1 1928, Foi et Vie, articles (1928–1977). Le péril Ford (février 1928)
1 Le péril Ford (février 1928)a On a trop dit que notre époque est chao
2 e est chaotique. Je crois bien, au contraire, que l’ histoire n’a pas connu de période où les directions d’une civilisation
3 raire, que l’histoire n’a pas connu de période où les directions d’une civilisation apparaissent plus nettement. Un certain
4 ou, pour mieux dire, une organisation générale de la vie mondiale. Toutes les forces du temps y concourent obscurément ; e
5 organisation générale de la vie mondiale. Toutes les forces du temps y concourent obscurément ; et, pour peu que cela cont
6 nt ; et, pour peu que cela continue, pour peu que la bourgeoisie intellectuelle persiste à jouer l’autruche aux yeux clos,
7 ue la bourgeoisie intellectuelle persiste à jouer l’ autruche aux yeux clos, l’avènement de cette organisation toute-puissa
8 tuelle persiste à jouer l’autruche aux yeux clos, l’ avènement de cette organisation toute-puissante n’est plus qu’une ques
9 s encore. Ici et là, quelques cris s’élèvent dans le désert d’une époque déjà presque abandonnée par l’Esprit. À l’heure d
10 e désert d’une époque déjà presque abandonnée par l’ Esprit. À l’heure de toucher aux buts que sa civilisation poursuit dep
11 ne époque déjà presque abandonnée par l’Esprit. À l’ heure de toucher aux buts que sa civilisation poursuit depuis près de
12 ivilisation poursuit depuis près de deux siècles, l’ Occidental est saisi d’un étrange malaise. Il soupçonne, par éclairs,
13 ut-être dans ces buts une absurdité fondamentale. L’ infaillible progrès aurait-il fait fausse route ? Est-il temps encore
14 ait-il fait fausse route ? Est-il temps encore de le détourner du désastre spirituel vers lequel il entraîne l’Occident ?
15 ner du désastre spirituel vers lequel il entraîne l’ Occident ? Cris dans le désert. Déserts des villes fiévreuses où le fr
16 el vers lequel il entraîne l’Occident ? Cris dans le désert. Déserts des villes fiévreuses où le fracas des machines couvr
17 dans le désert. Déserts des villes fiévreuses où le fracas des machines couvre déjà la plainte humaine. Il y a ceux qui p
18 fiévreuses où le fracas des machines couvre déjà la plainte humaine. Il y a ceux qui pleurent le passé et ceux qui prophé
19 déjà la plainte humaine. Il y a ceux qui pleurent le passé et ceux qui prophétisent, ceux qui jettent une imprécation stér
20 tent une imprécation stérile et magnifique contre l’ époque et ceux qui cherchent à l’oublier dans le rêve, dans l’utopie,
21 agnifique contre l’époque et ceux qui cherchent à l’ oublier dans le rêve, dans l’utopie, dans une belle doctrine… Il faudr
22 e l’époque et ceux qui cherchent à l’oublier dans le rêve, dans l’utopie, dans une belle doctrine… Il faudrait d’abord pre
23 ceux qui cherchent à l’oublier dans le rêve, dans l’ utopie, dans une belle doctrine… Il faudrait d’abord prendre conscienc
24 ous, dans cette complaisance générale à proclamer le désordre du temps. On a peur de certaines évidences, on préfère affir
25 n préfère affirmer que tout est incompréhensible. L’ homme moderne recule devant l’évidence de la banqueroute prochaine de
26 t incompréhensible. L’homme moderne recule devant l’ évidence de la banqueroute prochaine de sa civilisation. Il répugne à
27 ible. L’homme moderne recule devant l’évidence de la banqueroute prochaine de sa civilisation. Il répugne à admettre qu’un
28 rder autour de nous et d’en croire nos yeux. I. L’ homme qui a réussi Je prends Henry Ford comme un symbole du monde m
29 Henry Ford comme un symbole du monde moderne, et le meilleur, parce que personne ne s’est approché plus que lui du type i
30 e ne s’est approché plus que lui du type idéal de l’ industriel et du capitaliste. Le succès immense de ses livres1, sa pop
31 du type idéal de l’industriel et du capitaliste. Le succès immense de ses livres1, sa popularité universelle sont signes
32 ivres1, sa popularité universelle sont signes que l’ époque a senti en lui son incarnation la plus parfaite. Qu’on ne m’acc
33 ignes que l’époque a senti en lui son incarnation la plus parfaite. Qu’on ne m’accuse donc pas de caricaturer l’objet de m
34 rfaite. Qu’on ne m’accuse donc pas de caricaturer l’ objet de ma critique pour faciliter l’accusation : je prends pour la j
35 caricaturer l’objet de ma critique pour faciliter l’ accusation : je prends pour la juger ce que l’époque m’offre de mieux
36 ique pour faciliter l’accusation : je prends pour la juger ce que l’époque m’offre de mieux réussi. Voici la vie de Ford,
37 ter l’accusation : je prends pour la juger ce que l’ époque m’offre de mieux réussi. Voici la vie de Ford, telle qu’il la r
38 er ce que l’époque m’offre de mieux réussi. Voici la vie de Ford, telle qu’il la raconte dans Ma vie et mon œuvre. Il naît
39 e mieux réussi. Voici la vie de Ford, telle qu’il la raconte dans Ma vie et mon œuvre. Il naît fils de paysan. Il passe so
40 des outils qu’il joue encore à présent », dit‑il. Le plus mémorable événement de ces années de jeunesse, son « chemin de D
41 che au juste quelle dose d’« humour » il met dans l’ expression), c’est la rencontre d’une locomotive routière. « Depuis l’
42 ose d’« humour » il met dans l’expression), c’est la rencontre d’une locomotive routière. « Depuis l’instant où, enfant de
43 la rencontre d’une locomotive routière. « Depuis l’ instant où, enfant de 12 ans, j’aperçus cette machine de route, jusqu’
44 a été de construire une bonne machine routière. » Les étapes de sa jeunesse sont : la construction d’un moteur à vapeur, pu
45 hine routière. » Les étapes de sa jeunesse sont : la construction d’un moteur à vapeur, puis d’un moteur à explosion, enfi
46 simple mécanicien chez Edison. Il fonde tôt après la Société des automobiles Ford, « et commence à réaliser son rêve, le t
47 omobiles Ford, « et commence à réaliser son rêve, le type unique d’automobile utilitaire »2. Dès lors, c’est une suite de
48 . Dès lors, c’est une suite de chiffres indiquant le progrès de sa production, d’année en année. On pourrait ajouter à ces
49 ur lui qu’un résultat secondaire de son activité. Le but de sa vie n’a jamais été de s’enrichir. Son « rêve » était autre,
50 s été de s’enrichir. Son « rêve » était autre, il l’ a réalisé comme il est donné à peu d’hommes de le faire : 7000 voiture
51 l’a réalisé comme il est donné à peu d’hommes de le faire : 7000 voitures par jour, et la possibilité d’augmenter encore
52 d’hommes de le faire : 7000 voitures par jour, et la possibilité d’augmenter encore cette production. Ford est le plus pui
53 ité d’augmenter encore cette production. Ford est le plus puissant industriel du monde ; le plus riche, au point qu’il peu
54 . Ford est le plus puissant industriel du monde ; le plus riche, au point qu’il peut parler d’égal à égal avec beaucoup d’
55 peut parler d’égal à égal avec beaucoup d’États ; le plus parfait aussi. Son succès sans précédent le met à l’abri de tout
56 le plus parfait aussi. Son succès sans précédent le met à l’abri de toutes les attaques, du point de vue technique. L’org
57 parfait aussi. Son succès sans précédent le met à l’ abri de toutes les attaques, du point de vue technique. L’organisation
58 n succès sans précédent le met à l’abri de toutes les attaques, du point de vue technique. L’organisation de ses usines, de
59 e toutes les attaques, du point de vue technique. L’ organisation de ses usines, des salaires, des conditions de travail et
60 et du paupérisme. C’est un résultat qu’on n’a pas le droit humainement de sous-estimer. Les griefs que les socialistes fon
61 ’on n’a pas le droit humainement de sous-estimer. Les griefs que les socialistes font aux capitalistes européens ne sauraie
62 droit humainement de sous-estimer. Les griefs que les socialistes font aux capitalistes européens ne sauraient l’atteindre.
63 stes font aux capitalistes européens ne sauraient l’ atteindre. Au contraire, il a résolu la question sociale d’une façon q
64 sauraient l’atteindre. Au contraire, il a résolu la question sociale d’une façon qui ne devrait pas déplaire aux doctrina
65 mplète du monde, seule méthode capable d’empêcher les abus des capitalistes. Du même coup, en supprimant l’esclavage financ
66 bus des capitalistes. Du même coup, en supprimant l’ esclavage financier de l’ouvrier, il supprime la principale cause avou
67 même coup, en supprimant l’esclavage financier de l’ ouvrier, il supprime la principale cause avouée de la lutte des classe
68 t l’esclavage financier de l’ouvrier, il supprime la principale cause avouée de la lutte des classes. Il se dégage de la l
69 uvrier, il supprime la principale cause avouée de la lutte des classes. Il se dégage de la lecture de Ma vie et mon œuvre
70 e avouée de la lutte des classes. Il se dégage de la lecture de Ma vie et mon œuvre une impression de netteté, de solidité
71 pression de netteté, de solidité, de propreté. Si l’ on ajoute à cela le plaisir qu’on éprouve toujours au récit de succès
72 , de solidité, de propreté. Si l’on ajoute à cela le plaisir qu’on éprouve toujours au récit de succès mirobolants, et le
73 rouve toujours au récit de succès mirobolants, et le charme un peu facile mais fort goûté du grand public, de l’humour amé
74 un peu facile mais fort goûté du grand public, de l’ humour américain, l’on comprendra sans peine la popularité mondiale de
75 ort goûté du grand public, de l’humour américain, l’ on comprendra sans peine la popularité mondiale des « idées » d’Henry
76 de l’humour américain, l’on comprendra sans peine la popularité mondiale des « idées » d’Henry Ford et des livres qui les
77 iale des « idées » d’Henry Ford et des livres qui les répandent. L’on ne pourra qu’y applaudir, semble-t-il, en souhaitant
78 s » d’Henry Ford et des livres qui les répandent. L’ on ne pourra qu’y applaudir, semble-t-il, en souhaitant que les indust
79 ra qu’y applaudir, semble-t-il, en souhaitant que les industriels européens s’en inspirent toujours plus. Ford leur montre
80 ns s’en inspirent toujours plus. Ford leur montre le chemin qu’ils seront bien obligés de prendre tôt ou tard. Il est préf
81 e quelques chances encore de régler pacifiquement le conflit du capital et du travail. « Se fordiser ou mourir », écrivait
82 vait récemment un économiste. Ford, perfection de l’ industriel, offre au monde moderne le premier exemple de son achèvemen
83 exemple de son achèvement intégral. Il a atteint l’ objectif de la moderne civilisation occidentale. Voici donc venue l’he
84 n achèvement intégral. Il a atteint l’objectif de la moderne civilisation occidentale. Voici donc venue l’heure de la juge
85 oderne civilisation occidentale. Voici donc venue l’ heure de la juger. Le héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. M
86 lisation occidentale. Voici donc venue l’heure de la juger. Le héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi 
87 ccidentale. Voici donc venue l’heure de la juger. Le héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la
88 Voici donc venue l’heure de la juger. Le héros de l’ époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la plus grave
89 l’heure de la juger. Le héros de l’époque, c’est l’ homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la plus grave question qu’on p
90 , c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la plus grave question qu’on puisse poser à notre temps. II. M. Ford
91 ser à notre temps. II. M. Ford a ses idées, ou la philosophie de ceux qui n’en veulent pas Nous avons dit tout à l’h
92 eux qui n’en veulent pas Nous avons dit tout à l’ heure quel fut le but de la vie de Ford, sa « grande et constante ambi
93 ent pas Nous avons dit tout à l’heure quel fut le but de la vie de Ford, sa « grande et constante ambition ». Il semble
94 Nous avons dit tout à l’heure quel fut le but de la vie de Ford, sa « grande et constante ambition ». Il semble que toute
95 éthode, technique — soit conditionnée jusque dans le détail par une idée fixe primitive. Considérons-la sous cet angle. Il
96 e détail par une idée fixe primitive. Considérons- la sous cet angle. Il y a d’abord la vision de l’auto routière : naissan
97 ve. Considérons-la sous cet angle. Il y a d’abord la vision de l’auto routière : naissance de sa passion froide et tenace.
98 ns-la sous cet angle. Il y a d’abord la vision de l’ auto routière : naissance de sa passion froide et tenace. Il s’efforce
99 sion froide et tenace. Il s’efforce d’en réaliser l’ objet par ses propres moyens, à un exemplaire ; puis, il fonde une usi
100 plaire ; puis, il fonde une usine pour multiplier les réalisations. Bientôt, élargissant son ambition, il conçoit ce mythe
101 on, il conçoit ce mythe extravagant du bonheur de l’ humanité par la possession d’automobiles Ford. Et, comme il est très i
102 ce mythe extravagant du bonheur de l’humanité par la possession d’automobiles Ford. Et, comme il est très intelligent, il
103 l est très intelligent, il a vite fait de démêler les conditions les plus rationnelles de la production, avec cette netteté
104 lligent, il a vite fait de démêler les conditions les plus rationnelles de la production, avec cette netteté et cette décis
105 e démêler les conditions les plus rationnelles de la production, avec cette netteté et cette décision qu’une passion conte
106 te décision qu’une passion contenue peut donner à l’ homme d’action. Enfin, le voici en mesure de produire des quantités én
107 n contenue peut donner à l’homme d’action. Enfin, le voici en mesure de produire des quantités énormes d’autos. Seulement,
108 nt, pour pouvoir continuer, il faut vendre ; dans l’ intérêt de la production, il faut créer la consommation. La réclame s’
109 oir continuer, il faut vendre ; dans l’intérêt de la production, il faut créer la consommation. La réclame s’en charge. Pa
110  ; dans l’intérêt de la production, il faut créer la consommation. La réclame s’en charge. Par le procédé très simple de l
111 de la production, il faut créer la consommation. La réclame s’en charge. Par le procédé très simple de la répétition, on
112 réer la consommation. La réclame s’en charge. Par le procédé très simple de la répétition, on fait croire aux gens qu’ils
113 éclame s’en charge. Par le procédé très simple de la répétition, on fait croire aux gens qu’ils ne peuvent plus vivre heur
114 ls ne peuvent plus vivre heureux sans auto. Voilà l’ affaire lancée. La passion de Ford se donne libre cours. Il ne s’agit
115 vivre heureux sans auto. Voilà l’affaire lancée. La passion de Ford se donne libre cours. Il ne s’agit plus maintenant qu
116 À chaque page de ses livres, on pourrait relever les sophismes plus ou moins conscients par lesquels il prétend ramener le
117 moins conscients par lesquels il prétend ramener le bénéfice de la production à celui du consommateur. Prenons cette peti
118 ts par lesquels il prétend ramener le bénéfice de la production à celui du consommateur. Prenons cette petite phrase qui n
119 i n’a l’air de rien : « Nul ne contestera que, si l’ on abaisse suffisamment les prix, on ne trouve toujours des clients, q
120 l ne contestera que, si l’on abaisse suffisamment les prix, on ne trouve toujours des clients, quel que soit l’état du marc
121 on ne trouve toujours des clients, quel que soit l’ état du marché. » Il semble que cela soit tout à l’avantage du client.
122 ’état du marché. » Il semble que cela soit tout à l’ avantage du client. Mais cherchons un peu les causes réelles de cet ab
123 out à l’avantage du client. Mais cherchons un peu les causes réelles de cet abaissement de prix — la concurrence n’étant bi
124 u les causes réelles de cet abaissement de prix — la concurrence n’étant bien entendu qu’une cause accessoire. Dire que l’
125 nt bien entendu qu’une cause accessoire. Dire que l’ état du marché est tel que le client n’achète plus, cela signifie parf
126 accessoire. Dire que l’état du marché est tel que le client n’achète plus, cela signifie parfois que la marchandise est mo
127 e client n’achète plus, cela signifie parfois que la marchandise est momentanément trop chère ; mais surtout que le besoin
128 e est momentanément trop chère ; mais surtout que le besoin qu’on a de tel objet est satisfait ou a disparu. Il semble alo
129 t est satisfait ou a disparu. Il semble alors que l’ industriel n’ait plus qu’à plier bagage. Mais c’est ici que Ford montr
130 qu’à plier bagage. Mais c’est ici que Ford montre le bout de l’oreille, et que son but réel est la production pour elle-mê
131 bagage. Mais c’est ici que Ford montre le bout de l’ oreille, et que son but réel est la production pour elle-même, non pas
132 tre le bout de l’oreille, et que son but réel est la production pour elle-même, non pas le plaisir ou l’intérêt véritable
133 ut réel est la production pour elle-même, non pas le plaisir ou l’intérêt véritable du client. Le besoin ayant disparu, la
134 production pour elle-même, non pas le plaisir ou l’ intérêt véritable du client. Le besoin ayant disparu, la production de
135 pas le plaisir ou l’intérêt véritable du client. Le besoin ayant disparu, la production devant se maintenir, il n’y a qu’
136 rêt véritable du client. Le besoin ayant disparu, la production devant se maintenir, il n’y a qu’une solution : recréer le
137 se maintenir, il n’y a qu’une solution : recréer le besoin. Pour cela, on abaisse les prix. Le client fait la comparaison
138 lution : recréer le besoin. Pour cela, on abaisse les prix. Le client fait la comparaison. Il est impressionné par la baiss
139 ecréer le besoin. Pour cela, on abaisse les prix. Le client fait la comparaison. Il est impressionné par la baisse, au poi
140 n. Pour cela, on abaisse les prix. Le client fait la comparaison. Il est impressionné par la baisse, au point qu’il en oub
141 ient fait la comparaison. Il est impressionné par la baisse, au point qu’il en oublie que cela ne l’intéresse plus réellem
142 r la baisse, au point qu’il en oublie que cela ne l’ intéresse plus réellement. Il croit qu’il va gagner 5 francs en acheta
143 acheté du tout. Autrement dit, il est trompé par la baisse. L’industriel comptait. La tromperie est préméditée. Et le sca
144 tout. Autrement dit, il est trompé par la baisse. L’ industriel comptait. La tromperie est préméditée. Et le scandale, à mo
145 est trompé par la baisse. L’industriel comptait. La tromperie est préméditée. Et le scandale, à mon sens, n’est pas que l
146 ustriel comptait. La tromperie est préméditée. Et le scandale, à mon sens, n’est pas que l’industriel ait forcé (psycholog
147 éditée. Et le scandale, à mon sens, n’est pas que l’ industriel ait forcé (psychologiquement) le client à faire une dépense
148 as que l’industriel ait forcé (psychologiquement) le client à faire une dépense superflue ; le scandale est qu’il l’ait tr
149 uement) le client à faire une dépense superflue ; le scandale est qu’il l’ait trompé sur ses véritables besoins. Car cela
150 ire une dépense superflue ; le scandale est qu’il l’ ait trompé sur ses véritables besoins. Car cela va bien plus profond,
151 régulation et d’alternances. Tel est ce sophisme, le paradoxe du bon marché. Celui de la réclame a même but, mêmes effets.
152 ce sophisme, le paradoxe du bon marché. Celui de la réclame a même but, mêmes effets. Mais le plus grave est peut-être le
153 elui de la réclame a même but, mêmes effets. Mais le plus grave est peut-être le sophisme du loisir. M. Guglielmo Ferrero
154 t, mêmes effets. Mais le plus grave est peut-être le sophisme du loisir. M. Guglielmo Ferrero a fort bien montré, dans un
155 ro a fort bien montré, dans un article intitulé «  Le grand paradoxe du monde moderne »3, ce qu’il y a de profondément anti
156  »3, ce qu’il y a de profondément antihumain dans la conception fordienne de l’oisiveté. Ford a créé un second dimanche da
157 dément antihumain dans la conception fordienne de l’ oisiveté. Ford a créé un second dimanche dans la semaine, « retouché l
158 e l’oisiveté. Ford a créé un second dimanche dans la semaine, « retouché l’œuvre de la Création », comme dit Ferrero. Le b
159 éé un second dimanche dans la semaine, « retouché l’ œuvre de la Création », comme dit Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il
160 d dimanche dans la semaine, « retouché l’œuvre de la Création », comme dit Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il ne peut vo
161 uché l’œuvre de la Création », comme dit Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il ne peut voir la duperie : ce jeu du chat et
162 Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il ne peut voir la duperie : ce jeu du chat et de la souris ; si Ford relâche les ouvrie
163 Il ne peut voir la duperie : ce jeu du chat et de la souris ; si Ford relâche les ouvriers et leur donne une apparence de
164 ce jeu du chat et de la souris ; si Ford relâche les ouvriers et leur donne une apparence de liberté, c’est pour mieux les
165 donne une apparence de liberté, c’est pour mieux les prendre dans son engrenage. L’emploi de leurs loisirs est prévu. Il e
166 c’est pour mieux les prendre dans son engrenage. L’ emploi de leurs loisirs est prévu. Il est déterminé par la réclame, le
167 de leurs loisirs est prévu. Il est déterminé par la réclame, les produits Ford qu’il faut user, etc. Il a pour but vérita
168 isirs est prévu. Il est déterminé par la réclame, les produits Ford qu’il faut user, etc. Il a pour but véritable d’augment
169 ut user, etc. Il a pour but véritable d’augmenter la consommation. Il rend plus complet l’esclavage de l’ouvrier, puisqu’i
170 d’augmenter la consommation. Il rend plus complet l’ esclavage de l’ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à son repos dans le cy
171 consommation. Il rend plus complet l’esclavage de l’ ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à son repos dans le cycle de la produ
172 ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à son repos dans le cycle de la production. Cercle vicieux : plus la production s’intensi
173 squ’il englobe jusqu’à son repos dans le cycle de la production. Cercle vicieux : plus la production s’intensifie, plus il
174 le cycle de la production. Cercle vicieux : plus la production s’intensifie, plus il faut créer de besoins et de loisirs.
175 plus il faut créer de besoins et de loisirs. Or, l’ industrie ne peut subsister qu’en progressant. Mais la nature humaine
176 dustrie ne peut subsister qu’en progressant. Mais la nature humaine a des limites. Et le temps approche où elles seront at
177 ressant. Mais la nature humaine a des limites. Et le temps approche où elles seront atteintes. On peut se demander jusqu’à
178 qu’à quel point Ford est conscient des buts et de l’ avenir de son effort. Pour mon compte, je crois que l’idée fixe de pro
179 enir de son effort. Pour mon compte, je crois que l’ idée fixe de produire peut très bien envahir un cerveau moderne au poi
180 n’empêche pas notre industriel de philosopher sur les sujets les plus divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de la m
181 as notre industriel de philosopher sur les sujets les plus divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de la mentalité ca
182 el de philosopher sur les sujets les plus divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de la mentalité capitaliste américa
183 divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de la mentalité capitaliste américaine. Voici, par exemple, une définition
184 américaine. Voici, par exemple, une définition de la liberté : La liberté consiste à travailler pendant le temps convenab
185 ici, par exemple, une définition de la liberté : La liberté consiste à travailler pendant le temps convenable et à gagner
186 berté : La liberté consiste à travailler pendant le temps convenable et à gagner, par ce moyen, de quoi vivre convenablem
187 ement tout en restant maître de régler à sa guise le détail de sa vie privée. Cette liberté particulière, et cent autres p
188 e, et cent autres pareilles, composent, au total, la grande Liberté idéale et mettent de l’huile dans les rouages de la vi
189 au total, la grande Liberté idéale et mettent de l’ huile dans les rouages de la vie quotidienne. Cette Liberté idéale ré
190 grande Liberté idéale et mettent de l’huile dans les rouages de la vie quotidienne. Cette Liberté idéale réduite au rôle
191 idéale et mettent de l’huile dans les rouages de la vie quotidienne. Cette Liberté idéale réduite au rôle d’huile dans l
192 Cette Liberté idéale réduite au rôle d’huile dans les rouages, n’est-ce pas charmant et prometteur ? Et que dire de cette a
193 ette admirable simplification : « Sur quoi repose la société ? Sur les hommes et les moyens grâce auxquels on cultive, on
194 mplification : « Sur quoi repose la société ? Sur les hommes et les moyens grâce auxquels on cultive, on fabrique, on trans
195 « Sur quoi repose la société ? Sur les hommes et les moyens grâce auxquels on cultive, on fabrique, on transporte. » « Tou
196  » « Toute notre gloire est dans nos œuvres, dans le prix que nous payons à la terre la satisfaction de nos besoins. » — F
197 t dans nos œuvres, dans le prix que nous payons à la terre la satisfaction de nos besoins. » — Ford se moque de la philoso
198 s œuvres, dans le prix que nous payons à la terre la satisfaction de nos besoins. » — Ford se moque de la philosophie. Il
199 satisfaction de nos besoins. » — Ford se moque de la philosophie. Il ne peut empêcher que son attitude ne porte un nom phi
200 ations plus nettes encore : « Je ne considère pas les machines Ford simplement comme des machines. J’y vois la réalisation
201 ines Ford simplement comme des machines. J’y vois la réalisation concrète d’une théorie qui tend à faire de ce monde un sé
202 tend à faire de ce monde un séjour meilleur pour les hommes. » C’est le bonheur, le salut par l’auto. Philosophie réclame.
203 monde un séjour meilleur pour les hommes. » C’est le bonheur, le salut par l’auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ai à cœ
204 our meilleur pour les hommes. » C’est le bonheur, le salut par l’auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ai à cœur, aujourd’
205 pour les hommes. » C’est le bonheur, le salut par l’ auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ai à cœur, aujourd’hui, c’est de
206 j’ai à cœur, aujourd’hui, c’est de démontrer que les idées mises en pratique chez nous ne concernent pas particulièrement
207 ique chez nous ne concernent pas particulièrement les autos et les tracteurs, mais composent en quelque manière, un code un
208 s ne concernent pas particulièrement les autos et les tracteurs, mais composent en quelque manière, un code universel ! » R
209 e matérialiste ? Un seul doute effleure Ford vers la fin de son livre : Le problème de la production a été brillamment ré
210 l doute effleure Ford vers la fin de son livre : Le problème de la production a été brillamment résolu… Mais nous nous ab
211 e Ford vers la fin de son livre : Le problème de la production a été brillamment résolu… Mais nous nous absorbons trop da
212 e pensons pas assez aux raisons que nous avons de le faire. Tout notre système de concurrence, tout notre effort de créati
213 concurrence, tout notre effort de création, tout le jeu de nos facultés semblent dirigés uniquement vers la production ma
214 de nos facultés semblent dirigés uniquement vers la production matérielle et vers la richesse qui en est le fruit. On ne
215 uniquement vers la production matérielle et vers la richesse qui en est le fruit. On ne saurait mieux dire. Mais il faud
216 duction matérielle et vers la richesse qui en est le fruit. On ne saurait mieux dire. Mais il faudrait en tirer des consé
217 de technique. Il n’a pas senti qu’il touchait là le nœud vital du problème moderne. D’ailleurs, les idées générales de ce
218 là le nœud vital du problème moderne. D’ailleurs, les idées générales de cette sorte sont rares dans son livre. En général,
219 èmes techniques où son triomphe est facile. C’est le technicien parfait qui combat les techniciens imparfaits. Il ne se de
220 st facile. C’est le technicien parfait qui combat les techniciens imparfaits. Il ne se demande jamais si la technique même
221 echniciens imparfaits. Il ne se demande jamais si la technique même la plus perfectionnée mérite les sacrifices qu’elle ex
222 its. Il ne se demande jamais si la technique même la plus perfectionnée mérite les sacrifices qu’elle exige de l’homme mod
223 si la technique même la plus perfectionnée mérite les sacrifices qu’elle exige de l’homme moderne. Paradoxes plus ou moins
224 fectionnée mérite les sacrifices qu’elle exige de l’ homme moderne. Paradoxes plus ou moins intéressés, optimisme d’homme à
225 imisme d’homme à qui tout réussit, messianisme de la machine, méconnaissance glorieuse des forces spirituelles, le tout ag
226 méconnaissance glorieuse des forces spirituelles, le tout agrémenté d’humour et exposé avec un simplisme qui emporte à cou
227 t exposé avec un simplisme qui emporte à coup sûr l’ adhésion du gros public : telle est l’idéologie de celui que M. Cambon
228 à coup sûr l’adhésion du gros public : telle est l’ idéologie de celui que M. Cambon, dans sa préface, égale aux plus gran
229 sa préface, égale aux plus grands esprits de tous les temps. On me dira que Ford a mieux à faire que de philosopher. Je le
230 a que Ford a mieux à faire que de philosopher. Je le veux. Mais si j’insiste un peu sur ses « idées », c’est pour souligne
231 idées », c’est pour souligner ce hiatus étrange : l’ homme qu’on pourrait appeler le plus actif du monde, l’un de ceux qui
232 e hiatus étrange : l’homme qu’on pourrait appeler le plus actif du monde, l’un de ceux qui influent le plus sur notre civi
233 le plus actif du monde, l’un de ceux qui influent le plus sur notre civilisation, possède la philosophie la plus rudimenta
234 influent le plus sur notre civilisation, possède la philosophie la plus rudimentaire. Le phénomène n’est pas nouveau en O
235 us sur notre civilisation, possède la philosophie la plus rudimentaire. Le phénomène n’est pas nouveau en Occident, mais i
236 ion, possède la philosophie la plus rudimentaire. Le phénomène n’est pas nouveau en Occident, mais il est ici tragiquement
237 bien que notre temps ait prononcé définitivement le divorce de l’esprit et de l’action. III. Le fordisme contre l’Espr
238 e temps ait prononcé définitivement le divorce de l’ esprit et de l’action. III. Le fordisme contre l’Esprit La formi
239 noncé définitivement le divorce de l’esprit et de l’ action. III. Le fordisme contre l’Esprit La formidable erreur de
240 nt le divorce de l’esprit et de l’action. III. Le fordisme contre l’Esprit La formidable erreur de la bourgeoisie mo
241 esprit et de l’action. III. Le fordisme contre l’ Esprit La formidable erreur de la bourgeoisie moderne c’est de croi
242 l’action. III. Le fordisme contre l’Esprit La formidable erreur de la bourgeoisie moderne c’est de croire que les c
243 rdisme contre l’Esprit La formidable erreur de la bourgeoisie moderne c’est de croire que les choses pourront aller ain
244 eur de la bourgeoisie moderne c’est de croire que les choses pourront aller ainsi longtemps encore. On se refuse à l’idée d
245 ront aller ainsi longtemps encore. On se refuse à l’ idée d’une catastrophe, pourtant plus que probable, par crainte de se
246 lus que probable, par crainte de se voir obligé à la révision des valeurs, la plus difficile et la plus grave : celle qu’o
247 inte de se voir obligé à la révision des valeurs, la plus difficile et la plus grave : celle qu’on ne peut faire qu’au nom
248 é à la révision des valeurs, la plus difficile et la plus grave : celle qu’on ne peut faire qu’au nom de l’Esprit et de se
249 us grave : celle qu’on ne peut faire qu’au nom de l’ Esprit et de ses exigences. Mais le « rien de nouveau sous le soleil »
250 e qu’au nom de l’Esprit et de ses exigences. Mais le « rien de nouveau sous le soleil » derrière lequel on se réfugie avec
251 de ses exigences. Mais le « rien de nouveau sous le soleil » derrière lequel on se réfugie avec une paresse et une légère
252 e avec une paresse et une légèreté inouïes, c’est le signe d’une complicité avec un état de choses funeste pour l’Esprit.
253 ne complicité avec un état de choses funeste pour l’ Esprit. Si l’Esprit nous abandonne, c’est que nous avons voulu tenter
254 avec un état de choses funeste pour l’Esprit. Si l’ Esprit nous abandonne, c’est que nous avons voulu tenter sans lui une
255 e que nous pensions gratuite : nous avons cherché le bonheur dans le développement matériel, avec l’arrière-pensée sournoi
256 ons gratuite : nous avons cherché le bonheur dans le développement matériel, avec l’arrière-pensée sournoise que, si cela
257 é le bonheur dans le développement matériel, avec l’ arrière-pensée sournoise que, si cela ratait, on gardait toutes les au
258 sournoise que, si cela ratait, on gardait toutes les autres chances. J’accorderai que le progrès matériel n’est pas mauvai
259 rdait toutes les autres chances. J’accorderai que le progrès matériel n’est pas mauvais en soi. Mais par l’importance qu’i
260 ogrès matériel n’est pas mauvais en soi. Mais par l’ importance qu’il a prise dans notre vie, il détourne la civilisation d
261 ortance qu’il a prise dans notre vie, il détourne la civilisation de son but véritable : aller à l’Esprit, y conduire les
262 ne la civilisation de son but véritable : aller à l’ Esprit, y conduire les peuples. Ainsi, détournant de l’essentiel une g
263 son but véritable : aller à l’Esprit, y conduire les peuples. Ainsi, détournant de l’essentiel une grande part des forces
264 rit, y conduire les peuples. Ainsi, détournant de l’ essentiel une grande part des forces humaines, il travaille contre l’E
265 nde part des forces humaines, il travaille contre l’ Esprit. Rien n’est gratuit. Nous payons notre passion de posséder la m
266 st gratuit. Nous payons notre passion de posséder la matière du prix de la seule possession véritable, la connaissance de
267 s notre passion de posséder la matière du prix de la seule possession véritable, la connaissance de l’Esprit. C’est déjà u
268 matière du prix de la seule possession véritable, la connaissance de l’Esprit. C’est déjà un fait d’expérience. Et qui n’e
269 la seule possession véritable, la connaissance de l’ Esprit. C’est déjà un fait d’expérience. Et qui n’en pourrait citer un
270 ple individuel ? Nous savons assez en quel mépris l’ homme d’affaires à l’américaine tient les choses de l’Esprit. Dans le
271 savons assez en quel mépris l’homme d’affaires à l’ américaine tient les choses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable
272 el mépris l’homme d’affaires à l’américaine tient les choses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable, « il se passera bi
273 mme d’affaires à l’américaine tient les choses de l’ Esprit. Dans le cas le plus favorable, « il se passera bien de cette l
274 à l’américaine tient les choses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable, « il se passera bien de cette littérature ». P
275 ricaine tient les choses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable, « il se passera bien de cette littérature ». Plus tar
276 symphonies, ou autres œuvres destinées à charmer les loisirs de personnes oisives et raffinées, réunies pour admirer mutue
277 ement leur culture », dit Ford. Et tout est dit ! Le simplisme arrogant avec lequel, de nos jours, on tranche les grandes
278 me arrogant avec lequel, de nos jours, on tranche les grandes questions humaines est une des manifestations les plus frappa
279 des questions humaines est une des manifestations les plus frappantes de notre régression. Cette perte du sens de l’âme se
280 antes de notre régression. Cette perte du sens de l’ âme se nomme bon sens américain. On en fait quelque chose de jovial et
281 ophie. Mais, sans qu’on s’en doute, cela en prend la place. Les facultés de l’âme, inutilisées, s’atrophient. Pourvu, dit-
282 s, sans qu’on s’en doute, cela en prend la place. Les facultés de l’âme, inutilisées, s’atrophient. Pourvu, dit-on, que sub
283 en doute, cela en prend la place. Les facultés de l’ âme, inutilisées, s’atrophient. Pourvu, dit-on, que subsiste le peu de
284 isées, s’atrophient. Pourvu, dit-on, que subsiste le peu de morale nécessaire aux affaires, tout ira bien. (On pense que l
285 ssaire aux affaires, tout ira bien. (On pense que les formes de la morale peuvent exister sans leur substance religieuse.)
286 aires, tout ira bien. (On pense que les formes de la morale peuvent exister sans leur substance religieuse.) L’homme moder
287 peuvent exister sans leur substance religieuse.) L’ homme moderne manie les choses de l’âme avec une maladresse de barbare
288 leur substance religieuse.) L’homme moderne manie les choses de l’âme avec une maladresse de barbare. IV. « En être » ou
289 religieuse.) L’homme moderne manie les choses de l’ âme avec une maladresse de barbare. IV. « En être » ou ne pas en êt
290 en être Une fois qu’on a compris à quel point le fordisme et l’Esprit sont incompatibles, le monde moderne impose ce d
291 fois qu’on a compris à quel point le fordisme et l’ Esprit sont incompatibles, le monde moderne impose ce dilemme : « en ê
292 point le fordisme et l’Esprit sont incompatibles, le monde moderne impose ce dilemme : « en être » ou ne pas en être, c’es
293  » ou ne pas en être, c’est-à-dire se soumettre à la technique et s’abrutir spirituellement — ou se soumettre à l’Esprit,
294 et s’abrutir spirituellement — ou se soumettre à l’ Esprit, et tomber presque fatalement dans un anarchisme stérile. 1° Ac
295 atalement dans un anarchisme stérile. 1° Accepter la technique et ses conditions. Dans cette mécanique bien huilée, au mou
296 nt si régulier qu’il en devient insensible et que la fatigue semble disparaître, l’homme s’abandonne à des lois géométriqu
297 insensible et que la fatigue semble disparaître, l’ homme s’abandonne à des lois géométriques. Un jeu de chiffres d’horlog
298 une fois pour toutes et qu’il sent immuable comme la mort le restitue au monde vers 5 heures du soir, dans la détresse des
299 pour toutes et qu’il sent immuable comme la mort le restitue au monde vers 5 heures du soir, dans la détresse des dernièr
300 le restitue au monde vers 5 heures du soir, dans la détresse des dernières sirènes. Au monde, c’est-à-dire à une nature d
301 sirènes. Au monde, c’est-à-dire à une nature dont l’ usine lui a fait oublier jusqu’à l’existence, et à une liberté qu’il s
302 ne nature dont l’usine lui a fait oublier jusqu’à l’ existence, et à une liberté qu’il s’empresse d’aliéner au profit de pl
303 vec ses désirs réels, et dont il subit docilement l’ abstraite et commerciale nécessité. Ennui, fatigue, sommeil sans prièr
304 il sans prière. Cela s’appelle encore vivre. Mais l’ homme qui était un membre vivant dans le corps de la Nature, lié par l
305 vre. Mais l’homme qui était un membre vivant dans le corps de la Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus pr
306 homme qui était un membre vivant dans le corps de la Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus profonds à tou
307 membre vivant dans le corps de la Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus profonds à tous les autres membres
308 ant dans le corps de la Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus profonds à tous les autres membres de la Nat
309 la Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus profonds à tous les autres membres de la Nature, choses, bêtes e
310 iens les plus subtils et les plus profonds à tous les autres membres de la Nature, choses, bêtes et anges, — le voici deven
311 et les plus profonds à tous les autres membres de la Nature, choses, bêtes et anges, — le voici devenu sourd à cette harmo
312 s membres de la Nature, choses, bêtes et anges, —  le voici devenu sourd à cette harmonie universelle, incapable d’en compr
313 e harmonie universelle, incapable d’en comprendre les correspondances divines et humaines, insensible même à sa déchéance,
314 ines, insensible même à sa déchéance, abandonné à la lutte tragique et absurde des lois économiques et des exigences les p
315 et absurde des lois économiques et des exigences les plus rudimentaires de son corps. Il a perdu le contact avec les chose
316 s les plus rudimentaires de son corps. Il a perdu le contact avec les choses naturelles, et par là même, avec les surnatur
317 entaires de son corps. Il a perdu le contact avec les choses naturelles, et par là même, avec les surnaturelles. Il en ress
318 avec les choses naturelles, et par là même, avec les surnaturelles. Il en ressent une vague et intermittente détresse, — q
319 ntermittente détresse, — qu’il met d’ailleurs sur le compte de sa fatigue. Neurasthénie. La conquête du confort matériel l
320 lleurs sur le compte de sa fatigue. Neurasthénie. La conquête du confort matériel l’a laissé oublier les valeurs de l’espr
321 ue. Neurasthénie. La conquête du confort matériel l’ a laissé oublier les valeurs de l’esprit au point qu’il n’éprouve plus
322 a conquête du confort matériel l’a laissé oublier les valeurs de l’esprit au point qu’il n’éprouve plus même cette carence 
323 onfort matériel l’a laissé oublier les valeurs de l’ esprit au point qu’il n’éprouve plus même cette carence ; seulement, p
324 térielles, il a laissé se détendre, ou il a cassé les ressorts de sa joie : l’effort libre et généreux, le sentiment d’avoi
325 détendre, ou il a cassé les ressorts de sa joie : l’ effort libre et généreux, le sentiment d’avoir inventé ou compris par
326 ressorts de sa joie : l’effort libre et généreux, le sentiment d’avoir inventé ou compris par soi-même, la liberté et une
327 entiment d’avoir inventé ou compris par soi-même, la liberté et une certaine durée normale et capricieuse dans le plaisir,
328 et une certaine durée normale et capricieuse dans le plaisir, la conscience de ses besoins et de ses buts propres, humains
329 ine durée normale et capricieuse dans le plaisir, la conscience de ses besoins et de ses buts propres, humains et divins.
330 s loisirs. Ford lui a donné une auto pour admirer la nature entre 17 et 19 heures : vraiment, il ne lui manque plus rien —
331 ures : vraiment, il ne lui manque plus rien — que l’ envie. Mauvais travail. Il a perdu le sens religieux, cosmique, de l’e
332 s rien — que l’envie. Mauvais travail. Il a perdu le sens religieux, cosmique, de l’effort humain. Il ne peut plus situer
333 avail. Il a perdu le sens religieux, cosmique, de l’ effort humain. Il ne peut plus situer son effort individuel dans le mo
334 Il ne peut plus situer son effort individuel dans le monde, lui attribuer sa véritable valeur. Il sent obscurément que son
335 t obscurément que son travail est antinaturel. Il le méprise ou le subit, mais, jusque dans son repos, il en est l’esclave
336 que son travail est antinaturel. Il le méprise ou le subit, mais, jusque dans son repos, il en est l’esclave. Pour s’être
337 le subit, mais, jusque dans son repos, il en est l’ esclave. Pour s’être exclu lui-même de l’ordre de la nature, il est co
338 l en est l’esclave. Pour s’être exclu lui-même de l’ ordre de la nature, il est condamné à ne plus saisir que des rapports
339 esclave. Pour s’être exclu lui-même de l’ordre de la nature, il est condamné à ne plus saisir que des rapports abstraits e
340 à ne plus saisir que des rapports abstraits entre les choses. Il ne comprend presque plus rien à l’Univers. Par la techniqu
341 re les choses. Il ne comprend presque plus rien à l’ Univers. Par la technique, l’Occidental a prétendu maîtriser la matièr
342 Il ne comprend presque plus rien à l’Univers. Par la technique, l’Occidental a prétendu maîtriser la matière et parvenir à
343 presque plus rien à l’Univers. Par la technique, l’ Occidental a prétendu maîtriser la matière et parvenir à une liberté p
344 r la technique, l’Occidental a prétendu maîtriser la matière et parvenir à une liberté plus haute. Or, la technique a révé
345 matière et parvenir à une liberté plus haute. Or, la technique a révélé des exigences telles que l’Esprit ne peut les supp
346 r, la technique a révélé des exigences telles que l’ Esprit ne peut les supporter. Il abandonne donc la place, mais c’est p
347 révélé des exigences telles que l’Esprit ne peut les supporter. Il abandonne donc la place, mais c’est pourtant lui seul q
348 l’Esprit ne peut les supporter. Il abandonne donc la place, mais c’est pourtant lui seul qui nous permettrait de jouir de
349 l qui nous permettrait de jouir de notre liberté. La victoire mécanicienne est une victoire à la Pyrrhus. Elle nous donne
350 erté. La victoire mécanicienne est une victoire à la Pyrrhus. Elle nous donne une liberté dont nous ne sommes plus dignes.
351 dont nous ne sommes plus dignes. Nous perdons, en l’ acquérant, par l’effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous la fi
352 es plus dignes. Nous perdons, en l’acquérant, par l’ effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. 2°
353 es. Nous perdons, en l’acquérant, par l’effort de l’ acquérir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter l’
354 dons, en l’acquérant, par l’effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter l’esprit, et se
355 l’effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter l’esprit, et ses conditions. Je dis que
356 es mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter l’ esprit, et ses conditions. Je dis que les êtres encore doués de quelqu
357 Accepter l’esprit, et ses conditions. Je dis que les êtres encore doués de quelque sensibilité spirituelle deviennent par
358 de quelque sensibilité spirituelle deviennent par le seul fait de rester eux-mêmes dans un monde fordisé, des anarchistes.
359 mêmes dans un monde fordisé, des anarchistes. Car l’ Esprit n’est pas un luxe, n’est pas une faculté destinée à amuser nos
360 s exigences sont en contradiction avec celles que le développement de la technique impose au monde moderne. Ces êtres, d’u
361 contradiction avec celles que le développement de la technique impose au monde moderne. Ces êtres, d’une espèce de plus en
362 en plus rare, qui savent encore quelque chose de la vie profonde, qui voient encore des vérités invisibles, qui gardent,
363 t considèrent comme un « cas » très spécial, — on les écarte des engrenages où ils risqueraient de faire grain de sable. Il
364 . Ils se réfugient dans ce qu’on pourrait appeler les classes privilégiées de l’esprit : fortunes oisives ou misères sans e
365 u’on pourrait appeler les classes privilégiées de l’ esprit : fortunes oisives ou misères sans espoir. On en rencontre enco
366 misères sans espoir. On en rencontre encore parmi les jeunes gens, jusqu’au jour où, comme on dit, sans doute par ironie, «
367 u jour où, comme on dit, sans doute par ironie, «  la vie les prend ». Irréguliers aux yeux du monde ; la proie d’on ne sai
368 où, comme on dit, sans doute par ironie, « la vie les prend ». Irréguliers aux yeux du monde ; la proie d’on ne sait quelle
369 vie les prend ». Irréguliers aux yeux du monde ; la proie d’on ne sait quelles forces occultes sans doute dangereuses, pu
370 ces occultes sans doute dangereuses, puisqu’elles les rendent inutilisables dans les rouages de la vie moderne. Le triomphe
371 uses, puisqu’elles les rendent inutilisables dans les rouages de la vie moderne. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à dev
372 les les rendent inutilisables dans les rouages de la vie moderne. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à devenir l’apanage
373 inutilisables dans les rouages de la vie moderne. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à devenir l’apanage d’une sorte de
374 es de la vie moderne. Le triomphe de Ford réduira l’ Esprit à devenir l’apanage d’une sorte de franc-maçonnerie de quelques
375 e. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à devenir l’ apanage d’une sorte de franc-maçonnerie de quelques centaines d’indivi
376 a bientôt traquée avec la dernière rigueur : avec la rigueur de la nécessité — puisqu’elle est inutile au grand dessein ma
377 uée avec la dernière rigueur : avec la rigueur de la nécessité — puisqu’elle est inutile au grand dessein matérialiste de
378 elle est inutile au grand dessein matérialiste de l’ Occident. La logique, parlant par la bouche de Ford : « Inutile, donc
379 tile au grand dessein matérialiste de l’Occident. La logique, parlant par la bouche de Ford : « Inutile, donc à détruire. 
380 térialiste de l’Occident. La logique, parlant par la bouche de Ford : « Inutile, donc à détruire. » Ford a raison, une foi
381 e ? « Vous ne pouvez servir Dieu et Mammon », dit l’ Écriture. ⁂ Je ne pense pas qu’une attitude réactionnaire qui consist
382 tionnaire qui consisterait à vouloir en revenir à la période préindustrielle soit autre chose qu’une échappatoire utopique
383 uts — si bas soient-ils — d’une civilisation sous le poids de laquelle nous risquons de périr. Il se prépare déjà des révo
384 isme exaspéré, devenu presque fou dans sa prison. Les intellectuels d’aujourd’hui ont une tâche pressante : chercher s’il e
385 le d’échapper au fatal dilemme. Premiers pas vers la solution : l’existence du dilemme. Second pas : en poser les termes a
386 au fatal dilemme. Premiers pas vers la solution : l’ existence du dilemme. Second pas : en poser les termes avec netteté et
387 n : l’existence du dilemme. Second pas : en poser les termes avec netteté et courage. Pour le reste, je pense que c’est une
388 en poser les termes avec netteté et courage. Pour le reste, je pense que c’est une question de foi. 1. Une enquête fait
389 oi. 1. Une enquête faite à Genève a révélé que les livres les plus lus du grand public sont Ma vie et mon œuvre, de Ford
390 ne enquête faite à Genève a révélé que les livres les plus lus du grand public sont Ma vie et mon œuvre, de Ford et Mon cur
391 ont Ma vie et mon œuvre, de Ford et Mon curé chez les riches, de Clément Vautel. Dans les pays de langue allemande, son suc
392 Mon curé chez les riches, de Clément Vautel. Dans les pays de langue allemande, son succès est encore plus grand, et de mei
393 rand, et de meilleure qualité. Je ne parle pas de l’ Amérique. 2. Victor Cambon, préface à Henry Ford, Ma vie et mon œuvre
394 rd, Ma vie et mon œuvre, Paris, Payot, 1925. 3. L’ Illustration, 20 novembre 1926. 4. Ici et là, la révolte perce : « Ju
395 L’Illustration, 20 novembre 1926. 4. Ici et là, la révolte perce : « Jugendbewegung » en Allemagne ; surréalisme en Fran
396 ée mystique en Russie. a. Rougemont Denis de, «  Le péril Ford », Foi et Vie, Paris, février 1928, p. 189-202.
2 1930, Foi et Vie, articles (1928–1977). « Pour un humanisme nouveau » [Réponse à une enquête] (1930)
397 ces mortelles assiègent notre condition humaine : la liberté de l’esprit et les lois de la matière. Pris entre une anarchi
398 assiègent notre condition humaine : la liberté de l’ esprit et les lois de la matière. Pris entre une anarchie et une fatal
399 tre condition humaine : la liberté de l’esprit et les lois de la matière. Pris entre une anarchie et une fatalité également
400 n humaine : la liberté de l’esprit et les lois de la matière. Pris entre une anarchie et une fatalité également funestes,
401 atalité également funestes, également démesurées, l’ homme ne peut subsister qu’en tant que son génie parvient à composer l
402 ster qu’en tant que son génie parvient à composer les deux périls en une résultante qui est la civilisation. Appelons human
403 omposer les deux périls en une résultante qui est la civilisation. Appelons humanisme l’art de composer pour la défense de
404 tante qui est la civilisation. Appelons humanisme l’ art de composer pour la défense de l’homme et son illustration des pui
405 sation. Appelons humanisme l’art de composer pour la défense de l’homme et son illustration des puissances de nature inhum
406 ns humanisme l’art de composer pour la défense de l’ homme et son illustration des puissances de nature inhumaine. Nous pou
407 humaine. Nous pourrons définir un tel humanisme : l’ organe d’équilibre de la civilisation. Nous tenions de l’Antiquité, et
408 éfinir un tel humanisme : l’organe d’équilibre de la civilisation. Nous tenions de l’Antiquité, et singulièrement de la Gr
409 e d’équilibre de la civilisation. Nous tenions de l’ Antiquité, et singulièrement de la Grèce, le sentiment d’une harmonie
410 Nous tenions de l’Antiquité, et singulièrement de la Grèce, le sentiment d’une harmonie nécessaire entre nos gestes et nos
411 ns de l’Antiquité, et singulièrement de la Grèce, le sentiment d’une harmonie nécessaire entre nos gestes et nos pensées,
412 os pensées, nos créations et notre connaissance ; le sentiment d’une harmonie à sauvegarder au sein de nos connaissances m
413 garder au sein de nos connaissances même, et dans l’ allure de leur progrès. Les humanités nous paraissaient devoir transme
414 aissances même, et dans l’allure de leur progrès. Les humanités nous paraissaient devoir transmettre aux générations cette
415 n. Ainsi passèrent quelques siècles ; ainsi passa le xixe . On le laissa installer ses machines : elles avaient l’air de g
416 èrent quelques siècles ; ainsi passa le xixe . On le laissa installer ses machines : elles avaient l’air de grands joujoux
417 ines : elles avaient l’air de grands joujoux ; et l’ on continua d’apprendre rosa : la rose, d’admirer le Parthénon et le c
418 nds joujoux ; et l’on continua d’apprendre rosa : la rose, d’admirer le Parthénon et le courage de Mucius Scevola. On croy
419 on continua d’apprendre rosa : la rose, d’admirer le Parthénon et le courage de Mucius Scevola. On croyait au progrès, sou
420 prendre rosa : la rose, d’admirer le Parthénon et le courage de Mucius Scevola. On croyait au progrès, sous n’importe quel
421 « gagnés » par l’un des éléments de notre destin. La composante matérielle vient de l’emporter. Elle est en passe de gauch
422 e notre destin. La composante matérielle vient de l’ emporter. Elle est en passe de gauchir notre civilisation à tel point
423 sse de gauchir notre civilisation à tel point que l’ homme, affolé, soudain, doute s’il est encore maître de la redresser.
424 affolé, soudain, doute s’il est encore maître de la redresser. C’est qu’il n’y a plus d’humanisme, s’il subsiste des huma
425 a plus d’humanisme, s’il subsiste des humanités. L’ humanisme est compromis virtuellement dès lors que la science proclame
426 umanisme est compromis virtuellement dès lors que la science proclame son autonomie vis-à-vis de la métaphysique. L’équili
427 ue la science proclame son autonomie vis-à-vis de la métaphysique. L’équilibre de notre esprit ne comporte pas l’égalité d
428 clame son autonomie vis-à-vis de la métaphysique. L’ équilibre de notre esprit ne comporte pas l’égalité de droit de ces de
429 ique. L’équilibre de notre esprit ne comporte pas l’ égalité de droit de ces deux disciplines. Car la science à peine libér
430 s l’égalité de droit de ces deux disciplines. Car la science à peine libérée, demande la tête de la métaphysique. Elle n’e
431 ciplines. Car la science à peine libérée, demande la tête de la métaphysique. Elle n’entend que ses intérêts. Elle eut nag
432 ar la science à peine libérée, demande la tête de la métaphysique. Elle n’entend que ses intérêts. Elle eut naguère des in
433 Elle eut naguère des insolences d’affranchi, dont les philosophes demeurent tout intimidés. Et nous vîmes le matérialisme m
434 ilosophes demeurent tout intimidés. Et nous vîmes le matérialisme mener son morne triomphe. Certes, la plupart de nos phil
435 , la plupart de nos philosophies, officiellement, l’ ont renié. Mais pourquoi tant et toujours plus de mal à prouver la lib
436 s pourquoi tant et toujours plus de mal à prouver la liberté humaine ? C’est que l’on s’est trop bien assimilé les tours d
437 s de mal à prouver la liberté humaine ? C’est que l’ on s’est trop bien assimilé les tours de la pensée scientifique. Cherc
438 humaine ? C’est que l’on s’est trop bien assimilé les tours de la pensée scientifique. Cherchant des lois, la science ne pe
439 st que l’on s’est trop bien assimilé les tours de la pensée scientifique. Cherchant des lois, la science ne peut trouver q
440 rs de la pensée scientifique. Cherchant des lois, la science ne peut trouver que des déterminismes. Soumettre l’esprit à s
441 ne peut trouver que des déterminismes. Soumettre l’ esprit à ses méthodes, c’est en réalité le soumettre aux lois de l’ord
442 umettre l’esprit à ses méthodes, c’est en réalité le soumettre aux lois de l’ordre matériel ; c’est se condamner donc à ne
443 thodes, c’est en réalité le soumettre aux lois de l’ ordre matériel ; c’est se condamner donc à ne l’apercevoir que dans se
444 e l’ordre matériel ; c’est se condamner donc à ne l’ apercevoir que dans ses servitudes5. Aussi la critique du matérialisme
445 à ne l’apercevoir que dans ses servitudes5. Aussi la critique du matérialisme entreprise par certains philosophes des scie
446 tains philosophes des sciences fait-elle songer à l’ activité de cet espion anglais qui parvint durant la guerre à diriger
447 activité de cet espion anglais qui parvint durant la guerre à diriger le service de contre-espionnage allemand chargé de s
448 on anglais qui parvint durant la guerre à diriger le service de contre-espionnage allemand chargé de sa filature6. Ah ! co
449 de laboratoire dont notre pensée reste imprégnée. La science se moque des nuages qui animaient la matière d’intentions mor
450 née. La science se moque des nuages qui animaient la matière d’intentions morales. Elle-même cependant est tout occupée à
451 lle-même cependant est tout occupée à minéraliser l’ esprit. La tâche urgente d’un nouvel humanisme sera de nous dégager de
452 ependant est tout occupée à minéraliser l’esprit. La tâche urgente d’un nouvel humanisme sera de nous dégager des fatalité
453 ra de nous dégager des fatalités dont nous voyons l’ empire s’étendre dans tous les domaines de notre existence, inclinant
454 tés dont nous voyons l’empire s’étendre dans tous les domaines de notre existence, inclinant nos utopies mêmes, desséchant
455 xistence, inclinant nos utopies mêmes, desséchant les sources de notre foi. Qui parlait donc d’un « humanisme scientifique 
456 rs lois peser sur notre vie : s’agit-il d’enrayer la science ? Non, mais que l’esprit qui l’a créée, la surpasse7. Seul un
457  : s’agit-il d’enrayer la science ? Non, mais que l’ esprit qui l’a créée, la surpasse7. Seul un parti pris constant en fav
458 d’enrayer la science ? Non, mais que l’esprit qui l’ a créée, la surpasse7. Seul un parti pris constant en faveur de l’espr
459 a science ? Non, mais que l’esprit qui l’a créée, la surpasse7. Seul un parti pris constant en faveur de l’esprit peut mai
460 rpasse7. Seul un parti pris constant en faveur de l’ esprit peut maintenir l’équilibre de l’esprit et de la matière. L’huma
461 ris constant en faveur de l’esprit peut maintenir l’ équilibre de l’esprit et de la matière. L’humanisme moderne sera ce pa
462 faveur de l’esprit peut maintenir l’équilibre de l’ esprit et de la matière. L’humanisme moderne sera ce parti pris, spiri
463 prit peut maintenir l’équilibre de l’esprit et de la matière. L’humanisme moderne sera ce parti pris, spiritualiste — ou n
464 intenir l’équilibre de l’esprit et de la matière. L’ humanisme moderne sera ce parti pris, spiritualiste — ou ne méritera p
465 spiritualiste — ou ne méritera pas son nom. … Or, la rigueur de la science ne saurait être surmontée, sinon par la rigueur
466 — ou ne méritera pas son nom. … Or, la rigueur de la science ne saurait être surmontée, sinon par la rigueur au moins égal
467 e la science ne saurait être surmontée, sinon par la rigueur au moins égale d’une pensée qui par ailleurs participe de la
468 égale d’une pensée qui par ailleurs participe de la liberté : j’entends la pensée mystique. L’expérience mystique a la mê
469 par ailleurs participe de la liberté : j’entends la pensée mystique. L’expérience mystique a la même extension que l’huma
470 ipe de la liberté : j’entends la pensée mystique. L’ expérience mystique a la même extension que l’humanité. On n’en saurai
471 tends la pensée mystique. L’expérience mystique a la même extension que l’humanité. On n’en saurait dire autant de notre r
472 ue. L’expérience mystique a la même extension que l’ humanité. On n’en saurait dire autant de notre raison. Les faits mysti
473 ité. On n’en saurait dire autant de notre raison. Les faits mystiques — qu’on les prenne en l’état brut où notre pensée le
474 tant de notre raison. Les faits mystiques — qu’on les prenne en l’état brut où notre pensée le plus souvent les a laissés —
475 raison. Les faits mystiques — qu’on les prenne en l’ état brut où notre pensée le plus souvent les a laissés — sont au moin
476 — qu’on les prenne en l’état brut où notre pensée le plus souvent les a laissés — sont au moins aussi « objectifs » que le
477 ne en l’état brut où notre pensée le plus souvent les a laissés — sont au moins aussi « objectifs » que les faits physiques
478 a laissés — sont au moins aussi « objectifs » que les faits physiques élaborés par la science. Mais, participant de notre v
479  objectifs » que les faits physiques élaborés par la science. Mais, participant de notre volonté et de la grâce, ils échap
480 science. Mais, participant de notre volonté et de la grâce, ils échappent à cette fatalité qui est le signe du monde matér
481 la grâce, ils échappent à cette fatalité qui est le signe du monde matériel. Je vois l’humanisme nouveau sous l’aspect d
482 lité qui est le signe du monde matériel. Je vois l’ humanisme nouveau sous l’aspect d’une culture des facultés mystiques ;
483 monde matériel. Je vois l’humanisme nouveau sous l’ aspect d’une culture des facultés mystiques ; d’une technique spiritue
484 e d’autres facultés capables d’équilibrer en nous l’ esprit de géométrie. J’imagine une méthode, une façon d’appréhender la
485 e. J’imagine une méthode, une façon d’appréhender la vie, de hiérarchiser nos entreprises, qui ne bannirait pas de l’exist
486 archiser nos entreprises, qui ne bannirait pas de l’ existence la poésie, ce sens du Réel. Je vois se composer en cette mét
487 entreprises, qui ne bannirait pas de l’existence la poésie, ce sens du Réel. Je vois se composer en cette méthode — peut-
488 cette méthode — peut-être séculairement — ce que la « rationalisation » aura laissé de Raison à l’Occident, avec certains
489 ue la « rationalisation » aura laissé de Raison à l’ Occident, avec certains secrets de la méditation hindoue. Rêves, sans
490 de Raison à l’Occident, avec certains secrets de la méditation hindoue. Rêves, sans doute… Mais tout commence par des rêv
491 z aisé de prévoir et de décrire une tentation qui le guette et à laquelle tout humanisme paraît enclin : celle de créer un
492 nisme paraît enclin : celle de créer un modèle de l’ homme. Peut-être a-t-il existé un modèle gréco-latin, un canon de l’âm
493 a-t-il existé un modèle gréco-latin, un canon de l’ âme aussi bien que du corps. Il est possible que ce mythe ait animé l’
494 du corps. Il est possible que ce mythe ait animé l’ humanisme de nos humanités. Il est certain qu’il a perdu son ascendant
495 étendit guère au-delà des limites du monde roman. Le type de chevalier et ses succédanés militaires et wagnériens a toujou
496 militaires et wagnériens a toujours prévalu parmi les peuples germaniques, où son prestige ne le cède aujourd’hui qu’à l’id
497 parmi les peuples germaniques, où son prestige ne le cède aujourd’hui qu’à l’idéal anglo-saxon du gentleman. Le rabais est
498 ques, où son prestige ne le cède aujourd’hui qu’à l’ idéal anglo-saxon du gentleman. Le rabais est notable. On solde. Au ra
499 ujourd’hui qu’à l’idéal anglo-saxon du gentleman. Le rabais est notable. On solde. Au rayon des idéaux de confection voici
500 On solde. Au rayon des idéaux de confection voici le Citoyen du Monde, voici le Bon Européen, voici l’Américain à rendemen
501 ux de confection voici le Citoyen du Monde, voici le Bon Européen, voici l’Américain à rendement maximum. Et comptez que l
502 le Citoyen du Monde, voici le Bon Européen, voici l’ Américain à rendement maximum. Et comptez que l’on poussera plus avant
503 i l’Américain à rendement maximum. Et comptez que l’ on poussera plus avant la dégradation de cette idole qu’est l’Homme po
504 maximum. Et comptez que l’on poussera plus avant la dégradation de cette idole qu’est l’Homme pour l’homme. Toute décaden
505 a plus avant la dégradation de cette idole qu’est l’ Homme pour l’homme. Toute décadence invente un syncrétisme. Rome eut c
506 la dégradation de cette idole qu’est l’Homme pour l’ homme. Toute décadence invente un syncrétisme. Rome eut celui des dieu
507 celui des dieux ; nous aurons celui des races de la Terre. Non plus une foi commune, mais une moyenne de nos manières d’ê
508 nières d’être. Une sorte de commun dénominateur… ( Le christianisme en connaît un, depuis toujours : il le nomme péché.) To
509 christianisme en connaît un, depuis toujours : il le nomme péché.) Tous les modèles que l’homme se propose ont ceci d’insu
510 ît un, depuis toujours : il le nomme péché.) Tous les modèles que l’homme se propose ont ceci d’insuffisant : qu’ils peuven
511 ujours : il le nomme péché.) Tous les modèles que l’ homme se propose ont ceci d’insuffisant : qu’ils peuvent être atteints
512 qu’ils peuvent être atteints. Mais ce qui parfait la stature de l’homme, c’est l’effort pour se dépasser — indéfiniment. L
513 être atteints. Mais ce qui parfait la stature de l’ homme, c’est l’effort pour se dépasser — indéfiniment. L’homme ne se c
514 Mais ce qui parfait la stature de l’homme, c’est l’ effort pour se dépasser — indéfiniment. L’homme ne se comprend lui-mêm
515 , c’est l’effort pour se dépasser — indéfiniment. L’ homme ne se comprend lui-même qu’en tant qu’il « passe l’homme » et pa
516 ne se comprend lui-même qu’en tant qu’il « passe l’ homme » et participe, en esprit, d’un ordre transcendental. Un seul fu
517  : il y réussirait trop aisément. Ce qui manque à l’ homme moderne, c’est un principe d’harmonie qui lui garantisse le cara
518 , c’est un principe d’harmonie qui lui garantisse le caractère « d’humanité » de ses démarches intellectuelles. Nous avons
519 ls nous menacent et nous empêchent de voir encore le surhumain. Être véritablement homme, c’est avoir accès au divin. Que
520 in. Que sert de parler d’humanisme « chrétien » ? L’ humanisme est de l’homme, le christianisme est du nouvel homme. Tout h
521 ler d’humanisme « chrétien » ? L’humanisme est de l’ homme, le christianisme est du nouvel homme. Tout humanisme véritable
522 anisme « chrétien » ? L’humanisme est de l’homme, le christianisme est du nouvel homme. Tout humanisme véritable conduit «
523 s-nous lui demander de plus, s’il laisse en blanc la place de Dieu. Mais où trouver les lévites assez purs pour garder vie
524 laisse en blanc la place de Dieu. Mais où trouver les lévites assez purs pour garder vierge parmi nous — voici déjà tant de
525 erge parmi nous — voici déjà tant de faux dieux — le fascinant éclat de ce vide ? 5. Je songe à la « psychologie scienti
526 — le fascinant éclat de ce vide ? 5. Je songe à la « psychologie scientifique » et à ce leurre qu’est l’attitude parallé
527  psychologie scientifique » et à ce leurre qu’est l’ attitude paralléliste. 6. J’exagère probablement, car la sincérité de
528 ude paralléliste. 6. J’exagère probablement, car la sincérité de ce néo-scientisme tempéré — sinon vraiment converti — es
529 est hors de doute. Mais c’est Stilicon défendant l’ Empire. 7. Or, Bergson, dans un discours prononcé à l’Académie des sc
530 ire. 7. Or, Bergson, dans un discours prononcé à l’ Académie des sciences morales et politiques, en 1914, a posé le problè
531 s sciences morales et politiques, en 1914, a posé le problème en termes fort nets. (Cités par M. Brunschvicg dans Le Progr
532 termes fort nets. (Cités par M. Brunschvicg dans Le Progrès de la conscience dans la philosophie occidentale, p. 695.) 8
533 ets. (Cités par M. Brunschvicg dans Le Progrès de la conscience dans la philosophie occidentale, p. 695.) 8. Les humanité
534 Brunschvicg dans Le Progrès de la conscience dans la philosophie occidentale, p. 695.) 8. Les humanités y trouveraient bi
535 nce dans la philosophie occidentale, p. 695.) 8. Les humanités y trouveraient bien leur place : la connaissance des étymol
536 8. Les humanités y trouveraient bien leur place : la connaissance des étymologies est l’une des garanties les plus actives
537 naissance des étymologies est l’une des garanties les plus actives de la pensée. b. Rougemont Denis de, « Pour un humanis
538 ogies est l’une des garanties les plus actives de la pensée. b. Rougemont Denis de, « Pour un humanisme nouveau », Cahie
539 iers de Foi et Vie , Paris, 1930, p. 242-245. c. Le texte est précédé de la note suivante : « M. Denis de Rougemont a pou
540 is, 1930, p. 242-245. c. Le texte est précédé de la note suivante : « M. Denis de Rougemont a poursuivi des études de let
3 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). André Malraux, La Voie royale (février 1931)
541 André Malraux, La Voie royale (février 1931)d M. André Malraux écrit des livres qu’o
542 jourd’hui d’un jeune écrivain. Son premier roman, Les Conquérants, décrivait la révolution communiste en Chine, et la figur
543 in. Son premier roman, Les Conquérants, décrivait la révolution communiste en Chine, et la figure centrale de Garine, anar
544 , décrivait la révolution communiste en Chine, et la figure centrale de Garine, anarchiste par goût de l’expérience, confé
545 figure centrale de Garine, anarchiste par goût de l’ expérience, conférait à tout le livre un caractère assez directement a
546 chiste par goût de l’expérience, conférait à tout le livre un caractère assez directement autobiographique. La philosophie
547 un caractère assez directement autobiographique. La philosophie de ce Garine, en effet, ressemblait singulièrement à cell
548 oser dans un petit ouvrage aigu et dense intitulé La Tentation de l’Occident. La Voix royale 9, est, croyons-nous, le réc
549 it ouvrage aigu et dense intitulé La Tentation de l’ Occident. La Voix royale 9, est, croyons-nous, le récit des événement
550 gu et dense intitulé La Tentation de l’Occident. La Voix royale 9, est, croyons-nous, le récit des événements qui précédè
551 l’Occident. La Voix royale 9, est, croyons-nous, le récit des événements qui précédèrent l’aventure chinoise de l’auteur.
552 ons-nous, le récit des événements qui précédèrent l’ aventure chinoise de l’auteur. C’est un roman plus dépouillé, plus iné
553 événements qui précédèrent l’aventure chinoise de l’ auteur. C’est un roman plus dépouillé, plus inégal aussi à certains ég
554 à certains égards et qui cette fois ne montre pas l’ homme aux prises avec l’humanité civilisée, mais avec la nature la plu
555 cette fois ne montre pas l’homme aux prises avec l’ humanité civilisée, mais avec la nature la plus sauvage. Comme Les Con
556 e aux prises avec l’humanité civilisée, mais avec la nature la plus sauvage. Comme Les Conquérants, c’est une sorte de rom
557 es avec l’humanité civilisée, mais avec la nature la plus sauvage. Comme Les Conquérants, c’est une sorte de roman d’avent
558 lisée, mais avec la nature la plus sauvage. Comme Les Conquérants, c’est une sorte de roman d’aventures significatives, et
559 orte de roman d’aventures significatives, et dont le tragique est décuplé par la valeur qu’il prend dans l’esprit des héro
560 gnificatives, et dont le tragique est décuplé par la valeur qu’il prend dans l’esprit des héros. Un jeune Français a décid
561 agique est décuplé par la valeur qu’il prend dans l’ esprit des héros. Un jeune Français a décidé d’aller fouiller les temp
562 éros. Un jeune Français a décidé d’aller fouiller les temples en ruines de la Voie royale d’Angkor : il compte y découvrir
563 décidé d’aller fouiller les temples en ruines de la Voie royale d’Angkor : il compte y découvrir des bas-reliefs dont il
564 dont il pourrait tirer un prix considérable. Sur le bateau qui l’amène à pied d’œuvre, il s’associe à un aventurier danoi
565 ait tirer un prix considérable. Sur le bateau qui l’ amène à pied d’œuvre, il s’associe à un aventurier danois, Perken, per
566 puissance militaire, sans doute irrégulière, dans le Siam, et auquel l’auteur prête des caractéristiques qui le rapprochen
567 , sans doute irrégulière, dans le Siam, et auquel l’ auteur prête des caractéristiques qui le rapprochent du Garine des Con
568 et auquel l’auteur prête des caractéristiques qui le rapprochent du Garine des Conquérants : « hostilité à l’égard des val
569 eurs établies…, goût des actions des hommes lié à la conscience de leur vanité…, refus surtout. » Refus des « conditions »
570 té…, refus surtout. » Refus des « conditions » de la vie sociale, au profit d’une volonté de puissance dont l’objet demeur
571 ociale, au profit d’une volonté de puissance dont l’ objet demeure assez incertain. Ce mystère qui entoure Perken durant to
572 ertain. Ce mystère qui entoure Perken durant tout le récit, au travers des aventures des deux explorateurs aux prises avec
573 s aventures des deux explorateurs aux prises avec les fièvres de la forêt tropicale, puis avec les sauvages Moïs, donne au
574 deux explorateurs aux prises avec les fièvres de la forêt tropicale, puis avec les sauvages Moïs, donne au personnage un
575 avec les fièvres de la forêt tropicale, puis avec les sauvages Moïs, donne au personnage un relief étonnant, mais contribue
576 onnant, mais contribue à créer des obscurités que le style très tendu de M. Malraux n’est pas fait pour dissiper. Perken,
577 parfois penser à ces gens — on en rencontre dans les affaires — qui se donnent une espèce d’autorité en ne parlant jamais
578 ar allusions et mots couverts. Il intimide un peu le lecteur qui ne se sent pas complice de ses secrets desseins. Au reste
579 t pas complice de ses secrets desseins. Au reste, le livre s’achève par sa mort, sans qu’on ait pu distinguer nettement à
580 e ces êtres qui agissent par désespoir, parce que l’ action, à tout prendre, est une défense contre la mort — la mort parto
581 l’action, à tout prendre, est une défense contre la mort — la mort partout présente « comme l’irréfutable preuve de l’abs
582 à tout prendre, est une défense contre la mort — la mort partout présente « comme l’irréfutable preuve de l’absurdité de
583 contre la mort — la mort partout présente « comme l’ irréfutable preuve de l’absurdité de la vie ». L’agonie lente de Perke
584 partout présente « comme l’irréfutable preuve de l’ absurdité de la vie ». L’agonie lente de Perken, qui est tombé sur les
585 te « comme l’irréfutable preuve de l’absurdité de la vie ». L’agonie lente de Perken, qui est tombé sur les « pointes de g
586 l’irréfutable preuve de l’absurdité de la vie ». L’ agonie lente de Perken, qui est tombé sur les « pointes de guerre » em
587 ie ». L’agonie lente de Perken, qui est tombé sur les « pointes de guerre » empoisonnées des Moïs, est un morceau admirable
588 eau admirable et atroce où éclate douloureusement la révolte d’un être pour qui la mort ne peut être qu’une « défaite mons
589 ate douloureusement la révolte d’un être pour qui la mort ne peut être qu’une « défaite monstrueuse ». Ainsi les incidents
590 e peut être qu’une « défaite monstrueuse ». Ainsi les incidents pathétiques de cette aventure composent en définitive une m
591 enture composent en définitive une méditation sur le destin de l’homme. Chez Perken comme chez Garine, même héroïsme dépou
592 ent en définitive une méditation sur le destin de l’ homme. Chez Perken comme chez Garine, même héroïsme dépourvu d’idéal,
593 rvu d’idéal, même ardeur épuisante à vivre contre la mort, même fièvre de lucidité qui ne laisse subsister de tous les sen
594 ièvre de lucidité qui ne laisse subsister de tous les sentiments qu’une « fraternité désespérée » devant la mort. Tout cela
595 entiments qu’une « fraternité désespérée » devant la mort. Tout cela, dira-t-on, compose une figure originale certes, mais
596 s aventureux et atteints jusque dans leur goût de l’ action par un intellectualisme anarchique. Je tiens au contraire le ca
597 ntellectualisme anarchique. Je tiens au contraire le cas Malraux pour hautement significatif de notre époque post-nietzsch
598 otre époque post-nietzschéenne et pré-communiste. Le cas Malraux, — le cas Perken si vous voulez. Les personnages de M. Ma
599 ietzschéenne et pré-communiste. Le cas Malraux, —  le cas Perken si vous voulez. Les personnages de M. Malraux se ressemble
600 . Le cas Malraux, — le cas Perken si vous voulez. Les personnages de M. Malraux se ressemblent dans le souvenir du lecteur 
601 Les personnages de M. Malraux se ressemblent dans le souvenir du lecteur : leur tempérament est plus fortement marqué que
602 s particularités extérieures, et c’est sans doute le tempérament de leur auteur. Qui n’a pas remarqué que les portraits de
603 pérament de leur auteur. Qui n’a pas remarqué que les portraits des meilleurs peintres ressemblent à ces peintres sous les
604 eilleurs peintres ressemblent à ces peintres sous les traits du modèle. Cet air de famille qu’ont tous les personnages pein
605 traits du modèle. Cet air de famille qu’ont tous les personnages peints par Rembrandt, et qui permet de les identifier au
606 ersonnages peints par Rembrandt, et qui permet de les identifier au premier coup d’œil, ce « commun dénominateur » d’expres
607 s si dissemblables, n’est-ce point cela qui forme l’ autoportrait le plus profondément ressemblant du maître ? Ainsi appara
608 les, n’est-ce point cela qui forme l’autoportrait le plus profondément ressemblant du maître ? Ainsi apparaissent au trave
609 actions et des discours d’un Garine, d’un Perken, les traits d’une individualité morale qui n’est sans doute que l’idée la
610 une individualité morale qui n’est sans doute que l’ idée la plus forte que M. Malraux se fait de lui-même. Je suis tenté d
611 ividualité morale qui n’est sans doute que l’idée la plus forte que M. Malraux se fait de lui-même. Je suis tenté de dire 
612 représentatif et plus accompli. Perken-Garine est la personnification la plus frappante d’un certain « homme moderne », — 
613 s accompli. Perken-Garine est la personnification la plus frappante d’un certain « homme moderne », — l’homme sans Dieu, q
614 plus frappante d’un certain « homme moderne », —  l’ homme sans Dieu, qui n’attend rien que de cette vie, mais auquel cette
615 e, parce qu’il refuse de lui trouver un sens dans la mort. L’homme qui pourrait se définir : « Dieu n’est pas, donc je sui
616 qu’il refuse de lui trouver un sens dans la mort. L’ homme qui pourrait se définir : « Dieu n’est pas, donc je suis » ; l’h
617 t se définir : « Dieu n’est pas, donc je suis » ; l’ homme seul ; areligieux, relié à rien. Plutôt aventurier que conquéran
618 abîmer, d’où renaître. Je ne sais pas aujourd’hui le livre « bien pensant » qui pose avec une pareille acuité le problème
619  bien pensant » qui pose avec une pareille acuité le problème central de notre civilisation. À ce titre, l’œuvre anarchist
620 oblème central de notre civilisation. À ce titre, l’ œuvre anarchiste et antichrétienne que Malraux inaugure10 avec La Voie
621 ste et antichrétienne que Malraux inaugure10 avec La Voie royale, mérite mieux que notre curiosité humaine, ou que notre a
622 é humaine, ou que notre admiration littéraire11. Le courage presque agressif qu’elle apporte à décrire la figure de l’hom
623 ourage presque agressif qu’elle apporte à décrire la figure de l’homme moderne en proie au seul orgueil de vivre, dénonce
624 e agressif qu’elle apporte à décrire la figure de l’ homme moderne en proie au seul orgueil de vivre, dénonce la paresse de
625 oderne en proie au seul orgueil de vivre, dénonce la paresse de la religion qui n’est qu’un refuge contre la vie. Elle nou
626 e au seul orgueil de vivre, dénonce la paresse de la religion qui n’est qu’un refuge contre la vie. Elle nous amène à un p
627 esse de la religion qui n’est qu’un refuge contre la vie. Elle nous amène à un point de jugement d’où les facilités de cer
628 vie. Elle nous amène à un point de jugement d’où les facilités de certaine foi apparaissent aussi « fausses » que l’effort
629 e certaine foi apparaissent aussi « fausses » que l’ effort désespéré de ces conquérants de désert. 9. Chez Grasset. 10.
630 s conquérants de désert. 9. Chez Grasset. 10. La Voie royale n’est que l’introduction à une série de romans intitulés
631 9. Chez Grasset. 10. La Voie royale n’est que l’ introduction à une série de romans intitulés Les Puissances du désert.
632 ue l’introduction à une série de romans intitulés Les Puissances du désert. 11. Le prix Goncourt, dit-on, eût été décerné
633 e romans intitulés Les Puissances du désert. 11. Le prix Goncourt, dit-on, eût été décerné à M. Malraux s’il n’avait nagu
634 ques passé outre à certains règlements concernant la propriété officielle de bas-reliefs cambodgiens. Je donne l’histoire
635 é officielle de bas-reliefs cambodgiens. Je donne l’ histoire comme une fable. Il est peut-être curieux de noter que les pi
636 une fable. Il est peut-être curieux de noter que les pires blasphèmes, de la pornographie en outre violations des lois div
637 tre curieux de noter que les pires blasphèmes, de la pornographie en outre violations des lois divines et humaines, n’euss
638 me. Mais notre monde ne connaît plus de sacré que la propriété matérielle. d. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] André
639 ugemont Denis de, « [Compte rendu] André Malraux, La Voie royale  », Foi et Vie, Paris, février 1931, p. 78-81.
4 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Sécularisme (mars 1931)
640 rs 1931)e Il nous plaît de faire converser ici les gens les moins faits pour s’entendre : ce n’est pas un mauvais moyen
641 Il nous plaît de faire converser ici les gens les moins faits pour s’entendre : ce n’est pas un mauvais moyen de dégage
642 tendre : ce n’est pas un mauvais moyen de dégager la mentalité d’une époque — selon la dialectique de cet Hegel auquel on
643 oyen de dégager la mentalité d’une époque — selon la dialectique de cet Hegel auquel on revient parce qu’au contraire de M
644 qu’au contraire de M. Léon Brunschvicg, il avait le sens du tragique de la vie. De pareilles « conversations » ne ressort
645 Léon Brunschvicg, il avait le sens du tragique de la vie. De pareilles « conversations » ne ressortent nullement de la cri
646 lles « conversations » ne ressortent nullement de la critique littéraire ; il arrive qu’elles mettent en jeu de gros probl
647 opos d’ouvrages bien minces. C’est qu’aujourd’hui le moindre chien écrasé pose toute la question sociale. Ainsi, sommes-no
648 qu’aujourd’hui le moindre chien écrasé pose toute la question sociale. Ainsi, sommes-nous amenés à donner une « importance
649 res qui « signifient » plus qu’elles ne « sont ». L’ on mesure ici l’écart d’avec la littérature d’avant-guerre, qui était
650 ient » plus qu’elles ne « sont ». L’on mesure ici l’ écart d’avec la littérature d’avant-guerre, qui était avant tout un ar
651 elles ne « sont ». L’on mesure ici l’écart d’avec la littérature d’avant-guerre, qui était avant tout un art. La nôtre aya
652 ture d’avant-guerre, qui était avant tout un art. La nôtre ayant voix au forum discute autant qu’elle n’invente ou qu’elle
653 ailleurs que d’ironie, qu’elle touche à tout dans l’ homme et dans la société. Elle a l’absence de scrupules des gens qui o
654 ronie, qu’elle touche à tout dans l’homme et dans la société. Elle a l’absence de scrupules des gens qui ont une mission u
655 he à tout dans l’homme et dans la société. Elle a l’ absence de scrupules des gens qui ont une mission urgente à remplir. C
656 remplir. Ces quelques remarques nous placent sous l’ angle qu’il faut pour situer le petit livre de M. P. Nizan12, dans sa
657 nous placent sous l’angle qu’il faut pour situer le petit livre de M. P. Nizan12, dans sa perspective la plus équitable.
658 petit livre de M. P. Nizan12, dans sa perspective la plus équitable. C’est le type du livre qui vaut surtout par l’attitud
659 n12, dans sa perspective la plus équitable. C’est le type du livre qui vaut surtout par l’attitude qu’il manifeste et comm
660 able. C’est le type du livre qui vaut surtout par l’ attitude qu’il manifeste et commente. Son sujet : le voyage d’un jeun
661 ttitude qu’il manifeste et commente. Son sujet : le voyage d’un jeune normalien marxiste. Citons quelques phrases qui don
662 n marxiste. Citons quelques phrases qui donneront le ton et les thèmes principaux : J’avais vingt ans. Je ne laisserai pe
663 . Citons quelques phrases qui donneront le ton et les thèmes principaux : J’avais vingt ans. Je ne laisserai personne dire
664 ingt ans. Je ne laisserai personne dire que c’est le plus bel âge de la vie… — Où était placé notre mal ? dans quelle part
665 sserai personne dire que c’est le plus bel âge de la vie… — Où était placé notre mal ? dans quelle partie de notre vie. Vo
666 e partie de notre vie. Voici ce que nous savons : les hommes ne vivent pas comme un homme devrait vivre… — Être un homme no
667 homme devrait vivre… — Être un homme nous paraît la seule entreprise légitime… — Nous pensions vie intérieure, quand il f
668 de bonnes raisons humaines, de nous intéresser à l’ Asie : les grèves à Bombay, les révolutions et les massacres en Chine,
669 s raisons humaines, de nous intéresser à l’Asie : les grèves à Bombay, les révolutions et les massacres en Chine, les empri
670 e nous intéresser à l’Asie : les grèves à Bombay, les révolutions et les massacres en Chine, les emprisonnements au Tonkin.
671 l’Asie : les grèves à Bombay, les révolutions et les massacres en Chine, les emprisonnements au Tonkin. Et non Bouddha13.
672 ombay, les révolutions et les massacres en Chine, les emprisonnements au Tonkin. Et non Bouddha13. — La liberté est un pouv
673 es emprisonnements au Tonkin. Et non Bouddha13. —  La liberté est un pouvoir réel et une volonté réelle de vouloir être soi
674 oi. Ayant ainsi esquissé ses positions éthiques, l’ auteur part pour Aden. Quel n’est pas son étonnement de découvrir que
675 t concentrée de notre mère l’Europe », un lieu où la vie occidentale se trouve « décantée jusqu’à l’essence, tout ce qui a
676 ù la vie occidentale se trouve « décantée jusqu’à l’ essence, tout ce qui allongeait la sauce évaporé. Il demeure un résidu
677 écantée jusqu’à l’essence, tout ce qui allongeait la sauce évaporé. Il demeure un résidu impitoyable, descriptible et sec 
678 un résidu impitoyable, descriptible et sec ». Ici la vie des hommes se trouve « réduite à son état de pureté extrême qui e
679 ve « réduite à son état de pureté extrême qui est l’ état économique ». Si les mœurs sont occidentales, les habitants, eux,
680 de pureté extrême qui est l’état économique ». Si les mœurs sont occidentales, les habitants, eux, viennent de tout l’Orien
681 tat économique ». Si les mœurs sont occidentales, les habitants, eux, viennent de tout l’Orient. « On pense à une Genève de
682 ccidentales, les habitants, eux, viennent de tout l’ Orient. « On pense à une Genève de l’islam. » Il semble, à lire notre
683 nent de tout l’Orient. « On pense à une Genève de l’ islam. » Il semble, à lire notre auteur, que ce mélange de représentan
684 ce mélange de représentants de ne ordre de toutes les races compose quelque chose d’assez hideusement provincial, au pire s
685 Nizan se refuse à montrer aucune compensation : «  l’ art, la philosophie, la politique étant absents, faute d’emploi, il n’
686 e refuse à montrer aucune compensation : « l’art, la philosophie, la politique étant absents, faute d’emploi, il n’y avait
687 er aucune compensation : « l’art, la philosophie, la politique étant absents, faute d’emploi, il n’y avait aucune correcti
688 on à faire ». D’ailleurs, il ne veut pas poétiser le tableau, car, pour lui, « être poétique, c’est avoir besoin d’illusio
689 besoin d’illusions ». Je soutiendrais volontiers le contraire, mais M. Nizan est de ces gens, si nombreux aujourd’hui (Fr
690 mbreux aujourd’hui (Freud, etc.), qui croient que le pire est toujours le plus vrai ; que la prose est plus vraie que la p
691 reud, etc.), qui croient que le pire est toujours le plus vrai ; que la prose est plus vraie que la poésie, le petit fait
692 oient que le pire est toujours le plus vrai ; que la prose est plus vraie que la poésie, le petit fait plus vrai que le ha
693 rs le plus vrai ; que la prose est plus vraie que la poésie, le petit fait plus vrai que le haut fait, la mesquinerie plus
694 vrai ; que la prose est plus vraie que la poésie, le petit fait plus vrai que le haut fait, la mesquinerie plus vraie que
695 vraie que la poésie, le petit fait plus vrai que le haut fait, la mesquinerie plus vraie que la grandeur. C’est sans dout
696 poésie, le petit fait plus vrai que le haut fait, la mesquinerie plus vraie que la grandeur. C’est sans doute qu’on les a
697 i que le haut fait, la mesquinerie plus vraie que la grandeur. C’est sans doute qu’on les a par trop dupés ; ils ne marche
698 lus vraie que la grandeur. C’est sans doute qu’on les a par trop dupés ; ils ne marchent plus. La faute en est à l’idéologi
699 u’on les a par trop dupés ; ils ne marchent plus. La faute en est à l’idéologie bourgeoise du xixe siècle qui consiste da
700 p dupés ; ils ne marchent plus. La faute en est à l’ idéologie bourgeoise du xixe siècle qui consiste dans une large mesur
701 consiste dans une large mesure à éviter d’appeler les choses par leur nom, à préférer toujours le « distingué » et le « con
702 eler les choses par leur nom, à préférer toujours le « distingué » et le « conforme » au vrai. Mais n’est-il pas grand tem
703 leur nom, à préférer toujours le « distingué » et le « conforme » au vrai. Mais n’est-il pas grand temps de dépasser une r
704 réaction de vulgarité non moins artificielle que le lâche idéalisme qu’elle combat avec raison ? D’ailleurs, si je vois b
705 bat avec raison ? D’ailleurs, si je vois bien que le propos de M. Nizan n’est pas de nous rendre le goût de ce qui, en Eur
706 ue le propos de M. Nizan n’est pas de nous rendre le goût de ce qui, en Europe, « allongeait la solution », je ne puis m’e
707 rendre le goût de ce qui, en Europe, « allongeait la solution », je ne puis m’empêcher de penser que cette peinture d’Aden
708 faite pour y contribuer : si grande est en effet l’ horreur que M. Nizan éprouve à contempler « ce résidu impitoyable, des
709 t-il bien légitime de voir dans un tel « résidu » l’ essence de l’Europe, — « son état de pureté extrême, qui est l’économi
710 itime de voir dans un tel « résidu » l’essence de l’ Europe, — « son état de pureté extrême, qui est l’économique » ? On re
711 l’Europe, — « son état de pureté extrême, qui est l’ économique » ? On reconnaît ici la thèse marxiste, dont le moins qu’on
712 xtrême, qui est l’économique » ? On reconnaît ici la thèse marxiste, dont le moins qu’on puisse dire est qu’elle sent son
713 ique » ? On reconnaît ici la thèse marxiste, dont le moins qu’on puisse dire est qu’elle sent son xixe siècle. On peut lu
714 sformation radicale des conditions matérielles de la vie humaine. Je crois que l’homme ne peut être transformé que spiritu
715 tions matérielles de la vie humaine. Je crois que l’ homme ne peut être transformé que spirituellement. Et cette révolution
716 rmé que spirituellement. Et cette révolution-là a l’ avantage d’être possible dès maintenant. Mais M. Nizan a trop de préju
717 ant. Mais M. Nizan a trop de préjugés pour sentir la force neuve perpétuellement de la vérité religieuse. Il parle des rel
718 gés pour sentir la force neuve perpétuellement de la vérité religieuse. Il parle des religions avec une incroyable légèret
719 incroyable légèreté, — en littérateur qui cherche l’ effet pittoresque. « Les curés de tous les dieux blancs se sont mis à
720 en littérateur qui cherche l’effet pittoresque. «  Les curés de tous les dieux blancs se sont mis à convertir ces idolâtres,
721 cherche l’effet pittoresque. « Les curés de tous les dieux blancs se sont mis à convertir ces idolâtres, ces fétichistes,
722 s, ces fétichistes, à leur parler de Luther et de la Vierge de Lourdes, à leur révéler les culottes de chez Esders. » N’in
723 Luther et de la Vierge de Lourdes, à leur révéler les culottes de chez Esders. » N’insistons pas sur ce Luther prêché par n
724 ble !) mais un normalien se devrait de savoir que l’ œuvre missionnaire a consisté, dès le début, à combattre les funestes
725 e savoir que l’œuvre missionnaire a consisté, dès le début, à combattre les funestes effets de la civilisation athée qu’ap
726 issionnaire a consisté, dès le début, à combattre les funestes effets de la civilisation athée qu’apportaient les Européens
727 dès le début, à combattre les funestes effets de la civilisation athée qu’apportaient les Européens. Autre trait plus édi
728 es effets de la civilisation athée qu’apportaient les Européens. Autre trait plus édifiant encore : l’auteur rentrant à Mar
729 les Européens. Autre trait plus édifiant encore : l’ auteur rentrant à Marseille voit de loin le château d’If et N.-D. de l
730 core : l’auteur rentrant à Marseille voit de loin le château d’If et N.-D. de la Garde : « J’étais servi — s’écrie-t-il. —
731 s emblèmes venus à ma rencontre étaient justement les deux objets les plus révoltants de la terre : une église, une prison.
732 à ma rencontre étaient justement les deux objets les plus révoltants de la terre : une église, une prison. » Triste carenc
733 justement les deux objets les plus révoltants de la terre : une église, une prison. » Triste carence d’un jugement qui se
734 tend humain ! Pensez-y M. Nizan : quelle que soit la Tchéka régnante, il y aura toujours plus d’hommes dans les églises qu
735 a régnante, il y aura toujours plus d’hommes dans les églises que dans les prisons, — et des hommes qui viendront y trouver
736 toujours plus d’hommes dans les églises que dans les prisons, — et des hommes qui viendront y trouver leur liberté. Mais
737 on, s’arrêter à ces cris d’une révolte égarée par la haine ? C’est qu’ils caractérisent une attitude de plus en plus fréqu
738 isent une attitude de plus en plus fréquente chez les jeunes intellectuels : orgueil de la Vie, haine de cette vie-ci, mépr
739 quente chez les jeunes intellectuels : orgueil de la Vie, haine de cette vie-ci, mépris de la religion et ferveur pour des
740 gueil de la Vie, haine de cette vie-ci, mépris de la religion et ferveur pour des « valeurs nouvelles » encore plus vagues
741 gues d’ailleurs que ce qu’ils peuvent imaginer de la religion. C’est une forme aiguë de ce que les Anglais appellent « séc
742 r de la religion. C’est une forme aiguë de ce que les Anglais appellent « sécularisme ». Ce terme qui sans doute reviendra
743 ». Ce terme qui sans doute reviendra souvent dans les chroniques de Foi et Vie , « résume commodément cette volonté d’éman
744 ésume commodément cette volonté d’émancipation de la civilisation moderne à l’égard de toute autorité divine qui est le tr
745 oderne à l’égard de toute autorité divine qui est le trait dominant de notre époque » — pour reprendre la définition qu’en
746 trait dominant de notre époque » — pour reprendre la définition qu’en donnait ici même M. Pierre Maury. C’est à peu près d
747 t ici même M. Pierre Maury. C’est à peu près dans le même sens que M. René Gillouin parle14 de l’effort de notre monde pou
748 dans le même sens que M. René Gillouin parle14 de l’ effort de notre monde pour « se séculariser, pour se constituer en deh
749 nes ». Aux yeux du « séculariste », bien entendu, la question religieuse apparaît comme périmée. Avec M. Brunschvicg, il p
750 , qu’il n’est plus permis de nos jours… bref, que la science a changé tout cela. C’est précisément à ce sécularisme que ré
751 noncée au Foyer des étudiants protestants, et que la Nouvelle Revue des jeunes publie dans son numéro du 15 février15. M.
752 nalyse trois attitudes typiquement sécularistes : la philosophie des lumières, celle de la technique, celle du primat de l
753 ularistes : la philosophie des lumières, celle de la technique, celle du primat de la Vie. Ce lui est une occasion de rédu
754 mières, celle de la technique, celle du primat de la Vie. Ce lui est une occasion de réduire à ses justes proportions l’id
755 une occasion de réduire à ses justes proportions l’ idéalisme scientifique de M. Brunschvicg, philosophe officiel des lumi
756 dispose cet idéalisme ? se demande M. G. Marcel. L’ orgueil tout d’abord, je n’hésite pas à le déclarer. On m’arrêtera en
757 arcel. L’orgueil tout d’abord, je n’hésite pas à le déclarer. On m’arrêtera en me faisant observer que cet orgueil n’a pa
758 t orgueil n’a pas un caractère personnel, puisque l’ Esprit dont M. Brunschvicg nous entretient n’est l’Esprit de personne.
759 ’Esprit dont M. Brunschvicg nous entretient n’est l’ Esprit de personne. Je répondrai tout d’abord que c’est ou que cela ve
760 drai tout d’abord que c’est ou que cela veut être l’ Esprit de tout le monde ; et nous savons depuis Platon ce que la démoc
761 ut le monde ; et nous savons depuis Platon ce que la démocratie dont cet idéalisme n’est après tout qu’une transposition r
762 recèle de flatterie. Ce n’est pas tout : en fait l’ idéaliste se substitue inévitablement à l’Esprit — et cette fois nous
763 en fait l’idéaliste se substitue inévitablement à l’ Esprit — et cette fois nous avons affaire à quelqu’un. Mettons-le en p
764 ette fois nous avons affaire à quelqu’un. Mettons- le en présence du scandale que constitue à ses yeux cette anomalie : un
765 e chrétien. Comment un astronome peut-il croire à l’ Incarnation ou aller à la Messe ? On n’aura d’autre ressource que de n
766 tronome peut-il croire à l’Incarnation ou aller à la Messe ? On n’aura d’autre ressource que de nous opposer un distinguo 
767 plus exactement, est un homme du xxe siècle que l’ idéaliste salue comme son contemporain ; en tant qu’il croit à l’Incar
768 ue comme son contemporain ; en tant qu’il croit à l’ Incarnation et qu’il va à la Messe, il se comporte en homme du xiiie
769 en tant qu’il croit à l’Incarnation et qu’il va à la Messe, il se comporte en homme du xiiie siècle — ou en enfant : il y
770 nge sectionnement, il aura beau se recommander de la Raison ou de l’Esprit, nous resterons inquiets, d’autant que, s’il ne
771 t, il aura beau se recommander de la Raison ou de l’ Esprit, nous resterons inquiets, d’autant que, s’il ne s’interdit null
772 ues ou même sociologiques de ces survivances chez l’ astronome, il nous interdira formellement de procéder en ce qui le con
773 nous interdira formellement de procéder en ce qui le concerne lui-même, à des analyses ou à des réductions du même ordre.
774 des réductions du même ordre. Lui est des pieds à la tête un homme de 1930 ; et en même temps il se réclame d’un Esprit ét
775 ui cependant est né et dont on ne saurait prévoir les avatars. Tout cela, disons-le nettement, est d’une singulière incohér
776 ne saurait prévoir les avatars. Tout cela, disons- le nettement, est d’une singulière incohérence. Et il est évident que si
777 loisir économique, il lui faudra se réfugier dans la sphère des abstractions les plus exsangues. Je pense quant à moi qu’u
778 audra se réfugier dans la sphère des abstractions les plus exsangues. Je pense quant à moi qu’un idéalisme de cette espèce
779 ne philosophie religieuse concrète d’une part, et le matérialisme historique de l’autre. La preuve, je m’amuse à la voir
780 part, et le matérialisme historique de l’autre. La preuve, je m’amuse à la voir dans le fait que le pamphlet de M. Nizan
781 e historique de l’autre. La preuve, je m’amuse à la voir dans le fait que le pamphlet de M. Nizan, communiste, est encore
782 de l’autre. La preuve, je m’amuse à la voir dans le fait que le pamphlet de M. Nizan, communiste, est encore plus dur que
783 La preuve, je m’amuse à la voir dans le fait que le pamphlet de M. Nizan, communiste, est encore plus dur que l’article d
784 de M. Nizan, communiste, est encore plus dur que l’ article de M. Marcel, catholique, à l’endroit d’un philosophe caractér
785 lus dur que l’article de M. Marcel, catholique, à l’ endroit d’un philosophe caractérisé, nous dit-on, par « sa terreur sin
786 ctérisé, nous dit-on, par « sa terreur sincère de la vérité qui menace ». Mais partout ailleurs, qu’en cette commune antip
787 u’ils touchent des problèmes identiques, celui de la puissance de l’homme, celui de la valeur de son action, celui, en som
788 es problèmes identiques, celui de la puissance de l’ homme, celui de la valeur de son action, celui, en somme, de l’imperfe
789 iques, celui de la puissance de l’homme, celui de la valeur de son action, celui, en somme, de l’imperfection du monde. Je
790 i de la valeur de son action, celui, en somme, de l’ imperfection du monde. Je pense que tout chrétien conscient des problè
791 ps, souscrirait aux critiques que M. Nizan fait à l’ actuelle civilisation, souffrant comme lui de ce que « les hommes ne v
792 lle civilisation, souffrant comme lui de ce que «  les hommes ne vivent pas comme un homme devrait vivre ». Mais alors, se d
793 vivre ». Mais alors, se dit-on souvent en lisant les critiques marxistes — et c’est ici le nœud de divergence entre eux et
794 en lisant les critiques marxistes — et c’est ici le nœud de divergence entre eux et nous — si le mal est si grand qu’ils
795 ici le nœud de divergence entre eux et nous — si le mal est si grand qu’ils le montrent — et il l’est — aucun bouleversem
796 entre eux et nous — si le mal est si grand qu’ils le montrent — et il l’est — aucun bouleversement matériel n’y pourra rie
797 si le mal est si grand qu’ils le montrent — et il l’ est — aucun bouleversement matériel n’y pourra rien, si radical soit-i
798 , il postule une réalité transcendante — ou alors le suicide d’un monde empoisonné par sa propre haine. Le séculariste « c
799 uicide d’un monde empoisonné par sa propre haine. Le séculariste « constructiviste » répondra qu’il croit en la puissance
800 riste « constructiviste » répondra qu’il croit en la puissance de l’homme pour se dégager des servitudes provisoires de la
801 tiviste » répondra qu’il croit en la puissance de l’ homme pour se dégager des servitudes provisoires de la technique. Mais
802 mme pour se dégager des servitudes provisoires de la technique. Mais rien n’est plus hasardeux qu’une telle mystique, — ri
803 que son objet. Comme il est déchirant en vérité, le chant d’orgueil que le siècle entonne pour annoncer son morne triomph
804 l est déchirant en vérité, le chant d’orgueil que le siècle entonne pour annoncer son morne triomphe : « Vous n’avez pas s
805 on morne triomphe : « Vous n’avez pas su conjurer la malédiction du monde moderne, clame-t-on de toutes parts aux chrétien
806 sont des réussites qu’il nous faut. Saluons enfin le règne de l’homme ! » Mais le chrétien, qui sait un peu ce qu’est ce m
807 ssites qu’il nous faut. Saluons enfin le règne de l’ homme ! » Mais le chrétien, qui sait un peu ce qu’est ce monstre, se d
808 faut. Saluons enfin le règne de l’homme ! » Mais le chrétien, qui sait un peu ce qu’est ce monstre, se demande, songeant
809 peu ce qu’est ce monstre, se demande, songeant à l’ Europe, s’il y aura dix justes dans Sodome. 12. Aden Arabie, chez R
810 bie, chez Rieder, Paris. 13. Mais Bouddha, c’est l’ Asie. Les grèves, c’est encore l’Europe. 14. Dans un article des Nou
811 z Rieder, Paris. 13. Mais Bouddha, c’est l’Asie. Les grèves, c’est encore l’Europe. 14. Dans un article des Nouvelles li
812 s Bouddha, c’est l’Asie. Les grèves, c’est encore l’ Europe. 14. Dans un article des Nouvelles littéraires du 20 février
813 quelle nous renvoyons tous ceux qu’aura passionné l’ enquête de M. Paul Arbousse-Bastide publiée par Foi et Vie l’an dern
814 M. Paul Arbousse-Bastide publiée par Foi et Vie l’ an dernier. 15. « Remarques sur l’irréligion contemporaine ». e. Ro
815 r Foi et Vie l’an dernier. 15. « Remarques sur l’ irréligion contemporaine ». e. Rougemont Denis de, « [Compte rendu]
5 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Une exposition d’artistes protestants modernes (avril 1931)
816 C’est donc qu’il y en a ? avez-vous dit. Depuis le temps qu’on cherchait à nous faire croire qu’une origine protestante
817 voici que s’alignent sur une même affiche et sous la double étiquette de protestants et de modernes des noms de peintres c
818 tres comme Bosshardt, Raoul Dufy, Lotiron, Zingg, le sculpteur Gimond, l’architecte Le Corbusier, le décorateur Ruhlmann,
819 Raoul Dufy, Lotiron, Zingg, le sculpteur Gimond, l’ architecte Le Corbusier, le décorateur Ruhlmann, le photographe Kertés
820 Lotiron, Zingg, le sculpteur Gimond, l’architecte Le Corbusier, le décorateur Ruhlmann, le photographe Kertész… L’avant-ga
821 , le sculpteur Gimond, l’architecte Le Corbusier, le décorateur Ruhlmann, le photographe Kertész… L’avant-garde parisienne
822 ’architecte Le Corbusier, le décorateur Ruhlmann, le photographe Kertész… L’avant-garde parisienne la plus fringante et ba
823 , le décorateur Ruhlmann, le photographe Kertész… L’ avant-garde parisienne la plus fringante et bariolée. Il y a là quelqu
824 le photographe Kertész… L’avant-garde parisienne la plus fringante et bariolée. Il y a là quelque mystère ; demandons-en
825 ariolée. Il y a là quelque mystère ; demandons-en l’ explication à la Préface d’un si brillant catalogue. Parce qu’ils par
826 là quelque mystère ; demandons-en l’explication à la Préface d’un si brillant catalogue. Parce qu’ils parlent un peu pour
827 e. Héritiers du plus grand affranchissement et de la plus héroïque résistance, nous voulons aller de l’avant, nous n’avons
828 a plus héroïque résistance, nous voulons aller de l’ avant, nous n’avons pas peur d’essayer vers la beauté de nouvelles rou
829 de l’avant, nous n’avons pas peur d’essayer vers la beauté de nouvelles routes. On nous connaît mal. Derrière le mur de n
830 e nouvelles routes. On nous connaît mal. Derrière le mur de notre maison on nous croyait peut-être enfermés dans un morali
831 ables, nous faisions des projets dont on parlait, la nuit, dans les chambres où les curiosités et les enthousiasmes en dés
832 isions des projets dont on parlait, la nuit, dans les chambres où les curiosités et les enthousiasmes en désordre s’agitaie
833 ts dont on parlait, la nuit, dans les chambres où les curiosités et les enthousiasmes en désordre s’agitaient entre les mur
834 , la nuit, dans les chambres où les curiosités et les enthousiasmes en désordre s’agitaient entre les murs d’où nous arrach
835 t les enthousiasmes en désordre s’agitaient entre les murs d’où nous arrachions les moulures et les vieux papiers à fleurs.
836 e s’agitaient entre les murs d’où nous arrachions les moulures et les vieux papiers à fleurs. La confiance, la sincérité, l
837 tre les murs d’où nous arrachions les moulures et les vieux papiers à fleurs. La confiance, la sincérité, l’amitié, s’arron
838 hions les moulures et les vieux papiers à fleurs. La confiance, la sincérité, l’amitié, s’arrondissaient autour des livres
839 ures et les vieux papiers à fleurs. La confiance, la sincérité, l’amitié, s’arrondissaient autour des livres dont nous sav
840 eux papiers à fleurs. La confiance, la sincérité, l’ amitié, s’arrondissaient autour des livres dont nous savions de grands
841 ité un peu grave, on touchait avec notre jeunesse le tragique ou le merveilleux, on mettait notre volonté aimante, entre t
842 e, on touchait avec notre jeunesse le tragique ou le merveilleux, on mettait notre volonté aimante, entre toutes les pages
843 x, on mettait notre volonté aimante, entre toutes les pages, sur toutes les choses. Nous écrivions aux auteurs, nous recevi
844 lonté aimante, entre toutes les pages, sur toutes les choses. Nous écrivions aux auteurs, nous recevions des livres, des le
845 des lettres. Van Gogh, en qui nous aimions tout : le pasteur, le peintre et le fou, semait en nous toutes les curiosités d
846 Van Gogh, en qui nous aimions tout : le pasteur, le peintre et le fou, semait en nous toutes les curiosités de la couleur
847 qui nous aimions tout : le pasteur, le peintre et le fou, semait en nous toutes les curiosités de la couleur et de la vie.
848 teur, le peintre et le fou, semait en nous toutes les curiosités de la couleur et de la vie. Nous reprenions toutes les mes
849 t le fou, semait en nous toutes les curiosités de la couleur et de la vie. Nous reprenions toutes les mesures, tout redeve
850 en nous toutes les curiosités de la couleur et de la vie. Nous reprenions toutes les mesures, tout redevenait neuf : les m
851 e la couleur et de la vie. Nous reprenions toutes les mesures, tout redevenait neuf : les mots « forme », « couleur », « ar
852 enions toutes les mesures, tout redevenait neuf : les mots « forme », « couleur », « architecture ». Et Dieu avait une plac
853 cture ». Et Dieu avait une place plus grande dans la joyeuse lumière de notre ciel simplifié. Et voilà, n’est-ce pas, un
854 es beaucoup d’objections, ou qui expliqueront dès l’ abord, et légitimeront aux yeux de beaucoup, le choix des œuvres expos
855 ès l’abord, et légitimeront aux yeux de beaucoup, le choix des œuvres exposées. Il ne s’agit nullement de présenter l’ense
856 res exposées. Il ne s’agit nullement de présenter l’ ensemble des artistes protestants, il s’agit de manifester les préfére
857 des artistes protestants, il s’agit de manifester les préférences d’une jeunesse. À cet égard particulièrement, ce salon fu
858 gard particulièrement, ce salon fut une réussite. La curiosité d’abord un peu sceptique de certains critiques, artistes ou
859 ains critiques, artistes ou écrivains, s’est muée le soir du premier vernissage en une sympathie sincère et souvent fort a
860 une sympathie sincère et souvent fort admirative. Le titre de l’exposition, si l’on y prend bien garde, éludait dans une c
861 e sincère et souvent fort admirative. Le titre de l’ exposition, si l’on y prend bien garde, éludait dans une certaine mesu
862 ent fort admirative. Le titre de l’exposition, si l’ on y prend bien garde, éludait dans une certaine mesure la question dé
863 rend bien garde, éludait dans une certaine mesure la question délicate de l’existence d’un « art protestant ». En effet, o
864 dans une certaine mesure la question délicate de l’ existence d’un « art protestant ». En effet, on ne parlait ici que d’«
865 si ces traits ne constituent pas, en définitive, les éléments d’un art protestant. Il eût fallu peut-être qu’un plus grand
866 réponse valable pût être esquissée. Car, avouons- le , du fait même de la nouveauté que représentait une telle exposition,
867 être esquissée. Car, avouons-le, du fait même de la nouveauté que représentait une telle exposition, le caractère d’avant
868 nouveauté que représentait une telle exposition, le caractère d’avant-garde des toiles frappait le visiteur avant qu’il e
869 n, le caractère d’avant-garde des toiles frappait le visiteur avant qu’il eût songé à distinguer les caractères confession
870 it le visiteur avant qu’il eût songé à distinguer les caractères confessionnels. Espérons qu’un prochain salon, organisé s’
871 els. Espérons qu’un prochain salon, organisé s’il le faut dans de plus vastes locaux, pourra donner accès à un ensemble au
872 le aussi complet que possible d’artistes nés dans le protestantisme. Et l’on pourra se demander alors : qu’y a-t-il de spé
873 ossible d’artistes nés dans le protestantisme. Et l’ on pourra se demander alors : qu’y a-t-il de spécifiquement protestant
874 ? — On s’y serait attendu. Une visite au salon de la rue de Vaugirard nous invite à renoncer à ces clichés. Pas de trace d
875 e « puritanisme » chez des artistes si différents les uns des autres. Au contraire, une vitalité, une joie dans l’invention
876 autres. Au contraire, une vitalité, une joie dans l’ invention, une hardiesse partout manifeste. Voici Dufy, le plus invent
877 ion, une hardiesse partout manifeste. Voici Dufy, le plus inventif des artistes contemporains, avec une « Peinture » d’un
878 ts Lotiron font un coin de campagne lumineuse, et le « Douarnenez » de Mac-Avoy est tout animé de blancs vivants. Très pla
879 ives pour de futures éditions d’art protestantes. La sculpture est brillamment représentée par un « Torse de femme » de Ma
880 Petersen. André Kertész, l’un des rénovateurs de l’ art photographique, expose un portrait frappant de réalité humaine. Ma
881 ose un portrait frappant de réalité humaine. Mais l’ œuvre maîtresse de l’exposition est sans doute la « Crucifixion » de R
882 ant de réalité humaine. Mais l’œuvre maîtresse de l’ exposition est sans doute la « Crucifixion » de R.-Th. Bosshardt. C’es
883 l’œuvre maîtresse de l’exposition est sans doute la « Crucifixion » de R.-Th. Bosshardt. C’est un véritable renouvellemen
884 . Bosshardt. C’est un véritable renouvellement de la peinture à sujet religieux qu’annonce cette grande composition : troi
885 trois longues croix dans une lumière dramatique, le corps du Christ déjà presque transfiguré en symbole mystique sur le c
886 déjà presque transfiguré en symbole mystique sur le ciel vert du plus grand jour de l’Histoire. On a beaucoup remarqué la
887 e mystique sur le ciel vert du plus grand jour de l’ Histoire. On a beaucoup remarqué la part importante ménagée aux œuvres
888 grand jour de l’Histoire. On a beaucoup remarqué la part importante ménagée aux œuvres de décorateurs : paravents, vitrin
889 aux Gobelins, aux poteries de Palissy. Ce goût de la belle matière mise en valeur dans sa pureté, sa nudité, ce sens de l’
890 e en valeur dans sa pureté, sa nudité, ce sens de l’ artisanat qui se refuse aux truquages, aux trompe-l’œil, ne dissocie j
891 x truquages, aux trompe-l’œil, ne dissocie jamais la recherche du beau et le goût intransigeant du vrai, c’est le trait le
892 l’œil, ne dissocie jamais la recherche du beau et le goût intransigeant du vrai, c’est le trait le plus évidemment « prote
893 e du beau et le goût intransigeant du vrai, c’est le trait le plus évidemment « protestant » de l’art français.   Mais s’i
894 et le goût intransigeant du vrai, c’est le trait le plus évidemment « protestant » de l’art français.   Mais s’il est mal
895 est le trait le plus évidemment « protestant » de l’ art français.   Mais s’il est malaisé de décrire, dès à présent, un ar
896 , un art protestant de fait, peut-on, par contre, le définir idéalement ? Il nous semble que cela supposerait d’abord une
897 oi : il faut qu’on sache sans équivoque ce qu’est le protestantisme avant de pouvoir trancher de ce que doit être un art q
898 e pouvoir trancher de ce que doit être un art qui l’ exprime. En d’autres termes, la définition d’un art protestant est lié
899 it être un art qui l’exprime. En d’autres termes, la définition d’un art protestant est liée à une conception dogmatique d
900 rotestant est liée à une conception dogmatique de la foi. Nous pensons même que la renaissance et l’épanouissement d’un te
901 ption dogmatique de la foi. Nous pensons même que la renaissance et l’épanouissement d’un tel art seront conditionnés par
902 e la foi. Nous pensons même que la renaissance et l’ épanouissement d’un tel art seront conditionnés par un renouveau doctr
903 et c’est un paradoxe qui n’étonnera pas ceux que le problème de la création intéresse, l’artiste a besoin plus que quicon
904 radoxe qui n’étonnera pas ceux que le problème de la création intéresse, l’artiste a besoin plus que quiconque de principe
905 as ceux que le problème de la création intéresse, l’ artiste a besoin plus que quiconque de principes définis — je ne dis p
906 nts, de réactif, de contrainte, de stimulant dans l’ atmosphère spirituelle qui préside à l’élaboration d’une œuvre. Pas de
907 ulant dans l’atmosphère spirituelle qui préside à l’ élaboration d’une œuvre. Pas de style religieux sans doctrine. Et plus
908 re. Pas de style religieux sans doctrine. Et plus la doctrine se relâche et s’estompe, moins l’art montre d’accent et de v
909 t plus la doctrine se relâche et s’estompe, moins l’ art montre d’accent et de vivante inspiration. Une remarque encore. Ce
910 position se sont demandé non sans ironie où était le calvinisme dans tout ceci. Eussent-ils posé, à propos d’un salon d’ar
911 t-ils posé, à propos d’un salon d’art catholique, la même question, en remplaçant calvinisme par thomisme par exemple ? L’
912 remplaçant calvinisme par thomisme par exemple ? L’ artiste catholique bénéficie certainement, pour lui-même et aux yeux d
913 u public, des facilités que donne à sa production l’ appareil des dogmes spécifiquement catholiques, concernant la Vierge e
914 des dogmes spécifiquement catholiques, concernant la Vierge et les saints. En deux mots, il y a des « sujets catholiques »
915 écifiquement catholiques, concernant la Vierge et les saints. En deux mots, il y a des « sujets catholiques », il n’y a pas
916 ujets protestants ». Mais, dira-t-on, il y a tous les sujets chrétiens ! C’est bien là que nous voulions en venir : le dogm
917 iens ! C’est bien là que nous voulions en venir : le dogme ne doit être qu’un stimulant (une difficulté) non pas un poncif
918 ’un stimulant (une difficulté) non pas un poncif. L’ idéal d’un artiste protestant, le seul auquel sa foi puisse prétendre,
919 n pas un poncif. L’idéal d’un artiste protestant, le seul auquel sa foi puisse prétendre, ce n’est pas de réaliser un art
920 n art assez purement évangélique pour transcender la confession qui lui a permis de naître. La grandeur d’un art protestan
921 scender la confession qui lui a permis de naître. La grandeur d’un art protestant, c’est de n’être qu’un art chrétien. f
6 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Conférences du comte Keyserling (avril 1931)
922 Conférences du comte Keyserling (avril 1931)g L’ auteur du Journal de voyage d’un philosophe, d’Analyse spectrale de l’
923 de voyage d’un philosophe, d’Analyse spectrale de l’ Europe, de Psychanalyse de l’Amérique, le célèbre philosophe fondateur
924 Analyse spectrale de l’Europe, de Psychanalyse de l’ Amérique, le célèbre philosophe fondateur de l’École de la Sagesse de
925 trale de l’Europe, de Psychanalyse de l’Amérique, le célèbre philosophe fondateur de l’École de la Sagesse de Darmstadt vi
926 de l’Amérique, le célèbre philosophe fondateur de l’ École de la Sagesse de Darmstadt vient de donner au Trocadéro trois co
927 ue, le célèbre philosophe fondateur de l’École de la Sagesse de Darmstadt vient de donner au Trocadéro trois conférences s
928 ient de donner au Trocadéro trois conférences sur les problèmes fondamentaux de la civilisation moderne. Décidément, le goû
929 ois conférences sur les problèmes fondamentaux de la civilisation moderne. Décidément, le goût du colossal — transmis aux
930 damentaux de la civilisation moderne. Décidément, le goût du colossal — transmis aux Américains — reste un trait marquant
931 nsmis aux Américains — reste un trait marquant de l’ âme allemande : le choix de la salle, les sujets abordés, jusqu’à la s
932 ns — reste un trait marquant de l’âme allemande : le choix de la salle, les sujets abordés, jusqu’à la stature du conféren
933 n trait marquant de l’âme allemande : le choix de la salle, les sujets abordés, jusqu’à la stature du conférencier en témo
934 rquant de l’âme allemande : le choix de la salle, les sujets abordés, jusqu’à la stature du conférencier en témoignent une
935 le choix de la salle, les sujets abordés, jusqu’à la stature du conférencier en témoignent une fois de plus. Accueilli ave
936 is de plus. Accueilli avec quelque perplexité par le public de la première conférence, sifflé à la seconde, ovationné à la
937 nde, ovationné à la dernière, Keyserling, il faut le reconnaître, a su, par trois fois, tenir en haleine une salle énorme
938 le d’observations justes et souvent profondes sur les grandeurs et les misères d’une ère mécanicienne qui prélude à l’organ
939 justes et souvent profondes sur les grandeurs et les misères d’une ère mécanicienne qui prélude à l’organisation du monde-
940 les misères d’une ère mécanicienne qui prélude à l’ organisation du monde-termitière type Lénine ou Ford. Soucieux de comp
941 Ford. Soucieux de comprendre notre temps avant de le condamner ou de l’absoudre, défenseur convaincu d’une spiritualité do
942 omprendre notre temps avant de le condamner ou de l’ absoudre, défenseur convaincu d’une spiritualité dont il annonce le ré
943 seur convaincu d’une spiritualité dont il annonce le réveil au sein même du triomphe des machines, Keyserling apparaît com
944 ling apparaît comme un type très représentatif de l’ Occident. Il n’a rien du prophète oriental contre lequel des Massis ma
945 nous mettaient naguère en garde. Keyserling voit la cause du développement exagéré de la technique dans le fait qu’aujour
946 serling voit la cause du développement exagéré de la technique dans le fait qu’aujourd’hui les masses veulent conquérir de
947 use du développement exagéré de la technique dans le fait qu’aujourd’hui les masses veulent conquérir des biens spirituels
948 agéré de la technique dans le fait qu’aujourd’hui les masses veulent conquérir des biens spirituels et matériels réservés a
949 s pour en jouir convenablement. Il faut organiser la conquête et la distribution de ces biens : d’où la technique. Cette p
950 convenablement. Il faut organiser la conquête et la distribution de ces biens : d’où la technique. Cette prétention des m
951 a conquête et la distribution de ces biens : d’où la technique. Cette prétention des masses, légitime d’ailleurs, a entraî
952 ntion des masses, légitime d’ailleurs, a entraîné le renversement de presque tous les buts de civilisation. C’est ainsi qu
953 leurs, a entraîné le renversement de presque tous les buts de civilisation. C’est ainsi que la pauvreté, considérée par les
954 ue tous les buts de civilisation. C’est ainsi que la pauvreté, considérée par les civilisations spiritualistes comme le bi
955 tion. C’est ainsi que la pauvreté, considérée par les civilisations spiritualistes comme le bien suprême dont seuls quelque
956 idérée par les civilisations spiritualistes comme le bien suprême dont seuls quelques élus peuvent se rendre dignes (les b
957 ont seuls quelques élus peuvent se rendre dignes ( les brahmanes par exemple, le christianisme primitif) — la pauvreté est c
958 vent se rendre dignes (les brahmanes par exemple, le christianisme primitif) — la pauvreté est considérée de nos jours com
959 ahmanes par exemple, le christianisme primitif) — la pauvreté est considérée de nos jours comme un mal absolu et honteux.
960 un mal absolu et honteux. C’est ainsi encore que l’ idéal chrétien de l’amour du prochain a tourné pratiquement à la méfia
961 nteux. C’est ainsi encore que l’idéal chrétien de l’ amour du prochain a tourné pratiquement à la méfiance systématique du
962 en de l’amour du prochain a tourné pratiquement à la méfiance systématique du voisin inévitable. Mais ces anomalies très g
963 raversons une crise d’adaptation, et il s’agit de la résoudre dans le sens d’une philosophie de la vie qui rende aux valeu
964 se d’adaptation, et il s’agit de la résoudre dans le sens d’une philosophie de la vie qui rende aux valeurs spirituelles l
965 de la résoudre dans le sens d’une philosophie de la vie qui rende aux valeurs spirituelles leur primauté : car c’est à ce
966 mauté : car c’est à cette condition seulement que la vie humaine gardera sa signification. En somme, on pourrait résumer l
967 a sa signification. En somme, on pourrait résumer la pensée de Keyserling en disant qu’il oppose à l’idéal actuel d’assura
968 la pensée de Keyserling en disant qu’il oppose à l’ idéal actuel d’assurances à tous les degrés — idéal antispirituel, méc
969 qu’il oppose à l’idéal actuel d’assurances à tous les degrés — idéal antispirituel, mécanique et « formidablement ennuyeux 
970 saurait être pour nous qu’une « introduction » à l’ ère spirituelle, une préparation nécessaire mais nullement suffisante.
971 écessaire mais nullement suffisante. Ce n’est pas la peur du monde-termitière qui sauvera la condition humaine menacée par
972 n’est pas la peur du monde-termitière qui sauvera la condition humaine menacée par le matérialisme : c’est un idéal positi
973 ière qui sauvera la condition humaine menacée par le matérialisme : c’est un idéal positif, immédiat parce qu’éternel. Là
7 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Au sujet d’un grand roman : La Princesse Blanche par Maurice Baring (mai 1931)
974 Au sujet d’un grand roman : La Princesse Blanche par Maurice Baring (mai 1931)h M. Maurice Baring
975 g (mai 1931)h M. Maurice Baring est entré dans l’ intimité de milliers de lecteurs français avec un livre d’un rare pres
976 du même auteur16, et il nous aide à mieux définir le charme de cette œuvre inoubliable. Antérieur de quelques années à Dap
977 oup plus long, — il compte plus de 600 pages dans l’ édition française — d’un rythme plus inégal aussi, il ne lui est pas i
978 lus inégal aussi, il ne lui est pas inférieur par l’ intérêt humain, et sa qualité d’émotion n’est pas moins pure. C’est l’
979 sa qualité d’émotion n’est pas moins pure. C’est l’ histoire de la vie d’une femme, et de la vie d’une société aujourd’hui
980 émotion n’est pas moins pure. C’est l’histoire de la vie d’une femme, et de la vie d’une société aujourd’hui presque dispa
981 re. C’est l’histoire de la vie d’une femme, et de la vie d’une société aujourd’hui presque disparue, « roman-fleuve » que
982 x dates limitent : 1851-1914. Ainsi met-il en jeu les deux éléments dont l’antagonisme fait le fond de presque toutes les g
983 -1914. Ainsi met-il en jeu les deux éléments dont l’ antagonisme fait le fond de presque toutes les grandes œuvres romanesq
984 en jeu les deux éléments dont l’antagonisme fait le fond de presque toutes les grandes œuvres romanesques : une individua
985 dont l’antagonisme fait le fond de presque toutes les grandes œuvres romanesques : une individualité et un milieu social bi
986 ute un troisième qui est moins visible, mais dont la présence constante donne au livre toute sa gravité. Maurice Baring ex
987 ar deux vers de son ami Hilaire Belloc dont voici la traduction : L’amour de Dieu qui mène aux royaumes d’en-haut est cont
988 son ami Hilaire Belloc dont voici la traduction : L’ amour de Dieu qui mène aux royaumes d’en-haut est contrecarré par le d
989 i mène aux royaumes d’en-haut est contrecarré par le dieu de l’Amour. « Si vous désirez savoir comment cela s’applique à
990 royaumes d’en-haut est contrecarré par le dieu de l’ Amour. « Si vous désirez savoir comment cela s’applique à mon histoir
991 avoir comment cela s’applique à mon histoire, dit l’ auteur dans sa préface, lisez-la, et si vous la lisez, ne dites pas à
992 mon histoire, dit l’auteur dans sa préface, lisez- la , et si vous la lisez, ne dites pas à vos amis ce qui arrive avant qu’
993 it l’auteur dans sa préface, lisez-la, et si vous la lisez, ne dites pas à vos amis ce qui arrive avant qu’ils n’aient lu
994 s ce qui arrive avant qu’ils n’aient lu eux-mêmes le livre. J’espère que les critiques ne le diront pas non plus ; mais je
995 u’ils n’aient lu eux-mêmes le livre. J’espère que les critiques ne le diront pas non plus ; mais je sais que c’est beaucoup
996 eux-mêmes le livre. J’espère que les critiques ne le diront pas non plus ; mais je sais que c’est beaucoup leur demander. 
997 r ces critiques d’une tâche impossible. Car toute la valeur de l’œuvre de Baring réside dans sa durée, dans son atmosphère
998 es d’une tâche impossible. Car toute la valeur de l’ œuvre de Baring réside dans sa durée, dans son atmosphère et dans le s
999 réside dans sa durée, dans son atmosphère et dans le son qu’elle rend. Il ne s’y passe rien de plus que ce qu’admet la soc
1000 end. Il ne s’y passe rien de plus que ce qu’admet la société anglaise. Tout le drame est intérieur ; la passion ne s’y man
1001 de plus que ce qu’admet la société anglaise. Tout le drame est intérieur ; la passion ne s’y manifeste que par de très pet
1002 a société anglaise. Tout le drame est intérieur ; la passion ne s’y manifeste que par de très petits gestes qui, échappant
1003 iner une souffrance profonde, longtemps contenue. L’ intensité des scènes gagne à cette retenue mondaine ce que perd le pit
1004 scènes gagne à cette retenue mondaine ce que perd le pittoresque de l’action, encore que l’évocation de cette haute sociét
1005 te retenue mondaine ce que perd le pittoresque de l’ action, encore que l’évocation de cette haute société anglaise ne soit
1006 e que perd le pittoresque de l’action, encore que l’ évocation de cette haute société anglaise ne soit pas dépourvue d’un c
1007 ui attirera certains lecteurs, qui agacera un peu les autres. M. Charles Du Bos, dans la très belle préface qu’il a donnée
1008 gacera un peu les autres. M. Charles Du Bos, dans la très belle préface qu’il a donnée à la traduction française note avec
1009 Bos, dans la très belle préface qu’il a donnée à la traduction française note avec raison que M. Baring se montre « quelq
1010 M. Baring se montre « quelque peu inexorable dans la libéralité avec laquelle il nous invite à de multiples week-ends… » I
1011 nds… » Il y aurait beaucoup à dire pour et contre le roman mondain — entendons mondain par le cadre et les personnages, no
1012 t contre le roman mondain — entendons mondain par le cadre et les personnages, non par l’inspiration. (Dans le cas de Bari
1013 roman mondain — entendons mondain par le cadre et les personnages, non par l’inspiration. (Dans le cas de Baring, elle sera
1014 mondain par le cadre et les personnages, non par l’ inspiration. (Dans le cas de Baring, elle serait plutôt religieuse.) I
1015 et les personnages, non par l’inspiration. (Dans le cas de Baring, elle serait plutôt religieuse.) Il est incontestable q
1016 rait plutôt religieuse.) Il est incontestable que l’ art a tout à gagner à se choisir un cadre étroit, voire même conventio
1017 e étroit, voire même conventionnel. Racine en est le plus haut exemple. La Société dans laquelle évoluent les héros de Bar
1018 onventionnel. Racine en est le plus haut exemple. La Société dans laquelle évoluent les héros de Baring est riche, « confo
1019 s haut exemple. La Société dans laquelle évoluent les héros de Baring est riche, « conformiste » à l’extrême, mais internat
1020 les héros de Baring est riche, « conformiste » à l’ extrême, mais internationale. Cela permet à l’auteur autant qu’aux per
1021 » à l’extrême, mais internationale. Cela permet à l’ auteur autant qu’aux personnages de ne pas s’attarder à des considérat
1022 oudre certains conflits apparemment sans issues : les acteurs du drame n’hésitent pas à louer une villa à Heidelberg ou à S
1023 à louer une villa à Heidelberg ou à Séville quand la situation n’est plus tenable à Londres, et l’histoire continue, pour
1024 and la situation n’est plus tenable à Londres, et l’ histoire continue, pour notre agrément. Mais surtout, cette vie dénuée
1025 t à notre intérêt de se concentrer uniquement sur les sentiments, et dès lors elle constitue un milieu privilégié pour l’ét
1026 dès lors elle constitue un milieu privilégié pour l’ étude du cœur humain. Si le rôle de l’art est d’affiner nos âmes au co
1027 milieu privilégié pour l’étude du cœur humain. Si le rôle de l’art est d’affiner nos âmes au contact de réalités plus pure
1028 ilégié pour l’étude du cœur humain. Si le rôle de l’ art est d’affiner nos âmes au contact de réalités plus pures que celle
1029 s au contact de réalités plus pures que celles de la vie courante, on peut dire que les romans « mondains » de Baring ne m
1030 s que celles de la vie courante, on peut dire que les romans « mondains » de Baring ne manquent pas à cette tâche, et c’est
1031 Baring ne manquent pas à cette tâche, et c’est là l’ important. Le mérite le plus rare de ce livre est sans doute de faire
1032 quent pas à cette tâche, et c’est là l’important. Le mérite le plus rare de ce livre est sans doute de faire sentir et « r
1033 à cette tâche, et c’est là l’important. Le mérite le plus rare de ce livre est sans doute de faire sentir et « réaliser »
1034 doute de faire sentir et « réaliser » au lecteur le tragique de la durée d’une vie. M. Baring nous fait suivre de sa nais
1035 sentir et « réaliser » au lecteur le tragique de la durée d’une vie. M. Baring nous fait suivre de sa naissance à sa mort
1036 nous fait suivre de sa naissance à sa mort toute l’ existence de Blanche Clifford, sa vie de jeune fille, son mariage avec
1037 Clifford, sa vie de jeune fille, son mariage avec le prince Roccapalumba, puis avec un jeune lord ; toute l’existence d’un
1038 nce Roccapalumba, puis avec un jeune lord ; toute l’ existence d’une femme qui ne cesse, jusqu’à sa dernière heure, d’aimer
1039 choisir un sujet inévitablement tragique. Car si l’ histoire de l’ascension d’un caractère, d’une volonté, d’une âme viril
1040 jet inévitablement tragique. Car si l’histoire de l’ ascension d’un caractère, d’une volonté, d’une âme virile, trouve dans
1041 onté, d’une âme virile, trouve dans sa durée même l’ élément le plus convaincant de sa grandeur, et le plus tonique17, — il
1042 e âme virile, trouve dans sa durée même l’élément le plus convaincant de sa grandeur, et le plus tonique17, — il en va tou
1043 l’élément le plus convaincant de sa grandeur, et le plus tonique17, — il en va tout autrement de l’histoire d’une vie sen
1044 t le plus tonique17, — il en va tout autrement de l’ histoire d’une vie sentimentale. La durée est l’élément tragique par e
1045 t autrement de l’histoire d’une vie sentimentale. La durée est l’élément tragique par excellence du sentiment, parce qu’el
1046 e l’histoire d’une vie sentimentale. La durée est l’ élément tragique par excellence du sentiment, parce qu’elle le transfo
1047 agique par excellence du sentiment, parce qu’elle le transforme sans cesse, alors que nous sommes attachés surtout à des i
1048 s instants parfaits de nos affections ; parce que le sentiment ne souffre pas une ascension continue, mais une fois attein
1049 pas une ascension continue, mais une fois atteint le moment de sa perfection, ne peut plus que se souvenir, c’est-à-dire s
1050 que se souvenir, c’est-à-dire souffrir, vieillir. L’ amour étant d’essence éternelle, ses manifestations dans notre vie — d
1051 ernelle, ses manifestations dans notre vie — dans la durée — sont nécessairement douloureuses. Certains, peut-être, verron
1052 une condamnation des passions humaines, et comme la morale du roman. Mais nous ne croyons pas qu’une œuvre de cette enver
1053 à proprement parler de morale, malgré ce que dit l’ auteur dans sa préface. Bien plutôt, elle est l’expression concrète d’
1054 t l’auteur dans sa préface. Bien plutôt, elle est l’ expression concrète d’une loi divine et humaine, et c’est ici que l’on
1055 ète d’une loi divine et humaine, et c’est ici que l’ on peut voir sa profonde ressemblance avec les Affinités électives de
1056 que l’on peut voir sa profonde ressemblance avec les Affinités électives de Goethe. Aucune arrière-pensée de jugement mora
1057 ne arrière-pensée de jugement moral ne perce dans le ton ni dans l’agencement des incidents. Ce n’est pas un auteur qui s’
1058 ée de jugement moral ne perce dans le ton ni dans l’ agencement des incidents. Ce n’est pas un auteur qui s’arroge un petit
1059 petit jugement dernier de ses personnages, comme le moraliste s’arroge le pouvoir de séparer le bien du mal parmi les act
1060 r de ses personnages, comme le moraliste s’arroge le pouvoir de séparer le bien du mal parmi les actions d’autrui qu’il es
1061 comme le moraliste s’arroge le pouvoir de séparer le bien du mal parmi les actions d’autrui qu’il estime connaître. Simple
1062 arroge le pouvoir de séparer le bien du mal parmi les actions d’autrui qu’il estime connaître. Simplement, il enregistre le
1063 qu’il estime connaître. Simplement, il enregistre les effets d’une justice immanente. En même temps que les actions de ses
1064 effets d’une justice immanente. En même temps que les actions de ses héros, il note les jugements contradictoires qu’elles
1065 même temps que les actions de ses héros, il note les jugements contradictoires qu’elles provoquent. Et le tragique qui se
1066 jugements contradictoires qu’elles provoquent. Et le tragique qui se dégage lentement de cette longue confusion de plaisir
1067 ’égoïsmes déçus, d’égoïsmes comblés, ce n’est pas le tragique d’une condamnation, mais celui, combien plus amer et noble,
1068 n plus amer et noble, du consentement aux lois de la vie. Seule épreuve qui permette de nous en libérer. Car au-dessus des
1069 dessus des fatalités humaines, ce qui compte chez les personnages de Baring, c’est la manière d’accepter une destinée, de l
1070 qui compte chez les personnages de Baring, c’est la manière d’accepter une destinée, de la transfigurer ou d’y succomber.
1071 ing, c’est la manière d’accepter une destinée, de la transfigurer ou d’y succomber. C’est cela qui forme le sujet implicit
1072 ansfigurer ou d’y succomber. C’est cela qui forme le sujet implicite, nous l’avons dit, de son œuvre romanesque. Et c’est
1073 er. C’est cela qui forme le sujet implicite, nous l’ avons dit, de son œuvre romanesque. Et c’est par tout ce qu’elle conti
1074 eversante. Il est pourtant un endroit du roman où l’ auteur intervient visiblement, force les faits, agit comme un « morali
1075 u roman où l’auteur intervient visiblement, force les faits, agit comme un « moraliste » désireux de justifier une thèse pl
1076 justifier une thèse plus que de faire comprendre la réalité. Et c’est au cours des quarante pages qu’il consacre à la « c
1077 ’est au cours des quarante pages qu’il consacre à la « conversion » au catholicisme de la princesse Blanche. Arrêtons-nous
1078 l consacre à la « conversion » au catholicisme de la princesse Blanche. Arrêtons-nous un peu à l’examen de ce passage auqu
1079 e de la princesse Blanche. Arrêtons-nous un peu à l’ examen de ce passage auquel on sent que Baring attache une importance
1080 ortance qui n’est pas uniquement « romanesque » — le mouvement du récit se ralentit, au contraire, fâcheusement en ces pag
1081 fâcheusement en ces pages — et qui s’explique si l’ on a lu la phrase par quoi se termine un précédent livre de notre aute
1082 ent en ces pages — et qui s’explique si l’on a lu la phrase par quoi se termine un précédent livre de notre auteur : « La
1083 se termine un précédent livre de notre auteur : «  La veille de la Chandeleur 1909, je fus reçu dans le sein de l’Église ca
1084 précédent livre de notre auteur : « La veille de la Chandeleur 1909, je fus reçu dans le sein de l’Église catholique… le
1085 La veille de la Chandeleur 1909, je fus reçu dans le sein de l’Église catholique… le seul acte de ma vie que je suis parfa
1086 e la Chandeleur 1909, je fus reçu dans le sein de l’ Église catholique… le seul acte de ma vie que je suis parfaitement cer
1087 je fus reçu dans le sein de l’Église catholique… le seul acte de ma vie que je suis parfaitement certain de n’avoir jamai
1088 ne pression sur ses convictions religieuses. Mais le mot conviction ne doit être pris ici qu’au sens le plus conventionnel
1089 e mot conviction ne doit être pris ici qu’au sens le plus conventionnel. Car à une tante anglaise qui lui exprime l’espoir
1090 tionnel. Car à une tante anglaise qui lui exprime l’ espoir que sa vie à l’étranger n’ait point ébranlé sa foi, la princess
1091 te anglaise qui lui exprime l’espoir que sa vie à l’ étranger n’ait point ébranlé sa foi, la princesse répond : « Je ne cro
1092 e sa vie à l’étranger n’ait point ébranlé sa foi, la princesse répond : « Je ne crois pas, j’espère que non ; bien qu’il s
1093 nt de détresse aiguë, ou bien je m’y ennuie. » Et l’ on découvre soudain que cette femme, qui a subi sans les mettre jamais
1094 découvre soudain que cette femme, qui a subi sans les mettre jamais en question les exigences les plus terribles de la soci
1095 me, qui a subi sans les mettre jamais en question les exigences les plus terribles de la société insulaire, possède un sens
1096 sans les mettre jamais en question les exigences les plus terribles de la société insulaire, possède un sens critique assu
1097 s en question les exigences les plus terribles de la société insulaire, possède un sens critique assuré qu’elle applique n
1098 nner ici quelque invraisemblance psychologique si l’ on ne s’apercevait que M. Baring, lui-même, manifeste cette tournure d
1099 e cette tournure d’esprit au cours de ses romans. Le trait satirique, ailleurs presque imperceptible, est nettement appuyé
1100 nt appuyé dès qu’il s’agit des vieilles tantes de la Princesse, chargées ici de représenter deux églises anglaises. Ces de
1101 ables ladies, qui ne jouent pas d’autre rôle dans l’ histoire, sont ridicules et conventionnelles à souhait (ni plus ni moi
1102 conventionnelles à souhait (ni plus ni moins que la majorité des gens de cette sorte, mais est-ce à eux que l’on demande
1103 té des gens de cette sorte, mais est-ce à eux que l’ on demande de définir la doctrine ?). Voici quelques traits amusants o
1104 te, mais est-ce à eux que l’on demande de définir la doctrine ?). Voici quelques traits amusants ou cruels qui les caracté
1105  ?). Voici quelques traits amusants ou cruels qui les caractérisent. « Naturellement, vous allez à l’église le dimanche ? —
1106 les caractérisent. « Naturellement, vous allez à l’ église le dimanche ? — Oui, tante Harriet, j’y vais. — Tante Harriet e
1107 ctérisent. « Naturellement, vous allez à l’église le dimanche ? — Oui, tante Harriet, j’y vais. — Tante Harriet eut un sou
1108 is. — Tante Harriet eut un soupir de soulagement. La question était réglée : du moment qu’on allait à l’église le dimanche
1109 question était réglée : du moment qu’on allait à l’ église le dimanche, tout était bien ; inutile d’en demander plus. » Pa
1110 était réglée : du moment qu’on allait à l’église le dimanche, tout était bien ; inutile d’en demander plus. » Parlant de
1111 demander plus. » Parlant de son pasteur préféré, la même tante Harriet a ce mot exquis : « Il prêche merveilleusement san
1112 e excentricité. » Elle appelle ceux qui passent à l’ Église romaine des « pervertis » : « Nous en avons eu trop dans la fam
1113 des « pervertis » : « Nous en avons eu trop dans la famille, votre pauvre oncle Charles… qui avait stupéfié la famille en
1114 e, votre pauvre oncle Charles… qui avait stupéfié la famille en devenant catholique…, puis Edmund Lely, cousin germain de
1115 qui est devenu moine, et qui marche pieds nus, à l’ étranger lui aussi ; puis il y a eu votre pauvre tante Cornélia… Ce fu
1116 nous nous sommes montrés très bons à son égard… » L’ on conçoit que Blanche malheureuse, isolée, cherchant une sécurité int
1117 ne trouve pas dans ces indignations sentimentales la réponse aux premiers troubles que la grâce jette dans son âme. D’autr
1118 entimentales la réponse aux premiers troubles que la grâce jette dans son âme. D’autre part, tous les catholiques qu’elle
1119 e la grâce jette dans son âme. D’autre part, tous les catholiques qu’elle rencontre et qui lui parlent de leur foi se disti
1120 anité charmante, « une façon naturelle de traiter les questions religieuses, sans fausse honte ». (Seuls, parmi les catholi
1121 s religieuses, sans fausse honte ». (Seuls, parmi les catholiques, son mari et sa tyrannique belle-mère sont nettement anti
1122 ment Blanche ne se sentirait-elle pas attirée par la Rome papale, qui la console de la Rome de son mari et la venge de l’A
1123 entirait-elle pas attirée par la Rome papale, qui la console de la Rome de son mari et la venge de l’Angleterre de ses tan
1124 pas attirée par la Rome papale, qui la console de la Rome de son mari et la venge de l’Angleterre de ses tantes. Elle abju
1125 papale, qui la console de la Rome de son mari et la venge de l’Angleterre de ses tantes. Elle abjure secrètement, à Londr
1126 la console de la Rome de son mari et la venge de l’ Angleterre de ses tantes. Elle abjure secrètement, à Londres. C’est p
1127 s. C’est peut-être à l’endroit de cette œuvre où l’ on parle le plus directement de Dieu que Dieu est le plus absent. Car
1128 eut-être à l’endroit de cette œuvre où l’on parle le plus directement de Dieu que Dieu est le plus absent. Car nous y somm
1129 on parle le plus directement de Dieu que Dieu est le plus absent. Car nous y sommes à chaque page incités à juger, induits
1130 ais bien que tout changement de confession ramène les mêmes arguments qui retiennent l’esprit à la périphérie des vérités r
1131 fession ramène les mêmes arguments qui retiennent l’ esprit à la périphérie des vérités religieuses, là où elles paraissent
1132 ène les mêmes arguments qui retiennent l’esprit à la périphérie des vérités religieuses, là où elles paraissent s’opposer,
1133 les paraissent s’opposer, au lieu de nous aider à les mieux pénétrer, à les approfondir jusqu’à l’unité. Il est d’autant pl
1134 er, au lieu de nous aider à les mieux pénétrer, à les approfondir jusqu’à l’unité. Il est d’autant plus regrettable de voir
1135 r à les mieux pénétrer, à les approfondir jusqu’à l’ unité. Il est d’autant plus regrettable de voir Baring se départir ici
1136 lus regrettable de voir Baring se départir ici de la sagesse qu’il montre ailleurs, grossir les traits, découvrir la thèse
1137 ici de la sagesse qu’il montre ailleurs, grossir les traits, découvrir la thèse. Il eût pu s’en dispenser d’ailleurs, car
1138 il montre ailleurs, grossir les traits, découvrir la thèse. Il eût pu s’en dispenser d’ailleurs, car en définitive la conv
1139 t pu s’en dispenser d’ailleurs, car en définitive la conversion de son héroïne nous paraît être à tel point la seule solut
1140 rsion de son héroïne nous paraît être à tel point la seule solution possible qu’elle n’est plus du tout exemplaire et ne p
1141 ’est plus du tout exemplaire et ne peut servir ni le catholicisme (le milieu protestant étant nul), ni la foi chrétienne e
1142 exemplaire et ne peut servir ni le catholicisme ( le milieu protestant étant nul), ni la foi chrétienne en général (du fai
1143 catholicisme (le milieu protestant étant nul), ni la foi chrétienne en général (du fait précisément que les mobiles humain
1144 oi chrétienne en général (du fait précisément que les mobiles humains sont ici entièrement suffisants et rendent superflue
1145 t ici entièrement suffisants et rendent superflue l’ action de la grâce). Mais quoi ? Nous laisserons-nous vraiment « tente
1146 ement suffisants et rendent superflue l’action de la grâce). Mais quoi ? Nous laisserons-nous vraiment « tenter » par cett
1147 r » par cette erreur de Baring ? Cherchons plutôt le secret d’une communion que rompent les discussions, et qu’en tant d’a
1148 hons plutôt le secret d’une communion que rompent les discussions, et qu’en tant d’autres pages de cette belle œuvre, d’une
1149 ’une simple indication tranquille et profonde sur l’ état d’âme d’un de ses héros, comme sans le savoir, il établit. En vér
1150 de sur l’état d’âme d’un de ses héros, comme sans le savoir, il établit. En vérité, l’entrée de Blanche dans l’Église cath
1151 ros, comme sans le savoir, il établit. En vérité, l’ entrée de Blanche dans l’Église catholique n’est pas une conversion18,
1152 , il établit. En vérité, l’entrée de Blanche dans l’ Église catholique n’est pas une conversion18, c’est une adhésion à ce
1153 on18, c’est une adhésion à ce qui lui semble être la vérité. Sa vraie conversion a lieu beaucoup plus tard, lorsqu’elle tr
1154 tard, lorsqu’elle trouve, à force de souffrance, le courage de sacrifier son amour. Mais elle ne peut survivre à cet acte
1155 si notre bonheur humain n’est-il en aucune mesure le signe de la vérité. Personne, peut-être, n’a répété avec autant de fo
1156 heur humain n’est-il en aucune mesure le signe de la vérité. Personne, peut-être, n’a répété avec autant de force que Bari
1157 -être, n’a répété avec autant de force que Baring le fameux, l’irrépressible argument du bonheur, fondement pratique de la
1158 répété avec autant de force que Baring le fameux, l’ irrépressible argument du bonheur, fondement pratique de la morale cou
1159 ssible argument du bonheur, fondement pratique de la morale courante. Presque tous les événements de son roman le contredi
1160 ment pratique de la morale courante. Presque tous les événements de son roman le contredisent. Ceci entraîne cela — bonheur
1161 ourante. Presque tous les événements de son roman le contredisent. Ceci entraîne cela — bonheur ou catastrophe — non parce
1162 tout acte qui entraîne des ruines humaines. Mais la vérité, elle, est indifférente à ce que nous appelons bonheur ou malh
1163 ce que nous appelons bonheur ou malheur. Et c’est la vérité seule qu’il s’agit d’attendre. Dans Daphné Adeane, dans La Pri
1164 qu’il s’agit d’attendre. Dans Daphné Adeane, dans La Princesse Blanche, ce sont deux prêtres19 qui, au moment décisif, vie
1165 oment décisif, viennent apporter ce dur message à l’ âme de celle qui demandait d’être apaisée. Admirables dialogues, déchi
1166 es, déchirants et triomphants, qui comptent parmi les chefs-d’œuvre de la littérature religieuse. Celui de La Princesse Bl
1167 omphants, qui comptent parmi les chefs-d’œuvre de la littérature religieuse. Celui de La Princesse Blanche 20 donne sans
1168 s-d’œuvre de la littérature religieuse. Celui de La Princesse Blanche 20 donne sans aucun doute l’accord le plus profond
1169 e La Princesse Blanche 20 donne sans aucun doute l’ accord le plus profond de l’œuvre de Baring. En voici la conclusion. (
1170 ncesse Blanche 20 donne sans aucun doute l’accord le plus profond de l’œuvre de Baring. En voici la conclusion. (C’est Bla
1171 onne sans aucun doute l’accord le plus profond de l’ œuvre de Baring. En voici la conclusion. (C’est Blanche qui parle au p
1172 rd le plus profond de l’œuvre de Baring. En voici la conclusion. (C’est Blanche qui parle au père Michaël.) Vous comprene
1173 nde seulement de prier pour moi, car j’ai parfois la sensation que ma misère est plus que je ne peux supporter. La vie hum
1174 que ma misère est plus que je ne peux supporter. La vie humaine me paraît intolérable. — Elle l’est presque, mais pas tou
1175 ter. La vie humaine me paraît intolérable. — Elle l’ est presque, mais pas tout à fait. Il faut l’accepter. Songez à l’agon
1176 Elle l’est presque, mais pas tout à fait. Il faut l’ accepter. Songez à l’agonie du Jardin des Oliviers. Blanche se souvint
1177 ais pas tout à fait. Il faut l’accepter. Songez à l’ agonie du Jardin des Oliviers. Blanche se souvint que Lady Mount-Strat
1178 int que Lady Mount-Stratton lui avait dit presque la même chose dans le Podere à Florence. — Je sens, il est vrai, que j’a
1179 Stratton lui avait dit presque la même chose dans le Podere à Florence. — Je sens, il est vrai, que j’ai commis des erreur
1180 j’ai commis des erreurs irréparables. — Vous avez le droit de vous laisser mener par le remords au bord du désespoir, mais
1181 s. — Vous avez le droit de vous laisser mener par le remords au bord du désespoir, mais pas plus loin. Et c’est ainsi que
1182 mme dit Charles Du Bos « cette tristesse par-delà la tristesse que Baring excelle à suggérer, qu’au deuxième mouvement, au
1183 nn a enclose et embaumée ». « Tristesse, par-delà la tristesse »… Un tel état de l’âme n’est plus très éloigné peut-être d
1184 ristesse, par-delà la tristesse »… Un tel état de l’ âme n’est plus très éloigné peut-être de cette joie qui, elle aussi, e
1185 joie « qui surpasse toute connaissance ». 16. La Princesse Blanche, Stock, éditeur. 17. Qu’on lise, par exemple, l’ad
1186 he, Stock, éditeur. 17. Qu’on lise, par exemple, l’ admirable Goethe, histoire d’un homme, d’Émile Ludwig (Attinger, éd.),
1187 g (Attinger, éd.), ouvrage sur lequel nous aurons l’ occasion de revenir. 18. Il est absurde, voire aux yeux de la foi sca
1188 e revenir. 18. Il est absurde, voire aux yeux de la foi scandaleux de parler de conversion d’un protestantisme au catholi
1189 conversion d’un protestantisme au catholicisme ou l’ inverse. On ne se convertit pas à quelque chose. On se convertit simpl
1190 de, « [Compte rendu] Au sujet d’un grand roman : La Princesse Blanche par Maurice Baring », Foi et Vie, Paris, mai 1931,
8 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Kierkegaard (mai 1931)
1191 Kierkegaard (mai 1931)i j L’ entrée de l’œuvre de Kierkegaard dans le monde intellectuel et religie
1192 Kierkegaard (mai 1931)i j L’entrée de l’ œuvre de Kierkegaard dans le monde intellectuel et religieux français,
1193 31)i j L’entrée de l’œuvre de Kierkegaard dans le monde intellectuel et religieux français, est un événement qui mérite
1194 ignalé et qui aura un profond retentissement dans le protestantisme en particulier. Depuis quelques années, le nom de Kier
1195 stantisme en particulier. Depuis quelques années, le nom de Kierkegaard reparaît de loin en loin dans des revues comme Com
1196 t de loin en loin dans des revues comme Commerce, la Nouvelle Revue française , la Revue de Genève . Diverses études lui
1197 es comme Commerce, la Nouvelle Revue française , la Revue de Genève . Diverses études lui ont été consacrées, en particu
1198 tudes lui ont été consacrées, en particulier dans la Revue d’histoire et de philosophie religieuses de Strasbourg (Pascal
1199 es de Strasbourg (Pascal et Kierkegaard), et dans la Revue de métaphysique et de morale. Et voici que l’on annonce de plus
1200 Revue de métaphysique et de morale. Et voici que l’ on annonce de plusieurs côtés21, la publication prochaine des œuvres p
1201 . Et voici que l’on annonce de plusieurs côtés21, la publication prochaine des œuvres principales de l’un des plus grands
1202 hague en 1813, et y mourut en 1855. Voici comment le profond essayiste allemand Rudolf Kassner caractérise cette existence
1203 caractérise cette existence (Commerce, n° XII). Le grand événement de sa vie fut la mort de l’Évêque Mynster qui avait é
1204 merce, n° XII). Le grand événement de sa vie fut la mort de l’Évêque Mynster qui avait été très estimé au Danemark et que
1205 II). Le grand événement de sa vie fut la mort de l’ Évêque Mynster qui avait été très estimé au Danemark et que Kierkegaar
1206 aimé et honoré, comme ami de son père. Martensen, le successeur présumé de Mynster, prononçant un discours sur la tombe de
1207 ur présumé de Mynster, prononçant un discours sur la tombe de l’évêque, le loua d’avoir été l’un des « grands détenteurs d
1208 e Mynster, prononçant un discours sur la tombe de l’ évêque, le loua d’avoir été l’un des « grands détenteurs de la vérité,
1209 prononçant un discours sur la tombe de l’évêque, le loua d’avoir été l’un des « grands détenteurs de la vérité, dont la l
1210 loua d’avoir été l’un des « grands détenteurs de la vérité, dont la longue chaîne part des apôtres ». Mais Kierkegaard re
1211 é l’un des « grands détenteurs de la vérité, dont la longue chaîne part des apôtres ». Mais Kierkegaard reste soucieux : M
1212 gaard reste soucieux : Mynster est-il vraiment de la lignée des Apôtres, se demande-t-il ? Les prêtres sont-ils, dans le v
1213 iment de la lignée des Apôtres, se demande-t-il ? Les prêtres sont-ils, dans le vrai sens du mot, les successeurs du Christ
1214 res, se demande-t-il ? Les prêtres sont-ils, dans le vrai sens du mot, les successeurs du Christ ? Ne sont-ils pas plutôt
1215 ? Les prêtres sont-ils, dans le vrai sens du mot, les successeurs du Christ ? Ne sont-ils pas plutôt des fonctionnaires pay
1216 sont-ils pas plutôt des fonctionnaires payés par l’ État et avides d’avancement ? Les écrits polémiques de Kierkegaard, Le
1217 nnaires payés par l’État et avides d’avancement ? Les écrits polémiques de Kierkegaard, Le Moment et les Attaques contre le
1218 vancement ? Les écrits polémiques de Kierkegaard, Le Moment et les Attaques contre le christianisme officiel ne peuvent êt
1219 es écrits polémiques de Kierkegaard, Le Moment et les Attaques contre le christianisme officiel ne peuvent être comparés qu
1220 de Kierkegaard, Le Moment et les Attaques contre le christianisme officiel ne peuvent être comparés qu’aux Provinciales.
1221 tre comparés qu’aux Provinciales. Kierkegaard est le Pascal du protestantisme, et il est caractéristique à la fois du mond
1222 u catholicisme et du monde du protestantisme, que la polémique et la satire qui sévirent, dans le premier, dès ses origine
1223 t du monde du protestantisme, que la polémique et la satire qui sévirent, dans le premier, dès ses origines, ne se donnère
1224 s origines, ne se donnèrent cours par contre qu’à la fin du second. Le Moment et les Attaques contre le christianisme offi
1225 donnèrent cours par contre qu’à la fin du second. Le Moment et les Attaques contre le christianisme officiel furent l’acte
1226 rs par contre qu’à la fin du second. Le Moment et les Attaques contre le christianisme officiel furent l’acte de Kierkegaar
1227 a fin du second. Le Moment et les Attaques contre le christianisme officiel furent l’acte de Kierkegaard. Après cet acte,
1228 Attaques contre le christianisme officiel furent l’ acte de Kierkegaard. Après cet acte, il mourut. Comme Hamlet. » Et vo
1229 gaard fut le dernier grand protestant. On ne peut le comparer qu’aux grands fondateurs du christianisme, à Luther, à Calvi
1230 ateurs du christianisme, à Luther, à Calvin. Tous les autres paraissent petits à côté de lui. La question essentielle pour
1231 Tous les autres paraissent petits à côté de lui. La question essentielle pour Kierkegaard était : Comment deviendrai-je c
1232 l un protestant pouvait trouver pareille formule. Le héros de la foi, Kierkegaard, « l’Isolé », n’a plus rien en lui ni de
1233 ant pouvait trouver pareille formule. Le héros de la foi, Kierkegaard, « l’Isolé », n’a plus rien en lui ni de Faust, ni d
1234 eille formule. Le héros de la foi, Kierkegaard, «  l’ Isolé », n’a plus rien en lui ni de Faust, ni du Caïn de Byron, il a d
1235 ui ni de Faust, ni du Caïn de Byron, il a dépassé le romantisme. Ou plutôt, le romantisme fut la jeunesse, le passé de « l
1236 de Byron, il a dépassé le romantisme. Ou plutôt, le romantisme fut la jeunesse, le passé de « l’Isolé ». Et l’expression
1237 passé le romantisme. Ou plutôt, le romantisme fut la jeunesse, le passé de « l’Isolé ». Et l’expression la plus caractéris
1238 ntisme. Ou plutôt, le romantisme fut la jeunesse, le passé de « l’Isolé ». Et l’expression la plus caractéristique de ce n
1239 tôt, le romantisme fut la jeunesse, le passé de «  l’ Isolé ». Et l’expression la plus caractéristique de ce nouvel homme, q
1240 isme fut la jeunesse, le passé de « l’Isolé ». Et l’ expression la plus caractéristique de ce nouvel homme, qui a dépassé l
1241 eunesse, le passé de « l’Isolé ». Et l’expression la plus caractéristique de ce nouvel homme, qui a dépassé le romantisme,
1242 caractéristique de ce nouvel homme, qui a dépassé le romantisme, est la nouvelle psychologie. L’œuvre la plus profonde et
1243 ce nouvel homme, qui a dépassé le romantisme, est la nouvelle psychologie. L’œuvre la plus profonde et la plus originale d
1244 passé le romantisme, est la nouvelle psychologie. L’ œuvre la plus profonde et la plus originale de Kierkegaard est sa Psyc
1245 romantisme, est la nouvelle psychologie. L’œuvre la plus profonde et la plus originale de Kierkegaard est sa Psychologie
1246 nouvelle psychologie. L’œuvre la plus profonde et la plus originale de Kierkegaard est sa Psychologie de l’Angoisse, à laq
1247 us originale de Kierkegaard est sa Psychologie de l’ Angoisse, à laquelle on ne peut trouver d’analogie que chez Dostoïevsk
1248 rchent de pair et aucun autre esprit du siècle ne les dépasse. On peut déplorer qu’une œuvre de cette envergure ait pénétr
1249 tte envergure ait pénétré d’abord en France, sous les espèces du fragment le moins caractéristique de Kierkegaard : Le Jour
1250 é d’abord en France, sous les espèces du fragment le moins caractéristique de Kierkegaard : Le Journal du séducteur (Stock
1251 ragment le moins caractéristique de Kierkegaard : Le Journal du séducteur (Stock éd.). Kierkegaard lui-même avait exprimé
1252 r (Stock éd.). Kierkegaard lui-même avait exprimé le souhait formel que l’on n’ouvrît pas par ce roman la série de traduct
1253 aard lui-même avait exprimé le souhait formel que l’ on n’ouvrît pas par ce roman la série de traductions de ses livres. Ma
1254 souhait formel que l’on n’ouvrît pas par ce roman la série de traductions de ses livres. Mais ce Journal, s’il est l’œuvre
1255 ductions de ses livres. Mais ce Journal, s’il est l’ œuvre la moins forte du Danois, n’en est pas moins, dans son dosage pr
1256 de ses livres. Mais ce Journal, s’il est l’œuvre la moins forte du Danois, n’en est pas moins, dans son dosage pré-gidien
1257 l s’agit maintenant de nous révéler ce « héros de la foi », ce maître de la pensée chrétienne tragique, paradoxale et viru
1258 nous révéler ce « héros de la foi », ce maître de la pensée chrétienne tragique, paradoxale et virulente. Qu’une telle œuv
1259 œuvre commence son action en France au moment où l’ intérêt passionné de beaucoup se porte à la rencontre du message de Ka
1260 ent où l’intérêt passionné de beaucoup se porte à la rencontre du message de Karl Barth, disciple fervent de Kierkegaard,
1261 fervent de Kierkegaard, — nous pouvons y attacher la valeur d’un signe. Kierkegaard sera pour beaucoup d’esprits en quête
1262 sera pour beaucoup d’esprits en quête d’absolus, le maître que fut Nietzsche pour leurs aînés. Il n’est pas sûr que les «
1263 Nietzsche pour leurs aînés. Il n’est pas sûr que les « religions » y gagnent, mais la foi, certainement. Et « l’honneur de
1264 est pas sûr que les « religions » y gagnent, mais la foi, certainement. Et « l’honneur de Dieu ». 21. Aux Éditions de la
1265 ions » y gagnent, mais la foi, certainement. Et «  l’ honneur de Dieu ». 21. Aux Éditions de la Nouvelle Revue française
1266 . Et « l’honneur de Dieu ». 21. Aux Éditions de la Nouvelle Revue française , chez Fourcade et aux Éditions « Je sers »
9 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Littérature alpestre (juillet 1931)
1267 pour mériter quelques instants de plénitude dans la contemplation de sommets assez rares. Personne, à notre connaissance,
1268 e notre histoire littéraire : pour nos critiques, les Alpes n’avaient pas d’histoire. Enfin, voici ce livre, point trop vol
1269 udition très aérée. Comment ne point partager, en le lisant, ce goût qu’avait le vieux Goethe pour les ouvrages documentai
1270 ne point partager, en le lisant, ce goût qu’avait le vieux Goethe pour les ouvrages documentaires, pleins d’analyses préci
1271 le lisant, ce goût qu’avait le vieux Goethe pour les ouvrages documentaires, pleins d’analyses précises, de citations, de
1272 tions, de planches hors-texte ? C’est un repos de l’ esprit en même temps qu’une nourriture pour l’imagination. On goûtera
1273 de l’esprit en même temps qu’une nourriture pour l’ imagination. On goûtera les citations nombreuses que l’auteur a su int
1274 qu’une nourriture pour l’imagination. On goûtera les citations nombreuses que l’auteur a su introduire et commenter avec l
1275 gination. On goûtera les citations nombreuses que l’ auteur a su introduire et commenter avec la discrétion et souvent l’ir
1276 es que l’auteur a su introduire et commenter avec la discrétion et souvent l’ironie légère qui conviennent. Plus encore qu
1277 oduire et commenter avec la discrétion et souvent l’ ironie légère qui conviennent. Plus encore que par leur valeur proprem
1278 nt intéressantes par tout ce qu’elles révèlent de la mentalité des écrivains et des peuples dont elles émanent. La montagn
1279 des écrivains et des peuples dont elles émanent. La montagne est un merveilleux réactif, au contact duquel certains trait
1280 vue et significative. On regrettera seulement que l’ auteur ait dû se borner à confronter les réactions anglaises et frança
1281 lement que l’auteur ait dû se borner à confronter les réactions anglaises et françaises. La réaction allemande eût apporté
1282 confronter les réactions anglaises et françaises. La réaction allemande eût apporté un élément important et radicalement d
1283 ant et radicalement différent. Nous essaierons de l’ esquisser plus loin. ⁂ Ce qui frappe dès l’abord, c’est la pauvreté de
1284 ons de l’esquisser plus loin. ⁂ Ce qui frappe dès l’ abord, c’est la pauvreté de la littérature alpestre en France. À part
1285 ser plus loin. ⁂ Ce qui frappe dès l’abord, c’est la pauvreté de la littérature alpestre en France. À part Sénancour, aucu
1286 ⁂ Ce qui frappe dès l’abord, c’est la pauvreté de la littérature alpestre en France. À part Sénancour, aucun de nos écriva
1287 ancour, aucun de nos écrivains n’a su puiser dans le thème de la montagne une inspiration lyrique ou philosophique générat
1288 n de nos écrivains n’a su puiser dans le thème de la montagne une inspiration lyrique ou philosophique génératrice d’œuvre
1289 , à un Byron, à un Ruskin ? Chateaubriand, devant le Mont-Blanc, clame son horreur de tant de démesure, et ses description
1290 sure, et ses descriptions des Alpes constituent «  le plus violent réquisitoire qu’on ait jamais écrit contre elles ». Pour
1291 n ait jamais écrit contre elles ». Pour Rousseau, la montagne, c’est surtout le fond des vallées, — si l’on ose dire, — où
1292 lles ». Pour Rousseau, la montagne, c’est surtout le fond des vallées, — si l’on ose dire, — où il fait vivre d’imaginaire
1293 montagne, c’est surtout le fond des vallées, — si l’ on ose dire, — où il fait vivre d’imaginaires bons sauvages. Et pour l
1294 l fait vivre d’imaginaires bons sauvages. Et pour la grande majorité de ceux qui, après lui, feront intervenir la montagne
1295 ajorité de ceux qui, après lui, feront intervenir la montagne dans leurs œuvres, elle n’est guère qu’un décor conventionne
1296 tout fait, dont on agrémente des digressions sur l’ ordre social. Mlle Engel constate que « les plus grands poètes françai
1297 ons sur l’ordre social. Mlle Engel constate que «  les plus grands poètes français du xixe siècle ont échoué dans leur inte
1298 tagnes. Ils ont tous étudié presque exclusivement l’ âme humaine. La montagne qui repousse l’homme, la montagne farouche, e
1299 tous étudié presque exclusivement l’âme humaine. La montagne qui repousse l’homme, la montagne farouche, effrayante, leur
1300 usivement l’âme humaine. La montagne qui repousse l’ homme, la montagne farouche, effrayante, leur a semblé incompréhensibl
1301 l’âme humaine. La montagne qui repousse l’homme, la montagne farouche, effrayante, leur a semblé incompréhensible ». C’es
1302 ante, leur a semblé incompréhensible ». C’est que le mystère des choses les attire moins que le jeu des passions et des in
1303 compréhensible ». C’est que le mystère des choses les attire moins que le jeu des passions et des intérêts sociaux. Or, en
1304 st que le mystère des choses les attire moins que le jeu des passions et des intérêts sociaux. Or, en face de la montagne,
1305 passions et des intérêts sociaux. Or, en face de la montagne, l’homme est seul. Sénancour, c’est tout autre chose. Lui, c
1306 des intérêts sociaux. Or, en face de la montagne, l’ homme est seul. Sénancour, c’est tout autre chose. Lui, cherche un ref
1307 tout autre chose. Lui, cherche un refuge. « Dans l’ isolement des cimes ou des hautes vallées, seul avec la nature dans un
1308 lement des cimes ou des hautes vallées, seul avec la nature dans une sorte d’ivresse morne, il parvenait à oublier la fuit
1309 une sorte d’ivresse morne, il parvenait à oublier la fuite des heures et de la vie : l’existence perd sa fièvre au cours d
1310 il parvenait à oublier la fuite des heures et de la vie : l’existence perd sa fièvre au cours des longues heures silencie
1311 nait à oublier la fuite des heures et de la vie : l’ existence perd sa fièvre au cours des longues heures silencieuses qui
1312 heures silencieuses qui s’égrènent une à une dans les solitudes de rocs et de glace. » Sénancour éprouvait ce qu’il appela,
1313 éprouvait ce qu’il appela, d’un mot admirable, «  la lenteur des choses ». C’est qu’il a pénétré dans ces solitudes que le
1314 s ». C’est qu’il a pénétré dans ces solitudes que les autres contemplaient d’en bas ; non pas en curieux : en mystique. Par
1315 rendra pas un moderne ; mais elle est unique dans la littérature française du xixe . La littérature anglaise, au contraire
1316 st unique dans la littérature française du xixe . La littérature anglaise, au contraire, a donné toute une suite de chefs-
1317  Toute une tradition d’individualisme lui frayait la voie », note fort justement notre auteur. L’homme seul en face des so
1318 yait la voie », note fort justement notre auteur. L’ homme seul en face des sommets, qu’écrira-t-il ? — Shelley : « L’immen
1319 face des sommets, qu’écrira-t-il ? — Shelley : «  L’ immensité de ces sommets aériens excite, lorsqu’ils frappent la vue, u
1320 e ces sommets aériens excite, lorsqu’ils frappent la vue, un sentiment d’extase émerveillée auquel la folie n’est pas étra
1321 la vue, un sentiment d’extase émerveillée auquel la folie n’est pas étrangère. » — « Cependant, le Mont-Blanc luit là-hau
1322 el la folie n’est pas étrangère. » — « Cependant, le Mont-Blanc luit là-haut ; la Puissance est là, la tranquille et solen
1323 re. » — « Cependant, le Mont-Blanc luit là-haut ; la Puissance est là, la tranquille et solennelle Puissance aux mille asp
1324 le Mont-Blanc luit là-haut ; la Puissance est là, la tranquille et solennelle Puissance aux mille aspects, aux mille bruit
1325 mille aspects, aux mille bruits. » Ce n’est plus l’ homme que ces poètes viennent interroger sur les hauteurs, mais une so
1326 us l’homme que ces poètes viennent interroger sur les hauteurs, mais une sombre et surhumaine fatalité (Byron), ou « la sec
1327 s une sombre et surhumaine fatalité (Byron), ou «  la secrète force des choses » (Shelley), ou encore (Wordsworth) « les ty
1328 des choses » (Shelley), ou encore (Wordsworth) «  les types et les symboles de l’Éternité ». Du panthéisme d’un Shelley au
1329 (Shelley), ou encore (Wordsworth) « les types et les symboles de l’Éternité ». Du panthéisme d’un Shelley au mysticisme d’
1330 ncore (Wordsworth) « les types et les symboles de l’ Éternité ». Du panthéisme d’un Shelley au mysticisme d’un Ruskin, c’es
1331 st un cantique d’adoration spirituelle que chante la poésie anglaise en de véritables « élévations ». Mais tout ce lyrisme
1332 s dépourvu de grandiloquence ni de pieuse fadeur. La montagne, ne serait-elle jamais qu’un écrasant symbole de l’éternité 
1333 , ne serait-elle jamais qu’un écrasant symbole de l’ éternité ? — C’est aussi quelque chose qui devrait être surmonté, nous
1334 nte, aux résonances vraiment altières, celle-là : la voix de Nietzsche. ⁂ Ici, nous changeons de monde. À vrai dire, nous
1335 us changeons de monde. À vrai dire, nous quittons la littérature. « Celui qui sait respirer l’atmosphère de mon œuvre sait
1336 uittons la littérature. « Celui qui sait respirer l’ atmosphère de mon œuvre sait que c’est une atmosphère des hauteurs, qu
1337 e sait que c’est une atmosphère des hauteurs, que l’ air y est vif. Il faut être créé pour cette atmosphère, sinon l’on ris
1338 f. Il faut être créé pour cette atmosphère, sinon l’ on risque beaucoup de prendre froid. La glace est proche, la solitude
1339 ère, sinon l’on risque beaucoup de prendre froid. La glace est proche, la solitude énorme, mais voyez avec quelle tranquil
1340 e beaucoup de prendre froid. La glace est proche, la solitude énorme, mais voyez avec quelle tranquillité tout repose dans
1341 s voyez avec quelle tranquillité tout repose dans la lumière… » Vous avez reconnu ce ton souverain. Pour la première fois,
1342 reconnu ce ton souverain. Pour la première fois, le ton des hauteurs, le ton de celui qui les a conquises, physiquement a
1343 rain. Pour la première fois, le ton des hauteurs, le ton de celui qui les a conquises, physiquement aussi. Toute l’œuvre d
1344 re fois, le ton des hauteurs, le ton de celui qui les a conquises, physiquement aussi. Toute l’œuvre de Nietzsche est plein
1345 ui qui les a conquises, physiquement aussi. Toute l’ œuvre de Nietzsche est pleine de repères alpestres. « Comme ces vues p
1346 « Comme ces vues précises, aiguës, et qu’inspire l’ escarpement, nous changent des rêveries de Rousseau. Celui-ci se promè
1347 ne, l’autre escalade. Et comme elles s’opposent à la médiocre littérature qui transforme les sommets en images d’un Dieu v
1348 opposent à la médiocre littérature qui transforme les sommets en images d’un Dieu vertueux, ou en remparts de la liberté. L
1349 s en images d’un Dieu vertueux, ou en remparts de la liberté. La montagne n’est ni bienveillante ni maternelle ; elle pour
1350 d’un Dieu vertueux, ou en remparts de la liberté. La montagne n’est ni bienveillante ni maternelle ; elle poursuit une gra
1351 grandiose existence géologique sans rapport avec la nôtre. Les atomes que nous sommes peuvent trouver sur ses flancs l’oc
1352 existence géologique sans rapport avec la nôtre. Les atomes que nous sommes peuvent trouver sur ses flancs l’occasion d’un
1353 es que nous sommes peuvent trouver sur ses flancs l’ occasion d’une lutte… elle ignorera toujours ces victoires. » Nous emp
1354 el essai que Robert de Traz intitula Nietzsche et les hauteurs 23, et qui, posé en face du tableau franco-anglais, fournit
1355 -anglais, fournit un contraste de haut goût. Là, les montagnes se prêtaient successivement à des interprétations sociologi
1356 ssure), romanesques (Sterne, Toepffer), lyriques ( les Anglais). Ici, elles imposent une éthique. Là, elles prêtaient le rom
1357 , elles imposent une éthique. Là, elles prêtaient le romantisme de leur décor ; ici, par l’effort de discipline qu’elles e
1358 prêtaient le romantisme de leur décor ; ici, par l’ effort de discipline qu’elles exigent de qui veut les vaincre, c’est u
1359 effort de discipline qu’elles exigent de qui veut les vaincre, c’est un classicisme héroïque qu’elles inspirent. Ce thème é
1360 e thème éthique et philosophique paraît bien être le plus fécond et le plus adéquat à la nature alpestre. Il contient en p
1361 philosophique paraît bien être le plus fécond et le plus adéquat à la nature alpestre. Il contient en puissance toute une
1362 aît bien être le plus fécond et le plus adéquat à la nature alpestre. Il contient en puissance toute une morale de l’effor
1363 tre. Il contient en puissance toute une morale de l’ effort individuel et désintéressé, un constructivisme assez austère, m
1364 isme assez austère, mais stimulant, et qui mène à la joie… C’est un thème très « protestant ». Nietzsche l’a développé ave
1365 ie… C’est un thème très « protestant ». Nietzsche l’ a développé avec une ampleur inégalable : il y trouvait tous les symbo
1366 avec une ampleur inégalable : il y trouvait tous les symboles de la vie dangereuse, du risque, du triomphe conquis par la
1367 r inégalable : il y trouvait tous les symboles de la vie dangereuse, du risque, du triomphe conquis par la dureté. Mais l’
1368 ie dangereuse, du risque, du triomphe conquis par la dureté. Mais l’a-t-il épuisé ? Il y a depuis Nietzsche un style alpes
1369 u risque, du triomphe conquis par la dureté. Mais l’ a-t-il épuisé ? Il y a depuis Nietzsche un style alpestre dans la pens
1370  ? Il y a depuis Nietzsche un style alpestre dans la pensée. Ne pourrait-il pas informer d’autres pensées que les malédict
1371 Ne pourrait-il pas informer d’autres pensées que les malédictions de Zarathoustra ? Quand nos écrivains, lassés de la circ
1372 de Zarathoustra ? Quand nos écrivains, lassés de la circulation des idées citadines, éprouveront le besoin de créer vérit
1373 e la circulation des idées citadines, éprouveront le besoin de créer véritablement quelques valeurs nouvelles, il se peut
1374 tournent vers ces derniers symboles physiques de la solitude et de la grandeur, les Alpes. Nous souffrons d’une carence i
1375 derniers symboles physiques de la solitude et de la grandeur, les Alpes. Nous souffrons d’une carence inquiétante de l’hé
1376 boles physiques de la solitude et de la grandeur, les Alpes. Nous souffrons d’une carence inquiétante de l’héroïsme. Dans l
1377 lpes. Nous souffrons d’une carence inquiétante de l’ héroïsme. Dans la lutte pour la vie que nous impose le monde contempor
1378 ons d’une carence inquiétante de l’héroïsme. Dans la lutte pour la vie que nous impose le monde contemporain, c’est l’habi
1379 nce inquiétante de l’héroïsme. Dans la lutte pour la vie que nous impose le monde contemporain, c’est l’habileté qui triom
1380 roïsme. Dans la lutte pour la vie que nous impose le monde contemporain, c’est l’habileté qui triomphe, et non plus la « v
1381 vie que nous impose le monde contemporain, c’est l’ habileté qui triomphe, et non plus la « virtu ». L’héroïsme, au vieux
1382 orain, c’est l’habileté qui triomphe, et non plus la « virtu ». L’héroïsme, au vieux sens du mot, ne trouve plus où s’exer
1383 ’habileté qui triomphe, et non plus la « virtu ». L’ héroïsme, au vieux sens du mot, ne trouve plus où s’exercer. Et ce n’e
1384 uère qu’au plus obscur de certains cœurs, et dans le secret de certains renoncements, que le regard spirituel saurait enco
1385 , et dans le secret de certains renoncements, que le regard spirituel saurait encore en déceler l’équivalent. Peut-être le
1386 que le regard spirituel saurait encore en déceler l’ équivalent. Peut-être le goût du sport trahit-il la nostalgie d’une vi
1387 saurait encore en déceler l’équivalent. Peut-être le goût du sport trahit-il la nostalgie d’une vie qui comporterait des r
1388 ’équivalent. Peut-être le goût du sport trahit-il la nostalgie d’une vie qui comporterait des risques extérieurs. Mais c’e
1389 ntenter à bon marché, et personne ne croit plus à la vertu de simulacres à ce point galvaudés. (Un Montherlant lui-même, r
1390 t galvaudés. (Un Montherlant lui-même, récemment, le confessait.) Deux chances sont encore offertes aux amateurs de risque
1391 e offertes aux amateurs de risques authentiques : l’ aviation et l’alpinisme. On commence à nous donner quelques « romans d
1392 amateurs de risques authentiques : l’aviation et l’ alpinisme. On commence à nous donner quelques « romans de l’air », et
1393 e. On commence à nous donner quelques « romans de l’ air », et certains sont remarquables. Se trouvera-t-il un romancier po
1394 s. Se trouvera-t-il un romancier pour animer dans le décor des « hauts lieux » autre chose qu’une intrigue de palaces ?
1395 » autre chose qu’une intrigue de palaces ? 22. La Littérature alpestre en France et en Angleterre, aux xviiie et xixe
10 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Avant l’Aube, par Kagawa (septembre 1931)
1396 Avant l’ Aube, par Kagawa (septembre 1931)l m Dire de ce livre qu’il ne ress
1397 livre entièrement simple qui nous introduit dans la connaissance de la misère, et par là même nous fait sentir combien no
1398 simple qui nous introduit dans la connaissance de la misère, et par là même nous fait sentir combien nous sommes mesquins,
1399 itables et sans grandeur. Peut-être, se dit-on en le fermant, est-il réellement impossible à une âme chrétienne d’atteindr
1400 ement impossible à une âme chrétienne d’atteindre la grandeur morale si elle n’a pas connu, ne fût-ce que par sa puissance
1401 nnu, ne fût-ce que par sa puissance de sympathie, la misère physique et matérielle du monde où nous vivons. C’est un terri
1402 ir pratiquement abandonné à une doctrine de haine le sort de ceux que le Christ aima, parce que leur dénuement était ce qu
1403 donné à une doctrine de haine le sort de ceux que le Christ aima, parce que leur dénuement était ce qu’il y avait au monde
1404 y avait au monde, de plus proche de sa grandeur. L’ existence et l’action de Kagawa, telles qu’il les raconte dans ces deu
1405 de, de plus proche de sa grandeur. L’existence et l’ action de Kagawa, telles qu’il les raconte dans ces deux volumes, témo
1406 . L’existence et l’action de Kagawa, telles qu’il les raconte dans ces deux volumes, témoignent que l’amour chrétien peut e
1407 les raconte dans ces deux volumes, témoignent que l’ amour chrétien peut encore aujourd’hui pénétrer un monde revendiqué pa
1408 core aujourd’hui pénétrer un monde revendiqué par le communisme, comme son bien propre. Mais il n’y a pas là de quoi nous
1409 e. Mais il n’y a pas là de quoi nous rassurer. Si la vie de Kagawa glorifie l’Évangile, elle accuse formellement la grande
1410 quoi nous rassurer. Si la vie de Kagawa glorifie l’ Évangile, elle accuse formellement la grande majorité des chrétiens. T
1411 awa glorifie l’Évangile, elle accuse formellement la grande majorité des chrétiens. Tant mieux si ce livre nous passionne.
1412 sionne. Il faudrait surtout qu’il nous trouble. ⁂ L’ autobiographie de Toyohiko Kagawa, publiée au Japon sous le titre d’Au
1413 graphie de Toyohiko Kagawa, publiée au Japon sous le titre d’Au-delà de la ligne de la mort, en Amérique, en Angleterre, e
1414 gawa, publiée au Japon sous le titre d’Au-delà de la ligne de la mort, en Amérique, en Angleterre, en Allemagne, et en Fra
1415 e au Japon sous le titre d’Au-delà de la ligne de la mort, en Amérique, en Angleterre, en Allemagne, et en France, sous ce
1416 e, en Allemagne, et en France, sous celui d’Avant l’ Aube, est un des livres les plus significatifs de ce temps. Non pas qu
1417 nce, sous celui d’Avant l’Aube, est un des livres les plus significatifs de ce temps. Non pas que nous manquions de témoign
1418 ps. Non pas que nous manquions de témoignages sur les conditions d’existence du prolétariat mondial, ni que nous ignorions
1419 ions que notre siècle est celui des meneurs. Mais le rare, c’est qu’un de ces meneurs écrive un livre pour nous dire comme
1420 rs écrive un livre pour nous dire comment il voit le peuple, comment il l’aime, et quel est le secret de son autorité sur
1421 r nous dire comment il voit le peuple, comment il l’ aime, et quel est le secret de son autorité sur lui. L’état d’esprit d
1422 il voit le peuple, comment il l’aime, et quel est le secret de son autorité sur lui. L’état d’esprit de l’homme d’action s
1423 e, et quel est le secret de son autorité sur lui. L’ état d’esprit de l’homme d’action s’accommode rarement d’une réflexion
1424 ecret de son autorité sur lui. L’état d’esprit de l’ homme d’action s’accommode rarement d’une réflexion impartiale et d’un
1425 ersonnels, affectifs, voire religieux, qui sont à l’ origine de son entreprise. C’est même un des malheurs de notre temps,
1426 e. C’est même un des malheurs de notre temps, que l’ action devenue trop rapide suppose une cécité partielle chez ceux qui
1427 dans une vision du monde globale et cohérente, à le juger religieusement par exemple. Que l’on songe à l’œuvre d’un Ford,
1428 rente, à le juger religieusement par exemple. Que l’ on songe à l’œuvre d’un Ford, ou à celle de presque tous nos hommes d’
1429 uger religieusement par exemple. Que l’on songe à l’ œuvre d’un Ford, ou à celle de presque tous nos hommes d’État. Le priv
1430 rd, ou à celle de presque tous nos hommes d’État. Le privilège admirable de Kagawa, c’est qu’il poursuit son action en ple
1431 ec sa foi chrétienne. Il peut livrer sans crainte le secret d’une telle action ; sans crainte et sans vanité non plus, car
1432 çaises ou suisses nous avaient appris à connaître les résultats considérables de l’œuvre sociale, politique et religieuse s
1433 appris à connaître les résultats considérables de l’ œuvre sociale, politique et religieuse suscitée par Kagawa. Nous savio
1434 asteur d’une petite paroisse presbytérienne était le chef du Jeune Japon, l’initiateur de réformes de grande envergure, co
1435 isse presbytérienne était le chef du Jeune Japon, l’ initiateur de réformes de grande envergure, commencées dans les bas-fo
1436 de réformes de grande envergure, commencées dans les bas-fonds de la ville de Kobé et peu à peu élargies à tout ce vaste e
1437 rande envergure, commencées dans les bas-fonds de la ville de Kobé et peu à peu élargies à tout ce vaste empire moderne si
1438 ce vaste empire moderne si rapidement envahi par la civilisation d’une Europe dont il rejette la religion24. Nous savions
1439 par la civilisation d’une Europe dont il rejette la religion24. Nous savions aussi que ce leader social, cet économiste e
1440 doublaient d’un écrivain extrêmement fécond, dont l’ autobiographie en particulier avait atteint des tirages sans précédent
1441 rer en contact personnel avec cette œuvre : Avant l’ Aube comble cette attente, mais elle en fait naître une nouvelle. C’es
1442 n fait naître une nouvelle. C’est, en effet, sous la forme d’un roman dont le héros, Eiichi, est évidemment l’auteur lui-m
1443 e. C’est, en effet, sous la forme d’un roman dont le héros, Eiichi, est évidemment l’auteur lui-même, le récit de l’adoles
1444 d’un roman dont le héros, Eiichi, est évidemment l’ auteur lui-même, le récit de l’adolescence et de la jeunesse de notre
1445 héros, Eiichi, est évidemment l’auteur lui-même, le récit de l’adolescence et de la jeunesse de notre héros ; mais ce réc
1446 hi, est évidemment l’auteur lui-même, le récit de l’ adolescence et de la jeunesse de notre héros ; mais ce récit prend fin
1447 ’auteur lui-même, le récit de l’adolescence et de la jeunesse de notre héros ; mais ce récit prend fin au moment où Kagawa
1448 récit prend fin au moment où Kagawa débouche dans la vie publique et politique. Espérons qu’une biographie complète suivra
1449 dire passionnante, et qui nous fait pénétrer dans l’ intimité d’une vie, aux sources mêmes de ses déterminations. ⁂ Ce qui
1450 . ⁂ Ce qui frappe, dès les premières pages, c’est l’ extrême minutie du récit. Les auteurs qui écrivent leurs mémoires s’at
1451 remières pages, c’est l’extrême minutie du récit. Les auteurs qui écrivent leurs mémoires s’attachent d’ordinaire aux faits
1452 uèrent leur vie ; ils négligent volontiers ce qui les rend semblables au commun des mortels ; bref, plus ou moins inconscie
1453 surtout dans le premier volume, nous assistons à l’ existence la plus quotidienne d’Eiichi, à ces mille petites difficulté
1454 s le premier volume, nous assistons à l’existence la plus quotidienne d’Eiichi, à ces mille petites difficultés précises e
1455 nts de doute, de désir ou d’ennui qui constituent la trame réelle de notre activité et qui différencient radicalement notr
1456 ie d’un conte de fées. Il n’y a là, de la part de l’ auteur, nul parti pris de « réalisme » littéraire, mais bien le signe
1457 parti pris de « réalisme » littéraire, mais bien le signe d’une absence d’hypocrisie tout à fait insolite, et qui dans ce
1458 maints lecteurs. Kagawa ne « décolle » jamais de la réalité psychologique et matérielle, et c’est par là que dans sa simp
1459 isent une vérité vécue et particulière. Telle est la certitude qui se dégage lentement d’une profusion peu commune de peti
1460 criptions des lieux où ils vivent. C’est dire que l’ œuvre mérite l’effort d’attention soutenue que plusieurs chapitres du
1461 ieux où ils vivent. C’est dire que l’œuvre mérite l’ effort d’attention soutenue que plusieurs chapitres du premier tome ri
1462 ser, par une multiplicité de notations touchant à la monotonie. Au reste, à mesure qu’on avance, l’on comprend mieux les r
1463 à la monotonie. Au reste, à mesure qu’on avance, l’ on comprend mieux les raisons de la popularité d’une telle œuvre : c’e
1464 reste, à mesure qu’on avance, l’on comprend mieux les raisons de la popularité d’une telle œuvre : c’est toute la vie du Ja
1465 qu’on avance, l’on comprend mieux les raisons de la popularité d’une telle œuvre : c’est toute la vie du Japon actuel qu’
1466 de la popularité d’une telle œuvre : c’est toute la vie du Japon actuel qu’elle concrétise sous nos yeux. Certes, ce n’es
1467 awa : Il appuya son front chaud et malade contre la fenêtre, ferma les yeux et somnola. Le train faisait un bruit épouvan
1468 on front chaud et malade contre la fenêtre, ferma les yeux et somnola. Le train faisait un bruit épouvantable dans sa cours
1469 ade contre la fenêtre, ferma les yeux et somnola. Le train faisait un bruit épouvantable dans sa course. Il pensait que c’
1470 course. Il pensait que c’eût été bien agréable si le wagon entier eût été de verre. À partir de Tennoji, le train s’arrêta
1471 gon entier eût été de verre. À partir de Tennoji, le train s’arrêta à un nombre incalculable de stations. Regardant par la
1472 un nombre incalculable de stations. Regardant par la fenêtre, il vit d’affreux noms de gares tels que Tenman, Tamazukuri,
1473 res tels que Tenman, Tamazukuri, tout à fait dans le genre d’Osaka, écrits sur des lampes carrées. Entre les stations, des
1474 nre d’Osaka, écrits sur des lampes carrées. Entre les stations, des étendues de toits de tuiles, avec de la fumée noire qui
1475 tations, des étendues de toits de tuiles, avec de la fumée noire qui s’en échappait. Osaka, la nuit, avait un air étrange,
1476 avec de la fumée noire qui s’en échappait. Osaka, la nuit, avait un air étrange, quelque chose comme un océan battu par la
1477 r étrange, quelque chose comme un océan battu par la tempête. Tandis que le train longeait les bords de la rivière Yodogaw
1478 e comme un océan battu par la tempête. Tandis que le train longeait les bords de la rivière Yodogawa, il se rappela soudai
1479 attu par la tempête. Tandis que le train longeait les bords de la rivière Yodogawa, il se rappela soudain que c’était un en
1480 empête. Tandis que le train longeait les bords de la rivière Yodogawa, il se rappela soudain que c’était un endroit célèbr
1481 ppela soudain que c’était un endroit célèbre pour les suicides, et qu’il avait vu un jour, au théâtre, à Kobé, le drame du
1482 s, et qu’il avait vu un jour, au théâtre, à Kobé, le drame du suicide de Akaneya et Sankatsu, sa bien-aimée. Suicide et Os
1483 neya et Sankatsu, sa bien-aimée. Suicide et Osaka la nuit ! Il ne comprenait pas pourquoi ces deux mots lui semblaient avo
1484 es et atroces. Quel horrible endroit, cet Osaka ! Les endroits surpeuplés sont terribles ! Nous trouvons d’abord Eiichi Ni
1485 terribles ! Nous trouvons d’abord Eiichi Niimi à l’ Université de Meiji Gakuin, près de Tokyo, dans une atmosphère de disc
1486 e de discussions philosophiques fort curieuse, où les doctrines bouddhistes, chrétiennes, matérialistes et socialistes s’op
1487 ialistes s’opposent dans des termes inusités pour l’ Occident, mais sont oubliées, comme partout, dès qu’il s’agit d’embarr
1488 mauvaises nouvelles qu’on reçoit de sa famille. À la suite d’une discussion vive avec des étudiants chrétiens au sujet d’u
1489 urs camarades, Eiichi se décide soudain à quitter l’ Université. Ce passage nous le montre déjà tout entier : subit et abso
1490 e soudain à quitter l’Université. Ce passage nous le montre déjà tout entier : subit et absolu dans ses déterminations, fa
1491 matériels. Ses larmes augmentèrent en pensant à la pauvreté de sentiments des chrétiens ; il pensait aussi que lui-même,
1492 des chrétiens ; il pensait aussi que lui-même, à la fin du mois, devrait gagner sa pension et son écolage ; il pensait au
1493 ots. Soudain, il prit une décision. Il quitterait l’ Université pour se plonger dans la vie active et mettre à l’épreuve so
1494 . Il quitterait l’Université pour se plonger dans la vie active et mettre à l’épreuve son grand idéal. Que pouvait-il y av
1495 té pour se plonger dans la vie active et mettre à l’ épreuve son grand idéal. Que pouvait-il y avoir de plus noble que de p
1496 pouvait-il y avoir de plus noble que de partager la vie quotidienne des gens de la campagne. Il serait auprès de sa sœur,
1497 le que de partager la vie quotidienne des gens de la campagne. Il serait auprès de sa sœur, que personne n’aimait. Il déci
1498 ersonne n’aimait. Il décida de retourner chez lui la nuit même, et après s’être demandé avec quelque anxiété comment il fe
1499 nes terribles avec son père, riche commerçant que l’ on accuse de malhonnêteté, caractère impérieux, esprit étroit, et qui
1500 esprit étroit, et qui défend avec violence contre les idées subversives de son fils un ordre social dont l’avantage évident
1501 dées subversives de son fils un ordre social dont l’ avantage évident est de le mettre à l’abri de la véritable justice. Il
1502 ls un ordre social dont l’avantage évident est de le mettre à l’abri de la véritable justice. Il finit par mettre Eiichi à
1503 social dont l’avantage évident est de le mettre à l’ abri de la véritable justice. Il finit par mettre Eiichi à la porte. I
1504 t l’avantage évident est de le mettre à l’abri de la véritable justice. Il finit par mettre Eiichi à la porte. Il lui rest
1505 a véritable justice. Il finit par mettre Eiichi à la porte. Il lui reste la ressource de se faire instituteur. Il assiste
1506 finit par mettre Eiichi à la porte. Il lui reste la ressource de se faire instituteur. Il assiste un soir, par hasard, à
1507 , par hasard, à une réunion d’évangélisation dont la description serait tout entière à citer, dans son inénarrable et crue
1508 nte par moments. C’est là qu’il retrouve Tsuruko, la belle jeune fille qu’il aimait dans son adolescence. Et l’idylle pass
1509 jeune fille qu’il aimait dans son adolescence. Et l’ idylle passionnée se renoue, mais en même temps le drame s’éveille dan
1510 l’idylle passionnée se renoue, mais en même temps le drame s’éveille dans l’âme du jeune homme : comment concilier son bon
1511 enoue, mais en même temps le drame s’éveille dans l’ âme du jeune homme : comment concilier son bonheur personnel avec l’id
1512 me : comment concilier son bonheur personnel avec l’ idéal de rénovation sociale qu’il a conçu ? Et comment trouver le cour
1513 vation sociale qu’il a conçu ? Et comment trouver le courage de se donner à cet idéal, dont la réalisation pratique lui ré
1514 trouver le courage de se donner à cet idéal, dont la réalisation pratique lui répugne encore ? Il s’en rend compte lors de
1515 au plus vite de cet horrible endroit et de jeter les principes philanthropiques à tous les vents ; de rentrer bien vite da
1516 et de jeter les principes philanthropiques à tous les vents ; de rentrer bien vite dans sa maison garnie de belles nattes e
1517 te mêles de ces affaires, tu ne seras toi-même, à la fin, pas bien éloigné du vulgaire. » Mais au même moment une autre vo
1518 même moment une autre voix intérieure disait : «  La bonté est le sel de la vie. L’organisme social demande des sacrifices
1519 une autre voix intérieure disait : « La bonté est le sel de la vie. L’organisme social demande des sacrifices pour l’amour
1520 voix intérieure disait : « La bonté est le sel de la vie. L’organisme social demande des sacrifices pour l’amour des vivan
1521 érieure disait : « La bonté est le sel de la vie. L’ organisme social demande des sacrifices pour l’amour des vivants. » L
1522 e. L’organisme social demande des sacrifices pour l’ amour des vivants. » Le conflit intérieur s’intensifie bientôt jusqu’
1523 mande des sacrifices pour l’amour des vivants. » Le conflit intérieur s’intensifie bientôt jusqu’à provoquer en lui une s
1524 en lui une sorte de folie. Tsuruko est obligée de le quitter. Alors dans un accès de désespoir, il tente de mettre le feu
1525 rs dans un accès de désespoir, il tente de mettre le feu à sa maison. Il s’enfuit, et s’engage comme manœuvre dans les doc
1526 son. Il s’enfuit, et s’engage comme manœuvre dans les docks. La mort de son père l’oblige à en sortir, mais en même temps d
1527 nfuit, et s’engage comme manœuvre dans les docks. La mort de son père l’oblige à en sortir, mais en même temps décide de l
1528 omme manœuvre dans les docks. La mort de son père l’ oblige à en sortir, mais en même temps décide de l’orientation de sa v
1529 ’oblige à en sortir, mais en même temps décide de l’ orientation de sa vie : Il avait vu mourir Sanuki au logement ouvrier
1530 uki au logement ouvrier, et il ne pensait pas que la mort de son père fût particulièrement importante. Il avait appris qu’
1531 ut avoir une volonté de fer, lorsqu’on tombe dans la lie de la société. Le jour des funérailles, Eiichi essaya de garder t
1532 ne volonté de fer, lorsqu’on tombe dans la lie de la société. Le jour des funérailles, Eiichi essaya de garder tout son sa
1533 e fer, lorsqu’on tombe dans la lie de la société. Le jour des funérailles, Eiichi essaya de garder tout son sang-froid, ma
1534 oid, mais au cimetière du Temple de Zuigan, quand les prêtres de douze temples et Eiichi à leur suite entourèrent le cercue
1535 douze temples et Eiichi à leur suite entourèrent le cercueil, il ne put retenir ses larmes. Tandis qu’il marchait en sile
1536 s. Tandis qu’il marchait en silence à la suite de la procession funèbre, toutes ses relations avec son père se déroulèrent
1537 es yeux. Au-delà des sentiments de Hamlet, voyant la procession funèbre d’Ophélie, pensa Eiichi, il y avait la redoutable
1538 ssion funèbre d’Ophélie, pensa Eiichi, il y avait la redoutable réalité, et il pleura de crainte et de tristesse. Tout ins
1539 pleura de crainte et de tristesse. Tout inspirait le respect : le bruit discordant des cymbales, les psalmodies des écritu
1540 inte et de tristesse. Tout inspirait le respect : le bruit discordant des cymbales, les psalmodies des écritures. En écout
1541 it le respect : le bruit discordant des cymbales, les psalmodies des écritures. En écoutant la mystérieuse musique funèbre,
1542 mbales, les psalmodies des écritures. En écoutant la mystérieuse musique funèbre, Eiichi prit une résolution. Désormais, r
1543 une résolution. Désormais, rompant tout lien avec le passé, comme on franchit le pas de la mort, il lutterait contre les c
1544 ompant tout lien avec le passé, comme on franchit le pas de la mort, il lutterait contre les conventions établies, les tra
1545 t lien avec le passé, comme on franchit le pas de la mort, il lutterait contre les conventions établies, les traditions et
1546 n franchit le pas de la mort, il lutterait contre les conventions établies, les traditions et les sophismes. Devant lui éta
1547 rt, il lutterait contre les conventions établies, les traditions et les sophismes. Devant lui était le monde : le monde, l’
1548 ontre les conventions établies, les traditions et les sophismes. Devant lui était le monde : le monde, l’énorme asile de fo
1549 les traditions et les sophismes. Devant lui était le monde : le monde, l’énorme asile de fous dont Eiichi avait parlé à so
1550 ons et les sophismes. Devant lui était le monde : le monde, l’énorme asile de fous dont Eiichi avait parlé à son père — mo
1551 sophismes. Devant lui était le monde : le monde, l’ énorme asile de fous dont Eiichi avait parlé à son père — mort mainten
1552 rlé à son père — mort maintenant —, tourmenté par l’ emprise du militarisme et du capitalisme ; un asile de fous qui s’éten
1553 italisme ; un asile de fous qui s’étend sur toute la terre. Sans se préoccuper si c’était le monde ou lui-même qui était f
1554 sur toute la terre. Sans se préoccuper si c’était le monde ou lui-même qui était fou, Eiichi décida que, de ce jour-là, il
1555 suicider. Mais un soir qu’il prêche au carrefour, la maladie qui depuis longtemps l’enfiévrait, le terrasse, dans la boue,
1556 che au carrefour, la maladie qui depuis longtemps l’ enfiévrait, le terrasse, dans la boue, sous la pluie. Il renaîtra bien
1557 ur, la maladie qui depuis longtemps l’enfiévrait, le terrasse, dans la boue, sous la pluie. Il renaîtra bientôt à la vie,
1558 depuis longtemps l’enfiévrait, le terrasse, dans la boue, sous la pluie. Il renaîtra bientôt à la vie, mais cette fois po
1559 mps l’enfiévrait, le terrasse, dans la boue, sous la pluie. Il renaîtra bientôt à la vie, mais cette fois pour se donner t
1560 ans la boue, sous la pluie. Il renaîtra bientôt à la vie, mais cette fois pour se donner tout entier à la misère des bas-f
1561 vie, mais cette fois pour se donner tout entier à la misère des bas-fonds de Kobé. Il fait siennes toutes les épreuves d’u
1562 ère des bas-fonds de Kobé. Il fait siennes toutes les épreuves d’un peuple misérable, des pires brutes qu’il recueille dans
1563 es, et vont jusqu’à lui tirer dessus, — ce qui ne l’ empêche pas de les reprendre ensuite, chez lui, car il professe avec f
1564 ’à lui tirer dessus, — ce qui ne l’empêche pas de les reprendre ensuite, chez lui, car il professe avec fanatisme la non-ré
1565 ensuite, chez lui, car il professe avec fanatisme la non-résistance au mal. Bientôt il prend figure de saint parmi le peup
1566 ce au mal. Bientôt il prend figure de saint parmi le peuple qui le respecte, l’exploite et subit l’empire de sa douceur. C
1567 ntôt il prend figure de saint parmi le peuple qui le respecte, l’exploite et subit l’empire de sa douceur. Cette deuxième
1568 figure de saint parmi le peuple qui le respecte, l’ exploite et subit l’empire de sa douceur. Cette deuxième partie de l’o
1569 mi le peuple qui le respecte, l’exploite et subit l’ empire de sa douceur. Cette deuxième partie de l’ouvrage est extraordi
1570 l’empire de sa douceur. Cette deuxième partie de l’ ouvrage est extraordinaire de vie et de pathétique, sobre et directe p
1571 pu lire de plus vécu sur ces milieux. Finalement, la police accuse Eiichi d’avoir prêté son appui à une grève, et le récit
1572 se Eiichi d’avoir prêté son appui à une grève, et le récit se termine par une scène entre le procureur et le prévenu, qui
1573 grève, et le récit se termine par une scène entre le procureur et le prévenu, qui vaut d’être citée : — Pourquoi me regar
1574 it se termine par une scène entre le procureur et le prévenu, qui vaut d’être citée : — Pourquoi me regardez-vous ainsi ?
1575 itée : — Pourquoi me regardez-vous ainsi ? tonna le Procureur, qui cherchait à intimider Eiichi. Eiichi garda le silence 
1576 r, qui cherchait à intimider Eiichi. Eiichi garda le silence ; il ne voulait pas se laisser aller à la colère comme le Pro
1577 le silence ; il ne voulait pas se laisser aller à la colère comme le Procureur. Au contraire, il en profita pour faire une
1578 ne voulait pas se laisser aller à la colère comme le Procureur. Au contraire, il en profita pour faire une étude psycholog
1579 r faire une étude psychologique, en observant sur le visage de celui-ci les expressions changeantes qu’y imprimait la pass
1580 hologique, en observant sur le visage de celui-ci les expressions changeantes qu’y imprimait la passion. Il lui semblait qu
1581 lui-ci les expressions changeantes qu’y imprimait la passion. Il lui semblait qu’il faisait une étude pratique de désordre
1582 était calme et loin d’être troublé. En regardant les choses de près, il conclut que la profession de procureur devait être
1583 . En regardant les choses de près, il conclut que la profession de procureur devait être vraiment bien désagréable, puisqu
1584 es. Pire que cela, elle portait à croire que tous les hommes sont coupables. Ceci acquit au Procureur toute la sympathie d’
1585 es sont coupables. Ceci acquit au Procureur toute la sympathie d’Eiichi… Si c’est à des tâches aussi inutiles que les proc
1586 ’Eiichi… Si c’est à des tâches aussi inutiles que les procureurs passent leur vie, pensait Eiichi, il est impossible de ne
1587 hi, il est impossible de ne pas leur témoigner de la sympathie. — Qu’est-ce que cela veut dire ? Pourquoi me regardez-vous
1588 e ? Pourquoi me regardez-vous aussi insolemment ? Le Procureur continuait à enrager ; sa figure se contractait et ses lèvr
1589 es étaient pâles. — Comment voulez-vous renverser l’ état social actuel, si ce n’est par une révolution ? Je vous demande d
1590 cinq moineaux sautaient de branche en branche sur le camphrier du jardin, joyeux et insouciants. Eiichi se demanda s’il y
1591 iichi se demanda s’il y avait des procureurs dans le monde des moineaux. Il se taisait, car il savait qu’il était inutile
1592 colère. Trois, quatre, cinq minutes s’écoulèrent. Le Procureur regardait distraitement son carnet de notes. Il tremblait j
1593 eut été impossible de dire lequel des deux était le juge de l’autre. Eiichi est provisoirement libéré. Les enfants des b
1594 ge de l’autre. Eiichi est provisoirement libéré. Les enfants des bas-fonds l’attendent à sa sortie, s’accrochent à ses man
1595 provisoirement libéré. Les enfants des bas-fonds l’ attendent à sa sortie, s’accrochent à ses manches et l’escortent avec
1596 endent à sa sortie, s’accrochent à ses manches et l’ escortent avec amour. ⁂ Avant de tirer les conclusions qu’impose cette
1597 nches et l’escortent avec amour. ⁂ Avant de tirer les conclusions qu’impose cette œuvre avec l’autorité d’une action, arrêt
1598 tirer les conclusions qu’impose cette œuvre avec l’ autorité d’une action, arrêtons-nous quelques instants devant la beaut
1599 ne action, arrêtons-nous quelques instants devant la beauté singulière de l’âme qu’elle révèle. Une âme qui sent tout avec
1600 quelques instants devant la beauté singulière de l’ âme qu’elle révèle. Une âme qui sent tout avec force et délicatesse, é
1601 sent tout avec force et délicatesse, éprouve tous les penchants humains, s’y soustrait quand il le faut pour mieux vivre et
1602 ous les penchants humains, s’y soustrait quand il le faut pour mieux vivre et n’en fait jamais une affaire. Homme terrible
1603 s tentations comme toutes naturelles, il surmonte les obstacles avec un contentement modeste et intelligent qui est plus ém
1604 volonté. Une âme à la fois sobre et extrême. Tous les excès lui sont possibles, en action, surtout dans le bien, dans la sa
1605 excès lui sont possibles, en action, surtout dans le bien, dans la sainteté, mais toujours ils s’accompagnent d’une mesure
1606 possibles, en action, surtout dans le bien, dans la sainteté, mais toujours ils s’accompagnent d’une mesure parfaite dans
1607 urs ils s’accompagnent d’une mesure parfaite dans l’ appréciation. Il semble qu’il n’ait aucune peine à se juger impartiale
1608 rendre intéressant à lui-même en poussant au noir le tableau, ou au contraire en s’excitant sur ses belles actions. Il les
1609 ontraire en s’excitant sur ses belles actions. Il les note, simplement, sans oublier d’indiquer ses hésitations, les traver
1610 plement, sans oublier d’indiquer ses hésitations, les traverses souvent fortuites qui les provoquent. Et pas trace d’ostent
1611 hésitations, les traverses souvent fortuites qui les provoquent. Et pas trace d’ostentation dans son humilité ou dans son
1612 milité ou dans son impartialité. C’est toujours à l’ effarante sincérité de ce récit qu’il faut revenir, si l’on veut d’un
1613 ante sincérité de ce récit qu’il faut revenir, si l’ on veut d’un mot le caractériser. Parmi les innombrables sentiments :
1614 e récit qu’il faut revenir, si l’on veut d’un mot le caractériser. Parmi les innombrables sentiments : doutes, passions, c
1615 nir, si l’on veut d’un mot le caractériser. Parmi les innombrables sentiments : doutes, passions, conflits qu’il met en jeu
1616 ssions, conflits qu’il met en jeu, c’est toujours l’ absence absolue d’hypocrisie de sa part qui donne aux choses les plus
1617 olue d’hypocrisie de sa part qui donne aux choses les plus banales une nouveauté frappante. Cela éclate particulièrement da
1618 auté frappante. Cela éclate particulièrement dans l’ analyse des motifs de ses actions journalières. Par là, il fait souven
1619 aux grands Russes, à Tolstoï surtout. Et par tous les revirements intérieurs de ses personnages également. Quant à lui, la
1620 rieurs de ses personnages également. Quant à lui, la complexité vivante de sa vie morale n’a d’égale que la violence de se
1621 mplexité vivante de sa vie morale n’a d’égale que la violence de ses réactions. Une fois, désespéré, — « heureusement, per
1622 , personne ne regardait, il se jeta par terre sur la route, criant à son corps : “Meurs !”, mais sans résultat ». C’est da
1623 . C’est dans un tel état de désespoir que soudain l’ amour de la vie revient s’emparer de lui et décide de sa conversion :
1624 s un tel état de désespoir que soudain l’amour de la vie revient s’emparer de lui et décide de sa conversion : Il se déci
1625 décida à tout accepter, oui, tout. Il accepterait la vie et toutes ses manifestations dans le temps. Il était ressuscité d
1626 epterait la vie et toutes ses manifestations dans le temps. Il était ressuscité de l’abîme du désespoir et revenu au monde
1627 ifestations dans le temps. Il était ressuscité de l’ abîme du désespoir et revenu au monde merveilleux. Il résolut de vivre
1628 re fermement dans sa sphère actuelle, enrichi par la force de la mort. Tout était merveilleux, la mort, lui-même, la terre
1629 dans sa sphère actuelle, enrichi par la force de la mort. Tout était merveilleux, la mort, lui-même, la terre, les pierre
1630 par la force de la mort. Tout était merveilleux, la mort, lui-même, la terre, les pierres, le sable, la nourriture, les f
1631 mort. Tout était merveilleux, la mort, lui-même, la terre, les pierres, le sable, la nourriture, les femmes, les filles,
1632 t était merveilleux, la mort, lui-même, la terre, les pierres, le sable, la nourriture, les femmes, les filles, les bateaux
1633 illeux, la mort, lui-même, la terre, les pierres, le sable, la nourriture, les femmes, les filles, les bateaux à vapeur, m
1634 mort, lui-même, la terre, les pierres, le sable, la nourriture, les femmes, les filles, les bateaux à vapeur, même le vid
1635 , la terre, les pierres, le sable, la nourriture, les femmes, les filles, les bateaux à vapeur, même le vide qu’il avait ch
1636 les pierres, le sable, la nourriture, les femmes, les filles, les bateaux à vapeur, même le vide qu’il avait cherché, étaie
1637 le sable, la nourriture, les femmes, les filles, les bateaux à vapeur, même le vide qu’il avait cherché, étaient merveille
1638 es femmes, les filles, les bateaux à vapeur, même le vide qu’il avait cherché, étaient merveilleux. Les couleurs, la lumiè
1639 le vide qu’il avait cherché, étaient merveilleux. Les couleurs, la lumière du soleil, les dessins, les roses, les lèvres ro
1640 avait cherché, étaient merveilleux. Les couleurs, la lumière du soleil, les dessins, les roses, les lèvres rouges des fill
1641 merveilleux. Les couleurs, la lumière du soleil, les dessins, les roses, les lèvres rouges des filles, tout était surprena
1642 Les couleurs, la lumière du soleil, les dessins, les roses, les lèvres rouges des filles, tout était surprenant, même le s
1643 rs, la lumière du soleil, les dessins, les roses, les lèvres rouges des filles, tout était surprenant, même le sang caillé,
1644 es rouges des filles, tout était surprenant, même le sang caillé, le péché et le cœur souillé, tout était étonnement. Il a
1645 lles, tout était surprenant, même le sang caillé, le péché et le cœur souillé, tout était étonnement. Il acceptait tout. I
1646 tait surprenant, même le sang caillé, le péché et le cœur souillé, tout était étonnement. Il acceptait tout. Il décida de
1647 ment, de prendre courage et de lutter bravement à l’ avenir, et pour cela il accepterait tout de l’existence. Il accepterai
1648 t à l’avenir, et pour cela il accepterait tout de l’ existence. Il accepterait aussi la religion avec le courage du suicide
1649 pterait tout de l’existence. Il accepterait aussi la religion avec le courage du suicide. Dans sa résolution, il se sentai
1650 ’existence. Il accepterait aussi la religion avec le courage du suicide. Dans sa résolution, il se sentait graduellement a
1651 ésolution, il se sentait graduellement attiré par le Christ. Il se disait que ce n’était pas dans la mer qu’il fallait se
1652 r le Christ. Il se disait que ce n’était pas dans la mer qu’il fallait se jeter, mais dans les merveilles du monde. Et voi
1653 pas dans la mer qu’il fallait se jeter, mais dans les merveilles du monde. Et voici que, le 14 février, il se décida à fair
1654 mais dans les merveilles du monde. Et voici que, le 14 février, il se décida à faire profession de disciple du Christ. P
1655 iple du Christ. Page étrange, en vérité, et dont l’ accent presque nietzschéen choquera peut-être des gens qui eussent pré
1656 n choquera peut-être des gens qui eussent préféré l’ habituelle effusion en patois de Chanaan. Mais ce qui me frappe ici, c
1657 Chanaan. Mais ce qui me frappe ici, c’est de voir le reste du chapitre consacré au récit des actes qu’immédiatement Eiichi
1658 n. En mystique véritable, il évite rigoureusement les expressions sentimentales ou rassurantes qui pourraient dépasser une
1659 ser une action immédiate ou voiler sa difficulté. Les rares allusions qu’il fait à sa vie spirituelle n’en sont que plus ém
1660 n’en sont que plus émouvantes : Un dimanche, sur les collines derrière Nunobiki, au milieu des arbres, à côté d’un ruissea
1661 sseau, il passa trois heures et demie à lire tout l’ Évangile selon saint Matthieu, du premier chapitre au dernier, priant
1662 e au dernier, priant continuellement pour obtenir la grâce de devenir capable de suivre Jésus. Une autre fois, à midi, il
1663 uivre Jésus. Une autre fois, à midi, il monta sur le sommet d’une montagne en face du mont Maya et pria Dieu de lui donner
1664 e du mont Maya et pria Dieu de lui donner Kobé et les bas-fonds. La nature, le sommeil et les enfants étaient ses meilleurs
1665 et pria Dieu de lui donner Kobé et les bas-fonds. La nature, le sommeil et les enfants étaient ses meilleurs réconforts.
1666 u de lui donner Kobé et les bas-fonds. La nature, le sommeil et les enfants étaient ses meilleurs réconforts. Comment et
1667 r Kobé et les bas-fonds. La nature, le sommeil et les enfants étaient ses meilleurs réconforts. Comment et par quoi mesure
1668 eilleurs réconforts. Comment et par quoi mesurer la valeur chrétienne d’une âme ? L’action même est souvent trompeuse. Ma
1669 par quoi mesurer la valeur chrétienne d’une âme ? L’ action même est souvent trompeuse. Mais la qualité du regard qu’un êtr
1670 e âme ? L’action même est souvent trompeuse. Mais la qualité du regard qu’un être pose sur ses semblables, tel est le sign
1671 egard qu’un être pose sur ses semblables, tel est le signe et la mesure certaine. Au cours d’un livre où il se peint, aux
1672 être pose sur ses semblables, tel est le signe et la mesure certaine. Au cours d’un livre où il se peint, aux prises avec
1673 d’un livre où il se peint, aux prises avec toutes les formes du mal, jamais vous ne surprendrez dans ses yeux rien du moral
1674 ivre une conclusion capitale qui, sans doute, fut l’ objet déterminant de son auteur. Elle concerne la question sociale. Il
1675 l’objet déterminant de son auteur. Elle concerne la question sociale. Il s’attache à cette expression un « ennui » qui se
1676 que notre paresse et notre lâcheté naturelles, et l’ incertitude qui est leur résultante. Quelques-uns s’en tirent en réfut
1677 résultante. Quelques-uns s’en tirent en réfutant le marxisme — c’est un jeu intellectuel — ou bien en critiquant les réfo
1678 c’est un jeu intellectuel — ou bien en critiquant les réformes socialistes — mais cela dispense-t-il de chercher d’autres s
1679 acceptent d’étudier à fond ces problèmes, ils ne les rendent, en général, guère attirants — (le devraient-ils ?) — ni même
1680 ls ne les rendent, en général, guère attirants — ( le devraient-ils ?) — ni même vivants — (ils le devraient.). Pour celui
1681 s — (le devraient-ils ?) — ni même vivants — (ils le devraient.). Pour celui qui referme le livre de Kagawa, une certitude
1682 nts — (ils le devraient.). Pour celui qui referme le livre de Kagawa, une certitude s’impose. Je la formulerai brièvement 
1683 me le livre de Kagawa, une certitude s’impose. Je la formulerai brièvement : Tant que l’on considère la « question » socia
1684 s’impose. Je la formulerai brièvement : Tant que l’ on considère la « question » sociale et que l’on en « discute », c’est
1685 a formulerai brièvement : Tant que l’on considère la « question » sociale et que l’on en « discute », c’est irritant, vain
1686 que l’on considère la « question » sociale et que l’ on en « discute », c’est irritant, vain et irréductible. Car la questi
1687 cute », c’est irritant, vain et irréductible. Car la question sociale n’admet peut-être de solution que personnelle. Il ne
1688 de solution que personnelle. Il ne s’agit plus de la poser, sur le plan intellectuel, pour les autres, mais de la résoudre
1689 plus de la poser, sur le plan intellectuel, pour les autres, mais de la résoudre d’abord pour son compte et par un acte in
1690 ur le plan intellectuel, pour les autres, mais de la résoudre d’abord pour son compte et par un acte intérieur contraignan
1691 eux d’un incroyant, ceci peut sembler vague. Mais le sens chrétien primitif n’est-il pas, avant tout, le sens de la pauvre
1692 sens chrétien primitif n’est-il pas, avant tout, le sens de la pauvreté ? Qu’un Kagawa nous force à méditer chrétiennemen
1693 ien primitif n’est-il pas, avant tout, le sens de la pauvreté ? Qu’un Kagawa nous force à méditer chrétiennement le fait d
1694 Qu’un Kagawa nous force à méditer chrétiennement le fait de la misère humaine, — cela ne saurait être sans fruits. 24.
1695 wa nous force à méditer chrétiennement le fait de la misère humaine, — cela ne saurait être sans fruits. 24. Ceux qui ve
1696 Denis de, « [Compte rendu] Toyohiko Kagawa, Avant l’ Aube  », Foi et Vie, Paris, septembre 1931, p. 623-632. m. Une note p
11 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). André Gide ou le style exquis (à propos de Divers) (octobre 1931)
1697 André Gide ou le style exquis (à propos de Divers) (octobre 1931)n o La manière es
1698 exquis (à propos de Divers) (octobre 1931)n o La manière est toujours l’indice d’une complaisance, et vite elle en dev
1699 rs) (octobre 1931)n o La manière est toujours l’ indice d’une complaisance, et vite elle en devient la rançon. (Divers,
1700 ndice d’une complaisance, et vite elle en devient la rançon. (Divers, p. 75.) Ces quelques notes voudraient marquer une r
1701 dernière « manière » gidienne, et je m’excuse dès l’ abord de la rapidité avec laquelle je suis décidé à les formuler. Si l
1702 manière » gidienne, et je m’excuse dès l’abord de la rapidité avec laquelle je suis décidé à les formuler. Si l’on y voit
1703 ord de la rapidité avec laquelle je suis décidé à les formuler. Si l’on y voit une regrettable désinvolture vis-à-vis d’un
1704 é avec laquelle je suis décidé à les formuler. Si l’ on y voit une regrettable désinvolture vis-à-vis d’un des écrivains le
1705 ettable désinvolture vis-à-vis d’un des écrivains les plus justement célèbres de ce temps, elle aura du moins le mérite de
1706 ustement célèbres de ce temps, elle aura du moins le mérite de la spontanéité, qualité dont Gide aime à douer les héros de
1707 bres de ce temps, elle aura du moins le mérite de la spontanéité, qualité dont Gide aime à douer les héros de ses récits,
1708 de la spontanéité, qualité dont Gide aime à douer les héros de ses récits, mais dont lui-même se révèle dépourvu dans une m
1709 art qui tout ensemble se définit et se limite par l’ épithète valéryenne d’exquis. On sait quels « jugements » Gide s’attir
1710 t quels « jugements » Gide s’attira naguère, dont la « saine rudesse » m’a toujours paru plus rude que saine. Je ne pense
1711 pposer aux suggestions d’un moraliste trop subtil les vaniteux verdicts d’une moralité toute faite. Je ne me récrie pas et
1712 ne me récrie pas et ne compte nullement désigner l’ auteur de l’Immoraliste à la vindicte des « honnêtes gens ». D’abord p
1713 e pas et ne compte nullement désigner l’auteur de l’ Immoraliste à la vindicte des « honnêtes gens ». D’abord parce que je
1714 te nullement désigner l’auteur de l’Immoraliste à la vindicte des « honnêtes gens ». D’abord parce que je me refuse à reco
1715 cette dernière catégorie. (On sait qu’il y a dans le monde moderne trois sortes de gens, les pécheurs, les sauvés et les h
1716 l y a dans le monde moderne trois sortes de gens, les pécheurs, les sauvés et les honnêtes gens.) Ensuite, parce que je ne
1717 monde moderne trois sortes de gens, les pécheurs, les sauvés et les honnêtes gens.) Ensuite, parce que je ne veux pas me la
1718 trois sortes de gens, les pécheurs, les sauvés et les honnêtes gens.) Ensuite, parce que je ne veux pas me laisser entraîne
1719 parce que je ne veux pas me laisser entraîner sur le terrain purement moral ou immoral où Gide provoque ses lecteurs à le
1720 moral ou immoral où Gide provoque ses lecteurs à le juger, sûr d’avance que l’intelligence sera de son côté. — « Causons
1721 rovoque ses lecteurs à le juger, sûr d’avance que l’ intelligence sera de son côté. — « Causons un peu », dit le serpent… ⁂
1722 gence sera de son côté. — « Causons un peu », dit le serpent… ⁂ Divers, recueil d’aphorismes, de « caractères » et de let
1723 autres, il est si admirablement habile qu’on vote l’ acquittement à main levée, sans examen des preuves. Non seulement Gide
1724 sait avoir raison comme en s’excusant. Il apporte les plus délicats scrupules à sa justification, « prêt à tous les effacem
1725 icats scrupules à sa justification, « prêt à tous les effacements » (p. 59). Là où d’autres triompheraient, il met une sour
1726 ompheraient, il met une sourdine. Car il sait que la modestie est la vertu de choix du classicisme. Et qu’il est le dernie
1727 met une sourdine. Car il sait que la modestie est la vertu de choix du classicisme. Et qu’il est le dernier de nos classiq
1728 reille modestie est, d’ailleurs, signe de force : les critiques auxquels il adressa les lettres reproduites dans ce recueil
1729 igne de force : les critiques auxquels il adressa les lettres reproduites dans ce recueil en savent quelque chose, et le Pè
1730 uites dans ce recueil en savent quelque chose, et le Père jésuite qui tenta de soutenir la controverse prit une leçon de d
1731 e chose, et le Père jésuite qui tenta de soutenir la controverse prit une leçon de distinguo magistrale et cruellement iro
1732 s du tout à imiter ce Père. Nul besoin de citer à la barre d’un jugement dernier anticipé un esprit qui s’honore — on excu
1733 ier anticipé un esprit qui s’honore — on excusera le jeu de mots — d’être « non-prévenu ». Mais voici ce qu’il y a : l’on
1734 d’être « non-prévenu ». Mais voici ce qu’il y a : l’ on éprouve une gêne grandissante au spectacle de l’autojustification o
1735 ’on éprouve une gêne grandissante au spectacle de l’ autojustification obsédante que les derniers écrits de cet auteur repr
1736 au spectacle de l’autojustification obsédante que les derniers écrits de cet auteur reprennent et fignolent avec un talent
1737 objet. Que Gide ne soit pas si « mauvais » qu’on l’ a dit, — ou qu’il a bien voulu s’en donner l’air — je suis prêt à le c
1738 u’on l’a dit, — ou qu’il a bien voulu s’en donner l’ air — je suis prêt à le concéder au-delà de ce qu’il espère. Par incom
1739 l a bien voulu s’en donner l’air — je suis prêt à le concéder au-delà de ce qu’il espère. Par incompétence radicale. Ce qu
1740 le. Ce qu’il faut certainement déplorer, c’est de le voir utiliser des dons incomparables et une sorte subtile de loyauté
1741 de loyauté à des fins rien moins que grandes. Car l’ excès même de ces scrupules les fait tourner soudain, les fait cailler
1742 ns que grandes. Car l’excès même de ces scrupules les fait tourner soudain, les fait cailler en coquetteries. Et voici que
1743 s même de ces scrupules les fait tourner soudain, les fait cailler en coquetteries. Et voici que l’explication de soi parei
1744 n, les fait cailler en coquetteries. Et voici que l’ explication de soi pareillement tourne en indiscrétion, et cette reten
1745 mpudeur raffinée. « Celui qui veut sauver sa vie la perdra, mais celui qui veut la perdre la rendra vraiment vivante », r
1746 veut sauver sa vie la perdra, mais celui qui veut la perdre la rendra vraiment vivante », répète inlassablement M. Gide25.
1747 r sa vie la perdra, mais celui qui veut la perdre la rendra vraiment vivante », répète inlassablement M. Gide25. Seulement
1748 perdre sa vie, et non pas pour Christ, mais pour la rendre vraiment vivante, celui-là ne fait qu’usurper la forme du sacr
1749 dre vraiment vivante, celui-là ne fait qu’usurper la forme du sacrifice ; et c’est en vain qu’il tenterait d’y loger autre
1750 son égoïsme et sa coquetterie profonde. Tels sont les tours que nous joue la morale lorsque, se prenant pour fin, elle s’ér
1751 terie profonde. Tels sont les tours que nous joue la morale lorsque, se prenant pour fin, elle s’érige en dialectique indé
1752 onséquents que M. Gide, ou qu’ils reculent devant l’ audace de conclusions en toute logique inévitables. Car ce qui naît de
1753 en toute logique inévitables. Car ce qui naît de l’ Évangile n’a de sens que par le jaillissement vers Dieu. Et tout préce
1754 Car ce qui naît de l’Évangile n’a de sens que par le jaillissement vers Dieu. Et tout précepte évangélique une fois détach
1755 Et tout précepte évangélique une fois détaché de la grâce se décompose avec virulence en sophismes, ou bien engendre des
1756 des chimères. Tout, ainsi, devient inextricable. Les Lettres au cours desquelles Gide répond à ses critiques sont tout à f
1757 ques sont tout à fait significatives à cet égard. L’ on est d’abord séduit par la finesse et la mesure de leur argumentatio
1758 icatives à cet égard. L’on est d’abord séduit par la finesse et la mesure de leur argumentation, par leur côté vraiment « 
1759 égard. L’on est d’abord séduit par la finesse et la mesure de leur argumentation, par leur côté vraiment « non-prévenu »,
1760 côté vraiment « non-prévenu », et puis, soudain, l’ on s’impatiente d’être ramené sans cesse dans un cercle de paradoxes e
1761 it de cette classe ne devrait pas supporter qu’on l’ engage. Mais qu’est-ce à dire lorsqu’on comprend que, non satisfait de
1762 il croit y découvrir son originalité, ou comme il le dit : son « paysage intérieur ». « Je puis dire que ce n’est pas à mo
1763 onflit de certaines idées, dont mon âme n’est que le théâtre, et où je fais fonction moins d’acteur que de spectateur, de
1764 t-ce pas nécessairement un faux témoin ? Étendons la signification de ce terme. On sait que protestant veut dire témoin (p
1765 e attitude sereinement contradictoire, où il voit l’ essence de sa « réforme » et de sa nouveauté. Luther disait : « Je ne
1766 urrait autrement ». Que rien de ce qu’il écrit ne l’ engage tout entier. Qu’il n’est que spectateur de ses antagonismes. Dè
1767 est que spectateur de ses antagonismes. Dès lors, la morale qui, pourtant, seule l’intéresse, n’est plus qu’un jeu d’équil
1768 onismes. Dès lors, la morale qui, pourtant, seule l’ intéresse, n’est plus qu’un jeu d’équilibres relatifs, variables et ré
1769 dans un tel univers. Suppression du tragique. Car le tragique naît dans une âme qui s’efforce vers l’unité, vers l’unifica
1770 le tragique naît dans une âme qui s’efforce vers l’ unité, vers l’unification de ses aspirations et de ses actes ; dans un
1771 aît dans une âme qui s’efforce vers l’unité, vers l’ unification de ses aspirations et de ses actes ; dans une âme responsa
1772 me responsable de ses contradictions. Sans doute, la psychologie moderne a-t-elle montré que l’homme était beaucoup moins
1773 doute, la psychologie moderne a-t-elle montré que l’ homme était beaucoup moins simple qu’il ne le croyait. Mais la questio
1774 que l’homme était beaucoup moins simple qu’il ne le croyait. Mais la question reste de savoir si cette division interne,
1775 t beaucoup moins simple qu’il ne le croyait. Mais la question reste de savoir si cette division interne, une fois reconnue
1776 être acceptée ou surmontée. Pour moi je tiens que le seul problème éthique est de se réaliser comme unité. Non point parce
1777 int parce qu’une morale stoïcienne et laïque nous le recommande. Non point à cause de la logique ni même d’une norme socia
1778 t laïque nous le recommande. Non point à cause de la logique ni même d’une norme sociale. Mais à cause de la grandeur. ⁂ C
1779 ique ni même d’une norme sociale. Mais à cause de la grandeur. ⁂ Ce livre manque d’ange et de bête. Il est merveilleusemen
1780 le strictement que de psychologie et des ruses de l’ art, sans que ne s’ouvre jamais une perspective poétique ou métaphysiq
1781 ective poétique ou métaphysique. À cette heure où le monde tourne lentement et formidablement sur ses bases sociales et re
1782 manque d’enthousiasme, d’« endieusement », selon l’ étymologie de Unamuno. Ne détermine rien en nous. Ne nous met en demeu
1783 ur cette jeunesse qui aimait sa ferveur, mais que le monde de demain va contraindre, contraint déjà à des choix dramatique
1784 choix dramatiques ? Certaines phrases pourraient le laisser supposer qu’il écrivit en préface au livre récent d’un jeune
1785 e de Saint-Exupéry. (Mais par quoi tiendra-t-il à les « équilibrer », un de ces jours, à les « gauchir »…) Le héros de Vol
1786 dra-t-il à les « équilibrer », un de ces jours, à les « gauchir »…) Le héros de Vol de nuit, non déshumanisé certes, s’élè
1787 uilibrer », un de ces jours, à les « gauchir »…) Le héros de Vol de nuit, non déshumanisé certes, s’élève à une vertu sur
1788 tout dans ce récit frémissant, c’est sa noblesse. Les faiblesses, les abandons, les déchéances de l’homme, nous les connais
1789 it frémissant, c’est sa noblesse. Les faiblesses, les abandons, les déchéances de l’homme, nous les connaissons de reste et
1790 c’est sa noblesse. Les faiblesses, les abandons, les déchéances de l’homme, nous les connaissons de reste et la littératur
1791 . Les faiblesses, les abandons, les déchéances de l’ homme, nous les connaissons de reste et la littérature de nos jours n’
1792 es, les abandons, les déchéances de l’homme, nous les connaissons de reste et la littérature de nos jours n’est que trop ha
1793 nces de l’homme, nous les connaissons de reste et la littérature de nos jours n’est que trop habile à les dénoncer ; mais
1794 littérature de nos jours n’est que trop habile à les dénoncer ; mais le surpassement de soi qu’obtient la volonté tendue,
1795 jours n’est que trop habile à les dénoncer ; mais le surpassement de soi qu’obtient la volonté tendue, c’est là ce que nou
1796 dénoncer ; mais le surpassement de soi qu’obtient la volonté tendue, c’est là ce que nous avons surtout besoin qu’on nous
1797 d’une importance psychologique considérable : que le bonheur de l’homme n’est pas dans la liberté, mais dans l’acceptation
1798 ce psychologique considérable : que le bonheur de l’ homme n’est pas dans la liberté, mais dans l’acceptation d’un devoir.
1799 érable : que le bonheur de l’homme n’est pas dans la liberté, mais dans l’acceptation d’un devoir. Gide aurait-il pressen
1800 r de l’homme n’est pas dans la liberté, mais dans l’ acceptation d’un devoir. Gide aurait-il pressenti que l’ère n’est plu
1801 tation d’un devoir. Gide aurait-il pressenti que l’ ère n’est plus de certaines complaisances ? Pourquoi faut-il que l’ima
1802 de certaines complaisances ? Pourquoi faut-il que l’ image de cet aviateur m’évoque la fable : « Je suis oiseau, voyez mes
1803 quoi faut-il que l’image de cet aviateur m’évoque la fable : « Je suis oiseau, voyez mes ailes. » Qu’il n’aille pas croire
1804 » Qu’il n’aille pas croire pourtant que désormais la vertu fera prime, les vices ayant épuisé leurs saveurs. La question n
1805 roire pourtant que désormais la vertu fera prime, les vices ayant épuisé leurs saveurs. La question n’est pas d’être vertue
1806 fera prime, les vices ayant épuisé leurs saveurs. La question n’est pas d’être vertueux, mais de faire la volonté de Dieu.
1807 question n’est pas d’être vertueux, mais de faire la volonté de Dieu. Et ce que nous voulons ce ne sont pas des exemples é
1808 es de responsabilités acceptées devant Dieu, avec l’ incommensurable tragique que cela comporte. Un nom me hante, pendant q
1809 rkegaard, — et c’est Gide qui, l’un des premiers, l’ a prononcé en France. Kierkegaard, un homme qui ne vous lâche plus. Il
1810 parlé de lui-même. Mais là où d’autres produisent l’ impression pénible de se montrer, il arrive chez Kierkegaard une chose
1811 rde et qui me perce, — et me fait honte d’oublier la grandeur. 25. Remarquons le tour qu’il adopte : « mais celui qui ve
1812 ait honte d’oublier la grandeur. 25. Remarquons le tour qu’il adopte : « mais celui qui veut la perdre… » n. Rougemont
1813 uons le tour qu’il adopte : « mais celui qui veut la perdre… » n. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] André Gide ou le
1814 ougemont Denis de, « [Compte rendu] André Gide ou le style exquis », Foi et Vie, Paris, octobre 1931, p. 725-729. o. Une
1815 on prévenu. — Dictées. — Lettres »). Collection «  Les Essais », à la Librairie Gallimard, Paris. »
1816 ctées. — Lettres »). Collection « Les Essais », à la Librairie Gallimard, Paris. »
12 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Le protestantisme jugé (octobre 1931)
1817 Le protestantisme jugé (octobre 1931)p Parlant récemment, dans un art
1818 rage de M. Édouard Martinet, intitulé André Gide, l’ amour et la divinité, M. Albert Thibaudet exprime son regret de ce qu’
1819 Édouard Martinet, intitulé André Gide, l’amour et la divinité, M. Albert Thibaudet exprime son regret de ce qu’un tel titr
1820 nous faudrait. M. Martinet a pris pour épigraphe la citation suivante, empruntée à M. Thibaudet justement : Ceci au moin
1821 Thibaudet justement : Ceci au moins suffirait à la critique pour maintenir à Gide une place instructive, qu’il est, depu
1822 r à Gide une place instructive, qu’il est, depuis l’ édit de Nantes, notre seul notable écrivain protestant26, non exilé, n
1823 propos : On m’a fait observer très justement, à l’ époque, que j’oubliais Loti. Loti est un notable écrivain protestant q
1824 . Loti appartient à ce pays de Saintonge, qui, si la force de l’unité française n’avait été irrésistible, avait ce qu’il f
1825 tient à ce pays de Saintonge, qui, si la force de l’ unité française n’avait été irrésistible, avait ce qu’il fallait pour
1826 ière de Genève maritime, de Hollande atlantique : le maire Guiton, le héros, avec Rohan, de la résistance protestante cont
1827 ritime, de Hollande atlantique : le maire Guiton, le héros, avec Rohan, de la résistance protestante contre le Cardinal, é
1828 tique : le maire Guiton, le héros, avec Rohan, de la résistance protestante contre le Cardinal, était corsaire de son méti
1829 , avec Rohan, de la résistance protestante contre le Cardinal, était corsaire de son métier. N’oublions pas que depuis la
1830 corsaire de son métier. N’oublions pas que depuis la destruction de l’Invincible Armada la mer devient aux trois quarts pr
1831 tier. N’oublions pas que depuis la destruction de l’ Invincible Armada la mer devient aux trois quarts protestante — et l’e
1832 que depuis la destruction de l’Invincible Armada la mer devient aux trois quarts protestante — et l’est restée (la révoca
1833 la mer devient aux trois quarts protestante — et l’ est restée (la révocation fit quitter, selon Vauban, les vaisseaux du
1834 t aux trois quarts protestante — et l’est restée ( la révocation fit quitter, selon Vauban, les vaisseaux du roi à neuf-mil
1835 restée (la révocation fit quitter, selon Vauban, les vaisseaux du roi à neuf-mille marins). Loti est un protestant françai
1836 mille marins). Loti est un protestant français de la vieille souche maritime. Évidemment, cela n’en fait pas un Genevois,
1837 ois, au contraire ! Mais n’oublions pas que toute l’ œuvre de Loti est faite du morcellement et de l’adaptation d’un livre
1838 e l’œuvre de Loti est faite du morcellement et de l’ adaptation d’un livre unique, son journal intime — que Loti est un jou
1839 que Loti est un journal intime, comme Gide — que le journal intime, la littérature intime sont un produit autochtone de l
1840 urnal intime, comme Gide — que le journal intime, la littérature intime sont un produit autochtone de la terre protestante
1841 littérature intime sont un produit autochtone de la terre protestante et de l’esprit protestant. Ces intéressantes remar
1842 produit autochtone de la terre protestante et de l’ esprit protestant. Ces intéressantes remarques, où l’on retrouve le g
1843 prit protestant. Ces intéressantes remarques, où l’ on retrouve le goût de l’analogie historico-littéraire qui caractérise
1844 t. Ces intéressantes remarques, où l’on retrouve le goût de l’analogie historico-littéraire qui caractérise la critique d
1845 éressantes remarques, où l’on retrouve le goût de l’ analogie historico-littéraire qui caractérise la critique de M. Albert
1846 e l’analogie historico-littéraire qui caractérise la critique de M. Albert Thibaudet, nous ont fait penser qu’il existe be
1847 te bel et bien un Loti vu de Genève, non pas sous la forme d’un ouvrage complet, mais d’un essai très fouillé et profond d
1848 res et morales. Nous sommes certains d’intéresser les lecteurs de cette revue en citant ici quelques passages de l’étude de
1849 de cette revue en citant ici quelques passages de l’ étude de Frommel. Nous assistons, chez Pierre Loti, à ce spectacle ét
1850 enchants et d’affections élevées, tandis que déjà la conscience éteinte ne la dirige plus et qu’elle flotte au hasard, san
1851 élevées, tandis que déjà la conscience éteinte ne la dirige plus et qu’elle flotte au hasard, sans but et sans attaches, c
1852 taches, cherchant uniquement à se satisfaire dans la jouissance présente. La structure même de ses romans est un indice ré
1853 ment à se satisfaire dans la jouissance présente. La structure même de ses romans est un indice révélateur, car quoi qu’on
1854 est un indice révélateur, car quoi qu’on dise de la différence entre la vie et le roman, la composition de celui-ci dépen
1855 ateur, car quoi qu’on dise de la différence entre la vie et le roman, la composition de celui-ci dépend toujours de la man
1856 quoi qu’on dise de la différence entre la vie et le roman, la composition de celui-ci dépend toujours de la manière de co
1857 n dise de la différence entre la vie et le roman, la composition de celui-ci dépend toujours de la manière de concevoir ce
1858 an, la composition de celui-ci dépend toujours de la manière de concevoir celle-là. Tant que la vie était considérée comme
1859 urs de la manière de concevoir celle-là. Tant que la vie était considérée comme le lieu où s’exerçait la volonté, où se fo
1860 celle-là. Tant que la vie était considérée comme le lieu où s’exerçait la volonté, où se formait le caractère, les livres
1861 vie était considérée comme le lieu où s’exerçait la volonté, où se formait le caractère, les livres étaient conduits, ils
1862 e le lieu où s’exerçait la volonté, où se formait le caractère, les livres étaient conduits, ils avaient une unité, un ter
1863 ’exerçait la volonté, où se formait le caractère, les livres étaient conduits, ils avaient une unité, un terme auquel ils a
1864 aient une unité, un terme auquel ils arrivaient ; la vie n’est plus aujourd’hui qu’une suite d’événements qui se succèdent
1865 ui qu’une suite d’événements qui se succèdent, et les livres sont fragmentaires, ils se composent d’une série de tableaux p
1866 se composent d’une série de tableaux parallèles. Les parties n’en sont plus dérivées les unes des autres, mais elles s’éta
1867 x parallèles. Les parties n’en sont plus dérivées les unes des autres, mais elles s’étalent à la fois toutes ensemble. Dès
1868 s elles s’étalent à la fois toutes ensemble. Dès l’ année 1886, où il publiait son essai, Frommel donnait ainsi le diagnos
1869 , où il publiait son essai, Frommel donnait ainsi le diagnostic du roman moderne ; ne serait-il pas frappant, en effet, d’
1870 ses dernières lignes à des œuvres récentes comme les Faux-monnayeurs de Gide, ou Contrepoint d’Aldous Huxley. Combien actu
1871 Huxley. Combien actuelles aussi ces remarques sur le déclin de la personnalité, la profondeur des sentiments et leur trist
1872 en actuelles aussi ces remarques sur le déclin de la personnalité, la profondeur des sentiments et leur tristesse, que Fro
1873 i ces remarques sur le déclin de la personnalité, la profondeur des sentiments et leur tristesse, que Frommel exprime au s
1874 ujet de Mon Frère Yves. Il semble, en effet, que les âmes du xixe siècle soient plus profondes et plus voilées, plus inqu
1875 ondes et plus voilées, plus inquiètes qu’elles ne le furent jamais. Serait-ce la civilisation toute seule qui les aurait t
1876 inquiètes qu’elles ne le furent jamais. Serait-ce la civilisation toute seule qui les aurait travaillées à ce point et les
1877 jamais. Serait-ce la civilisation toute seule qui les aurait travaillées à ce point et les aurait ainsi fouillées ? Je ne s
1878 te seule qui les aurait travaillées à ce point et les aurait ainsi fouillées ? Je ne sais ; l’âme humaine, je pense, depuis
1879 oint et les aurait ainsi fouillées ? Je ne sais ; l’ âme humaine, je pense, depuis qu’elle existe, n’a pas changé de nature
1880 qu’elle était peut-être plus chaste. Au temps où le domaine intérieur du recueillement et de l’adoration lui demeurait ou
1881 ps où le domaine intérieur du recueillement et de l’ adoration lui demeurait ouvert, les secrets de la vie intime n’étaient
1882 eillement et de l’adoration lui demeurait ouvert, les secrets de la vie intime n’étaient pas révélés parce qu’on les cachai
1883 l’adoration lui demeurait ouvert, les secrets de la vie intime n’étaient pas révélés parce qu’on les cachait en Dieu et q
1884 e la vie intime n’étaient pas révélés parce qu’on les cachait en Dieu et qu’une sainte pudeur en dérobait l’accès. L’existe
1885 chait en Dieu et qu’une sainte pudeur en dérobait l’ accès. L’existence apparente était plus calme parce qu’elle n’était qu
1886 Dieu et qu’une sainte pudeur en dérobait l’accès. L’ existence apparente était plus calme parce qu’elle n’était qu’une part
1887 plus calme parce qu’elle n’était qu’une partie de l’ existence et qu’on cachait la meilleure ; les désespérances dont notre
1888 ait qu’une partie de l’existence et qu’on cachait la meilleure ; les désespérances dont notre époque est prodigue, ne s’ét
1889 ie de l’existence et qu’on cachait la meilleure ; les désespérances dont notre époque est prodigue, ne s’étalaient point au
1890 and jour, il y avait pour elles une autre issue : la prière en portait l’expression, loin des oreilles des hommes, jusqu’a
1891 pour elles une autre issue : la prière en portait l’ expression, loin des oreilles des hommes, jusqu’au trône de Dieu. Il n
1892 rône de Dieu. Il n’en est plus ainsi maintenant ; l’ âme est restée semblable, mais on lui a retranché le ciel ; les mêmes
1893 âme est restée semblable, mais on lui a retranché le ciel ; les mêmes aspirations demeurent, qui faisaient tressaillir nos
1894 stée semblable, mais on lui a retranché le ciel ; les mêmes aspirations demeurent, qui faisaient tressaillir nos ancêtres,
1895 ancêtres, mais leur légitime objet a été enlevé ; les souffrances sont encore là, mais non plus les espérances de la religi
1896 é ; les souffrances sont encore là, mais non plus les espérances de la religion, et l’âme, qui montait autrefois, est retom
1897 s sont encore là, mais non plus les espérances de la religion, et l’âme, qui montait autrefois, est retombée sur la terre
1898 , mais non plus les espérances de la religion, et l’ âme, qui montait autrefois, est retombée sur la terre et l’anime de to
1899 et l’âme, qui montait autrefois, est retombée sur la terre et l’anime de tout l’effort qu’elle portait sur les choses invi
1900 i montait autrefois, est retombée sur la terre et l’ anime de tout l’effort qu’elle portait sur les choses invisibles. La v
1901 ois, est retombée sur la terre et l’anime de tout l’ effort qu’elle portait sur les choses invisibles. La vie, désormais sa
1902 e et l’anime de tout l’effort qu’elle portait sur les choses invisibles. La vie, désormais sans au-delà, sans relation avec
1903 effort qu’elle portait sur les choses invisibles. La vie, désormais sans au-delà, sans relation avec l’infini, se trouble
1904 a vie, désormais sans au-delà, sans relation avec l’ infini, se trouble et se complique ; le sentiment contredit à la pensé
1905 ation avec l’infini, se trouble et se complique ; le sentiment contredit à la pensée, la pensée contredit au sentiment, et
1906 rouble et se complique ; le sentiment contredit à la pensée, la pensée contredit au sentiment, et, dans leur tumulte intér
1907 e complique ; le sentiment contredit à la pensée, la pensée contredit au sentiment, et, dans leur tumulte intérieur, les f
1908 it au sentiment, et, dans leur tumulte intérieur, les forces vives de l’être ont déchiré leur enveloppe, les âmes se sont o
1909 dans leur tumulte intérieur, les forces vives de l’ être ont déchiré leur enveloppe, les âmes se sont ouvertes à tous les
1910 orces vives de l’être ont déchiré leur enveloppe, les âmes se sont ouvertes à tous les regards, les cœurs se sont révélés e
1911 leur enveloppe, les âmes se sont ouvertes à tous les regards, les cœurs se sont révélés et leur souffrance s’est écrite da
1912 pe, les âmes se sont ouvertes à tous les regards, les cœurs se sont révélés et leur souffrance s’est écrite dans les pages
1913 sont révélés et leur souffrance s’est écrite dans les pages innombrables de notre littérature. L’ouverture s’est faite, mai
1914 dans les pages innombrables de notre littérature. L’ ouverture s’est faite, mais non du bon côté ; l’âme, que tourmente un
1915 . L’ouverture s’est faite, mais non du bon côté ; l’ âme, que tourmente un suprême besoin d’épanchement, s’est déversée, ma
1916 une paix dans une intimité purement humaine : Et l’ homme seul répond à l’homme épouvanté 27. Il nous manque une étude su
1917 mité purement humaine : Et l’homme seul répond à l’ homme épouvanté 27. Il nous manque une étude sur les critiques protes
1918 homme épouvanté 27. Il nous manque une étude sur les critiques protestants du xixe siècle. L’on serait surpris de constat
1919 de sur les critiques protestants du xixe siècle. L’ on serait surpris de constater à ce sujet que les jugements d’un Vinet
1920 . L’on serait surpris de constater à ce sujet que les jugements d’un Vinet sur le romantisme, ceux d’un Frommel sur les écr
1921 tater à ce sujet que les jugements d’un Vinet sur le romantisme, ceux d’un Frommel sur les écrivains qu’il appelle « posit
1922 un Vinet sur le romantisme, ceux d’un Frommel sur les écrivains qu’il appelle « positivistes » restent à peu près les seuls
1923 qu’il appelle « positivistes » restent à peu près les seuls valables, à nos yeux, qui aient été émis en leur temps. La crit
1924 es, à nos yeux, qui aient été émis en leur temps. La critique la plus moderne les confirme et les répète bien souvent sans
1925 ux, qui aient été émis en leur temps. La critique la plus moderne les confirme et les répète bien souvent sans les connaît
1926 é émis en leur temps. La critique la plus moderne les confirme et les répète bien souvent sans les connaître. Et « le point
1927 emps. La critique la plus moderne les confirme et les répète bien souvent sans les connaître. Et « le point de vue de Genèv
1928 erne les confirme et les répète bien souvent sans les connaître. Et « le point de vue de Genève » — c’est-à-dire protestant
1929 les répète bien souvent sans les connaître. Et «  le point de vue de Genève » — c’est-à-dire protestant — nous paraît avoi
1930 dire protestant — nous paraît avoir doué ceux qui le professèrent (en dépit de certain défaut de sympathie avec leurs suje
1931 t, Gide sans doute le premier. 27. Paul Bourget, Les Aveux : Désespoir en Dieu, p. 264. p. Rougemont Denis de, « Le prot
1932 spoir en Dieu, p. 264. p. Rougemont Denis de, «  Le protestantisme jugé », Foi et Vie, Paris, octobre 1931, p. 751-754.
13 1932, Foi et Vie, articles (1928–1977). Romanciers protestants (janvier 1932)
1933 t, et que personne, croyons-nous, n’a relevé, que les grands « succès » littéraires de l’année 1931 soient allés à trois ro
1934 relevé, que les grands « succès » littéraires de l’ année 1931 soient allés à trois romans d’écrivains protestants : Pierr
1935 protestants qui écrivent ? — Mais voyons d’abord les œuvres. La critique à peu près unanime a salué dans Le Scandale la me
1936 qui écrivent ? — Mais voyons d’abord les œuvres. La critique à peu près unanime a salué dans Le Scandale la meilleure œuv
1937 vres. La critique à peu près unanime a salué dans Le Scandale la meilleure œuvre de M. Bost, une espèce de somme romanesqu
1938 tique à peu près unanime a salué dans Le Scandale la meilleure œuvre de M. Bost, une espèce de somme romanesque des erreme
1939 , une espèce de somme romanesque des errements de la jeunesse d’après-guerre. La Claire de M. Chardonne a rallié tous les
1940 sque des errements de la jeunesse d’après-guerre. La Claire de M. Chardonne a rallié tous les suffrages féminins, et class
1941 s-guerre. La Claire de M. Chardonne a rallié tous les suffrages féminins, et classe son auteur dans la lignée de ces fameux
1942 les suffrages féminins, et classe son auteur dans la lignée de ces fameux « moralistes français » auxquels nous pardonnons
1943 souvent d’être des romanciers assez ternes, pour le plaisir que par ailleurs ils donnent à notre intelligence plus avide,
1944 étique tableau d’un domaine et d’une famille dont la mystique se révèle au cours d’un épisode central traité en profondeur
1945 vre d’une sorte de renaissance cornélienne. Dans la discordante après-guerre, Jean Schlumberger semblait devoir rester le
1946 -guerre, Jean Schlumberger semblait devoir rester le seul tenant du classicisme romanesque ; mais voici qu’on proclame au
1947 manesque ; mais voici qu’on proclame au contraire l’ avènement d’une littérature nouvelle28, dont cette œuvre serait comme
1948 érature nouvelle28, dont cette œuvre serait comme le frontispice (aux beaux noirs et gris profonds). Un critique fort écou
1949 que fort écouté29, à son propos, fit observer que les romanciers protestants montrent de préférence la famille dans sa forc
1950 les romanciers protestants montrent de préférence la famille dans sa force de conservation morale, alors que le catholique
1951 e dans sa force de conservation morale, alors que le catholique Mauriac s’attarde au spectacle de sa décomposition. Ici la
1952 c s’attarde au spectacle de sa décomposition. Ici la famille qui résiste, là la famille qui se défait30. Mais gardons-nous
1953 sa décomposition. Ici la famille qui résiste, là la famille qui se défait30. Mais gardons-nous de voir dans ce contraste
1954 ns-nous de voir dans ce contraste autre chose que la vieille opposition du sacrifice cornélien et de la passion racinienne
1955 a vieille opposition du sacrifice cornélien et de la passion racinienne, — opposition qui se prolonge et trouve son expres
1956 de Saint-Saturnin qu’un tel roman exprime « toute la grandeur — et toute la misère — des protestants sans foi »31. Quoi qu
1957 tel roman exprime « toute la grandeur — et toute la misère — des protestants sans foi »31. Quoi qu’il en fût d’ailleurs d
1958 nts sans foi »31. Quoi qu’il en fût d’ailleurs de la portée religieuse des trois œuvres, l’on se sentait tenté de marquer
1959 illeurs de la portée religieuse des trois œuvres, l’ on se sentait tenté de marquer ici d’une pierre blanche « l’année du r
1960 ntait tenté de marquer ici d’une pierre blanche «  l’ année du roman protestant ». À la réflexion, l’on y a renoncé, pour de
1961 pierre blanche « l’année du roman protestant ». À la réflexion, l’on y a renoncé, pour des raisons d’ordre général et comm
1962 « l’année du roman protestant ». À la réflexion, l’ on y a renoncé, pour des raisons d’ordre général et comme indépendante
1963 s nos Lettres, n’était-ce point, d’abord, céder à la tentation d’un nationalisme religieux plus injustifiable que l’autre 
1964 sses, de fausses hontes et de sourires complices. La question toutefois doit être portée sur un plan supérieur à toute pol
1965 toute polémique : s’agit-il jamais en effet pour les témoins d’une confession, de faire le compte de leurs gloires ? Ne do
1966 effet pour les témoins d’une confession, de faire le compte de leurs gloires ? Ne doivent-ils pas au contraire considérer
1967 celles-ci comme leur accusation perpétuelle ? Car la vraie question qu’elles posent, chrétiennement, c’est de savoir si no
1968 s posent, chrétiennement, c’est de savoir si nous les méritons encore. Comme le disait un homme d’esprit, plus l’ancêtre do
1969 ’est de savoir si nous les méritons encore. Comme le disait un homme d’esprit, plus l’ancêtre dont on se réclame est éloig
1970 s encore. Comme le disait un homme d’esprit, plus l’ ancêtre dont on se réclame est éloigné, moins on a de chances d’en ten
1971 yrs, camisards et prophètes, nous condamnent dans la mesure où elles furent authentiques. Mais d’autre part certaines « cé
1972 écessaire, aujourd’hui, de confesser. Aussi bien, la force qui nous est promise doit-elle nous rendre ce courage léger.
1973 romise doit-elle nous rendre ce courage léger. Le moralisme nous trahit Partons du cas concret de nos trois auteurs.
1974 t Partons du cas concret de nos trois auteurs. Le problème, à vrai dire, les dépasse, mais il n’est pas mauvais de l’ac
1975 t de nos trois auteurs. Le problème, à vrai dire, les dépasse, mais il n’est pas mauvais de l’actualiser, de le rétrécir, s
1976 i dire, les dépasse, mais il n’est pas mauvais de l’ actualiser, de le rétrécir, si de la sorte nous sentons mieux sa point
1977 se, mais il n’est pas mauvais de l’actualiser, de le rétrécir, si de la sorte nous sentons mieux sa pointe. Les héros du S
1978 as mauvais de l’actualiser, de le rétrécir, si de la sorte nous sentons mieux sa pointe. Les héros du Scandale, provinciau
1979 cir, si de la sorte nous sentons mieux sa pointe. Les héros du Scandale, provinciaux énervés par la vie des bars de la capi
1980 e. Les héros du Scandale, provinciaux énervés par la vie des bars de la capitale nous apparaissent incapables de transport
1981 ndale, provinciaux énervés par la vie des bars de la capitale nous apparaissent incapables de transporter dans ce décor le
1982 araissent incapables de transporter dans ce décor les dilemmes religieux d’une vie intérieure que l’on sent parfois sous-ja
1983 r les dilemmes religieux d’une vie intérieure que l’ on sent parfois sous-jacente, mais trop timide à s’exprimer. Le couple
1984 fois sous-jacente, mais trop timide à s’exprimer. Le couple que Jacques Chardonne étudie dans Claire poursuit un bonheur p
1985 , et par là si précaire qu’il côtoie bien souvent l’ angoisse, ou pis encore : un sentiment d’indifférence et d’inutilité.
1986 sentiment d’indifférence et d’inutilité. Quant à l’ auteur de Saint-Saturnin, il semble qu’une véritable préméditation — o
1987 in, il semble qu’une véritable préméditation — où l’ on n’eût voulu voir qu’une pudeur — lui fait éviter toute allusion chr
1988 usion chrétienne, au point qu’en tels endroits où la vraisemblance voudrait que le nom de Dieu fût invoqué (je pense au te
1989 en tels endroits où la vraisemblance voudrait que le nom de Dieu fût invoqué (je pense au testament de la mère par exemple
1990 nom de Dieu fût invoqué (je pense au testament de la mère par exemple), c’est au « sort » que l’on s’en remet, ni plus ni
1991 nt de la mère par exemple), c’est au « sort » que l’ on s’en remet, ni plus ni moins que dans un drame antique. M. Saurat d
1992 an Schlumberger une volonté consciente de réduire l’ homme à sa seule virtu. Donc : refus ou ignorance des catégories de la
1993 irtu. Donc : refus ou ignorance des catégories de la grâce et du péché ; un certain ascétisme de la forme, mais jamais rie
1994 de la grâce et du péché ; un certain ascétisme de la forme, mais jamais rien d’explicitement religieux : cela n’a point em
1995 de protestants tiennent à honneur de compromettre la Réforme avec cette attitude, et de prolonger un malentendu qu’ils jug
1996 estants par tradition », pourtant cache assez mal la faiblesse d’un compromis foncier. Le fort est celui qui refuse la lou
1997 he assez mal la faiblesse d’un compromis foncier. Le fort est celui qui refuse la louange approximative. Nous ne saurions
1998 n compromis foncier. Le fort est celui qui refuse la louange approximative. Nous ne saurions assez nous garder d’accepter
1999 e notre foi. Il est vrai que ceux-ci sont souvent les plus éclatants. Car un système politique, une doctrine, une éthique,
2000 à quelque erreur interne, ne vont pas forcément à la ruine immédiate, dans notre monde tel qu’il est. Mais c’est parfois,
2001 eurs faussetés et qu’ils se trouvent, aux yeux de l’ esprit, le plus durement jugés. Était-ce affaiblissement de notre foi
2002 etés et qu’ils se trouvent, aux yeux de l’esprit, le plus durement jugés. Était-ce affaiblissement de notre foi dans l’ave
2003 jugés. Était-ce affaiblissement de notre foi dans l’ avenir de la Réforme, besoin minoritaire de trouver des alliés à bon c
2004 -ce affaiblissement de notre foi dans l’avenir de la Réforme, besoin minoritaire de trouver des alliés à bon compte sur un
2005 trouver des alliés à bon compte sur un terrain où la compromission semblait pratiquement acceptable ? Nous avons trop souv
2006 trop souvent et bien trop volontiers souffert que l’ on nous attribue un moralisme tout semblable à celui des athées, — au
2007 athées, — au lieu qu’il eût fallu du premier coup le dénoncer, comme radicalement contraire à notre foi originale. Le sièc
2008 mme radicalement contraire à notre foi originale. Le siècle, hélas, décorait du beau nom de libéralisme l’absence de toute
2009 iècle, hélas, décorait du beau nom de libéralisme l’ absence de toute exigence unifiante entre la pensée et l’action. Certe
2010 lisme l’absence de toute exigence unifiante entre la pensée et l’action. Certes, nos prédicateurs affirmaient le salut gra
2011 ce de toute exigence unifiante entre la pensée et l’ action. Certes, nos prédicateurs affirmaient le salut gratuit par la f
2012 et l’action. Certes, nos prédicateurs affirmaient le salut gratuit par la foi ; mais d’autre part nous prêtions des mains
2013 nos prédicateurs affirmaient le salut gratuit par la foi ; mais d’autre part nous prêtions des mains complices à des œuvre
2014 evaient de conceptions nettement a-chrétiennes de la « moralité publique » par exemple. Et quelles qu’aient été les affirm
2015 é publique » par exemple. Et quelles qu’aient été les affirmations souvent indignées de nos docteurs, un fait prit corps, i
2016 docteurs, un fait prit corps, irréfutable : dans l’ esprit du Français moyen, « protestant » devint synonyme de « moralist
2017 yme de « moraliste ». Était-ce qu’il y avait dans l’ accent de ces docteurs-là quelque chose qui les empêchait de convaincr
2018 ans l’accent de ces docteurs-là quelque chose qui les empêchait de convaincre ? Tel étant l’état des choses, suffira-t-il d
2019 chose qui les empêchait de convaincre ? Tel étant l’ état des choses, suffira-t-il de déplorer une incompréhension publique
2020 is dont nous souffrons d’autant plus vivement que le monde actuel nous met en demeure d’abandonner tout ce qui, dans notre
2021 ’inspire d’un conformisme bourgeois plutôt que de l’ héroïsme chrétien ? En particulier, sommes-nous toujours assez conscie
2022 des fondements de notre foi pour récuser, dans «  l’ esprit protestant », tout ce qui rend inutile la grâce ? Il y va pourt
2023 « l’esprit protestant », tout ce qui rend inutile la grâce ? Il y va pourtant de notre force de conquête. Que nous le voul
2024 va pourtant de notre force de conquête. Que nous le voulions ou non, en fait, sinon toujours en droit, l’héritage intelle
2025 oulions ou non, en fait, sinon toujours en droit, l’ héritage intellectuel du protestantisme du xixe siècle se réduit, aux
2026 de son insistance… Et de ce fait qui paraît bien la confirmer : le dessèchement distingué de notre art. Toute forme relig
2027 nce… Et de ce fait qui paraît bien la confirmer : le dessèchement distingué de notre art. Toute forme religieuse donne lie
2028 nt ses traits spécifiques. On peut donc poser que le protestantisme de la fin du xixe siècle, tel que nos contemporains s
2029 ques. On peut donc poser que le protestantisme de la fin du xixe siècle, tel que nos contemporains se le représentent, ne
2030 fin du xixe siècle, tel que nos contemporains se le représentent, ne pouvait s’exprimer que dans la forme du roman morali
2031 e le représentent, ne pouvait s’exprimer que dans la forme du roman moraliste (forme qui par ailleurs flattait un penchant
2032 par ailleurs flattait un penchant traditionnel de l’ esprit français). Cela pouvait donner soit des œuvres d’analyse tendan
2033 ner soit des œuvres d’analyse tendant à dissoudre les affirmations massives de la foi ; soit des œuvres d’édification moral
2034 tendant à dissoudre les affirmations massives de la foi ; soit des œuvres d’édification morale, au sens littéral du terme
2035 ne atmosphère proprement chrétienne. Or voici que les faits confirment cette vue théorique : Loti, Schlumberger, Gide, le d
2036 t cette vue théorique : Loti, Schlumberger, Gide, le désenchanté, le stoïcien, le révolté, — trois noms parfaitement repré
2037 rique : Loti, Schlumberger, Gide, le désenchanté, le stoïcien, le révolté, — trois noms parfaitement représentatifs33. Bil
2038 Schlumberger, Gide, le désenchanté, le stoïcien, le révolté, — trois noms parfaitement représentatifs33. Bilan fort honor
2039 honorable du point de vue purement littéraire, si l’ on tient compte de la faiblesse numérique des protestants français. Bi
2040 vue purement littéraire, si l’on tient compte de la faiblesse numérique des protestants français. Bilan terriblement défi
2041 tants français. Bilan terriblement déficitaire si l’ on prend au sérieux la grandeur impérieuse et fulgurante du véritable
2042 terriblement déficitaire si l’on prend au sérieux la grandeur impérieuse et fulgurante du véritable calvinisme. Or nous n’
2043 ons plus à rendre responsable de cette carence de la poésie et du rayonnement spirituel notre fameux moralisme, traître à
2044 dé de toute théologie efficace. Peut-être vaut-il la peine de préciser ici et de pousser dans le détail une accusation que
2045 ut-il la peine de préciser ici et de pousser dans le détail une accusation que certains, déjà, disent banale, pour lui ôte
2046 , déjà, disent banale, pour lui ôter sa force, je le crains. ⁂ Le puritanisme, expression d’une doctrine héroïque, pouvait
2047 t banale, pour lui ôter sa force, je le crains. ⁂ Le puritanisme, expression d’une doctrine héroïque, pouvait provoquer da
2048 n d’une doctrine héroïque, pouvait provoquer dans les âmes des complexités merveilleuses, un pathétique aux résonances prof
2049 athétique aux résonances profondes : Milton. Mais le moralisme détendu que la théologie libérale prétendit conserver, fut
2050 profondes : Milton. Mais le moralisme détendu que la théologie libérale prétendit conserver, fut bientôt réduit au rôle d’
2051 tienne d’ailleurs, puisqu’elle récusait à la fois la charité, le risque, l’abandon et la divine légèreté, c’est-à-dire, qu
2052 leurs, puisqu’elle récusait à la fois la charité, le risque, l’abandon et la divine légèreté, c’est-à-dire, qu’elle récusa
2053 qu’elle récusait à la fois la charité, le risque, l’ abandon et la divine légèreté, c’est-à-dire, qu’elle récusait la grâce
2054 ait à la fois la charité, le risque, l’abandon et la divine légèreté, c’est-à-dire, qu’elle récusait la grâce autant que l
2055 a divine légèreté, c’est-à-dire, qu’elle récusait la grâce autant que le péché. La censure moraliste est avant tout peureu
2056 ’est-à-dire, qu’elle récusait la grâce autant que le péché. La censure moraliste est avant tout peureuse. Elle « craint »
2057 e, qu’elle récusait la grâce autant que le péché. La censure moraliste est avant tout peureuse. Elle « craint » la vérité 
2058 oraliste est avant tout peureuse. Elle « craint » la vérité ; non point au sens de ce verbe qui signifie la révérence, mai
2059 rité ; non point au sens de ce verbe qui signifie la révérence, mais comme on craint le risque, que Jésus n’a jamais crain
2060 e qui signifie la révérence, mais comme on craint le risque, que Jésus n’a jamais craint. Et c’est en quoi elle révèle la
2061 s n’a jamais craint. Et c’est en quoi elle révèle la faiblesse de sa théologie. Car il est certains cas où celui qui crain
2062 st certains cas où celui qui craint de dire toute la vérité n’exprime par là rien d’autre que sa méfiance vis-à-vis de la
2063 par là rien d’autre que sa méfiance vis-à-vis de la grâce et son optimisme vis-à-vis de la nature humaine, qui, selon cet
2064 s-à-vis de la grâce et son optimisme vis-à-vis de la nature humaine, qui, selon cette vue, serait bonne, ou du moins meill
2065 e vue, serait bonne, ou du moins meilleure, si on la « préservait » du mal. Ainsi Rousseau le libertaire doit et peut être
2066 e, si on la « préservait » du mal. Ainsi Rousseau le libertaire doit et peut être moraliste, tandis que Calvin l’orthodoxe
2067 re doit et peut être moraliste, tandis que Calvin l’ orthodoxe ne saurait l’être sans renier le fondement de sa croyance34.
2068 raliste, tandis que Calvin l’orthodoxe ne saurait l’ être sans renier le fondement de sa croyance34. Or nous voyons le mora
2069 Calvin l’orthodoxe ne saurait l’être sans renier le fondement de sa croyance34. Or nous voyons le moralisme se développer
2070 ier le fondement de sa croyance34. Or nous voyons le moralisme se développer précisément à l’époque où la théologie de Cal
2071 s voyons le moralisme se développer précisément à l’ époque où la théologie de Calvin, pessimiste quant à l’homme, mais con
2072 moralisme se développer précisément à l’époque où la théologie de Calvin, pessimiste quant à l’homme, mais confiante dans
2073 que où la théologie de Calvin, pessimiste quant à l’ homme, mais confiante dans la grâce, cède le champ aux idées de Rousse
2074 , pessimiste quant à l’homme, mais confiante dans la grâce, cède le champ aux idées de Rousseau, optimistes quant à l’homm
2075 ant à l’homme, mais confiante dans la grâce, cède le champ aux idées de Rousseau, optimistes quant à l’homme et pratiqueme
2076 e champ aux idées de Rousseau, optimistes quant à l’ homme et pratiquement athées. Voici donc l’homme, dans sa condition me
2077 uant à l’homme et pratiquement athées. Voici donc l’ homme, dans sa condition menacée, réduit aux seules défenses qu’invent
2078 aux seules défenses qu’invente son calcul. Voici l’ homme livré à lui-même, c’est-à-dire à son pire ennemi. Morne triomphe
2079 c’est-à-dire à son pire ennemi. Morne triomphe de l’ analyse psychologique. Un siècle de ce régime suffit à nous mener à ce
2080 e trouble gâchis intérieur où Freud naguère porta l’ impitoyable lumière de l’observation scientifique. Reflet du siècle, l
2081 r où Freud naguère porta l’impitoyable lumière de l’ observation scientifique. Reflet du siècle, le roman bientôt s’affaibl
2082 de l’observation scientifique. Reflet du siècle, le roman bientôt s’affaiblit à force de se compliquer, et tend à se rédu
2083 mment animer des êtres, lorsqu’à chaque moment de la création intervient une autocritique à la fois peureuse et agressive 
2084 it une puissance décuplée, excessive, et qui, par la force des choses, tournerait bientôt en révolte, en insolence, en dém
2085 olte, en insolence, en démence : Nietzsche. Ainsi l’ atmosphère moraliste a tué les germes de l’imagination créatrice chez
2086 e : Nietzsche. Ainsi l’atmosphère moraliste a tué les germes de l’imagination créatrice chez les protestants, qui lui furen
2087 Ainsi l’atmosphère moraliste a tué les germes de l’ imagination créatrice chez les protestants, qui lui furent plus que d’
2088 a tué les germes de l’imagination créatrice chez les protestants, qui lui furent plus que d’autres soumis, de par leur sér
2089 raditionnel. Et quand elle n’est point parvenue à les étouffer, elle a souvent faussé le développement de ces germes ; les
2090 nt parvenue à les étouffer, elle a souvent faussé le développement de ces germes ; les produits d’une terre ingrate grandi
2091 a souvent faussé le développement de ces germes ; les produits d’une terre ingrate grandissent comme une dérision de la pau
2092 e terre ingrate grandissent comme une dérision de la pauvreté maternelle, comme une caricature de la sécheresse à laquelle
2093 e la pauvreté maternelle, comme une caricature de la sécheresse à laquelle ils s’opposent, mais qu’ils manifestent en même
2094 me temps avec une ironie plus cruelle souvent que la stérilité. Sécheresse désolée de Benjamin Constant, impuissance et ba
2095 iel, désespérance vaniteuse de Loti : telles sont les réactions irrécusables et célèbres que provoqua le moralisme perverti
2096 s réactions irrécusables et célèbres que provoqua le moralisme perverti. Il eût conduit le protestantisme à la négation ab
2097 ue provoqua le moralisme perverti. Il eût conduit le protestantisme à la négation absolue de son essence35, si l’humanité
2098 isme perverti. Il eût conduit le protestantisme à la négation absolue de son essence35, si l’humanité ne possédait d’autre
2099 ntisme à la négation absolue de son essence35, si l’ humanité ne possédait d’autres recours que ceux qu’elle peut imaginer
2100 cours que ceux qu’elle peut imaginer en dehors de la grâce, c’est-à-dire la police des mœurs, l’éducation bourgeoise et ce
2101 peut imaginer en dehors de la grâce, c’est-à-dire la police des mœurs, l’éducation bourgeoise et ces blasphématoires « hyg
2102 rs de la grâce, c’est-à-dire la police des mœurs, l’ éducation bourgeoise et ces blasphématoires « hygiènes de l’esprit » d
2103 n bourgeoise et ces blasphématoires « hygiènes de l’ esprit » dont les ravages ne prendront fin qu’au jour où nous aurons c
2104 ces blasphématoires « hygiènes de l’esprit » dont les ravages ne prendront fin qu’au jour où nous aurons compris que la san
2105 endront fin qu’au jour où nous aurons compris que la santé est dans l’humilité de la prière, dans la reconnaissance éperdu
2106 jour où nous aurons compris que la santé est dans l’ humilité de la prière, dans la reconnaissance éperdue de notre incapac
2107 urons compris que la santé est dans l’humilité de la prière, dans la reconnaissance éperdue de notre incapacité à faire pa
2108 e la santé est dans l’humilité de la prière, dans la reconnaissance éperdue de notre incapacité à faire par nous-mêmes le
2109 perdue de notre incapacité à faire par nous-mêmes le bien, dans l’abandon aux mains de Dieu, — aux violentes mains de Dieu
2110 e incapacité à faire par nous-mêmes le bien, dans l’ abandon aux mains de Dieu, — aux violentes mains de Dieu. Un cantiq
2111 ne sont guère atteints par tout ceci. Mais quoi ? Le but ne fut jamais de démolir, mais bien plutôt de dénoncer un princip
2112 destructeur. C’est au nom d’une foi positive que l’ on attaque ici le moralisme survivant, c’est au nom d’une grande espér
2113 st au nom d’une foi positive que l’on attaque ici le moralisme survivant, c’est au nom d’une grande espérance. Que devons-
2114 ogmatique qui, s’il traduit et porte un réveil de la foi, ne peut manquer de libérer des forces créatrices. Or les temps v
2115 peut manquer de libérer des forces créatrices. Or les temps vont nous y contraindre. Que rien ne soit plus favorable à l’a
2116 y contraindre. Que rien ne soit plus favorable à l’ art que l’évangélisme dans sa pureté, héroïque ou sereine, il faudrait
2117 dre. Que rien ne soit plus favorable à l’art que l’ évangélisme dans sa pureté, héroïque ou sereine, il faudrait pour en d
2118 roïque ou sereine, il faudrait pour en douter que l’ on ait oublié les plus grands noms : Milton, Bach, Rembrandt, les sœur
2119 e, il faudrait pour en douter que l’on ait oublié les plus grands noms : Milton, Bach, Rembrandt, les sœurs Brontë, Henrik
2120 é les plus grands noms : Milton, Bach, Rembrandt, les sœurs Brontë, Henrik Ibsen et ces deux Danois prodigieux, Hans-Christ
2121 egaard. (Féerie du Conte de ma vie d’Andersen, où l’ on voit ce « poète des poètes » à la sensibilité si authentiquement év
2122 ’Andersen, où l’on voit ce « poète des poètes » à la sensibilité si authentiquement évangélique — comme celle d’une Lagerl
2123 s avec Charles Dickens, Jenny Lind, Thorwaldsen.) Les romans russes et les romans anglais du xixe siècle nous laissent ent
2124 s, Jenny Lind, Thorwaldsen.) Les romans russes et les romans anglais du xixe siècle nous laissent entrevoir ce que pourrai
2125 rraient être des œuvres modernes inspirées, comme le furent les plus grandes, par le sentiment tragique du péché et de la
2126 re des œuvres modernes inspirées, comme le furent les plus grandes, par le sentiment tragique du péché et de la grâce souve
2127 inspirées, comme le furent les plus grandes, par le sentiment tragique du péché et de la grâce souveraine. C’est cela qui
2128 grandes, par le sentiment tragique du péché et de la grâce souveraine. C’est cela qui donne aux romans de Dostoïevski ou d
2129 ntes qui manqueront toujours aux œuvres nées sous le signe fatal du moralisme. La grande poésie naît du tragique et de la
2130 aux œuvres nées sous le signe fatal du moralisme. La grande poésie naît du tragique et de la joie surabondante : verrons-n
2131 oralisme. La grande poésie naît du tragique et de la joie surabondante : verrons-nous quelque jour en France surgir une po
2132 ion évangélique ? Souhaitons qu’il n’y faille pas les conjonctures sanglantes d’où naquirent les Tragiques d’un d’Aubigné.
2133 le pas les conjonctures sanglantes d’où naquirent les Tragiques d’un d’Aubigné. Aussi bien avons-nous d’autres raisons d’es
2134 ien avons-nous d’autres raisons d’espérer. Car si la forme artistique adéquate au libéralisme fut l’analyse d’états d’âme
2135 i la forme artistique adéquate au libéralisme fut l’ analyse d’états d’âme dans le doute, il est permis d’attendre de la vi
2136 e au libéralisme fut l’analyse d’états d’âme dans le doute, il est permis d’attendre de la violence même d’une théologie d
2137 d’âme dans le doute, il est permis d’attendre de la violence même d’une théologie du Dieu Tout-Puissant qu’elle suscite d
2138 s36, qu’elle enflamme des chants prophétiques. Et l’ Éternel enfin sera loué « selon l’immensité de sa grandeur » comme il
2139 rophétiques. Et l’Éternel enfin sera loué « selon l’ immensité de sa grandeur » comme il est dit au dernier psaume. 28.
2140 dit au dernier psaume. 28. Denis Saurat, dans la Nouvelle Revue française et Marsyas. 29. Albert Thibaudet, dans Cand
2141 rger, André Chamson. 31. Charles Westphal, dans Le Semeur . 32. Il est entendu, même chez les protestants, qu’un « prot
2142 dans Le Semeur . 32. Il est entendu, même chez les protestants, qu’un « protestant qui écrit » ne saurait être qu’en rév
2143 qui écrit » ne saurait être qu’en révolte contre la foi de ses pères. Le jeu consiste uniquement à retrouver dans son œuv
2144 it être qu’en révolte contre la foi de ses pères. Le jeu consiste uniquement à retrouver dans son œuvre des traces qui « m
2145 fs d’une atmosphère moraliste, quelles que soient les opinions qu’ils adoptèrent vis-à-vis du moralisme. Qu’on me comprenne
2146 . A.-N. Bertrand, Protestantisme, p. 102, et tout le chapitre sur le Principe d’humilité. Également : Jean de Saussure : À
2147 , Protestantisme, p. 102, et tout le chapitre sur le Principe d’humilité. Également : Jean de Saussure : À l’École de Calv
2148 cipe d’humilité. Également : Jean de Saussure : À l’ École de Calvin, passim. 36. Cf. dans le dernier numéro de cette revu
2149 m. 36. Cf. dans le dernier numéro de cette revue l’ article de E. Hæin, et particulièrement la citation de F. Münch relati
2150 e revue l’article de E. Hæin, et particulièrement la citation de F. Münch relative à la musique religieuse d’Honegger. q.
2151 rticulièrement la citation de F. Münch relative à la musique religieuse d’Honegger. q. Rougemont Denis de, « Romanciers
14 1932, Foi et Vie, articles (1928–1977). Goethe, chrétien, païen (avril 1932)
2152 ien, païen (avril 1932)r Imaginez un membre de l’ Académie des sciences qui serait aussi directeur de la Comédie françai
2153 adémie des sciences qui serait aussi directeur de la Comédie française et ministre de l’Intérieur, et qui, en marge des ex
2154 et qui, en marge des expériences accumulées dans l’ exercice de ces activités, composerait des poèmes d’amour, des romans,
2155 s d’amour, des romans, des drames philosophiques, les meilleurs de son époque. Cela ne donnera pas un portrait de Goethe, c
2156 s un portrait de Goethe, certes, mais une idée de l’ importance du phénomène Goethe. Maintenant ajoutons que l’homme fut su
2157 ance du phénomène Goethe. Maintenant ajoutons que l’ homme fut supérieur à la somme de toutes ces activités et domina const
2158 . Maintenant ajoutons que l’homme fut supérieur à la somme de toutes ces activités et domina constamment sa vie et son œuv
2159 a peut-être pas d’individu plus significatif dans l’ histoire de l’Occident moderne, c’est-à-dire dans l’histoire des peupl
2160 s d’individu plus significatif dans l’histoire de l’ Occident moderne, c’est-à-dire dans l’histoire des peuples qui vivent
2161 histoire de l’Occident moderne, c’est-à-dire dans l’ histoire des peuples qui vivent sous le règne du christianisme. Mais l
2162 -dire dans l’histoire des peuples qui vivent sous le règne du christianisme. Mais le plus grand Occidental fut-il chrétien
2163 s qui vivent sous le règne du christianisme. Mais le plus grand Occidental fut-il chrétien ? Nous ne saurions, surtout dan
2164 ut dans Foi et Vie , aborder cette question sous l’ angle de la curiosité littéraire ou historique. Elle pose cependant un
2165 i et Vie , aborder cette question sous l’angle de la curiosité littéraire ou historique. Elle pose cependant un problème q
2166 u historique. Elle pose cependant un problème que la conscience intellectuelle des chrétiens ne peut et ne doit éviter. Go
2167 qu’il est de notre devoir d’envisager avec toute la bonne foi que nécessite un examen de conscience. ⁂ Goethe s’est toujo
2168 mé chrétien, mais d’une façon si particulière que les ennemis du christianisme, depuis un siècle, le revendiquent comme leu
2169 e les ennemis du christianisme, depuis un siècle, le revendiquent comme leur plus grand païen. Les fragments des Conversat
2170 cle, le revendiquent comme leur plus grand païen. Les fragments des Conversations avec Eckermann que nous donnons dans ce n
2171 quivoque réelle, mais plutôt pour en faire sentir l’ acuité. Mais, dira-t-on d’emblée, le simple fait qu’une équivoque si g
2172 faire sentir l’acuité. Mais, dira-t-on d’emblée, le simple fait qu’une équivoque si grave subsiste et paraisse avoir été
2173 tivée par Goethe, ne prouve-t-il pas suffisamment l’ inauthenticité de son christianisme ? Qu’est-ce qu’un chrétien que l’a
2174 son christianisme ? Qu’est-ce qu’un chrétien que l’ athéisme annexe avec une pareille aisance ? La question serait tranché
2175 que l’athéisme annexe avec une pareille aisance ? La question serait tranchée, en effet, si nous ne savions rien des circo
2176 récemment dans un article qui fit quelque bruit37 les débuts piétistes du jeune Goethe et la part active qu’il prit aux réu
2177 e bruit37 les débuts piétistes du jeune Goethe et la part active qu’il prit aux réunions de « belles âmes » suscitées par
2178 rit aux réunions de « belles âmes » suscitées par l’ apostolat du comte de Zinzendorf. C’était le temps du réveil sentiment
2179 s par l’apostolat du comte de Zinzendorf. C’était le temps du réveil sentimental et mystique dans une Allemagne luthérienn
2180 stique dans une Allemagne luthérienne ravagée par l’ Aufklärung et le rationalisme. C’était le temps aussi du « Sturm und D
2181 Allemagne luthérienne ravagée par l’Aufklärung et le rationalisme. C’était le temps aussi du « Sturm und Drang » auquel Go
2182 agée par l’Aufklärung et le rationalisme. C’était le temps aussi du « Sturm und Drang » auquel Goethe devait donner l’expr
2183 u « Sturm und Drang » auquel Goethe devait donner l’ expression littéraire la plus parfaite avec Werther. Et nous ne manquo
2184 quel Goethe devait donner l’expression littéraire la plus parfaite avec Werther. Et nous ne manquons pas de témoignages éc
2185 poque qui permettent d’imaginer ce qu’eût pu être le pendant chrétien du Werther : — « J’ai souffert et me voilà libre à n
2186 ette calcination a été très profitable à mon âme… Le Sauveur m’a enfin attrapé ; je courais trop vite pour lui, il m’a sai
2187 ; je courais trop vite pour lui, il m’a saisi par les cheveux. Il est sûrement à vos trousses aussi, j’espère voir le jour
2188 est sûrement à vos trousses aussi, j’espère voir le jour où il vous rattrapera ; mais je ne puis répondre de la manière.
2189 il vous rattrapera ; mais je ne puis répondre de la manière. Je suis parfois bien tranquille à ce sujet, parfois, quand j
2190 nd je suis calme, très calme, et que je sens tout le bien que les sources éternelles ont déversé dans mon cœur. » Et deux
2191 alme, très calme, et que je sens tout le bien que les sources éternelles ont déversé dans mon cœur. » Et deux ans plus tard
2192 à ceci près que mes rapports sont meilleurs avec le Seigneur et Jésus son fils bien-aimé. C’est vous dire que j’ai acquis
2193 que j’ai acquis plus de raison et d’expérience : la crainte du Seigneur est le commencement de la sagesse. » Par quel con
2194 ison et d’expérience : la crainte du Seigneur est le commencement de la sagesse. » Par quel concours de circonstances cett
2195 e : la crainte du Seigneur est le commencement de la sagesse. » Par quel concours de circonstances cette « sagesse » devin
2196 e non dépourvue d’orgueil vis-à-vis du Seigneur ? L’ on ne saurait ici exagérer la responsabilité qui incombe aux « chrétie
2197 -à-vis du Seigneur ? L’on ne saurait ici exagérer la responsabilité qui incombe aux « chrétiens » eux-mêmes, tels qu’ils a
2198 e exigeante ferveur mystique. « Mes rapports avec les dévots — écrit-il de Strasbourg — ne sont pas très fréquents ici. Au
2199 s lors recherchera dans une solitude aggravée par l’ agacement que lui causent les effusions piétistes trop verbeuses d’un
2200 solitude aggravée par l’agacement que lui causent les effusions piétistes trop verbeuses d’un Lavater ou d’un Jacobi. Mais
2201 à découvrir qu’on n’y atteint qu’en outrepassant les limites normales de l’esprit humain. La transcendance de Dieu est abs
2202 tteint qu’en outrepassant les limites normales de l’ esprit humain. La transcendance de Dieu est absolue, par rapport à not
2203 epassant les limites normales de l’esprit humain. La transcendance de Dieu est absolue, par rapport à notre pensée naturel
2204 ne recherche qui risque surtout d’être nuisible à la vie ? Bornons-nous à l’utile. Bornons-nous à « réaliser » dans nos ac
2205 surtout d’être nuisible à la vie ? Bornons-nous à l’ utile. Bornons-nous à « réaliser » dans nos actions ce que Dieu jugea
2206 ctions ce que Dieu jugea bon de nous révéler dans l’ Évangile. Et en présence de l’intempérance de langage qui trop souvent
2207 e nous révéler dans l’Évangile. Et en présence de l’ intempérance de langage qui trop souvent caractérise les chrétiens, af
2208 empérance de langage qui trop souvent caractérise les chrétiens, affirmons que nous ne savons presque rien de Dieu, ou plut
2209 est vain de chercher à en savoir plus que ce que la nature visible nous en révèle. Cette attitude s’accuse de plus en plu
2210 Goethe avance en âge. Nous voici à ces années de la vieillesse, dont Eckermann nous a livré les confidences, et où la vol
2211 ées de la vieillesse, dont Eckermann nous a livré les confidences, et où la volonté de sobriété spirituelle paraît avoir pr
2212 ont Eckermann nous a livré les confidences, et où la volonté de sobriété spirituelle paraît avoir produit chez le poète un
2213 de sobriété spirituelle paraît avoir produit chez le poète une sorte de sécheresse religieuse. Ce qui à l’origine, n’était
2214 oète une sorte de sécheresse religieuse. Ce qui à l’ origine, n’était qu’humilité de la raison devant l’insondable mystère
2215 ieuse. Ce qui à l’origine, n’était qu’humilité de la raison devant l’insondable mystère de Dieu devient, vu de l’extérieur
2216 ’origine, n’était qu’humilité de la raison devant l’ insondable mystère de Dieu devient, vu de l’extérieur, orgueil de la r
2217 evant l’insondable mystère de Dieu devient, vu de l’ extérieur, orgueil de la raison qui juge ce monde comme si Dieu n’exis
2218 re de Dieu devient, vu de l’extérieur, orgueil de la raison qui juge ce monde comme si Dieu n’existait pas, ou encore : co
2219 u encore : comme si Dieu n’était rien d’autre que l’ ensemble des lois de la nature. Ainsi la conception de la transcendanc
2220 u n’était rien d’autre que l’ensemble des lois de la nature. Ainsi la conception de la transcendance divine aboutit pratiq
2221 autre que l’ensemble des lois de la nature. Ainsi la conception de la transcendance divine aboutit pratiquement, chez Goet
2222 ble des lois de la nature. Ainsi la conception de la transcendance divine aboutit pratiquement, chez Goethe, à des affirma
2223 e malentendus perpétuellement renaissants, et que les adversaires de la religion eurent beau jeu d’exploiter, on le sait. M
2224 tuellement renaissants, et que les adversaires de la religion eurent beau jeu d’exploiter, on le sait. Mais, comme l’établ
2225 es de la religion eurent beau jeu d’exploiter, on le sait. Mais, comme l’établit fort justement Curtius « le Goethe païen
2226 ent beau jeu d’exploiter, on le sait. Mais, comme l’ établit fort justement Curtius « le Goethe païen et rien que païen est
2227 t. Mais, comme l’établit fort justement Curtius «  le Goethe païen et rien que païen est une légende, et une légende d’orig
2228 le est un mythe, au moyen duquel on peut faire de l’ agitation et de la propagande antireligieuse ». En vérité, Goethe qui
2229 u moyen duquel on peut faire de l’agitation et de la propagande antireligieuse ». En vérité, Goethe qui prêcha l’utile, no
2230 de antireligieuse ». En vérité, Goethe qui prêcha l’ utile, nous apparaît comme Goethe l’inutilisable, si nous le jugeons d
2231 he qui prêcha l’utile, nous apparaît comme Goethe l’ inutilisable, si nous le jugeons du point de vue d’un parti. Il n’est
2232 ous apparaît comme Goethe l’inutilisable, si nous le jugeons du point de vue d’un parti. Il n’est pas païen, pour la raiso
2233 point de vue d’un parti. Il n’est pas païen, pour la raison péremptoire qu’il n’y a plus de païen, au sens antique du mot,
2234 plus de païen, au sens antique du mot, depuis que la venue du Christ a modifié la nature même de l’homme et l’ensemble des
2235 e du mot, depuis que la venue du Christ a modifié la nature même de l’homme et l’ensemble des données religieuses. Mais, d
2236 ue la venue du Christ a modifié la nature même de l’ homme et l’ensemble des données religieuses. Mais, d’autre part, il fa
2237 du Christ a modifié la nature même de l’homme et l’ ensemble des données religieuses. Mais, d’autre part, il faudrait un l
2238 t nous nous sentons incapables pour admettre dans la communauté de la foi chrétienne l’homme qui a pu dire qu’il s’inclina
2239 ns incapables pour admettre dans la communauté de la foi chrétienne l’homme qui a pu dire qu’il s’inclinait devant le Chri
2240 admettre dans la communauté de la foi chrétienne l’ homme qui a pu dire qu’il s’inclinait devant le Christ comme devant la
2241 ne l’homme qui a pu dire qu’il s’inclinait devant le Christ comme devant la « révélation divine du plus haut principe de l
2242 e qu’il s’inclinait devant le Christ comme devant la « révélation divine du plus haut principe de la morale », tout en vén
2243 t la « révélation divine du plus haut principe de la morale », tout en vénérant également le soleil, comme une « révélatio
2244 incipe de la morale », tout en vénérant également le soleil, comme une « révélation du Très-Haut, et même la plus puissant
2245 eil, comme une « révélation du Très-Haut, et même la plus puissante qu’il nous ait jamais été donné, à nous enfants de la
2246 u’il nous ait jamais été donné, à nous enfants de la terre, de percevoir. » Et certes, on ne voit guère en quoi pareille c
2247 libéraux par exemple. Mais c’est précisément dans la facilité d’interprétation qu’offre Goethe dans cette espèce de sagess
2248 imiste si contraire au scandale chrétien, que gît la faiblesse religieuse de sa position. Ce qui, plus que tout, fait défa
2249 qui, plus que tout, fait défaut à ce génie, c’est le sens tragique du péché. Car c’est bien dans le sens du péché que gît
2250 st le sens tragique du péché. Car c’est bien dans le sens du péché que gît l’irréductible, c’est-à-dire le tragique essent
2251 ché. Car c’est bien dans le sens du péché que gît l’ irréductible, c’est-à-dire le tragique essentiel de notre condition. C
2252 ens du péché que gît l’irréductible, c’est-à-dire le tragique essentiel de notre condition. C’est bien là que réside l’élé
2253 tiel de notre condition. C’est bien là que réside l’ élément transcendant qui interdit à la pensée la plus probe de se pass
2254 que réside l’élément transcendant qui interdit à la pensée la plus probe de se passer de Dieu quand elle juge le monde sé
2255 e l’élément transcendant qui interdit à la pensée la plus probe de se passer de Dieu quand elle juge le monde séparé de Di
2256 a plus probe de se passer de Dieu quand elle juge le monde séparé de Dieu. Il n’est pas vrai de dire qu’un monde séparé de
2257 elque chose. Or, ce « quelque chose » aux yeux de la foi, constitue sa raison d’être. Il n’y a pas de neutralité du monde
2258 té du monde vis-à-vis de Dieu — à cause du péché. La réalité visible du péché entraîne la considération de la grâce. Et c’
2259 se du péché. La réalité visible du péché entraîne la considération de la grâce. Et c’est en quoi la transcendance divine,
2260 ité visible du péché entraîne la considération de la grâce. Et c’est en quoi la transcendance divine, sans cesse, se mêle
2261 ne la considération de la grâce. Et c’est en quoi la transcendance divine, sans cesse, se mêle à notre vie pratique et vie
2262 leverser nos sagesses. Goethe, prônant dans Faust le salut par l’effort humain au sein d’une nature harmonieuse — et quand
2263 sagesses. Goethe, prônant dans Faust le salut par l’ effort humain au sein d’une nature harmonieuse — et quand bien même il
2264 nieuse — et quand bien même il fait intervenir, à la fin, « l’amour d’En-Haut » venant à sa rencontre — Goethe nous appara
2265 t quand bien même il fait intervenir, à la fin, «  l’ amour d’En-Haut » venant à sa rencontre — Goethe nous apparaît comme n
2266 antichrétien, mais d’une tout autre sorte que ne l’ ont cru nos athées qui s’arrêtaient à des boutades anticatholiques ou
2267 tholiques ou à des moments d’humeur provoqués par les bavardages piétistes. Ici, nous confesserons un doute. De quel droit
2268 mme qui se prétendit tel en maintes occasions, de la façon la plus expresse ? Sera-ce sur la foi de certains biographes ?
2269 e prétendit tel en maintes occasions, de la façon la plus expresse ? Sera-ce sur la foi de certains biographes ? Mais comm
2270 sions, de la façon la plus expresse ? Sera-ce sur la foi de certains biographes ? Mais comment juger les actions d’un être
2271 a foi de certains biographes ? Mais comment juger les actions d’un être que nous n’avons pas connu, alors que nous-même… Al
2272 -même… Alors que Dieu seul juge. Si nous refusons le nom de chrétien à cet homme dont l’éthique, en définitive, apparaît c
2273 nous refusons le nom de chrétien à cet homme dont l’ éthique, en définitive, apparaît comme fondée sur deux des réalités ce
2274 t comme fondée sur deux des réalités centrales de l’ Évangile : le renoncement et la réalisation personnelle, n’est-ce poin
2275 e sur deux des réalités centrales de l’Évangile : le renoncement et la réalisation personnelle, n’est-ce point tout simple
2276 lités centrales de l’Évangile : le renoncement et la réalisation personnelle, n’est-ce point tout simplement que les idées
2277 n personnelle, n’est-ce point tout simplement que les idées, les théories et les systèmes prônés par lui ne coïncident pas
2278 le, n’est-ce point tout simplement que les idées, les théories et les systèmes prônés par lui ne coïncident pas avec les id
2279 nt tout simplement que les idées, les théories et les systèmes prônés par lui ne coïncident pas avec les idées, les théorie
2280 es systèmes prônés par lui ne coïncident pas avec les idées, les théories et les systèmes dont nous jugeons urgent d’accent
2281 prônés par lui ne coïncident pas avec les idées, les théories et les systèmes dont nous jugeons urgent d’accentuer actuell
2282 ne coïncident pas avec les idées, les théories et les systèmes dont nous jugeons urgent d’accentuer actuellement, la vérité
2283 ont nous jugeons urgent d’accentuer actuellement, la vérité ? N’est-ce point là porter un jugement avant tout partial, et
2284 autant que la sienne ? Certes, hic et nunc, dans la situation du monde de 1932, en présence du déchaînement orgueilleux e
2285 evoir est net : nous avons à défendre et attester les valeurs doctrinales les plus gênantes pour ce monde sans Dieu. Or, ce
2286 ns à défendre et attester les valeurs doctrinales les plus gênantes pour ce monde sans Dieu. Or, ce sont justement les vale
2287 es pour ce monde sans Dieu. Or, ce sont justement les valeurs que le « christianisme » de Goethe paraît avoir négligées ou
2288 sans Dieu. Or, ce sont justement les valeurs que le « christianisme » de Goethe paraît avoir négligées ou niées : le scan
2289 sme » de Goethe paraît avoir négligées ou niées : le scandale divin, le péché radical. Mais un homme de l’envergure de Goe
2290 aît avoir négligées ou niées : le scandale divin, le péché radical. Mais un homme de l’envergure de Goethe, s’il ne peut ê
2291 candale divin, le péché radical. Mais un homme de l’ envergure de Goethe, s’il ne peut être un argument pour nul parti, ne
2292 être un argument pour nul parti, ne saurait, pour les mêmes raisons, servir d’objet à notre jugement. Bien plutôt c’est lui
2293 Bien plutôt c’est lui qui nous juge. Il y a dans le Faust, et dans la vie de cet homme, dont le Faust n’est qu’une figura
2294 lui qui nous juge. Il y a dans le Faust, et dans la vie de cet homme, dont le Faust n’est qu’une figuration symbolique, u
2295 dans le Faust, et dans la vie de cet homme, dont le Faust n’est qu’une figuration symbolique, une leçon d’activité, de ré
2296 on d’activité, de réalisation, d’actualisation de la pensée, dont la vertu et la grandeur devraient s’imposer à nous tous.
2297 e réalisation, d’actualisation de la pensée, dont la vertu et la grandeur devraient s’imposer à nous tous. Goethe inutilis
2298 n, d’actualisation de la pensée, dont la vertu et la grandeur devraient s’imposer à nous tous. Goethe inutilisable, certes
2299 ons pas besoin d’avoir raison (contre lui, contre les athées) ; nous n’avons pas besoin d’avoir beaucoup de grands hommes —
15 1932, Foi et Vie, articles (1928–1977). Penser dangereusement (juin 1932)
2300 Penser dangereusement (juin 1932)s «  L’ esprit désintéressé est mort. » C’en est fait, les clercs ont trahi, e
2301  L’esprit désintéressé est mort. » C’en est fait, les clercs ont trahi, et les cris de M. Benda sont couverts par la rumeur
2302 t mort. » C’en est fait, les clercs ont trahi, et les cris de M. Benda sont couverts par la rumeur de la place. Dans toute
2303 trahi, et les cris de M. Benda sont couverts par la rumeur de la place. Dans toute la jeune génération littéraire et phil
2304 s cris de M. Benda sont couverts par la rumeur de la place. Dans toute la jeune génération littéraire et philosophique, c’
2305 nt couverts par la rumeur de la place. Dans toute la jeune génération littéraire et philosophique, c’est en vain que l’on
2306 on littéraire et philosophique, c’est en vain que l’ on chercherait un « esprit libre » selon le vœu de ce prêtre de l’abst
2307 in que l’on chercherait un « esprit libre » selon le vœu de ce prêtre de l’abstentionnisme et du célibat spirituel. Ils on
2308 un « esprit libre » selon le vœu de ce prêtre de l’ abstentionnisme et du célibat spirituel. Ils ont tous épousé une cause
2309 use, une de ces causes qui engagent bien plus que l’ adhésion des idées, une de ces causes qui doivent être gagnées. Chose
2310 s qui doivent être gagnées. Chose étrange, et que l’ on eût difficilement prévue au lendemain de la guerre, c’est sur la no
2311 que l’on eût difficilement prévue au lendemain de la guerre, c’est sur la notion — et la pratique — du service nécessaire
2312 ement prévue au lendemain de la guerre, c’est sur la notion — et la pratique — du service nécessaire que se fait l’unanimi
2313 lendemain de la guerre, c’est sur la notion — et la pratique — du service nécessaire que se fait l’unanimité de la nouvel
2314 t la pratique — du service nécessaire que se fait l’ unanimité de la nouvelle génération. Quels que soient par ailleurs les
2315 du service nécessaire que se fait l’unanimité de la nouvelle génération. Quels que soient par ailleurs les antagonismes q
2316 ouvelle génération. Quels que soient par ailleurs les antagonismes qui la divisent — bien plus extrêmes que ceux qui divisè
2317 uels que soient par ailleurs les antagonismes qui la divisent — bien plus extrêmes que ceux qui divisèrent les précédentes
2318 sent — bien plus extrêmes que ceux qui divisèrent les précédentes — elle éprouve son unité, elle connaît une fraternité en
2319 unité, elle connaît une fraternité en ceci : que la pensée n’est plus pour elle une justification idéale de l’égoïsme ou
2320 n’est plus pour elle une justification idéale de l’ égoïsme ou de l’indifférence, mais une obligation urgente à se risquer
2321 elle une justification idéale de l’égoïsme ou de l’ indifférence, mais une obligation urgente à se risquer en faveur des h
2322 en faveur des hommes, un acte, un combat. Fin de l’ esprit désintéressé, cela signifierait pour les clercs, selon M. Benda
2323 de l’esprit désintéressé, cela signifierait pour les clercs, selon M. Benda, la fin de l’esprit. Et pour nous, cela signif
2324 ela signifierait pour les clercs, selon M. Benda, la fin de l’esprit. Et pour nous, cela signifie : le renouveau, le sacri
2325 ierait pour les clercs, selon M. Benda, la fin de l’ esprit. Et pour nous, cela signifie : le renouveau, le sacrifice salut
2326 la fin de l’esprit. Et pour nous, cela signifie : le renouveau, le sacrifice salutaire et l’unique justification de la pen
2327 prit. Et pour nous, cela signifie : le renouveau, le sacrifice salutaire et l’unique justification de la pensée. Une telle
2328 ignifie : le renouveau, le sacrifice salutaire et l’ unique justification de la pensée. Une telle évolution peut paraître f
2329 sacrifice salutaire et l’unique justification de la pensée. Une telle évolution peut paraître favorable à la pensée chrét
2330 ée. Une telle évolution peut paraître favorable à la pensée chrétienne. La pensée protestante, en particulier, s’est toujo
2331 n peut paraître favorable à la pensée chrétienne. La pensée protestante, en particulier, s’est toujours montrée soucieuse
2332 tion éthique. Il n’a pas échappé à M. Benda que «  le clerc moderne » (en tant qu’il se montre préoccupé des conséquences n
2333 montre préoccupé des conséquences nécessaires de la pensée dans l’ordre pratique) « est protestant ». Mais, d’autre part,
2334 pé des conséquences nécessaires de la pensée dans l’ ordre pratique) « est protestant ». Mais, d’autre part, cette soif d’a
2335 tichrétienne dans son essence, et par suite, dans l’ action qu’elle commande à des millions de nos contemporains. Il y a au
2336 ains. Il y a aussi ceux qui se bornent à affirmer la nécessité d’une pensée active, mais qui n’ont pas vu — qui n’ont pas
2337 e vu — tout ce que cela implique. Ils voient bien le vice de la « pensée désintéressée », et qu’il faut s’affranchir d’une
2338 ce que cela implique. Ils voient bien le vice de la « pensée désintéressée », et qu’il faut s’affranchir d’une « liberté 
2339 isme ou marxisme. Ce qui revient à dire que seuls les chrétiens, en tant que chrétiens, non pas en tant que bourgeois, s’il
2340 e chrétiens, non pas en tant que bourgeois, s’ils le sont, ont des raisons réelles et valables de récuser une pensée et un
2341 pensée et une action tout entières dirigées vers l’ organisation et l’utilisation des biens matériels. ⁂ Arrêtons-nous auj
2342 ion tout entières dirigées vers l’organisation et l’ utilisation des biens matériels. ⁂ Arrêtons-nous aujourd’hui à deux li
2343 me une suite d’études parues pour la plupart dans les pages de l’Action française, mais qui, marquons-le tout de suite, ne
2344 d’études parues pour la plupart dans les pages de l’ Action française, mais qui, marquons-le tout de suite, ne comportent n
2345 s pages de l’Action française, mais qui, marquons- le tout de suite, ne comportent nulle allusion à la position politique d
2346 -le tout de suite, ne comportent nulle allusion à la position politique de ce journal. Le titre : La Crise est dans l’homm
2347 e allusion à la position politique de ce journal. Le titre : La Crise est dans l’homme 38, s’oppose d’emblée aux thèses de
2348 à la position politique de ce journal. Le titre : La Crise est dans l’homme 38, s’oppose d’emblée aux thèses des économist
2349 tique de ce journal. Le titre : La Crise est dans l’ homme 38, s’oppose d’emblée aux thèses des économistes bourgeois ou ma
2350 économistes bourgeois ou marxistes, pour lesquels la crise est dans les institutions. Il paraît supposer une rénovation in
2351 ois ou marxistes, pour lesquels la crise est dans les institutions. Il paraît supposer une rénovation intérieure, celle pré
2352 ovation intérieure, celle précisément que postule le christianisme. Mais c’est en vain que le lecteur cherchera la réalité
2353 postule le christianisme. Mais c’est en vain que le lecteur cherchera la réalité constructive et absolue sur quoi se fond
2354 isme. Mais c’est en vain que le lecteur cherchera la réalité constructive et absolue sur quoi se fonderait cette rénovatio
2355 . Maulnier critique un monde qui selon lui tend à la suppression de la personne humaine. Sa critique nous paraît pertinent
2356 e un monde qui selon lui tend à la suppression de la personne humaine. Sa critique nous paraît pertinente, mais elle serai
2357 pertinente, mais elle serait plus efficace si on la sentait inspirée par un principe spirituel capable de rendre une forc
2358 dre une force offensive à cette personne humaine. Le choix des sujets abordés dans son livre montre un esprit averti des v
2359 de ce temps. Il réfute MM. Berl et Guéhenno, sur la question de la culture dans ses rapports avec le peuple. Il discute M
2360 l réfute MM. Berl et Guéhenno, sur la question de la culture dans ses rapports avec le peuple. Il discute M. Malraux et so
2361 la question de la culture dans ses rapports avec le peuple. Il discute M. Malraux et son goût désespéré de l’action pour
2362 e. Il discute M. Malraux et son goût désespéré de l’ action pour elle-même. Il condamne le populisme de M. Thérive, il cond
2363 désespéré de l’action pour elle-même. Il condamne le populisme de M. Thérive, il condamne le pacifisme de M. Thomas Mann,
2364 condamne le populisme de M. Thérive, il condamne le pacifisme de M. Thomas Mann, il condamne l’Amérique de Ford et la Rus
2365 damne le pacifisme de M. Thomas Mann, il condamne l’ Amérique de Ford et la Russie de Staline ; il adopte enfin une positio
2366 M. Thomas Mann, il condamne l’Amérique de Ford et la Russie de Staline ; il adopte enfin une position assez voisine de cel
2367 n et Dandieu, sans aller jusqu’à prôner comme ils le font « la révolution nécessaire ». Certes, on ne saurait demander à u
2368 eu, sans aller jusqu’à prôner comme ils le font «  la révolution nécessaire ». Certes, on ne saurait demander à un recueil
2369 t ». Ce négativisme m’apparaît caractéristique de la pensée dite « de droite », et c’est par là surtout que M. Thierry Mau
2370 eule existence — si elles existent — rende vaines les passions égarées, rende visible l’origine de l’égarement, rende effic
2371 rende vaines les passions égarées, rende visible l’ origine de l’égarement, rende efficace et créatrice la critique de tou
2372 les passions égarées, rende visible l’origine de l’ égarement, rende efficace et créatrice la critique de tout cela qui ag
2373 igine de l’égarement, rende efficace et créatrice la critique de tout cela qui agite le cœur des hommes. Ce n’est pas une
2374 e et créatrice la critique de tout cela qui agite le cœur des hommes. Ce n’est pas une férule : c’est un bon outil qu’il n
2375 e à M. Thierry Maulnier. (Il serait fou de ne pas le partager.) Je lui reproche de manquer d’exigence vis-à-vis de l’homme
2376 e lui reproche de manquer d’exigence vis-à-vis de l’ homme ; de se borner à sa défense ; de ne pas voir que la vraie défens
2377  ; de se borner à sa défense ; de ne pas voir que la vraie défense, c’est l’attaque. Nous avons moins besoin d’idées juste
2378 ense ; de ne pas voir que la vraie défense, c’est l’ attaque. Nous avons moins besoin d’idées justes que d’idées efficaceme
2379 « philosophie à coups de marteau ». Ce peut être le marteau du constructeur, aussi bien que celui du démolisseur. ⁂ M. Pa
2380 à coups d’épingle. Ce qu’il veut dégonfler, c’est la philosophie avec grand P, la doctrine officielle de la Sorbonne, cett
2381 eut dégonfler, c’est la philosophie avec grand P, la doctrine officielle de la Sorbonne, cette pensée fabriquée par des bo
2382 ilosophie avec grand P, la doctrine officielle de la Sorbonne, cette pensée fabriquée par des bourgeois, pour des bourgeoi
2383 r des bourgeois, destinée à défendre et illustrer la notion bourgeoise de la vie, et payée — en la personne de ses grands
2384 e à défendre et illustrer la notion bourgeoise de la vie, et payée — en la personne de ses grands maîtres — par l’État bou
2385 rer la notion bourgeoise de la vie, et payée — en la personne de ses grands maîtres — par l’État bourgeois. Les Chiens de
2386 ayée — en la personne de ses grands maîtres — par l’ État bourgeois. Les Chiens de garde 39, tel est le titre de son pamphl
2387 nne de ses grands maîtres — par l’État bourgeois. Les Chiens de garde 39, tel est le titre de son pamphlet — ce sont les ph
2388 l’État bourgeois. Les Chiens de garde 39, tel est le titre de son pamphlet — ce sont les philosophes de la Troisième Répub
2389 de 39, tel est le titre de son pamphlet — ce sont les philosophes de la Troisième République. On peut recommander la lectur
2390 s de la Troisième République. On peut recommander la lecture de ce livre, parce qu’il a le mérite de poser simplement, bru
2391 recommander la lecture de ce livre, parce qu’il a le mérite de poser simplement, brutalement, une de ces grandes questions
2392 nt, brutalement, une de ces grandes questions que la pensée moderne a convenu d’appeler « naïves », parce qu’elles sont tr
2393 er « naïves », parce qu’elles sont trop gênantes. Le livre est mal composé. Ses phrases courtes se pressent en paragraphes
2394 eux. Elles redisent trois ou quatre fois de suite la même chose, sans ajouter aucune clarté au dessein général. Mais celui
2395 les qui sont posées ici, qui sont retournées ici. La philosophie présente qui dit et croit qu’elle se déroule au profit de
2396 qui dit et croit qu’elle se déroule au profit de l’ homme, est-elle dirigée réellement, et non plus en discours et croyanc
2397 quoi sert cette philosophie ? Que fait-elle pour les hommes ? Que fait-elle contre eux ? Selon M. Nizan, la philosophie r
2398 mes ? Que fait-elle contre eux ? Selon M. Nizan, la philosophie régnante est caractérisée par son refus d’aborder les que
2399 régnante est caractérisée par son refus d’aborder les questions dites vulgaires, qui conduiraient à des conclusions dangere
2400 i conduiraient à des conclusions dangereuses pour l’ ordre établi. « Nous vivons dans un temps où les philosophes s’abstien
2401 ur l’ordre établi. « Nous vivons dans un temps où les philosophes s’abstiennent. Ils vivent dans un état de scandaleuse abs
2402 cart, une scandaleuse distance entre ce qu’énonce la philosophie et ce qui arrive aux hommes en dépit de sa promesse. » M.
2403 e sa promesse. » M. Brunschvicg fait un cours sur la technique du passage à l’absolu, parle de noumènes, d’immanence, de c
2404 hvicg fait un cours sur la technique du passage à l’ absolu, parle de noumènes, d’immanence, de contingence, et l’on ne voi
2405 arle de noumènes, d’immanence, de contingence, et l’ on ne voit pas, dit M. Nizan, « comment ces produits tératologiques de
2406 . Nizan, « comment ces produits tératologiques de la méditation pourraient expliquer aux hommes vulgaires … la tuberculose
2407 ation pourraient expliquer aux hommes vulgaires … la tuberculose de leurs filles, les colères de leurs femmes, leur servic
2408 ommes vulgaires … la tuberculose de leurs filles, les colères de leurs femmes, leur service militaire et ses humiliations,
2409 ions, leur travail, leur chômage, leurs vacances, les guerres, les grèves, les pourritures de leurs parlements et l’insolen
2410 avail, leur chômage, leurs vacances, les guerres, les grèves, les pourritures de leurs parlements et l’insolence des pouvoi
2411 chômage, leurs vacances, les guerres, les grèves, les pourritures de leurs parlements et l’insolence des pouvoirs ; on ne v
2412 es grèves, les pourritures de leurs parlements et l’ insolence des pouvoirs ; on ne voit pas à quoi mène la philosophie san
2413 solence des pouvoirs ; on ne voit pas à quoi mène la philosophie sans matière, la philosophie sans rime ni raison » … « Il
2414 voit pas à quoi mène la philosophie sans matière, la philosophie sans rime ni raison » … « Il n’y a aucune raison d’écarte
2415 erches tout ce qui intéresse chaque homme et tout l’ homme, et de déclarer « non philosophique » tout ce qui ne tombe pas s
2416 non philosophique » tout ce qui ne tombe pas sous le coup de leurs techniques. On dira sans doute que l’auteur exagère qua
2417 coup de leurs techniques. On dira sans doute que l’ auteur exagère quand il dénonce le péril d’une pensée que l’on peut bi
2418 sans doute que l’auteur exagère quand il dénonce le péril d’une pensée que l’on peut bien appeler scolastique, pensée pur
2419 xagère quand il dénonce le péril d’une pensée que l’ on peut bien appeler scolastique, pensée purement conceptuelle et dépo
2420 ncret. On lui dira que ce n’est pas si grave, que le monde n’est plus mené par les philosophes, qu’il accorde à leur activ
2421 st pas si grave, que le monde n’est plus mené par les philosophes, qu’il accorde à leur activité une importance qu’elle ne
2422 uite des reproches démesurés. Certes40. Mais dans la mesure, si faible soit-elle, où la philosophie actuelle exerce une ac
2423 s40. Mais dans la mesure, si faible soit-elle, où la philosophie actuelle exerce une action, ne fût-ce que sur les étudian
2424 hie actuelle exerce une action, ne fût-ce que sur les étudiants forcés de s’y intéresser au lieu de s’intéresser à notre si
2425 e son entreprise est suffisamment justifiée. Pour le reste, c’est la politique, et dans un sens plus vaste, la religion, q
2426 est suffisamment justifiée. Pour le reste, c’est la politique, et dans un sens plus vaste, la religion, que cela regarde.
2427 , c’est la politique, et dans un sens plus vaste, la religion, que cela regarde. M. Nizan demande inlassablement ce que le
2428 a regarde. M. Nizan demande inlassablement ce que les philosophes bourgeois font et comptent faire pour les hommes. Très bi
2429 philosophes bourgeois font et comptent faire pour les hommes. Très bien. Nous le demandons aussi. (Nous avons même un scept
2430 t comptent faire pour les hommes. Très bien. Nous le demandons aussi. (Nous avons même un scepticisme plus profond que le
2431 ns même un scepticisme plus profond que le sien à l’ endroit des résultats « humains » de toute philosophie.) Mais ensuite,
2432 derons : que fait, que compte faire M. Nizan pour les hommes ? — Il compte leur apporter le marxisme. Or, s’il est clair qu
2433 Nizan pour les hommes ? — Il compte leur apporter le marxisme. Or, s’il est clair que le marxisme prétend travailler pour
2434 leur apporter le marxisme. Or, s’il est clair que le marxisme prétend travailler pour l’homme en général, il n’est pas moi
2435 est clair que le marxisme prétend travailler pour l’ homme en général, il n’est pas moins clair qu’il tombe par là même sou
2436 ’est pas moins clair qu’il tombe par là même sous le coup d’une critique semblable à celle que M. Nizan adresse à M. Bruns
2437 le à celle que M. Nizan adresse à M. Brunschvicg. L’ homme en général, même si on l’appelle avec Marx, l’homme concret (ce
2438 à M. Brunschvicg. L’homme en général, même si on l’ appelle avec Marx, l’homme concret (ce qui n’est encore qu’une formule
2439 homme en général, même si on l’appelle avec Marx, l’ homme concret (ce qui n’est encore qu’une formule), l’homme au singuli
2440 mme concret (ce qui n’est encore qu’une formule), l’ homme au singulier des philosophes, on sait ce qu’en vaut l’aune : ce
2441 singulier des philosophes, on sait ce qu’en vaut l’ aune : ce n’est qu’une extension orgueilleuse et démesurée du type d’h
2442 oupe de philosophes, et qui vient se substituer à la réelle humanité. C’est, pour M. Brunschvicg, le bourgeois. C’est le p
2443 à la réelle humanité. C’est, pour M. Brunschvicg, le bourgeois. C’est le prolétaire pour Marx. Il s’en faut de beaucoup qu
2444 . C’est, pour M. Brunschvicg, le bourgeois. C’est le prolétaire pour Marx. Il s’en faut de beaucoup que la notion du prolé
2445 rolétaire pour Marx. Il s’en faut de beaucoup que la notion du prolétaire marxiste, fondée sur des considérations aussi ab
2446 onsidérations aussi abstraites et discutables que la plus-value, recouvre la réalité de tel homme concret et réel que vous
2447 raites et discutables que la plus-value, recouvre la réalité de tel homme concret et réel que vous ou moi pouvons connaîtr
2448 e vous ou moi pouvons connaître. Mais, en vérité, la lecture du livre de M. Nizan n’inspire pas la certitude qu’il aime le
2449 té, la lecture du livre de M. Nizan n’inspire pas la certitude qu’il aime les hommes, qu’il aime aucun homme réel et concr
2450 de M. Nizan n’inspire pas la certitude qu’il aime les hommes, qu’il aime aucun homme réel et concret. Au contraire, il en é
2451 é plus qu’un partisan convaincu. On sent bien que le triomphe de M. Nizan est dans l’insolence plus que dans le sacrifice
2452 On sent bien que le triomphe de M. Nizan est dans l’ insolence plus que dans le sacrifice à une cause. Je n’insisterais pas
2453 he de M. Nizan est dans l’insolence plus que dans le sacrifice à une cause. Je n’insisterais pas, si ces traits ne me para
2454 ellectuels marxistes, en France particulièrement. Les philosophes ne s’adressent jamais à tel homme dans telle situation qu
2455 urir. Je demande à M. Nizan, qui est marxiste, si la lecture et la pratique de Marx peut apporter une certitude intime, un
2456 de à M. Nizan, qui est marxiste, si la lecture et la pratique de Marx peut apporter une certitude intime, une réalité dire
2457 une humiliation rénovatrice, une joie au sein de la douleur, la force de supporter des souffrances physiques, la force et
2458 tion rénovatrice, une joie au sein de la douleur, la force de supporter des souffrances physiques, la force et la joie d’e
2459 la force de supporter des souffrances physiques, la force et la joie d’envisager la mort comme une transfiguration tragiq
2460 supporter des souffrances physiques, la force et la joie d’envisager la mort comme une transfiguration tragique, la force
2461 rances physiques, la force et la joie d’envisager la mort comme une transfiguration tragique, la force et la joie d’envisa
2462 sager la mort comme une transfiguration tragique, la force et la joie d’envisager la vie comme un combat perpétuel dont l’
2463 t comme une transfiguration tragique, la force et la joie d’envisager la vie comme un combat perpétuel dont l’enjeu est à
2464 uration tragique, la force et la joie d’envisager la vie comme un combat perpétuel dont l’enjeu est à chaque instant total
2465 d’envisager la vie comme un combat perpétuel dont l’ enjeu est à chaque instant total, éternel et urgent. Je demande à M. N
2466 on appel à une philosophie vraiment humaine, dont les pensées concernent chaque homme dans chaque situation de sa vie de ch
2467 a vie de chaque jour, si cet appel n’a pas trouvé la seule réponse possible et réelle dans le message évangélique. Et je d
2468 s trouvé la seule réponse possible et réelle dans le message évangélique. Et je demande maintenant aux chrétiens s’ils le
2469 que. Et je demande maintenant aux chrétiens s’ils le savent eux-mêmes ; s’ils prouvent qu’ils le savent. S’ils n’ont pas t
2470 s’ils le savent eux-mêmes ; s’ils prouvent qu’ils le savent. S’ils n’ont pas trop souvent cherché auprès de philosophes se
2471 , ou même canonisés, une sécurité spirituelle que la Parole de Dieu désigne comme une lâcheté. Car en présence de l’athéis
2472 ieu désigne comme une lâcheté. Car en présence de l’ athéisme militant, nous n’avons plus à prouver vainement que Dieu est 
2473 de cette « révolution permanente » qui doit être l’ état du chrétien vis-à-vis de lui-même et de son passé. C’est le dange
2474 tien vis-à-vis de lui-même et de son passé. C’est le danger qui nous purifiera. « Toute plante que n’a pas plantée mon Pèr
2475 ée. » Et c’est en quoi, du point de vue chrétien, le marxisme radical constitue un progrès sur la libre-pensée : il force
2476 ien, le marxisme radical constitue un progrès sur la libre-pensée : il force au choix, à la prise de conscience. La révol
2477 rogrès sur la libre-pensée : il force au choix, à la prise de conscience. La révolution menaçante viendra comme le châtim
2478 e : il force au choix, à la prise de conscience. La révolution menaçante viendra comme le châtiment de ceux-là mêmes, de
2479 onscience. La révolution menaçante viendra comme le châtiment de ceux-là mêmes, de ceux-là justement qui refusèrent de « 
2480 qui refusèrent de « penser dangereusement ». Mais les marxistes n’y échapperont pas. Car celui qui refuse de penser le péch
2481 y échapperont pas. Car celui qui refuse de penser le péché, refuse d’envisager l’ultime et le plus « grossier » des danger
2482 qui refuse de penser le péché, refuse d’envisager l’ ultime et le plus « grossier » des dangers inhérents à l’être concret.
2483 e penser le péché, refuse d’envisager l’ultime et le plus « grossier » des dangers inhérents à l’être concret. Seul l’Évan
2484 e et le plus « grossier » des dangers inhérents à l’ être concret. Seul l’Évangile — je ne dis pas les religions, ni leurs
2485 er » des dangers inhérents à l’être concret. Seul l’ Évangile — je ne dis pas les religions, ni leurs morales, ni leurs prê
2486 à l’être concret. Seul l’Évangile — je ne dis pas les religions, ni leurs morales, ni leurs prêtres, ni tout leur appareil
2487 s prêtres, ni tout leur appareil d’assurance dans le monde et contre Dieu —, seul l’Évangile est radicalement dangereux, —
2488 d’assurance dans le monde et contre Dieu —, seul l’ Évangile est radicalement dangereux, — salutaire. 38. Aux Éditions d
2489 ent dangereux, — salutaire. 38. Aux Éditions de la Revue française, chez Alexis Rédier, Paris 1932. 39. Chez Rieder, co
2490 M. Nizan cite pas mal de textes qui prouveraient le contraire. s. Rougemont Denis de, « Penser dangereusement », Foi et
16 1933, Foi et Vie, articles (1928–1977). « Histoires du monde, s’il vous plaît ! » (janvier 1933)
2491 du monde, s’il vous plaît ! » (janvier 1933)t Le lecteur moderne est, paraît-il, un homme pressé, beaucoup plus pressé
2492 -il, un homme pressé, beaucoup plus pressé que ne le furent ses ancêtres (serait-ce peut-être à cause des innombrables moy
2493 agner du temps » ? Il semble que tout ce que fait l’ humanité se retourne contre elle-même). Que doit lire un homme pressé,
2494 aux livres autre chose que ce que peut lui offrir le conte du journal, c’est-à-dire s’il demande une nourriture rapidement
2495 ins, sans se lasser du romanesque, découvrent que la littérature peut apporter, sous d’autres formes, un agrément, un repo
2496 lus tonifiants et plus actuels, je veux parler de la vogue récente des essais, genre assurément fort ancien, mais auquel n
2497 emarquable, en effet, de constater, en parcourant les catalogues de librairie allemande, par exemple, que la proportion des
2498 talogues de librairie allemande, par exemple, que la proportion des ouvrages purement romanesques va en diminuant, et cela
2499 u profit d’une littérature qui tient à la fois de l’ histoire, de la politique, de la morale et de la religion. Des livres
2500 littérature qui tient à la fois de l’histoire, de la politique, de la morale et de la religion. Des livres comme l’Essai s
2501 ient à la fois de l’histoire, de la politique, de la morale et de la religion. Des livres comme l’Essai sur la France, de
2502 e l’histoire, de la politique, de la morale et de la religion. Des livres comme l’Essai sur la France, de E. R. Curtius, d
2503 de la morale et de la religion. Des livres comme l’ Essai sur la France, de E. R. Curtius, dont il fut parlé ici même, ou
2504 e et de la religion. Des livres comme l’Essai sur la France, de E. R. Curtius, dont il fut parlé ici même, ou le Dieu est-
2505 de E. R. Curtius, dont il fut parlé ici même, ou le Dieu est-il Français, de F. Sieburg, donneront une idée assez juste d
2506 ccès en Allemagne remonte aux premières années de l’ après-guerre, illustrées par les livres monumentaux de Spengler (Le Dé
2507 remières années de l’après-guerre, illustrées par les livres monumentaux de Spengler (Le Déclin de l’Occident) et du comte
2508 llustrées par les livres monumentaux de Spengler ( Le Déclin de l’Occident) et du comte Keyserling. Il faut reconnaître que
2509 les livres monumentaux de Spengler (Le Déclin de l’ Occident) et du comte Keyserling. Il faut reconnaître que l’état génér
2510 ) et du comte Keyserling. Il faut reconnaître que l’ état général du pays explique que ces ouvrages aient rencontré d’emblé
2511 xplique que ces ouvrages aient rencontré d’emblée le grand succès qu’ils méritaient. Les Allemands vivent « la crise » dep
2512 ontré d’emblée le grand succès qu’ils méritaient. Les Allemands vivent « la crise » depuis 1919, et l’atmosphère de crise b
2513 succès qu’ils méritaient. Les Allemands vivent «  la crise » depuis 1919, et l’atmosphère de crise baigne toutes leurs act
2514 Les Allemands vivent « la crise » depuis 1919, et l’ atmosphère de crise baigne toutes leurs activités, à un degré bien plu
2515 activités, à un degré bien plus profond qu’on ne l’ imagine d’ordinaire en France. En ceci, les Allemands se trouvent être
2516 u’on ne l’imagine d’ordinaire en France. En ceci, les Allemands se trouvent être en quelque sorte plus « actuels », plus di
2517 ctement mêlés au jeu des puissances modernes, que les Français ne le furent jusqu’à ces tout derniers temps. Et c’est là qu
2518 jeu des puissances modernes, que les Français ne le furent jusqu’à ces tout derniers temps. Et c’est là que gît l’explica
2519 qu’à ces tout derniers temps. Et c’est là que gît l’ explication du goût pour l’idéologie que manifeste le grand public all
2520 s. Et c’est là que gît l’explication du goût pour l’ idéologie que manifeste le grand public allemand. Il est bien naturel
2521 xplication du goût pour l’idéologie que manifeste le grand public allemand. Il est bien naturel qu’une société qui jouit d
2522 son divertissement dans des fictions romanesques. Le roman est un genre bourgeois — et c’est peut-être par là qu’il plaît
2523 ’est peut-être par là qu’il plaît tant au peuple. Le bourgeois qui rentre chez lui après 8 heures de bureau demande aux li
2524 eau demande aux livres une évasion facile hors de la médiocre existence quotidienne. Mais l’homme qui toute la journée a s
2525 e hors de la médiocre existence quotidienne. Mais l’ homme qui toute la journée a senti peser sur son œuvre la menace des f
2526 cre existence quotidienne. Mais l’homme qui toute la journée a senti peser sur son œuvre la menace des forces terribles dé
2527 qui toute la journée a senti peser sur son œuvre la menace des forces terribles déchaînées dans le monde contemporain voi
2528 re la menace des forces terribles déchaînées dans le monde contemporain voit bien que la question n’est plus de s’évader,
2529 chaînées dans le monde contemporain voit bien que la question n’est plus de s’évader, de se distraire en oubliant un monde
2530 monde qu’on serait sûr de retrouver bien en place le lendemain. L’angoisse qui plane vaguement, et parfois précisément, su
2531 rait sûr de retrouver bien en place le lendemain. L’ angoisse qui plane vaguement, et parfois précisément, sur la civilisat
2532 qui plane vaguement, et parfois précisément, sur la civilisation actuelle n’est pas quelque chose qu’on esquive comme l’e
2533 uelle n’est pas quelque chose qu’on esquive comme l’ ennui, par de petits moyens. L’homme menacé cherche à se rassurer, et
2534 u’on esquive comme l’ennui, par de petits moyens. L’ homme menacé cherche à se rassurer, et d’abord en essayant de comprend
2535 se rassurer, et d’abord en essayant de comprendre la menace. Il veut des documents, des explications, des directives. Ne f
2536 directives. Ne fût-ce, souvent, que pour motiver l’ appartenance à un parti, ou pour se fournir d’arguments précis et « sé
2537 incompétent. De là cette multitude d’écrits, dont le propos général est d’élucider les causes lointaines ou prochaines de
2538 e d’écrits, dont le propos général est d’élucider les causes lointaines ou prochaines de la crise sans précédent où s’engag
2539 d’élucider les causes lointaines ou prochaines de la crise sans précédent où s’engage l’humanité tout entière. ⁂ En France
2540 prochaines de la crise sans précédent où s’engage l’ humanité tout entière. ⁂ En France, plus longtemps qu’ailleurs, le « g
2541 entière. ⁂ En France, plus longtemps qu’ailleurs, le « grand public » considéra que la lecture d’un livre n’était qu’un mo
2542 ps qu’ailleurs, le « grand public » considéra que la lecture d’un livre n’était qu’un moyen de « passer une heure agréable
2543 qu’un moyen de « passer une heure agréablement ». Le goût des idées, même et surtout dans des cercles littéraires raffinés
2544 d’atteinte au « goût » tout court, c’est-à-dire à la mode. Il fallut la petite équipe des fondateurs de la Nouvelle Revue
2545 t » tout court, c’est-à-dire à la mode. Il fallut la petite équipe des fondateurs de la Nouvelle Revue française pour impo
2546 ode. Il fallut la petite équipe des fondateurs de la Nouvelle Revue française pour imposer, par l’effet d’un snobisme inat
2547 de la Nouvelle Revue française pour imposer, par l’ effet d’un snobisme inattendu, la mode des discussions éthiques, d’ail
2548 our imposer, par l’effet d’un snobisme inattendu, la mode des discussions éthiques, d’ailleurs purement intellectuelles la
2549 purement intellectuelles la plupart du temps, et le goût des « romans qui posent des problèmes ». On appelait cela de la
2550 s qui posent des problèmes ». On appelait cela de la « littérature difficile », non pas qu’une intelligence moyenne éprouv
2551 ligence moyenne éprouvât des difficultés à suivre les développements lumineux d’un André Gide, par exemple, mais simplement
2552 e ces écrits faisaient penser. J’exagère à peine. La littérature de l’après-guerre, faite en grande partie par des hommes
2553 ient penser. J’exagère à peine. La littérature de l’ après-guerre, faite en grande partie par des hommes qui n’avaient pas
2554 grande partie par des hommes qui n’avaient pas eu le temps de se cultiver, est caractérisée par une facilité foncière et b
2555 facilité foncière et bien décevante, sitôt écarté le voile d’obscurité purement formelle dont la mode d’alors recommandait
2556 carté le voile d’obscurité purement formelle dont la mode d’alors recommandait qu’on habillât la moindre historiette senti
2557 dont la mode d’alors recommandait qu’on habillât la moindre historiette sentimentale. Mais tout cela, semble-t-il, s’évan
2558 out cela, semble-t-il, s’évanouit en fumée, comme les fusées d’une fête intempestive. On demande des lumières qui ne soient
2559 tes. On voudrait être dirigé, plutôt qu’ébloui. ⁂ Le roman était un genre bourgeois, en ce sens que dans le monde bourgeoi
2560 man était un genre bourgeois, en ce sens que dans le monde bourgeois, privé de risques et d’aventures réelles, il représen
2561 ntait une évasion, une revanche nécessaire contre l’ ennui, — le royaume illusoire de la fantaisie, de l’héroïsme et des gr
2562 vasion, une revanche nécessaire contre l’ennui, —  le royaume illusoire de la fantaisie, de l’héroïsme et des grands sentim
2563 essaire contre l’ennui, — le royaume illusoire de la fantaisie, de l’héroïsme et des grands sentiments bouleversants. C’ét
2564 ennui, — le royaume illusoire de la fantaisie, de l’ héroïsme et des grands sentiments bouleversants. C’était ce qu’il y av
2565 . C’était ce qu’il y avait de plus subversif dans les salons. « Se nourrir de romans », dans certains milieux, c’était le c
2566 urrir de romans », dans certains milieux, c’était le commencement de la fin, c’était se préparer à « mal finir ». Est-ce l
2567 dans certains milieux, c’était le commencement de la fin, c’était se préparer à « mal finir ». Est-ce le cinéma qui a chan
2568 fin, c’était se préparer à « mal finir ». Est-ce le cinéma qui a changé tout cela ? L’explication tente les journalistes.
2569 inir ». Est-ce le cinéma qui a changé tout cela ? L’ explication tente les journalistes. Mais le cinéma n’est qu’un des eff
2570 néma qui a changé tout cela ? L’explication tente les journalistes. Mais le cinéma n’est qu’un des effets du changement à v
2571 cela ? L’explication tente les journalistes. Mais le cinéma n’est qu’un des effets du changement à vue qui s’opère dans to
2572 tre conception du monde. Dans une époque qui a vu les frontières et les peuples de l’Europe bouleversés ; les régimes choir
2573 monde. Dans une époque qui a vu les frontières et les peuples de l’Europe bouleversés ; les régimes choir ; le plan quinque
2574 époque qui a vu les frontières et les peuples de l’ Europe bouleversés ; les régimes choir ; le plan quinquennal s’édifier
2575 ontières et les peuples de l’Europe bouleversés ; les régimes choir ; le plan quinquennal s’édifier sur les ruines d’un con
2576 les de l’Europe bouleversés ; les régimes choir ; le plan quinquennal s’édifier sur les ruines d’un continent ; l’Amérique
2577 régimes choir ; le plan quinquennal s’édifier sur les ruines d’un continent ; l’Amérique s’enrichir au-delà de toute raison
2578 quennal s’édifier sur les ruines d’un continent ; l’ Amérique s’enrichir au-delà de toute raison européenne, puis s’affoler
2579 er à son tour une révolution ; dans une époque où l’ humanité risque de mourir pour la réalisation même de ses désirs matér
2580 ns une époque où l’humanité risque de mourir pour la réalisation même de ses désirs matériels, dans cette énorme aventure
2581 els, dans cette énorme aventure qui « règne » sur le monde comme une fièvre, le romanesque éclate, remplit nos vies, ou s’
2582 ture qui « règne » sur le monde comme une fièvre, le romanesque éclate, remplit nos vies, ou s’il n’y pénètre pas encore,
2583 remplit nos vies, ou s’il n’y pénètre pas encore, les baigne d’une atmosphère menaçante dont il devient impossible de ne pa
2584 sible de ne pas prendre conscience. Alors, toutes les nouvelles qui nous parviennent du monde sont comme autant d’épisodes
2585 épisodes d’un drame qui intéresse chacun de nous. L’ homme se prend d’un intérêt passionné pour la vie du monde. Et ce fait
2586 ous. L’homme se prend d’un intérêt passionné pour la vie du monde. Et ce fait est nouveau dans l’Histoire. Jamais le docum
2587 pour la vie du monde. Et ce fait est nouveau dans l’ Histoire. Jamais le document n’a été recherché avec une telle avidité.
2588 e. Et ce fait est nouveau dans l’Histoire. Jamais le document n’a été recherché avec une telle avidité. « Ce que je préfèr
2589 e avidité. « Ce que je préfère au cinéma, ce sont les actualités. » Phrase mille fois entendue. Les journaux se couvrent de
2590 ont les actualités. » Phrase mille fois entendue. Les journaux se couvrent de photos. La couverture photographique triomphe
2591 ois entendue. Les journaux se couvrent de photos. La couverture photographique triomphe chez tous les éditeurs. Et ces édi
2592 . La couverture photographique triomphe chez tous les éditeurs. Et ces éditeurs, que publient-ils ? Des collections documen
2593 documentaires, des reportages à grande distance, les mémoires d’Alain Gerbault, les aventures d’Henri de Monfreid, cinquan
2594 à grande distance, les mémoires d’Alain Gerbault, les aventures d’Henri de Monfreid, cinquante volumes sur l’URSS et sur le
2595 ntures d’Henri de Monfreid, cinquante volumes sur l’ URSS et sur le Plan de cinq ans, autant sur les formes américaines de
2596 de Monfreid, cinquante volumes sur l’URSS et sur le Plan de cinq ans, autant sur les formes américaines de la vie sociale
2597 sur l’URSS et sur le Plan de cinq ans, autant sur les formes américaines de la vie sociale, des albums de photos qui pour l
2598 de cinq ans, autant sur les formes américaines de la vie sociale, des albums de photos qui pour la première fois, nous sem
2599 e fois, nous semble-t-il, mettent sur notre table le monde tel qu’il est. Quel romancier pourrait nous apporter l’équivale
2600 qu’il est. Quel romancier pourrait nous apporter l’ équivalent de cette vision directe, exaltante et dépaysante ? Voici le
2601 e vision directe, exaltante et dépaysante ? Voici le monde en vrac, un monde plus absurdement divers que nul esprit ne pou
2602 plus absurdement divers que nul esprit ne pouvait le concevoir. C’est l’expérience de la Renaissance, étendue à toute la p
2603 ers que nul esprit ne pouvait le concevoir. C’est l’ expérience de la Renaissance, étendue à toute la planète. Et c’est ici
2604 it ne pouvait le concevoir. C’est l’expérience de la Renaissance, étendue à toute la planète. Et c’est ici que j’en revien
2605 t l’expérience de la Renaissance, étendue à toute la planète. Et c’est ici que j’en reviens à mon propos initial. Quels qu
2606 en reviens à mon propos initial. Quels que soient les bouleversements sociaux ou culturels, l’homme demeure cet être qui ve
2607 soient les bouleversements sociaux ou culturels, l’ homme demeure cet être qui veut penser le monde. Incapable désormais d
2608 lturels, l’homme demeure cet être qui veut penser le monde. Incapable désormais de s’en distraire en le fuyant, il cherche
2609 e monde. Incapable désormais de s’en distraire en le fuyant, il cherche à l’expliquer, avec une passion nouvelle. Nous avo
2610 mais de s’en distraire en le fuyant, il cherche à l’ expliquer, avec une passion nouvelle. Nous avons vu paraître, il y a q
2611 e volumes à grand succès qui pourraient reprendre le titre fameux de Paul Valéry : Regards sur le monde actuel. Les grande
2612 ndre le titre fameux de Paul Valéry : Regards sur le monde actuel. Les grandes controverses modernes sont nées en France a
2613 eux de Paul Valéry : Regards sur le monde actuel. Les grandes controverses modernes sont nées en France autour de la Trahis
2614 ntroverses modernes sont nées en France autour de la Trahison des clercs, autour du problème de l’humanisme (Conversion à
2615 de la Trahison des clercs, autour du problème de l’ humanisme (Conversion à l’humain, de J. Guéhenno, enquête de Foi et V
2616 , autour du problème de l’humanisme (Conversion à l’ humain, de J. Guéhenno, enquête de Foi et Vie sur l’humanisme nouvea
2617 main, de J. Guéhenno, enquête de Foi et Vie sur l’ humanisme nouveau, ouvrages de Ramon Fernandez, de Drieu la Rochelle,
2618 émieux), autour du problème, plus aigu encore, de la culture bourgeoise et des valeurs révolutionnaires. (Mort de la pensé
2619 rgeoise et des valeurs révolutionnaires. (Mort de la pensée et Mort de la morale bourgeoise d’E. Berl, manifestes de group
2620 s révolutionnaires. (Mort de la pensée et Mort de la morale bourgeoise d’E. Berl, manifestes de groupements de jeunes tels
2621 Esprit, Plans, l’Ordre nouveau, et tout récemment le « Cahier de revendications » publié dans la NRF ). Lorsqu’il y a deu
2622 mment le « Cahier de revendications » publié dans la NRF ). Lorsqu’il y a deux ans, Bernard Grasset, dans un article rete
2623 e retentissant, annonça son intention de « casser les reins au roman », on put croire à un mouvement de mauvaise humeur, vo
2624 , voire à une tentative publicitaire. En réalité, la suite prouva la clairvoyance de l’éditeur, habile à saisir dès leur n
2625 ntative publicitaire. En réalité, la suite prouva la clairvoyance de l’éditeur, habile à saisir dès leur naissance les dés
2626 e. En réalité, la suite prouva la clairvoyance de l’ éditeur, habile à saisir dès leur naissance les désirs à peine conscie
2627 de l’éditeur, habile à saisir dès leur naissance les désirs à peine conscients du grand public. On n’a pas cessé pour auta
2628 pour autant de publier des romans nouveaux, mais le fait est que le seul grand succès, dans cet ordre, est allé au livre
2629 publier des romans nouveaux, mais le fait est que le seul grand succès, dans cet ordre, est allé au livre de Céline, Voyag
2630 e, est allé au livre de Céline, Voyage au bout de la nuit, chef-d’œuvre de « documentaire », mauvais roman… Autre signe :
2631 de « documentaire », mauvais roman… Autre signe : les jeunes maisons, fondées depuis deux ans, se spécialisent de plus en p
2632 is deux ans, se spécialisent de plus en plus dans la publication de collections d’essais : Denoël et Steele lancent des sé
2633 ’essais : Denoël et Steele lancent des séries sur la psychanalyse et sur les penseurs religieux, Corrêa publie presque exc
2634 ele lancent des séries sur la psychanalyse et sur les penseurs religieux, Corrêa publie presque exclusivement des « écrivai
2635 presque exclusivement des « écrivains d’idées », les Éditions du Cavalier poursuivent une enquête européenne sous ce titre
2636 enquête européenne sous ce titre significatif : «  Les Mœurs et l’Esprit des nations 41. » Et l’on pense au titre de cet alb
2637 éenne sous ce titre significatif : « Les Mœurs et l’ Esprit des nations 41. » Et l’on pense au titre de cet album de photos
2638 if : « Les Mœurs et l’Esprit des nations 41. » Et l’ on pense au titre de cet album de photos paru récemment en Allemagne :
2639 , Histoire du monde, s’il vous plaît ! ⁂ Retour à l’ essai rendu nécessaire par le besoin de mettre en ordre l’énorme quant
2640 s plaît ! ⁂ Retour à l’essai rendu nécessaire par le besoin de mettre en ordre l’énorme quantité de faits nouveaux que nou
2641 rendu nécessaire par le besoin de mettre en ordre l’ énorme quantité de faits nouveaux que nous découvrons. Retour à l’inte
2642 é de faits nouveaux que nous découvrons. Retour à l’ intelligence ? Oui, mais non pas à l’intellectualisme. Car, — et j’esp
2643 ns. Retour à l’intelligence ? Oui, mais non pas à l’ intellectualisme. Car, — et j’espère que le lecteur m’aura compris — c
2644 pas à l’intellectualisme. Car, — et j’espère que le lecteur m’aura compris — ce n’est plus de jeux de l’esprit, d’acrobat
2645 lecteur m’aura compris — ce n’est plus de jeux de l’ esprit, d’acrobaties de psychologues, de curiosités académiques ou de
2646 mandarinades qu’il s’agit, mais c’est du sort de l’ homme tel qu’il est, dans son effarante et magnifique diversité. Sort
2647 te et magnifique diversité. Sort menacé, comme il le fut de tout temps, certes, mais de nos jours, plus visiblement, plus
2648 nd il y va de tous, il y va de chacun. 41. Dont le meilleur volume, à ce jour, est sans doute le recueil d’Essais espagn
2649 ont le meilleur volume, à ce jour, est sans doute le recueil d’Essais espagnols, du grand écrivain qu’est José Ortega y Ga
2650 ’est José Ortega y Gasset, l’un des fondateurs de la République espagnole, et l’un des meilleurs exemples de l’influence r
2651 ique espagnole, et l’un des meilleurs exemples de l’ influence réelle et directe que peut exercer un essayiste sur la march
2652 elle et directe que peut exercer un essayiste sur la marche des événements. Nous reviendrons prochainement sur ce livre br
17 1934, Foi et Vie, articles (1928–1977). Destin du siècle ou vocation personnelle ? (février 1934)
2653 (février 1934)u Depuis des années, dans toutes les conférences, dans tous les journaux d’opinion, dans tous les manifest
2654 es années, dans toutes les conférences, dans tous les journaux d’opinion, dans tous les manifestes de partis ou de ligues,
2655 nces, dans tous les journaux d’opinion, dans tous les manifestes de partis ou de ligues, une expression revient comme une v
2656 ession revient comme une véritable hantise, comme le grand lieu commun de la peur qui s’est emparée des hommes. On ne nous
2657 véritable hantise, comme le grand lieu commun de la peur qui s’est emparée des hommes. On ne nous parle plus que du « dés
2658 e, pour qui se borne à considérer notre époque et les doctrines infiniment contradictoires qui s’affrontent au milieu du dé
2659 , pour qui veut prendre position et pénétrer dans la bagarre universelle. Je vois bien le désordre et la contradiction. L’
2660 énétrer dans la bagarre universelle. Je vois bien le désordre et la contradiction. L’argent règne sur notre monde, comme u
2661 bagarre universelle. Je vois bien le désordre et la contradiction. L’argent règne sur notre monde, comme une puissance oc
2662 le. Je vois bien le désordre et la contradiction. L’ argent règne sur notre monde, comme une puissance occulte et pourtant
2663 pour une dictature qui tire son seul prestige de la misère et de la lâcheté publique. Des provinces entières sont ruinées
2664 ure qui tire son seul prestige de la misère et de la lâcheté publique. Des provinces entières sont ruinées par des exploit
2665 entières sont ruinées par des exploitations dont les bénéfices s’engloutissent en deux heures de panique boursière. Les in
2666 ngloutissent en deux heures de panique boursière. Les inventeurs se voient refuser des brevets parce que chaque machine nou
2667 des travailleurs, crée du chômage. Et, cependant, les peuples de toute la terre continuent de croire au Progrès et aux bien
2668 e du chômage. Et, cependant, les peuples de toute la terre continuent de croire au Progrès et aux bienfaits de la richesse
2669 ntinuent de croire au Progrès et aux bienfaits de la richesse. Les campagnes se vident ; les jeunes gens n’ont plus goût à
2670 roire au Progrès et aux bienfaits de la richesse. Les campagnes se vident ; les jeunes gens n’ont plus goût à y vivre. Les
2671 enfaits de la richesse. Les campagnes se vident ; les jeunes gens n’ont plus goût à y vivre. Les villes se congestionnent e
2672 dent ; les jeunes gens n’ont plus goût à y vivre. Les villes se congestionnent et la jeunesse y traîne une misère fiévreuse
2673 s goût à y vivre. Les villes se congestionnent et la jeunesse y traîne une misère fiévreuse. Et, cependant, les politicien
2674 sse y traîne une misère fiévreuse. Et, cependant, les politiciens de tous bords consacrent leur astuce à équilibrer des bud
2675 astuce à équilibrer des budgets, dont ils seront les seuls bénéficiaires. La corruption s’étale, flétrie avec grandiloquen
2676 budgets, dont ils seront les seuls bénéficiaires. La corruption s’étale, flétrie avec grandiloquence par des journaux qui
2677 ui vivent de fonds secrets. C’est à tout cela que l’ on pense lorsqu’on nous parle du « désarroi actuel ». Croit-on vraimen
2678 it-on vraiment que, jusqu’à ces dernières années, la civilisation de l’Occident ait permis plus d’espoirs, favorisé plus d
2679 jusqu’à ces dernières années, la civilisation de l’ Occident ait permis plus d’espoirs, favorisé plus de vertu, mieux assu
2680 s d’espoirs, favorisé plus de vertu, mieux assuré la paix du monde et les rapports normaux entre les hommes ? Croit-on vra
2681 é plus de vertu, mieux assuré la paix du monde et les rapports normaux entre les hommes ? Croit-on vraiment que le « désarr
2682 ré la paix du monde et les rapports normaux entre les hommes ? Croit-on vraiment que le « désarroi » soit seulement « actue
2683 normaux entre les hommes ? Croit-on vraiment que le « désarroi » soit seulement « actuel » et ne veut-on parler de « désa
2684 et ne veut-on parler de « désarroi » que lorsque les valeurs boursières et la tranquillité publique sont menacées ? La vér
2685  désarroi » que lorsque les valeurs boursières et la tranquillité publique sont menacées ? La vérité, c’est que la situati
2686 ières et la tranquillité publique sont menacées ? La vérité, c’est que la situation du monde a été de tout temps désespéré
2687 ité publique sont menacées ? La vérité, c’est que la situation du monde a été de tout temps désespérée. Seulement, mainten
2688 érée. Seulement, maintenant, cela se voit. Depuis la chute du premier homme, depuis le déluge, le monde se débat dans une
2689 se voit. Depuis la chute du premier homme, depuis le déluge, le monde se débat dans une crise millénaire dont les périodes
2690 puis la chute du premier homme, depuis le déluge, le monde se débat dans une crise millénaire dont les périodes dites « pr
2691 le monde se débat dans une crise millénaire dont les périodes dites « prospères » ne sont que les temps de répit, souvent
2692 dont les périodes dites « prospères » ne sont que les temps de répit, souvent déshonorés par la culture des illusions et la
2693 nt que les temps de répit, souvent déshonorés par la culture des illusions et la dégradation du sens de la révolte. L’hist
2694 ouvent déshonorés par la culture des illusions et la dégradation du sens de la révolte. L’histoire du monde, bien loin d’ê
2695 ulture des illusions et la dégradation du sens de la révolte. L’histoire du monde, bien loin d’être l’histoire d’un progrè
2696 llusions et la dégradation du sens de la révolte. L’ histoire du monde, bien loin d’être l’histoire d’un progrès continu, n
2697 la révolte. L’histoire du monde, bien loin d’être l’ histoire d’un progrès continu, nous apparaît plutôt comme une solennel
2698 n de déséquilibres dévorant successivement toutes les possibilités d’aménagement de la terre. Pourtant, certaines époques o
2699 sivement toutes les possibilités d’aménagement de la terre. Pourtant, certaines époques ont connu la grandeur. Ce ne furen
2700 e la terre. Pourtant, certaines époques ont connu la grandeur. Ce ne furent pas les moins corrompues de l’histoire, mais c
2701 s époques ont connu la grandeur. Ce ne furent pas les moins corrompues de l’histoire, mais celles où la corruption permanen
2702 randeur. Ce ne furent pas les moins corrompues de l’ histoire, mais celles où la corruption permanente fut ouvertement reco
2703 es moins corrompues de l’histoire, mais celles où la corruption permanente fut ouvertement reconnue, dénoncée et battue en
2704 i même qu’elle a plus de chances qu’aucune autre. Le vieux « désordre » qui couvait sous des apparences paisibles, est sou
2705 bles, est soudain devenu flagrant. Il promène par les rues de nos villes européennes de grands panneaux-réclame qui parlent
2706 lair. Jamais il ne fut plus facile de reconnaître les choix nécessaires. Désordre, oui, et plus grand que jamais. Désarroi 
2707 e, oui, et plus grand que jamais. Désarroi ? Non. Les doctrines sont contradictoires ? Les évaluations morales sont devenue
2708 arroi ? Non. Les doctrines sont contradictoires ? Les évaluations morales sont devenues presque impossibles ? Oui, certes !
2709 resque impossibles ? Oui, certes ! Sur le plan de la connaissance désintéressée, nous ne trouvons jamais aucun principe qu
2710 ontraire, dès que nous nous posons la question de l’ homme, du rôle de l’homme, du destin de l’homme en face du destin du s
2711 us nous posons la question de l’homme, du rôle de l’ homme, du destin de l’homme en face du destin du siècle, tout se simpl
2712 tion de l’homme, du rôle de l’homme, du destin de l’ homme en face du destin du siècle, tout se simplifie aussitôt ; et si,
2713 destin personnel en face des destins collectifs, le choix nécessaire apparaît avec une netteté qui, je le répète, est la
2714 hoix nécessaire apparaît avec une netteté qui, je le répète, est la chance de notre époque. Je voudrais décrire cette époq
2715 apparaît avec une netteté qui, je le répète, est la chance de notre époque. Je voudrais décrire cette époque, telle qu’el
2716 e, en quelques traits fort simples. J’insiste sur le mot simple, qui me paraît caractériser notre siècle. On dit le contra
2717 , qui me paraît caractériser notre siècle. On dit le contraire un peu partout, je le sais bien. On répète que les événemen
2718 re siècle. On dit le contraire un peu partout, je le sais bien. On répète que les événements nous dominent et qu’ils sont
2719 re un peu partout, je le sais bien. On répète que les événements nous dominent et qu’ils sont incompréhensibles et impensab
2720 aissons trop bien, et dont nous connaissons aussi la signification réelle. C’est l’argument des gens en place qui, chaque
2721 connaissons aussi la signification réelle. C’est l’ argument des gens en place qui, chaque fois que nous venons dire : voi
2722 ce qu’il faut faire, nous répondent : Attention ! le problème est plus complexe ! Non, les problèmes ne sont pas si comple
2723 Attention ! le problème est plus complexe ! Non, les problèmes ne sont pas si complexes, en réalité, ou s’ils le sont, oso
2724 es ne sont pas si complexes, en réalité, ou s’ils le sont, osons les simplifier. Ce qui est difficile, ce n’est pas de voi
2725 si complexes, en réalité, ou s’ils le sont, osons les simplifier. Ce qui est difficile, ce n’est pas de voir le vrai, c’est
2726 ifier. Ce qui est difficile, ce n’est pas de voir le vrai, c’est d’oser les actes qu’il faut, et que nous connaissons très
2727 icile, ce n’est pas de voir le vrai, c’est d’oser les actes qu’il faut, et que nous connaissons très bien. Trop souvent, no
2728 îtres nous ont fourni des méthodes d’évasion dans la complexité. Trop souvent ils nous ont mis en garde contre un « certai
2729 n « certain esprit simpliste », qui est, au vrai, l’ esprit de décision et d’engagement concret dont nous avons le plus bes
2730 décision et d’engagement concret dont nous avons le plus besoin. Cessons de nous réfugier derrière des complexités que no
2731 s que nous créons à plaisir, qui ne sont pas dans la situation et qui sont autant de prétextes à refuser de prendre positi
2732 là, déjà, prendre une position, mais à coup sûr, la pire ! Nous nous sommes laissés endormir. Nos maîtres les plus respec
2733  ! Nous nous sommes laissés endormir. Nos maîtres les plus respectés ont été trop souvent pour nous des professeurs d’abste
2734 rs d’abstention distinguée, des grands prêtres de l’ Insoluble. Mais, un beau jour, les événements nous réveillent brusquem
2735 rands prêtres de l’Insoluble. Mais, un beau jour, les événements nous réveillent brusquement. Maintenant, il va falloir cho
2736 t brusquement. Maintenant, il va falloir choisir. La pensée redevient un danger, un facteur de choix et de risque, et non
2737 plus un refuge idéal. Ne nous en plaignons pas : le risque est la santé de la pensée. ⁂ Destin du siècle ! Expression cu
2738 e idéal. Ne nous en plaignons pas : le risque est la santé de la pensée. ⁂ Destin du siècle ! Expression curieuse et bien
2739 nous en plaignons pas : le risque est la santé de la pensée. ⁂ Destin du siècle ! Expression curieuse et bien moderne ! S
2740 Si nous y regardons de près, nous allons voir que le simple assemblage de ces deux mots, destin et siècle, contient peut-ê
2741 s deux mots, destin et siècle, contient peut-être le secret de tout le mal dont nous souffrons. Il suffit, pour le faire a
2742 n et siècle, contient peut-être le secret de tout le mal dont nous souffrons. Il suffit, pour le faire apparaître, de pose
2743 tout le mal dont nous souffrons. Il suffit, pour le faire apparaître, de poser cette simple question : comment un siècle
2744 tin. Mais aussi chacun de nous a un destin ; dans la mesure où chacun de nous possède une raison d’être, quelle qu’elle so
2745 une passion qui est bien à lui, une vocation. Si l’ on admet facilement de nos jours, qu’un siècle ait un destin, c’est qu
2746 nos jours, qu’un siècle ait un destin, c’est que l’ on a pris l’habitude d’attribuer une sorte de valeur indépendante à de
2747 qu’un siècle ait un destin, c’est que l’on a pris l’ habitude d’attribuer une sorte de valeur indépendante à des êtres coll
2748 es collectifs. Je m’explique. Quand nous disons : le siècle, le xxe siècle par exemple, nous entendons par là une réalité
2749 fs. Je m’explique. Quand nous disons : le siècle, le xxe siècle par exemple, nous entendons par là une réalité historique
2750 très composite, très générale, qui englobe toute l’ humanité, et dont les éléments sont presque tous de nature collective.
2751 s générale, qui englobe toute l’humanité, et dont les éléments sont presque tous de nature collective. L’histoire d’un sièc
2752 éléments sont presque tous de nature collective. L’ histoire d’un siècle, c’est l’histoire des collectivités, c’est l’hist
2753 nature collective. L’histoire d’un siècle, c’est l’ histoire des collectivités, c’est l’histoire des peuples, des nations,
2754 siècle, c’est l’histoire des collectivités, c’est l’ histoire des peuples, des nations, des classes, des races, des entrepr
2755 ques ou privées. Ce n’est que très accessoirement l’ histoire des personnes, de quelques génies, par exemple. Quand nous di
2756 iat, destin du capitalisme, destin du machinisme. Le destin du siècle, c’est le destin des ismes, qui sont — en fin de com
2757 destin du machinisme. Le destin du siècle, c’est le destin des ismes, qui sont — en fin de compte — des abstractions. Et
2758 sont — en fin de compte — des abstractions. Et je le répète, pour que ces ismes aient, à nos yeux, un destin, il faut que
2759 nos yeux, un destin, il faut que nous ayons pris l’ habitude de les considérer comme autant de réalités autonomes, posséda
2760 destin, il faut que nous ayons pris l’habitude de les considérer comme autant de réalités autonomes, possédant leurs lois p
2761 stinée. Autant dire que nous avons fait de toutes les réalités collectives des divinités nouvelles, des divinités presque t
2762 s, et dont nous essayons avec angoisse de scruter les caractères, les habitudes, les intentions secrètes, les destins. Notr
2763 essayons avec angoisse de scruter les caractères, les habitudes, les intentions secrètes, les destins. Notre siècle, en tan
2764 ngoisse de scruter les caractères, les habitudes, les intentions secrètes, les destins. Notre siècle, en tant que siècle, e
2765 ractères, les habitudes, les intentions secrètes, les destins. Notre siècle, en tant que siècle, est athée, totalement athé
2766 st polythéiste et superstitieux au dernier degré. La grande majorité de nos contemporains ne croit pas en Dieu et sait qu’
2767 e n’y croit pas. Mais elle garde chevillé au cœur le besoin d’obéir à des forces invisibles et de leur rendre un culte de
2768 e nous sont prêts à leur sacrifier leur vie même. Les noms de ces divinités, vous les connaissez bien : ce sont l’État, la
2769 er leur vie même. Les noms de ces divinités, vous les connaissez bien : ce sont l’État, la nation, la classe, la race, l’ar
2770 ces divinités, vous les connaissez bien : ce sont l’ État, la nation, la classe, la race, l’argent et l’opinion publique. E
2771 nités, vous les connaissez bien : ce sont l’État, la nation, la classe, la race, l’argent et l’opinion publique. Elles ont
2772 les connaissez bien : ce sont l’État, la nation, la classe, la race, l’argent et l’opinion publique. Elles ont encore un
2773 ssez bien : ce sont l’État, la nation, la classe, la race, l’argent et l’opinion publique. Elles ont encore un autre nom,
2774  : ce sont l’État, la nation, la classe, la race, l’ argent et l’opinion publique. Elles ont encore un autre nom, et qui es
2775 ’État, la nation, la classe, la race, l’argent et l’ opinion publique. Elles ont encore un autre nom, et qui est commun à t
2776 un autre nom, et qui est commun à toutes : c’est le Nombre, c’est peut-être Légion… Sans doute n’avons-nous pas toujours
2777 ans doute n’avons-nous pas toujours conscience de les servir. Vous me direz peut-être que, pour votre compte, la classe ou
2778 . Vous me direz peut-être que, pour votre compte, la classe ou la race vous importent assez peu. Vous jouez, vis-à-vis de
2779 ez peut-être que, pour votre compte, la classe ou la race vous importent assez peu. Vous jouez, vis-à-vis de ces divinités
2780 ssez peu. Vous jouez, vis-à-vis de ces divinités, le rôle d’incroyants, de sceptiques ou même d’adversaires. Mais il y a d
2781 espèce-là d’incroyants, et ce sont, par exemple, l’ opinion publique et la presse, auxquelles nul d’entre nous n’échappe,
2782 s, et ce sont, par exemple, l’opinion publique et la presse, auxquelles nul d’entre nous n’échappe, ni ne songe à échapper
2783 l d’entre nous n’échappe, ni ne songe à échapper. La classe et la race : voilà peut-être les divinités maîtresses de cette
2784 s n’échappe, ni ne songe à échapper. La classe et la race : voilà peut-être les divinités maîtresses de cette première moi
2785 échapper. La classe et la race : voilà peut-être les divinités maîtresses de cette première moitié du siècle. Qu’il s’agis
2786 us prouvent abondamment leurs exigences, qui sont la foi aveugle et les sacrifices humains. Ces dieux ont même leur théolo
2787 mment leurs exigences, qui sont la foi aveugle et les sacrifices humains. Ces dieux ont même leur théologie, scientifique,
2788 ur théologie, scientifique, bien entendu, et dont les deux disciplines principales sont l’Histoire et la Sociologie. Nous
2789 du, et dont les deux disciplines principales sont l’ Histoire et la Sociologie. Nous trouverons les meilleurs exemples de
2790 s deux disciplines principales sont l’Histoire et la Sociologie. Nous trouverons les meilleurs exemples de cette théologi
2791 ont l’Histoire et la Sociologie. Nous trouverons les meilleurs exemples de cette théologie dans les écrits marxistes, plus
2792 ns les meilleurs exemples de cette théologie dans les écrits marxistes, plus intelligents et plus logiques surtout que ceux
2793 haîne en une démonstration inattaquable, une fois les prémisses admises. Quelles sont ces prémisses ? La principale, c’est
2794 s prémisses admises. Quelles sont ces prémisses ? La principale, c’est que toute notre idéologie, toutes nos révoltes, tou
2795 Hitler, selon Trotski, s’explique entièrement par le fait qu’il était, à la fin de la guerre, caporal dans l’armée alleman
2796 s’explique entièrement par le fait qu’il était, à la fin de la guerre, caporal dans l’armée allemande. Son idéologie n’a r
2797 entièrement par le fait qu’il était, à la fin de la guerre, caporal dans l’armée allemande. Son idéologie n’a rien de per
2798 qu’il était, à la fin de la guerre, caporal dans l’ armée allemande. Son idéologie n’a rien de personnel, c’est l’idéologi
2799 mande. Son idéologie n’a rien de personnel, c’est l’ idéologie des petits gradés d’une armée vaincue. L’hypothèse est sédui
2800 ’idéologie des petits gradés d’une armée vaincue. L’ hypothèse est séduisante, vraisemblable même. Que répondra Hitler ? Il
2801 out ce que dit Trotski, s’explique simplement par le fait que Trotski est un Juif. Voilà, n’est-ce pas, deux points de vue
2802 er avec une certaine violence, mais par rapport à l’ homme, ils sont absolument semblables et nous pouvons les renvoyer dos
2803 e, ils sont absolument semblables et nous pouvons les renvoyer dos à dos. L’un et l’autre tendent à nous faire croire que l
2804 . L’un et l’autre tendent à nous faire croire que l’ homme n’est rien, mais moins que rien, et que tout ce qui se passe dan
2805 moins que rien, et que tout ce qui se passe dans le monde obéit à des lois générales et historiques qui échappent à notre
2806 ou] notre race. Destin du siècle contre destin de l’ homme. Il faut bien reconnaître qu’en cette année 1934, l’homme se déf
2807 Il faut bien reconnaître qu’en cette année 1934, l’ homme se défend très mal. Et comment se défendrait-il quand il adore t
2808 ? Nos camarades marxistes ou racistes ont bien vu le danger. Mais ils en tirent une conclusion inattendue. Reprenant le mo
2809 ls en tirent une conclusion inattendue. Reprenant le mot de Goethe, sans le savoir, ils nous enseignent que la loi seule n
2810 sion inattendue. Reprenant le mot de Goethe, sans le savoir, ils nous enseignent que la loi seule nous conduit à la libert
2811 e Goethe, sans le savoir, ils nous enseignent que la loi seule nous conduit à la liberté. Adhérez au déterminisme de l’his
2812 s nous enseignent que la loi seule nous conduit à la liberté. Adhérez au déterminisme de l’histoire, abandonnez votre cher
2813 conduit à la liberté. Adhérez au déterminisme de l’ histoire, abandonnez votre cher petit moi, fondez votre destin dans ce
2814 ndez votre destin dans celui du prolétariat ou de la race aryenne, et toutes vos inquiétudes s’apaiseront. Bien. Mais il
2815 . Mais il faut prendre garde d’abord de confondre le sacrifice et le suicide. L’élan qui jette des millions de nos contemp
2816 rendre garde d’abord de confondre le sacrifice et le suicide. L’élan qui jette des millions de nos contemporains dans les
2817 d’abord de confondre le sacrifice et le suicide. L’ élan qui jette des millions de nos contemporains dans les destins du s
2818 qui jette des millions de nos contemporains dans les destins du siècle, c’est peut-être l’élan d’une fuite devant le desti
2819 rains dans les destins du siècle, c’est peut-être l’ élan d’une fuite devant le destin particulier et la responsabilité de
2820 siècle, c’est peut-être l’élan d’une fuite devant le destin particulier et la responsabilité de chacun. Les brigadiers de
2821 ’élan d’une fuite devant le destin particulier et la responsabilité de chacun. Les brigadiers de choc et les miliciens hit
2822 estin particulier et la responsabilité de chacun. Les brigadiers de choc et les miliciens hitlériens s’indignent de ce repr
2823 sponsabilité de chacun. Les brigadiers de choc et les miliciens hitlériens s’indignent de ce reproche. Ils nous répondent,
2824 s répondent, avec raison, que leur action n’a pas les apparences d’une évasion, d’une démission ; qu’ils n’ont pas fui les
2825 e évasion, d’une démission ; qu’ils n’ont pas fui les risques et qu’ils ont exposé leurs vies. Enfin, qu’ils sont animés pa
2826 rs devraient leur envier. C’est juste. Aussi bien la question revient-elle en définitive à savoir si la foi des marxistes
2827 a question revient-elle en définitive à savoir si la foi des marxistes et des racistes est vraie. Sur quoi se fonde-t-elle
2828 ur quoi se fonde-t-elle ? Quelles réalités sont à la base ? De l’aveu même des sociologues marxistes ou hitlériens, ce son
2829 nde-t-elle ? Quelles réalités sont à la base ? De l’ aveu même des sociologues marxistes ou hitlériens, ce sont des réalité
2830 tatistique ; des considérations, par exemple, sur le développement économique des siècles passés, quand ce ne sont pas des
2831 ssées, historiques, achevées, mortes comme toutes les moyennes, et dans ce sens, abstraites. Sur quoi peut bien se fonder u
2832 ce qui a été fait. Toute loi qu’on découvre dans la société humaine repose sur le principe démissionnaire par excellence
2833 qu’on découvre dans la société humaine repose sur le principe démissionnaire par excellence du déterminisme, qui peut se f
2834 qui peut se formuler ainsi : qui a bu boira ! Or, la seule chose intéressante au monde — et je dis intéressante au sens le
2835 essante au monde — et je dis intéressante au sens le plus profond du terme, la seule chose qui intéresse chacune de nos vi
2836 is intéressante au sens le plus profond du terme, la seule chose qui intéresse chacune de nos vies —, c’est qu’il y ait pa
2837 ’arrête de boire, ne fût-ce que pour faire mentir le proverbe. Les lois générales, économiques ou sociales, sont toujours
2838 ire, ne fût-ce que pour faire mentir le proverbe. Les lois générales, économiques ou sociales, sont toujours justes, dans l
2839 onomiques ou sociales, sont toujours justes, dans la mesure où nous démissionnons de notre rôle d’hommes responsables et c
2840 r rigueur mesure exactement notre dégénérescence. Le philosophe Léon Chestov disait un jour à quelques amis : « Il paraît
2841 ste deux théories tout à fait opposées concernant l’ origine du genre humain. Les uns prétendent que l’homme descend du sin
2842 it opposées concernant l’origine du genre humain. Les uns prétendent que l’homme descend du singe, les autres croient qu’il
2843 l’origine du genre humain. Les uns prétendent que l’ homme descend du singe, les autres croient qu’il a été créé par Dieu.
2844 Les uns prétendent que l’homme descend du singe, les autres croient qu’il a été créé par Dieu. Ils se disputent énormément
2845 ont tort de se disputer, parce qu’ils ont raison les uns et les autres. Ma théorie est la suivante : ceux qui pensent que
2846 e se disputer, parce qu’ils ont raison les uns et les autres. Ma théorie est la suivante : ceux qui pensent que l’homme des
2847 ont raison les uns et les autres. Ma théorie est la suivante : ceux qui pensent que l’homme descend du singe, descendent
2848 Ma théorie est la suivante : ceux qui pensent que l’ homme descend du singe, descendent en effet du singe et constituent un
2849 u singe et constituent une race à part, à côté de la race des hommes créés par Dieu, et qui, eux, croient et savent qu’ils
2850 Marx et de Gobineau. Il est tout à fait vrai que les adeptes du marxisme et du racisme sont entièrement dominés par la cla
2851 rxisme et du racisme sont entièrement dominés par la classe ou la race, et c’est perdre son temps que de contester leur cr
2852 racisme sont entièrement dominés par la classe ou la race, et c’est perdre son temps que de contester leur croyance. Ces h
2853 ur croyance. Ces hommes-là savent au moins ce qui les mène et poussent le monde dans la direction où il doit tomber fatalem
2854 es-là savent au moins ce qui les mène et poussent le monde dans la direction où il doit tomber fatalement, si on le laisse
2855 u moins ce qui les mène et poussent le monde dans la direction où il doit tomber fatalement, si on le laisse tomber. En ce
2856 la direction où il doit tomber fatalement, si on le laisse tomber. En cela, ils sont peut-être supérieurs aux libéraux et
2857 qui tombent, eux aussi, mais continuent d’évoquer la liberté et les idéaux supérieurs dont ils s’éloignent de plus en plus
2858 ux aussi, mais continuent d’évoquer la liberté et les idéaux supérieurs dont ils s’éloignent de plus en plus. Mais j’ai bea
2859 Mais j’ai beau ne pas croire, pour mon compte, à la réalité de tous ces mythes, j’ai beau ne pas croire qu’ils aient le d
2860 ces mythes, j’ai beau ne pas croire qu’ils aient le droit de disposer de nos vies, je suis bien obligé de reconnaître qu’
2861 qu’en fait, ils nous dominent. Ne fût-ce que par le moyen de la presse. On peut dire, sans exagérer, que les journaux dis
2862 ils nous dominent. Ne fût-ce que par le moyen de la presse. On peut dire, sans exagérer, que les journaux disposent de no
2863 en de la presse. On peut dire, sans exagérer, que les journaux disposent de nos vies. Sans eux, la préparation des esprits
2864 que les journaux disposent de nos vies. Sans eux, la préparation des esprits qui prélude à toute guerre moderne bien compr
2865 oderne bien comprise serait impossible. Sans eux, les partis politiques seraient sans force, les luttes sociales perdraient
2866 s eux, les partis politiques seraient sans force, les luttes sociales perdraient beaucoup de leur violence. Sans eux, nous
2867 ut-être aurions-nous un peu plus d’attention pour les vrais problèmes de nos vies. Mais si les journaux disposent de nos vi
2868 ion pour les vrais problèmes de nos vies. Mais si les journaux disposent de nos vies, l’argent dispose des journaux. Et voi
2869 vies. Mais si les journaux disposent de nos vies, l’ argent dispose des journaux. Et voilà le dernier anneau de la chaîne d
2870 spose des journaux. Et voilà le dernier anneau de la chaîne de notre destin. Abrégeons, car, avec l’argent nous n’en finir
2871 e la chaîne de notre destin. Abrégeons, car, avec l’ argent nous n’en finirions pas. L’argent est partout, il est dans tout
2872 eons, car, avec l’argent nous n’en finirions pas. L’ argent est partout, il est dans tout, il est tout et tous le servent.
2873 st partout, il est dans tout, il est tout et tous le servent. ⁂ Destin du siècle, destin des ismes, dévorants et inhumain
2874 endu que cette description a pu faire naître dans l’ esprit de quelques-uns. Je sais que le bon ton, dans certains milieux
2875 naître dans l’esprit de quelques-uns. Je sais que le bon ton, dans certains milieux bien-pensants, veut qu’on dénonce le r
2876 ertains milieux bien-pensants, veut qu’on dénonce le règne de la masse. On s’indigne du nivellement universel, à quoi doit
2877 eux bien-pensants, veut qu’on dénonce le règne de la masse. On s’indigne du nivellement universel, à quoi doit aboutir le
2878 gne du nivellement universel, à quoi doit aboutir le communisme. On raille le caporalisme des jeunes miliciens en chemise
2879 sel, à quoi doit aboutir le communisme. On raille le caporalisme des jeunes miliciens en chemise brune. On nous dit que la
2880 eunes miliciens en chemise brune. On nous dit que la vie, en Amérique, est impossible, parce que tous les appartements son
2881 vie, en Amérique, est impossible, parce que tous les appartements sont pareils et qu’un homme n’a pas le droit de sortir d
2882 appartements sont pareils et qu’un homme n’a pas le droit de sortir dans la rue coiffé d’un chapeau de paille avant la da
2883 ls et qu’un homme n’a pas le droit de sortir dans la rue coiffé d’un chapeau de paille avant la date fixée par les grands
2884 r dans la rue coiffé d’un chapeau de paille avant la date fixée par les grands fournisseurs. On prétend que l’individu se
2885 fé d’un chapeau de paille avant la date fixée par les grands fournisseurs. On prétend que l’individu se perd de plus en plu
2886 fixée par les grands fournisseurs. On prétend que l’ individu se perd de plus en plus dans la masse anonyme. Je crois que c
2887 étend que l’individu se perd de plus en plus dans la masse anonyme. Je crois que c’est là ce qu’il peut faire de mieux. L’
2888 crois que c’est là ce qu’il peut faire de mieux. L’ individu, tel que le concevait le dernier siècle, l’homme isolé qui cu
2889 ce qu’il peut faire de mieux. L’individu, tel que le concevait le dernier siècle, l’homme isolé qui cultivait jalousement
2890 individu, tel que le concevait le dernier siècle, l’ homme isolé qui cultivait jalousement sa petite vie intérieure, à l’ab
2891 cultivait jalousement sa petite vie intérieure, à l’ abri de la Déclaration des droits de l’homme, ne mérite pas qu’on le p
2892 jalousement sa petite vie intérieure, à l’abri de la Déclaration des droits de l’homme, ne mérite pas qu’on le pleure. L’i
2893 ration des droits de l’homme, ne mérite pas qu’on le pleure. L’individu des libéraux, c’était, par excellence, un homme sa
2894 droits de l’homme, ne mérite pas qu’on le pleure. L’ individu des libéraux, c’était, par excellence, un homme sans destin,
2895 mme sans vocation ni raison d’être, un homme dont le monde n’exigeait rien. Cet être-là, fatalement, devait désespérer de
2896 de soi-même et de tout. Et nous vîmes, tôt après la guerre, reparaître le fameux « mal du siècle ». La jeunesse découvrai
2897 t. Et nous vîmes, tôt après la guerre, reparaître le fameux « mal du siècle ». La jeunesse découvrait avec angoisse qu’ell
2898 a guerre, reparaître le fameux « mal du siècle ». La jeunesse découvrait avec angoisse qu’elle n’avait plus rien ni person
2899 lle n’avait plus rien ni personne à servir. C’est l’ état le plus dégradant qui soit. On vit alors, chez les meilleurs de c
2900 vait plus rien ni personne à servir. C’est l’état le plus dégradant qui soit. On vit alors, chez les meilleurs de ces jeun
2901 at le plus dégradant qui soit. On vit alors, chez les meilleurs de ces jeunes gens, se déclarer une épidémie de suicides, q
2902 ne épidémie de suicides, qui ne prit pas toujours la forme romantique du coup de revolver, qui prit même beaucoup plus sou
2903 de revolver, qui prit même beaucoup plus souvent la forme d’un enrôlement dans quelque troupe d’assaut. En vérité, ce ser
2904 rité, ce serait une erreur insondable que de voir le salut de notre époque dans un retour à l’individu. L’individu est l’o
2905 de voir le salut de notre époque dans un retour à l’ individu. L’individu est l’origine la plus certaine du triomphe des ma
2906 alut de notre époque dans un retour à l’individu. L’ individu est l’origine la plus certaine du triomphe des masses. C’est
2907 poque dans un retour à l’individu. L’individu est l’ origine la plus certaine du triomphe des masses. C’est parce que l’ind
2908 un retour à l’individu. L’individu est l’origine la plus certaine du triomphe des masses. C’est parce que l’individu des
2909 certaine du triomphe des masses. C’est parce que l’ individu des libéraux était sans destin, qu’il a cru au destin des aut
2910 ’il n’avait pas de vocation, qu’il a voulu servir la vocation de sa race. La meilleure preuve, d’ailleurs, de l’origine in
2911 ion, qu’il a voulu servir la vocation de sa race. La meilleure preuve, d’ailleurs, de l’origine individualiste des mythes
2912 n de sa race. La meilleure preuve, d’ailleurs, de l’ origine individualiste des mythes collectifs, je la vois dans l’abouti
2913 ’origine individualiste des mythes collectifs, je la vois dans l’aboutissement de ces mythes. On a cru trouver en eux les
2914 vidualiste des mythes collectifs, je la vois dans l’ aboutissement de ces mythes. On a cru trouver en eux les principes d’u
2915 utissement de ces mythes. On a cru trouver en eux les principes d’une communauté nouvelle que l’individualisme avait dissou
2916 n eux les principes d’une communauté nouvelle que l’ individualisme avait dissoute. Il n’y a jamais eu autant de ligues, de
2917 ins d’accord réel, jamais plus de haine déclarée. L’ amour des hommes, transposé dans la collectivité, devient automatiquem
2918 aine déclarée. L’amour des hommes, transposé dans la collectivité, devient automatiquement de la haine. On me dira que la
2919 dans la collectivité, devient automatiquement de la haine. On me dira que la solidarité entre les peuples est désormais u
2920 vient automatiquement de la haine. On me dira que la solidarité entre les peuples est désormais un fait acquis, une réalit
2921 t de la haine. On me dira que la solidarité entre les peuples est désormais un fait acquis, une réalité économique. Nous de
2922 e. Nous devons au progrès mécanique que désormais le globe entier apparaisse solidaire d’une même civilisation. Mais cette
2923 e vaut-elle ? Le premier exemple qui vous vient à l’ esprit, lorsqu’on vous dit que désormais « tout se tient » dans le mon
2924 ’on vous dit que désormais « tout se tient » dans le monde, c’est l’exemple suivant : le krach d’une banque à Paris peut r
2925 désormais « tout se tient » dans le monde, c’est l’ exemple suivant : le krach d’une banque à Paris peut ruiner des petits
2926 tient » dans le monde, c’est l’exemple suivant : le krach d’une banque à Paris peut ruiner des petits rentiers belges et
2927 ut ruiner des petits rentiers belges et jeter sur la paille des milliers d’ouvriers annamites. Oui, certes, tout se tient
2928 mites. Oui, certes, tout se tient désormais. Mais la solidarité des masses est toujours une solidarité catastrophique. Oui
2929 est toujours une solidarité catastrophique. Oui, le destin du siècle, le destin des ismes, ne nous laisse rien prévoir d’
2930 idarité catastrophique. Oui, le destin du siècle, le destin des ismes, ne nous laisse rien prévoir d’autre qu’un monde cha
2931 nstrueuse agglomération d’individus assemblés par la peur et la faim, et la haine, parqués dans des casernes ou des camps
2932 gglomération d’individus assemblés par la peur et la faim, et la haine, parqués dans des casernes ou des camps de travail,
2933 d’individus assemblés par la peur et la faim, et la haine, parqués dans des casernes ou des camps de travail, — et mouran
2934 é ma description du siècle. Est-elle pessimiste à l’ excès ? Ce n’est pas cela qu’il nous importe de savoir. Si j’ai simpli
2935 a qu’il nous importe de savoir. Si j’ai simplifié le tableau, c’est que je veux maintenant dégager le choix, la décision q
2936 le tableau, c’est que je veux maintenant dégager le choix, la décision que chacun d’entre nous peut prendre. ⁂ Destin du
2937 u, c’est que je veux maintenant dégager le choix, la décision que chacun d’entre nous peut prendre. ⁂ Destin du siècle ou
2938 us peut prendre. ⁂ Destin du siècle ou destin de l’ homme ? Loi historique ou acte personnel ? Irresponsable ou responsabl
2939 responsable ? Telle est, je crois, en définitive, la question simple que nous pose l’époque. Vous avez pressenti le parti
2940 , en définitive, la question simple que nous pose l’ époque. Vous avez pressenti le parti que j’embrasse. Il me reste à le
2941 imple que nous pose l’époque. Vous avez pressenti le parti que j’embrasse. Il me reste à le définir en termes positifs, ce
2942 pressenti le parti que j’embrasse. Il me reste à le définir en termes positifs, cette fois. Les dieux, les mythes du sièc
2943 este à le définir en termes positifs, cette fois. Les dieux, les mythes du siècle, sont tout-puissants sur nous. Dénoncer l
2944 éfinir en termes positifs, cette fois. Les dieux, les mythes du siècle, sont tout-puissants sur nous. Dénoncer leurs méfait
2945 leurs méfaits, ce n’est pas encore leur échapper. Les nier purement et simplement, ou désirer leur destruction, c’est de l’
2946 simplement, ou désirer leur destruction, c’est de l’ utopie. Ils sont là, et ils ont probablement leur raison d’être. La cl
2947 t là, et ils ont probablement leur raison d’être. La classe, la race, jouent dans le monde le même rôle que l’instinct dan
2948 s ont probablement leur raison d’être. La classe, la race, jouent dans le monde le même rôle que l’instinct dans l’homme.
2949 ur raison d’être. La classe, la race, jouent dans le monde le même rôle que l’instinct dans l’homme. La culture du xixe s
2950 d’être. La classe, la race, jouent dans le monde le même rôle que l’instinct dans l’homme. La culture du xixe siècle a v
2951 e, la race, jouent dans le monde le même rôle que l’ instinct dans l’homme. La culture du xixe siècle a voulu les ignorer
2952 nt dans le monde le même rôle que l’instinct dans l’ homme. La culture du xixe siècle a voulu les ignorer et nous assiston
2953 e monde le même rôle que l’instinct dans l’homme. La culture du xixe siècle a voulu les ignorer et nous assistons à leur
2954 dans l’homme. La culture du xixe siècle a voulu les ignorer et nous assistons à leur vengeance. Le spiritualisme les a dé
2955 u les ignorer et nous assistons à leur vengeance. Le spiritualisme les a déclarés vulgaires, et l’individualisme les a rat
2956 nous assistons à leur vengeance. Le spiritualisme les a déclarés vulgaires, et l’individualisme les a rationnellement ignor
2957 ce. Le spiritualisme les a déclarés vulgaires, et l’ individualisme les a rationnellement ignorés. Les voilà qui reviennent
2958 sme les a déclarés vulgaires, et l’individualisme les a rationnellement ignorés. Les voilà qui reviennent sous le couvert d
2959 t l’individualisme les a rationnellement ignorés. Les voilà qui reviennent sous le couvert de ce cheval de Troie qui se nom
2960 nnellement ignorés. Les voilà qui reviennent sous le couvert de ce cheval de Troie qui se nomme déterminisme historique. I
2961 éterminisme historique. Il faut croire qu’ils ont la vie dure, et que le mieux à faire pour nous, c’est encore de compter
2962 ue. Il faut croire qu’ils ont la vie dure, et que le mieux à faire pour nous, c’est encore de compter avec eux. Mais compt
2963 ter avec eux. Mais compter avec eux, ce n’est pas les diviser, ni abdiquer sous leur implacable destin. Ceux qui l’ont fait
2964 ni abdiquer sous leur implacable destin. Ceux qui l’ ont fait et qui le font encore, je vois bien ce qui les poussait, je v
2965 eur implacable destin. Ceux qui l’ont fait et qui le font encore, je vois bien ce qui les poussait, je vois bien ce qu’il
2966 t fait et qui le font encore, je vois bien ce qui les poussait, je vois bien ce qu’il y avait d’émouvant dans leur élan ver
2967 rte en s’adressant aux mythes collectifs. C’était l’ homme qu’il fallait refaire. Nous avons oublié ce fait très simple : q
2968 aire. Nous avons oublié ce fait très simple : que la société doit être composée d’hommes réels. Nous avons tout calculé, s
2969 calculé, sauf ce qui est en effet incalculable : l’ acte de l’homme. Mais le temps vient où les hommes se lassent de théor
2970 sauf ce qui est en effet incalculable : l’acte de l’ homme. Mais le temps vient où les hommes se lassent de théories qui ex
2971 t en effet incalculable : l’acte de l’homme. Mais le temps vient où les hommes se lassent de théories qui expliquent tout
2972 lable : l’acte de l’homme. Mais le temps vient où les hommes se lassent de théories qui expliquent tout sauf l’essentiel. V
2973 s se lassent de théories qui expliquent tout sauf l’ essentiel. Voici notre dilemme : voulons-nous être des éléments de sta
2974 onnelle ? Voulons-nous être des personnes ? Voilà le mot lâché. Je connais la réaction qui l’accueille. Hé quoi ! dit-on,
2975 re des personnes ? Voilà le mot lâché. Je connais la réaction qui l’accueille. Hé quoi ! dit-on, en face de tous ces monst
2976  ? Voilà le mot lâché. Je connais la réaction qui l’ accueille. Hé quoi ! dit-on, en face de tous ces monstres menaçants, v
2977 otre chétive personne ? Vous serez emportés comme les autres. Votre réaction est disproportionnée au danger. Et d’ailleurs
2978 nt on nous parle tant depuis quelques années dans les jeunes groupes révolutionnaires de France et de Belgique, dans la rev
2979 s révolutionnaires de France et de Belgique, dans la revue Esprit, et surtout dans les cercles de L’Ordre nouveau. Qu’est-
2980 e Belgique, dans la revue Esprit, et surtout dans les cercles de L’Ordre nouveau. Qu’est-ce que la personne ? Permettez-moi
2981 ans les cercles de L’Ordre nouveau. Qu’est-ce que la personne ? Permettez-moi de renverser la question : Qu’est-ce que ces
2982 t-ce que la personne ? Permettez-moi de renverser la question : Qu’est-ce que ces dieux et ces mythes collectifs ? J’ai es
2983 sayé de vous montrer qu’ils sont des créations de l’ homme, et particulièrement de ce personnage égoïste et, en somme, asse
2984 égoïste et, en somme, assez lâche, qu’on appelle l’ individu. Il faut aller plus loin : les mythes collectifs n’expriment
2985 ’on appelle l’individu. Il faut aller plus loin : les mythes collectifs n’expriment rien de plus qu’une certaine attitude,
2986 ’expriment rien de plus qu’une certaine attitude, l’ attitude démissionnaire de l’homme en fuite devant son destin. Eh bien
2987 e certaine attitude, l’attitude démissionnaire de l’ homme en fuite devant son destin. Eh bien ! la personne à son tour n’e
2988 de l’homme en fuite devant son destin. Eh bien ! la personne à son tour n’est rien d’autre que l’attitude créatrice de l’
2989 n ! la personne à son tour n’est rien d’autre que l’ attitude créatrice de l’homme. Tout, en définitive, se joue dans l’hom
2990 ur n’est rien d’autre que l’attitude créatrice de l’ homme. Tout, en définitive, se joue dans l’homme et se rapporte à lui.
2991 ice de l’homme. Tout, en définitive, se joue dans l’ homme et se rapporte à lui. Dans l’homme, la masse n’a pas plus de pui
2992 , se joue dans l’homme et se rapporte à lui. Dans l’ homme, la masse n’a pas plus de puissance que la personne. Dans l’homm
2993 dans l’homme et se rapporte à lui. Dans l’homme, la masse n’a pas plus de puissance que la personne. Dans l’homme, le cho
2994 s l’homme, la masse n’a pas plus de puissance que la personne. Dans l’homme, le choix peut avoir lieu, effectivement. Et v
2995 e n’a pas plus de puissance que la personne. Dans l’ homme, le choix peut avoir lieu, effectivement. Et votre rôle d’étudia
2996 plus de puissance que la personne. Dans l’homme, le choix peut avoir lieu, effectivement. Et votre rôle d’étudiants, c’es
2997 deur. C’est à vous de rechercher dans vos pensées les origines concrètes de ces grands faits qui bouleversent le monde. C’e
2998 es concrètes de ces grands faits qui bouleversent le monde. C’est à vous de déceler, par exemple, l’origine permanente et
2999 t le monde. C’est à vous de déceler, par exemple, l’ origine permanente et virtuelle des dictatures, dans un fléchissement,
3000 en vous, du sens de votre destinée personnelle. À l’ origine de tout, il y a une attitude de l’homme, j’ai essayé de vous m
3001 elle. À l’origine de tout, il y a une attitude de l’ homme, j’ai essayé de vous montrer l’attitude de celui qui se réfugie
3002 attitude de l’homme, j’ai essayé de vous montrer l’ attitude de celui qui se réfugie dans l’Histoire42, qui pense par péri
3003 s montrer l’attitude de celui qui se réfugie dans l’ Histoire42, qui pense par périodes séculaires, qui rêve et qui pour co
3004 historiquement, il fonde, dès maintenant, en lui, la dictature du nombre et de l’irresponsable. Je pourrais maintenant vou
3005 maintenant, en lui, la dictature du nombre et de l’ irresponsable. Je pourrais maintenant vous donner une contrepartie, te
3006 s donner une contrepartie, tenter de vous décrire la pensée personnaliste, la pensée qui ne veut s’attacher qu’aux seules
3007 , tenter de vous décrire la pensée personnaliste, la pensée qui ne veut s’attacher qu’aux seules tâches immédiates. La per
3008 veut s’attacher qu’aux seules tâches immédiates. La personne, au contraire, de l’individu perdu dans l’Histoire, vit d’in
3009 tâches immédiates. La personne, au contraire, de l’ individu perdu dans l’Histoire, vit d’instant en instant, d’une tâche
3010 personne, au contraire, de l’individu perdu dans l’ Histoire, vit d’instant en instant, d’une tâche à une autre, d’un acte
3011 imprévisible, toujours aventureuse. Elle vit dans le risque et dans la décision, au lieu que l’homme des masses vit dans l
3012 ours aventureuse. Elle vit dans le risque et dans la décision, au lieu que l’homme des masses vit dans l’attente, la révol
3013 t dans le risque et dans la décision, au lieu que l’ homme des masses vit dans l’attente, la révolte et l’impuissance. Je p
3014 décision, au lieu que l’homme des masses vit dans l’ attente, la révolte et l’impuissance. Je pourrais encore vous montrer
3015 u lieu que l’homme des masses vit dans l’attente, la révolte et l’impuissance. Je pourrais encore vous montrer quelles con
3016 omme des masses vit dans l’attente, la révolte et l’ impuissance. Je pourrais encore vous montrer quelles conséquences poli
3017 en mon nom personnel. Quel est donc, nous dit-on, le fondement réel de la personne ? Est-ce une vue philosophique ? Est-ce
3018 Quel est donc, nous dit-on, le fondement réel de la personne ? Est-ce une vue philosophique ? Est-ce une attitude nietzsc
3019 éenne ? Est-ce un choix subjectif ? Vous préférez l’ homme créateur à l’homme qui s’abandonne au destin collectif, mais c’e
3020 hoix subjectif ? Vous préférez l’homme créateur à l’ homme qui s’abandonne au destin collectif, mais c’est peut-être votre
3021 vois qu’une réponse à toutes ces questions, c’est la réponse de l’Évangile. Faites toutes les sociétés que vous voudrez, b
3022 ponse à toutes ces questions, c’est la réponse de l’ Évangile. Faites toutes les sociétés que vous voudrez, bouleversez les
3023 ns, c’est la réponse de l’Évangile. Faites toutes les sociétés que vous voudrez, bouleversez les institutions, organisez le
3024 toutes les sociétés que vous voudrez, bouleversez les institutions, organisez le monde par la contrainte ou dans la liberté
3025 voudrez, bouleversez les institutions, organisez le monde par la contrainte ou dans la liberté, vous ne ferez pas une soc
3026 leversez les institutions, organisez le monde par la contrainte ou dans la liberté, vous ne ferez pas une société si vous
3027 ons, organisez le monde par la contrainte ou dans la liberté, vous ne ferez pas une société si vous n’avez pas, avant tout
3028 société si vous n’avez pas, avant tout, retrouvé le rapport primitif, le rapport véritablement humain, celui qui unit l’h
3029 ez pas, avant tout, retrouvé le rapport primitif, le rapport véritablement humain, celui qui unit l’homme à son prochain.
3030 , le rapport véritablement humain, celui qui unit l’ homme à son prochain. Or, ce prochain, l’Évangile seul nous le désigne
3031 qui unit l’homme à son prochain. Or, ce prochain, l’ Évangile seul nous le désigne, bien plus : il nous ordonne de l’être.
3032 n prochain. Or, ce prochain, l’Évangile seul nous le désigne, bien plus : il nous ordonne de l’être. Et voilà la réalité d
3033 l nous le désigne, bien plus : il nous ordonne de l’ être. Et voilà la réalité décisive. Tous, nous avons reçu de Dieu cet
3034 , bien plus : il nous ordonne de l’être. Et voilà la réalité décisive. Tous, nous avons reçu de Dieu cet ordre : tu aimera
3035 possibles que dans cet acte unique d’obéissance à l’ ordre de Dieu, qui s’appelle l’amour du prochain. Je dis bien : acte,
3036 que d’obéissance à l’ordre de Dieu, qui s’appelle l’ amour du prochain. Je dis bien : acte, et il faut insister là-dessus.
3037 e dis bien : acte, et il faut insister là-dessus. Le monde s’est emparé des paroles du Christ et il les a complètement per
3038 Le monde s’est emparé des paroles du Christ et il les a complètement perverties. On nous a présenté cet amour du prochain c
3039 commode de vivre en société. On a transporté dans l’ histoire cet amour qui doit être un acte, une présence et un engagemen
3040 résence et engagement, ces trois mots définissent la personne, mais aussi ce que Jésus-Christ nous ordonne d’être : le pro
3041 s aussi ce que Jésus-Christ nous ordonne d’être : le prochain. Lorsque les docteurs de la loi voulurent éprouver Jésus, l’
3042 Christ nous ordonne d’être : le prochain. Lorsque les docteurs de la loi voulurent éprouver Jésus, l’un d’entre eux se leva
3043 nne d’être : le prochain. Lorsque les docteurs de la loi voulurent éprouver Jésus, l’un d’entre eux se leva et lui dit : M
3044 dit par une parabole, celle du Bon Samaritain. Et le docteur de la loi découvrit cette vérité que toute sa religion n’avai
3045 rabole, celle du Bon Samaritain. Et le docteur de la loi découvrit cette vérité que toute sa religion n’avait pas pu lui f
3046 sa religion n’avait pas pu lui faire comprendre : le prochain, c’est celui qui exerce, en actes, la miséricorde. Cet acte,
3047  : le prochain, c’est celui qui exerce, en actes, la miséricorde. Cet acte, en chacun de nous, peut être vainqueur de l’Hi
3048 t acte, en chacun de nous, peut être vainqueur de l’ Histoire. Cet acte, à chaque fois qu’il nous est donné de le faire, ré
3049 . Cet acte, à chaque fois qu’il nous est donné de le faire, rétablit le rapport humain, fonde notre destin personnel, et f
3050 e fois qu’il nous est donné de le faire, rétablit le rapport humain, fonde notre destin personnel, et fonde aussi la seule
3051 ain, fonde notre destin personnel, et fonde aussi la seule société possible. Ne nous y trompons pas : l’acte de la miséric
3052 seule société possible. Ne nous y trompons pas : l’ acte de la miséricorde, c’est l’acte le plus révolutionnaire qui ait j
3053 iété possible. Ne nous y trompons pas : l’acte de la miséricorde, c’est l’acte le plus révolutionnaire qui ait jamais paru
3054 y trompons pas : l’acte de la miséricorde, c’est l’ acte le plus révolutionnaire qui ait jamais paru dans notre monde. Lui
3055 pons pas : l’acte de la miséricorde, c’est l’acte le plus révolutionnaire qui ait jamais paru dans notre monde. Lui seul s
3056 paru dans notre monde. Lui seul suffit à vaincre les destins du siècle, lui seul atteint le mal à sa racine, qui est en no
3057 à vaincre les destins du siècle, lui seul atteint le mal à sa racine, qui est en nous, qui est au fond de notre désespoir.
3058 est en nous, qui est au fond de notre désespoir. Les grandes lois historiques et révolutionnaires peuvent bien nous servir
3059 e matérielle. Mais elles ne pénètrent jamais dans l’ intimité de notre être, là où réside le désespoir de l’homme qui ne co
3060 amais dans l’intimité de notre être, là où réside le désespoir de l’homme qui ne connaît pas son destin. Après tout, l’hom
3061 imité de notre être, là où réside le désespoir de l’ homme qui ne connaît pas son destin. Après tout, l’homme désespéré, ce
3062 ’homme qui ne connaît pas son destin. Après tout, l’ homme désespéré, ce qu’il veut, ce n’est pas une explication du désesp
3063 ut, ce n’est pas une explication du désespoir qui le possède, mais c’est une consolation. Je prends ce mot dans son sens l
3064 t une consolation. Je prends ce mot dans son sens le plus fort, tel que le donne l’étymologie. Consoler, c’est littéraleme
3065 prends ce mot dans son sens le plus fort, tel que le donne l’étymologie. Consoler, c’est littéralement : rendre complet, u
3066 mot dans son sens le plus fort, tel que le donne l’ étymologie. Consoler, c’est littéralement : rendre complet, unifier l’
3067 er, c’est littéralement : rendre complet, unifier l’ être, réunir. L’homme désespéré, l’homme sans vocation personnelle, c’
3068 alement : rendre complet, unifier l’être, réunir. L’ homme désespéré, l’homme sans vocation personnelle, c’est un homme inc
3069 mplet, unifier l’être, réunir. L’homme désespéré, l’ homme sans vocation personnelle, c’est un homme incomplet, désuni. Et
3070 c’est un homme incomplet, désuni. Et ce n’est pas la connaissance intellectuelle du destin de sa classe ou de sa race qui
3071 in de sa classe ou de sa race qui va suffire pour l’ arracher à sa misère ; il lui faut une rencontre, un événement, un act
3072 ut une rencontre, un événement, un acte. Et voilà le mystère devant lequel je vous laisse maintenant. Nous ne rencontrons
3073 ne au monde, avant d’avoir rencontré Dieu. 42. L’ Histoire au sens hégélien du mot, c’est-à-dire, plus exactement : l’Év
3074 hégélien du mot, c’est-à-dire, plus exactement : l’ Évolution. u. Rougemont Denis de, « Destin du siècle ou vocation per
18 1934, Foi et Vie, articles (1928–1977). Deux essais de philosophes chrétiens (mai 1934)
3075 -t-il en France de personnes intelligentes ? Pour le juger il ne faudrait sans doute pas se fier au tirage moyen d’un ouvr
3076 e de ce qu’on trouve cela normal. Ce fut toujours le cas, me dira-t-on ? Mais ce n’est point partout le cas. L’exemple de
3077 e cas, me dira-t-on ? Mais ce n’est point partout le cas. L’exemple de l’Allemagne peut nous faire réfléchir. Les philosop
3078 e dira-t-on ? Mais ce n’est point partout le cas. L’ exemple de l’Allemagne peut nous faire réfléchir. Les philosophes y co
3079 Mais ce n’est point partout le cas. L’exemple de l’ Allemagne peut nous faire réfléchir. Les philosophes y connaissent des
3080 exemple de l’Allemagne peut nous faire réfléchir. Les philosophes y connaissent des succès dont rien, ici, ne peut donner l
3081 aissent des succès dont rien, ici, ne peut donner l’ idée ; et même les théologiens. Le Römerbrief, de Barth, en est au 20e
3082 s dont rien, ici, ne peut donner l’idée ; et même les théologiens. Le Römerbrief, de Barth, en est au 20e mille. Un Keyserl
3083 ne peut donner l’idée ; et même les théologiens. Le Römerbrief, de Barth, en est au 20e mille. Un Keyserling, un Heidegge
3084 gger, un Karl Jaspers ont, dès longtemps, conquis le « grand public », celui-là même qui, chez nous, consacre ses loisirs
3085 s loisirs à dévorer des prix Goncourt, justifiant les plus grosses manœuvres publicitaires, et la méfiance des éditeurs à l
3086 iant les plus grosses manœuvres publicitaires, et la méfiance des éditeurs à l’endroit des meilleurs esprits. À qui faut-i
3087 vres publicitaires, et la méfiance des éditeurs à l’ endroit des meilleurs esprits. À qui faut-il s’en prendre ? Aux critiq
3088 à cette espèce nouvelle de critiques qu’on nomme les « courriéristes littéraires ». Ce n’est un secret pour personne qu’il
3089 nne qu’ils contribuent pour beaucoup à déterminer le succès ou l’échec d’une œuvre. Il semblerait, dès lors, que leur auto
3090 ntribuent pour beaucoup à déterminer le succès ou l’ échec d’une œuvre. Il semblerait, dès lors, que leur autorité — sinon
3091 bénéfice des auteurs réputés « difficiles ». Car les autres s’en passent fort bien. Or, c’est exactement le contraire qu’o
3092 tres s’en passent fort bien. Or, c’est exactement le contraire qu’on peut voir. Le critique qui dispose d’un feuilleton ré
3093 r, c’est exactement le contraire qu’on peut voir. Le critique qui dispose d’un feuilleton régulier dans un hebdomadaire ou
3094 son public. Bien loin d’avoir à cœur de signaler les œuvres qui risqueraient, sans lui, d’être incomprises ou ignorées, il
3095 rées, il se contente, la plupart du temps, d’être l’ écho de la vague rumeur entretenue par la publicité autour d’un « succ
3096 e contente, la plupart du temps, d’être l’écho de la vague rumeur entretenue par la publicité autour d’un « succès » de sa
3097 , d’être l’écho de la vague rumeur entretenue par la publicité autour d’un « succès » de saison. Mais l’insuccès notoire d
3098 publicité autour d’un « succès » de saison. Mais l’ insuccès notoire des philosophes auprès du grand public a des causes p
3099 attribuer autant aux philosophes qu’à ceux qui ne les lisent plus. Le public se figure que la philosophie est une activité
3100 aux philosophes qu’à ceux qui ne les lisent plus. Le public se figure que la philosophie est une activité qui ne le concer
3101 x qui ne les lisent plus. Le public se figure que la philosophie est une activité qui ne le concerne pas. Il ne nie pas sa
3102 figure que la philosophie est une activité qui ne le concerne pas. Il ne nie pas sa valeur intrinsèque. Ou, du moins, il i
3103 valeur intrinsèque. Ou, du moins, il ignore qu’il la nie pratiquement. Il répète avec le latin cet adage bourgeois avant l
3104 ignore qu’il la nie pratiquement. Il répète avec le latin cet adage bourgeois avant la lettre : primum vivere, deinde phi
3105 Il répète avec le latin cet adage bourgeois avant la lettre : primum vivere, deinde philosophari. Cynisme ou naïveté ? Car
3106 ase, en fait, supprime toute philosophie. Ou bien le primum vivere se trouve être réalisé, et quel besoin alors d’un deind
3107 mes, sinon qu’ils vivent bien ! On se souvient de la noble réponse de ce proscrit de la Révolution auquel on demandait à s
3108 se souvient de la noble réponse de ce proscrit de la Révolution auquel on demandait à son retour en France ce qu’il avait
3109 ’ai vécu, Monsieur, c’est bien assez ! ». Ou bien le primum vivere se révèle imparfait ; il lui manque quelque chose : pou
3110 rfait ; il lui manque quelque chose : pourra-t-on l’ ajouter après coup ? On ne complète pas un acte avec des considération
3111 ec des considérations sur cet acte ; ou c’est que la philosophie n’est qu’illusion et mystification. Une pensée vivante, u
3112 une pensée qui aide à vivre, trouve son lieu dans l’ acte et nulle part ailleurs. Mais il faudrait d’abord qu’elle soit ell
3113 rd qu’elle soit elle-même un acte43. Et c’est ici la déficience des philosophes qui se montre. Sous prétexte de science, l
3114 losophes qui se montre. Sous prétexte de science, la pensée de nos maîtres s’est tellement détachée du concret de nos vies
3115 est tellement détachée du concret de nos vies que l’ on comprend sans peine l’indifférence où le public la tient. Un philos
3116 concret de nos vies que l’on comprend sans peine l’ indifférence où le public la tient. Un philosophe « sérieux » pour l’U
3117 es que l’on comprend sans peine l’indifférence où le public la tient. Un philosophe « sérieux » pour l’Université c’est tr
3118 n comprend sans peine l’indifférence où le public la tient. Un philosophe « sérieux » pour l’Université c’est trop souvent
3119 e public la tient. Un philosophe « sérieux » pour l’ Université c’est trop souvent un homme que l’étude des problèmes posés
3120 pour l’Université c’est trop souvent un homme que l’ étude des problèmes posés par sa technique détourne des problèmes qui
3121 penser de ces techniques d’abstention ? ⁂ Tel est l’ état des choses. Public et philosophes ont si bien pris l’habitude de
3122 es choses. Public et philosophes ont si bien pris l’ habitude de s’ignorer, qu’on est en droit de se demander si leur renco
3123 se produise, ne signifierait pas une révolution. Les évaluations morales du philosophe et les coutumes du citoyen moderne
3124 olution. Les évaluations morales du philosophe et les coutumes du citoyen moderne ont perdu toute commune mesure. Que se pa
3125 mmune mesure. Que se passerait-il si un beau jour le public se mettait à l’école des penseurs ? On verrait éclater, je pen
3126 sserait-il si un beau jour le public se mettait à l’ école des penseurs ? On verrait éclater, je pense, l’absurdité d’une p
3127 cole des penseurs ? On verrait éclater, je pense, l’ absurdité d’une pensée inhumaine, en même temps que l’incohérence d’un
3128 surdité d’une pensée inhumaine, en même temps que l’ incohérence d’une action trop longtemps dépourvue de tout contrôle spi
3129 ourvue de tout contrôle spirituel. N’est-ce point l’ obscur pressentiment d’un tel péril qui explique, en dernière analyse,
3130 d’un tel péril qui explique, en dernière analyse, la méfiance réciproque dont je viens d’indiquer l’un des symptômes les p
3131 roque dont je viens d’indiquer l’un des symptômes les plus extérieurs ? Supposez, maintenant, que la collusion se produise.
3132 s les plus extérieurs ? Supposez, maintenant, que la collusion se produise. (L’hypothèse n’est pas absurde : elle s’est vé
3133 posez, maintenant, que la collusion se produise. ( L’ hypothèse n’est pas absurde : elle s’est vérifiée en Allemagne, à prop
3134 e, à propos de Spengler par exemple, dont on sait l’ influence qu’il exerça sur les prodromes de l’hitlérisme.) Les risques
3135 xemple, dont on sait l’influence qu’il exerça sur les prodromes de l’hitlérisme.) Les risques qu’elle entraîne sont proprem
3136 ait l’influence qu’il exerça sur les prodromes de l’ hitlérisme.) Les risques qu’elle entraîne sont proprement incalculable
3137 qu’il exerça sur les prodromes de l’hitlérisme.) Les risques qu’elle entraîne sont proprement incalculables. Qui donc voud
3138 ne sont proprement incalculables. Qui donc voudra les encourir ? Ceux-là seuls qui n’ont pas à subordonner la vérité de leu
3139 ourir ? Ceux-là seuls qui n’ont pas à subordonner la vérité de leur message aux calculs de l’opportunisme. Quelques exalté
3140 ordonner la vérité de leur message aux calculs de l’ opportunisme. Quelques exaltés, pensera-t-on ? Quelques cyniques, ou q
3141 és ? Certes, et c’est cela que nous voyons depuis la guerre. On pourrait aussi supposer que la leçon des catastrophes dict
3142 depuis la guerre. On pourrait aussi supposer que la leçon des catastrophes dictatoriales va réveiller quelques chrétiens.
3143 est-il pas de rappeler aux peuples où se trouvent les vraies valeurs, sans attendre que d’autres aient tout faussé, tout co
3144 tout faussé, tout compromis ? Il est certain que la pensée chrétienne n’a jamais eu plus impérieuse ni plus nette vocatio
3145 jamais eu plus impérieuse ni plus nette vocation. Le lieu, les modes de son obéissance sont plus visibles qu’ils ne le fur
3146 plus impérieuse ni plus nette vocation. Le lieu, les modes de son obéissance sont plus visibles qu’ils ne le furent jamais
3147 es de son obéissance sont plus visibles qu’ils ne le furent jamais. Si la pensée chrétienne existe, c’est à ce seul niveau
3148 sont plus visibles qu’ils ne le furent jamais. Si la pensée chrétienne existe, c’est à ce seul niveau où pensée et action
3149 igne de son nom, c’est à elle seule d’oser ce que les autres ne peuvent pas oser. C’est à elle seule d’entreprendre la conf
3150 uvent pas oser. C’est à elle seule d’entreprendre la confrontation générale des valeurs dont le monde croit vivre et des v
3151 rendre la confrontation générale des valeurs dont le monde croit vivre et des valeurs qui jugent cette vie. C’est à elle,
3152 et non pas au marxisme ni au fascisme, à conduire la critique des hérésies morales que toute la bourgeoisie, et le peuple
3153 nduire la critique des hérésies morales que toute la bourgeoisie, et le peuple à sa suite, révèrent. Car elle seule, si to
3154 des hérésies morales que toute la bourgeoisie, et le peuple à sa suite, révèrent. Car elle seule, si toutefois elle reste
3155 seule n’a rien à y perdre. Faut-il rappeler ici les graves avertissements de Berdiaev ? Faut-il une fois de plus évoquer
3156 ts de Berdiaev ? Faut-il une fois de plus évoquer les menaces qui pèsent sur la civilisation ? Ou verra-t-on que le service
3157 e fois de plus évoquer les menaces qui pèsent sur la civilisation ? Ou verra-t-on que le service que la pensée chrétienne
3158 ui pèsent sur la civilisation ? Ou verra-t-on que le service que la pensée chrétienne doit rendre n’est un service rendu a
3159 a civilisation ? Ou verra-t-on que le service que la pensée chrétienne doit rendre n’est un service rendu au monde que si
3160 que si d’abord il est obéissance ? Ce ne sont pas les catastrophes qui devraient effrayer le chrétien, mais le risque plus
3161 sont pas les catastrophes qui devraient effrayer le chrétien, mais le risque plus immédiat de faillir à sa vocation. Ces
3162 strophes qui devraient effrayer le chrétien, mais le risque plus immédiat de faillir à sa vocation. Ces réflexions nous s
3163 oduction à deux essais de philosophes chrétiens : L’ Homme du ressentiment, de Max Scheler44, Position et approches concrèt
3164 urs » que tout le monde sent nécessaire, mais que la foi seule rend possible. ⁂ Max Scheler se rattachait à l’école allema
3165 eule rend possible. ⁂ Max Scheler se rattachait à l’ école allemande des phénoménologues, illustrée par Husserl et Martin H
3166 trée par Husserl et Martin Heidegger. On sait que la coutume de ces philosophes est de fonder leurs analyses sur des total
3167 u’elles se présentent au sein d’un ensemble vécu. Le grand service rendu par la phénoménologie, c’est de nous avoir délivr
3168 in d’un ensemble vécu. Le grand service rendu par la phénoménologie, c’est de nous avoir délivrés d’une psychologie qui di
3169 s avoir délivrés d’une psychologie qui dissociait les unités vivantes en éléments abstraits, et prétendait examiner ensuite
3170 uite ces éléments sans tenir compte du sens et de l’ intention de l’ensemble. La « totalité d’expérience et d’actions vécue
3171 ts sans tenir compte du sens et de l’intention de l’ ensemble. La « totalité d’expérience et d’actions vécues » que Scheler
3172 r compte du sens et de l’intention de l’ensemble. La « totalité d’expérience et d’actions vécues » que Scheler étudie dans
3173 s » que Scheler étudie dans ce petit livre, c’est le phénomène que Nietzsche a baptisé ressentiment. Pour Nietzsche, on s’
3174 ressentiment. Pour Nietzsche, on s’en souvient46, l’ amour chrétien n’est que « la fine fleur du ressentiment » que les nat
3175 on s’en souvient46, l’amour chrétien n’est que «  la fine fleur du ressentiment » que les natures faibles vouent aux valeu
3176 n n’est que « la fine fleur du ressentiment » que les natures faibles vouent aux valeurs aristocratiques. La haine jalouse
3177 tures faibles vouent aux valeurs aristocratiques. La haine jalouse et rancunière de l’esclave opprimé, a trouvé, selon Nie
3178 ristocratiques. La haine jalouse et rancunière de l’ esclave opprimé, a trouvé, selon Nietzsche, son expression détournée d
3179 é, selon Nietzsche, son expression détournée dans l’ affirmation paradoxale que les premiers seront les derniers, ou que la
3180 l’affirmation paradoxale que les premiers seront les derniers, ou que la vraie noblesse réside dans la misère. C’est ce re
3181 xale que les premiers seront les derniers, ou que la vraie noblesse réside dans la misère. C’est ce renversement des valeu
3182 es derniers, ou que la vraie noblesse réside dans la misère. C’est ce renversement des valeurs « nobles » qu’il ne cesse d
3183 e de reprocher au christianisme. Voici comment il le décrit : … l’impuissance qui n’use pas de représailles devient par u
3184 au christianisme. Voici comment il le décrit : … l’ impuissance qui n’use pas de représailles devient par un mensonge, la
3185 ’use pas de représailles devient par un mensonge, la « bonté » ; la craintive bassesse, « humilité » ; la soumission à ceu
3186 résailles devient par un mensonge, la « bonté » ; la craintive bassesse, « humilité » ; la soumission à ceux qu’on hait, «
3187 « bonté » ; la craintive bassesse, « humilité » ; la soumission à ceux qu’on hait, « obéissance » (c’est-à-dire l’obéissan
3188 n à ceux qu’on hait, « obéissance » (c’est-à-dire l’ obéissance à quelqu’un dont ils disent qu’il ordonne cette soumission 
3189 t ils disent qu’il ordonne cette soumission : ils l’ appellent Dieu). Ce qu’il y a d’inoffensif chez l’être faible, sa lâch
3190 l’appellent Dieu). Ce qu’il y a d’inoffensif chez l’ être faible, sa lâcheté, cette lâcheté dont il est riche et qui, chez
3191 e et qui, chez lui, fait antichambre, et attend à la porte, inévitablement, cette lâcheté se pare ici d’un nom bien sonnan
3192 ent « ne pas vouloir se venger », et parfois même le pardon des offenses (« car ils ne savent ce qu’ils font — nous seuls
3193 seuls savons ce qu’ils font »). On parle aussi de l’ « amour de ses ennemis » et l’on « sue à grosses gouttes ». Il est fa
3194 . On parle aussi de l’« amour de ses ennemis » et l’ on « sue à grosses gouttes ». Il est facile de dire que Nietzsche exa
3195 e Nietzsche exagère ; plus difficile de contester la cruelle pénétration dont témoigne un passage de ce genre. Mais si l’o
3196 ion dont témoigne un passage de ce genre. Mais si l’ on donne raison à sa description du ressentiment — ce que je fais pour
3197 s pour ma part sans réserve —, il reste à voir si les causes en sont bien celles que Nietzsche allègue. Pour Scheler, les r
3198 bien celles que Nietzsche allègue. Pour Scheler, les reproches de Nietzsche s’adressent en vérité à l’humanitarisme, et nu
3199 es reproches de Nietzsche s’adressent en vérité à l’ humanitarisme, et nullement à l’Évangile. Le « christianisme » qu’atta
3200 ssent en vérité à l’humanitarisme, et nullement à l’ Évangile. Le « christianisme » qu’attaquait Nietzsche, c’est, en réali
3201 ité à l’humanitarisme, et nullement à l’Évangile. Le « christianisme » qu’attaquait Nietzsche, c’est, en réalité, la moral
3202 isme » qu’attaquait Nietzsche, c’est, en réalité, la morale bourgeoise. Scheler le démontre avec maîtrise dans un chapitre
3203 c’est, en réalité, la morale bourgeoise. Scheler le démontre avec maîtrise dans un chapitre consacré aux valeurs humanita
3204 aux valeurs humanitaires, qui me paraît renfermer l’ essentiel de son livre. Le lecteur se sent pris de vertige à découvrir
3205 qui me paraît renfermer l’essentiel de son livre. Le lecteur se sent pris de vertige à découvrir la profondeur et la gravi
3206 e. Le lecteur se sent pris de vertige à découvrir la profondeur et la gravité des confusions morales dans lesquelles nous
3207 sent pris de vertige à découvrir la profondeur et la gravité des confusions morales dans lesquelles nous vivons. Je ne con
3208 se centrale : nous en sommes venus à substituer «  l’ amour de l’humanité » à l’amour du prochain commandé par le Christ : e
3209  : nous en sommes venus à substituer « l’amour de l’ humanité » à l’amour du prochain commandé par le Christ : et c’est au
3210 es venus à substituer « l’amour de l’humanité » à l’ amour du prochain commandé par le Christ : et c’est au nom de cet amou
3211 e l’humanité » à l’amour du prochain commandé par le Christ : et c’est au nom de cet amour de l’humanité que nous revendiq
3212 é par le Christ : et c’est au nom de cet amour de l’ humanité que nous revendiquons les fausses valeurs décrites par Nietzs
3213 de cet amour de l’humanité que nous revendiquons les fausses valeurs décrites par Nietzsche. Nous ne voulons plus l’acte d
3214 eurs décrites par Nietzsche. Nous ne voulons plus l’ acte d’amour personnel — qui est une valeur héroïque —, mais nous prôn
3215 l exige de nous un moindre sacrifice. (On éloigne l’ amour : ainsi l’amour de la patrie passe avant celui du prochain, l’am
3216 un moindre sacrifice. (On éloigne l’amour : ainsi l’ amour de la patrie passe avant celui du prochain, l’amour du genre hum
3217 sacrifice. (On éloigne l’amour : ainsi l’amour de la patrie passe avant celui du prochain, l’amour du genre humain avant c
3218 amour de la patrie passe avant celui du prochain, l’ amour du genre humain avant celui de la patrie.) Cet humanitarisme ent
3219 prochain, l’amour du genre humain avant celui de la patrie.) Cet humanitarisme entraîne toute une série de perversions :
3220 ersions : un certain altruisme d’abord, qui prend la place de l’acte de miséricorde ; une pitié veule et platonique qui es
3221 certain altruisme d’abord, qui prend la place de l’ acte de miséricorde ; une pitié veule et platonique qui est le contrai
3222 séricorde ; une pitié veule et platonique qui est le contraire du courage et non pas de la cruauté ; un internationalisme
3223 que qui est le contraire du courage et non pas de la cruauté ; un internationalisme qui n’est qu’une rancune contre la pat
3224 internationalisme qui n’est qu’une rancune contre la patrie ; un pacifisme qui traduit bien plus la crainte de « se faire
3225 re la patrie ; un pacifisme qui traduit bien plus la crainte de « se faire des ennemis » que la surnaturelle paix annoncée
3226 n plus la crainte de « se faire des ennemis » que la surnaturelle paix annoncée par le Christ à ceux qui luttent (dans leu
3227 s ennemis » que la surnaturelle paix annoncée par le Christ à ceux qui luttent (dans leurs luttes et au-dessus d’elles) ;
3228 et au-dessus d’elles) ; un égalitarisme qui renie la réalité chrétienne de la vocation… Je suis loin d’épuiser la liste. L
3229 n égalitarisme qui renie la réalité chrétienne de la vocation… Je suis loin d’épuiser la liste. L’extrême gravité que prés
3230 chrétienne de la vocation… Je suis loin d’épuiser la liste. L’extrême gravité que présentent ces perversions de l’Évangile
3231 de la vocation… Je suis loin d’épuiser la liste. L’ extrême gravité que présentent ces perversions de l’Évangile vient de
3232 extrême gravité que présentent ces perversions de l’ Évangile vient de ce que les chrétiens s’y sont laissés prendre. C’est
3233 ent ces perversions de l’Évangile vient de ce que les chrétiens s’y sont laissés prendre. C’est tout le procès de la morale
3234 es chrétiens s’y sont laissés prendre. C’est tout le procès de la morale laïque, ou kantienne, qu’amorce ici Scheler. Je n
3235 s’y sont laissés prendre. C’est tout le procès de la morale laïque, ou kantienne, qu’amorce ici Scheler. Je ne veux donner
3236 qu’un exemple des dissociations qu’il propose. L’ Épargne, autrefois participation de l’idéal évangélique de la pauvreté
3237 propose. L’Épargne, autrefois participation de l’ idéal évangélique de la pauvreté volontaire, c’est-à-dire de la notion
3238 autrefois participation de l’idéal évangélique de la pauvreté volontaire, c’est-à-dire de la notion de sacrifice, et, par
3239 élique de la pauvreté volontaire, c’est-à-dire de la notion de sacrifice, et, par ailleurs, qualité pratique (et non pas v
3240 res seuls, est désormais une vertu sans lien avec la notion de sacrifice ou avec l’idéal évangélique et, pour comble, vert
3241 rtu sans lien avec la notion de sacrifice ou avec l’ idéal évangélique et, pour comble, vertu de riche, mais qui retient en
3242 r comble, vertu de riche, mais qui retient encore le pathos chrétien que renferme le mot. Ces quelques lignes décrivent a
3243 ui retient encore le pathos chrétien que renferme le mot. Ces quelques lignes décrivent assez bien le mouvement général d
3244 le mot. Ces quelques lignes décrivent assez bien le mouvement général de la critique de Scheler. À l’origine de toutes le
3245 gnes décrivent assez bien le mouvement général de la critique de Scheler. À l’origine de toutes les valeurs bourgeoises il
3246 le mouvement général de la critique de Scheler. À l’ origine de toutes les valeurs bourgeoises il n’y a pas la Loi, ni l’Év
3247 de la critique de Scheler. À l’origine de toutes les valeurs bourgeoises il n’y a pas la Loi, ni l’Évangile, il y a tout a
3248 ne de toutes les valeurs bourgeoises il n’y a pas la Loi, ni l’Évangile, il y a tout au contraire une sournoise révolte de
3249 s les valeurs bourgeoises il n’y a pas la Loi, ni l’ Évangile, il y a tout au contraire une sournoise révolte de l’homme na
3250 il y a tout au contraire une sournoise révolte de l’ homme naturel, une poussée de ressentiment contre l’héroïsme chrétien 
3251 homme naturel, une poussée de ressentiment contre l’ héroïsme chrétien ; à l’origine de l’amour de l’humanité, il y a, comm
3252 ée de ressentiment contre l’héroïsme chrétien ; à l’ origine de l’amour de l’humanité, il y a, comme Fichte l’avait vu, une
3253 iment contre l’héroïsme chrétien ; à l’origine de l’ amour de l’humanité, il y a, comme Fichte l’avait vu, une haine des ho
3254 e l’héroïsme chrétien ; à l’origine de l’amour de l’ humanité, il y a, comme Fichte l’avait vu, une haine des hommes ; bien
3255 ne de l’amour de l’humanité, il y a, comme Fichte l’ avait vu, une haine des hommes ; bien plus : une révolte contre Dieu.
3256 des hommes ; bien plus : une révolte contre Dieu. L’ homme du ressentiment, ce n’est pas le chrétien, c’est le bourgeois do
3257 ontre Dieu. L’homme du ressentiment, ce n’est pas le chrétien, c’est le bourgeois dont la morale usurpe l’apparence évangé
3258 du ressentiment, ce n’est pas le chrétien, c’est le bourgeois dont la morale usurpe l’apparence évangélique, en haine de
3259 ce n’est pas le chrétien, c’est le bourgeois dont la morale usurpe l’apparence évangélique, en haine de l’Évangile et de s
3260 hrétien, c’est le bourgeois dont la morale usurpe l’ apparence évangélique, en haine de l’Évangile et de ses exigences conc
3261 orale usurpe l’apparence évangélique, en haine de l’ Évangile et de ses exigences concrètes. Est-il besoin de marquer, pour
3262 oin de marquer, pour finir, que cette critique de l’ esprit bourgeois englobe également le socialisme humanitaire et le mar
3263 critique de l’esprit bourgeois englobe également le socialisme humanitaire et le marxisme, qui sont, à tant d’égards, de
3264 is englobe également le socialisme humanitaire et le marxisme, qui sont, à tant d’égards, de simples aveux des tendances p
3265 e Max Scheler — au moment du moins où il écrivait L’ Homme du ressentiment 47, M. Marcel est catholique. Sa méditation sur
3266 t 47, M. Marcel est catholique. Sa méditation sur le Mystère ontologique est la première œuvre philosophique qu’il ait pub
3267 x dont nous devons attendre qu’il fasse passer de l’ air dans la philosophie française ; un de ceux pour lesquels philosoph
3268 devons attendre qu’il fasse passer de l’air dans la philosophie française ; un de ceux pour lesquels philosopher ne figur
3269 n de ceux pour lesquels philosopher ne figure pas l’ activité de ceux qui n’en veulent point avoir. Son essai manifeste une
3270 ette de passer outre aux prudences intéressées de la scolastique laïque. Nos après-venants seront sans doute fort étonnés
3271 pour utiliser en philosophie des motifs tels que le désespoir, l’espérance, la présence ou la fidélité. Certes, l’exemple
3272 en philosophie des motifs tels que le désespoir, l’ espérance, la présence ou la fidélité. Certes, l’exemple de la phénomé
3273 ie des motifs tels que le désespoir, l’espérance, la présence ou la fidélité. Certes, l’exemple de la phénoménologie a ouv
3274 els que le désespoir, l’espérance, la présence ou la fidélité. Certes, l’exemple de la phénoménologie a ouvert la voie à u
3275 l’espérance, la présence ou la fidélité. Certes, l’ exemple de la phénoménologie a ouvert la voie à une nouvelle liberté d
3276 la présence ou la fidélité. Certes, l’exemple de la phénoménologie a ouvert la voie à une nouvelle liberté de la pensée ;
3277 . Certes, l’exemple de la phénoménologie a ouvert la voie à une nouvelle liberté de la pensée ; mais, jusqu’ici, peu l’ont
3278 ologie a ouvert la voie à une nouvelle liberté de la pensée ; mais, jusqu’ici, peu l’ont suivie, en France. Sachons gré à
3279 velle liberté de la pensée ; mais, jusqu’ici, peu l’ ont suivie, en France. Sachons gré à M. Gabriel Marcel de nous donner
3280 e. Sachons gré à M. Gabriel Marcel de nous donner l’ exemple d’une « présence » et d’une « fidélité » vraiment chrétienne.
3281 « Philosopher, c’est apprendre à mourir », disait le triste Cicéron, et Montaigne l’en loue. Pour M. Marcel, on lui ferait
3282 mourir », disait le triste Cicéron, et Montaigne l’ en loue. Pour M. Marcel, on lui ferait plus volontiers dire que philos
3283 à ne pas se suicider. « On pourrait même dire que la possibilité permanente du suicide est en ce sens48 le point d’amorçag
3284 ossibilité permanente du suicide est en ce sens48 le point d’amorçage peut-être essentiel de toute pensée métaphysique » (
3285 e métaphysique » (p. 276). Je ne puis résumer que les thèmes d’une méditation qui se propose pour objet d’approcher le myst
3286 méditation qui se propose pour objet d’approcher le mystère indéfinissable de l’être. « Il faut qu’il y ait, dit M. Marce
3287 ur objet d’approcher le mystère indéfinissable de l’ être. « Il faut qu’il y ait, dit M. Marcel, ou il faudrait qu’il y eût
3288 ait, dit M. Marcel, ou il faudrait qu’il y eût de l’ être, que tout ne se réduisît pas à un jeu d’apparences successives et
3289 ce dernier mot est essentiel — ou, pour reprendre la phrase de Shakespeare, à une histoire racontée par un idiot » (p. 261
3290 toire de ce genre qui caractérise malheureusement l’ existence de l’homme moderne, emprisonné dans la catégorie du « tout n
3291 re qui caractérise malheureusement l’existence de l’ homme moderne, emprisonné dans la catégorie du « tout naturel » incapa
3292 t l’existence de l’homme moderne, emprisonné dans la catégorie du « tout naturel » incapable, par suite, de s’interroger s
3293 turel » incapable, par suite, de s’interroger sur les sources de son être. Les philosophes lui sont de peu de recours. Ils
3294 ite, de s’interroger sur les sources de son être. Les philosophes lui sont de peu de recours. Ils ont fait de l’être un pro
3295 ophes lui sont de peu de recours. Ils ont fait de l’ être un problème qu’ils placent devant eux et qu’ils se mettent à crit
3296 s’ils n’étaient pas eux-mêmes en jeu ! Mais, dit l’ auteur, « je ne puis me dispenser de me demander du même coup : qui su
3297 u même coup : qui suis-je, moi qui questionne sur l’ être ? »49 (p. 264). Le problème devient alors tout autre chose qu’un
3298 e, moi qui questionne sur l’être ? »49 (p. 264). Le problème devient alors tout autre chose qu’un problème : un mystère.
3299 r elle-même une sorte de participation concrète à l’ être. Démarche négative du désespoir, positive de l’espérance, — elles
3300 être. Démarche négative du désespoir, positive de l’ espérance, — elles sont inséparables jusqu’au bout, note M. Marcel, qu
3301 m’apparaît ici très « dialectique » — démarche de la création qui va toujours dans le sens de l’être, à condition qu’elle
3302  » — démarche de la création qui va toujours dans le sens de l’être, à condition qu’elle soit soutenue par une fidélité qu
3303 he de la création qui va toujours dans le sens de l’ être, à condition qu’elle soit soutenue par une fidélité que l’auteur
3304 dition qu’elle soit soutenue par une fidélité que l’ auteur définit comme « une présence activement perpétuée ». Et tout ce
3305 ement perpétuée ». Et tout cela tend à créer dans l’ âme une disponibilité paradoxale : « parce que l’âme sait qu’elle n’es
3306 l’âme une disponibilité paradoxale : « parce que l’ âme sait qu’elle n’est pas à elle-même, et que le seul usage entièreme
3307 l’âme sait qu’elle n’est pas à elle-même, et que le seul usage entièrement légitime qu’elle puisse faire de sa liberté co
3308 é un certain nombre de motifs vitaux négligés par la technique idéaliste, d’autre part, il faut vivement louer l’auteur de
3309 e idéaliste, d’autre part, il faut vivement louer l’ auteur de conserver à chaque page le souci des références à l’actuel.
3310 ivement louer l’auteur de conserver à chaque page le souci des références à l’actuel. La description qu’il fait de l’homme
3311 conserver à chaque page le souci des références à l’ actuel. La description qu’il fait de l’homme moderne réduit à un compl
3312 à chaque page le souci des références à l’actuel. La description qu’il fait de l’homme moderne réduit à un complexe de fon
3313 férences à l’actuel. La description qu’il fait de l’ homme moderne réduit à un complexe de fonctions ; ses allusions au dés
3314 de fonctions ; ses allusions au désordre social ; la corrélation qu’il indique entre l’optimisme du progrès technique et u
3315 ordre social ; la corrélation qu’il indique entre l’ optimisme du progrès technique et une philosophie du désespoir, — auta
3316 sespoir, — autant de traits qui nous assurent que les problèmes débattus dans ce livre sont de ceux qui se posent ; non poi
3317 ont de ceux qui se posent ; non point de ceux que l’ on se plaît à poser gratuitement pour esquiver les choix concrets. La
3318 l’on se plaît à poser gratuitement pour esquiver les choix concrets. La démarche assez sinueuse, le titre un peu rebutant
3319 er gratuitement pour esquiver les choix concrets. La démarche assez sinueuse, le titre un peu rebutant de cet essai, ne no
3320 r les choix concrets. La démarche assez sinueuse, le titre un peu rebutant de cet essai, ne nous empêcheront pas de voir q
3321 sai, ne nous empêcheront pas de voir qu’il y a là les éléments d’une critique pénétrante de nos modes de vivre, je dirai pl
3322 us : quelques-uns des fondements d’une éthique de l’ être qu’il est urgent que les chrétiens opposent à la « morale des com
3323 ents d’une éthique de l’être qu’il est urgent que les chrétiens opposent à la « morale des commerçants » — comme disait Nie
3324 tre qu’il est urgent que les chrétiens opposent à la « morale des commerçants » — comme disait Nietzsche — qui domine notr
3325 qui domine notre société. 43. On trouvera dans les excellents articles d’Henry Corbin, publiés par Hic et Nunc (n° 1 et
3326 enry Corbin, publiés par Hic et Nunc (n° 1 et 2), le développement de cette thèse : que philosopher ne peut être qu’une fo
3327 orme de vivre. 44. Librairie Gallimard, collect. Les Essais. Traduit de l’allemand par un anonyme. 45. Cet essai constitu
3328 rairie Gallimard, collect. Les Essais. Traduit de l’ allemand par un anonyme. 45. Cet essai constitue la seconde partie d’
3329 constitue la seconde partie d’un volume intitulé le Monde cassé. La première partie est un drame en quatre actes qui n’es
3330 n’est pas à proprement parler une illustration de l’ essai, mais qui est né dans le même temps, et participe de la même pro
3331 une illustration de l’essai, mais qui est né dans le même temps, et participe de la même problématique (Desclée, De Brouwe
3332 is qui est né dans le même temps, et participe de la même problématique (Desclée, De Brouwer). 46. Cf. Généalogie de la M
3333 que (Desclée, De Brouwer). 46. Cf. Généalogie de la Morale (Mercure de France). 47. Converti au catholicisme après avoir
3334 t devenu l’un des chefs du parti catholique parmi les intellectuels allemands, Scheler rompit finalement avec l’Église et r
3335 ectuels allemands, Scheler rompit finalement avec l’ Église et revint à un nietzschéisme violent. On voit percer par endroi
3336 ce livre, une espèce de ressentiment à l’égard de la Réforme : d’où une série d’erreurs assez grossières sur Luther. 48.
3337 série d’erreurs assez grossières sur Luther. 48. L’ auteur entend : relativement à la possibilité universelle du désespoir
3338 sur Luther. 48. L’auteur entend : relativement à la possibilité universelle du désespoir. Un rapprochement avec Kierkegaa
3339 araît s’imposer ici. 49. M. Marcel introduit ici le motif du recueillement, qui lui paraît essentiel à toute existence on
3340 essentiel à toute existence ontologique. J’avoue la plus vive méfiance à l’égard de ce terme qui me paraît dangereusement
3341 paraît dangereusement lié à certain idéalisme de la « vie intérieure ». Je ne vois pas où le recueillement décrit par M.
3342 lisme de la « vie intérieure ». Je ne vois pas où le recueillement décrit par M. Marcel trouverait sa place, entre la priè
3343 t décrit par M. Marcel trouverait sa place, entre la prière et l’acte, seuls moments d’unité dans la vie du chrétien. v.
3344 M. Marcel trouverait sa place, entre la prière et l’ acte, seuls moments d’unité dans la vie du chrétien. v. Rougemont De
3345 e la prière et l’acte, seuls moments d’unité dans la vie du chrétien. v. Rougemont Denis de, « Deux essais de philosophe
19 1934, Foi et Vie, articles (1928–1977). Notice biographique [Kierkegaard] (août 1934)
3346 uit volumes de papiers posthumes, fut composée en l’ espace de douze années. Le père de Kierkegaard avait passé son enfance
3347 thumes, fut composée en l’espace de douze années. Le père de Kierkegaard avait passé son enfance à garder les moutons dans
3348 e de Kierkegaard avait passé son enfance à garder les moutons dans la plaine du Jutland. Un jour, accablé par la misère, il
3349 avait passé son enfance à garder les moutons dans la plaine du Jutland. Un jour, accablé par la misère, il était monté sur
3350 s dans la plaine du Jutland. Un jour, accablé par la misère, il était monté sur un petit tertre et il avait maudit le Dieu
3351 tait monté sur un petit tertre et il avait maudit le Dieu tout-puissant qui le laissait mourir de faim. Ce blasphème assom
3352 rtre et il avait maudit le Dieu tout-puissant qui le laissait mourir de faim. Ce blasphème assombrit toute sa vie ; il ne
3353 faim. Ce blasphème assombrit toute sa vie ; il ne l’ empêcha pas de faire fortune. Et c’est ainsi que Kierkegaard reçut en
3354 lle. Du secret il tira son œuvre ; sa fortune, il la confia à l’un de ses frères, ne voulant pas avoir affaire aux banques
3355 squ’il mourut, à 42 ans, il n’en subsistait rien. L’ argent provenait d’une malédiction, pensait-il, il l’avait donc dilapi
3356 rgent provenait d’une malédiction, pensait-il, il l’ avait donc dilapidé, surtout en dons. Sa vie était très simple. Il tra
3357 très simple. Il travaillait une grande partie de la nuit. Il aimait se promener à l’aube. Puis il se remettait à écrire.
3358 grande partie de la nuit. Il aimait se promener à l’ aube. Puis il se remettait à écrire. Vers midi, on le voyait parcourir
3359 ube. Puis il se remettait à écrire. Vers midi, on le voyait parcourir la rue la plus animée de la ville, parler, rire et d
3360 ttait à écrire. Vers midi, on le voyait parcourir la rue la plus animée de la ville, parler, rire et discuter avec des bou
3361 écrire. Vers midi, on le voyait parcourir la rue la plus animée de la ville, parler, rire et discuter avec des bourgeois,
3362 , on le voyait parcourir la rue la plus animée de la ville, parler, rire et discuter avec des bourgeois, des jeunes filles
3363 jeunes filles, des balayeurs, des intellectuels, le petit peuple. On connaissait sa silhouette, ses plaisanteries, il ava
3364 gende d’« original ». On savait aussi qu’il était le meilleur écrivain de son pays. Sa première œuvre eut un immense succè
3365 ès ; mais à mesure qu’il se fit mieux comprendre, le public s’écarta, effrayé. Lorsqu’en 1854 il se mit à attaquer de fron
3366 t à attaquer de front, avec une extrême violence, le christianisme officiel et les évêques qui avaient loué ses premières
3367 ne extrême violence, le christianisme officiel et les évêques qui avaient loué ses premières œuvres, il se vit abandonné da
3368 ué ses premières œuvres, il se vit abandonné dans la plus complète solitude qu’ait jamais connue un grand esprit. Un an pl
3369 nnue un grand esprit. Un an plus tard, épuisé par la lutte, il tomba dans la rue. On le transporta à l’hôpital, où il mour
3370 an plus tard, épuisé par la lutte, il tomba dans la rue. On le transporta à l’hôpital, où il mourut paisiblement, en « sa
3371 rd, épuisé par la lutte, il tomba dans la rue. On le transporta à l’hôpital, où il mourut paisiblement, en « saluant tous
3372 a lutte, il tomba dans la rue. On le transporta à l’ hôpital, où il mourut paisiblement, en « saluant tous les hommes ». Le
3373 tal, où il mourut paisiblement, en « saluant tous les hommes ». Le seul événement extérieur de sa vie fut la rupture de ses
3374 rut paisiblement, en « saluant tous les hommes ». Le seul événement extérieur de sa vie fut la rupture de ses fiançailles
3375 mmes ». Le seul événement extérieur de sa vie fut la rupture de ses fiançailles avec Régine Olsen. Mais son acte, après le
3376 ir accompli sa mission, ce fut son attaque contre le christianisme officiel, au nom du Christ de l’Évangile. Il avait term
3377 au nom du Christ de l’Évangile. Il avait terminé les études de théologie, mais il ne fut jamais pasteur. Il lui arriva pou
3378 pourtant de prêcher, et ses sermons, réunis sous le titre général de Discours d’édification, remplissent plusieurs volume
3379 ication, remplissent plusieurs volumes. Ce furent les seuls écrits qu’il publia sous son nom. Tous ses ouvrages esthétiques
3380 us ses ouvrages esthétiques et philosophiques, de la Répétition à l’Exercice du christianisme, en passant par la Maladie m
3381 esthétiques et philosophiques, de la Répétition à l’ Exercice du christianisme, en passant par la Maladie mortelle 50 et le
3382 ion à l’Exercice du christianisme, en passant par la Maladie mortelle 50 et le Concept d’angoisse, parurent sous divers ps
3383 ianisme, en passant par la Maladie mortelle 50 et le Concept d’angoisse, parurent sous divers pseudonymes symboliques. Il
3384 par là que ces ouvrages n’exprimaient pas encore la totalité de son message chrétien, et qu’il ne pouvait pas en assumer
3385 sage chrétien, et qu’il ne pouvait pas en assumer l’ entière responsabilité devant Dieu et devant les hommes. Ce ne fut qu’
3386 er l’entière responsabilité devant Dieu et devant les hommes. Ce ne fut qu’à la fin de sa vie qu’il s’offrit sans masques à
3387 devant Dieu et devant les hommes. Ce ne fut qu’à la fin de sa vie qu’il s’offrit sans masques à la lutte contre l’Église
3388 ’à la fin de sa vie qu’il s’offrit sans masques à la lutte contre l’Église établie, lutte qui devait le mener à la mort pa
3389 vie qu’il s’offrit sans masques à la lutte contre l’ Église établie, lutte qui devait le mener à la mort parce qu’elle acco
3390 a lutte contre l’Église établie, lutte qui devait le mener à la mort parce qu’elle accomplissait sa vocation chrétienne. ⁂
3391 tre l’Église établie, lutte qui devait le mener à la mort parce qu’elle accomplissait sa vocation chrétienne. ⁂ On a compa
3392 à tendance religieuse » et non pas un « témoin de la vérité » ; c’est qu’il se faisait du christianisme une idée si pure e
3393 dire chrétien. Cette position paradoxale a permis les interprétations les plus diverses. Elle assure aussi à sa pensée une
3394 position paradoxale a permis les interprétations les plus diverses. Elle assure aussi à sa pensée une influence multiforme
3395 ne influence multiforme, et qui va croissant avec le temps. La philosophie allemande contemporaine, avec ses deux grands m
3396 ce multiforme, et qui va croissant avec le temps. La philosophie allemande contemporaine, avec ses deux grands maîtres, He
3397 eidegger et Jaspers, procède de sa philosophie de l’ existence. La théologie barthienne se réclame de sa thèse principale :
3398 aspers, procède de sa philosophie de l’existence. La théologie barthienne se réclame de sa thèse principale : « Il y a une
3399 une différence qualitative infinie entre Dieu et l’ homme. » Le sens réel et profond de toute son œuvre réside dans sa pro
3400 ence qualitative infinie entre Dieu et l’homme. » Le sens réel et profond de toute son œuvre réside dans sa protestation à
3401 et pourtant foncièrement charitable en faveur de l’ absolu évangélique. Voici le jugement qu’un des meilleurs critiques de
3402 aritable en faveur de l’absolu évangélique. Voici le jugement qu’un des meilleurs critiques de ce temps51 a porté sur l’en
3403 des meilleurs critiques de ce temps51 a porté sur l’ ensemble de ses écrits : Kierkegaard fut le dernier grand protestant.
3404 gaard fut le dernier grand protestant. On ne peut le comparer qu’aux grands fondateurs du christianisme, à Luther, à Calvi
3405 ateurs du christianisme, à Luther, à Calvin. Tous les autres paraissent petits à côté de lui. La question essentielle pour
3406 Tous les autres paraissent petits à côté de lui. La question essentielle pour Kierkegaard était : Comment deviendrai-je c
3407 , un protestant pouvait trouver pareille formule… L’ œuvre la plus profonde et la plus originale de Kierkegaard est son Con
3408 testant pouvait trouver pareille formule… L’œuvre la plus profonde et la plus originale de Kierkegaard est son Concept de
3409 ver pareille formule… L’œuvre la plus profonde et la plus originale de Kierkegaard est son Concept de l’angoisse, auquel o
3410 plus originale de Kierkegaard est son Concept de l’ angoisse, auquel on ne peut trouver d’analogie que chez Dostoïevski. K
3411 chent de pair, et aucun autre esprit du siècle ne les dépasse. 50. Traduite en français sous le titre de Traité du déses
3412 ne les dépasse. 50. Traduite en français sous le titre de Traité du désespoir. 51. Rudolf Kassner, dans Commerce, n°
20 1934, Foi et Vie, articles (1928–1977). Nécessité de Kierkegaard (août 1934)
3413 ssité de Kierkegaard (août 1934)x On appelle l’ esprit… De quoi se plaint l’intelligence ? Si l’on en croit les écr
3414 )x On appelle l’esprit… De quoi se plaint l’ intelligence ? Si l’on en croit les écrits les plus dignes de formuler
3415 ’esprit… De quoi se plaint l’intelligence ? Si l’ on en croit les écrits les plus dignes de formuler son opinion, et qui
3416 quoi se plaint l’intelligence ? Si l’on en croit les écrits les plus dignes de formuler son opinion, et qui sont pleins d’
3417 aint l’intelligence ? Si l’on en croit les écrits les plus dignes de formuler son opinion, et qui sont pleins d’amères prot
3418 et qui sont pleins d’amères protestations contre le règne de la masse et les outrages divers encourus par l’individu, les
3419 pleins d’amères protestations contre le règne de la masse et les outrages divers encourus par l’individu, les Puissances
3420 ères protestations contre le règne de la masse et les outrages divers encourus par l’individu, les Puissances anonymes et l
3421 e de la masse et les outrages divers encourus par l’ individu, les Puissances anonymes et le Standard seraient en voie de t
3422 e et les outrages divers encourus par l’individu, les Puissances anonymes et le Standard seraient en voie de triompher, et
3423 courus par l’individu, les Puissances anonymes et le Standard seraient en voie de triompher, et ce serait aux dépens de l’
3424 en voie de triompher, et ce serait aux dépens de l’ humain. Au sein de cette crise que l’on dit sans précédent, que fait l
3425 ux dépens de l’humain. Au sein de cette crise que l’ on dit sans précédent, que fait l’individu pour se défendre ? Et quels
3426 cette crise que l’on dit sans précédent, que fait l’ individu pour se défendre ? Et quels titres à l’existence vient-il pro
3427 t l’individu pour se défendre ? Et quels titres à l’ existence vient-il produire ? Car il est excellent de défendre son moi
3428 oi, surtout lorsqu’il détient plus de réalité que l’ anonyme. Mais encore, il faudrait que ce moi fût fondé. Ce n’est pas é
3429 ce moi fût fondé. Ce n’est pas évident de soi, si l’ on peut dire : les marxistes le nient avec plus de passion que les bou
3430 Ce n’est pas évident de soi, si l’on peut dire : les marxistes le nient avec plus de passion que les bourgeois n’apportent
3431 évident de soi, si l’on peut dire : les marxistes le nient avec plus de passion que les bourgeois n’apportent à l’affirmer
3432 : les marxistes le nient avec plus de passion que les bourgeois n’apportent à l’affirmer. D’un côté, nous voyons une foi, d
3433 c plus de passion que les bourgeois n’apportent à l’ affirmer. D’un côté, nous voyons une foi, de l’autre, une mauvaise hum
3434 ins pensent : une mauvaise conscience. Que disent les collectivistes ? Que le grand nombre est plus précieux que le petit :
3435 e conscience. Que disent les collectivistes ? Que le grand nombre est plus précieux que le petit : Que la vie de l’esprit
3436 istes ? Que le grand nombre est plus précieux que le petit : Que la vie de l’esprit n’est possible que si l’on a d’abord a
3437 grand nombre est plus précieux que le petit : Que la vie de l’esprit n’est possible que si l’on a d’abord assuré l’autre v
3438 re est plus précieux que le petit : Que la vie de l’ esprit n’est possible que si l’on a d’abord assuré l’autre vie, la vie
3439 it : Que la vie de l’esprit n’est possible que si l’ on a d’abord assuré l’autre vie, la vie des corps, les conditions phys
3440 ossible que si l’on a d’abord assuré l’autre vie, la vie des corps, les conditions physiques de l’existence. Que la justic
3441 n a d’abord assuré l’autre vie, la vie des corps, les conditions physiques de l’existence. Que la justice est dans l’égalit
3442 ie, la vie des corps, les conditions physiques de l’ existence. Que la justice est dans l’égalité de tous, et la vertu dans
3443 rps, les conditions physiques de l’existence. Que la justice est dans l’égalité de tous, et la vertu dans l’opinion publiq
3444 physiques de l’existence. Que la justice est dans l’ égalité de tous, et la vertu dans l’opinion publique. Que l’histoire é
3445 ce. Que la justice est dans l’égalité de tous, et la vertu dans l’opinion publique. Que l’histoire évolue selon des lois f
3446 tice est dans l’égalité de tous, et la vertu dans l’ opinion publique. Que l’histoire évolue selon des lois fatales, et que
3447 de tous, et la vertu dans l’opinion publique. Que l’ histoire évolue selon des lois fatales, et que la volonté de quelques-
3448 l’histoire évolue selon des lois fatales, et que la volonté de quelques-uns n’y changera rien. Que la révolte, enfin, d’u
3449 la volonté de quelques-uns n’y changera rien. Que la révolte, enfin, d’un seul contre la foule serait la marque d’un affre
3450 era rien. Que la révolte, enfin, d’un seul contre la foule serait la marque d’un affreux orgueil, si d’abord elle ne témoi
3451 révolte, enfin, d’un seul contre la foule serait la marque d’un affreux orgueil, si d’abord elle ne témoignait d’un ridic
3452 cule défaut de sens pratique. Et que disent alors les bourgeois ? Les mêmes phrases, à peu près, mais sans y croire, ou du
3453 ens pratique. Et que disent alors les bourgeois ? Les mêmes phrases, à peu près, mais sans y croire, ou du moins sans prouv
3454 mais sans y croire, ou du moins sans prouver par le fait qu’ils y croient. Il s’agirait alors de croire à quelque chose q
3455 égitime ce scepticisme ou cette « mesure »… Sinon la foi des uns, fatalement, va triompher de la mauvaise humeur défensive
3456 Sinon la foi des uns, fatalement, va triompher de la mauvaise humeur défensive des autres. Certes, on y a pensé. Les plus
3457 umeur défensive des autres. Certes, on y a pensé. Les plus hardis parlent déjà de rendre sa place à « l’esprit »… Mais, que
3458 s plus hardis parlent déjà de rendre sa place à «  l’ esprit »… Mais, quel esprit ? Et qui l’a laissé perdre ? Et que va-t-o
3459 place à « l’esprit »… Mais, quel esprit ? Et qui l’ a laissé perdre ? Et que va-t-on lui sacrifier ? Supposez qu’un homme
3460  ? Supposez qu’un homme paraisse, et qu’il relève le défi collectiviste. Il soutient que le solitaire est plus grand que l
3461 ’il relève le défi collectiviste. Il soutient que le solitaire est plus grand que la foule anonyme, que la vie de l’esprit
3462 . Il soutient que le solitaire est plus grand que la foule anonyme, que la vie de l’esprit n’est possible que si l’on a d’
3463 olitaire est plus grand que la foule anonyme, que la vie de l’esprit n’est possible que si l’on a d’abord renoncé à l’autr
3464 st plus grand que la foule anonyme, que la vie de l’ esprit n’est possible que si l’on a d’abord renoncé à l’autre vie ; qu
3465 yme, que la vie de l’esprit n’est possible que si l’ on a d’abord renoncé à l’autre vie ; que les lois de l’histoire ne son
3466 que si l’on a d’abord renoncé à l’autre vie ; que les lois de l’histoire ne sont rien si l’acte de l’homme les dément ; que
3467 a d’abord renoncé à l’autre vie ; que les lois de l’ histoire ne sont rien si l’acte de l’homme les dément ; que la foi d’u
3468 vie ; que les lois de l’histoire ne sont rien si l’ acte de l’homme les dément ; que la foi d’un seul est plus forte, dans
3469 les lois de l’histoire ne sont rien si l’acte de l’ homme les dément ; que la foi d’un seul est plus forte, dans son humil
3470 s de l’histoire ne sont rien si l’acte de l’homme les dément ; que la foi d’un seul est plus forte, dans son humilité et de
3471 e sont rien si l’acte de l’homme les dément ; que la foi d’un seul est plus forte, dans son humilité et devant Dieu, — car
3472 te, dans son humilité et devant Dieu, — car c’est la foi, — que les discours des réalistes et l’enthousiasme populaire ; q
3473 umilité et devant Dieu, — car c’est la foi, — que les discours des réalistes et l’enthousiasme populaire ; que la justice,
3474 c’est la foi, — que les discours des réalistes et l’ enthousiasme populaire ; que la justice, enfin, et la vertu, n’ont auc
3475 s des réalistes et l’enthousiasme populaire ; que la justice, enfin, et la vertu, n’ont aucune réalité si chacun n’est pas
3476 nthousiasme populaire ; que la justice, enfin, et la vertu, n’ont aucune réalité si chacun n’est pas à sa place là où la v
3477 cune réalité si chacun n’est pas à sa place là où la vocation de Dieu l’a mis. Supposez qu’un tel homme existe. Que va-t-o
3478 un n’est pas à sa place là où la vocation de Dieu l’ a mis. Supposez qu’un tel homme existe. Que va-t-on faire de lui, de c
3479 de lui, de ce héros, n’est-ce pas, des valeurs de l’ esprit que justement l’on fait profession de défendre ? La biographie
3480 est-ce pas, des valeurs de l’esprit que justement l’ on fait profession de défendre ? La biographie de Kierkegaard va nous
3481 que justement l’on fait profession de défendre ? La biographie de Kierkegaard va nous l’apprendre. On commencera par mett
3482 e défendre ? La biographie de Kierkegaard va nous l’ apprendre. On commencera par mettre en doute son sérieux : « Qui est l
3483 ncera par mettre en doute son sérieux : « Qui est le docteur Søren Kierkegaard ? C’est l’homme dépourvu de sérieux », lit-
3484  : « Qui est le docteur Søren Kierkegaard ? C’est l’ homme dépourvu de sérieux », lit-on dans un journal du temps. On se mo
3485 op de peine que ses idées sont faites pour rendre la vie impossible, puisqu’elles impliquent le martyre des braves chrétie
3486 rendre la vie impossible, puisqu’elles impliquent le martyre des braves chrétiens, comme si la religion, de toute éternité
3487 liquent le martyre des braves chrétiens, comme si la religion, de toute éternité, n’était pas au contraire la façon la plu
3488 gion, de toute éternité, n’était pas au contraire la façon la plus sage de supporter les maux de ce bas monde tel qu’il es
3489 toute éternité, n’était pas au contraire la façon la plus sage de supporter les maux de ce bas monde tel qu’il est ! L’Égl
3490 s au contraire la façon la plus sage de supporter les maux de ce bas monde tel qu’il est ! L’Église, par la voix de ses évê
3491 upporter les maux de ce bas monde tel qu’il est ! L’ Église, par la voix de ses évêques, tentera de prouver qu’il extravagu
3492 aux de ce bas monde tel qu’il est ! L’Église, par la voix de ses évêques, tentera de prouver qu’il extravague ; on propose
3493 uver qu’il extravague ; on proposera en public de l’ interdire d’accès au temple ; l’opinion unanime accablera son fol orgu
3494 sera en public de l’interdire d’accès au temple ; l’ opinion unanime accablera son fol orgueil : n’a-t-il pas écrit que la
3495 ccablera son fol orgueil : n’a-t-il pas écrit que la presse est de nos jours l’obstacle décisif à la prédication du christ
3496 n’a-t-il pas écrit que la presse est de nos jours l’ obstacle décisif à la prédication du christianisme véritable ? Épuisé
3497 e la presse est de nos jours l’obstacle décisif à la prédication du christianisme véritable ? Épuisé par ce long effort dé
3498 ong effort démesuré contre son temps, accablé par la réprobation générale, il s’en ira mourir à l’hôpital, en disant à son
3499 par la réprobation générale, il s’en ira mourir à l’ hôpital, en disant à son seul ami : « Salue tous les hommes ! Je les a
3500 ’hôpital, en disant à son seul ami : « Salue tous les hommes ! Je les aimais bien tous… » Cela se passait à Copenhague, en
3501 ant à son seul ami : « Salue tous les hommes ! Je les aimais bien tous… » Cela se passait à Copenhague, en l’année 1855. D
3502 is bien tous… » Cela se passait à Copenhague, en l’ année 1855. Depuis lors, il est vrai, les choses ont bien changé. On d
3503 hague, en l’année 1855. Depuis lors, il est vrai, les choses ont bien changé. On dirait même qu’elles sont au pire, mais il
3504 tant est qu’ils s’y abandonnent. Qu’est-ce que l’ esprit ? Donc, on nous parle de sauver l’esprit. Qu’est-ce que l’es
3505 e que l’esprit ? Donc, on nous parle de sauver l’ esprit. Qu’est-ce que l’esprit ? « L’esprit, dit Kierkegaard, c’est la
3506 , on nous parle de sauver l’esprit. Qu’est-ce que l’ esprit ? « L’esprit, dit Kierkegaard, c’est la puissance que le savoir
3507 le de sauver l’esprit. Qu’est-ce que l’esprit ? «  L’ esprit, dit Kierkegaard, c’est la puissance que le savoir d’un homme e
3508 que l’esprit ? « L’esprit, dit Kierkegaard, c’est la puissance que le savoir d’un homme exerce sur sa vie.52 » Ce n’est pa
3509 L’esprit, dit Kierkegaard, c’est la puissance que le savoir d’un homme exerce sur sa vie.52 » Ce n’est pas le savoir ; ce
3510 ir d’un homme exerce sur sa vie.52 » Ce n’est pas le savoir ; ce n’est pas la puissance, mais la puissance du savoir en ex
3511 sa vie.52 » Ce n’est pas le savoir ; ce n’est pas la puissance, mais la puissance du savoir en exercice. Il y a bien de la
3512 t pas le savoir ; ce n’est pas la puissance, mais la puissance du savoir en exercice. Il y a bien de la différence. Le sav
3513 a puissance du savoir en exercice. Il y a bien de la différence. Le savoir autonome, ou la puissance, font décorer celui q
3514 savoir en exercice. Il y a bien de la différence. Le savoir autonome, ou la puissance, font décorer celui qui les détient,
3515 y a bien de la différence. Le savoir autonome, ou la puissance, font décorer celui qui les détient, mais l’exercice effect
3516 autonome, ou la puissance, font décorer celui qui les détient, mais l’exercice effectif du savoir peut fort bien le conduir
3517 issance, font décorer celui qui les détient, mais l’ exercice effectif du savoir peut fort bien le conduire à la ruine ou p
3518 mais l’exercice effectif du savoir peut fort bien le conduire à la ruine ou peut-être même au martyre. Ne soyez donc pas s
3519 e effectif du savoir peut fort bien le conduire à la ruine ou peut-être même au martyre. Ne soyez donc pas si pressés de d
3520 martyre. Ne soyez donc pas si pressés de défendre les « droits » de l’esprit : ce n’est pas une distinction. Et lequel d’en
3521 donc pas si pressés de défendre les « droits » de l’ esprit : ce n’est pas une distinction. Et lequel d’entre nous peut dir
3522 Et lequel d’entre nous peut dire qu’il a calculé la dépense ? Il faudrait bien savoir de quoi l’on parle, et ce n’est peu
3523 culé la dépense ? Il faudrait bien savoir de quoi l’ on parle, et ce n’est peut-être possible que si l’on sait bien où l’on
3524 l’on parle, et ce n’est peut-être possible que si l’ on sait bien où l’on va. À quoi tend la pensée… de Kierkegaard ? Contr
3525 n’est peut-être possible que si l’on sait bien où l’ on va. À quoi tend la pensée… de Kierkegaard ? Contre la presse et l’o
3526 ble que si l’on sait bien où l’on va. À quoi tend la pensée… de Kierkegaard ? Contre la presse et l’opinion publique, il p
3527 a. À quoi tend la pensée… de Kierkegaard ? Contre la presse et l’opinion publique, il proteste en faveur de ce qui est « o
3528 d la pensée… de Kierkegaard ? Contre la presse et l’ opinion publique, il proteste en faveur de ce qui est « original » ; c
3529 ste en faveur de ce qui est « original » ; contre l’ emportement des multitudes, il revendique la charité mystérieuse de l’
3530 ontre l’emportement des multitudes, il revendique la charité mystérieuse de l’ironie ; contre l’histoire, il pose l’acte d
3531 ltitudes, il revendique la charité mystérieuse de l’ ironie ; contre l’histoire, il pose l’acte de l’homme responsable de s
3532 dique la charité mystérieuse de l’ironie ; contre l’ histoire, il pose l’acte de l’homme responsable de son destin. Mais to
3533 térieuse de l’ironie ; contre l’histoire, il pose l’ acte de l’homme responsable de son destin. Mais tout cela va au martyr
3534 e l’ironie ; contre l’histoire, il pose l’acte de l’ homme responsable de son destin. Mais tout cela va au martyre, dans le
3535 de son destin. Mais tout cela va au martyre, dans le monde qu’on nous prépare ? Il se peut, si pourtant Dieu le veut. L’ex
3536 qu’on nous prépare ? Il se peut, si pourtant Dieu le veut. L’exigence de Kierkegaard se limite à l’instant du choix, où l’
3537 s prépare ? Il se peut, si pourtant Dieu le veut. L’ exigence de Kierkegaard se limite à l’instant du choix, où l’homme s’e
3538 de Kierkegaard se limite à l’instant du choix, où l’ homme s’engage, « en vertu de l’absurde », sur le chemin que Dieu lui
3539 tant du choix, où l’homme s’engage, « en vertu de l’ absurde », sur le chemin que Dieu lui montre, seul. Cette primauté de
3540 l’homme s’engage, « en vertu de l’absurde », sur le chemin que Dieu lui montre, seul. Cette primauté de la foi sur les vé
3541 emin que Dieu lui montre, seul. Cette primauté de la foi sur les vérités qui font vivre, cette solitude première devant Di
3542 eu lui montre, seul. Cette primauté de la foi sur les vérités qui font vivre, cette solitude première devant Dieu, est-ce b
3543 re devant Dieu, est-ce bien cela que revendiquent les défenseurs du primat de l’esprit ? L’esprit est drame, attaque et ris
3544 cela que revendiquent les défenseurs du primat de l’ esprit ? L’esprit est drame, attaque et risque. Et l’on peut douter qu
3545 vendiquent les défenseurs du primat de l’esprit ? L’ esprit est drame, attaque et risque. Et l’on peut douter qu’ils y croi
3546 sprit ? L’esprit est drame, attaque et risque. Et l’ on peut douter qu’ils y croient, ceux qui flétrissent le matérialisme
3547 eut douter qu’ils y croient, ceux qui flétrissent le matérialisme au nom des biens qu’ils n’ont pas su défendre ni davanta
3548 e sacrifier. Ils affirment trop tardivement que «  l’ argent ne fait pas le bonheur », et qu’il existe d’autres biens que nu
3549 rment trop tardivement que « l’argent ne fait pas le bonheur », et qu’il existe d’autres biens que nulle violence ne peut
3550 ne peut dérober, mais c’est une triste réponse à la révolte de ces pauvres qu’on redoute plus qu’on ne les aime… Si l’on
3551 évolte de ces pauvres qu’on redoute plus qu’on ne les aime… Si l’on voulait vraiment un champion de l’esprit, on ferait bie
3552 pauvres qu’on redoute plus qu’on ne les aime… Si l’ on voulait vraiment un champion de l’esprit, on ferait bien d’aller le
3553 les aime… Si l’on voulait vraiment un champion de l’ esprit, on ferait bien d’aller le prendre parmi ceux-là pour qui l’esp
3554 t un champion de l’esprit, on ferait bien d’aller le prendre parmi ceux-là pour qui l’esprit n’a pas à se défendre, mais b
3555 it bien d’aller le prendre parmi ceux-là pour qui l’ esprit n’a pas à se défendre, mais bien à témoigner de son incarnation
3556 arnation ; on ferait bien d’aller à ceux pour qui l’ esprit n’est pas une espèce de confort, mais une aventure absolue et c
3557 mais une aventure absolue et comme un jugement de l’ homme ; ainsi Pascal, Nietzsche, Dostoïevski. On pourrait en citer que
3558 n’est pas de hiérarchie possible en ces parages, le sacrifice y tient lieu de mesure, parce qu’il est un acte, incontesta
3559 parce qu’il est un acte, incontestable. Telle est la nouvelle grandeur, la nouvelle mesure de l’esprit. Nous irons donc à
3560 e, incontestable. Telle est la nouvelle grandeur, la nouvelle mesure de l’esprit. Nous irons donc à ce grand solitaire, à
3561 e est la nouvelle grandeur, la nouvelle mesure de l’ esprit. Nous irons donc à ce grand solitaire, à ce témoin extrême et d
3562 nd solitaire, à ce témoin extrême et décisif dont la mort, comme un sceau d’éternité, attesta dans sa plénitude la primaut
3563 me un sceau d’éternité, attesta dans sa plénitude la primauté de l’acte spirituel : Kierkegaard. Le grand mal de l’époque,
3564 ternité, attesta dans sa plénitude la primauté de l’ acte spirituel : Kierkegaard. Le grand mal de l’époque, et la terreur
3565 de la primauté de l’acte spirituel : Kierkegaard. Le grand mal de l’époque, et la terreur que commencent d’y semer nos fau
3566 e l’acte spirituel : Kierkegaard. Le grand mal de l’ époque, et la terreur que commencent d’y semer nos faux dieux, ont rév
3567 ituel : Kierkegaard. Le grand mal de l’époque, et la terreur que commencent d’y semer nos faux dieux, ont réveillé quelque
3568 eux, ont réveillé quelques esprits, dont témoigne la renaissance, ou pour mieux dire, la découverte, parmi nous, de cette
3569 dont témoigne la renaissance, ou pour mieux dire, la découverte, parmi nous, de cette pensée impitoyable. Remède du pire ?
3570 bien qu’on se sentît malade pour aller rechercher le médecin sévère que la santé moins déprimée d’un autre siècle avait tu
3571 alade pour aller rechercher le médecin sévère que la santé moins déprimée d’un autre siècle avait tué. C’est aussi qu’il e
3572 t aussi qu’il est devenu possible de saisir, dans le déploiement des faits, et des plus marquants de l’époque, la vérité d
3573 e déploiement des faits, et des plus marquants de l’ époque, la vérité des anathèmes dont Kierkegaard salua leur naissance.
3574 ent des faits, et des plus marquants de l’époque, la vérité des anathèmes dont Kierkegaard salua leur naissance. Nous nous
3575 rs ce prophète de nos malheurs, nous retournons à l’ origine où il se tient, nous mettons en lui notre espoir de trouver un
3576 devant Dieu. ⁂ Søren Kierkegaard est sans doute le penseur capital de notre époque, nous voulons dire : l’objection la p
3577 seur capital de notre époque, nous voulons dire : l’ objection la plus absolue, la plus fondamentale qui lui soit faite, un
3578 de notre époque, nous voulons dire : l’objection la plus absolue, la plus fondamentale qui lui soit faite, une figure lit
3579 nous voulons dire : l’objection la plus absolue, la plus fondamentale qui lui soit faite, une figure littéralement gênant
3580 lement gênante, un rappel presque insupportable à la présence dans ce temps de l’éternel. Car il ne suffit pas d’applaudir
3581 sque insupportable à la présence dans ce temps de l’ éternel. Car il ne suffit pas d’applaudir à ses thèses pour apaiser ce
3582 si nous sommes sourds à sa voix, comment étouffer le scandale de cette mort qui définit le destin de l’esprit parmi nous ?
3583 nt étouffer le scandale de cette mort qui définit le destin de l’esprit parmi nous ? Si l’Opinion publique a tué Kierkegaa
3584 e scandale de cette mort qui définit le destin de l’ esprit parmi nous ? Si l’Opinion publique a tué Kierkegaard, elle n’a
3585 qui définit le destin de l’esprit parmi nous ? Si l’ Opinion publique a tué Kierkegaard, elle n’a pas eu de prise sur les s
3586 e a tué Kierkegaard, elle n’a pas eu de prise sur les sarcasmes dont il l’a flétrie, plus charitables cependant que les dis
3587 lle n’a pas eu de prise sur les sarcasmes dont il l’ a flétrie, plus charitables cependant que les discours en l’honneur du
3588 nt il l’a flétrie, plus charitables cependant que les discours en l’honneur du progrès, car tout l’honneur de notre temps s
3589 e, plus charitables cependant que les discours en l’ honneur du progrès, car tout l’honneur de notre temps sera peut-être,
3590 ue les discours en l’honneur du progrès, car tout l’ honneur de notre temps sera peut-être, par une compensation mystérieus
3591 mystérieuse, d’avoir compris mieux qu’aucun autre le message du « solitaire devant Dieu ». L’ironie Lorsque je vois
3592 autre le message du « solitaire devant Dieu ». L’ ironie Lorsque je vois de toutes parts, en Europe, à travers la con
3593 que je vois de toutes parts, en Europe, à travers la confusion des doctrines, reparaître les traits ironiques du grand vis
3594 à travers la confusion des doctrines, reparaître les traits ironiques du grand visage de Kierkegaard, il me vient à l’espr
3595 ues du grand visage de Kierkegaard, il me vient à l’ esprit une image dont le burlesque n’aurait pas déplu à l’humeur shake
3596 ierkegaard, il me vient à l’esprit une image dont le burlesque n’aurait pas déplu à l’humeur shakespearienne de notre phil
3597 une image dont le burlesque n’aurait pas déplu à l’ humeur shakespearienne de notre philosophe. C’est l’image du chat d’Al
3598 humeur shakespearienne de notre philosophe. C’est l’ image du chat d’Alice in Wonderland. Souvenez-vous de ce chat, immense
3599 venez-vous de ce chat, immense et subversif, dont le rire a le don d’exaspérer la Reine. Elle tempête et hurle son cri fav
3600 de ce chat, immense et subversif, dont le rire a le don d’exaspérer la Reine. Elle tempête et hurle son cri favori : « Qu
3601 e et subversif, dont le rire a le don d’exaspérer la Reine. Elle tempête et hurle son cri favori : « Qu’on lui coupe la tê
3602 mpête et hurle son cri favori : « Qu’on lui coupe la tête ! » Alors, le chat s’élève dans les airs et peu à peu rend son c
3603 cri favori : « Qu’on lui coupe la tête ! » Alors, le chat s’élève dans les airs et peu à peu rend son corps invisible, seu
3604 lui coupe la tête ! » Alors, le chat s’élève dans les airs et peu à peu rend son corps invisible, seule subsiste sa face hi
3605 sent dignement à couper une tête pareille. Enfin, le chat disparaît complètement. Mais à certains moments, il s’amuse à re
3606 n rire qui plane, immatériel. Ensuite, seulement, la tête se recompose autour de cette angoissante mimique. Le rire de Kie
3607 se recompose autour de cette angoissante mimique. Le rire de Kierkegaard sur notre temps ! Dans un monde où règne la masse
3608 rkegaard sur notre temps ! Dans un monde où règne la masse, règne aussi le sérieux le plus pesant. On ne rit pas devant le
3609 ps ! Dans un monde où règne la masse, règne aussi le sérieux le plus pesant. On ne rit pas devant le dictateur, ni dans le
3610 n monde où règne la masse, règne aussi le sérieux le plus pesant. On ne rit pas devant le dictateur, ni dans les rangs des
3611 i le sérieux le plus pesant. On ne rit pas devant le dictateur, ni dans les rangs des troupes d’assaut. Ah ! si le rire es
3612 esant. On ne rit pas devant le dictateur, ni dans les rangs des troupes d’assaut. Ah ! si le rire est le propre de l’homme,
3613 , ni dans les rangs des troupes d’assaut. Ah ! si le rire est le propre de l’homme, nous voici devenus bien inhumains ! Il
3614 s rangs des troupes d’assaut. Ah ! si le rire est le propre de l’homme, nous voici devenus bien inhumains ! Il semble que
3615 roupes d’assaut. Ah ! si le rire est le propre de l’ homme, nous voici devenus bien inhumains ! Il semble que chacun porte
3616 venus bien inhumains ! Il semble que chacun porte le poids du monde et le sombre avenir du siècle. On a dépeint ce clerc m
3617 ! Il semble que chacun porte le poids du monde et le sombre avenir du siècle. On a dépeint ce clerc moderne, accablé par t
3618 . On a dépeint ce clerc moderne, accablé par tous les malheurs du temps, dont il feint de se croire victime ou responsable5
3619 me ou responsable53. De cet homme, justement, que l’ Histoire fait trembler et qui se réfugie dans les soucis publics comme
3620 e l’Histoire fait trembler et qui se réfugie dans les soucis publics comme on va voir un film pour s’oublier dans un drame
3621 ier dans un drame fictif, de cet homme affolé par la lecture de son journal, — mais qui porte l’enfer dans son âme ! — Kie
3622 é par la lecture de son journal, — mais qui porte l’ enfer dans son âme ! — Kierkegaard a montré « le comique infini ». Il
3623 e l’enfer dans son âme ! — Kierkegaard a montré «  le comique infini ». Il faut risquer cette expression : le rire de la ch
3624 ique infini ». Il faut risquer cette expression : le rire de la charité chrétienne. « Le christianisme a découvert une mis
3625  ». Il faut risquer cette expression : le rire de la charité chrétienne. « Le christianisme a découvert une misère dont l’
3626 expression : le rire de la charité chrétienne. «  Le christianisme a découvert une misère dont l’homme ignore, comme homme
3627 e. « Le christianisme a découvert une misère dont l’ homme ignore, comme homme, l’existence ; et c’est la maladie mortelle
3628 vert une misère dont l’homme ignore, comme homme, l’ existence ; et c’est la maladie mortelle (le péché)54. L’homme naturel
3629 homme ignore, comme homme, l’existence ; et c’est la maladie mortelle (le péché)54. L’homme naturel a beau dénombrer tout
3630 omme, l’existence ; et c’est la maladie mortelle ( le péché)54. L’homme naturel a beau dénombrer tout l’horrible, et tout é
3631 ence ; et c’est la maladie mortelle (le péché)54. L’ homme naturel a beau dénombrer tout l’horrible, et tout épuiser, le ch
3632 e péché)54. L’homme naturel a beau dénombrer tout l’ horrible, et tout épuiser, le chrétien se rit du bilan ! » Pourquoi ce
3633 beau dénombrer tout l’horrible, et tout épuiser, le chrétien se rit du bilan ! » Pourquoi ce rire scandaleux ? Parce que
3634 lan ! » Pourquoi ce rire scandaleux ? Parce que «  la crainte infinie d’un seul danger nous rendrait tous les autres inexis
3635 ainte infinie d’un seul danger nous rendrait tous les autres inexistants ». Mais cette « crainte d’un seul danger » peut-el
3636 er » peut-elle encore, sérieusement, caractériser le chrétien moyen de ce temps ? C’est ici que l’ironie de Kierkegaard to
3637 ser le chrétien moyen de ce temps ? C’est ici que l’ ironie de Kierkegaard tourne son aiguillon contre le « monde chrétien 
3638 ironie de Kierkegaard tourne son aiguillon contre le « monde chrétien », celui qui se réclame de l’esprit, ou qui fait pro
3639 re le « monde chrétien », celui qui se réclame de l’ esprit, ou qui fait profession de l’appeler. « Le Nouveau Testament re
3640 se réclame de l’esprit, ou qui fait profession de l’ appeler. « Le Nouveau Testament ressemble à une satire de l’homme. Il
3641 l’esprit, ou qui fait profession de l’appeler. «  Le Nouveau Testament ressemble à une satire de l’homme. Il contient des
3642 « Le Nouveau Testament ressemble à une satire de l’ homme. Il contient des consolations et encore des consolations pour ce
3643 nt à cause du Christ. Il suppose, sans autre, que le chrétien souffre pour sa doctrine… » Et c’est la tragi-comédie du chr
3644 le chrétien souffre pour sa doctrine… » Et c’est la tragi-comédie du christianisme de la chrétienté. Pauvre chrétien moye
3645 … » Et c’est la tragi-comédie du christianisme de la chrétienté. Pauvre chrétien moyen, qu’as-tu souffert pour ta doctrine
3646 Il faudrait cependant choisir. Ou bien tu crois à la seule grâce de Dieu, dans l’abîme infini où tu te vois, ou bien tu cr
3647 . Ou bien tu crois à la seule grâce de Dieu, dans l’ abîme infini où tu te vois, ou bien tu crois aussi à ce sérieux de l’e
3648 u te vois, ou bien tu crois aussi à ce sérieux de l’ existence symbolisé par la caisse d’épargne. Ou bien tu joues toute ta
3649 s aussi à ce sérieux de l’existence symbolisé par la caisse d’épargne. Ou bien tu joues toute ta vie sur le pardon, ou bie
3650 isse d’épargne. Ou bien tu joues toute ta vie sur le pardon, ou bien tu te reposes aussi sur ta vertu. Ou bien tu vois que
3651 e reposes aussi sur ta vertu. Ou bien tu vois que la question brûlante, c’est de savoir si toi, tu es chrétien, ou bien tu
3652 voir si toi, tu es chrétien, ou bien tu vitupères les sans-Dieu de Russie. Mais sais-tu bien de quoi tu souffres ? De ton p
3653 amer et infini de ce « croyant » qui tremble pour le sort de l’esprit dans le monde, et pour son sort dans le monde sans e
3654 ini de ce « croyant » qui tremble pour le sort de l’ esprit dans le monde, et pour son sort dans le monde sans esprit, exac
3655 oyant » qui tremble pour le sort de l’esprit dans le monde, et pour son sort dans le monde sans esprit, exactement comme s
3656 de l’esprit dans le monde, et pour son sort dans le monde sans esprit, exactement comme si l’Esprit n’existait pas ! Sero
3657 rt dans le monde sans esprit, exactement comme si l’ Esprit n’existait pas ! Serons-nous des témoins ou des espions crainti
3658 des espions craintifs ? Attendrons-nous toujours le « réveil de la masse » pour affirmer que tous ces dieux sont des faux
3659 aintifs ? Attendrons-nous toujours le « réveil de la masse » pour affirmer que tous ces dieux sont des faux dieux ? Mais s
3660 des faux dieux pour nous ? Appelons-nous vraiment l’ esprit ? Mais non, nous appelons le « règne de l’esprit », c’est bien
3661 -nous vraiment l’esprit ? Mais non, nous appelons le « règne de l’esprit », c’est bien moins dangereux ; tous en seront… «
3662 l’esprit ? Mais non, nous appelons le « règne de l’ esprit », c’est bien moins dangereux ; tous en seront… « Deux question
3663 uestions — dit encore Kierkegaard — témoignent de l’ esprit : 1) Ce qu’on nous prêche, est-ce possible ? 2) Puis-je le fair
3664 e qu’on nous prêche, est-ce possible ? 2) Puis-je le faire ? Deux questions témoignent de l’absence de l’esprit : 1) Est-c
3665 ) Puis-je le faire ? Deux questions témoignent de l’ absence de l’esprit : 1) Est-ce réel ? 2) Mon voisin Christofersen l’a
3666 faire ? Deux questions témoignent de l’absence de l’ esprit : 1) Est-ce réel ? 2) Mon voisin Christofersen l’a-t-il fait ?
3667 it : 1) Est-ce réel ? 2) Mon voisin Christofersen l’ a-t-il fait ? l’a-t-il réellement fait ? »55 Nous posons toujours la
3668 éel ? 2) Mon voisin Christofersen l’a-t-il fait ? l’ a-t-il réellement fait ? »55 Nous posons toujours la dernière questio
3669 jours la dernière question. Nous ne croyons pas à l’ esprit, nous préférons ne pas scandaliser ; nous croyons réellement à
3670 ns ne pas scandaliser ; nous croyons réellement à l’ opinion publique. Nous lisons les journaux, voilà notre réalité. Le di
3671 yons réellement à l’opinion publique. Nous lisons les journaux, voilà notre réalité. Le dimanche, nous allons quelquefois à
3672 e. Nous lisons les journaux, voilà notre réalité. Le dimanche, nous allons quelquefois à l’église déplorer en commun l’ath
3673 e réalité. Le dimanche, nous allons quelquefois à l’ église déplorer en commun l’athéisme du monde. « Le Nouveau Testament
3674 allons quelquefois à l’église déplorer en commun l’ athéisme du monde. « Le Nouveau Testament suppose sans autre que le ch
3675 ’église déplorer en commun l’athéisme du monde. «  Le Nouveau Testament suppose sans autre que le chrétien souffre pour sa
3676 de. « Le Nouveau Testament suppose sans autre que le chrétien souffre pour sa doctrine… » (Mais non ! il souffre simplemen
3677 ais non ! il souffre simplement de ce que tous ne l’ ont pas admise) « … et il apporte sa consolation, et sur ce texte on n
3678 , à nous qui n’avons pas voulu souffrir ». « Dans l’ église somptueuse paraît le Très Vénérable et Très Noble Premier Prédi
3679 ulu souffrir ». « Dans l’église somptueuse paraît le Très Vénérable et Très Noble Premier Prédicateur Général de la Cour,
3680 rès Noble Premier Prédicateur Général de la Cour, le favori élu par la bonne société ; il paraît devant une assemblée choi
3681 Prédicateur Général de la Cour, le favori élu par la bonne société ; il paraît devant une assemblée choisie d’élus, et prê
3682 texte qu’il a choisi lui-même : “Dieu a élu dans le monde les petits et les méprisés”, et personne ne rit ! »56. C’est a
3683 ’il a choisi lui-même : “Dieu a élu dans le monde les petits et les méprisés”, et personne ne rit ! »56. C’est alors que p
3684 ui-même : “Dieu a élu dans le monde les petits et les méprisés”, et personne ne rit ! »56. C’est alors que paraît le rire
3685 et personne ne rit ! »56. C’est alors que paraît le rire de Kierkegaard. Ce n’est pas le rire d’un Molière : Molière fait
3686 s que paraît le rire de Kierkegaard. Ce n’est pas le rire d’un Molière : Molière fait rire la foule au dépens de l’extrava
3687 ’est pas le rire d’un Molière : Molière fait rire la foule au dépens de l’extravagant. Mais Kierkegaard rit tout seul de l
3688 Molière : Molière fait rire la foule au dépens de l’ extravagant. Mais Kierkegaard rit tout seul de la foule, de son sérieu
3689 l’extravagant. Mais Kierkegaard rit tout seul de la foule, de son sérieux théâtral et fervent, et de sa peur de toute ext
3690 peut leur faire faire ce qu’on veut, que ce soit le bien ou le mal, une seule condition leur importe : qu’ils soient touj
3691 faire faire ce qu’on veut, que ce soit le bien ou le mal, une seule condition leur importe : qu’ils soient toujours comme
3692 leur importe : qu’ils soient toujours comme tous les autres, qu’ils imitent, et n’agissent jamais seuls. » Mais ce que Die
3693 euls. » Mais ce que Dieu exige, c’est précisément le contraire : il veut l’originalité. « Voilà pourquoi la Parole de Dieu
3694 u exige, c’est précisément le contraire : il veut l’ originalité. « Voilà pourquoi la Parole de Dieu est telle qu’on y trou
3695 ntraire : il veut l’originalité. « Voilà pourquoi la Parole de Dieu est telle qu’on y trouve quelque passage qui dise le c
3696 est telle qu’on y trouve quelque passage qui dise le contraire d’un autre. » Car l’apparence de la contradiction nous obli
3697 e passage qui dise le contraire d’un autre. » Car l’ apparence de la contradiction nous oblige à choisir, fait à la foi sa
3698 ise le contraire d’un autre. » Car l’apparence de la contradiction nous oblige à choisir, fait à la foi sa place, nous con
3699 de la contradiction nous oblige à choisir, fait à la foi sa place, nous contraint à l’originalité. « Mais quoi, professeur
3700 choisir, fait à la foi sa place, nous contraint à l’ originalité. « Mais quoi, professeurs et disciples ne se trouvent bien
3701 esseurs et disciples ne se trouvent bien que dans l’ imitation : c’est pourquoi ils se sentent unis en elle d’une manière s
3702 anière si touchante, et c’est ce qu’ils appellent l’ amour.57 » Rire du solitaire, qui ressemble peut-être à la pitié énigm
3703 57 » Rire du solitaire, qui ressemble peut-être à la pitié énigmatique d’un Dostoïevski. Ici tout le visage de Kierkegaard
3704 à la pitié énigmatique d’un Dostoïevski. Ici tout le visage de Kierkegaard se recompose. Et l’on voit que son rire n’est r
3705 ci tout le visage de Kierkegaard se recompose. Et l’ on voit que son rire n’est rien que la douleur du témoin de l’Esprit a
3706 compose. Et l’on voit que son rire n’est rien que la douleur du témoin de l’Esprit au milieu de la foule. L’originalité
3707 e son rire n’est rien que la douleur du témoin de l’ Esprit au milieu de la foule. L’originalité Qu’entend-il par ce
3708 que la douleur du témoin de l’Esprit au milieu de la foule. L’originalité Qu’entend-il par ce mot d’originalité ? Il
3709 r du témoin de l’Esprit au milieu de la foule. L’ originalité Qu’entend-il par ce mot d’originalité ? Il faut en rapp
3710 l par ce mot d’originalité ? Il faut en rapporter le sens au centre même de sa pensée, ou si l’on veut, de son action. Et
3711 porter le sens au centre même de sa pensée, ou si l’ on veut, de son action. Et ce centre, c’est « la catégorie du solitair
3712 i l’on veut, de son action. Et ce centre, c’est «  la catégorie du solitaire ». Bien des malentendus seraient ici possibles
3713 Bien des malentendus seraient ici possibles ; que l’ on écarte, au premier pas, trois mots qui faussent tout : anarchie, ro
3714 : anarchie, romantisme, individu. Il n’est que de les mesurer à la réalité dernière de l’homme. Qu’est-ce que l’homme ? Une
3715 mantisme, individu. Il n’est que de les mesurer à la réalité dernière de l’homme. Qu’est-ce que l’homme ? Une créature. Qu
3716 n’est que de les mesurer à la réalité dernière de l’ homme. Qu’est-ce que l’homme ? Une créature. Qu’est-ce que son ordre ?
3717 r à la réalité dernière de l’homme. Qu’est-ce que l’ homme ? Une créature. Qu’est-ce que son ordre ? La loi du Créateur. Le
3718 l’homme ? Une créature. Qu’est-ce que son ordre ? La loi du Créateur. Le solitaire que Kierkegaard appelle, c’est l’homme
3719 re. Qu’est-ce que son ordre ? La loi du Créateur. Le solitaire que Kierkegaard appelle, c’est l’homme seul devant son Dieu
3720 teur. Le solitaire que Kierkegaard appelle, c’est l’ homme seul devant son Dieu. Mais comment cela se peut-il, sinon par l’
3721 son Dieu. Mais comment cela se peut-il, sinon par l’ effet de la foi ? Il faut que Dieu l’appelle, qu’il le nomme et par là
3722 ais comment cela se peut-il, sinon par l’effet de la foi ? Il faut que Dieu l’appelle, qu’il le nomme et par là le sépare,
3723 l, sinon par l’effet de la foi ? Il faut que Dieu l’ appelle, qu’il le nomme et par là le sépare, autrement l’homme n’est r
3724 fet de la foi ? Il faut que Dieu l’appelle, qu’il le nomme et par là le sépare, autrement l’homme n’est rien qu’un exempla
3725 faut que Dieu l’appelle, qu’il le nomme et par là le sépare, autrement l’homme n’est rien qu’un exemplaire dans le troupea
3726 le, qu’il le nomme et par là le sépare, autrement l’ homme n’est rien qu’un exemplaire dans le troupeau. Le solitaire devan
3727 utrement l’homme n’est rien qu’un exemplaire dans le troupeau. Le solitaire devant Dieu, c’est celui qui répond à la foi,
3728 mme n’est rien qu’un exemplaire dans le troupeau. Le solitaire devant Dieu, c’est celui qui répond à la foi, cet appel. Qu
3729 e solitaire devant Dieu, c’est celui qui répond à la foi, cet appel. Quand on parle de romantisme, d’anarchie, d’individua
3730 d’une révolte, en fin de compte, imaginaire. Car l’ ordre de ce monde est lui-même en révolte contre l’ordre reçu de Dieu,
3731 ’ordre de ce monde est lui-même en révolte contre l’ ordre reçu de Dieu, qui sera l’Ordre du Royaume. Et nier une négation,
3732 en révolte contre l’ordre reçu de Dieu, qui sera l’ Ordre du Royaume. Et nier une négation, c’est s’enfoncer dans le néant
3733 aume. Et nier une négation, c’est s’enfoncer dans le néant. Seule la révolte du chrétien est position, obéissance. Si donc
3734 e négation, c’est s’enfoncer dans le néant. Seule la révolte du chrétien est position, obéissance. Si donc l’appel de Dieu
3735 lte du chrétien est position, obéissance. Si donc l’ appel de Dieu isole du monde un homme, c’est que le monde, dans sa for
3736 ’appel de Dieu isole du monde un homme, c’est que le monde, dans sa forme déchue, s’oppose au monde tel que Dieu l’a créé,
3737 s sa forme déchue, s’oppose au monde tel que Dieu l’ a créé, s’oppose à la transformation que veut l’Esprit, s’oppose à l’O
3738 oppose au monde tel que Dieu l’a créé, s’oppose à la transformation que veut l’Esprit, s’oppose à l’Ordre. « Ne vous confo
3739 u l’a créé, s’oppose à la transformation que veut l’ Esprit, s’oppose à l’Ordre. « Ne vous conformez pas à ce siècle présen
3740 à la transformation que veut l’Esprit, s’oppose à l’ Ordre. « Ne vous conformez pas à ce siècle présent, mais soyez transfo
3741 résent, mais soyez transformés », dit saint Paul. Le solitaire devant Dieu, c’est celui qui se tient à l’origine de sa réa
3742 solitaire devant Dieu, c’est celui qui se tient à l’ origine de sa réalité. Celui-là seul connaît sa fin et l’ordre éternel
3743 ne de sa réalité. Celui-là seul connaît sa fin et l’ ordre éternel de sa vie. Celui-là seul peut juger de ce monde, et s’y
3744 tenu. Il n’est pas d’autre « réaction » contre «  le siècle », pas d’autre révolution créatrice. Et tous nos appels à l’es
3745 ’autre révolution créatrice. Et tous nos appels à l’ esprit, s’ils ne sont pas ce retour au Réel, ne sont que poursuite du
3746 ite du vent, défection ou orgueil fantastique. Le solitaire et les faux dieux Nous croyons à la foule, aux races, à
3747 ection ou orgueil fantastique. Le solitaire et les faux dieux Nous croyons à la foule, aux races, à l’histoire (ou pl
3748 Le solitaire et les faux dieux Nous croyons à la foule, aux races, à l’histoire (ou plutôt à l’évolution des sociétés)
3749 ux dieux Nous croyons à la foule, aux races, à l’ histoire (ou plutôt à l’évolution des sociétés), à la révolution, au c
3750 à la foule, aux races, à l’histoire (ou plutôt à l’ évolution des sociétés), à la révolution, au capital, au jugement de l
3751 istoire (ou plutôt à l’évolution des sociétés), à la révolution, au capital, au jugement de l’opinion publique ; nous croy
3752 tés), à la révolution, au capital, au jugement de l’ opinion publique ; nous croyons au passé, au collectif, à l’avenir, et
3753 publique ; nous croyons au passé, au collectif, à l’ avenir, et tout cela n’est rien que fuite devant notre éternel présent
3754 ernel présent, et tout cela n’est que mythologie. Les dieux du siècle ont l’existence qu’on leur prête : hélas ! il serait
3755 ela n’est que mythologie. Les dieux du siècle ont l’ existence qu’on leur prête : hélas ! il serait faux de dire qu’ils n’e
3756 n’est pas échapper aux chimères publiques que de les dénoncer pour telles en vertu d’une idée de l’homme que la raison paï
3757 e les dénoncer pour telles en vertu d’une idée de l’ homme que la raison païenne admet fort bien : nietzschéisme agressif,
3758 er pour telles en vertu d’une idée de l’homme que la raison païenne admet fort bien : nietzschéisme agressif, ou désespoir
3759 démoniaque qui veut être soi-même, « en haine de l’ existence et selon sa misère ». Cette révolte n’est pas fondée dans la
3760 sa misère ». Cette révolte n’est pas fondée dans la transformation effective du monde. Elle participe encore de la dégrad
3761 tion effective du monde. Elle participe encore de la dégradation. « Une objection vraiment méchante s’arcboute toujours co
3762 aiment méchante s’arcboute toujours contre ce qui la suscite.58 » Et celui qui recourt à son moi révolté contre les forces
3763 8 » Et celui qui recourt à son moi révolté contre les forces d’anéantissement, s’appuie sur le néant et précipite sa propre
3764 contre les forces d’anéantissement, s’appuie sur le néant et précipite sa propre ruine. Le solitaire qui condamne « la ma
3765 appuie sur le néant et précipite sa propre ruine. Le solitaire qui condamne « la masse » n’est un aristocrate que s’il ne
3766 pite sa propre ruine. Le solitaire qui condamne «  la masse » n’est un aristocrate que s’il ne veut pas l’être. C’est qu’il
3767 masse » n’est un aristocrate que s’il ne veut pas l’ être. C’est qu’il se fonde sur sa vocation, et qu’il ne peut être lui-
3768 vocation, et qu’il ne peut être lui-même que par le droit divin de la Parole qui le distingue. Suprême humilité du solita
3769 l ne peut être lui-même que par le droit divin de la Parole qui le distingue. Suprême humilité du solitaire ! Il ne saurai
3770 lui-même que par le droit divin de la Parole qui le distingue. Suprême humilité du solitaire ! Il ne saurait se comparer
3771 ité du solitaire ! Il ne saurait se comparer qu’à la vocation qu’il reçoit. Où l’orgueil trouverait-il encore à se loger c
3772 ait se comparer qu’à la vocation qu’il reçoit. Où l’ orgueil trouverait-il encore à se loger chez un être à ce point simpli
3773 implifié qu’il n’est plus rien qu’obéissance dans la mesure où il agit, et pénitence dans la mesure où sa vocation le dépa
3774 ance dans la mesure où il agit, et pénitence dans la mesure où sa vocation le dépasse ? Si Kierkegaard condamne la foule,
3775 agit, et pénitence dans la mesure où sa vocation le dépasse ? Si Kierkegaard condamne la foule, ce n’est point qu’il la c
3776 sa vocation le dépasse ? Si Kierkegaard condamne la foule, ce n’est point qu’il la craigne, ou qu’il craigne d’y perdre l
3777 erkegaard condamne la foule, ce n’est point qu’il la craigne, ou qu’il craigne d’y perdre le pauvre moi des psychologues,
3778 int qu’il la craigne, ou qu’il craigne d’y perdre le pauvre moi des psychologues, son reproche à la foule, c’est qu’elle n
3779 re le pauvre moi des psychologues, son reproche à la foule, c’est qu’elle n’exige rien de lui. La foule nous veut tout sim
3780 he à la foule, c’est qu’elle n’exige rien de lui. La foule nous veut tout simplement irresponsables, par cela seul, nous l
3781 ut simplement irresponsables, par cela seul, nous la flattons, et elle nous reconnaît pour siens. Elle est le lieu de rend
3782 tons, et elle nous reconnaît pour siens. Elle est le lieu de rendez-vous des hommes qui se fuient, eux et leur vocation. E
3783 n’est personne, et tire de là son assurance dans le crime. « Il ne s’est pas trouvé un seul soldat pour oser porter la ma
3784 s’est pas trouvé un seul soldat pour oser porter la main sur Caïus Marius, telle est la vérité. Mais trois ou quatre femm
3785 r oser porter la main sur Caïus Marius, telle est la vérité. Mais trois ou quatre femmes, dans l’illusion d’être une foule
3786 est la vérité. Mais trois ou quatre femmes, dans l’ illusion d’être une foule et que personne peut-être ne saurait dire qu
3787 ule et que personne peut-être ne saurait dire qui l’ avait fait ou qui avait commencé, celles-là l’auraient eu, ce courage 
3788 qui l’avait fait ou qui avait commencé, celles-là l’ auraient eu, ce courage ! Ô mensonge ! » La foule n’est rien que la fu
3789 les-là l’auraient eu, ce courage ! Ô mensonge ! » La foule n’est rien que la fuite de chaque homme devant la responsabilit
3790 courage ! Ô mensonge ! » La foule n’est rien que la fuite de chaque homme devant la responsabilité de son acte. « Car une
3791 le n’est rien que la fuite de chaque homme devant la responsabilité de son acte. « Car une foule est une abstraction, qui
3792 n’a pas de mains, mais chaque homme isolé a, dans la règle, deux mains, et lorsqu’il porte ces deux mains sur Marius, ce s
3793 mains, non celles de son voisin et non celles de la foule qui n’a pas de mains. » Tout seul en face du Christ, un homme o
3794 is qu’il soit foule, il aura ce « courage », — il l’ a eu. Il faut aller plus loin. La foule n’est pas dans la rue seulemen
3795  courage », — il l’a eu. Il faut aller plus loin. La foule n’est pas dans la rue seulement. Elle est dans la pensée des ho
3796 Il faut aller plus loin. La foule n’est pas dans la rue seulement. Elle est dans la pensée des hommes de ce temps. Tout l
3797 le n’est pas dans la rue seulement. Elle est dans la pensée des hommes de ce temps. Tout le génie paradoxal et réaliste de
3798 e est dans la pensée des hommes de ce temps. Tout le génie paradoxal et réaliste de Kierkegaard consiste à l’avoir dénoncé
3799 e paradoxal et réaliste de Kierkegaard consiste à l’ avoir dénoncée au plus intime de l’existence individuelle. Chaque fois
3800 ard consiste à l’avoir dénoncée au plus intime de l’ existence individuelle. Chaque fois que nous disons d’un de nos dieux
3801 est puissant, nous témoignons de notre démission. La foule n’a pas d’autre existence et pas d’autre pouvoir que mon refus
3802 que mon refus d’exister devant Dieu et d’exercer le pouvoir que je suis. Elle n’est que ma dégradation. Et toutes les « s
3803 je suis. Elle n’est que ma dégradation. Et toutes les « sciences » qui étudient ses « lois » historiques ou sociologiques s
3804 ques ou sociologiques sont comme une inversion de la théologie, sont une théologie de la dégradation. L’opposition de Kier
3805 inversion de la théologie, sont une théologie de la dégradation. L’opposition de Kierkegaard et de Hegel59 trouve ici son
3806 théologie, sont une théologie de la dégradation. L’ opposition de Kierkegaard et de Hegel59 trouve ici son sens à la fois
3807 gaard et de Hegel59 trouve ici son sens à la fois le plus profond et le plus évidemment actuel. Hegel a tout objectivé : l
3808 trouve ici son sens à la fois le plus profond et le plus évidemment actuel. Hegel a tout objectivé : l’esprit, l’histoire
3809 plus évidemment actuel. Hegel a tout objectivé : l’ esprit, l’histoire, la dialectique, finalement, l’homme lui-même à ses
3810 emment actuel. Hegel a tout objectivé : l’esprit, l’ histoire, la dialectique, finalement, l’homme lui-même à ses propres y
3811 l. Hegel a tout objectivé : l’esprit, l’histoire, la dialectique, finalement, l’homme lui-même à ses propres yeux. Il a vo
3812 l’esprit, l’histoire, la dialectique, finalement, l’ homme lui-même à ses propres yeux. Il a voulu chasser du monde le para
3813 e à ses propres yeux. Il a voulu chasser du monde le paradoxe et le scandale du solitaire plus grand que tous. Il a voulu
3814 yeux. Il a voulu chasser du monde le paradoxe et le scandale du solitaire plus grand que tous. Il a voulu que tout s’expl
3815 out s’implique, c’est-à-dire qu’il a voulu bannir la possibilité scandaleuse des actes libres de la Providence. Entreprise
3816 ir la possibilité scandaleuse des actes libres de la Providence. Entreprise effroyable et vaine, qui serait d’un comique i
3817 , qui serait d’un comique insondable si seulement l’ homme des masses ne venait aujourd’hui s’en prévaloir pour rendre un c
3818 sanguinaire aux faux dieux qu’elle a suscités. «  Le philosophe dit à bon droit que la vie doit être comprise en arrière,
3819 e a suscités. « Le philosophe dit à bon droit que la vie doit être comprise en arrière, mais il oublie l’autre proposition
3820 doit être vécue en avant.60 » Semble-t-il pas que le temps court plus vite depuis un siècle ? C’est que la fuite des homme
3821 emps court plus vite depuis un siècle ? C’est que la fuite des hommes devant l’instant présent se précipite. Ils n’ont pas
3822 un siècle ? C’est que la fuite des hommes devant l’ instant présent se précipite. Ils n’ont pas lu Hegel, bien sûr, mais H
3823 is Hegel est dans tous nos journaux, Hegel domine le marxisme et les fascismes, et la théologie des sociologues, des histo
3824 ns tous nos journaux, Hegel domine le marxisme et les fascismes, et la théologie des sociologues, des historiens, des clerc
3825 ux, Hegel domine le marxisme et les fascismes, et la théologie des sociologues, des historiens, des clercs bourgeois. Comm
3826 cs bourgeois. Comment lui échapper ? N’est-il pas la voix même de cette Âme du monde, cet Esprit de la Forme qui se croit
3827 la voix même de cette Âme du monde, cet Esprit de la Forme qui se croit le Réel et qui pourtant n’est rien que le péché, m
3828 Âme du monde, cet Esprit de la Forme qui se croit le Réel et qui pourtant n’est rien que le péché, mais le péché n’est-il
3829 i se croit le Réel et qui pourtant n’est rien que le péché, mais le péché n’est-il pas notre réalité, notre réalité sans c
3830 éel et qui pourtant n’est rien que le péché, mais le péché n’est-il pas notre réalité, notre réalité sans cesse menacée pa
3831 tre réalité, notre réalité sans cesse menacée par l’ Esprit de transformation ? Notre réalité fuyarde et qui pourtant, par
3832 alité fuyarde et qui pourtant, par un artifice de l’ angoisse, se proclame autonome, s’absolutise, et s’adore elle-même ? L
3833 me autonome, s’absolutise, et s’adore elle-même ? Les uns fuient en avant, et les autres dans le passé, mais qui voudrait s
3834 t s’adore elle-même ? Les uns fuient en avant, et les autres dans le passé, mais qui voudrait se tenir, dans l’instant, « s
3835 ême ? Les uns fuient en avant, et les autres dans le passé, mais qui voudrait se tenir, dans l’instant, « sous le regard d
3836 s dans le passé, mais qui voudrait se tenir, dans l’ instant, « sous le regard de Dieu », comme disent les chrétiens. (Est-
3837 ais qui voudrait se tenir, dans l’instant, « sous le regard de Dieu », comme disent les chrétiens. (Est-ce facile ? ou bie
3838 instant, « sous le regard de Dieu », comme disent les chrétiens. (Est-ce facile ? ou bien même possible ? Est-ce un effet d
3839 aisément…) Certains des plus lucides entrevoient le péril que ces doctrines font courir à l’homme, et j’entends, à l’homm
3840 revoient le péril que ces doctrines font courir à l’ homme, et j’entends, à l’homme tel qu’il est, dans l’ordre même de son
3841 doctrines font courir à l’homme, et j’entends, à l’ homme tel qu’il est, dans l’ordre même de son péché. Ainsi Maurras, lo
3842 omme, et j’entends, à l’homme tel qu’il est, dans l’ ordre même de son péché. Ainsi Maurras, lorsqu’il dénonce les mythes d
3843 me de son péché. Ainsi Maurras, lorsqu’il dénonce les mythes de l’hégélianisme social. « Le meilleur moyen de s’en affranch
3844 é. Ainsi Maurras, lorsqu’il dénonce les mythes de l’ hégélianisme social. « Le meilleur moyen de s’en affranchir sera d’en
3845 il dénonce les mythes de l’hégélianisme social. «  Le meilleur moyen de s’en affranchir sera d’en revoir l’origine. Pour vo
3846 eilleur moyen de s’en affranchir sera d’en revoir l’ origine. Pour voiler le présent certain, ils hypothèquent le futur, ma
3847 ffranchir sera d’en revoir l’origine. Pour voiler le présent certain, ils hypothèquent le futur, mais pour gagner ce derni
3848 Pour voiler le présent certain, ils hypothèquent le futur, mais pour gagner ce dernier gage, les habitudes de l’esprit re
3849 quent le futur, mais pour gagner ce dernier gage, les habitudes de l’esprit religieux leur font concevoir une Âme du Monde
3850 ais pour gagner ce dernier gage, les habitudes de l’ esprit religieux leur font concevoir une Âme du Monde qu’ils se figure
3851 visible, mystérieusement répandu et vaporisé dans les choses afin d’y exaucer (comment et pourquoi ?) nos désirs. Cette sor
3852 e providence brute tout à fait inintelligible est le simple succédané de l’intelligible providence surnaturelle.61 » Mais
3853 à fait inintelligible est le simple succédané de l’ intelligible providence surnaturelle.61 » Mais qui ne voit que cette Â
3854 elle.61 » Mais qui ne voit que cette Âme du Monde le tient aussi, et jusque dans son scepticisme, lorsque Maurras proclame
3855 lorsque Maurras proclame après Auguste Comte : «  Les morts gouvernent les vivants. » Hypothèque sur le passé ! Car si les
3856 lame après Auguste Comte : « Les morts gouvernent les vivants. » Hypothèque sur le passé ! Car si les morts gouvernent les
3857 es morts gouvernent les vivants. » Hypothèque sur le passé ! Car si les morts gouvernent les vivants, c’est que nul vivant
3858 t les vivants. » Hypothèque sur le passé ! Car si les morts gouvernent les vivants, c’est que nul vivant n’ose vivre. Et co
3859 thèque sur le passé ! Car si les morts gouvernent les vivants, c’est que nul vivant n’ose vivre. Et comment vivrait-il sino
3860 vant n’ose vivre. Et comment vivrait-il sinon par l’ appel de la Providence ? Et comment se rendre à l’appel, si l’on pose
3861 vivre. Et comment vivrait-il sinon par l’appel de la Providence ? Et comment se rendre à l’appel, si l’on pose ses conditi
3862 l’appel de la Providence ? Et comment se rendre à l’ appel, si l’on pose ses conditions : « l’intelligible providence surna
3863 a Providence ? Et comment se rendre à l’appel, si l’ on pose ses conditions : « l’intelligible providence surnaturelle ! ».
3864 rendre à l’appel, si l’on pose ses conditions : «  l’ intelligible providence surnaturelle ! ». Toute-puissance des mythes !
3865 surnaturelle ! ». Toute-puissance des mythes ! «  Le meilleur moyen de s’en affranchir sera d’en revoir l’origine. » Seul,
3866 eilleur moyen de s’en affranchir sera d’en revoir l’ origine. » Seul, Kierkegaard sait nous la désigner, dans le refus de c
3867 n revoir l’origine. » Seul, Kierkegaard sait nous la désigner, dans le refus de cette « catégorie du solitaire », de l’hom
3868 . » Seul, Kierkegaard sait nous la désigner, dans le refus de cette « catégorie du solitaire », de l’homme qui vit de la P
3869 le refus de cette « catégorie du solitaire », de l’ homme qui vit de la Parole seulement, entre les temps, dans l’instant
3870 « catégorie du solitaire », de l’homme qui vit de la Parole seulement, entre les temps, dans l’instant éternel. Le soli
3871 de l’homme qui vit de la Parole seulement, entre les temps, dans l’instant éternel. Le solitaire peut-il agir ? Le m
3872 vit de la Parole seulement, entre les temps, dans l’ instant éternel. Le solitaire peut-il agir ? Le maléfice hégélie
3873 ment, entre les temps, dans l’instant éternel. Le solitaire peut-il agir ? Le maléfice hégélien, c’est l’objectivité
3874 nstant éternel. Le solitaire peut-il agir ? Le maléfice hégélien, c’est l’objectivité : cette attitude de l’homme qu
3875 ire peut-il agir ? Le maléfice hégélien, c’est l’ objectivité : cette attitude de l’homme qui ne veut plus être sujet de
3876 hégélien, c’est l’objectivité : cette attitude de l’ homme qui ne veut plus être sujet de son action, qui l’abandonne aux l
3877 me qui ne veut plus être sujet de son action, qui l’ abandonne aux lois mythiques de l’histoire. Kierkegaard au contraire n
3878 son action, qui l’abandonne aux lois mythiques de l’ histoire. Kierkegaard au contraire nous répète : « La subjectivité est
3879 istoire. Kierkegaard au contraire nous répète : «  La subjectivité est la vérité. » La liberté, la dignité de l’homme, c’es
3880 au contraire nous répète : « La subjectivité est la vérité. » La liberté, la dignité de l’homme, c’est qu’il soit seul le
3881 nous répète : « La subjectivité est la vérité. » La liberté, la dignité de l’homme, c’est qu’il soit seul le sujet de sa
3882  : « La subjectivité est la vérité. » La liberté, la dignité de l’homme, c’est qu’il soit seul le sujet de sa vie. Mais en
3883 tivité est la vérité. » La liberté, la dignité de l’ homme, c’est qu’il soit seul le sujet de sa vie. Mais encore faut-il s
3884 rté, la dignité de l’homme, c’est qu’il soit seul le sujet de sa vie. Mais encore faut-il se garder d’entendre l’expressio
3885 sa vie. Mais encore faut-il se garder d’entendre l’ expression au sens des romantiques. Je suis sujet, mais il reste à sav
3886 t-il d’un impérialisme du moi pur, tel que Fichte l’ a follement rêvé ? Si c’est le cas, je reste bien tranquille. Ce « moi
3887 pur, tel que Fichte l’a follement rêvé ? Si c’est le cas, je reste bien tranquille. Ce « moi pur » ne met pas en cause mon
3888 oi pur » ne met pas en cause mon désespoir, ou si l’ on veut, je peux rêver dans le sommeil du désespoir à ma perfection id
3889 on désespoir, ou si l’on veut, je peux rêver dans le sommeil du désespoir à ma perfection idéale, je peux rêver ma vocatio
3890 réveil. Il nous saisit à ce moment précis où tous les systèmes s’évanouissent devant l’effroi du choix concret, du risque,
3891 précis où tous les systèmes s’évanouissent devant l’ effroi du choix concret, du risque, dans la passion du désespoir total
3892 devant l’effroi du choix concret, du risque, dans la passion du désespoir total. Maintenant, tu vas témoigner de la puissa
3893 désespoir total. Maintenant, tu vas témoigner de la puissance que ton savoir exerce sur ta vie. Tu te croyais un moi : té
3894 ule, imitation et simple objet des lois du monde. La foule attend : si tu la suis, elle te méprisera sans doute, mais c’es
3895 objet des lois du monde. La foule attend : si tu la suis, elle te méprisera sans doute, mais c’est le sort commun, tu ne
3896 la suis, elle te méprisera sans doute, mais c’est le sort commun, tu ne cours pas grand risque. Si tu dis non, si tu agis,
3897 elle te tuera peut-être, quitte à fleurir ensuite la tombe du « héros », dernière insulte62. Il s’agit de savoir maintenan
3898 érer dans son être agissant : en cette extrémité, le compromis se justifie… Mais si ton moi n’est pas à toi ? S’il est ta
3899 ? S’il est ta vocation reçue d’ailleurs, et si tu l’ as reçue en vérité, tu n’as plus à choisir, ta mort est derrière toi,
3900 au monde ne pourrait permettre d’accepter, quand le martyr reçoit sa mort avec une sorte de sobriété… Le croyant seul agi
3901 martyr reçoit sa mort avec une sorte de sobriété… Le croyant seul agit, et seul il peut être sujet de son action, mais c’e
3902 est, dans l’autre sens du terme, « assujetti » à la Parole qui vit en lui. C’est dans ce sens que la formule de Kierkegaa
3903 la Parole qui vit en lui. C’est dans ce sens que la formule de Kierkegaard est vraie. La sujétion totale est seule active
3904 ce sens que la formule de Kierkegaard est vraie. La sujétion totale est seule active. Elle est aussi présence au monde. D
3905 lle est aussi présence au monde. Dans ce temps de la masse, où nous vivons, le « solitaire devant Dieu » est aussi l’homme
3906 monde. Dans ce temps de la masse, où nous vivons, le « solitaire devant Dieu » est aussi l’homme le plus réel, le plus pré
3907 us vivons, le « solitaire devant Dieu » est aussi l’ homme le plus réel, le plus présent. Parce qu’il sait qu’il existe un
3908 s, le « solitaire devant Dieu » est aussi l’homme le plus réel, le plus présent. Parce qu’il sait qu’il existe un « ailleu
3909 ire devant Dieu » est aussi l’homme le plus réel, le plus présent. Parce qu’il sait qu’il existe un « ailleurs », et que l
3910 e qu’il sait qu’il existe un « ailleurs », et que l’ éternité vient à lui, il peut réellement et jusqu’au bout accepter de
3911 usqu’au bout accepter de vivre hic et nunc, quand la foule est ubiquité et fuite sans fin dans le passé ou l’avenir. Un
3912 uand la foule est ubiquité et fuite sans fin dans le passé ou l’avenir. Un seul utile à tous La phrase de Carlyle es
3913 e est ubiquité et fuite sans fin dans le passé ou l’ avenir. Un seul utile à tous La phrase de Carlyle est connue, ré
3914 le passé ou l’avenir. Un seul utile à tous La phrase de Carlyle est connue, résumant l’utilitarisme de Bentham : « 
3915 tous La phrase de Carlyle est connue, résumant l’ utilitarisme de Bentham : « Étant donné un monde plein de coquins, mon
3916 tant donné un monde plein de coquins, montrer que la vertu est le résultat de leurs aspirations collectives. » Renversant
3917 monde plein de coquins, montrer que la vertu est le résultat de leurs aspirations collectives. » Renversant ce rapport il
3918 Kierkegaard que sa « catégorie du solitaire » est le seul fondement pratique d’une collectivité vraiment vivante. Cependan
3919 « catégorie » lui soit si familière qu’il puisse la considérer, sans autre, comme donnée ? La tentation est forte, de pas
3920 puisse la considérer, sans autre, comme donnée ? La tentation est forte, de passer d’une critique des collectivités menso
3921 tique des collectivités mensongères de ce temps à l’ utopie d’une communauté chrétienne, par l’artifice indispensable, mais
3922 temps à l’utopie d’une communauté chrétienne, par l’ artifice indispensable, mais peut-être aussi tout formel, de l’isoleme
3923 dispensable, mais peut-être aussi tout formel, de l’ isolement devant Dieu. Et, d’autre part, l’acte du « solitaire » n’est
3924 el, de l’isolement devant Dieu. Et, d’autre part, l’ acte du « solitaire » n’est pas de ceux dont nous ayons à développer l
3925  » n’est pas de ceux dont nous ayons à développer les conséquences. Ou bien il est, et c’est l’acte de Dieu, ou bien je l’i
3926 lopper les conséquences. Ou bien il est, et c’est l’ acte de Dieu, ou bien je l’imagine, et mon discours est vain. À qui pr
3927 bien il est, et c’est l’acte de Dieu, ou bien je l’ imagine, et mon discours est vain. À qui pressent, dans sa réalité bru
3928 sérieux dernier, et son risque absolu, ce qu’est la solitude dont Kierkegaard a témoigné, il n’apparaît plus nécessaire d
3929 émoigné, il n’apparaît plus nécessaire de réfuter les objections du « sens social ». Plusieurs ouvrages de Kierkegaard port
3930 s autres, et personne ne se sent atteint, mais si l’ on parle au solitaire de son angoisse, c’est de la mienne. Kierkegaard
3931 nsable parmi nous. Il sait bien qu’en tous temps, le malheur de l’époque ne provient pas de ce qu’elle est « sans Dieu »,
3932 ous. Il sait bien qu’en tous temps, le malheur de l’ époque ne provient pas de ce qu’elle est « sans Dieu », car nul siècle
3933 est sans maîtres, c’est-à-dire sans martyrs pour l’ enseigner. C’est au sel qu’il faut rendre sa saveur, c’est à lui seul
3934 qu’il faut rendre sa saveur, c’est à lui seul que l’ on peut reprocher d’être insipide. Rien ne sera jamais réel pour tous,
3935 est réel pour un seul. Maintenant, il faut être «  l’ impossible » : il faut être le solitaire. Kierkegaard peut-il nous aid
3936 ant, il faut être « l’impossible » : il faut être le solitaire. Kierkegaard peut-il nous aider ? (Un homme pourrait-il nou
3937 iers prétextes, de nos dernières incertitudes sur la nature et sur les exigences concrètes de l’esprit ? Mais ne fallait-i
3938 e nos dernières incertitudes sur la nature et sur les exigences concrètes de l’esprit ? Mais ne fallait-il pas qu’il ait co
3939 s sur la nature et sur les exigences concrètes de l’ esprit ? Mais ne fallait-il pas qu’il ait connu de grandes aides pour
3940 ait connu de grandes aides pour oser nous montrer la vanité de toutes les nôtres ? Somnium narrare vigilantis est. L’aveu
3941 utes les nôtres ? Somnium narrare vigilantis est. L’ aveu total de notre désespoir témoigne seul de la consolation. 52.
3942 L’aveu total de notre désespoir témoigne seul de la consolation. 52. Journal, tome X. 53. « Là encore, le clerc mode
3943 ation. 52. Journal, tome X. 53. « Là encore, le clerc moderne est protestant », ajoute M. Benda, qui, en fait de prot
3944 er, son maître… 54. Jean XI, 4. 55. Stades sur le chemin de la vie. 56. L’instant. 57. Journal. 58. Traité du dés
3945 e… 54. Jean XI, 4. 55. Stades sur le chemin de la vie. 56. L’instant. 57. Journal. 58. Traité du désespoir, p. 15
3946 I, 4. 55. Stades sur le chemin de la vie. 56. L’ instant. 57. Journal. 58. Traité du désespoir, p. 156. 59. Je ne
3947 poir, p. 156. 59. Je ne reviendrai pas, ici, sur l’ aspect philosophique de cette opposition, que Jean Wahl a remarquablem
3948 Wahl a remarquablement exposé dans un article de la Revue philosophique (nov.-déc. 1931). 60. Journal. 61. Le chemin
3949 losophique (nov.-déc. 1931). 60. Journal. 61. Le chemin du paradis, p. 269. C’est moi qui souligne. 62. Pourquoi pose
3950 question à propos d’un cas aussi exceptionnel que le martyre ? « Nous ne pouvons pas tous devenir martyrs ! » Certes, répo
3951 aard, mais il vaudrait mieux dire : « “Moi, je ne le puis pas.” Et s’il est fou de penser que tous doivent l’être, il est
3952 pas.” Et s’il est fou de penser que tous doivent l’ être, il est encore beaucoup plus fou qu’aucun ne veuille l’être. » L’
3953 est encore beaucoup plus fou qu’aucun ne veuille l’ être. » L’inévitable rappel aux nécessités quotidiennes est encore un
3954 e beaucoup plus fou qu’aucun ne veuille l’être. » L’ inévitable rappel aux nécessités quotidiennes est encore un prétexte d
3955 nécessités quotidiennes est encore un prétexte de l’ angoisse. Si la vie quotidienne est si peu dramatique, cela ne signifi
3956 idiennes est encore un prétexte de l’angoisse. Si la vie quotidienne est si peu dramatique, cela ne signifie pas que les q
3957 e est si peu dramatique, cela ne signifie pas que les questions dernières ne s’y posent jamais, mais simplement qu’on les y
3958 ières ne s’y posent jamais, mais simplement qu’on les y noie. Les hommes préfèrent « mourir imperceptiblement », comme disa
3959 posent jamais, mais simplement qu’on les y noie. Les hommes préfèrent « mourir imperceptiblement », comme disait Nietzsche
3960 ’ils appellent leur petit train-train journalier. La fameuse « vie quotidienne » n’est peut-être rien d’autre qu’un dernie
3961 peut-être rien d’autre qu’un dernier méfait de «  la foule » dans notre existence morale. Une question mal posée. Un regar
3962 e question mal posée. Un regard trouble porté sur la réalité. x. Rougemont Denis de, « Nécessité de Kierkegaard », Foi e
21 1934, Foi et Vie, articles (1928–1977). Kasimir Edschmid, Destin allemand (octobre 1934)
3963 imir Edschmid, Destin allemand (octobre 1934)y Le meilleur livre de l’année. Je crois bien pouvoir l’affirmer. Le roman
3964 allemand (octobre 1934)y Le meilleur livre de l’ année. Je crois bien pouvoir l’affirmer. Le roman le plus fort, le mie
3965 meilleur livre de l’année. Je crois bien pouvoir l’ affirmer. Le roman le plus fort, le mieux fait, le plus impressionnant
3966 vre de l’année. Je crois bien pouvoir l’affirmer. Le roman le plus fort, le mieux fait, le plus impressionnant, celui qui
3967 année. Je crois bien pouvoir l’affirmer. Le roman le plus fort, le mieux fait, le plus impressionnant, celui qui apporte l
3968 s bien pouvoir l’affirmer. Le roman le plus fort, le mieux fait, le plus impressionnant, celui qui apporte le plus de nouv
3969 l’affirmer. Le roman le plus fort, le mieux fait, le plus impressionnant, celui qui apporte le plus de nouveauté, d’humani
3970 x fait, le plus impressionnant, celui qui apporte le plus de nouveauté, d’humanité, de grandeur. J’ai d’autant plus envie
3971 umanité, de grandeur. J’ai d’autant plus envie de le dire qu’on n’a pas annoncé sa parution à grand fracas, et qu’à ma con
3972 as au public habituel des prix Goncourt —, et qui le dit avec une puissance assez austère. ⁂ Six chômeurs allemands, ancie
3973 ands, anciens officiers et sous-officiers pendant la guerre, s’embarquent pour l’Amérique du Sud. On les a engagés pour in
3974 us-officiers pendant la guerre, s’embarquent pour l’ Amérique du Sud. On les a engagés pour instruire l’armée bolivienne, m
3975 a guerre, s’embarquent pour l’Amérique du Sud. On les a engagés pour instruire l’armée bolivienne, mais sans contrat, car l
3976 ’Amérique du Sud. On les a engagés pour instruire l’ armée bolivienne, mais sans contrat, car le traité de Versailles inter
3977 truire l’armée bolivienne, mais sans contrat, car le traité de Versailles interdit à la Bolivie d’utiliser les services de
3978 s contrat, car le traité de Versailles interdit à la Bolivie d’utiliser les services des Allemands. Pendant leur traversée
3979 té de Versailles interdit à la Bolivie d’utiliser les services des Allemands. Pendant leur traversée, un coup d’État renver
3980 . Pendant leur traversée, un coup d’État renverse le gouvernement qui les avait appelés officieusement. Ils hésitent à pou
3981 rsée, un coup d’État renverse le gouvernement qui les avait appelés officieusement. Ils hésitent à poursuivre. L’un d’entre
3982 lutionnaires qui préparent un coup de main contre le dictateur du Venezuela ; un autre ira chercher fortune en Argentine,
3983 ntine, dans une plantation de thé où, d’ailleurs, la crise mondiale l’aura précédé. Les quatre autres atteignent enfin La
3984 antation de thé où, d’ailleurs, la crise mondiale l’ aura précédé. Les quatre autres atteignent enfin La Paz, capitale de l
3985 où, d’ailleurs, la crise mondiale l’aura précédé. Les quatre autres atteignent enfin La Paz, capitale de la Bolivie, ville
3986 ’aura précédé. Les quatre autres atteignent enfin La Paz, capitale de la Bolivie, ville étrange, perdue à 4000 mètres d’al
3987 uatre autres atteignent enfin La Paz, capitale de la Bolivie, ville étrange, perdue à 4000 mètres d’altitude dans un déser
3988 sert glacé, dominé par d’énormes cimes neigeuses. Le ministre de la Guerre, un métis assez suspect, les paye mais ne leur
3989 iné par d’énormes cimes neigeuses. Le ministre de la Guerre, un métis assez suspect, les paye mais ne leur donne rien à fa
3990 Le ministre de la Guerre, un métis assez suspect, les paye mais ne leur donne rien à faire ; finalement, pour se débarrasse
3991 faire ; finalement, pour se débarrasser d’eux, il les fait tomber dans un piège grossier : un agent provocateur leur offre
3992 leur offre un engagement au Paraguay, qu’ils ont la naïveté d’accepter. Accusés de haute trahison, ils sont jetés aussitô
3993 ans une prison infecte, avec des Indiens lépreux. Le ministre d’Allemagne à La Paz, Pillau, réussit à les tirer de là aprè
3994 ec des Indiens lépreux. Le ministre d’Allemagne à La Paz, Pillau, réussit à les tirer de là après des semaines d’efforts f
3995 ministre d’Allemagne à La Paz, Pillau, réussit à les tirer de là après des semaines d’efforts fiévreux, durant lesquelles
3996 fiévreux, durant lesquelles il éprouve amèrement la faiblesse de son autorité, c’est-à-dire la faiblesse de l’Allemagne s
3997 rement la faiblesse de son autorité, c’est-à-dire la faiblesse de l’Allemagne sur le plan international. Les quatre hommes
3998 sse de son autorité, c’est-à-dire la faiblesse de l’ Allemagne sur le plan international. Les quatre hommes s’en vont à Bue
3999 iblesse de l’Allemagne sur le plan international. Les quatre hommes s’en vont à Buenos Aires, et, là, à bout de ressources,
4000 de collaborer à une révolution qui va bouleverser le Brésil. Ils retrouvent un de leurs compagnons du début, celui qui éta
4001 s compagnons du début, celui qui était parti pour le Venezuela, et qui a subi, lui aussi, des emprisonnements, le bagne, e
4002 a, et qui a subi, lui aussi, des emprisonnements, le bagne, et des tortures physiques inouïes. Mais ils ne se retrouvent q
4003 é contre une section des troupes régulières, dont le chef n’est autre que le planteur de thé, le sixième camarade. Voilà q
4004 troupes régulières, dont le chef n’est autre que le planteur de thé, le sixième camarade. Voilà qui donne l’idée d’un rom
4005 teur de thé, le sixième camarade. Voilà qui donne l’ idée d’un roman d’aventures. Destin allemand est bien, entre autres, u
4006 ais cet aspect-là, qui suffit d’ailleurs à rendre le livre passionnant et presque obsédant, ne suffit pas à expliquer l’im
4007 nt et presque obsédant, ne suffit pas à expliquer l’ impression de grandeur brutale et grave à la fois qui demeure dans l’e
4008 ndeur brutale et grave à la fois qui demeure dans l’ esprit, bien après qu’on l’a lu. En vérité, ce résumé laisse à peine e
4009 fois qui demeure dans l’esprit, bien après qu’on l’ a lu. En vérité, ce résumé laisse à peine entrevoir le véritable sujet
4010 lu. En vérité, ce résumé laisse à peine entrevoir le véritable sujet de l’œuvre, celui que désigne le titre. Ces six homme
4011 mé laisse à peine entrevoir le véritable sujet de l’ œuvre, celui que désigne le titre. Ces six hommes63 ont été chassés de
4012 le véritable sujet de l’œuvre, celui que désigne le titre. Ces six hommes63 ont été chassés de leur pays par une crise qu
4013 ne crise qui atteint à la fois leur attachement à la patrie et leur humanité, au sens le plus profond. Ce dont ils souffre
4014 attachement à la patrie et leur humanité, au sens le plus profond. Ce dont ils souffrent, ce n’est pas seulement de manque
4015 er leur pain, mais c’est surtout de constater que l’ Allemagne, pour laquelle ils se sont battus, n’a plus la force d’utili
4016 magne, pour laquelle ils se sont battus, n’a plus la force d’utiliser leurs énergies, leurs vocations humaines. L’un d’eux
4017 rnier, paysan. On n’a pas voulu d’eux, là-bas. Et les voici lancés dans une vie d’aventures qu’ils n’avaient pas voulue, qu
4018 vie d’aventures qu’ils n’avaient pas voulue, qui les détourne de toutes leurs espérances. Ce n’est point qu’ils aient peur
4019 est plus atroce à supporter que ce sentiment-là ; l’ absurdité de sa vie, l’absurdité du destin qu’on subit. Arrachés de le
4020 rter que ce sentiment-là ; l’absurdité de sa vie, l’ absurdité du destin qu’on subit. Arrachés de leur terre et de leur peu
4021 es et qui s’expriment difficilement. Seul Pillau, le ministre, l’incarnation de leur nation, saura leur dire le mot de ce
4022 xpriment difficilement. Seul Pillau, le ministre, l’ incarnation de leur nation, saura leur dire le mot de ce destin. « Nou
4023 re, l’incarnation de leur nation, saura leur dire le mot de ce destin. « Nous avons perdu la guerre, Bell, et dans la situ
4024 leur dire le mot de ce destin. « Nous avons perdu la guerre, Bell, et dans la situation où nous sommes, nous ne pouvons pl
4025 stin. « Nous avons perdu la guerre, Bell, et dans la situation où nous sommes, nous ne pouvons plus nous affirmer que par
4026 ommes, nous ne pouvons plus nous affirmer que par le sacrifice… Il ne s’agit pas de ces sacrifices dont on s’acquitte avec
4027 esquels on joue sa propre existence intérieure. » Le destin de ces déracinés, ce sera désormais de porter en eux-mêmes l’i
4028 racinés, ce sera désormais de porter en eux-mêmes l’ image tragique de leur patrie, l’idée profonde de leur nation, que Pil
4029 ter en eux-mêmes l’image tragique de leur patrie, l’ idée profonde de leur nation, que Pillau définit comme la fidélité, et
4030 profonde de leur nation, que Pillau définit comme la fidélité, et de tout sacrifier à cette fidélité. À mesure qu’ils s’él
4031 t en elle qu’ils communient, c’est elle seule qui les soutient dans les plus effroyables et dégradantes épreuves. Eux, les
4032 ommunient, c’est elle seule qui les soutient dans les plus effroyables et dégradantes épreuves. Eux, les simples, ils souff
4033 es plus effroyables et dégradantes épreuves. Eux, les simples, ils souffrent physiquement. Mais leur drame s’exprime dans l
4034 rent physiquement. Mais leur drame s’exprime dans la méditation de Pillau, d’une manière non moins tragique. « Il découvri
4035 te, et pourtant fière, d’être Allemand, de garder la tête haute pour l’Allemagne, et de participer au destin qui lui était
4036 re, d’être Allemand, de garder la tête haute pour l’ Allemagne, et de participer au destin qui lui était échu pour un temps
4037 était échu pour un temps. Ce destin qui obligeait l’ Allemagne, après la guerre, à vivre dans un état de guerre encore plus
4038 temps. Ce destin qui obligeait l’Allemagne, après la guerre, à vivre dans un état de guerre encore plus cruel qu’auparavan
4039 tu, désuni et impuissant… » Mais tandis que Bell, le chef du petit groupe, agonise au fond d’une tranchée, sous les murs d
4040 etit groupe, agonise au fond d’une tranchée, sous les murs du fort de Capocabana, il a soudain la vision d’une Allemagne fu
4041 sous les murs du fort de Capocabana, il a soudain la vision d’une Allemagne future renaissant de son calvaire, purifiée et
4042 vaire, purifiée et galvanisée par ses sacrifices. La haute stature de Pillau se dresse devant lui. Une fois encore, Pillau
4043 se devant lui. Une fois encore, Pillau lui montre le sens du sacrifice de « ces jeunes gens qui sont entrés dans le malheu
4044 crifice de « ces jeunes gens qui sont entrés dans le malheur la tête haute ». Car ce sont « les jeunes gens, qui ne posséd
4045 « ces jeunes gens qui sont entrés dans le malheur la tête haute ». Car ce sont « les jeunes gens, qui ne possédaient rien,
4046 és dans le malheur la tête haute ». Car ce sont «  les jeunes gens, qui ne possédaient rien, qui ont écrit les pages héroïqu
4047 unes gens, qui ne possédaient rien, qui ont écrit les pages héroïques de l’histoire, et non les gens âgés qui possédaient t
4048 daient rien, qui ont écrit les pages héroïques de l’ histoire, et non les gens âgés qui possédaient tout. Ces jeunes Allema
4049 t écrit les pages héroïques de l’histoire, et non les gens âgés qui possédaient tout. Ces jeunes Allemands qui doivent supp
4050 mands qui doivent supporter, de nos jours, toutes les misères du monde au fond de leur exil, ceux-là deviendront sûrement u
4051 Bell… rien ne rend aussi dur et aussi ardent que le malheur. Rien ne rend aussi brave et aussi passionné, aussi modeste,
4052 ussi modeste, aussi patient et aussi endurant que le malheur. Et rien ne fonde une communauté comme le malheur. La communa
4053 le malheur. Et rien ne fonde une communauté comme le malheur. La communauté des gens qui vivent dans l’aisance, celle-là n
4054 Et rien ne fonde une communauté comme le malheur. La communauté des gens qui vivent dans l’aisance, celle-là ne vaut pas u
4055 e malheur. La communauté des gens qui vivent dans l’ aisance, celle-là ne vaut pas un clou. Mais la communauté des gens cim
4056 ans l’aisance, celle-là ne vaut pas un clou. Mais la communauté des gens cimentés par le malheur, ça c’est la seule vraie
4057 un clou. Mais la communauté des gens cimentés par le malheur, ça c’est la seule vraie communauté qui puisse exister pour u
4058 unauté des gens cimentés par le malheur, ça c’est la seule vraie communauté qui puisse exister pour un peuple ». ⁂ J’ai te
4059 sages pour faire sentir à quelle hauteur se situe le drame de ce livre. Nous sommes bien loin de la « propagande » nationa
4060 ue le drame de ce livre. Nous sommes bien loin de la « propagande » nationaliste et des rodomontades hitlériennes64. Nous
4061 nœud tragique de ce problème allemand qui domine l’ après-guerre, et dont le dénouement doit nous laisser d’autant moins i
4062 blème allemand qui domine l’après-guerre, et dont le dénouement doit nous laisser d’autant moins indifférents que notre so
4063 est engagé. À vrai dire, il est malaisé de faire la part, dans ce drame, de ce qui est national et de ce qui est plus gén
4064 umain. Destin allemand pourrait aussi s’appeler «  La condition humaine ». Et plusieurs des paroles de Pillau, — les plus b
4065 humaine ». Et plusieurs des paroles de Pillau, —  les plus belles peut-être — pourraient s’appliquer au destin de n’importe
4066 te quelle nation, de n’importe quelle communauté. Le « fait nation », dans les dernières phrases de Pillau, n’apparaît-il
4067 porte quelle communauté. Le « fait nation », dans les dernières phrases de Pillau, n’apparaît-il pas lié au seul malheur de
4068 au seul malheur des hommes ? Et n’est-ce point là le vrai tragique de l’Allemagne actuelle, que son destin la force à n’en
4069 hommes ? Et n’est-ce point là le vrai tragique de l’ Allemagne actuelle, que son destin la force à n’envisager plus le sort
4070 tragique de l’Allemagne actuelle, que son destin la force à n’envisager plus le sort de l’homme que sous l’aspect du sort
4071 uelle, que son destin la force à n’envisager plus le sort de l’homme que sous l’aspect du sort de la nation ? Tel est, je
4072 son destin la force à n’envisager plus le sort de l’ homme que sous l’aspect du sort de la nation ? Tel est, je crois, le p
4073 ce à n’envisager plus le sort de l’homme que sous l’ aspect du sort de la nation ? Tel est, je crois, le problème central q
4074 s le sort de l’homme que sous l’aspect du sort de la nation ? Tel est, je crois, le problème central qu’impose ce livre, e
4075 ’aspect du sort de la nation ? Tel est, je crois, le problème central qu’impose ce livre, et l’on admettra bien, quelque o
4076 crois, le problème central qu’impose ce livre, et l’ on admettra bien, quelque opinion qu’on ait sur le point de vue strict
4077 t sur le point de vue strictement « allemand » de l’ auteur, qu’il est peu de problèmes plus graves pour notre avenir imméd
4078 d évoque bien d’autres questions. Edschmid a fait le tour du monde ; il a séjourné longtemps en Orient et en Amérique ; il
4079 en Amérique ; il s’est enfoncé profondément dans la vie africaine ; et, de toutes ces enquêtes passionnées, il rapporte u
4080 rtout où il se crée quelque chose de durable dans le monde, c’est l’œuvre d’un blanc. Les blancs seuls ont su créer des em
4081 rée quelque chose de durable dans le monde, c’est l’ œuvre d’un blanc. Les blancs seuls ont su créer des empires solides, d
4082 durable dans le monde, c’est l’œuvre d’un blanc. Les blancs seuls ont su créer des empires solides, des valeurs morales st
4083 empires solides, des valeurs morales stables, de la fidélité. Les blancs seuls savent tenir une parole, se sacrifier à un
4084 des, des valeurs morales stables, de la fidélité. Les blancs seuls savent tenir une parole, se sacrifier à une cause désesp
4085 arole, se sacrifier à une cause désespérée, tenir le coup, malgré les trahisons du sort. Mais la guerre, mais la politique
4086 ier à une cause désespérée, tenir le coup, malgré les trahisons du sort. Mais la guerre, mais la politique surtout, sont en
4087 tenir le coup, malgré les trahisons du sort. Mais la guerre, mais la politique surtout, sont en train d’ébranler leur pres
4088 algré les trahisons du sort. Mais la guerre, mais la politique surtout, sont en train d’ébranler leur prestige. L’empire a
4089 surtout, sont en train d’ébranler leur prestige. L’ empire anglais se dissocie lentement. La France doute de sa mission. L
4090 prestige. L’empire anglais se dissocie lentement. La France doute de sa mission. L’Espagne est morte, et le spectacle de l
4091 issocie lentement. La France doute de sa mission. L’ Espagne est morte, et le spectacle de la vie politique en Amérique du
4092 ance doute de sa mission. L’Espagne est morte, et le spectacle de la vie politique en Amérique du Sud fait mesurer la déch
4093 mission. L’Espagne est morte, et le spectacle de la vie politique en Amérique du Sud fait mesurer la déchéance d’une race
4094 la vie politique en Amérique du Sud fait mesurer la déchéance d’une race qui n’a pas su se garder pure. Alors ? Serait-ce
4095 pas su se garder pure. Alors ? Serait-ce bientôt l’ heure de l’Allemagne ? On sent partout cette interrogation, cette anxi
4096 garder pure. Alors ? Serait-ce bientôt l’heure de l’ Allemagne ? On sent partout cette interrogation, cette anxieuse espéra
4097 tte interrogation, cette anxieuse espérance, dans le livre d’Edschmid. Et l’on découvre, pour la première fois peut-être,
4098 anxieuse espérance, dans le livre d’Edschmid. Et l’ on découvre, pour la première fois peut-être, l’arrière-pensée mondial
4099 t l’on découvre, pour la première fois peut-être, l’ arrière-pensée mondiale, grandiose, qui soutient ce peuple fiévreux da
4100 , grandiose, qui soutient ce peuple fiévreux dans les épreuves qu’il traverse. Ce ne sont pas les journaux qui nous apprend
4101 dans les épreuves qu’il traverse. Ce ne sont pas les journaux qui nous apprendront tout cela. Il faut lire Destin allemand
4102 l faut lire Destin allemand, comme on lirait dans la conscience même d’un peuple. Il faut avoir éprouvé par ce livre la gr
4103 e d’un peuple. Il faut avoir éprouvé par ce livre la grandeur d’une telle espérance, si l’on veut juger sainement la polit
4104 ar ce livre la grandeur d’une telle espérance, si l’ on veut juger sainement la politique étrange de cette nation. Mais j’a
4105 une telle espérance, si l’on veut juger sainement la politique étrange de cette nation. Mais j’ai dit que cette œuvre pour
4106 ette œuvre pourrait s’intituler tout aussi bien «  La condition humaine ». C’est qu’elle éveille, en dépit de ses intention
4107 ions nationalistes — au plus haut sens du mot, je le répète, mais il se peut tout de même que certains lecteurs français e
4108 ue certains lecteurs français en soient choqués — le sentiment d’une fraternité humaine que le roman d’André Malraux, qui
4109 oqués — le sentiment d’une fraternité humaine que le roman d’André Malraux, qui porte précisément ce titre, était loin d’é
4110 in d’évoquer avec une pareille puissance. J’ai eu l’ occasion de dire, ici même, mon admiration pour les livres de M. Malra
4111 l’occasion de dire, ici même, mon admiration pour les livres de M. Malraux. Je suis d’autant plus libre pour affirmer aujou
4112 d’autant plus libre pour affirmer aujourd’hui que le roman d’Edschmid est d’une classe nettement supérieure. J’ajouterai m
4113 e M. Malraux que de constater que ses livres sont les seuls ouvrages français qu’on puisse comparer, tant pour leur sujet q
4114 tension65, à ce Destin allemand, qui, toutefois, les domine. Edschmid est plus viril, plus massif, plus sain ; moins compl
4115 sain ; moins complaisant surtout aux voluptés de l’ aventure, à la psychologie de la douleur physique. Ses héros subissent
4116 complaisant surtout aux voluptés de l’aventure, à la psychologie de la douleur physique. Ses héros subissent, avec un héro
4117 t aux voluptés de l’aventure, à la psychologie de la douleur physique. Ses héros subissent, avec un héroïsme et une révolt
4118 us émouvants d’être silencieux, des tortures dont les héros de Malraux n’ont pas toujours renoncé à faire de la littérature
4119 de Malraux n’ont pas toujours renoncé à faire de la littérature. On comprend bien que je n’oppose pas ici le nationaliste
4120 érature. On comprend bien que je n’oppose pas ici le nationaliste au communiste. Je ne partage pas plus les idées racistes
4121 ationaliste au communiste. Je ne partage pas plus les idées racistes d’Edschmid que les idées marxistes de Malraux (encore
4122 artage pas plus les idées racistes d’Edschmid que les idées marxistes de Malraux (encore que l’un et l’autre fassent figure
4123 dans leurs camps respectifs). Mais sur le plan de l’ art romanesque, autant que sur le plan généralement humain, je suis co
4124 je suis contraint de reconnaître qu’Edschmid est le plus authentique. Il y a, dans Destin allemand, un timbre de voix mét
4125 ur enfin qui nous ramènent puissamment au sens de la réalité humaine, au sens de la dégradation humaine, au sens du péché
4126 samment au sens de la réalité humaine, au sens de la dégradation humaine, au sens du péché concret de l’homme. Et qui rend
4127 dégradation humaine, au sens du péché concret de l’ homme. Et qui rendent à notre jugement une rigueur qui se perdait à so
4128 oter que pas une seule femme n’apparaît dans tout le roman. 64. Je ne sais quel sort le Troisième Reich a réservé à ce li
4129 eich a réservé à ce livre, qui parut au moment de l’ avènement d’Hitler. Mais je le crois trop franc et trop complexe à la
4130 parut au moment de l’avènement d’Hitler. Mais je le crois trop franc et trop complexe à la fois pour avoir l’agrément off
4131 trop franc et trop complexe à la fois pour avoir l’ agrément officiel. 65. Le parallélisme est vraiment frappant : Malrau
4132 xe à la fois pour avoir l’agrément officiel. 65. Le parallélisme est vraiment frappant : Malraux, comme Edschmid, a voyag
4133 Edschmid, a voyagé dans des pays où il a pu voir les Européens mêlés à des révolutions indigènes, et comme Edschmid, il en
4134 comme Edschmid, il en a tiré des conclusions sur le destin de la race blanche, qui forment l’arrière-plan idéologique de
4135 id, il en a tiré des conclusions sur le destin de la race blanche, qui forment l’arrière-plan idéologique de son œuvre. Le
4136 ons sur le destin de la race blanche, qui forment l’ arrière-plan idéologique de son œuvre. Leurs manières de décrire des c
4137 s combats où, entre deux bandes de mitrailleuses, le héros médite sur son sort, sont presque identiques. Chez l’un et l’au
4138 uve ce goût des situations extrêmes, où se dénude le fond secret d’un être, sa sauvagerie ou sa bonté fondamentale. L’homm
4139 ’un être, sa sauvagerie ou sa bonté fondamentale. L’ homme ne s’avouera-t-il jamais lui-même que dans les tortures ? y. R
4140 ’homme ne s’avouera-t-il jamais lui-même que dans les tortures ? y. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Kasimir Edschmid
22 1935, Foi et Vie, articles (1928–1977). Notes en marge de Nietzsche (mars 1935)
4141 posthumes de Nietzsche. On ne saurait surestimer l’ importance de ces écrits demeurés longtemps inédits, et dont M. Henri-
4142 roduit ce volume, nous affirme qu’ils constituent le texte véritable d’une œuvre dont les volumes parus du vivant de Nietz
4143 s constituent le texte véritable d’une œuvre dont les volumes parus du vivant de Nietzsche ne seraient guère que le comment
4144 arus du vivant de Nietzsche ne seraient guère que le commentaire. Je ne sais ce qu’il faut penser d’une allégation qui par
4145 e celui qu’on vient de nous donner, nous restitue la totalité des thèmes de l’œuvre, sous une forme souvent beaucoup plus
4146 s donner, nous restitue la totalité des thèmes de l’ œuvre, sous une forme souvent beaucoup plus directe que celle qu’adopt
4147 p plus directe que celle qu’adopta Nietzsche dans les écrits qu’il fit paraître. On ne saurait trop recommander la lecture
4148 u’il fit paraître. On ne saurait trop recommander la lecture de ce recueil aux esprits suffisamment armés de sens critique
4149 ques, et de cette liberté spirituelle que confère la connaissance vivante de « la seule chose nécessaire ». Rien de grand,
4150 rituelle que confère la connaissance vivante de «  la seule chose nécessaire ». Rien de grand, dans l’ordre humain, ne peut
4151  la seule chose nécessaire ». Rien de grand, dans l’ ordre humain, ne peut être vraiment dangereux pour un chrétien qui sai
4152 our un chrétien qui sait en qui il croit. Et pour les autres, qu’importe qu’ils perdent à cette lecture des « certitudes »
4153 traditionnelles, jamais sérieusement éprouvées ? La foi vraie suppose la ruine de toutes les pauvres constructions où nou
4154 ais sérieusement éprouvées ? La foi vraie suppose la ruine de toutes les pauvres constructions où nous pensions pouvoir no
4155 rouvées ? La foi vraie suppose la ruine de toutes les pauvres constructions où nous pensions pouvoir nous abriter contre so
4156 r contre son risque salutaire. M. Bolle a réparti les fragments traduits en trois rubriques : le philosophe, le moraliste,
4157 parti les fragments traduits en trois rubriques : le philosophe, le moraliste, le politique. Je ne vois pas de meilleur mo
4158 ents traduits en trois rubriques : le philosophe, le moraliste, le politique. Je ne vois pas de meilleur moyen de donner a
4159 en trois rubriques : le philosophe, le moraliste, le politique. Je ne vois pas de meilleur moyen de donner aux lecteurs de
4160 e Foi et Vie une idée, même assez grossière, de la richesse de cet ensemble, que de lire avec eux les quelques pages de
4161 la richesse de cet ensemble, que de lire avec eux les quelques pages de la première partie intitulées Religion et christian
4162 à un commentaire marginal, crayonné rapidement, à la volée, et sans autre ordre que celui-là même des aphorismes dans l’éd
4163 autre ordre que celui-là même des aphorismes dans l’ édition de M. Bolle. ⁂ Le sens historique n’est qu’une théologie masq
4164 ême des aphorismes dans l’édition de M. Bolle. ⁂ Le sens historique n’est qu’une théologie masquée : “nous atteindrons un
4165 des buts magnifiques”. Un but final plane devant les regards de l’homme. Le christianisme, qui maudit l’humanité et en sor
4166 fiques”. Un but final plane devant les regards de l’ homme. Le christianisme, qui maudit l’humanité et en sort quelques spé
4167 Un but final plane devant les regards de l’homme. Le christianisme, qui maudit l’humanité et en sort quelques spécimens ra
4168 regards de l’homme. Le christianisme, qui maudit l’ humanité et en sort quelques spécimens rares et réussis, est de fond e
4169 ond en comble non historique, parce qu’il nie que les millénaires à venir puissent produire quelque chose qui ne soit pas,
4170 ne soit pas, dès maintenant et depuis 1800 ans, à la disposition de chacun. Si malgré cela, l’époque actuelle est, dans so
4171 ans, à la disposition de chacun. Si malgré cela, l’ époque actuelle est, dans son esprit, tout à fait historique, elle tém
4172 à fait historique, elle témoigne par ce fait que l’ humanité n’est plus courbée sous le joug, qu’elle est redevenue païenn
4173 ar ce fait que l’humanité n’est plus courbée sous le joug, qu’elle est redevenue païenne comme elle l’était il y a quelque
4174 le joug, qu’elle est redevenue païenne comme elle l’ était il y a quelque mille ans. On croirait presque lire du Kierkegaa
4175 nte ans avant Nietzsche, partait en guerre contre la philosophie de l’Évolution selon Hegel, et dénonçait en elle non seul
4176 zsche, partait en guerre contre la philosophie de l’ Évolution selon Hegel, et dénonçait en elle non seulement un succédané
4177 nçait en elle non seulement un succédané païen de l’ idée de Providence, mais surtout une négation de la foi ? Car la foi e
4178 ’idée de Providence, mais surtout une négation de la foi ? Car la foi est, selon Kierkegaard, cette opération paradoxale q
4179 idence, mais surtout une négation de la foi ? Car la foi est, selon Kierkegaard, cette opération paradoxale qui nous rend
4180 porains du Christ incarné, et qui nie par là même la valeur de tous les siècles qui nous séparent apparemment de cet événe
4181 incarné, et qui nie par là même la valeur de tous les siècles qui nous séparent apparemment de cet événement éternel. N’est
4182 qu’il faille un incroyant pour nous rappeler que le salut, pour le chrétien, n’est pas dans le Progrès indéfini de notre
4183 n incroyant pour nous rappeler que le salut, pour le chrétien, n’est pas dans le Progrès indéfini de notre histoire, mais
4184 er que le salut, pour le chrétien, n’est pas dans le Progrès indéfini de notre histoire, mais qu’il est venu sur la terre,
4185 défini de notre histoire, mais qu’il est venu sur la terre, et qu’il est dès maintenant — hic et nunc ! — « à la dispositi
4186 et qu’il est dès maintenant — hic et nunc ! — « à la disposition » du moindre d’entre nous. Nietzsche croit faire un repro
4187 it faire un reproche terrible au christianisme en le traitant d’agent « non historique ». Il faut croire que cet adversair
4188 ais il n’importe. Ce qui est admirable ici, c’est la lucidité avec laquelle Nietzsche décèle l’idolâtrie de notre temps, m
4189 c’est la lucidité avec laquelle Nietzsche décèle l’ idolâtrie de notre temps, même s’il y participe pour son compte. Il es
4190 i que nos contemporains ont cessé de croire, dans l’ ensemble, que le salut était déjà venu. Ils se sont mis à croire de no
4191 porains ont cessé de croire, dans l’ensemble, que le salut était déjà venu. Ils se sont mis à croire de nouveau que le Mes
4192 éjà venu. Ils se sont mis à croire de nouveau que le Messie naîtrait de leurs efforts indéfinis vers le Progrès. Ils sont
4193 e Messie naîtrait de leurs efforts indéfinis vers le Progrès. Ils sont redevenus païens. Les plus conscients de ce paganis
4194 finis vers le Progrès. Ils sont redevenus païens. Les plus conscients de ce paganisme nouveau ont adopté sa vraie théologie
4195 paganisme nouveau ont adopté sa vraie théologie : la dialectique historique de Karl Marx. En vertu de cet acte de foi, fai
4196 vertu de cet acte de foi, fait en révolte contre la vraie foi, ils se persuadent que l’humanité sera meilleure, sera plus
4197 évolte contre la vraie foi, ils se persuadent que l’ humanité sera meilleure, sera plus près de son « salut » dans cent ans
4198 us près de son « salut » dans cent ans qu’elle ne l’ est aujourd’hui. Mais que dis-je, cent ans ! Il faut à leur espoir de
4199 ux ans qui auraient encore dix mille ans à vivre. L’ esprit métaphysique me souffle : “Et après ?” Mais je ne l’écoute pas
4200 métaphysique me souffle : “Et après ?” Mais je ne l’ écoute pas et trouve malgré tout ces chiffres consolants. » Au salut p
4201 lgré tout ces chiffres consolants. » Au salut par l’ éternité, voici donc opposée une notion beaucoup plus scientifique et
4202 ifique et beaucoup plus conforme aux exigences de l’ Histoire : le salut par la sempiternité. Mais n’est-ce point là ce que
4203 ucoup plus conforme aux exigences de l’Histoire : le salut par la sempiternité. Mais n’est-ce point là ce que toute la Bib
4204 nforme aux exigences de l’Histoire : le salut par la sempiternité. Mais n’est-ce point là ce que toute la Bible nous désig
4205 sempiternité. Mais n’est-ce point là ce que toute la Bible nous désigne comme l’enfer même : ne plus pouvoir échapper au t
4206 point là ce que toute la Bible nous désigne comme l’ enfer même : ne plus pouvoir échapper au temps, ne plus pouvoir mourir
4207 plus pouvoir mourir, ne plus pouvoir renaître ? La contemplation religieuse du monde sans l’acuité et la profondeur de l
4208 ître ? La contemplation religieuse du monde sans l’ acuité et la profondeur de l’intellect fait de la religion la chose la
4209 ontemplation religieuse du monde sans l’acuité et la profondeur de l’intellect fait de la religion la chose la plus répugn
4210 gieuse du monde sans l’acuité et la profondeur de l’ intellect fait de la religion la chose la plus répugnante qui soit. O
4211 l’acuité et la profondeur de l’intellect fait de la religion la chose la plus répugnante qui soit. Oui, je sais bien de
4212 la profondeur de l’intellect fait de la religion la chose la plus répugnante qui soit. Oui, je sais bien de quoi il souf
4213 ndeur de l’intellect fait de la religion la chose la plus répugnante qui soit. Oui, je sais bien de quoi il souffre, et c
4214 z méfiante. Il est trop clair qu’on peut inverser la maxime : « La contemplation intellectuelle du monde sans l’acuité et
4215 est trop clair qu’on peut inverser la maxime : «  La contemplation intellectuelle du monde sans l’acuité et la profondeur
4216 : « La contemplation intellectuelle du monde sans l’ acuité et la profondeur de la foi fait de l’intelligence la chose la p
4217 mplation intellectuelle du monde sans l’acuité et la profondeur de la foi fait de l’intelligence la chose la plus répugnan
4218 tuelle du monde sans l’acuité et la profondeur de la foi fait de l’intelligence la chose la plus répugnante qui soit. » I
4219 sans l’acuité et la profondeur de la foi fait de l’ intelligence la chose la plus répugnante qui soit. » Il faut perdre l
4220 et la profondeur de la foi fait de l’intelligence la chose la plus répugnante qui soit. » Il faut perdre la croyance en D
4221 fondeur de la foi fait de l’intelligence la chose la plus répugnante qui soit. » Il faut perdre la croyance en Dieu, en l
4222 se la plus répugnante qui soit. » Il faut perdre la croyance en Dieu, en la liberté et en l’immortalité, comme ses premiè
4223 i soit. » Il faut perdre la croyance en Dieu, en la liberté et en l’immortalité, comme ses premières dents ; ce n’est qu’
4224 t perdre la croyance en Dieu, en la liberté et en l’ immortalité, comme ses premières dents ; ce n’est qu’ensuite que vous
4225 ières dents ; ce n’est qu’ensuite que vous pousse la véritable dentition. La foi est toujours une seconde dentition. Et c
4226 ’ensuite que vous pousse la véritable dentition. La foi est toujours une seconde dentition. Et celui qui n’est pas mort u
4227 difiées par ses bons sentiments ou par sa peur de la réalité, celui-là n’est pas né à la foi. Il n’a pas la mâchoire solid
4228 ar sa peur de la réalité, celui-là n’est pas né à la foi. Il n’a pas la mâchoire solide. (Mais je vois bien que Nietzsche
4229 alité, celui-là n’est pas né à la foi. Il n’a pas la mâchoire solide. (Mais je vois bien que Nietzsche voulait dire autre
4230 Nietzsche voulait dire autre chose…). Même pour l’ homme le plus pieux, le déjeuner quotidien est plus important que la S
4231 he voulait dire autre chose…). Même pour l’homme le plus pieux, le déjeuner quotidien est plus important que la Sainte-Cè
4232 autre chose…). Même pour l’homme le plus pieux, le déjeuner quotidien est plus important que la Sainte-Cène. Kierkegaar
4233 eux, le déjeuner quotidien est plus important que la Sainte-Cène. Kierkegaard n’eût pas mieux dit. « Pensées qui blessent
4234 sent — pour édifier » — c’est ainsi qu’il nommait les remarques amères qu’il ne pouvait s’empêcher de former au spectacle d
4235 l ne pouvait s’empêcher de former au spectacle de la chrétienté et dans sa nostalgie d’un christianisme vrai. Mais Nietzsc
4236 ngoisse de ne pouvoir parvenir lui-même à prendre le repas sacré plus au sérieux que le menu de sa pension ? « Même pour l
4237 même à prendre le repas sacré plus au sérieux que le menu de sa pension ? « Même pour l’homme le plus pieux… » jugez des a
4238 u sérieux que le menu de sa pension ? « Même pour l’ homme le plus pieux… » jugez des autres ! Jugez de moi ! semble-t-il d
4239 x que le menu de sa pension ? « Même pour l’homme le plus pieux… » jugez des autres ! Jugez de moi ! semble-t-il dire. Et
4240 gez de moi ! semble-t-il dire. Et c’est ainsi que l’ incroyant se juge chaque fois qu’il prononce une vérité. En quoi l’on
4241 ge chaque fois qu’il prononce une vérité. En quoi l’ on pourra dire qu’il ressemble fort au croyant, — toutefois, sans le s
4242 u’il ressemble fort au croyant, — toutefois, sans le savoir, c’est là le point. Les hommes sont le plus superstitieux qua
4243 au croyant, — toutefois, sans le savoir, c’est là le point. Les hommes sont le plus superstitieux quand ils sont très exc
4244 — toutefois, sans le savoir, c’est là le point. Les hommes sont le plus superstitieux quand ils sont très excités. Les re
4245 ns le savoir, c’est là le point. Les hommes sont le plus superstitieux quand ils sont très excités. Les religions se cons
4246 e plus superstitieux quand ils sont très excités. Les religions se consolident dans des périodes de grands troubles et d’in
4247 ’insécurité. Lorsque tout cède, on se cramponne à l’ illusion de l’au-delà. Parfaitement valable pour les religions, cette
4248 orsque tout cède, on se cramponne à l’illusion de l’ au-delà. Parfaitement valable pour les religions, cette sentence est
4249 illusion de l’au-delà. Parfaitement valable pour les religions, cette sentence est grossière, voire naïve, si Nietzsche en
4250 re, voire naïve, si Nietzsche entendait parler de la foi. La foi, qui donne à l’homme la vision réaliste du péché, crée la
4251 e naïve, si Nietzsche entendait parler de la foi. La foi, qui donne à l’homme la vision réaliste du péché, crée la crise b
4252 e entendait parler de la foi. La foi, qui donne à l’ homme la vision réaliste du péché, crée la crise bien davantage qu’ell
4253 ait parler de la foi. La foi, qui donne à l’homme la vision réaliste du péché, crée la crise bien davantage qu’elle n’en r
4254 donne à l’homme la vision réaliste du péché, crée la crise bien davantage qu’elle n’en résulte. Ce qui résulte inévitablem
4255 te. Ce qui résulte inévitablement d’une crise que la foi ne résout pas (en lui substituant une autre crise plus radicale e
4256 e plus radicale et salutaire) c’est, par exemple, le culte du Surhomme. Le « retour étemel » est alors le type même de la
4257 utaire) c’est, par exemple, le culte du Surhomme. Le « retour étemel » est alors le type même de la superstition née du ce
4258 culte du Surhomme. Le « retour étemel » est alors le type même de la superstition née du cerveau d’un homme très excité.
4259 e. Le « retour étemel » est alors le type même de la superstition née du cerveau d’un homme très excité. En somme, qu’est
4260 En somme, qu’est-ce que cela veut dire : J’aime les hommes pour l’amour de Dieu ? Est-ce autre chose que de dire : J’aime
4261 st-ce que cela veut dire : J’aime les hommes pour l’ amour de Dieu ? Est-ce autre chose que de dire : J’aime les gendarmes
4262 de Dieu ? Est-ce autre chose que de dire : J’aime les gendarmes pour l’amour de la justice ? Ou de s’écrier, comme cette je
4263 tre chose que de dire : J’aime les gendarmes pour l’ amour de la justice ? Ou de s’écrier, comme cette jeune fille : J’aime
4264 ue de dire : J’aime les gendarmes pour l’amour de la justice ? Ou de s’écrier, comme cette jeune fille : J’aime Schopenhau
4265 fille : J’aime Schopenhauer, parce que grand-père l’ a connu et aimé ? Phrase typique d’un homme qui n’a jamais rencontré
4266 en Christ ; pas plus qu’on ne saurait rencontrer la justice ; pas plus que la jeune fille n’avait rencontré Schopenhauer.
4267 n ne saurait rencontrer la justice ; pas plus que la jeune fille n’avait rencontré Schopenhauer. La nature est mauvaise,
4268 e la jeune fille n’avait rencontré Schopenhauer. La nature est mauvaise, dit le christianisme : ne serait-il pas quelque
4269 contré Schopenhauer. La nature est mauvaise, dit le christianisme : ne serait-il pas quelque chose contre nature ? Sinon,
4270 bon à rappeler, à ces « chrétiens » que terrorise l’ idée même que le christianisme veut leur mort, pour leur donner la vie
4271 à ces « chrétiens » que terrorise l’idée même que le christianisme veut leur mort, pour leur donner la vie. Il s’agit de s
4272 le christianisme veut leur mort, pour leur donner la vie. Il s’agit de savoir si la nature actuelle de l’homme est bonne o
4273 , pour leur donner la vie. Il s’agit de savoir si la nature actuelle de l’homme est bonne ou mauvaise. La foi nous montre
4274 vie. Il s’agit de savoir si la nature actuelle de l’ homme est bonne ou mauvaise. La foi nous montre qu’elle est mauvaise.
4275 nature actuelle de l’homme est bonne ou mauvaise. La foi nous montre qu’elle est mauvaise. Dans ce sens, il est vrai de di
4276 est mauvaise. Dans ce sens, il est vrai de dire : le christianisme est contre nature. Et je m’explique mal pourquoi tant d
4277 is si Nietzsche croit autre chose, s’il croit que la nature est bonne, pourquoi crie-t-il si fort que « l’homme est quelqu
4278 ature est bonne, pourquoi crie-t-il si fort que «  l’ homme est quelque chose qui doit être surmonté » ? Il n’y a pas que le
4279 chose qui doit être surmonté » ? Il n’y a pas que les chrétiens pour ne pas croire assez à ce qu’ils croient, ou s’imaginen
4280 ssez à ce qu’ils croient, ou s’imaginent croire. Le repentir ! Le remords ! Le chrétien ne pense pas à son prochain, il e
4281 ls croient, ou s’imaginent croire. Le repentir ! Le remords ! Le chrétien ne pense pas à son prochain, il est beaucoup tr
4282 u s’imaginent croire. Le repentir ! Le remords ! Le chrétien ne pense pas à son prochain, il est beaucoup trop occupé de
4283 aucoup trop occupé de soi-même ! Quelle que soit la justesse des critiques de Nietzsche — et jusque dans leur injustice,
4284 xpliquer cette espèce de déception que me procure la critique nietzschéenne, je trouve ceci : Nietzsche parle sans autorit
4285 he parle sans autorité. Il a tendance à confondre l’ autorité et la violence. Mais ses violences sont contradictoires : il
4286 autorité. Il a tendance à confondre l’autorité et la violence. Mais ses violences sont contradictoires : il attaque ici l’
4287 s violences sont contradictoires : il attaque ici l’ égoïsme, dont il fait par ailleurs l’apologie, mais sans jamais « décl
4288 attaque ici l’égoïsme, dont il fait par ailleurs l’ apologie, mais sans jamais « déclarer ses valeurs », sans jamais renvo
4289 is renvoyer à une autorité centrale qui donnerait la synthèse de ces contradictions. La vie chrétienne est pleine de contr
4290 qui donnerait la synthèse de ces contradictions. La vie chrétienne est pleine de contradictions, elle aussi, mais Paul le
4291 t pleine de contradictions, elle aussi, mais Paul les a toutes rassemblées dans une formule unique qui renvoie au fondement
4292 qui renvoie au fondement même du christianisme : l’ opposition du péché et de la foi. « Je ne fais pas le bien que j’aime,
4293 me du christianisme : l’opposition du péché et de la foi. « Je ne fais pas le bien que j’aime, mais je fais le mal que je
4294 pposition du péché et de la foi. « Je ne fais pas le bien que j’aime, mais je fais le mal que je hais. » C’est pourquoi, l
4295 « Je ne fais pas le bien que j’aime, mais je fais le mal que je hais. » C’est pourquoi, lorsque Paul critique la vie des c
4296 je hais. » C’est pourquoi, lorsque Paul critique la vie des chrétiens de son temps, il parle avec autorité, tandis que le
4297 de son temps, il parle avec autorité, tandis que les critiques de Nietzsche feront toujours l’effet de criailleries. L’in
4298 is que les critiques de Nietzsche feront toujours l’ effet de criailleries. L’intensité de la vie prise comme but unique d
4299 etzsche feront toujours l’effet de criailleries. L’ intensité de la vie prise comme but unique de celle-ci, voilà une pens
4300 toujours l’effet de criailleries. L’intensité de la vie prise comme but unique de celle-ci, voilà une pensée qui est insu
4301 able aux hommes. Ne voyons-nous pas au contraire le monde contemporain entièrement dominé par une religion de la vie, de
4302 ntemporain entièrement dominé par une religion de la vie, de « l’intensité » de la vie ? Ne voyons-nous pas cette mystique
4303 tièrement dominé par une religion de la vie, de «  l’ intensité » de la vie ? Ne voyons-nous pas cette mystique de « l’inten
4304 par une religion de la vie, de « l’intensité » de la vie ? Ne voyons-nous pas cette mystique de « l’intensité prise comme
4305 e la vie ? Ne voyons-nous pas cette mystique de «  l’ intensité prise comme but », c’est-à-dire cette mystique de la vie pri
4306 prise comme but », c’est-à-dire cette mystique de la vie prise comme but de la vie, et même de la religion, s’introduire j
4307 -dire cette mystique de la vie prise comme but de la vie, et même de la religion, s’introduire jusque dans les sermons, et
4308 e de la vie prise comme but de la vie, et même de la religion, s’introduire jusque dans les sermons, et s’y substituer au
4309 et même de la religion, s’introduire jusque dans les sermons, et s’y substituer au respect de la vérité, soupçonnée, non s
4310 dans les sermons, et s’y substituer au respect de la vérité, soupçonnée, non sans quelque raison, d’être parfois « antivit
4311 e-cinq ans plus tard, je serais tenté de dire que les hommes ne supportent plus aucune pensée qui contredise celle-là ! Le
4312 ent plus aucune pensée qui contredise celle-là ! Le christianisme a promis le royaume des cieux à la pauvreté spirituelle
4313 contredise celle-là ! Le christianisme a promis le royaume des cieux à la pauvreté spirituelle. Mais le premier chrétien
4314 Le christianisme a promis le royaume des cieux à la pauvreté spirituelle. Mais le premier chrétien cultivé et spirituel a
4315 hristianisme sa rhétorique et sa dialectique ; de la sorte, il a empêché le christianisme de mourir de sa pauvreté spiritu
4316 que et sa dialectique ; de la sorte, il a empêché le christianisme de mourir de sa pauvreté spirituelle. On est toujours
4317 lle. On est toujours étonné de voir un esprit de la trempe de celui de Nietzsche se livrer à d’aussi grossières confusion
4318 té, confondu ici avec bêtise). Mais c’est bien là la malhonnêteté du positivisme primaire qui régna sur le siècle dernier,
4319 alhonnêteté du positivisme primaire qui régna sur le siècle dernier, et dont l’œuvre de Nietzsche a subi trop souvent les
4320 primaire qui régna sur le siècle dernier, et dont l’ œuvre de Nietzsche a subi trop souvent les atteintes. Dans ce même liv
4321 et dont l’œuvre de Nietzsche a subi trop souvent les atteintes. Dans ce même livre, quatre pages plus bas, j’en trouve un
4322 un autre exemple : Nietzsche croit découvrir que la notion chrétienne du Dieu paternel dérive de la notion « de la famill
4323 e la notion chrétienne du Dieu paternel dérive de la notion « de la famille patriarcale ». Comme si l’on ne pouvait pas so
4324 étienne du Dieu paternel dérive de la notion « de la famille patriarcale ». Comme si l’on ne pouvait pas soutenir l’invers
4325 la notion « de la famille patriarcale ». Comme si l’ on ne pouvait pas soutenir l’inverse ! et avec beaucoup plus de vraise
4326 riarcale ». Comme si l’on ne pouvait pas soutenir l’ inverse ! et avec beaucoup plus de vraisemblance et même de « sérieux
4327 et même de « sérieux historique ».   Parmi toutes les criailleries de Nietzsche, certaines prennent un accent prophétique :
4328 t commanderont aussi à leur Dieu, tout en croyant le servir. » Formule qui n’est pas valable pour le seul pape de Rome et
4329 t le servir. » Formule qui n’est pas valable pour le seul pape de Rome et pour les seuls conciles. Les grands mouvements f
4330 est pas valable pour le seul pape de Rome et pour les seuls conciles. Les grands mouvements fascistes ne se réclament-ils p
4331 le seul pape de Rome et pour les seuls conciles. Les grands mouvements fascistes ne se réclament-ils pas, eux aussi, d’un
4332 cette même forme d’esprit sur un autre plan, dans le communisme russe ? On sait que ce régime s’est établi au nom de la Sc
4333 se ? On sait que ce régime s’est établi au nom de la Science, qui est son Dieu. On sait aussi qu’il n’a pas hésité à conda
4334 u. On sait aussi qu’il n’a pas hésité à condamner la théorie d’Einstein parce qu’elle contredisait l’hypothèse marxiste. C
4335 la théorie d’Einstein parce qu’elle contredisait l’ hypothèse marxiste. Croyant servir leur science, ils commandent à la s
4336 te. Croyant servir leur science, ils commandent à la science…, etc. Mais, afin que nul ne se croie justifié, voici pour le
4337 is, afin que nul ne se croie justifié, voici pour les conservateurs : « Vous dites que vous croyez à la nécessité de la rel
4338 es conservateurs : « Vous dites que vous croyez à la nécessité de la religion ? Soyez sincères ! Vous croyez à la nécessit
4339  : « Vous dites que vous croyez à la nécessité de la religion ? Soyez sincères ! Vous croyez à la nécessité de la police !
4340 é de la religion ? Soyez sincères ! Vous croyez à la nécessité de la police ! » Dès que vous croyez qu’il y a, à côté de
4341  ? Soyez sincères ! Vous croyez à la nécessité de la police ! » Dès que vous croyez qu’il y a, à côté de la causalité ab
4342 ce ! » Dès que vous croyez qu’il y a, à côté de la causalité absolue, encore un Dieu ou une finalité, l’idée de la néces
4343 ausalité absolue, encore un Dieu ou une finalité, l’ idée de la nécessité devient insupportable. Traduisons : dès que vous
4344 bsolue, encore un Dieu ou une finalité, l’idée de la nécessité devient insupportable. Traduisons : dès que vous croyez qu
4345 le, devoir kantien, conscience, notion humaine de la justice, science, mystique de la vie, droit au bonheur, etc., l’idée
4346 otion humaine de la justice, science, mystique de la vie, droit au bonheur, etc., l’idée de la toute-puissance et de la li
4347 ence, mystique de la vie, droit au bonheur, etc., l’ idée de la toute-puissance et de la liberté de Dieu devient insupporta
4348 ique de la vie, droit au bonheur, etc., l’idée de la toute-puissance et de la liberté de Dieu devient insupportable. C’est
4349 bonheur, etc., l’idée de la toute-puissance et de la liberté de Dieu devient insupportable. C’est le « Dieu moral » qui em
4350 e la liberté de Dieu devient insupportable. C’est le « Dieu moral » qui empêche, en particulier, une certaine théologie li
4351 ne certaine théologie libérale de reconnaître que le Dieu de la Bible — ancien et nouveau Testament — est seul Maître de l
4352 ancien et nouveau Testament — est seul Maître de la seule Justice, de la seule Vie, de la seule Science, du seul Bonheur 
4353 stament — est seul Maître de la seule Justice, de la seule Vie, de la seule Science, du seul Bonheur ; et qu’il a seul le
4354 l Maître de la seule Justice, de la seule Vie, de la seule Science, du seul Bonheur ; et qu’il a seul le droit de contredi
4355 seule Science, du seul Bonheur ; et qu’il a seul le droit de contredire nos notions, trop humaines et trop intéressées, d
4356 détourna plusieurs générations des églises où on le prêchait envers et contre tout « honneur de Dieu » ? La réfutation d
4357 hait envers et contre tout « honneur de Dieu » ? La réfutation de Dieu : en somme, ce n’est que le “Dieu moral” qui est r
4358 ? La réfutation de Dieu : en somme, ce n’est que le “Dieu moral” qui est réfuté. Il est bien significatif que les fragme
4359 al” qui est réfuté. Il est bien significatif que les fragments de Nietzsche sur la religion se terminent par cet aphorisme
4360 n significatif que les fragments de Nietzsche sur la religion se terminent par cet aphorisme d’une éblouissante vérité.
23 1937, Foi et Vie, articles (1928–1977). Luther et la liberté (À propos du Traité du serf arbitre) (avril 1937)
4361 Luther et la liberté (À propos du Traité du serf arbitre) (avril 1937)aa Luth
4362 gnore Luther en France serait exagérer, mais dans le sens contraire de celui qu’on imagine. Car, on fait pis que de l’igno
4363 e de celui qu’on imagine. Car, on fait pis que de l’ ignorer et même que de le méconnaître : on prétend, sans l’avoir jamai
4364 Car, on fait pis que de l’ignorer et même que de le méconnaître : on prétend, sans l’avoir jamais lu, savoir qui il fut,
4365 et même que de le méconnaître : on prétend, sans l’ avoir jamais lu, savoir qui il fut, qui il est. Certains ont parcouru
4366 oir qui il fut, qui il est. Certains ont parcouru les Propos de table, présentés au public français comme un ouvrage capita
4367 contradictions. Est-ce avec cela que s’est faite la Réforme ? D’autres, moins exigeants, n’hésitent pas à soutenir que Lu
4368 nir que Luther fut un démagogue, un exploiteur de l’ éternel ressentiment de la race allemande contre la civilisation romai
4369 gogue, un exploiteur de l’éternel ressentiment de la race allemande contre la civilisation romaine. On a poussé la bouffon
4370 ’éternel ressentiment de la race allemande contre la civilisation romaine. On a poussé la bouffonnerie jusqu’à cet excès g
4371 mande contre la civilisation romaine. On a poussé la bouffonnerie jusqu’à cet excès grandiose d’assimiler Luther et M. Hit
4372 iose d’assimiler Luther et M. Hitler, par goût de la rime sans doute. Pour l’opinion moyenne sur Luther, je crois que la p
4373 t M. Hitler, par goût de la rime sans doute. Pour l’ opinion moyenne sur Luther, je crois que la phrase suivante en donne u
4374 . Pour l’opinion moyenne sur Luther, je crois que la phrase suivante en donne une juste idée : « En somme, qu’est-ce que L
4375 ion du livre d’un critique littéraire connu, dont les revues n’hésitèrent pas lorsqu’il parut (en 1936) à louer la mesure e
4376 ’hésitèrent pas lorsqu’il parut (en 1936) à louer la mesure et la sérieuse information théologique… Ceci dit, il est juste
4377 as lorsqu’il parut (en 1936) à louer la mesure et la sérieuse information théologique… Ceci dit, il est juste d’insister s
4378 héologique… Ceci dit, il est juste d’insister sur la grande valeur des travaux de quelques spécialistes français qui, au n
4379 quelques spécialistes français qui, au niveau de la haute culture, ont largement sauvé l’honneur de leur pays. Je pense a
4380 u niveau de la haute culture, ont largement sauvé l’ honneur de leur pays. Je pense aux ouvrages publiés par MM. Henri Stro
4381 son, pour ne rien dire — mais cela va de soi — de l’ activité des professeurs de dogmatique luthérienne ou d’histoire de l’
4382 sseurs de dogmatique luthérienne ou d’histoire de l’ Église dans les trois Facultés françaises de théologie protestante. Il
4383 atique luthérienne ou d’histoire de l’Église dans les trois Facultés françaises de théologie protestante. Il n’en reste pas
4384 héologie protestante. Il n’en reste pas moins que l’ ignorance ou la méconnaissance courantes à l’égard de Luther, jointes
4385 tante. Il n’en reste pas moins que l’ignorance ou la méconnaissance courantes à l’égard de Luther, jointes aux diverses ca
4386 ies recueillies par des biographes amateurs, et à l’ action de la polémique catholique (Denifle, Maritain, Grisar), mettent
4387 ies par des biographes amateurs, et à l’action de la polémique catholique (Denifle, Maritain, Grisar), mettent le public f
4388 e catholique (Denifle, Maritain, Grisar), mettent le public français en état d’infériorité assez grave, ne fût-ce que sur
4389 riorité assez grave, ne fût-ce que sur le plan de la culture générale. Car, ignorer ou méconnaître Luther, c’est ignorer o
4390 onnaître un des deux ou trois moments décisifs de la tradition fondamentale de l’Occident, c’est s’interdire de rien compr
4391 moments décisifs de la tradition fondamentale de l’ Occident, c’est s’interdire de rien comprendre à la grande discussion
4392 ’Occident, c’est s’interdire de rien comprendre à la grande discussion millénaire, à la grande tension spirituelle dans la
4393 n comprendre à la grande discussion millénaire, à la grande tension spirituelle dans laquelle l’Europe a puisé son dynamis
4394 re, à la grande tension spirituelle dans laquelle l’ Europe a puisé son dynamisme créateur. Tension dont le débat du libre
4395 rope a puisé son dynamisme créateur. Tension dont le débat du libre arbitre, opposant Érasme à Luther, permet de définir s
4396 Érasme à Luther, permet de définir symboliquement les pôles : pensée « pure » et pensée « engagée », ou encore attitude du
4397 ion qui, sur le plan théologique, ou mieux : dans la totalité de l’être, revient à celle d’un christianisme qui se met au
4398 plan théologique, ou mieux : dans la totalité de l’ être, revient à celle d’un christianisme qui se met au service de l’hu
4399 celle d’un christianisme qui se met au service de l’ humain (j’entends bien de l’humain purifié, « divinisé » par les effor
4400 se met au service de l’humain (j’entends bien de l’ humain purifié, « divinisé » par les efforts de la religion s’ajoutant
4401 ntends bien de l’humain purifié, « divinisé » par les efforts de la religion s’ajoutant à ceux de la raison), et d’un chris
4402 l’humain purifié, « divinisé » par les efforts de la religion s’ajoutant à ceux de la raison), et d’un christianisme absol
4403 r les efforts de la religion s’ajoutant à ceux de la raison), et d’un christianisme absolu, qu’on déclare volontiers « inh
4404  inhumain », parce qu’il attribue tout à Dieu. Le Traité du serf arbitre C’est sans doute dans cette perspective qu
4405 e C’est sans doute dans cette perspective que le lecteur peu familiarisé avec la pensée luthérienne parviendra le plus
4406 e perspective que le lecteur peu familiarisé avec la pensée luthérienne parviendra le plus aisément à saisir l’importance
4407 familiarisé avec la pensée luthérienne parviendra le plus aisément à saisir l’importance centrale du De servo arbitrio, do
4408 luthérienne parviendra le plus aisément à saisir l’ importance centrale du De servo arbitrio, dont une première traduction
4409 se va paraître, après un peu plus de 400 ans : je le vois au centre du débat occidental par excellence, — mais au centre,
4410 ental par excellence, — mais au centre, aussi, de la Réforme, et de l’effort dogmatique de Luther68. On croit d’abord à u
4411 ce, — mais au centre, aussi, de la Réforme, et de l’ effort dogmatique de Luther68. On croit d’abord à un pamphlet, encore
4412 e que son volume matériel soit bien écrasant pour le genre. Mais on s’aperçoit, sans tarder, que la discussion avec Érasme
4413 ur le genre. Mais on s’aperçoit, sans tarder, que la discussion avec Érasme et sa Diatribe (souvent personnifiée) n’est, e
4414 atribe (souvent personnifiée) n’est, en fait, que le support apparent d’une réflexion de plus vaste envergure, d’un témoig
4415 le, excité (bien plutôt que « désarmé », comme il le dit aux premières pages) par les procédés de l’humaniste et du scepti
4416 sarmé », comme il le dit aux premières pages) par les procédés de l’humaniste et du sceptique que se vantait d’être Érasme,
4417 l le dit aux premières pages) par les procédés de l’ humaniste et du sceptique que se vantait d’être Érasme, Luther en vien
4418 che, à ressaisir et reposer avec puissance toutes les affirmations fondamentales de la Réforme : justification par la foi,
4419 uissance toutes les affirmations fondamentales de la Réforme : justification par la foi, qui est don gratuit et œuvre de D
4420 s fondamentales de la Réforme : justification par la foi, qui est don gratuit et œuvre de Dieu seul ; opposition de cette
4421 Dieu seul ; opposition de cette justice de Dieu à la justice des hommes et de leurs œuvres ; opposition de la grâce à la n
4422 ice des hommes et de leurs œuvres ; opposition de la grâce à la nature, selon les termes de l’Apôtre ; opposition de la Pa
4423 mes et de leurs œuvres ; opposition de la grâce à la nature, selon les termes de l’Apôtre ; opposition de la Parole vivant
4424 uvres ; opposition de la grâce à la nature, selon les termes de l’Apôtre ; opposition de la Parole vivante à la tradition c
4425 tion de la grâce à la nature, selon les termes de l’ Apôtre ; opposition de la Parole vivante à la tradition codifiée ; sen
4426 ure, selon les termes de l’Apôtre ; opposition de la Parole vivante à la tradition codifiée ; sens de la décision totale e
4427 s de l’Apôtre ; opposition de la Parole vivante à la tradition codifiée ; sens de la décision totale entre un oui et un no
4428 Parole vivante à la tradition codifiée ; sens de la décision totale entre un oui et un non absolus, et refus de tout moye
4429 erme ou médiation plus ou moins rationnelle entre les règnes en guerre ouverte du Dieu de la foi et du Prince de ce monde ;
4430 lle entre les règnes en guerre ouverte du Dieu de la foi et du Prince de ce monde ; nécessité du témoignage et du témoigna
4431 témoignage et du témoignage fidèle, certifié par l’ Esprit et la Bible, et constituant la véritable « action » de l’homme
4432 et du témoignage fidèle, certifié par l’Esprit et la Bible, et constituant la véritable « action » de l’homme entre les ma
4433 certifié par l’Esprit et la Bible, et constituant la véritable « action » de l’homme entre les mains de Dieu. Tels sont le
4434 Bible, et constituant la véritable « action » de l’ homme entre les mains de Dieu. Tels sont les thèmes qu’illustre cet ou
4435 stituant la véritable « action » de l’homme entre les mains de Dieu. Tels sont les thèmes qu’illustre cet ouvrage. S’ils n’
4436 n » de l’homme entre les mains de Dieu. Tels sont les thèmes qu’illustre cet ouvrage. S’ils n’y sont pas traités en forme,
4437 du mot, mais qu’ils s’impliquent très étroitement les uns les autres, et ne peuvent être mieux saisis que dans l’unique et
4438 mais qu’ils s’impliquent très étroitement les uns les autres, et ne peuvent être mieux saisis que dans l’unique et perpétue
4439 autres, et ne peuvent être mieux saisis que dans l’ unique et perpétuelle question que nous posent toutes les pages de la
4440 ue et perpétuelle question que nous posent toutes les pages de la Bible. Ils renvoient tous à une réalité dont ils ne sont
4441 elle question que nous posent toutes les pages de la Bible. Ils renvoient tous à une réalité dont ils ne sont que les refl
4442 renvoient tous à une réalité dont ils ne sont que les reflets, diversement réfractés par nos mots. Ils renvoient tous à la
4443 ment réfractés par nos mots. Ils renvoient tous à la question du Christ : « … Et toi, maintenant, crois-tu cela ? » — Si t
4444 « … Et toi, maintenant, crois-tu cela ? » — Si tu le crois, si tu as reçu la foi, il n’est plus rien de « difficile » dans
4445 crois-tu cela ? » — Si tu le crois, si tu as reçu la foi, il n’est plus rien de « difficile » dans les assertions de Luthe
4446 la foi, il n’est plus rien de « difficile » dans les assertions de Luther, ni dans sa négation joyeuse du libre arbitre. S
4447 arbitre. Ses coups violents n’ébranlent plus que le « vieil homme », celui qu’il nous faut dépouiller. « Folie pour le
4448 celui qu’il nous faut dépouiller. « Folie pour les sages » Mais il s’en faut de presque tout que les grandes thèses p
4449 sages » Mais il s’en faut de presque tout que les grandes thèses pauliniennes de la Réforme soient acceptées (ou simple
4450 esque tout que les grandes thèses pauliniennes de la Réforme soient acceptées (ou simplement connues !) par nos contempora
4451 s. Il s’en faut de beaucoup, de presque tout, que les arguments d’un Érasme nous apparaissent comme autant de sophismes. No
4452 ent comme autant de sophismes. Non seulement tous les humanistes, — des marxistes aux vieux libéraux, — y applaudissent ouv
4453 pplaudissent ouvertement, mais encore jusque chez les chrétiens, ces arguments se voient réinventés, admis, parfois même pr
4454 e voient réinventés, admis, parfois même prêchés. Le laïcisme moraliste n’en a pas du tout le monopole : tout catholique s
4455 prêchés. Le laïcisme moraliste n’en a pas du tout le monopole : tout catholique se doit, en bonne logique, de les faire si
4456 e : tout catholique se doit, en bonne logique, de les faire siens puisqu’il croit au mérite des œuvres ; et tous les protes
4457 ns puisqu’il croit au mérite des œuvres ; et tous les protestants qui jugent encore que Calvin et Luther ont fait leur temp
4458 Paul bien plus ancien ! — tous ceux qui tiennent la prédestination pour un dogme immoral ou périmé ; ceux qui traduisent 
4459 oral ou périmé ; ceux qui traduisent : « Paix sur la terre aux hommes que Dieu agrée », par « Paix aux hommes de bonne vol
4460 ec Érasme et son armée de grands docteurs de tous les siècles pour soutenir le libre arbitre religieux, c’est-à-dire le pou
4461 grands docteurs de tous les siècles pour soutenir le libre arbitre religieux, c’est-à-dire le pouvoir qu’aurait l’homme de
4462 soutenir le libre arbitre religieux, c’est-à-dire le pouvoir qu’aurait l’homme de contribuer à son salut par ses efforts e
4463 itre religieux, c’est-à-dire le pouvoir qu’aurait l’ homme de contribuer à son salut par ses efforts et ses œuvres morales.
4464 Une verdeur de polémique qui peut flatter en nous le goût du pittoresque ; l’élan génial, la violence loyale d’une certitu
4465 qui peut flatter en nous le goût du pittoresque ; l’ élan génial, la violence loyale d’une certitude pesante, vraiment « gr
4466 r en nous le goût du pittoresque ; l’élan génial, la violence loyale d’une certitude pesante, vraiment « grave », d’une di
4467 i va droit au point décisif, envisage honnêtement les objections, donne à la thèse adverse toutes ses chances, non sans iro
4468 sif, envisage honnêtement les objections, donne à la thèse adverse toutes ses chances, non sans ironie toutefois, et sait
4469 nie toutefois, et sait enfin conférer à son choix la force et la simplicité d’une constatation évidente. D’un point de vue
4470 s, et sait enfin conférer à son choix la force et la simplicité d’une constatation évidente. D’un point de vue purement es
4471 r assez flagrantes, pour qu’un lecteur qui refuse l’ essentiel soit tout de même attiré et subjugué par le style, par le to
4472 ssentiel soit tout de même attiré et subjugué par le style, par le ton de l’ouvrage. (Nous ne savons que trop bien, nous m
4473 tout de même attiré et subjugué par le style, par le ton de l’ouvrage. (Nous ne savons que trop bien, nous modernes, sépar
4474 me attiré et subjugué par le style, par le ton de l’ ouvrage. (Nous ne savons que trop bien, nous modernes, séparer le fond
4475 s ne savons que trop bien, nous modernes, séparer le fond de la forme ; admirer l’une quand nous condamnons l’autre, et vi
4476 que trop bien, nous modernes, séparer le fond de la forme ; admirer l’une quand nous condamnons l’autre, et vice versa.)
4477 lleurs du chef d’un grand mouvement (comme dirait le jargon d’aujourd’hui), tout est bien fait, dans ce Traité, pour heurt
4478 bien fait, dans ce Traité, pour heurter de front le lecteur incroyant, ou celui qui ne partage pas la foi de Paul et des
4479 le lecteur incroyant, ou celui qui ne partage pas la foi de Paul et des apôtres. D’abord, le langage scolastique, qui n’es
4480 rtage pas la foi de Paul et des apôtres. D’abord, le langage scolastique, qui n’est pas proprement luthérien, mais que Lut
4481 t obligé d’utiliser pour débrouiller et supprimer les faux problèmes où la Diatribe voulait l’embarrasser69. Ensuite, ce re
4482 ur débrouiller et supprimer les faux problèmes où la Diatribe voulait l’embarrasser69. Ensuite, ce refus total, ou mieux c
4483 pprimer les faux problèmes où la Diatribe voulait l’ embarrasser69. Ensuite, ce refus total, ou mieux cette négligence tran
4484 (Un tel homme est bien trop vivant pour faire de la psychologie ; trop engagé dans le réel pour prendre au sérieux ses re
4485 t pour faire de la psychologie ; trop engagé dans le réel pour prendre au sérieux ses reflets dans la conscience du specta
4486 le réel pour prendre au sérieux ses reflets dans la conscience du spectateur.) Ce qui ne manquera pas de faire crier au d
4487 faire crier au dogmatisme. Tout se passe ici « à l’ intérieur » du christianisme, de l’Église. L’humanisme laïque, autonom
4488 passe ici « à l’intérieur » du christianisme, de l’ Église. L’humanisme laïque, autonome, est simplement nié, comme une ab
4489 « à l’intérieur » du christianisme, de l’Église. L’ humanisme laïque, autonome, est simplement nié, comme une absurdité, u
4490 nié, comme une absurdité, une contradiction dans les termes. C’est à Érasme en tant que théologien que Luther s’applique à
4491 n que Luther s’applique à répondre, et c’est même la plus dure ironie — quoique involontaire, je le suppose —, dont il pou
4492 me la plus dure ironie — quoique involontaire, je le suppose —, dont il pouvait, en l’occurrence, l’accabler. On ne saurai
4493 nvolontaire, je le suppose —, dont il pouvait, en l’ occurrence, l’accabler. On ne saurait souligner trop fortement ce trai
4494 e le suppose —, dont il pouvait, en l’occurrence, l’ accabler. On ne saurait souligner trop fortement ce trait : c’est enco
4495 en philosophe ou en métaphysicien, que Luther nie le libre arbitre. Ceci pourrait suffire, et doit suffire en droit, à réf
4496 rait suffire, et doit suffire en droit, à réfuter l’ objection d’un moderne, l’objection parfaitement anachronique, mais qu
4497 ire en droit, à réfuter l’objection d’un moderne, l’ objection parfaitement anachronique, mais que je sais inévitable, qui
4498 à affirmer que Luther est « déterministe ». Mais le sérieux théologique est chose trop rare, et pour beaucoup trop diffic
4499 e écarter cette objection par un simple rappel de l’ ordre dans lequel le Traité fut pensé. Je tenterai donc d’esquisser,
4500 ction par un simple rappel de l’ordre dans lequel le Traité fut pensé. Je tenterai donc d’esquisser, tout au moins, le di
4501 sé. Je tenterai donc d’esquisser, tout au moins, le dialogue d’une « conscience moderne », douée d’exigence spirituelle,
4502 ’un tel dialogue se déroule même à l’intérieur de la pensée d’un homme qui veut croire…) Dialogue Car Dieu peut tout
4503 ue Car Dieu peut tout à tout instant. C’est là la santé de la foi. Kierkegaard. Une conscience moderne. — Selon Lut
4504 eu peut tout à tout instant. C’est là la santé de la foi. Kierkegaard. Une conscience moderne. — Selon Luther, nous n’
4505 selon sa prévision. Luther ne pose pas seulement l’ omnipotence, mais l’omniscience et la prescience éternelle de Dieu, qu
4506 Luther ne pose pas seulement l’omnipotence, mais l’ omniscience et la prescience éternelle de Dieu, qui ne peut faillir da
4507 as seulement l’omnipotence, mais l’omniscience et la prescience éternelle de Dieu, qui ne peut faillir dans sa promesse, e
4508 erons plus ! Nous refusons de jouer si, d’avance, le vainqueur a été désigné par un arbitre qui ne tient pas compte de nos
4509 oits ! Un luthérien. — Mais connais-tu seulement les vraies règles du jeu ? Qui t’a fait croire que ta vie était une parti
4510 que ta vie était une partie à jouer entre toi et le monde, par exemple ; ou encore entre l’individu et le Sort, cette ido
4511 re toi et le monde, par exemple ; ou encore entre l’ individu et le Sort, cette idole païenne ? C. M. — J’ai besoin de le
4512 onde, par exemple ; ou encore entre l’individu et le Sort, cette idole païenne ? C. M. — J’ai besoin de le croire pour ag
4513 rt, cette idole païenne ? C. M. — J’ai besoin de le croire pour agir. L. — Mais qu’est-ce qu’agir ? Est-ce vraiment toi
4514 e ta science ne s’occupe-t-elle pas, justement, à les découvrir ? Au besoin, à les inventer ? C. M. — Certes, mais ma dign
4515 le pas, justement, à les découvrir ? Au besoin, à les inventer ? C. M. — Certes, mais ma dignité consiste à lutter contre
4516 à lutter contre de telles forces, une fois que je les ai reconnues ; à m’affirmer dans mon autonomie par un acte qui crée m
4517 qui crée ma liberté, par un acte de révolte, s’il le faut ! L. — Tu crois donc détenir un tel pouvoir ? C. M. — Il me su
4518 un tel pouvoir ? C. M. — Il me suffit de vouloir l’ affirmer. L. — Soit, c’est une hypothèse de travail… Pour moi, je cro
4519 e de travail… Pour moi, je crois que Dieu connaît la fin, la somme, la valeur absolue de nos actions passées, présentes, f
4520 vail… Pour moi, je crois que Dieu connaît la fin, la somme, la valeur absolue de nos actions passées, présentes, futures,
4521 moi, je crois que Dieu connaît la fin, la somme, la valeur absolue de nos actions passées, présentes, futures, car elles
4522 passées, présentes, futures, car elles sont dans le temps, Dieu dans l’Éternité qui est avant le temps, qui est en lui, e
4523 futures, car elles sont dans le temps, Dieu dans l’ Éternité qui est avant le temps, qui est en lui, et qui est encore apr
4524 dans le temps, Dieu dans l’Éternité qui est avant le temps, qui est en lui, et qui est encore après lui. Au regard de Dieu
4525 ard de Dieu donc, « tout est accompli », — depuis la mort du Christ sur la croix. Non seulement prévu, mais accompli ! C.
4526 ut est accompli », — depuis la mort du Christ sur la croix. Non seulement prévu, mais accompli ! C. M. — Si c’était vrai,
4527 ncore nier ce Dieu qui prétend voir plus loin que le terme de mes actions, — ce qui, avouons-le, les ridiculise complèteme
4528 in que le terme de mes actions, — ce qui, avouons- le , les ridiculise complètement et les rend vaines en fin de compte : ca
4529 ue le terme de mes actions, — ce qui, avouons-le, les ridiculise complètement et les rend vaines en fin de compte : car je
4530 e qui, avouons-le, les ridiculise complètement et les rend vaines en fin de compte : car je sens, malgré tout, que je les f
4531 fin de compte : car je sens, malgré tout, que je les fais librement, et tu viens me dire qu’elles sont prévues ! Et prévue
4532 Nietzsche a proclamé qu’il avait fait. L. — Mais l’ homme est « chair », et cette chair est liée à l’espace et au temps. C
4533 l’homme est « chair », et cette chair est liée à l’ espace et au temps. Comment le temps tuerait-il l’Éternel ? Comment la
4534 te chair est liée à l’espace et au temps. Comment le temps tuerait-il l’Éternel ? Comment la chair tuerait-elle l’Esprit ?
4535 l’espace et au temps. Comment le temps tuerait-il l’ Éternel ? Comment la chair tuerait-elle l’Esprit ? Elle ne peut tuer q
4536 . Comment le temps tuerait-il l’Éternel ? Comment la chair tuerait-elle l’Esprit ? Elle ne peut tuer que l’idée fausse qu’
4537 rait-il l’Éternel ? Comment la chair tuerait-elle l’ Esprit ? Elle ne peut tuer que l’idée fausse qu’elle s’en formait… Tu
4538 air tuerait-elle l’Esprit ? Elle ne peut tuer que l’ idée fausse qu’elle s’en formait… Tu affirmes que si Dieu prévoit tout
4539 tu es alors dispensé d’agir, et que ce n’est plus la peine de faire aucun effort. Si tout est décidé d’avance, il n’y a pl
4540 ton effort aussi était prévu ? Pourrais-tu ne pas le fournir ? Et si tu décidais : « Je suis, donc Dieu n’est pas !70 », q
4541 ui t’assurerait que cet acte de révolte échappe à l’ éternelle Prévision ? Qui t’assurerait qu’en prononçant ces mots, tu n
4542 ant ces mots, tu ne prononcerais pas sur toi-même l’ arrêt éternel de Dieu te rejetant vers le néant, en sorte que Dieu, vr
4543 toi-même l’arrêt éternel de Dieu te rejetant vers le néant, en sorte que Dieu, vraiment, n’existe plus pour toi ? Fermer l
4544 e Dieu, vraiment, n’existe plus pour toi ? Fermer les yeux sur une réalité, ce n’est pas la supprimer objectivement. Mais c
4545 i ? Fermer les yeux sur une réalité, ce n’est pas la supprimer objectivement. Mais c’est peut-être se priver de son secour
4546 est peut-être se priver de son secours, ou encore la transformer en une menace obscure. Il y a une double prédestination :
4547 double prédestination : l’une au salut, l’autre à la damnation. Être damné, ne serait-ce pas justement être rivé au temps
4548 justement être rivé au temps sans fin, et refuser l’ éternité qui vient nous délivrer du temps ? C. M. — Mais mon temps es
4549 eauté, de création ! Ton éternité immobile, c’est l’ image même de la mort. L. — Que savons-nous de l’éternité ? Les philo
4550 on ! Ton éternité immobile, c’est l’image même de la mort. L. — Que savons-nous de l’éternité ? Les philosophes et la rai
4551 l’image même de la mort. L. — Que savons-nous de l’ éternité ? Les philosophes et la raison ne peuvent l’imaginer que mort
4552 de la mort. L. — Que savons-nous de l’éternité ? Les philosophes et la raison ne peuvent l’imaginer que morte. Mais la Bib
4553 ue savons-nous de l’éternité ? Les philosophes et la raison ne peuvent l’imaginer que morte. Mais la Bible nous dit qu’ell
4554 ternité ? Les philosophes et la raison ne peuvent l’ imaginer que morte. Mais la Bible nous dit qu’elle est la Vie, et que
4555 t la raison ne peuvent l’imaginer que morte. Mais la Bible nous dit qu’elle est la Vie, et que notre vie n’est qu’une mort
4556 ner que morte. Mais la Bible nous dit qu’elle est la Vie, et que notre vie n’est qu’une mort à ses yeux. Qui nous prouve q
4557 n’est qu’une mort à ses yeux. Qui nous prouve que l’ éternité est quelque chose d’immobile, de statique ? Qui nous dit qu’e
4558 e ? Qui nous dit qu’elle n’est pas, au contraire, la source de tout acte et de toute création, une invention totale et per
4559 totale et perpétuelle, une actualité permanente, la seule chose qui change quelque chose au déroulement calculable du tem
4560 se au déroulement calculable du temps, quand elle le touche dans l’instant (dans un « atome » de temps, comme l’écrit Paul
4561 nt calculable du temps, quand elle le touche dans l’ instant (dans un « atome » de temps, comme l’écrit Paul) (I Cor. 15 :
4562 dans l’instant (dans un « atome » de temps, comme l’ écrit Paul) (I Cor. 15 : 52) ? Qui t’assure que notre raison, tout att
4563 ? C’est un mystère plus profond que notre vie, et la raison n’est qu’un faible élément de notre vie. C’est un mystère que
4564 faible élément de notre vie. C’est un mystère que le croyant pressent et vit au seul moment de la prière. « Demandez et l’
4565 que le croyant pressent et vit au seul moment de la prière. « Demandez et l’on vous donnera », dit le même Dieu qui nous
4566 et vit au seul moment de la prière. « Demandez et l’ on vous donnera », dit le même Dieu qui nous prédestina ! Quand le cro
4567 la prière. « Demandez et l’on vous donnera », dit le même Dieu qui nous prédestina ! Quand le croyant, qui sait que Dieu a
4568 a », dit le même Dieu qui nous prédestina ! Quand le croyant, qui sait que Dieu a tout prévu éternellement, adresse à Dieu
4569 t-il pas ce paradoxe et ce mystère : croire que «  l’ Éternel est vivant », croire que sa volonté — qui a tout prévu — peut
4570 peut aussi tout changer en un instant aux yeux de l’ homme, sans que rien soit changé de ce qu’a décidé Dieu, de ce qu’il d
4571 de ce qu’il décide ou de ce qu’il décidera ? Car l’ Éternel ne connaît pas de « temps », il n’est pas lié comme nous à une
4572 ire, nos divers temps et successions procèdent de l’ Éternel et lui sont liés : nous venons de lui, nous retournons à lui,
4573 ui, nous retournons à lui, il est en nous lorsque l’ Esprit dit la Parole dans notre cœur. Quelle étrange illusion nous fer
4574 urnons à lui, il est en nous lorsque l’Esprit dit la Parole dans notre cœur. Quelle étrange illusion nous ferait croire qu
4575 ge illusion nous ferait croire qu’une décision de l’ Éternel est une décision dans le passé ! Quand c’est elle seule qui dé
4576 u’une décision de l’Éternel est une décision dans le passé ! Quand c’est elle seule qui définit notre présent ! Est-ce que
4577 t notre crainte du « fatalisme » ne reposent pas, le plus souvent, sur cette erreur des plus grossières ? … C. M. — On pe
4578 s plus grossières ? … C. M. — On peut aussi nier l’ éternité, et affirmer que seul existe notre temps. Dans ce cas, tu n’a
4579 — On ne prouve rien de ce qui est essentiel ; on l’ accepte ou on le refuse, en vertu d’une décision pure. Discuter ne peu
4580 rien de ce qui est essentiel ; on l’accepte ou on le refuse, en vertu d’une décision pure. Discuter ne peut nous conduire
4581 ns pas dialogué en vain, si nous avons pu dégager l’ alternative du libre arbitre, telle qu’elle se pose dans les termes ex
4582 tive du libre arbitre, telle qu’elle se pose dans les termes extrêmes où elle revêt sa vraie réalité : c’est l’Éternel qui
4583 s extrêmes où elle revêt sa vraie réalité : c’est l’ Éternel qui commande, — ou c’est moi. Il n’y a pas là de difficultés i
4584 s là de difficultés intellectuelles. Il n’y a que la résistance acharnée du « vieil homme », et les prétextes toujours trè
4585 que la résistance acharnée du « vieil homme », et les prétextes toujours très moraux, et même très pieux, qu’invoque notre
4586 révolte… Réalité radicale du problème Dans l’ Église, une fois acceptés le Credo et son fondement qui est la Parole
4587 e du problème Dans l’Église, une fois acceptés le Credo et son fondement qui est la Parole dite en nous par l’Esprit et
4588 e fois acceptés le Credo et son fondement qui est la Parole dite en nous par l’Esprit et attestée par l’Écriture, — or, ce
4589 son fondement qui est la Parole dite en nous par l’ Esprit et attestée par l’Écriture, — or, cette Parole est Christ lui-m
4590 Parole dite en nous par l’Esprit et attestée par l’ Écriture, — or, cette Parole est Christ lui-même, — il me paraît que l
4591 te Parole est Christ lui-même, — il me paraît que l’ opinion de Luther n’est pas sujette à de sérieuses objections. Et la d
4592 r n’est pas sujette à de sérieuses objections. Et la démonstration purement biblique qu’on en trouvera dans le Traité du s
4593 stration purement biblique qu’on en trouvera dans le Traité du serf arbitre, malgré quelques détails exégétiques discutabl
4594 ls exégétiques discutables, suffit à établir pour le chrétien la vérité d’un paradoxe que Luther n’a pas inventé, mais qui
4595 es discutables, suffit à établir pour le chrétien la vérité d’un paradoxe que Luther n’a pas inventé, mais qui est au cœur
4596 her n’a pas inventé, mais qui est au cœur même de l’ Évangile. L’apôtre Paul l’a formulé avant toute « tradition ecclésiast
4597 inventé, mais qui est au cœur même de l’Évangile. L’ apôtre Paul l’a formulé avant toute « tradition ecclésiastique », et t
4598 qui est au cœur même de l’Évangile. L’apôtre Paul l’ a formulé avant toute « tradition ecclésiastique », et tous les Pères
4599 avant toute « tradition ecclésiastique », et tous les Pères et tous les siècles dont se réclame Érasme n’y changeront rien 
4600 ition ecclésiastique », et tous les Pères et tous les siècles dont se réclame Érasme n’y changeront rien : « Travaillez à v
4601 emblement, puisque c’est Dieu qui produit en vous le vouloir et le faire. » (Phil. 2 : 12-13). C’est parce que Dieu fait t
4602 sque c’est Dieu qui produit en vous le vouloir et le faire. » (Phil. 2 : 12-13). C’est parce que Dieu fait tout que nous d
4603 fait tout que nous devons agir, selon qu’il nous l’ a commandé. C’est parce que Dieu a tout prévu que nous avons en lui, e
4604 tout prévu que nous avons en lui, et en lui seul, la liberté. Mais cela n’apparaît qu’à celui qui ose aller jusqu’aux extr
4605 ît qu’à celui qui ose aller jusqu’aux extrêmes de la connaissance de soi-même et de la connaissance de la foi. Luther insi
4606 aux extrêmes de la connaissance de soi-même et de la connaissance de la foi. Luther insiste sur cet « extrêmisme » évangél
4607 connaissance de soi-même et de la connaissance de la foi. Luther insiste sur cet « extrêmisme » évangélique, que les sophi
4608 r insiste sur cet « extrêmisme » évangélique, que les sophistes n’étaient que trop portés à corriger et à « humaniser », au
4609 orriger et à « humaniser », au risque d’« évacuer la Croix ». Tant qu’on n’a pas envisagé la doctrine de la pure grâce jus
4610 « évacuer la Croix ». Tant qu’on n’a pas envisagé la doctrine de la pure grâce jusque dans son sérieux dernier, on peut so
4611 oix ». Tant qu’on n’a pas envisagé la doctrine de la pure grâce jusque dans son sérieux dernier, on peut soutenir que l’ho
4612 ue dans son sérieux dernier, on peut soutenir que l’ homme possède au moins « un faible libre arbitre »71, dans les choses
4613 sède au moins « un faible libre arbitre »71, dans les choses du salut. Mais que le Christ ait dû mourir — cet acte extrême
4614 e arbitre »71, dans les choses du salut. Mais que le Christ ait dû mourir — cet acte extrême — pour nous sauver, fait voir
4615 liberté, par nous-mêmes, dans notre péché. Et, à l’ inverse, il faut oser descendre jusqu’au fond de la connaissance du pé
4616 ’inverse, il faut oser descendre jusqu’au fond de la connaissance du péché pour voir qu’il n’y a de liberté possible que d
4617 our voir qu’il n’y a de liberté possible que dans la grâce que Dieu nous fait. Toute l’argumentation de Luther vise le mom
4618 sible que dans la grâce que Dieu nous fait. Toute l’ argumentation de Luther vise le moment de la décision, et néglige les
4619 u nous fait. Toute l’argumentation de Luther vise le moment de la décision, et néglige les moyens termes où voulait se com
4620 Toute l’argumentation de Luther vise le moment de la décision, et néglige les moyens termes où voulait se complaire Érasme
4621 Luther vise le moment de la décision, et néglige les moyens termes où voulait se complaire Érasme. Le problème du salut es
4622 les moyens termes où voulait se complaire Érasme. Le problème du salut est un problème de vie ou de mort. Or, il est seul
4623 de vie ou de mort. Or, il est seul en cause pour le théologien. Et tout est clair lorsque l’on a compris que Luther ne ni
4624 use pour le théologien. Et tout est clair lorsque l’ on a compris que Luther ne nie pas du tout notre faculté de vouloir, m
4625 e seulement qu’elle puisse suffire à nous obtenir le salut, étant elle-même soumise au mal. Tout le reste est psychologie,
4626 ir le salut, étant elle-même soumise au mal. Tout le reste est psychologie, littérature et scolastique. Il n’en reste pas
4627 olastique. Il n’en reste pas moins qu’aux yeux de la raison — cette folle comme le répète Luther —, ce que nous nommons ic
4628 oins qu’aux yeux de la raison — cette folle comme le répète Luther —, ce que nous nommons ici un paradoxe demeure une pure
4629 s alors, on peut se demander si ceux qui refusent le christianisme échappent vraiment à la difficulté ; ou si, au contrair
4630 ui refusent le christianisme échappent vraiment à la difficulté ; ou si, au contraire, ils ne la retrouvent pas, mais dans
4631 ent à la difficulté ; ou si, au contraire, ils ne la retrouvent pas, mais dans un plan où elle reste insoluble. Érasme éta
4632 me était encore catholique ; son humanisme mesuré l’ empêche de voir le vrai tragique du débat. Mais le plus grand des adve
4633 tholique ; son humanisme mesuré l’empêche de voir le vrai tragique du débat. Mais le plus grand des adversaires du christi
4634 l’empêche de voir le vrai tragique du débat. Mais le plus grand des adversaires du christianisme dans les temps modernes,
4635 plus grand des adversaires du christianisme dans les temps modernes, Nietzsche, aboutit à un dilemme qui me paraît corresp
4636 e, terme à terme, à celui que Luther et Paul — et l’ Évangile — posent à notre foi. C’est qu’il a poussé, comme Luther, jus
4637 ussé, comme Luther, jusqu’aux extrêmes limites de l’ homme, jusqu’aux questions dernières que peut envisager notre pensée.
4638 ager notre pensée. Pour échapper au nihilisme qui l’ étreint, dès lors que « Dieu est mort » ou qu’il l’a « tué », il imagi
4639 ’étreint, dès lors que « Dieu est mort » ou qu’il l’ a « tué », il imagine le Retour éternel. Et comme ce Retour éternel pa
4640  Dieu est mort » ou qu’il l’a « tué », il imagine le Retour éternel. Et comme ce Retour éternel paraît exclure toute liber
4641 xclure toute liberté humaine, il se met à prêcher l’ amor fati, l’adhésion volontaire et joyeuse à la fatalité inéluctable.
4642 liberté humaine, il se met à prêcher l’amor fati, l’ adhésion volontaire et joyeuse à la fatalité inéluctable. C’est dans c
4643 r l’amor fati, l’adhésion volontaire et joyeuse à la fatalité inéluctable. C’est dans cette volonté de reconnaître notre t
4644 irresponsabilité, qu’il croit trouver et regagner la dignité suprême de l’homme sans Dieu. Être libre, c’est vouloir l’éte
4645 l croit trouver et regagner la dignité suprême de l’ homme sans Dieu. Être libre, c’est vouloir l’éternité de son destin. (
4646 e de l’homme sans Dieu. Être libre, c’est vouloir l’ éternité de son destin. (Pour le chrétien, c’est accepter, en acte, l’
4647 re, c’est vouloir l’éternité de son destin. (Pour le chrétien, c’est accepter, en acte, l’éternelle prévision du Dieu qui
4648 stin. (Pour le chrétien, c’est accepter, en acte, l’ éternelle prévision du Dieu qui sauve.) La similitude étonnante du par
4649 n acte, l’éternelle prévision du Dieu qui sauve.) La similitude étonnante du paradoxe luthérien et du paradoxe nietzschéen
4650 vérité, c’est bien du même problème qu’il s’agit. Le seul problème, dès qu’on en vient à une épreuve radicale de la vie. A
4651 ème, dès qu’on en vient à une épreuve radicale de la vie. Au « tu dois » des chrétiens, qui est prononcé par Dieu, Nietzsc
4652 iens, qui est prononcé par Dieu, Nietzsche oppose le « je veux » de l’homme divinisé. Puis, à l’existence de Dieu, il oppo
4653 oncé par Dieu, Nietzsche oppose le « je veux » de l’ homme divinisé. Puis, à l’existence de Dieu, il oppose sa propre exist
4654 ppose le « je veux » de l’homme divinisé. Puis, à l’ existence de Dieu, il oppose sa propre existence72. Mais la difficulté
4655 ce de Dieu, il oppose sa propre existence72. Mais la difficulté fondamentale que posent les rapports de notre volonté et d
4656 nce72. Mais la difficulté fondamentale que posent les rapports de notre volonté et de l’éternité souveraine, demeure entièr
4657 le que posent les rapports de notre volonté et de l’ éternité souveraine, demeure entière. La différence, c’est que Nietzsc
4658 nté et de l’éternité souveraine, demeure entière. La différence, c’est que Nietzsche nous propose d’adorer un Destin muet,
4659 muet, tandis que nous adorons une Providence dont la Parole vivante s’est incarnée : « Emmanuel ! » — Dieu avec nous !
4660 rnée : « Emmanuel ! » — Dieu avec nous ! 68. À la proposition qu’on lui faisait, en 1537, d’éditer ses œuvres complètes
4661 faisait, en 1537, d’éditer ses œuvres complètes, le réformateur répondit : « Je ne reconnais aucun de mes livres pour adé
4662 de mes livres pour adéquat, si ce n’est peut-être le De servo arbitrio et le Catéchisme. » 69. Luther avertit à chaque fo
4663 at, si ce n’est peut-être le De servo arbitrio et le Catéchisme. » 69. Luther avertit à chaque fois : « nécessité conditi
4664 absolue, comme ils disent », et ce ils désigne «  les sophistes », c’est-à-dire les scolastiques. 70. Comme l’anarchiste B
4665 et ce ils désigne « les sophistes », c’est-à-dire les scolastiques. 70. Comme l’anarchiste Bakounine. 71. Modiculum et m
4666 stes », c’est-à-dire les scolastiques. 70. Comme l’ anarchiste Bakounine. 71. Modiculum et minimum, écrit Érasme ! 72.
4667 . Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Luther et la liberté (À propos du Traité du serf arbitre) », Foi et Vie, Paris, ma
24 1946, Foi et Vie, articles (1928–1977). Fédéralisme et œcuménisme (octobre 1946)
4668 Fédéralisme et œcuménisme (octobre 1946)ab ac Le mouvement œcuménique ne deviendra réel aux yeux des peuples qu’à part
4669 té aux questions politiques de notre temps. Qu’il le pressente, qu’il ait au moins une sorte de conscience anxieuse de l’œ
4670 ait au moins une sorte de conscience anxieuse de l’ œuvre à faire, c’est ce que prouvent ses « encycliques » improvisées à
4671 ce que prouvent ses « encycliques » improvisées à la veille de la guerre. Qu’il soit encore très loin d’une vision dynamiq
4672 nt ses « encycliques » improvisées à la veille de la guerre. Qu’il soit encore très loin d’une vision dynamique de l’actio
4673 l soit encore très loin d’une vision dynamique de l’ action immédiate, c’est ce que prouvent ces mêmes déclarations. Elles
4674 n manque de nécessité intérieure. Elles expriment l’ accord d’un certain nombre de bonnes volontés, non pas l’élan d’une vo
4675 d d’un certain nombre de bonnes volontés, non pas l’ élan d’une volonté précise et combative. Elles sont un respectable rés
4676 Mais comme beaucoup de documents qui prennent par la suite une valeur historique, elles auront passé inaperçues en leur te
4677 anque d’efficacité des messages œcuméniques, dans le plan politique, provient sans doute du fait qu’ils sont des compromis
4678 ine et forcément trop généraux. Mais il y a plus. L’ erreur commise jusqu’ici a été d’essayer de choisir prudemment une att
4679 aire davantage à ce moment. En fait, on a examiné la situation mondiale et l’on a tenté de l’améliorer, conformément à des
4680 t. En fait, on a examiné la situation mondiale et l’ on a tenté de l’améliorer, conformément à des principes indiscutés de
4681 examiné la situation mondiale et l’on a tenté de l’ améliorer, conformément à des principes indiscutés de morale chrétienn
4682 indiscutés de morale chrétienne et naturelle. Or le réformisme moral n’a jamais pu influencer le cours des événements. L’
4683 . Or le réformisme moral n’a jamais pu influencer le cours des événements. L’histoire est faite d’initiatives, non de reto
4684 n’a jamais pu influencer le cours des événements. L’ histoire est faite d’initiatives, non de retouches, de vœux et d’amend
4685 on qui jaillisse du tréfonds de sa foi créatrice. Les hommes qui ont fait l’histoire sont ceux qui avaient une vision passi
4686 onds de sa foi créatrice. Les hommes qui ont fait l’ histoire sont ceux qui avaient une vision passionnée de leur but et qu
4687 vision passionnée de leur but et qui ont su plier les circonstances à leur dessein. Dans un certain sens, nous dirons qu’il
4688 sse d’eux-mêmes, de leur foi ou de leur ambition, la plus profonde, et non pas des données et des aspirations plus ou moin
4689 es de leur époque. Leur action fut puissante dans la mesure exacte où elle fut l’expression directe de leur être. Si le mo
4690 n fut puissante dans la mesure exacte où elle fut l’ expression directe de leur être. Si le mouvement œcuménique veut agir,
4691 où elle fut l’expression directe de leur être. Si le mouvement œcuménique veut agir, et il le doit, il faut qu’il reconnai
4692 être. Si le mouvement œcuménique veut agir, et il le doit, il faut qu’il reconnaisse d’abord cette loi fondamentale de l’a
4693 ’il reconnaisse d’abord cette loi fondamentale de l’ action. En d’autres termes, il faut que son action politique parte de
4694 oivent traduire en termes d’organisation pratique les principes qui sont impliqués dans la vision de l’œcuménisme. Rien que
4695 on pratique les principes qui sont impliqués dans la vision de l’œcuménisme. Rien que cela, mais tout cela, avec confiance
4696 es principes qui sont impliqués dans la vision de l’ œcuménisme. Rien que cela, mais tout cela, avec confiance, mais aussi
4697 ement « chrétienne », mais il s’agit d’actualiser la politique impliquée dès le début dans la volonté et l’espérance œcumé
4698 il s’agit d’actualiser la politique impliquée dès le début dans la volonté et l’espérance œcuménique. Le présent essai n’a
4699 tualiser la politique impliquée dès le début dans la volonté et l’espérance œcuménique. Le présent essai n’a d’autre ambit
4700 litique impliquée dès le début dans la volonté et l’ espérance œcuménique. Le présent essai n’a d’autre ambition que d’esqu
4701 début dans la volonté et l’espérance œcuménique. Le présent essai n’a d’autre ambition que d’esquisser les grandes lignes
4702 résent essai n’a d’autre ambition que d’esquisser les grandes lignes de ce développement, et d’en indiquer les articulation
4703 ndes lignes de ce développement, et d’en indiquer les articulations. Que l’on excuse le schématisme des pages qui suivent :
4704 oppement, et d’en indiquer les articulations. Que l’ on excuse le schématisme des pages qui suivent : c’est celui d’un plan
4705 d’en indiquer les articulations. Que l’on excuse le schématisme des pages qui suivent : c’est celui d’un plan de travail,
4706 , d’un sommaire. Certains conflits permanents de l’ histoire ont pris de nos jours un caractère de violence sans précédent
4707 n caractère de violence sans précédent. À travers les complexités infinies de nos difficultés économiques, sociales, politi
4708 que mortel. Conflit politique et économique entre l’ État totalitaire et les droits de l’homme. Conflit moral entre le coll
4709 litique et économique entre l’État totalitaire et les droits de l’homme. Conflit moral entre le collectivisme oppressif et
4710 ire et les droits de l’homme. Conflit moral entre le collectivisme oppressif et l’individualisme anarchisant. Conflit idéo
4711 Conflit moral entre le collectivisme oppressif et l’ individualisme anarchisant. Conflit idéologique et religieux entre l’u
4712 archisant. Conflit idéologique et religieux entre l’ unité imposée et la division irréfléchie, entre la centralisation rigi
4713 idéologique et religieux entre l’unité imposée et la division irréfléchie, entre la centralisation rigide et l’éparpilleme
4714 l’unité imposée et la division irréfléchie, entre la centralisation rigide et l’éparpillement poussiéreux. Remarquons tout
4715 on irréfléchie, entre la centralisation rigide et l’ éparpillement poussiéreux. Remarquons tout de suite que ces divers con
4716 te que ces divers conflits ne sont en réalité que les aspects d’une seule et même opposition fondamentale, réfractée à des
4717 n possible. Ils sont inconciliables parce que, de la combinaison de deux erreurs, on ne peut faire sortir une vérité, mais
4718 rité, mais seulement une erreur aggravée. De même l’ orthodoxie ne sera jamais retrouvée en faisant une somme d’hérésies. D
4719 t politique et économique, résultent pratiquement la guerre et la révolution. Du conflit moral résultent la tyrannie et l’
4720 t économique, résultent pratiquement la guerre et la révolution. Du conflit moral résultent la tyrannie et l’anarchie. Du
4721 erre et la révolution. Du conflit moral résultent la tyrannie et l’anarchie. Du conflit idéologique et religieux résultent
4722 lution. Du conflit moral résultent la tyrannie et l’ anarchie. Du conflit idéologique et religieux résultent des mises au p
4723 scrètes et des schismes multipliés. Pour résoudre l’ opposition unité-division, il serait vain de rechercher une solution i
4724 s en lutte. Il faut changer de plan, et retrouver l’ attitude centrale dont ces deux erreurs ne sont que des déviations mor
4725 rreurs ne sont que des déviations morbides. Entre la peste et le choléra, il n’y a ni « juste milieu » ni synthèse possibl
4726 nt que des déviations morbides. Entre la peste et le choléra, il n’y a ni « juste milieu » ni synthèse possible. Il faut r
4727 milieu » ni synthèse possible. Il faut revenir à la santé. Et tout d’abord, il faut se la représenter. La santé politique
4728 t revenir à la santé. Et tout d’abord, il faut se la représenter. La santé politique et économique s’appelle fédéralisme.
4729 anté. Et tout d’abord, il faut se la représenter. La santé politique et économique s’appelle fédéralisme. La santé morale
4730 té politique et économique s’appelle fédéralisme. La santé morale et civique s’appelle personnalisme. La santé religieuse
4731 santé morale et civique s’appelle personnalisme. La santé religieuse s’appelle œcuménisme. Nous allons définir ces trois
4732 sur leur nécessaire hiérarchie. Notre thèse étant la suivante : La théologie de l’œcuménisme implique une philosophie de l
4733 saire hiérarchie. Notre thèse étant la suivante : La théologie de l’œcuménisme implique une philosophie de la personne don
4734 . Notre thèse étant la suivante : La théologie de l’ œcuménisme implique une philosophie de la personne dont l’application
4735 logie de l’œcuménisme implique une philosophie de la personne dont l’application est une politique du fédéralisme. 1. Th
4736 isme implique une philosophie de la personne dont l’ application est une politique du fédéralisme. 1. Théologie de l’œcum
4737 t une politique du fédéralisme. 1. Théologie de l’ œcuménisme Écartons d’abord le malentendu que pourrait suggérer ce
4738 1. Théologie de l’œcuménisme Écartons d’abord le malentendu que pourrait suggérer ce titre : nous ne voulons pas parle
4739 gies existantes. Ce qui nous intéresse ici, c’est la doctrine concernant l’Église universelle, implicitée par le fait même
4740 nous intéresse ici, c’est la doctrine concernant l’ Église universelle, implicitée par le fait même qu’il existe un effort
4741 e concernant l’Église universelle, implicitée par le fait même qu’il existe un effort œcuménique. Nous supposons cette doc
4742 ctrine, dès lors que nous prononçons : « Je crois la sainte Église universelle. » Et nous nous bornerons ici à en souligne
4743 quelques traits qui importent à notre entreprise. Le principal est celui-ci : la théologie de l’œcuménisme subsiste et tom
4744 t à notre entreprise. Le principal est celui-ci : la théologie de l’œcuménisme subsiste et tombe avec la foi dans l’union
4745 rise. Le principal est celui-ci : la théologie de l’ œcuménisme subsiste et tombe avec la foi dans l’union des chrétiens en
4746 théologie de l’œcuménisme subsiste et tombe avec la foi dans l’union des chrétiens en Christ, cette foi pouvant être conn
4747 e l’œcuménisme subsiste et tombe avec la foi dans l’ union des chrétiens en Christ, cette foi pouvant être connotée par le
4748 ns en Christ, cette foi pouvant être connotée par le rejet de l’hérésie unitaire. Certes, il n’est pas de pire menace pour
4749 , cette foi pouvant être connotée par le rejet de l’ hérésie unitaire. Certes, il n’est pas de pire menace pour le mouvemen
4750 nitaire. Certes, il n’est pas de pire menace pour le mouvement œcuménique que l’utopie et la tentation d’une unité formell
4751 s de pire menace pour le mouvement œcuménique que l’ utopie et la tentation d’une unité formelle, humainement vérifiable, a
4752 nace pour le mouvement œcuménique que l’utopie et la tentation d’une unité formelle, humainement vérifiable, assurée et dé
4753 Car c’est précisément cette utopie qui a produit les schismes et les oppositions que le mouvement œcuménique se propose de
4754 sément cette utopie qui a produit les schismes et les oppositions que le mouvement œcuménique se propose de surmonter. C’es
4755 qui a produit les schismes et les oppositions que le mouvement œcuménique se propose de surmonter. C’est dans la mesure ex
4756 nt œcuménique se propose de surmonter. C’est dans la mesure exacte où les Églises ont voulu transformer la foi à l’Una San
4757 pose de surmonter. C’est dans la mesure exacte où les Églises ont voulu transformer la foi à l’Una Sancta en une assurance
4758 esure exacte où les Églises ont voulu transformer la foi à l’Una Sancta en une assurance visible et restrictive de l’unité
4759 cte où les Églises ont voulu transformer la foi à l’ Una Sancta en une assurance visible et restrictive de l’unité (d’organ
4760 Sancta en une assurance visible et restrictive de l’ unité (d’organisation ou de doctrine), c’est dans la mesure exacte où
4761 unité (d’organisation ou de doctrine), c’est dans la mesure exacte où elles ont douté d’une union par essence incontrôlabl
4762 es ont perdu leur communion réelle. Rappelons ici l’ histoire de la tour de Babel : la volonté de bâtir un monument visible
4763 eur communion réelle. Rappelons ici l’histoire de la tour de Babel : la volonté de bâtir un monument visible à la gloire d
4764 e. Rappelons ici l’histoire de la tour de Babel : la volonté de bâtir un monument visible à la gloire de l’unité des homme
4765 Babel : la volonté de bâtir un monument visible à la gloire de l’unité des hommes, conduisit à la division de leur langage
4766 lonté de bâtir un monument visible à la gloire de l’ unité des hommes, conduisit à la division de leur langage. Il convient
4767 le à la gloire de l’unité des hommes, conduisit à la division de leur langage. Il convient de laisser aux théologiens le s
4768 r langage. Il convient de laisser aux théologiens le soin de définir la doctrine positive de l’union au nom de laquelle do
4769 ent de laisser aux théologiens le soin de définir la doctrine positive de l’union au nom de laquelle doit être condamnée l
4770 ogiens le soin de définir la doctrine positive de l’ union au nom de laquelle doit être condamnée l’hérésie unitaire. Doctr
4771 de l’union au nom de laquelle doit être condamnée l’ hérésie unitaire. Doctrine de la multiplicité des dons accordés par le
4772 it être condamnée l’hérésie unitaire. Doctrine de la multiplicité des dons accordés par le seul et même Père, ou doctrine
4773 Doctrine de la multiplicité des dons accordés par le seul et même Père, ou doctrine de la pluralité des demeures dans un s
4774 accordés par le seul et même Père, ou doctrine de la pluralité des demeures dans un seul et même ciel, ou encore doctrine
4775 dans un seul et même ciel, ou encore doctrine de la diversité des membres d’un seul et même corps : quel que soit le nom
4776 s membres d’un seul et même corps : quel que soit le nom qu’on lui donne, en aucun cas elle ne manquera de fondements bibl
4777 Épître aux Corinthiens : c’est dans ses appels à l’ union, précisément, que Paul établit avec le plus de force la légitimi
4778 els à l’union, précisément, que Paul établit avec le plus de force la légitimité des diversités. Ce qui me paraît d’une ex
4779 écisément, que Paul établit avec le plus de force la légitimité des diversités. Ce qui me paraît d’une excellente méthode.
4780 glises d’Asie, possédant chacune leur ange ? Ou à la parole « Soyez un comme le Père et moi sommes un », qui établit le mo
4781 acune leur ange ? Ou à la parole « Soyez un comme le Père et moi sommes un », qui établit le modèle même de l’union dans l
4782 un comme le Père et moi sommes un », qui établit le modèle même de l’union dans la distinction des personnes ? Posons ces
4783 et moi sommes un », qui établit le modèle même de l’ union dans la distinction des personnes ? Posons ces questions-là aux
4784 un », qui établit le modèle même de l’union dans la distinction des personnes ? Posons ces questions-là aux docteurs de l
4785 rsonnes ? Posons ces questions-là aux docteurs de l’ Église. Mais voici ce que nous devons affirmer dès maintenant : la thé
4786 oici ce que nous devons affirmer dès maintenant : la théologie de l’œcuménisme considère que la diversité des vocations di
4787 devons affirmer dès maintenant : la théologie de l’ œcuménisme considère que la diversité des vocations divines n’est pas
4788 nant : la théologie de l’œcuménisme considère que la diversité des vocations divines n’est pas une imperfection de l’union
4789 s vocations divines n’est pas une imperfection de l’ union, mais sa vie même. Un deuxième trait, complémentaire d’ailleurs,
4790 aire d’ailleurs, doit être au moins rappelé ici : la théologie de l’œcuménisme ne vise pas à démanteler les orthodoxies ex
4791 doit être au moins rappelé ici : la théologie de l’ œcuménisme ne vise pas à démanteler les orthodoxies existantes, dans l
4792 héologie de l’œcuménisme ne vise pas à démanteler les orthodoxies existantes, dans les diverses Églises, mais au contraire,
4793 pas à démanteler les orthodoxies existantes, dans les diverses Églises, mais au contraire, elle a pour premier effet de les
4794 , mais au contraire, elle a pour premier effet de les renforcer en les rendant plus conscientes de leurs valeurs authentiqu
4795 re, elle a pour premier effet de les renforcer en les rendant plus conscientes de leurs valeurs authentiques, et c’est par
4796 union d’esprit en profondeur. En d’autres termes, l’ appel à l’union ne s’adresse pas aux dissidents virtuels de chaque Égl
4797 prit en profondeur. En d’autres termes, l’appel à l’ union ne s’adresse pas aux dissidents virtuels de chaque Église, mais
4798 s virtuels de chaque Église, mais à leurs membres les plus fidèles. Toutefois, cette méthode n’est compatible qu’avec des o
4799 rasser une orthodoxie qui céderait consciemment à la tentation unitaire, c’est-à-dire qui tendrait à se fermer sur elle-mê
4800 et à n’admettre plus de recours direct au chef de l’ Église, lequel est au ciel à la droite de Dieu, et non pas sur la terr
4801 direct au chef de l’Église, lequel est au ciel à la droite de Dieu, et non pas sur la terre, dans telle ville, ou dans te
4802 l est au ciel à la droite de Dieu, et non pas sur la terre, dans telle ville, ou dans tels écrits, ou dans tel prophète lo
4803 ciel, mais plusieurs ont agi comme s’il était sur la terre, c’est-à-dire à leur disposition. Plusieurs ont identifié l’Una
4804 -dire à leur disposition. Plusieurs ont identifié l’ Una Sancta avec leur organisation ou leur doctrine particulière. Au pr
4805 ière. Au principe d’union transcendant qui assure la permanence de l’Église universelle, certaines ont ajouté, et peu à pe
4806 d’union transcendant qui assure la permanence de l’ Église universelle, certaines ont ajouté, et peu à peu substitué en fa
4807 nent, c’est-à-dire humainement contrôlable. C’est la formule même de la tyrannie. Car, contre un principe d’unité immanent
4808 humainement contrôlable. C’est la formule même de la tyrannie. Car, contre un principe d’unité immanent, mais pratiquement
4809 se soumettre ou sortir. S’il se soumet, il court le risque d’obéir aux hommes plutôt qu’à Dieu. S’il sort, c’est avec ame
4810 tôt qu’à Dieu. S’il sort, c’est avec amertume, et l’ Église qu’il fondera peut-être sera opposée à l’ancienne, au lieu d’êt
4811 t l’Église qu’il fondera peut-être sera opposée à l’ ancienne, au lieu d’être seulement plus vraie, donc plus universelle.
4812 ieu d’être réformée, je n’épiloguerai pas ici sur l’ unité d’organisation romaine, considérée comme nécessaire au salut. Ma
4813 ée comme nécessaire au salut. Mais je rappellerai les critiques que Karl Barth adressait à l’orthodoxie protestante du xvii
4814 pellerai les critiques que Karl Barth adressait à l’ orthodoxie protestante du xviiie siècle : une certaine manière de pro
4815 viiie siècle : une certaine manière de proclamer le dogme de l’inspiration littérale des Écritures, par exemple, revient
4816 e : une certaine manière de proclamer le dogme de l’ inspiration littérale des Écritures, par exemple, revient à disposer h
4817 poser humainement des Écritures. Car aussitôt que le principe d’unité apparaît humainement vérifiable, l’orthodoxie de l’É
4818 principe d’unité apparaît humainement vérifiable, l’ orthodoxie de l’Église se « ferme » sur elle-même. D’où les schismes n
4819 apparaît humainement vérifiable, l’orthodoxie de l’ Église se « ferme » sur elle-même. D’où les schismes nombreux, dès cet
4820 oxie de l’Église se « ferme » sur elle-même. D’où les schismes nombreux, dès cette époque, dans les Églises calvinistes. Un
4821 ’où les schismes nombreux, dès cette époque, dans les Églises calvinistes. Une Église qui prétend se suffire et posséder so
4822 cipe d’unité, une Église qui tend à se fermer par le haut pour mieux assurer sa cohésion humaine, devient à la fois isolée
4823 ent antiœcuménique. Sa volonté d’unité s’oppose à l’ union. Elle transforme la diversité en division. Alors il y a scandale
4824 lonté d’unité s’oppose à l’union. Elle transforme la diversité en division. Alors il y a scandale, et c’est alors que le c
4825 vision. Alors il y a scandale, et c’est alors que le corps souffre dans son chef et dans ses membres ! La vie normale du c
4826 corps souffre dans son chef et dans ses membres ! La vie normale du corps dépend de la vitalité de chacun de ses membres,
4827 s ses membres ! La vie normale du corps dépend de la vitalité de chacun de ses membres, et la vie d’un membre dépend de so
4828 épend de la vitalité de chacun de ses membres, et la vie d’un membre dépend de son harmonie avec les autres membres, assur
4829 et la vie d’un membre dépend de son harmonie avec les autres membres, assurée par l’appartenance à un même chef. Nous retro
4830 son harmonie avec les autres membres, assurée par l’ appartenance à un même chef. Nous retrouverons plus loin, et à plusieu
4831 s plus loin, et à plusieurs reprises, ce thème de l’ harmonie organique opposé au thème de l’unité systématique. Notons qu’
4832 thème de l’harmonie organique opposé au thème de l’ unité systématique. Notons qu’il n’entraîne aucunement un éloge de la
4833 e. Notons qu’il n’entraîne aucunement un éloge de la « tolérance » libérale à base d’indifférence dogmatique. Car l’harmon
4834  » libérale à base d’indifférence dogmatique. Car l’ harmonie des membres n’est pas une tolérance, mais une nécessité vital
4835 est pas une tolérance, mais une nécessité vitale. Le poumon n’a pas à « tolérer » le cœur ! Il doit être un vrai poumon, e
4836 nécessité vitale. Le poumon n’a pas à « tolérer » le cœur ! Il doit être un vrai poumon, et dans cette mesure même, il aid
4837 vrai poumon, et dans cette mesure même, il aidera le cœur à être un bon cœur. Notons aussi que les Églises qui ne représen
4838 dera le cœur à être un bon cœur. Notons aussi que les Églises qui ne représentent pas spirituellement une fonction distinct
4839 tuellement une fonction distincte, mais seulement la division ou la duplication accidentelle d’un même organe, n’ont rien
4840 fonction distincte, mais seulement la division ou la duplication accidentelle d’un même organe, n’ont rien de mieux à fair
4841 rgane, n’ont rien de mieux à faire qu’à fusionner le plus tôt possible. 2. Philosophie de la personne Les positions
4842 ionner le plus tôt possible. 2. Philosophie de la personne Les positions œcuméniques que nous venons d’esquisser env
4843 tôt possible. 2. Philosophie de la personne Les positions œcuméniques que nous venons d’esquisser enveloppent une doc
4844 us venons d’esquisser enveloppent une doctrine de l’ homme. Au conflit qui oppose l’unité et la division dans le plan de l’
4845 nt une doctrine de l’homme. Au conflit qui oppose l’ unité et la division dans le plan de l’Église, correspond terme à term
4846 rine de l’homme. Au conflit qui oppose l’unité et la division dans le plan de l’Église, correspond terme à terme le confli
4847 Au conflit qui oppose l’unité et la division dans le plan de l’Église, correspond terme à terme le conflit qui oppose la c
4848 qui oppose l’unité et la division dans le plan de l’ Église, correspond terme à terme le conflit qui oppose la collectivité
4849 ans le plan de l’Église, correspond terme à terme le conflit qui oppose la collectivité et l’individu dans le plan de la s
4850 e, correspond terme à terme le conflit qui oppose la collectivité et l’individu dans le plan de la société. Et de même que
4851 à terme le conflit qui oppose la collectivité et l’ individu dans le plan de la société. Et de même que l’œcuménisme retro
4852 lit qui oppose la collectivité et l’individu dans le plan de la société. Et de même que l’œcuménisme retrouve la position
4853 ose la collectivité et l’individu dans le plan de la société. Et de même que l’œcuménisme retrouve la position spirituelle
4854 dividu dans le plan de la société. Et de même que l’ œcuménisme retrouve la position spirituelle centrale qui fonde l’union
4855 la société. Et de même que l’œcuménisme retrouve la position spirituelle centrale qui fonde l’union dans la diversité, no
4856 trouve la position spirituelle centrale qui fonde l’ union dans la diversité, nous avons à chercher la position philosophiq
4857 ition spirituelle centrale qui fonde l’union dans la diversité, nous avons à chercher la position philosophique centrale q
4858 l’union dans la diversité, nous avons à chercher la position philosophique centrale qui fonde la communion humaine dans l
4859 cher la position philosophique centrale qui fonde la communion humaine dans la liberté. Je l’appelle le personnalisme. Che
4860 ique centrale qui fonde la communion humaine dans la liberté. Je l’appelle le personnalisme. Cherchons à illustrer les not
4861 ui fonde la communion humaine dans la liberté. Je l’ appelle le personnalisme. Cherchons à illustrer les notions d’individu
4862 a communion humaine dans la liberté. Je l’appelle le personnalisme. Cherchons à illustrer les notions d’individu, de colle
4863 l’appelle le personnalisme. Cherchons à illustrer les notions d’individu, de collectivité, et de personne par des exemples
4864 exemples historiques susceptibles de faire image. L’ individu est une invention grecque, et sa naissance signale la naissan
4865 st une invention grecque, et sa naissance signale la naissance même de l’hellénisme. C’est l’homme de la tribu qui se met
4866 que, et sa naissance signale la naissance même de l’ hellénisme. C’est l’homme de la tribu qui se met à réfléchir « pour so
4867 signale la naissance même de l’hellénisme. C’est l’ homme de la tribu qui se met à réfléchir « pour son compte », et qui,
4868 naissance même de l’hellénisme. C’est l’homme de la tribu qui se met à réfléchir « pour son compte », et qui, de ce fait
4869 abord douter, et c’est bientôt se révolter contre les tabous et les conventions sacrées du groupe. Alors le groupe expulse
4870 et c’est bientôt se révolter contre les tabous et les conventions sacrées du groupe. Alors le groupe expulse le « non-confo
4871 abous et les conventions sacrées du groupe. Alors le groupe expulse le « non-conformiste ». Ce sont ces expulsés de divers
4872 ntions sacrées du groupe. Alors le groupe expulse le « non-conformiste ». Ce sont ces expulsés de divers groupes qui fonde
4873 ières thiases grecques, communautés comparables à la cité moderne, et basées non plus sur le sacré, le sang et les morts,
4874 arables à la cité moderne, et basées non plus sur le sacré, le sang et les morts, mais sur l’intérêt commun et les contrat
4875 la cité moderne, et basées non plus sur le sacré, le sang et les morts, mais sur l’intérêt commun et les contrats. Tous le
4876 erne, et basées non plus sur le sacré, le sang et les morts, mais sur l’intérêt commun et les contrats. Tous les membres de
4877 plus sur le sacré, le sang et les morts, mais sur l’ intérêt commun et les contrats. Tous les membres de la tribu devaient
4878 e sang et les morts, mais sur l’intérêt commun et les contrats. Tous les membres de la tribu devaient agir de la même maniè
4879 , mais sur l’intérêt commun et les contrats. Tous les membres de la tribu devaient agir de la même manière, minutieusement
4880 térêt commun et les contrats. Tous les membres de la tribu devaient agir de la même manière, minutieusement prescrite par
4881 ts. Tous les membres de la tribu devaient agir de la même manière, minutieusement prescrite par les usages, et toute dissi
4882 de la même manière, minutieusement prescrite par les usages, et toute dissidence de conduite entraînait l’exécration ou la
4883 sages, et toute dissidence de conduite entraînait l’ exécration ou la mort. Dans la cité, au contraire, chacun cherche à se
4884 dissidence de conduite entraînait l’exécration ou la mort. Dans la cité, au contraire, chacun cherche à se distinguer, à s
4885 conduite entraînait l’exécration ou la mort. Dans la cité, au contraire, chacun cherche à se distinguer, à se singulariser
4886 ence de soi, succèdent au respect des tabous et à la stricte observance du sacré collectif. Mais ce mouvement centrifuge p
4887 ectif. Mais ce mouvement centrifuge par rapport à la communauté d’origine, s’il se confond d’abord avec l’intelligence et
4888 ommunauté d’origine, s’il se confond d’abord avec l’ intelligence et la raison, ne tarde pas à affaiblir le lien social. Il
4889 e, s’il se confond d’abord avec l’intelligence et la raison, ne tarde pas à affaiblir le lien social. Il s’oriente vers l’
4890 telligence et la raison, ne tarde pas à affaiblir le lien social. Il s’oriente vers l’anarchie. À ce moment se crée un sen
4891 pas à affaiblir le lien social. Il s’oriente vers l’ anarchie. À ce moment se crée un sentiment de vide social. C’est une s
4892 ial. C’est une sorte d’angoisse diffuse d’où naît l’ appel à une communauté nouvelle et plus solide, où l’individu isolé re
4893 ppel à une communauté nouvelle et plus solide, où l’ individu isolé retrouve des contraintes qui le rassurent, et où l’État
4894 où l’individu isolé retrouve des contraintes qui le rassurent, et où l’État reprend sa puissance. C’est Rome alors qui no
4895 retrouve des contraintes qui le rassurent, et où l’ État reprend sa puissance. C’est Rome alors qui nous donnera le symbol
4896 d sa puissance. C’est Rome alors qui nous donnera le symbole éternel de la réaction collective. La victoire de Rome sur la
4897 Rome alors qui nous donnera le symbole éternel de la réaction collective. La victoire de Rome sur la Grèce est la première
4898 era le symbole éternel de la réaction collective. La victoire de Rome sur la Grèce est la première victoire fatale de l’ét
4899 e la réaction collective. La victoire de Rome sur la Grèce est la première victoire fatale de l’étatisme sur l’individuali
4900 e sur la Grèce est la première victoire fatale de l’ étatisme sur l’individualisme devenu anarchique. Entre individualisme
4901 est la première victoire fatale de l’étatisme sur l’ individualisme devenu anarchique. Entre individualisme et dictature, l
4902 nu anarchique. Entre individualisme et dictature, l’ opposition n’est pas aussi profonde qu’on l’imagine. Il s’agit plutôt
4903 ture, l’opposition n’est pas aussi profonde qu’on l’ imagine. Il s’agit plutôt d’une succession inévitable. L’individu ne s
4904 ne. Il s’agit plutôt d’une succession inévitable. L’ individu ne s’oppose à l’État qu’à la manière dont le vide s’oppose au
4905 e succession inévitable. L’individu ne s’oppose à l’ État qu’à la manière dont le vide s’oppose au plein : plus le vide est
4906 inévitable. L’individu ne s’oppose à l’État qu’à la manière dont le vide s’oppose au plein : plus le vide est absolu, plu
4907 ndividu ne s’oppose à l’État qu’à la manière dont le vide s’oppose au plein : plus le vide est absolu, plus l’appel est pu
4908 la manière dont le vide s’oppose au plein : plus le vide est absolu, plus l’appel est puissant. À bien des égards même, l
4909 s’oppose au plein : plus le vide est absolu, plus l’ appel est puissant. À bien des égards même, l’étatisme ne fait qu’ache
4910 lus l’appel est puissant. À bien des égards même, l’ étatisme ne fait qu’achever le processus de dissolution commencé par l
4911 en des égards même, l’étatisme ne fait qu’achever le processus de dissolution commencé par l’individualisme : il liquide l
4912 ’achever le processus de dissolution commencé par l’ individualisme : il liquide les groupes existants pour mieux accomplir
4913 lution commencé par l’individualisme : il liquide les groupes existants pour mieux accomplir son unification, sa « mise au
4914 r son unification, sa « mise au pas ». C’est avec la poussière des individus que l’État fait son ciment. Mais cet État cen
4915 pas ». C’est avec la poussière des individus que l’ État fait son ciment. Mais cet État centralisé, cette unité rigide et
4916 té rigide et trop contrôlée écrase bientôt toutes les initiatives individuelles. N’admettant pas de recours au-delà de son
4917 voir, il se prive de toute inspiration créatrice. L’ homme n’est plus qu’une fonction sociale, un « soldat politique », dir
4918 « soldat politique », dirait-on de nos jours. Et l’ esprit périclite, faute de liberté. La Grèce individualiste a triomphé
4919 s jours. Et l’esprit périclite, faute de liberté. La Grèce individualiste a triomphé de la communauté barbare du sang. Mai
4920 de liberté. La Grèce individualiste a triomphé de la communauté barbare du sang. Mais plus tard elle a sombré dans l’anarc
4921 arbare du sang. Mais plus tard elle a sombré dans l’ anarchie. Rome a triomphé de l’anarchie et sombre maintenant sous le p
4922 elle a sombré dans l’anarchie. Rome a triomphé de l’ anarchie et sombre maintenant sous le poids de son appareil collectivi
4923 triomphé de l’anarchie et sombre maintenant sous le poids de son appareil collectiviste. De nouveau se recrée le vide soc
4924 son appareil collectiviste. De nouveau se recrée le vide social. Quelle sera la nouvelle société ? En ce point crucial de
4925 De nouveau se recrée le vide social. Quelle sera la nouvelle société ? En ce point crucial de l’histoire — dans une situa
4926 sera la nouvelle société ? En ce point crucial de l’ histoire — dans une situation qui rappelle étrangement la lutte présen
4927 ire — dans une situation qui rappelle étrangement la lutte présente entre démocratie individualiste et étatisme totalitair
4928 dividualiste et étatisme totalitaire — se produit l’ événement unique de l’Incarnation. Et il apporte à la question des tem
4929 me totalitaire — se produit l’événement unique de l’ Incarnation. Et il apporte à la question des temps la réponse éternell
4930 vénement unique de l’Incarnation. Et il apporte à la question des temps la réponse éternelle de l’Église. Qu’est-ce que l’
4931 ncarnation. Et il apporte à la question des temps la réponse éternelle de l’Église. Qu’est-ce que l’Église primitive, dans
4932 e à la question des temps la réponse éternelle de l’ Église. Qu’est-ce que l’Église primitive, dans la perspective sociolog
4933 s la réponse éternelle de l’Église. Qu’est-ce que l’ Église primitive, dans la perspective sociologique où nous nous plaçon
4934 l’Église. Qu’est-ce que l’Église primitive, dans la perspective sociologique où nous nous plaçons ici ? Une communauté sp
4935 ou « cellules ». Celles-ci ne se fondent pas sur le passé ou sur des origines communes : « Il n’y a plus ni Juif ni Grec.
4936 us ni Juif ni Grec. » Elles ne se fondent pas sur la classe ou la race, ni sur quelque autre réalité collective. Leur lien
4937 Grec. » Elles ne se fondent pas sur la classe ou la race, ni sur quelque autre réalité collective. Leur lien n’est pas te
4938 d’abord, ni leur chef : il s’est assis au ciel à la droite de Dieu. Leur ambition non plus n’est pas terrestre : elles at
4939 on non plus n’est pas terrestre : elles attendent la fin des temps. Et cependant, elles constituent bel et bien les germes
4940 emps. Et cependant, elles constituent bel et bien les germes d’une société véritable. Elles ont leur organisation sociale,
4941 hefs locaux, leurs hiérarchies, leurs assemblées. L’ homme qui se convertit et s’incorpore à l’un de ces groupes y trouve d
4942 upes y trouve d’une part une activité sociale qui le relie à ses « frères » et le sauve de la solitude ; d’autre part, il
4943 activité sociale qui le relie à ses « frères » et le sauve de la solitude ; d’autre part, il revêt une dignité humaine nou
4944 iale qui le relie à ses « frères » et le sauve de la solitude ; d’autre part, il revêt une dignité humaine nouvelle, puisq
4945 ouvelle, puisqu’il a été racheté, et qu’il a reçu la promesse de sa résurrection individuelle. Il est donc à la fois engag
4946 libéré, et ceci en vertu d’un seul et même fait : la vocation qu’il a reçue de l’Éternel. Cet homme d’un type nouveau n’es
4947 seul et même fait : la vocation qu’il a reçue de l’ Éternel. Cet homme d’un type nouveau n’est pas l’individu grec, puisqu
4948 l’Éternel. Cet homme d’un type nouveau n’est pas l’ individu grec, puisqu’il se soucie davantage de servir que de se disti
4949 ervir que de se distinguer. Il n’est pas non plus le simple rouage, la simple fonction dans l’État qu’était le citoyen rom
4950 stinguer. Il n’est pas non plus le simple rouage, la simple fonction dans l’État qu’était le citoyen romain, puisqu’il pos
4951 on plus le simple rouage, la simple fonction dans l’ État qu’était le citoyen romain, puisqu’il possède une dignité indépen
4952 e rouage, la simple fonction dans l’État qu’était le citoyen romain, puisqu’il possède une dignité indépendante de son rôl
4953 dignité indépendante de son rôle social. Comment le baptiser ? Il faut un mot nouveau. Ou plutôt, on va prendre un mot dé
4954 auquel on donnera un sens nouveau. Pour désigner les relations constituant la Trinité, les docteurs grecs avaient adopté l
4955 nouveau. Pour désigner les relations constituant la Trinité, les docteurs grecs avaient adopté le terme latin de persona
4956 ur désigner les relations constituant la Trinité, les docteurs grecs avaient adopté le terme latin de persona (rôle social)
4957 ant la Trinité, les docteurs grecs avaient adopté le terme latin de persona (rôle social). C’est ce même terme qui servira
4958 ira aux premiers philosophes chrétiens à désigner la réalité de l’homme dans un monde christianisé. Car cet homme est, lui
4959 rs philosophes chrétiens à désigner la réalité de l’ homme dans un monde christianisé. Car cet homme est, lui aussi, à la f
4960 aussi, à la fois autonome et en relation. Ainsi, le mot personne avec son sens nouveau, et la réalité sociale qu’il désig
4961 Ainsi, le mot personne avec son sens nouveau, et la réalité sociale qu’il désigne, sont bel et bien des créations chrétie
4962 chrétiennes, ou pour mieux dire, des créations de l’ Église chrétienne. Dans la personne ainsi définie se résout l’éternel
4963 dire, des créations de l’Église chrétienne. Dans la personne ainsi définie se résout l’éternel conflit entre la liberté i
4964 étienne. Dans la personne ainsi définie se résout l’ éternel conflit entre la liberté individuelle et les devoirs vis-à-vis
4965 e ainsi définie se résout l’éternel conflit entre la liberté individuelle et les devoirs vis-à-vis de la collectivité. C’e
4966 ’éternel conflit entre la liberté individuelle et les devoirs vis-à-vis de la collectivité. C’est le même Dieu qui, par la
4967 liberté individuelle et les devoirs vis-à-vis de la collectivité. C’est le même Dieu qui, par la vocation qu’il envoie à
4968 t les devoirs vis-à-vis de la collectivité. C’est le même Dieu qui, par la vocation qu’il envoie à l’homme, distingue cet
4969 s de la collectivité. C’est le même Dieu qui, par la vocation qu’il envoie à l’homme, distingue cet homme de tous les autr
4970 le même Dieu qui, par la vocation qu’il envoie à l’ homme, distingue cet homme de tous les autres et le remet en relations
4971 ’il envoie à l’homme, distingue cet homme de tous les autres et le remet en relations concrètes avec ses semblables. La lib
4972 ’homme, distingue cet homme de tous les autres et le remet en relations concrètes avec ses semblables. La liberté est assu
4973 remet en relations concrètes avec ses semblables. La liberté est assurée par la possibilité constante de recourir directem
4974 s avec ses semblables. La liberté est assurée par la possibilité constante de recourir directement à l’Éternel, au-dessus
4975 a possibilité constante de recourir directement à l’ Éternel, au-dessus de la communauté. Et la communauté est liée par sa
4976 de recourir directement à l’Éternel, au-dessus de la communauté. Et la communauté est liée par sa fidélité à l’Éternel. Ai
4977 ement à l’Éternel, au-dessus de la communauté. Et la communauté est liée par sa fidélité à l’Éternel. Ainsi les droits et
4978 auté. Et la communauté est liée par sa fidélité à l’ Éternel. Ainsi les droits et les devoirs du particulier ont le même fo
4979 nauté est liée par sa fidélité à l’Éternel. Ainsi les droits et les devoirs du particulier ont le même fondement que les dr
4980 par sa fidélité à l’Éternel. Ainsi les droits et les devoirs du particulier ont le même fondement que les droits et les de
4981 insi les droits et les devoirs du particulier ont le même fondement que les droits et les devoirs de l’ensemble. Ils ne so
4982 devoirs du particulier ont le même fondement que les droits et les devoirs de l’ensemble. Ils ne sont plus contradictoires
4983 rticulier ont le même fondement que les droits et les devoirs de l’ensemble. Ils ne sont plus contradictoires. Ce qui libèr
4984 e même fondement que les droits et les devoirs de l’ ensemble. Ils ne sont plus contradictoires. Ce qui libère un homme est
4985 ictoires. Ce qui libère un homme est aussi ce qui le rend responsable vis-à-vis d’autrui. En retour, ce qui unit la commun
4986 nsable vis-à-vis d’autrui. En retour, ce qui unit la communauté est aussi ce qui l’oblige à respecter les vocations indivi
4987 etour, ce qui unit la communauté est aussi ce qui l’ oblige à respecter les vocations individuelles. La liberté du siècle p
4988 communauté est aussi ce qui l’oblige à respecter les vocations individuelles. La liberté du siècle présent se réclame du s
4989 l’oblige à respecter les vocations individuelles. La liberté du siècle présent se réclame du slogan utopique : à chacun sa
4990 ame du slogan utopique : à chacun sa chance. Mais la liberté et l’engagement de la personne chrétienne se définissent du m
4991 utopique : à chacun sa chance. Mais la liberté et l’ engagement de la personne chrétienne se définissent du même coup par l
4992 cun sa chance. Mais la liberté et l’engagement de la personne chrétienne se définissent du même coup par la formule : à ch
4993 rsonne chrétienne se définissent du même coup par la formule : à chacun sa vocation. Nous avons retrouvé, dans cette doctr
4994 tion. Nous avons retrouvé, dans cette doctrine de l’ homme, les mêmes structures que dans la doctrine de l’Église universel
4995 s avons retrouvé, dans cette doctrine de l’homme, les mêmes structures que dans la doctrine de l’Église universelle esquiss
4996 octrine de l’homme, les mêmes structures que dans la doctrine de l’Église universelle esquissée plus haut ; la même positi
4997 mme, les mêmes structures que dans la doctrine de l’ Église universelle esquissée plus haut ; la même position centrale déf
4998 ine de l’Église universelle esquissée plus haut ; la même position centrale définissant à la fois l’union et la diversité,
4999 ; la même position centrale définissant à la fois l’ union et la diversité, l’engagement et la liberté, les droits du tout
5000 osition centrale définissant à la fois l’union et la diversité, l’engagement et la liberté, les droits du tout et les droi
5001 le définissant à la fois l’union et la diversité, l’ engagement et la liberté, les droits du tout et les droits des parties
5002 la fois l’union et la diversité, l’engagement et la liberté, les droits du tout et les droits des parties. De même que la
5003 nion et la diversité, l’engagement et la liberté, les droits du tout et les droits des parties. De même que la théologie de
5004 l’engagement et la liberté, les droits du tout et les droits des parties. De même que la théologie de l’œcuménisme prévient
5005 ts du tout et les droits des parties. De même que la théologie de l’œcuménisme prévient d’une part l’orthodoxie fermée, d’
5006 s droits des parties. De même que la théologie de l’ œcuménisme prévient d’une part l’orthodoxie fermée, d’autre part la di
5007 la théologie de l’œcuménisme prévient d’une part l’ orthodoxie fermée, d’autre part la dissidence obstinée, la philosophie
5008 ient d’une part l’orthodoxie fermée, d’autre part la dissidence obstinée, la philosophie de la personne prévient d’une par
5009 oxie fermée, d’autre part la dissidence obstinée, la philosophie de la personne prévient d’une part le collectivisme oppre
5010 re part la dissidence obstinée, la philosophie de la personne prévient d’une part le collectivisme oppressif, d’autre part
5011 la philosophie de la personne prévient d’une part le collectivisme oppressif, d’autre part l’individualisme anarchisant. M
5012 une part le collectivisme oppressif, d’autre part l’ individualisme anarchisant. Mais ici encore, insistons sur ce point :
5013 hisant. Mais ici encore, insistons sur ce point : la personne n’est pas un moyen-terme entre l’individu trop flottant et l
5014 oint : la personne n’est pas un moyen-terme entre l’ individu trop flottant et le soldat politique trop esclave. Elle est l
5015 un moyen-terme entre l’individu trop flottant et le soldat politique trop esclave. Elle est l’homme intégral, dont les de
5016 ant et le soldat politique trop esclave. Elle est l’ homme intégral, dont les deux autres ne sont que des maladies. Dans le
5017 que trop esclave. Elle est l’homme intégral, dont les deux autres ne sont que des maladies. Dans le plan humain immanent, i
5018 nt les deux autres ne sont que des maladies. Dans le plan humain immanent, il n’y a pas d’équilibre possible entre l’anarc
5019 immanent, il n’y a pas d’équilibre possible entre l’ anarchie et l’unité forcée, l’individu et l’État. Mais dès qu’intervie
5020 ’y a pas d’équilibre possible entre l’anarchie et l’ unité forcée, l’individu et l’État. Mais dès qu’intervient la transcen
5021 ibre possible entre l’anarchie et l’unité forcée, l’ individu et l’État. Mais dès qu’intervient la transcendance, il y a mi
5022 entre l’anarchie et l’unité forcée, l’individu et l’ État. Mais dès qu’intervient la transcendance, il y a mieux qu’un équi
5023 cée, l’individu et l’État. Mais dès qu’intervient la transcendance, il y a mieux qu’un équilibre, il y a un principe vivan
5024 bre, il y a un principe vivant d’union. Là où est l’ Esprit, là est la liberté, mais là aussi est la vraie communion. Il no
5025 incipe vivant d’union. Là où est l’Esprit, là est la liberté, mais là aussi est la vraie communion. Il nous reste à dévelo
5026 st l’Esprit, là est la liberté, mais là aussi est la vraie communion. Il nous reste à développer maintenant les implicatio
5027 communion. Il nous reste à développer maintenant les implications politiques de cette théologie et de cette philosophie.
5028 dit pour qu’il soit désormais facile de voir qu’à l’ attitude œcuménique en religion ne peut correspondre que l’organisatio
5029 e œcuménique en religion ne peut correspondre que l’ organisation fédéraliste en politique. Quant à la philosophie de la pe
5030 l’organisation fédéraliste en politique. Quant à la philosophie de la personne, elle sera normalement celle du bon citoye
5031 déraliste en politique. Quant à la philosophie de la personne, elle sera normalement celle du bon citoyen d’une fédération
5032 ormalement celle du bon citoyen d’une fédération. La devise paradoxale du fédéralisme helvétique : « Un pour tous, tous po
5033 un », est également valable sur ces trois plans. L’ œcuménisme exclut l’orthodoxie fermée, créatrice de schismes, et la di
5034 valable sur ces trois plans. L’œcuménisme exclut l’ orthodoxie fermée, créatrice de schismes, et la dissidence obstinée. L
5035 ut l’orthodoxie fermée, créatrice de schismes, et la dissidence obstinée. Le fédéralisme exclut de même l’impérialisme, gé
5036 créatrice de schismes, et la dissidence obstinée. Le fédéralisme exclut de même l’impérialisme, générateur de guerres, et
5037 issidence obstinée. Le fédéralisme exclut de même l’ impérialisme, générateur de guerres, et le régionalisme borné et égoïs
5038 de même l’impérialisme, générateur de guerres, et le régionalisme borné et égoïste. (Remarquons d’ailleurs que l’impériali
5039 isme borné et égoïste. (Remarquons d’ailleurs que l’ impérialisme n’est que l’individualisme d’un groupe ; et l’individuali
5040 emarquons d’ailleurs que l’impérialisme n’est que l’ individualisme d’un groupe ; et l’individualisme, l’impérialisme d’un
5041 lisme n’est que l’individualisme d’un groupe ; et l’ individualisme, l’impérialisme d’un homme isolé. De même que l’État ce
5042 individualisme d’un groupe ; et l’individualisme, l’ impérialisme d’un homme isolé. De même que l’État cesse d’être un vrai
5043 sme, l’impérialisme d’un homme isolé. De même que l’ État cesse d’être un vrai État dès qu’il se veut souverain absolu, l’h
5044 un vrai État dès qu’il se veut souverain absolu, l’ homme cesse d’être un homme intégral dès qu’il absolutise sa liberté.)
5045 homme intégral dès qu’il absolutise sa liberté.) Le fédéralisme part des groupes locaux (région, commune, entreprises, et
5046 es locaux (région, commune, entreprises, etc.) et l’ œcuménisme reconnaît pareillement leur valeur (églises diverses, paroi
5047 es, paroisses, ordres, etc.). C’est en effet dans le groupe local que la personne peut se réaliser. Car les tâches civique
5048 s, etc.). C’est en effet dans le groupe local que la personne peut se réaliser. Car les tâches civiques y sont à l’échelle
5049 roupe local que la personne peut se réaliser. Car les tâches civiques y sont à l’échelle de l’individu et l’engagement conc
5050 eut se réaliser. Car les tâches civiques y sont à l’ échelle de l’individu et l’engagement concret dans la communauté y dev
5051 er. Car les tâches civiques y sont à l’échelle de l’ individu et l’engagement concret dans la communauté y devient donc pos
5052 ches civiques y sont à l’échelle de l’individu et l’ engagement concret dans la communauté y devient donc possible. Dans la
5053 chelle de l’individu et l’engagement concret dans la communauté y devient donc possible. Dans la petite congrégation, on s
5054 dans la communauté y devient donc possible. Dans la petite congrégation, on se connaît, on sait à quels hommes et à quels
5055 mes et à quels problèmes publics on a affaire. Si l’ on se trouve en opposition avec le groupe, on a la possibilité matérie
5056 n a affaire. Si l’on se trouve en opposition avec le groupe, on a la possibilité matérielle d’y faire entendre sa voix. Si
5057 l’on se trouve en opposition avec le groupe, on a la possibilité matérielle d’y faire entendre sa voix. Si cela ne suffit
5058 Si cela ne suffit pas, on peut changer de groupe. L’ on n’est donc pas isolé, comme l’individu se trouve isolé dans une gra
5059 anger de groupe. L’on n’est donc pas isolé, comme l’ individu se trouve isolé dans une grande ville moderne ou dans un vast
5060 i rigide et uniforme, puisque dans une fédération l’ on peut toujours adhérer à divers groupes, l’un religieux, l’autre soc
5061 ppartenances — qui trouverait son équivalent dans l’ œcuménisme ecclésiastique — est exclue par le régime totalitaire, qui
5062 dans l’œcuménisme ecclésiastique — est exclue par le régime totalitaire, qui prétend faire coïncider les frontières de l’É
5063 e régime totalitaire, qui prétend faire coïncider les frontières de l’État avec celles de toutes les activités sociales, sp
5064 re, qui prétend faire coïncider les frontières de l’ État avec celles de toutes les activités sociales, spirituelles ou pri
5065 er les frontières de l’État avec celles de toutes les activités sociales, spirituelles ou privées — ce qui est la définitio
5066 és sociales, spirituelles ou privées — ce qui est la définition même de l’oppression. Le fédéralisme, comme l’œcuménisme,
5067 les ou privées — ce qui est la définition même de l’ oppression. Le fédéralisme, comme l’œcuménisme, reconnaît que les dive
5068 — ce qui est la définition même de l’oppression. Le fédéralisme, comme l’œcuménisme, reconnaît que les diversités régiona
5069 ition même de l’oppression. Le fédéralisme, comme l’ œcuménisme, reconnaît que les diversités régionales sont la vie même d
5070 Le fédéralisme, comme l’œcuménisme, reconnaît que les diversités régionales sont la vie même de l’Union. Mais par l’organe
5071 sme, reconnaît que les diversités régionales sont la vie même de l’Union. Mais par l’organe central qui lie toutes les rég
5072 que les diversités régionales sont la vie même de l’ Union. Mais par l’organe central qui lie toutes les régions, il ménage
5073 régionales sont la vie même de l’Union. Mais par l’ organe central qui lie toutes les régions, il ménage un recours au cit
5074 l’Union. Mais par l’organe central qui lie toutes les régions, il ménage un recours au citoyen contre les abus de pouvoirs
5075 s régions, il ménage un recours au citoyen contre les abus de pouvoirs locaux. Il cherche la coopération organique de ses m
5076 en contre les abus de pouvoirs locaux. Il cherche la coopération organique de ses membres et non cette caricature de l’ord
5077 ganique de ses membres et non cette caricature de l’ ordre qu’est l’unité dans l’uniformité. Au lieu de pétrifier les front
5078 membres et non cette caricature de l’ordre qu’est l’ unité dans l’uniformité. Au lieu de pétrifier les frontières extérieur
5079 n cette caricature de l’ordre qu’est l’unité dans l’ uniformité. Au lieu de pétrifier les frontières extérieures des groupe
5080 t l’unité dans l’uniformité. Au lieu de pétrifier les frontières extérieures des groupes qui forment la fédération, il cher
5081 es frontières extérieures des groupes qui forment la fédération, il cherche à vivifier leurs foyers. Et de la sorte, à l’é
5082 ration, il cherche à vivifier leurs foyers. Et de la sorte, à l’équilibre méfiant et statique des puissances affrontées, i
5083 herche à vivifier leurs foyers. Et de la sorte, à l’ équilibre méfiant et statique des puissances affrontées, il substitue
5084 statique des puissances affrontées, il substitue l’ émulation vivante des valeurs originales. Spinoza définit la paix comm
5085 n vivante des valeurs originales. Spinoza définit la paix comme « l’harmonie des âmes fortes ». Nous pourrions pareillemen
5086 leurs originales. Spinoza définit la paix comme «  l’ harmonie des âmes fortes ». Nous pourrions pareillement définir l’œcum
5087 mes fortes ». Nous pourrions pareillement définir l’ œcuménisme et le fédéralisme en remplaçant « âmes » par « églises » et
5088 us pourrions pareillement définir l’œcuménisme et le fédéralisme en remplaçant « âmes » par « églises » et par « régions »
5089 er notre tableau en indiquant au moins ceci : que le fédéralisme implique dans l’ordre économique la vitalité des syndicat
5090 au moins ceci : que le fédéralisme implique dans l’ ordre économique la vitalité des syndicats ouvriers et patronaux, et l
5091 e le fédéralisme implique dans l’ordre économique la vitalité des syndicats ouvriers et patronaux, et la substitution au r
5092 vitalité des syndicats ouvriers et patronaux, et la substitution au régime capitaliste (centralisateur et individualiste
5093 ceci nous entraînerait dans un exposé qui déborde le cadre de ce schéma doctrinal. Notre objet était d’établir les relatio
5094 ce schéma doctrinal. Notre objet était d’établir les relations suivantes : l’œcuménisme, le personnalisme et le fédéralism
5095 e objet était d’établir les relations suivantes : l’ œcuménisme, le personnalisme et le fédéralisme sont les aspects divers
5096 d’établir les relations suivantes : l’œcuménisme, le personnalisme et le fédéralisme sont les aspects divers d’une seule e
5097 ons suivantes : l’œcuménisme, le personnalisme et le fédéralisme sont les aspects divers d’une seule et même attitude spir
5098 uménisme, le personnalisme et le fédéralisme sont les aspects divers d’une seule et même attitude spirituelle. Ils s’engend
5099 l’un l’autre et s’appuient mutuellement. Ils ont les mêmes structures et les mêmes ambitions. Ils opposent également à la
5100 ent mutuellement. Ils ont les mêmes structures et les mêmes ambitions. Ils opposent également à la notion d’unité rigide ce
5101 et les mêmes ambitions. Ils opposent également à la notion d’unité rigide celle de communion ; à l’Empire, le Commonwealt
5102 à la notion d’unité rigide celle de communion ; à l’ Empire, le Commonwealth ; à l’ordre unitaire et géométrique la collabo
5103 n d’unité rigide celle de communion ; à l’Empire, le Commonwealth ; à l’ordre unitaire et géométrique la collaboration plu
5104 le de communion ; à l’Empire, le Commonwealth ; à l’ ordre unitaire et géométrique la collaboration pluraliste et organique
5105 Commonwealth ; à l’ordre unitaire et géométrique la collaboration pluraliste et organique ; au couple de frères ennemis q
5106 ganique ; au couple de frères ennemis que forment l’ individu déraciné et la masse totalitaire, le couple de frères amis qu
5107 frères ennemis que forment l’individu déraciné et la masse totalitaire, le couple de frères amis que forment la personne e
5108 ment l’individu déraciné et la masse totalitaire, le couple de frères amis que forment la personne et la communauté fédéra
5109 totalitaire, le couple de frères amis que forment la personne et la communauté fédérale. Vouloir le fédéralisme sans accep
5110 couple de frères amis que forment la personne et la communauté fédérale. Vouloir le fédéralisme sans accepter l’œcuménism
5111 nt la personne et la communauté fédérale. Vouloir le fédéralisme sans accepter l’œcuménisme, ce serait priver l’organisati
5112 té fédérale. Vouloir le fédéralisme sans accepter l’ œcuménisme, ce serait priver l’organisation politique de ses fondement
5113 isme sans accepter l’œcuménisme, ce serait priver l’ organisation politique de ses fondements spirituels. Mais accepter l’œ
5114 tique de ses fondements spirituels. Mais accepter l’ œcuménisme sans vouloir également le fédéralisme, ce serait ne pas acc
5115 Mais accepter l’œcuménisme sans vouloir également le fédéralisme, ce serait ne pas accepter vraiment l’œcuménisme, j’enten
5116 e fédéralisme, ce serait ne pas accepter vraiment l’ œcuménisme, j’entends avec toutes ses conséquences. Car la foi sans le
5117 isme, j’entends avec toutes ses conséquences. Car la foi sans les œuvres n’est pas la foi.   Note. — On s’étonnera peut-ê
5118 nds avec toutes ses conséquences. Car la foi sans les œuvres n’est pas la foi.   Note. — On s’étonnera peut-être de ne pas
5119 onséquences. Car la foi sans les œuvres n’est pas la foi.   Note. — On s’étonnera peut-être de ne pas voir figurer le ter
5120 — On s’étonnera peut-être de ne pas voir figurer le terme de démocratie dans ce qui précède. C’est qu’il recouvre actuell
5121 actuellement de trop graves malentendus et abus. L’ œcuménisme n’a pas à les reprendre à sa charge. Et les peuples europée
5122 raves malentendus et abus. L’œcuménisme n’a pas à les reprendre à sa charge. Et les peuples européens ne sont nullement prê
5123 cuménisme n’a pas à les reprendre à sa charge. Et les peuples européens ne sont nullement prêts à se soulever pour rétablir
5124 soulever pour rétablir ce qu’on nommait chez eux la « démocratie ». Ils attendent un régime qui puisse allier la liberté
5125 atie ». Ils attendent un régime qui puisse allier la liberté à la communauté. Dans le fédéralisme, démocrates et totalitai
5126 ttendent un régime qui puisse allier la liberté à la communauté. Dans le fédéralisme, démocrates et totalitaires de droite
5127 ui puisse allier la liberté à la communauté. Dans le fédéralisme, démocrates et totalitaires de droite et de gauche pourro
5128 alitaires de droite et de gauche pourront trouver la plénitude de leurs idéaux incomplets, séparés, et par là même déformé
5129 ts, séparés, et par là même déformés. À mon sens, le fédéralisme est la seule possibilité pratique de réaliser la vraie dé
5130 là même déformés. À mon sens, le fédéralisme est la seule possibilité pratique de réaliser la vraie démocratie. Mais il a
5131 sme est la seule possibilité pratique de réaliser la vraie démocratie. Mais il a le grand avantage de réaliser en même tem
5132 atique de réaliser la vraie démocratie. Mais il a le grand avantage de réaliser en même temps ce qu’il y a de valable dans
5133 aliser en même temps ce qu’il y a de valable dans l’ appel communautaire que le totalitarisme a diaboliquement utilisé et d
5134 ’il y a de valable dans l’appel communautaire que le totalitarisme a diaboliquement utilisé et dévié. 4. Mission fédéra
5135 nt utilisé et dévié. 4. Mission fédératrice de l’ œcuménisme Et maintenant nous voici dans le drame de l’année 194173
5136 de l’œcuménisme Et maintenant nous voici dans le drame de l’année 194173. Nous constatons que le conflit en cours est
5137 isme Et maintenant nous voici dans le drame de l’ année 194173. Nous constatons que le conflit en cours est insoluble da
5138 s le drame de l’année 194173. Nous constatons que le conflit en cours est insoluble dans son plan. Si le totalitarisme tri
5139 conflit en cours est insoluble dans son plan. Si le totalitarisme triomphe définitivement des démocraties, ce sera la mor
5140 triomphe définitivement des démocraties, ce sera la mort d’une culture et d’une économie, sans doute, mais ce sera surtou
5141 d’une économie, sans doute, mais ce sera surtout la suppression de toute possibilité œcuménique, la subversion des valeur
5142 t la suppression de toute possibilité œcuménique, la subversion des valeurs universelles créées par l’évangélisation de la
5143 la subversion des valeurs universelles créées par l’ évangélisation de la conscience occidentale. D’autre part, si les démo
5144 leurs universelles créées par l’évangélisation de la conscience occidentale. D’autre part, si les démocraties capitalistes
5145 on de la conscience occidentale. D’autre part, si les démocraties capitalistes et individualistes triomphent, aucun problèm
5146 it. Tout le monde sent ou pressent d’ailleurs que les deux termes de cette alternative sont également improbables, et que l
5147 te alternative sont également improbables, et que les destructions en cours et à venir supprimeront pratiquement toutes pos
5148 s de victoire réelle de l’un ou de l’autre parti. L’ examen objectif des forces en présence ne permet d’envisager pour l’Eu
5149 des forces en présence ne permet d’envisager pour l’ Europe et le monde de demain qu’une période de chaos étatisé ; je ne d
5150 n présence ne permet d’envisager pour l’Europe et le monde de demain qu’une période de chaos étatisé ; je ne dis même pas
5151 une tactique nouvelles. Mais où sont-elles ? Qui les prépare ? Le capitalisme et l’individualisme ont reçu en Europe des c
5152 nouvelles. Mais où sont-elles ? Qui les prépare ? Le capitalisme et l’individualisme ont reçu en Europe des coups mortels,
5153 sont-elles ? Qui les prépare ? Le capitalisme et l’ individualisme ont reçu en Europe des coups mortels, dans les deux cam
5154 alisme ont reçu en Europe des coups mortels, dans les deux camps. Le totalitarisme est un état de guerre, qui ne peut subsi
5155 en Europe des coups mortels, dans les deux camps. Le totalitarisme est un état de guerre, qui ne peut subsister normalemen
5156 que et social sans précédent dans notre histoire. La seule espérance et aussi la seule possibilité qui demeure, c’est l’or
5157 dans notre histoire. La seule espérance et aussi la seule possibilité qui demeure, c’est l’organisation fédéraliste du mo
5158 et aussi la seule possibilité qui demeure, c’est l’ organisation fédéraliste du monde. Elle seule apporte du nouveau. Elle
5159 nfuses des peuples et aux nécessités pratiques de la paix. Elle seule s’oppose à la fois au capitalisme individualiste et
5160 ais qui peut aujourd’hui proposer cette réponse ? Le rôle d’Hitler est de détruire. Il détruit les contradictions intoléra
5161 se ? Le rôle d’Hitler est de détruire. Il détruit les contradictions intolérables d’une Europe qui s’obstinait à parler de
5162 liste, et qui refusait de se fédérer. Hitler abat les barrières, le passé. C’est toute sa force, et sa victoire même l’épui
5163 efusait de se fédérer. Hitler abat les barrières, le passé. C’est toute sa force, et sa victoire même l’épuiserait. Il n’y
5164 passé. C’est toute sa force, et sa victoire même l’ épuiserait. Il n’y aurait plus qu’une table rase couverte de ruines pu
5165 qu’une table rase couverte de ruines pulvérisées. Le rôle de Churchill est de faire la guerre. Mais il ne pourra pas la ga
5166 es pulvérisées. Le rôle de Churchill est de faire la guerre. Mais il ne pourra pas la gagner réellement s’il ne propose ri
5167 ill est de faire la guerre. Mais il ne pourra pas la gagner réellement s’il ne propose rien aux peuples de l’Europe. Or il
5168 er réellement s’il ne propose rien aux peuples de l’ Europe. Or il dit qu’il n’en a pas le temps… Quant au rôle de Staline,
5169 x peuples de l’Europe. Or il dit qu’il n’en a pas le temps… Quant au rôle de Staline, il paraît être de profiter de la gue
5170 au rôle de Staline, il paraît être de profiter de la guerre des autres pour consolider l’autarcie russe… Cette carence gén
5171 profiter de la guerre des autres pour consolider l’ autarcie russe… Cette carence générale des chefs, des doctrines et des
5172 s partis est un appel à une autorité nouvelle. Si les Églises n’y répondent pas, personne d’autre, je le crains, ne répondr
5173 s Églises n’y répondent pas, personne d’autre, je le crains, ne répondra. Avant même de se demander si les Églises peuvent
5174 crains, ne répondra. Avant même de se demander si les Églises peuvent répondre, il faut qu’elles comprennent qu’elles le do
5175 t répondre, il faut qu’elles comprennent qu’elles le doivent. Mais les deux termes ne se confondent-ils pas dans la réalit
5176 ut qu’elles comprennent qu’elles le doivent. Mais les deux termes ne se confondent-ils pas dans la réalité de la foi ? Cert
5177 ais les deux termes ne se confondent-ils pas dans la réalité de la foi ? Certes ! Si les Églises sont fidèles à leur chef,
5178 ermes ne se confondent-ils pas dans la réalité de la foi ? Certes ! Si les Églises sont fidèles à leur chef, elles savent
5179 t-ils pas dans la réalité de la foi ? Certes ! Si les Églises sont fidèles à leur chef, elles savent qu’il règne et crée po
5180 savent qu’il règne et crée pour ceux qui croient la possibilité de faire ce qu’il demande. Dans l’état d’impuissance appa
5181 nt la possibilité de faire ce qu’il demande. Dans l’ état d’impuissance apparente où se voient aujourd’hui les Églises, si
5182 d’impuissance apparente où se voient aujourd’hui les Églises, si cette foi seule demeure, elle sera suffisante. Aussi bien
5183 ante. Aussi bien, certaines raisons de croire que l’ Église peut agir, raisons que nous allons énumérer, sont-elles moins d
5184 fier des espérances ou à nourrir des volontés. 1. L’ histoire du monde christianisé nous montre que les structures ecclésia
5185 L’histoire du monde christianisé nous montre que les structures ecclésiastiques ont souvent précédé et prédéterminé les st
5186 clésiastiques ont souvent précédé et prédéterminé les structures politiques d’une nation. J’indiquerai trois groupes d’exem
5187 existe une forme de totalitarisme correspondant à la Russie orthodoxe, une seconde, correspondant à l’Allemagne en majorit
5188 la Russie orthodoxe, une seconde, correspondant à l’ Allemagne en majorité luthérienne, et une troisième correspondant à l’
5189 ité luthérienne, et une troisième correspondant à l’ Italie et à l’Espagne catholiques romaines, — alors qu’il n’en existe
5190 e, et une troisième correspondant à l’Italie et à l’ Espagne catholiques romaines, — alors qu’il n’en existe aucune qui se
5191 éléments calvinistes, même laïcisés, comme ce fut le cas de la France sous la Troisième République ? Comment expliquer ce
5192 alvinistes, même laïcisés, comme ce fut le cas de la France sous la Troisième République ? Comment expliquer ce fait ? À d
5193 e étude nuancée, — dont je ne puis donner ici que le thème — je dirai ceci : en Russie, en Allemagne, en Italie et en Espa
5194 en Russie, en Allemagne, en Italie et en Espagne, la distinction entre l’Église et l’État n’avait jamais été établie d’une
5195 ne, en Italie et en Espagne, la distinction entre l’ Église et l’État n’avait jamais été établie d’une manière satisfaisant
5196 e et en Espagne, la distinction entre l’Église et l’ État n’avait jamais été établie d’une manière satisfaisante. Il en rés
5197 ’une manière satisfaisante. Il en résultait, dans le peuple, le sentiment que l’Église et l’État formaient un tout, et con
5198 e satisfaisante. Il en résultait, dans le peuple, le sentiment que l’Église et l’État formaient un tout, et constituaient
5199 Il en résultait, dans le peuple, le sentiment que l’ Église et l’État formaient un tout, et constituaient à eux deux le Pou
5200 ait, dans le peuple, le sentiment que l’Église et l’ État formaient un tout, et constituaient à eux deux le Pouvoir. Renver
5201 at formaient un tout, et constituaient à eux deux le Pouvoir. Renverser l’un, c’était donc fatalement s’attaquer à l’autre
5202 à l’autre. Et comme une révolution copie toujours la structure du pouvoir qu’elle renverse, un Staline, un Hitler et, dans
5203 e moindre, un Mussolini, se virent contraints par le sentiment général de reprendre à leur compte le césaropapisme ou la t
5204 r le sentiment général de reprendre à leur compte le césaropapisme ou la théocratie dont ils triomphaient : ils réclamèren
5205 al de reprendre à leur compte le césaropapisme ou la théocratie dont ils triomphaient : ils réclamèrent à la fois le pouvo
5206 dont ils triomphaient : ils réclamèrent à la fois le pouvoir temporel et l’autorité spirituelle, et devinrent donc totalit
5207 ils réclamèrent à la fois le pouvoir temporel et l’ autorité spirituelle, et devinrent donc totalitaires. Dans les pays ca
5208 spirituelle, et devinrent donc totalitaires. Dans les pays calvinistes, au contraire, la séparation de l’Église et de l’Éta
5209 itaires. Dans les pays calvinistes, au contraire, la séparation de l’Église et de l’État a toujours été réelle — même lors
5210 pays calvinistes, au contraire, la séparation de l’ Église et de l’État a toujours été réelle — même lorsqu’elle n’était p
5211 es, au contraire, la séparation de l’Église et de l’ État a toujours été réelle — même lorsqu’elle n’était pas strictement
5212 e lorsqu’elle n’était pas strictement établie par la loi. De même les devoirs de la vocation personnelle ont toujours été
5213 était pas strictement établie par la loi. De même les devoirs de la vocation personnelle ont toujours été mis au-dessus des
5214 tement établie par la loi. De même les devoirs de la vocation personnelle ont toujours été mis au-dessus des devoirs enver
5215 ont toujours été mis au-dessus des devoirs envers le Pouvoir politique. Lors donc que la foi s’est affaiblie dans ces pays
5216 evoirs envers le Pouvoir politique. Lors donc que la foi s’est affaiblie dans ces pays, cette carence ne s’y est pas tradu
5217 s pays, cette carence ne s’y est pas traduite par l’ éclosion d’une anti-religion totalitaire, mais par un phénomène contra
5218 ire de dispersion individualiste. Autre exemple : l’ Angleterre et les pays scandinaves, au xvie siècle, ont accompli leur
5219 n individualiste. Autre exemple : l’Angleterre et les pays scandinaves, au xvie siècle, ont accompli leur Réforme au sein
5220 vie siècle, ont accompli leur Réforme au sein de l’ Église traditionnelle, sans rupture violente (surtout en Suède). Un co
5221 au, calviniste ou luthérien, s’est introduit dans les cadres et les rites anciens, jugés utilisables. Or, nous voyons ce pr
5222 ou luthérien, s’est introduit dans les cadres et les rites anciens, jugés utilisables. Or, nous voyons ce processus ecclés
5223 nos jours dans ces mêmes pays, cette fois-ci dans l’ ordre politique et social. Les cadres traditionnels subsistent — royau
5224 , cette fois-ci dans l’ordre politique et social. Les cadres traditionnels subsistent — royauté, hiérarchies sociales — mai
5225 usé à établir une uniformité de gouvernement pour les diverses Églises qui se réclamaient de sa réforme. L’Una Sancta nous
5226 iverses Églises qui se réclamaient de sa réforme. L’ Una Sancta nous apparaît ici-bas, selon ses propres termes, dans la di
5227 apparaît ici-bas, selon ses propres termes, dans la diversité « des Églises et des personnes particulières ». Elle doit d
5228 dans un fédéralisme plus ou moins accentué selon les nations : Confédération helvétique, Provinces-Unies des Pays-Bas, Com
5229 Commonwealth britannique, États-Unis d’Amérique. ( La forme de « l’individualisme par groupes » dans ce dernier pays, étant
5230 ritannique, États-Unis d’Amérique. (La forme de «  l’ individualisme par groupes » dans ce dernier pays, étant prédéterminée
5231 s » dans ce dernier pays, étant prédéterminée par le fait — d’ordre ecclésiastique — qu’il fut fondé par des seceders.) Et
5232 siastique — qu’il fut fondé par des seceders.) Et l’ on sait que les réformés de France, au xvie siècle, préconisèrent une
5233 ’il fut fondé par des seceders.) Et l’on sait que les réformés de France, au xvie siècle, préconisèrent une organisation f
5234 nuancer et de multiplier de tels exemples. Je ne les indique ici que pour montrer : 1° que la connaissance intime des proc
5235 . Je ne les indique ici que pour montrer : 1° que la connaissance intime des processus religieux dans un pays donné fourni
5236 tiques qui s’y manifesteront tôt ou tard ; 2° que l’ action, que le mouvement œcuménique peut et doit exercer sur ces proce
5237 manifesteront tôt ou tard ; 2° que l’action, que le mouvement œcuménique peut et doit exercer sur ces processus religieux
5238 it exercer sur ces processus religieux, préparera le terrain pour une action politique réaliste, c’est-à-dire tenant compt
5239 ées empiriques et des diversités spirituelles sur la connaissance desquelles se fonde nécessairement tout effort fédératif
5240 nécessairement tout effort fédératif sérieux. 2. La théologie de l’œcuménisme, et la philosophie de la personne qu’elle i
5241 tout effort fédératif sérieux. 2. La théologie de l’ œcuménisme, et la philosophie de la personne qu’elle implique, sont le
5242 atif sérieux. 2. La théologie de l’œcuménisme, et la philosophie de la personne qu’elle implique, sont les seules bases ac
5243 a théologie de l’œcuménisme, et la philosophie de la personne qu’elle implique, sont les seules bases actuellement conceva
5244 philosophie de la personne qu’elle implique, sont les seules bases actuellement concevables pour un ordre nouveau du monde.
5245 ment concevables pour un ordre nouveau du monde. ( La « religion de l’homme » que certains nous proposent est une contradic
5246 pour un ordre nouveau du monde. (La « religion de l’ homme » que certains nous proposent est une contradiction dans les ter
5247 ertains nous proposent est une contradiction dans les termes, à moins qu’elle ne soit la formule de la religion totalitaire
5248 adiction dans les termes, à moins qu’elle ne soit la formule de la religion totalitaire, sans transcendance, que préciséme
5249 les termes, à moins qu’elle ne soit la formule de la religion totalitaire, sans transcendance, que précisément l’on se pro
5250 totalitaire, sans transcendance, que précisément l’ on se propose de combattre !) D’autre part, la théologie de l’œcuménis
5251 ent l’on se propose de combattre !) D’autre part, la théologie de l’œcuménisme et la philosophie de la personne sont les s
5252 ose de combattre !) D’autre part, la théologie de l’ œcuménisme et la philosophie de la personne sont les seules bases actu
5253  !) D’autre part, la théologie de l’œcuménisme et la philosophie de la personne sont les seules bases actuellement existan
5254 la théologie de l’œcuménisme et la philosophie de la personne sont les seules bases actuellement existantes, et sur lesque
5255 ’œcuménisme et la philosophie de la personne sont les seules bases actuellement existantes, et sur lesquelles on puisse con
5256 lesquelles on puisse construire dès maintenant. ( La « religion de l’homme », ou du surhomme, est encore à créer, et le te
5257 isse construire dès maintenant. (La « religion de l’ homme », ou du surhomme, est encore à créer, et le temps presse !) Cha
5258 l’homme », ou du surhomme, est encore à créer, et le temps presse !) Chargées d’éléments traditionnels, condensant tout ce
5259 condensant tout ce que nous avons d’expérience de la paix, elles convoient et contiennent en même temps un indiscutable dy
5260 mps un indiscutable dynamisme révolutionnaire. 3. L’ organisation du Conseil œcuménique se trouve être de fait la seule Int
5261 tion du Conseil œcuménique se trouve être de fait la seule Internationale en formation. On sait assez que les Internationa
5262 le Internationale en formation. On sait assez que les Internationales idéologiques et politiques se sont désintégrées au co
5263 ésintégrées au cours des deux dernières décades. ( Les partis socialistes subsistant dans les pays où les Soviets ne règnent
5264 décades. (Les partis socialistes subsistant dans les pays où les Soviets ne règnent pas, sont en voie de divergence et non
5265 es partis socialistes subsistant dans les pays où les Soviets ne règnent pas, sont en voie de divergence et non de converge
5266 e convergence, sur le plan international. On a vu les socialistes anglais collaborer avec les conservateurs anglais, non pa
5267 . On a vu les socialistes anglais collaborer avec les conservateurs anglais, non pas avec les syndicalistes russes, ni même
5268 orer avec les conservateurs anglais, non pas avec les syndicalistes russes, ni même américains, pour ne donner qu’un exempl
5269 américains, pour ne donner qu’un exemple.) À part la Croix-Rouge, dont la tâche est strictement limitée, rien ne subsiste
5270 onner qu’un exemple.) À part la Croix-Rouge, dont la tâche est strictement limitée, rien ne subsiste en dehors de l’œcumén
5271 trictement limitée, rien ne subsiste en dehors de l’ œcuménisme, qui permette de mettre en relations des groupes nationaux
5272 onaux non étatiques. Ce fait simple institue pour le mouvement œcuménique une possibilité historique sans précédent, une l
5273 urde responsabilité humaine, et, n’hésitons pas à le dire, une vocation. 4. La renaissance liturgique qui va de pair, dans
5274 e, et, n’hésitons pas à le dire, une vocation. 4. La renaissance liturgique qui va de pair, dans toutes les Églises, avec
5275 enaissance liturgique qui va de pair, dans toutes les Églises, avec l’effort œcuménique, est en train de recréer un langage
5276 que qui va de pair, dans toutes les Églises, avec l’ effort œcuménique, est en train de recréer un langage commun, un ensem
5277 dessus des langages répond exactement aux besoins les plus légitimes de notre temps. Il nous rend les vraies formules de la
5278 s les plus légitimes de notre temps. Il nous rend les vraies formules de la communauté vivante, celle qui rassemble les per
5279 notre temps. Il nous rend les vraies formules de la communauté vivante, celle qui rassemble les personnes, et non pas cel
5280 les de la communauté vivante, celle qui rassemble les personnes, et non pas celle qui fond, en une masse informe et grossiè
5281 , en une masse informe et grossièrement encadrée, les individus privés de leur conscience normale. Du point de vue sociolog
5282 conscience normale. Du point de vue sociologique, la renaissance liturgique, favorisée par le mouvement œcuménique, marque
5283 logique, la renaissance liturgique, favorisée par le mouvement œcuménique, marque l’avènement d’une attitude personnaliste
5284 ue, favorisée par le mouvement œcuménique, marque l’ avènement d’une attitude personnaliste, au-delà de l’antinomie individ
5285 vènement d’une attitude personnaliste, au-delà de l’ antinomie individu isolé-masse militarisée. 5. La théologie de l’œcumé
5286 l’antinomie individu isolé-masse militarisée. 5. La théologie de l’œcuménisme, la philosophie de la personne et la politi
5287 ividu isolé-masse militarisée. 5. La théologie de l’ œcuménisme, la philosophie de la personne et la politique du fédéralis
5288 sse militarisée. 5. La théologie de l’œcuménisme, la philosophie de la personne et la politique du fédéralisme sont seules
5289 . La théologie de l’œcuménisme, la philosophie de la personne et la politique du fédéralisme sont seules en mesure, aujour
5290 de l’œcuménisme, la philosophie de la personne et la politique du fédéralisme sont seules en mesure, aujourd’hui, de synth
5291 ont seules en mesure, aujourd’hui, de synthétiser les vérités disjointes et tournées en erreurs, qui subsistent dans les dé
5292 intes et tournées en erreurs, qui subsistent dans les démocraties et dans les mouvements totalitaires. Ceci résulte, théori
5293 eurs, qui subsistent dans les démocraties et dans les mouvements totalitaires. Ceci résulte, théoriquement, de ce que nous
5294 t, de ce que nous avons exposé aux chapitres 1-3. Le mouvement œcuménique est donc seul en mesure de préparer la réconcili
5295 nt œcuménique est donc seul en mesure de préparer la réconciliation des adversaires actuels. Il ne se fonde pas sur un com
5296 dépasse ces erreurs en même temps qu’elle ré-axe les vérités égarées dans les deux camps. (N’oublions pas que l’on combat,
5297 ême temps qu’elle ré-axe les vérités égarées dans les deux camps. (N’oublions pas que l’on combat, de part et d’autre, sans
5298 égarées dans les deux camps. (N’oublions pas que l’ on combat, de part et d’autre, sans grand espoir mais avec une pathéti
5299 and espoir mais avec une pathétique sincérité.) ⁂ Le tableau que nous venons d’esquisser est ambitieux. Il veut l’être, pa
5300 ue nous venons d’esquisser est ambitieux. Il veut l’ être, parce qu’il doit l’être. L’action du chrétien n’est jamais parti
5301 r est ambitieux. Il veut l’être, parce qu’il doit l’ être. L’action du chrétien n’est jamais partie de la prudente considér
5302 bitieux. Il veut l’être, parce qu’il doit l’être. L’ action du chrétien n’est jamais partie de la prudente considération de
5303 être. L’action du chrétien n’est jamais partie de la prudente considération des forces dont il croyait pouvoir disposer, m
5304 arce que je me tenais immobile, dans ma prudence. L’ action risquée m’apporte les forces dont je manquais. De toutes parts,
5305 ile, dans ma prudence. L’action risquée m’apporte les forces dont je manquais. De toutes parts, un appel est ressenti : je
5306 uais. De toutes parts, un appel est ressenti : je le nommerai la nostalgie fédéraliste. Des auteurs isolés l’ont fait ente
5307 tes parts, un appel est ressenti : je le nommerai la nostalgie fédéraliste. Des auteurs isolés l’ont fait entendre. Des gr
5308 erai la nostalgie fédéraliste. Des auteurs isolés l’ ont fait entendre. Des groupes d’intellectuels ont tenté de formuler c
5309 tenté de formuler certaines réponses partielles. Le sentiment obscur des peuples n’attend que des réponses plus claires e
5310 ns théologie. Et point de théologie efficace sans le soutien d’une catholicité réelle, d’une communauté humaine fondée dan
5311 cité réelle, d’une communauté humaine fondée dans la communion des saints. Cette communauté ne se révélera pas dans des co
5312 ans une action risquée. De même que nous avons vu les Églises nées des missions en terre païenne se placer à l’avant-garde
5313 es nées des missions en terre païenne se placer à l’ avant-garde du mouvement vers l’union, nous ne verrons l’œcuménisme se
5314 ïenne se placer à l’avant-garde du mouvement vers l’ union, nous ne verrons l’œcuménisme se réaliser avec puissance que dan
5315 -garde du mouvement vers l’union, nous ne verrons l’ œcuménisme se réaliser avec puissance que dans l’épreuve missionnaire
5316 l’œcuménisme se réaliser avec puissance que dans l’ épreuve missionnaire universelle, qu’il doit affronter maintenant.
25 1977, Foi et Vie, articles (1928–1977). Pédagogie des catastrophes (avril 1977)
5317 re — c’est un résultat du Progrès — cependant que l’ on meurt chez nous de manger trop. Cette fois-ci, notre faute est imme
5318 le totalement étranger à toutes leurs traditions, le modèle de l’État-nation napoléonien — et que ce soit en version capit
5319 étranger à toutes leurs traditions, le modèle de l’ État-nation napoléonien — et que ce soit en version capitaliste ou com
5320 ence. Ils se trompent d’Europe, quand ils veulent l’ imiter, surtout pour mieux s’en libérer. Ils choisissent celle qui les
5321 our mieux s’en libérer. Ils choisissent celle qui les a dominés, mais c’est choisir aussi celle qui les a perdus ! Je leur
5322 les a dominés, mais c’est choisir aussi celle qui les a perdus ! Je leur propose l’Europe des régions, comme offrant la for
5323 ir aussi celle qui les a perdus ! Je leur propose l’ Europe des régions, comme offrant la formule la moins incompatible ave
5324 leur propose l’Europe des régions, comme offrant la formule la moins incompatible avec leurs différences libérées, leur i
5325 se l’Europe des régions, comme offrant la formule la moins incompatible avec leurs différences libérées, leur identité ret
5326 rs différences libérées, leur identité retrouvée. Le seul moyen de les inciter à éviter nos maux, au lieu de les revendiqu
5327 bérées, leur identité retrouvée. Le seul moyen de les inciter à éviter nos maux, au lieu de les revendiquer, sera l’exemple
5328 oyen de les inciter à éviter nos maux, au lieu de les revendiquer, sera l’exemple vécu et réussi d’un dépassement de nos st
5329 éviter nos maux, au lieu de les revendiquer, sera l’ exemple vécu et réussi d’un dépassement de nos stato-nationalismes par
5330 i d’un dépassement de nos stato-nationalismes par la fédération continentale ; d’un dépassement de la croissance à tout pr
5331 la fédération continentale ; d’un dépassement de la croissance à tout prix des formules d’équilibre humain qui prennent e
5332 ormules d’équilibre humain qui prennent en compte le bonheur, ou simplement l’aisance à vivre, plutôt que le gonflement ar
5333 qui prennent en compte le bonheur, ou simplement l’ aisance à vivre, plutôt que le gonflement artificiel du PNB et les sto
5334 heur, ou simplement l’aisance à vivre, plutôt que le gonflement artificiel du PNB et les stocks de bombes calculés en « éq
5335 re, plutôt que le gonflement artificiel du PNB et les stocks de bombes calculés en « équivalents TNT ». Condamner l’Europe
5336 bombes calculés en « équivalents TNT ». Condamner l’ Europe et ne rien faire pour sa fédération, c’est priver le tiers-mond
5337 et ne rien faire pour sa fédération, c’est priver le tiers-monde des seuls moyens de s’en tirer sans catastrophes. Car s’i
5338 en tirer sans catastrophes. Car s’il est vrai que l’ Europe est responsable de la plupart des maux qui accablent le tiers-m
5339 responsable de la plupart des maux qui accablent le tiers-monde, et d’abord de son explosion démographique, d’où famine,
5340 ussi de nos industries, il est non moins vrai que l’ Europe seule peut produire les anticorps des toxines qu’elle a répandu
5341 t non moins vrai que l’Europe seule peut produire les anticorps des toxines qu’elle a répandues, et peut élaborer un modèle
5342 laborer un modèle politique qui soit tentant pour le tiers-monde. Quant à savoir si le tiers-monde sera tenté, et tirera
5343 t tentant pour le tiers-monde. Quant à savoir si le tiers-monde sera tenté, et tirera de sa libération les conclusions qu
5344 iers-monde sera tenté, et tirera de sa libération les conclusions que nous aurions dû tirer, pour notre part, de l’échec du
5345 ns que nous aurions dû tirer, pour notre part, de l’ échec du colonialisme, je suis sceptique. Il se peut que le tiers-mond
5346 u colonialisme, je suis sceptique. Il se peut que le tiers-monde ne désire imiter qu’un Occident dominateur et sans scrupu
5347 ais ce qui est sûr, c’est qu’en refusant de faire les régions et de se « faire » du même mouvement, l’Europe perdrait ses d
5348 les régions et de se « faire » du même mouvement, l’ Europe perdrait ses dernières chances de paix, d’autonomie, et de surv
5349 té, de son génie.   — Comment alors, évaluez-vous les chances de votre projet ? Quelles forces peut-il mobiliser ? Qui est
5350 iser ? Qui est pour ? Qui sera contre ? Et qui va le prendre en charge ? — Je ne serais pas tenu de répondre à ces questio
5351 m’étant donné pour tâche de faire voir et sentir la nécessité des régions, en tant qu’elle me paraît lisiblement inscrite
5352 tant qu’elle me paraît lisiblement inscrite dans la problématique de notre temps. Et voilà bien pourquoi plusieurs hommes
5353 ’Ouest, se voient amenés aux mêmes conclusions et le confessent… dans une conversation ou un colloque privé. Pourtant, ils
5354 intenir au pouvoir. Ils voudraient bien agir dans le sens de mon plan, mais s’ils en montraient l’intention, ils perdraien
5355 ans le sens de mon plan, mais s’ils en montraient l’ intention, ils perdraient aussitôt, et à coup sûr, le pouvoir de le fa
5356 ntention, ils perdraient aussitôt, et à coup sûr, le pouvoir de le faire peut-être un jour… Je n’en vois pas un seul qui a
5357 perdraient aussitôt, et à coup sûr, le pouvoir de le faire peut-être un jour… Je n’en vois pas un seul qui ait risqué l’ex
5358 un jour… Je n’en vois pas un seul qui ait risqué l’ expérience, dont rien ne prouve qu’elle n’eût pas réussi. Mais je ne v
5359 ant que représentant d’une nation, d’un parti, de la gauche ou de la droite, ou même de la Jeunesse. Les hommes d’État ne
5360 tant d’une nation, d’un parti, de la gauche ou de la droite, ou même de la Jeunesse. Les hommes d’État ne feront rien, pou
5361 n parti, de la gauche ou de la droite, ou même de la Jeunesse. Les hommes d’État ne feront rien, pour la raison que je vie
5362 a gauche ou de la droite, ou même de la Jeunesse. Les hommes d’État ne feront rien, pour la raison que je viens de dire, et
5363 Jeunesse. Les hommes d’État ne feront rien, pour la raison que je viens de dire, et les politiciens moins encore, pour la
5364 ont rien, pour la raison que je viens de dire, et les politiciens moins encore, pour la raison que les régions n’existent p
5365 ns de dire, et les politiciens moins encore, pour la raison que les régions n’existent pas, ou seulement à l’état de néces
5366 les politiciens moins encore, pour la raison que les régions n’existent pas, ou seulement à l’état de nécessités vitales e
5367 on que les régions n’existent pas, ou seulement à l’ état de nécessités vitales et ça ne vote pas. Qu’ont fait tous nos gou
5368 . Qu’ont fait tous nos gouvernements, avertis par le club de Rome ? Et qu’ont fait les partis politiques ? Ils sont encore
5369 nts, avertis par le club de Rome ? Et qu’ont fait les partis politiques ? Ils sont encore « nationaux » avant tout, donc pa
5370 teuils, de manipuler ses commandes, et non pas de le modifier radicalement, encore moins de créer un tout autre pouvoir. M
5371 e créer un tout autre pouvoir. Même jeu donc pour la droite et la gauche, selon qu’elles ont le pouvoir ou seulement l’amb
5372 ut autre pouvoir. Même jeu donc pour la droite et la gauche, selon qu’elles ont le pouvoir ou seulement l’ambitionnent : s
5373 c pour la droite et la gauche, selon qu’elles ont le pouvoir ou seulement l’ambitionnent : sa structure leur dicte ses loi
5374 auche, selon qu’elles ont le pouvoir ou seulement l’ ambitionnent : sa structure leur dicte ses lois. Quant au « grand publ
5375 leur dicte ses lois. Quant au « grand public » de la droite et aux « masses » de la gauche, catégories de naguère aujourd’
5376  grand public » de la droite et aux « masses » de la gauche, catégories de naguère aujourd’hui confondues dans l’ensemble
5377 catégories de naguère aujourd’hui confondues dans l’ ensemble passif des téléspectateurs, on n’y voit pas mieux les régions
5378 passif des téléspectateurs, on n’y voit pas mieux les régions qu’on n’y a su voir venir les guerres mondiales, la théorie d
5379 t pas mieux les régions qu’on n’y a su voir venir les guerres mondiales, la théorie de la relativité, le stalinisme, la déc
5380 qu’on n’y a su voir venir les guerres mondiales, la théorie de la relativité, le stalinisme, la décevante marche sur la L
5381 u voir venir les guerres mondiales, la théorie de la relativité, le stalinisme, la décevante marche sur la Lune, ni même l
5382 s guerres mondiales, la théorie de la relativité, le stalinisme, la décevante marche sur la Lune, ni même la crise de l’én
5383 ales, la théorie de la relativité, le stalinisme, la décevante marche sur la Lune, ni même la crise de l’énergie. Tout ou
5384 elativité, le stalinisme, la décevante marche sur la Lune, ni même la crise de l’énergie. Tout ou presque semble indiquer
5385 linisme, la décevante marche sur la Lune, ni même la crise de l’énergie. Tout ou presque semble indiquer à l’observateur o
5386 décevante marche sur la Lune, ni même la crise de l’ énergie. Tout ou presque semble indiquer à l’observateur objectif que
5387 e de l’énergie. Tout ou presque semble indiquer à l’ observateur objectif que rien ne se fera, ni ne convaincra, ni ne s’im
5388 imposera au xxe siècle, en temps utile.   — Mais la Jeunesse ? — Pour autant qu’elle n’est pas un mythe journalistique, j
5389 ant qu’elle n’est pas un mythe journalistique, je la vois partagée dans sa majorité entre deux attitudes : — opportunisme
5390 t souci fortement anticipé de sécurité (s’assurer la retraite en même temps que le job). On ne s’occupe ni de l’Europe, ni
5391 sécurité (s’assurer la retraite en même temps que le job). On ne s’occupe ni de l’Europe, ni encore de régions, et encore
5392 e en même temps que le job). On ne s’occupe ni de l’ Europe, ni encore de régions, et encore moins de révolution. — Refus d
5393 « révolutionnaire ». On ne s’occupe pas encore de l’ Europe, ni de régions, ni de la création d’un pouvoir neuf, mais très
5394 cupe pas encore de l’Europe, ni de régions, ni de la création d’un pouvoir neuf, mais très souvent, presque toujours de « 
5395 — Si je comprends bien, vous n’avez avec vous ni les gouvernements ni les partis, ni la grande industrie ni le prolétariat
5396 en, vous n’avez avec vous ni les gouvernements ni les partis, ni la grande industrie ni le prolétariat, ni les masses ni mê
5397 avec vous ni les gouvernements ni les partis, ni la grande industrie ni le prolétariat, ni les masses ni même les élites
5398 rnements ni les partis, ni la grande industrie ni le prolétariat, ni les masses ni même les élites à la mode… Qu’avez-vous
5399 tis, ni la grande industrie ni le prolétariat, ni les masses ni même les élites à la mode… Qu’avez-vous donc ? — Le sens d’
5400 ndustrie ni le prolétariat, ni les masses ni même les élites à la mode… Qu’avez-vous donc ? — Le sens d’un péril imminent e
5401 e prolétariat, ni les masses ni même les élites à la mode… Qu’avez-vous donc ? — Le sens d’un péril imminent et la conscie
5402 même les élites à la mode… Qu’avez-vous donc ? — Le sens d’un péril imminent et la conscience de vivre un long cauchemar
5403 avez-vous donc ? — Le sens d’un péril imminent et la conscience de vivre un long cauchemar où tout est faux, impossible et
5404 cauchemar où tout est faux, impossible et réel ; le refus de croire que l’état des forces cataloguées, tel que vous venez
5405 faux, impossible et réel ; le refus de croire que l’ état des forces cataloguées, tel que vous venez de le caractériser trè
5406 tat des forces cataloguées, tel que vous venez de le caractériser très justement, ne puisse changer à bref délai ; et la v
5407 ès justement, ne puisse changer à bref délai ; et la vision d’un avenir vivant, qui peut faire se lever d’autres forces. R
5408 civilisation quelconque ne se trouve remplie par la nôtre : ni le consensus des meilleurs, ni celui du grand nombre ; ni
5409 quelconque ne se trouve remplie par la nôtre : ni le consensus des meilleurs, ni celui du grand nombre ; ni l’amour pieux
5410 nsus des meilleurs, ni celui du grand nombre ; ni l’ amour pieux ou gouailleur du peuple, ni le dévouement rituel d’une ari
5411 re ; ni l’amour pieux ou gouailleur du peuple, ni le dévouement rituel d’une aristocratie qui sait ce qu’elle se doit. Plu
5412 éés et entretenus. Absurde, impossible et réelle, la société stato-nationaliste a pour seule vertu d’être là. Écoutons Bau
5413 our seule vertu d’être là. Écoutons Baudelaire : Le monde va finir. La seule raison pour laquelle il pourrait durer, c’es
5414 tre là. Écoutons Baudelaire : Le monde va finir. La seule raison pour laquelle il pourrait durer, c’est qu’il existe. Que
5415 st faible, comparée à toutes celles qui annoncent le contraire, particulièrement à celle-ci : qu’est-ce que le monde a dés
5416 aire, particulièrement à celle-ci : qu’est-ce que le monde a désormais à faire sous le ciel ? Dans les partis, tout peut
5417 : qu’est-ce que le monde a désormais à faire sous le ciel ? Dans les partis, tout peut changer. Certains, disait Emmanuel
5418 le monde a désormais à faire sous le ciel ? Dans les partis, tout peut changer. Certains, disait Emmanuel Berl « peuvent e
5419 n toutes classes sociales et toutes classes d’âge la mobilisation de plus en plus fréquente d’activistes nombreux et motiv
5420 e d’activistes nombreux et motivés luttant contre la pollution sous toutes ses formes, des emballages plastiques aux déche
5421 hets plutoniens. À partir de là, tout s’enchaîne. L’ analyse des causes de la pollution et du système de ces causes conduit
5422 r de là, tout s’enchaîne. L’analyse des causes de la pollution et du système de ces causes conduit, au-delà des déductions
5423 uses conduit, au-delà des déductions critiques, à l’ escalade lente et sûre des innovations attendues et des rénovations so
5424 ces pages, et qui vont des petites communautés à la fédération du continent, première base d’un ordre mondial. Déjà, lors
5425 al. Déjà, lors d’élections locales ou nationales, les candidats bénéficiant de l’appui des mouvements « écologiques » ont b
5426 cales ou nationales, les candidats bénéficiant de l’ appui des mouvements « écologiques » ont battu les chevaux de retour d
5427 l’appui des mouvements « écologiques » ont battu les chevaux de retour des partis grâce aux quelques centaines de voix qui
5428 âce aux quelques centaines de voix qui font toute la différence. Déjà, un régime scandinave vient de se voir renversé aprè
5429 confondre progrès social et centrales nucléaires. La vertu des gouvernements, même s’ils sont au service des marchands d’a
5430 favorables ? — Des milliers de mouvements sont à l’ œuvre. Au premier rang, ceux des écologistes. On leur dispute ce nom,
5431 écologistes. On leur dispute ce nom, ils assurent la fonction. Et bien plus, par leurs luttes contre la pollution et les c
5432 a fonction. Et bien plus, par leurs luttes contre la pollution et les centrales nucléaires, ils ont fourni à la révolution
5433 ien plus, par leurs luttes contre la pollution et les centrales nucléaires, ils ont fourni à la révolution régionaliste le
5434 ion et les centrales nucléaires, ils ont fourni à la révolution régionaliste le levier politique qui avait fait défaut aux
5435 ires, ils ont fourni à la révolution régionaliste le levier politique qui avait fait défaut aux mouvements personnalistes
5436 uis aux fédéralistes européens ou mondialistes de l’ après-guerre. Je vois des signes. L’évolution de la TV reproduit le ph
5437 ndialistes de l’après-guerre. Je vois des signes. L’ évolution de la TV reproduit le phénomène dialectique des régions fédé
5438 ’après-guerre. Je vois des signes. L’évolution de la TV reproduit le phénomène dialectique des régions fédérées s’opposant
5439 e vois des signes. L’évolution de la TV reproduit le phénomène dialectique des régions fédérées s’opposant aux États-natio
5440 régions fédérées s’opposant aux États-nations par l’ intérieur et par l’extérieur. La formule des circuits fermés favorise
5441 opposant aux États-nations par l’intérieur et par l’ extérieur. La formule des circuits fermés favorise les communautés loc
5442 États-nations par l’intérieur et par l’extérieur. La formule des circuits fermés favorise les communautés locales, tandis
5443 xtérieur. La formule des circuits fermés favorise les communautés locales, tandis que les relais par satellites permettent
5444 rmés favorise les communautés locales, tandis que les relais par satellites permettent une communication mondiale : dans le
5445 ites permettent une communication mondiale : dans les deux cas on échappe aux contrôles de l’État-nation, dont les monopole
5446 e : dans les deux cas on échappe aux contrôles de l’ État-nation, dont les monopoles classiques se trouvent débordés et vid
5447 s on échappe aux contrôles de l’État-nation, dont les monopoles classiques se trouvent débordés et vidés tant par en bas (q
5448 des économistes comme E. F. Schumacher, pour qui l’ avenir est aux « petites unités intelligibles » ; des politologues com
5449 es » ; des politologues comme C. N. Parkinson (de la loi du même nom), pour qui l’Europe de demain ne sera viable que si e
5450 C. N. Parkinson (de la loi du même nom), pour qui l’ Europe de demain ne sera viable que si elle se recompose sur la base d
5451 emain ne sera viable que si elle se recompose sur la base de quelque 140 régions autonomes, dont il dresse la carte. Je vo
5452 de quelque 140 régions autonomes, dont il dresse la carte. Je vois des architectes comme Doxiadis, qui écrit : « L’expéri
5453 ois des architectes comme Doxiadis, qui écrit : «  L’ expérience nous apprend que seules des unités de dimensions restreinte
5454 onise au surplus de « petites cellules urbaines à l’ échelle humaine », d’ampleur limitée à 50 000 habitants75 ; enfin des
5455 remplacés par une « communauté plus effective », l’ Europe des régions.   — L’avenir serait donc à l’Europe des régions ?
5456 nauté plus effective », l’Europe des régions.   — L’ avenir serait donc à l’Europe des régions ? — Sans aucun doute, si les
5457 l’Europe des régions.   — L’avenir serait donc à l’ Europe des régions ? — Sans aucun doute, si les vues justes nous condu
5458 c à l’Europe des régions ? — Sans aucun doute, si les vues justes nous conduisaient. Mais depuis dix-mille ans qu’il y a de
5459 mes à Histoire, et qui n’ont pas trouvé mieux que la guerre pour résoudre leurs différends, on ne voit pas ce qui pourrait
5460 férends, on ne voit pas ce qui pourrait justifier l’ espoir fou qu’ils deviennent raisonnables dans les dix ou quinze ans p
5461 l’espoir fou qu’ils deviennent raisonnables dans les dix ou quinze ans prochains — et nous n’avons guère plus de temps pou
5462 nous n’avons guère plus de temps pour décider de la survie de notre espèce.   — Seriez-vous radicalement pessimiste ? —
5463 s faire quelque chose, quel qu’en soit d’ailleurs le succès ! Attitude qui n’est pas différente de celle que j’annonçais d
5464 te de celle que j’annonçais dans ma jeunesse sous le titre de « politique du pessimisme actif »76, prenant ma devise au Ta
5465 sme actif »76, prenant ma devise au Taciturne. Si l’ on me suivait, bien sûr, tout irait mieux, ou éviterait au moins le pi
5466 bien sûr, tout irait mieux, ou éviterait au moins le pire, mais je sais bien que vous ne me suivrez pas — pas assez tôt et
5467 assez tôt et pas en nombre suffisant. Il reste à la réalité de vous imposer ce que le bon sens jamais n’aura pu faire, et
5468 ant. Il reste à la réalité de vous imposer ce que le bon sens jamais n’aura pu faire, et c’est la réalité elle-même qui va
5469 que le bon sens jamais n’aura pu faire, et c’est la réalité elle-même qui va recourir à la pédagogie des catastrophes. Je
5470 , et c’est la réalité elle-même qui va recourir à la pédagogie des catastrophes. Je ne vois rien de plus probable. Je ne p
5471 ients. Si elles sont assez grandes pour réveiller le monde, pas assez pour tout écraser, je les dirai pédagogiques, seules
5472 veiller le monde, pas assez pour tout écraser, je les dirai pédagogiques, seules capables de surmonter notre inertie et l’i
5473 es, seules capables de surmonter notre inertie et l’ invincible propension des chroniqueurs à taxer de « psychose d’Apocaly
5474 disais cela dans mon jardin du pays de Gex devant la caméra de la TV française, dans l’après-midi lumineux du 24 août 1973
5475 ans mon jardin du pays de Gex devant la caméra de la TV française, dans l’après-midi lumineux du 24 août 1973, et donnais
5476 de Gex devant la caméra de la TV française, dans l’ après-midi lumineux du 24 août 1973, et donnais pour exemple la crise
5477 lumineux du 24 août 1973, et donnais pour exemple la crise énergétique, industrielle et monétaire où cinq ou six émirs de
5478 que nous chantions. Quelques semaines plus tard, la guerre du Kippour fournissait un prétexte à la « crise du pétrole »,
5479 d, la guerre du Kippour fournissait un prétexte à la « crise du pétrole », m’obligeant à jeter au panier, pour cause de co
5480 e centaine de pages destinées à ce livre, et dont le ton prophétique eût paru plutôt ridicule après coup. Tout le monde au
5481 savoir ce que je découvrais et croyais révéler : les ressources limitées, les besoins infinis, les centrales nucléaires qu
5482 ais et croyais révéler : les ressources limitées, les besoins infinis, les centrales nucléaires qui vont arranger cela et q
5483 r : les ressources limitées, les besoins infinis, les centrales nucléaires qui vont arranger cela et qu’on dit au surplus t
5484 … Mais comme tout le monde déjà oublie sa peur et la sagesse qu’il en tira pour quelques semaines, de nouvelles catastroph
5485 ines, de nouvelles catastrophes s’organisent dans l’ ombre : « excursions » nucléaires, déchaînements criminels, répression
5486 baleines, des éléphants, des phoques, et de tous les fauves à fourrure, chantages à la bombe bricolée exigeant les bijoux
5487 es, et de tous les fauves à fourrure, chantages à la bombe bricolée exigeant les bijoux de la couronne, la tête d’un chef
5488 fourrure, chantages à la bombe bricolée exigeant les bijoux de la couronne, la tête d’un chef d’État ou autrement c’est Ma
5489 ntages à la bombe bricolée exigeant les bijoux de la couronne, la tête d’un chef d’État ou autrement c’est Manhattan, Mosc
5490 ombe bricolée exigeant les bijoux de la couronne, la tête d’un chef d’État ou autrement c’est Manhattan, Moscou, Paris ras
5491 trement c’est Manhattan, Moscou, Paris rasés dans l’ heure… Quelqu’un d’autre l’avait déjà dit, c’était Saint-Just, au cœur
5492 scou, Paris rasés dans l’heure… Quelqu’un d’autre l’ avait déjà dit, c’était Saint-Just, au cœur de la Révolution : Il fau
5493 l’avait déjà dit, c’était Saint-Just, au cœur de la Révolution : Il faut attendre un mal général assez grand pour que l’
5494 faut attendre un mal général assez grand pour que l’ opinion générale éprouve le besoin de mesures propres à faire le bien.
5495 l assez grand pour que l’opinion générale éprouve le besoin de mesures propres à faire le bien. Saint-Just ajoutait : Ce
5496 rale éprouve le besoin de mesures propres à faire le bien. Saint-Just ajoutait : Ce qui produit le bien général est touj
5497 e le bien. Saint-Just ajoutait : Ce qui produit le bien général est toujours terrible, ou paraît bizarre lorsque l’on co
5498 est toujours terrible, ou paraît bizarre lorsque l’ on commence trop tôt. Mais je ne vois pas ce qu’il serait possible, a
5499 cinq siècles exactement (1300-1800) pour préparer l’ État-nation, moins d’un siècle pour en imposer le modèle à toute l’Eur
5500 l’État-nation, moins d’un siècle pour en imposer le modèle à toute l’Europe, et trente ans pour le propager au monde enti
5501 ins d’un siècle pour en imposer le modèle à toute l’ Europe, et trente ans pour le propager au monde entier. Mais depuis qu
5502 er le modèle à toute l’Europe, et trente ans pour le propager au monde entier. Mais depuis qu’il sévit, à cause de lui, to
5503 qu’il sévit, à cause de lui, tout s’accélère vers le pire. D’où non seulement l’urgence accrue d’un changement de cap, mai
5504 tout s’accélère vers le pire. D’où non seulement l’ urgence accrue d’un changement de cap, mais une plus grande lisibilité
5505 gement de cap, mais une plus grande lisibilité de l’ évolution, qui peut faciliter ce changement. Les catastrophes n’appren
5506 de l’évolution, qui peut faciliter ce changement. Les catastrophes n’apprendront rien à ceux qui n’ont pas vu où il faut al
5507 s vu où il faut aller, et donc n’en cherchent pas les voies et ne les inventeront jamais. « Pas de vent favorable pour qui
5508 aller, et donc n’en cherchent pas les voies et ne les inventeront jamais. « Pas de vent favorable pour qui ne sait pas où i
5509 t souffle, même contraire. Tirer des bords contre le vent de l’Histoire et de la guerre : formule de nos efforts actuels e
5510 même contraire. Tirer des bords contre le vent de l’ Histoire et de la guerre : formule de nos efforts actuels et prochains
5511 irer des bords contre le vent de l’Histoire et de la guerre : formule de nos efforts actuels et prochains. Et peu m’import
5512 uels et prochains. Et peu m’importe de prévoir si la gauche ou la droite vont l’emporter — de toute façon, ce sera tout au
5513 ains. Et peu m’importe de prévoir si la gauche ou la droite vont l’emporter — de toute façon, ce sera tout autre chose — c
5514 importe de prévoir si la gauche ou la droite vont l’ emporter — de toute façon, ce sera tout autre chose — car je n’écris c
5515 i B, mais incite à trouver des chemins vers V, je la vois déjà formulée par Héraclite au siècle d’or de Delphes, de la Pyt
5516 mulée par Héraclite au siècle d’or de Delphes, de la Pythie et de la naissance des cités grecques : Le maître de la Pythie
5517 ite au siècle d’or de Delphes, de la Pythie et de la naissance des cités grecques : Le maître de la Pythie ne veut ni préd
5518 la Pythie et de la naissance des cités grecques : Le maître de la Pythie ne veut ni prédire ni cacher, mais il indique sa
5519 prédire ni cacher, mais il indique sa volonté et la vraie Voie. « Sentinelle, que dis-tu de la nuit ? » Il y a quelques a
5520 nté et la vraie Voie. « Sentinelle, que dis-tu de la nuit ? » Il y a quelques années, ayant écrit que l’action politique p
5521 nuit ? » Il y a quelques années, ayant écrit que l’ action politique par excellence allait consister désormais à prendre d
5522 désormais à prendre des mesures conservatoires de l’ Humain, quelqu’un demanda : — « Pourquoi voulez-vous donc que ça dure 
5523 et qu’on ne peut simplement écarter. Je veux que l’ homme dure à cause de l’espérance. À quoi s’ajoute un raisonnable espo
5524 ment écarter. Je veux que l’homme dure à cause de l’ espérance. À quoi s’ajoute un raisonnable espoir. La fin de l’homme, t
5525 espérance. À quoi s’ajoute un raisonnable espoir. La fin de l’homme, tout à l’heure, serait au moins prématurée. Nous voyo
5526 À quoi s’ajoute un raisonnable espoir. La fin de l’ homme, tout à l’heure, serait au moins prématurée. Nous voyons aujourd
5527 un raisonnable espoir. La fin de l’homme, tout à l’ heure, serait au moins prématurée. Nous voyons aujourd’hui certaines c
5528 s voyons aujourd’hui certaines causes du péril où l’ humain risque de s’anéantir, et nous disons : — ce serait trop bête !
5529 : — ce serait trop bête ! Nous venons d’entrevoir la guérison possible. Nous avons les moyens de sauver « l’environnement 
5530 nons d’entrevoir la guérison possible. Nous avons les moyens de sauver « l’environnement » — la Nature et nos habitants — i
5531 rison possible. Nous avons les moyens de sauver «  l’ environnement » — la Nature et nos habitants — in extremis. Mais que s
5532 avons les moyens de sauver « l’environnement » —  la Nature et nos habitants — in extremis. Mais que serait la beauté du M
5533 e et nos habitants — in extremis. Mais que serait la beauté du Monde sans l’œil de l’homme ? C’était si beau, la Terre de
5534 extremis. Mais que serait la beauté du Monde sans l’ œil de l’homme ? C’était si beau, la Terre de la Vie, bleue, verte et
5535 Mais que serait la beauté du Monde sans l’œil de l’ homme ? C’était si beau, la Terre de la Vie, bleue, verte et blanche d
5536 du Monde sans l’œil de l’homme ? C’était si beau, la Terre de la Vie, bleue, verte et blanche dans le noir éternel… Mais s
5537 s l’œil de l’homme ? C’était si beau, la Terre de la Vie, bleue, verte et blanche dans le noir éternel… Mais sauver le pay
5538 la Terre de la Vie, bleue, verte et blanche dans le noir éternel… Mais sauver le paysage et les décors n’aura plus de sen
5539 erte et blanche dans le noir éternel… Mais sauver le paysage et les décors n’aura plus de sens si nous ne sommes plus là,
5540 e dans le noir éternel… Mais sauver le paysage et les décors n’aura plus de sens si nous ne sommes plus là, ou ce qui revie
5541 ’autre peut-il arriver ? Et venant d’où ? (À part les tremblements de terre.) Il nous faut donc vouloir que le meilleur gag
5542 blements de terre.) Il nous faut donc vouloir que le meilleur gagne — en nous. Et il nous faut d’abord nous le représenter
5543 eur gagne — en nous. Et il nous faut d’abord nous le représenter, nous le rendre présent, l’anticiper. On peut anticiper l
5544 Et il nous faut d’abord nous le représenter, nous le rendre présent, l’anticiper. On peut anticiper l’avenir et le prévoir
5545 bord nous le représenter, nous le rendre présent, l’ anticiper. On peut anticiper l’avenir et le prévoir par les yeux de la
5546 le rendre présent, l’anticiper. On peut anticiper l’ avenir et le prévoir par les yeux de la foi, « substance des choses es
5547 ésent, l’anticiper. On peut anticiper l’avenir et le prévoir par les yeux de la foi, « substance des choses espérées, ferm
5548 per. On peut anticiper l’avenir et le prévoir par les yeux de la foi, « substance des choses espérées, ferme assurance de c
5549 anticiper l’avenir et le prévoir par les yeux de la foi, « substance des choses espérées, ferme assurance de celles qu’on
5550 e assurance de celles qu’on ne voit pas ». Mais à l’ aide d’appareils scientifiques, on ne peut voir que du passé, des fait
5551 ces réalités et leur donnent vie dans notre vie, les réalisent. Désirer le meilleur en nous et par la force du désir, le d
5552 onnent vie dans notre vie, les réalisent. Désirer le meilleur en nous et par la force du désir, le devenir, c’est anticipe
5553 les réalisent. Désirer le meilleur en nous et par la force du désir, le devenir, c’est anticiper notre avenir, mieux : c’e
5554 rer le meilleur en nous et par la force du désir, le devenir, c’est anticiper notre avenir, mieux : c’est le faire.   La d
5555 enir, c’est anticiper notre avenir, mieux : c’est le faire.   La décadence d’une société commence quand l’homme se demande
5556 anticiper notre avenir, mieux : c’est le faire.   La décadence d’une société commence quand l’homme se demande : « Que va-
5557 aire.   La décadence d’une société commence quand l’ homme se demande : « Que va-t-il arriver ? » au lieu de se demander :
5558 meilleurs, obéissant mieux à notre vocation dans la cité. Hors de là point de communauté, ni donc de régions, ni d’Europe
5559 ix, ni de futur, à vues humaines. J’ai voulu dire l’ avenir inscrit en nous, — non certes dans nos chromosomes : n’allons p
5560 ’allons pas nous cacher une fois de plus derrière les arbres, aux forêts du passé profond ! — mais dans nos attitudes prése
5561 à vous convertir, à faire votre révolution, c’est le même mot. Je ne vais pas vous demander de devenir tous des saints. (P
5562 de devenir tous des saints. (Pourtant, ce serait la solution.) Je ne vais pas vous dire : — Aimez-vous ! (même remarque).
5563 seulement : — Remplacez ce système qui multiplie les occasions de haine par un autre qui favorise et qui appelle la solida
5564 de haine par un autre qui favorise et qui appelle la solidarité. Or ce changement n’adviendra pas dans le réseau des relat
5565 solidarité. Or ce changement n’adviendra pas dans le réseau des relations humaines, dans la cité, s’il ne s’est opéré d’ab
5566 a pas dans le réseau des relations humaines, dans la cité, s’il ne s’est opéré d’abord en vous. Si vous voulez changer l’a
5567 est opéré d’abord en vous. Si vous voulez changer l’ avenir, changez vous-mêmes. Et c’est pourquoi la Sentinelle de Juda, l
5568 r l’avenir, changez vous-mêmes. Et c’est pourquoi la Sentinelle de Juda, le grand prophète, interrogé sur l’avenir par la
5569 s-mêmes. Et c’est pourquoi la Sentinelle de Juda, le grand prophète, interrogé sur l’avenir par la voix de l’angoisse huma
5570 tinelle de Juda, le grand prophète, interrogé sur l’ avenir par la voix de l’angoisse humaine dit seulement : Convertissez-
5571 da, le grand prophète, interrogé sur l’avenir par la voix de l’angoisse humaine dit seulement : Convertissez-vous ! Le mot
5572 d prophète, interrogé sur l’avenir par la voix de l’ angoisse humaine dit seulement : Convertissez-vous ! Le mot doit être
5573 oisse humaine dit seulement : Convertissez-vous ! Le mot doit être ici reçu dans toute sa force et dans la plénitude de so
5574 ot doit être ici reçu dans toute sa force et dans la plénitude de son sens. (Qui n’est pas limité à « devenez chrétiens ! 
5575 s ! ». Isaïe n’était pas chrétien.) Dira-t-on que l’ on peut partager telles idées sur les méfaits des centrales nucléaires
5576 Dira-t-on que l’on peut partager telles idées sur les méfaits des centrales nucléaires et les bienfaits de la communauté, d
5577 idées sur les méfaits des centrales nucléaires et les bienfaits de la communauté, donc des régions, sans adopter l’attitude
5578 aits des centrales nucléaires et les bienfaits de la communauté, donc des régions, sans adopter l’attitude religieuse que
5579 de la communauté, donc des régions, sans adopter l’ attitude religieuse que suggère malgré tout le terme de conversion ? O
5580 ter l’attitude religieuse que suggère malgré tout le terme de conversion ? Ou que la religion n’a rien à voir avec tel mod
5581 ggère malgré tout le terme de conversion ? Ou que la religion n’a rien à voir avec tel mode de pollution ou de production
5582 ion ou de production d’énergie ? Je répondrai que les régions, la pollution, l’énergie nucléaire ont valeur symbolique en t
5583 duction d’énergie ? Je répondrai que les régions, la pollution, l’énergie nucléaire ont valeur symbolique en tant que nœud
5584 gie ? Je répondrai que les régions, la pollution, l’ énergie nucléaire ont valeur symbolique en tant que nœuds de problèmes
5585 ons métaphysiques et religieuses quant au rôle de l’ homme sur la Terre et quant à ses options de base : la puissance ou la
5586 iques et religieuses quant au rôle de l’homme sur la Terre et quant à ses options de base : la puissance ou la liberté. Fa
5587 mme sur la Terre et quant à ses options de base : la puissance ou la liberté. Faire des régions et recréer ainsi des possi
5588 et quant à ses options de base : la puissance ou la liberté. Faire des régions et recréer ainsi des possibilités de commu
5589 t recréer ainsi des possibilités de communauté où la personne ait liberté de découvrir et d’exercer sa vocation ; du même
5590 et d’exercer sa vocation ; du même coup, prévenir la guerre nucléaire (les unités de base simplement n’atteignant pas la m
5591 ion ; du même coup, prévenir la guerre nucléaire ( les unités de base simplement n’atteignant pas la masse critique) ce n’es
5592 e (les unités de base simplement n’atteignant pas la masse critique) ce n’est rien de moins que se tourner vers des finali
5593 inalités de liberté, rien de moins que renoncer à la puissance sur autrui. Et c’est littéralement se convertir. Tous les p
5594 autrui. Et c’est littéralement se convertir. Tous les prophètes condamnent la volonté de puissance, qu’ils assimilent à l’i
5595 ement se convertir. Tous les prophètes condamnent la volonté de puissance, qu’ils assimilent à l’invocation des faux dieux
5596 nent la volonté de puissance, qu’ils assimilent à l’ invocation des faux dieux. Pour les évangiles, la puissance est la plu
5597 ls assimilent à l’invocation des faux dieux. Pour les évangiles, la puissance est la plus grande des tentations que le diab
5598 l’invocation des faux dieux. Pour les évangiles, la puissance est la plus grande des tentations que le diable dresse au d
5599 faux dieux. Pour les évangiles, la puissance est la plus grande des tentations que le diable dresse au désert devant Jésu
5600 a puissance est la plus grande des tentations que le diable dresse au désert devant Jésus. Toute la Bible exalte en revanc
5601 ue le diable dresse au désert devant Jésus. Toute la Bible exalte en revanche « la liberté des enfants de Dieu ». Si l’on
5602 devant Jésus. Toute la Bible exalte en revanche «  la liberté des enfants de Dieu ». Si l’on exclut de la « sphère du relig
5603 n revanche « la liberté des enfants de Dieu ». Si l’ on exclut de la « sphère du religieux » le drame de l’humanité menacée
5604 liberté des enfants de Dieu ». Si l’on exclut de la « sphère du religieux » le drame de l’humanité menacée par ses propre
5605 u ». Si l’on exclut de la « sphère du religieux » le drame de l’humanité menacée par ses propres erreurs et menaçant du mê
5606 exclut de la « sphère du religieux » le drame de l’ humanité menacée par ses propres erreurs et menaçant du même coup la N
5607 par ses propres erreurs et menaçant du même coup la Nature ; si l’on remplace l’amour par l’efficacité — dont la mesure e
5608 s erreurs et menaçant du même coup la Nature ; si l’ on remplace l’amour par l’efficacité — dont la mesure est la puissance
5609 enaçant du même coup la Nature ; si l’on remplace l’ amour par l’efficacité — dont la mesure est la puissance militaire, pu
5610 ême coup la Nature ; si l’on remplace l’amour par l’ efficacité — dont la mesure est la puissance militaire, puissance de t
5611 si l’on remplace l’amour par l’efficacité — dont la mesure est la puissance militaire, puissance de tuer ; si l’on ne veu
5612 ace l’amour par l’efficacité — dont la mesure est la puissance militaire, puissance de tuer ; si l’on ne veut plus tirer s
5613 st la puissance militaire, puissance de tuer ; si l’ on ne veut plus tirer son énergie de soi-même mais seulement de la dés
5614 s tirer son énergie de soi-même mais seulement de la désintégration d’un peu de matière, que reste-t-il dans la « sphère d
5615 égration d’un peu de matière, que reste-t-il dans la « sphère du religieux » ? La casuistique ? Mais à l’inverse, si l’on
5616 que reste-t-il dans la « sphère du religieux » ? La casuistique ? Mais à l’inverse, si l’on exclut de notre drame l’irréd
5617 « sphère du religieux » ? La casuistique ? Mais à l’ inverse, si l’on exclut de notre drame l’irréductible spirituel, comme
5618 ligieux » ? La casuistique ? Mais à l’inverse, si l’ on exclut de notre drame l’irréductible spirituel, comment fonder l’ob
5619 ? Mais à l’inverse, si l’on exclut de notre drame l’ irréductible spirituel, comment fonder l’objection de la personne, au
5620 re drame l’irréductible spirituel, comment fonder l’ objection de la personne, au nom de quoi refuser le verdict de la Rais
5621 ductible spirituel, comment fonder l’objection de la personne, au nom de quoi refuser le verdict de la Raison d’État, quan
5622 ’objection de la personne, au nom de quoi refuser le verdict de la Raison d’État, quand il tombe de l’ordinateur bien prog
5623 la personne, au nom de quoi refuser le verdict de la Raison d’État, quand il tombe de l’ordinateur bien programmé ? Puissa
5624 le verdict de la Raison d’État, quand il tombe de l’ ordinateur bien programmé ? Puissance ou Liberté, qui tranchera ? Entr
5625 mmé ? Puissance ou Liberté, qui tranchera ? Entre le besoin de sécurité à tout prix et la soif de liberté à tous risques,
5626 hera ? Entre le besoin de sécurité à tout prix et la soif de liberté à tous risques, le choix de l’espèce sera fonction de
5627 à tout prix et la soif de liberté à tous risques, le choix de l’espèce sera fonction de la chose la moins prévisible du mo
5628 et la soif de liberté à tous risques, le choix de l’ espèce sera fonction de la chose la moins prévisible du monde, qui est
5629 us risques, le choix de l’espèce sera fonction de la chose la moins prévisible du monde, qui est la vitalité d’une société
5630 s, le choix de l’espèce sera fonction de la chose la moins prévisible du monde, qui est la vitalité d’une société. Mais il
5631 de la chose la moins prévisible du monde, qui est la vitalité d’une société. Mais il nous faut pousser l’analyse sur nous-
5632 vitalité d’une société. Mais il nous faut pousser l’ analyse sur nous-mêmes : que choisissons-nous réellement ? Au niveau d
5633 s États-nations tout est joué, tout est perdu. On le sait dans les hautes sphères du Pouvoir. Chacun, pour se sauver en ta
5634 ns tout est joué, tout est perdu. On le sait dans les hautes sphères du Pouvoir. Chacun, pour se sauver en tant que nation,
5635 pour se sauver en tant que nation, vend ou achète les armes de la fin, et se précipite vers l’holocauste général avec une t
5636 r en tant que nation, vend ou achète les armes de la fin, et se précipite vers l’holocauste général avec une très grande e
5637 achète les armes de la fin, et se précipite vers l’ holocauste général avec une très grande et très profonde stupidité, qu
5638 des éthologistes à penser que se manifeste, dans l’ humanité d’aujourd’hui, une tendance suicidaire assez puissante. Alors
5639 buts, ordonnons nos moyens à ces buts — recréons la communauté ! Ce ne sera pas encore la fin de la peine des hommes, la
5640 — recréons la communauté ! Ce ne sera pas encore la fin de la peine des hommes, la vie sans poids. Pas encore le Jour éte
5641 s la communauté ! Ce ne sera pas encore la fin de la peine des hommes, la vie sans poids. Pas encore le Jour éternel. Mais
5642 ne sera pas encore la fin de la peine des hommes, la vie sans poids. Pas encore le Jour éternel. Mais quelque chose comme
5643 a peine des hommes, la vie sans poids. Pas encore le Jour éternel. Mais quelque chose comme le miracle du réveil après le
5644 encore le Jour éternel. Mais quelque chose comme le miracle du réveil après le cauchemar où l’on hurlait seul, sans écho,
5645 is quelque chose comme le miracle du réveil après le cauchemar où l’on hurlait seul, sans écho, devant l’indicible injusti
5646 comme le miracle du réveil après le cauchemar où l’ on hurlait seul, sans écho, devant l’indicible injustice de l’écraseme
5647 cauchemar où l’on hurlait seul, sans écho, devant l’ indicible injustice de l’écrasement imminent. Comme la permission de v
5648 seul, sans écho, devant l’indicible injustice de l’ écrasement imminent. Comme la permission de vivre encore de nouveaux j
5649 dicible injustice de l’écrasement imminent. Comme la permission de vivre encore de nouveaux jours, de nouvelles nuits auss
5650 irer son espoir et sa résolution. Et ce n’est pas la promesse d’une fin de l’Histoire mais d’une rénovation de l’aventure
5651 olution. Et ce n’est pas la promesse d’une fin de l’ Histoire mais d’une rénovation de l’aventure d’être homme, si elle pre
5652 d’une fin de l’Histoire mais d’une rénovation de l’ aventure d’être homme, si elle prend naissance dans notre cœur.   Écou
5653 naissance dans notre cœur.   Écoutons maintenant le cri sublime.   De Séir, une voix crie au prophète : — Sentinelle, qu
5654 ix crie au prophète : — Sentinelle, que dis-tu de la nuit ? Sentinelle, que dis-tu de la nuit ? La sentinelle a répondu :
5655 que dis-tu de la nuit ? Sentinelle, que dis-tu de la nuit ? La sentinelle a répondu : — Le matin vient, et la nuit aussi.
5656 de la nuit ? Sentinelle, que dis-tu de la nuit ? La sentinelle a répondu : — Le matin vient, et la nuit aussi. Si vous vo
5657 e dis-tu de la nuit ? La sentinelle a répondu : — Le matin vient, et la nuit aussi. Si vous voulez interroger, interrogez 
5658  ? La sentinelle a répondu : — Le matin vient, et la nuit aussi. Si vous voulez interroger, interrogez ! Convertissez-vous
5659 Convertissez-vous et revenez ! 74. Interview à la TV française, avril 1973. 75. Constantin Doxiadis, « Œcumenopolis ou
5660 1973. 75. Constantin Doxiadis, « Œcumenopolis ou la forêt dans la ville », Preuves , Paris, n° 8, 1971. 76. Politique
5661 stantin Doxiadis, « Œcumenopolis ou la forêt dans la ville », Preuves , Paris, n° 8, 1971. 76. Politique de la personn
5662 Preuves , Paris, n° 8, 1971. 76. Politique de la personne , Paris, 1934. ad. Rougemont Denis de, « Pédagogie des cat
5663 . Une note précise : « Ces quelques pages forment la conclusion du livre à paraître chez Stock sous le titre L’Avenir est
5664 la conclusion du livre à paraître chez Stock sous le titre L’Avenir est notre affaire . »
5665 ion du livre à paraître chez Stock sous le titre L’ Avenir est notre affaire . »