1
Le
péril Ford (février 1928)a On a trop dit que notre époque est chao
2
e est chaotique. Je crois bien, au contraire, que
l’
histoire n’a pas connu de période où les directions d’une civilisation
3
raire, que l’histoire n’a pas connu de période où
les
directions d’une civilisation apparaissent plus nettement. Un certain
4
ou, pour mieux dire, une organisation générale de
la
vie mondiale. Toutes les forces du temps y concourent obscurément ; e
5
organisation générale de la vie mondiale. Toutes
les
forces du temps y concourent obscurément ; et, pour peu que cela cont
6
nt ; et, pour peu que cela continue, pour peu que
la
bourgeoisie intellectuelle persiste à jouer l’autruche aux yeux clos,
7
ue la bourgeoisie intellectuelle persiste à jouer
l’
autruche aux yeux clos, l’avènement de cette organisation toute-puissa
8
tuelle persiste à jouer l’autruche aux yeux clos,
l’
avènement de cette organisation toute-puissante n’est plus qu’une ques
9
s encore. Ici et là, quelques cris s’élèvent dans
le
désert d’une époque déjà presque abandonnée par l’Esprit. À l’heure d
10
e désert d’une époque déjà presque abandonnée par
l’
Esprit. À l’heure de toucher aux buts que sa civilisation poursuit dep
11
ne époque déjà presque abandonnée par l’Esprit. À
l’
heure de toucher aux buts que sa civilisation poursuit depuis près de
12
ivilisation poursuit depuis près de deux siècles,
l’
Occidental est saisi d’un étrange malaise. Il soupçonne, par éclairs,
13
ut-être dans ces buts une absurdité fondamentale.
L’
infaillible progrès aurait-il fait fausse route ? Est-il temps encore
14
ait-il fait fausse route ? Est-il temps encore de
le
détourner du désastre spirituel vers lequel il entraîne l’Occident ?
15
ner du désastre spirituel vers lequel il entraîne
l’
Occident ? Cris dans le désert. Déserts des villes fiévreuses où le fr
16
el vers lequel il entraîne l’Occident ? Cris dans
le
désert. Déserts des villes fiévreuses où le fracas des machines couvr
17
dans le désert. Déserts des villes fiévreuses où
le
fracas des machines couvre déjà la plainte humaine. Il y a ceux qui p
18
fiévreuses où le fracas des machines couvre déjà
la
plainte humaine. Il y a ceux qui pleurent le passé et ceux qui prophé
19
déjà la plainte humaine. Il y a ceux qui pleurent
le
passé et ceux qui prophétisent, ceux qui jettent une imprécation stér
20
tent une imprécation stérile et magnifique contre
l’
époque et ceux qui cherchent à l’oublier dans le rêve, dans l’utopie,
21
agnifique contre l’époque et ceux qui cherchent à
l’
oublier dans le rêve, dans l’utopie, dans une belle doctrine… Il faudr
22
e l’époque et ceux qui cherchent à l’oublier dans
le
rêve, dans l’utopie, dans une belle doctrine… Il faudrait d’abord pre
23
ceux qui cherchent à l’oublier dans le rêve, dans
l’
utopie, dans une belle doctrine… Il faudrait d’abord prendre conscienc
24
ous, dans cette complaisance générale à proclamer
le
désordre du temps. On a peur de certaines évidences, on préfère affir
25
n préfère affirmer que tout est incompréhensible.
L’
homme moderne recule devant l’évidence de la banqueroute prochaine de
26
t incompréhensible. L’homme moderne recule devant
l’
évidence de la banqueroute prochaine de sa civilisation. Il répugne à
27
ible. L’homme moderne recule devant l’évidence de
la
banqueroute prochaine de sa civilisation. Il répugne à admettre qu’un
28
rder autour de nous et d’en croire nos yeux. I.
L’
homme qui a réussi Je prends Henry Ford comme un symbole du monde m
29
Henry Ford comme un symbole du monde moderne, et
le
meilleur, parce que personne ne s’est approché plus que lui du type i
30
e ne s’est approché plus que lui du type idéal de
l’
industriel et du capitaliste. Le succès immense de ses livres1, sa pop
31
du type idéal de l’industriel et du capitaliste.
Le
succès immense de ses livres1, sa popularité universelle sont signes
32
ivres1, sa popularité universelle sont signes que
l’
époque a senti en lui son incarnation la plus parfaite. Qu’on ne m’acc
33
ignes que l’époque a senti en lui son incarnation
la
plus parfaite. Qu’on ne m’accuse donc pas de caricaturer l’objet de m
34
rfaite. Qu’on ne m’accuse donc pas de caricaturer
l’
objet de ma critique pour faciliter l’accusation : je prends pour la j
35
caricaturer l’objet de ma critique pour faciliter
l’
accusation : je prends pour la juger ce que l’époque m’offre de mieux
36
ique pour faciliter l’accusation : je prends pour
la
juger ce que l’époque m’offre de mieux réussi. Voici la vie de Ford,
37
ter l’accusation : je prends pour la juger ce que
l’
époque m’offre de mieux réussi. Voici la vie de Ford, telle qu’il la r
38
er ce que l’époque m’offre de mieux réussi. Voici
la
vie de Ford, telle qu’il la raconte dans Ma vie et mon œuvre. Il naît
39
e mieux réussi. Voici la vie de Ford, telle qu’il
la
raconte dans Ma vie et mon œuvre. Il naît fils de paysan. Il passe so
40
des outils qu’il joue encore à présent », dit‑il.
Le
plus mémorable événement de ces années de jeunesse, son « chemin de D
41
che au juste quelle dose d’« humour » il met dans
l’
expression), c’est la rencontre d’une locomotive routière. « Depuis l’
42
ose d’« humour » il met dans l’expression), c’est
la
rencontre d’une locomotive routière. « Depuis l’instant où, enfant de
43
la rencontre d’une locomotive routière. « Depuis
l’
instant où, enfant de 12 ans, j’aperçus cette machine de route, jusqu’
44
a été de construire une bonne machine routière. »
Les
étapes de sa jeunesse sont : la construction d’un moteur à vapeur, pu
45
hine routière. » Les étapes de sa jeunesse sont :
la
construction d’un moteur à vapeur, puis d’un moteur à explosion, enfi
46
simple mécanicien chez Edison. Il fonde tôt après
la
Société des automobiles Ford, « et commence à réaliser son rêve, le t
47
omobiles Ford, « et commence à réaliser son rêve,
le
type unique d’automobile utilitaire »2. Dès lors, c’est une suite de
48
. Dès lors, c’est une suite de chiffres indiquant
le
progrès de sa production, d’année en année. On pourrait ajouter à ces
49
ur lui qu’un résultat secondaire de son activité.
Le
but de sa vie n’a jamais été de s’enrichir. Son « rêve » était autre,
50
s été de s’enrichir. Son « rêve » était autre, il
l’
a réalisé comme il est donné à peu d’hommes de le faire : 7000 voiture
51
l’a réalisé comme il est donné à peu d’hommes de
le
faire : 7000 voitures par jour, et la possibilité d’augmenter encore
52
d’hommes de le faire : 7000 voitures par jour, et
la
possibilité d’augmenter encore cette production. Ford est le plus pui
53
ité d’augmenter encore cette production. Ford est
le
plus puissant industriel du monde ; le plus riche, au point qu’il peu
54
. Ford est le plus puissant industriel du monde ;
le
plus riche, au point qu’il peut parler d’égal à égal avec beaucoup d’
55
peut parler d’égal à égal avec beaucoup d’États ;
le
plus parfait aussi. Son succès sans précédent le met à l’abri de tout
56
le plus parfait aussi. Son succès sans précédent
le
met à l’abri de toutes les attaques, du point de vue technique. L’org
57
parfait aussi. Son succès sans précédent le met à
l’
abri de toutes les attaques, du point de vue technique. L’organisation
58
n succès sans précédent le met à l’abri de toutes
les
attaques, du point de vue technique. L’organisation de ses usines, de
59
e toutes les attaques, du point de vue technique.
L’
organisation de ses usines, des salaires, des conditions de travail et
60
et du paupérisme. C’est un résultat qu’on n’a pas
le
droit humainement de sous-estimer. Les griefs que les socialistes fon
61
’on n’a pas le droit humainement de sous-estimer.
Les
griefs que les socialistes font aux capitalistes européens ne sauraie
62
droit humainement de sous-estimer. Les griefs que
les
socialistes font aux capitalistes européens ne sauraient l’atteindre.
63
stes font aux capitalistes européens ne sauraient
l’
atteindre. Au contraire, il a résolu la question sociale d’une façon q
64
sauraient l’atteindre. Au contraire, il a résolu
la
question sociale d’une façon qui ne devrait pas déplaire aux doctrina
65
mplète du monde, seule méthode capable d’empêcher
les
abus des capitalistes. Du même coup, en supprimant l’esclavage financ
66
bus des capitalistes. Du même coup, en supprimant
l’
esclavage financier de l’ouvrier, il supprime la principale cause avou
67
même coup, en supprimant l’esclavage financier de
l’
ouvrier, il supprime la principale cause avouée de la lutte des classe
68
t l’esclavage financier de l’ouvrier, il supprime
la
principale cause avouée de la lutte des classes. Il se dégage de la l
69
uvrier, il supprime la principale cause avouée de
la
lutte des classes. Il se dégage de la lecture de Ma vie et mon œuvre
70
e avouée de la lutte des classes. Il se dégage de
la
lecture de Ma vie et mon œuvre une impression de netteté, de solidité
71
pression de netteté, de solidité, de propreté. Si
l’
on ajoute à cela le plaisir qu’on éprouve toujours au récit de succès
72
, de solidité, de propreté. Si l’on ajoute à cela
le
plaisir qu’on éprouve toujours au récit de succès mirobolants, et le
73
rouve toujours au récit de succès mirobolants, et
le
charme un peu facile mais fort goûté du grand public, de l’humour amé
74
un peu facile mais fort goûté du grand public, de
l’
humour américain, l’on comprendra sans peine la popularité mondiale de
75
ort goûté du grand public, de l’humour américain,
l’
on comprendra sans peine la popularité mondiale des « idées » d’Henry
76
de l’humour américain, l’on comprendra sans peine
la
popularité mondiale des « idées » d’Henry Ford et des livres qui les
77
iale des « idées » d’Henry Ford et des livres qui
les
répandent. L’on ne pourra qu’y applaudir, semble-t-il, en souhaitant
78
s » d’Henry Ford et des livres qui les répandent.
L’
on ne pourra qu’y applaudir, semble-t-il, en souhaitant que les indust
79
ra qu’y applaudir, semble-t-il, en souhaitant que
les
industriels européens s’en inspirent toujours plus. Ford leur montre
80
ns s’en inspirent toujours plus. Ford leur montre
le
chemin qu’ils seront bien obligés de prendre tôt ou tard. Il est préf
81
e quelques chances encore de régler pacifiquement
le
conflit du capital et du travail. « Se fordiser ou mourir », écrivait
82
vait récemment un économiste. Ford, perfection de
l’
industriel, offre au monde moderne le premier exemple de son achèvemen
83
exemple de son achèvement intégral. Il a atteint
l’
objectif de la moderne civilisation occidentale. Voici donc venue l’he
84
n achèvement intégral. Il a atteint l’objectif de
la
moderne civilisation occidentale. Voici donc venue l’heure de la juge
85
oderne civilisation occidentale. Voici donc venue
l’
heure de la juger. Le héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. M
86
lisation occidentale. Voici donc venue l’heure de
la
juger. Le héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi
87
ccidentale. Voici donc venue l’heure de la juger.
Le
héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la
88
Voici donc venue l’heure de la juger. Le héros de
l’
époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la plus grave
89
l’heure de la juger. Le héros de l’époque, c’est
l’
homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la plus grave question qu’on p
90
, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est
la
plus grave question qu’on puisse poser à notre temps. II. M. Ford
91
ser à notre temps. II. M. Ford a ses idées, ou
la
philosophie de ceux qui n’en veulent pas Nous avons dit tout à l’h
92
eux qui n’en veulent pas Nous avons dit tout à
l’
heure quel fut le but de la vie de Ford, sa « grande et constante ambi
93
ent pas Nous avons dit tout à l’heure quel fut
le
but de la vie de Ford, sa « grande et constante ambition ». Il semble
94
Nous avons dit tout à l’heure quel fut le but de
la
vie de Ford, sa « grande et constante ambition ». Il semble que toute
95
éthode, technique — soit conditionnée jusque dans
le
détail par une idée fixe primitive. Considérons-la sous cet angle. Il
96
e détail par une idée fixe primitive. Considérons-
la
sous cet angle. Il y a d’abord la vision de l’auto routière : naissan
97
ve. Considérons-la sous cet angle. Il y a d’abord
la
vision de l’auto routière : naissance de sa passion froide et tenace.
98
ns-la sous cet angle. Il y a d’abord la vision de
l’
auto routière : naissance de sa passion froide et tenace. Il s’efforce
99
sion froide et tenace. Il s’efforce d’en réaliser
l’
objet par ses propres moyens, à un exemplaire ; puis, il fonde une usi
100
plaire ; puis, il fonde une usine pour multiplier
les
réalisations. Bientôt, élargissant son ambition, il conçoit ce mythe
101
on, il conçoit ce mythe extravagant du bonheur de
l’
humanité par la possession d’automobiles Ford. Et, comme il est très i
102
ce mythe extravagant du bonheur de l’humanité par
la
possession d’automobiles Ford. Et, comme il est très intelligent, il
103
l est très intelligent, il a vite fait de démêler
les
conditions les plus rationnelles de la production, avec cette netteté
104
lligent, il a vite fait de démêler les conditions
les
plus rationnelles de la production, avec cette netteté et cette décis
105
e démêler les conditions les plus rationnelles de
la
production, avec cette netteté et cette décision qu’une passion conte
106
te décision qu’une passion contenue peut donner à
l’
homme d’action. Enfin, le voici en mesure de produire des quantités én
107
n contenue peut donner à l’homme d’action. Enfin,
le
voici en mesure de produire des quantités énormes d’autos. Seulement,
108
nt, pour pouvoir continuer, il faut vendre ; dans
l’
intérêt de la production, il faut créer la consommation. La réclame s’
109
oir continuer, il faut vendre ; dans l’intérêt de
la
production, il faut créer la consommation. La réclame s’en charge. Pa
110
; dans l’intérêt de la production, il faut créer
la
consommation. La réclame s’en charge. Par le procédé très simple de l
111
de la production, il faut créer la consommation.
La
réclame s’en charge. Par le procédé très simple de la répétition, on
112
réer la consommation. La réclame s’en charge. Par
le
procédé très simple de la répétition, on fait croire aux gens qu’ils
113
éclame s’en charge. Par le procédé très simple de
la
répétition, on fait croire aux gens qu’ils ne peuvent plus vivre heur
114
ls ne peuvent plus vivre heureux sans auto. Voilà
l’
affaire lancée. La passion de Ford se donne libre cours. Il ne s’agit
115
vivre heureux sans auto. Voilà l’affaire lancée.
La
passion de Ford se donne libre cours. Il ne s’agit plus maintenant qu
116
À chaque page de ses livres, on pourrait relever
les
sophismes plus ou moins conscients par lesquels il prétend ramener le
117
moins conscients par lesquels il prétend ramener
le
bénéfice de la production à celui du consommateur. Prenons cette peti
118
ts par lesquels il prétend ramener le bénéfice de
la
production à celui du consommateur. Prenons cette petite phrase qui n
119
i n’a l’air de rien : « Nul ne contestera que, si
l’
on abaisse suffisamment les prix, on ne trouve toujours des clients, q
120
l ne contestera que, si l’on abaisse suffisamment
les
prix, on ne trouve toujours des clients, quel que soit l’état du marc
121
on ne trouve toujours des clients, quel que soit
l’
état du marché. » Il semble que cela soit tout à l’avantage du client.
122
’état du marché. » Il semble que cela soit tout à
l’
avantage du client. Mais cherchons un peu les causes réelles de cet ab
123
out à l’avantage du client. Mais cherchons un peu
les
causes réelles de cet abaissement de prix — la concurrence n’étant bi
124
u les causes réelles de cet abaissement de prix —
la
concurrence n’étant bien entendu qu’une cause accessoire. Dire que l’
125
nt bien entendu qu’une cause accessoire. Dire que
l’
état du marché est tel que le client n’achète plus, cela signifie parf
126
accessoire. Dire que l’état du marché est tel que
le
client n’achète plus, cela signifie parfois que la marchandise est mo
127
e client n’achète plus, cela signifie parfois que
la
marchandise est momentanément trop chère ; mais surtout que le besoin
128
e est momentanément trop chère ; mais surtout que
le
besoin qu’on a de tel objet est satisfait ou a disparu. Il semble alo
129
t est satisfait ou a disparu. Il semble alors que
l’
industriel n’ait plus qu’à plier bagage. Mais c’est ici que Ford montr
130
qu’à plier bagage. Mais c’est ici que Ford montre
le
bout de l’oreille, et que son but réel est la production pour elle-mê
131
bagage. Mais c’est ici que Ford montre le bout de
l’
oreille, et que son but réel est la production pour elle-même, non pas
132
tre le bout de l’oreille, et que son but réel est
la
production pour elle-même, non pas le plaisir ou l’intérêt véritable
133
ut réel est la production pour elle-même, non pas
le
plaisir ou l’intérêt véritable du client. Le besoin ayant disparu, la
134
production pour elle-même, non pas le plaisir ou
l’
intérêt véritable du client. Le besoin ayant disparu, la production de
135
pas le plaisir ou l’intérêt véritable du client.
Le
besoin ayant disparu, la production devant se maintenir, il n’y a qu’
136
rêt véritable du client. Le besoin ayant disparu,
la
production devant se maintenir, il n’y a qu’une solution : recréer le
137
se maintenir, il n’y a qu’une solution : recréer
le
besoin. Pour cela, on abaisse les prix. Le client fait la comparaison
138
lution : recréer le besoin. Pour cela, on abaisse
les
prix. Le client fait la comparaison. Il est impressionné par la baiss
139
ecréer le besoin. Pour cela, on abaisse les prix.
Le
client fait la comparaison. Il est impressionné par la baisse, au poi
140
n. Pour cela, on abaisse les prix. Le client fait
la
comparaison. Il est impressionné par la baisse, au point qu’il en oub
141
ient fait la comparaison. Il est impressionné par
la
baisse, au point qu’il en oublie que cela ne l’intéresse plus réellem
142
r la baisse, au point qu’il en oublie que cela ne
l’
intéresse plus réellement. Il croit qu’il va gagner 5 francs en acheta
143
acheté du tout. Autrement dit, il est trompé par
la
baisse. L’industriel comptait. La tromperie est préméditée. Et le sca
144
tout. Autrement dit, il est trompé par la baisse.
L’
industriel comptait. La tromperie est préméditée. Et le scandale, à mo
145
est trompé par la baisse. L’industriel comptait.
La
tromperie est préméditée. Et le scandale, à mon sens, n’est pas que l
146
ustriel comptait. La tromperie est préméditée. Et
le
scandale, à mon sens, n’est pas que l’industriel ait forcé (psycholog
147
éditée. Et le scandale, à mon sens, n’est pas que
l’
industriel ait forcé (psychologiquement) le client à faire une dépense
148
as que l’industriel ait forcé (psychologiquement)
le
client à faire une dépense superflue ; le scandale est qu’il l’ait tr
149
uement) le client à faire une dépense superflue ;
le
scandale est qu’il l’ait trompé sur ses véritables besoins. Car cela
150
ire une dépense superflue ; le scandale est qu’il
l’
ait trompé sur ses véritables besoins. Car cela va bien plus profond,
151
régulation et d’alternances. Tel est ce sophisme,
le
paradoxe du bon marché. Celui de la réclame a même but, mêmes effets.
152
ce sophisme, le paradoxe du bon marché. Celui de
la
réclame a même but, mêmes effets. Mais le plus grave est peut-être le
153
elui de la réclame a même but, mêmes effets. Mais
le
plus grave est peut-être le sophisme du loisir. M. Guglielmo Ferrero
154
t, mêmes effets. Mais le plus grave est peut-être
le
sophisme du loisir. M. Guglielmo Ferrero a fort bien montré, dans un
155
ro a fort bien montré, dans un article intitulé «
Le
grand paradoxe du monde moderne »3, ce qu’il y a de profondément anti
156
»3, ce qu’il y a de profondément antihumain dans
la
conception fordienne de l’oisiveté. Ford a créé un second dimanche da
157
dément antihumain dans la conception fordienne de
l’
oisiveté. Ford a créé un second dimanche dans la semaine, « retouché l
158
e l’oisiveté. Ford a créé un second dimanche dans
la
semaine, « retouché l’œuvre de la Création », comme dit Ferrero. Le b
159
éé un second dimanche dans la semaine, « retouché
l’
œuvre de la Création », comme dit Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il
160
d dimanche dans la semaine, « retouché l’œuvre de
la
Création », comme dit Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il ne peut vo
161
uché l’œuvre de la Création », comme dit Ferrero.
Le
bon peuple s’extasie. Il ne peut voir la duperie : ce jeu du chat et
162
Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il ne peut voir
la
duperie : ce jeu du chat et de la souris ; si Ford relâche les ouvrie
163
Il ne peut voir la duperie : ce jeu du chat et de
la
souris ; si Ford relâche les ouvriers et leur donne une apparence de
164
ce jeu du chat et de la souris ; si Ford relâche
les
ouvriers et leur donne une apparence de liberté, c’est pour mieux les
165
donne une apparence de liberté, c’est pour mieux
les
prendre dans son engrenage. L’emploi de leurs loisirs est prévu. Il e
166
c’est pour mieux les prendre dans son engrenage.
L’
emploi de leurs loisirs est prévu. Il est déterminé par la réclame, le
167
de leurs loisirs est prévu. Il est déterminé par
la
réclame, les produits Ford qu’il faut user, etc. Il a pour but vérita
168
isirs est prévu. Il est déterminé par la réclame,
les
produits Ford qu’il faut user, etc. Il a pour but véritable d’augment
169
ut user, etc. Il a pour but véritable d’augmenter
la
consommation. Il rend plus complet l’esclavage de l’ouvrier, puisqu’i
170
d’augmenter la consommation. Il rend plus complet
l’
esclavage de l’ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à son repos dans le cy
171
consommation. Il rend plus complet l’esclavage de
l’
ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à son repos dans le cycle de la produ
172
ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à son repos dans
le
cycle de la production. Cercle vicieux : plus la production s’intensi
173
squ’il englobe jusqu’à son repos dans le cycle de
la
production. Cercle vicieux : plus la production s’intensifie, plus il
174
le cycle de la production. Cercle vicieux : plus
la
production s’intensifie, plus il faut créer de besoins et de loisirs.
175
plus il faut créer de besoins et de loisirs. Or,
l’
industrie ne peut subsister qu’en progressant. Mais la nature humaine
176
dustrie ne peut subsister qu’en progressant. Mais
la
nature humaine a des limites. Et le temps approche où elles seront at
177
ressant. Mais la nature humaine a des limites. Et
le
temps approche où elles seront atteintes. On peut se demander jusqu’à
178
qu’à quel point Ford est conscient des buts et de
l’
avenir de son effort. Pour mon compte, je crois que l’idée fixe de pro
179
enir de son effort. Pour mon compte, je crois que
l’
idée fixe de produire peut très bien envahir un cerveau moderne au poi
180
n’empêche pas notre industriel de philosopher sur
les
sujets les plus divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de la m
181
as notre industriel de philosopher sur les sujets
les
plus divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de la mentalité ca
182
el de philosopher sur les sujets les plus divers.
Les
aphorismes sont assez révélateurs de la mentalité capitaliste américa
183
divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de
la
mentalité capitaliste américaine. Voici, par exemple, une définition
184
américaine. Voici, par exemple, une définition de
la
liberté : La liberté consiste à travailler pendant le temps convenab
185
ici, par exemple, une définition de la liberté :
La
liberté consiste à travailler pendant le temps convenable et à gagner
186
berté : La liberté consiste à travailler pendant
le
temps convenable et à gagner, par ce moyen, de quoi vivre convenablem
187
ement tout en restant maître de régler à sa guise
le
détail de sa vie privée. Cette liberté particulière, et cent autres p
188
e, et cent autres pareilles, composent, au total,
la
grande Liberté idéale et mettent de l’huile dans les rouages de la vi
189
au total, la grande Liberté idéale et mettent de
l’
huile dans les rouages de la vie quotidienne. Cette Liberté idéale ré
190
grande Liberté idéale et mettent de l’huile dans
les
rouages de la vie quotidienne. Cette Liberté idéale réduite au rôle
191
idéale et mettent de l’huile dans les rouages de
la
vie quotidienne. Cette Liberté idéale réduite au rôle d’huile dans l
192
Cette Liberté idéale réduite au rôle d’huile dans
les
rouages, n’est-ce pas charmant et prometteur ? Et que dire de cette a
193
ette admirable simplification : « Sur quoi repose
la
société ? Sur les hommes et les moyens grâce auxquels on cultive, on
194
mplification : « Sur quoi repose la société ? Sur
les
hommes et les moyens grâce auxquels on cultive, on fabrique, on trans
195
« Sur quoi repose la société ? Sur les hommes et
les
moyens grâce auxquels on cultive, on fabrique, on transporte. » « Tou
196
» « Toute notre gloire est dans nos œuvres, dans
le
prix que nous payons à la terre la satisfaction de nos besoins. » — F
197
t dans nos œuvres, dans le prix que nous payons à
la
terre la satisfaction de nos besoins. » — Ford se moque de la philoso
198
s œuvres, dans le prix que nous payons à la terre
la
satisfaction de nos besoins. » — Ford se moque de la philosophie. Il
199
satisfaction de nos besoins. » — Ford se moque de
la
philosophie. Il ne peut empêcher que son attitude ne porte un nom phi
200
ations plus nettes encore : « Je ne considère pas
les
machines Ford simplement comme des machines. J’y vois la réalisation
201
ines Ford simplement comme des machines. J’y vois
la
réalisation concrète d’une théorie qui tend à faire de ce monde un sé
202
tend à faire de ce monde un séjour meilleur pour
les
hommes. » C’est le bonheur, le salut par l’auto. Philosophie réclame.
203
monde un séjour meilleur pour les hommes. » C’est
le
bonheur, le salut par l’auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ai à cœ
204
our meilleur pour les hommes. » C’est le bonheur,
le
salut par l’auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ai à cœur, aujourd’
205
pour les hommes. » C’est le bonheur, le salut par
l’
auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ai à cœur, aujourd’hui, c’est de
206
j’ai à cœur, aujourd’hui, c’est de démontrer que
les
idées mises en pratique chez nous ne concernent pas particulièrement
207
ique chez nous ne concernent pas particulièrement
les
autos et les tracteurs, mais composent en quelque manière, un code un
208
s ne concernent pas particulièrement les autos et
les
tracteurs, mais composent en quelque manière, un code universel ! » R
209
e matérialiste ? Un seul doute effleure Ford vers
la
fin de son livre : Le problème de la production a été brillamment ré
210
l doute effleure Ford vers la fin de son livre :
Le
problème de la production a été brillamment résolu… Mais nous nous ab
211
e Ford vers la fin de son livre : Le problème de
la
production a été brillamment résolu… Mais nous nous absorbons trop da
212
e pensons pas assez aux raisons que nous avons de
le
faire. Tout notre système de concurrence, tout notre effort de créati
213
concurrence, tout notre effort de création, tout
le
jeu de nos facultés semblent dirigés uniquement vers la production ma
214
de nos facultés semblent dirigés uniquement vers
la
production matérielle et vers la richesse qui en est le fruit. On ne
215
uniquement vers la production matérielle et vers
la
richesse qui en est le fruit. On ne saurait mieux dire. Mais il faud
216
duction matérielle et vers la richesse qui en est
le
fruit. On ne saurait mieux dire. Mais il faudrait en tirer des consé
217
de technique. Il n’a pas senti qu’il touchait là
le
nœud vital du problème moderne. D’ailleurs, les idées générales de ce
218
là le nœud vital du problème moderne. D’ailleurs,
les
idées générales de cette sorte sont rares dans son livre. En général,
219
èmes techniques où son triomphe est facile. C’est
le
technicien parfait qui combat les techniciens imparfaits. Il ne se de
220
st facile. C’est le technicien parfait qui combat
les
techniciens imparfaits. Il ne se demande jamais si la technique même
221
echniciens imparfaits. Il ne se demande jamais si
la
technique même la plus perfectionnée mérite les sacrifices qu’elle ex
222
its. Il ne se demande jamais si la technique même
la
plus perfectionnée mérite les sacrifices qu’elle exige de l’homme mod
223
si la technique même la plus perfectionnée mérite
les
sacrifices qu’elle exige de l’homme moderne. Paradoxes plus ou moins
224
fectionnée mérite les sacrifices qu’elle exige de
l’
homme moderne. Paradoxes plus ou moins intéressés, optimisme d’homme à
225
imisme d’homme à qui tout réussit, messianisme de
la
machine, méconnaissance glorieuse des forces spirituelles, le tout ag
226
méconnaissance glorieuse des forces spirituelles,
le
tout agrémenté d’humour et exposé avec un simplisme qui emporte à cou
227
t exposé avec un simplisme qui emporte à coup sûr
l’
adhésion du gros public : telle est l’idéologie de celui que M. Cambon
228
à coup sûr l’adhésion du gros public : telle est
l’
idéologie de celui que M. Cambon, dans sa préface, égale aux plus gran
229
sa préface, égale aux plus grands esprits de tous
les
temps. On me dira que Ford a mieux à faire que de philosopher. Je le
230
a que Ford a mieux à faire que de philosopher. Je
le
veux. Mais si j’insiste un peu sur ses « idées », c’est pour souligne
231
idées », c’est pour souligner ce hiatus étrange :
l’
homme qu’on pourrait appeler le plus actif du monde, l’un de ceux qui
232
e hiatus étrange : l’homme qu’on pourrait appeler
le
plus actif du monde, l’un de ceux qui influent le plus sur notre civi
233
le plus actif du monde, l’un de ceux qui influent
le
plus sur notre civilisation, possède la philosophie la plus rudimenta
234
influent le plus sur notre civilisation, possède
la
philosophie la plus rudimentaire. Le phénomène n’est pas nouveau en O
235
us sur notre civilisation, possède la philosophie
la
plus rudimentaire. Le phénomène n’est pas nouveau en Occident, mais i
236
ion, possède la philosophie la plus rudimentaire.
Le
phénomène n’est pas nouveau en Occident, mais il est ici tragiquement
237
bien que notre temps ait prononcé définitivement
le
divorce de l’esprit et de l’action. III. Le fordisme contre l’Espr
238
e temps ait prononcé définitivement le divorce de
l’
esprit et de l’action. III. Le fordisme contre l’Esprit La formi
239
noncé définitivement le divorce de l’esprit et de
l’
action. III. Le fordisme contre l’Esprit La formidable erreur de
240
nt le divorce de l’esprit et de l’action. III.
Le
fordisme contre l’Esprit La formidable erreur de la bourgeoisie mo
241
esprit et de l’action. III. Le fordisme contre
l’
Esprit La formidable erreur de la bourgeoisie moderne c’est de croi
242
l’action. III. Le fordisme contre l’Esprit
La
formidable erreur de la bourgeoisie moderne c’est de croire que les c
243
rdisme contre l’Esprit La formidable erreur de
la
bourgeoisie moderne c’est de croire que les choses pourront aller ain
244
eur de la bourgeoisie moderne c’est de croire que
les
choses pourront aller ainsi longtemps encore. On se refuse à l’idée d
245
ront aller ainsi longtemps encore. On se refuse à
l’
idée d’une catastrophe, pourtant plus que probable, par crainte de se
246
lus que probable, par crainte de se voir obligé à
la
révision des valeurs, la plus difficile et la plus grave : celle qu’o
247
inte de se voir obligé à la révision des valeurs,
la
plus difficile et la plus grave : celle qu’on ne peut faire qu’au nom
248
é à la révision des valeurs, la plus difficile et
la
plus grave : celle qu’on ne peut faire qu’au nom de l’Esprit et de se
249
us grave : celle qu’on ne peut faire qu’au nom de
l’
Esprit et de ses exigences. Mais le « rien de nouveau sous le soleil »
250
e qu’au nom de l’Esprit et de ses exigences. Mais
le
« rien de nouveau sous le soleil » derrière lequel on se réfugie avec
251
de ses exigences. Mais le « rien de nouveau sous
le
soleil » derrière lequel on se réfugie avec une paresse et une légère
252
e avec une paresse et une légèreté inouïes, c’est
le
signe d’une complicité avec un état de choses funeste pour l’Esprit.
253
ne complicité avec un état de choses funeste pour
l’
Esprit. Si l’Esprit nous abandonne, c’est que nous avons voulu tenter
254
avec un état de choses funeste pour l’Esprit. Si
l’
Esprit nous abandonne, c’est que nous avons voulu tenter sans lui une
255
e que nous pensions gratuite : nous avons cherché
le
bonheur dans le développement matériel, avec l’arrière-pensée sournoi
256
ons gratuite : nous avons cherché le bonheur dans
le
développement matériel, avec l’arrière-pensée sournoise que, si cela
257
é le bonheur dans le développement matériel, avec
l’
arrière-pensée sournoise que, si cela ratait, on gardait toutes les au
258
sournoise que, si cela ratait, on gardait toutes
les
autres chances. J’accorderai que le progrès matériel n’est pas mauvai
259
rdait toutes les autres chances. J’accorderai que
le
progrès matériel n’est pas mauvais en soi. Mais par l’importance qu’i
260
ogrès matériel n’est pas mauvais en soi. Mais par
l’
importance qu’il a prise dans notre vie, il détourne la civilisation d
261
ortance qu’il a prise dans notre vie, il détourne
la
civilisation de son but véritable : aller à l’Esprit, y conduire les
262
ne la civilisation de son but véritable : aller à
l’
Esprit, y conduire les peuples. Ainsi, détournant de l’essentiel une g
263
son but véritable : aller à l’Esprit, y conduire
les
peuples. Ainsi, détournant de l’essentiel une grande part des forces
264
rit, y conduire les peuples. Ainsi, détournant de
l’
essentiel une grande part des forces humaines, il travaille contre l’E
265
nde part des forces humaines, il travaille contre
l’
Esprit. Rien n’est gratuit. Nous payons notre passion de posséder la m
266
st gratuit. Nous payons notre passion de posséder
la
matière du prix de la seule possession véritable, la connaissance de
267
s notre passion de posséder la matière du prix de
la
seule possession véritable, la connaissance de l’Esprit. C’est déjà u
268
matière du prix de la seule possession véritable,
la
connaissance de l’Esprit. C’est déjà un fait d’expérience. Et qui n’e
269
la seule possession véritable, la connaissance de
l’
Esprit. C’est déjà un fait d’expérience. Et qui n’en pourrait citer un
270
ple individuel ? Nous savons assez en quel mépris
l’
homme d’affaires à l’américaine tient les choses de l’Esprit. Dans le
271
savons assez en quel mépris l’homme d’affaires à
l’
américaine tient les choses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable
272
el mépris l’homme d’affaires à l’américaine tient
les
choses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable, « il se passera bi
273
mme d’affaires à l’américaine tient les choses de
l’
Esprit. Dans le cas le plus favorable, « il se passera bien de cette l
274
à l’américaine tient les choses de l’Esprit. Dans
le
cas le plus favorable, « il se passera bien de cette littérature ». P
275
ricaine tient les choses de l’Esprit. Dans le cas
le
plus favorable, « il se passera bien de cette littérature ». Plus tar
276
symphonies, ou autres œuvres destinées à charmer
les
loisirs de personnes oisives et raffinées, réunies pour admirer mutue
277
ement leur culture », dit Ford. Et tout est dit !
Le
simplisme arrogant avec lequel, de nos jours, on tranche les grandes
278
me arrogant avec lequel, de nos jours, on tranche
les
grandes questions humaines est une des manifestations les plus frappa
279
des questions humaines est une des manifestations
les
plus frappantes de notre régression. Cette perte du sens de l’âme se
280
antes de notre régression. Cette perte du sens de
l’
âme se nomme bon sens américain. On en fait quelque chose de jovial et
281
ophie. Mais, sans qu’on s’en doute, cela en prend
la
place. Les facultés de l’âme, inutilisées, s’atrophient. Pourvu, dit-
282
s, sans qu’on s’en doute, cela en prend la place.
Les
facultés de l’âme, inutilisées, s’atrophient. Pourvu, dit-on, que sub
283
en doute, cela en prend la place. Les facultés de
l’
âme, inutilisées, s’atrophient. Pourvu, dit-on, que subsiste le peu de
284
isées, s’atrophient. Pourvu, dit-on, que subsiste
le
peu de morale nécessaire aux affaires, tout ira bien. (On pense que l
285
ssaire aux affaires, tout ira bien. (On pense que
les
formes de la morale peuvent exister sans leur substance religieuse.)
286
aires, tout ira bien. (On pense que les formes de
la
morale peuvent exister sans leur substance religieuse.) L’homme moder
287
peuvent exister sans leur substance religieuse.)
L’
homme moderne manie les choses de l’âme avec une maladresse de barbare
288
leur substance religieuse.) L’homme moderne manie
les
choses de l’âme avec une maladresse de barbare. IV. « En être » ou
289
religieuse.) L’homme moderne manie les choses de
l’
âme avec une maladresse de barbare. IV. « En être » ou ne pas en êt
290
en être Une fois qu’on a compris à quel point
le
fordisme et l’Esprit sont incompatibles, le monde moderne impose ce d
291
fois qu’on a compris à quel point le fordisme et
l’
Esprit sont incompatibles, le monde moderne impose ce dilemme : « en ê
292
point le fordisme et l’Esprit sont incompatibles,
le
monde moderne impose ce dilemme : « en être » ou ne pas en être, c’es
293
» ou ne pas en être, c’est-à-dire se soumettre à
la
technique et s’abrutir spirituellement — ou se soumettre à l’Esprit,
294
et s’abrutir spirituellement — ou se soumettre à
l’
Esprit, et tomber presque fatalement dans un anarchisme stérile. 1° Ac
295
atalement dans un anarchisme stérile. 1° Accepter
la
technique et ses conditions. Dans cette mécanique bien huilée, au mou
296
nt si régulier qu’il en devient insensible et que
la
fatigue semble disparaître, l’homme s’abandonne à des lois géométriqu
297
insensible et que la fatigue semble disparaître,
l’
homme s’abandonne à des lois géométriques. Un jeu de chiffres d’horlog
298
une fois pour toutes et qu’il sent immuable comme
la
mort le restitue au monde vers 5 heures du soir, dans la détresse des
299
pour toutes et qu’il sent immuable comme la mort
le
restitue au monde vers 5 heures du soir, dans la détresse des dernièr
300
le restitue au monde vers 5 heures du soir, dans
la
détresse des dernières sirènes. Au monde, c’est-à-dire à une nature d
301
sirènes. Au monde, c’est-à-dire à une nature dont
l’
usine lui a fait oublier jusqu’à l’existence, et à une liberté qu’il s
302
ne nature dont l’usine lui a fait oublier jusqu’à
l’
existence, et à une liberté qu’il s’empresse d’aliéner au profit de pl
303
vec ses désirs réels, et dont il subit docilement
l’
abstraite et commerciale nécessité. Ennui, fatigue, sommeil sans prièr
304
il sans prière. Cela s’appelle encore vivre. Mais
l’
homme qui était un membre vivant dans le corps de la Nature, lié par l
305
vre. Mais l’homme qui était un membre vivant dans
le
corps de la Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus pr
306
homme qui était un membre vivant dans le corps de
la
Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus profonds à tou
307
membre vivant dans le corps de la Nature, lié par
les
liens les plus subtils et les plus profonds à tous les autres membres
308
ant dans le corps de la Nature, lié par les liens
les
plus subtils et les plus profonds à tous les autres membres de la Nat
309
la Nature, lié par les liens les plus subtils et
les
plus profonds à tous les autres membres de la Nature, choses, bêtes e
310
iens les plus subtils et les plus profonds à tous
les
autres membres de la Nature, choses, bêtes et anges, — le voici deven
311
et les plus profonds à tous les autres membres de
la
Nature, choses, bêtes et anges, — le voici devenu sourd à cette harmo
312
s membres de la Nature, choses, bêtes et anges, —
le
voici devenu sourd à cette harmonie universelle, incapable d’en compr
313
e harmonie universelle, incapable d’en comprendre
les
correspondances divines et humaines, insensible même à sa déchéance,
314
ines, insensible même à sa déchéance, abandonné à
la
lutte tragique et absurde des lois économiques et des exigences les p
315
et absurde des lois économiques et des exigences
les
plus rudimentaires de son corps. Il a perdu le contact avec les chose
316
s les plus rudimentaires de son corps. Il a perdu
le
contact avec les choses naturelles, et par là même, avec les surnatur
317
entaires de son corps. Il a perdu le contact avec
les
choses naturelles, et par là même, avec les surnaturelles. Il en ress
318
avec les choses naturelles, et par là même, avec
les
surnaturelles. Il en ressent une vague et intermittente détresse, — q
319
ntermittente détresse, — qu’il met d’ailleurs sur
le
compte de sa fatigue. Neurasthénie. La conquête du confort matériel l
320
lleurs sur le compte de sa fatigue. Neurasthénie.
La
conquête du confort matériel l’a laissé oublier les valeurs de l’espr
321
ue. Neurasthénie. La conquête du confort matériel
l’
a laissé oublier les valeurs de l’esprit au point qu’il n’éprouve plus
322
a conquête du confort matériel l’a laissé oublier
les
valeurs de l’esprit au point qu’il n’éprouve plus même cette carence
323
onfort matériel l’a laissé oublier les valeurs de
l’
esprit au point qu’il n’éprouve plus même cette carence ; seulement, p
324
térielles, il a laissé se détendre, ou il a cassé
les
ressorts de sa joie : l’effort libre et généreux, le sentiment d’avoi
325
détendre, ou il a cassé les ressorts de sa joie :
l’
effort libre et généreux, le sentiment d’avoir inventé ou compris par
326
ressorts de sa joie : l’effort libre et généreux,
le
sentiment d’avoir inventé ou compris par soi-même, la liberté et une
327
entiment d’avoir inventé ou compris par soi-même,
la
liberté et une certaine durée normale et capricieuse dans le plaisir,
328
et une certaine durée normale et capricieuse dans
le
plaisir, la conscience de ses besoins et de ses buts propres, humains
329
ine durée normale et capricieuse dans le plaisir,
la
conscience de ses besoins et de ses buts propres, humains et divins.
330
s loisirs. Ford lui a donné une auto pour admirer
la
nature entre 17 et 19 heures : vraiment, il ne lui manque plus rien —
331
ures : vraiment, il ne lui manque plus rien — que
l’
envie. Mauvais travail. Il a perdu le sens religieux, cosmique, de l’e
332
s rien — que l’envie. Mauvais travail. Il a perdu
le
sens religieux, cosmique, de l’effort humain. Il ne peut plus situer
333
avail. Il a perdu le sens religieux, cosmique, de
l’
effort humain. Il ne peut plus situer son effort individuel dans le mo
334
Il ne peut plus situer son effort individuel dans
le
monde, lui attribuer sa véritable valeur. Il sent obscurément que son
335
t obscurément que son travail est antinaturel. Il
le
méprise ou le subit, mais, jusque dans son repos, il en est l’esclave
336
que son travail est antinaturel. Il le méprise ou
le
subit, mais, jusque dans son repos, il en est l’esclave. Pour s’être
337
le subit, mais, jusque dans son repos, il en est
l’
esclave. Pour s’être exclu lui-même de l’ordre de la nature, il est co
338
l en est l’esclave. Pour s’être exclu lui-même de
l’
ordre de la nature, il est condamné à ne plus saisir que des rapports
339
esclave. Pour s’être exclu lui-même de l’ordre de
la
nature, il est condamné à ne plus saisir que des rapports abstraits e
340
à ne plus saisir que des rapports abstraits entre
les
choses. Il ne comprend presque plus rien à l’Univers. Par la techniqu
341
re les choses. Il ne comprend presque plus rien à
l’
Univers. Par la technique, l’Occidental a prétendu maîtriser la matièr
342
Il ne comprend presque plus rien à l’Univers. Par
la
technique, l’Occidental a prétendu maîtriser la matière et parvenir à
343
presque plus rien à l’Univers. Par la technique,
l’
Occidental a prétendu maîtriser la matière et parvenir à une liberté p
344
r la technique, l’Occidental a prétendu maîtriser
la
matière et parvenir à une liberté plus haute. Or, la technique a révé
345
matière et parvenir à une liberté plus haute. Or,
la
technique a révélé des exigences telles que l’Esprit ne peut les supp
346
r, la technique a révélé des exigences telles que
l’
Esprit ne peut les supporter. Il abandonne donc la place, mais c’est p
347
révélé des exigences telles que l’Esprit ne peut
les
supporter. Il abandonne donc la place, mais c’est pourtant lui seul q
348
l’Esprit ne peut les supporter. Il abandonne donc
la
place, mais c’est pourtant lui seul qui nous permettrait de jouir de
349
l qui nous permettrait de jouir de notre liberté.
La
victoire mécanicienne est une victoire à la Pyrrhus. Elle nous donne
350
erté. La victoire mécanicienne est une victoire à
la
Pyrrhus. Elle nous donne une liberté dont nous ne sommes plus dignes.
351
dont nous ne sommes plus dignes. Nous perdons, en
l’
acquérant, par l’effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous la fi
352
es plus dignes. Nous perdons, en l’acquérant, par
l’
effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. 2°
353
es. Nous perdons, en l’acquérant, par l’effort de
l’
acquérir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter l’
354
dons, en l’acquérant, par l’effort de l’acquérir,
les
forces mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter l’esprit, et se
355
l’effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous
la
firent désirer. 2° Accepter l’esprit, et ses conditions. Je dis que
356
es mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter
l’
esprit, et ses conditions. Je dis que les êtres encore doués de quelqu
357
Accepter l’esprit, et ses conditions. Je dis que
les
êtres encore doués de quelque sensibilité spirituelle deviennent par
358
de quelque sensibilité spirituelle deviennent par
le
seul fait de rester eux-mêmes dans un monde fordisé, des anarchistes.
359
mêmes dans un monde fordisé, des anarchistes. Car
l’
Esprit n’est pas un luxe, n’est pas une faculté destinée à amuser nos
360
s exigences sont en contradiction avec celles que
le
développement de la technique impose au monde moderne. Ces êtres, d’u
361
contradiction avec celles que le développement de
la
technique impose au monde moderne. Ces êtres, d’une espèce de plus en
362
en plus rare, qui savent encore quelque chose de
la
vie profonde, qui voient encore des vérités invisibles, qui gardent,
363
t considèrent comme un « cas » très spécial, — on
les
écarte des engrenages où ils risqueraient de faire grain de sable. Il
364
. Ils se réfugient dans ce qu’on pourrait appeler
les
classes privilégiées de l’esprit : fortunes oisives ou misères sans e
365
u’on pourrait appeler les classes privilégiées de
l’
esprit : fortunes oisives ou misères sans espoir. On en rencontre enco
366
misères sans espoir. On en rencontre encore parmi
les
jeunes gens, jusqu’au jour où, comme on dit, sans doute par ironie, «
367
u jour où, comme on dit, sans doute par ironie, «
la
vie les prend ». Irréguliers aux yeux du monde ; la proie d’on ne sai
368
où, comme on dit, sans doute par ironie, « la vie
les
prend ». Irréguliers aux yeux du monde ; la proie d’on ne sait quelle
369
vie les prend ». Irréguliers aux yeux du monde ;
la
proie d’on ne sait quelles forces occultes sans doute dangereuses, pu
370
ces occultes sans doute dangereuses, puisqu’elles
les
rendent inutilisables dans les rouages de la vie moderne. Le triomphe
371
uses, puisqu’elles les rendent inutilisables dans
les
rouages de la vie moderne. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à dev
372
les les rendent inutilisables dans les rouages de
la
vie moderne. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à devenir l’apanage
373
inutilisables dans les rouages de la vie moderne.
Le
triomphe de Ford réduira l’Esprit à devenir l’apanage d’une sorte de
374
es de la vie moderne. Le triomphe de Ford réduira
l’
Esprit à devenir l’apanage d’une sorte de franc-maçonnerie de quelques
375
e. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à devenir
l’
apanage d’une sorte de franc-maçonnerie de quelques centaines d’indivi
376
a bientôt traquée avec la dernière rigueur : avec
la
rigueur de la nécessité — puisqu’elle est inutile au grand dessein ma
377
uée avec la dernière rigueur : avec la rigueur de
la
nécessité — puisqu’elle est inutile au grand dessein matérialiste de
378
elle est inutile au grand dessein matérialiste de
l’
Occident. La logique, parlant par la bouche de Ford : « Inutile, donc
379
tile au grand dessein matérialiste de l’Occident.
La
logique, parlant par la bouche de Ford : « Inutile, donc à détruire.
380
térialiste de l’Occident. La logique, parlant par
la
bouche de Ford : « Inutile, donc à détruire. » Ford a raison, une foi
381
e ? « Vous ne pouvez servir Dieu et Mammon », dit
l’
Écriture. ⁂ Je ne pense pas qu’une attitude réactionnaire qui consist
382
tionnaire qui consisterait à vouloir en revenir à
la
période préindustrielle soit autre chose qu’une échappatoire utopique
383
uts — si bas soient-ils — d’une civilisation sous
le
poids de laquelle nous risquons de périr. Il se prépare déjà des révo
384
isme exaspéré, devenu presque fou dans sa prison.
Les
intellectuels d’aujourd’hui ont une tâche pressante : chercher s’il e
385
le d’échapper au fatal dilemme. Premiers pas vers
la
solution : l’existence du dilemme. Second pas : en poser les termes a
386
au fatal dilemme. Premiers pas vers la solution :
l’
existence du dilemme. Second pas : en poser les termes avec netteté et
387
n : l’existence du dilemme. Second pas : en poser
les
termes avec netteté et courage. Pour le reste, je pense que c’est une
388
en poser les termes avec netteté et courage. Pour
le
reste, je pense que c’est une question de foi. 1. Une enquête fait
389
oi. 1. Une enquête faite à Genève a révélé que
les
livres les plus lus du grand public sont Ma vie et mon œuvre, de Ford
390
ne enquête faite à Genève a révélé que les livres
les
plus lus du grand public sont Ma vie et mon œuvre, de Ford et Mon cur
391
ont Ma vie et mon œuvre, de Ford et Mon curé chez
les
riches, de Clément Vautel. Dans les pays de langue allemande, son suc
392
Mon curé chez les riches, de Clément Vautel. Dans
les
pays de langue allemande, son succès est encore plus grand, et de mei
393
rand, et de meilleure qualité. Je ne parle pas de
l’
Amérique. 2. Victor Cambon, préface à Henry Ford, Ma vie et mon œuvre
394
rd, Ma vie et mon œuvre, Paris, Payot, 1925. 3.
L’
Illustration, 20 novembre 1926. 4. Ici et là, la révolte perce : « Ju
395
L’Illustration, 20 novembre 1926. 4. Ici et là,
la
révolte perce : « Jugendbewegung » en Allemagne ; surréalisme en Fran
396
ée mystique en Russie. a. Rougemont Denis de, «
Le
péril Ford », Foi et Vie, Paris, février 1928, p. 189-202.
397
ces mortelles assiègent notre condition humaine :
la
liberté de l’esprit et les lois de la matière. Pris entre une anarchi
398
assiègent notre condition humaine : la liberté de
l’
esprit et les lois de la matière. Pris entre une anarchie et une fatal
399
tre condition humaine : la liberté de l’esprit et
les
lois de la matière. Pris entre une anarchie et une fatalité également
400
n humaine : la liberté de l’esprit et les lois de
la
matière. Pris entre une anarchie et une fatalité également funestes,
401
atalité également funestes, également démesurées,
l’
homme ne peut subsister qu’en tant que son génie parvient à composer l
402
ster qu’en tant que son génie parvient à composer
les
deux périls en une résultante qui est la civilisation. Appelons human
403
omposer les deux périls en une résultante qui est
la
civilisation. Appelons humanisme l’art de composer pour la défense de
404
tante qui est la civilisation. Appelons humanisme
l’
art de composer pour la défense de l’homme et son illustration des pui
405
sation. Appelons humanisme l’art de composer pour
la
défense de l’homme et son illustration des puissances de nature inhum
406
ns humanisme l’art de composer pour la défense de
l’
homme et son illustration des puissances de nature inhumaine. Nous pou
407
humaine. Nous pourrons définir un tel humanisme :
l’
organe d’équilibre de la civilisation. Nous tenions de l’Antiquité, et
408
éfinir un tel humanisme : l’organe d’équilibre de
la
civilisation. Nous tenions de l’Antiquité, et singulièrement de la Gr
409
e d’équilibre de la civilisation. Nous tenions de
l’
Antiquité, et singulièrement de la Grèce, le sentiment d’une harmonie
410
Nous tenions de l’Antiquité, et singulièrement de
la
Grèce, le sentiment d’une harmonie nécessaire entre nos gestes et nos
411
ns de l’Antiquité, et singulièrement de la Grèce,
le
sentiment d’une harmonie nécessaire entre nos gestes et nos pensées,
412
os pensées, nos créations et notre connaissance ;
le
sentiment d’une harmonie à sauvegarder au sein de nos connaissances m
413
garder au sein de nos connaissances même, et dans
l’
allure de leur progrès. Les humanités nous paraissaient devoir transme
414
aissances même, et dans l’allure de leur progrès.
Les
humanités nous paraissaient devoir transmettre aux générations cette
415
n. Ainsi passèrent quelques siècles ; ainsi passa
le
xixe . On le laissa installer ses machines : elles avaient l’air de g
416
èrent quelques siècles ; ainsi passa le xixe . On
le
laissa installer ses machines : elles avaient l’air de grands joujoux
417
ines : elles avaient l’air de grands joujoux ; et
l’
on continua d’apprendre rosa : la rose, d’admirer le Parthénon et le c
418
nds joujoux ; et l’on continua d’apprendre rosa :
la
rose, d’admirer le Parthénon et le courage de Mucius Scevola. On croy
419
on continua d’apprendre rosa : la rose, d’admirer
le
Parthénon et le courage de Mucius Scevola. On croyait au progrès, sou
420
prendre rosa : la rose, d’admirer le Parthénon et
le
courage de Mucius Scevola. On croyait au progrès, sous n’importe quel
421
« gagnés » par l’un des éléments de notre destin.
La
composante matérielle vient de l’emporter. Elle est en passe de gauch
422
e notre destin. La composante matérielle vient de
l’
emporter. Elle est en passe de gauchir notre civilisation à tel point
423
sse de gauchir notre civilisation à tel point que
l’
homme, affolé, soudain, doute s’il est encore maître de la redresser.
424
affolé, soudain, doute s’il est encore maître de
la
redresser. C’est qu’il n’y a plus d’humanisme, s’il subsiste des huma
425
a plus d’humanisme, s’il subsiste des humanités.
L’
humanisme est compromis virtuellement dès lors que la science proclame
426
umanisme est compromis virtuellement dès lors que
la
science proclame son autonomie vis-à-vis de la métaphysique. L’équili
427
ue la science proclame son autonomie vis-à-vis de
la
métaphysique. L’équilibre de notre esprit ne comporte pas l’égalité d
428
clame son autonomie vis-à-vis de la métaphysique.
L’
équilibre de notre esprit ne comporte pas l’égalité de droit de ces de
429
ique. L’équilibre de notre esprit ne comporte pas
l’
égalité de droit de ces deux disciplines. Car la science à peine libér
430
s l’égalité de droit de ces deux disciplines. Car
la
science à peine libérée, demande la tête de la métaphysique. Elle n’e
431
ciplines. Car la science à peine libérée, demande
la
tête de la métaphysique. Elle n’entend que ses intérêts. Elle eut nag
432
ar la science à peine libérée, demande la tête de
la
métaphysique. Elle n’entend que ses intérêts. Elle eut naguère des in
433
Elle eut naguère des insolences d’affranchi, dont
les
philosophes demeurent tout intimidés. Et nous vîmes le matérialisme m
434
ilosophes demeurent tout intimidés. Et nous vîmes
le
matérialisme mener son morne triomphe. Certes, la plupart de nos phil
435
, la plupart de nos philosophies, officiellement,
l’
ont renié. Mais pourquoi tant et toujours plus de mal à prouver la lib
436
s pourquoi tant et toujours plus de mal à prouver
la
liberté humaine ? C’est que l’on s’est trop bien assimilé les tours d
437
s de mal à prouver la liberté humaine ? C’est que
l’
on s’est trop bien assimilé les tours de la pensée scientifique. Cherc
438
humaine ? C’est que l’on s’est trop bien assimilé
les
tours de la pensée scientifique. Cherchant des lois, la science ne pe
439
st que l’on s’est trop bien assimilé les tours de
la
pensée scientifique. Cherchant des lois, la science ne peut trouver q
440
rs de la pensée scientifique. Cherchant des lois,
la
science ne peut trouver que des déterminismes. Soumettre l’esprit à s
441
ne peut trouver que des déterminismes. Soumettre
l’
esprit à ses méthodes, c’est en réalité le soumettre aux lois de l’ord
442
umettre l’esprit à ses méthodes, c’est en réalité
le
soumettre aux lois de l’ordre matériel ; c’est se condamner donc à ne
443
thodes, c’est en réalité le soumettre aux lois de
l’
ordre matériel ; c’est se condamner donc à ne l’apercevoir que dans se
444
e l’ordre matériel ; c’est se condamner donc à ne
l’
apercevoir que dans ses servitudes5. Aussi la critique du matérialisme
445
à ne l’apercevoir que dans ses servitudes5. Aussi
la
critique du matérialisme entreprise par certains philosophes des scie
446
tains philosophes des sciences fait-elle songer à
l’
activité de cet espion anglais qui parvint durant la guerre à diriger
447
activité de cet espion anglais qui parvint durant
la
guerre à diriger le service de contre-espionnage allemand chargé de s
448
on anglais qui parvint durant la guerre à diriger
le
service de contre-espionnage allemand chargé de sa filature6. Ah ! co
449
de laboratoire dont notre pensée reste imprégnée.
La
science se moque des nuages qui animaient la matière d’intentions mor
450
née. La science se moque des nuages qui animaient
la
matière d’intentions morales. Elle-même cependant est tout occupée à
451
lle-même cependant est tout occupée à minéraliser
l’
esprit. La tâche urgente d’un nouvel humanisme sera de nous dégager de
452
ependant est tout occupée à minéraliser l’esprit.
La
tâche urgente d’un nouvel humanisme sera de nous dégager des fatalité
453
ra de nous dégager des fatalités dont nous voyons
l’
empire s’étendre dans tous les domaines de notre existence, inclinant
454
tés dont nous voyons l’empire s’étendre dans tous
les
domaines de notre existence, inclinant nos utopies mêmes, desséchant
455
xistence, inclinant nos utopies mêmes, desséchant
les
sources de notre foi. Qui parlait donc d’un « humanisme scientifique
456
rs lois peser sur notre vie : s’agit-il d’enrayer
la
science ? Non, mais que l’esprit qui l’a créée, la surpasse7. Seul un
457
: s’agit-il d’enrayer la science ? Non, mais que
l’
esprit qui l’a créée, la surpasse7. Seul un parti pris constant en fav
458
d’enrayer la science ? Non, mais que l’esprit qui
l’
a créée, la surpasse7. Seul un parti pris constant en faveur de l’espr
459
a science ? Non, mais que l’esprit qui l’a créée,
la
surpasse7. Seul un parti pris constant en faveur de l’esprit peut mai
460
rpasse7. Seul un parti pris constant en faveur de
l’
esprit peut maintenir l’équilibre de l’esprit et de la matière. L’huma
461
ris constant en faveur de l’esprit peut maintenir
l’
équilibre de l’esprit et de la matière. L’humanisme moderne sera ce pa
462
faveur de l’esprit peut maintenir l’équilibre de
l’
esprit et de la matière. L’humanisme moderne sera ce parti pris, spiri
463
prit peut maintenir l’équilibre de l’esprit et de
la
matière. L’humanisme moderne sera ce parti pris, spiritualiste — ou n
464
intenir l’équilibre de l’esprit et de la matière.
L’
humanisme moderne sera ce parti pris, spiritualiste — ou ne méritera p
465
spiritualiste — ou ne méritera pas son nom. … Or,
la
rigueur de la science ne saurait être surmontée, sinon par la rigueur
466
— ou ne méritera pas son nom. … Or, la rigueur de
la
science ne saurait être surmontée, sinon par la rigueur au moins égal
467
e la science ne saurait être surmontée, sinon par
la
rigueur au moins égale d’une pensée qui par ailleurs participe de la
468
égale d’une pensée qui par ailleurs participe de
la
liberté : j’entends la pensée mystique. L’expérience mystique a la mê
469
par ailleurs participe de la liberté : j’entends
la
pensée mystique. L’expérience mystique a la même extension que l’huma
470
ipe de la liberté : j’entends la pensée mystique.
L’
expérience mystique a la même extension que l’humanité. On n’en saurai
471
tends la pensée mystique. L’expérience mystique a
la
même extension que l’humanité. On n’en saurait dire autant de notre r
472
ue. L’expérience mystique a la même extension que
l’
humanité. On n’en saurait dire autant de notre raison. Les faits mysti
473
ité. On n’en saurait dire autant de notre raison.
Les
faits mystiques — qu’on les prenne en l’état brut où notre pensée le
474
tant de notre raison. Les faits mystiques — qu’on
les
prenne en l’état brut où notre pensée le plus souvent les a laissés —
475
raison. Les faits mystiques — qu’on les prenne en
l’
état brut où notre pensée le plus souvent les a laissés — sont au moin
476
— qu’on les prenne en l’état brut où notre pensée
le
plus souvent les a laissés — sont au moins aussi « objectifs » que le
477
ne en l’état brut où notre pensée le plus souvent
les
a laissés — sont au moins aussi « objectifs » que les faits physiques
478
a laissés — sont au moins aussi « objectifs » que
les
faits physiques élaborés par la science. Mais, participant de notre v
479
objectifs » que les faits physiques élaborés par
la
science. Mais, participant de notre volonté et de la grâce, ils échap
480
science. Mais, participant de notre volonté et de
la
grâce, ils échappent à cette fatalité qui est le signe du monde matér
481
la grâce, ils échappent à cette fatalité qui est
le
signe du monde matériel. Je vois l’humanisme nouveau sous l’aspect d
482
lité qui est le signe du monde matériel. Je vois
l’
humanisme nouveau sous l’aspect d’une culture des facultés mystiques ;
483
monde matériel. Je vois l’humanisme nouveau sous
l’
aspect d’une culture des facultés mystiques ; d’une technique spiritue
484
e d’autres facultés capables d’équilibrer en nous
l’
esprit de géométrie. J’imagine une méthode, une façon d’appréhender la
485
e. J’imagine une méthode, une façon d’appréhender
la
vie, de hiérarchiser nos entreprises, qui ne bannirait pas de l’exist
486
archiser nos entreprises, qui ne bannirait pas de
l’
existence la poésie, ce sens du Réel. Je vois se composer en cette mét
487
entreprises, qui ne bannirait pas de l’existence
la
poésie, ce sens du Réel. Je vois se composer en cette méthode — peut-
488
cette méthode — peut-être séculairement — ce que
la
« rationalisation » aura laissé de Raison à l’Occident, avec certains
489
ue la « rationalisation » aura laissé de Raison à
l’
Occident, avec certains secrets de la méditation hindoue. Rêves, sans
490
de Raison à l’Occident, avec certains secrets de
la
méditation hindoue. Rêves, sans doute… Mais tout commence par des rêv
491
z aisé de prévoir et de décrire une tentation qui
le
guette et à laquelle tout humanisme paraît enclin : celle de créer un
492
nisme paraît enclin : celle de créer un modèle de
l’
homme. Peut-être a-t-il existé un modèle gréco-latin, un canon de l’âm
493
a-t-il existé un modèle gréco-latin, un canon de
l’
âme aussi bien que du corps. Il est possible que ce mythe ait animé l’
494
du corps. Il est possible que ce mythe ait animé
l’
humanisme de nos humanités. Il est certain qu’il a perdu son ascendant
495
étendit guère au-delà des limites du monde roman.
Le
type de chevalier et ses succédanés militaires et wagnériens a toujou
496
militaires et wagnériens a toujours prévalu parmi
les
peuples germaniques, où son prestige ne le cède aujourd’hui qu’à l’id
497
parmi les peuples germaniques, où son prestige ne
le
cède aujourd’hui qu’à l’idéal anglo-saxon du gentleman. Le rabais est
498
ques, où son prestige ne le cède aujourd’hui qu’à
l’
idéal anglo-saxon du gentleman. Le rabais est notable. On solde. Au ra
499
ujourd’hui qu’à l’idéal anglo-saxon du gentleman.
Le
rabais est notable. On solde. Au rayon des idéaux de confection voici
500
On solde. Au rayon des idéaux de confection voici
le
Citoyen du Monde, voici le Bon Européen, voici l’Américain à rendemen
501
ux de confection voici le Citoyen du Monde, voici
le
Bon Européen, voici l’Américain à rendement maximum. Et comptez que l
502
le Citoyen du Monde, voici le Bon Européen, voici
l’
Américain à rendement maximum. Et comptez que l’on poussera plus avant
503
i l’Américain à rendement maximum. Et comptez que
l’
on poussera plus avant la dégradation de cette idole qu’est l’Homme po
504
maximum. Et comptez que l’on poussera plus avant
la
dégradation de cette idole qu’est l’Homme pour l’homme. Toute décaden
505
a plus avant la dégradation de cette idole qu’est
l’
Homme pour l’homme. Toute décadence invente un syncrétisme. Rome eut c
506
la dégradation de cette idole qu’est l’Homme pour
l’
homme. Toute décadence invente un syncrétisme. Rome eut celui des dieu
507
celui des dieux ; nous aurons celui des races de
la
Terre. Non plus une foi commune, mais une moyenne de nos manières d’ê
508
nières d’être. Une sorte de commun dénominateur… (
Le
christianisme en connaît un, depuis toujours : il le nomme péché.) To
509
christianisme en connaît un, depuis toujours : il
le
nomme péché.) Tous les modèles que l’homme se propose ont ceci d’insu
510
ît un, depuis toujours : il le nomme péché.) Tous
les
modèles que l’homme se propose ont ceci d’insuffisant : qu’ils peuven
511
ujours : il le nomme péché.) Tous les modèles que
l’
homme se propose ont ceci d’insuffisant : qu’ils peuvent être atteints
512
qu’ils peuvent être atteints. Mais ce qui parfait
la
stature de l’homme, c’est l’effort pour se dépasser — indéfiniment. L
513
être atteints. Mais ce qui parfait la stature de
l’
homme, c’est l’effort pour se dépasser — indéfiniment. L’homme ne se c
514
Mais ce qui parfait la stature de l’homme, c’est
l’
effort pour se dépasser — indéfiniment. L’homme ne se comprend lui-mêm
515
, c’est l’effort pour se dépasser — indéfiniment.
L’
homme ne se comprend lui-même qu’en tant qu’il « passe l’homme » et pa
516
ne se comprend lui-même qu’en tant qu’il « passe
l’
homme » et participe, en esprit, d’un ordre transcendental. Un seul fu
517
: il y réussirait trop aisément. Ce qui manque à
l’
homme moderne, c’est un principe d’harmonie qui lui garantisse le cara
518
, c’est un principe d’harmonie qui lui garantisse
le
caractère « d’humanité » de ses démarches intellectuelles. Nous avons
519
ls nous menacent et nous empêchent de voir encore
le
surhumain. Être véritablement homme, c’est avoir accès au divin. Que
520
in. Que sert de parler d’humanisme « chrétien » ?
L’
humanisme est de l’homme, le christianisme est du nouvel homme. Tout h
521
ler d’humanisme « chrétien » ? L’humanisme est de
l’
homme, le christianisme est du nouvel homme. Tout humanisme véritable
522
anisme « chrétien » ? L’humanisme est de l’homme,
le
christianisme est du nouvel homme. Tout humanisme véritable conduit «
523
s-nous lui demander de plus, s’il laisse en blanc
la
place de Dieu. Mais où trouver les lévites assez purs pour garder vie
524
laisse en blanc la place de Dieu. Mais où trouver
les
lévites assez purs pour garder vierge parmi nous — voici déjà tant de
525
erge parmi nous — voici déjà tant de faux dieux —
le
fascinant éclat de ce vide ? 5. Je songe à la « psychologie scienti
526
— le fascinant éclat de ce vide ? 5. Je songe à
la
« psychologie scientifique » et à ce leurre qu’est l’attitude parallé
527
psychologie scientifique » et à ce leurre qu’est
l’
attitude paralléliste. 6. J’exagère probablement, car la sincérité de
528
ude paralléliste. 6. J’exagère probablement, car
la
sincérité de ce néo-scientisme tempéré — sinon vraiment converti — es
529
est hors de doute. Mais c’est Stilicon défendant
l’
Empire. 7. Or, Bergson, dans un discours prononcé à l’Académie des sc
530
ire. 7. Or, Bergson, dans un discours prononcé à
l’
Académie des sciences morales et politiques, en 1914, a posé le problè
531
s sciences morales et politiques, en 1914, a posé
le
problème en termes fort nets. (Cités par M. Brunschvicg dans Le Progr
532
termes fort nets. (Cités par M. Brunschvicg dans
Le
Progrès de la conscience dans la philosophie occidentale, p. 695.) 8
533
ets. (Cités par M. Brunschvicg dans Le Progrès de
la
conscience dans la philosophie occidentale, p. 695.) 8. Les humanité
534
Brunschvicg dans Le Progrès de la conscience dans
la
philosophie occidentale, p. 695.) 8. Les humanités y trouveraient bi
535
nce dans la philosophie occidentale, p. 695.) 8.
Les
humanités y trouveraient bien leur place : la connaissance des étymol
536
8. Les humanités y trouveraient bien leur place :
la
connaissance des étymologies est l’une des garanties les plus actives
537
naissance des étymologies est l’une des garanties
les
plus actives de la pensée. b. Rougemont Denis de, « Pour un humanis
538
ogies est l’une des garanties les plus actives de
la
pensée. b. Rougemont Denis de, « Pour un humanisme nouveau », Cahie
539
iers de Foi et Vie , Paris, 1930, p. 242-245. c.
Le
texte est précédé de la note suivante : « M. Denis de Rougemont a pou
540
is, 1930, p. 242-245. c. Le texte est précédé de
la
note suivante : « M. Denis de Rougemont a poursuivi des études de let
541
André Malraux,
La
Voie royale (février 1931)d M. André Malraux écrit des livres qu’o
542
jourd’hui d’un jeune écrivain. Son premier roman,
Les
Conquérants, décrivait la révolution communiste en Chine, et la figur
543
in. Son premier roman, Les Conquérants, décrivait
la
révolution communiste en Chine, et la figure centrale de Garine, anar
544
, décrivait la révolution communiste en Chine, et
la
figure centrale de Garine, anarchiste par goût de l’expérience, confé
545
figure centrale de Garine, anarchiste par goût de
l’
expérience, conférait à tout le livre un caractère assez directement a
546
chiste par goût de l’expérience, conférait à tout
le
livre un caractère assez directement autobiographique. La philosophie
547
un caractère assez directement autobiographique.
La
philosophie de ce Garine, en effet, ressemblait singulièrement à cell
548
oser dans un petit ouvrage aigu et dense intitulé
La
Tentation de l’Occident. La Voix royale 9, est, croyons-nous, le réc
549
it ouvrage aigu et dense intitulé La Tentation de
l’
Occident. La Voix royale 9, est, croyons-nous, le récit des événement
550
gu et dense intitulé La Tentation de l’Occident.
La
Voix royale 9, est, croyons-nous, le récit des événements qui précédè
551
l’Occident. La Voix royale 9, est, croyons-nous,
le
récit des événements qui précédèrent l’aventure chinoise de l’auteur.
552
ons-nous, le récit des événements qui précédèrent
l’
aventure chinoise de l’auteur. C’est un roman plus dépouillé, plus iné
553
événements qui précédèrent l’aventure chinoise de
l’
auteur. C’est un roman plus dépouillé, plus inégal aussi à certains ég
554
à certains égards et qui cette fois ne montre pas
l’
homme aux prises avec l’humanité civilisée, mais avec la nature la plu
555
cette fois ne montre pas l’homme aux prises avec
l’
humanité civilisée, mais avec la nature la plus sauvage. Comme Les Con
556
e aux prises avec l’humanité civilisée, mais avec
la
nature la plus sauvage. Comme Les Conquérants, c’est une sorte de rom
557
es avec l’humanité civilisée, mais avec la nature
la
plus sauvage. Comme Les Conquérants, c’est une sorte de roman d’avent
558
lisée, mais avec la nature la plus sauvage. Comme
Les
Conquérants, c’est une sorte de roman d’aventures significatives, et
559
orte de roman d’aventures significatives, et dont
le
tragique est décuplé par la valeur qu’il prend dans l’esprit des héro
560
gnificatives, et dont le tragique est décuplé par
la
valeur qu’il prend dans l’esprit des héros. Un jeune Français a décid
561
agique est décuplé par la valeur qu’il prend dans
l’
esprit des héros. Un jeune Français a décidé d’aller fouiller les temp
562
éros. Un jeune Français a décidé d’aller fouiller
les
temples en ruines de la Voie royale d’Angkor : il compte y découvrir
563
décidé d’aller fouiller les temples en ruines de
la
Voie royale d’Angkor : il compte y découvrir des bas-reliefs dont il
564
dont il pourrait tirer un prix considérable. Sur
le
bateau qui l’amène à pied d’œuvre, il s’associe à un aventurier danoi
565
ait tirer un prix considérable. Sur le bateau qui
l’
amène à pied d’œuvre, il s’associe à un aventurier danois, Perken, per
566
puissance militaire, sans doute irrégulière, dans
le
Siam, et auquel l’auteur prête des caractéristiques qui le rapprochen
567
, sans doute irrégulière, dans le Siam, et auquel
l’
auteur prête des caractéristiques qui le rapprochent du Garine des Con
568
et auquel l’auteur prête des caractéristiques qui
le
rapprochent du Garine des Conquérants : « hostilité à l’égard des val
569
eurs établies…, goût des actions des hommes lié à
la
conscience de leur vanité…, refus surtout. » Refus des « conditions »
570
té…, refus surtout. » Refus des « conditions » de
la
vie sociale, au profit d’une volonté de puissance dont l’objet demeur
571
ociale, au profit d’une volonté de puissance dont
l’
objet demeure assez incertain. Ce mystère qui entoure Perken durant to
572
ertain. Ce mystère qui entoure Perken durant tout
le
récit, au travers des aventures des deux explorateurs aux prises avec
573
s aventures des deux explorateurs aux prises avec
les
fièvres de la forêt tropicale, puis avec les sauvages Moïs, donne au
574
deux explorateurs aux prises avec les fièvres de
la
forêt tropicale, puis avec les sauvages Moïs, donne au personnage un
575
avec les fièvres de la forêt tropicale, puis avec
les
sauvages Moïs, donne au personnage un relief étonnant, mais contribue
576
onnant, mais contribue à créer des obscurités que
le
style très tendu de M. Malraux n’est pas fait pour dissiper. Perken,
577
parfois penser à ces gens — on en rencontre dans
les
affaires — qui se donnent une espèce d’autorité en ne parlant jamais
578
ar allusions et mots couverts. Il intimide un peu
le
lecteur qui ne se sent pas complice de ses secrets desseins. Au reste
579
t pas complice de ses secrets desseins. Au reste,
le
livre s’achève par sa mort, sans qu’on ait pu distinguer nettement à
580
e ces êtres qui agissent par désespoir, parce que
l’
action, à tout prendre, est une défense contre la mort — la mort parto
581
l’action, à tout prendre, est une défense contre
la
mort — la mort partout présente « comme l’irréfutable preuve de l’abs
582
à tout prendre, est une défense contre la mort —
la
mort partout présente « comme l’irréfutable preuve de l’absurdité de
583
contre la mort — la mort partout présente « comme
l’
irréfutable preuve de l’absurdité de la vie ». L’agonie lente de Perke
584
partout présente « comme l’irréfutable preuve de
l’
absurdité de la vie ». L’agonie lente de Perken, qui est tombé sur les
585
te « comme l’irréfutable preuve de l’absurdité de
la
vie ». L’agonie lente de Perken, qui est tombé sur les « pointes de g
586
l’irréfutable preuve de l’absurdité de la vie ».
L’
agonie lente de Perken, qui est tombé sur les « pointes de guerre » em
587
ie ». L’agonie lente de Perken, qui est tombé sur
les
« pointes de guerre » empoisonnées des Moïs, est un morceau admirable
588
eau admirable et atroce où éclate douloureusement
la
révolte d’un être pour qui la mort ne peut être qu’une « défaite mons
589
ate douloureusement la révolte d’un être pour qui
la
mort ne peut être qu’une « défaite monstrueuse ». Ainsi les incidents
590
e peut être qu’une « défaite monstrueuse ». Ainsi
les
incidents pathétiques de cette aventure composent en définitive une m
591
enture composent en définitive une méditation sur
le
destin de l’homme. Chez Perken comme chez Garine, même héroïsme dépou
592
ent en définitive une méditation sur le destin de
l’
homme. Chez Perken comme chez Garine, même héroïsme dépourvu d’idéal,
593
rvu d’idéal, même ardeur épuisante à vivre contre
la
mort, même fièvre de lucidité qui ne laisse subsister de tous les sen
594
ièvre de lucidité qui ne laisse subsister de tous
les
sentiments qu’une « fraternité désespérée » devant la mort. Tout cela
595
entiments qu’une « fraternité désespérée » devant
la
mort. Tout cela, dira-t-on, compose une figure originale certes, mais
596
s aventureux et atteints jusque dans leur goût de
l’
action par un intellectualisme anarchique. Je tiens au contraire le ca
597
ntellectualisme anarchique. Je tiens au contraire
le
cas Malraux pour hautement significatif de notre époque post-nietzsch
598
otre époque post-nietzschéenne et pré-communiste.
Le
cas Malraux, — le cas Perken si vous voulez. Les personnages de M. Ma
599
ietzschéenne et pré-communiste. Le cas Malraux, —
le
cas Perken si vous voulez. Les personnages de M. Malraux se ressemble
600
. Le cas Malraux, — le cas Perken si vous voulez.
Les
personnages de M. Malraux se ressemblent dans le souvenir du lecteur
601
Les personnages de M. Malraux se ressemblent dans
le
souvenir du lecteur : leur tempérament est plus fortement marqué que
602
s particularités extérieures, et c’est sans doute
le
tempérament de leur auteur. Qui n’a pas remarqué que les portraits de
603
pérament de leur auteur. Qui n’a pas remarqué que
les
portraits des meilleurs peintres ressemblent à ces peintres sous les
604
eilleurs peintres ressemblent à ces peintres sous
les
traits du modèle. Cet air de famille qu’ont tous les personnages pein
605
traits du modèle. Cet air de famille qu’ont tous
les
personnages peints par Rembrandt, et qui permet de les identifier au
606
ersonnages peints par Rembrandt, et qui permet de
les
identifier au premier coup d’œil, ce « commun dénominateur » d’expres
607
s si dissemblables, n’est-ce point cela qui forme
l’
autoportrait le plus profondément ressemblant du maître ? Ainsi appara
608
les, n’est-ce point cela qui forme l’autoportrait
le
plus profondément ressemblant du maître ? Ainsi apparaissent au trave
609
actions et des discours d’un Garine, d’un Perken,
les
traits d’une individualité morale qui n’est sans doute que l’idée la
610
une individualité morale qui n’est sans doute que
l’
idée la plus forte que M. Malraux se fait de lui-même. Je suis tenté d
611
ividualité morale qui n’est sans doute que l’idée
la
plus forte que M. Malraux se fait de lui-même. Je suis tenté de dire
612
représentatif et plus accompli. Perken-Garine est
la
personnification la plus frappante d’un certain « homme moderne », —
613
s accompli. Perken-Garine est la personnification
la
plus frappante d’un certain « homme moderne », — l’homme sans Dieu, q
614
plus frappante d’un certain « homme moderne », —
l’
homme sans Dieu, qui n’attend rien que de cette vie, mais auquel cette
615
e, parce qu’il refuse de lui trouver un sens dans
la
mort. L’homme qui pourrait se définir : « Dieu n’est pas, donc je sui
616
qu’il refuse de lui trouver un sens dans la mort.
L’
homme qui pourrait se définir : « Dieu n’est pas, donc je suis » ; l’h
617
t se définir : « Dieu n’est pas, donc je suis » ;
l’
homme seul ; areligieux, relié à rien. Plutôt aventurier que conquéran
618
abîmer, d’où renaître. Je ne sais pas aujourd’hui
le
livre « bien pensant » qui pose avec une pareille acuité le problème
619
bien pensant » qui pose avec une pareille acuité
le
problème central de notre civilisation. À ce titre, l’œuvre anarchist
620
oblème central de notre civilisation. À ce titre,
l’
œuvre anarchiste et antichrétienne que Malraux inaugure10 avec La Voie
621
ste et antichrétienne que Malraux inaugure10 avec
La
Voie royale, mérite mieux que notre curiosité humaine, ou que notre a
622
é humaine, ou que notre admiration littéraire11.
Le
courage presque agressif qu’elle apporte à décrire la figure de l’hom
623
ourage presque agressif qu’elle apporte à décrire
la
figure de l’homme moderne en proie au seul orgueil de vivre, dénonce
624
e agressif qu’elle apporte à décrire la figure de
l’
homme moderne en proie au seul orgueil de vivre, dénonce la paresse de
625
oderne en proie au seul orgueil de vivre, dénonce
la
paresse de la religion qui n’est qu’un refuge contre la vie. Elle nou
626
e au seul orgueil de vivre, dénonce la paresse de
la
religion qui n’est qu’un refuge contre la vie. Elle nous amène à un p
627
esse de la religion qui n’est qu’un refuge contre
la
vie. Elle nous amène à un point de jugement d’où les facilités de cer
628
vie. Elle nous amène à un point de jugement d’où
les
facilités de certaine foi apparaissent aussi « fausses » que l’effort
629
e certaine foi apparaissent aussi « fausses » que
l’
effort désespéré de ces conquérants de désert. 9. Chez Grasset. 10.
630
s conquérants de désert. 9. Chez Grasset. 10.
La
Voie royale n’est que l’introduction à une série de romans intitulés
631
9. Chez Grasset. 10. La Voie royale n’est que
l’
introduction à une série de romans intitulés Les Puissances du désert.
632
ue l’introduction à une série de romans intitulés
Les
Puissances du désert. 11. Le prix Goncourt, dit-on, eût été décerné
633
e romans intitulés Les Puissances du désert. 11.
Le
prix Goncourt, dit-on, eût été décerné à M. Malraux s’il n’avait nagu
634
ques passé outre à certains règlements concernant
la
propriété officielle de bas-reliefs cambodgiens. Je donne l’histoire
635
é officielle de bas-reliefs cambodgiens. Je donne
l’
histoire comme une fable. Il est peut-être curieux de noter que les pi
636
une fable. Il est peut-être curieux de noter que
les
pires blasphèmes, de la pornographie en outre violations des lois div
637
tre curieux de noter que les pires blasphèmes, de
la
pornographie en outre violations des lois divines et humaines, n’euss
638
me. Mais notre monde ne connaît plus de sacré que
la
propriété matérielle. d. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] André
639
ugemont Denis de, « [Compte rendu] André Malraux,
La
Voie royale », Foi et Vie, Paris, février 1931, p. 78-81.
640
rs 1931)e Il nous plaît de faire converser ici
les
gens les moins faits pour s’entendre : ce n’est pas un mauvais moyen
641
Il nous plaît de faire converser ici les gens
les
moins faits pour s’entendre : ce n’est pas un mauvais moyen de dégage
642
tendre : ce n’est pas un mauvais moyen de dégager
la
mentalité d’une époque — selon la dialectique de cet Hegel auquel on
643
oyen de dégager la mentalité d’une époque — selon
la
dialectique de cet Hegel auquel on revient parce qu’au contraire de M
644
qu’au contraire de M. Léon Brunschvicg, il avait
le
sens du tragique de la vie. De pareilles « conversations » ne ressort
645
Léon Brunschvicg, il avait le sens du tragique de
la
vie. De pareilles « conversations » ne ressortent nullement de la cri
646
lles « conversations » ne ressortent nullement de
la
critique littéraire ; il arrive qu’elles mettent en jeu de gros probl
647
opos d’ouvrages bien minces. C’est qu’aujourd’hui
le
moindre chien écrasé pose toute la question sociale. Ainsi, sommes-no
648
qu’aujourd’hui le moindre chien écrasé pose toute
la
question sociale. Ainsi, sommes-nous amenés à donner une « importance
649
res qui « signifient » plus qu’elles ne « sont ».
L’
on mesure ici l’écart d’avec la littérature d’avant-guerre, qui était
650
ient » plus qu’elles ne « sont ». L’on mesure ici
l’
écart d’avec la littérature d’avant-guerre, qui était avant tout un ar
651
elles ne « sont ». L’on mesure ici l’écart d’avec
la
littérature d’avant-guerre, qui était avant tout un art. La nôtre aya
652
ture d’avant-guerre, qui était avant tout un art.
La
nôtre ayant voix au forum discute autant qu’elle n’invente ou qu’elle
653
ailleurs que d’ironie, qu’elle touche à tout dans
l’
homme et dans la société. Elle a l’absence de scrupules des gens qui o
654
ronie, qu’elle touche à tout dans l’homme et dans
la
société. Elle a l’absence de scrupules des gens qui ont une mission u
655
he à tout dans l’homme et dans la société. Elle a
l’
absence de scrupules des gens qui ont une mission urgente à remplir. C
656
remplir. Ces quelques remarques nous placent sous
l’
angle qu’il faut pour situer le petit livre de M. P. Nizan12, dans sa
657
nous placent sous l’angle qu’il faut pour situer
le
petit livre de M. P. Nizan12, dans sa perspective la plus équitable.
658
petit livre de M. P. Nizan12, dans sa perspective
la
plus équitable. C’est le type du livre qui vaut surtout par l’attitud
659
n12, dans sa perspective la plus équitable. C’est
le
type du livre qui vaut surtout par l’attitude qu’il manifeste et comm
660
able. C’est le type du livre qui vaut surtout par
l’
attitude qu’il manifeste et commente. Son sujet : le voyage d’un jeun
661
ttitude qu’il manifeste et commente. Son sujet :
le
voyage d’un jeune normalien marxiste. Citons quelques phrases qui don
662
n marxiste. Citons quelques phrases qui donneront
le
ton et les thèmes principaux : J’avais vingt ans. Je ne laisserai pe
663
. Citons quelques phrases qui donneront le ton et
les
thèmes principaux : J’avais vingt ans. Je ne laisserai personne dire
664
ingt ans. Je ne laisserai personne dire que c’est
le
plus bel âge de la vie… — Où était placé notre mal ? dans quelle part
665
sserai personne dire que c’est le plus bel âge de
la
vie… — Où était placé notre mal ? dans quelle partie de notre vie. Vo
666
e partie de notre vie. Voici ce que nous savons :
les
hommes ne vivent pas comme un homme devrait vivre… — Être un homme no
667
homme devrait vivre… — Être un homme nous paraît
la
seule entreprise légitime… — Nous pensions vie intérieure, quand il f
668
de bonnes raisons humaines, de nous intéresser à
l’
Asie : les grèves à Bombay, les révolutions et les massacres en Chine,
669
s raisons humaines, de nous intéresser à l’Asie :
les
grèves à Bombay, les révolutions et les massacres en Chine, les empri
670
e nous intéresser à l’Asie : les grèves à Bombay,
les
révolutions et les massacres en Chine, les emprisonnements au Tonkin.
671
l’Asie : les grèves à Bombay, les révolutions et
les
massacres en Chine, les emprisonnements au Tonkin. Et non Bouddha13.
672
ombay, les révolutions et les massacres en Chine,
les
emprisonnements au Tonkin. Et non Bouddha13. — La liberté est un pouv
673
es emprisonnements au Tonkin. Et non Bouddha13. —
La
liberté est un pouvoir réel et une volonté réelle de vouloir être soi
674
oi. Ayant ainsi esquissé ses positions éthiques,
l’
auteur part pour Aden. Quel n’est pas son étonnement de découvrir que
675
t concentrée de notre mère l’Europe », un lieu où
la
vie occidentale se trouve « décantée jusqu’à l’essence, tout ce qui a
676
ù la vie occidentale se trouve « décantée jusqu’à
l’
essence, tout ce qui allongeait la sauce évaporé. Il demeure un résidu
677
écantée jusqu’à l’essence, tout ce qui allongeait
la
sauce évaporé. Il demeure un résidu impitoyable, descriptible et sec
678
un résidu impitoyable, descriptible et sec ». Ici
la
vie des hommes se trouve « réduite à son état de pureté extrême qui e
679
ve « réduite à son état de pureté extrême qui est
l’
état économique ». Si les mœurs sont occidentales, les habitants, eux,
680
de pureté extrême qui est l’état économique ». Si
les
mœurs sont occidentales, les habitants, eux, viennent de tout l’Orien
681
tat économique ». Si les mœurs sont occidentales,
les
habitants, eux, viennent de tout l’Orient. « On pense à une Genève de
682
ccidentales, les habitants, eux, viennent de tout
l’
Orient. « On pense à une Genève de l’islam. » Il semble, à lire notre
683
nent de tout l’Orient. « On pense à une Genève de
l’
islam. » Il semble, à lire notre auteur, que ce mélange de représentan
684
ce mélange de représentants de ne ordre de toutes
les
races compose quelque chose d’assez hideusement provincial, au pire s
685
Nizan se refuse à montrer aucune compensation : «
l’
art, la philosophie, la politique étant absents, faute d’emploi, il n’
686
e refuse à montrer aucune compensation : « l’art,
la
philosophie, la politique étant absents, faute d’emploi, il n’y avait
687
er aucune compensation : « l’art, la philosophie,
la
politique étant absents, faute d’emploi, il n’y avait aucune correcti
688
on à faire ». D’ailleurs, il ne veut pas poétiser
le
tableau, car, pour lui, « être poétique, c’est avoir besoin d’illusio
689
besoin d’illusions ». Je soutiendrais volontiers
le
contraire, mais M. Nizan est de ces gens, si nombreux aujourd’hui (Fr
690
mbreux aujourd’hui (Freud, etc.), qui croient que
le
pire est toujours le plus vrai ; que la prose est plus vraie que la p
691
reud, etc.), qui croient que le pire est toujours
le
plus vrai ; que la prose est plus vraie que la poésie, le petit fait
692
oient que le pire est toujours le plus vrai ; que
la
prose est plus vraie que la poésie, le petit fait plus vrai que le ha
693
rs le plus vrai ; que la prose est plus vraie que
la
poésie, le petit fait plus vrai que le haut fait, la mesquinerie plus
694
vrai ; que la prose est plus vraie que la poésie,
le
petit fait plus vrai que le haut fait, la mesquinerie plus vraie que
695
vraie que la poésie, le petit fait plus vrai que
le
haut fait, la mesquinerie plus vraie que la grandeur. C’est sans dout
696
poésie, le petit fait plus vrai que le haut fait,
la
mesquinerie plus vraie que la grandeur. C’est sans doute qu’on les a
697
i que le haut fait, la mesquinerie plus vraie que
la
grandeur. C’est sans doute qu’on les a par trop dupés ; ils ne marche
698
lus vraie que la grandeur. C’est sans doute qu’on
les
a par trop dupés ; ils ne marchent plus. La faute en est à l’idéologi
699
u’on les a par trop dupés ; ils ne marchent plus.
La
faute en est à l’idéologie bourgeoise du xixe siècle qui consiste da
700
p dupés ; ils ne marchent plus. La faute en est à
l’
idéologie bourgeoise du xixe siècle qui consiste dans une large mesur
701
consiste dans une large mesure à éviter d’appeler
les
choses par leur nom, à préférer toujours le « distingué » et le « con
702
eler les choses par leur nom, à préférer toujours
le
« distingué » et le « conforme » au vrai. Mais n’est-il pas grand tem
703
leur nom, à préférer toujours le « distingué » et
le
« conforme » au vrai. Mais n’est-il pas grand temps de dépasser une r
704
réaction de vulgarité non moins artificielle que
le
lâche idéalisme qu’elle combat avec raison ? D’ailleurs, si je vois b
705
bat avec raison ? D’ailleurs, si je vois bien que
le
propos de M. Nizan n’est pas de nous rendre le goût de ce qui, en Eur
706
ue le propos de M. Nizan n’est pas de nous rendre
le
goût de ce qui, en Europe, « allongeait la solution », je ne puis m’e
707
rendre le goût de ce qui, en Europe, « allongeait
la
solution », je ne puis m’empêcher de penser que cette peinture d’Aden
708
faite pour y contribuer : si grande est en effet
l’
horreur que M. Nizan éprouve à contempler « ce résidu impitoyable, des
709
t-il bien légitime de voir dans un tel « résidu »
l’
essence de l’Europe, — « son état de pureté extrême, qui est l’économi
710
itime de voir dans un tel « résidu » l’essence de
l’
Europe, — « son état de pureté extrême, qui est l’économique » ? On re
711
l’Europe, — « son état de pureté extrême, qui est
l’
économique » ? On reconnaît ici la thèse marxiste, dont le moins qu’on
712
xtrême, qui est l’économique » ? On reconnaît ici
la
thèse marxiste, dont le moins qu’on puisse dire est qu’elle sent son
713
ique » ? On reconnaît ici la thèse marxiste, dont
le
moins qu’on puisse dire est qu’elle sent son xixe siècle. On peut lu
714
sformation radicale des conditions matérielles de
la
vie humaine. Je crois que l’homme ne peut être transformé que spiritu
715
tions matérielles de la vie humaine. Je crois que
l’
homme ne peut être transformé que spirituellement. Et cette révolution
716
rmé que spirituellement. Et cette révolution-là a
l’
avantage d’être possible dès maintenant. Mais M. Nizan a trop de préju
717
ant. Mais M. Nizan a trop de préjugés pour sentir
la
force neuve perpétuellement de la vérité religieuse. Il parle des rel
718
gés pour sentir la force neuve perpétuellement de
la
vérité religieuse. Il parle des religions avec une incroyable légèret
719
incroyable légèreté, — en littérateur qui cherche
l’
effet pittoresque. « Les curés de tous les dieux blancs se sont mis à
720
en littérateur qui cherche l’effet pittoresque. «
Les
curés de tous les dieux blancs se sont mis à convertir ces idolâtres,
721
cherche l’effet pittoresque. « Les curés de tous
les
dieux blancs se sont mis à convertir ces idolâtres, ces fétichistes,
722
s, ces fétichistes, à leur parler de Luther et de
la
Vierge de Lourdes, à leur révéler les culottes de chez Esders. » N’in
723
Luther et de la Vierge de Lourdes, à leur révéler
les
culottes de chez Esders. » N’insistons pas sur ce Luther prêché par n
724
ble !) mais un normalien se devrait de savoir que
l’
œuvre missionnaire a consisté, dès le début, à combattre les funestes
725
e savoir que l’œuvre missionnaire a consisté, dès
le
début, à combattre les funestes effets de la civilisation athée qu’ap
726
issionnaire a consisté, dès le début, à combattre
les
funestes effets de la civilisation athée qu’apportaient les Européens
727
dès le début, à combattre les funestes effets de
la
civilisation athée qu’apportaient les Européens. Autre trait plus édi
728
es effets de la civilisation athée qu’apportaient
les
Européens. Autre trait plus édifiant encore : l’auteur rentrant à Mar
729
les Européens. Autre trait plus édifiant encore :
l’
auteur rentrant à Marseille voit de loin le château d’If et N.-D. de l
730
core : l’auteur rentrant à Marseille voit de loin
le
château d’If et N.-D. de la Garde : « J’étais servi — s’écrie-t-il. —
731
s emblèmes venus à ma rencontre étaient justement
les
deux objets les plus révoltants de la terre : une église, une prison.
732
à ma rencontre étaient justement les deux objets
les
plus révoltants de la terre : une église, une prison. » Triste carenc
733
justement les deux objets les plus révoltants de
la
terre : une église, une prison. » Triste carence d’un jugement qui se
734
tend humain ! Pensez-y M. Nizan : quelle que soit
la
Tchéka régnante, il y aura toujours plus d’hommes dans les églises qu
735
a régnante, il y aura toujours plus d’hommes dans
les
églises que dans les prisons, — et des hommes qui viendront y trouver
736
toujours plus d’hommes dans les églises que dans
les
prisons, — et des hommes qui viendront y trouver leur liberté. Mais
737
on, s’arrêter à ces cris d’une révolte égarée par
la
haine ? C’est qu’ils caractérisent une attitude de plus en plus fréqu
738
isent une attitude de plus en plus fréquente chez
les
jeunes intellectuels : orgueil de la Vie, haine de cette vie-ci, mépr
739
quente chez les jeunes intellectuels : orgueil de
la
Vie, haine de cette vie-ci, mépris de la religion et ferveur pour des
740
gueil de la Vie, haine de cette vie-ci, mépris de
la
religion et ferveur pour des « valeurs nouvelles » encore plus vagues
741
gues d’ailleurs que ce qu’ils peuvent imaginer de
la
religion. C’est une forme aiguë de ce que les Anglais appellent « séc
742
r de la religion. C’est une forme aiguë de ce que
les
Anglais appellent « sécularisme ». Ce terme qui sans doute reviendra
743
». Ce terme qui sans doute reviendra souvent dans
les
chroniques de Foi et Vie , « résume commodément cette volonté d’éman
744
ésume commodément cette volonté d’émancipation de
la
civilisation moderne à l’égard de toute autorité divine qui est le tr
745
oderne à l’égard de toute autorité divine qui est
le
trait dominant de notre époque » — pour reprendre la définition qu’en
746
trait dominant de notre époque » — pour reprendre
la
définition qu’en donnait ici même M. Pierre Maury. C’est à peu près d
747
t ici même M. Pierre Maury. C’est à peu près dans
le
même sens que M. René Gillouin parle14 de l’effort de notre monde pou
748
dans le même sens que M. René Gillouin parle14 de
l’
effort de notre monde pour « se séculariser, pour se constituer en deh
749
nes ». Aux yeux du « séculariste », bien entendu,
la
question religieuse apparaît comme périmée. Avec M. Brunschvicg, il p
750
, qu’il n’est plus permis de nos jours… bref, que
la
science a changé tout cela. C’est précisément à ce sécularisme que ré
751
noncée au Foyer des étudiants protestants, et que
la
Nouvelle Revue des jeunes publie dans son numéro du 15 février15. M.
752
nalyse trois attitudes typiquement sécularistes :
la
philosophie des lumières, celle de la technique, celle du primat de l
753
ularistes : la philosophie des lumières, celle de
la
technique, celle du primat de la Vie. Ce lui est une occasion de rédu
754
mières, celle de la technique, celle du primat de
la
Vie. Ce lui est une occasion de réduire à ses justes proportions l’id
755
une occasion de réduire à ses justes proportions
l’
idéalisme scientifique de M. Brunschvicg, philosophe officiel des lumi
756
dispose cet idéalisme ? se demande M. G. Marcel.
L’
orgueil tout d’abord, je n’hésite pas à le déclarer. On m’arrêtera en
757
arcel. L’orgueil tout d’abord, je n’hésite pas à
le
déclarer. On m’arrêtera en me faisant observer que cet orgueil n’a pa
758
t orgueil n’a pas un caractère personnel, puisque
l’
Esprit dont M. Brunschvicg nous entretient n’est l’Esprit de personne.
759
’Esprit dont M. Brunschvicg nous entretient n’est
l’
Esprit de personne. Je répondrai tout d’abord que c’est ou que cela ve
760
drai tout d’abord que c’est ou que cela veut être
l’
Esprit de tout le monde ; et nous savons depuis Platon ce que la démoc
761
ut le monde ; et nous savons depuis Platon ce que
la
démocratie dont cet idéalisme n’est après tout qu’une transposition r
762
recèle de flatterie. Ce n’est pas tout : en fait
l’
idéaliste se substitue inévitablement à l’Esprit — et cette fois nous
763
en fait l’idéaliste se substitue inévitablement à
l’
Esprit — et cette fois nous avons affaire à quelqu’un. Mettons-le en p
764
ette fois nous avons affaire à quelqu’un. Mettons-
le
en présence du scandale que constitue à ses yeux cette anomalie : un
765
e chrétien. Comment un astronome peut-il croire à
l’
Incarnation ou aller à la Messe ? On n’aura d’autre ressource que de n
766
tronome peut-il croire à l’Incarnation ou aller à
la
Messe ? On n’aura d’autre ressource que de nous opposer un distinguo
767
plus exactement, est un homme du xxe siècle que
l’
idéaliste salue comme son contemporain ; en tant qu’il croit à l’Incar
768
ue comme son contemporain ; en tant qu’il croit à
l’
Incarnation et qu’il va à la Messe, il se comporte en homme du xiiie
769
en tant qu’il croit à l’Incarnation et qu’il va à
la
Messe, il se comporte en homme du xiiie siècle — ou en enfant : il y
770
nge sectionnement, il aura beau se recommander de
la
Raison ou de l’Esprit, nous resterons inquiets, d’autant que, s’il ne
771
t, il aura beau se recommander de la Raison ou de
l’
Esprit, nous resterons inquiets, d’autant que, s’il ne s’interdit null
772
ues ou même sociologiques de ces survivances chez
l’
astronome, il nous interdira formellement de procéder en ce qui le con
773
nous interdira formellement de procéder en ce qui
le
concerne lui-même, à des analyses ou à des réductions du même ordre.
774
des réductions du même ordre. Lui est des pieds à
la
tête un homme de 1930 ; et en même temps il se réclame d’un Esprit ét
775
ui cependant est né et dont on ne saurait prévoir
les
avatars. Tout cela, disons-le nettement, est d’une singulière incohér
776
ne saurait prévoir les avatars. Tout cela, disons-
le
nettement, est d’une singulière incohérence. Et il est évident que si
777
loisir économique, il lui faudra se réfugier dans
la
sphère des abstractions les plus exsangues. Je pense quant à moi qu’u
778
audra se réfugier dans la sphère des abstractions
les
plus exsangues. Je pense quant à moi qu’un idéalisme de cette espèce
779
ne philosophie religieuse concrète d’une part, et
le
matérialisme historique de l’autre. La preuve, je m’amuse à la voir
780
part, et le matérialisme historique de l’autre.
La
preuve, je m’amuse à la voir dans le fait que le pamphlet de M. Nizan
781
e historique de l’autre. La preuve, je m’amuse à
la
voir dans le fait que le pamphlet de M. Nizan, communiste, est encore
782
de l’autre. La preuve, je m’amuse à la voir dans
le
fait que le pamphlet de M. Nizan, communiste, est encore plus dur que
783
La preuve, je m’amuse à la voir dans le fait que
le
pamphlet de M. Nizan, communiste, est encore plus dur que l’article d
784
de M. Nizan, communiste, est encore plus dur que
l’
article de M. Marcel, catholique, à l’endroit d’un philosophe caractér
785
lus dur que l’article de M. Marcel, catholique, à
l’
endroit d’un philosophe caractérisé, nous dit-on, par « sa terreur sin
786
ctérisé, nous dit-on, par « sa terreur sincère de
la
vérité qui menace ». Mais partout ailleurs, qu’en cette commune antip
787
u’ils touchent des problèmes identiques, celui de
la
puissance de l’homme, celui de la valeur de son action, celui, en som
788
es problèmes identiques, celui de la puissance de
l’
homme, celui de la valeur de son action, celui, en somme, de l’imperfe
789
iques, celui de la puissance de l’homme, celui de
la
valeur de son action, celui, en somme, de l’imperfection du monde. Je
790
i de la valeur de son action, celui, en somme, de
l’
imperfection du monde. Je pense que tout chrétien conscient des problè
791
ps, souscrirait aux critiques que M. Nizan fait à
l’
actuelle civilisation, souffrant comme lui de ce que « les hommes ne v
792
lle civilisation, souffrant comme lui de ce que «
les
hommes ne vivent pas comme un homme devrait vivre ». Mais alors, se d
793
vivre ». Mais alors, se dit-on souvent en lisant
les
critiques marxistes — et c’est ici le nœud de divergence entre eux et
794
en lisant les critiques marxistes — et c’est ici
le
nœud de divergence entre eux et nous — si le mal est si grand qu’ils
795
ici le nœud de divergence entre eux et nous — si
le
mal est si grand qu’ils le montrent — et il l’est — aucun bouleversem
796
entre eux et nous — si le mal est si grand qu’ils
le
montrent — et il l’est — aucun bouleversement matériel n’y pourra rie
797
si le mal est si grand qu’ils le montrent — et il
l’
est — aucun bouleversement matériel n’y pourra rien, si radical soit-i
798
, il postule une réalité transcendante — ou alors
le
suicide d’un monde empoisonné par sa propre haine. Le séculariste « c
799
uicide d’un monde empoisonné par sa propre haine.
Le
séculariste « constructiviste » répondra qu’il croit en la puissance
800
riste « constructiviste » répondra qu’il croit en
la
puissance de l’homme pour se dégager des servitudes provisoires de la
801
tiviste » répondra qu’il croit en la puissance de
l’
homme pour se dégager des servitudes provisoires de la technique. Mais
802
mme pour se dégager des servitudes provisoires de
la
technique. Mais rien n’est plus hasardeux qu’une telle mystique, — ri
803
que son objet. Comme il est déchirant en vérité,
le
chant d’orgueil que le siècle entonne pour annoncer son morne triomph
804
l est déchirant en vérité, le chant d’orgueil que
le
siècle entonne pour annoncer son morne triomphe : « Vous n’avez pas s
805
on morne triomphe : « Vous n’avez pas su conjurer
la
malédiction du monde moderne, clame-t-on de toutes parts aux chrétien
806
sont des réussites qu’il nous faut. Saluons enfin
le
règne de l’homme ! » Mais le chrétien, qui sait un peu ce qu’est ce m
807
ssites qu’il nous faut. Saluons enfin le règne de
l’
homme ! » Mais le chrétien, qui sait un peu ce qu’est ce monstre, se d
808
faut. Saluons enfin le règne de l’homme ! » Mais
le
chrétien, qui sait un peu ce qu’est ce monstre, se demande, songeant
809
peu ce qu’est ce monstre, se demande, songeant à
l’
Europe, s’il y aura dix justes dans Sodome. 12. Aden Arabie, chez R
810
bie, chez Rieder, Paris. 13. Mais Bouddha, c’est
l’
Asie. Les grèves, c’est encore l’Europe. 14. Dans un article des Nou
811
z Rieder, Paris. 13. Mais Bouddha, c’est l’Asie.
Les
grèves, c’est encore l’Europe. 14. Dans un article des Nouvelles li
812
s Bouddha, c’est l’Asie. Les grèves, c’est encore
l’
Europe. 14. Dans un article des Nouvelles littéraires du 20 février
813
quelle nous renvoyons tous ceux qu’aura passionné
l’
enquête de M. Paul Arbousse-Bastide publiée par Foi et Vie l’an dern
814
M. Paul Arbousse-Bastide publiée par Foi et Vie
l’
an dernier. 15. « Remarques sur l’irréligion contemporaine ». e. Ro
815
r Foi et Vie l’an dernier. 15. « Remarques sur
l’
irréligion contemporaine ». e. Rougemont Denis de, « [Compte rendu]
816
C’est donc qu’il y en a ? avez-vous dit. Depuis
le
temps qu’on cherchait à nous faire croire qu’une origine protestante
817
voici que s’alignent sur une même affiche et sous
la
double étiquette de protestants et de modernes des noms de peintres c
818
tres comme Bosshardt, Raoul Dufy, Lotiron, Zingg,
le
sculpteur Gimond, l’architecte Le Corbusier, le décorateur Ruhlmann,
819
Raoul Dufy, Lotiron, Zingg, le sculpteur Gimond,
l’
architecte Le Corbusier, le décorateur Ruhlmann, le photographe Kertés
820
Lotiron, Zingg, le sculpteur Gimond, l’architecte
Le
Corbusier, le décorateur Ruhlmann, le photographe Kertész… L’avant-ga
821
, le sculpteur Gimond, l’architecte Le Corbusier,
le
décorateur Ruhlmann, le photographe Kertész… L’avant-garde parisienne
822
’architecte Le Corbusier, le décorateur Ruhlmann,
le
photographe Kertész… L’avant-garde parisienne la plus fringante et ba
823
, le décorateur Ruhlmann, le photographe Kertész…
L’
avant-garde parisienne la plus fringante et bariolée. Il y a là quelqu
824
le photographe Kertész… L’avant-garde parisienne
la
plus fringante et bariolée. Il y a là quelque mystère ; demandons-en
825
ariolée. Il y a là quelque mystère ; demandons-en
l’
explication à la Préface d’un si brillant catalogue. Parce qu’ils par
826
là quelque mystère ; demandons-en l’explication à
la
Préface d’un si brillant catalogue. Parce qu’ils parlent un peu pour
827
e. Héritiers du plus grand affranchissement et de
la
plus héroïque résistance, nous voulons aller de l’avant, nous n’avons
828
a plus héroïque résistance, nous voulons aller de
l’
avant, nous n’avons pas peur d’essayer vers la beauté de nouvelles rou
829
de l’avant, nous n’avons pas peur d’essayer vers
la
beauté de nouvelles routes. On nous connaît mal. Derrière le mur de n
830
e nouvelles routes. On nous connaît mal. Derrière
le
mur de notre maison on nous croyait peut-être enfermés dans un morali
831
ables, nous faisions des projets dont on parlait,
la
nuit, dans les chambres où les curiosités et les enthousiasmes en dés
832
isions des projets dont on parlait, la nuit, dans
les
chambres où les curiosités et les enthousiasmes en désordre s’agitaie
833
ts dont on parlait, la nuit, dans les chambres où
les
curiosités et les enthousiasmes en désordre s’agitaient entre les mur
834
, la nuit, dans les chambres où les curiosités et
les
enthousiasmes en désordre s’agitaient entre les murs d’où nous arrach
835
t les enthousiasmes en désordre s’agitaient entre
les
murs d’où nous arrachions les moulures et les vieux papiers à fleurs.
836
e s’agitaient entre les murs d’où nous arrachions
les
moulures et les vieux papiers à fleurs. La confiance, la sincérité, l
837
tre les murs d’où nous arrachions les moulures et
les
vieux papiers à fleurs. La confiance, la sincérité, l’amitié, s’arron
838
hions les moulures et les vieux papiers à fleurs.
La
confiance, la sincérité, l’amitié, s’arrondissaient autour des livres
839
ures et les vieux papiers à fleurs. La confiance,
la
sincérité, l’amitié, s’arrondissaient autour des livres dont nous sav
840
eux papiers à fleurs. La confiance, la sincérité,
l’
amitié, s’arrondissaient autour des livres dont nous savions de grands
841
ité un peu grave, on touchait avec notre jeunesse
le
tragique ou le merveilleux, on mettait notre volonté aimante, entre t
842
e, on touchait avec notre jeunesse le tragique ou
le
merveilleux, on mettait notre volonté aimante, entre toutes les pages
843
x, on mettait notre volonté aimante, entre toutes
les
pages, sur toutes les choses. Nous écrivions aux auteurs, nous recevi
844
lonté aimante, entre toutes les pages, sur toutes
les
choses. Nous écrivions aux auteurs, nous recevions des livres, des le
845
des lettres. Van Gogh, en qui nous aimions tout :
le
pasteur, le peintre et le fou, semait en nous toutes les curiosités d
846
Van Gogh, en qui nous aimions tout : le pasteur,
le
peintre et le fou, semait en nous toutes les curiosités de la couleur
847
qui nous aimions tout : le pasteur, le peintre et
le
fou, semait en nous toutes les curiosités de la couleur et de la vie.
848
teur, le peintre et le fou, semait en nous toutes
les
curiosités de la couleur et de la vie. Nous reprenions toutes les mes
849
t le fou, semait en nous toutes les curiosités de
la
couleur et de la vie. Nous reprenions toutes les mesures, tout redeve
850
en nous toutes les curiosités de la couleur et de
la
vie. Nous reprenions toutes les mesures, tout redevenait neuf : les m
851
e la couleur et de la vie. Nous reprenions toutes
les
mesures, tout redevenait neuf : les mots « forme », « couleur », « ar
852
enions toutes les mesures, tout redevenait neuf :
les
mots « forme », « couleur », « architecture ». Et Dieu avait une plac
853
cture ». Et Dieu avait une place plus grande dans
la
joyeuse lumière de notre ciel simplifié. Et voilà, n’est-ce pas, un
854
es beaucoup d’objections, ou qui expliqueront dès
l’
abord, et légitimeront aux yeux de beaucoup, le choix des œuvres expos
855
ès l’abord, et légitimeront aux yeux de beaucoup,
le
choix des œuvres exposées. Il ne s’agit nullement de présenter l’ense
856
res exposées. Il ne s’agit nullement de présenter
l’
ensemble des artistes protestants, il s’agit de manifester les préfére
857
des artistes protestants, il s’agit de manifester
les
préférences d’une jeunesse. À cet égard particulièrement, ce salon fu
858
gard particulièrement, ce salon fut une réussite.
La
curiosité d’abord un peu sceptique de certains critiques, artistes ou
859
ains critiques, artistes ou écrivains, s’est muée
le
soir du premier vernissage en une sympathie sincère et souvent fort a
860
une sympathie sincère et souvent fort admirative.
Le
titre de l’exposition, si l’on y prend bien garde, éludait dans une c
861
e sincère et souvent fort admirative. Le titre de
l’
exposition, si l’on y prend bien garde, éludait dans une certaine mesu
862
ent fort admirative. Le titre de l’exposition, si
l’
on y prend bien garde, éludait dans une certaine mesure la question dé
863
rend bien garde, éludait dans une certaine mesure
la
question délicate de l’existence d’un « art protestant ». En effet, o
864
dans une certaine mesure la question délicate de
l’
existence d’un « art protestant ». En effet, on ne parlait ici que d’«
865
si ces traits ne constituent pas, en définitive,
les
éléments d’un art protestant. Il eût fallu peut-être qu’un plus grand
866
réponse valable pût être esquissée. Car, avouons-
le
, du fait même de la nouveauté que représentait une telle exposition,
867
être esquissée. Car, avouons-le, du fait même de
la
nouveauté que représentait une telle exposition, le caractère d’avant
868
nouveauté que représentait une telle exposition,
le
caractère d’avant-garde des toiles frappait le visiteur avant qu’il e
869
n, le caractère d’avant-garde des toiles frappait
le
visiteur avant qu’il eût songé à distinguer les caractères confession
870
it le visiteur avant qu’il eût songé à distinguer
les
caractères confessionnels. Espérons qu’un prochain salon, organisé s’
871
els. Espérons qu’un prochain salon, organisé s’il
le
faut dans de plus vastes locaux, pourra donner accès à un ensemble au
872
le aussi complet que possible d’artistes nés dans
le
protestantisme. Et l’on pourra se demander alors : qu’y a-t-il de spé
873
ossible d’artistes nés dans le protestantisme. Et
l’
on pourra se demander alors : qu’y a-t-il de spécifiquement protestant
874
? — On s’y serait attendu. Une visite au salon de
la
rue de Vaugirard nous invite à renoncer à ces clichés. Pas de trace d
875
e « puritanisme » chez des artistes si différents
les
uns des autres. Au contraire, une vitalité, une joie dans l’invention
876
autres. Au contraire, une vitalité, une joie dans
l’
invention, une hardiesse partout manifeste. Voici Dufy, le plus invent
877
ion, une hardiesse partout manifeste. Voici Dufy,
le
plus inventif des artistes contemporains, avec une « Peinture » d’un
878
ts Lotiron font un coin de campagne lumineuse, et
le
« Douarnenez » de Mac-Avoy est tout animé de blancs vivants. Très pla
879
ives pour de futures éditions d’art protestantes.
La
sculpture est brillamment représentée par un « Torse de femme » de Ma
880
Petersen. André Kertész, l’un des rénovateurs de
l’
art photographique, expose un portrait frappant de réalité humaine. Ma
881
ose un portrait frappant de réalité humaine. Mais
l’
œuvre maîtresse de l’exposition est sans doute la « Crucifixion » de R
882
ant de réalité humaine. Mais l’œuvre maîtresse de
l’
exposition est sans doute la « Crucifixion » de R.-Th. Bosshardt. C’es
883
l’œuvre maîtresse de l’exposition est sans doute
la
« Crucifixion » de R.-Th. Bosshardt. C’est un véritable renouvellemen
884
. Bosshardt. C’est un véritable renouvellement de
la
peinture à sujet religieux qu’annonce cette grande composition : troi
885
trois longues croix dans une lumière dramatique,
le
corps du Christ déjà presque transfiguré en symbole mystique sur le c
886
déjà presque transfiguré en symbole mystique sur
le
ciel vert du plus grand jour de l’Histoire. On a beaucoup remarqué la
887
e mystique sur le ciel vert du plus grand jour de
l’
Histoire. On a beaucoup remarqué la part importante ménagée aux œuvres
888
grand jour de l’Histoire. On a beaucoup remarqué
la
part importante ménagée aux œuvres de décorateurs : paravents, vitrin
889
aux Gobelins, aux poteries de Palissy. Ce goût de
la
belle matière mise en valeur dans sa pureté, sa nudité, ce sens de l’
890
e en valeur dans sa pureté, sa nudité, ce sens de
l’
artisanat qui se refuse aux truquages, aux trompe-l’œil, ne dissocie j
891
x truquages, aux trompe-l’œil, ne dissocie jamais
la
recherche du beau et le goût intransigeant du vrai, c’est le trait le
892
l’œil, ne dissocie jamais la recherche du beau et
le
goût intransigeant du vrai, c’est le trait le plus évidemment « prote
893
e du beau et le goût intransigeant du vrai, c’est
le
trait le plus évidemment « protestant » de l’art français. Mais s’i
894
et le goût intransigeant du vrai, c’est le trait
le
plus évidemment « protestant » de l’art français. Mais s’il est mal
895
est le trait le plus évidemment « protestant » de
l’
art français. Mais s’il est malaisé de décrire, dès à présent, un ar
896
, un art protestant de fait, peut-on, par contre,
le
définir idéalement ? Il nous semble que cela supposerait d’abord une
897
oi : il faut qu’on sache sans équivoque ce qu’est
le
protestantisme avant de pouvoir trancher de ce que doit être un art q
898
e pouvoir trancher de ce que doit être un art qui
l’
exprime. En d’autres termes, la définition d’un art protestant est lié
899
it être un art qui l’exprime. En d’autres termes,
la
définition d’un art protestant est liée à une conception dogmatique d
900
rotestant est liée à une conception dogmatique de
la
foi. Nous pensons même que la renaissance et l’épanouissement d’un te
901
ption dogmatique de la foi. Nous pensons même que
la
renaissance et l’épanouissement d’un tel art seront conditionnés par
902
e la foi. Nous pensons même que la renaissance et
l’
épanouissement d’un tel art seront conditionnés par un renouveau doctr
903
et c’est un paradoxe qui n’étonnera pas ceux que
le
problème de la création intéresse, l’artiste a besoin plus que quicon
904
radoxe qui n’étonnera pas ceux que le problème de
la
création intéresse, l’artiste a besoin plus que quiconque de principe
905
as ceux que le problème de la création intéresse,
l’
artiste a besoin plus que quiconque de principes définis — je ne dis p
906
nts, de réactif, de contrainte, de stimulant dans
l’
atmosphère spirituelle qui préside à l’élaboration d’une œuvre. Pas de
907
ulant dans l’atmosphère spirituelle qui préside à
l’
élaboration d’une œuvre. Pas de style religieux sans doctrine. Et plus
908
re. Pas de style religieux sans doctrine. Et plus
la
doctrine se relâche et s’estompe, moins l’art montre d’accent et de v
909
t plus la doctrine se relâche et s’estompe, moins
l’
art montre d’accent et de vivante inspiration. Une remarque encore. Ce
910
position se sont demandé non sans ironie où était
le
calvinisme dans tout ceci. Eussent-ils posé, à propos d’un salon d’ar
911
t-ils posé, à propos d’un salon d’art catholique,
la
même question, en remplaçant calvinisme par thomisme par exemple ? L’
912
remplaçant calvinisme par thomisme par exemple ?
L’
artiste catholique bénéficie certainement, pour lui-même et aux yeux d
913
u public, des facilités que donne à sa production
l’
appareil des dogmes spécifiquement catholiques, concernant la Vierge e
914
des dogmes spécifiquement catholiques, concernant
la
Vierge et les saints. En deux mots, il y a des « sujets catholiques »
915
écifiquement catholiques, concernant la Vierge et
les
saints. En deux mots, il y a des « sujets catholiques », il n’y a pas
916
ujets protestants ». Mais, dira-t-on, il y a tous
les
sujets chrétiens ! C’est bien là que nous voulions en venir : le dogm
917
iens ! C’est bien là que nous voulions en venir :
le
dogme ne doit être qu’un stimulant (une difficulté) non pas un poncif
918
’un stimulant (une difficulté) non pas un poncif.
L’
idéal d’un artiste protestant, le seul auquel sa foi puisse prétendre,
919
n pas un poncif. L’idéal d’un artiste protestant,
le
seul auquel sa foi puisse prétendre, ce n’est pas de réaliser un art
920
n art assez purement évangélique pour transcender
la
confession qui lui a permis de naître. La grandeur d’un art protestan
921
scender la confession qui lui a permis de naître.
La
grandeur d’un art protestant, c’est de n’être qu’un art chrétien. f
922
Conférences du comte Keyserling (avril 1931)g
L’
auteur du Journal de voyage d’un philosophe, d’Analyse spectrale de l’
923
de voyage d’un philosophe, d’Analyse spectrale de
l’
Europe, de Psychanalyse de l’Amérique, le célèbre philosophe fondateur
924
Analyse spectrale de l’Europe, de Psychanalyse de
l’
Amérique, le célèbre philosophe fondateur de l’École de la Sagesse de
925
trale de l’Europe, de Psychanalyse de l’Amérique,
le
célèbre philosophe fondateur de l’École de la Sagesse de Darmstadt vi
926
de l’Amérique, le célèbre philosophe fondateur de
l’
École de la Sagesse de Darmstadt vient de donner au Trocadéro trois co
927
ue, le célèbre philosophe fondateur de l’École de
la
Sagesse de Darmstadt vient de donner au Trocadéro trois conférences s
928
ient de donner au Trocadéro trois conférences sur
les
problèmes fondamentaux de la civilisation moderne. Décidément, le goû
929
ois conférences sur les problèmes fondamentaux de
la
civilisation moderne. Décidément, le goût du colossal — transmis aux
930
damentaux de la civilisation moderne. Décidément,
le
goût du colossal — transmis aux Américains — reste un trait marquant
931
nsmis aux Américains — reste un trait marquant de
l’
âme allemande : le choix de la salle, les sujets abordés, jusqu’à la s
932
ns — reste un trait marquant de l’âme allemande :
le
choix de la salle, les sujets abordés, jusqu’à la stature du conféren
933
n trait marquant de l’âme allemande : le choix de
la
salle, les sujets abordés, jusqu’à la stature du conférencier en témo
934
rquant de l’âme allemande : le choix de la salle,
les
sujets abordés, jusqu’à la stature du conférencier en témoignent une
935
le choix de la salle, les sujets abordés, jusqu’à
la
stature du conférencier en témoignent une fois de plus. Accueilli ave
936
is de plus. Accueilli avec quelque perplexité par
le
public de la première conférence, sifflé à la seconde, ovationné à la
937
nde, ovationné à la dernière, Keyserling, il faut
le
reconnaître, a su, par trois fois, tenir en haleine une salle énorme
938
le d’observations justes et souvent profondes sur
les
grandeurs et les misères d’une ère mécanicienne qui prélude à l’organ
939
justes et souvent profondes sur les grandeurs et
les
misères d’une ère mécanicienne qui prélude à l’organisation du monde-
940
les misères d’une ère mécanicienne qui prélude à
l’
organisation du monde-termitière type Lénine ou Ford. Soucieux de comp
941
Ford. Soucieux de comprendre notre temps avant de
le
condamner ou de l’absoudre, défenseur convaincu d’une spiritualité do
942
omprendre notre temps avant de le condamner ou de
l’
absoudre, défenseur convaincu d’une spiritualité dont il annonce le ré
943
seur convaincu d’une spiritualité dont il annonce
le
réveil au sein même du triomphe des machines, Keyserling apparaît com
944
ling apparaît comme un type très représentatif de
l’
Occident. Il n’a rien du prophète oriental contre lequel des Massis ma
945
nous mettaient naguère en garde. Keyserling voit
la
cause du développement exagéré de la technique dans le fait qu’aujour
946
serling voit la cause du développement exagéré de
la
technique dans le fait qu’aujourd’hui les masses veulent conquérir de
947
use du développement exagéré de la technique dans
le
fait qu’aujourd’hui les masses veulent conquérir des biens spirituels
948
agéré de la technique dans le fait qu’aujourd’hui
les
masses veulent conquérir des biens spirituels et matériels réservés a
949
s pour en jouir convenablement. Il faut organiser
la
conquête et la distribution de ces biens : d’où la technique. Cette p
950
convenablement. Il faut organiser la conquête et
la
distribution de ces biens : d’où la technique. Cette prétention des m
951
a conquête et la distribution de ces biens : d’où
la
technique. Cette prétention des masses, légitime d’ailleurs, a entraî
952
ntion des masses, légitime d’ailleurs, a entraîné
le
renversement de presque tous les buts de civilisation. C’est ainsi qu
953
leurs, a entraîné le renversement de presque tous
les
buts de civilisation. C’est ainsi que la pauvreté, considérée par les
954
ue tous les buts de civilisation. C’est ainsi que
la
pauvreté, considérée par les civilisations spiritualistes comme le bi
955
tion. C’est ainsi que la pauvreté, considérée par
les
civilisations spiritualistes comme le bien suprême dont seuls quelque
956
idérée par les civilisations spiritualistes comme
le
bien suprême dont seuls quelques élus peuvent se rendre dignes (les b
957
ont seuls quelques élus peuvent se rendre dignes (
les
brahmanes par exemple, le christianisme primitif) — la pauvreté est c
958
vent se rendre dignes (les brahmanes par exemple,
le
christianisme primitif) — la pauvreté est considérée de nos jours com
959
ahmanes par exemple, le christianisme primitif) —
la
pauvreté est considérée de nos jours comme un mal absolu et honteux.
960
un mal absolu et honteux. C’est ainsi encore que
l’
idéal chrétien de l’amour du prochain a tourné pratiquement à la méfia
961
nteux. C’est ainsi encore que l’idéal chrétien de
l’
amour du prochain a tourné pratiquement à la méfiance systématique du
962
en de l’amour du prochain a tourné pratiquement à
la
méfiance systématique du voisin inévitable. Mais ces anomalies très g
963
raversons une crise d’adaptation, et il s’agit de
la
résoudre dans le sens d’une philosophie de la vie qui rende aux valeu
964
se d’adaptation, et il s’agit de la résoudre dans
le
sens d’une philosophie de la vie qui rende aux valeurs spirituelles l
965
de la résoudre dans le sens d’une philosophie de
la
vie qui rende aux valeurs spirituelles leur primauté : car c’est à ce
966
mauté : car c’est à cette condition seulement que
la
vie humaine gardera sa signification. En somme, on pourrait résumer l
967
a sa signification. En somme, on pourrait résumer
la
pensée de Keyserling en disant qu’il oppose à l’idéal actuel d’assura
968
la pensée de Keyserling en disant qu’il oppose à
l’
idéal actuel d’assurances à tous les degrés — idéal antispirituel, méc
969
qu’il oppose à l’idéal actuel d’assurances à tous
les
degrés — idéal antispirituel, mécanique et « formidablement ennuyeux
970
saurait être pour nous qu’une « introduction » à
l’
ère spirituelle, une préparation nécessaire mais nullement suffisante.
971
écessaire mais nullement suffisante. Ce n’est pas
la
peur du monde-termitière qui sauvera la condition humaine menacée par
972
n’est pas la peur du monde-termitière qui sauvera
la
condition humaine menacée par le matérialisme : c’est un idéal positi
973
ière qui sauvera la condition humaine menacée par
le
matérialisme : c’est un idéal positif, immédiat parce qu’éternel. Là
974
Au sujet d’un grand roman :
La
Princesse Blanche par Maurice Baring (mai 1931)h M. Maurice Baring
975
g (mai 1931)h M. Maurice Baring est entré dans
l’
intimité de milliers de lecteurs français avec un livre d’un rare pres
976
du même auteur16, et il nous aide à mieux définir
le
charme de cette œuvre inoubliable. Antérieur de quelques années à Dap
977
oup plus long, — il compte plus de 600 pages dans
l’
édition française — d’un rythme plus inégal aussi, il ne lui est pas i
978
lus inégal aussi, il ne lui est pas inférieur par
l’
intérêt humain, et sa qualité d’émotion n’est pas moins pure. C’est l’
979
sa qualité d’émotion n’est pas moins pure. C’est
l’
histoire de la vie d’une femme, et de la vie d’une société aujourd’hui
980
émotion n’est pas moins pure. C’est l’histoire de
la
vie d’une femme, et de la vie d’une société aujourd’hui presque dispa
981
re. C’est l’histoire de la vie d’une femme, et de
la
vie d’une société aujourd’hui presque disparue, « roman-fleuve » que
982
x dates limitent : 1851-1914. Ainsi met-il en jeu
les
deux éléments dont l’antagonisme fait le fond de presque toutes les g
983
-1914. Ainsi met-il en jeu les deux éléments dont
l’
antagonisme fait le fond de presque toutes les grandes œuvres romanesq
984
en jeu les deux éléments dont l’antagonisme fait
le
fond de presque toutes les grandes œuvres romanesques : une individua
985
dont l’antagonisme fait le fond de presque toutes
les
grandes œuvres romanesques : une individualité et un milieu social bi
986
ute un troisième qui est moins visible, mais dont
la
présence constante donne au livre toute sa gravité. Maurice Baring ex
987
ar deux vers de son ami Hilaire Belloc dont voici
la
traduction : L’amour de Dieu qui mène aux royaumes d’en-haut est cont
988
son ami Hilaire Belloc dont voici la traduction :
L’
amour de Dieu qui mène aux royaumes d’en-haut est contrecarré par le d
989
i mène aux royaumes d’en-haut est contrecarré par
le
dieu de l’Amour. « Si vous désirez savoir comment cela s’applique à
990
royaumes d’en-haut est contrecarré par le dieu de
l’
Amour. « Si vous désirez savoir comment cela s’applique à mon histoir
991
avoir comment cela s’applique à mon histoire, dit
l’
auteur dans sa préface, lisez-la, et si vous la lisez, ne dites pas à
992
mon histoire, dit l’auteur dans sa préface, lisez-
la
, et si vous la lisez, ne dites pas à vos amis ce qui arrive avant qu’
993
it l’auteur dans sa préface, lisez-la, et si vous
la
lisez, ne dites pas à vos amis ce qui arrive avant qu’ils n’aient lu
994
s ce qui arrive avant qu’ils n’aient lu eux-mêmes
le
livre. J’espère que les critiques ne le diront pas non plus ; mais je
995
u’ils n’aient lu eux-mêmes le livre. J’espère que
les
critiques ne le diront pas non plus ; mais je sais que c’est beaucoup
996
eux-mêmes le livre. J’espère que les critiques ne
le
diront pas non plus ; mais je sais que c’est beaucoup leur demander.
997
r ces critiques d’une tâche impossible. Car toute
la
valeur de l’œuvre de Baring réside dans sa durée, dans son atmosphère
998
es d’une tâche impossible. Car toute la valeur de
l’
œuvre de Baring réside dans sa durée, dans son atmosphère et dans le s
999
réside dans sa durée, dans son atmosphère et dans
le
son qu’elle rend. Il ne s’y passe rien de plus que ce qu’admet la soc
1000
end. Il ne s’y passe rien de plus que ce qu’admet
la
société anglaise. Tout le drame est intérieur ; la passion ne s’y man
1001
de plus que ce qu’admet la société anglaise. Tout
le
drame est intérieur ; la passion ne s’y manifeste que par de très pet
1002
a société anglaise. Tout le drame est intérieur ;
la
passion ne s’y manifeste que par de très petits gestes qui, échappant
1003
iner une souffrance profonde, longtemps contenue.
L’
intensité des scènes gagne à cette retenue mondaine ce que perd le pit
1004
scènes gagne à cette retenue mondaine ce que perd
le
pittoresque de l’action, encore que l’évocation de cette haute sociét
1005
te retenue mondaine ce que perd le pittoresque de
l’
action, encore que l’évocation de cette haute société anglaise ne soit
1006
e que perd le pittoresque de l’action, encore que
l’
évocation de cette haute société anglaise ne soit pas dépourvue d’un c
1007
ui attirera certains lecteurs, qui agacera un peu
les
autres. M. Charles Du Bos, dans la très belle préface qu’il a donnée
1008
gacera un peu les autres. M. Charles Du Bos, dans
la
très belle préface qu’il a donnée à la traduction française note avec
1009
Bos, dans la très belle préface qu’il a donnée à
la
traduction française note avec raison que M. Baring se montre « quelq
1010
M. Baring se montre « quelque peu inexorable dans
la
libéralité avec laquelle il nous invite à de multiples week-ends… » I
1011
nds… » Il y aurait beaucoup à dire pour et contre
le
roman mondain — entendons mondain par le cadre et les personnages, no
1012
t contre le roman mondain — entendons mondain par
le
cadre et les personnages, non par l’inspiration. (Dans le cas de Bari
1013
roman mondain — entendons mondain par le cadre et
les
personnages, non par l’inspiration. (Dans le cas de Baring, elle sera
1014
mondain par le cadre et les personnages, non par
l’
inspiration. (Dans le cas de Baring, elle serait plutôt religieuse.) I
1015
et les personnages, non par l’inspiration. (Dans
le
cas de Baring, elle serait plutôt religieuse.) Il est incontestable q
1016
rait plutôt religieuse.) Il est incontestable que
l’
art a tout à gagner à se choisir un cadre étroit, voire même conventio
1017
e étroit, voire même conventionnel. Racine en est
le
plus haut exemple. La Société dans laquelle évoluent les héros de Bar
1018
onventionnel. Racine en est le plus haut exemple.
La
Société dans laquelle évoluent les héros de Baring est riche, « confo
1019
s haut exemple. La Société dans laquelle évoluent
les
héros de Baring est riche, « conformiste » à l’extrême, mais internat
1020
les héros de Baring est riche, « conformiste » à
l’
extrême, mais internationale. Cela permet à l’auteur autant qu’aux per
1021
» à l’extrême, mais internationale. Cela permet à
l’
auteur autant qu’aux personnages de ne pas s’attarder à des considérat
1022
oudre certains conflits apparemment sans issues :
les
acteurs du drame n’hésitent pas à louer une villa à Heidelberg ou à S
1023
à louer une villa à Heidelberg ou à Séville quand
la
situation n’est plus tenable à Londres, et l’histoire continue, pour
1024
and la situation n’est plus tenable à Londres, et
l’
histoire continue, pour notre agrément. Mais surtout, cette vie dénuée
1025
t à notre intérêt de se concentrer uniquement sur
les
sentiments, et dès lors elle constitue un milieu privilégié pour l’ét
1026
dès lors elle constitue un milieu privilégié pour
l’
étude du cœur humain. Si le rôle de l’art est d’affiner nos âmes au co
1027
milieu privilégié pour l’étude du cœur humain. Si
le
rôle de l’art est d’affiner nos âmes au contact de réalités plus pure
1028
ilégié pour l’étude du cœur humain. Si le rôle de
l’
art est d’affiner nos âmes au contact de réalités plus pures que celle
1029
s au contact de réalités plus pures que celles de
la
vie courante, on peut dire que les romans « mondains » de Baring ne m
1030
s que celles de la vie courante, on peut dire que
les
romans « mondains » de Baring ne manquent pas à cette tâche, et c’est
1031
Baring ne manquent pas à cette tâche, et c’est là
l’
important. Le mérite le plus rare de ce livre est sans doute de faire
1032
quent pas à cette tâche, et c’est là l’important.
Le
mérite le plus rare de ce livre est sans doute de faire sentir et « r
1033
à cette tâche, et c’est là l’important. Le mérite
le
plus rare de ce livre est sans doute de faire sentir et « réaliser »
1034
doute de faire sentir et « réaliser » au lecteur
le
tragique de la durée d’une vie. M. Baring nous fait suivre de sa nais
1035
sentir et « réaliser » au lecteur le tragique de
la
durée d’une vie. M. Baring nous fait suivre de sa naissance à sa mort
1036
nous fait suivre de sa naissance à sa mort toute
l’
existence de Blanche Clifford, sa vie de jeune fille, son mariage avec
1037
Clifford, sa vie de jeune fille, son mariage avec
le
prince Roccapalumba, puis avec un jeune lord ; toute l’existence d’un
1038
nce Roccapalumba, puis avec un jeune lord ; toute
l’
existence d’une femme qui ne cesse, jusqu’à sa dernière heure, d’aimer
1039
choisir un sujet inévitablement tragique. Car si
l’
histoire de l’ascension d’un caractère, d’une volonté, d’une âme viril
1040
jet inévitablement tragique. Car si l’histoire de
l’
ascension d’un caractère, d’une volonté, d’une âme virile, trouve dans
1041
onté, d’une âme virile, trouve dans sa durée même
l’
élément le plus convaincant de sa grandeur, et le plus tonique17, — il
1042
e âme virile, trouve dans sa durée même l’élément
le
plus convaincant de sa grandeur, et le plus tonique17, — il en va tou
1043
l’élément le plus convaincant de sa grandeur, et
le
plus tonique17, — il en va tout autrement de l’histoire d’une vie sen
1044
t le plus tonique17, — il en va tout autrement de
l’
histoire d’une vie sentimentale. La durée est l’élément tragique par e
1045
t autrement de l’histoire d’une vie sentimentale.
La
durée est l’élément tragique par excellence du sentiment, parce qu’el
1046
e l’histoire d’une vie sentimentale. La durée est
l’
élément tragique par excellence du sentiment, parce qu’elle le transfo
1047
agique par excellence du sentiment, parce qu’elle
le
transforme sans cesse, alors que nous sommes attachés surtout à des i
1048
s instants parfaits de nos affections ; parce que
le
sentiment ne souffre pas une ascension continue, mais une fois attein
1049
pas une ascension continue, mais une fois atteint
le
moment de sa perfection, ne peut plus que se souvenir, c’est-à-dire s
1050
que se souvenir, c’est-à-dire souffrir, vieillir.
L’
amour étant d’essence éternelle, ses manifestations dans notre vie — d
1051
ernelle, ses manifestations dans notre vie — dans
la
durée — sont nécessairement douloureuses. Certains, peut-être, verron
1052
une condamnation des passions humaines, et comme
la
morale du roman. Mais nous ne croyons pas qu’une œuvre de cette enver
1053
à proprement parler de morale, malgré ce que dit
l’
auteur dans sa préface. Bien plutôt, elle est l’expression concrète d’
1054
t l’auteur dans sa préface. Bien plutôt, elle est
l’
expression concrète d’une loi divine et humaine, et c’est ici que l’on
1055
ète d’une loi divine et humaine, et c’est ici que
l’
on peut voir sa profonde ressemblance avec les Affinités électives de
1056
que l’on peut voir sa profonde ressemblance avec
les
Affinités électives de Goethe. Aucune arrière-pensée de jugement mora
1057
ne arrière-pensée de jugement moral ne perce dans
le
ton ni dans l’agencement des incidents. Ce n’est pas un auteur qui s’
1058
ée de jugement moral ne perce dans le ton ni dans
l’
agencement des incidents. Ce n’est pas un auteur qui s’arroge un petit
1059
petit jugement dernier de ses personnages, comme
le
moraliste s’arroge le pouvoir de séparer le bien du mal parmi les act
1060
r de ses personnages, comme le moraliste s’arroge
le
pouvoir de séparer le bien du mal parmi les actions d’autrui qu’il es
1061
comme le moraliste s’arroge le pouvoir de séparer
le
bien du mal parmi les actions d’autrui qu’il estime connaître. Simple
1062
arroge le pouvoir de séparer le bien du mal parmi
les
actions d’autrui qu’il estime connaître. Simplement, il enregistre le
1063
qu’il estime connaître. Simplement, il enregistre
les
effets d’une justice immanente. En même temps que les actions de ses
1064
effets d’une justice immanente. En même temps que
les
actions de ses héros, il note les jugements contradictoires qu’elles
1065
même temps que les actions de ses héros, il note
les
jugements contradictoires qu’elles provoquent. Et le tragique qui se
1066
jugements contradictoires qu’elles provoquent. Et
le
tragique qui se dégage lentement de cette longue confusion de plaisir
1067
’égoïsmes déçus, d’égoïsmes comblés, ce n’est pas
le
tragique d’une condamnation, mais celui, combien plus amer et noble,
1068
n plus amer et noble, du consentement aux lois de
la
vie. Seule épreuve qui permette de nous en libérer. Car au-dessus des
1069
dessus des fatalités humaines, ce qui compte chez
les
personnages de Baring, c’est la manière d’accepter une destinée, de l
1070
qui compte chez les personnages de Baring, c’est
la
manière d’accepter une destinée, de la transfigurer ou d’y succomber.
1071
ing, c’est la manière d’accepter une destinée, de
la
transfigurer ou d’y succomber. C’est cela qui forme le sujet implicit
1072
ansfigurer ou d’y succomber. C’est cela qui forme
le
sujet implicite, nous l’avons dit, de son œuvre romanesque. Et c’est
1073
er. C’est cela qui forme le sujet implicite, nous
l’
avons dit, de son œuvre romanesque. Et c’est par tout ce qu’elle conti
1074
eversante. Il est pourtant un endroit du roman où
l’
auteur intervient visiblement, force les faits, agit comme un « morali
1075
u roman où l’auteur intervient visiblement, force
les
faits, agit comme un « moraliste » désireux de justifier une thèse pl
1076
justifier une thèse plus que de faire comprendre
la
réalité. Et c’est au cours des quarante pages qu’il consacre à la « c
1077
’est au cours des quarante pages qu’il consacre à
la
« conversion » au catholicisme de la princesse Blanche. Arrêtons-nous
1078
l consacre à la « conversion » au catholicisme de
la
princesse Blanche. Arrêtons-nous un peu à l’examen de ce passage auqu
1079
e de la princesse Blanche. Arrêtons-nous un peu à
l’
examen de ce passage auquel on sent que Baring attache une importance
1080
ortance qui n’est pas uniquement « romanesque » —
le
mouvement du récit se ralentit, au contraire, fâcheusement en ces pag
1081
fâcheusement en ces pages — et qui s’explique si
l’
on a lu la phrase par quoi se termine un précédent livre de notre aute
1082
ent en ces pages — et qui s’explique si l’on a lu
la
phrase par quoi se termine un précédent livre de notre auteur : « La
1083
se termine un précédent livre de notre auteur : «
La
veille de la Chandeleur 1909, je fus reçu dans le sein de l’Église ca
1084
précédent livre de notre auteur : « La veille de
la
Chandeleur 1909, je fus reçu dans le sein de l’Église catholique… le
1085
La veille de la Chandeleur 1909, je fus reçu dans
le
sein de l’Église catholique… le seul acte de ma vie que je suis parfa
1086
e la Chandeleur 1909, je fus reçu dans le sein de
l’
Église catholique… le seul acte de ma vie que je suis parfaitement cer
1087
je fus reçu dans le sein de l’Église catholique…
le
seul acte de ma vie que je suis parfaitement certain de n’avoir jamai
1088
ne pression sur ses convictions religieuses. Mais
le
mot conviction ne doit être pris ici qu’au sens le plus conventionnel
1089
e mot conviction ne doit être pris ici qu’au sens
le
plus conventionnel. Car à une tante anglaise qui lui exprime l’espoir
1090
tionnel. Car à une tante anglaise qui lui exprime
l’
espoir que sa vie à l’étranger n’ait point ébranlé sa foi, la princess
1091
te anglaise qui lui exprime l’espoir que sa vie à
l’
étranger n’ait point ébranlé sa foi, la princesse répond : « Je ne cro
1092
e sa vie à l’étranger n’ait point ébranlé sa foi,
la
princesse répond : « Je ne crois pas, j’espère que non ; bien qu’il s
1093
nt de détresse aiguë, ou bien je m’y ennuie. » Et
l’
on découvre soudain que cette femme, qui a subi sans les mettre jamais
1094
découvre soudain que cette femme, qui a subi sans
les
mettre jamais en question les exigences les plus terribles de la soci
1095
me, qui a subi sans les mettre jamais en question
les
exigences les plus terribles de la société insulaire, possède un sens
1096
sans les mettre jamais en question les exigences
les
plus terribles de la société insulaire, possède un sens critique assu
1097
s en question les exigences les plus terribles de
la
société insulaire, possède un sens critique assuré qu’elle applique n
1098
nner ici quelque invraisemblance psychologique si
l’
on ne s’apercevait que M. Baring, lui-même, manifeste cette tournure d
1099
e cette tournure d’esprit au cours de ses romans.
Le
trait satirique, ailleurs presque imperceptible, est nettement appuyé
1100
nt appuyé dès qu’il s’agit des vieilles tantes de
la
Princesse, chargées ici de représenter deux églises anglaises. Ces de
1101
ables ladies, qui ne jouent pas d’autre rôle dans
l’
histoire, sont ridicules et conventionnelles à souhait (ni plus ni moi
1102
conventionnelles à souhait (ni plus ni moins que
la
majorité des gens de cette sorte, mais est-ce à eux que l’on demande
1103
té des gens de cette sorte, mais est-ce à eux que
l’
on demande de définir la doctrine ?). Voici quelques traits amusants o
1104
te, mais est-ce à eux que l’on demande de définir
la
doctrine ?). Voici quelques traits amusants ou cruels qui les caracté
1105
?). Voici quelques traits amusants ou cruels qui
les
caractérisent. « Naturellement, vous allez à l’église le dimanche ? —
1106
les caractérisent. « Naturellement, vous allez à
l’
église le dimanche ? — Oui, tante Harriet, j’y vais. — Tante Harriet e
1107
ctérisent. « Naturellement, vous allez à l’église
le
dimanche ? — Oui, tante Harriet, j’y vais. — Tante Harriet eut un sou
1108
is. — Tante Harriet eut un soupir de soulagement.
La
question était réglée : du moment qu’on allait à l’église le dimanche
1109
question était réglée : du moment qu’on allait à
l’
église le dimanche, tout était bien ; inutile d’en demander plus. » Pa
1110
était réglée : du moment qu’on allait à l’église
le
dimanche, tout était bien ; inutile d’en demander plus. » Parlant de
1111
demander plus. » Parlant de son pasteur préféré,
la
même tante Harriet a ce mot exquis : « Il prêche merveilleusement san
1112
e excentricité. » Elle appelle ceux qui passent à
l’
Église romaine des « pervertis » : « Nous en avons eu trop dans la fam
1113
des « pervertis » : « Nous en avons eu trop dans
la
famille, votre pauvre oncle Charles… qui avait stupéfié la famille en
1114
e, votre pauvre oncle Charles… qui avait stupéfié
la
famille en devenant catholique…, puis Edmund Lely, cousin germain de
1115
qui est devenu moine, et qui marche pieds nus, à
l’
étranger lui aussi ; puis il y a eu votre pauvre tante Cornélia… Ce fu
1116
nous nous sommes montrés très bons à son égard… »
L’
on conçoit que Blanche malheureuse, isolée, cherchant une sécurité int
1117
ne trouve pas dans ces indignations sentimentales
la
réponse aux premiers troubles que la grâce jette dans son âme. D’autr
1118
entimentales la réponse aux premiers troubles que
la
grâce jette dans son âme. D’autre part, tous les catholiques qu’elle
1119
e la grâce jette dans son âme. D’autre part, tous
les
catholiques qu’elle rencontre et qui lui parlent de leur foi se disti
1120
anité charmante, « une façon naturelle de traiter
les
questions religieuses, sans fausse honte ». (Seuls, parmi les catholi
1121
s religieuses, sans fausse honte ». (Seuls, parmi
les
catholiques, son mari et sa tyrannique belle-mère sont nettement anti
1122
ment Blanche ne se sentirait-elle pas attirée par
la
Rome papale, qui la console de la Rome de son mari et la venge de l’A
1123
entirait-elle pas attirée par la Rome papale, qui
la
console de la Rome de son mari et la venge de l’Angleterre de ses tan
1124
pas attirée par la Rome papale, qui la console de
la
Rome de son mari et la venge de l’Angleterre de ses tantes. Elle abju
1125
papale, qui la console de la Rome de son mari et
la
venge de l’Angleterre de ses tantes. Elle abjure secrètement, à Londr
1126
la console de la Rome de son mari et la venge de
l’
Angleterre de ses tantes. Elle abjure secrètement, à Londres. C’est p
1127
s. C’est peut-être à l’endroit de cette œuvre où
l’
on parle le plus directement de Dieu que Dieu est le plus absent. Car
1128
eut-être à l’endroit de cette œuvre où l’on parle
le
plus directement de Dieu que Dieu est le plus absent. Car nous y somm
1129
on parle le plus directement de Dieu que Dieu est
le
plus absent. Car nous y sommes à chaque page incités à juger, induits
1130
ais bien que tout changement de confession ramène
les
mêmes arguments qui retiennent l’esprit à la périphérie des vérités r
1131
fession ramène les mêmes arguments qui retiennent
l’
esprit à la périphérie des vérités religieuses, là où elles paraissent
1132
ène les mêmes arguments qui retiennent l’esprit à
la
périphérie des vérités religieuses, là où elles paraissent s’opposer,
1133
les paraissent s’opposer, au lieu de nous aider à
les
mieux pénétrer, à les approfondir jusqu’à l’unité. Il est d’autant pl
1134
er, au lieu de nous aider à les mieux pénétrer, à
les
approfondir jusqu’à l’unité. Il est d’autant plus regrettable de voir
1135
r à les mieux pénétrer, à les approfondir jusqu’à
l’
unité. Il est d’autant plus regrettable de voir Baring se départir ici
1136
lus regrettable de voir Baring se départir ici de
la
sagesse qu’il montre ailleurs, grossir les traits, découvrir la thèse
1137
ici de la sagesse qu’il montre ailleurs, grossir
les
traits, découvrir la thèse. Il eût pu s’en dispenser d’ailleurs, car
1138
il montre ailleurs, grossir les traits, découvrir
la
thèse. Il eût pu s’en dispenser d’ailleurs, car en définitive la conv
1139
t pu s’en dispenser d’ailleurs, car en définitive
la
conversion de son héroïne nous paraît être à tel point la seule solut
1140
rsion de son héroïne nous paraît être à tel point
la
seule solution possible qu’elle n’est plus du tout exemplaire et ne p
1141
’est plus du tout exemplaire et ne peut servir ni
le
catholicisme (le milieu protestant étant nul), ni la foi chrétienne e
1142
exemplaire et ne peut servir ni le catholicisme (
le
milieu protestant étant nul), ni la foi chrétienne en général (du fai
1143
catholicisme (le milieu protestant étant nul), ni
la
foi chrétienne en général (du fait précisément que les mobiles humain
1144
oi chrétienne en général (du fait précisément que
les
mobiles humains sont ici entièrement suffisants et rendent superflue
1145
t ici entièrement suffisants et rendent superflue
l’
action de la grâce). Mais quoi ? Nous laisserons-nous vraiment « tente
1146
ement suffisants et rendent superflue l’action de
la
grâce). Mais quoi ? Nous laisserons-nous vraiment « tenter » par cett
1147
r » par cette erreur de Baring ? Cherchons plutôt
le
secret d’une communion que rompent les discussions, et qu’en tant d’a
1148
hons plutôt le secret d’une communion que rompent
les
discussions, et qu’en tant d’autres pages de cette belle œuvre, d’une
1149
’une simple indication tranquille et profonde sur
l’
état d’âme d’un de ses héros, comme sans le savoir, il établit. En vér
1150
de sur l’état d’âme d’un de ses héros, comme sans
le
savoir, il établit. En vérité, l’entrée de Blanche dans l’Église cath
1151
ros, comme sans le savoir, il établit. En vérité,
l’
entrée de Blanche dans l’Église catholique n’est pas une conversion18,
1152
, il établit. En vérité, l’entrée de Blanche dans
l’
Église catholique n’est pas une conversion18, c’est une adhésion à ce
1153
on18, c’est une adhésion à ce qui lui semble être
la
vérité. Sa vraie conversion a lieu beaucoup plus tard, lorsqu’elle tr
1154
tard, lorsqu’elle trouve, à force de souffrance,
le
courage de sacrifier son amour. Mais elle ne peut survivre à cet acte
1155
si notre bonheur humain n’est-il en aucune mesure
le
signe de la vérité. Personne, peut-être, n’a répété avec autant de fo
1156
heur humain n’est-il en aucune mesure le signe de
la
vérité. Personne, peut-être, n’a répété avec autant de force que Bari
1157
-être, n’a répété avec autant de force que Baring
le
fameux, l’irrépressible argument du bonheur, fondement pratique de la
1158
répété avec autant de force que Baring le fameux,
l’
irrépressible argument du bonheur, fondement pratique de la morale cou
1159
ssible argument du bonheur, fondement pratique de
la
morale courante. Presque tous les événements de son roman le contredi
1160
ment pratique de la morale courante. Presque tous
les
événements de son roman le contredisent. Ceci entraîne cela — bonheur
1161
ourante. Presque tous les événements de son roman
le
contredisent. Ceci entraîne cela — bonheur ou catastrophe — non parce
1162
tout acte qui entraîne des ruines humaines. Mais
la
vérité, elle, est indifférente à ce que nous appelons bonheur ou malh
1163
ce que nous appelons bonheur ou malheur. Et c’est
la
vérité seule qu’il s’agit d’attendre. Dans Daphné Adeane, dans La Pri
1164
qu’il s’agit d’attendre. Dans Daphné Adeane, dans
La
Princesse Blanche, ce sont deux prêtres19 qui, au moment décisif, vie
1165
oment décisif, viennent apporter ce dur message à
l’
âme de celle qui demandait d’être apaisée. Admirables dialogues, déchi
1166
es, déchirants et triomphants, qui comptent parmi
les
chefs-d’œuvre de la littérature religieuse. Celui de La Princesse Bl
1167
omphants, qui comptent parmi les chefs-d’œuvre de
la
littérature religieuse. Celui de La Princesse Blanche 20 donne sans
1168
s-d’œuvre de la littérature religieuse. Celui de
La
Princesse Blanche 20 donne sans aucun doute l’accord le plus profond
1169
e La Princesse Blanche 20 donne sans aucun doute
l’
accord le plus profond de l’œuvre de Baring. En voici la conclusion. (
1170
ncesse Blanche 20 donne sans aucun doute l’accord
le
plus profond de l’œuvre de Baring. En voici la conclusion. (C’est Bla
1171
onne sans aucun doute l’accord le plus profond de
l’
œuvre de Baring. En voici la conclusion. (C’est Blanche qui parle au p
1172
rd le plus profond de l’œuvre de Baring. En voici
la
conclusion. (C’est Blanche qui parle au père Michaël.) Vous comprene
1173
nde seulement de prier pour moi, car j’ai parfois
la
sensation que ma misère est plus que je ne peux supporter. La vie hum
1174
que ma misère est plus que je ne peux supporter.
La
vie humaine me paraît intolérable. — Elle l’est presque, mais pas tou
1175
ter. La vie humaine me paraît intolérable. — Elle
l’
est presque, mais pas tout à fait. Il faut l’accepter. Songez à l’agon
1176
Elle l’est presque, mais pas tout à fait. Il faut
l’
accepter. Songez à l’agonie du Jardin des Oliviers. Blanche se souvint
1177
ais pas tout à fait. Il faut l’accepter. Songez à
l’
agonie du Jardin des Oliviers. Blanche se souvint que Lady Mount-Strat
1178
int que Lady Mount-Stratton lui avait dit presque
la
même chose dans le Podere à Florence. — Je sens, il est vrai, que j’a
1179
Stratton lui avait dit presque la même chose dans
le
Podere à Florence. — Je sens, il est vrai, que j’ai commis des erreur
1180
j’ai commis des erreurs irréparables. — Vous avez
le
droit de vous laisser mener par le remords au bord du désespoir, mais
1181
s. — Vous avez le droit de vous laisser mener par
le
remords au bord du désespoir, mais pas plus loin. Et c’est ainsi que
1182
mme dit Charles Du Bos « cette tristesse par-delà
la
tristesse que Baring excelle à suggérer, qu’au deuxième mouvement, au
1183
nn a enclose et embaumée ». « Tristesse, par-delà
la
tristesse »… Un tel état de l’âme n’est plus très éloigné peut-être d
1184
ristesse, par-delà la tristesse »… Un tel état de
l’
âme n’est plus très éloigné peut-être de cette joie qui, elle aussi, e
1185
joie « qui surpasse toute connaissance ». 16.
La
Princesse Blanche, Stock, éditeur. 17. Qu’on lise, par exemple, l’ad
1186
he, Stock, éditeur. 17. Qu’on lise, par exemple,
l’
admirable Goethe, histoire d’un homme, d’Émile Ludwig (Attinger, éd.),
1187
g (Attinger, éd.), ouvrage sur lequel nous aurons
l’
occasion de revenir. 18. Il est absurde, voire aux yeux de la foi sca
1188
e revenir. 18. Il est absurde, voire aux yeux de
la
foi scandaleux de parler de conversion d’un protestantisme au catholi
1189
conversion d’un protestantisme au catholicisme ou
l’
inverse. On ne se convertit pas à quelque chose. On se convertit simpl
1190
de, « [Compte rendu] Au sujet d’un grand roman :
La
Princesse Blanche par Maurice Baring », Foi et Vie, Paris, mai 1931,
1191
Kierkegaard (mai 1931)i j
L’
entrée de l’œuvre de Kierkegaard dans le monde intellectuel et religie
1192
Kierkegaard (mai 1931)i j L’entrée de
l’
œuvre de Kierkegaard dans le monde intellectuel et religieux français,
1193
31)i j L’entrée de l’œuvre de Kierkegaard dans
le
monde intellectuel et religieux français, est un événement qui mérite
1194
ignalé et qui aura un profond retentissement dans
le
protestantisme en particulier. Depuis quelques années, le nom de Kier
1195
stantisme en particulier. Depuis quelques années,
le
nom de Kierkegaard reparaît de loin en loin dans des revues comme Com
1196
t de loin en loin dans des revues comme Commerce,
la
Nouvelle Revue française , la Revue de Genève . Diverses études lui
1197
es comme Commerce, la Nouvelle Revue française ,
la
Revue de Genève . Diverses études lui ont été consacrées, en particu
1198
tudes lui ont été consacrées, en particulier dans
la
Revue d’histoire et de philosophie religieuses de Strasbourg (Pascal
1199
es de Strasbourg (Pascal et Kierkegaard), et dans
la
Revue de métaphysique et de morale. Et voici que l’on annonce de plus
1200
Revue de métaphysique et de morale. Et voici que
l’
on annonce de plusieurs côtés21, la publication prochaine des œuvres p
1201
. Et voici que l’on annonce de plusieurs côtés21,
la
publication prochaine des œuvres principales de l’un des plus grands
1202
hague en 1813, et y mourut en 1855. Voici comment
le
profond essayiste allemand Rudolf Kassner caractérise cette existence
1203
caractérise cette existence (Commerce, n° XII).
Le
grand événement de sa vie fut la mort de l’Évêque Mynster qui avait é
1204
merce, n° XII). Le grand événement de sa vie fut
la
mort de l’Évêque Mynster qui avait été très estimé au Danemark et que
1205
II). Le grand événement de sa vie fut la mort de
l’
Évêque Mynster qui avait été très estimé au Danemark et que Kierkegaar
1206
aimé et honoré, comme ami de son père. Martensen,
le
successeur présumé de Mynster, prononçant un discours sur la tombe de
1207
ur présumé de Mynster, prononçant un discours sur
la
tombe de l’évêque, le loua d’avoir été l’un des « grands détenteurs d
1208
e Mynster, prononçant un discours sur la tombe de
l’
évêque, le loua d’avoir été l’un des « grands détenteurs de la vérité,
1209
prononçant un discours sur la tombe de l’évêque,
le
loua d’avoir été l’un des « grands détenteurs de la vérité, dont la l
1210
loua d’avoir été l’un des « grands détenteurs de
la
vérité, dont la longue chaîne part des apôtres ». Mais Kierkegaard re
1211
é l’un des « grands détenteurs de la vérité, dont
la
longue chaîne part des apôtres ». Mais Kierkegaard reste soucieux : M
1212
gaard reste soucieux : Mynster est-il vraiment de
la
lignée des Apôtres, se demande-t-il ? Les prêtres sont-ils, dans le v
1213
iment de la lignée des Apôtres, se demande-t-il ?
Les
prêtres sont-ils, dans le vrai sens du mot, les successeurs du Christ
1214
res, se demande-t-il ? Les prêtres sont-ils, dans
le
vrai sens du mot, les successeurs du Christ ? Ne sont-ils pas plutôt
1215
? Les prêtres sont-ils, dans le vrai sens du mot,
les
successeurs du Christ ? Ne sont-ils pas plutôt des fonctionnaires pay
1216
sont-ils pas plutôt des fonctionnaires payés par
l’
État et avides d’avancement ? Les écrits polémiques de Kierkegaard, Le
1217
nnaires payés par l’État et avides d’avancement ?
Les
écrits polémiques de Kierkegaard, Le Moment et les Attaques contre le
1218
vancement ? Les écrits polémiques de Kierkegaard,
Le
Moment et les Attaques contre le christianisme officiel ne peuvent êt
1219
es écrits polémiques de Kierkegaard, Le Moment et
les
Attaques contre le christianisme officiel ne peuvent être comparés qu
1220
de Kierkegaard, Le Moment et les Attaques contre
le
christianisme officiel ne peuvent être comparés qu’aux Provinciales.
1221
tre comparés qu’aux Provinciales. Kierkegaard est
le
Pascal du protestantisme, et il est caractéristique à la fois du mond
1222
u catholicisme et du monde du protestantisme, que
la
polémique et la satire qui sévirent, dans le premier, dès ses origine
1223
t du monde du protestantisme, que la polémique et
la
satire qui sévirent, dans le premier, dès ses origines, ne se donnère
1224
s origines, ne se donnèrent cours par contre qu’à
la
fin du second. Le Moment et les Attaques contre le christianisme offi
1225
donnèrent cours par contre qu’à la fin du second.
Le
Moment et les Attaques contre le christianisme officiel furent l’acte
1226
rs par contre qu’à la fin du second. Le Moment et
les
Attaques contre le christianisme officiel furent l’acte de Kierkegaar
1227
a fin du second. Le Moment et les Attaques contre
le
christianisme officiel furent l’acte de Kierkegaard. Après cet acte,
1228
Attaques contre le christianisme officiel furent
l’
acte de Kierkegaard. Après cet acte, il mourut. Comme Hamlet. » Et vo
1229
gaard fut le dernier grand protestant. On ne peut
le
comparer qu’aux grands fondateurs du christianisme, à Luther, à Calvi
1230
ateurs du christianisme, à Luther, à Calvin. Tous
les
autres paraissent petits à côté de lui. La question essentielle pour
1231
Tous les autres paraissent petits à côté de lui.
La
question essentielle pour Kierkegaard était : Comment deviendrai-je c
1232
l un protestant pouvait trouver pareille formule.
Le
héros de la foi, Kierkegaard, « l’Isolé », n’a plus rien en lui ni de
1233
ant pouvait trouver pareille formule. Le héros de
la
foi, Kierkegaard, « l’Isolé », n’a plus rien en lui ni de Faust, ni d
1234
eille formule. Le héros de la foi, Kierkegaard, «
l’
Isolé », n’a plus rien en lui ni de Faust, ni du Caïn de Byron, il a d
1235
ui ni de Faust, ni du Caïn de Byron, il a dépassé
le
romantisme. Ou plutôt, le romantisme fut la jeunesse, le passé de « l
1236
de Byron, il a dépassé le romantisme. Ou plutôt,
le
romantisme fut la jeunesse, le passé de « l’Isolé ». Et l’expression
1237
passé le romantisme. Ou plutôt, le romantisme fut
la
jeunesse, le passé de « l’Isolé ». Et l’expression la plus caractéris
1238
ntisme. Ou plutôt, le romantisme fut la jeunesse,
le
passé de « l’Isolé ». Et l’expression la plus caractéristique de ce n
1239
tôt, le romantisme fut la jeunesse, le passé de «
l’
Isolé ». Et l’expression la plus caractéristique de ce nouvel homme, q
1240
isme fut la jeunesse, le passé de « l’Isolé ». Et
l’
expression la plus caractéristique de ce nouvel homme, qui a dépassé l
1241
eunesse, le passé de « l’Isolé ». Et l’expression
la
plus caractéristique de ce nouvel homme, qui a dépassé le romantisme,
1242
caractéristique de ce nouvel homme, qui a dépassé
le
romantisme, est la nouvelle psychologie. L’œuvre la plus profonde et
1243
ce nouvel homme, qui a dépassé le romantisme, est
la
nouvelle psychologie. L’œuvre la plus profonde et la plus originale d
1244
passé le romantisme, est la nouvelle psychologie.
L’
œuvre la plus profonde et la plus originale de Kierkegaard est sa Psyc
1245
romantisme, est la nouvelle psychologie. L’œuvre
la
plus profonde et la plus originale de Kierkegaard est sa Psychologie
1246
nouvelle psychologie. L’œuvre la plus profonde et
la
plus originale de Kierkegaard est sa Psychologie de l’Angoisse, à laq
1247
us originale de Kierkegaard est sa Psychologie de
l’
Angoisse, à laquelle on ne peut trouver d’analogie que chez Dostoïevsk
1248
rchent de pair et aucun autre esprit du siècle ne
les
dépasse. On peut déplorer qu’une œuvre de cette envergure ait pénétr
1249
tte envergure ait pénétré d’abord en France, sous
les
espèces du fragment le moins caractéristique de Kierkegaard : Le Jour
1250
é d’abord en France, sous les espèces du fragment
le
moins caractéristique de Kierkegaard : Le Journal du séducteur (Stock
1251
ragment le moins caractéristique de Kierkegaard :
Le
Journal du séducteur (Stock éd.). Kierkegaard lui-même avait exprimé
1252
r (Stock éd.). Kierkegaard lui-même avait exprimé
le
souhait formel que l’on n’ouvrît pas par ce roman la série de traduct
1253
aard lui-même avait exprimé le souhait formel que
l’
on n’ouvrît pas par ce roman la série de traductions de ses livres. Ma
1254
souhait formel que l’on n’ouvrît pas par ce roman
la
série de traductions de ses livres. Mais ce Journal, s’il est l’œuvre
1255
ductions de ses livres. Mais ce Journal, s’il est
l’
œuvre la moins forte du Danois, n’en est pas moins, dans son dosage pr
1256
de ses livres. Mais ce Journal, s’il est l’œuvre
la
moins forte du Danois, n’en est pas moins, dans son dosage pré-gidien
1257
l s’agit maintenant de nous révéler ce « héros de
la
foi », ce maître de la pensée chrétienne tragique, paradoxale et viru
1258
nous révéler ce « héros de la foi », ce maître de
la
pensée chrétienne tragique, paradoxale et virulente. Qu’une telle œuv
1259
œuvre commence son action en France au moment où
l’
intérêt passionné de beaucoup se porte à la rencontre du message de Ka
1260
ent où l’intérêt passionné de beaucoup se porte à
la
rencontre du message de Karl Barth, disciple fervent de Kierkegaard,
1261
fervent de Kierkegaard, — nous pouvons y attacher
la
valeur d’un signe. Kierkegaard sera pour beaucoup d’esprits en quête
1262
sera pour beaucoup d’esprits en quête d’absolus,
le
maître que fut Nietzsche pour leurs aînés. Il n’est pas sûr que les «
1263
Nietzsche pour leurs aînés. Il n’est pas sûr que
les
« religions » y gagnent, mais la foi, certainement. Et « l’honneur de
1264
est pas sûr que les « religions » y gagnent, mais
la
foi, certainement. Et « l’honneur de Dieu ». 21. Aux Éditions de la
1265
ions » y gagnent, mais la foi, certainement. Et «
l’
honneur de Dieu ». 21. Aux Éditions de la Nouvelle Revue française
1266
. Et « l’honneur de Dieu ». 21. Aux Éditions de
la
Nouvelle Revue française , chez Fourcade et aux Éditions « Je sers »
1267
pour mériter quelques instants de plénitude dans
la
contemplation de sommets assez rares. Personne, à notre connaissance,
1268
e notre histoire littéraire : pour nos critiques,
les
Alpes n’avaient pas d’histoire. Enfin, voici ce livre, point trop vol
1269
udition très aérée. Comment ne point partager, en
le
lisant, ce goût qu’avait le vieux Goethe pour les ouvrages documentai
1270
ne point partager, en le lisant, ce goût qu’avait
le
vieux Goethe pour les ouvrages documentaires, pleins d’analyses préci
1271
le lisant, ce goût qu’avait le vieux Goethe pour
les
ouvrages documentaires, pleins d’analyses précises, de citations, de
1272
tions, de planches hors-texte ? C’est un repos de
l’
esprit en même temps qu’une nourriture pour l’imagination. On goûtera
1273
de l’esprit en même temps qu’une nourriture pour
l’
imagination. On goûtera les citations nombreuses que l’auteur a su int
1274
qu’une nourriture pour l’imagination. On goûtera
les
citations nombreuses que l’auteur a su introduire et commenter avec l
1275
gination. On goûtera les citations nombreuses que
l’
auteur a su introduire et commenter avec la discrétion et souvent l’ir
1276
es que l’auteur a su introduire et commenter avec
la
discrétion et souvent l’ironie légère qui conviennent. Plus encore qu
1277
oduire et commenter avec la discrétion et souvent
l’
ironie légère qui conviennent. Plus encore que par leur valeur proprem
1278
nt intéressantes par tout ce qu’elles révèlent de
la
mentalité des écrivains et des peuples dont elles émanent. La montagn
1279
des écrivains et des peuples dont elles émanent.
La
montagne est un merveilleux réactif, au contact duquel certains trait
1280
vue et significative. On regrettera seulement que
l’
auteur ait dû se borner à confronter les réactions anglaises et frança
1281
lement que l’auteur ait dû se borner à confronter
les
réactions anglaises et françaises. La réaction allemande eût apporté
1282
confronter les réactions anglaises et françaises.
La
réaction allemande eût apporté un élément important et radicalement d
1283
ant et radicalement différent. Nous essaierons de
l’
esquisser plus loin. ⁂ Ce qui frappe dès l’abord, c’est la pauvreté de
1284
ons de l’esquisser plus loin. ⁂ Ce qui frappe dès
l’
abord, c’est la pauvreté de la littérature alpestre en France. À part
1285
ser plus loin. ⁂ Ce qui frappe dès l’abord, c’est
la
pauvreté de la littérature alpestre en France. À part Sénancour, aucu
1286
⁂ Ce qui frappe dès l’abord, c’est la pauvreté de
la
littérature alpestre en France. À part Sénancour, aucun de nos écriva
1287
ancour, aucun de nos écrivains n’a su puiser dans
le
thème de la montagne une inspiration lyrique ou philosophique générat
1288
n de nos écrivains n’a su puiser dans le thème de
la
montagne une inspiration lyrique ou philosophique génératrice d’œuvre
1289
, à un Byron, à un Ruskin ? Chateaubriand, devant
le
Mont-Blanc, clame son horreur de tant de démesure, et ses description
1290
sure, et ses descriptions des Alpes constituent «
le
plus violent réquisitoire qu’on ait jamais écrit contre elles ». Pour
1291
n ait jamais écrit contre elles ». Pour Rousseau,
la
montagne, c’est surtout le fond des vallées, — si l’on ose dire, — où
1292
lles ». Pour Rousseau, la montagne, c’est surtout
le
fond des vallées, — si l’on ose dire, — où il fait vivre d’imaginaire
1293
montagne, c’est surtout le fond des vallées, — si
l’
on ose dire, — où il fait vivre d’imaginaires bons sauvages. Et pour l
1294
l fait vivre d’imaginaires bons sauvages. Et pour
la
grande majorité de ceux qui, après lui, feront intervenir la montagne
1295
ajorité de ceux qui, après lui, feront intervenir
la
montagne dans leurs œuvres, elle n’est guère qu’un décor conventionne
1296
tout fait, dont on agrémente des digressions sur
l’
ordre social. Mlle Engel constate que « les plus grands poètes françai
1297
ons sur l’ordre social. Mlle Engel constate que «
les
plus grands poètes français du xixe siècle ont échoué dans leur inte
1298
tagnes. Ils ont tous étudié presque exclusivement
l’
âme humaine. La montagne qui repousse l’homme, la montagne farouche, e
1299
tous étudié presque exclusivement l’âme humaine.
La
montagne qui repousse l’homme, la montagne farouche, effrayante, leur
1300
usivement l’âme humaine. La montagne qui repousse
l’
homme, la montagne farouche, effrayante, leur a semblé incompréhensibl
1301
l’âme humaine. La montagne qui repousse l’homme,
la
montagne farouche, effrayante, leur a semblé incompréhensible ». C’es
1302
ante, leur a semblé incompréhensible ». C’est que
le
mystère des choses les attire moins que le jeu des passions et des in
1303
compréhensible ». C’est que le mystère des choses
les
attire moins que le jeu des passions et des intérêts sociaux. Or, en
1304
st que le mystère des choses les attire moins que
le
jeu des passions et des intérêts sociaux. Or, en face de la montagne,
1305
passions et des intérêts sociaux. Or, en face de
la
montagne, l’homme est seul. Sénancour, c’est tout autre chose. Lui, c
1306
des intérêts sociaux. Or, en face de la montagne,
l’
homme est seul. Sénancour, c’est tout autre chose. Lui, cherche un ref
1307
tout autre chose. Lui, cherche un refuge. « Dans
l’
isolement des cimes ou des hautes vallées, seul avec la nature dans un
1308
lement des cimes ou des hautes vallées, seul avec
la
nature dans une sorte d’ivresse morne, il parvenait à oublier la fuit
1309
une sorte d’ivresse morne, il parvenait à oublier
la
fuite des heures et de la vie : l’existence perd sa fièvre au cours d
1310
il parvenait à oublier la fuite des heures et de
la
vie : l’existence perd sa fièvre au cours des longues heures silencie
1311
nait à oublier la fuite des heures et de la vie :
l’
existence perd sa fièvre au cours des longues heures silencieuses qui
1312
heures silencieuses qui s’égrènent une à une dans
les
solitudes de rocs et de glace. » Sénancour éprouvait ce qu’il appela,
1313
éprouvait ce qu’il appela, d’un mot admirable, «
la
lenteur des choses ». C’est qu’il a pénétré dans ces solitudes que le
1314
s ». C’est qu’il a pénétré dans ces solitudes que
les
autres contemplaient d’en bas ; non pas en curieux : en mystique. Par
1315
rendra pas un moderne ; mais elle est unique dans
la
littérature française du xixe . La littérature anglaise, au contraire
1316
st unique dans la littérature française du xixe .
La
littérature anglaise, au contraire, a donné toute une suite de chefs-
1317
Toute une tradition d’individualisme lui frayait
la
voie », note fort justement notre auteur. L’homme seul en face des so
1318
yait la voie », note fort justement notre auteur.
L’
homme seul en face des sommets, qu’écrira-t-il ? — Shelley : « L’immen
1319
face des sommets, qu’écrira-t-il ? — Shelley : «
L’
immensité de ces sommets aériens excite, lorsqu’ils frappent la vue, u
1320
e ces sommets aériens excite, lorsqu’ils frappent
la
vue, un sentiment d’extase émerveillée auquel la folie n’est pas étra
1321
la vue, un sentiment d’extase émerveillée auquel
la
folie n’est pas étrangère. » — « Cependant, le Mont-Blanc luit là-hau
1322
el la folie n’est pas étrangère. » — « Cependant,
le
Mont-Blanc luit là-haut ; la Puissance est là, la tranquille et solen
1323
re. » — « Cependant, le Mont-Blanc luit là-haut ;
la
Puissance est là, la tranquille et solennelle Puissance aux mille asp
1324
le Mont-Blanc luit là-haut ; la Puissance est là,
la
tranquille et solennelle Puissance aux mille aspects, aux mille bruit
1325
mille aspects, aux mille bruits. » Ce n’est plus
l’
homme que ces poètes viennent interroger sur les hauteurs, mais une so
1326
us l’homme que ces poètes viennent interroger sur
les
hauteurs, mais une sombre et surhumaine fatalité (Byron), ou « la sec
1327
s une sombre et surhumaine fatalité (Byron), ou «
la
secrète force des choses » (Shelley), ou encore (Wordsworth) « les ty
1328
des choses » (Shelley), ou encore (Wordsworth) «
les
types et les symboles de l’Éternité ». Du panthéisme d’un Shelley au
1329
(Shelley), ou encore (Wordsworth) « les types et
les
symboles de l’Éternité ». Du panthéisme d’un Shelley au mysticisme d’
1330
ncore (Wordsworth) « les types et les symboles de
l’
Éternité ». Du panthéisme d’un Shelley au mysticisme d’un Ruskin, c’es
1331
st un cantique d’adoration spirituelle que chante
la
poésie anglaise en de véritables « élévations ». Mais tout ce lyrisme
1332
s dépourvu de grandiloquence ni de pieuse fadeur.
La
montagne, ne serait-elle jamais qu’un écrasant symbole de l’éternité
1333
, ne serait-elle jamais qu’un écrasant symbole de
l’
éternité ? — C’est aussi quelque chose qui devrait être surmonté, nous
1334
nte, aux résonances vraiment altières, celle-là :
la
voix de Nietzsche. ⁂ Ici, nous changeons de monde. À vrai dire, nous
1335
us changeons de monde. À vrai dire, nous quittons
la
littérature. « Celui qui sait respirer l’atmosphère de mon œuvre sait
1336
uittons la littérature. « Celui qui sait respirer
l’
atmosphère de mon œuvre sait que c’est une atmosphère des hauteurs, qu
1337
e sait que c’est une atmosphère des hauteurs, que
l’
air y est vif. Il faut être créé pour cette atmosphère, sinon l’on ris
1338
f. Il faut être créé pour cette atmosphère, sinon
l’
on risque beaucoup de prendre froid. La glace est proche, la solitude
1339
ère, sinon l’on risque beaucoup de prendre froid.
La
glace est proche, la solitude énorme, mais voyez avec quelle tranquil
1340
e beaucoup de prendre froid. La glace est proche,
la
solitude énorme, mais voyez avec quelle tranquillité tout repose dans
1341
s voyez avec quelle tranquillité tout repose dans
la
lumière… » Vous avez reconnu ce ton souverain. Pour la première fois,
1342
reconnu ce ton souverain. Pour la première fois,
le
ton des hauteurs, le ton de celui qui les a conquises, physiquement a
1343
rain. Pour la première fois, le ton des hauteurs,
le
ton de celui qui les a conquises, physiquement aussi. Toute l’œuvre d
1344
re fois, le ton des hauteurs, le ton de celui qui
les
a conquises, physiquement aussi. Toute l’œuvre de Nietzsche est plein
1345
ui qui les a conquises, physiquement aussi. Toute
l’
œuvre de Nietzsche est pleine de repères alpestres. « Comme ces vues p
1346
« Comme ces vues précises, aiguës, et qu’inspire
l’
escarpement, nous changent des rêveries de Rousseau. Celui-ci se promè
1347
ne, l’autre escalade. Et comme elles s’opposent à
la
médiocre littérature qui transforme les sommets en images d’un Dieu v
1348
opposent à la médiocre littérature qui transforme
les
sommets en images d’un Dieu vertueux, ou en remparts de la liberté. L
1349
s en images d’un Dieu vertueux, ou en remparts de
la
liberté. La montagne n’est ni bienveillante ni maternelle ; elle pour
1350
d’un Dieu vertueux, ou en remparts de la liberté.
La
montagne n’est ni bienveillante ni maternelle ; elle poursuit une gra
1351
grandiose existence géologique sans rapport avec
la
nôtre. Les atomes que nous sommes peuvent trouver sur ses flancs l’oc
1352
existence géologique sans rapport avec la nôtre.
Les
atomes que nous sommes peuvent trouver sur ses flancs l’occasion d’un
1353
es que nous sommes peuvent trouver sur ses flancs
l’
occasion d’une lutte… elle ignorera toujours ces victoires. » Nous emp
1354
el essai que Robert de Traz intitula Nietzsche et
les
hauteurs 23, et qui, posé en face du tableau franco-anglais, fournit
1355
-anglais, fournit un contraste de haut goût. Là,
les
montagnes se prêtaient successivement à des interprétations sociologi
1356
ssure), romanesques (Sterne, Toepffer), lyriques (
les
Anglais). Ici, elles imposent une éthique. Là, elles prêtaient le rom
1357
, elles imposent une éthique. Là, elles prêtaient
le
romantisme de leur décor ; ici, par l’effort de discipline qu’elles e
1358
prêtaient le romantisme de leur décor ; ici, par
l’
effort de discipline qu’elles exigent de qui veut les vaincre, c’est u
1359
effort de discipline qu’elles exigent de qui veut
les
vaincre, c’est un classicisme héroïque qu’elles inspirent. Ce thème é
1360
e thème éthique et philosophique paraît bien être
le
plus fécond et le plus adéquat à la nature alpestre. Il contient en p
1361
philosophique paraît bien être le plus fécond et
le
plus adéquat à la nature alpestre. Il contient en puissance toute une
1362
aît bien être le plus fécond et le plus adéquat à
la
nature alpestre. Il contient en puissance toute une morale de l’effor
1363
tre. Il contient en puissance toute une morale de
l’
effort individuel et désintéressé, un constructivisme assez austère, m
1364
isme assez austère, mais stimulant, et qui mène à
la
joie… C’est un thème très « protestant ». Nietzsche l’a développé ave
1365
ie… C’est un thème très « protestant ». Nietzsche
l’
a développé avec une ampleur inégalable : il y trouvait tous les symbo
1366
avec une ampleur inégalable : il y trouvait tous
les
symboles de la vie dangereuse, du risque, du triomphe conquis par la
1367
r inégalable : il y trouvait tous les symboles de
la
vie dangereuse, du risque, du triomphe conquis par la dureté. Mais l’
1368
ie dangereuse, du risque, du triomphe conquis par
la
dureté. Mais l’a-t-il épuisé ? Il y a depuis Nietzsche un style alpes
1369
u risque, du triomphe conquis par la dureté. Mais
l’
a-t-il épuisé ? Il y a depuis Nietzsche un style alpestre dans la pens
1370
? Il y a depuis Nietzsche un style alpestre dans
la
pensée. Ne pourrait-il pas informer d’autres pensées que les malédict
1371
Ne pourrait-il pas informer d’autres pensées que
les
malédictions de Zarathoustra ? Quand nos écrivains, lassés de la circ
1372
de Zarathoustra ? Quand nos écrivains, lassés de
la
circulation des idées citadines, éprouveront le besoin de créer vérit
1373
e la circulation des idées citadines, éprouveront
le
besoin de créer véritablement quelques valeurs nouvelles, il se peut
1374
tournent vers ces derniers symboles physiques de
la
solitude et de la grandeur, les Alpes. Nous souffrons d’une carence i
1375
derniers symboles physiques de la solitude et de
la
grandeur, les Alpes. Nous souffrons d’une carence inquiétante de l’hé
1376
boles physiques de la solitude et de la grandeur,
les
Alpes. Nous souffrons d’une carence inquiétante de l’héroïsme. Dans l
1377
lpes. Nous souffrons d’une carence inquiétante de
l’
héroïsme. Dans la lutte pour la vie que nous impose le monde contempor
1378
ons d’une carence inquiétante de l’héroïsme. Dans
la
lutte pour la vie que nous impose le monde contemporain, c’est l’habi
1379
nce inquiétante de l’héroïsme. Dans la lutte pour
la
vie que nous impose le monde contemporain, c’est l’habileté qui triom
1380
roïsme. Dans la lutte pour la vie que nous impose
le
monde contemporain, c’est l’habileté qui triomphe, et non plus la « v
1381
vie que nous impose le monde contemporain, c’est
l’
habileté qui triomphe, et non plus la « virtu ». L’héroïsme, au vieux
1382
orain, c’est l’habileté qui triomphe, et non plus
la
« virtu ». L’héroïsme, au vieux sens du mot, ne trouve plus où s’exer
1383
’habileté qui triomphe, et non plus la « virtu ».
L’
héroïsme, au vieux sens du mot, ne trouve plus où s’exercer. Et ce n’e
1384
uère qu’au plus obscur de certains cœurs, et dans
le
secret de certains renoncements, que le regard spirituel saurait enco
1385
, et dans le secret de certains renoncements, que
le
regard spirituel saurait encore en déceler l’équivalent. Peut-être le
1386
que le regard spirituel saurait encore en déceler
l’
équivalent. Peut-être le goût du sport trahit-il la nostalgie d’une vi
1387
saurait encore en déceler l’équivalent. Peut-être
le
goût du sport trahit-il la nostalgie d’une vie qui comporterait des r
1388
’équivalent. Peut-être le goût du sport trahit-il
la
nostalgie d’une vie qui comporterait des risques extérieurs. Mais c’e
1389
ntenter à bon marché, et personne ne croit plus à
la
vertu de simulacres à ce point galvaudés. (Un Montherlant lui-même, r
1390
t galvaudés. (Un Montherlant lui-même, récemment,
le
confessait.) Deux chances sont encore offertes aux amateurs de risque
1391
e offertes aux amateurs de risques authentiques :
l’
aviation et l’alpinisme. On commence à nous donner quelques « romans d
1392
amateurs de risques authentiques : l’aviation et
l’
alpinisme. On commence à nous donner quelques « romans de l’air », et
1393
e. On commence à nous donner quelques « romans de
l’
air », et certains sont remarquables. Se trouvera-t-il un romancier po
1394
s. Se trouvera-t-il un romancier pour animer dans
le
décor des « hauts lieux » autre chose qu’une intrigue de palaces ?
1395
» autre chose qu’une intrigue de palaces ? 22.
La
Littérature alpestre en France et en Angleterre, aux xviiie et xixe
1396
Avant
l’
Aube, par Kagawa (septembre 1931)l m Dire de ce livre qu’il ne ress
1397
livre entièrement simple qui nous introduit dans
la
connaissance de la misère, et par là même nous fait sentir combien no
1398
simple qui nous introduit dans la connaissance de
la
misère, et par là même nous fait sentir combien nous sommes mesquins,
1399
itables et sans grandeur. Peut-être, se dit-on en
le
fermant, est-il réellement impossible à une âme chrétienne d’atteindr
1400
ement impossible à une âme chrétienne d’atteindre
la
grandeur morale si elle n’a pas connu, ne fût-ce que par sa puissance
1401
nnu, ne fût-ce que par sa puissance de sympathie,
la
misère physique et matérielle du monde où nous vivons. C’est un terri
1402
ir pratiquement abandonné à une doctrine de haine
le
sort de ceux que le Christ aima, parce que leur dénuement était ce qu
1403
donné à une doctrine de haine le sort de ceux que
le
Christ aima, parce que leur dénuement était ce qu’il y avait au monde
1404
y avait au monde, de plus proche de sa grandeur.
L’
existence et l’action de Kagawa, telles qu’il les raconte dans ces deu
1405
de, de plus proche de sa grandeur. L’existence et
l’
action de Kagawa, telles qu’il les raconte dans ces deux volumes, témo
1406
. L’existence et l’action de Kagawa, telles qu’il
les
raconte dans ces deux volumes, témoignent que l’amour chrétien peut e
1407
les raconte dans ces deux volumes, témoignent que
l’
amour chrétien peut encore aujourd’hui pénétrer un monde revendiqué pa
1408
core aujourd’hui pénétrer un monde revendiqué par
le
communisme, comme son bien propre. Mais il n’y a pas là de quoi nous
1409
e. Mais il n’y a pas là de quoi nous rassurer. Si
la
vie de Kagawa glorifie l’Évangile, elle accuse formellement la grande
1410
quoi nous rassurer. Si la vie de Kagawa glorifie
l’
Évangile, elle accuse formellement la grande majorité des chrétiens. T
1411
awa glorifie l’Évangile, elle accuse formellement
la
grande majorité des chrétiens. Tant mieux si ce livre nous passionne.
1412
sionne. Il faudrait surtout qu’il nous trouble. ⁂
L’
autobiographie de Toyohiko Kagawa, publiée au Japon sous le titre d’Au
1413
graphie de Toyohiko Kagawa, publiée au Japon sous
le
titre d’Au-delà de la ligne de la mort, en Amérique, en Angleterre, e
1414
gawa, publiée au Japon sous le titre d’Au-delà de
la
ligne de la mort, en Amérique, en Angleterre, en Allemagne, et en Fra
1415
e au Japon sous le titre d’Au-delà de la ligne de
la
mort, en Amérique, en Angleterre, en Allemagne, et en France, sous ce
1416
e, en Allemagne, et en France, sous celui d’Avant
l’
Aube, est un des livres les plus significatifs de ce temps. Non pas qu
1417
nce, sous celui d’Avant l’Aube, est un des livres
les
plus significatifs de ce temps. Non pas que nous manquions de témoign
1418
ps. Non pas que nous manquions de témoignages sur
les
conditions d’existence du prolétariat mondial, ni que nous ignorions
1419
ions que notre siècle est celui des meneurs. Mais
le
rare, c’est qu’un de ces meneurs écrive un livre pour nous dire comme
1420
rs écrive un livre pour nous dire comment il voit
le
peuple, comment il l’aime, et quel est le secret de son autorité sur
1421
r nous dire comment il voit le peuple, comment il
l’
aime, et quel est le secret de son autorité sur lui. L’état d’esprit d
1422
il voit le peuple, comment il l’aime, et quel est
le
secret de son autorité sur lui. L’état d’esprit de l’homme d’action s
1423
e, et quel est le secret de son autorité sur lui.
L’
état d’esprit de l’homme d’action s’accommode rarement d’une réflexion
1424
ecret de son autorité sur lui. L’état d’esprit de
l’
homme d’action s’accommode rarement d’une réflexion impartiale et d’un
1425
ersonnels, affectifs, voire religieux, qui sont à
l’
origine de son entreprise. C’est même un des malheurs de notre temps,
1426
e. C’est même un des malheurs de notre temps, que
l’
action devenue trop rapide suppose une cécité partielle chez ceux qui
1427
dans une vision du monde globale et cohérente, à
le
juger religieusement par exemple. Que l’on songe à l’œuvre d’un Ford,
1428
rente, à le juger religieusement par exemple. Que
l’
on songe à l’œuvre d’un Ford, ou à celle de presque tous nos hommes d’
1429
uger religieusement par exemple. Que l’on songe à
l’
œuvre d’un Ford, ou à celle de presque tous nos hommes d’État. Le priv
1430
rd, ou à celle de presque tous nos hommes d’État.
Le
privilège admirable de Kagawa, c’est qu’il poursuit son action en ple
1431
ec sa foi chrétienne. Il peut livrer sans crainte
le
secret d’une telle action ; sans crainte et sans vanité non plus, car
1432
çaises ou suisses nous avaient appris à connaître
les
résultats considérables de l’œuvre sociale, politique et religieuse s
1433
appris à connaître les résultats considérables de
l’
œuvre sociale, politique et religieuse suscitée par Kagawa. Nous savio
1434
asteur d’une petite paroisse presbytérienne était
le
chef du Jeune Japon, l’initiateur de réformes de grande envergure, co
1435
isse presbytérienne était le chef du Jeune Japon,
l’
initiateur de réformes de grande envergure, commencées dans les bas-fo
1436
de réformes de grande envergure, commencées dans
les
bas-fonds de la ville de Kobé et peu à peu élargies à tout ce vaste e
1437
rande envergure, commencées dans les bas-fonds de
la
ville de Kobé et peu à peu élargies à tout ce vaste empire moderne si
1438
ce vaste empire moderne si rapidement envahi par
la
civilisation d’une Europe dont il rejette la religion24. Nous savions
1439
par la civilisation d’une Europe dont il rejette
la
religion24. Nous savions aussi que ce leader social, cet économiste e
1440
doublaient d’un écrivain extrêmement fécond, dont
l’
autobiographie en particulier avait atteint des tirages sans précédent
1441
rer en contact personnel avec cette œuvre : Avant
l’
Aube comble cette attente, mais elle en fait naître une nouvelle. C’es
1442
n fait naître une nouvelle. C’est, en effet, sous
la
forme d’un roman dont le héros, Eiichi, est évidemment l’auteur lui-m
1443
e. C’est, en effet, sous la forme d’un roman dont
le
héros, Eiichi, est évidemment l’auteur lui-même, le récit de l’adoles
1444
d’un roman dont le héros, Eiichi, est évidemment
l’
auteur lui-même, le récit de l’adolescence et de la jeunesse de notre
1445
héros, Eiichi, est évidemment l’auteur lui-même,
le
récit de l’adolescence et de la jeunesse de notre héros ; mais ce réc
1446
hi, est évidemment l’auteur lui-même, le récit de
l’
adolescence et de la jeunesse de notre héros ; mais ce récit prend fin
1447
’auteur lui-même, le récit de l’adolescence et de
la
jeunesse de notre héros ; mais ce récit prend fin au moment où Kagawa
1448
récit prend fin au moment où Kagawa débouche dans
la
vie publique et politique. Espérons qu’une biographie complète suivra
1449
dire passionnante, et qui nous fait pénétrer dans
l’
intimité d’une vie, aux sources mêmes de ses déterminations. ⁂ Ce qui
1450
. ⁂ Ce qui frappe, dès les premières pages, c’est
l’
extrême minutie du récit. Les auteurs qui écrivent leurs mémoires s’at
1451
remières pages, c’est l’extrême minutie du récit.
Les
auteurs qui écrivent leurs mémoires s’attachent d’ordinaire aux faits
1452
uèrent leur vie ; ils négligent volontiers ce qui
les
rend semblables au commun des mortels ; bref, plus ou moins inconscie
1453
surtout dans le premier volume, nous assistons à
l’
existence la plus quotidienne d’Eiichi, à ces mille petites difficulté
1454
s le premier volume, nous assistons à l’existence
la
plus quotidienne d’Eiichi, à ces mille petites difficultés précises e
1455
nts de doute, de désir ou d’ennui qui constituent
la
trame réelle de notre activité et qui différencient radicalement notr
1456
ie d’un conte de fées. Il n’y a là, de la part de
l’
auteur, nul parti pris de « réalisme » littéraire, mais bien le signe
1457
parti pris de « réalisme » littéraire, mais bien
le
signe d’une absence d’hypocrisie tout à fait insolite, et qui dans ce
1458
maints lecteurs. Kagawa ne « décolle » jamais de
la
réalité psychologique et matérielle, et c’est par là que dans sa simp
1459
isent une vérité vécue et particulière. Telle est
la
certitude qui se dégage lentement d’une profusion peu commune de peti
1460
criptions des lieux où ils vivent. C’est dire que
l’
œuvre mérite l’effort d’attention soutenue que plusieurs chapitres du
1461
ieux où ils vivent. C’est dire que l’œuvre mérite
l’
effort d’attention soutenue que plusieurs chapitres du premier tome ri
1462
ser, par une multiplicité de notations touchant à
la
monotonie. Au reste, à mesure qu’on avance, l’on comprend mieux les r
1463
à la monotonie. Au reste, à mesure qu’on avance,
l’
on comprend mieux les raisons de la popularité d’une telle œuvre : c’e
1464
reste, à mesure qu’on avance, l’on comprend mieux
les
raisons de la popularité d’une telle œuvre : c’est toute la vie du Ja
1465
qu’on avance, l’on comprend mieux les raisons de
la
popularité d’une telle œuvre : c’est toute la vie du Japon actuel qu’
1466
de la popularité d’une telle œuvre : c’est toute
la
vie du Japon actuel qu’elle concrétise sous nos yeux. Certes, ce n’es
1467
awa : Il appuya son front chaud et malade contre
la
fenêtre, ferma les yeux et somnola. Le train faisait un bruit épouvan
1468
on front chaud et malade contre la fenêtre, ferma
les
yeux et somnola. Le train faisait un bruit épouvantable dans sa cours
1469
ade contre la fenêtre, ferma les yeux et somnola.
Le
train faisait un bruit épouvantable dans sa course. Il pensait que c’
1470
course. Il pensait que c’eût été bien agréable si
le
wagon entier eût été de verre. À partir de Tennoji, le train s’arrêta
1471
gon entier eût été de verre. À partir de Tennoji,
le
train s’arrêta à un nombre incalculable de stations. Regardant par la
1472
un nombre incalculable de stations. Regardant par
la
fenêtre, il vit d’affreux noms de gares tels que Tenman, Tamazukuri,
1473
res tels que Tenman, Tamazukuri, tout à fait dans
le
genre d’Osaka, écrits sur des lampes carrées. Entre les stations, des
1474
nre d’Osaka, écrits sur des lampes carrées. Entre
les
stations, des étendues de toits de tuiles, avec de la fumée noire qui
1475
tations, des étendues de toits de tuiles, avec de
la
fumée noire qui s’en échappait. Osaka, la nuit, avait un air étrange,
1476
avec de la fumée noire qui s’en échappait. Osaka,
la
nuit, avait un air étrange, quelque chose comme un océan battu par la
1477
r étrange, quelque chose comme un océan battu par
la
tempête. Tandis que le train longeait les bords de la rivière Yodogaw
1478
e comme un océan battu par la tempête. Tandis que
le
train longeait les bords de la rivière Yodogawa, il se rappela soudai
1479
attu par la tempête. Tandis que le train longeait
les
bords de la rivière Yodogawa, il se rappela soudain que c’était un en
1480
empête. Tandis que le train longeait les bords de
la
rivière Yodogawa, il se rappela soudain que c’était un endroit célèbr
1481
ppela soudain que c’était un endroit célèbre pour
les
suicides, et qu’il avait vu un jour, au théâtre, à Kobé, le drame du
1482
s, et qu’il avait vu un jour, au théâtre, à Kobé,
le
drame du suicide de Akaneya et Sankatsu, sa bien-aimée. Suicide et Os
1483
neya et Sankatsu, sa bien-aimée. Suicide et Osaka
la
nuit ! Il ne comprenait pas pourquoi ces deux mots lui semblaient avo
1484
es et atroces. Quel horrible endroit, cet Osaka !
Les
endroits surpeuplés sont terribles ! Nous trouvons d’abord Eiichi Ni
1485
terribles ! Nous trouvons d’abord Eiichi Niimi à
l’
Université de Meiji Gakuin, près de Tokyo, dans une atmosphère de disc
1486
e de discussions philosophiques fort curieuse, où
les
doctrines bouddhistes, chrétiennes, matérialistes et socialistes s’op
1487
ialistes s’opposent dans des termes inusités pour
l’
Occident, mais sont oubliées, comme partout, dès qu’il s’agit d’embarr
1488
mauvaises nouvelles qu’on reçoit de sa famille. À
la
suite d’une discussion vive avec des étudiants chrétiens au sujet d’u
1489
urs camarades, Eiichi se décide soudain à quitter
l’
Université. Ce passage nous le montre déjà tout entier : subit et abso
1490
e soudain à quitter l’Université. Ce passage nous
le
montre déjà tout entier : subit et absolu dans ses déterminations, fa
1491
matériels. Ses larmes augmentèrent en pensant à
la
pauvreté de sentiments des chrétiens ; il pensait aussi que lui-même,
1492
des chrétiens ; il pensait aussi que lui-même, à
la
fin du mois, devrait gagner sa pension et son écolage ; il pensait au
1493
ots. Soudain, il prit une décision. Il quitterait
l’
Université pour se plonger dans la vie active et mettre à l’épreuve so
1494
. Il quitterait l’Université pour se plonger dans
la
vie active et mettre à l’épreuve son grand idéal. Que pouvait-il y av
1495
té pour se plonger dans la vie active et mettre à
l’
épreuve son grand idéal. Que pouvait-il y avoir de plus noble que de p
1496
pouvait-il y avoir de plus noble que de partager
la
vie quotidienne des gens de la campagne. Il serait auprès de sa sœur,
1497
le que de partager la vie quotidienne des gens de
la
campagne. Il serait auprès de sa sœur, que personne n’aimait. Il déci
1498
ersonne n’aimait. Il décida de retourner chez lui
la
nuit même, et après s’être demandé avec quelque anxiété comment il fe
1499
nes terribles avec son père, riche commerçant que
l’
on accuse de malhonnêteté, caractère impérieux, esprit étroit, et qui
1500
esprit étroit, et qui défend avec violence contre
les
idées subversives de son fils un ordre social dont l’avantage évident
1501
dées subversives de son fils un ordre social dont
l’
avantage évident est de le mettre à l’abri de la véritable justice. Il
1502
ls un ordre social dont l’avantage évident est de
le
mettre à l’abri de la véritable justice. Il finit par mettre Eiichi à
1503
social dont l’avantage évident est de le mettre à
l’
abri de la véritable justice. Il finit par mettre Eiichi à la porte. I
1504
t l’avantage évident est de le mettre à l’abri de
la
véritable justice. Il finit par mettre Eiichi à la porte. Il lui rest
1505
a véritable justice. Il finit par mettre Eiichi à
la
porte. Il lui reste la ressource de se faire instituteur. Il assiste
1506
finit par mettre Eiichi à la porte. Il lui reste
la
ressource de se faire instituteur. Il assiste un soir, par hasard, à
1507
, par hasard, à une réunion d’évangélisation dont
la
description serait tout entière à citer, dans son inénarrable et crue
1508
nte par moments. C’est là qu’il retrouve Tsuruko,
la
belle jeune fille qu’il aimait dans son adolescence. Et l’idylle pass
1509
jeune fille qu’il aimait dans son adolescence. Et
l’
idylle passionnée se renoue, mais en même temps le drame s’éveille dan
1510
l’idylle passionnée se renoue, mais en même temps
le
drame s’éveille dans l’âme du jeune homme : comment concilier son bon
1511
enoue, mais en même temps le drame s’éveille dans
l’
âme du jeune homme : comment concilier son bonheur personnel avec l’id
1512
me : comment concilier son bonheur personnel avec
l’
idéal de rénovation sociale qu’il a conçu ? Et comment trouver le cour
1513
vation sociale qu’il a conçu ? Et comment trouver
le
courage de se donner à cet idéal, dont la réalisation pratique lui ré
1514
trouver le courage de se donner à cet idéal, dont
la
réalisation pratique lui répugne encore ? Il s’en rend compte lors de
1515
au plus vite de cet horrible endroit et de jeter
les
principes philanthropiques à tous les vents ; de rentrer bien vite da
1516
et de jeter les principes philanthropiques à tous
les
vents ; de rentrer bien vite dans sa maison garnie de belles nattes e
1517
te mêles de ces affaires, tu ne seras toi-même, à
la
fin, pas bien éloigné du vulgaire. » Mais au même moment une autre vo
1518
même moment une autre voix intérieure disait : «
La
bonté est le sel de la vie. L’organisme social demande des sacrifices
1519
une autre voix intérieure disait : « La bonté est
le
sel de la vie. L’organisme social demande des sacrifices pour l’amour
1520
voix intérieure disait : « La bonté est le sel de
la
vie. L’organisme social demande des sacrifices pour l’amour des vivan
1521
érieure disait : « La bonté est le sel de la vie.
L’
organisme social demande des sacrifices pour l’amour des vivants. » L
1522
e. L’organisme social demande des sacrifices pour
l’
amour des vivants. » Le conflit intérieur s’intensifie bientôt jusqu’
1523
mande des sacrifices pour l’amour des vivants. »
Le
conflit intérieur s’intensifie bientôt jusqu’à provoquer en lui une s
1524
en lui une sorte de folie. Tsuruko est obligée de
le
quitter. Alors dans un accès de désespoir, il tente de mettre le feu
1525
rs dans un accès de désespoir, il tente de mettre
le
feu à sa maison. Il s’enfuit, et s’engage comme manœuvre dans les doc
1526
son. Il s’enfuit, et s’engage comme manœuvre dans
les
docks. La mort de son père l’oblige à en sortir, mais en même temps d
1527
nfuit, et s’engage comme manœuvre dans les docks.
La
mort de son père l’oblige à en sortir, mais en même temps décide de l
1528
omme manœuvre dans les docks. La mort de son père
l’
oblige à en sortir, mais en même temps décide de l’orientation de sa v
1529
’oblige à en sortir, mais en même temps décide de
l’
orientation de sa vie : Il avait vu mourir Sanuki au logement ouvrier
1530
uki au logement ouvrier, et il ne pensait pas que
la
mort de son père fût particulièrement importante. Il avait appris qu’
1531
ut avoir une volonté de fer, lorsqu’on tombe dans
la
lie de la société. Le jour des funérailles, Eiichi essaya de garder t
1532
ne volonté de fer, lorsqu’on tombe dans la lie de
la
société. Le jour des funérailles, Eiichi essaya de garder tout son sa
1533
e fer, lorsqu’on tombe dans la lie de la société.
Le
jour des funérailles, Eiichi essaya de garder tout son sang-froid, ma
1534
oid, mais au cimetière du Temple de Zuigan, quand
les
prêtres de douze temples et Eiichi à leur suite entourèrent le cercue
1535
douze temples et Eiichi à leur suite entourèrent
le
cercueil, il ne put retenir ses larmes. Tandis qu’il marchait en sile
1536
s. Tandis qu’il marchait en silence à la suite de
la
procession funèbre, toutes ses relations avec son père se déroulèrent
1537
es yeux. Au-delà des sentiments de Hamlet, voyant
la
procession funèbre d’Ophélie, pensa Eiichi, il y avait la redoutable
1538
ssion funèbre d’Ophélie, pensa Eiichi, il y avait
la
redoutable réalité, et il pleura de crainte et de tristesse. Tout ins
1539
pleura de crainte et de tristesse. Tout inspirait
le
respect : le bruit discordant des cymbales, les psalmodies des écritu
1540
inte et de tristesse. Tout inspirait le respect :
le
bruit discordant des cymbales, les psalmodies des écritures. En écout
1541
it le respect : le bruit discordant des cymbales,
les
psalmodies des écritures. En écoutant la mystérieuse musique funèbre,
1542
mbales, les psalmodies des écritures. En écoutant
la
mystérieuse musique funèbre, Eiichi prit une résolution. Désormais, r
1543
une résolution. Désormais, rompant tout lien avec
le
passé, comme on franchit le pas de la mort, il lutterait contre les c
1544
ompant tout lien avec le passé, comme on franchit
le
pas de la mort, il lutterait contre les conventions établies, les tra
1545
t lien avec le passé, comme on franchit le pas de
la
mort, il lutterait contre les conventions établies, les traditions et
1546
n franchit le pas de la mort, il lutterait contre
les
conventions établies, les traditions et les sophismes. Devant lui éta
1547
rt, il lutterait contre les conventions établies,
les
traditions et les sophismes. Devant lui était le monde : le monde, l’
1548
ontre les conventions établies, les traditions et
les
sophismes. Devant lui était le monde : le monde, l’énorme asile de fo
1549
les traditions et les sophismes. Devant lui était
le
monde : le monde, l’énorme asile de fous dont Eiichi avait parlé à so
1550
ons et les sophismes. Devant lui était le monde :
le
monde, l’énorme asile de fous dont Eiichi avait parlé à son père — mo
1551
sophismes. Devant lui était le monde : le monde,
l’
énorme asile de fous dont Eiichi avait parlé à son père — mort mainten
1552
rlé à son père — mort maintenant —, tourmenté par
l’
emprise du militarisme et du capitalisme ; un asile de fous qui s’éten
1553
italisme ; un asile de fous qui s’étend sur toute
la
terre. Sans se préoccuper si c’était le monde ou lui-même qui était f
1554
sur toute la terre. Sans se préoccuper si c’était
le
monde ou lui-même qui était fou, Eiichi décida que, de ce jour-là, il
1555
suicider. Mais un soir qu’il prêche au carrefour,
la
maladie qui depuis longtemps l’enfiévrait, le terrasse, dans la boue,
1556
che au carrefour, la maladie qui depuis longtemps
l’
enfiévrait, le terrasse, dans la boue, sous la pluie. Il renaîtra bien
1557
ur, la maladie qui depuis longtemps l’enfiévrait,
le
terrasse, dans la boue, sous la pluie. Il renaîtra bientôt à la vie,
1558
depuis longtemps l’enfiévrait, le terrasse, dans
la
boue, sous la pluie. Il renaîtra bientôt à la vie, mais cette fois po
1559
mps l’enfiévrait, le terrasse, dans la boue, sous
la
pluie. Il renaîtra bientôt à la vie, mais cette fois pour se donner t
1560
ans la boue, sous la pluie. Il renaîtra bientôt à
la
vie, mais cette fois pour se donner tout entier à la misère des bas-f
1561
vie, mais cette fois pour se donner tout entier à
la
misère des bas-fonds de Kobé. Il fait siennes toutes les épreuves d’u
1562
ère des bas-fonds de Kobé. Il fait siennes toutes
les
épreuves d’un peuple misérable, des pires brutes qu’il recueille dans
1563
es, et vont jusqu’à lui tirer dessus, — ce qui ne
l’
empêche pas de les reprendre ensuite, chez lui, car il professe avec f
1564
’à lui tirer dessus, — ce qui ne l’empêche pas de
les
reprendre ensuite, chez lui, car il professe avec fanatisme la non-ré
1565
ensuite, chez lui, car il professe avec fanatisme
la
non-résistance au mal. Bientôt il prend figure de saint parmi le peup
1566
ce au mal. Bientôt il prend figure de saint parmi
le
peuple qui le respecte, l’exploite et subit l’empire de sa douceur. C
1567
ntôt il prend figure de saint parmi le peuple qui
le
respecte, l’exploite et subit l’empire de sa douceur. Cette deuxième
1568
figure de saint parmi le peuple qui le respecte,
l’
exploite et subit l’empire de sa douceur. Cette deuxième partie de l’o
1569
mi le peuple qui le respecte, l’exploite et subit
l’
empire de sa douceur. Cette deuxième partie de l’ouvrage est extraordi
1570
l’empire de sa douceur. Cette deuxième partie de
l’
ouvrage est extraordinaire de vie et de pathétique, sobre et directe p
1571
pu lire de plus vécu sur ces milieux. Finalement,
la
police accuse Eiichi d’avoir prêté son appui à une grève, et le récit
1572
se Eiichi d’avoir prêté son appui à une grève, et
le
récit se termine par une scène entre le procureur et le prévenu, qui
1573
grève, et le récit se termine par une scène entre
le
procureur et le prévenu, qui vaut d’être citée : — Pourquoi me regar
1574
it se termine par une scène entre le procureur et
le
prévenu, qui vaut d’être citée : — Pourquoi me regardez-vous ainsi ?
1575
itée : — Pourquoi me regardez-vous ainsi ? tonna
le
Procureur, qui cherchait à intimider Eiichi. Eiichi garda le silence
1576
r, qui cherchait à intimider Eiichi. Eiichi garda
le
silence ; il ne voulait pas se laisser aller à la colère comme le Pro
1577
le silence ; il ne voulait pas se laisser aller à
la
colère comme le Procureur. Au contraire, il en profita pour faire une
1578
ne voulait pas se laisser aller à la colère comme
le
Procureur. Au contraire, il en profita pour faire une étude psycholog
1579
r faire une étude psychologique, en observant sur
le
visage de celui-ci les expressions changeantes qu’y imprimait la pass
1580
hologique, en observant sur le visage de celui-ci
les
expressions changeantes qu’y imprimait la passion. Il lui semblait qu
1581
lui-ci les expressions changeantes qu’y imprimait
la
passion. Il lui semblait qu’il faisait une étude pratique de désordre
1582
était calme et loin d’être troublé. En regardant
les
choses de près, il conclut que la profession de procureur devait être
1583
. En regardant les choses de près, il conclut que
la
profession de procureur devait être vraiment bien désagréable, puisqu
1584
es. Pire que cela, elle portait à croire que tous
les
hommes sont coupables. Ceci acquit au Procureur toute la sympathie d’
1585
es sont coupables. Ceci acquit au Procureur toute
la
sympathie d’Eiichi… Si c’est à des tâches aussi inutiles que les proc
1586
’Eiichi… Si c’est à des tâches aussi inutiles que
les
procureurs passent leur vie, pensait Eiichi, il est impossible de ne
1587
hi, il est impossible de ne pas leur témoigner de
la
sympathie. — Qu’est-ce que cela veut dire ? Pourquoi me regardez-vous
1588
e ? Pourquoi me regardez-vous aussi insolemment ?
Le
Procureur continuait à enrager ; sa figure se contractait et ses lèvr
1589
es étaient pâles. — Comment voulez-vous renverser
l’
état social actuel, si ce n’est par une révolution ? Je vous demande d
1590
cinq moineaux sautaient de branche en branche sur
le
camphrier du jardin, joyeux et insouciants. Eiichi se demanda s’il y
1591
iichi se demanda s’il y avait des procureurs dans
le
monde des moineaux. Il se taisait, car il savait qu’il était inutile
1592
colère. Trois, quatre, cinq minutes s’écoulèrent.
Le
Procureur regardait distraitement son carnet de notes. Il tremblait j
1593
eut été impossible de dire lequel des deux était
le
juge de l’autre. Eiichi est provisoirement libéré. Les enfants des b
1594
ge de l’autre. Eiichi est provisoirement libéré.
Les
enfants des bas-fonds l’attendent à sa sortie, s’accrochent à ses man
1595
provisoirement libéré. Les enfants des bas-fonds
l’
attendent à sa sortie, s’accrochent à ses manches et l’escortent avec
1596
endent à sa sortie, s’accrochent à ses manches et
l’
escortent avec amour. ⁂ Avant de tirer les conclusions qu’impose cette
1597
nches et l’escortent avec amour. ⁂ Avant de tirer
les
conclusions qu’impose cette œuvre avec l’autorité d’une action, arrêt
1598
tirer les conclusions qu’impose cette œuvre avec
l’
autorité d’une action, arrêtons-nous quelques instants devant la beaut
1599
ne action, arrêtons-nous quelques instants devant
la
beauté singulière de l’âme qu’elle révèle. Une âme qui sent tout avec
1600
quelques instants devant la beauté singulière de
l’
âme qu’elle révèle. Une âme qui sent tout avec force et délicatesse, é
1601
sent tout avec force et délicatesse, éprouve tous
les
penchants humains, s’y soustrait quand il le faut pour mieux vivre et
1602
ous les penchants humains, s’y soustrait quand il
le
faut pour mieux vivre et n’en fait jamais une affaire. Homme terrible
1603
s tentations comme toutes naturelles, il surmonte
les
obstacles avec un contentement modeste et intelligent qui est plus ém
1604
volonté. Une âme à la fois sobre et extrême. Tous
les
excès lui sont possibles, en action, surtout dans le bien, dans la sa
1605
excès lui sont possibles, en action, surtout dans
le
bien, dans la sainteté, mais toujours ils s’accompagnent d’une mesure
1606
possibles, en action, surtout dans le bien, dans
la
sainteté, mais toujours ils s’accompagnent d’une mesure parfaite dans
1607
urs ils s’accompagnent d’une mesure parfaite dans
l’
appréciation. Il semble qu’il n’ait aucune peine à se juger impartiale
1608
rendre intéressant à lui-même en poussant au noir
le
tableau, ou au contraire en s’excitant sur ses belles actions. Il les
1609
ontraire en s’excitant sur ses belles actions. Il
les
note, simplement, sans oublier d’indiquer ses hésitations, les traver
1610
plement, sans oublier d’indiquer ses hésitations,
les
traverses souvent fortuites qui les provoquent. Et pas trace d’ostent
1611
hésitations, les traverses souvent fortuites qui
les
provoquent. Et pas trace d’ostentation dans son humilité ou dans son
1612
milité ou dans son impartialité. C’est toujours à
l’
effarante sincérité de ce récit qu’il faut revenir, si l’on veut d’un
1613
ante sincérité de ce récit qu’il faut revenir, si
l’
on veut d’un mot le caractériser. Parmi les innombrables sentiments :
1614
e récit qu’il faut revenir, si l’on veut d’un mot
le
caractériser. Parmi les innombrables sentiments : doutes, passions, c
1615
nir, si l’on veut d’un mot le caractériser. Parmi
les
innombrables sentiments : doutes, passions, conflits qu’il met en jeu
1616
ssions, conflits qu’il met en jeu, c’est toujours
l’
absence absolue d’hypocrisie de sa part qui donne aux choses les plus
1617
olue d’hypocrisie de sa part qui donne aux choses
les
plus banales une nouveauté frappante. Cela éclate particulièrement da
1618
auté frappante. Cela éclate particulièrement dans
l’
analyse des motifs de ses actions journalières. Par là, il fait souven
1619
aux grands Russes, à Tolstoï surtout. Et par tous
les
revirements intérieurs de ses personnages également. Quant à lui, la
1620
rieurs de ses personnages également. Quant à lui,
la
complexité vivante de sa vie morale n’a d’égale que la violence de se
1621
mplexité vivante de sa vie morale n’a d’égale que
la
violence de ses réactions. Une fois, désespéré, — « heureusement, per
1622
, personne ne regardait, il se jeta par terre sur
la
route, criant à son corps : “Meurs !”, mais sans résultat ». C’est da
1623
. C’est dans un tel état de désespoir que soudain
l’
amour de la vie revient s’emparer de lui et décide de sa conversion :
1624
s un tel état de désespoir que soudain l’amour de
la
vie revient s’emparer de lui et décide de sa conversion : Il se déci
1625
décida à tout accepter, oui, tout. Il accepterait
la
vie et toutes ses manifestations dans le temps. Il était ressuscité d
1626
epterait la vie et toutes ses manifestations dans
le
temps. Il était ressuscité de l’abîme du désespoir et revenu au monde
1627
ifestations dans le temps. Il était ressuscité de
l’
abîme du désespoir et revenu au monde merveilleux. Il résolut de vivre
1628
re fermement dans sa sphère actuelle, enrichi par
la
force de la mort. Tout était merveilleux, la mort, lui-même, la terre
1629
dans sa sphère actuelle, enrichi par la force de
la
mort. Tout était merveilleux, la mort, lui-même, la terre, les pierre
1630
par la force de la mort. Tout était merveilleux,
la
mort, lui-même, la terre, les pierres, le sable, la nourriture, les f
1631
mort. Tout était merveilleux, la mort, lui-même,
la
terre, les pierres, le sable, la nourriture, les femmes, les filles,
1632
t était merveilleux, la mort, lui-même, la terre,
les
pierres, le sable, la nourriture, les femmes, les filles, les bateaux
1633
illeux, la mort, lui-même, la terre, les pierres,
le
sable, la nourriture, les femmes, les filles, les bateaux à vapeur, m
1634
mort, lui-même, la terre, les pierres, le sable,
la
nourriture, les femmes, les filles, les bateaux à vapeur, même le vid
1635
, la terre, les pierres, le sable, la nourriture,
les
femmes, les filles, les bateaux à vapeur, même le vide qu’il avait ch
1636
les pierres, le sable, la nourriture, les femmes,
les
filles, les bateaux à vapeur, même le vide qu’il avait cherché, étaie
1637
le sable, la nourriture, les femmes, les filles,
les
bateaux à vapeur, même le vide qu’il avait cherché, étaient merveille
1638
es femmes, les filles, les bateaux à vapeur, même
le
vide qu’il avait cherché, étaient merveilleux. Les couleurs, la lumiè
1639
le vide qu’il avait cherché, étaient merveilleux.
Les
couleurs, la lumière du soleil, les dessins, les roses, les lèvres ro
1640
avait cherché, étaient merveilleux. Les couleurs,
la
lumière du soleil, les dessins, les roses, les lèvres rouges des fill
1641
merveilleux. Les couleurs, la lumière du soleil,
les
dessins, les roses, les lèvres rouges des filles, tout était surprena
1642
Les couleurs, la lumière du soleil, les dessins,
les
roses, les lèvres rouges des filles, tout était surprenant, même le s
1643
rs, la lumière du soleil, les dessins, les roses,
les
lèvres rouges des filles, tout était surprenant, même le sang caillé,
1644
es rouges des filles, tout était surprenant, même
le
sang caillé, le péché et le cœur souillé, tout était étonnement. Il a
1645
lles, tout était surprenant, même le sang caillé,
le
péché et le cœur souillé, tout était étonnement. Il acceptait tout. I
1646
tait surprenant, même le sang caillé, le péché et
le
cœur souillé, tout était étonnement. Il acceptait tout. Il décida de
1647
ment, de prendre courage et de lutter bravement à
l’
avenir, et pour cela il accepterait tout de l’existence. Il accepterai
1648
t à l’avenir, et pour cela il accepterait tout de
l’
existence. Il accepterait aussi la religion avec le courage du suicide
1649
pterait tout de l’existence. Il accepterait aussi
la
religion avec le courage du suicide. Dans sa résolution, il se sentai
1650
’existence. Il accepterait aussi la religion avec
le
courage du suicide. Dans sa résolution, il se sentait graduellement a
1651
ésolution, il se sentait graduellement attiré par
le
Christ. Il se disait que ce n’était pas dans la mer qu’il fallait se
1652
r le Christ. Il se disait que ce n’était pas dans
la
mer qu’il fallait se jeter, mais dans les merveilles du monde. Et voi
1653
pas dans la mer qu’il fallait se jeter, mais dans
les
merveilles du monde. Et voici que, le 14 février, il se décida à fair
1654
mais dans les merveilles du monde. Et voici que,
le
14 février, il se décida à faire profession de disciple du Christ. P
1655
iple du Christ. Page étrange, en vérité, et dont
l’
accent presque nietzschéen choquera peut-être des gens qui eussent pré
1656
n choquera peut-être des gens qui eussent préféré
l’
habituelle effusion en patois de Chanaan. Mais ce qui me frappe ici, c
1657
Chanaan. Mais ce qui me frappe ici, c’est de voir
le
reste du chapitre consacré au récit des actes qu’immédiatement Eiichi
1658
n. En mystique véritable, il évite rigoureusement
les
expressions sentimentales ou rassurantes qui pourraient dépasser une
1659
ser une action immédiate ou voiler sa difficulté.
Les
rares allusions qu’il fait à sa vie spirituelle n’en sont que plus ém
1660
n’en sont que plus émouvantes : Un dimanche, sur
les
collines derrière Nunobiki, au milieu des arbres, à côté d’un ruissea
1661
sseau, il passa trois heures et demie à lire tout
l’
Évangile selon saint Matthieu, du premier chapitre au dernier, priant
1662
e au dernier, priant continuellement pour obtenir
la
grâce de devenir capable de suivre Jésus. Une autre fois, à midi, il
1663
uivre Jésus. Une autre fois, à midi, il monta sur
le
sommet d’une montagne en face du mont Maya et pria Dieu de lui donner
1664
e du mont Maya et pria Dieu de lui donner Kobé et
les
bas-fonds. La nature, le sommeil et les enfants étaient ses meilleurs
1665
et pria Dieu de lui donner Kobé et les bas-fonds.
La
nature, le sommeil et les enfants étaient ses meilleurs réconforts.
1666
u de lui donner Kobé et les bas-fonds. La nature,
le
sommeil et les enfants étaient ses meilleurs réconforts. Comment et
1667
r Kobé et les bas-fonds. La nature, le sommeil et
les
enfants étaient ses meilleurs réconforts. Comment et par quoi mesure
1668
eilleurs réconforts. Comment et par quoi mesurer
la
valeur chrétienne d’une âme ? L’action même est souvent trompeuse. Ma
1669
par quoi mesurer la valeur chrétienne d’une âme ?
L’
action même est souvent trompeuse. Mais la qualité du regard qu’un êtr
1670
e âme ? L’action même est souvent trompeuse. Mais
la
qualité du regard qu’un être pose sur ses semblables, tel est le sign
1671
egard qu’un être pose sur ses semblables, tel est
le
signe et la mesure certaine. Au cours d’un livre où il se peint, aux
1672
être pose sur ses semblables, tel est le signe et
la
mesure certaine. Au cours d’un livre où il se peint, aux prises avec
1673
d’un livre où il se peint, aux prises avec toutes
les
formes du mal, jamais vous ne surprendrez dans ses yeux rien du moral
1674
ivre une conclusion capitale qui, sans doute, fut
l’
objet déterminant de son auteur. Elle concerne la question sociale. Il
1675
l’objet déterminant de son auteur. Elle concerne
la
question sociale. Il s’attache à cette expression un « ennui » qui se
1676
que notre paresse et notre lâcheté naturelles, et
l’
incertitude qui est leur résultante. Quelques-uns s’en tirent en réfut
1677
résultante. Quelques-uns s’en tirent en réfutant
le
marxisme — c’est un jeu intellectuel — ou bien en critiquant les réfo
1678
c’est un jeu intellectuel — ou bien en critiquant
les
réformes socialistes — mais cela dispense-t-il de chercher d’autres s
1679
acceptent d’étudier à fond ces problèmes, ils ne
les
rendent, en général, guère attirants — (le devraient-ils ?) — ni même
1680
ls ne les rendent, en général, guère attirants — (
le
devraient-ils ?) — ni même vivants — (ils le devraient.). Pour celui
1681
s — (le devraient-ils ?) — ni même vivants — (ils
le
devraient.). Pour celui qui referme le livre de Kagawa, une certitude
1682
nts — (ils le devraient.). Pour celui qui referme
le
livre de Kagawa, une certitude s’impose. Je la formulerai brièvement
1683
me le livre de Kagawa, une certitude s’impose. Je
la
formulerai brièvement : Tant que l’on considère la « question » socia
1684
s’impose. Je la formulerai brièvement : Tant que
l’
on considère la « question » sociale et que l’on en « discute », c’est
1685
a formulerai brièvement : Tant que l’on considère
la
« question » sociale et que l’on en « discute », c’est irritant, vain
1686
que l’on considère la « question » sociale et que
l’
on en « discute », c’est irritant, vain et irréductible. Car la questi
1687
cute », c’est irritant, vain et irréductible. Car
la
question sociale n’admet peut-être de solution que personnelle. Il ne
1688
de solution que personnelle. Il ne s’agit plus de
la
poser, sur le plan intellectuel, pour les autres, mais de la résoudre
1689
plus de la poser, sur le plan intellectuel, pour
les
autres, mais de la résoudre d’abord pour son compte et par un acte in
1690
ur le plan intellectuel, pour les autres, mais de
la
résoudre d’abord pour son compte et par un acte intérieur contraignan
1691
eux d’un incroyant, ceci peut sembler vague. Mais
le
sens chrétien primitif n’est-il pas, avant tout, le sens de la pauvre
1692
sens chrétien primitif n’est-il pas, avant tout,
le
sens de la pauvreté ? Qu’un Kagawa nous force à méditer chrétiennemen
1693
ien primitif n’est-il pas, avant tout, le sens de
la
pauvreté ? Qu’un Kagawa nous force à méditer chrétiennement le fait d
1694
Qu’un Kagawa nous force à méditer chrétiennement
le
fait de la misère humaine, — cela ne saurait être sans fruits. 24.
1695
wa nous force à méditer chrétiennement le fait de
la
misère humaine, — cela ne saurait être sans fruits. 24. Ceux qui ve
1696
Denis de, « [Compte rendu] Toyohiko Kagawa, Avant
l’
Aube », Foi et Vie, Paris, septembre 1931, p. 623-632. m. Une note p
1697
André Gide ou
le
style exquis (à propos de Divers) (octobre 1931)n o La manière es
1698
exquis (à propos de Divers) (octobre 1931)n o
La
manière est toujours l’indice d’une complaisance, et vite elle en dev
1699
rs) (octobre 1931)n o La manière est toujours
l’
indice d’une complaisance, et vite elle en devient la rançon. (Divers,
1700
ndice d’une complaisance, et vite elle en devient
la
rançon. (Divers, p. 75.) Ces quelques notes voudraient marquer une r
1701
dernière « manière » gidienne, et je m’excuse dès
l’
abord de la rapidité avec laquelle je suis décidé à les formuler. Si l
1702
manière » gidienne, et je m’excuse dès l’abord de
la
rapidité avec laquelle je suis décidé à les formuler. Si l’on y voit
1703
ord de la rapidité avec laquelle je suis décidé à
les
formuler. Si l’on y voit une regrettable désinvolture vis-à-vis d’un
1704
é avec laquelle je suis décidé à les formuler. Si
l’
on y voit une regrettable désinvolture vis-à-vis d’un des écrivains le
1705
ettable désinvolture vis-à-vis d’un des écrivains
les
plus justement célèbres de ce temps, elle aura du moins le mérite de
1706
ustement célèbres de ce temps, elle aura du moins
le
mérite de la spontanéité, qualité dont Gide aime à douer les héros de
1707
bres de ce temps, elle aura du moins le mérite de
la
spontanéité, qualité dont Gide aime à douer les héros de ses récits,
1708
de la spontanéité, qualité dont Gide aime à douer
les
héros de ses récits, mais dont lui-même se révèle dépourvu dans une m
1709
art qui tout ensemble se définit et se limite par
l’
épithète valéryenne d’exquis. On sait quels « jugements » Gide s’attir
1710
t quels « jugements » Gide s’attira naguère, dont
la
« saine rudesse » m’a toujours paru plus rude que saine. Je ne pense
1711
pposer aux suggestions d’un moraliste trop subtil
les
vaniteux verdicts d’une moralité toute faite. Je ne me récrie pas et
1712
ne me récrie pas et ne compte nullement désigner
l’
auteur de l’Immoraliste à la vindicte des « honnêtes gens ». D’abord p
1713
e pas et ne compte nullement désigner l’auteur de
l’
Immoraliste à la vindicte des « honnêtes gens ». D’abord parce que je
1714
te nullement désigner l’auteur de l’Immoraliste à
la
vindicte des « honnêtes gens ». D’abord parce que je me refuse à reco
1715
cette dernière catégorie. (On sait qu’il y a dans
le
monde moderne trois sortes de gens, les pécheurs, les sauvés et les h
1716
l y a dans le monde moderne trois sortes de gens,
les
pécheurs, les sauvés et les honnêtes gens.) Ensuite, parce que je ne
1717
monde moderne trois sortes de gens, les pécheurs,
les
sauvés et les honnêtes gens.) Ensuite, parce que je ne veux pas me la
1718
trois sortes de gens, les pécheurs, les sauvés et
les
honnêtes gens.) Ensuite, parce que je ne veux pas me laisser entraîne
1719
parce que je ne veux pas me laisser entraîner sur
le
terrain purement moral ou immoral où Gide provoque ses lecteurs à le
1720
moral ou immoral où Gide provoque ses lecteurs à
le
juger, sûr d’avance que l’intelligence sera de son côté. — « Causons
1721
rovoque ses lecteurs à le juger, sûr d’avance que
l’
intelligence sera de son côté. — « Causons un peu », dit le serpent… ⁂
1722
gence sera de son côté. — « Causons un peu », dit
le
serpent… ⁂ Divers, recueil d’aphorismes, de « caractères » et de let
1723
autres, il est si admirablement habile qu’on vote
l’
acquittement à main levée, sans examen des preuves. Non seulement Gide
1724
sait avoir raison comme en s’excusant. Il apporte
les
plus délicats scrupules à sa justification, « prêt à tous les effacem
1725
icats scrupules à sa justification, « prêt à tous
les
effacements » (p. 59). Là où d’autres triompheraient, il met une sour
1726
ompheraient, il met une sourdine. Car il sait que
la
modestie est la vertu de choix du classicisme. Et qu’il est le dernie
1727
met une sourdine. Car il sait que la modestie est
la
vertu de choix du classicisme. Et qu’il est le dernier de nos classiq
1728
reille modestie est, d’ailleurs, signe de force :
les
critiques auxquels il adressa les lettres reproduites dans ce recueil
1729
igne de force : les critiques auxquels il adressa
les
lettres reproduites dans ce recueil en savent quelque chose, et le Pè
1730
uites dans ce recueil en savent quelque chose, et
le
Père jésuite qui tenta de soutenir la controverse prit une leçon de d
1731
e chose, et le Père jésuite qui tenta de soutenir
la
controverse prit une leçon de distinguo magistrale et cruellement iro
1732
s du tout à imiter ce Père. Nul besoin de citer à
la
barre d’un jugement dernier anticipé un esprit qui s’honore — on excu
1733
ier anticipé un esprit qui s’honore — on excusera
le
jeu de mots — d’être « non-prévenu ». Mais voici ce qu’il y a : l’on
1734
d’être « non-prévenu ». Mais voici ce qu’il y a :
l’
on éprouve une gêne grandissante au spectacle de l’autojustification o
1735
’on éprouve une gêne grandissante au spectacle de
l’
autojustification obsédante que les derniers écrits de cet auteur repr
1736
au spectacle de l’autojustification obsédante que
les
derniers écrits de cet auteur reprennent et fignolent avec un talent
1737
objet. Que Gide ne soit pas si « mauvais » qu’on
l’
a dit, — ou qu’il a bien voulu s’en donner l’air — je suis prêt à le c
1738
u’on l’a dit, — ou qu’il a bien voulu s’en donner
l’
air — je suis prêt à le concéder au-delà de ce qu’il espère. Par incom
1739
l a bien voulu s’en donner l’air — je suis prêt à
le
concéder au-delà de ce qu’il espère. Par incompétence radicale. Ce qu
1740
le. Ce qu’il faut certainement déplorer, c’est de
le
voir utiliser des dons incomparables et une sorte subtile de loyauté
1741
de loyauté à des fins rien moins que grandes. Car
l’
excès même de ces scrupules les fait tourner soudain, les fait cailler
1742
ns que grandes. Car l’excès même de ces scrupules
les
fait tourner soudain, les fait cailler en coquetteries. Et voici que
1743
s même de ces scrupules les fait tourner soudain,
les
fait cailler en coquetteries. Et voici que l’explication de soi parei
1744
n, les fait cailler en coquetteries. Et voici que
l’
explication de soi pareillement tourne en indiscrétion, et cette reten
1745
mpudeur raffinée. « Celui qui veut sauver sa vie
la
perdra, mais celui qui veut la perdre la rendra vraiment vivante », r
1746
veut sauver sa vie la perdra, mais celui qui veut
la
perdre la rendra vraiment vivante », répète inlassablement M. Gide25.
1747
r sa vie la perdra, mais celui qui veut la perdre
la
rendra vraiment vivante », répète inlassablement M. Gide25. Seulement
1748
perdre sa vie, et non pas pour Christ, mais pour
la
rendre vraiment vivante, celui-là ne fait qu’usurper la forme du sacr
1749
dre vraiment vivante, celui-là ne fait qu’usurper
la
forme du sacrifice ; et c’est en vain qu’il tenterait d’y loger autre
1750
son égoïsme et sa coquetterie profonde. Tels sont
les
tours que nous joue la morale lorsque, se prenant pour fin, elle s’ér
1751
terie profonde. Tels sont les tours que nous joue
la
morale lorsque, se prenant pour fin, elle s’érige en dialectique indé
1752
onséquents que M. Gide, ou qu’ils reculent devant
l’
audace de conclusions en toute logique inévitables. Car ce qui naît de
1753
en toute logique inévitables. Car ce qui naît de
l’
Évangile n’a de sens que par le jaillissement vers Dieu. Et tout préce
1754
Car ce qui naît de l’Évangile n’a de sens que par
le
jaillissement vers Dieu. Et tout précepte évangélique une fois détach
1755
Et tout précepte évangélique une fois détaché de
la
grâce se décompose avec virulence en sophismes, ou bien engendre des
1756
des chimères. Tout, ainsi, devient inextricable.
Les
Lettres au cours desquelles Gide répond à ses critiques sont tout à f
1757
ques sont tout à fait significatives à cet égard.
L’
on est d’abord séduit par la finesse et la mesure de leur argumentatio
1758
icatives à cet égard. L’on est d’abord séduit par
la
finesse et la mesure de leur argumentation, par leur côté vraiment «
1759
égard. L’on est d’abord séduit par la finesse et
la
mesure de leur argumentation, par leur côté vraiment « non-prévenu »,
1760
côté vraiment « non-prévenu », et puis, soudain,
l’
on s’impatiente d’être ramené sans cesse dans un cercle de paradoxes e
1761
it de cette classe ne devrait pas supporter qu’on
l’
engage. Mais qu’est-ce à dire lorsqu’on comprend que, non satisfait de
1762
il croit y découvrir son originalité, ou comme il
le
dit : son « paysage intérieur ». « Je puis dire que ce n’est pas à mo
1763
onflit de certaines idées, dont mon âme n’est que
le
théâtre, et où je fais fonction moins d’acteur que de spectateur, de
1764
t-ce pas nécessairement un faux témoin ? Étendons
la
signification de ce terme. On sait que protestant veut dire témoin (p
1765
e attitude sereinement contradictoire, où il voit
l’
essence de sa « réforme » et de sa nouveauté. Luther disait : « Je ne
1766
urrait autrement ». Que rien de ce qu’il écrit ne
l’
engage tout entier. Qu’il n’est que spectateur de ses antagonismes. Dè
1767
est que spectateur de ses antagonismes. Dès lors,
la
morale qui, pourtant, seule l’intéresse, n’est plus qu’un jeu d’équil
1768
onismes. Dès lors, la morale qui, pourtant, seule
l’
intéresse, n’est plus qu’un jeu d’équilibres relatifs, variables et ré
1769
dans un tel univers. Suppression du tragique. Car
le
tragique naît dans une âme qui s’efforce vers l’unité, vers l’unifica
1770
le tragique naît dans une âme qui s’efforce vers
l’
unité, vers l’unification de ses aspirations et de ses actes ; dans un
1771
aît dans une âme qui s’efforce vers l’unité, vers
l’
unification de ses aspirations et de ses actes ; dans une âme responsa
1772
me responsable de ses contradictions. Sans doute,
la
psychologie moderne a-t-elle montré que l’homme était beaucoup moins
1773
doute, la psychologie moderne a-t-elle montré que
l’
homme était beaucoup moins simple qu’il ne le croyait. Mais la questio
1774
que l’homme était beaucoup moins simple qu’il ne
le
croyait. Mais la question reste de savoir si cette division interne,
1775
t beaucoup moins simple qu’il ne le croyait. Mais
la
question reste de savoir si cette division interne, une fois reconnue
1776
être acceptée ou surmontée. Pour moi je tiens que
le
seul problème éthique est de se réaliser comme unité. Non point parce
1777
int parce qu’une morale stoïcienne et laïque nous
le
recommande. Non point à cause de la logique ni même d’une norme socia
1778
t laïque nous le recommande. Non point à cause de
la
logique ni même d’une norme sociale. Mais à cause de la grandeur. ⁂ C
1779
ique ni même d’une norme sociale. Mais à cause de
la
grandeur. ⁂ Ce livre manque d’ange et de bête. Il est merveilleusemen
1780
le strictement que de psychologie et des ruses de
l’
art, sans que ne s’ouvre jamais une perspective poétique ou métaphysiq
1781
ective poétique ou métaphysique. À cette heure où
le
monde tourne lentement et formidablement sur ses bases sociales et re
1782
manque d’enthousiasme, d’« endieusement », selon
l’
étymologie de Unamuno. Ne détermine rien en nous. Ne nous met en demeu
1783
ur cette jeunesse qui aimait sa ferveur, mais que
le
monde de demain va contraindre, contraint déjà à des choix dramatique
1784
choix dramatiques ? Certaines phrases pourraient
le
laisser supposer qu’il écrivit en préface au livre récent d’un jeune
1785
e de Saint-Exupéry. (Mais par quoi tiendra-t-il à
les
« équilibrer », un de ces jours, à les « gauchir »…) Le héros de Vol
1786
dra-t-il à les « équilibrer », un de ces jours, à
les
« gauchir »…) Le héros de Vol de nuit, non déshumanisé certes, s’élè
1787
uilibrer », un de ces jours, à les « gauchir »…)
Le
héros de Vol de nuit, non déshumanisé certes, s’élève à une vertu sur
1788
tout dans ce récit frémissant, c’est sa noblesse.
Les
faiblesses, les abandons, les déchéances de l’homme, nous les connais
1789
it frémissant, c’est sa noblesse. Les faiblesses,
les
abandons, les déchéances de l’homme, nous les connaissons de reste et
1790
c’est sa noblesse. Les faiblesses, les abandons,
les
déchéances de l’homme, nous les connaissons de reste et la littératur
1791
. Les faiblesses, les abandons, les déchéances de
l’
homme, nous les connaissons de reste et la littérature de nos jours n’
1792
es, les abandons, les déchéances de l’homme, nous
les
connaissons de reste et la littérature de nos jours n’est que trop ha
1793
nces de l’homme, nous les connaissons de reste et
la
littérature de nos jours n’est que trop habile à les dénoncer ; mais
1794
littérature de nos jours n’est que trop habile à
les
dénoncer ; mais le surpassement de soi qu’obtient la volonté tendue,
1795
jours n’est que trop habile à les dénoncer ; mais
le
surpassement de soi qu’obtient la volonté tendue, c’est là ce que nou
1796
dénoncer ; mais le surpassement de soi qu’obtient
la
volonté tendue, c’est là ce que nous avons surtout besoin qu’on nous
1797
d’une importance psychologique considérable : que
le
bonheur de l’homme n’est pas dans la liberté, mais dans l’acceptation
1798
ce psychologique considérable : que le bonheur de
l’
homme n’est pas dans la liberté, mais dans l’acceptation d’un devoir.
1799
érable : que le bonheur de l’homme n’est pas dans
la
liberté, mais dans l’acceptation d’un devoir. Gide aurait-il pressen
1800
r de l’homme n’est pas dans la liberté, mais dans
l’
acceptation d’un devoir. Gide aurait-il pressenti que l’ère n’est plu
1801
tation d’un devoir. Gide aurait-il pressenti que
l’
ère n’est plus de certaines complaisances ? Pourquoi faut-il que l’ima
1802
de certaines complaisances ? Pourquoi faut-il que
l’
image de cet aviateur m’évoque la fable : « Je suis oiseau, voyez mes
1803
quoi faut-il que l’image de cet aviateur m’évoque
la
fable : « Je suis oiseau, voyez mes ailes. » Qu’il n’aille pas croire
1804
» Qu’il n’aille pas croire pourtant que désormais
la
vertu fera prime, les vices ayant épuisé leurs saveurs. La question n
1805
roire pourtant que désormais la vertu fera prime,
les
vices ayant épuisé leurs saveurs. La question n’est pas d’être vertue
1806
fera prime, les vices ayant épuisé leurs saveurs.
La
question n’est pas d’être vertueux, mais de faire la volonté de Dieu.
1807
question n’est pas d’être vertueux, mais de faire
la
volonté de Dieu. Et ce que nous voulons ce ne sont pas des exemples é
1808
es de responsabilités acceptées devant Dieu, avec
l’
incommensurable tragique que cela comporte. Un nom me hante, pendant q
1809
rkegaard, — et c’est Gide qui, l’un des premiers,
l’
a prononcé en France. Kierkegaard, un homme qui ne vous lâche plus. Il
1810
parlé de lui-même. Mais là où d’autres produisent
l’
impression pénible de se montrer, il arrive chez Kierkegaard une chose
1811
rde et qui me perce, — et me fait honte d’oublier
la
grandeur. 25. Remarquons le tour qu’il adopte : « mais celui qui ve
1812
ait honte d’oublier la grandeur. 25. Remarquons
le
tour qu’il adopte : « mais celui qui veut la perdre… » n. Rougemont
1813
uons le tour qu’il adopte : « mais celui qui veut
la
perdre… » n. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] André Gide ou le
1814
ougemont Denis de, « [Compte rendu] André Gide ou
le
style exquis », Foi et Vie, Paris, octobre 1931, p. 725-729. o. Une
1815
on prévenu. — Dictées. — Lettres »). Collection «
Les
Essais », à la Librairie Gallimard, Paris. »
1816
ctées. — Lettres »). Collection « Les Essais », à
la
Librairie Gallimard, Paris. »
1817
Le
protestantisme jugé (octobre 1931)p Parlant récemment, dans un art
1818
rage de M. Édouard Martinet, intitulé André Gide,
l’
amour et la divinité, M. Albert Thibaudet exprime son regret de ce qu’
1819
Édouard Martinet, intitulé André Gide, l’amour et
la
divinité, M. Albert Thibaudet exprime son regret de ce qu’un tel titr
1820
nous faudrait. M. Martinet a pris pour épigraphe
la
citation suivante, empruntée à M. Thibaudet justement : Ceci au moin
1821
Thibaudet justement : Ceci au moins suffirait à
la
critique pour maintenir à Gide une place instructive, qu’il est, depu
1822
r à Gide une place instructive, qu’il est, depuis
l’
édit de Nantes, notre seul notable écrivain protestant26, non exilé, n
1823
propos : On m’a fait observer très justement, à
l’
époque, que j’oubliais Loti. Loti est un notable écrivain protestant q
1824
. Loti appartient à ce pays de Saintonge, qui, si
la
force de l’unité française n’avait été irrésistible, avait ce qu’il f
1825
tient à ce pays de Saintonge, qui, si la force de
l’
unité française n’avait été irrésistible, avait ce qu’il fallait pour
1826
ière de Genève maritime, de Hollande atlantique :
le
maire Guiton, le héros, avec Rohan, de la résistance protestante cont
1827
ritime, de Hollande atlantique : le maire Guiton,
le
héros, avec Rohan, de la résistance protestante contre le Cardinal, é
1828
tique : le maire Guiton, le héros, avec Rohan, de
la
résistance protestante contre le Cardinal, était corsaire de son méti
1829
, avec Rohan, de la résistance protestante contre
le
Cardinal, était corsaire de son métier. N’oublions pas que depuis la
1830
corsaire de son métier. N’oublions pas que depuis
la
destruction de l’Invincible Armada la mer devient aux trois quarts pr
1831
tier. N’oublions pas que depuis la destruction de
l’
Invincible Armada la mer devient aux trois quarts protestante — et l’e
1832
que depuis la destruction de l’Invincible Armada
la
mer devient aux trois quarts protestante — et l’est restée (la révoca
1833
la mer devient aux trois quarts protestante — et
l’
est restée (la révocation fit quitter, selon Vauban, les vaisseaux du
1834
t aux trois quarts protestante — et l’est restée (
la
révocation fit quitter, selon Vauban, les vaisseaux du roi à neuf-mil
1835
restée (la révocation fit quitter, selon Vauban,
les
vaisseaux du roi à neuf-mille marins). Loti est un protestant françai
1836
mille marins). Loti est un protestant français de
la
vieille souche maritime. Évidemment, cela n’en fait pas un Genevois,
1837
ois, au contraire ! Mais n’oublions pas que toute
l’
œuvre de Loti est faite du morcellement et de l’adaptation d’un livre
1838
e l’œuvre de Loti est faite du morcellement et de
l’
adaptation d’un livre unique, son journal intime — que Loti est un jou
1839
que Loti est un journal intime, comme Gide — que
le
journal intime, la littérature intime sont un produit autochtone de l
1840
urnal intime, comme Gide — que le journal intime,
la
littérature intime sont un produit autochtone de la terre protestante
1841
littérature intime sont un produit autochtone de
la
terre protestante et de l’esprit protestant. Ces intéressantes remar
1842
produit autochtone de la terre protestante et de
l’
esprit protestant. Ces intéressantes remarques, où l’on retrouve le g
1843
prit protestant. Ces intéressantes remarques, où
l’
on retrouve le goût de l’analogie historico-littéraire qui caractérise
1844
t. Ces intéressantes remarques, où l’on retrouve
le
goût de l’analogie historico-littéraire qui caractérise la critique d
1845
éressantes remarques, où l’on retrouve le goût de
l’
analogie historico-littéraire qui caractérise la critique de M. Albert
1846
e l’analogie historico-littéraire qui caractérise
la
critique de M. Albert Thibaudet, nous ont fait penser qu’il existe be
1847
te bel et bien un Loti vu de Genève, non pas sous
la
forme d’un ouvrage complet, mais d’un essai très fouillé et profond d
1848
res et morales. Nous sommes certains d’intéresser
les
lecteurs de cette revue en citant ici quelques passages de l’étude de
1849
de cette revue en citant ici quelques passages de
l’
étude de Frommel. Nous assistons, chez Pierre Loti, à ce spectacle ét
1850
enchants et d’affections élevées, tandis que déjà
la
conscience éteinte ne la dirige plus et qu’elle flotte au hasard, san
1851
élevées, tandis que déjà la conscience éteinte ne
la
dirige plus et qu’elle flotte au hasard, sans but et sans attaches, c
1852
taches, cherchant uniquement à se satisfaire dans
la
jouissance présente. La structure même de ses romans est un indice ré
1853
ment à se satisfaire dans la jouissance présente.
La
structure même de ses romans est un indice révélateur, car quoi qu’on
1854
est un indice révélateur, car quoi qu’on dise de
la
différence entre la vie et le roman, la composition de celui-ci dépen
1855
ateur, car quoi qu’on dise de la différence entre
la
vie et le roman, la composition de celui-ci dépend toujours de la man
1856
quoi qu’on dise de la différence entre la vie et
le
roman, la composition de celui-ci dépend toujours de la manière de co
1857
n dise de la différence entre la vie et le roman,
la
composition de celui-ci dépend toujours de la manière de concevoir ce
1858
an, la composition de celui-ci dépend toujours de
la
manière de concevoir celle-là. Tant que la vie était considérée comme
1859
urs de la manière de concevoir celle-là. Tant que
la
vie était considérée comme le lieu où s’exerçait la volonté, où se fo
1860
celle-là. Tant que la vie était considérée comme
le
lieu où s’exerçait la volonté, où se formait le caractère, les livres
1861
vie était considérée comme le lieu où s’exerçait
la
volonté, où se formait le caractère, les livres étaient conduits, ils
1862
e le lieu où s’exerçait la volonté, où se formait
le
caractère, les livres étaient conduits, ils avaient une unité, un ter
1863
’exerçait la volonté, où se formait le caractère,
les
livres étaient conduits, ils avaient une unité, un terme auquel ils a
1864
aient une unité, un terme auquel ils arrivaient ;
la
vie n’est plus aujourd’hui qu’une suite d’événements qui se succèdent
1865
ui qu’une suite d’événements qui se succèdent, et
les
livres sont fragmentaires, ils se composent d’une série de tableaux p
1866
se composent d’une série de tableaux parallèles.
Les
parties n’en sont plus dérivées les unes des autres, mais elles s’éta
1867
x parallèles. Les parties n’en sont plus dérivées
les
unes des autres, mais elles s’étalent à la fois toutes ensemble. Dès
1868
s elles s’étalent à la fois toutes ensemble. Dès
l’
année 1886, où il publiait son essai, Frommel donnait ainsi le diagnos
1869
, où il publiait son essai, Frommel donnait ainsi
le
diagnostic du roman moderne ; ne serait-il pas frappant, en effet, d’
1870
ses dernières lignes à des œuvres récentes comme
les
Faux-monnayeurs de Gide, ou Contrepoint d’Aldous Huxley. Combien actu
1871
Huxley. Combien actuelles aussi ces remarques sur
le
déclin de la personnalité, la profondeur des sentiments et leur trist
1872
en actuelles aussi ces remarques sur le déclin de
la
personnalité, la profondeur des sentiments et leur tristesse, que Fro
1873
i ces remarques sur le déclin de la personnalité,
la
profondeur des sentiments et leur tristesse, que Frommel exprime au s
1874
ujet de Mon Frère Yves. Il semble, en effet, que
les
âmes du xixe siècle soient plus profondes et plus voilées, plus inqu
1875
ondes et plus voilées, plus inquiètes qu’elles ne
le
furent jamais. Serait-ce la civilisation toute seule qui les aurait t
1876
inquiètes qu’elles ne le furent jamais. Serait-ce
la
civilisation toute seule qui les aurait travaillées à ce point et les
1877
jamais. Serait-ce la civilisation toute seule qui
les
aurait travaillées à ce point et les aurait ainsi fouillées ? Je ne s
1878
te seule qui les aurait travaillées à ce point et
les
aurait ainsi fouillées ? Je ne sais ; l’âme humaine, je pense, depuis
1879
oint et les aurait ainsi fouillées ? Je ne sais ;
l’
âme humaine, je pense, depuis qu’elle existe, n’a pas changé de nature
1880
qu’elle était peut-être plus chaste. Au temps où
le
domaine intérieur du recueillement et de l’adoration lui demeurait ou
1881
ps où le domaine intérieur du recueillement et de
l’
adoration lui demeurait ouvert, les secrets de la vie intime n’étaient
1882
eillement et de l’adoration lui demeurait ouvert,
les
secrets de la vie intime n’étaient pas révélés parce qu’on les cachai
1883
l’adoration lui demeurait ouvert, les secrets de
la
vie intime n’étaient pas révélés parce qu’on les cachait en Dieu et q
1884
e la vie intime n’étaient pas révélés parce qu’on
les
cachait en Dieu et qu’une sainte pudeur en dérobait l’accès. L’existe
1885
chait en Dieu et qu’une sainte pudeur en dérobait
l’
accès. L’existence apparente était plus calme parce qu’elle n’était qu
1886
Dieu et qu’une sainte pudeur en dérobait l’accès.
L’
existence apparente était plus calme parce qu’elle n’était qu’une part
1887
plus calme parce qu’elle n’était qu’une partie de
l’
existence et qu’on cachait la meilleure ; les désespérances dont notre
1888
ait qu’une partie de l’existence et qu’on cachait
la
meilleure ; les désespérances dont notre époque est prodigue, ne s’ét
1889
ie de l’existence et qu’on cachait la meilleure ;
les
désespérances dont notre époque est prodigue, ne s’étalaient point au
1890
and jour, il y avait pour elles une autre issue :
la
prière en portait l’expression, loin des oreilles des hommes, jusqu’a
1891
pour elles une autre issue : la prière en portait
l’
expression, loin des oreilles des hommes, jusqu’au trône de Dieu. Il n
1892
rône de Dieu. Il n’en est plus ainsi maintenant ;
l’
âme est restée semblable, mais on lui a retranché le ciel ; les mêmes
1893
âme est restée semblable, mais on lui a retranché
le
ciel ; les mêmes aspirations demeurent, qui faisaient tressaillir nos
1894
stée semblable, mais on lui a retranché le ciel ;
les
mêmes aspirations demeurent, qui faisaient tressaillir nos ancêtres,
1895
ancêtres, mais leur légitime objet a été enlevé ;
les
souffrances sont encore là, mais non plus les espérances de la religi
1896
é ; les souffrances sont encore là, mais non plus
les
espérances de la religion, et l’âme, qui montait autrefois, est retom
1897
s sont encore là, mais non plus les espérances de
la
religion, et l’âme, qui montait autrefois, est retombée sur la terre
1898
, mais non plus les espérances de la religion, et
l’
âme, qui montait autrefois, est retombée sur la terre et l’anime de to
1899
et l’âme, qui montait autrefois, est retombée sur
la
terre et l’anime de tout l’effort qu’elle portait sur les choses invi
1900
i montait autrefois, est retombée sur la terre et
l’
anime de tout l’effort qu’elle portait sur les choses invisibles. La v
1901
ois, est retombée sur la terre et l’anime de tout
l’
effort qu’elle portait sur les choses invisibles. La vie, désormais sa
1902
e et l’anime de tout l’effort qu’elle portait sur
les
choses invisibles. La vie, désormais sans au-delà, sans relation avec
1903
effort qu’elle portait sur les choses invisibles.
La
vie, désormais sans au-delà, sans relation avec l’infini, se trouble
1904
a vie, désormais sans au-delà, sans relation avec
l’
infini, se trouble et se complique ; le sentiment contredit à la pensé
1905
ation avec l’infini, se trouble et se complique ;
le
sentiment contredit à la pensée, la pensée contredit au sentiment, et
1906
rouble et se complique ; le sentiment contredit à
la
pensée, la pensée contredit au sentiment, et, dans leur tumulte intér
1907
e complique ; le sentiment contredit à la pensée,
la
pensée contredit au sentiment, et, dans leur tumulte intérieur, les f
1908
it au sentiment, et, dans leur tumulte intérieur,
les
forces vives de l’être ont déchiré leur enveloppe, les âmes se sont o
1909
dans leur tumulte intérieur, les forces vives de
l’
être ont déchiré leur enveloppe, les âmes se sont ouvertes à tous les
1910
orces vives de l’être ont déchiré leur enveloppe,
les
âmes se sont ouvertes à tous les regards, les cœurs se sont révélés e
1911
leur enveloppe, les âmes se sont ouvertes à tous
les
regards, les cœurs se sont révélés et leur souffrance s’est écrite da
1912
pe, les âmes se sont ouvertes à tous les regards,
les
cœurs se sont révélés et leur souffrance s’est écrite dans les pages
1913
sont révélés et leur souffrance s’est écrite dans
les
pages innombrables de notre littérature. L’ouverture s’est faite, mai
1914
dans les pages innombrables de notre littérature.
L’
ouverture s’est faite, mais non du bon côté ; l’âme, que tourmente un
1915
. L’ouverture s’est faite, mais non du bon côté ;
l’
âme, que tourmente un suprême besoin d’épanchement, s’est déversée, ma
1916
une paix dans une intimité purement humaine : Et
l’
homme seul répond à l’homme épouvanté 27. Il nous manque une étude su
1917
mité purement humaine : Et l’homme seul répond à
l’
homme épouvanté 27. Il nous manque une étude sur les critiques protes
1918
homme épouvanté 27. Il nous manque une étude sur
les
critiques protestants du xixe siècle. L’on serait surpris de constat
1919
de sur les critiques protestants du xixe siècle.
L’
on serait surpris de constater à ce sujet que les jugements d’un Vinet
1920
. L’on serait surpris de constater à ce sujet que
les
jugements d’un Vinet sur le romantisme, ceux d’un Frommel sur les écr
1921
tater à ce sujet que les jugements d’un Vinet sur
le
romantisme, ceux d’un Frommel sur les écrivains qu’il appelle « posit
1922
un Vinet sur le romantisme, ceux d’un Frommel sur
les
écrivains qu’il appelle « positivistes » restent à peu près les seuls
1923
qu’il appelle « positivistes » restent à peu près
les
seuls valables, à nos yeux, qui aient été émis en leur temps. La crit
1924
es, à nos yeux, qui aient été émis en leur temps.
La
critique la plus moderne les confirme et les répète bien souvent sans
1925
ux, qui aient été émis en leur temps. La critique
la
plus moderne les confirme et les répète bien souvent sans les connaît
1926
é émis en leur temps. La critique la plus moderne
les
confirme et les répète bien souvent sans les connaître. Et « le point
1927
emps. La critique la plus moderne les confirme et
les
répète bien souvent sans les connaître. Et « le point de vue de Genèv
1928
erne les confirme et les répète bien souvent sans
les
connaître. Et « le point de vue de Genève » — c’est-à-dire protestant
1929
les répète bien souvent sans les connaître. Et «
le
point de vue de Genève » — c’est-à-dire protestant — nous paraît avoi
1930
dire protestant — nous paraît avoir doué ceux qui
le
professèrent (en dépit de certain défaut de sympathie avec leurs suje
1931
t, Gide sans doute le premier. 27. Paul Bourget,
Les
Aveux : Désespoir en Dieu, p. 264. p. Rougemont Denis de, « Le prot
1932
spoir en Dieu, p. 264. p. Rougemont Denis de, «
Le
protestantisme jugé », Foi et Vie, Paris, octobre 1931, p. 751-754.
1933
t, et que personne, croyons-nous, n’a relevé, que
les
grands « succès » littéraires de l’année 1931 soient allés à trois ro
1934
relevé, que les grands « succès » littéraires de
l’
année 1931 soient allés à trois romans d’écrivains protestants : Pierr
1935
protestants qui écrivent ? — Mais voyons d’abord
les
œuvres. La critique à peu près unanime a salué dans Le Scandale la me
1936
qui écrivent ? — Mais voyons d’abord les œuvres.
La
critique à peu près unanime a salué dans Le Scandale la meilleure œuv
1937
vres. La critique à peu près unanime a salué dans
Le
Scandale la meilleure œuvre de M. Bost, une espèce de somme romanesqu
1938
tique à peu près unanime a salué dans Le Scandale
la
meilleure œuvre de M. Bost, une espèce de somme romanesque des erreme
1939
, une espèce de somme romanesque des errements de
la
jeunesse d’après-guerre. La Claire de M. Chardonne a rallié tous les
1940
sque des errements de la jeunesse d’après-guerre.
La
Claire de M. Chardonne a rallié tous les suffrages féminins, et class
1941
s-guerre. La Claire de M. Chardonne a rallié tous
les
suffrages féminins, et classe son auteur dans la lignée de ces fameux
1942
les suffrages féminins, et classe son auteur dans
la
lignée de ces fameux « moralistes français » auxquels nous pardonnons
1943
souvent d’être des romanciers assez ternes, pour
le
plaisir que par ailleurs ils donnent à notre intelligence plus avide,
1944
étique tableau d’un domaine et d’une famille dont
la
mystique se révèle au cours d’un épisode central traité en profondeur
1945
vre d’une sorte de renaissance cornélienne. Dans
la
discordante après-guerre, Jean Schlumberger semblait devoir rester le
1946
-guerre, Jean Schlumberger semblait devoir rester
le
seul tenant du classicisme romanesque ; mais voici qu’on proclame au
1947
manesque ; mais voici qu’on proclame au contraire
l’
avènement d’une littérature nouvelle28, dont cette œuvre serait comme
1948
érature nouvelle28, dont cette œuvre serait comme
le
frontispice (aux beaux noirs et gris profonds). Un critique fort écou
1949
que fort écouté29, à son propos, fit observer que
les
romanciers protestants montrent de préférence la famille dans sa forc
1950
les romanciers protestants montrent de préférence
la
famille dans sa force de conservation morale, alors que le catholique
1951
e dans sa force de conservation morale, alors que
le
catholique Mauriac s’attarde au spectacle de sa décomposition. Ici la
1952
c s’attarde au spectacle de sa décomposition. Ici
la
famille qui résiste, là la famille qui se défait30. Mais gardons-nous
1953
sa décomposition. Ici la famille qui résiste, là
la
famille qui se défait30. Mais gardons-nous de voir dans ce contraste
1954
ns-nous de voir dans ce contraste autre chose que
la
vieille opposition du sacrifice cornélien et de la passion racinienne
1955
a vieille opposition du sacrifice cornélien et de
la
passion racinienne, — opposition qui se prolonge et trouve son expres
1956
de Saint-Saturnin qu’un tel roman exprime « toute
la
grandeur — et toute la misère — des protestants sans foi »31. Quoi qu
1957
tel roman exprime « toute la grandeur — et toute
la
misère — des protestants sans foi »31. Quoi qu’il en fût d’ailleurs d
1958
nts sans foi »31. Quoi qu’il en fût d’ailleurs de
la
portée religieuse des trois œuvres, l’on se sentait tenté de marquer
1959
illeurs de la portée religieuse des trois œuvres,
l’
on se sentait tenté de marquer ici d’une pierre blanche « l’année du r
1960
ntait tenté de marquer ici d’une pierre blanche «
l’
année du roman protestant ». À la réflexion, l’on y a renoncé, pour de
1961
pierre blanche « l’année du roman protestant ». À
la
réflexion, l’on y a renoncé, pour des raisons d’ordre général et comm
1962
« l’année du roman protestant ». À la réflexion,
l’
on y a renoncé, pour des raisons d’ordre général et comme indépendante
1963
s nos Lettres, n’était-ce point, d’abord, céder à
la
tentation d’un nationalisme religieux plus injustifiable que l’autre
1964
sses, de fausses hontes et de sourires complices.
La
question toutefois doit être portée sur un plan supérieur à toute pol
1965
toute polémique : s’agit-il jamais en effet pour
les
témoins d’une confession, de faire le compte de leurs gloires ? Ne do
1966
effet pour les témoins d’une confession, de faire
le
compte de leurs gloires ? Ne doivent-ils pas au contraire considérer
1967
celles-ci comme leur accusation perpétuelle ? Car
la
vraie question qu’elles posent, chrétiennement, c’est de savoir si no
1968
s posent, chrétiennement, c’est de savoir si nous
les
méritons encore. Comme le disait un homme d’esprit, plus l’ancêtre do
1969
’est de savoir si nous les méritons encore. Comme
le
disait un homme d’esprit, plus l’ancêtre dont on se réclame est éloig
1970
s encore. Comme le disait un homme d’esprit, plus
l’
ancêtre dont on se réclame est éloigné, moins on a de chances d’en ten
1971
yrs, camisards et prophètes, nous condamnent dans
la
mesure où elles furent authentiques. Mais d’autre part certaines « cé
1972
écessaire, aujourd’hui, de confesser. Aussi bien,
la
force qui nous est promise doit-elle nous rendre ce courage léger.
1973
romise doit-elle nous rendre ce courage léger.
Le
moralisme nous trahit Partons du cas concret de nos trois auteurs.
1974
t Partons du cas concret de nos trois auteurs.
Le
problème, à vrai dire, les dépasse, mais il n’est pas mauvais de l’ac
1975
t de nos trois auteurs. Le problème, à vrai dire,
les
dépasse, mais il n’est pas mauvais de l’actualiser, de le rétrécir, s
1976
i dire, les dépasse, mais il n’est pas mauvais de
l’
actualiser, de le rétrécir, si de la sorte nous sentons mieux sa point
1977
se, mais il n’est pas mauvais de l’actualiser, de
le
rétrécir, si de la sorte nous sentons mieux sa pointe. Les héros du S
1978
as mauvais de l’actualiser, de le rétrécir, si de
la
sorte nous sentons mieux sa pointe. Les héros du Scandale, provinciau
1979
cir, si de la sorte nous sentons mieux sa pointe.
Les
héros du Scandale, provinciaux énervés par la vie des bars de la capi
1980
e. Les héros du Scandale, provinciaux énervés par
la
vie des bars de la capitale nous apparaissent incapables de transport
1981
ndale, provinciaux énervés par la vie des bars de
la
capitale nous apparaissent incapables de transporter dans ce décor le
1982
araissent incapables de transporter dans ce décor
les
dilemmes religieux d’une vie intérieure que l’on sent parfois sous-ja
1983
r les dilemmes religieux d’une vie intérieure que
l’
on sent parfois sous-jacente, mais trop timide à s’exprimer. Le couple
1984
fois sous-jacente, mais trop timide à s’exprimer.
Le
couple que Jacques Chardonne étudie dans Claire poursuit un bonheur p
1985
, et par là si précaire qu’il côtoie bien souvent
l’
angoisse, ou pis encore : un sentiment d’indifférence et d’inutilité.
1986
sentiment d’indifférence et d’inutilité. Quant à
l’
auteur de Saint-Saturnin, il semble qu’une véritable préméditation — o
1987
in, il semble qu’une véritable préméditation — où
l’
on n’eût voulu voir qu’une pudeur — lui fait éviter toute allusion chr
1988
usion chrétienne, au point qu’en tels endroits où
la
vraisemblance voudrait que le nom de Dieu fût invoqué (je pense au te
1989
en tels endroits où la vraisemblance voudrait que
le
nom de Dieu fût invoqué (je pense au testament de la mère par exemple
1990
nom de Dieu fût invoqué (je pense au testament de
la
mère par exemple), c’est au « sort » que l’on s’en remet, ni plus ni
1991
nt de la mère par exemple), c’est au « sort » que
l’
on s’en remet, ni plus ni moins que dans un drame antique. M. Saurat d
1992
an Schlumberger une volonté consciente de réduire
l’
homme à sa seule virtu. Donc : refus ou ignorance des catégories de la
1993
irtu. Donc : refus ou ignorance des catégories de
la
grâce et du péché ; un certain ascétisme de la forme, mais jamais rie
1994
de la grâce et du péché ; un certain ascétisme de
la
forme, mais jamais rien d’explicitement religieux : cela n’a point em
1995
de protestants tiennent à honneur de compromettre
la
Réforme avec cette attitude, et de prolonger un malentendu qu’ils jug
1996
estants par tradition », pourtant cache assez mal
la
faiblesse d’un compromis foncier. Le fort est celui qui refuse la lou
1997
he assez mal la faiblesse d’un compromis foncier.
Le
fort est celui qui refuse la louange approximative. Nous ne saurions
1998
n compromis foncier. Le fort est celui qui refuse
la
louange approximative. Nous ne saurions assez nous garder d’accepter
1999
e notre foi. Il est vrai que ceux-ci sont souvent
les
plus éclatants. Car un système politique, une doctrine, une éthique,
2000
à quelque erreur interne, ne vont pas forcément à
la
ruine immédiate, dans notre monde tel qu’il est. Mais c’est parfois,
2001
eurs faussetés et qu’ils se trouvent, aux yeux de
l’
esprit, le plus durement jugés. Était-ce affaiblissement de notre foi
2002
etés et qu’ils se trouvent, aux yeux de l’esprit,
le
plus durement jugés. Était-ce affaiblissement de notre foi dans l’ave
2003
jugés. Était-ce affaiblissement de notre foi dans
l’
avenir de la Réforme, besoin minoritaire de trouver des alliés à bon c
2004
-ce affaiblissement de notre foi dans l’avenir de
la
Réforme, besoin minoritaire de trouver des alliés à bon compte sur un
2005
trouver des alliés à bon compte sur un terrain où
la
compromission semblait pratiquement acceptable ? Nous avons trop souv
2006
trop souvent et bien trop volontiers souffert que
l’
on nous attribue un moralisme tout semblable à celui des athées, — au
2007
athées, — au lieu qu’il eût fallu du premier coup
le
dénoncer, comme radicalement contraire à notre foi originale. Le sièc
2008
mme radicalement contraire à notre foi originale.
Le
siècle, hélas, décorait du beau nom de libéralisme l’absence de toute
2009
iècle, hélas, décorait du beau nom de libéralisme
l’
absence de toute exigence unifiante entre la pensée et l’action. Certe
2010
lisme l’absence de toute exigence unifiante entre
la
pensée et l’action. Certes, nos prédicateurs affirmaient le salut gra
2011
ce de toute exigence unifiante entre la pensée et
l’
action. Certes, nos prédicateurs affirmaient le salut gratuit par la f
2012
et l’action. Certes, nos prédicateurs affirmaient
le
salut gratuit par la foi ; mais d’autre part nous prêtions des mains
2013
nos prédicateurs affirmaient le salut gratuit par
la
foi ; mais d’autre part nous prêtions des mains complices à des œuvre
2014
evaient de conceptions nettement a-chrétiennes de
la
« moralité publique » par exemple. Et quelles qu’aient été les affirm
2015
é publique » par exemple. Et quelles qu’aient été
les
affirmations souvent indignées de nos docteurs, un fait prit corps, i
2016
docteurs, un fait prit corps, irréfutable : dans
l’
esprit du Français moyen, « protestant » devint synonyme de « moralist
2017
yme de « moraliste ». Était-ce qu’il y avait dans
l’
accent de ces docteurs-là quelque chose qui les empêchait de convaincr
2018
ans l’accent de ces docteurs-là quelque chose qui
les
empêchait de convaincre ? Tel étant l’état des choses, suffira-t-il d
2019
chose qui les empêchait de convaincre ? Tel étant
l’
état des choses, suffira-t-il de déplorer une incompréhension publique
2020
is dont nous souffrons d’autant plus vivement que
le
monde actuel nous met en demeure d’abandonner tout ce qui, dans notre
2021
’inspire d’un conformisme bourgeois plutôt que de
l’
héroïsme chrétien ? En particulier, sommes-nous toujours assez conscie
2022
des fondements de notre foi pour récuser, dans «
l’
esprit protestant », tout ce qui rend inutile la grâce ? Il y va pourt
2023
« l’esprit protestant », tout ce qui rend inutile
la
grâce ? Il y va pourtant de notre force de conquête. Que nous le voul
2024
va pourtant de notre force de conquête. Que nous
le
voulions ou non, en fait, sinon toujours en droit, l’héritage intelle
2025
oulions ou non, en fait, sinon toujours en droit,
l’
héritage intellectuel du protestantisme du xixe siècle se réduit, aux
2026
de son insistance… Et de ce fait qui paraît bien
la
confirmer : le dessèchement distingué de notre art. Toute forme relig
2027
nce… Et de ce fait qui paraît bien la confirmer :
le
dessèchement distingué de notre art. Toute forme religieuse donne lie
2028
nt ses traits spécifiques. On peut donc poser que
le
protestantisme de la fin du xixe siècle, tel que nos contemporains s
2029
ques. On peut donc poser que le protestantisme de
la
fin du xixe siècle, tel que nos contemporains se le représentent, ne
2030
fin du xixe siècle, tel que nos contemporains se
le
représentent, ne pouvait s’exprimer que dans la forme du roman morali
2031
e le représentent, ne pouvait s’exprimer que dans
la
forme du roman moraliste (forme qui par ailleurs flattait un penchant
2032
par ailleurs flattait un penchant traditionnel de
l’
esprit français). Cela pouvait donner soit des œuvres d’analyse tendan
2033
ner soit des œuvres d’analyse tendant à dissoudre
les
affirmations massives de la foi ; soit des œuvres d’édification moral
2034
tendant à dissoudre les affirmations massives de
la
foi ; soit des œuvres d’édification morale, au sens littéral du terme
2035
ne atmosphère proprement chrétienne. Or voici que
les
faits confirment cette vue théorique : Loti, Schlumberger, Gide, le d
2036
t cette vue théorique : Loti, Schlumberger, Gide,
le
désenchanté, le stoïcien, le révolté, — trois noms parfaitement repré
2037
rique : Loti, Schlumberger, Gide, le désenchanté,
le
stoïcien, le révolté, — trois noms parfaitement représentatifs33. Bil
2038
Schlumberger, Gide, le désenchanté, le stoïcien,
le
révolté, — trois noms parfaitement représentatifs33. Bilan fort honor
2039
honorable du point de vue purement littéraire, si
l’
on tient compte de la faiblesse numérique des protestants français. Bi
2040
vue purement littéraire, si l’on tient compte de
la
faiblesse numérique des protestants français. Bilan terriblement défi
2041
tants français. Bilan terriblement déficitaire si
l’
on prend au sérieux la grandeur impérieuse et fulgurante du véritable
2042
terriblement déficitaire si l’on prend au sérieux
la
grandeur impérieuse et fulgurante du véritable calvinisme. Or nous n’
2043
ons plus à rendre responsable de cette carence de
la
poésie et du rayonnement spirituel notre fameux moralisme, traître à
2044
dé de toute théologie efficace. Peut-être vaut-il
la
peine de préciser ici et de pousser dans le détail une accusation que
2045
ut-il la peine de préciser ici et de pousser dans
le
détail une accusation que certains, déjà, disent banale, pour lui ôte
2046
, déjà, disent banale, pour lui ôter sa force, je
le
crains. ⁂ Le puritanisme, expression d’une doctrine héroïque, pouvait
2047
t banale, pour lui ôter sa force, je le crains. ⁂
Le
puritanisme, expression d’une doctrine héroïque, pouvait provoquer da
2048
n d’une doctrine héroïque, pouvait provoquer dans
les
âmes des complexités merveilleuses, un pathétique aux résonances prof
2049
athétique aux résonances profondes : Milton. Mais
le
moralisme détendu que la théologie libérale prétendit conserver, fut
2050
profondes : Milton. Mais le moralisme détendu que
la
théologie libérale prétendit conserver, fut bientôt réduit au rôle d’
2051
tienne d’ailleurs, puisqu’elle récusait à la fois
la
charité, le risque, l’abandon et la divine légèreté, c’est-à-dire, qu
2052
leurs, puisqu’elle récusait à la fois la charité,
le
risque, l’abandon et la divine légèreté, c’est-à-dire, qu’elle récusa
2053
qu’elle récusait à la fois la charité, le risque,
l’
abandon et la divine légèreté, c’est-à-dire, qu’elle récusait la grâce
2054
ait à la fois la charité, le risque, l’abandon et
la
divine légèreté, c’est-à-dire, qu’elle récusait la grâce autant que l
2055
a divine légèreté, c’est-à-dire, qu’elle récusait
la
grâce autant que le péché. La censure moraliste est avant tout peureu
2056
’est-à-dire, qu’elle récusait la grâce autant que
le
péché. La censure moraliste est avant tout peureuse. Elle « craint »
2057
e, qu’elle récusait la grâce autant que le péché.
La
censure moraliste est avant tout peureuse. Elle « craint » la vérité
2058
oraliste est avant tout peureuse. Elle « craint »
la
vérité ; non point au sens de ce verbe qui signifie la révérence, mai
2059
rité ; non point au sens de ce verbe qui signifie
la
révérence, mais comme on craint le risque, que Jésus n’a jamais crain
2060
e qui signifie la révérence, mais comme on craint
le
risque, que Jésus n’a jamais craint. Et c’est en quoi elle révèle la
2061
s n’a jamais craint. Et c’est en quoi elle révèle
la
faiblesse de sa théologie. Car il est certains cas où celui qui crain
2062
st certains cas où celui qui craint de dire toute
la
vérité n’exprime par là rien d’autre que sa méfiance vis-à-vis de la
2063
par là rien d’autre que sa méfiance vis-à-vis de
la
grâce et son optimisme vis-à-vis de la nature humaine, qui, selon cet
2064
s-à-vis de la grâce et son optimisme vis-à-vis de
la
nature humaine, qui, selon cette vue, serait bonne, ou du moins meill
2065
e vue, serait bonne, ou du moins meilleure, si on
la
« préservait » du mal. Ainsi Rousseau le libertaire doit et peut être
2066
e, si on la « préservait » du mal. Ainsi Rousseau
le
libertaire doit et peut être moraliste, tandis que Calvin l’orthodoxe
2067
re doit et peut être moraliste, tandis que Calvin
l’
orthodoxe ne saurait l’être sans renier le fondement de sa croyance34.
2068
raliste, tandis que Calvin l’orthodoxe ne saurait
l’
être sans renier le fondement de sa croyance34. Or nous voyons le mora
2069
Calvin l’orthodoxe ne saurait l’être sans renier
le
fondement de sa croyance34. Or nous voyons le moralisme se développer
2070
ier le fondement de sa croyance34. Or nous voyons
le
moralisme se développer précisément à l’époque où la théologie de Cal
2071
s voyons le moralisme se développer précisément à
l’
époque où la théologie de Calvin, pessimiste quant à l’homme, mais con
2072
moralisme se développer précisément à l’époque où
la
théologie de Calvin, pessimiste quant à l’homme, mais confiante dans
2073
que où la théologie de Calvin, pessimiste quant à
l’
homme, mais confiante dans la grâce, cède le champ aux idées de Rousse
2074
, pessimiste quant à l’homme, mais confiante dans
la
grâce, cède le champ aux idées de Rousseau, optimistes quant à l’homm
2075
ant à l’homme, mais confiante dans la grâce, cède
le
champ aux idées de Rousseau, optimistes quant à l’homme et pratiqueme
2076
e champ aux idées de Rousseau, optimistes quant à
l’
homme et pratiquement athées. Voici donc l’homme, dans sa condition me
2077
uant à l’homme et pratiquement athées. Voici donc
l’
homme, dans sa condition menacée, réduit aux seules défenses qu’invent
2078
aux seules défenses qu’invente son calcul. Voici
l’
homme livré à lui-même, c’est-à-dire à son pire ennemi. Morne triomphe
2079
c’est-à-dire à son pire ennemi. Morne triomphe de
l’
analyse psychologique. Un siècle de ce régime suffit à nous mener à ce
2080
e trouble gâchis intérieur où Freud naguère porta
l’
impitoyable lumière de l’observation scientifique. Reflet du siècle, l
2081
r où Freud naguère porta l’impitoyable lumière de
l’
observation scientifique. Reflet du siècle, le roman bientôt s’affaibl
2082
de l’observation scientifique. Reflet du siècle,
le
roman bientôt s’affaiblit à force de se compliquer, et tend à se rédu
2083
mment animer des êtres, lorsqu’à chaque moment de
la
création intervient une autocritique à la fois peureuse et agressive
2084
it une puissance décuplée, excessive, et qui, par
la
force des choses, tournerait bientôt en révolte, en insolence, en dém
2085
olte, en insolence, en démence : Nietzsche. Ainsi
l’
atmosphère moraliste a tué les germes de l’imagination créatrice chez
2086
e : Nietzsche. Ainsi l’atmosphère moraliste a tué
les
germes de l’imagination créatrice chez les protestants, qui lui furen
2087
Ainsi l’atmosphère moraliste a tué les germes de
l’
imagination créatrice chez les protestants, qui lui furent plus que d’
2088
a tué les germes de l’imagination créatrice chez
les
protestants, qui lui furent plus que d’autres soumis, de par leur sér
2089
raditionnel. Et quand elle n’est point parvenue à
les
étouffer, elle a souvent faussé le développement de ces germes ; les
2090
nt parvenue à les étouffer, elle a souvent faussé
le
développement de ces germes ; les produits d’une terre ingrate grandi
2091
a souvent faussé le développement de ces germes ;
les
produits d’une terre ingrate grandissent comme une dérision de la pau
2092
e terre ingrate grandissent comme une dérision de
la
pauvreté maternelle, comme une caricature de la sécheresse à laquelle
2093
e la pauvreté maternelle, comme une caricature de
la
sécheresse à laquelle ils s’opposent, mais qu’ils manifestent en même
2094
me temps avec une ironie plus cruelle souvent que
la
stérilité. Sécheresse désolée de Benjamin Constant, impuissance et ba
2095
iel, désespérance vaniteuse de Loti : telles sont
les
réactions irrécusables et célèbres que provoqua le moralisme perverti
2096
s réactions irrécusables et célèbres que provoqua
le
moralisme perverti. Il eût conduit le protestantisme à la négation ab
2097
ue provoqua le moralisme perverti. Il eût conduit
le
protestantisme à la négation absolue de son essence35, si l’humanité
2098
isme perverti. Il eût conduit le protestantisme à
la
négation absolue de son essence35, si l’humanité ne possédait d’autre
2099
ntisme à la négation absolue de son essence35, si
l’
humanité ne possédait d’autres recours que ceux qu’elle peut imaginer
2100
cours que ceux qu’elle peut imaginer en dehors de
la
grâce, c’est-à-dire la police des mœurs, l’éducation bourgeoise et ce
2101
peut imaginer en dehors de la grâce, c’est-à-dire
la
police des mœurs, l’éducation bourgeoise et ces blasphématoires « hyg
2102
rs de la grâce, c’est-à-dire la police des mœurs,
l’
éducation bourgeoise et ces blasphématoires « hygiènes de l’esprit » d
2103
n bourgeoise et ces blasphématoires « hygiènes de
l’
esprit » dont les ravages ne prendront fin qu’au jour où nous aurons c
2104
ces blasphématoires « hygiènes de l’esprit » dont
les
ravages ne prendront fin qu’au jour où nous aurons compris que la san
2105
endront fin qu’au jour où nous aurons compris que
la
santé est dans l’humilité de la prière, dans la reconnaissance éperdu
2106
jour où nous aurons compris que la santé est dans
l’
humilité de la prière, dans la reconnaissance éperdue de notre incapac
2107
urons compris que la santé est dans l’humilité de
la
prière, dans la reconnaissance éperdue de notre incapacité à faire pa
2108
e la santé est dans l’humilité de la prière, dans
la
reconnaissance éperdue de notre incapacité à faire par nous-mêmes le
2109
perdue de notre incapacité à faire par nous-mêmes
le
bien, dans l’abandon aux mains de Dieu, — aux violentes mains de Dieu
2110
e incapacité à faire par nous-mêmes le bien, dans
l’
abandon aux mains de Dieu, — aux violentes mains de Dieu. Un cantiq
2111
ne sont guère atteints par tout ceci. Mais quoi ?
Le
but ne fut jamais de démolir, mais bien plutôt de dénoncer un princip
2112
destructeur. C’est au nom d’une foi positive que
l’
on attaque ici le moralisme survivant, c’est au nom d’une grande espér
2113
st au nom d’une foi positive que l’on attaque ici
le
moralisme survivant, c’est au nom d’une grande espérance. Que devons-
2114
ogmatique qui, s’il traduit et porte un réveil de
la
foi, ne peut manquer de libérer des forces créatrices. Or les temps v
2115
peut manquer de libérer des forces créatrices. Or
les
temps vont nous y contraindre. Que rien ne soit plus favorable à l’a
2116
y contraindre. Que rien ne soit plus favorable à
l’
art que l’évangélisme dans sa pureté, héroïque ou sereine, il faudrait
2117
dre. Que rien ne soit plus favorable à l’art que
l’
évangélisme dans sa pureté, héroïque ou sereine, il faudrait pour en d
2118
roïque ou sereine, il faudrait pour en douter que
l’
on ait oublié les plus grands noms : Milton, Bach, Rembrandt, les sœur
2119
e, il faudrait pour en douter que l’on ait oublié
les
plus grands noms : Milton, Bach, Rembrandt, les sœurs Brontë, Henrik
2120
é les plus grands noms : Milton, Bach, Rembrandt,
les
sœurs Brontë, Henrik Ibsen et ces deux Danois prodigieux, Hans-Christ
2121
egaard. (Féerie du Conte de ma vie d’Andersen, où
l’
on voit ce « poète des poètes » à la sensibilité si authentiquement év
2122
’Andersen, où l’on voit ce « poète des poètes » à
la
sensibilité si authentiquement évangélique — comme celle d’une Lagerl
2123
s avec Charles Dickens, Jenny Lind, Thorwaldsen.)
Les
romans russes et les romans anglais du xixe siècle nous laissent ent
2124
s, Jenny Lind, Thorwaldsen.) Les romans russes et
les
romans anglais du xixe siècle nous laissent entrevoir ce que pourrai
2125
rraient être des œuvres modernes inspirées, comme
le
furent les plus grandes, par le sentiment tragique du péché et de la
2126
re des œuvres modernes inspirées, comme le furent
les
plus grandes, par le sentiment tragique du péché et de la grâce souve
2127
inspirées, comme le furent les plus grandes, par
le
sentiment tragique du péché et de la grâce souveraine. C’est cela qui
2128
grandes, par le sentiment tragique du péché et de
la
grâce souveraine. C’est cela qui donne aux romans de Dostoïevski ou d
2129
ntes qui manqueront toujours aux œuvres nées sous
le
signe fatal du moralisme. La grande poésie naît du tragique et de la
2130
aux œuvres nées sous le signe fatal du moralisme.
La
grande poésie naît du tragique et de la joie surabondante : verrons-n
2131
oralisme. La grande poésie naît du tragique et de
la
joie surabondante : verrons-nous quelque jour en France surgir une po
2132
ion évangélique ? Souhaitons qu’il n’y faille pas
les
conjonctures sanglantes d’où naquirent les Tragiques d’un d’Aubigné.
2133
le pas les conjonctures sanglantes d’où naquirent
les
Tragiques d’un d’Aubigné. Aussi bien avons-nous d’autres raisons d’es
2134
ien avons-nous d’autres raisons d’espérer. Car si
la
forme artistique adéquate au libéralisme fut l’analyse d’états d’âme
2135
i la forme artistique adéquate au libéralisme fut
l’
analyse d’états d’âme dans le doute, il est permis d’attendre de la vi
2136
e au libéralisme fut l’analyse d’états d’âme dans
le
doute, il est permis d’attendre de la violence même d’une théologie d
2137
d’âme dans le doute, il est permis d’attendre de
la
violence même d’une théologie du Dieu Tout-Puissant qu’elle suscite d
2138
s36, qu’elle enflamme des chants prophétiques. Et
l’
Éternel enfin sera loué « selon l’immensité de sa grandeur » comme il
2139
rophétiques. Et l’Éternel enfin sera loué « selon
l’
immensité de sa grandeur » comme il est dit au dernier psaume. 28.
2140
dit au dernier psaume. 28. Denis Saurat, dans
la
Nouvelle Revue française et Marsyas. 29. Albert Thibaudet, dans Cand
2141
rger, André Chamson. 31. Charles Westphal, dans
Le
Semeur . 32. Il est entendu, même chez les protestants, qu’un « prot
2142
dans Le Semeur . 32. Il est entendu, même chez
les
protestants, qu’un « protestant qui écrit » ne saurait être qu’en rév
2143
qui écrit » ne saurait être qu’en révolte contre
la
foi de ses pères. Le jeu consiste uniquement à retrouver dans son œuv
2144
it être qu’en révolte contre la foi de ses pères.
Le
jeu consiste uniquement à retrouver dans son œuvre des traces qui « m
2145
fs d’une atmosphère moraliste, quelles que soient
les
opinions qu’ils adoptèrent vis-à-vis du moralisme. Qu’on me comprenne
2146
. A.-N. Bertrand, Protestantisme, p. 102, et tout
le
chapitre sur le Principe d’humilité. Également : Jean de Saussure : À
2147
, Protestantisme, p. 102, et tout le chapitre sur
le
Principe d’humilité. Également : Jean de Saussure : À l’École de Calv
2148
cipe d’humilité. Également : Jean de Saussure : À
l’
École de Calvin, passim. 36. Cf. dans le dernier numéro de cette revu
2149
m. 36. Cf. dans le dernier numéro de cette revue
l’
article de E. Hæin, et particulièrement la citation de F. Münch relati
2150
e revue l’article de E. Hæin, et particulièrement
la
citation de F. Münch relative à la musique religieuse d’Honegger. q.
2151
rticulièrement la citation de F. Münch relative à
la
musique religieuse d’Honegger. q. Rougemont Denis de, « Romanciers
2152
ien, païen (avril 1932)r Imaginez un membre de
l’
Académie des sciences qui serait aussi directeur de la Comédie françai
2153
adémie des sciences qui serait aussi directeur de
la
Comédie française et ministre de l’Intérieur, et qui, en marge des ex
2154
et qui, en marge des expériences accumulées dans
l’
exercice de ces activités, composerait des poèmes d’amour, des romans,
2155
s d’amour, des romans, des drames philosophiques,
les
meilleurs de son époque. Cela ne donnera pas un portrait de Goethe, c
2156
s un portrait de Goethe, certes, mais une idée de
l’
importance du phénomène Goethe. Maintenant ajoutons que l’homme fut su
2157
ance du phénomène Goethe. Maintenant ajoutons que
l’
homme fut supérieur à la somme de toutes ces activités et domina const
2158
. Maintenant ajoutons que l’homme fut supérieur à
la
somme de toutes ces activités et domina constamment sa vie et son œuv
2159
a peut-être pas d’individu plus significatif dans
l’
histoire de l’Occident moderne, c’est-à-dire dans l’histoire des peupl
2160
s d’individu plus significatif dans l’histoire de
l’
Occident moderne, c’est-à-dire dans l’histoire des peuples qui vivent
2161
histoire de l’Occident moderne, c’est-à-dire dans
l’
histoire des peuples qui vivent sous le règne du christianisme. Mais l
2162
-dire dans l’histoire des peuples qui vivent sous
le
règne du christianisme. Mais le plus grand Occidental fut-il chrétien
2163
s qui vivent sous le règne du christianisme. Mais
le
plus grand Occidental fut-il chrétien ? Nous ne saurions, surtout dan
2164
ut dans Foi et Vie , aborder cette question sous
l’
angle de la curiosité littéraire ou historique. Elle pose cependant un
2165
i et Vie , aborder cette question sous l’angle de
la
curiosité littéraire ou historique. Elle pose cependant un problème q
2166
u historique. Elle pose cependant un problème que
la
conscience intellectuelle des chrétiens ne peut et ne doit éviter. Go
2167
qu’il est de notre devoir d’envisager avec toute
la
bonne foi que nécessite un examen de conscience. ⁂ Goethe s’est toujo
2168
mé chrétien, mais d’une façon si particulière que
les
ennemis du christianisme, depuis un siècle, le revendiquent comme leu
2169
e les ennemis du christianisme, depuis un siècle,
le
revendiquent comme leur plus grand païen. Les fragments des Conversat
2170
cle, le revendiquent comme leur plus grand païen.
Les
fragments des Conversations avec Eckermann que nous donnons dans ce n
2171
quivoque réelle, mais plutôt pour en faire sentir
l’
acuité. Mais, dira-t-on d’emblée, le simple fait qu’une équivoque si g
2172
faire sentir l’acuité. Mais, dira-t-on d’emblée,
le
simple fait qu’une équivoque si grave subsiste et paraisse avoir été
2173
tivée par Goethe, ne prouve-t-il pas suffisamment
l’
inauthenticité de son christianisme ? Qu’est-ce qu’un chrétien que l’a
2174
son christianisme ? Qu’est-ce qu’un chrétien que
l’
athéisme annexe avec une pareille aisance ? La question serait tranché
2175
que l’athéisme annexe avec une pareille aisance ?
La
question serait tranchée, en effet, si nous ne savions rien des circo
2176
récemment dans un article qui fit quelque bruit37
les
débuts piétistes du jeune Goethe et la part active qu’il prit aux réu
2177
e bruit37 les débuts piétistes du jeune Goethe et
la
part active qu’il prit aux réunions de « belles âmes » suscitées par
2178
rit aux réunions de « belles âmes » suscitées par
l’
apostolat du comte de Zinzendorf. C’était le temps du réveil sentiment
2179
s par l’apostolat du comte de Zinzendorf. C’était
le
temps du réveil sentimental et mystique dans une Allemagne luthérienn
2180
stique dans une Allemagne luthérienne ravagée par
l’
Aufklärung et le rationalisme. C’était le temps aussi du « Sturm und D
2181
Allemagne luthérienne ravagée par l’Aufklärung et
le
rationalisme. C’était le temps aussi du « Sturm und Drang » auquel Go
2182
agée par l’Aufklärung et le rationalisme. C’était
le
temps aussi du « Sturm und Drang » auquel Goethe devait donner l’expr
2183
u « Sturm und Drang » auquel Goethe devait donner
l’
expression littéraire la plus parfaite avec Werther. Et nous ne manquo
2184
quel Goethe devait donner l’expression littéraire
la
plus parfaite avec Werther. Et nous ne manquons pas de témoignages éc
2185
poque qui permettent d’imaginer ce qu’eût pu être
le
pendant chrétien du Werther : — « J’ai souffert et me voilà libre à n
2186
ette calcination a été très profitable à mon âme…
Le
Sauveur m’a enfin attrapé ; je courais trop vite pour lui, il m’a sai
2187
; je courais trop vite pour lui, il m’a saisi par
les
cheveux. Il est sûrement à vos trousses aussi, j’espère voir le jour
2188
est sûrement à vos trousses aussi, j’espère voir
le
jour où il vous rattrapera ; mais je ne puis répondre de la manière.
2189
il vous rattrapera ; mais je ne puis répondre de
la
manière. Je suis parfois bien tranquille à ce sujet, parfois, quand j
2190
nd je suis calme, très calme, et que je sens tout
le
bien que les sources éternelles ont déversé dans mon cœur. » Et deux
2191
alme, très calme, et que je sens tout le bien que
les
sources éternelles ont déversé dans mon cœur. » Et deux ans plus tard
2192
à ceci près que mes rapports sont meilleurs avec
le
Seigneur et Jésus son fils bien-aimé. C’est vous dire que j’ai acquis
2193
que j’ai acquis plus de raison et d’expérience :
la
crainte du Seigneur est le commencement de la sagesse. » Par quel con
2194
ison et d’expérience : la crainte du Seigneur est
le
commencement de la sagesse. » Par quel concours de circonstances cett
2195
e : la crainte du Seigneur est le commencement de
la
sagesse. » Par quel concours de circonstances cette « sagesse » devin
2196
e non dépourvue d’orgueil vis-à-vis du Seigneur ?
L’
on ne saurait ici exagérer la responsabilité qui incombe aux « chrétie
2197
-à-vis du Seigneur ? L’on ne saurait ici exagérer
la
responsabilité qui incombe aux « chrétiens » eux-mêmes, tels qu’ils a
2198
e exigeante ferveur mystique. « Mes rapports avec
les
dévots — écrit-il de Strasbourg — ne sont pas très fréquents ici. Au
2199
s lors recherchera dans une solitude aggravée par
l’
agacement que lui causent les effusions piétistes trop verbeuses d’un
2200
solitude aggravée par l’agacement que lui causent
les
effusions piétistes trop verbeuses d’un Lavater ou d’un Jacobi. Mais
2201
à découvrir qu’on n’y atteint qu’en outrepassant
les
limites normales de l’esprit humain. La transcendance de Dieu est abs
2202
tteint qu’en outrepassant les limites normales de
l’
esprit humain. La transcendance de Dieu est absolue, par rapport à not
2203
epassant les limites normales de l’esprit humain.
La
transcendance de Dieu est absolue, par rapport à notre pensée naturel
2204
ne recherche qui risque surtout d’être nuisible à
la
vie ? Bornons-nous à l’utile. Bornons-nous à « réaliser » dans nos ac
2205
surtout d’être nuisible à la vie ? Bornons-nous à
l’
utile. Bornons-nous à « réaliser » dans nos actions ce que Dieu jugea
2206
ctions ce que Dieu jugea bon de nous révéler dans
l’
Évangile. Et en présence de l’intempérance de langage qui trop souvent
2207
e nous révéler dans l’Évangile. Et en présence de
l’
intempérance de langage qui trop souvent caractérise les chrétiens, af
2208
empérance de langage qui trop souvent caractérise
les
chrétiens, affirmons que nous ne savons presque rien de Dieu, ou plut
2209
est vain de chercher à en savoir plus que ce que
la
nature visible nous en révèle. Cette attitude s’accuse de plus en plu
2210
Goethe avance en âge. Nous voici à ces années de
la
vieillesse, dont Eckermann nous a livré les confidences, et où la vol
2211
ées de la vieillesse, dont Eckermann nous a livré
les
confidences, et où la volonté de sobriété spirituelle paraît avoir pr
2212
ont Eckermann nous a livré les confidences, et où
la
volonté de sobriété spirituelle paraît avoir produit chez le poète un
2213
de sobriété spirituelle paraît avoir produit chez
le
poète une sorte de sécheresse religieuse. Ce qui à l’origine, n’était
2214
oète une sorte de sécheresse religieuse. Ce qui à
l’
origine, n’était qu’humilité de la raison devant l’insondable mystère
2215
ieuse. Ce qui à l’origine, n’était qu’humilité de
la
raison devant l’insondable mystère de Dieu devient, vu de l’extérieur
2216
’origine, n’était qu’humilité de la raison devant
l’
insondable mystère de Dieu devient, vu de l’extérieur, orgueil de la r
2217
evant l’insondable mystère de Dieu devient, vu de
l’
extérieur, orgueil de la raison qui juge ce monde comme si Dieu n’exis
2218
re de Dieu devient, vu de l’extérieur, orgueil de
la
raison qui juge ce monde comme si Dieu n’existait pas, ou encore : co
2219
u encore : comme si Dieu n’était rien d’autre que
l’
ensemble des lois de la nature. Ainsi la conception de la transcendanc
2220
u n’était rien d’autre que l’ensemble des lois de
la
nature. Ainsi la conception de la transcendance divine aboutit pratiq
2221
autre que l’ensemble des lois de la nature. Ainsi
la
conception de la transcendance divine aboutit pratiquement, chez Goet
2222
ble des lois de la nature. Ainsi la conception de
la
transcendance divine aboutit pratiquement, chez Goethe, à des affirma
2223
e malentendus perpétuellement renaissants, et que
les
adversaires de la religion eurent beau jeu d’exploiter, on le sait. M
2224
tuellement renaissants, et que les adversaires de
la
religion eurent beau jeu d’exploiter, on le sait. Mais, comme l’établ
2225
es de la religion eurent beau jeu d’exploiter, on
le
sait. Mais, comme l’établit fort justement Curtius « le Goethe païen
2226
ent beau jeu d’exploiter, on le sait. Mais, comme
l’
établit fort justement Curtius « le Goethe païen et rien que païen est
2227
t. Mais, comme l’établit fort justement Curtius «
le
Goethe païen et rien que païen est une légende, et une légende d’orig
2228
le est un mythe, au moyen duquel on peut faire de
l’
agitation et de la propagande antireligieuse ». En vérité, Goethe qui
2229
u moyen duquel on peut faire de l’agitation et de
la
propagande antireligieuse ». En vérité, Goethe qui prêcha l’utile, no
2230
de antireligieuse ». En vérité, Goethe qui prêcha
l’
utile, nous apparaît comme Goethe l’inutilisable, si nous le jugeons d
2231
he qui prêcha l’utile, nous apparaît comme Goethe
l’
inutilisable, si nous le jugeons du point de vue d’un parti. Il n’est
2232
ous apparaît comme Goethe l’inutilisable, si nous
le
jugeons du point de vue d’un parti. Il n’est pas païen, pour la raiso
2233
point de vue d’un parti. Il n’est pas païen, pour
la
raison péremptoire qu’il n’y a plus de païen, au sens antique du mot,
2234
plus de païen, au sens antique du mot, depuis que
la
venue du Christ a modifié la nature même de l’homme et l’ensemble des
2235
e du mot, depuis que la venue du Christ a modifié
la
nature même de l’homme et l’ensemble des données religieuses. Mais, d
2236
ue la venue du Christ a modifié la nature même de
l’
homme et l’ensemble des données religieuses. Mais, d’autre part, il fa
2237
du Christ a modifié la nature même de l’homme et
l’
ensemble des données religieuses. Mais, d’autre part, il faudrait un l
2238
t nous nous sentons incapables pour admettre dans
la
communauté de la foi chrétienne l’homme qui a pu dire qu’il s’inclina
2239
ns incapables pour admettre dans la communauté de
la
foi chrétienne l’homme qui a pu dire qu’il s’inclinait devant le Chri
2240
admettre dans la communauté de la foi chrétienne
l’
homme qui a pu dire qu’il s’inclinait devant le Christ comme devant la
2241
ne l’homme qui a pu dire qu’il s’inclinait devant
le
Christ comme devant la « révélation divine du plus haut principe de l
2242
e qu’il s’inclinait devant le Christ comme devant
la
« révélation divine du plus haut principe de la morale », tout en vén
2243
t la « révélation divine du plus haut principe de
la
morale », tout en vénérant également le soleil, comme une « révélatio
2244
incipe de la morale », tout en vénérant également
le
soleil, comme une « révélation du Très-Haut, et même la plus puissant
2245
eil, comme une « révélation du Très-Haut, et même
la
plus puissante qu’il nous ait jamais été donné, à nous enfants de la
2246
u’il nous ait jamais été donné, à nous enfants de
la
terre, de percevoir. » Et certes, on ne voit guère en quoi pareille c
2247
libéraux par exemple. Mais c’est précisément dans
la
facilité d’interprétation qu’offre Goethe dans cette espèce de sagess
2248
imiste si contraire au scandale chrétien, que gît
la
faiblesse religieuse de sa position. Ce qui, plus que tout, fait défa
2249
qui, plus que tout, fait défaut à ce génie, c’est
le
sens tragique du péché. Car c’est bien dans le sens du péché que gît
2250
st le sens tragique du péché. Car c’est bien dans
le
sens du péché que gît l’irréductible, c’est-à-dire le tragique essent
2251
ché. Car c’est bien dans le sens du péché que gît
l’
irréductible, c’est-à-dire le tragique essentiel de notre condition. C
2252
ens du péché que gît l’irréductible, c’est-à-dire
le
tragique essentiel de notre condition. C’est bien là que réside l’élé
2253
tiel de notre condition. C’est bien là que réside
l’
élément transcendant qui interdit à la pensée la plus probe de se pass
2254
que réside l’élément transcendant qui interdit à
la
pensée la plus probe de se passer de Dieu quand elle juge le monde sé
2255
e l’élément transcendant qui interdit à la pensée
la
plus probe de se passer de Dieu quand elle juge le monde séparé de Di
2256
a plus probe de se passer de Dieu quand elle juge
le
monde séparé de Dieu. Il n’est pas vrai de dire qu’un monde séparé de
2257
elque chose. Or, ce « quelque chose » aux yeux de
la
foi, constitue sa raison d’être. Il n’y a pas de neutralité du monde
2258
té du monde vis-à-vis de Dieu — à cause du péché.
La
réalité visible du péché entraîne la considération de la grâce. Et c’
2259
se du péché. La réalité visible du péché entraîne
la
considération de la grâce. Et c’est en quoi la transcendance divine,
2260
ité visible du péché entraîne la considération de
la
grâce. Et c’est en quoi la transcendance divine, sans cesse, se mêle
2261
ne la considération de la grâce. Et c’est en quoi
la
transcendance divine, sans cesse, se mêle à notre vie pratique et vie
2262
leverser nos sagesses. Goethe, prônant dans Faust
le
salut par l’effort humain au sein d’une nature harmonieuse — et quand
2263
sagesses. Goethe, prônant dans Faust le salut par
l’
effort humain au sein d’une nature harmonieuse — et quand bien même il
2264
nieuse — et quand bien même il fait intervenir, à
la
fin, « l’amour d’En-Haut » venant à sa rencontre — Goethe nous appara
2265
t quand bien même il fait intervenir, à la fin, «
l’
amour d’En-Haut » venant à sa rencontre — Goethe nous apparaît comme n
2266
antichrétien, mais d’une tout autre sorte que ne
l’
ont cru nos athées qui s’arrêtaient à des boutades anticatholiques ou
2267
tholiques ou à des moments d’humeur provoqués par
les
bavardages piétistes. Ici, nous confesserons un doute. De quel droit
2268
mme qui se prétendit tel en maintes occasions, de
la
façon la plus expresse ? Sera-ce sur la foi de certains biographes ?
2269
e prétendit tel en maintes occasions, de la façon
la
plus expresse ? Sera-ce sur la foi de certains biographes ? Mais comm
2270
sions, de la façon la plus expresse ? Sera-ce sur
la
foi de certains biographes ? Mais comment juger les actions d’un être
2271
a foi de certains biographes ? Mais comment juger
les
actions d’un être que nous n’avons pas connu, alors que nous-même… Al
2272
-même… Alors que Dieu seul juge. Si nous refusons
le
nom de chrétien à cet homme dont l’éthique, en définitive, apparaît c
2273
nous refusons le nom de chrétien à cet homme dont
l’
éthique, en définitive, apparaît comme fondée sur deux des réalités ce
2274
t comme fondée sur deux des réalités centrales de
l’
Évangile : le renoncement et la réalisation personnelle, n’est-ce poin
2275
e sur deux des réalités centrales de l’Évangile :
le
renoncement et la réalisation personnelle, n’est-ce point tout simple
2276
lités centrales de l’Évangile : le renoncement et
la
réalisation personnelle, n’est-ce point tout simplement que les idées
2277
n personnelle, n’est-ce point tout simplement que
les
idées, les théories et les systèmes prônés par lui ne coïncident pas
2278
le, n’est-ce point tout simplement que les idées,
les
théories et les systèmes prônés par lui ne coïncident pas avec les id
2279
nt tout simplement que les idées, les théories et
les
systèmes prônés par lui ne coïncident pas avec les idées, les théorie
2280
es systèmes prônés par lui ne coïncident pas avec
les
idées, les théories et les systèmes dont nous jugeons urgent d’accent
2281
prônés par lui ne coïncident pas avec les idées,
les
théories et les systèmes dont nous jugeons urgent d’accentuer actuell
2282
ne coïncident pas avec les idées, les théories et
les
systèmes dont nous jugeons urgent d’accentuer actuellement, la vérité
2283
ont nous jugeons urgent d’accentuer actuellement,
la
vérité ? N’est-ce point là porter un jugement avant tout partial, et
2284
autant que la sienne ? Certes, hic et nunc, dans
la
situation du monde de 1932, en présence du déchaînement orgueilleux e
2285
evoir est net : nous avons à défendre et attester
les
valeurs doctrinales les plus gênantes pour ce monde sans Dieu. Or, ce
2286
ns à défendre et attester les valeurs doctrinales
les
plus gênantes pour ce monde sans Dieu. Or, ce sont justement les vale
2287
es pour ce monde sans Dieu. Or, ce sont justement
les
valeurs que le « christianisme » de Goethe paraît avoir négligées ou
2288
sans Dieu. Or, ce sont justement les valeurs que
le
« christianisme » de Goethe paraît avoir négligées ou niées : le scan
2289
sme » de Goethe paraît avoir négligées ou niées :
le
scandale divin, le péché radical. Mais un homme de l’envergure de Goe
2290
aît avoir négligées ou niées : le scandale divin,
le
péché radical. Mais un homme de l’envergure de Goethe, s’il ne peut ê
2291
candale divin, le péché radical. Mais un homme de
l’
envergure de Goethe, s’il ne peut être un argument pour nul parti, ne
2292
être un argument pour nul parti, ne saurait, pour
les
mêmes raisons, servir d’objet à notre jugement. Bien plutôt c’est lui
2293
Bien plutôt c’est lui qui nous juge. Il y a dans
le
Faust, et dans la vie de cet homme, dont le Faust n’est qu’une figura
2294
lui qui nous juge. Il y a dans le Faust, et dans
la
vie de cet homme, dont le Faust n’est qu’une figuration symbolique, u
2295
dans le Faust, et dans la vie de cet homme, dont
le
Faust n’est qu’une figuration symbolique, une leçon d’activité, de ré
2296
on d’activité, de réalisation, d’actualisation de
la
pensée, dont la vertu et la grandeur devraient s’imposer à nous tous.
2297
e réalisation, d’actualisation de la pensée, dont
la
vertu et la grandeur devraient s’imposer à nous tous. Goethe inutilis
2298
n, d’actualisation de la pensée, dont la vertu et
la
grandeur devraient s’imposer à nous tous. Goethe inutilisable, certes
2299
ons pas besoin d’avoir raison (contre lui, contre
les
athées) ; nous n’avons pas besoin d’avoir beaucoup de grands hommes —
2300
Penser dangereusement (juin 1932)s «
L’
esprit désintéressé est mort. » C’en est fait, les clercs ont trahi, e
2301
L’esprit désintéressé est mort. » C’en est fait,
les
clercs ont trahi, et les cris de M. Benda sont couverts par la rumeur
2302
t mort. » C’en est fait, les clercs ont trahi, et
les
cris de M. Benda sont couverts par la rumeur de la place. Dans toute
2303
trahi, et les cris de M. Benda sont couverts par
la
rumeur de la place. Dans toute la jeune génération littéraire et phil
2304
s cris de M. Benda sont couverts par la rumeur de
la
place. Dans toute la jeune génération littéraire et philosophique, c’
2305
nt couverts par la rumeur de la place. Dans toute
la
jeune génération littéraire et philosophique, c’est en vain que l’on
2306
on littéraire et philosophique, c’est en vain que
l’
on chercherait un « esprit libre » selon le vœu de ce prêtre de l’abst
2307
in que l’on chercherait un « esprit libre » selon
le
vœu de ce prêtre de l’abstentionnisme et du célibat spirituel. Ils on
2308
un « esprit libre » selon le vœu de ce prêtre de
l’
abstentionnisme et du célibat spirituel. Ils ont tous épousé une cause
2309
use, une de ces causes qui engagent bien plus que
l’
adhésion des idées, une de ces causes qui doivent être gagnées. Chose
2310
s qui doivent être gagnées. Chose étrange, et que
l’
on eût difficilement prévue au lendemain de la guerre, c’est sur la no
2311
que l’on eût difficilement prévue au lendemain de
la
guerre, c’est sur la notion — et la pratique — du service nécessaire
2312
ement prévue au lendemain de la guerre, c’est sur
la
notion — et la pratique — du service nécessaire que se fait l’unanimi
2313
lendemain de la guerre, c’est sur la notion — et
la
pratique — du service nécessaire que se fait l’unanimité de la nouvel
2314
t la pratique — du service nécessaire que se fait
l’
unanimité de la nouvelle génération. Quels que soient par ailleurs les
2315
du service nécessaire que se fait l’unanimité de
la
nouvelle génération. Quels que soient par ailleurs les antagonismes q
2316
ouvelle génération. Quels que soient par ailleurs
les
antagonismes qui la divisent — bien plus extrêmes que ceux qui divisè
2317
uels que soient par ailleurs les antagonismes qui
la
divisent — bien plus extrêmes que ceux qui divisèrent les précédentes
2318
sent — bien plus extrêmes que ceux qui divisèrent
les
précédentes — elle éprouve son unité, elle connaît une fraternité en
2319
unité, elle connaît une fraternité en ceci : que
la
pensée n’est plus pour elle une justification idéale de l’égoïsme ou
2320
n’est plus pour elle une justification idéale de
l’
égoïsme ou de l’indifférence, mais une obligation urgente à se risquer
2321
elle une justification idéale de l’égoïsme ou de
l’
indifférence, mais une obligation urgente à se risquer en faveur des h
2322
en faveur des hommes, un acte, un combat. Fin de
l’
esprit désintéressé, cela signifierait pour les clercs, selon M. Benda
2323
de l’esprit désintéressé, cela signifierait pour
les
clercs, selon M. Benda, la fin de l’esprit. Et pour nous, cela signif
2324
ela signifierait pour les clercs, selon M. Benda,
la
fin de l’esprit. Et pour nous, cela signifie : le renouveau, le sacri
2325
ierait pour les clercs, selon M. Benda, la fin de
l’
esprit. Et pour nous, cela signifie : le renouveau, le sacrifice salut
2326
la fin de l’esprit. Et pour nous, cela signifie :
le
renouveau, le sacrifice salutaire et l’unique justification de la pen
2327
prit. Et pour nous, cela signifie : le renouveau,
le
sacrifice salutaire et l’unique justification de la pensée. Une telle
2328
ignifie : le renouveau, le sacrifice salutaire et
l’
unique justification de la pensée. Une telle évolution peut paraître f
2329
sacrifice salutaire et l’unique justification de
la
pensée. Une telle évolution peut paraître favorable à la pensée chrét
2330
ée. Une telle évolution peut paraître favorable à
la
pensée chrétienne. La pensée protestante, en particulier, s’est toujo
2331
n peut paraître favorable à la pensée chrétienne.
La
pensée protestante, en particulier, s’est toujours montrée soucieuse
2332
tion éthique. Il n’a pas échappé à M. Benda que «
le
clerc moderne » (en tant qu’il se montre préoccupé des conséquences n
2333
montre préoccupé des conséquences nécessaires de
la
pensée dans l’ordre pratique) « est protestant ». Mais, d’autre part,
2334
pé des conséquences nécessaires de la pensée dans
l’
ordre pratique) « est protestant ». Mais, d’autre part, cette soif d’a
2335
tichrétienne dans son essence, et par suite, dans
l’
action qu’elle commande à des millions de nos contemporains. Il y a au
2336
ains. Il y a aussi ceux qui se bornent à affirmer
la
nécessité d’une pensée active, mais qui n’ont pas vu — qui n’ont pas
2337
e vu — tout ce que cela implique. Ils voient bien
le
vice de la « pensée désintéressée », et qu’il faut s’affranchir d’une
2338
ce que cela implique. Ils voient bien le vice de
la
« pensée désintéressée », et qu’il faut s’affranchir d’une « liberté
2339
isme ou marxisme. Ce qui revient à dire que seuls
les
chrétiens, en tant que chrétiens, non pas en tant que bourgeois, s’il
2340
e chrétiens, non pas en tant que bourgeois, s’ils
le
sont, ont des raisons réelles et valables de récuser une pensée et un
2341
pensée et une action tout entières dirigées vers
l’
organisation et l’utilisation des biens matériels. ⁂ Arrêtons-nous auj
2342
ion tout entières dirigées vers l’organisation et
l’
utilisation des biens matériels. ⁂ Arrêtons-nous aujourd’hui à deux li
2343
me une suite d’études parues pour la plupart dans
les
pages de l’Action française, mais qui, marquons-le tout de suite, ne
2344
d’études parues pour la plupart dans les pages de
l’
Action française, mais qui, marquons-le tout de suite, ne comportent n
2345
s pages de l’Action française, mais qui, marquons-
le
tout de suite, ne comportent nulle allusion à la position politique d
2346
-le tout de suite, ne comportent nulle allusion à
la
position politique de ce journal. Le titre : La Crise est dans l’homm
2347
e allusion à la position politique de ce journal.
Le
titre : La Crise est dans l’homme 38, s’oppose d’emblée aux thèses de
2348
à la position politique de ce journal. Le titre :
La
Crise est dans l’homme 38, s’oppose d’emblée aux thèses des économist
2349
tique de ce journal. Le titre : La Crise est dans
l’
homme 38, s’oppose d’emblée aux thèses des économistes bourgeois ou ma
2350
économistes bourgeois ou marxistes, pour lesquels
la
crise est dans les institutions. Il paraît supposer une rénovation in
2351
ois ou marxistes, pour lesquels la crise est dans
les
institutions. Il paraît supposer une rénovation intérieure, celle pré
2352
ovation intérieure, celle précisément que postule
le
christianisme. Mais c’est en vain que le lecteur cherchera la réalité
2353
postule le christianisme. Mais c’est en vain que
le
lecteur cherchera la réalité constructive et absolue sur quoi se fond
2354
isme. Mais c’est en vain que le lecteur cherchera
la
réalité constructive et absolue sur quoi se fonderait cette rénovatio
2355
. Maulnier critique un monde qui selon lui tend à
la
suppression de la personne humaine. Sa critique nous paraît pertinent
2356
e un monde qui selon lui tend à la suppression de
la
personne humaine. Sa critique nous paraît pertinente, mais elle serai
2357
pertinente, mais elle serait plus efficace si on
la
sentait inspirée par un principe spirituel capable de rendre une forc
2358
dre une force offensive à cette personne humaine.
Le
choix des sujets abordés dans son livre montre un esprit averti des v
2359
de ce temps. Il réfute MM. Berl et Guéhenno, sur
la
question de la culture dans ses rapports avec le peuple. Il discute M
2360
l réfute MM. Berl et Guéhenno, sur la question de
la
culture dans ses rapports avec le peuple. Il discute M. Malraux et so
2361
la question de la culture dans ses rapports avec
le
peuple. Il discute M. Malraux et son goût désespéré de l’action pour
2362
e. Il discute M. Malraux et son goût désespéré de
l’
action pour elle-même. Il condamne le populisme de M. Thérive, il cond
2363
désespéré de l’action pour elle-même. Il condamne
le
populisme de M. Thérive, il condamne le pacifisme de M. Thomas Mann,
2364
condamne le populisme de M. Thérive, il condamne
le
pacifisme de M. Thomas Mann, il condamne l’Amérique de Ford et la Rus
2365
damne le pacifisme de M. Thomas Mann, il condamne
l’
Amérique de Ford et la Russie de Staline ; il adopte enfin une positio
2366
M. Thomas Mann, il condamne l’Amérique de Ford et
la
Russie de Staline ; il adopte enfin une position assez voisine de cel
2367
n et Dandieu, sans aller jusqu’à prôner comme ils
le
font « la révolution nécessaire ». Certes, on ne saurait demander à u
2368
eu, sans aller jusqu’à prôner comme ils le font «
la
révolution nécessaire ». Certes, on ne saurait demander à un recueil
2369
t ». Ce négativisme m’apparaît caractéristique de
la
pensée dite « de droite », et c’est par là surtout que M. Thierry Mau
2370
eule existence — si elles existent — rende vaines
les
passions égarées, rende visible l’origine de l’égarement, rende effic
2371
rende vaines les passions égarées, rende visible
l’
origine de l’égarement, rende efficace et créatrice la critique de tou
2372
les passions égarées, rende visible l’origine de
l’
égarement, rende efficace et créatrice la critique de tout cela qui ag
2373
igine de l’égarement, rende efficace et créatrice
la
critique de tout cela qui agite le cœur des hommes. Ce n’est pas une
2374
e et créatrice la critique de tout cela qui agite
le
cœur des hommes. Ce n’est pas une férule : c’est un bon outil qu’il n
2375
e à M. Thierry Maulnier. (Il serait fou de ne pas
le
partager.) Je lui reproche de manquer d’exigence vis-à-vis de l’homme
2376
e lui reproche de manquer d’exigence vis-à-vis de
l’
homme ; de se borner à sa défense ; de ne pas voir que la vraie défens
2377
; de se borner à sa défense ; de ne pas voir que
la
vraie défense, c’est l’attaque. Nous avons moins besoin d’idées juste
2378
ense ; de ne pas voir que la vraie défense, c’est
l’
attaque. Nous avons moins besoin d’idées justes que d’idées efficaceme
2379
« philosophie à coups de marteau ». Ce peut être
le
marteau du constructeur, aussi bien que celui du démolisseur. ⁂ M. Pa
2380
à coups d’épingle. Ce qu’il veut dégonfler, c’est
la
philosophie avec grand P, la doctrine officielle de la Sorbonne, cett
2381
eut dégonfler, c’est la philosophie avec grand P,
la
doctrine officielle de la Sorbonne, cette pensée fabriquée par des bo
2382
ilosophie avec grand P, la doctrine officielle de
la
Sorbonne, cette pensée fabriquée par des bourgeois, pour des bourgeoi
2383
r des bourgeois, destinée à défendre et illustrer
la
notion bourgeoise de la vie, et payée — en la personne de ses grands
2384
e à défendre et illustrer la notion bourgeoise de
la
vie, et payée — en la personne de ses grands maîtres — par l’État bou
2385
rer la notion bourgeoise de la vie, et payée — en
la
personne de ses grands maîtres — par l’État bourgeois. Les Chiens de
2386
ayée — en la personne de ses grands maîtres — par
l’
État bourgeois. Les Chiens de garde 39, tel est le titre de son pamphl
2387
nne de ses grands maîtres — par l’État bourgeois.
Les
Chiens de garde 39, tel est le titre de son pamphlet — ce sont les ph
2388
l’État bourgeois. Les Chiens de garde 39, tel est
le
titre de son pamphlet — ce sont les philosophes de la Troisième Répub
2389
de 39, tel est le titre de son pamphlet — ce sont
les
philosophes de la Troisième République. On peut recommander la lectur
2390
s de la Troisième République. On peut recommander
la
lecture de ce livre, parce qu’il a le mérite de poser simplement, bru
2391
recommander la lecture de ce livre, parce qu’il a
le
mérite de poser simplement, brutalement, une de ces grandes questions
2392
nt, brutalement, une de ces grandes questions que
la
pensée moderne a convenu d’appeler « naïves », parce qu’elles sont tr
2393
er « naïves », parce qu’elles sont trop gênantes.
Le
livre est mal composé. Ses phrases courtes se pressent en paragraphes
2394
eux. Elles redisent trois ou quatre fois de suite
la
même chose, sans ajouter aucune clarté au dessein général. Mais celui
2395
les qui sont posées ici, qui sont retournées ici.
La
philosophie présente qui dit et croit qu’elle se déroule au profit de
2396
qui dit et croit qu’elle se déroule au profit de
l’
homme, est-elle dirigée réellement, et non plus en discours et croyanc
2397
quoi sert cette philosophie ? Que fait-elle pour
les
hommes ? Que fait-elle contre eux ? Selon M. Nizan, la philosophie r
2398
mes ? Que fait-elle contre eux ? Selon M. Nizan,
la
philosophie régnante est caractérisée par son refus d’aborder les que
2399
régnante est caractérisée par son refus d’aborder
les
questions dites vulgaires, qui conduiraient à des conclusions dangere
2400
i conduiraient à des conclusions dangereuses pour
l’
ordre établi. « Nous vivons dans un temps où les philosophes s’abstien
2401
ur l’ordre établi. « Nous vivons dans un temps où
les
philosophes s’abstiennent. Ils vivent dans un état de scandaleuse abs
2402
cart, une scandaleuse distance entre ce qu’énonce
la
philosophie et ce qui arrive aux hommes en dépit de sa promesse. » M.
2403
e sa promesse. » M. Brunschvicg fait un cours sur
la
technique du passage à l’absolu, parle de noumènes, d’immanence, de c
2404
hvicg fait un cours sur la technique du passage à
l’
absolu, parle de noumènes, d’immanence, de contingence, et l’on ne voi
2405
arle de noumènes, d’immanence, de contingence, et
l’
on ne voit pas, dit M. Nizan, « comment ces produits tératologiques de
2406
. Nizan, « comment ces produits tératologiques de
la
méditation pourraient expliquer aux hommes vulgaires … la tuberculose
2407
ation pourraient expliquer aux hommes vulgaires …
la
tuberculose de leurs filles, les colères de leurs femmes, leur servic
2408
ommes vulgaires … la tuberculose de leurs filles,
les
colères de leurs femmes, leur service militaire et ses humiliations,
2409
ions, leur travail, leur chômage, leurs vacances,
les
guerres, les grèves, les pourritures de leurs parlements et l’insolen
2410
avail, leur chômage, leurs vacances, les guerres,
les
grèves, les pourritures de leurs parlements et l’insolence des pouvoi
2411
chômage, leurs vacances, les guerres, les grèves,
les
pourritures de leurs parlements et l’insolence des pouvoirs ; on ne v
2412
es grèves, les pourritures de leurs parlements et
l’
insolence des pouvoirs ; on ne voit pas à quoi mène la philosophie san
2413
solence des pouvoirs ; on ne voit pas à quoi mène
la
philosophie sans matière, la philosophie sans rime ni raison » … « Il
2414
voit pas à quoi mène la philosophie sans matière,
la
philosophie sans rime ni raison » … « Il n’y a aucune raison d’écarte
2415
erches tout ce qui intéresse chaque homme et tout
l’
homme, et de déclarer « non philosophique » tout ce qui ne tombe pas s
2416
non philosophique » tout ce qui ne tombe pas sous
le
coup de leurs techniques. On dira sans doute que l’auteur exagère qua
2417
coup de leurs techniques. On dira sans doute que
l’
auteur exagère quand il dénonce le péril d’une pensée que l’on peut bi
2418
sans doute que l’auteur exagère quand il dénonce
le
péril d’une pensée que l’on peut bien appeler scolastique, pensée pur
2419
xagère quand il dénonce le péril d’une pensée que
l’
on peut bien appeler scolastique, pensée purement conceptuelle et dépo
2420
ncret. On lui dira que ce n’est pas si grave, que
le
monde n’est plus mené par les philosophes, qu’il accorde à leur activ
2421
st pas si grave, que le monde n’est plus mené par
les
philosophes, qu’il accorde à leur activité une importance qu’elle ne
2422
uite des reproches démesurés. Certes40. Mais dans
la
mesure, si faible soit-elle, où la philosophie actuelle exerce une ac
2423
s40. Mais dans la mesure, si faible soit-elle, où
la
philosophie actuelle exerce une action, ne fût-ce que sur les étudian
2424
hie actuelle exerce une action, ne fût-ce que sur
les
étudiants forcés de s’y intéresser au lieu de s’intéresser à notre si
2425
e son entreprise est suffisamment justifiée. Pour
le
reste, c’est la politique, et dans un sens plus vaste, la religion, q
2426
est suffisamment justifiée. Pour le reste, c’est
la
politique, et dans un sens plus vaste, la religion, que cela regarde.
2427
, c’est la politique, et dans un sens plus vaste,
la
religion, que cela regarde. M. Nizan demande inlassablement ce que le
2428
a regarde. M. Nizan demande inlassablement ce que
les
philosophes bourgeois font et comptent faire pour les hommes. Très bi
2429
philosophes bourgeois font et comptent faire pour
les
hommes. Très bien. Nous le demandons aussi. (Nous avons même un scept
2430
t comptent faire pour les hommes. Très bien. Nous
le
demandons aussi. (Nous avons même un scepticisme plus profond que le
2431
ns même un scepticisme plus profond que le sien à
l’
endroit des résultats « humains » de toute philosophie.) Mais ensuite,
2432
derons : que fait, que compte faire M. Nizan pour
les
hommes ? — Il compte leur apporter le marxisme. Or, s’il est clair qu
2433
Nizan pour les hommes ? — Il compte leur apporter
le
marxisme. Or, s’il est clair que le marxisme prétend travailler pour
2434
leur apporter le marxisme. Or, s’il est clair que
le
marxisme prétend travailler pour l’homme en général, il n’est pas moi
2435
est clair que le marxisme prétend travailler pour
l’
homme en général, il n’est pas moins clair qu’il tombe par là même sou
2436
’est pas moins clair qu’il tombe par là même sous
le
coup d’une critique semblable à celle que M. Nizan adresse à M. Bruns
2437
le à celle que M. Nizan adresse à M. Brunschvicg.
L’
homme en général, même si on l’appelle avec Marx, l’homme concret (ce
2438
à M. Brunschvicg. L’homme en général, même si on
l’
appelle avec Marx, l’homme concret (ce qui n’est encore qu’une formule
2439
homme en général, même si on l’appelle avec Marx,
l’
homme concret (ce qui n’est encore qu’une formule), l’homme au singuli
2440
mme concret (ce qui n’est encore qu’une formule),
l’
homme au singulier des philosophes, on sait ce qu’en vaut l’aune : ce
2441
singulier des philosophes, on sait ce qu’en vaut
l’
aune : ce n’est qu’une extension orgueilleuse et démesurée du type d’h
2442
oupe de philosophes, et qui vient se substituer à
la
réelle humanité. C’est, pour M. Brunschvicg, le bourgeois. C’est le p
2443
à la réelle humanité. C’est, pour M. Brunschvicg,
le
bourgeois. C’est le prolétaire pour Marx. Il s’en faut de beaucoup qu
2444
. C’est, pour M. Brunschvicg, le bourgeois. C’est
le
prolétaire pour Marx. Il s’en faut de beaucoup que la notion du prolé
2445
rolétaire pour Marx. Il s’en faut de beaucoup que
la
notion du prolétaire marxiste, fondée sur des considérations aussi ab
2446
onsidérations aussi abstraites et discutables que
la
plus-value, recouvre la réalité de tel homme concret et réel que vous
2447
raites et discutables que la plus-value, recouvre
la
réalité de tel homme concret et réel que vous ou moi pouvons connaîtr
2448
e vous ou moi pouvons connaître. Mais, en vérité,
la
lecture du livre de M. Nizan n’inspire pas la certitude qu’il aime le
2449
té, la lecture du livre de M. Nizan n’inspire pas
la
certitude qu’il aime les hommes, qu’il aime aucun homme réel et concr
2450
de M. Nizan n’inspire pas la certitude qu’il aime
les
hommes, qu’il aime aucun homme réel et concret. Au contraire, il en é
2451
é plus qu’un partisan convaincu. On sent bien que
le
triomphe de M. Nizan est dans l’insolence plus que dans le sacrifice
2452
On sent bien que le triomphe de M. Nizan est dans
l’
insolence plus que dans le sacrifice à une cause. Je n’insisterais pas
2453
he de M. Nizan est dans l’insolence plus que dans
le
sacrifice à une cause. Je n’insisterais pas, si ces traits ne me para
2454
ellectuels marxistes, en France particulièrement.
Les
philosophes ne s’adressent jamais à tel homme dans telle situation qu
2455
urir. Je demande à M. Nizan, qui est marxiste, si
la
lecture et la pratique de Marx peut apporter une certitude intime, un
2456
de à M. Nizan, qui est marxiste, si la lecture et
la
pratique de Marx peut apporter une certitude intime, une réalité dire
2457
une humiliation rénovatrice, une joie au sein de
la
douleur, la force de supporter des souffrances physiques, la force et
2458
tion rénovatrice, une joie au sein de la douleur,
la
force de supporter des souffrances physiques, la force et la joie d’e
2459
la force de supporter des souffrances physiques,
la
force et la joie d’envisager la mort comme une transfiguration tragiq
2460
supporter des souffrances physiques, la force et
la
joie d’envisager la mort comme une transfiguration tragique, la force
2461
rances physiques, la force et la joie d’envisager
la
mort comme une transfiguration tragique, la force et la joie d’envisa
2462
sager la mort comme une transfiguration tragique,
la
force et la joie d’envisager la vie comme un combat perpétuel dont l’
2463
t comme une transfiguration tragique, la force et
la
joie d’envisager la vie comme un combat perpétuel dont l’enjeu est à
2464
uration tragique, la force et la joie d’envisager
la
vie comme un combat perpétuel dont l’enjeu est à chaque instant total
2465
d’envisager la vie comme un combat perpétuel dont
l’
enjeu est à chaque instant total, éternel et urgent. Je demande à M. N
2466
on appel à une philosophie vraiment humaine, dont
les
pensées concernent chaque homme dans chaque situation de sa vie de ch
2467
a vie de chaque jour, si cet appel n’a pas trouvé
la
seule réponse possible et réelle dans le message évangélique. Et je d
2468
s trouvé la seule réponse possible et réelle dans
le
message évangélique. Et je demande maintenant aux chrétiens s’ils le
2469
que. Et je demande maintenant aux chrétiens s’ils
le
savent eux-mêmes ; s’ils prouvent qu’ils le savent. S’ils n’ont pas t
2470
s’ils le savent eux-mêmes ; s’ils prouvent qu’ils
le
savent. S’ils n’ont pas trop souvent cherché auprès de philosophes se
2471
, ou même canonisés, une sécurité spirituelle que
la
Parole de Dieu désigne comme une lâcheté. Car en présence de l’athéis
2472
ieu désigne comme une lâcheté. Car en présence de
l’
athéisme militant, nous n’avons plus à prouver vainement que Dieu est
2473
de cette « révolution permanente » qui doit être
l’
état du chrétien vis-à-vis de lui-même et de son passé. C’est le dange
2474
tien vis-à-vis de lui-même et de son passé. C’est
le
danger qui nous purifiera. « Toute plante que n’a pas plantée mon Pèr
2475
ée. » Et c’est en quoi, du point de vue chrétien,
le
marxisme radical constitue un progrès sur la libre-pensée : il force
2476
ien, le marxisme radical constitue un progrès sur
la
libre-pensée : il force au choix, à la prise de conscience. La révol
2477
rogrès sur la libre-pensée : il force au choix, à
la
prise de conscience. La révolution menaçante viendra comme le châtim
2478
e : il force au choix, à la prise de conscience.
La
révolution menaçante viendra comme le châtiment de ceux-là mêmes, de
2479
onscience. La révolution menaçante viendra comme
le
châtiment de ceux-là mêmes, de ceux-là justement qui refusèrent de «
2480
qui refusèrent de « penser dangereusement ». Mais
les
marxistes n’y échapperont pas. Car celui qui refuse de penser le péch
2481
y échapperont pas. Car celui qui refuse de penser
le
péché, refuse d’envisager l’ultime et le plus « grossier » des danger
2482
qui refuse de penser le péché, refuse d’envisager
l’
ultime et le plus « grossier » des dangers inhérents à l’être concret.
2483
e penser le péché, refuse d’envisager l’ultime et
le
plus « grossier » des dangers inhérents à l’être concret. Seul l’Évan
2484
e et le plus « grossier » des dangers inhérents à
l’
être concret. Seul l’Évangile — je ne dis pas les religions, ni leurs
2485
er » des dangers inhérents à l’être concret. Seul
l’
Évangile — je ne dis pas les religions, ni leurs morales, ni leurs prê
2486
à l’être concret. Seul l’Évangile — je ne dis pas
les
religions, ni leurs morales, ni leurs prêtres, ni tout leur appareil
2487
s prêtres, ni tout leur appareil d’assurance dans
le
monde et contre Dieu —, seul l’Évangile est radicalement dangereux, —
2488
d’assurance dans le monde et contre Dieu —, seul
l’
Évangile est radicalement dangereux, — salutaire. 38. Aux Éditions d
2489
ent dangereux, — salutaire. 38. Aux Éditions de
la
Revue française, chez Alexis Rédier, Paris 1932. 39. Chez Rieder, co
2490
M. Nizan cite pas mal de textes qui prouveraient
le
contraire. s. Rougemont Denis de, « Penser dangereusement », Foi et
2491
du monde, s’il vous plaît ! » (janvier 1933)t
Le
lecteur moderne est, paraît-il, un homme pressé, beaucoup plus pressé
2492
-il, un homme pressé, beaucoup plus pressé que ne
le
furent ses ancêtres (serait-ce peut-être à cause des innombrables moy
2493
agner du temps » ? Il semble que tout ce que fait
l’
humanité se retourne contre elle-même). Que doit lire un homme pressé,
2494
aux livres autre chose que ce que peut lui offrir
le
conte du journal, c’est-à-dire s’il demande une nourriture rapidement
2495
ins, sans se lasser du romanesque, découvrent que
la
littérature peut apporter, sous d’autres formes, un agrément, un repo
2496
lus tonifiants et plus actuels, je veux parler de
la
vogue récente des essais, genre assurément fort ancien, mais auquel n
2497
emarquable, en effet, de constater, en parcourant
les
catalogues de librairie allemande, par exemple, que la proportion des
2498
talogues de librairie allemande, par exemple, que
la
proportion des ouvrages purement romanesques va en diminuant, et cela
2499
u profit d’une littérature qui tient à la fois de
l’
histoire, de la politique, de la morale et de la religion. Des livres
2500
littérature qui tient à la fois de l’histoire, de
la
politique, de la morale et de la religion. Des livres comme l’Essai s
2501
ient à la fois de l’histoire, de la politique, de
la
morale et de la religion. Des livres comme l’Essai sur la France, de
2502
e l’histoire, de la politique, de la morale et de
la
religion. Des livres comme l’Essai sur la France, de E. R. Curtius, d
2503
de la morale et de la religion. Des livres comme
l’
Essai sur la France, de E. R. Curtius, dont il fut parlé ici même, ou
2504
e et de la religion. Des livres comme l’Essai sur
la
France, de E. R. Curtius, dont il fut parlé ici même, ou le Dieu est-
2505
de E. R. Curtius, dont il fut parlé ici même, ou
le
Dieu est-il Français, de F. Sieburg, donneront une idée assez juste d
2506
ccès en Allemagne remonte aux premières années de
l’
après-guerre, illustrées par les livres monumentaux de Spengler (Le Dé
2507
remières années de l’après-guerre, illustrées par
les
livres monumentaux de Spengler (Le Déclin de l’Occident) et du comte
2508
llustrées par les livres monumentaux de Spengler (
Le
Déclin de l’Occident) et du comte Keyserling. Il faut reconnaître que
2509
les livres monumentaux de Spengler (Le Déclin de
l’
Occident) et du comte Keyserling. Il faut reconnaître que l’état génér
2510
) et du comte Keyserling. Il faut reconnaître que
l’
état général du pays explique que ces ouvrages aient rencontré d’emblé
2511
xplique que ces ouvrages aient rencontré d’emblée
le
grand succès qu’ils méritaient. Les Allemands vivent « la crise » dep
2512
ontré d’emblée le grand succès qu’ils méritaient.
Les
Allemands vivent « la crise » depuis 1919, et l’atmosphère de crise b
2513
succès qu’ils méritaient. Les Allemands vivent «
la
crise » depuis 1919, et l’atmosphère de crise baigne toutes leurs act
2514
Les Allemands vivent « la crise » depuis 1919, et
l’
atmosphère de crise baigne toutes leurs activités, à un degré bien plu
2515
activités, à un degré bien plus profond qu’on ne
l’
imagine d’ordinaire en France. En ceci, les Allemands se trouvent être
2516
u’on ne l’imagine d’ordinaire en France. En ceci,
les
Allemands se trouvent être en quelque sorte plus « actuels », plus di
2517
ctement mêlés au jeu des puissances modernes, que
les
Français ne le furent jusqu’à ces tout derniers temps. Et c’est là qu
2518
jeu des puissances modernes, que les Français ne
le
furent jusqu’à ces tout derniers temps. Et c’est là que gît l’explica
2519
qu’à ces tout derniers temps. Et c’est là que gît
l’
explication du goût pour l’idéologie que manifeste le grand public all
2520
s. Et c’est là que gît l’explication du goût pour
l’
idéologie que manifeste le grand public allemand. Il est bien naturel
2521
xplication du goût pour l’idéologie que manifeste
le
grand public allemand. Il est bien naturel qu’une société qui jouit d
2522
son divertissement dans des fictions romanesques.
Le
roman est un genre bourgeois — et c’est peut-être par là qu’il plaît
2523
’est peut-être par là qu’il plaît tant au peuple.
Le
bourgeois qui rentre chez lui après 8 heures de bureau demande aux li
2524
eau demande aux livres une évasion facile hors de
la
médiocre existence quotidienne. Mais l’homme qui toute la journée a s
2525
e hors de la médiocre existence quotidienne. Mais
l’
homme qui toute la journée a senti peser sur son œuvre la menace des f
2526
cre existence quotidienne. Mais l’homme qui toute
la
journée a senti peser sur son œuvre la menace des forces terribles dé
2527
qui toute la journée a senti peser sur son œuvre
la
menace des forces terribles déchaînées dans le monde contemporain voi
2528
re la menace des forces terribles déchaînées dans
le
monde contemporain voit bien que la question n’est plus de s’évader,
2529
chaînées dans le monde contemporain voit bien que
la
question n’est plus de s’évader, de se distraire en oubliant un monde
2530
monde qu’on serait sûr de retrouver bien en place
le
lendemain. L’angoisse qui plane vaguement, et parfois précisément, su
2531
rait sûr de retrouver bien en place le lendemain.
L’
angoisse qui plane vaguement, et parfois précisément, sur la civilisat
2532
qui plane vaguement, et parfois précisément, sur
la
civilisation actuelle n’est pas quelque chose qu’on esquive comme l’e
2533
uelle n’est pas quelque chose qu’on esquive comme
l’
ennui, par de petits moyens. L’homme menacé cherche à se rassurer, et
2534
u’on esquive comme l’ennui, par de petits moyens.
L’
homme menacé cherche à se rassurer, et d’abord en essayant de comprend
2535
se rassurer, et d’abord en essayant de comprendre
la
menace. Il veut des documents, des explications, des directives. Ne f
2536
directives. Ne fût-ce, souvent, que pour motiver
l’
appartenance à un parti, ou pour se fournir d’arguments précis et « sé
2537
incompétent. De là cette multitude d’écrits, dont
le
propos général est d’élucider les causes lointaines ou prochaines de
2538
e d’écrits, dont le propos général est d’élucider
les
causes lointaines ou prochaines de la crise sans précédent où s’engag
2539
d’élucider les causes lointaines ou prochaines de
la
crise sans précédent où s’engage l’humanité tout entière. ⁂ En France
2540
prochaines de la crise sans précédent où s’engage
l’
humanité tout entière. ⁂ En France, plus longtemps qu’ailleurs, le « g
2541
entière. ⁂ En France, plus longtemps qu’ailleurs,
le
« grand public » considéra que la lecture d’un livre n’était qu’un mo
2542
ps qu’ailleurs, le « grand public » considéra que
la
lecture d’un livre n’était qu’un moyen de « passer une heure agréable
2543
qu’un moyen de « passer une heure agréablement ».
Le
goût des idées, même et surtout dans des cercles littéraires raffinés
2544
d’atteinte au « goût » tout court, c’est-à-dire à
la
mode. Il fallut la petite équipe des fondateurs de la Nouvelle Revue
2545
t » tout court, c’est-à-dire à la mode. Il fallut
la
petite équipe des fondateurs de la Nouvelle Revue française pour impo
2546
ode. Il fallut la petite équipe des fondateurs de
la
Nouvelle Revue française pour imposer, par l’effet d’un snobisme inat
2547
de la Nouvelle Revue française pour imposer, par
l’
effet d’un snobisme inattendu, la mode des discussions éthiques, d’ail
2548
our imposer, par l’effet d’un snobisme inattendu,
la
mode des discussions éthiques, d’ailleurs purement intellectuelles la
2549
purement intellectuelles la plupart du temps, et
le
goût des « romans qui posent des problèmes ». On appelait cela de la
2550
s qui posent des problèmes ». On appelait cela de
la
« littérature difficile », non pas qu’une intelligence moyenne éprouv
2551
ligence moyenne éprouvât des difficultés à suivre
les
développements lumineux d’un André Gide, par exemple, mais simplement
2552
e ces écrits faisaient penser. J’exagère à peine.
La
littérature de l’après-guerre, faite en grande partie par des hommes
2553
ient penser. J’exagère à peine. La littérature de
l’
après-guerre, faite en grande partie par des hommes qui n’avaient pas
2554
grande partie par des hommes qui n’avaient pas eu
le
temps de se cultiver, est caractérisée par une facilité foncière et b
2555
facilité foncière et bien décevante, sitôt écarté
le
voile d’obscurité purement formelle dont la mode d’alors recommandait
2556
carté le voile d’obscurité purement formelle dont
la
mode d’alors recommandait qu’on habillât la moindre historiette senti
2557
dont la mode d’alors recommandait qu’on habillât
la
moindre historiette sentimentale. Mais tout cela, semble-t-il, s’évan
2558
out cela, semble-t-il, s’évanouit en fumée, comme
les
fusées d’une fête intempestive. On demande des lumières qui ne soient
2559
tes. On voudrait être dirigé, plutôt qu’ébloui. ⁂
Le
roman était un genre bourgeois, en ce sens que dans le monde bourgeoi
2560
man était un genre bourgeois, en ce sens que dans
le
monde bourgeois, privé de risques et d’aventures réelles, il représen
2561
ntait une évasion, une revanche nécessaire contre
l’
ennui, — le royaume illusoire de la fantaisie, de l’héroïsme et des gr
2562
vasion, une revanche nécessaire contre l’ennui, —
le
royaume illusoire de la fantaisie, de l’héroïsme et des grands sentim
2563
essaire contre l’ennui, — le royaume illusoire de
la
fantaisie, de l’héroïsme et des grands sentiments bouleversants. C’ét
2564
ennui, — le royaume illusoire de la fantaisie, de
l’
héroïsme et des grands sentiments bouleversants. C’était ce qu’il y av
2565
. C’était ce qu’il y avait de plus subversif dans
les
salons. « Se nourrir de romans », dans certains milieux, c’était le c
2566
urrir de romans », dans certains milieux, c’était
le
commencement de la fin, c’était se préparer à « mal finir ». Est-ce l
2567
dans certains milieux, c’était le commencement de
la
fin, c’était se préparer à « mal finir ». Est-ce le cinéma qui a chan
2568
fin, c’était se préparer à « mal finir ». Est-ce
le
cinéma qui a changé tout cela ? L’explication tente les journalistes.
2569
inir ». Est-ce le cinéma qui a changé tout cela ?
L’
explication tente les journalistes. Mais le cinéma n’est qu’un des eff
2570
néma qui a changé tout cela ? L’explication tente
les
journalistes. Mais le cinéma n’est qu’un des effets du changement à v
2571
cela ? L’explication tente les journalistes. Mais
le
cinéma n’est qu’un des effets du changement à vue qui s’opère dans to
2572
tre conception du monde. Dans une époque qui a vu
les
frontières et les peuples de l’Europe bouleversés ; les régimes choir
2573
monde. Dans une époque qui a vu les frontières et
les
peuples de l’Europe bouleversés ; les régimes choir ; le plan quinque
2574
époque qui a vu les frontières et les peuples de
l’
Europe bouleversés ; les régimes choir ; le plan quinquennal s’édifier
2575
ontières et les peuples de l’Europe bouleversés ;
les
régimes choir ; le plan quinquennal s’édifier sur les ruines d’un con
2576
les de l’Europe bouleversés ; les régimes choir ;
le
plan quinquennal s’édifier sur les ruines d’un continent ; l’Amérique
2577
régimes choir ; le plan quinquennal s’édifier sur
les
ruines d’un continent ; l’Amérique s’enrichir au-delà de toute raison
2578
quennal s’édifier sur les ruines d’un continent ;
l’
Amérique s’enrichir au-delà de toute raison européenne, puis s’affoler
2579
er à son tour une révolution ; dans une époque où
l’
humanité risque de mourir pour la réalisation même de ses désirs matér
2580
ns une époque où l’humanité risque de mourir pour
la
réalisation même de ses désirs matériels, dans cette énorme aventure
2581
els, dans cette énorme aventure qui « règne » sur
le
monde comme une fièvre, le romanesque éclate, remplit nos vies, ou s’
2582
ture qui « règne » sur le monde comme une fièvre,
le
romanesque éclate, remplit nos vies, ou s’il n’y pénètre pas encore,
2583
remplit nos vies, ou s’il n’y pénètre pas encore,
les
baigne d’une atmosphère menaçante dont il devient impossible de ne pa
2584
sible de ne pas prendre conscience. Alors, toutes
les
nouvelles qui nous parviennent du monde sont comme autant d’épisodes
2585
épisodes d’un drame qui intéresse chacun de nous.
L’
homme se prend d’un intérêt passionné pour la vie du monde. Et ce fait
2586
ous. L’homme se prend d’un intérêt passionné pour
la
vie du monde. Et ce fait est nouveau dans l’Histoire. Jamais le docum
2587
pour la vie du monde. Et ce fait est nouveau dans
l’
Histoire. Jamais le document n’a été recherché avec une telle avidité.
2588
e. Et ce fait est nouveau dans l’Histoire. Jamais
le
document n’a été recherché avec une telle avidité. « Ce que je préfèr
2589
e avidité. « Ce que je préfère au cinéma, ce sont
les
actualités. » Phrase mille fois entendue. Les journaux se couvrent de
2590
ont les actualités. » Phrase mille fois entendue.
Les
journaux se couvrent de photos. La couverture photographique triomphe
2591
ois entendue. Les journaux se couvrent de photos.
La
couverture photographique triomphe chez tous les éditeurs. Et ces édi
2592
. La couverture photographique triomphe chez tous
les
éditeurs. Et ces éditeurs, que publient-ils ? Des collections documen
2593
documentaires, des reportages à grande distance,
les
mémoires d’Alain Gerbault, les aventures d’Henri de Monfreid, cinquan
2594
à grande distance, les mémoires d’Alain Gerbault,
les
aventures d’Henri de Monfreid, cinquante volumes sur l’URSS et sur le
2595
ntures d’Henri de Monfreid, cinquante volumes sur
l’
URSS et sur le Plan de cinq ans, autant sur les formes américaines de
2596
de Monfreid, cinquante volumes sur l’URSS et sur
le
Plan de cinq ans, autant sur les formes américaines de la vie sociale
2597
sur l’URSS et sur le Plan de cinq ans, autant sur
les
formes américaines de la vie sociale, des albums de photos qui pour l
2598
de cinq ans, autant sur les formes américaines de
la
vie sociale, des albums de photos qui pour la première fois, nous sem
2599
e fois, nous semble-t-il, mettent sur notre table
le
monde tel qu’il est. Quel romancier pourrait nous apporter l’équivale
2600
qu’il est. Quel romancier pourrait nous apporter
l’
équivalent de cette vision directe, exaltante et dépaysante ? Voici le
2601
e vision directe, exaltante et dépaysante ? Voici
le
monde en vrac, un monde plus absurdement divers que nul esprit ne pou
2602
plus absurdement divers que nul esprit ne pouvait
le
concevoir. C’est l’expérience de la Renaissance, étendue à toute la p
2603
ers que nul esprit ne pouvait le concevoir. C’est
l’
expérience de la Renaissance, étendue à toute la planète. Et c’est ici
2604
it ne pouvait le concevoir. C’est l’expérience de
la
Renaissance, étendue à toute la planète. Et c’est ici que j’en revien
2605
t l’expérience de la Renaissance, étendue à toute
la
planète. Et c’est ici que j’en reviens à mon propos initial. Quels qu
2606
en reviens à mon propos initial. Quels que soient
les
bouleversements sociaux ou culturels, l’homme demeure cet être qui ve
2607
soient les bouleversements sociaux ou culturels,
l’
homme demeure cet être qui veut penser le monde. Incapable désormais d
2608
lturels, l’homme demeure cet être qui veut penser
le
monde. Incapable désormais de s’en distraire en le fuyant, il cherche
2609
e monde. Incapable désormais de s’en distraire en
le
fuyant, il cherche à l’expliquer, avec une passion nouvelle. Nous avo
2610
mais de s’en distraire en le fuyant, il cherche à
l’
expliquer, avec une passion nouvelle. Nous avons vu paraître, il y a q
2611
e volumes à grand succès qui pourraient reprendre
le
titre fameux de Paul Valéry : Regards sur le monde actuel. Les grande
2612
ndre le titre fameux de Paul Valéry : Regards sur
le
monde actuel. Les grandes controverses modernes sont nées en France a
2613
eux de Paul Valéry : Regards sur le monde actuel.
Les
grandes controverses modernes sont nées en France autour de la Trahis
2614
ntroverses modernes sont nées en France autour de
la
Trahison des clercs, autour du problème de l’humanisme (Conversion à
2615
de la Trahison des clercs, autour du problème de
l’
humanisme (Conversion à l’humain, de J. Guéhenno, enquête de Foi et V
2616
, autour du problème de l’humanisme (Conversion à
l’
humain, de J. Guéhenno, enquête de Foi et Vie sur l’humanisme nouvea
2617
main, de J. Guéhenno, enquête de Foi et Vie sur
l’
humanisme nouveau, ouvrages de Ramon Fernandez, de Drieu la Rochelle,
2618
émieux), autour du problème, plus aigu encore, de
la
culture bourgeoise et des valeurs révolutionnaires. (Mort de la pensé
2619
rgeoise et des valeurs révolutionnaires. (Mort de
la
pensée et Mort de la morale bourgeoise d’E. Berl, manifestes de group
2620
s révolutionnaires. (Mort de la pensée et Mort de
la
morale bourgeoise d’E. Berl, manifestes de groupements de jeunes tels
2621
Esprit, Plans, l’Ordre nouveau, et tout récemment
le
« Cahier de revendications » publié dans la NRF ). Lorsqu’il y a deu
2622
mment le « Cahier de revendications » publié dans
la
NRF ). Lorsqu’il y a deux ans, Bernard Grasset, dans un article rete
2623
e retentissant, annonça son intention de « casser
les
reins au roman », on put croire à un mouvement de mauvaise humeur, vo
2624
, voire à une tentative publicitaire. En réalité,
la
suite prouva la clairvoyance de l’éditeur, habile à saisir dès leur n
2625
ntative publicitaire. En réalité, la suite prouva
la
clairvoyance de l’éditeur, habile à saisir dès leur naissance les dés
2626
e. En réalité, la suite prouva la clairvoyance de
l’
éditeur, habile à saisir dès leur naissance les désirs à peine conscie
2627
de l’éditeur, habile à saisir dès leur naissance
les
désirs à peine conscients du grand public. On n’a pas cessé pour auta
2628
pour autant de publier des romans nouveaux, mais
le
fait est que le seul grand succès, dans cet ordre, est allé au livre
2629
publier des romans nouveaux, mais le fait est que
le
seul grand succès, dans cet ordre, est allé au livre de Céline, Voyag
2630
e, est allé au livre de Céline, Voyage au bout de
la
nuit, chef-d’œuvre de « documentaire », mauvais roman… Autre signe :
2631
de « documentaire », mauvais roman… Autre signe :
les
jeunes maisons, fondées depuis deux ans, se spécialisent de plus en p
2632
is deux ans, se spécialisent de plus en plus dans
la
publication de collections d’essais : Denoël et Steele lancent des sé
2633
’essais : Denoël et Steele lancent des séries sur
la
psychanalyse et sur les penseurs religieux, Corrêa publie presque exc
2634
ele lancent des séries sur la psychanalyse et sur
les
penseurs religieux, Corrêa publie presque exclusivement des « écrivai
2635
presque exclusivement des « écrivains d’idées »,
les
Éditions du Cavalier poursuivent une enquête européenne sous ce titre
2636
enquête européenne sous ce titre significatif : «
Les
Mœurs et l’Esprit des nations 41. » Et l’on pense au titre de cet alb
2637
éenne sous ce titre significatif : « Les Mœurs et
l’
Esprit des nations 41. » Et l’on pense au titre de cet album de photos
2638
if : « Les Mœurs et l’Esprit des nations 41. » Et
l’
on pense au titre de cet album de photos paru récemment en Allemagne :
2639
, Histoire du monde, s’il vous plaît ! ⁂ Retour à
l’
essai rendu nécessaire par le besoin de mettre en ordre l’énorme quant
2640
s plaît ! ⁂ Retour à l’essai rendu nécessaire par
le
besoin de mettre en ordre l’énorme quantité de faits nouveaux que nou
2641
rendu nécessaire par le besoin de mettre en ordre
l’
énorme quantité de faits nouveaux que nous découvrons. Retour à l’inte
2642
é de faits nouveaux que nous découvrons. Retour à
l’
intelligence ? Oui, mais non pas à l’intellectualisme. Car, — et j’esp
2643
ns. Retour à l’intelligence ? Oui, mais non pas à
l’
intellectualisme. Car, — et j’espère que le lecteur m’aura compris — c
2644
pas à l’intellectualisme. Car, — et j’espère que
le
lecteur m’aura compris — ce n’est plus de jeux de l’esprit, d’acrobat
2645
lecteur m’aura compris — ce n’est plus de jeux de
l’
esprit, d’acrobaties de psychologues, de curiosités académiques ou de
2646
mandarinades qu’il s’agit, mais c’est du sort de
l’
homme tel qu’il est, dans son effarante et magnifique diversité. Sort
2647
te et magnifique diversité. Sort menacé, comme il
le
fut de tout temps, certes, mais de nos jours, plus visiblement, plus
2648
nd il y va de tous, il y va de chacun. 41. Dont
le
meilleur volume, à ce jour, est sans doute le recueil d’Essais espagn
2649
ont le meilleur volume, à ce jour, est sans doute
le
recueil d’Essais espagnols, du grand écrivain qu’est José Ortega y Ga
2650
’est José Ortega y Gasset, l’un des fondateurs de
la
République espagnole, et l’un des meilleurs exemples de l’influence r
2651
ique espagnole, et l’un des meilleurs exemples de
l’
influence réelle et directe que peut exercer un essayiste sur la march
2652
elle et directe que peut exercer un essayiste sur
la
marche des événements. Nous reviendrons prochainement sur ce livre br
2653
(février 1934)u Depuis des années, dans toutes
les
conférences, dans tous les journaux d’opinion, dans tous les manifest
2654
es années, dans toutes les conférences, dans tous
les
journaux d’opinion, dans tous les manifestes de partis ou de ligues,
2655
nces, dans tous les journaux d’opinion, dans tous
les
manifestes de partis ou de ligues, une expression revient comme une v
2656
ession revient comme une véritable hantise, comme
le
grand lieu commun de la peur qui s’est emparée des hommes. On ne nous
2657
véritable hantise, comme le grand lieu commun de
la
peur qui s’est emparée des hommes. On ne nous parle plus que du « dés
2658
e, pour qui se borne à considérer notre époque et
les
doctrines infiniment contradictoires qui s’affrontent au milieu du dé
2659
, pour qui veut prendre position et pénétrer dans
la
bagarre universelle. Je vois bien le désordre et la contradiction. L’
2660
énétrer dans la bagarre universelle. Je vois bien
le
désordre et la contradiction. L’argent règne sur notre monde, comme u
2661
bagarre universelle. Je vois bien le désordre et
la
contradiction. L’argent règne sur notre monde, comme une puissance oc
2662
le. Je vois bien le désordre et la contradiction.
L’
argent règne sur notre monde, comme une puissance occulte et pourtant
2663
pour une dictature qui tire son seul prestige de
la
misère et de la lâcheté publique. Des provinces entières sont ruinées
2664
ure qui tire son seul prestige de la misère et de
la
lâcheté publique. Des provinces entières sont ruinées par des exploit
2665
entières sont ruinées par des exploitations dont
les
bénéfices s’engloutissent en deux heures de panique boursière. Les in
2666
ngloutissent en deux heures de panique boursière.
Les
inventeurs se voient refuser des brevets parce que chaque machine nou
2667
des travailleurs, crée du chômage. Et, cependant,
les
peuples de toute la terre continuent de croire au Progrès et aux bien
2668
e du chômage. Et, cependant, les peuples de toute
la
terre continuent de croire au Progrès et aux bienfaits de la richesse
2669
ntinuent de croire au Progrès et aux bienfaits de
la
richesse. Les campagnes se vident ; les jeunes gens n’ont plus goût à
2670
roire au Progrès et aux bienfaits de la richesse.
Les
campagnes se vident ; les jeunes gens n’ont plus goût à y vivre. Les
2671
enfaits de la richesse. Les campagnes se vident ;
les
jeunes gens n’ont plus goût à y vivre. Les villes se congestionnent e
2672
dent ; les jeunes gens n’ont plus goût à y vivre.
Les
villes se congestionnent et la jeunesse y traîne une misère fiévreuse
2673
s goût à y vivre. Les villes se congestionnent et
la
jeunesse y traîne une misère fiévreuse. Et, cependant, les politicien
2674
sse y traîne une misère fiévreuse. Et, cependant,
les
politiciens de tous bords consacrent leur astuce à équilibrer des bud
2675
astuce à équilibrer des budgets, dont ils seront
les
seuls bénéficiaires. La corruption s’étale, flétrie avec grandiloquen
2676
budgets, dont ils seront les seuls bénéficiaires.
La
corruption s’étale, flétrie avec grandiloquence par des journaux qui
2677
ui vivent de fonds secrets. C’est à tout cela que
l’
on pense lorsqu’on nous parle du « désarroi actuel ». Croit-on vraimen
2678
it-on vraiment que, jusqu’à ces dernières années,
la
civilisation de l’Occident ait permis plus d’espoirs, favorisé plus d
2679
jusqu’à ces dernières années, la civilisation de
l’
Occident ait permis plus d’espoirs, favorisé plus de vertu, mieux assu
2680
s d’espoirs, favorisé plus de vertu, mieux assuré
la
paix du monde et les rapports normaux entre les hommes ? Croit-on vra
2681
é plus de vertu, mieux assuré la paix du monde et
les
rapports normaux entre les hommes ? Croit-on vraiment que le « désarr
2682
ré la paix du monde et les rapports normaux entre
les
hommes ? Croit-on vraiment que le « désarroi » soit seulement « actue
2683
normaux entre les hommes ? Croit-on vraiment que
le
« désarroi » soit seulement « actuel » et ne veut-on parler de « désa
2684
et ne veut-on parler de « désarroi » que lorsque
les
valeurs boursières et la tranquillité publique sont menacées ? La vér
2685
désarroi » que lorsque les valeurs boursières et
la
tranquillité publique sont menacées ? La vérité, c’est que la situati
2686
ières et la tranquillité publique sont menacées ?
La
vérité, c’est que la situation du monde a été de tout temps désespéré
2687
ité publique sont menacées ? La vérité, c’est que
la
situation du monde a été de tout temps désespérée. Seulement, mainten
2688
érée. Seulement, maintenant, cela se voit. Depuis
la
chute du premier homme, depuis le déluge, le monde se débat dans une
2689
se voit. Depuis la chute du premier homme, depuis
le
déluge, le monde se débat dans une crise millénaire dont les périodes
2690
puis la chute du premier homme, depuis le déluge,
le
monde se débat dans une crise millénaire dont les périodes dites « pr
2691
le monde se débat dans une crise millénaire dont
les
périodes dites « prospères » ne sont que les temps de répit, souvent
2692
dont les périodes dites « prospères » ne sont que
les
temps de répit, souvent déshonorés par la culture des illusions et la
2693
nt que les temps de répit, souvent déshonorés par
la
culture des illusions et la dégradation du sens de la révolte. L’hist
2694
ouvent déshonorés par la culture des illusions et
la
dégradation du sens de la révolte. L’histoire du monde, bien loin d’ê
2695
ulture des illusions et la dégradation du sens de
la
révolte. L’histoire du monde, bien loin d’être l’histoire d’un progrè
2696
llusions et la dégradation du sens de la révolte.
L’
histoire du monde, bien loin d’être l’histoire d’un progrès continu, n
2697
la révolte. L’histoire du monde, bien loin d’être
l’
histoire d’un progrès continu, nous apparaît plutôt comme une solennel
2698
n de déséquilibres dévorant successivement toutes
les
possibilités d’aménagement de la terre. Pourtant, certaines époques o
2699
sivement toutes les possibilités d’aménagement de
la
terre. Pourtant, certaines époques ont connu la grandeur. Ce ne furen
2700
e la terre. Pourtant, certaines époques ont connu
la
grandeur. Ce ne furent pas les moins corrompues de l’histoire, mais c
2701
s époques ont connu la grandeur. Ce ne furent pas
les
moins corrompues de l’histoire, mais celles où la corruption permanen
2702
randeur. Ce ne furent pas les moins corrompues de
l’
histoire, mais celles où la corruption permanente fut ouvertement reco
2703
es moins corrompues de l’histoire, mais celles où
la
corruption permanente fut ouvertement reconnue, dénoncée et battue en
2704
i même qu’elle a plus de chances qu’aucune autre.
Le
vieux « désordre » qui couvait sous des apparences paisibles, est sou
2705
bles, est soudain devenu flagrant. Il promène par
les
rues de nos villes européennes de grands panneaux-réclame qui parlent
2706
lair. Jamais il ne fut plus facile de reconnaître
les
choix nécessaires. Désordre, oui, et plus grand que jamais. Désarroi
2707
e, oui, et plus grand que jamais. Désarroi ? Non.
Les
doctrines sont contradictoires ? Les évaluations morales sont devenue
2708
arroi ? Non. Les doctrines sont contradictoires ?
Les
évaluations morales sont devenues presque impossibles ? Oui, certes !
2709
resque impossibles ? Oui, certes ! Sur le plan de
la
connaissance désintéressée, nous ne trouvons jamais aucun principe qu
2710
ontraire, dès que nous nous posons la question de
l’
homme, du rôle de l’homme, du destin de l’homme en face du destin du s
2711
us nous posons la question de l’homme, du rôle de
l’
homme, du destin de l’homme en face du destin du siècle, tout se simpl
2712
tion de l’homme, du rôle de l’homme, du destin de
l’
homme en face du destin du siècle, tout se simplifie aussitôt ; et si,
2713
destin personnel en face des destins collectifs,
le
choix nécessaire apparaît avec une netteté qui, je le répète, est la
2714
hoix nécessaire apparaît avec une netteté qui, je
le
répète, est la chance de notre époque. Je voudrais décrire cette époq
2715
apparaît avec une netteté qui, je le répète, est
la
chance de notre époque. Je voudrais décrire cette époque, telle qu’el
2716
e, en quelques traits fort simples. J’insiste sur
le
mot simple, qui me paraît caractériser notre siècle. On dit le contra
2717
, qui me paraît caractériser notre siècle. On dit
le
contraire un peu partout, je le sais bien. On répète que les événemen
2718
re siècle. On dit le contraire un peu partout, je
le
sais bien. On répète que les événements nous dominent et qu’ils sont
2719
re un peu partout, je le sais bien. On répète que
les
événements nous dominent et qu’ils sont incompréhensibles et impensab
2720
aissons trop bien, et dont nous connaissons aussi
la
signification réelle. C’est l’argument des gens en place qui, chaque
2721
connaissons aussi la signification réelle. C’est
l’
argument des gens en place qui, chaque fois que nous venons dire : voi
2722
ce qu’il faut faire, nous répondent : Attention !
le
problème est plus complexe ! Non, les problèmes ne sont pas si comple
2723
Attention ! le problème est plus complexe ! Non,
les
problèmes ne sont pas si complexes, en réalité, ou s’ils le sont, oso
2724
es ne sont pas si complexes, en réalité, ou s’ils
le
sont, osons les simplifier. Ce qui est difficile, ce n’est pas de voi
2725
si complexes, en réalité, ou s’ils le sont, osons
les
simplifier. Ce qui est difficile, ce n’est pas de voir le vrai, c’est
2726
ifier. Ce qui est difficile, ce n’est pas de voir
le
vrai, c’est d’oser les actes qu’il faut, et que nous connaissons très
2727
icile, ce n’est pas de voir le vrai, c’est d’oser
les
actes qu’il faut, et que nous connaissons très bien. Trop souvent, no
2728
îtres nous ont fourni des méthodes d’évasion dans
la
complexité. Trop souvent ils nous ont mis en garde contre un « certai
2729
n « certain esprit simpliste », qui est, au vrai,
l’
esprit de décision et d’engagement concret dont nous avons le plus bes
2730
décision et d’engagement concret dont nous avons
le
plus besoin. Cessons de nous réfugier derrière des complexités que no
2731
s que nous créons à plaisir, qui ne sont pas dans
la
situation et qui sont autant de prétextes à refuser de prendre positi
2732
là, déjà, prendre une position, mais à coup sûr,
la
pire ! Nous nous sommes laissés endormir. Nos maîtres les plus respec
2733
! Nous nous sommes laissés endormir. Nos maîtres
les
plus respectés ont été trop souvent pour nous des professeurs d’abste
2734
rs d’abstention distinguée, des grands prêtres de
l’
Insoluble. Mais, un beau jour, les événements nous réveillent brusquem
2735
rands prêtres de l’Insoluble. Mais, un beau jour,
les
événements nous réveillent brusquement. Maintenant, il va falloir cho
2736
t brusquement. Maintenant, il va falloir choisir.
La
pensée redevient un danger, un facteur de choix et de risque, et non
2737
plus un refuge idéal. Ne nous en plaignons pas :
le
risque est la santé de la pensée. ⁂ Destin du siècle ! Expression cu
2738
e idéal. Ne nous en plaignons pas : le risque est
la
santé de la pensée. ⁂ Destin du siècle ! Expression curieuse et bien
2739
nous en plaignons pas : le risque est la santé de
la
pensée. ⁂ Destin du siècle ! Expression curieuse et bien moderne ! S
2740
Si nous y regardons de près, nous allons voir que
le
simple assemblage de ces deux mots, destin et siècle, contient peut-ê
2741
s deux mots, destin et siècle, contient peut-être
le
secret de tout le mal dont nous souffrons. Il suffit, pour le faire a
2742
n et siècle, contient peut-être le secret de tout
le
mal dont nous souffrons. Il suffit, pour le faire apparaître, de pose
2743
tout le mal dont nous souffrons. Il suffit, pour
le
faire apparaître, de poser cette simple question : comment un siècle
2744
tin. Mais aussi chacun de nous a un destin ; dans
la
mesure où chacun de nous possède une raison d’être, quelle qu’elle so
2745
une passion qui est bien à lui, une vocation. Si
l’
on admet facilement de nos jours, qu’un siècle ait un destin, c’est qu
2746
nos jours, qu’un siècle ait un destin, c’est que
l’
on a pris l’habitude d’attribuer une sorte de valeur indépendante à de
2747
qu’un siècle ait un destin, c’est que l’on a pris
l’
habitude d’attribuer une sorte de valeur indépendante à des êtres coll
2748
es collectifs. Je m’explique. Quand nous disons :
le
siècle, le xxe siècle par exemple, nous entendons par là une réalité
2749
fs. Je m’explique. Quand nous disons : le siècle,
le
xxe siècle par exemple, nous entendons par là une réalité historique
2750
très composite, très générale, qui englobe toute
l’
humanité, et dont les éléments sont presque tous de nature collective.
2751
s générale, qui englobe toute l’humanité, et dont
les
éléments sont presque tous de nature collective. L’histoire d’un sièc
2752
éléments sont presque tous de nature collective.
L’
histoire d’un siècle, c’est l’histoire des collectivités, c’est l’hist
2753
nature collective. L’histoire d’un siècle, c’est
l’
histoire des collectivités, c’est l’histoire des peuples, des nations,
2754
siècle, c’est l’histoire des collectivités, c’est
l’
histoire des peuples, des nations, des classes, des races, des entrepr
2755
ques ou privées. Ce n’est que très accessoirement
l’
histoire des personnes, de quelques génies, par exemple. Quand nous di
2756
iat, destin du capitalisme, destin du machinisme.
Le
destin du siècle, c’est le destin des ismes, qui sont — en fin de com
2757
destin du machinisme. Le destin du siècle, c’est
le
destin des ismes, qui sont — en fin de compte — des abstractions. Et
2758
sont — en fin de compte — des abstractions. Et je
le
répète, pour que ces ismes aient, à nos yeux, un destin, il faut que
2759
nos yeux, un destin, il faut que nous ayons pris
l’
habitude de les considérer comme autant de réalités autonomes, posséda
2760
destin, il faut que nous ayons pris l’habitude de
les
considérer comme autant de réalités autonomes, possédant leurs lois p
2761
stinée. Autant dire que nous avons fait de toutes
les
réalités collectives des divinités nouvelles, des divinités presque t
2762
s, et dont nous essayons avec angoisse de scruter
les
caractères, les habitudes, les intentions secrètes, les destins. Notr
2763
essayons avec angoisse de scruter les caractères,
les
habitudes, les intentions secrètes, les destins. Notre siècle, en tan
2764
ngoisse de scruter les caractères, les habitudes,
les
intentions secrètes, les destins. Notre siècle, en tant que siècle, e
2765
ractères, les habitudes, les intentions secrètes,
les
destins. Notre siècle, en tant que siècle, est athée, totalement athé
2766
st polythéiste et superstitieux au dernier degré.
La
grande majorité de nos contemporains ne croit pas en Dieu et sait qu’
2767
e n’y croit pas. Mais elle garde chevillé au cœur
le
besoin d’obéir à des forces invisibles et de leur rendre un culte de
2768
e nous sont prêts à leur sacrifier leur vie même.
Les
noms de ces divinités, vous les connaissez bien : ce sont l’État, la
2769
er leur vie même. Les noms de ces divinités, vous
les
connaissez bien : ce sont l’État, la nation, la classe, la race, l’ar
2770
ces divinités, vous les connaissez bien : ce sont
l’
État, la nation, la classe, la race, l’argent et l’opinion publique. E
2771
nités, vous les connaissez bien : ce sont l’État,
la
nation, la classe, la race, l’argent et l’opinion publique. Elles ont
2772
les connaissez bien : ce sont l’État, la nation,
la
classe, la race, l’argent et l’opinion publique. Elles ont encore un
2773
ssez bien : ce sont l’État, la nation, la classe,
la
race, l’argent et l’opinion publique. Elles ont encore un autre nom,
2774
: ce sont l’État, la nation, la classe, la race,
l’
argent et l’opinion publique. Elles ont encore un autre nom, et qui es
2775
’État, la nation, la classe, la race, l’argent et
l’
opinion publique. Elles ont encore un autre nom, et qui est commun à t
2776
un autre nom, et qui est commun à toutes : c’est
le
Nombre, c’est peut-être Légion… Sans doute n’avons-nous pas toujours
2777
ans doute n’avons-nous pas toujours conscience de
les
servir. Vous me direz peut-être que, pour votre compte, la classe ou
2778
. Vous me direz peut-être que, pour votre compte,
la
classe ou la race vous importent assez peu. Vous jouez, vis-à-vis de
2779
ez peut-être que, pour votre compte, la classe ou
la
race vous importent assez peu. Vous jouez, vis-à-vis de ces divinités
2780
ssez peu. Vous jouez, vis-à-vis de ces divinités,
le
rôle d’incroyants, de sceptiques ou même d’adversaires. Mais il y a d
2781
espèce-là d’incroyants, et ce sont, par exemple,
l’
opinion publique et la presse, auxquelles nul d’entre nous n’échappe,
2782
s, et ce sont, par exemple, l’opinion publique et
la
presse, auxquelles nul d’entre nous n’échappe, ni ne songe à échapper
2783
l d’entre nous n’échappe, ni ne songe à échapper.
La
classe et la race : voilà peut-être les divinités maîtresses de cette
2784
s n’échappe, ni ne songe à échapper. La classe et
la
race : voilà peut-être les divinités maîtresses de cette première moi
2785
échapper. La classe et la race : voilà peut-être
les
divinités maîtresses de cette première moitié du siècle. Qu’il s’agis
2786
us prouvent abondamment leurs exigences, qui sont
la
foi aveugle et les sacrifices humains. Ces dieux ont même leur théolo
2787
mment leurs exigences, qui sont la foi aveugle et
les
sacrifices humains. Ces dieux ont même leur théologie, scientifique,
2788
ur théologie, scientifique, bien entendu, et dont
les
deux disciplines principales sont l’Histoire et la Sociologie. Nous
2789
du, et dont les deux disciplines principales sont
l’
Histoire et la Sociologie. Nous trouverons les meilleurs exemples de
2790
s deux disciplines principales sont l’Histoire et
la
Sociologie. Nous trouverons les meilleurs exemples de cette théologi
2791
ont l’Histoire et la Sociologie. Nous trouverons
les
meilleurs exemples de cette théologie dans les écrits marxistes, plus
2792
ns les meilleurs exemples de cette théologie dans
les
écrits marxistes, plus intelligents et plus logiques surtout que ceux
2793
haîne en une démonstration inattaquable, une fois
les
prémisses admises. Quelles sont ces prémisses ? La principale, c’est
2794
s prémisses admises. Quelles sont ces prémisses ?
La
principale, c’est que toute notre idéologie, toutes nos révoltes, tou
2795
Hitler, selon Trotski, s’explique entièrement par
le
fait qu’il était, à la fin de la guerre, caporal dans l’armée alleman
2796
s’explique entièrement par le fait qu’il était, à
la
fin de la guerre, caporal dans l’armée allemande. Son idéologie n’a r
2797
entièrement par le fait qu’il était, à la fin de
la
guerre, caporal dans l’armée allemande. Son idéologie n’a rien de per
2798
qu’il était, à la fin de la guerre, caporal dans
l’
armée allemande. Son idéologie n’a rien de personnel, c’est l’idéologi
2799
mande. Son idéologie n’a rien de personnel, c’est
l’
idéologie des petits gradés d’une armée vaincue. L’hypothèse est sédui
2800
’idéologie des petits gradés d’une armée vaincue.
L’
hypothèse est séduisante, vraisemblable même. Que répondra Hitler ? Il
2801
out ce que dit Trotski, s’explique simplement par
le
fait que Trotski est un Juif. Voilà, n’est-ce pas, deux points de vue
2802
er avec une certaine violence, mais par rapport à
l’
homme, ils sont absolument semblables et nous pouvons les renvoyer dos
2803
e, ils sont absolument semblables et nous pouvons
les
renvoyer dos à dos. L’un et l’autre tendent à nous faire croire que l
2804
. L’un et l’autre tendent à nous faire croire que
l’
homme n’est rien, mais moins que rien, et que tout ce qui se passe dan
2805
moins que rien, et que tout ce qui se passe dans
le
monde obéit à des lois générales et historiques qui échappent à notre
2806
ou] notre race. Destin du siècle contre destin de
l’
homme. Il faut bien reconnaître qu’en cette année 1934, l’homme se déf
2807
Il faut bien reconnaître qu’en cette année 1934,
l’
homme se défend très mal. Et comment se défendrait-il quand il adore t
2808
? Nos camarades marxistes ou racistes ont bien vu
le
danger. Mais ils en tirent une conclusion inattendue. Reprenant le mo
2809
ls en tirent une conclusion inattendue. Reprenant
le
mot de Goethe, sans le savoir, ils nous enseignent que la loi seule n
2810
sion inattendue. Reprenant le mot de Goethe, sans
le
savoir, ils nous enseignent que la loi seule nous conduit à la libert
2811
e Goethe, sans le savoir, ils nous enseignent que
la
loi seule nous conduit à la liberté. Adhérez au déterminisme de l’his
2812
s nous enseignent que la loi seule nous conduit à
la
liberté. Adhérez au déterminisme de l’histoire, abandonnez votre cher
2813
conduit à la liberté. Adhérez au déterminisme de
l’
histoire, abandonnez votre cher petit moi, fondez votre destin dans ce
2814
ndez votre destin dans celui du prolétariat ou de
la
race aryenne, et toutes vos inquiétudes s’apaiseront. Bien. Mais il
2815
. Mais il faut prendre garde d’abord de confondre
le
sacrifice et le suicide. L’élan qui jette des millions de nos contemp
2816
rendre garde d’abord de confondre le sacrifice et
le
suicide. L’élan qui jette des millions de nos contemporains dans les
2817
d’abord de confondre le sacrifice et le suicide.
L’
élan qui jette des millions de nos contemporains dans les destins du s
2818
qui jette des millions de nos contemporains dans
les
destins du siècle, c’est peut-être l’élan d’une fuite devant le desti
2819
rains dans les destins du siècle, c’est peut-être
l’
élan d’une fuite devant le destin particulier et la responsabilité de
2820
siècle, c’est peut-être l’élan d’une fuite devant
le
destin particulier et la responsabilité de chacun. Les brigadiers de
2821
’élan d’une fuite devant le destin particulier et
la
responsabilité de chacun. Les brigadiers de choc et les miliciens hit
2822
estin particulier et la responsabilité de chacun.
Les
brigadiers de choc et les miliciens hitlériens s’indignent de ce repr
2823
sponsabilité de chacun. Les brigadiers de choc et
les
miliciens hitlériens s’indignent de ce reproche. Ils nous répondent,
2824
s répondent, avec raison, que leur action n’a pas
les
apparences d’une évasion, d’une démission ; qu’ils n’ont pas fui les
2825
e évasion, d’une démission ; qu’ils n’ont pas fui
les
risques et qu’ils ont exposé leurs vies. Enfin, qu’ils sont animés pa
2826
rs devraient leur envier. C’est juste. Aussi bien
la
question revient-elle en définitive à savoir si la foi des marxistes
2827
a question revient-elle en définitive à savoir si
la
foi des marxistes et des racistes est vraie. Sur quoi se fonde-t-elle
2828
ur quoi se fonde-t-elle ? Quelles réalités sont à
la
base ? De l’aveu même des sociologues marxistes ou hitlériens, ce son
2829
nde-t-elle ? Quelles réalités sont à la base ? De
l’
aveu même des sociologues marxistes ou hitlériens, ce sont des réalité
2830
tatistique ; des considérations, par exemple, sur
le
développement économique des siècles passés, quand ce ne sont pas des
2831
ssées, historiques, achevées, mortes comme toutes
les
moyennes, et dans ce sens, abstraites. Sur quoi peut bien se fonder u
2832
ce qui a été fait. Toute loi qu’on découvre dans
la
société humaine repose sur le principe démissionnaire par excellence
2833
qu’on découvre dans la société humaine repose sur
le
principe démissionnaire par excellence du déterminisme, qui peut se f
2834
qui peut se formuler ainsi : qui a bu boira ! Or,
la
seule chose intéressante au monde — et je dis intéressante au sens le
2835
essante au monde — et je dis intéressante au sens
le
plus profond du terme, la seule chose qui intéresse chacune de nos vi
2836
is intéressante au sens le plus profond du terme,
la
seule chose qui intéresse chacune de nos vies —, c’est qu’il y ait pa
2837
’arrête de boire, ne fût-ce que pour faire mentir
le
proverbe. Les lois générales, économiques ou sociales, sont toujours
2838
ire, ne fût-ce que pour faire mentir le proverbe.
Les
lois générales, économiques ou sociales, sont toujours justes, dans l
2839
onomiques ou sociales, sont toujours justes, dans
la
mesure où nous démissionnons de notre rôle d’hommes responsables et c
2840
r rigueur mesure exactement notre dégénérescence.
Le
philosophe Léon Chestov disait un jour à quelques amis : « Il paraît
2841
ste deux théories tout à fait opposées concernant
l’
origine du genre humain. Les uns prétendent que l’homme descend du sin
2842
it opposées concernant l’origine du genre humain.
Les
uns prétendent que l’homme descend du singe, les autres croient qu’il
2843
l’origine du genre humain. Les uns prétendent que
l’
homme descend du singe, les autres croient qu’il a été créé par Dieu.
2844
Les uns prétendent que l’homme descend du singe,
les
autres croient qu’il a été créé par Dieu. Ils se disputent énormément
2845
ont tort de se disputer, parce qu’ils ont raison
les
uns et les autres. Ma théorie est la suivante : ceux qui pensent que
2846
e se disputer, parce qu’ils ont raison les uns et
les
autres. Ma théorie est la suivante : ceux qui pensent que l’homme des
2847
ont raison les uns et les autres. Ma théorie est
la
suivante : ceux qui pensent que l’homme descend du singe, descendent
2848
Ma théorie est la suivante : ceux qui pensent que
l’
homme descend du singe, descendent en effet du singe et constituent un
2849
u singe et constituent une race à part, à côté de
la
race des hommes créés par Dieu, et qui, eux, croient et savent qu’ils
2850
Marx et de Gobineau. Il est tout à fait vrai que
les
adeptes du marxisme et du racisme sont entièrement dominés par la cla
2851
rxisme et du racisme sont entièrement dominés par
la
classe ou la race, et c’est perdre son temps que de contester leur cr
2852
racisme sont entièrement dominés par la classe ou
la
race, et c’est perdre son temps que de contester leur croyance. Ces h
2853
ur croyance. Ces hommes-là savent au moins ce qui
les
mène et poussent le monde dans la direction où il doit tomber fatalem
2854
es-là savent au moins ce qui les mène et poussent
le
monde dans la direction où il doit tomber fatalement, si on le laisse
2855
u moins ce qui les mène et poussent le monde dans
la
direction où il doit tomber fatalement, si on le laisse tomber. En ce
2856
la direction où il doit tomber fatalement, si on
le
laisse tomber. En cela, ils sont peut-être supérieurs aux libéraux et
2857
qui tombent, eux aussi, mais continuent d’évoquer
la
liberté et les idéaux supérieurs dont ils s’éloignent de plus en plus
2858
ux aussi, mais continuent d’évoquer la liberté et
les
idéaux supérieurs dont ils s’éloignent de plus en plus. Mais j’ai bea
2859
Mais j’ai beau ne pas croire, pour mon compte, à
la
réalité de tous ces mythes, j’ai beau ne pas croire qu’ils aient le d
2860
ces mythes, j’ai beau ne pas croire qu’ils aient
le
droit de disposer de nos vies, je suis bien obligé de reconnaître qu’
2861
qu’en fait, ils nous dominent. Ne fût-ce que par
le
moyen de la presse. On peut dire, sans exagérer, que les journaux dis
2862
ils nous dominent. Ne fût-ce que par le moyen de
la
presse. On peut dire, sans exagérer, que les journaux disposent de no
2863
en de la presse. On peut dire, sans exagérer, que
les
journaux disposent de nos vies. Sans eux, la préparation des esprits
2864
que les journaux disposent de nos vies. Sans eux,
la
préparation des esprits qui prélude à toute guerre moderne bien compr
2865
oderne bien comprise serait impossible. Sans eux,
les
partis politiques seraient sans force, les luttes sociales perdraient
2866
s eux, les partis politiques seraient sans force,
les
luttes sociales perdraient beaucoup de leur violence. Sans eux, nous
2867
ut-être aurions-nous un peu plus d’attention pour
les
vrais problèmes de nos vies. Mais si les journaux disposent de nos vi
2868
ion pour les vrais problèmes de nos vies. Mais si
les
journaux disposent de nos vies, l’argent dispose des journaux. Et voi
2869
vies. Mais si les journaux disposent de nos vies,
l’
argent dispose des journaux. Et voilà le dernier anneau de la chaîne d
2870
spose des journaux. Et voilà le dernier anneau de
la
chaîne de notre destin. Abrégeons, car, avec l’argent nous n’en finir
2871
e la chaîne de notre destin. Abrégeons, car, avec
l’
argent nous n’en finirions pas. L’argent est partout, il est dans tout
2872
eons, car, avec l’argent nous n’en finirions pas.
L’
argent est partout, il est dans tout, il est tout et tous le servent.
2873
st partout, il est dans tout, il est tout et tous
le
servent. ⁂ Destin du siècle, destin des ismes, dévorants et inhumain
2874
endu que cette description a pu faire naître dans
l’
esprit de quelques-uns. Je sais que le bon ton, dans certains milieux
2875
naître dans l’esprit de quelques-uns. Je sais que
le
bon ton, dans certains milieux bien-pensants, veut qu’on dénonce le r
2876
ertains milieux bien-pensants, veut qu’on dénonce
le
règne de la masse. On s’indigne du nivellement universel, à quoi doit
2877
eux bien-pensants, veut qu’on dénonce le règne de
la
masse. On s’indigne du nivellement universel, à quoi doit aboutir le
2878
gne du nivellement universel, à quoi doit aboutir
le
communisme. On raille le caporalisme des jeunes miliciens en chemise
2879
sel, à quoi doit aboutir le communisme. On raille
le
caporalisme des jeunes miliciens en chemise brune. On nous dit que la
2880
eunes miliciens en chemise brune. On nous dit que
la
vie, en Amérique, est impossible, parce que tous les appartements son
2881
vie, en Amérique, est impossible, parce que tous
les
appartements sont pareils et qu’un homme n’a pas le droit de sortir d
2882
appartements sont pareils et qu’un homme n’a pas
le
droit de sortir dans la rue coiffé d’un chapeau de paille avant la da
2883
ls et qu’un homme n’a pas le droit de sortir dans
la
rue coiffé d’un chapeau de paille avant la date fixée par les grands
2884
r dans la rue coiffé d’un chapeau de paille avant
la
date fixée par les grands fournisseurs. On prétend que l’individu se
2885
fé d’un chapeau de paille avant la date fixée par
les
grands fournisseurs. On prétend que l’individu se perd de plus en plu
2886
fixée par les grands fournisseurs. On prétend que
l’
individu se perd de plus en plus dans la masse anonyme. Je crois que c
2887
étend que l’individu se perd de plus en plus dans
la
masse anonyme. Je crois que c’est là ce qu’il peut faire de mieux. L’
2888
crois que c’est là ce qu’il peut faire de mieux.
L’
individu, tel que le concevait le dernier siècle, l’homme isolé qui cu
2889
ce qu’il peut faire de mieux. L’individu, tel que
le
concevait le dernier siècle, l’homme isolé qui cultivait jalousement
2890
individu, tel que le concevait le dernier siècle,
l’
homme isolé qui cultivait jalousement sa petite vie intérieure, à l’ab
2891
cultivait jalousement sa petite vie intérieure, à
l’
abri de la Déclaration des droits de l’homme, ne mérite pas qu’on le p
2892
jalousement sa petite vie intérieure, à l’abri de
la
Déclaration des droits de l’homme, ne mérite pas qu’on le pleure. L’i
2893
ration des droits de l’homme, ne mérite pas qu’on
le
pleure. L’individu des libéraux, c’était, par excellence, un homme sa
2894
droits de l’homme, ne mérite pas qu’on le pleure.
L’
individu des libéraux, c’était, par excellence, un homme sans destin,
2895
mme sans vocation ni raison d’être, un homme dont
le
monde n’exigeait rien. Cet être-là, fatalement, devait désespérer de
2896
de soi-même et de tout. Et nous vîmes, tôt après
la
guerre, reparaître le fameux « mal du siècle ». La jeunesse découvrai
2897
t. Et nous vîmes, tôt après la guerre, reparaître
le
fameux « mal du siècle ». La jeunesse découvrait avec angoisse qu’ell
2898
a guerre, reparaître le fameux « mal du siècle ».
La
jeunesse découvrait avec angoisse qu’elle n’avait plus rien ni person
2899
lle n’avait plus rien ni personne à servir. C’est
l’
état le plus dégradant qui soit. On vit alors, chez les meilleurs de c
2900
vait plus rien ni personne à servir. C’est l’état
le
plus dégradant qui soit. On vit alors, chez les meilleurs de ces jeun
2901
at le plus dégradant qui soit. On vit alors, chez
les
meilleurs de ces jeunes gens, se déclarer une épidémie de suicides, q
2902
ne épidémie de suicides, qui ne prit pas toujours
la
forme romantique du coup de revolver, qui prit même beaucoup plus sou
2903
de revolver, qui prit même beaucoup plus souvent
la
forme d’un enrôlement dans quelque troupe d’assaut. En vérité, ce ser
2904
rité, ce serait une erreur insondable que de voir
le
salut de notre époque dans un retour à l’individu. L’individu est l’o
2905
de voir le salut de notre époque dans un retour à
l’
individu. L’individu est l’origine la plus certaine du triomphe des ma
2906
alut de notre époque dans un retour à l’individu.
L’
individu est l’origine la plus certaine du triomphe des masses. C’est
2907
poque dans un retour à l’individu. L’individu est
l’
origine la plus certaine du triomphe des masses. C’est parce que l’ind
2908
un retour à l’individu. L’individu est l’origine
la
plus certaine du triomphe des masses. C’est parce que l’individu des
2909
certaine du triomphe des masses. C’est parce que
l’
individu des libéraux était sans destin, qu’il a cru au destin des aut
2910
’il n’avait pas de vocation, qu’il a voulu servir
la
vocation de sa race. La meilleure preuve, d’ailleurs, de l’origine in
2911
ion, qu’il a voulu servir la vocation de sa race.
La
meilleure preuve, d’ailleurs, de l’origine individualiste des mythes
2912
n de sa race. La meilleure preuve, d’ailleurs, de
l’
origine individualiste des mythes collectifs, je la vois dans l’abouti
2913
’origine individualiste des mythes collectifs, je
la
vois dans l’aboutissement de ces mythes. On a cru trouver en eux les
2914
vidualiste des mythes collectifs, je la vois dans
l’
aboutissement de ces mythes. On a cru trouver en eux les principes d’u
2915
utissement de ces mythes. On a cru trouver en eux
les
principes d’une communauté nouvelle que l’individualisme avait dissou
2916
n eux les principes d’une communauté nouvelle que
l’
individualisme avait dissoute. Il n’y a jamais eu autant de ligues, de
2917
ins d’accord réel, jamais plus de haine déclarée.
L’
amour des hommes, transposé dans la collectivité, devient automatiquem
2918
aine déclarée. L’amour des hommes, transposé dans
la
collectivité, devient automatiquement de la haine. On me dira que la
2919
dans la collectivité, devient automatiquement de
la
haine. On me dira que la solidarité entre les peuples est désormais u
2920
vient automatiquement de la haine. On me dira que
la
solidarité entre les peuples est désormais un fait acquis, une réalit
2921
t de la haine. On me dira que la solidarité entre
les
peuples est désormais un fait acquis, une réalité économique. Nous de
2922
e. Nous devons au progrès mécanique que désormais
le
globe entier apparaisse solidaire d’une même civilisation. Mais cette
2923
e vaut-elle ? Le premier exemple qui vous vient à
l’
esprit, lorsqu’on vous dit que désormais « tout se tient » dans le mon
2924
’on vous dit que désormais « tout se tient » dans
le
monde, c’est l’exemple suivant : le krach d’une banque à Paris peut r
2925
désormais « tout se tient » dans le monde, c’est
l’
exemple suivant : le krach d’une banque à Paris peut ruiner des petits
2926
tient » dans le monde, c’est l’exemple suivant :
le
krach d’une banque à Paris peut ruiner des petits rentiers belges et
2927
ut ruiner des petits rentiers belges et jeter sur
la
paille des milliers d’ouvriers annamites. Oui, certes, tout se tient
2928
mites. Oui, certes, tout se tient désormais. Mais
la
solidarité des masses est toujours une solidarité catastrophique. Oui
2929
est toujours une solidarité catastrophique. Oui,
le
destin du siècle, le destin des ismes, ne nous laisse rien prévoir d’
2930
idarité catastrophique. Oui, le destin du siècle,
le
destin des ismes, ne nous laisse rien prévoir d’autre qu’un monde cha
2931
nstrueuse agglomération d’individus assemblés par
la
peur et la faim, et la haine, parqués dans des casernes ou des camps
2932
gglomération d’individus assemblés par la peur et
la
faim, et la haine, parqués dans des casernes ou des camps de travail,
2933
d’individus assemblés par la peur et la faim, et
la
haine, parqués dans des casernes ou des camps de travail, — et mouran
2934
é ma description du siècle. Est-elle pessimiste à
l’
excès ? Ce n’est pas cela qu’il nous importe de savoir. Si j’ai simpli
2935
a qu’il nous importe de savoir. Si j’ai simplifié
le
tableau, c’est que je veux maintenant dégager le choix, la décision q
2936
le tableau, c’est que je veux maintenant dégager
le
choix, la décision que chacun d’entre nous peut prendre. ⁂ Destin du
2937
u, c’est que je veux maintenant dégager le choix,
la
décision que chacun d’entre nous peut prendre. ⁂ Destin du siècle ou
2938
us peut prendre. ⁂ Destin du siècle ou destin de
l’
homme ? Loi historique ou acte personnel ? Irresponsable ou responsabl
2939
responsable ? Telle est, je crois, en définitive,
la
question simple que nous pose l’époque. Vous avez pressenti le parti
2940
, en définitive, la question simple que nous pose
l’
époque. Vous avez pressenti le parti que j’embrasse. Il me reste à le
2941
imple que nous pose l’époque. Vous avez pressenti
le
parti que j’embrasse. Il me reste à le définir en termes positifs, ce
2942
pressenti le parti que j’embrasse. Il me reste à
le
définir en termes positifs, cette fois. Les dieux, les mythes du sièc
2943
este à le définir en termes positifs, cette fois.
Les
dieux, les mythes du siècle, sont tout-puissants sur nous. Dénoncer l
2944
éfinir en termes positifs, cette fois. Les dieux,
les
mythes du siècle, sont tout-puissants sur nous. Dénoncer leurs méfait
2945
leurs méfaits, ce n’est pas encore leur échapper.
Les
nier purement et simplement, ou désirer leur destruction, c’est de l’
2946
simplement, ou désirer leur destruction, c’est de
l’
utopie. Ils sont là, et ils ont probablement leur raison d’être. La cl
2947
t là, et ils ont probablement leur raison d’être.
La
classe, la race, jouent dans le monde le même rôle que l’instinct dan
2948
s ont probablement leur raison d’être. La classe,
la
race, jouent dans le monde le même rôle que l’instinct dans l’homme.
2949
ur raison d’être. La classe, la race, jouent dans
le
monde le même rôle que l’instinct dans l’homme. La culture du xixe s
2950
d’être. La classe, la race, jouent dans le monde
le
même rôle que l’instinct dans l’homme. La culture du xixe siècle a v
2951
e, la race, jouent dans le monde le même rôle que
l’
instinct dans l’homme. La culture du xixe siècle a voulu les ignorer
2952
nt dans le monde le même rôle que l’instinct dans
l’
homme. La culture du xixe siècle a voulu les ignorer et nous assiston
2953
e monde le même rôle que l’instinct dans l’homme.
La
culture du xixe siècle a voulu les ignorer et nous assistons à leur
2954
dans l’homme. La culture du xixe siècle a voulu
les
ignorer et nous assistons à leur vengeance. Le spiritualisme les a dé
2955
u les ignorer et nous assistons à leur vengeance.
Le
spiritualisme les a déclarés vulgaires, et l’individualisme les a rat
2956
nous assistons à leur vengeance. Le spiritualisme
les
a déclarés vulgaires, et l’individualisme les a rationnellement ignor
2957
ce. Le spiritualisme les a déclarés vulgaires, et
l’
individualisme les a rationnellement ignorés. Les voilà qui reviennent
2958
sme les a déclarés vulgaires, et l’individualisme
les
a rationnellement ignorés. Les voilà qui reviennent sous le couvert d
2959
t l’individualisme les a rationnellement ignorés.
Les
voilà qui reviennent sous le couvert de ce cheval de Troie qui se nom
2960
nnellement ignorés. Les voilà qui reviennent sous
le
couvert de ce cheval de Troie qui se nomme déterminisme historique. I
2961
éterminisme historique. Il faut croire qu’ils ont
la
vie dure, et que le mieux à faire pour nous, c’est encore de compter
2962
ue. Il faut croire qu’ils ont la vie dure, et que
le
mieux à faire pour nous, c’est encore de compter avec eux. Mais compt
2963
ter avec eux. Mais compter avec eux, ce n’est pas
les
diviser, ni abdiquer sous leur implacable destin. Ceux qui l’ont fait
2964
ni abdiquer sous leur implacable destin. Ceux qui
l’
ont fait et qui le font encore, je vois bien ce qui les poussait, je v
2965
eur implacable destin. Ceux qui l’ont fait et qui
le
font encore, je vois bien ce qui les poussait, je vois bien ce qu’il
2966
t fait et qui le font encore, je vois bien ce qui
les
poussait, je vois bien ce qu’il y avait d’émouvant dans leur élan ver
2967
rte en s’adressant aux mythes collectifs. C’était
l’
homme qu’il fallait refaire. Nous avons oublié ce fait très simple : q
2968
aire. Nous avons oublié ce fait très simple : que
la
société doit être composée d’hommes réels. Nous avons tout calculé, s
2969
calculé, sauf ce qui est en effet incalculable :
l’
acte de l’homme. Mais le temps vient où les hommes se lassent de théor
2970
sauf ce qui est en effet incalculable : l’acte de
l’
homme. Mais le temps vient où les hommes se lassent de théories qui ex
2971
t en effet incalculable : l’acte de l’homme. Mais
le
temps vient où les hommes se lassent de théories qui expliquent tout
2972
lable : l’acte de l’homme. Mais le temps vient où
les
hommes se lassent de théories qui expliquent tout sauf l’essentiel. V
2973
s se lassent de théories qui expliquent tout sauf
l’
essentiel. Voici notre dilemme : voulons-nous être des éléments de sta
2974
onnelle ? Voulons-nous être des personnes ? Voilà
le
mot lâché. Je connais la réaction qui l’accueille. Hé quoi ! dit-on,
2975
re des personnes ? Voilà le mot lâché. Je connais
la
réaction qui l’accueille. Hé quoi ! dit-on, en face de tous ces monst
2976
? Voilà le mot lâché. Je connais la réaction qui
l’
accueille. Hé quoi ! dit-on, en face de tous ces monstres menaçants, v
2977
otre chétive personne ? Vous serez emportés comme
les
autres. Votre réaction est disproportionnée au danger. Et d’ailleurs
2978
nt on nous parle tant depuis quelques années dans
les
jeunes groupes révolutionnaires de France et de Belgique, dans la rev
2979
s révolutionnaires de France et de Belgique, dans
la
revue Esprit, et surtout dans les cercles de L’Ordre nouveau. Qu’est-
2980
e Belgique, dans la revue Esprit, et surtout dans
les
cercles de L’Ordre nouveau. Qu’est-ce que la personne ? Permettez-moi
2981
ans les cercles de L’Ordre nouveau. Qu’est-ce que
la
personne ? Permettez-moi de renverser la question : Qu’est-ce que ces
2982
t-ce que la personne ? Permettez-moi de renverser
la
question : Qu’est-ce que ces dieux et ces mythes collectifs ? J’ai es
2983
sayé de vous montrer qu’ils sont des créations de
l’
homme, et particulièrement de ce personnage égoïste et, en somme, asse
2984
égoïste et, en somme, assez lâche, qu’on appelle
l’
individu. Il faut aller plus loin : les mythes collectifs n’expriment
2985
’on appelle l’individu. Il faut aller plus loin :
les
mythes collectifs n’expriment rien de plus qu’une certaine attitude,
2986
’expriment rien de plus qu’une certaine attitude,
l’
attitude démissionnaire de l’homme en fuite devant son destin. Eh bien
2987
e certaine attitude, l’attitude démissionnaire de
l’
homme en fuite devant son destin. Eh bien ! la personne à son tour n’e
2988
de l’homme en fuite devant son destin. Eh bien !
la
personne à son tour n’est rien d’autre que l’attitude créatrice de l’
2989
n ! la personne à son tour n’est rien d’autre que
l’
attitude créatrice de l’homme. Tout, en définitive, se joue dans l’hom
2990
ur n’est rien d’autre que l’attitude créatrice de
l’
homme. Tout, en définitive, se joue dans l’homme et se rapporte à lui.
2991
ice de l’homme. Tout, en définitive, se joue dans
l’
homme et se rapporte à lui. Dans l’homme, la masse n’a pas plus de pui
2992
, se joue dans l’homme et se rapporte à lui. Dans
l’
homme, la masse n’a pas plus de puissance que la personne. Dans l’homm
2993
dans l’homme et se rapporte à lui. Dans l’homme,
la
masse n’a pas plus de puissance que la personne. Dans l’homme, le cho
2994
s l’homme, la masse n’a pas plus de puissance que
la
personne. Dans l’homme, le choix peut avoir lieu, effectivement. Et v
2995
e n’a pas plus de puissance que la personne. Dans
l’
homme, le choix peut avoir lieu, effectivement. Et votre rôle d’étudia
2996
plus de puissance que la personne. Dans l’homme,
le
choix peut avoir lieu, effectivement. Et votre rôle d’étudiants, c’es
2997
deur. C’est à vous de rechercher dans vos pensées
les
origines concrètes de ces grands faits qui bouleversent le monde. C’e
2998
es concrètes de ces grands faits qui bouleversent
le
monde. C’est à vous de déceler, par exemple, l’origine permanente et
2999
t le monde. C’est à vous de déceler, par exemple,
l’
origine permanente et virtuelle des dictatures, dans un fléchissement,
3000
en vous, du sens de votre destinée personnelle. À
l’
origine de tout, il y a une attitude de l’homme, j’ai essayé de vous m
3001
elle. À l’origine de tout, il y a une attitude de
l’
homme, j’ai essayé de vous montrer l’attitude de celui qui se réfugie
3002
attitude de l’homme, j’ai essayé de vous montrer
l’
attitude de celui qui se réfugie dans l’Histoire42, qui pense par péri
3003
s montrer l’attitude de celui qui se réfugie dans
l’
Histoire42, qui pense par périodes séculaires, qui rêve et qui pour co
3004
historiquement, il fonde, dès maintenant, en lui,
la
dictature du nombre et de l’irresponsable. Je pourrais maintenant vou
3005
maintenant, en lui, la dictature du nombre et de
l’
irresponsable. Je pourrais maintenant vous donner une contrepartie, te
3006
s donner une contrepartie, tenter de vous décrire
la
pensée personnaliste, la pensée qui ne veut s’attacher qu’aux seules
3007
, tenter de vous décrire la pensée personnaliste,
la
pensée qui ne veut s’attacher qu’aux seules tâches immédiates. La per
3008
veut s’attacher qu’aux seules tâches immédiates.
La
personne, au contraire, de l’individu perdu dans l’Histoire, vit d’in
3009
tâches immédiates. La personne, au contraire, de
l’
individu perdu dans l’Histoire, vit d’instant en instant, d’une tâche
3010
personne, au contraire, de l’individu perdu dans
l’
Histoire, vit d’instant en instant, d’une tâche à une autre, d’un acte
3011
imprévisible, toujours aventureuse. Elle vit dans
le
risque et dans la décision, au lieu que l’homme des masses vit dans l
3012
ours aventureuse. Elle vit dans le risque et dans
la
décision, au lieu que l’homme des masses vit dans l’attente, la révol
3013
t dans le risque et dans la décision, au lieu que
l’
homme des masses vit dans l’attente, la révolte et l’impuissance. Je p
3014
décision, au lieu que l’homme des masses vit dans
l’
attente, la révolte et l’impuissance. Je pourrais encore vous montrer
3015
u lieu que l’homme des masses vit dans l’attente,
la
révolte et l’impuissance. Je pourrais encore vous montrer quelles con
3016
omme des masses vit dans l’attente, la révolte et
l’
impuissance. Je pourrais encore vous montrer quelles conséquences poli
3017
en mon nom personnel. Quel est donc, nous dit-on,
le
fondement réel de la personne ? Est-ce une vue philosophique ? Est-ce
3018
Quel est donc, nous dit-on, le fondement réel de
la
personne ? Est-ce une vue philosophique ? Est-ce une attitude nietzsc
3019
éenne ? Est-ce un choix subjectif ? Vous préférez
l’
homme créateur à l’homme qui s’abandonne au destin collectif, mais c’e
3020
hoix subjectif ? Vous préférez l’homme créateur à
l’
homme qui s’abandonne au destin collectif, mais c’est peut-être votre
3021
vois qu’une réponse à toutes ces questions, c’est
la
réponse de l’Évangile. Faites toutes les sociétés que vous voudrez, b
3022
ponse à toutes ces questions, c’est la réponse de
l’
Évangile. Faites toutes les sociétés que vous voudrez, bouleversez les
3023
ns, c’est la réponse de l’Évangile. Faites toutes
les
sociétés que vous voudrez, bouleversez les institutions, organisez le
3024
toutes les sociétés que vous voudrez, bouleversez
les
institutions, organisez le monde par la contrainte ou dans la liberté
3025
voudrez, bouleversez les institutions, organisez
le
monde par la contrainte ou dans la liberté, vous ne ferez pas une soc
3026
leversez les institutions, organisez le monde par
la
contrainte ou dans la liberté, vous ne ferez pas une société si vous
3027
ons, organisez le monde par la contrainte ou dans
la
liberté, vous ne ferez pas une société si vous n’avez pas, avant tout
3028
société si vous n’avez pas, avant tout, retrouvé
le
rapport primitif, le rapport véritablement humain, celui qui unit l’h
3029
ez pas, avant tout, retrouvé le rapport primitif,
le
rapport véritablement humain, celui qui unit l’homme à son prochain.
3030
, le rapport véritablement humain, celui qui unit
l’
homme à son prochain. Or, ce prochain, l’Évangile seul nous le désigne
3031
qui unit l’homme à son prochain. Or, ce prochain,
l’
Évangile seul nous le désigne, bien plus : il nous ordonne de l’être.
3032
n prochain. Or, ce prochain, l’Évangile seul nous
le
désigne, bien plus : il nous ordonne de l’être. Et voilà la réalité d
3033
l nous le désigne, bien plus : il nous ordonne de
l’
être. Et voilà la réalité décisive. Tous, nous avons reçu de Dieu cet
3034
, bien plus : il nous ordonne de l’être. Et voilà
la
réalité décisive. Tous, nous avons reçu de Dieu cet ordre : tu aimera
3035
possibles que dans cet acte unique d’obéissance à
l’
ordre de Dieu, qui s’appelle l’amour du prochain. Je dis bien : acte,
3036
que d’obéissance à l’ordre de Dieu, qui s’appelle
l’
amour du prochain. Je dis bien : acte, et il faut insister là-dessus.
3037
e dis bien : acte, et il faut insister là-dessus.
Le
monde s’est emparé des paroles du Christ et il les a complètement per
3038
Le monde s’est emparé des paroles du Christ et il
les
a complètement perverties. On nous a présenté cet amour du prochain c
3039
commode de vivre en société. On a transporté dans
l’
histoire cet amour qui doit être un acte, une présence et un engagemen
3040
résence et engagement, ces trois mots définissent
la
personne, mais aussi ce que Jésus-Christ nous ordonne d’être : le pro
3041
s aussi ce que Jésus-Christ nous ordonne d’être :
le
prochain. Lorsque les docteurs de la loi voulurent éprouver Jésus, l’
3042
Christ nous ordonne d’être : le prochain. Lorsque
les
docteurs de la loi voulurent éprouver Jésus, l’un d’entre eux se leva
3043
nne d’être : le prochain. Lorsque les docteurs de
la
loi voulurent éprouver Jésus, l’un d’entre eux se leva et lui dit : M
3044
dit par une parabole, celle du Bon Samaritain. Et
le
docteur de la loi découvrit cette vérité que toute sa religion n’avai
3045
rabole, celle du Bon Samaritain. Et le docteur de
la
loi découvrit cette vérité que toute sa religion n’avait pas pu lui f
3046
sa religion n’avait pas pu lui faire comprendre :
le
prochain, c’est celui qui exerce, en actes, la miséricorde. Cet acte,
3047
: le prochain, c’est celui qui exerce, en actes,
la
miséricorde. Cet acte, en chacun de nous, peut être vainqueur de l’Hi
3048
t acte, en chacun de nous, peut être vainqueur de
l’
Histoire. Cet acte, à chaque fois qu’il nous est donné de le faire, ré
3049
. Cet acte, à chaque fois qu’il nous est donné de
le
faire, rétablit le rapport humain, fonde notre destin personnel, et f
3050
e fois qu’il nous est donné de le faire, rétablit
le
rapport humain, fonde notre destin personnel, et fonde aussi la seule
3051
ain, fonde notre destin personnel, et fonde aussi
la
seule société possible. Ne nous y trompons pas : l’acte de la miséric
3052
seule société possible. Ne nous y trompons pas :
l’
acte de la miséricorde, c’est l’acte le plus révolutionnaire qui ait j
3053
iété possible. Ne nous y trompons pas : l’acte de
la
miséricorde, c’est l’acte le plus révolutionnaire qui ait jamais paru
3054
y trompons pas : l’acte de la miséricorde, c’est
l’
acte le plus révolutionnaire qui ait jamais paru dans notre monde. Lui
3055
pons pas : l’acte de la miséricorde, c’est l’acte
le
plus révolutionnaire qui ait jamais paru dans notre monde. Lui seul s
3056
paru dans notre monde. Lui seul suffit à vaincre
les
destins du siècle, lui seul atteint le mal à sa racine, qui est en no
3057
à vaincre les destins du siècle, lui seul atteint
le
mal à sa racine, qui est en nous, qui est au fond de notre désespoir.
3058
est en nous, qui est au fond de notre désespoir.
Les
grandes lois historiques et révolutionnaires peuvent bien nous servir
3059
e matérielle. Mais elles ne pénètrent jamais dans
l’
intimité de notre être, là où réside le désespoir de l’homme qui ne co
3060
amais dans l’intimité de notre être, là où réside
le
désespoir de l’homme qui ne connaît pas son destin. Après tout, l’hom
3061
imité de notre être, là où réside le désespoir de
l’
homme qui ne connaît pas son destin. Après tout, l’homme désespéré, ce
3062
’homme qui ne connaît pas son destin. Après tout,
l’
homme désespéré, ce qu’il veut, ce n’est pas une explication du désesp
3063
ut, ce n’est pas une explication du désespoir qui
le
possède, mais c’est une consolation. Je prends ce mot dans son sens l
3064
t une consolation. Je prends ce mot dans son sens
le
plus fort, tel que le donne l’étymologie. Consoler, c’est littéraleme
3065
prends ce mot dans son sens le plus fort, tel que
le
donne l’étymologie. Consoler, c’est littéralement : rendre complet, u
3066
mot dans son sens le plus fort, tel que le donne
l’
étymologie. Consoler, c’est littéralement : rendre complet, unifier l’
3067
er, c’est littéralement : rendre complet, unifier
l’
être, réunir. L’homme désespéré, l’homme sans vocation personnelle, c’
3068
alement : rendre complet, unifier l’être, réunir.
L’
homme désespéré, l’homme sans vocation personnelle, c’est un homme inc
3069
mplet, unifier l’être, réunir. L’homme désespéré,
l’
homme sans vocation personnelle, c’est un homme incomplet, désuni. Et
3070
c’est un homme incomplet, désuni. Et ce n’est pas
la
connaissance intellectuelle du destin de sa classe ou de sa race qui
3071
in de sa classe ou de sa race qui va suffire pour
l’
arracher à sa misère ; il lui faut une rencontre, un événement, un act
3072
ut une rencontre, un événement, un acte. Et voilà
le
mystère devant lequel je vous laisse maintenant. Nous ne rencontrons
3073
ne au monde, avant d’avoir rencontré Dieu. 42.
L’
Histoire au sens hégélien du mot, c’est-à-dire, plus exactement : l’Év
3074
hégélien du mot, c’est-à-dire, plus exactement :
l’
Évolution. u. Rougemont Denis de, « Destin du siècle ou vocation per
3075
-t-il en France de personnes intelligentes ? Pour
le
juger il ne faudrait sans doute pas se fier au tirage moyen d’un ouvr
3076
e de ce qu’on trouve cela normal. Ce fut toujours
le
cas, me dira-t-on ? Mais ce n’est point partout le cas. L’exemple de
3077
e cas, me dira-t-on ? Mais ce n’est point partout
le
cas. L’exemple de l’Allemagne peut nous faire réfléchir. Les philosop
3078
e dira-t-on ? Mais ce n’est point partout le cas.
L’
exemple de l’Allemagne peut nous faire réfléchir. Les philosophes y co
3079
Mais ce n’est point partout le cas. L’exemple de
l’
Allemagne peut nous faire réfléchir. Les philosophes y connaissent des
3080
exemple de l’Allemagne peut nous faire réfléchir.
Les
philosophes y connaissent des succès dont rien, ici, ne peut donner l
3081
aissent des succès dont rien, ici, ne peut donner
l’
idée ; et même les théologiens. Le Römerbrief, de Barth, en est au 20e
3082
s dont rien, ici, ne peut donner l’idée ; et même
les
théologiens. Le Römerbrief, de Barth, en est au 20e mille. Un Keyserl
3083
ne peut donner l’idée ; et même les théologiens.
Le
Römerbrief, de Barth, en est au 20e mille. Un Keyserling, un Heidegge
3084
gger, un Karl Jaspers ont, dès longtemps, conquis
le
« grand public », celui-là même qui, chez nous, consacre ses loisirs
3085
s loisirs à dévorer des prix Goncourt, justifiant
les
plus grosses manœuvres publicitaires, et la méfiance des éditeurs à l
3086
iant les plus grosses manœuvres publicitaires, et
la
méfiance des éditeurs à l’endroit des meilleurs esprits. À qui faut-i
3087
vres publicitaires, et la méfiance des éditeurs à
l’
endroit des meilleurs esprits. À qui faut-il s’en prendre ? Aux critiq
3088
à cette espèce nouvelle de critiques qu’on nomme
les
« courriéristes littéraires ». Ce n’est un secret pour personne qu’il
3089
nne qu’ils contribuent pour beaucoup à déterminer
le
succès ou l’échec d’une œuvre. Il semblerait, dès lors, que leur auto
3090
ntribuent pour beaucoup à déterminer le succès ou
l’
échec d’une œuvre. Il semblerait, dès lors, que leur autorité — sinon
3091
bénéfice des auteurs réputés « difficiles ». Car
les
autres s’en passent fort bien. Or, c’est exactement le contraire qu’o
3092
tres s’en passent fort bien. Or, c’est exactement
le
contraire qu’on peut voir. Le critique qui dispose d’un feuilleton ré
3093
r, c’est exactement le contraire qu’on peut voir.
Le
critique qui dispose d’un feuilleton régulier dans un hebdomadaire ou
3094
son public. Bien loin d’avoir à cœur de signaler
les
œuvres qui risqueraient, sans lui, d’être incomprises ou ignorées, il
3095
rées, il se contente, la plupart du temps, d’être
l’
écho de la vague rumeur entretenue par la publicité autour d’un « succ
3096
e contente, la plupart du temps, d’être l’écho de
la
vague rumeur entretenue par la publicité autour d’un « succès » de sa
3097
, d’être l’écho de la vague rumeur entretenue par
la
publicité autour d’un « succès » de saison. Mais l’insuccès notoire d
3098
publicité autour d’un « succès » de saison. Mais
l’
insuccès notoire des philosophes auprès du grand public a des causes p
3099
attribuer autant aux philosophes qu’à ceux qui ne
les
lisent plus. Le public se figure que la philosophie est une activité
3100
aux philosophes qu’à ceux qui ne les lisent plus.
Le
public se figure que la philosophie est une activité qui ne le concer
3101
x qui ne les lisent plus. Le public se figure que
la
philosophie est une activité qui ne le concerne pas. Il ne nie pas sa
3102
figure que la philosophie est une activité qui ne
le
concerne pas. Il ne nie pas sa valeur intrinsèque. Ou, du moins, il i
3103
valeur intrinsèque. Ou, du moins, il ignore qu’il
la
nie pratiquement. Il répète avec le latin cet adage bourgeois avant l
3104
ignore qu’il la nie pratiquement. Il répète avec
le
latin cet adage bourgeois avant la lettre : primum vivere, deinde phi
3105
Il répète avec le latin cet adage bourgeois avant
la
lettre : primum vivere, deinde philosophari. Cynisme ou naïveté ? Car
3106
ase, en fait, supprime toute philosophie. Ou bien
le
primum vivere se trouve être réalisé, et quel besoin alors d’un deind
3107
mes, sinon qu’ils vivent bien ! On se souvient de
la
noble réponse de ce proscrit de la Révolution auquel on demandait à s
3108
se souvient de la noble réponse de ce proscrit de
la
Révolution auquel on demandait à son retour en France ce qu’il avait
3109
’ai vécu, Monsieur, c’est bien assez ! ». Ou bien
le
primum vivere se révèle imparfait ; il lui manque quelque chose : pou
3110
rfait ; il lui manque quelque chose : pourra-t-on
l’
ajouter après coup ? On ne complète pas un acte avec des considération
3111
ec des considérations sur cet acte ; ou c’est que
la
philosophie n’est qu’illusion et mystification. Une pensée vivante, u
3112
une pensée qui aide à vivre, trouve son lieu dans
l’
acte et nulle part ailleurs. Mais il faudrait d’abord qu’elle soit ell
3113
rd qu’elle soit elle-même un acte43. Et c’est ici
la
déficience des philosophes qui se montre. Sous prétexte de science, l
3114
losophes qui se montre. Sous prétexte de science,
la
pensée de nos maîtres s’est tellement détachée du concret de nos vies
3115
est tellement détachée du concret de nos vies que
l’
on comprend sans peine l’indifférence où le public la tient. Un philos
3116
concret de nos vies que l’on comprend sans peine
l’
indifférence où le public la tient. Un philosophe « sérieux » pour l’U
3117
es que l’on comprend sans peine l’indifférence où
le
public la tient. Un philosophe « sérieux » pour l’Université c’est tr
3118
n comprend sans peine l’indifférence où le public
la
tient. Un philosophe « sérieux » pour l’Université c’est trop souvent
3119
e public la tient. Un philosophe « sérieux » pour
l’
Université c’est trop souvent un homme que l’étude des problèmes posés
3120
pour l’Université c’est trop souvent un homme que
l’
étude des problèmes posés par sa technique détourne des problèmes qui
3121
penser de ces techniques d’abstention ? ⁂ Tel est
l’
état des choses. Public et philosophes ont si bien pris l’habitude de
3122
es choses. Public et philosophes ont si bien pris
l’
habitude de s’ignorer, qu’on est en droit de se demander si leur renco
3123
se produise, ne signifierait pas une révolution.
Les
évaluations morales du philosophe et les coutumes du citoyen moderne
3124
olution. Les évaluations morales du philosophe et
les
coutumes du citoyen moderne ont perdu toute commune mesure. Que se pa
3125
mmune mesure. Que se passerait-il si un beau jour
le
public se mettait à l’école des penseurs ? On verrait éclater, je pen
3126
sserait-il si un beau jour le public se mettait à
l’
école des penseurs ? On verrait éclater, je pense, l’absurdité d’une p
3127
cole des penseurs ? On verrait éclater, je pense,
l’
absurdité d’une pensée inhumaine, en même temps que l’incohérence d’un
3128
surdité d’une pensée inhumaine, en même temps que
l’
incohérence d’une action trop longtemps dépourvue de tout contrôle spi
3129
ourvue de tout contrôle spirituel. N’est-ce point
l’
obscur pressentiment d’un tel péril qui explique, en dernière analyse,
3130
d’un tel péril qui explique, en dernière analyse,
la
méfiance réciproque dont je viens d’indiquer l’un des symptômes les p
3131
roque dont je viens d’indiquer l’un des symptômes
les
plus extérieurs ? Supposez, maintenant, que la collusion se produise.
3132
s les plus extérieurs ? Supposez, maintenant, que
la
collusion se produise. (L’hypothèse n’est pas absurde : elle s’est vé
3133
posez, maintenant, que la collusion se produise. (
L’
hypothèse n’est pas absurde : elle s’est vérifiée en Allemagne, à prop
3134
e, à propos de Spengler par exemple, dont on sait
l’
influence qu’il exerça sur les prodromes de l’hitlérisme.) Les risques
3135
xemple, dont on sait l’influence qu’il exerça sur
les
prodromes de l’hitlérisme.) Les risques qu’elle entraîne sont proprem
3136
ait l’influence qu’il exerça sur les prodromes de
l’
hitlérisme.) Les risques qu’elle entraîne sont proprement incalculable
3137
qu’il exerça sur les prodromes de l’hitlérisme.)
Les
risques qu’elle entraîne sont proprement incalculables. Qui donc voud
3138
ne sont proprement incalculables. Qui donc voudra
les
encourir ? Ceux-là seuls qui n’ont pas à subordonner la vérité de leu
3139
ourir ? Ceux-là seuls qui n’ont pas à subordonner
la
vérité de leur message aux calculs de l’opportunisme. Quelques exalté
3140
ordonner la vérité de leur message aux calculs de
l’
opportunisme. Quelques exaltés, pensera-t-on ? Quelques cyniques, ou q
3141
és ? Certes, et c’est cela que nous voyons depuis
la
guerre. On pourrait aussi supposer que la leçon des catastrophes dict
3142
depuis la guerre. On pourrait aussi supposer que
la
leçon des catastrophes dictatoriales va réveiller quelques chrétiens.
3143
est-il pas de rappeler aux peuples où se trouvent
les
vraies valeurs, sans attendre que d’autres aient tout faussé, tout co
3144
tout faussé, tout compromis ? Il est certain que
la
pensée chrétienne n’a jamais eu plus impérieuse ni plus nette vocatio
3145
jamais eu plus impérieuse ni plus nette vocation.
Le
lieu, les modes de son obéissance sont plus visibles qu’ils ne le fur
3146
plus impérieuse ni plus nette vocation. Le lieu,
les
modes de son obéissance sont plus visibles qu’ils ne le furent jamais
3147
es de son obéissance sont plus visibles qu’ils ne
le
furent jamais. Si la pensée chrétienne existe, c’est à ce seul niveau
3148
sont plus visibles qu’ils ne le furent jamais. Si
la
pensée chrétienne existe, c’est à ce seul niveau où pensée et action
3149
igne de son nom, c’est à elle seule d’oser ce que
les
autres ne peuvent pas oser. C’est à elle seule d’entreprendre la conf
3150
uvent pas oser. C’est à elle seule d’entreprendre
la
confrontation générale des valeurs dont le monde croit vivre et des v
3151
rendre la confrontation générale des valeurs dont
le
monde croit vivre et des valeurs qui jugent cette vie. C’est à elle,
3152
et non pas au marxisme ni au fascisme, à conduire
la
critique des hérésies morales que toute la bourgeoisie, et le peuple
3153
nduire la critique des hérésies morales que toute
la
bourgeoisie, et le peuple à sa suite, révèrent. Car elle seule, si to
3154
des hérésies morales que toute la bourgeoisie, et
le
peuple à sa suite, révèrent. Car elle seule, si toutefois elle reste
3155
seule n’a rien à y perdre. Faut-il rappeler ici
les
graves avertissements de Berdiaev ? Faut-il une fois de plus évoquer
3156
ts de Berdiaev ? Faut-il une fois de plus évoquer
les
menaces qui pèsent sur la civilisation ? Ou verra-t-on que le service
3157
e fois de plus évoquer les menaces qui pèsent sur
la
civilisation ? Ou verra-t-on que le service que la pensée chrétienne
3158
ui pèsent sur la civilisation ? Ou verra-t-on que
le
service que la pensée chrétienne doit rendre n’est un service rendu a
3159
a civilisation ? Ou verra-t-on que le service que
la
pensée chrétienne doit rendre n’est un service rendu au monde que si
3160
que si d’abord il est obéissance ? Ce ne sont pas
les
catastrophes qui devraient effrayer le chrétien, mais le risque plus
3161
sont pas les catastrophes qui devraient effrayer
le
chrétien, mais le risque plus immédiat de faillir à sa vocation. Ces
3162
strophes qui devraient effrayer le chrétien, mais
le
risque plus immédiat de faillir à sa vocation. Ces réflexions nous s
3163
oduction à deux essais de philosophes chrétiens :
L’
Homme du ressentiment, de Max Scheler44, Position et approches concrèt
3164
urs » que tout le monde sent nécessaire, mais que
la
foi seule rend possible. ⁂ Max Scheler se rattachait à l’école allema
3165
eule rend possible. ⁂ Max Scheler se rattachait à
l’
école allemande des phénoménologues, illustrée par Husserl et Martin H
3166
trée par Husserl et Martin Heidegger. On sait que
la
coutume de ces philosophes est de fonder leurs analyses sur des total
3167
u’elles se présentent au sein d’un ensemble vécu.
Le
grand service rendu par la phénoménologie, c’est de nous avoir délivr
3168
in d’un ensemble vécu. Le grand service rendu par
la
phénoménologie, c’est de nous avoir délivrés d’une psychologie qui di
3169
s avoir délivrés d’une psychologie qui dissociait
les
unités vivantes en éléments abstraits, et prétendait examiner ensuite
3170
uite ces éléments sans tenir compte du sens et de
l’
intention de l’ensemble. La « totalité d’expérience et d’actions vécue
3171
ts sans tenir compte du sens et de l’intention de
l’
ensemble. La « totalité d’expérience et d’actions vécues » que Scheler
3172
r compte du sens et de l’intention de l’ensemble.
La
« totalité d’expérience et d’actions vécues » que Scheler étudie dans
3173
s » que Scheler étudie dans ce petit livre, c’est
le
phénomène que Nietzsche a baptisé ressentiment. Pour Nietzsche, on s’
3174
ressentiment. Pour Nietzsche, on s’en souvient46,
l’
amour chrétien n’est que « la fine fleur du ressentiment » que les nat
3175
on s’en souvient46, l’amour chrétien n’est que «
la
fine fleur du ressentiment » que les natures faibles vouent aux valeu
3176
n n’est que « la fine fleur du ressentiment » que
les
natures faibles vouent aux valeurs aristocratiques. La haine jalouse
3177
tures faibles vouent aux valeurs aristocratiques.
La
haine jalouse et rancunière de l’esclave opprimé, a trouvé, selon Nie
3178
ristocratiques. La haine jalouse et rancunière de
l’
esclave opprimé, a trouvé, selon Nietzsche, son expression détournée d
3179
é, selon Nietzsche, son expression détournée dans
l’
affirmation paradoxale que les premiers seront les derniers, ou que la
3180
l’affirmation paradoxale que les premiers seront
les
derniers, ou que la vraie noblesse réside dans la misère. C’est ce re
3181
xale que les premiers seront les derniers, ou que
la
vraie noblesse réside dans la misère. C’est ce renversement des valeu
3182
es derniers, ou que la vraie noblesse réside dans
la
misère. C’est ce renversement des valeurs « nobles » qu’il ne cesse d
3183
e de reprocher au christianisme. Voici comment il
le
décrit : … l’impuissance qui n’use pas de représailles devient par u
3184
au christianisme. Voici comment il le décrit : …
l’
impuissance qui n’use pas de représailles devient par un mensonge, la
3185
’use pas de représailles devient par un mensonge,
la
« bonté » ; la craintive bassesse, « humilité » ; la soumission à ceu
3186
résailles devient par un mensonge, la « bonté » ;
la
craintive bassesse, « humilité » ; la soumission à ceux qu’on hait, «
3187
« bonté » ; la craintive bassesse, « humilité » ;
la
soumission à ceux qu’on hait, « obéissance » (c’est-à-dire l’obéissan
3188
n à ceux qu’on hait, « obéissance » (c’est-à-dire
l’
obéissance à quelqu’un dont ils disent qu’il ordonne cette soumission
3189
t ils disent qu’il ordonne cette soumission : ils
l’
appellent Dieu). Ce qu’il y a d’inoffensif chez l’être faible, sa lâch
3190
l’appellent Dieu). Ce qu’il y a d’inoffensif chez
l’
être faible, sa lâcheté, cette lâcheté dont il est riche et qui, chez
3191
e et qui, chez lui, fait antichambre, et attend à
la
porte, inévitablement, cette lâcheté se pare ici d’un nom bien sonnan
3192
ent « ne pas vouloir se venger », et parfois même
le
pardon des offenses (« car ils ne savent ce qu’ils font — nous seuls
3193
seuls savons ce qu’ils font »). On parle aussi de
l’
« amour de ses ennemis » et l’on « sue à grosses gouttes ». Il est fa
3194
. On parle aussi de l’« amour de ses ennemis » et
l’
on « sue à grosses gouttes ». Il est facile de dire que Nietzsche exa
3195
e Nietzsche exagère ; plus difficile de contester
la
cruelle pénétration dont témoigne un passage de ce genre. Mais si l’o
3196
ion dont témoigne un passage de ce genre. Mais si
l’
on donne raison à sa description du ressentiment — ce que je fais pour
3197
s pour ma part sans réserve —, il reste à voir si
les
causes en sont bien celles que Nietzsche allègue. Pour Scheler, les r
3198
bien celles que Nietzsche allègue. Pour Scheler,
les
reproches de Nietzsche s’adressent en vérité à l’humanitarisme, et nu
3199
es reproches de Nietzsche s’adressent en vérité à
l’
humanitarisme, et nullement à l’Évangile. Le « christianisme » qu’atta
3200
ssent en vérité à l’humanitarisme, et nullement à
l’
Évangile. Le « christianisme » qu’attaquait Nietzsche, c’est, en réali
3201
ité à l’humanitarisme, et nullement à l’Évangile.
Le
« christianisme » qu’attaquait Nietzsche, c’est, en réalité, la moral
3202
isme » qu’attaquait Nietzsche, c’est, en réalité,
la
morale bourgeoise. Scheler le démontre avec maîtrise dans un chapitre
3203
c’est, en réalité, la morale bourgeoise. Scheler
le
démontre avec maîtrise dans un chapitre consacré aux valeurs humanita
3204
aux valeurs humanitaires, qui me paraît renfermer
l’
essentiel de son livre. Le lecteur se sent pris de vertige à découvrir
3205
qui me paraît renfermer l’essentiel de son livre.
Le
lecteur se sent pris de vertige à découvrir la profondeur et la gravi
3206
e. Le lecteur se sent pris de vertige à découvrir
la
profondeur et la gravité des confusions morales dans lesquelles nous
3207
sent pris de vertige à découvrir la profondeur et
la
gravité des confusions morales dans lesquelles nous vivons. Je ne con
3208
se centrale : nous en sommes venus à substituer «
l’
amour de l’humanité » à l’amour du prochain commandé par le Christ : e
3209
: nous en sommes venus à substituer « l’amour de
l’
humanité » à l’amour du prochain commandé par le Christ : et c’est au
3210
es venus à substituer « l’amour de l’humanité » à
l’
amour du prochain commandé par le Christ : et c’est au nom de cet amou
3211
e l’humanité » à l’amour du prochain commandé par
le
Christ : et c’est au nom de cet amour de l’humanité que nous revendiq
3212
é par le Christ : et c’est au nom de cet amour de
l’
humanité que nous revendiquons les fausses valeurs décrites par Nietzs
3213
de cet amour de l’humanité que nous revendiquons
les
fausses valeurs décrites par Nietzsche. Nous ne voulons plus l’acte d
3214
eurs décrites par Nietzsche. Nous ne voulons plus
l’
acte d’amour personnel — qui est une valeur héroïque —, mais nous prôn
3215
l exige de nous un moindre sacrifice. (On éloigne
l’
amour : ainsi l’amour de la patrie passe avant celui du prochain, l’am
3216
un moindre sacrifice. (On éloigne l’amour : ainsi
l’
amour de la patrie passe avant celui du prochain, l’amour du genre hum
3217
sacrifice. (On éloigne l’amour : ainsi l’amour de
la
patrie passe avant celui du prochain, l’amour du genre humain avant c
3218
amour de la patrie passe avant celui du prochain,
l’
amour du genre humain avant celui de la patrie.) Cet humanitarisme ent
3219
prochain, l’amour du genre humain avant celui de
la
patrie.) Cet humanitarisme entraîne toute une série de perversions :
3220
ersions : un certain altruisme d’abord, qui prend
la
place de l’acte de miséricorde ; une pitié veule et platonique qui es
3221
certain altruisme d’abord, qui prend la place de
l’
acte de miséricorde ; une pitié veule et platonique qui est le contrai
3222
séricorde ; une pitié veule et platonique qui est
le
contraire du courage et non pas de la cruauté ; un internationalisme
3223
que qui est le contraire du courage et non pas de
la
cruauté ; un internationalisme qui n’est qu’une rancune contre la pat
3224
internationalisme qui n’est qu’une rancune contre
la
patrie ; un pacifisme qui traduit bien plus la crainte de « se faire
3225
re la patrie ; un pacifisme qui traduit bien plus
la
crainte de « se faire des ennemis » que la surnaturelle paix annoncée
3226
n plus la crainte de « se faire des ennemis » que
la
surnaturelle paix annoncée par le Christ à ceux qui luttent (dans leu
3227
s ennemis » que la surnaturelle paix annoncée par
le
Christ à ceux qui luttent (dans leurs luttes et au-dessus d’elles) ;
3228
et au-dessus d’elles) ; un égalitarisme qui renie
la
réalité chrétienne de la vocation… Je suis loin d’épuiser la liste. L
3229
n égalitarisme qui renie la réalité chrétienne de
la
vocation… Je suis loin d’épuiser la liste. L’extrême gravité que prés
3230
chrétienne de la vocation… Je suis loin d’épuiser
la
liste. L’extrême gravité que présentent ces perversions de l’Évangile
3231
de la vocation… Je suis loin d’épuiser la liste.
L’
extrême gravité que présentent ces perversions de l’Évangile vient de
3232
extrême gravité que présentent ces perversions de
l’
Évangile vient de ce que les chrétiens s’y sont laissés prendre. C’est
3233
ent ces perversions de l’Évangile vient de ce que
les
chrétiens s’y sont laissés prendre. C’est tout le procès de la morale
3234
es chrétiens s’y sont laissés prendre. C’est tout
le
procès de la morale laïque, ou kantienne, qu’amorce ici Scheler. Je n
3235
s’y sont laissés prendre. C’est tout le procès de
la
morale laïque, ou kantienne, qu’amorce ici Scheler. Je ne veux donner
3236
qu’un exemple des dissociations qu’il propose.
L’
Épargne, autrefois participation de l’idéal évangélique de la pauvreté
3237
propose. L’Épargne, autrefois participation de
l’
idéal évangélique de la pauvreté volontaire, c’est-à-dire de la notion
3238
autrefois participation de l’idéal évangélique de
la
pauvreté volontaire, c’est-à-dire de la notion de sacrifice, et, par
3239
élique de la pauvreté volontaire, c’est-à-dire de
la
notion de sacrifice, et, par ailleurs, qualité pratique (et non pas v
3240
res seuls, est désormais une vertu sans lien avec
la
notion de sacrifice ou avec l’idéal évangélique et, pour comble, vert
3241
rtu sans lien avec la notion de sacrifice ou avec
l’
idéal évangélique et, pour comble, vertu de riche, mais qui retient en
3242
r comble, vertu de riche, mais qui retient encore
le
pathos chrétien que renferme le mot. Ces quelques lignes décrivent a
3243
ui retient encore le pathos chrétien que renferme
le
mot. Ces quelques lignes décrivent assez bien le mouvement général d
3244
le mot. Ces quelques lignes décrivent assez bien
le
mouvement général de la critique de Scheler. À l’origine de toutes le
3245
gnes décrivent assez bien le mouvement général de
la
critique de Scheler. À l’origine de toutes les valeurs bourgeoises il
3246
le mouvement général de la critique de Scheler. À
l’
origine de toutes les valeurs bourgeoises il n’y a pas la Loi, ni l’Év
3247
de la critique de Scheler. À l’origine de toutes
les
valeurs bourgeoises il n’y a pas la Loi, ni l’Évangile, il y a tout a
3248
ne de toutes les valeurs bourgeoises il n’y a pas
la
Loi, ni l’Évangile, il y a tout au contraire une sournoise révolte de
3249
s les valeurs bourgeoises il n’y a pas la Loi, ni
l’
Évangile, il y a tout au contraire une sournoise révolte de l’homme na
3250
il y a tout au contraire une sournoise révolte de
l’
homme naturel, une poussée de ressentiment contre l’héroïsme chrétien
3251
homme naturel, une poussée de ressentiment contre
l’
héroïsme chrétien ; à l’origine de l’amour de l’humanité, il y a, comm
3252
ée de ressentiment contre l’héroïsme chrétien ; à
l’
origine de l’amour de l’humanité, il y a, comme Fichte l’avait vu, une
3253
iment contre l’héroïsme chrétien ; à l’origine de
l’
amour de l’humanité, il y a, comme Fichte l’avait vu, une haine des ho
3254
e l’héroïsme chrétien ; à l’origine de l’amour de
l’
humanité, il y a, comme Fichte l’avait vu, une haine des hommes ; bien
3255
ne de l’amour de l’humanité, il y a, comme Fichte
l’
avait vu, une haine des hommes ; bien plus : une révolte contre Dieu.
3256
des hommes ; bien plus : une révolte contre Dieu.
L’
homme du ressentiment, ce n’est pas le chrétien, c’est le bourgeois do
3257
ontre Dieu. L’homme du ressentiment, ce n’est pas
le
chrétien, c’est le bourgeois dont la morale usurpe l’apparence évangé
3258
du ressentiment, ce n’est pas le chrétien, c’est
le
bourgeois dont la morale usurpe l’apparence évangélique, en haine de
3259
ce n’est pas le chrétien, c’est le bourgeois dont
la
morale usurpe l’apparence évangélique, en haine de l’Évangile et de s
3260
hrétien, c’est le bourgeois dont la morale usurpe
l’
apparence évangélique, en haine de l’Évangile et de ses exigences conc
3261
orale usurpe l’apparence évangélique, en haine de
l’
Évangile et de ses exigences concrètes. Est-il besoin de marquer, pour
3262
oin de marquer, pour finir, que cette critique de
l’
esprit bourgeois englobe également le socialisme humanitaire et le mar
3263
critique de l’esprit bourgeois englobe également
le
socialisme humanitaire et le marxisme, qui sont, à tant d’égards, de
3264
is englobe également le socialisme humanitaire et
le
marxisme, qui sont, à tant d’égards, de simples aveux des tendances p
3265
e Max Scheler — au moment du moins où il écrivait
L’
Homme du ressentiment 47, M. Marcel est catholique. Sa méditation sur
3266
t 47, M. Marcel est catholique. Sa méditation sur
le
Mystère ontologique est la première œuvre philosophique qu’il ait pub
3267
x dont nous devons attendre qu’il fasse passer de
l’
air dans la philosophie française ; un de ceux pour lesquels philosoph
3268
devons attendre qu’il fasse passer de l’air dans
la
philosophie française ; un de ceux pour lesquels philosopher ne figur
3269
n de ceux pour lesquels philosopher ne figure pas
l’
activité de ceux qui n’en veulent point avoir. Son essai manifeste une
3270
ette de passer outre aux prudences intéressées de
la
scolastique laïque. Nos après-venants seront sans doute fort étonnés
3271
pour utiliser en philosophie des motifs tels que
le
désespoir, l’espérance, la présence ou la fidélité. Certes, l’exemple
3272
en philosophie des motifs tels que le désespoir,
l’
espérance, la présence ou la fidélité. Certes, l’exemple de la phénomé
3273
ie des motifs tels que le désespoir, l’espérance,
la
présence ou la fidélité. Certes, l’exemple de la phénoménologie a ouv
3274
els que le désespoir, l’espérance, la présence ou
la
fidélité. Certes, l’exemple de la phénoménologie a ouvert la voie à u
3275
l’espérance, la présence ou la fidélité. Certes,
l’
exemple de la phénoménologie a ouvert la voie à une nouvelle liberté d
3276
la présence ou la fidélité. Certes, l’exemple de
la
phénoménologie a ouvert la voie à une nouvelle liberté de la pensée ;
3277
. Certes, l’exemple de la phénoménologie a ouvert
la
voie à une nouvelle liberté de la pensée ; mais, jusqu’ici, peu l’ont
3278
ologie a ouvert la voie à une nouvelle liberté de
la
pensée ; mais, jusqu’ici, peu l’ont suivie, en France. Sachons gré à
3279
velle liberté de la pensée ; mais, jusqu’ici, peu
l’
ont suivie, en France. Sachons gré à M. Gabriel Marcel de nous donner
3280
e. Sachons gré à M. Gabriel Marcel de nous donner
l’
exemple d’une « présence » et d’une « fidélité » vraiment chrétienne.
3281
« Philosopher, c’est apprendre à mourir », disait
le
triste Cicéron, et Montaigne l’en loue. Pour M. Marcel, on lui ferait
3282
mourir », disait le triste Cicéron, et Montaigne
l’
en loue. Pour M. Marcel, on lui ferait plus volontiers dire que philos
3283
à ne pas se suicider. « On pourrait même dire que
la
possibilité permanente du suicide est en ce sens48 le point d’amorçag
3284
ossibilité permanente du suicide est en ce sens48
le
point d’amorçage peut-être essentiel de toute pensée métaphysique » (
3285
e métaphysique » (p. 276). Je ne puis résumer que
les
thèmes d’une méditation qui se propose pour objet d’approcher le myst
3286
méditation qui se propose pour objet d’approcher
le
mystère indéfinissable de l’être. « Il faut qu’il y ait, dit M. Marce
3287
ur objet d’approcher le mystère indéfinissable de
l’
être. « Il faut qu’il y ait, dit M. Marcel, ou il faudrait qu’il y eût
3288
ait, dit M. Marcel, ou il faudrait qu’il y eût de
l’
être, que tout ne se réduisît pas à un jeu d’apparences successives et
3289
ce dernier mot est essentiel — ou, pour reprendre
la
phrase de Shakespeare, à une histoire racontée par un idiot » (p. 261
3290
toire de ce genre qui caractérise malheureusement
l’
existence de l’homme moderne, emprisonné dans la catégorie du « tout n
3291
re qui caractérise malheureusement l’existence de
l’
homme moderne, emprisonné dans la catégorie du « tout naturel » incapa
3292
t l’existence de l’homme moderne, emprisonné dans
la
catégorie du « tout naturel » incapable, par suite, de s’interroger s
3293
turel » incapable, par suite, de s’interroger sur
les
sources de son être. Les philosophes lui sont de peu de recours. Ils
3294
ite, de s’interroger sur les sources de son être.
Les
philosophes lui sont de peu de recours. Ils ont fait de l’être un pro
3295
ophes lui sont de peu de recours. Ils ont fait de
l’
être un problème qu’ils placent devant eux et qu’ils se mettent à crit
3296
s’ils n’étaient pas eux-mêmes en jeu ! Mais, dit
l’
auteur, « je ne puis me dispenser de me demander du même coup : qui su
3297
u même coup : qui suis-je, moi qui questionne sur
l’
être ? »49 (p. 264). Le problème devient alors tout autre chose qu’un
3298
e, moi qui questionne sur l’être ? »49 (p. 264).
Le
problème devient alors tout autre chose qu’un problème : un mystère.
3299
r elle-même une sorte de participation concrète à
l’
être. Démarche négative du désespoir, positive de l’espérance, — elles
3300
être. Démarche négative du désespoir, positive de
l’
espérance, — elles sont inséparables jusqu’au bout, note M. Marcel, qu
3301
m’apparaît ici très « dialectique » — démarche de
la
création qui va toujours dans le sens de l’être, à condition qu’elle
3302
» — démarche de la création qui va toujours dans
le
sens de l’être, à condition qu’elle soit soutenue par une fidélité qu
3303
he de la création qui va toujours dans le sens de
l’
être, à condition qu’elle soit soutenue par une fidélité que l’auteur
3304
dition qu’elle soit soutenue par une fidélité que
l’
auteur définit comme « une présence activement perpétuée ». Et tout ce
3305
ement perpétuée ». Et tout cela tend à créer dans
l’
âme une disponibilité paradoxale : « parce que l’âme sait qu’elle n’es
3306
l’âme une disponibilité paradoxale : « parce que
l’
âme sait qu’elle n’est pas à elle-même, et que le seul usage entièreme
3307
l’âme sait qu’elle n’est pas à elle-même, et que
le
seul usage entièrement légitime qu’elle puisse faire de sa liberté co
3308
é un certain nombre de motifs vitaux négligés par
la
technique idéaliste, d’autre part, il faut vivement louer l’auteur de
3309
e idéaliste, d’autre part, il faut vivement louer
l’
auteur de conserver à chaque page le souci des références à l’actuel.
3310
ivement louer l’auteur de conserver à chaque page
le
souci des références à l’actuel. La description qu’il fait de l’homme
3311
conserver à chaque page le souci des références à
l’
actuel. La description qu’il fait de l’homme moderne réduit à un compl
3312
à chaque page le souci des références à l’actuel.
La
description qu’il fait de l’homme moderne réduit à un complexe de fon
3313
férences à l’actuel. La description qu’il fait de
l’
homme moderne réduit à un complexe de fonctions ; ses allusions au dés
3314
de fonctions ; ses allusions au désordre social ;
la
corrélation qu’il indique entre l’optimisme du progrès technique et u
3315
ordre social ; la corrélation qu’il indique entre
l’
optimisme du progrès technique et une philosophie du désespoir, — auta
3316
sespoir, — autant de traits qui nous assurent que
les
problèmes débattus dans ce livre sont de ceux qui se posent ; non poi
3317
ont de ceux qui se posent ; non point de ceux que
l’
on se plaît à poser gratuitement pour esquiver les choix concrets. La
3318
l’on se plaît à poser gratuitement pour esquiver
les
choix concrets. La démarche assez sinueuse, le titre un peu rebutant
3319
er gratuitement pour esquiver les choix concrets.
La
démarche assez sinueuse, le titre un peu rebutant de cet essai, ne no
3320
r les choix concrets. La démarche assez sinueuse,
le
titre un peu rebutant de cet essai, ne nous empêcheront pas de voir q
3321
sai, ne nous empêcheront pas de voir qu’il y a là
les
éléments d’une critique pénétrante de nos modes de vivre, je dirai pl
3322
us : quelques-uns des fondements d’une éthique de
l’
être qu’il est urgent que les chrétiens opposent à la « morale des com
3323
ents d’une éthique de l’être qu’il est urgent que
les
chrétiens opposent à la « morale des commerçants » — comme disait Nie
3324
tre qu’il est urgent que les chrétiens opposent à
la
« morale des commerçants » — comme disait Nietzsche — qui domine notr
3325
qui domine notre société. 43. On trouvera dans
les
excellents articles d’Henry Corbin, publiés par Hic et Nunc (n° 1 et
3326
enry Corbin, publiés par Hic et Nunc (n° 1 et 2),
le
développement de cette thèse : que philosopher ne peut être qu’une fo
3327
orme de vivre. 44. Librairie Gallimard, collect.
Les
Essais. Traduit de l’allemand par un anonyme. 45. Cet essai constitu
3328
rairie Gallimard, collect. Les Essais. Traduit de
l’
allemand par un anonyme. 45. Cet essai constitue la seconde partie d’
3329
constitue la seconde partie d’un volume intitulé
le
Monde cassé. La première partie est un drame en quatre actes qui n’es
3330
n’est pas à proprement parler une illustration de
l’
essai, mais qui est né dans le même temps, et participe de la même pro
3331
une illustration de l’essai, mais qui est né dans
le
même temps, et participe de la même problématique (Desclée, De Brouwe
3332
is qui est né dans le même temps, et participe de
la
même problématique (Desclée, De Brouwer). 46. Cf. Généalogie de la M
3333
que (Desclée, De Brouwer). 46. Cf. Généalogie de
la
Morale (Mercure de France). 47. Converti au catholicisme après avoir
3334
t devenu l’un des chefs du parti catholique parmi
les
intellectuels allemands, Scheler rompit finalement avec l’Église et r
3335
ectuels allemands, Scheler rompit finalement avec
l’
Église et revint à un nietzschéisme violent. On voit percer par endroi
3336
ce livre, une espèce de ressentiment à l’égard de
la
Réforme : d’où une série d’erreurs assez grossières sur Luther. 48.
3337
série d’erreurs assez grossières sur Luther. 48.
L’
auteur entend : relativement à la possibilité universelle du désespoir
3338
sur Luther. 48. L’auteur entend : relativement à
la
possibilité universelle du désespoir. Un rapprochement avec Kierkegaa
3339
araît s’imposer ici. 49. M. Marcel introduit ici
le
motif du recueillement, qui lui paraît essentiel à toute existence on
3340
essentiel à toute existence ontologique. J’avoue
la
plus vive méfiance à l’égard de ce terme qui me paraît dangereusement
3341
paraît dangereusement lié à certain idéalisme de
la
« vie intérieure ». Je ne vois pas où le recueillement décrit par M.
3342
lisme de la « vie intérieure ». Je ne vois pas où
le
recueillement décrit par M. Marcel trouverait sa place, entre la priè
3343
t décrit par M. Marcel trouverait sa place, entre
la
prière et l’acte, seuls moments d’unité dans la vie du chrétien. v.
3344
M. Marcel trouverait sa place, entre la prière et
l’
acte, seuls moments d’unité dans la vie du chrétien. v. Rougemont De
3345
e la prière et l’acte, seuls moments d’unité dans
la
vie du chrétien. v. Rougemont Denis de, « Deux essais de philosophe
3346
uit volumes de papiers posthumes, fut composée en
l’
espace de douze années. Le père de Kierkegaard avait passé son enfance
3347
thumes, fut composée en l’espace de douze années.
Le
père de Kierkegaard avait passé son enfance à garder les moutons dans
3348
e de Kierkegaard avait passé son enfance à garder
les
moutons dans la plaine du Jutland. Un jour, accablé par la misère, il
3349
avait passé son enfance à garder les moutons dans
la
plaine du Jutland. Un jour, accablé par la misère, il était monté sur
3350
s dans la plaine du Jutland. Un jour, accablé par
la
misère, il était monté sur un petit tertre et il avait maudit le Dieu
3351
tait monté sur un petit tertre et il avait maudit
le
Dieu tout-puissant qui le laissait mourir de faim. Ce blasphème assom
3352
rtre et il avait maudit le Dieu tout-puissant qui
le
laissait mourir de faim. Ce blasphème assombrit toute sa vie ; il ne
3353
faim. Ce blasphème assombrit toute sa vie ; il ne
l’
empêcha pas de faire fortune. Et c’est ainsi que Kierkegaard reçut en
3354
lle. Du secret il tira son œuvre ; sa fortune, il
la
confia à l’un de ses frères, ne voulant pas avoir affaire aux banques
3355
squ’il mourut, à 42 ans, il n’en subsistait rien.
L’
argent provenait d’une malédiction, pensait-il, il l’avait donc dilapi
3356
rgent provenait d’une malédiction, pensait-il, il
l’
avait donc dilapidé, surtout en dons. Sa vie était très simple. Il tra
3357
très simple. Il travaillait une grande partie de
la
nuit. Il aimait se promener à l’aube. Puis il se remettait à écrire.
3358
grande partie de la nuit. Il aimait se promener à
l’
aube. Puis il se remettait à écrire. Vers midi, on le voyait parcourir
3359
ube. Puis il se remettait à écrire. Vers midi, on
le
voyait parcourir la rue la plus animée de la ville, parler, rire et d
3360
ttait à écrire. Vers midi, on le voyait parcourir
la
rue la plus animée de la ville, parler, rire et discuter avec des bou
3361
écrire. Vers midi, on le voyait parcourir la rue
la
plus animée de la ville, parler, rire et discuter avec des bourgeois,
3362
, on le voyait parcourir la rue la plus animée de
la
ville, parler, rire et discuter avec des bourgeois, des jeunes filles
3363
jeunes filles, des balayeurs, des intellectuels,
le
petit peuple. On connaissait sa silhouette, ses plaisanteries, il ava
3364
gende d’« original ». On savait aussi qu’il était
le
meilleur écrivain de son pays. Sa première œuvre eut un immense succè
3365
ès ; mais à mesure qu’il se fit mieux comprendre,
le
public s’écarta, effrayé. Lorsqu’en 1854 il se mit à attaquer de fron
3366
t à attaquer de front, avec une extrême violence,
le
christianisme officiel et les évêques qui avaient loué ses premières
3367
ne extrême violence, le christianisme officiel et
les
évêques qui avaient loué ses premières œuvres, il se vit abandonné da
3368
ué ses premières œuvres, il se vit abandonné dans
la
plus complète solitude qu’ait jamais connue un grand esprit. Un an pl
3369
nnue un grand esprit. Un an plus tard, épuisé par
la
lutte, il tomba dans la rue. On le transporta à l’hôpital, où il mour
3370
an plus tard, épuisé par la lutte, il tomba dans
la
rue. On le transporta à l’hôpital, où il mourut paisiblement, en « sa
3371
rd, épuisé par la lutte, il tomba dans la rue. On
le
transporta à l’hôpital, où il mourut paisiblement, en « saluant tous
3372
a lutte, il tomba dans la rue. On le transporta à
l’
hôpital, où il mourut paisiblement, en « saluant tous les hommes ». Le
3373
tal, où il mourut paisiblement, en « saluant tous
les
hommes ». Le seul événement extérieur de sa vie fut la rupture de ses
3374
rut paisiblement, en « saluant tous les hommes ».
Le
seul événement extérieur de sa vie fut la rupture de ses fiançailles
3375
mmes ». Le seul événement extérieur de sa vie fut
la
rupture de ses fiançailles avec Régine Olsen. Mais son acte, après le
3376
ir accompli sa mission, ce fut son attaque contre
le
christianisme officiel, au nom du Christ de l’Évangile. Il avait term
3377
au nom du Christ de l’Évangile. Il avait terminé
les
études de théologie, mais il ne fut jamais pasteur. Il lui arriva pou
3378
pourtant de prêcher, et ses sermons, réunis sous
le
titre général de Discours d’édification, remplissent plusieurs volume
3379
ication, remplissent plusieurs volumes. Ce furent
les
seuls écrits qu’il publia sous son nom. Tous ses ouvrages esthétiques
3380
us ses ouvrages esthétiques et philosophiques, de
la
Répétition à l’Exercice du christianisme, en passant par la Maladie m
3381
esthétiques et philosophiques, de la Répétition à
l’
Exercice du christianisme, en passant par la Maladie mortelle 50 et le
3382
ion à l’Exercice du christianisme, en passant par
la
Maladie mortelle 50 et le Concept d’angoisse, parurent sous divers ps
3383
ianisme, en passant par la Maladie mortelle 50 et
le
Concept d’angoisse, parurent sous divers pseudonymes symboliques. Il
3384
par là que ces ouvrages n’exprimaient pas encore
la
totalité de son message chrétien, et qu’il ne pouvait pas en assumer
3385
sage chrétien, et qu’il ne pouvait pas en assumer
l’
entière responsabilité devant Dieu et devant les hommes. Ce ne fut qu’
3386
er l’entière responsabilité devant Dieu et devant
les
hommes. Ce ne fut qu’à la fin de sa vie qu’il s’offrit sans masques à
3387
devant Dieu et devant les hommes. Ce ne fut qu’à
la
fin de sa vie qu’il s’offrit sans masques à la lutte contre l’Église
3388
’à la fin de sa vie qu’il s’offrit sans masques à
la
lutte contre l’Église établie, lutte qui devait le mener à la mort pa
3389
vie qu’il s’offrit sans masques à la lutte contre
l’
Église établie, lutte qui devait le mener à la mort parce qu’elle acco
3390
a lutte contre l’Église établie, lutte qui devait
le
mener à la mort parce qu’elle accomplissait sa vocation chrétienne. ⁂
3391
tre l’Église établie, lutte qui devait le mener à
la
mort parce qu’elle accomplissait sa vocation chrétienne. ⁂ On a compa
3392
à tendance religieuse » et non pas un « témoin de
la
vérité » ; c’est qu’il se faisait du christianisme une idée si pure e
3393
dire chrétien. Cette position paradoxale a permis
les
interprétations les plus diverses. Elle assure aussi à sa pensée une
3394
position paradoxale a permis les interprétations
les
plus diverses. Elle assure aussi à sa pensée une influence multiforme
3395
ne influence multiforme, et qui va croissant avec
le
temps. La philosophie allemande contemporaine, avec ses deux grands m
3396
ce multiforme, et qui va croissant avec le temps.
La
philosophie allemande contemporaine, avec ses deux grands maîtres, He
3397
eidegger et Jaspers, procède de sa philosophie de
l’
existence. La théologie barthienne se réclame de sa thèse principale :
3398
aspers, procède de sa philosophie de l’existence.
La
théologie barthienne se réclame de sa thèse principale : « Il y a une
3399
une différence qualitative infinie entre Dieu et
l’
homme. » Le sens réel et profond de toute son œuvre réside dans sa pro
3400
ence qualitative infinie entre Dieu et l’homme. »
Le
sens réel et profond de toute son œuvre réside dans sa protestation à
3401
et pourtant foncièrement charitable en faveur de
l’
absolu évangélique. Voici le jugement qu’un des meilleurs critiques de
3402
aritable en faveur de l’absolu évangélique. Voici
le
jugement qu’un des meilleurs critiques de ce temps51 a porté sur l’en
3403
des meilleurs critiques de ce temps51 a porté sur
l’
ensemble de ses écrits : Kierkegaard fut le dernier grand protestant.
3404
gaard fut le dernier grand protestant. On ne peut
le
comparer qu’aux grands fondateurs du christianisme, à Luther, à Calvi
3405
ateurs du christianisme, à Luther, à Calvin. Tous
les
autres paraissent petits à côté de lui. La question essentielle pour
3406
Tous les autres paraissent petits à côté de lui.
La
question essentielle pour Kierkegaard était : Comment deviendrai-je c
3407
, un protestant pouvait trouver pareille formule…
L’
œuvre la plus profonde et la plus originale de Kierkegaard est son Con
3408
testant pouvait trouver pareille formule… L’œuvre
la
plus profonde et la plus originale de Kierkegaard est son Concept de
3409
ver pareille formule… L’œuvre la plus profonde et
la
plus originale de Kierkegaard est son Concept de l’angoisse, auquel o
3410
plus originale de Kierkegaard est son Concept de
l’
angoisse, auquel on ne peut trouver d’analogie que chez Dostoïevski. K
3411
chent de pair, et aucun autre esprit du siècle ne
les
dépasse. 50. Traduite en français sous le titre de Traité du déses
3412
ne les dépasse. 50. Traduite en français sous
le
titre de Traité du désespoir. 51. Rudolf Kassner, dans Commerce, n°
3413
ssité de Kierkegaard (août 1934)x On appelle
l’
esprit… De quoi se plaint l’intelligence ? Si l’on en croit les écr
3414
)x On appelle l’esprit… De quoi se plaint
l’
intelligence ? Si l’on en croit les écrits les plus dignes de formuler
3415
’esprit… De quoi se plaint l’intelligence ? Si
l’
on en croit les écrits les plus dignes de formuler son opinion, et qui
3416
quoi se plaint l’intelligence ? Si l’on en croit
les
écrits les plus dignes de formuler son opinion, et qui sont pleins d’
3417
aint l’intelligence ? Si l’on en croit les écrits
les
plus dignes de formuler son opinion, et qui sont pleins d’amères prot
3418
et qui sont pleins d’amères protestations contre
le
règne de la masse et les outrages divers encourus par l’individu, les
3419
pleins d’amères protestations contre le règne de
la
masse et les outrages divers encourus par l’individu, les Puissances
3420
ères protestations contre le règne de la masse et
les
outrages divers encourus par l’individu, les Puissances anonymes et l
3421
e de la masse et les outrages divers encourus par
l’
individu, les Puissances anonymes et le Standard seraient en voie de t
3422
e et les outrages divers encourus par l’individu,
les
Puissances anonymes et le Standard seraient en voie de triompher, et
3423
courus par l’individu, les Puissances anonymes et
le
Standard seraient en voie de triompher, et ce serait aux dépens de l’
3424
en voie de triompher, et ce serait aux dépens de
l’
humain. Au sein de cette crise que l’on dit sans précédent, que fait l
3425
ux dépens de l’humain. Au sein de cette crise que
l’
on dit sans précédent, que fait l’individu pour se défendre ? Et quels
3426
cette crise que l’on dit sans précédent, que fait
l’
individu pour se défendre ? Et quels titres à l’existence vient-il pro
3427
t l’individu pour se défendre ? Et quels titres à
l’
existence vient-il produire ? Car il est excellent de défendre son moi
3428
oi, surtout lorsqu’il détient plus de réalité que
l’
anonyme. Mais encore, il faudrait que ce moi fût fondé. Ce n’est pas é
3429
ce moi fût fondé. Ce n’est pas évident de soi, si
l’
on peut dire : les marxistes le nient avec plus de passion que les bou
3430
Ce n’est pas évident de soi, si l’on peut dire :
les
marxistes le nient avec plus de passion que les bourgeois n’apportent
3431
évident de soi, si l’on peut dire : les marxistes
le
nient avec plus de passion que les bourgeois n’apportent à l’affirmer
3432
: les marxistes le nient avec plus de passion que
les
bourgeois n’apportent à l’affirmer. D’un côté, nous voyons une foi, d
3433
c plus de passion que les bourgeois n’apportent à
l’
affirmer. D’un côté, nous voyons une foi, de l’autre, une mauvaise hum
3434
ins pensent : une mauvaise conscience. Que disent
les
collectivistes ? Que le grand nombre est plus précieux que le petit :
3435
e conscience. Que disent les collectivistes ? Que
le
grand nombre est plus précieux que le petit : Que la vie de l’esprit
3436
istes ? Que le grand nombre est plus précieux que
le
petit : Que la vie de l’esprit n’est possible que si l’on a d’abord a
3437
grand nombre est plus précieux que le petit : Que
la
vie de l’esprit n’est possible que si l’on a d’abord assuré l’autre v
3438
re est plus précieux que le petit : Que la vie de
l’
esprit n’est possible que si l’on a d’abord assuré l’autre vie, la vie
3439
it : Que la vie de l’esprit n’est possible que si
l’
on a d’abord assuré l’autre vie, la vie des corps, les conditions phys
3440
ossible que si l’on a d’abord assuré l’autre vie,
la
vie des corps, les conditions physiques de l’existence. Que la justic
3441
n a d’abord assuré l’autre vie, la vie des corps,
les
conditions physiques de l’existence. Que la justice est dans l’égalit
3442
ie, la vie des corps, les conditions physiques de
l’
existence. Que la justice est dans l’égalité de tous, et la vertu dans
3443
rps, les conditions physiques de l’existence. Que
la
justice est dans l’égalité de tous, et la vertu dans l’opinion publiq
3444
physiques de l’existence. Que la justice est dans
l’
égalité de tous, et la vertu dans l’opinion publique. Que l’histoire é
3445
ce. Que la justice est dans l’égalité de tous, et
la
vertu dans l’opinion publique. Que l’histoire évolue selon des lois f
3446
tice est dans l’égalité de tous, et la vertu dans
l’
opinion publique. Que l’histoire évolue selon des lois fatales, et que
3447
de tous, et la vertu dans l’opinion publique. Que
l’
histoire évolue selon des lois fatales, et que la volonté de quelques-
3448
l’histoire évolue selon des lois fatales, et que
la
volonté de quelques-uns n’y changera rien. Que la révolte, enfin, d’u
3449
la volonté de quelques-uns n’y changera rien. Que
la
révolte, enfin, d’un seul contre la foule serait la marque d’un affre
3450
era rien. Que la révolte, enfin, d’un seul contre
la
foule serait la marque d’un affreux orgueil, si d’abord elle ne témoi
3451
révolte, enfin, d’un seul contre la foule serait
la
marque d’un affreux orgueil, si d’abord elle ne témoignait d’un ridic
3452
cule défaut de sens pratique. Et que disent alors
les
bourgeois ? Les mêmes phrases, à peu près, mais sans y croire, ou du
3453
ens pratique. Et que disent alors les bourgeois ?
Les
mêmes phrases, à peu près, mais sans y croire, ou du moins sans prouv
3454
mais sans y croire, ou du moins sans prouver par
le
fait qu’ils y croient. Il s’agirait alors de croire à quelque chose q
3455
égitime ce scepticisme ou cette « mesure »… Sinon
la
foi des uns, fatalement, va triompher de la mauvaise humeur défensive
3456
Sinon la foi des uns, fatalement, va triompher de
la
mauvaise humeur défensive des autres. Certes, on y a pensé. Les plus
3457
umeur défensive des autres. Certes, on y a pensé.
Les
plus hardis parlent déjà de rendre sa place à « l’esprit »… Mais, que
3458
s plus hardis parlent déjà de rendre sa place à «
l’
esprit »… Mais, quel esprit ? Et qui l’a laissé perdre ? Et que va-t-o
3459
place à « l’esprit »… Mais, quel esprit ? Et qui
l’
a laissé perdre ? Et que va-t-on lui sacrifier ? Supposez qu’un homme
3460
? Supposez qu’un homme paraisse, et qu’il relève
le
défi collectiviste. Il soutient que le solitaire est plus grand que l
3461
’il relève le défi collectiviste. Il soutient que
le
solitaire est plus grand que la foule anonyme, que la vie de l’esprit
3462
. Il soutient que le solitaire est plus grand que
la
foule anonyme, que la vie de l’esprit n’est possible que si l’on a d’
3463
olitaire est plus grand que la foule anonyme, que
la
vie de l’esprit n’est possible que si l’on a d’abord renoncé à l’autr
3464
st plus grand que la foule anonyme, que la vie de
l’
esprit n’est possible que si l’on a d’abord renoncé à l’autre vie ; qu
3465
yme, que la vie de l’esprit n’est possible que si
l’
on a d’abord renoncé à l’autre vie ; que les lois de l’histoire ne son
3466
que si l’on a d’abord renoncé à l’autre vie ; que
les
lois de l’histoire ne sont rien si l’acte de l’homme les dément ; que
3467
a d’abord renoncé à l’autre vie ; que les lois de
l’
histoire ne sont rien si l’acte de l’homme les dément ; que la foi d’u
3468
vie ; que les lois de l’histoire ne sont rien si
l’
acte de l’homme les dément ; que la foi d’un seul est plus forte, dans
3469
les lois de l’histoire ne sont rien si l’acte de
l’
homme les dément ; que la foi d’un seul est plus forte, dans son humil
3470
s de l’histoire ne sont rien si l’acte de l’homme
les
dément ; que la foi d’un seul est plus forte, dans son humilité et de
3471
e sont rien si l’acte de l’homme les dément ; que
la
foi d’un seul est plus forte, dans son humilité et devant Dieu, — car
3472
te, dans son humilité et devant Dieu, — car c’est
la
foi, — que les discours des réalistes et l’enthousiasme populaire ; q
3473
umilité et devant Dieu, — car c’est la foi, — que
les
discours des réalistes et l’enthousiasme populaire ; que la justice,
3474
c’est la foi, — que les discours des réalistes et
l’
enthousiasme populaire ; que la justice, enfin, et la vertu, n’ont auc
3475
s des réalistes et l’enthousiasme populaire ; que
la
justice, enfin, et la vertu, n’ont aucune réalité si chacun n’est pas
3476
nthousiasme populaire ; que la justice, enfin, et
la
vertu, n’ont aucune réalité si chacun n’est pas à sa place là où la v
3477
cune réalité si chacun n’est pas à sa place là où
la
vocation de Dieu l’a mis. Supposez qu’un tel homme existe. Que va-t-o
3478
un n’est pas à sa place là où la vocation de Dieu
l’
a mis. Supposez qu’un tel homme existe. Que va-t-on faire de lui, de c
3479
de lui, de ce héros, n’est-ce pas, des valeurs de
l’
esprit que justement l’on fait profession de défendre ? La biographie
3480
est-ce pas, des valeurs de l’esprit que justement
l’
on fait profession de défendre ? La biographie de Kierkegaard va nous
3481
que justement l’on fait profession de défendre ?
La
biographie de Kierkegaard va nous l’apprendre. On commencera par mett
3482
e défendre ? La biographie de Kierkegaard va nous
l’
apprendre. On commencera par mettre en doute son sérieux : « Qui est l
3483
ncera par mettre en doute son sérieux : « Qui est
le
docteur Søren Kierkegaard ? C’est l’homme dépourvu de sérieux », lit-
3484
: « Qui est le docteur Søren Kierkegaard ? C’est
l’
homme dépourvu de sérieux », lit-on dans un journal du temps. On se mo
3485
op de peine que ses idées sont faites pour rendre
la
vie impossible, puisqu’elles impliquent le martyre des braves chrétie
3486
rendre la vie impossible, puisqu’elles impliquent
le
martyre des braves chrétiens, comme si la religion, de toute éternité
3487
liquent le martyre des braves chrétiens, comme si
la
religion, de toute éternité, n’était pas au contraire la façon la plu
3488
gion, de toute éternité, n’était pas au contraire
la
façon la plus sage de supporter les maux de ce bas monde tel qu’il es
3489
toute éternité, n’était pas au contraire la façon
la
plus sage de supporter les maux de ce bas monde tel qu’il est ! L’Égl
3490
s au contraire la façon la plus sage de supporter
les
maux de ce bas monde tel qu’il est ! L’Église, par la voix de ses évê
3491
upporter les maux de ce bas monde tel qu’il est !
L’
Église, par la voix de ses évêques, tentera de prouver qu’il extravagu
3492
aux de ce bas monde tel qu’il est ! L’Église, par
la
voix de ses évêques, tentera de prouver qu’il extravague ; on propose
3493
uver qu’il extravague ; on proposera en public de
l’
interdire d’accès au temple ; l’opinion unanime accablera son fol orgu
3494
sera en public de l’interdire d’accès au temple ;
l’
opinion unanime accablera son fol orgueil : n’a-t-il pas écrit que la
3495
ccablera son fol orgueil : n’a-t-il pas écrit que
la
presse est de nos jours l’obstacle décisif à la prédication du christ
3496
n’a-t-il pas écrit que la presse est de nos jours
l’
obstacle décisif à la prédication du christianisme véritable ? Épuisé
3497
e la presse est de nos jours l’obstacle décisif à
la
prédication du christianisme véritable ? Épuisé par ce long effort dé
3498
ong effort démesuré contre son temps, accablé par
la
réprobation générale, il s’en ira mourir à l’hôpital, en disant à son
3499
par la réprobation générale, il s’en ira mourir à
l’
hôpital, en disant à son seul ami : « Salue tous les hommes ! Je les a
3500
’hôpital, en disant à son seul ami : « Salue tous
les
hommes ! Je les aimais bien tous… » Cela se passait à Copenhague, en
3501
ant à son seul ami : « Salue tous les hommes ! Je
les
aimais bien tous… » Cela se passait à Copenhague, en l’année 1855. D
3502
is bien tous… » Cela se passait à Copenhague, en
l’
année 1855. Depuis lors, il est vrai, les choses ont bien changé. On d
3503
hague, en l’année 1855. Depuis lors, il est vrai,
les
choses ont bien changé. On dirait même qu’elles sont au pire, mais il
3504
tant est qu’ils s’y abandonnent. Qu’est-ce que
l’
esprit ? Donc, on nous parle de sauver l’esprit. Qu’est-ce que l’es
3505
e que l’esprit ? Donc, on nous parle de sauver
l’
esprit. Qu’est-ce que l’esprit ? « L’esprit, dit Kierkegaard, c’est la
3506
, on nous parle de sauver l’esprit. Qu’est-ce que
l’
esprit ? « L’esprit, dit Kierkegaard, c’est la puissance que le savoir
3507
le de sauver l’esprit. Qu’est-ce que l’esprit ? «
L’
esprit, dit Kierkegaard, c’est la puissance que le savoir d’un homme e
3508
que l’esprit ? « L’esprit, dit Kierkegaard, c’est
la
puissance que le savoir d’un homme exerce sur sa vie.52 » Ce n’est pa
3509
L’esprit, dit Kierkegaard, c’est la puissance que
le
savoir d’un homme exerce sur sa vie.52 » Ce n’est pas le savoir ; ce
3510
ir d’un homme exerce sur sa vie.52 » Ce n’est pas
le
savoir ; ce n’est pas la puissance, mais la puissance du savoir en ex
3511
sa vie.52 » Ce n’est pas le savoir ; ce n’est pas
la
puissance, mais la puissance du savoir en exercice. Il y a bien de la
3512
t pas le savoir ; ce n’est pas la puissance, mais
la
puissance du savoir en exercice. Il y a bien de la différence. Le sav
3513
a puissance du savoir en exercice. Il y a bien de
la
différence. Le savoir autonome, ou la puissance, font décorer celui q
3514
savoir en exercice. Il y a bien de la différence.
Le
savoir autonome, ou la puissance, font décorer celui qui les détient,
3515
y a bien de la différence. Le savoir autonome, ou
la
puissance, font décorer celui qui les détient, mais l’exercice effect
3516
autonome, ou la puissance, font décorer celui qui
les
détient, mais l’exercice effectif du savoir peut fort bien le conduir
3517
issance, font décorer celui qui les détient, mais
l’
exercice effectif du savoir peut fort bien le conduire à la ruine ou p
3518
mais l’exercice effectif du savoir peut fort bien
le
conduire à la ruine ou peut-être même au martyre. Ne soyez donc pas s
3519
e effectif du savoir peut fort bien le conduire à
la
ruine ou peut-être même au martyre. Ne soyez donc pas si pressés de d
3520
martyre. Ne soyez donc pas si pressés de défendre
les
« droits » de l’esprit : ce n’est pas une distinction. Et lequel d’en
3521
donc pas si pressés de défendre les « droits » de
l’
esprit : ce n’est pas une distinction. Et lequel d’entre nous peut dir
3522
Et lequel d’entre nous peut dire qu’il a calculé
la
dépense ? Il faudrait bien savoir de quoi l’on parle, et ce n’est peu
3523
culé la dépense ? Il faudrait bien savoir de quoi
l’
on parle, et ce n’est peut-être possible que si l’on sait bien où l’on
3524
l’on parle, et ce n’est peut-être possible que si
l’
on sait bien où l’on va. À quoi tend la pensée… de Kierkegaard ? Contr
3525
n’est peut-être possible que si l’on sait bien où
l’
on va. À quoi tend la pensée… de Kierkegaard ? Contre la presse et l’o
3526
ble que si l’on sait bien où l’on va. À quoi tend
la
pensée… de Kierkegaard ? Contre la presse et l’opinion publique, il p
3527
a. À quoi tend la pensée… de Kierkegaard ? Contre
la
presse et l’opinion publique, il proteste en faveur de ce qui est « o
3528
d la pensée… de Kierkegaard ? Contre la presse et
l’
opinion publique, il proteste en faveur de ce qui est « original » ; c
3529
ste en faveur de ce qui est « original » ; contre
l’
emportement des multitudes, il revendique la charité mystérieuse de l’
3530
ontre l’emportement des multitudes, il revendique
la
charité mystérieuse de l’ironie ; contre l’histoire, il pose l’acte d
3531
ltitudes, il revendique la charité mystérieuse de
l’
ironie ; contre l’histoire, il pose l’acte de l’homme responsable de s
3532
dique la charité mystérieuse de l’ironie ; contre
l’
histoire, il pose l’acte de l’homme responsable de son destin. Mais to
3533
térieuse de l’ironie ; contre l’histoire, il pose
l’
acte de l’homme responsable de son destin. Mais tout cela va au martyr
3534
e l’ironie ; contre l’histoire, il pose l’acte de
l’
homme responsable de son destin. Mais tout cela va au martyre, dans le
3535
de son destin. Mais tout cela va au martyre, dans
le
monde qu’on nous prépare ? Il se peut, si pourtant Dieu le veut. L’ex
3536
qu’on nous prépare ? Il se peut, si pourtant Dieu
le
veut. L’exigence de Kierkegaard se limite à l’instant du choix, où l’
3537
s prépare ? Il se peut, si pourtant Dieu le veut.
L’
exigence de Kierkegaard se limite à l’instant du choix, où l’homme s’e
3538
de Kierkegaard se limite à l’instant du choix, où
l’
homme s’engage, « en vertu de l’absurde », sur le chemin que Dieu lui
3539
tant du choix, où l’homme s’engage, « en vertu de
l’
absurde », sur le chemin que Dieu lui montre, seul. Cette primauté de
3540
l’homme s’engage, « en vertu de l’absurde », sur
le
chemin que Dieu lui montre, seul. Cette primauté de la foi sur les vé
3541
emin que Dieu lui montre, seul. Cette primauté de
la
foi sur les vérités qui font vivre, cette solitude première devant Di
3542
eu lui montre, seul. Cette primauté de la foi sur
les
vérités qui font vivre, cette solitude première devant Dieu, est-ce b
3543
re devant Dieu, est-ce bien cela que revendiquent
les
défenseurs du primat de l’esprit ? L’esprit est drame, attaque et ris
3544
cela que revendiquent les défenseurs du primat de
l’
esprit ? L’esprit est drame, attaque et risque. Et l’on peut douter qu
3545
vendiquent les défenseurs du primat de l’esprit ?
L’
esprit est drame, attaque et risque. Et l’on peut douter qu’ils y croi
3546
sprit ? L’esprit est drame, attaque et risque. Et
l’
on peut douter qu’ils y croient, ceux qui flétrissent le matérialisme
3547
eut douter qu’ils y croient, ceux qui flétrissent
le
matérialisme au nom des biens qu’ils n’ont pas su défendre ni davanta
3548
e sacrifier. Ils affirment trop tardivement que «
l’
argent ne fait pas le bonheur », et qu’il existe d’autres biens que nu
3549
rment trop tardivement que « l’argent ne fait pas
le
bonheur », et qu’il existe d’autres biens que nulle violence ne peut
3550
ne peut dérober, mais c’est une triste réponse à
la
révolte de ces pauvres qu’on redoute plus qu’on ne les aime… Si l’on
3551
évolte de ces pauvres qu’on redoute plus qu’on ne
les
aime… Si l’on voulait vraiment un champion de l’esprit, on ferait bie
3552
pauvres qu’on redoute plus qu’on ne les aime… Si
l’
on voulait vraiment un champion de l’esprit, on ferait bien d’aller le
3553
les aime… Si l’on voulait vraiment un champion de
l’
esprit, on ferait bien d’aller le prendre parmi ceux-là pour qui l’esp
3554
t un champion de l’esprit, on ferait bien d’aller
le
prendre parmi ceux-là pour qui l’esprit n’a pas à se défendre, mais b
3555
it bien d’aller le prendre parmi ceux-là pour qui
l’
esprit n’a pas à se défendre, mais bien à témoigner de son incarnation
3556
arnation ; on ferait bien d’aller à ceux pour qui
l’
esprit n’est pas une espèce de confort, mais une aventure absolue et c
3557
mais une aventure absolue et comme un jugement de
l’
homme ; ainsi Pascal, Nietzsche, Dostoïevski. On pourrait en citer que
3558
n’est pas de hiérarchie possible en ces parages,
le
sacrifice y tient lieu de mesure, parce qu’il est un acte, incontesta
3559
parce qu’il est un acte, incontestable. Telle est
la
nouvelle grandeur, la nouvelle mesure de l’esprit. Nous irons donc à
3560
e, incontestable. Telle est la nouvelle grandeur,
la
nouvelle mesure de l’esprit. Nous irons donc à ce grand solitaire, à
3561
e est la nouvelle grandeur, la nouvelle mesure de
l’
esprit. Nous irons donc à ce grand solitaire, à ce témoin extrême et d
3562
nd solitaire, à ce témoin extrême et décisif dont
la
mort, comme un sceau d’éternité, attesta dans sa plénitude la primaut
3563
me un sceau d’éternité, attesta dans sa plénitude
la
primauté de l’acte spirituel : Kierkegaard. Le grand mal de l’époque,
3564
ternité, attesta dans sa plénitude la primauté de
l’
acte spirituel : Kierkegaard. Le grand mal de l’époque, et la terreur
3565
de la primauté de l’acte spirituel : Kierkegaard.
Le
grand mal de l’époque, et la terreur que commencent d’y semer nos fau
3566
e l’acte spirituel : Kierkegaard. Le grand mal de
l’
époque, et la terreur que commencent d’y semer nos faux dieux, ont rév
3567
ituel : Kierkegaard. Le grand mal de l’époque, et
la
terreur que commencent d’y semer nos faux dieux, ont réveillé quelque
3568
eux, ont réveillé quelques esprits, dont témoigne
la
renaissance, ou pour mieux dire, la découverte, parmi nous, de cette
3569
dont témoigne la renaissance, ou pour mieux dire,
la
découverte, parmi nous, de cette pensée impitoyable. Remède du pire ?
3570
bien qu’on se sentît malade pour aller rechercher
le
médecin sévère que la santé moins déprimée d’un autre siècle avait tu
3571
alade pour aller rechercher le médecin sévère que
la
santé moins déprimée d’un autre siècle avait tué. C’est aussi qu’il e
3572
t aussi qu’il est devenu possible de saisir, dans
le
déploiement des faits, et des plus marquants de l’époque, la vérité d
3573
e déploiement des faits, et des plus marquants de
l’
époque, la vérité des anathèmes dont Kierkegaard salua leur naissance.
3574
ent des faits, et des plus marquants de l’époque,
la
vérité des anathèmes dont Kierkegaard salua leur naissance. Nous nous
3575
rs ce prophète de nos malheurs, nous retournons à
l’
origine où il se tient, nous mettons en lui notre espoir de trouver un
3576
devant Dieu. ⁂ Søren Kierkegaard est sans doute
le
penseur capital de notre époque, nous voulons dire : l’objection la p
3577
seur capital de notre époque, nous voulons dire :
l’
objection la plus absolue, la plus fondamentale qui lui soit faite, un
3578
de notre époque, nous voulons dire : l’objection
la
plus absolue, la plus fondamentale qui lui soit faite, une figure lit
3579
nous voulons dire : l’objection la plus absolue,
la
plus fondamentale qui lui soit faite, une figure littéralement gênant
3580
lement gênante, un rappel presque insupportable à
la
présence dans ce temps de l’éternel. Car il ne suffit pas d’applaudir
3581
sque insupportable à la présence dans ce temps de
l’
éternel. Car il ne suffit pas d’applaudir à ses thèses pour apaiser ce
3582
si nous sommes sourds à sa voix, comment étouffer
le
scandale de cette mort qui définit le destin de l’esprit parmi nous ?
3583
nt étouffer le scandale de cette mort qui définit
le
destin de l’esprit parmi nous ? Si l’Opinion publique a tué Kierkegaa
3584
e scandale de cette mort qui définit le destin de
l’
esprit parmi nous ? Si l’Opinion publique a tué Kierkegaard, elle n’a
3585
qui définit le destin de l’esprit parmi nous ? Si
l’
Opinion publique a tué Kierkegaard, elle n’a pas eu de prise sur les s
3586
e a tué Kierkegaard, elle n’a pas eu de prise sur
les
sarcasmes dont il l’a flétrie, plus charitables cependant que les dis
3587
lle n’a pas eu de prise sur les sarcasmes dont il
l’
a flétrie, plus charitables cependant que les discours en l’honneur du
3588
nt il l’a flétrie, plus charitables cependant que
les
discours en l’honneur du progrès, car tout l’honneur de notre temps s
3589
e, plus charitables cependant que les discours en
l’
honneur du progrès, car tout l’honneur de notre temps sera peut-être,
3590
ue les discours en l’honneur du progrès, car tout
l’
honneur de notre temps sera peut-être, par une compensation mystérieus
3591
mystérieuse, d’avoir compris mieux qu’aucun autre
le
message du « solitaire devant Dieu ». L’ironie Lorsque je vois
3592
autre le message du « solitaire devant Dieu ».
L’
ironie Lorsque je vois de toutes parts, en Europe, à travers la con
3593
que je vois de toutes parts, en Europe, à travers
la
confusion des doctrines, reparaître les traits ironiques du grand vis
3594
à travers la confusion des doctrines, reparaître
les
traits ironiques du grand visage de Kierkegaard, il me vient à l’espr
3595
ues du grand visage de Kierkegaard, il me vient à
l’
esprit une image dont le burlesque n’aurait pas déplu à l’humeur shake
3596
ierkegaard, il me vient à l’esprit une image dont
le
burlesque n’aurait pas déplu à l’humeur shakespearienne de notre phil
3597
une image dont le burlesque n’aurait pas déplu à
l’
humeur shakespearienne de notre philosophe. C’est l’image du chat d’Al
3598
humeur shakespearienne de notre philosophe. C’est
l’
image du chat d’Alice in Wonderland. Souvenez-vous de ce chat, immense
3599
venez-vous de ce chat, immense et subversif, dont
le
rire a le don d’exaspérer la Reine. Elle tempête et hurle son cri fav
3600
de ce chat, immense et subversif, dont le rire a
le
don d’exaspérer la Reine. Elle tempête et hurle son cri favori : « Qu
3601
e et subversif, dont le rire a le don d’exaspérer
la
Reine. Elle tempête et hurle son cri favori : « Qu’on lui coupe la tê
3602
mpête et hurle son cri favori : « Qu’on lui coupe
la
tête ! » Alors, le chat s’élève dans les airs et peu à peu rend son c
3603
cri favori : « Qu’on lui coupe la tête ! » Alors,
le
chat s’élève dans les airs et peu à peu rend son corps invisible, seu
3604
lui coupe la tête ! » Alors, le chat s’élève dans
les
airs et peu à peu rend son corps invisible, seule subsiste sa face hi
3605
sent dignement à couper une tête pareille. Enfin,
le
chat disparaît complètement. Mais à certains moments, il s’amuse à re
3606
n rire qui plane, immatériel. Ensuite, seulement,
la
tête se recompose autour de cette angoissante mimique. Le rire de Kie
3607
se recompose autour de cette angoissante mimique.
Le
rire de Kierkegaard sur notre temps ! Dans un monde où règne la masse
3608
rkegaard sur notre temps ! Dans un monde où règne
la
masse, règne aussi le sérieux le plus pesant. On ne rit pas devant le
3609
ps ! Dans un monde où règne la masse, règne aussi
le
sérieux le plus pesant. On ne rit pas devant le dictateur, ni dans le
3610
n monde où règne la masse, règne aussi le sérieux
le
plus pesant. On ne rit pas devant le dictateur, ni dans les rangs des
3611
i le sérieux le plus pesant. On ne rit pas devant
le
dictateur, ni dans les rangs des troupes d’assaut. Ah ! si le rire es
3612
esant. On ne rit pas devant le dictateur, ni dans
les
rangs des troupes d’assaut. Ah ! si le rire est le propre de l’homme,
3613
, ni dans les rangs des troupes d’assaut. Ah ! si
le
rire est le propre de l’homme, nous voici devenus bien inhumains ! Il
3614
s rangs des troupes d’assaut. Ah ! si le rire est
le
propre de l’homme, nous voici devenus bien inhumains ! Il semble que
3615
roupes d’assaut. Ah ! si le rire est le propre de
l’
homme, nous voici devenus bien inhumains ! Il semble que chacun porte
3616
venus bien inhumains ! Il semble que chacun porte
le
poids du monde et le sombre avenir du siècle. On a dépeint ce clerc m
3617
! Il semble que chacun porte le poids du monde et
le
sombre avenir du siècle. On a dépeint ce clerc moderne, accablé par t
3618
. On a dépeint ce clerc moderne, accablé par tous
les
malheurs du temps, dont il feint de se croire victime ou responsable5
3619
me ou responsable53. De cet homme, justement, que
l’
Histoire fait trembler et qui se réfugie dans les soucis publics comme
3620
e l’Histoire fait trembler et qui se réfugie dans
les
soucis publics comme on va voir un film pour s’oublier dans un drame
3621
ier dans un drame fictif, de cet homme affolé par
la
lecture de son journal, — mais qui porte l’enfer dans son âme ! — Kie
3622
é par la lecture de son journal, — mais qui porte
l’
enfer dans son âme ! — Kierkegaard a montré « le comique infini ». Il
3623
e l’enfer dans son âme ! — Kierkegaard a montré «
le
comique infini ». Il faut risquer cette expression : le rire de la ch
3624
ique infini ». Il faut risquer cette expression :
le
rire de la charité chrétienne. « Le christianisme a découvert une mis
3625
». Il faut risquer cette expression : le rire de
la
charité chrétienne. « Le christianisme a découvert une misère dont l’
3626
expression : le rire de la charité chrétienne. «
Le
christianisme a découvert une misère dont l’homme ignore, comme homme
3627
e. « Le christianisme a découvert une misère dont
l’
homme ignore, comme homme, l’existence ; et c’est la maladie mortelle
3628
vert une misère dont l’homme ignore, comme homme,
l’
existence ; et c’est la maladie mortelle (le péché)54. L’homme naturel
3629
homme ignore, comme homme, l’existence ; et c’est
la
maladie mortelle (le péché)54. L’homme naturel a beau dénombrer tout
3630
omme, l’existence ; et c’est la maladie mortelle (
le
péché)54. L’homme naturel a beau dénombrer tout l’horrible, et tout é
3631
ence ; et c’est la maladie mortelle (le péché)54.
L’
homme naturel a beau dénombrer tout l’horrible, et tout épuiser, le ch
3632
e péché)54. L’homme naturel a beau dénombrer tout
l’
horrible, et tout épuiser, le chrétien se rit du bilan ! » Pourquoi ce
3633
beau dénombrer tout l’horrible, et tout épuiser,
le
chrétien se rit du bilan ! » Pourquoi ce rire scandaleux ? Parce que
3634
lan ! » Pourquoi ce rire scandaleux ? Parce que «
la
crainte infinie d’un seul danger nous rendrait tous les autres inexis
3635
ainte infinie d’un seul danger nous rendrait tous
les
autres inexistants ». Mais cette « crainte d’un seul danger » peut-el
3636
er » peut-elle encore, sérieusement, caractériser
le
chrétien moyen de ce temps ? C’est ici que l’ironie de Kierkegaard to
3637
ser le chrétien moyen de ce temps ? C’est ici que
l’
ironie de Kierkegaard tourne son aiguillon contre le « monde chrétien
3638
ironie de Kierkegaard tourne son aiguillon contre
le
« monde chrétien », celui qui se réclame de l’esprit, ou qui fait pro
3639
re le « monde chrétien », celui qui se réclame de
l’
esprit, ou qui fait profession de l’appeler. « Le Nouveau Testament re
3640
se réclame de l’esprit, ou qui fait profession de
l’
appeler. « Le Nouveau Testament ressemble à une satire de l’homme. Il
3641
l’esprit, ou qui fait profession de l’appeler. «
Le
Nouveau Testament ressemble à une satire de l’homme. Il contient des
3642
« Le Nouveau Testament ressemble à une satire de
l’
homme. Il contient des consolations et encore des consolations pour ce
3643
nt à cause du Christ. Il suppose, sans autre, que
le
chrétien souffre pour sa doctrine… » Et c’est la tragi-comédie du chr
3644
le chrétien souffre pour sa doctrine… » Et c’est
la
tragi-comédie du christianisme de la chrétienté. Pauvre chrétien moye
3645
… » Et c’est la tragi-comédie du christianisme de
la
chrétienté. Pauvre chrétien moyen, qu’as-tu souffert pour ta doctrine
3646
Il faudrait cependant choisir. Ou bien tu crois à
la
seule grâce de Dieu, dans l’abîme infini où tu te vois, ou bien tu cr
3647
. Ou bien tu crois à la seule grâce de Dieu, dans
l’
abîme infini où tu te vois, ou bien tu crois aussi à ce sérieux de l’e
3648
u te vois, ou bien tu crois aussi à ce sérieux de
l’
existence symbolisé par la caisse d’épargne. Ou bien tu joues toute ta
3649
s aussi à ce sérieux de l’existence symbolisé par
la
caisse d’épargne. Ou bien tu joues toute ta vie sur le pardon, ou bie
3650
isse d’épargne. Ou bien tu joues toute ta vie sur
le
pardon, ou bien tu te reposes aussi sur ta vertu. Ou bien tu vois que
3651
e reposes aussi sur ta vertu. Ou bien tu vois que
la
question brûlante, c’est de savoir si toi, tu es chrétien, ou bien tu
3652
voir si toi, tu es chrétien, ou bien tu vitupères
les
sans-Dieu de Russie. Mais sais-tu bien de quoi tu souffres ? De ton p
3653
amer et infini de ce « croyant » qui tremble pour
le
sort de l’esprit dans le monde, et pour son sort dans le monde sans e
3654
ini de ce « croyant » qui tremble pour le sort de
l’
esprit dans le monde, et pour son sort dans le monde sans esprit, exac
3655
oyant » qui tremble pour le sort de l’esprit dans
le
monde, et pour son sort dans le monde sans esprit, exactement comme s
3656
de l’esprit dans le monde, et pour son sort dans
le
monde sans esprit, exactement comme si l’Esprit n’existait pas ! Sero
3657
rt dans le monde sans esprit, exactement comme si
l’
Esprit n’existait pas ! Serons-nous des témoins ou des espions crainti
3658
des espions craintifs ? Attendrons-nous toujours
le
« réveil de la masse » pour affirmer que tous ces dieux sont des faux
3659
aintifs ? Attendrons-nous toujours le « réveil de
la
masse » pour affirmer que tous ces dieux sont des faux dieux ? Mais s
3660
des faux dieux pour nous ? Appelons-nous vraiment
l’
esprit ? Mais non, nous appelons le « règne de l’esprit », c’est bien
3661
-nous vraiment l’esprit ? Mais non, nous appelons
le
« règne de l’esprit », c’est bien moins dangereux ; tous en seront… «
3662
l’esprit ? Mais non, nous appelons le « règne de
l’
esprit », c’est bien moins dangereux ; tous en seront… « Deux question
3663
uestions — dit encore Kierkegaard — témoignent de
l’
esprit : 1) Ce qu’on nous prêche, est-ce possible ? 2) Puis-je le fair
3664
e qu’on nous prêche, est-ce possible ? 2) Puis-je
le
faire ? Deux questions témoignent de l’absence de l’esprit : 1) Est-c
3665
) Puis-je le faire ? Deux questions témoignent de
l’
absence de l’esprit : 1) Est-ce réel ? 2) Mon voisin Christofersen l’a
3666
faire ? Deux questions témoignent de l’absence de
l’
esprit : 1) Est-ce réel ? 2) Mon voisin Christofersen l’a-t-il fait ?
3667
it : 1) Est-ce réel ? 2) Mon voisin Christofersen
l’
a-t-il fait ? l’a-t-il réellement fait ? »55 Nous posons toujours la
3668
éel ? 2) Mon voisin Christofersen l’a-t-il fait ?
l’
a-t-il réellement fait ? »55 Nous posons toujours la dernière questio
3669
jours la dernière question. Nous ne croyons pas à
l’
esprit, nous préférons ne pas scandaliser ; nous croyons réellement à
3670
ns ne pas scandaliser ; nous croyons réellement à
l’
opinion publique. Nous lisons les journaux, voilà notre réalité. Le di
3671
yons réellement à l’opinion publique. Nous lisons
les
journaux, voilà notre réalité. Le dimanche, nous allons quelquefois à
3672
e. Nous lisons les journaux, voilà notre réalité.
Le
dimanche, nous allons quelquefois à l’église déplorer en commun l’ath
3673
e réalité. Le dimanche, nous allons quelquefois à
l’
église déplorer en commun l’athéisme du monde. « Le Nouveau Testament
3674
allons quelquefois à l’église déplorer en commun
l’
athéisme du monde. « Le Nouveau Testament suppose sans autre que le ch
3675
’église déplorer en commun l’athéisme du monde. «
Le
Nouveau Testament suppose sans autre que le chrétien souffre pour sa
3676
de. « Le Nouveau Testament suppose sans autre que
le
chrétien souffre pour sa doctrine… » (Mais non ! il souffre simplemen
3677
ais non ! il souffre simplement de ce que tous ne
l’
ont pas admise) « … et il apporte sa consolation, et sur ce texte on n
3678
, à nous qui n’avons pas voulu souffrir ». « Dans
l’
église somptueuse paraît le Très Vénérable et Très Noble Premier Prédi
3679
ulu souffrir ». « Dans l’église somptueuse paraît
le
Très Vénérable et Très Noble Premier Prédicateur Général de la Cour,
3680
rès Noble Premier Prédicateur Général de la Cour,
le
favori élu par la bonne société ; il paraît devant une assemblée choi
3681
Prédicateur Général de la Cour, le favori élu par
la
bonne société ; il paraît devant une assemblée choisie d’élus, et prê
3682
texte qu’il a choisi lui-même : “Dieu a élu dans
le
monde les petits et les méprisés”, et personne ne rit ! »56. C’est a
3683
’il a choisi lui-même : “Dieu a élu dans le monde
les
petits et les méprisés”, et personne ne rit ! »56. C’est alors que p
3684
ui-même : “Dieu a élu dans le monde les petits et
les
méprisés”, et personne ne rit ! »56. C’est alors que paraît le rire
3685
et personne ne rit ! »56. C’est alors que paraît
le
rire de Kierkegaard. Ce n’est pas le rire d’un Molière : Molière fait
3686
s que paraît le rire de Kierkegaard. Ce n’est pas
le
rire d’un Molière : Molière fait rire la foule au dépens de l’extrava
3687
’est pas le rire d’un Molière : Molière fait rire
la
foule au dépens de l’extravagant. Mais Kierkegaard rit tout seul de l
3688
Molière : Molière fait rire la foule au dépens de
l’
extravagant. Mais Kierkegaard rit tout seul de la foule, de son sérieu
3689
l’extravagant. Mais Kierkegaard rit tout seul de
la
foule, de son sérieux théâtral et fervent, et de sa peur de toute ext
3690
peut leur faire faire ce qu’on veut, que ce soit
le
bien ou le mal, une seule condition leur importe : qu’ils soient touj
3691
faire faire ce qu’on veut, que ce soit le bien ou
le
mal, une seule condition leur importe : qu’ils soient toujours comme
3692
leur importe : qu’ils soient toujours comme tous
les
autres, qu’ils imitent, et n’agissent jamais seuls. » Mais ce que Die
3693
euls. » Mais ce que Dieu exige, c’est précisément
le
contraire : il veut l’originalité. « Voilà pourquoi la Parole de Dieu
3694
u exige, c’est précisément le contraire : il veut
l’
originalité. « Voilà pourquoi la Parole de Dieu est telle qu’on y trou
3695
ntraire : il veut l’originalité. « Voilà pourquoi
la
Parole de Dieu est telle qu’on y trouve quelque passage qui dise le c
3696
est telle qu’on y trouve quelque passage qui dise
le
contraire d’un autre. » Car l’apparence de la contradiction nous obli
3697
e passage qui dise le contraire d’un autre. » Car
l’
apparence de la contradiction nous oblige à choisir, fait à la foi sa
3698
ise le contraire d’un autre. » Car l’apparence de
la
contradiction nous oblige à choisir, fait à la foi sa place, nous con
3699
de la contradiction nous oblige à choisir, fait à
la
foi sa place, nous contraint à l’originalité. « Mais quoi, professeur
3700
choisir, fait à la foi sa place, nous contraint à
l’
originalité. « Mais quoi, professeurs et disciples ne se trouvent bien
3701
esseurs et disciples ne se trouvent bien que dans
l’
imitation : c’est pourquoi ils se sentent unis en elle d’une manière s
3702
anière si touchante, et c’est ce qu’ils appellent
l’
amour.57 » Rire du solitaire, qui ressemble peut-être à la pitié énigm
3703
57 » Rire du solitaire, qui ressemble peut-être à
la
pitié énigmatique d’un Dostoïevski. Ici tout le visage de Kierkegaard
3704
à la pitié énigmatique d’un Dostoïevski. Ici tout
le
visage de Kierkegaard se recompose. Et l’on voit que son rire n’est r
3705
ci tout le visage de Kierkegaard se recompose. Et
l’
on voit que son rire n’est rien que la douleur du témoin de l’Esprit a
3706
compose. Et l’on voit que son rire n’est rien que
la
douleur du témoin de l’Esprit au milieu de la foule. L’originalité
3707
e son rire n’est rien que la douleur du témoin de
l’
Esprit au milieu de la foule. L’originalité Qu’entend-il par ce
3708
que la douleur du témoin de l’Esprit au milieu de
la
foule. L’originalité Qu’entend-il par ce mot d’originalité ? Il
3709
r du témoin de l’Esprit au milieu de la foule.
L’
originalité Qu’entend-il par ce mot d’originalité ? Il faut en rapp
3710
l par ce mot d’originalité ? Il faut en rapporter
le
sens au centre même de sa pensée, ou si l’on veut, de son action. Et
3711
porter le sens au centre même de sa pensée, ou si
l’
on veut, de son action. Et ce centre, c’est « la catégorie du solitair
3712
i l’on veut, de son action. Et ce centre, c’est «
la
catégorie du solitaire ». Bien des malentendus seraient ici possibles
3713
Bien des malentendus seraient ici possibles ; que
l’
on écarte, au premier pas, trois mots qui faussent tout : anarchie, ro
3714
: anarchie, romantisme, individu. Il n’est que de
les
mesurer à la réalité dernière de l’homme. Qu’est-ce que l’homme ? Une
3715
mantisme, individu. Il n’est que de les mesurer à
la
réalité dernière de l’homme. Qu’est-ce que l’homme ? Une créature. Qu
3716
n’est que de les mesurer à la réalité dernière de
l’
homme. Qu’est-ce que l’homme ? Une créature. Qu’est-ce que son ordre ?
3717
r à la réalité dernière de l’homme. Qu’est-ce que
l’
homme ? Une créature. Qu’est-ce que son ordre ? La loi du Créateur. Le
3718
l’homme ? Une créature. Qu’est-ce que son ordre ?
La
loi du Créateur. Le solitaire que Kierkegaard appelle, c’est l’homme
3719
re. Qu’est-ce que son ordre ? La loi du Créateur.
Le
solitaire que Kierkegaard appelle, c’est l’homme seul devant son Dieu
3720
teur. Le solitaire que Kierkegaard appelle, c’est
l’
homme seul devant son Dieu. Mais comment cela se peut-il, sinon par l’
3721
son Dieu. Mais comment cela se peut-il, sinon par
l’
effet de la foi ? Il faut que Dieu l’appelle, qu’il le nomme et par là
3722
ais comment cela se peut-il, sinon par l’effet de
la
foi ? Il faut que Dieu l’appelle, qu’il le nomme et par là le sépare,
3723
l, sinon par l’effet de la foi ? Il faut que Dieu
l’
appelle, qu’il le nomme et par là le sépare, autrement l’homme n’est r
3724
fet de la foi ? Il faut que Dieu l’appelle, qu’il
le
nomme et par là le sépare, autrement l’homme n’est rien qu’un exempla
3725
faut que Dieu l’appelle, qu’il le nomme et par là
le
sépare, autrement l’homme n’est rien qu’un exemplaire dans le troupea
3726
le, qu’il le nomme et par là le sépare, autrement
l’
homme n’est rien qu’un exemplaire dans le troupeau. Le solitaire devan
3727
utrement l’homme n’est rien qu’un exemplaire dans
le
troupeau. Le solitaire devant Dieu, c’est celui qui répond à la foi,
3728
mme n’est rien qu’un exemplaire dans le troupeau.
Le
solitaire devant Dieu, c’est celui qui répond à la foi, cet appel. Qu
3729
e solitaire devant Dieu, c’est celui qui répond à
la
foi, cet appel. Quand on parle de romantisme, d’anarchie, d’individua
3730
d’une révolte, en fin de compte, imaginaire. Car
l’
ordre de ce monde est lui-même en révolte contre l’ordre reçu de Dieu,
3731
’ordre de ce monde est lui-même en révolte contre
l’
ordre reçu de Dieu, qui sera l’Ordre du Royaume. Et nier une négation,
3732
en révolte contre l’ordre reçu de Dieu, qui sera
l’
Ordre du Royaume. Et nier une négation, c’est s’enfoncer dans le néant
3733
aume. Et nier une négation, c’est s’enfoncer dans
le
néant. Seule la révolte du chrétien est position, obéissance. Si donc
3734
e négation, c’est s’enfoncer dans le néant. Seule
la
révolte du chrétien est position, obéissance. Si donc l’appel de Dieu
3735
lte du chrétien est position, obéissance. Si donc
l’
appel de Dieu isole du monde un homme, c’est que le monde, dans sa for
3736
’appel de Dieu isole du monde un homme, c’est que
le
monde, dans sa forme déchue, s’oppose au monde tel que Dieu l’a créé,
3737
s sa forme déchue, s’oppose au monde tel que Dieu
l’
a créé, s’oppose à la transformation que veut l’Esprit, s’oppose à l’O
3738
oppose au monde tel que Dieu l’a créé, s’oppose à
la
transformation que veut l’Esprit, s’oppose à l’Ordre. « Ne vous confo
3739
u l’a créé, s’oppose à la transformation que veut
l’
Esprit, s’oppose à l’Ordre. « Ne vous conformez pas à ce siècle présen
3740
à la transformation que veut l’Esprit, s’oppose à
l’
Ordre. « Ne vous conformez pas à ce siècle présent, mais soyez transfo
3741
résent, mais soyez transformés », dit saint Paul.
Le
solitaire devant Dieu, c’est celui qui se tient à l’origine de sa réa
3742
solitaire devant Dieu, c’est celui qui se tient à
l’
origine de sa réalité. Celui-là seul connaît sa fin et l’ordre éternel
3743
ne de sa réalité. Celui-là seul connaît sa fin et
l’
ordre éternel de sa vie. Celui-là seul peut juger de ce monde, et s’y
3744
tenu. Il n’est pas d’autre « réaction » contre «
le
siècle », pas d’autre révolution créatrice. Et tous nos appels à l’es
3745
’autre révolution créatrice. Et tous nos appels à
l’
esprit, s’ils ne sont pas ce retour au Réel, ne sont que poursuite du
3746
ite du vent, défection ou orgueil fantastique.
Le
solitaire et les faux dieux Nous croyons à la foule, aux races, à
3747
ection ou orgueil fantastique. Le solitaire et
les
faux dieux Nous croyons à la foule, aux races, à l’histoire (ou pl
3748
Le solitaire et les faux dieux Nous croyons à
la
foule, aux races, à l’histoire (ou plutôt à l’évolution des sociétés)
3749
ux dieux Nous croyons à la foule, aux races, à
l’
histoire (ou plutôt à l’évolution des sociétés), à la révolution, au c
3750
à la foule, aux races, à l’histoire (ou plutôt à
l’
évolution des sociétés), à la révolution, au capital, au jugement de l
3751
istoire (ou plutôt à l’évolution des sociétés), à
la
révolution, au capital, au jugement de l’opinion publique ; nous croy
3752
tés), à la révolution, au capital, au jugement de
l’
opinion publique ; nous croyons au passé, au collectif, à l’avenir, et
3753
publique ; nous croyons au passé, au collectif, à
l’
avenir, et tout cela n’est rien que fuite devant notre éternel présent
3754
ernel présent, et tout cela n’est que mythologie.
Les
dieux du siècle ont l’existence qu’on leur prête : hélas ! il serait
3755
ela n’est que mythologie. Les dieux du siècle ont
l’
existence qu’on leur prête : hélas ! il serait faux de dire qu’ils n’e
3756
n’est pas échapper aux chimères publiques que de
les
dénoncer pour telles en vertu d’une idée de l’homme que la raison paï
3757
e les dénoncer pour telles en vertu d’une idée de
l’
homme que la raison païenne admet fort bien : nietzschéisme agressif,
3758
er pour telles en vertu d’une idée de l’homme que
la
raison païenne admet fort bien : nietzschéisme agressif, ou désespoir
3759
démoniaque qui veut être soi-même, « en haine de
l’
existence et selon sa misère ». Cette révolte n’est pas fondée dans la
3760
sa misère ». Cette révolte n’est pas fondée dans
la
transformation effective du monde. Elle participe encore de la dégrad
3761
tion effective du monde. Elle participe encore de
la
dégradation. « Une objection vraiment méchante s’arcboute toujours co
3762
aiment méchante s’arcboute toujours contre ce qui
la
suscite.58 » Et celui qui recourt à son moi révolté contre les forces
3763
8 » Et celui qui recourt à son moi révolté contre
les
forces d’anéantissement, s’appuie sur le néant et précipite sa propre
3764
contre les forces d’anéantissement, s’appuie sur
le
néant et précipite sa propre ruine. Le solitaire qui condamne « la ma
3765
appuie sur le néant et précipite sa propre ruine.
Le
solitaire qui condamne « la masse » n’est un aristocrate que s’il ne
3766
pite sa propre ruine. Le solitaire qui condamne «
la
masse » n’est un aristocrate que s’il ne veut pas l’être. C’est qu’il
3767
masse » n’est un aristocrate que s’il ne veut pas
l’
être. C’est qu’il se fonde sur sa vocation, et qu’il ne peut être lui-
3768
vocation, et qu’il ne peut être lui-même que par
le
droit divin de la Parole qui le distingue. Suprême humilité du solita
3769
l ne peut être lui-même que par le droit divin de
la
Parole qui le distingue. Suprême humilité du solitaire ! Il ne saurai
3770
lui-même que par le droit divin de la Parole qui
le
distingue. Suprême humilité du solitaire ! Il ne saurait se comparer
3771
ité du solitaire ! Il ne saurait se comparer qu’à
la
vocation qu’il reçoit. Où l’orgueil trouverait-il encore à se loger c
3772
ait se comparer qu’à la vocation qu’il reçoit. Où
l’
orgueil trouverait-il encore à se loger chez un être à ce point simpli
3773
implifié qu’il n’est plus rien qu’obéissance dans
la
mesure où il agit, et pénitence dans la mesure où sa vocation le dépa
3774
ance dans la mesure où il agit, et pénitence dans
la
mesure où sa vocation le dépasse ? Si Kierkegaard condamne la foule,
3775
agit, et pénitence dans la mesure où sa vocation
le
dépasse ? Si Kierkegaard condamne la foule, ce n’est point qu’il la c
3776
sa vocation le dépasse ? Si Kierkegaard condamne
la
foule, ce n’est point qu’il la craigne, ou qu’il craigne d’y perdre l
3777
erkegaard condamne la foule, ce n’est point qu’il
la
craigne, ou qu’il craigne d’y perdre le pauvre moi des psychologues,
3778
int qu’il la craigne, ou qu’il craigne d’y perdre
le
pauvre moi des psychologues, son reproche à la foule, c’est qu’elle n
3779
re le pauvre moi des psychologues, son reproche à
la
foule, c’est qu’elle n’exige rien de lui. La foule nous veut tout sim
3780
he à la foule, c’est qu’elle n’exige rien de lui.
La
foule nous veut tout simplement irresponsables, par cela seul, nous l
3781
ut simplement irresponsables, par cela seul, nous
la
flattons, et elle nous reconnaît pour siens. Elle est le lieu de rend
3782
tons, et elle nous reconnaît pour siens. Elle est
le
lieu de rendez-vous des hommes qui se fuient, eux et leur vocation. E
3783
n’est personne, et tire de là son assurance dans
le
crime. « Il ne s’est pas trouvé un seul soldat pour oser porter la ma
3784
s’est pas trouvé un seul soldat pour oser porter
la
main sur Caïus Marius, telle est la vérité. Mais trois ou quatre femm
3785
r oser porter la main sur Caïus Marius, telle est
la
vérité. Mais trois ou quatre femmes, dans l’illusion d’être une foule
3786
est la vérité. Mais trois ou quatre femmes, dans
l’
illusion d’être une foule et que personne peut-être ne saurait dire qu
3787
ule et que personne peut-être ne saurait dire qui
l’
avait fait ou qui avait commencé, celles-là l’auraient eu, ce courage
3788
qui l’avait fait ou qui avait commencé, celles-là
l’
auraient eu, ce courage ! Ô mensonge ! » La foule n’est rien que la fu
3789
les-là l’auraient eu, ce courage ! Ô mensonge ! »
La
foule n’est rien que la fuite de chaque homme devant la responsabilit
3790
courage ! Ô mensonge ! » La foule n’est rien que
la
fuite de chaque homme devant la responsabilité de son acte. « Car une
3791
le n’est rien que la fuite de chaque homme devant
la
responsabilité de son acte. « Car une foule est une abstraction, qui
3792
n’a pas de mains, mais chaque homme isolé a, dans
la
règle, deux mains, et lorsqu’il porte ces deux mains sur Marius, ce s
3793
mains, non celles de son voisin et non celles de
la
foule qui n’a pas de mains. » Tout seul en face du Christ, un homme o
3794
is qu’il soit foule, il aura ce « courage », — il
l’
a eu. Il faut aller plus loin. La foule n’est pas dans la rue seulemen
3795
courage », — il l’a eu. Il faut aller plus loin.
La
foule n’est pas dans la rue seulement. Elle est dans la pensée des ho
3796
Il faut aller plus loin. La foule n’est pas dans
la
rue seulement. Elle est dans la pensée des hommes de ce temps. Tout l
3797
le n’est pas dans la rue seulement. Elle est dans
la
pensée des hommes de ce temps. Tout le génie paradoxal et réaliste de
3798
e est dans la pensée des hommes de ce temps. Tout
le
génie paradoxal et réaliste de Kierkegaard consiste à l’avoir dénoncé
3799
e paradoxal et réaliste de Kierkegaard consiste à
l’
avoir dénoncée au plus intime de l’existence individuelle. Chaque fois
3800
ard consiste à l’avoir dénoncée au plus intime de
l’
existence individuelle. Chaque fois que nous disons d’un de nos dieux
3801
est puissant, nous témoignons de notre démission.
La
foule n’a pas d’autre existence et pas d’autre pouvoir que mon refus
3802
que mon refus d’exister devant Dieu et d’exercer
le
pouvoir que je suis. Elle n’est que ma dégradation. Et toutes les « s
3803
je suis. Elle n’est que ma dégradation. Et toutes
les
« sciences » qui étudient ses « lois » historiques ou sociologiques s
3804
ques ou sociologiques sont comme une inversion de
la
théologie, sont une théologie de la dégradation. L’opposition de Kier
3805
inversion de la théologie, sont une théologie de
la
dégradation. L’opposition de Kierkegaard et de Hegel59 trouve ici son
3806
théologie, sont une théologie de la dégradation.
L’
opposition de Kierkegaard et de Hegel59 trouve ici son sens à la fois
3807
gaard et de Hegel59 trouve ici son sens à la fois
le
plus profond et le plus évidemment actuel. Hegel a tout objectivé : l
3808
trouve ici son sens à la fois le plus profond et
le
plus évidemment actuel. Hegel a tout objectivé : l’esprit, l’histoire
3809
plus évidemment actuel. Hegel a tout objectivé :
l’
esprit, l’histoire, la dialectique, finalement, l’homme lui-même à ses
3810
emment actuel. Hegel a tout objectivé : l’esprit,
l’
histoire, la dialectique, finalement, l’homme lui-même à ses propres y
3811
l. Hegel a tout objectivé : l’esprit, l’histoire,
la
dialectique, finalement, l’homme lui-même à ses propres yeux. Il a vo
3812
l’esprit, l’histoire, la dialectique, finalement,
l’
homme lui-même à ses propres yeux. Il a voulu chasser du monde le para
3813
e à ses propres yeux. Il a voulu chasser du monde
le
paradoxe et le scandale du solitaire plus grand que tous. Il a voulu
3814
yeux. Il a voulu chasser du monde le paradoxe et
le
scandale du solitaire plus grand que tous. Il a voulu que tout s’expl
3815
out s’implique, c’est-à-dire qu’il a voulu bannir
la
possibilité scandaleuse des actes libres de la Providence. Entreprise
3816
ir la possibilité scandaleuse des actes libres de
la
Providence. Entreprise effroyable et vaine, qui serait d’un comique i
3817
, qui serait d’un comique insondable si seulement
l’
homme des masses ne venait aujourd’hui s’en prévaloir pour rendre un c
3818
sanguinaire aux faux dieux qu’elle a suscités. «
Le
philosophe dit à bon droit que la vie doit être comprise en arrière,
3819
e a suscités. « Le philosophe dit à bon droit que
la
vie doit être comprise en arrière, mais il oublie l’autre proposition
3820
doit être vécue en avant.60 » Semble-t-il pas que
le
temps court plus vite depuis un siècle ? C’est que la fuite des homme
3821
emps court plus vite depuis un siècle ? C’est que
la
fuite des hommes devant l’instant présent se précipite. Ils n’ont pas
3822
un siècle ? C’est que la fuite des hommes devant
l’
instant présent se précipite. Ils n’ont pas lu Hegel, bien sûr, mais H
3823
is Hegel est dans tous nos journaux, Hegel domine
le
marxisme et les fascismes, et la théologie des sociologues, des histo
3824
ns tous nos journaux, Hegel domine le marxisme et
les
fascismes, et la théologie des sociologues, des historiens, des clerc
3825
ux, Hegel domine le marxisme et les fascismes, et
la
théologie des sociologues, des historiens, des clercs bourgeois. Comm
3826
cs bourgeois. Comment lui échapper ? N’est-il pas
la
voix même de cette Âme du monde, cet Esprit de la Forme qui se croit
3827
la voix même de cette Âme du monde, cet Esprit de
la
Forme qui se croit le Réel et qui pourtant n’est rien que le péché, m
3828
Âme du monde, cet Esprit de la Forme qui se croit
le
Réel et qui pourtant n’est rien que le péché, mais le péché n’est-il
3829
i se croit le Réel et qui pourtant n’est rien que
le
péché, mais le péché n’est-il pas notre réalité, notre réalité sans c
3830
éel et qui pourtant n’est rien que le péché, mais
le
péché n’est-il pas notre réalité, notre réalité sans cesse menacée pa
3831
tre réalité, notre réalité sans cesse menacée par
l’
Esprit de transformation ? Notre réalité fuyarde et qui pourtant, par
3832
alité fuyarde et qui pourtant, par un artifice de
l’
angoisse, se proclame autonome, s’absolutise, et s’adore elle-même ? L
3833
me autonome, s’absolutise, et s’adore elle-même ?
Les
uns fuient en avant, et les autres dans le passé, mais qui voudrait s
3834
t s’adore elle-même ? Les uns fuient en avant, et
les
autres dans le passé, mais qui voudrait se tenir, dans l’instant, « s
3835
ême ? Les uns fuient en avant, et les autres dans
le
passé, mais qui voudrait se tenir, dans l’instant, « sous le regard d
3836
s dans le passé, mais qui voudrait se tenir, dans
l’
instant, « sous le regard de Dieu », comme disent les chrétiens. (Est-
3837
ais qui voudrait se tenir, dans l’instant, « sous
le
regard de Dieu », comme disent les chrétiens. (Est-ce facile ? ou bie
3838
instant, « sous le regard de Dieu », comme disent
les
chrétiens. (Est-ce facile ? ou bien même possible ? Est-ce un effet d
3839
aisément…) Certains des plus lucides entrevoient
le
péril que ces doctrines font courir à l’homme, et j’entends, à l’homm
3840
revoient le péril que ces doctrines font courir à
l’
homme, et j’entends, à l’homme tel qu’il est, dans l’ordre même de son
3841
doctrines font courir à l’homme, et j’entends, à
l’
homme tel qu’il est, dans l’ordre même de son péché. Ainsi Maurras, lo
3842
omme, et j’entends, à l’homme tel qu’il est, dans
l’
ordre même de son péché. Ainsi Maurras, lorsqu’il dénonce les mythes d
3843
me de son péché. Ainsi Maurras, lorsqu’il dénonce
les
mythes de l’hégélianisme social. « Le meilleur moyen de s’en affranch
3844
é. Ainsi Maurras, lorsqu’il dénonce les mythes de
l’
hégélianisme social. « Le meilleur moyen de s’en affranchir sera d’en
3845
il dénonce les mythes de l’hégélianisme social. «
Le
meilleur moyen de s’en affranchir sera d’en revoir l’origine. Pour vo
3846
eilleur moyen de s’en affranchir sera d’en revoir
l’
origine. Pour voiler le présent certain, ils hypothèquent le futur, ma
3847
ffranchir sera d’en revoir l’origine. Pour voiler
le
présent certain, ils hypothèquent le futur, mais pour gagner ce derni
3848
Pour voiler le présent certain, ils hypothèquent
le
futur, mais pour gagner ce dernier gage, les habitudes de l’esprit re
3849
quent le futur, mais pour gagner ce dernier gage,
les
habitudes de l’esprit religieux leur font concevoir une Âme du Monde
3850
ais pour gagner ce dernier gage, les habitudes de
l’
esprit religieux leur font concevoir une Âme du Monde qu’ils se figure
3851
visible, mystérieusement répandu et vaporisé dans
les
choses afin d’y exaucer (comment et pourquoi ?) nos désirs. Cette sor
3852
e providence brute tout à fait inintelligible est
le
simple succédané de l’intelligible providence surnaturelle.61 » Mais
3853
à fait inintelligible est le simple succédané de
l’
intelligible providence surnaturelle.61 » Mais qui ne voit que cette Â
3854
elle.61 » Mais qui ne voit que cette Âme du Monde
le
tient aussi, et jusque dans son scepticisme, lorsque Maurras proclame
3855
lorsque Maurras proclame après Auguste Comte : «
Les
morts gouvernent les vivants. » Hypothèque sur le passé ! Car si les
3856
lame après Auguste Comte : « Les morts gouvernent
les
vivants. » Hypothèque sur le passé ! Car si les morts gouvernent les
3857
es morts gouvernent les vivants. » Hypothèque sur
le
passé ! Car si les morts gouvernent les vivants, c’est que nul vivant
3858
t les vivants. » Hypothèque sur le passé ! Car si
les
morts gouvernent les vivants, c’est que nul vivant n’ose vivre. Et co
3859
thèque sur le passé ! Car si les morts gouvernent
les
vivants, c’est que nul vivant n’ose vivre. Et comment vivrait-il sino
3860
vant n’ose vivre. Et comment vivrait-il sinon par
l’
appel de la Providence ? Et comment se rendre à l’appel, si l’on pose
3861
vivre. Et comment vivrait-il sinon par l’appel de
la
Providence ? Et comment se rendre à l’appel, si l’on pose ses conditi
3862
l’appel de la Providence ? Et comment se rendre à
l’
appel, si l’on pose ses conditions : « l’intelligible providence surna
3863
a Providence ? Et comment se rendre à l’appel, si
l’
on pose ses conditions : « l’intelligible providence surnaturelle ! ».
3864
rendre à l’appel, si l’on pose ses conditions : «
l’
intelligible providence surnaturelle ! ». Toute-puissance des mythes !
3865
surnaturelle ! ». Toute-puissance des mythes ! «
Le
meilleur moyen de s’en affranchir sera d’en revoir l’origine. » Seul,
3866
eilleur moyen de s’en affranchir sera d’en revoir
l’
origine. » Seul, Kierkegaard sait nous la désigner, dans le refus de c
3867
n revoir l’origine. » Seul, Kierkegaard sait nous
la
désigner, dans le refus de cette « catégorie du solitaire », de l’hom
3868
. » Seul, Kierkegaard sait nous la désigner, dans
le
refus de cette « catégorie du solitaire », de l’homme qui vit de la P
3869
le refus de cette « catégorie du solitaire », de
l’
homme qui vit de la Parole seulement, entre les temps, dans l’instant
3870
« catégorie du solitaire », de l’homme qui vit de
la
Parole seulement, entre les temps, dans l’instant éternel. Le soli
3871
de l’homme qui vit de la Parole seulement, entre
les
temps, dans l’instant éternel. Le solitaire peut-il agir ? Le m
3872
vit de la Parole seulement, entre les temps, dans
l’
instant éternel. Le solitaire peut-il agir ? Le maléfice hégélie
3873
ment, entre les temps, dans l’instant éternel.
Le
solitaire peut-il agir ? Le maléfice hégélien, c’est l’objectivité
3874
nstant éternel. Le solitaire peut-il agir ?
Le
maléfice hégélien, c’est l’objectivité : cette attitude de l’homme qu
3875
ire peut-il agir ? Le maléfice hégélien, c’est
l’
objectivité : cette attitude de l’homme qui ne veut plus être sujet de
3876
hégélien, c’est l’objectivité : cette attitude de
l’
homme qui ne veut plus être sujet de son action, qui l’abandonne aux l
3877
me qui ne veut plus être sujet de son action, qui
l’
abandonne aux lois mythiques de l’histoire. Kierkegaard au contraire n
3878
son action, qui l’abandonne aux lois mythiques de
l’
histoire. Kierkegaard au contraire nous répète : « La subjectivité est
3879
istoire. Kierkegaard au contraire nous répète : «
La
subjectivité est la vérité. » La liberté, la dignité de l’homme, c’es
3880
au contraire nous répète : « La subjectivité est
la
vérité. » La liberté, la dignité de l’homme, c’est qu’il soit seul le
3881
nous répète : « La subjectivité est la vérité. »
La
liberté, la dignité de l’homme, c’est qu’il soit seul le sujet de sa
3882
: « La subjectivité est la vérité. » La liberté,
la
dignité de l’homme, c’est qu’il soit seul le sujet de sa vie. Mais en
3883
tivité est la vérité. » La liberté, la dignité de
l’
homme, c’est qu’il soit seul le sujet de sa vie. Mais encore faut-il s
3884
rté, la dignité de l’homme, c’est qu’il soit seul
le
sujet de sa vie. Mais encore faut-il se garder d’entendre l’expressio
3885
sa vie. Mais encore faut-il se garder d’entendre
l’
expression au sens des romantiques. Je suis sujet, mais il reste à sav
3886
t-il d’un impérialisme du moi pur, tel que Fichte
l’
a follement rêvé ? Si c’est le cas, je reste bien tranquille. Ce « moi
3887
pur, tel que Fichte l’a follement rêvé ? Si c’est
le
cas, je reste bien tranquille. Ce « moi pur » ne met pas en cause mon
3888
oi pur » ne met pas en cause mon désespoir, ou si
l’
on veut, je peux rêver dans le sommeil du désespoir à ma perfection id
3889
on désespoir, ou si l’on veut, je peux rêver dans
le
sommeil du désespoir à ma perfection idéale, je peux rêver ma vocatio
3890
réveil. Il nous saisit à ce moment précis où tous
les
systèmes s’évanouissent devant l’effroi du choix concret, du risque,
3891
précis où tous les systèmes s’évanouissent devant
l’
effroi du choix concret, du risque, dans la passion du désespoir total
3892
devant l’effroi du choix concret, du risque, dans
la
passion du désespoir total. Maintenant, tu vas témoigner de la puissa
3893
désespoir total. Maintenant, tu vas témoigner de
la
puissance que ton savoir exerce sur ta vie. Tu te croyais un moi : té
3894
ule, imitation et simple objet des lois du monde.
La
foule attend : si tu la suis, elle te méprisera sans doute, mais c’es
3895
objet des lois du monde. La foule attend : si tu
la
suis, elle te méprisera sans doute, mais c’est le sort commun, tu ne
3896
la suis, elle te méprisera sans doute, mais c’est
le
sort commun, tu ne cours pas grand risque. Si tu dis non, si tu agis,
3897
elle te tuera peut-être, quitte à fleurir ensuite
la
tombe du « héros », dernière insulte62. Il s’agit de savoir maintenan
3898
érer dans son être agissant : en cette extrémité,
le
compromis se justifie… Mais si ton moi n’est pas à toi ? S’il est ta
3899
? S’il est ta vocation reçue d’ailleurs, et si tu
l’
as reçue en vérité, tu n’as plus à choisir, ta mort est derrière toi,
3900
au monde ne pourrait permettre d’accepter, quand
le
martyr reçoit sa mort avec une sorte de sobriété… Le croyant seul agi
3901
martyr reçoit sa mort avec une sorte de sobriété…
Le
croyant seul agit, et seul il peut être sujet de son action, mais c’e
3902
est, dans l’autre sens du terme, « assujetti » à
la
Parole qui vit en lui. C’est dans ce sens que la formule de Kierkegaa
3903
la Parole qui vit en lui. C’est dans ce sens que
la
formule de Kierkegaard est vraie. La sujétion totale est seule active
3904
ce sens que la formule de Kierkegaard est vraie.
La
sujétion totale est seule active. Elle est aussi présence au monde. D
3905
lle est aussi présence au monde. Dans ce temps de
la
masse, où nous vivons, le « solitaire devant Dieu » est aussi l’homme
3906
monde. Dans ce temps de la masse, où nous vivons,
le
« solitaire devant Dieu » est aussi l’homme le plus réel, le plus pré
3907
us vivons, le « solitaire devant Dieu » est aussi
l’
homme le plus réel, le plus présent. Parce qu’il sait qu’il existe un
3908
s, le « solitaire devant Dieu » est aussi l’homme
le
plus réel, le plus présent. Parce qu’il sait qu’il existe un « ailleu
3909
ire devant Dieu » est aussi l’homme le plus réel,
le
plus présent. Parce qu’il sait qu’il existe un « ailleurs », et que l
3910
e qu’il sait qu’il existe un « ailleurs », et que
l’
éternité vient à lui, il peut réellement et jusqu’au bout accepter de
3911
usqu’au bout accepter de vivre hic et nunc, quand
la
foule est ubiquité et fuite sans fin dans le passé ou l’avenir. Un
3912
uand la foule est ubiquité et fuite sans fin dans
le
passé ou l’avenir. Un seul utile à tous La phrase de Carlyle es
3913
e est ubiquité et fuite sans fin dans le passé ou
l’
avenir. Un seul utile à tous La phrase de Carlyle est connue, ré
3914
le passé ou l’avenir. Un seul utile à tous
La
phrase de Carlyle est connue, résumant l’utilitarisme de Bentham : «
3915
tous La phrase de Carlyle est connue, résumant
l’
utilitarisme de Bentham : « Étant donné un monde plein de coquins, mon
3916
tant donné un monde plein de coquins, montrer que
la
vertu est le résultat de leurs aspirations collectives. » Renversant
3917
monde plein de coquins, montrer que la vertu est
le
résultat de leurs aspirations collectives. » Renversant ce rapport il
3918
Kierkegaard que sa « catégorie du solitaire » est
le
seul fondement pratique d’une collectivité vraiment vivante. Cependan
3919
« catégorie » lui soit si familière qu’il puisse
la
considérer, sans autre, comme donnée ? La tentation est forte, de pas
3920
puisse la considérer, sans autre, comme donnée ?
La
tentation est forte, de passer d’une critique des collectivités menso
3921
tique des collectivités mensongères de ce temps à
l’
utopie d’une communauté chrétienne, par l’artifice indispensable, mais
3922
temps à l’utopie d’une communauté chrétienne, par
l’
artifice indispensable, mais peut-être aussi tout formel, de l’isoleme
3923
dispensable, mais peut-être aussi tout formel, de
l’
isolement devant Dieu. Et, d’autre part, l’acte du « solitaire » n’est
3924
el, de l’isolement devant Dieu. Et, d’autre part,
l’
acte du « solitaire » n’est pas de ceux dont nous ayons à développer l
3925
» n’est pas de ceux dont nous ayons à développer
les
conséquences. Ou bien il est, et c’est l’acte de Dieu, ou bien je l’i
3926
lopper les conséquences. Ou bien il est, et c’est
l’
acte de Dieu, ou bien je l’imagine, et mon discours est vain. À qui pr
3927
bien il est, et c’est l’acte de Dieu, ou bien je
l’
imagine, et mon discours est vain. À qui pressent, dans sa réalité bru
3928
sérieux dernier, et son risque absolu, ce qu’est
la
solitude dont Kierkegaard a témoigné, il n’apparaît plus nécessaire d
3929
émoigné, il n’apparaît plus nécessaire de réfuter
les
objections du « sens social ». Plusieurs ouvrages de Kierkegaard port
3930
s autres, et personne ne se sent atteint, mais si
l’
on parle au solitaire de son angoisse, c’est de la mienne. Kierkegaard
3931
nsable parmi nous. Il sait bien qu’en tous temps,
le
malheur de l’époque ne provient pas de ce qu’elle est « sans Dieu »,
3932
ous. Il sait bien qu’en tous temps, le malheur de
l’
époque ne provient pas de ce qu’elle est « sans Dieu », car nul siècle
3933
est sans maîtres, c’est-à-dire sans martyrs pour
l’
enseigner. C’est au sel qu’il faut rendre sa saveur, c’est à lui seul
3934
qu’il faut rendre sa saveur, c’est à lui seul que
l’
on peut reprocher d’être insipide. Rien ne sera jamais réel pour tous,
3935
est réel pour un seul. Maintenant, il faut être «
l’
impossible » : il faut être le solitaire. Kierkegaard peut-il nous aid
3936
ant, il faut être « l’impossible » : il faut être
le
solitaire. Kierkegaard peut-il nous aider ? (Un homme pourrait-il nou
3937
iers prétextes, de nos dernières incertitudes sur
la
nature et sur les exigences concrètes de l’esprit ? Mais ne fallait-i
3938
e nos dernières incertitudes sur la nature et sur
les
exigences concrètes de l’esprit ? Mais ne fallait-il pas qu’il ait co
3939
s sur la nature et sur les exigences concrètes de
l’
esprit ? Mais ne fallait-il pas qu’il ait connu de grandes aides pour
3940
ait connu de grandes aides pour oser nous montrer
la
vanité de toutes les nôtres ? Somnium narrare vigilantis est. L’aveu
3941
utes les nôtres ? Somnium narrare vigilantis est.
L’
aveu total de notre désespoir témoigne seul de la consolation. 52.
3942
L’aveu total de notre désespoir témoigne seul de
la
consolation. 52. Journal, tome X. 53. « Là encore, le clerc mode
3943
ation. 52. Journal, tome X. 53. « Là encore,
le
clerc moderne est protestant », ajoute M. Benda, qui, en fait de prot
3944
er, son maître… 54. Jean XI, 4. 55. Stades sur
le
chemin de la vie. 56. L’instant. 57. Journal. 58. Traité du dés
3945
e… 54. Jean XI, 4. 55. Stades sur le chemin de
la
vie. 56. L’instant. 57. Journal. 58. Traité du désespoir, p. 15
3946
I, 4. 55. Stades sur le chemin de la vie. 56.
L’
instant. 57. Journal. 58. Traité du désespoir, p. 156. 59. Je ne
3947
poir, p. 156. 59. Je ne reviendrai pas, ici, sur
l’
aspect philosophique de cette opposition, que Jean Wahl a remarquablem
3948
Wahl a remarquablement exposé dans un article de
la
Revue philosophique (nov.-déc. 1931). 60. Journal. 61. Le chemin
3949
losophique (nov.-déc. 1931). 60. Journal. 61.
Le
chemin du paradis, p. 269. C’est moi qui souligne. 62. Pourquoi pose
3950
question à propos d’un cas aussi exceptionnel que
le
martyre ? « Nous ne pouvons pas tous devenir martyrs ! » Certes, répo
3951
aard, mais il vaudrait mieux dire : « “Moi, je ne
le
puis pas.” Et s’il est fou de penser que tous doivent l’être, il est
3952
pas.” Et s’il est fou de penser que tous doivent
l’
être, il est encore beaucoup plus fou qu’aucun ne veuille l’être. » L’
3953
est encore beaucoup plus fou qu’aucun ne veuille
l’
être. » L’inévitable rappel aux nécessités quotidiennes est encore un
3954
e beaucoup plus fou qu’aucun ne veuille l’être. »
L’
inévitable rappel aux nécessités quotidiennes est encore un prétexte d
3955
nécessités quotidiennes est encore un prétexte de
l’
angoisse. Si la vie quotidienne est si peu dramatique, cela ne signifi
3956
idiennes est encore un prétexte de l’angoisse. Si
la
vie quotidienne est si peu dramatique, cela ne signifie pas que les q
3957
e est si peu dramatique, cela ne signifie pas que
les
questions dernières ne s’y posent jamais, mais simplement qu’on les y
3958
ières ne s’y posent jamais, mais simplement qu’on
les
y noie. Les hommes préfèrent « mourir imperceptiblement », comme disa
3959
posent jamais, mais simplement qu’on les y noie.
Les
hommes préfèrent « mourir imperceptiblement », comme disait Nietzsche
3960
’ils appellent leur petit train-train journalier.
La
fameuse « vie quotidienne » n’est peut-être rien d’autre qu’un dernie
3961
peut-être rien d’autre qu’un dernier méfait de «
la
foule » dans notre existence morale. Une question mal posée. Un regar
3962
e question mal posée. Un regard trouble porté sur
la
réalité. x. Rougemont Denis de, « Nécessité de Kierkegaard », Foi e
3963
imir Edschmid, Destin allemand (octobre 1934)y
Le
meilleur livre de l’année. Je crois bien pouvoir l’affirmer. Le roman
3964
allemand (octobre 1934)y Le meilleur livre de
l’
année. Je crois bien pouvoir l’affirmer. Le roman le plus fort, le mie
3965
meilleur livre de l’année. Je crois bien pouvoir
l’
affirmer. Le roman le plus fort, le mieux fait, le plus impressionnant
3966
vre de l’année. Je crois bien pouvoir l’affirmer.
Le
roman le plus fort, le mieux fait, le plus impressionnant, celui qui
3967
année. Je crois bien pouvoir l’affirmer. Le roman
le
plus fort, le mieux fait, le plus impressionnant, celui qui apporte l
3968
s bien pouvoir l’affirmer. Le roman le plus fort,
le
mieux fait, le plus impressionnant, celui qui apporte le plus de nouv
3969
l’affirmer. Le roman le plus fort, le mieux fait,
le
plus impressionnant, celui qui apporte le plus de nouveauté, d’humani
3970
x fait, le plus impressionnant, celui qui apporte
le
plus de nouveauté, d’humanité, de grandeur. J’ai d’autant plus envie
3971
umanité, de grandeur. J’ai d’autant plus envie de
le
dire qu’on n’a pas annoncé sa parution à grand fracas, et qu’à ma con
3972
as au public habituel des prix Goncourt —, et qui
le
dit avec une puissance assez austère. ⁂ Six chômeurs allemands, ancie
3973
ands, anciens officiers et sous-officiers pendant
la
guerre, s’embarquent pour l’Amérique du Sud. On les a engagés pour in
3974
us-officiers pendant la guerre, s’embarquent pour
l’
Amérique du Sud. On les a engagés pour instruire l’armée bolivienne, m
3975
a guerre, s’embarquent pour l’Amérique du Sud. On
les
a engagés pour instruire l’armée bolivienne, mais sans contrat, car l
3976
’Amérique du Sud. On les a engagés pour instruire
l’
armée bolivienne, mais sans contrat, car le traité de Versailles inter
3977
truire l’armée bolivienne, mais sans contrat, car
le
traité de Versailles interdit à la Bolivie d’utiliser les services de
3978
s contrat, car le traité de Versailles interdit à
la
Bolivie d’utiliser les services des Allemands. Pendant leur traversée
3979
té de Versailles interdit à la Bolivie d’utiliser
les
services des Allemands. Pendant leur traversée, un coup d’État renver
3980
. Pendant leur traversée, un coup d’État renverse
le
gouvernement qui les avait appelés officieusement. Ils hésitent à pou
3981
rsée, un coup d’État renverse le gouvernement qui
les
avait appelés officieusement. Ils hésitent à poursuivre. L’un d’entre
3982
lutionnaires qui préparent un coup de main contre
le
dictateur du Venezuela ; un autre ira chercher fortune en Argentine,
3983
ntine, dans une plantation de thé où, d’ailleurs,
la
crise mondiale l’aura précédé. Les quatre autres atteignent enfin La
3984
antation de thé où, d’ailleurs, la crise mondiale
l’
aura précédé. Les quatre autres atteignent enfin La Paz, capitale de l
3985
où, d’ailleurs, la crise mondiale l’aura précédé.
Les
quatre autres atteignent enfin La Paz, capitale de la Bolivie, ville
3986
’aura précédé. Les quatre autres atteignent enfin
La
Paz, capitale de la Bolivie, ville étrange, perdue à 4000 mètres d’al
3987
uatre autres atteignent enfin La Paz, capitale de
la
Bolivie, ville étrange, perdue à 4000 mètres d’altitude dans un déser
3988
sert glacé, dominé par d’énormes cimes neigeuses.
Le
ministre de la Guerre, un métis assez suspect, les paye mais ne leur
3989
iné par d’énormes cimes neigeuses. Le ministre de
la
Guerre, un métis assez suspect, les paye mais ne leur donne rien à fa
3990
Le ministre de la Guerre, un métis assez suspect,
les
paye mais ne leur donne rien à faire ; finalement, pour se débarrasse
3991
faire ; finalement, pour se débarrasser d’eux, il
les
fait tomber dans un piège grossier : un agent provocateur leur offre
3992
leur offre un engagement au Paraguay, qu’ils ont
la
naïveté d’accepter. Accusés de haute trahison, ils sont jetés aussitô
3993
ans une prison infecte, avec des Indiens lépreux.
Le
ministre d’Allemagne à La Paz, Pillau, réussit à les tirer de là aprè
3994
ec des Indiens lépreux. Le ministre d’Allemagne à
La
Paz, Pillau, réussit à les tirer de là après des semaines d’efforts f
3995
ministre d’Allemagne à La Paz, Pillau, réussit à
les
tirer de là après des semaines d’efforts fiévreux, durant lesquelles
3996
fiévreux, durant lesquelles il éprouve amèrement
la
faiblesse de son autorité, c’est-à-dire la faiblesse de l’Allemagne s
3997
rement la faiblesse de son autorité, c’est-à-dire
la
faiblesse de l’Allemagne sur le plan international. Les quatre hommes
3998
sse de son autorité, c’est-à-dire la faiblesse de
l’
Allemagne sur le plan international. Les quatre hommes s’en vont à Bue
3999
iblesse de l’Allemagne sur le plan international.
Les
quatre hommes s’en vont à Buenos Aires, et, là, à bout de ressources,
4000
de collaborer à une révolution qui va bouleverser
le
Brésil. Ils retrouvent un de leurs compagnons du début, celui qui éta
4001
s compagnons du début, celui qui était parti pour
le
Venezuela, et qui a subi, lui aussi, des emprisonnements, le bagne, e
4002
a, et qui a subi, lui aussi, des emprisonnements,
le
bagne, et des tortures physiques inouïes. Mais ils ne se retrouvent q
4003
é contre une section des troupes régulières, dont
le
chef n’est autre que le planteur de thé, le sixième camarade. Voilà q
4004
troupes régulières, dont le chef n’est autre que
le
planteur de thé, le sixième camarade. Voilà qui donne l’idée d’un rom
4005
teur de thé, le sixième camarade. Voilà qui donne
l’
idée d’un roman d’aventures. Destin allemand est bien, entre autres, u
4006
ais cet aspect-là, qui suffit d’ailleurs à rendre
le
livre passionnant et presque obsédant, ne suffit pas à expliquer l’im
4007
nt et presque obsédant, ne suffit pas à expliquer
l’
impression de grandeur brutale et grave à la fois qui demeure dans l’e
4008
ndeur brutale et grave à la fois qui demeure dans
l’
esprit, bien après qu’on l’a lu. En vérité, ce résumé laisse à peine e
4009
fois qui demeure dans l’esprit, bien après qu’on
l’
a lu. En vérité, ce résumé laisse à peine entrevoir le véritable sujet
4010
lu. En vérité, ce résumé laisse à peine entrevoir
le
véritable sujet de l’œuvre, celui que désigne le titre. Ces six homme
4011
mé laisse à peine entrevoir le véritable sujet de
l’
œuvre, celui que désigne le titre. Ces six hommes63 ont été chassés de
4012
le véritable sujet de l’œuvre, celui que désigne
le
titre. Ces six hommes63 ont été chassés de leur pays par une crise qu
4013
ne crise qui atteint à la fois leur attachement à
la
patrie et leur humanité, au sens le plus profond. Ce dont ils souffre
4014
attachement à la patrie et leur humanité, au sens
le
plus profond. Ce dont ils souffrent, ce n’est pas seulement de manque
4015
er leur pain, mais c’est surtout de constater que
l’
Allemagne, pour laquelle ils se sont battus, n’a plus la force d’utili
4016
magne, pour laquelle ils se sont battus, n’a plus
la
force d’utiliser leurs énergies, leurs vocations humaines. L’un d’eux
4017
rnier, paysan. On n’a pas voulu d’eux, là-bas. Et
les
voici lancés dans une vie d’aventures qu’ils n’avaient pas voulue, qu
4018
vie d’aventures qu’ils n’avaient pas voulue, qui
les
détourne de toutes leurs espérances. Ce n’est point qu’ils aient peur
4019
est plus atroce à supporter que ce sentiment-là ;
l’
absurdité de sa vie, l’absurdité du destin qu’on subit. Arrachés de le
4020
rter que ce sentiment-là ; l’absurdité de sa vie,
l’
absurdité du destin qu’on subit. Arrachés de leur terre et de leur peu
4021
es et qui s’expriment difficilement. Seul Pillau,
le
ministre, l’incarnation de leur nation, saura leur dire le mot de ce
4022
xpriment difficilement. Seul Pillau, le ministre,
l’
incarnation de leur nation, saura leur dire le mot de ce destin. « Nou
4023
re, l’incarnation de leur nation, saura leur dire
le
mot de ce destin. « Nous avons perdu la guerre, Bell, et dans la situ
4024
leur dire le mot de ce destin. « Nous avons perdu
la
guerre, Bell, et dans la situation où nous sommes, nous ne pouvons pl
4025
stin. « Nous avons perdu la guerre, Bell, et dans
la
situation où nous sommes, nous ne pouvons plus nous affirmer que par
4026
ommes, nous ne pouvons plus nous affirmer que par
le
sacrifice… Il ne s’agit pas de ces sacrifices dont on s’acquitte avec
4027
esquels on joue sa propre existence intérieure. »
Le
destin de ces déracinés, ce sera désormais de porter en eux-mêmes l’i
4028
racinés, ce sera désormais de porter en eux-mêmes
l’
image tragique de leur patrie, l’idée profonde de leur nation, que Pil
4029
ter en eux-mêmes l’image tragique de leur patrie,
l’
idée profonde de leur nation, que Pillau définit comme la fidélité, et
4030
profonde de leur nation, que Pillau définit comme
la
fidélité, et de tout sacrifier à cette fidélité. À mesure qu’ils s’él
4031
t en elle qu’ils communient, c’est elle seule qui
les
soutient dans les plus effroyables et dégradantes épreuves. Eux, les
4032
ommunient, c’est elle seule qui les soutient dans
les
plus effroyables et dégradantes épreuves. Eux, les simples, ils souff
4033
es plus effroyables et dégradantes épreuves. Eux,
les
simples, ils souffrent physiquement. Mais leur drame s’exprime dans l
4034
rent physiquement. Mais leur drame s’exprime dans
la
méditation de Pillau, d’une manière non moins tragique. « Il découvri
4035
te, et pourtant fière, d’être Allemand, de garder
la
tête haute pour l’Allemagne, et de participer au destin qui lui était
4036
re, d’être Allemand, de garder la tête haute pour
l’
Allemagne, et de participer au destin qui lui était échu pour un temps
4037
était échu pour un temps. Ce destin qui obligeait
l’
Allemagne, après la guerre, à vivre dans un état de guerre encore plus
4038
temps. Ce destin qui obligeait l’Allemagne, après
la
guerre, à vivre dans un état de guerre encore plus cruel qu’auparavan
4039
tu, désuni et impuissant… » Mais tandis que Bell,
le
chef du petit groupe, agonise au fond d’une tranchée, sous les murs d
4040
etit groupe, agonise au fond d’une tranchée, sous
les
murs du fort de Capocabana, il a soudain la vision d’une Allemagne fu
4041
sous les murs du fort de Capocabana, il a soudain
la
vision d’une Allemagne future renaissant de son calvaire, purifiée et
4042
vaire, purifiée et galvanisée par ses sacrifices.
La
haute stature de Pillau se dresse devant lui. Une fois encore, Pillau
4043
se devant lui. Une fois encore, Pillau lui montre
le
sens du sacrifice de « ces jeunes gens qui sont entrés dans le malheu
4044
crifice de « ces jeunes gens qui sont entrés dans
le
malheur la tête haute ». Car ce sont « les jeunes gens, qui ne posséd
4045
« ces jeunes gens qui sont entrés dans le malheur
la
tête haute ». Car ce sont « les jeunes gens, qui ne possédaient rien,
4046
és dans le malheur la tête haute ». Car ce sont «
les
jeunes gens, qui ne possédaient rien, qui ont écrit les pages héroïqu
4047
unes gens, qui ne possédaient rien, qui ont écrit
les
pages héroïques de l’histoire, et non les gens âgés qui possédaient t
4048
daient rien, qui ont écrit les pages héroïques de
l’
histoire, et non les gens âgés qui possédaient tout. Ces jeunes Allema
4049
t écrit les pages héroïques de l’histoire, et non
les
gens âgés qui possédaient tout. Ces jeunes Allemands qui doivent supp
4050
mands qui doivent supporter, de nos jours, toutes
les
misères du monde au fond de leur exil, ceux-là deviendront sûrement u
4051
Bell… rien ne rend aussi dur et aussi ardent que
le
malheur. Rien ne rend aussi brave et aussi passionné, aussi modeste,
4052
ussi modeste, aussi patient et aussi endurant que
le
malheur. Et rien ne fonde une communauté comme le malheur. La communa
4053
le malheur. Et rien ne fonde une communauté comme
le
malheur. La communauté des gens qui vivent dans l’aisance, celle-là n
4054
Et rien ne fonde une communauté comme le malheur.
La
communauté des gens qui vivent dans l’aisance, celle-là ne vaut pas u
4055
e malheur. La communauté des gens qui vivent dans
l’
aisance, celle-là ne vaut pas un clou. Mais la communauté des gens cim
4056
ans l’aisance, celle-là ne vaut pas un clou. Mais
la
communauté des gens cimentés par le malheur, ça c’est la seule vraie
4057
un clou. Mais la communauté des gens cimentés par
le
malheur, ça c’est la seule vraie communauté qui puisse exister pour u
4058
unauté des gens cimentés par le malheur, ça c’est
la
seule vraie communauté qui puisse exister pour un peuple ». ⁂ J’ai te
4059
sages pour faire sentir à quelle hauteur se situe
le
drame de ce livre. Nous sommes bien loin de la « propagande » nationa
4060
ue le drame de ce livre. Nous sommes bien loin de
la
« propagande » nationaliste et des rodomontades hitlériennes64. Nous
4061
nœud tragique de ce problème allemand qui domine
l’
après-guerre, et dont le dénouement doit nous laisser d’autant moins i
4062
blème allemand qui domine l’après-guerre, et dont
le
dénouement doit nous laisser d’autant moins indifférents que notre so
4063
est engagé. À vrai dire, il est malaisé de faire
la
part, dans ce drame, de ce qui est national et de ce qui est plus gén
4064
umain. Destin allemand pourrait aussi s’appeler «
La
condition humaine ». Et plusieurs des paroles de Pillau, — les plus b
4065
humaine ». Et plusieurs des paroles de Pillau, —
les
plus belles peut-être — pourraient s’appliquer au destin de n’importe
4066
te quelle nation, de n’importe quelle communauté.
Le
« fait nation », dans les dernières phrases de Pillau, n’apparaît-il
4067
porte quelle communauté. Le « fait nation », dans
les
dernières phrases de Pillau, n’apparaît-il pas lié au seul malheur de
4068
au seul malheur des hommes ? Et n’est-ce point là
le
vrai tragique de l’Allemagne actuelle, que son destin la force à n’en
4069
hommes ? Et n’est-ce point là le vrai tragique de
l’
Allemagne actuelle, que son destin la force à n’envisager plus le sort
4070
tragique de l’Allemagne actuelle, que son destin
la
force à n’envisager plus le sort de l’homme que sous l’aspect du sort
4071
uelle, que son destin la force à n’envisager plus
le
sort de l’homme que sous l’aspect du sort de la nation ? Tel est, je
4072
son destin la force à n’envisager plus le sort de
l’
homme que sous l’aspect du sort de la nation ? Tel est, je crois, le p
4073
ce à n’envisager plus le sort de l’homme que sous
l’
aspect du sort de la nation ? Tel est, je crois, le problème central q
4074
s le sort de l’homme que sous l’aspect du sort de
la
nation ? Tel est, je crois, le problème central qu’impose ce livre, e
4075
’aspect du sort de la nation ? Tel est, je crois,
le
problème central qu’impose ce livre, et l’on admettra bien, quelque o
4076
crois, le problème central qu’impose ce livre, et
l’
on admettra bien, quelque opinion qu’on ait sur le point de vue strict
4077
t sur le point de vue strictement « allemand » de
l’
auteur, qu’il est peu de problèmes plus graves pour notre avenir imméd
4078
d évoque bien d’autres questions. Edschmid a fait
le
tour du monde ; il a séjourné longtemps en Orient et en Amérique ; il
4079
en Amérique ; il s’est enfoncé profondément dans
la
vie africaine ; et, de toutes ces enquêtes passionnées, il rapporte u
4080
rtout où il se crée quelque chose de durable dans
le
monde, c’est l’œuvre d’un blanc. Les blancs seuls ont su créer des em
4081
rée quelque chose de durable dans le monde, c’est
l’
œuvre d’un blanc. Les blancs seuls ont su créer des empires solides, d
4082
durable dans le monde, c’est l’œuvre d’un blanc.
Les
blancs seuls ont su créer des empires solides, des valeurs morales st
4083
empires solides, des valeurs morales stables, de
la
fidélité. Les blancs seuls savent tenir une parole, se sacrifier à un
4084
des, des valeurs morales stables, de la fidélité.
Les
blancs seuls savent tenir une parole, se sacrifier à une cause désesp
4085
arole, se sacrifier à une cause désespérée, tenir
le
coup, malgré les trahisons du sort. Mais la guerre, mais la politique
4086
ier à une cause désespérée, tenir le coup, malgré
les
trahisons du sort. Mais la guerre, mais la politique surtout, sont en
4087
tenir le coup, malgré les trahisons du sort. Mais
la
guerre, mais la politique surtout, sont en train d’ébranler leur pres
4088
algré les trahisons du sort. Mais la guerre, mais
la
politique surtout, sont en train d’ébranler leur prestige. L’empire a
4089
surtout, sont en train d’ébranler leur prestige.
L’
empire anglais se dissocie lentement. La France doute de sa mission. L
4090
prestige. L’empire anglais se dissocie lentement.
La
France doute de sa mission. L’Espagne est morte, et le spectacle de l
4091
issocie lentement. La France doute de sa mission.
L’
Espagne est morte, et le spectacle de la vie politique en Amérique du
4092
ance doute de sa mission. L’Espagne est morte, et
le
spectacle de la vie politique en Amérique du Sud fait mesurer la déch
4093
mission. L’Espagne est morte, et le spectacle de
la
vie politique en Amérique du Sud fait mesurer la déchéance d’une race
4094
la vie politique en Amérique du Sud fait mesurer
la
déchéance d’une race qui n’a pas su se garder pure. Alors ? Serait-ce
4095
pas su se garder pure. Alors ? Serait-ce bientôt
l’
heure de l’Allemagne ? On sent partout cette interrogation, cette anxi
4096
garder pure. Alors ? Serait-ce bientôt l’heure de
l’
Allemagne ? On sent partout cette interrogation, cette anxieuse espéra
4097
tte interrogation, cette anxieuse espérance, dans
le
livre d’Edschmid. Et l’on découvre, pour la première fois peut-être,
4098
anxieuse espérance, dans le livre d’Edschmid. Et
l’
on découvre, pour la première fois peut-être, l’arrière-pensée mondial
4099
t l’on découvre, pour la première fois peut-être,
l’
arrière-pensée mondiale, grandiose, qui soutient ce peuple fiévreux da
4100
, grandiose, qui soutient ce peuple fiévreux dans
les
épreuves qu’il traverse. Ce ne sont pas les journaux qui nous apprend
4101
dans les épreuves qu’il traverse. Ce ne sont pas
les
journaux qui nous apprendront tout cela. Il faut lire Destin allemand
4102
l faut lire Destin allemand, comme on lirait dans
la
conscience même d’un peuple. Il faut avoir éprouvé par ce livre la gr
4103
e d’un peuple. Il faut avoir éprouvé par ce livre
la
grandeur d’une telle espérance, si l’on veut juger sainement la polit
4104
ar ce livre la grandeur d’une telle espérance, si
l’
on veut juger sainement la politique étrange de cette nation. Mais j’a
4105
une telle espérance, si l’on veut juger sainement
la
politique étrange de cette nation. Mais j’ai dit que cette œuvre pour
4106
ette œuvre pourrait s’intituler tout aussi bien «
La
condition humaine ». C’est qu’elle éveille, en dépit de ses intention
4107
ions nationalistes — au plus haut sens du mot, je
le
répète, mais il se peut tout de même que certains lecteurs français e
4108
ue certains lecteurs français en soient choqués —
le
sentiment d’une fraternité humaine que le roman d’André Malraux, qui
4109
oqués — le sentiment d’une fraternité humaine que
le
roman d’André Malraux, qui porte précisément ce titre, était loin d’é
4110
in d’évoquer avec une pareille puissance. J’ai eu
l’
occasion de dire, ici même, mon admiration pour les livres de M. Malra
4111
l’occasion de dire, ici même, mon admiration pour
les
livres de M. Malraux. Je suis d’autant plus libre pour affirmer aujou
4112
d’autant plus libre pour affirmer aujourd’hui que
le
roman d’Edschmid est d’une classe nettement supérieure. J’ajouterai m
4113
e M. Malraux que de constater que ses livres sont
les
seuls ouvrages français qu’on puisse comparer, tant pour leur sujet q
4114
tension65, à ce Destin allemand, qui, toutefois,
les
domine. Edschmid est plus viril, plus massif, plus sain ; moins compl
4115
sain ; moins complaisant surtout aux voluptés de
l’
aventure, à la psychologie de la douleur physique. Ses héros subissent
4116
complaisant surtout aux voluptés de l’aventure, à
la
psychologie de la douleur physique. Ses héros subissent, avec un héro
4117
t aux voluptés de l’aventure, à la psychologie de
la
douleur physique. Ses héros subissent, avec un héroïsme et une révolt
4118
us émouvants d’être silencieux, des tortures dont
les
héros de Malraux n’ont pas toujours renoncé à faire de la littérature
4119
de Malraux n’ont pas toujours renoncé à faire de
la
littérature. On comprend bien que je n’oppose pas ici le nationaliste
4120
érature. On comprend bien que je n’oppose pas ici
le
nationaliste au communiste. Je ne partage pas plus les idées racistes
4121
ationaliste au communiste. Je ne partage pas plus
les
idées racistes d’Edschmid que les idées marxistes de Malraux (encore
4122
artage pas plus les idées racistes d’Edschmid que
les
idées marxistes de Malraux (encore que l’un et l’autre fassent figure
4123
dans leurs camps respectifs). Mais sur le plan de
l’
art romanesque, autant que sur le plan généralement humain, je suis co
4124
je suis contraint de reconnaître qu’Edschmid est
le
plus authentique. Il y a, dans Destin allemand, un timbre de voix mét
4125
ur enfin qui nous ramènent puissamment au sens de
la
réalité humaine, au sens de la dégradation humaine, au sens du péché
4126
samment au sens de la réalité humaine, au sens de
la
dégradation humaine, au sens du péché concret de l’homme. Et qui rend
4127
dégradation humaine, au sens du péché concret de
l’
homme. Et qui rendent à notre jugement une rigueur qui se perdait à so
4128
oter que pas une seule femme n’apparaît dans tout
le
roman. 64. Je ne sais quel sort le Troisième Reich a réservé à ce li
4129
eich a réservé à ce livre, qui parut au moment de
l’
avènement d’Hitler. Mais je le crois trop franc et trop complexe à la
4130
parut au moment de l’avènement d’Hitler. Mais je
le
crois trop franc et trop complexe à la fois pour avoir l’agrément off
4131
trop franc et trop complexe à la fois pour avoir
l’
agrément officiel. 65. Le parallélisme est vraiment frappant : Malrau
4132
xe à la fois pour avoir l’agrément officiel. 65.
Le
parallélisme est vraiment frappant : Malraux, comme Edschmid, a voyag
4133
Edschmid, a voyagé dans des pays où il a pu voir
les
Européens mêlés à des révolutions indigènes, et comme Edschmid, il en
4134
comme Edschmid, il en a tiré des conclusions sur
le
destin de la race blanche, qui forment l’arrière-plan idéologique de
4135
id, il en a tiré des conclusions sur le destin de
la
race blanche, qui forment l’arrière-plan idéologique de son œuvre. Le
4136
ons sur le destin de la race blanche, qui forment
l’
arrière-plan idéologique de son œuvre. Leurs manières de décrire des c
4137
s combats où, entre deux bandes de mitrailleuses,
le
héros médite sur son sort, sont presque identiques. Chez l’un et l’au
4138
uve ce goût des situations extrêmes, où se dénude
le
fond secret d’un être, sa sauvagerie ou sa bonté fondamentale. L’homm
4139
’un être, sa sauvagerie ou sa bonté fondamentale.
L’
homme ne s’avouera-t-il jamais lui-même que dans les tortures ? y. R
4140
’homme ne s’avouera-t-il jamais lui-même que dans
les
tortures ? y. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Kasimir Edschmid
4141
posthumes de Nietzsche. On ne saurait surestimer
l’
importance de ces écrits demeurés longtemps inédits, et dont M. Henri-
4142
roduit ce volume, nous affirme qu’ils constituent
le
texte véritable d’une œuvre dont les volumes parus du vivant de Nietz
4143
s constituent le texte véritable d’une œuvre dont
les
volumes parus du vivant de Nietzsche ne seraient guère que le comment
4144
arus du vivant de Nietzsche ne seraient guère que
le
commentaire. Je ne sais ce qu’il faut penser d’une allégation qui par
4145
e celui qu’on vient de nous donner, nous restitue
la
totalité des thèmes de l’œuvre, sous une forme souvent beaucoup plus
4146
s donner, nous restitue la totalité des thèmes de
l’
œuvre, sous une forme souvent beaucoup plus directe que celle qu’adopt
4147
p plus directe que celle qu’adopta Nietzsche dans
les
écrits qu’il fit paraître. On ne saurait trop recommander la lecture
4148
u’il fit paraître. On ne saurait trop recommander
la
lecture de ce recueil aux esprits suffisamment armés de sens critique
4149
ques, et de cette liberté spirituelle que confère
la
connaissance vivante de « la seule chose nécessaire ». Rien de grand,
4150
rituelle que confère la connaissance vivante de «
la
seule chose nécessaire ». Rien de grand, dans l’ordre humain, ne peut
4151
la seule chose nécessaire ». Rien de grand, dans
l’
ordre humain, ne peut être vraiment dangereux pour un chrétien qui sai
4152
our un chrétien qui sait en qui il croit. Et pour
les
autres, qu’importe qu’ils perdent à cette lecture des « certitudes »
4153
traditionnelles, jamais sérieusement éprouvées ?
La
foi vraie suppose la ruine de toutes les pauvres constructions où nou
4154
ais sérieusement éprouvées ? La foi vraie suppose
la
ruine de toutes les pauvres constructions où nous pensions pouvoir no
4155
rouvées ? La foi vraie suppose la ruine de toutes
les
pauvres constructions où nous pensions pouvoir nous abriter contre so
4156
r contre son risque salutaire. M. Bolle a réparti
les
fragments traduits en trois rubriques : le philosophe, le moraliste,
4157
parti les fragments traduits en trois rubriques :
le
philosophe, le moraliste, le politique. Je ne vois pas de meilleur mo
4158
ents traduits en trois rubriques : le philosophe,
le
moraliste, le politique. Je ne vois pas de meilleur moyen de donner a
4159
en trois rubriques : le philosophe, le moraliste,
le
politique. Je ne vois pas de meilleur moyen de donner aux lecteurs de
4160
e Foi et Vie une idée, même assez grossière, de
la
richesse de cet ensemble, que de lire avec eux les quelques pages de
4161
la richesse de cet ensemble, que de lire avec eux
les
quelques pages de la première partie intitulées Religion et christian
4162
à un commentaire marginal, crayonné rapidement, à
la
volée, et sans autre ordre que celui-là même des aphorismes dans l’éd
4163
autre ordre que celui-là même des aphorismes dans
l’
édition de M. Bolle. ⁂ Le sens historique n’est qu’une théologie masq
4164
ême des aphorismes dans l’édition de M. Bolle. ⁂
Le
sens historique n’est qu’une théologie masquée : “nous atteindrons un
4165
des buts magnifiques”. Un but final plane devant
les
regards de l’homme. Le christianisme, qui maudit l’humanité et en sor
4166
fiques”. Un but final plane devant les regards de
l’
homme. Le christianisme, qui maudit l’humanité et en sort quelques spé
4167
Un but final plane devant les regards de l’homme.
Le
christianisme, qui maudit l’humanité et en sort quelques spécimens ra
4168
regards de l’homme. Le christianisme, qui maudit
l’
humanité et en sort quelques spécimens rares et réussis, est de fond e
4169
ond en comble non historique, parce qu’il nie que
les
millénaires à venir puissent produire quelque chose qui ne soit pas,
4170
ne soit pas, dès maintenant et depuis 1800 ans, à
la
disposition de chacun. Si malgré cela, l’époque actuelle est, dans so
4171
ans, à la disposition de chacun. Si malgré cela,
l’
époque actuelle est, dans son esprit, tout à fait historique, elle tém
4172
à fait historique, elle témoigne par ce fait que
l’
humanité n’est plus courbée sous le joug, qu’elle est redevenue païenn
4173
ar ce fait que l’humanité n’est plus courbée sous
le
joug, qu’elle est redevenue païenne comme elle l’était il y a quelque
4174
le joug, qu’elle est redevenue païenne comme elle
l’
était il y a quelque mille ans. On croirait presque lire du Kierkegaa
4175
nte ans avant Nietzsche, partait en guerre contre
la
philosophie de l’Évolution selon Hegel, et dénonçait en elle non seul
4176
zsche, partait en guerre contre la philosophie de
l’
Évolution selon Hegel, et dénonçait en elle non seulement un succédané
4177
nçait en elle non seulement un succédané païen de
l’
idée de Providence, mais surtout une négation de la foi ? Car la foi e
4178
’idée de Providence, mais surtout une négation de
la
foi ? Car la foi est, selon Kierkegaard, cette opération paradoxale q
4179
idence, mais surtout une négation de la foi ? Car
la
foi est, selon Kierkegaard, cette opération paradoxale qui nous rend
4180
porains du Christ incarné, et qui nie par là même
la
valeur de tous les siècles qui nous séparent apparemment de cet événe
4181
incarné, et qui nie par là même la valeur de tous
les
siècles qui nous séparent apparemment de cet événement éternel. N’est
4182
qu’il faille un incroyant pour nous rappeler que
le
salut, pour le chrétien, n’est pas dans le Progrès indéfini de notre
4183
n incroyant pour nous rappeler que le salut, pour
le
chrétien, n’est pas dans le Progrès indéfini de notre histoire, mais
4184
er que le salut, pour le chrétien, n’est pas dans
le
Progrès indéfini de notre histoire, mais qu’il est venu sur la terre,
4185
défini de notre histoire, mais qu’il est venu sur
la
terre, et qu’il est dès maintenant — hic et nunc ! — « à la dispositi
4186
et qu’il est dès maintenant — hic et nunc ! — « à
la
disposition » du moindre d’entre nous. Nietzsche croit faire un repro
4187
it faire un reproche terrible au christianisme en
le
traitant d’agent « non historique ». Il faut croire que cet adversair
4188
ais il n’importe. Ce qui est admirable ici, c’est
la
lucidité avec laquelle Nietzsche décèle l’idolâtrie de notre temps, m
4189
c’est la lucidité avec laquelle Nietzsche décèle
l’
idolâtrie de notre temps, même s’il y participe pour son compte. Il es
4190
i que nos contemporains ont cessé de croire, dans
l’
ensemble, que le salut était déjà venu. Ils se sont mis à croire de no
4191
porains ont cessé de croire, dans l’ensemble, que
le
salut était déjà venu. Ils se sont mis à croire de nouveau que le Mes
4192
éjà venu. Ils se sont mis à croire de nouveau que
le
Messie naîtrait de leurs efforts indéfinis vers le Progrès. Ils sont
4193
e Messie naîtrait de leurs efforts indéfinis vers
le
Progrès. Ils sont redevenus païens. Les plus conscients de ce paganis
4194
finis vers le Progrès. Ils sont redevenus païens.
Les
plus conscients de ce paganisme nouveau ont adopté sa vraie théologie
4195
paganisme nouveau ont adopté sa vraie théologie :
la
dialectique historique de Karl Marx. En vertu de cet acte de foi, fai
4196
vertu de cet acte de foi, fait en révolte contre
la
vraie foi, ils se persuadent que l’humanité sera meilleure, sera plus
4197
évolte contre la vraie foi, ils se persuadent que
l’
humanité sera meilleure, sera plus près de son « salut » dans cent ans
4198
us près de son « salut » dans cent ans qu’elle ne
l’
est aujourd’hui. Mais que dis-je, cent ans ! Il faut à leur espoir de
4199
ux ans qui auraient encore dix mille ans à vivre.
L’
esprit métaphysique me souffle : “Et après ?” Mais je ne l’écoute pas
4200
métaphysique me souffle : “Et après ?” Mais je ne
l’
écoute pas et trouve malgré tout ces chiffres consolants. » Au salut p
4201
lgré tout ces chiffres consolants. » Au salut par
l’
éternité, voici donc opposée une notion beaucoup plus scientifique et
4202
ifique et beaucoup plus conforme aux exigences de
l’
Histoire : le salut par la sempiternité. Mais n’est-ce point là ce que
4203
ucoup plus conforme aux exigences de l’Histoire :
le
salut par la sempiternité. Mais n’est-ce point là ce que toute la Bib
4204
nforme aux exigences de l’Histoire : le salut par
la
sempiternité. Mais n’est-ce point là ce que toute la Bible nous désig
4205
sempiternité. Mais n’est-ce point là ce que toute
la
Bible nous désigne comme l’enfer même : ne plus pouvoir échapper au t
4206
point là ce que toute la Bible nous désigne comme
l’
enfer même : ne plus pouvoir échapper au temps, ne plus pouvoir mourir
4207
plus pouvoir mourir, ne plus pouvoir renaître ?
La
contemplation religieuse du monde sans l’acuité et la profondeur de l
4208
ître ? La contemplation religieuse du monde sans
l’
acuité et la profondeur de l’intellect fait de la religion la chose la
4209
ontemplation religieuse du monde sans l’acuité et
la
profondeur de l’intellect fait de la religion la chose la plus répugn
4210
gieuse du monde sans l’acuité et la profondeur de
l’
intellect fait de la religion la chose la plus répugnante qui soit. O
4211
l’acuité et la profondeur de l’intellect fait de
la
religion la chose la plus répugnante qui soit. Oui, je sais bien de
4212
la profondeur de l’intellect fait de la religion
la
chose la plus répugnante qui soit. Oui, je sais bien de quoi il souf
4213
ndeur de l’intellect fait de la religion la chose
la
plus répugnante qui soit. Oui, je sais bien de quoi il souffre, et c
4214
z méfiante. Il est trop clair qu’on peut inverser
la
maxime : « La contemplation intellectuelle du monde sans l’acuité et
4215
est trop clair qu’on peut inverser la maxime : «
La
contemplation intellectuelle du monde sans l’acuité et la profondeur
4216
: « La contemplation intellectuelle du monde sans
l’
acuité et la profondeur de la foi fait de l’intelligence la chose la p
4217
mplation intellectuelle du monde sans l’acuité et
la
profondeur de la foi fait de l’intelligence la chose la plus répugnan
4218
tuelle du monde sans l’acuité et la profondeur de
la
foi fait de l’intelligence la chose la plus répugnante qui soit. » I
4219
sans l’acuité et la profondeur de la foi fait de
l’
intelligence la chose la plus répugnante qui soit. » Il faut perdre l
4220
et la profondeur de la foi fait de l’intelligence
la
chose la plus répugnante qui soit. » Il faut perdre la croyance en D
4221
fondeur de la foi fait de l’intelligence la chose
la
plus répugnante qui soit. » Il faut perdre la croyance en Dieu, en l
4222
se la plus répugnante qui soit. » Il faut perdre
la
croyance en Dieu, en la liberté et en l’immortalité, comme ses premiè
4223
i soit. » Il faut perdre la croyance en Dieu, en
la
liberté et en l’immortalité, comme ses premières dents ; ce n’est qu’
4224
t perdre la croyance en Dieu, en la liberté et en
l’
immortalité, comme ses premières dents ; ce n’est qu’ensuite que vous
4225
ières dents ; ce n’est qu’ensuite que vous pousse
la
véritable dentition. La foi est toujours une seconde dentition. Et c
4226
’ensuite que vous pousse la véritable dentition.
La
foi est toujours une seconde dentition. Et celui qui n’est pas mort u
4227
difiées par ses bons sentiments ou par sa peur de
la
réalité, celui-là n’est pas né à la foi. Il n’a pas la mâchoire solid
4228
ar sa peur de la réalité, celui-là n’est pas né à
la
foi. Il n’a pas la mâchoire solide. (Mais je vois bien que Nietzsche
4229
alité, celui-là n’est pas né à la foi. Il n’a pas
la
mâchoire solide. (Mais je vois bien que Nietzsche voulait dire autre
4230
Nietzsche voulait dire autre chose…). Même pour
l’
homme le plus pieux, le déjeuner quotidien est plus important que la S
4231
he voulait dire autre chose…). Même pour l’homme
le
plus pieux, le déjeuner quotidien est plus important que la Sainte-Cè
4232
autre chose…). Même pour l’homme le plus pieux,
le
déjeuner quotidien est plus important que la Sainte-Cène. Kierkegaar
4233
eux, le déjeuner quotidien est plus important que
la
Sainte-Cène. Kierkegaard n’eût pas mieux dit. « Pensées qui blessent
4234
sent — pour édifier » — c’est ainsi qu’il nommait
les
remarques amères qu’il ne pouvait s’empêcher de former au spectacle d
4235
l ne pouvait s’empêcher de former au spectacle de
la
chrétienté et dans sa nostalgie d’un christianisme vrai. Mais Nietzsc
4236
ngoisse de ne pouvoir parvenir lui-même à prendre
le
repas sacré plus au sérieux que le menu de sa pension ? « Même pour l
4237
même à prendre le repas sacré plus au sérieux que
le
menu de sa pension ? « Même pour l’homme le plus pieux… » jugez des a
4238
u sérieux que le menu de sa pension ? « Même pour
l’
homme le plus pieux… » jugez des autres ! Jugez de moi ! semble-t-il d
4239
x que le menu de sa pension ? « Même pour l’homme
le
plus pieux… » jugez des autres ! Jugez de moi ! semble-t-il dire. Et
4240
gez de moi ! semble-t-il dire. Et c’est ainsi que
l’
incroyant se juge chaque fois qu’il prononce une vérité. En quoi l’on
4241
ge chaque fois qu’il prononce une vérité. En quoi
l’
on pourra dire qu’il ressemble fort au croyant, — toutefois, sans le s
4242
u’il ressemble fort au croyant, — toutefois, sans
le
savoir, c’est là le point. Les hommes sont le plus superstitieux qua
4243
au croyant, — toutefois, sans le savoir, c’est là
le
point. Les hommes sont le plus superstitieux quand ils sont très exc
4244
— toutefois, sans le savoir, c’est là le point.
Les
hommes sont le plus superstitieux quand ils sont très excités. Les re
4245
ns le savoir, c’est là le point. Les hommes sont
le
plus superstitieux quand ils sont très excités. Les religions se cons
4246
e plus superstitieux quand ils sont très excités.
Les
religions se consolident dans des périodes de grands troubles et d’in
4247
’insécurité. Lorsque tout cède, on se cramponne à
l’
illusion de l’au-delà. Parfaitement valable pour les religions, cette
4248
orsque tout cède, on se cramponne à l’illusion de
l’
au-delà. Parfaitement valable pour les religions, cette sentence est
4249
illusion de l’au-delà. Parfaitement valable pour
les
religions, cette sentence est grossière, voire naïve, si Nietzsche en
4250
re, voire naïve, si Nietzsche entendait parler de
la
foi. La foi, qui donne à l’homme la vision réaliste du péché, crée la
4251
e naïve, si Nietzsche entendait parler de la foi.
La
foi, qui donne à l’homme la vision réaliste du péché, crée la crise b
4252
e entendait parler de la foi. La foi, qui donne à
l’
homme la vision réaliste du péché, crée la crise bien davantage qu’ell
4253
ait parler de la foi. La foi, qui donne à l’homme
la
vision réaliste du péché, crée la crise bien davantage qu’elle n’en r
4254
donne à l’homme la vision réaliste du péché, crée
la
crise bien davantage qu’elle n’en résulte. Ce qui résulte inévitablem
4255
te. Ce qui résulte inévitablement d’une crise que
la
foi ne résout pas (en lui substituant une autre crise plus radicale e
4256
e plus radicale et salutaire) c’est, par exemple,
le
culte du Surhomme. Le « retour étemel » est alors le type même de la
4257
utaire) c’est, par exemple, le culte du Surhomme.
Le
« retour étemel » est alors le type même de la superstition née du ce
4258
culte du Surhomme. Le « retour étemel » est alors
le
type même de la superstition née du cerveau d’un homme très excité.
4259
e. Le « retour étemel » est alors le type même de
la
superstition née du cerveau d’un homme très excité. En somme, qu’est
4260
En somme, qu’est-ce que cela veut dire : J’aime
les
hommes pour l’amour de Dieu ? Est-ce autre chose que de dire : J’aime
4261
st-ce que cela veut dire : J’aime les hommes pour
l’
amour de Dieu ? Est-ce autre chose que de dire : J’aime les gendarmes
4262
de Dieu ? Est-ce autre chose que de dire : J’aime
les
gendarmes pour l’amour de la justice ? Ou de s’écrier, comme cette je
4263
tre chose que de dire : J’aime les gendarmes pour
l’
amour de la justice ? Ou de s’écrier, comme cette jeune fille : J’aime
4264
ue de dire : J’aime les gendarmes pour l’amour de
la
justice ? Ou de s’écrier, comme cette jeune fille : J’aime Schopenhau
4265
fille : J’aime Schopenhauer, parce que grand-père
l’
a connu et aimé ? Phrase typique d’un homme qui n’a jamais rencontré
4266
en Christ ; pas plus qu’on ne saurait rencontrer
la
justice ; pas plus que la jeune fille n’avait rencontré Schopenhauer.
4267
n ne saurait rencontrer la justice ; pas plus que
la
jeune fille n’avait rencontré Schopenhauer. La nature est mauvaise,
4268
e la jeune fille n’avait rencontré Schopenhauer.
La
nature est mauvaise, dit le christianisme : ne serait-il pas quelque
4269
contré Schopenhauer. La nature est mauvaise, dit
le
christianisme : ne serait-il pas quelque chose contre nature ? Sinon,
4270
bon à rappeler, à ces « chrétiens » que terrorise
l’
idée même que le christianisme veut leur mort, pour leur donner la vie
4271
à ces « chrétiens » que terrorise l’idée même que
le
christianisme veut leur mort, pour leur donner la vie. Il s’agit de s
4272
le christianisme veut leur mort, pour leur donner
la
vie. Il s’agit de savoir si la nature actuelle de l’homme est bonne o
4273
, pour leur donner la vie. Il s’agit de savoir si
la
nature actuelle de l’homme est bonne ou mauvaise. La foi nous montre
4274
vie. Il s’agit de savoir si la nature actuelle de
l’
homme est bonne ou mauvaise. La foi nous montre qu’elle est mauvaise.
4275
nature actuelle de l’homme est bonne ou mauvaise.
La
foi nous montre qu’elle est mauvaise. Dans ce sens, il est vrai de di
4276
est mauvaise. Dans ce sens, il est vrai de dire :
le
christianisme est contre nature. Et je m’explique mal pourquoi tant d
4277
is si Nietzsche croit autre chose, s’il croit que
la
nature est bonne, pourquoi crie-t-il si fort que « l’homme est quelqu
4278
ature est bonne, pourquoi crie-t-il si fort que «
l’
homme est quelque chose qui doit être surmonté » ? Il n’y a pas que le
4279
chose qui doit être surmonté » ? Il n’y a pas que
les
chrétiens pour ne pas croire assez à ce qu’ils croient, ou s’imaginen
4280
ssez à ce qu’ils croient, ou s’imaginent croire.
Le
repentir ! Le remords ! Le chrétien ne pense pas à son prochain, il e
4281
ls croient, ou s’imaginent croire. Le repentir !
Le
remords ! Le chrétien ne pense pas à son prochain, il est beaucoup tr
4282
u s’imaginent croire. Le repentir ! Le remords !
Le
chrétien ne pense pas à son prochain, il est beaucoup trop occupé de
4283
aucoup trop occupé de soi-même ! Quelle que soit
la
justesse des critiques de Nietzsche — et jusque dans leur injustice,
4284
xpliquer cette espèce de déception que me procure
la
critique nietzschéenne, je trouve ceci : Nietzsche parle sans autorit
4285
he parle sans autorité. Il a tendance à confondre
l’
autorité et la violence. Mais ses violences sont contradictoires : il
4286
autorité. Il a tendance à confondre l’autorité et
la
violence. Mais ses violences sont contradictoires : il attaque ici l’
4287
s violences sont contradictoires : il attaque ici
l’
égoïsme, dont il fait par ailleurs l’apologie, mais sans jamais « décl
4288
attaque ici l’égoïsme, dont il fait par ailleurs
l’
apologie, mais sans jamais « déclarer ses valeurs », sans jamais renvo
4289
is renvoyer à une autorité centrale qui donnerait
la
synthèse de ces contradictions. La vie chrétienne est pleine de contr
4290
qui donnerait la synthèse de ces contradictions.
La
vie chrétienne est pleine de contradictions, elle aussi, mais Paul le
4291
t pleine de contradictions, elle aussi, mais Paul
les
a toutes rassemblées dans une formule unique qui renvoie au fondement
4292
qui renvoie au fondement même du christianisme :
l’
opposition du péché et de la foi. « Je ne fais pas le bien que j’aime,
4293
me du christianisme : l’opposition du péché et de
la
foi. « Je ne fais pas le bien que j’aime, mais je fais le mal que je
4294
pposition du péché et de la foi. « Je ne fais pas
le
bien que j’aime, mais je fais le mal que je hais. » C’est pourquoi, l
4295
« Je ne fais pas le bien que j’aime, mais je fais
le
mal que je hais. » C’est pourquoi, lorsque Paul critique la vie des c
4296
je hais. » C’est pourquoi, lorsque Paul critique
la
vie des chrétiens de son temps, il parle avec autorité, tandis que le
4297
de son temps, il parle avec autorité, tandis que
les
critiques de Nietzsche feront toujours l’effet de criailleries. L’in
4298
is que les critiques de Nietzsche feront toujours
l’
effet de criailleries. L’intensité de la vie prise comme but unique d
4299
etzsche feront toujours l’effet de criailleries.
L’
intensité de la vie prise comme but unique de celle-ci, voilà une pens
4300
toujours l’effet de criailleries. L’intensité de
la
vie prise comme but unique de celle-ci, voilà une pensée qui est insu
4301
able aux hommes. Ne voyons-nous pas au contraire
le
monde contemporain entièrement dominé par une religion de la vie, de
4302
ntemporain entièrement dominé par une religion de
la
vie, de « l’intensité » de la vie ? Ne voyons-nous pas cette mystique
4303
tièrement dominé par une religion de la vie, de «
l’
intensité » de la vie ? Ne voyons-nous pas cette mystique de « l’inten
4304
par une religion de la vie, de « l’intensité » de
la
vie ? Ne voyons-nous pas cette mystique de « l’intensité prise comme
4305
e la vie ? Ne voyons-nous pas cette mystique de «
l’
intensité prise comme but », c’est-à-dire cette mystique de la vie pri
4306
prise comme but », c’est-à-dire cette mystique de
la
vie prise comme but de la vie, et même de la religion, s’introduire j
4307
-dire cette mystique de la vie prise comme but de
la
vie, et même de la religion, s’introduire jusque dans les sermons, et
4308
e de la vie prise comme but de la vie, et même de
la
religion, s’introduire jusque dans les sermons, et s’y substituer au
4309
et même de la religion, s’introduire jusque dans
les
sermons, et s’y substituer au respect de la vérité, soupçonnée, non s
4310
dans les sermons, et s’y substituer au respect de
la
vérité, soupçonnée, non sans quelque raison, d’être parfois « antivit
4311
e-cinq ans plus tard, je serais tenté de dire que
les
hommes ne supportent plus aucune pensée qui contredise celle-là ! Le
4312
ent plus aucune pensée qui contredise celle-là !
Le
christianisme a promis le royaume des cieux à la pauvreté spirituelle
4313
contredise celle-là ! Le christianisme a promis
le
royaume des cieux à la pauvreté spirituelle. Mais le premier chrétien
4314
Le christianisme a promis le royaume des cieux à
la
pauvreté spirituelle. Mais le premier chrétien cultivé et spirituel a
4315
hristianisme sa rhétorique et sa dialectique ; de
la
sorte, il a empêché le christianisme de mourir de sa pauvreté spiritu
4316
que et sa dialectique ; de la sorte, il a empêché
le
christianisme de mourir de sa pauvreté spirituelle. On est toujours
4317
lle. On est toujours étonné de voir un esprit de
la
trempe de celui de Nietzsche se livrer à d’aussi grossières confusion
4318
té, confondu ici avec bêtise). Mais c’est bien là
la
malhonnêteté du positivisme primaire qui régna sur le siècle dernier,
4319
alhonnêteté du positivisme primaire qui régna sur
le
siècle dernier, et dont l’œuvre de Nietzsche a subi trop souvent les
4320
primaire qui régna sur le siècle dernier, et dont
l’
œuvre de Nietzsche a subi trop souvent les atteintes. Dans ce même liv
4321
et dont l’œuvre de Nietzsche a subi trop souvent
les
atteintes. Dans ce même livre, quatre pages plus bas, j’en trouve un
4322
un autre exemple : Nietzsche croit découvrir que
la
notion chrétienne du Dieu paternel dérive de la notion « de la famill
4323
e la notion chrétienne du Dieu paternel dérive de
la
notion « de la famille patriarcale ». Comme si l’on ne pouvait pas so
4324
étienne du Dieu paternel dérive de la notion « de
la
famille patriarcale ». Comme si l’on ne pouvait pas soutenir l’invers
4325
la notion « de la famille patriarcale ». Comme si
l’
on ne pouvait pas soutenir l’inverse ! et avec beaucoup plus de vraise
4326
riarcale ». Comme si l’on ne pouvait pas soutenir
l’
inverse ! et avec beaucoup plus de vraisemblance et même de « sérieux
4327
et même de « sérieux historique ». Parmi toutes
les
criailleries de Nietzsche, certaines prennent un accent prophétique :
4328
t commanderont aussi à leur Dieu, tout en croyant
le
servir. » Formule qui n’est pas valable pour le seul pape de Rome et
4329
t le servir. » Formule qui n’est pas valable pour
le
seul pape de Rome et pour les seuls conciles. Les grands mouvements f
4330
est pas valable pour le seul pape de Rome et pour
les
seuls conciles. Les grands mouvements fascistes ne se réclament-ils p
4331
le seul pape de Rome et pour les seuls conciles.
Les
grands mouvements fascistes ne se réclament-ils pas, eux aussi, d’un
4332
cette même forme d’esprit sur un autre plan, dans
le
communisme russe ? On sait que ce régime s’est établi au nom de la Sc
4333
se ? On sait que ce régime s’est établi au nom de
la
Science, qui est son Dieu. On sait aussi qu’il n’a pas hésité à conda
4334
u. On sait aussi qu’il n’a pas hésité à condamner
la
théorie d’Einstein parce qu’elle contredisait l’hypothèse marxiste. C
4335
la théorie d’Einstein parce qu’elle contredisait
l’
hypothèse marxiste. Croyant servir leur science, ils commandent à la s
4336
te. Croyant servir leur science, ils commandent à
la
science…, etc. Mais, afin que nul ne se croie justifié, voici pour le
4337
is, afin que nul ne se croie justifié, voici pour
les
conservateurs : « Vous dites que vous croyez à la nécessité de la rel
4338
es conservateurs : « Vous dites que vous croyez à
la
nécessité de la religion ? Soyez sincères ! Vous croyez à la nécessit
4339
: « Vous dites que vous croyez à la nécessité de
la
religion ? Soyez sincères ! Vous croyez à la nécessité de la police !
4340
é de la religion ? Soyez sincères ! Vous croyez à
la
nécessité de la police ! » Dès que vous croyez qu’il y a, à côté de
4341
? Soyez sincères ! Vous croyez à la nécessité de
la
police ! » Dès que vous croyez qu’il y a, à côté de la causalité ab
4342
ce ! » Dès que vous croyez qu’il y a, à côté de
la
causalité absolue, encore un Dieu ou une finalité, l’idée de la néces
4343
ausalité absolue, encore un Dieu ou une finalité,
l’
idée de la nécessité devient insupportable. Traduisons : dès que vous
4344
bsolue, encore un Dieu ou une finalité, l’idée de
la
nécessité devient insupportable. Traduisons : dès que vous croyez qu
4345
le, devoir kantien, conscience, notion humaine de
la
justice, science, mystique de la vie, droit au bonheur, etc., l’idée
4346
otion humaine de la justice, science, mystique de
la
vie, droit au bonheur, etc., l’idée de la toute-puissance et de la li
4347
ence, mystique de la vie, droit au bonheur, etc.,
l’
idée de la toute-puissance et de la liberté de Dieu devient insupporta
4348
ique de la vie, droit au bonheur, etc., l’idée de
la
toute-puissance et de la liberté de Dieu devient insupportable. C’est
4349
bonheur, etc., l’idée de la toute-puissance et de
la
liberté de Dieu devient insupportable. C’est le « Dieu moral » qui em
4350
e la liberté de Dieu devient insupportable. C’est
le
« Dieu moral » qui empêche, en particulier, une certaine théologie li
4351
ne certaine théologie libérale de reconnaître que
le
Dieu de la Bible — ancien et nouveau Testament — est seul Maître de l
4352
ancien et nouveau Testament — est seul Maître de
la
seule Justice, de la seule Vie, de la seule Science, du seul Bonheur
4353
stament — est seul Maître de la seule Justice, de
la
seule Vie, de la seule Science, du seul Bonheur ; et qu’il a seul le
4354
l Maître de la seule Justice, de la seule Vie, de
la
seule Science, du seul Bonheur ; et qu’il a seul le droit de contredi
4355
seule Science, du seul Bonheur ; et qu’il a seul
le
droit de contredire nos notions, trop humaines et trop intéressées, d
4356
détourna plusieurs générations des églises où on
le
prêchait envers et contre tout « honneur de Dieu » ? La réfutation d
4357
hait envers et contre tout « honneur de Dieu » ?
La
réfutation de Dieu : en somme, ce n’est que le “Dieu moral” qui est r
4358
? La réfutation de Dieu : en somme, ce n’est que
le
“Dieu moral” qui est réfuté. Il est bien significatif que les fragme
4359
al” qui est réfuté. Il est bien significatif que
les
fragments de Nietzsche sur la religion se terminent par cet aphorisme
4360
n significatif que les fragments de Nietzsche sur
la
religion se terminent par cet aphorisme d’une éblouissante vérité.
4361
Luther et
la
liberté (À propos du Traité du serf arbitre) (avril 1937)aa Luth
4362
gnore Luther en France serait exagérer, mais dans
le
sens contraire de celui qu’on imagine. Car, on fait pis que de l’igno
4363
e de celui qu’on imagine. Car, on fait pis que de
l’
ignorer et même que de le méconnaître : on prétend, sans l’avoir jamai
4364
Car, on fait pis que de l’ignorer et même que de
le
méconnaître : on prétend, sans l’avoir jamais lu, savoir qui il fut,
4365
et même que de le méconnaître : on prétend, sans
l’
avoir jamais lu, savoir qui il fut, qui il est. Certains ont parcouru
4366
oir qui il fut, qui il est. Certains ont parcouru
les
Propos de table, présentés au public français comme un ouvrage capita
4367
contradictions. Est-ce avec cela que s’est faite
la
Réforme ? D’autres, moins exigeants, n’hésitent pas à soutenir que Lu
4368
nir que Luther fut un démagogue, un exploiteur de
l’
éternel ressentiment de la race allemande contre la civilisation romai
4369
gogue, un exploiteur de l’éternel ressentiment de
la
race allemande contre la civilisation romaine. On a poussé la bouffon
4370
’éternel ressentiment de la race allemande contre
la
civilisation romaine. On a poussé la bouffonnerie jusqu’à cet excès g
4371
mande contre la civilisation romaine. On a poussé
la
bouffonnerie jusqu’à cet excès grandiose d’assimiler Luther et M. Hit
4372
iose d’assimiler Luther et M. Hitler, par goût de
la
rime sans doute. Pour l’opinion moyenne sur Luther, je crois que la p
4373
t M. Hitler, par goût de la rime sans doute. Pour
l’
opinion moyenne sur Luther, je crois que la phrase suivante en donne u
4374
. Pour l’opinion moyenne sur Luther, je crois que
la
phrase suivante en donne une juste idée : « En somme, qu’est-ce que L
4375
ion du livre d’un critique littéraire connu, dont
les
revues n’hésitèrent pas lorsqu’il parut (en 1936) à louer la mesure e
4376
’hésitèrent pas lorsqu’il parut (en 1936) à louer
la
mesure et la sérieuse information théologique… Ceci dit, il est juste
4377
as lorsqu’il parut (en 1936) à louer la mesure et
la
sérieuse information théologique… Ceci dit, il est juste d’insister s
4378
héologique… Ceci dit, il est juste d’insister sur
la
grande valeur des travaux de quelques spécialistes français qui, au n
4379
quelques spécialistes français qui, au niveau de
la
haute culture, ont largement sauvé l’honneur de leur pays. Je pense a
4380
u niveau de la haute culture, ont largement sauvé
l’
honneur de leur pays. Je pense aux ouvrages publiés par MM. Henri Stro
4381
son, pour ne rien dire — mais cela va de soi — de
l’
activité des professeurs de dogmatique luthérienne ou d’histoire de l’
4382
sseurs de dogmatique luthérienne ou d’histoire de
l’
Église dans les trois Facultés françaises de théologie protestante. Il
4383
atique luthérienne ou d’histoire de l’Église dans
les
trois Facultés françaises de théologie protestante. Il n’en reste pas
4384
héologie protestante. Il n’en reste pas moins que
l’
ignorance ou la méconnaissance courantes à l’égard de Luther, jointes
4385
tante. Il n’en reste pas moins que l’ignorance ou
la
méconnaissance courantes à l’égard de Luther, jointes aux diverses ca
4386
ies recueillies par des biographes amateurs, et à
l’
action de la polémique catholique (Denifle, Maritain, Grisar), mettent
4387
ies par des biographes amateurs, et à l’action de
la
polémique catholique (Denifle, Maritain, Grisar), mettent le public f
4388
e catholique (Denifle, Maritain, Grisar), mettent
le
public français en état d’infériorité assez grave, ne fût-ce que sur
4389
riorité assez grave, ne fût-ce que sur le plan de
la
culture générale. Car, ignorer ou méconnaître Luther, c’est ignorer o
4390
onnaître un des deux ou trois moments décisifs de
la
tradition fondamentale de l’Occident, c’est s’interdire de rien compr
4391
moments décisifs de la tradition fondamentale de
l’
Occident, c’est s’interdire de rien comprendre à la grande discussion
4392
’Occident, c’est s’interdire de rien comprendre à
la
grande discussion millénaire, à la grande tension spirituelle dans la
4393
n comprendre à la grande discussion millénaire, à
la
grande tension spirituelle dans laquelle l’Europe a puisé son dynamis
4394
re, à la grande tension spirituelle dans laquelle
l’
Europe a puisé son dynamisme créateur. Tension dont le débat du libre
4395
rope a puisé son dynamisme créateur. Tension dont
le
débat du libre arbitre, opposant Érasme à Luther, permet de définir s
4396
Érasme à Luther, permet de définir symboliquement
les
pôles : pensée « pure » et pensée « engagée », ou encore attitude du
4397
ion qui, sur le plan théologique, ou mieux : dans
la
totalité de l’être, revient à celle d’un christianisme qui se met au
4398
plan théologique, ou mieux : dans la totalité de
l’
être, revient à celle d’un christianisme qui se met au service de l’hu
4399
celle d’un christianisme qui se met au service de
l’
humain (j’entends bien de l’humain purifié, « divinisé » par les effor
4400
se met au service de l’humain (j’entends bien de
l’
humain purifié, « divinisé » par les efforts de la religion s’ajoutant
4401
ntends bien de l’humain purifié, « divinisé » par
les
efforts de la religion s’ajoutant à ceux de la raison), et d’un chris
4402
l’humain purifié, « divinisé » par les efforts de
la
religion s’ajoutant à ceux de la raison), et d’un christianisme absol
4403
r les efforts de la religion s’ajoutant à ceux de
la
raison), et d’un christianisme absolu, qu’on déclare volontiers « inh
4404
inhumain », parce qu’il attribue tout à Dieu.
Le
Traité du serf arbitre C’est sans doute dans cette perspective qu
4405
e C’est sans doute dans cette perspective que
le
lecteur peu familiarisé avec la pensée luthérienne parviendra le plus
4406
e perspective que le lecteur peu familiarisé avec
la
pensée luthérienne parviendra le plus aisément à saisir l’importance
4407
familiarisé avec la pensée luthérienne parviendra
le
plus aisément à saisir l’importance centrale du De servo arbitrio, do
4408
luthérienne parviendra le plus aisément à saisir
l’
importance centrale du De servo arbitrio, dont une première traduction
4409
se va paraître, après un peu plus de 400 ans : je
le
vois au centre du débat occidental par excellence, — mais au centre,
4410
ental par excellence, — mais au centre, aussi, de
la
Réforme, et de l’effort dogmatique de Luther68. On croit d’abord à u
4411
ce, — mais au centre, aussi, de la Réforme, et de
l’
effort dogmatique de Luther68. On croit d’abord à un pamphlet, encore
4412
e que son volume matériel soit bien écrasant pour
le
genre. Mais on s’aperçoit, sans tarder, que la discussion avec Érasme
4413
ur le genre. Mais on s’aperçoit, sans tarder, que
la
discussion avec Érasme et sa Diatribe (souvent personnifiée) n’est, e
4414
atribe (souvent personnifiée) n’est, en fait, que
le
support apparent d’une réflexion de plus vaste envergure, d’un témoig
4415
le, excité (bien plutôt que « désarmé », comme il
le
dit aux premières pages) par les procédés de l’humaniste et du scepti
4416
sarmé », comme il le dit aux premières pages) par
les
procédés de l’humaniste et du sceptique que se vantait d’être Érasme,
4417
l le dit aux premières pages) par les procédés de
l’
humaniste et du sceptique que se vantait d’être Érasme, Luther en vien
4418
che, à ressaisir et reposer avec puissance toutes
les
affirmations fondamentales de la Réforme : justification par la foi,
4419
uissance toutes les affirmations fondamentales de
la
Réforme : justification par la foi, qui est don gratuit et œuvre de D
4420
s fondamentales de la Réforme : justification par
la
foi, qui est don gratuit et œuvre de Dieu seul ; opposition de cette
4421
Dieu seul ; opposition de cette justice de Dieu à
la
justice des hommes et de leurs œuvres ; opposition de la grâce à la n
4422
ice des hommes et de leurs œuvres ; opposition de
la
grâce à la nature, selon les termes de l’Apôtre ; opposition de la Pa
4423
mes et de leurs œuvres ; opposition de la grâce à
la
nature, selon les termes de l’Apôtre ; opposition de la Parole vivant
4424
uvres ; opposition de la grâce à la nature, selon
les
termes de l’Apôtre ; opposition de la Parole vivante à la tradition c
4425
tion de la grâce à la nature, selon les termes de
l’
Apôtre ; opposition de la Parole vivante à la tradition codifiée ; sen
4426
ure, selon les termes de l’Apôtre ; opposition de
la
Parole vivante à la tradition codifiée ; sens de la décision totale e
4427
s de l’Apôtre ; opposition de la Parole vivante à
la
tradition codifiée ; sens de la décision totale entre un oui et un no
4428
Parole vivante à la tradition codifiée ; sens de
la
décision totale entre un oui et un non absolus, et refus de tout moye
4429
erme ou médiation plus ou moins rationnelle entre
les
règnes en guerre ouverte du Dieu de la foi et du Prince de ce monde ;
4430
lle entre les règnes en guerre ouverte du Dieu de
la
foi et du Prince de ce monde ; nécessité du témoignage et du témoigna
4431
témoignage et du témoignage fidèle, certifié par
l’
Esprit et la Bible, et constituant la véritable « action » de l’homme
4432
et du témoignage fidèle, certifié par l’Esprit et
la
Bible, et constituant la véritable « action » de l’homme entre les ma
4433
certifié par l’Esprit et la Bible, et constituant
la
véritable « action » de l’homme entre les mains de Dieu. Tels sont le
4434
Bible, et constituant la véritable « action » de
l’
homme entre les mains de Dieu. Tels sont les thèmes qu’illustre cet ou
4435
stituant la véritable « action » de l’homme entre
les
mains de Dieu. Tels sont les thèmes qu’illustre cet ouvrage. S’ils n’
4436
n » de l’homme entre les mains de Dieu. Tels sont
les
thèmes qu’illustre cet ouvrage. S’ils n’y sont pas traités en forme,
4437
du mot, mais qu’ils s’impliquent très étroitement
les
uns les autres, et ne peuvent être mieux saisis que dans l’unique et
4438
mais qu’ils s’impliquent très étroitement les uns
les
autres, et ne peuvent être mieux saisis que dans l’unique et perpétue
4439
autres, et ne peuvent être mieux saisis que dans
l’
unique et perpétuelle question que nous posent toutes les pages de la
4440
ue et perpétuelle question que nous posent toutes
les
pages de la Bible. Ils renvoient tous à une réalité dont ils ne sont
4441
elle question que nous posent toutes les pages de
la
Bible. Ils renvoient tous à une réalité dont ils ne sont que les refl
4442
renvoient tous à une réalité dont ils ne sont que
les
reflets, diversement réfractés par nos mots. Ils renvoient tous à la
4443
ment réfractés par nos mots. Ils renvoient tous à
la
question du Christ : « … Et toi, maintenant, crois-tu cela ? » — Si t
4444
« … Et toi, maintenant, crois-tu cela ? » — Si tu
le
crois, si tu as reçu la foi, il n’est plus rien de « difficile » dans
4445
crois-tu cela ? » — Si tu le crois, si tu as reçu
la
foi, il n’est plus rien de « difficile » dans les assertions de Luthe
4446
la foi, il n’est plus rien de « difficile » dans
les
assertions de Luther, ni dans sa négation joyeuse du libre arbitre. S
4447
arbitre. Ses coups violents n’ébranlent plus que
le
« vieil homme », celui qu’il nous faut dépouiller. « Folie pour le
4448
celui qu’il nous faut dépouiller. « Folie pour
les
sages » Mais il s’en faut de presque tout que les grandes thèses p
4449
sages » Mais il s’en faut de presque tout que
les
grandes thèses pauliniennes de la Réforme soient acceptées (ou simple
4450
esque tout que les grandes thèses pauliniennes de
la
Réforme soient acceptées (ou simplement connues !) par nos contempora
4451
s. Il s’en faut de beaucoup, de presque tout, que
les
arguments d’un Érasme nous apparaissent comme autant de sophismes. No
4452
ent comme autant de sophismes. Non seulement tous
les
humanistes, — des marxistes aux vieux libéraux, — y applaudissent ouv
4453
pplaudissent ouvertement, mais encore jusque chez
les
chrétiens, ces arguments se voient réinventés, admis, parfois même pr
4454
e voient réinventés, admis, parfois même prêchés.
Le
laïcisme moraliste n’en a pas du tout le monopole : tout catholique s
4455
prêchés. Le laïcisme moraliste n’en a pas du tout
le
monopole : tout catholique se doit, en bonne logique, de les faire si
4456
e : tout catholique se doit, en bonne logique, de
les
faire siens puisqu’il croit au mérite des œuvres ; et tous les protes
4457
ns puisqu’il croit au mérite des œuvres ; et tous
les
protestants qui jugent encore que Calvin et Luther ont fait leur temp
4458
Paul bien plus ancien ! — tous ceux qui tiennent
la
prédestination pour un dogme immoral ou périmé ; ceux qui traduisent
4459
oral ou périmé ; ceux qui traduisent : « Paix sur
la
terre aux hommes que Dieu agrée », par « Paix aux hommes de bonne vol
4460
ec Érasme et son armée de grands docteurs de tous
les
siècles pour soutenir le libre arbitre religieux, c’est-à-dire le pou
4461
grands docteurs de tous les siècles pour soutenir
le
libre arbitre religieux, c’est-à-dire le pouvoir qu’aurait l’homme de
4462
soutenir le libre arbitre religieux, c’est-à-dire
le
pouvoir qu’aurait l’homme de contribuer à son salut par ses efforts e
4463
itre religieux, c’est-à-dire le pouvoir qu’aurait
l’
homme de contribuer à son salut par ses efforts et ses œuvres morales.
4464
Une verdeur de polémique qui peut flatter en nous
le
goût du pittoresque ; l’élan génial, la violence loyale d’une certitu
4465
qui peut flatter en nous le goût du pittoresque ;
l’
élan génial, la violence loyale d’une certitude pesante, vraiment « gr
4466
r en nous le goût du pittoresque ; l’élan génial,
la
violence loyale d’une certitude pesante, vraiment « grave », d’une di
4467
i va droit au point décisif, envisage honnêtement
les
objections, donne à la thèse adverse toutes ses chances, non sans iro
4468
sif, envisage honnêtement les objections, donne à
la
thèse adverse toutes ses chances, non sans ironie toutefois, et sait
4469
nie toutefois, et sait enfin conférer à son choix
la
force et la simplicité d’une constatation évidente. D’un point de vue
4470
s, et sait enfin conférer à son choix la force et
la
simplicité d’une constatation évidente. D’un point de vue purement es
4471
r assez flagrantes, pour qu’un lecteur qui refuse
l’
essentiel soit tout de même attiré et subjugué par le style, par le to
4472
ssentiel soit tout de même attiré et subjugué par
le
style, par le ton de l’ouvrage. (Nous ne savons que trop bien, nous m
4473
tout de même attiré et subjugué par le style, par
le
ton de l’ouvrage. (Nous ne savons que trop bien, nous modernes, sépar
4474
me attiré et subjugué par le style, par le ton de
l’
ouvrage. (Nous ne savons que trop bien, nous modernes, séparer le fond
4475
s ne savons que trop bien, nous modernes, séparer
le
fond de la forme ; admirer l’une quand nous condamnons l’autre, et vi
4476
que trop bien, nous modernes, séparer le fond de
la
forme ; admirer l’une quand nous condamnons l’autre, et vice versa.)
4477
lleurs du chef d’un grand mouvement (comme dirait
le
jargon d’aujourd’hui), tout est bien fait, dans ce Traité, pour heurt
4478
bien fait, dans ce Traité, pour heurter de front
le
lecteur incroyant, ou celui qui ne partage pas la foi de Paul et des
4479
le lecteur incroyant, ou celui qui ne partage pas
la
foi de Paul et des apôtres. D’abord, le langage scolastique, qui n’es
4480
rtage pas la foi de Paul et des apôtres. D’abord,
le
langage scolastique, qui n’est pas proprement luthérien, mais que Lut
4481
t obligé d’utiliser pour débrouiller et supprimer
les
faux problèmes où la Diatribe voulait l’embarrasser69. Ensuite, ce re
4482
ur débrouiller et supprimer les faux problèmes où
la
Diatribe voulait l’embarrasser69. Ensuite, ce refus total, ou mieux c
4483
pprimer les faux problèmes où la Diatribe voulait
l’
embarrasser69. Ensuite, ce refus total, ou mieux cette négligence tran
4484
(Un tel homme est bien trop vivant pour faire de
la
psychologie ; trop engagé dans le réel pour prendre au sérieux ses re
4485
t pour faire de la psychologie ; trop engagé dans
le
réel pour prendre au sérieux ses reflets dans la conscience du specta
4486
le réel pour prendre au sérieux ses reflets dans
la
conscience du spectateur.) Ce qui ne manquera pas de faire crier au d
4487
faire crier au dogmatisme. Tout se passe ici « à
l’
intérieur » du christianisme, de l’Église. L’humanisme laïque, autonom
4488
passe ici « à l’intérieur » du christianisme, de
l’
Église. L’humanisme laïque, autonome, est simplement nié, comme une ab
4489
« à l’intérieur » du christianisme, de l’Église.
L’
humanisme laïque, autonome, est simplement nié, comme une absurdité, u
4490
nié, comme une absurdité, une contradiction dans
les
termes. C’est à Érasme en tant que théologien que Luther s’applique à
4491
n que Luther s’applique à répondre, et c’est même
la
plus dure ironie — quoique involontaire, je le suppose —, dont il pou
4492
me la plus dure ironie — quoique involontaire, je
le
suppose —, dont il pouvait, en l’occurrence, l’accabler. On ne saurai
4493
nvolontaire, je le suppose —, dont il pouvait, en
l’
occurrence, l’accabler. On ne saurait souligner trop fortement ce trai
4494
e le suppose —, dont il pouvait, en l’occurrence,
l’
accabler. On ne saurait souligner trop fortement ce trait : c’est enco
4495
en philosophe ou en métaphysicien, que Luther nie
le
libre arbitre. Ceci pourrait suffire, et doit suffire en droit, à réf
4496
rait suffire, et doit suffire en droit, à réfuter
l’
objection d’un moderne, l’objection parfaitement anachronique, mais qu
4497
ire en droit, à réfuter l’objection d’un moderne,
l’
objection parfaitement anachronique, mais que je sais inévitable, qui
4498
à affirmer que Luther est « déterministe ». Mais
le
sérieux théologique est chose trop rare, et pour beaucoup trop diffic
4499
e écarter cette objection par un simple rappel de
l’
ordre dans lequel le Traité fut pensé. Je tenterai donc d’esquisser,
4500
ction par un simple rappel de l’ordre dans lequel
le
Traité fut pensé. Je tenterai donc d’esquisser, tout au moins, le di
4501
sé. Je tenterai donc d’esquisser, tout au moins,
le
dialogue d’une « conscience moderne », douée d’exigence spirituelle,
4502
’un tel dialogue se déroule même à l’intérieur de
la
pensée d’un homme qui veut croire…) Dialogue Car Dieu peut tout
4503
ue Car Dieu peut tout à tout instant. C’est là
la
santé de la foi. Kierkegaard. Une conscience moderne. — Selon Lut
4504
eu peut tout à tout instant. C’est là la santé de
la
foi. Kierkegaard. Une conscience moderne. — Selon Luther, nous n’
4505
selon sa prévision. Luther ne pose pas seulement
l’
omnipotence, mais l’omniscience et la prescience éternelle de Dieu, qu
4506
Luther ne pose pas seulement l’omnipotence, mais
l’
omniscience et la prescience éternelle de Dieu, qui ne peut faillir da
4507
as seulement l’omnipotence, mais l’omniscience et
la
prescience éternelle de Dieu, qui ne peut faillir dans sa promesse, e
4508
erons plus ! Nous refusons de jouer si, d’avance,
le
vainqueur a été désigné par un arbitre qui ne tient pas compte de nos
4509
oits ! Un luthérien. — Mais connais-tu seulement
les
vraies règles du jeu ? Qui t’a fait croire que ta vie était une parti
4510
que ta vie était une partie à jouer entre toi et
le
monde, par exemple ; ou encore entre l’individu et le Sort, cette ido
4511
re toi et le monde, par exemple ; ou encore entre
l’
individu et le Sort, cette idole païenne ? C. M. — J’ai besoin de le
4512
onde, par exemple ; ou encore entre l’individu et
le
Sort, cette idole païenne ? C. M. — J’ai besoin de le croire pour ag
4513
rt, cette idole païenne ? C. M. — J’ai besoin de
le
croire pour agir. L. — Mais qu’est-ce qu’agir ? Est-ce vraiment toi
4514
e ta science ne s’occupe-t-elle pas, justement, à
les
découvrir ? Au besoin, à les inventer ? C. M. — Certes, mais ma dign
4515
le pas, justement, à les découvrir ? Au besoin, à
les
inventer ? C. M. — Certes, mais ma dignité consiste à lutter contre
4516
à lutter contre de telles forces, une fois que je
les
ai reconnues ; à m’affirmer dans mon autonomie par un acte qui crée m
4517
qui crée ma liberté, par un acte de révolte, s’il
le
faut ! L. — Tu crois donc détenir un tel pouvoir ? C. M. — Il me su
4518
un tel pouvoir ? C. M. — Il me suffit de vouloir
l’
affirmer. L. — Soit, c’est une hypothèse de travail… Pour moi, je cro
4519
e de travail… Pour moi, je crois que Dieu connaît
la
fin, la somme, la valeur absolue de nos actions passées, présentes, f
4520
vail… Pour moi, je crois que Dieu connaît la fin,
la
somme, la valeur absolue de nos actions passées, présentes, futures,
4521
moi, je crois que Dieu connaît la fin, la somme,
la
valeur absolue de nos actions passées, présentes, futures, car elles
4522
passées, présentes, futures, car elles sont dans
le
temps, Dieu dans l’Éternité qui est avant le temps, qui est en lui, e
4523
futures, car elles sont dans le temps, Dieu dans
l’
Éternité qui est avant le temps, qui est en lui, et qui est encore apr
4524
dans le temps, Dieu dans l’Éternité qui est avant
le
temps, qui est en lui, et qui est encore après lui. Au regard de Dieu
4525
ard de Dieu donc, « tout est accompli », — depuis
la
mort du Christ sur la croix. Non seulement prévu, mais accompli ! C.
4526
ut est accompli », — depuis la mort du Christ sur
la
croix. Non seulement prévu, mais accompli ! C. M. — Si c’était vrai,
4527
ncore nier ce Dieu qui prétend voir plus loin que
le
terme de mes actions, — ce qui, avouons-le, les ridiculise complèteme
4528
in que le terme de mes actions, — ce qui, avouons-
le
, les ridiculise complètement et les rend vaines en fin de compte : ca
4529
ue le terme de mes actions, — ce qui, avouons-le,
les
ridiculise complètement et les rend vaines en fin de compte : car je
4530
e qui, avouons-le, les ridiculise complètement et
les
rend vaines en fin de compte : car je sens, malgré tout, que je les f
4531
fin de compte : car je sens, malgré tout, que je
les
fais librement, et tu viens me dire qu’elles sont prévues ! Et prévue
4532
Nietzsche a proclamé qu’il avait fait. L. — Mais
l’
homme est « chair », et cette chair est liée à l’espace et au temps. C
4533
l’homme est « chair », et cette chair est liée à
l’
espace et au temps. Comment le temps tuerait-il l’Éternel ? Comment la
4534
te chair est liée à l’espace et au temps. Comment
le
temps tuerait-il l’Éternel ? Comment la chair tuerait-elle l’Esprit ?
4535
l’espace et au temps. Comment le temps tuerait-il
l’
Éternel ? Comment la chair tuerait-elle l’Esprit ? Elle ne peut tuer q
4536
. Comment le temps tuerait-il l’Éternel ? Comment
la
chair tuerait-elle l’Esprit ? Elle ne peut tuer que l’idée fausse qu’
4537
rait-il l’Éternel ? Comment la chair tuerait-elle
l’
Esprit ? Elle ne peut tuer que l’idée fausse qu’elle s’en formait… Tu
4538
air tuerait-elle l’Esprit ? Elle ne peut tuer que
l’
idée fausse qu’elle s’en formait… Tu affirmes que si Dieu prévoit tout
4539
tu es alors dispensé d’agir, et que ce n’est plus
la
peine de faire aucun effort. Si tout est décidé d’avance, il n’y a pl
4540
ton effort aussi était prévu ? Pourrais-tu ne pas
le
fournir ? Et si tu décidais : « Je suis, donc Dieu n’est pas !70 », q
4541
ui t’assurerait que cet acte de révolte échappe à
l’
éternelle Prévision ? Qui t’assurerait qu’en prononçant ces mots, tu n
4542
ant ces mots, tu ne prononcerais pas sur toi-même
l’
arrêt éternel de Dieu te rejetant vers le néant, en sorte que Dieu, vr
4543
toi-même l’arrêt éternel de Dieu te rejetant vers
le
néant, en sorte que Dieu, vraiment, n’existe plus pour toi ? Fermer l
4544
e Dieu, vraiment, n’existe plus pour toi ? Fermer
les
yeux sur une réalité, ce n’est pas la supprimer objectivement. Mais c
4545
i ? Fermer les yeux sur une réalité, ce n’est pas
la
supprimer objectivement. Mais c’est peut-être se priver de son secour
4546
est peut-être se priver de son secours, ou encore
la
transformer en une menace obscure. Il y a une double prédestination :
4547
double prédestination : l’une au salut, l’autre à
la
damnation. Être damné, ne serait-ce pas justement être rivé au temps
4548
justement être rivé au temps sans fin, et refuser
l’
éternité qui vient nous délivrer du temps ? C. M. — Mais mon temps es
4549
eauté, de création ! Ton éternité immobile, c’est
l’
image même de la mort. L. — Que savons-nous de l’éternité ? Les philo
4550
on ! Ton éternité immobile, c’est l’image même de
la
mort. L. — Que savons-nous de l’éternité ? Les philosophes et la rai
4551
l’image même de la mort. L. — Que savons-nous de
l’
éternité ? Les philosophes et la raison ne peuvent l’imaginer que mort
4552
de la mort. L. — Que savons-nous de l’éternité ?
Les
philosophes et la raison ne peuvent l’imaginer que morte. Mais la Bib
4553
ue savons-nous de l’éternité ? Les philosophes et
la
raison ne peuvent l’imaginer que morte. Mais la Bible nous dit qu’ell
4554
ternité ? Les philosophes et la raison ne peuvent
l’
imaginer que morte. Mais la Bible nous dit qu’elle est la Vie, et que
4555
t la raison ne peuvent l’imaginer que morte. Mais
la
Bible nous dit qu’elle est la Vie, et que notre vie n’est qu’une mort
4556
ner que morte. Mais la Bible nous dit qu’elle est
la
Vie, et que notre vie n’est qu’une mort à ses yeux. Qui nous prouve q
4557
n’est qu’une mort à ses yeux. Qui nous prouve que
l’
éternité est quelque chose d’immobile, de statique ? Qui nous dit qu’e
4558
e ? Qui nous dit qu’elle n’est pas, au contraire,
la
source de tout acte et de toute création, une invention totale et per
4559
totale et perpétuelle, une actualité permanente,
la
seule chose qui change quelque chose au déroulement calculable du tem
4560
se au déroulement calculable du temps, quand elle
le
touche dans l’instant (dans un « atome » de temps, comme l’écrit Paul
4561
nt calculable du temps, quand elle le touche dans
l’
instant (dans un « atome » de temps, comme l’écrit Paul) (I Cor. 15 :
4562
dans l’instant (dans un « atome » de temps, comme
l’
écrit Paul) (I Cor. 15 : 52) ? Qui t’assure que notre raison, tout att
4563
? C’est un mystère plus profond que notre vie, et
la
raison n’est qu’un faible élément de notre vie. C’est un mystère que
4564
faible élément de notre vie. C’est un mystère que
le
croyant pressent et vit au seul moment de la prière. « Demandez et l’
4565
que le croyant pressent et vit au seul moment de
la
prière. « Demandez et l’on vous donnera », dit le même Dieu qui nous
4566
et vit au seul moment de la prière. « Demandez et
l’
on vous donnera », dit le même Dieu qui nous prédestina ! Quand le cro
4567
la prière. « Demandez et l’on vous donnera », dit
le
même Dieu qui nous prédestina ! Quand le croyant, qui sait que Dieu a
4568
a », dit le même Dieu qui nous prédestina ! Quand
le
croyant, qui sait que Dieu a tout prévu éternellement, adresse à Dieu
4569
t-il pas ce paradoxe et ce mystère : croire que «
l’
Éternel est vivant », croire que sa volonté — qui a tout prévu — peut
4570
peut aussi tout changer en un instant aux yeux de
l’
homme, sans que rien soit changé de ce qu’a décidé Dieu, de ce qu’il d
4571
de ce qu’il décide ou de ce qu’il décidera ? Car
l’
Éternel ne connaît pas de « temps », il n’est pas lié comme nous à une
4572
ire, nos divers temps et successions procèdent de
l’
Éternel et lui sont liés : nous venons de lui, nous retournons à lui,
4573
ui, nous retournons à lui, il est en nous lorsque
l’
Esprit dit la Parole dans notre cœur. Quelle étrange illusion nous fer
4574
urnons à lui, il est en nous lorsque l’Esprit dit
la
Parole dans notre cœur. Quelle étrange illusion nous ferait croire qu
4575
ge illusion nous ferait croire qu’une décision de
l’
Éternel est une décision dans le passé ! Quand c’est elle seule qui dé
4576
u’une décision de l’Éternel est une décision dans
le
passé ! Quand c’est elle seule qui définit notre présent ! Est-ce que
4577
t notre crainte du « fatalisme » ne reposent pas,
le
plus souvent, sur cette erreur des plus grossières ? … C. M. — On pe
4578
s plus grossières ? … C. M. — On peut aussi nier
l’
éternité, et affirmer que seul existe notre temps. Dans ce cas, tu n’a
4579
— On ne prouve rien de ce qui est essentiel ; on
l’
accepte ou on le refuse, en vertu d’une décision pure. Discuter ne peu
4580
rien de ce qui est essentiel ; on l’accepte ou on
le
refuse, en vertu d’une décision pure. Discuter ne peut nous conduire
4581
ns pas dialogué en vain, si nous avons pu dégager
l’
alternative du libre arbitre, telle qu’elle se pose dans les termes ex
4582
tive du libre arbitre, telle qu’elle se pose dans
les
termes extrêmes où elle revêt sa vraie réalité : c’est l’Éternel qui
4583
s extrêmes où elle revêt sa vraie réalité : c’est
l’
Éternel qui commande, — ou c’est moi. Il n’y a pas là de difficultés i
4584
s là de difficultés intellectuelles. Il n’y a que
la
résistance acharnée du « vieil homme », et les prétextes toujours trè
4585
que la résistance acharnée du « vieil homme », et
les
prétextes toujours très moraux, et même très pieux, qu’invoque notre
4586
révolte… Réalité radicale du problème Dans
l’
Église, une fois acceptés le Credo et son fondement qui est la Parole
4587
e du problème Dans l’Église, une fois acceptés
le
Credo et son fondement qui est la Parole dite en nous par l’Esprit et
4588
e fois acceptés le Credo et son fondement qui est
la
Parole dite en nous par l’Esprit et attestée par l’Écriture, — or, ce
4589
son fondement qui est la Parole dite en nous par
l’
Esprit et attestée par l’Écriture, — or, cette Parole est Christ lui-m
4590
Parole dite en nous par l’Esprit et attestée par
l’
Écriture, — or, cette Parole est Christ lui-même, — il me paraît que l
4591
te Parole est Christ lui-même, — il me paraît que
l’
opinion de Luther n’est pas sujette à de sérieuses objections. Et la d
4592
r n’est pas sujette à de sérieuses objections. Et
la
démonstration purement biblique qu’on en trouvera dans le Traité du s
4593
stration purement biblique qu’on en trouvera dans
le
Traité du serf arbitre, malgré quelques détails exégétiques discutabl
4594
ls exégétiques discutables, suffit à établir pour
le
chrétien la vérité d’un paradoxe que Luther n’a pas inventé, mais qui
4595
es discutables, suffit à établir pour le chrétien
la
vérité d’un paradoxe que Luther n’a pas inventé, mais qui est au cœur
4596
her n’a pas inventé, mais qui est au cœur même de
l’
Évangile. L’apôtre Paul l’a formulé avant toute « tradition ecclésiast
4597
inventé, mais qui est au cœur même de l’Évangile.
L’
apôtre Paul l’a formulé avant toute « tradition ecclésiastique », et t
4598
qui est au cœur même de l’Évangile. L’apôtre Paul
l’
a formulé avant toute « tradition ecclésiastique », et tous les Pères
4599
avant toute « tradition ecclésiastique », et tous
les
Pères et tous les siècles dont se réclame Érasme n’y changeront rien
4600
ition ecclésiastique », et tous les Pères et tous
les
siècles dont se réclame Érasme n’y changeront rien : « Travaillez à v
4601
emblement, puisque c’est Dieu qui produit en vous
le
vouloir et le faire. » (Phil. 2 : 12-13). C’est parce que Dieu fait t
4602
sque c’est Dieu qui produit en vous le vouloir et
le
faire. » (Phil. 2 : 12-13). C’est parce que Dieu fait tout que nous d
4603
fait tout que nous devons agir, selon qu’il nous
l’
a commandé. C’est parce que Dieu a tout prévu que nous avons en lui, e
4604
tout prévu que nous avons en lui, et en lui seul,
la
liberté. Mais cela n’apparaît qu’à celui qui ose aller jusqu’aux extr
4605
ît qu’à celui qui ose aller jusqu’aux extrêmes de
la
connaissance de soi-même et de la connaissance de la foi. Luther insi
4606
aux extrêmes de la connaissance de soi-même et de
la
connaissance de la foi. Luther insiste sur cet « extrêmisme » évangél
4607
connaissance de soi-même et de la connaissance de
la
foi. Luther insiste sur cet « extrêmisme » évangélique, que les sophi
4608
r insiste sur cet « extrêmisme » évangélique, que
les
sophistes n’étaient que trop portés à corriger et à « humaniser », au
4609
orriger et à « humaniser », au risque d’« évacuer
la
Croix ». Tant qu’on n’a pas envisagé la doctrine de la pure grâce jus
4610
« évacuer la Croix ». Tant qu’on n’a pas envisagé
la
doctrine de la pure grâce jusque dans son sérieux dernier, on peut so
4611
oix ». Tant qu’on n’a pas envisagé la doctrine de
la
pure grâce jusque dans son sérieux dernier, on peut soutenir que l’ho
4612
ue dans son sérieux dernier, on peut soutenir que
l’
homme possède au moins « un faible libre arbitre »71, dans les choses
4613
sède au moins « un faible libre arbitre »71, dans
les
choses du salut. Mais que le Christ ait dû mourir — cet acte extrême
4614
e arbitre »71, dans les choses du salut. Mais que
le
Christ ait dû mourir — cet acte extrême — pour nous sauver, fait voir
4615
liberté, par nous-mêmes, dans notre péché. Et, à
l’
inverse, il faut oser descendre jusqu’au fond de la connaissance du pé
4616
’inverse, il faut oser descendre jusqu’au fond de
la
connaissance du péché pour voir qu’il n’y a de liberté possible que d
4617
our voir qu’il n’y a de liberté possible que dans
la
grâce que Dieu nous fait. Toute l’argumentation de Luther vise le mom
4618
sible que dans la grâce que Dieu nous fait. Toute
l’
argumentation de Luther vise le moment de la décision, et néglige les
4619
u nous fait. Toute l’argumentation de Luther vise
le
moment de la décision, et néglige les moyens termes où voulait se com
4620
Toute l’argumentation de Luther vise le moment de
la
décision, et néglige les moyens termes où voulait se complaire Érasme
4621
Luther vise le moment de la décision, et néglige
les
moyens termes où voulait se complaire Érasme. Le problème du salut es
4622
les moyens termes où voulait se complaire Érasme.
Le
problème du salut est un problème de vie ou de mort. Or, il est seul
4623
de vie ou de mort. Or, il est seul en cause pour
le
théologien. Et tout est clair lorsque l’on a compris que Luther ne ni
4624
use pour le théologien. Et tout est clair lorsque
l’
on a compris que Luther ne nie pas du tout notre faculté de vouloir, m
4625
e seulement qu’elle puisse suffire à nous obtenir
le
salut, étant elle-même soumise au mal. Tout le reste est psychologie,
4626
ir le salut, étant elle-même soumise au mal. Tout
le
reste est psychologie, littérature et scolastique. Il n’en reste pas
4627
olastique. Il n’en reste pas moins qu’aux yeux de
la
raison — cette folle comme le répète Luther —, ce que nous nommons ic
4628
oins qu’aux yeux de la raison — cette folle comme
le
répète Luther —, ce que nous nommons ici un paradoxe demeure une pure
4629
s alors, on peut se demander si ceux qui refusent
le
christianisme échappent vraiment à la difficulté ; ou si, au contrair
4630
ui refusent le christianisme échappent vraiment à
la
difficulté ; ou si, au contraire, ils ne la retrouvent pas, mais dans
4631
ent à la difficulté ; ou si, au contraire, ils ne
la
retrouvent pas, mais dans un plan où elle reste insoluble. Érasme éta
4632
me était encore catholique ; son humanisme mesuré
l’
empêche de voir le vrai tragique du débat. Mais le plus grand des adve
4633
tholique ; son humanisme mesuré l’empêche de voir
le
vrai tragique du débat. Mais le plus grand des adversaires du christi
4634
l’empêche de voir le vrai tragique du débat. Mais
le
plus grand des adversaires du christianisme dans les temps modernes,
4635
plus grand des adversaires du christianisme dans
les
temps modernes, Nietzsche, aboutit à un dilemme qui me paraît corresp
4636
e, terme à terme, à celui que Luther et Paul — et
l’
Évangile — posent à notre foi. C’est qu’il a poussé, comme Luther, jus
4637
ussé, comme Luther, jusqu’aux extrêmes limites de
l’
homme, jusqu’aux questions dernières que peut envisager notre pensée.
4638
ager notre pensée. Pour échapper au nihilisme qui
l’
étreint, dès lors que « Dieu est mort » ou qu’il l’a « tué », il imagi
4639
’étreint, dès lors que « Dieu est mort » ou qu’il
l’
a « tué », il imagine le Retour éternel. Et comme ce Retour éternel pa
4640
Dieu est mort » ou qu’il l’a « tué », il imagine
le
Retour éternel. Et comme ce Retour éternel paraît exclure toute liber
4641
xclure toute liberté humaine, il se met à prêcher
l’
amor fati, l’adhésion volontaire et joyeuse à la fatalité inéluctable.
4642
liberté humaine, il se met à prêcher l’amor fati,
l’
adhésion volontaire et joyeuse à la fatalité inéluctable. C’est dans c
4643
r l’amor fati, l’adhésion volontaire et joyeuse à
la
fatalité inéluctable. C’est dans cette volonté de reconnaître notre t
4644
irresponsabilité, qu’il croit trouver et regagner
la
dignité suprême de l’homme sans Dieu. Être libre, c’est vouloir l’éte
4645
l croit trouver et regagner la dignité suprême de
l’
homme sans Dieu. Être libre, c’est vouloir l’éternité de son destin. (
4646
e de l’homme sans Dieu. Être libre, c’est vouloir
l’
éternité de son destin. (Pour le chrétien, c’est accepter, en acte, l’
4647
re, c’est vouloir l’éternité de son destin. (Pour
le
chrétien, c’est accepter, en acte, l’éternelle prévision du Dieu qui
4648
stin. (Pour le chrétien, c’est accepter, en acte,
l’
éternelle prévision du Dieu qui sauve.) La similitude étonnante du par
4649
n acte, l’éternelle prévision du Dieu qui sauve.)
La
similitude étonnante du paradoxe luthérien et du paradoxe nietzschéen
4650
vérité, c’est bien du même problème qu’il s’agit.
Le
seul problème, dès qu’on en vient à une épreuve radicale de la vie. A
4651
ème, dès qu’on en vient à une épreuve radicale de
la
vie. Au « tu dois » des chrétiens, qui est prononcé par Dieu, Nietzsc
4652
iens, qui est prononcé par Dieu, Nietzsche oppose
le
« je veux » de l’homme divinisé. Puis, à l’existence de Dieu, il oppo
4653
oncé par Dieu, Nietzsche oppose le « je veux » de
l’
homme divinisé. Puis, à l’existence de Dieu, il oppose sa propre exist
4654
ppose le « je veux » de l’homme divinisé. Puis, à
l’
existence de Dieu, il oppose sa propre existence72. Mais la difficulté
4655
ce de Dieu, il oppose sa propre existence72. Mais
la
difficulté fondamentale que posent les rapports de notre volonté et d
4656
nce72. Mais la difficulté fondamentale que posent
les
rapports de notre volonté et de l’éternité souveraine, demeure entièr
4657
le que posent les rapports de notre volonté et de
l’
éternité souveraine, demeure entière. La différence, c’est que Nietzsc
4658
nté et de l’éternité souveraine, demeure entière.
La
différence, c’est que Nietzsche nous propose d’adorer un Destin muet,
4659
muet, tandis que nous adorons une Providence dont
la
Parole vivante s’est incarnée : « Emmanuel ! » — Dieu avec nous !
4660
rnée : « Emmanuel ! » — Dieu avec nous ! 68. À
la
proposition qu’on lui faisait, en 1537, d’éditer ses œuvres complètes
4661
faisait, en 1537, d’éditer ses œuvres complètes,
le
réformateur répondit : « Je ne reconnais aucun de mes livres pour adé
4662
de mes livres pour adéquat, si ce n’est peut-être
le
De servo arbitrio et le Catéchisme. » 69. Luther avertit à chaque fo
4663
at, si ce n’est peut-être le De servo arbitrio et
le
Catéchisme. » 69. Luther avertit à chaque fois : « nécessité conditi
4664
absolue, comme ils disent », et ce ils désigne «
les
sophistes », c’est-à-dire les scolastiques. 70. Comme l’anarchiste B
4665
et ce ils désigne « les sophistes », c’est-à-dire
les
scolastiques. 70. Comme l’anarchiste Bakounine. 71. Modiculum et m
4666
stes », c’est-à-dire les scolastiques. 70. Comme
l’
anarchiste Bakounine. 71. Modiculum et minimum, écrit Érasme ! 72.
4667
. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Luther et
la
liberté (À propos du Traité du serf arbitre) », Foi et Vie, Paris, ma
4668
Fédéralisme et œcuménisme (octobre 1946)ab ac
Le
mouvement œcuménique ne deviendra réel aux yeux des peuples qu’à part
4669
té aux questions politiques de notre temps. Qu’il
le
pressente, qu’il ait au moins une sorte de conscience anxieuse de l’œ
4670
ait au moins une sorte de conscience anxieuse de
l’
œuvre à faire, c’est ce que prouvent ses « encycliques » improvisées à
4671
ce que prouvent ses « encycliques » improvisées à
la
veille de la guerre. Qu’il soit encore très loin d’une vision dynamiq
4672
nt ses « encycliques » improvisées à la veille de
la
guerre. Qu’il soit encore très loin d’une vision dynamique de l’actio
4673
l soit encore très loin d’une vision dynamique de
l’
action immédiate, c’est ce que prouvent ces mêmes déclarations. Elles
4674
n manque de nécessité intérieure. Elles expriment
l’
accord d’un certain nombre de bonnes volontés, non pas l’élan d’une vo
4675
d d’un certain nombre de bonnes volontés, non pas
l’
élan d’une volonté précise et combative. Elles sont un respectable rés
4676
Mais comme beaucoup de documents qui prennent par
la
suite une valeur historique, elles auront passé inaperçues en leur te
4677
anque d’efficacité des messages œcuméniques, dans
le
plan politique, provient sans doute du fait qu’ils sont des compromis
4678
ine et forcément trop généraux. Mais il y a plus.
L’
erreur commise jusqu’ici a été d’essayer de choisir prudemment une att
4679
aire davantage à ce moment. En fait, on a examiné
la
situation mondiale et l’on a tenté de l’améliorer, conformément à des
4680
t. En fait, on a examiné la situation mondiale et
l’
on a tenté de l’améliorer, conformément à des principes indiscutés de
4681
examiné la situation mondiale et l’on a tenté de
l’
améliorer, conformément à des principes indiscutés de morale chrétienn
4682
indiscutés de morale chrétienne et naturelle. Or
le
réformisme moral n’a jamais pu influencer le cours des événements. L’
4683
. Or le réformisme moral n’a jamais pu influencer
le
cours des événements. L’histoire est faite d’initiatives, non de reto
4684
n’a jamais pu influencer le cours des événements.
L’
histoire est faite d’initiatives, non de retouches, de vœux et d’amend
4685
on qui jaillisse du tréfonds de sa foi créatrice.
Les
hommes qui ont fait l’histoire sont ceux qui avaient une vision passi
4686
onds de sa foi créatrice. Les hommes qui ont fait
l’
histoire sont ceux qui avaient une vision passionnée de leur but et qu
4687
vision passionnée de leur but et qui ont su plier
les
circonstances à leur dessein. Dans un certain sens, nous dirons qu’il
4688
sse d’eux-mêmes, de leur foi ou de leur ambition,
la
plus profonde, et non pas des données et des aspirations plus ou moin
4689
es de leur époque. Leur action fut puissante dans
la
mesure exacte où elle fut l’expression directe de leur être. Si le mo
4690
n fut puissante dans la mesure exacte où elle fut
l’
expression directe de leur être. Si le mouvement œcuménique veut agir,
4691
où elle fut l’expression directe de leur être. Si
le
mouvement œcuménique veut agir, et il le doit, il faut qu’il reconnai
4692
être. Si le mouvement œcuménique veut agir, et il
le
doit, il faut qu’il reconnaisse d’abord cette loi fondamentale de l’a
4693
’il reconnaisse d’abord cette loi fondamentale de
l’
action. En d’autres termes, il faut que son action politique parte de
4694
oivent traduire en termes d’organisation pratique
les
principes qui sont impliqués dans la vision de l’œcuménisme. Rien que
4695
on pratique les principes qui sont impliqués dans
la
vision de l’œcuménisme. Rien que cela, mais tout cela, avec confiance
4696
es principes qui sont impliqués dans la vision de
l’
œcuménisme. Rien que cela, mais tout cela, avec confiance, mais aussi
4697
ement « chrétienne », mais il s’agit d’actualiser
la
politique impliquée dès le début dans la volonté et l’espérance œcumé
4698
il s’agit d’actualiser la politique impliquée dès
le
début dans la volonté et l’espérance œcuménique. Le présent essai n’a
4699
tualiser la politique impliquée dès le début dans
la
volonté et l’espérance œcuménique. Le présent essai n’a d’autre ambit
4700
litique impliquée dès le début dans la volonté et
l’
espérance œcuménique. Le présent essai n’a d’autre ambition que d’esqu
4701
début dans la volonté et l’espérance œcuménique.
Le
présent essai n’a d’autre ambition que d’esquisser les grandes lignes
4702
résent essai n’a d’autre ambition que d’esquisser
les
grandes lignes de ce développement, et d’en indiquer les articulation
4703
ndes lignes de ce développement, et d’en indiquer
les
articulations. Que l’on excuse le schématisme des pages qui suivent :
4704
oppement, et d’en indiquer les articulations. Que
l’
on excuse le schématisme des pages qui suivent : c’est celui d’un plan
4705
d’en indiquer les articulations. Que l’on excuse
le
schématisme des pages qui suivent : c’est celui d’un plan de travail,
4706
, d’un sommaire. Certains conflits permanents de
l’
histoire ont pris de nos jours un caractère de violence sans précédent
4707
n caractère de violence sans précédent. À travers
les
complexités infinies de nos difficultés économiques, sociales, politi
4708
que mortel. Conflit politique et économique entre
l’
État totalitaire et les droits de l’homme. Conflit moral entre le coll
4709
litique et économique entre l’État totalitaire et
les
droits de l’homme. Conflit moral entre le collectivisme oppressif et
4710
ire et les droits de l’homme. Conflit moral entre
le
collectivisme oppressif et l’individualisme anarchisant. Conflit idéo
4711
Conflit moral entre le collectivisme oppressif et
l’
individualisme anarchisant. Conflit idéologique et religieux entre l’u
4712
archisant. Conflit idéologique et religieux entre
l’
unité imposée et la division irréfléchie, entre la centralisation rigi
4713
idéologique et religieux entre l’unité imposée et
la
division irréfléchie, entre la centralisation rigide et l’éparpilleme
4714
l’unité imposée et la division irréfléchie, entre
la
centralisation rigide et l’éparpillement poussiéreux. Remarquons tout
4715
on irréfléchie, entre la centralisation rigide et
l’
éparpillement poussiéreux. Remarquons tout de suite que ces divers con
4716
te que ces divers conflits ne sont en réalité que
les
aspects d’une seule et même opposition fondamentale, réfractée à des
4717
n possible. Ils sont inconciliables parce que, de
la
combinaison de deux erreurs, on ne peut faire sortir une vérité, mais
4718
rité, mais seulement une erreur aggravée. De même
l’
orthodoxie ne sera jamais retrouvée en faisant une somme d’hérésies. D
4719
t politique et économique, résultent pratiquement
la
guerre et la révolution. Du conflit moral résultent la tyrannie et l’
4720
t économique, résultent pratiquement la guerre et
la
révolution. Du conflit moral résultent la tyrannie et l’anarchie. Du
4721
erre et la révolution. Du conflit moral résultent
la
tyrannie et l’anarchie. Du conflit idéologique et religieux résultent
4722
lution. Du conflit moral résultent la tyrannie et
l’
anarchie. Du conflit idéologique et religieux résultent des mises au p
4723
scrètes et des schismes multipliés. Pour résoudre
l’
opposition unité-division, il serait vain de rechercher une solution i
4724
s en lutte. Il faut changer de plan, et retrouver
l’
attitude centrale dont ces deux erreurs ne sont que des déviations mor
4725
rreurs ne sont que des déviations morbides. Entre
la
peste et le choléra, il n’y a ni « juste milieu » ni synthèse possibl
4726
nt que des déviations morbides. Entre la peste et
le
choléra, il n’y a ni « juste milieu » ni synthèse possible. Il faut r
4727
milieu » ni synthèse possible. Il faut revenir à
la
santé. Et tout d’abord, il faut se la représenter. La santé politique
4728
t revenir à la santé. Et tout d’abord, il faut se
la
représenter. La santé politique et économique s’appelle fédéralisme.
4729
anté. Et tout d’abord, il faut se la représenter.
La
santé politique et économique s’appelle fédéralisme. La santé morale
4730
té politique et économique s’appelle fédéralisme.
La
santé morale et civique s’appelle personnalisme. La santé religieuse
4731
santé morale et civique s’appelle personnalisme.
La
santé religieuse s’appelle œcuménisme. Nous allons définir ces trois
4732
sur leur nécessaire hiérarchie. Notre thèse étant
la
suivante : La théologie de l’œcuménisme implique une philosophie de l
4733
saire hiérarchie. Notre thèse étant la suivante :
La
théologie de l’œcuménisme implique une philosophie de la personne don
4734
. Notre thèse étant la suivante : La théologie de
l’
œcuménisme implique une philosophie de la personne dont l’application
4735
logie de l’œcuménisme implique une philosophie de
la
personne dont l’application est une politique du fédéralisme. 1. Th
4736
isme implique une philosophie de la personne dont
l’
application est une politique du fédéralisme. 1. Théologie de l’œcum
4737
t une politique du fédéralisme. 1. Théologie de
l’
œcuménisme Écartons d’abord le malentendu que pourrait suggérer ce
4738
1. Théologie de l’œcuménisme Écartons d’abord
le
malentendu que pourrait suggérer ce titre : nous ne voulons pas parle
4739
gies existantes. Ce qui nous intéresse ici, c’est
la
doctrine concernant l’Église universelle, implicitée par le fait même
4740
nous intéresse ici, c’est la doctrine concernant
l’
Église universelle, implicitée par le fait même qu’il existe un effort
4741
e concernant l’Église universelle, implicitée par
le
fait même qu’il existe un effort œcuménique. Nous supposons cette doc
4742
ctrine, dès lors que nous prononçons : « Je crois
la
sainte Église universelle. » Et nous nous bornerons ici à en souligne
4743
quelques traits qui importent à notre entreprise.
Le
principal est celui-ci : la théologie de l’œcuménisme subsiste et tom
4744
t à notre entreprise. Le principal est celui-ci :
la
théologie de l’œcuménisme subsiste et tombe avec la foi dans l’union
4745
rise. Le principal est celui-ci : la théologie de
l’
œcuménisme subsiste et tombe avec la foi dans l’union des chrétiens en
4746
théologie de l’œcuménisme subsiste et tombe avec
la
foi dans l’union des chrétiens en Christ, cette foi pouvant être conn
4747
e l’œcuménisme subsiste et tombe avec la foi dans
l’
union des chrétiens en Christ, cette foi pouvant être connotée par le
4748
ns en Christ, cette foi pouvant être connotée par
le
rejet de l’hérésie unitaire. Certes, il n’est pas de pire menace pour
4749
, cette foi pouvant être connotée par le rejet de
l’
hérésie unitaire. Certes, il n’est pas de pire menace pour le mouvemen
4750
nitaire. Certes, il n’est pas de pire menace pour
le
mouvement œcuménique que l’utopie et la tentation d’une unité formell
4751
s de pire menace pour le mouvement œcuménique que
l’
utopie et la tentation d’une unité formelle, humainement vérifiable, a
4752
nace pour le mouvement œcuménique que l’utopie et
la
tentation d’une unité formelle, humainement vérifiable, assurée et dé
4753
Car c’est précisément cette utopie qui a produit
les
schismes et les oppositions que le mouvement œcuménique se propose de
4754
sément cette utopie qui a produit les schismes et
les
oppositions que le mouvement œcuménique se propose de surmonter. C’es
4755
qui a produit les schismes et les oppositions que
le
mouvement œcuménique se propose de surmonter. C’est dans la mesure ex
4756
nt œcuménique se propose de surmonter. C’est dans
la
mesure exacte où les Églises ont voulu transformer la foi à l’Una San
4757
pose de surmonter. C’est dans la mesure exacte où
les
Églises ont voulu transformer la foi à l’Una Sancta en une assurance
4758
esure exacte où les Églises ont voulu transformer
la
foi à l’Una Sancta en une assurance visible et restrictive de l’unité
4759
cte où les Églises ont voulu transformer la foi à
l’
Una Sancta en une assurance visible et restrictive de l’unité (d’organ
4760
Sancta en une assurance visible et restrictive de
l’
unité (d’organisation ou de doctrine), c’est dans la mesure exacte où
4761
unité (d’organisation ou de doctrine), c’est dans
la
mesure exacte où elles ont douté d’une union par essence incontrôlabl
4762
es ont perdu leur communion réelle. Rappelons ici
l’
histoire de la tour de Babel : la volonté de bâtir un monument visible
4763
eur communion réelle. Rappelons ici l’histoire de
la
tour de Babel : la volonté de bâtir un monument visible à la gloire d
4764
e. Rappelons ici l’histoire de la tour de Babel :
la
volonté de bâtir un monument visible à la gloire de l’unité des homme
4765
Babel : la volonté de bâtir un monument visible à
la
gloire de l’unité des hommes, conduisit à la division de leur langage
4766
lonté de bâtir un monument visible à la gloire de
l’
unité des hommes, conduisit à la division de leur langage. Il convient
4767
le à la gloire de l’unité des hommes, conduisit à
la
division de leur langage. Il convient de laisser aux théologiens le s
4768
r langage. Il convient de laisser aux théologiens
le
soin de définir la doctrine positive de l’union au nom de laquelle do
4769
ent de laisser aux théologiens le soin de définir
la
doctrine positive de l’union au nom de laquelle doit être condamnée l
4770
ogiens le soin de définir la doctrine positive de
l’
union au nom de laquelle doit être condamnée l’hérésie unitaire. Doctr
4771
de l’union au nom de laquelle doit être condamnée
l’
hérésie unitaire. Doctrine de la multiplicité des dons accordés par le
4772
it être condamnée l’hérésie unitaire. Doctrine de
la
multiplicité des dons accordés par le seul et même Père, ou doctrine
4773
Doctrine de la multiplicité des dons accordés par
le
seul et même Père, ou doctrine de la pluralité des demeures dans un s
4774
accordés par le seul et même Père, ou doctrine de
la
pluralité des demeures dans un seul et même ciel, ou encore doctrine
4775
dans un seul et même ciel, ou encore doctrine de
la
diversité des membres d’un seul et même corps : quel que soit le nom
4776
s membres d’un seul et même corps : quel que soit
le
nom qu’on lui donne, en aucun cas elle ne manquera de fondements bibl
4777
Épître aux Corinthiens : c’est dans ses appels à
l’
union, précisément, que Paul établit avec le plus de force la légitimi
4778
els à l’union, précisément, que Paul établit avec
le
plus de force la légitimité des diversités. Ce qui me paraît d’une ex
4779
écisément, que Paul établit avec le plus de force
la
légitimité des diversités. Ce qui me paraît d’une excellente méthode.
4780
glises d’Asie, possédant chacune leur ange ? Ou à
la
parole « Soyez un comme le Père et moi sommes un », qui établit le mo
4781
acune leur ange ? Ou à la parole « Soyez un comme
le
Père et moi sommes un », qui établit le modèle même de l’union dans l
4782
un comme le Père et moi sommes un », qui établit
le
modèle même de l’union dans la distinction des personnes ? Posons ces
4783
et moi sommes un », qui établit le modèle même de
l’
union dans la distinction des personnes ? Posons ces questions-là aux
4784
un », qui établit le modèle même de l’union dans
la
distinction des personnes ? Posons ces questions-là aux docteurs de l
4785
rsonnes ? Posons ces questions-là aux docteurs de
l’
Église. Mais voici ce que nous devons affirmer dès maintenant : la thé
4786
oici ce que nous devons affirmer dès maintenant :
la
théologie de l’œcuménisme considère que la diversité des vocations di
4787
devons affirmer dès maintenant : la théologie de
l’
œcuménisme considère que la diversité des vocations divines n’est pas
4788
nant : la théologie de l’œcuménisme considère que
la
diversité des vocations divines n’est pas une imperfection de l’union
4789
s vocations divines n’est pas une imperfection de
l’
union, mais sa vie même. Un deuxième trait, complémentaire d’ailleurs,
4790
aire d’ailleurs, doit être au moins rappelé ici :
la
théologie de l’œcuménisme ne vise pas à démanteler les orthodoxies ex
4791
doit être au moins rappelé ici : la théologie de
l’
œcuménisme ne vise pas à démanteler les orthodoxies existantes, dans l
4792
héologie de l’œcuménisme ne vise pas à démanteler
les
orthodoxies existantes, dans les diverses Églises, mais au contraire,
4793
pas à démanteler les orthodoxies existantes, dans
les
diverses Églises, mais au contraire, elle a pour premier effet de les
4794
, mais au contraire, elle a pour premier effet de
les
renforcer en les rendant plus conscientes de leurs valeurs authentiqu
4795
re, elle a pour premier effet de les renforcer en
les
rendant plus conscientes de leurs valeurs authentiques, et c’est par
4796
union d’esprit en profondeur. En d’autres termes,
l’
appel à l’union ne s’adresse pas aux dissidents virtuels de chaque Égl
4797
prit en profondeur. En d’autres termes, l’appel à
l’
union ne s’adresse pas aux dissidents virtuels de chaque Église, mais
4798
s virtuels de chaque Église, mais à leurs membres
les
plus fidèles. Toutefois, cette méthode n’est compatible qu’avec des o
4799
rasser une orthodoxie qui céderait consciemment à
la
tentation unitaire, c’est-à-dire qui tendrait à se fermer sur elle-mê
4800
et à n’admettre plus de recours direct au chef de
l’
Église, lequel est au ciel à la droite de Dieu, et non pas sur la terr
4801
direct au chef de l’Église, lequel est au ciel à
la
droite de Dieu, et non pas sur la terre, dans telle ville, ou dans te
4802
l est au ciel à la droite de Dieu, et non pas sur
la
terre, dans telle ville, ou dans tels écrits, ou dans tel prophète lo
4803
ciel, mais plusieurs ont agi comme s’il était sur
la
terre, c’est-à-dire à leur disposition. Plusieurs ont identifié l’Una
4804
-dire à leur disposition. Plusieurs ont identifié
l’
Una Sancta avec leur organisation ou leur doctrine particulière. Au pr
4805
ière. Au principe d’union transcendant qui assure
la
permanence de l’Église universelle, certaines ont ajouté, et peu à pe
4806
d’union transcendant qui assure la permanence de
l’
Église universelle, certaines ont ajouté, et peu à peu substitué en fa
4807
nent, c’est-à-dire humainement contrôlable. C’est
la
formule même de la tyrannie. Car, contre un principe d’unité immanent
4808
humainement contrôlable. C’est la formule même de
la
tyrannie. Car, contre un principe d’unité immanent, mais pratiquement
4809
se soumettre ou sortir. S’il se soumet, il court
le
risque d’obéir aux hommes plutôt qu’à Dieu. S’il sort, c’est avec ame
4810
tôt qu’à Dieu. S’il sort, c’est avec amertume, et
l’
Église qu’il fondera peut-être sera opposée à l’ancienne, au lieu d’êt
4811
t l’Église qu’il fondera peut-être sera opposée à
l’
ancienne, au lieu d’être seulement plus vraie, donc plus universelle.
4812
ieu d’être réformée, je n’épiloguerai pas ici sur
l’
unité d’organisation romaine, considérée comme nécessaire au salut. Ma
4813
ée comme nécessaire au salut. Mais je rappellerai
les
critiques que Karl Barth adressait à l’orthodoxie protestante du xvii
4814
pellerai les critiques que Karl Barth adressait à
l’
orthodoxie protestante du xviiie siècle : une certaine manière de pro
4815
viiie siècle : une certaine manière de proclamer
le
dogme de l’inspiration littérale des Écritures, par exemple, revient
4816
e : une certaine manière de proclamer le dogme de
l’
inspiration littérale des Écritures, par exemple, revient à disposer h
4817
poser humainement des Écritures. Car aussitôt que
le
principe d’unité apparaît humainement vérifiable, l’orthodoxie de l’É
4818
principe d’unité apparaît humainement vérifiable,
l’
orthodoxie de l’Église se « ferme » sur elle-même. D’où les schismes n
4819
apparaît humainement vérifiable, l’orthodoxie de
l’
Église se « ferme » sur elle-même. D’où les schismes nombreux, dès cet
4820
oxie de l’Église se « ferme » sur elle-même. D’où
les
schismes nombreux, dès cette époque, dans les Églises calvinistes. Un
4821
’où les schismes nombreux, dès cette époque, dans
les
Églises calvinistes. Une Église qui prétend se suffire et posséder so
4822
cipe d’unité, une Église qui tend à se fermer par
le
haut pour mieux assurer sa cohésion humaine, devient à la fois isolée
4823
ent antiœcuménique. Sa volonté d’unité s’oppose à
l’
union. Elle transforme la diversité en division. Alors il y a scandale
4824
lonté d’unité s’oppose à l’union. Elle transforme
la
diversité en division. Alors il y a scandale, et c’est alors que le c
4825
vision. Alors il y a scandale, et c’est alors que
le
corps souffre dans son chef et dans ses membres ! La vie normale du c
4826
corps souffre dans son chef et dans ses membres !
La
vie normale du corps dépend de la vitalité de chacun de ses membres,
4827
s ses membres ! La vie normale du corps dépend de
la
vitalité de chacun de ses membres, et la vie d’un membre dépend de so
4828
épend de la vitalité de chacun de ses membres, et
la
vie d’un membre dépend de son harmonie avec les autres membres, assur
4829
et la vie d’un membre dépend de son harmonie avec
les
autres membres, assurée par l’appartenance à un même chef. Nous retro
4830
son harmonie avec les autres membres, assurée par
l’
appartenance à un même chef. Nous retrouverons plus loin, et à plusieu
4831
s plus loin, et à plusieurs reprises, ce thème de
l’
harmonie organique opposé au thème de l’unité systématique. Notons qu’
4832
thème de l’harmonie organique opposé au thème de
l’
unité systématique. Notons qu’il n’entraîne aucunement un éloge de la
4833
e. Notons qu’il n’entraîne aucunement un éloge de
la
« tolérance » libérale à base d’indifférence dogmatique. Car l’harmon
4834
» libérale à base d’indifférence dogmatique. Car
l’
harmonie des membres n’est pas une tolérance, mais une nécessité vital
4835
est pas une tolérance, mais une nécessité vitale.
Le
poumon n’a pas à « tolérer » le cœur ! Il doit être un vrai poumon, e
4836
nécessité vitale. Le poumon n’a pas à « tolérer »
le
cœur ! Il doit être un vrai poumon, et dans cette mesure même, il aid
4837
vrai poumon, et dans cette mesure même, il aidera
le
cœur à être un bon cœur. Notons aussi que les Églises qui ne représen
4838
dera le cœur à être un bon cœur. Notons aussi que
les
Églises qui ne représentent pas spirituellement une fonction distinct
4839
tuellement une fonction distincte, mais seulement
la
division ou la duplication accidentelle d’un même organe, n’ont rien
4840
fonction distincte, mais seulement la division ou
la
duplication accidentelle d’un même organe, n’ont rien de mieux à fair
4841
rgane, n’ont rien de mieux à faire qu’à fusionner
le
plus tôt possible. 2. Philosophie de la personne Les positions
4842
ionner le plus tôt possible. 2. Philosophie de
la
personne Les positions œcuméniques que nous venons d’esquisser env
4843
tôt possible. 2. Philosophie de la personne
Les
positions œcuméniques que nous venons d’esquisser enveloppent une doc
4844
us venons d’esquisser enveloppent une doctrine de
l’
homme. Au conflit qui oppose l’unité et la division dans le plan de l’
4845
nt une doctrine de l’homme. Au conflit qui oppose
l’
unité et la division dans le plan de l’Église, correspond terme à term
4846
rine de l’homme. Au conflit qui oppose l’unité et
la
division dans le plan de l’Église, correspond terme à terme le confli
4847
Au conflit qui oppose l’unité et la division dans
le
plan de l’Église, correspond terme à terme le conflit qui oppose la c
4848
qui oppose l’unité et la division dans le plan de
l’
Église, correspond terme à terme le conflit qui oppose la collectivité
4849
ans le plan de l’Église, correspond terme à terme
le
conflit qui oppose la collectivité et l’individu dans le plan de la s
4850
e, correspond terme à terme le conflit qui oppose
la
collectivité et l’individu dans le plan de la société. Et de même que
4851
à terme le conflit qui oppose la collectivité et
l’
individu dans le plan de la société. Et de même que l’œcuménisme retro
4852
lit qui oppose la collectivité et l’individu dans
le
plan de la société. Et de même que l’œcuménisme retrouve la position
4853
ose la collectivité et l’individu dans le plan de
la
société. Et de même que l’œcuménisme retrouve la position spirituelle
4854
dividu dans le plan de la société. Et de même que
l’
œcuménisme retrouve la position spirituelle centrale qui fonde l’union
4855
la société. Et de même que l’œcuménisme retrouve
la
position spirituelle centrale qui fonde l’union dans la diversité, no
4856
trouve la position spirituelle centrale qui fonde
l’
union dans la diversité, nous avons à chercher la position philosophiq
4857
ition spirituelle centrale qui fonde l’union dans
la
diversité, nous avons à chercher la position philosophique centrale q
4858
l’union dans la diversité, nous avons à chercher
la
position philosophique centrale qui fonde la communion humaine dans l
4859
cher la position philosophique centrale qui fonde
la
communion humaine dans la liberté. Je l’appelle le personnalisme. Che
4860
ique centrale qui fonde la communion humaine dans
la
liberté. Je l’appelle le personnalisme. Cherchons à illustrer les not
4861
ui fonde la communion humaine dans la liberté. Je
l’
appelle le personnalisme. Cherchons à illustrer les notions d’individu
4862
a communion humaine dans la liberté. Je l’appelle
le
personnalisme. Cherchons à illustrer les notions d’individu, de colle
4863
l’appelle le personnalisme. Cherchons à illustrer
les
notions d’individu, de collectivité, et de personne par des exemples
4864
exemples historiques susceptibles de faire image.
L’
individu est une invention grecque, et sa naissance signale la naissan
4865
st une invention grecque, et sa naissance signale
la
naissance même de l’hellénisme. C’est l’homme de la tribu qui se met
4866
que, et sa naissance signale la naissance même de
l’
hellénisme. C’est l’homme de la tribu qui se met à réfléchir « pour so
4867
signale la naissance même de l’hellénisme. C’est
l’
homme de la tribu qui se met à réfléchir « pour son compte », et qui,
4868
naissance même de l’hellénisme. C’est l’homme de
la
tribu qui se met à réfléchir « pour son compte », et qui, de ce fait
4869
abord douter, et c’est bientôt se révolter contre
les
tabous et les conventions sacrées du groupe. Alors le groupe expulse
4870
et c’est bientôt se révolter contre les tabous et
les
conventions sacrées du groupe. Alors le groupe expulse le « non-confo
4871
abous et les conventions sacrées du groupe. Alors
le
groupe expulse le « non-conformiste ». Ce sont ces expulsés de divers
4872
ntions sacrées du groupe. Alors le groupe expulse
le
« non-conformiste ». Ce sont ces expulsés de divers groupes qui fonde
4873
ières thiases grecques, communautés comparables à
la
cité moderne, et basées non plus sur le sacré, le sang et les morts,
4874
arables à la cité moderne, et basées non plus sur
le
sacré, le sang et les morts, mais sur l’intérêt commun et les contrat
4875
la cité moderne, et basées non plus sur le sacré,
le
sang et les morts, mais sur l’intérêt commun et les contrats. Tous le
4876
erne, et basées non plus sur le sacré, le sang et
les
morts, mais sur l’intérêt commun et les contrats. Tous les membres de
4877
plus sur le sacré, le sang et les morts, mais sur
l’
intérêt commun et les contrats. Tous les membres de la tribu devaient
4878
e sang et les morts, mais sur l’intérêt commun et
les
contrats. Tous les membres de la tribu devaient agir de la même maniè
4879
, mais sur l’intérêt commun et les contrats. Tous
les
membres de la tribu devaient agir de la même manière, minutieusement
4880
térêt commun et les contrats. Tous les membres de
la
tribu devaient agir de la même manière, minutieusement prescrite par
4881
ts. Tous les membres de la tribu devaient agir de
la
même manière, minutieusement prescrite par les usages, et toute dissi
4882
de la même manière, minutieusement prescrite par
les
usages, et toute dissidence de conduite entraînait l’exécration ou la
4883
sages, et toute dissidence de conduite entraînait
l’
exécration ou la mort. Dans la cité, au contraire, chacun cherche à se
4884
dissidence de conduite entraînait l’exécration ou
la
mort. Dans la cité, au contraire, chacun cherche à se distinguer, à s
4885
conduite entraînait l’exécration ou la mort. Dans
la
cité, au contraire, chacun cherche à se distinguer, à se singulariser
4886
ence de soi, succèdent au respect des tabous et à
la
stricte observance du sacré collectif. Mais ce mouvement centrifuge p
4887
ectif. Mais ce mouvement centrifuge par rapport à
la
communauté d’origine, s’il se confond d’abord avec l’intelligence et
4888
ommunauté d’origine, s’il se confond d’abord avec
l’
intelligence et la raison, ne tarde pas à affaiblir le lien social. Il
4889
e, s’il se confond d’abord avec l’intelligence et
la
raison, ne tarde pas à affaiblir le lien social. Il s’oriente vers l’
4890
telligence et la raison, ne tarde pas à affaiblir
le
lien social. Il s’oriente vers l’anarchie. À ce moment se crée un sen
4891
pas à affaiblir le lien social. Il s’oriente vers
l’
anarchie. À ce moment se crée un sentiment de vide social. C’est une s
4892
ial. C’est une sorte d’angoisse diffuse d’où naît
l’
appel à une communauté nouvelle et plus solide, où l’individu isolé re
4893
ppel à une communauté nouvelle et plus solide, où
l’
individu isolé retrouve des contraintes qui le rassurent, et où l’État
4894
où l’individu isolé retrouve des contraintes qui
le
rassurent, et où l’État reprend sa puissance. C’est Rome alors qui no
4895
retrouve des contraintes qui le rassurent, et où
l’
État reprend sa puissance. C’est Rome alors qui nous donnera le symbol
4896
d sa puissance. C’est Rome alors qui nous donnera
le
symbole éternel de la réaction collective. La victoire de Rome sur la
4897
Rome alors qui nous donnera le symbole éternel de
la
réaction collective. La victoire de Rome sur la Grèce est la première
4898
era le symbole éternel de la réaction collective.
La
victoire de Rome sur la Grèce est la première victoire fatale de l’ét
4899
e la réaction collective. La victoire de Rome sur
la
Grèce est la première victoire fatale de l’étatisme sur l’individuali
4900
e sur la Grèce est la première victoire fatale de
l’
étatisme sur l’individualisme devenu anarchique. Entre individualisme
4901
est la première victoire fatale de l’étatisme sur
l’
individualisme devenu anarchique. Entre individualisme et dictature, l
4902
nu anarchique. Entre individualisme et dictature,
l’
opposition n’est pas aussi profonde qu’on l’imagine. Il s’agit plutôt
4903
ture, l’opposition n’est pas aussi profonde qu’on
l’
imagine. Il s’agit plutôt d’une succession inévitable. L’individu ne s
4904
ne. Il s’agit plutôt d’une succession inévitable.
L’
individu ne s’oppose à l’État qu’à la manière dont le vide s’oppose au
4905
e succession inévitable. L’individu ne s’oppose à
l’
État qu’à la manière dont le vide s’oppose au plein : plus le vide est
4906
inévitable. L’individu ne s’oppose à l’État qu’à
la
manière dont le vide s’oppose au plein : plus le vide est absolu, plu
4907
ndividu ne s’oppose à l’État qu’à la manière dont
le
vide s’oppose au plein : plus le vide est absolu, plus l’appel est pu
4908
la manière dont le vide s’oppose au plein : plus
le
vide est absolu, plus l’appel est puissant. À bien des égards même, l
4909
s’oppose au plein : plus le vide est absolu, plus
l’
appel est puissant. À bien des égards même, l’étatisme ne fait qu’ache
4910
lus l’appel est puissant. À bien des égards même,
l’
étatisme ne fait qu’achever le processus de dissolution commencé par l
4911
en des égards même, l’étatisme ne fait qu’achever
le
processus de dissolution commencé par l’individualisme : il liquide l
4912
’achever le processus de dissolution commencé par
l’
individualisme : il liquide les groupes existants pour mieux accomplir
4913
lution commencé par l’individualisme : il liquide
les
groupes existants pour mieux accomplir son unification, sa « mise au
4914
r son unification, sa « mise au pas ». C’est avec
la
poussière des individus que l’État fait son ciment. Mais cet État cen
4915
pas ». C’est avec la poussière des individus que
l’
État fait son ciment. Mais cet État centralisé, cette unité rigide et
4916
té rigide et trop contrôlée écrase bientôt toutes
les
initiatives individuelles. N’admettant pas de recours au-delà de son
4917
voir, il se prive de toute inspiration créatrice.
L’
homme n’est plus qu’une fonction sociale, un « soldat politique », dir
4918
« soldat politique », dirait-on de nos jours. Et
l’
esprit périclite, faute de liberté. La Grèce individualiste a triomphé
4919
s jours. Et l’esprit périclite, faute de liberté.
La
Grèce individualiste a triomphé de la communauté barbare du sang. Mai
4920
de liberté. La Grèce individualiste a triomphé de
la
communauté barbare du sang. Mais plus tard elle a sombré dans l’anarc
4921
arbare du sang. Mais plus tard elle a sombré dans
l’
anarchie. Rome a triomphé de l’anarchie et sombre maintenant sous le p
4922
elle a sombré dans l’anarchie. Rome a triomphé de
l’
anarchie et sombre maintenant sous le poids de son appareil collectivi
4923
triomphé de l’anarchie et sombre maintenant sous
le
poids de son appareil collectiviste. De nouveau se recrée le vide soc
4924
son appareil collectiviste. De nouveau se recrée
le
vide social. Quelle sera la nouvelle société ? En ce point crucial de
4925
De nouveau se recrée le vide social. Quelle sera
la
nouvelle société ? En ce point crucial de l’histoire — dans une situa
4926
sera la nouvelle société ? En ce point crucial de
l’
histoire — dans une situation qui rappelle étrangement la lutte présen
4927
ire — dans une situation qui rappelle étrangement
la
lutte présente entre démocratie individualiste et étatisme totalitair
4928
dividualiste et étatisme totalitaire — se produit
l’
événement unique de l’Incarnation. Et il apporte à la question des tem
4929
me totalitaire — se produit l’événement unique de
l’
Incarnation. Et il apporte à la question des temps la réponse éternell
4930
vénement unique de l’Incarnation. Et il apporte à
la
question des temps la réponse éternelle de l’Église. Qu’est-ce que l’
4931
ncarnation. Et il apporte à la question des temps
la
réponse éternelle de l’Église. Qu’est-ce que l’Église primitive, dans
4932
e à la question des temps la réponse éternelle de
l’
Église. Qu’est-ce que l’Église primitive, dans la perspective sociolog
4933
s la réponse éternelle de l’Église. Qu’est-ce que
l’
Église primitive, dans la perspective sociologique où nous nous plaçon
4934
l’Église. Qu’est-ce que l’Église primitive, dans
la
perspective sociologique où nous nous plaçons ici ? Une communauté sp
4935
ou « cellules ». Celles-ci ne se fondent pas sur
le
passé ou sur des origines communes : « Il n’y a plus ni Juif ni Grec.
4936
us ni Juif ni Grec. » Elles ne se fondent pas sur
la
classe ou la race, ni sur quelque autre réalité collective. Leur lien
4937
Grec. » Elles ne se fondent pas sur la classe ou
la
race, ni sur quelque autre réalité collective. Leur lien n’est pas te
4938
d’abord, ni leur chef : il s’est assis au ciel à
la
droite de Dieu. Leur ambition non plus n’est pas terrestre : elles at
4939
on non plus n’est pas terrestre : elles attendent
la
fin des temps. Et cependant, elles constituent bel et bien les germes
4940
emps. Et cependant, elles constituent bel et bien
les
germes d’une société véritable. Elles ont leur organisation sociale,
4941
hefs locaux, leurs hiérarchies, leurs assemblées.
L’
homme qui se convertit et s’incorpore à l’un de ces groupes y trouve d
4942
upes y trouve d’une part une activité sociale qui
le
relie à ses « frères » et le sauve de la solitude ; d’autre part, il
4943
activité sociale qui le relie à ses « frères » et
le
sauve de la solitude ; d’autre part, il revêt une dignité humaine nou
4944
iale qui le relie à ses « frères » et le sauve de
la
solitude ; d’autre part, il revêt une dignité humaine nouvelle, puisq
4945
ouvelle, puisqu’il a été racheté, et qu’il a reçu
la
promesse de sa résurrection individuelle. Il est donc à la fois engag
4946
libéré, et ceci en vertu d’un seul et même fait :
la
vocation qu’il a reçue de l’Éternel. Cet homme d’un type nouveau n’es
4947
seul et même fait : la vocation qu’il a reçue de
l’
Éternel. Cet homme d’un type nouveau n’est pas l’individu grec, puisqu
4948
l’Éternel. Cet homme d’un type nouveau n’est pas
l’
individu grec, puisqu’il se soucie davantage de servir que de se disti
4949
ervir que de se distinguer. Il n’est pas non plus
le
simple rouage, la simple fonction dans l’État qu’était le citoyen rom
4950
stinguer. Il n’est pas non plus le simple rouage,
la
simple fonction dans l’État qu’était le citoyen romain, puisqu’il pos
4951
on plus le simple rouage, la simple fonction dans
l’
État qu’était le citoyen romain, puisqu’il possède une dignité indépen
4952
e rouage, la simple fonction dans l’État qu’était
le
citoyen romain, puisqu’il possède une dignité indépendante de son rôl
4953
dignité indépendante de son rôle social. Comment
le
baptiser ? Il faut un mot nouveau. Ou plutôt, on va prendre un mot dé
4954
auquel on donnera un sens nouveau. Pour désigner
les
relations constituant la Trinité, les docteurs grecs avaient adopté l
4955
nouveau. Pour désigner les relations constituant
la
Trinité, les docteurs grecs avaient adopté le terme latin de persona
4956
ur désigner les relations constituant la Trinité,
les
docteurs grecs avaient adopté le terme latin de persona (rôle social)
4957
ant la Trinité, les docteurs grecs avaient adopté
le
terme latin de persona (rôle social). C’est ce même terme qui servira
4958
ira aux premiers philosophes chrétiens à désigner
la
réalité de l’homme dans un monde christianisé. Car cet homme est, lui
4959
rs philosophes chrétiens à désigner la réalité de
l’
homme dans un monde christianisé. Car cet homme est, lui aussi, à la f
4960
aussi, à la fois autonome et en relation. Ainsi,
le
mot personne avec son sens nouveau, et la réalité sociale qu’il désig
4961
Ainsi, le mot personne avec son sens nouveau, et
la
réalité sociale qu’il désigne, sont bel et bien des créations chrétie
4962
chrétiennes, ou pour mieux dire, des créations de
l’
Église chrétienne. Dans la personne ainsi définie se résout l’éternel
4963
dire, des créations de l’Église chrétienne. Dans
la
personne ainsi définie se résout l’éternel conflit entre la liberté i
4964
étienne. Dans la personne ainsi définie se résout
l’
éternel conflit entre la liberté individuelle et les devoirs vis-à-vis
4965
e ainsi définie se résout l’éternel conflit entre
la
liberté individuelle et les devoirs vis-à-vis de la collectivité. C’e
4966
’éternel conflit entre la liberté individuelle et
les
devoirs vis-à-vis de la collectivité. C’est le même Dieu qui, par la
4967
liberté individuelle et les devoirs vis-à-vis de
la
collectivité. C’est le même Dieu qui, par la vocation qu’il envoie à
4968
t les devoirs vis-à-vis de la collectivité. C’est
le
même Dieu qui, par la vocation qu’il envoie à l’homme, distingue cet
4969
s de la collectivité. C’est le même Dieu qui, par
la
vocation qu’il envoie à l’homme, distingue cet homme de tous les autr
4970
le même Dieu qui, par la vocation qu’il envoie à
l’
homme, distingue cet homme de tous les autres et le remet en relations
4971
’il envoie à l’homme, distingue cet homme de tous
les
autres et le remet en relations concrètes avec ses semblables. La lib
4972
’homme, distingue cet homme de tous les autres et
le
remet en relations concrètes avec ses semblables. La liberté est assu
4973
remet en relations concrètes avec ses semblables.
La
liberté est assurée par la possibilité constante de recourir directem
4974
s avec ses semblables. La liberté est assurée par
la
possibilité constante de recourir directement à l’Éternel, au-dessus
4975
a possibilité constante de recourir directement à
l’
Éternel, au-dessus de la communauté. Et la communauté est liée par sa
4976
de recourir directement à l’Éternel, au-dessus de
la
communauté. Et la communauté est liée par sa fidélité à l’Éternel. Ai
4977
ement à l’Éternel, au-dessus de la communauté. Et
la
communauté est liée par sa fidélité à l’Éternel. Ainsi les droits et
4978
auté. Et la communauté est liée par sa fidélité à
l’
Éternel. Ainsi les droits et les devoirs du particulier ont le même fo
4979
nauté est liée par sa fidélité à l’Éternel. Ainsi
les
droits et les devoirs du particulier ont le même fondement que les dr
4980
par sa fidélité à l’Éternel. Ainsi les droits et
les
devoirs du particulier ont le même fondement que les droits et les de
4981
insi les droits et les devoirs du particulier ont
le
même fondement que les droits et les devoirs de l’ensemble. Ils ne so
4982
devoirs du particulier ont le même fondement que
les
droits et les devoirs de l’ensemble. Ils ne sont plus contradictoires
4983
rticulier ont le même fondement que les droits et
les
devoirs de l’ensemble. Ils ne sont plus contradictoires. Ce qui libèr
4984
e même fondement que les droits et les devoirs de
l’
ensemble. Ils ne sont plus contradictoires. Ce qui libère un homme est
4985
ictoires. Ce qui libère un homme est aussi ce qui
le
rend responsable vis-à-vis d’autrui. En retour, ce qui unit la commun
4986
nsable vis-à-vis d’autrui. En retour, ce qui unit
la
communauté est aussi ce qui l’oblige à respecter les vocations indivi
4987
etour, ce qui unit la communauté est aussi ce qui
l’
oblige à respecter les vocations individuelles. La liberté du siècle p
4988
communauté est aussi ce qui l’oblige à respecter
les
vocations individuelles. La liberté du siècle présent se réclame du s
4989
l’oblige à respecter les vocations individuelles.
La
liberté du siècle présent se réclame du slogan utopique : à chacun sa
4990
ame du slogan utopique : à chacun sa chance. Mais
la
liberté et l’engagement de la personne chrétienne se définissent du m
4991
utopique : à chacun sa chance. Mais la liberté et
l’
engagement de la personne chrétienne se définissent du même coup par l
4992
cun sa chance. Mais la liberté et l’engagement de
la
personne chrétienne se définissent du même coup par la formule : à ch
4993
rsonne chrétienne se définissent du même coup par
la
formule : à chacun sa vocation. Nous avons retrouvé, dans cette doctr
4994
tion. Nous avons retrouvé, dans cette doctrine de
l’
homme, les mêmes structures que dans la doctrine de l’Église universel
4995
s avons retrouvé, dans cette doctrine de l’homme,
les
mêmes structures que dans la doctrine de l’Église universelle esquiss
4996
octrine de l’homme, les mêmes structures que dans
la
doctrine de l’Église universelle esquissée plus haut ; la même positi
4997
mme, les mêmes structures que dans la doctrine de
l’
Église universelle esquissée plus haut ; la même position centrale déf
4998
ine de l’Église universelle esquissée plus haut ;
la
même position centrale définissant à la fois l’union et la diversité,
4999
; la même position centrale définissant à la fois
l’
union et la diversité, l’engagement et la liberté, les droits du tout
5000
osition centrale définissant à la fois l’union et
la
diversité, l’engagement et la liberté, les droits du tout et les droi
5001
le définissant à la fois l’union et la diversité,
l’
engagement et la liberté, les droits du tout et les droits des parties
5002
la fois l’union et la diversité, l’engagement et
la
liberté, les droits du tout et les droits des parties. De même que la
5003
nion et la diversité, l’engagement et la liberté,
les
droits du tout et les droits des parties. De même que la théologie de
5004
l’engagement et la liberté, les droits du tout et
les
droits des parties. De même que la théologie de l’œcuménisme prévient
5005
ts du tout et les droits des parties. De même que
la
théologie de l’œcuménisme prévient d’une part l’orthodoxie fermée, d’
5006
s droits des parties. De même que la théologie de
l’
œcuménisme prévient d’une part l’orthodoxie fermée, d’autre part la di
5007
la théologie de l’œcuménisme prévient d’une part
l’
orthodoxie fermée, d’autre part la dissidence obstinée, la philosophie
5008
ient d’une part l’orthodoxie fermée, d’autre part
la
dissidence obstinée, la philosophie de la personne prévient d’une par
5009
oxie fermée, d’autre part la dissidence obstinée,
la
philosophie de la personne prévient d’une part le collectivisme oppre
5010
re part la dissidence obstinée, la philosophie de
la
personne prévient d’une part le collectivisme oppressif, d’autre part
5011
la philosophie de la personne prévient d’une part
le
collectivisme oppressif, d’autre part l’individualisme anarchisant. M
5012
une part le collectivisme oppressif, d’autre part
l’
individualisme anarchisant. Mais ici encore, insistons sur ce point :
5013
hisant. Mais ici encore, insistons sur ce point :
la
personne n’est pas un moyen-terme entre l’individu trop flottant et l
5014
oint : la personne n’est pas un moyen-terme entre
l’
individu trop flottant et le soldat politique trop esclave. Elle est l
5015
un moyen-terme entre l’individu trop flottant et
le
soldat politique trop esclave. Elle est l’homme intégral, dont les de
5016
ant et le soldat politique trop esclave. Elle est
l’
homme intégral, dont les deux autres ne sont que des maladies. Dans le
5017
que trop esclave. Elle est l’homme intégral, dont
les
deux autres ne sont que des maladies. Dans le plan humain immanent, i
5018
nt les deux autres ne sont que des maladies. Dans
le
plan humain immanent, il n’y a pas d’équilibre possible entre l’anarc
5019
immanent, il n’y a pas d’équilibre possible entre
l’
anarchie et l’unité forcée, l’individu et l’État. Mais dès qu’intervie
5020
’y a pas d’équilibre possible entre l’anarchie et
l’
unité forcée, l’individu et l’État. Mais dès qu’intervient la transcen
5021
ibre possible entre l’anarchie et l’unité forcée,
l’
individu et l’État. Mais dès qu’intervient la transcendance, il y a mi
5022
entre l’anarchie et l’unité forcée, l’individu et
l’
État. Mais dès qu’intervient la transcendance, il y a mieux qu’un équi
5023
cée, l’individu et l’État. Mais dès qu’intervient
la
transcendance, il y a mieux qu’un équilibre, il y a un principe vivan
5024
bre, il y a un principe vivant d’union. Là où est
l’
Esprit, là est la liberté, mais là aussi est la vraie communion. Il no
5025
incipe vivant d’union. Là où est l’Esprit, là est
la
liberté, mais là aussi est la vraie communion. Il nous reste à dévelo
5026
st l’Esprit, là est la liberté, mais là aussi est
la
vraie communion. Il nous reste à développer maintenant les implicatio
5027
communion. Il nous reste à développer maintenant
les
implications politiques de cette théologie et de cette philosophie.
5028
dit pour qu’il soit désormais facile de voir qu’à
l’
attitude œcuménique en religion ne peut correspondre que l’organisatio
5029
e œcuménique en religion ne peut correspondre que
l’
organisation fédéraliste en politique. Quant à la philosophie de la pe
5030
l’organisation fédéraliste en politique. Quant à
la
philosophie de la personne, elle sera normalement celle du bon citoye
5031
déraliste en politique. Quant à la philosophie de
la
personne, elle sera normalement celle du bon citoyen d’une fédération
5032
ormalement celle du bon citoyen d’une fédération.
La
devise paradoxale du fédéralisme helvétique : « Un pour tous, tous po
5033
un », est également valable sur ces trois plans.
L’
œcuménisme exclut l’orthodoxie fermée, créatrice de schismes, et la di
5034
valable sur ces trois plans. L’œcuménisme exclut
l’
orthodoxie fermée, créatrice de schismes, et la dissidence obstinée. L
5035
ut l’orthodoxie fermée, créatrice de schismes, et
la
dissidence obstinée. Le fédéralisme exclut de même l’impérialisme, gé
5036
créatrice de schismes, et la dissidence obstinée.
Le
fédéralisme exclut de même l’impérialisme, générateur de guerres, et
5037
issidence obstinée. Le fédéralisme exclut de même
l’
impérialisme, générateur de guerres, et le régionalisme borné et égoïs
5038
de même l’impérialisme, générateur de guerres, et
le
régionalisme borné et égoïste. (Remarquons d’ailleurs que l’impériali
5039
isme borné et égoïste. (Remarquons d’ailleurs que
l’
impérialisme n’est que l’individualisme d’un groupe ; et l’individuali
5040
emarquons d’ailleurs que l’impérialisme n’est que
l’
individualisme d’un groupe ; et l’individualisme, l’impérialisme d’un
5041
lisme n’est que l’individualisme d’un groupe ; et
l’
individualisme, l’impérialisme d’un homme isolé. De même que l’État ce
5042
individualisme d’un groupe ; et l’individualisme,
l’
impérialisme d’un homme isolé. De même que l’État cesse d’être un vrai
5043
sme, l’impérialisme d’un homme isolé. De même que
l’
État cesse d’être un vrai État dès qu’il se veut souverain absolu, l’h
5044
un vrai État dès qu’il se veut souverain absolu,
l’
homme cesse d’être un homme intégral dès qu’il absolutise sa liberté.)
5045
homme intégral dès qu’il absolutise sa liberté.)
Le
fédéralisme part des groupes locaux (région, commune, entreprises, et
5046
es locaux (région, commune, entreprises, etc.) et
l’
œcuménisme reconnaît pareillement leur valeur (églises diverses, paroi
5047
es, paroisses, ordres, etc.). C’est en effet dans
le
groupe local que la personne peut se réaliser. Car les tâches civique
5048
s, etc.). C’est en effet dans le groupe local que
la
personne peut se réaliser. Car les tâches civiques y sont à l’échelle
5049
roupe local que la personne peut se réaliser. Car
les
tâches civiques y sont à l’échelle de l’individu et l’engagement conc
5050
eut se réaliser. Car les tâches civiques y sont à
l’
échelle de l’individu et l’engagement concret dans la communauté y dev
5051
er. Car les tâches civiques y sont à l’échelle de
l’
individu et l’engagement concret dans la communauté y devient donc pos
5052
ches civiques y sont à l’échelle de l’individu et
l’
engagement concret dans la communauté y devient donc possible. Dans la
5053
chelle de l’individu et l’engagement concret dans
la
communauté y devient donc possible. Dans la petite congrégation, on s
5054
dans la communauté y devient donc possible. Dans
la
petite congrégation, on se connaît, on sait à quels hommes et à quels
5055
mes et à quels problèmes publics on a affaire. Si
l’
on se trouve en opposition avec le groupe, on a la possibilité matérie
5056
n a affaire. Si l’on se trouve en opposition avec
le
groupe, on a la possibilité matérielle d’y faire entendre sa voix. Si
5057
l’on se trouve en opposition avec le groupe, on a
la
possibilité matérielle d’y faire entendre sa voix. Si cela ne suffit
5058
Si cela ne suffit pas, on peut changer de groupe.
L’
on n’est donc pas isolé, comme l’individu se trouve isolé dans une gra
5059
anger de groupe. L’on n’est donc pas isolé, comme
l’
individu se trouve isolé dans une grande ville moderne ou dans un vast
5060
i rigide et uniforme, puisque dans une fédération
l’
on peut toujours adhérer à divers groupes, l’un religieux, l’autre soc
5061
ppartenances — qui trouverait son équivalent dans
l’
œcuménisme ecclésiastique — est exclue par le régime totalitaire, qui
5062
dans l’œcuménisme ecclésiastique — est exclue par
le
régime totalitaire, qui prétend faire coïncider les frontières de l’É
5063
e régime totalitaire, qui prétend faire coïncider
les
frontières de l’État avec celles de toutes les activités sociales, sp
5064
re, qui prétend faire coïncider les frontières de
l’
État avec celles de toutes les activités sociales, spirituelles ou pri
5065
er les frontières de l’État avec celles de toutes
les
activités sociales, spirituelles ou privées — ce qui est la définitio
5066
és sociales, spirituelles ou privées — ce qui est
la
définition même de l’oppression. Le fédéralisme, comme l’œcuménisme,
5067
les ou privées — ce qui est la définition même de
l’
oppression. Le fédéralisme, comme l’œcuménisme, reconnaît que les dive
5068
— ce qui est la définition même de l’oppression.
Le
fédéralisme, comme l’œcuménisme, reconnaît que les diversités régiona
5069
ition même de l’oppression. Le fédéralisme, comme
l’
œcuménisme, reconnaît que les diversités régionales sont la vie même d
5070
Le fédéralisme, comme l’œcuménisme, reconnaît que
les
diversités régionales sont la vie même de l’Union. Mais par l’organe
5071
sme, reconnaît que les diversités régionales sont
la
vie même de l’Union. Mais par l’organe central qui lie toutes les rég
5072
que les diversités régionales sont la vie même de
l’
Union. Mais par l’organe central qui lie toutes les régions, il ménage
5073
régionales sont la vie même de l’Union. Mais par
l’
organe central qui lie toutes les régions, il ménage un recours au cit
5074
l’Union. Mais par l’organe central qui lie toutes
les
régions, il ménage un recours au citoyen contre les abus de pouvoirs
5075
s régions, il ménage un recours au citoyen contre
les
abus de pouvoirs locaux. Il cherche la coopération organique de ses m
5076
en contre les abus de pouvoirs locaux. Il cherche
la
coopération organique de ses membres et non cette caricature de l’ord
5077
ganique de ses membres et non cette caricature de
l’
ordre qu’est l’unité dans l’uniformité. Au lieu de pétrifier les front
5078
membres et non cette caricature de l’ordre qu’est
l’
unité dans l’uniformité. Au lieu de pétrifier les frontières extérieur
5079
n cette caricature de l’ordre qu’est l’unité dans
l’
uniformité. Au lieu de pétrifier les frontières extérieures des groupe
5080
t l’unité dans l’uniformité. Au lieu de pétrifier
les
frontières extérieures des groupes qui forment la fédération, il cher
5081
es frontières extérieures des groupes qui forment
la
fédération, il cherche à vivifier leurs foyers. Et de la sorte, à l’é
5082
ration, il cherche à vivifier leurs foyers. Et de
la
sorte, à l’équilibre méfiant et statique des puissances affrontées, i
5083
herche à vivifier leurs foyers. Et de la sorte, à
l’
équilibre méfiant et statique des puissances affrontées, il substitue
5084
statique des puissances affrontées, il substitue
l’
émulation vivante des valeurs originales. Spinoza définit la paix comm
5085
n vivante des valeurs originales. Spinoza définit
la
paix comme « l’harmonie des âmes fortes ». Nous pourrions pareillemen
5086
leurs originales. Spinoza définit la paix comme «
l’
harmonie des âmes fortes ». Nous pourrions pareillement définir l’œcum
5087
mes fortes ». Nous pourrions pareillement définir
l’
œcuménisme et le fédéralisme en remplaçant « âmes » par « églises » et
5088
us pourrions pareillement définir l’œcuménisme et
le
fédéralisme en remplaçant « âmes » par « églises » et par « régions »
5089
er notre tableau en indiquant au moins ceci : que
le
fédéralisme implique dans l’ordre économique la vitalité des syndicat
5090
au moins ceci : que le fédéralisme implique dans
l’
ordre économique la vitalité des syndicats ouvriers et patronaux, et l
5091
e le fédéralisme implique dans l’ordre économique
la
vitalité des syndicats ouvriers et patronaux, et la substitution au r
5092
vitalité des syndicats ouvriers et patronaux, et
la
substitution au régime capitaliste (centralisateur et individualiste
5093
ceci nous entraînerait dans un exposé qui déborde
le
cadre de ce schéma doctrinal. Notre objet était d’établir les relatio
5094
ce schéma doctrinal. Notre objet était d’établir
les
relations suivantes : l’œcuménisme, le personnalisme et le fédéralism
5095
e objet était d’établir les relations suivantes :
l’
œcuménisme, le personnalisme et le fédéralisme sont les aspects divers
5096
d’établir les relations suivantes : l’œcuménisme,
le
personnalisme et le fédéralisme sont les aspects divers d’une seule e
5097
ons suivantes : l’œcuménisme, le personnalisme et
le
fédéralisme sont les aspects divers d’une seule et même attitude spir
5098
uménisme, le personnalisme et le fédéralisme sont
les
aspects divers d’une seule et même attitude spirituelle. Ils s’engend
5099
l’un l’autre et s’appuient mutuellement. Ils ont
les
mêmes structures et les mêmes ambitions. Ils opposent également à la
5100
ent mutuellement. Ils ont les mêmes structures et
les
mêmes ambitions. Ils opposent également à la notion d’unité rigide ce
5101
et les mêmes ambitions. Ils opposent également à
la
notion d’unité rigide celle de communion ; à l’Empire, le Commonwealt
5102
à la notion d’unité rigide celle de communion ; à
l’
Empire, le Commonwealth ; à l’ordre unitaire et géométrique la collabo
5103
n d’unité rigide celle de communion ; à l’Empire,
le
Commonwealth ; à l’ordre unitaire et géométrique la collaboration plu
5104
le de communion ; à l’Empire, le Commonwealth ; à
l’
ordre unitaire et géométrique la collaboration pluraliste et organique
5105
Commonwealth ; à l’ordre unitaire et géométrique
la
collaboration pluraliste et organique ; au couple de frères ennemis q
5106
ganique ; au couple de frères ennemis que forment
l’
individu déraciné et la masse totalitaire, le couple de frères amis qu
5107
frères ennemis que forment l’individu déraciné et
la
masse totalitaire, le couple de frères amis que forment la personne e
5108
ment l’individu déraciné et la masse totalitaire,
le
couple de frères amis que forment la personne et la communauté fédéra
5109
totalitaire, le couple de frères amis que forment
la
personne et la communauté fédérale. Vouloir le fédéralisme sans accep
5110
couple de frères amis que forment la personne et
la
communauté fédérale. Vouloir le fédéralisme sans accepter l’œcuménism
5111
nt la personne et la communauté fédérale. Vouloir
le
fédéralisme sans accepter l’œcuménisme, ce serait priver l’organisati
5112
té fédérale. Vouloir le fédéralisme sans accepter
l’
œcuménisme, ce serait priver l’organisation politique de ses fondement
5113
isme sans accepter l’œcuménisme, ce serait priver
l’
organisation politique de ses fondements spirituels. Mais accepter l’œ
5114
tique de ses fondements spirituels. Mais accepter
l’
œcuménisme sans vouloir également le fédéralisme, ce serait ne pas acc
5115
Mais accepter l’œcuménisme sans vouloir également
le
fédéralisme, ce serait ne pas accepter vraiment l’œcuménisme, j’enten
5116
e fédéralisme, ce serait ne pas accepter vraiment
l’
œcuménisme, j’entends avec toutes ses conséquences. Car la foi sans le
5117
isme, j’entends avec toutes ses conséquences. Car
la
foi sans les œuvres n’est pas la foi. Note. — On s’étonnera peut-ê
5118
nds avec toutes ses conséquences. Car la foi sans
les
œuvres n’est pas la foi. Note. — On s’étonnera peut-être de ne pas
5119
onséquences. Car la foi sans les œuvres n’est pas
la
foi. Note. — On s’étonnera peut-être de ne pas voir figurer le ter
5120
— On s’étonnera peut-être de ne pas voir figurer
le
terme de démocratie dans ce qui précède. C’est qu’il recouvre actuell
5121
actuellement de trop graves malentendus et abus.
L’
œcuménisme n’a pas à les reprendre à sa charge. Et les peuples europée
5122
raves malentendus et abus. L’œcuménisme n’a pas à
les
reprendre à sa charge. Et les peuples européens ne sont nullement prê
5123
cuménisme n’a pas à les reprendre à sa charge. Et
les
peuples européens ne sont nullement prêts à se soulever pour rétablir
5124
soulever pour rétablir ce qu’on nommait chez eux
la
« démocratie ». Ils attendent un régime qui puisse allier la liberté
5125
atie ». Ils attendent un régime qui puisse allier
la
liberté à la communauté. Dans le fédéralisme, démocrates et totalitai
5126
ttendent un régime qui puisse allier la liberté à
la
communauté. Dans le fédéralisme, démocrates et totalitaires de droite
5127
ui puisse allier la liberté à la communauté. Dans
le
fédéralisme, démocrates et totalitaires de droite et de gauche pourro
5128
alitaires de droite et de gauche pourront trouver
la
plénitude de leurs idéaux incomplets, séparés, et par là même déformé
5129
ts, séparés, et par là même déformés. À mon sens,
le
fédéralisme est la seule possibilité pratique de réaliser la vraie dé
5130
là même déformés. À mon sens, le fédéralisme est
la
seule possibilité pratique de réaliser la vraie démocratie. Mais il a
5131
sme est la seule possibilité pratique de réaliser
la
vraie démocratie. Mais il a le grand avantage de réaliser en même tem
5132
atique de réaliser la vraie démocratie. Mais il a
le
grand avantage de réaliser en même temps ce qu’il y a de valable dans
5133
aliser en même temps ce qu’il y a de valable dans
l’
appel communautaire que le totalitarisme a diaboliquement utilisé et d
5134
’il y a de valable dans l’appel communautaire que
le
totalitarisme a diaboliquement utilisé et dévié. 4. Mission fédéra
5135
nt utilisé et dévié. 4. Mission fédératrice de
l’
œcuménisme Et maintenant nous voici dans le drame de l’année 194173
5136
de l’œcuménisme Et maintenant nous voici dans
le
drame de l’année 194173. Nous constatons que le conflit en cours est
5137
isme Et maintenant nous voici dans le drame de
l’
année 194173. Nous constatons que le conflit en cours est insoluble da
5138
s le drame de l’année 194173. Nous constatons que
le
conflit en cours est insoluble dans son plan. Si le totalitarisme tri
5139
conflit en cours est insoluble dans son plan. Si
le
totalitarisme triomphe définitivement des démocraties, ce sera la mor
5140
triomphe définitivement des démocraties, ce sera
la
mort d’une culture et d’une économie, sans doute, mais ce sera surtou
5141
d’une économie, sans doute, mais ce sera surtout
la
suppression de toute possibilité œcuménique, la subversion des valeur
5142
t la suppression de toute possibilité œcuménique,
la
subversion des valeurs universelles créées par l’évangélisation de la
5143
la subversion des valeurs universelles créées par
l’
évangélisation de la conscience occidentale. D’autre part, si les démo
5144
leurs universelles créées par l’évangélisation de
la
conscience occidentale. D’autre part, si les démocraties capitalistes
5145
on de la conscience occidentale. D’autre part, si
les
démocraties capitalistes et individualistes triomphent, aucun problèm
5146
it. Tout le monde sent ou pressent d’ailleurs que
les
deux termes de cette alternative sont également improbables, et que l
5147
te alternative sont également improbables, et que
les
destructions en cours et à venir supprimeront pratiquement toutes pos
5148
s de victoire réelle de l’un ou de l’autre parti.
L’
examen objectif des forces en présence ne permet d’envisager pour l’Eu
5149
des forces en présence ne permet d’envisager pour
l’
Europe et le monde de demain qu’une période de chaos étatisé ; je ne d
5150
n présence ne permet d’envisager pour l’Europe et
le
monde de demain qu’une période de chaos étatisé ; je ne dis même pas
5151
une tactique nouvelles. Mais où sont-elles ? Qui
les
prépare ? Le capitalisme et l’individualisme ont reçu en Europe des c
5152
nouvelles. Mais où sont-elles ? Qui les prépare ?
Le
capitalisme et l’individualisme ont reçu en Europe des coups mortels,
5153
sont-elles ? Qui les prépare ? Le capitalisme et
l’
individualisme ont reçu en Europe des coups mortels, dans les deux cam
5154
alisme ont reçu en Europe des coups mortels, dans
les
deux camps. Le totalitarisme est un état de guerre, qui ne peut subsi
5155
en Europe des coups mortels, dans les deux camps.
Le
totalitarisme est un état de guerre, qui ne peut subsister normalemen
5156
que et social sans précédent dans notre histoire.
La
seule espérance et aussi la seule possibilité qui demeure, c’est l’or
5157
dans notre histoire. La seule espérance et aussi
la
seule possibilité qui demeure, c’est l’organisation fédéraliste du mo
5158
et aussi la seule possibilité qui demeure, c’est
l’
organisation fédéraliste du monde. Elle seule apporte du nouveau. Elle
5159
nfuses des peuples et aux nécessités pratiques de
la
paix. Elle seule s’oppose à la fois au capitalisme individualiste et
5160
ais qui peut aujourd’hui proposer cette réponse ?
Le
rôle d’Hitler est de détruire. Il détruit les contradictions intoléra
5161
se ? Le rôle d’Hitler est de détruire. Il détruit
les
contradictions intolérables d’une Europe qui s’obstinait à parler de
5162
liste, et qui refusait de se fédérer. Hitler abat
les
barrières, le passé. C’est toute sa force, et sa victoire même l’épui
5163
efusait de se fédérer. Hitler abat les barrières,
le
passé. C’est toute sa force, et sa victoire même l’épuiserait. Il n’y
5164
passé. C’est toute sa force, et sa victoire même
l’
épuiserait. Il n’y aurait plus qu’une table rase couverte de ruines pu
5165
qu’une table rase couverte de ruines pulvérisées.
Le
rôle de Churchill est de faire la guerre. Mais il ne pourra pas la ga
5166
es pulvérisées. Le rôle de Churchill est de faire
la
guerre. Mais il ne pourra pas la gagner réellement s’il ne propose ri
5167
ill est de faire la guerre. Mais il ne pourra pas
la
gagner réellement s’il ne propose rien aux peuples de l’Europe. Or il
5168
er réellement s’il ne propose rien aux peuples de
l’
Europe. Or il dit qu’il n’en a pas le temps… Quant au rôle de Staline,
5169
x peuples de l’Europe. Or il dit qu’il n’en a pas
le
temps… Quant au rôle de Staline, il paraît être de profiter de la gue
5170
au rôle de Staline, il paraît être de profiter de
la
guerre des autres pour consolider l’autarcie russe… Cette carence gén
5171
profiter de la guerre des autres pour consolider
l’
autarcie russe… Cette carence générale des chefs, des doctrines et des
5172
s partis est un appel à une autorité nouvelle. Si
les
Églises n’y répondent pas, personne d’autre, je le crains, ne répondr
5173
s Églises n’y répondent pas, personne d’autre, je
le
crains, ne répondra. Avant même de se demander si les Églises peuvent
5174
crains, ne répondra. Avant même de se demander si
les
Églises peuvent répondre, il faut qu’elles comprennent qu’elles le do
5175
t répondre, il faut qu’elles comprennent qu’elles
le
doivent. Mais les deux termes ne se confondent-ils pas dans la réalit
5176
ut qu’elles comprennent qu’elles le doivent. Mais
les
deux termes ne se confondent-ils pas dans la réalité de la foi ? Cert
5177
ais les deux termes ne se confondent-ils pas dans
la
réalité de la foi ? Certes ! Si les Églises sont fidèles à leur chef,
5178
ermes ne se confondent-ils pas dans la réalité de
la
foi ? Certes ! Si les Églises sont fidèles à leur chef, elles savent
5179
t-ils pas dans la réalité de la foi ? Certes ! Si
les
Églises sont fidèles à leur chef, elles savent qu’il règne et crée po
5180
savent qu’il règne et crée pour ceux qui croient
la
possibilité de faire ce qu’il demande. Dans l’état d’impuissance appa
5181
nt la possibilité de faire ce qu’il demande. Dans
l’
état d’impuissance apparente où se voient aujourd’hui les Églises, si
5182
d’impuissance apparente où se voient aujourd’hui
les
Églises, si cette foi seule demeure, elle sera suffisante. Aussi bien
5183
ante. Aussi bien, certaines raisons de croire que
l’
Église peut agir, raisons que nous allons énumérer, sont-elles moins d
5184
fier des espérances ou à nourrir des volontés. 1.
L’
histoire du monde christianisé nous montre que les structures ecclésia
5185
L’histoire du monde christianisé nous montre que
les
structures ecclésiastiques ont souvent précédé et prédéterminé les st
5186
clésiastiques ont souvent précédé et prédéterminé
les
structures politiques d’une nation. J’indiquerai trois groupes d’exem
5187
existe une forme de totalitarisme correspondant à
la
Russie orthodoxe, une seconde, correspondant à l’Allemagne en majorit
5188
la Russie orthodoxe, une seconde, correspondant à
l’
Allemagne en majorité luthérienne, et une troisième correspondant à l’
5189
ité luthérienne, et une troisième correspondant à
l’
Italie et à l’Espagne catholiques romaines, — alors qu’il n’en existe
5190
e, et une troisième correspondant à l’Italie et à
l’
Espagne catholiques romaines, — alors qu’il n’en existe aucune qui se
5191
éléments calvinistes, même laïcisés, comme ce fut
le
cas de la France sous la Troisième République ? Comment expliquer ce
5192
alvinistes, même laïcisés, comme ce fut le cas de
la
France sous la Troisième République ? Comment expliquer ce fait ? À d
5193
e étude nuancée, — dont je ne puis donner ici que
le
thème — je dirai ceci : en Russie, en Allemagne, en Italie et en Espa
5194
en Russie, en Allemagne, en Italie et en Espagne,
la
distinction entre l’Église et l’État n’avait jamais été établie d’une
5195
ne, en Italie et en Espagne, la distinction entre
l’
Église et l’État n’avait jamais été établie d’une manière satisfaisant
5196
e et en Espagne, la distinction entre l’Église et
l’
État n’avait jamais été établie d’une manière satisfaisante. Il en rés
5197
’une manière satisfaisante. Il en résultait, dans
le
peuple, le sentiment que l’Église et l’État formaient un tout, et con
5198
e satisfaisante. Il en résultait, dans le peuple,
le
sentiment que l’Église et l’État formaient un tout, et constituaient
5199
Il en résultait, dans le peuple, le sentiment que
l’
Église et l’État formaient un tout, et constituaient à eux deux le Pou
5200
ait, dans le peuple, le sentiment que l’Église et
l’
État formaient un tout, et constituaient à eux deux le Pouvoir. Renver
5201
at formaient un tout, et constituaient à eux deux
le
Pouvoir. Renverser l’un, c’était donc fatalement s’attaquer à l’autre
5202
à l’autre. Et comme une révolution copie toujours
la
structure du pouvoir qu’elle renverse, un Staline, un Hitler et, dans
5203
e moindre, un Mussolini, se virent contraints par
le
sentiment général de reprendre à leur compte le césaropapisme ou la t
5204
r le sentiment général de reprendre à leur compte
le
césaropapisme ou la théocratie dont ils triomphaient : ils réclamèren
5205
al de reprendre à leur compte le césaropapisme ou
la
théocratie dont ils triomphaient : ils réclamèrent à la fois le pouvo
5206
dont ils triomphaient : ils réclamèrent à la fois
le
pouvoir temporel et l’autorité spirituelle, et devinrent donc totalit
5207
ils réclamèrent à la fois le pouvoir temporel et
l’
autorité spirituelle, et devinrent donc totalitaires. Dans les pays ca
5208
spirituelle, et devinrent donc totalitaires. Dans
les
pays calvinistes, au contraire, la séparation de l’Église et de l’Éta
5209
itaires. Dans les pays calvinistes, au contraire,
la
séparation de l’Église et de l’État a toujours été réelle — même lors
5210
pays calvinistes, au contraire, la séparation de
l’
Église et de l’État a toujours été réelle — même lorsqu’elle n’était p
5211
es, au contraire, la séparation de l’Église et de
l’
État a toujours été réelle — même lorsqu’elle n’était pas strictement
5212
e lorsqu’elle n’était pas strictement établie par
la
loi. De même les devoirs de la vocation personnelle ont toujours été
5213
était pas strictement établie par la loi. De même
les
devoirs de la vocation personnelle ont toujours été mis au-dessus des
5214
tement établie par la loi. De même les devoirs de
la
vocation personnelle ont toujours été mis au-dessus des devoirs enver
5215
ont toujours été mis au-dessus des devoirs envers
le
Pouvoir politique. Lors donc que la foi s’est affaiblie dans ces pays
5216
evoirs envers le Pouvoir politique. Lors donc que
la
foi s’est affaiblie dans ces pays, cette carence ne s’y est pas tradu
5217
s pays, cette carence ne s’y est pas traduite par
l’
éclosion d’une anti-religion totalitaire, mais par un phénomène contra
5218
ire de dispersion individualiste. Autre exemple :
l’
Angleterre et les pays scandinaves, au xvie siècle, ont accompli leur
5219
n individualiste. Autre exemple : l’Angleterre et
les
pays scandinaves, au xvie siècle, ont accompli leur Réforme au sein
5220
vie siècle, ont accompli leur Réforme au sein de
l’
Église traditionnelle, sans rupture violente (surtout en Suède). Un co
5221
au, calviniste ou luthérien, s’est introduit dans
les
cadres et les rites anciens, jugés utilisables. Or, nous voyons ce pr
5222
ou luthérien, s’est introduit dans les cadres et
les
rites anciens, jugés utilisables. Or, nous voyons ce processus ecclés
5223
nos jours dans ces mêmes pays, cette fois-ci dans
l’
ordre politique et social. Les cadres traditionnels subsistent — royau
5224
, cette fois-ci dans l’ordre politique et social.
Les
cadres traditionnels subsistent — royauté, hiérarchies sociales — mai
5225
usé à établir une uniformité de gouvernement pour
les
diverses Églises qui se réclamaient de sa réforme. L’Una Sancta nous
5226
iverses Églises qui se réclamaient de sa réforme.
L’
Una Sancta nous apparaît ici-bas, selon ses propres termes, dans la di
5227
apparaît ici-bas, selon ses propres termes, dans
la
diversité « des Églises et des personnes particulières ». Elle doit d
5228
dans un fédéralisme plus ou moins accentué selon
les
nations : Confédération helvétique, Provinces-Unies des Pays-Bas, Com
5229
Commonwealth britannique, États-Unis d’Amérique. (
La
forme de « l’individualisme par groupes » dans ce dernier pays, étant
5230
ritannique, États-Unis d’Amérique. (La forme de «
l’
individualisme par groupes » dans ce dernier pays, étant prédéterminée
5231
s » dans ce dernier pays, étant prédéterminée par
le
fait — d’ordre ecclésiastique — qu’il fut fondé par des seceders.) Et
5232
siastique — qu’il fut fondé par des seceders.) Et
l’
on sait que les réformés de France, au xvie siècle, préconisèrent une
5233
’il fut fondé par des seceders.) Et l’on sait que
les
réformés de France, au xvie siècle, préconisèrent une organisation f
5234
nuancer et de multiplier de tels exemples. Je ne
les
indique ici que pour montrer : 1° que la connaissance intime des proc
5235
. Je ne les indique ici que pour montrer : 1° que
la
connaissance intime des processus religieux dans un pays donné fourni
5236
tiques qui s’y manifesteront tôt ou tard ; 2° que
l’
action, que le mouvement œcuménique peut et doit exercer sur ces proce
5237
manifesteront tôt ou tard ; 2° que l’action, que
le
mouvement œcuménique peut et doit exercer sur ces processus religieux
5238
it exercer sur ces processus religieux, préparera
le
terrain pour une action politique réaliste, c’est-à-dire tenant compt
5239
ées empiriques et des diversités spirituelles sur
la
connaissance desquelles se fonde nécessairement tout effort fédératif
5240
nécessairement tout effort fédératif sérieux. 2.
La
théologie de l’œcuménisme, et la philosophie de la personne qu’elle i
5241
tout effort fédératif sérieux. 2. La théologie de
l’
œcuménisme, et la philosophie de la personne qu’elle implique, sont le
5242
atif sérieux. 2. La théologie de l’œcuménisme, et
la
philosophie de la personne qu’elle implique, sont les seules bases ac
5243
a théologie de l’œcuménisme, et la philosophie de
la
personne qu’elle implique, sont les seules bases actuellement conceva
5244
philosophie de la personne qu’elle implique, sont
les
seules bases actuellement concevables pour un ordre nouveau du monde.
5245
ment concevables pour un ordre nouveau du monde. (
La
« religion de l’homme » que certains nous proposent est une contradic
5246
pour un ordre nouveau du monde. (La « religion de
l’
homme » que certains nous proposent est une contradiction dans les ter
5247
ertains nous proposent est une contradiction dans
les
termes, à moins qu’elle ne soit la formule de la religion totalitaire
5248
adiction dans les termes, à moins qu’elle ne soit
la
formule de la religion totalitaire, sans transcendance, que préciséme
5249
les termes, à moins qu’elle ne soit la formule de
la
religion totalitaire, sans transcendance, que précisément l’on se pro
5250
totalitaire, sans transcendance, que précisément
l’
on se propose de combattre !) D’autre part, la théologie de l’œcuménis
5251
ent l’on se propose de combattre !) D’autre part,
la
théologie de l’œcuménisme et la philosophie de la personne sont les s
5252
ose de combattre !) D’autre part, la théologie de
l’
œcuménisme et la philosophie de la personne sont les seules bases actu
5253
!) D’autre part, la théologie de l’œcuménisme et
la
philosophie de la personne sont les seules bases actuellement existan
5254
la théologie de l’œcuménisme et la philosophie de
la
personne sont les seules bases actuellement existantes, et sur lesque
5255
’œcuménisme et la philosophie de la personne sont
les
seules bases actuellement existantes, et sur lesquelles on puisse con
5256
lesquelles on puisse construire dès maintenant. (
La
« religion de l’homme », ou du surhomme, est encore à créer, et le te
5257
isse construire dès maintenant. (La « religion de
l’
homme », ou du surhomme, est encore à créer, et le temps presse !) Cha
5258
l’homme », ou du surhomme, est encore à créer, et
le
temps presse !) Chargées d’éléments traditionnels, condensant tout ce
5259
condensant tout ce que nous avons d’expérience de
la
paix, elles convoient et contiennent en même temps un indiscutable dy
5260
mps un indiscutable dynamisme révolutionnaire. 3.
L’
organisation du Conseil œcuménique se trouve être de fait la seule Int
5261
tion du Conseil œcuménique se trouve être de fait
la
seule Internationale en formation. On sait assez que les Internationa
5262
le Internationale en formation. On sait assez que
les
Internationales idéologiques et politiques se sont désintégrées au co
5263
ésintégrées au cours des deux dernières décades. (
Les
partis socialistes subsistant dans les pays où les Soviets ne règnent
5264
décades. (Les partis socialistes subsistant dans
les
pays où les Soviets ne règnent pas, sont en voie de divergence et non
5265
es partis socialistes subsistant dans les pays où
les
Soviets ne règnent pas, sont en voie de divergence et non de converge
5266
e convergence, sur le plan international. On a vu
les
socialistes anglais collaborer avec les conservateurs anglais, non pa
5267
. On a vu les socialistes anglais collaborer avec
les
conservateurs anglais, non pas avec les syndicalistes russes, ni même
5268
orer avec les conservateurs anglais, non pas avec
les
syndicalistes russes, ni même américains, pour ne donner qu’un exempl
5269
américains, pour ne donner qu’un exemple.) À part
la
Croix-Rouge, dont la tâche est strictement limitée, rien ne subsiste
5270
onner qu’un exemple.) À part la Croix-Rouge, dont
la
tâche est strictement limitée, rien ne subsiste en dehors de l’œcumén
5271
trictement limitée, rien ne subsiste en dehors de
l’
œcuménisme, qui permette de mettre en relations des groupes nationaux
5272
onaux non étatiques. Ce fait simple institue pour
le
mouvement œcuménique une possibilité historique sans précédent, une l
5273
urde responsabilité humaine, et, n’hésitons pas à
le
dire, une vocation. 4. La renaissance liturgique qui va de pair, dans
5274
e, et, n’hésitons pas à le dire, une vocation. 4.
La
renaissance liturgique qui va de pair, dans toutes les Églises, avec
5275
enaissance liturgique qui va de pair, dans toutes
les
Églises, avec l’effort œcuménique, est en train de recréer un langage
5276
que qui va de pair, dans toutes les Églises, avec
l’
effort œcuménique, est en train de recréer un langage commun, un ensem
5277
dessus des langages répond exactement aux besoins
les
plus légitimes de notre temps. Il nous rend les vraies formules de la
5278
s les plus légitimes de notre temps. Il nous rend
les
vraies formules de la communauté vivante, celle qui rassemble les per
5279
notre temps. Il nous rend les vraies formules de
la
communauté vivante, celle qui rassemble les personnes, et non pas cel
5280
les de la communauté vivante, celle qui rassemble
les
personnes, et non pas celle qui fond, en une masse informe et grossiè
5281
, en une masse informe et grossièrement encadrée,
les
individus privés de leur conscience normale. Du point de vue sociolog
5282
conscience normale. Du point de vue sociologique,
la
renaissance liturgique, favorisée par le mouvement œcuménique, marque
5283
logique, la renaissance liturgique, favorisée par
le
mouvement œcuménique, marque l’avènement d’une attitude personnaliste
5284
ue, favorisée par le mouvement œcuménique, marque
l’
avènement d’une attitude personnaliste, au-delà de l’antinomie individ
5285
vènement d’une attitude personnaliste, au-delà de
l’
antinomie individu isolé-masse militarisée. 5. La théologie de l’œcumé
5286
l’antinomie individu isolé-masse militarisée. 5.
La
théologie de l’œcuménisme, la philosophie de la personne et la politi
5287
ividu isolé-masse militarisée. 5. La théologie de
l’
œcuménisme, la philosophie de la personne et la politique du fédéralis
5288
sse militarisée. 5. La théologie de l’œcuménisme,
la
philosophie de la personne et la politique du fédéralisme sont seules
5289
. La théologie de l’œcuménisme, la philosophie de
la
personne et la politique du fédéralisme sont seules en mesure, aujour
5290
de l’œcuménisme, la philosophie de la personne et
la
politique du fédéralisme sont seules en mesure, aujourd’hui, de synth
5291
ont seules en mesure, aujourd’hui, de synthétiser
les
vérités disjointes et tournées en erreurs, qui subsistent dans les dé
5292
intes et tournées en erreurs, qui subsistent dans
les
démocraties et dans les mouvements totalitaires. Ceci résulte, théori
5293
eurs, qui subsistent dans les démocraties et dans
les
mouvements totalitaires. Ceci résulte, théoriquement, de ce que nous
5294
t, de ce que nous avons exposé aux chapitres 1-3.
Le
mouvement œcuménique est donc seul en mesure de préparer la réconcili
5295
nt œcuménique est donc seul en mesure de préparer
la
réconciliation des adversaires actuels. Il ne se fonde pas sur un com
5296
dépasse ces erreurs en même temps qu’elle ré-axe
les
vérités égarées dans les deux camps. (N’oublions pas que l’on combat,
5297
ême temps qu’elle ré-axe les vérités égarées dans
les
deux camps. (N’oublions pas que l’on combat, de part et d’autre, sans
5298
égarées dans les deux camps. (N’oublions pas que
l’
on combat, de part et d’autre, sans grand espoir mais avec une pathéti
5299
and espoir mais avec une pathétique sincérité.) ⁂
Le
tableau que nous venons d’esquisser est ambitieux. Il veut l’être, pa
5300
ue nous venons d’esquisser est ambitieux. Il veut
l’
être, parce qu’il doit l’être. L’action du chrétien n’est jamais parti
5301
r est ambitieux. Il veut l’être, parce qu’il doit
l’
être. L’action du chrétien n’est jamais partie de la prudente considér
5302
bitieux. Il veut l’être, parce qu’il doit l’être.
L’
action du chrétien n’est jamais partie de la prudente considération de
5303
être. L’action du chrétien n’est jamais partie de
la
prudente considération des forces dont il croyait pouvoir disposer, m
5304
arce que je me tenais immobile, dans ma prudence.
L’
action risquée m’apporte les forces dont je manquais. De toutes parts,
5305
ile, dans ma prudence. L’action risquée m’apporte
les
forces dont je manquais. De toutes parts, un appel est ressenti : je
5306
uais. De toutes parts, un appel est ressenti : je
le
nommerai la nostalgie fédéraliste. Des auteurs isolés l’ont fait ente
5307
tes parts, un appel est ressenti : je le nommerai
la
nostalgie fédéraliste. Des auteurs isolés l’ont fait entendre. Des gr
5308
erai la nostalgie fédéraliste. Des auteurs isolés
l’
ont fait entendre. Des groupes d’intellectuels ont tenté de formuler c
5309
tenté de formuler certaines réponses partielles.
Le
sentiment obscur des peuples n’attend que des réponses plus claires e
5310
ns théologie. Et point de théologie efficace sans
le
soutien d’une catholicité réelle, d’une communauté humaine fondée dan
5311
cité réelle, d’une communauté humaine fondée dans
la
communion des saints. Cette communauté ne se révélera pas dans des co
5312
ans une action risquée. De même que nous avons vu
les
Églises nées des missions en terre païenne se placer à l’avant-garde
5313
es nées des missions en terre païenne se placer à
l’
avant-garde du mouvement vers l’union, nous ne verrons l’œcuménisme se
5314
ïenne se placer à l’avant-garde du mouvement vers
l’
union, nous ne verrons l’œcuménisme se réaliser avec puissance que dan
5315
-garde du mouvement vers l’union, nous ne verrons
l’
œcuménisme se réaliser avec puissance que dans l’épreuve missionnaire
5316
l’œcuménisme se réaliser avec puissance que dans
l’
épreuve missionnaire universelle, qu’il doit affronter maintenant.
5317
re — c’est un résultat du Progrès — cependant que
l’
on meurt chez nous de manger trop. Cette fois-ci, notre faute est imme
5318
le totalement étranger à toutes leurs traditions,
le
modèle de l’État-nation napoléonien — et que ce soit en version capit
5319
étranger à toutes leurs traditions, le modèle de
l’
État-nation napoléonien — et que ce soit en version capitaliste ou com
5320
ence. Ils se trompent d’Europe, quand ils veulent
l’
imiter, surtout pour mieux s’en libérer. Ils choisissent celle qui les
5321
our mieux s’en libérer. Ils choisissent celle qui
les
a dominés, mais c’est choisir aussi celle qui les a perdus ! Je leur
5322
les a dominés, mais c’est choisir aussi celle qui
les
a perdus ! Je leur propose l’Europe des régions, comme offrant la for
5323
ir aussi celle qui les a perdus ! Je leur propose
l’
Europe des régions, comme offrant la formule la moins incompatible ave
5324
leur propose l’Europe des régions, comme offrant
la
formule la moins incompatible avec leurs différences libérées, leur i
5325
se l’Europe des régions, comme offrant la formule
la
moins incompatible avec leurs différences libérées, leur identité ret
5326
rs différences libérées, leur identité retrouvée.
Le
seul moyen de les inciter à éviter nos maux, au lieu de les revendiqu
5327
bérées, leur identité retrouvée. Le seul moyen de
les
inciter à éviter nos maux, au lieu de les revendiquer, sera l’exemple
5328
oyen de les inciter à éviter nos maux, au lieu de
les
revendiquer, sera l’exemple vécu et réussi d’un dépassement de nos st
5329
éviter nos maux, au lieu de les revendiquer, sera
l’
exemple vécu et réussi d’un dépassement de nos stato-nationalismes par
5330
i d’un dépassement de nos stato-nationalismes par
la
fédération continentale ; d’un dépassement de la croissance à tout pr
5331
la fédération continentale ; d’un dépassement de
la
croissance à tout prix des formules d’équilibre humain qui prennent e
5332
ormules d’équilibre humain qui prennent en compte
le
bonheur, ou simplement l’aisance à vivre, plutôt que le gonflement ar
5333
qui prennent en compte le bonheur, ou simplement
l’
aisance à vivre, plutôt que le gonflement artificiel du PNB et les sto
5334
heur, ou simplement l’aisance à vivre, plutôt que
le
gonflement artificiel du PNB et les stocks de bombes calculés en « éq
5335
re, plutôt que le gonflement artificiel du PNB et
les
stocks de bombes calculés en « équivalents TNT ». Condamner l’Europe
5336
bombes calculés en « équivalents TNT ». Condamner
l’
Europe et ne rien faire pour sa fédération, c’est priver le tiers-mond
5337
et ne rien faire pour sa fédération, c’est priver
le
tiers-monde des seuls moyens de s’en tirer sans catastrophes. Car s’i
5338
en tirer sans catastrophes. Car s’il est vrai que
l’
Europe est responsable de la plupart des maux qui accablent le tiers-m
5339
responsable de la plupart des maux qui accablent
le
tiers-monde, et d’abord de son explosion démographique, d’où famine,
5340
ussi de nos industries, il est non moins vrai que
l’
Europe seule peut produire les anticorps des toxines qu’elle a répandu
5341
t non moins vrai que l’Europe seule peut produire
les
anticorps des toxines qu’elle a répandues, et peut élaborer un modèle
5342
laborer un modèle politique qui soit tentant pour
le
tiers-monde. Quant à savoir si le tiers-monde sera tenté, et tirera
5343
t tentant pour le tiers-monde. Quant à savoir si
le
tiers-monde sera tenté, et tirera de sa libération les conclusions qu
5344
iers-monde sera tenté, et tirera de sa libération
les
conclusions que nous aurions dû tirer, pour notre part, de l’échec du
5345
ns que nous aurions dû tirer, pour notre part, de
l’
échec du colonialisme, je suis sceptique. Il se peut que le tiers-mond
5346
u colonialisme, je suis sceptique. Il se peut que
le
tiers-monde ne désire imiter qu’un Occident dominateur et sans scrupu
5347
ais ce qui est sûr, c’est qu’en refusant de faire
les
régions et de se « faire » du même mouvement, l’Europe perdrait ses d
5348
les régions et de se « faire » du même mouvement,
l’
Europe perdrait ses dernières chances de paix, d’autonomie, et de surv
5349
té, de son génie. — Comment alors, évaluez-vous
les
chances de votre projet ? Quelles forces peut-il mobiliser ? Qui est
5350
iser ? Qui est pour ? Qui sera contre ? Et qui va
le
prendre en charge ? — Je ne serais pas tenu de répondre à ces questio
5351
m’étant donné pour tâche de faire voir et sentir
la
nécessité des régions, en tant qu’elle me paraît lisiblement inscrite
5352
tant qu’elle me paraît lisiblement inscrite dans
la
problématique de notre temps. Et voilà bien pourquoi plusieurs hommes
5353
’Ouest, se voient amenés aux mêmes conclusions et
le
confessent… dans une conversation ou un colloque privé. Pourtant, ils
5354
intenir au pouvoir. Ils voudraient bien agir dans
le
sens de mon plan, mais s’ils en montraient l’intention, ils perdraien
5355
ans le sens de mon plan, mais s’ils en montraient
l’
intention, ils perdraient aussitôt, et à coup sûr, le pouvoir de le fa
5356
ntention, ils perdraient aussitôt, et à coup sûr,
le
pouvoir de le faire peut-être un jour… Je n’en vois pas un seul qui a
5357
perdraient aussitôt, et à coup sûr, le pouvoir de
le
faire peut-être un jour… Je n’en vois pas un seul qui ait risqué l’ex
5358
un jour… Je n’en vois pas un seul qui ait risqué
l’
expérience, dont rien ne prouve qu’elle n’eût pas réussi. Mais je ne v
5359
ant que représentant d’une nation, d’un parti, de
la
gauche ou de la droite, ou même de la Jeunesse. Les hommes d’État ne
5360
tant d’une nation, d’un parti, de la gauche ou de
la
droite, ou même de la Jeunesse. Les hommes d’État ne feront rien, pou
5361
n parti, de la gauche ou de la droite, ou même de
la
Jeunesse. Les hommes d’État ne feront rien, pour la raison que je vie
5362
a gauche ou de la droite, ou même de la Jeunesse.
Les
hommes d’État ne feront rien, pour la raison que je viens de dire, et
5363
Jeunesse. Les hommes d’État ne feront rien, pour
la
raison que je viens de dire, et les politiciens moins encore, pour la
5364
ont rien, pour la raison que je viens de dire, et
les
politiciens moins encore, pour la raison que les régions n’existent p
5365
ns de dire, et les politiciens moins encore, pour
la
raison que les régions n’existent pas, ou seulement à l’état de néces
5366
les politiciens moins encore, pour la raison que
les
régions n’existent pas, ou seulement à l’état de nécessités vitales e
5367
on que les régions n’existent pas, ou seulement à
l’
état de nécessités vitales et ça ne vote pas. Qu’ont fait tous nos gou
5368
. Qu’ont fait tous nos gouvernements, avertis par
le
club de Rome ? Et qu’ont fait les partis politiques ? Ils sont encore
5369
nts, avertis par le club de Rome ? Et qu’ont fait
les
partis politiques ? Ils sont encore « nationaux » avant tout, donc pa
5370
teuils, de manipuler ses commandes, et non pas de
le
modifier radicalement, encore moins de créer un tout autre pouvoir. M
5371
e créer un tout autre pouvoir. Même jeu donc pour
la
droite et la gauche, selon qu’elles ont le pouvoir ou seulement l’amb
5372
ut autre pouvoir. Même jeu donc pour la droite et
la
gauche, selon qu’elles ont le pouvoir ou seulement l’ambitionnent : s
5373
c pour la droite et la gauche, selon qu’elles ont
le
pouvoir ou seulement l’ambitionnent : sa structure leur dicte ses loi
5374
auche, selon qu’elles ont le pouvoir ou seulement
l’
ambitionnent : sa structure leur dicte ses lois. Quant au « grand publ
5375
leur dicte ses lois. Quant au « grand public » de
la
droite et aux « masses » de la gauche, catégories de naguère aujourd’
5376
grand public » de la droite et aux « masses » de
la
gauche, catégories de naguère aujourd’hui confondues dans l’ensemble
5377
catégories de naguère aujourd’hui confondues dans
l’
ensemble passif des téléspectateurs, on n’y voit pas mieux les régions
5378
passif des téléspectateurs, on n’y voit pas mieux
les
régions qu’on n’y a su voir venir les guerres mondiales, la théorie d
5379
t pas mieux les régions qu’on n’y a su voir venir
les
guerres mondiales, la théorie de la relativité, le stalinisme, la déc
5380
qu’on n’y a su voir venir les guerres mondiales,
la
théorie de la relativité, le stalinisme, la décevante marche sur la L
5381
u voir venir les guerres mondiales, la théorie de
la
relativité, le stalinisme, la décevante marche sur la Lune, ni même l
5382
s guerres mondiales, la théorie de la relativité,
le
stalinisme, la décevante marche sur la Lune, ni même la crise de l’én
5383
ales, la théorie de la relativité, le stalinisme,
la
décevante marche sur la Lune, ni même la crise de l’énergie. Tout ou
5384
elativité, le stalinisme, la décevante marche sur
la
Lune, ni même la crise de l’énergie. Tout ou presque semble indiquer
5385
linisme, la décevante marche sur la Lune, ni même
la
crise de l’énergie. Tout ou presque semble indiquer à l’observateur o
5386
décevante marche sur la Lune, ni même la crise de
l’
énergie. Tout ou presque semble indiquer à l’observateur objectif que
5387
e de l’énergie. Tout ou presque semble indiquer à
l’
observateur objectif que rien ne se fera, ni ne convaincra, ni ne s’im
5388
imposera au xxe siècle, en temps utile. — Mais
la
Jeunesse ? — Pour autant qu’elle n’est pas un mythe journalistique, j
5389
ant qu’elle n’est pas un mythe journalistique, je
la
vois partagée dans sa majorité entre deux attitudes : — opportunisme
5390
t souci fortement anticipé de sécurité (s’assurer
la
retraite en même temps que le job). On ne s’occupe ni de l’Europe, ni
5391
sécurité (s’assurer la retraite en même temps que
le
job). On ne s’occupe ni de l’Europe, ni encore de régions, et encore
5392
e en même temps que le job). On ne s’occupe ni de
l’
Europe, ni encore de régions, et encore moins de révolution. — Refus d
5393
« révolutionnaire ». On ne s’occupe pas encore de
l’
Europe, ni de régions, ni de la création d’un pouvoir neuf, mais très
5394
cupe pas encore de l’Europe, ni de régions, ni de
la
création d’un pouvoir neuf, mais très souvent, presque toujours de «
5395
— Si je comprends bien, vous n’avez avec vous ni
les
gouvernements ni les partis, ni la grande industrie ni le prolétariat
5396
en, vous n’avez avec vous ni les gouvernements ni
les
partis, ni la grande industrie ni le prolétariat, ni les masses ni mê
5397
avec vous ni les gouvernements ni les partis, ni
la
grande industrie ni le prolétariat, ni les masses ni même les élites
5398
rnements ni les partis, ni la grande industrie ni
le
prolétariat, ni les masses ni même les élites à la mode… Qu’avez-vous
5399
tis, ni la grande industrie ni le prolétariat, ni
les
masses ni même les élites à la mode… Qu’avez-vous donc ? — Le sens d’
5400
ndustrie ni le prolétariat, ni les masses ni même
les
élites à la mode… Qu’avez-vous donc ? — Le sens d’un péril imminent e
5401
e prolétariat, ni les masses ni même les élites à
la
mode… Qu’avez-vous donc ? — Le sens d’un péril imminent et la conscie
5402
même les élites à la mode… Qu’avez-vous donc ? —
Le
sens d’un péril imminent et la conscience de vivre un long cauchemar
5403
avez-vous donc ? — Le sens d’un péril imminent et
la
conscience de vivre un long cauchemar où tout est faux, impossible et
5404
cauchemar où tout est faux, impossible et réel ;
le
refus de croire que l’état des forces cataloguées, tel que vous venez
5405
faux, impossible et réel ; le refus de croire que
l’
état des forces cataloguées, tel que vous venez de le caractériser trè
5406
tat des forces cataloguées, tel que vous venez de
le
caractériser très justement, ne puisse changer à bref délai ; et la v
5407
ès justement, ne puisse changer à bref délai ; et
la
vision d’un avenir vivant, qui peut faire se lever d’autres forces. R
5408
civilisation quelconque ne se trouve remplie par
la
nôtre : ni le consensus des meilleurs, ni celui du grand nombre ; ni
5409
quelconque ne se trouve remplie par la nôtre : ni
le
consensus des meilleurs, ni celui du grand nombre ; ni l’amour pieux
5410
nsus des meilleurs, ni celui du grand nombre ; ni
l’
amour pieux ou gouailleur du peuple, ni le dévouement rituel d’une ari
5411
re ; ni l’amour pieux ou gouailleur du peuple, ni
le
dévouement rituel d’une aristocratie qui sait ce qu’elle se doit. Plu
5412
éés et entretenus. Absurde, impossible et réelle,
la
société stato-nationaliste a pour seule vertu d’être là. Écoutons Bau
5413
our seule vertu d’être là. Écoutons Baudelaire :
Le
monde va finir. La seule raison pour laquelle il pourrait durer, c’es
5414
tre là. Écoutons Baudelaire : Le monde va finir.
La
seule raison pour laquelle il pourrait durer, c’est qu’il existe. Que
5415
st faible, comparée à toutes celles qui annoncent
le
contraire, particulièrement à celle-ci : qu’est-ce que le monde a dés
5416
aire, particulièrement à celle-ci : qu’est-ce que
le
monde a désormais à faire sous le ciel ? Dans les partis, tout peut
5417
: qu’est-ce que le monde a désormais à faire sous
le
ciel ? Dans les partis, tout peut changer. Certains, disait Emmanuel
5418
le monde a désormais à faire sous le ciel ? Dans
les
partis, tout peut changer. Certains, disait Emmanuel Berl « peuvent e
5419
n toutes classes sociales et toutes classes d’âge
la
mobilisation de plus en plus fréquente d’activistes nombreux et motiv
5420
e d’activistes nombreux et motivés luttant contre
la
pollution sous toutes ses formes, des emballages plastiques aux déche
5421
hets plutoniens. À partir de là, tout s’enchaîne.
L’
analyse des causes de la pollution et du système de ces causes conduit
5422
r de là, tout s’enchaîne. L’analyse des causes de
la
pollution et du système de ces causes conduit, au-delà des déductions
5423
uses conduit, au-delà des déductions critiques, à
l’
escalade lente et sûre des innovations attendues et des rénovations so
5424
ces pages, et qui vont des petites communautés à
la
fédération du continent, première base d’un ordre mondial. Déjà, lors
5425
al. Déjà, lors d’élections locales ou nationales,
les
candidats bénéficiant de l’appui des mouvements « écologiques » ont b
5426
cales ou nationales, les candidats bénéficiant de
l’
appui des mouvements « écologiques » ont battu les chevaux de retour d
5427
l’appui des mouvements « écologiques » ont battu
les
chevaux de retour des partis grâce aux quelques centaines de voix qui
5428
âce aux quelques centaines de voix qui font toute
la
différence. Déjà, un régime scandinave vient de se voir renversé aprè
5429
confondre progrès social et centrales nucléaires.
La
vertu des gouvernements, même s’ils sont au service des marchands d’a
5430
favorables ? — Des milliers de mouvements sont à
l’
œuvre. Au premier rang, ceux des écologistes. On leur dispute ce nom,
5431
écologistes. On leur dispute ce nom, ils assurent
la
fonction. Et bien plus, par leurs luttes contre la pollution et les c
5432
a fonction. Et bien plus, par leurs luttes contre
la
pollution et les centrales nucléaires, ils ont fourni à la révolution
5433
ien plus, par leurs luttes contre la pollution et
les
centrales nucléaires, ils ont fourni à la révolution régionaliste le
5434
ion et les centrales nucléaires, ils ont fourni à
la
révolution régionaliste le levier politique qui avait fait défaut aux
5435
ires, ils ont fourni à la révolution régionaliste
le
levier politique qui avait fait défaut aux mouvements personnalistes
5436
uis aux fédéralistes européens ou mondialistes de
l’
après-guerre. Je vois des signes. L’évolution de la TV reproduit le ph
5437
ndialistes de l’après-guerre. Je vois des signes.
L’
évolution de la TV reproduit le phénomène dialectique des régions fédé
5438
’après-guerre. Je vois des signes. L’évolution de
la
TV reproduit le phénomène dialectique des régions fédérées s’opposant
5439
e vois des signes. L’évolution de la TV reproduit
le
phénomène dialectique des régions fédérées s’opposant aux États-natio
5440
régions fédérées s’opposant aux États-nations par
l’
intérieur et par l’extérieur. La formule des circuits fermés favorise
5441
opposant aux États-nations par l’intérieur et par
l’
extérieur. La formule des circuits fermés favorise les communautés loc
5442
États-nations par l’intérieur et par l’extérieur.
La
formule des circuits fermés favorise les communautés locales, tandis
5443
xtérieur. La formule des circuits fermés favorise
les
communautés locales, tandis que les relais par satellites permettent
5444
rmés favorise les communautés locales, tandis que
les
relais par satellites permettent une communication mondiale : dans le
5445
ites permettent une communication mondiale : dans
les
deux cas on échappe aux contrôles de l’État-nation, dont les monopole
5446
e : dans les deux cas on échappe aux contrôles de
l’
État-nation, dont les monopoles classiques se trouvent débordés et vid
5447
s on échappe aux contrôles de l’État-nation, dont
les
monopoles classiques se trouvent débordés et vidés tant par en bas (q
5448
des économistes comme E. F. Schumacher, pour qui
l’
avenir est aux « petites unités intelligibles » ; des politologues com
5449
es » ; des politologues comme C. N. Parkinson (de
la
loi du même nom), pour qui l’Europe de demain ne sera viable que si e
5450
C. N. Parkinson (de la loi du même nom), pour qui
l’
Europe de demain ne sera viable que si elle se recompose sur la base d
5451
emain ne sera viable que si elle se recompose sur
la
base de quelque 140 régions autonomes, dont il dresse la carte. Je vo
5452
de quelque 140 régions autonomes, dont il dresse
la
carte. Je vois des architectes comme Doxiadis, qui écrit : « L’expéri
5453
ois des architectes comme Doxiadis, qui écrit : «
L’
expérience nous apprend que seules des unités de dimensions restreinte
5454
onise au surplus de « petites cellules urbaines à
l’
échelle humaine », d’ampleur limitée à 50 000 habitants75 ; enfin des
5455
remplacés par une « communauté plus effective »,
l’
Europe des régions. — L’avenir serait donc à l’Europe des régions ?
5456
nauté plus effective », l’Europe des régions. —
L’
avenir serait donc à l’Europe des régions ? — Sans aucun doute, si les
5457
l’Europe des régions. — L’avenir serait donc à
l’
Europe des régions ? — Sans aucun doute, si les vues justes nous condu
5458
c à l’Europe des régions ? — Sans aucun doute, si
les
vues justes nous conduisaient. Mais depuis dix-mille ans qu’il y a de
5459
mes à Histoire, et qui n’ont pas trouvé mieux que
la
guerre pour résoudre leurs différends, on ne voit pas ce qui pourrait
5460
férends, on ne voit pas ce qui pourrait justifier
l’
espoir fou qu’ils deviennent raisonnables dans les dix ou quinze ans p
5461
l’espoir fou qu’ils deviennent raisonnables dans
les
dix ou quinze ans prochains — et nous n’avons guère plus de temps pou
5462
nous n’avons guère plus de temps pour décider de
la
survie de notre espèce. — Seriez-vous radicalement pessimiste ? —
5463
s faire quelque chose, quel qu’en soit d’ailleurs
le
succès ! Attitude qui n’est pas différente de celle que j’annonçais d
5464
te de celle que j’annonçais dans ma jeunesse sous
le
titre de « politique du pessimisme actif »76, prenant ma devise au Ta
5465
sme actif »76, prenant ma devise au Taciturne. Si
l’
on me suivait, bien sûr, tout irait mieux, ou éviterait au moins le pi
5466
bien sûr, tout irait mieux, ou éviterait au moins
le
pire, mais je sais bien que vous ne me suivrez pas — pas assez tôt et
5467
assez tôt et pas en nombre suffisant. Il reste à
la
réalité de vous imposer ce que le bon sens jamais n’aura pu faire, et
5468
ant. Il reste à la réalité de vous imposer ce que
le
bon sens jamais n’aura pu faire, et c’est la réalité elle-même qui va
5469
que le bon sens jamais n’aura pu faire, et c’est
la
réalité elle-même qui va recourir à la pédagogie des catastrophes. Je
5470
, et c’est la réalité elle-même qui va recourir à
la
pédagogie des catastrophes. Je ne vois rien de plus probable. Je ne p
5471
ients. Si elles sont assez grandes pour réveiller
le
monde, pas assez pour tout écraser, je les dirai pédagogiques, seules
5472
veiller le monde, pas assez pour tout écraser, je
les
dirai pédagogiques, seules capables de surmonter notre inertie et l’i
5473
es, seules capables de surmonter notre inertie et
l’
invincible propension des chroniqueurs à taxer de « psychose d’Apocaly
5474
disais cela dans mon jardin du pays de Gex devant
la
caméra de la TV française, dans l’après-midi lumineux du 24 août 1973
5475
ans mon jardin du pays de Gex devant la caméra de
la
TV française, dans l’après-midi lumineux du 24 août 1973, et donnais
5476
de Gex devant la caméra de la TV française, dans
l’
après-midi lumineux du 24 août 1973, et donnais pour exemple la crise
5477
lumineux du 24 août 1973, et donnais pour exemple
la
crise énergétique, industrielle et monétaire où cinq ou six émirs de
5478
que nous chantions. Quelques semaines plus tard,
la
guerre du Kippour fournissait un prétexte à la « crise du pétrole »,
5479
d, la guerre du Kippour fournissait un prétexte à
la
« crise du pétrole », m’obligeant à jeter au panier, pour cause de co
5480
e centaine de pages destinées à ce livre, et dont
le
ton prophétique eût paru plutôt ridicule après coup. Tout le monde au
5481
savoir ce que je découvrais et croyais révéler :
les
ressources limitées, les besoins infinis, les centrales nucléaires qu
5482
ais et croyais révéler : les ressources limitées,
les
besoins infinis, les centrales nucléaires qui vont arranger cela et q
5483
r : les ressources limitées, les besoins infinis,
les
centrales nucléaires qui vont arranger cela et qu’on dit au surplus t
5484
… Mais comme tout le monde déjà oublie sa peur et
la
sagesse qu’il en tira pour quelques semaines, de nouvelles catastroph
5485
ines, de nouvelles catastrophes s’organisent dans
l’
ombre : « excursions » nucléaires, déchaînements criminels, répression
5486
baleines, des éléphants, des phoques, et de tous
les
fauves à fourrure, chantages à la bombe bricolée exigeant les bijoux
5487
es, et de tous les fauves à fourrure, chantages à
la
bombe bricolée exigeant les bijoux de la couronne, la tête d’un chef
5488
fourrure, chantages à la bombe bricolée exigeant
les
bijoux de la couronne, la tête d’un chef d’État ou autrement c’est Ma
5489
ntages à la bombe bricolée exigeant les bijoux de
la
couronne, la tête d’un chef d’État ou autrement c’est Manhattan, Mosc
5490
ombe bricolée exigeant les bijoux de la couronne,
la
tête d’un chef d’État ou autrement c’est Manhattan, Moscou, Paris ras
5491
trement c’est Manhattan, Moscou, Paris rasés dans
l’
heure… Quelqu’un d’autre l’avait déjà dit, c’était Saint-Just, au cœur
5492
scou, Paris rasés dans l’heure… Quelqu’un d’autre
l’
avait déjà dit, c’était Saint-Just, au cœur de la Révolution : Il fau
5493
l’avait déjà dit, c’était Saint-Just, au cœur de
la
Révolution : Il faut attendre un mal général assez grand pour que l’
5494
faut attendre un mal général assez grand pour que
l’
opinion générale éprouve le besoin de mesures propres à faire le bien.
5495
l assez grand pour que l’opinion générale éprouve
le
besoin de mesures propres à faire le bien. Saint-Just ajoutait : Ce
5496
rale éprouve le besoin de mesures propres à faire
le
bien. Saint-Just ajoutait : Ce qui produit le bien général est touj
5497
e le bien. Saint-Just ajoutait : Ce qui produit
le
bien général est toujours terrible, ou paraît bizarre lorsque l’on co
5498
est toujours terrible, ou paraît bizarre lorsque
l’
on commence trop tôt. Mais je ne vois pas ce qu’il serait possible, a
5499
cinq siècles exactement (1300-1800) pour préparer
l’
État-nation, moins d’un siècle pour en imposer le modèle à toute l’Eur
5500
l’État-nation, moins d’un siècle pour en imposer
le
modèle à toute l’Europe, et trente ans pour le propager au monde enti
5501
ins d’un siècle pour en imposer le modèle à toute
l’
Europe, et trente ans pour le propager au monde entier. Mais depuis qu
5502
er le modèle à toute l’Europe, et trente ans pour
le
propager au monde entier. Mais depuis qu’il sévit, à cause de lui, to
5503
qu’il sévit, à cause de lui, tout s’accélère vers
le
pire. D’où non seulement l’urgence accrue d’un changement de cap, mai
5504
tout s’accélère vers le pire. D’où non seulement
l’
urgence accrue d’un changement de cap, mais une plus grande lisibilité
5505
gement de cap, mais une plus grande lisibilité de
l’
évolution, qui peut faciliter ce changement. Les catastrophes n’appren
5506
de l’évolution, qui peut faciliter ce changement.
Les
catastrophes n’apprendront rien à ceux qui n’ont pas vu où il faut al
5507
s vu où il faut aller, et donc n’en cherchent pas
les
voies et ne les inventeront jamais. « Pas de vent favorable pour qui
5508
aller, et donc n’en cherchent pas les voies et ne
les
inventeront jamais. « Pas de vent favorable pour qui ne sait pas où i
5509
t souffle, même contraire. Tirer des bords contre
le
vent de l’Histoire et de la guerre : formule de nos efforts actuels e
5510
même contraire. Tirer des bords contre le vent de
l’
Histoire et de la guerre : formule de nos efforts actuels et prochains
5511
irer des bords contre le vent de l’Histoire et de
la
guerre : formule de nos efforts actuels et prochains. Et peu m’import
5512
uels et prochains. Et peu m’importe de prévoir si
la
gauche ou la droite vont l’emporter — de toute façon, ce sera tout au
5513
ains. Et peu m’importe de prévoir si la gauche ou
la
droite vont l’emporter — de toute façon, ce sera tout autre chose — c
5514
importe de prévoir si la gauche ou la droite vont
l’
emporter — de toute façon, ce sera tout autre chose — car je n’écris c
5515
i B, mais incite à trouver des chemins vers V, je
la
vois déjà formulée par Héraclite au siècle d’or de Delphes, de la Pyt
5516
mulée par Héraclite au siècle d’or de Delphes, de
la
Pythie et de la naissance des cités grecques : Le maître de la Pythie
5517
ite au siècle d’or de Delphes, de la Pythie et de
la
naissance des cités grecques : Le maître de la Pythie ne veut ni préd
5518
la Pythie et de la naissance des cités grecques :
Le
maître de la Pythie ne veut ni prédire ni cacher, mais il indique sa
5519
prédire ni cacher, mais il indique sa volonté et
la
vraie Voie. « Sentinelle, que dis-tu de la nuit ? » Il y a quelques a
5520
nté et la vraie Voie. « Sentinelle, que dis-tu de
la
nuit ? » Il y a quelques années, ayant écrit que l’action politique p
5521
nuit ? » Il y a quelques années, ayant écrit que
l’
action politique par excellence allait consister désormais à prendre d
5522
désormais à prendre des mesures conservatoires de
l’
Humain, quelqu’un demanda : — « Pourquoi voulez-vous donc que ça dure
5523
et qu’on ne peut simplement écarter. Je veux que
l’
homme dure à cause de l’espérance. À quoi s’ajoute un raisonnable espo
5524
ment écarter. Je veux que l’homme dure à cause de
l’
espérance. À quoi s’ajoute un raisonnable espoir. La fin de l’homme, t
5525
espérance. À quoi s’ajoute un raisonnable espoir.
La
fin de l’homme, tout à l’heure, serait au moins prématurée. Nous voyo
5526
À quoi s’ajoute un raisonnable espoir. La fin de
l’
homme, tout à l’heure, serait au moins prématurée. Nous voyons aujourd
5527
un raisonnable espoir. La fin de l’homme, tout à
l’
heure, serait au moins prématurée. Nous voyons aujourd’hui certaines c
5528
s voyons aujourd’hui certaines causes du péril où
l’
humain risque de s’anéantir, et nous disons : — ce serait trop bête !
5529
: — ce serait trop bête ! Nous venons d’entrevoir
la
guérison possible. Nous avons les moyens de sauver « l’environnement
5530
nons d’entrevoir la guérison possible. Nous avons
les
moyens de sauver « l’environnement » — la Nature et nos habitants — i
5531
rison possible. Nous avons les moyens de sauver «
l’
environnement » — la Nature et nos habitants — in extremis. Mais que s
5532
avons les moyens de sauver « l’environnement » —
la
Nature et nos habitants — in extremis. Mais que serait la beauté du M
5533
e et nos habitants — in extremis. Mais que serait
la
beauté du Monde sans l’œil de l’homme ? C’était si beau, la Terre de
5534
extremis. Mais que serait la beauté du Monde sans
l’
œil de l’homme ? C’était si beau, la Terre de la Vie, bleue, verte et
5535
Mais que serait la beauté du Monde sans l’œil de
l’
homme ? C’était si beau, la Terre de la Vie, bleue, verte et blanche d
5536
du Monde sans l’œil de l’homme ? C’était si beau,
la
Terre de la Vie, bleue, verte et blanche dans le noir éternel… Mais s
5537
s l’œil de l’homme ? C’était si beau, la Terre de
la
Vie, bleue, verte et blanche dans le noir éternel… Mais sauver le pay
5538
la Terre de la Vie, bleue, verte et blanche dans
le
noir éternel… Mais sauver le paysage et les décors n’aura plus de sen
5539
erte et blanche dans le noir éternel… Mais sauver
le
paysage et les décors n’aura plus de sens si nous ne sommes plus là,
5540
e dans le noir éternel… Mais sauver le paysage et
les
décors n’aura plus de sens si nous ne sommes plus là, ou ce qui revie
5541
’autre peut-il arriver ? Et venant d’où ? (À part
les
tremblements de terre.) Il nous faut donc vouloir que le meilleur gag
5542
blements de terre.) Il nous faut donc vouloir que
le
meilleur gagne — en nous. Et il nous faut d’abord nous le représenter
5543
eur gagne — en nous. Et il nous faut d’abord nous
le
représenter, nous le rendre présent, l’anticiper. On peut anticiper l
5544
Et il nous faut d’abord nous le représenter, nous
le
rendre présent, l’anticiper. On peut anticiper l’avenir et le prévoir
5545
bord nous le représenter, nous le rendre présent,
l’
anticiper. On peut anticiper l’avenir et le prévoir par les yeux de la
5546
le rendre présent, l’anticiper. On peut anticiper
l’
avenir et le prévoir par les yeux de la foi, « substance des choses es
5547
ésent, l’anticiper. On peut anticiper l’avenir et
le
prévoir par les yeux de la foi, « substance des choses espérées, ferm
5548
per. On peut anticiper l’avenir et le prévoir par
les
yeux de la foi, « substance des choses espérées, ferme assurance de c
5549
anticiper l’avenir et le prévoir par les yeux de
la
foi, « substance des choses espérées, ferme assurance de celles qu’on
5550
e assurance de celles qu’on ne voit pas ». Mais à
l’
aide d’appareils scientifiques, on ne peut voir que du passé, des fait
5551
ces réalités et leur donnent vie dans notre vie,
les
réalisent. Désirer le meilleur en nous et par la force du désir, le d
5552
onnent vie dans notre vie, les réalisent. Désirer
le
meilleur en nous et par la force du désir, le devenir, c’est anticipe
5553
les réalisent. Désirer le meilleur en nous et par
la
force du désir, le devenir, c’est anticiper notre avenir, mieux : c’e
5554
rer le meilleur en nous et par la force du désir,
le
devenir, c’est anticiper notre avenir, mieux : c’est le faire. La d
5555
enir, c’est anticiper notre avenir, mieux : c’est
le
faire. La décadence d’une société commence quand l’homme se demande
5556
anticiper notre avenir, mieux : c’est le faire.
La
décadence d’une société commence quand l’homme se demande : « Que va-
5557
aire. La décadence d’une société commence quand
l’
homme se demande : « Que va-t-il arriver ? » au lieu de se demander :
5558
meilleurs, obéissant mieux à notre vocation dans
la
cité. Hors de là point de communauté, ni donc de régions, ni d’Europe
5559
ix, ni de futur, à vues humaines. J’ai voulu dire
l’
avenir inscrit en nous, — non certes dans nos chromosomes : n’allons p
5560
’allons pas nous cacher une fois de plus derrière
les
arbres, aux forêts du passé profond ! — mais dans nos attitudes prése
5561
à vous convertir, à faire votre révolution, c’est
le
même mot. Je ne vais pas vous demander de devenir tous des saints. (P
5562
de devenir tous des saints. (Pourtant, ce serait
la
solution.) Je ne vais pas vous dire : — Aimez-vous ! (même remarque).
5563
seulement : — Remplacez ce système qui multiplie
les
occasions de haine par un autre qui favorise et qui appelle la solida
5564
de haine par un autre qui favorise et qui appelle
la
solidarité. Or ce changement n’adviendra pas dans le réseau des relat
5565
solidarité. Or ce changement n’adviendra pas dans
le
réseau des relations humaines, dans la cité, s’il ne s’est opéré d’ab
5566
a pas dans le réseau des relations humaines, dans
la
cité, s’il ne s’est opéré d’abord en vous. Si vous voulez changer l’a
5567
est opéré d’abord en vous. Si vous voulez changer
l’
avenir, changez vous-mêmes. Et c’est pourquoi la Sentinelle de Juda, l
5568
r l’avenir, changez vous-mêmes. Et c’est pourquoi
la
Sentinelle de Juda, le grand prophète, interrogé sur l’avenir par la
5569
s-mêmes. Et c’est pourquoi la Sentinelle de Juda,
le
grand prophète, interrogé sur l’avenir par la voix de l’angoisse huma
5570
tinelle de Juda, le grand prophète, interrogé sur
l’
avenir par la voix de l’angoisse humaine dit seulement : Convertissez-
5571
da, le grand prophète, interrogé sur l’avenir par
la
voix de l’angoisse humaine dit seulement : Convertissez-vous ! Le mot
5572
d prophète, interrogé sur l’avenir par la voix de
l’
angoisse humaine dit seulement : Convertissez-vous ! Le mot doit être
5573
oisse humaine dit seulement : Convertissez-vous !
Le
mot doit être ici reçu dans toute sa force et dans la plénitude de so
5574
ot doit être ici reçu dans toute sa force et dans
la
plénitude de son sens. (Qui n’est pas limité à « devenez chrétiens !
5575
s ! ». Isaïe n’était pas chrétien.) Dira-t-on que
l’
on peut partager telles idées sur les méfaits des centrales nucléaires
5576
Dira-t-on que l’on peut partager telles idées sur
les
méfaits des centrales nucléaires et les bienfaits de la communauté, d
5577
idées sur les méfaits des centrales nucléaires et
les
bienfaits de la communauté, donc des régions, sans adopter l’attitude
5578
aits des centrales nucléaires et les bienfaits de
la
communauté, donc des régions, sans adopter l’attitude religieuse que
5579
de la communauté, donc des régions, sans adopter
l’
attitude religieuse que suggère malgré tout le terme de conversion ? O
5580
ter l’attitude religieuse que suggère malgré tout
le
terme de conversion ? Ou que la religion n’a rien à voir avec tel mod
5581
ggère malgré tout le terme de conversion ? Ou que
la
religion n’a rien à voir avec tel mode de pollution ou de production
5582
ion ou de production d’énergie ? Je répondrai que
les
régions, la pollution, l’énergie nucléaire ont valeur symbolique en t
5583
duction d’énergie ? Je répondrai que les régions,
la
pollution, l’énergie nucléaire ont valeur symbolique en tant que nœud
5584
gie ? Je répondrai que les régions, la pollution,
l’
énergie nucléaire ont valeur symbolique en tant que nœuds de problèmes
5585
ons métaphysiques et religieuses quant au rôle de
l’
homme sur la Terre et quant à ses options de base : la puissance ou la
5586
iques et religieuses quant au rôle de l’homme sur
la
Terre et quant à ses options de base : la puissance ou la liberté. Fa
5587
mme sur la Terre et quant à ses options de base :
la
puissance ou la liberté. Faire des régions et recréer ainsi des possi
5588
et quant à ses options de base : la puissance ou
la
liberté. Faire des régions et recréer ainsi des possibilités de commu
5589
t recréer ainsi des possibilités de communauté où
la
personne ait liberté de découvrir et d’exercer sa vocation ; du même
5590
et d’exercer sa vocation ; du même coup, prévenir
la
guerre nucléaire (les unités de base simplement n’atteignant pas la m
5591
ion ; du même coup, prévenir la guerre nucléaire (
les
unités de base simplement n’atteignant pas la masse critique) ce n’es
5592
e (les unités de base simplement n’atteignant pas
la
masse critique) ce n’est rien de moins que se tourner vers des finali
5593
inalités de liberté, rien de moins que renoncer à
la
puissance sur autrui. Et c’est littéralement se convertir. Tous les p
5594
autrui. Et c’est littéralement se convertir. Tous
les
prophètes condamnent la volonté de puissance, qu’ils assimilent à l’i
5595
ement se convertir. Tous les prophètes condamnent
la
volonté de puissance, qu’ils assimilent à l’invocation des faux dieux
5596
nent la volonté de puissance, qu’ils assimilent à
l’
invocation des faux dieux. Pour les évangiles, la puissance est la plu
5597
ls assimilent à l’invocation des faux dieux. Pour
les
évangiles, la puissance est la plus grande des tentations que le diab
5598
l’invocation des faux dieux. Pour les évangiles,
la
puissance est la plus grande des tentations que le diable dresse au d
5599
faux dieux. Pour les évangiles, la puissance est
la
plus grande des tentations que le diable dresse au désert devant Jésu
5600
a puissance est la plus grande des tentations que
le
diable dresse au désert devant Jésus. Toute la Bible exalte en revanc
5601
ue le diable dresse au désert devant Jésus. Toute
la
Bible exalte en revanche « la liberté des enfants de Dieu ». Si l’on
5602
devant Jésus. Toute la Bible exalte en revanche «
la
liberté des enfants de Dieu ». Si l’on exclut de la « sphère du relig
5603
n revanche « la liberté des enfants de Dieu ». Si
l’
on exclut de la « sphère du religieux » le drame de l’humanité menacée
5604
liberté des enfants de Dieu ». Si l’on exclut de
la
« sphère du religieux » le drame de l’humanité menacée par ses propre
5605
u ». Si l’on exclut de la « sphère du religieux »
le
drame de l’humanité menacée par ses propres erreurs et menaçant du mê
5606
exclut de la « sphère du religieux » le drame de
l’
humanité menacée par ses propres erreurs et menaçant du même coup la N
5607
par ses propres erreurs et menaçant du même coup
la
Nature ; si l’on remplace l’amour par l’efficacité — dont la mesure e
5608
s erreurs et menaçant du même coup la Nature ; si
l’
on remplace l’amour par l’efficacité — dont la mesure est la puissance
5609
enaçant du même coup la Nature ; si l’on remplace
l’
amour par l’efficacité — dont la mesure est la puissance militaire, pu
5610
ême coup la Nature ; si l’on remplace l’amour par
l’
efficacité — dont la mesure est la puissance militaire, puissance de t
5611
si l’on remplace l’amour par l’efficacité — dont
la
mesure est la puissance militaire, puissance de tuer ; si l’on ne veu
5612
ace l’amour par l’efficacité — dont la mesure est
la
puissance militaire, puissance de tuer ; si l’on ne veut plus tirer s
5613
st la puissance militaire, puissance de tuer ; si
l’
on ne veut plus tirer son énergie de soi-même mais seulement de la dés
5614
s tirer son énergie de soi-même mais seulement de
la
désintégration d’un peu de matière, que reste-t-il dans la « sphère d
5615
égration d’un peu de matière, que reste-t-il dans
la
« sphère du religieux » ? La casuistique ? Mais à l’inverse, si l’on
5616
que reste-t-il dans la « sphère du religieux » ?
La
casuistique ? Mais à l’inverse, si l’on exclut de notre drame l’irréd
5617
« sphère du religieux » ? La casuistique ? Mais à
l’
inverse, si l’on exclut de notre drame l’irréductible spirituel, comme
5618
ligieux » ? La casuistique ? Mais à l’inverse, si
l’
on exclut de notre drame l’irréductible spirituel, comment fonder l’ob
5619
? Mais à l’inverse, si l’on exclut de notre drame
l’
irréductible spirituel, comment fonder l’objection de la personne, au
5620
re drame l’irréductible spirituel, comment fonder
l’
objection de la personne, au nom de quoi refuser le verdict de la Rais
5621
ductible spirituel, comment fonder l’objection de
la
personne, au nom de quoi refuser le verdict de la Raison d’État, quan
5622
’objection de la personne, au nom de quoi refuser
le
verdict de la Raison d’État, quand il tombe de l’ordinateur bien prog
5623
la personne, au nom de quoi refuser le verdict de
la
Raison d’État, quand il tombe de l’ordinateur bien programmé ? Puissa
5624
le verdict de la Raison d’État, quand il tombe de
l’
ordinateur bien programmé ? Puissance ou Liberté, qui tranchera ? Entr
5625
mmé ? Puissance ou Liberté, qui tranchera ? Entre
le
besoin de sécurité à tout prix et la soif de liberté à tous risques,
5626
hera ? Entre le besoin de sécurité à tout prix et
la
soif de liberté à tous risques, le choix de l’espèce sera fonction de
5627
à tout prix et la soif de liberté à tous risques,
le
choix de l’espèce sera fonction de la chose la moins prévisible du mo
5628
et la soif de liberté à tous risques, le choix de
l’
espèce sera fonction de la chose la moins prévisible du monde, qui est
5629
us risques, le choix de l’espèce sera fonction de
la
chose la moins prévisible du monde, qui est la vitalité d’une société
5630
s, le choix de l’espèce sera fonction de la chose
la
moins prévisible du monde, qui est la vitalité d’une société. Mais il
5631
de la chose la moins prévisible du monde, qui est
la
vitalité d’une société. Mais il nous faut pousser l’analyse sur nous-
5632
vitalité d’une société. Mais il nous faut pousser
l’
analyse sur nous-mêmes : que choisissons-nous réellement ? Au niveau d
5633
s États-nations tout est joué, tout est perdu. On
le
sait dans les hautes sphères du Pouvoir. Chacun, pour se sauver en ta
5634
ns tout est joué, tout est perdu. On le sait dans
les
hautes sphères du Pouvoir. Chacun, pour se sauver en tant que nation,
5635
pour se sauver en tant que nation, vend ou achète
les
armes de la fin, et se précipite vers l’holocauste général avec une t
5636
r en tant que nation, vend ou achète les armes de
la
fin, et se précipite vers l’holocauste général avec une très grande e
5637
achète les armes de la fin, et se précipite vers
l’
holocauste général avec une très grande et très profonde stupidité, qu
5638
des éthologistes à penser que se manifeste, dans
l’
humanité d’aujourd’hui, une tendance suicidaire assez puissante. Alors
5639
buts, ordonnons nos moyens à ces buts — recréons
la
communauté ! Ce ne sera pas encore la fin de la peine des hommes, la
5640
— recréons la communauté ! Ce ne sera pas encore
la
fin de la peine des hommes, la vie sans poids. Pas encore le Jour éte
5641
s la communauté ! Ce ne sera pas encore la fin de
la
peine des hommes, la vie sans poids. Pas encore le Jour éternel. Mais
5642
ne sera pas encore la fin de la peine des hommes,
la
vie sans poids. Pas encore le Jour éternel. Mais quelque chose comme
5643
a peine des hommes, la vie sans poids. Pas encore
le
Jour éternel. Mais quelque chose comme le miracle du réveil après le
5644
encore le Jour éternel. Mais quelque chose comme
le
miracle du réveil après le cauchemar où l’on hurlait seul, sans écho,
5645
is quelque chose comme le miracle du réveil après
le
cauchemar où l’on hurlait seul, sans écho, devant l’indicible injusti
5646
comme le miracle du réveil après le cauchemar où
l’
on hurlait seul, sans écho, devant l’indicible injustice de l’écraseme
5647
cauchemar où l’on hurlait seul, sans écho, devant
l’
indicible injustice de l’écrasement imminent. Comme la permission de v
5648
seul, sans écho, devant l’indicible injustice de
l’
écrasement imminent. Comme la permission de vivre encore de nouveaux j
5649
dicible injustice de l’écrasement imminent. Comme
la
permission de vivre encore de nouveaux jours, de nouvelles nuits auss
5650
irer son espoir et sa résolution. Et ce n’est pas
la
promesse d’une fin de l’Histoire mais d’une rénovation de l’aventure
5651
olution. Et ce n’est pas la promesse d’une fin de
l’
Histoire mais d’une rénovation de l’aventure d’être homme, si elle pre
5652
d’une fin de l’Histoire mais d’une rénovation de
l’
aventure d’être homme, si elle prend naissance dans notre cœur. Écou
5653
naissance dans notre cœur. Écoutons maintenant
le
cri sublime. De Séir, une voix crie au prophète : — Sentinelle, qu
5654
ix crie au prophète : — Sentinelle, que dis-tu de
la
nuit ? Sentinelle, que dis-tu de la nuit ? La sentinelle a répondu :
5655
que dis-tu de la nuit ? Sentinelle, que dis-tu de
la
nuit ? La sentinelle a répondu : — Le matin vient, et la nuit aussi.
5656
de la nuit ? Sentinelle, que dis-tu de la nuit ?
La
sentinelle a répondu : — Le matin vient, et la nuit aussi. Si vous vo
5657
e dis-tu de la nuit ? La sentinelle a répondu : —
Le
matin vient, et la nuit aussi. Si vous voulez interroger, interrogez
5658
? La sentinelle a répondu : — Le matin vient, et
la
nuit aussi. Si vous voulez interroger, interrogez ! Convertissez-vous
5659
Convertissez-vous et revenez ! 74. Interview à
la
TV française, avril 1973. 75. Constantin Doxiadis, « Œcumenopolis ou
5660
1973. 75. Constantin Doxiadis, « Œcumenopolis ou
la
forêt dans la ville », Preuves , Paris, n° 8, 1971. 76. Politique
5661
stantin Doxiadis, « Œcumenopolis ou la forêt dans
la
ville », Preuves , Paris, n° 8, 1971. 76. Politique de la personn
5662
Preuves , Paris, n° 8, 1971. 76. Politique de
la
personne , Paris, 1934. ad. Rougemont Denis de, « Pédagogie des cat
5663
. Une note précise : « Ces quelques pages forment
la
conclusion du livre à paraître chez Stock sous le titre L’Avenir est
5664
la conclusion du livre à paraître chez Stock sous
le
titre L’Avenir est notre affaire . »
5665
ion du livre à paraître chez Stock sous le titre
L’
Avenir est notre affaire . »