1 1928, Foi et Vie, articles (1928–1977). Le péril Ford (février 1928)
1 hines couvre déjà la plainte humaine. Il y a ceux qui pleurent le passé et ceux qui prophétisent, ceux qui jettent une impr
2 umaine. Il y a ceux qui pleurent le passé et ceux qui prophétisent, ceux qui jettent une imprécation stérile et magnifique
3 pleurent le passé et ceux qui prophétisent, ceux qui jettent une imprécation stérile et magnifique contre l’époque et ceux
4 ion stérile et magnifique contre l’époque et ceux qui cherchent à l’oublier dans le rêve, dans l’utopie, dans une belle doc
5 our de nous et d’en croire nos yeux. I. L’homme qui a réussi Je prends Henry Ford comme un symbole du monde moderne, e
6 aire, il a résolu la question sociale d’une façon qui ne devrait pas déplaire aux doctrinaires de gauche, lesquels ont cout
7 mondiale des « idées » d’Henry Ford et des livres qui les répandent. L’on ne pourra qu’y applaudir, semble-t-il, en souhait
8 de la juger. Le héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la plus grave question qu’on puisse pos
9 I. M. Ford a ses idées, ou la philosophie de ceux qui n’en veulent pas Nous avons dit tout à l’heure quel fut le but de
10 elui du consommateur. Prenons cette petite phrase qui n’a l’air de rien : « Nul ne contestera que, si l’on abaisse suffisam
11 s. J’y vois la réalisation concrète d’une théorie qui tend à faire de ce monde un séjour meilleur pour les hommes. » C’est
12 vers la production matérielle et vers la richesse qui en est le fruit. On ne saurait mieux dire. Mais il faudrait en tirer
13 triomphe est facile. C’est le technicien parfait qui combat les techniciens imparfaits. Il ne se demande jamais si la tech
14 xes plus ou moins intéressés, optimisme d’homme à qui tout réussit, messianisme de la machine, méconnaissance glorieuse des
15 ut agrémenté d’humour et exposé avec un simplisme qui emporte à coup sûr l’adhésion du gros public : telle est l’idéologie
16 rait appeler le plus actif du monde, l’un de ceux qui influent le plus sur notre civilisation, possède la philosophie la pl
17 il est ici tragiquement aigu. Est-ce notre pensée qui , à force de subtiliser, est devenue trop faible pour nous conduire ?
18 pour nous conduire ? Ou bien est-ce notre action qui est devenue trop effrénée, trop folle, pour être justiciable encore d
19 de l’Esprit. C’est déjà un fait d’expérience. Et qui n’en pourrait citer un exemple individuel ? Nous savons assez en quel
20 prière. Cela s’appelle encore vivre. Mais l’homme qui était un membre vivant dans le corps de la Nature, lié par les liens
21 donne donc la place, mais c’est pourtant lui seul qui nous permettrait de jouir de notre liberté. La victoire mécanicienne
22 ant, par l’effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter l’esprit, et ses conditions. Je
23 ne. Ces êtres, d’une espèce de plus en plus rare, qui savent encore quelque chose de la vie profonde, qui voient encore des
24 i savent encore quelque chose de la vie profonde, qui voient encore des vérités invisibles, qui gardent, par quelle grâce ?
25 ofonde, qui voient encore des vérités invisibles, qui gardent, par quelle grâce ? un peu de cette connaissance active de Di
26 ⁂ Je ne pense pas qu’une attitude réactionnaire qui consisterait à vouloir en revenir à la période préindustrielle soit a
2 1930, Foi et Vie, articles (1928–1977). « Pour un humanisme nouveau » [Réponse à une enquête] (1930)
27 ient à composer les deux périls en une résultante qui est la civilisation. Appelons humanisme l’art de composer pour la déf
28 it-elle songer à l’activité de cet espion anglais qui parvint durant la guerre à diriger le service de contre-espionnage al
29 e reste imprégnée. La science se moque des nuages qui animaient la matière d’intentions morales. Elle-même cependant est to
30 opies mêmes, desséchant les sources de notre foi. Qui parlait donc d’un « humanisme scientifique » ? Nous avons été pris de
31 -il d’enrayer la science ? Non, mais que l’esprit qui l’a créée, la surpasse7. Seul un parti pris constant en faveur de l’e
32 sinon par la rigueur au moins égale d’une pensée qui par ailleurs participe de la liberté : j’entends la pensée mystique.
33 té et de la grâce, ils échappent à cette fatalité qui est le signe du monde matériel. Je vois l’humanisme nouveau sous l’a
34 réhender la vie, de hiérarchiser nos entreprises, qui ne bannirait pas de l’existence la poésie, ce sens du Réel. Je vois s
35 assez aisé de prévoir et de décrire une tentation qui le guette et à laquelle tout humanisme paraît enclin : celle de créer
36 suffisant : qu’ils peuvent être atteints. Mais ce qui parfait la stature de l’homme, c’est l’effort pour se dépasser — indé
37 une direction : il y réussirait trop aisément. Ce qui manque à l’homme moderne, c’est un principe d’harmonie qui lui garant
38 e à l’homme moderne, c’est un principe d’harmonie qui lui garantisse le caractère « d’humanité » de ses démarches intellect
3 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). André Malraux, La Voie royale (février 1931)
39 ale 9, est, croyons-nous, le récit des événements qui précédèrent l’aventure chinoise de l’auteur. C’est un roman plus dépo
40 dépouillé, plus inégal aussi à certains égards et qui cette fois ne montre pas l’homme aux prises avec l’humanité civilisée
41 ourrait tirer un prix considérable. Sur le bateau qui l’amène à pied d’œuvre, il s’associe à un aventurier danois, Perken,
42 aventurier danois, Perken, personnage énigmatique qui possède une sorte de puissance militaire, sans doute irrégulière, dan
43 am, et auquel l’auteur prête des caractéristiques qui le rapprochent du Garine des Conquérants : « hostilité à l’égard des
44 dont l’objet demeure assez incertain. Ce mystère qui entoure Perken durant tout le récit, au travers des aventures des deu
45 à ces gens — on en rencontre dans les affaires — qui se donnent une espèce d’autorité en ne parlant jamais que par allusio
46 s et mots couverts. Il intimide un peu le lecteur qui ne se sent pas complice de ses secrets desseins. Au reste, le livre s
47 en a pas. Perken, comme Garine, est de ces êtres qui agissent par désespoir, parce que l’action, à tout prendre, est une d
48 ’absurdité de la vie ». L’agonie lente de Perken, qui est tombé sur les « pointes de guerre » empoisonnées des Moïs, est un
49 éclate douloureusement la révolte d’un être pour qui la mort ne peut être qu’une « défaite monstrueuse ». Ainsi les incide
50 e à vivre contre la mort, même fièvre de lucidité qui ne laisse subsister de tous les sentiments qu’une « fraternité désesp
51 t c’est sans doute le tempérament de leur auteur. Qui n’a pas remarqué que les portraits des meilleurs peintres ressemblent
52 ont tous les personnages peints par Rembrandt, et qui permet de les identifier au premier coup d’œil, ce « commun dénominat
53 de masques si dissemblables, n’est-ce point cela qui forme l’autoportrait le plus profondément ressemblant du maître ? Ain
54 ’un Perken, les traits d’une individualité morale qui n’est sans doute que l’idée la plus forte que M. Malraux se fait de l
55 n certain « homme moderne », — l’homme sans Dieu, qui n’attend rien que de cette vie, mais auquel cette vie même, en fin de
56 fuse de lui trouver un sens dans la mort. L’homme qui pourrait se définir : « Dieu n’est pas, donc je suis » ; l’homme seul
57 ne sais pas aujourd’hui le livre « bien pensant » qui pose avec une pareille acuité le problème central de notre civilisati
58 gueil de vivre, dénonce la paresse de la religion qui n’est qu’un refuge contre la vie. Elle nous amène à un point de jugem
4 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Sécularisme (mars 1931)
59 à donner une « importance » relative à des œuvres qui « signifient » plus qu’elles ne « sont ». L’on mesure ici l’écart d’a
60 ici l’écart d’avec la littérature d’avant-guerre, qui était avant tout un art. La nôtre ayant voix au forum discute autant
61 a société. Elle a l’absence de scrupules des gens qui ont une mission urgente à remplir. Ces quelques remarques nous placen
62 pective la plus équitable. C’est le type du livre qui vaut surtout par l’attitude qu’il manifeste et commente. Son sujet :
63 jeune normalien marxiste. Citons quelques phrases qui donneront le ton et les thèmes principaux : J’avais vingt ans. Je ne
64 it penser dividendes, impérialisme, plus-value. —  Qui donc nous aurait révélé de bonnes raisons brutales, de bonnes raisons
65 e se trouve « décantée jusqu’à l’essence, tout ce qui allongeait la sauce évaporé. Il demeure un résidu impitoyable, descri
66 se trouve « réduite à son état de pureté extrême qui est l’état économique ». Si les mœurs sont occidentales, les habitant
67 ces gens, si nombreux aujourd’hui (Freud, etc.), qui croient que le pire est toujours le plus vrai ; que la prose est plus
68 e en est à l’idéologie bourgeoise du xixe siècle qui consiste dans une large mesure à éviter d’appeler les choses par leur
69 e M. Nizan n’est pas de nous rendre le goût de ce qui , en Europe, « allongeait la solution », je ne puis m’empêcher de pens
70 ence de l’Europe, — « son état de pureté extrême, qui est l’économique » ? On reconnaît ici la thèse marxiste, dont le moin
71 ute réforme à une préalable révolution économique qui paraît de plus en plus impossible, car elle équivaudrait à une transf
72 ns avec une incroyable légèreté, — en littérateur qui cherche l’effet pittoresque. « Les curés de tous les dieux blancs se
73 glise, une prison. » Triste carence d’un jugement qui se prétend humain ! Pensez-y M. Nizan : quelle que soit la Tchéka rég
74 les églises que dans les prisons, — et des hommes qui viendront y trouver leur liberté. Mais pourquoi dira-t-on, s’arrêter
75 e les Anglais appellent « sécularisme ». Ce terme qui sans doute reviendra souvent dans les chroniques de Foi et Vie , « r
76 sation moderne à l’égard de toute autorité divine qui est le trait dominant de notre époque » — pour reprendre la définitio
77 il nous interdira formellement de procéder en ce qui le concerne lui-même, à des analyses ou à des réductions du même ordr
78 t en même temps il se réclame d’un Esprit éternel qui cependant est né et dont on ne saurait prévoir les avatars. Tout cela
79 rouve mis en présence d’un marxiste, par exemple, qui lui déclare nettement que son Esprit est un produit purement bourgeoi
80 ous dit-on, par « sa terreur sincère de la vérité qui menace ». Mais partout ailleurs, qu’en cette commune antipathie, M. M
81 s enfin le règne de l’homme ! » Mais le chrétien, qui sait un peu ce qu’est ce monstre, se demande, songeant à l’Europe, s’
5 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Une exposition d’artistes protestants modernes (avril 1931)
82 s recevions des livres, des lettres. Van Gogh, en qui nous aimions tout : le pasteur, le peintre et le fou, semait en nous
83 é. Et voilà, n’est-ce pas, un ton et une ferveur qui rendront vaines beaucoup d’objections, ou qui expliqueront dès l’abor
84 eur qui rendront vaines beaucoup d’objections, ou qui expliqueront dès l’abord, et légitimeront aux yeux de beaucoup, le ch
85 offrets, objets ouvragés. Il y a là une tradition qui certainement est bien huguenote : elle remonte aux meubles de Boulle,
86 dans sa pureté, sa nudité, ce sens de l’artisanat qui se refuse aux truquages, aux trompe-l’œil, ne dissocie jamais la rech
87 nt de pouvoir trancher de ce que doit être un art qui l’exprime. En d’autres termes, la définition d’un art protestant est
88 un renouveau doctrinal. Car, et c’est un paradoxe qui n’étonnera pas ceux que le problème de la création intéresse, l’artis
89 de principes définis — je ne dis pas de cadres — qui lui servent de thèmes dans ses variations, d’appui dans ses tâtonneme
90 ainte, de stimulant dans l’atmosphère spirituelle qui préside à l’élaboration d’une œuvre. Pas de style religieux sans doct
91 rement évangélique pour transcender la confession qui lui a permis de naître. La grandeur d’un art protestant, c’est de n’ê
6 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Conférences du comte Keyserling (avril 1931)
92 x de problèmes essentiels : c’est une performance qui vaut d’être enregistrée. Rien de très neuf dans cette trilogie philos
93 s grandeurs et les misères d’une ère mécanicienne qui prélude à l’organisation du monde-termitière type Lénine ou Ford. Sou
94 s et matériels réservés autrefois à ceux-là seuls qui , par leur naissance ou leur milieu, se trouvaient préparés pour en jo
95 résoudre dans le sens d’une philosophie de la vie qui rende aux valeurs spirituelles leur primauté : car c’est à cette cond
96 « formidablement ennuyeux » — un idéal de risque qui redonne à toutes choses leur vivante réalité. Mais tout ceci, à quoi
97 fisante. Ce n’est pas la peur du monde-termitière qui sauvera la condition humaine menacée par le matérialisme : c’est un i
7 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Au sujet d’un grand roman : La Princesse Blanche par Maurice Baring (mai 1931)
98 ini. À ces deux éléments s’en ajoute un troisième qui est moins visible, mais dont la présence constante donne au livre tou
99 Belloc dont voici la traduction : L’amour de Dieu qui mène aux royaumes d’en-haut est contrecarré par le dieu de l’Amour.
100 , et si vous la lisez, ne dites pas à vos amis ce qui arrive avant qu’ils n’aient lu eux-mêmes le livre. J’espère que les c
101 on ne s’y manifeste que par de très petits gestes qui , échappant soudain à des êtres d’ordinaire admirablement corrects et
102 ociété anglaise ne soit pas dépourvue d’un charme qui attirera certains lecteurs, qui agacera un peu les autres. M. Charles
103 urvue d’un charme qui attirera certains lecteurs, qui agacera un peu les autres. M. Charles Du Bos, dans la très belle préf
104 vec un jeune lord ; toute l’existence d’une femme qui ne cesse, jusqu’à sa dernière heure, d’aimer et de souffrir par son a
105 ’agencement des incidents. Ce n’est pas un auteur qui s’arroge un petit jugement dernier de ses personnages, comme le moral
106 ntradictoires qu’elles provoquent. Et le tragique qui se dégage lentement de cette longue confusion de plaisirs mondains, d
107 du consentement aux lois de la vie. Seule épreuve qui permette de nous en libérer. Car au-dessus des fatalités humaines, ce
108 libérer. Car au-dessus des fatalités humaines, ce qui compte chez les personnages de Baring, c’est la manière d’accepter un
109 , de la transfigurer ou d’y succomber. C’est cela qui forme le sujet implicite, nous l’avons dit, de son œuvre romanesque.
110 auquel on sent que Baring attache une importance qui n’est pas uniquement « romanesque » — le mouvement du récit se ralent
111 tit, au contraire, fâcheusement en ces pages — et qui s’explique si l’on a lu la phrase par quoi se termine un précédent li
112 pousé un Italien et vit dans un milieu catholique qui n’exerce, dit-elle, aucune pression sur ses convictions religieuses.
113 s le plus conventionnel. Car à une tante anglaise qui lui exprime l’espoir que sa vie à l’étranger n’ait point ébranlé sa f
114 nuie. » Et l’on découvre soudain que cette femme, qui a subi sans les mettre jamais en question les exigences les plus terr
115 églises anglaises. Ces deux respectables ladies, qui ne jouent pas d’autre rôle dans l’histoire, sont ridicules et convent
116 rine ?). Voici quelques traits amusants ou cruels qui les caractérisent. « Naturellement, vous allez à l’église le dimanche
117 s jamais aucune excentricité. » Elle appelle ceux qui passent à l’Église romaine des « pervertis » : « Nous en avons eu tro
118 trop dans la famille, votre pauvre oncle Charles… qui avait stupéfié la famille en devenant catholique…, puis Edmund Lely,
119 , puis Edmund Lely, cousin germain de votre père, qui est devenu moine, et qui marche pieds nus, à l’étranger lui aussi ; p
120 n germain de votre père, qui est devenu moine, et qui marche pieds nus, à l’étranger lui aussi ; puis il y a eu votre pauvr
121 e part, tous les catholiques qu’elle rencontre et qui lui parlent de leur foi se distinguent par une humanité charmante, « 
122 se sentirait-elle pas attirée par la Rome papale, qui la console de la Rome de son mari et la venge de l’Angleterre de ses
123 angement de confession ramène les mêmes arguments qui retiennent l’esprit à la périphérie des vérités religieuses, là où el
124 est pas une conversion18, c’est une adhésion à ce qui lui semble être la vérité. Sa vraie conversion a lieu beaucoup plus t
125 ec notre bien, et à taxer d’immoralisme tout acte qui entraîne des ruines humaines. Mais la vérité, elle, est indifférente
126 dans La Princesse Blanche, ce sont deux prêtres19 qui , au moment décisif, viennent apporter ce dur message à l’âme de celle
127 viennent apporter ce dur message à l’âme de celle qui demandait d’être apaisée. Admirables dialogues, déchirants et triomph
128 Admirables dialogues, déchirants et triomphants, qui comptent parmi les chefs-d’œuvre de la littérature religieuse. Celui
129 de Baring. En voici la conclusion. (C’est Blanche qui parle au père Michaël.) Vous comprenez tout à présent. Je vous deman
130 e n’est plus très éloigné peut-être de cette joie qui , elle aussi, est « par-delà », — cette joie « qui surpasse toute conn
131 qui, elle aussi, est « par-delà », — cette joie «  qui surpasse toute connaissance ». 16. La Princesse Blanche, Stock, éd
8 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Kierkegaard (mai 1931)
132 ellectuel et religieux français, est un événement qui mérite d’être signalé et qui aura un profond retentissement dans le p
133 is, est un événement qui mérite d’être signalé et qui aura un profond retentissement dans le protestantisme en particulier.
134 énement de sa vie fut la mort de l’Évêque Mynster qui avait été très estimé au Danemark et que Kierkegaard lui-même avait a
135 du protestantisme, que la polémique et la satire qui sévirent, dans le premier, dès ses origines, ne se donnèrent cours pa
136 ssion la plus caractéristique de ce nouvel homme, qui a dépassé le romantisme, est la nouvelle psychologie. L’œuvre la plus
9 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Littérature alpestre (juillet 1931)
137 stre (juillet 1931)k Mlle Claire-Éliane Engel, qui a conquis maint sommet du massif du Mont-Blanc, et un grade de docteu
138 ter avec la discrétion et souvent l’ironie légère qui conviennent. Plus encore que par leur valeur proprement littéraire et
139 t. Nous essaierons de l’esquisser plus loin. ⁂ Ce qui frappe dès l’abord, c’est la pauvreté de la littérature alpestre en F
140 bons sauvages. Et pour la grande majorité de ceux qui , après lui, feront intervenir la montagne dans leurs œuvres, elle n’e
141 presque exclusivement l’âme humaine. La montagne qui repousse l’homme, la montagne farouche, effrayante, leur a semblé inc
142 a fièvre au cours des longues heures silencieuses qui s’égrènent une à une dans les solitudes de rocs et de glace. » Sénanc
143 mbole de l’éternité ? — C’est aussi quelque chose qui devrait être surmonté, nous souffle une voix émouvante, aux résonance
144 vrai dire, nous quittons la littérature. « Celui qui sait respirer l’atmosphère de mon œuvre sait que c’est une atmosphère
145 emière fois, le ton des hauteurs, le ton de celui qui les a conquises, physiquement aussi. Toute l’œuvre de Nietzsche est p
146 comme elles s’opposent à la médiocre littérature qui transforme les sommets en images d’un Dieu vertueux, ou en remparts d
147 de Traz intitula Nietzsche et les hauteurs 23, et qui , posé en face du tableau franco-anglais, fournit un contraste de haut
148 i, par l’effort de discipline qu’elles exigent de qui veut les vaincre, c’est un classicisme héroïque qu’elles inspirent. C
149 constructivisme assez austère, mais stimulant, et qui mène à la joie… C’est un thème très « protestant ». Nietzsche l’a dév
150 us impose le monde contemporain, c’est l’habileté qui triomphe, et non plus la « virtu ». L’héroïsme, au vieux sens du mot,
151 le goût du sport trahit-il la nostalgie d’une vie qui comporterait des risques extérieurs. Mais c’est là se contenter à bon
10 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Avant l’Aube, par Kagawa (septembre 1931)
152 rop littéraire. C’est un livre entièrement simple qui nous introduit dans la connaissance de la misère, et par là même nous
153 s mobiles personnels, affectifs, voire religieux, qui sont à l’origine de son entreprise. C’est même un des malheurs de not
154 rop rapide suppose une cécité partielle chez ceux qui s’y livrent, une incapacité organique à situer leur effort dans une v
155 vra cette « genèse » à vrai dire passionnante, et qui nous fait pénétrer dans l’intimité d’une vie, aux sources mêmes de se
156 ie, aux sources mêmes de ses déterminations. ⁂ Ce qui frappe, dès les premières pages, c’est l’extrême minutie du récit. Le
157 es, c’est l’extrême minutie du récit. Les auteurs qui écrivent leurs mémoires s’attachent d’ordinaire aux faits pittoresque
158 ordinaire aux faits pittoresques ou exceptionnels qui marquèrent leur vie ; ils négligent volontiers ce qui les rend sembla
159 marquèrent leur vie ; ils négligent volontiers ce qui les rend semblables au commun des mortels ; bref, plus ou moins incon
160 ntes, à ces moments de doute, de désir ou d’ennui qui constituent la trame réelle de notre activité et qui différencient ra
161 constituent la trame réelle de notre activité et qui différencient radicalement notre vie d’un conte de fées. Il n’y a là,
162 une absence d’hypocrisie tout à fait insolite, et qui dans certains cas, paraîtra presque scandaleuse à maints lecteurs. Ka
163 deux lignes d’allure conventionnelle, deux lignes qui ne traduisent une vérité vécue et particulière. Telle est la certitud
164 ité vécue et particulière. Telle est la certitude qui se dégage lentement d’une profusion peu commune de petits faits, de p
165 endues de toits de tuiles, avec de la fumée noire qui s’en échappait. Osaka, la nuit, avait un air étrange, quelque chose c
166 honnêteté, caractère impérieux, esprit étroit, et qui défend avec violence contre les idées subversives de son fils un ordr
167 de philosophie. Il entendait une voix intérieure qui lui disait : « Si tu te mêles de ces affaires, tu ne seras toi-même,
168 militarisme et du capitalisme ; un asile de fous qui s’étend sur toute la terre. Sans se préoccuper si c’était le monde ou
169 ans se préoccuper si c’était le monde ou lui-même qui était fou, Eiichi décida que, de ce jour-là, il entrerait en bataille
170 ais un soir qu’il prêche au carrefour, la maladie qui depuis longtemps l’enfiévrait, le terrasse, dans la boue, sous la plu
171 abits, des prostituées qu’il soigne, des ivrognes qui lui font des scènes effroyables, et vont jusqu’à lui tirer dessus, — 
172 froyables, et vont jusqu’à lui tirer dessus, — ce qui ne l’empêche pas de les reprendre ensuite, chez lui, car il professe
173 Bientôt il prend figure de saint parmi le peuple qui le respecte, l’exploite et subit l’empire de sa douceur. Cette deuxiè
174 e par une scène entre le procureur et le prévenu, qui vaut d’être citée : — Pourquoi me regardez-vous ainsi ? tonna le Pro
175 quoi me regardez-vous ainsi ? tonna le Procureur, qui cherchait à intimider Eiichi. Eiichi garda le silence ; il ne voulait
176 t bien désagréable, puisqu’elle exigeait de celui qui s’y livrait de se fâcher, de se poser comme juste et de juger ses sem
177 eauté singulière de l’âme qu’elle révèle. Une âme qui sent tout avec force et délicatesse, éprouve tous les penchants humai
178 acles avec un contentement modeste et intelligent qui est plus émouvant que bien des chants de victoire de « sauvés ». Une
179 ses hésitations, les traverses souvent fortuites qui les provoquent. Et pas trace d’ostentation dans son humilité ou dans
180 oujours l’absence absolue d’hypocrisie de sa part qui donne aux choses les plus banales une nouveauté frappante. Cela éclat
181 t presque nietzschéen choquera peut-être des gens qui eussent préféré l’habituelle effusion en patois de Chanaan. Mais ce q
182 habituelle effusion en patois de Chanaan. Mais ce qui me frappe ici, c’est de voir le reste du chapitre consacré au récit d
183 ment les expressions sentimentales ou rassurantes qui pourraient dépasser une action immédiate ou voiler sa difficulté. Les
184 emps de tirer de ce livre une conclusion capitale qui , sans doute, fut l’objet déterminant de son auteur. Elle concerne la
185 ale. Il s’attache à cette expression un « ennui » qui sert à beaucoup de prétexte pour n’y point réfléchir. Mais à tout pre
186 sse et notre lâcheté naturelles, et l’incertitude qui est leur résultante. Quelques-uns s’en tirent en réfutant le marxisme
187 -il de chercher d’autres solutions ? Quant à ceux qui acceptent d’étudier à fond ces problèmes, ils ne les rendent, en géné
188 ni même vivants — (ils le devraient.). Pour celui qui referme le livre de Kagawa, une certitude s’impose. Je la formulerai
189 e, — cela ne saurait être sans fruits. 24. Ceux qui veulent assimiler christianisme et capitalisme feraient bien de ne pa
11 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). André Gide ou le style exquis (à propos de Divers) (octobre 1931)
190 dont lui-même se révèle dépourvu dans une mesure qui est celle, exactement, de son art, — considérable. Art de ruses, de p
191 ons et de nuances sarcastiques (celles du serpent qui charme à froid) — art qui tout ensemble se définit et se limite par l
192 ques (celles du serpent qui charme à froid) — art qui tout ensemble se définit et se limite par l’épithète valéryenne d’exq
193 cueil en savent quelque chose, et le Père jésuite qui tenta de soutenir la controverse prit une leçon de distinguo magistra
194 la barre d’un jugement dernier anticipé un esprit qui s’honore — on excusera le jeu de mots — d’être « non-prévenu ». Mais
195 ets n’est plus qu’une impudeur raffinée. « Celui qui veut sauver sa vie la perdra, mais celui qui veut la perdre la rendra
196 elui qui veut sauver sa vie la perdra, mais celui qui veut la perdre la rendra vraiment vivante », répète inlassablement M.
197 répète inlassablement M. Gide25. Seulement, celui qui , de propos délibéré, veut perdre sa vie, et non pas pour Christ, mais
198 conclusions en toute logique inévitables. Car ce qui naît de l’Évangile n’a de sens que par le jaillissement vers Dieu. Et
199 ectateur de ses antagonismes. Dès lors, la morale qui , pourtant, seule l’intéresse, n’est plus qu’un jeu d’équilibres relat
200 on du tragique. Car le tragique naît dans une âme qui s’efforce vers l’unité, vers l’unification de ses aspirations et de s
201 e saura-t-il rester un maître pour cette jeunesse qui aimait sa ferveur, mais que le monde de demain va contraindre, contra
202 , s’élève à une vertu surhumaine. Je crois que ce qui me plaît surtout dans ce récit frémissant, c’est sa noblesse. Les fai
203 e j’écris ces mots : Kierkegaard, — et c’est Gide qui , l’un des premiers, l’a prononcé en France. Kierkegaard, un homme qui
204 rs, l’a prononcé en France. Kierkegaard, un homme qui ne vous lâche plus. Il a beaucoup parlé de lui-même. Mais là où d’aut
205 aard une chose extraordinaire : soudain c’est lui qui me regarde et qui me perce, — et me fait honte d’oublier la grandeur.
206 raordinaire : soudain c’est lui qui me regarde et qui me perce, — et me fait honte d’oublier la grandeur. 25. Remarquons
207 5. Remarquons le tour qu’il adopte : « mais celui qui veut la perdre… » n. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] André Gid
12 1931, Foi et Vie, articles (1928–1977). Le protestantisme jugé (octobre 1931)
208 ais Loti. Loti est un notable écrivain protestant qui répond à ce même signalement. Et précisément il y aurait lieu à une m
209 e Genève. Loti appartient à ce pays de Saintonge, qui , si la force de l’unité française n’avait été irrésistible, avait ce
210 trouve le goût de l’analogie historico-littéraire qui caractérise la critique de M. Albert Thibaudet, nous ont fait penser
211 n’est plus aujourd’hui qu’une suite d’événements qui se succèdent, et les livres sont fragmentaires, ils se composent d’un
212 ent jamais. Serait-ce la civilisation toute seule qui les aurait travaillées à ce point et les aurait ainsi fouillées ? Je
213 ranché le ciel ; les mêmes aspirations demeurent, qui faisaient tressaillir nos ancêtres, mais leur légitime objet a été en
214 non plus les espérances de la religion, et l’âme, qui montait autrefois, est retombée sur la terre et l’anime de tout l’eff
215 estent à peu près les seuls valables, à nos yeux, qui aient été émis en leur temps. La critique la plus moderne les confirm
216 t-à-dire protestant — nous paraît avoir doué ceux qui le professèrent (en dépit de certain défaut de sympathie avec leurs s
13 1932, Foi et Vie, articles (1928–1977). Romanciers protestants (janvier 1932)
217 ins protestants, vraiment ?… Ou bien, protestants qui écrivent ? — Mais voyons d’abord les œuvres. La critique à peu près u
218 au spectacle de sa décomposition. Ici la famille qui résiste, là la famille qui se défait30. Mais gardons-nous de voir dan
219 sition. Ici la famille qui résiste, là la famille qui se défait30. Mais gardons-nous de voir dans ce contraste autre chose
220 rnélien et de la passion racinienne, — opposition qui se prolonge et trouve son expression moderne dans des œuvres bien plu
221 , aujourd’hui, de confesser. Aussi bien, la force qui nous est promise doit-elle nous rendre ce courage léger. Le morali
222 mmer « un caractère protestant »32. Et c’est cela qui est grave, — d’autant plus grave que nombre de protestants tiennent à
223 iblesse d’un compromis foncier. Le fort est celui qui refuse la louange approximative. Nous ne saurions assez nous garder d
224 urions assez nous garder d’accepter des adhésions qui vont aux produits déviés de notre foi. Il est vrai que ceux-ci sont s
225 rt nous prêtions des mains complices à des œuvres qui relevaient de conceptions nettement a-chrétiennes de la « moralité pu
226 it dans l’accent de ces docteurs-là quelque chose qui les empêchait de convaincre ? Tel étant l’état des choses, suffira-t-
227 e actuel nous met en demeure d’abandonner tout ce qui , dans notre éthique, s’inspire d’un conformisme bourgeois plutôt que
228 ur récuser, dans « l’esprit protestant », tout ce qui rend inutile la grâce ? Il y va pourtant de notre force de conquête.
229 e sa généralité, de son insistance… Et de ce fait qui paraît bien la confirmer : le dessèchement distingué de notre art. To
230 te forme religieuse donne lieu à des formes d’art qui manifestent ses traits spécifiques. On peut donc poser que le protest
231 rimer que dans la forme du roman moraliste (forme qui par ailleurs flattait un penchant traditionnel de l’esprit français).
232 ientôt réduit au rôle d’une censure tatillonne et qui flattait curieusement certaine notion de « correction » bourgeoise. N
233 raint » la vérité ; non point au sens de ce verbe qui signifie la révérence, mais comme on craint le risque, que Jésus n’a
234 de sa théologie. Car il est certains cas où celui qui craint de dire toute la vérité n’exprime par là rien d’autre que sa m
235 et son optimisme vis-à-vis de la nature humaine, qui , selon cette vue, serait bonne, ou du moins meilleure, si on la « pré
236 y faudrait une puissance décuplée, excessive, et qui , par la force des choses, tournerait bientôt en révolte, en insolence
237 de l’imagination créatrice chez les protestants, qui lui furent plus que d’autres soumis, de par leur sérieux traditionnel
238 vons-nous attendre ? Tout, d’un réveil dogmatique qui , s’il traduit et porte un réveil de la foi, ne peut manquer de libére
239 ue du péché et de la grâce souveraine. C’est cela qui donne aux romans de Dostoïevski ou d’Émily Brontë ces prolongements p
240 ements poétiques, ces perspectives bouleversantes qui manqueront toujours aux œuvres nées sous le signe fatal du moralisme.
241 du, même chez les protestants, qu’un « protestant qui écrit » ne saurait être qu’en révolte contre la foi de ses pères. Le
242 uniquement à retrouver dans son œuvre des traces qui « malgré tout » révèlent ses origines. Triste jeu. 33. Représentatif
14 1932, Foi et Vie, articles (1928–1977). Goethe, chrétien, païen (avril 1932)
243 Imaginez un membre de l’Académie des sciences qui serait aussi directeur de la Comédie française et ministre de l’Intér
244 Comédie française et ministre de l’Intérieur, et qui , en marge des expériences accumulées dans l’exercice de ces activités
245 moderne, c’est-à-dire dans l’histoire des peuples qui vivent sous le règne du christianisme. Mais le plus grand Occidental
246 stianisme » comme dit Barth, une de ces questions qui nous sont posées comme autant d’accusations, et qu’il est de notre de
247 bert Curtius, rappelait récemment dans un article qui fit quelque bruit37 les débuts piétistes du jeune Goethe et la part a
248 anquons pas de témoignages écrits de cette époque qui permettent d’imaginer ce qu’eût pu être le pendant chrétien du Werthe
249 « sagesse » devint-elle chez Goethe quelque chose qui , en fin de compte, ressemble si étrangement à une indifférence non dé
250  ? L’on ne saurait ici exagérer la responsabilité qui incombe aux « chrétiens » eux-mêmes, tels qu’ils apparurent à ce jeun
251 urait tenir. Rien que des gens d’esprit médiocre, qui n’ont eu de pensée raisonnable qu’avec leur première sensation religi
252 uoi faire intervenir dans notre vie une recherche qui risque surtout d’être nuisible à la vie ? Bornons-nous à l’utile. Bor
253 gile. Et en présence de l’intempérance de langage qui trop souvent caractérise les chrétiens, affirmons que nous ne savons
254 z le poète une sorte de sécheresse religieuse. Ce qui à l’origine, n’était qu’humilité de la raison devant l’insondable mys
255 devient, vu de l’extérieur, orgueil de la raison qui juge ce monde comme si Dieu n’existait pas, ou encore : comme si Dieu
256 la propagande antireligieuse ». En vérité, Goethe qui prêcha l’utile, nous apparaît comme Goethe l’inutilisable, si nous le
257 e dans la communauté de la foi chrétienne l’homme qui a pu dire qu’il s’inclinait devant le Christ comme devant la « révéla
258 ue gît la faiblesse religieuse de sa position. Ce qui , plus que tout, fait défaut à ce génie, c’est le sens tragique du péc
259 . C’est bien là que réside l’élément transcendant qui interdit à la pensée la plus probe de se passer de Dieu quand elle ju
260 ’une tout autre sorte que ne l’ont cru nos athées qui s’arrêtaient à des boutades anticatholiques ou à des moments d’humeur
261 t refusons-nous donc d’appeler chrétien, un homme qui se prétendit tel en maintes occasions, de la façon la plus expresse ?
262 oint là porter un jugement avant tout partial, et qui révèle notre insuffisance autant que la sienne ? Certes, hic et nunc,
263 haînement orgueilleux et misérable d’une humanité qui croit pouvoir fabriquer son bonheur par ses propres forces, notre dev
264 r d’objet à notre jugement. Bien plutôt c’est lui qui nous juge. Il y a dans le Faust, et dans la vie de cet homme, dont le
15 1932, Foi et Vie, articles (1928–1977). Penser dangereusement (juin 1932)
265 Ils ont tous épousé une cause, une de ces causes qui engagent bien plus que l’adhésion des idées, une de ces causes qui do
266 plus que l’adhésion des idées, une de ces causes qui doivent être gagnées. Chose étrange, et que l’on eût difficilement pr
267 n. Quels que soient par ailleurs les antagonismes qui la divisent — bien plus extrêmes que ceux qui divisèrent les précéden
268 mes qui la divisent — bien plus extrêmes que ceux qui divisèrent les précédentes — elle éprouve son unité, elle connaît une
269 millions de nos contemporains. Il y a aussi ceux qui se bornent à affirmer la nécessité d’une pensée active, mais qui n’on
270 à affirmer la nécessité d’une pensée active, mais qui n’ont pas vu — qui n’ont pas encore vu — tout ce que cela implique. I
271 sité d’une pensée active, mais qui n’ont pas vu — qui n’ont pas encore vu — tout ce que cela implique. Ils voient bien le v
272 ’un choix profond : christianisme ou marxisme. Ce qui revient à dire que seuls les chrétiens, en tant que chrétiens, non pa
273 à deux livres caractéristiques de ce double péril qui menace une génération : péril de gauche et péril de droite, pourrait-
274 lupart dans les pages de l’Action française, mais qui , marquons-le tout de suite, ne comportent nulle allusion à la positio
275 t cette rénovation. M. Maulnier critique un monde qui selon lui tend à la suppression de la personne humaine. Sa critique n
276 te statique, au nom de valeurs tout intemporelles qui , n’étant pas religieuses, sont donc abstraites. Il ne suffit pas de d
277 de efficace et créatrice la critique de tout cela qui agite le cœur des hommes. Ce n’est pas une férule : c’est un bon outi
278 y a point de questions plus grossières que celles qui sont posées ici, qui sont retournées ici. La philosophie présente qui
279 s plus grossières que celles qui sont posées ici, qui sont retournées ici. La philosophie présente qui dit et croit qu’elle
280 qui sont retournées ici. La philosophie présente qui dit et croit qu’elle se déroule au profit de l’homme, est-elle dirigé
281 on refus d’aborder les questions dites vulgaires, qui conduiraient à des conclusions dangereuses pour l’ordre établi. « Nou
282 distance entre ce qu’énonce la philosophie et ce qui arrive aux hommes en dépit de sa promesse. » M. Brunschvicg fait un c
283 philosophes d’exclure de leurs recherches tout ce qui intéresse chaque homme et tout l’homme, et de déclarer « non philosop
284 mme, et de déclarer « non philosophique » tout ce qui ne tombe pas sous le coup de leurs techniques. On dira sans doute que
285 me si on l’appelle avec Marx, l’homme concret (ce qui n’est encore qu’une formule), l’homme au singulier des philosophes, o
286 tension orgueilleuse et démesurée du type d’homme qui intéresse tel groupe de philosophes, et qui vient se substituer à la
287 homme qui intéresse tel groupe de philosophes, et qui vient se substituer à la réelle humanité. C’est, pour M. Brunschvicg,
288 traire, il en émane une sorte de mépris satisfait qui révèle un intellectuel déchaîné plus qu’un partisan convaincu. On sen
289 s aider à vivre, à mourir. Je demande à M. Nizan, qui est marxiste, si la lecture et la pratique de Marx peut apporter une
290 lutaire, germe de cette « révolution permanente » qui doit être l’état du chrétien vis-à-vis de lui-même et de son passé. C
291 -vis de lui-même et de son passé. C’est le danger qui nous purifiera. « Toute plante que n’a pas plantée mon Père céleste s
292 châtiment de ceux-là mêmes, de ceux-là justement qui refusèrent de « penser dangereusement ». Mais les marxistes n’y échap
293 Mais les marxistes n’y échapperont pas. Car celui qui refuse de penser le péché, refuse d’envisager l’ultime et le plus « g
294 40. Et pourtant, M. Nizan cite pas mal de textes qui prouveraient le contraire. s. Rougemont Denis de, « Penser dangereu
16 1933, Foi et Vie, articles (1928–1977). « Histoires du monde, s’il vous plaît ! » (janvier 1933)
295 en diminuant, et cela au profit d’une littérature qui tient à la fois de l’histoire, de la politique, de la morale et de la
296 blic allemand. Il est bien naturel qu’une société qui jouit d’une relative sécurité cherche son divertissement dans des fic
297 e par là qu’il plaît tant au peuple. Le bourgeois qui rentre chez lui après 8 heures de bureau demande aux livres une évasi
298 e la médiocre existence quotidienne. Mais l’homme qui toute la journée a senti peser sur son œuvre la menace des forces ter
299 retrouver bien en place le lendemain. L’angoisse qui plane vaguement, et parfois précisément, sur la civilisation actuelle
300 lles la plupart du temps, et le goût des « romans qui posent des problèmes ». On appelait cela de la « littérature difficil
301 rès-guerre, faite en grande partie par des hommes qui n’avaient pas eu le temps de se cultiver, est caractérisée par une fa
302 d’une fête intempestive. On demande des lumières qui ne soient plus seulement aveuglantes. On voudrait être dirigé, plutôt
303 ait se préparer à « mal finir ». Est-ce le cinéma qui a changé tout cela ? L’explication tente les journalistes. Mais le ci
304 cinéma n’est qu’un des effets du changement à vue qui s’opère dans toute notre conception du monde. Dans une époque qui a v
305 toute notre conception du monde. Dans une époque qui a vu les frontières et les peuples de l’Europe bouleversés ; les régi
306 ses désirs matériels, dans cette énorme aventure qui « règne » sur le monde comme une fièvre, le romanesque éclate, rempli
307 s prendre conscience. Alors, toutes les nouvelles qui nous parviennent du monde sont comme autant d’épisodes d’un drame qui
308 du monde sont comme autant d’épisodes d’un drame qui intéresse chacun de nous. L’homme se prend d’un intérêt passionné pou
309 éricaines de la vie sociale, des albums de photos qui pour la première fois, nous semble-t-il, mettent sur notre table le m
310 ts sociaux ou culturels, l’homme demeure cet être qui veut penser le monde. Incapable désormais de s’en distraire en le fuy
311 ps. Et depuis lors, que de volumes à grand succès qui pourraient reprendre le titre fameux de Paul Valéry : Regards sur le
17 1934, Foi et Vie, articles (1928–1977). Destin du siècle ou vocation personnelle ? (février 1934)
312 le hantise, comme le grand lieu commun de la peur qui s’est emparée des hommes. On ne nous parle plus que du « désarroi act
313 uel ». Il n’est pas d’expression plus juste, pour qui se borne à considérer notre époque et les doctrines infiniment contra
314 poque et les doctrines infiniment contradictoires qui s’affrontent au milieu du désordre. Il n’est pas d’expression plus fa
315 ession plus fausse, et même plus dangereuse, pour qui veut prendre position et pénétrer dans la bagarre universelle. Je voi
316 nt méticuleusement tyrannique, comme une divinité qui , depuis peu, serait devenue folle. Des peuples entiers s’exaltent pou
317 Des peuples entiers s’exaltent pour une dictature qui tire son seul prestige de la misère et de la lâcheté publique. Des pr
318 ale, flétrie avec grandiloquence par des journaux qui vivent de fonds secrets. C’est à tout cela que l’on pense lorsqu’on n
319 de chances qu’aucune autre. Le vieux « désordre » qui couvait sous des apparences paisibles, est soudain devenu flagrant. I
320 nos villes européennes de grands panneaux-réclame qui parlent un langage clair. Jamais il ne fut plus facile de reconnaître
321 ntéressée, nous ne trouvons jamais aucun principe qui unifie. Mais, au contraire, dès que nous nous posons la question de l
322 fs, le choix nécessaire apparaît avec une netteté qui , je le répète, est la chance de notre époque. Je voudrais décrire cet
323 traits fort simples. J’insiste sur le mot simple, qui me paraît caractériser notre siècle. On dit le contraire un peu parto
324 cation réelle. C’est l’argument des gens en place qui , chaque fois que nous venons dire : voici ce qu’il faut faire, nous r
325 alité, ou s’ils le sont, osons les simplifier. Ce qui est difficile, ce n’est pas de voir le vrai, c’est d’oser les actes q
326 en garde contre un « certain esprit simpliste », qui est, au vrai, l’esprit de décision et d’engagement concret dont nous
327 rrière des complexités que nous créons à plaisir, qui ne sont pas dans la situation et qui sont autant de prétextes à refus
328 s à plaisir, qui ne sont pas dans la situation et qui sont autant de prétextes à refuser de prendre position, comme si ce n
329 lle soit, une servitude particulière, une passion qui est bien à lui, une vocation. Si l’on admet facilement de nos jours,
330 réalité historique très composite, très générale, qui englobe toute l’humanité, et dont les éléments sont presque tous de n
331 . Le destin du siècle, c’est le destin des ismes, qui sont — en fin de compte — des abstractions. Et je le répète, pour que
332 inion publique. Elles ont encore un autre nom, et qui est commun à toutes : c’est le Nombre, c’est peut-être Légion… Sans d
333 ce que nous prouvent abondamment leurs exigences, qui sont la foi aveugle et les sacrifices humains. Ces dieux ont même leu
334 e n’est rien, mais moins que rien, et que tout ce qui se passe dans le monde obéit à des lois générales et historiques qui
335 e monde obéit à des lois générales et historiques qui échappent à notre volonté et sur lesquelles nos révoltes sont sans pr
336 t comment se défendrait-il quand il adore tout ce qui veut sa perte ? Nos camarades marxistes ou racistes ont bien vu le da
337 d de confondre le sacrifice et le suicide. L’élan qui jette des millions de nos contemporains dans les destins du siècle, c
338 i peut bien se fonder une loi historique ? Sur ce qui a été fait. Toute loi qu’on découvre dans la société humaine repose s
339 pe démissionnaire par excellence du déterminisme, qui peut se formuler ainsi : qui a bu boira ! Or, la seule chose intéress
340 nce du déterminisme, qui peut se formuler ainsi : qui a bu boira ! Or, la seule chose intéressante au monde — et je dis int
341 au sens le plus profond du terme, la seule chose qui intéresse chacune de nos vies —, c’est qu’il y ait parfois, par exemp
342 ’est qu’il y ait parfois, par exemple, un ivrogne qui s’arrête de boire, ne fût-ce que pour faire mentir le proverbe. Les l
343 et les autres. Ma théorie est la suivante : ceux qui pensent que l’homme descend du singe, descendent en effet du singe et
344 , à côté de la race des hommes créés par Dieu, et qui , eux, croient et savent qu’ils ont été créés par Dieu. » Cette petite
345 r leur croyance. Ces hommes-là savent au moins ce qui les mène et poussent le monde dans la direction où il doit tomber fat
346 t-être supérieurs aux libéraux et aux dilettantes qui tombent, eux aussi, mais continuent d’évoquer la liberté et les idéau
347 de nos vies. Sans eux, la préparation des esprits qui prélude à toute guerre moderne bien comprise serait impossible. Sans
348 que le concevait le dernier siècle, l’homme isolé qui cultivait jalousement sa petite vie intérieure, à l’abri de la Déclar
349 personne à servir. C’est l’état le plus dégradant qui soit. On vit alors, chez les meilleurs de ces jeunes gens, se déclare
350 eunes gens, se déclarer une épidémie de suicides, qui ne prit pas toujours la forme romantique du coup de revolver, qui pri
351 toujours la forme romantique du coup de revolver, qui prit même beaucoup plus souvent la forme d’un enrôlement dans quelque
352 te solidarité, que vaut-elle ? Le premier exemple qui vous vient à l’esprit, lorsqu’on vous dit que désormais « tout se tie
353 dualisme les a rationnellement ignorés. Les voilà qui reviennent sous le couvert de ce cheval de Troie qui se nomme détermi
354 reviennent sous le couvert de ce cheval de Troie qui se nomme déterminisme historique. Il faut croire qu’ils ont la vie du
355 er, ni abdiquer sous leur implacable destin. Ceux qui l’ont fait et qui le font encore, je vois bien ce qui les poussait, j
356 us leur implacable destin. Ceux qui l’ont fait et qui le font encore, je vois bien ce qui les poussait, je vois bien ce qu’
357 l’ont fait et qui le font encore, je vois bien ce qui les poussait, je vois bien ce qu’il y avait d’émouvant dans leur élan
358 d’hommes réels. Nous avons tout calculé, sauf ce qui est en effet incalculable : l’acte de l’homme. Mais le temps vient où
359 temps vient où les hommes se lassent de théories qui expliquent tout sauf l’essentiel. Voici notre dilemme : voulons-nous
360 nnes ? Voilà le mot lâché. Je connais la réaction qui l’accueille. Hé quoi ! dit-on, en face de tous ces monstres menaçants
361 ensées les origines concrètes de ces grands faits qui bouleversent le monde. C’est à vous de déceler, par exemple, l’origin
362 , j’ai essayé de vous montrer l’attitude de celui qui se réfugie dans l’Histoire42, qui pense par périodes séculaires, qui
363 titude de celui qui se réfugie dans l’Histoire42, qui pense par périodes séculaires, qui rêve et qui pour comble, se croit
364 l’Histoire42, qui pense par périodes séculaires, qui rêve et qui pour comble, se croit seul éveillé et conscient des réali
365 2, qui pense par périodes séculaires, qui rêve et qui pour comble, se croit seul éveillé et conscient des réalités. ]’ai es
366 e vous décrire la pensée personnaliste, la pensée qui ne veut s’attacher qu’aux seules tâches immédiates. La personne, au c
367 jectif ? Vous préférez l’homme créateur à l’homme qui s’abandonne au destin collectif, mais c’est peut-être votre orgueil q
368 tin collectif, mais c’est peut-être votre orgueil qui parle ? Sur quelle vérité supérieure se fonde votre personnalisme ? J
369 primitif, le rapport véritablement humain, celui qui unit l’homme à son prochain. Or, ce prochain, l’Évangile seul nous le
370 s cet acte unique d’obéissance à l’ordre de Dieu, qui s’appelle l’amour du prochain. Je dis bien : acte, et il faut insiste
371 ociété. On a transporté dans l’histoire cet amour qui doit être un acte, une présence et un engagement immédiat. Acte, prés
372 Jésus, l’un d’entre eux se leva et lui dit : Mais qui est mon prochain ? Ce docteur se disait sans doute : aimer son procha
373 u lui faire comprendre : le prochain, c’est celui qui exerce, en actes, la miséricorde. Cet acte, en chacun de nous, peut ê
374 miséricorde, c’est l’acte le plus révolutionnaire qui ait jamais paru dans notre monde. Lui seul suffit à vaincre les desti
375 s du siècle, lui seul atteint le mal à sa racine, qui est en nous, qui est au fond de notre désespoir. Les grandes lois his
376 seul atteint le mal à sa racine, qui est en nous, qui est au fond de notre désespoir. Les grandes lois historiques et révol
377 notre être, là où réside le désespoir de l’homme qui ne connaît pas son destin. Après tout, l’homme désespéré, ce qu’il ve
378 l veut, ce n’est pas une explication du désespoir qui le possède, mais c’est une consolation. Je prends ce mot dans son sen
379 tellectuelle du destin de sa classe ou de sa race qui va suffire pour l’arracher à sa misère ; il lui faut une rencontre, u
18 1934, Foi et Vie, articles (1928–1977). Deux essais de philosophes chrétiens (mai 1934)
380 temps, conquis le « grand public », celui-là même qui , chez nous, consacre ses loisirs à dévorer des prix Goncourt, justifi
381 des éditeurs à l’endroit des meilleurs esprits. À qui faut-il s’en prendre ? Aux critiques d’abord, et, en particulier, à c
382 ctement le contraire qu’on peut voir. Le critique qui dispose d’un feuilleton régulier dans un hebdomadaire ou un quotidien
383 . Bien loin d’avoir à cœur de signaler les œuvres qui risqueraient, sans lui, d’être incomprises ou ignorées, il se content
384 l faut attribuer autant aux philosophes qu’à ceux qui ne les lisent plus. Le public se figure que la philosophie est une ac
385 lic se figure que la philosophie est une activité qui ne le concerne pas. Il ne nie pas sa valeur intrinsèque. Ou, du moins
386 et mystification. Une pensée vivante, une pensée qui aide à vivre, trouve son lieu dans l’acte et nulle part ailleurs. Mai
387 cte43. Et c’est ici la déficience des philosophes qui se montre. Sous prétexte de science, la pensée de nos maîtres s’est t
388 mes posés par sa technique détourne des problèmes qui se posent en fait. Mais que faut-il penser de ces techniques d’absten
389 st-ce point l’obscur pressentiment d’un tel péril qui explique, en dernière analyse, la méfiance réciproque dont je viens d
390 s qu’elle entraîne sont proprement incalculables. Qui donc voudra les encourir ? Ceux-là seuls qui n’ont pas à subordonner
391 les. Qui donc voudra les encourir ? Ceux-là seuls qui n’ont pas à subordonner la vérité de leur message aux calculs de l’op
392 valeurs dont le monde croit vivre et des valeurs qui jugent cette vie. C’est à elle, en particulier, et non pas au marxism
393 ev ? Faut-il une fois de plus évoquer les menaces qui pèsent sur la civilisation ? Ou verra-t-on que le service que la pens
394 est obéissance ? Ce ne sont pas les catastrophes qui devraient effrayer le chrétien, mais le risque plus immédiat de faill
395 e, c’est de nous avoir délivrés d’une psychologie qui dissociait les unités vivantes en éléments abstraits, et prétendait e
396 me. Voici comment il le décrit : … l’impuissance qui n’use pas de représailles devient par un mensonge, la « bonté » ; la
397 e, sa lâcheté, cette lâcheté dont il est riche et qui , chez lui, fait antichambre, et attend à la porte, inévitablement, ce
398 ns un chapitre consacré aux valeurs humanitaires, qui me paraît renfermer l’essentiel de son livre. Le lecteur se sent pris
399 . Nous ne voulons plus l’acte d’amour personnel —  qui est une valeur héroïque —, mais nous prônons tout simplement un senti
400 ie de perversions : un certain altruisme d’abord, qui prend la place de l’acte de miséricorde ; une pitié veule et platoniq
401 te de miséricorde ; une pitié veule et platonique qui est le contraire du courage et non pas de la cruauté ; un internation
402 e et non pas de la cruauté ; un internationalisme qui n’est qu’une rancune contre la patrie ; un pacifisme qui traduit bien
403 st qu’une rancune contre la patrie ; un pacifisme qui traduit bien plus la crainte de « se faire des ennemis » que la surna
404 a surnaturelle paix annoncée par le Christ à ceux qui luttent (dans leurs luttes et au-dessus d’elles) ; un égalitarisme qu
405 rs luttes et au-dessus d’elles) ; un égalitarisme qui renie la réalité chrétienne de la vocation… Je suis loin d’épuiser la
406 évangélique et, pour comble, vertu de riche, mais qui retient encore le pathos chrétien que renferme le mot. Ces quelques
407 alement le socialisme humanitaire et le marxisme, qui sont, à tant d’égards, de simples aveux des tendances plus ou moins d
408 uels philosopher ne figure pas l’activité de ceux qui n’en veulent point avoir. Son essai manifeste une volonté très nette
409 e ne puis résumer que les thèmes d’une méditation qui se propose pour objet d’approcher le mystère indéfinissable de l’être
410 idiot » (p. 261). C’est une histoire de ce genre qui caractérise malheureusement l’existence de l’homme moderne, emprisonn
411 e puis me dispenser de me demander du même coup : qui suis-je, moi qui questionne sur l’être ? »49 (p. 264). Le problème d
412 er de me demander du même coup : qui suis-je, moi qui questionne sur l’être ? »49 (p. 264). Le problème devient alors tout
413 sont inséparables jusqu’au bout, note M. Marcel, qui m’apparaît ici très « dialectique » — démarche de la création qui va
414 ci très « dialectique » — démarche de la création qui va toujours dans le sens de l’être, à condition qu’elle soit soutenue
415 une philosophie du désespoir, — autant de traits qui nous assurent que les problèmes débattus dans ce livre sont de ceux q
416 les problèmes débattus dans ce livre sont de ceux qui se posent ; non point de ceux que l’on se plaît à poser gratuitement
417 rale des commerçants » — comme disait Nietzsche — qui domine notre société. 43. On trouvera dans les excellents articles
418 . La première partie est un drame en quatre actes qui n’est pas à proprement parler une illustration de l’essai, mais qui e
419 oprement parler une illustration de l’essai, mais qui est né dans le même temps, et participe de la même problématique (Des
420 . Marcel introduit ici le motif du recueillement, qui lui paraît essentiel à toute existence ontologique. J’avoue la plus v
421 avoue la plus vive méfiance à l’égard de ce terme qui me paraît dangereusement lié à certain idéalisme de la « vie intérieu
19 1934, Foi et Vie, articles (1928–1977). Notice biographique [Kierkegaard] (août 1934)
422 t tertre et il avait maudit le Dieu tout-puissant qui le laissait mourir de faim. Ce blasphème assombrit toute sa vie ; il
423 iolence, le christianisme officiel et les évêques qui avaient loué ses premières œuvres, il se vit abandonné dans la plus c
424 masques à la lutte contre l’Église établie, lutte qui devait le mener à la mort parce qu’elle accomplissait sa vocation chr
425 re aussi à sa pensée une influence multiforme, et qui va croissant avec le temps. La philosophie allemande contemporaine, a
20 1934, Foi et Vie, articles (1928–1977). Nécessité de Kierkegaard (août 1934)
426 crits les plus dignes de formuler son opinion, et qui sont pleins d’amères protestations contre le règne de la masse et les
427 ent. Il s’agirait alors de croire à quelque chose qui légitime ce scepticisme ou cette « mesure »… Sinon la foi des uns, fa
428 e sa place à « l’esprit »… Mais, quel esprit ? Et qui l’a laissé perdre ? Et que va-t-on lui sacrifier ? Supposez qu’un hom
429 On commencera par mettre en doute son sérieux : «  Qui est le docteur Søren Kierkegaard ? C’est l’homme dépourvu de sérieux 
430 oir autonome, ou la puissance, font décorer celui qui les détient, mais l’exercice effectif du savoir peut fort bien le con
431 t l’opinion publique, il proteste en faveur de ce qui est « original » ; contre l’emportement des multitudes, il revendique
432 e, seul. Cette primauté de la foi sur les vérités qui font vivre, cette solitude première devant Dieu, est-ce bien cela que
433 isque. Et l’on peut douter qu’ils y croient, ceux qui flétrissent le matérialisme au nom des biens qu’ils n’ont pas su défe
434 ferait bien d’aller le prendre parmi ceux-là pour qui l’esprit n’a pas à se défendre, mais bien à témoigner de son incarnat
435 incarnation ; on ferait bien d’aller à ceux pour qui l’esprit n’est pas une espèce de confort, mais une aventure absolue e
436 tre espoir de trouver un autre chemin : un chemin qui ne mène à Rome, ni à Berlin, ni à Moscou, mais à nous-mêmes devant Di
437 l’objection la plus absolue, la plus fondamentale qui lui soit faite, une figure littéralement gênante, un rappel presque i
438 s d’applaudir à ses thèses pour apaiser ce regard qui nous perce, et si nous sommes sourds à sa voix, comment étouffer le s
439 voix, comment étouffer le scandale de cette mort qui définit le destin de l’esprit parmi nous ? Si l’Opinion publique a tu
440 e sa face hilare au-dessus des bourreaux pantois, qui se refusent dignement à couper une tête pareille. Enfin, le chat disp
441 ître. On voit d’abord son rire, rien que son rire qui plane, immatériel. Ensuite, seulement, la tête se recompose autour de
442 homme, justement, que l’Histoire fait trembler et qui se réfugie dans les soucis publics comme on va voir un film pour s’ou
443 omme affolé par la lecture de son journal, — mais qui porte l’enfer dans son âme ! — Kierkegaard a montré « le comique infi
444 son aiguillon contre le « monde chrétien », celui qui se réclame de l’esprit, ou qui fait profession de l’appeler. « Le Nou
445 chrétien », celui qui se réclame de l’esprit, ou qui fait profession de l’appeler. « Le Nouveau Testament ressemble à une
446 consolations et encore des consolations pour ceux qui souffrent à cause du Christ. Il suppose, sans autre, que le chrétien
447 autres ? Comique amer et infini de ce « croyant » qui tremble pour le sort de l’esprit dans le monde, et pour son sort dans
448 et sur ce texte on nous fait des sermons, à nous qui n’avons pas voulu souffrir ». « Dans l’église somptueuse paraît le Tr
449 de Dieu est telle qu’on y trouve quelque passage qui dise le contraire d’un autre. » Car l’apparence de la contradiction n
450 qu’ils appellent l’amour.57 » Rire du solitaire, qui ressemble peut-être à la pitié énigmatique d’un Dostoïevski. Ici tout
451 les ; que l’on écarte, au premier pas, trois mots qui faussent tout : anarchie, romantisme, individu. Il n’est que de les m
452 e troupeau. Le solitaire devant Dieu, c’est celui qui répond à la foi, cet appel. Quand on parle de romantisme, d’anarchie,
453 lui-même en révolte contre l’ordre reçu de Dieu, qui sera l’Ordre du Royaume. Et nier une négation, c’est s’enfoncer dans
454 saint Paul. Le solitaire devant Dieu, c’est celui qui se tient à l’origine de sa réalité. Celui-là seul connaît sa fin et l
455 ietzschéisme agressif, ou désespoir du démoniaque qui veut être soi-même, « en haine de l’existence et selon sa misère ». C
456 n vraiment méchante s’arcboute toujours contre ce qui la suscite.58 » Et celui qui recourt à son moi révolté contre les for
457 e toujours contre ce qui la suscite.58 » Et celui qui recourt à son moi révolté contre les forces d’anéantissement, s’appui
458 néant et précipite sa propre ruine. Le solitaire qui condamne « la masse » n’est un aristocrate que s’il ne veut pas l’êtr
459 être lui-même que par le droit divin de la Parole qui le distingue. Suprême humilité du solitaire ! Il ne saurait se compar
460 siens. Elle est le lieu de rendez-vous des hommes qui se fuient, eux et leur vocation. Elle n’est personne, et tire de là s
461 e foule et que personne peut-être ne saurait dire qui l’avait fait ou qui avait commencé, celles-là l’auraient eu, ce coura
462 nne peut-être ne saurait dire qui l’avait fait ou qui avait commencé, celles-là l’auraient eu, ce courage ! Ô mensonge ! »
463 de son acte. « Car une foule est une abstraction, qui n’a pas de mains, mais chaque homme isolé a, dans la règle, deux main
464 on celles de son voisin et non celles de la foule qui n’a pas de mains. » Tout seul en face du Christ, un homme oserait-il
465 st que ma dégradation. Et toutes les « sciences » qui étudient ses « lois » historiques ou sociologiques sont comme une inv
466 de la Providence. Entreprise effroyable et vaine, qui serait d’un comique insondable si seulement l’homme des masses ne ven
467 ême de cette Âme du monde, cet Esprit de la Forme qui se croit le Réel et qui pourtant n’est rien que le péché, mais le péc
468 e, cet Esprit de la Forme qui se croit le Réel et qui pourtant n’est rien que le péché, mais le péché n’est-il pas notre ré
469 prit de transformation ? Notre réalité fuyarde et qui pourtant, par un artifice de l’angoisse, se proclame autonome, s’abso
470 uient en avant, et les autres dans le passé, mais qui voudrait se tenir, dans l’instant, « sous le regard de Dieu », comme
471 l’intelligible providence surnaturelle.61 » Mais qui ne voit que cette Âme du Monde le tient aussi, et jusque dans son sce
472 s de cette « catégorie du solitaire », de l’homme qui vit de la Parole seulement, entre les temps, dans l’instant éternel.
473 , c’est l’objectivité : cette attitude de l’homme qui ne veut plus être sujet de son action, qui l’abandonne aux lois mythi
474 ’homme qui ne veut plus être sujet de son action, qui l’abandonne aux lois mythiques de l’histoire. Kierkegaard au contrair
475 l’autre sens du terme, « assujetti » à la Parole qui vit en lui. C’est dans ce sens que la formule de Kierkegaard est vrai
476 tel rétablissement. Pour deux raisons, je crois. Qui , d’abord, parmi nous, oserait affirmer que cette « catégorie » lui so
477 ou bien je l’imagine, et mon discours est vain. À qui pressent, dans sa réalité brutale, dans son sérieux dernier, et son r
478 clerc moderne est protestant », ajoute M. Benda, qui , en fait de protestants, ne connaît guère que Renouvier, son maître…
479 al. 61. Le chemin du paradis, p. 269. C’est moi qui souligne. 62. Pourquoi poser la question à propos d’un cas aussi exc
21 1934, Foi et Vie, articles (1928–1977). Kasimir Edschmid, Destin allemand (octobre 1934)
480 ort, le mieux fait, le plus impressionnant, celui qui apporte le plus de nouveauté, d’humanité, de grandeur. J’ai d’autant
481 u moins, presque personne encore n’en a parlé. Ce qui n’est pas très étonnant, d’ailleurs. Il s’agit d’une œuvre allemande,
482 un auteur inconnu en France jusqu’ici, d’un roman qui veut dire quelque chose — quelque chose qui ne plaira pas au public h
483 roman qui veut dire quelque chose — quelque chose qui ne plaira pas au public habituel des prix Goncourt —, et qui le dit a
484 ra pas au public habituel des prix Goncourt —, et qui le dit avec une puissance assez austère. ⁂ Six chômeurs allemands, an
485 raversée, un coup d’État renverse le gouvernement qui les avait appelés officieusement. Ils hésitent à poursuivre. L’un d’e
486 eux se laisse entraîner par des révolutionnaires qui préparent un coup de main contre le dictateur du Venezuela ; un autre
487 sources, acceptent de collaborer à une révolution qui va bouleverser le Brésil. Ils retrouvent un de leurs compagnons du dé
488 retrouvent un de leurs compagnons du début, celui qui était parti pour le Venezuela, et qui a subi, lui aussi, des emprison
489 ébut, celui qui était parti pour le Venezuela, et qui a subi, lui aussi, des emprisonnements, le bagne, et des tortures phy
490 ue le planteur de thé, le sixième camarade. Voilà qui donne l’idée d’un roman d’aventures. Destin allemand est bien, entre
491 d’une intensité peu commune. Mais cet aspect-là, qui suffit d’ailleurs à rendre le livre passionnant et presque obsédant,
492 impression de grandeur brutale et grave à la fois qui demeure dans l’esprit, bien après qu’on l’a lu. En vérité, ce résumé
493 mmes63 ont été chassés de leur pays par une crise qui n’est pas seulement économique, par une crise qui atteint à la fois l
494 qui n’est pas seulement économique, par une crise qui atteint à la fois leur attachement à la patrie et leur humanité, au s
495 une vie d’aventures qu’ils n’avaient pas voulue, qui les détourne de toutes leurs espérances. Ce n’est point qu’ils aient
496 r peuple, ils s’en vont au-devant d’une existence qui n’a plus aucun but, au-devant de souffrances qui ne servent à rien. C
497 qui n’a plus aucun but, au-devant de souffrances qui ne servent à rien. Ce sont des hommes très simples et qui s’expriment
498 ervent à rien. Ce sont des hommes très simples et qui s’expriment difficilement. Seul Pillau, le ministre, l’incarnation de
499 c’est en elle qu’ils communient, c’est elle seule qui les soutient dans les plus effroyables et dégradantes épreuves. Eux,
500 aute pour l’Allemagne, et de participer au destin qui lui était échu pour un temps. Ce destin qui obligeait l’Allemagne, ap
501 estin qui lui était échu pour un temps. Ce destin qui obligeait l’Allemagne, après la guerre, à vivre dans un état de guerr
502 tat de guerre encore plus cruel qu’auparavant, et qui en faisait un pays pauvre, abattu, désuni et impuissant… » Mais tandi
503 montre le sens du sacrifice de « ces jeunes gens qui sont entrés dans le malheur la tête haute ». Car ce sont « les jeunes
504 r la tête haute ». Car ce sont « les jeunes gens, qui ne possédaient rien, qui ont écrit les pages héroïques de l’histoire,
505 sont « les jeunes gens, qui ne possédaient rien, qui ont écrit les pages héroïques de l’histoire, et non les gens âgés qui
506 ges héroïques de l’histoire, et non les gens âgés qui possédaient tout. Ces jeunes Allemands qui doivent supporter, de nos
507 s âgés qui possédaient tout. Ces jeunes Allemands qui doivent supporter, de nos jours, toutes les misères du monde au fond
508 mmunauté comme le malheur. La communauté des gens qui vivent dans l’aisance, celle-là ne vaut pas un clou. Mais la communau
509 ar le malheur, ça c’est la seule vraie communauté qui puisse exister pour un peuple ». ⁂ J’ai tenu à citer ces passages pou
510 mmes ici au nœud tragique de ce problème allemand qui domine l’après-guerre, et dont le dénouement doit nous laisser d’auta
511 st malaisé de faire la part, dans ce drame, de ce qui est national et de ce qui est plus généralement humain. Destin allema
512 t, dans ce drame, de ce qui est national et de ce qui est plus généralement humain. Destin allemand pourrait aussi s’appele
513 rique du Sud fait mesurer la déchéance d’une race qui n’a pas su se garder pure. Alors ? Serait-ce bientôt l’heure de l’All
514 peut-être, l’arrière-pensée mondiale, grandiose, qui soutient ce peuple fiévreux dans les épreuves qu’il traverse. Ce ne s
515 euves qu’il traverse. Ce ne sont pas les journaux qui nous apprendront tout cela. Il faut lire Destin allemand, comme on li
516 fraternité humaine que le roman d’André Malraux, qui porte précisément ce titre, était loin d’évoquer avec une pareille pu
517 mosphère et leur tension65, à ce Destin allemand, qui , toutefois, les domine. Edschmid est plus viril, plus massif, plus sa
518 ère et courageuse, un souffle, une grandeur enfin qui nous ramènent puissamment au sens de la réalité humaine, au sens de l
519 humaine, au sens du péché concret de l’homme. Et qui rendent à notre jugement une rigueur qui se perdait à soupeser des ob
520 omme. Et qui rendent à notre jugement une rigueur qui se perdait à soupeser des objets trop petits. 63. Il est curieux de
521 uel sort le Troisième Reich a réservé à ce livre, qui parut au moment de l’avènement d’Hitler. Mais je le crois trop franc
522 des conclusions sur le destin de la race blanche, qui forment l’arrière-plan idéologique de son œuvre. Leurs manières de dé
22 1935, Foi et Vie, articles (1928–1977). Notes en marge de Nietzsche (mars 1935)
523 s longtemps inédits, et dont M. Henri-Jean Bolle, qui a traduit et fort bien introduit ce volume, nous affirme qu’ils const
524 Je ne sais ce qu’il faut penser d’une allégation qui paraît à première vue aussi exorbitante : je n’ai lu que de courts fr
525 courts fragments des posthuma nietzschéens 66. Ce qui est certain, c’est qu’un choix tel que celui qu’on vient de nous donn
526 ne peut être vraiment dangereux pour un chrétien qui sait en qui il croit. Et pour les autres, qu’importe qu’ils perdent à
527 e vraiment dangereux pour un chrétien qui sait en qui il croit. Et pour les autres, qu’importe qu’ils perdent à cette lectu
528 uis tout citer : je me bornerai donc aux passages qui me paraissent prêter à un commentaire marginal, crayonné rapidement,
529 devant les regards de l’homme. Le christianisme, qui maudit l’humanité et en sort quelques spécimens rares et réussis, est
530 llénaires à venir puissent produire quelque chose qui ne soit pas, dès maintenant et depuis 1800 ans, à la disposition de c
531 Kierkegaard ! N’est-ce pas Kierkegaard, en effet, qui , cinquante ans avant Nietzsche, partait en guerre contre la philosoph
532 st, selon Kierkegaard, cette opération paradoxale qui nous rend contemporains du Christ incarné, et qui nie par là même la
533 qui nous rend contemporains du Christ incarné, et qui nie par là même la valeur de tous les siècles qui nous séparent appar
534 qui nie par là même la valeur de tous les siècles qui nous séparent apparemment de cet événement éternel. N’est-il pas fort
535 ions pseudo-scientifiques ! Mais il n’importe. Ce qui est admirable ici, c’est la lucidité avec laquelle Nietzsche décèle l
536 rds d’années. Nous sommes des enfants de deux ans qui auraient encore dix mille ans à vivre. L’esprit métaphysique me souff
537 t fait de la religion la chose la plus répugnante qui soit. Oui, je sais bien de quoi il souffre, et contre quelle espèce
538 ait de l’intelligence la chose la plus répugnante qui soit. » Il faut perdre la croyance en Dieu, en la liberté et en l’im
539 foi est toujours une seconde dentition. Et celui qui n’est pas mort une bonne fois aux « croyances » héritées sans examen
540 Cène. Kierkegaard n’eût pas mieux dit. « Pensées qui blessent — pour édifier » — c’est ainsi qu’il nommait les remarques a
541 si Nietzsche entendait parler de la foi. La foi, qui donne à l’homme la vision réaliste du péché, crée la crise bien davan
542 la crise bien davantage qu’elle n’en résulte. Ce qui résulte inévitablement d’une crise que la foi ne résout pas (en lui s
543 re l’a connu et aimé ? Phrase typique d’un homme qui n’a jamais rencontré Dieu en Christ ; pas plus qu’on ne saurait renco
544 crie-t-il si fort que « l’homme est quelque chose qui doit être surmonté » ? Il n’y a pas que les chrétiens pour ne pas cro
545 nquiet sur le mien. Mauvais signe pour un penseur qui a entrepris d’ébranler nos fondements. Si j’essaie de m’expliquer cet
546 s », sans jamais renvoyer à une autorité centrale qui donnerait la synthèse de ces contradictions. La vie chrétienne est pl
547 les a toutes rassemblées dans une formule unique qui renvoie au fondement même du christianisme : l’opposition du péché et
548 se comme but unique de celle-ci, voilà une pensée qui est insupportable aux hommes. Ne voyons-nous pas au contraire le mon
549 e que les hommes ne supportent plus aucune pensée qui contredise celle-là ! Le christianisme a promis le royaume des cieux
550 t bien là la malhonnêteté du positivisme primaire qui régna sur le siècle dernier, et dont l’œuvre de Nietzsche a subi trop
551 à leur Dieu, tout en croyant le servir. » Formule qui n’est pas valable pour le seul pape de Rome et pour les seuls concile
552 que ce régime s’est établi au nom de la Science, qui est son Dieu. On sait aussi qu’il n’a pas hésité à condamner la théor
553 eu devient insupportable. C’est le « Dieu moral » qui empêche, en particulier, une certaine théologie libérale de reconnaît
554 toutes ces choses. N’est-ce pas ce « Dieu moral » qui détourna plusieurs générations des églises où on le prêchait envers e
555 de Dieu : en somme, ce n’est que le “Dieu moral” qui est réfuté. Il est bien significatif que les fragments de Nietzsche
23 1937, Foi et Vie, articles (1928–1977). Luther et la liberté (À propos du Traité du serf arbitre) (avril 1937)
556 ître : on prétend, sans l’avoir jamais lu, savoir qui il fut, qui il est. Certains ont parcouru les Propos de table, présen
557 étend, sans l’avoir jamais lu, savoir qui il fut, qui il est. Certains ont parcouru les Propos de table, présentés au publi
558 dée : « En somme, qu’est-ce que Luther ? Un moine qui a voulu se marier. » J’extrais cette déclaration du livre d’un critiq
559 eur des travaux de quelques spécialistes français qui , au niveau de la haute culture, ont largement sauvé l’honneur de leur
560 pectateur » et attitude du « témoin ». Opposition qui , sur le plan théologique, ou mieux : dans la totalité de l’être, revi
561 ité de l’être, revient à celle d’un christianisme qui se met au service de l’humain (j’entends bien de l’humain purifié, « 
562 éflexion de plus vaste envergure, d’un témoignage qui transcende toute dispute. Entraîné par sa fougue habituelle, excité (
563 entales de la Réforme : justification par la foi, qui est don gratuit et œuvre de Dieu seul ; opposition de cette justice d
564 it au mérite des œuvres ; et tous les protestants qui jugent encore que Calvin et Luther ont fait leur temps, — que dire de
565 — que dire de Paul bien plus ancien ! — tous ceux qui tiennent la prédestination pour un dogme immoral ou périmé ; ceux qui
566 estination pour un dogme immoral ou périmé ; ceux qui traduisent : « Paix sur la terre aux hommes que Dieu agrée », par « P
567 ès lors dans ce Traité ? Une verdeur de polémique qui peut flatter en nous le goût du pittoresque ; l’élan génial, la viole
568 ment « grave », d’une dialectique sobre et têtue, qui va droit au point décisif, envisage honnêtement les objections, donne
569 chez Luther assez flagrantes, pour qu’un lecteur qui refuse l’essentiel soit tout de même attiré et subjugué par le style,
570 r heurter de front le lecteur incroyant, ou celui qui ne partage pas la foi de Paul et des apôtres. D’abord, le langage sco
571 et des apôtres. D’abord, le langage scolastique, qui n’est pas proprement luthérien, mais que Luther est obligé d’utiliser
572 ses reflets dans la conscience du spectateur.) Ce qui ne manquera pas de faire crier au dogmatisme. Tout se passe ici « à l
573 tement anachronique, mais que je sais inévitable, qui consiste à affirmer que Luther est « déterministe ». Mais le sérieux
574 éroule même à l’intérieur de la pensée d’un homme qui veut croire…) Dialogue Car Dieu peut tout à tout instant. C’est
575 l’omniscience et la prescience éternelle de Dieu, qui ne peut faillir dans sa promesse, et auquel nul obstacle ne s’oppose.
576 avance, le vainqueur a été désigné par un arbitre qui ne tient pas compte de nos exploits ! Un luthérien. — Mais connais-t
577 s connais-tu seulement les vraies règles du jeu ? Qui t’a fait croire que ta vie était une partie à jouer entre toi et le m
578 L. — Mais qu’est-ce qu’agir ? Est-ce vraiment toi qui agis ? Ou n’es-tu pas toi-même agi par de puissantes forces sociales,
579 ues ; à m’affirmer dans mon autonomie par un acte qui crée ma liberté, par un acte de révolte, s’il le faut ! L. — Tu croi
580 ar elles sont dans le temps, Dieu dans l’Éternité qui est avant le temps, qui est en lui, et qui est encore après lui. Au r
581 mps, Dieu dans l’Éternité qui est avant le temps, qui est en lui, et qui est encore après lui. Au regard de Dieu donc, « to
582 ernité qui est avant le temps, qui est en lui, et qui est encore après lui. Au regard de Dieu donc, « tout est accompli »,
583 c’était vrai, je préférerais encore nier ce Dieu qui prétend voir plus loin que le terme de mes actions, — ce qui, avouons
584 voir plus loin que le terme de mes actions, — ce qui , avouons-le, les ridiculise complètement et les rend vaines en fin de
585 es sont prévues ! Et prévues par un Dieu éternel, qui alors se joue de moi indignement ! Il faudra donc choisir : Dieu ou m
586 décidais : « Je suis, donc Dieu n’est pas !70 », qui t’assurerait que cet acte de révolte échappe à l’éternelle Prévision 
587 acte de révolte échappe à l’éternelle Prévision ? Qui t’assurerait qu’en prononçant ces mots, tu ne prononcerais pas sur to
588 tre rivé au temps sans fin, et refuser l’éternité qui vient nous délivrer du temps ? C. M. — Mais mon temps est vivant, et
589 e, et que notre vie n’est qu’une mort à ses yeux. Qui nous prouve que l’éternité est quelque chose d’immobile, de statique 
590 rnité est quelque chose d’immobile, de statique ? Qui nous dit qu’elle n’est pas, au contraire, la source de tout acte et d
591 étuelle, une actualité permanente, la seule chose qui change quelque chose au déroulement calculable du temps, quand elle l
592 de temps, comme l’écrit Paul) (I Cor. 15 : 52) ? Qui t’assure que notre raison, tout attachée à notre chair, à notre temps
593 Demandez et l’on vous donnera », dit le même Dieu qui nous prédestina ! Quand le croyant, qui sait que Dieu a tout prévu ét
594 même Dieu qui nous prédestina ! Quand le croyant, qui sait que Dieu a tout prévu éternellement, adresse à Dieu, au nom de s
595 « l’Éternel est vivant », croire que sa volonté —  qui a tout prévu — peut aussi tout changer en un instant aux yeux de l’ho
596 e décision dans le passé ! Quand c’est elle seule qui définit notre présent ! Est-ce que nos objections « philosophiques »,
597 u n’as rien prouvé. L. — On ne prouve rien de ce qui est essentiel ; on l’accepte ou on le refuse, en vertu d’une décision
598 où elle revêt sa vraie réalité : c’est l’Éternel qui commande, — ou c’est moi. Il n’y a pas là de difficultés intellectuel
599 lise, une fois acceptés le Credo et son fondement qui est la Parole dite en nous par l’Esprit et attestée par l’Écriture, —
600 té d’un paradoxe que Luther n’a pas inventé, mais qui est au cœur même de l’Évangile. L’apôtre Paul l’a formulé avant toute
601 t avec crainte et tremblement, puisque c’est Dieu qui produit en vous le vouloir et le faire. » (Phil. 2 : 12-13). C’est pa
602 seul, la liberté. Mais cela n’apparaît qu’à celui qui ose aller jusqu’aux extrêmes de la connaissance de soi-même et de la
603 bsurdité. Mais alors, on peut se demander si ceux qui refusent le christianisme échappent vraiment à la difficulté ; ou si,
604 s temps modernes, Nietzsche, aboutit à un dilemme qui me paraît correspondre, terme à terme, à celui que Luther et Paul — e
605 nvisager notre pensée. Pour échapper au nihilisme qui l’étreint, dès lors que « Dieu est mort » ou qu’il l’a « tué », il im
606 accepter, en acte, l’éternelle prévision du Dieu qui sauve.) La similitude étonnante du paradoxe luthérien et du paradoxe
607 radicale de la vie. Au « tu dois » des chrétiens, qui est prononcé par Dieu, Nietzsche oppose le « je veux » de l’homme div
24 1946, Foi et Vie, articles (1928–1977). Fédéralisme et œcuménisme (octobre 1946)
608 s. Elles souffrent avant tout d’un manque de ton, qui révèle un manque de nécessité intérieure. Elles expriment l’accord d’
609 leur historique. Mais comme beaucoup de documents qui prennent par la suite une valeur historique, elles auront passé inape
610 ence, il faut qu’elle soit portée par une passion qui jaillisse du tréfonds de sa foi créatrice. Les hommes qui ont fait l’
611 lisse du tréfonds de sa foi créatrice. Les hommes qui ont fait l’histoire sont ceux qui avaient une vision passionnée de le
612 ice. Les hommes qui ont fait l’histoire sont ceux qui avaient une vision passionnée de leur but et qui ont su plier les cir
613 qui avaient une vision passionnée de leur but et qui ont su plier les circonstances à leur dessein. Dans un certain sens,
614 e en termes d’organisation pratique les principes qui sont impliqués dans la vision de l’œcuménisme. Rien que cela, mais to
615 lations. Que l’on excuse le schématisme des pages qui suivent : c’est celui d’un plan de travail, d’un sommaire. Certains
616 e des théologies existantes, ou doctrine nouvelle qui risquerait de n’être compatible avec aucune des théologies existantes
617 patible avec aucune des théologies existantes. Ce qui nous intéresse ici, c’est la doctrine concernant l’Église universelle
618 nous bornerons ici à en souligner quelques traits qui importent à notre entreprise. Le principal est celui-ci : la théologi
619 et définitive. Car c’est précisément cette utopie qui a produit les schismes et les oppositions que le mouvement œcuménique
620 le plus de force la légitimité des diversités. Ce qui me paraît d’une excellente méthode.) Est-il permis d’en appeler aussi
621 role « Soyez un comme le Père et moi sommes un », qui établit le modèle même de l’union dans la distinction des personnes ?
622 i ouvertes. Elle ne peut embrasser une orthodoxie qui céderait consciemment à la tentation unitaire, c’est-à-dire qui tendr
623 onsciemment à la tentation unitaire, c’est-à-dire qui tendrait à se fermer sur elle-même et à n’admettre plus de recours di
624 ne particulière. Au principe d’union transcendant qui assure la permanence de l’Église universelle, certaines ont ajouté, e
625 époque, dans les Églises calvinistes. Une Église qui prétend se suffire et posséder son principe d’unité, une Église qui t
626 fire et posséder son principe d’unité, une Église qui tend à se fermer par le haut pour mieux assurer sa cohésion humaine,
627 à être un bon cœur. Notons aussi que les Églises qui ne représentent pas spirituellement une fonction distincte, mais seul
628 r enveloppent une doctrine de l’homme. Au conflit qui oppose l’unité et la division dans le plan de l’Église, correspond te
629 de l’Église, correspond terme à terme le conflit qui oppose la collectivité et l’individu dans le plan de la société. Et d
630 ménisme retrouve la position spirituelle centrale qui fonde l’union dans la diversité, nous avons à chercher la position ph
631 ons à chercher la position philosophique centrale qui fonde la communion humaine dans la liberté. Je l’appelle le personnal
632 e même de l’hellénisme. C’est l’homme de la tribu qui se met à réfléchir « pour son compte », et qui, de ce fait même, se d
633 bu qui se met à réfléchir « pour son compte », et qui , de ce fait même, se distingue et s’isole. Raisonner, c’est d’abord d
634 ormiste ». Ce sont ces expulsés de divers groupes qui fondent les premières thiases grecques, communautés comparables à la
635 ide, où l’individu isolé retrouve des contraintes qui le rassurent, et où l’État reprend sa puissance. C’est Rome alors qui
636 où l’État reprend sa puissance. C’est Rome alors qui nous donnera le symbole éternel de la réaction collective. La victoir
637 point crucial de l’histoire — dans une situation qui rappelle étrangement la lutte présente entre démocratie individualist
638 aux, leurs hiérarchies, leurs assemblées. L’homme qui se convertit et s’incorpore à l’un de ces groupes y trouve d’une part
639 groupes y trouve d’une part une activité sociale qui le relie à ses « frères » et le sauve de la solitude ; d’autre part,
640 tin de persona (rôle social). C’est ce même terme qui servira aux premiers philosophes chrétiens à désigner la réalité de l
641 vis-à-vis de la collectivité. C’est le même Dieu qui , par la vocation qu’il envoie à l’homme, distingue cet homme de tous
642 l’ensemble. Ils ne sont plus contradictoires. Ce qui libère un homme est aussi ce qui le rend responsable vis-à-vis d’autr
643 tradictoires. Ce qui libère un homme est aussi ce qui le rend responsable vis-à-vis d’autrui. En retour, ce qui unit la com
644 end responsable vis-à-vis d’autrui. En retour, ce qui unit la communauté est aussi ce qui l’oblige à respecter les vocation
645 En retour, ce qui unit la communauté est aussi ce qui l’oblige à respecter les vocations individuelles. La liberté du siècl
646 professionnel. Cette pluralité d’appartenances — qui trouverait son équivalent dans l’œcuménisme ecclésiastique — est excl
647 siastique — est exclue par le régime totalitaire, qui prétend faire coïncider les frontières de l’État avec celles de toute
648 activités sociales, spirituelles ou privées — ce qui est la définition même de l’oppression. Le fédéralisme, comme l’œcumé
649 la vie même de l’Union. Mais par l’organe central qui lie toutes les régions, il ménage un recours au citoyen contre les ab
650 pétrifier les frontières extérieures des groupes qui forment la fédération, il cherche à vivifier leurs foyers. Et de la s
651 ratif. Mais ceci nous entraînerait dans un exposé qui déborde le cadre de ce schéma doctrinal. Notre objet était d’établir
652 e pas voir figurer le terme de démocratie dans ce qui précède. C’est qu’il recouvre actuellement de trop graves malentendus
653 ez eux la « démocratie ». Ils attendent un régime qui puisse allier la liberté à la communauté. Dans le fédéralisme, démocr
654 e et une tactique nouvelles. Mais où sont-elles ? Qui les prépare ? Le capitalisme et l’individualisme ont reçu en Europe d
655 ux camps. Le totalitarisme est un état de guerre, qui ne peut subsister normalement. Il ne reste donc à prévoir qu’un vide
656 La seule espérance et aussi la seule possibilité qui demeure, c’est l’organisation fédéraliste du monde. Elle seule apport
657 au capitalisme individualiste et au totalitarisme qui en est né. Mais qui peut aujourd’hui proposer cette réponse ? Le rôle
658 idualiste et au totalitarisme qui en est né. Mais qui peut aujourd’hui proposer cette réponse ? Le rôle d’Hitler est de dét
659 ruit les contradictions intolérables d’une Europe qui s’obstinait à parler de justice et de droit en restant capitaliste et
660 droit en restant capitaliste et nationaliste, et qui refusait de se fédérer. Hitler abat les barrières, le passé. C’est to
661 chef, elles savent qu’il règne et crée pour ceux qui croient la possibilité de faire ce qu’il demande. Dans l’état d’impui
662 liques romaines, — alors qu’il n’en existe aucune qui se soit développée en pays calvinistes, ou seulement influencés par d
663 formité de gouvernement pour les diverses Églises qui se réclamaient de sa réforme. L’Una Sancta nous apparaît ici-bas, sel
664 ys donné fournit une clé des processus politiques qui s’y manifesteront tôt ou tard ; 2° que l’action, que le mouvement œcu
665 itée, rien ne subsiste en dehors de l’œcuménisme, qui permette de mettre en relations des groupes nationaux non étatiques.
666 dire, une vocation. 4. La renaissance liturgique qui va de pair, dans toutes les Églises, avec l’effort œcuménique, est en
667 s vraies formules de la communauté vivante, celle qui rassemble les personnes, et non pas celle qui fond, en une masse info
668 lle qui rassemble les personnes, et non pas celle qui fond, en une masse informe et grossièrement encadrée, les individus p
669 er les vérités disjointes et tournées en erreurs, qui subsistent dans les démocraties et dans les mouvements totalitaires.
670 erreurs opposées, mais sur une attitude centrale qui dépasse ces erreurs en même temps qu’elle ré-axe les vérités égarées
671 res et convaincantes pour devenir une volonté. Ce qui manque à ces tentatives dispersées, c’est un arrière-plan spirituel c
672 1946 : Je n’ai pas un mot à changer au diagnostic qui suit. ab. Rougemont Denis de, « Fédéralisme et œcuménisme », Foi et
25 1977, Foi et Vie, articles (1928–1977). Pédagogie des catastrophes (avril 1977)
673 ut pour mieux s’en libérer. Ils choisissent celle qui les a dominés, mais c’est choisir aussi celle qui les a perdus ! Je l
674 qui les a dominés, mais c’est choisir aussi celle qui les a perdus ! Je leur propose l’Europe des régions, comme offrant la
675 sance à tout prix des formules d’équilibre humain qui prennent en compte le bonheur, ou simplement l’aisance à vivre, plutô
676 e l’Europe est responsable de la plupart des maux qui accablent le tiers-monde, et d’abord de son explosion démographique,
677 a répandues, et peut élaborer un modèle politique qui soit tentant pour le tiers-monde. Quant à savoir si le tiers-monde s
678 crupules, non pas perdant et devenu sage. Mais ce qui est sûr, c’est qu’en refusant de faire les régions et de se « faire »
679 votre projet ? Quelles forces peut-il mobiliser ? Qui est pour ? Qui sera contre ? Et qui va le prendre en charge ? — Je ne
680 Quelles forces peut-il mobiliser ? Qui est pour ? Qui sera contre ? Et qui va le prendre en charge ? — Je ne serais pas ten
681 l mobiliser ? Qui est pour ? Qui sera contre ? Et qui va le prendre en charge ? — Je ne serais pas tenu de répondre à ces q
682 faire peut-être un jour… Je n’en vois pas un seul qui ait risqué l’expérience, dont rien ne prouve qu’elle n’eût pas réussi
683 estion que je ne cesse de me poser. Vous demandez qui va réaliser mon plan. À vrai dire, il y a toutes raisons de redouter
684 r à bref délai ; et la vision d’un avenir vivant, qui peut faire se lever d’autres forces. Rien de ce qui nous semble aujou
685 i peut faire se lever d’autres forces. Rien de ce qui nous semble aujourd’hui définitivement installé dans une évidence gra
686 euple, ni le dévouement rituel d’une aristocratie qui sait ce qu’elle se doit. Plus grave encore, cette civilisation ne peu
687 cette raison est faible, comparée à toutes celles qui annoncent le contraire, particulièrement à celle-ci : qu’est-ce que l
688 et politiques proposées au long de ces pages, et qui vont des petites communautés à la fédération du continent, première b
689 r des partis grâce aux quelques centaines de voix qui font toute la différence. Déjà, un régime scandinave vient de se voir
690 à la révolution régionaliste le levier politique qui avait fait défaut aux mouvements personnalistes des années 1930, puis
691 s et des économistes comme E. F. Schumacher, pour qui l’avenir est aux « petites unités intelligibles » ; des politologues
692 mme C. N. Parkinson (de la loi du même nom), pour qui l’Europe de demain ne sera viable que si elle se recompose sur la bas
693 la carte. Je vois des architectes comme Doxiadis, qui écrit : « L’expérience nous apprend que seules des unités de dimensio
694 nts et leur offrir un cadre de vie plaisant », et qui préconise au surplus de « petites cellules urbaines à l’échelle humai
695 ts75 ; enfin des futurologues comme Hermann Kahn, qui voit nos États-nations, ayant perdu leurs raisons d’être, bientôt rem
696 dix-mille ans qu’il y a des hommes à Histoire, et qui n’ont pas trouvé mieux que la guerre pour résoudre leurs différends,
697 pour résoudre leurs différends, on ne voit pas ce qui pourrait justifier l’espoir fou qu’ils deviennent raisonnables dans l
698 , quel qu’en soit d’ailleurs le succès ! Attitude qui n’est pas différente de celle que j’annonçais dans ma jeunesse sous l
699 is n’aura pu faire, et c’est la réalité elle-même qui va recourir à la pédagogie des catastrophes. Je ne vois rien de plus
700 n d’un facteur de danger mortel, bien avéré, mais qui rapporte. Je disais cela dans mon jardin du pays de Gex devant la cam
701 es, les besoins infinis, les centrales nucléaires qui vont arranger cela et qu’on dit au surplus tellement propres… Mais co
702 opres à faire le bien. Saint-Just ajoutait : Ce qui produit le bien général est toujours terrible, ou paraît bizarre lors
703 , mais une plus grande lisibilité de l’évolution, qui peut faciliter ce changement. Les catastrophes n’apprendront rien à c
704 ement. Les catastrophes n’apprendront rien à ceux qui n’ont pas vu où il faut aller, et donc n’en cherchent pas les voies e
705 inventeront jamais. « Pas de vent favorable pour qui ne sait pas où il va », disait Sénèque. Mais pour celui qui sait, tou
706 t pas où il va », disait Sénèque. Mais pour celui qui sait, tout est possible tant qu’un vent souffle, même contraire. Tire
707 ouloir, préparer d’autres fins. Cette dialectique qui ne prévoit ni A ni B, mais incite à trouver des chemins vers V, je la
708 ura plus de sens si nous ne sommes plus là, ou ce qui revient au même, si nous sommes encore là mais aliénés, devenus incap
709 nés, devenus incapables même de nostalgie pour ce qui fut un jour notre vie menacée. Mais il n’est pas de prévision d’aveni
710 Mais il n’est pas de prévision d’avenir meilleur qui ne passe par un homme meilleur. Car il arrivera… ce que nous sommes.
711 emarque). Mais seulement : — Remplacez ce système qui multiplie les occasions de haine par un autre qui favorise et qui app
712 qui multiplie les occasions de haine par un autre qui favorise et qui appelle la solidarité. Or ce changement n’adviendra p
713 s occasions de haine par un autre qui favorise et qui appelle la solidarité. Or ce changement n’adviendra pas dans le résea
714 toute sa force et dans la plénitude de son sens. ( Qui n’est pas limité à « devenez chrétiens ! ». Isaïe n’était pas chrétie
715 ordinateur bien programmé ? Puissance ou Liberté, qui tranchera ? Entre le besoin de sécurité à tout prix et la soif de lib
716 onction de la chose la moins prévisible du monde, qui est la vitalité d’une société. Mais il nous faut pousser l’analyse su
717 avec une très grande et très profonde stupidité, qui amène des éthologistes à penser que se manifeste, dans l’humanité d’a