1
itlérisme et sur ses causes. On voudrait rappeler
qu’
en telle matière, tout jugement massif manque de sérieux, et traduit q
2
1. Des hommes aussi divers et aussi respectables
que
MM. Massis, Henry Bordeaux, Edmond Vermeil, G. de Reynold, d’autres e
3
l, G. de Reynold, d’autres encore, nous affirment
que
l’hitlérisme sort de Luther. Certains d’entre eux nuancent leur jugem
4
e, sur le papier l’on peut déduire de ces erreurs
que
Luther conduit à Hitler : il suffit, pour y arriver, d’oublier quelqu
5
its importants. Il suffit d’oublier, par exemple,
que
le Führer autrichien n’est pas né luthérien mais catholique ; que son
6
trichien n’est pas né luthérien mais catholique ;
que
son mouvement s’est développé d’abord en Bavière, pays catholique ; q
7
t développé d’abord en Bavière, pays catholique ;
que
la doctrine de Luther, là où elle a triomphé sans résistance notable,
8
orable, mais ce qui n’est pas absolument pareil ;
que
l’Autriche catholique, bien qu’armée, n’a pas résisté à l’hitlérisme,
9
thérienne, bien qu’à peu près désarmée, résiste ;
qu’
enfin le totalitarisme n’est pas l’apanage de la seule Allemagne, à de
10
ule Allemagne, à demi luthérienne seulement, mais
qu’
il a triomphé d’abord dans une Russie tout orthodoxe, et dans une Ital
11
ique. Ce qui n’est pas sans compliquer l’affaire…
Qu’
on recherche la coloration particulière que le luthéranisme a donnée a
12
faire… Qu’on recherche la coloration particulière
que
le luthéranisme a donnée au totalitarisme allemand, le catholicisme a
13
rthodoxie au totalitarisme russe, fort bien. Mais
qu’
on ne dise pas : Luther mène à Hitler. C’est une sottise et une mauvai
14
une sottise et une mauvaise action, si l’on songe
que
le pasteur Niemöller, vrai descendant de Luther, est en prison. 2. Le
15
s conclusions fort différentes. J’ai pu constater
que
les bourgeois allemands considéraient le nouveau régime comme étant l
16
ouveau régime comme étant le régime de la masse ;
que
la plupart des socialistes le toléraient fort bien ; et qu’un très gr
17
part des socialistes le toléraient fort bien ; et
qu’
un très grand nombre d’anciens chefs communistes avaient revêtu quelqu
18
rti hitlérien. L’un d’entre eux me déclarait même
que
tout en détestant les chefs nazis, « il se ferait tuer pour Hitler »,
19
ramme communiste. (Je donne cette opinion pour ce
qu’
elle vaut.) Le petit livre que j’ai écrit là-dessus m’a valu deux arti
20
tte opinion pour ce qu’elle vaut.) Le petit livre
que
j’ai écrit là-dessus m’a valu deux articles significatifs. Le premier
21
agnostic ; il soulignait la tendance nationaliste
qu’
avait toujours montrée le socialisme allemand. Cet article était écrit
22
tre vendu au régime hitlérien, pour avoir soutenu
que
des communistes approuvaient Hitler. L’auteur de cette diatribe était
23
Gazette du 27 avril a fort bien réfuté l’erreur
que
je viens de relever, et qui consiste à voir dans l’hitlérisme une tyr
24
stes français qui, eux, s’y trompent encore. Mais
que
penser alors de l’aveuglement des bourgeois qui s’obstinèrent jusqu’e
25
me « un rempart contre le marxisme » ! (Certains,
que
je connais, n’en ont pas encore démordu.) Après tout, les socialistes
26
re démordu.) Après tout, les socialistes français
que
critique justement M. Muret, ne sont coupables que d’avoir partagé l’
27
ue critique justement M. Muret, ne sont coupables
que
d’avoir partagé l’erreur fatale et prolongée des bourgeois de divers
28
rui, mais bien les nôtres. Surtout s’il se trouve
qu’
en fait, ce sont exactement les mêmes erreurs. 4. Si d’aucuns remonten
29
t, le meilleur celtisant français, n’écrit-il pas
que
dans la mythologie des Celtes, « l’idée de la mort domine tout, et to
30
On voit le danger d’aller chercher dans un passé
que
l’on connaît mal les causes d’une révolution dont les effets ne sont
31
s causes d’une révolution dont les effets ne sont
que
trop connus. Le seul avantage de ce procédé historique et littéraire,
32
age de ce procédé historique et littéraire, c’est
qu’
il dispense de mentionner des causes prochaines, beaucoup plus claires
33
tre Staline… Tout cela est plus gênant à alléguer
que
Luther et les vieux Germains, parce que dans tout cela se trouvent im
34
dans tout cela se trouvent impliquées des nations
que
l’on aime et de chères croyances… Mais quoi, la guerre présente nous
35
is exsangue voile sa face d’un nuage, et se tait,
que
son deuil soit le deuil du monde ! Nous sentons bien que nous sommes
36
u monde : Il ne les connaîtra jamais. Il ne verra
que
d’aveugles façades. Il s’est privé à tout jamais de quelque chose d’i
37
e quelque chose d’irremplaçable, de quelque chose
qu’
on peut tuer, mais qu’on ne peut conquérir par la force, et qui vaut p
38
mplaçable, de quelque chose qu’on peut tuer, mais
qu’
on ne peut conquérir par la force, et qui vaut plus, insondablement pl
39
r la force, et qui vaut plus, insondablement plus
que
tout ce que peuvent rafler dans le monde entier les servants des Panz
40
et qui vaut plus, insondablement plus que tout ce
que
peuvent rafler dans le monde entier les servants des Panzerdivisionen
41
nzerdivisionen. Quelque chose d’indéfinissable et
que
nous appelions Paris. C’est ici l’impuissance tragique de ce conquéra
42
ce tragique de ce conquérant victorieux : Tout ce
qu’
il veut saisir se change à son approche — Midas de l’ère prolétarienne
43
visage de cette capitale plus douce et plus fière
qu’
aucune autre portait les traces pacifiées. N’importe quel badaud, mais
44
nécessaire pour faire comprendre au monde entier
qu’
il est des victoires impossibles. On ne conquiert pas avec des chars l
45
de l’âme et les raisons de vivre dont on manque.
Qu’
ils fassent dix fois le tour du monde ! Ils ne rencontreront partout q
46
s le tour du monde ! Ils ne rencontreront partout
que
le fracas du néant mécanique. Jusqu’au jour bien plus terrifiant que
47
ant mécanique. Jusqu’au jour bien plus terrifiant
que
le jour de la pire vengeance où, s’arrêtant enfin, ils comprendront q
48
vengeance où, s’arrêtant enfin, ils comprendront
qu’
aucun triomphe ne vaut pour eux la moindre des réalités humaines qu’il
49
ne vaut pour eux la moindre des réalités humaines
qu’
ils ont tuées. « …car ils ne savent ce qu’ils font. » Le 15 juin 1940.
50
umaines qu’ils ont tuées. « …car ils ne savent ce
qu’
ils font. » Le 15 juin 1940. b. Rougemont Denis de, « À cette heure
51
tre (14 février 1941)c Personne ne m’avait dit
que
New York est une île en forme d’un gratte-ciel couché. C’est la ville
52
es surélevées. Personne ne m’avait dit, non plus,
que
New York est une ville alpestre. Je l’ai senti le premier soir, quand
53
es gratte-ciel, de cette couleur orangée aérienne
qu’
on voit aux crêtes des parois rocheuses alors que la vallée s’emplit d
54
Chrysler, de cent autres de ces sommités célèbres
que
les New-Yorkais ne se lassent pas de désigner, comme nous énumérons n
55
des parois violemment découpées, c’est un climat
que
je connais. Mais il y a plus. Il y a le sol qui est alpestre dans sa
56
York, ont coutume de se plaindre de l’inhumanité
que
revêtent ici le climat et les rapports humains. Ils pensent, dans leu
57
pports humains. Ils pensent, dans leur ignorance,
que
c’est une ville trop « européenne »… Mais moi, je m’y sens contempora
58
cade en décade, à travers le Far West, jusqu’à ce
qu’
ils eussent rejoint les terres du Pacifique. On ne pouvait plus rien a
59
vident au-dessus du cinquantième étage, pour peu
que
la pression baisse à Wall Street. Un grand malaise étreignait l’âme a
60
plan et disparaissent en coup de vent, jusqu’à ce
que
l’œil s’éduque et se mette à déchiffrer cette espèce de manuel de con
61
a profondeur, vers la culture, vers ces problèmes
que
le grand nombre a toujours fuis, partout. Peut-être alors les masses
62
e alors les masses elles-mêmes comprendront-elles
qu’
il n’est qu’un seul infini véritable : celui que chacun porte en soi,
63
masses elles-mêmes comprendront-elles qu’il n’est
qu’
un seul infini véritable : celui que chacun porte en soi, celui de l’â
64
s qu’il n’est qu’un seul infini véritable : celui
que
chacun porte en soi, celui de l’âme inépuisable. Ce jour-là, les glor
65
oitures branlantes qui semblent ne pouvoir rouler
que
sur les routes écartées, d’une ferme au marché le plus proche. Nulle
66
rète, si pacifique et séculaire. Ce pays-là n’est
qu’
amitié des tons et des lignes humaines, humilité sous la douceur du ci
67
et doux, le goudron de la route sentait plus fort
que
les champs de roses, et des nuages noirs traînaient sur les vergers.
68
s traînaient sur les vergers. J’ai su, plus tard,
que
ce jour-là j’avais fait mes adieux à la France. e. Rougemont Denis
69
hère française ; la production littéraire demande
qu’
on ne séjourne pas indéfiniment dans le climat étranger. En outre, j’a
70
astant brutalement avec la foule qui la peuple et
que
je ne reconnaissais plus : des visages sans gaieté, des corps petits,
71
i surtout habité New York, à part les quatre mois
que
j’ai passés en Argentine à faire les conférences qu’impliquait ma mis
72
j’ai passés en Argentine à faire les conférences
qu’
impliquait ma mission. Je pensais alors regagner la Suisse, quand l’en
73
États-Unis me bloqua sur place. J’avais constaté
que
les conférences n’étaient pas un très bon moyen de propagande. Les Am
74
et qui eut un grand succès. C’est le seul ouvrage
que
les Américains peuvent consulter, pour se renseigner sur notre pays,
75
aintenant destiné aux jeunes Américains. Je crois
qu’
on en a peu parlé en Suisse ? En effet. Qu’y enseigniez-vous ? J’avais
76
crois qu’on en a peu parlé en Suisse ? En effet.
Qu’
y enseigniez-vous ? J’avais une chaire de philosophie-sociologie. Mes
77
elle était donc fort active à New York ? Au point
que
trois maisons françaises d’édition s’y sont fondées pendant la guerre
78
tion s’y sont fondées pendant la guerre. J’ajoute
que
l’École des hautes études a lancé une revue, Renaissance. De là, j’ai
79
le du genre voltairien, dans lesquelles je montre
que
les armées de masse sont devenues inutiles et que la guerre militaire
80
que les armées de masse sont devenues inutiles et
que
la guerre militaire est morte, et qu’un gouvernement mondial est deve
81
inutiles et que la guerre militaire est morte, et
qu’
un gouvernement mondial est devenu possible, mais doit émaner des peup
82
l’aime énormément ; c’est une autre civilisation
que
la nôtre, mais qui a ses valeurs à elle. Peut-on employer ce mot de c
83
t de civilisation pour un peuple si neuf ? Disons
que
leur conception de la vie est différente. C’est une question de mœurs
84
és ». Ils sont évidemment très simplistes dans ce
qu’
ils impriment, et manquent d’esprit critique. Quant à leurs loufoqueri
85
tique. Quant à leurs loufoqueries, ne croyons pas
qu’
ils les prennent au sérieux : c’est un genre d’humour qui leur plaît,
86
un genre d’humour qui leur plaît, et ils ne font
que
s’en amuser. Si on les compare aux Français, il est indéniable que ce
87
Si on les compare aux Français, il est indéniable
que
ces derniers, quoi qu’on dise, sont beaucoup plus « sérieux ». L’Amér
88
reste un pays si vaste, si mélangé et si divers,
que
tout y est toujours vrai quelque part. C’est un résumé de la planète.
89
d’hui, comme au centre du monde. Et, ne serait-ce
que
pour mieux comprendre leur continent grâce à l’éloignement, il faudra
90
leur continent grâce à l’éloignement, il faudrait
que
le plus grand nombre possible d’Européens eussent l’occasion de quitt
91
il y en a beaucoup) avec les Suisses. Non, plutôt
que
l’influence de la standardisation matérielle, c’est la standardisatio
92
ne le ton, et où l’Amérique semble copier l’image
qu’
elle s’y fait d’elle-même ; par la baisse du niveau intellectuel auque
93
diteurs contribuent en ne faisant de gros tirages
que
pour les ouvrages médiocres. Quand un livre a du succès, on le refait
94
rs américains sont beaucoup plus connus en Europe
qu’
en Amérique. Ce qui est tout à notre honneur ! L’Europe reste le conti
95
l’impérialisme américain. J’ai peur, quant à moi,
qu’
il ne soit beaucoup trop timide ! Car les Américains redoutent énormém
96
arrêter là cette interview ; nous ne doutons pas
que
les considérations de l’écrivain neuchâtelois — que nous espérons n’a
97
e les considérations de l’écrivain neuchâtelois —
que
nous espérons n’avoir point trahies en les résumant — intéresseront v
98
l est une des fiertés. Ce retour n’est d’ailleurs
que
provisoire, l’écrivain ayant laissé sa famille en Amérique où il la r
99
rdu (5 décembre 1947)h i Voici le raisonnement
qu’
a tenu devant la cour le bouillant Me Duperrier : — Rougemont s’est mi
100
Vous n’y comprenez rien ? Ni moi non plus. C’est
que
ce raisonnement n’en est pas un, mais combine deux absurdités. 1. Si
101
deux absurdités. 1. Si l’on admet avec cet avocat
que
j’ai vraiment agi comme son client, l’alternative est la suivante : o
102
is où est l’homme sain d’esprit qui peut admettre
que
j’aie vraiment agi comme Oltramare ? Nous avons tous les deux écrit p
103
ombe dans le calembour juridique. Car il est vrai
que
les deux cas s’énoncent et se prononcent de même, mais par ce procédé
104
, donc pour la Suisse. Il en résulte à l’évidence
que
je faisais en Amérique exactement le contraire d’Oltramare à Paris. S
105
, essayons de l’éclairer par une fable. Supposons
que
j’aie tant et si bien parlé à la radio américaine, qu’à la fin les na
106
’aie tant et si bien parlé à la radio américaine,
qu’
à la fin les nazis ont occupé la Suisse. Voilà ce que c’est ! On m’y r
107
à la fin les nazis ont occupé la Suisse. Voilà ce
que
c’est ! On m’y ramène sous bonne escorte. Le Gauleiter, un nommé Oltr
108
Duperrier se voit chargé d’office de ma défense.
Que
va-t-il dire ? Il n’hésite pas : il dit que j’ai fait comme Oltramare
109
ense. Que va-t-il dire ? Il n’hésite pas : il dit
que
j’ai fait comme Oltramare, notre infaillible führer suisse. On lui ré
110
e, notre infaillible führer suisse. On lui répond
que
ça ne prend pas, que j’ai fait exactement le contraire. On me fusille
111
führer suisse. On lui répond que ça ne prend pas,
que
j’ai fait exactement le contraire. On me fusille et on le pend d’offi
112
mocratie du monde. Jugez donc ! et dites avec moi
que
nous l’avons échappé belle ! Et que le désordre tolérable et tolérant
113
ites avec moi que nous l’avons échappé belle ! Et
que
le désordre tolérable et tolérant où nous voici tout de même encore v
114
tout de même encore vivants et libres, vaut mieux
que
leur « ordre » où nous serions des morts, ou je ne sais quels esclave
115
49)j k Questions 1 et 2. — Nous avons tout ce
qu’
il faut, en Suisse romande, pour nourrir une littérature. Nous avons p
116
une littérature. Nous avons peut-être un peu plus
que
bien d’autres provinces françaises : milieu intellectuel très dense,
117
du monde germanique. Mais nous n’avons rien de ce
qu’
il faut pour assurer le succès d’une œuvre : publicité, mouvement auto
118
tie de la littérature française. Or, il se trouve
que
la France est un pays centralisé, dans sa vie littéraire aussi. Pourq
119
stion 3. – « Le départ vers Paris… » Il n’y a pas
que
Paris, mais c’est le départ qui importe. Combien de grandes œuvres on
120
Eliot, de Dante à Paul Claudel ou à James Joyce —
que
j’en viens à me demander si la condition normale du « bon écrivain »
121
in (nous entendons par là aussi bien un romancier
qu’
un dramaturge) a-t-il à sa disposition dans la réalité romande ou même
122
e temps qu’une tentative de retrouver ailleurs ce
que
l’on ne trouve pas dans son pays, une fuite, loin de ce que Ramuz app
123
e trouve pas dans son pays, une fuite, loin de ce
que
Ramuz appelle “le train-train d’une vie moyenne où l’exception, n’a p
124
ce Suisse très cosmopolite reconnaît, à son tour,
que
notre pays manque de ce qui est indispensable au succès d’une œuvre l
125
l’urgence de notre congrès. Elle dit tout haut ce
que
pensent des millions. Et elle le dit sans précautions, avec la calme
126
rope. Les autres dorment. Ils n’ont pas encore vu
qu’
on ne leur laissera plus le temps d’être prudents. Trop tard, dites-vo
127
ressort de notre action. Je voudrais vous montrer
que
ce presque est une réalité, et qui change tout. Mon argument sera sim
128
rriez plus même le dire, et cela pour des raisons
que
vous avez bien connues… Or non seulement vous le dites, vous l’écrive
129
imer, puisque votre lettre est « ouverte ». C’est
qu’
il y a donc encore un peu d’Europe vivante. L’Europe existe encore, là
130
de leur révolte. Vous allez me dire : « Ce n’est
qu’
une survivance. En réalité, les jeux sont faits. Le droit de parler no
131
roit de parler nous est encore laissé, mais c’est
qu’
il n’a plus d’importance. La possibilité d’agir nous est ôtée. » Venez
132
n. Elle est très répandue, elle est si fascinante
qu’
elle risque bien de provoquer, comme tout vertige, la chute qu’elle im
133
e bien de provoquer, comme tout vertige, la chute
qu’
elle imagine. Cette illusion d’optique consiste à voir une toute petit
134
, nous sommes 300 millions : c’est deux fois plus
que
l’Amérique, autant que la Russie et tous ses satellites. Sur ces 300
135
ons : c’est deux fois plus que l’Amérique, autant
que
la Russie et tous ses satellites. Sur ces 300 millions, dix pour cent
136
industries ; et l’URSS n’a pas été traitée mieux
qu’
elle, qu’on s’en souvienne. Une Europe entre deux colosses ? Mais gard
137
es ; et l’URSS n’a pas été traitée mieux qu’elle,
qu’
on s’en souvienne. Une Europe entre deux colosses ? Mais gardons-nous
138
es. La symétrie est une loi de la paresse, autant
qu’
un procédé de construction. Dans toutes les choses humaines, elle est
139
oses humaines, elle est une illusion. Il est vrai
que
l’Amérique souhaite l’union de l’Europe. Ce n’est pas la même union q
140
e l’union de l’Europe. Ce n’est pas la même union
que
les Russes nous imposeraient ! L’Amérique veut l’Europe unie, parce q
141
deux ans, à nous fédérer librement. Il ne dépend
que
de nous d’y réussir. Les jeux ne sont donc pas faits. Il nous reste d
142
vous avez quelques raisons d’être plus pessimiste
que
d’autres. Tous ceux qui ont lu votre livre l’ont senti, et même s’ils
143
votre livre l’ont senti, et même s’ils ignoraient
que
c’était votre histoire. Je vous invite à Lausanne en tant que pessimi
144
te à Lausanne en tant que pessimiste. Je voudrais
que
vous adhériez à ma doctrine du pessimisme actif. Un dernier mot sur l
145
reproche d’avoir vendu vos peuples. Mais je pense
que
vous avez tort de proposer qu’on choisisse un Grand Homme. Vous n’y c
146
les. Mais je pense que vous avez tort de proposer
qu’
on choisisse un Grand Homme. Vous n’y croyez sans doute pas plus que m
147
guer les signes. Les Mages aussi pouvaient penser
que
l’Étoile était illusion. Elle les conduisait dans la nuit vers un Enf
148
« Ce
qu’
ils pensent de Noël… » [Réponse] (24 décembre 1953)n Déjà les paste
149
méricanisme de l’Europe pour que nous comprenions
que
les hommes ont fort peu de bonne volonté ? La plupart sont involontai
150
onté ? La plupart sont involontaires, ils ne font
que
subir leur condition. n. Rougemont Denis de, « [Réponse à une enqu
151
Rougemont Denis de, « [Réponse à une enquête] Ce
qu’
ils pensent de Noël… », Gazette de Lausanne (supplément littéraire), L
152
s dangereuse, démontrant ainsi, une fois de plus,
que
les nations de l’Europe sont solidaires en fait, pour le meilleur qua
153
Elle ne sera pas gagnée dans ces lieux indécents
que
sont les couloirs de parlements, mais dans les esprits et les cœurs.
154
onomie — quand chacun de nos peuples aura compris
qu’
il s’agit de se sauver tous ensemble ou de périr isolément. o. Roug
155
nt du Mouvement européen. Votre photo me rappelle
que
je m’y trouvais aussi… Veuillez croire, Monsieur le rédacteur en chef
156
nos particularismes les plus désuets. Il voudrait
que
chacune de nos cités se suffise à elle-même dans tous les domaines :
157
: université, radio, publications, etc. Et plutôt
que
de reconnaître que cela n’est pas possible, en plus d’un cas, il pous
158
, publications, etc. Et plutôt que de reconnaître
que
cela n’est pas possible, en plus d’un cas, il pousse à préférer des s
159
iocres, mais « bien de chez nous », aux avantages
que
pourrait procurer une coopération sans réserve avec d’autres cantons
160
libre et dispersé, voire anarchique. Il est clair
que
nos villes sont trop petites pour se payer chacune un laboratoire de
161
ratoire de recherches nucléaires, pour ne prendre
que
cet exemple. Mais qu’on ne dise pas qu’elles sont trop petites pour q
162
nucléaires, pour ne prendre que cet exemple. Mais
qu’
on ne dise pas qu’elles sont trop petites pour que s’y développent à f
163
e prendre que cet exemple. Mais qu’on ne dise pas
qu’
elles sont trop petites pour que s’y développent à foison des écoles d
164
avec l’intransigeance nécessaire. N’oublions pas
que
les cités qui ont fait la Renaissance en Italie, en Flandres ou en Bo
165
ndres ou en Bourgogne, étaient alors plus petites
que
nos villes romandes actuelles. Elles sont tout de même devenues des f
166
e grands marchands de l’époque. Il est trop clair
qu’
à l’absence de cette passion créatrice et de ce sens du mécénat, nul c
167
remédier. Les comités ne peuvent faire, au mieux,
que
des choses raisonnables, mais la culture est faite par des passions i
168
le gaspillage des forces et des sommes. Je crains
que
nous soyons encore, en Suisse romande, aux antipodes de ce climat d’e
169
rotégeant en revanche trop de médiocrité pour peu
qu’
elles aient été un jour inscrites à quelque budget d’État, et sous pré
170
ue équitable — ce qui n’est, soit dit en passant,
qu’
une parodie du vrai fédéralisme — c’est tout cela qui mérite aujourd’h
171
aliste. On parle beaucoup, ces jours-ci du danger
que
le Marché commun représenterait pour notre Suisse fédéraliste. Mais c
172
C’est bien plutôt le fait de ne plus s’intéresser
qu’
au niveau de notre vie matérielle, de traiter la culture en mendiante,
173
nd ses sources dans les mêmes attitudes de pensée
que
la culture créatrice. On ne sauvera pas l’un sans l’autre. q. Roug
174
t, nous publions un extrait de l’important exposé
qu’
il présentera aujourd’hui au congrès pour une collaboration culturelle
175
ceux de la création. La moitié d’une vérité n’est
qu’
une sottise, surtout lorsqu’il s’agit de fédéralisme ! Me faire dire q
176
t lorsqu’il s’agit de fédéralisme ! Me faire dire
que
« tout le secret du fédéralisme » réside dans l’art de distinguer ce
177
ations futures avec le Marché commun, on croirait
que
l’union de l’Europe se réduit à des problèmes de tarifs douaniers et
178
entre des peuples ne saurait se faire en général
que
sur la base de quelque unité préexistante ; 2. Or, l’Europe que l’on
179
e de quelque unité préexistante ; 2. Or, l’Europe
que
l’on tente aujourd’hui d’unir est d’abord une entité culturelle ; 3.
180
d’abord une entité culturelle ; 3. Il en résulte
que
l’on ne doit et que l’on ne peut « faire l’Europe » qu’en conformité
181
culturelle ; 3. Il en résulte que l’on ne doit et
que
l’on ne peut « faire l’Europe » qu’en conformité avec le génie même d
182
on ne doit et que l’on ne peut « faire l’Europe »
qu’
en conformité avec le génie même de sa culture, qui est celui de l’uni
183
st celui de l’union dans la diversité. On va voir
que
cette thèse « culturelle » nous porte en pleine actualité, et qu’elle
184
« culturelle » nous porte en pleine actualité, et
qu’
elle entraîne une politique bien définie. ⁂ La première proposition n’
185
ntraîne pas de longs commentaires. Il est évident
que
des peuples, ne songent à s’unir que s’ils ont en commun certains tra
186
est évident que des peuples, ne songent à s’unir
que
s’ils ont en commun certains traits qu’ils tiennent pour essentiels :
187
à s’unir que s’ils ont en commun certains traits
qu’
ils tiennent pour essentiels : leur union consiste donc à restaurer ou
188
il n’est pas difficile de l’établir. Quand je dis
que
l’Europe est d’abord une entité culturelle, ou que son unité la moins
189
ue l’Europe est d’abord une entité culturelle, ou
que
son unité la moins contestable réside dans sa culture, je songe à deu
190
de dans sa culture, je songe à deux faits majeurs
que
chacun connaît. Un fait de nature : l’Europe est le plus petit de tou
191
gine et le cœur. Voilà qui ne saurait s’expliquer
que
par la culture des Européens, entendant par culture, au sens le plus
192
t par culture, au sens le plus large du terme, ce
que
l’esprit humain, le génie créateur dans tous les ordres, vient ajoute
193
peu de chose plus une culture. Quand on s’imagine
que
l’Europe, dont discutent aujourd’hui toute la presse et tous les parl
194
essentiellement une réalité économique, on oublie
que
notre économie n’est pas tombée du ciel ni sortie du sol, et qu’elle
195
mie n’est pas tombée du ciel ni sortie du sol, et
qu’
elle ne tire pas son origine et sa vitalité de notre nature, mais bien
196
de nos peuples et les extraordinaires diversités
qu’
ils juxtaposent sur un très petit territoire. Quand ces diversités tou
197
peine à prendre conscience de leur nocivité tant
que
celle-ci ne se manifeste qu’au niveau des idéologies, même meurtrière
198
e leur nocivité tant que celle-ci ne se manifeste
qu’
au niveau des idéologies, même meurtrières. On va répétant que le nati
199
des idéologies, même meurtrières. On va répétant
que
le nationalisme — généralement confondu avec le patriotisme, hélas —
200
fondu avec le patriotisme, hélas — a du bon, tant
qu’
il ne s’exagère pas en chauvinisme. Mais qu’est-ce que le chauvinisme
201
tant qu’il ne s’exagère pas en chauvinisme. Mais
qu’
est-ce que le chauvinisme ? C’est tout simplement le nationalisme des
202
l ne s’exagère pas en chauvinisme. Mais qu’est-ce
que
le chauvinisme ? C’est tout simplement le nationalisme des autres. Qu
203
s s’oppose aux intérêts économiques de ma nation,
que
je sois industriel, ouvrier, paysan ou politicien, je me dis que quel
204
ustriel, ouvrier, paysan ou politicien, je me dis
que
quelque chose ne marche pas. C’est alors que j’accepte de prendre au
205
e mesures d’union supranationales. Et c’est ainsi
que
l’union de l’Europe a commencé dans le domaine économique, avec la CE
206
’il faut et s’il suffit, pour « faire l’Europe »,
que
toutes les nations du continent s’intègrent dans le Marché commun, c’
207
d’arrière-pensées politiques. ⁂ Même en admettant
que
l’unification économique puisse suffire à « faire l’Europe », il faud
208
absolument vitales. Il faudrait notamment exiger
que
cette unification économique ne détruise pas les bases de l’Europe, m
209
is y puise au contraire ses meilleures énergies ;
qu’
elle respecte nos diversités traditionnelles, dans toute la mesure où
210
la mesure où elles sont encore fécondes, et enfin
qu’
elle se subordonne à une grande politique commune, laquelle ne peut se
211
politique commune, laquelle ne peut se développer
qu’
à l’échelle mondiale. Commentons brièvement ces conditions de succès :
212
ix de l’éducation générale ou humaniste. C’est ce
que
fait l’URSS. Mais ce serait tuer la poule aux œufs d’or. La technique
213
C’est là le vrai sens, et le seul possible, de ce
qu’
on a nommé « l’Europe des patries ». (Par malheur, l’auteur de ce mot
214
l’auteur de ce mot d’ordre, M. Debré, ne pensait
qu’
à l’Europe des États, qui est tout à fait autre chose.) Les modes d’
215
harmonieuse de la technique à l’homme. C’est dire
que
l’union économique appelle une union politique, qu’on ne peut souhait
216
e l’union économique appelle une union politique,
qu’
on ne peut souhaiter que fédérale. L’intégration totale et uniformisan
217
elle une union politique, qu’on ne peut souhaiter
que
fédérale. L’intégration totale et uniformisante détruirait les bases
218
seulement les moyens nécessaires d’une politique
qu’
il reste encore à définir et à réaliser. 3. Cette politique, appuyée s
219
s’étendre aux problèmes immenses et tout nouveaux
que
posent le contact des cultures, la technique, l’expansion démographiq
220
ur les Européens. La Suisse est aussi bien placée
que
n’importe quel autre pays pour faire valoir ces vues mondiales : on n
221
is de néo-colonialisme ! Et elle est mieux placée
que
tout autre pour faire valoir les avantages d’une union de type fédéra
222
uction européenne me semblent avoir plus de poids
que
les scrupules qui nous retiennent encore. Quand elle se borne à invoq
223
e au passé du continent, aux rivalités nationales
que
l’union, justement, entend éliminer. En invoquant au contraire son ex
224
’a compris ce pays s’il n’a pas découvert un jour
qu’
un souffle immense de lyrisme nomade est le secret le mieux couvé dans
225
verrai qui je veux ou personne s’il me plaît, ce
que
j’ai envie de voir ou rien, pendant deux mois — je me suis gardé d’ét
226
r religieux le plus influent de l’Amérique. C’est
qu’
il prône une théologie qu’on pourrait nommer culturelle, et qui tient
227
nt de l’Amérique. C’est qu’il prône une théologie
qu’
on pourrait nommer culturelle, et qui tient compte des arts et des rel
228
domine la pensée catholique en grand progrès, et
que
Karl Barth a restauré dans tous les séminaires presbytériens la notio
229
rouges et rose pourpre d’une intensité de couleur
que
je n’ai jamais vue ailleurs. Arrêt dans une auberge faite d’un vieux
230
nt pour avoir des maisons, cabanes, pavillons, ce
que
vous voulez, à deux heures de New York par avion, ou à quatre ou cinq
231
t, vous n’êtes plus jamais seuls. » Je lui ai dit
qu’
il exagérait, qu’il y avait encore en Europe des refuges à peu près co
232
us jamais seuls. » Je lui ai dit qu’il exagérait,
qu’
il y avait encore en Europe des refuges à peu près comparables. Mais j
233
al la substance même, ou la technique, des œuvres
qu’
ils sont en train d’écrire. Combien d’écrivains véritables, de peintre
234
s ou le bras d’un fauteuil. Le professeur annonce
que
la leçon sera consacrée à l’examen d’un court poème écrit par l’une d
235
, irréguliers. À la seconde lecture, je comprends
qu’
il s’agit de deux vieillards dans une cuisine regardant par la fenêtre
236
t dans le traitement imagiste et presque abstrait
qu’
a choisi l’auteur anonyme. Plusieurs girls manifestent leur intention
237
n de cet art poétique me paraît aussi sec et gris
que
l’automne abstraitement évoqué par une ramure sèche et fragile devant
238
nt le même accoutrement si commode et si négligé,
que
la jeunesse européenne semble avoir adopté depuis quinze ans, croyant
239
d’une côte à l’autre, mais c’est vraiment tout ce
que
j’en sais. La série de mes rendez-vous commence quelques secondes apr
240
sités sur l’union de l’Europe et le Marché commun
que
l’Amérique découvre subitement, et déjà elle croit que c’est fait… À
241
’Amérique découvre subitement, et déjà elle croit
que
c’est fait… À 3 heures, la grande salle est pleine ; et l’on me condu
242
dit le pacifiste Bertrand Russell. (Plutôt rouges
que
morts.) À quoi mon ami Sidney Hook a répondu : « Cette attitude nous
243
à faire. Improvisation d’une demi-heure. Sachant
que
mon auditoire est composé d’étudiants « très à gauche » et dont plusi
244
s clés de l’avenir du monde uni, je leur rappelle
que
c’est l’Europe qui a fait le monde, en créant les moyens de relier le
245
e concept de genre humain. Je leur rappelle aussi
que
le communisme russe est une création de l’Europe. (Marx, juif rhénan
246
protestant, écrit au British Museum, des articles
que
publie le New York Herald Tribune : on ne fait pas plus Européen.) Où
247
ù sont les successeurs de l’Occident ? Je ne vois
que
des imitateurs. Le but des Soviétiques, à les en croire, est de rattr
248
e. Croyons à nos valeurs et prouvons-le, c’est ce
que
le monde attend de nous, pour nous rejoindre en fin de compte, Russes
249
iduelle peut-elle être présentée de telle manière
qu’
elle ne soit pas méprisée comme un simple sermon ? » « La décision n’a
250
sont détruites de toute façon. » « Admettez-vous
que
l’État-nation est une conception archaïque, et que la tendance à crée
251
ue l’État-nation est une conception archaïque, et
que
la tendance à créer des marchés communs peut conduire à la formation
252
aire ? » « À votre sens, serait-ce une bonne idée
que
tous les Américains intelligents se mettent à aimer (pas Éros mais Ag
253
le plan d’une conférence sur l’Europe et le monde
que
je leur ai brièvement exposé. Critiques et suggestions d’une pertinen
254
iques, me dit ce dernier, c’est le langage commun
que
nous avons trouvé, entre nos différentes spécialités. Les historiens
255
3 février 1963)w x Le problème « d’exprimer ce
que
cela veut dire d’être d’Yverdon, de Féchy » relève, me semble-t-il, d
256
» relève, me semble-t-il, de la sociologie plutôt
que
de la littérature. Si l’on est né à Tubingue, à Eboli, à Collombay ou
257
? A-t-on vraiment de meilleures chances ? L’idée
que
la littérature ait pour fonction d’exprimer l’homme en tant que natio
258
plus exact — cette idée m’est tellement étrangère
que
je crains de ne pouvoir rendre justice à la problématique de M. Tauxe
259
tice à la problématique de M. Tauxe. Je sais bien
que
ce souci « quasi obsessionnel » bloque beaucoup d’esprits dans nos ca
260
l’Helvetia et à l’homo helveticus. Il ne croyait
qu’
au pays de Vaud, réduit aux vignes, et pimenté d’exotisme valaisan. «
261
’est fait un langage de peintre, en prose. Plutôt
que
d’une « rationalité adéquate », le jeune Suisse romand qui veut écrir
262
re n’aurait-il pas besoin, tout simplement, de ce
qu’
on appelle en France la classe de rhétorique ? Je ne sens pas que ce s
263
n France la classe de rhétorique ? Je ne sens pas
que
ce soit aux « préjugés spiritualistes » qu’il se heurte, mais plutôt
264
s pas que ce soit aux « préjugés spiritualistes »
qu’
il se heurte, mais plutôt au matérialisme néo-bourgeois, réaliste et m
265
arques de M. Tauxe sur ce point sont aussi justes
qu’
opportunes. Quelles sont les chances particulières du Suisse romand ?
266
familiales, le Suisse romand qui veut écrire n’a
qu’
à jouer ses atouts et bien savoir sa langue. Cela donne Rousseau, Staë
267
Si cela ne donne plus rien, n’est-ce pas le signe
qu’
il serait temps de se tourner vers autre chose ? L’éloge, l’élan, l’am
268
qui vous retient ? Écoutez Nietzsche : « Je veux
que
tu me dises ta pensée maîtresse, et non que tu t’es échappé d’un joug
269
veux que tu me dises ta pensée maîtresse, et non
que
tu t’es échappé d’un joug. » w. Rougemont Denis de, « [Réponse à u
270
t vous a valu de beaux triomphes. Les hypothèses
que
vous aviez lancées alors sur les cathares et sur l’amour courtois, ap
271
plus exprimer la part instinctive de l’homme, ce
que
j’appelle son animisme. Les musiciens (comme le dit Ansermet), les pe
272
n de sécheresse, d’épuisement. Ne croyez-vous pas
que
l’Europe est épuisée ? Absolument pas. D’ailleurs, si elle l’était, q
273
, sont épuisées. Elles ne font, pour l’essentiel,
que
prendre ce que nous leur donnons. Mais si nos mythes sont morts… Ils
274
. Elles ne font, pour l’essentiel, que prendre ce
que
nous leur donnons. Mais si nos mythes sont morts… Ils sommeillent. Il
275
mythes sont morts… Ils sommeillent. Ils attendent
que
nous soyons tout à fait sortis de cette période d’anarchie, que nous
276
s tout à fait sortis de cette période d’anarchie,
que
nous mettions en place de nouvelles conventions, de nouvelles contrai
277
u par les interdits de la religion… Moi, je crois
que
le christianisme a repris sa marche en avant. … de la morale et de la
278
la hiérarchie mondaine. Il n’y a plus d’obstacles
que
les mythes puissent tenter de vaincre. Pardon ! Il s’en crée maintena
279
tellement dépendant, conditionné par les autres,
que
nous parvenons à un choix : régler, réglementer minutieusement chaque
280
uissant, assez rusé pour trouver soudain, quelles
que
soient les circonstances, de nouvelles portes de sortie. Jung a écrit
281
velles portes de sortie. Jung a écrit précisément
que
l’archétype de la Femme a gardé son rôle primordial. Mais oui. Les tr
282
s de prendre un envol extraordinaire. Croyez-vous
que
l’étude systématique du xie et du xiie siècle nous donnerait des él
283
ar exemple un texte inédit de Teilhard. Il faudra
que
j’en parle à Lausanne. Voyez ce passage : le Père (qui d’ailleurs a e
284
he de la Femme. Une sublimation. Vous pensez donc
que
le mythe, après s’être longuement abâtardi, commence à se manifester
285
Rougemont. « Les modernes — écrivait-il — croient
qu’
il existe une sorte de nature normale, à laquelle la culture et la rel
286
ais non pas à comprendre leur vie. Car tous, tant
que
nous sommes, sans le savoir, menons nos vies de civilisés dans une co
287
us actuels, et aussi des plus angoissants de ceux
que
nous a légués l’Antiquité proche-orientale, si étroitement mêlée aux
288
s’appliquait à une tâche particulière. Jusqu’à ce
qu’
ils fussent frappés par le Ciel et jetés dans une confusion telle que
289
pés par le Ciel et jetés dans une confusion telle
que
tous ceux qui étaient venus à l’œuvre parlant une seule et même langu
290
igine de la diversité des langues ne serait autre
que
la spécialisation des métiers et par suite des jargons de métier — sp
291
Ceci m’évoque d’abord la description de l’Europe
que
nous donnait Paul Valéry dans sa célèbre Lettre sur la société des es
292
ette institution dont le nom même semble indiquer
qu’
elle devrait résumer le monde de l’esprit, l’ensemble de nos activités
293
onger à cette Tour du Savoir, tellement démesurée
qu’
il faut, pour l’édifier, diviser maîtres d’œuvre et ouvriers en équipe
294
ur d’elles ou en elles, prolifèrent. Dans la page
que
je viens de vous lire sur l’origine de la pluralité des langues, Dant
295
Europe. Les races qui s’ignoraient jadis au point
qu’
un homme de couleur différente ne semblait pas vraiment humain, se rec
296
rt plus visible et plus facile à observer, hélas,
que
dans nos universités. Tout le monde sait ici de quoi je veux parler :
297
galaxies dans le cosmos en expansion vertigineuse
que
nous décrivent les astronomes contemporains. D’où résultent les deux
298
rdent dans les nuées de l’inconcevable. Mais dire
que
tout langage commun se perd, entre les branches sans cesse multipliée
299
ches sans cesse multipliées du savoir, c’est dire
que
la commune mesure d’une civilisation est en train de s’évanouir — j’e
300
urces vives de la nouvelle culture mondiale. Mais
qu’
il n’y ait plus, ou presque plus, de langage commun, et que les buts f
301
ait plus, ou presque plus, de langage commun, et
que
les buts finaux s’obscurcissent, il faut bien voir que cela veut dire
302
es buts finaux s’obscurcissent, il faut bien voir
que
cela veut dire aussi, très concrètement, qu’il n’y a plus d’Universit
303
voir que cela veut dire aussi, très concrètement,
qu’
il n’y a plus d’Université aux deux sens primitifs de l’universitas, q
304
sée. Nos universités ne sont plus guère, en fait,
que
des agglomérats ou juxtapositions souvent fortuites d’écoles professi
305
s de recherches n’ayant plus d’autres liens réels
que
ceux d’une administration en outre accablée de soucis matériels et qu
306
ucis matériels et qui a d’autres chats à fouetter
que
de méditer sur la synthèse des facultés de l’esprit humain. La juxtap
307
facultés étanches ne fait pas plus une université
qu’
une addition d’organes ne fait un corps vivant. Regardons cela d’un pe
308
il est d’environ 280 000 en 1964, et l’on prévoit
qu’
il sera de 500 000 dans une dizaine d’années. (Seules n’auront pu vari
309
mer et d’autres savants américains nous affirment
que
85 % des scientifiques ayant vécu depuis l’aube de l’histoire, sont v
310
imie et n’en avions rien oublié, nous ne saurions
qu’
un dixième de ce qu’elle est aujourd’hui. Ces données numériques, que
311
rien oublié, nous ne saurions qu’un dixième de ce
qu’
elle est aujourd’hui. Ces données numériques, que je prends pour image
312
qu’elle est aujourd’hui. Ces données numériques,
que
je prends pour images, sont probablement vraies en gros dans le domai
313
t dire « version à l’unité »…). Toute l’évolution
que
j’ai dite conduit inévitablement à la confusion des langages, dissous
314
ous en terminologies incomparables. L’université,
que
l’on pourrait considérer comme un grand appareil distributeur d’infor
315
Un exemple précis illustrera ce point : Supposons
que
la théologie ait gardé ses pouvoirs régulateurs de l’ensemble de nos
316
estimé négatif, positif ou indifférent. J’ajoute
que
le physicien ne saurait pas davantage si sa démarche est conforme ou
317
lines diverses n’ont souvent plus guère en commun
que
des platitudes quotidiennes ou des préjugés mutuels hérités de confli
318
ement l’esprit européen, ne peut se résoudre à ce
que
les routines et l’utilité immédiate suffisent à justifier l’existence
319
ci l’interprète. Faudrait-il donc nous résigner à
que
l’accroissement même du savoir traîne pour conséquence la division de
320
observateur non prévenu, jugeant seulement sur ce
qu’
il nous voit faire, il semblerait que la très grande majorité des Euro
321
ement sur ce qu’il nous voit faire, il semblerait
que
la très grande majorité des Européens trouve que cela peut fort bien
322
que la très grande majorité des Européens trouve
que
cela peut fort bien continuer ainsi, sans nul danger sérieux de catas
323
niversité, dans nos pays, paraît plus florissante
que
jamais : loin d’être abandonnée, elle attire une foule croissante de
324
lleurs et de curieux. L’industrie et l’État, plus
que
jamais, ont besoin d’elle. Si elle est devenue trop petite pour ses t
325
t devenue trop petite pour ses tâches immédiates,
qu’
on l’agrandisse ! Les crises de croissance n’ont jamais été mortelles
326
lines, et qui ne peuvent défendre leur « vérité »
qu’
en se fermant méthodiquement sur elles-mêmes, acceptant ainsi de n’êtr
327
tion attentive de nos universités, l’on ne trouve
qu’
une sorte de monstre, assemblage de pièces et de morceaux que seuls le
328
e de monstre, assemblage de pièces et de morceaux
que
seuls les vêtements tiendraient ensemble, ou la force de l’habitude !
329
otivé sur lequel on se soit accordé ? Il est vrai
que
ces questions débordent le seul domaine de l’Université, et qu’elles
330
ons débordent le seul domaine de l’Université, et
qu’
elles affectent tout l’ensemble de la culture européenne. Mais c’est p
331
a culture européenne. Mais c’est par l’Université
que
les hommes d’outre-mer viennent au contact de la culture européenne,
332
au contact de la culture européenne, et c’est là
qu’
ils se posent à eux-mêmes ces questions, et nous les posent avec une i
333
moins en moins armés pour y répondre. Le problème
qu’
on soulève ici, et qui est celui du principe de cohérence de notre civ
334
s recherches particulières à l’aventure, advienne
que
pourra, et qu’on trouve ce que l’on trouvera, que cela soit compatibl
335
rticulières à l’aventure, advienne que pourra, et
qu’
on trouve ce que l’on trouvera, que cela soit compatible ou non avec l
336
aventure, advienne que pourra, et qu’on trouve ce
que
l’on trouvera, que cela soit compatible ou non avec l’image du monde
337
que pourra, et qu’on trouve ce que l’on trouvera,
que
cela soit compatible ou non avec l’image du monde communément admise.
338
ion de l’Université est liée à ce phénomène, soit
qu’
elle l’exprime, soit qu’elle réagisse contre lui avec le thomisme, ce
339
liée à ce phénomène, soit qu’elle l’exprime, soit
qu’
elle réagisse contre lui avec le thomisme, ce serait un beau sujet d’é
340
tant ? Or rien de tel ne s’est produit, autant
que
l’on sache, dans les cultures sacrées et homogènes de l’Asie brahmani
341
istinction sacré-profane n’existe pas, en ce sens
que
sagesse spirituelle, science ethnique et esthétique, sont réglées par
342
ar l’explication et la programmation universelles
que
figure le marxisme-léninisme (ou, au moins, le parti qui l’interprète
343
cherchez-vous à accroître la productivité plutôt
que
la sagesse ? et à contrôler la matière plutôt que vos passions et vos
344
que la sagesse ? et à contrôler la matière plutôt
que
vos passions et vos désirs ? Bien peu d’entre nous sont capables de d
345
s l’Occident christianisé — alors qu’il est clair
qu’
une Asie qui tenait la matière et le corps pour essentiellement illuso
346
Temps, de l’Évolution et du Progrès, il faudrait
que
le théologien soit capable de se référer non seulement aux conciles e
347
portée métaphysique indiscutable. Et il faudrait
que
les physiciens qui en discutent sachent que la dialectique de leurs p
348
drait que les physiciens qui en discutent sachent
que
la dialectique de leurs problèmes actuels sur le temps, la matière et
349
e gros ouvrages pour être exposé sérieusement. Ce
qu’
il m’importe de marquer par cet exemple, c’est que l’Europe de l’espri
350
qu’il m’importe de marquer par cet exemple, c’est
que
l’Europe de l’esprit ne peut plus se présenter devant le monde qu’ell
351
’esprit ne peut plus se présenter devant le monde
qu’
elle a réveillé, dans le désordre spirituel et dans l’incohérence babé
352
r en progression géométrique Le grand problème
que
l’Europe seule me paraît en mesure de résoudre, parce qu’elle seule l
353
isés et synthèse de nos connaissances n’est guère
qu’
un cas particulier. Le paradoxe européen par excellence de l’union dan
354
opéenne, dans sa forme fédéraliste, non unitaire,
que
je tiens pour la seule possible et désirable. Comment résoudre ce pro
355
ière enseignable. Elle ne peut vraiment consister
que
dans une attention en éveil permanent aux implications générales, aux
356
ales, aux ramifications interdisciplinaires de ce
que
l’on est en train d’étudier dans le détail. La vie est trop courte, m
357
oindre chance de succès et l’éducation permanente
qu’
on nous propose, qui s’étendrait du berceau à la tombe, ne laisserait
358
galement pour illusoire. Certes, on peut soutenir
que
la spécialisation du savoir, loin de représenter un progrès, n’est li
359
in de représenter un progrès, n’est littéralement
qu’
une monstruosité : le développement excessif d’un organe aux dépens de
360
semble humain est une perte absolue, essentielle,
que
tous les gains partiels, additionnés, dus à la spécialisation, ne com
361
bouts au prix de son âme. Il n’en reste pas moins
que
la spécialisation dans l’Université ne peut aller qu’en croissant, so
362
la spécialisation dans l’Université ne peut aller
qu’
en croissant, sous la double pression que j’ai dite : toujours plus de
363
ut aller qu’en croissant, sous la double pression
que
j’ai dite : toujours plus de matières à enseigner à un nombre toujour
364
de son cheminement, à déboucher sur des domaines
que
la vertueuse méthode, naguère, interdisait rigoureusement. Un neurolo
365
e l’irréversibilité du temps est amené à écrire «
qu’
une vue physicienne stricto sensu du cosmos est trop étriquée » ; et q
366
stricto sensu du cosmos est trop étriquée » ; et
que
la physique de demain risque de se trouver obligée d’entrer dans un d
367
ience beaucoup plus compréhensive. Et chacun sait
que
c’est en poussant l’exigence de l’analyse jusqu’aux anomalies les plu
368
de l’analyse jusqu’aux anomalies les plus fines,
que
les savants contemporains ont créé la science nucléaire : or, les imp
369
nucléaire : or, les impasses et les paralogismes
qu’
ils y rencontrent semblent les confronter désormais à des options méta
370
eu. » Si je la transpose au domaine moins sublime
que
j’essaie aujourd’hui d’explorer, elle me paraît rendre compte du fait
371
d’explorer, elle me paraît rendre compte du fait
que
ce sont les meilleurs spécialistes, c’est-à-dire ceux qui vont le plu
372
mouvement, rythme et structure dynamiques autant
que
dans leurs implications jusqu’alors inaperçues. C’est dire que l’œuvr
373
s implications jusqu’alors inaperçues. C’est dire
que
l’œuvre de synthèse qu’exige l’état présent de notre culture et de no
374
rs inaperçues. C’est dire que l’œuvre de synthèse
qu’
exige l’état présent de notre culture et de nos universités, devrait d
375
mieux notre affaire. Ce qui importe, ce n’est pas
que
la synthèse s’opère dans le vide, ou au ciel des Idées, — car là sans
376
omme un résultat objectif ; ce qui importe, c’est
que
la synthèse s’actualise, qu’elle s’opère donc dans un esprit, dans un
377
e qui importe, c’est que la synthèse s’actualise,
qu’
elle s’opère donc dans un esprit, dans une personne, car là seulement
378
s, son utilité au sens le plus élevé du terme. Ce
qu’
il nous faut enfin, ce qui nous manque, ce sont des hommes de synthèse
379
leur excellence en tant que tels par le fait même
qu’
ils auront pris conscience de ce qu’ils ne peuvent se contenter d’être
380
le fait même qu’ils auront pris conscience de ce
qu’
ils ne peuvent se contenter d’être seulement des spécialistes. Favoris
381
n, voilà sans doute le genre de solution concrète
que
nous pourrions préconiser, si nous voulons tenter de faire face au pr
382
tifs universitaires, je n’aurais guère à proposer
qu’
une solution de bon sens presque simpliste : il me semble que le seul
383
tion de bon sens presque simpliste : il me semble
que
le seul moyen de sauver la qualité des universités existantes et leur
384
velles pourraient librement s’accorder aux optima
que
votre Conférence se préoccupe d’établir et que proposent avec beaucou
385
ma que votre Conférence se préoccupe d’établir et
que
proposent avec beaucoup de sagesse, me semble-t-il, les rapports d’ex
386
de la culture européenne, qui n’est rien d’autre
que
la mesure humaine, le module des relations personnelles, condition de
387
ys ou université. Ce n’est pas du tout par hasard
que
dans le tableau qu’a établi le sociologue belge Léo Moulin, sous le t
388
n’est pas du tout par hasard que dans le tableau
qu’
a établi le sociologue belge Léo Moulin, sous le titre d’indice Nobel,
389
iversités, maintenues dans les petites dimensions
qu’
exige leur rendement optimum, peut freiner l’accroissement de l’entrop
390
ionnelle, et démontrer d’une manière convaincante
qu’
on éprouve l’impérieux désir d’intégrer l’expérience acquise dans un e
391
nterdisciplinaires. J’entends par là : les sujets
qu’
il serait le plus malaisé de traiter dans le cadre de nos facultés cla
392
acultés classiques. Voici quelques-uns des sujets
que
, pour ma part, je serais heureux de pouvoir étudier et discuter, si j
393
té du milieu et de paix des disciplines farouches
qu’
imposent à la majorité de nos contemporains les impératifs de la crois
394
nce, à l’heure où elle s’interroge elle-même plus
qu’
elle n’a jamais fait dans son histoire. Cette liste de thèmes, vous le
395
Cette liste de thèmes, vous le sentez, ne demande
qu’
à s’allonger au gré de vos désirs. Quant aux relations entre un tel Ce
396
de remise en question générale, et c’est aussi ce
que
nous attendons tous de nos vacances. Après un an, les professeurs dét
397
ombinatoria. Mais surtout, et c’est la conclusion
que
je souhaite que vous tiriez de mes propos, cet institut de synthèse s
398
s surtout, et c’est la conclusion que je souhaite
que
vous tiriez de mes propos, cet institut de synthèse serait idéalement
399
ui a fait le Monde, et qui doit aujourd’hui, plus
que
jamais, faire des hommes. 3. Je n’ignore pas les tentatives qui se
400
s haut niveau de précision. Mais on peut craindre
que
le langage mathématique, même une fois maîtrisé par nos économistes,
401
Un écrivain suisse (20-21 mars 1965)ab
Qu’
il n’y ait pas une patrie suisse mais deux douzaines, point de grands
402
e marché intellectuel, et surtout point de langue
que
ces patries aient en commun, semble interdire la possibilité d’un écr
403
lie n’aient réuni dans une de ces super-provinces
qu’
on nomme nations toutes leurs cités, tous leurs pays. Pourtant je vois
404
l’œuvre et la carrière de Carl Burckhardt. C’est
qu’
il est l’un de ceux, très rares, dont la personne, le style, la formul
405
de l’historien de la Renaissance, je ne pense pas
qu’
il tienne de lui ce don de prévision de l’avenir européen dont tous le
406
îné, celles à Hofmannsthal du cadet), mais plutôt
qu’
il faut l’attribuer à leur commune formation bâloise d’historiens scru
407
lone de Dantzig ; enfin mémorialiste d’événements
qu’
il a vécus et qu’il avait prévus. Burckhardt est le type même de l’écr
408
enfin mémorialiste d’événements qu’il a vécus et
qu’
il avait prévus. Burckhardt est le type même de l’écrivain qui ne peut
409
orce en toute indépendance d’esprit, peut-on dire
que
ces traits composent une personnalité typiquement suisse ? Je constat
410
une personnalité typiquement suisse ? Je constate
qu’
on les trouve réunis chez quelques-uns des hommes les mieux liés par t
411
tellement plus exemplaire pour l’humanité à venir
que
le « dictateur… ». (Mais j’allais oublier de dire que « C.J.B. », l’h
412
le « dictateur… ». (Mais j’allais oublier de dire
que
« C.J.B. », l’homme dont la stature est imposante, est aussi un conte
413
éuni à son peuple », comme dit la Bible. C’est là
que
je l’avais surpris un jour en plein travail — on ne devrait jamais fa
414
— on ne devrait jamais faire ça — pour découvrir
qu’
avant, ailleurs, au Flore, chez Lipp, depuis vingt ans et plus qu’on s
415
rs, au Flore, chez Lipp, depuis vingt ans et plus
qu’
on se rencontrait, je ne l’avais jamais vu dans sa réalité et nous n’a
416
ble de bas en haut, rien à faire, c’est plus fort
que
moi… » Là-dessus des théories bien saugrenues, et nous sommes allés p
417
ésertes, au pied démesuré des roches surgissantes
qu’
une force irrésistible allongeait vers le haut. Émotion de pressentir
418
lage, à New York. (20 juin 1942, selon le journal
que
je tenais alors.) Deux jours plus tôt, je l’avais rencontré à l’Offic
419
à l’affût.) Il se plaignit, très gentiment, de ce
que
durant nos années parisiennes, nous n’ayons pu, ou cru pouvoir, nous
420
nous rencontrer. « Ce sont de ces conneries ! Et
que
l’on expie ! » (Beaucoup de lui dans ces quelques mots.) Il m’arrive
421
lui dans ces quelques mots.) Il m’arrive de rêver
que
je m’entends au mieux avec tel homme, telle femme dont tout me sépare
422
use ! À quelques jours de là, il me dit souhaiter
que
nous puissions désormais nous rencontrer « mécaniquement en quelque s
423
d’articles à paraître ces prochains jours. C’est
que
Breton, pour toute la haine vigilante qu’il n’a cessé de vouer sa vie
424
. C’est que Breton, pour toute la haine vigilante
qu’
il n’a cessé de vouer sa vie durant aux manifestations visibles et off
425
qu’il jugeait le christianisme trop peu religieux
qu’
il le dénigrait sans relâche. Il voulait un rituel, des mystères, une
426
ui rejoignait l’Inquisition… Il me dit ce soir-là
qu’
il avait découvert au fond de l’échoppe d’un cordonnier dans le Morvan
427
roupe, d’ailleurs variable et quelque peu fortuit
qu’
avait reconstitué André Breton dès son arrivée à New York. Il avait po
428
aphes, et quelques jeunes femmes assez fantasques
qu’
on eût dit nées des comédies de Shakespeare. On se rencontrait chez l’
429
Christ aviateur, dans le même poème…) C’est ainsi
qu’
il me lut un jour l’Ode à Charles Fourier qu’il venait de recopier d’u
430
insi qu’il me lut un jour l’Ode à Charles Fourier
qu’
il venait de recopier d’une belle écriture sage et d’orner de fleurs a
431
ouvriers, de l’utopie phalanstérienne. On eût dit
qu’
il était le premier à découvrir ce jeune auteur d’avant-garde ! « Ombr
432
’est mieux défini. Je pense au soir où il déclara
qu’
il était temps d’aller regarder de plus près qu’on ne l’avait fait sai
433
a qu’il était temps d’aller regarder de plus près
qu’
on ne l’avait fait saint Augustin, qu’il tenait pour l’ancêtre des jan
434
e plus près qu’on ne l’avait fait saint Augustin,
qu’
il tenait pour l’ancêtre des jansénistes. Nous lui dîmes qu’il y avait
435
it pour l’ancêtre des jansénistes. Nous lui dîmes
qu’
il y avait là-dessus des bibliothèques ; il n’en crut rien, visiblemen
436
Augustin à lui était sans nul rapport avec celui
qu’
avait canonisé « l’Obscurantisme ». Un dimanche matin à New York, au b
437
s de rêve. « Je pensais, me dit-il, à la religion
qu’
il faut absolument fonder, et pourquoi ne pas la fonder sur le culte d
438
ue si hautement exemplaire à tant d’égards, c’est
qu’
il voulait tout à la fois changer la vie par une sédition passionnelle
439
cessé d’inventer un chemin qui ne pouvait exister
que
pour lui seul. De personne je ne suis à ce point sûr qu’il a toujours
440
r lui seul. De personne je ne suis à ce point sûr
qu’
il a toujours suivi — avec autant d’audace que d’exacte obéissance aux
441
sûr qu’il a toujours suivi — avec autant d’audace
que
d’exacte obéissance aux signes devinés — ce qu’il faut bien que j’app
442
e que d’exacte obéissance aux signes devinés — ce
qu’
il faut bien que j’appelle ici d’un terme signifiant pour moi la relat
443
t, combien j’aime cet éclat, d’allégresse solaire
que
fait la première phrase du chapitre suivant : Le Tanébeau mais le Van
444
lettres et celui de l’action — et l’on dirait ici
qu’
un nouveau livre se propose — quelques événements silencieux exigent l
445
rnières pages du livre, intitulées « Sans date »,
qu’
il cherche à « distancier », vainement d’ailleurs, sont admirables.
446
prisonniers Descriptions d’une mémoire ; et ce
qu’
elle a gardé, et qui revit en ce recueil, va devenir par la grâce d’un
447
émoire de chaque lecteur. Je sais bien les images
que
je n’oublierai plus, que j’aimerais évoquer ici, mais beaucoup ne son
448
Je sais bien les images que je n’oublierai plus,
que
j’aimerais évoquer ici, mais beaucoup ne sont pas de celles que l’on
449
évoquer ici, mais beaucoup ne sont pas de celles
que
l’on peut désigner facilement, faites d’atmosphère, de sentiment, et
450
», l’autre fumant sans cesse des petits cigares «
qu’
elle plantait juste au milieu de sa bouche grande, charnue et bien pei
451
en peinte », même s’il s’agit seulement des robes
que
leur composait Worth trente ans plus tôt pour un bal de la Cour (« Av
452
nte ans plus tôt pour un bal de la Cour (« Avouez
que
nous étions un peu rivales… »), s’élève jusqu’au sublime dans la friv
453
s et jeunes filles d’aujourd’hui, j’aimerais dire
qu’
un tel livre transmet quelque chose qui n’a pas de prix : les secrets
454
s moi la précision des sentiments. Si vous croyez
qu’
un sentiment, c’est vague, lisez Jacques Chenevière, vous y découvrire
455
stoire du Nouveau Monde par un éclat « plus clair
que
mille soleils », cet homme était d’Europe par les mesures et les affi
456
demi-sourire : « Peut-être suis-je plus chrétien
que
quiconque… Il faudra bien que je vous l’explique quand nous serons se
457
plus le revoir. Il aimait citer la Bhagavad-Gita,
qu’
il lisait en sanscrit. Il connaissait à fond notre littérature, où il
458
aura, il le savait, un prestige un peu douloureux
qu’
il portait avec juste assez de gaucherie pour une impeccable élégance…
459
, qui est comme le signe sensible de la situation
que
l’écrivain n’a cessé d’occuper dans la culture de notre temps : à pro
460
s préoccupations. C’est à ce moment-là, en effet,
qu’
avec plusieurs jeunes intellectuels de ma génération, j’ai découvert l
461
d’une insatisfaction de notre sort. Nous pensions
que
la société où nous vivions était fichue, qu’on allait à des catastrop
462
ions que la société où nous vivions était fichue,
qu’
on allait à des catastrophes, notamment à la guerre : faire la révolut
463
cipes de droit international ne servait, en fait,
que
les nationalismes. Dans le groupement l’Ordre nouveau, nous nous atta
464
ons aussi bien la dictature stalinienne du parti,
que
la dictature de l’État, telle que l’incarnaient Hitler et Mussolini.
465
ienne du parti, que la dictature de l’État, telle
que
l’incarnaient Hitler et Mussolini. Quels furent, au niveau des faits,
466
Hic et Nunc , une revue de pensée existentielle
que
je dirigeais, en collaboration avec Roger Breuil, Henry Corbin, Rolan
467
sée étaient Karl Barth, Kierkegaard, et Heidegger
que
Corbin commençait à traduire. En ce qui concerne L’Ordre nouveau où j
468
premier de Hic et Nunc parut, Mounier a trouvé
que
j’y allais un peu fort. Nous avons échangé quelques lettres assez viv
469
issait pas. Pour marquer une différence, je dirai
que
l’on trouvait, chez Esprit plus de méfiance pour les réalités scienti
470
n quant à votre conception de l’Europe ? Je dirai
que
dans ces journaux, qui ne sont pas des mémoires et se tiennent à égal
471
ution d’une sensibilité européenne, beaucoup plus
que
des positions idéologiques. Cette sensibilité est assez fréquente en
472
sse, située à la croisée des chemins. C’est ainsi
que
, Suisse français, je me suis nourri de Goethe, de Novalis, et de Höld
473
uis nourri de Goethe, de Novalis, et de Hölderlin
que
les jeunes Français ne connaissaient pas. On peut d’ailleurs repérer
474
de faire partie de plusieurs clubs. Je considère
que
ma patrie est Neuchâtel, ma nation la Suisse, ma nation culturelle la
475
sible aux particularités d’un pays, d’une région,
qu’
il s’agisse du monde germanique ou de la France. Maintenir les contr
476
tension entre la personne qui se crée et l’époque
qu’
elle vit n’est-elle pas la caractéristique fondamentale de votre vie e
477
ment qui se retrouve à tous les niveaux. Je pense
qu’
il faut maintenir dans un individu l’exigence spécifique, singulière,
478
1932, je définissais la personne comme l’individu
que
sa vocation distingue de la masse et relie à la communauté. Maintenir
479
nce par brider sévèrement son imagination, obsédé
qu’
il est par la crainte que ses projets ne soient pas « sérieux », c’est
480
son imagination, obsédé qu’il est par la crainte
que
ses projets ne soient pas « sérieux », c’est-à-dire puissent paraître
481
latin, ce qui était utopie devient nécessité, ce
que
l’on qualifiait avec un sourire indulgent de Zukunftsmusik devient ur
482
être même est-il trop tard), et chacun d’affirmer
qu’
il l’avait toujours dit… Sans plus de précautions, et pour faire court
483
fois anciennes5 sur le plus actuel des sujets. 1.
Qu’
est-ce que l’Université ? À sa naissance, aux xiie et xiiie siècles,
484
nnes5 sur le plus actuel des sujets. 1. Qu’est-ce
que
l’Université ? À sa naissance, aux xiie et xiiie siècles, c’est une
485
d’un certain sens de la vie 2. Au sens du mot
que
je viens de définir, l’Université n’existe plus. Ce qu’on persiste à
486
viens de définir, l’Université n’existe plus. Ce
qu’
on persiste à décorer de ce nom n’est que la juxtaposition d’une quant
487
plus. Ce qu’on persiste à décorer de ce nom n’est
que
la juxtaposition d’une quantité variable d’écoles professionnelles, d
488
ou des pasteurs. Ces écoles n’ont plus en commun
que
leur location dans une même ville, leurs services administratifs et l
489
et de dire le Sens de la société. Il se pourrait
qu’
au nom du Sens, elle soit amenée à contester les finalités productivis
490
ui qui veut apprendre un métier pour en vivre n’a
que
faire de la contestation. Et celui qui entend contester la société n’
491
ion. Et celui qui entend contester la société n’a
que
faire d’une « étude des débouchés ». Cependant, avant de contester la
492
téresser des problèmes de l’autre. 7. Je propose
que
l’on traite ces problèmes par la méthode fédéraliste, dont je vais do
493
de décision aux finalités des différentes tâches
qu’
on se propose. 9. Le fédéralisme, au contraire du nationalisme canton
494
de chaque discipline par les autres (et c’est ce
qu’
on peut nommer : recherche interdisciplinaire). 12. Les dimensions opt
495
quand il s’agit d’exposer les recherches inédites
qu’
un maître est en train de faire et qui peuvent intéresser beaucoup d’é
496
ersité digne du nom. 16. Il ne faut pas redouter
qu’
une tension s’institue entre écoles professionnelles et Université. Ce
497
e entre écoles professionnelles et Université. Ce
qu’
il faut redouter, c’est la subordination de la recherche aux besoins d
498
même coup d’être une Université, et n’aurait plus
qu’
à disparaître. 17. Une Université digne du nom, dont le rôle serait d’
499
n pôle de création et de rayonnement culturel. Ce
que
ne peuvent être, bien évidemment, ces encombrants conglomérats d’écol
500
glomérats d’écoles professionnelles (ou facultés)
que
l’on s’obstine encore à nommer des universités. 18. Il ne faut pas dé
501
alisme cantonal, notamment) et ce qui fait croire
que
l’Université existe encore (routines, vanités, ignorance surtout, san
502
tour dans l’esprit du public : on croit bonnement
qu’
un auteur engagé est celui qui s’en est remis une fois pour toutes à l
503
ition occasionnelle face à l’événement historique
qu’
un écrivain est engagé — ou non. Dans le fait, dans le concret vécu, i
504
d’un côté et l’événement de l’autre, deux objets
qu’
on pourrait isoler, séparer ou rapprocher à volonté. Nul événement soc
505
ait exprimé, nommé, écrit, avant ou après la date
que
l’Histoire lui attribue — Histoire qui est le produit de l’écriture !
506
ont l’œuvre ne constitue une partie de la réalité
qu’
il croit décrire quand il l’écrit… ⁂ On ne peut donc parler que de dif
507
écrire quand il l’écrit… ⁂ On ne peut donc parler
que
de différents modes de relations entre l’œuvre et l’époque. Pour simp
508
ment : le ludion, le contestateur et le prophète,
que
certains nomment l’utopiste. 1. Le ludion réagit passivement à l’époq
509
t en formation, sans essayer d’agir sur eux, soit
qu’
il n’en ait aucune envie, soit qu’il désespère d’en avoir les moyens,
510
r sur eux, soit qu’il n’en ait aucune envie, soit
qu’
il désespère d’en avoir les moyens, ou nie que ces moyens puissent mêm
511
oit qu’il désespère d’en avoir les moyens, ou nie
que
ces moyens puissent même exister. La plupart des conteurs et romancie
512
lateur par l’angoisse du syndrome totalitaire tel
qu’
il se constituait alors dans l’inconscient des peuples. Entre ces deux
513
ficacité immédiate suffira. 3. Quant au prophète,
que
certains nomment l’utopiste, c’est toute la grande poésie d’Isaïe à l
514
arx et Mao. Le prophète sent l’époque (bien mieux
que
le ludion) dans la mesure où il la refuse (bien plus radicalement que
515
la mesure où il la refuse (bien plus radicalement
que
le contestateur) mais s’il la juge et la refuse, c’est au nom d’une v
516
la refuse, c’est au nom d’une vision meilleure —
qu’
il annonce, illustre, anticipe… Bien entendu — mais l’ai-je assez lais
517
dans chaque catégorie peut se reconnaître au fait
qu’
il participe peu ou prou des deux autres : reprenez mes exemples. In
518
rer ou restaurer une communauté Finalement, ce
que
la société peut attendre de l’écrivain confronté à sa crise et à l’év
519
nt une communauté. Cela comporte bien autre chose
que
de signer ou même d’écrire des manifestes en faveur des victimes d’un
520
donner réponse, dire la réalité du monde nouveau
que
la révolte obscurément postule, car si elle le concevait elle le susc
521
s de prophète, c’est autant dire de fondateur. Ce
que
l’écrivain doit au monde et à l’événement, c’est de les créer. Et ce
522
monde et à l’événement, c’est de les créer. Et ce
qu’
il faut attendre du meilleur écrivain, c’est qu’il fasse converger dan
523
e qu’il faut attendre du meilleur écrivain, c’est
qu’
il fasse converger dans son œuvre le sentiment baudelairien de son épo
524
trant d’Amérique après la guerre, j’avais compris
qu’
il était indispensable d’unir les Européens. Non seulement nous-mêmes,
525
-dire du genre de valeurs, d’équilibre, de mesure
que
représentait notre vieux continent. En août 1947 on est venu me deman
526
n. L’unité existe ou n’existe pas. L’union est ce
que
l’on peut bâtir. Non pas une uniformité mais un certain mode de conta
527
. J’ai donc créé le Centre européen de la culture
que
je dirige depuis près de vingt ans afin d’aider tous les mouvements q
528
ne Association des festivals de musique européens
que
je préside tout à fait par hasard. Nous avons coordonné les instituts
529
toire, de géographie, de langues. Je souhaiterais
que
tombent en désuétude les grands États-nations comme la France, l’Espa
530
le plan politique. Cette situation tient au fait
que
les États veulent garder leur souveraineté absolue, devenant ainsi eu
531
le pays en un certain nombre de régions. Je pense
qu’
on finira par se mettre d’accord assez vite pour la France sur une diz
532
s Paris. Notre idée de fédéralistes européens est
que
ces régions, définies surtout par l’économie, se définissent aussi pa
533
ce problème. L’union mondiale ne sera concevable
que
s’il existe une solide fédération européenne. Ce sera le point d’accr
534
itueront de proche en proche un tissu plus solide
que
leurs liens avec les États-nations ; ceux-ci peu à peu tomberont en d
535
tie de la solution des problèmes européens, c’est
que
l’unité du genre humain est une invention des Européens. C’est l’Euro
536
quences des options philosophiques et religieuses
que
l’on croit justes. al. Rougemont Denis de, « [Entretien] Vers l’Eu
537
ttéraire. Le programme est composé de telle façon
que
tous les grands problèmes d’actualité seront traités par d’éminents s
538
Jean Paulhan (19-20 octobre 1968)an Un jour
que
je montai chez Jean Paulhan, ce devait être en 1937, 1938, je rejoign
539
it en s’arrêtant sur le dernier palier : « Est-ce
que
vous sentez toujours votre cœur battre au moment de passer cette port
540
ature dont il nous paraissait tout à fait évident
que
Paulhan détenait les clefs et les mesures. (Mais c’était justement ce
541
clefs et les mesures. (Mais c’était justement ce
qu’
il cherchait, comme nous l’apprirent beaucoup plus tard les Fleurs de
542
les Fleurs de Tarbes !) Il n’avait encore publié
que
deux ou trois petits livres un peu trop parfaits par l’écriture et la
543
ul notre air de parenté, si différents ou opposés
que
nous fussions. C’est le seul directeur de revue littéraire qui ait ja
544
ttéraire qui ait jamais montré dans cet emploi ce
qu’
il faut appeler du génie. Et le plus libéral qu’on puisse imaginer ! L
545
e qu’il faut appeler du génie. Et le plus libéral
qu’
on puisse imaginer ! La presse, depuis vingt ans, s’obstine à le trait
546
ce, attentif à ne rien nous imposer qui ne fût ce
qu’
il avait senti, bien avant nous, qui pourrait être nous. Bien trop cur
547
curieux pour être autoritaire, il n’avait de goût
que
pour nos singularités (que d’autres nommeraient vocations) et il les
548
re, il n’avait de goût que pour nos singularités (
que
d’autres nommeraient vocations) et il les respectait scrupuleusement,
549
preuve, pas toujours suffisante mais nécessaire,
qu’
on avait quelques chances d’exister. J’ai retrouvé la première lettre
550
ances d’exister. J’ai retrouvé la première lettre
qu’
il m’ait écrite, en 1926. M’ayant lu dans la Revue de Genève , il me
551
comme il est grand ! C’est le plus grand écrivain
que
j’aie jamais connu : 1 m 90 je pense, larges épaules, grande tête rec
552
nce, à peine passé la porte : « Mais il me semble
que
depuis des années je vous supplie de nous donner des textes ! » Me vo
553
dis : « Pourquoi ne pas les assumer ? » (Bien sûr
qu’
à cela, du moins, il n’a jamais songé.) Je l’ai surpris, notre dialogu
554
uivra dans plusieurs de mes livres, d’une manière
que
je suis seul à connaître. Je m’arrangerai pour y faire figurer les qu
555
e m’arrangerai pour y faire figurer les questions
qu’
il me soumettra (c’est sa manière de critiquer) après lecture du manus
556
ains a été composée pour prévenir les objections
qu’
il avait faites à la seconde, dont je croyais d’abord qu’elle pouvait
557
vait faites à la seconde, dont je croyais d’abord
qu’
elle pouvait se suffire. Longtemps, Jean P. (comme il signait ses bref
558
à propos de mes Lettres sur la bombe atomique ,
que
j’écris « un œil sur l’Éternel et l’autre sur Jean Paulhan ». Ce qui
559
m’engage à rapporter ces petits souvenirs, c’est
qu’
ils sont personnels… à combien d’entre nous, jeunes auteurs de l’entre
560
re nous, jeunes auteurs de l’entre-deux-guerres !
Que
dirai-je de plus aujourd’hui ? J’aurais aimé pouvoir parler de l’écri
561
nt du grand patron en maïeutique de l’expression.
Qu’
on me permette au moins de recopier cette page des Fleurs de Tarbes où
562
our un général. Paul Valéry attend des Lettres ce
qu’
un philosophe n’ose pas toujours espérer de la philosophie : il veut c
563
espérer de la philosophie : il veut connaître ce
que
peut l’homme. Et Gide, ce qu’il est. Il suffirait à Claudel de reform
564
l veut connaître ce que peut l’homme. Et Gide, ce
qu’
il est. Il suffirait à Claudel de reformer sur les débris d’une sociét
565
débris d’une société laïque le monde sacral, tel
que
l’a connu le Moyen Âge. Breton cependant exige le triomphe d’une éthi
566
» Il semble à Maurras suffisant, mais nécessaire,
que
l’écrivain maintienne au-dessus de l’eau toute une civilisation qui s
567
en d’Alerte : la poésie lui semble chose si grave
qu’
il a pris le parti de se taire. Je ne sais s’il est vrai que les homme
568
is le parti de se taire. Je ne sais s’il est vrai
que
les hommes de lettres se soient contentés jadis de distraire d’honnêt
569
e enfin révélé. Il n’est pas une joie de l’esprit
que
les Lettres ne leur doivent. Et qui pourrait tolérer, se demande un j
570
ture n’autorise pas trop d’optimisme. Il se peut
que
les hommes soient devenus plus exigeants. Il se peut aussi que les Le
571
s soient devenus plus exigeants. Il se peut aussi
que
les Lettres soient devenues moins donnantes. Tout se passe comme s’il
572
son œuvre, justement, qui nous en restitue mieux
que
l’idée : la présence fraîche et vivace. 6. Le communiqué de l’AFP a
573
êtres dont la détresse est d’autant plus cruelle
qu’
elle est contenue sous des dehors trop polis. Une fois fermé le livre,
574
et la justesse de l’analyse pour ne plus évoquer
que
des visions où se condense le sentiment du récit. Dans Le Cœur gros u
575
qui explique leur éclipse injuste et provisoire,
que
les deux ou trois autres carrières qu’il a connues avec de si constan
576
rovisoire, que les deux ou trois autres carrières
qu’
il a connues avec de si constants succès pour ceux qui savent — dans l
577
fait presque toujours de la littérature, si bonne
qu’
elle soit. Mais l’aventure militaire de Barbey est singulière. Assurer
578
scrétion souriante et merveilleusement attentive.
Que
pouvait-on refuser à quelqu’un que l’on sentait si naturellement prêt
579
ent attentive. Que pouvait-on refuser à quelqu’un
que
l’on sentait si naturellement prêt à s’oublier lui-même ? C’est sans
580
à la très amicale et délicate insistance de Berne
que
je dois d’avoir écrit mes deux livres sur la Suisseap. « Romancier au
581
efficacité. C’est par des hommes de cette qualité
que
vaut la Suisse. 7. « Bernard Barbey : La Maladère (Grasset, Paris)
582
ames et Messieurs, Je pense, avec Robert Schuman,
qu’
il est possible d’unir nos pays pour cette raison littéralement fondam
583
pays pour cette raison littéralement fondamentale
qu’
une unité de base existe, sur laquelle fonder cette union. Il s’agit d
584
ture, de laquelle participent tous les Européens,
qu’
ils soient d’ailleurs « cultivés » ou non, conscients ou non de ce qu’
585
eurs « cultivés » ou non, conscients ou non de ce
qu’
ils doivent, en fait, à la culture. Unité non pas homogène et qui ne r
586
stoire, Héraclite écrivait cette phrase décisive,
qu’
il faut tenir pour la formule même de l’unité européenne : « Ce qui s’
587
s par Marx, puis par Lénine avec les conséquences
que
l’on sait, jusque dans l’existence quotidienne de 700 millions de Chi
588
pales de la poésie amoureuse, donc de l’amour tel
qu’
on le parle et qu’on croit le sentir en Occident ; l’apport slave au x
589
amoureuse, donc de l’amour tel qu’on le parle et
qu’
on croit le sentir en Occident ; l’apport slave au xixe ; l’art afric
590
er, si peu que ce soit, est si cher aux Européens
qu’
il les porte à exagérer d’une manière tout à fait extravagante l’impor
591
l’importance de ce qui les distingue. C’est ainsi
qu’
ils en viennent à penser sincèrement qu’ils ne pourront jamais s’unir,
592
est ainsi qu’ils en viennent à penser sincèrement
qu’
ils ne pourront jamais s’unir, même s’il le faut, du fait qu’ils n’ont
593
ourront jamais s’unir, même s’il le faut, du fait
qu’
ils n’ont en somme rien de commun ! Un jour, tandis que je présidais u
594
comme Européen dans la mesure précise où il doute
qu’
il le soit, et prétend au contraire s’identifier soit avec l’homme d’u
595
seule nation de cette Europe dont il révèle ainsi
qu’
il fait partie, par le seul fait qu’il le conteste ? On ne changera p
596
révèle ainsi qu’il fait partie, par le seul fait
qu’
il le conteste ? On ne changera pas cela, ce ne serait plus l’Europe.
597
il faut en prendre son parti, et c’est là-dessus
qu’
il faut bâtir notre union, si l’on veut qu’elle mérite le nom d’Europe
598
dessus qu’il faut bâtir notre union, si l’on veut
qu’
elle mérite le nom d’Europe. Si l’on me demande maintenant comment on
599
nitaire et si hautement diversifiée, je répondrai
que
la solution se trouve dans les termes mêmes du problème ainsi formulé
600
Je ne vois pas d’autre réponse imaginable au défi
que
l’Histoire nous pose dans les termes les plus précis et sans échappat
601
nion ne saurait être acquise au prix des libertés
qu’
elle est censée servir. Rien de plus limpide que la déduction qui fait
602
s qu’elle est censée servir. Rien de plus limpide
que
la déduction qui fait toute ma thèse : étant donné que la base de not
603
a déduction qui fait toute ma thèse : étant donné
que
la base de notre unité est une culture pluraliste, on ne peut fonder
604
ne culture pluraliste, on ne peut fonder sur elle
qu’
une union fédérale. Ce qui paraît beaucoup plus difficile à expliquer,
605
paraît beaucoup plus difficile à expliquer, c’est
que
rien n’ait encore été fait dans ce sens, depuis près de vingt-cinq an
606
fait dans ce sens, depuis près de vingt-cinq ans
qu’
on nous déclare, avec Churchill — dans son fameux discours de Zurich —
607
Churchill — dans son fameux discours de Zurich —
qu’
il n’y a pas une minute à perdre ! Quel est l’obstacle apparemment ins
608
’obstacle apparemment insurmontable à cette union
que
tout indique, que tout exige, que tout le monde admet qu’il faut fair
609
ent insurmontable à cette union que tout indique,
que
tout exige, que tout le monde admet qu’il faut faire — et que pourtan
610
e à cette union que tout indique, que tout exige,
que
tout le monde admet qu’il faut faire — et que pourtant personne ne fa
611
indique, que tout exige, que tout le monde admet
qu’
il faut faire — et que pourtant personne ne fait ? Eh bien, chacun le
612
ge, que tout le monde admet qu’il faut faire — et
que
pourtant personne ne fait ? Eh bien, chacun le sait, rien n’est moins
613
’Europe (donc à toute union fédérale) n’est autre
que
l’État-nation, tel que Napoléon en a posé le modèle, intégralement ce
614
nion fédérale) n’est autre que l’État-nation, tel
que
Napoléon en a posé le modèle, intégralement centralisé en vue de la g
615
t centralisé en vue de la guerre. C’est ce modèle
que
tous les peuples de l’Europe, grands et petits, ont imité l’un après
616
t par le tiers-monde, mal décolonisé à cet égard…
Qu’
est-ce en somme qu’instituer un État-nation ? C’est soumettre toute un
617
e, mal décolonisé à cet égard… Qu’est-ce en somme
qu’
instituer un État-nation ? C’est soumettre toute une nation aux pouvoi
618
n continentale). À l’intérieur de ses frontières,
qu’
il déclare naturelles contre toute évidence, l’État-nation n’admet auc
619
veraineté absolues aussi peu défendables en droit
qu’
elles deviennent illusoires en fait au xxe siècle. Rien, donc, de plu
620
espèce d’union tant soit peu sérieuse ou sincère,
que
cet État-nation qui, d’autre part, se révèle incapable de répondre au
621
ion civique réelle ; et sans correspondance autre
qu’
accidentelle avec aucun espace économique défini par la nature des cho
622
sur la base de cet obstacle radical à toute union
que
l’on s’efforce depuis vingt-cinq ans d’unir l’Europe ! Voilà qui expl
623
: il fallait se battre pour survivre. Aujourd’hui
que
le nécessaire est assuré, on se bat pour le contrôle de zones d’influ
624
e contrôle de zones d’influence plus idéologiques
que
commerciales (voir le Vietnam) et l’on travaille pour le profit, qui
625
érils ! Nous voici contraints de nous demander ce
que
nous attendons de notre vie et de la société, ce que nous voulons rée
626
nous attendons de notre vie et de la société, ce
que
nous voulons réellement, principalement, et contraints de tirer des p
627
mais qui serait très peu européenne. Sans compter
qu’
un super-État-nation ne pourrait être imposé à tous nos peuples qu’à l
628
nation ne pourrait être imposé à tous nos peuples
qu’
à la faveur d’une guerre générale — selon la loi de l’État-nation dès
629
s communautés (la production industrielle n’étant
qu’
un des moyens de ces libertés), alors il faut reconnaître que l’État-n
630
oyens de ces libertés), alors il faut reconnaître
que
l’État-nation n’est pas seulement un modèle périmé, mais qu’il est en
631
nation n’est pas seulement un modèle périmé, mais
qu’
il est en fait aujourd’hui radicalement incompatible avec les fins de
632
ens. On ne manquera pas de m’objecter en ce point
que
la politique a toujours eu pour fin réelle la puissance ; et je crois
633
e ; et je crois bien que toutes les civilisations
que
nous connaissons ont choisi la puissance comme seul but réaliste de l
634
t simple captatio démagogique. Mais je vois aussi
que
seuls, des Européens, rares mais exemplaires, ont osé proclamer, d’Ar
635
ristote à Rousseau et de William Penn à Proudhon,
que
les libertés personnelles et les communautés autonomes valent mieux q
636
nnelles et les communautés autonomes valent mieux
que
la puissance collective. L’Europe unie sera seule capable de réaliser
637
réaliser leur vision. On me dira peut-être aussi
que
je radicalise indûment l’antithèse État-nation / fédération, ramenée
638
comme finalités de l’union. Mais je ne crois pas
qu’
il y ait un tiers parti tenable. Je ne crois pas à cette « imposante c
639
ne crois pas à cette « imposante confédération »
qu’
évoquait le général de Gaulle, et qui serait formée d’États-nations co
640
sont encore efficaces, il est vrai, pour gêner ce
qu’
il faudrait aider : les échanges culturels, les mouvements de personne
641
telligibles. Je ne sais si les problèmes profonds
que
pose leur balance commerciale (laquelle ne saurait être positive, me
642
qui ne correspondent à rien d’économique. Mais ce
que
je sais de science certaine, c’est que les États-nations n’existent p
643
e. Mais ce que je sais de science certaine, c’est
que
les États-nations n’existent pas dans l’histoire de la culture, et qu
644
n’existent pas dans l’histoire de la culture, et
que
les « cheminements de l’esprit » dont parlait Robert Schuman traverse
645
nales », en dépit des manuels scolaires, il n’y a
que
des divisions tout arbitraires opérées dans l’ensemble vivant de la c
646
ivant de la culture européenne. Et les diversités
que
nous devons respecter ne sont pas celles de ces États-nations nés d’h
647
és par l’idée de « se faire respecter », oublient
qu’
ils n’y arriveraient qu’en se rendant utiles. Ils exigent, depuis Loui
648
ire respecter », oublient qu’ils n’y arriveraient
qu’
en se rendant utiles. Ils exigent, depuis Louis XIV, que l’on s’inclin
649
se rendant utiles. Ils exigent, depuis Louis XIV,
que
l’on s’incline devant la « majesté de l’État ». Mais non ! L’État n’e
650
». Mais non ! L’État n’est pas un dieu, ce n’est
qu’
un appareil plus ou moins efficace, qui doit être mis au service des c
651
its sacrés de vos États-nations ! Vous savez bien
que
vous ne pourrez pas unir l’Europe en proclamant votre attachement aux
652
uvertement ? Tous les sondages d’opinion montrent
qu’
on vous suivrait, si vous osiez marcher. Je propose la convocation d’u
653
autres fédérations continentales. Et vous noterez
que
je ne parle pas de relations ou d’affaires étrangères : c’est un mot
654
relations ou d’affaires étrangères : c’est un mot
qu’
il nous faut bannir du vocabulaire politique dans une Europe fédérale,
655
imera l’unité millénaire de sa culture. Dira-t-on
que
ce programme est révolutionnaire ? Il l’est, bien sûr : on ne fera pa
656
cinq ans. Mais il l’est moins parce qu’il demande
qu’
on dépasse les États-nations que parce qu’il pose une hiérarchie nouve
657
rce qu’il demande qu’on dépasse les États-nations
que
parce qu’il pose une hiérarchie nouvelle des finalités politiques. Do
658
ivités communautaires et personnelles. Si sérieux
que
soient les problèmes de prix du lait, du blé ou du vin, il est clair
659
s de prix du lait, du blé ou du vin, il est clair
que
l’Europe des marchandages entre économies étatiques ne peut pas entra
660
transcendant, c’est un sens de la vie, maintenant
que
la guerre n’est plus leur exutoire, l’alibi des raisons de vivre inex
661
ut en offrir le modèle. Si l’on me dit maintenant
que
c’est une utopie que de vouloir dépasser l’État-nation, je réponds qu
662
e. Si l’on me dit maintenant que c’est une utopie
que
de vouloir dépasser l’État-nation, je réponds que c’est au contraire
663
que de vouloir dépasser l’État-nation, je réponds
que
c’est au contraire la grande tâche politique de notre temps. Précison
664
peau suivant : « Nous publions la fin du discours
que
prononça Denis de Rougemont le 15 avril en recevant le prix Robert Sc
665
Une réflexion sur le mode de vie plutôt
que
sur le niveau de vie (2 juin 1970)av aw Les Suisses sont sans dout
666
x depuis des siècles en plus grand nombre relatif
que
partout ailleurs, touristes, convalescents, réfugiés politiques attir
667
à eux et les renvoyer au plus vite. Il semblerait
que
tout le monde « gagne » à ce jeu : l’industrie qui y trouve le moyen
668
ce qui précède. De quoi se plaint-on ? C’est ici
qu’
interviennent les deux questions que vous avez bien voulu me poser :
669
n ? C’est ici qu’interviennent les deux questions
que
vous avez bien voulu me poser : — Dans une Europe fédérée telle que
670
voulu me poser : — Dans une Europe fédérée telle
que
vous la concevez, chaque État peut-il conserver son intégrité spiritu
671
e en Suisse ? Permettez-moi de confesser d’abord
que
le problème qui me préoccupe est beaucoup moins celui du oui ou du no
672
occupe est beaucoup moins celui du oui ou du non,
que
celui de la qualité des arguments invoqués de part et d’autre, et des
673
uments invoqués de part et d’autre, et des suites
qu’
entraîneront les attitudes réelles de ceux qui les invoquent. C’est da
674
de ceux qui les invoquent. C’est dans cet esprit
que
je vais esquisser une réponse. Le beurre et l’argent du beurre I
675
ls nous disent : « À l’heure où il n’est question
que
de s’ouvrir à l’Europe, pourquoi nous fermer devant les travailleurs
676
le « l’économie suisse » ne pourrait « résister »
que
grâce à l’appoint des travailleurs étrangers, cet argument se détruit
677
ulement importer autant de travailleurs étrangers
qu’
il en faut pour que nos exportations continuent à croître, cela revien
678
la concurrence entre États-nations. (Sans compter
que
tous les États-nations ne peuvent pas avoir en même temps une balance
679
à l’Assemblée nationale. On constate au contraire
que
les travailleurs ne se déplacent en général que s’ils y sont fortemen
680
e que les travailleurs ne se déplacent en général
que
s’ils y sont fortement incités, s’ils sont en quelque sorte recrutés,
681
vraient avant tout les routes du gain maximal, où
qu’
elles aillent, est fausse et irréelle, quoique matérialiste. La plupar
682
hommes suivent leurs coutumes et leurs rêves plus
que
l’argent. (J’ai là-dessus quelques statistiques.) Quelle est la pi
683
uelle est la pire menace ? II. Quant au danger
que
la présence sur notre sol d’un étranger contre cinq ou six Suisses re
684
cité », comme vous osez l’écrire ! — il est clair
que
ce n’est pas sérieux. L’argument ne vaut rien, mais en cache un meill
685
s soldats gardent aux frontières un « sol sacré »
que
les usines et les traxs derrière leur dos profanent, défoncent et sté
686
modifie radicalement le cadre de nos vies, l’air
que
nous respirons, et à la longue nos sensibilités. Si notre industrie s
687
et ne peut être atteint par ce choix. La question
qu’
a soulevée M. James Schwarzenbach dépasse très largement tout ce qui p
688
’initiative. Le fabuleux brain storming collectif
qu’
a déclenché le député zurichois sera des plus utiles aux Suisses s’il
689
nt ? — Le « niveau de vie » est-il plus important
que
le mode de vie ? — La philanthropie qu’invoquent à juste titre les ad
690
important que le mode de vie ? — La philanthropie
qu’
invoquent à juste titre les adversaires de l’initiative (« on ne peut
691
ence des travailleurs étrangers nous coûtait plus
qu’
elle ne rapporte ? — La pire menace contre notre mode de vie suisse vi
692
nnement au nom de valeurs bien plus matérialistes
que
celles des marxistes redoutés ou des Américains enviés ? av. Roug
693
nis de, « Une réflexion sur le mode de vie plutôt
que
sur le niveau de vie », Gazette de Lausanne, Lausanne, 2 juin 1970, p
694
re les réalités du monde naissant. Plus chevalier
que
militaire, plus efficace à lui tout seul par la passion et le mépris
695
icace à lui tout seul par la passion et le mépris
que
tous les autres par le calcul et la flatterie, Charles de Gaulle aura
696
destinée éminente et exceptionnelle… S’il advient
que
la médiocrité marque, pourtant, ses faits et gestes, [c’est] imputabl
697
ve. Il l’a ramené au mari légitime, à ce roi Marc
que
figurait le Pays légal, la République. Puis il a dû s’éloigner d’elle
698
, quand il était le plus fort — Tristan plus fort
que
le roi Marc —, n’a-t-il pas déposé une épée symbolique ? » J’écrivais
699
e allégué : l’instauration en France des régions,
qu’
il proposa solennellement, et à quoi il choisit de lier son sort. Un s
700
minements de la conscience européenne, elle-même,
que
vous mettez en lumière. Je vous félicite d’avoir entrepris et mené à
701
finir le régime général d’union dans la diversité
qu’
il admirait dans notre Suisse. Quant à la participation qu’il demandai
702
irait dans notre Suisse. Quant à la participation
qu’
il demandait, c’est le mot clé du fédéralisme. Merveilleux compromis e
703
rons et le Pays légal, il ne veut devant sa tombe
que
la France seule, une fois de plus symbolisée par son armée… ax. Ro
704
utre ? Nous avons demandé à Denis de Rougemont ce
qu’
il pensait de l’homme d’État, après que Jacques Mercanton, la semaine
705
’étudier les rapports du Général avec la culture,
qu’
il n’a guère encouragée. »
706
e la clé de la caisse. Nulle part peut-être mieux
que
dans ses « jeux » n’a régné l’essentiel terrorisme qu’entretenait le
707
ans ses « jeux » n’a régné l’essentiel terrorisme
qu’
entretenait le surréalisme. André Breton se trouve ainsi, bien malgré
708
crains, certains de ceux qui prétendent n’écrire
que
pour le salut de leurs lecteurs. En fait, on commence à écrire vers 1
709
est de n’y pas croire, sinon ce serait la preuve
qu’
on a perdu le contact avec le mystère brut, la réalité. Nietzsche a di
710
temps sont peu à peu tellement imbibées de raison
que
l’origine qu’elles tirent de la déraison devient invraisemblable. »
711
à peu tellement imbibées de raison que l’origine
qu’
elles tirent de la déraison devient invraisemblable. » Hypocrites aut
712
uts dans l’écriture. Écrire est une démangeaison
que
l’on calme en grattant du papier. C’est à peu près aussi irrésistible
713
peu près aussi irrésistible, aussi peu rationnel
que
l’élan du désir, ou de la prière, et cela tient des deux, probablemen
714
pour devenir aussi admirable aux yeux des autres
qu’
il est admiré par vous-même, vous essayez d’écrire comme lui des vers,
715
ion, esprit d’imitation naïve ou vaniteuse (selon
que
l’on sera bon ou mauvais auteur). Et c’est beaucoup plus tard qu’on s
716
n ou mauvais auteur). Et c’est beaucoup plus tard
qu’
on s’inventera de belles et bonnes raisons d’écrire pour exposer, pour
717
e définit par rapport à notre progrès. ⁂ Ce n’est
qu’
au début d’une carrière que l’on écrit par pure envie d’écrire. Et je
718
re progrès. ⁂ Ce n’est qu’au début d’une carrière
que
l’on écrit par pure envie d’écrire. Et je ne dis pas que ce besoin à
719
n écrit par pure envie d’écrire. Et je ne dis pas
que
ce besoin à l’état brut ne continue d’agir dans mes écrits, mais il n
720
s, mais il n’est plus seul discernable, tout mêlé
qu’
il se trouve à des courants violents chargés de matériaux littéraireme
721
ons, mais d’un discours, d’un livre, d’un article
qu’
il s’agit de donner à date fixe — et de tout ce qu’il faut bien ajoute
722
u’il s’agit de donner à date fixe — et de tout ce
qu’
il faut bien ajouter à quelque ouvrage obscurément jailli, pour l’ache
723
u bout du compte. Un sens qui ne peut être défini
que
par le tout — que pas un scientifique n’appréhende et par suite ne sa
724
Un sens qui ne peut être défini que par le tout —
que
pas un scientifique n’appréhende et par suite ne saurait nier, et qui
725
s l’époque, je me l’écrie, et je lui crie d’abord
qu’
elle devrait être une autre pour que je n’y sois plus seulement un moi
726
n’y sois plus seulement un moi contre elle, mais
que
[je] m’y perde et m’y donne. Quand je saurai pourquoi, j’aurai fini d
727
ît-il, à celui de ne pas se mouiller. Nous savons
que
la Suisse, c’est autre chose. Mais quoi ? Combien de nos compatriotes
728
la Gazette demandait dernièrement s’il pensait
que
l’on devait faire l’Europe sur le modèle de la Suisse, et qui réponda
729
pays une bonne solution. Ce qui ne veut pas dire
qu’
elle soit généralisable. » Réponse plutôt comique si l’on s’avise que
730
lisable. » Réponse plutôt comique si l’on s’avise
que
le fédéralisme n’a jamais été ni pu être une « solution » aux problèm
731
aux problèmes de la Suisse, pour la simple raison
qu’
il l’a faite et que seul il la définit en tant que Suisse. Il n’y a pa
732
Suisse, pour la simple raison qu’il l’a faite et
que
seul il la définit en tant que Suisse. Il n’y a pas eu la Suisse d’ab
733
rd, puis le fédéralisme appliqué à ce pays plutôt
qu’
à d’autres, mais l’inverse. Sans unité géographique, ethnique, linguis
734
e n’est rien hors du fédéralisme. Elle n’est rien
qu’
un régime d’union. Dans leur très grande majorité — 98 % exactement —
735
amais adhéré au Pacte dit du Grütli, qui ne porte
que
trois signatures. Mais alors, si nous fêtons aujourd’hui le 680e anni
736
titution, car ces deux choses ne datent chez nous
que
de 1848. Ce que nous célébrons, c’est en fait une idée, qui est l’ess
737
s deux choses ne datent chez nous que de 1848. Ce
que
nous célébrons, c’est en fait une idée, qui est l’essence de la Suiss
738
stence : l’idée fédéraliste et la formule d’union
qu’
illustre le pacte en latin conclu par trois « communes forestières » c
739
ionaux du continent, tous plus souverains les uns
que
les autres. La Suisse est une authentique fédération dans la mesure o
740
lations étrangères. Voilà bien le régime original
que
je souhaite voir copier au niveau de l’Europe. La réalité propremen
741
is protestant, de langue française, au même titre
qu’
un Schwyzois catholique de dialecte allemand, qu’un yodleur des Rhodes
742
qu’un Schwyzois catholique de dialecte allemand,
qu’
un yodleur des Rhodes-Intérieures, qu’un Tessinois ou qu’un Grison rom
743
e allemand, qu’un yodleur des Rhodes-Intérieures,
qu’
un Tessinois ou qu’un Grison romantsch, avec lesquels je puis très bie
744
odleur des Rhodes-Intérieures, qu’un Tessinois ou
qu’
un Grison romantsch, avec lesquels je puis très bien n’avoir rien en c
745
lesquels je puis très bien n’avoir rien en commun
que
cette adhésion même. Telle étant la réalité proprement suisse : une i
746
’Europe. Autant il devient clair aux yeux de tous
que
la formule de l’État-nation napoléonien s’oppose radicalement à toute
747
oppose radicalement à toute union de l’Europe, et
que
sa généralisation ne conduirait qu’à la guerre, autant il apparaît qu
748
l’Europe, et que sa généralisation ne conduirait
qu’
à la guerre, autant il apparaît que la formule suisse, c’est-à-dire le
749
ne conduirait qu’à la guerre, autant il apparaît
que
la formule suisse, c’est-à-dire le fédéralisme, est au contraire la s
750
ne va-t-elle pas s’y perdre ? — C’est oublier ce
qu’
est la Suisse. Dans une Europe unie, loin de se perdre, elle se retrou
751
rolongée dans l’espace et le temps, au-delà de ce
qu’
elle est aujourd’hui, qui est tellement au-delà de ce qu’elle fut au G
752
est aujourd’hui, qui est tellement au-delà de ce
qu’
elle fut au Grütli, berceau mythique. Une idée se perd-elle en se géné
753
ions toujours plus nombreuses ? Ceux qui ont peur
que
la Suisse se perde dans une Europe fédéraliste montrent par là qu’ils
754
perde dans une Europe fédéraliste montrent par là
qu’
ils ne savent pas ce qu’est la Suisse. Écoutons plutôt un grand Zurich
755
déraliste montrent par là qu’ils ne savent pas ce
qu’
est la Suisse. Écoutons plutôt un grand Zurichois du siècle passé, le
756
son d’être, ne serait-ce pas le sort le plus beau
que
nous puissions souhaiter en tant que Suisse ? Dans l’Europe des régio
757
er en tant que Suisse ? Dans l’Europe des régions
que
j’appelle et prépare, dans l’Europe des foyers rayonnants sans fronti
758
e désirons vraiment, si nous le voulons. C’est ce
qu’
il reste à savoir, et c’est ce qui nous inquiète. S’il n’y a plus de f
759
in de se demander, au minimum une fois par an, ce
que
nous faisons là, et pourquoi nous restons ensemble. Personne ne peut
760
ont alors les vrais Suisses. « Et s’il n’en reste
qu’
un… », disait Victor Hugo, reprenant un vers de Corneille. 8. Il s’
761
niversaire un éloge dont tout me faisait craindre
qu’
il fût de nature — si plus tôt exprimé, sans précaution — à desservir
762
r la hauteur, affable mais non sans malice, et ce
qu’
il faut d’arbitraire dans les jugements, lucide avec plus de mélancoli
763
ans les jugements, lucide avec plus de mélancolie
que
de cynisme, plus de sensibilité aux êtres qu’aux idées et aux situati
764
lie que de cynisme, plus de sensibilité aux êtres
qu’
aux idées et aux situations qu’aux systèmes, d’où son sens politique i
765
sibilité aux êtres qu’aux idées et aux situations
qu’
aux systèmes, d’où son sens politique intuitif et ses vues parfois pro
766
a dimension qui manquait le plus à ce pays, celle
que
j’aime à nommer la dimension princière. bb. Rougemont Denis de, «
767
as parler des autorités scolaires, n’ont apprécié
qu’
à demi la réédition des Méfaits, soit qu’ils se sentent attaqués dans
768
apprécié qu’à demi la réédition des Méfaits, soit
qu’
ils se sentent attaqués dans leur conscience professionnelle, soit qu’
769
taqués dans leur conscience professionnelle, soit
qu’
ils jugent, eux, que votre texte a vieilli. Je le regrette infiniment,
770
science professionnelle, soit qu’ils jugent, eux,
que
votre texte a vieilli. Je le regrette infiniment, car j’ai beaucoup d
771
scolaire, dont les instituteurs sont victimes, et
qu’
ils perpétuent malgré eux. Ils n’en sont pas responsables. J’ai d’aill
772
voir ce qui se faisait ailleurs. Et j’ai constaté
qu’
ailleurs, notamment en France, c’était comme en Suisse. Et même pire.
773
es lois de la nature. Elles n’arrêtent rien de ce
qu’
il faudrait arrêter : les nuages, les tempêtes, l’eau polluée ; et ell
774
prisonnière des schémas nationaux. Souvenez-vous
que
le général de Gaulle aimait à répéter que l’Europe va de Gibraltar à
775
ez-vous que le général de Gaulle aimait à répéter
que
l’Europe va de Gibraltar à l’Oural. Cette bourde m’a toujours étonné.
776
in de l’industrie lourde de l’URSS. Exactement ce
qu’
est la Ruhr pour l’Allemagne. Côté « asiatique » ou côté « européen »,
777
l’Oural-frontière est si absurde, et si répandue,
que
j’ai mis deux de mes étudiants sur le problème. Ils ont trouvé que le
778
de mes étudiants sur le problème. Ils ont trouvé
que
les manuels d’histoire et de géographie des années 1900 à 1940 — l’ép
779
ent au pouvoir en Europe, incapables de saisir ce
que
pourrait être une fédération. Or c’est la seule formule possible. En
780
formule possible. En France, les rares personnes
que
je n’aie pas trouvées inaccessibles à l’idée du fédéralisme appartien
781
et cherchez sous « fédéralisme » : vous trouverez
que
c’est un système de sauvages, ou bien une utopie attribuée aux girond
782
pas l’école sans changer l’État. » Est-ce à dire
que
l’État doit changer l’école, ou que l’école doit former ceux qui chan
783
Est-ce à dire que l’État doit changer l’école, ou
que
l’école doit former ceux qui changeront l’État ? L’un et l’autre, et
784
e l’œuf… Il faut agir aux deux niveaux à la fois.
Que
faire au niveau des États ? Dans toutes les discussions que j’ai avec
785
au niveau des États ? Dans toutes les discussions
que
j’ai avec les officiels, on me répète : « Tout ce que vous dites là e
786
j’ai avec les officiels, on me répète : « Tout ce
que
vous dites là est bien beau, mais on voit que vous n’avez pas affaire
787
ce que vous dites là est bien beau, mais on voit
que
vous n’avez pas affaire à la réalité. » Or que font-ils ? Ils expédie
788
it que vous n’avez pas affaire à la réalité. » Or
que
font-ils ? Ils expédient les affaires courantes. Étudier l’introducti
789
vent jamais faire face à ce problème. Il faudrait
qu’
ils puissent s’arrêter, sortir de l’urgent et du quotidien, pour pouvo
790
ritable révolution. L’impossible révolution
Qu’
entendez-vous par « révolution » ? Mais… ce qu’on entend généralement
791
Qu’entendez-vous par « révolution » ? Mais… ce
qu’
on entend généralement par ce terme : une mutation, un changement brus
792
s européennes donnera-t-elle lieu à la révolution
que
vous souhaitez. Mais on en distingue déjà deux développements possibl
793
ividualiser l’enseignement au maximum, de manière
que
chaque élève puisse travailler à son rythme propre, d’autre part on c
794
il faudra bien que l’élève le plus rapide attende
que
le plus lent de son groupe le rejoigne. Comment résoudre cette altern
795
t qui nous a déjà valu deux guerres mondiales. Ce
qu’
Illich appelle en termes marxistes « aliénation » des élèves, je préfè
796
Ça consiste à laisser à chacun autant d’autonomie
que
possible, c’est-à-dire le droit de différer. Ceci pour le premier ter
797
f, mais bien une complémentarité. Je ne crois pas
que
des élèves doués puissent avoir à souffrir de travailler avec des cam
798
apprendraient d’autant mieux. On ne sait vraiment
que
ce qu’on a dû enseigner. Je l’observe tous les jours sur moi-même à l
799
raient d’autant mieux. On ne sait vraiment que ce
qu’
on a dû enseigner. Je l’observe tous les jours sur moi-même à l’Univer
800
versité : je ne creuse jamais si bien un problème
que
quand je dois le présenter à mes étudiants. « Illich est trop rous
801
us parlez dans les Méfaits 10, et dont vous dites
qu’
elle ressemble à ce que demande Illich ? Une école comme celle des ami
802
its 10, et dont vous dites qu’elle ressemble à ce
que
demande Illich ? Une école comme celle des amish, oui. Quant à Illich
803
me naît bon, et l’école le corrompt. Or je crains
que
, livrés à eux-mêmes, les enfants ne tombent en proie à toutes les mod
804
ndividualisation et travail collectif. À supposer
que
tout le monde admette que l’un et l’autre sont nécessaires, on peut i
805
l collectif. À supposer que tout le monde admette
que
l’un et l’autre sont nécessaires, on peut imaginer, grosso modo, qu’à
806
sont nécessaires, on peut imaginer, grosso modo,
qu’
à gauche on aura tendance à insister sur le travail en groupe, à laiss
807
on… La droite et la gauche ont tort de ne tolérer
qu’
un des deux termes. Car il faut que l’un existe pour que l’autre vive,
808
de ne tolérer qu’un des deux termes. Car il faut
que
l’un existe pour que l’autre vive, et vice versa. L’éducation sera la
809
tension dynamique entre les deux. On ne peut nier
que
l’homme a besoin de compagnie, mais aussi besoin d’être seul ; besoin
810
d’attraction et de répulsion. Là encore, supposez
qu’
un équilibre statique s’installe : c’est la mort. Tout ce système est
811
ions, dans la doctrine chrétienne, viennent de ce
qu’
on a tendu soit à confondre le Christ avec Dieu, soit à le limiter à s
812
imiter à son essence humaine. Il faut reconnaître
que
l’existence simultanée du divin et de l’humain dans le même être est
813
ais de la Campagne d’éducation civique européenne
que
je préside depuis une dizaine d’années, nous essayons de toucher le p
814
ticle dans Civisme européen 11. Mais il est clair
que
, seule, la bonne volonté des maîtres ne suffira pas. Il faut modifier
815
fois, alors peut-être… Le principal, dans tout ce
que
je vous ai dit, c’est ceci, je le répète : il faut apprendre à penser
816
et fantaisie, etc. Il y a une phrase d’Héraclite
qu’
on comprend généralement mal, parce qu’elle est mal traduite : « La gu
817
« La guerre est la mère de toute chose. » Plutôt
que
« guerre » il faudrait dire « conflit ». À quoi je préfère encore le
818
Benjamin Constant, dans le Cahier Rouge, raconte
que
son premier précepteur, un Allemand, avait eu « une idée assez ingéni
819
faire à nous deux une langue qui ne serait connue
que
de nous ; je me passionnai pour cette idée. Nous formâmes d’abord un
820
ublique , tel était le titre de la première œuvre
qu’
ait publié Denis de Rougemont, en 1929, à l’âge de 22 ans. Dans ce pam
821
une Suite des méfaits . Le texte de 1929 n’a subi
que
des retouches de détail, et fort peu. Quant à l’“aggravation”, de 197
822
“Écrit d’un jeune homme en colère, aussi injuste
qu’
un pamphlet doit l’être, j’ai le triste plaisir de constater que mon t
823
doit l’être, j’ai le triste plaisir de constater
que
mon texte n’a pas vieilli, parce que l’école n’a pas changé.” Et l’au
824
ême : c’est un crime contre l’homme, estime-t-il,
que
d’aligner les esprits pour la commodité des pouvoirs établis. »
825
, la théorie de la relativité l’a démontré. Mais,
que
le centre du monde se situe réellement quelque part dans les airs au-
826
ve : vous la vivez « comme on respire », ou c’est
que
vous n’êtes jamais vraiment venu, n’avez jamais existé dans ce lieu.
827
mplatif, ou de céder à cette espèce de conscience
que
donne l’indignation active. Lavaux est beaucoup plus défiguré que les
828
gnation active. Lavaux est beaucoup plus défiguré
que
les autres vignobles de La Côte, de Begnins à Vufflens par exemple. O
829
besoin de solitude. Mais la plupart n’osant aimer
que
ce qui par d’autres est aimé, ils détruisent à coup sûr les amours qu
830
es est aimé, ils détruisent à coup sûr les amours
qu’
ils partagent. Ce paysage sublime est un pays réel, peuplé de vigneron
831
vie tendent à détruire les raisons de vivre. Mais
que
tient-on pour nécessaire ? Les maxima contradictoires, toujours à l’œ
832
rre labourée, la terre bâtie, d’utilité publique,
que
vont faire les hommes et les femmes et les enfants qui habitent ici ?
833
tous ceux qui aiment la beauté, et qui voudraient
que
Lavaux, à jamais, demeure tel qu’un beau jour ils l’ont aimé. Or, ses
834
qui voudraient que Lavaux, à jamais, demeure tel
qu’
un beau jour ils l’ont aimé. Or, ses habitants l’aiment aussi, mais il
835
usure et patine à la fois. Pour garder le Lavaux
que
nous aimons, faudrait-il qu’ils renoncent à le vivre, à en vivre ? Sa
836
our garder le Lavaux que nous aimons, faudrait-il
qu’
ils renoncent à le vivre, à en vivre ? Sauver Lavaux, oui, mais vivant
837
ublime se posent en des termes semblables. Ainsi,
qu’
est-ce que sauver Venise ? Non pas offrir des étages de palais sur le
838
posent en des termes semblables. Ainsi, qu’est-ce
que
sauver Venise ? Non pas offrir des étages de palais sur le Grand Cana
839
sur le Grand Canal à des riches. Il faut d’abord
que
Venise soit peuplée, animée, habitée par des gens du pays. Et qu’ils
840
peuplée, animée, habitée par des gens du pays. Et
qu’
ils y trouvent un intérêt vital, et non pas archéologique. Pour sauver
841
aire son salut » suppose la foi, mais chacun sait
que
la foi sans les œuvres est morte. Sauver Lavaux ne suppose rien de mo
842
est morte. Sauver Lavaux ne suppose rien de moins
que
la prédominance accordée par un peuple à la saveur de vivre sur le ni
843
n-Pierre Laubscher, auteur de Dixence Cathédrale,
que
l’on doit un ouvrage qui vient à point nommé : Merveillleux Lavaux. S
844
homme. Les artisans du livre, auteurs des textes,
qu’
ils s’appellent Paul Chaudet, Claude Massy, Jean Villars-Gilles, Franç
845
tre le reflet d’un Lavaux épuré, prouve néanmoins
qu’
un tel coin de pays doit être sauvegardé au prix de l’intelligence et
846
uelle M. Desmeules, son directeur, aurait affirmé
que
les promoteurs des initiatives antinucléaires, c’est-à-dire selon lui
847
ntrer en discussion avec un directeur qui n’a dit
que
ce qu’il devait dire pour défendre les intérêts de sa compagnie ; mai
848
n discussion avec un directeur qui n’a dit que ce
qu’
il devait dire pour défendre les intérêts de sa compagnie ; mais votre
849
Ce conférencier, c’était moi. Certains penseront
que
cela me préparait mal à venir vous parler ce matin. J’irai plus loin
850
al à venir vous parler ce matin. J’irai plus loin
qu’
eux. Je pense que ces déclarations, si je les répétais aujourd’hui, co
851
arler ce matin. J’irai plus loin qu’eux. Je pense
que
ces déclarations, si je les répétais aujourd’hui, comme le font la pl
852
vec l’autonomie en particulier. Mais j’ai changé,
qu’
on se rassure, et même à 180°, comme on a cru pouvoir me le reprocher
853
le-là, est datée de 1984. Je la rappelle : Selon
que
(notre) choix se portera sur le nucléaire ou sur le solaire, nous aur
854
mes. Cette seconde citation est censée démontrer
que
je me contredis sans vergogne. (« Une philosophie à géométrie variabl
855
ariable » titre votre rédacteur.) Or il est clair
qu’
elle ne contredit en réalité que les intentions que M. Desmeules nous
856
) Or il est clair qu’elle ne contredit en réalité
que
les intentions que M. Desmeules nous attribue d’une manière arbitrair
857
u’elle ne contredit en réalité que les intentions
que
M. Desmeules nous attribue d’une manière arbitraire et calomnieuse. I
858
rouille tout, décidément, et beaucoup plus encore
qu’
on ne le croirait : car l’expression « exploitée de façon quasi milita
859
s nucléaires ne sont pas dangereuses, à condition
qu’
elles soient exploitées et contrôlées par des équipes organisées de ma
860
de manière rigoureuse… Pour moi, il est essentiel
que
les centrales nucléaires soient peu nombreuses, donc de grande taille
861
x de son bord qui ont dit cela. Quant à prétendre
que
mon idéal serait l’État marxiste omnipotent, il faut n’avoir rien lu
862
e répéter à longueur de colonnes. Est-il pensable
qu’
une cause défendue par de tels procédés soit une bonne cause ? 12. T