1 1962, {Title}. « Né d’un regard juste… » (à propos de Richard Coudenhove-Kalergi) (2 septembre 1962)
1 s du monde occidental, le mouvement paneuropéen a été l’expression directe et immédiate d’une pensée politique qui se disti
2 selon ces lignes de force traditionnelles qui se sont de nos jours manifestées comme lignes du destin de la politique mondi
3 de la politique mondiale. Churchill parfois s’en est souvenu — relisez son discours de Zurich sur l’Europe. Clarté de l’ex
4 inon aux catastrophes que l’on sait ; et l’Europe est en train de s’unir. Une utopie qui réussit prouve par là même qu’elle
5 topie qui réussit prouve par là même qu’elle n’en était pas une. Encore fallait-il l’énoncer. Elle ne se serait jamais réalis
6 pas une. Encore fallait-il l’énoncer. Elle ne se serait jamais réalisée si personne ne l’avait dressée comme un but simple et
7 un but simple et grand devant nos volontés. Nous sommes tout près de ce but que Coudenhove fut le premier du siècle à désigne
8 s. Nous sommes tout près de ce but que Coudenhove fut le premier du siècle à désigner clairement. Mais il sait que ce n’est
9 ècle à désigner clairement. Mais il sait que ce n’ est qu’une étape nécessaire. L’Occident tout entier, qu’il nous faut exig
10 iste pratique » que Coudenhove n’a jamais cessé d’ être , et qui sera devant l’Histoire son plus beau titre. a. Édition réal
11  » que Coudenhove n’a jamais cessé d’être, et qui sera devant l’Histoire son plus beau titre. a. Édition réalisée sur la b
2 1963, {Title}. L’Europe entière, ou la première force (1963)
12 urope entière, ou la première force (1963)b Je tiens la crise de Bruxelles pour éphémère, sur le plan des manœuvres et nég
13 puissance, évitant pour l’instant que notre union soit réduite à un ensemble économique, dominé par les États-Unis pour les
14 é occidentale et le Marché commun). Désormais, il sera bien clair que si la Grande-Bretagne rejoint le Marché commun, comme
15 nt le Marché commun, comme tous le souhaitent, ce sera dans la volonté de s’intégrer à l’Europe politique, et non pas dans l
16 es virtuelles du coup d’arrêt de Bruxelles, il en est une que je tiens à souligner ici : elle concerne les pays de l’Est eu
17 u coup d’arrêt de Bruxelles, il en est une que je tiens à souligner ici : elle concerne les pays de l’Est européen. Nul n’ign
18 ens à souligner ici : elle concerne les pays de l’ Est européen. Nul n’ignore que les intérêts transigent plus facilement qu
19 la transaction sauve en partie les intérêts, qui sont par nature relatifs et divisibles, mais dégrade à coup sûr les idéaux
20 visibles, mais dégrade à coup sûr les idéaux, qui sont entiers ou ne valent rien. Pour les Six, accepter l’Angleterre au pri
21 aucun doute un gain matériel immédiat, mais c’eût été vendre le droit d’aînesse de l’Europe. C’est ce droit que les peuples
22 ce droit que les peuples de l’Ouest et ceux de l’ Est européen ont en commun, face aux US d’une part, à l’URSS de l’autre.
23 sens civique et les distinguent tous tant qu’ils sont , et dans ce qu’ils ont de meilleur, des grands ensembles unifiés par
24 raliste. Or cette union spécifiquement européenne serait compromise pour longtemps, voire à jamais, si nous acceptions de grev
25 . L’Europe de l’Ouest ne peut ouvrir à celle de l’ Est qu’une possibilité purement européenne, et qui serait d’abord, osons
26 st qu’une possibilité purement européenne, et qui serait d’abord, osons le dire, d’idéal et non d’intérêt. Une fusion atlantiq
27 ernières chances d’union avec les satellites de l’ Est . Peuples, communautés ou nations ne se fédèrent qu’autour d’un noyau
28 ous proposez une « troisième force » européenne ? Seriez -vous le seul à ignorer que ça ne se fait pas ? Qu’il y a là un tabou,
29 u, même et surtout dans les milieux européistes ? Seriez -vous devenu anti-américain, voire neutraliste ? Cessons de jouer sur
30 Si l’Europe doit s’unir, c’est une force, ou ce n’ est rien ; et nécessairement une troisième, du seul fait que deux autres
31 ement une troisième, du seul fait que deux autres sont là. Mais pourquoi s’obstiner à croire qu’elle serait nécessairement u
32 ont là. Mais pourquoi s’obstiner à croire qu’elle serait nécessairement une force « neutre », au sens mesquin ou hypocrite du
33 e », au sens mesquin ou hypocrite du terme ? Elle serait simplement une force autonome et différente, et même la plus grande d
34 s deux moins Grands. L’Europe unie et autonome ne serait pas neutre, mais centrale. C’est dans cette perspective qu’il nous fa
3 1965, {Title}. État présent des études européennes (septembre 1965)
35 de la commission exécutive de l’Institut, dont il est le président. Je dois excuser l’absence de M. le prof. J. Freymond, d
36 ce titre membre de notre commission exécutive. Il est représenté ici par M. Chatelanat, directeur administratif de l’Instit
37 péennes » : l’expression déjà a cessé de frapper, est passée dans les mœurs d’un grand nombre d’universités, et pourtant el
38 d’un grand nombre d’universités, et pourtant elle est très récente : les premiers instituts d’enseignement supérieur expres
39 , et comme une culture parmi d’autres, puisqu’ils étaient le foyer même de toute culture, et la norme de toute civilisation dig
40 Chine et l’Inde avaient toujours pensé de même, s’ étaient toujours conçues comme la seule vraie culture, vraiment humaine, le r
41 ie culture, vraiment humaine, le reste du monde n’ étant peuplé que de barbares. Mais il y avait entre ces grandes civilisatio
42 différence fondamentale : ni la Chine ni l’Inde n’ étaient curieuses du reste du Monde. L’Europe seule l’était, et avec une pass
43 ent curieuses du reste du Monde. L’Europe seule l’ était , et avec une passion qui a longtemps causé l’étonnement, puis l’indig
44 n : Pourquoi donc avez-vous fait ce long voyage ? Êtes -vous si malheureux chez vous ? Dès le xviiie siècle, les Européens, a
45 éation d’études européennes, en Europe d’abord, a été pris vers les années 1950, et il a coïncidé avec trois grands faits d
46 vie politique par le Congrès de l’Europe, qui se tint à La Haye en 1948, le mouvement pour unir nos pays devait aboutir rap
47 péen qu’elles tentaient de résoudre et dont elles étaient issues. C’est alors qu’on voit apparaître dans les universités de Nan
48 1957 à 1963, deux douzaines d’instituts nouveaux sont entrés en fonction. Au total, on compte 37 instituts d’études europée
49 l’Institut, foyer de recherches et d’initiatives, est l’ancêtre de tous les autres, puisqu’il s’est ouvert à Genève dès fév
50 es, est l’ancêtre de tous les autres, puisqu’il s’ est ouvert à Genève dès février 1949.) La grande majorité de ces institut
51 rité de ces instituts universitaires ou assimilés sont consacrés essentiellement à l’étude des conditions de l’union europée
52 sciences économiques, surtout à partir de 1957, y tiennent une place prépondérante, suivies par les études juridiques et plus ré
53 ée de 1946 à 1961, a réduit l’Europe à ce qu’elle est en réalité, du point de vue géographique et démographique. Elle tend
54 s. Cette tendance à constituer une européologie s’ est manifestée d’abord dans les études historiques (Mayence et Bruges). S
55 squ’elle consiste à additionner des victoires qui sont , pour le pays prochain, des défaites, — sans compter que toutes nos g
56 ans compter que toutes nos guerres intestines ont été des défaites pour l’ensemble européen. C’était aller dans la bonne di
57 er dans la bonne direction pour l’Europe : car ce sont en effet les études historiques qui avaient créé au xix e siècle l’il
58 les autres cultures — lesquelles en revanche ont été trop longtemps et sont encore trop souvent étudiées comme des déviati
59  lesquelles en revanche ont été trop longtemps et sont encore trop souvent étudiées comme des déviations de la norme occiden
60 e que la caractéristique de la culture européenne est d’avoir produit la civilisation technique, et ici nous en venons au t
61 ise de conscience de ce troisième fait dominant a été marquée récemment par la conférence culturelle qui s’est tenue à Bâle
62 (à Bruxelles et à Salzbourg, notamment). Mais il est clair que l’étude approfondie de la culture européenne, de sa spécifi
63 ficité, donc le développement d’une européologie, est la condition préalable de ces études comparatives. Tant il est vrai q
64 ion préalable de ces études comparatives. Tant il est vrai qu’on ne se connaît bien qu’en se comparant avec autrui, mais qu
65 ffit pas à nous faire prendre conscience de notre être intime, et à susciter la volonté d’assumer nos options fondamentales.
66 s européennes — si rapide en somme, puisqu’elle s’ est dessinée au cours des 15 dernières années seulement — où se situe not
67 en cours. Montrer ses origines idéologiques — ce fut l’objet du cours que j’ai donné pendant les trois premiers semestres
68 l’économie. Les conséquences de l’union en cours sont en effet en train de modifier profondément le milieu réel où vous, ét
4 1966, {Title}. « J’essaie d’imaginer mes lecteurs japonais… » (janvier 1966)
69 essaie d’imaginer mes lecteurs japonais… Comme il est difficile d’écrire pour des gens qui habitent tellement loin ! Leurs
70 ens qui habitent tellement loin ! Leurs problèmes sont tellement différents, m’assure-t-on, et puis nous n’avons pas les mêm
71 ux. « Comment, vous aussi ? s’écrie l’autre. Nous sommes donc frères ! » Pourtant, si je fais tourner lentement mon globe terr
72 Parce que les Japonais, tout comme les Européens, sont des hommes dont tous les réflexes, les sentiments, les idéaux, et le
73 épendent très largement de leurs traditions, mais sont aussi des hommes qui ont accepté les risques et les promesses de la t
74 des traditions et de la technique la plus moderne soit posé dans des termes aussi voisins, aussi facilement comparables qu’a
75 ntre campagne et ville, enracinement et mobilité, est l’un des plus gravement menacés dans nos deux régions. De même que l’
76 goureuses, ne pourra progresser longtemps si elle est coupée de ses sources culturelles. La technique n’est pas née de rien
77 coupée de ses sources culturelles. La technique n’ est pas née de rien. Elle est le produit logique quoique imprévu d’un com
78 urelles. La technique n’est pas née de rien. Elle est le produit logique quoique imprévu d’un complexe très vaste, étiré su
79 type de civilisation ou de culture. La technique est née au xix e siècle et en Europe. Elle nous apparaît aujourd’hui comm
80 iaux et politiques. Il y a un individualisme, qui est né dans le conflit séculaire entre ces deux tendances fondamentales,
81 l’on essaie d’équilibrer en dynamismes créateurs, sont nées la science et la technique, et elles en vivent, au Japon comme e
82 chnique enchaîne l’individu ou le libère, si nous sommes les esclaves de nos machines ou si elles nous servent, et surtout — c
83 u Kremlin, la bombe nous anéantira… Ces questions sont très populaires, non seulement chez les publicistes à grand tirage, m
84 le qui fait que l’on bat la table à laquelle on s’ est heurté. La technique n’est pas une puissance indépendante de l’homme
85 table à laquelle on s’est heurté. La technique n’ est pas une puissance indépendante de l’homme et qui pourrait se tourner
86 se tourner subitement contre lui. La technique n’ est pas matérialiste : seul l’homme peut l’être, quand il se laisse aller
87 ique n’est pas matérialiste : seul l’homme peut l’ être , quand il se laisse aller à ses instincts abâtardis. La technique n’e
88 e aller à ses instincts abâtardis. La technique n’ est pas davantage utilitariste. Dans ses intentions primitives, dans sa g
89 ses intentions primitives, dans sa genèse, elle n’ est même pas utilitaire ! L’histoire des grandes inventions, de celle du
90 , de celle du feu à celle de la fusée spatiale, n’ est pas l’histoire de nos « besoins ». C’est plutôt l’histoire de nos rêv
91 que de la technique aux premiers âges de l’homme, est aujourd’hui abandonnée au profit d’explications des premières inventi
92 es grandes inventions qui ont modifié nos vies ne sont pas nées pour satisfaire des besoins matériels que personne n’éprouva
93 nt elles, mais c’est généralement l’inverse qui s’ est produit. Personne, à part quelques rêveurs un peu bizarres, n’avait b
94 nd il n’y en avait pas. C’est du rêve de voler qu’ est né l’avion, et du rêve de partir au hasard sur les routes qu’est née
95 et du rêve de partir au hasard sur les routes qu’ est née l’auto : on en trouve le récit détaillé dans l’autobiographie de
96 Ford. Ce rêveur incurable, bricoleur sans génie, était obsédé par l’idée de construire une « locomotive routière », c’est-à-
97 outière », c’est-à-dire un véhicule rapide qui ne fût pas astreint à suivre la loi rigide des « voies ferrées » et des hora
98 , l’on entend de belles âmes soupirer que l’homme est devenu l’esclave de sa voiture, et c’est vrai dans ce sens que l’homm
99 ait plus se passer de cet objet, mais le fautif n’ est pas la voiture, c’est la publicité, la mode, la vie sociale — c’est d
100 chnique. Je voudrais observer au surplus que s’il est bien certain que l’invention de Ford est née d’un rêve d’évasion hors
101 que s’il est bien certain que l’invention de Ford est née d’un rêve d’évasion hors des voies imposées de la civilisation, h
102 voque la liberté de l’individu, cette invention n’ était certes pas la mieux adaptée à ses fins, ni la mieux calculée pour rép
103 et quand il faut payer les autoroutes. Si je veux être libre de rêver, c’est justement un train que je vais prendre. Dans mo
104 nt, rien de pareil : tout ce que je peux lire, ce sont des chiffres, des ordres de police routière ; si je mange, ce n’est g
105 des ordres de police routière ; si je mange, ce n’ est guère qu’un sandwich, si je rêvasse un klaxon me réveille brutalement
5 1966, {Title}. Situation de l’Europe en 1966 (1966)
106 66) Un changement d’équilibre L’histoire n’ est pas faite seulement de catastrophes, traités, révolutions, avènements
107 si de la région européenne en 1966 : elle n’a pas été le théâtre d’événements très spectaculaires, mais d’une sorte de chan
108 t surtout aux « deux Grands ». Cette modification est devenue sensible à l’occasion de certains gestes accomplis par le che
109 t français, au nom de « l’Europe européenne ». Il est vrai que ces gestes, tout en traduisant bien une évolution générale s
110 on générale survenue dans nos pays à l’égard de l’ Est d’une part et des USA de l’autre, obéissaient à des motifs d’intérêt
111 la réalité du problème de l’union de l’Europe se sont manifestées plus vivement que jamais en 1966. D’une part la crise du
112 s en 1966. D’une part la crise du Marché commun a été finalement résolue au printemps par des accords sur la politique agri
113 éral de Gaulle a signifié son congé à l’OTAN puis est allé se faire acclamer en URSS, et n’a cessé, avant et après, de rece
114 e recevoir à l’Élysée les ministres des pays de l’ Est  ; enfin, il a dénoncé la politique américaine au Vietnam dans son dis
115 au Vietnam dans son discours de Phnom Penh. Il s’ est fait ainsi le champion de « l’Europe européenne » aux yeux des États-
116 La portée des gestes qu’on vient de rappeler eût été considérable s’ils avaient été faits au nom de l’Europe entière et po
117 nt de rappeler eût été considérable s’ils avaient été faits au nom de l’Europe entière et pour affirmer son union ; mais fa
118 litique demeurée foncièrement nationaliste, ils n’ étaient pas de nature à faciliter l’union — pourtant seule condition de leur
119 e « la nation reste la seule réalité » : ce qui n’ était que trop vrai en 1939, on l’a bien vu, mais qui nous a conduits, aprè
120 inent divisé. Ainsi le mouvement de bascule qui s’ est fait sentir en 1966 ne s’est opéré jusqu’ici que dans notre représent
121 ent de bascule qui s’est fait sentir en 1966 ne s’ est opéré jusqu’ici que dans notre représentation du monde, non pas dans
122 On sait que les premiers efforts d’union avaient été motivés, au lendemain de la guerre, par les nécessités de la reconstr
123 évolué depuis lors. Aux premiers motifs, qui ont été suivis d’actions largement réussies (puisque l’Europe est désormais p
124 is d’actions largement réussies (puisque l’Europe est désormais pacifiée et rétablie dans sa prospérité) viennent s’en ajou
125 tionnels ou prospectifs. J’en retiendrai cinq qui sont apparus d’une brûlante actualité au cours de 1966. 1. Sauver l’indé
126 ien près de se réaliser, et l’ont voit pas que ce soit nécessairement au détriment de nos pays, rien d’autre que leurs divis
127 iers égal. Mais l’entente que redoute P.-H. Spaak est celle qui s’est déjà produite à Téhéran, puis à Yalta entre Roosevelt
128 l’entente que redoute P.-H. Spaak est celle qui s’ est déjà produite à Téhéran, puis à Yalta entre Roosevelt et Staline, et
129 seul à la représenter, pût s’y opposer. Or ce qui fut refusé au chef incontesté d’une nation combattante — seule victorieus
130 ’Europe ! — quel autre homme d’État d’aujourd’hui serait -il en mesure de l’obtenir dans une conjoncture analogue ? Aucun ne po
131 (ainsi dans l’affaire du Vietnam)2 et personne ne serait d’ailleurs habilité pour le dire et se faire écouter. Unie, elle sera
132 lité pour le dire et se faire écouter. Unie, elle serait l’un des Grands, et même, à bien des égards, le plus Grand3. Mais pas
133 e. L’indépendance, pour les Européens, ne saurait être qu’un attribut de leur union, et plus du tout de la « souveraineté »
134 de leur nation. 2. Renouer avec les pays de l’ Est européen Au Congrès de l’Europe, à La Haye, en mai 1948, les fédér
135 es européens avaient demandé que des sièges vides fussent réservés, dans l’enceinte du futur Conseil de l’Europe, pour les nati
136 futur Conseil de l’Europe, pour les nations de l’ Est momentanément empêchées de se faire représenter. On peut regretter qu
137 bâtir à l’Ouest un noyau dense d’Europe unie qui fût capable d’une part d’assurer une autonomie plus réelle à l’égard des
138 d’autre part d’attirer les peuples du glacis de l’ Est à mesure que se relâcherait l’emprise soviétique. La stratégie du do
139 gagement préalable à une vaste union continentale était en général des plus mal vues des chroniqueurs politiques, pendant les
140 ceux (d’ailleurs très rares) qui la préconisaient soit des arrière-pensées « dangereusement neutralistes », soit une touchan
141 arrière-pensées « dangereusement neutralistes », soit une touchante absence de réalisme. Et pourtant, l’année 1966 a vu se
142 e évolution dans ce sens4. Les gouvernements de l’ Est desserrent un peu leur contrôle sur la vie culturelle, et tolèrent mi
143 hniques, spatiaux, nucléaires… Dans les pays de l’ Est européen, où l’on suit de près toute cette évolution, un sourd espoir
144 « colonialiste-impérialiste », tandis que l’URSS est occupée ailleurs, contrainte d’affronter une menace orientale d’autan
145 nçaises portant ce nom par la General Electric) a été le signal d’alarme. Elle a montré que des gestes négatifs, comme se r
146 ciements massifs sur des ordres venus d’Amérique, sont de nature à faire comprendre à beaucoup que, faute d’appliquer sans d
147 tellisation politique, les unes par l’empire de l’ Est , les autres par l’empire de l’Ouest. Face à ces menaces de plus en pl
148 le temps qu’ils en bénéficiaient, comme si elle n’ était qu’hypocrisie. Elle pose ses conditions avec chaque subvention : c’es
149 es colonisateurs économiques qu’on les accusait d’ être , à tort, quand ils tentaient seulement de nous remettre sur pieds.
150 4. Combler le « retard technologique » S’il est vrai que les usines que possèdent les Américains dans les pays europé
151 ent guère plus de 5 % de la production totale, il est remarquable que leur contrôle s’exerce sur les secteurs les plus déve
152 la Chine, parce que leur équipement électronique est américain. Les observateurs américains et européens sont d’accord pou
153 éricain. Les observateurs américains et européens sont d’accord pour attribuer la cause principale de notre dépendance écono
154 t récemment le directeur général d’Olivetti, « il est inconcevable que nous autres Européens soyons encore entravés par le
155 , « il est inconcevable que nous autres Européens soyons encore entravés par le concept d’État-nation. Si nous parvenons à nou
156 unauté technologique européenne », dont l’intérêt serait bien moins de concurrencer les États-Unis que de développer les possi
157 l’URSS, les chiffres absolus de l’aide européenne sont dérisoires. La tâche déborde notoirement les possibilités de chacun d
158 échelle continentale, permettrait de dégager les sommes et de former les hommes capables d’agir dans le tiers-monde et d’y ma
159 ccident et à l’URSS n’a cessé de s’accentuer et d’ être publié sur tous les tons dans le monde entier. Que nous le méritions
160 le méritions ou non, nous autres Européens, nous sommes tenus pour responsables de la carence des riches à secourir les pauvr
161 itions ou non, nous autres Européens, nous sommes tenus pour responsables de la carence des riches à secourir les pauvres (hi
162 ande-Bretagne), et sans union économique, nous ne serons jamais assez riches pour ce que le tiers-monde attend de nous. Et pui
163 le tiers-monde attend de nous. Et puis enfin, ce sont les divisions nationalistes de l’Europe en 1914 et en 1939 qui ont je
164 nos pays et un tiers de leur population globale, Est et Ouest additionnés9. En 1966, le Marché commun a prouvé qu’il était
165 ionnés9. En 1966, le Marché commun a prouvé qu’il était assez souple et robuste pour surmonter la crise la plus sérieuse prov
166 t fort bien, mais le dynamisme de la Communauté a été atteint, les espoirs de développement au-delà de la lettre du traité
167 développement au-delà de la lettre du traité ont été vertement rabroués, et l’on s’est aperçu que Jean Monnet avait été tr
168 e du traité ont été vertement rabroués, et l’on s’ est aperçu que Jean Monnet avait été trop optimiste en croyant que les né
169 roués, et l’on s’est aperçu que Jean Monnet avait été trop optimiste en croyant que les nécessités de l’union économique am
170 s plus concrètes d’union politique. La vérité qui est apparue en 1966, c’est qu’on ne fera pas l’Europe fédérale sans le vo
171 e le saut d’abord et le corps suivra. Mais quelle est la vision de l’union européenne qui pourrait entraîner l’opinion et l
172 saut de l’économique au politique ? Ce ne saurait être une super-nation-Europe unitaire et centralisée, telle que les nation
173 ais personne ne la veut en réalité. Ce ne saurait être davantage une nouvelle Sainte-Alliance des nations souveraines, même
174 probable autant qu’indésirable toute union qui ne serait pas de forme fédérale, c’est-à-dire qui ne respecterait pas ces diver
175 ette formule fédérale, seule possible, n’a encore été proposé. On a souvent parlé de « relance de l’Europe politique » en 1
176 êté au général de Gaulle de grands desseins qu’il est fort possible qu’il tienne en réserve. Mais rien de concret ne s’est
177 de grands desseins qu’il est fort possible qu’il tienne en réserve. Mais rien de concret ne s’est manifesté. L’opinion s’est
178 u’il tienne en réserve. Mais rien de concret ne s’ est manifesté. L’opinion s’est donc contentée de spéculer sur le revireme
179 s rien de concret ne s’est manifesté. L’opinion s’ est donc contentée de spéculer sur le revirement de l’attitude britanniqu
180 voyages d’exploration dans les capitales des Six sont suivis de près par les observateurs politiques. Et certes, l’éventual
181 l’adhésion de la Grande-Bretagne au Marché commun est importante10, car elle entraînerait celle de la plupart des pays de l
182 er l’autonomie économique de l’Europe. Mais nul n’ est en droit d’affirmer que l’union politique du continent serait facilit
183 oit d’affirmer que l’union politique du continent serait facilitée par l’entrée des Anglais dans le Marché commun. Plusieurs p
184 olitique économique commune. ⁂ La détente entre l’ Est et l’Ouest européens, mais aussi entre la CEE et la Grande-Bretagne c
185 iré de concret d’une conjoncture si favorable. Ce sont au contraire les conséquences les plus inquiétantes de notre désunion
186 es les plus inquiétantes de notre désunion qui se sont manifestées : renaissance d’un certain nationalisme en Allemagne, fai
187 l’absence de l’Europe au plan mondial n’a jamais été plus flagrante, alors que la guerre au Vietnam, l’appauvrissement du
6 1967, {Title}. L’intellectuel suisse et la politique (juillet 1967)
188 de l’intellectuel dans la vie publique ne saurait être que de dénonciation. Fustiger l’hypocrisie bourgeoise à l’échelle com
189 , disons entre Güllen et Washington ou Moscou, ce serait , paraît-il, « s’engager ». Ayant été le premier à parler de l’engagem
190 oscou, ce serait, paraît-il, « s’engager ». Ayant été le premier à parler de l’engagement de l’écrivain (cela remonte à 193
191 e Cuba, du Yémen, ou du Vietnam, ou d’Israël, qui sont très loin, ni même à propos du Jura, tout près de nous. Le rôle de l’
192 ! Prenez l’exemple de l’intellectuel suisse. Ce n’ est pas sa vertu qui peut intéresser, même si elle le porte à soutenir ré
193 e en flèche et non pas en retrait, dès lors qu’il est question d’unir l’Europe, de Gibraltar à Varsovie et d’Édimbourg à Bu
194 t 656. Une note manuscrite indique que le texte a été envoyé le 14 juillet 1967 à la « rédaction du feuilleton Weltwoche ».
7 1968, {Title}. Message pour la Grèce (3 avril 1968)
195 ue j’aurais surtout le droit de me taire. Mais je suis également citoyen de l’Europe, et à ce titre j’ai le devoir de parler
196 us regarde tous : Car nous autres Européens, nous sommes tous Grecs ! Que nous le sachions ou non, quand nous parlons, quand n
197 evoirs civiques et notre droit d’opposition, nous sommes Grecs, héritiers d’Athènes, héritiers de Socrate, de Platon, d’Homère
198 ble qui élève hardiment la voix sur l’agora. Nous sommes tous Grecs dans le passé, dans notre commun héritage, mais tous Europ
199 le que nous donne la présente dictature militaire est justement celui d’une Grèce qui se sépare de l’Europe en esprit, qui
200 ec que ce jour-là — c’était Vinet), « la tyrannie est le souverain désordre ». Lugubre erreur de ceux qui au nom d’une légi
201 stalinisme, d’ailleurs en voie de liquidation à l’ Est , qui soit plus scandaleux que ce qu’ils font eux-mêmes dans le même s
202 e, d’ailleurs en voie de liquidation à l’Est, qui soit plus scandaleux que ce qu’ils font eux-mêmes dans le même style ? Qua
203 temporain de Platon, l’orateur athénien Isocrate, tenait qu’il convient d’appeler Grecs « plutôt les gens qui participent à no
204 empêché la Grèce de résister à la conquête par l’ Est macédonien et plus tard par l’Ouest romain, c’est la traditionnelle d
205 à détruire l’union des cités, cette union qui eût été leur seule et vraie sauvegarde contre la satellisation par les empire
206 arde contre la satellisation par les empires de l’ Est et de l’Ouest. Mais nous autres Européens du xx e siècle, nous gardon
207 imposés par les militaires : Sparte aujourd’hui n’ est plus qu’une bourgade poussiéreuse et vouée au plus juste oubli par le
208 e solidement fédérée, c’est-à-dire un pouvoir qui soit enfin capable de garantir les libertés civiques dans tous les peuples
8 1969, {Title}. L’esprit romand (années 1960)
209 esprit romand (années 1960)h La Suisse romande est l’expression moderne — elle ne date guère que de la seconde moitié du
210 ii e siècle. Au nord, la principauté de Neuchâtel est gouvernée au nom d’un prince français, Henry II d’Orléans-Longueville
211 urs, succéderont dès 1707 les rois de Prusse, qui seront princes de Neuchâtel jusqu’en 1848. Au sud, Genève, ville d’Empire, d
212 ement à Berne. (Une partie du canton, d’ailleurs, est de langue alémanique.) Quant au Valais, principauté épiscopale dont s
213 dont seule la moitié ouest parle français, elle s’ est liée peu à peu aux ligues suisses, mais restera longtemps à l’écart d
214 e avec les seigneurs de la haute vallée. Ce cas n’ est d’ailleurs pas exceptionnel. Neuchâtel est depuis des siècles en rela
215 cas n’est d’ailleurs pas exceptionnel. Neuchâtel est depuis des siècles en relations étroites avec la Franche-Comté (pourt
216 a République de Berne (pourtant germanophone) à l’ est , beaucoup plus qu’avec les Vaudois « occupés » par les baillis de Leu
217 urs Excellences de Berne. Genève, cité du Refuge, est déjà tournée vers le monde plutôt que vers les Vaudois campagnards ou
218 e ces cinq pays, principautés et républiques : ce sont la Réforme (pour Genève, Neuchâtel et Vaud) et les liens de combourge
219 lendemain de la guerre civile du Sonderbund (qui fut littéralement, la guerre de Sécession des Suisses), pressés par la né
220 la géographie (point de frontières naturelles à l’ est ), ou l’histoire (intérêts divergents de nos cinq cantons au long des
221 e 1848, un « esprit romand » va se constituer. Il sera l’expression de ce que les cinq cantons — et surtout les trois protes
222 même économique. Les trois réformateurs décisifs sont français : Calvin, de Bèze à Genève, Guillaume Farel à Neuchâtel. Seu
223 es deux grands noms du siècle, en Suisse romande, sont Alexandre Vinet et Henri-Frédéric Amiel, c’est-à-dire le civisme à fo
224 nte de la pensée romande : Quand tous les périls seraient dans la liberté, toute la tranquillité dans la servitude, je préférai
225 a vie, et la servitude c’est la mort. La tyrannie est le souverain désordre. Au xx e siècle, la Suisse romande va devenir
226 l’éducation, fondé par Jean Piaget à Genève, peut être considéré comme la capitale mondiale de la psychologie génétique et d
227 n le parle. Inutile d’insister : les deux clichés sont faux, ne sont rien de plus que des clichés. Il y a chez le Vaudois un
228 utile d’insister : les deux clichés sont faux, ne sont rien de plus que des clichés. Il y a chez le Vaudois une bonhommie un
9 1969, {Title}. L’union de l’Europe, modèle d’union dans la liberté (fin des années 1960)
229 rté (fin des années 1960) L’union de l’Europe n’ étant pas encore faite — ni dans la liberté ni autrement — il va sans dire
230 va sans dire que le titre de ce chapitre ne peut être conçu comme la constatation satisfaite d’un phénomène historique qu’i
231 s dans la réalité historique, union et liberté se sont trouvées généralement alliées ou en interaction de fait, quoique de d
232 ction de l’ensemble constitué : elle ne peut donc être conclue qu’aux dépens d’une part importante de la liberté des constit
233 a liberté des constituants. Cette part de liberté est sacrifiée librement par une élite au profit du groupe initiateur, mai
234 uelle mesure ces deux types d’union politique ont été préconisés et ont donné lieu à des réalisations plus ou moins consist
235 fédérale de l’Europe L’idée d’union européenne est apparue dans le temps même où les premières nations (c’étaient la Fra
236 périeure aux intérêts des monarchies en formation sont ceux du légiste français Pierre Dubois (1306-1307) et du partisan pol
237 et l’autre de surmonter le risque de division qu’ est en train de créer précisément le pouvoir même que servent leurs auteu
238 rs auteurs : on sait que le De Monarchia de Dante est écrit pour saluer la venue en Italie de l’empereur Henri VII, tandis
239 le De recuperatione terre sancte de Pierre Dubois est dédié en partie à Édouard Ier d’Angleterre, en partie à Philippe le B
240 ’absence de toute « juridiction plus ample et qui tienne les princes en son pouvoir », le genre humain devient, selon Dante, «
241 possédant des « qualités différentes […] doivent être dirigées par des lois différentes », mais orientées par une seule vue
242 vue générale. Or, selon Dante, cette opération n’ est possible qu’à un seul, sous peine de confusion dans les principes uni
243 iversels (De Monarchia, I, 14). Le même problème est posé par Dubois : comment rassembler, discipliner et ordonner en vue
244 guerre sainte contre l’islam, des princes qui se tiennent pour souverains absolus superiores in terris non recognoscentes ? Mai
245 is non recognoscentes ? Mais la solution proposée est bien différente. Au lieu d’exalter l’utopie d’un « monarque du monde 
246 . « Projet trop réaliste pour une époque qui ne l’ était guère », note avec raison Christian L. Lange.11 Au cours des siècles
247 des siècles qui vont suivre, jusqu’au nôtre, ce n’ est pas la vision du poète ni sa logique sublime, mais l’empirisme sans v
248 Crucé et s’en souvient). Quelques idées générales sont communes à presque tous ces auteurs et à leurs plans redécouverts dep
249 ou un empire centralisé sur le modèle romain, qui sera mis en système par les jacobins et mis en œuvre par Napoléon. Paix, g
250 ’a passé dans les faits, où pourtant sa nécessité était inscrite et bien lisible. Refusés par les princes, souvent ridiculisé
251 s philosophiques, sociales et religieuses. Car il est typiquement européen d’admettre que l’unité et la diversité sont non
252 t européen d’admettre que l’unité et la diversité sont non seulement compatibles mais vitalement corrélatives, à la manière
253 nt, non de géométries pesantes et figées, doivent être rappelées ici, de même qu’on attribuera principalement aux Grecs et a
254 ant les deux termes de base d’une dialectique qui est le ressort même de notre histoire européenne. Lorsque ces éléments ou
255 uropéenne. Lorsque ces éléments ou termes de base sont séparés, isolés l’un de l’autre, et que l’un triomphe intégralement d
256 » ou le « collectivisme totalitaire ». Lorsqu’ils sont en revanche mis en tension, comme deux pôles électriques, ils se modi
257 ne union de l’Europe selon la formule fédéraliste serait particulièrement européenne non seulement dans ses fins, mais dans se
258 Enfin, l’on constatera que la liberté et la paix sont les buts principaux qu’ils assignent à l’union et qu’elle a pour fonc
259 a trois siècles plus tard Hitler, dont l’ambition était d’unir tous les peuples européens sous la seule loi de son parti, tou
260 s d’évolution différents. La société d’ailleurs n’ est plus imaginée comme un corps, mais comme un mécanisme. Les groupes so
261 , mais comme un mécanisme. Les groupes sociaux ne sont plus des organes assurant une fonction propre, mais doivent être rédu
262 rganes assurant une fonction propre, mais doivent être réduits à l’état substantiellement indifférencié de subdivisions terr
263 édérale l’avantage décisif de la simplicité. Elle est d’une application facile dès qu’on dispose de la force (militaire, po
264 ers le milieu du xx e siècle. Ses maximes lui ont été données par les penseurs politiques du xvi e siècle comme Jean Bodin,
265 e à cet égard). Le sentiment patriotique lui-même est « nationalisé » en attendant que ce soit le tour des grandes entrepri
266 lui-même est « nationalisé » en attendant que ce soit le tour des grandes entreprises, des banques, puis de certaines scien
267 a résultante d’une telle contradiction ne saurait être que la guerre : celle qui éclate en 1914 est la conséquence logique e
268 ait être que la guerre : celle qui éclate en 1914 est la conséquence logique et pratique, rationnelle et affective, des pas
269 ule fédérale (dont nous disions plus haut qu’elle était spécifiquement européenne dans ses fins, ses motifs et ses méthodes),
270 éenne dans ses fins, ses motifs et ses méthodes), est celle qui a représenté, aux yeux des autres peuples de la terre, l’Eu
271 lisme telle que nous la dressions tout à l’heure, est une liste de grands esprits qui ont tous échoué à faire passer leur i
272 es et belliqueuses, donc divisives de l’Europe, n’ est autre que la liste des plus grands souverains, capitaines ou meneurs
273 ’action de leur État. Or la « liberté » des États est de celles que réclament les gangsters, non les honnêtes citoyens, et
274 et c’est même aux dépens de ces derniers qu’elle est généralement acquise. La liberté de l’État-nation X ou Y en Europe, c
275 at-nation X ou Y en Europe, c’est son « droit » d’ être seul juge de ses droits, de résilier tout contrat ou alliance qui ces
276 tielle, tout sacrifice à une cause commune, qu’il est toujours facile de tourner en dérision au nom du « réalisme », c’est-
277 , nommée « indépendance » ou « souveraineté », ne serait , si elle existait vraiment telle qu’on l’invoque ou la revendique, qu
278 pour unir ces communautés. La formule fédéraliste est celle d’une composition organique des réseaux de relations qui se nou
279 . La formule nationaliste part d’un pouvoir qui s’ est posé par la force (pouvoir personnel ou collectif, roi ou parti) et q
280 e, face à l’étranger, sa souveraineté, laquelle n’ est limitée qu’en fait, par la seule force nécessairement antagoniste des
281 s deux formules. Ils doivent s’unir pour éviter d’ être satellisés l’un après l’autre par l’un ou l’autre des deux Grands, il
282 rmule d’union la plus conforme à la fin qu’ils se seront assignée : la puissance ou la liberté, en d’autres termes : la domina
283 e d’un fédérateur tel qu’à l’Ouest tentèrent de l’ être — chacun à sa façon — César et ses successeurs, Othon, Charles-Quint,
284 n, Charles-Quint, Napoléon, Hitler, et tel qu’à l’ Est s’y essaya Staline, serait régie par quelque aréopage technocratique,
285 on, Hitler, et tel qu’à l’Est s’y essaya Staline, serait régie par quelque aréopage technocratique, apatride et irresponsable.
286 États… Seul ce plan lui paraît conforme à ce que sont effectivement les nations de notre continent. Ce texte est important
287 ivement les nations de notre continent. Ce texte est important en ce sens qu’il démontre qu’un des Européens les plus cons
288 nationale » aussi mal définie qu’inatteintes. Il est clair pourtant que c’est dans une Europe unitaire, formée précisément
289 lisme qui entend respecter cette personnalité. Il est clair aussi que les prétendus « fédérateurs » dont de Gaulle note l’a
290 t un mal — César, Napoléon, Hitler, Staline — ont été en réalité des dictateurs et unificateurs radicalement hostiles à tou
291 antes les plus typiques — États-Unis, Suisse — ne sont pas nées des œuvres d’un « fédérateur », mais au contraire de la libr
292 matiquement que le jugement gaullien sur « ce que sont effectivement les nations de notre continent » soit erroné. On a trop
293 nt effectivement les nations de notre continent » soit erroné. On a trop vite fait, trop souvent, dans les rangs des Européi
294 s militants, de déclarer que la formule nationale est dépassée, morte, enterrée. C’est prendre ses désirs pour des réalités
295 ficacité dans les pays neufs du tiers-monde. Il n’ est pas lié à une patrie d’abord, mais à une novation sociale et politiqu
296 ême, le mot d’ordre « Les Soviets partout ! » qui fut populaire dans les manifestations communistes en France ou en Italie
297 e ! ». Ainsi le nationalisme dans le tiers-monde, est -il d’abord affirmation d’anti-occidentalisme, de « socialisme », c’es
298 ogique, par le mouvement naturel de sa polémique, est rapidement devenu missionnaire, donc impérialiste, et cela donne au x
299 es » et la Première Guerre mondiale. Tout n’a pas été mauvais, loin de là, dans le colonialisme conduit par les nations de
300 d’une race, d’une région, d’une fraternité jurée, fût -elle le Ku Klux Klan, la Mafia, ou plus innocemment un club, une équi
301 n club, une équipe sportive, un gang d’élèves. Il serait donc ridicule de ne pas tenir compte de ces réalités nationales, dont
302 , dont le tort des nationalistes d’ancienne école est de tenir compte exclusivement, sans nul espoir et nul désir d’une mod
303 désir d’une modification prochaine, « les choses étant ce qu’elles sont », ainsi que de Gaulle aime à le dire. Or, les chose
304 ication prochaine, « les choses étant ce qu’elles sont  », ainsi que de Gaulle aime à le dire. Or, les choses ne changent pas
305 l’homme n’intervient pas. La formule nationale ne serait ni fausse ni rejetable en soi, et un philosophe de la politique n’aur
306 ion publique, pour peu que « l’intérêt national » soit invoqué ; 3. empêche toute espèce d’union européenne parce qu’elle pe
307 e, le régime centralisé d’un pays comme la France est débordé, dépassé, non payant, en cette seconde moitié du xx e siècle 
308 ntre l’idée que l’on s’y fait de l’Occident. Ce n’ est donc pas une caricature du nationalisme que l’on se permettrait ici d
309 que l’on se permettrait ici de condamner, mais on est contraint de reconnaître que la formule d’union nationale n’est plus
310 de reconnaître que la formule d’union nationale n’ est plus à l’échelle de l’Europe et du monde en cette fin du xx e siècle,
311 rie, de la technique, et de la société mobile qui est la nôtre — en attendant que l’on prenne au sérieux, au-delà de la sta
312 édéralistes demandent que l’Europe s’unisse, ce n’ est certes pas pour que nos plus petites nations se voient entraînées dan
313 . Accessoirement d’ailleurs, cette union fédérale serait en mesure — et elle seule — d’assurer l’indépendance des Européens et
314 dans des domaines bien définis ; que ces agences soient bien articulées et coopèrent dans une vue générale, c’est-à-dire prop
315 mbition de puissance sur l’Europe et le Monde qui fut celle de quelques souverains et dictateurs, mais de bien plus nombreu
316 ropéenne, j’entends la prétention hégémonique qui fut celle de tous les soi-disant « fédérateurs », en réalité dévastateurs
317 complexe à la fois et mieux coordonnée que ne le sont nos cabinets à la mode du siècle dernier, avec leurs ministères dont
318 sa prospérité et les libertés que j’ai dites, qui sont personnelles d’abord, mais ensuite, et non moins, pour le tiers-monde
319 non moins, pour le tiers-monde. Qui sait si ce ne sera pas là notre contribution la plus féconde au développement de l’human
320 -delà des calculs de technocrates politiciens qui sont parfois tentés de juger gratuite et littéraire toute considération su
321 olitique qui puisse servir demain le genre humain sera le modèle fédéraliste, dépassement de la formule nationale et du conc
322 es Européens. Essayons le modèle fédéraliste, qui est celui de l’union librement consentie des groupes, des cités, des État
10 1969, {Title}. Les chances de l’Europe : huit ans après (novembre 1969)
323 es à mon sujet, et vous dire avec quel plaisir je suis ici ce matin — à peine rentré des États-Unis. Je sais à quel point il
324 ne rentré des États-Unis. Je sais à quel point il est important que des gens qui ont vos responsabilités se réunissent pour
325 . Je vais partir, selon la proposition qui m’en a été faite, de ce que j’avais exposé il y a sept ou huit ans, dans un peti
326 it livre intitulé Les Chances de l’Europe . Il y est question des bases durables, je dirais presque permanentes, de l’unio
327 omiques et technologiques de cette union. Je m’en suis tenu à un certain nombre de motifs qui, pour les uns existent depuis
328 es et technologiques de cette union. Je m’en suis tenu à un certain nombre de motifs qui, pour les uns existent depuis trois
329 eur actualité de sitôt, je le crains. Au fond, qu’ est -ce qui a changé depuis que j’ai publié ces quatre conférences ? Hélas
330 ce de cette formation politique très particulière est assez récente puisque ce n’est qu’à partir de Napoléon que l’on peut
331 très particulière est assez récente puisque ce n’ est qu’à partir de Napoléon que l’on peut vraiment parler d’État-nation,
332 c’est-à-dire de la confiscation de la nation, qui est un grand mythe, par l’État, qui est un appareil administratif. C’est
333 a nation, qui est un grand mythe, par l’État, qui est un appareil administratif. C’est l’étatisation de la nation. Formatio
334 e n’a guère que 170 ans d’âge, mais qui se trouve être devenue tellement naturelle à nos yeux que beaucoup d’entre vous sans
335 e s’imaginent qu’il n’y en a pas d’autre, qu’elle est le résultat normal de l’évolution historique, et qu’on devait en arri
336 a limite totalitaire — et nous découvrons qu’elle est très récente. Et si elle a été fabriquée et imposée récemment, c’est
337 découvrons qu’elle est très récente. Et si elle a été fabriquée et imposée récemment, c’est une raison de plus pour la mett
338 our la mettre en question et nous demander quelle est sa validité. Si l’on n’a pas avancé dans la construction de l’Europe
339  et là je plaide coupable, comme tous ceux qui se sont occupés de l’Europe à ce moment-là — parce que l’on est parti du mauv
340 On a voulu fonder l’union de l’Europe sur ce qui était précisément l’obstacle à cette union, c’est-à-dire sur les États-nati
341 n, c’est-à-dire sur les États-nations tels qu’ils sont . Lors des premiers congrès européens à Montreux, à La Haye, à Rome, à
342 quelque vingt-cinq États (si on prenait ceux de l’ Est ), et nous pensions qu’on arriverait à les grouper comme des cantons s
343 ne fédération de petits États. Car tous nos États étaient devenus petits, à l’échelle mondiale, avec l’apparition des deux ou t
344 rition des deux ou trois empires. Là sans doute a été l’erreur fondamentale : essayer de former une fédération sur ce qui f
345 des attributs classiques de la souveraineté, qui étaient comme vous le savez, depuis qu’on en a fait la théorie à la Renaissan
346 tre l’Égypte, au bout de quelques jours elles ont été stoppées par un froncement des sourcils des vrais maîtres du monde, c
347 , qui continuent à se dire souverains, mais ne le sont plus, la France et l’Angleterre, ont dû arrêter leur guerre à deux he
348 erre à deux heures de la prise du Caire. La leçon est absolument claire : la prétention à la souveraineté nationale n’exist
349 . Or c’est toujours d’une manière absolue qu’elle est revendiquée. Elle n’a plus d’autre efficacité que le pouvoir de refus
350 uveraineté prétendue des États-nations, à force d’ être revendiquée, nous incite à une analyse plus serrée du concept, et l’o
351 de l’État-nation comme communauté. Cette critique tient en quelques mots — et vous la retrouverez identique chez au moins une
352 s une douzaine d’auteurs contemporains, qui ne se sont pas concertés : — L’État-nation, au xx e siècle, est à la fois trop p
353 pas concertés : — L’État-nation, au xx e siècle, est à la fois trop petit et trop grand pour les réalités d’aujourd’hui. I
354 et trop grand pour les réalités d’aujourd’hui. Il est trop petit parce que pas un seul de nos États-nations, même s’ils se
355 ns une politique qu’il préconiserait, parce qu’il est trop petit à l’échelle mondiale. Ceci n’a pas besoin d’être développé
356 petit à l’échelle mondiale. Ceci n’a pas besoin d’ être développé beaucoup ; au point de vue économique, il saute aux yeux qu
357 pays, même les petits, se trouve trop grand pour être capable d’animer réellement toutes ses régions, toutes ses communes,
358 jours à cet égard, c’est celui de la France. Ce n’ est pas par hasard. La France a donné le modèle même de l’État-nation cen
359 l’État-nation centralisé avec Napoléon. La France est beaucoup trop grande pour animer toutes ses régions, ce qui a amené m
360 pénitent comme le général de Gaulle — parce qu’il est tout de même réaliste — à constater qu’il fallait une régionalisation
361 à marcher et que les Français s’intéressent tant soit peu à leur vie politique et à leur vie publique autrement que d’une m
362 égions. Comme vous le savez, le général de Gaulle est tombé à l’occasion d’un référendum concernant les régions. Chacun sai
363 ions d’habitants. Mais, peu ou prou, la situation est la même dans les autres pays, avec la seule exception peut-être du nô
364 nistratives : la trop grande dimension des cadres est évitée.) Ces États-nations continuent à être juste assez forts pour s
365 adres est évitée.) Ces États-nations continuent à être juste assez forts pour se refuser à l’union, mais ils sont trop petit
366 e assez forts pour se refuser à l’union, mais ils sont trop petits et trop grands à la fois, ils sont donc en crise, ils se
367 ls sont trop petits et trop grands à la fois, ils sont donc en crise, ils se voient attaqués de tous les côtés, non seulemen
368 e Marché commun ou le Conseil de l’Europe, et ils sont imités dans d’autres parties du monde, d’abord dans le monde communis
369 agitation beaucoup moins virulente parce qu’elle est mieux reconnue, en Grande-Bretagne, du côté du pays de Galles et de l
370 lème du même ordre en Belgique, mais la situation est beaucoup plus violente puisqu’elle va presque jusqu’à l’éclatement du
371 s, plus petites que le cadre stato-national qui a été imposé à la plupart de nos pays au xix e siècle seulement. (Dites-vou
372 erre ou une partie de l’Espagne ; tous les autres sont de création beaucoup plus récente.) Double mouvement contradictoire,
373 Malraux, qui disait récemment : « Le xx e siècle sera le siècle des nations » — si l’on prend nation dans le sens ancien du
374 cle voit la renaissance de ces nations-là, qui ne sont pas du tout la nation telle que la Révolution française et Napoléon l
375 ion française et Napoléon l’ont définie, mais qui sont beaucoup plus petites. Ces deux réalités qui ont l’air contradictoire
376 re de triturer ou de dissoudre les États-nations, soit par en dessous (mouvement vers les régions), soit par en haut (mouvem
377 soit par en dessous (mouvement vers les régions), soit par en haut (mouvement de grandes convergences continentales). Donc,
378 ales. Tout semble pointer vers une résultante qui est le fédéralisme. Ici j’introduis une nouvelle idée, une nouvelle thèse
379 velle idée, une nouvelle thèse : — Le fédéralisme est le terme le plus mal compris du vocabulaire politique, et ceci pas se
380 tes les langues où on l’emploie aujourd’hui. Il n’ est pas de terme qui donne lieu à pires malentendus. Je vais vous en donn
381 ada, où vous savez que la question du fédéralisme est très brûlante. J’avais proposé un certain nombre de sujets de confére
382 Parlez-nous d’amour, mais pas de fédéralisme ! J’ étais extrêmement étonné et déçu, car le vrai but de mon voyage était de di
383 ent étonné et déçu, car le vrai but de mon voyage était de discuter le fédéralisme. J’ai réussi à le faire à l’occasion d’int
384 tale autour d’Ottawa, la capitale fédérale ! J’ai été obligé d’expliquer à mon tour que pour nous, Suisses, c’était à peu p
385 amais de subventions fédérales, parce qu’ici nous sommes fédéralistes ! » D’autres exemples : au cours des travaux de préparat
386 européen, j’avais demandé que la première journée fût consacrée à une discussion sur le fédéralisme. Sur quoi le représenta
387 e quitter le comité, parce que le mot fédéralisme est tabou à Strasbourg. » On finit par comprendre que pour ce haut foncti
388 lé d’un « défaut congénital du fédéralisme », qui tient au fait que le fédéralisme, c’est toujours la coexistence de deux cho
389 coexistence en tension. Le modèle le plus simple est fourni par la coexistence entre les autonomies locales et l’union féd
390 s autonomies locales et l’union fédérale, l’union étant le moyen de sauvegarder les autonomies, qui mettent en commun certain
391 ire que par exemple le mariage, le couple humain, est le premier stade du fédéralisme. Vous y retrouvez tous les caractères
392 qu’il ne faut pas du tout unifier et qui doivent être égales, peser du même poids dans le mariage, qui ne doivent pas être
393 du même poids dans le mariage, qui ne doivent pas être subordonnées l’une à l’autre. Donc, si vous voulez, en termes théolog
394 e seule personne », en une seule institution, qui est le mariage. Vous retrouverez ce même genre d’antinomie à tous les deg
395 inomie à tous les degrés de la réalité. Voilà qui est tout à fait fondamental pour la forme de pensée européenne. Le plus a
396 retrouverez dans la pensée fédéraliste, laquelle est à mon sens la plus ancienne tradition ou forme de pensée de l’esprit
397 ou forme de pensée de l’esprit humain tel qu’il s’ est manifesté en Occident. Ceci explique aussi tous les malentendus qui p
398 dus qui peuvent toujours se produire, parce qu’il est presque fatal que l’esprit humain ait de la peine à maintenir ensembl
399 tions logiquement exclusives l’une de l’autre. Il est toujours tenté soit de subordonner l’une à l’autre, soit de les fusio
400 xclusives l’une de l’autre. Il est toujours tenté soit de subordonner l’une à l’autre, soit de les fusionner complètement, d
401 ujours tenté soit de subordonner l’une à l’autre, soit de les fusionner complètement, de manière qu’il n’y ait plus de diffi
402 ut comprendre la vraie nature du fédéralisme, qui est la seule manière d’unir les Européens, divers comme ils sont, il faut
403 le manière d’unir les Européens, divers comme ils sont , il faut se rappeler d’abord que le fédéralisme est une pensée dialec
404 t, il faut se rappeler d’abord que le fédéralisme est une pensée dialectique, qui veut faire coexister des réalités antinom
405 des concepts de base de toute pensée fédéraliste est le concept de dimension — dimension des cadres et dimension des tâche
406 cadres et dimension des tâches communautaires. Il est évident que si vous avez un cadre trop vaste, comme celui de la Franc
407 troisième, c’est participation, tous ces concepts étant d’ailleurs interdépendants : vous ne pouvez pas en avoir un si vous n
408 ys centralisé de 50 millions d’habitants, il n’en est pas question. Voter tous les sept ans en principe, pour un président,
409 ’on ne peut pas connaître personnellement, cela n’ est pas de la participation civique, cela n’est rien du tout, c’est une l
410 ela n’est pas de la participation civique, cela n’ est rien du tout, c’est une loterie, c’est de l’ordre du tiercé : on pari
411 de retrouver des communautés dont les dimensions soient telles que les citoyens puissent être des citoyens, donc des communau
412 imensions soient telles que les citoyens puissent être des citoyens, donc des communautés assez petites. Le concept de dimen
413 e. Prenez l’exemple de l’université. L’université est définie par une certaine dimension, dimension culturelle, dimension d
414 ander que chaque commune ait son université. Elle est déjà trop grande pour nos cantons, on commence à s’en apercevoir. Cel
415 ade supérieur. Allons encore plus loin. Nous nous sommes aperçus tout au début de la construction européenne, en 1949, qu’aucu
416 sur mesure, à la mesure de cette tâche énorme qu’ était la recherche nucléaire. Donc, dimensions des tâches, dimension des ca
417 e ainsi conçu comme méthode d’union de l’Europe n’ est pas du tout limité au genre de relations qui existent, en Suisse, ent
418 stes l’ont étudié au xix e siècle, qui lui-même n’ est qu’un cas particulier de la méthode fédéraliste. Celle-ci, à mon sens
419 e une antinomie : la personne, c’est un homme qui est à la fois libre et responsable, qui est à la fois distingué de la mas
420 homme qui est à la fois libre et responsable, qui est à la fois distingué de la masse par sa vocation même. C’est déjà quel
421 déralisme aux relations entre nos cantons, qui ne sont pas nécessairement restés à la bonne mesure ou à la bonne taille au x
422 dhérer par exemple au Marché commun, comme cela a été un prétexte pendant longtemps de ne pas même adhérer au Conseil de l’
423 dhérer au Conseil de l’Europe — et Dieu sait s’il est anodin, le Conseil de l’Europe. Notre fédéralisme doit continuer au-d
424 continuer au-delà de nos frontières, comme cela s’ est fait dans le cas du CERN que je citais tout à l’heure ; tout naturell
425 ’ai publié mon petit ouvrage, c’est parce qu’on s’ est trompé en essayant de faire l’Europe sur la base des États-nations te
426 e fait pas d’omelette sans casser des œufs, et je suis parfaitement persuadé qu’on ne fera jamais l’Europe sans casser des É
427 ser des États-nations, sans les dissocier, ce qui est d’ailleurs un processus en train de se faire. Je ne prône pas une rév
428 dit à la Sorbonne : « Cassez la baraque ! » Il n’ est pas question de cela, car c’est toujours la police qui gagne dans ces
429 t d’État-nation, que nous voyions à quel point il est en crise aujourd’hui, à quel point il faut le dépasser, par en haut e
430 version, changer de direction. Une révolution qui sera celle de la mesure européenne. Chaque fois que je retourne aux États-
431 . Questions I. La discussion du groupe I s’ est centrée sur le thème des régions. 1. L’idée de région dans le cadre e
432 gions. 1. L’idée de région dans le cadre européen est -elle suffisamment avancée pour pouvoir être proposée ? 2. Quelles ser
433 ropéen est-elle suffisamment avancée pour pouvoir être proposée ? 2. Quelles seraient ces régions ? Devraient-elles se const
434 t avancée pour pouvoir être proposée ? 2. Quelles seraient ces régions ? Devraient-elles se constituer sur une définition géogra
435 uels devraient-elles disparaître, ou au contraire être maintenues ? 4. Quelle conception M. de Rougemont a-t-il des frontièr
436 de leur passé culturel ? II. 1. Notre neutralité est -elle une entrave à notre participation sur le plan européen ? Quel es
437 à notre participation sur le plan européen ? Quel est l’avenir de notre neutralité ? 2. Puisqu’il s’agit de définir les rég
438 e la région. Les questions qu’il se pose ont déjà été exposées par les deux premiers groupes. Il aimerait néanmoins avoir u
439 uvelle, comme base nouvelle d’union, qui pourrait être à la taille de l’homme et en même temps la dépasser. Mais la régional
440 rer en régionalisme étroit, repli qui ne pourrait être que négatif pour la création de l’Europe ? IV. 1. Après une telle cri
441 les moyens d’y parvenir. 1. La solution régionale est très séduisante, parce que humaine. Mais dans le monde actuel, où l’é
442 ise de plus en plus grande, la solution régionale est -elle la seule et la meilleure ? 2. La solution de l’Europe économique
443 Europe économique conduisant à l’Europe politique est -elle opposée à l’idée de M. de Rougemont, ou peut-elle la rejoindre ?
444 és par l’exposé de M. de Rougemont et qui peuvent être résumés sous la forme de deux questions fondamentales : 1. L’Europe d
445 de Rougemont Dans chacun de vos groupes, vous êtes revenus sur l’idée de région et sur les difficultés que soulève ce no
446 exactement le cas, ce qui prouve que le dialogue est bien engagé, qu’il est bien centré. Je voudrais essayer de répondre à
447 qui prouve que le dialogue est bien engagé, qu’il est bien centré. Je voudrais essayer de répondre à quelques grandes quest
448 au point. Il y a un autre groupe de questions qui sont me semble-t-il beaucoup plus générales, qui sont des questions de pol
449 sont me semble-t-il beaucoup plus générales, qui sont des questions de politique générale ou mondiale, savoir par exemple s
450 e revenir à la fin, si j’ai le temps et si vous n’ êtes pas trop fatigués. Troisième ordre de questions : la neutralité suiss
451 directement à l’un ou à l’autre de ces problèmes. Est -ce qu’il y aurait un quatrième ordre de questions, sur lequel vous in
452 édagogique de la présentation de l’Europe ? Je ne suis pas sûr que je puisse entrer dans beaucoup de détails. On me dit que
453 s aurez une matinée entière, celle de samedi, qui sera consacrée à ce genre de questions et d’application. Mais j’aurai prob
454 régions, tout d’abord. On m’a demandé si la chose était suffisamment avancée, si je n’étais pas trop optimiste, si je n’avais
455 é si la chose était suffisamment avancée, si je n’ étais pas trop optimiste, si je n’avais pas une vision idyllique de la réal
456 n idyllique de la réalité, si les États-nations n’ étaient pas encore assez solides tout de même, si je n’avais pas exagéré ma c
457 z-vous les “découper” ? » Ici, on a dit : comment est -ce qu’elles se répartiraient, quelles seraient leurs relations avec l
458 comment est-ce qu’elles se répartiraient, quelles seraient leurs relations avec les ensembles déjà existants, et les déborderaie
459 une meilleure manière de poser la question. Quel est l’état actuel du problème ? Il est évident que c’est nouveau, ce conc
460 question. Quel est l’état actuel du problème ? Il est évident que c’est nouveau, ce concept de région comme élément de base
461 d’études assez développées. Des revues entières y sont consacrées, comme celles qui sont publiées en France par l’Institut d
462 vues entières y sont consacrées, comme celles qui sont publiées en France par l’Institut de science économique appliquée de
463 estion des régions, et j’ai l’impression que ce n’ est qu’un début. Comme le problème, je vous le rappelais tout à l’heure,
464 le problème, je vous le rappelais tout à l’heure, est posé en réalité d’une manière très concrète, politique et économique,
465 en plus urgent, à mesure qu’on décidera que ça l’ est . J’ai l’impression qu’en parlant de régions je ne parle pas d’une uto
466 utopie, mais j’essaie d’épouser un mouvement qui est en train de se prononcer partout, qu’on le veuille ou non, qu’on l’ap
467 che concrète proposée à cette génération. Quelles sont les chances des régions de se substituer peu à peu aux États-nations
468 les choses dans le mouvement d’une évolution qui est assez lent, au gré de nos impatiences naturelles. Je pense à ce que n
469 ien, nous n’avons eu ni l’une ni l’autre. Nous ne sommes pas encore morts, mais nous sommes loin d’être unis. Et je crois qu’i
470 autre. Nous ne sommes pas encore morts, mais nous sommes loin d’être unis. Et je crois qu’il faut en rabattre sur ces enthousi
471 sommes pas encore morts, mais nous sommes loin d’ être unis. Et je crois qu’il faut en rabattre sur ces enthousiasmes de mil
472 va vous tomber sur la tête, vers 1985, et vous ne serez absolument pas préparés, parce que vous la cherchez toujours du côté
473 rchez toujours du côté des États-nations. Elle ne sera pas formée sur la base des États-nations, encore moins sur celle de v
474 u’elles nouent entre elles des liens, ce qu’elles sont déjà en train de faire dans beaucoup de cas par-dessus les frontières
475 ières. Donc, une espèce de coagulation — le mot n’ est peut-être pas très bon — ou constitution de régions un peu partout en
476 millions d’habitants), ne peuvent pas prétendre à être complètes, ce qu’ont prétendu les États-nations au xix e siècle. Il n
477 prétendu les États-nations au xix e siècle. Il n’ est pas question qu’elles se rêvent autarciques. Elles sont faites pour ê
478 as question qu’elles se rêvent autarciques. Elles sont faites pour être complémentaires, les unes ayant certaines qualités s
479 les se rêvent autarciques. Elles sont faites pour être complémentaires, les unes ayant certaines qualités spécifiques bien p
480 On peut imaginer que d’ici dix à douze ans, elles soient suffisamment constituées, et que le tissu, le réseau de leurs interre
481 x mots : La Regio Basiliensis, ou région bâloise, est une conception qui est née dans l’esprit de jeunes économistes et pro
482 iensis, ou région bâloise, est une conception qui est née dans l’esprit de jeunes économistes et professeurs de Bâle, qui o
483 ns égards, jusqu’à Strasbourg. Plusieurs réalités sont à la base de ce projet. D’abord une réalité historique : cette région
484 . D’abord une réalité historique : cette région a été historiquement unie. Liens politiques et sociaux, intermariages fréqu
485 lgré la présence du français en Alsace, la langue est en grande majorité germanique ; il y a trois dialectes, mais les gens
486 Quand vous regardez ce pays, vous voyez que Bâle est ultra-industrialisé et bâti, et puis il y a la frontière française, e
487 elle à constituer. Or, cette région qui se trouve être au cœur de l’Europe, géographiquement, est en même temps située entre
488 rouve être au cœur de l’Europe, géographiquement, est en même temps située entre trois pays, et dans chacun de ces pays, su
489 surtout en France et en Allemagne, elle se trouve être périphérique. C’est un grand paradoxe. Ce coude du Rhin, c’est vraime
490 du lieu. Je ne veux pas en dire plus qu’eux ! Ils sont souvent amers sur la manière dont on les traite dans la capitale. On
491 x : des appareils pour une école de dentistes ont été mis en commun entre les trois universités. Mais on cherche à aller be
492 tion politique : de qui relèverait cette région ? Est -ce que Bâle va se séparer de la Suisse ? Le pays de Bade de l’Allemag
493 r de la Suisse ? Le pays de Bade de l’Allemagne ? Est -ce que l’Alsace va devenir autonome ? Il n’est absolument pas nécessa
494  ? Est-ce que l’Alsace va devenir autonome ? Il n’ est absolument pas nécessaire d’aller jusque là. On peut très bien imagin
495 el point que nous la croyons naturelle, mais elle est absolument monstrueuse, si on y réfléchit : poser les mêmes frontière
496 ol, la religion dans certains cas — maintenant on est en train de dépasser cela, mais pendant longtemps cela a joué un rôle
497 ’est de la folie, et on le voit aujourd’hui, ce n’ est pas tenable. On a été obligé de commencer le Marché commun. Pourquoi 
498 n le voit aujourd’hui, ce n’est pas tenable. On a été obligé de commencer le Marché commun. Pourquoi ? Parce que vous aviez
499 allemand comme ils le veulent, à la surface, ce n’ est pas une raison pour diviser le sous-sol, jusqu’à je ne sais pas combi
500 octorat, mettre tout le monde en uniforme (il n’y est pas arrivé tout à fait, il n’a réussi qu’avec les lycéens et les gran
501 académie, comme ils s’appellent en France — qui n’ est pas du tout un recteur élu par ses pairs, comme dans les autres pays,
502 me dans les autres pays, mais nommé par Paris — , tient à dire qu’il a le même rang qu’un général de division ou qu’un préfet
503 ’un général de division ou qu’un préfet. Cela m’a été rappelé à maintes reprises par des recteurs français, qui me disaient
504 étudiants et beaucoup de professeurs français se sont révoltés l’année dernière. Contre cette concentration, les régionalis
505 bitude de donner l’exemple suivant, parce qu’il m’ est personnel et que je le connais bien. À des Français, par exemple, qui
506 ques, culturelles différentes, je dis ceci : — Je suis Neuchâtelois, né dans un canton qui eut son histoire séparée de celle
507 qu’il n’a rejoint la Confédération qu’en 1848. Là est ma patrie, ma tradition, c’est là que je suis né, c’est de là que j’a
508 . Là est ma patrie, ma tradition, c’est là que je suis né, c’est de là que j’ai mon accent. C’est ma première allégeance pat
509 légeance patriotique. Mais comme Neuchâtelois, je suis Suisse de passeport, c’est là mon allégeance nationale. Ensuite, je s
510 t, c’est là mon allégeance nationale. Ensuite, je suis écrivain français, et là mon allégeance est à la francophonie, à l’en
511 , je suis écrivain français, et là mon allégeance est à la francophonie, à l’ensemble de la langue française, qui recouvre
512 ’allégeance : religieusement, il se trouve que je suis né protestant, mais si j’étais né catholique ou communiste ce serait
513 il se trouve que je suis né protestant, mais si j’ étais né catholique ou communiste ce serait la même chose : je fais partie
514 t, mais si j’étais né catholique ou communiste ce serait la même chose : je fais partie religieusement — si j’étais communiste
515 même chose : je fais partie religieusement — si j’ étais communiste, je dirais : idéologiquement — d’un ensemble qui ne recouv
516 qui n’ont pas du tout de frontières communes, qui sont répandues n’importe comment sur toute la surface de la Terre. Et je s
517 x voter ! où je dois payer mes impôts ! Tout cela est parfaitement clair, il n’est pas du tout difficile de s’en souvenir !
518 s impôts ! Tout cela est parfaitement clair, il n’ est pas du tout difficile de s’en souvenir ! Donc on peut parfaitement — 
519 les mouvements totalitaires d’aujourd’hui, que ce soit le totalitarisme de Staline ou celui de Hitler, dont la devise était
520 sme de Staline ou celui de Hitler, dont la devise était presque la même que celle de la Ligue : « Ein Volk, ein Reich, ein Fü
521 il faut correspondre à la réalité de l’homme, qui est multiple. L’homme relève de toutes sortes de niveaux différents, et i
522 ève de toutes sortes de niveaux différents, et il est normal qu’il y ait des autorités différentes qui y correspondent. J’e
523 de tort à la notion nouvelle de région. Tout cela serait vrai, s’il n’y avait pas un pouvoir — j’allais dire central, il faut
524 rif, un politicien local. La tyrannie du « boss » est bien pire encore que celle du centre, parce qu’elle s’exerce à bout p
525 terrible. Alors, pour lutter contre ce danger qui est très réel, il faut absolument maintenir des pouvoirs fédéraux, mainte
526 cela se complique un peu : Il ne faut pas que ce soit le même État, siégeant avec tous ses ministères dans la même capitale
527 ion de l’Europe qui aurait une seule capitale, où seraient réunis tous les gouvernements : économique, politique, culturel, soci
528 avons déjà en puissance dans le Marché commun. Qu’ est -ce que le Marché commun ? Une agence qui n’a d’autorité que sur le pl
529 nationaux. On peut imaginer d’autres régions, qui seraient des régions culturelles, ethniques, qui auraient d’autres centres qui
530 ues, qui auraient d’autres centres qui pourraient être situés dans d’autres villes. Je suis en train de vous parler maintena
531 i pourraient être situés dans d’autres villes. Je suis en train de vous parler maintenant de la partie la plus difficile, de
532 dont vous avez une petite idée, cette fédération serait amenée à prendre une position neutre à l’échelle mondiale. Simplement
533 verses et qu’on veut respecter ces diversités, on est amené à prendre une position neutre. J’imagine que l’Europe, qui a te
534 e position politique commune sur le plan mondial, serait amenée, si elle avait un organe fédéral politique commun, à prendre d
535 là, contrairement à ce que certains disent, elle serait un élément d’équilibre et de pacification à l’échelle du monde, ce qu
536 tion à l’échelle du monde, ce qu’elle ne peut pas être aujourd’hui. Elle a été, et vous le savez bien, exactement le contrai
537 , ce qu’elle ne peut pas être aujourd’hui. Elle a été , et vous le savez bien, exactement le contraire : à deux reprises, el
538 exactement le contraire : à deux reprises, elle a été déséquilibrée et a mis le monde entier à feu et à sang à cause des Ét
539 et en 1939. Alors, quand on dit : « L’État-nation était une étape nécessaire, cela a tout de même rendu des services », moi j
540 toujours dit que c’était nécessaire quand cela s’ était fait… Mais qu’est-ce que cela a donné ? Cela a donné 38 millions de m
541 était nécessaire quand cela s’était fait… Mais qu’ est -ce que cela a donné ? Cela a donné 38 millions de morts en deux guerr
542 donné 38 millions de morts en deux guerres. Ce n’ est pas mal. Je trouve qu’il suffit bien à juger la formule de l’État-nat
543 er la formule de l’État-nation, ce résultat qui n’ est pas attribuable à autre chose. Car s’il n’y avait pas eu les États-na
544 res — en tout cas pas dans ces proportions-là. Je suis donc pour une Suisse qui continuerait à être neutre en tant que modèl
545 . Je suis donc pour une Suisse qui continuerait à être neutre en tant que modèle d’une fédération européenne, mais qui ne pr
546 qui ne deviendrait possible qu’au moment où elle serait unie. Ce qui n’est pas du tout possible aujourd’hui. g. Édition ré
547 ssible qu’au moment où elle serait unie. Ce qui n’ est pas du tout possible aujourd’hui. g. Édition réalisée sur la base
11 1970, {Title}. 1931-1937 ou les années tournantes (années 1970)
548 ntôt antagonistes et tantôt complices, qu’il nous est devenu facile de distinguer et de nommer après coup : — le nationalis
549 despotique infligée à des masses traumatisées. Il est plus que probable que ces quatre facteurs principaux, successivement
550 7 que ces courants de forces ont fait un nœud, se sont noués d’une manière décisive, fatidique, justifiant le titre d’années
551 ler, ou le facteur nationaliste Le xx e siècle est né en 1919, des œuvres d’une des guerres les plus absurdes de l’histo
552 ries du siècle précédent, dans la mesure où elles étaient communes aux socialistes et aux capitalistes ; théories jacobines de
553 s centraux par les démocraties de l’Ouest avaient été nommés « traités de banlieue » parce que Paris était encore centre du
554 té nommés « traités de banlieue » parce que Paris était encore centre du monde et que ses villes de banlieue avaient offert a
555 s et non moins erronés des « puissances ». Tout y était faux, dans le détail et le principe. Les frontières des langues passa
556 haleur, mais aussi de leurs voisins slovaques à l’ Est , et germanophones à l’Ouest ? Qui peut nier que l’une des causes dire
557 Tous les « traités de banlieue » de 1919 avaient été fondés sur les dogmes et les clichés stato-nationalistes inventés par
558 t partout répétés. Or pas un de ces miracles ne s’ est jamais produit, nulle part. Le Danube, le Rhône et le Rhin, la Vistul
559 le Vardar ou le Pô, les Alpes et les Pyrénées ne sont ni des séparations ni des « limites naturelles », mais au contraire d
560 des Pyrénées le basque à l’ouest, le catalan à l’ est , et que sur les deux versants des Alpes on parle tantôt l’italien (co
561 main, allemand ou hongrois selon les villages. Il est faux que le Rhin divise Français et Allemands tandis que le Rhône uni
562 Rhône unirait Provençaux et Languedociens. Et il est aberrant de vouloir faire coïncider les frontières linguistiques avec
563 les nécessités de la mobilisation militaire) ne s’ est totalement épanouie en Europe qu’au lendemain de la victoire franco-a
564 — celle du Duce déjà, celle du Führer demain — n’ est donc nullement nouveau ni scandaleux : il figure dans tous les préamb
565 sés par les vainqueurs « démocrates » de 1918. Il est absolument conforme à l’esprit des manuels scolaires de tous les pays
566 eté absolue » et à ses « limites naturelles ». Ce sont les lois, les surprises et les crises de l’économie capitaliste qui v
567 all Street, le « jeudi noir » du 24 octobre 1929, fut une sorte de fulgurante pneumonie double, quasi mortelle pour les Éta
568 r, le roi des allumettes. La crise, d’ailleurs, n’ est pas seulement financière. Faute de profit et non de besoins humains,
569 er. Dans tous les pays développés ou en voie de l’ être (sauf l’URSS, restée hors des circuits capitalistes), la production i
570 ainsi que leurs dépendances coloniales ; mais ce sont les pays décisifs. ⁂ Échec des institutions internationales À c
571 és, les seules réponses valables, à première vue, seraient celles qui résulteraient d’une concertation internationale et qui pou
572 une concertation internationale et qui pourraient être appliquées à une échelle internationale. Or on assiste au cours des a
573 Plan d’union des États européens. Ce plan allait être rédigé par le plus proche conseiller de Briand, Alexis Léger — plus t
574 rs sacro-saintes souverainetés nationales (ce qui est une faiblesse), mais aussi et surtout des tâches communes, créant des
575 munes, créant des « solidarités de fait », et qui seraient propres à surmonter progressivement les conflits nationaux d’intérêts
576 stige. Les réponses des États, parvenues en 1930, étaient très en retrait sur l’enthousiasme qui avait accueilli le discours Br
577 ne suffit à faire enterrer le seul projet qui eût été susceptible de barrer la route au national-socialisme, justement ! Dè
578 e poste de délégué à la Conférence du désarmement soit déclaré héréditaire… L’année suivante, Hitler déchire le traité de Ve
579 harte non seulement se révèlent inopérantes, mais sont très vite ridiculisées par la sortie des États condamnés, qui se drap
580 lancer de la sorte leurs industries lourdes. Il n’ est pas une année, de 1930 à 1937, qui ne marque une nouvelle étape de la
581 u éloquents, mais hypocrites, sapées avant même d’ être mises en œuvre, ridiculisées à l’envi, puis éliminées, qu’il s’agisse
582 en commun vraiment réussie des années 1931 à 1934 est celle des crises financières, économiques et sociales. Et le seul pac
583 es, économiques et sociales. Et le seul pacte qui sera respecté, le fameux « pacte d’acier » conclu en 1936 entre Hitler et
584 ussolini, rejoints l’année suivante par le Japon, sera conclu en vue de la guerre, pour justifier la guerre d’Éthiopie, l’ag
585 e la défaite militaire ou de la crise économique, seront les premières à se redresser, et de la manière la plus radicale. La g
586 tionale, va-t-elle aggraver les nationalismes qui sont à sa source. Les causes immédiates de la Seconde Guerre mondiale sont
587 s causes immédiates de la Seconde Guerre mondiale sont nouées dès 1936-1937, années où l’on voit s’annoncer le pacte germano
588 ite par Prague. Quant aux causes profondes, elles tiennent aux solutions que les différentes nations prétendent donner ou se rév
589 e peut, voilà le seul but « concret » et le reste est « chimères »… Mais à l’Est, ces « chimères » ont pris le pouvoir ! Po
590  concret » et le reste est « chimères »… Mais à l’ Est , ces « chimères » ont pris le pouvoir ! Pouvoir brutal, terriblement
591 les plus simples et les plus jeunes. Le reste qui est « chimères », c’est simplement Staline, Mussolini, Hitler, bientôt Fr
592 résident tout entières dans ce seul fait : que ce sont là deux tentatives colossales pour restaurer une mesure commune. Le s
593 lutions, suffirait à prouver ma thèse. Quelle que soit la haine violente qui oppose un Staline et un Hitler, ils se ressembl
594 Hitler, ils se ressemblent au moins en ceci, qui est décisif : c’est qu’ils veulent l’un et l’autre imposer à leur peuple
595 e à l’action et à la pensée. Et dans ce sens, ils sont les vrais génies du siècle, dès lors qu’il s’agit de construire. Mais
596 re. Mais que valent ces mesures imposées ? Quelle est la vérité des fins qu’elles servent ? Et si ces fins se réalisent, éc
597 meilleurs et des plus humains des hommes, qui s’y seront d’abord sacrifiés, de gré ou de force ? Les sauveront-elles vraiment
598 s haute vérité ? ⁂ La commune mesure soviétique est représentée par les fameux « plans quinquennaux », dont le deuxième c
599 rxiste du matérialisme dialectique ou « diamat », sont en réalité des ensembles de mesures autoritaires dictant à l’industri
600 ournal moscovite de 1935 : « Le niveau culturel a été élevé par le Torgsin (magasin offrant des produits étrangers). Le Tor
601 on accélérée dites « stakhanovistes » (dès 1935), sont donc données comme autant de progrès culturels et de « conquêtes popu
602 octrine) du deuxième plan. Les « grandes purges » sont inaugurées en 1934, et vont conduire aux trop fameux « procès de Mosc
603 nt analogues à celles du dictateur géorgien qui s’ est emparé de tous les pouvoirs sur toutes les Russies, en 1924, se sont
604 les pouvoirs sur toutes les Russies, en 1924, se sont manifestées dès la même année, avec une intensité plus grande, sur un
605 période qui nous intéresse. Sa doctrine politique tient tout entière en deux lignes, voire en un mot : « Rien hors de l’État,
606 le succès littéralement vertigineux — le vertige étant l’attrait de ce qu’on redoute — des appels du Duce à « combattre, obé
607 et dynamique. Seulement, croire, obéir, combattre sont des verbes qui exigent leur tribut de réalités concrètes et actives :
608 e tente ici de restituer les dynamismes. Hitler a été le dictateur totalitaire par excellence. Il a réussi à surpasser — et
609 ouvrir, après coup, avec quelle rapidité Hitler s’ est révélé, manifesté et imposé, dans toutes les dimensions de son projet
610 , de son complot mégalomane. De 1933 à 1937, tout est fait ou noué, il n’y aura plus — en 1938 et 1939 — qu’à laisser faire
611 e vote librement pour Hitler. Le Front du travail est créé. Le chômage est en baisse rapide. Les lois de Nuremberg légitime
612 Hitler. Le Front du travail est créé. Le chômage est en baisse rapide. Les lois de Nuremberg légitiment et déchaînent l’an
613 s d’Hitler annoncent en réalité que les décisions sont prises et les plans élaborés pour l’Anschluss et la satellisation des
614 passais une année de lectorat à Francfort), ce n’ était pas seulement la guerre, seul but visible et seule justification poss
615 qui me donnait le frisson de l’horreur sacrée, ce fut la certitude, éprouvée jusqu’aux moelles pendant que, pressé dans une
616 rande cérémonie sacrale d’une religion dont je ne suis pas, et qui m’écrase et me repousse avec bien plus de puissance, même
617 blement tendus et hurlant leur salut au héros. Je suis seul, et ils sont tous ensemble. ( Journal d’une époque ) Tous ensem
618 hurlant leur salut au héros. Je suis seul, et ils sont tous ensemble. ( Journal d’une époque ) Tous ensemble : liés par une
619 hoix d’une profession, idéologie et costume, tout est prescrit par le Parti qui est le porte-voix du dictateur, lequel n’es
620 ie et costume, tout est prescrit par le Parti qui est le porte-voix du dictateur, lequel n’est à son tour que l’âme de son
621 arti qui est le porte-voix du dictateur, lequel n’ est à son tour que l’âme de son peuple faite homme. Alors que Staline vou
622 t l’infaillibilité. Toutes ces vertus religieuses sont chantées à l’envi par les slogans du parti au pouvoir et les poètes p
623 l’Azerbaïdjan et du Caucase) ; quant à Hitler, il est non seulement infaillible, mais invincible et intouchable : tous les
624 nt échoué. Chacun se sent seul, à l’Ouest, et ils sont tous ensemble. C’est cela qui fait l’attrait et la fascination des di
625 le « Une Foi, une Loi, un Roi ». Mais la devise n’ était qu’un vœu et le slogan est une réalité. Cette espèce de paralysie de
626  ». Mais la devise n’était qu’un vœu et le slogan est une réalité. Cette espèce de paralysie des hommes politiques libérau
627 itler et Mussolini d’un côté, Staline de l’autre, sont dès lors convaincus que les démocraties, par amour de la paix à tout
628 ront les mains libres quoi qu’ils fassent — et ce sera l’une des causes de la guerre de 1939. À l’autre extrême, les États-U
629 uivante — 13 millions de chômeurs ! — , Roosevelt est élu, au moment même où Hitler prend un pouvoir dictatorial, suivi par
630 Portugal et le caporal Batista à Cuba. Roosevelt est un grand bourgeois capitaliste. Il esquisse et fait appliquer avec l’
631 a son programme. La droite échoue parce qu’elle s’ est liée aux ligues. Or ces ligues n’ont pas compris que le fascisme et l
632 pris que le fascisme et le national-socialisme ne sont pas des mouvements de droite, des partis de l’ordre, mais des religio
633 perser sans avoir osé renverser le Parlement, qui est à 200 mètres. Ce jour-là, le fascisme est mort en France. Un an plus
634 nt, qui est à 200 mètres. Ce jour-là, le fascisme est mort en France. Un an plus tard, après une vague de grèves et de scan
635 s unis), qui accède au pouvoir en 1936, Léon Blum étant président du Conseil. Mais la gauche ne réalisera pas mieux que la dr
636 tes les pressions politiques et financières, n’en sera pas moins le premier en Europe à instaurer des lois du travail réelle
637 socialistes, alors que les communistes russes en sont à caporaliser la classe ouvrière au service du prestige national, de
638 a production d’acier pour les canons. ⁂ 1935 peut être considérée comme « l’année tournante » parce qu’on y assiste à une sé
639 national-socialisme (ou national-communisme) à l’ Est , pointe vers la catastrophe majeure que sera la guerre. Elle opposera
640 ) à l’Est, pointe vers la catastrophe majeure que sera la guerre. Elle opposera nécessairement les groupes de nations qui se
641 sera nécessairement les groupes de nations qui se sont définis entre les années 1931 et 1935 : celui des nantis, mais qui n’
642 trouvé le secret d’une nouvelle fraternité. (Ce n’ est pas vrai : il ne s’agit que d’une discipline militaire.) ⁂ Cette desc
643 aître uniformément pessimiste et négative. Elle l’ est en fait, puisque tous les faits bruts et tous les dogmes politiques d
644 a sauvé l’honneur de l’Europe, en ces années, ce sont quelques intellectuels, savants, théologiens, écrivains et philosophe
645 ges de l’anarchie « porteuse de flambeaux » qu’il est paradoxal de voir naître au pays du rationalisme, des lois laïques et
646 ne. Ce très beau cri contre la tyrannie n’a hélas été poussé que dans les pays libéraux, où il m’entraînait ni la prison — 
647 e vrai moment de conscience des années 1930, ce n’ est évidemment ni chez les totalitaires ni chez les artistes anarchisants
648 ussi (clandestinement) dans les pays de l’Axe, il est demeuré beaucoup moins voyant que ne l’était alors le surréalisme (ou
649 xe, il est demeuré beaucoup moins voyant que ne l’ était alors le surréalisme (ou que ne le serait plus tard l’existentialisme
650 que ne l’était alors le surréalisme (ou que ne le serait plus tard l’existentialisme) ; il n’a pas entraîné ou violenté les ma
651 hypocrites ou larvées de l’État totalitaire (qui est « l’état de guerre en permanence »), antifascistes et anticommunistes
652 rofit d’institutions régionales et continentales, était capable d’éviter la guerre et de changer les destins de l’Europe. Ces
653 de changer les destins de l’Europe. Ces doctrines étaient faites littéralement pour inspirer les groupes non communistes de la
654 r de cette génération. Entretemps, on le sait, ce fut d’un autre prophète, mais sans message celui-là, d’un prophète de l’a
655 oudain se révèle à l’Européen comme le sien, quel est l’homme tant soit peu cultivé qui s’est écrié : « C’est du Kafka ! »
656 à l’Européen comme le sien, quel est l’homme tant soit peu cultivé qui s’est écrié : « C’est du Kafka ! » Telle fut la gloir
657 ien, quel est l’homme tant soit peu cultivé qui s’ est écrié : « C’est du Kafka ! » Telle fut la gloire posthume de l’écriva
658 tivé qui s’est écrié : « C’est du Kafka ! » Telle fut la gloire posthume de l’écrivain qui seul peut-être se savait justifi
659 ssamment assumé la négativité de mon temps, qui m’ est du reste très proche, que je n’ai pas le droit de combattre, mais que
12 1970, {Title}. Discours au Cercle de la presse et des amitiés étrangères (13 octobre 1970)
660 re 1970)j Mesdames, Messieurs, Je me propose d’ être devant vous, ce soir, pendant une quinzaine de minutes, délibérément
661 et m’attacher à un thème de réflexion unique, qui sera le contraire de toute espèce de propagande pour une cause quelconque
662 de propagande pour une cause quelconque puisqu’il sera interrogatif, et que voici : — Pourquoi un écrivain, comme j’en suis
663 et que voici : — Pourquoi un écrivain, comme j’en suis un essentiellement, s’occupe-t-il de l’Europe comme je le fais depuis
664 e le fais depuis 22 ans ? — Combien de fois ne me suis -je pas entendu reprocher d’aller me « perdre » dans la politique et d
665 nt l’esprit, c’est-à-dire après ses études, je me suis trouvé jeté dans un Paris qui était alors le vrai centre du monde int
666 études, je me suis trouvé jeté dans un Paris qui était alors le vrai centre du monde intellectuel, le carrefour des inquiétu
667 , le carrefour des inquiétudes du temps. Et je me suis vu mis au défi tout à la fois de gagner ma vie, de justifier mon beso
668 e en grattant du papier — , enfin de savoir qui j’ étais . Car plus grand-chose, alors, n’allait de soi, dans un monde où les d
669 e et le Père des peuples : la guerre venait, nous étions quelques jeunes à la prévoir inévitable. Il s’agissait de savoir pour
670 maines, quel idéal, ou quel type d’homme — qui ne fût ni cet individualiste politiquement irresponsable que préparait l’éco
671 par les trois grands régimes totalitaires. Je me suis donc vu contraint de commencer mon œuvre d’écrivain par une réflexion
672 ain par une réflexion sur ce qui fait qu’un homme est ou devient lui-même et pas un autre, et se sent justifié d’exister pa
673 leur ressemble assez pour les aimer, tels qu’ils sont — c’est-à-dire en tant qu’autres. Réflexion à la fois religieuse au s
674 tion somme toute assez simple de la personne, qui est pour moi le contraire d’une abstraction, qui est l’homme réel, agissa
675 est pour moi le contraire d’une abstraction, qui est l’homme réel, agissant, créateur — même s’il n’est créateur d’aucune
676 st l’homme réel, agissant, créateur — même s’il n’ est créateur d’aucune autre œuvre d’art que de lui-même, précisément : la
677 la fois libre et responsable — libre parce qu’il est responsable et donc capable d’agir selon son choix — responsable parc
678 d’agir selon son choix — responsable parce qu’il est libre et donc capable d’assumer son choix. (Un tribunal ne tient jama
679 donc capable d’assumer son choix. (Un tribunal ne tient jamais pour responsable un homme dont il est établi qu’il n’était pas
680 ne tient jamais pour responsable un homme dont il est établi qu’il n’était pas libre en commettant l’acte incriminé.) L’hom
681 r responsable un homme dont il est établi qu’il n’ était pas libre en commettant l’acte incriminé.) L’homme à la fois libre et
682 les mains . Or, cette formule de la personne, il est clair qu’elle ne peut se traduire, sur le plan politique, que par la
683 oi et comment ? C’est très simple. Si la personne est la co-existence, dans un individu, de sa vocation unique (mystérieuse
684 évident et contraignant) — de même le fédéralisme est la co-existence, dans une communauté, de l’autonomie de chacun et de
685 omme les pôles positif et négatif. Mais voici qui est plus remarquable : ces mêmes définitions s’appliquent exactement à la
686 exactement à la plus petite cellule sociale, qui est le couple. Couple de l’homme et de la femme qui ont chacun sa loi dis
687 acceptation de la liberté de l’autre. L’égalité n’ est qu’un mensonge, une tyrannie, un lit de Procuste si elle n’est pas un
688 songe, une tyrannie, un lit de Procuste si elle n’ est pas un mystère de l’amour. Dans ces mêmes termes, et c’est assez extr
689 e en traduisant Karl Barth, du temps béni où je n’ étais encore qu’un « intellectuel en chômage », c’est-à-dire quelqu’un qui
690 antérieure de six siècles au christianisme et qui est , je crois, celle que j’ai le plus souvent citée dans mes écrits : « C
691 é en Suisse pendant un an, puis envoyé (catapulté serait plus juste) en Amérique. Et qu’est-ce que je découvre là-bas, pendant
692 (catapulté serait plus juste) en Amérique. Et qu’ est -ce que je découvre là-bas, pendant un séjour de six ans ? L’Europe, b
693 ’ils ont tous — une convenance profonde entre les êtres , les façades et les paysages, cette harmonie follement douce et viole
694 se souvient, là-bas — ou qui revient. … Comme je suis revenu un beau jour de 1947, pour atterrir près de Genève, mais en Fr
695 ains où avait vécu Emmanuel Mounier, et qui avait été au xviii e siècle la maison du garde-chasse de Voltaire : constellati
696 éfini par des pourcentages, mais cette Europe qui est un mode de vie et de pensée, un mode de sentir et d’exclure, une aven
697 ans fin d’une société nouvelle dont l’ambition ne soit plus la puissance collective, mais la liberté des personnes adonnées
698 données à leur vocation, ou à sa recherche… Je me suis donc engagé dans l’œuvre européenne, et quand quelques amis sont venu
699 é dans l’œuvre européenne, et quand quelques amis sont venus me chercher le deuxième jour de mon retour en Europe pour m’off
700 urelle du Mouvement européen, j’ai dit « Bon ; je suis prêt à donner à la cause deux ans de ma vie » — et me voilà : cela fa
701 a vie » — et me voilà : cela fait 22 ans, et ce n’ est pas fini, je le crains — et trois des responsables de ce détournement
702 es fieffés pirates non de l’air, mais de l’esprit sont dans cette salle ce soir, mes amis Alexandre Marc, Raymond Silva et H
703 me résume : parti d’une idée de la personne, j’ai été conduit à la doctrine de l’engagement et du fédéralisme, et puis en A
704 e forme de vie politique. Et comme cette croyance est inculquée dans nos esprits par l’école, à ses trois degrés, c’est à l
705 olitique des grands hommes d’État d’aujourd’hui a été déterminée par les manuels d’histoire qu’on pratiquait au degré secon
706 ellent écrivain français, qui bien plus que moi s’ est « perdu » dans la politique et l’administration, je veux parler du gé
707 de demain. Et voilà par quels cheminements je me suis trouvé pris dans les réseaux de l’action pour l’Europe par la culture
708 re. Faut-il avouer que cette forme d’engagement n’ est pas trop romantique en réalité, et comporte un peu plus de servitudes
709 e vous peut l’imaginer, je n’insiste pas, et ce n’ est pas un propos de soir de fête. Nous sommes un institut privé, libre
710 et ce n’est pas un propos de soir de fête. Nous sommes un institut privé, libre comme l’air, et cela signifie pratiquement :
711 ix. Si l’argent fait défaut, c’est que l’esprit n’ est pas mûr. Tout se ramène donc à des problèmes d’éducation, d’informati
712 t vivre, et tout d’abord survivre matériellement, fût -ce au prix de perpétuelles acrobaties, comme il a bien fallu le faire
713 omme il a bien fallu le faire depuis vingt ans. J’ étais à Strasbourg, en 1950, attendant un peu anxieusement le vote par l’As
714 deux : renoncez appui moral. » Ah ! si les choses étaient aussi faciles ! Mais j’ai appris, depuis ce temps-là, que si un État
715 moral. Et j’ai appris qu’en fin de compte rien n’ est plus précieux dans la vie que l’appui moral des amis et des camarades
716 xelles et du Conseil de l’Europe, à tous ceux qui sont venus de loin nous entourer, nous le petit groupe de Genève, renouvel
717 ères années de luttes. Il se peut que le plus dur soit fait. Et maintenant tournons-nous ensemble, avec une confiance renouv
718 tre espoir, vers cette Europe unie et fédérée qui sera faite dans les vingt ans qui viennent, cette Europe dont j’aime à rép
719 nt, cette Europe dont j’aime à répéter qu’elle ne sera pas nécessairement et à tout prix la plus puissante ou la plus riche,
13 1970, {Title}. « Ô saisons ! Ô châteaux ! » (novembre 1970)
720 en Amérique. Quelques années. La route américaine est exaltante à travers les forêts de « l’été indien », comme le sont les
721 ricaine est exaltante à travers les forêts de « l’ été indien », comme le sont les gratte-ciel de Manhattan sur un fond d’or
722 travers les forêts de « l’été indien », comme le sont les gratte-ciel de Manhattan sur un fond d’or pollué, quand on passe
723 tinent, qu’il y manquait un je ne sais quoi… Ce n’ étaient ni grandeur ni beautés éclatantes, ni fascinants bas-fonds de villes
724 d’Ortega y Gasset intitulées « Notes de l’errant été  ». Il s’agit des châteaux de Castille et Léon, mais cela vaut pour to
725 âme au réactif des châteaux… Comment faut-il que soit une vie, pour que son logis soit un château ? » Admirable question !
726 ment faut-il que soit une vie, pour que son logis soit un château ? » Admirable question ! À quoi j’oserai répondre : il fau
727 À quoi j’oserai répondre : il faut que cette vie soit européenne. Voilà qui définit l’Europe mieux que toute autre descrip
728 ystique de sainte Thérèse d’Avila. Château et âme sont si profondément liés, qu’un pays sans château me semble privé d’âme.
729 s sans château me semble privé d’âme. Quelles que soient ses beautés visibles, elles font décor. Les vraies beautés de l’Europ
730 elles font décor. Les vraies beautés de l’Europe sont intérieures, et c’est pourquoi Versailles me laisse indifférent, vagu
731 aucune profondeur. Les vraies beautés de l’Europe sont dans les formes qui enclosent et protègent une aventure secrète, burg
14 1970, {Title}. La Suisse et la CEE (28 novembre 1970)
732 politique de l’administration, etc., etc. Mais il est clair que c’est de tout autre problème que parlait le journal cité. I
733 ue je devrais entendre — par une politique qui ne serait celle d’aucun des domaines que je viens d’énumérer, qui serait la pol
734 d’aucun des domaines que je viens d’énumérer, qui serait la politique, sans qualification, la politique par excellence. Serait
735 sans qualification, la politique par excellence. Serait -ce un être d’abstraction pure ? Si je posais la question au journalis
736 cation, la politique par excellence. Serait-ce un être d’abstraction pure ? Si je posais la question au journaliste auteur d
737 aisant. Il se dirait que je fais la bête. Tant il est clair pour lui, évident, aveuglant, que la politique — au niveau de l
738 it de cette politique proprement dite tout ce qui est économique, monétaire, culturel, social, écologique, etc., à quoi se
739 il, si l’on écarte, une fois de plus, tout ce qui est puissance économique, monétaire, intellectuelle, etc. ? À des questio
740 ilitaire15. Le problème politique suisse numéro 1 est le problème de la neutralité, qui est, au fait et au prendre, en dern
741 se numéro 1 est le problème de la neutralité, qui est , au fait et au prendre, en dernière analyse, un problème militaire, u
742 la politique de puissance des États-nations, qui est militaire en dernier ressort, la coopération ne peut être qu’un pis-a
743 itaire en dernier ressort, la coopération ne peut être qu’un pis-aller. (Comme l’union franco-britannique proposée à l’heure
744 du désastre de 1940.) Le but normal d’une armée n’ est pas de coopérer avec les armées voisines, mais au contraire d’assurer
745 pelé cela : une « amicale des misanthropes ». (Ce sont de ces choses qu’on peut écrire ou dire, mais non pas faire.) Une pol
746 actuel du terme — dont nous venons de voir qu’il est militaire en fin de compte. De même qu’une politique de la Suisse féd
747 ilitaire, non économique). Si de telles finalités étaient solennellement affirmées dans le préambule et réitérées dans le corps
748 u sens que la Suisse déclarait inacceptable. Il y est question de politique économique, commerciale, monétaire, sociale, sc
749 , scientifique, etc., mais on sait assez que ce n’ est pas cela que nos États et l’opinion nomment « politique ». On sait qu
750 a Haye en 1969, rapport Davignon en 1970 — , il a été proposé d’étendre au domaine politique les compétences de la CEE. On
751 EE. On sait aussi que toutes ces propositions ont été repoussées ou différées sine die. Et que, comme l’écrivait Le Monde
752 s et les grandes constructions supranationales ne sont plus de mise aujourd’hui, non seulement en France où le gaullisme a l
753 clus que l’objection suisse, qui déjà se trouvait être sans objet quand il n’y avait que le traité de Rome, ne porte que sur
754 , des « rêves » ou des « arrière-pensées » qui ne sont « plus de mise aujourd’hui ». 3. La CEE doit-elle « s’élargir au d
755 t. Nous avons vu, depuis 1955, que le contraire s’ est produit : les prétentions « politiques » de certains des États membre
756 élargissement, outre qu’il demeure improbable, n’ est pas souhaitable. Imagine-t-on, en Suisse, que le Département fédéral
757 ents ? La prétention que l’on attribue à la CEE n’ est pas seulement inavouable (même si elle existe !), elle est irréalisab
758 eulement inavouable (même si elle existe !), elle est irréalisable, quel que soit le niveau considéré, régional, national o
759 i elle existe !), elle est irréalisable, quel que soit le niveau considéré, régional, national ou continental — si toutefois
760 itiques » attribuées à la CEE ? Ce qui précède étant posé, quelles conclusions en tirer aujourd’hui pour l’Europe, et pour
761 ope : la CEE doit devenir (à mon sens) ce qu’elle est en puissance et très partiellement en fait : l’agence fédérale de l’é
762 continentales. D’autres agences fédérales doivent être créées, dans tous les autres domaines où une politique continentale s
763 résident nommé par roulement). Or ce système, qui est à mes yeux non seulement le seul possible, mais le seul souhaitable,
764 eul possible, mais le seul souhaitable, se trouve être précisément le système du gouvernement fédéral suisse. Le problème ma
765 e problème majeur, pour la Suisse, aujourd’hui, n’ est donc pas de savoir : — comment adhérer à la CEE, nonobstant ses final
766 ne sauraient qu’approuver sans réserve, puisqu’il est le leur. Vous me direz que c’est difficile. Je ne suis pas ici pour e
767 le leur. Vous me direz que c’est difficile. Je ne suis pas ici pour essayer de formuler la solution la plus facile, mais bie
768 e ressemble une dernière fois mes arguments. Si j’ étais le négociateur,si j’étais la Suisse à Bruxelles, je dirais : 1° Le tr
769 ois mes arguments. Si j’étais le négociateur,si j’ étais la Suisse à Bruxelles, je dirais : 1° Le traité de Rome n’a pas de fi
770 donc d’adhérer à ses institutions économiques, 3° étant entendu que les « développements politiques ultérieurs », dont parfoi
771 engagements « politiques » chacune de vos nations est prête, en principe, à assumer elle-même. (Je ne puis admettre que vou
772 ) cette citation de Michel Debré : « La politique est affaire de puissance, et la première marque de la puissance, c’est la