1 1928, Foi et Vie, articles (1928–1977). Le péril Ford (février 1928)
1 Le péril Ford (février 1928) a On a trop dit que notre époque est chaotique. Je crois bien, au co
2 Le péril Ford (février 1928)a On a trop dit que notre époque est chaotique. Je crois bien, au contraire,
3 ue. Je crois bien, au contraire, que l’histoire n’ a pas connu de période où les directions d’une civilisation apparaissen
4 une absurdité fondamentale. L’infaillible progrès aurait -il fait fausse route ? Est-il temps encore de le détourner du désastr
5 nce générale à proclamer le désordre du temps. On a peur de certaines évidences, on préfère affirmer que tout est incompr
6 tion. Il répugne à admettre qu’une époque entière ait pu se tromper, et se tromper mortellement. Il suffit pourtant de rega
7 de nous et d’en croire nos yeux. I. L’homme qui a réussi Je prends Henry Ford comme un symbole du monde moderne, et
8 a popularité universelle sont signes que l’époque a senti en lui son incarnation la plus parfaite. Qu’on ne m’accuse donc
9 ’au jour présent, ma grande et constante ambition a été de construire une bonne machine routière. » Les étapes de sa jeun
10 at secondaire de son activité. Le but de sa vie n’ a jamais été de s’enrichir. Son « rêve » était autre, il l’a réalisé co
11 été de s’enrichir. Son « rêve » était autre, il l’ a réalisé comme il est donné à peu d’hommes de le faire : 7000 voitures
12 enage et du paupérisme. C’est un résultat qu’on n’ a pas le droit humainement de sous-estimer. Les griefs que les socialis
13 opéens ne sauraient l’atteindre. Au contraire, il a résolu la question sociale d’une façon qui ne devrait pas déplaire au
14 pas déplaire aux doctrinaires de gauche, lesquels ont coutume de promettre à leurs électeurs une organisation complète du m
15 le premier exemple de son achèvement intégral. Il a atteint l’objectif de la moderne civilisation occidentale. Voici donc
16 la juger. Le héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la plus grave question qu’on puisse poser
17 qu’on puisse poser à notre temps. II. M. Ford a ses idées, ou la philosophie de ceux qui n’en veulent pas Nous avo
18 philosophie de ceux qui n’en veulent pas Nous avons dit tout à l’heure quel fut le but de la vie de Ford, sa « grande et
19 biles Ford. Et, comme il est très intelligent, il a vite fait de démêler les conditions les plus rationnelles de la produ
20 ent trop chère ; mais surtout que le besoin qu’on a de tel objet est satisfait ou a disparu. Il semble alors que l’indust
21 e le besoin qu’on a de tel objet est satisfait ou a disparu. Il semble alors que l’industriel n’ait plus qu’à plier bagag
22 ou a disparu. Il semble alors que l’industriel n’ ait plus qu’à plier bagage. Mais c’est ici que Ford montre le bout de l’o
23 aisir ou l’intérêt véritable du client. Le besoin ayant disparu, la production devant se maintenir, il n’y a qu’une solution 
24 isparu, la production devant se maintenir, il n’y a qu’une solution : recréer le besoin. Pour cela, on abaisse les prix.
25 moins chers un objet que, sans cette baisse, il n’ eût pas acheté du tout. Autrement dit, il est trompé par la baisse. L’ind
26 scandale, à mon sens, n’est pas que l’industriel ait forcé (psychologiquement) le client à faire une dépense superflue ; l
27 e une dépense superflue ; le scandale est qu’il l’ ait trompé sur ses véritables besoins. Car cela va bien plus profond, cet
28 e, le paradoxe du bon marché. Celui de la réclame a même but, mêmes effets. Mais le plus grave est peut-être le sophisme
29 -être le sophisme du loisir. M. Guglielmo Ferrero a fort bien montré, dans un article intitulé « Le grand paradoxe du mon
30 dans la conception fordienne de l’oisiveté. Ford a créé un second dimanche dans la semaine, « retouché l’œuvre de la Cré
31 clame, les produits Ford qu’il faut user, etc. Il a pour but véritable d’augmenter la consommation. Il rend plus complet
32 bsister qu’en progressant. Mais la nature humaine a des limites. Et le temps approche où elles seront atteintes. On peut
33 t au plus pur, au plus naïf matérialiste que nous avons affaire ici. Et ses prétentions « idéalistes » n’y changeront rien. D
34 salut par l’auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ ai à cœur, aujourd’hui, c’est de démontrer que les idées mises en pratiq
35 fin de son livre : Le problème de la production a été brillamment résolu… Mais nous nous absorbons trop dans ce que nou
36 sons et ne pensons pas assez aux raisons que nous avons de le faire. Tout notre système de concurrence, tout notre effort de
37 se remet à discuter des points de technique. Il n’ a pas senti qu’il touchait là le nœud vital du problème moderne. D’aill
38 ds esprits de tous les temps. On me dira que Ford a mieux à faire que de philosopher. Je le veux. Mais si j’insiste un pe
39 tés essentielles ? Il semble bien que notre temps ait prononcé définitivement le divorce de l’esprit et de l’action. III
40 sprit. Si l’Esprit nous abandonne, c’est que nous avons voulu tenter sans lui une aventure que nous pensions gratuite : nous
41 ui une aventure que nous pensions gratuite : nous avons cherché le bonheur dans le développement matériel, avec l’arrière-pen
42 t pas mauvais en soi. Mais par l’importance qu’il a prise dans notre vie, il détourne la civilisation de son but véritabl
43 . « En être » ou ne pas en être Une fois qu’on a compris à quel point le fordisme et l’Esprit sont incompatibles, le m
44 monde, c’est-à-dire à une nature dont l’usine lui a fait oublier jusqu’à l’existence, et à une liberté qu’il s’empresse d
45 exigences les plus rudimentaires de son corps. Il a perdu le contact avec les choses naturelles, et par là même, avec les
46 . Neurasthénie. La conquête du confort matériel l’ a laissé oublier les valeurs de l’esprit au point qu’il n’éprouve plus
47 fatigué de trop de satisfactions matérielles, il a laissé se détendre, ou il a cassé les ressorts de sa joie : l’effort
48 tions matérielles, il a laissé se détendre, ou il a cassé les ressorts de sa joie : l’effort libre et généreux, le sentim
49 joie : l’effort libre et généreux, le sentiment d’ avoir inventé ou compris par soi-même, la liberté et une certaine durée nor
50 res, humains et divins. Mauvais loisirs. Ford lui a donné une auto pour admirer la nature entre 17 et 19 heures : vraimen
51 nque plus rien — que l’envie. Mauvais travail. Il a perdu le sens religieux, cosmique, de l’effort humain. Il ne peut plu
52 rien à l’Univers. Par la technique, l’Occidental a prétendu maîtriser la matière et parvenir à une liberté plus haute. O
53 rvenir à une liberté plus haute. Or, la technique a révélé des exigences telles que l’Esprit ne peut les supporter. Il ab
54 culté destinée à amuser nos moments de loisir, il a des exigences effectives ; et ces exigences sont en contradiction ave
55 uche de Ford : « Inutile, donc à détruire. » Ford a raison, une fois de plus. Pas de compromis possible de ce côté. Mais
56 it autre chose qu’une échappatoire utopique. Nous avons mieux à faire, il n’est plus temps de se désintéresser simplement des
57 u dans sa prison. Les intellectuels d’aujourd’hui ont une tâche pressante : chercher s’il est possible d’échapper au fatal
58 question de foi. 1. Une enquête faite à Genève a révélé que les livres les plus lus du grand public sont Ma vie et mon
59 rance, en Amérique ; poussée mystique en Russie. a . Rougemont Denis de, « Le péril Ford », Foi et Vie, Paris, février 1
2 1930, Foi et Vie, articles (1928–1977). « Pour un humanisme nouveau » [Réponse à une enquête] (1930)
60 st encore maître de la redresser. C’est qu’il n’y a plus d’humanisme, s’il subsiste des humanités. L’humanisme est compro
61 étaphysique. Elle n’entend que ses intérêts. Elle eut naguère des insolences d’affranchi, dont les philosophes demeurent to
62 la plupart de nos philosophies, officiellement, l’ ont renié. Mais pourquoi tant et toujours plus de mal à prouver la libert
63 allemand chargé de sa filature6. Ah ! comme nous avons besoin d’être purifiés d’une odeur de laboratoire dont notre pensée r
64 rlait donc d’un « humanisme scientifique » ? Nous avons été pris de vitesse par nos inventions matérielles et déjà nous sento
65 enrayer la science ? Non, mais que l’esprit qui l’ a créée, la surpasse7. Seul un parti pris constant en faveur de l’espri
66 entends la pensée mystique. L’expérience mystique a la même extension que l’humanité. On n’en saurait dire autant de notr
67 n l’état brut où notre pensée le plus souvent les a laissés — sont au moins aussi « objectifs » que les faits physiques é
68 tre séculairement — ce que la « rationalisation » aura laissé de Raison à l’Occident, avec certains secrets de la méditation
69  : celle de créer un modèle de l’homme. Peut-être a-t -il existé un modèle gréco-latin, un canon de l’âme aussi bien que du
70 i bien que du corps. Il est possible que ce mythe ait animé l’humanisme de nos humanités. Il est certain qu’il a perdu son
71 ’humanisme de nos humanités. Il est certain qu’il a perdu son ascendant. D’ailleurs son pouvoir, s’il en eut, ne s’étendi
72 du son ascendant. D’ailleurs son pouvoir, s’il en eut , ne s’étendit guère au-delà des limites du monde roman. Le type de ch
73 valier et ses succédanés militaires et wagnériens a toujours prévalu parmi les peuples germaniques, où son prestige ne le
74 mme. Toute décadence invente un syncrétisme. Rome eut celui des dieux ; nous aurons celui des races de la Terre. Non plus u
75 e un syncrétisme. Rome eut celui des dieux ; nous aurons celui des races de la Terre. Non plus une foi commune, mais une moyen
76 e péché.) Tous les modèles que l’homme se propose ont ceci d’insuffisant : qu’ils peuvent être atteints. Mais ce qui parfai
77 humanité » de ses démarches intellectuelles. Nous avons inventé trop d’êtres inhumains : ils nous menacent et nous empêchent
78 ore le surhumain. Être véritablement homme, c’est avoir accès au divin. Que sert de parler d’humanisme « chrétien » ? L’human
79 émie des sciences morales et politiques, en 1914, a posé le problème en termes fort nets. (Cités par M. Brunschvicg dans
80 édé de la note suivante : « M. Denis de Rougemont a poursuivi des études de lettres à Neuchâtel, Vienne et Genève. Il a c
81 udes de lettres à Neuchâtel, Vienne et Genève. Il a collaboré à diverses revues suisses et françaises. Il prépare trois v
3 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). André Malraux, La Voie royale (février 1931)
82 apporte un peu plus d’expérience humaine qu’on n’ a coutume d’en attendre aujourd’hui d’un jeune écrivain. Son premier ro
83 prend dans l’esprit des héros. Un jeune Français a décidé d’aller fouiller les temples en ruines de la Voie royale d’Ang
84 reste, le livre s’achève par sa mort, sans qu’on ait pu distinguer nettement à quels mobiles extérieurs obéissait son acti
85 béissait son action. C’est peut-être qu’il n’y en a pas. Perken, comme Garine, est de ces êtres qui agissent par désespoi
86 t sans doute le tempérament de leur auteur. Qui n’ a pas remarqué que les portraits des meilleurs peintres ressemblent à c
87 sous les traits du modèle. Cet air de famille qu’ ont tous les personnages peints par Rembrandt, et qui permet de les ident
88 l donne sa plus profonde et intime adhésion. Nous avons tous en nous de quoi composer un semblable personnage, plus vrai que
89 ssances du désert. 11. Le prix Goncourt, dit-on, eût été décerné à M. Malraux s’il n’avait naguère au cours de ses aventur
90 ourt, dit-on, eût été décerné à M. Malraux s’il n’ avait naguère au cours de ses aventures asiatiques passé outre à certains r
91 outre violations des lois divines et humaines, n’ eussent vraisemblablement pas fait encourir à notre auteur pareil ostracisme.
4 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Sécularisme (mars 1931)
92 parce qu’au contraire de M. Léon Brunschvicg, il avait le sens du tragique de la vie. De pareilles « conversations » ne ress
93 ant-guerre, qui était avant tout un art. La nôtre ayant voix au forum discute autant qu’elle n’invente ou qu’elle ne stylise.
94 uche à tout dans l’homme et dans la société. Elle a l’absence de scrupules des gens qui ont une mission urgente à remplir
95 ciété. Elle a l’absence de scrupules des gens qui ont une mission urgente à remplir. Ces quelques remarques nous placent so
96 ui donneront le ton et les thèmes principaux : J’ avais vingt ans. Je ne laisserai personne dire que c’est le plus bel âge de
97 dendes, impérialisme, plus-value. — Qui donc nous aurait révélé de bonnes raisons brutales, de bonnes raisons humaines, de nou
98 réel et une volonté réelle de vouloir être soi. Ayant ainsi esquissé ses positions éthiques, l’auteur part pour Aden. Quel
99 a politique étant absents, faute d’emploi, il n’y avait aucune correction à faire ». D’ailleurs, il ne veut pas poétiser le t
100 le tableau, car, pour lui, « être poétique, c’est avoir besoin d’illusions ». Je soutiendrais volontiers le contraire, mais M
101 vraie que la grandeur. C’est sans doute qu’on les a par trop dupés ; ils ne marchent plus. La faute en est à l’idéologie
102 formé que spirituellement. Et cette révolution-là a l’avantage d’être possible dès maintenant. Mais M. Nizan a trop de pr
103 age d’être possible dès maintenant. Mais M. Nizan a trop de préjugés pour sentir la force neuve perpétuellement de la vér
104 ien se devrait de savoir que l’œuvre missionnaire a consisté, dès le début, à combattre les funestes effets de la civilis
105 Avec M. Brunschvicg, il pense qu’un homme de 1931 a dépassé ce « stade », qu’il n’est plus permis de nos jours… bref, que
106 st plus permis de nos jours… bref, que la science a changé tout cela. C’est précisément à ce sécularisme que répond M. Ga
107 arrêtera en me faisant observer que cet orgueil n’ a pas un caractère personnel, puisque l’Esprit dont M. Brunschvicg nous
108 ue inévitablement à l’Esprit — et cette fois nous avons affaire à quelqu’un. Mettons-le en présence du scandale que constitue
109 croire à l’Incarnation ou aller à la Messe ? On n’ aura d’autre ressource que de nous opposer un distinguo : en tant qu’astro
110 l droit il pratique cet étrange sectionnement, il aura beau se recommander de la Raison ou de l’Esprit, nous resterons inqui
111 tonne pour annoncer son morne triomphe : « Vous n’ avez pas su conjurer la malédiction du monde moderne, clame-t-on de toutes
112 humanisme, à laquelle nous renvoyons tous ceux qu’ aura passionné l’enquête de M. Paul Arbousse-Bastide publiée par Foi et V
5 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Une exposition d’artistes protestants modernes (avril 1931)
113 s modernes (avril 1931)f C’est donc qu’il y en a  ? avez-vous dit. Depuis le temps qu’on cherchait à nous faire croire
114 dernes (avril 1931)f C’est donc qu’il y en a ? avez -vous dit. Depuis le temps qu’on cherchait à nous faire croire qu’une
115 peu pour nous et parce qu’ils nous parlent, nous avons demandé à ces artistes de venir dans notre cercle. Héritiers du plus
116 résistance, nous voulons aller de l’avant, nous n’ avons pas peur d’essayer vers la beauté de nouvelles routes. On nous connaî
117 « forme », « couleur », « architecture ». Et Dieu avait une place plus grande dans la joyeuse lumière de notre ciel simplifié
118 che pas de rechercher ce que ces artistes peuvent avoir de commun, ce qu’ils doivent à leur origine ou à leur foi réformée, —
119 définitive, les éléments d’un art protestant. Il eût fallu peut-être qu’un plus grand nombre d’artistes exposassent pour q
120 garde des toiles frappait le visiteur avant qu’il eût songé à distinguer les caractères confessionnels. Espérons qu’un proc
121 tantisme. Et l’on pourra se demander alors : qu’y a-t -il de spécifiquement protestant chez ces peintres ? — Certaines rigid
122 le ciel vert du plus grand jour de l’Histoire. On a beaucoup remarqué la part importante ménagée aux œuvres de décorateur
123 e le problème de la création intéresse, l’artiste a besoin plus que quiconque de principes définis — je ne dis pas de cad
124 ans ironie où était le calvinisme dans tout ceci. Eussent -ils posé, à propos d’un salon d’art catholique, la même question, en
125 x mots, il y a des « sujets catholiques », il n’y a pas de « sujets protestants ». Mais, dira-t-on, il y a tous les sujet
126 vangélique pour transcender la confession qui lui a permis de naître. La grandeur d’un art protestant, c’est de n’être qu
6 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Conférences du comte Keyserling (avril 1931)
127 la dernière, Keyserling, il faut le reconnaître, a su, par trois fois, tenir en haleine une salle énorme en parlant avec
128 me un type très représentatif de l’Occident. Il n’ a rien du prophète oriental contre lequel des Massis mal informés nous
129 Cette prétention des masses, légitime d’ailleurs, a entraîné le renversement de presque tous les buts de civilisation. C’
130 ncore que l’idéal chrétien de l’amour du prochain a tourné pratiquement à la méfiance systématique du voisin inévitable.
7 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Au sujet d’un grand roman : La Princesse Blanche par Maurice Baring (mai 1931)
131 dites pas à vos amis ce qui arrive avant qu’ils n’ aient lu eux-mêmes le livre. J’espère que les critiques ne le diront pas no
132 Charles Du Bos, dans la très belle préface qu’il a donnée à la traduction française note avec raison que M. Baring se mo
133 lutôt religieuse.) Il est incontestable que l’art a tout à gagner à se choisir un cadre étroit, voire même conventionnel.
134 . C’est cela qui forme le sujet implicite, nous l’ avons dit, de son œuvre romanesque. Et c’est par tout ce qu’elle contient d
135 eusement en ces pages — et qui s’explique si l’on a lu la phrase par quoi se termine un précédent livre de notre auteur :
136 e de ma vie que je suis parfaitement certain de n’ avoir jamais regretté. » Blanche, anglicane « de naissance », a donc épousé
137 regretté. » Blanche, anglicane « de naissance », a donc épousé un Italien et vit dans un milieu catholique qui n’exerce,
138 ui lui exprime l’espoir que sa vie à l’étranger n’ ait point ébranlé sa foi, la princesse répond : « Je ne crois pas, j’espè
139 e semble-t-il, de savoir exactement quelle foi on a . » Plus tard elle avoue franchement : « … dans nos églises j’éprouve
140 . » Et l’on découvre soudain que cette femme, qui a subi sans les mettre jamais en question les exigences les plus terrib
141 ? — Oui, tante Harriet, j’y vais. — Tante Harriet eut un soupir de soulagement. La question était réglée : du moment qu’on
142 ant de son pasteur préféré, la même tante Harriet a ce mot exquis : « Il prêche merveilleusement sans jamais aucune excen
143 à l’Église romaine des « pervertis » : « Nous en avons eu trop dans la famille, votre pauvre oncle Charles… qui avait stupéf
144 glise romaine des « pervertis » : « Nous en avons eu trop dans la famille, votre pauvre oncle Charles… qui avait stupéfié
145 dans la famille, votre pauvre oncle Charles… qui avait stupéfié la famille en devenant catholique…, puis Edmund Lely, cousin
146 leurs, grossir les traits, découvrir la thèse. Il eût pu s’en dispenser d’ailleurs, car en définitive la conversion de son
147 ure le signe de la vérité. Personne, peut-être, n’ a répété avec autant de force que Baring le fameux, l’irrépressible arg
148 e vous demande seulement de prier pour moi, car j’ ai parfois la sensation que ma misère est plus que je ne peux supporter.
149 s. Blanche se souvint que Lady Mount-Stratton lui avait dit presque la même chose dans le Podere à Florence. — Je sens, il es
150 Podere à Florence. — Je sens, il est vrai, que j’ ai commis des erreurs irréparables. — Vous avez le droit de vous laisser
151 que j’ai commis des erreurs irréparables. — Vous avez le droit de vous laisser mener par le remords au bord du désespoir, m
152 vement, au mouvement lent, du Quintette, Schumann a enclose et embaumée ». « Tristesse, par-delà la tristesse »… Un tel é
153 e Ludwig (Attinger, éd.), ouvrage sur lequel nous aurons l’occasion de revenir. 18. Il est absurde, voire aux yeux de la foi
8 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Kierkegaard (mai 1931)
154 est un événement qui mérite d’être signalé et qui aura un profond retentissement dans le protestantisme en particulier. Depu
155 çaise , la Revue de Genève . Diverses études lui ont été consacrées, en particulier dans la Revue d’histoire et de philoso
156 ent de sa vie fut la mort de l’Évêque Mynster qui avait été très estimé au Danemark et que Kierkegaard lui-même avait aimé et
157 ès estimé au Danemark et que Kierkegaard lui-même avait aimé et honoré, comme ami de son père. Martensen, le successeur présu
158 t un discours sur la tombe de l’évêque, le loua d’ avoir été l’un des « grands détenteurs de la vérité, dont la longue chaîne
159 . Le héros de la foi, Kierkegaard, « l’Isolé », n’ a plus rien en lui ni de Faust, ni du Caïn de Byron, il a dépassé le ro
160 rien en lui ni de Faust, ni du Caïn de Byron, il a dépassé le romantisme. Ou plutôt, le romantisme fut la jeunesse, le p
161 n la plus caractéristique de ce nouvel homme, qui a dépassé le romantisme, est la nouvelle psychologie. L’œuvre la plus p
162 On peut déplorer qu’une œuvre de cette envergure ait pénétré d’abord en France, sous les espèces du fragment le moins cara
163 al du séducteur (Stock éd.). Kierkegaard lui-même avait exprimé le souhait formel que l’on n’ouvrît pas par ce roman la série
9 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Littérature alpestre (juillet 1931)
164  (juillet 1931)k Mlle Claire-Éliane Engel, qui a conquis maint sommet du massif du Mont-Blanc, et un grade de docteur
165 jusqu’ici dans pareille aventure. Personne même n’ avait signalé cette curieuse lacune de notre histoire littéraire : pour nos
166 oire littéraire : pour nos critiques, les Alpes n’ avaient pas d’histoire. Enfin, voici ce livre, point trop volumineux — il tro
167 mment ne point partager, en le lisant, ce goût qu’ avait le vieux Goethe pour les ouvrages documentaires, pleins d’analyses pr
168 On goûtera les citations nombreuses que l’auteur a su introduire et commenter avec la discrétion et souvent l’ironie lég
169 gnificative. On regrettera seulement que l’auteur ait dû se borner à confronter les réactions anglaises et françaises. La r
170 ns anglaises et françaises. La réaction allemande eût apporté un élément important et radicalement différent. Nous essaiero
171 rance. À part Sénancour, aucun de nos écrivains n’ a su puiser dans le thème de la montagne une inspiration lyrique ou phi
172 philosophique génératrice d’œuvres marquantes. Qu’ aurions -nous à opposer à un Shelley, à un Byron, à un Ruskin ? Chateaubriand,
173 constituent « le plus violent réquisitoire qu’on ait jamais écrit contre elles ». Pour Rousseau, la montagne, c’est surtou
174 « les plus grands poètes français du xixe siècle ont échoué dans leur interprétation des montagnes. Ils ont tous étudié pr
175 choué dans leur interprétation des montagnes. Ils ont tous étudié presque exclusivement l’âme humaine. La montagne qui repo
176 e l’homme, la montagne farouche, effrayante, leur a semblé incompréhensible ». C’est que le mystère des choses les attire
177 admirable, « la lenteur des choses ». C’est qu’il a pénétré dans ces solitudes que les autres contemplaient d’en bas ; no
178 du xixe . La littérature anglaise, au contraire, a donné toute une suite de chefs-d’œuvre lyriques à sujets alpestres. «
179 tranquillité tout repose dans la lumière… » Vous avez reconnu ce ton souverain. Pour la première fois, le ton des hauteurs,
180 ois, le ton des hauteurs, le ton de celui qui les a conquises, physiquement aussi. Toute l’œuvre de Nietzsche est pleine
181 … C’est un thème très « protestant ». Nietzsche l’ a développé avec une ampleur inégalable : il y trouvait tous les symbol
182 risque, du triomphe conquis par la dureté. Mais l’ a-t -il épuisé ? Il y a depuis Nietzsche un style alpestre dans la pensée.
10 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Avant l’Aube, par Kagawa (septembre 1931)
183 rétienne d’atteindre la grandeur morale si elle n’ a pas connu, ne fût-ce que par sa puissance de sympathie, la misère phy
184 n terrible péché du christianisme européen, que d’ avoir pratiquement abandonné à une doctrine de haine le sort de ceux que le
185 le communisme, comme son bien propre. Mais il n’y a pas là de quoi nous rassurer. Si la vie de Kagawa glorifie l’Évangile
186 parus dans des revues françaises ou suisses nous avaient appris à connaître les résultats considérables de l’œuvre sociale, po
187 ment fécond, dont l’autobiographie en particulier avait atteint des tirages sans précédent dans son pays. Il nous restait à e
188 radicalement notre vie d’un conte de fées. Il n’y a là, de la part de l’auteur, nul parti pris de « réalisme » littéraire
189 que dans ces deux gros volumes si nourris, il n’y a pas deux lignes d’allure conventionnelle, deux lignes qui ne traduise
190 it que c’eût été bien agréable si le wagon entier eût été de verre. À partir de Tennoji, le train s’arrêta à un nombre inca
191 a fumée noire qui s’en échappait. Osaka, la nuit, avait un air étrange, quelque chose comme un océan battu par la tempête. Ta
192 it un endroit célèbre pour les suicides, et qu’il avait vu un jour, au théâtre, à Kobé, le drame du suicide de Akaneya et San
193 prenait pas pourquoi ces deux mots lui semblaient avoir des rapports intimes et atroces. Quel horrible endroit, cet Osaka ! L
194 ersonnel avec l’idéal de rénovation sociale qu’il a conçu ? Et comment trouver le courage de se donner à cet idéal, dont
195 ême temps décide de l’orientation de sa vie : Il avait vu mourir Sanuki au logement ouvrier, et il ne pensait pas que la mor
196 t de son père fût particulièrement importante. Il avait appris qu’il faut avoir une volonté de fer, lorsqu’on tombe dans la l
197 ulièrement importante. Il avait appris qu’il faut avoir une volonté de fer, lorsqu’on tombe dans la lie de la société. Le jou
198 de : le monde, l’énorme asile de fous dont Eiichi avait parlé à son père — mort maintenant —, tourmenté par l’emprise du mili
199 se convertit enfin, brusquement, au moment où il avait décidé de se suicider. Mais un soir qu’il prêche au carrefour, la mal
200 thétique, sobre et directe plus que tout ce qu’on a pu lire de plus vécu sur ces milieux. Finalement, la police accuse Ei
201 es milieux. Finalement, la police accuse Eiichi d’ avoir prêté son appui à une grève, et le récit se termine par une scène ent
202 notes. Il tremblait jusqu’au bout des doigts. Il eut été impossible de dire lequel des deux était le juge de l’autre. Eii
203 e parfaite dans l’appréciation. Il semble qu’il n’ ait aucune peine à se juger impartialement, sans exagérer sa critique et
204 érer sa critique et sans nulle complaisance. Il n’ a pas de terribles remords, il a des remords. Il ne cherche pas à se re
205 complaisance. Il n’a pas de terribles remords, il a des remords. Il ne cherche pas à se rendre intéressant à lui-même en
206 t à lui, la complexité vivante de sa vie morale n’ a d’égale que la violence de ses réactions. Une fois, désespéré, — « he
207 filles, les bateaux à vapeur, même le vide qu’il avait cherché, étaient merveilleux. Les couleurs, la lumière du soleil, les
208 esque nietzschéen choquera peut-être des gens qui eussent préféré l’habituelle effusion en patois de Chanaan. Mais ce qui me fr
11 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). André Gide ou le style exquis (à propos de Divers) (octobre 1931)
209 ins les plus justement célèbres de ce temps, elle aura du moins le mérite de la spontanéité, qualité dont Gide aime à douer
210 ide s’attira naguère, dont la « saine rudesse » m’ a toujours paru plus rude que saine. Je ne pense pas qu’il faille oppos
211 evée, sans examen des preuves. Non seulement Gide a presque toujours raison de ses juges, mais il sait avoir raison comme
212 resque toujours raison de ses juges, mais il sait avoir raison comme en s’excusant. Il apporte les plus délicats scrupules à
213 bjet. Que Gide ne soit pas si « mauvais » qu’on l’ a dit, — ou qu’il a bien voulu s’en donner l’air — je suis prêt à le co
214 soit pas si « mauvais » qu’on l’a dit, — ou qu’il a bien voulu s’en donner l’air — je suis prêt à le concéder au-delà de
215 ique inévitables. Car ce qui naît de l’Évangile n’ a de sens que par le jaillissement vers Dieu. Et tout précepte évangéli
216 ontradictions. Sans doute, la psychologie moderne a-t -elle montré que l’homme était beaucoup moins simple qu’il ne le croya
217 u’obtient la volonté tendue, c’est là ce que nous avons surtout besoin qu’on nous montre… Je lui sais gré particulièrement d’
218 berté, mais dans l’acceptation d’un devoir. Gide aurait -il pressenti que l’ère n’est plus de certaines complaisances ? Pourqu
219 tant que désormais la vertu fera prime, les vices ayant épuisé leurs saveurs. La question n’est pas d’être vertueux, mais de
220 egaard, — et c’est Gide qui, l’un des premiers, l’ a prononcé en France. Kierkegaard, un homme qui ne vous lâche plus. Il
221 Kierkegaard, un homme qui ne vous lâche plus. Il a beaucoup parlé de lui-même. Mais là où d’autres produisent l’impressi
12 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Le protestantisme jugé (octobre 1931)
222 e vu de Genève » qu’il nous faudrait. M. Martinet a pris pour épigraphe la citation suivante, empruntée à M. Thibaudet ju
223 ançaise. M. Thibaudet ajoute à ce propos : On m’ a fait observer très justement, à l’époque, que j’oubliais Loti. Loti e
224 aintonge, qui, si la force de l’unité française n’ avait été irrésistible, avait ce qu’il fallait pour devenir une manière de
225 ce de l’unité française n’avait été irrésistible, avait ce qu’il fallait pour devenir une manière de Genève maritime, de Holl
226 actérise la critique de M. Albert Thibaudet, nous ont fait penser qu’il existe bel et bien un Loti vu de Genève, non pas so
227 it le caractère, les livres étaient conduits, ils avaient une unité, un terme auquel ils arrivaient ; la vie n’est plus aujourd
228 is. Serait-ce la civilisation toute seule qui les aurait travaillées à ce point et les aurait ainsi fouillées ? Je ne sais ; l
229 eule qui les aurait travaillées à ce point et les aurait ainsi fouillées ? Je ne sais ; l’âme humaine, je pense, depuis qu’ell
230 l’âme humaine, je pense, depuis qu’elle existe, n’ a pas changé de nature, et, si elle paraissait autrefois plus simple, c
231 ntenant ; l’âme est restée semblable, mais on lui a retranché le ciel ; les mêmes aspirations demeurent, qui faisaient tr
232 ressaillir nos ancêtres, mais leur légitime objet a été enlevé ; les souffrances sont encore là, mais non plus les espéra
233 eur tumulte intérieur, les forces vives de l’être ont déchiré leur enveloppe, les âmes se sont ouvertes à tous les regards,
234 e besoin d’épanchement, s’est déversée, mais elle a mal choisi son confident : elle ne trouve aucune paix dans une intimi
235 nt à peu près les seuls valables, à nos yeux, qui aient été émis en leur temps. La critique la plus moderne les confirme et l
236 Genève » — c’est-à-dire protestant — nous paraît avoir doué ceux qui le professèrent (en dépit de certain défaut de sympathi
13 1932, Foi et Vie, articles (1928–1977). Romanciers protestants (janvier 1932)
237 digne d’intérêt, et que personne, croyons-nous, n’ a relevé, que les grands « succès » littéraires de l’année 1931 soient
238 ’abord les œuvres. La critique à peu près unanime a salué dans Le Scandale la meilleure œuvre de M. Bost, une espèce de s
239 eunesse d’après-guerre. La Claire de M. Chardonne a rallié tous les suffrages féminins, et classe son auteur dans la lign
240 née du roman protestant ». À la réflexion, l’on y a renoncé, pour des raisons d’ordre général et comme indépendantes des
241 ’ancêtre dont on se réclame est éloigné, moins on a de chances d’en tenir… C’est ainsi que nos gloires passées, martyrs,
242 semble qu’une véritable préméditation — où l’on n’ eût voulu voir qu’une pudeur — lui fait éviter toute allusion chrétienne,
243 is jamais rien d’explicitement religieux : cela n’ a point empêché ces trois romans de faire figure, aux yeux de beaucoup,
244 romission semblait pratiquement acceptable ? Nous avons trop souvent et bien trop volontiers souffert que l’on nous attribue
245 out semblable à celui des athées, — au lieu qu’il eût fallu du premier coup le dénoncer, comme radicalement contraire à not
246 « moralité publique » par exemple. Et quelles qu’ aient été les affirmations souvent indignées de nos docteurs, un fait prit
247 oralisme libéral. Nous savons ce qu’une telle vue a d’injuste, c’est-à-dire d’incomplet. Mais comment n’être point frappé
248 ence, mais comme on craint le risque, que Jésus n’ a jamais craint. Et c’est en quoi elle révèle la faiblesse de sa théolo
249 démence : Nietzsche. Ainsi l’atmosphère moraliste a tué les germes de l’imagination créatrice chez les protestants, qui l
250 nd elle n’est point parvenue à les étouffer, elle a souvent faussé le développement de ces germes ; les produits d’une te
251 t célèbres que provoqua le moralisme perverti. Il eût conduit le protestantisme à la négation absolue de son essence35, si
252 t les ravages ne prendront fin qu’au jour où nous aurons compris que la santé est dans l’humilité de la prière, dans la reconn
253 e ou sereine, il faudrait pour en douter que l’on ait oublié les plus grands noms : Milton, Bach, Rembrandt, les sœurs Bron
254 aquirent les Tragiques d’un d’Aubigné. Aussi bien avons -nous d’autres raisons d’espérer. Car si la forme artistique adéquate
255 Qu’on me comprenne : ce n’est pas à eux que j’en ai , mais à ce dont ils ont souffert. 34. Tout ceci appellerait une foul
256 e n’est pas à eux que j’en ai, mais à ce dont ils ont souffert. 34. Tout ceci appellerait une foule de nuances. Mais il ne
14 1932, Foi et Vie, articles (1928–1977). Goethe, chrétien, païen (avril 1932)
257 et domina constamment sa vie et son œuvre. Il n’y a peut-être pas d’individu plus significatif dans l’histoire de l’Occid
258 avec Eckermann que nous donnons dans ce numéro n’ ont pas été choisis pour dissiper trop facilement une équivoque réelle, m
259 it qu’une équivoque si grave subsiste et paraisse avoir été cultivée par Goethe, ne prouve-t-il pas suffisamment l’inauthenti
260 s de cette époque qui permettent d’imaginer ce qu’ eût pu être le pendant chrétien du Werther : — « J’ai souffert et me voil
261 ût pu être le pendant chrétien du Werther : — « J’ ai souffert et me voilà libre à nouveau, écrit Goethe à un ami en 1768,
262 sortir d’une grave maladie — ; cette calcination a été très profitable à mon âme… Le Sauveur m’a enfin attrapé ; je cour
263 ion a été très profitable à mon âme… Le Sauveur m’ a enfin attrapé ; je courais trop vite pour lui, il m’a saisi par les c
264 fin attrapé ; je courais trop vite pour lui, il m’ a saisi par les cheveux. Il est sûrement à vos trousses aussi, j’espère
265 e je sens tout le bien que les sources éternelles ont déversé dans mon cœur. » Et deux ans plus tard : « Je suis ce que j’a
266 œur. » Et deux ans plus tard : « Je suis ce que j’ ai toujours été, à ceci près que mes rapports sont meilleurs avec le Sei
267 t Jésus son fils bien-aimé. C’est vous dire que j’ ai acquis plus de raison et d’expérience : la crainte du Seigneur est le
268 tenir. Rien que des gens d’esprit médiocre, qui n’ ont eu de pensée raisonnable qu’avec leur première sensation religieuse,
269 r. Rien que des gens d’esprit médiocre, qui n’ont eu de pensée raisonnable qu’avec leur première sensation religieuse, et
270 ces années de la vieillesse, dont Eckermann nous a livré les confidences, et où la volonté de sobriété spirituelle paraî
271 , et où la volonté de sobriété spirituelle paraît avoir produit chez le poète une sorte de sécheresse religieuse. Ce qui à l’
272 enaissants, et que les adversaires de la religion eurent beau jeu d’exploiter, on le sait. Mais, comme l’établit fort justemen
273 t pas païen, pour la raison péremptoire qu’il n’y a plus de païen, au sens antique du mot, depuis que la venue du Christ
274 ens antique du mot, depuis que la venue du Christ a modifié la nature même de l’homme et l’ensemble des données religieus
275 ns la communauté de la foi chrétienne l’homme qui a pu dire qu’il s’inclinait devant le Christ comme devant la « révélati
276 u Très-Haut, et même la plus puissante qu’il nous ait jamais été donné, à nous enfants de la terre, de percevoir. » Et cert
277 eux de la foi, constitue sa raison d’être. Il n’y a pas de neutralité du monde vis-à-vis de Dieu — à cause du péché. La r
278 ntichrétien, mais d’une tout autre sorte que ne l’ ont cru nos athées qui s’arrêtaient à des boutades anticatholiques ou à d
279 is comment juger les actions d’un être que nous n’ avons pas connu, alors que nous-même… Alors que Dieu seul juge. Si nous ref
280 r ses propres forces, notre devoir est net : nous avons à défendre et attester les valeurs doctrinales les plus gênantes pour
281 valeurs que le « christianisme » de Goethe paraît avoir négligées ou niées : le scandale divin, le péché radical. Mais un hom
282 e, certes. Mais nous ne sommes d’aucun parti et n’ avons pas à utiliser qui que ce soit. Il suffit que nous puissions nous sen
283 xemplaire soit « chrétien » ou « païen » ? Nous n’ avons pas besoin d’avoir raison (contre lui, contre les athées) ; nous n’av
284 rétien » ou « païen » ? Nous n’avons pas besoin d’ avoir raison (contre lui, contre les athées) ; nous n’avons pas besoin d’av
285 r raison (contre lui, contre les athées) ; nous n’ avons pas besoin d’avoir beaucoup de grands hommes — ni même d’avoir quoi q
286 i, contre les athées) ; nous n’avons pas besoin d’ avoir beaucoup de grands hommes — ni même d’avoir quoi que ce soit —, mais
287 oin d’avoir beaucoup de grands hommes — ni même d’ avoir quoi que ce soit —, mais seulement d’être, efficacement. Et qu’il nou
15 1932, Foi et Vie, articles (1928–1977). Penser dangereusement (juin 1932)
288 ésintéressé est mort. » C’en est fait, les clercs ont trahi, et les cris de M. Benda sont couverts par la rumeur de la plac
289 de l’abstentionnisme et du célibat spirituel. Ils ont tous épousé une cause, une de ces causes qui engagent bien plus que l
290 doivent être gagnées. Chose étrange, et que l’on eût difficilement prévue au lendemain de la guerre, c’est sur la notion —
291 e réalisation personnelle, d’action éthique. Il n’ a pas échappé à M. Benda que « le clerc moderne » (en tant qu’il se mon
292 rmer la nécessité d’une pensée active, mais qui n’ ont pas vu — qui n’ont pas encore vu — tout ce que cela implique. Ils voi
293 ’une pensée active, mais qui n’ont pas vu — qui n’ ont pas encore vu — tout ce que cela implique. Ils voient bien le vice de
294 ns, non pas en tant que bourgeois, s’ils le sont, ont des raisons réelles et valables de récuser une pensée et une action t
295 ne suffit pas de dire à ses contemporains qu’ils ont tort de penser ceci ou cela avec passion. Il faut encore leur donner
296 voir que la vraie défense, c’est l’attaque. Nous avons moins besoin d’idées justes que d’idées efficacement justes ; moins b
297 t recommander la lecture de ce livre, parce qu’il a le mérite de poser simplement, brutalement, une de ces grandes questi
298 ne de ces grandes questions que la pensée moderne a convenu d’appeler « naïves », parce qu’elles sont trop gênantes. Le l
299 celui-ci, par bonheur, est très simple : Il n’y a point de questions plus grossières que celles qui sont posées ici, qu
300 , la philosophie sans rime ni raison » … « Il n’y a aucune raison d’écarter ce genre de questions. Il n’y a aucune raison
301 ne raison d’écarter ce genre de questions. Il n’y a aucune raison de ne pas leur donner de réponses ». Au fond, M. Nizan
302 à leur activité une importance qu’elle ne saurait avoir et lui fait par suite des reproches démesurés. Certes40. Mais dans la
303 s’intéresser à notre situation concrète, M. Nizan a tellement raison que son entreprise est suffisamment justifiée. Pour
304 hommes. Très bien. Nous le demandons aussi. (Nous avons même un scepticisme plus profond que le sien à l’endroit des résultat
305 ituation de sa vie de chaque jour, si cet appel n’ a pas trouvé la seule réponse possible et réelle dans le message évangé
306 -mêmes ; s’ils prouvent qu’ils le savent. S’ils n’ ont pas trop souvent cherché auprès de philosophes secrètement avides de
307 é. Car en présence de l’athéisme militant, nous n’ avons plus à prouver vainement que Dieu est ; mais à prouver pratiquement q
308 à prouver pratiquement que nous y croyons. Nous n’ avons plus à argumenter à la manière des philosophes, mais à témoigner. Épr
309 e danger qui nous purifiera. « Toute plante que n’ a pas plantée mon Père céleste sera déracinée. » Et c’est en quoi, du p
16 1933, Foi et Vie, articles (1928–1977). « Histoires du monde, s’il vous plaît ! » (janvier 1933)
310 e peut-être à cause des innombrables moyens qu’il a inventés pour « gagner du temps » ? Il semble que tout ce que fait l’
311 l’état général du pays explique que ces ouvrages aient rencontré d’emblée le grand succès qu’ils méritaient. Les Allemands v
312 ce quotidienne. Mais l’homme qui toute la journée a senti peser sur son œuvre la menace des forces terribles déchaînées d
313 erre, faite en grande partie par des hommes qui n’ avaient pas eu le temps de se cultiver, est caractérisée par une facilité fon
314 en grande partie par des hommes qui n’avaient pas eu le temps de se cultiver, est caractérisée par une facilité foncière e
315 se préparer à « mal finir ». Est-ce le cinéma qui a changé tout cela ? L’explication tente les journalistes. Mais le ciné
316 te notre conception du monde. Dans une époque qui a vu les frontières et les peuples de l’Europe bouleversés ; les régime
317 est nouveau dans l’Histoire. Jamais le document n’ a été recherché avec une telle avidité. « Ce que je préfère au cinéma,
318 he à l’expliquer, avec une passion nouvelle. Nous avons vu paraître, il y a quelque dix ans, les premières Explications de no
319 s désirs à peine conscients du grand public. On n’ a pas cessé pour autant de publier des romans nouveaux, mais le fait es
320 llectualisme. Car, — et j’espère que le lecteur m’ aura compris — ce n’est plus de jeux de l’esprit, d’acrobaties de psycholo
17 1934, Foi et Vie, articles (1928–1977). Destin du siècle ou vocation personnelle ? (février 1934)
321 esse. Les campagnes se vident ; les jeunes gens n’ ont plus goût à y vivre. Les villes se congestionnent et la jeunesse y tr
322 s dernières années, la civilisation de l’Occident ait permis plus d’espoirs, favorisé plus de vertu, mieux assuré la paix d
323 cées ? La vérité, c’est que la situation du monde a été de tout temps désespérée. Seulement, maintenant, cela se voit. De
324 nagement de la terre. Pourtant, certaines époques ont connu la grandeur. Ce ne furent pas les moins corrompues de l’histoir
325 sède sa chance de grandeur. Je dirai même qu’elle a plus de chances qu’aucune autre. Le vieux « désordre » qui couvait so
326 aissons très bien. Trop souvent, nos maîtres nous ont fourni des méthodes d’évasion dans la complexité. Trop souvent ils no
327 évasion dans la complexité. Trop souvent ils nous ont mis en garde contre un « certain esprit simpliste », qui est, au vrai
328 rit de décision et d’engagement concret dont nous avons le plus besoin. Cessons de nous réfugier derrière des complexités que
329 laissés endormir. Nos maîtres les plus respectés ont été trop souvent pour nous des professeurs d’abstention distinguée, d
330 cette simple question : comment un siècle peut-il avoir un destin ? En réalité, il n’y a de destin que personnel. Seul un hom
331 ècle peut-il avoir un destin ? En réalité, il n’y a de destin que personnel. Seul un homme peut avoir un destin, un homme
332 n’y a de destin que personnel. Seul un homme peut avoir un destin, un homme seul, en tant qu’il est différent des autres homm
333 férent des autres hommes. Napoléon, César, Lénine ont un destin. Mais aussi chacun de nous a un destin ; dans la mesure où
334 , Lénine ont un destin. Mais aussi chacun de nous a un destin ; dans la mesure où chacun de nous possède une raison d’êtr
335 l’on admet facilement de nos jours, qu’un siècle ait un destin, c’est que l’on a pris l’habitude d’attribuer une sorte de
336 jours, qu’un siècle ait un destin, c’est que l’on a pris l’habitude d’attribuer une sorte de valeur indépendante à des êt
337 abstractions. Et je le répète, pour que ces ismes aient , à nos yeux, un destin, il faut que nous ayons pris l’habitude de les
338 es aient, à nos yeux, un destin, il faut que nous ayons pris l’habitude de les considérer comme autant de réalités autonomes,
339 ution fatale, leur destinée. Autant dire que nous avons fait de toutes les réalités collectives des divinités nouvelles, des
340 e, la race, l’argent et l’opinion publique. Elles ont encore un autre nom, et qui est commun à toutes : c’est le Nombre, c’
341 t le Nombre, c’est peut-être Légion… Sans doute n’ avons -nous pas toujours conscience de les servir. Vous me direz peut-être q
342 foi aveugle et les sacrifices humains. Ces dieux ont même leur théologie, scientifique, bien entendu, et dont les deux dis
343 , caporal dans l’armée allemande. Son idéologie n’ a rien de personnel, c’est l’idéologie des petits gradés d’une armée va
344 ut sa perte ? Nos camarades marxistes ou racistes ont bien vu le danger. Mais ils en tirent une conclusion inattendue. Repr
345 ls nous répondent, avec raison, que leur action n’ a pas les apparences d’une évasion, d’une démission ; qu’ils n’ont pas
346 arences d’une évasion, d’une démission ; qu’ils n’ ont pas fui les risques et qu’ils ont exposé leurs vies. Enfin, qu’ils so
347 sion ; qu’ils n’ont pas fui les risques et qu’ils ont exposé leurs vies. Enfin, qu’ils sont animés par une foi constructive
348 ut bien se fonder une loi historique ? Sur ce qui a été fait. Toute loi qu’on découvre dans la société humaine repose sur
349 du déterminisme, qui peut se formuler ainsi : qui a bu boira ! Or, la seule chose intéressante au monde — et je dis intér
350 ’homme descend du singe, les autres croient qu’il a été créé par Dieu. Ils se disputent énormément. Je crois qu’ils ont t
351 ieu. Ils se disputent énormément. Je crois qu’ils ont tort de se disputer, parce qu’ils ont raison les uns et les autres. M
352 rois qu’ils ont tort de se disputer, parce qu’ils ont raison les uns et les autres. Ma théorie est la suivante : ceux qui p
353 s par Dieu, et qui, eux, croient et savent qu’ils ont été créés par Dieu. » Cette petite histoire ne s’applique pas seuleme
354 eurs dont ils s’éloignent de plus en plus. Mais j’ ai beau ne pas croire, pour mon compte, à la réalité de tous ces mythes,
355 ur mon compte, à la réalité de tous ces mythes, j’ ai beau ne pas croire qu’ils aient le droit de disposer de nos vies, je
356 e tous ces mythes, j’ai beau ne pas croire qu’ils aient le droit de disposer de nos vies, je suis bien obligé de reconnaître
357 pas grand-chose des dieux du siècle, et peut-être aurions -nous un peu plus d’attention pour les vrais problèmes de nos vies. Ma
358 vre, dissiper un malentendu que cette description a pu faire naître dans l’esprit de quelques-uns. Je sais que le bon ton
359 us les appartements sont pareils et qu’un homme n’ a pas le droit de sortir dans la rue coiffé d’un chapeau de paille avan
360 ». La jeunesse découvrait avec angoisse qu’elle n’ avait plus rien ni personne à servir. C’est l’état le plus dégradant qui so
361 l’individu des libéraux était sans destin, qu’il a cru au destin des autres ; c’est parce qu’il n’avait pas de vocation,
362 a cru au destin des autres ; c’est parce qu’il n’ avait pas de vocation, qu’il a voulu servir la vocation de sa race. La meil
363 c’est parce qu’il n’avait pas de vocation, qu’il a voulu servir la vocation de sa race. La meilleure preuve, d’ailleurs,
364 je la vois dans l’aboutissement de ces mythes. On a cru trouver en eux les principes d’une communauté nouvelle que l’indi
365 es d’une communauté nouvelle que l’individualisme avait dissoute. Il n’y a jamais eu autant de ligues, de groupements, de par
366 velle que l’individualisme avait dissoute. Il n’y a jamais eu autant de ligues, de groupements, de partis et d’associatio
367 l’individualisme avait dissoute. Il n’y a jamais eu autant de ligues, de groupements, de partis et d’associations qu’aujo
368 des camps de travail, — et mourant de solitude. J’ ai terminé ma description du siècle. Est-elle pessimiste à l’excès ? Ce
369 n’est pas cela qu’il nous importe de savoir. Si j’ ai simplifié le tableau, c’est que je veux maintenant dégager le choix,
370 , la question simple que nous pose l’époque. Vous avez pressenti le parti que j’embrasse. Il me reste à le définir en termes
371 struction, c’est de l’utopie. Ils sont là, et ils ont probablement leur raison d’être. La classe, la race, jouent dans le m
372 instinct dans l’homme. La culture du xixe siècle a voulu les ignorer et nous assistons à leur vengeance. Le spiritualism
373 assistons à leur vengeance. Le spiritualisme les a déclarés vulgaires, et l’individualisme les a rationnellement ignorés
374 les a déclarés vulgaires, et l’individualisme les a rationnellement ignorés. Les voilà qui reviennent sous le couvert de
375 me déterminisme historique. Il faut croire qu’ils ont la vie dure, et que le mieux à faire pour nous, c’est encore de compt
376 abdiquer sous leur implacable destin. Ceux qui l’ ont fait et qui le font encore, je vois bien ce qui les poussait, je vois
377 tifs. C’était l’homme qu’il fallait refaire. Nous avons oublié ce fait très simple : que la société doit être composée d’homm
378 a société doit être composée d’hommes réels. Nous avons tout calculé, sauf ce qui est en effet incalculable : l’acte de l’hom
379 n, en face de tous ces monstres menaçants, vous n’ avez rien à proposer que votre chétive personne ? Vous serez emportés comm
380 est-ce que ces dieux et ces mythes collectifs ? J’ ai essayé de vous montrer qu’ils sont des créations de l’homme, et parti
381 me et se rapporte à lui. Dans l’homme, la masse n’ a pas plus de puissance que la personne. Dans l’homme, le choix peut av
382 rigine de tout, il y a une attitude de l’homme, j’ ai essayé de vous montrer l’attitude de celui qui se réfugie dans l’Hist
383 vent aux groupements révolutionnaires que je vous ai cités. Je voudrais y répondre ici en mon nom personnel. Quel est donc
384 liberté, vous ne ferez pas une société si vous n’ avez pas, avant tout, retrouvé le rapport primitif, le rapport véritableme
385 l’être. Et voilà la réalité décisive. Tous, nous avons reçu de Dieu cet ordre : tu aimeras ton prochain comme toi-même. Tous
386 eras ton prochain comme toi-même. Tous donc, nous avons reçu, chacun à notre place et dans nos circonstances particulières, u
387 onde s’est emparé des paroles du Christ et il les a complètement perverties. On nous a présenté cet amour du prochain com
388 rist et il les a complètement perverties. On nous a présenté cet amour du prochain comme un sentiment bienveillant, une t
389 n, une façon plus commode de vivre en société. On a transporté dans l’histoire cet amour qui doit être un acte, une prése
390 oi découvrit cette vérité que toute sa religion n’ avait pas pu lui faire comprendre : le prochain, c’est celui qui exerce, en
391 ricorde, c’est l’acte le plus révolutionnaire qui ait jamais paru dans notre monde. Lui seul suffit à vaincre les destins d
392 t. Nous ne rencontrons personne au monde, avant d’ avoir rencontré Dieu. 42. L’Histoire au sens hégélien du mot, c’est-à-di
18 1934, Foi et Vie, articles (1928–1977). Deux essais de philosophes chrétiens (mai 1934)
393 lle. Un Keyserling, un Heidegger, un Karl Jaspers ont , dès longtemps, conquis le « grand public », celui-là même qui, chez
394 commentateur des goûts de son public. Bien loin d’ avoir à cœur de signaler les œuvres qui risqueraient, sans lui, d’être inco
395 ès notoire des philosophes auprès du grand public a des causes plus graves, qu’il faut attribuer autant aux philosophes q
396 quel on demandait à son retour en France ce qu’il avait fait en exil : « J’ai vécu, Monsieur, c’est bien assez ! ». Ou bien l
397 etour en France ce qu’il avait fait en exil : « J’ ai vécu, Monsieur, c’est bien assez ! ». Ou bien le primum vivere se rév
398 Tel est l’état des choses. Public et philosophes ont si bien pris l’habitude de s’ignorer, qu’on est en droit de se demand
399 du philosophe et les coutumes du citoyen moderne ont perdu toute commune mesure. Que se passerait-il si un beau jour le pu
400 ui donc voudra les encourir ? Ceux-là seuls qui n’ ont pas à subordonner la vérité de leur message aux calculs de l’opportun
401 nt les vraies valeurs, sans attendre que d’autres aient tout faussé, tout compromis ? Il est certain que la pensée chrétienne
402 romis ? Il est certain que la pensée chrétienne n’ a jamais eu plus impérieuse ni plus nette vocation. Le lieu, les modes
403 l est certain que la pensée chrétienne n’a jamais eu plus impérieuse ni plus nette vocation. Le lieu, les modes de son obé
404 efois elle reste digne de sa charge, elle seule n’ a rien à y perdre. Faut-il rappeler ici les graves avertissements de B
405 rcel. L’un et l’autre, ils répondent au vœu que j’ ai tenté de formuler. Ils s’attaquent à cette « transmutation des valeur
406 ervice rendu par la phénoménologie, c’est de nous avoir délivrés d’une psychologie qui dissociait les unités vivantes en élém
407 ce petit livre, c’est le phénomène que Nietzsche a baptisé ressentiment. Pour Nietzsche, on s’en souvient46, l’amour chr
408 haine jalouse et rancunière de l’esclave opprimé, a trouvé, selon Nietzsche, son expression détournée dans l’affirmation
409 ’origine de toutes les valeurs bourgeoises il n’y a pas la Loi, ni l’Évangile, il y a tout au contraire une sournoise rév
410 de l’amour de l’humanité, il y a, comme Fichte l’ avait vu, une haine des hommes ; bien plus : une révolte contre Dieu. L’hom
411 logique est la première œuvre philosophique qu’il ait publiée depuis sa conversion. On est heureux de constater qu’elle mar
412 ure pas l’activité de ceux qui n’en veulent point avoir . Son essai manifeste une volonté très nette de passer outre aux prude
413 fidélité. Certes, l’exemple de la phénoménologie a ouvert la voie à une nouvelle liberté de la pensée ; mais, jusqu’ici,
414 lle liberté de la pensée ; mais, jusqu’ici, peu l’ ont suivie, en France. Sachons gré à M. Gabriel Marcel de nous donner l’e
415 . Les philosophes lui sont de peu de recours. Ils ont fait de l’être un problème qu’ils placent devant eux et qu’ils se met
416 itation. Si son mérite principal est à mes yeux d’ avoir revalorisé un certain nombre de motifs vitaux négligés par la techniq
417 e de France). 47. Converti au catholicisme après avoir écrit ses premières œuvres, et devenu l’un des chefs du parti catholi
19 1934, Foi et Vie, articles (1928–1977). Notice biographique [Kierkegaard] (août 1934)
418 l’espace de douze années. Le père de Kierkegaard avait passé son enfance à garder les moutons dans la plaine du Jutland. Un
419 misère, il était monté sur un petit tertre et il avait maudit le Dieu tout-puissant qui le laissait mourir de faim. Ce blasp
420 il la confia à l’un de ses frères, ne voulant pas avoir affaire aux banques. Lorsqu’il mourut, à 42 ans, il n’en subsistait r
421 ent provenait d’une malédiction, pensait-il, il l’ avait donc dilapidé, surtout en dons. Sa vie était très simple. Il travaill
422 connaissait sa silhouette, ses plaisanteries, il avait sa légende d’« original ». On savait aussi qu’il était le meilleur éc
423 meilleur écrivain de son pays. Sa première œuvre eut un immense succès ; mais à mesure qu’il se fit mieux comprendre, le p
424 nce, le christianisme officiel et les évêques qui avaient loué ses premières œuvres, il se vit abandonné dans la plus complète
425 e vit abandonné dans la plus complète solitude qu’ ait jamais connue un grand esprit. Un an plus tard, épuisé par la lutte,
426 s son acte, après lequel il put mourir, certain d’ avoir accompli sa mission, ce fut son attaque contre le christianisme offic
427 isme officiel, au nom du Christ de l’Évangile. Il avait terminé les études de théologie, mais il ne fut jamais pasteur. Il lu
428 u’elle accomplissait sa vocation chrétienne. ⁂ On a comparé Kierkegaard à Nietzsche, à Dostoïevski, à Pascal. Lui-même ne
429 amais se dire chrétien. Cette position paradoxale a permis les interprétations les plus diverses. Elle assure aussi à sa
430 ement qu’un des meilleurs critiques de ce temps51 a porté sur l’ensemble de ses écrits : Kierkegaard fut le dernier gran
20 1934, Foi et Vie, articles (1928–1977). Nécessité de Kierkegaard (août 1934)
431 Que la vie de l’esprit n’est possible que si l’on a d’abord assuré l’autre vie, la vie des corps, les conditions physique
432 auvaise humeur défensive des autres. Certes, on y a pensé. Les plus hardis parlent déjà de rendre sa place à « l’esprit »
433 lace à « l’esprit »… Mais, quel esprit ? Et qui l’ a laissé perdre ? Et que va-t-on lui sacrifier ? Supposez qu’un homme p
434 que la vie de l’esprit n’est possible que si l’on a d’abord renoncé à l’autre vie ; que les lois de l’histoire ne sont ri
435 populaire ; que la justice, enfin, et la vertu, n’ ont aucune réalité si chacun n’est pas à sa place là où la vocation de Di
436 n’est pas à sa place là où la vocation de Dieu l’ a mis. Supposez qu’un tel homme existe. Que va-t-on faire de lui, de ce
437 ; l’opinion unanime accablera son fol orgueil : n’ a-t -il pas écrit que la presse est de nos jours l’obstacle décisif à la p
438 ’année 1855. Depuis lors, il est vrai, les choses ont bien changé. On dirait même qu’elles sont au pire, mais il faut prend
439 stinction. Et lequel d’entre nous peut dire qu’il a calculé la dépense ? Il faudrait bien savoir de quoi l’on parle, et c
440 rissent le matérialisme au nom des biens qu’ils n’ ont pas su défendre ni davantage sacrifier. Ils affirment trop tardivemen
441 ller le prendre parmi ceux-là pour qui l’esprit n’ a pas à se défendre, mais bien à témoigner de son incarnation ; on fera
442 oïevski. On pourrait en citer quelques autres. Qu’ ont -ils donc de commun, génie à part ? Peut-être leurs souffrances seulem
443 terreur que commencent d’y semer nos faux dieux, ont réveillé quelques esprits, dont témoigne la renaissance, ou pour mieu
444 ère que la santé moins déprimée d’un autre siècle avait tué. C’est aussi qu’il est devenu possible de saisir, dans le déploie
445 in de l’esprit parmi nous ? Si l’Opinion publique a tué Kierkegaard, elle n’a pas eu de prise sur les sarcasmes dont il l
446 ? Si l’Opinion publique a tué Kierkegaard, elle n’ a pas eu de prise sur les sarcasmes dont il l’a flétrie, plus charitabl
447 ’Opinion publique a tué Kierkegaard, elle n’a pas eu de prise sur les sarcasmes dont il l’a flétrie, plus charitables cepe
448 e n’a pas eu de prise sur les sarcasmes dont il l’ a flétrie, plus charitables cependant que les discours en l’honneur du
449 ra peut-être, par une compensation mystérieuse, d’ avoir compris mieux qu’aucun autre le message du « solitaire devant Dieu ».
450 me vient à l’esprit une image dont le burlesque n’ aurait pas déplu à l’humeur shakespearienne de notre philosophe. C’est l’ima
451 us de ce chat, immense et subversif, dont le rire a le don d’exaspérer la Reine. Elle tempête et hurle son cri favori : «
452 poids du monde et le sombre avenir du siècle. On a dépeint ce clerc moderne, accablé par tous les malheurs du temps, don
453 is qui porte l’enfer dans son âme ! — Kierkegaard a montré « le comique infini ». Il faut risquer cette expression : le r
454 rire de la charité chrétienne. « Le christianisme a découvert une misère dont l’homme ignore, comme homme, l’existence ;
455 la maladie mortelle (le péché)54. L’homme naturel a beau dénombrer tout l’horrible, et tout épuiser, le chrétien se rit d
456 nisme de la chrétienté. Pauvre chrétien moyen, qu’ as -tu souffert pour ta doctrine ? Tu souffres, il est vrai, mais n’est-c
457  : 1) Est-ce réel ? 2) Mon voisin Christofersen l’ a-t -il fait ? l’a-t-il réellement fait ? »55 Nous posons toujours la der
458 l ? 2) Mon voisin Christofersen l’a-t-il fait ? l’ a-t -il réellement fait ? »55 Nous posons toujours la dernière question.
459 s non ! il souffre simplement de ce que tous ne l’ ont pas admise) « … et il apporte sa consolation, et sur ce texte on nous
460 r ce texte on nous fait des sermons, à nous qui n’ avons pas voulu souffrir ». « Dans l’église somptueuse paraît le Très Vénér
461 d’élus, et prêche avec émotion sur ce texte qu’il a choisi lui-même : “Dieu a élu dans le monde les petits et les méprisé
462 tion sur ce texte qu’il a choisi lui-même : “Dieu a élu dans le monde les petits et les méprisés”, et personne ne rit ! »
463 sa forme déchue, s’oppose au monde tel que Dieu l’ a créé, s’oppose à la transformation que veut l’Esprit, s’oppose à l’Or
464 ut cela n’est que mythologie. Les dieux du siècle ont l’existence qu’on leur prête : hélas ! il serait faux de dire qu’ils
465 rête : hélas ! il serait faux de dire qu’ils n’en ont pas… Mais encore une fois, ce n’est pas échapper aux chimères publiqu
466 e et que personne peut-être ne saurait dire qui l’ avait fait ou qui avait commencé, celles-là l’auraient eu, ce courage ! Ô m
467 peut-être ne saurait dire qui l’avait fait ou qui avait commencé, celles-là l’auraient eu, ce courage ! Ô mensonge ! » La fou
468 i l’avait fait ou qui avait commencé, celles-là l’ auraient eu, ce courage ! Ô mensonge ! » La foule n’est rien que la fuite de c
469 fait ou qui avait commencé, celles-là l’auraient eu , ce courage ! Ô mensonge ! » La foule n’est rien que la fuite de chaq
470 acte. « Car une foule est une abstraction, qui n’ a pas de mains, mais chaque homme isolé a, dans la règle, deux mains, e
471 on, qui n’a pas de mains, mais chaque homme isolé a , dans la règle, deux mains, et lorsqu’il porte ces deux mains sur Mar
472 les de son voisin et non celles de la foule qui n’ a pas de mains. » Tout seul en face du Christ, un homme oserait-il s’av
473 isage du Fils de Dieu ? Mais qu’il soit foule, il aura ce « courage », — il l’a eu. Il faut aller plus loin. La foule n’est
474 qu’il soit foule, il aura ce « courage », — il l’ a eu. Il faut aller plus loin. La foule n’est pas dans la rue seulement
475 u’il soit foule, il aura ce « courage », — il l’a eu . Il faut aller plus loin. La foule n’est pas dans la rue seulement. E
476 paradoxal et réaliste de Kierkegaard consiste à l’ avoir dénoncée au plus intime de l’existence individuelle. Chaque fois que
477 t, nous témoignons de notre démission. La foule n’ a pas d’autre existence et pas d’autre pouvoir que mon refus d’exister
478 plus profond et le plus évidemment actuel. Hegel a tout objectivé : l’esprit, l’histoire, la dialectique, finalement, l’
479 nalement, l’homme lui-même à ses propres yeux. Il a voulu chasser du monde le paradoxe et le scandale du solitaire plus g
480 le scandale du solitaire plus grand que tous. Il a voulu que tout s’explique, que tout s’implique, c’est-à-dire qu’il a
481 explique, que tout s’implique, c’est-à-dire qu’il a voulu bannir la possibilité scandaleuse des actes libres de la Provid
482 endre un culte sanguinaire aux faux dieux qu’elle a suscités. « Le philosophe dit à bon droit que la vie doit être compri
483 mmes devant l’instant présent se précipite. Ils n’ ont pas lu Hegel, bien sûr, mais Hegel est dans tous nos journaux, Hegel
484 il d’un impérialisme du moi pur, tel que Fichte l’ a follement rêvé ? Si c’est le cas, je reste bien tranquille. Ce « moi
485 S’il est ta vocation reçue d’ailleurs, et si tu l’ as reçue en vérité, tu n’as plus à choisir, ta mort est derrière toi, el
486 e d’ailleurs, et si tu l’as reçue en vérité, tu n’ as plus à choisir, ta mort est derrière toi, elle n’est plus ton affaire
487 acte du « solitaire » n’est pas de ceux dont nous ayons à développer les conséquences. Ou bien il est, et c’est l’acte de Die
488 ue absolu, ce qu’est la solitude dont Kierkegaard a témoigné, il n’apparaît plus nécessaire de réfuter les objections du
489 pourrait-il nous aider ?). Ou bien seulement nous a-t -il délivrés de nos derniers prétextes, de nos dernières incertitudes
490 crètes de l’esprit ? Mais ne fallait-il pas qu’il ait connu de grandes aides pour oser nous montrer la vanité de toutes les
491 philosophique de cette opposition, que Jean Wahl a remarquablement exposé dans un article de la Revue philosophique (nov
21 1934, Foi et Vie, articles (1928–1977). Kasimir Edschmid, Destin allemand (octobre 1934)
492 le plus de nouveauté, d’humanité, de grandeur. J’ ai d’autant plus envie de le dire qu’on n’a pas annoncé sa parution à gr
493 deur. J’ai d’autant plus envie de le dire qu’on n’ a pas annoncé sa parution à grand fracas, et qu’à ma connaissance, tout
494 ance, tout au moins, presque personne encore n’en a parlé. Ce qui n’est pas très étonnant, d’ailleurs. Il s’agit d’une œu
495 erre, s’embarquent pour l’Amérique du Sud. On les a engagés pour instruire l’armée bolivienne, mais sans contrat, car le
496 , un coup d’État renverse le gouvernement qui les avait appelés officieusement. Ils hésitent à poursuivre. L’un d’entre eux s
497 tation de thé où, d’ailleurs, la crise mondiale l’ aura précédé. Les quatre autres atteignent enfin La Paz, capitale de la Bo
498 teur leur offre un engagement au Paraguay, qu’ils ont la naïveté d’accepter. Accusés de haute trahison, ils sont jetés auss
499 , celui qui était parti pour le Venezuela, et qui a subi, lui aussi, des emprisonnements, le bagne, et des tortures physi
500 ois qui demeure dans l’esprit, bien après qu’on l’ a lu. En vérité, ce résumé laisse à peine entrevoir le véritable sujet
501 vre, celui que désigne le titre. Ces six hommes63 ont été chassés de leur pays par une crise qui n’est pas seulement économ
502 l’Allemagne, pour laquelle ils se sont battus, n’ a plus la force d’utiliser leurs énergies, leurs vocations humaines. L’
503 es : mais on ne construit plus, là-bas, et il n’y a plus de colonies. D’autres étaient mécaniciens, aviateurs ; un autre
504 ore, employé de bureau ; le dernier, paysan. On n’ a pas voulu d’eux, là-bas. Et les voici lancés dans une vie d’aventures
505 es voici lancés dans une vie d’aventures qu’ils n’ avaient pas voulue, qui les détourne de toutes leurs espérances. Ce n’est poi
506 de toutes leurs espérances. Ce n’est point qu’ils aient peur, mais tout leur apparaît absurde. Et rien n’est plus atroce à su
507 le, ils s’en vont au-devant d’une existence qui n’ a plus aucun but, au-devant de souffrances qui ne servent à rien. Ce so
508 tion, saura leur dire le mot de ce destin. « Nous avons perdu la guerre, Bell, et dans la situation où nous sommes, nous ne p
509 tranchée, sous les murs du fort de Capocabana, il a soudain la vision d’une Allemagne future renaissant de son calvaire,
510 t « les jeunes gens, qui ne possédaient rien, qui ont écrit les pages héroïques de l’histoire, et non les gens âgés qui pos
511 mmunauté qui puisse exister pour un peuple ». ⁂ J’ ai tenu à citer ces passages pour faire sentir à quelle hauteur se situe
512 vre, et l’on admettra bien, quelque opinion qu’on ait sur le point de vue strictement « allemand » de l’auteur, qu’il est p
513 allemand évoque bien d’autres questions. Edschmid a fait le tour du monde ; il a séjourné longtemps en Orient et en Améri
514 questions. Edschmid a fait le tour du monde ; il a séjourné longtemps en Orient et en Amérique ; il s’est enfoncé profon
515 monde, c’est l’œuvre d’un blanc. Les blancs seuls ont su créer des empires solides, des valeurs morales stables, de la fidé
516 du Sud fait mesurer la déchéance d’une race qui n’ a pas su se garder pure. Alors ? Serait-ce bientôt l’heure de l’Allemag
517 rait dans la conscience même d’un peuple. Il faut avoir éprouvé par ce livre la grandeur d’une telle espérance, si l’on veut
518 ment la politique étrange de cette nation. Mais j’ ai dit que cette œuvre pourrait s’intituler tout aussi bien « La conditi
519 ait loin d’évoquer avec une pareille puissance. J’ ai eu l’occasion de dire, ici même, mon admiration pour les livres de M.
520 loin d’évoquer avec une pareille puissance. J’ai eu l’occasion de dire, ici même, mon admiration pour les livres de M. Ma
521 encieux, des tortures dont les héros de Malraux n’ ont pas toujours renoncé à faire de la littérature. On comprend bien que
522 man. 64. Je ne sais quel sort le Troisième Reich a réservé à ce livre, qui parut au moment de l’avènement d’Hitler. Mais
523 crois trop franc et trop complexe à la fois pour avoir l’agrément officiel. 65. Le parallélisme est vraiment frappant : Mal
524 est vraiment frappant : Malraux, comme Edschmid, a voyagé dans des pays où il a pu voir les Européens mêlés à des révolu
525 aux, comme Edschmid, a voyagé dans des pays où il a pu voir les Européens mêlés à des révolutions indigènes, et comme Eds
526 s révolutions indigènes, et comme Edschmid, il en a tiré des conclusions sur le destin de la race blanche, qui forment l’
22 1935, Foi et Vie, articles (1928–1977). Notes en marge de Nietzsche (mars 1935)
527 ngtemps inédits, et dont M. Henri-Jean Bolle, qui a traduit et fort bien introduit ce volume, nous affirme qu’ils constit
528 ui paraît à première vue aussi exorbitante : je n’ ai lu que de courts fragments des posthuma nietzschéens 66. Ce qui est c
529 ous abriter contre son risque salutaire. M. Bolle a réparti les fragments traduits en trois rubriques : le philosophe, le
530 on compte. Il est très vrai que nos contemporains ont cessé de croire, dans l’ensemble, que le salut était déjà venu. Ils s
531 ïens. Les plus conscients de ce paganisme nouveau ont adopté sa vraie théologie : la dialectique historique de Karl Marx. E
532 M. Langevin, expliqua un jour devant moi que nous avions derrière nous deux milliards d’années, devant nous dix mille milliard
533 d’années. Nous sommes des enfants de deux ans qui auraient encore dix mille ans à vivre. L’esprit métaphysique me souffle : “Et
534 la réalité, celui-là n’est pas né à la foi. Il n’ a pas la mâchoire solide. (Mais je vois bien que Nietzsche voulait dire
535 plus important que la Sainte-Cène. Kierkegaard n’ eût pas mieux dit. « Pensées qui blessent — pour édifier » — c’est ainsi
536 lle : J’aime Schopenhauer, parce que grand-père l’ a connu et aimé ? Phrase typique d’un homme qui n’a jamais rencontré D
537 connu et aimé ? Phrase typique d’un homme qui n’ a jamais rencontré Dieu en Christ ; pas plus qu’on ne saurait rencontre
538 ontrer la justice ; pas plus que la jeune fille n’ avait rencontré Schopenhauer. La nature est mauvaise, dit le christianisme
539 t quelque chose qui doit être surmonté » ? Il n’y a pas que les chrétiens pour ne pas croire assez à ce qu’ils croient, o
540 et sur le mien. Mauvais signe pour un penseur qui a entrepris d’ébranler nos fondements. Si j’essaie de m’expliquer cette
541 e trouve ceci : Nietzsche parle sans autorité. Il a tendance à confondre l’autorité et la violence. Mais ses violences so
542 eine de contradictions, elle aussi, mais Paul les a toutes rassemblées dans une formule unique qui renvoie au fondement m
543 ensée qui contredise celle-là ! Le christianisme a promis le royaume des cieux à la pauvreté spirituelle. Mais le premie
544 le. Mais le premier chrétien cultivé et spirituel a donné au christianisme sa rhétorique et sa dialectique ; de la sorte,
545 sa rhétorique et sa dialectique ; de la sorte, il a empêché le christianisme de mourir de sa pauvreté spirituelle. On es
546 r le siècle dernier, et dont l’œuvre de Nietzsche a subi trop souvent les atteintes. Dans ce même livre, quatre pages plu
547 Science, qui est son Dieu. On sait aussi qu’il n’ a pas hésité à condamner la théorie d’Einstein parce qu’elle contredisa
548 , de la seule Science, du seul Bonheur ; et qu’il a seul le droit de contredire nos notions, trop humaines et trop intére
23 1937, Foi et Vie, articles (1928–1977). Luther et la liberté (À propos du Traité du serf arbitre) (avril 1937)
549 t même que de le méconnaître : on prétend, sans l’ avoir jamais lu, savoir qui il fut, qui il est. Certains ont parcouru les P
550 amais lu, savoir qui il fut, qui il est. Certains ont parcouru les Propos de table, présentés au public français comme un o
551 race allemande contre la civilisation romaine. On a poussé la bouffonnerie jusqu’à cet excès grandiose d’assimiler Luther
552 : « En somme, qu’est-ce que Luther ? Un moine qui a voulu se marier. » J’extrais cette déclaration du livre d’un critique
553 stes français qui, au niveau de la haute culture, ont largement sauvé l’honneur de leur pays. Je pense aux ouvrages publiés
554 ohl, J. Vignaud et Lucien Febvre, et aux cours qu’ ont professés MM. Jean Baruzi et E. Gilson, pour ne rien dire — mais cela
555 grande tension spirituelle dans laquelle l’Europe a puisé son dynamisme créateur. Tension dont le débat du libre arbitre,
556 tenant, crois-tu cela ? » — Si tu le crois, si tu as reçu la foi, il n’est plus rien de « difficile » dans les assertions
557 parfois même prêchés. Le laïcisme moraliste n’en a pas du tout le monopole : tout catholique se doit, en bonne logique,
558 rotestants qui jugent encore que Calvin et Luther ont fait leur temps, — que dire de Paul bien plus ancien ! — tous ceux qu
559 bre arbitre religieux, c’est-à-dire le pouvoir qu’ aurait l’homme de contribuer à son salut par ses efforts et ses œuvres moral
560 Une conscience moderne. — Selon Luther, nous n’ avons aucune liberté, car en réalité, Dieu a tout prévu, et rien n’arrive q
561 nous n’avons aucune liberté, car en réalité, Dieu a tout prévu, et rien n’arrive que selon sa prévision. Luther ne pose p
562 Nous refusons de jouer si, d’avance, le vainqueur a été désigné par un arbitre qui ne tient pas compte de nos exploits !
563 ais-tu seulement les vraies règles du jeu ? Qui t’ a fait croire que ta vie était une partie à jouer entre toi et le monde
564 vidu et le Sort, cette idole païenne ? C. M. — J’ ai besoin de le croire pour agir. L. — Mais qu’est-ce qu’agir ? Est-ce
565 tter contre de telles forces, une fois que je les ai reconnues ; à m’affirmer dans mon autonomie par un acte qui crée ma l
566 dirai : moi. Dussè-je tuer Dieu, comme Nietzsche a proclamé qu’il avait fait. L. — Mais l’homme est « chair », et cette
567 sè-je tuer Dieu, comme Nietzsche a proclamé qu’il avait fait. L. — Mais l’homme est « chair », et cette chair est liée à l’e
568 aucun effort. Si tout est décidé d’avance, il n’y a plus qu’à se laisser aller à la manière des musulmans. C’est peut-êtr
569 prédestina ! Quand le croyant, qui sait que Dieu a tout prévu éternellement, adresse à Dieu, au nom de sa promesse, une
570 Éternel est vivant », croire que sa volonté — qui a tout prévu — peut aussi tout changer en un instant aux yeux de l’homm
571 ux de l’homme, sans que rien soit changé de ce qu’ a décidé Dieu, de ce qu’il décide ou de ce qu’il décidera ? Car l’Étern
572 er que seul existe notre temps. Dans ce cas, tu n’ as rien prouvé. L. — On ne prouve rien de ce qui est essentiel ; on l’a
573 conduire qu’au seuil de cette décision. Et nous n’ aurons pas dialogué en vain, si nous avons pu dégager l’alternative du libre
574 n. Et nous n’aurons pas dialogué en vain, si nous avons pu dégager l’alternative du libre arbitre, telle qu’elle se pose dans
575 st l’Éternel qui commande, — ou c’est moi. Il n’y a pas là de difficultés intellectuelles. Il n’y a que la résistance ach
576 y a pas là de difficultés intellectuelles. Il n’y a que la résistance acharnée du « vieil homme », et les prétextes toujo
577 le chrétien la vérité d’un paradoxe que Luther n’ a pas inventé, mais qui est au cœur même de l’Évangile. L’apôtre Paul l
578 i est au cœur même de l’Évangile. L’apôtre Paul l’ a formulé avant toute « tradition ecclésiastique », et tous les Pères e
579 ait tout que nous devons agir, selon qu’il nous l’ a commandé. C’est parce que Dieu a tout prévu que nous avons en lui, et
580 lon qu’il nous l’a commandé. C’est parce que Dieu a tout prévu que nous avons en lui, et en lui seul, la liberté. Mais ce
581 mandé. C’est parce que Dieu a tout prévu que nous avons en lui, et en lui seul, la liberté. Mais cela n’apparaît qu’à celui q
582 », au risque d’« évacuer la Croix ». Tant qu’on n’ a pas envisagé la doctrine de la pure grâce jusque dans son sérieux der
583 »71, dans les choses du salut. Mais que le Christ ait dû mourir — cet acte extrême — pour nous sauver, fait voir que nous n
584 extrême — pour nous sauver, fait voir que nous n’ avons aucune liberté, par nous-mêmes, dans notre péché. Et, à l’inverse, il
585 d de la connaissance du péché pour voir qu’il n’y a de liberté possible que dans la grâce que Dieu nous fait. Toute l’arg
586 our le théologien. Et tout est clair lorsque l’on a compris que Luther ne nie pas du tout notre faculté de vouloir, mais
587 — et l’Évangile — posent à notre foi. C’est qu’il a poussé, comme Luther, jusqu’aux extrêmes limites de l’homme, jusqu’au
588 treint, dès lors que « Dieu est mort » ou qu’il l’ a « tué », il imagine le Retour éternel. Et comme ce Retour éternel par
24 1946, Foi et Vie, articles (1928–1977). Fédéralisme et œcuménisme (octobre 1946)
589 itiques de notre temps. Qu’il le pressente, qu’il ait au moins une sorte de conscience anxieuse de l’œuvre à faire, c’est c
590 rennent par la suite une valeur historique, elles auront passé inaperçues en leur temps. Ce manque d’efficacité des messages œ
591 aux. Mais il y a plus. L’erreur commise jusqu’ici a été d’essayer de choisir prudemment une attitude politique plus ou mo
592 sible de faire davantage à ce moment. En fait, on a examiné la situation mondiale et l’on a tenté de l’améliorer, conform
593 fait, on a examiné la situation mondiale et l’on a tenté de l’améliorer, conformément à des principes indiscutés de mora
594 chrétienne et naturelle. Or le réformisme moral n’ a jamais pu influencer le cours des événements. L’histoire est faite d’
595 e du tréfonds de sa foi créatrice. Les hommes qui ont fait l’histoire sont ceux qui avaient une vision passionnée de leur b
596 Les hommes qui ont fait l’histoire sont ceux qui avaient une vision passionnée de leur but et qui ont su plier les circonstanc
597 avaient une vision passionnée de leur but et qui ont su plier les circonstances à leur dessein. Dans un certain sens, nous
598 n action politique parte de lui-même, de ce qu’il a , de ce qu’il est, et de sa foi constitutive. Il n’a pas à emprunter i
599 de ce qu’il est, et de sa foi constitutive. Il n’ a pas à emprunter ici et là pour composer une mosaïque de mesures désir
600 nté et l’espérance œcuménique. Le présent essai n’ a d’autre ambition que d’esquisser les grandes lignes de ce développeme
601 aire. Certains conflits permanents de l’histoire ont pris de nos jours un caractère de violence sans précédent. À travers
602 dégagent avec d’autant plus de simplicité qu’ils ont atteint un climat presque mortel. Conflit politique et économique ent
603 incomplet. Il s’ensuit que dans leur plan, il n’y a pas de solution possible. Ils sont inconciliables parce que, de la co
604 ns morbides. Entre la peste et le choléra, il n’y a ni « juste milieu » ni synthèse possible. Il faut revenir à la santé.
605 éfinitive. Car c’est précisément cette utopie qui a produit les schismes et les oppositions que le mouvement œcuménique s
606 onter. C’est dans la mesure exacte où les Églises ont voulu transformer la foi à l’Una Sancta en une assurance visible et r
607 e doctrine), c’est dans la mesure exacte où elles ont douté d’une union par essence incontrôlable, qu’elles ont perdu leur
608 é d’une union par essence incontrôlable, qu’elles ont perdu leur communion réelle. Rappelons ici l’histoire de la tour de B
609 ans les diverses Églises, mais au contraire, elle a pour premier effet de les renforcer en les rendant plus conscientes d
610 prophète local. Certes, aucune église ou secte n’ a jamais été capable, grâce à Dieu, de se fermer totalement aux inspira
611 rations du Saint-Esprit. Aucune église ou secte n’ a jamais nié que son chef réel fût au ciel, mais plusieurs ont agi comm
612 nié que son chef réel fût au ciel, mais plusieurs ont agi comme s’il était sur la terre, c’est-à-dire à leur disposition. P
613 terre, c’est-à-dire à leur disposition. Plusieurs ont identifié l’Una Sancta avec leur organisation ou leur doctrine partic
614 la permanence de l’Église universelle, certaines ont ajouté, et peu à peu substitué en fait, un principe d’unité immanent,
615 ratiquement puis théoriquement absolutisé, il n’y a pas de recours ou d’appel possibles de la part du fidèle. Il doit se
616 tolérance, mais une nécessité vitale. Le poumon n’ a pas à « tolérer » le cœur ! Il doit être un vrai poumon, et dans cett
617 u la duplication accidentelle d’un même organe, n’ ont rien de mieux à faire qu’à fusionner le plus tôt possible. 2. Phil
618 entrale qui fonde l’union dans la diversité, nous avons à chercher la position philosophique centrale qui fonde la communion
619 iclite, faute de liberté. La Grèce individualiste a triomphé de la communauté barbare du sang. Mais plus tard elle a somb
620 a communauté barbare du sang. Mais plus tard elle a sombré dans l’anarchie. Rome a triomphé de l’anarchie et sombre maint
621 ais plus tard elle a sombré dans l’anarchie. Rome a triomphé de l’anarchie et sombre maintenant sous le poids de son appa
622 le passé ou sur des origines communes : « Il n’y a plus ni Juif ni Grec. » Elles ne se fondent pas sur la classe ou la r
623 et bien les germes d’une société véritable. Elles ont leur organisation sociale, leurs chefs locaux, leurs hiérarchies, leu
624 il revêt une dignité humaine nouvelle, puisqu’il a été racheté, et qu’il a reçu la promesse de sa résurrection individue
625 maine nouvelle, puisqu’il a été racheté, et qu’il a reçu la promesse de sa résurrection individuelle. Il est donc à la fo
626 vertu d’un seul et même fait : la vocation qu’il a reçue de l’Éternel. Cet homme d’un type nouveau n’est pas l’individu
627 ations constituant la Trinité, les docteurs grecs avaient adopté le terme latin de persona (rôle social). C’est ce même terme q
628 l. Ainsi les droits et les devoirs du particulier ont le même fondement que les droits et les devoirs de l’ensemble. Ils ne
629 coup par la formule : à chacun sa vocation. Nous avons retrouvé, dans cette doctrine de l’homme, les mêmes structures que da
630 es maladies. Dans le plan humain immanent, il n’y a pas d’équilibre possible entre l’anarchie et l’unité forcée, l’indivi
631 sophie. 3. Politique du fédéralisme Nous en avons assez dit pour qu’il soit désormais facile de voir qu’à l’attitude œc
632 it à quels hommes et à quels problèmes publics on a affaire. Si l’on se trouve en opposition avec le groupe, on a la poss
633 i l’on se trouve en opposition avec le groupe, on a la possibilité matérielle d’y faire entendre sa voix. Si cela ne suff
634 rent l’un l’autre et s’appuient mutuellement. Ils ont les mêmes structures et les mêmes ambitions. Ils opposent également à
635 e trop graves malentendus et abus. L’œcuménisme n’ a pas à les reprendre à sa charge. Et les peuples européens ne sont nul
636 pratique de réaliser la vraie démocratie. Mais il a le grand avantage de réaliser en même temps ce qu’il y a de valable d
637 e dans l’appel communautaire que le totalitarisme a diaboliquement utilisé et dévié. 4. Mission fédératrice de l’œcumé
638 les prépare ? Le capitalisme et l’individualisme ont reçu en Europe des coups mortels, dans les deux camps. Le totalitaris
639 a force, et sa victoire même l’épuiserait. Il n’y aurait plus qu’une table rase couverte de ruines pulvérisées. Le rôle de Chu
640 ien aux peuples de l’Europe. Or il dit qu’il n’en a pas le temps… Quant au rôle de Staline, il paraît être de profiter de
641 sé nous montre que les structures ecclésiastiques ont souvent précédé et prédéterminé les structures politiques d’une natio
642 cédence des facteurs religieux. Voilà le premier. A-t -on remarqué qu’il existe une forme de totalitarisme correspondant à l
643 spagne, la distinction entre l’Église et l’État n’ avait jamais été établie d’une manière satisfaisante. Il en résultait, dans
644 contraire, la séparation de l’Église et de l’État a toujours été réelle — même lorsqu’elle n’était pas strictement établi
645 i. De même les devoirs de la vocation personnelle ont toujours été mis au-dessus des devoirs envers le Pouvoir politique. L
646 leterre et les pays scandinaves, au xvie siècle, ont accompli leur Réforme au sein de l’Église traditionnelle, sans ruptur
647 éments traditionnels, condensant tout ce que nous avons d’expérience de la paix, elles convoient et contiennent en même temps
648 non de convergence, sur le plan international. On a vu les socialistes anglais collaborer avec les conservateurs anglais,
649 ires. Ceci résulte, théoriquement, de ce que nous avons exposé aux chapitres 1-3. Le mouvement œcuménique est donc seul en me
650 ai la nostalgie fédéraliste. Des auteurs isolés l’ ont fait entendre. Des groupes d’intellectuels ont tenté de formuler cert
651 l’ont fait entendre. Des groupes d’intellectuels ont tenté de formuler certaines réponses partielles. Le sentiment obscur
652 festera dans une action risquée. De même que nous avons vu les Églises nées des missions en terre païenne se placer à l’avant
653 affronter maintenant. 73. Note de 1946 : Je n’ ai pas un mot à changer au diagnostic qui suit. ab. Rougemont Denis de
25 1977, Foi et Vie, articles (1928–1977). Pédagogie des catastrophes (avril 1977)
654 tre faute est immense, mais ailleurs : elle est d’ avoir offert, ou plutôt imposé aux élites occidentalisées du tiers-monde un
655 mieux s’en libérer. Ils choisissent celle qui les a dominés, mais c’est choisir aussi celle qui les a perdus ! Je leur pr
656 a dominés, mais c’est choisir aussi celle qui les a perdus ! Je leur propose l’Europe des régions, comme offrant la formu
657 e peut produire les anticorps des toxines qu’elle a répandues, et peut élaborer un modèle politique qui soit tentant pour
658 tirera de sa libération les conclusions que nous aurions dû tirer, pour notre part, de l’échec du colonialisme, je suis scepti
659 e peut-être un jour… Je n’en vois pas un seul qui ait risqué l’expérience, dont rien ne prouve qu’elle n’eût pas réussi. Ma
660 isqué l’expérience, dont rien ne prouve qu’elle n’ eût pas réussi. Mais je ne vais pas me dérober à une question que je ne c
661 ’état de nécessités vitales et ça ne vote pas. Qu’ ont fait tous nos gouvernements, avertis par le club de Rome ? Et qu’ont
662 ouvernements, avertis par le club de Rome ? Et qu’ ont fait les partis politiques ? Ils sont encore « nationaux » avant tout
663 donc pour la droite et la gauche, selon qu’elles ont le pouvoir ou seulement l’ambitionnent : sa structure leur dicte ses
664 eurs, on n’y voit pas mieux les régions qu’on n’y a su voir venir les guerres mondiales, la théorie de la relativité, le
665  », notez cela !   — Si je comprends bien, vous n’ avez avec vous ni les gouvernements ni les partis, ni la grande industrie
666 t, ni les masses ni même les élites à la mode… Qu’ avez -vous donc ? — Le sens d’un péril imminent et la conscience de vivre u
667 possible et réelle, la société stato-nationaliste a pour seule vertu d’être là. Écoutons Baudelaire : Le monde va finir.
668 ticulièrement à celle-ci : qu’est-ce que le monde a désormais à faire sous le ciel ? Dans les partis, tout peut changer.
669 nger. Certains, disait Emmanuel Berl « peuvent en avoir marre tout d’un coup »74. Déjà s’opère en toutes classes sociales et
670 ficiant de l’appui des mouvements « écologiques » ont battu les chevaux de retour des partis grâce aux quelques centaines d
671 tre la pollution et les centrales nucléaires, ils ont fourni à la révolution régionaliste le levier politique qui avait fai
672 a révolution régionaliste le levier politique qui avait fait défaut aux mouvements personnalistes des années 1930, puis aux f
673 s comme Hermann Kahn, qui voit nos États-nations, ayant perdu leurs raisons d’être, bientôt remplacés par une « communauté pl
674 lle ans qu’il y a des hommes à Histoire, et qui n’ ont pas trouvé mieux que la guerre pour résoudre leurs différends, on ne
675 dans les dix ou quinze ans prochains — et nous n’ avons guère plus de temps pour décider de la survie de notre espèce.   — S
676 ment pessimiste ? — Pessimiste, optimiste, cela n’ a pas de sens en soi. Je ne cesserai de me sentir optimiste tant que je
677 alité de vous imposer ce que le bon sens jamais n’ aura pu faire, et c’est la réalité elle-même qui va recourir à la pédagogi
678 destinées à ce livre, et dont le ton prophétique eût paru plutôt ridicule après coup. Tout le monde aujourd’hui sait ou po
679 ou, Paris rasés dans l’heure… Quelqu’un d’autre l’ avait déjà dit, c’était Saint-Just, au cœur de la Révolution : Il faut att
680 de « commencer trop tôt » : tout va trop vite. Il a fallu cinq siècles exactement (1300-1800) pour préparer l’État-nation
681 Les catastrophes n’apprendront rien à ceux qui n’ ont pas vu où il faut aller, et donc n’en cherchent pas les voies et ne l
682 ’autres fins. Cette dialectique qui ne prévoit ni A ni B, mais incite à trouver des chemins vers V, je la vois déjà formu
683 que dis-tu de la nuit ? » Il y a quelques années, ayant écrit que l’action politique par excellence allait consister désormai
684 ous venons d’entrevoir la guérison possible. Nous avons les moyens de sauver « l’environnement » — la Nature et nos habitants
685 r éternel… Mais sauver le paysage et les décors n’ aura plus de sens si nous ne sommes plus là, ou ce qui revient au même, si
686 rope, ni de paix, ni de futur, à vues humaines. J’ ai voulu dire l’avenir inscrit en nous, — non certes dans nos chromosome
687 out le terme de conversion ? Ou que la religion n’ a rien à voir avec tel mode de pollution ou de production d’énergie ? J
688 ue les régions, la pollution, l’énergie nucléaire ont valeur symbolique en tant que nœuds de problèmes qu’on ne peut résoud
689 nsi des possibilités de communauté où la personne ait liberté de découvrir et d’exercer sa vocation ; du même coup, préveni
690 Sentinelle, que dis-tu de la nuit ? La sentinelle a répondu : — Le matin vient, et la nuit aussi. Si vous voulez interrog