défendre, c’est l’anarchie qui renonce à ses droits. Et si le cadre d
542 e changé depuis un siècle, et c’est pourquoi l’on s’ imagine que l’équilibre s’est stabilisé. Au vrai, chacun peut voir que
543 et c’est pourquoi l’on s’imagine que l’équilibre s’ est stabilisé. Au vrai, chacun peut voir que l’homme d’aujourd’hui se
544 vrai, chacun peut voir que l’homme d’aujourd’hui se déshumanise rapidement parce qu’il cesse de se croire des droits « ir
545 ui se déshumanise rapidement parce qu’il cesse de se croire des droits « irrationnels » et immédiats contre l’État. Le sen
546 et immédiats contre l’État. Le sens de la révolte se perd. Il se sublime, ô ironie, en rouspétance, en criailleries électo
547 contre l’État. Le sens de la révolte se perd. Il se sublime, ô ironie, en rouspétance, en criailleries électorales, journ
548 en criailleries électorales, journalistiques. Il s’ étale en mauvaise humeur. C’est cela que je nomme démoralisation à l’a
549 composante « personnelle ». Il doit en permanence se déplacer au profit des personnes. (Au profit des irréductibles, dans
550 superstitions que j’ai dites, et dont l’éducation se fait très lentement sous l’influence des résistances assimilées, créa
551 tion des personnes au moment où leurs disciplines se seront enfin harmonisées. (Dans un temps que j’accorde aussi lointain
552 ntimentale, mystique ou sensuelle, qui ne saurait se traduire en termes de raison. Mais je la tiens pour néfaste quand ell
553 progressif. Si par l’effet d’une perversion, elle se met à jouer au profit de la politique et des doctrines d’État qui doi
554 t qui doivent justement la combattre, le désordre s’ installe et grandit. Dans notre cas, l’État devient totalitaire. « Là
555 plus en plus totalitaire. C’est donc que l’homme se défend de moins en moins. Ses « superstitions » personnelles (son qua
556 re à sa loi — à ses superstitions incomparables — se met à croire de la même manière aux lois et aux pouvoirs qu’il aurait
557 rait aisément à ce « complexe de castration » qui se noue au moment précis où l’agressivité normale de la personne se reto
558 nt précis où l’agressivité normale de la personne se retourne contre elle, au profit des tyrannies impersonnelles. C’est l
559 ouvent vaines, que la joie de voir son public, de s’ entretenir avec ces hommes et ces femmes pour qui l’on écrivait sans l
560 t directe. Je vois cette abstraction : le Public, s’ évanouir et renaître, incarnée à chaque fois dans une seule figure pré
561 n autre leur dit. Quand un lecteur vous écrit, il s’ exprime le plus souvent dans un langage conventionnel qu’il croit de m
562 ans un langage conventionnel qu’il croit de mise, s’ adressant à un écrivain. Ou bien il se répand en confidences exagérées
563 it de mise, s’adressant à un écrivain. Ou bien il se répand en confidences exagérées ; il s’excite, il s’admire dans sa ré
564 u bien il se répand en confidences exagérées ; il s’ excite, il s’admire dans sa révolte ou son malheur. Mais celui qu’on p
565 répand en confidences exagérées ; il s’excite, il s’ admire dans sa révolte ou son malheur. Mais celui qu’on peut voir, cel
566 e trouve soi-même à portée de l’auditeur, où l’on se voit naturellement contraint, ne fût-ce que par la proximité matériel
567 , ne fût-ce que par la proximité matérielle70, de se mettre moralement à la portée de ces esprits, visibles et lisibles su
568 nécessairement l’entretien institué dans la salle se prolonge en conversations pendant qu’on remet son pardessus ou qu’on
569 assemble ses papiers. L’auditeur a eu le temps de se familiariser avec l’orateur, dont il connaissait peut-être déjà la pe
570 en réalité la suite de quelque chose ; le contact s’ établit normalement, sans surprises et sans illusion. Ce n’est plus un
571 son étrangeté. Alors seulement quelque chose peut se passer en vérité. Alors seulement, ma pensée trouve son point d’attac
572 es abstractions qui achètent nos livres. Ce qu’il s’ agit de retrouver, c’est le contact avec l’homme qui réfléchit et qui
573 rgit formidablement à l’approche de la joie, elle se sent gênée, pauvre et maladroite, pareille à cette clarté lunaire inc
574 es paysans et des bourgeois, c’est une manière de s’ exprimer qui en dit plus long qu’on ne croirait. « J’ai mes brouillard
575 mps au-dedans de moi », note Pascal. En sorte que s’ étonner d’une pluie « intempestive » c’est une manière de dire : « Je
576 ilà que cela prend les chiens. Toute la nuit, ils se sont battus dans la remise qui est juste au-dessous de notre chambre,
577 le nez au sol. Soudain, l’un relevait la tête, et s’ en allait. Un nouveau faisait son apparition au haut de la colline. Si
578 leur avons lancé quelques pierres, pour voir. Ils s’ éloignaient un peu, en se retournant à chaque saut, et puis cela reven
579 pierres, pour voir. Ils s’éloignaient un peu, en se retournant à chaque saut, et puis cela revenait bientôt de tous côtés
580 poignées de terre sur tous ces ventres. Ils vont se coucher un peu plus loin. Un ou deux se défilent en silence. « J’ai p
581 Ils vont se coucher un peu plus loin. Un ou deux se défilent en silence. « J’ai pris la nature sur le fait. » Vertige de
582 e cessé chez les chiens. Cette nuit, les crapauds s’ y sont mis. Un vieux mâle coasse des notes basses, et le chœur lui rép
583 s. Toujours ces luttes dans la remise. La chienne se traîne. La chatte est déjà grosse. Une puissance inexorable s’est emp
584 chatte est déjà grosse. Une puissance inexorable s’ est emparée de l’espèce, tourmente les bêtes, les essouffle et les esq
585 romantiques, en termes d’extase religieuse, c’est se moquer cruellement des créatures, ou plutôt c’est avouer qu’on n’a pa
586 es partis de gauche ont fait liste commune : cela s’ appelle le front antifasciste. Je recopie cette phrase merveilleuse qu
587 atin, la mère Calixte arrive tout agitée : Madame se meurt ! s’écrie-t-elle. C’est Madame Bastide, la belle-mère. — Qu’a-t
588 re Calixte arrive tout agitée : Madame se meurt ! s’ écrie-t-elle. C’est Madame Bastide, la belle-mère. — Qu’a-t-elle ? — O
589 explique que c’est pour monter « là-haut », pour s’ aider ! 8 mai Il y a eu du bruit toute la nuit. Vers 2 heures, nous no
590 a rôtissent ? On distingue des étoffes noires qui se gonflent sur le brasier… Je me suis réveillé tard. Tandis que je me r
591 a belle-mère est morte cette nuit. Il ne faut pas se moquer des gens en deuil ! » — Mais, monsieur Simard… — Il est parti.
592 e peut voir d’ici. Je ne comprends pas très bien. S’ il s’agit de respect, ne vaudrait-il pas mieux respecter les vieux pen
593 t voir d’ici. Je ne comprends pas très bien. S’il s’ agit de respect, ne vaudrait-il pas mieux respecter les vieux pendant
594 a beaucoup remercié. Bref, il m’a semblé que tout s’ était bien passé. Je me trompais. C’est la mère Calixte qui me l’appre
595 explique. Une visite de deuil, chez nous, ça doit se faire dans la cuisine. Aussi, je lui ai dit, à Fernann, il aurait dû
596 oyez-vous ils sont trop orgueilleux ces gens-là ! S’ ils avaient eu toute la peine que j’ai eue dans ma vie, moi, ça serait
597 e sens bien qu’il est inutile de leur demander de s’ expliquer. Tout cela repose sur un vieux fonds de rites de protection
598 n’arriveraient pas à concevoir qu’on puisse même s’ étonner. Et ne pas croire, surtout, qu’il s’agit là de « préjugés », c
599 même s’étonner. Et ne pas croire, surtout, qu’il s’ agit là de « préjugés », comme disent les jeunes personnes en mal d’ém
600 lupart des vitres sont cassées. Une poule blanche se promène quelquefois dans la cour. Mais on m’assure que ces habitation
601 s prétendent qu’ils ne croient qu’à un seul Dieu, s’ écriait l’orateur, et ils adorent la Trinité ! Ils disent que le Père,
32 1937, Esprit, articles (1932–1962). Marius Richard, Le Procès (juin 1937)
602 rocès (juin 1937)am an Un petit livre qui sait s’ arrêter dès qu’il nous a fait voir le monde pitoyable : sans ajouter à
603 oir et chaque matin, écrire dans les journaux qui s’ impriment quelques heures plus tard, exactement ce que l’on pense, ce
604 ue l’auteur suit au jour le jour, par profession, s’ étend ainsi à toute la société, à tout cet embrouillamini de responsab
605 cette profondeur, donne la mesure d’un art qui ne se prend pas pour idole. am. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Mar
33 1937, Esprit, articles (1932–1962). Paul Éluard, L’Évidence poétique (juin 1937)
606 e, — d’une manière incompréhensible.) La poésie «  s’ applique… à refuser de servir un ordre qui n’est pas le sien ». C’est
607 es, toutes les paroles seront sacrées et l’homme, s’ étant enfin accordé à la réalité qui est sienne, n’aura plus qu’à ferm
608 sienne, n’aura plus qu’à fermer les yeux pour que s’ ouvrent les portes du merveilleux. » Phrase étonnante à la fois par la
609 , et il n’y aurait pas de poésie — ni de prière — s’ il n’y avait pas, consciente ou non, cette espérance ou cette « attent
610 e sont celles que les bourgeois et les staliniens se font de ces réalités, nous combattrons ensemble. Mais avec cela nous
611 exploitation, nous les sauverons ! (De nous-mêmes s’ il le faut.) Et enfin : « Voici que les poètes sont des hommes parmi l
34 1937, Esprit, articles (1932–1962). M. Benda nous « cherche », mais ne nous trouve pas (juillet 1937)
612 iens étaient « intellectuels », et que les jeunes se voient contraints par la logique des circonstances à se montrer plutô
613 ent contraints par la logique des circonstances à se montrer plutôt… « moraux ». On goûta beaucoup l’euphémisme. Mais lors
614 te pensée est un acte, M. Benda répliqua qu’il ne s’ agissait pas du tout de cela, et que la pensée des jeunes se veut acti
615 pas du tout de cela, et que la pensée des jeunes se veut active en ce sens qu’elle vénère « ce qui rapporte », matérielle
616 oi, M. Benda apprit à l’assistance que ses livres se vendent très bien. Enfin Denis de Rougemont dénonça le sophisme sur l
617 tion. On nageait en pleine confusion. Les anciens se vantaient et accablaient les jeunes. Ceux-ci refusaient de se reconna
618 et accablaient les jeunes. Ceux-ci refusaient de se reconnaître dans le signalement qu’on leur attribuait. Cette tempête
619 isconti, nous apprend tout de même quelque chose. S’ il est vrai que penser, pour les jeunes, équivaut à gagner de l’argent
620 seur, mais M. Dekobra est notre maître à tous. Et s’ il est vrai que celui qui refuse d’endosser les conséquences de sa vér
621 e par là qu’il en a plus de respect que celui qui s’ efforce de la réaliser, — c’est que la vérité dont il s’agit ressemble
622 rce de la réaliser, — c’est que la vérité dont il s’ agit ressemble pas mal au néant. Soyons sérieux : la majorité des trai
623 nt et simplement ce qui est. Au surplus, M. Benda se trompe quand il croit juger de Sirius. Il est encore en pleine affair
624 rius. Il est encore en pleine affaire Dreyfus. Il se vante d’être intemporel, mais il n’est guère qu’anachronique. Partisa
35 1937, Esprit, articles (1932–1962). Brève introduction à quelques témoignages littéraires (septembre 1937)
625 ittérature, dans Esprit , c’est une question qui se pose à nos lecteurs, parce que, sous une forme plus générale, la ques
626 t dire qu’une réflexion patiente — mais urgente — s’ impose à nous sur ce point comme sur tant d’autres, dans la mesure où
627 qui soit assez organique et complet pour pouvoir s’ opposer valablement aux ambitions totalitaires. La littérature agit su
628 is pris, et par un certain ordre d’objets qu’elle se choisit, est aussi le produit d’une époque. C’est pourquoi la questio
629 de la durée d’un ordre social personnaliste. Elle se fait en faisant, par ce mouvement d’interaction à quoi se réduit en f
630 en faisant, par ce mouvement d’interaction à quoi se réduit en fin de compte la « dialectique » dont tout le monde parle d
631 soutiennent, et qu’elle maintienne. (La question se posera un jour aussi lointain peut-être que certains le désirent…) Po
632 uvons que militer dans une direction générale qui se précisera par les obstacles mêmes que nous aurons à surmonter. Quoi
633 ut provisoire d’une sorte d’anthologie mensuelle. S’ il fallait résumer ce qu’ils ont en commun, nous trouverions d’abord q
634 inguer cette « génération » nouvelle de celle qui s’ illustra par le surréalisme. Littérature présente au monde dans lequel
635 ésente au monde dans lequel et contre lequel elle s’ édifie. Je ne pense pas qu’il soit souhaitable d’en dire plus, au seui
636 . Dans cette perspective générale, que l’on verra se préciser ou se ramifier de mois en mois, nous avons réuni d’ores et d
637 rspective générale, que l’on verra se préciser ou se ramifier de mois en mois, nous avons réuni d’ores et déjà un certain
638 t, Michel Seuphor, Jean Tardieu. On voit qu’il ne s’ agit pas d’une école ; encore moins d’une orthodoxie personnaliste. Ma
36 1937, Esprit, articles (1932–1962). Martin Lamm, Swedenborg (septembre 1937)
639 toujours bon gré mal gré pour quelque chose, même s’ ils préfèrent l’ignorer — nous ne pensons pas que cette limitation nor
640 e cette limitation normale — et normative — doive se traduire par un appauvrissement de notre curiosité intellectuelle. Bi
641 encer chaque mois le procès d’une littérature qui se vante d’être « insignifiante » — c’est-à-dire sans but, privée de « s
642 gloire posthume est un « titre » ; « l’intérêt » s’ accumule avec le temps ; l’œuvre enfin devient présentable… On a l’imp
643 te ne prend quelque chaleur qu’aux endroits où il s’ agit de réfuter les hypothèses d’un collègue historien. Je ne nie pas
644 Lamm et qui me paraît très convaincante, mais on se demande souvent pourquoi il la défend, et pourquoi il s’occupe d’un p
645 nde souvent pourquoi il la défend, et pourquoi il s’ occupe d’un personnage qui ne semble exciter ni sa réprobation ni son
646 ions mystiques, et aux problèmes théologiques qui s’ y rattachent étroitement, c’est cette étrangeté même de l’objet qui se
647 nnable, à des « rêveries » purement mystiques. On s’ imagine couramment que la doctrine théosophique de Swedenborg est le s
648 du sujet, donc à son détriment, surtout lorsqu’il s’ agit d’un phénomène spirituel et culturel de première importance. Ensu
649 ue l’honnêteté soit justement le prétexte qu’elle se donne — s’appliquant à un ordre de spéculation tel que le mysticisme.
650 eté soit justement le prétexte qu’elle se donne — s’ appliquant à un ordre de spéculation tel que le mysticisme. M. Lamm a
651 spéculation tel que le mysticisme. M. Lamm a beau s’ efforcer de ne point porter de jugement de valeur sur la « réalité » d
652 étend critiquer. Exemples : « Les visions dont il s’ agit ici sont vraisemblablement des hallucinations hypnagogiques, genr
653 a fameuse « vertu dormitive »… 2. Les auteurs qui s’ occupent des mystiques et, en général, d’objets religieux qui leur par
654 iable de « la science » d’aucune époque, et qu’il se pose au seul jugement métaphysique et théologique de chaque génératio
655 chez les jeunes écrivains français et belges, et s’ allie parfois curieusement avec l’éthique collectiviste. Mais l’anéant
656 ussi être compris comme un effort de l’homme pour se libérer de sa personnalité (ou de son individualité) telle qu’elle se
657 propre, c’est Dieu qui vit et agit en elle. » Il s’ agit, au vrai, de la lutte entre le vieil homme et le nouvel homme, en
658 uvel homme, entre l’individu et la vocation qu’il se reconnaît, je dirais volontiers : entre la personnalité, naturelle ou
659 n petit personnage individuel ou sociologique, et se mettre au service de quelque chose qui le dépasse, mais où il trouve
37 1937, Esprit, articles (1932–1962). Neutralité oblige (octobre 1937)
660 muz pour nous tirer de l’optimisme assez épais où s’ endorment les jeunes Suisses, trop assurés, comme le dit Cingria, de t
661 d’hésitants fort distingués. Mais ces inquiétudes se limitent au « plan moral », comme nous aimons à dire. Elles sont d’us
662 nalement, que Ramuz pose ces questions ; mais que s’ il garde en même temps le souci d’expliquer qui nous sommes à nos vois
663 ’il faille poser à la Suisse. Parce que la Suisse se figure justement que c’est la question qui ne se pose pas. Que nous l
664 se figure justement que c’est la question qui ne se pose pas. Que nous le voulions ou non, notre neutralité caractérise n
665 onscience de sa raison d’être, et le prestige qui s’ y attache. On croit souvent, surtout chez nous, qu’un petit pays a, co
666 i le propriétaire laisse ses terres en friche, et s’ enrichit sans rien créer, tout simplement parce qu’il possède des coup
667 les, et les obligations surtout spirituelles, ils se persuadent petit à petit qu’on pourrait jouir des premières sans se s
668 t à petit qu’on pourrait jouir des premières sans se soucier trop des secondes. Sous prétexte de réalisme, et de défense d
669 s qu’offrait la SDN sans accepter les charges qui s’ y trouvaient liées. D’où le malaise provoqué par l’application des san
670 ouveau de l’Europe. Il est fatal que ces dilemmes se multiplient à l’avenir. Le fameux équilibre stratégique de l’Europe q
671 isse sur le continent, nous le voyons, lui aussi, se transformer d’année en année. Et nous voyons que lui aussi dépend d’u
672 e idéale, me paraît être la grande leçon qui doit se dégager de notre effort. La mission essentielle de la Suisse est une
673 s du particulier et les devoirs envers le général se fécondent mutuellement75. Cette conception du monde n’est pas nouvell
674 ’est autour d’elle et grâce à elle que l’Occident s’ est édifié, et qu’il a dominé le monde. Elle n’est nullement, comme ce
675 mission même qui justifie cette neutralité. Elle se permet de prendre parti, dans les questions de politique étrangère, o
676 ’autant plus que ce magistère ne paraît nullement s’ exercer au nom d’une vocation bien définie et de portée européenne. Qu
677 es ni nationaux. La même critique peut d’ailleurs s’ adresser à notre presse d’extrême gauche lorsqu’elle défend le même Lé
678 fédérale. Quand nous verrons nos grands journaux se préoccuper de juger ce qui se passe chez nos voisins non plus au nom
679 nos grands journaux se préoccuper de juger ce qui se passe chez nos voisins non plus au nom de la droite française ou de l
680 rions en tirer qu’une seule leçon : les fascismes se donnent pour but d’exalter leur mission nationale. Quelles que soient
681 nation. L’autorité qu’une certaine presse suisse s’ était acquise à l’étranger reposait justement sur le fait que nous éti
682 fédéraliste vient à faiblir, quand par exemple on se met chez nous à l’école de la droite française et de sa politique par
683 singularités sinon latines, du moins romanes. On se découvre en s’opposant, mais en s’opposant réellement, c’est-à-dire d
684 inon latines, du moins romanes. On se découvre en s’ opposant, mais en s’opposant réellement, c’est-à-dire de près, corps à
685 ns romanes. On se découvre en s’opposant, mais en s’ opposant réellement, c’est-à-dire de près, corps à corps. Croit-on que
686 s ses grandeurs. Aux xviie et xviiie , l’horizon se resserre un peu, on ne voit guère que Berne et le « grand Haller », e
687 de Coppet, Gibbon, Schlegel et Sismondi. Ce foyer s’ éteint pour un temps. Il en renaît un autre à Bâle : Jacob Burckhardt,
688 teint la grandeur qu’en utilisant ses défauts, en s’ élevant au point où ils deviennent les conditions d’une création uniqu
689 es buts et du rôle de l’armée dans la cité. Il ne s’ agit ici que de nuances dans l’atmosphère de notre pays, mais il est i
690 rons-nous rappeler qu’il existe d’autres manières se servir son pays et d’illustrer sa cause. Et que c’est faire grand tor
691 stifications parfois mythiques à des réalités qui se sont constituées par le jeu d’intérêts et de routines médiocres. Vous
692 tout cela à partir des formes existantes ? Il ne s’ agit pas pour nous de « révolutionner », au sens que le bourgeois crai
693 ui sont médiocres. J’ai cité le cas de la presse, se réduisant elle-même au rôle de presse locale. Il faut bien dire aussi
694 faut bien dire aussi que notre fédéralisme tend à se réduire à l’esprit de clocher, à une limitation des horizons, bien pl
695 s et protégées82.) Seule notre économie cherche à se mettre au pas des grandes économies européennes, mais de la manière l
696 passe. Petit peuple chargé d’une grande mission : s’ il l’oublie, il étouffe bientôt dans le confort et l’asepsie morale. M
697 es clichés lyriques d’allure nationale-socialiste se mêlent à des déclarations de loyalisme démocratique. 80. Qu’on enten
698 ion militaire, comme le réclament déjà certains ! S’ il fallait établir un rapport, je choisirais naturellement l’inverse,
38 1938, Esprit, articles (1932–1962). La passion contre le mariage (septembre 1938)
699 t l’influence, du xiie siècle jusqu’à nos jours, se révèle exactement assimilable à celle d’un mythe. Tristan est un roma
700 ure) que l’on décrit dans le présent chapitre. On s’ est efforcé de remédier par quelques notes aux obscurités qu’entraînai
701 e. 1. Crise moderne du mariage Deux morales s’ affrontaient au Moyen Âge : celle de la société christianisée, et cell
702 Celui qui contrevenait à ce triple engagement ne se rendait pas « intéressant », mais pitoyable ou méprisable. La synthès
703 s pitoyable ou méprisable. La synthèse catholique s’ efforçait de marier l’eau et le feu, car on pouvait tirer des Écriture
704 lui qui reste vierge « fait mieux » que celui qui se marie, même chrétiennement. L’hérésie manichéenne qui est à l’origine
705 héenne qui est à l’origine de la cortezia du Midi s’ opposait au mariage catholique sur les trois chefs que l’on vient de r
706 fane d’apparences, dont la puissance de séduction s’ accroît encore du fait que l’on ignore la signification mystique de se
707 e roi David en volant Bethsabé commet un crime et se rend méprisable. Mais Tristan, s’il enlève Iseut, vit un roman, et se
708 met un crime et se rend méprisable. Mais Tristan, s’ il enlève Iseut, vit un roman, et se rend admirable… Ce qui était « fa
709 Mais Tristan, s’il enlève Iseut, vit un roman, et se rend admirable… Ce qui était « faute » et ne pouvait donner lieu qu’à
710 nt soudain vertu mystique (dans le symbole), puis se dégrade (dans la littérature) en aventure troublante et attirante. ⁂
711 e est héritée de l’orthodoxie religieuse, mais ne s’ appuie plus sur une foi vivante, et dont l’autre dérive d’une hérésie
712 incompatibles. Leurs origines et leurs finalités s’ excluent. De leur coexistence dans nos vies surgissent sans fin des pr
713 Rôle d’exutoire, rôle civilisateur. Mais le mythe s’ est déprimé et profané en même temps que les formes sociales dont il t
714 éléments plastiques. Si maintenant il tentait de se recomposer, on pressent qu’il ne trouverait plus de résistances assez
715 ns les cadres actuels. L’institution matrimoniale se fondait en effet sur trois groupes de valeurs qui lui fournissaient s
716 ens d’expression. Or voici que ces contraintes ou se relâchent, ou disparaissent :   1. — Contraintes sacrées. Le mariage,
717 tes sacrées. Le mariage, chez les peuples païens, s’ est toujours entouré d’un rituel dont nos institutions gardèrent longt
718 uve plus même le besoin « superstitieux » d’aller se faire bénir par un prêtre.   2. — Contraintes sociales. Les questions
719 ces. En même temps, les cérémonies épithalamiques se simplifient ou disparaissent. Il est curieux de noter que des coutume
720 nification, représente bien plutôt une volonté de s’ évader de l’ambiance sociale, et de souligner le caractère privé de ce
721 t de conditions externes qui ne manqueront pas de se produire un jour ou l’autre dans la vie du couple. Or c’est de tout c
722 un système de contraintes sociales, ne peut plus se fonder, désormais, que sur des déterminations individuelles. C’est-à-
723 deux conjoints dans le cas le plus favorable. Or s’ il est assez difficile de définir en général le bonheur, le problème d
724 le bonheur, le problème devient insoluble dès que s’ y ajoute la volonté moderne d’être le maître de son bonheur, ou ce qui
725 onde de la comparaison, où nul bonheur ne saurait s’ établir, tant que l’homme ne sera pas Dieu. Le bonheur est une Eurydic
726 r à sa merci — au lieu d’y être comme par grâce — se transforme instantanément en une absence insupportable. Fonder le mar
727 us, expliquent seuls la facilité avec laquelle on se marie encore « sans y croire ». Le rêve de la passion possible agit c
728 que en Languedoc. Il est clair qu’un tel jugement se fonde sur une équivoque : car l’Amour dont il s’agissait n’était rien
729 se fonde sur une équivoque : car l’Amour dont il s’ agissait n’était rien d’autre que la foi cathare, et l’accession d’un
730 tion aux coutumes du droit féodal. Mais là-dessus se produisit la confusion inévitable de la Dame, pur symbole de l’Amour,
731 s haute, où les barrières sociales, entre autres, s’ évanouissent. Le Tzigane peut enlever la princesse, le mécano épouser
732 olentes ou flatteuses. C’est tout le possible qui s’ ouvre, un destin qui acquiesce au désir ! Je vais y entrer, je vais y
733 ion de plénitude. Je nommerais libre un homme qui se possède. Mais l’homme de la passion cherche au contraire à être possé
734 s jours — et ce n’est qu’un début —, un homme qui se prend de passion pour une femme qu’il est seul à voir belle, est prés
735 disation des types de femmes admis pour « beaux » se produit normalement dans chaque génération, de même que chaque époque
736 la plus obsédante. (Encore la femme pourra-t-elle s’ efforcer de se faire une tête à la Garbo, mais alors il s’agit que le
737 nte. (Encore la femme pourra-t-elle s’efforcer de se faire une tête à la Garbo, mais alors il s’agit que le mari ressemble
738 er de se faire une tête à la Garbo, mais alors il s’ agit que le mari ressemble à Gable ou à Taylor !) Ainsi la « liberté »
739 six mois. Supposons, comme il est probable, qu’il se fixe enfin sur un type, compromis entre ce qu’il aime et ce que le fi
740 de la révélation mythique. (Pas même la couronne s’ il est roi.) Voilà le vrai « mariage d’amour » moderne : le mariage av
741 dant. Alors commence une « passion » nouvelle. On s’ ingénie à renouveler l’obstacle et le combat. On imagine différente la
742 s bras, on la déguise et on l’éloigne en rêve, on s’ acharne à dépayser les sentiments qui sont en train de se nouer dans u
743 ne à dépayser les sentiments qui sont en train de se nouer dans une durée étale et trop sereine. C’est qu’il faut recréer
744 istan emmène Iseut dans la forêt, où plus rien ne s’ oppose à leur union, le génie de la passion dépose entre leurs corps u
745 éroïsme religieux à la confusion sans grandeur où se débattent les hommes du temps profane : au lieu de l’épée du chevalie
746 ables victimes d’un mythe dont l’horizon mystique s’ est refermé depuis longtemps. Pour Tristan, Iseut n’était rien que le
747 fin terrestre — et c’est par là que cette passion se détachait des rythmes du désir charnel ; mais tandis que pour Tristan
748 Tristan l’infini, c’est l’éternité sans retour où s’ évanouit la conscience douloureuse — pour le moderne, ce n’est plus qu
749 ivait une fatalité dont ses victimes ne pouvaient se délivrer qu’en échappant au monde fini. Mais la passion dite « fatale
750 s la passion dite « fatale » — c’est l’alibi — où se complaisent les modernes, ne sait plus même être fidèle, puisqu’elle
751 aciles à saisir. Au lieu de mener à la mort, elle se dénoue en infidélité. Qui ne sent la dégradation d’un Tristan qui a p
752 est la victime d’un ordre social où les obstacles se sont dégradés. Ils cèdent trop vite, ils cèdent avant que l’expérienc
753 de l’homme aux amours successives. Les catégories se détruisent. L’aventure n’est plus même exemplaire. Seul le Don Juan m
754 il n’a jamais le temps d’aimer — d’attendre et de se souvenir — et rien de ce qu’il désire ne lui résiste, puisqu’il n’aim
755 mplications qui servent d’intrigues à nos auteurs se ramènent au schéma monotone des ruses de la passion pour s’« entreten
756 t au schéma monotone des ruses de la passion pour s’ « entretenir », — des ruses d’une passion débile pour s’inventer de pl
757 tretenir », — des ruses d’une passion débile pour s’ inventer de plus secrets obstacles. Je songe à la psychologie de la ja
758 e fois de plus, que le mythe des amants « ravis » s’ est dégradé en perdant sa mystique. Le ravissement n’est plus qu’une s
759 tel qu’il est, parce qu’il faudrait tout d’abord s’ accepter, ils ne voient de toutes parts que choses à envier, qualités
760 utes parts que choses à envier, qualités dont ils se sentent privés, et motifs de comparaisons qui toujours tournent à leu
761 té et réel, que l’on choisit non comme prétexte à s’ exalter, ou comme « objet de contemplation »90, mais comme une existen
762 onscience de la nature du phénomène, c’est à quoi se résume l’ambition des analyses qui précèdent ; mais je sens bien qu’e
763 contraintes de classe et d’argent. D’autres enfin s’ efforcent de fonder une science des rapports conjugaux. Jung analyse l
764 t ancrées. On a peur de paraître « puritain ». On s’ efforce de faire la part du feu, et l’on va même parfois jusqu’à ce pa
765 combattant, de parler comme un philistin. (Ce qui se produirait fatalement !) Ainsi l’on passe avec une feinte légèreté à
766 égèreté à côté du problème fondamental. « Il faut se faire lire et gagner la confiance ; on ne remonte pas le courant de t
767 ieux. Et comme il faut pourtant que quelque chose se fasse, la seule question qui se pose à l’historien, au sociologue, c’
768 que quelque chose se fasse, la seule question qui se pose à l’historien, au sociologue, c’est de savoir quel mécanisme soc
769 iologue, c’est de savoir quel mécanisme social va se déclencher pour rétablir la situation, ou quel réflexe collectif. ⁂ D
770 ues, qui inspirait les jeunes chefs bolchéviques, se traduisit dans la réalité par une généralisation de l’union libre, de
771 yait contraire aux préjugés réactionnaires, qu’on se figurait, bien à tort, entretenus par le capitalisme. Dans une lettre
772 ingt ans plus tard, le « redressement des mœurs » s’ est opéré, non par quelque sursaut vertueux, non par l’initiative d’un
773 nt consciente des conditions de sa durée. Staline s’ est assigné pour but prochain de refaire des cadres à sa nation. Car s
774 itait, et la « défense nationale » ne pouvait pas s’ organiser sans un constant recours à la passion des premiers révolutio
775 dictature hitlérienne, du fait qu’elle prétendait se fonder sur une base raciste et militaire, devait se donner pour premi
776 fonder sur une base raciste et militaire, devait se donner pour première tâche de surmonter cette crise des mœurs. On com
777 ants, puis les élever jusqu’au moment où le Parti s’ en chargera (c’est-à-dire pendant 6 ou 7 ans). De là, on passe à des m
778 ⁂ Trois hypothèses demeurent alors possibles. Il se peut que d’ici vingt ou cent ans, l’on voie se reformer les condition
779 Il se peut que d’ici vingt ou cent ans, l’on voie se reformer les conditions externes indispensables à la reconstitution d
780 mme simple déficience sociale (ou sabotage) devra se réfugier dans le secret. Mais alors elle retrouvera pour s’exprimer d
781 r dans le secret. Mais alors elle retrouvera pour s’ exprimer dans un langage symbolique (ésotérique et d’extérieur rassura
782 tension incalculablement plus forte que celle qui s’ institua au xiie siècle. Mais l’éventualité de la guerre, c’est-à-dir
783 e de l’amour. 86. Sauf peut-être aux États-Unis, s’ il faut en croire certains échos de presse sur la vie privée des stars
784 nécessité des obstacles au désir — on les invente s’ il n’y en a pas — et toute la dialectique de la passion qui se disting
785 a pas — et toute la dialectique de la passion qui se distingue de celle du désir en ce qu’elle refuse la satisfaction. On
786 n’aime pas Iseut, on aime l’amour. On ne veut pas se satisfaire, on veut brûler. 89. Le Dict de Padma. 90. C’est l’une
39 1938, Esprit, articles (1932–1962). Revue des revues (septembre 1938)
787 me gauche française (communistes exclus) quand il s’ agit de thèses objectives et de programmes d’avenir. C’est le ton et l
788 ’avenir. C’est le ton et les sentimentalismes qui s’ opposent encore. Mais enfin l’on s’apercevra bientôt que le capitalism
789 entalismes qui s’opposent encore. Mais enfin l’on s’ apercevra bientôt que le capitalisme est une doctrine centriste, modér
790 u M. Michelin, Je doute qu’il soit assez sot pour se contenter de cette révolution. Je doute que ce qu’il demande ce soit
791 signe » n’est pas négligeable : la vieille droite s’ est toujours définie en termes de littérature, et l’Action française a
792 , 1938). — Manifeste des Bretons fédéralistes. On s’ y réclame très curieusement de la « nation » bretonne, du manifeste de
793 Germain (comme on disait naguère) et Montparnasse se mêlaient à merveille. Le déhanchement des inversions et l’odeur sourn
794 nt des inversions et l’odeur sournoise de l’opium se faisaient à peine remarquer dans le brouhaha parfaitement mesuré ». D
40 1938, Esprit, articles (1932–1962). L’amour action, ou de la fidélité (novembre 1938)
795 ombien serait vaine l’attitude intellectuelle qui se définirait elle-même comme une condamnation de la passion : il suffit
796 ute à racheter ! Mais tuer l’homme avant qu’il ne se tue, et le tuer autrement qu’il ne veut l’être, c’est bien de cela, d
797 ut l’être, c’est bien de cela, de cela seul qu’il s’ agit, pour qui veut surpasser la passion. Quant à stériliser le milieu
798 on plonge ses racines, il est probable que l’État s’ en chargera, c’est son hygiène. Il y a toutes les raisons de le prévoi
799 omporte pas d’échappatoire dans le temps à venir. S’ il n’est peut-être pas possible à l’homme — à un homme déterminé — de
800 si elle existait ce serait pour moi seul : on ne se décide jamais que pour son compte, et le reste est indiscrétion. Mais
801 vaillant travailleur qui rentre le soir, harassé, se retremper dans la paix familiale, vous verrez que cela va, neuf fois
802 un ouvrier : la censure pour un coup trouverait à se justifier. Oui, les romantiques ont raison ; et les réalistes ont rai
803 la fin il n’écrase pas seulement ce philistin qui se contente d’épouser la veuve du brasseur, ou ce jeune fou qui aime la
804 nce, je n’en fais pas un ordre… Car il vaut mieux se marier que de brûler… Que chacun marche selon la part que le Seigneur
805 i le coup de grâce : « Celui qui n’est pas marié s’ inquiète des choses du Seigneur, des moyens de plaire au Seigneur, et
806 ens de plaire au Seigneur, et celui qui est marié s’ inquiète des choses du monde, des moyens de plaire à sa femme. » (v. 3
807 du mariage, mais aussi de tout ordre humain, qui s’ appelle le Royaume de Dieu (« Il n’y aura plus ni hommes ni femmes »),
808 effort porte en lui-même une vérité imperturbable s’ il témoigne sans cesse en faveur de ce qui transcende tout résultat, m
809 e qu’obéit sans le savoir le mal marié, lorsqu’il se persuade qu’un second ou qu’un troisième essai le rapprochera sensibl
810 y a du sophisme dans mon raisonnement : car tout se passe d’ordinaire comme si le bonheur des époux dépendait en réalité
811 , beauté, fortune, rang social… Mais pour peu que se précisent les exigences individuelles94, ces données extérieures perd
812 un choix de cet ordre, on donne à croire que tout se ramène à une sagesse, à un savoir ; et non pas à une décision. Or ce
813 pouvant être qu’imparfait, et provisoire, devrait se doubler d’une garantie. Et la seule garantie concevable est dans la f
814 s la force de la décision en vertu de laquelle on s’ engage pour toute la vie, « advienne que pourra ». Mais justement cett
815 ît secondaire ou superflue dans la mesure où l’on se persuade qu’il s’agit avant tout de calcul… D’où je conclus qu’il ser
816 uperflue dans la mesure où l’on se persuade qu’il s’ agit avant tout de calcul… D’où je conclus qu’il serait plus conforme
817 elève toujours d’une sorte d’arbitraire, dont ils s’ engagent à assumer les suites, heureuses ou non. Ce n’est pas là un él
818 l’on peut calculer, j’admets qu’il est stupide de s’ en priver. Mais je dis que la garantie d’une union raisonnable en appa
819 a ! — comme le diront beaucoup de jeunes gens qui s’ attendent, en vertu du mythe, à je ne sais quels transports divins — i
820 ité un problème, alors que le problème ne devrait se poser qu’à partir de cette promesse, considérée comme absolue. La pro
821 naturelle, et de plus qu’elle est salutaire. Cela se discute à l’infini. Et cela nous sera des plus utile dès que les homm
822 cela nous sera des plus utile dès que les hommes se régleront sur la raison et l’intérêt : quand ils n’auront plus de pas
823 ceux du siècle présent, je pense que la fidélité se définit comme la moins naturelle des vertus, et la plus désavantageus
824 ndication fondamentale : leur religion de la vie, s’ y oppose diamétralement. Ils considèrent la fidélité comme une discipl
825 situation au maximum et pour elle-même, sans plus se référer à rien qui « juge » et qui « mesure » la jouissance qu’on en
826 rofonde, nous l’avons vu95. Dans les deux cas, il s’ agit de s’évader hors de tout engagement concret, considéré comme une
827 ous l’avons vu95. Dans les deux cas, il s’agit de s’ évader hors de tout engagement concret, considéré comme une odieuse li
828 élité observée en vertu de l’absurde, parce qu’on s’ y est engagé, simplement, et que c’est un fait absolu, sur quoi se fon
829 simplement, et que c’est un fait absolu, sur quoi se fonde la personne même des époux. Il faut bien voir que cette fidélit
830 « Absurde » au moins autant que la passion, elle se distingue de la passion par un refus constant de subir ses rêves, par
831 telle fidélité fonde la personne. Car la personne se manifeste comme une œuvre, au sens le plus large du terme. Elle s’édi
832 e une œuvre, au sens le plus large du terme. Elle s’ édifie à la manière d’une œuvre, à la faveur d’une œuvre, et aux mêmes
833 e ne soit pas faite pour des « raisons » que l’on se réserve de répudier un jour, quand elles cesseront de paraître raison
834 à Abraham. Mais alors il n’y songeait pas ! Et il se peut aussi que rien ne compense la perte : nous sommes ici dans un or
835 Tristan. C’est un narcissisme mystique, mais qui s’ ignore, naturellement, et qui croit être un vrai amour pour l’autre. L
836 e, ni à cet être symbolique, ce beau prétexte qui s’ appelle Iseut, mais à sa plus profonde et secrète passion. Le mythe s’
837 s à sa plus profonde et secrète passion. Le mythe s’ empare de l’« instinct de mort » inséparable de toute vie créée, et il
838 en lui donnant un but essentiellement spirituel. Se détruire, mépriser son bonheur, c’est alors une manière de se sauver
839 mépriser son bonheur, c’est alors une manière de se sauver et d’accéder à une vie supérieure, la « joie suprême » d’Isold
840 habituellement ; elle ne peut être qu’une action. Se contenter de ne pas tromper sa femme serait une preuve d’indigence et
841 t la chute dans l’illimité, au sein de la Nuit où s’ effacent les formes, les visages, les destins singuliers : « Non plus
842 , aimé parce qu’il m’appelle à le créer, et qu’il se tourne avec moi vers le Jour afin d’attester notre alliance. ⁂ Une vi
843 , et qui a voulu le « spiritualiser ». Mais Agapè se venge d’Éros en le sauvant. Car Agapè ne sait pas détruire et ne veut
844 eux pas la mort du pécheur, mais sa vie. » ⁂ Éros s’ asservit à la mort parce qu’il veut exalter la vie au-dessus de notre
845 ugement du Créateur. C’est ici-bas que notre sort se joue. C’est sur la terre qu’il faut aimer et recevoir le pardon. L’h
846 était donc condamné à croire Éros, c’est-à-dire à se confier dans son désir le plus puissant, à lui demander la délivrance
847 à la révélation de l’Agapè voit soudain le cercle s’ ouvrir : il est délivré par la foi de sa religion naturelle. Il peut m
848 autre délivrance. Et voici que l’Éros à son tour se voit relevé de sa fonction mortelle et délivré de son destin. Dès qu’
849 la séduction du Rien. Mais dès lors que le Verbe s’ est fait chair et qu’il nous a parlé en mots humains, nous avons appri
850 is cette nouvelle : ce n’est pas l’homme qui doit se délivrer lui-même, c’est Dieu qui l’a aimé le premier, et qui s’est a
851 -même, c’est Dieu qui l’a aimé le premier, et qui s’ est approché de lui. Le salut n’est plus au-delà, toujours plus haut,
852 e la fidélité dans le mariage. Car cette fidélité se fonde justement sur le refus initial et juré de « cultiver » les illu
853 nt réciproque exige et crée l’égalité de ceux qui s’ aiment. Dieu manifeste son amour pour l’homme en exigeant que l’homme
854 eut-être par sa seule rêverie. Alors la tentation se dissipe, déconcertée, au lieu de se faire obsédante, et la fidélité s
855 la tentation se dissipe, déconcertée, au lieu de se faire obsédante, et la fidélité se garantit par la lucidité qu’elle d
856 ée, au lieu de se faire obsédante, et la fidélité se garantit par la lucidité qu’elle développe. L’emprise du mythe faibli
857 veloppe. L’emprise du mythe faiblit d’autant ; et s’ il reste improbable qu’elle s’abolisse jamais sans laisser de traces d
858 iblit d’autant ; et s’il reste improbable qu’elle s’ abolisse jamais sans laisser de traces dans le cœur d’un homme moderne
859 d’autres termes, on pourrait dire que la fidélité se garantit elle-même contre l’infidélité, du simple fait qu’elle habitu
860 d’Éros. Mais de combien de complaisances secrètes se compose une « fatalité » ! Quant au coup de foudre, il est censé just
861 générale, et sexuellement localisée, que le corps se voit porté à ces brusques écarts, comparables aux calembours qui obsè
862 ux calembours qui obsèdent un esprit fatigué : on se laisse aller à des « rapprochements » idiots. Par contre, dans un éta
863 t du sentimentalisme). L’amour sauvage et naturel se manifeste par le viol, preuve d’amour chez tous les barbares. Mais le
864 e les relations humaines. Par contre, l’homme qui se domine, ce n’est pas faute de « passion » (au sens de tempérament) ma
865 tement, et qu’en vertu de cet amour, il refuse de s’ imposer, il se refuse à une violence qui nie et détruit la personne. I
866 en vertu de cet amour, il refuse de s’imposer, il se refuse à une violence qui nie et détruit la personne. Il prouve ainsi
867 t de l’Agapè, c’est-à-dire des deux religions qui se disputent notre Occident. La connaissance de ce conflit, de ses origi
868 st une hérésie d’origine orientale. Cette hérésie s’ est répandue d’abord dans les contrées les moins christianisées, préci
869 uerrier que l’on entend désigner par ce terme, il se rattache de la manière la plus précise, historiquement, à la passion1
870 telle, trahit les ambitions dont elle est née. Il se peut que l’Occident succombe à ce destin qu’il s’est forgé. Mais il e
871 se peut que l’Occident succombe à ce destin qu’il s’ est forgé. Mais il est clair que ce n’est pas le christianisme — comme
872 ion serait la tentation orientale de l’Occident ? S’ il est vrai qu’elle ne s’est développée dans notre histoire et nos cul
873 rientale de l’Occident ? S’il est vrai qu’elle ne s’ est développée dans notre histoire et nos cultures qu’à partir des xii
874 vie produit aussi la mort. Il suffit qu’un accent se déplace pour que le dynamisme change de signe. ⁂ C’est en fin de com
875 end. Il est certain que l’Occidental christianisé se distingue du mystique oriental par son pouvoir d’approfondir l’être c
876 es possibilités de les surmonter. Par exemple, il se peut que l’Europe, après une crise totalitaire (et supposé qu’elle n’
877 titutions solides, à la mesure de la personne. Il se peut que les excès mêmes de la passion provoquent et recréent des rés
878 obsède aujourd’hui tant de fronts ? Notre vie ne se joue pas dans l’au-delà temporel, mais dans les décisions toujours ac
879 et nunc, dans l’acte de l’Éternel où notre espoir se fonde. ⁂ Deux thèmes de réflexion, amorcés çà et là dans ces pages, p
880 » essentiellement impartageable et indicible, qui s’ opposait aux yeux de Kierkegaard à un mariage heureux selon le monde.
881 a marcher maintenant et vivre dans le monde comme s’ il n’avait pas d’autre tâche ni plus urgente ni plus haute. Ce « cheva
882 e surhumain : « il ressemble à un percepteur » et se conduit comme n’importe quel honnête bourgeois. Et pourtant « il a to
883 l a tout renoncé dans une infinie résignation, et s’ il a tout ressaisi par la suite, c’est en vertu de l’absurde (c’est-à-
884 ir que la passion — quel que soit l’ordre où elle se manifeste — ne trouve son au-delà réel et son salut que par cette act
885 age, mais alors « en vertu de l’absurde ». Et ils s’ étonnent chaque jour de leur bonheur. (Ces choses-là sont trop simples
886 t c’est ce qu’il nomme le mariage mystique. L’âme se comporte alors à l’endroit de son amour avec une sorte d’indifférence
887 ’obéissance. Et le désir de la plus haute passion se voit alors comblé sans cesse dans l’acte même d’obéir, en sorte qu’il
888 ynique méconnaissance de leur piété… 94. Plus on s’ écarte de l’espèce pour se rapprocher de la personne, plus le choix de
889 eur piété… 94. Plus on s’écarte de l’espèce pour se rapprocher de la personne, plus le choix devient singulier. À cette p
890 on croissante de l’instinct, à mesure que l’homme se virilise : c’est l’argument du Dr Maranon en faveur de la monogamie.
891 être fondé sur des « arguments » de ce genre. Il s’ agit ici, simplement, d’un fait d’observation qui réfute les croyances
892 ’idée antique du travail indigne de l’homme libre se retrouve dans la chevalerie », écrit Henri Pirenne, Histoire de l’Eur
893 e moins du monde, de la singularité du cas. Elles s’ appliqueraient aussi bien à n’importe quel malade sans génie. 108. C
41 1938, Esprit, articles (1932–1962). Suite à « La passion contre le mariage » (décembre 1938)
894 le nom de Lawrence parmi les premiers de ceux qui se sont attaqués à la fausse passion) et la réponse de Rougemont. La voi
42 1939, Esprit, articles (1932–1962). D’une critique stérile (mai 1939)
895 peu novatrices, la naissance d’une dictature qui s’ affirmerait malgré elle, non par volonté mais par crainte, pour assure
896 paralysie dont souffre le mouvement personnaliste s’ explique par un excès de critique négative, d’origine universitaire, o
897 olés ». 7. Ainsi l’écart entre action et doctrine s’ accentue d’année en année. La doctrine tourne à l’utopie, l’action se
898 en année. La doctrine tourne à l’utopie, l’action se décourage ou s’éparpille. 8. Pendant ce temps, on néglige l’essentiel
899 trine tourne à l’utopie, l’action se décourage ou s’ éparpille. 8. Pendant ce temps, on néglige l’essentiel : la création d
900 é, il vaut mieux n’être qu’une douzaine. 14. Pour se risquer personnellement, il suffit de croire personnellement à ce qu’
901 s le désirent tous plus ou moins courageusement — s’ empare de l’État, la puissance de cet État devient la totalisation des
902 des partis à collaborer dans l’État : au lieu de se complémenter, ils s’excluent, chacun prétendant « tout » régler selon
903 rer dans l’État : au lieu de se complémenter, ils s’ excluent, chacun prétendant « tout » régler selon son idéologie. Parti
904  » régler selon son idéologie. Partis qui veulent se faire aussi grands que le tout. 21. L’injustice, c’est la justice d’u
905 ustice. 23. Le but du personnalisme n’est pas de s’ emparer des « centrales » pour établir ensuite un régime personnaliste
906 est un but essentiellement fédéraliste. 25. Il ne s’ agit pas de s’emparer d’un pouvoir impuissant, mais d’exercer le pouvo
907 entiellement fédéraliste. 25. Il ne s’agit pas de s’ emparer d’un pouvoir impuissant, mais d’exercer le pouvoir sur place,
908 qui travaille fait plus que cent-mille mains qui se lèvent. 28. La critique des partis n’est stérile que dans la mesure o
43 1939, Esprit, articles (1932–1962). Autour de L’Amour et l’Occident (septembre 1939)
909 , bien moins des historiens — qui ne peuvent plus se faire d’illusions — que du public qui croit aux manuels. Je ne dis pa
910 même de l’histoire littéraire. C’est bien plutôt, s’ il faut une étiquette, un livre de théologie morale, et c’est sur ce t
911 qu’érudition et critique dite « sérieuse », elle se constitue proprement par le refus d’admettre quoi que ce soit de ce g
912 fus d’admettre quoi que ce soit de ce genre. Elle se condamne à l’enregistrement sans intervention de l’esprit. (C’est d’a
913 age tout ce reste, mes conclusions, à votre sens, s’ en fussent-elles trouvées modifiées ? J’entends mes conclusions religi
914 se « historique » que je suis tout prêt à réviser s’ il y a lieu. Voilà le point. Voilà le terrain de ma défense et aussi d
915  ? Nous en sommes tous là ! Mais faut-il vraiment s’ en réjouir ? Si l’on appelle catholique le refus conscient de renoncer
916 , mais ce n’est pas synonyme.) Et même dissonant, s’ il le faut. Dans ma dissonance obstinée, je considère que le chrétien,
917 e qu’elle est, mais vers le moi rêvé de celui qui s’ exalte. C’est une espèce de narcissisme. Le seul amour qui tende vers
918 e venez-vous faire ici ? C’est en Allemagne qu’on se passionne pour les troubadours et qu’on les connaît. » 111. La citat
919 note précise avant la lettre : « Le dialogue qui s’ est poursuivi entre Rougemont et Davenson, après la note de ce dernier
44 1946, Esprit, articles (1932–1962). « Un divorce entre le christianisme et le monde ? » (août-septembre 1946)
920 ise chrétienne est l’Épouse du Christ. Quand elle s’ arrange trop bien avec le monde (Constantin et la suite) c’est qu’elle
921 fossé comblé entre elle et le monde, c’est qu’on se trompe à la fois sur la fonction de l’Église et sur la nature du mond
922 nature du monde. Le fait que leur incompatibilité se voit mieux aujourd’hui qu’au Moyen Âge peut inquiéter : d’où votre en
923 istianisme serait de cesser d’être chrétien, sans s’ en apercevoir, et c’est le risque qu’il court dans les périodes où les
924 istianisme et le monde romain ; ni les staliniens s’ inquiétant du « divorce actuel entre le marxisme et le monde moderne »
925 l entre le marxisme et le monde moderne », lequel s’ est cependant constitué « massivement en dehors d’eux », c’est-à-dire
45 1946, Esprit, articles (1932–1962). Épilogue (novembre 1946)
926 ncipe à propos de ce produit utile et hygiénique. S’ il y a crise dans la fabrication et dans la répartition de l’article,
927 vail à la satisfaction du plus grand nombre, puis se dissout. C’est ainsi que de 1942 à 1946, l’État américain a contrôlé
928 rix, de la main-d’œuvre et des matières premières se dissolvent l’une après l’autre, sans trop d’histoires. Ce qui veut di
929 la lutte des partis. C’est pourquoi les partis ne s’ en sont point occupés, et n’ont point jugé nécessaire de proclamer l’u
930 tis, dans les commissions du Congrès et du Sénat, se sont bornés à des échanges d’arguments souvent brutaux, au cours d’en
931 te : le travail était fait. En France, les partis s’ arrangent en général pour rendre tous les problèmes aussi insolubles q
932 un Américain moyen voit le Monde — Quels sont, se dit-il, les pays qui marchent le mieux en Europe ? Les États scandina
933 ats turbulents, susceptibles et toujours prêts et se battre. Oui, l’Europe, ce sont nos Balkans. Mais il y a l’Amérique du
934 se de l’URSS ? Mais aussi… Une moitié de moi-même se révolte au spectacle de la mauvaise volonté internationale des Soviet
935 bor. Quant à l’autre moitié, elle ne demande qu’à s’ ouvrir à l’amitié de ce grand peuple des plaines, qui se met à vous re
936 ir à l’amitié de ce grand peuple des plaines, qui se met à vous ressembler si curieusement. Nous n’avons guère plus que lu
937 gros clients. C’est là que les choses pourraient se gâter… Quant à nos bons voisins « latins », je ne sais pourquoi, chaq
938 ans trois de leurs États, les dernières élections se sont passées presque sans coups de fusil. Peut-être atteindront-ils b
939 masses chez eux les fuient et que leurs élites ne s’ en approchent qu’en hésitant. Ils nous sont supérieurs à tant d’autres
940 et des correspondances. On ne peut pas impunément se vêtir de n’importe quelle couleur, sous prétexte que cela « fait bien
941 ien ne l’est en nous ni autour d’elle. Un peuple, s’ il éduque son sens des formes, cesse d’imiter et se met à créer. La r
942 ’il éduque son sens des formes, cesse d’imiter et se met à créer. La réduction du fait à une signification. L’Américain c
943 omme fer. Il les réduit d’ailleurs en chiffres et se sent aussitôt rassuré. Mais un fait n’est qu’un signe dans une équati
944 ase, on ne peut le lire qu’avec tout le contexte. S’ en tenir aux faits seuls, aux faits bruts, c’est une timidité de l’esp
945 s et masochiste. Et il est vrai que la conscience s’ éveille généralement dans la douleur, mais ils préfèrent l’anesthésie.
946 lamour, Superman et les sports à la radio. Et ils s’ entourent d’objets polis, luisants, emballés dans de la cellophane, qu
947 musiques qui empêchent d’entendre le silence. Ils s’ imaginent qu’un certain nombre de recettes et de martingales, — d’aill
948 ssures dans cet édifice d’inconscience que chacun s’ ingéniait à rendre étanche, — inconsciemment. Ce sont là des secousses
949 volonté souriante mais sérieuse d’apprendre et de s’ améliorer. J’y vois la marque de sa force. Qui n’a pas lu les éreintem
950 u les éreintements de l’esprit américain auxquels se livrent avec exubérance les revues et les journaux américains ne sait
951 it sur le thème de « L’homme américain ». bh. Il s’ agit de Vivre en Amérique , qui paraîtra chez Stock en 1947.
46 1948, Esprit, articles (1932–1962). Thèses du fédéralisme (novembre 1948)
952 ente et la plus créatrice de l’homme. […] Or, il s’ en faut de beaucoup que les Européens soient unanimes à tenir activeme
953 . À tort ou à raison — je n’en juge pas ici — ils s’ imaginent que ces pays réalisent mieux que leur nation ce qu’ils atten
954 us ont émigré. La bourgeoisie, dans son ensemble, se contente d’un double refus de la Russie et de l’Amérique, se résigne
955 d’un double refus de la Russie et de l’Amérique, se résigne à la décadence, ou la déplore mais sans faire mieux. Je ne vo
956 instauration d’une fédération européenne pour que se crée un troisième bloc, un bloc-tampon, ou un bloc opposé aux deux au
957 nir, nous tous, c’est que les nations européennes s’ ouvrent d’abord les unes aux autres, suppriment, sur tous les plans, f
958 pes et de personnes qui prendront l’initiative de se fédérer en dehors des gouvernements nationaux. Et ce sont ces groupes
959 Esprit, Paris, novembre 1948, p. 608-610. bj. Il s’ agit d’extraits de différents discours prononcés par Denis de Rougemon
47 1962, Esprit, articles (1932–1962). Lettre à Jean-Marie Domenach, à propos de « Sartre et l’Europe » (mai 1962)
960 mblent dire la même chose. Un lecteur non prévenu s’ y tromperait, mais pas vous. Car ma phrase signifie, à vous en croire,
961 européenne », sens qui me fait évidemment défaut s’ il est vrai qu’il se définit par « la conscience épouvantée d’une déch
962 qui me fait évidemment défaut s’il est vrai qu’il se définit par « la conscience épouvantée d’une déchéance et d’un reniem
963 qui auront dit que l’Europe était finie, quand il s’ agissait de la faire. » C’était cela, l’essentiel de ma réponse à Sart
964 ment, un aspect de son article. Pour le reste, il se peut que son texte m’ait “servi”, comme il dit. Après quinze ans de m