1
« Né
d’
un regard juste… » (à propos de Richard Coudenhove-Kalergi) (2 septemb
2
ard Coudenhove-Kalergi) (2 septembre 1962)a Né
d’
un regard juste — vertu majeure du bouddhisme — posé sur les réalités
3
neuropéen a été l’expression directe et immédiate
d’
une pensée politique qui se distingue de toute autre, en ce siècle, pa
4
immédiate d’une pensée politique qui se distingue
de
toute autre, en ce siècle, par un alliage unique de clarté et d’imagi
5
toute autre, en ce siècle, par un alliage unique
de
clarté et d’imagination : la pensée de Richard Coudenhove-Kalergi. Ré
6
en ce siècle, par un alliage unique de clarté et
d’
imagination : la pensée de Richard Coudenhove-Kalergi. Réalités délimi
7
age unique de clarté et d’imagination : la pensée
de
Richard Coudenhove-Kalergi. Réalités délimitées et situées d’emblée a
8
, et les USA. C’était en 1922, soulignons-le. Peu
d’
hommes, en ce temps-là, partageaient l’Occident selon ces lignes de fo
9
emps-là, partageaient l’Occident selon ces lignes
de
force traditionnelles qui se sont de nos jours manifestées comme lign
10
n ces lignes de force traditionnelles qui se sont
de
nos jours manifestées comme lignes du destin de la politique mondiale
11
t de nos jours manifestées comme lignes du destin
de
la politique mondiale. Churchill parfois s’en est souvenu — relisez s
12
l parfois s’en est souvenu — relisez son discours
de
Zurich sur l’Europe. Clarté de l’exposé et parfaite liberté de l’imag
13
lisez son discours de Zurich sur l’Europe. Clarté
de
l’exposé et parfaite liberté de l’imagination : voilà ce qui donne à
14
l’Europe. Clarté de l’exposé et parfaite liberté
de
l’imagination : voilà ce qui donne à la parole de Coudenhove ce pouvo
15
de l’imagination : voilà ce qui donne à la parole
de
Coudenhove ce pouvoir convaincant dont tous les militants de l’Europe
16
ve ce pouvoir convaincant dont tous les militants
de
l’Europe unie peuvent témoigner. Je sais bien que les adversaires de
17
uvent témoigner. Je sais bien que les adversaires
de
cette union, et les politiciens aux courtes ruses, ont cru pouvoir ta
18
courtes ruses, ont cru pouvoir taxer cette clarté
de
simplisme, et cette libre imagination d’utopie. Mais leur culte oppor
19
e clarté de simplisme, et cette libre imagination
d’
utopie. Mais leur culte opportuniste des complications d’experts ne me
20
e. Mais leur culte opportuniste des complications
d’
experts ne menait à rien, sinon aux catastrophes que l’on sait ; et l’
21
il nous faut exiger, domine aujourd’hui la vision
de
« l’idéaliste pratique » que Coudenhove n’a jamais cessé d’être, et q
22
aliste pratique » que Coudenhove n’a jamais cessé
d’
être, et qui sera devant l’Histoire son plus beau titre. a. Édition
23
lus beau titre. a. Édition réalisée sur la base
d’
un tapuscrit conservé à la Bibliothèque publique et universitaire de N
24
servé à la Bibliothèque publique et universitaire
de
Neuchâtel sous l’identifiant 612. Outre la date de rédaction, une not
25
e Neuchâtel sous l’identifiant 612. Outre la date
de
rédaction, une note manuscrite précise : « Pour le 40e anniversaire d
26
e manuscrite précise : « Pour le 40e anniversaire
de
Paneuropa. »
27
ou la première force (1963)b Je tiens la crise
de
Bruxelles pour éphémère, sur le plan des manœuvres et négociations po
28
t à l’Europe politique, et cela non pas seulement
d’
une manière implicite, mais aux termes exprès de maintes déclarations,
29
t d’une manière implicite, mais aux termes exprès
de
maintes déclarations, dont celle de M. Spaak, en mai 1962, réitérée e
30
termes exprès de maintes déclarations, dont celle
de
M. Spaak, en mai 1962, réitérée et précisée au lendemain de la « jour
31
k, en mai 1962, réitérée et précisée au lendemain
de
la « journée noire » de Bruxelles1. L’autre voulait sauver les perspe
32
et précisée au lendemain de la « journée noire »
de
Bruxelles1. L’autre voulait sauver les perspectives d’une Europe unie
33
uxelles1. L’autre voulait sauver les perspectives
d’
une Europe unie autonome, — unie d’abord politiquement, avant de se li
34
t de se lier et pour pouvoir se lier, sur un pied
de
réelle égalité, aux US et au Commonwealth. C’est la seconde politique
35
mmonwealth. C’est la seconde politique que le non
de
la France a permis de sauver en puissance, évitant pour l’instant que
36
econde politique que le non de la France a permis
de
sauver en puissance, évitant pour l’instant que notre union soit rédu
37
comme tous le souhaitent, ce sera dans la volonté
de
s’intégrer à l’Europe politique, et non pas dans l’arrière-pensée d’i
38
urope politique, et non pas dans l’arrière-pensée
d’
intégrer le marché européen à la balance commerciale des US. Parmi les
39
des US. Parmi les conséquences virtuelles du coup
d’
arrêt de Bruxelles, il en est une que je tiens à souligner ici : elle
40
Parmi les conséquences virtuelles du coup d’arrêt
de
Bruxelles, il en est une que je tiens à souligner ici : elle concerne
41
je tiens à souligner ici : elle concerne les pays
de
l’Est européen. Nul n’ignore que les intérêts transigent plus facilem
42
s Six, accepter l’Angleterre au prix du sacrifice
de
leurs buts politiques eût signifié sans aucun doute un gain matériel
43
matériel immédiat, mais c’eût été vendre le droit
d’
aînesse de l’Europe. C’est ce droit que les peuples de l’Ouest et ceux
44
mmédiat, mais c’eût été vendre le droit d’aînesse
de
l’Europe. C’est ce droit que les peuples de l’Ouest et ceux de l’Est
45
nesse de l’Europe. C’est ce droit que les peuples
de
l’Ouest et ceux de l’Est européen ont en commun, face aux US d’une pa
46
C’est ce droit que les peuples de l’Ouest et ceux
de
l’Est européen ont en commun, face aux US d’une part, à l’URSS de l’a
47
n ont en commun, face aux US d’une part, à l’URSS
de
l’autre. L’Europe en tant que telle ne peut s’épanouir et ne peut exe
48
ation mondiale que si elle unit tous ses peuples,
d’
Athènes à Helsinki, de Londres à Bucarest, et de Madrid à Varsovie. Ca
49
elle unit tous ses peuples, d’Athènes à Helsinki,
de
Londres à Bucarest, et de Madrid à Varsovie. Car tous ses peuples ont
50
, d’Athènes à Helsinki, de Londres à Bucarest, et
de
Madrid à Varsovie. Car tous ses peuples ont en commun une culture, un
51
uent tous tant qu’ils sont, et dans ce qu’ils ont
de
meilleur, des grands ensembles unifiés par un parti, par un État ou p
52
arti, par un État ou par des mass médias. Ce sens
de
la mesure humaine, et de l’équilibre en tension de la personne et de
53
des mass médias. Ce sens de la mesure humaine, et
de
l’équilibre en tension de la personne et de la communauté, c’est cela
54
e la mesure humaine, et de l’équilibre en tension
de
la personne et de la communauté, c’est cela, notre droit d’aînesse, n
55
e, et de l’équilibre en tension de la personne et
de
la communauté, c’est cela, notre droit d’aînesse, notre ancienneté, n
56
onne et de la communauté, c’est cela, notre droit
d’
aînesse, notre ancienneté, non seulement de fait, mais d’idéal, non se
57
droit d’aînesse, notre ancienneté, non seulement
de
fait, mais d’idéal, non seulement de racines locales, mais de compréh
58
se, notre ancienneté, non seulement de fait, mais
d’
idéal, non seulement de racines locales, mais de compréhension univers
59
on seulement de fait, mais d’idéal, non seulement
de
racines locales, mais de compréhension universelle. Et c’est cela qui
60
s d’idéal, non seulement de racines locales, mais
de
compréhension universelle. Et c’est cela qui doit s’exprimer dans une
61
our longtemps, voire à jamais, si nous acceptions
de
grever la construction économique des Six d’une trop lourde hypothèqu
62
ions de grever la construction économique des Six
d’
une trop lourde hypothèque américaine. L’Europe de l’Ouest ne peut ouv
63
caine. L’Europe de l’Ouest ne peut ouvrir à celle
de
l’Est qu’une possibilité purement européenne, et qui serait d’abord,
64
européenne, et qui serait d’abord, osons le dire,
d’
idéal et non d’intérêt. Une fusion atlantique prématurée servirait san
65
qui serait d’abord, osons le dire, d’idéal et non
d’
intérêt. Une fusion atlantique prématurée servirait sans doute mieux l
66
rématurée servirait sans doute mieux les intérêts
de
l’Ouest, mais au prix de l’idée européenne. L’Europe de l’Ouest satel
67
l’Ouest satellisée perdrait ses dernières chances
d’
union avec les satellites de l’Est. Peuples, communautés ou nations ne
68
ses dernières chances d’union avec les satellites
de
l’Est. Peuples, communautés ou nations ne se fédèrent qu’autour d’un
69
, communautés ou nations ne se fédèrent qu’autour
d’
un noyau libre et autonome, et lui-même de structure fédérale. Mais al
70
’autour d’un noyau libre et autonome, et lui-même
de
structure fédérale. Mais alors, dira-t-on, vous proposez une « troisi
71
evenu anti-américain, voire neutraliste ? Cessons
de
jouer sur les mots. Si l’Europe doit s’unir, c’est une force, ou ce n
72
ve que l’Europe entière comprendrait 450 millions
d’
habitants, tandis que les États-Unis (180) et l’URSS (220) additionnés
73
t que 400 millions, on ne voit plus aucune raison
de
penser que l’Europe unie devra seule se déterminer par rapport aux de
74
s que nous, et qui tiraient leur force principale
de
nos divisions et de nos doutes, bien plus que de ces bombes qu’ils ne
75
iraient leur force principale de nos divisions et
de
nos doutes, bien plus que de ces bombes qu’ils ne peuvent employer.
76
de nos divisions et de nos doutes, bien plus que
de
ces bombes qu’ils ne peuvent employer. 1. Cf. mon bref article dans
77
mars 1963, où je cite textuellement les arguments
de
P.-H. Spaak. b. Édition réalisée sur la base d’un tapuscrit conservé
78
de P.-H. Spaak. b. Édition réalisée sur la base
d’
un tapuscrit conservé à la Bibliothèque publique et universitaire de N
79
servé à la Bibliothèque publique et universitaire
de
Neuchâtel sous l’identifiant 627.
80
européennes (septembre 1965)c M. le conseiller
d’
État, M. le recteur, MM. les doyens, Mesdames et Messieurs, Nous inaug
81
s, Nous inaugurons aujourd’hui la troisième année
d’
activité de l’Institut d’études européennes (à quelques semaines près)
82
ugurons aujourd’hui la troisième année d’activité
de
l’Institut d’études européennes (à quelques semaines près) et son qua
83
d’hui la troisième année d’activité de l’Institut
d’
études européennes (à quelques semaines près) et son quatrième semestr
84
quelques semaines près) et son quatrième semestre
d’
enseignement. Entre un passé aussi bref et modeste et un avenir qui ou
85
ectuelles, c’est du présent que nous avons choisi
de
nous entretenir ce soir, et de l’état présent de nos activités, en no
86
nous avons choisi de nous entretenir ce soir, et
de
l’état présent de nos activités, en nous posant un problème précis, s
87
de nous entretenir ce soir, et de l’état présent
de
nos activités, en nous posant un problème précis, susceptible d’intér
88
s, en nous posant un problème précis, susceptible
d’
intéresser en premier chef nos étudiants : comment se situe l’enseigne
89
f nos étudiants : comment se situe l’enseignement
de
notre Institut dans l’ensemble des études européennes, qui se poursui
90
européennes, qui se poursuivent et s’élargissent
d’
une manière si réjouissante dans les différents pays de notre continen
91
manière si réjouissante dans les différents pays
de
notre continent — et même dans la grande île britannique ? Je commenc
92
a bien conclure au nom de la commission exécutive
de
l’Institut, dont il est le président. Je dois excuser l’absence de M.
93
nt il est le président. Je dois excuser l’absence
de
M. le prof. J. Freymond, directeur de l’Institut universitaire des ha
94
r l’absence de M. le prof. J. Freymond, directeur
de
l’Institut universitaire des hautes études internationales et à ce ti
95
autes études internationales et à ce titre membre
de
notre commission exécutive. Il est représenté ici par M. Chatelanat,
96
té ici par M. Chatelanat, directeur administratif
de
l’Institut frère de la villa Barton. « Études européennes » : l’expre
97
anat, directeur administratif de l’Institut frère
de
la villa Barton. « Études européennes » : l’expression déjà a cessé d
98
Études européennes » : l’expression déjà a cessé
de
frapper, est passée dans les mœurs d’un grand nombre d’universités, e
99
éjà a cessé de frapper, est passée dans les mœurs
d’
un grand nombre d’universités, et pourtant elle est très récente : les
100
pper, est passée dans les mœurs d’un grand nombre
d’
universités, et pourtant elle est très récente : les premiers institut
101
nt elle est très récente : les premiers instituts
d’
enseignement supérieur expressément et nommément consacrés aux études
102
montent guère qu’à 1949 et 1950, comme le Collège
d’
Europe, à Bruges, et l’Institut für europäische Politik und Wirtschaft
103
ardive des études européennes s’explique en somme
d’
une manière assez simple. Jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale
104
somme d’une manière assez simple. Jusqu’à la fin
de
la Seconde Guerre mondiale, et jusqu’à la décolonisation, qui commenc
105
u’Européens, mais en tant que porteurs et auteurs
de
la Civilisation avec un grand C, la seule, et la définitive, comme l’
106
universels. Il ne leur venait donc pas à l’esprit
de
s’étudier eux-mêmes comme une partie de l’humanité parmi d’autres, et
107
l’esprit de s’étudier eux-mêmes comme une partie
de
l’humanité parmi d’autres, et comme une culture parmi d’autres, puisq
108
parmi d’autres, puisqu’ils étaient le foyer même
de
toute culture, et la norme de toute civilisation digne de ce nom. Cer
109
aient le foyer même de toute culture, et la norme
de
toute civilisation digne de ce nom. Certes, la Chine et l’Inde avaien
110
culture, et la norme de toute civilisation digne
de
ce nom. Certes, la Chine et l’Inde avaient toujours pensé de même, s’
111
ent humaine, le reste du monde n’étant peuplé que
de
barbares. Mais il y avait entre ces grandes civilisations et celle de
112
y avait entre ces grandes civilisations et celle
de
l’Europe une différence fondamentale : ni la Chine ni l’Inde n’étaien
113
gnation des autres peuples. On connaît l’anecdote
de
cet empereur de Chine disant à un voyageur européen : Pourquoi donc a
114
es peuples. On connaît l’anecdote de cet empereur
de
Chine disant à un voyageur européen : Pourquoi donc avez-vous fait ce
115
t des peuples et des cultures différentes l’objet
de
leurs études. Ils ont créé l’ethnographie en tant qu’étude des ethnie
116
t qu’étude des « primitifs » d’abord, des Autres,
de
ceux qui différaient de la norme occidentale. Puis ils ont créé dans
117
fs » d’abord, des Autres, de ceux qui différaient
de
la norme occidentale. Puis ils ont créé dans toutes les grandes unive
118
é dans toutes les grandes universités, des études
d’
indologie, d’islamisme, de sinologie, de civilisations tropicales. Cep
119
les grandes universités, des études d’indologie,
d’
islamisme, de sinologie, de civilisations tropicales. Cependant qu’en
120
universités, des études d’indologie, d’islamisme,
de
sinologie, de civilisations tropicales. Cependant qu’en Inde, dans le
121
es études d’indologie, d’islamisme, de sinologie,
de
civilisations tropicales. Cependant qu’en Inde, dans le monde arabe,
122
s études, j’entends : aucune chaire universitaire
d’
européologie, ni aucune étude systématique de l’Europe en tant que tel
123
aire d’européologie, ni aucune étude systématique
de
l’Europe en tant que telle. Mieux encore : on ne voyait rien de parei
124
tant que telle. Mieux encore : on ne voyait rien
de
pareil en Europe même ! Le grand tournant, la création d’études europ
125
l en Europe même ! Le grand tournant, la création
d’
études européennes, en Europe d’abord, a été pris vers les années 1950
126
t il a coïncidé avec trois grands faits dominants
de
l’histoire contemporaine : 1. la naissance du mouvement d’union europ
127
oire contemporaine : 1. la naissance du mouvement
d’
union européenne, 2. le processus de décolonisation, 3. l’adoption acc
128
du mouvement d’union européenne, 2. le processus
de
décolonisation, 3. l’adoption accélérée de la civilisation technique
129
cessus de décolonisation, 3. l’adoption accélérée
de
la civilisation technique par les élites de l’Asie, du monde arabe et
130
lérée de la civilisation technique par les élites
de
l’Asie, du monde arabe et de l’Afrique. Chacun de ces grands faits a
131
nique par les élites de l’Asie, du monde arabe et
de
l’Afrique. Chacun de ces grands faits a déterminé la création et l’or
132
de l’Asie, du monde arabe et de l’Afrique. Chacun
de
ces grands faits a déterminé la création et l’orientation de nombreux
133
ds faits a déterminé la création et l’orientation
de
nombreux instituts et centres de recherche. a) Le mouvement d’union e
134
et l’orientation de nombreux instituts et centres
de
recherche. a) Le mouvement d’union européenne, tout d’abord. Lancé da
135
nstituts et centres de recherche. a) Le mouvement
d’
union européenne, tout d’abord. Lancé dans l’opinion publique et dans
136
Lancé dans l’opinion publique et dans la réalité
de
la vie politique par le Congrès de l’Europe, qui se tint à La Haye en
137
ans la réalité de la vie politique par le Congrès
de
l’Europe, qui se tint à La Haye en 1948, le mouvement pour unir nos p
138
idement à la création du Conseil de l’Europe puis
de
la CECA. Vers 1950, il apparaissait donc urgent d’étudier ces premièr
139
e la CECA. Vers 1950, il apparaissait donc urgent
d’
étudier ces premières institutions et surtout le problème européen qu’
140
t surtout le problème européen qu’elles tentaient
de
résoudre et dont elles étaient issues. C’est alors qu’on voit apparaî
141
alors qu’on voit apparaître dans les universités
de
Nancy, Strasbourg, Sarrebruck, Mayence, Turin, Bologne et Édimbourg d
142
ayence, Turin, Bologne et Édimbourg des instituts
d’
enseignement ou de recherche qui se consacrent à des études juridiques
143
ogne et Édimbourg des instituts d’enseignement ou
de
recherche qui se consacrent à des études juridiques et économiques su
144
ropéennes, mais aussi à des études historiques et
de
science politique sur les données générales du problème européen et s
145
péen et sur les objectifs à court et à long terme
de
ce que l’on commence à nommer, d’un terme emprunté à l’anglais, l’int
146
et à long terme de ce que l’on commence à nommer,
d’
un terme emprunté à l’anglais, l’intégration. On observe une proliféra
147
lais, l’intégration. On observe une prolifération
d’
instituts à partir de 1949 (au lendemain du congrès de La Haye), puis
148
stituts à partir de 1949 (au lendemain du congrès
de
La Haye), puis un temps mort de 1953 à 1957 (à la suite du rejet de l
149
demain du congrès de La Haye), puis un temps mort
de
1953 à 1957 (à la suite du rejet de la CED probablement, cet événemen
150
un temps mort de 1953 à 1957 (à la suite du rejet
de
la CED probablement, cet événement ayant fait croire à beaucoup qu’il
151
up qu’il marquait un arrêt définitif du processus
d’
intégration), puis une reprise très marquée à partir de 1957 (consécut
152
arquée à partir de 1957 (consécutive à la relance
de
l’intégration économique par les traités de Rome). C’est ainsi que de
153
lance de l’intégration économique par les traités
de
Rome). C’est ainsi que de 1957 à 1963, deux douzaines d’instituts nou
154
nomique par les traités de Rome). C’est ainsi que
de
1957 à 1963, deux douzaines d’instituts nouveaux sont entrés en fonct
155
). C’est ainsi que de 1957 à 1963, deux douzaines
d’
instituts nouveaux sont entrés en fonction. Au total, on compte 37 ins
156
rés en fonction. Au total, on compte 37 instituts
d’
études européennes actuellement existants, le nôtre n’occupant que le
157
ts, le nôtre n’occupant que le 34e rang par ordre
d’
ancienneté. (J’ajouterai toutefois que le Centre européen de la cultur
158
ure, en tant que maison mère de l’Institut, foyer
de
recherches et d’initiatives, est l’ancêtre de tous les autres, puisqu
159
maison mère de l’Institut, foyer de recherches et
d’
initiatives, est l’ancêtre de tous les autres, puisqu’il s’est ouvert
160
yer de recherches et d’initiatives, est l’ancêtre
de
tous les autres, puisqu’il s’est ouvert à Genève dès février 1949.) L
161
rt à Genève dès février 1949.) La grande majorité
de
ces instituts universitaires ou assimilés sont consacrés essentiellem
162
onsacrés essentiellement à l’étude des conditions
de
l’union européenne et de ses mécanismes institutionnels et économique
163
à l’étude des conditions de l’union européenne et
de
ses mécanismes institutionnels et économiques. Ils suivent donc d’ass
164
institutionnels et économiques. Ils suivent donc
d’
assez près l’actualité, et la hiérarchie des problèmes qu’elle impose,
165
érarchie des problèmes qu’elle impose, leur ordre
d’
urgence. C’est dire que les sciences économiques, surtout à partir de
166
cemment, sociologiques. Les études plus générales
d’
histoire, d’histoire des idées, de théorie politique (notamment du féd
167
iologiques. Les études plus générales d’histoire,
d’
histoire des idées, de théorie politique (notamment du fédéralisme) ou
168
plus générales d’histoire, d’histoire des idées,
de
théorie politique (notamment du fédéralisme) ou de philosophie de la
169
e théorie politique (notamment du fédéralisme) ou
de
philosophie de la culture considérées comme essentielles au début, se
170
ique (notamment du fédéralisme) ou de philosophie
de
la culture considérées comme essentielles au début, semblent durant c
171
nt négligées. Pourtant, le 2e grand fait dominant
de
notre époque, la décolonisation, me paraît de nature à leur rendre dé
172
ant de notre époque, la décolonisation, me paraît
de
nature à leur rendre désormais une importance primordiale et qui ne d
173
nce primordiale et qui ne dépendra plus des aléas
de
la construction européenne. b) En effet, la décolonisation, si rapide
174
effet, la décolonisation, si rapidement effectuée
de
1946 à 1961, a réduit l’Europe à ce qu’elle est en réalité, du point
175
évolution copernicienne, ce décentrement apparent
de
l’Europe, incite donc à étudier l’Europe comme ensemble déterminé, au
176
ait les autres ensembles, les prenait comme objet
de
ses études ethnographiques, anthropologiques, historiques et culturel
177
ues (Mayence et Bruges). Selon la formule célèbre
de
A. Toynbee, on a considéré l’Europe entière comme champ d’études hist
178
nbee, on a considéré l’Europe entière comme champ
d’
études historiques intelligibles, en lieu et place de l’addition d’his
179
ues intelligibles, en lieu et place de l’addition
d’
histoires nationales, addition toujours fausse par définition comme on
180
e au-delà des soi-disant « cultures nationales » (
de
la chimie national-socialiste, de la peinture française, des mathémat
181
s nationales » (de la chimie national-socialiste,
de
la peinture française, des mathématiques soviétiques, etc.). Ici s’ou
182
es, etc.). Ici s’ouvre, désormais, un vaste champ
d’
études nouvelles. Il s’agit d’étudier l’Europe en tant que réalité glo
183
ais, un vaste champ d’études nouvelles. Il s’agit
d’
étudier l’Europe en tant que réalité globale du point de vue de ses op
184
urope en tant que réalité globale du point de vue
de
ses options fondamentales, philosophiques, morales et religieuses, de
185
mentales, philosophiques, morales et religieuses,
de
son ethnographie et de ses structures sociales, au même titre que les
186
s, morales et religieuses, de son ethnographie et
de
ses structures sociales, au même titre que les autres cultures — lesq
187
encore trop souvent étudiées comme des déviations
de
la norme occidentale — , l’ethnographie se confondant avec une sorte
188
e — , l’ethnographie se confondant avec une sorte
de
pathologie de la civilisation. Donc, en même temps que se constitue u
189
raphie se confondant avec une sorte de pathologie
de
la civilisation. Donc, en même temps que se constitue une science eur
190
s par rapport au modèle rationnel et scientifique
de
l’Europe, mais comme des solutions différentes du problème humain. Il
191
problème humain. Il reste que la caractéristique
de
la culture européenne est d’avoir produit la civilisation technique,
192
e la caractéristique de la culture européenne est
d’
avoir produit la civilisation technique, et ici nous en venons au troi
193
et ici nous en venons au troisième fait dominant
de
l’histoire contemporaine : la diffusion mondiale de la civilisation s
194
l’histoire contemporaine : la diffusion mondiale
de
la civilisation scientifique et technique née de l’Europe et du conte
195
de la civilisation scientifique et technique née
de
l’Europe et du contexte européen. Cette civilisation technique, en qu
196
n technique, en quelque sorte objective, détachée
de
ses sources européennes, se trouve actuellement mettre au défi toutes
197
la culture européenne. c) La prise de conscience
de
ce troisième fait dominant a été marquée récemment par la conférence
198
ire les relations entre l’Europe en tant qu’unité
de
culture et les autres unités culturelles de l’Afrique noire, du monde
199
unité de culture et les autres unités culturelles
de
l’Afrique noire, du monde arabe, de l’Inde, du Sud-Est asiatique, de
200
s culturelles de l’Afrique noire, du monde arabe,
de
l’Inde, du Sud-Est asiatique, de l’Extrême-Orient et de l’Amérique la
201
du monde arabe, de l’Inde, du Sud-Est asiatique,
de
l’Extrême-Orient et de l’Amérique latine. Cette conférence de Bâle de
202
nde, du Sud-Est asiatique, de l’Extrême-Orient et
de
l’Amérique latine. Cette conférence de Bâle devrait et peut marquer l
203
-Orient et de l’Amérique latine. Cette conférence
de
Bâle devrait et peut marquer le point de départ d’études comparatives
204
nférence de Bâle devrait et peut marquer le point
de
départ d’études comparatives sur les ensembles culturels, — et d’un d
205
e Bâle devrait et peut marquer le point de départ
d’
études comparatives sur les ensembles culturels, — et d’un dialogue de
206
es comparatives sur les ensembles culturels, — et
d’
un dialogue des cultures différentes confrontées avec le problème comm
207
s différentes confrontées avec le problème commun
de
leur adaptation à la civilisation technique désormais mondialisée. Il
208
ndialisée. Il existe déjà deux ou trois instituts
de
civilisations comparées (à Bruxelles et à Salzbourg, notamment). Mais
209
mment). Mais il est clair que l’étude approfondie
de
la culture européenne, de sa spécificité, donc le développement d’une
210
que l’étude approfondie de la culture européenne,
de
sa spécificité, donc le développement d’une européologie, est la cond
211
opéenne, de sa spécificité, donc le développement
d’
une européologie, est la condition préalable de ces études comparative
212
nt d’une européologie, est la condition préalable
de
ces études comparatives. Tant il est vrai qu’on ne se connaît bien qu
213
son ne suffit pas à nous faire prendre conscience
de
notre être intime, et à susciter la volonté d’assumer nos options fon
214
ce de notre être intime, et à susciter la volonté
d’
assumer nos options fondamentales. ⁂ Dans cette vaste évolution des ét
215
e Institut ? Il est parti, comme tous les autres,
de
l’examen de la question européenne en soi, mais d’entrée de jeu, il l
216
Il est parti, comme tous les autres, de l’examen
de
la question européenne en soi, mais d’entrée de jeu, il l’a considéré
217
e l’examen de la question européenne en soi, mais
d’
entrée de jeu, il l’a considérée dans l’optique d’une européologie à c
218
n de la question européenne en soi, mais d’entrée
de
jeu, il l’a considérée dans l’optique d’une européologie à constituer
219
d’entrée de jeu, il l’a considérée dans l’optique
d’
une européologie à constituer, donc dans un esprit de synthèse, de rec
220
ne européologie à constituer, donc dans un esprit
de
synthèse, de recherche interdisciplinaire autant que possible. Et il
221
ie à constituer, donc dans un esprit de synthèse,
de
recherche interdisciplinaire autant que possible. Et il compte bien s
222
développer de plus en plus dans cette direction.
D’
où, par exemple, l’adjonction à nos premiers enseignements d’un cours
223
xemple, l’adjonction à nos premiers enseignements
d’
un cours qui commence ces jours-ci sur les relations entre l’Europe et
224
terminer cet hiver par l’examen des prolongements
de
ces influences dans et par les réalisations actuelles. En même temps,
225
it — et il faut encore — dégager les implications
de
l’union dans les domaines du droit, des sciences politiques et de l’é
226
les domaines du droit, des sciences politiques et
de
l’économie. Les conséquences de l’union en cours sont en effet en tra
227
ces politiques et de l’économie. Les conséquences
de
l’union en cours sont en effet en train de modifier profondément le m
228
vos professions. On pouvait craindre qu’un cours
de
culture générale européenne puisse sembler trop général pour présente
229
ptions à notre Institut (en dépit des difficultés
d’
accès, de passage de la rive gauche à la rive droite !) et des collusi
230
notre Institut (en dépit des difficultés d’accès,
de
passage de la rive gauche à la rive droite !) et des collusions diffi
231
tut (en dépit des difficultés d’accès, de passage
de
la rive gauche à la rive droite !) et des collusions difficiles à évi
232
ter avec les cours existants, prouve que beaucoup
d’
étudiants ont compris l’intérêt que pouvait présenter, même pour leur
233
ter pour vous, étudiants, des exercices pratiques
d’
application à la nouvelle réalité européenne des connaissances théoriq
234
ssances théoriques que vous dispensent vos études
de
base dans les facultés. Les brefs exposés que vont vous donner mes co
235
brefs exposés que vont vous donner mes collègues
de
l’Institut sur leur propre discipline illustreront d’ailleurs ce dern
236
scipline illustreront d’ailleurs ce dernier point
d’
une manière plus précise et autorisée. c. Édition réalisée sur la ba
237
e et autorisée. c. Édition réalisée sur la base
d’
un tapuscrit conservé à la Bibliothèque publique et universitaire de N
238
servé à la Bibliothèque publique et universitaire
de
Neuchâtel sous l’identifiant 921.
239
« J’essaie
d’
imaginer mes lecteurs japonais… » (janvier 1966)d I Dans ma m
240
nais… » (janvier 1966)d I Dans ma maison
de
la campagne française, non loin de Genève, en face d’un paysage d’hiv
241
ançaise, non loin de Genève, en face d’un paysage
d’
hiver méditatif, je commence cette série de courts messages qu’a bien
242
aysage d’hiver méditatif, je commence cette série
de
courts messages qu’a bien voulu me demander le Yomiuri. J’essaie d’im
243
qu’a bien voulu me demander le Yomiuri. J’essaie
d’
imaginer mes lecteurs japonais… Comme il est difficile d’écrire pour d
244
ner mes lecteurs japonais… Comme il est difficile
d’
écrire pour des gens qui habitent tellement loin ! Leurs problèmes son
245
(the cheapest way) deux inconnus : « J’ai horreur
de
ceci ou de cela », dit l’un d’eux. « Comment, vous aussi ? s’écrie l’
246
st way) deux inconnus : « J’ai horreur de ceci ou
de
cela », dit l’un d’eux. « Comment, vous aussi ? s’écrie l’autre. Nous
247
s : « J’ai horreur de ceci ou de cela », dit l’un
d’
eux. « Comment, vous aussi ? s’écrie l’autre. Nous sommes donc frères
248
nt mon globe terrestre, cherchant quelles régions
de
la Boule ont des problèmes fondamentaux comparables à ceux de l’Europ
249
ont des problèmes fondamentaux comparables à ceux
de
l’Europe, mes yeux s’arrêtent bientôt sur le Japon. Pourquoi ? Parce
250
exes, les sentiments, les idéaux, et le sens même
de
la vie, dépendent très largement de leurs traditions, mais sont aussi
251
le sens même de la vie, dépendent très largement
de
leurs traditions, mais sont aussi des hommes qui ont accepté les risq
252
mmes qui ont accepté les risques et les promesses
de
la technique. Certes, je vois quelques régions de la Terre qui vénère
253
de la technique. Certes, je vois quelques régions
de
la Terre qui vénèrent plus scrupuleusement des traditions parfois bie
254
nt dans l’aventure technique avec au moins autant
de
résolution — les USA, l’URSS, par exemple — mais c’est qu’elles ont p
255
t l’oublier. Mais je n’en vois pas où le problème
de
la coexistence féconde des traditions et de la technique la plus mode
256
blème de la coexistence féconde des traditions et
de
la technique la plus moderne soit posé dans des termes aussi voisins,
257
moderne peut détruire les équilibres coutumiers,
d’
ordre religieux, moral, social, économique, si difficilement mis au po
258
ifficilement mis au point comme des chefs-d’œuvre
d’
art ou de l’artisanat par nos cultures traditionnelles. L’équilibre en
259
ent mis au point comme des chefs-d’œuvre d’art ou
de
l’artisanat par nos cultures traditionnelles. L’équilibre entre campa
260
quilibre entre méditation et activité, entre sens
de
la vie et efficience… Mais nous savons aussi que la technique, si el
261
ique, si elle nous ouvre et nous promet un avenir
de
libertés individuelles plus nombreuses, payé d’ailleurs au prix de di
262
ne pourra progresser longtemps si elle est coupée
de
ses sources culturelles. La technique n’est pas née de rien. Elle est
263
s sources culturelles. La technique n’est pas née
de
rien. Elle est le produit logique quoique imprévu d’un complexe très
264
rien. Elle est le produit logique quoique imprévu
d’
un complexe très vaste, étiré sur des siècles, de croyances religieuse
265
d’un complexe très vaste, étiré sur des siècles,
de
croyances religieuses, de structures sociales et de nécessités physiq
266
étiré sur des siècles, de croyances religieuses,
de
structures sociales et de nécessités physiques. Ce complexe définit u
267
croyances religieuses, de structures sociales et
de
nécessités physiques. Ce complexe définit un certain type de civilisa
268
és physiques. Ce complexe définit un certain type
de
civilisation ou de culture. La technique est née au xix e siècle et e
269
mplexe définit un certain type de civilisation ou
de
culture. La technique est née au xix e siècle et en Europe. Elle nous
270
paraît aujourd’hui comme la résultante invincible
de
deux millénaires de conflits entre des vérités contradictoires qui tr
271
omme la résultante invincible de deux millénaires
de
conflits entre des vérités contradictoires qui triomphent alternative
272
dictoires qui triomphent alternativement : celles
de
la foi révélée en l’ordre physique et moral de l’univers, et celles d
273
es de la foi révélée en l’ordre physique et moral
de
l’univers, et celles du savoir vérifié ; celles de l’imagination anti
274
e l’univers, et celles du savoir vérifié ; celles
de
l’imagination anticipatrice et celles de l’expérience méticuleuse ; c
275
; celles de l’imagination anticipatrice et celles
de
l’expérience méticuleuse ; celles de la prudence conservatrice et cel
276
ce et celles de l’expérience méticuleuse ; celles
de
la prudence conservatrice et celles de l’audace créatrice ; celles qu
277
e ; celles de la prudence conservatrice et celles
de
l’audace créatrice ; celles qui nous rassurent au nom du passé éprouv
278
européen, une tradition ritualiste et un ferment
de
révolution critique, une propension à la sagesse théologique ou spiri
279
agesse théologique ou spirituelle, et une passion
de
la découverte à tous risques sociaux et politiques. Il y a un individ
280
uant l’homme au choix et au pari sur le sens même
de
sa vie. On retrouve ces deux phénomènes dans l’histoire du Japon. La
281
e du Japon. La dualité entre le pouvoir religieux
de
Kyoto, et le pouvoir impérial de Kamakura ou de Yedo. Et l’individual
282
ouvoir religieux de Kyoto, et le pouvoir impérial
de
Kamakura ou de Yedo. Et l’individualisme qui se manifeste dans l’art
283
x de Kyoto, et le pouvoir impérial de Kamakura ou
de
Yedo. Et l’individualisme qui se manifeste dans l’art — en contraste
284
el, comme dans l’Europe médiévale et renaissante.
De
ces conflits de forces contraires, mais que l’on essaie d’équilibrer
285
’Europe médiévale et renaissante. De ces conflits
de
forces contraires, mais que l’on essaie d’équilibrer en dynamismes cr
286
nflits de forces contraires, mais que l’on essaie
d’
équilibrer en dynamismes créateurs, sont nées la science et la techniq
287
n domine la seconde moitié du xx e siècle : celle
de
savoir si la technique enchaîne l’individu ou le libère, si nous somm
288
ndividu ou le libère, si nous sommes les esclaves
de
nos machines ou si elles nous servent, et surtout — cette question ré
289
iser la bombe atomique, ou si un jour, à la suite
d’
une erreur commise au Pentagone ou au Kremlin, la bombe nous anéantira
290
ture considérable produit depuis une cinquantaine
d’
années des variations sur le thème pessimiste de « la technique contre
291
e d’années des variations sur le thème pessimiste
de
« la technique contre l’humain ». Tout cela repose, à mon avis, sur u
292
La technique n’est pas une puissance indépendante
de
l’homme et qui pourrait se tourner subitement contre lui. La techniqu
293
s utilitaire ! L’histoire des grandes inventions,
de
celle du feu à celle de la fusée spatiale, n’est pas l’histoire de no
294
e des grandes inventions, de celle du feu à celle
de
la fusée spatiale, n’est pas l’histoire de nos « besoins ». C’est plu
295
celle de la fusée spatiale, n’est pas l’histoire
de
nos « besoins ». C’est plutôt l’histoire de nos rêves. L’hypothèse si
296
toire de nos « besoins ». C’est plutôt l’histoire
de
nos rêves. L’hypothèse si longtemps admise sur l’origine utilitaire o
297
mps admise sur l’origine utilitaire ou économique
de
la technique aux premiers âges de l’homme, est aujourd’hui abandonnée
298
e ou économique de la technique aux premiers âges
de
l’homme, est aujourd’hui abandonnée au profit d’explications des prem
299
de l’homme, est aujourd’hui abandonnée au profit
d’
explications des premières inventions — le feu, la flèche — par la mag
300
la flèche — par la magie ou les rites religieux.
D’
une manière générale, et plus près de nous, les grandes inventions qui
301
quelques rêveurs un peu bizarres, n’avait besoin
d’
autos quand il n’y en avait pas. C’est du rêve de voler qu’est né l’av
302
d’autos quand il n’y en avait pas. C’est du rêve
de
voler qu’est né l’avion, et du rêve de partir au hasard sur les route
303
st du rêve de voler qu’est né l’avion, et du rêve
de
partir au hasard sur les routes qu’est née l’auto : on en trouve le r
304
en trouve le récit détaillé dans l’autobiographie
de
Henry Ford. Ce rêveur incurable, bricoleur sans génie, était obsédé p
305
le, bricoleur sans génie, était obsédé par l’idée
de
construire une « locomotive routière », c’est-à-dire un véhicule rapi
306
, mais pût aller à l’aventure : phantasme typique
de
l’adolescence. Le jeune Ford le réalise en 1893, quelques années aprè
307
erne. On n’ignore pas d’ailleurs que des dizaines
d’
ingénieurs — en France surtout — avaient construit des prototypes vari
308
surtout — avaient construit des prototypes variés
d’
automobiles avant Ford. Son invention, ou sa réinvention indépendante
309
meure pas moins exemplaire, par ses motifs réels,
d’
ordre psychologique, autant ou plus que par ses succès ultérieurs. Auj
310
r ses succès ultérieurs. Aujourd’hui, l’on entend
de
belles âmes soupirer que l’homme est devenu l’esclave de sa voiture,
311
es âmes soupirer que l’homme est devenu l’esclave
de
sa voiture, et c’est vrai dans ce sens que l’homme moyen croit qu’il
312
omme moyen croit qu’il ne pourrait plus se passer
de
cet objet, mais le fautif n’est pas la voiture, c’est la publicité, l
313
surplus que s’il est bien certain que l’invention
de
Ford est née d’un rêve d’évasion hors des voies imposées de la civili
314
est bien certain que l’invention de Ford est née
d’
un rêve d’évasion hors des voies imposées de la civilisation, hors des
315
certain que l’invention de Ford est née d’un rêve
d’
évasion hors des voies imposées de la civilisation, hors des « chemins
316
t née d’un rêve d’évasion hors des voies imposées
de
la civilisation, hors des « chemins de fer » au nom évocateur de dure
317
ion, hors des « chemins de fer » au nom évocateur
de
dure contrainte, tandis que le préfixe « auto » évoque la liberté de
318
tandis que le préfixe « auto » évoque la liberté
de
l’individu, cette invention n’était certes pas la mieux adaptée à ses
319
faut payer les autoroutes. Si je veux être libre
de
rêver, c’est justement un train que je vais prendre. Dans mon wagon,
320
e et je puis méditer à loisir. À mon volant, rien
de
pareil : tout ce que je peux lire, ce sont des chiffres, des ordres d
321
ue je peux lire, ce sont des chiffres, des ordres
de
police routière ; si je mange, ce n’est guère qu’un sandwich, si je r
322
pour toujours… d. Édition réalisée sur la base
d’
un tapuscrit conservé à la Bibliothèque publique et universitaire de N
323
servé à la Bibliothèque publique et universitaire
de
Neuchâtel sous l’identifiant 647. Selon une note manuscrite, il s’agi
324
tifiant 647. Selon une note manuscrite, il s’agit
de
deux chroniques pour le Yomiuri shinbun.
325
Situation
de
l’Europe en 1966 (1966) Un changement d’équilibre L’histoire n
326
tion de l’Europe en 1966 (1966) Un changement
d’
équilibre L’histoire n’est pas faite seulement de catastrophes, tra
327
équilibre L’histoire n’est pas faite seulement
de
catastrophes, traités, révolutions, avènements, découvertes et morts
328
avènements, découvertes et morts illustres, mais
d’
une perpétuelle interaction de facteurs innombrables, dont on peut que
329
rts illustres, mais d’une perpétuelle interaction
de
facteurs innombrables, dont on peut quelquefois déceler certaines rés
330
ines résultantes régionales, sous forme de prises
de
conscience d’une situation que l’on ressent comme nouvelle. Ainsi de
331
es régionales, sous forme de prises de conscience
d’
une situation que l’on ressent comme nouvelle. Ainsi de la région euro
332
situation que l’on ressent comme nouvelle. Ainsi
de
la région européenne en 1966 : elle n’a pas été le théâtre d’événemen
333
européenne en 1966 : elle n’a pas été le théâtre
d’
événements très spectaculaires, mais d’une sorte de changement d’aplom
334
le théâtre d’événements très spectaculaires, mais
d’
une sorte de changement d’aplomb dans l’attitude des Européens face au
335
’événements très spectaculaires, mais d’une sorte
de
changement d’aplomb dans l’attitude des Européens face au reste du mo
336
ès spectaculaires, mais d’une sorte de changement
d’
aplomb dans l’attitude des Européens face au reste du monde et surtout
337
te modification est devenue sensible à l’occasion
de
certains gestes accomplis par le chef de l’État français, au nom de «
338
nos pays à l’égard de l’Est d’une part et des USA
de
l’autre, obéissaient à des motifs d’intérêt national d’abord, et dans
339
t et des USA de l’autre, obéissaient à des motifs
d’
intérêt national d’abord, et dans cette mesure-là, ne servaient pas né
340
pas moins que l’urgence et la réalité du problème
de
l’union de l’Europe se sont manifestées plus vivement que jamais en 1
341
ue l’urgence et la réalité du problème de l’union
de
l’Europe se sont manifestées plus vivement que jamais en 1966. D’une
342
es barrières douanières entre les Six cesseraient
d’
exister dès le 1er juillet 1968. La question d’une union économique gé
343
nt d’exister dès le 1er juillet 1968. La question
d’
une union économique générale, appelant des mesures d’union politique,
344
e union économique générale, appelant des mesures
d’
union politique, redevenait du même coup très actuelle. D’autre part,
345
e acclamer en URSS, et n’a cessé, avant et après,
de
recevoir à l’Élysée les ministres des pays de l’Est ; enfin, il a dén
346
ès, de recevoir à l’Élysée les ministres des pays
de
l’Est ; enfin, il a dénoncé la politique américaine au Vietnam dans s
347
politique américaine au Vietnam dans son discours
de
Phnom Penh. Il s’est fait ainsi le champion de « l’Europe européenne
348
rs de Phnom Penh. Il s’est fait ainsi le champion
de
« l’Europe européenne » aux yeux des États-Unis, sans cesser de figur
349
européenne » aux yeux des États-Unis, sans cesser
de
figurer aux yeux des partisans européens de l’Europe unie l’obstacle
350
esser de figurer aux yeux des partisans européens
de
l’Europe unie l’obstacle principal à leur Grand Dessein. La portée de
351
n union ; mais faits au nom d’une seule nation et
d’
une conception politique demeurée foncièrement nationaliste, ils n’éta
352
urée foncièrement nationaliste, ils n’étaient pas
de
nature à faciliter l’union — pourtant seule condition de leur efficac
353
re à faciliter l’union — pourtant seule condition
de
leur efficacité, dans l’immédiat tout au moins. Pendant que l’OTAN dé
354
iat tout au moins. Pendant que l’OTAN déménageait
de
Fontainebleau, des Américains s’installaient aux commandes de l’indus
355
leau, des Américains s’installaient aux commandes
de
l’industrie électronique en France. Coïncidence, sans doute, mais sym
356
ans doute, mais symbole frappant des effets réels
d’
une conception européenne fondée sur la conviction que « la nation res
357
tique, notre continent divisé. Ainsi le mouvement
de
bascule qui s’est fait sentir en 1966 ne s’est opéré jusqu’ici que da
358
eprésentation du monde, non pas dans les réalités
de
notre action. Nouveaux motifs d’union On sait que les premiers
359
les réalités de notre action. Nouveaux motifs
d’
union On sait que les premiers efforts d’union avaient été motivés,
360
otifs d’union On sait que les premiers efforts
d’
union avaient été motivés, au lendemain de la guerre, par les nécessit
361
efforts d’union avaient été motivés, au lendemain
de
la guerre, par les nécessités de la reconstruction économique et le d
362
és, au lendemain de la guerre, par les nécessités
de
la reconstruction économique et le désir de lier les ennemis d’hier,
363
sités de la reconstruction économique et le désir
de
lier les ennemis d’hier, France et Allemagne : d’où le Conseil de l’E
364
uction économique et le désir de lier les ennemis
d’
hier, France et Allemagne : d’où le Conseil de l’Europe, puis la CECA,
365
de lier les ennemis d’hier, France et Allemagne :
d’
où le Conseil de l’Europe, puis la CECA, conduisant au Marché commun.
366
uis lors. Aux premiers motifs, qui ont été suivis
d’
actions largement réussies (puisque l’Europe est désormais pacifiée et
367
ans sa prospérité) viennent s’en ajouter d’autres
de
tous ordres, culturels ou politiques, traditionnels ou prospectifs. J
368
rospectifs. J’en retiendrai cinq qui sont apparus
d’
une brûlante actualité au cours de 1966. 1. Sauver l’indépendance po
369
urs de 1966. 1. Sauver l’indépendance politique
de
l’Europe « Sans Europe unie, Américains et Russes s’entendraient p
370
oit nécessairement au détriment de nos pays, rien
d’
autre que leurs divisions nationalistes ne s’opposant à ce qu’ils s’y
371
opposer. Or ce qui fut refusé au chef incontesté
d’
une nation combattante — seule victorieuse entre toutes celles de l’Eu
372
mbattante — seule victorieuse entre toutes celles
de
l’Europe ! — quel autre homme d’État d’aujourd’hui serait-il en mesur
373
es celles de l’Europe ! — quel autre homme d’État
d’
aujourd’hui serait-il en mesure de l’obtenir dans une conjoncture anal
374
re homme d’État d’aujourd’hui serait-il en mesure
de
l’obtenir dans une conjoncture analogue ? Aucun ne pourrait parler au
375
art du Marché commun après avoir longtemps refusé
d’
y entrer, et une douzaine d’autres États « souverains », mais qui ne c
376
en des égards, le plus Grand3. Mais pas une seule
de
ses vingt-cinq nations, isolément, ne peut prétendre à jouer un rôle
377
jouer un rôle actif, c’est-à-dire à faire preuve
d’
indépendance politique. L’indépendance, pour les Européens, ne saurait
378
our les Européens, ne saurait être qu’un attribut
de
leur union, et plus du tout de la « souveraineté » de leur nation.
379
tre qu’un attribut de leur union, et plus du tout
de
la « souveraineté » de leur nation. 2. Renouer avec les pays de l’
380
eur union, et plus du tout de la « souveraineté »
de
leur nation. 2. Renouer avec les pays de l’Est européen Au Cong
381
eté » de leur nation. 2. Renouer avec les pays
de
l’Est européen Au Congrès de l’Europe, à La Haye, en mai 1948, les
382
uer avec les pays de l’Est européen Au Congrès
de
l’Europe, à La Haye, en mai 1948, les fédéralistes européens avaient
383
te du futur Conseil de l’Europe, pour les nations
de
l’Est momentanément empêchées de se faire représenter. On peut regret
384
pour les nations de l’Est momentanément empêchées
de
se faire représenter. On peut regretter que la motion n’ait pas eu de
385
ter. On peut regretter que la motion n’ait pas eu
de
suites. Mais il fallait d’abord bâtir à l’Ouest un noyau dense d’Euro
386
il fallait d’abord bâtir à l’Ouest un noyau dense
d’
Europe unie qui fût capable d’une part d’assurer une autonomie plus ré
387
au dense d’Europe unie qui fût capable d’une part
d’
assurer une autonomie plus réelle à l’égard des USA, d’autre part d’at
388
nomie plus réelle à l’égard des USA, d’autre part
d’
attirer les peuples du glacis de l’Est à mesure que se relâcherait l’e
389
USA, d’autre part d’attirer les peuples du glacis
de
l’Est à mesure que se relâcherait l’emprise soviétique. La stratégie
390
s des chroniqueurs politiques, pendant les années
de
la guerre froide. Ils la dénonçaient comme révélant chez ceux (d’aill
391
sement neutralistes », soit une touchante absence
de
réalisme. Et pourtant, l’année 1966 a vu se multiplier les signes d’u
392
rtant, l’année 1966 a vu se multiplier les signes
d’
une évolution dans ce sens4. Les gouvernements de l’Est desserrent un
393
d’une évolution dans ce sens4. Les gouvernements
de
l’Est desserrent un peu leur contrôle sur la vie culturelle, et tolèr
394
llectuels voyagent et dialoguent. On traduit plus
d’
auteurs, on joue plus de compositeurs de l’autre « camp », et l’idée d
395
aloguent. On traduit plus d’auteurs, on joue plus
de
compositeurs de l’autre « camp », et l’idée de « camp » d’ailleurs s’
396
duit plus d’auteurs, on joue plus de compositeurs
de
l’autre « camp », et l’idée de « camp » d’ailleurs s’estompe : on pas
397
us de compositeurs de l’autre « camp », et l’idée
de
« camp » d’ailleurs s’estompe : on passe le rideau de fer sans s’en a
398
camp » d’ailleurs s’estompe : on passe le rideau
de
fer sans s’en apercevoir, parfois plus facilement qu’une douane à l’O
399
quie. Les contrats se multiplient avec des firmes
de
l’Ouest. Fiat s’installe en URSS. Et de l’autre côté, la France manif
400
es firmes de l’Ouest. Fiat s’installe en URSS. Et
de
l’autre côté, la France manifeste des intentions de dégagement de la
401
l’autre côté, la France manifeste des intentions
de
dégagement de la « tutelle » américaine bien faites pour rassurer ceu
402
la France manifeste des intentions de dégagement
de
la « tutelle » américaine bien faites pour rassurer ceux qu’on appela
403
Le président Johnson lui-même proclame sa volonté
d’
entente avec le Kremlin et multiplie les offres de traités techniques,
404
d’entente avec le Kremlin et multiplie les offres
de
traités techniques, spatiaux, nucléaires… Dans les pays de l’Est euro
405
s techniques, spatiaux, nucléaires… Dans les pays
de
l’Est européen, où l’on suit de près toute cette évolution, un sourd
406
es… Dans les pays de l’Est européen, où l’on suit
de
près toute cette évolution, un sourd espoir grandit de rejoindre dema
407
ès toute cette évolution, un sourd espoir grandit
de
rejoindre demain une Europe de l’Ouest libérée de l’hypothèque « colo
408
de rejoindre demain une Europe de l’Ouest libérée
de
l’hypothèque « colonialiste-impérialiste », tandis que l’URSS est occ
409
andis que l’URSS est occupée ailleurs, contrainte
d’
affronter une menace orientale d’autant plus grave que rien ne la lais
410
eurs, contrainte d’affronter une menace orientale
d’
autant plus grave que rien ne la laissait prévoir en bonne doctrine ma
411
ne la laissait prévoir en bonne doctrine marxiste
de
l’histoire5. Mais pour pouvoir « rejoindre » l’Europe, il faut d’abor
412
t ce nom par la General Electric) a été le signal
d’
alarme. Elle a montré que des gestes négatifs, comme se retirer de l’O
413
montré que des gestes négatifs, comme se retirer
de
l’OTAN ou menacer de bloquer le Marché commun, ne servaient de rien q
414
s négatifs, comme se retirer de l’OTAN ou menacer
de
bloquer le Marché commun, ne servaient de rien quand on venait à l’ép
415
menacer de bloquer le Marché commun, ne servaient
de
rien quand on venait à l’épreuve de force. Elle a montré que le « gra
416
nti-américain en paroles et dans les déclarations
de
sa presse courait autant de risques de se voir satellisé dans des dom
417
dans les déclarations de sa presse courait autant
de
risques de se voir satellisé dans des domaines clés de son industrie
418
clarations de sa presse courait autant de risques
de
se voir satellisé dans des domaines clés de son industrie qu’un petit
419
sques de se voir satellisé dans des domaines clés
de
son industrie qu’un petit pays neutre et discret comme la Suisse, qui
420
s à coup de dumping et suivis après quelques mois
de
licenciements massifs sur des ordres venus d’Amérique, sont de nature
421
ois de licenciements massifs sur des ordres venus
d’
Amérique, sont de nature à faire comprendre à beaucoup que, faute d’ap
422
nts massifs sur des ordres venus d’Amérique, sont
de
nature à faire comprendre à beaucoup que, faute d’appliquer sans déla
423
e nature à faire comprendre à beaucoup que, faute
d’
appliquer sans délai un plan d’union, les vingt-cinq nations de l’Euro
424
eaucoup que, faute d’appliquer sans délai un plan
d’
union, les vingt-cinq nations de l’Europe se condamnent à la colonisat
425
ans délai un plan d’union, les vingt-cinq nations
de
l’Europe se condamnent à la colonisation économique et à la satellisa
426
la satellisation politique, les unes par l’empire
de
l’Est, les autres par l’empire de l’Ouest. Face à ces menaces de plus
427
es par l’empire de l’Est, les autres par l’empire
de
l’Ouest. Face à ces menaces de plus en plus précises, on aura vu en 1
428
iel des coopératives en Suisse déclarer, au terme
d’
exposés objectifs des faits, qu’ils ne voyaient qu’un seul moyen de pr
429
fs des faits, qu’ils ne voyaient qu’un seul moyen
de
protéger chacun de nos pays contre l’invisible invasion américaine :
430
s ne voyaient qu’un seul moyen de protéger chacun
de
nos pays contre l’invisible invasion américaine : c’était l’union. L’
431
urcit ses attitudes et ses méthodes. Elle prétend
de
moins en moins à cette philanthropie dont les Français lui faisaient
432
t au moment où les Européens de l’Ouest font mine
de
se « libérer » de leurs bienfaiteurs que ceux-ci risquent de devenir
433
Européens de l’Ouest font mine de se « libérer »
de
leurs bienfaiteurs que ceux-ci risquent de devenir les colonisateurs
434
érer » de leurs bienfaiteurs que ceux-ci risquent
de
devenir les colonisateurs économiques qu’on les accusait d’être, à to
435
les colonisateurs économiques qu’on les accusait
d’
être, à tort, quand ils tentaient seulement de nous remettre sur pieds
436
ait d’être, à tort, quand ils tentaient seulement
de
nous remettre sur pieds. 4. Combler le « retard technologique »
437
dans les pays européens ne fournissent guère plus
de
5 % de la production totale, il est remarquable que leur contrôle s’e
438
s pays européens ne fournissent guère plus de 5 %
de
la production totale, il est remarquable que leur contrôle s’exerce s
439
vue technique, ou les plus décisifs pour l’avenir
de
l’industrie6 : 33 % du marché de l’automobile, 40 % du pétrole en Gra
440
fs pour l’avenir de l’industrie6 : 33 % du marché
de
l’automobile, 40 % du pétrole en Grande-Bretagne et en Allemagne, 75
441
on des ordinateurs en France. Fière à juste titre
de
ses « Caravelle », la France ne peut les vendre à la Chine, parce que
442
sont d’accord pour attribuer la cause principale
de
notre dépendance économique par rapport aux États-Unis à ce technolog
443
acrée), lequel à son tour s’explique par l’esprit
de
routine des industriels artificiellement protégés contre la concurren
444
des « culturels » à l’égard des « techniciens »,
d’
où l’insuffisance des écoles professionnelles et des salaires promis à
445
t : tout cela se ramenant toujours à la petitesse
de
nos marchés cloisonnés par les douanes nationales. Comme le déclarait
446
Comme le déclarait récemment le directeur général
d’
Olivetti, « il est inconcevable que nous autres Européens soyons encor
447
s Européens soyons encore entravés par le concept
d’
État-nation. Si nous parvenons à nous débarrasser de ces barrières, je
448
État-nation. Si nous parvenons à nous débarrasser
de
ces barrières, je prévois un formidable essor intellectuel et psychol
449
d’autres n’hésitent pas à prédire qu’en l’absence
d’
une union réelle, nos nations qui se prétendent « souveraines » tomber
450
ndent « souveraines » tomberaient bientôt au rang
de
« sous-développées du monde occidental ». Certes, E. Barold Wilson a
451
s, E. Barold Wilson a proposé en 1966 la création
d’
une « communauté technologique européenne », dont l’intérêt serait bie
452
ue européenne », dont l’intérêt serait bien moins
de
concurrencer les États-Unis que de développer les possibilités propre
453
ait bien moins de concurrencer les États-Unis que
de
développer les possibilités propres à l’Europe dans ce domaine. Mais
454
dans ce domaine. Mais cela supposerait un minimum
d’
union politique qui n’existe pas encore. 5. Aider le tiers-monde
455
du tiers-monde un pourcentage beaucoup plus fort
de
son revenu national que les USA et que l’URSS, les chiffres absolus d
456
l que les USA et que l’URSS, les chiffres absolus
de
l’aide européenne sont dérisoires. La tâche déborde notoirement les p
457
es. La tâche déborde notoirement les possibilités
de
chacun de nos pays, et même de l’addition de nos vingt-cinq pays. Car
458
he déborde notoirement les possibilités de chacun
de
nos pays, et même de l’addition de nos vingt-cinq pays. Car seule la
459
t les possibilités de chacun de nos pays, et même
de
l’addition de nos vingt-cinq pays. Car seule la multiplication, rendu
460
ités de chacun de nos pays, et même de l’addition
de
nos vingt-cinq pays. Car seule la multiplication, rendue possible par
461
iplication, rendue possible par la mise en commun
de
nos efforts et ressources à une échelle continentale, permettrait de
462
essources à une échelle continentale, permettrait
de
dégager les sommes et de former les hommes capables d’agir dans le ti
463
ontinentale, permettrait de dégager les sommes et
de
former les hommes capables d’agir dans le tiers-monde et d’y manifest
464
gager les sommes et de former les hommes capables
d’
agir dans le tiers-monde et d’y manifester la présence de l’Europe (et
465
les hommes capables d’agir dans le tiers-monde et
d’
y manifester la présence de l’Europe (et non pas seulement le retour d
466
dans le tiers-monde et d’y manifester la présence
de
l’Europe (et non pas seulement le retour des petits calculs nationali
467
des petits calculs nationalistes-capitalistes, ou
de
prestige, d’anciennes « puissances coloniales »). Or durant toute l’a
468
lculs nationalistes-capitalistes, ou de prestige,
d’
anciennes « puissances coloniales »). Or durant toute l’année 1966, l’
469
de par rapport à l’Occident et à l’URSS n’a cessé
de
s’accentuer et d’être publié sur tous les tons dans le monde entier.
470
’Occident et à l’URSS n’a cessé de s’accentuer et
d’
être publié sur tous les tons dans le monde entier. Que nous le mériti
471
es Européens, nous sommes tenus pour responsables
de
la carence des riches à secourir les pauvres (hier encore sujets des
472
pauvres (hier encore sujets des empires coloniaux
de
la France et de la Grande-Bretagne), et sans union économique, nous n
473
core sujets des empires coloniaux de la France et
de
la Grande-Bretagne), et sans union économique, nous ne serons jamais
474
is assez riches pour ce que le tiers-monde attend
de
nous. Et puis enfin, ce sont les divisions nationalistes de l’Europe
475
t puis enfin, ce sont les divisions nationalistes
de
l’Europe en 1914 et en 1939 qui ont jeté le monde entier dans la guer
476
monde entier dans la guerre. C’est aux Européens
d’
offrir l’exemple d’une union régionale qui, d’une part, mettrait fin à
477
la guerre. C’est aux Européens d’offrir l’exemple
d’
une union régionale qui, d’une part, mettrait fin à ces divisions, d’a
478
mme anticorps contre le virus nationaliste. C’est
d’
un traitement fédéraliste, solidariste, coopératif, que les jeunes nat
479
, solidariste, coopératif, que les jeunes nations
de
l’Afrique7, comme les vieilles nations de l’Asie et les fragiles nati
480
nations de l’Afrique7, comme les vieilles nations
de
l’Asie et les fragiles nations de l’Amérique du Sud8 ont aujourd’hui
481
ieilles nations de l’Asie et les fragiles nations
de
l’Amérique du Sud8 ont aujourd’hui le plus grand besoin. Et l’Europe
482
», encore que les Six ne représentent qu’un quart
de
nos pays et un tiers de leur population globale, Est et Ouest additio
483
représentent qu’un quart de nos pays et un tiers
de
leur population globale, Est et Ouest additionnés9. En 1966, le March
484
nter la crise la plus sérieuse provoquée par l’un
de
ses membres, mais que c’était au prix de l’ambition majeure de ceux q
485
s, mais que c’était au prix de l’ambition majeure
de
ceux qui rédigèrent le traité de Rome : la supranationalité des décis
486
ambition majeure de ceux qui rédigèrent le traité
de
Rome : la supranationalité des décisions, conduisant à l’union politi
487
légitimes, et c’est fort bien, mais le dynamisme
de
la Communauté a été atteint, les espoirs de développement au-delà de
488
misme de la Communauté a été atteint, les espoirs
de
développement au-delà de la lettre du traité ont été vertement rabrou
489
été atteint, les espoirs de développement au-delà
de
la lettre du traité ont été vertement rabroués, et l’on s’est aperçu
490
été trop optimiste en croyant que les nécessités
de
l’union économique amèneraient les gouvernements européens à accepter
491
nolens volens des mesures toujours plus concrètes
d’
union politique. La vérité qui est apparue en 1966, c’est qu’on ne fer
492
— ce qui suppose une volonté consciente, un coup
de
passion, et une vision du but à rejoindre. L’esprit doit faire le sau
493
ord et le corps suivra. Mais quelle est la vision
de
l’union européenne qui pourrait entraîner l’opinion et les peuples, o
494
obligeant ainsi les responsables à faire le saut
de
l’économique au politique ? Ce ne saurait être une super-nation-Europ
495
ue les nationalistes accusant les « européistes »
de
la vouloir, — mais personne ne la veut en réalité. Ce ne saurait être
496
prouvé à l’envi son insuffisance. Les diversités
de
tous ordres — culturelles, religieuses, historiques, régionales, poli
497
es, régionales, politiques — qui font la richesse
de
l’Europe rendent improbable autant qu’indésirable toute union qui ne
498
tant qu’indésirable toute union qui ne serait pas
de
forme fédérale, c’est-à-dire qui ne respecterait pas ces diversités ;
499
; et en retour, leur union seule peut les sauver
de
l’uniformisation par une économie, une technique et une idéologie ven
500
rs… Mais il faut bien reconnaître qu’aucun projet
d’
union selon cette formule fédérale, seule possible, n’a encore été pro
501
sible, n’a encore été proposé. On a souvent parlé
de
« relance de l’Europe politique » en 1966. On a prêté au général de G
502
core été proposé. On a souvent parlé de « relance
de
l’Europe politique » en 1966. On a prêté au général de Gaulle de gran
503
itique » en 1966. On a prêté au général de Gaulle
de
grands desseins qu’il est fort possible qu’il tienne en réserve. Mais
504
fort possible qu’il tienne en réserve. Mais rien
de
concret ne s’est manifesté. L’opinion s’est donc contentée de spécule
505
e s’est manifesté. L’opinion s’est donc contentée
de
spéculer sur le revirement de l’attitude britannique à l’égard du Mar
506
’est donc contentée de spéculer sur le revirement
de
l’attitude britannique à l’égard du Marché commun, qui a marqué l’ann
507
tions du Premier ministre et ses premiers voyages
d’
exploration dans les capitales des Six sont suivis de près par les obs
508
xploration dans les capitales des Six sont suivis
de
près par les observateurs politiques. Et certes, l’éventualité de l’a
509
observateurs politiques. Et certes, l’éventualité
de
l’adhésion de la Grande-Bretagne au Marché commun est importante10, c
510
olitiques. Et certes, l’éventualité de l’adhésion
de
la Grande-Bretagne au Marché commun est importante10, car elle entraî
511
mun est importante10, car elle entraînerait celle
de
la plupart des pays de l’AELE et contribuerait puissamment à renforce
512
ar elle entraînerait celle de la plupart des pays
de
l’AELE et contribuerait puissamment à renforcer l’autonomie économiqu
513
it puissamment à renforcer l’autonomie économique
de
l’Europe. Mais nul n’est en droit d’affirmer que l’union politique du
514
e économique de l’Europe. Mais nul n’est en droit
d’
affirmer que l’union politique du continent serait facilitée par l’ent
515
ais aussi entre la CEE et la Grande-Bretagne chef
de
file de l’AELE ; dans le camp communiste, la tension accrue entre l’U
516
i entre la CEE et la Grande-Bretagne chef de file
de
l’AELE ; dans le camp communiste, la tension accrue entre l’URSS et l
517
ns — en attendant l’union finale. Mais une espèce
d’
inertie politique a marqué l’année 1966. Personne n’a rien tiré de con
518
que a marqué l’année 1966. Personne n’a rien tiré
de
concret d’une conjoncture si favorable. Ce sont au contraire les cons
519
é l’année 1966. Personne n’a rien tiré de concret
d’
une conjoncture si favorable. Ce sont au contraire les conséquences le
520
contraire les conséquences les plus inquiétantes
de
notre désunion qui se sont manifestées : renaissance d’un certain nat
521
re désunion qui se sont manifestées : renaissance
d’
un certain nationalisme en Allemagne, faisant écho à l’évocation parfo
522
ne, faisant écho à l’évocation parfois insistante
de
la « grandeur » française ; dégradation de la capacité de concurrence
523
stante de la « grandeur » française ; dégradation
de
la capacité de concurrence de nos pays face aux États-Unis dans le do
524
grandeur » française ; dégradation de la capacité
de
concurrence de nos pays face aux États-Unis dans le domaine technolog
525
çaise ; dégradation de la capacité de concurrence
de
nos pays face aux États-Unis dans le domaine technologique, et par su
526
e domaine industriel. Enfin et surtout, l’absence
de
l’Europe au plan mondial n’a jamais été plus flagrante, alors que la
527
auvrissement du tiers-monde et la crise endémique
de
ses nouveaux régimes appelaient une puissance politique capable d’arb
528
égimes appelaient une puissance politique capable
d’
arbitrer, d’organiser une aide économique et technique de grande enver
529
aient une puissance politique capable d’arbitrer,
d’
organiser une aide économique et technique de grande envergure, et sur
530
rer, d’organiser une aide économique et technique
de
grande envergure, et surtout de montrer les voies nouvelles d’une int
531
ique et technique de grande envergure, et surtout
de
montrer les voies nouvelles d’une intégration fédérale réalisée à l’é
532
ergure, et surtout de montrer les voies nouvelles
d’
une intégration fédérale réalisée à l’échelle d’un continent. C’est e
533
s d’une intégration fédérale réalisée à l’échelle
d’
un continent. C’est en prenant conscience de cette énorme Absence, fo
534
elle d’un continent. C’est en prenant conscience
de
cette énorme Absence, forme en creux ou négatif angoissant d’une réal
535
rme Absence, forme en creux ou négatif angoissant
d’
une réalité refusée, qu’on sentira le rôle central et décisif que nos
536
une Europe. 2. Sur ce problème, le plus voyant
de
la politique mondiale en 1966, lire plus loin l’étude le R. H. Wüst,
537
re plus loin l’étude le R. H. Wüst, qui s’efforce
de
rétablir une vérité historique trop souvent négligée. 3. Population
538
historique trop souvent négligée. 3. Population
de
l’Europe de l’Ouest en 1966 : environ 378 millions ; de l’Europe de l
539
urope de l’Ouest en 1966 : environ 378 millions ;
de
l’Europe de l’Est (URSS exclue) : environ 122 millions. Total : envir
540
r le conflit sino-soviétique et les premiers mois
de
la « révolution culturelle » l’étude de Tibor Meray. 6. Voir plus lo
541
iers mois de la « révolution culturelle » l’étude
de
Tibor Meray. 6. Voir plus loin : « Le cas des investissements améric
542
Henri Schwamm. 7. Voir plus loin la description
de
l’état politique de l’Afrique noire par Jean Ziegler. 8. Voir l’étud
543
Voir plus loin la description de l’état politique
de
l’Afrique noire par Jean Ziegler. 8. Voir l’étude de D. Sidjanski su
544
’Afrique noire par Jean Ziegler. 8. Voir l’étude
de
D. Sidjanski sur les tentatives d’union régionale en cours dans l’Amé
545
. Voir l’étude de D. Sidjanski sur les tentatives
d’
union régionale en cours dans l’Amérique latine. 9. Je ne parle pas i
546
s dans l’Amérique latine. 9. Je ne parle pas ici
de
l’AELE (sept pays, 20 % de la population européenne globale) parce qu
547
9. Je ne parle pas ici de l’AELE (sept pays, 20 %
de
la population européenne globale) parce que cette organisation douani
548
parce que cette organisation douanière se défend
de
toute ambition politique et ne saurait offrir de solution au problème
549
de toute ambition politique et ne saurait offrir
de
solution au problème de l’union de l’Europe. 10. D’où la demande que
550
ique et ne saurait offrir de solution au problème
de
l’union de l’Europe. 10. D’où la demande que nous avons faite au maî
551
saurait offrir de solution au problème de l’union
de
l’Europe. 10. D’où la demande que nous avons faite au maître inconte
552
solution au problème de l’union de l’Europe. 10.
D’
où la demande que nous avons faite au maître incontesté de la psycholo
553
demande que nous avons faite au maître incontesté
de
la psychologie des peuples européens, Salvador de Madariaga, d’une ét
554
gie des peuples européens, Salvador de Madariaga,
d’
une étude qu’on va lire plus loin sur l’évolution sociale de la Grande
555
e qu’on va lire plus loin sur l’évolution sociale
de
la Grande-Bretagne.
556
Beaucoup s’imaginent aujourd’hui que la fonction
de
l’intellectuel dans la vie publique ne saurait être que de dénonciati
557
llectuel dans la vie publique ne saurait être que
de
dénonciation. Fustiger l’hypocrisie bourgeoise à l’échelle communale,
558
-il, « s’engager ». Ayant été le premier à parler
de
l’engagement de l’écrivain (cela remonte à 1933), je voudrais précise
559
». Ayant été le premier à parler de l’engagement
de
l’écrivain (cela remonte à 1933), je voudrais préciser que je ne l’ai
560
e un simple verdict rendu et publié par la vertu (
de
gauche ou de droite) contre le vice (de droite ou de gauche), à propo
561
erdict rendu et publié par la vertu (de gauche ou
de
droite) contre le vice (de droite ou de gauche), à propos de la Corée
562
la vertu (de gauche ou de droite) contre le vice (
de
droite ou de gauche), à propos de la Corée, de Cuba, du Yémen, ou du
563
gauche ou de droite) contre le vice (de droite ou
de
gauche), à propos de la Corée, de Cuba, du Yémen, ou du Vietnam, ou d
564
e (de droite ou de gauche), à propos de la Corée,
de
Cuba, du Yémen, ou du Vietnam, ou d’Israël, qui sont très loin, ni mê
565
de la Corée, de Cuba, du Yémen, ou du Vietnam, ou
d’
Israël, qui sont très loin, ni même à propos du Jura, tout près de nou
566
même à propos du Jura, tout près de nous. Le rôle
de
l’intellectuel en politique, comme dans tous les domaines où sa passi
567
ir des voies, montrer des buts ! Prenez l’exemple
de
l’intellectuel suisse. Ce n’est pas sa vertu qui peut intéresser, mêm
568
vrai dire, je ne sais pas du tout ce qu’on attend
de
nous à l’étranger. Sans doute, rien. Mais je vois bien ce que nous po
569
léchit, imagine et publie, s’il éprouve le besoin
de
s’engager, doit se mettre en flèche et non pas en retrait, dès lors q
570
t non pas en retrait, dès lors qu’il est question
d’
unir l’Europe, de Gibraltar à Varsovie et d’Édimbourg à Bucarest. Il d
571
ait, dès lors qu’il est question d’unir l’Europe,
de
Gibraltar à Varsovie et d’Édimbourg à Bucarest. Il doit demander que
572
stion d’unir l’Europe, de Gibraltar à Varsovie et
d’
Édimbourg à Bucarest. Il doit demander que l’Europe s’unisse selon la
573
ela ? Parce que primo, seul le fédéralisme permet
d’
unir les merveilleuses diversités européennes — ethniques, culturelles
574
fficultés et les risques autant que les avantages
d’
un système qu’ils pratiquent depuis un siècle ; tertio, parce que le f
575
ope peut à la fois nous obliger et nous permettre
de
rénover à son échelle la formule fédérale, l’œuvre d’art immortelle,
576
août européen ! e. Édition réalisée sur la base
d’
un tapuscrit conservé à la Bibliothèque publique et universitaire de N
577
servé à la Bibliothèque publique et universitaire
de
Neuchâtel sous l’identifiant 656. Une note manuscrite indique que le
578
Message pour la Grèce (3 avril 1968)f
De
quel droit parlerais-je ici d’un drame interne de la Grèce ? À vrai d
579
(3 avril 1968)f De quel droit parlerais-je ici
d’
un drame interne de la Grèce ? À vrai dire, comme citoyen suisse, il p
580
De quel droit parlerais-je ici d’un drame interne
de
la Grèce ? À vrai dire, comme citoyen suisse, il peut sembler que j’a
581
se, il peut sembler que j’aurais surtout le droit
de
me taire. Mais je suis également citoyen de l’Europe, et à ce titre j
582
droit de me taire. Mais je suis également citoyen
de
l’Europe, et à ce titre j’ai le devoir de parler de quelque chose qui
583
citoyen de l’Europe, et à ce titre j’ai le devoir
de
parler de quelque chose qui nous regarde tous : Car nous autres Europ
584
l’Europe, et à ce titre j’ai le devoir de parler
de
quelque chose qui nous regarde tous : Car nous autres Européens, nous
585
ce inventive, nos devoirs civiques et notre droit
d’
opposition, nous sommes Grecs, héritiers d’Athènes, héritiers de Socra
586
droit d’opposition, nous sommes Grecs, héritiers
d’
Athènes, héritiers de Socrate, de Platon, d’Homère et de Pythagore, ma
587
nous sommes Grecs, héritiers d’Athènes, héritiers
de
Socrate, de Platon, d’Homère et de Pythagore, mais plus encore de ceu
588
Grecs, héritiers d’Athènes, héritiers de Socrate,
de
Platon, d’Homère et de Pythagore, mais plus encore de ceux qui invent
589
tiers d’Athènes, héritiers de Socrate, de Platon,
d’
Homère et de Pythagore, mais plus encore de ceux qui inventèrent le ci
590
nes, héritiers de Socrate, de Platon, d’Homère et
de
Pythagore, mais plus encore de ceux qui inventèrent le civisme, cette
591
laton, d’Homère et de Pythagore, mais plus encore
de
ceux qui inventèrent le civisme, cette conduite de l’homme libre et r
592
e ceux qui inventèrent le civisme, cette conduite
de
l’homme libre et responsable qui élève hardiment la voix sur l’agora.
593
ce, et c’est au nom de cette espérance autant que
de
cet héritage que je me sens pressé de parler ce soir. Il n’y a pas d’
594
autant que de cet héritage que je me sens pressé
de
parler ce soir. Il n’y a pas d’Europe imaginable sans la Grèce, ni da
595
je me sens pressé de parler ce soir. Il n’y a pas
d’
Europe imaginable sans la Grèce, ni dans le passé ni dans l’avenir, ma
596
assé ni dans l’avenir, mais il n’y a pas non plus
de
Grèce viable sans l’Europe. Or, le spectacle que nous donne la présen
597
présente dictature militaire est justement celui
d’
une Grèce qui se sépare de l’Europe en esprit, qui rejoint en esprit l
598
ire est justement celui d’une Grèce qui se sépare
de
l’Europe en esprit, qui rejoint en esprit le camp des Barbares, et re
599
oncer au nom de l’Europe, c’est la lugubre erreur
de
ceux qui dressent contre un danger de désordre social une tyrannie !
600
ubre erreur de ceux qui dressent contre un danger
de
désordre social une tyrannie ! Car selon la célèbre parole d’un pense
601
social une tyrannie ! Car selon la célèbre parole
d’
un penseur suisse (jamais plus grec que ce jour-là — c’était Vinet), «
602
annie est le souverain désordre ». Lugubre erreur
de
ceux qui au nom d’une légitime résistance au communisme se mettent au
603
gitime résistance au communisme se mettent au ban
de
l’Europe démocratique ! Ah ! les Gribouille, qui pour mieux éviter un
604
t-ils reprocher au stalinisme, d’ailleurs en voie
de
liquidation à l’Est, qui soit plus scandaleux que ce qu’ils font eux-
605
me style ? Quand on accuse un professeur du crime
d’
avoir — et je cite — « glorifié la supériorité de l’esprit sur les arm
606
d’avoir — et je cite — « glorifié la supériorité
de
l’esprit sur les armes », quand on fait cela, on se range du côté des
607
and on fait cela, on se range du côté des ennemis
de
l’Europe, on bafoue et l’on renie par l’intérieur la cause même que l
608
eur la cause même que l’on invoquait pour essayer
de
légitimer l’usurpation aux yeux de l’opinion occidentale. Un contempo
609
ux yeux de l’opinion occidentale. Un contemporain
de
Platon, l’orateur athénien Isocrate, tenait qu’il convient d’appeler
610
’orateur athénien Isocrate, tenait qu’il convient
d’
appeler Grecs « plutôt les gens qui participent à notre mode de vivre
611
cs « plutôt les gens qui participent à notre mode
de
vivre et de penser que ceux qui ont même origine que nous ». Et certe
612
les gens qui participent à notre mode de vivre et
de
penser que ceux qui ont même origine que nous ». Et certes, il y eut
613
ont même origine que nous ». Et certes, il y eut
de
tout dans les traditions grecques. Il y eut d’abord Athènes, la Béoti
614
s sages et la science, et le matin resplendissant
de
Salamine ! Mais il y eut Sparte aussi, et sa morale fasciste. Et il y
615
t eu leur descendance jusqu’à nous. Ce qui a fait
de
l’Europe, pendant des siècles, « la métropole du genre humain », « la
616
opole du genre humain », « la perle et le cerveau
de
la planète » comme l’appelait encore Valéry, c’est la tradition de li
617
omme l’appelait encore Valéry, c’est la tradition
de
liberté, de réflexion critique, de discours cohérent héritée de l’Att
618
ait encore Valéry, c’est la tradition de liberté,
de
réflexion critique, de discours cohérent héritée de l’Attique et des
619
t la tradition de liberté, de réflexion critique,
de
discours cohérent héritée de l’Attique et des penseurs d’Ionie. Mais
620
réflexion critique, de discours cohérent héritée
de
l’Attique et des penseurs d’Ionie. Mais ce qui a fait de cette même E
621
urs cohérent héritée de l’Attique et des penseurs
d’
Ionie. Mais ce qui a fait de cette même Europe un foyer de guerres et
622
tique et des penseurs d’Ionie. Mais ce qui a fait
de
cette même Europe un foyer de guerres et d’oppression morale d’une in
623
Mais ce qui a fait de cette même Europe un foyer
de
guerres et d’oppression morale d’une inhumanité sans précédent, c’est
624
fait de cette même Europe un foyer de guerres et
d’
oppression morale d’une inhumanité sans précédent, c’est la tradition
625
Europe un foyer de guerres et d’oppression morale
d’
une inhumanité sans précédent, c’est la tradition qui opposait à la mi
626
au pas des esprits, j’entends la tradition bottée
de
Sparte. Et enfin, ce qui a empêché la Grèce de résister à la conquête
627
ée de Sparte. Et enfin, ce qui a empêché la Grèce
de
résister à la conquête par l’Est macédonien et plus tard par l’Ouest
628
ionnelle désunion des cités, c’est l’échec répété
de
leurs fédérations. Or, la dure tradition spartiate n’a rien pu contre
629
auvegarde contre la satellisation par les empires
de
l’Est et de l’Ouest. Mais nous autres Européens du xx e siècle, nous
630
ntre la satellisation par les empires de l’Est et
de
l’Ouest. Mais nous autres Européens du xx e siècle, nous gardons et r
631
x e siècle, nous gardons et revendiquons le droit
de
choisir entre ces traditions ! D’une Grèce livrée à Sparte et à ses c
632
iquons le droit de choisir entre ces traditions !
D’
une Grèce livrée à Sparte et à ses colonels, nous en appelons à l’Hell
633
lons à l’Hellade athénienne, mère des libertés et
de
la pensée de l’Occident. Nous le faisons pour l’Europe autant que pou
634
ade athénienne, mère des libertés et de la pensée
de
l’Occident. Nous le faisons pour l’Europe autant que pour la Grèce, c
635
tout le monde sait comment finissent les régimes
de
redressement national imposés par les militaires : Sparte aujourd’hui
636
ar les touristes, tandis que l’acropole au-dessus
d’
Athènes dresse le témoignage vainqueur du temps d’un des plus hauts mo
637
d’Athènes dresse le témoignage vainqueur du temps
d’
un des plus hauts moments de l’humanité. Un dernier mot : le droit de
638
ge vainqueur du temps d’un des plus hauts moments
de
l’humanité. Un dernier mot : le droit de protestation, que nous exerç
639
moments de l’humanité. Un dernier mot : le droit
de
protestation, que nous exerçons ce soir au nom du génie hellénique et
640
in et dérisoire, s’il ne réveillait pas en chacun
de
nous la volonté d’instituer une Europe solidement fédérée, c’est-à-di
641
il ne réveillait pas en chacun de nous la volonté
d’
instituer une Europe solidement fédérée, c’est-à-dire un pouvoir qui s
642
e, c’est-à-dire un pouvoir qui soit enfin capable
de
garantir les libertés civiques dans tous les peuples de ce continent.
643
antir les libertés civiques dans tous les peuples
de
ce continent. f. : Édition réalisée sur la base d’un tapuscrit con
644
e continent. f. : Édition réalisée sur la base
d’
un tapuscrit conservé à la Bibliothèque publique et universitaire de N
645
servé à la Bibliothèque publique et universitaire
de
Neuchâtel sous l’identifiant 662. Une note manuscrite précise : « Mes
646
1968, par le comité suisse pour le rétablissement
de
la démocratie en Grèce. »
647
est l’expression moderne — elle ne date guère que
de
la seconde moitié du siècle passé — d’un complexe de petites unités t
648
guère que de la seconde moitié du siècle passé —
d’
un complexe de petites unités territoriales qui menaient chacune, depu
649
la seconde moitié du siècle passé — d’un complexe
de
petites unités territoriales qui menaient chacune, depuis un millénai
650
ns, leur histoire fort indépendante et différente
de
celle des autres. Ces histoires ont soudain convergé en l’année 1848
651
dain convergé en l’année 1848 lors de la création
de
la Confédération, pour former au sein de celle-ci une nouvelle entité
652
t définir grosso modo comme la partie francophone
de
la Suisse ; et dès ce moment on a parlé d’une Suisse romande, par opp
653
ophone de la Suisse ; et dès ce moment on a parlé
d’
une Suisse romande, par opposition à la Suisse alémanique et à la Suis
654
Suisse italophone du Tessin. Pour donner une idée
de
la diversité des communautés qui formeront plus tard la Romandie, pre
655
formeront plus tard la Romandie, prenons à titre
d’
exemple l’état de la région au xvii e siècle. Au nord, la principauté
656
ard la Romandie, prenons à titre d’exemple l’état
de
la région au xvii e siècle. Au nord, la principauté de Neuchâtel est
657
région au xvii e siècle. Au nord, la principauté
de
Neuchâtel est gouvernée au nom d’un prince français, Henry II d’Orléa
658
éans-Longueville, par les quelque douze familles,
d’
un conseil d’État qui s’appuie tantôt sur la France, tantôt sur Berne,
659
lle, par les quelque douze familles, d’un conseil
d’
État qui s’appuie tantôt sur la France, tantôt sur Berne, pour échappe
660
nce, tantôt sur Berne, pour échapper à la tutelle
de
l’autre. Aux Orléans, Condé, et Nemours, succéderont dès 1707 les roi
661
Condé, et Nemours, succéderont dès 1707 les rois
de
Prusse, qui seront princes de Neuchâtel jusqu’en 1848. Au sud, Genève
662
t dès 1707 les rois de Prusse, qui seront princes
de
Neuchâtel jusqu’en 1848. Au sud, Genève, ville d’Empire, donc républi
663
de Neuchâtel jusqu’en 1848. Au sud, Genève, ville
d’
Empire, donc république indépendante promue par Calvin au rang de « Ro
664
république indépendante promue par Calvin au rang
de
« Rome protestante », vient d’échapper aux agressions du duc de Savoi
665
par Calvin au rang de « Rome protestante », vient
d’
échapper aux agressions du duc de Savoie (la célèbre Escalade de 1602)
666
agressions du duc de Savoie (la célèbre Escalade
de
1602). Les Bernois, déjà venus à son secours en 1535, ont annexé au p
667
on secours en 1535, ont annexé au passage le pays
de
Vaud, naguère encore fief des Savoie, ainsi que les Chablais et le pa
668
ief des Savoie, ainsi que les Chablais et le pays
de
Gex. Fribourg, vieille cité-État aristocratique, demeurée catholique,
669
t à Berne. (Une partie du canton, d’ailleurs, est
de
langue alémanique.) Quant au Valais, principauté épiscopale dont seul
670
ligues suisses, mais restera longtemps à l’écart
de
la vie de ses voisins francophones, les uns (Vaudois) passés à la Réf
671
isses, mais restera longtemps à l’écart de la vie
de
ses voisins francophones, les uns (Vaudois) passés à la Réforme, les
672
Savoyards) en guerre chronique avec les seigneurs
de
la haute vallée. Ce cas n’est d’ailleurs pas exceptionnel. Neuchâtel
673
s qu’avec les Vaudois « occupés » par les baillis
de
Leurs Excellences de Berne. Genève, cité du Refuge, est déjà tournée
674
« occupés » par les baillis de Leurs Excellences
de
Berne. Genève, cité du Refuge, est déjà tournée vers le monde plutôt
675
iages ou par immigration, mais sujets catholiques
de
l’ennemi séculaire, le duc de Savoie. Dès ce moment, et jusqu’aux déb
676
x vont contribuer à former peu à peu un sentiment
de
communauté entre ces cinq pays, principautés et républiques : ce sont
677
rme (pour Genève, Neuchâtel et Vaud) et les liens
de
combourgeoisie avec la république de Berne (pour Neuchâtel quoique fr
678
et les liens de combourgeoisie avec la république
de
Berne (pour Neuchâtel quoique francophone, pour Fribourg quoique cath
679
et pour Genève, quoique lointaine.) Au lendemain
de
la guerre civile du Sonderbund (qui fut littéralement, la guerre de S
680
e du Sonderbund (qui fut littéralement, la guerre
de
Sécession des Suisses), pressés par la nécessité de se prémunir contr
681
Sécession des Suisses), pressés par la nécessité
de
se prémunir contre le retour de pareils conflits intérieurs, mais aus
682
par la nécessité de se prémunir contre le retour
de
pareils conflits intérieurs, mais aussi et surtout de trouver ensembl
683
areils conflits intérieurs, mais aussi et surtout
de
trouver ensemble les moyens de résister à la pression des mouvements
684
s aussi et surtout de trouver ensemble les moyens
de
résister à la pression des mouvements « nationalitaires » dans les de
685
ionalitaires » dans les deux grands États en voie
de
formation à partir des petits États de l’Allemagne et de l’Italie, no
686
ation à partir des petits États de l’Allemagne et
de
l’Italie, nos vingt-deux cantons décident enfin de se donner une cons
687
e l’Italie, nos vingt-deux cantons décident enfin
de
se donner une constitution fédérale. Ils la rédigent, la ratifient et
688
au 16 novembre 1848. C’est en somme la formation
de
la Suisse fédérale, en 1848 (phénomène proprement politique), qui a c
689
sse romande, bien plutôt que la géographie (point
de
frontières naturelles à l’est), ou l’histoire (intérêts divergents de
690
lles à l’est), ou l’histoire (intérêts divergents
de
nos cinq cantons au long des siècles), ou le régime politique (deux p
691
publiques). ⁂ À partir de la convergence décisive
de
1848, un « esprit romand » va se constituer. Il sera l’expression de
692
t romand » va se constituer. Il sera l’expression
de
ce que les cinq cantons — et surtout les trois protestants — se senti
693
moment-là, existe en fonction de la Suisse, donc
d’
un libre choix politique, d’un choix d’avenir. Elle va constituer en q
694
on de la Suisse, donc d’un libre choix politique,
d’
un choix d’avenir. Elle va constituer en quelques décennies son identi
695
isse, donc d’un libre choix politique, d’un choix
d’
avenir. Elle va constituer en quelques décennies son identité culturel
696
ois réformateurs décisifs sont français : Calvin,
de
Bèze à Genève, Guillaume Farel à Neuchâtel. Seul Pierre Viret domine
697
urs descendants donneront naissance à un complexe
de
philosophie et de doctrine politique qu’illustreront au cœur même de
698
nneront naissance à un complexe de philosophie et
de
doctrine politique qu’illustreront au cœur même de l’Europe, successi
699
e doctrine politique qu’illustreront au cœur même
de
l’Europe, successivement, Jean-Jacques Rousseau, premier doctrinaire
700
premier doctrinaire du fédéralisme, c’est-à-dire
de
la libre alliance de très petites communautés, puis Germaine de Staël
701
du fédéralisme, c’est-à-dire de la libre alliance
de
très petites communautés, puis Germaine de Staël et Benjamin Constant
702
e de Staël et Benjamin Constant : par « la trouée
de
Coppet », ils vont faire entrer en France la philosophie romantique d
703
France la philosophie romantique des Allemagnes,
de
Kant à Schelling par Hegel, et cela, peu après qu’en sens inverse, l’
704
ela, peu après qu’en sens inverse, l’École suisse
de
Zurich ait introduit dans le monde germanique la première connaissanc
705
dans le monde germanique la première connaissance
de
Dante et de Shakespeare. Ainsi la Suisse romande se définit comme « S
706
e germanique la première connaissance de Dante et
de
Shakespeare. Ainsi la Suisse romande se définit comme « Suisse » en t
707
tout comme les maîtres et les principaux épigones
de
l’École suisse, écrivains, philosophes et peintres, ont rempli leur f
708
philosophes et peintres, ont rempli leur fonction
de
médiateurs entre le monde latin, le monde anglo-saxon, et les Allemag
709
clandestine et craintive du territoire des tabous
de
la bourgeoisie. Deux pensées de Vinet me paraissent définir la pointe
710
itoire des tabous de la bourgeoisie. Deux pensées
de
Vinet me paraissent définir la pointe militante de la pensée romande
711
e Vinet me paraissent définir la pointe militante
de
la pensée romande : Quand tous les périls seraient dans la liberté,
712
ècle, la Suisse romande va devenir la mère patrie
de
ce qu’on nomme aujourd’hui les sciences humaines. Ferdinand de Saussu
713
nes. Ferdinand de Saussure fonde la linguistique,
d’
où naîtront les doctrines structuralistes des années 1960 et de nombre
714
les doctrines structuralistes des années 1960 et
de
nombreuses écoles américaines et françaises illustrées par les noms d
715
américaines et françaises illustrées par les noms
de
Jakobson et de Lévi-Strauss. En même temps s’ouvre à Genève l’Institu
716
françaises illustrées par les noms de Jakobson et
de
Lévi-Strauss. En même temps s’ouvre à Genève l’Institut Rousseau, cen
717
emps s’ouvre à Genève l’Institut Rousseau, centre
de
recherches pédagogiques, qui par Édouard Claparède, Pierre Bovet, Jea
718
Piaget, et tant d’autres, va créer la psychologie
de
l’enfant, et modifier profondément dans tout l’Occident, l’approche d
719
nt dans tout l’Occident, l’approche des problèmes
de
l’école et de la formation de l’enfant. Le Bureau international de l’
720
’Occident, l’approche des problèmes de l’école et
de
la formation de l’enfant. Le Bureau international de l’éducation, fon
721
roche des problèmes de l’école et de la formation
de
l’enfant. Le Bureau international de l’éducation, fondé par Jean Piag
722
la formation de l’enfant. Le Bureau international
de
l’éducation, fondé par Jean Piaget à Genève, peut être considéré comm
723
e, peut être considéré comme la capitale mondiale
de
la psychologie génétique et de la pédagogie scientifique du xx e sièc
724
capitale mondiale de la psychologie génétique et
de
la pédagogie scientifique du xx e siècle. On a beaucoup écrit sur cet
725
eux, ennemi des extrêmes, introspectif, incapable
de
toute rhétorique… Bref, on a fait du Romand type l’antithèse du Franç
726
antithèse du Français tel qu’on le parle. Inutile
d’
insister : les deux clichés sont faux, ne sont rien de plus que des cl
727
ourgeois, un sens du terroir trop facilement taxé
de
« réactionnaire » ; chez le Valaisan un fanatisme corse ; et chez le
728
rse ; et chez le Genevois un bien curieux mélange
de
gouaille à la française dans le peuple, de sérieux calvinistes dans l
729
élange de gouaille à la française dans le peuple,
de
sérieux calvinistes dans la grande bourgeoisie, de gauchisme chez les
730
e sérieux calvinistes dans la grande bourgeoisie,
de
gauchisme chez les enseignants et rédacteurs littéraires de la TV ou
731
me chez les enseignants et rédacteurs littéraires
de
la TV ou de journaux par ailleurs capitalistes. Tout cela, au demeura
732
enseignants et rédacteurs littéraires de la TV ou
de
journaux par ailleurs capitalistes. Tout cela, au demeurant, moins da
733
eux qu’amusant. h. Édition réalisée sur la base
d’
un tapuscrit conservé à la Bibliothèque publique et universitaire de N
734
servé à la Bibliothèque publique et universitaire
de
Neuchâtel sous l’identifiant 1019.
735
L’union
de
l’Europe, modèle d’union dans la liberté (fin des années 1960) L’un
736
L’union de l’Europe, modèle
d’
union dans la liberté (fin des années 1960) L’union de l’Europe n’ét
737
n dans la liberté (fin des années 1960) L’union
de
l’Europe n’étant pas encore faite — ni dans la liberté ni autrement —
738
berté ni autrement — il va sans dire que le titre
de
ce chapitre ne peut être conçu comme la constatation satisfaite d’un
739
peut être conçu comme la constatation satisfaite
d’
un phénomène historique qu’il n’y aurait plus qu’à analyser, mais seul
740
qu’à analyser, mais seulement comme l’expression
d’
un vœu, ou plus exactement comme la désignation d’un objectif qu’on vo
741
d’un vœu, ou plus exactement comme la désignation
d’
un objectif qu’on voudrait assigner à l’action des Européens, et d’abo
742
opéens, et d’abord à leur réflexion. Les concepts
d’
union et de liberté ne s’appellent pas l’un l’autre et paraissent même
743
d’abord à leur réflexion. Les concepts d’union et
de
liberté ne s’appellent pas l’un l’autre et paraissent même s’exclure
744
mesure où toute union implique quelque limitation
de
la liberté des éléments qu’elle lie. Mais dans la réalité historique,
745
t trouvées généralement alliées ou en interaction
de
fait, quoique de deux manières très différentes : a) des personnes ou
746
lement alliées ou en interaction de fait, quoique
de
deux manières très différentes : a) des personnes ou des communautés
747
ment nouent certains liens, calculés et spécifiés
de
telle sorte qu’ils créent la quantité de force nécessaire à la défens
748
pécifiés de telle sorte qu’ils créent la quantité
de
force nécessaire à la défense commune sans supprimer pour autant les
749
téristiques individuelles, qu’il s’agit justement
de
défendre : association, fédération. b) des personnes ou des communaut
750
ment leur volonté conçoivent et réalisent un plan
d’
action unifiée et unifiante, visant à la puissance collective, et auqu
751
t ou se voient soumises quitte à perdre certaines
de
leurs caractéristiques individuelles : ordre militaire, parti unique,
752
, nation. Dans le premier cas, l’union a pour fin
de
favoriser la liberté d’action de chacun des constituants : ils la con
753
r cas, l’union a pour fin de favoriser la liberté
d’
action de chacun des constituants : ils la concluent donc librement. D
754
union a pour fin de favoriser la liberté d’action
de
chacun des constituants : ils la concluent donc librement. Dans le se
755
librement. Dans le second cas, l’union a pour fin
de
favoriser la liberté d’action de l’ensemble constitué : elle ne peut
756
d cas, l’union a pour fin de favoriser la liberté
d’
action de l’ensemble constitué : elle ne peut donc être conclue qu’aux
757
union a pour fin de favoriser la liberté d’action
de
l’ensemble constitué : elle ne peut donc être conclue qu’aux dépens d
758
être conclue qu’aux dépens d’une part importante
de
la liberté des constituants. Cette part de liberté est sacrifiée libr
759
rtante de la liberté des constituants. Cette part
de
liberté est sacrifiée librement par une élite au profit du groupe ini
760
idus et tous les autres groupes se voient unifiés
de
gré ou de force. Rappelons d’abord dans quelle mesure ces deux types
761
us les autres groupes se voient unifiés de gré ou
de
force. Rappelons d’abord dans quelle mesure ces deux types d’union po
762
ppelons d’abord dans quelle mesure ces deux types
d’
union politique ont été préconisés et ont donné lieu à des réalisation
763
ne, au cours du dernier millénaire. ⁂ Naissance
de
l’idée d’union fédérale de l’Europe L’idée d’union européenne est
764
rs du dernier millénaire. ⁂ Naissance de l’idée
d’
union fédérale de l’Europe L’idée d’union européenne est apparue da
765
lénaire. ⁂ Naissance de l’idée d’union fédérale
de
l’Europe L’idée d’union européenne est apparue dans le temps même
766
de l’idée d’union fédérale de l’Europe L’idée
d’
union européenne est apparue dans le temps même où les premières natio
767
stituer face à l’empire cependant que la querelle
de
l’empereur et du pape mettait en cause le principe même de l’Unité. L
768
reur et du pape mettait en cause le principe même
de
l’Unité. Les deux premiers projets de « restauration » (comme on disa
769
incipe même de l’Unité. Les deux premiers projets
de
« restauration » (comme on disait) d’une sorte d’unité ou universalit
770
ers projets de « restauration » (comme on disait)
d’
une sorte d’unité ou universalité supérieure aux intérêts des monarchi
771
de « restauration » (comme on disait) d’une sorte
d’
unité ou universalité supérieure aux intérêts des monarchies en format
772
eri (1308-1311). Et ils proposent l’un et l’autre
de
surmonter le risque de division qu’est en train de créer précisément
773
proposent l’un et l’autre de surmonter le risque
de
division qu’est en train de créer précisément le pouvoir même que ser
774
r même que servent leurs auteurs : on sait que le
De
Monarchia de Dante est écrit pour saluer la venue en Italie de l’empe
775
de Dante est écrit pour saluer la venue en Italie
de
l’empereur Henri VII, tandis que le De recuperatione terre sancte de
776
en Italie de l’empereur Henri VII, tandis que le
De
recuperatione terre sancte de Pierre Dubois est dédié en partie à Édo
777
VII, tandis que le De recuperatione terre sancte
de
Pierre Dubois est dédié en partie à Édouard Ier d’Angleterre, en part
778
des rivalités entre les gouvernants, en l’absence
de
toute « juridiction plus ample et qui tienne les princes en son pouvo
779
nstituer une monarchie universelle, seule capable
d’
assurer la paix du genre humain et les libertés des « nations, royaume
780
peine de confusion dans les principes universels (
De
Monarchia, I, 14). Le même problème est posé par Dubois : comment ra
781
pliner et ordonner en vue de la paix en Europe et
de
la guerre sainte contre l’islam, des princes qui se tiennent pour sou
782
e est bien différente. Au lieu d’exalter l’utopie
d’
un « monarque du monde » ou empereur idéal, l’avocat du roi de France
783
confédération des royaumes, seigneuries et cités
de
l’Europe, qui, tout en restant souverains, soumettent leurs différend
784
erains, soumettent leurs différends à un tribunal
d’
ecclésiastiques et de prudhommes, dument assermentés. Si l’une des par
785
urs différends à un tribunal d’ecclésiastiques et
de
prudhommes, dument assermentés. Si l’une des parties refuse la senten
786
a logique sublime, mais l’empirisme sans vergogne
de
l’avocat normand qui inspireront les innombrables plans visant à unir
787
meric Crucé, Guillaume Postel, et, dans plusieurs
de
ses lettres, Leibniz, qui a lu Crucé et s’en souvient). Quelques idée
788
écouverts depuis peu.12 Tous ont en vue la paix
de
l’Europe qu’il s’agit d’obtenir sans sacrifier les autonomies locales
789
Tous ont en vue la paix de l’Europe qu’il s’agit
d’
obtenir sans sacrifier les autonomies locales ou nationales. Tous cher
790
sions sans supprimer nos diversités, et proposent
d’
instituer à cette fin un concile, ou un parlement, ou une diète ou un
791
ile, ou un parlement, ou une diète ou un tribunal
d’
arbitrage, donc une instance collégiale et non pas unitaire ; une auto
792
rité commune respectueuse des variétés existantes
de
régimes et de coutumes et qui ne prétende pas les uniformiser ; une c
793
espectueuse des variétés existantes de régimes et
de
coutumes et qui ne prétende pas les uniformiser ; une confédération o
794
quels les crises européennes ont donné naissance,
de
Pierre Dubois à Coudenhove-Kalergi, de Podiebrad à Churchill, et de C
795
naissance, de Pierre Dubois à Coudenhove-Kalergi,
de
Podiebrad à Churchill, et de Crucé au Mouvement européen, en passant
796
Coudenhove-Kalergi, de Podiebrad à Churchill, et
de
Crucé au Mouvement européen, en passant par Saint-Simon et Proudhon.
797
las un autre dénominateur commun : c’est qu’aucun
d’
eux n’a passé dans les faits, où pourtant sa nécessité était inscrite
798
s déversés par Voltaire et ses amis sur le Projet
de
paix perpétuelle de l’abbé de Saint-Pierre), ou pire encore, étouffés
799
ire et ses amis sur le Projet de paix perpétuelle
de
l’abbé de Saint-Pierre), ou pire encore, étouffés et ignorés, ils n’o
800
cune action mesurable sur le cours des événements
de
leur temps, et ils n’ont guère influencé, plus tard, que les auteurs
801
’en attestent pas moins l’existence et le progrès
d’
une forme de pensée spécifiquement européenne par ses sources et ses p
802
t pas moins l’existence et le progrès d’une forme
de
pensée spécifiquement européenne par ses sources et ses parentés, con
803
s et religieuses. Car il est typiquement européen
d’
admettre que l’unité et la diversité sont non seulement compatibles ma
804
t patristiques (doctrines trinitaires, notamment)
de
cette conception d’harmonie, non d’unisson, et d’équilibre vivant, no
805
rines trinitaires, notamment) de cette conception
d’
harmonie, non d’unisson, et d’équilibre vivant, non de géométries pesa
806
s, notamment) de cette conception d’harmonie, non
d’
unisson, et d’équilibre vivant, non de géométries pesantes et figées,
807
de cette conception d’harmonie, non d’unisson, et
d’
équilibre vivant, non de géométries pesantes et figées, doivent être r
808
rmonie, non d’unisson, et d’équilibre vivant, non
de
géométries pesantes et figées, doivent être rappelées ici, de même qu
809
cs et aux Alexandrins l’invention et l’exaltation
de
l’individu autonome, et aux Romains le culte des institutions unifian
810
ividu et la collectivité figurant les deux termes
de
base d’une dialectique qui est le ressort même de notre histoire euro
811
la collectivité figurant les deux termes de base
d’
une dialectique qui est le ressort même de notre histoire européenne.
812
de base d’une dialectique qui est le ressort même
de
notre histoire européenne. Lorsque ces éléments ou termes de base son
813
stoire européenne. Lorsque ces éléments ou termes
de
base sont séparés, isolés l’un de l’autre, et que l’un triomphe intég
814
ments ou termes de base sont séparés, isolés l’un
de
l’autre, et que l’un triomphe intégralement de l’autre, nous avons «
815
un de l’autre, et que l’un triomphe intégralement
de
l’autre, nous avons « l’individualisme atomisant » ou le « collectivi
816
’autres ordres que celui du politique, on parlera
de
mariage, d’harmonie des sons, de couleurs complémentaires, etc.) On d
817
es que celui du politique, on parlera de mariage,
d’
harmonie des sons, de couleurs complémentaires, etc.) On déduira de ce
818
ique, on parlera de mariage, d’harmonie des sons,
de
couleurs complémentaires, etc.) On déduira de ces considérations qu’u
819
ns, de couleurs complémentaires, etc.) On déduira
de
ces considérations qu’une union de l’Europe selon la formule fédérali
820
c.) On déduira de ces considérations qu’une union
de
l’Europe selon la formule fédéraliste serait particulièrement europée
821
ue par ses méthodes. On observera que les auteurs
de
plans d’union fédéraliste de l’Europe qu’on vient de citer (à l’excep
822
s méthodes. On observera que les auteurs de plans
d’
union fédéraliste de l’Europe qu’on vient de citer (à l’exception des
823
vera que les auteurs de plans d’union fédéraliste
de
l’Europe qu’on vient de citer (à l’exception des deux derniers, au xx
824
) se réclament tous du christianisme, ou au moins
de
son éthique communautaire. Enfin, l’on constatera que la liberté et l
825
ls assignent à l’union et qu’elle a pour fonction
de
garantir. De l’union nationale à division continentale À cette
826
’union et qu’elle a pour fonction de garantir.
De
l’union nationale à division continentale À cette formule d’union
827
ionale à division continentale À cette formule
d’
union fédérale de l’Europe, à la fois chrétienne et libertaire ou libé
828
continentale À cette formule d’union fédérale
de
l’Europe, à la fois chrétienne et libertaire ou libérale, préconisée
829
s qui n’a réussi jusqu’ici qu’à l’échelle réduite
de
la Suisse, s’oppose la formule d’union centralisée, uniforme et impos
830
échelle réduite de la Suisse, s’oppose la formule
d’
union centralisée, uniforme et imposée par la contrainte, qu’illustren
831
plus fameux, mais non tous les plus respectables,
de
l’histoire de l’Europe : Louis XIV, Napoléon, Hitler. « Une foi, une
832
ais non tous les plus respectables, de l’histoire
de
l’Europe : Louis XIV, Napoléon, Hitler. « Une foi, une loi, un roi »,
833
it-on sous Louis XIV pour justifier la révocation
de
l’édit de Nantes. « Ein Volk, ein Reich, ein Führer » dira trois sièc
834
s siècles plus tard Hitler, dont l’ambition était
d’
unir tous les peuples européens sous la seule loi de son parti, tout c
835
unir tous les peuples européens sous la seule loi
de
son parti, tout comme Napoléon (et d’abord Bonaparte) avait rêvé de l
836
comme Napoléon (et d’abord Bonaparte) avait rêvé
de
le faire au nom de la Révolution. C’est ici la composante « romaine »
837
a Révolution. C’est ici la composante « romaine »
de
notre dialectique européenne qui tente de s’imposer seule et totaleme
838
maine » de notre dialectique européenne qui tente
de
s’imposer seule et totalement, et d’éliminer la composante « helléniq
839
ne qui tente de s’imposer seule et totalement, et
d’
éliminer la composante « hellénique ». Elle récuse comme « réactionnai
840
ure et par l’histoire, ou formées par des rythmes
d’
évolution différents. La société d’ailleurs n’est plus imaginée comme
841
réduits à l’état substantiellement indifférencié
de
subdivisions territoriales, militaires, civiles, administratives défi
842
s, des chiffres et des règlements. Il ne fait pas
de
doute que cette formule d’union non plus dans la diversité, mais par
843
ements. Il ne fait pas de doute que cette formule
d’
union non plus dans la diversité, mais par l’uniformisation, et non pl
844
ême, a sur la formule fédérale l’avantage décisif
de
la simplicité. Elle est d’une application facile dès qu’on dispose de
845
ale l’avantage décisif de la simplicité. Elle est
d’
une application facile dès qu’on dispose de la force (militaire, polic
846
le est d’une application facile dès qu’on dispose
de
la force (militaire, policière, financière ou électorale), tandis que
847
que ne connaissent pas ou que méprisent les chefs
de
guerre et les « hommes forts » ou aventuriers et démagogues qui ont c
848
ui ont créé la plupart de nos nations. La formule
d’
union nationale, unitaire, et centralisatrice n’a cessé de progresser,
849
nationale, unitaire, et centralisatrice n’a cessé
de
progresser, puis a triomphé en fait dans toute l’Europe — sauf en Sui
850
omme Jean Bodin, par Richelieu, par les ministres
de
Louis XIV, puis par les jacobins qui croyaient s’opposer à l’ambition
851
oyaient s’opposer à l’ambition séculaire des rois
de
France, mais la réalisaient enfin avec une rigueur presque démente. A
852
ces, mais au contraire à fomenter l’élan créateur
d’
une communauté populaire contre les « tyrans » au pouvoir (autochtones
853
et élan populaire dit « nationalitaire » du temps
de
Mazzini, de Lamartine, de Mickiewicz, de Kossuth, et synonyme alors d
854
laire dit « nationalitaire » du temps de Mazzini,
de
Lamartine, de Mickiewicz, de Kossuth, et synonyme alors de liberté, d
855
tionalitaire » du temps de Mazzini, de Lamartine,
de
Mickiewicz, de Kossuth, et synonyme alors de liberté, de démocratie,
856
du temps de Mazzini, de Lamartine, de Mickiewicz,
de
Kossuth, et synonyme alors de liberté, de démocratie, de progrès, se
857
ine, de Mickiewicz, de Kossuth, et synonyme alors
de
liberté, de démocratie, de progrès, se voit capté par les pouvoirs ét
858
iewicz, de Kossuth, et synonyme alors de liberté,
de
démocratie, de progrès, se voit capté par les pouvoirs étatiques (rép
859
uth, et synonyme alors de liberté, de démocratie,
de
progrès, se voit capté par les pouvoirs étatiques (républicains ou mo
860
e tour des grandes entreprises, des banques, puis
de
certaines sciences (la physique atomique par exemple). Cette collusio
861
onalisme classique et du nationalisme romantique,
de
l’absolutisme et de la démocratie, va permettre d’ajouter aux quelque
862
t du nationalisme romantique, de l’absolutisme et
de
la démocratie, va permettre d’ajouter aux quelques vieilles nations d
863
e l’absolutisme et de la démocratie, va permettre
d’
ajouter aux quelques vieilles nations de l’Europe, de 1860 à 1919, une
864
permettre d’ajouter aux quelques vieilles nations
de
l’Europe, de 1860 à 1919, une quinzaine de grandes, moyennes et petit
865
jouter aux quelques vieilles nations de l’Europe,
de
1860 à 1919, une quinzaine de grandes, moyennes et petites unités éta
866
ations de l’Europe, de 1860 à 1919, une quinzaine
de
grandes, moyennes et petites unités étatiques plus ou moins inspirées
867
s. Toutefois, dans le même temps qu’elle triomphe
de
la sorte à l’échelle nationale, cette formule d’union agit comme une
868
de la sorte à l’échelle nationale, cette formule
d’
union agit comme une formule de division à l’échelle continentale. La
869
ale, cette formule d’union agit comme une formule
de
division à l’échelle continentale. La résultante d’une telle contradi
870
division à l’échelle continentale. La résultante
d’
une telle contradiction ne saurait être que la guerre : celle qui écla
871
ne fait guère que tirer les conséquences extrêmes
d’
un processus que les doctrinaires jacobins et Fichte (cf. Der geschlos
872
(cf. Der geschlossene Handelsstaat) avaient tenté
de
justifier rationnellement aux yeux des élites bourgeoises, mais que N
873
s, mais que Napoléon et Bismarck avaient illustré
d’
une manière plus convaincante aux yeux des masses13. On déduira de ce
874
s convaincante aux yeux des masses13. On déduira
de
ces considérations que la formule d’union nationale, quoique opposée
875
On déduira de ces considérations que la formule
d’
union nationale, quoique opposée point par point à la formule fédérale
876
lle qui a représenté, aux yeux des autres peuples
de
la terre, l’Europe réelle et historique, de Napoléon jusqu’à la Secon
877
uples de la terre, l’Europe réelle et historique,
de
Napoléon jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, c’est-à-dire durant l’èr
878
e nous la dressions tout à l’heure, est une liste
de
grands esprits qui ont tous échoué à faire passer leur idéal dans la
879
la pratique. En revanche, la liste des fondateurs
de
nations de plus en plus impérialistes et belliqueuses, donc divisives
880
lus impérialistes et belliqueuses, donc divisives
de
l’Europe, n’est autre que la liste des plus grands souverains, capita
881
des plus grands souverains, capitaines ou meneurs
de
peuples qu’exaltent l’histoire officielle et les manuels scolaires de
882
nt l’histoire officielle et les manuels scolaires
de
nos pays. La mode démocratique veut qu’on loue ces hommes en tant que
883
l’équation fausse nation = liberté, l’homme moyen
d’
aujourd’hui se figure que pour défendre son « indépendance nationale »
884
ques les plus immorales dès qu’elles s’autorisent
de
ces modèles vénérés, ou officiellement vénérables. En toute vérité ob
885
mes aient établie et garantie, c’était la liberté
de
leur peuple ou de leur nation, ou pour parler d’une manière réaliste
886
et garantie, c’était la liberté de leur peuple ou
de
leur nation, ou pour parler d’une manière réaliste (non romantique),
887
de leur peuple ou de leur nation, ou pour parler
d’
une manière réaliste (non romantique), la liberté d’action de leur Éta
888
une manière réaliste (non romantique), la liberté
d’
action de leur État. Or la « liberté » des États est de celles que réc
889
re réaliste (non romantique), la liberté d’action
de
leur État. Or la « liberté » des États est de celles que réclament le
890
ion de leur État. Or la « liberté » des États est
de
celles que réclament les gangsters, non les honnêtes citoyens, et c’e
891
iers qu’elle est généralement acquise. La liberté
de
l’État-nation X ou Y en Europe, c’est son « droit » d’être seul juge
892
État-nation X ou Y en Europe, c’est son « droit »
d’
être seul juge de ses droits, de résilier tout contrat ou alliance qui
893
Y en Europe, c’est son « droit » d’être seul juge
de
ses droits, de résilier tout contrat ou alliance qui cesserait de ser
894
est son « droit » d’être seul juge de ses droits,
de
résilier tout contrat ou alliance qui cesserait de servir ses intérêt
895
e résilier tout contrat ou alliance qui cesserait
de
servir ses intérêts, de ridiculiser tout arbitrage, de refuser toute
896
ou alliance qui cesserait de servir ses intérêts,
de
ridiculiser tout arbitrage, de refuser toute limitation de son agress
897
rvir ses intérêts, de ridiculiser tout arbitrage,
de
refuser toute limitation de son agressivité concurrentielle, tout sac
898
liser tout arbitrage, de refuser toute limitation
de
son agressivité concurrentielle, tout sacrifice à une cause commune,
899
ce à une cause commune, qu’il est toujours facile
de
tourner en dérision au nom du « réalisme », c’est-à-dire des intérêts
900
éalisme », c’est-à-dire des intérêts particuliers
de
l’État X ou Y. La liberté totale de chaque État-nation, nommée « indé
901
particuliers de l’État X ou Y. La liberté totale
de
chaque État-nation, nommée « indépendance » ou « souveraineté », ne s
902
ou la revendique, qu’une révoltante illustration
de
la devise qu’Albert de Mun proposait ironiquement aux tenants d’un li
903
’Albert de Mun proposait ironiquement aux tenants
d’
un libéralisme économique sans frein : « Le renard libre dans le poula
904
ule nationale contrastées L’histoire politique
de
l’Europe nous met donc en présence de deux conceptions parfaitement a
905
ce de deux conceptions parfaitement antithétiques
de
l’union, de l’existence en commun et de la méthode pour unir les homm
906
onceptions parfaitement antithétiques de l’union,
de
l’existence en commun et de la méthode pour unir les hommes en commun
907
thétiques de l’union, de l’existence en commun et
de
la méthode pour unir les hommes en communautés puis pour unir ces com
908
ces communautés. La formule fédéraliste est celle
d’
une composition organique des réseaux de relations qui se nouent entre
909
est celle d’une composition organique des réseaux
de
relations qui se nouent entre les personnes pour former des groupes,
910
lles pour former des communes, entre ces cellules
de
base pour former des régions, des pays, des États, puis entre ces Éta
911
fin l’ordre mondial. La formule nationaliste part
d’
un pouvoir qui s’est posé par la force (pouvoir personnel ou collectif
912
ces deux formules. Ils doivent s’unir pour éviter
d’
être satellisés l’un après l’autre par l’un ou l’autre des deux Grands
913
’un ou l’autre des deux Grands, ils ont à décider
de
la formule d’union la plus conforme à la fin qu’ils se seront assigné
914
des deux Grands, ils ont à décider de la formule
d’
union la plus conforme à la fin qu’ils se seront assignée : la puissan
915
pris l’enjeu, et la nature exacte des deux termes
de
l’alternative. J’en veux pour preuve la conférence de presse donnée l
916
e. Ce chef d’État, auquel on ne saurait reprocher
de
manquer du sens de ses responsabilités, et de n’avoir pas mesuré les
917
auquel on ne saurait reprocher de manquer du sens
de
ses responsabilités, et de n’avoir pas mesuré les risques de ses décl
918
her de manquer du sens de ses responsabilités, et
de
n’avoir pas mesuré les risques de ses déclarations au sujet de l’Euro
919
onsabilités, et de n’avoir pas mesuré les risques
de
ses déclarations au sujet de l’Europe, exalte les souverainetés natio
920
lte les souverainetés nationales et moque l’idée
d’
une fédération européenne dans laquelle, suivant les rêves de ceux qui
921
ation européenne dans laquelle, suivant les rêves
de
ceux qui l’ont conçue, les pays perdraient leur personnalité national
922
r personnalité nationale, et où d’ailleurs, faute
d’
un fédérateur tel qu’à l’Ouest tentèrent de l’être — chacun à sa façon
923
faute d’un fédérateur tel qu’à l’Ouest tentèrent
de
l’être — chacun à sa façon — César et ses successeurs, Othon, Charles
924
ose à ce projet contraire à toute réalité le plan
d’
une coopération organisée des États… Seul ce plan lui paraît conforme
925
conforme à ce que sont effectivement les nations
de
notre continent. Ce texte est important en ce sens qu’il démontre qu
926
démontre qu’un des Européens les plus conscients
de
son rôle devant l’Histoire, ignore le vrai sens du fédéralisme, écart
927
solution, et se conduit comme si les professeurs
d’
histoire qui enseignaient au degré secondaire autour des années 1900 a
928
es 1900 avaient eu raison, lorsqu’ils préparaient
de
leur mieux les esprits à la mise à mort officiellement glorieuse de 1
929
esprits à la mise à mort officiellement glorieuse
de
11 millions d’Européens, entre 1914 et 1918, pour des fins de « grand
930
se à mort officiellement glorieuse de 11 millions
d’
Européens, entre 1914 et 1918, pour des fins de « grandeur nationale »
931
ns d’Européens, entre 1914 et 1918, pour des fins
de
« grandeur nationale » aussi mal définie qu’inatteintes. Il est clair
932
Europe unitaire, formée précisément sur le modèle
de
l’unité nationale française, chère à de Gaulle, que les pays « perdra
933
États-Unis, Suisse — ne sont pas nées des œuvres
d’
un « fédérateur », mais au contraire de la libre volonté des peuples q
934
llien sur « ce que sont effectivement les nations
de
notre continent » soit erroné. On a trop vite fait, trop souvent, dan
935
péistes bruxellois et des fédéralistes militants,
de
déclarer que la formule nationale est dépassée, morte, enterrée. C’es
936
ité du mythe Nation dans l’histoire des Européens
de
l’ère moderne. Le nationalisme idéologique des révolutionnaires euro
937
e valable pour tout le genre humain. C’est un cri
de
guerre, littéralement, mais de guerre sociale. Le « Vive la Nation !
938
main. C’est un cri de guerre, littéralement, mais
de
guerre sociale. Le « Vive la Nation ! » poussé par les troupes frança
939
e dans le tiers-monde, est-il d’abord affirmation
d’
anti-occidentalisme, de « socialisme », c’est-à-dire de droits civique
940
est-il d’abord affirmation d’anti-occidentalisme,
de
« socialisme », c’est-à-dire de droits civiques et économiques, et se
941
i-occidentalisme, de « socialisme », c’est-à-dire
de
droits civiques et économiques, et seulement en dernier lieu de chauv
942
ques et économiques, et seulement en dernier lieu
de
chauvinisme ou d’orgueil national. Mais en Europe, le nationalisme id
943
s, et seulement en dernier lieu de chauvinisme ou
d’
orgueil national. Mais en Europe, le nationalisme idéologique, par le
944
ationalisme idéologique, par le mouvement naturel
de
sa polémique, est rapidement devenu missionnaire, donc impérialiste,
945
là, dans le colonialisme conduit par les nations
de
l’Europe, Russie incluse. D’autre part, il demeure incontestable que
946
’autre part, il demeure incontestable que l’homme
de
tous les continents et de toutes les époques de l’histoire réagit d’a
947
contestable que l’homme de tous les continents et
de
toutes les époques de l’histoire réagit d’abord et très généralement,
948
e de tous les continents et de toutes les époques
de
l’histoire réagit d’abord et très généralement, parfois principalemen
949
néralement, parfois principalement, comme l’homme
d’
une tribu, d’une race, d’une région, d’une fraternité jurée, fût-elle
950
arfois principalement, comme l’homme d’une tribu,
d’
une race, d’une région, d’une fraternité jurée, fût-elle le Ku Klux Kl
951
ipalement, comme l’homme d’une tribu, d’une race,
d’
une région, d’une fraternité jurée, fût-elle le Ku Klux Klan, la Mafia
952
me l’homme d’une tribu, d’une race, d’une région,
d’
une fraternité jurée, fût-elle le Ku Klux Klan, la Mafia, ou plus inno
953
innocemment un club, une équipe sportive, un gang
d’
élèves. Il serait donc ridicule de ne pas tenir compte de ces réalités
954
ortive, un gang d’élèves. Il serait donc ridicule
de
ne pas tenir compte de ces réalités nationales, dont le tort des nati
955
s. Il serait donc ridicule de ne pas tenir compte
de
ces réalités nationales, dont le tort des nationalistes d’ancienne éc
956
alités nationales, dont le tort des nationalistes
d’
ancienne école est de tenir compte exclusivement, sans nul espoir et n
957
nt le tort des nationalistes d’ancienne école est
de
tenir compte exclusivement, sans nul espoir et nul désir d’une modifi
958
ompte exclusivement, sans nul espoir et nul désir
d’
une modification prochaine, « les choses étant ce qu’elles sont », ain
959
t ni fausse ni rejetable en soi, et un philosophe
de
la politique n’aurait aucune raison de la juger mal, si l’analyse de
960
philosophe de la politique n’aurait aucune raison
de
la juger mal, si l’analyse de la conjoncture présente ne révélait trè
961
urait aucune raison de la juger mal, si l’analyse
de
la conjoncture présente ne révélait très vite et, je le crains, sans
962
vite et, je le crains, sans possibilité sérieuse
de
discussion, que cette formule nationale : 1. conduit pratiquement à l
963
, et l’humanité ne peut plus se permettre ce type
de
« solution », depuis l’invention de la Bombe H ; 2. autorise la suppr
964
ettre ce type de « solution », depuis l’invention
de
la Bombe H ; 2. autorise la suppression des libertés d’opposition et
965
Bombe H ; 2. autorise la suppression des libertés
d’
opposition et d’expression publique, pour peu que « l’intérêt national
966
orise la suppression des libertés d’opposition et
d’
expression publique, pour peu que « l’intérêt national » soit invoqué
967
national » soit invoqué ; 3. empêche toute espèce
d’
union européenne parce qu’elle permet de récuser comme « idéaliste » t
968
te espèce d’union européenne parce qu’elle permet
de
récuser comme « idéaliste » tout ce qui gêne les intérêts particulier
969
iscussion raisonnable ou arbitrage ; 4. se révèle
de
moins en moins capable d’administrer réellement et non pas seulement
970
rbitrage ; 4. se révèle de moins en moins capable
d’
administrer réellement et non pas seulement selon le formalisme juridi
971
juridique, les réalités de plus en plus complexes
de
l’existence socio-économique d’aujourd’hui. Dans les domaines les plu
972
en plus complexes de l’existence socio-économique
d’
aujourd’hui. Dans les domaines les plus divers : militaire ou scientif
973
que, culturel ou économique, le régime centralisé
d’
un pays comme la France est débordé, dépassé, non payant, en cette sec
974
rès l’avoir initiée et entretenue dans les élites
d’
outre-mer éduquées en Occident, la révolte du tiers-monde contre l’idé
975
te du tiers-monde contre l’idée que l’on s’y fait
de
l’Occident. Ce n’est donc pas une caricature du nationalisme que l’on
976
ature du nationalisme que l’on se permettrait ici
de
condamner, mais on est contraint de reconnaître que la formule d’unio
977
rmettrait ici de condamner, mais on est contraint
de
reconnaître que la formule d’union nationale n’est plus à l’échelle d
978
is on est contraint de reconnaître que la formule
d’
union nationale n’est plus à l’échelle de l’Europe et du monde en cett
979
formule d’union nationale n’est plus à l’échelle
de
l’Europe et du monde en cette fin du xx e siècle, et ne correspond pa
980
u xx e siècle, et ne correspond pas aux exigences
de
la société industrielle, dont les complexités requièrent des instrume
981
es instruments mille fois plus subtils et précis.
D’
où la nécessité qu’éprouvent les meilleurs esprits de ce temps — polit
982
ù la nécessité qu’éprouvent les meilleurs esprits
de
ce temps — politiciens parfois, mais plus souvent « technocrates » et
983
t « philosophes », ou encore jeunes industriels —
de
se tourner vers l’autre formule d’union, la fédéraliste ; quitte à la
984
industriels — de se tourner vers l’autre formule
d’
union, la fédéraliste ; quitte à la transformer et à l’adapter — comm
985
e mieux que tout autre — aux conditions nouvelles
de
l’industrie, de la technique, et de la société mobile qui est la nôtr
986
autre — aux conditions nouvelles de l’industrie,
de
la technique, et de la société mobile qui est la nôtre — en attendant
987
ons nouvelles de l’industrie, de la technique, et
de
la société mobile qui est la nôtre — en attendant que l’on prenne au
988
en attendant que l’on prenne au sérieux, au-delà
de
la statistique, les buts purement humains, ou disons culturels, de l’
989
, les buts purement humains, ou disons culturels,
de
l’homme personnel et concret. Le modèle fédéraliste, contribution
990
t concret. Le modèle fédéraliste, contribution
de
l’Europe au « développement » C’est en définitive sur les sens dif
991
iques nécessaires si l’on entend unir les peuples
de
l’Europe en connaissance de cause, ou plus exactement, en connaissanc
992
ne à savoir si l’on mettra l’accent sur la notion
de
libertés personnelles ou sur la notion de liberté collective, la prem
993
notion de libertés personnelles ou sur la notion
de
liberté collective, la première ayant pour fin la sauvegarde des auto
994
our fin la puissance et pour moyens l’unification
de
type national et la force militaire ou policière. Par libertés person
995
ves, qui donnent à un nombre sans cesse croissant
d’
individus les meilleures chances de découvrir et de suivre leur vocati
996
esse croissant d’individus les meilleures chances
de
découvrir et de suivre leur vocation, de devenir une personne, de tro
997
’individus les meilleures chances de découvrir et
de
suivre leur vocation, de devenir une personne, de trouver leur style
998
chances de découvrir et de suivre leur vocation,
de
devenir une personne, de trouver leur style de vie, de s’intégrer aux
999
de suivre leur vocation, de devenir une personne,
de
trouver leur style de vie, de s’intégrer aux groupes qui y correspond
1000
n, de devenir une personne, de trouver leur style
de
vie, de s’intégrer aux groupes qui y correspondent le mieux, et de co
1001
venir une personne, de trouver leur style de vie,
de
s’intégrer aux groupes qui y correspondent le mieux, et de conformer
1002
grer aux groupes qui y correspondent le mieux, et
de
conformer leur conduite aux buts derniers qu’ils s’assignent ou qu’il
1003
nce nationale, enfin droit des peuples à disposer
d’
eux-mêmes ou autodétermination. Quand les fédéralistes demandent que l
1004
ées dans une tentative menée par les plus grandes
de
reprendre l’hégémonie mondiale qu’elles exercèrent (en dépit de leurs
1005
es des guerres et des révolutions qui n’ont cessé
de
rendre l’appareil étatique toujours plus oppressif, et pour qu’à la f
1006
e toujours plus oppressif, et pour qu’à la faveur
de
la paix, dans la coopération qu’elle seule permet entre personnes et
1007
n qu’elle seule permet entre personnes et groupes
de
tous ordres, les libertés réelles trouvent leurs meilleures chances d
1008
ibertés réelles trouvent leurs meilleures chances
de
l’épanouir. Accessoirement d’ailleurs, cette union fédérale serait en
1009
union fédérale serait en mesure — et elle seule —
d’
assurer l’indépendance des Européens et leur liberté collective face a
1010
eci qu’ils ne posent pas pour préalable à l’union
de
l’Europe l’institution d’un super-État, c’est-à-dire d’un gouvernemen
1011
our préalable à l’union de l’Europe l’institution
d’
un super-État, c’est-à-dire d’un gouvernement appuyé sur une armée et
1012
urope l’institution d’un super-État, c’est-à-dire
d’
un gouvernement appuyé sur une armée et sur un puissant appareil écono
1013
ions très stables et supranationales (comme celle
de
la CEE). Ainsi l’on éviterait d’une part de réchauffer l’ambition de
1014
celle de la CEE). Ainsi l’on éviterait d’une part
de
réchauffer l’ambition de puissance sur l’Europe et le Monde qui fut c
1015
’on éviterait d’une part de réchauffer l’ambition
de
puissance sur l’Europe et le Monde qui fut celle de quelques souverai
1016
puissance sur l’Europe et le Monde qui fut celle
de
quelques souverains et dictateurs, mais de bien plus nombreux cabinet
1017
celle de quelques souverains et dictateurs, mais
de
bien plus nombreux cabinets de ministres puis de trusts et de conseil
1018
t dictateurs, mais de bien plus nombreux cabinets
de
ministres puis de trusts et de conseils d’administration ; et d’autre
1019
de bien plus nombreux cabinets de ministres puis
de
trusts et de conseils d’administration ; et d’autre part, d’entreteni
1020
nombreux cabinets de ministres puis de trusts et
de
conseils d’administration ; et d’autre part, d’entretenir le principe
1021
binets de ministres puis de trusts et de conseils
d’
administration ; et d’autre part, d’entretenir le principe même de div
1022
t de conseils d’administration ; et d’autre part,
d’
entretenir le principe même de division de l’unité européenne, j’enten
1023
; et d’autre part, d’entretenir le principe même
de
division de l’unité européenne, j’entends la prétention hégémonique q
1024
e part, d’entretenir le principe même de division
de
l’unité européenne, j’entends la prétention hégémonique qui fut celle
1025
j’entends la prétention hégémonique qui fut celle
de
tous les soi-disant « fédérateurs », en réalité dévastateurs et divis
1026
dérateurs », en réalité dévastateurs et diviseurs
de
nos peuples. La méthode du fédéralisme fonctionnel, par secteurs bien
1027
ûrement pas tout de suite, à une formule nouvelle
de
gouvernement, plus complexe à la fois et mieux coordonnée que ne le s
1028
les problèmes à résoudre), et avec leurs méthodes
d’
un formalisme toujours inefficace et souvent imbécile, qu’il s’agisse
1029
rs inefficace et souvent imbécile, qu’il s’agisse
de
censure, de défense militaire ou de finances. C’est ce modèle d’unio
1030
e et souvent imbécile, qu’il s’agisse de censure,
de
défense militaire ou de finances. C’est ce modèle d’union fédéralist
1031
u’il s’agisse de censure, de défense militaire ou
de
finances. C’est ce modèle d’union fédéraliste dans et pour la libert
1032
éfense militaire ou de finances. C’est ce modèle
d’
union fédéraliste dans et pour la liberté, modèle au sens de maquette,
1033
déraliste dans et pour la liberté, modèle au sens
de
maquette, non d’exemple, que l’Europe se doit de mettre au point, pou
1034
pour la liberté, modèle au sens de maquette, non
d’
exemple, que l’Europe se doit de mettre au point, pour elle-même d’abo
1035
de maquette, non d’exemple, que l’Europe se doit
de
mettre au point, pour elle-même d’abord, cela s’entend, pour sa paix,
1036
tre contribution la plus féconde au développement
de
l’humanité en voie de convergence inévitable ? Au-delà des nations qu
1037
us féconde au développement de l’humanité en voie
de
convergence inévitable ? Au-delà des nations qui doivent bien s’avoue
1038
qui doivent bien s’avouer pratiquement incapables
d’
autarcie, c’est-à-dire de concrète indépendance économique, politique
1039
pratiquement incapables d’autarcie, c’est-à-dire
de
concrète indépendance économique, politique ou culturelle ; au-delà d
1040
ngleterre ou aux États-Unis ; au-delà des calculs
de
technocrates politiciens qui sont parfois tentés de juger gratuite et
1041
technocrates politiciens qui sont parfois tentés
de
juger gratuite et littéraire toute considération sur les buts dernier
1042
téraire toute considération sur les buts derniers
de
l’existence humaine, — il faut envisager que le seul modèle d’organis
1043
e humaine, — il faut envisager que le seul modèle
d’
organisation politique qui puisse servir demain le genre humain sera l
1044
re humain sera le modèle fédéraliste, dépassement
de
la formule nationale et du concept non moins occidental d’État, que t
1045
mule nationale et du concept non moins occidental
d’
État, que tous copient aujourd’hui dans le tiers-monde, mais qui feron
1046
ssi, ou ne conduiront qu’à des guerres. Le modèle
d’
union en vue de la puissance, l’État-nation, n’a réussi à s’imposer qu
1047
chie du tiers-monde, et finalement l’effondrement
de
la puissance des Européens. Essayons le modèle fédéraliste, qui est c
1048
ns. Essayons le modèle fédéraliste, qui est celui
de
l’union librement consentie des groupes, des cités, des États, en vue
1049
s. 11. Cf. l’excellente présentation du projet
de
Pierre Dubois dans son Histoire de l’internationalisme, tome I, chap.
1050
tion du projet de Pierre Dubois dans son Histoire
de
l’internationalisme, tome I, chap. IV., Kristiania, 1919. 12. Après
1051
xiv e s.), il faut signaler au moins les projets
de
Georges Podiebrad, roi de Bohême, 1463 ; d’Émeric Crucé, moine parisi
1052
ojets de Georges Podiebrad, roi de Bohême, 1463 ;
d’
Émeric Crucé, moine parisien, 1623 ; du duc de Sully, 1638 ; de l’évêq
1053
é, moine parisien, 1623 ; du duc de Sully, 1638 ;
de
l’évêque morave Amos Comenius, 1645 ; du grand homme d’État quaker Wi
1054
nn, 1692 ; du fameux abbé de Saint-Pierre, 1712 ;
de
l’économiste Jeremy Bentham, 1789 (publié en 1843) ; de Kant, 1795 ;
1055
conomiste Jeremy Bentham, 1789 (publié en 1843) ;
de
Kant, 1795 ; du comte Henri de Saint-Simon, 1813 ; du libertaire Mazz
1056
comte Richard Coudenhove-Kalergi, 1923 ; et enfin
d’
Aristide Briand (rédigé par Alexis Léger, alias Saint-John Perse), 193
1057
se), 1930. Sur tout cela, on consultera l’ouvrage
de
Ch. Lange, déjà cité ; Les Sources doctrinales de l’internationalisme
1058
de Ch. Lange, déjà cité ; Les Sources doctrinales
de
l’internationalisme, Paris 1954, de Th. Ruyssen ; Europa. Storia di u
1059
s doctrinales de l’internationalisme, Paris 1954,
de
Th. Ruyssen ; Europa. Storia di un’idea, Firenze, 1958, de Carlo Curc
1060
yssen ; Europa. Storia di un’idea, Firenze, 1958,
de
Carlo Curcio ; et mes Vingt-huit siècles d’Europe , Paris, 1961, tra
1061
958, de Carlo Curcio ; et mes Vingt-huit siècles
d’
Europe , Paris, 1961, trad. allemande (très fautive) sous le titre de
1062
961, trad. allemande (très fautive) sous le titre
de
Europa, vom Mythos zur Wirklichkeit, München, 1963. 13. Ces quatre s
1063
eraient-elles pas en résultante un portrait-robot
de
Lénine plus ressemblant que celui que l’on pourrait tirer de la seule
1064
lus ressemblant que celui que l’on pourrait tirer
de
la seule combinaison marxisme-slavisme ?
1065
Les chances
de
l’Europe : huit ans après (novembre 1969)g Conférence Mesdam
1066
urs, Je voudrais d’abord remercier M. Vuilleumier
de
ses paroles trop aimables à mon sujet, et vous dire avec quel plaisir
1067
eux, et que vous puissiez le faire sous le signe
de
l’Europe m’apparaît d’une importance particulière. Je vais partir, se
1068
iez le faire sous le signe de l’Europe m’apparaît
d’
une importance particulière. Je vais partir, selon la proposition qui
1069
artir, selon la proposition qui m’en a été faite,
de
ce que j’avais exposé il y a sept ou huit ans, dans un petit livre in
1070
it ans, dans un petit livre intitulé Les Chances
de
l’Europe . Il y est question des bases durables, je dirais presque pe
1071
es bases durables, je dirais presque permanentes,
de
l’union de l’Europe, c’est-à-dire des bases culturelles et des motifs
1072
rables, je dirais presque permanentes, de l’union
de
l’Europe, c’est-à-dire des bases culturelles et des motifs culturels
1073
ire des bases culturelles et des motifs culturels
d’
unir l’Europe. À quoi vous ferez bien d’ajouter un livre comme Le Défi
1074
culturels d’unir l’Europe. À quoi vous ferez bien
d’
ajouter un livre comme Le Défi américain de Jean-Jacques Servan-Schrei
1075
z bien d’ajouter un livre comme Le Défi américain
de
Jean-Jacques Servan-Schreiber qui, lui, insiste sur les aspects écono
1076
ste sur les aspects économiques et technologiques
de
cette union. Je m’en suis tenu à un certain nombre de motifs qui, pou
1077
ette union. Je m’en suis tenu à un certain nombre
de
motifs qui, pour les uns existent depuis trois mille ans et pour les
1078
ix e siècle et qui ne perdront pas leur actualité
de
sitôt, je le crains. Au fond, qu’est-ce qui a changé depuis que j’ai
1079
’on sent beaucoup mieux aujourd’hui la difficulté
d’
arriver à unir l’Europe, et qu’on arrive mieux à la localiser. Pour ma
1080
alise beaucoup mieux l’obstacle, et je le baptise
d’
un nom simple : le nationalisme. Le nationalisme, l’État-nation. L’exi
1081
isme. Le nationalisme, l’État-nation. L’existence
de
cette formation politique très particulière est assez récente puisque
1082
partir de Napoléon que l’on peut vraiment parler
d’
État-nation, c’est-à-dire de la confiscation de la nation, qui est un
1083
peut vraiment parler d’État-nation, c’est-à-dire
de
la confiscation de la nation, qui est un grand mythe, par l’État, qui
1084
er d’État-nation, c’est-à-dire de la confiscation
de
la nation, qui est un grand mythe, par l’État, qui est un appareil ad
1085
st un appareil administratif. C’est l’étatisation
de
la nation. Formation récente en somme, puisqu’elle n’a guère que 170
1086
cente en somme, puisqu’elle n’a guère que 170 ans
d’
âge, mais qui se trouve être devenue tellement naturelle à nos yeux qu
1087
re vous sans doute s’imaginent qu’il n’y en a pas
d’
autre, qu’elle est le résultat normal de l’évolution historique, et qu
1088
en a pas d’autre, qu’elle est le résultat normal
de
l’évolution historique, et qu’on devait en arriver là, sous peine de
1089
er là, sous peine de s’arrêter à un certain stade
de
barbarie, de sous-développement. Or, nous avons vu se réaliser cette
1090
eine de s’arrêter à un certain stade de barbarie,
de
sous-développement. Or, nous avons vu se réaliser cette notion d’État
1091
ement. Or, nous avons vu se réaliser cette notion
d’
État-nation jusqu’à sa limite totalitaire — et nous découvrons qu’elle
1092
ité. Si l’on n’a pas avancé dans la construction
de
l’Europe depuis sept ou huit ans, disons plus : depuis plus de vingt
1093
epuis sept ou huit ans, disons plus : depuis plus
de
vingt ans que l’on en parle (congrès de La Haye, présidé par Churchil
1094
puis plus de vingt ans que l’on en parle (congrès
de
La Haye, présidé par Churchill, 1948), c’est à mon sens — et là je pl
1095
ide coupable, comme tous ceux qui se sont occupés
de
l’Europe à ce moment-là — parce que l’on est parti du mauvais pied. O
1096
parti du mauvais pied. On a voulu fonder l’union
de
l’Europe sur ce qui était précisément l’obstacle à cette union, c’est
1097
à Westminster, nous avions en vue une fédération
de
nos quelque vingt-cinq États (si on prenait ceux de l’Est), et nous p
1098
nos quelque vingt-cinq États (si on prenait ceux
de
l’Est), et nous pensions qu’on arriverait à les grouper comme des can
1099
comme des cantons suisses. Dans l’arrière-pensée
de
chacun de nous, il y avait le modèle suisse : une fédération de petit
1100
cantons suisses. Dans l’arrière-pensée de chacun
de
nous, il y avait le modèle suisse : une fédération de petits États. C
1101
ous, il y avait le modèle suisse : une fédération
de
petits États. Car tous nos États étaient devenus petits, à l’échelle
1102
sans doute a été l’erreur fondamentale : essayer
de
former une fédération sur ce qui faisait obstacle à toute espèce de f
1103
ration sur ce qui faisait obstacle à toute espèce
de
fédération ou même d’union, c’est-à-dire : les États, qui continuent
1104
ait obstacle à toute espèce de fédération ou même
d’
union, c’est-à-dire : les États, qui continuent à se proclamer souvera
1105
inuent à se proclamer souverains et à se réclamer
d’
une indépendance absolue, alors que plus aucun d’entre eux n’a d’indép
1106
nce absolue, alors que plus aucun d’entre eux n’a
d’
indépendance réelle, et ne peut faire autre chose que de choisir ses i
1107
pendance réelle, et ne peut faire autre chose que
de
choisir ses interdépendances. Aucun d’eux ne bénéficie plus des attri
1108
chose que de choisir ses interdépendances. Aucun
d’
eux ne bénéficie plus des attributs classiques de la souveraineté, qui
1109
d’eux ne bénéficie plus des attributs classiques
de
la souveraineté, qui étaient comme vous le savez, depuis qu’on en a f
1110
n en a fait la théorie à la Renaissance, le droit
de
déclarer la guerre et de conclure la paix quand on le veut et comme o
1111
la Renaissance, le droit de déclarer la guerre et
de
conclure la paix quand on le veut et comme on le veut. Or vous avez p
1112
me on le veut. Or vous avez pu voir par l’exemple
de
la guerre de Suez que ces droits n’existent plus sauf pour les grands
1113
. Or vous avez pu voir par l’exemple de la guerre
de
Suez que ces droits n’existent plus sauf pour les grands empires : qu
1114
leterre, ont dû arrêter leur guerre à deux heures
de
la prise du Caire. La leçon est absolument claire : la prétention à l
1115
tention à la souveraineté nationale n’existe plus
d’
une manière absolue. Or c’est toujours d’une manière absolue qu’elle e
1116
ste plus d’une manière absolue. Or c’est toujours
d’
une manière absolue qu’elle est revendiquée. Elle n’a plus d’autre eff
1117
re absolue qu’elle est revendiquée. Elle n’a plus
d’
autre efficacité que le pouvoir de refuser des mesures d’union, au nom
1118
. Elle n’a plus d’autre efficacité que le pouvoir
de
refuser des mesures d’union, au nom de cette même souveraineté. On pe
1119
efficacité que le pouvoir de refuser des mesures
d’
union, au nom de cette même souveraineté. On peut encore refuser l’uni
1120
souveraineté prétendue des États-nations, à force
d’
être revendiquée, nous incite à une analyse plus serrée du concept, et
1121
us serrée du concept, et l’on en vient très vite,
de
toutes sortes de côtés différents, à une critique fondamentale de la
1122
ept, et l’on en vient très vite, de toutes sortes
de
côtés différents, à une critique fondamentale de la conception même d
1123
de côtés différents, à une critique fondamentale
de
la conception même de l’État-nation comme communauté. Cette critique
1124
à une critique fondamentale de la conception même
de
l’État-nation comme communauté. Cette critique tient en quelques mots
1125
retrouverez identique chez au moins une douzaine
d’
auteurs contemporains, qui ne se sont pas concertés : — L’État-nation,
1126
a fois trop petit et trop grand pour les réalités
d’
aujourd’hui. Il est trop petit parce que pas un seul de nos États-nati
1127
ourd’hui. Il est trop petit parce que pas un seul
de
nos États-nations, même s’ils se disent encore grandes puissances com
1128
sances comme la France et l’Angleterre, n’a assez
de
poids pour jouer un rôle efficace à l’échelle mondiale, sur le plan d
1129
politique des États-Unis au Vietnam. Pas un seul
de
nos pays ne peut vraiment parler, se faire entendre, se faire suivre
1130
p petit à l’échelle mondiale. Ceci n’a pas besoin
d’
être développé beaucoup ; au point de vue économique, il saute aux yeu
1131
int de vue économique, il saute aux yeux qu’aucun
de
nos pays n’a le poids nécessaire. En même temps, chacun de nos pays,
1132
ys n’a le poids nécessaire. En même temps, chacun
de
nos pays, même les petits, se trouve trop grand pour être capable d’a
1133
es petits, se trouve trop grand pour être capable
d’
animer réellement toutes ses régions, toutes ses communes, tous ses ca
1134
t que l’on cite toujours à cet égard, c’est celui
de
la France. Ce n’est pas par hasard. La France a donné le modèle même
1135
pas par hasard. La France a donné le modèle même
de
l’État-nation centralisé avec Napoléon. La France est beaucoup trop g
1136
e — à constater qu’il fallait une régionalisation
de
la France si l’on voulait que les choses continuent à marcher et que
1137
ie politique et à leur vie publique autrement que
d’
une manière idéologique. Il fallait recréer des cadres de dimensions t
1138
anière idéologique. Il fallait recréer des cadres
de
dimensions telles — assez petites — que la vie publique puisse s’y ma
1139
avez, le général de Gaulle est tombé à l’occasion
d’
un référendum concernant les régions. Chacun sait que c’est lui qu’on
1140
nira bien par se réaliser, parce qu’il n’y a rien
d’
autre à faire. On ne peut pas continuer à régir de Paris, dans des bur
1141
d’autre à faire. On ne peut pas continuer à régir
de
Paris, dans des bureaux qui mettent deux ans à répondre à une lettre,
1142
t dans les 38 000 communes et les 92 départements
d’
un pays de 50 millions d’habitants. Mais, peu ou prou, la situation es
1143
38 000 communes et les 92 départements d’un pays
de
50 millions d’habitants. Mais, peu ou prou, la situation est la même
1144
s et les 92 départements d’un pays de 50 millions
d’
habitants. Mais, peu ou prou, la situation est la même dans les autres
1145
re structure fédéraliste précisément. (Petit pays
de
6 millions d’habitants, divisé en vingt-cinq petites unités administr
1146
édéraliste précisément. (Petit pays de 6 millions
d’
habitants, divisé en vingt-cinq petites unités administratives : la tr
1147
s, ils sont donc en crise, ils se voient attaqués
de
tous les côtés, non seulement par des partis, des hommes politiques o
1148
ontradictoire : D’une part vous avez un mouvement
de
convergence très général, qui se manifeste par la création des Nation
1149
éation des Nations unies par exemple, la création
de
l’Unesco, ou bien les grands mouvements œcuméniques. Vous avez une qu
1150
ds mouvements œcuméniques. Vous avez une quantité
d’
entreprises d’union qui tendent à s’organiser à l’échelle mondiale ou
1151
œcuméniques. Vous avez une quantité d’entreprises
d’
union qui tendent à s’organiser à l’échelle mondiale ou à l’échelle co
1152
u à l’AELE ou au Marché commun. Il y a les essais
de
réunion des États du Maghreb et du Proche-Orient dans la Ligue arabe,
1153
hose. Partout, même en Afrique, on sent ce besoin
de
grandes convergences au moins continentales et peut-être mondiales. E
1154
ême temps, vous assistez à un mouvement contraire
de
divergence, de diversification plus exactement : agitation régionale
1155
assistez à un mouvement contraire de divergence,
de
diversification plus exactement : agitation régionale dans à peu près
1156
en Grande-Bretagne, du côté du pays de Galles et
de
l’Écosse ; déjà, une femme députée très éloquente au Parlement britan
1157
, mais la reine a déjà dû nommer deux commissions
d’
étude de la régionalisation du Royaume-Uni sur le modèle de l’Irlande
1158
a reine a déjà dû nommer deux commissions d’étude
de
la régionalisation du Royaume-Uni sur le modèle de l’Irlande du Nord
1159
e la régionalisation du Royaume-Uni sur le modèle
de
l’Irlande du Nord : parlement et exécutif propres, un peu comme les c
1160
nq pays, il n’y en a que cinq ou six qui ont plus
de
cent ans, qui peuvent remonter sans arrêt jusqu’au xi e siècle comme
1161
cle comme la France et l’Angleterre ou une partie
de
l’Espagne ; tous les autres sont de création beaucoup plus récente.)
1162
ou une partie de l’Espagne ; tous les autres sont
de
création beaucoup plus récente.) Double mouvement contradictoire, dis
1163
t, qui désignait un peuple, une ethnie, un groupe
de
gens qui se ressemblent par certains caractères, comme la langue. Au
1164
ique, la nation italienne : c’étaient les groupes
d’
étudiants qui habitaient le même quartier parce qu’ils parlaient la mê
1165
On peut dire que notre siècle voit la renaissance
de
ces nations-là, qui ne sont pas du tout la nation telle que la Révolu
1166
r contradictoires se rejoignent dans leur manière
de
triturer ou de dissoudre les États-nations, soit par en dessous (mouv
1167
es se rejoignent dans leur manière de triturer ou
de
dissoudre les États-nations, soit par en dessous (mouvement vers les
1168
nt vers les régions), soit par en haut (mouvement
de
grandes convergences continentales). Donc, tout indique la nécessité
1169
s continentales). Donc, tout indique la nécessité
de
formes fédérales d’union, c’est-à-dire de formes d’union qui respecte
1170
nc, tout indique la nécessité de formes fédérales
d’
union, c’est-à-dire de formes d’union qui respectent deux choses appar
1171
cessité de formes fédérales d’union, c’est-à-dire
de
formes d’union qui respectent deux choses apparemment contradictoires
1172
formes fédérales d’union, c’est-à-dire de formes
d’
union qui respectent deux choses apparemment contradictoires : les aut
1173
langues où on l’emploie aujourd’hui. Il n’est pas
de
terme qui donne lieu à pires malentendus. Je vais vous en donner quel
1174
très brûlante. J’avais proposé un certain nombre
de
sujets de conférences aux universités canadiennes qui m’invitaient :
1175
ante. J’avais proposé un certain nombre de sujets
de
conférences aux universités canadiennes qui m’invitaient : le fédéral
1176
ande surprise, toutes m’ont répondu : Parlez-nous
d’
amour, mais pas de fédéralisme ! J’étais extrêmement étonné et déçu, c
1177
tes m’ont répondu : Parlez-nous d’amour, mais pas
de
fédéralisme ! J’étais extrêmement étonné et déçu, car le vrai but de
1178
étais extrêmement étonné et déçu, car le vrai but
de
mon voyage était de discuter le fédéralisme. J’ai réussi à le faire à
1179
onné et déçu, car le vrai but de mon voyage était
de
discuter le fédéralisme. J’ai réussi à le faire à l’occasion d’interv
1180
fédéralisme. J’ai réussi à le faire à l’occasion
d’
interviews, d’apparitions à la télévision, mais je n’ai pu en parler q
1181
J’ai réussi à le faire à l’occasion d’interviews,
d’
apparitions à la télévision, mais je n’ai pu en parler qu’à la seule U
1182
ais je n’ai pu en parler qu’à la seule Université
de
Montréal, où l’on m’a expliqué qu’au Canada, fédéralisme voulait dire
1183
ralisme voulait dire centralisation totale autour
d’
Ottawa, la capitale fédérale ! J’ai été obligé d’expliquer à mon tour
1184
d’Ottawa, la capitale fédérale ! J’ai été obligé
d’
expliquer à mon tour que pour nous, Suisses, c’était à peu près le con
1185
donné l’exemple suivant : il y a six ou sept ans
de
cela, quand on commençait à parler de subventions fédérales aux unive
1186
ou sept ans de cela, quand on commençait à parler
de
subventions fédérales aux universités, le recteur de Lausanne déclara
1187
subventions fédérales aux universités, le recteur
de
Lausanne déclara : « Nous n’accepterons jamais de subventions fédéral
1188
de Lausanne déclara : « Nous n’accepterons jamais
de
subventions fédérales, parce qu’ici nous sommes fédéralistes ! » D’au
1189
stes ! » D’autres exemples : au cours des travaux
de
préparation d’un congrès européen, j’avais demandé que la première jo
1190
es exemples : au cours des travaux de préparation
d’
un congrès européen, j’avais demandé que la première journée fût consa
1191
s acceptez cette proposition, je me verrai obligé
de
quitter le comité, parce que le mot fédéralisme est tabou à Strasbour
1192
Québécois, c’est-à-dire une centralisation totale
de
l’Europe qui ne laisserait plus aucune autonomie aux États membres. D
1193
membres. Donc, là encore, exactement le contraire
de
ce que nous entendons en Suisse par fédéralisme. On a parlé d’un « dé
1194
s entendons en Suisse par fédéralisme. On a parlé
d’
un « défaut congénital du fédéralisme », qui tient au fait que le fédé
1195
que le fédéralisme, c’est toujours la coexistence
de
deux choses différentes, également valables, et qu’il faut s’arranger
1196
nt faux du même coup. Il faut toujours s’efforcer
de
maintenir l’équilibre en tension de deux réalités différentes, leur c
1197
rs s’efforcer de maintenir l’équilibre en tension
de
deux réalités différentes, leur coexistence en tension. Le modèle le
1198
cales et l’union fédérale, l’union étant le moyen
de
sauvegarder les autonomies, qui mettent en commun certains de leurs p
1199
er les autonomies, qui mettent en commun certains
de
leurs pouvoirs de souveraineté. Exemple : la Suisse et les cantons. M
1200
qui mettent en commun certains de leurs pouvoirs
de
souveraineté. Exemple : la Suisse et les cantons. Mais on peut aller
1201
tères du fédéralisme, c’est-à-dire la coexistence
de
deux entités différentes qu’il ne faut pas du tout unifier et qui doi
1202
ui est le mariage. Vous retrouverez ce même genre
d’
antinomie à tous les degrés de la réalité. Voilà qui est tout à fait f
1203
verez ce même genre d’antinomie à tous les degrés
de
la réalité. Voilà qui est tout à fait fondamental pour la forme de pe
1204
ilà qui est tout à fait fondamental pour la forme
de
pensée européenne. Le plus ancien philosophe de la tradition occident
1205
e de pensée européenne. Le plus ancien philosophe
de
la tradition occidentale, c’était Héraclite d’Éphèse, qui disait que
1206
phèse, qui disait que la plus belle harmonie naît
de
l’opposition des contraires. Les grands conciles œcuméniques du iv e
1207
iles œcuméniques du iv e au vi e siècle ont tenté
de
définir — il a fallu deux cents ans pour cela — la personne de Jésus-
1208
il a fallu deux cents ans pour cela — la personne
de
Jésus-Christ en deux natures, « vrai homme et vrai Dieu à la fois, sa
1209
is, sans confusion ni séparation ni subordination
de
l’un à l’autre ». Il y a donc là un type de pensée très ancien en Eur
1210
ation de l’un à l’autre ». Il y a donc là un type
de
pensée très ancien en Europe, que vous retrouverez dans la pensée féd
1211
st à mon sens la plus ancienne tradition ou forme
de
pensée de l’esprit humain tel qu’il s’est manifesté en Occident. Ceci
1212
ens la plus ancienne tradition ou forme de pensée
de
l’esprit humain tel qu’il s’est manifesté en Occident. Ceci explique
1213
e qu’il est presque fatal que l’esprit humain ait
de
la peine à maintenir ensemble deux notions logiquement exclusives l’u
1214
nsemble deux notions logiquement exclusives l’une
de
l’autre. Il est toujours tenté soit de subordonner l’une à l’autre, s
1215
ives l’une de l’autre. Il est toujours tenté soit
de
subordonner l’une à l’autre, soit de les fusionner complètement, de m
1216
s tenté soit de subordonner l’une à l’autre, soit
de
les fusionner complètement, de manière qu’il n’y ait plus de difficul
1217
ne à l’autre, soit de les fusionner complètement,
de
manière qu’il n’y ait plus de difficulté. Si l’on veut comprendre la
1218
onner complètement, de manière qu’il n’y ait plus
de
difficulté. Si l’on veut comprendre la vraie nature du fédéralisme, q
1219
e nature du fédéralisme, qui est la seule manière
d’
unir les Européens, divers comme ils sont, il faut se rappeler d’abord
1220
tés antinomiques ; et ensuite, qu’un des concepts
de
base de toute pensée fédéraliste est le concept de dimension — dimens
1221
nomiques ; et ensuite, qu’un des concepts de base
de
toute pensée fédéraliste est le concept de dimension — dimension des
1222
e base de toute pensée fédéraliste est le concept
de
dimension — dimension des cadres et dimension des tâches communautair
1223
que si vous avez un cadre trop vaste, comme celui
de
la France centralisée autour de Paris, il ne se prête pas, par ses di
1224
vous aurez, ou vous n’aurez pas, une possibilité
de
participation des citoyens. Vous pouvez avoir une participation direc
1225
vous pouvez encore l’avoir au niveau du canton ou
de
la région — c’est déjà moins évident, il faut là une délégation. Mais
1226
vident, il faut là une délégation. Mais au niveau
d’
un pays centralisé de 50 millions d’habitants, il n’en est pas questio
1227
e délégation. Mais au niveau d’un pays centralisé
de
50 millions d’habitants, il n’en est pas question. Voter tous les sep
1228
ais au niveau d’un pays centralisé de 50 millions
d’
habitants, il n’en est pas question. Voter tous les sept ans en princi
1229
eut pas connaître personnellement, cela n’est pas
de
la participation civique, cela n’est rien du tout, c’est une loterie,
1230
cela n’est rien du tout, c’est une loterie, c’est
de
l’ordre du tiercé : on parie plus ou moins bien. Mais on ne peut pas
1231
ais on ne peut pas dire qu’on réalise sa vocation
de
citoyen en faisant cela, ni même en élisant un député. Donc le premie
1232
premier problème du fédéralisme, du régionalisme,
de
l’union de l’Europe, c’est de retrouver des communautés dont les dime
1233
blème du fédéralisme, du régionalisme, de l’union
de
l’Europe, c’est de retrouver des communautés dont les dimensions soie
1234
e, du régionalisme, de l’union de l’Europe, c’est
de
retrouver des communautés dont les dimensions soient telles que les c
1235
s, donc des communautés assez petites. Le concept
de
dimension s’applique aussi aux tâches à réaliser. Et voilà un princip
1236
aussi aux tâches à réaliser. Et voilà un principe
de
méthode fédéraliste, ou de méthode d’union, qui me paraît de toute im
1237
. Et voilà un principe de méthode fédéraliste, ou
de
méthode d’union, qui me paraît de toute importance : — Il s’agit, en
1238
un principe de méthode fédéraliste, ou de méthode
d’
union, qui me paraît de toute importance : — Il s’agit, en principe fé
1239
fédéraliste, ou de méthode d’union, qui me paraît
de
toute importance : — Il s’agit, en principe fédéraliste, de faire cor
1240
mportance : — Il s’agit, en principe fédéraliste,
de
faire correspondre les dimensions des tâches à réaliser avec la dimen
1241
i peuvent s’en occuper. C’est-à-dire qu’il s’agit
de
fixer les niveaux de décisions d’après la dimension des tâches et la
1242
r. C’est-à-dire qu’il s’agit de fixer les niveaux
de
décisions d’après la dimension des tâches et la dimension des communa
1243
le feront très vite comprendre. Prenez l’exemple
de
l’université. L’université est définie par une certaine dimension, di
1244
ombre des professeurs, des étudiants, des niveaux
de
culture. C’est une tâche trop grande naturellement pour une commune,
1245
bien. Mais on voit aujourd’hui que les dimensions
de
certaines tâches de recherche scientifique débordent déjà les dimensi
1246
ujourd’hui que les dimensions de certaines tâches
de
recherche scientifique débordent déjà les dimensions de la communauté
1247
herche scientifique débordent déjà les dimensions
de
la communauté cantonale. Il faut donc passer à un stade supérieur. Al
1248
plus loin. Nous nous sommes aperçus tout au début
de
la construction européenne, en 1949, qu’aucun de nos pays ne pouvait
1249
de la construction européenne, en 1949, qu’aucun
de
nos pays ne pouvait se payer un grand laboratoire de recherches nuclé
1250
nos pays ne pouvait se payer un grand laboratoire
de
recherches nucléaires. C’était trop cher même pour la France, même po
1251
fallu passer à un niveau supérieur, la dimension
de
la tâche l’indiquait, c’était le niveau continental. Et on a créé le
1252
Genève. Donc, la bonne méthode fédéraliste, c’est
de
chercher quel niveau de décision, de compétence, correspond aux dimen
1253
éthode fédéraliste, c’est de chercher quel niveau
de
décision, de compétence, correspond aux dimensions d’une tâche, et qu
1254
liste, c’est de chercher quel niveau de décision,
de
compétence, correspond aux dimensions d’une tâche, et quelle communau
1255
écision, de compétence, correspond aux dimensions
d’
une tâche, et quelle communauté a les dimensions nécessaires pour s’en
1256
et bien il faut la créer. C’est ce qu’on a essayé
de
faire en créant le CERN. C’est un premier morceau d’Europe unie qu’on
1257
faire en créant le CERN. C’est un premier morceau
d’
Europe unie qu’on a dû fabriquer sur mesure, à la mesure de cette tâch
1258
unie qu’on a dû fabriquer sur mesure, à la mesure
de
cette tâche énorme qu’était la recherche nucléaire. Donc, dimensions
1259
s, dimension des cadres communautaires, et niveau
de
décision, tout cela d’après le principe de la participation possible.
1260
niveau de décision, tout cela d’après le principe
de
la participation possible. (On parle aussi dans ces cas-là d’un princ
1261
ipation possible. (On parle aussi dans ces cas-là
d’
un principe de subsidiarité.) Il faut bien comprendre que le fédéralis
1262
le. (On parle aussi dans ces cas-là d’un principe
de
subsidiarité.) Il faut bien comprendre que le fédéralisme ainsi conçu
1263
ndre que le fédéralisme ainsi conçu comme méthode
d’
union de l’Europe n’est pas du tout limité au genre de relations qui e
1264
le fédéralisme ainsi conçu comme méthode d’union
de
l’Europe n’est pas du tout limité au genre de relations qui existent,
1265
ion de l’Europe n’est pas du tout limité au genre
de
relations qui existent, en Suisse, entre les cantons et Berne. C’est
1266
siècle, qui lui-même n’est qu’un cas particulier
de
la méthode fédéraliste. Celle-ci, à mon sens, commence déjà dans la p
1267
libre et responsable, qui est à la fois distingué
de
la masse par sa vocation même. C’est déjà quelque chose de dialectiqu
1268
se par sa vocation même. C’est déjà quelque chose
de
dialectique, si vous voulez. Et puis, vous passez de là au groupe hum
1269
dialectique, si vous voulez. Et puis, vous passez
de
là au groupe humain, à la commune, au groupement de communes en régio
1270
là au groupe humain, à la commune, au groupement
de
communes en régions, au groupement de régions en fédérations locales,
1271
groupement de communes en régions, au groupement
de
régions en fédérations locales, au groupement de fédérations locales
1272
de régions en fédérations locales, au groupement
de
fédérations locales en fédérations continentales, et puis on arrivera
1273
averse toutes les réalités humaines, depuis celle
de
la personne jusqu’à la communauté mondiale. Nous aurions grand tort e
1274
nauté mondiale. Nous aurions grand tort en Suisse
de
vouloir limiter le fédéralisme aux relations entre nos cantons, qui n
1275
e, encore moins au xxi e. Nous aurions tort aussi
de
vouloir limiter notre fédéralisme aux limites actuelles de la Suisse.
1276
r limiter notre fédéralisme aux limites actuelles
de
la Suisse. Il ne faut pas que notre fédéralisme devienne pour nous un
1277
n, comme cela a été un prétexte pendant longtemps
de
ne pas même adhérer au Conseil de l’Europe — et Dieu sait s’il est an
1278
’Europe. Notre fédéralisme doit continuer au-delà
de
nos frontières, comme cela s’est fait dans le cas du CERN que je cita
1279
’heure ; tout naturellement on a dû aller au-delà
de
la dimension nationale. On ne peut pas bloquer le processus fédéralis
1280
En résumé — je vous ai proposé un certain nombre
de
thèses, je crois qu’il y en a assez pour nourrir quelques discussions
1281
ceci : Si l’on n’a pas du tout avancé sur le plan
de
l’union de l’Europe depuis que j’ai publié mon petit ouvrage, c’est p
1282
’on n’a pas du tout avancé sur le plan de l’union
de
l’Europe depuis que j’ai publié mon petit ouvrage, c’est parce qu’on
1283
vrage, c’est parce qu’on s’est trompé en essayant
de
faire l’Europe sur la base des États-nations tels que le xix e siècle
1284
tels que le xix e siècle les a créés. On a essayé
de
faire l’Europe sans révolution, et il s’avère aujourd’hui que c’est i
1285
aujourd’hui que c’est impossible. On ne fait pas
d’
omelette sans casser des œufs, et je suis parfaitement persuadé qu’on
1286
e : « Cassez la baraque ! » Il n’est pas question
de
cela, car c’est toujours la police qui gagne dans ces cas-là. Il y a
1287
ution beaucoup plus profonde à faire, c’est celle
de
nos concepts. Il faut que nous arrivions à faire la critique de ce co
1288
s. Il faut que nous arrivions à faire la critique
de
ce concept d’État-nation, que nous voyions à quel point il est en cri
1289
nous arrivions à faire la critique de ce concept
d’
État-nation, que nous voyions à quel point il est en crise aujourd’hui
1290
r d’un autre côté, opérer une conversion, changer
de
direction. Une révolution qui sera celle de la mesure européenne. Cha
1291
anger de direction. Une révolution qui sera celle
de
la mesure européenne. Chaque fois que je retourne aux États-Unis et q
1292
t que je rentre en Europe, je me dis : la mission
de
l’Europe, il n’y a pas de doute, c’est de maintenir un certain sens d
1293
je me dis : la mission de l’Europe, il n’y a pas
de
doute, c’est de maintenir un certain sens de l’équilibre — cet équili
1294
mission de l’Europe, il n’y a pas de doute, c’est
de
maintenir un certain sens de l’équilibre — cet équilibre en tension d
1295
pas de doute, c’est de maintenir un certain sens
de
l’équilibre — cet équilibre en tension dont je vous parlais, cet art
1296
quilibre en tension dont je vous parlais, cet art
d’
équilibrer les contraires — que d’autres grandes régions du monde n’on
1297
ires un déséquilibre permanent, une perte du sens
de
la mesure, et que notre rôle, à nous Européens, c’est, en recréant to
1298
nous Européens, c’est, en recréant toutes sortes
de
types de communautés de différentes tailles, de différentes dimension
1299
opéens, c’est, en recréant toutes sortes de types
de
communautés de différentes tailles, de différentes dimensions, et en
1300
en recréant toutes sortes de types de communautés
de
différentes tailles, de différentes dimensions, et en les mettant en
1301
s de types de communautés de différentes tailles,
de
différentes dimensions, et en les mettant en équilibre, de manifester
1302
entes dimensions, et en les mettant en équilibre,
de
manifester ce sens de la mesure que nous n’avons pas toujours respect
1303
n les mettant en équilibre, de manifester ce sens
de
la mesure que nous n’avons pas toujours respecté, beaucoup plus que l
1304
s’est centrée sur le thème des régions. 1. L’idée
de
région dans le cadre européen est-elle suffisamment avancée pour pouv
1305
des États ? 5. Pourrait-on envisager l’existence
de
régions entièrement différentes les unes des autres en raison de leur
1306
utres en raison de leurs richesses économiques ou
de
leur passé culturel ? II. 1. Notre neutralité est-elle une entrave à
1307
cipation sur le plan européen ? Quel est l’avenir
de
notre neutralité ? 2. Puisqu’il s’agit de définir les régions en rapp
1308
’avenir de notre neutralité ? 2. Puisqu’il s’agit
de
définir les régions en rapport avec des tâches à réaliser, M. de Roug
1309
Rougemont pourrait-il nous indiquer quelques-unes
de
ces tâches ? 3. Il nous faut transcender l’État-nation, mais quelle t
1310
ployer pour faire cette révolution ? 4. Il s’agit
d’
intéresser les jeunes aux tâches qui vont dans le sens de l’union euro
1311
esser les jeunes aux tâches qui vont dans le sens
de
l’union européenne. Que peuvent faire les élèves ? Que peuvent faire
1312
peuvent faire les maîtres, pour développer l’idée
d’
une fédération européenne ? III. Le groupe III a centré sa discussion
1313
groupe III a centré sa discussion sur le problème
de
la région. Les questions qu’il se pose ont déjà été exposées par les
1314
une réponse sur le point suivant : Après l’échec
de
l’État-nation comme base d’union de l’Europe, la région apparaît comm
1315
ivant : Après l’échec de l’État-nation comme base
d’
union de l’Europe, la région apparaît comme une source de vie nouvelle
1316
Après l’échec de l’État-nation comme base d’union
de
l’Europe, la région apparaît comme une source de vie nouvelle, comme
1317
de l’Europe, la région apparaît comme une source
de
vie nouvelle, comme base nouvelle d’union, qui pourrait être à la tai
1318
e une source de vie nouvelle, comme base nouvelle
d’
union, qui pourrait être à la taille de l’homme et en même temps la dé
1319
e nouvelle d’union, qui pourrait être à la taille
de
l’homme et en même temps la dépasser. Mais la régionalisation ne pour
1320
qui ne pourrait être que négatif pour la création
de
l’Europe ? IV. 1. Après une telle critique de l’état actuel de l’Euro
1321
ion de l’Europe ? IV. 1. Après une telle critique
de
l’état actuel de l’Europe, l’Europe a-t-elle encore des chances ? et
1322
IV. 1. Après une telle critique de l’état actuel
de
l’Europe, l’Europe a-t-elle encore des chances ? et à quelle échéance
1323
nalisation ? l’aide au tiers-monde ? un mouvement
de
défense contre les grands blocs économiques et politiques ? 3. Les hi
1324
nomistes souhaitent-ils actuellement la formation
d’
une Europe nouvelle ? V. La discussion au sein du groupe V a mis en év
1325
du groupe V a mis en évidence l’urgence qu’il y a
de
faire l’Europe. Les questions concernent les moyens d’y parvenir. 1.
1326
ire l’Europe. Les questions concernent les moyens
d’
y parvenir. 1. La solution régionale est très séduisante, parce que hu
1327
st-elle la seule et la meilleure ? 2. La solution
de
l’Europe économique conduisant à l’Europe politique est-elle opposée
1328
nt à l’Europe politique est-elle opposée à l’idée
de
M. de Rougemont, ou peut-elle la rejoindre ? VI. Le groupe VI a disc
1329
discuté certains problèmes soulevés par l’exposé
de
M. de Rougemont et qui peuvent être résumés sous la forme de deux que
1330
ugemont et qui peuvent être résumés sous la forme
de
deux questions fondamentales : 1. L’Europe devenue une troisième forc
1331
me force ne contribuerait-elle pas, dans l’esprit
de
beaucoup de jeunes d’aujourd’hui, à remettre en cause dans une certai
1332
ait-elle pas, dans l’esprit de beaucoup de jeunes
d’
aujourd’hui, à remettre en cause dans une certaine mesure l’équilibre
1333
sorte revancharde et revendicatrice ? Réponses
de
M. Denis de Rougemont Dans chacun de vos groupes, vous êtes revenu
1334
Réponses de M. Denis de Rougemont Dans chacun
de
vos groupes, vous êtes revenus sur l’idée de région et sur les diffic
1335
acun de vos groupes, vous êtes revenus sur l’idée
de
région et sur les difficultés que soulève ce nouveau concept. Je pens
1336
urai à parler maintenant, n’ayant pas eu le temps
de
regrouper systématiquement vos questions. D’abord, je les trouve pres
1337
es. Elles évoquent ce que je n’ai pas eu le temps
de
dire dans mon introduction. Je viens de me promener pendant une heure
1338
ux. J’ai pensé surtout à tout ce que j’avais omis
de
vous dire dans mon introduction. J’espérais que cela ressortirait dan
1339
ngagé, qu’il est bien centré. Je voudrais essayer
de
répondre à quelques grandes questions, celle de la possibilité de pas
1340
r de répondre à quelques grandes questions, celle
de
la possibilité de passer des régions à une fédération européenne, cel
1341
elques grandes questions, celle de la possibilité
de
passer des régions à une fédération européenne, celle de la possibili
1342
er des régions à une fédération européenne, celle
de
la possibilité de surmonter les États-nations, et je pense que tout c
1343
ne fédération européenne, celle de la possibilité
de
surmonter les États-nations, et je pense que tout cela se concrétiser
1344
ls et frontières des régions. Il y a là une série
de
concepts à mettre au point. Il y a un autre groupe de questions qui s
1345
oncepts à mettre au point. Il y a un autre groupe
de
questions qui sont me semble-t-il beaucoup plus générales, qui sont d
1346
l beaucoup plus générales, qui sont des questions
de
politique générale ou mondiale, savoir par exemple si l’Europe unie m
1347
l’équilibre mondial » — je ne sais pas très bien
de
quoi on parle, je voudrais bien le connaître, cet « équilibre mondial
1348
équilibre mondial » ! Cela, c’est un autre ordre
de
questions, auquel j’espère revenir à la fin, si j’ai le temps et si v
1349
si vous n’êtes pas trop fatigués. Troisième ordre
de
questions : la neutralité suisse, qui ne se rattache pas directement
1350
oblèmes. Est-ce qu’il y aurait un quatrième ordre
de
questions, sur lequel vous insisteriez pour que je réponde ? Oui, le
1351
nsisteriez pour que je réponde ? Oui, le problème
de
la jeunesse… C’est-à-dire, au fond, le problème pédagogique de la pré
1352
e… C’est-à-dire, au fond, le problème pédagogique
de
la présentation de l’Europe ? Je ne suis pas sûr que je puisse entrer
1353
fond, le problème pédagogique de la présentation
de
l’Europe ? Je ne suis pas sûr que je puisse entrer dans beaucoup de d
1354
me dit que vous aurez une matinée entière, celle
de
samedi, qui sera consacrée à ce genre de questions et d’application.
1355
e, celle de samedi, qui sera consacrée à ce genre
de
questions et d’application. Mais j’aurai probablement l’occasion de s
1356
di, qui sera consacrée à ce genre de questions et
d’
application. Mais j’aurai probablement l’occasion de situer plusieurs
1357
application. Mais j’aurai probablement l’occasion
de
situer plusieurs de mes réponses dans la perspective de ce que la jeu
1358
aurai probablement l’occasion de situer plusieurs
de
mes réponses dans la perspective de ce que la jeunesse peut absorber,
1359
uer plusieurs de mes réponses dans la perspective
de
ce que la jeunesse peut absorber, ou pour quoi elle peut se passionne
1360
optimiste, si je n’avais pas une vision idyllique
de
la réalité, si les États-nations n’étaient pas encore assez solides t
1361
ut de même, si je n’avais pas exagéré ma critique
de
l’État-nation, s’il n’avait pas rendu des services. Et puis, comment
1362
u’on prononce toujours en France : quand on parle
de
régions, on commence toujours par vous demander : « Comment voulez-vo
1363
t les déborderaient ? C’est une meilleure manière
de
poser la question. Quel est l’état actuel du problème ? Il est éviden
1364
me ? Il est évident que c’est nouveau, ce concept
de
région comme élément de base d’une fédération de l’Europe, en lieu et
1365
c’est nouveau, ce concept de région comme élément
de
base d’une fédération de l’Europe, en lieu et place des États-nations
1366
uveau, ce concept de région comme élément de base
d’
une fédération de l’Europe, en lieu et place des États-nations. On n’e
1367
de région comme élément de base d’une fédération
de
l’Europe, en lieu et place des États-nations. On n’en parle guère que
1368
de la culture, une première brochure, Naissance
de
l’Europe des régions , où nous donnons une bibliographie dos principa
1369
dos principaux ouvrages parus depuis une dizaine
d’
années sur le problème régional. Il y a déjà à peu près 400 titres et
1370
l y a déjà à peu près 400 titres et des centaines
d’
études assez développées. Des revues entières y sont consacrées, comme
1371
celles qui sont publiées en France par l’Institut
de
science économique appliquée de François Perroux (toute une série de
1372
ce par l’Institut de science économique appliquée
de
François Perroux (toute une série de cahiers — je crois qu’il y en a
1373
ue appliquée de François Perroux (toute une série
de
cahiers — je crois qu’il y en a déjà vingt-quatre — entièrement consa
1374
le rappelais tout à l’heure, est posé en réalité
d’
une manière très concrète, politique et économique, dans presque tous
1375
onomique, dans presque tous nos pays, il y a lieu
de
penser que l’intérêt pour les régions va augmenter et que cela devien
1376
era que ça l’est. J’ai l’impression qu’en parlant
de
régions je ne parle pas d’une utopie, mais j’essaie d’épouser un mouv
1377
pression qu’en parlant de régions je ne parle pas
d’
une utopie, mais j’essaie d’épouser un mouvement qui est en train de s
1378
gions je ne parle pas d’une utopie, mais j’essaie
d’
épouser un mouvement qui est en train de se prononcer partout, qu’on l
1379
génération. Quelles sont les chances des régions
de
se substituer peu à peu aux États-nations comme éléments de base d’un
1380
tituer peu à peu aux États-nations comme éléments
de
base d’une fédération européenne ? Il faut voir les choses dans le mo
1381
eu à peu aux États-nations comme éléments de base
d’
une fédération européenne ? Il faut voir les choses dans le mouvement
1382
éenne ? Il faut voir les choses dans le mouvement
d’
une évolution qui est assez lent, au gré de nos impatiences naturelles
1383
vement d’une évolution qui est assez lent, au gré
de
nos impatiences naturelles. Je pense à ce que nous disions dans nos p
1384
uence : « L’Europe unie ou la mort ! » au congrès
de
La Haye de 1948. Et bien, nous n’avons eu ni l’une ni l’autre. Nous n
1385
’Europe unie ou la mort ! » au congrès de La Haye
de
1948. Et bien, nous n’avons eu ni l’une ni l’autre. Nous ne sommes pa
1386
ne sommes pas encore morts, mais nous sommes loin
d’
être unis. Et je crois qu’il faut en rabattre sur ces enthousiasmes de
1387
rois qu’il faut en rabattre sur ces enthousiasmes
de
militants du début. J’approuve Jean Fourastié, le sociologue français
1388
il y a deux ou trois ans, devant tous les préfets
de
France réunis, il a dit à peu près cette phrase : « L’Europe unie va
1389
la base des États-nations, encore moins sur celle
de
vos départements : elle se fera sur la base des régions. » Déclaratio
1390
napoléoniens. Alors, comment envisager ce passage
de
l’Europe qui ne peut pas se faire avec des États-nations à une Europe
1391
nt très important — , mais par une certaine force
de
rayonnement. Et puis, qu’elles nouent entre elles des liens, ce qu’el
1392
e cas par-dessus les frontières. Donc, une espèce
de
coagulation — le mot n’est peut-être pas très bon — ou constitution d
1393
ot n’est peut-être pas très bon — ou constitution
de
régions un peu partout en Europe. À mesure qu’elles se consolident, q
1394
e qu’elles se consolident, qu’elles prennent plus
de
substance et d’existence, elles multiplient les liens interrégionaux.
1395
nsolident, qu’elles prennent plus de substance et
d’
existence, elles multiplient les liens interrégionaux. Les régions, te
1396
. Les régions, telles qu’on les envisage (régions
de
un à six millions d’habitants), ne peuvent pas prétendre à être compl
1397
qu’on les envisage (régions de un à six millions
d’
habitants), ne peuvent pas prétendre à être complètes, ce qu’ont préte
1398
fisamment constituées, et que le tissu, le réseau
de
leurs interrelations devienne si solide, que dans beaucoup de cas, tr
1399
où Marx l’entendait, à un véritable dépérissement
de
l’État-nation central, remplacé peu à peu par un tissu nouveau de lie
1400
central, remplacé peu à peu par un tissu nouveau
de
liens interrégionaux qui s’étendront de proche en proche à toute l’Eu
1401
u nouveau de liens interrégionaux qui s’étendront
de
proche en proche à toute l’Europe. Il s’agit là vraiment d’une créati
1402
en proche à toute l’Europe. Il s’agit là vraiment
d’
une création qui négligera, par la force des choses, les frontières na
1403
e qu’on puisse donner aujourd’hui c’est l’exemple
de
la Regio Basiliensis, dont on entend souvent parler sans savoir très
1404
nt on entend souvent parler sans savoir très bien
de
quoi il s’agit. Il se trouve qu’avec un de mes collaborateurs économi
1405
s bien de quoi il s’agit. Il se trouve qu’avec un
de
mes collaborateurs économistes, nous avons fait une étude assez appro
1406
stes, nous avons fait une étude assez approfondie
de
cette région, du point de vue économique et du point de vue historiqu
1407
istorique, culturel, généralement européen. Voilà
de
quoi il s’agit en deux mots : La Regio Basiliensis, ou région bâloise
1408
ise, est une conception qui est née dans l’esprit
de
jeunes économistes et professeurs de Bâle, qui ont rapidement trouvé
1409
ans l’esprit de jeunes économistes et professeurs
de
Bâle, qui ont rapidement trouvé des confrères en Alsace et dans le pa
1410
nt trouvé des confrères en Alsace et dans le pays
de
Bade. En gros, le projet consiste à créer une région entre les Vosges
1411
llemagne et la Suisse. Pour la France, une partie
de
l’Alsace et une partie de la Franche-Comté (Territoire de Belfort) ;
1412
r la France, une partie de l’Alsace et une partie
de
la Franche-Comté (Territoire de Belfort) ; pour la Suisse, le canton
1413
erritoire de Belfort) ; pour la Suisse, le canton
de
Bâle et une partie du Jura bernois et du canton de Soleure ; pour l’A
1414
e Bâle et une partie du Jura bernois et du canton
de
Soleure ; pour l’Allemagne, une partie de l’État de Bade-Wurtemberg.
1415
canton de Soleure ; pour l’Allemagne, une partie
de
l’État de Bade-Wurtemberg. Cela irait à peu près de Mulhouse à Bâle e
1416
l’État de Bade-Wurtemberg. Cela irait à peu près
de
Mulhouse à Bâle et à Fribourg-en-Brisgau ; et, à certains égards, jus
1417
u’à Strasbourg. Plusieurs réalités sont à la base
de
ce projet. D’abord une réalité historique : cette région a été histor
1418
une grande effervescence industrielle, mais qui a
de
la peine à se joindre à Bâle : toutes sortes de difficultés de transp
1419
a de la peine à se joindre à Bâle : toutes sortes
de
difficultés de transport et de passage à la frontière pour la main-d’
1420
se joindre à Bâle : toutes sortes de difficultés
de
transport et de passage à la frontière pour la main-d’œuvre. Toutes c
1421
le : toutes sortes de difficultés de transport et
de
passage à la frontière pour la main-d’œuvre. Toutes ces réalités indi
1422
tuer. Or, cette région qui se trouve être au cœur
de
l’Europe, géographiquement, est en même temps située entre trois pays
1423
ême temps située entre trois pays, et dans chacun
de
ces pays, surtout en France et en Allemagne, elle se trouve être péri
1424
adoxe. Ce coude du Rhin, c’est vraiment le centre
de
l’Europe industrielle, culturelle, mais partagée en trois régions pér
1425
centre. Ou bien on s’en occupe comme on s’occupe
d’
une colonie, à entendre les gens du lieu. Je ne veux pas en dire plus
1426
rtaine existence géographique entre trois chaînes
de
montagnes, et qui aurait une existence économique, culturelle, entre
1427
et Bâle). Il y a beaucoup à faire. Toutes sortes
d’
échanges ont commencé à se faire, chose curieuse, dans des domaines qu
1428
raissent marginaux : des appareils pour une école
de
dentistes ont été mis en commun entre les trois universités. Mais on
1429
délimitée. Alors se pose la question politique :
de
qui relèverait cette région ? Est-ce que Bâle va se séparer de la Sui
1430
rait cette région ? Est-ce que Bâle va se séparer
de
la Suisse ? Le pays de Bade de l’Allemagne ? Est-ce que l’Alsace va d
1431
-ce que Bâle va se séparer de la Suisse ? Le pays
de
Bade de l’Allemagne ? Est-ce que l’Alsace va devenir autonome ? Il n’
1432
nir autonome ? Il n’est absolument pas nécessaire
d’
aller jusque là. On peut très bien imaginer que les gens de la Regio B
1433
usque là. On peut très bien imaginer que les gens
de
la Regio Basiliensis relèvent de la région au point de vue économique
1434
ner que les gens de la Regio Basiliensis relèvent
de
la région au point de vue économique et au point de vue culturel, pou
1435
leurs écoles, leurs universités, leurs instituts
de
formation technique ; et que, politiquement, ils continuent à relever
1436
; et que, politiquement, ils continuent à relever
d’
ensembles tout à fait différents : que les Bâlois continuent à rester
1437
istes, uniquement. Cela choque chez nous le mythe
de
l’État-nation qui devrait tout réunir, les choses les plus diverses,
1438
us regio, ejus religio — ; toutes les allégeances
de
tous les ordres réunies autour de la même capitale et de la même idée
1439
les ordres réunies autour de la même capitale et
de
la même idée nationale, c’est de la folie, et on le voit aujourd’hui,
1440
même capitale et de la même idée nationale, c’est
de
la folie, et on le voit aujourd’hui, ce n’est pas tenable. On a été o
1441
ujourd’hui, ce n’est pas tenable. On a été obligé
de
commencer le Marché commun. Pourquoi ? Parce que vous aviez cette rég
1442
rapport ! Le fait que les gens parlaient français
d’
un côté et allemand de l’autre, ou flamand, ou hollandais, faisait qu’
1443
les gens parlaient français d’un côté et allemand
de
l’autre, ou flamand, ou hollandais, faisait qu’on a divisé cette régi
1444
au lieu d’en faire ce que le Marché commun essaie
d’
en refaire : une région économique unie, comme la nature des choses l’
1445
viser le sous-sol, jusqu’à je ne sais pas combien
de
mètres de profondeur, entre des pays différents. Ce petit exemple m’a
1446
ous-sol, jusqu’à je ne sais pas combien de mètres
de
profondeur, entre des pays différents. Ce petit exemple m’amène à l’i
1447
m’amène à l’idée fondamentale, pour les régions,
de
la pluralité des allégeances. Donc, idée absolument contraire à celle
1448
égeances. Donc, idée absolument contraire à celle
de
l’État-nation de type jacobin ou napoléonien, qui voulait tout réunir
1449
dée absolument contraire à celle de l’État-nation
de
type jacobin ou napoléonien, qui voulait tout réunir autour d’un même
1450
in ou napoléonien, qui voulait tout réunir autour
d’
un même centre et tout discipliner d’une manière militaire. Vous conna
1451
éunir autour d’un même centre et tout discipliner
d’
une manière militaire. Vous connaissez les ambitions de Napoléon : tra
1452
manière militaire. Vous connaissez les ambitions
de
Napoléon : transformer l’université, détruire les anciennes universit
1453
adre que l’armée française. Si bien qu’un recteur
d’
académie, comme ils s’appellent en France — qui n’est pas du tout un r
1454
, tient à dire qu’il a le même rang qu’un général
de
division ou qu’un préfet. Cela m’a été rappelé à maintes reprises par
1455
ues, nous devons avoir le même rang qu’un général
de
division ou qu’un préfet, et ceci depuis Napoléon. » Napoléon a voulu
1456
is Napoléon. » Napoléon a voulu faire, d’après un
de
mes collègues de Strasbourg, une « gendarmerie intellectuelle » avec
1457
poléon a voulu faire, d’après un de mes collègues
de
Strasbourg, une « gendarmerie intellectuelle » avec son université ce
1458
compliqué, mais si vous y pensez dans le concret
de
la vie, c’est extrêmement simple et facile à sentir. J’ai l’habitude
1459
mement simple et facile à sentir. J’ai l’habitude
de
donner l’exemple suivant, parce qu’il m’est personnel et que je le co
1460
s, né dans un canton qui eut son histoire séparée
de
celle de la Suisse pendant longtemps, puisqu’il n’a rejoint la Conféd
1461
s un canton qui eut son histoire séparée de celle
de
la Suisse pendant longtemps, puisqu’il n’a rejoint la Confédération q
1462
rie, ma tradition, c’est là que je suis né, c’est
de
là que j’ai mon accent. C’est ma première allégeance patriotique. Mai
1463
riotique. Mais comme Neuchâtelois, je suis Suisse
de
passeport, c’est là mon allégeance nationale. Ensuite, je suis écriva
1464
on allégeance est à la francophonie, à l’ensemble
de
la langue française, qui recouvre à peu près les trois quarts de la F
1465
ançaise, qui recouvre à peu près les trois quarts
de
la France, la Suisse romande, la moitié de la Belgique, un petit coin
1466
quarts de la France, la Suisse romande, la moitié
de
la Belgique, un petit coin de l’Italie et qui se répand, indépendamme
1467
romande, la moitié de la Belgique, un petit coin
de
l’Italie et qui se répand, indépendamment des frontières nationales,
1468
ères nationales, sur cinq ou six pays. Autre type
d’
allégeance : religieusement, il se trouve que je suis né protestant, m
1469
j’étais communiste, je dirais : idéologiquement —
d’
un ensemble qui ne recouvre absolument pas ce que je viens de dire : n
1470
canton, ni la Suisse, ni la francophonie, qui ont
de
tout autres frontières ou n’en ont pas du tout. De plus, je fais part
1471
ou n’en ont pas du tout. De plus, je fais partie
d’
un certain nombre de sociétés auxquelles je cotise et qui n’ont pas du
1472
tout. De plus, je fais partie d’un certain nombre
de
sociétés auxquelles je cotise et qui n’ont pas du tout de frontières
1473
tés auxquelles je cotise et qui n’ont pas du tout
de
frontières communes, qui sont répandues n’importe comment sur toute l
1474
répandues n’importe comment sur toute la surface
de
la Terre. Et je sais très bien de quoi je fais partie ! Je sais très
1475
oute la surface de la Terre. Et je sais très bien
de
quoi je fais partie ! Je sais très bien à qui j’envoie mes cotisation
1476
arfaitement clair, il n’est pas du tout difficile
de
s’en souvenir ! Donc on peut parfaitement — non seulement on le peut,
1477
frontières communes, d’après les vieilles devises
de
l’État souverain et indivisible, les vieilles devises de la Ligue par
1478
at souverain et indivisible, les vieilles devises
de
la Ligue par exemple, en France, ou de Jean Bodin : « Une foi, une lo
1479
es devises de la Ligue par exemple, en France, ou
de
Jean Bodin : « Une foi, une loi, un roi », reprise par tous les mouve
1480
i », reprise par tous les mouvements totalitaires
d’
aujourd’hui, que ce soit le totalitarisme de Staline ou celui de Hitle
1481
aires d’aujourd’hui, que ce soit le totalitarisme
de
Staline ou celui de Hitler, dont la devise était presque la même que
1482
que ce soit le totalitarisme de Staline ou celui
de
Hitler, dont la devise était presque la même que celle de la Ligue :
1483
r, dont la devise était presque la même que celle
de
la Ligue : « Ein Volk, ein Reich, ein Führer ». C’est contre cela que
1484
ns lutter si nous voulons arriver à la fédération
de
l’Europe. Nous devons inculquer aux jeunes gens, aux élèves, l’idée d
1485
ons inculquer aux jeunes gens, aux élèves, l’idée
de
cette pluralité des allégeances, l’idée qu’il ne faut pas mettre tous
1486
c’est une idée économique, un petit peu une idée
d’
épicier ! Il y a plus : il faut correspondre à la réalité de l’homme,
1487
! Il y a plus : il faut correspondre à la réalité
de
l’homme, qui est multiple. L’homme relève de toutes sortes de niveaux
1488
lité de l’homme, qui est multiple. L’homme relève
de
toutes sortes de niveaux différents, et il est normal qu’il y ait des
1489
qui est multiple. L’homme relève de toutes sortes
de
niveaux différents, et il est normal qu’il y ait des autorités différ
1490
férentes qui y correspondent. J’en viens à l’idée
de
l’État. On m’a fait observer — c’est une objection très juste — que l
1491
que les régions peuvent mener à l’Europe fédérée
d’
un côté, mais qu’elles peuvent mener à un certain obscurantisme région
1492
rmé sur sa langue, sur ses coutumes — ces régions
de
folklore qui ont fait tellement de tort à la notion nouvelle de régio
1493
— ces régions de folklore qui ont fait tellement
de
tort à la notion nouvelle de région. Tout cela serait vrai, s’il n’y
1494
i ont fait tellement de tort à la notion nouvelle
de
région. Tout cela serait vrai, s’il n’y avait pas un pouvoir — j’alla
1495
ns domaines, à certains niveaux. Sinon, on risque
de
retomber aux petites dictatures régionales de ce qu’on appelle en Amé
1496
que de retomber aux petites dictatures régionales
de
ce qu’on appelle en Amérique les « bosses ». Le « boss », c’est le ch
1497
érique les « bosses ». Le « boss », c’est le chef
de
parti local, le maire, le shérif, un politicien local. La tyrannie du
1498
t. Je ne verrais pas, par exemple, une fédération
de
l’Europe qui aurait une seule capitale, où seraient réunis tous les g
1499
n État-nation en réduction. Je vois quelque chose
de
beaucoup plus complexe, des régions économiques déterminées par leur
1500
xistence économique, qui relèveraient par exemple
d’
une agence fédérale économique, laquelle dirigerait le plan à l’échell
1501
’est-ce que le Marché commun ? Une agence qui n’a
d’
autorité que sur le plan économique (et pas encore assez d’ailleurs) e
1502
(et pas encore assez d’ailleurs) et qui s’occupe
de
la planification en général, de tout ce qui déborde les capacités d’u
1503
) et qui s’occupe de la planification en général,
de
tout ce qui déborde les capacités d’une commune, d’une région ou de g
1504
en général, de tout ce qui déborde les capacités
d’
une commune, d’une région ou de grands ensembles nationaux. On peut im
1505
tout ce qui déborde les capacités d’une commune,
d’
une région ou de grands ensembles nationaux. On peut imaginer d’autres
1506
orde les capacités d’une commune, d’une région ou
de
grands ensembles nationaux. On peut imaginer d’autres régions, qui se
1507
illes. Je suis en train de vous parler maintenant
de
la partie la plus difficile, de la répartition de réseaux de régions
1508
parler maintenant de la partie la plus difficile,
de
la répartition de réseaux de régions différentes dans toute l’Europe.
1509
de la partie la plus difficile, de la répartition
de
réseaux de régions différentes dans toute l’Europe. Je pense que si l
1510
e la plus difficile, de la répartition de réseaux
de
régions différentes dans toute l’Europe. Je pense que si l’Europe fai
1511
en Suisse, quand on a un ensemble politique formé
de
tendances très diverses et qu’on veut respecter ces diversités, on es
1512
n neutre. J’imagine que l’Europe, qui a tellement
de
peine à cause de ses vieilles traditions à prendre une position polit
1513
fédéral politique commun, à prendre des positions
de
neutralité, par exemple entre les grands empires. Et là, contrairemen
1514
à ce que certains disent, elle serait un élément
d’
équilibre et de pacification à l’échelle du monde, ce qu’elle ne peut
1515
ins disent, elle serait un élément d’équilibre et
de
pacification à l’échelle du monde, ce qu’elle ne peut pas être aujour
1516
st-ce que cela a donné ? Cela a donné 38 millions
de
morts en deux guerres. Ce n’est pas mal. Je trouve qu’il suffit bien
1517
l. Je trouve qu’il suffit bien à juger la formule
de
l’État-nation, ce résultat qui n’est pas attribuable à autre chose. C
1518
qui continuerait à être neutre en tant que modèle
d’
une fédération européenne, mais qui ne prendrait pas prétexte de cette
1519
on européenne, mais qui ne prendrait pas prétexte
de
cette neutralité pour refuser d’entrer dans la fédération européenne,
1520
ait pas prétexte de cette neutralité pour refuser
d’
entrer dans la fédération européenne, au contraire. Et une fois cette
1521
te fédération faite, elle adopterait une position
de
neutralité ou de pacification entre les grands groupes, en tout cas e
1522
te, elle adopterait une position de neutralité ou
de
pacification entre les grands groupes, en tout cas entre le groupe co
1523
e aujourd’hui. g. Édition réalisée sur la base
d’
un tapuscrit conservé à la Bibliothèque publique et universitaire de N
1524
servé à la Bibliothèque publique et universitaire
de
Neuchâtel sous l’identifiant 671. Il s’agit d’une conférence donnée à
1525
re de Neuchâtel sous l’identifiant 671. Il s’agit
d’
une conférence donnée à Crêt-Bérard dans le cadre de la Campagne d’édu
1526
une conférence donnée à Crêt-Bérard dans le cadre
de
la Campagne d’éducation civique européenne.
1527
donnée à Crêt-Bérard dans le cadre de la Campagne
d’
éducation civique européenne.
1528
es années tournantes (années 1970)i L’histoire
de
l’entre-deux-guerres — comme certains prophètes de malheur l’appelaie
1529
e l’entre-deux-guerres — comme certains prophètes
de
malheur l’appelaient déjà au cours des années 1930 ! — résulte du jeu
1530
déjà au cours des années 1930 ! — résulte du jeu
d’
un petit nombre de forces principales et de phénomènes spécifiques, ta
1531
années 1930 ! — résulte du jeu d’un petit nombre
de
forces principales et de phénomènes spécifiques, tantôt antagonistes
1532
du jeu d’un petit nombre de forces principales et
de
phénomènes spécifiques, tantôt antagonistes et tantôt complices, qu’i
1533
et tantôt complices, qu’il nous est devenu facile
de
distinguer et de nommer après coup : — le nationalisme (ou principe d
1534
es, qu’il nous est devenu facile de distinguer et
de
nommer après coup : — le nationalisme (ou principe des nationalités)
1535
uquel on venait de bouleverser la carte politique
de
l’Europe en créant une dizaine d’États neufs ou renouvelés et multipl
1536
carte politique de l’Europe en créant une dizaine
d’
États neufs ou renouvelés et multipliant du même coup les causes de co
1537
renouvelés et multipliant du même coup les causes
de
conflits ; — la crise du capitalisme occidental, qui éclate en 1929 a
1538
isme occidental, qui éclate en 1929 avec le krach
de
Wall Street et va propager ses effets en Europe au cours des dix anné
1539
e dénommé tiers-monde) que le colosse a des pieds
d’
argile ; — l’échec des institutions politiques internationales et des
1540
entatives multipliées en vain par les démocraties
de
l’Ouest et l’Amérique pour contenir l’anarchie des nationalismes et l
1541
contenir l’anarchie des nationalismes et les lois
de
la jungle du capitalisme, par des mesures de coopération économique e
1542
lois de la jungle du capitalisme, par des mesures
de
coopération économique et financière : plan Briand d’union européenne
1543
oopération économique et financière : plan Briand
d’
union européenne, sanctions économiques, sécurité collective ; — la mo
1544
égimes totalitaires chez les trois grands vaincus
de
la guerre mondiale, la Russie, l’Italie et l’Allemagne, portant le na
1545
l’Allemagne, portant le nationalisme à son point
de
fusion délirante et belliqueuse, mais surmontant la crise économique
1546
rendre compte des péripéties les plus marquantes
de
la période qui sépare l’armistice du 11 novembre 1919 et les déclarat
1547
armistice du 11 novembre 1919 et les déclarations
de
guerre du début de septembre 1939. Mais il se trouve que c’est dans l
1548
embre 1919 et les déclarations de guerre du début
de
septembre 1939. Mais il se trouve que c’est dans les années 1931 à 19
1549
’est dans les années 1931 à 1937 que ces courants
de
forces ont fait un nœud, se sont noués d’une manière décisive, fatidi
1550
ourants de forces ont fait un nœud, se sont noués
d’
une manière décisive, fatidique, justifiant le titre d’années tournant
1551
manière décisive, fatidique, justifiant le titre
d’
années tournantes que leur donnait à bout portant un lucide et sensibl
1552
à bout portant un lucide et sensible observateur
de
l’époque14. Nous allons donc tenter de saisir ou de ressaisir un à un
1553
bservateur de l’époque14. Nous allons donc tenter
de
saisir ou de ressaisir un à un, dans leur mouvement, ces quatre phéno
1554
l’époque14. Nous allons donc tenter de saisir ou
de
ressaisir un à un, dans leur mouvement, ces quatre phénomènes majeurs
1555
ls se présentaient au début des années 1930, puis
de
retracer leurs évolutions combinées jusqu’à la veille de la Seconde G
1556
acer leurs évolutions combinées jusqu’à la veille
de
la Seconde Guerre mondiale. ⁂ Des « traités de banlieue » à Hitler,
1557
de la Seconde Guerre mondiale. ⁂ Des « traités
de
banlieue » à Hitler, ou le facteur nationaliste Le xx e siècle est
1558
iste Le xx e siècle est né en 1919, des œuvres
d’
une des guerres les plus absurdes de l’histoire si l’on en croit ceux
1559
9, des œuvres d’une des guerres les plus absurdes
de
l’histoire si l’on en croit ceux qui la déclarèrent, et qui tous, la
1560
s voulu cela ». Absurde guerre, née par une sorte
de
logique irréfutable des théories du siècle précédent, dans la mesure
1561
ialistes et aux capitalistes ; théories jacobines
de
l’État administrativement centralisé et moralement uniformisé, appliq
1562
imposés aux empires centraux par les démocraties
de
l’Ouest avaient été nommés « traités de banlieue » parce que Paris ét
1563
mocraties de l’Ouest avaient été nommés « traités
de
banlieue » parce que Paris était encore centre du monde et que ses vi
1564
is était encore centre du monde et que ses villes
de
banlieue avaient offert aux diplomates leurs grands ou petits palais
1565
trés en leur nom par des « experts » sur la carte
de
la vieille Europe avaient créé une bonne dizaine de pays neufs, défin
1566
la vieille Europe avaient créé une bonne dizaine
de
pays neufs, définis, disait-on, par l’ethnie ou la langue, en réalité
1567
s frontières des langues passaient au beau milieu
d’
un village (et parfois même d’une maison !), mais laissaient à gauche
1568
ient au beau milieu d’un village (et parfois même
d’
une maison !), mais laissaient à gauche et à droite de nombreuses mino
1569
e maison !), mais laissaient à gauche et à droite
de
nombreuses minorités en colère. Faute d’une exactitude impraticable d
1570
à droite de nombreuses minorités en colère. Faute
d’
une exactitude impraticable dans le partage linguistique, il eût fallu
1571
ique, il eût fallu favoriser une grande tolérance
de
principe, mais on fit tout le contraire, et partout on prétendit que
1572
le contraire, et partout on prétendit que l’union
de
l’État neuf exigeait l’uniformisation des dialectes, des mœurs, des e
1573
litiges ethniques ou linguistiques, les occasions
de
maquignonnages territoriaux, et les casus belli généreusement offerts
1574
is pour Teschen. Quant à Hitler, il aura beau jeu
de
justifier ses interventions dans les États voisins au nom du principe
1575
ntion étrangère : le droit des peuples à disposer
d’
eux-mêmes. Qui osera dire que les Sudètes ont librement adhéré à l’Éta
1576
es Tchèques « disposant librement » non seulement
d’
eux-mêmes, ce que tout le monde admettait avec chaleur, mais aussi de
1577
tout le monde admettait avec chaleur, mais aussi
de
leurs voisins slovaques à l’Est, et germanophones à l’Ouest ? Qui peu
1578
est ? Qui peut nier que l’une des causes directes
de
la Seconde Guerre mondiale naîtra du refus tchèque de respecter les d
1579
a Seconde Guerre mondiale naîtra du refus tchèque
de
respecter les droits minoritaires et de l’inflexible volonté affichée
1580
s tchèque de respecter les droits minoritaires et
de
l’inflexible volonté affichée par Bénès, avec l’appui de la France, d
1581
flexible volonté affichée par Bénès, avec l’appui
de
la France, d’imposer à trois peuples bien distincts des institutions
1582
té affichée par Bénès, avec l’appui de la France,
d’
imposer à trois peuples bien distincts des institutions uniformes ? Le
1583
ns uniformes ? Le problème sudète, l’interdiction
d’
Anschluss signifiée à l’Autriche, et le cas de Dantzig, pourrait-on rê
1584
ion d’Anschluss signifiée à l’Autriche, et le cas
de
Dantzig, pourrait-on rêver mieux, espérer davantage pour priver les p
1585
eux, espérer davantage pour priver les puissances
de
l’Ouest de toute espèce de bonne conscience lorsqu’elles tenteront de
1586
r davantage pour priver les puissances de l’Ouest
de
toute espèce de bonne conscience lorsqu’elles tenteront de résister a
1587
priver les puissances de l’Ouest de toute espèce
de
bonne conscience lorsqu’elles tenteront de résister aux prétentions d
1588
espèce de bonne conscience lorsqu’elles tenteront
de
résister aux prétentions d’Hitler fondées sur leurs principes ? Tous
1589
orsqu’elles tenteront de résister aux prétentions
d’
Hitler fondées sur leurs principes ? Tous les « traités de banlieue »
1590
fondées sur leurs principes ? Tous les « traités
de
banlieue » de 1919 avaient été fondés sur les dogmes et les clichés s
1591
eurs principes ? Tous les « traités de banlieue »
de
1919 avaient été fondés sur les dogmes et les clichés stato-nationali
1592
ues enfin ; et tous, ils exprimaient les rapports
de
forces militaires au lendemain de l’armistice de 1918. L’ennui, c’est
1593
nt les rapports de forces militaires au lendemain
de
l’armistice de 1918. L’ennui, c’est que ces frontières prétendues « n
1594
de forces militaires au lendemain de l’armistice
de
1918. L’ennui, c’est que ces frontières prétendues « naturelles », gé
1595
ider que par miracle, disons plus : par une suite
de
miracles toujours et partout répétés. Or pas un de ces miracles ne s’
1596
e miracles toujours et partout répétés. Or pas un
de
ces miracles ne s’est jamais produit, nulle part. Le Danube, le Rhône
1597
imites naturelles », mais au contraire des traits
d’
union traditionnels ! Les experts chargés par les Alliés, en 1919, de
1598
ls ! Les experts chargés par les Alliés, en 1919,
de
délimiter les États neufs, sont partis de la théorie que les Pyrénées
1599
n 1919, de délimiter les États neufs, sont partis
de
la théorie que les Pyrénées et les Alpes séparent Français et Espagno
1600
antôt l’italien (comté de Nice), le français (Val
d’
Aoste), l’allemand (Sud-Tyrol). De même, l’accident géographique de la
1601
and (Sud-Tyrol). De même, l’accident géographique
de
la chaîne du Böhmerwald n’empêche nullement les Sudètes de parler la
1602
îne du Böhmerwald n’empêche nullement les Sudètes
de
parler la même langue que les Franconiens, tandis qu’aucun accident n
1603
nt ni fluvial ni montagneux ne sépare les régions
de
la Transylvanie où l’on parle roumain, allemand ou hongrois selon les
1604
t Provençaux et Languedociens. Et il est aberrant
de
vouloir faire coïncider les frontières linguistiques avec les frontiè
1605
les frontières linguistiques avec les frontières
d’
économies nationales, quand chacun voit que les bassins de la Ruhr, de
1606
ies nationales, quand chacun voit que les bassins
de
la Ruhr, de la Sarre, de la Meuse et de la Moselle forment une unité
1607
es, quand chacun voit que les bassins de la Ruhr,
de
la Sarre, de la Meuse et de la Moselle forment une unité économique f
1608
cun voit que les bassins de la Ruhr, de la Sarre,
de
la Meuse et de la Moselle forment une unité économique fondée sur le
1609
s bassins de la Ruhr, de la Sarre, de la Meuse et
de
la Moselle forment une unité économique fondée sur le sous-sol ferroc
1610
dans un même territoire sur les seules nécessités
de
la mobilisation militaire) ne s’est totalement épanouie en Europe qu’
1611
est totalement épanouie en Europe qu’au lendemain
de
la victoire franco-anglaise de 1918, financée et organisée par les Ét
1612
pe qu’au lendemain de la victoire franco-anglaise
de
1918, financée et organisée par les États-Unis, puis mise en forme pa
1613
xperts des trois « puissances ». Sur des milliers
d’
erreurs intéressées de ce genre, les auteurs des traités de banlieue a
1614
ssances ». Sur des milliers d’erreurs intéressées
de
ce genre, les auteurs des traités de banlieue avaient peut-être cru —
1615
intéressées de ce genre, les auteurs des traités
de
banlieue avaient peut-être cru — plus ou moins naïvement ou cyniqueme
1616
une paix durable. Dès 1931, l’imposture objective
de
leurs méthodes éclate de toutes parts. C’est en effet au nom des théo
1617
s et des sophismes partagés par les nationalistes
de
tous les pays démocratiques que Mussolini revendique Nice et la Corse
1618
atiques que Mussolini revendique Nice et la Corse
d’
un côté, Trieste de l’autre, tandis qu’Hitler annonce dans Mein Kampf
1619
ni revendique Nice et la Corse d’un côté, Trieste
de
l’autre, tandis qu’Hitler annonce dans Mein Kampf qu’aussitôt au pouv
1620
a l’Autriche, la Sarre, les Sudètes et le couloir
de
Dantzig, en attendant l’Alsace. Le principe d’expansion des dictature
1621
ir de Dantzig, en attendant l’Alsace. Le principe
d’
expansion des dictatures totalitaires — celle du Duce déjà, celle du F
1622
traités imposés par les vainqueurs « démocrates »
de
1918. Il est absolument conforme à l’esprit des manuels scolaires de
1623
olument conforme à l’esprit des manuels scolaires
de
tous les pays de l’Europe, qui tous exaltent les droits imprescriptib
1624
à l’esprit des manuels scolaires de tous les pays
de
l’Europe, qui tous exaltent les droits imprescriptibles de chaque Éta
1625
pe, qui tous exaltent les droits imprescriptibles
de
chaque État à son « unité nationale », à sa « souveraineté absolue »
1626
». Ce sont les lois, les surprises et les crises
de
l’économie capitaliste qui vont permettre à cette logique des traités
1627
te qui vont permettre à cette logique des traités
de
manifester très vite ses effets politiques et sociaux à une grande éc
1628
ux à une grande échelle, dès 1931. ⁂ Du krach
de
Wall Street à Hitler, ou le facteur capitaliste Dans le même temps
1629
ncapacité politique. Les yeux fixés sur les cotes
de
la bourse, il ne voit rien au-delà, il n’a pas d’horizon, pas de stra
1630
de la bourse, il ne voit rien au-delà, il n’a pas
d’
horizon, pas de stratégie à long terme, et il traite de rêveurs ceux q
1631
l ne voit rien au-delà, il n’a pas d’horizon, pas
de
stratégie à long terme, et il traite de rêveurs ceux qui regardent pl
1632
izon, pas de stratégie à long terme, et il traite
de
rêveurs ceux qui regardent plus loin, économistes ou philosophes, réf
1633
volutionnaires. C’est pourquoi la crise qui vient
d’
éclater au cœur même du système, à Wall Street, jette les capitalistes
1634
agogues les mieux accordés à la psyché collective
de
leur nation. « Quand Paris prend une prise de tabac, toute la France
1635
ive de leur nation. « Quand Paris prend une prise
de
tabac, toute la France éternue », dit une phrase fameuse de Gogol. Le
1636
toute la France éternue », dit une phrase fameuse
de
Gogol. Les journalistes du xx e siècle devaient en tirer abusivement
1637
rape un rhume, toute l’Europe fait une bronchite.
De
fait, le grand krach de Wall Street, le « jeudi noir » du 24 octobre
1638
urope fait une bronchite. De fait, le grand krach
de
Wall Street, le « jeudi noir » du 24 octobre 1929, fut une sorte de f
1639
« jeudi noir » du 24 octobre 1929, fut une sorte
de
fulgurante pneumonie double, quasi mortelle pour les États-Unis, mais
1640
pour les États-Unis, mais dont l’Europe mit plus
de
deux ans à ressentir les effets, en général beaucoup moins dramatique
1641
up moins dramatiques. On ne vit pas des douzaines
de
banquiers sauter par la fenêtre de leur vingtième étage, mais les cou
1642
des douzaines de banquiers sauter par la fenêtre
de
leur vingtième étage, mais les cours nationaux s’effondrèrent les uns
1643
èrent les uns après les autres dès 1931 : au mois
de
mai de cette année, faillite de la Kredit anstalt, première banque au
1644
es uns après les autres dès 1931 : au mois de mai
de
cette année, faillite de la Kredit anstalt, première banque autrichie
1645
ès 1931 : au mois de mai de cette année, faillite
de
la Kredit anstalt, première banque autrichienne ; au mois de juillet,
1646
t anstalt, première banque autrichienne ; au mois
de
juillet, fermeture de nombreuses banques et mesures de moratoire en A
1647
nque autrichienne ; au mois de juillet, fermeture
de
nombreuses banques et mesures de moratoire en Allemagne ; au mois de
1648
illet, fermeture de nombreuses banques et mesures
de
moratoire en Allemagne ; au mois de septembre, la Grande-Bretagne aba
1649
es et mesures de moratoire en Allemagne ; au mois
de
septembre, la Grande-Bretagne abandonne l’étalon-or, suivie par le Co
1650
, suivie par le Commonwealth et par une vingtaine
d’
États qui en dépendent financièrement. En 1932, c’est la France qui su
1651
ent. En 1932, c’est la France qui suit : faillite
de
la Banque nationale de commerce et de la Compagnie générale transatla
1652
France qui suit : faillite de la Banque nationale
de
commerce et de la Compagnie générale transatlantique ; puis les Scand
1653
: faillite de la Banque nationale de commerce et
de
la Compagnie générale transatlantique ; puis les Scandinaves : failli
1654
ique ; puis les Scandinaves : faillite et suicide
d’
Ivar Kreuger, le roi des allumettes. La crise, d’ailleurs, n’est pas s
1655
d’ailleurs, n’est pas seulement financière. Faute
de
profit et non de besoins humains, on détruit des milliers de tonnes d
1656
pas seulement financière. Faute de profit et non
de
besoins humains, on détruit des milliers de tonnes de blé au Canada,
1657
t non de besoins humains, on détruit des milliers
de
tonnes de blé au Canada, de café au Brésil. Ces scandales moraux plus
1658
esoins humains, on détruit des milliers de tonnes
de
blé au Canada, de café au Brésil. Ces scandales moraux plus encore qu
1659
détruit des milliers de tonnes de blé au Canada,
de
café au Brésil. Ces scandales moraux plus encore qu’économiques frapp
1660
entier. Dans tous les pays développés ou en voie
de
l’être (sauf l’URSS, restée hors des circuits capitalistes), la produ
1661
ction industrielle tombe au-dessous de son niveau
de
1929, de 33 % en France, à 50 % aux USA. On recense près de 10 millio
1662
ustrielle tombe au-dessous de son niveau de 1929,
de
33 % en France, à 50 % aux USA. On recense près de 10 millions de chô
1663
e, à 50 % aux USA. On recense près de 10 millions
de
chômeurs dans le monde en 1932 (6 millions en Allemagne, 13 millions
1664
13 millions aux États-Unis…). Tout le monde parle
de
« crise mondiale ». En fait, la crise ne concerne que les pays d’écon
1665
ale ». En fait, la crise ne concerne que les pays
d’
économie capitaliste et de régime démocratique, ainsi que leurs dépend
1666
e concerne que les pays d’économie capitaliste et
de
régime démocratique, ainsi que leurs dépendances coloniales ; mais ce
1667
à première vue, seraient celles qui résulteraient
d’
une concertation internationale et qui pourraient être appliquées à un
1668
es nationalismes aux dents longues et pour tenter
d’
apprendre aux États vieux et neufs à coopérer et s’entraider plutôt qu
1669
oisin pour les exploiter sans scrupules — fin mot
de
la politique nationaliste. Débâcle de la Société des Nations, seule c
1670
s — fin mot de la politique nationaliste. Débâcle
de
la Société des Nations, seule capable, théoriquement, de s’opposer au
1671
ociété des Nations, seule capable, théoriquement,
de
s’opposer au gangstérisme des États-nations « souverains ». En 1929,
1672
jeune comte Richard Coudenhove-Kalergi, fondateur
de
Paneuropa, avait présenté devant l’Assemblée de la SDN un Plan d’unio
1673
ait présenté devant l’Assemblée de la SDN un Plan
d’
union des États européens. Ce plan allait être rédigé par le plus proc
1674
allait être rédigé par le plus proche conseiller
de
Briand, Alexis Léger — plus tard prix Nobel de poésie sous le nom de
1675
er de Briand, Alexis Léger — plus tard prix Nobel
de
poésie sous le nom de Saint-John Perse. Il proposait aux Européens de
1676
éger — plus tard prix Nobel de poésie sous le nom
de
Saint-John Perse. Il proposait aux Européens des institutions commune
1677
out des tâches communes, créant des « solidarités
de
fait », et qui seraient propres à surmonter progressivement les confl
1678
surmonter progressivement les conflits nationaux
d’
intérêts et de prestige. Les réponses des États, parvenues en 1930, ét
1679
gressivement les conflits nationaux d’intérêts et
de
prestige. Les réponses des États, parvenues en 1930, étaient très en
1680
qui avait accueilli le discours Briand : le krach
de
Wall Street, survenu entretemps, avait rendu les gouvernements hostil
1681
fs douaniers. Personne n’osait se dire adversaire
de
l’union, mais personne ne semblait disposé à en accepter les conditio
1682
e enterrer le seul projet qui eût été susceptible
de
barrer la route au national-socialisme, justement ! Dès lors, les éch
1683
tement ! Dès lors, les échecs, puis les désastres
de
la coopération internationale vont se succéder rapidement. Une Confér
1684
1930 se réunit à Genève en 1932. Le représentant
de
l’Espagne républicaine, Salvador de Madariaga, pacifiste convaincu, m
1685
s États, propose avec un humour noir que le poste
de
délégué à la Conférence du désarmement soit déclaré héréditaire… L’an
1686
taire… L’année suivante, Hitler déchire le traité
de
Versailles et recrée une armée allemande. Puis se déchaîne une course
1687
nt pour « réarmer » à qui mieux mieux et relancer
de
la sorte leurs industries lourdes. Il n’est pas une année, de 1930 à
1688
leurs industries lourdes. Il n’est pas une année,
de
1930 à 1937, qui ne marque une nouvelle étape de la dégradation puis
1689
de 1930 à 1937, qui ne marque une nouvelle étape
de
la dégradation puis de la ruine définitive de ce qu’on s’obstine enco
1690
marque une nouvelle étape de la dégradation puis
de
la ruine définitive de ce qu’on s’obstine encore à nommer la « sécuri
1691
ape de la dégradation puis de la ruine définitive
de
ce qu’on s’obstine encore à nommer la « sécurité collective » dans le
1692
mmer la « sécurité collective » dans les couloirs
de
moins en moins animés du Palais Wilson, à Genève. Toutes les tentativ
1693
du Palais Wilson, à Genève. Toutes les tentatives
d’
ententes bi- ou multilatérales, dans tous les domaines, se voient succ
1694
us les domaines, se voient successivement saluées
de
vœux polis ou éloquents, mais hypocrites, sapées avant même d’être mi
1695
ou éloquents, mais hypocrites, sapées avant même
d’
être mises en œuvre, ridiculisées à l’envi, puis éliminées, qu’il s’ag
1696
culisées à l’envi, puis éliminées, qu’il s’agisse
d’
accords diplomatiques mort-nés (comme ceux de Stresa en 1934 entre Fra
1697
isse d’accords diplomatiques mort-nés (comme ceux
de
Stresa en 1934 entre France, Grande-Bretagne et Italie fasciste), de
1698
ntre France, Grande-Bretagne et Italie fasciste),
de
traités déchirés, dès 1933, de mesures théoriques de désarmement et d
1699
Italie fasciste), de traités déchirés, dès 1933,
de
mesures théoriques de désarmement et d’embargos sur les armes aboutis
1700
traités déchirés, dès 1933, de mesures théoriques
de
désarmement et d’embargos sur les armes aboutissant à la création d’a
1701
dès 1933, de mesures théoriques de désarmement et
d’
embargos sur les armes aboutissant à la création d’armes et d’armées n
1702
’embargos sur les armes aboutissant à la création
d’
armes et d’armées nouvelles, de sanctions collectives impuissantes, pu
1703
ur les armes aboutissant à la création d’armes et
d’
armées nouvelles, de sanctions collectives impuissantes, puis de prome
1704
sant à la création d’armes et d’armées nouvelles,
de
sanctions collectives impuissantes, puis de promesses de « réparation
1705
lles, de sanctions collectives impuissantes, puis
de
promesses de « réparations » partout reniées, de dévaluations nationa
1706
tions collectives impuissantes, puis de promesses
de
« réparations » partout reniées, de dévaluations nationales opérées e
1707
de promesses de « réparations » partout reniées,
de
dévaluations nationales opérées en violation des accords internationa
1708
opérées en violation des accords internationaux,
de
l’échec des conférences économiques mondiales de Lausanne 1932 et de
1709
de l’échec des conférences économiques mondiales
de
Lausanne 1932 et de Londres 1933. La seule mise en commun vraiment ré
1710
érences économiques mondiales de Lausanne 1932 et
de
Londres 1933. La seule mise en commun vraiment réussie des années 193
1711
e seul pacte qui sera respecté, le fameux « pacte
d’
acier » conclu en 1936 entre Hitler et Mussolini, rejoints l’année sui
1712
clu en vue de la guerre, pour justifier la guerre
d’
Éthiopie, l’agression japonaise contre la Chine, enfin l’annonce par H
1713
e la Chine, enfin l’annonce par Hitler, dès 1937,
de
l’Anschluss autrichien et de la mise au pas des Tchèques, menaces exé
1714
ar Hitler, dès 1937, de l’Anschluss autrichien et
de
la mise au pas des Tchèques, menaces exécutées un an plus tard. Les «
1715
aces exécutées un an plus tard. Les « démocraties
de
l’Ouest » participent souvent très activement à cette débâcle interna
1716
issant par des phrases pompeuses aux divers coups
de
force des totalitaires. Staline, Mussolini, Hitler, suivis (dès 1936)
1717
ranco, prennent en main les destins et l’histoire
de
l’Europe. ⁂ Les solutions internationales aux crises majeures de « l’
1718
Les solutions internationales aux crises majeures
de
« l’après-guerre » ayant échoué comme on vient de le voir, les nation
1719
ant échoué comme on vient de le voir, les nations
de
l’Europe de l’Ouest, de l’Amérique et de l’URSS se replient sur elles
1720
t de le voir, les nations de l’Europe de l’Ouest,
de
l’Amérique et de l’URSS se replient sur elles-mêmes, pour un temps, e
1721
nations de l’Europe de l’Ouest, de l’Amérique et
de
l’URSS se replient sur elles-mêmes, pour un temps, et s’enferment cha
1722
s. Les plus durement atteintes par l’effondrement
de
leur monnaie, le chômage et l’humiliation de la défaite militaire ou
1723
ment de leur monnaie, le chômage et l’humiliation
de
la défaite militaire ou de la crise économique, seront les premières
1724
ômage et l’humiliation de la défaite militaire ou
de
la crise économique, seront les premières à se redresser, et de la ma
1725
onomique, seront les premières à se redresser, et
de
la manière la plus radicale. La guerre de 1914-18 a fait deux grands
1726
ser, et de la manière la plus radicale. La guerre
de
1914-18 a fait deux grands vaincus : l’Allemagne et la Russie. Plus,
1727
Europe, la Russie et les États-Unis dans le reste
de
l’Occident, qui opèrent les redressements économiques, monétaires, so
1728
dans les années 1931 à 1937. Les uns par le moyen
de
la dictature totalitaire, les autres au contraire en démocratisant un
1729
de et la Suisse d’une part, les États successeurs
de
l’Autriche-Hongrie et les pays balkaniques d’autre part, semblent se
1730
ernisation américaine. Aux grandes interrogations
de
l’époque, ils ne répondent que par la dénonciation indignée des tenta
1731
taires » (rouges, noirs ou bruns) et « démocrates
de
l’Ouest ». Ainsi la crise mondiale, née du refus de toute espèce de s
1732
l’Ouest ». Ainsi la crise mondiale, née du refus
de
toute espèce de solution internationale, va-t-elle aggraver les natio
1733
i la crise mondiale, née du refus de toute espèce
de
solution internationale, va-t-elle aggraver les nationalismes qui son
1734
ismes qui sont à sa source. Les causes immédiates
de
la Seconde Guerre mondiale sont nouées dès 1936-1937, années où l’on
1735
er le pacte germano-russe et se déclarer le Pacte
d’
acier, d’une part, tandis qu’une alliance franco-polonaise, d’autre pa
1736
nco-polonaise, d’autre part, s’ajoute aux accords
de
l’Ouest avec la Petite Entente conduite par Prague. Quant aux causes
1737
tions prétendent donner ou se révèlent incapables
de
donner au problème principal du siècle : celui de la communauté, celu
1738
de donner au problème principal du siècle : celui
de
la communauté, celui de la commune mesure des actions, des jugements
1739
incipal du siècle : celui de la communauté, celui
de
la commune mesure des actions, des jugements et des passions d’un peu
1740
mesure des actions, des jugements et des passions
d’
un peuple. Communauté perdue, évanouie, dans les démocraties de l’Oues
1741
Communauté perdue, évanouie, dans les démocraties
de
l’Ouest livrées à l’individualisme irresponsable, aux masses inorgani
1742
trop vastes où les élites et le peuple n’ont plus
de
vocabulaire ni d’idéal communs — ou alors c’est seulement l’idéal le
1743
élites et le peuple n’ont plus de vocabulaire ni
d’
idéal communs — ou alors c’est seulement l’idéal le plus bas : faire d
1744
alors c’est seulement l’idéal le plus bas : faire
de
l’argent, chacun pour soi, autant qu’on le peut, voilà le seul but «
1745
en même temps, puissamment symbolique et capable
d’
enthousiasmer les plus simples et les plus jeunes. Le reste qui est «
1746
nser avec les mains , une page qu’on me permettra
de
citer ici comme un témoignage direct de la conscience qu’un jeune hom
1747
permettra de citer ici comme un témoignage direct
de
la conscience qu’un jeune homme pouvait alors prendre de son époque e
1748
onscience qu’un jeune homme pouvait alors prendre
de
son époque et de ses problèmes : La nouveauté, la grandeur et la vra
1749
eune homme pouvait alors prendre de son époque et
de
ses problèmes : La nouveauté, la grandeur et la vraie puissance du c
1750
es pour restaurer une mesure commune. Le seul mot
de
totalitaire, qui qualifie les deux régimes fondés par ces révolutions
1751
oser à leur peuple une conception et une pratique
de
la vie qui obéissent à un but commun, au service duquel s’harmonisent
1752
mes ont répondu à l’appel angoissé et inconscient
de
leur époque. Ils ont refait au moins provisoirement une mesure, en im
1753
les vrais génies du siècle, dès lors qu’il s’agit
de
construire. Mais que valent ces mesures imposées ? Quelle est la véri
1754
ins des hommes, qui s’y seront d’abord sacrifiés,
de
gré ou de force ? Les sauveront-elles vraiment de leur angoisse, ou b
1755
mmes, qui s’y seront d’abord sacrifiés, de gré ou
de
force ? Les sauveront-elles vraiment de leur angoisse, ou bien empêch
1756
de gré ou de force ? Les sauveront-elles vraiment
de
leur angoisse, ou bien empêcheront-elles seulement cette angoisse de
1757
u bien empêcheront-elles seulement cette angoisse
de
s’exprimer, de s’avouer, de porter témoignage en faveur d’une plus ha
1758
ont-elles seulement cette angoisse de s’exprimer,
de
s’avouer, de porter témoignage en faveur d’une plus haute vérité ? ⁂
1759
lement cette angoisse de s’exprimer, de s’avouer,
de
porter témoignage en faveur d’une plus haute vérité ? ⁂ La commune
1760
ique ou « diamat », sont en réalité des ensembles
de
mesures autoritaires dictant à l’industrie, à l’agriculture, aux sava
1761
vants, aux artistes et aux écrivains leurs quotas
de
production et d’invention. Ainsi culture et production industrielle s
1762
es et aux écrivains leurs quotas de production et
d’
invention. Ainsi culture et production industrielle se confondent, com
1763
ondent, comme l’illustre fort bien cette citation
d’
un journal moscovite de 1935 : « Le niveau culturel a été élevé par le
1764
e fort bien cette citation d’un journal moscovite
de
1935 : « Le niveau culturel a été élevé par le Torgsin (magasin offra
1765
réalisations du Plan », obtenues par la pression
de
l’État central, de sa police et des méthodes de production accélérée
1766
an », obtenues par la pression de l’État central,
de
sa police et des méthodes de production accélérée dites « stakhanovis
1767
n de l’État central, de sa police et des méthodes
de
production accélérée dites « stakhanovistes » (dès 1935), sont donc d
1768
stes » (dès 1935), sont donc données comme autant
de
progrès culturels et de « conquêtes populaires ». Le Plan ne cesse de
1769
donc données comme autant de progrès culturels et
de
« conquêtes populaires ». Le Plan ne cesse de rappeler à tous les fin
1770
et de « conquêtes populaires ». Le Plan ne cesse
de
rappeler à tous les fins dernières de la société communiste : l’établ
1771
an ne cesse de rappeler à tous les fins dernières
de
la société communiste : l’établissement d’une société sans classes, e
1772
nières de la société communiste : l’établissement
d’
une société sans classes, et par suite sans État, au terme d’une évolu
1773
té sans classes, et par suite sans État, au terme
d’
une évolution de la production qui prendra le temps qu’il faudra ! Au
1774
et par suite sans État, au terme d’une évolution
de
la production qui prendra le temps qu’il faudra ! Au nom de cet avène
1775
l faudra ! Au nom de cet avènement « inévitable »
d’
un paradis terrestre créé par la production industrielle socialisée, l
1776
ialisée, les jeunes « komsomols » et « brigadiers
de
choc » s’imposent une morale ascétique, acceptent des privations de t
1777
nt une morale ascétique, acceptent des privations
de
toute nature, et supportent avec enthousiasme un régime de travail be
1778
nature, et supportent avec enthousiasme un régime
de
travail beaucoup plus dur que celui qui existe alors dans les pays ca
1779
apitalistes. Mais derrière cette façade éclatante
de
labeur unanime et joyeux que décrivent à l’envi les films de propagan
1780
nanime et joyeux que décrivent à l’envi les films
de
propagande, les romanciers et les peintres officiels du régime, des r
1781
931 voit s’ouvrir les luxueuses stations du métro
de
Moscou, 1932 connaît le processus meurtrier de « dékoulakisation », o
1782
ro de Moscou, 1932 connaît le processus meurtrier
de
« dékoulakisation », ou élimination par tous les moyens, légaux et ph
1783
s, des paysans propriétaires : plusieurs millions
de
victimes, selon les calculs d’auteurs sérieux. En 1933, l’activité de
1784
plusieurs millions de victimes, selon les calculs
d’
auteurs sérieux. En 1933, l’activité de la police politique s’intensif
1785
es calculs d’auteurs sérieux. En 1933, l’activité
de
la police politique s’intensifie, comme pour mieux garantir la réalis
1786
n 1934, et vont conduire aux trop fameux « procès
de
Moscou » des années 1936 et 1937 : tous les compagnons de Lénine, che
1787
u » des années 1936 et 1937 : tous les compagnons
de
Lénine, chefs du parti et ministres glorieux (à une ou deux exception
1788
une ou deux exceptions près) et les grands chefs
de
l’Armée rouge, tel le maréchal Toukhatchevski, se verront accuser de
1789
el le maréchal Toukhatchevski, se verront accuser
de
trahison délibérée, d’intelligence avec l’ennemi capitaliste, de « sa
1790
hevski, se verront accuser de trahison délibérée,
d’
intelligence avec l’ennemi capitaliste, de « sabotage idéologique » —
1791
ibérée, d’intelligence avec l’ennemi capitaliste,
de
« sabotage idéologique » — et tous, ou presque tous, feront en public
1792
s jettent un doute sur la réalité et l’efficacité
de
la commune mesure soviétique. Officiellement, c’est le « diamat » qui
1793
tout, assassinats, famines et génocides compris.
De
fait, c’est Staline et ses sbires qui affichent une harmonie de façad
1794
Staline et ses sbires qui affichent une harmonie
de
façade, quitte à livrer dans l’ombre cette guerre civile larvée que d
1795
s à celles du dictateur géorgien qui s’est emparé
de
tous les pouvoirs sur toutes les Russies, en 1924, se sont manifestée
1796
Suisse où il travaille comme maçon, propagandiste
de
la guerre en 1913 (il la fera comme caporal), enfin fondateur des « f
1797
aisceaux » (un emblème emprunté au passé impérial
de
Rome), le Duce, qui a réussi sa « marche sur Rome » en 1922 déjà, par
1798
arche sur Rome » en 1922 déjà, parvient au sommet
de
sa puissance dans la période qui nous intéresse. Sa doctrine politiqu
1799
oire en un mot : « Rien hors de l’État, au-dessus
de
l’État, contre l’État. Tout à l’État, pour l’État, dans l’État. » On
1800
our l’État, dans l’État. » On oublie trop le rôle
de
l’exemple bolchévique sur le Duce, mais peut-être aussi le rôle de l’
1801
hévique sur le Duce, mais peut-être aussi le rôle
de
l’exemple fasciste sur Staline : celui-ci n’avait-il accédé au pouvoi
1802
qui vit Mussolini créer et proclamer la doctrine
de
« l’État totalitaire » ? Cette expression, qui aura la fortune que l’
1803
n type possible et très tentant pour des millions
de
cette « commune mesure » à la recherche de laquelle toute la jeunesse
1804
llions de cette « commune mesure » à la recherche
de
laquelle toute la jeunesse européenne se trouve plus ou moins conscie
1805
nne se trouve plus ou moins consciemment engagée.
D’
où le succès littéralement vertigineux — le vertige étant l’attrait de
1806
ralement vertigineux — le vertige étant l’attrait
de
ce qu’on redoute — des appels du Duce à « combattre, obéir, croire »
1807
cent qui cherche à la fois l’aventure personnelle
de
la liberté et l’autorité paternelle ou étatique capable de la lui int
1808
erté et l’autorité paternelle ou étatique capable
de
la lui interdire, donc de le libérer de l’angoisse inhérente à toute
1809
lle ou étatique capable de la lui interdire, donc
de
le libérer de l’angoisse inhérente à toute aventure personnelle, et d
1810
e capable de la lui interdire, donc de le libérer
de
l’angoisse inhérente à toute aventure personnelle, et de le ré-encadr
1811
goisse inhérente à toute aventure personnelle, et
de
le ré-encadrer dans une cité autoritaire et dynamique. Seulement, cro
1812
combattre sont des verbes qui exigent leur tribut
de
réalités concrètes et actives : croire, dans l’idée de Mussolini, ne
1813
alités concrètes et actives : croire, dans l’idée
de
Mussolini, ne peut signifier que croire à la grandeur de l’Italie ; o
1814
olini, ne peut signifier que croire à la grandeur
de
l’Italie ; obéir concerne César, donc le Duce, non plus le pape ; et
1815
des victoires faciles. On inventera une conquête
de
la Lybie en 1931, et si un cela fait mauvais effet, on conclura l’ann
1816
quand Hitler accédera au pouvoir, on se dépêchera
de
conclure les accords de Stresa (1935) avec la France et la Grande-Bre
1817
pouvoir, on se dépêchera de conclure les accords
de
Stresa (1935) avec la France et la Grande-Bretagne seules, pour s’ass
1818
ance et la Grande-Bretagne seules, pour s’assurer
de
leur tolérance au moment où l’on se dispose à envahir l’Éthiopie. Et
1819
jette le masque et l’on s’en va signer un « Pacte
d’
acier » (1936) avec cet inquiétant émule nordique : le Führer. ⁂ Le ph
1820
domine sans conteste la période dont je tente ici
de
restituer les dynamismes. Hitler a été le dictateur totalitaire par e
1821
aire par excellence. Il a réussi à surpasser — et
de
très loin — ses deux principaux rivaux, Staline et Mussolini, par la
1822
x rivaux, Staline et Mussolini, par la soudaineté
de
son ascension, l’efficacité de sa propagande, le fanatisme de la jeun
1823
par la soudaineté de son ascension, l’efficacité
de
sa propagande, le fanatisme de la jeunesse à son égard, la faculté de
1824
sion, l’efficacité de sa propagande, le fanatisme
de
la jeunesse à son égard, la faculté de séduire les industriels, les c
1825
fanatisme de la jeunesse à son égard, la faculté
de
séduire les industriels, les capitalistes et les généraux, la haine e
1826
liste et la folie qualifiée. On demeure stupéfait
de
découvrir, après coup, avec quelle rapidité Hitler s’est révélé, mani
1827
, manifesté et imposé, dans toutes les dimensions
de
son projet dément, de son complot mégalomane. De 1933 à 1937, tout es
1828
dans toutes les dimensions de son projet dément,
de
son complot mégalomane. De 1933 à 1937, tout est fait ou noué, il n’y
1829
de son projet dément, de son complot mégalomane.
De
1933 à 1937, tout est fait ou noué, il n’y aura plus — en 1938 et 193
1830
la Chancellerie du Reich : dénonciation du traité
de
Versailles. La délégation allemande se retire de la Conférence du dés
1831
de Versailles. La délégation allemande se retire
de
la Conférence du désarmement. Écrasement du Parti communiste, sous le
1832
prétexte de l’incendie du Reichstag. Mise au pas
de
la grande industrie. — 1934. Élimination des opposants au sein du par
1833
ors de la « nuit des Longs Couteaux », assassinat
de
Röhm et de milliers de militants. Réarmement de l’Allemagne. Première
1834
nuit des Longs Couteaux », assassinat de Röhm et
de
milliers de militants. Réarmement de l’Allemagne. Première rencontre
1835
ngs Couteaux », assassinat de Röhm et de milliers
de
militants. Réarmement de l’Allemagne. Première rencontre avec le Duce
1836
t de Röhm et de milliers de militants. Réarmement
de
l’Allemagne. Première rencontre avec le Duce. — 1935. La Sarre vote l
1837
t créé. Le chômage est en baisse rapide. Les lois
de
Nuremberg légitiment et déchaînent l’antisémitisme. — 1936. La Rhénan
1838
énanie réoccupée sans coup férir et sans réaction
de
la France. Chômage résorbé. Pacte d’acier conclu avec le fascisme, pl
1839
ans réaction de la France. Chômage résorbé. Pacte
d’
acier conclu avec le fascisme, plus tard avec le Japon. — 1937. Expans
1840
autoroutes, armée mécanisée. Les démentis répétés
d’
Hitler annoncent en réalité que les décisions sont prises et les plans
1841
un chef nazi que j’interrogeais sur l’éventualité
de
l’Anschluss. Ce qui me faisait peur, à cette date (où je passais une
1842
isait peur, à cette date (où je passais une année
de
lectorat à Francfort), ce n’était pas seulement la guerre, seul but v
1843
frôlaient le 100 %. Ce qui me donnait le frisson
de
l’horreur sacrée, ce fut la certitude, éprouvée jusqu’aux moelles pen
1844
oelles pendant que, pressé dans une foule de plus
de
40 000 hommes, j’écoutais un discours du Führer, que j’assistais à un
1845
al, le 11 mars 1936 : Je me croyais à un meeting
de
masses, à quelque manifestation politique. Mais c’est leur culte qu’i
1846
urgie qui se déroule, la grande cérémonie sacrale
d’
une religion dont je ne suis pas, et qui m’écrase et me repousse avec
1847
as, et qui m’écrase et me repousse avec bien plus
de
puissance, même physique, que tous ces corps horriblement tendus et h
1848
e suis seul, et ils sont tous ensemble. ( Journal
d’
une époque ) Tous ensemble : liés par une foi, par une religion au se
1849
oi, par une religion au sens étymologique du mot (
de
religare). Et cela résume la situation de l’Europe des années 1930 :
1850
du mot (de religare). Et cela résume la situation
de
l’Europe des années 1930 : du côté des démocraties, l’individualisme
1851
commun commande à tous dans toutes les situations
de
l’existence, tant privées que publiques : éducation, choix du conjoin
1852
e publiques : éducation, choix du conjoint, choix
d’
une profession, idéologie et costume, tout est prescrit par le Parti q
1853
x du dictateur, lequel n’est à son tour que l’âme
de
son peuple faite homme. Alors que Staline voulait incarner le Parti u
1854
des trois grands dictateurs atteignant le sommet
de
sa puissance vers 1935-1937, se présentait donc comme incarnant le gé
1855
arismatique, un caractère sacro-saint, le pouvoir
de
faire des miracles, et l’infaillibilité. Toutes ces vertus religieuse
1856
aline « fait lever le soleil » (disent des poèmes
de
l’Azerbaïdjan et du Caucase) ; quant à Hitler, il est non seulement i
1857
res et qui désarme curieusement les hommes d’État
de
nos démocraties. Ils dépendent d’un vote à la Chambre, d’une saute d’
1858
s hommes d’État de nos démocraties. Ils dépendent
d’
un vote à la Chambre, d’une saute d’humeur d’un secrétaire de parti, t
1859
émocraties. Ils dépendent d’un vote à la Chambre,
d’
une saute d’humeur d’un secrétaire de parti, tandis qu’Hitler fait acc
1860
Ils dépendent d’un vote à la Chambre, d’une saute
d’
humeur d’un secrétaire de parti, tandis qu’Hitler fait acclamer par to
1861
dent d’un vote à la Chambre, d’une saute d’humeur
d’
un secrétaire de parti, tandis qu’Hitler fait acclamer par tout son pe
1862
la Chambre, d’une saute d’humeur d’un secrétaire
de
parti, tandis qu’Hitler fait acclamer par tout son peuple le slogan «
1863
Volk, ein Reich, ein Führer », équivalent moderne
de
la devise de la Ligue des catholiques au XVIe siècle « Une Foi, une L
1864
ch, ein Führer », équivalent moderne de la devise
de
la Ligue des catholiques au XVIe siècle « Une Foi, une Loi, un Roi ».
1865
n vœu et le slogan est une réalité. Cette espèce
de
paralysie des hommes politiques libéraux à Paris et à Londres se mani
1866
es et son parti fasciste, la Phalange, à l’assaut
de
la jeune République. (Elle n’avait succédé à la monarchie qu’en 1931.
1867
républicains espagnols et devant une déclaration
de
neutralité, invente la « politique de non-intervention ». Cette expre
1868
déclaration de neutralité, invente la « politique
de
non-intervention ». Cette expression sauve peut-être la paix, mais sa
1869
guerre civile, du même coup. Hitler et Mussolini
d’
un côté, Staline de l’autre, sont dès lors convaincus que les démocrat
1870
même coup. Hitler et Mussolini d’un côté, Staline
de
l’autre, sont dès lors convaincus que les démocraties, par amour de l
1871
ès lors convaincus que les démocraties, par amour
de
la paix à tout prix, leur laisseront les mains libres quoi qu’ils fas
1872
quoi qu’ils fassent — et ce sera l’une des causes
de
la guerre de 1939. À l’autre extrême, les États-Unis. Entre les deux,
1873
assent — et ce sera l’une des causes de la guerre
de
1939. À l’autre extrême, les États-Unis. Entre les deux, la France et
1874
nis. Entre les deux, la France et les démocraties
de
l’Ouest, petites ou grandes. ⁂ Les USA opèrent de 1931 à 1937 un redr
1875
de l’Ouest, petites ou grandes. ⁂ Les USA opèrent
de
1931 à 1937 un redressement encore plus spectaculaire que celui de l’
1876
redressement encore plus spectaculaire que celui
de
l’Italie et surtout du Troisième Reich, mais par des moyens différent
1877
ue. En 1931, les États-Unis comptent dix millions
de
chômeurs, à peu près un sur cinq travailleurs industriels. L’année su
1878
leurs industriels. L’année suivante — 13 millions
de
chômeurs ! — , Roosevelt est élu, au moment même où Hitler prend un p
1879
aliste. Il esquisse et fait appliquer avec l’aide
de
quelques amis intellectuels qu’il baptise son brains trust (banque de
1880
ellectuels qu’il baptise son brains trust (banque
de
cerveaux) un programme beaucoup plus progressiste que ceux des dictat
1881
nt aux totalitaires, Roosevelt assume les risques
de
la liberté. Loin de faire fusiller ses adversaires, il les combat à l
1882
tion drastique du chômage, embargo sur les ventes
d’
armes, création (grâce à un régime de détaxation) de grandes fondation
1883
r les ventes d’armes, création (grâce à un régime
de
détaxation) de grandes fondations, dont la fondation Ford, de loin la
1884
armes, création (grâce à un régime de détaxation)
de
grandes fondations, dont la fondation Ford, de loin la plus riche de
1885
n) de grandes fondations, dont la fondation Ford,
de
loin la plus riche de toutes, en 1936. Cette même année, les USA remo
1886
ns, dont la fondation Ford, de loin la plus riche
de
toutes, en 1936. Cette même année, les USA remontent au niveau économ
1887
ême année, les USA remontent au niveau économique
de
1928. Leur ascension économique ne cessera pas jusqu’à nos jours, et
1888
urs, et sauvera l’Europe au passage (en attendant
de
la satelliser, si nos États persistent dans leur refus d’unir leurs «
1889
telliser, si nos États persistent dans leur refus
d’
unir leurs « souverainetés absolues »). ⁂ La France, durant les années
1890
, durant les années 1930, subit les répercussions
de
tous les phénomènes qu’on vient de décrire, mais sous une forme très
1891
tions exclusives, sans aboutir jamais au triomphe
d’
un parti (comme en URSS), d’un homme (comme en Allemagne et en Italie)
1892
ir jamais au triomphe d’un parti (comme en URSS),
d’
un homme (comme en Allemagne et en Italie), ou d’un programme (comme a
1893
d’un homme (comme en Allemagne et en Italie), ou
d’
un programme (comme aux USA). Alors qu’en 1932, suite au krach de Wall
1894
(comme aux USA). Alors qu’en 1932, suite au krach
de
Wall Street, la Grande-Bretagne a 3 millions de chômeurs et l’Allemag
1895
h de Wall Street, la Grande-Bretagne a 3 millions
de
chômeurs et l’Allemagne 6 millions, on n’en compte que 780 000 en Fra
1896
ew Deal, on ne signale en France que la formation
de
plusieurs ligues de droite, qui ne prendront jamais le pouvoir, et de
1897
le en France que la formation de plusieurs ligues
de
droite, qui ne prendront jamais le pouvoir, et de trois ministères su
1898
de droite, qui ne prendront jamais le pouvoir, et
de
trois ministères successifs, qui n’auront le temps d’entreprendre auc
1899
rois ministères successifs, qui n’auront le temps
d’
entreprendre aucune réforme économique. Incapable d’intervenir et a fo
1900
entreprendre aucune réforme économique. Incapable
d’
intervenir et a fortiori de faire valoir ses idéaux, alors que l’Allem
1901
économique. Incapable d’intervenir et a fortiori
de
faire valoir ses idéaux, alors que l’Allemagne hitlérienne viole ses
1902
e, la France réagit aux grands problèmes du temps
d’
une manière constamment négative et dans un style byzantin, à droite c
1903
le national-socialisme ne sont pas des mouvements
de
droite, des partis de l’ordre, mais des religions sociales et sociali
1904
ne sont pas des mouvements de droite, des partis
de
l’ordre, mais des religions sociales et socialisantes, des ersatz de
1905
s religions sociales et socialisantes, des ersatz
de
communauté. Le 6 février 1934, « Croix de feu », ligueurs fascisants
1906
ersatz de communauté. Le 6 février 1934, « Croix
de
feu », ligueurs fascisants et « hommes d’ordre » mêlés descendent les
1907
« Croix de feu », ligueurs fascisants et « hommes
d’
ordre » mêlés descendent les Champs-Élysées, se heurtent à la police p
1908
les Champs-Élysées, se heurtent à la police place
de
la Concorde, et se laissent disperser sans avoir osé renverser le Par
1909
mort en France. Un an plus tard, après une vague
de
grèves et de scandales financiers, se forme le Front populaire (radic
1910
ce. Un an plus tard, après une vague de grèves et
de
scandales financiers, se forme le Front populaire (radicaux, socialis
1911
alement importantes : la tactique des occupations
d’
usine, ou « grève sur le tas », qui fleurira quelque trente ans plus t
1912
ard dans les universités américaines ; la semaine
de
48 heures ; et les vacances payées pour tous les ouvriers. Le régime
1913
classe ouvrière au service du prestige national,
de
l’armée dite populaire et de la production d’acier pour les canons. ⁂
1914
u prestige national, de l’armée dite populaire et
de
la production d’acier pour les canons. ⁂ 1935 peut être considérée co
1915
al, de l’armée dite populaire et de la production
d’
acier pour les canons. ⁂ 1935 peut être considérée comme « l’année tou
1916
née tournante » parce qu’on y assiste à une série
d’
événements porteurs d’avenir : — formation des fronts populaires contr
1917
qu’on y assiste à une série d’événements porteurs
d’
avenir : — formation des fronts populaires contre les fascismes — la S
1918
ich — l’Italie envahit l’Éthiopie — les sanctions
de
la SDN restent vaines — Hitler occupe la Rhénanie avec tous ses blind
1919
ses blindés — la France ne lui oppose qu’une page
de
rhétorique : « Nous opposerons la force du droit au droit de la force
1920
hrer — la France et la Grande-Bretagne, par souci
de
la paix, adoptent une politique de « non intervention » — Roosevelt p
1921
gne, par souci de la paix, adoptent une politique
de
« non intervention » — Roosevelt proclame l’embargo sur la vente des
1922
es armes, mais n’intervient nulle part. Plusieurs
de
ces données paraissent contradictoires, mais la résultante générale d
1923
guerre. Elle opposera nécessairement les groupes
de
nations qui se sont définis entre les années 1931 et 1935 : celui des
1924
1 et 1935 : celui des nantis, mais qui n’ont plus
de
principe communautaire, et celui des totalitaires, à peine sortis de
1925
utaire, et celui des totalitaires, à peine sortis
de
la misère, mais qui prétendent avoir trouvé le secret d’une nouvelle
1926
isère, mais qui prétendent avoir trouvé le secret
d’
une nouvelle fraternité. (Ce n’est pas vrai : il ne s’agit que d’une d
1927
fraternité. (Ce n’est pas vrai : il ne s’agit que
d’
une discipline militaire.) ⁂ Cette description de l’époque par ses cou
1928
d’une discipline militaire.) ⁂ Cette description
de
l’époque par ses courants profonds peut paraître uniformément pessimi
1929
es dogmes politiques du temps représentent autant
de
facteurs de guerre. Ce qui a sauvé l’honneur de l’Europe, en ces anné
1930
litiques du temps représentent autant de facteurs
de
guerre. Ce qui a sauvé l’honneur de l’Europe, en ces années, ce sont
1931
t de facteurs de guerre. Ce qui a sauvé l’honneur
de
l’Europe, en ces années, ce sont quelques intellectuels, savants, thé
1932
écrivains et philosophes, qui ont dit l’essentiel
de
leur temps et annoncé ce qui venait. Vienne, capitale détrônée d’une
1933
annoncé ce qui venait. Vienne, capitale détrônée
d’
une vaste fédération que les « traités de banlieue » avaient sottement
1934
détrônée d’une vaste fédération que les « traités
de
banlieue » avaient sottement dissoute, donne à l’Occident, à la veill
1935
ttement dissoute, donne à l’Occident, à la veille
de
l’Anschluss, dans un dernier éclat de gloire, une pléiade de très gra
1936
à la veille de l’Anschluss, dans un dernier éclat
de
gloire, une pléiade de très grands écrivains : Rilke, Hofmannsthal, H
1937
uss, dans un dernier éclat de gloire, une pléiade
de
très grands écrivains : Rilke, Hofmannsthal, Hermann Broch, Robert Mu
1938
annsthal, Hermann Broch, Robert Musil ; une école
de
logiciens qui va révolutionner la philosophie et les mathématiques, l
1939
, avec Hilbert, Carnap et Wittgenstein) une école
de
compositeurs dodécaphoniques et sériels qui va révolutionner la musiq
1940
n Berg et Anton von Webern ; enfin les fondateurs
de
la psychanalyse, Sigmund Freud et Alfred Adler. L’Allemagne, avant de
1941
ans l’obscurantisme nazi, invente un nouveau mode
de
philosopher : la phénoménologie avec Edmond Husserl, puis l’existenti
1942
ce philosophe danois que l’Europe redécouvre près
d’
un siècle après sa mort, et dont le message prend soudain toute sa for
1943
, et dont le message prend soudain toute sa force
d’
objection fondamentale à la « mise au pas » des consciences par les ré
1944
e succédant à Dada proclame les droits souverains
de
l’imagination et annonce un renouveau de la poésie, de la peinture et
1945
uverains de l’imagination et annonce un renouveau
de
la poésie, de la peinture et des prestiges de l’anarchie « porteuse d
1946
imagination et annonce un renouveau de la poésie,
de
la peinture et des prestiges de l’anarchie « porteuse de flambeaux »
1947
eau de la poésie, de la peinture et des prestiges
de
l’anarchie « porteuse de flambeaux » qu’il est paradoxal de voir naît
1948
einture et des prestiges de l’anarchie « porteuse
de
flambeaux » qu’il est paradoxal de voir naître au pays du rationalism
1949
hie « porteuse de flambeaux » qu’il est paradoxal
de
voir naître au pays du rationalisme, des lois laïques et de la sagess
1950
ître au pays du rationalisme, des lois laïques et
de
la sagesse bourgeoise. Le surréalisme demeure la manifestation la plu
1951
demeure la manifestation la plus caractéristique
de
ces années, dans la mesure où il exprime avec éclat la révolte contre
1952
lat la révolte contre la « mise au pas » générale
de
l’homme moderne par le rationalisme utilitaire, les nécessités techni
1953
litaire, les nécessités techniques, la production
de
série, mais aussi les disciplines de parti, la police politique et le
1954
a production de série, mais aussi les disciplines
de
parti, la police politique et le lavage des cerveaux après le bourrag
1955
tique et le lavage des cerveaux après le bourrage
de
crâne. Ce très beau cri contre la tyrannie n’a hélas été poussé que d
1956
u sociaux. Si l’on veut déterminer le vrai moment
de
conscience des années 1930, ce n’est évidemment ni chez les totalitai
1957
her. Pour ma part, je le trouve dans un mouvement
de
pensée à la fois philosophique, politique et social, dont je n’ai ces
1958
sophique, politique et social, dont je n’ai cessé
de
m’inspirer dans toute mon œuvre (et dans les pages qu’on lit maintena
1959
tagne, mais aussi (clandestinement) dans les pays
de
l’Axe, il est demeuré beaucoup moins voyant que ne l’était alors le s
1960
u. S’il me paraît cependant le plus représentatif
de
son temps, c’est moins à cause du prestige de ses revues, Esprit et
1961
tif de son temps, c’est moins à cause du prestige
de
ses revues, Esprit et L’Ordre nouveau , et de la centaine de volum
1962
de ses revues, Esprit et L’Ordre nouveau , et
de
la centaine de volumes publiés par ses leaders de 1931 à 1939, que pa
1963
Esprit et L’Ordre nouveau , et de la centaine
de
volumes publiés par ses leaders de 1931 à 1939, que par la richesse d
1964
de la centaine de volumes publiés par ses leaders
de
1931 à 1939, que par la richesse des sources qui confluèrent en lui,
1965
e des sources qui confluèrent en lui, la lucidité
de
ses diagnostics que l’histoire allait confirmer, et la fécondité de s
1966
que l’histoire allait confirmer, et la fécondité
de
son influence pendant la Résistance puis dans le mouvement européen.
1967
etzsche, Heidegger et Péguy, mais aussi le cercle
de
Vienne nommé plus haut, et enfin, en théologie — pour ses membres chr
1968
es membres chrétiens du moins — , le néo-thomisme
de
Jacques Maritain, le socialisme de l’orthodoxe russe Nicolas Berdiaev
1969
e néo-thomisme de Jacques Maritain, le socialisme
de
l’orthodoxe russe Nicolas Berdiaev et la dialectique existentielle du
1970
œuvres s’épanouissent ces années-là. Adversaires
de
l’État-nation, dénonçant dans ses versions « libérales » des formes h
1971
ns « libérales » des formes hypocrites ou larvées
de
l’État totalitaire (qui est « l’état de guerre en permanence »), anti
1972
u larvées de l’État totalitaire (qui est « l’état
de
guerre en permanence »), antifascistes et anticommunistes pour les mê
1973
commune et l’entreprise et supposant des abandons
de
souveraineté nationale au profit d’institutions régionales et contine
1974
des abandons de souveraineté nationale au profit
d’
institutions régionales et continentales, était capable d’éviter la gu
1975
utions régionales et continentales, était capable
d’
éviter la guerre et de changer les destins de l’Europe. Ces doctrines
1976
ontinentales, était capable d’éviter la guerre et
de
changer les destins de l’Europe. Ces doctrines étaient faites littéra
1977
able d’éviter la guerre et de changer les destins
de
l’Europe. Ces doctrines étaient faites littéralement pour inspirer le
1978
alement pour inspirer les groupes non communistes
de
la Résistance à Hitler, et l’on décèle effectivement, dans tous nos p
1979
eur courant souterrain durant la guerre. Or c’est
de
la Résistance qu’allait sortir la campagne pour l’union fédérale de l
1980
u’allait sortir la campagne pour l’union fédérale
de
l’Europe, objectif majeur de cette génération. Entretemps, on le sait
1981
our l’union fédérale de l’Europe, objectif majeur
de
cette génération. Entretemps, on le sait, ce fut d’un autre prophète,
1982
cette génération. Entretemps, on le sait, ce fut
d’
un autre prophète, mais sans message celui-là, d’un prophète de l’ango
1983
d’un autre prophète, mais sans message celui-là,
d’
un prophète de l’angoisse pure, qu’on vit se réaliser le long cauchema
1984
ophète, mais sans message celui-là, d’un prophète
de
l’angoisse pure, qu’on vit se réaliser le long cauchemar décrit plusi
1985
reur implacablement organisée du monde des procès
de
Moscou et des camps de la mort, avec sa bureaucratie méticuleusement
1986
anisée du monde des procès de Moscou et des camps
de
la mort, avec sa bureaucratie méticuleusement démoniaque et anonyme,
1987
« C’est du Kafka ! » Telle fut la gloire posthume
de
l’écrivain qui seul peut-être se savait justifié à écrire sans aucune
1988
anterie : « J’ai puissamment assumé la négativité
de
mon temps, qui m’est du reste très proche, que je n’ai pas le droit d
1989
st du reste très proche, que je n’ai pas le droit
de
combattre, mais que dans une certaine mesure j’ai le droit de représe
1990
, mais que dans une certaine mesure j’ai le droit
de
représenter. » 14. H. Daniel-Rops, Les Années tournantes, Paris, 1
1991
es, Paris, 1932. i. Édition réalisée sur la base
d’
un tapuscrit conservé à la Bibliothèque publique et universitaire de N
1992
servé à la Bibliothèque publique et universitaire
de
Neuchâtel sous l’identifiant 944. Texte sans date, postérieur au Jou
1993
iant 944. Texte sans date, postérieur au Journal
d’
une époque (1968) y mentionné.
1994
Discours au Cercle
de
la presse et des amitiés étrangères (13 octobre 1970)j Mesdames, M
1995
obre 1970)j Mesdames, Messieurs, Je me propose
d’
être devant vous, ce soir, pendant une quinzaine de minutes, délibérém
1996
’être devant vous, ce soir, pendant une quinzaine
de
minutes, délibérément égocentrique et personnel. Je vais en effet m’a
1997
personnel. Je vais en effet m’attacher à un thème
de
réflexion unique, qui sera le contraire de toute espèce de propagande
1998
thème de réflexion unique, qui sera le contraire
de
toute espèce de propagande pour une cause quelconque puisqu’il sera i
1999
ion unique, qui sera le contraire de toute espèce
de
propagande pour une cause quelconque puisqu’il sera interrogatif, et
2000
comme j’en suis un essentiellement, s’occupe-t-il
de
l’Europe comme je le fais depuis 22 ans ? — Combien de fois ne me sui
2001
Europe comme je le fais depuis 22 ans ? — Combien
de
fois ne me suis-je pas entendu reprocher d’aller me « perdre » dans l
2002
mbien de fois ne me suis-je pas entendu reprocher
d’
aller me « perdre » dans la politique et dans les servitudes de l’admi
2003
perdre » dans la politique et dans les servitudes
de
l’administration d’instituts et d’associations, sur l’air de « Qu’all
2004
itique et dans les servitudes de l’administration
d’
instituts et d’associations, sur l’air de « Qu’allait-il faire dans ce
2005
les servitudes de l’administration d’instituts et
d’
associations, sur l’air de « Qu’allait-il faire dans cette galère » ?
2006
stration d’instituts et d’associations, sur l’air
de
« Qu’allait-il faire dans cette galère » ? Tant d’autres feraient mie
2007
feraient mieux ces besognes, avec moindre dépense
d’
énergie morale et sans doute plus de rentabilité (financière s’entend)
2008
indre dépense d’énergie morale et sans doute plus
de
rentabilité (financière s’entend). Que ne se contente-t-il d’écrire,
2009
té (financière s’entend). Que ne se contente-t-il
d’
écrire, et au mieux de nous amuser, au pire de nous édifier ? Ce XX e
2010
d). Que ne se contente-t-il d’écrire, et au mieux
de
nous amuser, au pire de nous édifier ? Ce XX e anniversaire du CEC, e
2011
-il d’écrire, et au mieux de nous amuser, au pire
de
nous édifier ? Ce XX e anniversaire du CEC, et la publication qui l’a
2012
rsaire du CEC, et la publication qui l’accompagne
de
trois petits livres de moi traitant de l’union européenne m’ont amené
2013
blication qui l’accompagne de trois petits livres
de
moi traitant de l’union européenne m’ont amené à me poser à moi-même
2014
accompagne de trois petits livres de moi traitant
de
l’union européenne m’ont amené à me poser à moi-même ces questions-là
2015
ns-là, très sincèrement, non sans quelque vertige
d’
anxiété très intime. Mais peu à peu, en regardant mon passé, je vois s
2016
rtaines structures cohérentes que je vais essayer
de
décrire. À l’âge où un jeune bourgeois commence à se former sérieusem
2017
emps. Et je me suis vu mis au défi tout à la fois
de
gagner ma vie, de justifier mon besoin d’écrire — cette démangeaison
2018
s vu mis au défi tout à la fois de gagner ma vie,
de
justifier mon besoin d’écrire — cette démangeaison que l’on calme en
2019
la fois de gagner ma vie, de justifier mon besoin
d’
écrire — cette démangeaison que l’on calme en grattant du papier — , e
2020
on que l’on calme en grattant du papier — , enfin
de
savoir qui j’étais. Car plus grand-chose, alors, n’allait de soi, dan
2021
ues jeunes à la prévoir inévitable. Il s’agissait
de
savoir pourquoi nous la ferions — ou non — , pour quelles finalités h
2022
lles finalités humaines, quel idéal, ou quel type
d’
homme — qui ne fût ni cet individualiste politiquement irresponsable q
2023
égimes totalitaires. Je me suis donc vu contraint
de
commencer mon œuvre d’écrivain par une réflexion sur ce qui fait qu’u
2024
me suis donc vu contraint de commencer mon œuvre
d’
écrivain par une réflexion sur ce qui fait qu’un homme est ou devient
2025
ent lui-même et pas un autre, et se sent justifié
d’
exister parce qu’il diffère assez des autres pour refuser de s’aligner
2026
parce qu’il diffère assez des autres pour refuser
de
s’aligner, de se mettre au pas, mais leur ressemble assez pour les ai
2027
ffère assez des autres pour refuser de s’aligner,
de
se mettre au pas, mais leur ressemble assez pour les aimer, tels qu’i
2028
ces, morale et politique dans ses aboutissements.
De
mes deux premiers livres publiés à Paris en 1934 et 1936, Politique
2029
ivres publiés à Paris en 1934 et 1936, Politique
de
la personne et Penser avec les mains , se dégage une définition som
2030
se dégage une définition somme toute assez simple
de
la personne, qui est pour moi le contraire d’une abstraction, qui est
2031
ple de la personne, qui est pour moi le contraire
d’
une abstraction, qui est l’homme réel, agissant, créateur — même s’il
2032
el, agissant, créateur — même s’il n’est créateur
d’
aucune autre œuvre d’art que de lui-même, précisément : la personne, c
2033
’il n’est créateur d’aucune autre œuvre d’art que
de
lui-même, précisément : la personne, c’est l’homme à la fois libre et
2034
libre parce qu’il est responsable et donc capable
d’
agir selon son choix — responsable parce qu’il est libre et donc capab
2035
responsable parce qu’il est libre et donc capable
d’
assumer son choix. (Un tribunal ne tient jamais pour responsable un ho
2036
ique — comme on dit qu’il n’y a pas deux feuilles
d’
arbre exactement pareilles, il n’y a pas deux hommes, deux destinées p
2037
estinées pareilles — , vocation qui le distingue,
de
la masse, mais aussitôt qu’il l’exerce le remet en communion avec ses
2038
iété. Et voilà pour ma philosophie, ma conception
de
l’homme personnel et social : à la fois distinct et relié, à la fois
2039
ié, à la fois libre et engagé. Dès 1932, ce terme
d’
« engagement » apparaît avec une insistance croissante dans mes écrits
2040
stre : Penser avec les mains . Or, cette formule
de
la personne, il est clair qu’elle ne peut se traduire, sur le plan po
2041
a personne est la co-existence, dans un individu,
de
sa vocation unique (mystérieuse) et de son engagement social (évident
2042
individu, de sa vocation unique (mystérieuse) et
de
son engagement social (évident et contraignant) — de même le fédérali
2043
ralisme est la co-existence, dans une communauté,
de
l’autonomie de chacun et de l’union de tous, de la diversité et de l’
2044
co-existence, dans une communauté, de l’autonomie
de
chacun et de l’union de tous, de la diversité et de l’unité — réalité
2045
dans une communauté, de l’autonomie de chacun et
de
l’union de tous, de la diversité et de l’unité — réalités de signes c
2046
ommunauté, de l’autonomie de chacun et de l’union
de
tous, de la diversité et de l’unité — réalités de signes contraires,
2047
, de l’autonomie de chacun et de l’union de tous,
de
la diversité et de l’unité — réalités de signes contraires, mais liée
2048
chacun et de l’union de tous, de la diversité et
de
l’unité — réalités de signes contraires, mais liées en tension comme
2049
de tous, de la diversité et de l’unité — réalités
de
signes contraires, mais liées en tension comme les pôles positif et n
2050
petite cellule sociale, qui est le couple. Couple
de
l’homme et de la femme qui ont chacun sa loi distincte ; union des op
2051
sociale, qui est le couple. Couple de l’homme et
de
la femme qui ont chacun sa loi distincte ; union des opposés sans con
2052
sans confusion ni séparation, sans subordination
de
l’un à l’autre et dans la seule égalité réelle, celle qui ne résulte
2053
la seule égalité réelle, celle qui ne résulte pas
d’
une réduction des différences, d’une uniformité forcée, mais d’une acc
2054
i ne résulte pas d’une réduction des différences,
d’
une uniformité forcée, mais d’une acceptation de la liberté de l’autre
2055
on des différences, d’une uniformité forcée, mais
d’
une acceptation de la liberté de l’autre. L’égalité n’est qu’un menson
2056
, d’une uniformité forcée, mais d’une acceptation
de
la liberté de l’autre. L’égalité n’est qu’un mensonge, une tyrannie,
2057
mité forcée, mais d’une acceptation de la liberté
de
l’autre. L’égalité n’est qu’un mensonge, une tyrannie, un lit de Proc
2058
galité n’est qu’un mensonge, une tyrannie, un lit
de
Procuste si elle n’est pas un mystère de l’amour. Dans ces mêmes term
2059
, un lit de Procuste si elle n’est pas un mystère
de
l’amour. Dans ces mêmes termes, et c’est assez extraordinaire, le con
2060
termes, et c’est assez extraordinaire, le concile
de
Chalcédoine, au v e siècle de notre ère, définissait la deuxième Pers
2061
dinaire, le concile de Chalcédoine, au v e siècle
de
notre ère, définissait la deuxième Personne de la Trinité, « vrai Die
2062
le de notre ère, définissait la deuxième Personne
de
la Trinité, « vrai Dieu et vrai homme à la fois, fils unique en deux
2063
res, mais plutôt elle a sauvegardé les propriétés
de
chaque nature, qui se rencontrent dans une seule personne ». Abstrac
2064
ent dans une seule personne ». Abstraction faite
de
la foi que l’on accorde ou non à ces énoncés conciliaires, je retiens
2065
leur forme, leur structure, pose un certain type
de
relations, pose donc une société et une politique. Et voilà pour ma t
2066
», c’est-à-dire quelqu’un qui dispose à sa guise
de
tout son temps… (Il y a des jours où je me dis : vivement le chômage
2067
e chômage !) Plus tard, j’ai découvert une phrase
d’
Héraclite, antérieure de six siècles au christianisme et qui est, je c
2068
j’ai découvert une phrase d’Héraclite, antérieure
de
six siècles au christianisme et qui est, je crois, celle que j’ai le
2069
e dans mes écrits : « Ce qui s’oppose coopère, et
de
la lutte des contraires procède la plus belle harmonie. » Personne, e
2070
sonnaliste, et tous mes livres, jusqu’à la guerre
de
1939 : de Politique de la personne jusqu’à L’Amour et l’Occident .
2071
, et tous mes livres, jusqu’à la guerre de 1939 :
de
Politique de la personne jusqu’à L’Amour et l’Occident . Survient
2072
livres, jusqu’à la guerre de 1939 : de Politique
de
la personne jusqu’à L’Amour et l’Occident . Survient alors la guerr
2073
’est-ce que je découvre là-bas, pendant un séjour
de
six ans ? L’Europe, bien sûr. Car c’est beau, l’Amérique, c’est même
2074
s quoi qui finit par représenter comme un négatif
de
l’Europe. Et par ce manque profondément senti je découvre non plus ce
2075
ces différences entre les peuples ou les régions
de
l’Europe, qui m’avaient fasciné jusqu’alors, mais au contraire une re
2076
qui revient. … Comme je suis revenu un beau jour
de
1947, pour atterrir près de Genève, mais en France, dans une maison d
2077
r près de Genève, mais en France, dans une maison
d’
amis américains où avait vécu Emmanuel Mounier, et qui avait été au xv
2078
t été au xviii e siècle la maison du garde-chasse
de
Voltaire : constellation pleine de sens à mes yeux, et dont chaque él
2079
u garde-chasse de Voltaire : constellation pleine
de
sens à mes yeux, et dont chaque élément corrige ou pimente l’autre. J
2080
tour de moi, je lis : et je découvre qu’une école
de
pensée fait grand bruit, à Paris, qui invoque la notion d’engagement.
2081
fait grand bruit, à Paris, qui invoque la notion
d’
engagement. Je me dis : si d’autres vivent du mot, gardons la chose !
2082
ouleur »… La chose, c’est l’engagement au service
de
l’Europe. Quelle Europe ? Je l’ai dit, et vous l’avez compris : non p
2083
du lait, du blé ou même du vin. Non pas l’Europe
d’
un niveau de vie défini par des pourcentages, mais cette Europe qui es
2084
ages, mais cette Europe qui est un mode de vie et
de
pensée, un mode de sentir et d’exclure, une aventure de l’âme et une
2085
rope qui est un mode de vie et de pensée, un mode
de
sentir et d’exclure, une aventure de l’âme et une culture, la quête s
2086
un mode de vie et de pensée, un mode de sentir et
d’
exclure, une aventure de l’âme et une culture, la quête sans fin d’une
2087
sée, un mode de sentir et d’exclure, une aventure
de
l’âme et une culture, la quête sans fin d’une société nouvelle dont l
2088
enture de l’âme et une culture, la quête sans fin
d’
une société nouvelle dont l’ambition ne soit plus la puissance collect
2089
ques amis sont venus me chercher le deuxième jour
de
mon retour en Europe pour m’offrir de parler au congrès de Montreux e
2090
uxième jour de mon retour en Europe pour m’offrir
de
parler au congrès de Montreux en septembre 1947, puis un peu plus tar
2091
tour en Europe pour m’offrir de parler au congrès
de
Montreux en septembre 1947, puis un peu plus tard pour me charger de
2092
embre 1947, puis un peu plus tard pour me charger
de
la partie culturelle du Mouvement européen, j’ai dit « Bon ; je suis
2093
« Bon ; je suis prêt à donner à la cause deux ans
de
ma vie » — et me voilà : cela fait 22 ans, et ce n’est pas fini, je l
2094
as fini, je le crains — et trois des responsables
de
ce détournement d’un écrivain vers l’action pour l’Europe, trois de c
2095
ns — et trois des responsables de ce détournement
d’
un écrivain vers l’action pour l’Europe, trois de ces fieffés pirates
2096
d’un écrivain vers l’action pour l’Europe, trois
de
ces fieffés pirates non de l’air, mais de l’esprit sont dans cette sa
2097
n pour l’Europe, trois de ces fieffés pirates non
de
l’air, mais de l’esprit sont dans cette salle ce soir, mes amis Alexa
2098
, trois de ces fieffés pirates non de l’air, mais
de
l’esprit sont dans cette salle ce soir, mes amis Alexandre Marc, Raym
2099
ond Silva et Henri Brugmans. Je me résume : parti
d’
une idée de la personne, j’ai été conduit à la doctrine de l’engagemen
2100
t Henri Brugmans. Je me résume : parti d’une idée
de
la personne, j’ai été conduit à la doctrine de l’engagement et du féd
2101
ée de la personne, j’ai été conduit à la doctrine
de
l’engagement et du fédéralisme, et puis en Amérique j’ai découvert l’
2102
rveilleuses diversités qui font toute la richesse
de
la culture. Or l’ennemi juré du fédéralisme, c’est le nationalisme, l
2103
me, la croyance à l’État-nation comme seule forme
de
vie politique. Et comme cette croyance est inculquée dans nos esprits
2104
à ses trois degrés, c’est à l’école qu’il s’agit
de
la combattre. D’où la Campagne d’éducation civique européenne lancée
2105
és, c’est à l’école qu’il s’agit de la combattre.
D’
où la Campagne d’éducation civique européenne lancée par notre Centre
2106
le qu’il s’agit de la combattre. D’où la Campagne
d’
éducation civique européenne lancée par notre Centre il y a huit ans s
2107
oute la grande politique des grands hommes d’État
d’
aujourd’hui a été déterminée par les manuels d’histoire qu’on pratiqua
2108
at d’aujourd’hui a été déterminée par les manuels
d’
histoire qu’on pratiquait au degré secondaire entre 1900 et 1914 ? Un
2109
e veux parler du général de Gaulle, avait coutume
de
répéter que l’Europe va « de Gibraltar à l’Oural ». Deux de mes étudi
2110
aulle, avait coutume de répéter que l’Europe va «
de
Gibraltar à l’Oural ». Deux de mes étudiants ont vérifié que cette ph
2111
que l’Europe va « de Gibraltar à l’Oural ». Deux
de
mes étudiants ont vérifié que cette phrase figure dans tous les manue
2112
fit son bachot. Or cela ne correspond plus à rien
de
nos jours : le petit fleuve Oural, c’est un peu comme la rivière nomm
2113
r, c’est simplement le centre du bassin principal
de
la grosse industrie soviétique. Récrire une histoire vraie, une géogr
2114
phie vraie, voilà sans doute les meilleurs moyens
d’
influencer la grande politique de demain. Et voilà par quels chemineme
2115
meilleurs moyens d’influencer la grande politique
de
demain. Et voilà par quels cheminements je me suis trouvé pris dans l
2116
minements je me suis trouvé pris dans les réseaux
de
l’action pour l’Europe par la culture. Faut-il avouer que cette forme
2117
pe par la culture. Faut-il avouer que cette forme
d’
engagement n’est pas trop romantique en réalité, et comporte un peu pl
2118
op romantique en réalité, et comporte un peu plus
de
servitudes que de grandeurs et de moments d’exaltation ? Chacun de vo
2119
éalité, et comporte un peu plus de servitudes que
de
grandeurs et de moments d’exaltation ? Chacun de vous peut l’imaginer
2120
rte un peu plus de servitudes que de grandeurs et
de
moments d’exaltation ? Chacun de vous peut l’imaginer, je n’insiste p
2121
plus de servitudes que de grandeurs et de moments
d’
exaltation ? Chacun de vous peut l’imaginer, je n’insiste pas, et ce n
2122
de grandeurs et de moments d’exaltation ? Chacun
de
vous peut l’imaginer, je n’insiste pas, et ce n’est pas un propos de
2123
iner, je n’insiste pas, et ce n’est pas un propos
de
soir de fête. Nous sommes un institut privé, libre comme l’air, et c
2124
n’insiste pas, et ce n’est pas un propos de soir
de
fête. Nous sommes un institut privé, libre comme l’air, et cela sign
2125
et cela signifie pratiquement : un institut privé
de
ces solides soutiens que les États donnent volontiers à n’importe que
2126
es États donnent volontiers à n’importe quel club
de
gymnastique ou de pompiers en retraite. Songez qu’il a fallu cinq vot
2127
olontiers à n’importe quel club de gymnastique ou
de
pompiers en retraite. Songez qu’il a fallu cinq votes et deux navette
2128
es pour porter la subvention fédérale à notre CEC
de
10 à 20 000 francs. Mais je lis dans un journal du début de ce mois l
2129
000 francs. Mais je lis dans un journal du début
de
ce mois les deux informations suivantes : « Le Conseil communal de la
2130
ux informations suivantes : « Le Conseil communal
de
la ville de Berne (législatif) a accepté, jeudi soir, un crédit de 51
2131
ons suivantes : « Le Conseil communal de la ville
de
Berne (législatif) a accepté, jeudi soir, un crédit de 51 millions de
2132
rne (législatif) a accepté, jeudi soir, un crédit
de
51 millions de francs pour l’extension de la station d’incinération d
2133
) a accepté, jeudi soir, un crédit de 51 millions
de
francs pour l’extension de la station d’incinération des ordures de l
2134
crédit de 51 millions de francs pour l’extension
de
la station d’incinération des ordures de la ville. » « Le Conseil féd
2135
millions de francs pour l’extension de la station
d’
incinération des ordures de la ville. » « Le Conseil fédéral a accordé
2136
xtension de la station d’incinération des ordures
de
la ville. » « Le Conseil fédéral a accordé une contribution de 720 00
2137
» « Le Conseil fédéral a accordé une contribution
de
720 000 francs à une mission bâloise qui gère, à Mandomai (Bornéo), u
2138
’est pas mûr. Tout se ramène donc à des problèmes
d’
éducation, d’information, et c’est pourquoi le Centre doit vivre, et t
2139
Tout se ramène donc à des problèmes d’éducation,
d’
information, et c’est pourquoi le Centre doit vivre, et tout d’abord s
2140
u anxieusement le vote par l’Assemblée européenne
d’
une résolution accordant à notre Centre l’appui matériel et moral des
2141
s membres. Salvador de Madariaga, notre président
d’
alors, me télégraphie de Londres : « Si négociations trop difficiles,
2142
adariaga, notre président d’alors, me télégraphie
de
Londres : « Si négociations trop difficiles, coupez la poire en deux
2143
faire. Je voudrais donc terminer sur l’expression
de
ma plus profonde reconnaissance à mes amis et collaborateurs du Centr
2144
issance à mes amis et collaborateurs du Centre et
de
ses si diverses activités, aux directeurs des festivals de musique, a
2145
diverses activités, aux directeurs des festivals
de
musique, aux savants, aux représentants de fondations, aux universita
2146
tivals de musique, aux savants, aux représentants
de
fondations, aux universitaires, aux pédagogues, aux historiens et soc
2147
aux historiens et sociologues, aux organisateurs
de
notre Campagne d’éducation civique européenne, à notre trésorier, bie
2148
sociologues, aux organisateurs de notre Campagne
d’
éducation civique européenne, à notre trésorier, bien sûr ! à nos amis
2149
n sûr ! à nos amis et conseillers des Communautés
de
Bruxelles et du Conseil de l’Europe, à tous ceux qui sont venus de lo
2150
venus de loin nous entourer, nous le petit groupe
de
Genève, renouvelant leur appui moral : c’est le plus beau cadeau que
2151
us beau cadeau que nous pouvions espérer au terme
de
ces vingt premières années de luttes. Il se peut que le plus dur soit
2152
ns espérer au terme de ces vingt premières années
de
luttes. Il se peut que le plus dur soit fait. Et maintenant tournons-
2153
lus puissante ou la plus riche, mais bien ce coin
de
la Terre indispensable au monde, où l’homme pourra trouver non pas le
2154
monde, où l’homme pourra trouver non pas le plus
de
bonheur matériel, mécanique et chiffrable, mais le plus de saveur, le
2155
r matériel, mécanique et chiffrable, mais le plus
de
saveur, le plus de sens à la vie ! j. Édition réalisée sur la base
2156
ue et chiffrable, mais le plus de saveur, le plus
de
sens à la vie ! j. Édition réalisée sur la base d’un tapuscrit cons
2157
sens à la vie ! j. Édition réalisée sur la base
d’
un tapuscrit conservé à la Bibliothèque publique et universitaire de N
2158
servé à la Bibliothèque publique et universitaire
de
Neuchâtel sous l’identifiant 689. Discours prononcé à l’occasion du X
2159
ute américaine est exaltante à travers les forêts
de
« l’été indien », comme le sont les gratte-ciel de Manhattan sur un f
2160
e « l’été indien », comme le sont les gratte-ciel
de
Manhattan sur un fond d’or pollué, quand on passe le Triboro Bridge v
2161
le sont les gratte-ciel de Manhattan sur un fond
d’
or pollué, quand on passe le Triboro Bridge vers quatre heures du soir
2162
quatre heures du soir en décembre, ou les champs
de
batailles perdues du Sud profond, dans l’arc immense des Appalaches.
2163
laches. Mais je me disais, après plusieurs années
d’
intimité avec ce continent, qu’il y manquait un je ne sais quoi… Ce n’
2164
ur ni beautés éclatantes, ni fascinants bas-fonds
de
villes énormes, et ni même le charme désuet des grandes demeures bois
2165
ême le charme désuet des grandes demeures boisées
de
blanc dans un paysage luxueux de prairies à paddocks. Un je ne sais q
2166
demeures boisées de blanc dans un paysage luxueux
de
prairies à paddocks. Un je ne sais quoi… Et tout d’un coup je l’ai su
2167
prairies à paddocks. Un je ne sais quoi… Et tout
d’
un coup je l’ai su, en me remémorant quelques pages d’Ortega y Gasset
2168
coup je l’ai su, en me remémorant quelques pages
d’
Ortega y Gasset intitulées « Notes de l’errant été ». Il s’agit des ch
2169
elques pages d’Ortega y Gasset intitulées « Notes
de
l’errant été ». Il s’agit des châteaux de Castille et Léon, mais cela
2170
« Notes de l’errant été ». Il s’agit des châteaux
de
Castille et Léon, mais cela vaut pour tout le reste de l’Europe médié
2171
stille et Léon, mais cela vaut pour tout le reste
de
l’Europe médiévale, de l’Aquitaine à la Scanie, et de l’Écosse à la S
2172
la vaut pour tout le reste de l’Europe médiévale,
de
l’Aquitaine à la Scanie, et de l’Écosse à la Sicile, à la Morée. Que
2173
’Europe médiévale, de l’Aquitaine à la Scanie, et
de
l’Écosse à la Sicile, à la Morée. Que se passe-t-il, interroge Ortega
2174
asse-t-il, interroge Ortega, « quand ces monstres
de
pierre entrent avec leurs grands gestes dans notre champ visuel ?… Ge
2175
el ?… Gestes géants, plongés dans l’arrière-monde
de
la mémoire… » Le château, pour l’Européen, figure un archétype de l’â
2176
Le château, pour l’Européen, figure un archétype
de
l’âme. « C’est une fertile expérience que celle que nous faisons en s
2177
ue celle que nous faisons en soumettant la chimie
de
notre âme au réactif des châteaux… Comment faut-il que soit une vie,
2178
hique ou économique. Europe, terre des « Châteaux
de
l’âme », selon le titre d’un traité mystique de sainte Thérèse d’Avil
2179
, terre des « Châteaux de l’âme », selon le titre
d’
un traité mystique de sainte Thérèse d’Avila. Château et âme sont si p
2180
x de l’âme », selon le titre d’un traité mystique
de
sainte Thérèse d’Avila. Château et âme sont si profondément liés, qu’
2181
ent liés, qu’un pays sans château me semble privé
d’
âme. Quelles que soient ses beautés visibles, elles font décor. Les vr
2182
és visibles, elles font décor. Les vraies beautés
de
l’Europe sont intérieures, et c’est pourquoi Versailles me laisse ind
2183
ui ne cache aucune profondeur. Les vraies beautés
de
l’Europe sont dans les formes qui enclosent et protègent une aventure
2184
nclosent et protègent une aventure secrète, burgs
de
l’Europe centrale peints par Victor Hugo, castra du Toulousain héréti
2185
Toulousain hérétique et chantant, vastes manoirs
de
la forêt normande où Lancelot, Bohor et Perceval affrontent les charm
2186
ohor et Perceval affrontent les charmes périlleux
de
Morgane la fée, de Merlin l’enchanteur, passions de l’âme et quête de
2187
frontent les charmes périlleux de Morgane la fée,
de
Merlin l’enchanteur, passions de l’âme et quête de l’esprit…
2188
Morgane la fée, de Merlin l’enchanteur, passions
de
l’âme et quête de l’esprit…
2189
e Merlin l’enchanteur, passions de l’âme et quête
de
l’esprit…
2190
k Je vais vous proposer ma manière personnelle
de
considérer les relations de la Suisse et de la CEE, à titre, dirons-n
2191
a manière personnelle de considérer les relations
de
la Suisse et de la CEE, à titre, dirons-nous, d’exercice intellectuel
2192
nelle de considérer les relations de la Suisse et
de
la CEE, à titre, dirons-nous, d’exercice intellectuel. Je vais donc e
2193
de la Suisse et de la CEE, à titre, dirons-nous,
d’
exercice intellectuel. Je vais donc exposer ma thèse en quatre points,
2194
, puis mes conclusions. Je ne vous demanderai pas
de
l’accepter, mais de me dire en quoi j’aurai pu me tromper, et où, exa
2195
ns. Je ne vous demanderai pas de l’accepter, mais
de
me dire en quoi j’aurai pu me tromper, et où, exactement. 1. Qu’ent
2196
mes économiques » ( Le Monde , 21 novembre 1970),
de
quels problèmes parle-t-on ? Il existe, ou devraient exister, dans to
2197
tique des recherches scientifiques, une politique
de
l’écologie, une politique démographique, une politique des transports
2198
uivalences), une politique sociale, une politique
de
l’administration, etc., etc. Mais il est clair que c’est de tout autr
2199
istration, etc., etc. Mais il est clair que c’est
de
tout autre problème que parlait le journal cité. Il parlait de la « v
2200
problème que parlait le journal cité. Il parlait
de
la « vraie politique », de la politique en soi, sans adjectif, et qu’
2201
urnal cité. Il parlait de la « vraie politique »,
de
la politique en soi, sans adjectif, et qu’il n’y a pas besoin de qual
2202
en soi, sans adjectif, et qu’il n’y a pas besoin
de
qualifier, d’ailleurs, parce que tout le monde sait très bien ce que
2203
entendre — par une politique qui ne serait celle
d’
aucun des domaines que je viens d’énumérer, qui serait la politique, s
2204
ne serait celle d’aucun des domaines que je viens
d’
énumérer, qui serait la politique, sans qualification, la politique pa
2205
n, la politique par excellence. Serait-ce un être
d’
abstraction pure ? Si je posais la question au journaliste auteur de l
2206
? Si je posais la question au journaliste auteur
de
la phrase dont je pars, il me regarderait comme un mauvais plaisant.
2207
ique — au niveau de l’Europe — , c’est le domaine
de
l’affrontement des États ; comme c’est le domaine, au niveau d’une na
2208
ent des États ; comme c’est le domaine, au niveau
d’
une nation, de l’affrontement des partis. Mais si l’on soustrait de ce
2209
; comme c’est le domaine, au niveau d’une nation,
de
l’affrontement des partis. Mais si l’on soustrait de cette politique
2210
l’affrontement des partis. Mais si l’on soustrait
de
cette politique proprement dite tout ce qui est économique, monétaire
2211
à quoi se réduit l’affrontement ? À des questions
de
puissance évidemment. Mais de quelle sorte de puissance s’agit-il, si
2212
t ? À des questions de puissance évidemment. Mais
de
quelle sorte de puissance s’agit-il, si l’on écarte, une fois de plus
2213
ons de puissance évidemment. Mais de quelle sorte
de
puissance s’agit-il, si l’on écarte, une fois de plus, tout ce qui es
2214
monétaire, intellectuelle, etc. ? À des questions
de
puissance militaire15. Le problème politique suisse numéro 1 est le p
2215
roblème politique suisse numéro 1 est le problème
de
la neutralité, qui est, au fait et au prendre, en dernière analyse, u
2216
blème militaire, un problème qui concerne le rôle
de
l’armée suisse dans la politique des États — et pas du tout le rôle d
2217
s la politique des États — et pas du tout le rôle
de
l’opinion, de la recherche, de l’idéologie ou de l’économie. On compr
2218
des États — et pas du tout le rôle de l’opinion,
de
la recherche, de l’idéologie ou de l’économie. On comprend alors — ma
2219
as du tout le rôle de l’opinion, de la recherche,
de
l’idéologie ou de l’économie. On comprend alors — mais alors seulemen
2220
de l’opinion, de la recherche, de l’idéologie ou
de
l’économie. On comprend alors — mais alors seulement — la phrase cité
2221
s économiques. » En effet, dans tous les domaines
de
l’existence publique, au xx e siècle, la coopération, à tous les étag
2222
la coopération, à tous les étages communautaires,
de
l’entreprise et de la commune à la région, à la fédération continenta
2223
ous les étages communautaires, de l’entreprise et
de
la commune à la région, à la fédération continentale, à la fédération
2224
impose comme seule méthode efficace et défendable
de
co-existence des sociétés humaines au service de leurs fins communes.
2225
de co-existence des sociétés humaines au service
de
leurs fins communes. Mais dans le domaine de la politique de puissanc
2226
vice de leurs fins communes. Mais dans le domaine
de
la politique de puissance des États-nations, qui est militaire en der
2227
ns communes. Mais dans le domaine de la politique
de
puissance des États-nations, qui est militaire en dernier ressort, la
2228
franco-britannique proposée à l’heure du désastre
de
1940.) Le but normal d’une armée n’est pas de coopérer avec les armée
2229
sée à l’heure du désastre de 1940.) Le but normal
d’
une armée n’est pas de coopérer avec les armées voisines, mais au cont
2230
tre de 1940.) Le but normal d’une armée n’est pas
de
coopérer avec les armées voisines, mais au contraire d’assurer à l’Ét
2231
pérer avec les armées voisines, mais au contraire
d’
assurer à l’État les moyens de mener son jeu propre à sa manière et en
2232
, mais au contraire d’assurer à l’État les moyens
de
mener son jeu propre à sa manière et en vue de ses seuls intérêts, c’
2233
ue de ses seuls intérêts, c’est-à-dire le pouvoir
de
ne pas coopérer, précisément. Le pouvoir d’opposer aux fins communes
2234
uvoir de ne pas coopérer, précisément. Le pouvoir
d’
opposer aux fins communes du genre humain les fins particulières d’un
2235
s communes du genre humain les fins particulières
d’
un État. Vouloir fonder la politique européenne sur l’harmonie des pol
2236
cela : une « amicale des misanthropes ». (Ce sont
de
ces choses qu’on peut écrire ou dire, mais non pas faire.) Une politi
2237
crire ou dire, mais non pas faire.) Une politique
de
l’Europe fédérée suppose et implique non pas l’impossible harmonisati
2238
non pas l’impossible harmonisation des politiques
de
puissance nationales, mais la renonciation à toute espèce de politiqu
2239
e nationales, mais la renonciation à toute espèce
de
politique nationale au sens actuel du terme — dont nous venons de voi
2240
itaire en fin de compte. De même qu’une politique
de
la Suisse fédérée supposait et a entraîné en fait la renonciation à t
2241
politique cantonale vis-à-vis d’autres cantons ou
d’
États tiers. 2. La CEE a-t-elle des finalités politiques ? Dès l
2242
Dès le moment où la CEE a inauguré son processus
d’
ouverture d’un marché commun, la Suisse a déclaré qu’elle ne pouvait e
2243
nt où la CEE a inauguré son processus d’ouverture
d’
un marché commun, la Suisse a déclaré qu’elle ne pouvait en faire part
2244
lité (sous-entendu militaire, non économique). Si
de
telles finalités étaient solennellement affirmées dans le préambule e
2245
le préambule et réitérées dans le corps du traité
de
Rome, pense-t-on que cela suffirait à les imposer pratiquement aux Ét
2246
nous invitent à en douter. Or, en fait, le traité
de
Rome ne contient pas la moindre allusion à des finalités politiques,
2247
Suisse déclarait inacceptable. Il y est question
de
politique économique, commerciale, monétaire, sociale, scientifique,
2248
69, rapport Davignon en 1970 — , il a été proposé
d’
étendre au domaine politique les compétences de la CEE. On sait aussi
2249
sé d’étendre au domaine politique les compétences
de
la CEE. On sait aussi que toutes ces propositions ont été repoussées
2250
randes constructions supranationales ne sont plus
de
mise aujourd’hui, non seulement en France où le gaullisme a laissé un
2251
être sans objet quand il n’y avait que le traité
de
Rome, ne porte que sur des projets non acceptés, des « rêves » ou des
2252
s » ou des « arrière-pensées » qui ne sont « plus
de
mise aujourd’hui ». 3. La CEE doit-elle « s’élargir au domaine pol
2253
au domaine politique » ? J’ai nommé « illusion
de
Jean Monnet » la croyance partagée par les matérialistes, tant capita
2254
istes, qui veut que si l’on se trouve en position
de
manipuler les facteurs de la production économique (ou infrastructure
2255
n se trouve en position de manipuler les facteurs
de
la production économique (ou infrastructure), des conséquences politi
2256
re s’est produit : les prétentions « politiques »
de
certains des États membres des Six ont freiné et même mis en question
2257
i l’Europe politique ne résulte pas mécaniquement
de
l’Europe économique, ne pourrait-elle, ou ne devrait-elle pas en résu
2258
lent croire ceux qui, chaque jour, dans la presse
de
tous nos pays, parlent de la nécessité d’« élargir la CEE » non seule
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ue jour, dans la presse de tous nos pays, parlent
de
la nécessité d’« élargir la CEE » non seulement à plus de six pays, m
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presse de tous nos pays, parlent de la nécessité
d’
« élargir la CEE » non seulement à plus de six pays, mais surtout au «
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cessité d’« élargir la CEE » non seulement à plus
de
six pays, mais surtout au « domaine politique ». J’estime pour ma par
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agine-t-on, en Suisse, que le Département fédéral
de
l’économie (ou sa Division du commerce) déclare sa volonté de « s’éla
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e (ou sa Division du commerce) déclare sa volonté
de
« s’élargir » au politique, au militaire, au culturel ? Et que les éc
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tefois l’humanité dans son ensemble n’accepte pas
de
se soumettre à la seule exigence de l’accroissement indéfini du PNB.
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n’accepte pas de se soumettre à la seule exigence
de
l’accroissement indéfini du PNB. 4. La Suisse doit-elle accepter l
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et très partiellement en fait : l’agence fédérale
de
l’économie, ayant pouvoir de décision sur les problèmes économiques d
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: l’agence fédérale de l’économie, ayant pouvoir
de
décision sur les problèmes économiques de dimensions continentales. D
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pouvoir de décision sur les problèmes économiques
de
dimensions continentales. D’autres agences fédérales doivent être cré
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transports, démographie, défense, etc. Les chefs
de
ces agences fédérales formeront tout naturellement le collège exécuti
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formeront tout naturellement le collège exécutif
de
la fédération européenne (président nommé par roulement). Or ce systè
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jeur, pour la Suisse, aujourd’hui, n’est donc pas
de
savoir : — comment adhérer à la CEE, nonobstant ses finalités politiq
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° elles n’existent pas et 2° elles n’ont pas lieu
d’
exister), mais bien de savoir : — comment contribuer activement à l’in
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et 2° elles n’ont pas lieu d’exister), mais bien
de
savoir : — comment contribuer activement à l’instauration d’un régime
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— comment contribuer activement à l’instauration
d’
un régime fédéral européen conforme au régime que les Suisses ne saura
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c’est difficile. Je ne suis pas ici pour essayer
de
formuler la solution la plus facile, mais bien celle qui me paraît à
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s la Suisse à Bruxelles, je dirais : 1° Le traité
de
Rome n’a pas de finalité politique au sens idéologique et militaire d
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uxelles, je dirais : 1° Le traité de Rome n’a pas
de
finalité politique au sens idéologique et militaire du terme. 2° Rien
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et militaire du terme. 2° Rien ne m’empêche donc
d’
adhérer à ses institutions économiques, 3° étant entendu que les « dév
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t, ne sauraient m’engager (plus que vous) au-delà
de
ce que j’aurais signé. 4° Si vous me refusez l’entrée de votre groupe
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ue j’aurais signé. 4° Si vous me refusez l’entrée
de
votre groupe économique à cause de cette réserve que je fais sur les
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déclarer quels engagements « politiques » chacune
de
vos nations est prête, en principe, à assumer elle-même. (Je ne puis
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écartiez sous prétexte que moi, je dis clairement
d’
avance que je refuserai ce que vous, vous prétendez, vouloir faire, to
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ti-centralisateur-uniformiste, et je m’efforcerai
de
le faire prévaloir dans vos pays et dans le mien, devant l’opinion pu
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que. Ainsi la Suisse se placerait à l’avant-garde
d’
un vrai mouvement fédéraliste européen — au lieu de jouer les serre-fr
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ans Le Monde (1er décembre 1970) cette citation
de
Michel Debré : « La politique est affaire de puissance, et la premièr
2286
tion de Michel Debré : « La politique est affaire
de
puissance, et la première marque de la puissance, c’est la puissance
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e est affaire de puissance, et la première marque
de
la puissance, c’est la puissance militaire. » On peut tout reprocher
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On peut tout reprocher à M. Debré sauf un manque
de
franchise. Peu d’hommes politiques l’égalent sur ce point. k. Éditio
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ocher à M. Debré sauf un manque de franchise. Peu
d’
hommes politiques l’égalent sur ce point. k. Édition réalisée sur la
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nt sur ce point. k. Édition réalisée sur la base
d’
un tapuscrit conservé à la Bibliothèque publique et universitaire de N
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servé à la Bibliothèque publique et universitaire
de
Neuchâtel sous l’identifiant 692. Une note indique : « Exposé présent
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M. Denis de Rougemont à l’Institut universitaire
de
hautes études internationales à Genève, le 28 novembre 1970. »