1 1932, Esprit, articles (1932–1962). À l’index (Première liste) : Candide (octobre 1932)
1 mann-Paul en les peignant « chez nous » — d’après ses souvenirs d’avant-crise sans doute — ne parvient pas à égaler les cél
2 on » possible de tout ce qu’il y a d’honnête dans son public soit à coup sûr d’écœurement et de mépris, devant cette déject
3 ion, grassement payée mais qui peut coûter cher à ses producteurs, de la haine qui se bat les flancs. a. Rougemont Denis
2 1932, Esprit, articles (1932–1962). On oubliera les juges (novembre 1932)
4 tude d’une chambre la nuit, — si c’est le lieu de sa prière. Les faits l’attendent : elle les juge. (Elle les avait jugés
5 diants surtout, quelques casquettes. La cour fait son entrée — maniement d’armes — dépose sur la table sabres et képis, s’a
6 tre de lui, qui sourit parfois doucement derrière ses lunettes d’écaille. C’est lui qui juge, ayant pesé son acte. Les autr
7 unettes d’écaille. C’est lui qui juge, ayant pesé son acte. Les autres appliquent un tarif. ⁂ Je ne suis pas antimilitarist
8 toire du Commissaire du gouvernement. Non pas que ses arguments fussent bien neufs, ni même honnêtement choisis. Mais simpl
9 ufs, ni même honnêtement choisis. Mais simplement sa conclusion le classe, quoi qu’il en pense, dans cette phalange de rhé
10 e pas difficile : on tient tout de même à choisir ses complices. Sans entrer donc dans le vif du débat — à savoir si Martin
11 Martin, « objecteur de conscience », a donné par son acte la preuve d’une obéissance à Dieu qui devrait être celle de tout
12 e de tout croyant ; ou s’il a seulement manifesté sa vocation particulière —, on voudrait dégager ici quelques constatatio
13 e rassurant et d’avouable, qui fait qu’on invoque son nom dans tous les cas où il s’agit en vérité de conscience de classe,
14 artin fait dans la paix ce que firent à la guerre ses aînés : c’est pour la même cause qu’il se sacrifie, avec le même cour
15  ». Tout aveu de cet ordre concourt à la ruine de ses auteurs. Un régime fort, usant de ses pouvoirs dans un style adéquat
16 la ruine de ses auteurs. Un régime fort, usant de ses pouvoirs dans un style adéquat à ses fins, jugerait de tels cas somma
17 rt, usant de ses pouvoirs dans un style adéquat à ses fins, jugerait de tels cas sommairement sans avocats ni simulacres d’
18  ! Mais il faut rendre à Martin cette justice que sa muette intransigeance a bien plus de portée. Prenons garde que la fam
19 en faits absurdes, le geste de Martin, détaché de ses considérants individuels, s’isole comme un signal de rupture consommé
20 signal de rupture consommée. Tout homme qui agit, sa pensée est en rupture de bourgeoisie. Jacques Martin, dans sa prison,
21 t en rupture de bourgeoisie. Jacques Martin, dans sa prison, témoigne pour un ordre nouveau. b. Rougemont Denis de, « O
3 1933, Esprit, articles (1932–1962). Comment rompre ? (mars 1933)
22 t tant que dure la lutte le christianisme vainc : sa victoire est d’être éveillé. Tel est pour lui l’ordre, le commandemen
23  qu’enfin ils la bénissent, la sanctifient, et en son nom rendent grâces au ciel, alors éclate le scandale, car alors, de p
24 parence de règne qu’en confondant scandaleusement sa cause avec la cause de ceux qui réellement gouvernent. (On sait ce qu
25 ois qu’il est porté, rétablit le christianisme et sa nouveauté menaçante. ⁂ Que la passion qui nous arrache ce cri, nous r
26 tre. Ce n’est pas le christianisme qui a confondu sa cause avec celle de la bourgeoisie capitaliste. Mais c’est un parti d
27 il s’est fait le soutien, et qui, depuis, assure son succès relatif. Une église « établie » établissant à son tour un ordr
28 cès relatif. Une église « établie » établissant à son tour un ordre injuste du monde et s’appuyant sur lui, en réalité n’es
29 t depuis si longtemps qu’elles parlent maintenant sa langue, adoptent ses préjugés, singent ses pires faiblesses et béniss
30 s qu’elles parlent maintenant sa langue, adoptent ses préjugés, singent ses pires faiblesses et bénissent ses canons. Bien
31 ntenant sa langue, adoptent ses préjugés, singent ses pires faiblesses et bénissent ses canons. Bien moins encore que tout
32 éjugés, singent ses pires faiblesses et bénissent ses canons. Bien moins encore que tout cela, nous attendons de nos église
33 imposture, partout où la chrétienté, ayant touché ses 30 deniers, voudra parler encore au nom du christianisme. ⁂ Le christ
34 e la refuser. Comment dès lors l’utiliserait-il à son gré ? Car d’une part il ne peut pas la compromettre, et ce qu’il comp
35 ent, à l’origine du désordre, et plus encore dans son établissement, nous trouvons ce désir trop humain de parler des chose
36 ces politiques que si nous posons le problème sur son plan réel. Or, le lieu de sa décision n’est pas le lieu des décisions
37 ons le problème sur son plan réel. Or, le lieu de sa décision n’est pas le lieu des décisions et des calculs humains ; il
38 ter le Christ : feindre d’accepter la doctrine de ses disciples, se faire un avoir de la Pauvreté évangélique, et bientôt n
39 — fût-ce à la gloire de Dieu ! — qui poursuivrait son plan sans se soucier de la justice de Dieu. Et la voix du prophète s’
40 à qu’elle mérite la mort. Les uns alors défendent ses propriétés, je ne sais quelles régions spirituelles dont tout leur êt
41 is c’est à la foi seule de me dire : Tu dois ! En son nom je ne puis engager que moi-même, hic et nunc. La politique est af
42 chrétien, mais ne se confond pas avec l’enjeu de son salut. Tel est le paradoxe, qui remonte au cœur même du christianisme
43 lors nous savons le véritable nom de la rupture, son lieu, son mode et son enjeu total : rétablir à chaque instant le chri
44 savons le véritable nom de la rupture, son lieu, son mode et son enjeu total : rétablir à chaque instant le christianisme,
45 éritable nom de la rupture, son lieu, son mode et son enjeu total : rétablir à chaque instant le christianisme, dans sa nou
46 rétablir à chaque instant le christianisme, dans sa nouveauté prophétique, tel est l’Acte — le seul ! — et tel est aussi
4 1933, Esprit, articles (1932–1962). Protestants (mars 1933)
47 sure où, constamment, il reproduit la démarche de ses fondateurs : le retour à l’Évangile débarrassé de tous les adoucissem
48 ême du capitaliste conservateur. En réalité, dans ses pires errements, le protestantisme garde toujours la possibilité de t
49 s la possibilité de transcender, de révolutionner ses formes. C’est pourquoi nous voyons aujourd’hui à l’avant-garde du mou
50 la « théologie dialectique » de Karl Barth et de ses amis de justifier une sorte de désintéressement radical à l’endroit d
51 goureuses. Friedrich Gogarten en particulier dans son Éthique politique pose tous les problèmes de l’heure avec une lucidit
52 nt chez les écrivains politiques. Si certaines de ses conclusions sont nettement étatistes, il n’en reste pas moins non con
53 Beaucoup plus « existentielle » que systématique, sa doctrine pourrait éclairer et aérer beaucoup de nos polémiques byzant
54 initive, mais ce n’est pas sans avoir reconnu que sa force persuasive vient de ce que seul, aujourd’hui, il prétend résoud
55 ite de débarrasser le protestantisme américain de son piétisme optimiste et moralisant. Mais qu’entendent-ils par « christi
56 festent en Amérique. On remarque dans la liste de ses collaborateurs des noms d’évêques socialistes et d’essayistes à tenda
57 s plus influents du Japon, et l’on n’a pas oublié son fameux message aux peuples chinois, publié à Tokyo pendant le bombard
58 hant le problème de la violence et que seul parmi ses collaborateurs, André Philip tranche avec netteté, comme on l’a vu pl
59 ture » à laquelle nous travaillons tous ici. 9. Son autobiographie a été traduite en français sous le titre de Avant l’Au
5 1933, Esprit, articles (1932–1962). Loisir ou temps vide ? (juillet 1933)
60 L’homme dit « j’agis », et il trouve dans l’acte sa mesure, son rythme et sa joie. Une totalité. Et s’il divise alors le
61 t « j’agis », et il trouve dans l’acte sa mesure, son rythme et sa joie. Une totalité. Et s’il divise alors le temps de ses
62 et il trouve dans l’acte sa mesure, son rythme et sa joie. Une totalité. Et s’il divise alors le temps de ses journées, c’
63 e. Une totalité. Et s’il divise alors le temps de ses journées, c’est pour mieux dominer ses moyens. Selon sa loi. Mais le
64 e temps de ses journées, c’est pour mieux dominer ses moyens. Selon sa loi. Mais le moderne dit : « Je gagne » ou « Je prod
65 rnées, c’est pour mieux dominer ses moyens. Selon sa loi. Mais le moderne dit : « Je gagne » ou « Je produis », ou bien « 
66 , de l’histoire. Lorsque l’homme renonce à créer, son « travail » n’est plus que souffrance. Il ne s’agit plus d’accoucher,
67 s’agit plus d’accoucher, mais seulement de purger sa peine. C’est alors qu’un Franklin, qu’un Guizot, qu’un Staline, vous
68 t-on, dans le travail qu’il fournit pour « gagner sa vie », pour assurer sa subsistance matérielle. La dignité du singe al
69 u’il fournit pour « gagner sa vie », pour assurer sa subsistance matérielle. La dignité du singe alors ? Elle apparaît trè
70 ue la dignité de l’homme consiste à mettre en jeu sa vie, à la risquer jusqu’à la perdre si la mesure de notre acte nous d
71 rxistes partent de la nécessité du gain, — gagner sa vie. Nous partons de la liberté du risque, — perdre sa vie. Cette opp
72 e. Nous partons de la liberté du risque, — perdre sa vie. Cette opposition est tellement radicale, tellement fondamentale,
73 ne d’un système, elle ne s’introduira jamais dans ses effets (à moins d’une révolution). Mais il y a plus. Tout travail qu’
74 que l’homme essaie de se donner pour justifier à ses propres yeux, voire pour glorifier ce qu’il répugne à considérer comm
75 our glorifier ce qu’il répugne à considérer comme sa peine. Nous assistons au triple échec du cynisme grossier — « Je gagn
76 enne par fatigue à décréter vides les loisirs que ses ancêtres consacraient à la création de leur puissance, du même coup e
77 loisir est simplement le contraire du travail, et son but ; si le labeur et le repos n’ont plus de finalité commune ; s’il
78 joyeusement renouvelée. L’homme tendu assume dans ses desseins la nécessité et le jeu, les combinant selon sa loi pour crée
79 seins la nécessité et le jeu, les combinant selon sa loi pour créer un risque nouveau. Le temps de cet homme est plein, et
80 l’empereur de la Chine fait appeler auprès de lui son peintre. « Peins-moi sur ce rouleau un crabe ». — « Il me faut vingt
81 ule. Au terme qu’il s’était fixé, le voici devant son seigneur. « Ton tableau ? » — « Qu’on m’apporte un rouleau, des pince
6 1934, Esprit, articles (1932–1962). Préface à une littérature (octobre 1934)
82 afin d’éclairer par contraste un avenir qui devra son éclat moins à lui-même qu’à nos ombres, et moins à sa jeunesse incomp
83 clat moins à lui-même qu’à nos ombres, et moins à sa jeunesse incomparable qu’au souvenir récent de nos décrépitudes. Si l
84 ons vu ce spectacle indécent : le cadavre a mangé ses mouches. Certes, il faut commencer par dénoncer le mal. Mais que l’on
85 ; et le peuple les aime, parce qu’elles décrivent ses désirs réalisés. Cet amour à peu près unanime figure la bonne conscie
86 oir mis trop haut. Soit que l’on gruge légalement son prochain, soit que l’on se découvre légalement grugé, il est bon de s
87 t plus rare, et vaut un peu mieux, si l’on estime ses seuls moyens. Elle comprend la plupart des auteurs qui se gaussent de
88 jeune bourgeois émancipé ne pourrait pas « vivre sa vie ». Il se sentirait prisonnier. Il en viendrait peut-être à des ac
89 ls expriment bien mieux qu’il ne saurait le faire ses propres révoltes et ses rêves. Ils lui en font une espèce de gloire.
90 qu’il ne saurait le faire ses propres révoltes et ses rêves. Ils lui en font une espèce de gloire. Le voilà justifié dans s
91 font une espèce de gloire. Le voilà justifié dans sa mauvaise conscience. Jeunesse se passe, anarchie se passe, rougeole s
92 salons, des cafés, des antichambres d’éditeurs. À sa façon, non moins que les littérateurs dont j’ai parlé, elle tend à dé
93 ritique des marxistes. « L’art pour l’art » reste sa méthode, et lui tient lieu de justification ; or cette doctrine est p
94 fait, des valeurs établies ; liée, en fait et par ses conséquences pratiques, à l’établissement des bourgeois. Mais cette c
95 ces d’une classe bourgeoise très capricieuse dans ses goûts, parce qu’elle est incertaine de sa mission. Cette anarchie ne
96 e dans ses goûts, parce qu’elle est incertaine de sa mission. Cette anarchie ne se développera pas impunément : elle va se
97 mprévisible Une littérature n’est valable — et son influence efficace — que si elle ordonne ses œuvres à une commune mes
98 — et son influence efficace — que si elle ordonne ses œuvres à une commune mesure humaine. Mais notre siècle est justement
99 proposons tous ici, c’est l’homme considéré dans sa vocation créatrice, — c’est la personne. Que la mesure de tout soit d
100 as — je dis : de l’homme rendu à la conscience de sa liberté. Toute création suppose une liberté, ou plus exactement, crée
101 ivain sera créateur dans la mesure où il obéira à sa seule vocation personnelle : mais dans cette mesure-là, il assumera s
102 sonnelle : mais dans cette mesure-là, il assumera son risque ! D’autant plus personnel, d’autant plus responsable, — et d’a
103 humaine. Rendez à l’écrivain la responsabilité de ses écrits, vous le rendrez aussi à la communauté, vous recréerez le lien
104 é, vous recréerez le lien vivant de l’auteur avec son public. Une fois posés ces fondements spirituels d’une littérature ré
105 e. Mais avant l’œuvre, il y a l’appel de l’homme, sa volonté déterminée, son attitude créatrice. Je dirai donc ce que notr
106 il y a l’appel de l’homme, sa volonté déterminée, son attitude créatrice. Je dirai donc ce que notre désir invoque. Je vois
107 brusque soleil, et l’homme au centre, campé dans sa stature réelle, ouvrant les yeux sur sa misère, portant sur elle un j
108 ampé dans sa stature réelle, ouvrant les yeux sur sa misère, portant sur elle un jugement sobre, — l’homme, vu dans l’élan
109 u dans l’élan peut-être chancelant qui le jette à sa vocation. Situation initiale de l’humain ! Initiation au réalisme enf
110 ité, c’est que la bourgeoisie n’ose plus défendre ses vrais buts, et préfère parler d’autre chose. Tous nos romans ne sont
111 n’ont jamais pensé qu’une œuvre d’art perdrait de sa valeur à illustrer des « thèses », à développer des lieux communs pui
112 . C’est, pour un écrivain, ordonner les moyens de son art à ces fins. Il y faut bien autant de talent qu’en exige notre lit
113 a personne est toujours originale quand elle est. Son seul souci est d’être, le plus fidèlement. C’est à partir d’elle seul
114 s sur la magie de l’aventure, l’entraîner loin de son train-train, etc. tel est le rôle que se propose de poursuivre (sic)
115 révolution mal fondée en doctrine, ou qui trahit ses buts humains finaux, aboutit fatalement à l’étatisme renforcé. 14. P
7 1934, Esprit, articles (1932–1962). Sur une nouvelle de Jean Giono (novembre 1934)
116 ’en mêle trop — et qui a cherché à s’en tirer par ses moyens. Je cite : J’essayai de me sauver par l’esprit. Vous qui êtes
117 ue je voulais vous citer non seulement à cause de sa beauté (et parce qu’il faut faire un sort à ces choses-là quand on en
118 horeau. Voilà le camarade Hamsun, qui arrive avec son violon. Dresse-toi, viens, nous partons dans le vaste monde. À ceux-l
119 e même ne disait pas lui aussi « aidez-moi ! », à sa façon vulgaire, avec son rire insupportable, et fallait-il être bien
120 aussi « aidez-moi ! », à sa façon vulgaire, avec son rire insupportable, et fallait-il être bien fin pour le comprendre ?
8 1934, Esprit, articles (1932–1962). Définition de la personne (décembre 1934)
121 Hic et Nunc . Ces deux références peuvent fixer sa position spirituelle. Toutefois, l’exposé qu’on va lire n’est pas un
122 ait d’ailleurs considérer comme le bien commun de sa génération. 1. L’indéfinissable concret Il ne faut pas estimer q
123 rétiser le concret, et de manifester à l’évidence son mystère. Or l’événement ne naît jamais, comme feignent certains philo
124 er aucune présence. C’est là le rôle du sujet, et sa nature. La manière d’être du sujet est essentiellement provocante. Il
125 out un objet qui lui donne occasion de manifester son pouvoir. Et son angoisse est de n’en pas trouver ; sa joie, de provoq
126 lui donne occasion de manifester son pouvoir. Et son angoisse est de n’en pas trouver ; sa joie, de provoquer le corps-à-c
127 ouvoir. Et son angoisse est de n’en pas trouver ; sa joie, de provoquer le corps-à-corps avec l’objet. Par où l’on voit qu
128 ctuelle. S’il se borne à imaginer l’objet hors de sa prise, comme absent, il ne fait à vrai dire qu’augmenter son angoisse
129 comme absent, il ne fait à vrai dire qu’augmenter son angoisse de l’impression d’une impuissance. Alors l’objet n’a pas d’a
130 Mais dès que l’homme secoue ce sortilège, sort de ses ombres, cherche des résistances, veut agir, trouve son objet, — la fa
131 mbres, cherche des résistances, veut agir, trouve son objet, — la fatalité disparaît, l’angoisse devient joie de combattre.
132 de l’homme est un acte La joie de l’homme, ou sa douleur, tels sont les signes de son existence concrète, cependant qu
133 e l’homme, ou sa douleur, tels sont les signes de son existence concrète, cependant que l’angoisse est le signe de son abse
134 oncrète, cependant que l’angoisse est le signe de son absence au monde et à soi-même. Dire que l’homme est, concrètement, c
135 ur effort pour décrire l’acte et rendre compte de ses déterminations suffisantes. Ce qui revient à reconnaître que la psych
136 non concept. Mais la psychologie fait de l’homme son « objet », et par là même le déshumanise. Elle pose l’homme comme un
137 l’entendement n’est pas l’étude de l’homme, mais son éducation. Il n’est pas de décrire, mais d’inventer. L’acte étant suj
138 qu’il paraisse, aussitôt les objets s’ordonnent à sa décision, et deviennent saisissables pour l’entendement. 5. L’acte
139 e la personne immédiatement lié aux conditions de son apparition, j’entends à la présence et à l’engagement : la personne n
140 t en communication. Le figurant peut bien ignorer ses voisins, mais l’acteur les provoque autant qu’il leur répond, et la m
141 out à coup l’assurance que ce qu’il fait est dans son rôle ? Pour quelle raison sort-il du chœur des anonymes résignés, pou
142 un nom et une autorité, une attitude d’auteur de son propre destin ? C’est ce que l’on ne voit point. C’est ce que nul ne
143 cependant que chacun peut savoir en quoi consiste sa propre personne. Ma personne, c’est ma présence au monde et à moi-mêm
144 on d’un de ces termes n’est pas ailleurs que dans son assimilation existentielle à tous les autres. Mais ces concepts, un à
145 l’éternité, de cela qui échappe au temps, marque sa fin, et le recrée. De ce mystère, je puis seul témoigner dans l’insta
146 concret, juge en réalité la raison même, déclare sa permanente crise et ses limites humiliantes. L’éternel est dans le pr
147 té la raison même, déclare sa permanente crise et ses limites humiliantes. L’éternel est dans le présent, et non point dans
148 fait de l’homme sujet à l’instant qu’il rencontre son objet. L’homme sujet, c’est l’homme seul à l’instant qu’il cesse de l
149 me n’est vraiment homme que dans l’acte qui fonde sa qualité incomparable de sujet ; si l’on admet enfin que la personne e
150 ne parfaite se réduirait purement et simplement à son histoire, à l’énoncé des témoignages visibles qu’elle produit. Dans c
151 ue nous baptisons fatalité, parce que nous sommes ses impuissants objets. Nous sommes très peu personnels. Nous sommes ali
152 te vérité de la personne : qu’elle est toute dans sa communication, laquelle doit être certifiée par quelque signe matérie
153 l’homme. À l’évolutionnisme objectif elle oppose son exigence proximiste. Dans l’ordre personnel, les relations les plus «
154 où la personne abritée par la loi perde à la fois son risque et son pouvoir de création (démocratie libérale). Le droit de
155 abritée par la loi perde à la fois son risque et son pouvoir de création (démocratie libérale). Le droit de la personne à
156 u, mais la fin de tout droit humain, et peut-être son contraire. La formule du rapport social ne doit pas contenir une reve
157 umilité où la personne retrouve l’un des pôles de sa tension. Peut-être est-il plus difficile d’être équitable envers le s
158 mal, et que l’erreur matérialiste est bâtarde de ses excès. Ceci pourtant doit être dit en sa faveur : il a compris le fai
159 arde de ses excès. Ceci pourtant doit être dit en sa faveur : il a compris le fait — sinon l’acte — de la liberté. Il a su
160 se replier sur cette liberté pour la chérir dans sa précieuse intégrité. Orgueilleux de sa force, il refuse de l’exercer,
161 hérir dans sa précieuse intégrité. Orgueilleux de sa force, il refuse de l’exercer, de l’engager dans des limites objectiv
162 bjets, mais néglige d’en choisir aucun. Il chante sa grandeur, mais n’en témoigne pas. Il est plus dangereux que le matéri
163 ais glorifiant le sujet pur comme tel, il dégrade son existence, c’est-à-dire qu’il l’atrophie. L’objet pendant ce temps, s
164 ophie. L’objet pendant ce temps, se dégrade selon ses lois. La révolte matérialiste trouve dans la carence du spiritualisme
165 uel Descartes a détruit la personne, ou plutôt son lieu naturel, en séparant le corps et l’âme : c’est qu’il les a mal d
166 ence insinuée comme un retard entre l’individu et sa pressante vocation. L’âme immortelle n’est rien que l’illusion d’un é
167 ible. J’ai fait ce pas, je puis le mesurer — mais sa grandeur pourtant n’est pas un nombre. J’appelle esprit cette surpris
168 emps lui-même au Jugement. Ni la foi ne court sur son erre, ni l’homme n’est rien devant sa vocation, qu’un doute ; mais la
169 court sur son erre, ni l’homme n’est rien devant sa vocation, qu’un doute ; mais la fidélité de la personne n’est pas vai
170 re celui — opposé à l’impersonnel ceux — qui agit sa vocation. 17. Ceci ne doit pas être entendu dans le sens restrictif
171 mis ou des désincarnés. L’Église chrétienne, dans son Credo, parle d’une « résurrection de la chair », non pas de l’âme ni
9 1934, Esprit, articles (1932–1962). André Breton, Point du jour (décembre 1934)
172 ule de ce qu’il se doit ! Et qu’il est attentif à sa propre démarche ! « Il me paraît absolument nécessaire de le dire… Po
173 dit-il donc, cet homme qui le prend de si haut ? Son livre s’ouvre par un discours lyrique « sur le peu de réalité » et se
174 ’entends, de se poser comme auteur responsable de son acte ? Alors qu’elle ne repose que sur l’espoir du faible : que la vi
175 que l’homme ne soit plus rien qu’un spectateur de son angoisse muée en rêve ? Qu’on prenne un ton tranchant lorsqu’on attaq
176 erches plutôt hésitantes. Tant que Breton invente son sujet, en partant d’un donné très réduit et de quelques rythmes lyriq
177 onné très réduit et de quelques rythmes lyriques, son style est large, ses périodes font la roue. Mais il se débrouille mal
178 e quelques rythmes lyriques, son style est large, ses périodes font la roue. Mais il se débrouille mal avec des données sci
179 e débrouille mal avec des données scientifiques ; sa syntaxe s’embarrasse et s’alourdit dès qu’il aborde une matière tant
10 1935, Esprit, articles (1932–1962). André Rouveyre, Singulier (janvier 1935)
180 « désertique » d’un tête-à-tête de l’auteur avec sa mort. Négation de l’humain trop purement humain dans son effort le pl
181 t. Négation de l’humain trop purement humain dans son effort le plus « spirituel » ? On ne sait si l’auteur veut nous pouss
182 spectacle d’un pareil tragique ne perdra rien de sa grandeur lucide à gagner un sens religieux. Ce livre enfin vaut par u
183 usqu’au retors de cette écriture contractée. Dans son progrès strictement mesuré, la phrase ici, vraiment, réfléchit sous n
184 i ne consent à la tendresse qu’après avoir épuisé ses rigueurs : il faut concéder à Rouveyre ces qualités dont il fait tant
185 u cœur à l’intelligence. Et l’austérité tendre de son « inquisition » rend un sens à l’amour humain, disqualifié dans la li
11 1935, Esprit, articles (1932–1962). Maurice Meunier, Idoles (février 1935)
186 apparent la perfection dans la banalité aimable. Son livre pose une seule question : quel dessein vaguement subversif peut
12 1935, Esprit, articles (1932–1962). Albert Soulillou, Nitro (février 1935)
187 e pas forcément plus de valeur que d’avoir traîné son vague à l’âme par les rues d’une ville de province ; mais cela donne
188 êt humain faiblit, la critique littéraire reprend ses droits et proteste une fois de plus contre les poncifs populistes. Ce
189 M. Soulillou, c’est la patience de laisser mûrir ses livres ; d’attendre qu’un sujet impose sa forme propre, ses proportio
190 mûrir ses livres ; d’attendre qu’un sujet impose sa forme propre, ses proportions et ses « valeurs », dirait un peintre.
191  ; d’attendre qu’un sujet impose sa forme propre, ses proportions et ses « valeurs », dirait un peintre. Il est remarquable
192 sujet impose sa forme propre, ses proportions et ses « valeurs », dirait un peintre. Il est remarquable que presque tous l
13 1935, Esprit, articles (1932–1962). Roger Breuil, Les Uns les Autres (avril 1935)
193 e pas une « classe » définie par les sociologues. Son roman tendrait à prouver au contraire l’inexistence des classes dans
194 complexes qu’on ne le croit couramment. Au fond, son vrai sujet, c’est l’étude concrète de la communauté qui peut s’instit
195 rlant d’étude, je fais tort au ton de ce livre, à son charme sentimental, à son humour particulier, à ses jeunes filles sur
196 t au ton de ce livre, à son charme sentimental, à son humour particulier, à ses jeunes filles surtout qui suffiraient à déc
197 n charme sentimental, à son humour particulier, à ses jeunes filles surtout qui suffiraient à déconcerter toute « étude ».
198 que Breuil est mêlé de très près à l’existence de ses personnages : et le « nous » qui apparaît parfois dans certains chapi
199 « je » de Marcel dans Proust — rend un tout autre son que le « je » des Vivants : plus complice et plus fraternel. Le défau
200 pas insister ; de ne pas réaliser plus carrément ses desseins. Mais parmi toutes ces choses vivantes qu’il évoque d’une to
14 1935, Esprit, articles (1932–1962). Kasimir Edschmid, Destin allemand (mai 1935)
201 profondes le mouvement hitlérien est né et a pris son élan. C’est une admirable réussite littéraire, c’est aussi un roman d
202 les protéger à l’étranger, parce qu’elle a perdu son prestige, sa puissance militaire, le droit de parler haut. « Nous avo
203 à l’étranger, parce qu’elle a perdu son prestige, sa puissance militaire, le droit de parler haut. « Nous avons perdu la g
204 ’Allemagne à La Paz — celui qui n’a pas pu sauver ses camarades — se dresse devant lui dans son délire. Une fois encore, Pi
205 sauver ses camarades — se dresse devant lui dans son délire. Une fois encore, Pillau lui montre le sens du sacrifice de « 
206 là le vrai tragique de l’Allemagne actuelle, que son destin la force à n’envisager plus le sort de l’homme que sous l’aspe
207 e presque à bout portant, etc.), où l’homme avoue ses dernières ressources de sacrifice. Mais il faut se représenter un Mal
15 1935, Esprit, articles (1932–1962). Tristan Tzara, Grains et Issues (juin 1935)
208 avec Arnaud Dandieu (chap. sur la métaphore dans son Proust) que la métaphore est un acte, j’entends par acte, justement,
209 e Tzara est exactement celle de l’hitlérisme sous ses formes les plus virulentes. Dans une anticipation lyrique (tout au dé
210 vers un nouvel ordre économique, c’est l’homme et sa libération qui en reste l’enjeu et le but ; il serait donc vain et da
211 re qu’ignorent tous les partis, voilà qui rend un son que nous reconnaissons. Voilà qui appelle enfin la réalité. 22. Aut
212 l’action du poète à un phénomène de mimétisme par son assimilation à un objet extérieur » (p. 283). Autrement dit, le sujet
213 » (p. 283). Autrement dit, le sujet se désiste de sa responsabilité au profit de l’objet, — d’où l’erreur d’accord, d’où a
214 matérialisme historique qui décharge le sujet de son actualité. 23. Voir toutefois page 297 un essai de réaffirmation de
16 1935, Esprit, articles (1932–1962). « L’Esprit n’a pas son palais » (octobre 1935)
215 « L’Esprit n’a pas son palais » (octobre 1935)r Par une belle matinée de mars 1935, le jo
216 eurs de faire suivre l’annonce du mal de celle de son remède. Pourquoi résister au plaisir de proposer à mes lecteurs la mé
217 maints égards révélateur ?   « L’Esprit n’a pas son palais. L’Exposition de 1937 doit lui en donner un »   Par Hippolyte
218 ’ouvrent. Une fois de plus, la France va affirmer sa vitalité, sa puissance d’assimilation et de création, le génie de ses
219 fois de plus, la France va affirmer sa vitalité, sa puissance d’assimilation et de création, le génie de ses ouvriers, de
220 ssance d’assimilation et de création, le génie de ses ouvriers, de ses artisans, de ses artistes, de ses « découvreurs », e
221 tion et de création, le génie de ses ouvriers, de ses artisans, de ses artistes, de ses « découvreurs », et confronter son
222 on, le génie de ses ouvriers, de ses artisans, de ses artistes, de ses « découvreurs », et confronter son effort vers le mi
223 es ouvriers, de ses artisans, de ses artistes, de ses « découvreurs », et confronter son effort vers le mieux-être et le mi
224 s artistes, de ses « découvreurs », et confronter son effort vers le mieux-être et le mieux-connaître avec l’effort des aut
225 illuminé le passé. Mais nous entendons lui donner son caractère propre. Nous voulons que, dans le déséquilibre qui déconcer
226 n liaison étroite avec l’enseignement qui, à tous ses degrés, forme les esprits aux méthodes de la recherche et de la scien
227 he et de la science, qui, au degré supérieur, par ses laboratoires, ses subventions, ses missions, ses grands instituts, or
228 e, qui, au degré supérieur, par ses laboratoires, ses subventions, ses missions, ses grands instituts, organise la découver
229 supérieur, par ses laboratoires, ses subventions, ses missions, ses grands instituts, organise la découverte, on verra dans
230 ses laboratoires, ses subventions, ses missions, ses grands instituts, organise la découverte, on verra dans ce palais com
231 le ? Avait-il conscience de l’aveu que signifiait son entreprise ? Car enfin, poser la question en apparence inoffensive et
232 ont on découvre alors la profondeur, il devient à son tour un problème, il se trouve mis en question. Il faut voir, en effe
233 ne société équilibrée. Où est l’esprit ? Quel est son champ d’action ? Doit-il avoir un lieu particulier ? De la réponse à
234  ? Serait-ce donc qu’on ne sait plus le voir dans ses effets ? Mais alors, comment fera-t-on pour le voir « en soi », dans
235 , comment fera-t-on pour le voir « en soi », dans son temple ? Cela paraît une bien autre gageure. II. Pour un musée des
236 est juste, il est nécessaire de mettre l’esprit à sa place — s’écriait le fameux romancier —, à sa place qui est la premiè
237 t à sa place — s’écriait le fameux romancier —, à sa place qui est la première, et de l’y mettre en pleine clarté. Cela di
238 de tout ; l’exposition elle-même sera, dans toute son ampleur, une manifestation sensible de l’esprit ; il n’en faut pas mo
239 t élever un sanctuaire et non à telle ou telle de ses extrêmes applications. L’accord parfait des « vues » de nos deux com
240 ât moins littérateur et beaucoup plus précis dans ses projets que le politicien, sans doute intimidé par son sujet. En bref
241 rojets que le politicien, sans doute intimidé par son sujet. En bref, M. Duhamel proposait au moins deux palais. « Comment
242 de la parole. M. Duhamel affirmait au surplus que son « sanctuaire du livre » ne serait pas un « musée » mais bien une « ru
243 mépris de la culture et de l’esprit qui marque à son insu l’élite bourgeoise, et confirme sa décadence. Ils me diraient :
244 marque à son insu l’élite bourgeoise, et confirme sa décadence. Ils me diraient : « Honorer l’esprit pur ? Quoi de plus ra
245 ispense par ailleurs des témoignages éclatants de sa force. Très efficace dans la pratique, car l’enseignement officiel de
246 ins intérêts, qu’il ne faut pas trop s’étonner de son triomphe universel. Professeurs, députés ou commissaires, ils croient
247 gé du réel, ou comme ils disent avec dégoût, « de ses applications pratiques ». Laissant entendre ainsi que la science et l
248 u roman français à l’étranger, vient confirmer de son côté que ce Palais de l’esprit pur ne peut être en réalité qu’un pala
249  théorique ». J’ai cru bon d’aller la saisir dans ses aboutissements les plus voyants, ou pour parler littéralement, dans s
250 plus voyants, ou pour parler littéralement, dans son excès le plus monumental. Or il se trouve, par une sorte de chance, q
251 ette erreur, mais la confirmation tout ingénue de son origine historique. J’avais omis d’en citer quelques lignes qui trouv
252 la raison universelle, donnera à notre Exposition son sens et sa portée. Je répugne à rendre Descartes responsable de tout
253 iverselle, donnera à notre Exposition son sens et sa portée. Je répugne à rendre Descartes responsable de tout le mal qu’
254 Ce que Descartes a proposé, ce que l’Église, pour son malheur, a pris en compte, c’est la doctrine « spiritualiste » de l’e
255 loisir, soit pour marquer les causes internes de son succès auprès des clercs, soit pour rappeler au passage quels intérêt
256 homme « distingué » à l’homme qui ne fait rien de ses deux mains. Ce que je reproche à l’esprit cartésien, c’est d’avoir fo
257 ce corps à lui-même, le mépriser, l’abandonner à sa lourdeur. Décréter que l’esprit n’a pas de mains, c’est libérer de so
258 r que l’esprit n’a pas de mains, c’est libérer de son pouvoir arbitral et animateur le domaine de l’action quotidienne. Plu
259 ire des intérêts. Sorel a bien montré ce jeu dans ses Illusions du progrès : le maximum d’hypocrisie sociale — ou « injusti
260 e l’on enfermera dans la « cité René Descartes », ses droits ne sauraient consister que dans l’affirmation d’un idéal : et
261 ir sophistiqué l’histoire, elle veut se réduire à son tour à une histoire des doctrines, à une filiation de systèmes, qu’el
262 re » et le réel confus et dangereux qui échappe à ses prises prudentes. Et ces lois confirment le penseur dans l’idée que l
263 gement est impossible. Et plus il se persuade que sa nature est essentiellement « distinguée », essentiellement inactuelle
264 iques ou sociales qui selon eux mènent le monde à sa perte ; qu’ils refusent de se faire les complices des folies collecti
265 et précises ». Et que le monde suive le cours de ses passions ! Pour sa part, il s’en lave les mains. Pilate fut le premie
266 juger. On me dira que ce gouverneur eût été dans son rôle en agissant, et qu’il trahissait sa fonction en alléguant un arg
267 té dans son rôle en agissant, et qu’il trahissait sa fonction en alléguant un argument de clerc. Il y aurait donc une diff
268 ’est encore une fois supposer un esprit dégagé de son corps, jamais un tel esprit n’est né dégagé de tous liens, irresponsa
269 nt serions-nous donc fondés à juger, à risquer en son nom les réalités immédiates ?38 Les clercs ont pris parti : les uns
270 ant d’élégance, — et l’abandonnent libéralement à sa passion ? Mais en face de Pilate : « Voici l’homme » ! Et que dit cet
271 ut semblable à celui des clercs. On lui eût donné son Palais. Mais que vient-il faire parmi nous ? Qu’est-ce que la vérité 
272 , mais on exige par surcroît qu’il gagne lui-même sa vie. C’est la seule chose qu’on ne lui ait pas apprise. Considérez ce
273 l est vrai que la liberté de penser et d’écrire à sa guise, la pauvreté, le risque matériel, le nomadisme, le contact avec
274 ériel, le nomadisme, le contact avec le peuple et ses difficultés souvent sordides et parfois émouvantes, enfin l’espèce d’
275 n dans laquelle on parvient assez vite à composer son équilibre, sont pour l’esprit autant de gains certains lui offrant un
276 lui offrant une chance admirable de se guérir de son irréalisme. Une pratique assez longue, et d’ailleurs imposée, de cet
277 mmandable pour l’intellectuel soucieux d’agir par sa pensée. Cette vie « mal compassée » qu’on nomme la vie pratique, avec
278 mal compassée » qu’on nomme la vie pratique, avec ses résistances et ses aspérités, ses rencontres, ses courtes habitudes (
279 on nomme la vie pratique, avec ses résistances et ses aspérités, ses rencontres, ses courtes habitudes (louées par Nietzsch
280 pratique, avec ses résistances et ses aspérités, ses rencontres, ses courtes habitudes (louées par Nietzsche), ses brusque
281 ses résistances et ses aspérités, ses rencontres, ses courtes habitudes (louées par Nietzsche), ses brusques changements de
282 es, ses courtes habitudes (louées par Nietzsche), ses brusques changements de décor suivis de guerre d’usure contre l’inert
283 la publicité ; vu le chômage des intellectuels et ses suites politiques inévitables et prochaines ; vu la panique nationali
284 e de la France, une restauration de l’esprit dans sa charge effective, créatrice et régulatrice ; vu les revendications de
285 tions suivantes : a) définition de la culture, de ses moyens et de son but final. b) qu’est-elle devenue en théorie et en p
286 a) définition de la culture, de ses moyens et de son but final. b) qu’est-elle devenue en théorie et en pratique sous les
287 xiste en fait ou en droit — et quels doivent être ses moyens ? Les discussions seront introduites chaque matin par l’exposé
288 e ne peut voir la foule. Il faut donner un sens à sa vision. Oserons-nous dire que c’est la vocation d’Esprit ? Donner un
289 rang de suprastructure et en la privant par là de sa relation essentielle avec la constitution réelle de la vie », Henri d
290 quels ouvrages impérissables faudra-t-il réserver son bas de laine ? N’est-ce pas pour les plus périssables choses que nous
291 Et je ne pense pas que M. Duhamel compte acheter son « immortalité » académique. 28. J’entends : à la grande masse du peu
292 du terme, par suite inapte à modifier le réel par son jeu même, d’une manière immédiate. L’idéalisme excessif n’a pu que re
293 cela, est-ce bien le même homme qui écrivait dans sa jeunesse : « La science maîtresse, le souverain… ce sera la philosoph
294 it au fait (du droit de la philosophie au fait de son gouvernement) s’opérera sans qu’il y mette les mains. Par malheur, le
295 spoir naïf qu’elles joueraient automatiquement en sa faveur. Et le peuple qui croit les clercs, croit aussi qu’ils ne peuv
296 dit le droit : « Cet homme est juste. » Ayant dit ses raisons, il a fait tout ce qu’un clerc doit faire, selon nos grands d
297 que la vérité ? Valent-elles qu’on leur sacrifie sa situation de gouverneur ? Ces Juifs sont en émeute : voilà le fait. J
298 ce de nuit du 4 août de la pensée, abdiquant tous ses privilèges pêle-mêle, entre les mains du bureau d’un parti, d’un dict
299 nul. r. Rougemont Denis de, « L’Esprit n’a pas son palais », Esprit, Paris, octobre 1935, p. 25-46.
17 1936, Esprit, articles (1932–1962). Francfort, 16 mars 1936 (avril 1936)
300 ion nouvelle. Par exemple un discours du Führer à son peuple. Je roulais ces pensées, hier soir, debout parmi la foule qui
301 les, parfois avec ironie, mais sans amertume ; et ses gestes sont souples, n’ont plus rien de la brutalité des années de co
18 1936, Esprit, articles (1932–1962). Vues sur C. F. Ramuz (mai 1936)
302 est exact de dire qu’elle s’ordonne par avance à sa fin. On n’imagine pas d’aborder l’œuvre et la personne de Ramuz d’une
303 ne » d’un auteur authentique, c’est aussi décrire sa personne, à la manière du physiognomoniste plutôt qu’à celle du psych
304 rnation, vous le lirez toujours sur les traits de sa face. (Encore faut-il avoir des yeux pour voir. Encore faut-il en cro
305 voir des yeux pour voir. Encore faut-il en croire ses yeux…) Il n’est d’art que physionomique. Il n’est d’esprit que dans l
306 t une forme pour la transformer. L’esprit n’a pas son siège dans la cervelle. Ni dans le ciel. L’esprit n’a pas de siège. I
307 , d’où encore la nécessité quelquefois de refaire son pas, parce que la pente vous porte en arrière, parce qu’on l’a mal ca
308 comme moi. » C’est comme lui quand il écrit. Car sa vision est harmonie avec ces formes, et son langage avec les rythmes
309 t. Car sa vision est harmonie avec ces formes, et son langage avec les rythmes qu’elles traduisent. ⁂ Une forme, une image
310 ondra : ni l’un ni l’autre. Car il se tient, avec son imagination, dans cette région qui n’est ni du dedans ni du dehors, q
311 n imaginée. Il faut rendre à ce mot d’imagination son sens fort : c’est la natura naturans. (Nous pourrons dire aussi, un p
312 ique de Ramuz me paraît centrée sur cette phrase. Son vocabulaire tout d’abord. Cette abondance de noms de choses ! Comment
313 du genre humain consisterait en une éducation de son langage. Un tribunal muni des pleins pouvoirs, institué pour juger de
314 dans la tête. Presque toutes les singularités de son style s’expliquent par cette seule intention, de concentrer notre vis
315 esure que cette psychologie s’assure davantage de ses lois, elle tend à les substituer à l’imagination concrète du réel. Le
316 us la forme, qui ne peut être interprétée que par ses relations organiques à d’autres formes. Et c’est encore l’office de l
317 e des psychologues. Et l’on découvre à chacune de ses œuvres une signification mythologique. C’est en général l’irruption d
318 chez un individu, qui constitue le vrai sujet de ses romans. Passage du Poète — ou du diable (dans le Règne de l’esprit ma
319 , en tant qu’on peut le définir par le divorce de ses idées et de ses actes. D’où naît une certaine littérature d’intrigues
320 peut le définir par le divorce de ses idées et de ses actes. D’où naît une certaine littérature d’intrigues pour laquelle i
321 u peuple, on devrait dire plutôt qu’il y remonte. Son art vient de plus bas, des origines créatrices de sa race. Il a cette
322 art vient de plus bas, des origines créatrices de sa race. Il a cette lenteur qu’impose la nature du pays. Il participe de
323 oyez Les Signes parmi nous. Dans la simplicité de son sujet, ce récit réalise d’une manière exemplaire l’accord des élément
324 à peu on ne sait quelle puissance naturelle, dans sa fascinante monotonie. Un art dont la mesure ne doit pas être cherchée
325 ue, ni dans l’ingéniosité, ni dans l’harmonie des sons , mais bien dans la pesée. Tous les procédés ramuziens : juxtaposition
326 z Ramuz. Ce qu’il a d’insolite, ce n’est pas tant sa forme que les vertus qu’elle suppose : la sobriété, la solidité, le r
327 est bien facile de tirer une épreuve positive : «  Sa poésie commence avec le commencement de sa personne ; elle prend fin
328 ve : « Sa poésie commence avec le commencement de sa personne ; elle prend fin là où commence, pour lui, l’impersonnel. El
329 iter l’ampleur du fait humain mais aussi garantir son unité concrète, esprit et corps. Les niveaux respectifs auxquels se p
330 qu’elle était au temps de Goethe. Plus encore que sa valeur, c’est sa fin qui est contestable, dès lors que cette fin n’es
331 temps de Goethe. Plus encore que sa valeur, c’est sa fin qui est contestable, dès lors que cette fin n’est plus la plénitu
332 critique le machinisme, s’il raille le confort de ses concitoyens, leurs assurances, leur hygiène proprette, leur idéal du
333 re résistante et ce risque de l’homme créateur de sa forme. Si Ramuz n’aime pas les machines, s’il refuse l’économie d’eff
334 t unique de l’œuvre de Ramuz, et la définition de sa personne en exercice. « Je ne distingue l’être qu’aux racines de l’él
335 n là où les choses et les êtres attendent tout de son pouvoir restaurateur : leur nom, leur nombre et leur emploi. Parce qu
336 est la plus clairvoyante que Ramuz ait écrite sur son art, mais aussi parce qu’elle indique, à peu près seule dans son œuvr
337 ussi parce qu’elle indique, à peu près seule dans son œuvre, une perspective qui est, je crois, celle de la plénitude de ce
338 sorte que pour finir on est chacun tout seul sur son petit bout de sentier. Et il y a aussi cette malédiction, où on sent
339 nt, ici encore, ne point songer à Goethe ? Mais à sa seule leçon, à l’équation fondamentale de sa vie, non point certes au
340 is à sa seule leçon, à l’équation fondamentale de sa vie, non point certes aux contingences et au décor de son apparition.
341 non point certes aux contingences et au décor de son apparition. Aussi bien la suite du passage nous ramène au niveau prop
342 , j’ai tenté de faire voir comment Ramuz existe à sa façon. Je vois que son pouvoir est sa présence active au monde (« Tou
343 voir comment Ramuz existe à sa façon. Je vois que son pouvoir est sa présence active au monde (« Toute résistance, dit-il,
344 uz existe à sa façon. Je vois que son pouvoir est sa présence active au monde (« Toute résistance, dit-il, nous oblige à ê
345 oser les questions dernières, s’autorise à borner sa vision à son acte. Voilà l’utile ; et qu’on taise le reste, tout cela
346 stions dernières, s’autorise à borner sa vision à son acte. Voilà l’utile ; et qu’on taise le reste, tout cela qui échappe
347 appe à nos prises. Ainsi fait Goethe, et c’est là sa vertu. Mais notre siècle pose d’autres questions, des questions que R
348 où tout homme se voit mis en demeure de déclarer ses origines et ses fins. Voici le temps où l’homme est attaqué par des p
349 e voit mis en demeure de déclarer ses origines et ses fins. Voici le temps où l’homme est attaqué par des puissances qui ve
350 ’homme est attaqué par des puissances qui veulent son abdication totale, — ou sa révolte, mais au nom d’une vérité qu’il fa
351 uissances qui veulent son abdication totale, — ou sa révolte, mais au nom d’une vérité qu’il faudrait dire. Maintenant il
352 celle de notre destination. Le silence perd alors son pouvoir ; mais la parole n’appartient plus à l’homme. Au comble de no
353 lisme fut une doctrine abstraite du concret. Mais ses racines plongent dans la vérité. Nous aussi, nous dirons qu’il faut «
354 e, laisse une trace au visage de l’homme, modifie sa forme existante. « La figure a été faite sur la vérité, et la vérité
355 a du premier sens. 46. C’est là ce qu’il appelle sa « vie intérieure », même s’il est résolument laïque. Rien n’est plus
356 x discours nationalistes, s’occupe à faire passer ses capitaux à l’étranger pour les mettre à l’abri du fisc. Ce qui est pl
357 création du monde. 48. Il dit des personnages de ses romans : « Je ne les aime pas en tant que “primitifs” comme on semble
19 1936, Esprit, articles (1932–1962). Culture et commune mesure (novembre 1936)
358 sait à l’examen critique des doctrines qui sont à sa base. Je ne dis pas qu’elles n’aient été souvent trahies. Ni qu’elles
359 nnent persuadés que la critique d’un clerc y perd ses droits et n’est plus à l’échelle du phénomène… Raison de plus, chance
360 de la culture s’il le faut. Quand l’esprit « perd ses droits », c’est à nous de les lui rendre. ⁂ Poussé par les nécessités
361 et de la lutte des classes qui en résulte. De là sa théorie de la culture considérée comme une simple superstructure du d
362 s socialisé. ⁂ On connaît le nom de cette mesure, son incarnation très visible et ses moyens d’action ou même de contrainte
363 de cette mesure, son incarnation très visible et ses moyens d’action ou même de contrainte : c’est le Plan55. Ainsi donc,
364 our unifier la pensée et l’action du peuple et de ses conducteurs en vue d’une fin à laquelle tout doit s’ordonner. L’assim
365 rdonner. L’assimilation de la culture (et donc de sa mesure) au Plan est même si radicale, si naïve, que les Soviets en so
366 volution. Elle s’est constituée en même temps que son public. Autrement dit, les « écrivains de choc » ont appris à écrire
367 glent la grande masse. Mais elle est réfutée dans son principe par la création culturelle, dès lors que cette création vien
368 ercée par les chefs soviétiques réussit à masquer son étendue. Le désir d’une mesure plus vivante se manifeste bien souvent
369 t ici le mythe de l’homme nouveau qui lui fournit son expression en même temps que son déguisement. Mythe plus vaste et plu
370 qui lui fournit son expression en même temps que son déguisement. Mythe plus vaste et plus vague que celui des économistes
371 maîtresse de tout l’homme. Mais l’homme résiste à son emprise et à sa prétention totalitaire. Il ne veut pas se laisser mut
372 l’homme. Mais l’homme résiste à son emprise et à sa prétention totalitaire. Il ne veut pas se laisser mutiler. Fût-ce au
373 Il découvre que la mesure qu’on voulait imposer à son orgueil n’est encore qu’une immense caricature ; et que les fins qu’e
374 es paye. Mais d’autre part, il ne peut renoncer à ses conquêtes matérielles. Alors il met son espoir et sa foi dans ce mira
375 enoncer à ses conquêtes matérielles. Alors il met son espoir et sa foi dans ce miracle qui résoudrait seul le conflit du ca
376 conquêtes matérielles. Alors il met son espoir et sa foi dans ce miracle qui résoudrait seul le conflit du calcul et du rê
377 ets du Plan surpassent-ils largement pour l’heure sa malfaisance « culturelle ». Mais pour nous il ne s’agit plus de décou
378 ovoquer la création, et à la régler, étant de par son origine coupé des sources mêmes de toute création culturelle, qui jai
379 s, ou n’ose plus avouer à quelle fin elle conduit ses adeptes. Si vous ne faites rien, que de nous critiquer, vous en serez
380 les astres. Cependant, une mesure n’est rien, et ses symboles ne signifient rien, si l’on oublie les fins dernières, le gr
381 foi. Mais on ne retrouve une foi qu’en discernant sa vocation concrète. Or toute vocation est située en un lieu circonscri
382 ou surtout la plus mythique, quand on y sacrifie ses aises immédiates ? Difficultés actuelles, optimisme imposé, ces deux
383 e bien davantage que la fin de cette misère et de ses causes immédiates. Il n’exige pas seulement le bien-être physique, ma
384 ien que la liberté du désespoir et qu’il meurt de son isolement, ou du refus de se dépasser ; qu’il n’y a pas de lignes dro
385 à une mesure commune. Seul l’homme déterminé par ses relations prochaines et actives peut se sentir à la mesure des temps
386 xistentiels » qui cherchent à saisir l’homme dans son actualité (dans son être de relation), et la pensée dans ses effets.
387 erchent à saisir l’homme dans son actualité (dans son être de relation), et la pensée dans ses effets. Elle agit dans la th
388 té (dans son être de relation), et la pensée dans ses effets. Elle agit dans la théologie, qui affirme à nouveau l’Église e
389 nniers d’une tradition qui survit sans grandeur à ses racines. Notre seule chance de salut, à nous autres nations libérales
390 u jalousie, mais par nature, par le seul fait que sa religion n’est pas la nôtre. Étudions les doctrines provisoires ou le
391 a mesure de l’homme en tant qu’il se possède dans ses relations actives avec tous ses prochains. C’est à nous qu’il incombe
392 l se possède dans ses relations actives avec tous ses prochains. C’est à nous qu’il incombe aujourd’hui d’opérer cette synt
20 1936, Esprit, articles (1932–1962). Henri Petit, Un homme veut rester vivant (novembre 1936)
393 s semaines qu’il va consacrer à prendre mesure de sa vie. Il choisit pour cela de l’écrire, de « jouer sa provision de bon
394 vie. Il choisit pour cela de l’écrire, de « jouer sa provision de bon air contre du papier noirci », et il rapporte 300 pa
395 il nous livre cet aveu éclaire une bonne part de son œuvre. Rien n’est plus redoutable pour notre société que le regard tr
396 d tranquille, apparemment modeste, d’un homme que son métier contraint à dissimuler sa vraie force. Car de l’auteur tout co
397 d’un homme que son métier contraint à dissimuler sa vraie force. Car de l’auteur tout comme de son modèle légendaire, nou
398 ler sa vraie force. Car de l’auteur tout comme de son modèle légendaire, nous voyons bien que « ses ruses sont aussi ses pl
399 de son modèle légendaire, nous voyons bien que «  ses ruses sont aussi ses plus chères pensées », celles dont l’aveu lui co
400 aire, nous voyons bien que « ses ruses sont aussi ses plus chères pensées », celles dont l’aveu lui coûterait ses moyens ma
401 hères pensées », celles dont l’aveu lui coûterait ses moyens matériels de vivre, mais dont l’acceptation virile constitue s
402 e vivre, mais dont l’acceptation virile constitue sa seule raison d’être. Tout le débat de ce journal revient à cette scan
403 té, entre les deux sens du mot « vivre » : gagner sa vie et mériter sa vie ; et peut-être entre les deux sens du mot « gag
404 sens du mot « vivre » : gagner sa vie et mériter sa vie ; et peut-être entre les deux sens du mot « gagner » : gagner le
405 ste avec la foi chrétienne, telle qu’il songe que ses pères l’ont eue. Nos lecteurs se souviennent des pages sur le journal
406 cre, de cette mesure constamment observée — voilà sa ruse— et qui nourrit enfin, comme sans le vouloir, le plus féroce réq
407 ritique de l’État — « Le Tous contre un » — et de son emprise sur nos vies. Critique dont la portée directe et l’évidence i
408 s de la seule exactitude d’une enquête menée dans sa vie quotidienne par un Français lucide qui veut rester humain. J’aime
409 yant ait su donner à notre position personnaliste sa plus solide justification humaine. Henri Petit veut parler pour lui s
21 1936, Esprit, articles (1932–1962). Note sur nos notes (novembre 1936)
410 un peuple de l’état de barbarie, le soutenir dans sa splendeur, l’arrêter sur le penchant de sa chute, sont trois opératio
411 r dans sa splendeur, l’arrêter sur le penchant de sa chute, sont trois opérations difficiles ; mais la dernière est la plu
412 a longue imbécilité d’un monarque caduc prépare à son successeur des maux presque impossibles à réparer. S’il s’agit de li
413 acun de nous dans le cœur duquel ce régime plonge ses dernières racines vivantes. Il ne s’agit pas de morale ! Ni de condam
414 eut poser ces questions-là que si l’on sait, pour son compte, y répondre. Elles jaillissent d’une passion de construire, d’
22 1936, Esprit, articles (1932–1962). Erskine Caldwell, Le Petit Arpent du Bon Dieu (novembre 1936)
415 » des convenances ou du sentiment… Huizinga, dans son admirable Déclin du Moyen Âge 62, a là-dessus un passage qui pourrait
23 1936, Esprit, articles (1932–1962). André Gide, Retour de l’URSS (décembre 1936)
416 omaine qu’il aborde, la merveilleuse précision de son vocabulaire sauvera Gide du journalisme. Car ce n’est pas l’actualité
417 . Car ce n’est pas l’actualité toute passagère de son objet qui fait la faiblesse d’un ouvrage, mais bien l’insuffisance ou
418 oncret, le particulier de cet objet, je veux dire son message unique et par là même généralement humain. Gide retrouve la m
419 goethéen de ce terme. Ce n’est pas là, je crois, sa pente naturelle ; plutôt l’effet d’une permanente correction que par
420 rupule humain, et par prudence aussi, il oppose à ses entraînements. L’âge venant, je me sens moins de curiosité pour les
421 une astuce inexprimables…63 » Mais voici Gide de son côté, observant les acheteurs et l’étalage du bazar de Moscou : « Les
422 rait, sans bien connaître Gide, l’avant-propos de son petit livre et cette espèce de happy end que figure le dernier paragr
423 es phrases : l’une prononcée par Gide au début de son voyage, l’autre écrite au retour en France. Point de départ : « Le so
424 epticisme, lorsque je dis que Paris a, lui aussi, son métro. » — Égalité, société sans classes ? « Comment n’être pas choqu
425 foi. Tandis que dissocier la doctrine de Marx de ses applications historiques, c’est en définitive critiquer le marxisme l
426 et historiquement valable, elle est comptable de ses déviations humaines et historiques. Elle est jugée par ces déviations
427 n ont fait, et par la réussite ou bien l’échec de ses prévisions pratiques. Gide le sent-il ? « D’autres plus compétents qu
428 circonstances, l’expérience marxiste eût réussi ? Sa croyance est d’ordre mystique, contredite par les faits connus. C’est
429 écheur, et ne peut pas outrepasser les limites de sa condition. Qui veut faire l’ange — l’Homme nouveau — appelle la bête,
24 1937, Esprit, articles (1932–1962). Défense de la culture (janvier 1937)
430 Franco, et Commune, par la voix d’Aragon, exprime sa juste indignation. Crime contre la culture. Car c’était le parti comm
431 igure sur le portrait du gentilhomme, fait fête à ses nouveaux camarades, les miliciens, qui jouent avec lui avec une infin
432 nne-t-on pas au canari de la duchesse chaque jour sa feuille de salade bien verte ? » Si tout cela est fini, c’est à cause
433 vons, nous aussi, caresser un petit chien, donner sa feuille de salade verte au canari. Et nous ne sommes pas « communiste
434 ssion que le Français réserve, présentement, sous son régime de liberté, à la lecture de Paris-Soir et Paris-Sports, quand
435 onde approche du trois-centième-mille un an après sa publication. Et les poètes ne restent pas en arrière : le jeune Gerha
25 1937, Esprit, articles (1932–1962). La fièvre romanesque (janvier 1937)
436 e n’en rien laisser paraître. Oui, c’est toujours sa fièvre que le romancier moderne nous propose, mais très diversement v
437 re croire que ce n’est pas lui qui agit… Pourtant ses personnages ne sont pas plus vrais que lui ; le mieux qu’on puisse at
438 se vanter d’être si faible que de céder à toutes ses obsessions ? (Je feindrai d’ignorer qu’elles sont anxieusement souhai
439 loux, si par hasard on les obtient.) Qu’on publie ses victoires ou ses défaites mémorables, c’est dans l’ordre. Qu’on attes
440 rd on les obtient.) Qu’on publie ses victoires ou ses défaites mémorables, c’est dans l’ordre. Qu’on atteste par une public
441 publication tel acte victorieux de l’homme contre ses servitudes naturelles et les illusions qu’elles entraînent : Goethe o
26 1937, Esprit, articles (1932–1962). Jean Blanzat, Septembre (janvier 1937)
442 nvier 1937)ad Roman d’une jalousie qui se crée son objet, par masochisme. Un jeune mari trouble sa femme, et la perd enf
443 son objet, par masochisme. Un jeune mari trouble sa femme, et la perd enfin, à force de souffrir d’une infidélité qu’elle
444 ssion pour un héros malade ou mon admiration pour son auteur ? Le livre n’est ni passionnant, ni indifférent, habile et sen
27 1937, Esprit, articles (1932–1962). Robert Briffaut, Europe (janvier 1937)
445 cynisme de naturaliste puritain en révolte contre sa bourgeoisie, Dos Passos le procédé des biographies parallèles, et Fra
446 armer — ceci pour moi lecteur — par le tableau de sa déchéance. ae. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Robert Briffau
28 1937, Esprit, articles (1932–1962). Paul Vaillant-Couturier, Au service de l’Esprit (février 1937)
447 cations qui présenta le mouvement personnaliste à son départ, en 1932 (n° de décembre de la NRF). Ce sont ces thèses-là, pr
29 1937, Esprit, articles (1932–1962). Albert Thibaudet, Histoire de la littérature française de 1789 à nos jours (mars 1937)
448 ni : « badaud de la République des Lettres, ayant sa place à la terrasse du café de leur commerce, emboîtant le pas à leur
449 leurs musiques militaires, fier des mouvements de sa ville… ». Voilà l’anti-Lanson qu’on attendait depuis la guerre. Mais
450 loi qui n’est pas celle de l’objet mais du sujet. Son chapitre sur Balzac a de la grandeur, et touche même au délire poétiq
451 que, plus « triomphante ». Voici la conclusion de son chapitre sur la Chanson de Béranger : « Elle est la colonne de Juille
30 1937, Esprit, articles (1932–1962). Retour de Nietzsche (mai 1937)
452 froid des monstres froids. À part cela, il reste son exaltation de la volonté humaine, de l’athéisme et de la force, qui s
453 int, qui est central, l’accord de Nietzsche et de ses disciples avec le personnalisme paraît beaucoup plus facile à réalise
454 autre doctrine politique66. Mais pour Bataille et ses amis, l’« acéphalité » est aussi une doctrine métaphysique antichréti
455 héenne. Ils permettent en particulier de situer à sa place centrale la conception du « retour éternel » et de la volonté d
456 ification de la volonté humaine, qui doit vouloir son destin éternel et nécessaire… Enfin, dernier événement nietzschéen :
457 à la communauté unitaire que la personne emprunte sa forme et son être. » Les trois derniers mots définissent exactement l
458 uté unitaire que la personne emprunte sa forme et son être. » Les trois derniers mots définissent exactement le pseudo-pers
31 1937, Esprit, articles (1932–1962). Journal d’un intellectuel en chômage (fragments) (juin 1937)
459 , est dit aussi par le vallon des oliviers et par sa jeune nudité. Pas une vapeur ne s’élève de l’herbe pauvre des terrass
460 angage innocent et raisonnable ; voilà le monde à son contentement ; à la mesure de l’amitié humaine. J’entends un bruit de
461 e, au-dessous. Je vois un chien qui se promène de son petit pas élastique sur les restanques étroites, passant de l’une à l
462 d’une accession à la condition générale ! Avouer ses superstitions, ce serait avouer ce qu’on a de plus individuel, de plu
463 que homme est irréductible, et que chaque homme a ses aveux à faire. Et l’on comprend ainsi, soudain, que l’on est un homme
464 res. 1er mars Si l’on craint d’ordinaire d’avouer sa réalité individuelle et ses superstitions, c’est sans doute en vertu
465 t d’ordinaire d’avouer sa réalité individuelle et ses superstitions, c’est sans doute en vertu d’une prudence qui est le fo
466 ir compte de la personne, et finalement favoriser son développement, mais d’une manière négative, dialectique, ou mieux enc
467 politique de s’opposer à la personne, de limiter son expansion, de combattre en définitive le réel que nous incarnons. Tou
468 se de se défendre, c’est l’anarchie qui renonce à ses droits. Et si le cadre de l’État paraît demeurer identique, la démora
469 est donc que l’homme se défend de moins en moins. Ses « superstitions » personnelles (son quant-à-soi), vaincues par une cr
470 ins en moins. Ses « superstitions » personnelles ( son quant-à-soi), vaincues par une crise dont ce n’est pas ici le lieu de
471 mitaient normalement. L’homme cessant de croire à sa loi — à ses superstitions incomparables — se met à croire de la même
472 rmalement. L’homme cessant de croire à sa loi — à ses superstitions incomparables — se met à croire de la même manière aux
473 uissances mythiques deviennent l’objet anormal de ses croyances spontanées et immédiates. D’où l’empire monstrueux qu’elles
474 es paraissent souvent vaines, que la joie de voir son public, de s’entretenir avec ces hommes et ces femmes pour qui l’on é
475 idences exagérées ; il s’excite, il s’admire dans sa révolte ou son malheur. Mais celui qu’on peut voir, celui qui vous po
476 ées ; il s’excite, il s’admire dans sa révolte ou son malheur. Mais celui qu’on peut voir, celui qui vous pose des question
477 omment vous aborder, celui qui vous entraîne dans sa chambre ou au café, celui-là peut vous révéler la vraie raison d’une
478 qui ne vaut qu’entre lui et moi, et qui ne prend son vrai sens que dans cette rencontre effective. Ce sont de telles renco
479 se prolonge en conversations pendant qu’on remet son pardessus ou qu’on rassemble ses papiers. L’auditeur a eu le temps de
480 dant qu’on remet son pardessus ou qu’on rassemble ses papiers. L’auditeur a eu le temps de se familiariser avec l’orateur,
481 e voir de près une heure durant. Il a pu corriger ses préjugés. Et la première rencontre, sous l’auvent du local que l’on q
482 C’est un homme qui rencontre un autre homme dans sa situation concrète et ses habits de tous les jours, sa maladresse et
483 ntre un autre homme dans sa situation concrète et ses habits de tous les jours, sa maladresse et son étrangeté. Alors seule
484 tuation concrète et ses habits de tous les jours, sa maladresse et son étrangeté. Alors seulement quelque chose peut se pa
485 et ses habits de tous les jours, sa maladresse et son étrangeté. Alors seulement quelque chose peut se passer en vérité. Al
486 sser en vérité. Alors seulement, ma pensée trouve son point d’attache, découvre sa mesure, sa force ou sa faiblesse, touche
487 t, ma pensée trouve son point d’attache, découvre sa mesure, sa force ou sa faiblesse, touche à son terme dans le cœur d’u
488 e trouve son point d’attache, découvre sa mesure, sa force ou sa faiblesse, touche à son terme dans le cœur d’un homme. Je
489 point d’attache, découvre sa mesure, sa force ou sa faiblesse, touche à son terme dans le cœur d’un homme. Je dois à ces
490 vre sa mesure, sa force ou sa faiblesse, touche à son terme dans le cœur d’un homme. Je dois à ces rencontres d’avoir press
491 Cette conclusion est la suivante : le lecteur en son particulier — précisons : le lecteur sérieux, personnellement intéres
492 ique des idées non point à l’aide des opinions de son journal, mais à l’aide de sa vie concrète. Celui-là seul peut faire s
493 ide des opinions de son journal, mais à l’aide de sa vie concrète. Celui-là seul peut faire sentir à l’écrivain ce qui est
494 ù nagent d’énormes bottes de radis rouges. Tout a son éclat neuf, sa densité, sa légèreté originelles. Les oliviers sont pl
495 es bottes de radis rouges. Tout a son éclat neuf, sa densité, sa légèreté originelles. Les oliviers sont plus soyeux et pl
496 radis rouges. Tout a son éclat neuf, sa densité, sa légèreté originelles. Les oliviers sont plus soyeux et plus moirés su
497 nt autre chose. » Et l’on décrit les croyances de son groupe en « parlant de la pluie et du beau temps ». (Je dis bien grou
498 t gentiment sur les restanques, en faisant tinter son grelot, respectueusement talonnée par un grand flandrin de métis aux
499 ignait. Ensuite une sorte d’épagneul impur a pris sa place. Deux ou trois autres mâles faméliques reniflaient la trace de
500 evait la tête, et s’en allait. Un nouveau faisait son apparition au haut de la colline. Simard et moi leur avons lancé quel
501 elles de la gauche. (Car la droite n’ose pas dire son nom dans ce canton.) Les partis de gauche ont fait liste commune : ce
502 t laissé ignorer : une belle-mère. Nous apprenons son existence en même temps que l’imminence de sa mort — et voici qui éve
503 ns son existence en même temps que l’imminence de sa mort — et voici qui éveillera peut-être des réflexions fécondes dans
504 re… Je viens d’aller la voir. Elle a un bâton sur son lit, qu’elle ne veut pas le lâcher, c’est pour lui tenir compagnie… O
505 cher le pasteur. Je le rencontre comme il sort de sa visite. — Elle est curieuse, cette vieille, me dit-il. Figurez-vous q
506 te vieille, me dit-il. Figurez-vous qu’elle tient sa canne à la main, comme ça, sur la couverture, et elle explique que c’
507 madame Simard, que j’ai trouvée hier soir devant son seuil, entourée de commères qui entretiennent son chagrin décent. Aux
508 son seuil, entourée de commères qui entretiennent son chagrin décent. Aux premiers mots que j’ai dits, elle a pleuré, gémi
32 1937, Esprit, articles (1932–1962). Marius Richard, Le Procès (juin 1937)
509 nom de leur mal » et même « du polémiste prenant son chien à témoin de la lâcheté des hommes, qu’il exploite ». Ce procès
33 1937, Esprit, articles (1932–1962). Paul Éluard, L’Évidence poétique (juin 1937)
510 espérance qu’elle proclame et par la confusion de sa proclamation. Que « toutes les paroles soient sacrées », c’est la vol
511 nté de réintégration générale de la création dans son état d’innocence et de grâce, et il n’y aurait pas de poésie — ni de
512 r le rêveur éveillé — pour le poète — l’action de son imagination. Qu’il formule cet espoir ou ce désespoir et ses rapports
513 tion. Qu’il formule cet espoir ou ce désespoir et ses rapports avec le monde changeront immédiatement. » Ou encore : « Le p
514 r voulu « redonner à l’homme civilisé la force de ses instincts primitifs ». Comme si l’instinct primitif ne poussait pas l
515 inct primitif ne poussait pas l’homme à exploiter son semblable, pour peu qu’il en ait la force ! Comme si la civilisation,
34 1937, Esprit, articles (1932–1962). M. Benda nous « cherche », mais ne nous trouve pas (juillet 1937)
516 u. Après quoi, M. Benda apprit à l’assistance que ses livres se vendent très bien. Enfin Denis de Rougemont dénonça le soph
517 e de M. Benda, œuvre, en dépit des prétentions de son auteur, purement polémique et politique. Ce sophisme consiste à enfer
518 la pensée doit entrer dans l’action, non pas « à son service », mais au service de la vérité. Le mot d’incarnation résume
519 e celui qui refuse d’endosser les conséquences de sa vérité prouve par là qu’il en a plus de respect que celui qui s’effor
520 ’est guère qu’anachronique. Partisan qui survit à sa cause ; et pensée qui refuse de payer. ap. Rougemont Denis de, « M
35 1937, Esprit, articles (1932–1962). Brève introduction à quelques témoignages littéraires (septembre 1937)
521 , poèmes, essais sur le rôle de la littérature ou ses méthodes. Mises au point et illustrations, — ou « signes » simplement
36 1937, Esprit, articles (1932–1962). Martin Lamm, Swedenborg (septembre 1937)
522 l’œuvre d’un illuminé que toutes les académies de son siècle eussent rejeté avec mépris et pitié. Mais la gloire posthume e
523 analyse qu’il nous donne des principaux écrits de son compatriote ne prend quelque chaleur qu’aux endroits où il s’agit de
524 s’occupe d’un personnage qui ne semble exciter ni sa réprobation ni son enthousiasme. C’est ce que l’on nomme du beau trav
525 onnage qui ne semble exciter ni sa réprobation ni son enthousiasme. C’est ce que l’on nomme du beau travail d’universitaire
526 ons personnelles qu’il formule admirablement dans sa préface. Morceau brillant, disert, d’une élégance trop aisée, mais no
527 système plus ou moins disparate qu’il a déduit de ses visions fameuses. M. Lamm démontre au contraire que ces visions n’ont
528 à lire, quel que soit l’intérêt du sujet, donc à son détriment, surtout lorsqu’il s’agit d’un phénomène spirituel et cultu
529 eur sur la « réalité » des visions de Swedenborg, son expression le trahit à chaque page, et révèle un parti pris assez bru
530 ant W. James et les psychologues d’avant-guerre — son livre est de 1915 — déclare que les visions intérieures de Swedenborg
531 ris comme un effort de l’homme pour se libérer de sa personnalité (ou de son individualité) telle qu’elle se trouve donnée
532 l’homme pour se libérer de sa personnalité (ou de son individualité) telle qu’elle se trouve donnée à cet homme par sa nais
533 é) telle qu’elle se trouve donnée à cet homme par sa naissance, et telle qu’il la développait pour ses fins propres, indiv
534 sa naissance, et telle qu’il la développait pour ses fins propres, individuelles, individualistes. « Le moi est anéanti, é
535 la mort mystique”. L’âme ne vit plus désormais de sa vie propre, c’est Dieu qui vit et agit en elle. » Il s’agit, au vrai,
536 l’identifie, l’effort de l’homme pour transcender son petit personnage individuel ou sociologique, et se mettre au service
537 que chose qui le dépasse, mais où il trouve enfin sa plus profonde raison d’être. Or il semble bien que la mystique occide
538 ici sur les aspects hétérodoxes et orthodoxes de son luthéranisme. Il faudrait d’abord expliquer qui était Luther, si mal
37 1937, Esprit, articles (1932–1962). Neutralité oblige (octobre 1937)
539 lui donner, qui se trouvent mises en question par sa méfiance paysanne. Cela n’est pas sans irriter certains. Pour moi, je
540 général, mais pour ce pays-ci, tel que l’ont fait sa nature et sept siècles d’histoire : le point de vue du personnalisme.
541 le traité de Vienne est aussi mal interprété par ses garants que par ses soi-disant bénéficiaires. Hors de chez nous, l’on
542 est aussi mal interprété par ses garants que par ses soi-disant bénéficiaires. Hors de chez nous, l’on pense généralement 
543 ez nous, l’on pense généralement : la Suisse tire son épingle du jeu. Neutralité égale prudence, égoïsme, ambitions mesquin
544 ur un petit pays comme le nôtre, la conscience de sa raison d’être, et le prestige qui s’y attache. On croit souvent, surt
545 prétendre à jouer un rôle analogue, croit-on que son droit à rester neutre soit suffisamment garanti du seul fait qu’elle
546 travail qu’on y donne. Si le propriétaire laisse ses terres en friche, et s’enrichit sans rien créer, tout simplement parc
547 il possède des coupons de papier dans une banque, ses droits sont ressentis comme des abus. Ils cessent dès lors d’être ass
548 ératif ; et elle ne peut être autre chose, de par sa nature même, physique et historique. Gardiens des cols, gardiens de l
549 s, grands Portiers de l’Europe, et mainteneurs de ses communes mesures. Qu’on ne voie pas là je ne sais quelle manière d’id
550 ut et doit maintenant revendiquer face à l’Europe son droit à la neutralité. Elle n’est réellement intangible que parce qu’
551 incarner, on pourra dire que la Suisse a retrouvé sa raison d’être, et d’être neutre. Quoi de plus comique et de plus irri
552 ’authenticité de ces missions qu’ils proclament à son de trompe, il est clair que leur force est là, et qu’en les admirant,
553 chez nous à l’école de la droite française et de sa politique particulière conditionnée par le nationalisme unitaire et a
554 voisinage germanique qui l’a contraint à formuler sa différence spécifique ? En France même, quoi de plus français — jusqu
555 vorable. Mais il faudrait savoir l’envisager dans sa grandeur, sans crispation de méfiance ou de timidité ; dans une volon
556 erait le péché même d’idolâtrie qui consiste dans son principe à adorer les instruments d’un culte, oubliant le dieu qu’il
557 volontiers une Suisse culturelle pluraliste, avec ses centres successifs ou parfois même simultanés, offrant un asile provi
558 bigné, et le fameux docteur Paracelse, entraînant sa suite turbulente de disciples d’auberge en auberge. C’était la Suisse
559 tuelle de la Renaissance, le microcosme de toutes ses grandeurs. Aux xviie et xviiie , l’horizon se resserre un peu, on ne
560 nuer, et qui, je le crois, n’a pas encore réalisé ses possibilités extrêmes. Nous avons le goût du moyen, c’est entendu, et
561 pense qu’on n’atteint la grandeur qu’en utilisant ses défauts, en s’élevant au point où ils deviennent les conditions d’une
562 bien ce que devrait être une armée consciente de son rôle particulier de garde neutre. Mais je ne sens pas cette conscienc
563 e fédérale, ne peut être l’armée d’une classe, de ses intérêts, de son ordre. Il n’y aurait aucun avantage à combattre l’es
564 ut être l’armée d’une classe, de ses intérêts, de son ordre. Il n’y aurait aucun avantage à combattre l’esprit de caste si
565 rappeler qu’il existe d’autres manières se servir son pays et d’illustrer sa cause. Et que c’est faire grand tort à ce patr
566 autres manières se servir son pays et d’illustrer sa cause. Et que c’est faire grand tort à ce patriotisme qu’on exalte, q
567 érale. Et un aspect subordonné. Si l’on néglige à son profit « le reste », on fait œuvre de mauvais Suisse, car c’est ce « 
568 beaux jours de la SDN semblait devoir renouveler son rayonnement. Asile ou lieu d’élection d’Européens comme Ferrero ou Th
569 que le groupe de L’Ordre nouveau avait déduit, de ses principes fondamentaux, une organisation tout analogue pour l’armée d
38 1938, Esprit, articles (1932–1962). La passion contre le mariage (septembre 1938)
570 sujet d’exaltation de la littérature occidentale. Son vocabulaire sera repris par les mystiques orthodoxes. Sa rhétorique,
571 bulaire sera repris par les mystiques orthodoxes. Sa rhétorique, d’origine sacrée, transformera peu à peu nos sentiments,
572 immense « mystification » de l’instinct faussant ses rythmes naturels, invertissant sa direction, exaltant le « désir de m
573 tinct faussant ses rythmes naturels, invertissant sa direction, exaltant le « désir de mort », développera d’importantes c
574 éternel et angoissé avec la créature de chair et ses instincts asservissants. L’apparition de la passion d’Amour devait do
575 fait que l’on ignore la signification mystique de ses symboles, et que ceux-ci ne paraissent plus révélateurs que d’un myst
576 même temps que les formes sociales dont il tirait ses éléments plastiques. Si maintenant il tentait de se recomposer, on pr
577 ur trois groupes de valeurs qui lui fournissaient ses « contraintes » — et c’est précisément dans le jeu de ces contraintes
578 e ces contraintes que le mythe de Tristan puisait ses moyens d’expression. Or voici que ces contraintes ou se relâchent, ou
579 de l’exorcisme. Mais de nos jours, la dot perd de son importance, par suite de l’instabilité économique. Les coutumes rappe
580 s’y ajoute la volonté moderne d’être le maître de son bonheur, ou ce qui revient peut-être au même, de sentir de quoi il es
581 nheur que l’on veut sentir, que l’on veut tenir à sa merci — au lieu d’y être comme par grâce — se transforme instantanéme
582 « vivant » que la vie normale, plus exaltant que son « petit bonheur »… Ou l’ennui résigné, ou la passion : tel est le dil
583 l’extravagante idéalisation de l’attrait sexuel, sa transformation en passion. Et c’est de là que nous vient, par la litt
584 ors de soi, dans l’extase. Et de fait, c’est déjà sa nostalgie qui le « démeine » — pour parler comme l’auteur du Tristan
585 algie dont il ignore l’origine autant que la fin. Son illusion de liberté repose sur cette double ignorance. Le passionné,
586 nce. Le passionné, c’est l’homme qui veut trouver son « type de femme » et n’aimer qu’elle. Souvenez-vous du rêve de Nerval
587 souvenirs d’enfance : Blonde, aux yeux noirs, en ses habits anciens Que dans une autre existence peut-être J’ai déjà vue,
588 tiques publicitaires. L’homme qui croit désirer «  son  » type de femme se trouve intimement déterminé par des facteurs de mo
589 e femme, il la reconnaît. C’est elle, la femme de son désir et de sa plus secrète nostalgie88, l’Iseut du rêve ; elle est m
590 econnaît. C’est elle, la femme de son désir et de sa plus secrète nostalgie88, l’Iseut du rêve ; elle est mariée, naturell
591 ouissement de ce Tristan qu’il porte en soi comme son génie caché ! Et plus rien ne compte en regard de la révélation mythi
592 n imagine différente la femme que l’on tient dans ses bras, on la déguise et on l’éloigne en rêve, on s’acharne à dépayser
593 ieu de l’épée du chevalier, entre le bourgeois et sa femme, voici le rêve sournois du mari qui ne peut plus désirer sa fem
594 le rêve sournois du mari qui ne peut plus désirer sa femme qu’en l’imaginant sa maîtresse. (Balzac déjà donne la recette d
595 i ne peut plus désirer sa femme qu’en l’imaginant sa maîtresse. (Balzac déjà donne la recette dans sa Physiologie du maria
596 sa maîtresse. (Balzac déjà donne la recette dans sa Physiologie du mariage.) Une innombrable et écœurante littérature rom
597 train-train des liens légitimes où la femme perd son « attrait » parce qu’il n’est plus d’obstacles entre elle et lui. Pit
598 t n’était rien que le symbole du Désir lumineux : son au-delà, c’était la mort divinisante, libération des liens terrestres
599 ui que le mythe vient tourmenter sans lui révéler son secret, il n’est d’au-delà de la passion que dans une passion nouvell
600 mment déçue. Le mythe décrivait une fatalité dont ses victimes ne pouvaient se délivrer qu’en échappant au monde fini. Mais
601 the des amants « ravis » s’est dégradé en perdant sa mystique. Le ravissement n’est plus qu’une sensation, — n’aboutit pas
602 is comme une existence incomparable et autonome à son côté, une exigence d’amour actif. ⁂ Je n’entends pas ici attaquer la
603 re, sans apporter les éléments d’une révolution à sa mesure. En outre, il est frappant de constater que presque tous ces s
604 à concevoir, on craint d’attaquer le lecteur dans ses croyances les plus intimes et les plus solidement ancrées. On a peur
605 dictature exactement consciente des conditions de sa durée. Staline s’est assigné pour but prochain de refaire des cadres
606 assigné pour but prochain de refaire des cadres à sa nation. Car sans cadres, l’économie périclitait, et la « défense nati
607 lisée par le Führer. D’abord on prive la femme de son auréole romantique : on la réduit à sa fonction matrimoniale : faire
608 femme de son auréole romantique : on la réduit à sa fonction matrimoniale : faire des enfants, puis les élever jusqu’au m
609  goûts » individuels, donc des passions. À chacun sa « fiche de mariage ». Alors la science matrimoniale trouvera sa juste
610 mariage ». Alors la science matrimoniale trouvera sa juste application dans l’esprit de Lycurgue et de Sparte : on en fera
611 aires et sacrés, qui lui font aujourd’hui défaut. Sa dialectique mortelle pourra de nouveau mimer des intrigues épiques ou
612 es épiques ou politiques. Et l’aventure reprendra son départ dans une tension incalculablement plus forte que celle qui s’i
613 nfin sur des entretiens de Jésus ressuscité et de ses disciples « que les évangélistes et les Actes mentionnent sans les ra
39 1938, Esprit, articles (1932–1962). Revue des revues (septembre 1938)
614 ros de ces cahiers. L’extrême droite qui ose dire son nom paraît souvent bien proche de la véritable extrême gauche françai
615 ’il demande ce soit l’honneur d’être exploité par ses propres compatriotes. » Robert Francis, après Bernanos, met en garde
616 s. » Robert Francis, après Bernanos, met en garde ses camarades contre « une aventure d’intolérance et d’inquisition où nou
617 uteuil académique au trône, dans la hiérarchie de ses vénérations). Une droite qui abandonne Boileau pour Rimbaud, c’est un
618 anifeste à l’égard du Parti national Breton et de ses doctrines corporatistes et paternalistes. Au total, ce Manifeste de h
619 uceur de vivre », en a gardé — tout au moins dans son style — la sécheresse aiguë, mais non l’exaltation, le cynisme impuis
620 re réplique. — Francis Jammes continue à célébrer son autoculte mensuel, cite tous les éloges qu’il reçoit par l’argus ou l
40 1938, Esprit, articles (1932–1962). L’amour action, ou de la fidélité (novembre 1938)
621 n parti pris À l’heure où cet ouvrage touche à sa conclusion, il me semble que son dessein le plus secret m’échappe enc
622 ouvrage touche à sa conclusion, il me semble que son dessein le plus secret m’échappe encore. L’aveu sera jugé insolite. M
623 . (Au xiie siècle). J’ai cru cerner le secret de son mythe. La découverte ne serait pas négligeable. Mais peut-on décrire
624 ssion est justement celui qui choisit d’être dans son tort, aux yeux du monde — et dans ce tort majeur, irrévocable, que si
625 n fondamentale de l’homme, qui veut être lui-même son dieu93. La passion brûle dans notre cœur sitôt que le serpent au sang
626 serpent au sang-froid — le cynique pur — insinue sa promesse éternellement trahie : eritis sicut dei. Infinie naïveté du
627 isante, en lui « prouvant » qu’elle débouche dans sa perte ! En lui opposant toutes les raisons de la terre, et les consei
628 tériliser le milieu culturel où la passion plonge ses racines, il est probable que l’État s’en chargera, c’est son hygiène.
629 , il est probable que l’État s’en chargera, c’est son hygiène. Il y a toutes les raisons de le prévoir, dans une époque où
630 e à l’homme — à un homme déterminé — de connaître ses propres désirs et de sonder en vérité ses préférences les plus secrèt
631 nnaître ses propres désirs et de sonder en vérité ses préférences les plus secrètes, du moins peut-il connaître ses actions
632 ces les plus secrètes, du moins peut-il connaître ses actions, et reconnaître à leurs effets les décisions qu’il a risquées
633 t pour moi seul : on ne se décide jamais que pour son compte, et le reste est indiscrétion. Mais je ne pouvais écrire un li
634 ion devait être un amour heureux, un mariage avec sa vertu. Car l’amour du pécheur pour Dieu est « essentiellement malheur
635 utefois, pour éviter l’impudicité, que chacun ait sa femme, et que chaque femme ait son mari… La femme n’a pas autorité su
636 que chacun ait sa femme, et que chaque femme ait son mari… La femme n’a pas autorité sur son propre corps, mais c’est le m
637 femme ait son mari… La femme n’a pas autorité sur son propre corps, mais c’est le mari ; et pareillement, le mari n’a pas a
638 i ; et pareillement, le mari n’a pas autorité sur son propre corps, mais c’est la femme. Ne vous privez pas l’un de l’autre
639 uiète des choses du monde, des moyens de plaire à sa femme. » (v. 32). ⁂ Tout ce qu’on peut dire contre le mariage est vr
640 u point de vue du clerc parfait — si l’on croit à son œuvre —, soit du point de vue spirituel pur, pour ceux qui croient. I
641 un troisième essai le rapprochera sensiblement de son « bonheur ». Alors que tout nous montre que cent-mille essais ne sera
642 ment sentimental. Choisir une femme pour en faire son épouse, ce n’est pas dire à Mademoiselle Untel : « Vous êtes l’idéal
643 é je changerais ! Choisir une femme pour en faire son épouse, c’est dire à Mademoiselle Untel : « Je veux vivre avec vous t
644 ait muer en savoir, mais dans un savoir qui exige sa réalisation. » Ce n’est pas l’engagement qui est problématique, mais
645 oyez les excuses invoquées par le mari qui trompe sa femme ; il dit tantôt : « Cela n’a pas d’importance, cela ne change r
646 ngue de la passion par un refus constant de subir ses rêves, par un besoin constant d’agir pour l’être aimé, par une consta
647 ) Toute vie, fût-elle la plus déshéritée, détient sa chance immédiate de grandeur, et c’est dans la fidélité « absurde » q
648 serait-ce pas simplement celui qui a reconnu dans sa femme une Iseut ? Lorsque l’amant de la légende manichéenne a travers
649 que, ce beau prétexte qui s’appelle Iseut, mais à sa plus profonde et secrète passion. Le mythe s’empare de l’« instinct d
650 essentiellement spirituel. Se détruire, mépriser son bonheur, c’est alors une manière de se sauver et d’accéder à une vie
651 pris pour ce monde », écrivait Novalis songeant à sa fiancée perdue. C’est l’émouvante formule de la fidélité courtoise ;
652 le mariage, c’est à l’autre d’abord, et non pas à son moi d’abord, que celui qui aime voue sa fidélité. Et tandis que la fi
653 on pas à son moi d’abord, que celui qui aime voue sa fidélité. Et tandis que la fidélité de Tristan était un perpétuel ref
654 une volonté d’exclure et de nier la création dans sa diversité, d’empêcher le monde d’envahir l’âme, la fidélité des époux
655 la volonté d’accepter l’autre tel qu’il est, dans son intime singularité. Insistons : la fidélité dans le mariage ne peut p
656 tre qu’une action. Se contenter de ne pas tromper sa femme serait une preuve d’indigence et non d’amour. La fidélité veut
657 ce détour, à travers l’autre, que le moi rejoint sa personne — au-delà de son propre bonheur. Ainsi la personne des époux
658 utre, que le moi rejoint sa personne — au-delà de son propre bonheur. Ainsi la personne des époux est une mutuelle création
659 de « l’amour-action ». Ce qui niait l’individu et son naturel égoïsme, c’est cela qui édifie la personne. À ce terme, on dé
660 Tristan). ⁂ L’amour fidèle de Tristan détruisait son bonheur et sa vie pour témoigner en faveur de la Nuit, c’est-à-dire d
661 amour fidèle de Tristan détruisait son bonheur et sa vie pour témoigner en faveur de la Nuit, c’est-à-dire du moi glorifié
662 an et d’Iseut c’était l’angoisse d’être deux ; et son aboutissement suprême, c’était la chute dans l’illimité, au sein de l
663 ’amour chrétien, qui est Agapè, paraît enfin dans sa pleine stature : il est l’affirmation de l’être. Et c’est Éros, l’amo
664 étruit. « Je ne veux pas la mort du pécheur, mais sa vie. » ⁂ Éros s’asservit à la mort parce qu’il veut exalter la vie au
665 fait que nous adorons la vie nous précipite dans sa négation. C’est la profonde misère, le désespoir d’Éros, sa servitude
666 n. C’est la profonde misère, le désespoir d’Éros, sa servitude inexprimable : — en l’exprimant, Agapè l’en délivre. Agapè
667 mné à croire Éros, c’est-à-dire à se confier dans son désir le plus puissant, à lui demander la délivrance. Et l’Éros ne po
668 le cercle s’ouvrir : il est délivré par la foi de sa religion naturelle. Il peut maintenant espérer autre chose, il sait q
669 l est une autre délivrance. Et voici que l’Éros à son tour se voit relevé de sa fonction mortelle et délivré de son destin.
670 Et voici que l’Éros à son tour se voit relevé de sa fonction mortelle et délivré de son destin. Dès qu’il cesse d’être un
671 voit relevé de sa fonction mortelle et délivré de son destin. Dès qu’il cesse d’être un dieu, il cesse d’être un démon 97.
672 dieu, il cesse d’être un démon 97. Et il retrouve sa juste place, et vivifiante, dans l’économie provisoire de la Création
673 utrement que de faire un dieu de l’Éros : c’était son pouvoir le plus fort, le plus dangereux et le plus mystérieux, le plu
674 ement : qu’il nous détourne d’obéir. Mais il perd sa puissance absolue quand nous cessons de le diviniser. Et c’est ce qu’
675 la plus précise : La femme n’a pas autorité sur son propre corps, mais c’est le mari ; et pareillement le mari n’a pas au
676 ri ; et pareillement le mari n’a pas autorité sur son propre corps, mais c’est la femme. (I. Cor. 7.) La femme étant l’éga
677 ée l’égalité de ceux qui s’aiment. Dieu manifeste son amour pour l’homme en exigeant que l’homme soit saint comme Dieu est
678 aint comme Dieu est saint. Et l’homme témoigne de son amour pour une femme en la traitant comme une personne humaine totale
679 llusoire ou fugitif aspect, projeté peut-être par sa seule rêverie. Alors la tentation se dissipe, déconcertée, au lieu de
680 s le cœur d’un homme moderne — du moins perd-elle son efficace : ce n’est plus elle qui détermine la personne. En d’autres
681 n’exige pas moins que cet engagement pour révéler sa vérité. Et c’est pourquoi l’homme qui croit au mariage ne peut plus c
682 celui qui veut être trompé, parce qu’il y trouve son intérêt ; figures de rhétorique romanesque, et acceptables à ce titre
683 the, naturellement, qui nous le fait croire, avec son obsession de l’amour contrarié. Il serait plus vrai de dire avec Bene
684 imer. Le viol et la polygamie privent la femme de sa qualité d’égale — en la réduisant à son sexe. L’amour sauvage déperso
685 a femme de sa qualité d’égale — en la réduisant à son sexe. L’amour sauvage dépersonnalise les relations humaines. Par cont
686 ouve ainsi qu’il veut d’abord le bien de l’autre. Son égoïsme passe par l’autre. On admettra que c’est une révolution série
687 notre Occident. La connaissance de ce conflit, de ses origines historiques et psychologiques, de son enjeu spirituel, me pa
688 de ses origines historiques et psychologiques, de son enjeu spirituel, me paraît devoir entraîner la révision d’un certain
689 ’abord, mais aussi dans celui de la culture et de sa philosophie. Au terme de cet essai, il suffira sans doute de dégager
690 e, et puisque le salut est justement d’échapper à sa loi démoniaque.104 Faut-il voir à la source de cet aspect le plus ré
691 ns 8), et qui tendrait à restaurer le Cosmos dans sa loi primitive, troublée par le péché ? La volonté chrétienne de trans
692 volonté chrétienne de transformer le pécheur dans son âme et dans sa conduite a entraîné en Occident l’idée de transformer
693 ne de transformer le pécheur dans son âme et dans sa conduite a entraîné en Occident l’idée de transformer le milieu humai
694 ident était chrétien. Si donc l’Europe succombe à son mauvais génie, ce sera pour avoir trop longtemps cultivé la religion
695 hristianisé se distingue du mystique oriental par son pouvoir d’approfondir l’être créé dans ce qu’il a de particulier. C’e
696 donc de l’incomplet, la prise sur le concret dans ses limitations. Le chrétien prend le monde tel qu’il est, et non point t
697 qu’il est, et non point tel qu’il peut le rêver. Son activité « créatrice » consiste alors à retrouver en profondeur toute
698 aurait être la pure et simple négation de l’un de ses termes. Je l’ai dit et j’y insiste encore : condamner la passion en p
699 à le seul progrès concevable est dans la crise de sa sécurité, c’est-à-dire dans le drame passionnel. Mais au-delà de la p
700 vint pour Kierkegaard le point de départ de toute sa réflexion, fut la rupture de ses fiançailles avec Régine. La cause in
701 e départ de toute sa réflexion, fut la rupture de ses fiançailles avec Régine. La cause intime de cette rupture nous demeur
702 ’homme fini et pécheur ne saurait entretenir avec son Dieu, — qui est l’Éternel et le Saint— que des relations d’amour mort
703 crée tout ex nihilo » et celui que Dieu élit par son amour, « il commence par le réduire à néant ». Du point de vue du mon
704 que soit l’ordre où elle se manifeste — ne trouve son au-delà réel et son salut que par cette action d’obéissance qui est l
705 elle se manifeste — ne trouve son au-delà réel et son salut que par cette action d’obéissance qui est la vie de fidélité. V
706 ssaisir » le monde fini que dans la conscience de sa perte, infiniment féconde pour son génie ; il ne recouvra pas Régine,
707 a conscience de sa perte, infiniment féconde pour son génie ; il ne recouvra pas Régine, mais ne cessa jamais de l’aimer et
708 ne cessa jamais de l’aimer et de lui dédier toute son œuvre. Et c’est peut-être que cette œuvre était le lieu de sa fidélit
709 c’est peut-être que cette œuvre était le lieu de sa fidélité la plus réelle. Pourquoi chercher ailleurs que dans la vocat
710 cation vraiment unique du Solitaire, le secret de son échec humain ? D’autres reçoivent une autre vocation, épousent Régine
711 ples et totales pour qu’un discours vienne mettre ses délais entre la question qu’elles nous posent et la réponse de notre
712 mystique. L’âme se comporte alors à l’endroit de son amour avec une sorte d’indifférence quasi divine. Elle est au-delà du
713 mme un déchirement ; elle ne désire plus rien que son amour ne veuille, elle est une avec lui dans la dualité, qui n’est pl
714 e par la rencontre d’un autre, par l’admission de sa vie étrangère, de sa personne à tout jamais distincte, mais qui offre
715 un autre, par l’admission de sa vie étrangère, de sa personne à tout jamais distincte, mais qui offre une alliance sans fi
716 ce qui ne change pas comme nous, révèle peu à peu son mystère : c’est qu’au-delà de la tragédie, il y a de nouveau le bonhe
717 oyances courantes, nées du mythe de Tristan et de son négatif donjuanesque. Mais cette « raison » est tout à fait inefficac
718 est admirablement défini par ce petit livre, dans ses données actuelles, psychologiques. 103. À partir de cette règle comm
41 1938, Esprit, articles (1932–1962). Suite à « La passion contre le mariage » (décembre 1938)
719 qui « fait question », selon M. Lavaud, mais bien son fondement biblique. À propos de la lettre de Miatlev. — Non, je ne « 
42 1939, Esprit, articles (1932–1962). D’une critique stérile (mai 1939)
720 ouvement ait péché par défaut de radicalisme dans sa critique négative. Mon expérience des groupes et des congrès personn
721 s au niveau de l’opinion. 10. Ceux qui doutent de son efficace sont victimes de l’optique des partis. 11. Ceux qui demanden
722 devant la véritable puissance de l’homme, qui est sa responsabilité personnelle. 16. Les partis sont mauvais non point par
723 ’un parti, c’est la somme des abdications de tous ses membres. 18. Lorsqu’un parti — comme ils le désirent tous plus ou moi
724 les citoyens. 19. Tout parti est totalitaire dans son essence, et préfigure l’État totalitaire, brutal et stérilisant. 20.
725 excluent, chacun prétendant « tout » régler selon son idéologie. Partis qui veulent se faire aussi grands que le tout. 21.
43 1939, Esprit, articles (1932–1962). Autour de L’Amour et l’Occident (septembre 1939)
726 méditerranéen sur mon Amour et l’Occident , par sa forme même d’apostrophe amicale et ironique, provoque et engage un di
727 urtois !… dites-vous. Mais voilà, je le « vide de sa riche, émouvante réalité humaine », Et vous citez la légende de Rudel
728 ier amour, c’est le désir, c’est l’amour sensuel, sa fièvre et son bonheur, un « aspect éternel du cœur humain » — si vous
729 est le désir, c’est l’amour sensuel, sa fièvre et son bonheur, un « aspect éternel du cœur humain » — si vous voulez… (Mais
730 l’Éros et qui, loin de le sublimer, lui redonnera sa juste place dans l’humain. Ma thèse centrale présentée de la sorte —
44 1946, Esprit, articles (1932–1962). « Un divorce entre le christianisme et le monde ? » (août-septembre 1946)
731 nde (Constantin et la suite) c’est qu’elle trahit son état. Quand on croit le fossé comblé entre elle et le monde, c’est qu
45 1946, Esprit, articles (1932–1962). Épilogue (novembre 1946)
732  nationalisé » (ou plus exactement étatisé) toute son industrie et tout son commerce, sans dépense de salive patriotique, p
733 s exactement étatisé) toute son industrie et tout son commerce, sans dépense de salive patriotique, pour des raisons bien é
734 tique nécessairement improvisée, puisqu’il a reçu ses pouvoirs au moment même où il devait en faire un usage maximum, de to
735 ppose que le nouveau venu, encore tout étourdi de sa puissance, et qui ne sait pas où l’on cache les dossiers, doit juger
736 avec émotion le renvoi de l’ingénieur en chef et son remplacement à la dernière seconde soit par un antifasciste convaincu
737 uoi nous adorons la France comme une femme ! Pour sa grâce et pour ses faiblesses de grande coquette blessée, peut-être. M
738 la France comme une femme ! Pour sa grâce et pour ses faiblesses de grande coquette blessée, peut-être. Mais aussi pour une
739 s de la marine de guerre, et comme pour démontrer sa force à toute épreuve, les expériences de Bikini ? C’était un clair a
740 mérique. Cinq choses témoignent de l’esprit et de sa présence active dans une culture. Les meilleurs d’entre nous les ont
741 ger des libertés réelles. Le sens de l’échec, de sa nécessité métaphysique et de sa valeur d’enseignement spirituel. La c
742 ns de l’échec, de sa nécessité métaphysique et de sa valeur d’enseignement spirituel. La croyance exclusive et la réussite
743 en nous ni autour d’elle. Un peuple, s’il éduque son sens des formes, cesse d’imiter et se met à créer. La réduction du f
744 c’est une timidité de l’esprit qui recule devant son acte propre : donner un sens, voir au-delà, relier les moyens aux fin
745 pprendre et de s’améliorer. J’y vois la marque de sa force. Qui n’a pas lu les éreintements de l’esprit américain auxquels
46 1948, Esprit, articles (1932–1962). Thèses du fédéralisme (novembre 1948)
746 s à tenir activement le parti de cette Europe, de ses complexités vitales, de sa culture. Une analyse sociologique assez gr
747 i de cette Europe, de ses complexités vitales, de sa culture. Une analyse sociologique assez grossière suffit à révéler da
748 ifs d’entre nous ont émigré. La bourgeoisie, dans son ensemble, se contente d’un double refus de la Russie et de l’Amérique
749 pour ce faire, a besoin de l’Europe, j’entends de son esprit critique autant que de son sens inventif. […] La fédération eu
750 e, j’entends de son esprit critique autant que de son sens inventif. […] La fédération européenne ne sera pas l’œuvre des g
47 1962, Esprit, articles (1932–1962). Lettre à Jean-Marie Domenach, à propos de « Sartre et l’Europe » (mai 1962)
751 ments de douanes » et du « foie gras » : c’est en son nom, dites-vous, que je répondais à Sartre. Allons donc ! Je vois bie
752 ui-même ce qui était, effectivement, un aspect de son article. Pour le reste, il se peut que son texte m’ait “servi”, comme
753 ect de son article. Pour le reste, il se peut que son texte m’ait “servi”, comme il dit. Après quinze ans de métier, je res
754 tuce. Je me contente donc d’assurer Rougemont que son article m’a agacé et m’a mis en colère, d’où l’interprétation polémiq