1
b Il existe — hic et nunc — un certain nombre
de
choses à dire, un certain ordre de vérités qu’il n’est plus possible
2
certain nombre de choses à dire, un certain ordre
de
vérités qu’il n’est plus possible de taire. Mais c’est en vain que no
3
ertain ordre de vérités qu’il n’est plus possible
de
taire. Mais c’est en vain que nous cherchons autour de nous leur lien
4
Pareille constatation ne peut nous signifier rien
d’
autre qu’une invitation pressante à créer ce lien et ce lieu : ce lieu
5
on pressante à créer ce lien et ce lieu : ce lieu
de
témoignage où puissent être dites avec tout le sérieux, toute l’ironi
6
uxquels, peut-être mieux qu’à nous, il sera donné
de
les comprendre en vérité, c’est-à-dire de les réaliser en obéissance.
7
a donné de les comprendre en vérité, c’est-à-dire
de
les réaliser en obéissance. ⁂ En face d’une pensée religieuse qui s’é
8
ines ces démons que seule la prière peut délivrer
d’
eux-mêmes ; en face d’une pensée religieuse qui, pour tout dire, trahi
9
religieuse qui, pour tout dire, trahit sa mission
de
scandale, et tente lâchement de réduire le divin au « surhumain » (c’
10
trahit sa mission de scandale, et tente lâchement
de
réduire le divin au « surhumain » (c’est-à-dire au « trop humain »),
11
le transcendant au temporel, il y a lieu et ordre
d’
attester que nous n’avons rien mérité, sinon la colère de Dieu. En fac
12
ter que nous n’avons rien mérité, sinon la colère
de
Dieu. En face de morales de plus en plus débilitantes, asservies à la
13
e, et à la lâcheté publique, il y a lieu et ordre
d’
attester la scandaleuse doctrine du « salut de grâce et bonté pure »,
14
dre d’attester la scandaleuse doctrine du « salut
de
grâce et bonté pure », du salut par la foi, par l’abandon aux mains d
15
es hommes et ne voient même pas qu’ils n’ont plus
de
réponses à offrir à leurs perpétuelles et urgentes questions ; en fac
16
urgentes questions ; en face de philosophies qui
de
Descartes à Kant, ou de Hegel à Marx, ont cru pouvoir nous sauver de
17
face de philosophies qui de Descartes à Kant, ou
de
Hegel à Marx, ont cru pouvoir nous sauver de l’angoisse en fondant l’
18
, ou de Hegel à Marx, ont cru pouvoir nous sauver
de
l’angoisse en fondant l’être humain sur soi-même, sur l’intelligence
19
lonté supposées non déchues, il y a lieu et ordre
d’
attester avec l’un des prophètes de ce temps, que la raison d’un homme
20
lieu et ordre d’attester avec l’un des prophètes
de
ce temps, que la raison d’un homme n’est pas sa raison d’être : « Cog
21
vec l’un des prophètes de ce temps, que la raison
d’
un homme n’est pas sa raison d’être : « Cogitor, ergo sum. » (Je suis
22
mps, que la raison d’un homme n’est pas sa raison
d’
être : « Cogitor, ergo sum. » (Je suis pensé…). En face d’une civilisa
23
et qui s’appelle Production, il y a lieu et ordre
d’
attester qu’« une seule chose est nécessaire ». Et qu’heureux sont les
24
sont les pauvres en esprit. ⁂ Notre but n’est pas
d’
imposer des idées, un système nouveau, plus ou moins cohérent. Ce sera
25
veau, plus ou moins cohérent. Ce serait alimenter
de
nouvelles discussions, exciter des oppositions stériles, purement int
26
s positions que, peut-être, ils étaient bien près
d’
abandonner. Il nous est indifférent, en principe, de nous opposer à te
27
abandonner. Il nous est indifférent, en principe,
de
nous opposer à telles idées courantes, ou de confirmer telles autres.
28
ipe, de nous opposer à telles idées courantes, ou
de
confirmer telles autres. Car notre opposition ne prendra jamais son p
29
Car notre opposition ne prendra jamais son point
de
départ dans ces idées mêmes, mais bien dans une réalité qui les domin
30
es. Avant tout, après tout, il ne peut s’agir que
d’
une chose : témoigner, aussi fortement que possible, d’une vérité dont
31
chose : témoigner, aussi fortement que possible,
d’
une vérité dont nous ne sommes pas les auteurs, mais dont l’essence mê
32
comme un ordre, personnellement adressé à chacun
de
nous. Vérité actuelle aux deux sens de ce mot, qui sont acte et prése
33
é à chacun de nous. Vérité actuelle aux deux sens
de
ce mot, qui sont acte et présence. Et certes notre activité serait i
34
re activité serait injustifiable si nous tentions
de
la justifier par des arguments, au lieu d’entrer sans plus tarder en
35
es hommes. Ceci n’est rien, en vérité, qu’un acte
de
soumission et d’espérance, car ce n’est pas aux hommes que nous dison
36
’est rien, en vérité, qu’un acte de soumission et
d’
espérance, car ce n’est pas aux hommes que nous disons : nous voici.
37
e nous disons : nous voici. a. Rougemont Denis
de
, « Hic et nunc », Hic et Nunc, Paris, novembre 1932, p. 1-3. b. Text
38
Principe
d’
une politique du pessimisme actif (novembre 1932)c …que nous faison
39
exactement le paradoxe est la marque et la preuve
de
toute réalité en tant que saisie et vécue, c’est-à-dire assumée par l
40
tionaliste, catholique, ou marxiste, c’est sortir
de
la réalité même. Car la réalité est précisément ce qui nous met en re
41
nelle et immédiate avec Dieu : et que la relation
d’
un être déchu avec son Créateur ne puisse être que paradoxale, cela es
42
ur ne puisse être que paradoxale, cela est clair,
d’
une clarté proprement aveuglante et même insupportable, si nous n’avio
43
lement accessible au plus profond du désespoir et
de
la nuit, par la foi seule, — qui ne vient pas de nous. Telle est la d
44
elle est la démarche paradoxale, « dialectique »,
de
la vie chrétienne : elle rejette tout espoir qui ne serait pas le seu
45
serait pas la seule promesse : espoir et promesse
de
la foi, — et la foi naît au cœur du désespoir. Mais, d’autre part, en
46
ofondeurs dernières où l’attend l’espoir éclatant
de
la révélation. La Croix, signe éternel de la contradiction et de l’«
47
clatant de la révélation. La Croix, signe éternel
de
la contradiction et de l’« agonie », est au centre du monde chrétien,
48
n. La Croix, signe éternel de la contradiction et
de
l’« agonie », est au centre du monde chrétien, parce qu’elle est le s
49
u monde chrétien, parce qu’elle est le signe même
de
notre condition. Et lorsque nous disons le « monde-chrétien », nous e
50
d pas au sérieux ce qu’impliquent les deux termes
de
l’antinomie, ou qui cherche à la supprimer, est antichrétienne en son
51
ne à lui-même un monde qui ne saurait nous offrir
de
salut, puisqu’il n’est de salut qu’en la foi, qui transcende le monde
52
ne saurait nous offrir de salut, puisqu’il n’est
de
salut qu’en la foi, qui transcende le monde. Principe de l’individual
53
t qu’en la foi, qui transcende le monde. Principe
de
l’individualisme anarchique ; point de vue qui rend absurde le fait m
54
ique ; point de vue qui rend absurde le fait même
d’
être né, c’est-à-dire d’avoir été « mis au monde ». 2° L’hérésie optim
55
rend absurde le fait même d’être né, c’est-à-dire
d’
avoir été « mis au monde ». 2° L’hérésie optimiste constate au contrai
56
a nous est à jamais impossible. C’est le principe
de
cet activisme que les Européens trouvent commode de nommer « américai
57
cet activisme que les Européens trouvent commode
de
nommer « américain ». 3° L’hérésie de la synthèse est inhérente à tou
58
ent commode de nommer « américain ». 3° L’hérésie
de
la synthèse est inhérente à tout système rationaliste du monde, soit
59
’il refuse comme le marxisme l’antinomie centrale
de
notre condition, et que, enfermant les conflits purement humains dans
60
fermant les conflits purement humains dans le jeu
de
synthèses successives, il achemine l’espèce vers un équilibre final,
61
rende à leur tour intenables les dernières ruses
de
la sécurité. ⁂ Il faut les entendre parler du « protestantisme ». Les
62
parler du « protestantisme ». Les uns l’accusent
de
fomenter une anarchie individualiste, les autres — ou parfois les mêm
63
dividualiste, les autres — ou parfois les mêmes —
d’
avoir sécrété la mystique du capitalisme américain. Les uns l’accusent
64
ique du capitalisme américain. Les uns l’accusent
de
livrer le monde au Malin, les autres — ou parfois les mêmes — de voul
65
nde au Malin, les autres — ou parfois les mêmes —
de
vouloir fonder dans ce monde un Royaume de Dieu qui pour capitale, pl
66
êmes — de vouloir fonder dans ce monde un Royaume
de
Dieu qui pour capitale, plutôt que Genève, choisirait Détroit. Il s’a
67
utôt que Genève, choisirait Détroit. Il s’agirait
de
s’entendre ; mais pour cela il faudrait tout d’abord connaître la pos
68
en lui-même, — s’il n’est pas attesté dans l’acte
de
la foi. Qu’est-ce donc, en effet, que l’effort humain ? Sinon l’exerc
69
que l’effort humain ? Sinon l’exercice nécessaire
de
l’âme, son actualisation, la raison d’être de son incorporation ; mai
70
nécessaire de l’âme, son actualisation, la raison
d’
être de son incorporation ; mais les résultats terrestres de cet effor
71
ire de l’âme, son actualisation, la raison d’être
de
son incorporation ; mais les résultats terrestres de cet effort ne no
72
son incorporation ; mais les résultats terrestres
de
cet effort ne nous mériteront jamais le Pardon ; ils mériteront tout
73
nt jamais le Pardon ; ils mériteront tout au plus
d’
être eux-mêmes pardonnés. Ce qui nous assure le Pardon, c’est la foi.
74
t la foi. Agissez donc, mais votre action ne sert
de
rien. L’hérésie pessimiste et l’hérésie optimiste ainsi renvoyées dos
75
ésence de l’accusation plus subtile des partisans
de
la synthèse. Comment des gens qui se réclament de Calvin, de Luther,
76
de la synthèse. Comment des gens qui se réclament
de
Calvin, de Luther, c’est-à-dire de contempteurs absolus des mérites h
77
èse. Comment des gens qui se réclament de Calvin,
de
Luther, c’est-à-dire de contempteurs absolus des mérites humains, pou
78
i se réclament de Calvin, de Luther, c’est-à-dire
de
contempteurs absolus des mérites humains, pourraient-ils, s’ils prenn
79
un effort politique quelconque ? Ayons le courage
de
l’affirmer ; il n’est pas de réponse à cette question pour ceux qui n
80
e ? Ayons le courage de l’affirmer ; il n’est pas
de
réponse à cette question pour ceux qui ne savent pas ce que c’est que
81
s), tandis qu’au contraire la politique est l’art
d’
accommoder les relations dans le sens de la plus grande facilité de ré
82
est l’art d’accommoder les relations dans le sens
de
la plus grande facilité de réalisation. La politique est un art de sy
83
relations dans le sens de la plus grande facilité
de
réalisation. La politique est un art de synthèses pratiques ; son off
84
facilité de réalisation. La politique est un art
de
synthèses pratiques ; son office est de résoudre dans la mesure de l’
85
st un art de synthèses pratiques ; son office est
de
résoudre dans la mesure de l’utile des difficultés naturelles. Mais l
86
iques ; son office est de résoudre dans la mesure
de
l’utile des difficultés naturelles. Mais la foi, bien souvent, ne peu
87
s physiques et morales. Doit-on conclure au refus
de
toute activité politique ? Ce serait admettre que les deux termes de
88
olitique ? Ce serait admettre que les deux termes
de
l’antinomie s’équivalent et peuvent s’annuler. La logique n’a le droi
89
ent et peuvent s’annuler. La logique n’a le droit
de
conclure qu’à partir de concepts réduits au même ordre, mais ce n’est
90
s au même ordre, mais ce n’est pas ici du concept
de
la foi que nous parlons. C’est de la foi vivante. Or, cette foi, nul
91
ici du concept de la foi que nous parlons. C’est
de
la foi vivante. Or, cette foi, nul homme n’est capable de la posséder
92
i vivante. Or, cette foi, nul homme n’est capable
de
la posséder dans la durée ; elle « survient », et jamais nous ne pouv
93
t jamais nous ne pouvons en tirer argument, comme
d’
une force à notre disposition ; elle survient, et c’est alors un ordre
94
mes tels qu’ils sont, — des hommes qui ont besoin
d’
une politique pour suppléer à leur faiblesse, qui ont besoin tout auta
95
nt besoin tout autant qu’on leur montre la vanité
d’
une chose si nécessaire. Telle est, dans son principe, la seule attitu
96
politique du pessimisme actif, — ou si l’on veut
de
l’activisme sans illusions. Et sa devise n’est autre que la maxime so
97
calviniste par excellence : « Point n’est besoin
d’
espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer. » Cette abse
98
oint n’est besoin d’espérer pour entreprendre, ni
de
réussir pour persévérer. » Cette absence d’illusions quant à la valeu
99
e, ni de réussir pour persévérer. » Cette absence
d’
illusions quant à la valeur absolue du résultat sinon de l’acte, est e
100
sions quant à la valeur absolue du résultat sinon
de
l’acte, est en même temps le meilleur ressort de l’action. La preuve
101
de l’acte, est en même temps le meilleur ressort
de
l’action. La preuve est dans tous les livres d’histoire. Les peuples
102
t de l’action. La preuve est dans tous les livres
d’
histoire. Les peuples calvinistes ont été les plus « actifs » des temp
103
principe animateur — n’en continuaient pas moins
d’
agir en vertu du principe d’inertie (tout corps en mouvement tend à co
104
ontinuaient pas moins d’agir en vertu du principe
d’
inertie (tout corps en mouvement tend à conserver son mouvement). C’es
105
ientés ont développé le capitalisme, symbole même
de
l’action dépourvue de fins transcendantes, de l’action optimiste. Ceu
106
e capitalisme, symbole même de l’action dépourvue
de
fins transcendantes, de l’action optimiste. Ceux donc qui rendent le
107
ême de l’action dépourvue de fins transcendantes,
de
l’action optimiste. Ceux donc qui rendent le calvinisme responsable d
108
que celle qui consisterait à reprocher à Euclide
d’
avoir permis le développement de l’artillerie moderne et son utilisati
109
procher à Euclide d’avoir permis le développement
de
l’artillerie moderne et son utilisation criminelle. ⁂ Mais il existe
110
ssion et sans appel. Et c’est peut-être vis-à-vis
d’
eux seulement que notre politique pourra se fixer un programme : la de
111
olitique pourra se fixer un programme : la devise
de
Guillaume d’Orange est l’arrêt de mort des idoles. Elle suppose un Di
112
mme : la devise de Guillaume d’Orange est l’arrêt
de
mort des idoles. Elle suppose un Dieu transcendant. Quel dieu fait de
113
Elle suppose un Dieu transcendant. Quel dieu fait
de
nos désirs d’hommes pourrait nous certifier dans le fond de nos âmes
114
n Dieu transcendant. Quel dieu fait de nos désirs
d’
hommes pourrait nous certifier dans le fond de nos âmes un salut qui s
115
irs d’hommes pourrait nous certifier dans le fond
de
nos âmes un salut qui se rit des ultimes efforts et des ultimes défai
116
e rit des ultimes efforts et des ultimes défaites
de
notre volonté de vivre ? Les dieux de l’Occident réclament des divide
117
efforts et des ultimes défaites de notre volonté
de
vivre ? Les dieux de l’Occident réclament des dividendes ; ils réclam
118
es défaites de notre volonté de vivre ? Les dieux
de
l’Occident réclament des dividendes ; ils réclament aussi des sacrifi
119
es humains. Le dieu-nation respire la bonne odeur
d’
onze millions de morts sacrifiés en quatre ans à sa gloire. Moins redo
120
ieu-nation respire la bonne odeur d’onze millions
de
morts sacrifiés en quatre ans à sa gloire. Moins redoutable, en appar
121
e, le dieu-production se contente des macérations
de
70 millions de chômeurs, et de super-holocaustes annuels de blé, de c
122
uction se contente des macérations de 70 millions
de
chômeurs, et de super-holocaustes annuels de blé, de coton et d’obus.
123
te des macérations de 70 millions de chômeurs, et
de
super-holocaustes annuels de blé, de coton et d’obus. En face des ido
124
ions de chômeurs, et de super-holocaustes annuels
de
blé, de coton et d’obus. En face des idoles, il n’y a que deux attitu
125
chômeurs, et de super-holocaustes annuels de blé,
de
coton et d’obus. En face des idoles, il n’y a que deux attitudes poss
126
de super-holocaustes annuels de blé, de coton et
d’
obus. En face des idoles, il n’y a que deux attitudes possibles : les
127
auvre type ! Peut-être aurai-je pourtant la force
d’
avoir pitié de toi, quand tu grinceras des dents sous le genou de ces
128
eut-être aurai-je pourtant la force d’avoir pitié
de
toi, quand tu grinceras des dents sous le genou de ces démons que tu
129
e toi, quand tu grinceras des dents sous le genou
de
ces démons que tu veux ignorer hic et nunc. Peut-être.) Je ne veux pa
130
Peut-être.) Je ne veux parler ici que du principe
de
notre politique ; il est bien clair qu’elle condamne, dans la mesure
131
endues à la réussite matérielle ou à des systèmes
d’
assurances, le capitalisme comme le stalinisme, tous les nationalismes
132
ion terrestre quelle qu’elle soit. Il ne suit pas
de
là, bien au contraire, que nous ne puissions collaborer à aucune révo
133
e révolution. L’iconoclaste est un type assez pur
de
révolutionnaire. Nous ne pouvons être ni conformistes — les ordres de
134
Nous ne pouvons être ni conformistes — les ordres
de
la foi sont absolus — ni réformistes, n’ayant rien qui nous assure de
135
us — ni réformistes, n’ayant rien qui nous assure
de
l’action continue de la foi. Je songe ici à l’armature catholique, qu
136
n’ayant rien qui nous assure de l’action continue
de
la foi. Je songe ici à l’armature catholique, qui condamne cette Égli
137
int-Esprit. La politique romaine est la recherche
d’
une harmonie statique des relations humaines, d’un visible « principe
138
e d’une harmonie statique des relations humaines,
d’
un visible « principe d’union » (terme de l’encyclique Quadragesimo an
139
e des relations humaines, d’un visible « principe
d’
union » (terme de l’encyclique Quadragesimo anno), tout à fait étrange
140
umaines, d’un visible « principe d’union » (terme
de
l’encyclique Quadragesimo anno), tout à fait étranger au réalisme « t
141
o), tout à fait étranger au réalisme « tragique »
de
l’Évangile, et qui même, dans certains cas extrêmes, nous tient quitt
142
me, dans certains cas extrêmes, nous tient quitte
de
la foi. Il ne s’agit jamais pour nous de rendre cette vie possible, m
143
t quitte de la foi. Il ne s’agit jamais pour nous
de
rendre cette vie possible, mais tout au plus d’abattre les obstacles
144
s de rendre cette vie possible, mais tout au plus
d’
abattre les obstacles à la foi, les idoles, les synthèses dans lesquel
145
les l’homme cherche sa sécurité, et qui n’ont pas
de
vérité. ⁂ La plus grande liberté d’action et de révolution est promis
146
qui n’ont pas de vérité. ⁂ La plus grande liberté
d’
action et de révolution est promise à celui que n’empêtre aucun respec
147
s de vérité. ⁂ La plus grande liberté d’action et
de
révolution est promise à celui que n’empêtre aucun respect du résulta
148
isme rétablissant sur un plan supérieur une sorte
de
jeu, ou mieux d’humour, qui se mêle au tragique quotidien comme un ra
149
sur un plan supérieur une sorte de jeu, ou mieux
d’
humour, qui se mêle au tragique quotidien comme un rappel de la seule
150
qui se mêle au tragique quotidien comme un rappel
de
la seule grandeur transcendante. Nous ne sommes pas condamnés au succ
151
les idoles, menaçantes. Et puis rester aux ordres
de
l’esprit. Nous n’avons pas à prendre d’assurances sur l’avenir. Nous
152
ux ordres de l’esprit. Nous n’avons pas à prendre
d’
assurances sur l’avenir. Nous n’avons pas à nous garantir à l’avance p
153
« chrétien » qu’on le veuille. Un certain nombre
de
compromissions nous sont à jamais impossibles : et tout le reste est
154
jamais impossibles : et tout le reste est affaire
d’
obéissance aux ordres imprévisibles et concrets de la Parole. Point de
155
d’obéissance aux ordres imprévisibles et concrets
de
la Parole. Point de « synthèse », point de « consolation » ailleurs q
156
res imprévisibles et concrets de la Parole. Point
de
« synthèse », point de « consolation » ailleurs qu’en Dieu : notre ac
157
ncrets de la Parole. Point de « synthèse », point
de
« consolation » ailleurs qu’en Dieu : notre action baigne dans l’« an
158
u’en Dieu : notre action baigne dans l’« angoisse
de
l’espérance »1. 1. Expression qu’Arnaud Dandieu opposait dans un in
159
naud Dandieu opposait dans un intéressant article
de
la Revue d’Allemagne (oct. 1932), à la conception kierkegaardienne du
160
opposait dans un intéressant article de la Revue
d’
Allemagne (oct. 1932), à la conception kierkegaardienne du désespoir.
161
oir. Elle ne désigne en réalité qu’un des moments
de
la dialectique du désespoir : le moment décisif, l’acte. Elle n’a de
162
u désespoir : le moment décisif, l’acte. Elle n’a
de
sens, pour nous, que parce qu’il y a la foi. c. Rougemont Denis de,
163
que parce qu’il y a la foi. c. Rougemont Denis
de
, « Principe d’une politique du pessimisme actif », Hic et Nunc, Paris
164
l y a la foi. c. Rougemont Denis de, « Principe
d’
une politique du pessimisme actif », Hic et Nunc, Paris, novembre 1932
165
atiques apportez-vous ? On voudrait quelque chose
de
positif… » Nous avons accueilli cette question de la façon dont nous
166
de positif… » Nous avons accueilli cette question
de
la façon dont nous voudrions que toutes les questions que nous posero
167
e consistera jamais, pour nous, dans une attitude
d’
humilité lugubre. Le sérieux et le respect, en présence d’une question
168
en présence d’une question, c’est tout simplement
de
se dire : cette question est justifiée par le fait même qu’elle a sur
169
iée par le fait même qu’elle a surgi à l’occasion
de
ce que j’écris ; il s’agit, avant que d’y répondre, de se rendre comp
170
occasion de ce que j’écris ; il s’agit, avant que
d’
y répondre, de se rendre compte de ce qu’elle signifie pour celui qui
171
que j’écris ; il s’agit, avant que d’y répondre,
de
se rendre compte de ce qu’elle signifie pour celui qui me la pose. Ré
172
agit, avant que d’y répondre, de se rendre compte
de
ce qu’elle signifie pour celui qui me la pose. Répondre du tac au tac
173
la pose. Répondre du tac au tac, à la « lettre »
de
la question, c’est un procédé électoral qui peut être utile à son heu
174
ns pas à avoir raison contre quelqu’un : l’esprit
de
vérité n’est à personne. Bien souvent, parmi nous, on répond mal aux
175
tesse sur nos intentions et nos buts, à seule fin
de
« causer un peu ». Qu’on les reconnaisse à ce signe : dès qu’ils comm
176
e à ce signe : dès qu’ils commencent à comprendre
de
quoi il s’agit, ils s’écrient : « Je ne comprends plus ! » En réalité
177
lus ! » En réalité, ils nous demandent des thèmes
de
discussion, c’est-à-dire des prétextes à différer toute action « prat
178
parce qu’elle se pose à eux-mêmes. Il n’y a pas
de
solutions, — il y a des ordres 1. Celui qui veut vraiment agir ne
179
d’abord une force. On peut affirmer sans crainte
d’
erreur une telle maxime : tout l’Évangile la confirme et l’illustre. O
180
elle ? Il se trouve que nul homme n’est en mesure
de
la donner à son frère : c’est la foi. Tout au plus pouvons-nous, par
181
nt le bon sens, faire naître le besoin et la soif
d’
une telle force. Et voilà bien la seule acception chrétienne du mot «
182
e qui trouble en vérité les hommes et les délivre
de
leurs tourments mesquins et dégradants ; tout ce qui les libère de le
183
s mesquins et dégradants ; tout ce qui les libère
de
leur férocité ou de leur quiétude naturelles, et les rend enfin respo
184
ants ; tout ce qui les libère de leur férocité ou
de
leur quiétude naturelles, et les rend enfin responsables dans l’obéis
185
dans la foi sait bien qu’il n’y a pas à demander
de
« solutions pratiques », car la foi est précisément une force qui se
186
ler certains chrétiens, que la foi est une espèce
d’
inspiration flottante, difficile à localiser et beaucoup trop imprécis
187
faible créature, puisse s’y « fier » et se passer
de
recettes morales inventées par les anciens juifs, Kant, Joseph Prudho
188
s nos églises, avec une virulence sourde, attisée
de
temps à autre par un sermon courageusement moralisateur2, ou résolume
189
que, ou tout simplement pacifiste. Et les fidèles
de
se congratuler à la sortie, se figurant qu’on vient enfin de leur don
190
atuler à la sortie, se figurant qu’on vient enfin
de
leur donner des directives pratiques et des solutions positives, « di
191
trouvé, qu’enfin ! nous apportions quelque chose
de
« positif » ! Comme si le christianisme n’était qu’une politique poss
192
tions humaines, également prévisibles et classées
d’
avance ! Comme si la foi était une espèce de puissance continuellement
193
ssées d’avance ! Comme si la foi était une espèce
de
puissance continuellement disponible entre nos mains incertaines, et
194
ectives venaient à nous manquer, que ferions-nous
de
cette « foi » que nous prétendions posséder ? Aurions-nous l’honnêtet
195
s prétendions posséder ? Aurions-nous l’honnêteté
de
reconnaître qu’en réalité nous n’avions rien, — puisque la foi, préci
196
n, je n’ai pas la foi ! » et alors vraiment prier
de
toute sa pauvreté, plutôt que de dire, comme certains : « J’ai la foi
197
s vraiment prier de toute sa pauvreté, plutôt que
de
dire, comme certains : « J’ai la foi, mais dites-moi ce qu’il faut qu
198
avoir. Entendons maintenant cette phrase capitale
de
Kierkegaard : « L’Éthique ne commence pas dans une ignorance qu’il fa
199
notre nature, ni le pourquoi, ni le « vers quoi »
de
notre vie, ayant perdu la clef de l’Origine et de la Fin, qu’il s’agi
200
e « vers quoi » de notre vie, ayant perdu la clef
de
l’Origine et de la Fin, qu’il s’agisse de notre existence personnelle
201
de notre vie, ayant perdu la clef de l’Origine et
de
la Fin, qu’il s’agisse de notre existence personnelle ou du cours de
202
la clef de l’Origine et de la Fin, qu’il s’agisse
de
notre existence personnelle ou du cours de l’histoire terrestre. Voic
203
agisse de notre existence personnelle ou du cours
de
l’histoire terrestre. Voici alors les chrétiens qui viennent nous par
204
oici alors les chrétiens qui viennent nous parler
d’
une Révélation. Est-ce donc qu’une grande lumière leur est venue dans
205
que le Christ leur promet la lumière à la mesure
de
leur obéissance. Ils n’ont donc pas reçu une révélation ésotérique, q
206
c pas reçu une révélation ésotérique, que l’homme
d’
aujourd’hui, sans doute, ne serait pas capable de supporter, d’interpr
207
d’aujourd’hui, sans doute, ne serait pas capable
de
supporter, d’interpréter. Ils n’ont pas davantage reçu une révélation
208
, sans doute, ne serait pas capable de supporter,
d’
interpréter. Ils n’ont pas davantage reçu une révélation éthique, un é
209
atique », c’est-à-dire immédiate à chacun des cas
de
l’existence, inconcevable pour celui qui se place en dehors du cas. C
210
rdre qui me dit, à tel endroit précis du temps et
de
l’espace : voici ce que tu dois faire. À celui qui demande : que doi
211
rincipe. Il ne peut que renvoyer à la seule force
d’
où provient l’ordre véritable. La décision éthique est toujours choix
212
e est sérieuse, si sérieuse qu’il serait ridicule
d’
attendre de nous ou de qui que ce soit un remède. Doctrine désespérant
213
use, si sérieuse qu’il serait ridicule d’attendre
de
nous ou de qui que ce soit un remède. Doctrine désespérante ? Oui, po
214
ieuse qu’il serait ridicule d’attendre de nous ou
de
qui que ce soit un remède. Doctrine désespérante ? Oui, pour ceux qui
215
eux votre mal. Nous ne pouvons rien vous apporter
d’
autre que l’injonction de prendre vous-mêmes au sérieux vos questions.
216
uvons rien vous apporter d’autre que l’injonction
de
prendre vous-mêmes au sérieux vos questions. Car alors, vous approche
217
rieux vos questions. Car alors, vous approcheriez
de
la réponse, vous y offrant sans défenses humaines. Nous avons aussi,
218
mme la question que Dieu lui adresse. À la faveur
de
cette « conversion », la notion même de positif est bouleversée. Crit
219
la faveur de cette « conversion », la notion même
de
positif est bouleversée. Critiquer les doctrines qui prétendent résou
220
inconcevable ; dénoncer tous les codes existants
de
morale, parce qu’ils dénaturent ou refoulent la question, en lui four
221
ères ; désespérer les optimistes en leur montrant
de
quel prix dérisoire ils ont cru payer leur salut, — telle est la seul
222
pproche du Réel. Cela prend bien souvent l’aspect
d’
une destruction. Il peut paraître étrange que l’on doive rappeler de t
223
Il peut paraître étrange que l’on doive rappeler
de
telles choses, mais la raison en est pourtant bien claire. Nous préfé
224
x hommes ces ordres que l’on ne peut attendre que
de
Dieu : parce qu’avec les hommes, nous pourrons discuter… 2. « Mais
225
! malgré l’impopularité du terme ! » 3. Capable
de
réponse, c’est-à-dire capable de prière. d. Rougemont Denis de, « S
226
! » 3. Capable de réponse, c’est-à-dire capable
de
prière. d. Rougemont Denis de, « Solutions pratiques ? », Hic et Nu
227
st-à-dire capable de prière. d. Rougemont Denis
de
, « Solutions pratiques ? », Hic et Nunc, Paris, mars 1933, p. 37-42.
228
aire oblige à reconnaître que nos vies comportent
d’
autant moins de solutions que nous sommes plus exigeants. Tout idéal a
229
econnaître que nos vies comportent d’autant moins
de
solutions que nous sommes plus exigeants. Tout idéal atteint se retou
230
ne aussitôt contre notre bonheur. Depuis l’auteur
de
l’Ecclésiaste jusqu’au romancier le plus moderne, la littérature univ
231
de qu’on ne s’atteint jamais. Et les philosophies
de
l’Occident mettent le comble à cette gigantesque pagaille dont naquit
232
dont naquit bizarrement au xviiie siècle l’idée
de
Progrès. L’extérieur déçoit, l’intérieur égare ; l’objet pur opprime,
233
nité et poursuite du vent », y compris la sagesse
de
celui qui croit trouver dans cette sentence la justification de son r
234
roit trouver dans cette sentence la justification
de
son refus de vivre. Mais il existe une sagesse qui semble bien n’être
235
dans cette sentence la justification de son refus
de
vivre. Mais il existe une sagesse qui semble bien n’être pas affectée
236
e une sagesse qui semble bien n’être pas affectée
de
la dégradation immanente à toute solution humaine. Cette sagesse dit
237
its sans cesse renaissants que suscite l’exigence
de
la personne lorsqu’elle s’insère dans le donné hostile du monde ambia
238
nnelle que signifie la coefficience en nous-mêmes
de
la thèse et de l’antithèse. Avec Kierkegaard, elle répète que « toute
239
ifie la coefficience en nous-mêmes de la thèse et
de
l’antithèse. Avec Kierkegaard, elle répète que « toute prétention à u
240
taphysique contre l’éthique ». Il s’agit donc ici
d’
une dialectique à deux termes simultanés, et dont la tension n’est pas
241
l’Histoire. Sa dialectique est devenue une espèce
de
bascule automatique. Le tragique s’évanouit, le choix s’élude, la per
242
permanent ; qu’il y ait au contraire un principe
de
dégradation éthique dans toute recherche de la synthèse et plus sûrem
243
ncipe de dégradation éthique dans toute recherche
de
la synthèse et plus sûrement dans la croyance en une synthèse possibl
244
ynthèse possible, voilà qui ne paraît point faire
de
doute. Ailleurs4, j’ai pu marquer mon choix et quelles conséquences i
245
une dialectique fondée sur l’actualité permanente
de
la personne nous oppose d’une part à l’idéal bourgeois, synthèse eudé
246
l’idéal marxiste, synthèse eudémonique à l’usage
d’
une masse non responsable. Une dialectique sans « médiation » et compo
247
e risque personnel, le choix et l’acte, une sorte
de
« contre-Hegel » radical, voilà qui ne peut manquer d’évoquer l’attit
248
contre-Hegel » radical, voilà qui ne peut manquer
d’
évoquer l’attitude d’un Kierkegaard et par là même de ses descendants
249
l, voilà qui ne peut manquer d’évoquer l’attitude
d’
un Kierkegaard et par là même de ses descendants directs, les théologi
250
voquer l’attitude d’un Kierkegaard et par là même
de
ses descendants directs, les théologiens dialectiques. Je ne me serai
251
aison précisément elles ne constituaient un terme
de
comparaison tout à fait privilégié. Peut-être le point de vue dialect
252
privilégié. Peut-être le point de vue dialectique
de
Barth se laissera-t-il d’autant plus clairement définir qu’on le défi
253
oint de vue dialectique de Barth se laissera-t-il
d’
autant plus clairement définir qu’on le définira par son opposition gl
254
passement qu’il permet ? Et le rendement créateur
de
cette éthique de la personne, par quoi, au bout du temps, se trouve-t
255
ermet ? Et le rendement créateur de cette éthique
de
la personne, par quoi, au bout du temps, se trouve-t-il à son tour ju
256
ée soi-même et se suffit en soi. Si l’on refusait
de
poser la question de l’Origine et de la Fin, on supposerait par là mê
257
fit en soi. Si l’on refusait de poser la question
de
l’Origine et de la Fin, on supposerait par là même que la doctrine de
258
’on refusait de poser la question de l’Origine et
de
la Fin, on supposerait par là même que la doctrine de l’acte rend un
259
a Fin, on supposerait par là même que la doctrine
de
l’acte rend un compte suffisant de l’ensemble du monde. Ce serait dir
260
ue la doctrine de l’acte rend un compte suffisant
de
l’ensemble du monde. Ce serait dire qu’elle constitue finalement la s
261
s disons « la critique » au sens le plus littéral
de
ce mot : l’accusation qui met en état de crise l’ensemble de ces affi
262
littéral de ce mot : l’accusation qui met en état
de
crise l’ensemble de ces affirmations et de ces négations, cette éthiq
263
l’accusation qui met en état de crise l’ensemble
de
ces affirmations et de ces négations, cette éthique et cette actualit
264
n état de crise l’ensemble de ces affirmations et
de
ces négations, cette éthique et cette actualité, ce refus de toutes l
265
tions, cette éthique et cette actualité, ce refus
de
toutes les synthèses et ce principe de synthèse qu’il contient. Accus
266
, ce refus de toutes les synthèses et ce principe
de
synthèse qu’il contient. Accusation qui ne porte pas sur le détail ni
267
e porte pas sur le détail ni sur la valeur morale
de
cette méthode, mais qui tombe perpendiculairement sur le plan humain
268
ement à rapporter tous ces problèmes à la réalité
de
Dieu telle qu’elle nous apparaît, c’est-à-dire au problème de tous no
269
e qu’elle nous apparaît, c’est-à-dire au problème
de
tous nos problèmes, au problème absolument insoluble, puisque notre r
270
paradoxe par définition. Tel est l’aspect humain
de
la dialectique dont il est question chez Barth ; et que cela suffise
271
ou là contre la théologie dialectique incriminée
de
pessimisme romantique, de recours abusif au langage pathétique5 et au
272
dialectique incriminée de pessimisme romantique,
de
recours abusif au langage pathétique5 et au « concept d’angoisse ». C
273
urs abusif au langage pathétique5 et au « concept
d’
angoisse ». Car enfin si le paradoxe n’est pas dans la situation même
274
n si le paradoxe n’est pas dans la situation même
de
l’homme devant Dieu, notre foi est vaine et c’est perdre son temps qu
275
notre foi est vaine et c’est perdre son temps que
d’
en apprécier humainement l’expression la plus directe ; si au contrair
276
a vraie joie n’est pas avec ceux qui nous parlent
de
la « tristesse » du message barthien, puisqu’ils entendent désigner p
277
uisqu’ils entendent désigner par là l’acceptation
de
la mort et du rien, de l’insondable et du scandale en tant que tels,
278
igner par là l’acceptation de la mort et du rien,
de
l’insondable et du scandale en tant que tels, l’acceptation du salut
279
ossible, paradoxe dont la formule est le nom même
de
Jésus-Christ. La réalité centrale d’une telle dialectique est formulé
280
le nom même de Jésus-Christ. La réalité centrale
d’
une telle dialectique est formulée dans ce passage de Barth : « Que Di
281
ne telle dialectique est formulée dans ce passage
de
Barth : « Que Dieu (mais vraiment Dieu) devienne homme (mais vraiment
282
ici devient la vérité vivante, le contenu décisif
d’
un vrai discours sur Dieu. Mais comment établir le rapport nécessaire
283
Dieu. Mais comment établir le rapport nécessaire
de
ces deux aspects de la vérité à leur centre vivant ? Le vrai dialecti
284
établir le rapport nécessaire de ces deux aspects
de
la vérité à leur centre vivant ? Le vrai dialecticien sait que ce cen
285
née. Mais alors, si nous voulons parler en vérité
d’
une telle incarnation du oui dans le non, nous ne pouvons que recourir
286
é dépassera toujours le oui et le non, et ce que,
de
leur simultanéité, nous croirons être en droit de déduire par la voie
287
de leur simultanéité, nous croirons être en droit
de
déduire par la voie logique. C’est pourtant cette inconcevable réalit
288
oui et à ce non qui, au travers de toute l’œuvre
de
Barth, nous entraînent dans une oscillation gigantesque, entre deux i
289
nche chercher dans un sermon consolateur le droit
de
ne pas trop prendre au sérieux les questions étranges et cruelles que
290
ns étranges et cruelles que poserait sinon la vie
de
tous les jours, — on conçoit que ce brave homme s’effare, et vitupère
291
ortable, dont, au surplus, il n’est plus possible
de
se défaire au nom de l’« action » ou de la « piété du cœur », puisqu’
292
possible de se défaire au nom de l’« action » ou
de
la « piété du cœur », puisqu’elle prétend précisément les mettre en c
293
durée n’est sans doute que notre perpétuel refus
de
l’éternité. Dieu dit oui : l’homme comprend non, se découvrant soudai
294
Mais aussitôt, s’il accepte ce non, l’affirmation
de
son salut paraît : il reconnaît la Vie au travers de sa mort. Si, par
295
r un souci peut-être vain, en tous cas dangereux,
de
simplification formelle, nous revenions au schéma hégélien, il faudra
296
d’ailleurs bien équivoque, puisque tout cela n’a
de
réalité que dans l’instant éternel, dans le contact mortel du temps e
297
stant éternel, dans le contact mortel du temps et
de
l’éternité ; puisque tout cela, encore une fois, ne concerne que l’or
298
ligieuse » ? Il y a la mort, et notre acceptation
de
cette mort. Et qu’y a-t-il entre ce oui dernier et tous nos sic et no
299
toutes les affirmations orgueilleuses ou modestes
de
notre vie mortelle ? Il y a l’acceptation de la Vie qui n’est pas nôt
300
stes de notre vie mortelle ? Il y a l’acceptation
de
la Vie qui n’est pas nôtre, qu’il faut croire. Dissymétrie vertigineu
301
ais la promesse qui nous est faite dans l’instant
de
la foi, c’est la promesse de la victoire éternelle. ⁂ Loin de moi la
302
faite dans l’instant de la foi, c’est la promesse
de
la victoire éternelle. ⁂ Loin de moi la prétention d’avoir, par ces q
303
a victoire éternelle. ⁂ Loin de moi la prétention
d’
avoir, par ces quelques traits schématiques, voulu décrire une dialect
304
lement en avoir dit assez pour qu’il soit inutile
d’
insister davantage sur ce fait : nos dialectiques humaines et la diale
305
ernelle. Qu’un philosophe, qu’un moraliste, parle
de
choix, de risque et d’acte, ces mots désignent des réalités éthiques
306
u’un philosophe, qu’un moraliste, parle de choix,
de
risque et d’acte, ces mots désignent des réalités éthiques qui n’ont
307
he, qu’un moraliste, parle de choix, de risque et
d’
acte, ces mots désignent des réalités éthiques qui n’ont rien de commu
308
ts désignent des réalités éthiques qui n’ont rien
de
commun avec l’acte, le risque et le choix dont parle la théologie dan
309
ie dans sa dialectique absolue. Il n’y a plus ici
d’
opération réelle que par la Parole de Dieu : acte de la Parole, que l’
310
y a plus ici d’opération réelle que par la Parole
de
Dieu : acte de la Parole, que l’homme ne peut saisir que dans la foi
311
opération réelle que par la Parole de Dieu : acte
de
la Parole, que l’homme ne peut saisir que dans la foi ; choix de l’él
312
ue l’homme ne peut saisir que dans la foi ; choix
de
l’élection, c’est-à-dire d’une possibilité qui n’est pas nôtre. Et le
313
e dans la foi ; choix de l’élection, c’est-à-dire
d’
une possibilité qui n’est pas nôtre. Et le risque permanent, c’est alo
314
s celui qu’encourt l’homme jeté par la révélation
de
la Parole dans une situation absolument nouvelle, dans un instant don
315
les travaux du groupe politique et philosophique
de
L’Ordre nouveau. 5. Qu’on nomme en France « pathos » alors que ce mo
316
inologie propre à un auteur. e. Rougemont Denis
de
, « Dialectique des fins dernières », Hic et Nunc, Paris, juillet 1933
317
Poésie dialectique (juillet 1933)f Au cours
d’
un article paru en Suisse allemande, le professeur O.-E. Strasser décl
318
i lui soit tombée sous les yeux » ! Petite erreur
de
fait, voulons-nous croire, mais aggravée par l’ironie dont le profess
319
ialectique et la poésie. Car : 1° Toute la poésie
de
la Réforme jusqu’au xviie siècle peut être qualifiée de dialectique
320
éforme jusqu’au xviie siècle peut être qualifiée
de
dialectique : c’est le « wit » des poètes métaphysiciens de la Renais
321
ique : c’est le « wit » des poètes métaphysiciens
de
la Renaissance anglaise, John Donne, Crashaw, Marvell, Herbert, Vaugh
322
le style antithétique des huguenots contemporains
de
la Pléiade, si méchamment enterrés par les jésuites dans leurs Histoi
323
nt enterrés par les jésuites dans leurs Histoires
de
la littérature française (pour ne rien dire des lamentables dédains d
324
nçaise (pour ne rien dire des lamentables dédains
de
M. Lanson parlant de Du Bartas, ce géant — mais nous y reviendrons) ;
325
dire des lamentables dédains de M. Lanson parlant
de
Du Bartas, ce géant — mais nous y reviendrons) ; ce sont les sonnets
326
— mais nous y reviendrons) ; ce sont les sonnets
de
Goulard, admirable commentateur de Du Bartas, et toute une école de p
327
nt les sonnets de Goulard, admirable commentateur
de
Du Bartas, et toute une école de poètes calvinistes imbus des théorie
328
ble commentateur de Du Bartas, et toute une école
de
poètes calvinistes imbus des théories cosmologiques de Paracelse ; ce
329
ètes calvinistes imbus des théories cosmologiques
de
Paracelse ; ce sont encore en plein xviie siècle, les Sonnets spirit
330
re en plein xviie siècle, les Sonnets spirituels
d’
un Gombaud. Et je cite au hasard d’une mémoire mal informée. Et je ne
331
ets spirituels d’un Gombaud. Et je cite au hasard
d’
une mémoire mal informée. Et je ne dis rien de la dialectique de Polye
332
ard d’une mémoire mal informée. Et je ne dis rien
de
la dialectique de Polyeucte… 2° La vision dialectique jetant l’homme
333
mal informée. Et je ne dis rien de la dialectique
de
Polyeucte… 2° La vision dialectique jetant l’homme dans une situation
334
une situation dramatique ; lui révélant le néant
de
ses idoles et la nouveauté inénarrable de l’instant où la Parole lui
335
e néant de ses idoles et la nouveauté inénarrable
de
l’instant où la Parole lui est adressée ; enfin, excitant en lui l’es
336
i l’espoir infini au sein du désespoir et la joie
de
la Promesse invisible, — cette vision donnée à l’homme, est la plus p
337
homme, est la plus propre à créer en lui l’organe
d’
une haute poésie. 3° Enfin toute poésie ne serait-elle pas, dans son
338
ue ? La métaphore ne tire-t-elle pas sa puissance
de
la nouveauté paradoxale des rapprochements qu’elle opère ? Ne jaillit
339
approchements qu’elle opère ? Ne jaillit-elle pas
de
la tension des contradictoires qu’elle saisit en une seule image, ind
340
image beaucoup plus que ce qu’il y a dans chacun
de
ses termes, désignant au-delà d’elle-même une réalité d’un autre ordr
341
y a dans chacun de ses termes, désignant au-delà
d’
elle-même une réalité d’un autre ordre et que les mots n’atteignent ja
342
termes, désignant au-delà d’elle-même une réalité
d’
un autre ordre et que les mots n’atteignent jamais directement ?… Nous
343
ici à suggérer. Voici en attendant la traduction
d’
un hymne de John Donne (1573-1661), le plus grand des « poètes métaphy
344
érer. Voici en attendant la traduction d’un hymne
de
John Donne (1573-1661), le plus grand des « poètes métaphysiciens » d
345
661), le plus grand des « poètes métaphysiciens »
de
l’école anglaise. Une première traduction de cet hymne, dont nous nou
346
ns » de l’école anglaise. Une première traduction
de
cet hymne, dont nous nous sommes inspirés, a paru dans la Nouvelle Re
347
Menasce). N. B. — Le poème contient deux jeux
de
mots intraduisibles : « When thou hast done, thou hast not done » (ve
348
n’auras pas encore Donne. » Et au troisième vers
de
la dernière strophe, Sonne peut signifier, dans la langue de l’époque
349
ère strophe, Sonne peut signifier, dans la langue
de
l’époque, Soleil ou Fils. hymne à dieu le père Pardonneras-tu ce pé
350
par lequel j’entraînai D’autres pécheurs, faisant
de
mon péché leur porte ? Pardonneras-tu ce péché que j’ai fui Un an ou
351
auras rien fini, Car il y a plus. J’ai un péché
de
peur : mourrai-je sur la rive Lorsque mon dernier fil aura été filé ?
352
ai plus peur. John Donne f. Rougemont Denis
de
, « Poésie dialectique », Hic et Nunc, Paris, juillet 1933, p. 116-117
353
Grammaire
de
la personne (janvier 1934)g h L’individu, tel que les libéraux — e
354
hie — nous l’ont légué, c’est l’homme qui n’a pas
de
prochain et qui n’est le prochain de personne. Ou encore, comme le di
355
qui n’a pas de prochain et qui n’est le prochain
de
personne. Ou encore, comme le dit Keyserling, c’est l’homme pour lequ
356
Nous voudrions montrer ici d’une part l’identité
de
la personne, telle qu’on peut l’opposer à cet individu, et du prochai
357
; d’autre part, certaines conséquences politiques
de
l’erreur individualiste, et surtout, de ses plus récents succédanés.
358
olitiques de l’erreur individualiste, et surtout,
de
ses plus récents succédanés. Le lieu de toute décision qui crée, c’
359
urtout, de ses plus récents succédanés. Le lieu
de
toute décision qui crée, c’est la personne. Toute l’agitation du mond
360
récise en moi qu’à l’instant où elle me contraint
d’
agir. Peut-être qu’il est inutile de rien savoir du monde et de son tr
361
me contraint d’agir. Peut-être qu’il est inutile
de
rien savoir du monde et de son train, des sciences, des faits et gest
362
être qu’il est inutile de rien savoir du monde et
de
son train, des sciences, des faits et gestes, des batailles, des acci
363
, un ordre ou une tentation. Quand cesserons-nous
d’
agiter des problèmes qui n’ont jamais été notre problème ? Car un prob
364
té dernière, dont l’existence déborde les limites
de
l’incarnation personnelle. On songe ici tout de suite à la question s
365
ion des grands problèmes sociaux est une question
de
morale individuelle. » L’originalité d’une morale individuelle apte à
366
question de morale individuelle. » L’originalité
d’
une morale individuelle apte à résoudre les conflits sociaux se réduir
367
lits sociaux se réduirait probablement aux vertus
de
surdité, de cécité et de mutisme. Par ailleurs, elle pourrait être au
368
se réduirait probablement aux vertus de surdité,
de
cécité et de mutisme. Par ailleurs, elle pourrait être aussi laïque o
369
probablement aux vertus de surdité, de cécité et
de
mutisme. Par ailleurs, elle pourrait être aussi laïque ou religieuse
370
que pour renaître dans le collectif. La mystique
de
la masse ou du groupe qui domine la moitié de l’Europe, n’a pas d’ori
371
que de la masse ou du groupe qui domine la moitié
de
l’Europe, n’a pas d’origine plus certaine que ce renversement de l’in
372
groupe qui domine la moitié de l’Europe, n’a pas
d’
origine plus certaine que ce renversement de l’individualisme. Ramener
373
a pas d’origine plus certaine que ce renversement
de
l’individualisme. Ramener la question sociale aux limites de la perso
374
dualisme. Ramener la question sociale aux limites
de
la personne, c’est constater que la question sociale, en tant qu’elle
375
pose. Qu’il soit là, proche ou lointain, à portée
de
ma main, à portée de mes yeux, à portée d’imagination, peu importe, p
376
proche ou lointain, à portée de ma main, à portée
de
mes yeux, à portée d’imagination, peu importe, pourvu que cette prise
377
portée de ma main, à portée de mes yeux, à portée
d’
imagination, peu importe, pourvu que cette prise, cette vue, cette ima
378
t pour moi une « deuxième personne », un tu sujet
d’
une parole qui m’advient6. On voudrait nous faire croire aujourd’hui q
379
mécanique étatiste et dictatoriale qui tient lieu
d’
ordre dès que l’homme renonce à assumer personnellement son risque et
380
elle la figure dans l’abstrait, dans le plan même
de
ce qu’elle croit mépriser. Le rapport véritable entre les hommes, c’e
381
s que les personnes : elle n’est que l’expression
de
leurs rapports spécifiques. Elle a son centre en chacune des personne
382
ce centre. Elle est le rayonnement dans la durée
de
l’acte instantané qui unit un je et un tu par un lien de responsabili
383
te instantané qui unit un je et un tu par un lien
de
responsabilité7. En son principe, l’erreur fasciste consiste à consid
384
comme un état. C’est faire simplement abstraction
de
la responsabilité réciproque. Il en résulte que le je et que le tu, c
385
Il en résulte que le je et que le tu, considérés
d’
un point de vue qui n’est plus ni celui du je ni celui du tu, c’est-à-
386
trouvent du même coup objectivés, et prisonniers
de
ce rapport, le nous. Le groupe ainsi formé est défini par sa circonfé
387
ts sur eux, bien qu’à la vérité il ne résulte que
de
la somme de leurs altérations. Les hommes qui constituent ce groupe n
388
bien qu’à la vérité il ne résulte que de la somme
de
leurs altérations. Les hommes qui constituent ce groupe ne sont plus
389
mes véritablement humains, puisque l’un des pôles
de
leur être n’est plus visible ni concret, échappe aux prises de leurs
390
n’est plus visible ni concret, échappe aux prises
de
leurs mains. Pour chacun d’eux, le tu es devenu le nous, c’est-à-dire
391
t, échappe aux prises de leurs mains. Pour chacun
d’
eux, le tu es devenu le nous, c’est-à-dire a cessé d’être le vis-à-vis
392
ux, le tu es devenu le nous, c’est-à-dire a cessé
d’
être le vis-à-vis qui pose une question directe, — le prochain. Il a c
393
e une question directe, — le prochain. Il a cessé
d’
être un des pôles de la personne. Le nous n’est rien qu’un biais, c’es
394
te, — le prochain. Il a cessé d’être un des pôles
de
la personne. Le nous n’est rien qu’un biais, c’est un tu sans visage
395
vient se confondre avec un je désormais incertain
de
ses limites agrandies. Perte de tension, en chaque point du cercle. I
396
sormais incertain de ses limites agrandies. Perte
de
tension, en chaque point du cercle. Il faudra bien la compenser par u
397
faudra bien la compenser par une rigidité accrue
de
la circonférence. Et c’est l’histoire de toute association humaine :
398
é accrue de la circonférence. Et c’est l’histoire
de
toute association humaine : on s’unit par la force d’un principe tran
399
oute association humaine : on s’unit par la force
d’
un principe transcendant, — et tant qu’il règne on peut mépriser la po
400
la police ; puis vient un temps où l’on se lasse
d’
obéir à la force vivante, — et l’on institue la police pour soutenir u
401
personne. Si la personne est la mise en question
d’
un je par un tu, donc une rencontre, cette rencontre n’a lieu que dans
402
contrent pas, spirituellement, à mi-distance l’un
de
l’autre — dans le nous 8. Pour nous aimer, nous devons faire chacun t
403
faire chacun tout le chemin qui nous sépare l’un
de
l’autre. Et c’est au seul moment où je t’atteins en toi, où tu m’atte
404
ho humain. C’est en elle enfin que s’opère l’acte
d’
une communion réelle. La personne est un lieu d’héroïsme, et cela sign
405
e d’une communion réelle. La personne est un lieu
d’
héroïsme, et cela signifie qu’elle est le lieu, l’origine et la fin de
406
signifie qu’elle est le lieu, l’origine et la fin
de
toute incarnation, de toute création, de tout risque. La personne est
407
e lieu, l’origine et la fin de toute incarnation,
de
toute création, de tout risque. La personne est aussi, par conséquent
408
t la fin de toute incarnation, de toute création,
de
tout risque. La personne est aussi, par conséquent, l’individu moral,
409
me des systèmes, indépendamment du rapport actuel
d’
un je et d’un tu, ne rendent pas compte de l’être personnel, ni d’aucu
410
èmes, indépendamment du rapport actuel d’un je et
d’
un tu, ne rendent pas compte de l’être personnel, ni d’aucune réalité
411
actuel d’un je et d’un tu, ne rendent pas compte
de
l’être personnel, ni d’aucune réalité humaine. ⁂ Ces considérations p
412
tu, ne rendent pas compte de l’être personnel, ni
d’
aucune réalité humaine. ⁂ Ces considérations peuvent paraître assez ar
413
t italiennes, et jusque dans les pages illustrées
de
nos quotidiens. Il me reste à marquer la dépendance théologique d’une
414
. Il me reste à marquer la dépendance théologique
d’
une analyse qui peut paraître strictement humaine. On peut parler en t
415
n peut parler en termes de philosophie du rapport
d’
un je à un tu. Mais on ne peut le comprendre et le vivre, dans son par
416
imitif qui fonde la personne humaine : le rapport
de
l’homme à son Créateur. Le Droit romain a peut-être raison de refuser
417
son Créateur. Le Droit romain a peut-être raison
de
refuser à mon voisin le pouvoir de me questionner, puisque ce pouvoir
418
ut-être raison de refuser à mon voisin le pouvoir
de
me questionner, puisque ce pouvoir n’a pas d’autre fondement que l’or
419
oir de me questionner, puisque ce pouvoir n’a pas
d’
autre fondement que l’ordre révélé par Jésus-Christ. Si le tu a le dro
420
rdre révélé par Jésus-Christ. Si le tu a le droit
de
venir troubler ma quiétude, n’est-ce pas, en définitive, parce qu’il
421
u’il est pour moi, à tel instant, le symbole réel
de
Celui qui nous a dit : « En vérité, toutes les fois que vous avez fai
422
it. » Et si ce tu, non seulement possède le droit
d’
être reçu par moi, mais encore d’être reçu quoi qu’il me demande, fût-
423
possède le droit d’être reçu par moi, mais encore
d’
être reçu quoi qu’il me demande, fût-ce ma mort, n’est-ce pas pour cet
424
» ? 6. Je préfère employer le pronom tu, sujet
de
son action — plutôt que le toi, plus couramment employé par certains
425
me. 7. Ainsi l’Église : le chrétien, dans l’acte
de
la communion avec le Christ, fonde véritablement l’Église universelle
426
asciste n’est que le lieu des points équidistants
de
tous les individus qui composent le groupe. Un lieu parfaitement abst
427
rationalistes, on peut faire remarquer que le nom
d’
idiot désigne étymologiquement le « particulier » qui s’enferme dans s
428
’enferme dans sa particularité, — qui refuse donc
d’
être le prochain de son frère. 10. ou tout autre « isme » qu’on voudr
429
rticularité, — qui refuse donc d’être le prochain
de
son frère. 10. ou tout autre « isme » qu’on voudra. g. Rougemont D
430
autre « isme » qu’on voudra. g. Rougemont Denis
de
, « Grammaire de la personne », Hic et Nunc, Paris, janvier 1934, p. 1
431
u’on voudra. g. Rougemont Denis de, « Grammaire
de
la personne », Hic et Nunc, Paris, janvier 1934, p. 18-23. h. Une no
432
r 1934, p. 18-23. h. Une note ajoute : « Extrait
d’
un volume à paraître, intitulé Penser avec les mains . »
433
lénitude du monde n’est pas dans la contemplation
d’
un esprit immobile. La plénitude du monde est un événement. Elle a son
434
esse pour une réponse. La plénitude est un combat
d’
amour. Mais aimer ? C’est d’abord répondre, — c’est en même temps et c
435
t en même temps et c’est surtout répondre au-delà
de
la question. ⁂ L’homme jeté dans la diversité de l’univers, aux aguet
436
de la question. ⁂ L’homme jeté dans la diversité
de
l’univers, aux aguets des tentations et des menaces qui surgissent dè
437
menaces qui surgissent dès qu’il dit je, n’a pas
d’
autre mouvement que la peur ou l’amour. Non qu’il ait à choisir : déjà
438
e distingue du monde n’est pas autre que cet élan
de
refus ou de tendresse. En vérité, point de séparation réelle, jamais
439
du monde n’est pas autre que cet élan de refus ou
de
tendresse. En vérité, point de séparation réelle, jamais de vide entr
440
t élan de refus ou de tendresse. En vérité, point
de
séparation réelle, jamais de vide entre moi et le monde, non, rien qu
441
se. En vérité, point de séparation réelle, jamais
de
vide entre moi et le monde, non, rien que la tension d’un corps à cor
442
e entre moi et le monde, non, rien que la tension
d’
un corps à corps amoureux ou meurtrier. Je n’existe que par cette tens
443
n’échappe point au règne naturel. L’indifférence
d’
un « esprit », qui s’imagine dégagé d’un tel choix, et qui le considèr
444
ndifférence d’un « esprit », qui s’imagine dégagé
d’
un tel choix, et qui le considère comme une alternative extérieure à s
445
ourner, cette indifférence n’est rien que le rêve
d’
un atome abandonné qui se croit je. Ce rêve peut remplir nos journées
446
st pas notre vie. Il n’est qu’un abandon aux lois
de
la poussière. ⁂ Ceci peut définir l’Antiquité : la panique de l’homme
447
ère. ⁂ Ceci peut définir l’Antiquité : la panique
de
l’homme environné par les voix innombrables de l’univers, et son reco
448
ue de l’homme environné par les voix innombrables
de
l’univers, et son recours à la raison pour leur imposer le silence. O
449
ui lui répond, mais la crainte majestueuse, mêlée
d’
orgueil, de l’esprit qui connaît son pouvoir et son acte, mesure la gr
450
nd, mais la crainte majestueuse, mêlée d’orgueil,
de
l’esprit qui connaît son pouvoir et son acte, mesure la grandeur du d
451
ellectuelle ou sophismes logiques, ce sont autant
de
formes d’une espèce de fuite en avant, autant de tentatives angoissée
452
e ou sophismes logiques, ce sont autant de formes
d’
une espèce de fuite en avant, autant de tentatives angoissées pour opp
453
s logiques, ce sont autant de formes d’une espèce
de
fuite en avant, autant de tentatives angoissées pour opposer à la ter
454
de formes d’une espèce de fuite en avant, autant
de
tentatives angoissées pour opposer à la terreur de Pan les ordonnance
455
e tentatives angoissées pour opposer à la terreur
de
Pan les ordonnances dictatoriales de l’esprit. Mais cet esprit n’est
456
à la terreur de Pan les ordonnances dictatoriales
de
l’esprit. Mais cet esprit n’est pas le tout de l’homme, — l’homme le
457
es de l’esprit. Mais cet esprit n’est pas le tout
de
l’homme, — l’homme le sait. Et sa dictature n’est pas l’ordre. Elle p
458
un monde. L’arbre devient colonne et ne pose plus
de
question. Enfermé maintenant dans ses architectures, l’homme se retro
459
tarchie rationnelle. Il a mauvaise conscience. «
De
la raison considérée comme un assassinat », écrit un jour un philosop
460
our un philosophe. Mais c’est encore une illusion
d’
orgueil. Le grand Pan n’est pas mort pour si peu, et sa domination ter
461
t. L’enfer logique est sans défaut. Le sens exact
d’
une question n’est donné que par la réponse. Mais l’homme antique n’a
462
r la réponse. Mais l’homme antique n’a pas en lui
de
quoi répondre à la Nature : il est lui-même une question que Dieu ne
463
as entendre. L’homme antique, c’est Adam dessaisi
de
sa royauté ; et l’univers antique, c’est son royaume abandonné à l’an
464
l’anarchie. Comment Adam ne s’effraierait-il pas
d’
une plainte qui s’adresse, en lui, à ce pouvoir qu’il sait avoir perdu
465
Nature se révolte en désordre. Elle veut la mort
de
l’homme parce qu’il ne sait plus la faire vivre. L’homme se défend br
466
la Nature sa tyrannie, moins il comprend le sens
de
sa haine anxieuse. Peut-être, s’il allait au-devant de ces voix, sans
467
haine anxieuse. Peut-être, s’il allait au-devant
de
ces voix, sans armes, les mains nues, au risque de sa vie, peut-être
468
ions aux dieux. ⁂ Un panthéisme angoissé, ressort
d’
une révolte rationnelle contre la Nature, — cette dialectique fondamen
469
ontre la Nature, — cette dialectique fondamentale
de
l’univers antique, ne pouvait se résoudre sur le plan humain et rien
470
es où se désespère le xxe siècle. Mais avant que
d’
y venir, et suivant l’ordre d’une Histoire dont la loi peut paraître s
471
cle. Mais avant que d’y venir, et suivant l’ordre
d’
une Histoire dont la loi peut paraître souverainement illogique, nous
472
e souverainement illogique, nous voici contraints
de
nous arrêter : l’an 33 de notre ère, la réponse éternelle à la perpét
473
, nous voici contraints de nous arrêter : l’an 33
de
notre ère, la réponse éternelle à la perpétuelle question du monde, n
474
l possède cette réponse, l’homme comprend le sens
de
la question. Et dans l’élan désordonné des êtres et des choses, il dé
475
ente ». Il sait qu’elle s’adresse en lui à ce qui
de
lui ressuscite, ayant reçu et accepté la mort. Il peut aimer : ce n’e
476
est ressuscité ! » Le Nouvel Adam vit. Le message
de
Pâques, c’est la mort du Grand Pan11. ⁂ Le Nouvel Adam vit : il ne vi
477
toire, et l’histoire temporelle est la succession
de
nos chutes, selon la Loi, à cause de la Loi. Rachetés, mais non pas p
478
ps. Restaurés, mais non pas dans la forme visible
de
ce monde. Ainsi la lutte se poursuit, entre les fatalités qui régisse
479
ntre les fatalités qui régissent le monde, séparé
de
l’homme, et l’homme, séparé de Dieu. Pourtant le dernier mot a été pr
480
t le monde, séparé de l’homme, et l’homme, séparé
de
Dieu. Pourtant le dernier mot a été prononcé. ⁂ L’effort de l’homme p
481
ourtant le dernier mot a été prononcé. ⁂ L’effort
de
l’homme pour imposer au monde — mais sans comprendre sa question — un
482
térisé dans ses effets bons et mauvais par le mot
de
séparation. D’une part, il constitue le ressort de toute invention ;
483
e séparation. D’une part, il constitue le ressort
de
toute invention ; et le symbole de cette activité, c’est la machine.
484
tue le ressort de toute invention ; et le symbole
de
cette activité, c’est la machine. D’autre part, il devait aboutir à u
485
à une distinction entre l’esprit et le corps qui,
d’
accidentelle qu’elle était à l’origine, allait être décrétée essentiel
486
ne tiendraient plus réellement compte du péché ni
de
la grâce. Et le symbole de cette passivité, proclamé par la Renaissan
487
ent compte du péché ni de la grâce. Et le symbole
de
cette passivité, proclamé par la Renaissance, c’est l’individu autono
488
le, et dont l’absurdité tragique évoque ce combat
d’
aveugles peint par un primitif flamand. L’humanité pâtit à tous les co
489
s’installe un matérialisme sans âme. ⁂ À ce degré
d’
évolution du mal, la conscience du danger s’obscurcit. Une espèce d’in
490
, la conscience du danger s’obscurcit. Une espèce
d’
indifférence monstrueuse se répand chez les civilisés. Formulée d’abor
491
orieuse du rationalisme scientifique. Les progrès
de
la technique ont supprimé définitivement la question. La Nature n’est
492
ature n’est plus que matières premières, surfaces
d’
exploitations, richesses du sous-sol ; par une charité dernière, jardi
493
rnière, jardin public. Mais cette forme grossière
de
la mutilation cosmique n’est pas plus dangereuse que la perversion sp
494
lui oppose depuis le xviiie siècle, sous le nom
de
Sentiment de la Nature. L’Occidental rationaliste naît dans une ambia
495
epuis le xviiie siècle, sous le nom de Sentiment
de
la Nature. L’Occidental rationaliste naît dans une ambiance chrétienn
496
naît dans une ambiance chrétienne qui le rassure
d’
une manière vague et suffisante quant aux intentions cachées de la Nat
497
vague et suffisante quant aux intentions cachées
de
la Nature. Il arrive alors que cet homme, trahissant la mission dont
498
ce morbide à l’endroit des réalités naturelles et
de
l’« attente ardente » des créatures. De la séparation tragique, maint
499
relles et de l’« attente ardente » des créatures.
De
la séparation tragique, maintenant consommée, il ne subsiste en l’hom
500
science effective. Seul, le désir qu’il dit avoir
de
« communier » avec la Nature, révèlerait encore qu’il pressent une sé
501
aration dont, par ailleurs, son optimisme, hérité
d’
une foi morte, lui dissimule l’irréparable gravité. La « communion ave
502
ien que l’abandon égoïste, et parfois voluptueux,
d’
un moi qui renonce à créer, qui renonce à souffrir, qui se rend sourd
503
uestion des choses en même temps qu’à la question
de
Dieu. Baptiser communion ce lyrisme de l’isolement, c’est un des tour
504
a question de Dieu. Baptiser communion ce lyrisme
de
l’isolement, c’est un des tours communs de l’orgueil romantique. On a
505
yrisme de l’isolement, c’est un des tours communs
de
l’orgueil romantique. On a coutume d’en rendre Rousseau responsable.
506
urs communs de l’orgueil romantique. On a coutume
d’
en rendre Rousseau responsable. Mais c’est à ses disciples qu’il faudr
507
a pas trompé sur son état. Le sentiment extatique
de
la nature, dans la Cinquième Rêverie, comment le décrit-il, sinon, pr
508
crit-il, sinon, précisément, comme « le sentiment
de
l’existence dépouillé de toute autre affection » (entendons : dégagé
509
nt, comme « le sentiment de l’existence dépouillé
de
toute autre affection » (entendons : dégagé de toute passion, comme a
510
lé de toute autre affection » (entendons : dégagé
de
toute passion, comme aussi de toute responsabilité !) ; il note bien
511
(entendons : dégagé de toute passion, comme aussi
de
toute responsabilité !) ; il note bien que ce sentiment permet l’écon
512
; il note bien que ce sentiment permet l’économie
de
tout « concours actif de l’âme » ; il pousse la lucidité jusqu’à marq
513
timent permet l’économie de tout « concours actif
de
l’âme » ; il pousse la lucidité jusqu’à marquer qu’un tel état n’est
514
mmandable, sauf à l’infortuné qu’on a « retranché
de
la société humaine, et qui ne peut plus rien faire ici-bas d’utile et
515
é humaine, et qui ne peut plus rien faire ici-bas
d’
utile et de bon pour autrui ni pour soi ». Enfin, il précise qu’on y a
516
et qui ne peut plus rien faire ici-bas d’utile et
de
bon pour autrui ni pour soi ». Enfin, il précise qu’on y atteint le m
517
e mieux couché dans un bateau « qui dérive au gré
de
l’eau ». Image assez frappante de l’homme qui conclut avec le monde u
518
i dérive au gré de l’eau ». Image assez frappante
de
l’homme qui conclut avec le monde une paix honteuse. Il est vrai que
519
un homme aux solitudes naturelles, la conscience
de
l’« étrangeté » d’un tel cas se voilait et faisait bientôt place à la
520
udes naturelles, la conscience de l’« étrangeté »
d’
un tel cas se voilait et faisait bientôt place à la satisfaction pauvr
521
faisait bientôt place à la satisfaction pauvrette
d’
une âme flattée de s’admirer dans l’infini d’un paysage. « Un paysage
522
ace à la satisfaction pauvrette d’une âme flattée
de
s’admirer dans l’infini d’un paysage. « Un paysage est un état d’âme
523
ette d’une âme flattée de s’admirer dans l’infini
d’
un paysage. « Un paysage est un état d’âme », disait Amiel au comble d
524
un état d’âme », disait Amiel au comble du délire
d’
isolement idéaliste. À l’autre extrême, celui du délire objectif ou te
525
qui ne voyait jamais dans un paysage que le plan
d’
une possible stratégie12 : nous aurons deux images d’un semblable égar
526
ne possible stratégie12 : nous aurons deux images
d’
un semblable égarement. Cette espèce-là de paganisme rassuré n’est pas
527
images d’un semblable égarement. Cette espèce-là
de
paganisme rassuré n’est pas le fait des seuls païens de notre époque.
528
anisme rassuré n’est pas le fait des seuls païens
de
notre époque. Le recours aux émotions fortes que la Nature est censée
529
cher dans l’invective prophétique ou dans la joie
de
la doctrine du salut. Songez à ces pasteurs qui, chaque printemps, sa
530
ui, chaque printemps, saisissent le premier rayon
de
soleil venu et s’envolent dans une apologétique naturaliste, dont peu
531
olent dans une apologétique naturaliste, dont peu
d’
auditeurs soupçonnent qu’elle n’est, au mieux, que le dernier relent,
532
antiques. ⁂ N’est-il pas significatif que le mot
de
Ehrfurcht qui, chez Goethe, traduit la vénération de l’homme en prése
533
Ehrfurcht qui, chez Goethe, traduit la vénération
de
l’homme en présence de la Nature ; que le mot de awe, qui exprime che
534
de l’homme en présence de la Nature ; que le mot
de
awe, qui exprime chez les lakistes ce même sentiment mêlé d’amour et
535
exprime chez les lakistes ce même sentiment mêlé
d’
amour et de terreur, que ces mots soient intraduisibles en notre langu
536
ez les lakistes ce même sentiment mêlé d’amour et
de
terreur, que ces mots soient intraduisibles en notre langue13 ? Alors
537
que les lyriques anglais nourrissent leur flamme
d’
une connaissance voluptueuse de l’antagonisme cosmique, la France rati
538
issent leur flamme d’une connaissance voluptueuse
de
l’antagonisme cosmique, la France rationaliste, catholique et citadin
539
catholique et citadine, théorise sur le sentiment
de
la Nature, sans jamais atteindre au pathétique existentiel de la ques
540
, sans jamais atteindre au pathétique existentiel
de
la question. Un seul, peut-être, a pressenti le sens chrétien de la N
541
Un seul, peut-être, a pressenti le sens chrétien
de
la Nature, c’est Benjamin Constant : on l’accusa de panthéisme. Const
542
la Nature, c’est Benjamin Constant : on l’accusa
de
panthéisme. Constant, drôle de corps ironique, esprit exact dont les
543
tant : on l’accusa de panthéisme. Constant, drôle
de
corps ironique, esprit exact dont les erreurs ne sont jamais que défa
544
dont les erreurs ne sont jamais que défaillances
de
caractère, cet « inconstant », ce païen calviniste, bien moins romain
545
en calviniste, bien moins romain que grec — hélas
d’
un hellénisme style Empire — voilà peut-être le seul auteur qui situe
546
e allemand. Il y décrit un état d’âme tout voisin
de
la « panique » antique14, mais qui, dans cet esprit nourri des Écritu
547
cet esprit nourri des Écritures, ne peut manquer
d’
évoquer aussitôt la réponse de l’Épître aux Romains : « Tout l’univers
548
es, ne peut manquer d’évoquer aussitôt la réponse
de
l’Épître aux Romains : « Tout l’univers s’adresse à l’homme dans un l
549
e ineffable qui se fait entendre dans l’intérieur
de
son âme, dans une partie de son être inconnue à lui-même, et qui tien
550
ndre dans l’intérieur de son âme, dans une partie
de
son être inconnue à lui-même, et qui tient à la fois des sens et de l
551
ue à lui-même, et qui tient à la fois des sens et
de
la pensée. Quoi de plus simple que d’imaginer que cet effort de la na
552
des sens et de la pensée. Quoi de plus simple que
d’
imaginer que cet effort de la nature pour pénétrer en nous n’est pas s
553
Quoi de plus simple que d’imaginer que cet effort
de
la nature pour pénétrer en nous n’est pas sans une mystérieuse signif
554
ponse n’est encore qu’une évasion. Cette « partie
de
son être inconnue à lui-même », il en fait aussitôt une réalité psych
555
ychologique, « et qui tient à la fois des sens et
de
la pensée ». Il en conclut qu’elle est « essentiellement du domaine d
556
conclut qu’elle est « essentiellement du domaine
de
la poésie ». L’origine du mythe contemporain de l’inconscient ne sera
557
e de la poésie ». L’origine du mythe contemporain
de
l’inconscient ne serait-elle pas, elle aussi, dans ce refus de croire
558
ent ne serait-elle pas, elle aussi, dans ce refus
de
croire à la réalité tout invisible de « l’homme nouveau » — réalité d
559
ns ce refus de croire à la réalité tout invisible
de
« l’homme nouveau » — réalité de foi ? ⁂ Seule, l’attitude chrétienne
560
é tout invisible de « l’homme nouveau » — réalité
de
foi ? ⁂ Seule, l’attitude chrétienne dit « oui » au monde avec une in
561
panthéisme, par un paradoxe dont nous avons tenté
de
suivre la logique fatale, isole l’individu dans un monde désert ; alo
562
isent l’homme en esprit et en corps, seul l’amour
d’
espérance, charité de la foi, nous permet d’apporter à la Nature une r
563
it et en corps, seul l’amour d’espérance, charité
de
la foi, nous permet d’apporter à la Nature une réponse qui dépasse sa
564
amour d’espérance, charité de la foi, nous permet
d’
apporter à la Nature une réponse qui dépasse sa question et qui attein
565
ion et qui atteint et qui embrasse l’être anxieux
de
la créature. En cet amour, enfin, l’homme et les choses accèdent au c
566
enfin, l’homme et les choses accèdent au concret
de
leur existence, assumant leur rapport de mutuelle responsabilité. Et
567
concret de leur existence, assumant leur rapport
de
mutuelle responsabilité. Et ce rapport est orienté vers l’homme. Mais
568
l’homme, vers le nouvel homme, vers les prémices
de
l’Esprit. En ce lieu où la Poésie devient prière et prophétie, où l’h
569
animaux rugissants, se tient debout en plein midi
de
la vision, vêtu de sa royale charité. P.-S. — Nul écrivain contemp
570
se tient debout en plein midi de la vision, vêtu
de
sa royale charité. P.-S. — Nul écrivain contemporain mieux que C.
571
su replacer l’homme dans la perspective biblique
de
la Création. Il faut lire ce chef-d’œuvre qu’est son dernier roman, A
572
deur calvinienne retrouvée, — par ce vieil ennemi
de
la Genève moderne ! Il faudrait parler longuement du « barthisme » d’
573
! Il faudrait parler longuement du « barthisme »
d’
une telle œuvre, — plus réel sans doute, parce qu’il est plus inconsci
574
oute, parce qu’il est plus inconscient, que celui
de
nos essais critiques. Mais Ramuz, comme ses héros, s’arrête encore au
575
se devant la Nature. La Résurrection nous délivre
de
cette angoisse en nous révélant l’éternité perdue de notre être. Mais
576
cette angoisse en nous révélant l’éternité perdue
de
notre être. Mais par là même, elle nous charge d’une nouvelle respons
577
de notre être. Mais par là même, elle nous charge
d’
une nouvelle responsabilité vis-à-vis de la Nature. 12. Mais on peut
578
devant la question. 13. Cf. la remarquable étude
de
Charles Du Bos sur Wordsworth, dans Vigile, IV, 1931. Elle est riche
579
point de vue. Mais là encore la funeste doctrine
de
l’analogia entis empêche l’auteur de conclure dans le sens paulinien,
580
ste doctrine de l’analogia entis empêche l’auteur
de
conclure dans le sens paulinien, et « naturalise » les réalités escha
581
eschatologiques. 14. « La nature n’a point fait
de
l’homme un être isolé, destiné seulement à cultiver la terre et à la
582
la peupler, et n’ayant avec tout ce qui n’est pas
de
son espèce que les rapports arides et fixes que l’utilité l’invite à
583
orizon sans bornes, ou se promenant sur les rives
de
la mer que viennent battre les vagues, ou levant les yeux vers le fir
584
ues, ou levant les yeux vers le firmament parsemé
d’
étoiles, n’ait éprouvé une sorte d’émotion qu’il lui était impossible
585
mament parsemé d’étoiles, n’ait éprouvé une sorte
d’
émotion qu’il lui était impossible d’analyser ou de définir. On dirait
586
vé une sorte d’émotion qu’il lui était impossible
d’
analyser ou de définir. On dirait que des voix descendent du haut des
587
’émotion qu’il lui était impossible d’analyser ou
de
définir. On dirait que des voix descendent du haut des cieux…, il sem
588
aut des cieux…, il semble y avoir je ne sais quoi
de
prophétique dans le vol pesant du corbeau, dans les cris funèbres des
589
nt du corbeau, dans les cris funèbres des oiseaux
de
la nuit, dans les rugissements éloignés des bêtes sauvages. » (Benjam
590
ns sur le Théâtre allemand). i. Rougemont Denis
de
, « Précisions sur la mort du grand Pan », Hic et Nunc, Paris, avril 1
591
lez à respondre à chascun qui vont demande rayson
de
l’espérance qui est en vous.15 » On n’oserait pas affirmer que le pro
592
.15 » On n’oserait pas affirmer que le protestant
d’
aujourd’hui, dans la moyenne, soit trop bien appareillé. Il advient mê
593
’incertitude. Il ne lui reste alors que le refuge
d’
un antidogmatisme cordial, sous le couvert duquel renaissent bien des
594
u libre examen dans la mesure où cela le dispense
de
répondre d’une façon précise et autorisée aux questions des incroyant
595
en dans la mesure où cela le dispense de répondre
d’
une façon précise et autorisée aux questions des incroyants ou des cat
596
oyants ou des catholiques ; mais il se soucie peu
d’
examiner « librement », comme le veut la formule rationaliste, ou fidè
597
t, comme le voulait Calvin, le contenu des dogmes
de
l’Église chrétienne. Cette indifférence est si profonde qu’elle rend
598
es hérésies qui se sont introduites dans la piété
de
nos églises au cours des deux derniers siècles. Non seulement on voit
599
ulement on voit des pasteurs prêcher l’équivalent
de
la doctrine du salut par les œuvres, mais encore on voit ces mêmes pa
600
mêmes pasteurs lire sans sourciller la confession
de
nos églises, qui proclame le salut par la foi seule. Bien plus, quand
601
vient rappeler avec force l’exigence évangélique
de
la mort à soi-même, vient définir à nouveau l’Église chrétienne comme
602
, chaque dimanche pourtant, prêchent l’exaltation
de
« l’âme humaine » par la religion, et qui définissent volontiers l’Ég
603
nt volontiers l’Église comme une force au service
de
la civilisation, s’étonner des rudesses de ce théologien, et affirmer
604
ervice de la civilisation, s’étonner des rudesses
de
ce théologien, et affirmer innocemment qu’il n’y a rien de bien nouve
605
ologien, et affirmer innocemment qu’il n’y a rien
de
bien nouveau dans ce message ; que c’est là ce qu’ils ont toujours di
606
urs dit. Ainsi le sel perd sa saveur. Les ravages
de
cette indifférence théologique sont tels qu’on se demande parfois si
607
quentés par des protestants, et si la prédication
de
Calvin ressuscité y provoquerait autre chose qu’une curiosité passagè
608
laient un peu moins fort, ce serait bien édifiant
de
les entendre… Le seul avantage de cette situation, c’est qu’elle a qu
609
t bien édifiant de les entendre… Le seul avantage
de
cette situation, c’est qu’elle a quelque peu immunisé les fidèles con
610
Mais combien s’en trouve-t-il qui soient capables
d’
expliquer ce qu’ils croient ? Combien qui puissent donner raison de ce
611
’ils croient ? Combien qui puissent donner raison
de
ce que dans la communion, et non pas dans le pain et le vin, il y a l
612
neur mort pour nous, impies ? Peut-être le fidèle
d’
aujourd’hui n’a-t-il plus, comme ses pères, la crainte païenne de se p
613
’a-t-il plus, comme ses pères, la crainte païenne
de
se présenter à la table sainte dans un état « moral » insuffisant ; m
614
» insuffisant ; mais sait-il bien que seul l’aveu
de
sa totale insuffisance morale lui donne le droit de saisir le salut d
615
sa totale insuffisance morale lui donne le droit
de
saisir le salut dont les signes sacrés sont le gage ? On est moins ex
616
eant. Nous renoncerons, dans cette nouvelle série
de
Hic et Nunc , à polémiser directement contre les hérésies qui fourmi
617
croyance moderne. Nous avons eu le tort, souvent,
d’
attaquer des erreurs auxquelles bien des fidèles tiennent aussi peu qu
618
sont point. Nous tenterons simplement, désormais,
de
« donner raison de l’espérance qui est en nous ». À nos lecteurs comm
619
nterons simplement, désormais, de « donner raison
de
l’espérance qui est en nous ». À nos lecteurs comme à nous-mêmes, nou
620
e à nous-mêmes, nous demanderons le simple effort
de
confronter la doctrine chrétienne telle que les bons docteurs de la R
621
a doctrine chrétienne telle que les bons docteurs
de
la Réforme nous l’enseignent, avec l’ensemble vague et contradictoire
622
seignent, avec l’ensemble vague et contradictoire
d’
idées, de sentiments, d’habitudes pieuses, de doctrines plus ou moins
623
avec l’ensemble vague et contradictoire d’idées,
de
sentiments, d’habitudes pieuses, de doctrines plus ou moins autorisée
624
e vague et contradictoire d’idées, de sentiments,
d’
habitudes pieuses, de doctrines plus ou moins autorisées, de préjugés,
625
oire d’idées, de sentiments, d’habitudes pieuses,
de
doctrines plus ou moins autorisées, de préjugés, que tout fidèle port
626
s pieuses, de doctrines plus ou moins autorisées,
de
préjugés, que tout fidèle porte en soi. Nous essaierons de reconstitu
627
és, que tout fidèle porte en soi. Nous essaierons
de
reconstituer l’« appareil » dogmatique dont une théologie ou une abse
628
il » dogmatique dont une théologie ou une absence
de
théologie également orgueilleuses ont cruellement privé tant de chrét
629
eilleuses ont cruellement privé tant de chrétiens
de
bonne volonté. Scientifiquement, il y faudrait de gros volumes. Mais
630
de bonne volonté. Scientifiquement, il y faudrait
de
gros volumes. Mais il suffit parfois de quelques phrases, d’un mot re
631
faudrait de gros volumes. Mais il suffit parfois
de
quelques phrases, d’un mot rendu à son vrai sens, pour orienter le dé
632
umes. Mais il suffit parfois de quelques phrases,
d’
un mot rendu à son vrai sens, pour orienter le débat intérieur, pour d
633
a question fût posée utilement. Il suffit parfois
d’
indiquer, de rappeler certains arguments ; de les grouper en brefs tra
634
ût posée utilement. Il suffit parfois d’indiquer,
de
rappeler certains arguments ; de les grouper en brefs traités. Dans l
635
fois d’indiquer, de rappeler certains arguments ;
de
les grouper en brefs traités. Dans le petit espace dont nous disposon
636
le petit espace dont nous disposons pour aborder
de
si grands sujets, force nous est de condenser, de couper court à des
637
pour aborder de si grands sujets, force nous est
de
condenser, de couper court à des développements qui parfois mettraien
638
de si grands sujets, force nous est de condenser,
de
couper court à des développements qui parfois mettraient de l’aise da
639
court à des développements qui parfois mettraient
de
l’aise dans nos pages. Notre ambition serait d’être relus. Nous aimon
640
t de l’aise dans nos pages. Notre ambition serait
d’
être relus. Nous aimons cette maxime de Nietzsche : « Ne rien écrire d
641
ion serait d’être relus. Nous aimons cette maxime
de
Nietzsche : « Ne rien écrire d’autre que ce qui pourrait désespérer l
642
mons cette maxime de Nietzsche : « Ne rien écrire
d’
autre que ce qui pourrait désespérer l’espèce d’hommes qui “se hâte”.
643
e d’autre que ce qui pourrait désespérer l’espèce
d’
hommes qui “se hâte”. » 15. I Pierre 3 :15. Version de Calvin. 16.
644
es qui “se hâte”. » 15. I Pierre 3 :15. Version
de
Calvin. 16. Et malgré certains catéchismes. Nous y reviendrons au n°
645
Nous y reviendrons au n° 8. j. Rougemont Denis
de
, « Éditorial », Hic et Nunc, Paris, juillet 1934, p. 65-67.
646
Les trois temps
de
la Parole (mai 1935)k On sait avec quelle insistance Kierkegaard r
647
ses œuvres proprement religieuses, sur la notion
de
« contemporanéité » avec le Christ. Toute la polémique de Kierkegaard
648
temporanéité » avec le Christ. Toute la polémique
de
Kierkegaard est dirigée contre un certain esprit historique ou histor
649
qui tend à nous faire croire qu’après 19 siècles
de
christianisme, le « scandale » du Christ s’est atténué. Cette longue
650
ogmes appris, nous dispenseraient progressivement
de
faire en présence du Verbe divin incarné dans un homme juif, l’acte d
651
du Verbe divin incarné dans un homme juif, l’acte
de
foi impossible à l’homme, celui que Pierre fit lorsqu’il dit à Jésus
652
s du Dieu vivant ! » L’Histoire, le développement
de
la tradition, l’accoutumance religieuse nous faciliteraient cette rec
653
t ainsi, sans que nous nous en doutions, à l’acte
de
l’Esprit. Le scandale s’évanouirait, pour faire place à une adhésion
654
i toucher, ni comprendre humainement. Cette thèse
de
Kierkegaard, sous la forme polémique et non systématique qu’il lui a
655
on systématique qu’il lui a donnée, peut prêter à
de
graves malentendus. À celui-ci en particulier : certains seront tenté
656
celui-ci en particulier : certains seront tentés
de
croire que tout l’effort de la pensée chrétienne doit être de remonte
657
ertains seront tentés de croire que tout l’effort
de
la pensée chrétienne doit être de remonter l’Histoire, de se transpor
658
e tout l’effort de la pensée chrétienne doit être
de
remonter l’Histoire, de se transporter en imagination aux premières a
659
nsée chrétienne doit être de remonter l’Histoire,
de
se transporter en imagination aux premières années de notre ère, en J
660
e transporter en imagination aux premières années
de
notre ère, en Judée, de nous remettre tant bien que mal dans la situa
661
tion aux premières années de notre ère, en Judée,
de
nous remettre tant bien que mal dans la situation de Pierre devant Jé
662
nous remettre tant bien que mal dans la situation
de
Pierre devant Jésus, bref, de nous rendre contemporains de Jésus-Chri
663
l dans la situation de Pierre devant Jésus, bref,
de
nous rendre contemporains de Jésus-Christ en faisant abstraction du t
664
devant Jésus, bref, de nous rendre contemporains
de
Jésus-Christ en faisant abstraction du temps qui nous sépare de son a
665
t en faisant abstraction du temps qui nous sépare
de
son apparition terrestre. Notre formation historique et psychologique
666
ique nous y invite. Bien plus, la pente naturelle
de
notre esprit nous y pousse. D’une part, nous ne pouvons nous empêcher
667
pousse. D’une part, nous ne pouvons nous empêcher
de
nous « transporter par la pensée » à l’époque et aux lieux historique
668
e » à l’époque et aux lieux historiques où la vie
de
Jésus s’est écoulée. D’autre part, nous ne pouvons nous empêcher, apr
669
e part, nous ne pouvons nous empêcher, après tant
d’
auteurs religieux — qui ne sont pas tous américains — de nous représen
670
urs religieux — qui ne sont pas tous américains —
de
nous représenter un « Jésus-homme », un « ami suprême », présent parm
671
rait être confondu, par certains, avec l’exigence
de
la « contemporanéité » de Kierkegaard. Il a bien pour objet de nous r
672
rtains, avec l’exigence de la « contemporanéité »
de
Kierkegaard. Il a bien pour objet de nous rendre, d’une façon ou d’un
673
mporanéité » de Kierkegaard. Il a bien pour objet
de
nous rendre, d’une façon ou d’une autre, « contemporains » de l’appar
674
Kierkegaard. Il a bien pour objet de nous rendre,
d’
une façon ou d’une autre, « contemporains » de l’apparition de Jésus-C
675
a bien pour objet de nous rendre, d’une façon ou
d’
une autre, « contemporains » de l’apparition de Jésus-Christ. Mais ne
676
re, d’une façon ou d’une autre, « contemporains »
de
l’apparition de Jésus-Christ. Mais ne jouons pas sur le mot pour fair
677
ou d’une autre, « contemporains » de l’apparition
de
Jésus-Christ. Mais ne jouons pas sur le mot pour faire dire à Kierkeg
678
faire dire à Kierkegaard exactement le contraire
de
ce qu’il entendait. Car il est évident que notre double effort pour n
679
Lorsque nous nous laissons aller à cette tendance
de
notre esprit — car c’est bien de la même tendance qu’il s’agit dans l
680
à cette tendance de notre esprit — car c’est bien
de
la même tendance qu’il s’agit dans les deux cas — nous ne pensons qu’
681
us ne pensons qu’aux 19 siècles qui nous séparent
de
Jésus-homme, et que nous parvenons plus ou moins aisément à survoler,
682
dain, profondément déçus, dans la réalité profane
d’
aujourd’hui. Nous oublions tout simplement ce fait : c’est qu’entre le
683
une éternité ; il n’y a pas une certaine quantité
de
temps et d’histoire, mais l’abîme absolu d’une différence de qualité
684
; il n’y a pas une certaine quantité de temps et
d’
histoire, mais l’abîme absolu d’une différence de qualité ; il n’y a p
685
ntité de temps et d’histoire, mais l’abîme absolu
d’
une différence de qualité ; il n’y a pas une distance, mais une ruptur
686
d’histoire, mais l’abîme absolu d’une différence
de
qualité ; il n’y a pas une distance, mais une rupture — notre péché.
687
ce Jésus-homme si cher à la théologie moderniste (
de
Lessing à Fosdick), si cher aux historiens, aux psychologues, aux par
688
r aux historiens, aux psychologues, aux partisans
de
l’expérience religieuse « sentie et vécue ». Mais si c’est le péché q
689
t vécue ». Mais si c’est le péché qui nous sépare
de
Christ, pensons-nous rejoindre Jésus-Christ par les artifices d’une p
690
ons-nous rejoindre Jésus-Christ par les artifices
d’
une pensée justement soumise au péché ? D’autre part, il nous est impo
691
e au péché ? D’autre part, il nous est impossible
de
nous arrêter de penser… Telle est l’impasse où nous conduisent non se
692
utre part, il nous est impossible de nous arrêter
de
penser… Telle est l’impasse où nous conduisent non seulement la pensé
693
aine irrépressible, dès que la vigilance critique
d’
une sobre théologie se relâche. ⁂ Nous ne sortirons jamais une fois po
694
. ⁂ Nous ne sortirons jamais une fois pour toutes
d’
une telle impasse. Au contraire, toutes nos théories nous y ramènent.
695
constamment la vraie nature, le caractère absolu
de
cette difficulté. La question précise que nous nous poserons sera don
696
on historico-psychologique, lorsque nous essayons
de
prendre au sérieux l’exigence de la contemporanéité avec le Christ de
697
ue nous essayons de prendre au sérieux l’exigence
de
la contemporanéité avec le Christ des évangiles ? La Dogmatique de Ba
698
éité avec le Christ des évangiles ? La Dogmatique
de
Barth nous offre maints exemples de mise au point théologique des thè
699
La Dogmatique de Barth nous offre maints exemples
de
mise au point théologique des thèses parfois fort équivoques de Kierk
700
nt théologique des thèses parfois fort équivoques
de
Kierkegaard. Le plus frappant est peut-être fourni par le passage où
701
fourni par le passage où Barth traite précisément
de
la notion de contemporanéité avec la Parole de Dieu. Essayons de résu
702
passage où Barth traite précisément de la notion
de
contemporanéité avec la Parole de Dieu. Essayons de résumer sa descri
703
nt de la notion de contemporanéité avec la Parole
de
Dieu. Essayons de résumer sa description extrêmement précise et vigou
704
contemporanéité avec la Parole de Dieu. Essayons
de
résumer sa description extrêmement précise et vigoureuse des trois te
705
extrêmement précise et vigoureuse des trois temps
de
la Parole de Dieu. Nous la trouvons aux pages 148 à 155 du premier to
706
récise et vigoureuse des trois temps de la Parole
de
Dieu. Nous la trouvons aux pages 148 à 155 du premier tome (en cours
707
ons aux pages 148 à 155 du premier tome (en cours
de
traduction). Il y a trois sortes de temps, dit Barth : le temps de Jé
708
ome (en cours de traduction). Il y a trois sortes
de
temps, dit Barth : le temps de Jésus-Christ, — le temps de ses témoin
709
l y a trois sortes de temps, dit Barth : le temps
de
Jésus-Christ, — le temps de ses témoins bibliques, — le temps de l’Ég
710
dit Barth : le temps de Jésus-Christ, — le temps
de
ses témoins bibliques, — le temps de l’Église (notre temps). Ce sont
711
, — le temps de ses témoins bibliques, — le temps
de
l’Église (notre temps). Ce sont là les trois temps de la Parole. Jésu
712
’Église (notre temps). Ce sont là les trois temps
de
la Parole. Jésus-Christ est la Parole de Dieu (Jean i). Les écrits de
713
is temps de la Parole. Jésus-Christ est la Parole
de
Dieu (Jean i). Les écrits des prophètes et des apôtres — l’Ancien et
714
en et le Nouveau Testament — sont les témoignages
de
la Parole. Enfin, la prédication de l’Église procède de ces témoignag
715
s témoignages de la Parole. Enfin, la prédication
de
l’Église procède de ces témoignages et renvoie, au-delà d’elle-même,
716
Parole. Enfin, la prédication de l’Église procède
de
ces témoignages et renvoie, au-delà d’elle-même, à travers eux, à la
717
se procède de ces témoignages et renvoie, au-delà
d’
elle-même, à travers eux, à la Parole même de Dieu. « Autre est le tem
718
delà d’elle-même, à travers eux, à la Parole même
de
Dieu. « Autre est le temps du parler direct et originel de Dieu lui-m
719
« Autre est le temps du parler direct et originel
de
Dieu lui-même dans sa Révélation, le temps de Jésus-Christ, le temps
720
nel de Dieu lui-même dans sa Révélation, le temps
de
Jésus-Christ, le temps de celui qui a été annoncé aux prophètes et au
721
sa Révélation, le temps de Jésus-Christ, le temps
de
celui qui a été annoncé aux prophètes et aux apôtres pour qu’ils en t
722
u’ils en témoignent ensuite, — autre est le temps
de
ce témoignage, le temps de la prophétie et de l’apostolat, le temps d
723
, — autre est le temps de ce témoignage, le temps
de
la prophétie et de l’apostolat, le temps de Pierre sur lequel Christ
724
mps de ce témoignage, le temps de la prophétie et
de
l’apostolat, le temps de Pierre sur lequel Christ bâtit son Église…,
725
temps de la prophétie et de l’apostolat, le temps
de
Pierre sur lequel Christ bâtit son Église…, — autre encore est le tem
726
st bâtit son Église…, — autre encore est le temps
de
cette Église même, le temps de la prédication dérivée de la parole de
727
ncore est le temps de cette Église même, le temps
de
la prédication dérivée de la parole des prophètes et des apôtres, ori
728
e Église même, le temps de la prédication dérivée
de
la parole des prophètes et des apôtres, orientée vers cette parole et
729
s apôtres, orientée vers cette parole et recevant
d’
elle sa norme. » Or, ces temps différents ne sont pas différenciés seu
730
éloignement des siècles et l’évolution historique
de
l’humanité. Ils résultent d’attitudes différentes que Dieu adopte en
731
évolution historique de l’humanité. Ils résultent
d’
attitudes différentes que Dieu adopte en face de l’homme. Ils représen
732
face de l’homme. Ils représentent trois activités
de
Dieu bien distinctes. « Cette position différente dans la hiérarchie
733
s. « Cette position différente dans la hiérarchie
de
Dieu distingue les trois temps d’une manière tout à fait particulière
734
s la hiérarchie de Dieu distingue les trois temps
d’
une manière tout à fait particulière, qui n’est pas celle dont se dist
735
qui n’est pas celle dont se distinguent les temps
de
l’homme en dehors de la Parole de Dieu, et qui dépend ici de la disti
736
guent les temps de l’homme en dehors de la Parole
de
Dieu, et qui dépend ici de la distinction propre aux temps de la Paro
737
en dehors de la Parole de Dieu, et qui dépend ici
de
la distinction propre aux temps de la Parole. » Autrement dit, ces tr
738
qui dépend ici de la distinction propre aux temps
de
la Parole. » Autrement dit, ces trois temps ne sont pas dans le prolo
739
ne sont pas dans le prolongement historique l’un
de
l’autre ; ce ne sont pas trois portions successives du même temps dan
740
dans lequel nous vivons, mais bien trois espèces
de
temps distinctes. D’où il résulte que l’on ne peut pas passer de l’un
741
ons, mais bien trois espèces de temps distinctes.
D’
où il résulte que l’on ne peut pas passer de l’un à l’autre par un mou
742
ctes. D’où il résulte que l’on ne peut pas passer
de
l’un à l’autre par un mouvement continu, de proche en proche. Il faut
743
asser de l’un à l’autre par un mouvement continu,
de
proche en proche. Il faut un saut17. Prenons un exemple fameux : celu
744
faut un saut17. Prenons un exemple fameux : celui
de
Pierre à Césarée de Philippe. Certes, Pierre vit dans le même temps q
745
Pierre vit dans le même temps que Jésus, le rabbi
de
Nazareth, mais il ne devient le « contemporain » du Fils de Dieu qu’à
746
h, mais il ne devient le « contemporain » du Fils
de
Dieu qu’à l’instant où, par la foi, il prononce : « Tu es le Christ,
747
, qui lui fait faire le « pas », le saut du temps
de
la prophétie au temps de la présence. Ou encore : c’est Dieu seul qui
748
e : c’est Dieu seul qui peut faire passer l’homme
d’
un temps à l’autre, c’est par le « bon plaisir » de Dieu seul que nous
749
’un temps à l’autre, c’est par le « bon plaisir »
de
Dieu seul que nous pouvons devenir contemporains de sa Parole. Nicodè
750
Dieu seul que nous pouvons devenir contemporains
de
sa Parole. Nicodème a beau vivre en même temps que le Christ : il ne
751
ète, il n’est pas son contemporain. Les disciples
d’
Emmaüs ont beau cheminer aux côtés du Christ : ils ne deviennent ses c
752
Calvaire, l’un seulement devient le contemporain
de
son Sauveur. Ce dernier exemple fait sentir l’échec final de toute mé
753
eur. Ce dernier exemple fait sentir l’échec final
de
toute méthode historique qui voudrait nous rendre « contemporains » d
754
orique qui voudrait nous rendre « contemporains »
de
Christ. Car cette méthode, par elle-même, ne peut nous conduire qu’à
755
ge des apôtres, la Bible, est le vis-à-vis absolu
de
l’Église dans notre temps. Il dépend de Dieu seul, et nullement de no
756
is absolu de l’Église dans notre temps. Il dépend
de
Dieu seul, et nullement de nos efforts, que nous passions de notre te
757
notre temps. Il dépend de Dieu seul, et nullement
de
nos efforts, que nous passions de notre temps à ce temps des apôtres,
758
l, et nullement de nos efforts, que nous passions
de
notre temps à ce temps des apôtres, ou à ce temps de la Parole faite
759
notre temps à ce temps des apôtres, ou à ce temps
de
la Parole faite chair. ⁂ On dira qu’il ne s’agit là que d’un schéma.
760
ole faite chair. ⁂ On dira qu’il ne s’agit là que
d’
un schéma. Certes, et j’ai dû schématiser encore les pages que Barth c
761
oudre concrètement nos problèmes. Elle a pour but
de
les poser, de nous donner un instrument critique qui nous renvoie san
762
ment nos problèmes. Elle a pour but de les poser,
de
nous donner un instrument critique qui nous renvoie sans cesse à la r
763
, et qui corrige le mouvement naturel et perverti
de
nos pensées. Cette position du problème, que nous venons d’esquisser
764
ées. Cette position du problème, que nous venons
d’
esquisser, nous permettra de situer honnêtement les essais qui compose
765
lème, que nous venons d’esquisser, nous permettra
de
situer honnêtement les essais qui composent ce numéro de Hic et Nunc.
766
er honnêtement les essais qui composent ce numéro
de
Hic et Nunc. Qu’il soit donc bien établi : 1° que les efforts de notr
767
Qu’il soit donc bien établi : 1° que les efforts
de
notre imagination, qu’ils s’expriment sous une forme franchement litt
768
forme franchement littéraire18, ou sous la forme
de
méditations religieuses, ou même sous forme de sermons, sont par eux-
769
mêmes absolument vains, s’ils prétendent, à force
d’
habileté, de science, de poésie ou d’éloquence, nous rendre « contempo
770
ment vains, s’ils prétendent, à force d’habileté,
de
science, de poésie ou d’éloquence, nous rendre « contemporains » de l
771
s’ils prétendent, à force d’habileté, de science,
de
poésie ou d’éloquence, nous rendre « contemporains » de la Parole ou
772
ent, à force d’habileté, de science, de poésie ou
d’
éloquence, nous rendre « contemporains » de la Parole ou de ses témoin
773
sie ou d’éloquence, nous rendre « contemporains »
de
la Parole ou de ses témoins bibliques ; 2° qu’ils ne peuvent avoir d’
774
ce, nous rendre « contemporains » de la Parole ou
de
ses témoins bibliques ; 2° qu’ils ne peuvent avoir d’utilité que s’il
775
es témoins bibliques ; 2° qu’ils ne peuvent avoir
d’
utilité que s’ils concrétisent à nos yeux les limites de nos imaginati
776
ité que s’ils concrétisent à nos yeux les limites
de
nos imaginations. Reconnaître, éprouver péniblement ces limites, voil
777
ver péniblement ces limites, voilà la vraie leçon
de
nos voyages en Palestine, réels ou figurés. Nous ne pouvons nous empê
778
, réels ou figurés. Nous ne pouvons nous empêcher
d’
imaginer. Le sermon le plus sec, le plus littéralement biblique, compo
779
téralement biblique, comportera toujours une part
de
« littérature », une tentative de représenter aux yeux des fidèles le
780
ujours une part de « littérature », une tentative
de
représenter aux yeux des fidèles les choses qu’il annonce. L’importan
781
e signification19. Quand nous parlons des témoins
de
la Bible, nous n’avons pas à nous préoccuper outre mesure d’exactitud
782
, nous n’avons pas à nous préoccuper outre mesure
d’
exactitude historique, archéologique, etc. La plus grande fantaisie no
783
rande fantaisie nous est permise dans nos efforts
de
représentation : puisqu’aussi bien, tous ces efforts ne pourront jama
784
ns un certain sens, on peut dire que l’échec seul
de
ces efforts leur confère, s’il est déclaré expressément, s’il est épr
785
r l’orateur et par l’auditeur comme une nécessité
de
notre nature, leur sens de prédication. Par le véhicule de l’histoire
786
ur comme une nécessité de notre nature, leur sens
de
prédication. Par le véhicule de l’histoire ou de notre imagination —
787
nature, leur sens de prédication. Par le véhicule
de
l’histoire ou de notre imagination — machine à remonter le temps —, n
788
de prédication. Par le véhicule de l’histoire ou
de
notre imagination — machine à remonter le temps —, nous ne rejoindron
789
ent. Nous avons voulu confronter avec les témoins
de
la Bible, les « problèmes » — le mot est bien faible — qui se posent
790
th dit simplement « un pas », soucieux sans doute
de
se distinguer des philosophes « existentiels », qui ont mis à toutes
791
es et romantiques la notion, chère à Kierkegaard,
de
saut. 18. ou cinématographique ! Voir le film Golgotha. Ou encore la
792
que ! Voir le film Golgotha. Ou encore la Passion
d’
Oberammergau ! 19. C’est le rôle que joue la parole peinte par Grünew
793
amais aucun juif ne l’a été. k. Rougemont Denis
de
, « Les trois temps de la Parole », Hic et Nunc, Paris, mai 1935, p. 1
794
a été. k. Rougemont Denis de, « Les trois temps
de
la Parole », Hic et Nunc, Paris, mai 1935, p. 152-158.
795
quoi ? Au nom de l’expérience que vous n’avez pas
d’
expérience ! W. Monod, Le Problème du Bien, I, p. 512. Nous avions d
796
ne l’ignorez pas — c’est cet illustre professeur
de
théologie dogmatique dont l’esprit de répartie et la finesse à distin
797
professeur de théologie dogmatique dont l’esprit
de
répartie et la finesse à distinguer chez son interlocuteur, quel qu’i
798
n interlocuteur, quel qu’il soit, le point faible
d’
un raisonnement, qu’il se borne à faire apparaître par une simple ques
799
borne à faire apparaître par une simple question
de
bon sens, a fait toute la célébrité. On se plaît à le dire : il n’a p
800
la célébrité. On se plaît à le dire : il n’a pas
d’
âge. Sa barbe blanche et ses joues roses, son grand front d’humaniste
801
barbe blanche et ses joues roses, son grand front
d’
humaniste et ses yeux vifs de Méditerranéen lui composent un visage cl
802
ses, son grand front d’humaniste et ses yeux vifs
de
Méditerranéen lui composent un visage classique, que d’aucuns n’hésit
803
iterranéen lui composent un visage classique, que
d’
aucuns n’hésitent pas à comparer à celui du Vinci, que d’autres, simpl
804
ui du Vinci, que d’autres, simplement, qualifient
de
patriarcal. Tel est donc Nicodème, et tel est son aspect vénérable. P
805
t tel est son aspect vénérable. Pour ses qualités
d’
âme, j’espère que ce récit d’une soirée passée dans son salon pourra f
806
e. Pour ses qualités d’âme, j’espère que ce récit
d’
une soirée passée dans son salon pourra faire deviner quelques-unes d’
807
, revint à la théologie avec les premières tasses
de
café. Un étudiant feuilletait un gros ouvrage posé en évidence sur le
808
Un monument ! » prononça Nicodème en s’approchant
de
l’étudiant. Nous nous assîmes en cercle autour du patriarche. Et l’en
809
fred Monod, m’écriai-je, n’est-ce pas celui qu’un
de
mes amis, effrayé de son humanisme, a baptisé l’homme qui ne veut pas
810
je, n’est-ce pas celui qu’un de mes amis, effrayé
de
son humanisme, a baptisé l’homme qui ne veut pas mourir ? » — Il y a
811
pas mourir ? » — Il y a des gens qui ont le sens
de
la gaffe, et le sort, je le crains, a voulu que j’en fusse. Mais Nico
812
eux débat. Je n’ignore pas que l’éternel problème
de
la mort à soi-même et au monde est l’un de ceux qui préoccupent le pl
813
oblème de la mort à soi-même et au monde est l’un
de
ceux qui préoccupent le plus, et à très juste titre, nos jeunes barth
814
eunes barthiens, kierkegaardiens et « réacteurs »
de
diverses nuances. Je m’étonne seulement de vous voir prendre à votre
815
eurs » de diverses nuances. Je m’étonne seulement
de
vous voir prendre à votre compte un jugement si désobligeant, — si !
816
pas, j’ai surmonté depuis longtemps toute espèce
d’
amour-propre en ces matières ! —, un jugement si désobligeant, dis-je,
817
—, un jugement si désobligeant, dis-je, pour l’un
de
mes collègues et amis les plus chers. Je serais fort curieux de savoi
818
es et amis les plus chers. Je serais fort curieux
de
savoir sur quoi vous appuyez, précisément, ce jugement-là : « L’homme
819
mme qui ne veut pas mourir. » Moi. — Il y aurait
de
l’impertinence à affirmer rien de « précis », en se rapportant à quel
820
. — Il y aurait de l’impertinence à affirmer rien
de
« précis », en se rapportant à quelque affirmation choisie entre tren
821
isie entre trente-six-mille autres dans l’ouvrage
de
M. Monod. Vous savez qu’il a 3000 pages. Mais que dites-vous de ces d
822
ous savez qu’il a 3000 pages. Mais que dites-vous
de
ces deux phrases qui me sont tombées sous les yeux tandis que je parc
823
petit carnet) : « Je reste sur le terrain concret
de
l’humble “bon sens” (cartésien ?), et de la quotidienne “expérience”
824
concret de l’humble “bon sens” (cartésien ?), et
de
la quotidienne “expérience” chrétienne. » (Tome III, p. 287.) Et ceci
825
287.) Et ceci : « Un homme ne peut se dépouiller
de
son humanité. » Par malheur, j’ai oublié la référence. Nicodème. — P
826
Moi. — M. Monod dit même : « Le terrain concret
de
l’humble bon sens cartésien. » Étiez-vous vraiment « cartésien » en c
827
ien l’êtes-vous devenu ? Peut-on dire que l’homme
de
la table rase se soit placé sur le « terrain concret de l’humble bon
828
table rase se soit placé sur le « terrain concret
de
l’humble bon sens » ? Pardonnez-moi d’ergoter… Mais je sais bien ce q
829
in concret de l’humble bon sens » ? Pardonnez-moi
d’
ergoter… Mais je sais bien ce que M. Monod voulait dire : il pense que
830
placent plus volontiers sur le « terrain abstrait
de
l’orgueilleux paradoxe ». Il ne nous pardonne guère de faire table ra
831
orgueilleux paradoxe ». Il ne nous pardonne guère
de
faire table rase de ce qu’il appelle « l’expérience chrétienne ». U
832
». Il ne nous pardonne guère de faire table rase
de
ce qu’il appelle « l’expérience chrétienne ». Un étudiant. — Tenez,
833
dont vous aviez perdu la référence. Permettez-moi
de
vous le lire. C’est à la page 512 du premier tome : « … n’avoir pas f
834
… n’avoir pas fait une expérience est à la portée
d’
un quelconque. À ceux qui préconisent un pareil idéal (au moins en app
835
u moins en apparence, entraînés par l’exagération
de
leurs formules téméraires) je dirais volontiers : un homme ne peut se
836
irais volontiers : un homme ne peut se dépouiller
de
son humanité ; un chrétien ne peut se dégager de sa “divinité” (au se
837
de son humanité ; un chrétien ne peut se dégager
de
sa “divinité” (au sens où saint Chrysostome prenait le terme). Et pui
838
quoi ? Au nom de l’expérience que vous n’avez pas
d’
expérience… » Mme Nicodème. — Comme c’est bien dit ! Ce M. Monod a vr
839
me c’est bien dit ! Ce M. Monod a vraiment le don
de
la formule. Et quelle charité dans tout ce qu’il écrit ! Poupette (f
840
arité dans tout ce qu’il écrit ! Poupette (fille
de
Nicodème, 20 ans). — C’est extrêmement suggestif ! Et c’est tellement
841
seule expérience qu’on fait, c’est qu’on n’a pas
d’
expérience… Je n’osais pas le dire, mais c’est ce que je sens profondé
842
est, comme moi d’ailleurs, un partisan impénitent
de
l’expérience chrétienne, de sa piété vécue et chaque jour expérimenté
843
n partisan impénitent de l’expérience chrétienne,
de
sa piété vécue et chaque jour expérimentée tout à nouveau ! J’ai conn
844
au ! J’ai connu des évangélistes qui avaient fait
d’
admirables expériences, et leurs récits t’eussent fait le plus grand b
845
grand bien. Certes, il y a des abus partout, mais
de
là à condamner la notion même d’expérience ! N’est-ce pas au récit de
846
us partout, mais de là à condamner la notion même
d’
expérience ! N’est-ce pas au récit de ses miracles que je l’ai reconnu
847
notion même d’expérience ! N’est-ce pas au récit
de
ses miracles que je l’ai reconnu ? Un miracle, voilà une expérience,
848
t combien édifiante ! (Se tournant vers un groupe
de
jeunes barthiens très excités qui échangent dans un coin des coups de
849
très excités qui échangent dans un coin des coups
de
coude significatifs.) Enfin, mes chers amis, si le christianisme n’es
850
ce à la fois humaine et divine ! — que reste-t-il
de
la vie chrétienne ? Je vous le demande ! Mme Nicodème (sèchement). —
851
bien, il reste simplement le message existentiel
de
la Parole de Dieu ! Il me semble que c’est assez ! — Ici s’engagea
852
te simplement le message existentiel de la Parole
de
Dieu ! Il me semble que c’est assez ! — Ici s’engagea un débat extr
853
e que voulait établir le barthien entre la notion
d’
expérience et le concept d’existentiel, Nicodème soutenait leur identi
854
rthien entre la notion d’expérience et le concept
d’
existentiel, Nicodème soutenait leur identité et alla même jusqu’à cit
855
tité et alla même jusqu’à citer certaines paroles
de
Kierkegaard à l’appui de sa thèse : « Kierkegaard, ce prince du parad
856
oliment mon ami Monod. » Selon Nicodème, le terme
d’
existentiel n’était qu’une locution philosophique « importée d’Allemag
857
n’était qu’une locution philosophique « importée
d’
Allemagne », inassimilable pour nos « clairs esprits latins », et qui,
858
ême chose qu’expérience. J’avoue que je fus tenté
de
lui donner raison. Et je l’eusse fait avec plaisir si les arguments i
859
s à l’appui de sa thèse, assez juste, eussent été
d’
une autre nature que ceux de M. Dürrleman… Je ne sais si vous sentez c
860
ez juste, eussent été d’une autre nature que ceux
de
M. Dürrleman… Je ne sais si vous sentez comme moi, mais cette « clart
861
s cette « clarté latine » me donne toujours envie
de
dire des grossièretés, — en allemand, par-dessus le marché. Or, le to
862
, — en allemand, par-dessus le marché. Or, le ton
de
cette soirée avait été jusqu’à ce moment des plus polis, peut-être mê
863
de conviction, quel que fut par ailleurs l’objet
de
la conviction. Une belle soirée théologique ! On invoquait tantôt Hei
864
comprises que Sabatier, tantôt l’humble bon sens
de
M. Monod, tantôt la science universelle du même auteur. Cette espèce
865
science universelle du même auteur. Cette espèce
de
cacophonie, vous le savez, est assez habituelle dans les entretiens d
866
e savez, est assez habituelle dans les entretiens
de
l’élite. Soudain, j’eus une idée paradoxale : je proposai de lire l’É
867
Soudain, j’eus une idée paradoxale : je proposai
de
lire l’Évangile. Je m’emparai d’une Bible qui se trouvait posée sur l
868
le : je proposai de lire l’Évangile. Je m’emparai
d’
une Bible qui se trouvait posée sur le bureau et qui s’ouvrit d’elle-m
869
i se trouvait posée sur le bureau et qui s’ouvrit
d’
elle-même à la page que je cherchais. Je lus ceci : « Mais il y eut un
870
n chef des juifs, qui vint, lui, auprès de Jésus,
de
nuit, et lui dit : Rabbi, nous savons que tu es un docteur venu de Di
871
me ne naît de nouveau, il ne peut voir le Royaume
de
Dieu. Nicodème lui dit : Comment un homme peut-il naître quand il est
872
quand il est vieux ? Peut-il rentrer dans le sein
de
sa mère et naître ? Jésus répondit : En vérité, en vérité, je te le d
873
ité, en vérité, je te le dis, si un homme ne naît
d’
eau et d’Esprit, il ne peut entrer dans le Royaume de Dieu… Nicodème l
874
érité, je te le dis, si un homme ne naît d’eau et
d’
Esprit, il ne peut entrer dans le Royaume de Dieu… Nicodème lui dit :
875
au et d’Esprit, il ne peut entrer dans le Royaume
de
Dieu… Nicodème lui dit : Comment cela peut-il se faire ? Jésus lui ré
876
is peu à peu une vivacité fébrile parut s’emparer
de
sa voix. Nicodème. — « …Ce que nous savons, nous le disons. Ce que n
877
… Moi, Nicodème, docteur et professeur des choses
de
Dieu… Ce que j’ai vu et entendu c’est cela qu’il me faut attester… Et
878
?… J’ai vu que l’homme ne peut pas se dépouiller
de
son humanité, et je le dis, et je l’atteste ! C’est là mon expérience
879
radition, ah ! que c’est donc facile et rassurant
de
jeter la pierre à Nicodème ! Nicodème, l’orgueilleux Nicodème qui ref
880
l’orgueilleux Nicodème qui refusait si méchamment
de
comprendre, et vous, vous comprenez si bien, n’est-ce pas, si facilem
881
eigne, si ce n’est ce qu’il a vécu, entendu et vu
de
ses yeux, son expérience la plus profonde, la seule chose dont il pui
882
it bien d’autres. J’en parle aussi, j’ai le droit
d’
en parler… À mon âge, j’en ai même le devoir, vis-à-vis de cette jeune
883
r l’expérience ! », disent-ils. Que font-ils donc
de
Ses miracles, et des actions de ses apôtres, celles que j’ai vues et
884
Que font-ils donc de Ses miracles, et des actions
de
ses apôtres, celles que j’ai vues et que j’atteste ! Mais voilà… il y
885
nce-là, celle-là justement — rentrer dans le sein
de
sa mère ! Et tous ces galopins viennent aujourd’hui prétendre que c’e
886
t cela seul qui compte, et qu’ils font table rase
de
tout le reste ! Comme s’ils étaient… Je ne veux pas blasphémer. Il fa
887
eux qui l’exigent ! — mais j’ai fait l’expérience
de
l’amour, et c’est elle que je veux attester. Galopins ! voilà ce que
888
a l’accolade à chacun. Puis il fit un grand geste
de
ses deux bras levés, — comme pour bénir les circonstants, — et soudai
889
ette scène, si imprévue pour la plupart des hôtes
de
ce soir-là, ne laissa pas de nous plonger dans la gêne, dont quelques
890
la plupart des hôtes de ce soir-là, ne laissa pas
de
nous plonger dans la gêne, dont quelques-uns ne crurent pouvoir secou
891
uvoir secouer l’effet qu’en s’étonnant subitement
de
l’heure tardive. Mais Mme Nicodème les rassura vivement, affirmant d’
892
Mais Mme Nicodème les rassura vivement, affirmant
d’
un ton sans réplique qu’il n’était pas question de s’en aller. Et Poup
893
d’un ton sans réplique qu’il n’était pas question
de
s’en aller. Et Poupette passa les petits fours, avec un naturel parfa
894
tits fours, avec un naturel parfait. Le monologue
de
Nicodème ne paraissait pas avoir fait grande impression sur cette enf
895
ui éveillaient tantôt des rires excessifs, tantôt
de
véhémentes protestations. Je ne vous rapporterai que le dernier de ce
896
testations. Je ne vous rapporterai que le dernier
de
ces passages : — « Qui est vainqueur du monde, sinon celui qui croit
897
onde, sinon celui qui croit que Jésus est le Fils
de
Dieu ? Nous sommes là en pleine et absolue certitude ; nous apercevon
898
et absolue certitude ; nous apercevons le sommet
d’
un gigantesque pylône, d’un poste émetteur d’où émanent depuis quasi d
899
ous apercevons le sommet d’un gigantesque pylône,
d’
un poste émetteur d’où émanent depuis quasi deux-mille années, intaris
900
mmet d’un gigantesque pylône, d’un poste émetteur
d’
où émanent depuis quasi deux-mille années, intarissablement, à travers
901
e moins radicale que la mort, on serait bien bête
de
ne pas y recourir. Mais saint Jean ne se doutait guère que son Évangi
902
etteur ! » — À quoi l’un des barthiens s’empressa
d’
ajouter : « Quoi qu’il en soit, d’ailleurs, de toutes ces métaphores,
903
ssa d’ajouter : « Quoi qu’il en soit, d’ailleurs,
de
toutes ces métaphores, le seul fait qui demeure, c’est celui que Bart
904
ui que Barth exprimait si magnifiquement dans une
de
ses réponses aux objections des humanistes : “Christ n’a pas cru pouv
905
re de plus que lui ? L’imitation du Christ, c’est
de
mourir en lui et avec lui, — non pas de s’emparer de son message comm
906
st, c’est de mourir en lui et avec lui, — non pas
de
s’emparer de son message comme d’un prétexte à ne plus mourir tout à
907
mourir en lui et avec lui, — non pas de s’emparer
de
son message comme d’un prétexte à ne plus mourir tout à fait. » Le di
908
lui, — non pas de s’emparer de son message comme
d’
un prétexte à ne plus mourir tout à fait. » Le dirai-je ? Ce dialogue,
909
ent tragiques ne firent qu’aviver en moi l’espèce
d’
angoisse sur laquelle m’avait laissé le monologue de Nicodème. Au poin
910
angoisse sur laquelle m’avait laissé le monologue
de
Nicodème. Au point que tout d’abord, je n’osai pas élever la voix. Je
911
si convaincus et si merveilleusement inconscients
de
l’insondable gravité de leurs paroles, — et Mme Nicodème d’autre part
912
eilleusement inconscients de l’insondable gravité
de
leurs paroles, — et Mme Nicodème d’autre part, dont je craignais qu’e
913
ment mes réserves, j’hésitais à parler, redoutant
d’
introduire un nouvel élément de discorde, quand c’était justement l’ac
914
parler, redoutant d’introduire un nouvel élément
de
discorde, quand c’était justement l’accent de controverse de mes amis
915
ent de discorde, quand c’était justement l’accent
de
controverse de mes amis qui me jetait dans une sorte de honte… La con
916
, quand c’était justement l’accent de controverse
de
mes amis qui me jetait dans une sorte de honte… La confession de Nico
917
troverse de mes amis qui me jetait dans une sorte
de
honte… La confession de Nicodème m’avait profondément ému, en dépit d
918
me jetait dans une sorte de honte… La confession
de
Nicodème m’avait profondément ému, en dépit de cette légère pointe de
919
profondément ému, en dépit de cette légère pointe
de
cabotinage pieux qu’il met, hélas, dans ses moindres propos… J’en éta
920
s moi : « Je retiens en tous cas votre définition
de
l’auteur du Problème du Bien ! “L’homme qui ne veut pas mourir”, c’es
921
-je. Et je m’en voudrais plus que je ne puis dire
d’
avoir lâché cette méchante boutade, si elle vous est une occasion de t
922
e méchante boutade, si elle vous est une occasion
de
triompher, ici, dans la maison de Nicodème ! Tenez, j’ai l’impression
923
st une occasion de triompher, ici, dans la maison
de
Nicodème ! Tenez, j’ai l’impression, depuis que nous nous sommes mis
924
uis que nous nous sommes mis à discuter, qu’aucun
de
nous ne sait ce qu’il dit. J’entends exactement : aucun de nous ! Nou
925
e sait ce qu’il dit. J’entends exactement : aucun
de
nous ! Nous parlons tous avec beaucoup de conviction, mais je crois b
926
x. Voulez-vous que je vous le prouve ? Il suffira
de
résumer notre débat. Quel est le problème que nous discutons ? C’est
927
me que nous discutons ? C’est le problème inverse
de
celui d’Hamlet. « Être ou ne pas être », disait Hamlet. Et nous dison
928
us discutons ? C’est le problème inverse de celui
d’
Hamlet. « Être ou ne pas être », disait Hamlet. Et nous disons : mouri
929
as mourir tout à fait, c’est-à-dire revivre avant
d’
être tout à fait mort, — souffler sur la petite étincelle divine qui,
930
on les uns, subsiste en nous et pourrait rallumer
d’
un nouveau feu toute notre humanité, plus ou moins consumée par le péc
931
-il l’expérience ? Parce qu’il ne veut parler que
de
ce qu’il a vécu — et je vous ferai remarquer qu’il a vécu, de fait, c
932
a vécu — et je vous ferai remarquer qu’il a vécu,
de
fait, certaines expériences dont nous n’avons qu’une pâle idée. Il af
933
igion vécue, c’est-à-dire expérimentée. Mais tout
d’
un coup, voilà qu’il ne sait plus ce qu’il dit ! Vous l’avez entendu t
934
échouait devant l’apparition du souvenir terrible
de
cette seule expérience impossible, humainement impossible, à jamais,
935
usement impossible ! Voilà l’angoisse et la folie
de
ceux qui défendent l’expérience, sachant bien, cependant, que la seul
936
te sincérité, qu’elle soit possible ! Ne riez pas
de
leurs efforts pour remplacer cette unique expérience par d’autres exp
937
n qu’ils cherchent à se rassurer, à grand renfort
d’
images impressionnantes, de métaphores mystiques, d’influx spirituel d
938
surer, à grand renfort d’images impressionnantes,
de
métaphores mystiques, d’influx spirituel dans le vieil homme, de grâc
939
images impressionnantes, de métaphores mystiques,
d’
influx spirituel dans le vieil homme, de grâce infuse et de radioactiv
940
ystiques, d’influx spirituel dans le vieil homme,
de
grâce infuse et de radioactivité de l’Évangile ! Mais vous, avez-vous
941
spirituel dans le vieil homme, de grâce infuse et
de
radioactivité de l’Évangile ! Mais vous, avez-vous donc dépassé cette
942
vieil homme, de grâce infuse et de radioactivité
de
l’Évangile ! Mais vous, avez-vous donc dépassé cette angoisse ? Vraim
943
ous entends, il me semble que vous essayez plutôt
de
la conjurer par des formules théologiques. Je ne nie pas un instant l
944
Je ne nie pas un instant la vérité, comme telles,
de
ces formules. Mais vous tenez le mot d’une énigme qui ne vous a pas l
945
e telles, de ces formules. Mais vous tenez le mot
d’
une énigme qui ne vous a pas longtemps empêchés de dormir ! C’est en t
946
d’une énigme qui ne vous a pas longtemps empêchés
de
dormir ! C’est en tous cas ce que le ton de vos affirmations pourrait
947
êchés de dormir ! C’est en tous cas ce que le ton
de
vos affirmations pourrait faire croire. Voilà votre folie à vous : vo
948
es vérités littéralement terrifiantes, l’exigence
de
la mort au monde et à soi-même, comme s’il s’agissait là de thèses à
949
au monde et à soi-même, comme s’il s’agissait là
de
thèses à imposer ! Nicodème le disait : On croirait que c’est vous qu
950
, au nom d’une théologie… Je ne vous reproche pas
d’
être fous, je vous reproche de dire sans nulle angoisse des choses fol
951
e vous reproche pas d’être fous, je vous reproche
de
dire sans nulle angoisse des choses folles et follement vraies. Je vo
952
lement vraies. Je vous reproche tout simplement —
de
les dire ! et surtout de les dire contre quelqu’un. « Vous souvenez-v
953
proche tout simplement — de les dire ! et surtout
de
les dire contre quelqu’un. « Vous souvenez-vous de ce que disait et r
954
e les dire contre quelqu’un. « Vous souvenez-vous
de
ce que disait et répétait sans cesse Kierkegaard ? Être chrétien, c’e
955
gaard ? Être chrétien, c’est devenir contemporain
de
Jésus-Christ dans son abaissement. Contemporains ! Mais Nicodème auss
956
temporains ! Mais Nicodème aussi fut contemporain
de
Jésus. Et même il sut reconnaître en ce Jésus un docteur envoyé par D
957
ieu ! « Mais voyez-vous, nous sommes ici au nœud
de
ce mystère étourdissant. Nicodème a reconnu un prophète, il l’a forme
958
it que ce prophète, Jésus, “était venu de la part
de
Dieu”. Comment le savait-il ? Parce qu’on lui avait dit quels miracle
959
iences, n’est-ce pas ? Et l’expérience religieuse
de
ce grand docteur de l’Église avait bien su les reconnaître. C’était c
960
, on pouvait se risquer à discuter avec cet homme
de
nuit, quand il ne s’agit plus d’agir, mais seulement d’agiter des pen
961
r avec cet homme de nuit, quand il ne s’agit plus
d’
agir, mais seulement d’agiter des pensées… Eh bien, je vous demande si
962
t, quand il ne s’agit plus d’agir, mais seulement
d’
agiter des pensées… Eh bien, je vous demande si nous faisons autre cho
963
fut, cette nuit-là ? Faisons-nous autre chose que
de
répéter formellement des vérités que nous ne pouvons pas vivre ? Vivo
964
peut pas mourir, et celui qui affirme l’exigence
de
la mort, il n’y a peut-être aucune différence : car tous les deux son
965
ment osez-vous affirmer cette impossible exigence
de
la mort, si vous ne vivez pas de cette mort ! Or, vous n’en vivez pas
966
ossible exigence de la mort, si vous ne vivez pas
de
cette mort ! Or, vous n’en vivez pas, j’en suis trop sûr, quand vous
967
t théologique ! Où donc est-il, celui qui accepte
de
mourir ? Oui, maintenant, je vais vous dire la vérité : Nous sommes t
968
t : il demeure parmi nous comme le vivant symbole
de
l’homme qui ne peut pas mourir !… Plaise à Dieu que l’angoisse qui to
969
sans fièvre. Je m’arrêtai soudain, plutôt confus
de
ma véhémence. Les jeunes barthiens se consultaient du regard. Était-c
970
nes barthiens se consultaient du regard. Était-ce
de
ma part une palinodie ? J’étais bien loin de considérer la chose ain
971
es… Minuit sonna, dans ce silence. Il était temps
de
prendre congé de nos hôtes. Mais un des étudiants, qui justement n’av
972
dans ce silence. Il était temps de prendre congé
de
nos hôtes. Mais un des étudiants, qui justement n’avait presque rien
973
e croire qu’il exprima la vérité la plus certaine
de
la soirée, encore que cette vérité ne soit point facile à entendre. J
974
-être pourquoi son langage me parut rendre un son
d’
autorité, bien qu’il fût beaucoup moins péremptoire que celui dont les
975
tres avaient usé. — Vous avez dit — commença-t-il
d’
une voix très calme — que l’angoisse de Nicodème devrait nous empêcher
976
mença-t-il d’une voix très calme — que l’angoisse
de
Nicodème devrait nous empêcher tous de parler, c’est-à-dire, si je vo
977
l’angoisse de Nicodème devrait nous empêcher tous
de
parler, c’est-à-dire, si je vous entends bien, devrait nous empêcher
978
je vous entends bien, devrait nous empêcher tous
de
dire des choses complètement impossibles. Je ne pense pas comme vous,
979
ent dite. Mais nous avons le devoir et la mission
de
proclamer que cette angoisse a été surmontée, une fois pour toutes, p
980
montée, une fois pour toutes, par la résurrection
de
Jésus-Christ. Pardonnez mon langage, peut-être trop ecclésiastique, m
981
ots, ce que je crois, pour mon compte. L’angoisse
de
Nicodème trouve sa résolution dans le Baptême. Et nous confirmons ce
982
communiant ainsi avec la mort et la résurrection
de
Jésus-Christ. Certes, ce n’est pas là une expérience ! Ou plutôt, les
983
sentiments que nous éprouvons lors du Baptême et
de
la Cène n’ont aucune espèce d’importance. Dieu fait pour nous, à ce m
984
lors du Baptême et de la Cène n’ont aucune espèce
d’
importance. Dieu fait pour nous, à ce moment, ce que Nicodème et tous
985
as s’opposer au baptême des enfants, c’est-à-dire
de
ceux qui ne peuvent rien encore… Ainsi donc, deux choses demeurent :
986
a mesure où la foi les anime, l’événement central
de
notre vie chrétienne. Elles sont, avec les sacrements, la promesse de
987
nne. Elles sont, avec les sacrements, la promesse
de
l’accomplissement en Christ — déjà venu et qui revient ! — de ce que
988
issement en Christ — déjà venu et qui revient ! —
de
ce que nous espérons présentement, à la fois dans l’angoisse et dans
989
cit., I, p. 441. 21. Hegel. l. Rougemont Denis
de
, « Soirée chez Nicodème », Hic et Nunc, Paris, mai 1935, p. 159-170.
990
Sur une page
de
Bossuet (ou Tradition et Révélation) (janvier 1936)m Que nos amis
991
936)m Que nos amis catholiques nous permettent
de
relever tout d’abord un défaut très courant de la controverse22 avec
992
nt de relever tout d’abord un défaut très courant
de
la controverse22 avec la Réforme, en France : on oppose dix-neuf sièc
993
a Réforme, en France : on oppose dix-neuf siècles
de
tradition universelle — dont quinze nous sont communs d’ailleurs avec
994
ailleurs avec l’Église romaine — à quatre siècles
d’
une tradition que l’on réduit au seul domaine français, sans même comp
995
nçais, sans même compter que nos églises ont subi
de
telles persécutions qu’elles ont été quasi anéanties durant la moitié
996
qu’elles ont été quasi anéanties durant la moitié
de
ce temps. Ne serait-il pas plus conforme à la probité historique et p
997
obité historique et plus fécond pour la théologie
de
mettre en regard du catholicisme romain le protestantisme tout entier
998
iste et wesleyen, voire anglican, dans ce qu’il a
de
spécifique et de commun au sein de sa diversité ? L’on verrait mieux
999
voire anglican, dans ce qu’il a de spécifique et
de
commun au sein de sa diversité ? L’on verrait mieux alors, que l’oppo
1000
l’opposition réelle n’est pas, ainsi qu’on risque
de
le déduire de l’entreprise des Pères de Juvisy, entre « l’héritage du
1001
éelle n’est pas, ainsi qu’on risque de le déduire
de
l’entreprise des Pères de Juvisy, entre « l’héritage du Christ » d’un
1002
l’héritage du Christ » d’une part, et les dangers
de
déviations protestantes de l’autre23. L’on verrait mieux que l’opposi
1003
e part, et les dangers de déviations protestantes
de
l’autre23. L’on verrait mieux que l’opposition réelle est entre la co
1004
héma, qui ne prétend qu’à indiquer le lieu précis
de
la divergence : la Réforme prêche que le Christ est le chef absolu, s
1005
rist est le chef absolu, souverainement adorable,
de
l’Église qui est son corps ; tandis que Rome affirme que la tradition
1006
le secret du Christ » lui-même. (L’expression est
de
Bossuet.) À la question ainsi posée, on me répondra probablement que
1007
e mon antithèse est forcée et que mes définitions
de
la position catholique ne sont pas formulées en termes catholiques. J
1008
comprends parfaitement à quel souci très légitime
d’
honnêteté, à quelle crainte très légitime de me voir combattre une car
1009
itime d’honnêteté, à quelle crainte très légitime
de
me voir combattre une caricature peut correspondre une objection de c
1010
re une caricature peut correspondre une objection
de
ce genre. Et pourtant, pour peu qu’on adopte la position des catholiq
1011
vis-à-vis de leurs grands docteurs, on est obligé
de
constater que cette objection ne porte guère. En effet, « l’Église ne
1012
et, « l’Église ne reconnaît une expression exacte
de
sa substance que dans la personne de ses saints », écrit le père Cong
1013
ssion exacte de sa substance que dans la personne
de
ses saints », écrit le père Congar en une fort belle définition24. Or
1014
rt belle définition24. Or, si je cite une formule
d’
Augustin, qui est un grand saint, on me répond que cette formule lui e
1015
Laberthonnière, dans des livres pourtant revêtus
de
l’imprimatur. Finalement, faute du concile qui aurait seul qualité po
1016
iles et les bulles papales, donc simple catalogue
de
résultats, sans commentaires ni justifications. Serait-ce là le langa
1017
je cherche ? Il est souvent contraire aux écrits
d’
Augustin ou de Thomas d’Aquin25, seuls témoignages qui nous restent de
1018
Il est souvent contraire aux écrits d’Augustin ou
de
Thomas d’Aquin25, seuls témoignages qui nous restent de la « personne
1019
mas d’Aquin25, seuls témoignages qui nous restent
de
la « personne » de ces saints… On pourrait remarquer que tout cela,
1020
s témoignages qui nous restent de la « personne »
de
ces saints… On pourrait remarquer que tout cela, même simplifié dans
1021
plexe, bien contradictoire, et sous une apparence
de
précision rigide, bien propice aux interprétations, aux distinguos in
1022
nguos infinis par où le pire subjectivisme, celui
de
la prudence opportuniste, s’insinue jusqu’au cœur de la dogmatique ro
1023
la prudence opportuniste, s’insinue jusqu’au cœur
de
la dogmatique romaine. On pourrait remarquer que le fidèle protestant
1024
a, sur le fidèle catholique, l’avantage sans prix
d’
avoir toujours à portée de la main le critère dernier de toute « formu
1025
e, l’avantage sans prix d’avoir toujours à portée
de
la main le critère dernier de toute « formulation chrétienne », les é
1026
r toujours à portée de la main le critère dernier
de
toute « formulation chrétienne », les évangiles et les écrits apostol
1027
apostoliques. Mais mon propos est ici simplement
de
répondre à l’objection de nos frères romanisés. Si les formules par l
1028
opos est ici simplement de répondre à l’objection
de
nos frères romanisés. Si les formules par lesquelles je résume leurs
1029
rmules élaborées par les conciles, est bien forcé
de
parler un langage personnel, dont il sera toujours possible d’affirme
1030
langage personnel, dont il sera toujours possible
d’
affirmer qu’il n’est pas littéralement « catholique » (même s’il a reç
1031
nt on en use dans l’Église romaine, mais le degré
de
sérieux qu’on leur accorde en fait, mais l’opinion commune qu’elles s
1032
registrer. Cette opinion commune, je suis certain
de
la traduire sans la fausser quand je dis que le catholique, en tant q
1033
en tant que tel, croit que l’Église est au-dessus
de
l’Évangile, qu’elle a barre sur lui, qu’elle dispose de critères qui
1034
vangile, qu’elle a barre sur lui, qu’elle dispose
de
critères qui ne sont pas tirés de lui26 et au nom desquels elle a le
1035
qu’elle dispose de critères qui ne sont pas tirés
de
lui26 et au nom desquels elle a le droit de l’interpréter, voire de l
1036
tirés de lui26 et au nom desquels elle a le droit
de
l’interpréter, voire de le contredire dans sa lettre. Je suis certain
1037
desquels elle a le droit de l’interpréter, voire
de
le contredire dans sa lettre. Je suis certain de ne pas forcer le moi
1038
de le contredire dans sa lettre. Je suis certain
de
ne pas forcer le moins du monde l’antithèse lorsque j’affirme que cet
1039
est un négatif absolu des positions fondamentales
de
la Réforme. Voilà l’opposition réelle, du noir au blanc, que nos frèr
1040
s quand l’effort perpétuel et d’ailleurs émouvant
de
leur théologie est de combler tant bien que mal tous les abîmes : ceu
1041
tuel et d’ailleurs émouvant de leur théologie est
de
combler tant bien que mal tous les abîmes : ceux qui séparent l’étern
1042
s : ceux qui séparent l’éternel du temporel, Dieu
de
l’homme, la grâce de la nature, et la Révélation de notre raison ? Au
1043
l’éternel du temporel, Dieu de l’homme, la grâce
de
la nature, et la Révélation de notre raison ? Au point qu’on en arriv
1044
l’homme, la grâce de la nature, et la Révélation
de
notre raison ? Au point qu’on en arrive à se demander pourquoi le Chr
1045
der pourquoi le Christ a dû mourir pour triompher
de
notre péché, alors que la sagesse antique pouvait fournir l’amorce de
1046
s que la sagesse antique pouvait fournir l’amorce
de
si belles synthèses ! « Blasphème ! me dit alors un catholique. Ces s
1047
su les achever en les incorporant à la tradition
de
l’Église, corps du Christ ressuscité ! » Réponse qui justement donne
1048
ponse qui justement donne un exemple bien typique
de
la méthode romaine de médiation27. Cette tradition n’est, à vrai dire
1049
nne un exemple bien typique de la méthode romaine
de
médiation27. Cette tradition n’est, à vrai dire, qu’une transition, u
1050
ment suffisant, on ne cherche pas d’autres moyens
de
surmonter la séparation originelle. On craint au contraire que tout a
1051
contraire que tout autre moyen, fût-il « déduit »
de
la Révélation, ne voile la réalité de l’abîme, et ne détourne les fid
1052
« déduit » de la Révélation, ne voile la réalité
de
l’abîme, et ne détourne les fidèles de cette seule chose nécessaire,
1053
la réalité de l’abîme, et ne détourne les fidèles
de
cette seule chose nécessaire, de cette foi au seul moyen de salut qui
1054
urne les fidèles de cette seule chose nécessaire,
de
cette foi au seul moyen de salut qui ait été donné aux hommes. Il en
1055
eule chose nécessaire, de cette foi au seul moyen
de
salut qui ait été donné aux hommes. Il en va de même du purgatoire, d
1056
donné aux hommes. Il en va de même du purgatoire,
de
l’analogia entis, de la grâce infuse, de la révélation progressive :
1057
en va de même du purgatoire, de l’analogia entis,
de
la grâce infuse, de la révélation progressive : termes transitifs int
1058
gatoire, de l’analogia entis, de la grâce infuse,
de
la révélation progressive : termes transitifs introduits pour voiler,
1059
? Est-ce que la question n’existe pas, ou n’a pas
d’
importance aux yeux des catholiques ? Est-ce qu’ils se la posent parfo
1060
e simple méconnaissance des possibilités infinies
d’
interprétation dont dispose leur apologétique, s’ils me convainquent e
1061
se leur apologétique, s’ils me convainquent enfin
de
mon erreur, je m’en réjouirai hautement. Et je me sentirai d’autant p
1062
r, je m’en réjouirai hautement. Et je me sentirai
d’
autant plus libre de leur demander sérieusement, c’est-à-dire sans auc
1063
hautement. Et je me sentirai d’autant plus libre
de
leur demander sérieusement, c’est-à-dire sans aucune intention polémi
1064
ans aucune intention polémique, ce qu’ils pensent
d’
un texte précis, et comment il se fait que le pape n’ait jamais, que j
1065
n grand pouvoir à son Église dans la dispensation
de
ses mystères !… Il a permis à son Église de séparer ce qu’il avait mi
1066
ation de ses mystères !… Il a permis à son Église
de
séparer ce qu’il avait mis ensemble… Et non seulement l’Église a cess
1067
t mis ensemble… Et non seulement l’Église a cessé
de
faire ce que Jésus-Christ avait fait, et les apôtres suivi ; mais enc
1068
pôtres suivi ; mais encore elle a pris la liberté
d’
interdire sévèrement cette pratique… Quand donc on veut s’imaginer qu’
1069
’entend pas que c’est l’Église qui sait le secret
de
Jésus-Christ, qui sait ce qui appartient essentiellement à son instit
1070
lve jour.) Bossuet ajoute : Vous vous étonnez
de
ce qu’on sépare ce que Jésus-Christ a mis ensemble, et qu’on donne le
1071
me temps le sang à boire. Étonnez-vous donc aussi
de
ce que la Cène sacrée est séparée du souper commun ! Mais plutôt ne v
1072
ouper commun ! Mais plutôt ne vous étonnez jamais
de
ce que l’Église fait. Instruite par le Saint-Esprit et par la traditi
1073
Instruite par le Saint-Esprit et par la tradition
de
tous les siècles, elle sait ce que Jésus-Christ a voulu faire… Comme
1074
ormules qui pourraient amener à poser la question
d’
une manière claire et nette, et à choisir. Car, enfin, si Bossuet, en
1075
Il ne dit rien dans ce que je cite que le concile
de
Trente n’ait dit ou n’ait permis de dire28. Seulement, il le dit en f
1076
ue le concile de Trente n’ait dit ou n’ait permis
de
dire28. Seulement, il le dit en français. Or, c’est précisément ce qu
1077
es dans la conscience des fidèles, et des fidèles
de
ce pays de France dont on ne peut nier que Bossuet soit l’un des clas
1078
conscience des fidèles, et des fidèles de ce pays
de
France dont on ne peut nier que Bossuet soit l’un des classiques préf
1079
assiques préférés29. ⁂ Une fois définie la valeur
de
cette objection préalable, que pourraient nous opposer les catholique
1080
us opposer les catholiques, si nous les pressions
de
nous rassurer sur un texte qui nous inquiète, nous sommes en droit de
1081
un texte qui nous inquiète, nous sommes en droit
de
poursuivre l’examen des « réflexes catholiques » que ce texte trahit.
1082
ues » que ce texte trahit. Reprenons donc la page
de
Bossuet : « … Le Sauveur a-t-il voulu laisser aux hommes à distinguer
1083
er par leur propre sens ce qui était la substance
de
l’institution d’avec ce qui ne l’était pas ? » La Réforme, par Luther
1084
alvin, répond : non, Dieu seul connaît ce qui est
de
Dieu. Pour nous, ne connaissons de la volonté de Dieu que ce qu’il lu
1085
aît ce qui est de Dieu. Pour nous, ne connaissons
de
la volonté de Dieu que ce qu’il lui a plu de nous en révéler dans l’É
1086
de Dieu. Pour nous, ne connaissons de la volonté
de
Dieu que ce qu’il lui a plu de nous en révéler dans l’Écriture, et pa
1087
sons de la volonté de Dieu que ce qu’il lui a plu
de
nous en révéler dans l’Écriture, et par l’action du Saint-Esprit, grâ
1088
issait son Église pour être une fidèle interprète
de
ses volontés, et une sûre dispensatrice de ses sacrements ? » Décidém
1089
rprète de ses volontés, et une sûre dispensatrice
de
ses sacrements ? » Décidément, nous sommes d’accord. L’Église véritab
1090
lle demeure la « fidèle interprète » des volontés
de
Dieu. Mais c’est ici que Bossuet nous arrête : « Qu’entendez-vous, no
1091
et non pas la seule Écriture, qui sait le secret
de
Jésus-Christ ! — Et d’où l’a-t-elle appris, si ce n’est de l’Écriture
1092
riture, qui sait le secret de Jésus-Christ ! — Et
d’
où l’a-t-elle appris, si ce n’est de l’Écriture ? — Relisez-moi : « In
1093
Christ ! — Et d’où l’a-t-elle appris, si ce n’est
de
l’Écriture ? — Relisez-moi : « Instruite par le Saint-Esprit et par l
1094
Instruite par le Saint-Esprit et par la tradition
de
tous les siècles, elle sait ce que Jésus-Christ a voulu faire. Elle a
1095
ésus-Christ a voulu faire. Elle a donc le pouvoir
de
séparer ce qu’il avait mis ensemble, de cesser de faire ce qu’il avai
1096
e pouvoir de séparer ce qu’il avait mis ensemble,
de
cesser de faire ce qu’il avait fait, et les apôtres suivi, et même de
1097
de séparer ce qu’il avait mis ensemble, de cesser
de
faire ce qu’il avait fait, et les apôtres suivi, et même de condamner
1098
e qu’il avait fait, et les apôtres suivi, et même
de
condamner sévèrement cette pratique. » — Si nous comprenons bien, l’É
1099
nons bien, l’Église prouve qu’elle sait le secret
de
Jésus-Christ, en ordonnant de faire tout le contraire de ce qu’il a d
1100
elle sait le secret de Jésus-Christ, en ordonnant
de
faire tout le contraire de ce qu’il a dit ? — Exactement, et c’est là
1101
s-Christ, en ordonnant de faire tout le contraire
de
ce qu’il a dit ? — Exactement, et c’est là sa grandeur, ou, comme je
1102
instruite par le Saint-Esprit et par la tradition
de
tous les siècles, elle sait ce que Jésus-Christ a voulu faire ». (Ell
1103
(Elle sait même qu’il a voulu faire le contraire
de
ce qu’il a fait.) Qu’est-ce donc que cette tradition de tous les sièc
1104
qu’il a fait.) Qu’est-ce donc que cette tradition
de
tous les siècles ? C’est, nous répond l’Enchiridion symbolorum et def
1105
s répond l’Enchiridion symbolorum et definitionum
de
Denzinger, « l’autre source » de la Révélation, la première source ét
1106
et definitionum de Denzinger, « l’autre source »
de
la Révélation, la première source étant la Bible (fons revelationis a
1107
s la trouvons définie tout d’abord par le concile
d’
Éphèse (431) comme étant la fidem definitam a sanctis Patribus qui in
1108
m spiritu sancto congregati fuerunt. Aux formules
de
ce premier concile de Nicée, s’ajoutent ensuite celles des conciles d
1109
egati fuerunt. Aux formules de ce premier concile
de
Nicée, s’ajoutent ensuite celles des conciles d’Éphèse, de Chalcédoin
1110
de Nicée, s’ajoutent ensuite celles des conciles
d’
Éphèse, de Chalcédoine, etc., etc. Puis, dès 514, les écrits d’Augusti
1111
s’ajoutent ensuite celles des conciles d’Éphèse,
de
Chalcédoine, etc., etc. Puis, dès 514, les écrits d’Augustin. (Import
1112
Chalcédoine, etc., etc. Puis, dès 514, les écrits
d’
Augustin. (Importante réserve indiquée en 1689 lors de la condamnation
1113
.) Puis les doctrines des théologiens, et surtout
de
Thomas d’Aquin (Encycl. de Benoît XV, en 1923, seulement !). Voilà qu
1114
héologiens, et surtout de Thomas d’Aquin (Encycl.
de
Benoît XV, en 1923, seulement !). Voilà qui est clair et sans mystère
1115
tourne alors vers nous et nous exprime une sorte
de
pitié : « À quoi s’appuiera le protestant, avec, pour tout guide, une
1116
érieur du Saint-Esprit, qu’il sera bien incapable
de
différencier de sa nature à lui, de son époque et de sa formation ? »
1117
Esprit, qu’il sera bien incapable de différencier
de
sa nature à lui, de son époque et de sa formation ? »30. Autrement di
1118
ien incapable de différencier de sa nature à lui,
de
son époque et de sa formation ? »30. Autrement dit, on nous plaint d’
1119
différencier de sa nature à lui, de son époque et
de
sa formation ? »30. Autrement dit, on nous plaint d’être abandonnés à
1120
sa formation ? »30. Autrement dit, on nous plaint
d’
être abandonnés à la seule inspiration de l’Esprit, à laquelle on n’ac
1121
s plaint d’être abandonnés à la seule inspiration
de
l’Esprit, à laquelle on n’accorde aucun pouvoir réel d’éclairer, de f
1122
sprit, à laquelle on n’accorde aucun pouvoir réel
d’
éclairer, de faire taire la nature, d’enseigner « objectivement » la v
1123
uelle on n’accorde aucun pouvoir réel d’éclairer,
de
faire taire la nature, d’enseigner « objectivement » la vérité à l’ho
1124
ouvoir réel d’éclairer, de faire taire la nature,
d’
enseigner « objectivement » la vérité à l’homme « subjectif ». Et tout
1125
ement qu’elle est notre critère, ce « vis-à-vis »
de
l’Église dont parle Barth, et auquel doit se rapporter sans cesse tou
1126
on vraiment fidèle. Cette méconnaissance profonde
de
la Réforme est la rançon fatale de la croyance romaine en la traditio
1127
sance profonde de la Réforme est la rançon fatale
de
la croyance romaine en la tradition considérée comme « l’autre source
1128
la tradition considérée comme « l’autre source »
de
la Révélation. En réalité, c’est l’Église de Rome qui nous paraît à c
1129
ce » de la Révélation. En réalité, c’est l’Église
de
Rome qui nous paraît à cet égard abandonnée à un subjectivisme redout
1130
voir aisément par l’examen du critère infaillible
de
discernement que représenterait la « tradition ». En effet, sur quel
1131
iles. Et ceux-ci à leur tour ? Prenons le concile
de
Trente : « Sacrosancta œcumenica et generalis Tridentina Synodus in S
1132
ra-t-il contrôlé, si j’ose dire, et « différencié
de
la nature » des prélats, de leur époque et de leur formation ? Par la
1133
ire, et « différencié de la nature » des prélats,
de
leur époque et de leur formation ? Par la Bible ? En principe, oui. M
1134
cié de la nature » des prélats, de leur époque et
de
leur formation ? Par la Bible ? En principe, oui. Mais le principe a
1135
ue fit le concile du Vatican (1869-1870. Cap. 2 :
de
revelatione, de interpretatione S. Scripturae) en déclarant que l’Écr
1136
e du Vatican (1869-1870. Cap. 2 : de revelatione,
de
interpretatione S. Scripturae) en déclarant que l’Écriture ne peut êt
1137
et en particulier selon les décisions du concile
de
Trente. La tradition est ainsi substituée à l’Écriture comme critère
1138
ituée à l’Écriture comme critère des inspirations
de
l’Esprit saint. Mais la tradition, ce sont les conciles. Inspirés par
1139
; ou bien que l’Esprit saint est le seul critère
de
l’Esprit saint. Le premier terme de l’alternative revient à consacrer
1140
seul critère de l’Esprit saint. Le premier terme
de
l’alternative revient à consacrer en droit l’arbitraire le plus absol
1141
Le second terme, vrai en soi, et que nous croyons
de
toute notre foi31, devient faux et ne traduit qu’un subjectivisme abs
1142
it qu’un subjectivisme absolu dès qu’on le sépare
de
l’Écriture, qui nous fournit son critère objectif. Pourquoi nos frère
1143
re objectif, la Bible, alors qu’ils ont tout fait
de
leur côté pour évincer ou, en tout cas, pour relativiser ce seul crit
1144
e seul critère ? Comprennent-ils toute la gravité
de
la question ? ⁂ En vérité, la question que pose la page de Bossuet ce
1145
stion ? ⁂ En vérité, la question que pose la page
de
Bossuet ce n’est pas seulement la question capitale de la Cène, c’est
1146
ssuet ce n’est pas seulement la question capitale
de
la Cène, c’est toute la question de la tradition et par là même de la
1147
tion capitale de la Cène, c’est toute la question
de
la tradition et par là même de la Révélation. Résumons brièvement ce
1148
toute la question de la tradition et par là même
de
la Révélation. Résumons brièvement ce développement : L’Écriture dit,
1149
eloppement : L’Écriture dit, à propos de la coupe
de
la Sainte-Cène : « Buvez-en tous ! » L’intention « secrète » du Chris
1150
» du Christ, intention que Bossuet loue l’Église
d’
avoir exécutée, n’est donc pas contenue dans l’Écriture. Il faudra la
1151
. Il faudra la chercher alors dans l’autre source
de
la Révélation : la tradition. Nous avons vu que, pratiquement, la tra
1152
liques se sont fondés pour opposer à la tradition
de
leur temps (qui était encore le « Buvez-en tous ») un démenti formel
1153
en boire), devenu par la suite partie intégrante
de
la nouvelle tradition, contradictoire à l’Écriture. Le cercle n’est-i
1154
ure. Le cercle n’est-il pas vicieux ? Le scandale
de
cette innovation (et de tant d’autres) serait-il devenu moins grand,
1155
pas vicieux ? Le scandale de cette innovation (et
de
tant d’autres) serait-il devenu moins grand, avec le temps, qu’il ne
1156
tait en 1569 ? La tradition serait-elle une sorte
de
promotion « à l’ancienneté » des erreurs les plus manifestes des conc
1157
ître brutale, simpliste. Elle manque certainement
d’
« onction ». Est-ce assez pour qu’on l’écarte ? Ne se pose-t-elle jama
1158
rquoi j’espère. ⁂ L’inquiétude catholique procède
de
ce doute profond : la Révélation évangélique éclairée par l’Esprit es
1159
e dans cette inquiétude32, qui a conduit l’Église
de
Rome à statuer qu’il existe, à côté de la Bible, une autre source. To
1160
question que vous adressez à la Réforme, du haut
d’
une grandeur traditionnelle mal assurée, — trop craintivement, trop mé
1161
aine, une réponse qui n’est pas nôtre : « L’œuvre
de
Dieu, c’est que vous croyiez en celui qu’il a envoyé. » (Jean 6:29) S
1162
à cette autre parole qui est comme un commentaire
de
la première : « Ma grâce te suffit »33, vous retrouvez le sens de la
1163
« Ma grâce te suffit »33, vous retrouvez le sens
de
la vraie tradition : celle qui n’est pas une « autre source », un vai
1164
envisager que la controverse sérieuse. Je laisse
de
côté les banales invectives contre Luther qui traînent dans les hebdo
1165
ait honneur ni à l’information, ni à la bonne foi
de
nos écrivains, s’appelassent-ils Paul Claudel. Ce très grand poète es
1166
s, à la mauvaise foi, mais à une ignorance totale
de
ce qu’il croit devoir attaquer périodiquement. Le diable sait pourquo
1167
intell., numéro cit., p. 363. 25. Sur des points
de
dogme aussi importants que la prédestination (pour Augustin) ou l’Imm
1168
ination (pour Augustin) ou l’Immaculée Conception
de
la Vierge (pour Thomas d’Aquin), par exemple. 26. Le plus étonnant,
1169
in), par exemple. 26. Le plus étonnant, aux yeux
d’
un protestant, c’est peut-être le critère de cohérence dont un prêtre
1170
yeux d’un protestant, c’est peut-être le critère
de
cohérence dont un prêtre me disait récemment qu’il atteste la « vérit
1171
toujours, en fin de compte, sur la méconnaissance
de
l’un des termes qu’on entend concilier. On ne peut pas incorporer imp
1172
ation ; pas plus qu’on ne peut faire une synthèse
de
l’eau et du feu sans éteindre le feu. Celui qui affirmerait y être pa
1173
nder aux catholiques ce qu’ils pensent réellement
de
cette… raison, car le concile a pris soin de déclarer par avance anat
1174
ment de cette… raison, car le concile a pris soin
de
déclarer par avance anathème celui qui dirait que l’Église n’a pas ét
1175
(Canon 2). 29. « Ce grand Docteur », — « ce père
de
la spiritualité française » : je relève, au hasard, ces deux qualific
1176
» : je relève, au hasard, ces deux qualifications
de
Bossuet dans des articles récents de chroniqueurs catholiques, qui ne
1177
alifications de Bossuet dans des articles récents
de
chroniqueurs catholiques, qui ne sont nullement de l’Académie ! 30.
1178
e chroniqueurs catholiques, qui ne sont nullement
de
l’Académie ! 30. Vie intellectuelle, numéro cit., p. 413. 31. « Ca
1179
« Car l’Esprit pénètre tout, même les profondeurs
de
Dieu... De même — personne ne connaît ce qui est en Dieu, si ce n’est
1180
connaît ce qui est en Dieu, si ce n’est l’Esprit
de
Dieu. » I Cor. 2:10. 32. On le voit bien à ce trait : le « développe
1181
nt du dogme » n’est en fait qu’une stratification
de
refus, de défenses contre les hérésies. Cela produit des effets étran
1182
e » n’est en fait qu’une stratification de refus,
de
défenses contre les hérésies. Cela produit des effets étranges. Ainsi
1183
Saint-Esprit ». C’est simplement la condamnation
de
la thèse inverse de Luther ! De même l’article suivant : « Faire la g
1184
st simplement la condamnation de la thèse inverse
de
Luther ! De même l’article suivant : « Faire la guerre aux Turcs n’es
1185
’est pas contraire au Saint-Esprit. » 33. L’acte
de
la grâce, l’acte libre et parfait de la libre grâce que Dieu nous fai
1186
33. L’acte de la grâce, l’acte libre et parfait
de
la libre grâce que Dieu nous fait ; et non point cette infusio, ce pr
1187
um divinum que Rome appelle grâce. Voir l’article
de
R. de Pury. m. Rougemont Denis de, « Sur une page de Bossuet (ou Tr
1188
oir l’article de R. de Pury. m. Rougemont Denis
de
, « Sur une page de Bossuet (ou Tradition et Révélation) », Hic et Nun
1189
de Pury. m. Rougemont Denis de, « Sur une page
de
Bossuet (ou Tradition et Révélation) », Hic et Nunc, Paris, janvier 1