1
e question de quelques années. Mais peut-être est-
il
temps encore. Ici et là, quelques cris s’élèvent dans le désert d’une
2
les, l’Occidental est saisi d’un étrange malaise.
Il
soupçonne, par éclairs, qu’il y avait peut-être dans ces buts une abs
3
urdité fondamentale. L’infaillible progrès aurait-
il
fait fausse route ? Est-il temps encore de le détourner du désastre s
4
illible progrès aurait-il fait fausse route ? Est-
il
temps encore de le détourner du désastre spirituel vers lequel il ent
5
de le détourner du désastre spirituel vers lequel
il
entraîne l’Occident ? Cris dans le désert. Déserts des villes fiévreu
6
le rêve, dans l’utopie, dans une belle doctrine…
Il
faudrait d’abord prendre conscience du péril. Nous ne tentons rien d’
7
e de la banqueroute prochaine de sa civilisation.
Il
répugne à admettre qu’une époque entière ait pu se tromper, et se tro
8
re ait pu se tromper, et se tromper mortellement.
Il
suffit pourtant de regarder autour de nous et d’en croire nos yeux.
9
e de mieux réussi. Voici la vie de Ford, telle qu’
il
la raconte dans Ma vie et mon œuvre. Il naît fils de paysan. Il passe
10
telle qu’il la raconte dans Ma vie et mon œuvre.
Il
naît fils de paysan. Il passe son enfance à jouer avec des outils, «
11
dans Ma vie et mon œuvre. Il naît fils de paysan.
Il
passe son enfance à jouer avec des outils, « et c’est avec des outils
12
er avec des outils, « et c’est avec des outils qu’
il
joue encore à présent », dit‑il. Le plus mémorable événement de ces a
13
vec des outils qu’il joue encore à présent », dit‑
il
. Le plus mémorable événement de ces années de jeunesse, son « chemin
14
nnées de jeunesse, son « chemin de Damas » (comme
il
dit sans qu’on sache au juste quelle dose d’« humour » il met dans l’
15
ans qu’on sache au juste quelle dose d’« humour »
il
met dans l’expression), c’est la rencontre d’une locomotive routière.
16
ère automobile fabriquée, à temps perdu, alors qu’
il
est simple mécanicien chez Edison. Il fonde tôt après la Société des
17
u, alors qu’il est simple mécanicien chez Edison.
Il
fonde tôt après la Société des automobiles Ford, « et commence à réal
18
ait ajouter à ces chiffres celui des milliards qu’
il
possède, ou plutôt qu’il gère, mais ce n’est pour lui qu’un résultat
19
s celui des milliards qu’il possède, ou plutôt qu’
il
gère, mais ce n’est pour lui qu’un résultat secondaire de son activit
20
mais été de s’enrichir. Son « rêve » était autre,
il
l’a réalisé comme il est donné à peu d’hommes de le faire : 7000 voit
21
r. Son « rêve » était autre, il l’a réalisé comme
il
est donné à peu d’hommes de le faire : 7000 voitures par jour, et la
22
industriel du monde ; le plus riche, au point qu’
il
peut parler d’égal à égal avec beaucoup d’États ; le plus parfait aus
23
alaires, des conditions de travail et de repos qu’
il
offre à ses ouvriers semblent bien apporter une solution définitive a
24
européens ne sauraient l’atteindre. Au contraire,
il
a résolu la question sociale d’une façon qui ne devrait pas déplaire
25
en supprimant l’esclavage financier de l’ouvrier,
il
supprime la principale cause avouée de la lutte des classes. Il se dé
26
principale cause avouée de la lutte des classes.
Il
se dégage de la lecture de Ma vie et mon œuvre une impression de nett
27
épandent. L’on ne pourra qu’y applaudir, semble-t-
il
, en souhaitant que les industriels européens s’en inspirent toujours
28
rent toujours plus. Ford leur montre le chemin qu’
ils
seront bien obligés de prendre tôt ou tard. Il est préférable qu’ils
29
u’ils seront bien obligés de prendre tôt ou tard.
Il
est préférable qu’ils s’y engagent dès aujourd’hui résolument, pendan
30
igés de prendre tôt ou tard. Il est préférable qu’
ils
s’y engagent dès aujourd’hui résolument, pendant qu’il reste quelques
31
y engagent dès aujourd’hui résolument, pendant qu’
il
reste quelques chances encore de régler pacifiquement le conflit du c
32
ne le premier exemple de son achèvement intégral.
Il
a atteint l’objectif de la moderne civilisation occidentale. Voici do
33
vie de Ford, sa « grande et constante ambition ».
Il
semble que toute sa carrière — pensée, méthode, technique — soit cond
34
tière : naissance de sa passion froide et tenace.
Il
s’efforce d’en réaliser l’objet par ses propres moyens, à un exemplai
35
t par ses propres moyens, à un exemplaire ; puis,
il
fonde une usine pour multiplier les réalisations. Bientôt, élargissan
36
réalisations. Bientôt, élargissant son ambition,
il
conçoit ce mythe extravagant du bonheur de l’humanité par la possessi
37
é par la possession d’automobiles Ford. Et, comme
il
est très intelligent, il a vite fait de démêler les conditions les pl
38
omobiles Ford. Et, comme il est très intelligent,
il
a vite fait de démêler les conditions les plus rationnelles de la pro
39
ormes d’autos. Seulement, pour pouvoir continuer,
il
faut vendre ; dans l’intérêt de la production, il faut créer la conso
40
il faut vendre ; dans l’intérêt de la production,
il
faut créer la consommation. La réclame s’en charge. Par le procédé tr
41
mple de la répétition, on fait croire aux gens qu’
ils
ne peuvent plus vivre heureux sans auto. Voilà l’affaire lancée. La p
42
lancée. La passion de Ford se donne libre cours.
Il
ne s’agit plus maintenant que de lui donner une apparence d’utilité p
43
s sophismes plus ou moins conscients par lesquels
il
prétend ramener le bénéfice de la production à celui du consommateur.
44
rs des clients, quel que soit l’état du marché. »
Il
semble que cela soit tout à l’avantage du client. Mais cherchons un p
45
qu’on a de tel objet est satisfait ou a disparu.
Il
semble alors que l’industriel n’ait plus qu’à plier bagage. Mais c’es
46
ayant disparu, la production devant se maintenir,
il
n’y a qu’une solution : recréer le besoin. Pour cela, on abaisse les
47
abaisse les prix. Le client fait la comparaison.
Il
est impressionné par la baisse, au point qu’il en oublie que cela ne
48
n. Il est impressionné par la baisse, au point qu’
il
en oublie que cela ne l’intéresse plus réellement. Il croit qu’il va
49
n oublie que cela ne l’intéresse plus réellement.
Il
croit qu’il va gagner 5 francs en achetant 5 francs moins chers un ob
50
cela ne l’intéresse plus réellement. Il croit qu’
il
va gagner 5 francs en achetant 5 francs moins chers un objet que, san
51
ancs moins chers un objet que, sans cette baisse,
il
n’eût pas acheté du tout. Autrement dit, il est trompé par la baisse.
52
isse, il n’eût pas acheté du tout. Autrement dit,
il
est trompé par la baisse. L’industriel comptait. La tromperie est pré
53
faire une dépense superflue ; le scandale est qu’
il
l’ait trompé sur ses véritables besoins. Car cela va bien plus profon
54
ar cela va bien plus profond, cette tromperie-là.
Elle
peut amener, en se généralisant, une sorte de suicide du genre humain
55
on », comme dit Ferrero. Le bon peuple s’extasie.
Il
ne peut voir la duperie : ce jeu du chat et de la souris ; si Ford re
56
n engrenage. L’emploi de leurs loisirs est prévu.
Il
est déterminé par la réclame, les produits Ford qu’il faut user, etc.
57
st déterminé par la réclame, les produits Ford qu’
il
faut user, etc. Il a pour but véritable d’augmenter la consommation.
58
réclame, les produits Ford qu’il faut user, etc.
Il
a pour but véritable d’augmenter la consommation. Il rend plus comple
59
a pour but véritable d’augmenter la consommation.
Il
rend plus complet l’esclavage de l’ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à
60
end plus complet l’esclavage de l’ouvrier, puisqu’
il
englobe jusqu’à son repos dans le cycle de la production. Cercle vici
61
e vicieux : plus la production s’intensifie, plus
il
faut créer de besoins et de loisirs. Or, l’industrie ne peut subsiste
62
re humaine a des limites. Et le temps approche où
elles
seront atteintes. On peut se demander jusqu’à quel point Ford est con
63
nos besoins. » — Ford se moque de la philosophie.
Il
ne peut empêcher que son attitude ne porte un nom philosophique : c’e
64
en est le fruit. On ne saurait mieux dire. Mais
il
faudrait en tirer des conséquences, alors que Ford passe outre et se
65
e et se remet à discuter des points de technique.
Il
n’a pas senti qu’il touchait là le nœud vital du problème moderne. D’
66
uter des points de technique. Il n’a pas senti qu’
il
touchait là le nœud vital du problème moderne. D’ailleurs, les idées
67
ette sorte sont rares dans son livre. En général,
il
se borne à parler de problèmes techniques où son triomphe est facile.
68
en parfait qui combat les techniciens imparfaits.
Il
ne se demande jamais si la technique même la plus perfectionnée mérit
69
me la plus perfectionnée mérite les sacrifices qu’
elle
exige de l’homme moderne. Paradoxes plus ou moins intéressés, optimis
70
Le phénomène n’est pas nouveau en Occident, mais
il
est ici tragiquement aigu. Est-ce notre pensée qui, à force de subtil
71
justiciable encore de nos vérités essentielles ?
Il
semble bien que notre temps ait prononcé définitivement le divorce de
72
’est pas mauvais en soi. Mais par l’importance qu’
il
a prise dans notre vie, il détourne la civilisation de son but vérita
73
is par l’importance qu’il a prise dans notre vie,
il
détourne la civilisation de son but véritable : aller à l’Esprit, y c
74
l’essentiel une grande part des forces humaines,
il
travaille contre l’Esprit. Rien n’est gratuit. Nous payons notre pass
75
ses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable, «
il
se passera bien de cette littérature ». Plus tard, « puisqu’elle n’es
76
bien de cette littérature ». Plus tard, « puisqu’
elle
n’est pas utile, elle est nuisible ». « … Tableaux, symphonies, ou au
77
ture ». Plus tard, « puisqu’elle n’est pas utile,
elle
est nuisible ». « … Tableaux, symphonies, ou autres œuvres destinées
78
écanique bien huilée, au mouvement si régulier qu’
il
en devient insensible et que la fatigue semble disparaître, l’homme s
79
s d’horlogerie calculé une fois pour toutes et qu’
il
sent immuable comme la mort le restitue au monde vers 5 heures du soi
80
oublier jusqu’à l’existence, et à une liberté qu’
il
s’empresse d’aliéner au profit de plaisirs tarifés, soumis plus subti
81
mande sans rapport avec ses désirs réels, et dont
il
subit docilement l’abstraite et commerciale nécessité. Ennui, fatigue
82
es exigences les plus rudimentaires de son corps.
Il
a perdu le contact avec les choses naturelles, et par là même, avec l
83
turelles, et par là même, avec les surnaturelles.
Il
en ressent une vague et intermittente détresse, — qu’il met d’ailleur
84
ressent une vague et intermittente détresse, — qu’
il
met d’ailleurs sur le compte de sa fatigue. Neurasthénie. La conquête
85
aissé oublier les valeurs de l’esprit au point qu’
il
n’éprouve plus même cette carence ; seulement, peu à peu, il découvre
86
e plus même cette carence ; seulement, peu à peu,
il
découvre qu’il s’ennuie profondément ; fatigué de trop de satisfactio
87
te carence ; seulement, peu à peu, il découvre qu’
il
s’ennuie profondément ; fatigué de trop de satisfactions matérielles,
88
t ; fatigué de trop de satisfactions matérielles,
il
a laissé se détendre, ou il a cassé les ressorts de sa joie : l’effor
89
factions matérielles, il a laissé se détendre, ou
il
a cassé les ressorts de sa joie : l’effort libre et généreux, le sent
90
mirer la nature entre 17 et 19 heures : vraiment,
il
ne lui manque plus rien — que l’envie. Mauvais travail. Il a perdu le
91
manque plus rien — que l’envie. Mauvais travail.
Il
a perdu le sens religieux, cosmique, de l’effort humain. Il ne peut p
92
le sens religieux, cosmique, de l’effort humain.
Il
ne peut plus situer son effort individuel dans le monde, lui attribue
93
dans le monde, lui attribuer sa véritable valeur.
Il
sent obscurément que son travail est antinaturel. Il le méprise ou le
94
sent obscurément que son travail est antinaturel.
Il
le méprise ou le subit, mais, jusque dans son repos, il en est l’escl
95
méprise ou le subit, mais, jusque dans son repos,
il
en est l’esclave. Pour s’être exclu lui-même de l’ordre de la nature,
96
ur s’être exclu lui-même de l’ordre de la nature,
il
est condamné à ne plus saisir que des rapports abstraits entre les ch
97
isir que des rapports abstraits entre les choses.
Il
ne comprend presque plus rien à l’Univers. Par la technique, l’Occide
98
gences telles que l’Esprit ne peut les supporter.
Il
abandonne donc la place, mais c’est pourtant lui seul qui nous permet
99
toire mécanicienne est une victoire à la Pyrrhus.
Elle
nous donne une liberté dont nous ne sommes plus dignes. Nous perdons,
100
faculté destinée à amuser nos moments de loisir,
il
a des exigences effectives ; et ces exigences sont en contradiction a
101
» très spécial, — on les écarte des engrenages où
ils
risqueraient de faire grain de sable. Ils se réfugient dans ce qu’on
102
ages où ils risqueraient de faire grain de sable.
Ils
se réfugient dans ce qu’on pourrait appeler les classes privilégiées
103
es forces occultes sans doute dangereuses, puisqu’
elles
les rendent inutilisables dans les rouages de la vie moderne. Le trio
104
igueur : avec la rigueur de la nécessité — puisqu’
elle
est inutile au grand dessein matérialiste de l’Occident. La logique,
105
échappatoire utopique. Nous avons mieux à faire,
il
n’est plus temps de se désintéresser simplement des buts — si bas soi
106
désintéresser simplement des buts — si bas soient-
ils
— d’une civilisation sous le poids de laquelle nous risquons de périr
107
sous le poids de laquelle nous risquons de périr.
Il
se prépare déjà des révoltes terribles4, celles d’un mysticisme exasp
108
’aujourd’hui ont une tâche pressante : chercher s’
il
est possible d’échapper au fatal dilemme. Premiers pas vers la soluti
109
a le xixe . On le laissa installer ses machines :
elles
avaient l’air de grands joujoux ; et l’on continua d’apprendre rosa :
110
in. La composante matérielle vient de l’emporter.
Elle
est en passe de gauchir notre civilisation à tel point que l’homme, a
111
à tel point que l’homme, affolé, soudain, doute s’
il
est encore maître de la redresser. C’est qu’il n’y a plus d’humanisme
112
s’il est encore maître de la redresser. C’est qu’
il
n’y a plus d’humanisme, s’il subsiste des humanités. L’humanisme est
113
redresser. C’est qu’il n’y a plus d’humanisme, s’
il
subsiste des humanités. L’humanisme est compromis virtuellement dès l
114
eine libérée, demande la tête de la métaphysique.
Elle
n’entend que ses intérêts. Elle eut naguère des insolences d’affranch
115
la métaphysique. Elle n’entend que ses intérêts.
Elle
eut naguère des insolences d’affranchi, dont les philosophes demeuren
116
eprise par certains philosophes des sciences fait-
elle
songer à l’activité de cet espion anglais qui parvint durant la guerr
117
s sentons leurs lois peser sur notre vie : s’agit-
il
d’enrayer la science ? Non, mais que l’esprit qui l’a créée, la surpa
118
ais, participant de notre volonté et de la grâce,
ils
échappent à cette fatalité qui est le signe du monde matériel. Je vo
119
rieure à n’importe quel dogme. Je ne crois pas qu’
il
existe d’autres facultés capables d’équilibrer en nous l’esprit de gé
120
ar des rêves. Et je ne vois rien d’autre. Quoi qu’
il
en soit d’ailleurs du contenu d’un nouvel humanisme, il est assez ais
121
soit d’ailleurs du contenu d’un nouvel humanisme,
il
est assez aisé de prévoir et de décrire une tentation qui le guette e
122
elle de créer un modèle de l’homme. Peut-être a-t-
il
existé un modèle gréco-latin, un canon de l’âme aussi bien que du cor
123
ce mythe ait animé l’humanisme de nos humanités.
Il
est certain qu’il a perdu son ascendant. D’ailleurs son pouvoir, s’il
124
é l’humanisme de nos humanités. Il est certain qu’
il
a perdu son ascendant. D’ailleurs son pouvoir, s’il en eut, ne s’éten
125
a perdu son ascendant. D’ailleurs son pouvoir, s’
il
en eut, ne s’étendit guère au-delà des limites du monde roman. Le typ
126
Le christianisme en connaît un, depuis toujours :
il
le nomme péché.) Tous les modèles que l’homme se propose ont ceci d’i
127
ue l’homme se propose ont ceci d’insuffisant : qu’
ils
peuvent être atteints. Mais ce qui parfait la stature de l’homme, c’e
128
nt. L’homme ne se comprend lui-même qu’en tant qu’
il
« passe l’homme » et participe, en esprit, d’un ordre transcendental.
129
un dieu. N’attendons pas d’un nouvel humanisme qu’
il
nous désigne un but, ni même une direction : il y réussirait trop ais
130
u’il nous désigne un but, ni même une direction :
il
y réussirait trop aisément. Ce qui manque à l’homme moderne, c’est un
131
lles. Nous avons inventé trop d’êtres inhumains :
ils
nous menacent et nous empêchent de voir encore le surhumain. Être vér
132
uil » : et qu’irions-nous lui demander de plus, s’
il
laisse en blanc la place de Dieu. Mais où trouver les lévites assez p
133
études de lettres à Neuchâtel, Vienne et Genève.
Il
a collaboré à diverses revues suisses et françaises. Il prépare trois
134
ollaboré à diverses revues suisses et françaises.
Il
prépare trois volumes (Essais, Romans, Voyages). »
135
es livres qu’on n’oublie pas facilement. C’est qu’
il
y apporte un peu plus d’expérience humaine qu’on n’a coutume d’en att
136
et dont le tragique est décuplé par la valeur qu’
il
prend dans l’esprit des héros. Un jeune Français a décidé d’aller fou
137
es temples en ruines de la Voie royale d’Angkor :
il
compte y découvrir des bas-reliefs dont il pourrait tirer un prix con
138
gkor : il compte y découvrir des bas-reliefs dont
il
pourrait tirer un prix considérable. Sur le bateau qui l’amène à pied
139
érable. Sur le bateau qui l’amène à pied d’œuvre,
il
s’associe à un aventurier danois, Perken, personnage énigmatique qui
140
arlant jamais que par allusions et mots couverts.
Il
intimide un peu le lecteur qui ne se sent pas complice de ses secrets
141
térieurs obéissait son action. C’est peut-être qu’
il
n’y en a pas. Perken, comme Garine, est de ces êtres qui agissent par
142
suis tenté de dire : son moi idéal, celui auquel
il
donne sa plus profonde et intime adhésion. Nous avons tous en nous de
143
même, en fin de compte, paraît absurde, parce qu’
il
refuse de lui trouver un sens dans la mort. L’homme qui pourrait se d
144
ion littéraire11. Le courage presque agressif qu’
elle
apporte à décrire la figure de l’homme moderne en proie au seul orgue
145
la religion qui n’est qu’un refuge contre la vie.
Elle
nous amène à un point de jugement d’où les facilités de certaine foi
146
Goncourt, dit-on, eût été décerné à M. Malraux s’
il
n’avait naguère au cours de ses aventures asiatiques passé outre à ce
147
cambodgiens. Je donne l’histoire comme une fable.
Il
est peut-être curieux de noter que les pires blasphèmes, de la pornog
148
Sécularisme (mars 1931)e
Il
nous plaît de faire converser ici les gens les moins faits pour s’ent
149
ent parce qu’au contraire de M. Léon Brunschvicg,
il
avait le sens du tragique de la vie. De pareilles « conversations » n
150
ressortent nullement de la critique littéraire ;
il
arrive qu’elles mettent en jeu de gros problèmes à propos d’ouvrages
151
ullement de la critique littéraire ; il arrive qu’
elles
mettent en jeu de gros problèmes à propos d’ouvrages bien minces. C’e
152
relative à des œuvres qui « signifient » plus qu’
elles
ne « sont ». L’on mesure ici l’écart d’avec la littérature d’avant-gu
153
t. La nôtre ayant voix au forum discute autant qu’
elle
n’invente ou qu’elle ne stylise. On peut dire, avec plus de louange d
154
x au forum discute autant qu’elle n’invente ou qu’
elle
ne stylise. On peut dire, avec plus de louange d’ailleurs que d’ironi
155
avec plus de louange d’ailleurs que d’ironie, qu’
elle
touche à tout dans l’homme et dans la société. Elle a l’absence de sc
156
le touche à tout dans l’homme et dans la société.
Elle
a l’absence de scrupules des gens qui ont une mission urgente à rempl
157
s quelques remarques nous placent sous l’angle qu’
il
faut pour situer le petit livre de M. P. Nizan12, dans sa perspective
158
type du livre qui vaut surtout par l’attitude qu’
il
manifeste et commente. Son sujet : le voyage d’un jeune normalien ma
159
e légitime… — Nous pensions vie intérieure, quand
il
fallait penser dividendes, impérialisme, plus-value. — Qui donc nous
160
essence, tout ce qui allongeait la sauce évaporé.
Il
demeure un résidu impitoyable, descriptible et sec ». Ici la vie des
161
t l’Orient. « On pense à une Genève de l’islam. »
Il
semble, à lire notre auteur, que ce mélange de représentants de ne or
162
phie, la politique étant absents, faute d’emploi,
il
n’y avait aucune correction à faire ». D’ailleurs, il ne veut pas poé
163
’y avait aucune correction à faire ». D’ailleurs,
il
ne veut pas poétiser le tableau, car, pour lui, « être poétique, c’es
164
ur. C’est sans doute qu’on les a par trop dupés ;
ils
ne marchent plus. La faute en est à l’idéologie bourgeoise du xixe s
165
istingué » et le « conforme » au vrai. Mais n’est-
il
pas grand temps de dépasser une réaction de vulgarité non moins artif
166
non moins artificielle que le lâche idéalisme qu’
elle
combat avec raison ? D’ailleurs, si je vois bien que le propos de M.
167
sidu impitoyable, descriptible et sec ». Mais est-
il
bien légitime de voir dans un tel « résidu » l’essence de l’Europe, —
168
marxiste, dont le moins qu’on puisse dire est qu’
elle
sent son xixe siècle. On peut lui faire un grief plus grave : elle s
169
siècle. On peut lui faire un grief plus grave :
elle
subordonne toute réforme à une préalable révolution économique qui pa
170
omique qui paraît de plus en plus impossible, car
elle
équivaudrait à une transformation radicale des conditions matérielles
171
ce neuve perpétuellement de la vérité religieuse.
Il
parle des religions avec une incroyable légèreté, — en littérateur qu
172
t N.-D. de la Garde : « J’étais servi — s’écrie-t-
il
. — Les premiers emblèmes venus à ma rencontre étaient justement les d
173
cris d’une révolte égarée par la haine ? C’est qu’
ils
caractérisent une attitude de plus en plus fréquente chez les jeunes
174
uvelles » encore plus vagues d’ailleurs que ce qu’
ils
peuvent imaginer de la religion. C’est une forme aiguë de ce que les
175
euse apparaît comme périmée. Avec M. Brunschvicg,
il
pense qu’un homme de 1931 a dépassé ce « stade », qu’il n’est plus pe
176
se qu’un homme de 1931 a dépassé ce « stade », qu’
il
n’est plus permis de nos jours… bref, que la science a changé tout ce
177
un astronome chrétien. Comment un astronome peut-
il
croire à l’Incarnation ou aller à la Messe ? On n’aura d’autre ressou
178
éaliste salue comme son contemporain ; en tant qu’
il
croit à l’Incarnation et qu’il va à la Messe, il se comporte en homme
179
orain ; en tant qu’il croit à l’Incarnation et qu’
il
va à la Messe, il se comporte en homme du xiiie siècle — ou en enfan
180
’il croit à l’Incarnation et qu’il va à la Messe,
il
se comporte en homme du xiiie siècle — ou en enfant : il y a lieu de
181
ter. Si vous demandez au philosophe de quel droit
il
pratique cet étrange sectionnement, il aura beau se recommander de la
182
quel droit il pratique cet étrange sectionnement,
il
aura beau se recommander de la Raison ou de l’Esprit, nous resterons
183
’Esprit, nous resterons inquiets, d’autant que, s’
il
ne s’interdit nullement de rendre compte par des considérations psych
184
ociologiques de ces survivances chez l’astronome,
il
nous interdira formellement de procéder en ce qui le concerne lui-mêm
185
eds à la tête un homme de 1930 ; et en même temps
il
se réclame d’un Esprit éternel qui cependant est né et dont on ne sau
186
e nettement, est d’une singulière incohérence. Et
il
est évident que si cet idéaliste se trouve mis en présence d’un marxi
187
purement bourgeois, enfant du loisir économique,
il
lui faudra se réfugier dans la sphère des abstractions les plus exsan
188
t avec une netteté d’autant plus significative qu’
ils
touchent des problèmes identiques, celui de la puissance de l’homme,
189
nce entre eux et nous — si le mal est si grand qu’
ils
le montrent — et il l’est — aucun bouleversement matériel n’y pourra
190
— si le mal est si grand qu’ils le montrent — et
il
l’est — aucun bouleversement matériel n’y pourra rien, si radical soi
191
rsement matériel n’y pourra rien, si radical soit-
il
. Un pessimisme aussi féroce que celui de MM. Malraux, Nizan, etc., ne
192
d’idéal pour nourrir une révolution. Par là même,
il
postule une réalité transcendante — ou alors le suicide d’un monde em
193
e. Le séculariste « constructiviste » répondra qu’
il
croit en la puissance de l’homme pour se dégager des servitudes provi
194
— rien n’est plus incertain que son objet. Comme
il
est déchirant en vérité, le chant d’orgueil que le siècle entonne pou
195
. Assez parlé de Vérité, ce sont des réussites qu’
il
nous faut. Saluons enfin le règne de l’homme ! » Mais le chrétien, qu
196
otestants modernes (avril 1931)f C’est donc qu’
il
y en a ? avez-vous dit. Depuis le temps qu’on cherchait à nous faire
197
la Préface d’un si brillant catalogue. Parce qu’
ils
parlent un peu pour nous et parce qu’ils nous parlent, nous avons dem
198
Parce qu’ils parlent un peu pour nous et parce qu’
ils
nous parlent, nous avons demandé à ces artistes de venir dans notre c
199
x yeux de beaucoup, le choix des œuvres exposées.
Il
ne s’agit nullement de présenter l’ensemble des artistes protestants,
200
de présenter l’ensemble des artistes protestants,
il
s’agit de manifester les préférences d’une jeunesse. À cet égard part
201
e que ces artistes peuvent avoir de commun, ce qu’
ils
doivent à leur origine ou à leur foi réformée, — et si ces traits ne
202
en définitive, les éléments d’un art protestant.
Il
eût fallu peut-être qu’un plus grand nombre d’artistes exposassent po
203
nt-garde des toiles frappait le visiteur avant qu’
il
eût songé à distinguer les caractères confessionnels. Espérons qu’un
204
onnels. Espérons qu’un prochain salon, organisé s’
il
le faut dans de plus vastes locaux, pourra donner accès à un ensemble
205
isme. Et l’on pourra se demander alors : qu’y a-t-
il
de spécifiquement protestant chez ces peintres ? — Certaines rigidité
206
e tradition qui certainement est bien huguenote :
elle
remonte aux meubles de Boulle, aux Gobelins, aux poteries de Palissy.
207
emment « protestant » de l’art français. Mais s’
il
est malaisé de décrire, dès à présent, un art protestant de fait, peu
208
ait, peut-on, par contre, le définir idéalement ?
Il
nous semble que cela supposerait d’abord une définition nette de notr
209
erait d’abord une définition nette de notre foi :
il
faut qu’on sache sans équivoque ce qu’est le protestantisme avant de
210
ie où était le calvinisme dans tout ceci. Eussent-
ils
posé, à propos d’un salon d’art catholique, la même question, en remp
211
En deux mots, il y a des « sujets catholiques »,
il
n’y a pas de « sujets protestants ». Mais, dira-t-on, il y a tous les
212
la seconde, ovationné à la dernière, Keyserling,
il
faut le reconnaître, a su, par trois fois, tenir en haleine une salle
213
udre, défenseur convaincu d’une spiritualité dont
il
annonce le réveil au sein même du triomphe des machines, Keyserling a
214
t comme un type très représentatif de l’Occident.
Il
n’a rien du prophète oriental contre lequel des Massis mal informés n
215
trouvaient préparés pour en jouir convenablement.
Il
faut organiser la conquête et la distribution de ces biens : d’où la
216
rling. Nous traversons une crise d’adaptation, et
il
s’agit de la résoudre dans le sens d’une philosophie de la vie qui re
217
rait résumer la pensée de Keyserling en disant qu’
il
oppose à l’idéal actuel d’assurances à tous les degrés — idéal antisp
218
daptation, nous ajoutons régénération ; et lorsqu’
il
dit spiritualité, nous pensons connaissance mystique. g. Rougemont
219
t de traduire un autre roman du même auteur16, et
il
nous aide à mieux définir le charme de cette œuvre inoubliable. Antér
220
e quelques années à Daphné, beaucoup plus long, —
il
compte plus de 600 pages dans l’édition française — d’un rythme plus
221
dition française — d’un rythme plus inégal aussi,
il
ne lui est pas inférieur par l’intérêt humain, et sa qualité d’émotio
222
» que deux dates limitent : 1851-1914. Ainsi met-
il
en jeu les deux éléments dont l’antagonisme fait le fond de presque t
223
z, ne dites pas à vos amis ce qui arrive avant qu’
ils
n’aient lu eux-mêmes le livre. J’espère que les critiques ne le diron
224
s sa durée, dans son atmosphère et dans le son qu’
elle
rend. Il ne s’y passe rien de plus que ce qu’admet la société anglais
225
dans son atmosphère et dans le son qu’elle rend.
Il
ne s’y passe rien de plus que ce qu’admet la société anglaise. Tout l
226
M. Charles Du Bos, dans la très belle préface qu’
il
a donnée à la traduction française note avec raison que M. Baring se
227
e peu inexorable dans la libéralité avec laquelle
il
nous invite à de multiples week-ends… » Il y aurait beaucoup à dire p
228
s, non par l’inspiration. (Dans le cas de Baring,
elle
serait plutôt religieuse.) Il est incontestable que l’art a tout à ga
229
le cas de Baring, elle serait plutôt religieuse.)
Il
est incontestable que l’art a tout à gagner à se choisir un cadre étr
230
entrer uniquement sur les sentiments, et dès lors
elle
constitue un milieu privilégié pour l’étude du cœur humain. Si le rôl
231
nvaincant de sa grandeur, et le plus tonique17, —
il
en va tout autrement de l’histoire d’une vie sentimentale. La durée e
232
nt tragique par excellence du sentiment, parce qu’
elle
le transforme sans cesse, alors que nous sommes attachés surtout à de
233
ce que dit l’auteur dans sa préface. Bien plutôt,
elle
est l’expression concrète d’une loi divine et humaine, et c’est ici q
234
arer le bien du mal parmi les actions d’autrui qu’
il
estime connaître. Simplement, il enregistre les effets d’une justice
235
ions d’autrui qu’il estime connaître. Simplement,
il
enregistre les effets d’une justice immanente. En même temps que les
236
ente. En même temps que les actions de ses héros,
il
note les jugements contradictoires qu’elles provoquent. Et le tragiqu
237
s héros, il note les jugements contradictoires qu’
elles
provoquent. Et le tragique qui se dégage lentement de cette longue co
238
de son œuvre romanesque. Et c’est par tout ce qu’
elle
contient d’inexprimé qu’elle atteint en certains passages à une inten
239
c’est par tout ce qu’elle contient d’inexprimé qu’
elle
atteint en certains passages à une intensité presque bouleversante. I
240
s passages à une intensité presque bouleversante.
Il
est pourtant un endroit du roman où l’auteur intervient visiblement,
241
réalité. Et c’est au cours des quarante pages qu’
il
consacre à la « conversion » au catholicisme de la princesse Blanche.
242
t vit dans un milieu catholique qui n’exerce, dit-
elle
, aucune pression sur ses convictions religieuses. Mais le mot convict
243
d : « Je ne crois pas, j’espère que non ; bien qu’
il
soit difficile, quelquefois, me semble-t-il, de savoir exactement que
244
en qu’il soit difficile, quelquefois, me semble-t-
il
, de savoir exactement quelle foi on a. » Plus tard elle avoue franche
245
de savoir exactement quelle foi on a. » Plus tard
elle
avoue franchement : « … dans nos églises j’éprouve un sentiment de dé
246
été insulaire, possède un sens critique assuré qu’
elle
applique non sans acuité aux pratiques anglicanes. On serait tenté de
247
resque imperceptible, est nettement appuyé dès qu’
il
s’agit des vieilles tantes de la Princesse, chargées ici de représent
248
référé, la même tante Harriet a ce mot exquis : «
Il
prêche merveilleusement sans jamais aucune excentricité. » Elle appel
249
rveilleusement sans jamais aucune excentricité. »
Elle
appelle ceux qui passent à l’Église romaine des « pervertis » : « Nou
250
ns son âme. D’autre part, tous les catholiques qu’
elle
rencontre et qui lui parlent de leur foi se distinguent par une human
251
que belle-mère sont nettement antipathiques, mais
ils
ne disent rien, eux !) Comment Blanche ne se sentirait-elle pas attir
252
sent rien, eux !) Comment Blanche ne se sentirait-
elle
pas attirée par la Rome papale, qui la console de la Rome de son mari
253
n mari et la venge de l’Angleterre de ses tantes.
Elle
abjure secrètement, à Londres. C’est peut-être à l’endroit de cette
254
it à la périphérie des vérités religieuses, là où
elles
paraissent s’opposer, au lieu de nous aider à les mieux pénétrer, à l
255
ieux pénétrer, à les approfondir jusqu’à l’unité.
Il
est d’autant plus regrettable de voir Baring se départir ici de la sa
256
e de voir Baring se départir ici de la sagesse qu’
il
montre ailleurs, grossir les traits, découvrir la thèse. Il eût pu s’
257
ailleurs, grossir les traits, découvrir la thèse.
Il
eût pu s’en dispenser d’ailleurs, car en définitive la conversion de
258
ît être à tel point la seule solution possible qu’
elle
n’est plus du tout exemplaire et ne peut servir ni le catholicisme (l
259
at d’âme d’un de ses héros, comme sans le savoir,
il
établit. En vérité, l’entrée de Blanche dans l’Église catholique n’es
260
raie conversion a lieu beaucoup plus tard, lorsqu’
elle
trouve, à force de souffrance, le courage de sacrifier son amour. Mai
261
uffrance, le courage de sacrifier son amour. Mais
elle
ne peut survivre à cet acte suprême, à cette grâce. Aussi notre bonhe
262
, à cette grâce. Aussi notre bonheur humain n’est-
il
en aucune mesure le signe de la vérité. Personne, peut-être, n’a répé
263
qui entraîne des ruines humaines. Mais la vérité,
elle
, est indifférente à ce que nous appelons bonheur ou malheur. Et c’est
264
s bonheur ou malheur. Et c’est la vérité seule qu’
il
s’agit d’attendre. Dans Daphné Adeane, dans La Princesse Blanche, ce
265
upporter. La vie humaine me paraît intolérable. —
Elle
l’est presque, mais pas tout à fait. Il faut l’accepter. Songez à l’a
266
able. — Elle l’est presque, mais pas tout à fait.
Il
faut l’accepter. Songez à l’agonie du Jardin des Oliviers. Blanche se
267
même chose dans le Podere à Florence. — Je sens,
il
est vrai, que j’ai commis des erreurs irréparables. — Vous avez le dr
268
st plus très éloigné peut-être de cette joie qui,
elle
aussi, est « par-delà », — cette joie « qui surpasse toute connaissan
269
ur lequel nous aurons l’occasion de revenir. 18.
Il
est absurde, voire aux yeux de la foi scandaleux de parler de convers
270
hose. On se convertit simplement. (Simplement…) —
Il
faut souligner cette insuffisance du vocabulaire religieux. 19. Soul
271
». Mais Kierkegaard reste soucieux : Mynster est-
il
vraiment de la lignée des Apôtres, se demande-t-il ? Les prêtres sont
272
l vraiment de la lignée des Apôtres, se demande-t-
il
? Les prêtres sont-ils, dans le vrai sens du mot, les successeurs du
273
e des Apôtres, se demande-t-il ? Les prêtres sont-
ils
, dans le vrai sens du mot, les successeurs du Christ ? Ne sont-ils pa
274
sens du mot, les successeurs du Christ ? Ne sont-
ils
pas plutôt des fonctionnaires payés par l’État et avides d’avancement
275
. Kierkegaard est le Pascal du protestantisme, et
il
est caractéristique à la fois du monde du catholicisme et du monde du
276
iel furent l’acte de Kierkegaard. Après cet acte,
il
mourut. Comme Hamlet. » Et voici comment il faut situer Kierkegaard
277
cte, il mourut. Comme Hamlet. » Et voici comment
il
faut situer Kierkegaard dans notre Panthéon spirituel : Kierkegaard
278
lus rien en lui ni de Faust, ni du Caïn de Byron,
il
a dépassé le romantisme. Ou plutôt, le romantisme fut la jeunesse, le
279
de traductions de ses livres. Mais ce Journal, s’
il
est l’œuvre la moins forte du Danois, n’en est pas moins, dans son do
280
n document peut-être d’autant plus intéressant qu’
il
émane d’un grand théologien. Il s’agit maintenant de nous révéler ce
281
us intéressant qu’il émane d’un grand théologien.
Il
s’agit maintenant de nous révéler ce « héros de la foi », ce maître d
282
us, le maître que fut Nietzsche pour leurs aînés.
Il
n’est pas sûr que les « religions » y gagnent, mais la foi, certainem
283
de nous donner un livre bien utile22. En vérité,
il
fallait une sorte d’intrépidité pour entreprendre cette « traversée »
284
e. Enfin, voici ce livre, point trop volumineux —
il
trouvera sa place dans votre valise — et d’une érudition très aérée.
285
leur valeur proprement littéraire et descriptive,
elles
nous paraissent intéressantes par tout ce qu’elles révèlent de la men
286
lles nous paraissent intéressantes par tout ce qu’
elles
révèlent de la mentalité des écrivains et des peuples dont elles éman
287
de la mentalité des écrivains et des peuples dont
elles
émanent. La montagne est un merveilleux réactif, au contact duquel ce
288
iolent réquisitoire qu’on ait jamais écrit contre
elles
». Pour Rousseau, la montagne, c’est surtout le fond des vallées, — s
289
out le fond des vallées, — si l’on ose dire, — où
il
fait vivre d’imaginaires bons sauvages. Et pour la grande majorité de
290
feront intervenir la montagne dans leurs œuvres,
elle
n’est guère qu’un décor conventionnel, un élément de pittoresque, un
291
nt échoué dans leur interprétation des montagnes.
Ils
ont tous étudié presque exclusivement l’âme humaine. La montagne qui
292
ul avec la nature dans une sorte d’ivresse morne,
il
parvenait à oublier la fuite des heures et de la vie : l’existence pe
293
de rocs et de glace. » Sénancour éprouvait ce qu’
il
appela, d’un mot admirable, « la lenteur des choses ». C’est qu’il a
294
ot admirable, « la lenteur des choses ». C’est qu’
il
a pénétré dans ces solitudes que les autres contemplaient d’en bas ;
295
ille attitude ne surprendra pas un moderne ; mais
elle
est unique dans la littérature française du xixe . La littérature ang
296
ur. L’homme seul en face des sommets, qu’écrira-t-
il
? — Shelley : « L’immensité de ces sommets aériens excite, lorsqu’ils
297
L’immensité de ces sommets aériens excite, lorsqu’
ils
frappent la vue, un sentiment d’extase émerveillée auquel la folie n’
298
uence ni de pieuse fadeur. La montagne, ne serait-
elle
jamais qu’un écrasant symbole de l’éternité ? — C’est aussi quelque c
299
une atmosphère des hauteurs, que l’air y est vif.
Il
faut être créé pour cette atmosphère, sinon l’on risque beaucoup de p
300
. Celui-ci se promène, l’autre escalade. Et comme
elles
s’opposent à la médiocre littérature qui transforme les sommets en im
301
a montagne n’est ni bienveillante ni maternelle ;
elle
poursuit une grandiose existence géologique sans rapport avec la nôtr
302
nt trouver sur ses flancs l’occasion d’une lutte…
elle
ignorera toujours ces victoires. » Nous empruntons ces lignes au très
303
(Sterne, Toepffer), lyriques (les Anglais). Ici,
elles
imposent une éthique. Là, elles prêtaient le romantisme de leur décor
304
es Anglais). Ici, elles imposent une éthique. Là,
elles
prêtaient le romantisme de leur décor ; ici, par l’effort de discipli
305
e leur décor ; ici, par l’effort de discipline qu’
elles
exigent de qui veut les vaincre, c’est un classicisme héroïque qu’ell
306
eut les vaincre, c’est un classicisme héroïque qu’
elles
inspirent. Ce thème éthique et philosophique paraît bien être le plus
307
s fécond et le plus adéquat à la nature alpestre.
Il
contient en puissance toute une morale de l’effort individuel et dési
308
zsche l’a développé avec une ampleur inégalable :
il
y trouvait tous les symboles de la vie dangereuse, du risque, du trio
309
ue, du triomphe conquis par la dureté. Mais l’a-t-
il
épuisé ? Il y a depuis Nietzsche un style alpestre dans la pensée. Ne
310
che un style alpestre dans la pensée. Ne pourrait-
il
pas informer d’autres pensées que les malédictions de Zarathoustra ?
311
e créer véritablement quelques valeurs nouvelles,
il
se peut que certains se tournent vers ces derniers symboles physiques
312
r l’équivalent. Peut-être le goût du sport trahit-
il
la nostalgie d’une vie qui comporterait des risques extérieurs. Mais
313
r », et certains sont remarquables. Se trouvera-t-
il
un romancier pour animer dans le décor des « hauts lieux » autre chos
314
Kagawa (septembre 1931)l m Dire de ce livre qu’
il
ne ressemble à rien serait une louange trop littéraire. C’est un livr
315
grandeur. Peut-être, se dit-on en le fermant, est-
il
réellement impossible à une âme chrétienne d’atteindre la grandeur mo
316
âme chrétienne d’atteindre la grandeur morale si
elle
n’a pas connu, ne fût-ce que par sa puissance de sympathie, la misère
317
eur. L’existence et l’action de Kagawa, telles qu’
il
les raconte dans ces deux volumes, témoignent que l’amour chrétien pe
318
ué par le communisme, comme son bien propre. Mais
il
n’y a pas là de quoi nous rassurer. Si la vie de Kagawa glorifie l’Év
319
assurer. Si la vie de Kagawa glorifie l’Évangile,
elle
accuse formellement la grande majorité des chrétiens. Tant mieux si c
320
chrétiens. Tant mieux si ce livre nous passionne.
Il
faudrait surtout qu’il nous trouble. ⁂ L’autobiographie de Toyohiko K
321
i ce livre nous passionne. Il faudrait surtout qu’
il
nous trouble. ⁂ L’autobiographie de Toyohiko Kagawa, publiée au Japon
322
es meneurs écrive un livre pour nous dire comment
il
voit le peuple, comment il l’aime, et quel est le secret de son autor
323
pour nous dire comment il voit le peuple, comment
il
l’aime, et quel est le secret de son autorité sur lui. L’état d’espri
324
’État. Le privilège admirable de Kagawa, c’est qu’
il
poursuit son action en pleine connaissance de cause et de buts, en pl
325
is même sentimentale), et avec sa foi chrétienne.
Il
peut livrer sans crainte le secret d’une telle action ; sans crainte
326
ment envahi par la civilisation d’une Europe dont
il
rejette la religion24. Nous savions aussi que ce leader social, cet é
327
atteint des tirages sans précédent dans son pays.
Il
nous restait à entrer en contact personnel avec cette œuvre : Avant l
328
e œuvre : Avant l’Aube comble cette attente, mais
elle
en fait naître une nouvelle. C’est, en effet, sous la forme d’un roma
329
esques ou exceptionnels qui marquèrent leur vie ;
ils
négligent volontiers ce qui les rend semblables au commun des mortels
330
des mortels ; bref, plus ou moins inconsciemment,
ils
contribuent à créer leur légende. Ici, bien au contraire, et surtout
331
ncient radicalement notre vie d’un conte de fées.
Il
n’y a là, de la part de l’auteur, nul parti pris de « réalisme » litt
332
térielle, et c’est par là que dans sa simplicité,
il
parvient à être si émouvant. On peut dire que dans ces deux gros volu
333
t dire que dans ces deux gros volumes si nourris,
il
n’y a pas deux lignes d’allure conventionnelle, deux lignes qui ne tr
334
s, de personnages et de descriptions des lieux où
ils
vivent. C’est dire que l’œuvre mérite l’effort d’attention soutenue q
335
lle œuvre : c’est toute la vie du Japon actuel qu’
elle
concrétise sous nos yeux. Certes, ce n’est pas une japonerie d’estamp
336
du pays, au travers duquel nous emmène Kagawa :
Il
appuya son front chaud et malade contre la fenêtre, ferma les yeux et
337
ain faisait un bruit épouvantable dans sa course.
Il
pensait que c’eût été bien agréable si le wagon entier eût été de ver
338
calculable de stations. Regardant par la fenêtre,
il
vit d’affreux noms de gares tels que Tenman, Tamazukuri, tout à fait
339
train longeait les bords de la rivière Yodogawa,
il
se rappela soudain que c’était un endroit célèbre pour les suicides,
340
était un endroit célèbre pour les suicides, et qu’
il
avait vu un jour, au théâtre, à Kobé, le drame du suicide de Akaneya
341
nkatsu, sa bien-aimée. Suicide et Osaka la nuit !
Il
ne comprenait pas pourquoi ces deux mots lui semblaient avoir des rap
342
cident, mais sont oubliées, comme partout, dès qu’
il
s’agit d’embarras d’argent, de difficultés sentimentales, ou de mauva
343
urtant jamais dupe de ses beaux sentiments lorsqu’
il
s’y mêle des motifs tout matériels. Ses larmes augmentèrent en pensa
344
nsant à la pauvreté de sentiments des chrétiens ;
il
pensait aussi que lui-même, à la fin du mois, devrait gagner sa pensi
345
mois, devrait gagner sa pension et son écolage ;
il
pensait au sort de Tsukamoto ; à sa stupide petite sœur, à lui-même,
346
kamoto ; à sa stupide petite sœur, à lui-même, et
il
éclata en sanglots. Soudain, il prit une décision. Il quitterait l’Un
347
r, à lui-même, et il éclata en sanglots. Soudain,
il
prit une décision. Il quitterait l’Université pour se plonger dans la
348
clata en sanglots. Soudain, il prit une décision.
Il
quitterait l’Université pour se plonger dans la vie active et mettre
349
tager la vie quotidienne des gens de la campagne.
Il
serait auprès de sa sœur, que personne n’aimait. Il décida de retourn
350
serait auprès de sa sœur, que personne n’aimait.
Il
décida de retourner chez lui la nuit même, et après s’être demandé av
351
après s’être demandé avec quelque anxiété comment
il
ferait face aux dépenses du voyage, il décida de vendre ses livres.
352
té comment il ferait face aux dépenses du voyage,
il
décida de vendre ses livres. Mais son retour au foyer provoque des s
353
st de le mettre à l’abri de la véritable justice.
Il
finit par mettre Eiichi à la porte. Il lui reste la ressource de se f
354
e justice. Il finit par mettre Eiichi à la porte.
Il
lui reste la ressource de se faire instituteur. Il assiste un soir, p
355
l lui reste la ressource de se faire instituteur.
Il
assiste un soir, par hasard, à une réunion d’évangélisation dont la d
356
pourtant fort émouvante par moments. C’est là qu’
il
retrouve Tsuruko, la belle jeune fille qu’il aimait dans son adolesce
357
à qu’il retrouve Tsuruko, la belle jeune fille qu’
il
aimait dans son adolescence. Et l’idylle passionnée se renoue, mais e
358
r personnel avec l’idéal de rénovation sociale qu’
il
a conçu ? Et comment trouver le courage de se donner à cet idéal, don
359
dont la réalisation pratique lui répugne encore ?
Il
s’en rend compte lors de sa première visite aux bas-fonds : Eiichi é
360
et de se plonger dans ses livres de philosophie.
Il
entendait une voix intérieure qui lui disait : « Si tu te mêles de ce
361
de le quitter. Alors dans un accès de désespoir,
il
tente de mettre le feu à sa maison. Il s’enfuit, et s’engage comme ma
362
désespoir, il tente de mettre le feu à sa maison.
Il
s’enfuit, et s’engage comme manœuvre dans les docks. La mort de son p
363
n même temps décide de l’orientation de sa vie :
Il
avait vu mourir Sanuki au logement ouvrier, et il ne pensait pas que
364
Il avait vu mourir Sanuki au logement ouvrier, et
il
ne pensait pas que la mort de son père fût particulièrement important
365
mort de son père fût particulièrement importante.
Il
avait appris qu’il faut avoir une volonté de fer, lorsqu’on tombe dan
366
t particulièrement importante. Il avait appris qu’
il
faut avoir une volonté de fer, lorsqu’on tombe dans la lie de la soci
367
s et Eiichi à leur suite entourèrent le cercueil,
il
ne put retenir ses larmes. Tandis qu’il marchait en silence à la suit
368
cercueil, il ne put retenir ses larmes. Tandis qu’
il
marchait en silence à la suite de la procession funèbre, toutes ses r
369
ensa Eiichi, il y avait la redoutable réalité, et
il
pleura de crainte et de tristesse. Tout inspirait le respect : le bru
370
ec le passé, comme on franchit le pas de la mort,
il
lutterait contre les conventions établies, les traditions et les soph
371
qui était fou, Eiichi décida que, de ce jour-là,
il
entrerait en bataille contre cet ordre de choses. Il se délivre prog
372
ntrerait en bataille contre cet ordre de choses.
Il
se délivre progressivement de tous ses intérêts matériels et familiau
373
our en même temps que sa révolte contre ce monde.
Il
se convertit enfin, brusquement, au moment où il avait décidé de se s
374
Il se convertit enfin, brusquement, au moment où
il
avait décidé de se suicider. Mais un soir qu’il prêche au carrefour,
375
ù il avait décidé de se suicider. Mais un soir qu’
il
prêche au carrefour, la maladie qui depuis longtemps l’enfiévrait, le
376
évrait, le terrasse, dans la boue, sous la pluie.
Il
renaîtra bientôt à la vie, mais cette fois pour se donner tout entier
377
er tout entier à la misère des bas-fonds de Kobé.
Il
fait siennes toutes les épreuves d’un peuple misérable, des pires bru
378
reuves d’un peuple misérable, des pires brutes qu’
il
recueille dans sa chambre, et qu’il couvre de ses propres habits, des
379
res brutes qu’il recueille dans sa chambre, et qu’
il
couvre de ses propres habits, des prostituées qu’il soigne, des ivrog
380
couvre de ses propres habits, des prostituées qu’
il
soigne, des ivrognes qui lui font des scènes effroyables, et vont jus
381
pêche pas de les reprendre ensuite, chez lui, car
il
professe avec fanatisme la non-résistance au mal. Bientôt il prend fi
382
avec fanatisme la non-résistance au mal. Bientôt
il
prend figure de saint parmi le peuple qui le respecte, l’exploite et
383
ait à intimider Eiichi. Eiichi garda le silence ;
il
ne voulait pas se laisser aller à la colère comme le Procureur. Au co
384
ler à la colère comme le Procureur. Au contraire,
il
en profita pour faire une étude psychologique, en observant sur le vi
385
xpressions changeantes qu’y imprimait la passion.
Il
lui semblait qu’il faisait une étude pratique de désordre mental dans
386
tes qu’y imprimait la passion. Il lui semblait qu’
il
faisait une étude pratique de désordre mental dans une classe d’école
387
de désordre mental dans une classe d’école, tant
il
était calme et loin d’être troublé. En regardant les choses de près,
388
d’être troublé. En regardant les choses de près,
il
conclut que la profession de procureur devait être vraiment bien désa
389
eur devait être vraiment bien désagréable, puisqu’
elle
exigeait de celui qui s’y livrait de se fâcher, de se poser comme jus
390
juste et de juger ses semblables. Pire que cela,
elle
portait à croire que tous les hommes sont coupables. Ceci acquit au P
391
les procureurs passent leur vie, pensait Eiichi,
il
est impossible de ne pas leur témoigner de la sympathie. — Qu’est-ce
392
avait des procureurs dans le monde des moineaux.
Il
se taisait, car il savait qu’il était inutile de dire quoi que ce soi
393
rs dans le monde des moineaux. Il se taisait, car
il
savait qu’il était inutile de dire quoi que ce soit à cet homme en co
394
nde des moineaux. Il se taisait, car il savait qu’
il
était inutile de dire quoi que ce soit à cet homme en colère. Trois,
395
reur regardait distraitement son carnet de notes.
Il
tremblait jusqu’au bout des doigts. Il eut été impossible de dire leq
396
de notes. Il tremblait jusqu’au bout des doigts.
Il
eut été impossible de dire lequel des deux était le juge de l’autre.
397
instants devant la beauté singulière de l’âme qu’
elle
révèle. Une âme qui sent tout avec force et délicatesse, éprouve tous
398
e tous les penchants humains, s’y soustrait quand
il
le faut pour mieux vivre et n’en fait jamais une affaire. Homme terri
399
décrivant ses tentations comme toutes naturelles,
il
surmonte les obstacles avec un contentement modeste et intelligent qu
400
out dans le bien, dans la sainteté, mais toujours
ils
s’accompagnent d’une mesure parfaite dans l’appréciation. Il semble q
401
agnent d’une mesure parfaite dans l’appréciation.
Il
semble qu’il n’ait aucune peine à se juger impartialement, sans exagé
402
mesure parfaite dans l’appréciation. Il semble qu’
il
n’ait aucune peine à se juger impartialement, sans exagérer sa critiq
403
exagérer sa critique et sans nulle complaisance.
Il
n’a pas de terribles remords, il a des remords. Il ne cherche pas à s
404
le complaisance. Il n’a pas de terribles remords,
il
a des remords. Il ne cherche pas à se rendre intéressant à lui-même e
405
l n’a pas de terribles remords, il a des remords.
Il
ne cherche pas à se rendre intéressant à lui-même en poussant au noir
406
u contraire en s’excitant sur ses belles actions.
Il
les note, simplement, sans oublier d’indiquer ses hésitations, les tr
407
t toujours à l’effarante sincérité de ce récit qu’
il
faut revenir, si l’on veut d’un mot le caractériser. Parmi les innomb
408
rables sentiments : doutes, passions, conflits qu’
il
met en jeu, c’est toujours l’absence absolue d’hypocrisie de sa part
409
e des motifs de ses actions journalières. Par là,
il
fait souvent penser aux grands Russes, à Tolstoï surtout. Et par tous
410
sespéré, — « heureusement, personne ne regardait,
il
se jeta par terre sur la route, criant à son corps : “Meurs !”, mais
411
nt s’emparer de lui et décide de sa conversion :
Il
se décida à tout accepter, oui, tout. Il accepterait la vie et toutes
412
rsion : Il se décida à tout accepter, oui, tout.
Il
accepterait la vie et toutes ses manifestations dans le temps. Il éta
413
a vie et toutes ses manifestations dans le temps.
Il
était ressuscité de l’abîme du désespoir et revenu au monde merveille
414
bîme du désespoir et revenu au monde merveilleux.
Il
résolut de vivre fermement dans sa sphère actuelle, enrichi par la fo
415
les filles, les bateaux à vapeur, même le vide qu’
il
avait cherché, étaient merveilleux. Les couleurs, la lumière du solei
416
péché et le cœur souillé, tout était étonnement.
Il
acceptait tout. Il décida de vivre fermement, de prendre courage et d
417
ouillé, tout était étonnement. Il acceptait tout.
Il
décida de vivre fermement, de prendre courage et de lutter bravement
418
e et de lutter bravement à l’avenir, et pour cela
il
accepterait tout de l’existence. Il accepterait aussi la religion ave
419
et pour cela il accepterait tout de l’existence.
Il
accepterait aussi la religion avec le courage du suicide. Dans sa rés
420
n avec le courage du suicide. Dans sa résolution,
il
se sentait graduellement attiré par le Christ. Il se disait que ce n’
421
il se sentait graduellement attiré par le Christ.
Il
se disait que ce n’était pas dans la mer qu’il fallait se jeter, mais
422
t. Il se disait que ce n’était pas dans la mer qu’
il
fallait se jeter, mais dans les merveilles du monde. Et voici que, le
423
merveilles du monde. Et voici que, le 14 février,
il
se décida à faire profession de disciple du Christ. Page étrange, en
424
moignage de sa conversion. En mystique véritable,
il
évite rigoureusement les expressions sentimentales ou rassurantes qui
425
e ou voiler sa difficulté. Les rares allusions qu’
il
fait à sa vie spirituelle n’en sont que plus émouvantes : Un dimanch
426
biki, au milieu des arbres, à côté d’un ruisseau,
il
passa trois heures et demie à lire tout l’Évangile selon saint Matthi
427
capable de suivre Jésus. Une autre fois, à midi,
il
monta sur le sommet d’une montagne en face du mont Maya et pria Dieu
428
gne et la mesure certaine. Au cours d’un livre où
il
se peint, aux prises avec toutes les formes du mal, jamais vous ne su
429
Et c’est l’un des secrets de sa puissance. ⁂ Mais
il
est temps de tirer de ce livre une conclusion capitale qui, sans dout
430
ans doute, fut l’objet déterminant de son auteur.
Elle
concerne la question sociale. Il s’attache à cette expression un « en
431
de son auteur. Elle concerne la question sociale.
Il
s’attache à cette expression un « ennui » qui sert à beaucoup de prét
432
t les réformes socialistes — mais cela dispense-t-
il
de chercher d’autres solutions ? Quant à ceux qui acceptent d’étudier
433
eux qui acceptent d’étudier à fond ces problèmes,
ils
ne les rendent, en général, guère attirants — (le devraient-ils ?) —
434
dent, en général, guère attirants — (le devraient-
ils
?) — ni même vivants — (ils le devraient.). Pour celui qui referme le
435
rants — (le devraient-ils ?) — ni même vivants — (
ils
le devraient.). Pour celui qui referme le livre de Kagawa, une certit
436
le n’admet peut-être de solution que personnelle.
Il
ne s’agit plus de la poser, sur le plan intellectuel, pour les autres
437
mbler vague. Mais le sens chrétien primitif n’est-
il
pas, avant tout, le sens de la pauvreté ? Qu’un Kagawa nous force à m
438
est toujours l’indice d’une complaisance, et vite
elle
en devient la rançon. (Divers, p. 75.) Ces quelques notes voudraient
439
crivains les plus justement célèbres de ce temps,
elle
aura du moins le mérite de la spontanéité, qualité dont Gide aime à d
440
ours paru plus rude que saine. Je ne pense pas qu’
il
faille opposer aux suggestions d’un moraliste trop subtil les vaniteu
441
en somme un plaidoyer pour André Gide. J’avoue qu’
il
sait dans un grand nombre de cas me convaincre ; et que, dans la plup
442
convaincre ; et que, dans la plupart des autres,
il
est si admirablement habile qu’on vote l’acquittement à main levée, s
443
Gide a presque toujours raison de ses juges, mais
il
sait avoir raison comme en s’excusant. Il apporte les plus délicats s
444
s, mais il sait avoir raison comme en s’excusant.
Il
apporte les plus délicats scrupules à sa justification, « prêt à tous
445
cements » (p. 59). Là où d’autres triompheraient,
il
met une sourdine. Car il sait que la modestie est la vertu de choix d
446
d’autres triompheraient, il met une sourdine. Car
il
sait que la modestie est la vertu de choix du classicisme. Et qu’il e
447
estie est la vertu de choix du classicisme. Et qu’
il
est le dernier de nos classiques… Pareille modestie est, d’ailleurs,
448
ailleurs, signe de force : les critiques auxquels
il
adressa les lettres reproduites dans ce recueil en savent quelque cho
449
ne soit pas si « mauvais » qu’on l’a dit, — ou qu’
il
a bien voulu s’en donner l’air — je suis prêt à le concéder au-delà d
450
air — je suis prêt à le concéder au-delà de ce qu’
il
espère. Par incompétence radicale. Ce qu’il faut certainement déplore
451
ce qu’il espère. Par incompétence radicale. Ce qu’
il
faut certainement déplorer, c’est de le voir utiliser des dons incomp
452
urper la forme du sacrifice ; et c’est en vain qu’
il
tenterait d’y loger autre chose que son égoïsme et sa coquetterie pro
453
nous joue la morale lorsque, se prenant pour fin,
elle
s’érige en dialectique indépendante. Si des sophismes de ce genre n’a
454
ntelligents, moins conséquents que M. Gide, ou qu’
ils
reculent devant l’audace de conclusions en toute logique inévitables.
455
dans un cercle de paradoxes et de malentendus où
il
semble qu’un esprit de cette classe ne devrait pas supporter qu’on l’
456
’on comprend que, non satisfait de s’y complaire,
il
croit y découvrir son originalité, ou comme il le dit : son « paysage
457
e, il croit y découvrir son originalité, ou comme
il
le dit : son « paysage intérieur ». « Je puis dire que ce n’est pas à
458
ans cette attitude sereinement contradictoire, où
il
voit l’essence de sa « réforme » et de sa nouveauté. Luther disait :
459
lui, se préoccupe sans cesse de faire entendre qu’
il
« pourrait autrement ». Que rien de ce qu’il écrit ne l’engage tout e
460
e qu’il « pourrait autrement ». Que rien de ce qu’
il
écrit ne l’engage tout entier. Qu’il n’est que spectateur de ses anta
461
ien de ce qu’il écrit ne l’engage tout entier. Qu’
il
n’est que spectateur de ses antagonismes. Dès lors, la morale qui, po
462
adictions. Sans doute, la psychologie moderne a-t-
elle
montré que l’homme était beaucoup moins simple qu’il ne le croyait. M
463
montré que l’homme était beaucoup moins simple qu’
il
ne le croyait. Mais la question reste de savoir si cette division int
464
la grandeur. ⁂ Ce livre manque d’ange et de bête.
Il
est merveilleusement intelligent. On n’y parle strictement que de psy
465
là même, d’une étrange indiscrétion. Gide saura-t-
il
rester un maître pour cette jeunesse qui aimait sa ferveur, mais que
466
rtaines phrases pourraient le laisser supposer qu’
il
écrivit en préface au livre récent d’un jeune aviateur, Antoine de Sa
467
ntoine de Saint-Exupéry. (Mais par quoi tiendra-t-
il
à les « équilibrer », un de ces jours, à les « gauchir »…) Le héros
468
mais dans l’acceptation d’un devoir. Gide aurait-
il
pressenti que l’ère n’est plus de certaines complaisances ? Pourquoi
469
t plus de certaines complaisances ? Pourquoi faut-
il
que l’image de cet aviateur m’évoque la fable : « Je suis oiseau, voy
470
a fable : « Je suis oiseau, voyez mes ailes. » Qu’
il
n’aille pas croire pourtant que désormais la vertu fera prime, les vi
471
ce. Kierkegaard, un homme qui ne vous lâche plus.
Il
a beaucoup parlé de lui-même. Mais là où d’autres produisent l’impres
472
es produisent l’impression pénible de se montrer,
il
arrive chez Kierkegaard une chose extraordinaire : soudain c’est lui
473
’oublier la grandeur. 25. Remarquons le tour qu’
il
adopte : « mais celui qui veut la perdre… » n. Rougemont Denis de,
474
elon lui, c’est un « André Gide vu de Genève » qu’
il
nous faudrait. M. Martinet a pris pour épigraphe la citation suivante
475
e pour maintenir à Gide une place instructive, qu’
il
est, depuis l’édit de Nantes, notre seul notable écrivain protestant2
476
é française n’avait été irrésistible, avait ce qu’
il
fallait pour devenir une manière de Genève maritime, de Hollande atla
477
e de M. Albert Thibaudet, nous ont fait penser qu’
il
existe bel et bien un Loti vu de Genève, non pas sous la forme d’un o
478
éjà la conscience éteinte ne la dirige plus et qu’
elle
flotte au hasard, sans but et sans attaches, cherchant uniquement à s
479
ormait le caractère, les livres étaient conduits,
ils
avaient une unité, un terme auquel ils arrivaient ; la vie n’est plus
480
conduits, ils avaient une unité, un terme auquel
ils
arrivaient ; la vie n’est plus aujourd’hui qu’une suite d’événements
481
i se succèdent, et les livres sont fragmentaires,
ils
se composent d’une série de tableaux parallèles. Les parties n’en son
482
n’en sont plus dérivées les unes des autres, mais
elles
s’étalent à la fois toutes ensemble. Dès l’année 1886, où il publiai
483
à la fois toutes ensemble. Dès l’année 1886, où
il
publiait son essai, Frommel donnait ainsi le diagnostic du roman mode
484
ainsi le diagnostic du roman moderne ; ne serait-
il
pas frappant, en effet, d’appliquer ses dernières lignes à des œuvres
485
que Frommel exprime au sujet de Mon Frère Yves.
Il
semble, en effet, que les âmes du xixe siècle soient plus profondes
486
plus profondes et plus voilées, plus inquiètes qu’
elles
ne le furent jamais. Serait-ce la civilisation toute seule qui les au
487
? Je ne sais ; l’âme humaine, je pense, depuis qu’
elle
existe, n’a pas changé de nature, et, si elle paraissait autrefois pl
488
qu’elle existe, n’a pas changé de nature, et, si
elle
paraissait autrefois plus simple, c’est qu’elle était peut-être plus
489
i elle paraissait autrefois plus simple, c’est qu’
elle
était peut-être plus chaste. Au temps où le domaine intérieur du recu
490
. L’existence apparente était plus calme parce qu’
elle
n’était qu’une partie de l’existence et qu’on cachait la meilleure ;
491
s’étalaient point au grand jour, il y avait pour
elles
une autre issue : la prière en portait l’expression, loin des oreille
492
des oreilles des hommes, jusqu’au trône de Dieu.
Il
n’en est plus ainsi maintenant ; l’âme est restée semblable, mais on
493
ombée sur la terre et l’anime de tout l’effort qu’
elle
portait sur les choses invisibles. La vie, désormais sans au-delà, sa
494
uprême besoin d’épanchement, s’est déversée, mais
elle
a mal choisi son confident : elle ne trouve aucune paix dans une inti
495
déversée, mais elle a mal choisi son confident :
elle
ne trouve aucune paix dans une intimité purement humaine : Et l’homm
496
Et l’homme seul répond à l’homme épouvanté 27.
Il
nous manque une étude sur les critiques protestants du xixe siècle.
497
omantisme, ceux d’un Frommel sur les écrivains qu’
il
appelle « positivistes » restent à peu près les seuls valables, à nos
498
e perspicacité prophétique. 26. Dire de Gide qu’
il
est un écrivain protestant est une façon de parler que beaucoup conte
499
rs assez ternes, pour le plaisir que par ailleurs
ils
donnent à notre intelligence plus avide, au fond, de formules adroite
500
la misère — des protestants sans foi »31. Quoi qu’
il
en fût d’ailleurs de la portée religieuse des trois œuvres, l’on se s
501
sur un plan supérieur à toute polémique : s’agit-
il
jamais en effet pour les témoins d’une confession, de faire le compte
502
de faire le compte de leurs gloires ? Ne doivent-
ils
pas au contraire considérer celles-ci comme leur accusation perpétuel
503
accusation perpétuelle ? Car la vraie question qu’
elles
posent, chrétiennement, c’est de savoir si nous les méritons encore.
504
s et prophètes, nous condamnent dans la mesure où
elles
furent authentiques. Mais d’autre part certaines « célébrités » polit
505
ignificative sévérité. Et dès lors, c’est cela qu’
il
nous paraît utile et nécessaire, aujourd’hui, de confesser. Aussi bie
506
r. Aussi bien, la force qui nous est promise doit-
elle
nous rendre ce courage léger. Le moralisme nous trahit Partons
507
eurs. Le problème, à vrai dire, les dépasse, mais
il
n’est pas mauvais de l’actualiser, de le rétrécir, si de la sorte nou
508
onheur purement égoïste, et par là si précaire qu’
il
côtoie bien souvent l’angoisse, ou pis encore : un sentiment d’indiff
509
d’inutilité. Quant à l’auteur de Saint-Saturnin,
il
semble qu’une véritable préméditation — où l’on n’eût voulu voir qu’u
510
drame antique. M. Saurat doit se tromper, lorsqu’
il
note que dans ce conflit moral, Dieu est « tranquillement oublié ». I
511
cette attitude, et de prolonger un malentendu qu’
ils
jugent peut-être flatteur, ou commode. Cette espèce de stoïcisme mora
512
ésions qui vont aux produits déviés de notre foi.
Il
est vrai que ceux-ci sont souvent les plus éclatants. Car un système
513
n système politique, une doctrine, une éthique, s’
ils
s’abandonnent de tout leur poids à quelque erreur interne, ne vont pa
514
ent à la ruine immédiate, dans notre monde tel qu’
il
est. Mais c’est parfois, bien au contraire, par leur succès et dans l
515
e, par leur succès et dans leur épanouissement qu’
ils
manifestent au jour leurs faussetés et qu’ils se trouvent, aux yeux d
516
qu’ils manifestent au jour leurs faussetés et qu’
ils
se trouvent, aux yeux de l’esprit, le plus durement jugés. Était-ce a
517
e tout semblable à celui des athées, — au lieu qu’
il
eût fallu du premier coup le dénoncer, comme radicalement contraire à
518
nvaincre ? Tel étant l’état des choses, suffira-t-
il
de déplorer une incompréhension publique dont nous sommes en grande p
519
protestant », tout ce qui rend inutile la grâce ?
Il
y va pourtant de notre force de conquête. Que nous le voulions ou non
520
vidé de toute théologie efficace. Peut-être vaut-
il
la peine de préciser ici et de pousser dans le détail une accusation
521
urgeoise. Nullement chrétienne d’ailleurs, puisqu’
elle
récusait à la fois la charité, le risque, l’abandon et la divine légè
522
l’abandon et la divine légèreté, c’est-à-dire, qu’
elle
récusait la grâce autant que le péché. La censure moraliste est avant
523
hé. La censure moraliste est avant tout peureuse.
Elle
« craint » la vérité ; non point au sens de ce verbe qui signifie la
524
ue, que Jésus n’a jamais craint. Et c’est en quoi
elle
révèle la faiblesse de sa théologie. Car il est certains cas où celui
525
uoi elle révèle la faiblesse de sa théologie. Car
il
est certains cas où celui qui craint de dire toute la vérité n’exprim
526
ne autocritique à la fois peureuse et agressive ?
Il
y faudrait une puissance décuplée, excessive, et qui, par la force de
527
oumis, de par leur sérieux traditionnel. Et quand
elle
n’est point parvenue à les étouffer, elle a souvent faussé le dévelop
528
t quand elle n’est point parvenue à les étouffer,
elle
a souvent faussé le développement de ces germes ; les produits d’une
529
comme une caricature de la sécheresse à laquelle
ils
s’opposent, mais qu’ils manifestent en même temps avec une ironie plu
530
la sécheresse à laquelle ils s’opposent, mais qu’
ils
manifestent en même temps avec une ironie plus cruelle souvent que la
531
s et célèbres que provoqua le moralisme perverti.
Il
eût conduit le protestantisme à la négation absolue de son essence35,
532
umanité ne possédait d’autres recours que ceux qu’
elle
peut imaginer en dehors de la grâce, c’est-à-dire la police des mœurs
533
us voici loin de nos auteurs. Si loin qu’en somme
ils
ne sont guère atteints par tout ceci. Mais quoi ? Le but ne fut jamai
534
us attendre ? Tout, d’un réveil dogmatique qui, s’
il
traduit et porte un réveil de la foi, ne peut manquer de libérer des
535
’évangélisme dans sa pureté, héroïque ou sereine,
il
faudrait pour en douter que l’on ait oublié les plus grands noms : Mi
536
étienne d’inspiration évangélique ? Souhaitons qu’
il
n’y faille pas les conjonctures sanglantes d’où naquirent les Tragiqu
537
alisme fut l’analyse d’états d’âme dans le doute,
il
est permis d’attendre de la violence même d’une théologie du Dieu Tou
538
nce même d’une théologie du Dieu Tout-Puissant qu’
elle
suscite de nouveaux psaumes36, qu’elle enflamme des chants prophétiqu
539
uissant qu’elle suscite de nouveaux psaumes36, qu’
elle
enflamme des chants prophétiques. Et l’Éternel enfin sera loué « selo
540
a loué « selon l’immensité de sa grandeur » comme
il
est dit au dernier psaume. 28. Denis Saurat, dans la Nouvelle Revu
541
on. 31. Charles Westphal, dans Le Semeur . 32.
Il
est entendu, même chez les protestants, qu’un « protestant qui écrit
542
ère moraliste, quelles que soient les opinions qu’
ils
adoptèrent vis-à-vis du moralisme. Qu’on me comprenne : ce n’est pas
543
: ce n’est pas à eux que j’en ai, mais à ce dont
ils
ont souffert. 34. Tout ceci appellerait une foule de nuances. Mais i
544
Tout ceci appellerait une foule de nuances. Mais
il
ne s’agit pas d’édulcorer. 35. Cf. A.-N. Bertrand, Protestantisme, p
545
ivités et domina constamment sa vie et son œuvre.
Il
n’y a peut-être pas d’individu plus significatif dans l’histoire de l
546
christianisme. Mais le plus grand Occidental fut-
il
chrétien ? Nous ne saurions, surtout dans Foi et Vie , aborder cette
547
l’angle de la curiosité littéraire ou historique.
Elle
pose cependant un problème que la conscience intellectuelle des chrét
548
ous sont posées comme autant d’accusations, et qu’
il
est de notre devoir d’envisager avec toute la bonne foi que nécessite
549
raisse avoir été cultivée par Goethe, ne prouve-t-
il
pas suffisamment l’inauthenticité de son christianisme ? Qu’est-ce qu
550
ts piétistes du jeune Goethe et la part active qu’
il
prit aux réunions de « belles âmes » suscitées par l’apostolat du com
551
’a enfin attrapé ; je courais trop vite pour lui,
il
m’a saisi par les cheveux. Il est sûrement à vos trousses aussi, j’es
552
trop vite pour lui, il m’a saisi par les cheveux.
Il
est sûrement à vos trousses aussi, j’espère voir le jour où il vous r
553
nt à vos trousses aussi, j’espère voir le jour où
il
vous rattrapera ; mais je ne puis répondre de la manière. Je suis par
554
oncours de circonstances cette « sagesse » devint-
elle
chez Goethe quelque chose qui, en fin de compte, ressemble si étrange
555
qui incombe aux « chrétiens » eux-mêmes, tels qu’
ils
apparurent à ce jeune homme plein d’une exigeante ferveur mystique. «
556
mystique. « Mes rapports avec les dévots — écrit-
il
de Strasbourg — ne sont pas très fréquents ici. Au début, je m’étais
557
, je m’étais tourné passionnément vers eux ; mais
il
semble que ce ne doive pas être. Ils sont si cordialement ennuyeux qu
558
rs eux ; mais il semble que ce ne doive pas être.
Ils
sont si cordialement ennuyeux quand ils s’y mettent que ma vivacité n
559
pas être. Ils sont si cordialement ennuyeux quand
ils
s’y mettent que ma vivacité n’y saurait tenir. Rien que des gens d’es
560
et croient qu’on ne peut aller plus loin parce qu’
ils
ignorent tout du reste. » C’est ce « reste » précisément que Goethe d
561
. Mais ce « reste », cette connaissance mystique,
il
ne tardera pas à découvrir qu’on n’y atteint qu’en outrepassant les l
562
nous ne savons presque rien de Dieu, ou plutôt qu’
il
est vain de chercher à en savoir plus que ce que la nature visible no
563
une légende, et une légende d’origine juive, car
elle
remonte à Heine. Elle est un mythe, au moyen duquel on peut faire de
564
égende d’origine juive, car elle remonte à Heine.
Elle
est un mythe, au moyen duquel on peut faire de l’agitation et de la p
565
e, si nous le jugeons du point de vue d’un parti.
Il
n’est pas païen, pour la raison péremptoire qu’il n’y a plus de païen
566
Il n’est pas païen, pour la raison péremptoire qu’
il
n’y a plus de païen, au sens antique du mot, depuis que la venue du C
567
mble des données religieuses. Mais, d’autre part,
il
faudrait un libéralisme dont nous nous sentons incapables pour admett
568
uté de la foi chrétienne l’homme qui a pu dire qu’
il
s’inclinait devant le Christ comme devant la « révélation divine du p
569
lation du Très-Haut, et même la plus puissante qu’
il
nous ait jamais été donné, à nous enfants de la terre, de percevoir.
570
a pensée la plus probe de se passer de Dieu quand
elle
juge le monde séparé de Dieu. Il n’est pas vrai de dire qu’un monde s
571
de Dieu quand elle juge le monde séparé de Dieu.
Il
n’est pas vrai de dire qu’un monde séparé de Dieu doit ou peut être e
572
it ou peut être envisagé comme un monde autonome.
Il
doit être envisagé comme manquant de quelque chose. Or, ce « quelque
573
» aux yeux de la foi, constitue sa raison d’être.
Il
n’y a pas de neutralité du monde vis-à-vis de Dieu — à cause du péché
574
ein d’une nature harmonieuse — et quand bien même
il
fait intervenir, à la fin, « l’amour d’En-Haut » venant à sa rencontr
575
adical. Mais un homme de l’envergure de Goethe, s’
il
ne peut être un argument pour nul parti, ne saurait, pour les mêmes r
576
parti et n’avons pas à utiliser qui que ce soit.
Il
suffit que nous puissions nous sentir à la fois accusés et exhortés p
577
oit —, mais seulement d’être, efficacement. Et qu’
il
nous y aide ! 37. Numéro d’hommage à Goethe de la Nouvelle Revue fr
578
tre de l’abstentionnisme et du célibat spirituel.
Ils
ont tous épousé une cause, une de ces causes qui engagent bien plus q
579
xtrêmes que ceux qui divisèrent les précédentes —
elle
éprouve son unité, elle connaît une fraternité en ceci : que la pensé
580
isèrent les précédentes — elle éprouve son unité,
elle
connaît une fraternité en ceci : que la pensée n’est plus pour elle u
581
raternité en ceci : que la pensée n’est plus pour
elle
une justification idéale de l’égoïsme ou de l’indifférence, mais une
582
out de réalisation personnelle, d’action éthique.
Il
n’a pas échappé à M. Benda que « le clerc moderne » (en tant qu’il se
583
é à M. Benda que « le clerc moderne » (en tant qu’
il
se montre préoccupé des conséquences nécessaires de la pensée dans l’
584
dans son essence, et par suite, dans l’action qu’
elle
commande à des millions de nos contemporains. Il y a aussi ceux qui s
585
n’ont pas encore vu — tout ce que cela implique.
Ils
voient bien le vice de la « pensée désintéressée », et qu’il faut s’a
586
ien le vice de la « pensée désintéressée », et qu’
il
faut s’affranchir d’une « liberté » stérilisante. Ils ne voient pas à
587
faut s’affranchir d’une « liberté » stérilisante.
Ils
ne voient pas à quel prix cet affranchissement devient possible ; ils
588
quel prix cet affranchissement devient possible ;
ils
ne voient pas encore qu’il faut choisir. Or, notre temps ne comporte
589
nt devient possible ; ils ne voient pas encore qu’
il
faut choisir. Or, notre temps ne comporte qu’un choix profond : chris
590
t que chrétiens, non pas en tant que bourgeois, s’
ils
le sont, ont des raisons réelles et valables de récuser une pensée et
591
pour lesquels la crise est dans les institutions.
Il
paraît supposer une rénovation intérieure, celle précisément que post
592
humaine. Sa critique nous paraît pertinente, mais
elle
serait plus efficace si on la sentait inspirée par un principe spirit
593
un esprit averti des vraies valeurs de ce temps.
Il
réfute MM. Berl et Guéhenno, sur la question de la culture dans ses r
594
n de la culture dans ses rapports avec le peuple.
Il
discute M. Malraux et son goût désespéré de l’action pour elle-même.
595
et son goût désespéré de l’action pour elle-même.
Il
condamne le populisme de M. Thérive, il condamne le pacifisme de M. T
596
lle-même. Il condamne le populisme de M. Thérive,
il
condamne le pacifisme de M. Thomas Mann, il condamne l’Amérique de Fo
597
rive, il condamne le pacifisme de M. Thomas Mann,
il
condamne l’Amérique de Ford et la Russie de Staline ; il adopte enfin
598
amne l’Amérique de Ford et la Russie de Staline ;
il
adopte enfin une position assez voisine de celle de MM. Aron et Dandi
599
Aron et Dandieu, sans aller jusqu’à prôner comme
ils
le font « la révolution nécessaire ». Certes, on ne saurait demander
600
s réunis après coup de fournir une doctrine. Mais
il
est inquiétant d’entendre M. Maulnier, dans sa préface, se déclarer s
601
gines politiques, et peut-être aussi sa jeunesse.
Il
critique des erreurs au nom d’une vérité toute statique, au nom de va
602
i, n’étant pas religieuses, sont donc abstraites.
Il
ne suffit pas de dire à ses contemporains qu’ils ont tort de penser c
603
. Il ne suffit pas de dire à ses contemporains qu’
ils
ont tort de penser ceci ou cela avec passion. Il faut encore leur don
604
ils ont tort de penser ceci ou cela avec passion.
Il
faut encore leur donner d’autres objets de passion. Ou bien il faut l
605
e leur donner d’autres objets de passion. Ou bien
il
faut leur rappeler des vérités d’un ordre tel que leur seule existenc
606
ités d’un ordre tel que leur seule existence — si
elles
existent — rende vaines les passions égarées, rende visible l’origine
607
. Ce n’est pas une férule : c’est un bon outil qu’
il
nous faut. Ce n’est pas son pessimisme que je reproche à M. Thierry M
608
essimisme que je reproche à M. Thierry Maulnier. (
Il
serait fou de ne pas le partager.) Je lui reproche de manquer d’exige
609
ns à coups de marteau qu’à coups d’épingle. Ce qu’
il
veut dégonfler, c’est la philosophie avec grand P, la doctrine offici
610
peut recommander la lecture de ce livre, parce qu’
il
a le mérite de poser simplement, brutalement, une de ces grandes ques
611
moderne a convenu d’appeler « naïves », parce qu’
elles
sont trop gênantes. Le livre est mal composé. Ses phrases courtes se
612
n uniformément péremptoire, ironique et hargneux.
Elles
redisent trois ou quatre fois de suite la même chose, sans ajouter au
613
l. Mais celui-ci, par bonheur, est très simple :
Il
n’y a point de questions plus grossières que celles qui sont posées i
614
ici. La philosophie présente qui dit et croit qu’
elle
se déroule au profit de l’homme, est-elle dirigée réellement, et non
615
roit qu’elle se déroule au profit de l’homme, est-
elle
dirigée réellement, et non plus en discours et croyances, en faveur d
616
ncrets ? À quoi sert cette philosophie ? Que fait-
elle
pour les hommes ? Que fait-elle contre eux ? Selon M. Nizan, la phil
617
sophie ? Que fait-elle pour les hommes ? Que fait-
elle
contre eux ? Selon M. Nizan, la philosophie régnante est caractérisé
618
s dans un temps où les philosophes s’abstiennent.
Ils
vivent dans un état de scandaleuse absence. Il existe un scandaleux é
619
. Ils vivent dans un état de scandaleuse absence.
Il
existe un scandaleux écart, une scandaleuse distance entre ce qu’énon
620
matière, la philosophie sans rime ni raison » … «
Il
n’y a aucune raison d’écarter ce genre de questions. Il n’y a aucune
621
a aucune raison d’écarter ce genre de questions.
Il
n’y a aucune raison de ne pas leur donner de réponses ». Au fond, M.
622
es. On dira sans doute que l’auteur exagère quand
il
dénonce le péril d’une pensée que l’on peut bien appeler scolastique,
623
le monde n’est plus mené par les philosophes, qu’
il
accorde à leur activité une importance qu’elle ne saurait avoir et lu
624
, qu’il accorde à leur activité une importance qu’
elle
ne saurait avoir et lui fait par suite des reproches démesurés. Certe
625
és. Certes40. Mais dans la mesure, si faible soit-
elle
, où la philosophie actuelle exerce une action, ne fût-ce que sur les
626
it, que compte faire M. Nizan pour les hommes ? —
Il
compte leur apporter le marxisme. Or, s’il est clair que le marxisme
627
es ? — Il compte leur apporter le marxisme. Or, s’
il
est clair que le marxisme prétend travailler pour l’homme en général,
628
xisme prétend travailler pour l’homme en général,
il
n’est pas moins clair qu’il tombe par là même sous le coup d’une crit
629
r l’homme en général, il n’est pas moins clair qu’
il
tombe par là même sous le coup d’une critique semblable à celle que M
630
icg, le bourgeois. C’est le prolétaire pour Marx.
Il
s’en faut de beaucoup que la notion du prolétaire marxiste, fondée su
631
u livre de M. Nizan n’inspire pas la certitude qu’
il
aime les hommes, qu’il aime aucun homme réel et concret. Au contraire
632
nspire pas la certitude qu’il aime les hommes, qu’
il
aime aucun homme réel et concret. Au contraire, il en émane une sorte
633
l aime aucun homme réel et concret. Au contraire,
il
en émane une sorte de mépris satisfait qui révèle un intellectuel déc
634
telle situation quotidienne, répète M. Nizan. Et
il
propose Marx. Je demande en quoi Marx peut nous aider à vivre, à mour
635
gélique. Et je demande maintenant aux chrétiens s’
ils
le savent eux-mêmes ; s’ils prouvent qu’ils le savent. S’ils n’ont pa
636
enant aux chrétiens s’ils le savent eux-mêmes ; s’
ils
prouvent qu’ils le savent. S’ils n’ont pas trop souvent cherché auprè
637
ens s’ils le savent eux-mêmes ; s’ils prouvent qu’
ils
le savent. S’ils n’ont pas trop souvent cherché auprès de philosophes
638
nt eux-mêmes ; s’ils prouvent qu’ils le savent. S’
ils
n’ont pas trop souvent cherché auprès de philosophes secrètement avid
639
adical constitue un progrès sur la libre-pensée :
il
force au choix, à la prise de conscience. La révolution menaçante vi
640
« Histoires du monde, s’
il
vous plaît ! » (janvier 1933)t Le lecteur moderne est, paraît-il,
641
(janvier 1933)t Le lecteur moderne est, paraît-
il
, un homme pressé, beaucoup plus pressé que ne le furent ses ancêtres
642
t-ce peut-être à cause des innombrables moyens qu’
il
a inventés pour « gagner du temps » ? Il semble que tout ce que fait
643
oyens qu’il a inventés pour « gagner du temps » ?
Il
semble que tout ce que fait l’humanité se retourne contre elle-même).
644
ntre elle-même). Que doit lire un homme pressé, s’
il
demande aux livres autre chose que ce que peut lui offrir le conte du
645
ut lui offrir le conte du journal, c’est-à-dire s’
il
demande une nourriture rapidement assimilable, mais tout de même reco
646
époque vient de redonner une très vive nouveauté.
Il
est bien remarquable, en effet, de constater, en parcourant les catal
647
mme l’Essai sur la France, de E. R. Curtius, dont
il
fut parlé ici même, ou le Dieu est-il Français, de F. Sieburg, donner
648
rtius, dont il fut parlé ici même, ou le Dieu est-
il
Français, de F. Sieburg, donneront une idée assez juste du genre. Son
649
(Le Déclin de l’Occident) et du comte Keyserling.
Il
faut reconnaître que l’état général du pays explique que ces ouvrages
650
rages aient rencontré d’emblée le grand succès qu’
ils
méritaient. Les Allemands vivent « la crise » depuis 1919, et l’atmos
651
idéologie que manifeste le grand public allemand.
Il
est bien naturel qu’une société qui jouit d’une relative sécurité che
652
un genre bourgeois — et c’est peut-être par là qu’
il
plaît tant au peuple. Le bourgeois qui rentre chez lui après 8 heures
653
, et d’abord en essayant de comprendre la menace.
Il
veut des documents, des explications, des directives. Ne fût-ce, souv
654
e au « goût » tout court, c’est-à-dire à la mode.
Il
fallut la petite équipe des fondateurs de la Nouvelle Revue française
655
istoriette sentimentale. Mais tout cela, semble-t-
il
, s’évanouit en fumée, comme les fusées d’une fête intempestive. On de
656
urgeois, privé de risques et d’aventures réelles,
il
représentait une évasion, une revanche nécessaire contre l’ennui, — l
657
vre, le romanesque éclate, remplit nos vies, ou s’
il
n’y pénètre pas encore, les baigne d’une atmosphère menaçante dont il
658
ncore, les baigne d’une atmosphère menaçante dont
il
devient impossible de ne pas prendre conscience. Alors, toutes les no
659
tous les éditeurs. Et ces éditeurs, que publient-
ils
? Des collections documentaires, des reportages à grande distance, le
660
e photos qui pour la première fois, nous semble-t-
il
, mettent sur notre table le monde tel qu’il est. Quel romancier pourr
661
ble-t-il, mettent sur notre table le monde tel qu’
il
est. Quel romancier pourrait nous apporter l’équivalent de cette visi
662
capable désormais de s’en distraire en le fuyant,
il
cherche à l’expliquer, avec une passion nouvelle. Nous avons vu paraî
663
Weltgeschichte gefälligst », Histoire du monde, s’
il
vous plaît ! ⁂ Retour à l’essai rendu nécessaire par le besoin de met
664
, de curiosités académiques ou de mandarinades qu’
il
s’agit, mais c’est du sort de l’homme tel qu’il est, dans son effaran
665
u’il s’agit, mais c’est du sort de l’homme tel qu’
il
est, dans son effarante et magnifique diversité. Sort menacé, comme i
666
rante et magnifique diversité. Sort menacé, comme
il
le fut de tout temps, certes, mais de nos jours, plus visiblement, pl
667
rs, plus visiblement, plus universellement. Quand
il
y va de tous, il y va de chacun. 41. Dont le meilleur volume, à ce
668
ent, plus universellement. Quand il y va de tous,
il
y va de chacun. 41. Dont le meilleur volume, à ce jour, est sans do
669
t. Rougemont Denis de, « Histoires du monde, s’
il
vous plaît ! », Foi et Vie, Paris, janvier–février 1933, p. 134-139.
670
On ne nous parle plus que du « désarroi actuel ».
Il
n’est pas d’expression plus juste, pour qui se borne à considérer not
671
dictoires qui s’affrontent au milieu du désordre.
Il
n’est pas d’expression plus fausse, et même plus dangereuse, pour qui
672
acrent leur astuce à équilibrer des budgets, dont
ils
seront les seuls bénéficiaires. La corruption s’étale, flétrie avec g
673
nnue, dénoncée et battue en brèche. Notre époque,
elle
aussi, possède sa chance de grandeur. Je dirai même qu’elle a plus de
674
, possède sa chance de grandeur. Je dirai même qu’
elle
a plus de chances qu’aucune autre. Le vieux « désordre » qui couvait
675
pparences paisibles, est soudain devenu flagrant.
Il
promène par les rues de nos villes européennes de grands panneaux-réc
676
eaux-réclame qui parlent un langage clair. Jamais
il
ne fut plus facile de reconnaître les choix nécessaires. Désordre, ou
677
poque. Je voudrais décrire cette époque, telle qu’
elle
nous apparaît de ce point de vue, en quelques traits fort simples. J’
678
On répète que les événements nous dominent et qu’
ils
sont incompréhensibles et impensables. Ce n’est pas vrai ! C’est enco
679
i, chaque fois que nous venons dire : voici ce qu’
il
faut faire, nous répondent : Attention ! le problème est plus complex
680
blèmes ne sont pas si complexes, en réalité, ou s’
ils
le sont, osons les simplifier. Ce qui est difficile, ce n’est pas de
681
st pas de voir le vrai, c’est d’oser les actes qu’
il
faut, et que nous connaissons très bien. Trop souvent, nos maîtres no
682
thodes d’évasion dans la complexité. Trop souvent
ils
nous ont mis en garde contre un « certain esprit simpliste », qui est
683
énements nous réveillent brusquement. Maintenant,
il
va falloir choisir. La pensée redevient un danger, un facteur de choi
684
tre le secret de tout le mal dont nous souffrons.
Il
suffit, pour le faire apparaître, de poser cette simple question : co
685
er cette simple question : comment un siècle peut-
il
avoir un destin ? En réalité, il n’y a de destin que personnel. Seul
686
t un siècle peut-il avoir un destin ? En réalité,
il
n’y a de destin que personnel. Seul un homme peut avoir un destin, un
687
e peut avoir un destin, un homme seul, en tant qu’
il
est différent des autres hommes. Napoléon, César, Lénine ont un desti
688
acun de nous possède une raison d’être, quelle qu’
elle
soit, une servitude particulière, une passion qui est bien à lui, une
689
pour que ces ismes aient, à nos yeux, un destin,
il
faut que nous ayons pris l’habitude de les considérer comme autant de
690
thée, et consciemment athée. Mais, en même temps,
il
est polythéiste et superstitieux au dernier degré. La grande majorité
691
nos contemporains ne croit pas en Dieu et sait qu’
elle
n’y croit pas. Mais elle garde chevillé au cœur le besoin d’obéir à d
692
t pas en Dieu et sait qu’elle n’y croit pas. Mais
elle
garde chevillé au cœur le besoin d’obéir à des forces invisibles et d
693
classe, la race, l’argent et l’opinion publique.
Elles
ont encore un autre nom, et qui est commun à toutes : c’est le Nombre
694
maîtresses de cette première moitié du siècle. Qu’
il
s’agisse bien là de dieux, c’est ce que nous prouvent abondamment leu
695
on Trotski, s’explique entièrement par le fait qu’
il
était, à la fin de la guerre, caporal dans l’armée allemande. Son idé
696
isante, vraisemblable même. Que répondra Hitler ?
Il
répondra que tout ce que dit Trotski, s’explique simplement par le fa
697
adictoires ! Sur le plan politique tout au moins,
ils
paraissent s’opposer avec une certaine violence, mais par rapport à l
698
ne certaine violence, mais par rapport à l’homme,
ils
sont absolument semblables et nous pouvons les renvoyer dos à dos. L’
699
race. Destin du siècle contre destin de l’homme.
Il
faut bien reconnaître qu’en cette année 1934, l’homme se défend très
700
omme se défend très mal. Et comment se défendrait-
il
quand il adore tout ce qui veut sa perte ? Nos camarades marxistes ou
701
éfend très mal. Et comment se défendrait-il quand
il
adore tout ce qui veut sa perte ? Nos camarades marxistes ou racistes
702
marxistes ou racistes ont bien vu le danger. Mais
ils
en tirent une conclusion inattendue. Reprenant le mot de Goethe, sans
703
ndue. Reprenant le mot de Goethe, sans le savoir,
ils
nous enseignent que la loi seule nous conduit à la liberté. Adhérez a
704
toutes vos inquiétudes s’apaiseront. Bien. Mais
il
faut prendre garde d’abord de confondre le sacrifice et le suicide. L
705
miliciens hitlériens s’indignent de ce reproche.
Ils
nous répondent, avec raison, que leur action n’a pas les apparences d
706
es apparences d’une évasion, d’une démission ; qu’
ils
n’ont pas fui les risques et qu’ils ont exposé leurs vies. Enfin, qu’
707
émission ; qu’ils n’ont pas fui les risques et qu’
ils
ont exposé leurs vies. Enfin, qu’ils sont animés par une foi construc
708
isques et qu’ils ont exposé leurs vies. Enfin, qu’
ils
sont animés par une foi constructive que bien des jeunes bourgeois ra
709
vier. C’est juste. Aussi bien la question revient-
elle
en définitive à savoir si la foi des marxistes et des racistes est vr
710
es et des racistes est vraie. Sur quoi se fonde-t-
elle
? Quelles réalités sont à la base ? De l’aveu même des sociologues ma
711
e Léon Chestov disait un jour à quelques amis : «
Il
paraît qu’il existe deux théories tout à fait opposées concernant l’o
712
v disait un jour à quelques amis : « Il paraît qu’
il
existe deux théories tout à fait opposées concernant l’origine du gen
713
e l’homme descend du singe, les autres croient qu’
il
a été créé par Dieu. Ils se disputent énormément. Je crois qu’ils ont
714
ge, les autres croient qu’il a été créé par Dieu.
Ils
se disputent énormément. Je crois qu’ils ont tort de se disputer, par
715
ar Dieu. Ils se disputent énormément. Je crois qu’
ils
ont tort de se disputer, parce qu’ils ont raison les uns et les autre
716
Je crois qu’ils ont tort de se disputer, parce qu’
ils
ont raison les uns et les autres. Ma théorie est la suivante : ceux q
717
créés par Dieu, et qui, eux, croient et savent qu’
ils
ont été créés par Dieu. » Cette petite histoire ne s’applique pas seu
718
aussi bien aux partisans de Marx et de Gobineau.
Il
est tout à fait vrai que les adeptes du marxisme et du racisme sont e
719
es mène et poussent le monde dans la direction où
il
doit tomber fatalement, si on le laisse tomber. En cela, ils sont peu
720
mber fatalement, si on le laisse tomber. En cela,
ils
sont peut-être supérieurs aux libéraux et aux dilettantes qui tombent
721
’évoquer la liberté et les idéaux supérieurs dont
ils
s’éloignent de plus en plus. Mais j’ai beau ne pas croire, pour mon c
722
té de tous ces mythes, j’ai beau ne pas croire qu’
ils
aient le droit de disposer de nos vies, je suis bien obligé de reconn
723
s, je suis bien obligé de reconnaître qu’en fait,
ils
nous dominent. Ne fût-ce que par le moyen de la presse. On peut dire,
724
nt nous n’en finirions pas. L’argent est partout,
il
est dans tout, il est tout et tous le servent. ⁂ Destin du siècle, d
725
ions pas. L’argent est partout, il est dans tout,
il
est tout et tous le servent. ⁂ Destin du siècle, destin des ismes, d
726
ans la masse anonyme. Je crois que c’est là ce qu’
il
peut faire de mieux. L’individu, tel que le concevait le dernier sièc
727
siècle ». La jeunesse découvrait avec angoisse qu’
elle
n’avait plus rien ni personne à servir. C’est l’état le plus dégradan
728
que l’individu des libéraux était sans destin, qu’
il
a cru au destin des autres ; c’est parce qu’il n’avait pas de vocatio
729
qu’il a cru au destin des autres ; c’est parce qu’
il
n’avait pas de vocation, qu’il a voulu servir la vocation de sa race.
730
s ; c’est parce qu’il n’avait pas de vocation, qu’
il
a voulu servir la vocation de sa race. La meilleure preuve, d’ailleur
731
uté nouvelle que l’individualisme avait dissoute.
Il
n’y a jamais eu autant de ligues, de groupements, de partis et d’asso
732
ême civilisation. Mais cette solidarité, que vaut-
elle
? Le premier exemple qui vous vient à l’esprit, lorsqu’on vous dit qu
733
itude. J’ai terminé ma description du siècle. Est-
elle
pessimiste à l’excès ? Ce n’est pas cela qu’il nous importe de savoir
734
-elle pessimiste à l’excès ? Ce n’est pas cela qu’
il
nous importe de savoir. Si j’ai simplifié le tableau, c’est que je ve
735
que. Vous avez pressenti le parti que j’embrasse.
Il
me reste à le définir en termes positifs, cette fois. Les dieux, les
736
, ou désirer leur destruction, c’est de l’utopie.
Ils
sont là, et ils ont probablement leur raison d’être. La classe, la ra
737
r destruction, c’est de l’utopie. Ils sont là, et
ils
ont probablement leur raison d’être. La classe, la race, jouent dans
738
al de Troie qui se nomme déterminisme historique.
Il
faut croire qu’ils ont la vie dure, et que le mieux à faire pour nous
739
nomme déterminisme historique. Il faut croire qu’
ils
ont la vie dure, et que le mieux à faire pour nous, c’est encore de c
740
r élan vers une nouvelle communauté humaine. Mais
ils
se sont cruellement trompés de porte en s’adressant aux mythes collec
741
ressant aux mythes collectifs. C’était l’homme qu’
il
fallait refaire. Nous avons oublié ce fait très simple : que la socié
742
ythes collectifs ? J’ai essayé de vous montrer qu’
ils
sont des créations de l’homme, et particulièrement de ce personnage é
743
en somme, assez lâche, qu’on appelle l’individu.
Il
faut aller plus loin : les mythes collectifs n’expriment rien de plus
744
ayé de vous montrer qu’en pensant historiquement,
il
fonde, dès maintenant, en lui, la dictature du nombre et de l’irrespo
745
cte, toujours imprévisible, toujours aventureuse.
Elle
vit dans le risque et dans la décision, au lieu que l’homme des masse
746
e attitude et quelles révolutions, enfin réelles,
elle
prépare. Mais ce serait là une autre conférence. ⁂ Il reste une quest
747
répare. Mais ce serait là une autre conférence. ⁂
Il
reste une question grave, une question dernière que je ne veux pas es
748
ain, l’Évangile seul nous le désigne, bien plus :
il
nous ordonne de l’être. Et voilà la réalité décisive. Tous, nous avon
749
pelle l’amour du prochain. Je dis bien : acte, et
il
faut insister là-dessus. Le monde s’est emparé des paroles du Christ
750
s. Le monde s’est emparé des paroles du Christ et
il
les a complètement perverties. On nous a présenté cet amour du procha
751
inqueur de l’Histoire. Cet acte, à chaque fois qu’
il
nous est donné de le faire, rétablit le rapport humain, fonde notre d
752
ions, au secours de notre misère matérielle. Mais
elles
ne pénètrent jamais dans l’intimité de notre être, là où réside le dé
753
son destin. Après tout, l’homme désespéré, ce qu’
il
veut, ce n’est pas une explication du désespoir qui le possède, mais
754
race qui va suffire pour l’arracher à sa misère ;
il
lui faut une rencontre, un événement, un acte. Et voilà le mystère de
755
osophes chrétiens (mai 1934)v Combien existe-t-
il
en France de personnes intelligentes ? Pour le juger il ne faudrait s
756
France de personnes intelligentes ? Pour le juger
il
ne faudrait sans doute pas se fier au tirage moyen d’un ouvrage « dif
757
urs à l’endroit des meilleurs esprits. À qui faut-
il
s’en prendre ? Aux critiques d’abord, et, en particulier, à cette esp
758
ittéraires ». Ce n’est un secret pour personne qu’
ils
contribuent pour beaucoup à déterminer le succès ou l’échec d’une œuv
759
up à déterminer le succès ou l’échec d’une œuvre.
Il
semblerait, dès lors, que leur autorité — sinon de droit, du moins de
760
raient, sans lui, d’être incomprises ou ignorées,
il
se contente, la plupart du temps, d’être l’écho de la vague rumeur en
761
près du grand public a des causes plus graves, qu’
il
faut attribuer autant aux philosophes qu’à ceux qui ne les lisent plu
762
losophie est une activité qui ne le concerne pas.
Il
ne nie pas sa valeur intrinsèque. Ou, du moins, il ignore qu’il la ni
763
l ne nie pas sa valeur intrinsèque. Ou, du moins,
il
ignore qu’il la nie pratiquement. Il répète avec le latin cet adage b
764
sa valeur intrinsèque. Ou, du moins, il ignore qu’
il
la nie pratiquement. Il répète avec le latin cet adage bourgeois avan
765
u, du moins, il ignore qu’il la nie pratiquement.
Il
répète avec le latin cet adage bourgeois avant la lettre : primum viv
766
re, deinde philosophari. Cynisme ou naïveté ? Car
il
est évident que cette phrase, en fait, supprime toute philosophie. Ou
767
rs d’un deinde. Que demander aux hommes, sinon qu’
ils
vivent bien ! On se souvient de la noble réponse de ce proscrit de la
768
auquel on demandait à son retour en France ce qu’
il
avait fait en exil : « J’ai vécu, Monsieur, c’est bien assez ! ». Ou
769
». Ou bien le primum vivere se révèle imparfait ;
il
lui manque quelque chose : pourra-t-on l’ajouter après coup ? On ne c
770
son lieu dans l’acte et nulle part ailleurs. Mais
il
faudrait d’abord qu’elle soit elle-même un acte43. Et c’est ici la dé
771
nulle part ailleurs. Mais il faudrait d’abord qu’
elle
soit elle-même un acte43. Et c’est ici la déficience des philosophes
772
es problèmes qui se posent en fait. Mais que faut-
il
penser de ces techniques d’abstention ? ⁂ Tel est l’état des choses.
773
t de se demander si leur rencontre, à supposer qu’
elle
se produise, ne signifierait pas une révolution. Les évaluations mora
774
ont perdu toute commune mesure. Que se passerait-
il
si un beau jour le public se mettait à l’école des penseurs ? On verr
775
ion se produise. (L’hypothèse n’est pas absurde :
elle
s’est vérifiée en Allemagne, à propos de Spengler par exemple, dont o
776
Spengler par exemple, dont on sait l’influence qu’
il
exerça sur les prodromes de l’hitlérisme.) Les risques qu’elle entraî
777
ur les prodromes de l’hitlérisme.) Les risques qu’
elle
entraîne sont proprement incalculables. Qui donc voudra les encourir
778
a réveiller quelques chrétiens. Leur office n’est-
il
pas de rappeler aux peuples où se trouvent les vraies valeurs, sans a
779
que d’autres aient tout faussé, tout compromis ?
Il
est certain que la pensée chrétienne n’a jamais eu plus impérieuse ni
780
les modes de son obéissance sont plus visibles qu’
ils
ne le furent jamais. Si la pensée chrétienne existe, c’est à ce seul
781
seul niveau où pensée et action se confondent. Si
elle
veut être digne de son nom, c’est à elle seule d’oser ce que les autr
782
dent. Si elle veut être digne de son nom, c’est à
elle
seule d’oser ce que les autres ne peuvent pas oser. C’est à elle seul
783
er ce que les autres ne peuvent pas oser. C’est à
elle
seule d’entreprendre la confrontation générale des valeurs dont le mo
784
ivre et des valeurs qui jugent cette vie. C’est à
elle
, en particulier, et non pas au marxisme ni au fascisme, à conduire la
785
urgeoisie, et le peuple à sa suite, révèrent. Car
elle
seule, si toutefois elle reste digne de sa charge, elle seule n’a rie
786
sa suite, révèrent. Car elle seule, si toutefois
elle
reste digne de sa charge, elle seule n’a rien à y perdre. Faut-il ra
787
eule, si toutefois elle reste digne de sa charge,
elle
seule n’a rien à y perdre. Faut-il rappeler ici les graves avertisse
788
sa charge, elle seule n’a rien à y perdre. Faut-
il
rappeler ici les graves avertissements de Berdiaev ? Faut-il une fois
789
ici les graves avertissements de Berdiaev ? Faut-
il
une fois de plus évoquer les menaces qui pèsent sur la civilisation ?
790
re n’est un service rendu au monde que si d’abord
il
est obéissance ? Ce ne sont pas les catastrophes qui devraient effray
791
tologique 45, de Gabriel Marcel. L’un et l’autre,
ils
répondent au vœu que j’ai tenté de formuler. Ils s’attaquent à cette
792
ils répondent au vœu que j’ai tenté de formuler.
Ils
s’attaquent à cette « transmutation des valeurs » que tout le monde s
793
s unités d’expérience sensible, saisies telles qu’
elles
se présentent au sein d’un ensemble vécu. Le grand service rendu par
794
. C’est ce renversement des valeurs « nobles » qu’
il
ne cesse de reprocher au christianisme. Voici comment il le décrit :
795
esse de reprocher au christianisme. Voici comment
il
le décrit : … l’impuissance qui n’use pas de représailles devient pa
796
nce » (c’est-à-dire l’obéissance à quelqu’un dont
ils
disent qu’il ordonne cette soumission : ils l’appellent Dieu). Ce qu’
797
-dire l’obéissance à quelqu’un dont ils disent qu’
il
ordonne cette soumission : ils l’appellent Dieu). Ce qu’il y a d’inof
798
dont ils disent qu’il ordonne cette soumission :
ils
l’appellent Dieu). Ce qu’il y a d’inoffensif chez l’être faible, sa l
799
hez l’être faible, sa lâcheté, cette lâcheté dont
il
est riche et qui, chez lui, fait antichambre, et attend à la porte, i
800
», et parfois même le pardon des offenses (« car
ils
ne savent ce qu’ils font — nous seuls savons ce qu’ils font »). On pa
801
le pardon des offenses (« car ils ne savent ce qu’
ils
font — nous seuls savons ce qu’ils font »). On parle aussi de l’« amo
802
e savent ce qu’ils font — nous seuls savons ce qu’
ils
font »). On parle aussi de l’« amour de ses ennemis » et l’on « sue à
803
ses ennemis » et l’on « sue à grosses gouttes ».
Il
est facile de dire que Nietzsche exagère ; plus difficile de conteste
804
ent — ce que je fais pour ma part sans réserve —,
il
reste à voir si les causes en sont bien celles que Nietzsche allègue.
805
iment que nous jugeons d’autant plus « idéal » qu’
il
exige de nous un moindre sacrifice. (On éloigne l’amour : ainsi l’amo
806
eux qui luttent (dans leurs luttes et au-dessus d’
elles
) ; un égalitarisme qui renie la réalité chrétienne de la vocation… Je
807
ne veux donner qu’un exemple des dissociations qu’
il
propose. L’Épargne, autrefois participation de l’idéal évangélique
808
er. À l’origine de toutes les valeurs bourgeoises
il
n’y a pas la Loi, ni l’Évangile, il y a tout au contraire une sournoi
809
de l’Évangile et de ses exigences concrètes. Est-
il
besoin de marquer, pour finir, que cette critique de l’esprit bourgeo
810
ois ? ⁂ Comme Max Scheler — au moment du moins où
il
écrivait L’Homme du ressentiment 47, M. Marcel est catholique. Sa méd
811
ntologique est la première œuvre philosophique qu’
il
ait publiée depuis sa conversion. On est heureux de constater qu’elle
812
uis sa conversion. On est heureux de constater qu’
elle
marque un élargissement en même temps qu’une simplification de sa pen
813
arcel est un de ceux dont nous devons attendre qu’
il
fasse passer de l’air dans la philosophie française ; un de ceux pour
814
nts seront sans doute fort étonnés d’apprendre qu’
il
fallait, en 1934, un courage véritable pour utiliser en philosophie d
815
’approcher le mystère indéfinissable de l’être. «
Il
faut qu’il y ait, dit M. Marcel, ou il faudrait qu’il y eût de l’être
816
l’être. « Il faut qu’il y ait, dit M. Marcel, ou
il
faudrait qu’il y eût de l’être, que tout ne se réduisît pas à un jeu
817
être. Les philosophes lui sont de peu de recours.
Ils
ont fait de l’être un problème qu’ils placent devant eux et qu’ils se
818
de recours. Ils ont fait de l’être un problème qu’
ils
placent devant eux et qu’ils se mettent à critiquer, comme s’ils n’ét
819
’être un problème qu’ils placent devant eux et qu’
ils
se mettent à critiquer, comme s’ils n’étaient pas eux-mêmes en jeu !
820
ant eux et qu’ils se mettent à critiquer, comme s’
ils
n’étaient pas eux-mêmes en jeu ! Mais, dit l’auteur, « je ne puis me
821
négative du désespoir, positive de l’espérance, —
elles
sont inséparables jusqu’au bout, note M. Marcel, qui m’apparaît ici t
822
a toujours dans le sens de l’être, à condition qu’
elle
soit soutenue par une fidélité que l’auteur définit comme « une prése
823
ponibilité paradoxale : « parce que l’âme sait qu’
elle
n’est pas à elle-même, et que le seul usage entièrement légitime qu’e
824
ême, et que le seul usage entièrement légitime qu’
elle
puisse faire de sa liberté consiste précisément à reconnaître qu’elle
825
sa liberté consiste précisément à reconnaître qu’
elle
ne s’appartient pas ; c’est à partir de cette reconnaissance qu’elle
826
t pas ; c’est à partir de cette reconnaissance qu’
elle
peut agir, qu’elle peut créer » (p. 297). Je sens bien qu’un aperçu s
827
tir de cette reconnaissance qu’elle peut agir, qu’
elle
peut créer » (p. 297). Je sens bien qu’un aperçu si schématique fait
828
égligés par la technique idéaliste, d’autre part,
il
faut vivement louer l’auteur de conserver à chaque page le souci des
829
ouci des références à l’actuel. La description qu’
il
fait de l’homme moderne réduit à un complexe de fonctions ; ses allus
830
allusions au désordre social ; la corrélation qu’
il
indique entre l’optimisme du progrès technique et une philosophie du
831
ues-uns des fondements d’une éthique de l’être qu’
il
est urgent que les chrétiens opposent à la « morale des commerçants »
832
laine du Jutland. Un jour, accablé par la misère,
il
était monté sur un petit tertre et il avait maudit le Dieu tout-puiss
833
la misère, il était monté sur un petit tertre et
il
avait maudit le Dieu tout-puissant qui le laissait mourir de faim. Ce
834
ir de faim. Ce blasphème assombrit toute sa vie ;
il
ne l’empêcha pas de faire fortune. Et c’est ainsi que Kierkegaard reç
835
ifiant et une belle aisance matérielle. Du secret
il
tira son œuvre ; sa fortune, il la confia à l’un de ses frères, ne vo
836
rielle. Du secret il tira son œuvre ; sa fortune,
il
la confia à l’un de ses frères, ne voulant pas avoir affaire aux banq
837
ne voulant pas avoir affaire aux banques. Lorsqu’
il
mourut, à 42 ans, il n’en subsistait rien. L’argent provenait d’une m
838
affaire aux banques. Lorsqu’il mourut, à 42 ans,
il
n’en subsistait rien. L’argent provenait d’une malédiction, pensait-i
839
en. L’argent provenait d’une malédiction, pensait-
il
, il l’avait donc dilapidé, surtout en dons. Sa vie était très simple.
840
L’argent provenait d’une malédiction, pensait-il,
il
l’avait donc dilapidé, surtout en dons. Sa vie était très simple. Il
841
apidé, surtout en dons. Sa vie était très simple.
Il
travaillait une grande partie de la nuit. Il aimait se promener à l’a
842
ple. Il travaillait une grande partie de la nuit.
Il
aimait se promener à l’aube. Puis il se remettait à écrire. Vers midi
843
de la nuit. Il aimait se promener à l’aube. Puis
il
se remettait à écrire. Vers midi, on le voyait parcourir la rue la pl
844
On connaissait sa silhouette, ses plaisanteries,
il
avait sa légende d’« original ». On savait aussi qu’il était le meill
845
ait sa légende d’« original ». On savait aussi qu’
il
était le meilleur écrivain de son pays. Sa première œuvre eut un imme
846
re œuvre eut un immense succès ; mais à mesure qu’
il
se fit mieux comprendre, le public s’écarta, effrayé. Lorsqu’en 1854
847
ndre, le public s’écarta, effrayé. Lorsqu’en 1854
il
se mit à attaquer de front, avec une extrême violence, le christianis
848
es évêques qui avaient loué ses premières œuvres,
il
se vit abandonné dans la plus complète solitude qu’ait jamais connue
849
and esprit. Un an plus tard, épuisé par la lutte,
il
tomba dans la rue. On le transporta à l’hôpital, où il mourut paisibl
850
mba dans la rue. On le transporta à l’hôpital, où
il
mourut paisiblement, en « saluant tous les hommes ». Le seul événemen
851
es avec Régine Olsen. Mais son acte, après lequel
il
put mourir, certain d’avoir accompli sa mission, ce fut son attaque c
852
ianisme officiel, au nom du Christ de l’Évangile.
Il
avait terminé les études de théologie, mais il ne fut jamais pasteur.
853
e. Il avait terminé les études de théologie, mais
il
ne fut jamais pasteur. Il lui arriva pourtant de prêcher, et ses serm
854
udes de théologie, mais il ne fut jamais pasteur.
Il
lui arriva pourtant de prêcher, et ses sermons, réunis sous le titre
855
plusieurs volumes. Ce furent les seuls écrits qu’
il
publia sous son nom. Tous ses ouvrages esthétiques et philosophiques,
856
se, parurent sous divers pseudonymes symboliques.
Il
voulait signifier par là que ces ouvrages n’exprimaient pas encore la
857
encore la totalité de son message chrétien, et qu’
il
ne pouvait pas en assumer l’entière responsabilité devant Dieu et dev
858
nt les hommes. Ce ne fut qu’à la fin de sa vie qu’
il
s’offrit sans masques à la lutte contre l’Église établie, lutte qui d
859
lie, lutte qui devait le mener à la mort parce qu’
elle
accomplissait sa vocation chrétienne. ⁂ On a comparé Kierkegaard à Ni
860
: à saint Paul, à Luther, mais pour se condamner.
Il
affirmait qu’il n’était qu’un « poète à tendance religieuse » et non
861
à Luther, mais pour se condamner. Il affirmait qu’
il
n’était qu’un « poète à tendance religieuse » et non pas un « témoin
862
et non pas un « témoin de la vérité » ; c’est qu’
il
se faisait du christianisme une idée si pure et si absolue qu’il voya
863
u christianisme une idée si pure et si absolue qu’
il
voyait clairement que nul homme ne peut jamais se dire chrétien. Cett
864
e a permis les interprétations les plus diverses.
Elle
assure aussi à sa pensée une influence multiforme, et qui va croissan
865
se défendre ? Et quels titres à l’existence vient-
il
produire ? Car il est excellent de défendre son moi, surtout lorsqu’i
866
uels titres à l’existence vient-il produire ? Car
il
est excellent de défendre son moi, surtout lorsqu’il détient plus de
867
est excellent de défendre son moi, surtout lorsqu’
il
détient plus de réalité que l’anonyme. Mais encore, il faudrait que c
868
tient plus de réalité que l’anonyme. Mais encore,
il
faudrait que ce moi fût fondé. Ce n’est pas évident de soi, si l’on p
869
serait la marque d’un affreux orgueil, si d’abord
elle
ne témoignait d’un ridicule défaut de sens pratique. Et que disent al
870
y croire, ou du moins sans prouver par le fait qu’
ils
y croient. Il s’agirait alors de croire à quelque chose qui légitime
871
moins sans prouver par le fait qu’ils y croient.
Il
s’agirait alors de croire à quelque chose qui légitime ce scepticisme
872
sacrifier ? Supposez qu’un homme paraisse, et qu’
il
relève le défi collectiviste. Il soutient que le solitaire est plus g
873
paraisse, et qu’il relève le défi collectiviste.
Il
soutient que le solitaire est plus grand que la foule anonyme, que la
874
sont faites pour rendre la vie impossible, puisqu’
elles
impliquent le martyre des braves chrétiens, comme si la religion, de
875
sage de supporter les maux de ce bas monde tel qu’
il
est ! L’Église, par la voix de ses évêques, tentera de prouver qu’il
876
par la voix de ses évêques, tentera de prouver qu’
il
extravague ; on proposera en public de l’interdire d’accès au temple
877
opinion unanime accablera son fol orgueil : n’a-t-
il
pas écrit que la presse est de nos jours l’obstacle décisif à la préd
878
e son temps, accablé par la réprobation générale,
il
s’en ira mourir à l’hôpital, en disant à son seul ami : « Salue tous
879
ssait à Copenhague, en l’année 1855. Depuis lors,
il
est vrai, les choses ont bien changé. On dirait même qu’elles sont au
880
ai, les choses ont bien changé. On dirait même qu’
elles
sont au pire, mais il faut prendre garde de laisser croire à nos cont
881
hangé. On dirait même qu’elles sont au pire, mais
il
faut prendre garde de laisser croire à nos contemporains que ce pire
882
ue ce pire ne puisse être aggravé, si tant est qu’
ils
s’y abandonnent. Qu’est-ce que l’esprit ? Donc, on nous parle d
883
distinction. Et lequel d’entre nous peut dire qu’
il
a calculé la dépense ? Il faudrait bien savoir de quoi l’on parle, et
884
entre nous peut dire qu’il a calculé la dépense ?
Il
faudrait bien savoir de quoi l’on parle, et ce n’est peut-être possib
885
kegaard ? Contre la presse et l’opinion publique,
il
proteste en faveur de ce qui est « original » ; contre l’emportement
886
original » ; contre l’emportement des multitudes,
il
revendique la charité mystérieuse de l’ironie ; contre l’histoire, il
887
rité mystérieuse de l’ironie ; contre l’histoire,
il
pose l’acte de l’homme responsable de son destin. Mais tout cela va a
888
va au martyre, dans le monde qu’on nous prépare ?
Il
se peut, si pourtant Dieu le veut. L’exigence de Kierkegaard se limit
889
drame, attaque et risque. Et l’on peut douter qu’
ils
y croient, ceux qui flétrissent le matérialisme au nom des biens qu’i
890
i flétrissent le matérialisme au nom des biens qu’
ils
n’ont pas su défendre ni davantage sacrifier. Ils affirment trop tard
891
ils n’ont pas su défendre ni davantage sacrifier.
Ils
affirment trop tardivement que « l’argent ne fait pas le bonheur », e
892
nt que « l’argent ne fait pas le bonheur », et qu’
il
existe d’autres biens que nulle violence ne peut dérober, mais c’est
893
ski. On pourrait en citer quelques autres. Qu’ont-
ils
donc de commun, génie à part ? Peut-être leurs souffrances seulement.
894
t ? Peut-être leurs souffrances seulement. Mais s’
il
n’est pas de hiérarchie possible en ces parages, le sacrifice y tient
895
es, le sacrifice y tient lieu de mesure, parce qu’
il
est un acte, incontestable. Telle est la nouvelle grandeur, la nouvel
896
us, de cette pensée impitoyable. Remède du pire ?
Il
fallait bien qu’on se sentît malade pour aller rechercher le médecin
897
rimée d’un autre siècle avait tué. C’est aussi qu’
il
est devenu possible de saisir, dans le déploiement des faits, et des
898
e de nos malheurs, nous retournons à l’origine où
il
se tient, nous mettons en lui notre espoir de trouver un autre chemin
899
ble à la présence dans ce temps de l’éternel. Car
il
ne suffit pas d’applaudir à ses thèses pour apaiser ce regard qui nou
900
i nous ? Si l’Opinion publique a tué Kierkegaard,
elle
n’a pas eu de prise sur les sarcasmes dont il l’a flétrie, plus chari
901
, elle n’a pas eu de prise sur les sarcasmes dont
il
l’a flétrie, plus charitables cependant que les discours en l’honneur
902
traits ironiques du grand visage de Kierkegaard,
il
me vient à l’esprit une image dont le burlesque n’aurait pas déplu à
903
rsif, dont le rire a le don d’exaspérer la Reine.
Elle
tempête et hurle son cri favori : « Qu’on lui coupe la tête ! » Alors
904
disparaît complètement. Mais à certains moments,
il
s’amuse à renaître. On voit d’abord son rire, rien que son rire qui p
905
e de l’homme, nous voici devenus bien inhumains !
Il
semble que chacun porte le poids du monde et le sombre avenir du sièc
906
rne, accablé par tous les malheurs du temps, dont
il
feint de se croire victime ou responsable53. De cet homme, justement,
907
e ! — Kierkegaard a montré « le comique infini ».
Il
faut risquer cette expression : le rire de la charité chrétienne. « L
908
s ». Mais cette « crainte d’un seul danger » peut-
elle
encore, sérieusement, caractériser le chrétien moyen de ce temps ? C’
909
veau Testament ressemble à une satire de l’homme.
Il
contient des consolations et encore des consolations pour ceux qui so
910
ations pour ceux qui souffrent à cause du Christ.
Il
suppose, sans autre, que le chrétien souffre pour sa doctrine… » Et c
911
qu’as-tu souffert pour ta doctrine ? Tu souffres,
il
est vrai, mais n’est-ce point justement pour ces choses que ta doctri
912
our ces choses que ta doctrine te montre vaines ?
Il
faudrait cependant choisir. Ou bien tu crois à la seule grâce de Dieu
913
ue tous ces dieux sont des faux dieux ? Mais sont-
ils
des faux dieux pour nous ? Appelons-nous vraiment l’esprit ? Mais non
914
) Est-ce réel ? 2) Mon voisin Christofersen l’a-t-
il
fait ? l’a-t-il réellement fait ? »55 Nous posons toujours la derniè
915
2) Mon voisin Christofersen l’a-t-il fait ? l’a-t-
il
réellement fait ? »55 Nous posons toujours la dernière question. Nou
916
chrétien souffre pour sa doctrine… » (Mais non !
il
souffre simplement de ce que tous ne l’ont pas admise) « … et il appo
917
lement de ce que tous ne l’ont pas admise) « … et
il
apporte sa consolation, et sur ce texte on nous fait des sermons, à n
918
de la Cour, le favori élu par la bonne société ;
il
paraît devant une assemblée choisie d’élus, et prêche avec émotion su
919
ie d’élus, et prêche avec émotion sur ce texte qu’
il
a choisi lui-même : “Dieu a élu dans le monde les petits et les mépri
920
ou le mal, une seule condition leur importe : qu’
ils
soient toujours comme tous les autres, qu’ils imitent, et n’agissent
921
qu’ils soient toujours comme tous les autres, qu’
ils
imitent, et n’agissent jamais seuls. » Mais ce que Dieu exige, c’est
922
que Dieu exige, c’est précisément le contraire :
il
veut l’originalité. « Voilà pourquoi la Parole de Dieu est telle qu’o
923
ouvent bien que dans l’imitation : c’est pourquoi
ils
se sentent unis en elle d’une manière si touchante, et c’est ce qu’il
924
imitation : c’est pourquoi ils se sentent unis en
elle
d’une manière si touchante, et c’est ce qu’ils appellent l’amour.57 »
925
n elle d’une manière si touchante, et c’est ce qu’
ils
appellent l’amour.57 » Rire du solitaire, qui ressemble peut-être à l
926
milieu de la foule. L’originalité Qu’entend-
il
par ce mot d’originalité ? Il faut en rapporter le sens au centre mêm
927
nalité Qu’entend-il par ce mot d’originalité ?
Il
faut en rapporter le sens au centre même de sa pensée, ou si l’on veu
928
i faussent tout : anarchie, romantisme, individu.
Il
n’est que de les mesurer à la réalité dernière de l’homme. Qu’est-ce
929
e seul devant son Dieu. Mais comment cela se peut-
il
, sinon par l’effet de la foi ? Il faut que Dieu l’appelle, qu’il le n
930
nt cela se peut-il, sinon par l’effet de la foi ?
Il
faut que Dieu l’appelle, qu’il le nomme et par là le sépare, autremen
931
’effet de la foi ? Il faut que Dieu l’appelle, qu’
il
le nomme et par là le sépare, autrement l’homme n’est rien qu’un exem
932
de ce monde, et s’y tenir comme n’étant pas tenu.
Il
n’est pas d’autre « réaction » contre « le siècle », pas d’autre révo
933
ution créatrice. Et tous nos appels à l’esprit, s’
ils
ne sont pas ce retour au Réel, ne sont que poursuite du vent, défecti
934
siècle ont l’existence qu’on leur prête : hélas !
il
serait faux de dire qu’ils n’en ont pas… Mais encore une fois, ce n’e
935
on leur prête : hélas ! il serait faux de dire qu’
ils
n’en ont pas… Mais encore une fois, ce n’est pas échapper aux chimère
936
fondée dans la transformation effective du monde.
Elle
participe encore de la dégradation. « Une objection vraiment méchante
937
condamne « la masse » n’est un aristocrate que s’
il
ne veut pas l’être. C’est qu’il se fonde sur sa vocation, et qu’il ne
938
aristocrate que s’il ne veut pas l’être. C’est qu’
il
se fonde sur sa vocation, et qu’il ne peut être lui-même que par le d
939
être. C’est qu’il se fonde sur sa vocation, et qu’
il
ne peut être lui-même que par le droit divin de la Parole qui le dist
940
qui le distingue. Suprême humilité du solitaire !
Il
ne saurait se comparer qu’à la vocation qu’il reçoit. Où l’orgueil tr
941
e ! Il ne saurait se comparer qu’à la vocation qu’
il
reçoit. Où l’orgueil trouverait-il encore à se loger chez un être à c
942
la vocation qu’il reçoit. Où l’orgueil trouverait-
il
encore à se loger chez un être à ce point simplifié qu’il n’est plus
943
e à se loger chez un être à ce point simplifié qu’
il
n’est plus rien qu’obéissance dans la mesure où il agit, et pénitence
944
l n’est plus rien qu’obéissance dans la mesure où
il
agit, et pénitence dans la mesure où sa vocation le dépasse ? Si Kier
945
Kierkegaard condamne la foule, ce n’est point qu’
il
la craigne, ou qu’il craigne d’y perdre le pauvre moi des psychologue
946
la foule, ce n’est point qu’il la craigne, ou qu’
il
craigne d’y perdre le pauvre moi des psychologues, son reproche à la
947
s psychologues, son reproche à la foule, c’est qu’
elle
n’exige rien de lui. La foule nous veut tout simplement irresponsable
948
responsables, par cela seul, nous la flattons, et
elle
nous reconnaît pour siens. Elle est le lieu de rendez-vous des hommes
949
s la flattons, et elle nous reconnaît pour siens.
Elle
est le lieu de rendez-vous des hommes qui se fuient, eux et leur voca
950
s des hommes qui se fuient, eux et leur vocation.
Elle
n’est personne, et tire de là son assurance dans le crime. « Il ne s’
951
nne, et tire de là son assurance dans le crime. «
Il
ne s’est pas trouvé un seul soldat pour oser porter la main sur Caïus
952
mme isolé a, dans la règle, deux mains, et lorsqu’
il
porte ces deux mains sur Marius, ce sont ses mains, non celles de son
953
. » Tout seul en face du Christ, un homme oserait-
il
s’avancer et cracher au visage du Fils de Dieu ? Mais qu’il soit foul
954
er et cracher au visage du Fils de Dieu ? Mais qu’
il
soit foule, il aura ce « courage », — il l’a eu. Il faut aller plus l
955
u visage du Fils de Dieu ? Mais qu’il soit foule,
il
aura ce « courage », — il l’a eu. Il faut aller plus loin. La foule n
956
Mais qu’il soit foule, il aura ce « courage », —
il
l’a eu. Il faut aller plus loin. La foule n’est pas dans la rue seule
957
soit foule, il aura ce « courage », — il l’a eu.
Il
faut aller plus loin. La foule n’est pas dans la rue seulement. Elle
958
s loin. La foule n’est pas dans la rue seulement.
Elle
est dans la pensée des hommes de ce temps. Tout le génie paradoxal et
959
Chaque fois que nous disons d’un de nos dieux qu’
il
est puissant, nous témoignons de notre démission. La foule n’a pas d’
960
devant Dieu et d’exercer le pouvoir que je suis.
Elle
n’est que ma dégradation. Et toutes les « sciences » qui étudient ses
961
finalement, l’homme lui-même à ses propres yeux.
Il
a voulu chasser du monde le paradoxe et le scandale du solitaire plus
962
et le scandale du solitaire plus grand que tous.
Il
a voulu que tout s’explique, que tout s’implique, c’est-à-dire qu’il
963
s’explique, que tout s’implique, c’est-à-dire qu’
il
a voulu bannir la possibilité scandaleuse des actes libres de la Prov
964
our rendre un culte sanguinaire aux faux dieux qu’
elle
a suscités. « Le philosophe dit à bon droit que la vie doit être comp
965
it que la vie doit être comprise en arrière, mais
il
oublie l’autre proposition : qu’elle doit être vécue en avant.60 » Se
966
arrière, mais il oublie l’autre proposition : qu’
elle
doit être vécue en avant.60 » Semble-t-il pas que le temps court plus
967
: qu’elle doit être vécue en avant.60 » Semble-t-
il
pas que le temps court plus vite depuis un siècle ? C’est que la fuit
968
des hommes devant l’instant présent se précipite.
Ils
n’ont pas lu Hegel, bien sûr, mais Hegel est dans tous nos journaux,
969
es clercs bourgeois. Comment lui échapper ? N’est-
il
pas la voix même de cette Âme du monde, cet Esprit de la Forme qui se
970
tant n’est rien que le péché, mais le péché n’est-
il
pas notre réalité, notre réalité sans cesse menacée par l’Esprit de t
971
effet de notre choix, ou un moment de notre vie ?
Ils
en parlent bien aisément…) Certains des plus lucides entrevoient le p
972
courir à l’homme, et j’entends, à l’homme tel qu’
il
est, dans l’ordre même de son péché. Ainsi Maurras, lorsqu’il dénonce
973
l’ordre même de son péché. Ainsi Maurras, lorsqu’
il
dénonce les mythes de l’hégélianisme social. « Le meilleur moyen de s
974
revoir l’origine. Pour voiler le présent certain,
ils
hypothèquent le futur, mais pour gagner ce dernier gage, les habitude
975
religieux leur font concevoir une Âme du Monde qu’
ils
se figurent (mais sans franchise, ni précision) comme une espèce de v
976
st que nul vivant n’ose vivre. Et comment vivrait-
il
sinon par l’appel de la Providence ? Et comment se rendre à l’appel,
977
mps, dans l’instant éternel. Le solitaire peut-
il
agir ? Le maléfice hégélien, c’est l’objectivité : cette attitude
978
té. » La liberté, la dignité de l’homme, c’est qu’
il
soit seul le sujet de sa vie. Mais encore faut-il se garder d’entendr
979
il soit seul le sujet de sa vie. Mais encore faut-
il
se garder d’entendre l’expression au sens des romantiques. Je suis su
980
sion au sens des romantiques. Je suis sujet, mais
il
reste à savoir d’où vient ce je, comment il peut agir. S’agit-il d’un
981
mais il reste à savoir d’où vient ce je, comment
il
peut agir. S’agit-il d’un impérialisme du moi pur, tel que Fichte l’a
982
ir d’où vient ce je, comment il peut agir. S’agit-
il
d’un impérialisme du moi pur, tel que Fichte l’a follement rêvé ? Si
983
et ses périls… Kierkegaard nous attend au réveil.
Il
nous saisit à ce moment précis où tous les systèmes s’évanouissent de
984
s lois du monde. La foule attend : si tu la suis,
elle
te méprisera sans doute, mais c’est le sort commun, tu ne cours pas g
985
ours pas grand risque. Si tu dis non, si tu agis,
elle
te tuera peut-être, quitte à fleurir ensuite la tombe du « héros », d
986
nsuite la tombe du « héros », dernière insulte62.
Il
s’agit de savoir maintenant au nom de quoi tu agiras, si tu agis. Un
987
se justifie… Mais si ton moi n’est pas à toi ? S’
il
est ta vocation reçue d’ailleurs, et si tu l’as reçue en vérité, tu n
988
tu n’as plus à choisir, ta mort est derrière toi,
elle
n’est plus ton affaire, elle n’est plus ton angoisse. Et surtout, ell
989
rt est derrière toi, elle n’est plus ton affaire,
elle
n’est plus ton angoisse. Et surtout, elle n’est plus cette absurdité
990
ffaire, elle n’est plus ton angoisse. Et surtout,
elle
n’est plus cette absurdité révoltante que rien au monde ne pourrait p
991
sorte de sobriété… Le croyant seul agit, et seul
il
peut être sujet de son action, mais c’est qu’il est, dans l’autre sen
992
l il peut être sujet de son action, mais c’est qu’
il
est, dans l’autre sens du terme, « assujetti » à la Parole qui vit en
993
d est vraie. La sujétion totale est seule active.
Elle
est aussi présence au monde. Dans ce temps de la masse, où nous vivon
994
i l’homme le plus réel, le plus présent. Parce qu’
il
sait qu’il existe un « ailleurs », et que l’éternité vient à lui, il
995
e plus réel, le plus présent. Parce qu’il sait qu’
il
existe un « ailleurs », et que l’éternité vient à lui, il peut réelle
996
e un « ailleurs », et que l’éternité vient à lui,
il
peut réellement et jusqu’au bout accepter de vivre hic et nunc, quand
997
aspirations collectives. » Renversant ce rapport
il
ne resterait à montrer de Kierkegaard que sa « catégorie du solitaire
998
e d’une collectivité vraiment vivante. Cependant,
il
vaut mieux se garder d’insister sur un tel rétablissement. Pour deux
999
que cette « catégorie » lui soit si familière qu’
il
puisse la considérer, sans autre, comme donnée ? La tentation est for
1000
nous ayons à développer les conséquences. Ou bien
il
est, et c’est l’acte de Dieu, ou bien je l’imagine, et mon discours e
1001
e qu’est la solitude dont Kierkegaard a témoigné,
il
n’apparaît plus nécessaire de réfuter les objections du « sens social
1002
u’on parle à tous ou contre tous, chacun croit qu’
il
s’agit des autres, et personne ne se sent atteint, mais si l’on parle
1003
u chrétien, comme au seul responsable parmi nous.
Il
sait bien qu’en tous temps, le malheur de l’époque ne provient pas de
1004
, le malheur de l’époque ne provient pas de ce qu’
elle
est « sans Dieu », car nul siècle, comme tel, ne fut jamais chrétien,
1005
ne fut jamais chrétien, mais bien plutôt de ce qu’
elle
est sans maîtres, c’est-à-dire sans martyrs pour l’enseigner. C’est a
1006
re sans martyrs pour l’enseigner. C’est au sel qu’
il
faut rendre sa saveur, c’est à lui seul que l’on peut reprocher d’êtr
1007
rien d’abord n’est réel pour un seul. Maintenant,
il
faut être « l’impossible » : il faut être le solitaire. Kierkegaard p
1008
seul. Maintenant, il faut être « l’impossible » :
il
faut être le solitaire. Kierkegaard peut-il nous aider ? (Un homme po
1009
e » : il faut être le solitaire. Kierkegaard peut-
il
nous aider ? (Un homme pourrait-il nous aider ?). Ou bien seulement n
1010
erkegaard peut-il nous aider ? (Un homme pourrait-
il
nous aider ?). Ou bien seulement nous a-t-il délivrés de nos derniers
1011
rait-il nous aider ?). Ou bien seulement nous a-t-
il
délivrés de nos derniers prétextes, de nos dernières incertitudes sur
1012
exigences concrètes de l’esprit ? Mais ne fallait-
il
pas qu’il ait connu de grandes aides pour oser nous montrer la vanité
1013
concrètes de l’esprit ? Mais ne fallait-il pas qu’
il
ait connu de grandes aides pour oser nous montrer la vanité de toutes
1014
enir martyrs ! » Certes, répond Kierkegaard, mais
il
vaudrait mieux dire : « “Moi, je ne le puis pas.” Et s’il est fou de
1015
ait mieux dire : « “Moi, je ne le puis pas.” Et s’
il
est fou de penser que tous doivent l’être, il est encore beaucoup plu
1016
t s’il est fou de penser que tous doivent l’être,
il
est encore beaucoup plus fou qu’aucun ne veuille l’être. » L’inévitab
1017
ment », comme disait Nietzsche, et c’est là ce qu’
ils
appellent leur petit train-train journalier. La fameuse « vie quotidi
1018
arlé. Ce qui n’est pas très étonnant, d’ailleurs.
Il
s’agit d’une œuvre allemande, d’un auteur inconnu en France jusqu’ici
1019
ouvernement qui les avait appelés officieusement.
Ils
hésitent à poursuivre. L’un d’entre eux se laisse entraîner par des r
1020
à faire ; finalement, pour se débarrasser d’eux,
il
les fait tomber dans un piège grossier : un agent provocateur leur of
1021
vocateur leur offre un engagement au Paraguay, qu’
ils
ont la naïveté d’accepter. Accusés de haute trahison, ils sont jetés
1022
la naïveté d’accepter. Accusés de haute trahison,
ils
sont jetés aussitôt dans une prison infecte, avec des Indiens lépreux
1023
es semaines d’efforts fiévreux, durant lesquelles
il
éprouve amèrement la faiblesse de son autorité, c’est-à-dire la faibl
1024
er à une révolution qui va bouleverser le Brésil.
Ils
retrouvent un de leurs compagnons du début, celui qui était parti pou
1025
le bagne, et des tortures physiques inouïes. Mais
ils
ne se retrouvent que pour aller se faire tuer ensemble devant Rio de
1026
t leur humanité, au sens le plus profond. Ce dont
ils
souffrent, ce n’est pas seulement de manquer de travail et de ne pas
1027
rtout de constater que l’Allemagne, pour laquelle
ils
se sont battus, n’a plus la force d’utiliser leurs énergies, leurs vo
1028
vocations humaines. L’un d’eux est architecte, et
il
rêvait d’entreprises coloniales : mais on ne construit plus, là-bas,
1029
oloniales : mais on ne construit plus, là-bas, et
il
n’y a plus de colonies. D’autres étaient mécaniciens, aviateurs ; un
1030
. Et les voici lancés dans une vie d’aventures qu’
ils
n’avaient pas voulue, qui les détourne de toutes leurs espérances. Ce
1031
rne de toutes leurs espérances. Ce n’est point qu’
ils
aient peur, mais tout leur apparaît absurde. Et rien n’est plus atroc
1032
subit. Arrachés de leur terre et de leur peuple,
ils
s’en vont au-devant d’une existence qui n’a plus aucun but, au-devant
1033
pouvons plus nous affirmer que par le sacrifice…
Il
ne s’agit pas de ces sacrifices dont on s’acquitte avec son argent ou
1034
t de tout sacrifier à cette fidélité. À mesure qu’
ils
s’éloignent de leur patrie, cette image grandit en eux, prend forme e
1035
dit en eux, prend forme et puissance, et c’est en
elle
qu’ils communient, c’est elle seule qui les soutient dans les plus ef
1036
ux, prend forme et puissance, et c’est en elle qu’
ils
communient, c’est elle seule qui les soutient dans les plus effroyabl
1037
ssance, et c’est en elle qu’ils communient, c’est
elle
seule qui les soutient dans les plus effroyables et dégradantes épreu
1038
yables et dégradantes épreuves. Eux, les simples,
ils
souffrent physiquement. Mais leur drame s’exprime dans la méditation
1039
on de Pillau, d’une manière non moins tragique. «
Il
découvrit, pour la première fois, une forme nouvelle de patriotisme,
1040
ne tranchée, sous les murs du fort de Capocabana,
il
a soudain la vision d’une Allemagne future renaissant de son calvaire
1041
ort à tous, Européens, y est engagé. À vrai dire,
il
est malaisé de faire la part, dans ce drame, de ce qui est national e
1042
dans les dernières phrases de Pillau, n’apparaît-
il
pas lié au seul malheur des hommes ? Et n’est-ce point là le vrai tra
1043
t de vue strictement « allemand » de l’auteur, qu’
il
est peu de problèmes plus graves pour notre avenir immédiat. Mais ce
1044
res questions. Edschmid a fait le tour du monde ;
il
a séjourné longtemps en Orient et en Amérique ; il s’est enfoncé prof
1045
l a séjourné longtemps en Orient et en Amérique ;
il
s’est enfoncé profondément dans la vie africaine ; et, de toutes ces
1046
ricaine ; et, de toutes ces enquêtes passionnées,
il
rapporte une certitude assez impressionnante : partout où il se crée
1047
une certitude assez impressionnante : partout où
il
se crée quelque chose de durable dans le monde, c’est l’œuvre d’un bl
1048
soutient ce peuple fiévreux dans les épreuves qu’
il
traverse. Ce ne sont pas les journaux qui nous apprendront tout cela.
1049
pas les journaux qui nous apprendront tout cela.
Il
faut lire Destin allemand, comme on lirait dans la conscience même d’
1050
me on lirait dans la conscience même d’un peuple.
Il
faut avoir éprouvé par ce livre la grandeur d’une telle espérance, si
1051
out aussi bien « La condition humaine ». C’est qu’
elle
éveille, en dépit de ses intentions nationalistes — au plus haut sens
1052
es — au plus haut sens du mot, je le répète, mais
il
se peut tout de même que certains lecteurs français en soient choqués
1053
perdait à soupeser des objets trop petits. 63.
Il
est curieux de noter que pas une seule femme n’apparaît dans tout le
1054
alraux, comme Edschmid, a voyagé dans des pays où
il
a pu voir les Européens mêlés à des révolutions indigènes, et comme E
1055
s à des révolutions indigènes, et comme Edschmid,
il
en a tiré des conclusions sur le destin de la race blanche, qui forme
1056
ou sa bonté fondamentale. L’homme ne s’avouera-t-
il
jamais lui-même que dans les tortures ? y. Rougemont Denis de, « [C
1057
Notes en marge de Nietzsche (mars 1935)z
Il
vient de paraître au Mercure de France un volumineux choix de sentenc
1058
et fort bien introduit ce volume, nous affirme qu’
ils
constituent le texte véritable d’une œuvre dont les volumes parus du
1059
raient guère que le commentaire. Je ne sais ce qu’
il
faut penser d’une allégation qui paraît à première vue aussi exorbita
1060
que celle qu’adopta Nietzsche dans les écrits qu’
il
fit paraître. On ne saurait trop recommander la lecture de ce recueil
1061
aiment dangereux pour un chrétien qui sait en qui
il
croit. Et pour les autres, qu’importe qu’ils perdent à cette lecture
1062
n qui il croit. Et pour les autres, qu’importe qu’
ils
perdent à cette lecture des « certitudes » mal centrées, purement tra
1063
s, est de fond en comble non historique, parce qu’
il
nie que les millénaires à venir puissent produire quelque chose qui n
1064
lle est, dans son esprit, tout à fait historique,
elle
témoigne par ce fait que l’humanité n’est plus courbée sous le joug,
1065
ue l’humanité n’est plus courbée sous le joug, qu’
elle
est redevenue païenne comme elle l’était il y a quelque mille ans. O
1066
sous le joug, qu’elle est redevenue païenne comme
elle
l’était il y a quelque mille ans. On croirait presque lire du Kierke
1067
ophie de l’Évolution selon Hegel, et dénonçait en
elle
non seulement un succédané païen de l’idée de Providence, mais surtou
1068
arent apparemment de cet événement éternel. N’est-
il
pas fort étrange et humiliant, qu’il faille un incroyant pour nous ra
1069
ernel. N’est-il pas fort étrange et humiliant, qu’
il
faille un incroyant pour nous rappeler que le salut, pour le chrétien
1070
ns le Progrès indéfini de notre histoire, mais qu’
il
est venu sur la terre, et qu’il est dès maintenant — hic et nunc ! —
1071
histoire, mais qu’il est venu sur la terre, et qu’
il
est dès maintenant — hic et nunc ! — « à la disposition » du moindre
1072
anisme en le traitant d’agent « non historique ».
Il
faut croire que cet adversaire de Hegel était encore bien mal purgé d
1073
de ses superstitions pseudo-scientifiques ! Mais
il
n’importe. Ce qui est admirable ici, c’est la lucidité avec laquelle
1074
etzsche décèle l’idolâtrie de notre temps, même s’
il
y participe pour son compte. Il est très vrai que nos contemporains o
1075
tre temps, même s’il y participe pour son compte.
Il
est très vrai que nos contemporains ont cessé de croire, dans l’ensem
1076
e, dans l’ensemble, que le salut était déjà venu.
Ils
se sont mis à croire de nouveau que le Messie naîtrait de leurs effor
1077
trait de leurs efforts indéfinis vers le Progrès.
Ils
sont redevenus païens. Les plus conscients de ce paganisme nouveau on
1078
acte de foi, fait en révolte contre la vraie foi,
ils
se persuadent que l’humanité sera meilleure, sera plus près de son «
1079
sera plus près de son « salut » dans cent ans qu’
elle
ne l’est aujourd’hui. Mais que dis-je, cent ans ! Il faut à leur espo
1080
ne l’est aujourd’hui. Mais que dis-je, cent ans !
Il
faut à leur espoir de bien plus formidables chiffres. Ouvrez le derni
1081
s répugnante qui soit. Oui, je sais bien de quoi
il
souffre, et contre quelle espèce déprimante de piétistes, arrogants d
1082
rimante de piétistes, arrogants dans leur bêtise,
il
se défend. Et pourtant, je puis donner à cette sentence une adhésion
1083
ner à cette sentence une adhésion assez méfiante.
Il
est trop clair qu’on peut inverser la maxime : « La contemplation int
1084
lligence la chose la plus répugnante qui soit. »
Il
faut perdre la croyance en Dieu, en la liberté et en l’immortalité, c
1085
ur de la réalité, celui-là n’est pas né à la foi.
Il
n’a pas la mâchoire solide. (Mais je vois bien que Nietzsche voulait
1086
es qui blessent — pour édifier » — c’est ainsi qu’
il
nommait les remarques amères qu’il ne pouvait s’empêcher de former au
1087
c’est ainsi qu’il nommait les remarques amères qu’
il
ne pouvait s’empêcher de former au spectacle de la chrétienté et dans
1088
eux… » jugez des autres ! Jugez de moi ! semble-t-
il
dire. Et c’est ainsi que l’incroyant se juge chaque fois qu’il pronon
1089
’est ainsi que l’incroyant se juge chaque fois qu’
il
prononce une vérité. En quoi l’on pourra dire qu’il ressemble fort au
1090
prononce une vérité. En quoi l’on pourra dire qu’
il
ressemble fort au croyant, — toutefois, sans le savoir, c’est là le p
1091
int. Les hommes sont le plus superstitieux quand
ils
sont très excités. Les religions se consolident dans des périodes de
1092
éaliste du péché, crée la crise bien davantage qu’
elle
n’en résulte. Ce qui résulte inévitablement d’une crise que la foi ne
1093
re est mauvaise, dit le christianisme : ne serait-
il
pas quelque chose contre nature ? Sinon, il serait, selon son propre
1094
erait-il pas quelque chose contre nature ? Sinon,
il
serait, selon son propre jugement, quelque chose de mauvais. Juste e
1095
tianisme veut leur mort, pour leur donner la vie.
Il
s’agit de savoir si la nature actuelle de l’homme est bonne ou mauvai
1096
omme est bonne ou mauvaise. La foi nous montre qu’
elle
est mauvaise. Dans ce sens, il est vrai de dire : le christianisme es
1097
i nous montre qu’elle est mauvaise. Dans ce sens,
il
est vrai de dire : le christianisme est contre nature. Et je m’expliq
1098
damentale. Mais si Nietzsche croit autre chose, s’
il
croit que la nature est bonne, pourquoi crie-t-il si fort que « l’hom
1099
il croit que la nature est bonne, pourquoi crie-t-
il
si fort que « l’homme est quelque chose qui doit être surmonté » ? Il
1100
omme est quelque chose qui doit être surmonté » ?
Il
n’y a pas que les chrétiens pour ne pas croire assez à ce qu’ils croi
1101
ue les chrétiens pour ne pas croire assez à ce qu’
ils
croient, ou s’imaginent croire. Le repentir ! Le remords ! Le chréti
1102
emords ! Le chrétien ne pense pas à son prochain,
il
est beaucoup trop occupé de soi-même ! Quelle que soit la justesse d
1103
e « injuste » de dire des choses vraies en soi —,
elles
me laissent presque toujours plus perplexe sur son compte qu’inquiet
1104
, je trouve ceci : Nietzsche parle sans autorité.
Il
a tendance à confondre l’autorité et la violence. Mais ses violences
1105
olence. Mais ses violences sont contradictoires :
il
attaque ici l’égoïsme, dont il fait par ailleurs l’apologie, mais san
1106
contradictoires : il attaque ici l’égoïsme, dont
il
fait par ailleurs l’apologie, mais sans jamais « déclarer ses valeurs
1107
. La vie chrétienne est pleine de contradictions,
elle
aussi, mais Paul les a toutes rassemblées dans une formule unique qui
1108
Paul critique la vie des chrétiens de son temps,
il
parle avec autorité, tandis que les critiques de Nietzsche feront tou
1109
me sa rhétorique et sa dialectique ; de la sorte,
il
a empêché le christianisme de mourir de sa pauvreté spirituelle. On
1110
. Les grands mouvements fascistes ne se réclament-
ils
pas, eux aussi, d’un « spirituel » préalablement « mis au pas » ? Et
1111
de la Science, qui est son Dieu. On sait aussi qu’
il
n’a pas hésité à condamner la théorie d’Einstein parce qu’elle contre
1112
hésité à condamner la théorie d’Einstein parce qu’
elle
contredisait l’hypothèse marxiste. Croyant servir leur science, ils c
1113
’hypothèse marxiste. Croyant servir leur science,
ils
commandent à la science…, etc. Mais, afin que nul ne se croie justifi
1114
Vie, de la seule Science, du seul Bonheur ; et qu’
il
a seul le droit de contredire nos notions, trop humaines et trop inté
1115
me, ce n’est que le “Dieu moral” qui est réfuté.
Il
est bien significatif que les fragments de Nietzsche sur la religion
1116
: on prétend, sans l’avoir jamais lu, savoir qui
il
fut, qui il est. Certains ont parcouru les Propos de table, présentés
1117
d, sans l’avoir jamais lu, savoir qui il fut, qui
il
est. Certains ont parcouru les Propos de table, présentés au public f
1118
tés au public français comme un ouvrage capital :
ils
s’étonnent d’y trouver si peu de substance théologique et tant de pla
1119
re connu, dont les revues n’hésitèrent pas lorsqu’
il
parut (en 1936) à louer la mesure et la sérieuse information théologi
1120
et la sérieuse information théologique… Ceci dit,
il
est juste d’insister sur la grande valeur des travaux de quelques spé
1121
ois Facultés françaises de théologie protestante.
Il
n’en reste pas moins que l’ignorance ou la méconnaissance courantes à
1122
, qu’on déclare volontiers « inhumain », parce qu’
il
attribue tout à Dieu. Le Traité du serf arbitre C’est sans dou
1123
uelle, excité (bien plutôt que « désarmé », comme
il
le dit aux premières pages) par les procédés de l’humaniste et du sce
1124
. Tels sont les thèmes qu’illustre cet ouvrage. S’
ils
n’y sont pas traités en forme, c’est qu’ils ne constituent pas un sys
1125
ge. S’ils n’y sont pas traités en forme, c’est qu’
ils
ne constituent pas un système, au sens philosophique du mot, mais qu’
1126
un système, au sens philosophique du mot, mais qu’
ils
s’impliquent très étroitement les uns les autres, et ne peuvent être
1127
ion que nous posent toutes les pages de la Bible.
Ils
renvoient tous à une réalité dont ils ne sont que les reflets, divers
1128
e la Bible. Ils renvoient tous à une réalité dont
ils
ne sont que les reflets, diversement réfractés par nos mots. Ils renv
1129
les reflets, diversement réfractés par nos mots.
Ils
renvoient tous à la question du Christ : « … Et toi, maintenant, croi
1130
cela ? » — Si tu le crois, si tu as reçu la foi,
il
n’est plus rien de « difficile » dans les assertions de Luther, ni da
1131
n’ébranlent plus que le « vieil homme », celui qu’
il
nous faut dépouiller. « Folie pour les sages » Mais il s’en fau
1132
t dépouiller. « Folie pour les sages » Mais
il
s’en faut de presque tout que les grandes thèses pauliniennes de la R
1133
connues !) par nos contemporains, même chrétiens.
Il
s’en faut de beaucoup, de presque tout, que les arguments d’un Érasme
1134
doit, en bonne logique, de les faire siens puisqu’
il
croit au mérite des œuvres ; et tous les protestants qui jugent encor
1135
ses efforts et ses œuvres morales. Que trouveront-
ils
dès lors dans ce Traité ? Une verdeur de polémique qui peut flatter e
1136
nie — quoique involontaire, je le suppose —, dont
il
pouvait, en l’occurrence, l’accabler. On ne saurait souligner trop fo
1137
cle ne s’oppose. Que devient alors notre effort ?
Il
ne sert plus de rien. Nous n’en ferons plus ! Nous refusons de jouer
1138
s et économiques ? Toute ta science ne s’occupe-t-
elle
pas, justement, à les découvrir ? Au besoin, à les inventer ? C. M.
1139
te qui crée ma liberté, par un acte de révolte, s’
il
le faut ! L. — Tu crois donc détenir un tel pouvoir ? C. M. — Il me
1140
— Tu crois donc détenir un tel pouvoir ? C. M. —
Il
me suffit de vouloir l’affirmer. L. — Soit, c’est une hypothèse de t
1141
e de nos actions passées, présentes, futures, car
elles
sont dans le temps, Dieu dans l’Éternité qui est avant le temps, qui
1142
que je les fais librement, et tu viens me dire qu’
elles
sont prévues ! Et prévues par un Dieu éternel, qui alors se joue de m
1143
u éternel, qui alors se joue de moi indignement !
Il
faudra donc choisir : Dieu ou moi. Je dirai : moi. Dussè-je tuer Dieu
1144
Dussè-je tuer Dieu, comme Nietzsche a proclamé qu’
il
avait fait. L. — Mais l’homme est « chair », et cette chair est liée
1145
à l’espace et au temps. Comment le temps tuerait-
il
l’Éternel ? Comment la chair tuerait-elle l’Esprit ? Elle ne peut tue
1146
s tuerait-il l’Éternel ? Comment la chair tuerait-
elle
l’Esprit ? Elle ne peut tuer que l’idée fausse qu’elle s’en formait…
1147
ternel ? Comment la chair tuerait-elle l’Esprit ?
Elle
ne peut tuer que l’idée fausse qu’elle s’en formait… Tu affirmes que
1148
l’Esprit ? Elle ne peut tuer que l’idée fausse qu’
elle
s’en formait… Tu affirmes que si Dieu prévoit tout, tu es alors dispe
1149
faire aucun effort. Si tout est décidé d’avance,
il
n’y a plus qu’à se laisser aller à la manière des musulmans. C’est pe
1150
t l’imaginer que morte. Mais la Bible nous dit qu’
elle
est la Vie, et que notre vie n’est qu’une mort à ses yeux. Qui nous p
1151
e chose d’immobile, de statique ? Qui nous dit qu’
elle
n’est pas, au contraire, la source de tout acte et de toute création,
1152
e chose au déroulement calculable du temps, quand
elle
le touche dans l’instant (dans un « atome » de temps, comme l’écrit P
1153
on, tout attachée à notre chair, à notre temps où
elle
s’est constituée, soit capable de concevoir ce paradoxe ou ce scandal
1154
promesse, une prière précise et instante, ne vit-
il
pas ce paradoxe et ce mystère : croire que « l’Éternel est vivant »,
1155
rien soit changé de ce qu’a décidé Dieu, de ce qu’
il
décide ou de ce qu’il décidera ? Car l’Éternel ne connaît pas de « te
1156
qu’a décidé Dieu, de ce qu’il décide ou de ce qu’
il
décidera ? Car l’Éternel ne connaît pas de « temps », il n’est pas li
1157
dera ? Car l’Éternel ne connaît pas de « temps »,
il
n’est pas lié comme nous à une succession. Mais, au contraire, nos di
1158
liés : nous venons de lui, nous retournons à lui,
il
est en nous lorsque l’Esprit dit la Parole dans notre cœur. Quelle ét
1159
rnel est une décision dans le passé ! Quand c’est
elle
seule qui définit notre présent ! Est-ce que nos objections « philoso
1160
dégager l’alternative du libre arbitre, telle qu’
elle
se pose dans les termes extrêmes où elle revêt sa vraie réalité : c’e
1161
telle qu’elle se pose dans les termes extrêmes où
elle
revêt sa vraie réalité : c’est l’Éternel qui commande, — ou c’est moi
1162
é : c’est l’Éternel qui commande, — ou c’est moi.
Il
n’y a pas là de difficultés intellectuelles. Il n’y a que la résistan
1163
. Il n’y a pas là de difficultés intellectuelles.
Il
n’y a que la résistance acharnée du « vieil homme », et les prétextes
1164
riture, — or, cette Parole est Christ lui-même, —
il
me paraît que l’opinion de Luther n’est pas sujette à de sérieuses ob
1165
que Dieu fait tout que nous devons agir, selon qu’
il
nous l’a commandé. C’est parce que Dieu a tout prévu que nous avons e
1166
ar nous-mêmes, dans notre péché. Et, à l’inverse,
il
faut oser descendre jusqu’au fond de la connaissance du péché pour vo
1167
’au fond de la connaissance du péché pour voir qu’
il
n’y a de liberté possible que dans la grâce que Dieu nous fait. Toute
1168
e du salut est un problème de vie ou de mort. Or,
il
est seul en cause pour le théologien. Et tout est clair lorsque l’on
1169
t notre faculté de vouloir, mais nie seulement qu’
elle
puisse suffire à nous obtenir le salut, étant elle-même soumise au ma
1170
este est psychologie, littérature et scolastique.
Il
n’en reste pas moins qu’aux yeux de la raison — cette folle comme le
1171
t vraiment à la difficulté ; ou si, au contraire,
ils
ne la retrouvent pas, mais dans un plan où elle reste insoluble. Éras
1172
e, ils ne la retrouvent pas, mais dans un plan où
elle
reste insoluble. Érasme était encore catholique ; son humanisme mesur
1173
ul — et l’Évangile — posent à notre foi. C’est qu’
il
a poussé, comme Luther, jusqu’aux extrêmes limites de l’homme, jusqu’
1174
i l’étreint, dès lors que « Dieu est mort » ou qu’
il
l’a « tué », il imagine le Retour éternel. Et comme ce Retour éternel
1175
lors que « Dieu est mort » ou qu’il l’a « tué »,
il
imagine le Retour éternel. Et comme ce Retour éternel paraît exclure
1176
our éternel paraît exclure toute liberté humaine,
il
se met à prêcher l’amor fati, l’adhésion volontaire et joyeuse à la f
1177
de reconnaître notre totale irresponsabilité, qu’
il
croit trouver et regagner la dignité suprême de l’homme sans Dieu. Êt
1178
idence. En vérité, c’est bien du même problème qu’
il
s’agit. Le seul problème, dès qu’on en vient à une épreuve radicale d
1179
de l’homme divinisé. Puis, à l’existence de Dieu,
il
oppose sa propre existence72. Mais la difficulté fondamentale que pos
1180
essité conditionnelle et nécessité absolue, comme
ils
disent », et ce ils désigne « les sophistes », c’est-à-dire les scola
1181
e et nécessité absolue, comme ils disent », et ce
ils
désigne « les sophistes », c’est-à-dire les scolastiques. 70. Comme
1182
réel aux yeux des peuples qu’à partir du jour où
il
sera capable de répondre avec force et autorité aux questions politiq
1183
orité aux questions politiques de notre temps. Qu’
il
le pressente, qu’il ait au moins une sorte de conscience anxieuse de
1184
politiques de notre temps. Qu’il le pressente, qu’
il
ait au moins une sorte de conscience anxieuse de l’œuvre à faire, c’e
1185
liques » improvisées à la veille de la guerre. Qu’
il
soit encore très loin d’une vision dynamique de l’action immédiate, c
1186
te, c’est ce que prouvent ces mêmes déclarations.
Elles
souffrent avant tout d’un manque de ton, qui révèle un manque de néce
1187
on, qui révèle un manque de nécessité intérieure.
Elles
expriment l’accord d’un certain nombre de bonnes volontés, non pas l’
1188
on pas l’élan d’une volonté précise et combative.
Elles
sont un respectable résultat, mais non pas un point de départ. Sans d
1189
non pas un point de départ. Sans doute garderont-
elles
une valeur historique. Mais comme beaucoup de documents qui prennent
1190
qui prennent par la suite une valeur historique,
elles
auront passé inaperçues en leur temps. Ce manque d’efficacité des mes
1191
le plan politique, provient sans doute du fait qu’
ils
sont des compromis, des accords minima, obtenus non sans peine et for
1192
u moins acceptable de l’autre. Sans doute n’était-
il
pas possible de faire davantage à ce moment. En fait, on a examiné la
1193
amendements. Et pour qu’une initiative aboutisse,
il
faut qu’elle représente un risque autant et plus qu’une prudence, il
1194
. Et pour qu’une initiative aboutisse, il faut qu’
elle
représente un risque autant et plus qu’une prudence, il faut qu’elle
1195
résente un risque autant et plus qu’une prudence,
il
faut qu’elle soit portée par une passion qui jaillisse du tréfonds de
1196
risque autant et plus qu’une prudence, il faut qu’
elle
soit portée par une passion qui jaillisse du tréfonds de sa foi créat
1197
eur dessein. Dans un certain sens, nous dirons qu’
ils
partaient sans cesse d’eux-mêmes, de leur foi ou de leur ambition, la
1198
eur action fut puissante dans la mesure exacte où
elle
fut l’expression directe de leur être. Si le mouvement œcuménique veu
1199
ur être. Si le mouvement œcuménique veut agir, et
il
le doit, il faut qu’il reconnaisse d’abord cette loi fondamentale de
1200
le mouvement œcuménique veut agir, et il le doit,
il
faut qu’il reconnaisse d’abord cette loi fondamentale de l’action. En
1201
t œcuménique veut agir, et il le doit, il faut qu’
il
reconnaisse d’abord cette loi fondamentale de l’action. En d’autres t
1202
loi fondamentale de l’action. En d’autres termes,
il
faut que son action politique parte de lui-même, de ce qu’il a, de ce
1203
son action politique parte de lui-même, de ce qu’
il
a, de ce qu’il est, et de sa foi constitutive. Il n’a pas à emprunter
1204
itique parte de lui-même, de ce qu’il a, de ce qu’
il
est, et de sa foi constitutive. Il n’a pas à emprunter ici et là pour
1205
il a, de ce qu’il est, et de sa foi constitutive.
Il
n’a pas à emprunter ici et là pour composer une mosaïque de mesures d
1206
avec une inflexible conséquence. Résumons-nous :
il
ne s’agit pas d’adopter une politique accidentellement ou indirecteme
1207
entellement ou indirectement « chrétienne », mais
il
s’agit d’actualiser la politique impliquée dès le début dans la volon
1208
économiques, sociales, politiques et religieuses,
ils
se dégagent avec d’autant plus de simplicité qu’ils ont atteint un cl
1209
s se dégagent avec d’autant plus de simplicité qu’
ils
ont atteint un climat presque mortel. Conflit politique et économique
1210
oi, c’est-à-dire à la fois excessif et incomplet.
Il
s’ensuit que dans leur plan, il n’y a pas de solution possible. Ils s
1211
sif et incomplet. Il s’ensuit que dans leur plan,
il
n’y a pas de solution possible. Ils sont inconciliables parce que, de
1212
ans leur plan, il n’y a pas de solution possible.
Ils
sont inconciliables parce que, de la combinaison de deux erreurs, on
1213
pliés. Pour résoudre l’opposition unité-division,
il
serait vain de rechercher une solution intermédiaire ou « libérale »,
1214
ibérale », à mi-chemin des deux erreurs en lutte.
Il
faut changer de plan, et retrouver l’attitude centrale dont ces deux
1215
éviations morbides. Entre la peste et le choléra,
il
n’y a ni « juste milieu » ni synthèse possible. Il faut revenir à la
1216
l n’y a ni « juste milieu » ni synthèse possible.
Il
faut revenir à la santé. Et tout d’abord, il faut se la représenter.
1217
ble. Il faut revenir à la santé. Et tout d’abord,
il
faut se la représenter. La santé politique et économique s’appelle fé
1218
glise universelle, implicitée par le fait même qu’
il
existe un effort œcuménique. Nous supposons cette doctrine, dès lors
1219
notée par le rejet de l’hérésie unitaire. Certes,
il
n’est pas de pire menace pour le mouvement œcuménique que l’utopie et
1220
n ou de doctrine), c’est dans la mesure exacte où
elles
ont douté d’une union par essence incontrôlable, qu’elles ont perdu l
1221
t douté d’une union par essence incontrôlable, qu’
elles
ont perdu leur communion réelle. Rappelons ici l’histoire de la tour
1222
hommes, conduisit à la division de leur langage.
Il
convient de laisser aux théologiens le soin de définir la doctrine po
1223
uel que soit le nom qu’on lui donne, en aucun cas
elle
ne manquera de fondements bibliques indiscutables. (Pour ma part, je
1224
. Ce qui me paraît d’une excellente méthode.) Est-
il
permis d’en appeler aussi au précédent des sept églises d’Asie, possé
1225
es, dans les diverses Églises, mais au contraire,
elle
a pour premier effet de les renforcer en les rendant plus conscientes
1226
entiques, et c’est par ce détour, précisément, qu’
elle
espère atteindre une communion d’esprit en profondeur. En d’autres te
1227
u’avec des orthodoxies que j’appellerai ouvertes.
Elle
ne peut embrasser une orthodoxie qui céderait consciemment à la tenta
1228
réel fût au ciel, mais plusieurs ont agi comme s’
il
était sur la terre, c’est-à-dire à leur disposition. Plusieurs ont id
1229
mais pratiquement puis théoriquement absolutisé,
il
n’y a pas de recours ou d’appel possibles de la part du fidèle. Il do
1230
ecours ou d’appel possibles de la part du fidèle.
Il
doit se soumettre ou sortir. S’il se soumet, il court le risque d’obé
1231
part du fidèle. Il doit se soumettre ou sortir. S’
il
se soumet, il court le risque d’obéir aux hommes plutôt qu’à Dieu. S’
1232
. Il doit se soumettre ou sortir. S’il se soumet,
il
court le risque d’obéir aux hommes plutôt qu’à Dieu. S’il sort, c’est
1233
le risque d’obéir aux hommes plutôt qu’à Dieu. S’
il
sort, c’est avec amertume, et l’Église qu’il fondera peut-être sera o
1234
u. S’il sort, c’est avec amertume, et l’Église qu’
il
fondera peut-être sera opposée à l’ancienne, au lieu d’être seulement
1235
être seulement plus vraie, donc plus universelle.
Elle
sera déformée à rebours, au lieu d’être réformée, je n’épiloguerai pa
1236
cuménique. Sa volonté d’unité s’oppose à l’union.
Elle
transforme la diversité en division. Alors il y a scandale, et c’est
1237
pposé au thème de l’unité systématique. Notons qu’
il
n’entraîne aucunement un éloge de la « tolérance » libérale à base d’
1238
vitale. Le poumon n’a pas à « tolérer » le cœur !
Il
doit être un vrai poumon, et dans cette mesure même, il aidera le cœu
1239
t être un vrai poumon, et dans cette mesure même,
il
aidera le cœur à être un bon cœur. Notons aussi que les Églises qui n
1240
ntrifuge par rapport à la communauté d’origine, s’
il
se confond d’abord avec l’intelligence et la raison, ne tarde pas à a
1241
raison, ne tarde pas à affaiblir le lien social.
Il
s’oriente vers l’anarchie. À ce moment se crée un sentiment de vide s
1242
osition n’est pas aussi profonde qu’on l’imagine.
Il
s’agit plutôt d’une succession inévitable. L’individu ne s’oppose à l
1243
us de dissolution commencé par l’individualisme :
il
liquide les groupes existants pour mieux accomplir son unification, s
1244
’admettant pas de recours au-delà de son pouvoir,
il
se prive de toute inspiration créatrice. L’homme n’est plus qu’une fo
1245
de la communauté barbare du sang. Mais plus tard
elle
a sombré dans l’anarchie. Rome a triomphé de l’anarchie et sombre mai
1246
e produit l’événement unique de l’Incarnation. Et
il
apporte à la question des temps la réponse éternelle de l’Église. Qu’
1247
pas sur le passé ou sur des origines communes : «
Il
n’y a plus ni Juif ni Grec. » Elles ne se fondent pas sur la classe o
1248
nes communes : « Il n’y a plus ni Juif ni Grec. »
Elles
ne se fondent pas sur la classe ou la race, ni sur quelque autre réal
1249
lien n’est pas terrestre d’abord, ni leur chef :
il
s’est assis au ciel à la droite de Dieu. Leur ambition non plus n’est
1250
ieu. Leur ambition non plus n’est pas terrestre :
elles
attendent la fin des temps. Et cependant, elles constituent bel et bi
1251
: elles attendent la fin des temps. Et cependant,
elles
constituent bel et bien les germes d’une société véritable. Elles ont
1252
t bel et bien les germes d’une société véritable.
Elles
ont leur organisation sociale, leurs chefs locaux, leurs hiérarchies,
1253
ères » et le sauve de la solitude ; d’autre part,
il
revêt une dignité humaine nouvelle, puisqu’il a été racheté, et qu’il
1254
rt, il revêt une dignité humaine nouvelle, puisqu’
il
a été racheté, et qu’il a reçu la promesse de sa résurrection individ
1255
humaine nouvelle, puisqu’il a été racheté, et qu’
il
a reçu la promesse de sa résurrection individuelle. Il est donc à la
1256
reçu la promesse de sa résurrection individuelle.
Il
est donc à la fois engagé et libéré, et ceci en vertu d’un seul et mê
1257
en vertu d’un seul et même fait : la vocation qu’
il
a reçue de l’Éternel. Cet homme d’un type nouveau n’est pas l’individ
1258
un type nouveau n’est pas l’individu grec, puisqu’
il
se soucie davantage de servir que de se distinguer. Il n’est pas non
1259
soucie davantage de servir que de se distinguer.
Il
n’est pas non plus le simple rouage, la simple fonction dans l’État q
1260
on dans l’État qu’était le citoyen romain, puisqu’
il
possède une dignité indépendante de son rôle social. Comment le bapti
1261
endante de son rôle social. Comment le baptiser ?
Il
faut un mot nouveau. Ou plutôt, on va prendre un mot déjà connu, mais
1262
e avec son sens nouveau, et la réalité sociale qu’
il
désigne, sont bel et bien des créations chrétiennes, ou pour mieux di
1263
ivité. C’est le même Dieu qui, par la vocation qu’
il
envoie à l’homme, distingue cet homme de tous les autres et le remet
1264
ment que les droits et les devoirs de l’ensemble.
Ils
ne sont plus contradictoires. Ce qui libère un homme est aussi ce qui
1265
rop flottant et le soldat politique trop esclave.
Elle
est l’homme intégral, dont les deux autres ne sont que des maladies.
1266
t que des maladies. Dans le plan humain immanent,
il
n’y a pas d’équilibre possible entre l’anarchie et l’unité forcée, l’
1267
la liberté, mais là aussi est la vraie communion.
Il
nous reste à développer maintenant les implications politiques de cet
1268
du fédéralisme Nous en avons assez dit pour qu’
il
soit désormais facile de voir qu’à l’attitude œcuménique en religion
1269
politique. Quant à la philosophie de la personne,
elle
sera normalement celle du bon citoyen d’une fédération. La devise par
1270
même que l’État cesse d’être un vrai État dès qu’
il
se veut souverain absolu, l’homme cesse d’être un homme intégral dès
1271
lu, l’homme cesse d’être un homme intégral dès qu’
il
absolutise sa liberté.) Le fédéralisme part des groupes locaux (régio
1272
par l’organe central qui lie toutes les régions,
il
ménage un recours au citoyen contre les abus de pouvoirs locaux. Il c
1273
rs au citoyen contre les abus de pouvoirs locaux.
Il
cherche la coopération organique de ses membres et non cette caricatu
1274
xtérieures des groupes qui forment la fédération,
il
cherche à vivifier leurs foyers. Et de la sorte, à l’équilibre méfian
1275
re méfiant et statique des puissances affrontées,
il
substitue l’émulation vivante des valeurs originales. Spinoza définit
1276
divers d’une seule et même attitude spirituelle.
Ils
s’engendrent l’un l’autre et s’appuient mutuellement. Ils ont les mêm
1277
gendrent l’un l’autre et s’appuient mutuellement.
Ils
ont les mêmes structures et les mêmes ambitions. Ils opposent égaleme
1278
ont les mêmes structures et les mêmes ambitions.
Ils
opposent également à la notion d’unité rigide celle de communion ; à
1279
terme de démocratie dans ce qui précède. C’est qu’
il
recouvre actuellement de trop graves malentendus et abus. L’œcuménism
1280
blir ce qu’on nommait chez eux la « démocratie ».
Ils
attendent un régime qui puisse allier la liberté à la communauté. Dan
1281
té pratique de réaliser la vraie démocratie. Mais
il
a le grand avantage de réaliser en même temps ce qu’il y a de valable
1282
ution ». Car pour qu’une révolution se déclenche,
il
faut une vision, une doctrine et une tactique nouvelles. Mais où sont
1283
doctrine et une tactique nouvelles. Mais où sont-
elles
? Qui les prépare ? Le capitalisme et l’individualisme ont reçu en Eu
1284
tat de guerre, qui ne peut subsister normalement.
Il
ne reste donc à prévoir qu’un vide économique, idéologique et social
1285
meure, c’est l’organisation fédéraliste du monde.
Elle
seule apporte du nouveau. Elle seule répond à la fois aux aspirations
1286
éraliste du monde. Elle seule apporte du nouveau.
Elle
seule répond à la fois aux aspirations confuses des peuples et aux né
1287
s peuples et aux nécessités pratiques de la paix.
Elle
seule s’oppose à la fois au capitalisme individualiste et au totalita
1288
cette réponse ? Le rôle d’Hitler est de détruire.
Il
détruit les contradictions intolérables d’une Europe qui s’obstinait
1289
toute sa force, et sa victoire même l’épuiserait.
Il
n’y aurait plus qu’une table rase couverte de ruines pulvérisées. Le
1290
Le rôle de Churchill est de faire la guerre. Mais
il
ne pourra pas la gagner réellement s’il ne propose rien aux peuples d
1291
rre. Mais il ne pourra pas la gagner réellement s’
il
ne propose rien aux peuples de l’Europe. Or il dit qu’il n’en a pas l
1292
s’il ne propose rien aux peuples de l’Europe. Or
il
dit qu’il n’en a pas le temps… Quant au rôle de Staline, il paraît êt
1293
ropose rien aux peuples de l’Europe. Or il dit qu’
il
n’en a pas le temps… Quant au rôle de Staline, il paraît être de prof
1294
il n’en a pas le temps… Quant au rôle de Staline,
il
paraît être de profiter de la guerre des autres pour consolider l’aut
1295
e de se demander si les Églises peuvent répondre,
il
faut qu’elles comprennent qu’elles le doivent. Mais les deux termes n
1296
ander si les Églises peuvent répondre, il faut qu’
elles
comprennent qu’elles le doivent. Mais les deux termes ne se confonden
1297
peuvent répondre, il faut qu’elles comprennent qu’
elles
le doivent. Mais les deux termes ne se confondent-ils pas dans la réa
1298
le doivent. Mais les deux termes ne se confondent-
ils
pas dans la réalité de la foi ? Certes ! Si les Églises sont fidèles
1299
Certes ! Si les Églises sont fidèles à leur chef,
elles
savent qu’il règne et crée pour ceux qui croient la possibilité de fa
1300
Églises sont fidèles à leur chef, elles savent qu’
il
règne et crée pour ceux qui croient la possibilité de faire ce qu’il
1301
ur ceux qui croient la possibilité de faire ce qu’
il
demande. Dans l’état d’impuissance apparente où se voient aujourd’hui
1302
ourd’hui les Églises, si cette foi seule demeure,
elle
sera suffisante. Aussi bien, certaines raisons de croire que l’Église
1303
peut agir, raisons que nous allons énumérer, sont-
elles
moins destinées à combattre des doutes qu’à fortifier des espérances
1304
s religieux. Voilà le premier. A-t-on remarqué qu’
il
existe une forme de totalitarisme correspondant à la Russie orthodoxe
1305
e et à l’Espagne catholiques romaines, — alors qu’
il
n’en existe aucune qui se soit développée en pays calvinistes, ou seu
1306
t jamais été établie d’une manière satisfaisante.
Il
en résultait, dans le peuple, le sentiment que l’Église et l’État for
1307
olution copie toujours la structure du pouvoir qu’
elle
renverse, un Staline, un Hitler et, dans une mesure moindre, un Musso
1308
eur compte le césaropapisme ou la théocratie dont
ils
triomphaient : ils réclamèrent à la fois le pouvoir temporel et l’aut
1309
opapisme ou la théocratie dont ils triomphaient :
ils
réclamèrent à la fois le pouvoir temporel et l’autorité spirituelle,
1310
et de l’État a toujours été réelle — même lorsqu’
elle
n’était pas strictement établie par la loi. De même les devoirs de la
1311
subsistent — royauté, hiérarchies sociales — mais
il
s’y introduit un contenu socialiste. (Là encore avec moins de secouss
1312
é « des Églises et des personnes particulières ».
Elle
doit donc s’organiser en fédération de paroisses et de provinces, par
1313
erminée par le fait — d’ordre ecclésiastique — qu’
il
fut fondé par des seceders.) Et l’on sait que les réformés de France,
1314
-à-dire le premier plan d’une Europe confédérée.
Il
serait aisé de développer, de nuancer et de multiplier de tels exempl
1315
l’œcuménisme, et la philosophie de la personne qu’
elle
implique, sont les seules bases actuellement concevables pour un ordr
1316
est une contradiction dans les termes, à moins qu’
elle
ne soit la formule de la religion totalitaire, sans transcendance, qu
1317
t tout ce que nous avons d’expérience de la paix,
elles
convoient et contiennent en même temps un indiscutable dynamisme révo
1318
nt aux besoins les plus légitimes de notre temps.
Il
nous rend les vraies formules de la communauté vivante, celle qui ras
1319
éparer la réconciliation des adversaires actuels.
Il
ne se fonde pas sur un compromis entre des erreurs opposées, mais sur
1320
centrale qui dépasse ces erreurs en même temps qu’
elle
ré-axe les vérités égarées dans les deux camps. (N’oublions pas que l
1321
ableau que nous venons d’esquisser est ambitieux.
Il
veut l’être, parce qu’il doit l’être. L’action du chrétien n’est jama
1322
esquisser est ambitieux. Il veut l’être, parce qu’
il
doit l’être. L’action du chrétien n’est jamais partie de la prudente
1323
rtie de la prudente considération des forces dont
il
croyait pouvoir disposer, mais de ce que Dieu voulait qu’il fît. C’es
1324
pouvoir disposer, mais de ce que Dieu voulait qu’
il
fît. C’est toujours une utopie apparente ; en réalité, ce n’est qu’un
1325
e que dans l’épreuve missionnaire universelle, qu’
il
doit affronter maintenant. 73. Note de 1946 : Je n’ai pas un mot à
1326
, Paris, septembre–octobre 1946, p. 621-639. ac.
Il
s’agit d’une traduction en français de « Ecumenicity and federalism »
1327
ad ae Tout ne fut pas toujours de notre faute.
Ils
souffraient de famine quand nous n’étions pas nés. Ils meurent encore
1328
ouffraient de famine quand nous n’étions pas nés.
Ils
meurent encore de faim, mais en bien plus grand nombre — c’est un rés
1329
fois-ci, notre faute est immense, mais ailleurs :
elle
est d’avoir offert, ou plutôt imposé aux élites occidentalisées du ti
1330
italiste ou communiste ne fait aucune différence.
Ils
se trompent d’Europe, quand ils veulent l’imiter, surtout pour mieux
1331
ucune différence. Ils se trompent d’Europe, quand
ils
veulent l’imiter, surtout pour mieux s’en libérer. Ils choisissent ce
1332
eulent l’imiter, surtout pour mieux s’en libérer.
Ils
choisissent celle qui les a dominés, mais c’est choisir aussi celle q
1333
uls moyens de s’en tirer sans catastrophes. Car s’
il
est vrai que l’Europe est responsable de la plupart des maux qui acca
1334
ù famine, mais d’où soif aussi de nos industries,
il
est non moins vrai que l’Europe seule peut produire les anticorps des
1335
seule peut produire les anticorps des toxines qu’
elle
a répandues, et peut élaborer un modèle politique qui soit tentant po
1336
t, de l’échec du colonialisme, je suis sceptique.
Il
se peut que le tiers-monde ne désire imiter qu’un Occident dominateur
1337
les chances de votre projet ? Quelles forces peut-
il
mobiliser ? Qui est pour ? Qui sera contre ? Et qui va le prendre en
1338
ir et sentir la nécessité des régions, en tant qu’
elle
me paraît lisiblement inscrite dans la problématique de notre temps.
1339
une conversation ou un colloque privé. Pourtant,
ils
ne font rien de visible dans ce sens, tout occupés qu’ils sont à se m
1340
ont rien de visible dans ce sens, tout occupés qu’
ils
sont à se maintenir au pouvoir. Ils voudraient bien agir dans le sens
1341
ut occupés qu’ils sont à se maintenir au pouvoir.
Ils
voudraient bien agir dans le sens de mon plan, mais s’ils en montraie
1342
raient bien agir dans le sens de mon plan, mais s’
ils
en montraient l’intention, ils perdraient aussitôt, et à coup sûr, le
1343
e mon plan, mais s’ils en montraient l’intention,
ils
perdraient aussitôt, et à coup sûr, le pouvoir de le faire peut-être
1344
i ait risqué l’expérience, dont rien ne prouve qu’
elle
n’eût pas réussi. Mais je ne vais pas me dérober à une question que j
1345
de Rome ? Et qu’ont fait les partis politiques ?
Ils
sont encore « nationaux » avant tout, donc pas plus régionaux qu’euro
1346
me jeu donc pour la droite et la gauche, selon qu’
elles
ont le pouvoir ou seulement l’ambitionnent : sa structure leur dicte
1347
ps utile. — Mais la Jeunesse ? — Pour autant qu’
elle
n’est pas un mythe journalistique, je la vois partagée dans sa majori
1348
vouement rituel d’une aristocratie qui sait ce qu’
elle
se doit. Plus grave encore, cette civilisation ne peut produire nulle
1349
Le monde va finir. La seule raison pour laquelle
il
pourrait durer, c’est qu’il existe. Que cette raison est faible, comp
1350
raison pour laquelle il pourrait durer, c’est qu’
il
existe. Que cette raison est faible, comparée à toutes celles qui ann
1351
ir renversé après trente ans de pouvoir, parce qu’
il
s’obstinait à confondre progrès social et centrales nucléaires. La ve
1352
es nucléaires. La vertu des gouvernements, même s’
ils
sont au service des marchands d’armes, n’est pas telle qu’ils ne tire
1353
service des marchands d’armes, n’est pas telle qu’
ils
ne tirent de pareils résultats des conclusions d’un sain opportunisme
1354
ng, ceux des écologistes. On leur dispute ce nom,
ils
assurent la fonction. Et bien plus, par leurs luttes contre la pollut
1355
contre la pollution et les centrales nucléaires,
ils
ont fourni à la révolution régionaliste le levier politique qui avait
1356
pour qui l’Europe de demain ne sera viable que si
elle
se recompose sur la base de quelque 140 régions autonomes, dont il dr
1357
ur la base de quelque 140 régions autonomes, dont
il
dresse la carte. Je vois des architectes comme Doxiadis, qui écrit :
1358
oit pas ce qui pourrait justifier l’espoir fou qu’
ils
deviennent raisonnables dans les dix ou quinze ans prochains — et nou
1359
z pas — pas assez tôt et pas en nombre suffisant.
Il
reste à la réalité de vous imposer ce que le bon sens jamais n’aura p
1360
par nos soins diligents quoique inconscients. Si
elles
sont assez grandes pour réveiller le monde, pas assez pour tout écras
1361
out le monde déjà oublie sa peur et la sagesse qu’
il
en tira pour quelques semaines, de nouvelles catastrophes s’organisen
1362
, c’était Saint-Just, au cœur de la Révolution :
Il
faut attendre un mal général assez grand pour que l’opinion générale
1363
’on commence trop tôt. Mais je ne vois pas ce qu’
il
serait possible, aujourd’hui, de « commencer trop tôt » : tout va tro
1364
i, de « commencer trop tôt » : tout va trop vite.
Il
a fallu cinq siècles exactement (1300-1800) pour préparer l’État-nati
1365
pour le propager au monde entier. Mais depuis qu’
il
sévit, à cause de lui, tout s’accélère vers le pire. D’où non seuleme
1366
hes n’apprendront rien à ceux qui n’ont pas vu où
il
faut aller, et donc n’en cherchent pas les voies et ne les inventeron
1367
. « Pas de vent favorable pour qui ne sait pas où
il
va », disait Sénèque. Mais pour celui qui sait, tout est possible tan
1368
e de la Pythie ne veut ni prédire ni cacher, mais
il
indique sa volonté et la vraie Voie. « Sentinelle, que dis-tu de la n
1369
e pour ce qui fut un jour notre vie menacée. Mais
il
n’est pas de prévision d’avenir meilleur qui ne passe par un homme me
1370
meilleur qui ne passe par un homme meilleur. Car
il
arrivera… ce que nous sommes. Et quoi d’autre peut-il arriver ? Et ve
1371
rrivera… ce que nous sommes. Et quoi d’autre peut-
il
arriver ? Et venant d’où ? (À part les tremblements de terre.) Il nou
1372
venant d’où ? (À part les tremblements de terre.)
Il
nous faut donc vouloir que le meilleur gagne — en nous. Et il nous fa
1373
donc vouloir que le meilleur gagne — en nous. Et
il
nous faut d’abord nous le représenter, nous le rendre présent, l’anti
1374
té commence quand l’homme se demande : « Que va-t-
il
arriver ? » au lieu de se demander : « Que puis-je faire ? » À ces d
1375
je faire ? » À ces deux questions, curieusement,
il
n’est qu’une seule réponse possible et c’est : — Toi-même ! Car il ar
1376
eule réponse possible et c’est : — Toi-même ! Car
il
arrivera ce que nous sommes : du mal au pire si nous restons aussi ma
1377
et d’abord celui d’être tous des seuls en masse,
il
vous reste à vous convertir, à faire votre révolution, c’est le même
1378
le réseau des relations humaines, dans la cité, s’
il
ne s’est opéré d’abord en vous. Si vous voulez changer l’avenir, chan
1379
prophètes condamnent la volonté de puissance, qu’
ils
assimilent à l’invocation des faux dieux. Pour les évangiles, la puis
1380
a désintégration d’un peu de matière, que reste-t-
il
dans la « sphère du religieux » ? La casuistique ? Mais à l’inverse,
1381
uoi refuser le verdict de la Raison d’État, quand
il
tombe de l’ordinateur bien programmé ? Puissance ou Liberté, qui tran
1382
du monde, qui est la vitalité d’une société. Mais
il
nous faut pousser l’analyse sur nous-mêmes : que choisissons-nous rée
1383
oracle que celui d’Isaïe à Séir, c’est de lui qu’
elle
devra tirer son espoir et sa résolution. Et ce n’est pas la promesse
1384
s d’une rénovation de l’aventure d’être homme, si
elle
prend naissance dans notre cœur. Écoutons maintenant le cri sublime