1
uire de ces erreurs que Luther conduit à Hitler :
il
suffit, pour y arriver, d’oublier quelques faits importants. Il suffi
2
r y arriver, d’oublier quelques faits importants.
Il
suffit d’oublier, par exemple, que le Führer autrichien n’est pas né
3
ays catholique ; que la doctrine de Luther, là où
elle
a triomphé sans résistance notable, c’est-à-dire en Scandinavie, n’a
4
Allemagne, à demi luthérienne seulement, mais qu’
il
a triomphé d’abord dans une Russie tout orthodoxe, et dans une Italie
5
ait même que tout en détestant les chefs nazis, «
il
se ferait tuer pour Hitler », car l’ambition réelle du Führer, croyai
6
itler », car l’ambition réelle du Führer, croyait-
il
, était d’appliquer le programme communiste. (Je donne cette opinion p
7
me communiste. (Je donne cette opinion pour ce qu’
elle
vaut.) Le petit livre que j’ai écrit là-dessus m’a valu deux articles
8
rançais, approuvait sans réserve mon diagnostic ;
il
soulignait la tendance nationaliste qu’avait toujours montrée le soci
9
en connaissance de cause, je puis le dire, puisqu’
il
était signé par Émile Vandervelde, ancien président de la IIe Interna
10
erreurs d’autrui, mais bien les nôtres. Surtout s’
il
se trouve qu’en fait, ce sont exactement les mêmes erreurs. 4. Si d’a
11
es. Or les vieux poèmes allemands, pour autant qu’
ils
ne sont pas les traductions de chants islandais ou scandinaves, sont
12
. Hubert, le meilleur celtisant français, n’écrit-
il
pas que dans la mythologie des Celtes, « l’idée de la mort domine tou
13
de ce procédé historique et littéraire, c’est qu’
il
dispense de mentionner des causes prochaines, beaucoup plus claires,
14
n Européen. La Ville Lumière n’est pas détruite :
elle
s’est éteinte. Désert de hautes pierres sans âme, cimetière… L’envahi
15
t prophétisé : le 15 juin, j’entrerai dans Paris.
Il
y entre, en effet, mais ce n’est plus Paris. Et telle est sa défaite
16
jourd’hui ces rues les plus émouvantes du monde :
Il
ne les connaîtra jamais. Il ne verra que d’aveugles façades. Il s’est
17
émouvantes du monde : Il ne les connaîtra jamais.
Il
ne verra que d’aveugles façades. Il s’est privé à tout jamais de quel
18
aîtra jamais. Il ne verra que d’aveugles façades.
Il
s’est privé à tout jamais de quelque chose d’irremplaçable, de quelqu
19
tragique de ce conquérant victorieux : Tout ce qu’
il
veut saisir se change à son approche — Midas de l’ère prolétarienne —
20
cessaire pour faire comprendre au monde entier qu’
il
est des victoires impossibles. On ne conquiert pas avec des chars les
21
l’âme et les raisons de vivre dont on manque. Qu’
ils
fassent dix fois le tour du monde ! Ils ne rencontreront partout que
22
anque. Qu’ils fassent dix fois le tour du monde !
Ils
ne rencontreront partout que le fracas du néant mécanique. Jusqu’au j
23
e jour de la pire vengeance où, s’arrêtant enfin,
ils
comprendront qu’aucun triomphe ne vaut pour eux la moindre des réalit
24
vaut pour eux la moindre des réalités humaines qu’
ils
ont tuées. « …car ils ne savent ce qu’ils font. » Le 15 juin 1940.
25
re des réalités humaines qu’ils ont tuées. « …car
ils
ne savent ce qu’ils font. » Le 15 juin 1940. b. Rougemont Denis de
26
ines qu’ils ont tuées. « …car ils ne savent ce qu’
ils
font. » Le 15 juin 1940. b. Rougemont Denis de, « À cette heure où
27
La mer et la montagne se ressemblent partout. Ici
elles
se rejoignent et se mêlent. Les grands souffles océaniques, chargés d
28
it. Autrefois les glaciers sont venus jusqu’ici !
Ils
couvraient la moitié de l’île, et la moraine s’étendait bien plus ava
29
e revêtent ici le climat et les rapports humains.
Ils
pensent, dans leur ignorance, que c’est une ville trop « européenne »
30
e en décade, à travers le Far West, jusqu’à ce qu’
ils
eussent rejoint les terres du Pacifique. On ne pouvait plus rien ajou
31
reignait l’âme américaine, prise de nausée dès qu’
elle
ressent l’approche d’une limite infranchissable. Où s’élancer encore
32
r de cet embouteillage de richesses matérielles ?
Il
restait à construire des routes. Depuis dix ans, les autostrades amér
33
même un expédient pour lutter contre le chômage.
Elles
sont le produit du rêve et de la vitalité inépuisable d’un peuple lib
34
neaux de toutes formes et couleurs. Sans relâche,
ils
croissent en gros plan et disparaissent en coup de vent, jusqu’à ce q
35
ut-être alors les masses elles-mêmes comprendront-
elles
qu’il n’est qu’un seul infini véritable : celui que chacun porte en s
36
lors les masses elles-mêmes comprendront-elles qu’
il
n’est qu’un seul infini véritable : celui que chacun porte en soi, ce
37
té, les maisons dominaient une vallée, de l’autre
elles
s’élevaient à peine d’un étage au-dessus des champs de roses et des b
38
erser, et l’on parvient dans la grand-rue : comme
elle
est vide ! Les toits d’ardoises ne dépassent pas les façades nues, br
39
Rares sont les boutiques, et même les cafés. Et s’
il
passe une auto, c’est une de ces voitures branlantes qui semblent ne
40
u pays après une longue absence et des déboires :
il
entre, il ne trouve personne. Mais ses outils sont là, contre le mur.
41
ès une longue absence et des déboires : il entre,
il
ne trouve personne. Mais ses outils sont là, contre le mur. Il repren
42
personne. Mais ses outils sont là, contre le mur.
Il
reprend le chemin de son champ. En passant au carrefour, il s’est dit
43
le chemin de son champ. En passant au carrefour,
il
s’est dit : Peut-être est-elle à Mandres ; c’est donc jour de marché.
44
assant au carrefour, il s’est dit : Peut-être est-
elle
à Mandres ; c’est donc jour de marché. Il a écrit ces mots. Elle saur
45
e est-elle à Mandres ; c’est donc jour de marché.
Il
a écrit ces mots. Elle saura bien. Il a rejoint l’usage du pays, l’in
46
; c’est donc jour de marché. Il a écrit ces mots.
Elle
saura bien. Il a rejoint l’usage du pays, l’intimité des choses de to
47
de marché. Il a écrit ces mots. Elle saura bien.
Il
a rejoint l’usage du pays, l’intimité des choses de toujours. Et le m
48
i coule entre des saules et des peupliers blancs.
Il
faisait lourd et doux, le goudron de la route sentait plus fort que l
49
consulter, pour se renseigner sur notre pays, et
il
s’en vend encore régulièrement. J’ai été professeur — et le suis enco
50
ue parle aux Français », retransmise par Londres.
Il
me fallait faire chaque jour 20 à 30 pages, soit un quart d’heure de
51
uples et non des États. Vos derniers ouvrages ont-
ils
été traduits à l’usage des Américains ? J’ai un contrat avec une mais
52
a bombe atomique ont paru dans Le Figaro ? Oui,
elles
ont causé du scandale dans certains milieux, mais aussi beaucoup d’ap
53
vilisation que la nôtre, mais qui a ses valeurs à
elle
. Peut-on employer ce mot de civilisation pour un peuple si neuf ? Dis
54
st une question de mœurs, de rapports quotidiens.
Ils
n’ont pas de culture proprement dite, mais bien une civilisation scie
55
se former, et de gens extrêmement gentils. Y a-t-
il
bien, à votre avis, une puérilité américaine ? Et quel jugement porte
56
xtravagant qui nous viennent de là-bas ? Puérils,
ils
le sont à nos yeux sur certains points, et nous le sommes à leurs yeu
57
). À côté d’eux, nous sommes un peu « névrosés ».
Ils
sont évidemment très simplistes dans ce qu’ils impriment, et manquent
58
». Ils sont évidemment très simplistes dans ce qu’
ils
impriment, et manquent d’esprit critique. Quant à leurs loufoqueries,
59
ue. Quant à leurs loufoqueries, ne croyons pas qu’
ils
les prennent au sérieux : c’est un genre d’humour qui leur plaît, et
60
ieux : c’est un genre d’humour qui leur plaît, et
ils
ne font que s’en amuser. Si on les compare aux Français, il est indén
61
que s’en amuser. Si on les compare aux Français,
il
est indéniable que ces derniers, quoi qu’on dise, sont beaucoup plus
62
comprendre leur continent grâce à l’éloignement,
il
faudrait que le plus grand nombre possible d’Européens eussent l’occa
63
quitter leur « province » pour s’y rendre. N’ont-
ils
donc rien à craindre de l’américanisme ? Pour ce qui est du matériali
64
, et c’est là une de leurs grandes ressemblances (
il
y en a beaucoup) avec les Suisses. Non, plutôt que l’influence de la
65
le ton, et où l’Amérique semble copier l’image qu’
elle
s’y fait d’elle-même ; par la baisse du niveau intellectuel auquel le
66
continent de la création. L’Amérique ne crée pas.
Elle
est plutôt complémentaire de l’Europe. Cela permettrait entre elles u
67
omplémentaire de l’Europe. Cela permettrait entre
elles
une entente fructueuse et solide. Et, à ce propos, on a tort en Europ
68
mpérialisme américain. J’ai peur, quant à moi, qu’
il
ne soit beaucoup trop timide ! Car les Américains redoutent énormémen
69
e Rougemont est revenu au pays de Neuchâtel, dont
il
est une des fiertés. Ce retour n’est d’ailleurs que provisoire, l’écr
70
l’écrivain ayant laissé sa famille en Amérique où
il
la retrouvera cet automne. Il a bien voulu nous accorder la primeur d
71
ille en Amérique où il la retrouvera cet automne.
Il
a bien voulu nous accorder la primeur d’une interview, ce dont nous l
72
ice d’une propagande étrangère, comme Oltramare ;
il
a parlé à la radio, comme Oltramare ; hors de Suisse, comme Oltramare
73
Oltramare encore. Les deux cas étant identiques,
il
faut donc condamner Rougemont, mais il faut acquitter Oltramare. Vous
74
dentiques, il faut donc condamner Rougemont, mais
il
faut acquitter Oltramare. Vous n’y comprenez rien ? Ni moi non plus.
75
re, et l’avocat fait une drôle de figure. Ou bien
il
faut acquitter Oltramare, mais alors il n’y a pas lieu de me dénoncer
76
. Ou bien il faut acquitter Oltramare, mais alors
il
n’y a pas lieu de me dénoncer, tout ce discours retombe à plat, et no
77
e des mots tombe dans le calembour juridique. Car
il
est vrai que les deux cas s’énoncent et se prononcent de même, mais p
78
nazis, pour les démocraties, donc pour la Suisse.
Il
en résulte à l’évidence que je faisais en Amérique exactement le cont
79
r se voit chargé d’office de ma défense. Que va-t-
il
dire ? Il n’hésite pas : il dit que j’ai fait comme Oltramare, notre
80
chargé d’office de ma défense. Que va-t-il dire ?
Il
n’hésite pas : il dit que j’ai fait comme Oltramare, notre infaillibl
81
ma défense. Que va-t-il dire ? Il n’hésite pas :
il
dit que j’ai fait comme Oltramare, notre infaillible führer suisse. O
82
oici la conclusion de ses réflexions narquoises ;
elles
intéresseront tous ceux, fort nombreux, qui ont jugé… surprenant le p
83
j k Questions 1 et 2. — Nous avons tout ce qu’
il
faut, en Suisse romande, pour nourrir une littérature. Nous avons peu
84
monde germanique. Mais nous n’avons rien de ce qu’
il
faut pour assurer le succès d’une œuvre : publicité, mouvement autour
85
iaux, politiques ou financiers. Je ne sais trop s’
il
faut s’en plaindre. Tout cela se crée naturellement autour des « gran
86
a se crée naturellement autour des « grands », et
ils
sont à Paris. Nous faisons partie de la littérature française. Or, il
87
s faisons partie de la littérature française. Or,
il
se trouve que la France est un pays centralisé, dans sa vie littérair
88
fait ? Imagine-t-on Chateaubriand se demandant s’
il
existe pour lui « une possibilité de salut » comme écrivain, « un pub
89
de soi. Question 3. – « Le départ vers Paris… »
Il
n’y a pas que Paris, mais c’est le départ qui importe. Combien de gra
90
départ qui importe. Combien de grandes œuvres ont-
elles
été écrites, et publiées, au lieu même et dans le milieu où leur aute
91
même et dans le milieu où leur auteur est né, où
il
a grandi ? J’en vois si peu, et je trouve en revanche tant d’exemples
92
là aussi bien un romancier qu’un dramaturge) a-t-
il
à sa disposition dans la réalité romande ou même helvétique des éléme
93
pas uniquement et strictement « locale » ? 2. A-t-
il
des chances d’être compris par ses compatriotes ? Trouvera-t-il un pu
94
d’être compris par ses compatriotes ? Trouvera-t-
il
un public ? Des appuis ? Un milieu ? 3. Le départ vers Paris n’est-il
95
ppuis ? Un milieu ? 3. Le départ vers Paris n’est-
il
pas, en même temps qu’une tentative de retrouver ailleurs ce que l’on
96
t indispensable au succès d’une œuvre littéraire,
il
ne se répand point en lamentations. Au contraire : il préconise des r
97
e se répand point en lamentations. Au contraire :
il
préconise des remèdes énergiques. »
98
a meilleure preuve de l’urgence de notre congrès.
Elle
dit tout haut ce que pensent des millions. Et elle le dit sans précau
99
lle dit tout haut ce que pensent des millions. Et
elle
le dit sans précautions, avec la calme outrance de la désillusion. El
100
utions, avec la calme outrance de la désillusion.
Elle
dit deux mots : trop tard. D’autres nous disent : trop tôt… Entre ceu
101
ourrait seul sauver l’Europe. Les autres dorment.
Ils
n’ont pas encore vu qu’on ne leur laissera plus le temps d’être prude
102
t de parler nous est encore laissé, mais c’est qu’
il
n’a plus d’importance. La possibilité d’agir nous est ôtée. » Venez d
103
ante. C’est l’illusion causée par la désillusion.
Elle
est très répandue, elle est si fascinante qu’elle risque bien de prov
104
ausée par la désillusion. Elle est très répandue,
elle
est si fascinante qu’elle risque bien de provoquer, comme tout vertig
105
Elle est très répandue, elle est si fascinante qu’
elle
risque bien de provoquer, comme tout vertige, la chute qu’elle imagin
106
ien de provoquer, comme tout vertige, la chute qu’
elle
imagine. Cette illusion d’optique consiste à voir une toute petite Eu
107
s communistes. Une Europe en partie ruinée ? Mais
elle
relève déjà ses industries ; et l’URSS n’a pas été traitée mieux qu’e
108
dustries ; et l’URSS n’a pas été traitée mieux qu’
elle
, qu’on s’en souvienne. Une Europe entre deux colosses ? Mais gardons-
109
de construction. Dans toutes les choses humaines,
elle
est une illusion. Il est vrai que l’Amérique souhaite l’union de l’Eu
110
outes les choses humaines, elle est une illusion.
Il
est vrai que l’Amérique souhaite l’union de l’Europe. Ce n’est pas la
111
eraient ! L’Amérique veut l’Europe unie, parce qu’
elle
a besoin de nous en tant qu’Européens, autonomes, et même concurrents
112
ns pas, d’ici deux ans, à nous fédérer librement.
Il
ne dépend que de nous d’y réussir. Les jeux ne sont donc pas faits. I
113
ous d’y réussir. Les jeux ne sont donc pas faits.
Il
nous reste deux ans. Nous perdrons ces deux ans si l’Europe dès maint
114
ns si l’Europe dès maintenant se croit perdue, si
elle
cède au vertige, à l’illusion d’urne impuissance qui alors seulement
115
eux qui ont lu votre livre l’ont senti, et même s’
ils
ignoraient que c’était votre histoire. Je vous invite à Lausanne en t
116
actif. Un dernier mot sur les hommes politiques.
Ils
ont eu leur congrès ailleurs. À Lausanne, ce seront les savants, les
117
t les philosophes qui prendront enfin la parole. (
Ils
auraient dû la prendre les premiers.) Et M. Spaak, seul homme d’État
118
ssi pouvaient penser que l’Étoile était illusion.
Elle
les conduisait dans la nuit vers un Enfant qui a sauvé le monde. l.
119
« Ce qu’
ils
pensent de Noël… » [Réponse] (24 décembre 1953)n Déjà les pasteurs
120
e, bonne volonté (de Dieu) envers les hommes. Est-
il
besoin de la bombe, et des grèves, et de la famine européenne, et de
121
de bonne volonté ? La plupart sont involontaires,
ils
ne font que subir leur condition. n. Rougemont Denis de, « [Répons
122
ugemont Denis de, « [Réponse à une enquête] Ce qu’
ils
pensent de Noël… », Gazette de Lausanne (supplément littéraire), Laus
123
e sont solidaires en fait, pour le meilleur quand
elles
le reconnaissent, et pour le pire quand elles le nient. Dans la confu
124
and elles le reconnaissent, et pour le pire quand
elles
le nient. Dans la confusion générale qui a suivi la journée des dupes
125
sans poser la question dans son ampleur, à tous.
Il
faut vouloir maintenant la vraie fédération, dans sa totalité, non pa
126
tion, dans sa totalité, non par pièces détachées.
Il
faut enfin se décider à expliquer l’Europe aux masses, avec franchise
127
concrets. La vraie lutte pour l’Europe commence.
Elle
ne sera pas gagnée dans ces lieux indécents que sont les couloirs de
128
mie — quand chacun de nos peuples aura compris qu’
il
s’agit de se sauver tous ensemble ou de périr isolément. o. Rougem
129
pas celle du ministre britannique de la Défense.
Elle
représente un homme anxieux, aux traits tendus par la fatigue et pres
130
traits tendus par la fatigue et presque lugubre.
Il
semble avoir été « piqué » par le photographe non point au terme d’un
131
décembre 1949. Mon ami Duncan Sandys y prit part,
il
est vrai, en tant que président du Mouvement européen. Votre photo me
132
icielle, de nos particularismes les plus désuets.
Il
voudrait que chacune de nos cités se suffise à elle-même dans tous le
133
re que cela n’est pas possible, en plus d’un cas,
il
pousse à préférer des solutions médiocres, mais « bien de chez nous »
134
x en restant libre et dispersé, voire anarchique.
Il
est clair que nos villes sont trop petites pour se payer chacune un l
135
rendre que cet exemple. Mais qu’on ne dise pas qu’
elles
sont trop petites pour que s’y développent à foison des écoles de pei
136
s plus petites que nos villes romandes actuelles.
Elles
sont tout de même devenues des foyers rayonnants de créations du prem
137
nt de princes et de grands marchands de l’époque.
Il
est trop clair qu’à l’absence de cette passion créatrice et de ce sen
138
st normalement de rationaliser les activités dont
ils
s’occupent, pour les rendre plus économiques ou plus rentables. Mais
139
égeant en revanche trop de médiocrité pour peu qu’
elles
aient été un jour inscrites à quelque budget d’État, et sous prétexte
140
nous publions un extrait de l’important exposé qu’
il
présentera aujourd’hui au congrès pour une collaboration culturelle r
141
d’une vérité n’est qu’une sottise, surtout lorsqu’
il
s’agit de fédéralisme ! Me faire dire que « tout le secret du fédéral
142
hui d’unir est d’abord une entité culturelle ; 3.
Il
en résulte que l’on ne doit et que l’on ne peut « faire l’Europe » qu
143
ulturelle » nous porte en pleine actualité, et qu’
elle
entraîne une politique bien définie. ⁂ La première proposition n’entr
144
proposition n’entraîne pas de longs commentaires.
Il
est évident que des peuples, ne songent à s’unir que s’ils ont en com
145
vident que des peuples, ne songent à s’unir que s’
ils
ont en commun certains traits qu’ils tiennent pour essentiels : leur
146
s’unir que s’ils ont en commun certains traits qu’
ils
tiennent pour essentiels : leur union consiste donc à restaurer ou à
147
n’est pas aussi évidente pour chacun. Cependant,
il
n’est pas difficile de l’établir. Quand je dis que l’Europe est d’abo
148
onner sur toute la terre par la civilisation dont
elle
est l’origine et le cœur. Voilà qui ne saurait s’expliquer que par la
149
n’est pas tombée du ciel ni sortie du sol, et qu’
elle
ne tire pas son origine et sa vitalité de notre nature, mais bien de
150
nos peuples et les extraordinaires diversités qu’
ils
juxtaposent sur un très petit territoire. Quand ces diversités tourne
151
en 1939, se résument dans le terme nationalisme.
Elles
sont, elles aussi, d’origine culturelle en dernière analyse. Mais l’o
152
résument dans le terme nationalisme. Elles sont,
elles
aussi, d’origine culturelle en dernière analyse. Mais l’opinion publi
153
du avec le patriotisme, hélas — a du bon, tant qu’
il
ne s’exagère pas en chauvinisme. Mais qu’est-ce que le chauvinisme ?
154
volution, la question qui se pose est de savoir s’
il
faut et s’il suffit, pour « faire l’Europe », que toutes les nations
155
question qui se pose est de savoir s’il faut et s’
il
suffit, pour « faire l’Europe », que toutes les nations du continent
156
n économique puisse suffire à « faire l’Europe »,
il
faudrait respecter dans cette hypothèse quelques conditions de succès
157
s de succès qui me paraissent absolument vitales.
Il
faudrait notamment exiger que cette unification économique ne détruis
158
y puise au contraire ses meilleures énergies ; qu’
elle
respecte nos diversités traditionnelles, dans toute la mesure où elle
159
versités traditionnelles, dans toute la mesure où
elles
sont encore fécondes, et enfin qu’elle se subordonne à une grande pol
160
mesure où elles sont encore fécondes, et enfin qu’
elle
se subordonne à une grande politique commune, laquelle ne peut se dév
161
Commentons brièvement ces conditions de succès :
elles
nous ramènent aux problèmes culturels. L’Europe du plan économique a
162
a besoin de centaines de milliers de techniciens.
Il
est concevable et faisable de les fabriquer en série au prix de l’édu
163
fonction d’animation des échanges de tous ordres.
Elle
a transmis au monde entier les procédés de la technologie. Elle se do
164
s au monde entier les procédés de la technologie.
Elle
se doit d’en transmettre aussi les modes d’emploi. Toutes les culture
165
pays neufs de ses expériences durement acquises.
Elle
a inventé bien des maux, mais aussi leurs remèdes, bien des méthodes
166
r, de les équilibrer et de les rendre bénéfiques.
Elle
a inventé et pratiqué la libre concurrence, mais aussi la coopération
167
ulement les moyens nécessaires d’une politique qu’
il
reste encore à définir et à réaliser. 3. Cette politique, appuyée sur
168
on ne l’accusera jamais de néo-colonialisme ! Et
elle
est mieux placée que tout autre pour faire valoir les avantages d’une
169
e les scrupules qui nous retiennent encore. Quand
elle
se borne à invoquer sa neutralité perpétuelle, la Suisse se trouve dé
170
la voie d’un avenir authentiquement européen. Si
elle
s’y refuse, qui va plaider sa cause ? Une union faite sans nous ne se
171
uest se nomme Vents, et nul n’a compris ce pays s’
il
n’a pas découvert un jour qu’un souffle immense de lyrisme nomade est
172
obligation — je verrai qui je veux ou personne s’
il
me plaît, ce que j’ai envie de voir ou rien, pendant deux mois — je m
173
ce Janus à deux fronts gouverne l’Amérique, mais
il
faut faire son choix entre l’ennui qui paie et l’imprévu révélateur,
174
s d’amis anciens. (Mais tout bouge ici, où seront-
ils
?) Harvard Déjeuner avec Paul Tillich. Je ne l’avais pas revu d
175
eligieux le plus influent de l’Amérique. C’est qu’
il
prône une théologie qu’on pourrait nommer culturelle, et qui tient co
176
vous n’êtes plus jamais seuls. » Je lui ai dit qu’
il
exagérait, qu’il y avait encore en Europe des refuges à peu près comp
177
. Au fond, l’église au clocher fin, toute blanche
elle
aussi, sur un tertre. Et subitement voici tomber de toutes parts, san
178
e, Paul Boepple, chef du département de musique. (
Il
a dirigé le Roi David lors de sa création à Mézière, puis Nicolas de
179
mieux dotées de la côte Est ou de la Californie.
Ils
y enseignent en général la substance même, ou la technique, des œuvre
180
la substance même, ou la technique, des œuvres qu’
ils
sont en train d’écrire. Combien d’écrivains véritables, de peintres e
181
dans ce pays, la veille d’une fête ou le samedi.
Elles
s’installent longuement, disposant autour d’elles cendriers, paquets
182
Elles s’installent longuement, disposant autour d’
elles
cendriers, paquets de cigarettes, blouses, cahiers et livres, et leur
183
l’examen d’un court poème écrit par l’une d’entre
elles
, dont il taira le nom. Il lit la pièce, puis la relit lentement. Une
184
n court poème écrit par l’une d’entre elles, dont
il
taira le nom. Il lit la pièce, puis la relit lentement. Une vingtaine
185
it par l’une d’entre elles, dont il taira le nom.
Il
lit la pièce, puis la relit lentement. Une vingtaine de vers brefs, i
186
rréguliers. À la seconde lecture, je comprends qu’
il
s’agit de deux vieillards dans une cuisine regardant par la fenêtre u
187
un doigt discret ou un très long fume-cigarette.
Elles
parlent posément avec un sérieux et une assurance imperturbables : je
188
lconque, en l’occurrence l’expression littéraire.
Il
est exclu de parler de sentiment, bien entendu, ça ne se fait plus, m
189
us « avancés » de l’Amérique. Pendant quatre ans,
elles
vivent ensemble dans ce luxueux campus perdu au milieu des forêts du
190
anse — pour 3 à 4000 dollars par an. Et ce seront
elles
qui domineront la société américaine de demain, avec une infaillible
191
puses dispersés sur tout l’État. Ici, à Berkeley,
ils
sont plus de 25 000. Je vais y rencontrer une bonne trentaine de prof
192
ommun que l’Amérique découvre subitement, et déjà
elle
croit que c’est fait… À 3 heures, la grande salle est pleine ; et l’o
193
us conduirait à être à la fois rouges et morts. »
Ils
ont parlé surtout de la guerre froide et de la Bombe, et très peu des
194
omment la nécessité de l’action individuelle peut-
elle
être présentée de telle manière qu’elle ne soit pas méprisée comme un
195
elle peut-elle être présentée de telle manière qu’
elle
ne soit pas méprisée comme un simple sermon ? » « La décision n’appar
196
e un simple sermon ? » « La décision n’appartient-
elle
pas aux Soviets ? Car s’ils décident la guerre, a) ils sont victorieu
197
écision n’appartient-elle pas aux Soviets ? Car s’
ils
décident la guerre, a) ils sont victorieux et ils établissent le comm
198
as aux Soviets ? Car s’ils décident la guerre, a)
ils
sont victorieux et ils établissent le communisme mondial ; b) nous so
199
ils décident la guerre, a) ils sont victorieux et
ils
établissent le communisme mondial ; b) nous sommes vainqueurs et nos
200
philosophique au sens large. Mais encore faudrait-
il
le créer. Où sont nos fondations, à quoi pensent les mécènes ? 2.
201
t en automne 1961, dans le journal de voyage dont
il
a bien voulu détacher quelques pages à notre intention. L’Amérique, c
202
dans des universités très différentes des nôtres.
Elles
ressemblent à des couvents laïques, à des campus, à des cottages angl
203
d’être d’Yverdon, de Féchy » relève, me semble-t-
il
, de la sociologie plutôt que de la littérature. Si l’on est né à Tubi
204
seul en a tiré une œuvre forte, c’est Ramuz. Mais
il
ne croyait pas à l’Helvetia et à l’homo helveticus. Il ne croyait qu’
205
croyait pas à l’Helvetia et à l’homo helveticus.
Il
ne croyait qu’au pays de Vaud, réduit aux vignes, et pimenté d’exotis
206
. « Entre nous, nous sommes racistes », me disait-
il
un jour — provocateur ! Il aurait sans nul doute échoué dans son « pr
207
racistes », me disait-il un jour — provocateur !
Il
aurait sans nul doute échoué dans son « projet » s’il avait emprunté
208
urait sans nul doute échoué dans son « projet » s’
il
avait emprunté ses « instruments » à une philosophie, même existentia
209
uments » à une philosophie, même existentialiste.
Il
s’est fait un langage de peintre, en prose. Plutôt que d’une « ration
210
, le jeune Suisse romand qui veut écrire n’aurait-
il
pas besoin, tout simplement, de ce qu’on appelle en France la classe
211
as que ce soit aux « préjugés spiritualistes » qu’
il
se heurte, mais plutôt au matérialisme néo-bourgeois, réaliste et mor
212
cela ne donne plus rien, n’est-ce pas le signe qu’
il
serait temps de se tourner vers autre chose ? L’éloge, l’élan, l’amou
213
ttéraire), Lausanne, 2–3 février 1963, p. 20. x.
Il
s’agit d’une réponse à l’enquête « Homo helveticus : existe-t-il en S
214
réponse à l’enquête « Homo helveticus : existe-t-
il
en Suisse romande ? »
215
Les mythes sommeillent…
ils
vont se réveiller [Entretien] (9-10 février 1963)y z Quand Denis d
216
z Quand Denis de Rougemont était en Amérique,
il
lui arriva un jour de décrocher son téléphone, et d’entendre à l’autr
217
du fil une voix annoncer : “Ici Albert Einstein”.
Il
se souviendra toujours du choc. Un mythe avait pris corps… “J’ai lu v
218
up changé… Les années 1930, puis la guerre, n’ont-
elles
pas porté au romantisme, donc à l’amour-passion, un coup mortel ? Pas
219
rivains refusent de donner forme à l’irrationnel,
ils
ne veulent plus être poètes, ils calculent, ils cherchent de façon pu
220
à l’irrationnel, ils ne veulent plus être poètes,
ils
calculent, ils cherchent de façon purement intellectuelle de nouveaux
221
, ils ne veulent plus être poètes, ils calculent,
ils
cherchent de façon purement intellectuelle de nouveaux langages… Ce q
222
rope est épuisée ? Absolument pas. D’ailleurs, si
elle
l’était, qui reprendrait le flambeau ? Les autres civilisations, oui,
223
u ? Les autres civilisations, oui, sont épuisées.
Elles
ne font, pour l’essentiel, que prendre ce que nous leur donnons. Mais
224
nous leur donnons. Mais si nos mythes sont morts…
Ils
sommeillent. Ils attendent que nous soyons tout à fait sortis de cett
225
. Mais si nos mythes sont morts… Ils sommeillent.
Ils
attendent que nous soyons tout à fait sortis de cette période d’anarc
226
ant. … de la morale et de la hiérarchie mondaine.
Il
n’y a plus d’obstacles que les mythes puissent tenter de vaincre. Par
227
e les mythes puissent tenter de vaincre. Pardon !
Il
s’en crée maintenant d’énormes et d’inédits. La terre se surpeuple. C
228
ccidents. Moralité : l’homme tourne à l’automate,
il
perd sa liberté, son épaisseur de vie, il ressemble à ces montres ext
229
tomate, il perd sa liberté, son épaisseur de vie,
il
ressemble à ces montres extraplates… Justement ! Et c’est ce qui prép
230
is oui. Les troubadours ne l’avaient pas inventé.
Ils
lui avaient donné une forme nouvelle. Cette forme lui a permis de pre
231
J’ai là par exemple un texte inédit de Teilhard.
Il
faudra que j’en parle à Lausanne. Voyez ce passage : le Père (qui d’a
232
hasteté comme d’un moyen de parvenir à la vérité.
Il
le fait dans des termes extrêmement proches du xiie siècle. La Chast
233
de Denis de Rougemont. « Les modernes — écrivait-
il
— croient qu’il existe une sorte de nature normale, à laquelle la cul
234
gemont. « Les modernes — écrivait-il — croient qu’
il
existe une sorte de nature normale, à laquelle la culture et la relig
235
t Denis de, « [Entretien] Les mythes sommeillent…
ils
vont se réveiller », Gazette de Lausanne (supplément littéraire), Lau
236
Il
nous faut des hommes de synthèses (19-20 septembre 1964)aa Le myth
237
ent la Nature, mais le Naturant, qui est Dieu, et
il
entreprit d’édifier une tour à Sennaar, qui fut ensuite appelée Babel
238
, ce qui veut dire confusion. Grâce à cette tour,
il
espérait escalader le Ciel : tentant ainsi non seulement d’égaler mai
239
ppliquait à une tâche particulière. Jusqu’à ce qu’
ils
fussent frappés par le Ciel et jetés dans une confusion telle que tou
240
omes différents divisant le genre humain. Et plus
ils
excellaient dans leur activité spéciale, plus ils parlaient en jargon
241
ils excellaient dans leur activité spéciale, plus
ils
parlaient en jargon barbare (tanto rudius nunc et barbarius loquuntur
242
derne tout entier. Et, à l’intérieur de l’Europe,
elle
fait songer irrésistiblement à cette institution dont le nom même sem
243
e institution dont le nom même semble indiquer qu’
elle
devrait résumer le monde de l’esprit, l’ensemble de nos activités int
244
ctivités intellectuelles, et donc artificielles —
elle
fait songer à cette Tour du Savoir, tellement démesurée qu’il faut, p
245
er à cette Tour du Savoir, tellement démesurée qu’
il
faut, pour l’édifier, diviser maîtres d’œuvre et ouvriers en équipes
246
, et tous les instituts spécialisés qui, autour d’
elles
ou en elles, prolifèrent. Dans la page que je viens de vous lire sur
247
s instituts spécialisés qui, autour d’elles ou en
elles
, prolifèrent. Dans la page que je viens de vous lire sur l’origine de
248
l’échelle planétaire. Nous assistons, me semble-t-
il
, au xxe siècle, à deux mouvements de sens contraire, qui affectent c
249
réponse me paraît évidente. C’est l’Europe, c’est
elle
seule, qui a déclenché cette évolution planétaire. L’Europe a découve
250
es vives de la nouvelle culture mondiale. Mais qu’
il
n’y ait plus, ou presque plus, de langage commun, et que les buts fin
251
e commun, et que les buts finaux s’obscurcissent,
il
faut bien voir que cela veut dire aussi, très concrètement, qu’il n’y
252
r que cela veut dire aussi, très concrètement, qu’
il
n’y a plus d’Université aux deux sens primitifs de l’universitas, qui
253
des étudiants en France était de 42 000 en 1924,
il
est d’environ 280 000 en 1964, et l’on prévoit qu’il sera de 500 000
254
est d’environ 280 000 en 1964, et l’on prévoit qu’
il
sera de 500 000 dans une dizaine d’années. (Seules n’auront pu varier
255
n oublié, nous ne saurions qu’un dixième de ce qu’
elle
est aujourd’hui. Ces données numériques, que je prends pour images, s
256
parité n’a rien de rassurant, tout au contraire :
elle
accroît la séparation et les distances entre le savoir et le croire,
257
Église jugea Galilée, parce que, tout simplement,
il
ne comprendrait pas de quoi parle le physicien, et a fortiori ne saur
258
t je tente de me faire ici l’interprète. Faudrait-
il
donc nous résigner à que l’accroissement même du savoir traîne pour c
259
ervateur non prévenu, jugeant seulement sur ce qu’
il
nous voit faire, il semblerait que la très grande majorité des Europé
260
, jugeant seulement sur ce qu’il nous voit faire,
il
semblerait que la très grande majorité des Européens trouve que cela
261
e Babel ne s’est pas écroulée sur ses bâtisseurs,
ils
l’ont seulement abandonnée, ne sachant plus s’expliquer les uns aux a
262
s’expliquer les uns aux autres pour quelles fins
ils
l’avaient entreprise. Mais l’Université, dans nos pays, paraît plus f
263
florissante que jamais : loin d’être abandonnée,
elle
attire une foule croissante de travailleurs et de curieux. L’industri
264
ndustrie et l’État, plus que jamais, ont besoin d’
elle
. Si elle est devenue trop petite pour ses tâches immédiates, qu’on l’
265
et l’État, plus que jamais, ont besoin d’elle. Si
elle
est devenue trop petite pour ses tâches immédiates, qu’on l’agrandiss
266
t jamais été mortelles pour les administrations :
elles
représentent an contraire leur régime normal d’existence, selon la lo
267
savoir humain. Dans le Temple même de la Science,
il
faut bien que les lévites, même sceptiques quant aux fins de leur rel
268
s et donnent leurs cours… Mais quel dieu servent-
ils
encore ? À quelle idée de l’homme, divine ou idéale, correspond aujou
269
l’Université occidentale ? Quel type d’homme a-t-
elle
en vue, veut-elle former ? Je crains bien que si l’on tentait de le d
270
dentale ? Quel type d’homme a-t-elle en vue, veut-
elle
former ? Je crains bien que si l’on tentait de le déduire d’une obser
271
re osseuse, et très peu d’articulations… Au vrai,
il
est devenu presque impossible de répondre à une telle question, et c’
272
on la pose si rarement. Notre enseignement vise-t-
il
à former des personnes réelles et complètes, ou seulement de futurs p
273
choix bien motivé sur lequel on se soit accordé ?
Il
est vrai que ces questions débordent le seul domaine de l’Université,
274
débordent le seul domaine de l’Université, et qu’
elles
affectent tout l’ensemble de la culture européenne. Mais c’est par l’
275
contact de la culture européenne, et c’est là qu’
ils
se posent à eux-mêmes ces questions, et nous les posent avec une insi
276
de l’Université est liée à ce phénomène, soit qu’
elle
l’exprime, soit qu’elle réagisse contre lui avec le thomisme, ce sera
277
e à ce phénomène, soit qu’elle l’exprime, soit qu’
elle
réagisse contre lui avec le thomisme, ce serait un beau sujet d’étude
278
s particuliers et divergents. L’originalité, pour
elles
, n’est pas vertu, mais atteinte à l’ordre sacré — ou simple erreur d’
279
— ou simple erreur d’exécution. Mutatis mutandis,
il
en va de même dans les cultures totalitaires du xxe siècle, dominées
280
ons naïves et pénétrantes : pourquoi l’Europe a-t-
elle
fait les machines ? Pourquoi travaillez-vous autant ? Pourquoi cherch
281
aturelles dans l’Occident christianisé — alors qu’
il
est clair qu’une Asie qui tenait la matière et le corps pour essentie
282
bes, qui leur posent ces questions fondamentales,
ils
se verraient conduits à dépasser leur régime de spécialités académiqu
283
Histoire, du Temps, de l’Évolution et du Progrès,
il
faudrait que le théologien soit capable de se référer non seulement a
284
qui ont une portée métaphysique indiscutable. Et
il
faudrait que les physiciens qui en discutent sachent que la dialectiq
285
ros ouvrages pour être exposé sérieusement. Ce qu’
il
m’importe de marquer par cet exemple, c’est que l’Europe de l’esprit
286
prit ne peut plus se présenter devant le monde qu’
elle
a réveillé, dans le désordre spirituel et dans l’incohérence babéliqu
287
e seule me paraît en mesure de résoudre, parce qu’
elle
seule l’a posé dans l’histoire, c’est celui de l’Un et du Divers égal
288
La généralité n’est pas une matière enseignable.
Elle
ne peut vraiment consister que dans une attention en éveil permanent
289
ner le monde par petits bouts au prix de son âme.
Il
n’en reste pas moins que la spécialisation dans l’Université ne peut
290
uisqu’on ne peut chercher de solution en arrière,
il
faut donc la chercher en avant : accepter le mouvement de spécialisat
291
cléaire : or, les impasses et les paralogismes qu’
ils
y rencontrent semblent les confronter désormais à des options métaphy
292
oins sublime que j’essaie aujourd’hui d’explorer,
elle
me paraît rendre compte du fait que ce sont les meilleurs spécialiste
293
. c) Mais ces synthèses ne tomberont pas du Ciel,
elles
n’apparaîtront pas objectivement et comme spontanément au terme d’une
294
r leur réunion physique en séminaires restreints,
ils
créeraient ces « carrefours de vérités hétérogènes » sur lesquels et
295
estions et de réponses, le dialogue en un mot, et
il
exclut l’intervention monologante sous forme de discours. Ce détail a
296
s existent déjà en puissance — et pas non plus qu’
elle
s’inscrive devant nous, sur quelque carte perforée, comme un résultat
297
ui importe, c’est que la synthèse s’actualise, qu’
elle
s’opère donc dans un esprit, dans une personne, car là seulement elle
298
ns un esprit, dans une personne, car là seulement
elle
peut trouver ses significations humaines, ses mesures, son utilité au
299
son utilité au sens le plus élevé du terme. Ce qu’
il
nous faut enfin, ce qui nous manque, ce sont des hommes de synthèse,
300
r excellence en tant que tels par le fait même qu’
ils
auront pris conscience de ce qu’ils ne peuvent se contenter d’être se
301
fait même qu’ils auront pris conscience de ce qu’
ils
ne peuvent se contenter d’être seulement des spécialistes. Favoriser
302
r qu’une solution de bon sens presque simpliste :
il
me semble que le seul moyen de sauver la qualité des universités exis
303
e proposent avec beaucoup de sagesse, me semble-t-
il
, les rapports d’experts qui vous sont soumis. Si l’on garde à l’espri
304
avoir, dont je vous ai plus longuement entretenu,
il
me tarde de vous proposer des conclusions plus personnelles et plus p
305
savoir en langages spécialisés. Pour y répondre,
il
faut envisager la création d’instituts ou de centres de synthèse, éta
306
ue mutuelle. Deux meneurs de jeu par colloque, et
ils
ne peuvent appartenir à la même spécialité. Faire le monde Et q
307
rdisciplinaires. J’entends par là : les sujets qu’
il
serait le plus malaisé de traiter dans le cadre de nos facultés class
308
ons ou découvertes de la science et des arts sont-
elles
apparues ? Part de la gratuité, de la nécessité, des fins utilitaires
309
comment y suppléer par les arts. 5. Européologie.
Il
existe dans la plupart de nos grandes universités des départements d’
310
, africaines, indaméricaines, indonésiennes, etc.
Il
n’existe pas, ni hors de l’Europe ni en Europe, de chaires d’études e
311
s spécifiques de notre civilisation, à l’heure où
elle
se répand d’une manière anarchique sur tous les continents de la plan
312
avec une anxiété mêlée d’arrogance, à l’heure où
elle
s’interroge elle-même plus qu’elle n’a jamais fait dans son histoire.
313
, à l’heure où elle s’interroge elle-même plus qu’
elle
n’a jamais fait dans son histoire. Cette liste de thèmes, vous le sen
314
autres rajeunis… Comment baptiser l’entreprise ?
Elle
pourrait se réclamer de beaucoup de noms illustres, d’hommes qui ont
315
e Université européenne. Vraie université, puisqu’
elle
traiterait spécifiquement du général, en vue d’entretenir ou de forme
316
ge cohérente du Tout. Vraiment européenne, puisqu’
elle
aurait pour fin de recréer l’union dans la diversité, qui est la form
317
au sens de nos vies. aa. Rougemont Denis de, «
Il
nous faut des hommes de synthèses », Gazette de Lausanne (supplément
318
Un écrivain suisse (20-21 mars 1965)ab Qu’
il
n’y ait pas une patrie suisse mais deux douzaines, point de grands ce
319
œuvre et la carrière de Carl Burckhardt. C’est qu’
il
est l’un de ceux, très rares, dont la personne, le style, la formule
320
l’historien de la Renaissance, je ne pense pas qu’
il
tienne de lui ce don de prévision de l’avenir européen dont tous les
321
, celles à Hofmannsthal du cadet), mais plutôt qu’
il
faut l’attribuer à leur commune formation bâloise d’historiens scrupu
322
e de Dantzig ; enfin mémorialiste d’événements qu’
il
a vécus et qu’il avait prévus. Burckhardt est le type même de l’écriv
323
fin mémorialiste d’événements qu’il a vécus et qu’
il
avait prévus. Burckhardt est le type même de l’écrivain qui ne peut s
324
eux village préromain au milieu du val Bregaglia.
Il
y était né comme ses ancêtres, il y avait passé les 14 premières anné
325
y avait passé les 14 premières années de sa vie,
il
y revenait souvent, voir sa très vieille mère et travailler dans l’at
326
r dans l’atelier qui avait été celui de son père.
Il
y est mort hier soir, puisse-t-il y reposer parmi les siens, « réuni
327
ui de son père. Il y est mort hier soir, puisse-t-
il
y reposer parmi les siens, « réuni à son peuple », comme dit la Bible
328
it qui vaille entre deux hommes. Mais ce jour-là,
il
triturait une mince colonne de terre et se plaignait — « c’est l’enfe
329
rre et se plaignait — « c’est l’enfer ! », disait-
il
. De la matière fuyait entre ses doigts, s’effilait et refusait de rem
330
mes, cette longue aliénation parfois libératrice,
il
a fallu tout cela pour que celui qui avait été l’un des « phares » ba
331
), Lévi-Strauss, un des fils Pitoëff, et Breton. (
Il
avait trouvé ce moyen de gagner juste de quoi vivre sans la moindre c
332
compromission avec tous les snobismes à l’affût.)
Il
se plaignit, très gentiment, de ce que durant nos années parisiennes,
333
pie ! » (Beaucoup de lui dans ces quelques mots.)
Il
m’arrive de rêver que je m’entends au mieux avec tel homme, telle fem
334
en convergence heureuse ! À quelques jours de là,
il
me dit souhaiter que nous puissions désormais nous rencontrer « mécan
335
’est que Breton, pour toute la haine vigilante qu’
il
n’a cessé de vouer sa vie durant aux manifestations visibles et offic
336
ux par excellence. C’est même sans doute parce qu’
il
jugeait le christianisme trop peu religieux qu’il le dénigrait sans r
337
il jugeait le christianisme trop peu religieux qu’
il
le dénigrait sans relâche. Il voulait un rituel, des mystères, une ad
338
op peu religieux qu’il le dénigrait sans relâche.
Il
voulait un rituel, des mystères, une adoration fascinée, une rébellio
339
folle dans le défi qui rejoignait l’Inquisition…
Il
me dit ce soir-là qu’il avait découvert au fond de l’échoppe d’un cor
340
rejoignait l’Inquisition… Il me dit ce soir-là qu’
il
avait découvert au fond de l’échoppe d’un cordonnier dans le Morvan,
341
de l’artisan lui semblait des plus exaltants. Or,
il
n’est rien de commun aux deux doctrines hors le grand ton de rigueur
342
selon Breton, autrement dit, de sa « religion ».
Il
en tirait une morale ombrageuse, celle qui réglait absolument sa vie,
343
, déjetée, insultée jusqu’à l’âme. D’autres fois,
il
se contentait d’un ou deux coups d’épingle très courtois, ou d’une ép
344
onstitué André Breton dès son arrivée à New York.
Il
avait pour noyau quelques peintres qui allaient changer là-bas le cou
345
nnonçait ma Part du diable ). J’allais chez lui,
il
me lisait de la poésie sur un ton d’emphase contenue, en marchant à g
346
e plus moderne, c’est vous pape Pie X ! », criait-
il
en déclamant Zone. Ce pape-là ne le gênait pas : c’était un vers d’Ap
347
ist aviateur, dans le même poème…) C’est ainsi qu’
il
me lut un jour l’Ode à Charles Fourier qu’il venait de recopier d’une
348
i qu’il me lut un jour l’Ode à Charles Fourier qu’
il
venait de recopier d’une belle écriture sage et d’orner de fleurs au
349
ur. Fourier était alors son nouvel intercesseur :
il
insistait pour m’en lire des chapitres décrivant le travail et les pl
350
riers, de l’utopie phalanstérienne. On eût dit qu’
il
était le premier à découvrir ce jeune auteur d’avant-garde ! « Ombre
351
n… une grande réparation vous est due », écrira-t-
il
dans Arcane 17, deux ans plus tard, et il poursuit : « À travers leur
352
crira-t-il dans Arcane 17, deux ans plus tard, et
il
poursuit : « À travers leurs outrances et tout ce qui procède chez eu
353
Breton ne s’est mieux défini. Je pense au soir où
il
déclara qu’il était temps d’aller regarder de plus près qu’on ne l’av
354
t mieux défini. Je pense au soir où il déclara qu’
il
était temps d’aller regarder de plus près qu’on ne l’avait fait saint
355
lus près qu’on ne l’avait fait saint Augustin, qu’
il
tenait pour l’ancêtre des jansénistes. Nous lui dîmes qu’il y avait l
356
dîmes qu’il y avait là-dessus des bibliothèques ;
il
n’en crut rien, visiblement, et avec raison : son Augustin à lui étai
357
che lentement à pas de rêve. « Je pensais, me dit-
il
, à la religion qu’il faut absolument fonder, et pourquoi ne pas la fo
358
e rêve. « Je pensais, me dit-il, à la religion qu’
il
faut absolument fonder, et pourquoi ne pas la fonder sur le culte d’u
359
si hautement exemplaire à tant d’égards, c’est qu’
il
voulait tout à la fois changer la vie par une sédition passionnelle (
360
ns bibelots, entre le délire et l’extrême rigueur
il
n’a jamais cessé d’inventer un chemin qui ne pouvait exister que pour
361
ui seul. De personne je ne suis à ce point sûr qu’
il
a toujours suivi — avec autant d’audace que d’exacte obéissance aux s
362
ue d’exacte obéissance aux signes devinés — ce qu’
il
faut bien que j’appelle ici d’un terme signifiant pour moi la relatio
363
urs articulations déliées mais fort précises, car
elles
nous disent très bien de quoi parle ce livre4 mais aussi comment il e
364
s bien de quoi parle ce livre4 mais aussi comment
il
en parle. Et c’est cela qui nous intéresse : Jacques Chenevière, écri
365
été bien mal vu des professeurs dans ma jeunesse,
ils
croyaient dur comme fer à « l’unité », l’unité à tout prix, fût-ce au
366
tion le requiert, dès le seuil de l’âge d’homme ;
elle
menace souvent d’accaparer ses énergies aux dépens de l’œuvre personn
367
r ses énergies aux dépens de l’œuvre personnelle,
elle
pourra tour à tour l’aliéner (comme on dit) ou le rassurer sur lui-mê
368
dit) ou le rassurer sur lui-même, mais finalement
elle
n’aura pas contaminé son art d’écrire « pour le plaisir ». Je pense à
369
lle de Neige, qui n’ont rien de philanthropique. (
Ils
ravissaient Valéry Larbaud, et c’est tout dire.) Cette suite d’une qu
370
ères pages du livre, intitulées « Sans date », qu’
il
cherche à « distancier », vainement d’ailleurs, sont admirables. L’
371
sonniers Descriptions d’une mémoire ; et ce qu’
elle
a gardé, et qui revit en ce recueil, va devenir par la grâce d’un art
372
urd’hui si vous voulez. » C’était Romain Rolland.
Il
venait de publier Au-dessus de la Mêlée et vivait à Villeneuve, réali
373
exposé. Mussolini répond, Chenevière l’observe. «
Il
est dressé, les mains au bord de la table — où je remarque soudain un
374
soudain une coupe emplie de beaux raisins pâles.
Il
tient le menton haut… L’œil est impérieux, mais impérieux dans le vid
375
impérieux, mais impérieux dans le vide, semble-t-
il
, car il fixe on ne sait quel objet imaginaire bien au-delà de nos per
376
ux, mais impérieux dans le vide, semble-t-il, car
il
fixe on ne sait quel objet imaginaire bien au-delà de nos personnes,
377
devant la table officielle. Plus du tout cambré,
il
piquait des raisins avec une surprenante prestesse. » Plusieurs chapi
378
l’autre fumant sans cesse des petits cigares « qu’
elle
plantait juste au milieu de sa bouche grande, charnue et bien peinte
379
a bouche grande, charnue et bien peinte », même s’
il
s’agit seulement des robes que leur composait Worth trente ans plus t
380
tout le reste est linguistique, dirait Verlaine s’
il
revenait parmi nous. 4. Retours et images, Éditions Rencontre. a
381
r les mesures et les affinités de sa pensée, mais
il
me donnait l’impression de représenter parmi nous quelque chose de bi
382
désert d’El-Amarna, d’une cité du Soleil absolu :
il
en avait la sensitivité, l’ossature délicate allongée, le large regar
383
Nous devons être absolument séculiers » insistait-
il
. Mais une fois je l’entendis murmurer, avec un demi-sourire : « Peut-
384
« Peut-être suis-je plus chrétien que quiconque…
Il
faudra bien que je vous l’explique quand nous serons seuls. » C’était
385
ait il y a deux ans, je ne devais plus le revoir.
Il
aimait citer la Bhagavad-Gita, qu’il lisait en sanscrit. Il connaissa
386
s le revoir. Il aimait citer la Bhagavad-Gita, qu’
il
lisait en sanscrit. Il connaissait à fond notre littérature, où il pr
387
citer la Bhagavad-Gita, qu’il lisait en sanscrit.
Il
connaissait à fond notre littérature, où il préférait à tout François
388
crit. Il connaissait à fond notre littérature, où
il
préférait à tout François Villon. Jeune homme, il avait rêvé un sonne
389
il préférait à tout François Villon. Jeune homme,
il
avait rêvé un sonnet en français : il l’écrivit au réveil et le publi
390
eune homme, il avait rêvé un sonnet en français :
il
l’écrivit au réveil et le publia dans la petite revue de poésie d’ava
391
d and the Horn. Infiniment scrupuleux, par bonté,
il
voyait tout, pensait à tout pour ses amis, et savait écouter comme pe
392
bleu qui allait interroger au-delà de vous-même.
Il
avait une aura, il le savait, un prestige un peu douloureux qu’il por
393
terroger au-delà de vous-même. Il avait une aura,
il
le savait, un prestige un peu douloureux qu’il portait avec juste ass
394
a, il le savait, un prestige un peu douloureux qu’
il
portait avec juste assez de gaucherie pour une impeccable élégance…
395
ins suisses romands ; pensez à Roud et Jaccottet.
Il
existe un filon de romantisme allemand qui nous est très proche et, c
396
me. Rien de tout cela n’a les mêmes frontières et
il
se produit là un jeu complexe d’exclusions et d’inclusions, qui s’opp
397
anière systématique à toute idée de nationalisme.
Il
faut multiplier les communautés d’aires différentes qui n’ont pas les
398
le aux particularités d’un pays, d’une région, qu’
il
s’agisse du monde germanique ou de la France. Maintenir les contrai
399
sion entre la personne qui se crée et l’époque qu’
elle
vit n’est-elle pas la caractéristique fondamentale de votre vie et de
400
ersonne qui se crée et l’époque qu’elle vit n’est-
elle
pas la caractéristique fondamentale de votre vie et de votre œuvre ?
401
t qui se retrouve à tous les niveaux. Je pense qu’
il
faut maintenir dans un individu l’exigence spécifique, singulière, d’
402
a pensée doit conduire l’action : mais sans agir,
elle
n’est pas vraie pensée. » ⁂ Quittant Ferney-Voltaire, où des êtres hu
403
vite ses droits : avant d’emprunter l’autoroute,
il
me faut présenter ma carte d’identité au douanier ! L’Europe des poli
404
. Propos recueillis par Henri-Charles Tauxe. ai.
Il
s’agit sans doute d’une erreur de transcription : Rougemont se réfère
405
Il
faut réinventer l’Université (29 juin 1968)aj En Suisse (comme en
406
par brider sévèrement son imagination, obsédé qu’
il
est par la crainte que ses projets ne soient pas « sérieux », c’est-à
407
Zukunftsmusik devient urgence (peut-être même est-
il
trop tard), et chacun d’affirmer qu’il l’avait toujours dit… Sans plu
408
e même est-il trop tard), et chacun d’affirmer qu’
il
l’avait toujours dit… Sans plus de précautions, et pour faire court,
409
ssure sa propre police et s’administre elle-même.
Elle
est formée par la totalité (universitas) des maîtres et des élèves, e
410
itas) des maîtres et des élèves, et en même temps
elle
représente la totalité des savoirs acquis et des recherches en cours
411
épendance financière d’un même État. À part cela,
elles
n’ont plus rien à se dire, ni au fond rien à faire ensemble. 3. L’Uni
412
radictoires. Les écoles préparent à des métiers :
elles
servent la Production. L’Université devrait préparer à juger, évaluer
413
évaluer, orienter les esprits et les activités :
elle
aurait pour fonction de chercher et de dire le Sens de la société. Il
414
ion de chercher et de dire le Sens de la société.
Il
se pourrait qu’au nom du Sens, elle soit amenée à contester les final
415
de la société. Il se pourrait qu’au nom du Sens,
elle
soit amenée à contester les finalités productivistes de la plupart de
416
vistes de la plupart des écoles. 4. Les méthodes,
elles
aussi, sont différentes, voire opposées. Pour les écoles ou facultés
417
Une école doit normalement déboucher sur un job.
Elle
doit donc, comme le dit un de nos magistrats, « favoriser une meilleu
418
chés ». Cependant, avant de contester la société,
il
serait bon de la connaître par l’une au moins de ses activités. L’éco
419
canton, une école polytechnique pour tel autre :
elles
exigent la coopération de plusieurs cantons, ou la dimension national
420
té : une école, en effet, ne saurait se la poser.
Il
faut l’Université parce qu’un centre de contestation est indispensabl
421
ex cathedra doivent être conservés : ainsi quand
il
s’agit d’exposer les recherches inédites qu’un maître est en train de
422
vrait pas être et avoir été seulement professeur.
Il
ne devrait pas être jugé sur ses seuls titres universitaires mais sur
423
versitaires mais sur sa valeur comme praticien, s’
il
enseigne dans une école, et comme créateur intellectuel, s’il enseign
424
dans une école, et comme créateur intellectuel, s’
il
enseigne dans une Université. 15. Les recherches spécialisées en phys
425
able à la vie d’une Université digne du nom. 16.
Il
ne faut pas redouter qu’une tension s’institue entre écoles professio
426
ntre écoles professionnelles et Université. Ce qu’
il
faut redouter, c’est la subordination de la recherche aux besoins de
427
on s’obstine encore à nommer des universités. 18.
Il
ne faut pas détruire ce qui existe — les écoles professionnelles (ou
428
ler de la peur d’imaginer). Par-dessus tout cela,
il
faut réinventer une Université digne du nom. Car sans elle, les école
429
réinventer une Université digne du nom. Car sans
elle
, les écoles professionnelles, l’économie, et la société tout entière
430
re, en novembre 1964. aj. Rougemont Denis de, «
Il
faut réinventer l’université », Gazette de Lausanne (supplément litté
431
fois pour toutes à la politique d’un parti, quand
il
s’agit de prendre une position publique. L’engagement supposait à mon
432
ilosophique et religieux. De l’intime à l’ultime,
il
supposait un passage obligé par le « proxime », la proximité, le proc
433
et ce passage était le lieu de l’engagement. Est-
il
encore praticable ? Autrement dit : quelle peut être aujourd’hui, au
434
réponds ! Mais de quoi l’écrivain comme tel peut-
il
répondre, sinon de son œuvre elle-même, de sa pensée et de son style
435
agé — ou non. Dans le fait, dans le concret vécu,
il
n’y a pas l’écrivain d’un côté et l’événement de l’autre, deux objets
436
l’œuvre ne constitue une partie de la réalité qu’
il
croit décrire quand il l’écrit… ⁂ On ne peut donc parler que de diffé
437
ne partie de la réalité qu’il croit décrire quand
il
l’écrit… ⁂ On ne peut donc parler que de différents modes de relation
438
ste. 1. Le ludion réagit passivement à l’époque :
il
n’est pas engagé mais immergé en elle, il en révèle les courants loca
439
à l’époque : il n’est pas engagé mais immergé en
elle
, il en révèle les courants locaux et superficiels ou profonds et en f
440
poque : il n’est pas engagé mais immergé en elle,
il
en révèle les courants locaux et superficiels ou profonds et en forma
441
n formation, sans essayer d’agir sur eux, soit qu’
il
n’en ait aucune envie, soit qu’il désespère d’en avoir les moyens, ou
442
ur eux, soit qu’il n’en ait aucune envie, soit qu’
il
désespère d’en avoir les moyens, ou nie que ces moyens puissent même
443
eur par l’angoisse du syndrome totalitaire tel qu’
il
se constituait alors dans l’inconscient des peuples. Entre ces deux e
444
oque (bien mieux que le ludion) dans la mesure où
il
la refuse (bien plus radicalement que le contestateur) mais s’il la j
445
ien plus radicalement que le contestateur) mais s’
il
la juge et la refuse, c’est au nom d’une vision meilleure — qu’il ann
446
refuse, c’est au nom d’une vision meilleure — qu’
il
annonce, illustre, anticipe… Bien entendu — mais l’ai-je assez laissé
447
s chaque catégorie peut se reconnaître au fait qu’
il
participe peu ou prou des deux autres : reprenez mes exemples. Inst
448
ime et au nom d’un autre régime qui ferait pire s’
il
le pouvait. Cela comporte : donner réponse, dire la réalité du monde
449
ouveau que la révolte obscurément postule, car si
elle
le concevait elle le susciterait au lieu de simplement « contester »
450
lte obscurément postule, car si elle le concevait
elle
le susciterait au lieu de simplement « contester » du passé. Cela com
451
de et à l’événement, c’est de les créer. Et ce qu’
il
faut attendre du meilleur écrivain, c’est qu’il fasse converger dans
452
u’il faut attendre du meilleur écrivain, c’est qu’
il
fasse converger dans son œuvre le sentiment baudelairien de son époqu
453
ent baudelairien de son époque, la révolte contre
elle
de tout homme qui se veut tel, et l’annonce admirable d’un monde équi
454
nt d’Amérique après la guerre, j’avais compris qu’
il
était indispensable d’unir les Européens. Non seulement nous-mêmes, m
455
oblème. L’union mondiale ne sera concevable que s’
il
existe une solide fédération européenne. Ce sera le point d’accrochag
456
ction et de la vie intellectuelle et auront entre
elles
des liens de toutes natures. Elles constitueront de proche en proche
457
t auront entre elles des liens de toutes natures.
Elles
constitueront de proche en proche un tissu plus solide que leurs lien
458
ité universelle : « Désormais, disait saint Paul,
il
n’y a plus ni Juifs ni Grecs. » Cette responsabilité de l’Europe s’op
459
t à la racine d’ordre philosophique ou religieux.
Il
s’agit de transposer sur les plans économique et politique les conséq
460
re attente et sa folle exigence ; en ce temps-là.
Elle
s’adressait à cela dans la littérature dont il nous paraissait tout à
461
Elle s’adressait à cela dans la littérature dont
il
nous paraissait tout à fait évident que Paulhan détenait les clefs et
462
efs et les mesures. (Mais c’était justement ce qu’
il
cherchait, comme nous l’apprirent beaucoup plus tard les Fleurs de Ta
463
rirent beaucoup plus tard les Fleurs de Tarbes !)
Il
n’avait encore publié que deux ou trois petits livres un peu trop par
464
e la NRF . Ce n’était pas le sien, bien entendu,
il
ne récrivait pas nos textes, mais le style de chacun des auteurs de l
465
t le même sans sa présence et sans son attention.
Il
était à lui seul notre air de parenté, si différents ou opposés que n
466
raire qui ait jamais montré dans cet emploi ce qu’
il
faut appeler du génie. Et le plus libéral qu’on puisse imaginer ! La
467
ine à le traiter d’éminence grise de nos lettres.
Il
était tout le contraire : un maître socratique, indemne de toute secr
468
attentif à ne rien nous imposer qui ne fût ce qu’
il
avait senti, bien avant nous, qui pourrait être nous. Bien trop curie
469
re nous. Bien trop curieux pour être autoritaire,
il
n’avait de goût que pour nos singularités (que d’autres nommeraient v
470
gularités (que d’autres nommeraient vocations) et
il
les respectait scrupuleusement, quitte à les provoquer ou débusquer p
471
à l’improviste d’une mystifiante naïveté — comme
il
lui arrivait de s’en poser à lui-même, et parfois d’y répondre par un
472
un opuscule. « Ah ! je suis bien déçu, me disait-
il
un jour. Je me suis appliqué à relire Cicéron dans l’espoir de le tro
473
directeur.) Chaque jour, d’un large bec de plume,
il
écrivait sur des petites feuilles de papier vert frappées du monogram
474
un entretien interrompu par un coup de téléphone.
Il
dictait à sa femme les lettres moins intimes. Germaine et Jean, dans
475
es d’exister. J’ai retrouvé la première lettre qu’
il
m’ait écrite, en 1926. M’ayant lu dans la Revue de Genève , il me de
476
e, en 1926. M’ayant lu dans la Revue de Genève ,
il
me demandait « s’il m’intéresserait quelque jour de collaborer à la
477
lu dans la Revue de Genève , il me demandait « s’
il
m’intéresserait quelque jour de collaborer à la NRF ». J’étais admi
478
années plus tard, me voici devant Paulhan : comme
il
est grand ! C’est le plus grand écrivain que j’aie jamais connu : 1 m
479
ent qui me lance, à peine passé la porte : « Mais
il
me semble que depuis des années je vous supplie de nous donner des te
480
l’aise, et mal à l’aise aussi. Un peu plus tard,
il
me confie, rêveur : « Comme il est difficile, n’est-ce pas, de se lib
481
Un peu plus tard, il me confie, rêveur : « Comme
il
est difficile, n’est-ce pas, de se libérer de ses origines protestant
482
as les assumer ? » (Bien sûr qu’à cela, du moins,
il
n’a jamais songé.) Je l’ai surpris, notre dialogue s’est noué, et il
483
.) Je l’ai surpris, notre dialogue s’est noué, et
il
se poursuivra dans plusieurs de mes livres, d’une manière que je suis
484
’arrangerai pour y faire figurer les questions qu’
il
me soumettra (c’est sa manière de critiquer) après lecture du manuscr
485
s a été composée pour prévenir les objections qu’
il
avait faites à la seconde, dont je croyais d’abord qu’elle pouvait se
486
t faites à la seconde, dont je croyais d’abord qu’
elle
pouvait se suffire. Longtemps, Jean P. (comme il signait ses brefs bi
487
lle pouvait se suffire. Longtemps, Jean P. (comme
il
signait ses brefs billets) a joué pour moi le rôle du lecteur idéal d
488
engage à rapporter ces petits souvenirs, c’est qu’
ils
sont personnels… à combien d’entre nous, jeunes auteurs de l’entre-de
489
he n’ose pas toujours espérer de la philosophie :
il
veut connaître ce que peut l’homme. Et Gide, ce qu’il est. Il suffira
490
eut connaître ce que peut l’homme. Et Gide, ce qu’
il
est. Il suffirait à Claudel de reformer sur les débris d’une société
491
aître ce que peut l’homme. Et Gide, ce qu’il est.
Il
suffirait à Claudel de reformer sur les débris d’une société laïque l
492
de sur le crime et la merveille. « La poésie, dit-
il
, a pour cela ses moyens, dont les hommes sous-estiment l’efficacité.
493
ns, dont les hommes sous-estiment l’efficacité. »
Il
semble à Maurras suffisant, mais nécessaire, que l’écrivain maintienn
494
d’Alerte : la poésie lui semble chose si grave qu’
il
a pris le parti de se taire. Je ne sais s’il est vrai que les hommes
495
e qu’il a pris le parti de se taire. Je ne sais s’
il
est vrai que les hommes de lettres se soient contentés jadis de distr
496
nt contentés jadis de distraire d’honnêtes gens. (
Ils
le disaient du moins.) Les plus modestes de nous attendent une religi
497
n, une morale, et le sens de la vie enfin révélé.
Il
n’est pas une joie de l’esprit que les Lettres ne leur doivent. Et qu
498
tre littérature n’autorise pas trop d’optimisme.
Il
se peut que les hommes soient devenus plus exigeants. Il se peut auss
499
eut que les hommes soient devenus plus exigeants.
Il
se peut aussi que les Lettres soient devenues moins donnantes. Tout s
500
le petit fait faux » qui seul intéressera, croit-
elle
. an. Rougemont Denis de, « Jean Paulhan », Gazette de Lausanne (sup
501
, j’écrivais du second roman de Bernard Barbey :
Il
règne dans La Maladère une étrange harmonie entre le climat des senti
502
des sentiments et celui des campagnes désolées où
il
se développe. Paysages tristes et sans violence, autour de ces êtres
503
res dont la détresse est d’autant plus cruelle qu’
elle
est contenue sous des dehors trop polis. Une fois fermé le livre, on
504
isoire, que les deux ou trois autres carrières qu’
il
a connues avec de si constants succès pour ceux qui savent — dans l’a
505
t presque toujours de la littérature, si bonne qu’
elle
soit. Mais l’aventure militaire de Barbey est singulière. Assurer la
506
de l’Académie. Mais là n’était pas son souci ! Et
il
nous suffisait, nous ses amis (mais avons-nous su le lui dire assez…)
507
téraire), Lausanne, 7–8 février 1970, p. 21. ap.
Il
s’agit de La Confédération helvétique (1953) et de La Suisse ou l’
508
s et Messieurs, Je pense, avec Robert Schuman, qu’
il
est possible d’unir nos pays pour cette raison littéralement fondamen
509
de base existe, sur laquelle fonder cette union.
Il
s’agit de l’unité d’une culture, de laquelle participent tous les Eur
510
e, de laquelle participent tous les Européens, qu’
ils
soient d’ailleurs « cultivés » ou non, conscients ou non de ce qu’ils
511
s « cultivés » ou non, conscients ou non de ce qu’
ils
doivent, en fait, à la culture. Unité non pas homogène et qui ne résu
512
ire, Héraclite écrivait cette phrase décisive, qu’
il
faut tenir pour la formule même de l’unité européenne : « Ce qui s’op
513
s citoyens à la fois libres et responsables, mais
elle
invente aussi l’analyse critique, elle la conduit à ses dernières con
514
bles, mais elle invente aussi l’analyse critique,
elle
la conduit à ses dernières conséquences, découvre ainsi l’idée de l’a
515
invente l’État et les institutions centralisées :
elle
poussera l’ordre et la stabilité dans l’uniformité universelle jusqu’
516
a morale de la mesure et de la raison utilitaire,
il
oppose les élans de l’amour sans calcul, au droit de la force le serv
517
culte du succès le sens du sacrifice. Bien plus,
il
porte la contradiction au cœur de l’être, et la traduit dans l’énoncé
518
pas pour autant : entre leurs triomphes alternés,
elles
durent dans l’ombre de l’histoire, dans la tradition, dans les livres
519
dans les livres, et dans l’inconscient collectif.
Elles
agissent toutes, sans exception, dans la vie des hommes d’aujourd’hui
520
Lancelot et d’un Perceval, symbole mystique. Faut-
il
enfin rappeler l’apport arabe, qui ne se limite pas au zéro précédant
521
si peu que ce soit, est si cher aux Européens qu’
il
les porte à exagérer d’une manière tout à fait extravagante l’importa
522
mportance de ce qui les distingue. C’est ainsi qu’
ils
en viennent à penser sincèrement qu’ils ne pourront jamais s’unir, mê
523
ainsi qu’ils en viennent à penser sincèrement qu’
ils
ne pourront jamais s’unir, même s’il le faut, du fait qu’ils n’ont en
524
cèrement qu’ils ne pourront jamais s’unir, même s’
il
le faut, du fait qu’ils n’ont en somme rien de commun ! Un jour, tand
525
ront jamais s’unir, même s’il le faut, du fait qu’
ils
n’ont en somme rien de commun ! Un jour, tandis que je présidais une
526
sai de définition suivant : L’Européen ne serait-
il
pas cet homme étrange qui se manifeste comme Européen dans la mesure
527
anifeste comme Européen dans la mesure précise où
il
doute qu’il le soit, et prétend au contraire s’identifier soit avec l
528
me Européen dans la mesure précise où il doute qu’
il
le soit, et prétend au contraire s’identifier soit avec l’homme d’une
529
c l’homme d’une seule nation de cette Europe dont
il
révèle ainsi qu’il fait partie, par le seul fait qu’il le conteste ?
530
le nation de cette Europe dont il révèle ainsi qu’
il
fait partie, par le seul fait qu’il le conteste ? On ne changera pas
531
vèle ainsi qu’il fait partie, par le seul fait qu’
il
le conteste ? On ne changera pas cela, ce ne serait plus l’Europe. L
532
ressemblons tous, c’est notre mal et notre bien,
il
faut en prendre son parti, et c’est là-dessus qu’il faut bâtir notre
533
faut en prendre son parti, et c’est là-dessus qu’
il
faut bâtir notre union, si l’on veut qu’elle mérite le nom d’Europe.
534
sus qu’il faut bâtir notre union, si l’on veut qu’
elle
mérite le nom d’Europe. Si l’on me demande maintenant comment on peut
535
n ne saurait être acquise au prix des libertés qu’
elle
est censée servir. Rien de plus limpide que la déduction qui fait tou
536
est une culture pluraliste, on ne peut fonder sur
elle
qu’une union fédérale. Ce qui paraît beaucoup plus difficile à expliq
537
urchill — dans son fameux discours de Zurich — qu’
il
n’y a pas une minute à perdre ! Quel est l’obstacle apparemment insur
538
dique, que tout exige, que tout le monde admet qu’
il
faut faire — et que pourtant personne ne fait ? Eh bien, chacun le sa
539
ontinentale). À l’intérieur de ses frontières, qu’
il
déclare naturelles contre toute évidence, l’État-nation n’admet aucun
540
utonomie, aucune diversité réelle. À l’extérieur,
il
refuse toute union, alléguant une indépendance et une souveraineté ab
541
aineté absolues aussi peu défendables en droit qu’
elles
deviennent illusoires en fait au xxe siècle. Rien, donc, de plus hos
542
re aux exigences concrètes de notre temps, puisqu’
il
est à la fois trop petit pour agir à l’échelle mondiale ; trop grand
543
s plus concrètes et le culte prolongé d’un mythe,
il
faut choisir. Pour la première fois dans son histoire, l’homme se voi
544
es longuement délibérés, concertés à long terme :
il
fallait se battre pour survivre. Aujourd’hui que le nécessaire est as
545
le rapport de l’industrie et de la technique. Et
ils
les forcent à reposer des questions difficiles, voire angoissantes su
546
e de la vie… D’une façon plus précise, en Europe,
il
nous faut décider si notre union aura pour but la puissance collectiv
547
puissance collective ou la liberté des personnes.
Il
nous faut le décider, en toute conscience, et vite, car le choix de l
548
mais à l’inverse, si vous vous trompez de moyens,
ils
risquent bien de vous conduire où vous ne vouliez pas aller… Voici do
549
incipalement de tenir tête aux deux autres, alors
il
faut créer un super-État-nation continental, uniformisé, centralisé e
550
on, et faire de nos États autant de départements.
Il
faut tout unifier par des lois inflexibles, sans égard aux diversités
551
e — selon la loi de l’État-nation dès ses débuts.
Il
s’agit donc d’une utopie catastrophique, mais dont la réalisation ne
552
n’étant qu’un des moyens de ces libertés), alors
il
faut reconnaître que l’État-nation n’est pas seulement un modèle péri
553
ion n’est pas seulement un modèle périmé, mais qu’
il
est en fait aujourd’hui radicalement incompatible avec les fins de l’
554
tible avec les fins de l’Europe et de la liberté.
Il
faut adopter sans délai les méthodes les plus propres à réduire l’obs
555
neufs pour une cité rendue à l’usage de l’homme.
Il
faut mettre en commun à l’échelle fédérale continentale, tout ce qui
556
s, communales et personnelles, mais rien de plus.
Il
faut admettre la pluralité des allégeances, civiques, politiques, cul
557
étention de l’État-nation à leur monopole absolu.
Il
faut distribuer les pouvoirs étatiques aux différents niveaux de déci
558
unauté la plus apte à les administrer. En un mot,
il
faut appliquer la méthode du fédéralisme. Puissance ou liberté : ces
559
as perdre une occasion de faire voir à quel point
elles
sont absurdes. Elles sont encore efficaces, il est vrai, pour gêner c
560
n de faire voir à quel point elles sont absurdes.
Elles
sont encore efficaces, il est vrai, pour gêner ce qu’il faudrait aide
561
elles sont absurdes. Elles sont encore efficaces,
il
est vrai, pour gêner ce qu’il faudrait aider : les échanges culturels
562
t encore efficaces, il est vrai, pour gêner ce qu’
il
faudrait aider : les échanges culturels, les mouvements de personnes,
563
des productions industrielles et agricoles. Mais
elles
ne servent absolument à rien pour arrêter ce qui devrait l’être : les
564
nde et les grandes contagions dites idéologiques.
Elles
empêchent simplement de bien traiter ces problèmes. Ce statut des fro
565
ouche à l’État-nation : néfaste dans la mesure où
il
est encore réel, inexistant quand on voudrait compter sur lui. Je ne
566
e (laquelle ne saurait être positive, me semble-t-
il
, dans tous les pays à la fois…) ne sont pas le type même de faux prob
567
rs frontières sans les apercevoir : dans ce plan,
elles
n’existent pas. Il n’y a pas de « cultures nationales », en dépit des
568
apercevoir : dans ce plan, elles n’existent pas.
Il
n’y a pas de « cultures nationales », en dépit des manuels scolaires,
569
res nationales », en dépit des manuels scolaires,
il
n’y a que des divisions tout arbitraires opérées dans l’ensemble viva
570
sont pas celles de ces États-nations nés d’hier :
elles
les traversent et les divisent tous également, et ne coïncident jamai
571
par l’idée de « se faire respecter », oublient qu’
ils
n’y arriveraient qu’en se rendant utiles. Ils exigent, depuis Louis X
572
qu’ils n’y arriveraient qu’en se rendant utiles.
Ils
exigent, depuis Louis XIV, que l’on s’incline devant la « majesté de
573
e des nations. À l’aspect négatif de ses travaux,
elle
ajouterait l’étude on ne peut plus positive de la renaissance des rég
574
peut plus positive de la renaissance des régions.
Il
faut défaire et dépasser l’État-nation. En instaurant les régions en
575
nt les régions en deçà, et la fédération au-delà.
Il
faut distribuer et répartir l’État aux différents niveaux de décision
576
rtir l’État aux différents niveaux de décision où
il
peut servir une entité vivante, civique, économique ou culturelle, et
577
ations ou d’affaires étrangères : c’est un mot qu’
il
nous faut bannir du vocabulaire politique dans une Europe fédérale, a
578
Dira-t-on que ce programme est révolutionnaire ?
Il
l’est, bien sûr : on ne fera pas l’Europe sans casser des œufs, nous
579
œufs, nous le voyons depuis vingt-cinq ans. Mais
il
l’est moins parce qu’il demande qu’on dépasse les États-nations que p
580
puis vingt-cinq ans. Mais il l’est moins parce qu’
il
demande qu’on dépasse les États-nations que parce qu’il pose une hiér
581
ande qu’on dépasse les États-nations que parce qu’
il
pose une hiérarchie nouvelle des finalités politiques. Donner comme b
582
les problèmes de prix du lait, du blé ou du vin,
il
est clair que l’Europe des marchandages entre économies étatiques ne
583
ront pas convaincus par des avantages matériels :
ils
sont presque comblés à cet égard. Ce qui leur manque le plus durement
584
la politique au sens étroit et partisan du terme.
Elle
exige la recréation de communautés véritables. Et la Cité européenne
585
re plus grâce à eux et les renvoyer au plus vite.
Il
semblerait que tout le monde « gagne » à ce jeu : l’industrie qui y t
586
érée telle que vous la concevez, chaque État peut-
il
conserver son intégrité spirituelle et culturelle malgré la libre cir
587
manuels ? — La notion d’« helvéticité » existe-t-
elle
? Et si oui, dans le cas particulier qui nous préoccupe, cette « helv
588
ier qui nous préoccupe, cette « helvéticité » est-
elle
menacée par la présence d’une nombreuse main-d’œuvre étrangère en Sui
589
la plupart de ceux qui viennent de le découvrir.
Ils
nous disent : « À l’heure où il n’est question que de s’ouvrir à l’Eu
590
de le découvrir. Ils nous disent : « À l’heure où
il
n’est question que de s’ouvrir à l’Europe, pourquoi nous fermer devan
591
détruit lui-même : car dans une Europe intégrée,
il
n’y a plus « d’économie suisse », il y a seulement une économie europ
592
ment importer autant de travailleurs étrangers qu’
il
en faut pour que nos exportations continuent à croître, cela revient,
593
les travailleurs ne se déplacent en général que s’
ils
y sont fortement incités, s’ils sont en quelque sorte recrutés, à l’i
594
en général que s’ils y sont fortement incités, s’
ils
sont en quelque sorte recrutés, à l’instar des soldats du service étr
595
ient avant tout les routes du gain maximal, où qu’
elles
aillent, est fausse et irréelle, quoique matérialiste. La plupart des
596
tre « helvéticité », comme vous osez l’écrire ! —
il
est clair que ce n’est pas sérieux. L’argument ne vaut rien, mais en
597
ues et hygiéniques, écologiques et politiques, si
elle
n’établit pas ses plans en conséquence et ne s’engage pas à les réali
598
puté zurichois sera des plus utiles aux Suisses s’
il
les amène à se poser — bien au-delà du 7 juin et de ses résultats — l
599
suivantes : — La croissance indéfinie du PNB est-
elle
une obligation sacrée, donc indiscutable, ou faut-il la subordonner à
600
une obligation sacrée, donc indiscutable, ou faut-
il
la subordonner à d’autres impératifs, écologiques notamment ? — Le «
601
cologiques notamment ? — Le « niveau de vie » est-
il
plus important que le mode de vie ? — La philanthropie qu’invoquent à
602
ne peut pas chasser des frères humains ») serait-
elle
encore invoquée si la présence des travailleurs étrangers nous coûtai
603
e des travailleurs étrangers nous coûtait plus qu’
elle
ne rapporte ? — La pire menace contre notre mode de vie suisse vient-
604
pire menace contre notre mode de vie suisse vient-
elle
de la présence d’étrangers parmi nous, ou de nous-mêmes, qui tolérons
605
on, sur « Les travailleurs étrangers en Suisse ».
Il
est précédé du chapeau suivant : « Invité à se prononcer sur notre do
606
estament de Tristan (14-15 novembre 1970)ax ay
Il
a choisi le pays de son nom contre le continent de son prénom ; et ju
607
e voter son exil. Mais j’ai tort de dire France :
il
s’agit des Français, et de Gaulle a toujours distingué. Toute ma vie
608
ouée à une destinée éminente et exceptionnelle… S’
il
advient que la médiocrité marque, pourtant, ses faits et gestes, [c’e
609
passion nationale. Son Iseut, c’est la France, et
il
est près de le dire dans plus d’une page de ses Mémoires, et pas seul
610
seulement dans ces célèbres premières phrases où
il
l’a peinte « telles la princesse des contes ou la madone des fresques
611
des succès achevés ou des malheurs exemplaires ».
Il
l’a longtemps aimée de loin, dans son exil. Il l’a délivrée de haute
612
». Il l’a longtemps aimée de loin, dans son exil.
Il
l’a délivrée de haute lutte en terrassant le monstre, qui la tenait c
613
en terrassant le monstre, qui la tenait captive.
Il
l’a ramené au mari légitime, à ce roi Marc que figurait le Pays légal
614
c que figurait le Pays légal, la République. Puis
il
a dû s’éloigner d’elle et de la Cour, de nouveau, écœuré par l’intrig
615
s légal, la République. Puis il a dû s’éloigner d’
elle
et de la Cour, de nouveau, écœuré par l’intrigue des « barons félons
616
(son premier départ volontaire, en 1946). Certes,
il
est revenu à son appel, et c’est en 1958. « Mais la vraie passion tri
617
retraits et d’obstacles, quitte à les susciter s’
ils
semblent faire défaut. Entre la France et lui, quand il était le plus
618
blent faire défaut. Entre la France et lui, quand
il
était le plus fort — Tristan plus fort que le roi Marc —, n’a-t-il pa
619
fort — Tristan plus fort que le roi Marc —, n’a-t-
il
pas déposé une épée symbolique ? » J’écrivais cela en 1961, annonçant
620
llégué : l’instauration en France des régions, qu’
il
proposa solennellement, et à quoi il choisit de lier son sort. Un sui
621
régions, qu’il proposa solennellement, et à quoi
il
choisit de lier son sort. Un suicide politique, dirent les observateu
622
un tragique malentendu entre « de Gaulle », comme
il
disait, et cette Europe qui l’eût plébiscité comme un second Charles
623
itier de Louis XIV, des jacobins et de Napoléon.)
Il
m’écrivait en 1962 à propos de mes Vingt-huit siècles d’Europe : E
624
ir le régime général d’union dans la diversité qu’
il
admirait dans notre Suisse. Quant à la participation qu’il demandait,
625
it dans notre Suisse. Quant à la participation qu’
il
demandait, c’est le mot clé du fédéralisme. Merveilleux compromis ent
626
e stature : écartant les barons et le Pays légal,
il
ne veut devant sa tombe que la France seule, une fois de plus symboli
627
cuter avec le Marché commun. Ce hasard marquera-t-
il
la fin d’une certaine Europe, le début d’une autre ? Nous avons deman
628
e ? Nous avons demandé à Denis de Rougemont ce qu’
il
pensait de l’homme d’État, après que Jacques Mercanton, la semaine de
629
udier les rapports du Général avec la culture, qu’
il
n’a guère encouragée. »
630
s motivations. Les écrivains ont développé contre
elle
une série de réactions de mauvaise foi protectrice, ou de « rationali
631
ationalisations » pour parler le jargon freudien.
Ils
ont trouvé trente-six raisons d’écrire. Ils ont milité pour des cause
632
dien. Ils ont trouvé trente-six raisons d’écrire.
Ils
ont milité pour des causes. Ils ont même inventé la notion de l’engag
633
raisons d’écrire. Ils ont milité pour des causes.
Ils
ont même inventé la notion de l’engagement, dans les années 1930… Ell
634
la notion de l’engagement, dans les années 1930…
Elle
était vraie, mais elle n’expliquait rien. Quand on demande à Zazie po
635
ent, dans les années 1930… Elle était vraie, mais
elle
n’expliquait rien. Quand on demande à Zazie pourquoi elle veut deveni
636
xpliquait rien. Quand on demande à Zazie pourquoi
elle
veut devenir institutrice, elle répond : « Pour faire chier les mômes
637
à Zazie pourquoi elle veut devenir institutrice,
elle
répond : « Pour faire chier les mômes ! » Ces mauvais sentiments anim
638
peu tellement imbibées de raison que l’origine qu’
elles
tirent de la déraison devient invraisemblable. » Hypocrites auteurs,
639
ur devenir aussi admirable aux yeux des autres qu’
il
est admiré par vous-même, vous essayez d’écrire comme lui des vers, u
640
tat brut ne continue d’agir dans mes écrits, mais
il
n’est plus seul discernable, tout mêlé qu’il se trouve à des courants
641
mais il n’est plus seul discernable, tout mêlé qu’
il
se trouve à des courants violents chargés de matériaux littérairement
642
, mais d’un discours, d’un livre, d’un article qu’
il
s’agit de donner à date fixe — et de tout ce qu’il faut bien ajouter
643
l s’agit de donner à date fixe — et de tout ce qu’
il
faut bien ajouter à quelque ouvrage obscurément jailli, pour l’acheve
644
’époque, je me l’écrie, et je lui crie d’abord qu’
elle
devrait être une autre pour que je n’y sois plus seulement un moi con
645
pour que je n’y sois plus seulement un moi contre
elle
, mais que [je] m’y perde et m’y donne. Quand je saurai pourquoi, j’au
646
, secret des banques, et les arts réduits, paraît-
il
, à celui de ne pas se mouiller. Nous savons que la Suisse, c’est autr
647
étrangers : quelle est à leurs yeux notre image ?
Ils
nous renvoient le plus souvent celle de nos erreurs sur nous-mêmes. T
648
nce8 auquel la Gazette demandait dernièrement s’
il
pensait que l’on devait faire l’Europe sur le modèle de la Suisse, et
649
ys une bonne solution. Ce qui ne veut pas dire qu’
elle
soit généralisable. » Réponse plutôt comique si l’on s’avise que le f
650
problèmes de la Suisse, pour la simple raison qu’
il
l’a faite et que seul il la définit en tant que Suisse. Il n’y a pas
651
pour la simple raison qu’il l’a faite et que seul
il
la définit en tant que Suisse. Il n’y a pas eu la Suisse d’abord, pui
652
ite et que seul il la définit en tant que Suisse.
Il
n’y a pas eu la Suisse d’abord, puis le fédéralisme appliqué à ce pay
653
urelle, la Suisse n’est rien hors du fédéralisme.
Elle
n’est rien qu’un régime d’union. Dans leur très grande majorité — 98
654
re de la Confédération helvétique, de quoi s’agit-
il
? Ni de l’anniversaire d’une dynastie — les Zähringen et les Kibourg
655
est une authentique fédération dans la mesure où
elle
s’est formée par la libre association de communes rurales et urbaines
656
énéraliser cette formule à toute l’Europe. Autant
il
devient clair aux yeux de tous que la formule de l’État-nation napolé
657
néralisation ne conduirait qu’à la guerre, autant
il
apparaît que la formule suisse, c’est-à-dire le fédéralisme, est au c
658
proche à l’Europe tout entière, la Suisse ne va-t-
elle
pas s’y perdre ? — C’est oublier ce qu’est la Suisse. Dans une Europe
659
Suisse. Dans une Europe unie, loin de se perdre,
elle
se retrouverait agrandie, prolongée dans l’espace et le temps, au-del
660
ongée dans l’espace et le temps, au-delà de ce qu’
elle
est aujourd’hui, qui est tellement au-delà de ce qu’elle fut au Grütl
661
t aujourd’hui, qui est tellement au-delà de ce qu’
elle
fut au Grütli, berceau mythique. Une idée se perd-elle en se générali
662
fut au Grütli, berceau mythique. Une idée se perd-
elle
en se généralisant, et une formule d’union en fécondant des unions to
663
de dans une Europe fédéraliste montrent par là qu’
ils
ne savent pas ce qu’est la Suisse. Écoutons plutôt un grand Zurichois
664
a communauté de la Grande Europe. De cette façon,
elle
n’aura pas vécu en vain, ni sans gloire. S’évanouir dans le succès d
665
ésirons vraiment, si nous le voulons. C’est ce qu’
il
reste à savoir, et c’est ce qui nous inquiète. S’il n’y a plus de fro
666
reste à savoir, et c’est ce qui nous inquiète. S’
il
n’y a plus de frontières tangibles, plus de douaniers, où sera la Sui
667
isse, gémissent nos « patriotes » désorientés. Or
il
est sain de se demander, au minimum une fois par an, ce que nous fais
668
e voudront seront alors les vrais Suisses. « Et s’
il
n’en reste qu’un… », disait Victor Hugo, reprenant un vers de Corneil
669
ictor Hugo, reprenant un vers de Corneille. 8.
Il
s’agit d’une interview de M. Raymond Aron, publiée dans la Gazette de
670
ersaire un éloge dont tout me faisait craindre qu’
il
fût de nature — si plus tôt exprimé, sans précaution — à desservir la
671
a hauteur, affable mais non sans malice, et ce qu’
il
faut d’arbitraire dans les jugements, lucide avec plus de mélancolie
672
Il
faut dénationaliser l’enseignement [Entretien] (8 décembre 1972)bc bd
673
récié qu’à demi la réédition des Méfaits, soit qu’
ils
se sentent attaqués dans leur conscience professionnelle, soit qu’ils
674
ués dans leur conscience professionnelle, soit qu’
ils
jugent, eux, que votre texte a vieilli. Je le regrette infiniment, ca
675
car j’ai beaucoup de respect pour les maîtres, et
ils
ont toute mon amitié. J’ai reçu une lettre, récemment, où une dame me
676
laire, dont les instituteurs sont victimes, et qu’
ils
perpétuent malgré eux. Ils n’en sont pas responsables. J’ai d’ailleur
677
s sont victimes, et qu’ils perpétuent malgré eux.
Ils
n’en sont pas responsables. J’ai d’ailleurs reçu d’autres lettres d’i
678
entralisé, comme le système français. Conviennent-
elles
vraiment à la Confédération suisse, où l’instruction publique est du
679
tons ? Mais en 1929 je parlais de mon expérience.
Elle
était tout à fait suisse, puisque j’ai fait l’école primaire, jusqu’à
680
squ’à présent le moyen de formation le plus fort.
Elle
a prétendu à un monopole de l’éducation, contre l’Église et contre la
681
service de l’État-nation. Dans le système actuel,
il
serait pratiquement impossible de déscolariser la société, comme le r
682
aillent à l’extérieur. Mais l’école doit changer.
Il
faut dénationaliser l’enseignement. Quel sens peut avoir pour un enfa
683
ns peut avoir pour un enfant l’histoire suisse, s’
il
ignore celle de sa région ? À Couvet, j’ai tout appris sur les Waldst
684
enfin le monde, réalité biologique et écologique.
Il
faut étudier l’histoire, la géographie, l’écologie, l’économie — l’éc
685
res n’ont rien à voir avec les lois de la nature.
Elles
n’arrêtent rien de ce qu’il faudrait arrêter : les nuages, les tempêt
686
lois de la nature. Elles n’arrêtent rien de ce qu’
il
faudrait arrêter : les nuages, les tempêtes, l’eau polluée ; et elles
687
er : les nuages, les tempêtes, l’eau polluée ; et
elles
empêchent le passage de ce qui devrait circuler : les hommes, les mar
688
e j’ai mis deux de mes étudiants sur le problème.
Ils
ont trouvé que les manuels d’histoire et de géographie des années 190
689
Mitterrand. Des exceptions. Mais comment pourrait-
il
en aller autrement ? Prenez le Petit Littré, qui est encore le dictio
690
nous ramène au problème de la poule et de l’œuf…
Il
faut agir aux deux niveaux à la fois. Que faire au niveau des États ?
691
us n’avez pas affaire à la réalité. » Or que font-
ils
? Ils expédient les affaires courantes. Étudier l’introduction de nou
692
vez pas affaire à la réalité. » Or que font-ils ?
Ils
expédient les affaires courantes. Étudier l’introduction de nouvelles
693
La réalité, c’est tout le système scolaire. Mais
ils
ne peuvent jamais faire face à ce problème. Il faudrait qu’ils puisse
694
s ils ne peuvent jamais faire face à ce problème.
Il
faudrait qu’ils puissent s’arrêter, sortir de l’urgent et du quotidie
695
t jamais faire face à ce problème. Il faudrait qu’
ils
puissent s’arrêter, sortir de l’urgent et du quotidien, pour pouvoir
696
, pour pouvoir tout reconsidérer. Pour en sortir,
il
faut une véritable révolution. L’impossible révolution Qu’enten
697
i est pratiquement impossible dans notre culture.
Il
faudrait, au minimum, une volonté générale de sortir du cercle vicieu
698
éfaits , l’exemple de Benjamin Constant. À 5 ans,
il
a appris le grec. Sous forme de jeu9. Peut-être l’évolution en cours
699
dans la plupart des écoles européennes donnera-t-
elle
lieu à la révolution que vous souhaitez. Mais on en distingue déjà de
700
es, l’élève pourra « trotter à son pas, galoper s’
il
le peut à travers les programmes, bride sur le cou ». Dans le second,
701
s programmes, bride sur le cou ». Dans le second,
il
faudra bien que l’élève le plus rapide attende que le plus lent de so
702
et c’est à mes yeux la chose la plus importante —
il
faut interdire la phrase : « Ici, tous doivent faire la même chose !
703
rades plus faibles. Au contraire : en les aidant,
ils
apprendraient d’autant mieux. On ne sait vraiment que ce qu’on a dû e
704
parlez dans les Méfaits 10, et dont vous dites qu’
elle
ressemble à ce que demande Illich ? Une école comme celle des amish,
705
Illich, bien que je partage largement ses idées,
il
est trop rousseauiste : il suppose chez tous les enfants une sorte de
706
e largement ses idées, il est trop rousseauiste :
il
suppose chez tous les enfants une sorte de besoin inné de s’instruire
707
très proches : aux États-Unis. Plus d’autorité du
maître Il
se forme spontanément des groupes, autour d’un chef, fanatiquement ob
708
ont tort de ne tolérer qu’un des deux termes. Car
il
faut que l’un existe pour que l’autre vive, et vice versa. L’éducatio
709
on-solitude, action-repos, permanence-changement.
Il
faut trouver leur point d’équilibre dynamique. Ainsi pour le fédérali
710
éralisme, qui est si mal compris, même en Suisse.
Il
s’agit de mettre en relation des éléments — dans le cas européen, des
711
ion des deux, ni subordination de l’un à l’autre.
Ils
sont à la fois semblables et différents, séparés et unis. C’est la fo
712
ec Dieu, soit à le limiter à son essence humaine.
Il
faut reconnaître que l’existence simultanée du divin et de l’humain d
713
on dernier article dans Civisme européen 11. Mais
il
est clair que, seule, la bonne volonté des maîtres ne suffira pas. Il
714
ule, la bonne volonté des maîtres ne suffira pas.
Il
faut modifier les structures. Les structures nouvelles étant censées
715
ter une nouvelle pédagogie, de nouveaux maîtres ?
Elles
n’entraîneront pas automatiquement une meilleure pédagogie mais pourr
716
ce que je vous ai dit, c’est ceci, je le répète :
il
faut apprendre à penser par antinomies. Lier solitude et compagnie, r
717
raclite qu’on comprend généralement mal, parce qu’
elle
est mal traduite : « La guerre est la mère de toute chose. » Plutôt q
718
t la mère de toute chose. » Plutôt que « guerre »
il
faudrait dire « conflit ». À quoi je préfère encore le mot « tension
719
le de me faire inventer le grec pour l’apprendre.
Il
me proposa de nous faire à nous deux une langue qui ne serait connue
720
cette idée. Nous formâmes d’abord un alphabet, où
il
introduisait les lettres grecques. Puis nous commençâmes un dictionna
721
ile. La communauté des amish produit tout ce dont
elle
a besoin et refuse le tracteur et l’auto. » 11. « Le sort de l’an 20
722
, Genève. bc. Rougemont Denis de, « [Entretien]
Il
faut dénationaliser l’enseignement », Gazette de Lausanne, Lausanne,
723
e”. La fonction de l’instruction publique, disait-
il
, était de conditionner les esprits des futurs citoyens dans le sens v
724
l, et fort peu. Quant à l’“aggravation”, de 1972,
elle
commence ainsi : “Écrit d’un jeune homme en colère, aussi injuste qu’
725
ents l’essentiel de ses critiques quadragénaires.
Il
cite Ivan Illich, un professeur français, un ministre de l’Éducation
726
le même : c’est un crime contre l’homme, estime-t-
il
, que d’aligner les esprits pour la commodité des pouvoirs établis. »
727
importance rapidement fabuleuse, et passionnelle.
Il
est difficile d’en parler, fût-ce à sa louange éperdue, sans provoque
728
ues faits vrais, dont la discordance m’inquiète :
elle
m’empêche de m’abandonner à l’euphorie d’un lyrisme contemplatif, ou
729
du paradoxe majeur de notre civilisation. Grâce à
elles
, l’homme des villes a retrouvé le contact avec la nature, et ce conta
730
t n’osant aimer que ce qui par d’autres est aimé,
ils
détruisent à coup sûr les amours qu’ils partagent. Ce paysage sublime
731
est aimé, ils détruisent à coup sûr les amours qu’
ils
partagent. Ce paysage sublime est un pays réel, peuplé de vignerons e
732
que Lavaux, à jamais, demeure tel qu’un beau jour
ils
l’ont aimé. Or, ses habitants l’aiment aussi, mais ils en usent, c’es
733
’ont aimé. Or, ses habitants l’aiment aussi, mais
ils
en usent, c’est-à-dire le transforment chaque jour par les retouches
734
. Pour garder le Lavaux que nous aimons, faudrait-
il
qu’ils renoncent à le vivre, à en vivre ? Sauver Lavaux, oui, mais vi
735
garder le Lavaux que nous aimons, faudrait-il qu’
ils
renoncent à le vivre, à en vivre ? Sauver Lavaux, oui, mais vivant no
736
. Et vivant, c’est-à-dire changeant selon sa loi.
Il
est d’autres centres du monde où les problèmes de la survie d’un lieu
737
étages de palais sur le Grand Canal à des riches.
Il
faut d’abord que Venise soit peuplée, animée, habitée par des gens du
738
plée, animée, habitée par des gens du pays. Et qu’
ils
y trouvent un intérêt vital, et non pas archéologique. Pour sauver Ve
739
al, et non pas archéologique. Pour sauver Venise,
il
faudra la changer. Inaliénable, oui, inaltérable, non. Ensuite, « fai
740
me. Les artisans du livre, auteurs des textes, qu’
ils
s’appellent Paul Chaudet, Claude Massy, Jean Villars-Gilles, François
741
iscussion avec un directeur qui n’a dit que ce qu’
il
devait dire pour défendre les intérêts de sa compagnie ; mais votre r
742
par M. Desmeules. À l’intention de vos lecteurs,
il
m’importe de dénoncer l’usage fait de ces deux citations, qui en fals
743
doit être replacée dans son contexte historique :
elle
remonte en effet à 1958 — et non pas 1964 comme vous le dites — date
744
hui au premier rang de l’opposition au nucléaire.
Ils
pourront confirmer ma description de l’état d’innocence générale où n
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à géométrie variable » titre votre rédacteur.) Or
il
est clair qu’elle ne contredit en réalité que les intentions que M. D
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able » titre votre rédacteur.) Or il est clair qu’
elle
ne contredit en réalité que les intentions que M. Desmeules nous attr
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attribue d’une manière arbitraire et calomnieuse.
Il
embrouille tout, décidément, et beaucoup plus encore qu’on ne le croi
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ucléaires ne sont pas dangereuses, à condition qu’
elles
soient exploitées et contrôlées par des équipes organisées de manière
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uipes organisées de manière rigoureuse… Pour moi,
il
est essentiel que les centrales nucléaires soient peu nombreuses, don
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de façon quasi militaire 14. M. Desmeules aurait-
il
mal compris ? Ce n’est pas nous, mais ceux de son bord qui ont dit ce
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que mon idéal serait l’État marxiste omnipotent,
il
faut n’avoir rien lu de moi pour oser le répéter à longueur de colonn
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pour oser le répéter à longueur de colonnes. Est-
il
pensable qu’une cause défendue par de tels procédés soit une bonne ca