1 1940, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). Erreurs sur l’Allemagne (1er mai 1940)
1 1940)a Les journaux, les revues et les livres nous apportent chaque jour des jugements plus massifs sur l’hitlérisme et
2 , Edmond Vermeil, G. de Reynold, d’autres encore, nous affirment que l’hitlérisme sort de Luther. Certains d’entre eux nuanc
3 ale et prolongée des bourgeois de divers pays. Si nous prétendons défendre le christianisme, agissons d’abord en chrétiens,
4 par dénoncer non les erreurs d’autrui, mais bien les nôtres . Surtout s’il se trouve qu’en fait, ce sont exactement les mêmes erre
5 e chères croyances… Mais quoi, la guerre présente nous rappelle au sérieux. Et ce n’est pas ma faute, ni celle des protestan
2 1940, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). « À cette heure où Paris… » (17 juin 1940)
6 t se tait, que son deuil soit le deuil du monde ! Nous sentons bien que nous sommes tous atteints. Quelqu’un disait : si Par
7 il soit le deuil du monde ! Nous sentons bien que nous sommes tous atteints. Quelqu’un disait : si Paris est détruit, j’en p
8 divisionen. Quelque chose d’indéfinissable et que nous appelions Paris. C’est ici l’impuissance tragique de ce conquérant vi
3 1941, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). New York alpestre (14 février 1941)
9 New-Yorkais ne se lassent pas de désigner, comme nous énumérons nos Alpes quand nous en contemplons la chaîne, et qui leur
10 se lassent pas de désigner, comme nous énumérons nos Alpes quand nous en contemplons la chaîne, et qui leur servent de rep
11 de désigner, comme nous énumérons nos Alpes quand nous en contemplons la chaîne, et qui leur servent de repères pour se diri
4 1941, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). La route américaine (18 février 1941)
12 de la route américaine de la vie. Ce qui est pour nous concept, forme arrêtée, devient chez eux chemin, mouvement indéfini.
13 d des pneus qui mordent le béton. En cinq heures, nous aurons couvert les 400 kilomètres qui séparent le centre de New York
5 1946, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). Monsieur Denis de Rougemont, de passage en Europe, nous dit… [Entretien] (4 mai 1946)
14 onsieur Denis de Rougemont, de passage en Europe, nous dit… [Entretien] (4 mai 1946)f g Monsieur, quel bon vent vous amèn
15 ricains peuvent consulter, pour se renseigner sur notre pays, et il s’en vend encore régulièrement. J’ai été professeur — et
16 énormément ; c’est une autre civilisation que la nôtre , mais qui a ses valeurs à elle. Peut-on employer ce mot de civilisati
17 ur les histoires d’un pittoresque extravagant qui nous viennent de là-bas ? Puérils, ils le sont à nos yeux sur certains poi
18 nous viennent de là-bas ? Puérils, ils le sont à nos yeux sur certains points, et nous le sommes à leurs yeux sur certains
19 s, ils le sont à nos yeux sur certains points, et nous le sommes à leurs yeux sur certains autres (par exemple, la manie de
20 eux sur certains autres (par exemple, la manie de nous battre). À côté d’eux, nous sommes un peu « névrosés ». Ils sont évid
21 exemple, la manie de nous battre). À côté d’eux, nous sommes un peu « névrosés ». Ils sont évidemment très simplistes dans
22 , les Américains n’ont en somme pas grand-chose à nous apprendre, et c’est là une de leurs grandes ressemblances (il y en a
23 onnus en Europe qu’en Amérique. Ce qui est tout à notre honneur ! L’Europe reste le continent de la création. L’Amérique ne c
24 par un commentaire conclusif de l’interviewer : «  Nous devons arrêter là cette interview ; nous ne doutons pas que les consi
25 ewer : « Nous devons arrêter là cette interview ; nous ne doutons pas que les considérations de l’écrivain neuchâtelois — qu
26 s considérations de l’écrivain neuchâtelois — que nous espérons n’avoir point trahies en les résumant — intéresseront viveme
27 trahies en les résumant — intéresseront vivement nos lecteurs. » f. Rougemont Denis de, « [Entretien] Monsieur Denis de
28 onsieur Denis de Rougemont, de passage en Europe, nous dit… », Gazette de Lausanne, Lausanne, 4 mai 1946, p. 3. g. Ces prop
29 où il la retrouvera cet automne. Il a bien voulu nous accorder la primeur d’une interview, ce dont nous le remercions ici t
30 nous accorder la primeur d’une interview, ce dont nous le remercions ici très vivement. »
6 1947, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). Consolation à Me Duperrier sur un procès perdu (5 décembre 1947)
31 me dénoncer, tout ce discours retombe à plat, et notre avocat perd la face. 2. Mais où est l’homme sain d’esprit qui peut ad
32 admettre que j’aie vraiment agi comme Oltramare ? Nous avons tous les deux écrit pour la radio, hors de Suisse, sur la polit
33 procès. La seule question sérieuse qui se posait, notre avocat s’est bien gardé de la formuler, c’est celle du contenu des ém
34 ésite pas : il dit que j’ai fait comme Oltramare, notre infaillible führer suisse. On lui répond que ça ne prend pas, que j’a
35 atie du monde. Jugez donc ! et dites avec moi que nous l’avons échappé belle ! Et que le désordre tolérable et tolérant où n
36 lle ! Et que le désordre tolérable et tolérant où nous voici tout de même encore vivants et libres, vaut mieux que leur « or
37 vants et libres, vaut mieux que leur « ordre » où nous serions des morts, ou je ne sais quels esclaves honteux de vivre. h
7 1949, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). Les écrivains romands et Paris (10 septembre 1949)
38 is (10 septembre 1949)j k Questions 1 et 2. —  Nous avons tout ce qu’il faut, en Suisse romande, pour nourrir une littéra
39 en Suisse romande, pour nourrir une littérature. Nous avons peut-être un peu plus que bien d’autres provinces françaises :
40 é religieuse, proximité du monde germanique. Mais nous n’avons rien de ce qu’il faut pour assurer le succès d’une œuvre : pu
41 ement autour des « grands », et ils sont à Paris. Nous faisons partie de la littérature française. Or, il se trouve que la F
42 ans sa vie littéraire aussi. Pourquoi s’insurger, nous seuls, contre ce fait ? Imagine-t-on Chateaubriand se demandant s’il
43 ci est précédée du chapeau suivant : « Récemment, notre correspondant de Paris, Jean-Pierre Moulin, a posé dans nos colonnes
44 pondant de Paris, Jean-Pierre Moulin, a posé dans nos colonnes les trois questions suivantes : 1. Un écrivain (nous entendo
45 s les trois questions suivantes : 1. Un écrivain ( nous entendons par là aussi bien un romancier qu’un dramaturge) a-t-il à s
46 uisse très cosmopolite reconnaît, à son tour, que notre pays manque de ce qui est indispensable au succès d’une œuvre littéra
8 1949, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). L’Europe est encore un espoir (8 décembre 1949)
47 re lettre est la meilleure preuve de l’urgence de notre congrès. Elle dit tout haut ce que pensent des millions. Et elle le d
48 llusion. Elle dit deux mots : trop tard. D’autres nous disent : trop tôt… Entre ceux qui parlent comme vous, et ceux qui nou
49 t… Entre ceux qui parlent comme vous, et ceux qui nous reprochent une hâte « imprudente », la différence n’est pas de jugeme
50 presque raison. Mais dans ce presque il y a tout notre espoir, bien plus, il y a le ressort de notre action. Je voudrais vou
51 out notre espoir, bien plus, il y a le ressort de notre action. Je voudrais vous montrer que ce presque est une réalité, et q
52 nge tout. Mon argument sera simple, le voici : Si notre Europe n’existait plus, si c’était vrai, vous ne pourriez plus même l
53 réalité, les jeux sont faits. Le droit de parler nous est encore laissé, mais c’est qu’il n’a plus d’importance. La possibi
54 u’il n’a plus d’importance. La possibilité d’agir nous est ôtée. » Venez donc à Lausanne, et nous en discuterons. (L’Europe
55 d’agir nous est ôtée. » Venez donc à Lausanne, et nous en discuterons. (L’Europe existe encore, là où le dialogue existe.) V
56 pe ruinée entre deux colosses agressifs. Secouons- nous , détournons les yeux de cet abîme d’angoisse, et calculons. Le tablea
57 nge en un clin d’œil. À l’ouest du rideau de fer, nous sommes 300 millions : c’est deux fois plus que l’Amérique, autant que
58 ne. Une Europe entre deux colosses ? Mais gardons- nous des fausses symétries. La symétrie est une loi de la paresse, autant
59 Europe. Ce n’est pas la même union que les Russes nous imposeraient ! L’Amérique veut l’Europe unie, parce qu’elle a besoin
60 que veut l’Europe unie, parce qu’elle a besoin de nous en tant qu’Européens, autonomes, et même concurrents, non pas en tant
61 pas en tant qu’esclaves coûteux à entretenir. Et nous avons besoin de l’Amérique, en retour ; nous n’avons pas besoin des R
62 . Et nous avons besoin de l’Amérique, en retour ; nous n’avons pas besoin des Russes. Les Américains seront forcés de nous f
63 esoin des Russes. Les Américains seront forcés de nous forcer à l’union ou de nous abandonner, si nous n’arrivons pas, d’ici
64 ains seront forcés de nous forcer à l’union ou de nous abandonner, si nous n’arrivons pas, d’ici deux ans, à nous fédérer li
65 e nous forcer à l’union ou de nous abandonner, si nous n’arrivons pas, d’ici deux ans, à nous fédérer librement. Il ne dépen
66 donner, si nous n’arrivons pas, d’ici deux ans, à nous fédérer librement. Il ne dépend que de nous d’y réussir. Les jeux ne
67 ns, à nous fédérer librement. Il ne dépend que de nous d’y réussir. Les jeux ne sont donc pas faits. Il nous reste deux ans.
68 d’y réussir. Les jeux ne sont donc pas faits. Il nous reste deux ans. Nous perdrons ces deux ans si l’Europe dès maintenant
69 x ne sont donc pas faits. Il nous reste deux ans. Nous perdrons ces deux ans si l’Europe dès maintenant se croit perdue, si
70 s que moi. Et vous dites : « Ou bien un enfant… » Nous voici dans le temps de l’Avent, dans les nuits les plus longues de l’
9 1953, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). « Ce qu’ils pensent de Noël… » [Réponse] (24 décembre 1953)
71 me, et de l’antiaméricanisme de l’Europe pour que nous comprenions que les hommes ont fort peu de bonne volonté ? La plupart
10 1954, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). Rejet de la CED : l’avis de Denis de Rougemont (20 septembre 1954)
72 te suivra — l’armée, l’économie — quand chacun de nos peuples aura compris qu’il s’agit de se sauver tous ensemble ou de pé
11 1962, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). Fédéralisme et culture (3-4 mars 1962)
73 uvegarde organisée, et si possible officielle, de nos particularismes les plus désuets. Il voudrait que chacune de nos cité
74 smes les plus désuets. Il voudrait que chacune de nos cités se suffise à elle-même dans tous les domaines : université, rad
75 érer des solutions médiocres, mais « bien de chez nous  », aux avantages que pourrait procurer une coopération sans réserve a
76 e et dispersé, voire anarchique. Il est clair que nos villes sont trop petites pour se payer chacune un laboratoire de rech
77 s ou en Bourgogne, étaient alors plus petites que nos villes romandes actuelles. Elles sont tout de même devenues des foyer
78 aspillage des forces et des sommes. Je crains que nous soyons encore, en Suisse romande, aux antipodes de ce climat d’excita
79 climat d’excitation intellectuelle et artistique. Nos habitudes utilitaires, notre notion du sérieux confondu avec le renta
80 ctuelle et artistique. Nos habitudes utilitaires, notre notion du sérieux confondu avec le rentable, nos réflexes jalousement
81 otre notion du sérieux confondu avec le rentable, nos réflexes jalousement égalitaires, décourageant toutes les initiatives
82 c’est aussi tout cela qui menace dans ses sources notre vitalité fédéraliste. On parle beaucoup, ces jours-ci du danger que l
83 u danger que le Marché commun représenterait pour notre Suisse fédéraliste. Mais ce n’est pas le fait de supprimer nos douane
84 déraliste. Mais ce n’est pas le fait de supprimer nos douanes qui mettrait en danger nos « raisons d’être » ! C’est bien pl
85 t de supprimer nos douanes qui mettrait en danger nos « raisons d’être » ! C’est bien plutôt le fait de ne plus s’intéresse
86 t le fait de ne plus s’intéresser qu’au niveau de notre vie matérielle, de traiter la culture en mendiante, de refuser de la
87 ciper à une prospérité économique sans précédent. Nos raisons d’être et de rester Suisses ne sont pas des raisons économiqu
88 « Grâce à l’obligeance de M. Denis de Rougemont, nous publions un extrait de l’important exposé qu’il présentera aujourd’hu
12 1962, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). L’Europe est d’abord une culture (30 juin 1962)
89 2)t À suivre les débats qui se multiplient sur nos relations futures avec le Marché commun, on croirait que l’union de l
90 ersité. On va voir que cette thèse « culturelle » nous porte en pleine actualité, et qu’elle entraîne une politique bien déf
91 ntiellement une réalité économique, on oublie que notre économie n’est pas tombée du ciel ni sortie du sol, et qu’elle ne tir
92 qu’elle ne tire pas son origine et sa vitalité de notre nature, mais bien de nos cerveaux, donc de notre culture. L’économie
93 gine et sa vitalité de notre nature, mais bien de nos cerveaux, donc de notre culture. L’économie moderne est dominée par l
94 notre nature, mais bien de nos cerveaux, donc de notre culture. L’économie moderne est dominée par la technique, laquelle es
95 par la technique, laquelle est née du mariage de nos sciences spéculatives et de notre volonté de transformer la nature, l
96 née du mariage de nos sciences spéculatives et de notre volonté de transformer la nature, lesquelles sont nées de nos philoso
97 de transformer la nature, lesquelles sont nées de nos philosophies et de notre religion dominante, lesquelles nous sont ven
98 e, lesquelles sont nées de nos philosophies et de notre religion dominante, lesquelles nous sont venues d’Athènes et de Jérus
99 ophies et de notre religion dominante, lesquelles nous sont venues d’Athènes et de Jérusalem à travers Rome et son empire, e
100 es, proviennent à la fois l’unité fondamentale de nos peuples et les extraordinaires diversités qu’ils juxtaposent sur un t
101 étant ainsi replacé et situé dans le contexte de notre évolution, la question qui se pose est de savoir s’il faut et s’il su
102 traire ses meilleures énergies ; qu’elle respecte nos diversités traditionnelles, dans toute la mesure où elles sont encore
103 ntons brièvement ces conditions de succès : elles nous ramènent aux problèmes culturels. L’Europe du plan économique a besoi
104 pressions, et finalement détendre les ressorts de notre génie créateur. L’union économique implique, par conséquent, une poli
105 ns ont fait preuve depuis des siècles, résulte de nos diversités locales, régionales, idéologiques. Tout système centralisé
106 déprimer les autonomies locales et d’uniformiser nos coutumes régionales serait antieuropéen. Notre culture puise son pouv
107 iser nos coutumes régionales serait antieuropéen. Notre culture puise son pouvoir de rayonnement universel dans la pluralité
108 dans les tensions qui en naissent. D’autant plus nous sommes d’un canton, d’un pays, d’un climat religieux ou idéologique,
109 un climat religieux ou idéologique, d’autant plus nous pouvons devenir de bons Européens. « D’autant plus nous connaissons l
110 ouvons devenir de bons Européens. « D’autant plus nous connaissons les choses particulières, d’autant plus nous connaissons
111 nnaissons les choses particulières, d’autant plus nous connaissons Dieu », disait Spinoza. C’est là le vrai sens, et le seul
112 Toutes les cultures traditionnelles, y compris la nôtre , se voient en effet menacées par la technique. L’Europe ayant cent an
113 le et uniformisante détruirait les bases mêmes de notre dynamisme. Une simple alliance d’États souverains ne répondrait nulle
114 gardant les autonomies et diversités qui ont fait notre culture et sa vitalité. ⁂ Le problème européen étant ainsi posé ou re
115 ant ainsi posé ou reposé à partir des réalités de notre culture une et diverse, les conclusions suivantes me paraissent en dé
116 tique, appuyée sur une organisation fédérative de nos pays, aura pour mission essentielle d’orienter leur action commune à
117 emblent avoir plus de poids que les scrupules qui nous retiennent encore. Quand elle se borne à invoquer sa neutralité perpé
118 e, qui va plaider sa cause ? Une union faite sans nous ne sera pas faite pour nous, c’est l’évidence. Mais nous aurons perdu
119 Une union faite sans nous ne sera pas faite pour nous , c’est l’évidence. Mais nous aurons perdu le droit de nous en plaindr
120 sera pas faite pour nous, c’est l’évidence. Mais nous aurons perdu le droit de nous en plaindre. t. Rougemont Denis de,
121 st l’évidence. Mais nous aurons perdu le droit de nous en plaindre. t. Rougemont Denis de, « L’Europe est d’abord une cu
13 1963, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). Universités américaines (12-13 janvier 1963)
122 pas revu depuis un soir de 1941, à New York, chez notre ami commun Reinhold Niebuhr. Cet Allemand qui a fui les nazis est dev
123 t des religions de l’Orient, et de la gnose (dont nous allons beaucoup parler), cependant que Maritain domine la pensée cath
124 l’on est ami du patron et de la fille superbe qui nous sert le café après quelques échanges de phrases banales. Vivre ici se
125 le Vermont, sur la mer, dans des lieux déserts où nous allons passer le week-end, du vendredi après-midi au lundi matin. J’a
126 est le site d’un célèbre collège de jeunes gens. Nous y entrons par une avenue bordée d’arbres immenses aux petites feuille
127 us de grands arbres aux branches horizontales. On nous conduit par des sentiers dallés vers une maison de brique dominant le
128 fond noir, signée Georges Mathieu. Tout en haut, notre appartement pour quelques jours. Une musique bien rythmée remplit l’é
129 e peintres et de musiciens, se voient offrir chez nous ces possibilités — à tous égards enrichissantes — de contact avec la
130 mon ami Sidney Hook a répondu : « Cette attitude nous conduirait à être à la fois rouges et morts. » Ils ont parlé surtout
131 que, qui est une invention de l’Europe. Croyons à nos valeurs et prouvons-le, c’est ce que le monde attend de nous, pour no
132 s et prouvons-le, c’est ce que le monde attend de nous , pour nous rejoindre en fin de compte, Russes compris. J’ai terminé,
133 ns-le, c’est ce que le monde attend de nous, pour nous rejoindre en fin de compte, Russes compris. J’ai terminé, les questio
134 opie quelques exemples : « Le plus grand homme de notre temps était Gandhi. Pourquoi ne pas défendre nos valeurs en étant prê
135 otre temps était Gandhi. Pourquoi ne pas défendre nos valeurs en étant prêts à mourir, mais non pas à tuer, en leur nom ? »
136 à mourir, mais non pas à tuer, en leur nom ? » «  Nous devons incarner nos valeurs. Mais comment peut-on faire cela, compte
137 as à tuer, en leur nom ? » « Nous devons incarner nos valeurs. Mais comment peut-on faire cela, compte tenu des tensions po
138 eux et ils établissent le communisme mondial ; b) nous sommes vainqueurs et nos chères valeurs occidentales sont détruites d
139 communisme mondial ; b) nous sommes vainqueurs et nos chères valeurs occidentales sont détruites de toute façon. » « Admett
140 s, me dit ce dernier, c’est le langage commun que nous avons trouvé, entre nos différentes spécialités. Les historiens recou
141 st le langage commun que nous avons trouvé, entre nos différentes spécialités. Les historiens recourent aux maths pour éval
142 otidien sur les matrices algébriques. Bref, c’est notre latin moderne. » Je me demande où l’on trouve en Europe rien qui ress
143 urs esprits d’avant-garde. D’un instrument pareil nous ferions sans nul doute un usage assez différent, plus philosophique a
144 large. Mais encore faudrait-il le créer. Où sont nos fondations, à quoi pensent les mécènes ? 2. VIP : Very important p
145 ge dont il a bien voulu détacher quelques pages à notre intention. L’Amérique, c’est le vent, la mer, c’est aussi la jeunesse
14 1963, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). L’éloge, l’élan, l’amour, le monde ouvert à ceux qui s’ouvrent, cela existe… (2-3 février 1963)
146 asi obsessionnel » bloque beaucoup d’esprits dans nos cantons romands. Un seul en a tiré une œuvre forte, c’est Ramuz. Mais
147 x vignes, et pimenté d’exotisme valaisan. « Entre nous , nous sommes racistes », me disait-il un jour — provocateur ! Il aura
148 es, et pimenté d’exotisme valaisan. « Entre nous, nous sommes racistes », me disait-il un jour — provocateur ! Il aurait san
149 cela n’empêche nullement Cendrars ou Cingria. On nous parle de révolte, de crise et d’analyse, d’inhibitions, de pièges, de
15 1963, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). Les mythes sommeillent… ils vont se réveiller [Entretien] (9-10 février 1963)
150 a raison. Aujourd’hui, les mythes s’évanouissent. Nous devenons très « raisonnables ». Les arts mêmes ne veulent plus exprim
151 ement intellectuelle de nouveaux langages… Ce qui nous donne une impression de sécheresse, d’épuisement. Ne croyez-vous pas
152 les ne font, pour l’essentiel, que prendre ce que nous leur donnons. Mais si nos mythes sont morts… Ils sommeillent. Ils att
153 el, que prendre ce que nous leur donnons. Mais si nos mythes sont morts… Ils sommeillent. Ils attendent que nous soyons tou
154 es sont morts… Ils sommeillent. Ils attendent que nous soyons tout à fait sortis de cette période d’anarchie, que nous metti
155 ut à fait sortis de cette période d’anarchie, que nous mettions en place de nouvelles conventions, de nouvelles contraintes.
156 s conventions, de nouvelles contraintes. Et alors nous aurons de nouveau l’envie de nous libérer de quelque chose. Mais la s
157 intes. Et alors nous aurons de nouveau l’envie de nous libérer de quelque chose. Mais la société européenne n’a jamais été m
158 lement dépendant, conditionné par les autres, que nous parvenons à un choix : régler, réglementer minutieusement chaque déta
159 gler, réglementer minutieusement chaque détail de notre vie, de nos comportements ; ou bien déclencher des catastrophes. Tout
160 ter minutieusement chaque détail de notre vie, de nos comportements ; ou bien déclencher des catastrophes. Tout de même, ra
161 e qui fera un homme tous les dix mètres. En 2400, nous aurons un mètre carré chacun. Dans moins de 440 ans ! Bien sûr, la st
162 mment ne pas voir le problème ? Aujourd’hui déjà, notre vie est balisée de feux verts, de feux rouges et de feux clignotants.
163 eux verts, de feux rouges et de feux clignotants. Nous les respectons, parce qu’en les violant nous nous condamnerions à de
164 nts. Nous les respectons, parce qu’en les violant nous nous condamnerions à de terribles accidents. Moralité : l’homme tourn
165 Nous les respectons, parce qu’en les violant nous nous condamnerions à de terribles accidents. Moralité : l’homme tourne à l
166 couches immémorialement superposées, entrelacées, notre moi s’est fait. Notre animisme est assez bien formé, assez puissant,
167 t superposées, entrelacées, notre moi s’est fait. Notre animisme est assez bien formé, assez puissant, assez rusé pour trouve
168 e l’étude systématique du xie et du xiie siècle nous donnerait des éléments d’appréciation pour le xxie  ? On peut tracer
169 s ? C’est tout à fait possible. Ici s’est terminé notre entretien, ici commence la conférence de Denis de Rougemont. « Les mo
170 non pas à comprendre leur vie. Car tous, tant que nous sommes, sans le savoir, menons nos vies de civilisés dans une confusi
171 ous, tant que nous sommes, sans le savoir, menons nos vies de civilisés dans une confusion proprement insensée de religions
172 e superposent ou se combinent à l’arrière-plan de nos conduites élémentaires ; de complexes ignorés, mais d’autant plus act
173 illons pas sans reconnaissance l’homme capable de nous dire savamment, certes, mais avec une fougue et une simplicité devenu
174 té devenues rares, de quelle manière, à son avis, nous devons nous comprendre. y. Rougemont Denis de, « [Entretien] Les m
175 rares, de quelle manière, à son avis, nous devons nous comprendre. y. Rougemont Denis de, « [Entretien] Les mythes sommei
16 1964, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). Il nous faut des hommes de synthèses (19-20 septembre 1964)
176 Il nous faut des hommes de synthèses (19-20 septembre 1964)aa Le mythe de
177 ctuels, et aussi des plus angoissants de ceux que nous a légués l’Antiquité proche-orientale, si étroitement mêlée aux origi
178 i m’évoque d’abord la description de l’Europe que nous donnait Paul Valéry dans sa célèbre Lettre sur la société des esprits
179 vrait résumer le monde de l’esprit, l’ensemble de nos activités intellectuelles, et donc artificielles — elle fait songer à
180 oubli des buts finaux de l’existence dans lequel nous voyons s’enfoncer, inexorablement, le spécialiste. Essayons de poser
181 oblème dans son ensemble, à l’échelle planétaire. Nous assistons, me semble-t-il, au xxe siècle, à deux mouvements de sens
182 mêle, pour le meilleur et pour le pire. Arrêtons- nous quelques instants pour nous demander quelles sont les causes, le mote
183 our le pire. Arrêtons-nous quelques instants pour nous demander quelles sont les causes, le moteur et l’agent de ce mouvemen
184 isible et plus facile à observer, hélas, que dans nos universités. Tout le monde sait ici de quoi je veux parler : nous ass
185 . Tout le monde sait ici de quoi je veux parler : nous assistons en fait à une double explosion au sein des institutions d’e
186 xies dans le cosmos en expansion vertigineuse que nous décrivent les astronomes contemporains. D’où résultent les deux consé
187 is aussi des hommes d’outre-mer qui viennent chez nous en pèlerinage aux sources vives de la nouvelle culture mondiale. Mais
188 autaire, et le sens synthétique ou universalisée. Nos universités ne sont plus guère, en fait, que des agglomérats ou juxta
189 ’un peu plus près. Sur l’explosion des effectifs, nous disposons d’une grande richesse de statistiques. Un seul exemple peut
190 Robert Oppenheimer et d’autres savants américains nous affirment que 85 % des scientifiques ayant vécu depuis l’aube de l’hi
191 s Armand me disait un jour : si vous et moi, dans nos années d’études, il y a 30 à 35 ans, avions appris toute la chimie et
192 ppris toute la chimie et n’en avions rien oublié, nous ne saurions qu’un dixième de ce qu’elle est aujourd’hui. Ces données
193 t gardé ses pouvoirs régulateurs de l’ensemble de nos croyances : un théologien d’aujourd’hui, lisant l’œuvre d’un physicie
194 te de me faire ici l’interprète. Faudrait-il donc nous résigner à que l’accroissement même du savoir traîne pour conséquence
195 ateur non prévenu, jugeant seulement sur ce qu’il nous voit faire, il semblerait que la très grande majorité des Européens t
196 ils l’avaient entreprise. Mais l’Université, dans nos pays, paraît plus florissante que jamais : loin d’être abandonnée, el
197 L’incommunicabilité des savoirs est ressentie par notre esprit comme une frustration, comme une blessure intime, et comme une
198 tait de le déduire d’une observation attentive de nos universités, l’on ne trouve qu’une sorte de monstre, assemblage de pi
199 c’est pourquoi sans doute on la pose si rarement. Notre enseignement vise-t-il à former des personnes réelles et complètes, o
200 là qu’ils se posent à eux-mêmes ces questions, et nous les posent avec une insistance gênante — car nous voici de moins en m
201 nous les posent avec une insistance gênante — car nous voici de moins en moins armés pour y répondre. Le problème qu’on soul
202 ici, et qui est celui du principe de cohérence de notre civilisation, me paraît absolument spécifique de l’Europe. Seule en e
203 licité des disciplines spécialisées provient chez nous de la sécularisation de la philosophie et de la recherche qui s’est m
204 s hommes nourris de cultures différentes viennent nous poser leurs grandes questions naïves et pénétrantes : pourquoi l’Euro
205 que vos passions et vos désirs ? Bien peu d’entre nous sont capables de donner une réponse satisfaisante. Le spécialiste se
206 elations entre savoirs spécialisés et synthèse de nos connaissances n’est guère qu’un cas particulier. Le paradoxe européen
207 as seulement celui de l’Université, mais celui de notre politique d’intégration européenne, dans sa forme fédéraliste, non un
208 e. Comment résoudre ce problème dans le cadre qui nous intéresse ici, celui de l’Université ? Trois solutions me paraissent
209 . La vie est trop courte, même prolongée comme on nous le promet jusqu’à une moyenne de 90 ans, pour que l’espoir de maîtris
210 chance de succès et l’éducation permanente qu’on nous propose, qui s’étendrait du berceau à la tombe, ne laisserait guère l
211 mon souvenir dès l’adolescence : « D’autant plus nous connaissons les choses particulières, d’autant plus nous connaissons
212 nnaissons les choses particulières, d’autant plus nous connaissons Dieu. » Si je la transpose au domaine moins sublime que j
213 dans l’analyse de certains cas particuliers, qui nous conduisent le plus sûrement au général ou tout au moins au seuil des
214 ue l’œuvre de synthèse qu’exige l’état présent de notre culture et de nos universités, devrait d’abord être confiée à des gro
215 se qu’exige l’état présent de notre culture et de nos universités, devrait d’abord être confiée à des groupes de chercheurs
216 e, convenablement informée, ferait beaucoup mieux notre affaire. Ce qui importe, ce n’est pas que la synthèse s’opère dans le
217 sance — et pas non plus qu’elle s’inscrive devant nous , sur quelque carte perforée, comme un résultat objectif ; ce qui impo
218 utilité au sens le plus élevé du terme. Ce qu’il nous faut enfin, ce qui nous manque, ce sont des hommes de synthèse, un ty
219 élevé du terme. Ce qu’il nous faut enfin, ce qui nous manque, ce sont des hommes de synthèse, un type nouveau d’hommes de p
220 te de conscience conjoncturelle de l’évolution de nos recherches, un sens constamment alerté de leurs corrélations virtuell
221 oilà sans doute le genre de solution concrète que nous pourrions préconiser, si nous voulons tenter de faire face au problèm
222 lution concrète que nous pourrions préconiser, si nous voulons tenter de faire face au problème posé par l’accroissement bab
223 erait le plus malaisé de traiter dans le cadre de nos facultés classiques. Voici quelques-uns des sujets que, pour ma part,
224 isciplines farouches qu’imposent à la majorité de nos contemporains les impératifs de la croissance de production, et de l’
225 ts. 5. Européologie. Il existe dans la plupart de nos grandes universités des départements d’indianisme, de sinologie, d’is
226 rdination de leurs politiques économiques. Ce qui nous manque encore, c’est une étude quasi ethnographique des caractères sp
227 uasi ethnographique des caractères spécifiques de notre civilisation, à l’heure où elle se répand d’une manière anarchique su
228 nera sans peine. L’introduction si désirable dans nos mœurs universitaires d’une année sabbatique de type américain, permet
229 emise en question générale, et c’est aussi ce que nous attendons tous de nos vacances. Après un an, les professeurs détachés
230 ale, et c’est aussi ce que nous attendons tous de nos vacances. Après un an, les professeurs détachés reviendraient à leur
231 l’union dans la diversité, qui est la formule de notre grand passé, et de notre avenir, intégré, le seul possible. L’Europe,
232 é, qui est la formule de notre grand passé, et de notre avenir, intégré, le seul possible. L’Europe, c’est très peu de chose
233 langage mathématique, même une fois maîtrisé par nos économistes, philosophes, psychologues, politistes, biologistes, voir
234 fectives et personnelles, essentielles au sens de nos vies. aa. Rougemont Denis de, « Il nous faut des hommes de synthèse
235 sens de nos vies. aa. Rougemont Denis de, « Il nous faut des hommes de synthèses », Gazette de Lausanne (supplément litté
17 1965, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). Un écrivain suisse (20-21 mars 1965)
236 profonde méfiance à l’endroit de ce qui vient, de notre monde moderne en général, mais son goût puissant de la vie et son sen
18 1966, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). Stampa, vieux village… (15-16 janvier 1966)
237 trait, je ne l’avais jamais vu dans sa réalité et nous n’avions presque rien dit qui vaille entre deux hommes. Mais ce jour-
238 moi… » Là-dessus des théories bien saugrenues, et nous sommes allés prendre un verre sur la terrasse du Café de la Poste, au
239 r la Suisse, c’était la raison de mon passage, et nous avons parlé de notre pays, fraternisé dans un éloge immodéré de ses a
240 la raison de mon passage, et nous avons parlé de notre pays, fraternisé dans un éloge immodéré de ses aspects variés et inso
241 t ses palais alpestres. Et quel paysage autour de nous  ! Le clocher aigu de l’église ; de maigres peupliers noueux sur des p
19 1966, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). André Breton à New York (8-9 octobre 1966)
242 ui avait été l’un des « phares » baudelairiens de notre adolescence loin de Paris, puis un symbole (refusé mais sacré) de la
243 Il se plaignit, très gentiment, de ce que durant nos années parisiennes, nous n’ayons pu, ou cru pouvoir, nous rencontrer.
244 ntiment, de ce que durant nos années parisiennes, nous n’ayons pu, ou cru pouvoir, nous rencontrer. « Ce sont de ces conneri
245 ées parisiennes, nous n’ayons pu, ou cru pouvoir, nous rencontrer. « Ce sont de ces conneries ! Et que l’on expie ! » (Beauc
246 e soir-là, au Village, mon rêve est devenu vrai : nous parlons certes de ce qui peut nous rapprocher, l’amour-passion, les t
247 devenu vrai : nous parlons certes de ce qui peut nous rapprocher, l’amour-passion, les troubadours, la psychanalyse, Saint-
248 lyse, Saint-John Perse, mais aussi de ce qui doit nous opposer de front : nos options politiques, morales et religieuses. Et
249 mais aussi de ce qui doit nous opposer de front : nos options politiques, morales et religieuses. Et nous voici bientôt dan
250 os options politiques, morales et religieuses. Et nous voici bientôt dans l’euphorie de la contestation en convergence heure
251 ! À quelques jours de là, il me dit souhaiter que nous puissions désormais nous rencontrer « mécaniquement en quelque sorte 
252 il me dit souhaiter que nous puissions désormais nous rencontrer « mécaniquement en quelque sorte ». L’OWI eut ceci de bon
253 ment en quelque sorte ». L’OWI eut ceci de bon de nous en assurer l’occasion quotidienne. Le culte d’une pierre bleue D
254 quotidienne. Le culte d’une pierre bleue Dès notre première vraie rencontre, j’avais découvert quelque chose dont je pen
255 tin, qu’il tenait pour l’ancêtre des jansénistes. Nous lui dîmes qu’il y avait là-dessus des bibliothèques ; il n’en crut ri
20 1966, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). Jacques Chenevière ou la précision des sentiments (22-23 octobre 1966)
256 ticulations déliées mais fort précises, car elles nous disent très bien de quoi parle ce livre4 mais aussi comment il en par
257 mais aussi comment il en parle. Et c’est cela qui nous intéresse : Jacques Chenevière, écrivain de race, ne donne pas ici se
258 et signifiante. Comme la plupart des écrivains de notre pays — et très Suisse en cela du moins — Jacques Chenevière n’est pas
259 stoire politique et littéraire d’un passé proche, nous font passer et repasser sans transition de la prose à la poésie, d’un
260 des prisonniers de guerre, dès l’automne de 1914. Notre cycliste volontaire rappelé à Genève par Gustave Ador, président du C
261 on ne sait quel objet imaginaire bien au-delà de nos personnes, quoique l’attention soit évidente, concentrée. » Tout s’ét
262 ans plus tôt pour un bal de la Cour (« Avouez que nous étions un peu rivales… »), s’élève jusqu’au sublime dans la frivolité
263 vois, voilà de quoi se fait un style, unique dans nos lettres romandes. Entre le Paul Morand des descriptions de la Belle É
264 linguistique, dirait Verlaine s’il revenait parmi nous . 4. Retours et images, Éditions Rencontre. ae. Rougemont Denis
21 1967, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). J. Robert Oppenheimer (25 février 1967)
265 s il me donnait l’impression de représenter parmi nous quelque chose de bien plus ancien. Parfois, en l’écoutant, en le voya
266 tranger à toute espèce de religion des prêtres. «  Nous devons être absolument séculiers » insistait-il. Mais une fois je l’e
267 nque… Il faudra bien que je vous l’explique quand nous serons seuls. » C’était il y a deux ans, je ne devais plus le revoir.
268 , qu’il lisait en sanscrit. Il connaissait à fond notre littérature, où il préférait à tout François Villon. Jeune homme, il
22 1968, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). Entretien avec Denis de Rougemont (6-7 avril 1968)
269 l’écrivain n’a cessé d’occuper dans la culture de notre temps : à proximité, le regard rencontre les champs et les arbres de
270 arler de l’Europe, de la personne, du langage, de notre univers, des avions passant dans le ciel apportaient comme un écho de
271 ouveau témoignèrent de cette prise de conscience. Nous ne partions pas d’une insatisfaction de notre sort. Nous pensions que
272 nce. Nous ne partions pas d’une insatisfaction de notre sort. Nous pensions que la société où nous vivions était fichue, qu’o
273 partions pas d’une insatisfaction de notre sort. Nous pensions que la société où nous vivions était fichue, qu’on allait à
274 on de notre sort. Nous pensions que la société où nous vivions était fichue, qu’on allait à des catastrophes, notamment à la
275 notamment à la guerre : faire la révolution, pour nous , signifiait refaire un ordre, là où menaçait la guerre, qui résume to
276 çait la guerre, qui résume toutes les injustices. Nous étions frappés par l’anarchie des pays dits démocratiques et par les
277 par les réactions massives des pays totalitaires. Nous décelions également, chez la bourgeoisie capitaliste, la dissolution
278 ationalismes. Dans le groupement l’Ordre nouveau, nous nous attachions à une doctrine très rigoureuse de la personne qui déb
279 alismes. Dans le groupement l’Ordre nouveau, nous nous attachions à une doctrine très rigoureuse de la personne qui déboucha
280 voulaient faire la révolution, n’était pas nette. Nous refusions aussi bien la dictature stalinienne du parti, que la dictat
281 Les théologiens et philosophes qui nourrissaient notre pensée étaient Karl Barth, Kierkegaard, et Heidegger que Corbin comme
282 élien, avec sa triade thèse, antithèse, synthèse, nous voulions laisser les choses dans leur état de tension. Quant à Esprit
283 rut, Mounier a trouvé que j’y allais un peu fort. Nous avons échangé quelques lettres assez vives. Pour ma part, j’étais rel
284 our les réalités scientifiques et techniques, qui nous intéressaient, à Hic et Nunc ai, comme moyens de libération de la p
285 c ai, comme moyens de libération de la personne. Nous étions également en relation avec Réaction, un mouvement d’extrême dr
286 et. Il existe un filon de romantisme allemand qui nous est très proche et, chose curieuse, la langue ne constitue pas un bar
287 vre comme celle de Denis de Rougemont est là pour nous aider à ne pas désespérer complètement de l’esprit. ag. Rougemont
23 1968, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). Il faut réinventer l’Université (29 juin 1968)
288 er sur un job. Elle doit donc, comme le dit un de nos magistrats, « favoriser une meilleure connaissance des débouchés ». M
289 le serait d’orienter les options fondamentales de notre société, en fonction d’un certain Sens de la vie (à découvrir, assume
24 1968, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). Vers l’Europe des régions [Entretien]
290 valeurs, d’équilibre, de mesure que représentait notre vieux continent. En août 1947 on est venu me demander de parler à un
291 t en faveur d’une coopération au niveau culturel. Nous avons réuni pour la première fois les directeurs d’administration d’a
292 té la réalisation de cette première initiative de notre centre. Nous avons fondé une Association des festivals de musique eur
293 ion de cette première initiative de notre centre. Nous avons fondé une Association des festivals de musique européens que je
294 européens que je préside tout à fait par hasard. Nous avons coordonné les instituts d’études européennes qui étaient en tra
295 in de se constituer dans différentes universités. Nous avons pris contact avec des historiens, des professeurs d’enseignemen
296 fesseurs d’enseignement secondaire, des éditeurs. Nous avons d’autre part lancé une Campagne européenne d’éducation civique
297 ion de l’Europe sur les obstacles à toute union ! Notre espoir réside dans une politique des régions. Par exemple l’Italie es
298 la France sur une dizaine de régions, plus Paris. Notre idée de fédéralistes européens est que ces régions, définies surtout
299 t l’union. Si l’union de l’Europe ne se fait pas, nous serons colonisés par le dollar et peut-être par une certaine idéologi
300 oins sûr. Mais le fait de ne plus être maîtres de notre destinée économique entraînerait une quantité de conséquences sur le
301 iale. Sans doute d’ici à dix ou quinze ans serons- nous parvenus à créer des régions sur une base économique, historique, eth
302 urgence des problèmes européens. À cette occasion nous présentons l’activité de Denis de Rougemont dans ce domaine, et son p
25 1968, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). Jean Paulhan (19-20 octobre 1968)
303 ns ces deux phrases en couronne sur le tombeau de notre ami. Telle était notre attente et sa folle exigence ; en ce temps-là.
304 couronne sur le tombeau de notre ami. Telle était notre attente et sa folle exigence ; en ce temps-là. Elle s’adressait à cel
305 le s’adressait à cela dans la littérature dont il nous paraissait tout à fait évident que Paulhan détenait les clefs et les
306 (Mais c’était justement ce qu’il cherchait, comme nous l’apprirent beaucoup plus tard les Fleurs de Tarbes !) Il n’avait enc
307 it pas le sien, bien entendu, il ne récrivait pas nos textes, mais le style de chacun des auteurs de la revue n’eût pas été
308 ésence et sans son attention. Il était à lui seul notre air de parenté, si différents ou opposés que nous fussions. C’est le
309 otre air de parenté, si différents ou opposés que nous fussions. C’est le seul directeur de revue littéraire qui ait jamais
310 t ans, s’obstine à le traiter d’éminence grise de nos lettres. Il était tout le contraire : un maître socratique, indemne d
311 secrète volonté de puissance, attentif à ne rien nous imposer qui ne fût ce qu’il avait senti, bien avant nous, qui pourrai
312 poser qui ne fût ce qu’il avait senti, bien avant nous , qui pourrait être nous. Bien trop curieux pour être autoritaire, il
313 l avait senti, bien avant nous, qui pourrait être nous . Bien trop curieux pour être autoritaire, il n’avait de goût que pour
314 our être autoritaire, il n’avait de goût que pour nos singularités (que d’autres nommeraient vocations) et il les respectai
315 e semble que depuis des années je vous supplie de nous donner des textes ! » Me voici mis à l’aise, et mal à l’aise aussi. U
316 du moins, il n’a jamais songé.) Je l’ai surpris, notre dialogue s’est noué, et il se poursuivra dans plusieurs de mes livres
317 , c’est qu’ils sont personnels… à combien d’entre nous , jeunes auteurs de l’entre-deux-guerres ! Que dirai-je de plus aujour
318 (Ils le disaient du moins.) Les plus modestes de nous attendent une religion, une morale, et le sens de la vie enfin révélé
319 n’être pas écrivain ? Cet état « singulier » de notre littérature n’autorise pas trop d’optimisme. Il se peut que les homm
320 de libre, de joyeux et peut-être d’insensé, dont nous aurions perdu jusqu’au souvenir et à l’idée. Mais non pas perdu tout
321 ’insensé », c’est toute son œuvre, justement, qui nous en restitue mieux que l’idée : la présence fraîche et vivace. 6. Le
26 1970, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). Témoignage sur Bernard Barbey (7-8 février 1970)
322 l’Académie. Mais là n’était pas son souci ! Et il nous suffisait, nous ses amis (mais avons-nous su le lui dire assez…) de p
323 là n’était pas son souci ! Et il nous suffisait, nous ses amis (mais avons-nous su le lui dire assez…) de pouvoir admirer,
324 ! Et il nous suffisait, nous ses amis (mais avons- nous su le lui dire assez…) de pouvoir admirer, en lui, la parfaite élégan
27 1970, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). La cité européenne (18-19 avril 1970)
325 e, avec Robert Schuman, qu’il est possible d’unir nos pays pour cette raison littéralement fondamentale qu’une unité de bas
326 es continents découverts tour à tour, conquis par nos aventuriers puis libérés au nom de nos principes, molestés, réveillés
327 onquis par nos aventuriers puis libérés au nom de nos principes, molestés, réveillés, mis en mouvement, fût-ce contre nous,
328 estés, réveillés, mis en mouvement, fût-ce contre nous , pour le meilleur et pour le pire. Et de là viennent aussi nos divisi
329 meilleur et pour le pire. Et de là viennent aussi nos divisions mortelles, nos efforts pour les surmonter par le recours à
330 Et de là viennent aussi nos divisions mortelles, nos efforts pour les surmonter par le recours à des instances universelle
331 cités d’Ionie où prit naissance la dialectique de notre histoire, Héraclite écrivait cette phrase décisive, qu’il faut tenir
332 la plus belle harmonie. » ⁂ De ce temps jusqu’au nôtre , tout concourt à nourrir ce paradoxe qui paraît bien être la loi cons
333 adoxe qui paraît bien être la loi constitutive de notre histoire et le ressort de notre pensée : l’antinomie de l’un et du di
334 i constitutive de notre histoire et le ressort de notre pensée : l’antinomie de l’un et du divers, l’unité dans la diversité,
335 au xxe siècle ? ⁂ Tout cela dure, agit et vit en nous de mille manières. Tout cela se combine en figures et en structures v
336 este et les rénove. Tout cela préforme, dès avant notre naissance, nos sensibilités et nos jugements moraux, nos réflexes soc
337 e. Tout cela préforme, dès avant notre naissance, nos sensibilités et nos jugements moraux, nos réflexes sociaux et nos bes
338 e, dès avant notre naissance, nos sensibilités et nos jugements moraux, nos réflexes sociaux et nos besoins économiques. To
339 ssance, nos sensibilités et nos jugements moraux, nos réflexes sociaux et nos besoins économiques. Tout cela nous incite au
340 et nos jugements moraux, nos réflexes sociaux et nos besoins économiques. Tout cela nous incite aussi à remettre en questi
341 xes sociaux et nos besoins économiques. Tout cela nous incite aussi à remettre en question ces déterminations, et nous en fo
342 ssi à remettre en question ces déterminations, et nous en fournit les moyens. Enfin tout cela dénote l’Europe comme patrie d
343 l’Europe. Le goût furieux de différer, par lequel nous nous ressemblons tous, c’est notre mal et notre bien, il faut en pren
344 ope. Le goût furieux de différer, par lequel nous nous ressemblons tous, c’est notre mal et notre bien, il faut en prendre s
345 rer, par lequel nous nous ressemblons tous, c’est notre mal et notre bien, il faut en prendre son parti, et c’est là-dessus q
346 el nous nous ressemblons tous, c’est notre mal et notre bien, il faut en prendre son parti, et c’est là-dessus qu’il faut bât
347 re son parti, et c’est là-dessus qu’il faut bâtir notre union, si l’on veut qu’elle mérite le nom d’Europe. Si l’on me demand
28 1970, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). L’Europe et le sens de la vie (25-26 avril 1970)
348 d’autre réponse imaginable au défi que l’Histoire nous pose dans les termes les plus précis et sans échappatoire possible dé
349 appatoire possible désormais : s’unir, au-delà de nos fausses souverainetés, pour préserver nos vraies diversités — créer u
350 delà de nos fausses souverainetés, pour préserver nos vraies diversités — créer un pouvoir fédéral pour la sauvegarde de no
351 — créer un pouvoir fédéral pour la sauvegarde de nos autonomies. Car ces autonomies seront perdues une à une, si nous refu
352 . Car ces autonomies seront perdues une à une, si nous refusons l’union qui ferait leur force ; mais en retour, cette union
353 fait toute ma thèse : étant donné que la base de notre unité est une culture pluraliste, on ne peut fonder sur elle qu’une u
354 dans ce sens, depuis près de vingt-cinq ans qu’on nous déclare, avec Churchill — dans son fameux discours de Zurich — qu’il
355 s l’autre tout au long du xixe siècle, suivis de nos jours par le reste du monde, notamment par le tiers-monde, mal décolo
356 incapable de répondre aux exigences concrètes de notre temps, puisqu’il est à la fois trop petit pour agir à l’échelle mondi
357 n projet rationnel. Or voici l’ironie tragique de notre histoire : c’est sur la base de cet obstacle radical à toute union qu
358 on n’a pas avancé d’un centimètre en direction de notre union politique. Entre l’union de l’Europe et les États-nations sacra
359 ituation de choisir librement son avenir. Jusqu’à nous , point de choix économiques ni même peut-être politiques longuement d
360 somme du superflu. Mais dès lors que ce choix de notre avenir est libre, nous voici contraints de le faire, à nos risques et
361 dès lors que ce choix de notre avenir est libre, nous voici contraints de le faire, à nos risques et périls ! Nous voici co
362 r est libre, nous voici contraints de le faire, à nos risques et périls ! Nous voici contraints de nous demander ce que nou
363 contraints de le faire, à nos risques et périls ! Nous voici contraints de nous demander ce que nous attendons de notre vie
364 nos risques et périls ! Nous voici contraints de nous demander ce que nous attendons de notre vie et de la société, ce que
365 s ! Nous voici contraints de nous demander ce que nous attendons de notre vie et de la société, ce que nous voulons réelleme
366 traints de nous demander ce que nous attendons de notre vie et de la société, ce que nous voulons réellement, principalement,
367 s attendons de notre vie et de la société, ce que nous voulons réellement, principalement, et contraints de tirer des plans
368 raints de tirer des plans en conséquence. Voulons- nous par exemple à tout prix notre niveau de vie, quantitatif — ou plutôt
369 conséquence. Voulons-nous par exemple à tout prix notre niveau de vie, quantitatif — ou plutôt voulons-nous sauvegarder un ce
370 re niveau de vie, quantitatif — ou plutôt voulons- nous sauvegarder un certain mode de vie, qualitatif ? Voulons-nous contrib
371 rder un certain mode de vie, qualitatif ? Voulons- nous contribuer à tout prix à l’accroissement indéfini du PNB (produit nat
372 ent, une communauté vivante ? Et quel prix sommes- nous prêts à payer pour cela ? Le prix de certaines libertés, ou le prix d
373 e la vie… D’une façon plus précise, en Europe, il nous faut décider si notre union aura pour but la puissance collective ou
374 plus précise, en Europe, il nous faut décider si notre union aura pour but la puissance collective ou la liberté des personn
375 ssance collective ou la liberté des personnes. Il nous faut le décider, en toute conscience, et vite, car le choix de la fin
376 iez pas aller… Voici donc le dilemme présent : Si nous attribuons pour finalité à la Cité européenne de demain la puissance,
377 gressif, comme la France de Napoléon, et faire de nos États autant de départements. Il faut tout unifier par des lois infle
378 super-État-nation ne pourrait être imposé à tous nos peuples qu’à la faveur d’une guerre générale — selon la loi de l’État
379 saurait être exclue pour autant. Au contraire, si nous donnons pour finalité à la Cité européenne la liberté, c’est-à-dire l
380 et je crois bien que toutes les civilisations que nous connaissons ont choisi la puissance comme seul but réaliste de la soc
381 misanthropes. Je crois à la nécessité de défaire nos États-nations. Ou plutôt, de les dépasser, de démystifier leur sacré,
382 r sur lui. Je ne sais, n’étant pas économiste, si nos États-nations délimités pour la plupart au xixe et au xxe siècle, s
383 t de la culture européenne. Et les diversités que nous devons respecter ne sont pas celles de ces États-nations nés d’hier :
384 t, et ne coïncident jamais avec aucune frontière. Nos États-nations, obsédés par l’idée de « se faire respecter », oublient
385 ons ou d’affaires étrangères : c’est un mot qu’il nous faut bannir du vocabulaire politique dans une Europe fédérale, au seu
386 r : on ne fera pas l’Europe sans casser des œufs, nous le voyons depuis vingt-cinq ans. Mais il l’est moins parce qu’il dema
387 communiste à la mise en question du sens même de nos vies, et des vrais buts de nos activités communautaires et personnell
388 on du sens même de nos vies, et des vrais buts de nos activités communautaires et personnelles. Si sérieux que soient les p
389 e c’est au contraire la grande tâche politique de notre temps. Précisons : des vingt ans qui viennent. Car à ce prix seulemen
390 s vingt ans qui viennent. Car à ce prix seulement nous ferons l’Europe, et nous la ferons pour toute l’humanité, nous lui de
391 Car à ce prix seulement nous ferons l’Europe, et nous la ferons pour toute l’humanité, nous lui devons cela ! Une Europe qu
392 ’Europe, et nous la ferons pour toute l’humanité, nous lui devons cela ! Une Europe qui ne sera pas nécessairement la plus p
393 au. Le texte est précédé du chapeau suivant : «  Nous publions la fin du discours que prononça Denis de Rougemont le 15 avr
29 1970, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). Une réflexion sur le mode de vie plutôt que sur le niveau de vie (2 juin 1970)
394 s, convalescents, réfugiés politiques attirés par nos paysages, notre air, nos libertés. Mais le problème actuel se trouve
395 ts, réfugiés politiques attirés par nos paysages, notre air, nos libertés. Mais le problème actuel se trouve posé par la soud
396 s politiques attirés par nos paysages, notre air, nos libertés. Mais le problème actuel se trouve posé par la soudaineté d’
397 principal de cet afflux, qui n’est pas d’admirer nos lacs ni de fuir des dictatures, mais de faire du « fric ». Or ce moti
398 ux côtés : pour eux, gagner vite et rentrer, pour nous , produire plus grâce à eux et les renvoyer au plus vite. Il semblerai
399 u : l’industrie qui y trouve le moyen d’accroître nos exportations, le peuple suisse dont le niveau de vie matérielle dépen
400 e-t-elle ? Et si oui, dans le cas particulier qui nous préoccupe, cette « helvéticité » est-elle menacée par la présence d’u
401 plupart de ceux qui viennent de le découvrir. Ils nous disent : « À l’heure où il n’est question que de s’ouvrir à l’Europe,
402 est question que de s’ouvrir à l’Europe, pourquoi nous fermer devant les travailleurs étrangers ? » C’est confondre deux sen
403 supprimer les frontières économiques et intégrer nos entreprises dans une économie concertée à l’échelle continentale (com
404 de travailleurs étrangers qu’il en faut pour que nos exportations continuent à croître, cela revient, paradoxalement, à s’
405 nace ? II. Quant au danger que la présence sur notre sol d’un étranger contre cinq ou six Suisses représenterait pour notr
406 er contre cinq ou six Suisses représenterait pour notre mode de vie — notre « helvéticité », comme vous osez l’écrire ! — il
407 x Suisses représenterait pour notre mode de vie — notre « helvéticité », comme vous osez l’écrire ! — il est clair que ce n’e
408 tugais laissent peu de traces de leur passage sur notre sol, dans nos cités et dans nos mœurs. Je n’en dirais pas autant d’un
409 peu de traces de leur passage sur notre sol, dans nos cités et dans nos mœurs. Je n’en dirais pas autant d’une industrie do
410 eur passage sur notre sol, dans nos cités et dans nos mœurs. Je n’en dirais pas autant d’une industrie dont l’essor défigur
411 pas autant d’une industrie dont l’essor défigure nos paysages, détruit nos forêts et nos champs, pollue nos lacs et dévers
412 strie dont l’essor défigure nos paysages, détruit nos forêts et nos champs, pollue nos lacs et déverse un flot de ciment, d
413 ssor défigure nos paysages, détruit nos forêts et nos champs, pollue nos lacs et déverse un flot de ciment, d’agglomérés et
414 aysages, détruit nos forêts et nos champs, pollue nos lacs et déverse un flot de ciment, d’agglomérés et de plastique sur «
415 ourtant cela qui modifie radicalement le cadre de nos vies, l’air que nous respirons, et à la longue nos sensibilités. Si n
416 ifie radicalement le cadre de nos vies, l’air que nous respirons, et à la longue nos sensibilités. Si notre industrie suisse
417 os vies, l’air que nous respirons, et à la longue nos sensibilités. Si notre industrie suisse refuse de calculer le prix hu
418 us respirons, et à la longue nos sensibilités. Si notre industrie suisse refuse de calculer le prix humain de son essor, ses
419 nvoquée si la présence des travailleurs étrangers nous coûtait plus qu’elle ne rapporte ? — La pire menace contre notre mode
420 lus qu’elle ne rapporte ? — La pire menace contre notre mode de vie suisse vient-elle de la présence d’étrangers parmi nous,
421 uisse vient-elle de la présence d’étrangers parmi nous , ou de nous-mêmes, qui tolérons la destruction de notre environnement
422 ou de nous-mêmes, qui tolérons la destruction de notre environnement au nom de valeurs bien plus matérialistes que celles de
423 du chapeau suivant : « Invité à se prononcer sur notre double question — intégrité de l’État dans l’Europe fédérée et notion
424 ’une “helvéticité” menacée ? — Denis de Rougemont nous suggère ses réflexions sous forme d’interrogations. »
30 1970, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). Le testament de Tristan (14-15 novembre 1970)
425 sant travail. Je vous en remercie aussi parce que nos efforts actuels, en vue de bâtir une union des peuples européens, qui
426 caractère original de chacun et le génie propre à notre continent, y trouvent appuis et encouragements. On ne peut mieux déf
427 ral d’union dans la diversité qu’il admirait dans notre Suisse. Quant à la participation qu’il demandait, c’est le mot clé du
428 fin d’une certaine Europe, le début d’une autre ? Nous avons demandé à Denis de Rougemont ce qu’il pensait de l’homme d’État
31 1971, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). Pourquoi j’écris (30-31 janvier 1971)
429 r les équipes de la TV) de l’enquête méfiante sur nos motivations. Les écrivains ont développé contre elle une série de réa
430 poétique, l’horizon qui se définit par rapport à notre progrès. ⁂ Ce n’est qu’au début d’une carrière que l’on écrit par pur
32 1971, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). Au défi de l’Europe, la Suisse (31 juillet-1er août 1971)
431 Europe, la Suisse (31 juillet-1er août 1971)ba Nous souffrons des clichés ridicules qui composent l’image de la Suisse à
432 éduits, paraît-il, à celui de ne pas se mouiller. Nous savons que la Suisse, c’est autre chose. Mais quoi ? Combien de nos c
433 Suisse, c’est autre chose. Mais quoi ? Combien de nos compatriotes interrogés au hasard dans la rue seraient capables de le
434 terviewer des étrangers : quelle est à leurs yeux notre image ? Ils nous renvoient le plus souvent celle de nos erreurs sur n
435 ngers : quelle est à leurs yeux notre image ? Ils nous renvoient le plus souvent celle de nos erreurs sur nous-mêmes. Tel ce
436 age ? Ils nous renvoient le plus souvent celle de nos erreurs sur nous-mêmes. Tel ce professeur au Collège de France8 auque
437 qui ne porte que trois signatures. Mais alors, si nous fêtons aujourd’hui le 680e anniversaire de la Confédération helvétiqu
438 Constitution, car ces deux choses ne datent chez nous que de 1848. Ce que nous célébrons, c’est en fait une idée, qui est l
439 ux choses ne datent chez nous que de 1848. Ce que nous célébrons, c’est en fait une idée, qui est l’essence de la Suisse et
440 in, ni sans gloire. S’évanouir dans le succès de notre idée et d’une formule d’union qui est notre raison d’être, ne serait-
441 ès de notre idée et d’une formule d’union qui est notre raison d’être, ne serait-ce pas le sort le plus beau que nous puissio
442 d’être, ne serait-ce pas le sort le plus beau que nous puissions souhaiter en tant que Suisse ? Dans l’Europe des régions qu
443 pe des foyers rayonnants sans frontières, rien ne nous empêchera, Suisses de tous les cantons, de rester ensemble et de cont
444 ommunauté : celle des gardiens de l’idée mère. Si nous le désirons vraiment, si nous le voulons. C’est ce qu’il reste à savo
445 de l’idée mère. Si nous le désirons vraiment, si nous le voulons. C’est ce qu’il reste à savoir, et c’est ce qui nous inqui
446 s. C’est ce qu’il reste à savoir, et c’est ce qui nous inquiète. S’il n’y a plus de frontières tangibles, plus de douaniers,
447 , plus de douaniers, où sera la Suisse, gémissent nos « patriotes » désorientés. Or il est sain de se demander, au minimum
448 e se demander, au minimum une fois par an, ce que nous faisons là, et pourquoi nous restons ensemble. Personne ne peut prédi
449 fois par an, ce que nous faisons là, et pourquoi nous restons ensemble. Personne ne peut prédire si, à bulletin secret, en
450 n secret, en connaissance de cause et en majorité nous choisirons de continuer la Suisse. Ceux qui le voudront seront alors
33 1971, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). Une dimension nouvelle (11-12 septembre 1971)
451 s précaution — à desservir la bonne réputation de notre ami dans un pays égalitaire. Aujourd’hui je ne reculerai plus, les je
452 fois prophétiques : — Carl-J. Burckhardt ajoute à notre Suisse la dimension qui manquait le plus à ce pays, celle que j’aime
34 1972, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). Il faut dénationaliser l’enseignement [Entretien] (8 décembre 1972)
453 système actuel, et qui me disent : « Merci, vous nous vengez. » Vos critiques semblent s’adresser surtout à un système scol
454 e l’Église et contre la famille. Cet état de fait nous vient tout droit de Napoléon, qui a légué au monde entier, à peu près
455 tat. C’est un cercle vicieux : chercher l’origine nous ramène au problème de la poule et de l’œuf… Il faut agir aux deux niv
456 ouvelles… ce qui est pratiquement impossible dans notre culture. Il faudrait, au minimum, une volonté générale de sortir du c
457 volonté générale de sortir du cercle vicieux dont nous parlions tout à l’heure. Une école nouvelle pourrait exploiter des po
458 une place ne lui est faite — et pour cause — dans nos programmes. Moi, j’ai appris à lire hors de l’école, avec ma sœur. En
459 uoi on a fabriqué des peuples militarisés, et qui nous a déjà valu deux guerres mondiales. Ce qu’Illich appelle en termes ma
460 à l’évolution de l’école, et aux deux pôles dont nous avons parlé : individualisation et travail collectif. À supposer que
461 ifficile, voire impossible à concevoir. Mais cela nous éloigne un peu de l’école… Comment changer l’école ? Pour y rev
462 éenne que je préside depuis une dizaine d’années, nous essayons de toucher le plus grand nombre possible d’enseignants, du d
463 venter le grec pour l’apprendre. Il me proposa de nous faire à nous deux une langue qui ne serait connue que de nous ; je me
464 c pour l’apprendre. Il me proposa de nous faire à nous deux une langue qui ne serait connue que de nous ; je me passionnai p
465 nous deux une langue qui ne serait connue que de nous  ; je me passionnai pour cette idée. Nous formâmes d’abord un alphabet
466 e que de nous ; je me passionnai pour cette idée. Nous formâmes d’abord un alphabet, où il introduisait les lettres grecques
467 et, où il introduisait les lettres grecques. Puis nous commençâmes un dictionnaire dans lequel chaque mot français était tra
468 ’auto. » 11. « Le sort de l’an 2000 se joue dans nos écoles », Civisme européen, Genève, mars 1972, publié par le Centre e
469 et même un collégien lausannois, bien connu chez nous pour avoir prononcé un discours inconvenant lors d’une cérémonie de p
35 1972, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). Merveilleux Lavaux (23-24-25 décembre 1972)
470 es autos figurent l’emblème du paradoxe majeur de notre civilisation. Grâce à elles, l’homme des villes a retrouvé le contact
471 re et patine à la fois. Pour garder le Lavaux que nous aimons, faudrait-il qu’ils renoncent à le vivre, à en vivre ? Sauver
472 e sont nullement ceux qui pensent court et bas et nous jettent dans la pollution au nom de la rentabilité, mais ceux qui fon
36 1984, Gazette de Lausanne, articles (1940–1984). Philosophie et énergie nucléaire : une mise au point (28 juin 1984)
473  préparent l’avènement du dirigisme marxiste dans notre pays » et préconisent en réalité « une société policière … centralisé
474 ec « intervention de la Confédération jusque dans nos cuisines et salles de bains. » Je n’ai pas à entrer en discussion ave
475 non sur la vraisemblance du fait… La situation de notre continent et de l’humanité entière serait apparemment sans espoir, si
476 paremment sans espoir, si la culture élaborée par notre Europe n’avait pas découvert une fois de plus, et vraiment au dernier
477 L’énergie nucléaire est la réponse, inventée par notre génie, par nos savants européens, au défi d’une humanité dont notre s
478 ire est la réponse, inventée par notre génie, par nos savants européens, au défi d’une humanité dont notre science, notre h
479 os savants européens, au défi d’une humanité dont notre science, notre hygiène, et nos techniques étaient en train d’accroîtr
480 péens, au défi d’une humanité dont notre science, notre hygiène, et nos techniques étaient en train d’accroître au-delà du po
481 ne humanité dont notre science, notre hygiène, et nos techniques étaient en train d’accroître au-delà du possible les besoi
482 ma description de l’état d’innocence générale où nous étions à peu près tous. […] Je ne pense pas avoir à m’excuser d’avoir
483 , est datée de 1984. Je la rappelle : Selon que ( notre ) choix se portera sur le nucléaire ou sur le solaire, nous aurons soi
484 ix se portera sur le nucléaire ou sur le solaire, nous aurons soit une société centralisée, exploitée de façon quasi militai
485 it en réalité que les intentions que M. Desmeules nous attribue d’une manière arbitraire et calomnieuse. Il embrouille tout,
486 seulement n’est pas de moi et ne traduit en rien notre idéal, mais formule l’exigence « essentielle » du grand patron des ce
487 M. Desmeules aurait-il mal compris ? Ce n’est pas nous , mais ceux de son bord qui ont dit cela. Quant à prétendre que mon id