1
re de M. de Traz1, par les précisions importantes
qu’
il apporte sur les rapports de l’Orient et de l’Europe, me paraît dest
2
coups d’œil aigus sur l’âme orientale de l’islam,
que
nous l’avons lu avec un intérêt si soutenu et parfois — je pense à ce
3
testante — si passionné. Nul n’est moins oriental
que
de Traz, et c’est ce qui donne à ses notations tout leur prix. Elles
4
lui-ci est plus dans l’opposition des deux mondes
que
dans la peinture elle-même de l’Orient. Tandis que s’accumulent les t
5
uteur : car il n’est guère de comparaison valable
qu’
entre individus, et comme type d’individu européen Robert de Traz ne p
6
européen Robert de Traz ne pouvait trouver mieux
que
lui-même. S’il dit des Égyptiens : « Le mensonge, autant qu’une polit
7
e. S’il dit des Égyptiens : « Le mensonge, autant
qu’
une politesse, leur paraît une beauté », c’est pour affirmer par contr
8
Ce qui lui permet de voir profond dans cet islam
qu’
il qualifie de « religion du fil de l’eau », ou de « prodigieux stupéf
9
l’attrait du christianisme est dans l’inquiétude
qu’
il nous inflige ». « Ils mettent leur âme en veilleuse, dit-il des rêv
10
qu’à leur mysticisme, partout c’est une démission
qu’
ils désirent. Du difficile oubli de soi-même nous avons fait une vertu
11
acile et en ont fait un plaisir. » Et encore ceci
que
je trouve si juste : « Ce qui définit le plus profondément l’Occident
12
es et le mènent à cette constatation fondamentale
que
« notre intelligence et celle de l’Oriental ne sont pas superposables
13
mpossible, pourra-t-on du moins éviter le conflit
que
certains prétendent menaçant ? Malgré l’« anxiété mélancolique » qu’i
14
dent menaçant ? Malgré l’« anxiété mélancolique »
qu’
il éprouve à se sentir si loin de l’Oriental, les conclusions de M. de
15
ntal, les conclusions de M. de Traz — si tant est
qu’
on peut conclure en une matière si complexe — sont plutôt optimistes.
16
ire à un péril oriental très pressant, ni surtout
que
nous ayons à chercher là-bas notre salut. « La seule leçon à attendre
17
« La seule leçon à attendre des musulmans, c’est
que
le spectacle de leur décadence nous enseigne comment éviter la nôtre.
18
ertaine amertume, où de Traz quitte le ton mesuré
qu’
il s’impose d’ordinaire. Mais j’avoue que m’a parfois un peu gêné cett
19
n mesuré qu’il s’impose d’ordinaire. Mais j’avoue
que
m’a parfois un peu gêné cette présence de la mort qu’il fait sentir p
20
m’a parfois un peu gêné cette présence de la mort
qu’
il fait sentir partout aux lieux mêmes où naquit la religion du « Prin
21
es où naquit la religion du « Prince de la vie »…
Qu’
on ne croie pas, d’ailleurs, que l’attitude presque constamment critiq
22
ince de la vie »… Qu’on ne croie pas, d’ailleurs,
que
l’attitude presque constamment critique de M. de Traz diminue l’intér
23
en elles, révèle sa personnalité peut-être mieux
que
ne le feraient une suite de pages lyriques toujours un peu stylisées.
24
voyageur intelligent, qui n’accepte d’être séduit
que
pour « mieux comprendre », assez « fidèle » à ses origines pour garde
25
pitales suffit à vous en donner la sensation : ce
que
vous pourrez voir durant le reste de votre séjour ne fera que confirm
26
rrez voir durant le reste de votre séjour ne fera
que
confirmer cette première impression. Vienne : assis sur les banquette
27
t des cafés débordants de crème, avec une apathie
qu’
aucun orchestre ne vient troubler, aucune voix haute, aucune couleur v
28
une voix haute, aucune couleur vive. Les journaux
qu’
ils lisent annoncent chaque jour quelque catastrophe imminente, une ré
29
s après-midi entiers devant les deux verres d’eau
que
le garçon renouvelle de temps à autre, à lire des potins tout en essu
30
portant, en cœur noir, la nouvelle… « Savez-vous
qu’
on nous a pris les deux tiers de notre pays ?… Non, non, jamais ! » La
31
eige (une boue ocre, épaisse, on envie les bottes
que
portent les femmes), encombrée de piétons qui traversent en tous sens
32
idylles démodées… Rentrons dans la ville un soir
qu’
elle s’amuse. Vous avez dîné au paprika chez des gens qui vous ont reç
33
c’est leur formule de salutation — vous constatez
que
cette profusion de liqueurs légères facilite singulièrement les rappo
34
l y a une chose au monde plus difficile à réussir
qu’
un beau roman : c’est un roman chrétien. Qu’est-ce donc qu’un roman ch
35
ussir qu’un beau roman : c’est un roman chrétien.
Qu’
est-ce donc qu’un roman chrétien ? Une histoire où tout le monde « se
36
u roman : c’est un roman chrétien. Qu’est-ce donc
qu’
un roman chrétien ? Une histoire où tout le monde « se conduit bien »
37
ristianisme. Et l’on serait en droit de prétendre
qu’
un roman pessimiste à la Thomas Hardy a plus de chances d’être chrétie
38
la Thomas Hardy a plus de chances d’être chrétien
qu’
un quelconque happy end soi-disant édifiant, s’il est certain que l’Év
39
e happy end soi-disant édifiant, s’il est certain
que
l’Évangile et ses promesses de salut sont seuls capables de donner à
40
nent des existences bien plus proches de la nôtre
que
celle du passant qu’on coudoie. Moins d’art peut-être, je veux dire m
41
ien plus proches de la nôtre que celle du passant
qu’
on coudoie. Moins d’art peut-être, je veux dire moins d’apparent lyris
42
peut-être, je veux dire moins d’apparent lyrisme
que
chez l’auteur de Gösta Berling : mais une sobriété qui vous saisit le
43
st un des grands pouvoirs des romanciers du Nord,
que
d’introduire la durée d’une vie comme protagoniste du drame.) Des fra
44
éraire, à la fin du siècle dernier, pour soutenir
que
la réalité c’est le terne train-train des journées. Ils avaient en so
45
nous. À chacun sa réalité : elle dépend du regard
qu’
on porte sur les choses. Le regard « réaliste » de Hildur Dixelius a s
46
es folies, l’originalité bouleversante des êtres,
qu’
il s’agisse d’un grand évêque ou de cette fille de ferme « au mince vi
47
être aussi des saints qui se croient plus mauvais
que
tous ; surtout et jusque dans les choses, un mystère inquiétant se ré
48
aux yeux de celui qui sait voir parce que, mieux
que
d’autres, il sait aimer. Et sur ce monde, qu’il est, sur ces vies dou
49
eux que d’autres, il sait aimer. Et sur ce monde,
qu’
il est, sur ces vies douloureuses, banales ou touchantes, mal engagées
50
mbole d’une miséricorde lumineuse, dont on dirait
qu’
elle est le vrai sujet de ce grand livre. Je ne vous conterai pas « l’
51
, à l’instar de l’affiche (dont il faut regretter
qu’
elle soit elle-même un affreux barbarisme importé d’outre-Manche). Mai
52
crivain (I) (15 février 1937)d On n’ignore pas
que
les partis de gauche, en France, et spécialement le parti communiste,
53
dans leur dictionnaire) « anguille sous roche » ?
Que
signifie, notamment de la part des marxistes, qui soutinrent si longt
54
éfractaires à la caporalisation intégrale. Quelle
que
soit la part de vérité que comporte ce point de vue simpliste (et ce
55
tion intégrale. Quelle que soit la part de vérité
que
comporte ce point de vue simpliste (et ce n’est pas chez nous qu’on l
56
point de vue simpliste (et ce n’est pas chez nous
qu’
on la niera) il faut reconnaître qu’il est essentiellement négatif. Ca
57
pas chez nous qu’on la niera) il faut reconnaître
qu’
il est essentiellement négatif. Car à la vérité, et si libre qu’elle s
58
ntiellement négatif. Car à la vérité, et si libre
qu’
elle soit encore, Dieu merci, la culture française est malade elle aus
59
tive des masses. (On lit beaucoup moins en France
qu’
en Suisse et qu’en Allemagne.) Elle me paraît souffrir ensuite, et peu
60
(On lit beaucoup moins en France qu’en Suisse et
qu’
en Allemagne.) Elle me paraît souffrir ensuite, et peut-être plus grav
61
n orgueil et de l’amour de sa Muse. C’est l’image
que
vulgarisait, tout récemment encore, le timbre-poste vendu au profit d
62
voir au cinéma. C’est agréable, pour un écrivain,
qu’
on croie tout cela… Je doute que ce soit bien utile. Un membre de l’Ac
63
pour un écrivain, qu’on croie tout cela… Je doute
que
ce soit bien utile. Un membre de l’Académie Goncourt, M. Jean Ajalber
64
. Là-dessus, les bonnes gens disent d’ordinaire :
que
ne prennent-ils un second métier, ces écrivains ! La littérature n’es
65
cond métier, ces écrivains ! La littérature n’est
qu’
un luxe, elle n’a pas à nourrir son homme. Et l’on cite M. Duhamel, qu
66
n cite M. Duhamel, qui est médecin. Voire ! Outre
que
les cas de « second métier » sont rares et fort peu concluants (Duham
67
nts (Duhamel et Daudet n’ont pratiqué la médecine
que
durant les années de naturalisation de leur œuvre), il est clair que
68
es de naturalisation de leur œuvre), il est clair
que
la création artistique requiert toutes les forces d’un homme, et s’ac
69
orts. Comme, d’autre part, on ne saurait admettre
que
seules les personnes fortunées aient quelque chose à dire dans le dom
70
à dire dans le domaine de la culture, il ne reste
qu’
une solution : que l’écrivain vive de sa plume. Or, c’est cela qui dev
71
aine de la culture, il ne reste qu’une solution :
que
l’écrivain vive de sa plume. Or, c’est cela qui devient impraticable
72
mpraticable : l’écrivain ne touche sur les livres
que
dix pour cent du produit de la vente. Supposez une vente normale de t
73
cas du second métier, aggravé sans doute du fait
qu’
il s’agit encore d’écrire, mais dans un style qui ne saurait être celu
74
sans risques graves, pour la plupart. Tout cela,
que
je résume à grands traits, me paraît tendre vers la même limite, et à
75
in de compte l’écrivain à déclarer pathétiquement
que
c’est la société qui est mal faite dans son ensemble, étant faite de
76
ite dans son ensemble, étant faite de telle sorte
qu’
il n’y trouve pas sa place normale. Et ceci suffirait à expliquer que
77
s sa place normale. Et ceci suffirait à expliquer
que
les meilleures œuvres du temps soient des cris de protestation, souve
78
dre neuf dans tout cela. Mais il faudrait d’abord
que
cela se sache ! d. Rougemont Denis de, « Condition de l’écrivain I
79
37)e La situation de l’écrivain moderne, telle
que
je la décrivais dans mon premier article, a notablement empiré du fai
80
moralistes se récrient en vain : l’éditeur répond
qu’
il faut vivre ! Règne de la publicité et de la littérature faite sur c
81
e sur commande, comme s’il ne s’agissait vraiment
que
de commerce, d’épicerie, de macaronis. On exige des produits standard
82
e telles fantaisies. Ainsi la situation est telle
qu’
un éditeur, bon gré mal gré, se voit souvent contraint de refuser les
83
souvent contraint de refuser les meilleurs livres
qu’
on lui offre, et cela pour les meilleures raisons ! Ou s’il tente la c
84
font excessivement rares.) Les débats passionnés
que
vient de soulever le fameux projet de loi Jean Zay démasquent un autr
85
Cette polémique fait apparaître assez clairement
que
la situation est sans issue directe. J’entends que nulle réforme léga
86
ue la situation est sans issue directe. J’entends
que
nulle réforme légale ne suffirait à l’assainir. Et l’on pressent déjà
87
ne suffirait à l’assainir. Et l’on pressent déjà
que
le problème déborde infiniment le plan technique : c’est tout le prob
88
emier réflexe d’économiser sur les livres, plutôt
que
sur toute autre distraction, cinéma ou meetings sportifs ? D’où vient
89
pas seulement matérielles. Je crois au contraire
qu’
elles affectent les sources vives de notre civilisation. C’est pourquo
90
leures armes ? Je persiste à croire, malgré tout,
que
c’est elles qui résoudront le mieux le problème de la culture, — si t
91
public ou aux écrivains ? On objectera sans doute
que
le vrai responsable, c’est la paresse intellectuelle qui sévit dans t
92
tellectuelle qui sévit dans toutes les classes et
qu’
entretiennent le cinéma, la TSF, les illustrés et les hebdomadaires. J
93
les illustrés et les hebdomadaires. Je ne nie pas
que
cela explique bien des choses. Mais d’où vient cette paresse ? D’où v
94
hoses. Mais d’où vient cette paresse ? D’où vient
que
le public se défende aussi mal contre les sollicitations vulgaires de
95
té ? Car, après tout, le public est à peu près ce
qu’
on le fait. En temps normal, il se forme à l’image de ses auteurs préf
96
r l’art. Pour mille raisons diverses, il n’a fait
qu’
empirer depuis. Les grands auteurs de notre siècle ne sont pas des aut
97
se restreinte de la population. Alors qu’un Hugo,
qu’
un Balzac, qu’un Zola atteignent rapidement la masse profonde du peupl
98
de la population. Alors qu’un Hugo, qu’un Balzac,
qu’
un Zola atteignent rapidement la masse profonde du peuple, nous voyons
99
es dans un grand monde de cinéma. Comment veut-on
qu’
il en soit autrement, quand Proust, Gide ou Valéry ne paraissent reche
100
ide ou Valéry ne paraissent rechercher l’audience
que
de très petits cercles d’élus ? Le peuple lit ce qu’on écrit pour lui
101
de très petits cercles d’élus ? Le peuple lit ce
qu’
on écrit pour lui, et si les grands esprits se désintéressent de son s
102
esprits se désintéressent de son sort, il ne peut
que
leur rendre la pareille. Alors le champ devient libre pour une « litt
103
rature » commerciale qui, elle, ne sera soucieuse
que
de plaire à bon compte, c’est-à-dire de flatter des instincts, d’offr
104
l’habitude de demander aux écrivains autre chose
qu’
« une heure d’oubli », une distraction sans conséquence entre les heur
105
t avant le sommeil (bien plus semblable au second
qu’
au premier) la lecture, aujourd’hui, n’est plus du tout ce qu’elle éta
106
r) la lecture, aujourd’hui, n’est plus du tout ce
qu’
elle était au siècle passé pour des millions de personnes de toutes co
107
e et du cœur. Dès lors, les efforts très louables
que
tentent les éditeurs, ou même l’État, pour remettre le livre en honne
108
t perdu. Et s’il s’est perdu, je le répète, c’est
que
les plus grands de nos écrivains ont beaucoup fait pour qu’il se perd
109
laindre. Mais la société en pâtit, plus gravement
qu’
elle ne le croit, sans doute. Une situation si compromise ne se rétabl
110
ou campagne de propagande. Il s’agit bien plutôt
que
les écrivains reprennent le sens de leur fonction sociale avant qu’un
111
déplaisante. Il s’agit, pour eux, de retrouver ce
qu’
on appelle l’oreille du peuple. Mais cela suppose une véritable révolu
112
suppose une véritable révolution dans les valeurs
qu’
ils ont cultivées jusqu’ici ! Car pour guider un peuple, et pour influ
113
seulement d’amuser ou de se montrer original. Et
qu’
on ne croie pas que l’art en souffrirait : l’exemple des grands, d’un
114
ou de se montrer original. Et qu’on ne croie pas
que
l’art en souffrirait : l’exemple des grands, d’un Dante ou d’un Tolst
115
contraire. Jamais un écrivain ne travaille mieux
que
lorsqu’il sent qu’il est en communion avec les soucis de la nation, s
116
un écrivain ne travaille mieux que lorsqu’il sent
qu’
il est en communion avec les soucis de la nation, sa vie réelle et sa
117
e de ces problèmes. On ne manquera pas de me dire
que
la situation est loin d’être aussi grave chez nous qu’ailleurs. C’est
118
a situation est loin d’être aussi grave chez nous
qu’
ailleurs. C’est vrai sans doute. Mais si l’on se borne à le répéter, c
119
ours fatal des choses. J’observais tout à l’heure
que
le public est à peu près ce que les auteurs le font. Mais il est just
120
is tout à l’heure que le public est à peu près ce
que
les auteurs le font. Mais il est juste de dire aussi qu’il a souvent
121
auteurs le font. Mais il est juste de dire aussi
qu’
il a souvent les auteurs qu’il mérite. Or, il importe hautement à notr
122
t juste de dire aussi qu’il a souvent les auteurs
qu’
il mérite. Or, il importe hautement à notre pays d’avoir des écrivains
123
urels sont pour nous, Suisses, plus vitaux encore
que
pour les grandes nations qui nous entourent. Et c’est pourquoi enfin,
124
engés, perdu dans la foule exaltée je me disais :
Qu’
est-ce que tout cela, ce discours, ces clameurs, sinon les phantasmes
125
du dans la foule exaltée je me disais : Qu’est-ce
que
tout cela, ce discours, ces clameurs, sinon les phantasmes d’un rêve,
126
moins héroïque… En vérité, rien n’est plus actuel
que
le phénomène du rêve, je dirais même en politique. Rien n’est plus im
127
rais même en politique. Rien n’est plus important
que
de savoir la qualité, et la nature, des rêves qui mènent le monde, à
128
ouver une étude du rêve et de l’inconscient telle
que
l’a poursuivie M. Albert Béguin, viennent s’ajouter, en 1937, des opp
129
de façon suffisamment profonde, par les relations
qu’
elle établit entre le rêve et la vie réelle. » Or notre époque, plus q
130
le rêve et la vie réelle. » Or notre époque, plus
que
toute autre semble-t-il, s’est attachée à l’étude des rêves : qu’il s
131
semble-t-il, s’est attachée à l’étude des rêves :
qu’
il suffise de citer Freud et Jung et, d’autre part, l’école surréalist
132
hilosophie et sciences de l’homme. Il était temps
qu’
un ouvrage d’ensemble reprenne l’étude du phénomène à ses racines : M.
133
la culture. C’est en effet au romantisme allemand
qu’
il faut remonter si l’on veut étudier la source véritable de préoccupa
134
hanalyse. Les interprétations de la vie onirique,
qu’
il nous propose, sont infiniment plus larges que celles du savant vien
135
, qu’il nous propose, sont infiniment plus larges
que
celles du savant viennois. Elles englobent tout le mystère de la créa
136
us douter de la « modernité » aiguë des problèmes
que
posèrent un Hamann, un Carus, à propos de l’inconscient notamment. To
137
rus, à propos de l’inconscient notamment. Tout ce
que
les plus récentes écoles ont passionnément discuté, se trouve déjà po
138
, par ces penseurs dont nous ignorons tout. C’est
que
leurs œuvres sont pratiquement inaccessibles au public de langue fran
139
exagérer l’importance. Je n’hésite pas à affirmer
que
cette thèse fera date dans l’évolution naturelle du « domaine françai
140
plus avant cette étude, et de montrer l’analogie
que
présentent les recherches d’un Valéry ou d’un Claudel avec celles d’u
141
s dans nos esprits, notamment le préjugé qui veut
que
les romantiques allemands n’aient été que de « doux rêveurs », alors
142
ui veut que les romantiques allemands n’aient été
que
de « doux rêveurs », alors qu’ils furent souvent, en réalité, des esp
143
’une telle synthèse, dont il est permis de croire
qu’
elle exprime la vocation européenne des Suisses français dans l’ordre
144
atteindra la Suisse est l’une des plus violentes
qu’
aient connue les États-Unis. D’autant plus violente, semble-t-il, que
145
États-Unis. D’autant plus violente, semble-t-il,
que
l’enjeu en est plus confus, comme il arrive souvent dans les luttes p
146
— le jeu des totalitaires. Mais Willkie réplique
que
c’est Roosevelt qui, en prétendant demeurer au pouvoir pour un « thir
147
anger dictatorial. Peut-on dire, pour simplifier,
qu’
avec Roosevelt l’entrée en guerre des États-Unis serait un peu plus pr
148
guerre des États-Unis serait un peu plus probable
qu’
avec Willkie ? Ce n’est pas certain. Mais peut-être cette nuance hypot
149
e hypothétique joue-t-elle un rôle plus important
qu’
on ne veut bien le dire, ou qu’on ne veut bien se l’avouer ici dans le
150
ôle plus important qu’on ne veut bien le dire, ou
qu’
on ne veut bien se l’avouer ici dans le choix qu’est en train de faire
151
qu’on ne veut bien se l’avouer ici dans le choix
qu’
est en train de faire le corps électoral américain. Qu’on ne s’y tromp
152
t en train de faire le corps électoral américain.
Qu’
on ne s’y trompe pas : le parti proallemand est extrêmement faible aux
153
du allant aux candidats socialiste et communiste.
Que
s’est-il passé ? Personne ne pourrait le dire avec certitude, pas plu
154
masses, c’est précisément le nombre des inconnues
qu’
elle met en jeu et l’instabilité caractéristique des passions dans ce
155
ses chances, et de ne pas gêner son jeu davantage
qu’
on ne fait lors d’un match. On peut applaudir ou huer, mais non pas en
156
techniciens et arguments personnels. C’est ainsi
que
, dans chaque journal américain, vous pourrez lire quelques articles s
157
aire mi-sportif, et l’on a souvent peine à croire
que
l’enjeu de cette compétition soit tout à fait pris au sérieux par les
158
eux par les électeurs. Pourtant personne n’ignore
que
le sort du pays dépendra certainement — quoique d’une manière encore
159
5 novembre. Ce jour-là, les Américains sauront ce
qu’
ils pensent en tant que nation. Ils auront cessé de parier. Si Rooseve
160
a rumeur qui monta lentement des masses, à mesure
que
la nouvelle faisait le tour du bâtiment, se transmettait dans la prof
161
c ensemble, et qui n’avait pas cessé de démontrer
que
Roosevelt signifiait ruine, division, guerre et inflation, toute cett
162
battu. On peut dire aujourd’hui sans exagération
que
la réélection de Roosevelt a été l’une des trois « Kraftprobe » de la
163
dernière manche, c’est-à-dire l’issue de la lutte
que
soutient l’Empire britannique, essayons de comprendre les raisons de
164
le de cicatriser rapidement ses blessures : signe
que
sa circulation est bonne. Si les oppositions politiques les plus viol
165
à Washington, on examine son projet, et il arrive
qu’
on le charge officiellement de le réaliser. Nombreux sont les professe
166
s, les financiers, les avocats ou les économistes
que
le gouvernement Roosevelt a mis de la sorte au service de la nation,
167
eut s’y intéresser, parce que chacun peut espérer
qu’
on tiendra compte de son avis ou de ses compétences, qu’on lui « donne
168
tiendra compte de son avis ou de ses compétences,
qu’
on lui « donnera sa chance », comme ils disent. Cet esprit de particip
169
a radio : voilà le problème qui se pose, voilà ce
que
nous avons fait, voilà ce qui reste à faire. Le président et ses secr
170
n’importe quelle question. Rien de plus frappant
que
l’absence de démagogie et d’effets oratoires qui caractérise ces comm
171
s. Et ce souci constant de l’humanité du citoyen,
qu’
il s’agisse des nationaux ou des étrangers… Ainsi informée et formée,
172
sent responsable de ses réactions. Lorsqu’on sait
que
l’on sera pris au sérieux, on dit moins de bêtises, on se contrôle da
173
secret réside peut-être dans le fait très simple
que
voici : en réalité, il n’y a pas de partis aux États-Unis. Il serait
174
, indispensable à toute vie démocratique. Le fait
qu’
il n’y a que deux partis, et que ces deux partis ne représentent nulle
175
ble à toute vie démocratique. Le fait qu’il n’y a
que
deux partis, et que ces deux partis ne représentent nullement deux cl
176
cratique. Le fait qu’il n’y a que deux partis, et
que
ces deux partis ne représentent nullement deux classes, à peine deux
177
e deux tendances générales, signifie pratiquement
que
les États-Unis sont une démocratie sans partis. Entre le citoyen et l
178
toyen et les autorités, pas d’autre intermédiaire
que
l’opinion publique. L’Américain ne possède légalement ni le droit de
179
, des mandements et des manifestes. Sait-on assez
que
les Américains sont très conscients et très jaloux de la qualité de l
180
atique. » Cela ne fait pas sourire, quand on voit
que
c’est vrai. j. Rougemont Denis de, « Santé de la démocratie améric
181
ai fait une découverte sur les États-Unis : c’est
qu’
il n’est pas de pays moderne où la religion tienne dans la vie publiqu
182
dans ce pays ; d’autre part, l’importance sociale
que
chacune d’entre elles y revêt. On peut apprécier diversement cette in
183
e d’être connu et médité en Suisse, d’autant plus
qu’
il s’est vu curieusement négligé par la presque totalité des observate
184
musique sacrée, annonces détaillées des services
que
célébreront les principales paroisses de la cité. (Trois cultes chaqu
185
e du pays. Ce qui est étonnant, c’est précisément
que
cela n’étonne personne ici. Je songe à la France laïque de naguère !
186
cloisonnements, et peut-être de prudences aussi,
que
l’on n’imagine pas en Amérique… Cherchant à louer une maison, je parc
187
isse. » Certes, l’on peut sourire de la publicité
qu’
étalent les Églises de province, des grands panneaux de « bienvenue à
188
ince, des grands panneaux de « bienvenue à tous »
qu’
elles plantent à l’entrée de leur ville, et qui promettent des jeux de
189
ises catholiques. On peut déplorer la concurrence
que
se font les diverses dénominations dans un même village. Mais ces tra
190
cellule sociale, c’est la paroisse. Plus sociale
que
religieuse, dira-t-on ? C’est un risque. Mais c’est aussi une possibi
191
mide mystique », déclarant après son installation
qu’
il va se retirer à la campagne pour une semaine de recueillement. Le c
192
vieille Bible de famille, en langue hollandaise,
qu’
il avait choisi d’ouvrir au chapitre 13 de la première Épître aux Cori
193
bénédiction. Si je relève tous ces traits, c’est
que
la presse et la radio ne cesseront de les souligner et de les détaill
194
souligner et de les détailler le lendemain, c’est
qu’
ils sont réellement essentiels à la compréhension de la démocratie amé
195
démocratie américaine. Il est important de savoir
que
les grandes cérémonies civiques et politiques de ce pays, aussi impre
196
et politiques de ce pays, aussi impressionnantes
que
les cérémonies totalitaires, se déroulent dans un cadre chrétien, imm
197
entiment unanime et profond, mais aussi différent
que
possible de ces passions de haine et d’orgueil collectif que l’on exc
198
e de ces passions de haine et d’orgueil collectif
que
l’on excite ailleurs « Ô Dieu, priait le chapelain, revêts notre prés
199
e-le des dons les plus saints du chef, et permets
que
dans ces sombres jours, il puisse conduire un peuple pieux et uni de
200
en sorte de réduire à peu de chose les avantages
que
la machine menaçait de leur procurer, après les avoir décimés. Les av
201
ple, permettaient de voyager vingt fois plus vite
qu’
en bateau. L’on décida en conséquence de rendre vingt fois plus pénibl
202
es. Passer d’Amérique en Europe ne demandait plus
que
quelques heures ? On y ajouta plusieurs semaines de démarches et cont
203
t ainsi la longueur du voyage, pratiquement, à ce
qu’
elle était au bon vieux temps de Christophe Colomb. Et pourtant, me vo
204
éale nous avait arrêtés toute une nuit, non point
que
sa beauté nous eût cloués sur place, mais parce qu’elle provoquait de
205
d’aveugler les avions aux appareils plus délicats
que
les sens de l’homme. Cette belle crise radio-poétique s’étant heureus
206
llé dans le fauteuil profond de l’avion, attendre
que
la Boule au-dessous de nous ait tourné jusqu’au point désiré, pour y
207
Mais tout d’un coup elle se déchire : ce n’était
qu’
une couche de nuages. Trois-mille mètres plus bas paraît une surface b
208
uebot qui en est à la troisième journée du trajet
que
nous ferons à rebours en quatre heures. Nous sommes partis tout au dé
209
s de la gloire aux ténèbres denses. Il n’y a plus
que
, tout près sur nos têtes, les lampes en veilleuse, et le ronron assou
210
rrain d’Orly vers Paris. Sept ans bientôt, depuis
que
je l’ai quitté… Par quelle Porte allons-nous entrer ? Je ne puis pas
211
du convoi m’interrogent. Cet hôtel ne leur plaît
qu’
à moitié. Je les décourage d’aller chercher ailleurs. Crise des logeme
212
chercher ailleurs. Crise des logements. — Est-ce
que
Paris a été bombardé ? me demandent-ils non sans inquiétude. — Et New
213
me ils se mettent immédiatement à ressembler à ce
que
l’on pense d’eux en Europe !) Il y a des chambres, et même des salles
214
, je vais la voir… Tout d’abord je n’ai distingué
qu’
un paysage de toits bleus, médiéval. Et voici qu’une cloche très fine
215
qu’un paysage de toits bleus, médiéval. Et voici
qu’
une cloche très fine a sonné cinq coups délicats. Puis une autre plus
216
ho. Je ne savais plus, après six ans de New York,
qu’
il y a des cloches qui sonnent les heures, et qui s’accordent à la sua
217
n siècle, en direction d’une beauté oubliée. Mais
que
dire de la foule que j’ai vue le lendemain aux trottoirs des Champs-É
218
n d’une beauté oubliée. Mais que dire de la foule
que
j’ai vue le lendemain aux trottoirs des Champs-Élysées ? Je me disais
219
suis pas à Paris. » Et c’est bien un de ces tours
que
nous jouent les cauchemars, de rapetisser méchamment tous les êtres,
220
n retour (fin) (18-19 mai 1946)o Plus Suisse
que
nature Que la Suisse soit restée aussi suisse m’a paru proprement
221
(18-19 mai 1946)o Plus Suisse que nature
Que
la Suisse soit restée aussi suisse m’a paru proprement incroyable. Je
222
able. Je ne trouve ici d’autre sujet de m’étonner
que
de n’en point trouver, justement. Tout est pareil à mes souvenirs, à
223
yés intacte, quand on demande un renseignement et
qu’
on les voit s’identifier, en un clin d’œil, avec les règlements « pare
224
i parfaites dans le propret-coquet scolaire 1910,
que
l’imagination se rend sans condition après la plus rapide reconnaissa
225
bon vin. Et j’ai feuilleté des éditions si belles
qu’
on se demande quels talents les méritent. Ce qu’il y a de plus intact
226
s qu’on se demande quels talents les méritent. Ce
qu’
il y a de plus intact en Suisse, peut-être, c’est le mythe helvétique
227
xcellence, d’une décence fondamentale. Il se peut
que
la Suisse ait seule gagné la guerre, et seule n’ait pas été contaminé
228
n le tient encore pour anormal. J’ai l’impression
qu’
on exagère un peu, à cet égard. Mais le reste du monde se charge de ré
229
de nos frontières. Je viens de voir, du monde, ce
qu’
il en reste et que l’on est autorisé à voir : l’un des deux grands et
230
Je viens de voir, du monde, ce qu’il en reste et
que
l’on est autorisé à voir : l’un des deux grands et le Tout Petit, qui
231
implifie à peine, et c’est déjà cruel — il semble
qu’
il n’y ait plus qu’un no man’s land où s’affrontent sournoisement les
232
t c’est déjà cruel — il semble qu’il n’y ait plus
qu’
un no man’s land où s’affrontent sournoisement les seules Puissances q
233
, comme disent les Anglo-Saxons, pensant au temps
qu’
il fait, tout simplement. Les délégués paraissaient regretter « l’atmo
234
ssaient regretter « l’atmosphère de Genève » plus
que
leur job manqué, d’ailleurs repris par l’ONU. Et, sur ce thème inépui
235
inépuisable, j’improvisai à part moi le discours
que
nul, parmi les officiels, ne se risquait à prononcer : « Messieurs, n
236
torieuse. On a parlé de funérailles. Il ne s’agit
que
d’un déménagement. Nous ne pourrons plus faire signe aux cygnes, comm
237
mme le négatif d’un cliché au positif de la photo
que
l’on va proposer à notre admiration. Elle tient ses dernières assises
238
e nuit. Paradoxe de la crise des logements ! Mais
qu’
importe. Notre idée se « développe », comme on le dit en photographie.
239
artons pour une Ligue meilleure. Et, plus heureux
que
Moïse, nous nous sentons certains d’entrer dans l’ère de la Terre uni
240
y touchons, Messieurs, vraiment — il ne s’en faut
que
d’un atome… » ⁂ Le hasard a voulu que, le soir même, je me visse entr
241
e s’en faut que d’un atome… » ⁂ Le hasard a voulu
que
, le soir même, je me visse entraîné à Cointrin, où se posait dans une
242
ut le monde croit l’avoir vue et s’en va répétant
qu’
il a fallu plus de cinq-cents ans pour sceller son union fédérale. Tou
243
exact. Au début de 1848, la Confédération n’était
qu’
un Pacte d’alliance entre vingt-cinq États absolument souverains. Poin
244
ant la guerre entre les États membres. Niera-t-on
que
ce fût là, trait pour trait, un état comparable à celui de notre Euro
245
il extérieur, qui n’était rien au regard de celui
que
nous courons. Une partie de l’opinion réclamait une Autorité fédérale
246
anières. La routine rétorquait, chiffres en main,
que
la liberté d’échanges ne manquerait pas de causer quelques dommages l
247
utopistes qui proposaient d’éteindre l’incendie,
que
l’eau peut abîmer les meubles. Il y eut une guerre civile entre canto
248
erains. Le 15 mai, la Diète est saisie du projet,
qu’
elle adopte le 27 juin. Pendant le mois d’août, le peuple vote dans le
249
s les cantons. Le 12 septembre, la Diète proclame
que
la Constitution est acceptée par près de 2/3 des États et plus de 2/3
250
s et dûment calculées ne se produisirent. L’essor
que
prit la Suisse, dès cet instant, n’a pas fléchi durant un siècle. Mes
251
fédérer vingt-cinq États souverains… Pensez-vous
que
l’Histoire vous en laisse beaucoup plus, pour unir vos États dans un
252
os États dans un plus grand péril ? Vous me direz
que
l’Europe est plus grande que la Suisse ; qu’il fallut une bonne guerr
253
éril ? Vous me direz que l’Europe est plus grande
que
la Suisse ; qu’il fallut une bonne guerre pour briser le tabou des so
254
irez que l’Europe est plus grande que la Suisse ;
qu’
il fallut une bonne guerre pour briser le tabou des souverainetés cant
255
le tabou des souverainetés cantonales absolues ;
que
les cantons suisses vivaient ensemble depuis des siècles ; que les pr
256
ns suisses vivaient ensemble depuis des siècles ;
que
les problèmes économiques sont plus complexes ; et qu’on ne peut comp
257
es problèmes économiques sont plus complexes ; et
qu’
on ne peut comparer, sans offense, nos modestes sagesses et les folies
258
s Nations contemporaines. Mais il n’est pas exact
que
l’Europe d’aujourd’hui soit plus grande que la Suisse d’alors : vous
259
exact que l’Europe d’aujourd’hui soit plus grande
que
la Suisse d’alors : vous êtes venus de Stockholm à Strasbourg — ou de
260
ou de Rome, ou même d’Ankara — en moins de temps
qu’
il n’en fallait, il y a cent ans, pour aller de Genève ou des Grisons
261
e depuis autant de siècles, et souvent davantage,
que
nos cantons. Leurs sorts ne sont pas moins liés, si vous regardez l’E
262
sont pas plus nombreux, ni moins strangulatoires,
que
ne l’étaient les nôtres. Et vos économies ne sont pas plus disparates
263
res. Et vos économies ne sont pas plus disparates
que
celle de Zurich par exemple, et de ses petits voisins paysans. Les so
264
araisse dans la bouche même de ceux qui affirment
que
nos réalités sont tellement différentes… Certes, comparaison n’est pa
265
faire restent les mêmes quoi qu’il arrive, c’est
qu’
elles traduisent une certaine forme d’esprit, une cécité partielle dev
266
cécité partielle devant les leçons de l’Histoire,
que
j’ai plus d’une raison de nommer le daltonisme politique. Messieurs l
267
isse ; elle existe en dépit de tous les arguments
qu’
on oppose aujourd’hui à l’Europe. Son exemple vivant tend à nous démon
268
’Europe. Son exemple vivant tend à nous démontrer
que
la solution fédéraliste n’est pas seulement praticable en principe, m
269
s’arrêter devant ce fait, pour mieux se persuader
qu’
on peut aller très vite. Car le temps fait beaucoup à l’affaire. Celui
270
te. Car le temps fait beaucoup à l’affaire. Celui
que
vous n’auriez pas, Staline le prend. C’est le temps de méditer avant
271
’est le temps de méditer avant d’agir. Mais celui
que
vous risquez de perdre, cet été, soyez bien sûr qu’il le retrouvera :
272
e vous risquez de perdre, cet été, soyez bien sûr
qu’
il le retrouvera : c’est le temps de modifier non pas des paragraphes,
273
ants fédéralistes, qui pensent comme des millions
que
le temps presse, et que les lenteurs de l’Assemblée, ramenées par les
274
ensent comme des millions que le temps presse, et
que
les lenteurs de l’Assemblée, ramenées par les ministres à l’immobilit
275
s impatients, mais angoissés. Nous ne voulons pas
qu’
on aille vite par doctrine, par manie ou par tempérament, comme nous l
276
principe ceux-là, ont décidé une fois pour toutes
qu’
il faut aller lentement dans tous les cas. Mais nous ne voyons aucun m
277
es cas. Mais nous ne voyons aucun motif de croire
qu’
on leur laissera tout le temps d’aller lentement, et le loisir d’être
278
L’opinion, sur ce point, entretient des soupçons
qu’
il vous faut dissiper. Vous allez, paraît-il, réviser prudemment les s
279
demment les statuts du Conseil de l’Europe, ainsi
que
vos rapports internes avec le comité ministériel. Permettez-moi de vo
280
le comité ministériel. Permettez-moi de vous dire
que
l’opinion s’en moque, parce qu’elle a ses doutes motivés sur vos inte
281
ur vos intentions véritables. Elle n’est pas sûre
qu’
une fois dotés d’un instrument un peu meilleur — moins astucieusement
282
ns faute avant le départ —, vous en ferez l’usage
qu’
elle attend. Elle n’a pas l’impression très nette que vous êtes décidé
283
elle attend. Elle n’a pas l’impression très nette
que
vous êtes décidés à faire l’Europe envers et contre toutes ses routin
284
rt, inquiets de ne pas vous avancer au-delà de ce
qu’
on vous a permis, qui est moins que rien, arrêtés par un alinéa, décon
285
au-delà de ce qu’on vous a permis, qui est moins
que
rien, arrêtés par un alinéa, déconcertés par un éternuement des dalto
286
rtés par un éternuement des daltoniens. Elle voit
que
votre Assemblée consultative d’un comité lui-même consultatif, formé
287
— si l’on peut dire ! — répondent après six mois
que
c’est prématuré, mais qu’il ne faut rien faire en attendant. Et l’opi
288
épondent après six mois que c’est prématuré, mais
qu’
il ne faut rien faire en attendant. Et l’opinion se demande si tout ce
289
naît vos sentiments intimes, qui sont très purs :
qu’
elle distingue mal les forces colossales qui paralysent jusqu’à votre
290
des intentions peut-être subversives (on chuchote
que
vous tenez en réserve un projet de timbre-poste européen). Certes, il
291
experts. Mais rien ne pourra jamais me persuader
qu’
ils aient tous raison à la fois, quand il n’en est pas deux qui tomben
292
est pas deux qui tombent d’accord sur autre chose
que
ne rien faire. Parlons un peu de cette fameuse prudence dont l’éloge
293
éloge inlassable embellit vos discours. En somme,
que
risquez-vous ? Je cherche à voir ce qui peut vous faire peur, ce qui
294
vous faire peur, ce qui peut être plus dangereux
que
l’inaction totale où vous glissez, plus utopique que le maintien du s
295
l’inaction totale où vous glissez, plus utopique
que
le maintien du statu quo, plus follement imprudent que vos prudences
296
e maintien du statu quo, plus follement imprudent
que
vos prudences ? Je ne trouve pas. On dirait que vous avez le trac. Vo
297
t que vos prudences ? Je ne trouve pas. On dirait
que
vous avez le trac. Vous répétez qu’il faut être prudents quand on s’e
298
as. On dirait que vous avez le trac. Vous répétez
qu’
il faut être prudents quand on s’engage dans une entreprise aussi vast
299
r vous ne vous êtes, jusqu’ici, engagés dans rien
que
l’on sache. Quand vous y serez, il sera temps de voir si la prudence,
300
l’Europe par le toit. Je ne sais pourquoi, ni ce
qu’
il veut dire exactement, mais cave ou toit, chacun peut voir que M. Be
301
e exactement, mais cave ou toit, chacun peut voir
que
M. Bevin n’a jamais voulu rien commencer. Au reste, l’Europe existe d
302
ntre pas dans les subtilités. Elle vous demande «
Que
voulez-vous faire ? » Si vous ne voulez pas fédérer l’Europe, vous ne
303
é, vous serez oubliés cet automne. Si vous croyez
qu’
il vaut mieux ne rien faire, ou qu’on ne peut rien faire de sérieux, v
304
Si vous croyez qu’il vaut mieux ne rien faire, ou
qu’
on ne peut rien faire de sérieux, vous pouvez encore rendre un service
305
sez la place à ceux qui ont décidé d’agir. Avouez
que
rien ne vous paraît possible, on comprendra que vous n’êtes plus néce
306
z que rien ne vous paraît possible, on comprendra
que
vous n’êtes plus nécessaires. Mais cessez de faire semblant d’être là
307
entre vous, comme je le crois, sont fédéralistes,
qu’
ils le disent, qu’ils proclament leur but, et tout changera dans un in
308
je le crois, sont fédéralistes, qu’ils le disent,
qu’
ils proclament leur but, et tout changera dans un instant. Il s’agit d
309
blée. Ce n’était pas une attaque, je décrivais ce
qu’
un chacun peut voir de ses yeux. Et plusieurs d’entre vous, je le sais
310
vous, je le sais, s’en affligent. (On peut penser
que
ce n’est pas suffisant.) Aujourd’hui, je voudrais vous dire l’admirat
311
je voudrais vous dire l’admiration et le respect
que
j’éprouve, non point hélas ! pour vos succès jusqu’à cette date, mais
312
pour le rôle qui vous est dévolu, et pour le nom
qu’
il vous convient de revendiquer, celui dont, par avance, je vous salue
313
l’Europe entière, voilà qui signifie, Messieurs,
que
vous avez perdu le droit d’être étrangers sur aucune de nos terres, d
314
le risque et la grandeur d’une liberté nouvelle.
Que
vous le sachiez ou non, vous êtes les députés d’Athènes, de Rome et d
315
em. Les députés de la conscience la plus inquiète
que
l’homme ait jamais prise de son destin et des chances de le surmonter
316
int d’une presqu’île de l’Asie un peu plus grande
que
la Corée, quoique ne dépassant guère 4 % de la superficie du globe, m
317
de l’humanité : notre culture, cette civilisation
que
rien ne s’offre à remplacer, et qui a su remplacer toutes les autres.
318
mplacer toutes les autres. D’où vient, Messieurs,
que
ce cap de l’Asie ait dominé le monde pendant des siècles ? D’où, sino
319
aux Russes — sens de la mesure et sens critique —
qu’
avons-nous inventé, nous les Européens, depuis cent ans ? Je répondrai
320
s les Européens, depuis cent ans ? Je répondrai :
que
n’avons-nous pas inventé ? Je cite pêle-mêle : le marxisme et la psyc
321
— et nos armes, quitte à les tourner contre nous.
Que
sont en fin de compte les deux empires qui prétendent partager notre
322
nde, et qui maintienne l’Europe dans une fonction
qu’
aucun Empire nouveau n’ose lui disputer sérieusement. Je viens d’enten
323
Juan de Mozart retransmis de Salzbourg. Voilà ce
que
l’Europe a su faire. Toute la musique est née du contrepoint de l’Eur
324
! Nous sommes plusieurs millions qui n’attendons
qu’
un signe. r. Rougemont Denis de, « Troisième lettre aux députés eur
325
Athènes, ni de Rome, ni de rien à vrai dire de ce
qu’
a pu signifier le nom d’Europe, c’est bien l’auteur du Manifeste publi
326
otre vieux continent, il n’y voit, si j’ose dire,
que
ce qui n’y est pas ; il voit que ça n’est pas rouge, et que ça n’est
327
, si j’ose dire, que ce qui n’y est pas ; il voit
que
ça n’est pas rouge, et que ça n’est pas anglais. Il distingue un ense
328
n’y est pas ; il voit que ça n’est pas rouge, et
que
ça n’est pas anglais. Il distingue un ensemble de pays peu sûrs, qui
329
bien lu ce pamphlet, d’une étrange arrogance. Ce
qu’
il dit n’est pas toujours clair. Ce qu’il ne dit pas saute aux yeux. L
330
ogance. Ce qu’il dit n’est pas toujours clair. Ce
qu’
il ne dit pas saute aux yeux. L’idée que l’Europe soit une culture, un
331
clair. Ce qu’il ne dit pas saute aux yeux. L’idée
que
l’Europe soit une culture, une unité de civilisation, un foyer d’inve
332
par exemple ne l’effleure pas. Il n’y a pour lui
qu’
un seul problème : la politique du plein emploi ; une seule méthode :
333
les Anglais, nous sommes plus près des Dominions
que
de l’Europe, « par notre langue ; et par nos origines, nos habitudes
334
ique et nos intérêts économiques »… Je ne sais ce
que
les Hindous, les Boers, les Canadiens français et même les Irlandais,
335
es habitudes sociales, les intérêts… On devine ce
qu’
il y aurait à dire là-dessus. Bref, une seule chose paraît claire, dan
336
sa brochure, ce minimum ne saurait être envisagé
que
s’il n’affecte pas les intérêts anglais, et que si toute l’Europe se
337
é que s’il n’affecte pas les intérêts anglais, et
que
si toute l’Europe se convertit à l’étatisme illimité. Ce qui n’offre
338
lée, selon lui, peut faire du bon travail, pourvu
qu’
elle n’ait aucun pouvoir. Mais le Comité ministériel cessera d’être dé
339
e logique fait la nouveauté du daltonisme, encore
qu’
elle ne soit pas tout inconnue des Russes. Elle se fonde sur l’axiome
340
t inconnue des Russes. Elle se fonde sur l’axiome
que
la démocratie est identique au socialisme anglais. Il en découle prim
341
ique au socialisme anglais. Il en découle primo :
qu’
une Assemblée sans majorité travailliste ne saurait être tolérable que
342
s majorité travailliste ne saurait être tolérable
que
dans la mesure où elle reste impuissante — d’où le refus d’un Parleme
343
d’où le refus d’un Parlement européen ; secundo :
que
les champions d’un régime fédéral fondé sur la majorité « doivent êtr
344
conservateurs britanniques des seconds. On devine
que
ces conservateurs suivent une logique non daltonienne : ils partent d
345
rs législatifs, à l’Autorité politique, s’il faut
qu’
elle ait vraiment de l’autorité et ne souffre donc point de veto, les
346
es disent non d’un seul cœur, dans la même langue
que
le chancelier du Lancaster. Opposés en tout, sauf en cela, conservate
347
stes nous obligent donc à constater objectivement
que
leurs motifs profonds ne sont point ceux qu’ils donnent, mais bien ce
348
ment que leurs motifs profonds ne sont point ceux
qu’
ils donnent, mais bien ceux qu’ils subissent plus que d’autres en leur
349
ne sont point ceux qu’ils donnent, mais bien ceux
qu’
ils subissent plus que d’autres en leur île : j’entends le nationalism
350
ils donnent, mais bien ceux qu’ils subissent plus
que
d’autres en leur île : j’entends le nationalisme étatisé et le mythe
351
uve un alibi. Cette passion ne recourt à ce mythe
que
pour garder quelque moyen d’agir sans démasquer sa vraie nature. Car
352
ynbee, qui est un grand historien, écrit au Times
qu’
elles ne font point partie de la doctrine et des dogmes chrétiens. Suá
353
sait très bien, en somme. On essaie de nous dire
que
l’opinion y tient. Quelle opinion, et qui l’exprime ? Les peuples, in
354
n peine d’en comprendre le sens. Ils n’aiment pas
que
l’étranger commande chez eux. C’est tout. Mais s’il faut éviter que l
355
mande chez eux. C’est tout. Mais s’il faut éviter
que
l’étranger soit Staline, ils acceptent fort bien que leurs armées soi
356
l’étranger soit Staline, ils acceptent fort bien
que
leurs armées soient commandées par un Américain. On prétend même qu’i
357
ient commandées par un Américain. On prétend même
qu’
ils auraient accepté que leur monnaie perde un tiers de sa valeur, par
358
méricain. On prétend même qu’ils auraient accepté
que
leur monnaie perde un tiers de sa valeur, parce que Londres avait dév
359
, quand l’armée et l’économie n’en dépendent plus
que
pour la forme et le détail ? Restent les tarifs douaniers, les monnai
360
s pénales et aux systèmes fiscaux, je ne vois pas
que
leur variété ait empêché les États des US ou les cantons de la Suisse
361
La souveraineté nationale absolue n’est donc plus
qu’
un prétexte au droit de veto, qui revient à donner le seul pouvoir rée
362
aïfs, quand c’est par décision d’un État étranger
qu’
ils disent vouloir garder la souveraineté du leur ?) Messieurs les dép
363
ur ?) Messieurs les députés, ce serait pure folie
que
d’essayer de sauver ce qui s’en va, au prix de l’avenir de ce qui est
364
rainetés illusoires — comment faire abandon de ce
qu’
on n’a plus ? — mais de renoncer, une fois pour toutes, à invoquer ce
365
e ! Il y va de notre indépendance, qui vaut mieux
qu’
elles, et qu’elles sabotent. Le peuple suisse, il y a cent ans, n’a pa
366
e notre indépendance, qui vaut mieux qu’elles, et
qu’
elles sabotent. Le peuple suisse, il y a cent ans, n’a pas voté la sup
367
es députés de l’Europe à sauver ! Ceux qui disent
que
« l’Europe sera socialiste ou ne sera pas », savent très bien qu’à ce
368
cela vaut pour tous ceux qui pourraient déclarer
que
l’Europe sera toute catholique, ou protestante, ou française, ou alle
369
lle dure, dans ses diversités de tous les ordres,
que
l’on ne peut préserver que par l’union, et que l’unification tuerait.
370
és de tous les ordres, que l’on ne peut préserver
que
par l’union, et que l’unification tuerait. Mais sans sacrifices d’amo
371
s, que l’on ne peut préserver que par l’union, et
que
l’unification tuerait. Mais sans sacrifices d’amour-propre, sans repl
372
nécessité, il nous reste à leur faire comprendre
que
le pire obstacle, c’est eux-mêmes. Ils nous disent : « Je veux bien,
373
nion, par exemple, n’est pas mûre, et chacun sait
qu’
on ne peut rien faire sans elle. » C’est qu’ils se prennent pour l’opi
374
sait qu’on ne peut rien faire sans elle. » C’est
qu’
ils se prennent pour l’opinion, qu’ils ont négligé d’écouter. Tous les
375
elle. » C’est qu’ils se prennent pour l’opinion,
qu’
ils ont négligé d’écouter. Tous les sondages précis réfutent leurs cra
376
plus pour fédérer la Suisse. Mais l’opinion veut
qu’
on l’entraîne. « On suit ceux qui marchent », dit Péguy. Elle ne vous
377
urmontables. Il y a deux sortes d’opinions, celle
que
l’on invoque, et la vraie. L’une qui sert d’alibi aux démagogues, et
378
, l’autre qui vote. La première est exactement ce
que
la presse et la radio déclarent qu’elle est. Presse et radio voudraie
379
exactement ce que la presse et la radio déclarent
qu’
elle est. Presse et radio voudraient que Dewey soit élu : on dit alors
380
déclarent qu’elle est. Presse et radio voudraient
que
Dewey soit élu : on dit alors qu’il a pour lui toute l’opinion. Truma
381
ait avant cela, bien sûr, mais elle n’a pu parler
que
dans le secret des urnes. L’opinion d’aujourd’hui, je la sens, c’est
382
eil de l’Europe murmurer pudiquement chaque année
qu’
il reste désireux d’envisager l’étude de quelques mesures préalables t
383
important vers l’union ». Et les Anglais jugeront
qu’
ils ne peuvent s’associer à ces engagements téméraires avant d’avoir p
384
emps d’étudier leur contenu, et de s’être assurés
qu’
en tous les cas cela ne peut les conduire absolument à rien. Soyons fr
385
ncipes, a fait jusqu’ici pratiquement plus de mal
que
de bien à notre cause à tous. On me dira que si l’on se contente d’af
386
mal que de bien à notre cause à tous. On me dira
que
si l’on se contente d’affirmer des principes sans les mettre en prati
387
pe qui se moque des principes vaut beaucoup moins
qu’
une Amérique qui les professe, et ne vaut rien en face des Russes qui
388
rase est vague. Les actes sont parfois plus vains
que
les paroles. Lancer un timbre européen, ce serait un acte enfin, quel
389
peu déçus, et Staline très content. Voici l’acte
que
je vous propose, au nom de l’opinion qui ne parle pas encore. Messieu
390
l’Europe sans informer ses peuples, et du danger
qu’
ils courent, et de la parade puissante que pourrait constituer notre f
391
danger qu’ils courent, et de la parade puissante
que
pourrait constituer notre fédération. On n’informera pas les peuples
392
’agitation, d’émulation, de polémique européenne,
que
nulle autre méthode ne saurait provoquer. La condition à la fois néce
393
telle campagne, c’est de faire sentir aux peuples
qu’
elle comporte un enjeu, et que leur sort peut changer, matériellement
394
sentir aux peuples qu’elle comporte un enjeu, et
que
leur sort peut changer, matériellement aussi, selon l’issue des élect
395
’issue des élections. En d’autres termes, il faut
que
le Parlement issu des élections ait quelque chose à faire. Qu’un but
396
ent issu des élections ait quelque chose à faire.
Qu’
un but concret soit assigné à ses travaux. Je n’en vois pour ma part q
397
assigné à ses travaux. Je n’en vois pour ma part
qu’
un seul : discuter et voter un projet bien précis de Constitution fédé
398
s n’acceptez pas, vous ne trouverez derrière vous
que
le vide et l’indifférence ; et devant vous, le rire des hommes d’acie
399
us, le rire des hommes d’acier ! Si vous me dites
que
c’est prématuré, je vous supplierai de déclarer clairement à quel mom
400
, cela cessera d’être prématuré. Si vous me dites
que
c’est très joli, mais qu’il faut qu’on vous laisse du temps, je vous
401
aturé. Si vous me dites que c’est très joli, mais
qu’
il faut qu’on vous laisse du temps, je vous proposerai de l’obtenir de
402
ous me dites que c’est très joli, mais qu’il faut
qu’
on vous laisse du temps, je vous proposerai de l’obtenir de Staline. C
403
en Europe, il y en a peu. Si vous me dites enfin
que
c’est plus difficile que je n’ai l’air de le penser dans ma candeur n
404
. Si vous me dites enfin que c’est plus difficile
que
je n’ai l’air de le penser dans ma candeur naïve, je vous demanderai
405
que chose au monde est plus difficile à concevoir
que
le maintien du statu quo, que la vie, la durée de notre Europe divisé
406
fficile à concevoir que le maintien du statu quo,
que
la vie, la durée de notre Europe divisée, devant toutes les menaces q
407
e notre Europe divisée, devant toutes les menaces
que
vous savez : un régime social déficient, le chômage étendu, la ruine
408
ions de l’armée rouge. D’une part, on peut penser
qu’
au point où nous en sommes, il n’y a presque plus rien à perdre. Que r
409
s en sommes, il n’y a presque plus rien à perdre.
Que
risquez-vous à tenter l’impossible ? D’autre part, il est sûr qu’il y
410
à tenter l’impossible ? D’autre part, il est sûr
qu’
il y aurait tout à perdre, même l’espoir, à ne point risquer la derniè
411
! Messieurs les députés, faut-il vous dire encore
que
je ne suis rien qu’une voix presque désespérée, et sans autre pouvoir
412
tés, faut-il vous dire encore que je ne suis rien
qu’
une voix presque désespérée, et sans autre pouvoir que de vous adjurer
413
ne voix presque désespérée, et sans autre pouvoir
que
de vous adjurer de la part des millions qui se taisent mais qui ont p
414
ès bien qu’une partie d’entre vous m’approuve, et
qu’
une autre ne dit pas non. Dans un mouvement de passion, je m’écriais l
415
e ne pourra la défendre. Personne ne veut mourir,
que
pour des raisons de vivre. Mozart n’en est plus une pour les chômeurs
416
ire, si quelqu’un nous propose une autre solution
que
l’Autorité fédérale, souveraine au-dessus des États. Messieurs les dé
417
sans nulle raison visible, découpant une contrée
que
la nature avait conçue d’un seul tenant. Je connais peu de paysages a
418
dent présent parmi nous. Plutôt ces inscriptions,
que
je copie sur le socle : Face nord : Au bienfaiteur de Ferney Volta
419
nd âge, il plantait. « Quand je n’aurais défriché
qu’
un champ et quand je n’aurais fait réussir que vingt arbres, c’est tou
420
ché qu’un champ et quand je n’aurais fait réussir
que
vingt arbres, c’est toujours un bien qui ne sera pas perdu. » Les cèd
421
protestants, mais qui vécurent en paix avec ceux
qu’
ils enrichissaient. En même temps, il faisait bâtir une église neuve.
422
de la messe, en vieux père de famille. C’est ici
que
la publicité fut inventée. Voltaire n’écrivait plus une lettre aux pr
423
qualité des montres de Ferney, ou des bas de soie
que
l’on filait dans sa fabrique. La première paire parvint à la duchesse
424
amis de Paris : « On fabrique ici beaucoup mieux
qu’
à Genève… Donnez vos ordres ; vous serez servis… Vous aurez de très be
425
ants qui deviennent propriétaires, par un système
qu’
on nommerait de nos jours location-vente. « Il commande des maisons à
426
», disent les Mémoires secrets. Mille tractations
qu’
il combine avec joie permettent de supprimer les douanes de notre zone
427
ent de supprimer les douanes de notre zone : ah !
que
ne pouvait un seul individu, dans ces temps que l’on nous a décrits c
428
! que ne pouvait un seul individu, dans ces temps
que
l’on nous a décrits comme adversaires des libertés réelles ! Enfin, V
429
vi. Paul Claudel, informé par un ami commun de ce
que
j’habite à Ferney : « Est-ce que Voltaire ne vient pas lui chatouille
430
ami commun de ce que j’habite à Ferney : « Est-ce
que
Voltaire ne vient pas lui chatouiller la plante des pieds pendant la
431
es son exemple vient chatouiller mon imagination,
que
bien d’autres images entraînent, dans ce pays de « marches » entre Al
432
ourdit tout d’un coup leur grondement. Vous voyez
que
ce pays est le centre du monde. C’est ce que l’on pense toujours d’un
433
oyez que ce pays est le centre du monde. C’est ce
que
l’on pense toujours d’un lieu qu’on aime. u. Rougemont Denis de, «
434
monde. C’est ce que l’on pense toujours d’un lieu
qu’
on aime. u. Rougemont Denis de, « Au pays du Patriarche », Journal
435
méricaine. J’écris ceci dans la pleine conviction
qu’
il n’est pas un des responsables de la politique mondiale des États-Un
436
communiste ? Le fait brutal, incontestable, c’est
qu’
aussi longtemps que nos pays resteront désunis et même rivaux, ils ser
437
t brutal, incontestable, c’est qu’aussi longtemps
que
nos pays resteront désunis et même rivaux, ils seront incapables de s
438
ent, après tout, la puissance, non moins redoutée
que
sollicitée, des USA ? Leur nom même suffit à répondre : ils sont unis
439
e se libérer de la tutelle britannique décidèrent
que
leur simple alliance confédérale devait être remplacée par une fédéra
440
C’est donc précisément dans la presse de New York
que
trois des rédacteurs de la Constitution, Hamilton, Jay et Madison, en
441
Federalist, exercèrent une action décisive, ainsi
que
nul écolier américain ne peut aujourd’hui l’ignorer. S’il fallait rés
442
le rôle et l’importance d’un tel écrit, je dirais
que
d’une part il a créé l’animation politique nécessaire à la vie de la
443
prudence des problèmes institutionnels. Or, voici
qu’
au onzième chapitre de ce fameux texte de base de la grandeur américai
444
vement tombées sous sa domination. La supériorité
que
l’Europe a depuis si longtemps conservée l’a disposée à se regarder c
445
supériorité physique, et ont sérieusement assuré
que
tous les animaux, ainsi que la race humaine, dégénéraient en Amérique
446
t sérieusement assuré que tous les animaux, ainsi
que
la race humaine, dégénéraient en Amérique ; que les chiens même perda
447
i que la race humaine, dégénéraient en Amérique ;
que
les chiens même perdaient la faculté d’aboyer, après avoir respiré qu
448
préparerait une nouvelle victime à leur triomphe.
Que
les Américains méprisent enfin d’être les instruments de la grandeur
449
’être les instruments de la grandeur européenne !
que
les treize États, réunis dans une étroite et indissoluble union, conc
450
vous laisse le soin de commenter le parallélisme
qu’
un tel texte suggère, et même impose à l’évidence, entre la situation
451
t moral (19 juillet 1955)w Comment ne pas voir
que
les thèses officielles, présentées par les Russes avant Genève, sont
452
pe de la non-ingérence, c’est par exemple décider
que
les partis communistes de l’Occident vont vivre de leurs seules resso
453
lever le rideau de fer. Je pars de là. Je ne suis
qu’
un écrivain. Rien ne m’oblige aux prudences des hommes d’État, on vien
454
ux fois, fortement soulignée, dans la déclaration
que
M. Boulganine fit à Moscou la semaine dernière, au moment de s’envole
455
t le vainqueur qui impose à tous le sens des mots
qu’
il juge convenable. On se rappelle qu’au moment où l’armée rouge tenta
456
ns des mots qu’il juge convenable. On se rappelle
qu’
au moment où l’armée rouge tentait d’envahir la petite Finlande, M. Mo
457
d’envahir la petite Finlande, M. Molotov déclara
que
cette dernière était le véritable agresseur, « les événements ayant d
458
d’une recherche commune — autrement l’on n’aurait
qu’
une suite de monologues. Or ces deux conditions du dialogue viennent d
459
hévisme à l’Occident. Je cite : D’aucuns estiment
que
le capitalisme est meilleur que le socialisme. Nous sommes convaincus
460
D’aucuns estiment que le capitalisme est meilleur
que
le socialisme. Nous sommes convaincus du contraire. Cette discussion
461
ette discussion ne peut être réglée par la force.
Que
chacun prouve la justesse de sa cause dans une compétition pacifique.
462
sujets de débats, plus actuels et moins rebattus
que
celui qu’on vient de mentionner, nous ne saurions demander rien de pl
463
débats, plus actuels et moins rebattus que celui
qu’
on vient de mentionner, nous ne saurions demander rien de plus ; nous
464
eurs. Allons voir ce qui se fait chez l’autre, ce
qu’
il dit et comment il le sent ; et que l’autre en fasse autant chez nou
465
l’autre, ce qu’il dit et comment il le sent ; et
que
l’autre en fasse autant chez nous. Circulons. Questionnons. Causons !
466
ulons. Questionnons. Causons ! Certains penseront
que
nous sommes trop faibles sur nos positions trop variées d’Occidentaux
467
partenaire : ce n’est pas à ceux qui croient cela
que
les Russes demanderont à parler ! Les contempteurs de l’Occident, dou
468
pas non plus leurs opposants… D’autres craindront
que
la culture du voisin soit au contraire son cheval de Troie. Mais il s
469
Si chacun mène chez l’autre un cheval de Troie et
qu’
il en organise, en place publique, la visite officielle et gratuite, l
470
evient un pavillon d’exposition. On ne court plus
que
le risque normal d’une « compétition pacifique ». Il est temps de cou
471
d’un changement d’attitude des Russes. Il se peut
que
les nombreux témoignages qu’ils en donnent depuis quelques mois soien
472
s Russes. Il se peut que les nombreux témoignages
qu’
ils en donnent depuis quelques mois soient plus clairs et certains que
473
puis quelques mois soient plus clairs et certains
que
la conscience qu’ils en ont. Le Père des peuples est mort, qui tenait
474
soient plus clairs et certains que la conscience
qu’
ils en ont. Le Père des peuples est mort, qui tenait tout ensemble. Le
475
D l’a suivi dans la tombe. Et le Kremlin subit ce
qu’
on nomme la détente, mot qu’il faut prendre ici dans son sens littéral
476
t le Kremlin subit ce qu’on nomme la détente, mot
qu’
il faut prendre ici dans son sens littéral : un ressort est détendu, l
477
Celle-ci cherche avant tout non point la liberté,
qu’
elle redoute, mais la sécurité. À l’intérieur, elle ne trouve que prob
478
, mais la sécurité. À l’intérieur, elle ne trouve
que
problèmes. À l’extérieur, elle voit quelques hommes forts : un Tito,
479
mmes forts : un Tito, un Adenauer. C’est vers eux
que
s’en vont ceux qui parlent pour les Russes — comme aujourd’hui Joukov
480
don d’être resté paralysé devant leur appel, tant
que
je n’aurai pas fait tout ce que peut un homme libre pour hâter le jou
481
leur appel, tant que je n’aurai pas fait tout ce
que
peut un homme libre pour hâter le jour de la vengeance du peuple hong
482
es rues de Poznań et de Budapest. À la question :
qu’
est-ce que le communisme ? le monde entier répondra désormais : la thé
483
Poznań et de Budapest. À la question : qu’est-ce
que
le communisme ? le monde entier répondra désormais : la théorie du cr
484
alles des « réactionnaires », car c’est entre eux
qu’
ils se sont tous assassinés depuis trente ans, la misère collective et
485
tre-mer, mais de nos seules consciences, advienne
que
pourra. Nous devons mettre le communisme au ban de l’humanité civili
486
ettons fin à cette comédie. Nous savons désormais
que
les Russes, dès qu’ils le peuvent, utilisent les négociations pour ar
487
nnent négocier. Le communiste actuel, plus encore
que
le fasciste, est un malade mental, ou, s’il est sain d’esprit, c’est
488
ssacres de Budapest ; qui trouve cela moins grave
que
d’arrêter Nasser, s’il prétend écraser Israël. On ne peut pas discute
489
pas d’abord abjuré publiquement la cause du crime
qu’
il a servie. Et jurons en même temps de faire l’Europe. Cette Europe q
490
Hommage à Pasternak (31 octobre 1958)y
Qu’
un écrivain de l’Ouest reçoive un prix Staline, nous pensons simplemen
491
reçoive un prix Staline, nous pensons simplement
que
cet heureux lauréat doit être un communiste plutôt qu’un grand poète,
492
et heureux lauréat doit être un communiste plutôt
qu’
un grand poète, grand romancier ou grand styliste, et nous passons. La
493
r si peu : elles ne dépendent pas de l’État. Mais
qu’
un écrivain russe reçoive le prix Nobel, tout le monde sait aussitôt q
494
eçoive le prix Nobel, tout le monde sait aussitôt
qu’
il se passe quelque chose, qu’il s’agit d’un talent et d’un homme. Ses
495
monde sait aussitôt qu’il se passe quelque chose,
qu’
il s’agit d’un talent et d’un homme. Ses confrères communistes le save
496
e immense joie, mais un peu solitaire ! » sachons
qu’
il s’agit moins de lâcheté, dans son cas, que de patriotisme au sens a
497
hons qu’il s’agit moins de lâcheté, dans son cas,
que
de patriotisme au sens ancien du mot, d’attachement instinctif à sa t
498
t matin sibérien. C’est devant une autre tragédie
que
l’esprit s’arrête, dans le cas de Boris Pasternak. Son refus le juge
499
e cas de Boris Pasternak. Son refus le juge moins
qu’
il ne juge un régime qui ôte à l’homme le courage d’être lui-même, et
500
œur » (9-10 novembre 1963)z Descartes estimait
qu’
un athée ne pourrait pas faire de physique. Certes, beaucoup de physic
501
sont dit athées, mais cela ne change rien au fait
que
le mouvement créateur de la science procède d’une confiance intuitive
502
et, dans le grand livre où il démontre, en somme,
qu’
un athée ne peut pas faire de musique. Pas davantage que Descartes, An
503
athée ne peut pas faire de musique. Pas davantage
que
Descartes, Ansermet ne se fonde sur le dogme, sur la Bible et la Trad
504
de cent pages de ses Fondements de la musique ce
qu’
il nomme sa « phénoménologie de Dieu », qui est en même temps une théo
505
t, commentateur et assistant de l’œuvre. Et voici
que
l’analyse de ce « fondement » conduit à retrouver par l’intérieur les
506
ni aux symboles de la mythologie biblique, encore
que
le sens de quelques-uns d’entre eux — comme l’Arbre de Vie de la Genè
507
e de cette phénoménologie. On se demande alors ce
que
l’auteur n’a pas restitué de la croyance des Églises ? C’est à vrai d
508
ent ». C’est la mystique et le surnaturel, autant
que
la magie et la superstition. C’est enfin et surtout la notion d’une t
509
nce de Dieu, en les ramenant du Dieu transcendant
que
seul ils s’étaient révélé jusqu’alors, au Dieu immanent qui s’annonce
510
agine d’admirables disputations ! On voit bien ce
qu’
en diraient les barthiens dont je fus : Ansermet, partant de Husserl,
511
isme protestant de l’époque post-hégélienne. Mais
qu’
en dirait Karl Barth lui-même, qui n’a pas fini de nous surprendre ? C
512
urprendre ? C’est sans doute par rapport à Pascal
qu’
il serait le plus intéressant d’évaluer la théologie logarithmique de
513
u « Dieu des philosophes et des savants », encore
qu’
Ansermet dise très bien que ce n’est pas le Dieu des philosophes qui s
514
« l’éducation chrétienne », p. 231.) Or, ce Dieu
que
l’on écrit sans sourciller Ps-Pr-F — comme l’énergie s’écrit mc2 dans
515
t mc2 dans la célèbre équation d’Einstein — voici
qu’
il est aussi, pour Ansermet, précisément le « Dieu sensible au cœur »,
516
). Je suis bien placé pour savoir les résistances
que
ce point de vue provoque dans l’intelligentsia plus ou moins masochis
517
e la musique contemporaine au nom d’une théologie
que
, d’autre part, nos docteurs jugeront hérétique, voilà de quoi faire à
518
nnes : faut-il brûler Ernest Ansermet ? Nul doute
que
la Genève de Calvin l’eût accusé de parler comme un athée, puisqu’il
519
d’appropriation des vérités religieuses. Quelles
que
soient les réserves qu’inspirent parfois tant d’assurance intellectue
520
ités religieuses. Quelles que soient les réserves
qu’
inspirent parfois tant d’assurance intellectuelle et un vocabulaire tr
521
à vos lecteurs ( Samedi littéraire, 22 juin 1968)
que
pendant six ans d’Amérique je n’ai fait que « papoter avec des millia
522
1968) que pendant six ans d’Amérique je n’ai fait
que
« papoter avec des milliardaires nyouorkaises » et me « perfectionner
523
utre chose et ne mentionne, en fait de papotages,
que
des conversations avec Jacques Maritain, André Breton et Saint-Exupér
524
ête les réprouve. Tout autre chose est d’affirmer
que
j’ai « jeté mon sac (militaire) aux orties » avant de « disparaître d
525
n défini, qui m’eût valu un peu plus, croyez-moi,
que
les quinze jours de forteresse auxquels le Général m’avait condamné e
526
eport « de service », il est rigoureusement exclu
qu’
il ait jeté son uniforme aux orties, c’est-à-dire déserté, peu de jour
527
, m’a paru nécessaire pour ceux qui n’auraient lu
que
l’article du Samedi littéraire. aa. Rougemont Denis de, « Denis de
528
mparaîtra le 27 juin devant le tribunal militaire
que
vous présidez. J’ai beaucoup d’estime pour M. Bugnot. Équilibré, maît
529
t critique mais capable de s’enthousiasmer autant
que
de s’indigner. Les motifs de son objection sont les mêmes que ceux de
530
igner. Les motifs de son objection sont les mêmes
que
ceux de sa vocation pastorale. Ils relèvent de sa fidélité à l’idéal
531
nom desquels notre Confédération s’est formée et
qu’
elle prétend défendre : le respect du prochain et de sa différence, la
532
er certaines applications théoriques ou concrètes
qu’
en fait M. Bugnot. Mais il y a loin de contester à condamner et à flét
533
prison ceux qui se réclament en toute conscience,
qu’
aurons-nous encore à défendre en Suisse, à part les « beautés de la na
534
ent prendre soin tout aussi bien ou parfois mieux
que
nous. En tout cas, il n’y aurait pas lieu de se faire tuer pour si pe
535
ur action dans la communauté, comment ne pas voir
qu’
ils sont au moins d’aussi bons Suisses que ceux qui, trop souvent, en
536
as voir qu’ils sont au moins d’aussi bons Suisses
que
ceux qui, trop souvent, en toute indifférence et ignorance quant aux
537
ases mêmes de notre civisme, ne font leur service
que
pour faire comme les autres ? Où sont en vérité les meilleurs Suisses
538
ts et dissidents, les Soviétiques le feront mieux
que
nous : voir Budapest et Prague. Si c’est la liberté, vous acquitterez
539
, et peut-être le voudriez-vous mais je sais bien
que
vous n’avez pas le droit formel. Dans ces conditions, pourquoi ne pas
540
ès de sorcières. J’espère, Monsieur le président,
que
vous voudrez bien excuser la liberté que je prends en m’adressant à v
541
ésident, que vous voudrez bien excuser la liberté
que
je prends en m’adressant à vous si franchement et longuement. Je ne v
542
si franchement et longuement. Je ne voulais être
qu’
un témoin de moralité, et je n’ai pu m’empêcher de vous faire part de
543
en. Me le pardonnerez-vous en pensant aux efforts
que
j’ai faits — et ne cesserai de faire — pour expliquer notre pays, par
544
ir chacun à sa manière. C’est de cette conviction
que
je m’autorise pour vous communiquer mes réflexions sur ce cas de cons
545
e non recrutés. Cette peine est identique à cette
qu’
a déjà subie Bugnot une première fois. Et il ne pouvait en être autrem
546
uge n’est plus obligé d’aggraver la peine du fait
qu’
il n’est plus tenu compte de la récidive en matière d’objection de con
547
à la seconde condamnation, une peine plus faible
qu’
à la première. Au cours de cette audience, une lettre de l’écrivain et
548
ident du Tribunal. Une copie nous a été transmise
que
nous publions ci-dessous. » ad. Cette lettre est suivie du commentai
549
ntester le témoignage de moralité et de caractère
qu’
il porte sur un homme dont il connaît personnellement la pensée et les
550
Il n’est pas difficile, d’autre part, d’admettre
que
la prison, à titre répressif, correctif ou préventif, est une peine t
551
Et il est facile de voir — voici un cas de plus —
qu’
elle tend au contraire à éloigner de la solidarité nationale des homme
552
, au nom des valeurs qui étayent son patriotisme,
que
ce problème soit étudié. En revanche, nous ne pouvons le suivre dans
553
ons le suivre dans ce “tout ou rien” qui voudrait
qu’
à défaut d’un statut des objecteurs de conscience, la Suisse ne serait
554
des objecteurs de conscience, la Suisse ne serait
qu’
un État policier régnant sur des êtres sans âmes. La politique de neut
555
u citoyen-soldat une garantie de légitime défense
que
personne ne peut contester, et qui rassure valablement des hommes qui
556
rance, mais dans la connaissance lucide des choix
que
poserait un conflit armé. La statistique montre que les objecteurs de
557
e poserait un conflit armé. La statistique montre
que
les objecteurs de conscience ne sont qu’une infime minorité. Humainem
558
e montre que les objecteurs de conscience ne sont
qu’
une infime minorité. Humainement respectable, oui. Dépositaire de la m
559
ai été surpris de vous voir répondre à une lettre
que
j’avais adressée au président d’un tribunal militaire et que vous pub
560
adressée au président d’un tribunal militaire et
que
vous publiez à mon insu, sous un titre trompeur, je le crains. Car ce
561
Bugnot. Si je me relis bien, je n’ai pas proposé
qu’
on fasse de lui le « dépositaire de la mission morale du pays ». Je n’
562
la mission morale du pays ». Je n’ai pas demandé
qu’
on le décore, mais simplement qu’on ne le mette pas au ban de notre so
563
n’ai pas demandé qu’on le décore, mais simplement
qu’
on ne le mette pas au ban de notre société et que l’on s’interdise de
564
qu’on ne le mette pas au ban de notre société et
que
l’on s’interdise de répéter que l’objecteur est lâche, un mauvais cit
565
notre société et que l’on s’interdise de répéter
que
l’objecteur est lâche, un mauvais citoyen qui trahit ses devoirs de s
566
e. Non, je ne pense pas et je n’ai donc pas dit «
qu’
à défaut d’un statut des objecteurs, la Suisse ne serait qu’un État po
567
t d’un statut des objecteurs, la Suisse ne serait
qu’
un État policier ». J’ai dit seulement que si l’on choisissait de s’en
568
serait qu’un État policier ». J’ai dit seulement
que
si l’on choisissait de s’en tenir à « l’ordre à tout prix » et à l’éc
569
s non-conformistes, Moscou ferait cela bien mieux
que
nous. Cela dit, il me reste à vous remercier d’avoir, en publiant ma
570
motivée : c’est ce problème qui importe seul, et
qu’
il faut prendre soin de poser dans ses termes les plus authentiques. V
571
nt : « Nous avons publié lundi dernier une lettre
que
le professeur Denis de Rougemont avait adressée le vendredi précédent
572
mentaire dans lequel il nuançait les termes de ce
qu’
il considérait comme une alternative de la part de Denis de Rougemont.
573
ortelle ! » (30-31 août 1969)ag ah Pensez-vous
qu’
il existe une culture bourgeoise ? Le terme de « culture bourgeoise »
574
ne culture européenne. C’est la plus petite unité
que
l’on puisse trouver. Je suis tout à fait d’accord avec l’historien an
575
d’accord avec l’historien anglais Toynbee qui dit
que
la plus petite unité d’étude intelligible qu’on puisse prendre est un
576
dit que la plus petite unité d’étude intelligible
qu’
on puisse prendre est une civilisation de dimension continentale. Nous
577
tableaux de chevalet, le concerto, la symphonie,
que
vous ne trouvez pas en dehors de l’Europe. Les grandes écoles d’art o
578
l, Modigliani, Soutine, Max Ernst… Et la culture,
qu’
est-ce que c’est ? Je ne sais pas très bien ce que l’on entend par cul
579
ani, Soutine, Max Ernst… Et la culture, qu’est-ce
que
c’est ? Je ne sais pas très bien ce que l’on entend par culture bourg
580
qu’est-ce que c’est ? Je ne sais pas très bien ce
que
l’on entend par culture bourgeoise, parce que la culture n’a pas été
581
oyen Âge. On ne peut parler de culture bourgeoise
qu’
en pensant aux consommateurs de cette culture. Bien sûr, depuis cent a
582
pas les ouvriers d’avoir des goûts plus bourgeois
que
les bourgeois cultivés. L’avant-garde est toujours sortie de la bourg
583
ncore de le faire. C’est uniquement l’avant-garde
que
vous trouvez dans les prisons russes. Vous n’y trouverez pas un seul
584
ns toutes les dictatures communistes. Pensez-vous
que
nous sommes entrés dans une ère de révolutions ? Il y a une nécessité
585
nctionne pas, ça ne joue plus. Ne pensez-vous pas
que
les revendications ne sont pas assez bien formulées ? C’est exact. On
586
Vers quoi va l’homme ? une mutation tant physique
que
spirituelle ? Je n’en sais rien. Je sais vers quoi je voudrais qu’on
587
Je n’en sais rien. Je sais vers quoi je voudrais
qu’
on aille. Le progrès est l’augmentation des risques humains, c’est-à-d
588
gmentation des possibilités de choix. Pensez-vous
que
nous assistons à la mort de la civilisation occidentale ? C’est impos
589
us autres, civilisations, nous savons aujourd’hui
que
nous sommes mortelles. » C’est doublement inexact : en premier lieu,
590
le qui ait conquis le monde entier. Si on déclare
qu’
elle va mourir, cela revient à dire qu’il n’y aura plus de civilisatio
591
on déclare qu’elle va mourir, cela revient à dire
qu’
il n’y aura plus de civilisation du tout. Et vous ne croyez pas qu’il
592
us de civilisation du tout. Et vous ne croyez pas
qu’
il y aurait des indices pour une autre culture, une autre civilisation
593
’en vois aucune. Et la Chine ? Encore faudrait-il
que
ce soit une civilisation vraiment différente, et qui ait de meilleure
594
nt différente, et qui ait de meilleures solutions
que
les nôtres. Or nous constatons un gigantesque effort pour imposer aux
595
velle. Croyez-vous plus au succès des révolutions
que
des évolutions ? Je ne crois pas du tout au succès des révolutions. I
596
, prêt à prendre la relève du désordre ancien, ce
que
j’appelle le « désordre établi ». Ces conditions idéales n’ont encore
597
pouvoir personnel finit toujours mal. » Bon. Mais
qu’
en est-il du pouvoir impersonnel ? Le cas des quatre Républiques franç
598
civilisations ? Personnellement, je ne crois pas
que
les civilisations soient comme les plantes, qui poussent, donnent des
599
is je le suis en ce qui concerne les effets de ce
que
l’Homme, indépendamment de la nature, a développé dans cette civilisa
600
éveloppé dans cette civilisation. Je ne crois pas
que
l’homme devient esclave des machines ; il est esclave de certaines de
601
a vanité sociale par exemple. Dans un petit livre
que
j’ai écrit en 1946 sur la bombe atomique, je disais en post-scriptum
602
criptum à mes lettres : « Un dernier mot, et dire
que
j’allais l’oublier : la bombe n’est pas dangereuse du tout. C’est un
603
tés pour contrôler la bombe ! C’est aussi absurde
que
si l’on se jetait sur une chaise pour l’empêcher d’aller casser un va
604
. Le “contrôle de la bombe” est une absurdité. Ce
qu’
il nous faut, c’est un contrôle de l’homme. » Les gens disent : « Nous
605
par des idées, des concepts, des angles de vision
qu’
on lui propose et qui s’imposent plus ou moins aux esprits et aux sens
606
on veut essayer de l’influencer : et c’est à cela
que
l’art peut nous aider. Kafka nous a révélé dès 1930 le style et l’hab
607
1930 le style et l’habitus des régimes policiers
que
la psyché moderne fomentait dans sa démence la plus secrète. Par quoi
608
a plus secrète. Par quoi cette période anarchique
que
traverse notre siècle a-t-elle été préparée ? Je vous dirais sans tro
609
ire plus divin. Et ne me demandez pas si je crois
que
cela réussira : car nous ne sommes pas là pour essayer de prévoir l’a
610
de le changer dans le bon sens. Une des formules
que
j’ai lancées dans ma jeunesse (outre celle de l’engagement de l’écriv
611
ivain), c’était la politique du pessimisme actif.
Qu’
est-ce que cela veut dire ? C’est en somme une morale du risque assumé
612
était la politique du pessimisme actif. Qu’est-ce
que
cela veut dire ? C’est en somme une morale du risque assumé, de l’act
613
ion personnelle. Je m’y tiens et l’époque fera ce
qu’
elle pourra… Après tout, le but de la société n’est pas la société ell
614
ction simple de cette phrase mystérieuse pour peu
qu’
on y réfléchisse : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même. » ag.
615
au président du Tribunal militaire un témoignage
que
nous avons publié le 30 juin. Ce témoignage a suscité des controverse
616
e a suscité des controverses, auxquelles le débat
que
nous présentons ici n’a pas la prétention d’apporter une conclusion d
617
ection de conscience, c’est admettre en préalable
que
ce problème existe. Non pas par l’importance du nombre de ceux qui pr
618
tent témoignage, mais par la valeur des principes
qu’
elle révèle et des questions qu’elle pose et qu’elle nous pose. Confro
619
eur des principes qu’elle révèle et des questions
qu’
elle pose et qu’elle nous pose. Confrontée au phénomène de la guerre,
620
s qu’elle révèle et des questions qu’elle pose et
qu’
elle nous pose. Confrontée au phénomène de la guerre, l’objection de c
621
e temps de paix. C’est dans ce cadre-là, d’abord,
qu’
elle doit être envisagée et discutée. Car ce n’est que dans la paix qu
622
lle doit être envisagée et discutée. Car ce n’est
que
dans la paix que l’on s’interroge sur la guerre. Si l’on met à part l
623
isagée et discutée. Car ce n’est que dans la paix
que
l’on s’interroge sur la guerre. Si l’on met à part les Témoins de Jéh
624
ot » des soixante-quinze objecteurs de conscience
que
les tribunaux militaires suisses ont condamnés en 1967 peut être rapi
625
des motivations chrétiennes. C’est donc par elles
que
la discussion doit commencer. Et là, deux religions se heurtent : la
626
se. N’y a-t-il pas une contradiction dans le fait
que
la Constitution fédérale stipule que tout Suisse est astreint au serv
627
dans le fait que la Constitution fédérale stipule
que
tout Suisse est astreint au service militaire, alors que l’objecteur
628
nscience. Mais le paragraphe 5 de cet article dit
qu’
« on ne peut, pour cause d’opinion religieuse, s’affranchir de l’accom
629
édure qui conduit à la sanction peut faire croire
qu’
il s’agit uniquement d’une opposition d’intérêt entre l’armée et l’obj
630
tutionnelle, mais elle peut s’appuyer sur le fait
que
la Constitution se réfère « Au Dieu Tout-Puissant ». Christian Schall
631
exclusif Christian Schaller. — Je ne pense pas
qu’
il y ait de différence dans les aboutissants entre une objection pour
632
titution pour vous autoriser à objecter autrement
que
les autres ? Christian Schaller. — Non. Je ne fais personnellement pa
633
re les diverses catégories d’objecteurs. Je pense
que
ce qui est important, c’est ce qu’ils demandent, ce qu’ils préconisen
634
eurs. Je pense que ce qui est important, c’est ce
qu’
ils demandent, ce qu’ils préconisent, et que leurs motivations personn
635
qui est important, c’est ce qu’ils demandent, ce
qu’
ils préconisent, et que leurs motivations personnelles peuvent être d’
636
st ce qu’ils demandent, ce qu’ils préconisent, et
que
leurs motivations personnelles peuvent être d’ordre religieux, humani
637
, de faire une œuvre antimilitariste — je précise
que
ceux qui font du service ne sont pas nécessairement militaristes… — o
638
ous les objecteurs). D’autre part je ne pense pas
que
la séparation soit tellement entre militaires et objecteurs qu’entre
639
ion soit tellement entre militaires et objecteurs
qu’
entre « conservateurs » et « progressistes », si je puis dire. L’objec
640
rte que les problèmes soient posés, mais ce n’est
qu’
un moyen parmi d’autres. Et personnellement je me sens très proche des
641
jecteur religieux n’est-il pas plus « intimiste »
que
l’objecteur humanitaire, attaché à renverser certaines structures ? C
642
lecture de cet article 49, paragraphe 5, qui dit
que
dans le cas d’un conflit entre les devoirs civiques et ce que l’on co
643
cas d’un conflit entre les devoirs civiques et ce
que
l’on considère comme ses devoirs religieux, ce sont les devoirs civiq
644
ux, ce sont les devoirs civiques qui l’emportent.
Que
veut dire alors « Au nom du Dieu Tout-Puissant », inscrit au portique
645
lque chose dont le contenu est une autre religion
que
le christianisme, à savoir la religion civique. C’est la religion sta
646
religion qui aboutit, dans certains régimes, à ce
qu’
on sait : au régime totalitaire. Colonel Voucher. — Pas chez nous. Den
647
Mais quel est le sens de cette protection divine
que
l’on utilise pour la religion du civisme ? Est-ce que c’est vraiment
648
l’on utilise pour la religion du civisme ? Est-ce
que
c’est vraiment la même chose d’être chrétien, et d’être civique, et d
649
s il y a aussi l’esprit des lois. Je ne pense pas
que
le conformisme soit une qualité première du bon citoyen, et je pense
650
une qualité première du bon citoyen, et je pense
que
la critique des lois fait partie intégrante des qualités du civisme.
651
ller. — Eh bien ! L’objection de conscience n’est
que
l’un des moyens d’amener à ce que les lois puissent s’amender. C’est
652
onscience n’est que l’un des moyens d’amener à ce
que
les lois puissent s’amender. C’est une façon de mettre en évidence ce
653
ne façon de mettre en évidence certains problèmes
qu’
on a tendance à masquer d’habitude. Par exemple le fait que ce n’est p
654
endance à masquer d’habitude. Par exemple le fait
que
ce n’est pas la même chose d’être chrétien et d’être citoyen. L’objec
655
qui se croit bon citoyen parce qu’il fait tout ce
qu’
on lui dit, ce conformisme-là ne conduit pas à l’anarchie, mais condui
656
cadre. Denis de Rougemont. — J’aimerais rappeler
que
le problème est celui de l’objecteur de conscience vis-à-vis de l’arm
657
’armée. Bernard Béguin. — Il a été dit clairement
que
le conflit était plutôt avec la Constitution qu’avec l’armée. Or en e
658
que le conflit était plutôt avec la Constitution
qu’
avec l’armée. Or en effet c’est l’armée qui accueille les objecteurs a
659
r la première fois, quand il n’a même pas 20 ans,
qu’
il n’est même pas citoyen ? Colonel divisionnaire Dénéréaz. — Nous avo
660
désirent. Nous avons besoin d’eux, et cela montre
que
si nous n’avons pas en droit un statut pour les objecteurs nous l’avo
661
sont pas encore citoyens, pas encore soldats, et
qu’
on lui envoie pour leur premier refus de servir ? Colonel Vaucher. — L
662
litaire, nous ne verrions aucun inconvénient à ce
que
les objecteurs de conscience soient jugés par des tribunaux civils. À
663
aire, qui juge essentiellement des honnêtes gens,
que
par des tribunaux ordinaires qui jugent en majorité des gens plus ou
664
tes. Colonel divisionnaire Dénéréaz. — Je croyais
qu’
il pouvait attendre jusqu’à sa majorité. Colonel Vaucher. — Non, non.
665
eut être plus long. Bernard Béguin. — Mais est-ce
que
les arrêts répressifs se purgent avec des prisonniers de droit commun
666
tonal. Bernard Béguin. — Cela veut dire, en fait,
qu’
un garçon de 20 ans condamné pour objection de conscience — vous avez
667
amné pour objection de conscience — vous avez dit
que
c’est un honnête homme — va loger trois mois à Saint-Antoine, qui est
668
ions de détention. Michel Barde. — Il est évident
que
l’on ne peut éviter toute promiscuité, mais les objecteurs de conscie
669
ite, on pourrait étendre votre définition et dire
que
tous les gens qui vont devant les tribunaux, ou à peu près, viennent
670
nal. Colonel divisionnaire Dénéréaz. — J’aimerais
que
le colonel Vaucher parle du sursis. Colonel Vaucher. — Depuis 1950
671
pareil au Code pénal suisse sur ce point, précise
que
le sursis ne peut être accordé que lorsque le tribunal a la convictio
672
point, précise que le sursis ne peut être accordé
que
lorsque le tribunal a la conviction que cette mesure détournera l’acc
673
e accordé que lorsque le tribunal a la conviction
que
cette mesure détournera l’accusé de commettre de nouvelles infraction
674
Quelques tribunaux militaires ont essayé de dire
qu’
ils n’avaient pas la conviction, mais l’espoir que le jeune homme réfl
675
qu’ils n’avaient pas la conviction, mais l’espoir
que
le jeune homme réfléchirait et qu’il se présenterait au service milit
676
mais l’espoir que le jeune homme réfléchirait et
qu’
il se présenterait au service militaire. Ces jugements ont été cassés
677
ux pénaux suisses, le sursis ne peut être accordé
que
si le juge a plus qu’un espoir, mais une conviction suffisante. Alors
678
sursis ne peut être accordé que si le juge a plus
qu’
un espoir, mais une conviction suffisante. Alors, l’objecteur est forc
679
parlé. Bernard Béguin. — Ces atténuations, est-ce
qu’
elles sont venues d’un malaise, d’un sentiment public que la répressio
680
s sont venues d’un malaise, d’un sentiment public
que
la répression était excessive ? Est-ce que c’est une évolution de la
681
public que la répression était excessive ? Est-ce
que
c’est une évolution de la pensée du législateur interprétée par les t
682
parce qu’il avait déjà été condamné une fois, et
que
les choses semblaient se présenter de telle manière qu’il serait cert
683
s choses semblaient se présenter de telle manière
qu’
il serait certainement condamné une seconde fois à la même peine ou à
684
s avoir refusé de le porter. J’ai eu l’impression
que
les objecteurs étaient toujours punis, et que le procès n’avait pas d
685
ion que les objecteurs étaient toujours punis, et
que
le procès n’avait pas d’autre objet que de déterminer si les conditio
686
punis, et que le procès n’avait pas d’autre objet
que
de déterminer si les conditions objectives de l’objection de conscien
687
ection de conscience étaient réunies. C’est ainsi
que
cela se passait au Moyen Âge dans les tribunaux de l’Inquisition. On
688
On cherchait uniquement la constatation objective
que
le personnage était un hérétique. Après ça, il n’y avait plus rien à
689
ait. Et alors j’ai été un peu scandalisé à l’idée
que
, dans le cas de l’objecteur de conscience, on le condamne comme un hé
690
ique, uniquement parce qu’on a enregistré le fait
qu’
il était objecteur. On tient compte des circonstances atténuantes
691
t. Mais je n’en ai jamais vu. Tous les objecteurs
que
j’ai connus étaient des gens sensés. Donc pas de maladie mentale, pas
692
me les hérétiques. Les civils plus intolérants
que
l’armée Colonel Vaucher. — Nous écoutons très longuement leurs mot
693
. — M. Schaller va me répondre parce que j’ai dit
qu’
il cherchait la condamnation. Christian Schaller. — Je voudrais répond
694
voudrais répondre également au grand juge Vaucher
que
le tribunal apprécie les motifs de conscience avec plus ou moins de s
695
t de conscience. On ne peut pas dire d’autre part
que
l’objecteur cherche sa condamnation. Il accepte la loi. (Il pourrait
696
. — Je voudrais répondre encore à M. de Rougemont
que
l’appréciation des mobiles joue un rôle dans la quotité de la peine.
697
la peine. Nous donnons beaucoup d’importance à ce
que
la vie des objecteurs soit en rapport avec leurs principes. Enfin nou
698
mnons pas perpétuellement. Autrefois, il arrivait
que
l’on prononce trois condamnations. C’était trop. Maintenant à la deux
699
unaux militaires et de tribunaux civils. Je crois
que
dans notre pays, l’armée et le peuple sont si intimement mêlés que vo
700
ys, l’armée et le peuple sont si intimement mêlés
que
vous retrouvez les mêmes personnages dans les deux juridictions. Ce n
701
e telle. Je parle contre un certain état d’esprit
que
je trouve beaucoup plus répandu chez les civils que chez les officier
702
e je trouve beaucoup plus répandu chez les civils
que
chez les officiers. Les civils sont souvent absolument intolérants. I
703
érants. Ils n’ont absolument pas la compréhension
que
vous avez. Ils sont violemment contre : « Ce sont des lavettes, ce so
704
certaines causes à d’autres instances, eh bien !
qu’
il le fasse. Bernard Béguin. — Colonel divisionnaire Dénéréaz, vous co
705
mécanisée. Vous êtes officier de carrière. Est-ce
qu’
il ne serait pas plus simple, pour vous, d’admettre un service civil ?
706
, pour vous, d’admettre un service civil ? Est-ce
que
ça a un sens de contraindre au service militaire des hommes qui ont l
707
Vous avez le droit de critiquer l’armée. Tout ce
qu’
on vous demande c’est de faire votre service. Nous ne vous demandons p
708
teur de conscience n’est pas quelqu’un qui trouve
que
l’armée est mal faite. Il veut manifester contre la guerre. C’est un
709
ut à mon sens. Bernard Béguin. — Quand vous dites
que
l’objection n’est pas de l’antimilitarisme, il faut bien voir que si
710
n’est pas de l’antimilitarisme, il faut bien voir
que
si l’on hésite à créer un statut de l’objecteur, c’est qu’on a le sen
711
on hésite à créer un statut de l’objecteur, c’est
qu’
on a le sentiment qu’il vise l’appareil qui défendra les institutions.
712
statut de l’objecteur, c’est qu’on a le sentiment
qu’
il vise l’appareil qui défendra les institutions. Ce que l’objecteur n
713
vise l’appareil qui défendra les institutions. Ce
que
l’objecteur nous explique mal quand il veut lutter contre la guerre,
714
il veut lutter contre la guerre, en Suisse, c’est
qu’
il s’attaque en même temps à un appareil militaire dont les obligation
715
ute initiative à l’extérieur, et qui ne peut agir
qu’
en autodéfense. Service civil et milice incompatibles ? Christia
716
l’ai entendu dire par des officiers supérieurs —
qu’
on se prépare très consciencieusement à la dernière guerre. Une des qu
717
ieusement à la dernière guerre. Une des questions
que
posent les objecteurs, est de savoir : que faisons-nous dans le monde
718
stions que posent les objecteurs, est de savoir :
que
faisons-nous dans le monde où nous vivons ? Est-ce que nous nous cont
719
aisons-nous dans le monde où nous vivons ? Est-ce
que
nous nous contentons d’appliquer les recettes du passé — qui ont touj
720
qui ont toujours si bien marché — ou bien est-ce
que
nous avons autre chose à faire que simplement assurer notre prospérit
721
ou bien est-ce que nous avons autre chose à faire
que
simplement assurer notre prospérité et la défendre par nos moyens tra
722
la défendre par nos moyens traditionnels ? Est-ce
que
la Suisse, c’est uniquement la conservation de son acquis, ou est-ce
723
iquement la conservation de son acquis, ou est-ce
qu’
il y a une autre dimension ? Colonel divisionnaire Dénéréaz. — Je ne c
724
Colonel divisionnaire Dénéréaz. — Je ne crois pas
que
tout cela soit dépassé. Je suis un officier de métier, un technicien,
725
éfense est encore positive, ou négative. Je pense
que
notre système militaire, tel qu’il est maintenant, avec l’armée que n
726
gative. Je pense que notre système militaire, tel
qu’
il est maintenant, avec l’armée que nous avons, est certainement un él
727
militaire, tel qu’il est maintenant, avec l’armée
que
nous avons, est certainement un élément positif, en dépit de la bombe
728
vait eu un vide stratégique, il est fort possible
que
nous aurions été attaqués. Pour citer le dernier exemple : 40 divisio
729
es Balkans… le grand état-major allemand a estimé
que
ce n’était pas suffisant. Demain ? Nous avons l’armée la plus nombreu
730
olonel divisionnaire Dénéréaz. — Il n’est pas dit
que
la bombe atomique intervienne dans les combats. Je ne veux pas faire
731
ux pas faire ici de la tactique. Je suis persuadé
que
l’État ne peut pas mettre en doute, surtout dans notre communauté hel
732
i a été fait à l’étranger. D’ailleurs, vous savez
qu’
en France un objecteur doit se déclarer comme tel au recrutement, et q
733
eur doit se déclarer comme tel au recrutement, et
qu’
il ne peut assumer par la suite aucune charge d’État… Christian Schall
734
ne charge d’État… Christian Schaller. — N’empêche
qu’
il y a un statut, c’est déjà un progrès… Colonel divisionnaire Dénéréa
735
’est ma conviction intime, à moi militaire ! Mais
que
voulons-nous faire ? défendre notre pays, c’est tout. Le général Guis
736
s ne voulons de mal à personne, sinon défendre ce
que
nous avons reçu. » Colonel Vaucher. — Sur le plan de la justice milit
737
ecteurs de la faire poser — , je pense finalement
qu’
une armée est indispensable en Suisse et que le service militaire obli
738
ement qu’une armée est indispensable en Suisse et
que
le service militaire obligatoire paraît la forme la plus démocratique
739
militarisme en horreur. Bernard Béguin. — Est-ce
qu’
un service civil affaiblirait l’armée de milice ? Colonel Vaucher. — P
740
ans doute plus attrayant. Nous protégeons mais
que
construisons-nous ? Colonel divisionnaire Dénéréaz. — Nous pourrio
741
un système international, supranational. L’armée
que
nous avons actuellement en propre nous permet en cas de conflit de fa
742
is la question est bien là. Nous conservons, mais
que
construisons-nous ? C’est peut-être ça la question que nous pouvons n
743
onstruisons-nous ? C’est peut-être ça la question
que
nous pouvons nous poser ? Colonel divisionnaire Dénéréaz. — L’armée n
744
qui vaille les destructions physiques et morales
qu’
entraînerait la bombe atomique sur un pays. Cela me paraît changer rad
745
— Les grandes crises de conscience sur la guerre
que
nous avons vécues et que notre jeunesse vit actuellement sont venues
746
conscience sur la guerre que nous avons vécues et
que
notre jeunesse vit actuellement sont venues de deux guerres très conv
747
la bombe atomique sont très comparables à celles
que
nous avons tolérées, idéologiquement, pendant la dernière guerre, com
748
ristian Schaller. — On peut précisément s’étonner
que
vous ayez pu le tolérer si bien sans changer de mentalité. Bernard Bé
749
d Béguin. — Nous ne pouvons pas ignorer non plus,
qu’
actuellement encore, à l’extérieur de nos frontières, des forces peuve
750
challer. — C’est au nom des valeurs de ce système
que
nous appelons, en tant qu’objecteurs, à un élargissement de nos conce
751
le faire en Russie. Mais je pense, pour ma part,
que
si la neutralité suisse doit s’accompagner de la solidarité, il faut
752
termes on va toujours préférer. Or l’on constate
qu’
on a toujours consacré beaucoup d’énergie à la neutralité et bien peu
753
les frontières du passé sans tenir compte du fait
que
nos frontières actuelles sont celles de la planète. Denis de Rougemon
754
ation et au sérieux, du problème de la guerre tel
qu’
il se présente aujourd’hui. Je me demande si on peut toujours se référ
755
ssi : Neutralité oblige, allez plus loin. Tout ce
que
je voudrais dire ici, en faveur des objecteurs de conscience, c’est q
756
ci, en faveur des objecteurs de conscience, c’est
qu’
ils posent cette question d’une manière dramatique, et qu’ils forcent
757
osent cette question d’une manière dramatique, et
qu’
ils forcent le public à se poser des questions auxquelles je ne préten
758
répondre, mais qui me paraissent tellement graves
qu’
on doit reconnaître une fonction civique irremplaçable aux objecteurs
759
ites-moi plutôt pourquoi et comment vous imaginez
que
j’aurais pu ne pas le faire, étant écrivain, et Européen ! Quand on c
760
, étant écrivain, et Européen ! Quand on constate
qu’
un écrivain véritable, et d’Europe, n’a jamais écrit sur l’amour, là,
761
dans Doctrine fabuleuse , sur les trente volumes
que
j’ai publiés, ce n’est guère envahissant. N’oubliez pas mes journaux
762
bien — mais je suis presque le seul à le savoir —
que
j’ai aussi écrit un roman, et des poèmes, qui peut-être, un jour ou l
763
rsonne. L’Amour et l’Occident n’en est en somme
qu’
une illustration dans le domaine des relations individuelles, dont l’e
764
vie et des œuvres de Kierkegaard et de Nietzsche,
que
la dialectique de l’amour-passion, exalté par l’obstacle qui le nie,
765
a vie du couple le plus « fidèle ». S’il est vrai
que
la passion cherche l’inaccessible, et que l’autre en tant qu’autre re
766
st vrai que la passion cherche l’inaccessible, et
que
l’autre en tant qu’autre reste aux yeux de l’amour exigeant le mystèr
767
La jeunesse dans son ensemble vit actuellement ce
que
nous pourrions appeler l’éclatement de l’Éros, ce qui entraîne une so
768
ssession de l’autre. Certains vont jusqu’à penser
qu’
« il faut guérir l’Occident de sa maladie monogamique ». De l’unicité,
769
nt on parle tant, il s’agit de la mort du couple.
Que
pensez-vous de ce phénomène qui met votre œuvre à l’ordre du jour ? L
770
j’en crois mes yeux et les statistiques. Le fait
qu’
un livre comme Love Story ait été tiré à plusieurs millions montre une
771
se résume dans le mot d’adultère ». Je craignais
que
cette observation fût « dépassée ». Mais le Nouvel Observateur, qui l
772
» Me voici dépassé, mais dans mon sens ! Il reste
que
l’amour-passion est une maladie de l’amour comme la drogue et l’alcoo
773
humaine, trop humaine. Rien n’a fait plus de mal
que
la passion, ni créé plus de beauté, en Occident. Je pense que le coup
774
on, ni créé plus de beauté, en Occident. Je pense
que
le couple, fondement du rapport humain le plus total, survivra sans t
775
rs soucieux de William Reich. Quant à l’érotisme,
que
je définis comme « l’usage non procréateur du sexe » — j’y vois un mé
776
a-t-il un lien entre ces deux pôles d’attraction
que
sont pour vous l’amour d’une part, l’Europe d’autre part ? Mon titre
777
e occidentale de l’homme . J’ai essayé de montrer
que
la notion de révolution n’est rien d’autre que la passion transposée
778
er que la notion de révolution n’est rien d’autre
que
la passion transposée au niveau collectif. Or, il n’y a de révolution
779
e au niveau collectif. Or, il n’y a de révolution
qu’
européenne, c’est-à-dire chrétienne à sa source : le socialiste Henri
780
les » depuis le Centre européen de la culture tel
que
vous vouliez le faire à votre retour d’Amérique en Europe en 1946 ? J
781
? Je suis un écrivain engagé au sens actif du mot
que
j’ai défini dans mon premier livre, publié à Paris en 1934, Politiqu
782
d je suis rentré des États-Unis, en 1946, j’ai vu
que
l’engagement était devenu une théorie à la mode. Je n’en ai plus parl
783
Lettre ouverte aux Européens : « La révolution
que
j’appelle, qui fera seule l’Europe et qui ne peut être faite que par
784
qui fera seule l’Europe et qui ne peut être faite
que
par l’Europe en train de se faire, consiste à déplacer le centre du s
785
tte « révolution » et votre pamphlet de jeunesse,
qu’
on vient de rééditer, Les Méfaits de l’instruction publique ? Il y a
786
nce, mais la situation actuelle est plus sérieuse
que
mon petit pamphlet, avouons-le, car c’est l’école qui a fabriqué nos
787
qué nos nationalismes. C’est un écrit de jeunesse
que
je renie d’autant moins qu’il a gardé la vertu réjouissante d’exaspér
788
un écrit de jeunesse que je renie d’autant moins
qu’
il a gardé la vertu réjouissante d’exaspérer ceux qui aujourd’hui enco
789
portugais, en japonais et en italien. C’est dire
que
1972 a été pour lui “une année de mise au point d’une partie de son œ
790
e presque tous les grands débats politiques. Rien
que
pour les votations du 26 février prochain, deux sujets sur six la con
791
de la place Cornavin et initiative Franz Weber).
Que
l’on parle d’aménagement du territoire, de reconstruction de quartier
792
le-bol, elle est tout cela à la fois. Mais n’être
qu’
utilitaire et discrète, elle n’y parvient plus. « C’est devenu une vér
793
de religion », s’exclamait une des personnalités
que
nous avions conviées à notre table ronde. De toute évidence, que l’on
794
conviées à notre table ronde. De toute évidence,
que
l’on y soit favorable ou non, il faut reconnaître que la voiture a tr
795
l’on y soit favorable ou non, il faut reconnaître
que
la voiture a très largement débordé le cadre social, économique et po
796
tés de venir à notre rédaction débattre du sujet,
qu’
elles connaissent toutes pour l’avoir étudié à fond, bien que sous des
797
partisan. Sur le plan social, parce qu’il estime
qu’
elle nous rapproche les uns des autres, sur le plan économique, parce
798
Rougemont : d’entrée de jeu, je souhaite affirmer
que
je ne suis pas contre l’automobile. D’ailleurs je n’aurais pas l’outr
799
illeurs je n’aurais pas l’outrecuidance de penser
que
le problème de l’auto soit tranché du seul fait que je l’aime bien ou
800
e le problème de l’auto soit tranché du seul fait
que
je l’aime bien ou que je la trouve utile. Si j’ai consacré dans mon d
801
o soit tranché du seul fait que je l’aime bien ou
que
je la trouve utile. Si j’ai consacré dans mon dernier livre une trent
802
nier livre une trentaine de pages à l’auto, c’est
que
je la considère — son titre l’indique — comme une histoire de fous, s
803
développement du national-socialisme. Et j’espère
qu’
il n’y en aura pas une troisième qui serait celle des centrales nucléa
804
les enfants et les chevaux. » Ford a alors estimé
que
la seule manière de surmonter cette répugnance c’était d’organiser de
805
t pas avant. Les premières années, Ford n’a vendu
que
cent ou deux cents voitures. En 1909, il en avait vendu 18 000, en 19
806
res par an. Ford est mort dans une petite auberge
qu’
il avait achetée pour jouer avec ses petits enfants. Il avait obtenu d
807
ire aujourd’hui, M. Peyrot, à l’utilisateur moyen
que
la voiture est un besoin créé de toute pièce et qu’elle est répugnant
808
e la voiture est un besoin créé de toute pièce et
qu’
elle est répugnante, il aurait une réaction assez vive. François Peyro
809
et n’importe quel industriel vous le confirmera —
que
là où il n’y a pas de besoin, il n’y a pas de fabrication possible. C
810
amentale de notre civilisation industrielle, quel
que
soit le type de fabrication que l’on se propose de faire. Que Henry F
811
ndustrielle, quel que soit le type de fabrication
que
l’on se propose de faire. Que Henry Ford ait dit que le besoin de voi
812
type de fabrication que l’on se propose de faire.
Que
Henry Ford ait dit que le besoin de voiture n’existait pas, mais qu’i
813
l’on se propose de faire. Que Henry Ford ait dit
que
le besoin de voiture n’existait pas, mais qu’il l’avait créé, n’est p
814
dit que le besoin de voiture n’existait pas, mais
qu’
il l’avait créé, n’est pas une démonstration suffisante. Les financier
815
nstruction d’une usine, demandent bien évidemment
que
cette usine puisse fonctionner et soit rentable. Jean Kräyenbühl : Je
816
nner et soit rentable. Jean Kräyenbühl : Je pense
que
Ford a surtout exprimé un sentiment personnel. Il aura peut-être perç
817
ra peut-être perçu, déjà à cette époque le danger
que
pouvait apporter l’automobile. Il aura donc fait cette déclaration da
818
t cette déclaration dans un moment d’angoisse tel
que
d’autres chercheurs en ont connu dans d’autres domaines. Denis de Rou
819
interprétation. Ce n’était pas lui qui a affirmé
qu’
il n’y avait pas de besoin pour la voiture, mais tous ses amis. C’étai
820
ox populi. Jacob Roffler : Rien n’est plus facile
que
de créer des besoins, grâce aux mass medias et aux moyens financiers
821
re, notamment lorsque vous habitez la campagne et
que
vous devez vous rendre en ville pour travailler. Mais aussi sur le pl
822
, vous devez respecter des horaires au même titre
que
si vous preniez le train. Vous partez en vacance non pas le samedi ma
823
esoin. François Peyrot : Permettez-moi d’observer
que
l’on ne peut pas tirer d’une déclaration d’un homme à la fin de sa vi
824
n tout… Il n’y avait presque pas plus de voitures
que
d’inventeurs. Il a été de toute évidence le créateur de l’industrie a
825
orte à porte. Elle donne une liberté de mouvement
qu’
aucun autre mode de transport ne peut donner. Vous sortez de chez vous
826
uvrent toute une quantité de choses merveilleuses
qu’
ils auraient de la peine à découvrir autrement, à pied ou à vélo. Vous
827
en a pas réduit les avantages. Mais c’est certain
qu’
elle les a réduits en partie. La « belle époque » où seules les famill
828
n du niveau de vie — et je m’en félicite — a fait
que
beaucoup ont aujourd’hui accès à l’automobile. Une personne sur trois
829
comporte aussi des inconvénients. Un autre aspect
qu’
il faut souligner c’est la voiture signe de la civilisation industriel
830
Et c’est finalement bien davantage un « stress »
que
vous ressentez. Vous avez évoqué la culture. Je parlerais plutôt d’an
831
utôt d’anti-culture, car quoi de plus abrutissant
que
les conditions de conduite sur nos routes ? François Peyrot : Mais il
832
eyrot : Mais il faut faire un bilan ! C’est clair
que
l’on peut mentionner des avantages comme des inconvénients. L’importa
833
s posé la question. Il ne s’est jamais demandé ce
qu’
il adviendrait si au lieu de vendre cent ou deux cents véhicules par a
834
spective. J’ai omis de vous dire à propos de Ford
qu’
il avait douze ans, lorsqu’il a rencontré sa première locomotive routi
835
sibilité de détour. Mais à partir de ce fantasme,
qu’
est-ce que cela a donné ? Quand il disait à ses ouvriers : « achetez d
836
e détour. Mais à partir de ce fantasme, qu’est-ce
que
cela a donné ? Quand il disait à ses ouvriers : « achetez des voiture
837
is rendement qui soit. Les Américains ont calculé
que
leurs voitures rejettent le 87 % de l’énergie qu’elles consomment. Il
838
que leurs voitures rejettent le 87 % de l’énergie
qu’
elles consomment. Illich a calculé que la vitesse moyenne des automobi
839
e l’énergie qu’elles consomment. Illich a calculé
que
la vitesse moyenne des automobiles dans les villes des États-Unis éta
840
tables, même à la limite romantiques, on constate
que
la voiture a donné exactement le contraire : un rendement minable, de
841
bouteillages sans fin. Jean Kräyenbühl : Je pense
qu’
il faudrait davantage analyser le comportement de la population et des
842
rtement de la population et des individus, plutôt
que
la voiture en tant que telle. Car on pourrait adresser exactement les
843
uits, dans d’autres secteurs. Pourquoi ne retenir
que
le cas de la voiture ? Il faut prendre en considération l’individu et
844
e. Au niveau du comportement, il faut reconnaître
qu’
il y a trop de gens qui font de la voiture un usage abusif. Un urbanis
845
. C’est un aspect négatif. Mais le problème c’est
que
les gens aujourd’hui ont appris à se servir de leur voiture comme d’u
846
servent pour venir travailler. Jacob Roffler : Ce
que
je déplore dans l’évolution actuelle de l’urbanisme, c’est la place b
847
et à ceux qui l’utilisent. C’est ce qui explique
que
des zones de verdure continuent chaque année de disparaître au détrim
848
ttre en évidence le problème de l’individu plutôt
que
celui de la voiture. Car de cette dernière, comme de n’importe quel o
849
l faut faire façon d’elle. Ce qui me choque c’est
qu’
on veut absolument la charger de tous les péchés du monde. Il faut rev
850
à une saine interprétation des choses. Nul doute
que
l’extraordinaire prolifération du nombre de véhicules pose des problè
851
suis pour ou contre la voiture, je dois convenir
que
c’est de la rigolade. Cela n’a plus aucune importance. Je parlais de
852
ais de bouleversements. C’est en raison de l’auto
que
le pétrole est devenu le produit dont toute l’économie occidentale dé
853
nomie occidentale dépend aujourd’hui. Pensez-vous
qu’
à l’origine on avait compté avec cela ? Est-ce qu’on aurait accepté de
854
qu’à l’origine on avait compté avec cela ? Est-ce
qu’
on aurait accepté de rendre toute l’économie occidentale dépendante de
855
ues émirs du golfe Persique ? Tout cela pour dire
que
l’on ne peut traiter d’une question aussi grave en demandant simpleme
856
ans une émission de midi à 14 heures n’ont trouvé
que
cela à me répondre : « Mais Monsieur de Rougemont, avez-vous une voit
857
tés. Mais les opposants prétendent, de leur côté,
que
l’intervention de l’État pour faire face à l’extension de la voiture,
858
intérêts souvent divergents. Il doit veiller à ce
qu’
il y ait un certain équilibre entre les activités des individus. Vous
859
Ce qui nous fait déboucher sur un cercle vicieux
qu’
il nous faut briser. François Peyrot : Comprenez-moi bien, je ne suis
860
est constitutionnelle. Mais je suis contre le but
qu’
elle vise. Denis de Rougemont : Je suis bien obligé de reconnaître que
861
de Rougemont : Je suis bien obligé de reconnaître
que
les expropriations sont de plus en plus fréquentes et représentent un
862
om de la raison d’État. Pensez aux expropriations
que
l’on se prépare à faire, selon des déclarations officielles, à cause
863
s le ferons ! disent ces messieurs qui forment ce
qu’
on a appelé la « chevalerie du nucléaire ». Les expropriations au nom
864
opriations au nom des autoroutes, ou le seul fait
que
la Confédération puisse imposer certains tracés contre la volonté pop
865
’initiative Weber ne vise rien d’autre. J’ai peur
que
lorsque vous dites, M. Peyrot, que la démocratie dépend des corps con
866
tre. J’ai peur que lorsque vous dites, M. Peyrot,
que
la démocratie dépend des corps constitués, vous parliez d’oligarchie.
867
et plus personne ne discutera. Je n’ai jamais dit
que
cette initiative était antidémocratique. J’ai seulement affirmé que l
868
ve était antidémocratique. J’ai seulement affirmé
que
les reproches adressés à nos autorités, en ce moment, étaient injusti
869
emande rien d’impossible. Elle demande simplement
que
le peuple puisse se prononcer. François Peyrot : Rétroactivement, ce
870
e multiplier les permis de construire. Une erreur
que
l’on commet avec le trafic routier, c’est de transporter beaucoup tro
871
Étant Neuchâtelois, je connais bien les problèmes
qu’
apporte la construction d’une autoroute sur le côté nord du lac de Neu
872
nord du lac de Neuchâtel et les débats terribles
que
cela entraîne : va-t-on passer à travers la ville, va-t-on détruire l
873
va-t-on détruire les rives du lac ? Sans compter
que
l’on nous construit une seconde autoroute de l’autre côté du lac qui
874
à de telles choses, on est bien obligé de penser
que
si le fédéral s’obstine, un recours démocratique doit être possible.
875
rt de Senarclens : Des récentes études ont montré
que
les gens sont de plus en plus concernés par les effets négatifs de la
876
villes. Vous avez souvent écrit, M. de Rougemont,
que
l’automobile avait détruit les rapports humains dans les villes et fi
877
Genève, je dois dire, on a très tôt vu le danger
que
représentait une utilisation abusive de la voiture. Déjà en 1968, rap
878
iculièrement rapide ! Jean Kräyenbühl : Il semble
qu’
il y ait une sorte de schizophrénie dans la population. Tout le monde
879
lation. Tout le monde semble d’accord sur le rôle
que
doivent jouer les transports en commun, notamment dans les zones dens
880
ément peuplées où la voiture ne devrait plus être
qu’
un appoint. Mais lorsque l’on passe aux actes, plus personne n’est prê
881
commun. Denis de Rougemont : Vous me rappelez ce
que
disait Alfred Sauvy dans son petit livre sur l’auto : « Les accidents
882
mpopulaires ». Ce qui ne veut pas dire, bien sûr,
qu’
il ne faille pas lutter par une meilleure information. François Peyrot
883
r une meilleure information. François Peyrot : Ce
que
dit Jean Kräyenbühl à propos de l’urbanisme est juste. Dès que vous a
884
utilisée davantage pour les bureaux. C’est ainsi
que
Wall Street ou le centre de Paris sont devenus complètement morts. En
885
point d’interrogation demeure selon moi : est-ce
que
le conducteur qui va faire ses achats, acceptera de s’extraire de sa
886
ses achats, acceptera de s’extraire de sa voiture
qu’
il aura laissée dans un de ces parkings, alors que vous avez de plus e
887
onnes désirent aller habiter à la campagne, c’est
que
la ville est devenue invivable. Ce qui se passe en Occident, à cet ég
888
Occident, à cet égard, est juste l’inverse de ce
que
l’on constate dans les pays en voie de développement. Là-bas vous ass
889
ieux de loisirs. L’homme est un tout. Vous n’avez
qu’
à constater les effets catastrophiques des cités-dortoirs où les gens
890
: Vous avez fréquemment écrit Denis de Rougemont,
que
la voiture avait tué les relations humaines dans la cité. Denis de Ro
891
sieurs ouvrages nous a rendus attentifs à ce fait
que
la voiture, en envahissant complètement les places transformées en pa
892
Voilà encore un certain nombre d’effets objectifs
que
personne n’avait pu prévoir, et qui repose le problème de l’automobil
893
1968 — les choses se sont aggravées depuis — dit
que
le 40 % des frais d’administration de la ville de Paris sont consacré
894
consacrés à la voiture. Et il ajoute en substance
qu’
à ce jeu de l’auto prioritaire ont été sacrifiés sans douleur, logemen
895
gement est assez impressionnant lorsque l’on sait
que
Sauvy est non seulement professeur au Collège de France mais qu’il s’
896
on seulement professeur au Collège de France mais
qu’
il s’occupe chaque année du budget de la nation. François Peyrot : On
897
des problèmes presque insolubles. Je suis d’avis
que
des règlements s’imposent. Denis de Rougemont : Nous sommes ici, je p
898
s sommes ici, je pense, tous d’accord pour penser
que
cette déclaration de feu le président Georges Pompidou est une monstr
899
. À propos des quais de la Seine : « Il est temps
que
Paris s’adapte à l’automobile ». François Peyrot : C’est en effet une
900
car une ville doit s’adapter, tout en gardant ce
qu’
elle a d’authentique et qui doit absolument être préservé IV Hu
901
losophique, sociale ou politique sur la voiture —
qu’
on le veuille ou non — n’est-elle pas neutralisée par cette réalité éc
902
iter une usine d’automobiles, vous aurez constaté
qu’
elle dépend d’un nombre considérable de sous-traitants qui eux-mêmes s
903
e, elle débouche sur une quantité d’emplois. Rien
que
pour la Suisse — qui pourtant ne fabrique pas directement d’automobil
904
rité des gens, en Occident, vit aujourd’hui mieux
qu’
il n’y a un ou deux siècles. Moi ce qui me frappe, M. de Rougemont, da
905
qui me frappe, M. de Rougemont, dans la critique
que
vous faites du système en général c’est que vous insistez beaucoup su
906
tique que vous faites du système en général c’est
que
vous insistez beaucoup sur l’objet — en l’occurrence la voiture — mai
907
re va sortir de son usine, il ne faut pas oublier
qu’
elle risque de tuer. Il y a par le monde plus de 200 000 personnes qui
908
sés. À cela s’ajoute le coût social. Je reconnais
qu’
actuellement, sur le plan strictement économique, il serait très diffi
909
ugemont : En ce qui concerne l’économie, je pense
qu’
il faut rester humain. Il y a des limites qui commencent à être attein
910
es. Pour les autoroutes, il est clairement établi
que
loin de résoudre le problème du trafic, elles tendent à le bloquer. É
911
dre la circulation plus fluide mais on s’aperçoit
qu’
au moindre départ en vacances les voitures y sont bloquées. Hubert de
912
tement exagérés ? Jacob Roffler : Je ne pense pas
que
l’on puisse parler de conspiration du silence. En fait même si certai
913
nt débuté il y a cinq ou dix ans. Je vous signale
qu’
un groupe d’ingénieurs de Lausanne a calculé que 900 tonnes d’hydrocar
914
e qu’un groupe d’ingénieurs de Lausanne a calculé
que
900 tonnes d’hydrocarbures sont déposées chaque année sur un kilomètr
915
par les eaux de pluie avec les effets biologiques
que
vous devinez. Le reste par le vent. Or on sait — pour l’avoir testé s
916
r l’avoir testé sur des animaux de laboratoires —
que
certains hydrocarbures sont responsables du cancer. On connaît égalem
917
été étudiés. Des chercheurs ont notamment prouvé
que
des écoliers étudiant à proximité de routes fréquentées, connaissent
918
e part en ce qui concerne les accidents, je pense
qu’
il ne faut pas prendre uniquement en considération le choc ou la bless
919
ou la blessure mais l’ensemble des suites telles
que
la diminution de l’espérance de vie, la diminution des chances de pro
920
e la joie de vivre, la douleur, etc. Donc on voit
que
si la voiture donne une certaine liberté, on paie celle-ci horribleme
921
C’est l’aspect de la criminalité. Il est évident
que
nos outils ne sont jamais responsables de nos crimes. Ce qui est dang
922
sque apparaît lorsque vous donnez aux hommes tels
qu’
ils sont — finalement assez dangereux et bêtes — des jouets comme la b
923
Car même en les baratinant, vous n’obtiendrez pas
qu’
ils restent « gentils ». Cela me rappelle ce que l’on dit aux États au
924
s qu’ils restent « gentils ». Cela me rappelle ce
que
l’on dit aux États auxquels on vend des centrales : « Surtout ne fait
925
er… François Peyrot : Personne ne discute le fait
que
les gaz de voiture sont toxiques à forte dose. Mais quels sont les mé
926
s ! Denis de Rougemont : Je dois dire, M. Peyrot,
que
vous avez systématiquement, au cours de ce débat, minimisé les inconv
927
Les journalistes sportifs ? On dirait
qu’
ils aiment les tyrans (31 mai-1er juin 1980)ao ap Dans ma jeunesse,
928
du gymnase puis de l’Université de Neuchâtel. Ce
que
j’aimais tout particulièrement dans ce rôle, c’était le moment de cri
929
r la manière dont Montherlant parlait du football
que
pour son style. Mon article fut donc publié dans La semaine littérair
930
ntendu très fier de recevoir des lettres de celui
que
je considérais comme un merveilleux écrivain. Mes débuts littéraires
931
Si vous deviez définir le rôle du sport… Je crois
que
le sport doit être pour l’individu une sorte de morale ; celle de la
932
u respect de l’autre. Mais force est de constater
qu’
à l’heure actuelle cette morale est en train de fortement se dégrader
933
ernationales, des JO en particulier. Précisément,
que
pensez-vous des Jeux olympiques ? Je suis violemment opposé à tout ce
934
6 et ceux qui vont se dérouler à Moscou. Je pense
qu’
en 1936, les démocraties occidentales ont eu le plus grand tort de par
935
t en exprimant clairement leurs raisons, à savoir
qu’
elles ne voulaient pas servir la publicité d’un régime scandaleux, la
936
otalement ceux qui refusent d’aller à Moscou tant
que
le régime soviétique continue à faire ce que l’on sait. D’autant que
937
tant que le régime soviétique continue à faire ce
que
l’on sait. D’autant que le gouvernement russe a largement diffusé une
938
a d’ailleurs vivement protesté, disant clairement
que
le fait que Moscou ait été choisi comme siège des JO est un témoignag
939
vivement protesté, disant clairement que le fait
que
Moscou ait été choisi comme siège des JO est un témoignage d’admirati
940
r de mon pays ! » Quand on en arrive là, je crois
qu’
il n’est plus question de sport mais de délire nationaliste. Et la pre
941
e. Et la presse sportive dans tout cela… Je pense
que
les mass médias, dans leur ensemble, sont en grande partie responsabl
942
istes vont même jusqu’à écrire des phrases telles
que
« Tartampion ne fait pas de quartier, il écrase ses adversaires, dict
943
emps de revenir à une vraie morale du sport telle
que
je l’admirais comme adolescent dans les premiers livres de Montherlan
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[Entretien] Les journalistes sportifs ? On dirait
qu’
ils aiment les tyrans », Journal de Genève, Genève, 31 mai–1 juin 1980
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essentiels de notre temps. Mais, aussi surprenant
que
cela puisse paraître, sa vocation littéraire a commencé avec le footb
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compagnons de mes mises en train. Le sort a voulu
que
je n’arrive à lire qu’un seul des « livres d’amis » : le Poisson-scor
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en train. Le sort a voulu que je n’arrive à lire
qu’
un seul des « livres d’amis » : le Poisson-scorpion de Nicolas Bouvier
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jourd’hui ! Mais pour le reste, hélas, je n’ai pu
que
relire, et de très près, sept ou huit de mes propres livres, en vue d
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jours dans Nerval : je m’étais aperçu à ma honte
que
je ne savais plus par cœur les sonnets des Chimères : c’est réparé.
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9 octobre 1982, p. V. ar. Réponse à l’enquête «
Que
lisent les écrivains romands ? »
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firmer avec force sa foi en un avenir qui sera ce
que
nous en ferons, Denis de Rougemont expliqua pourquoi l’essai est, à s
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isqu’il ne se déclare, pour notre Suisse romande,
que
tous les vingt ans en moyenne — je vous dirai qu’il me rassure au moi
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que tous les vingt ans en moyenne — je vous dirai
qu’
il me rassure au moins autant qu’il m’honore. Il distingue en effet un
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— je vous dirai qu’il me rassure au moins autant
qu’
il m’honore. Il distingue en effet un « essayiste », c’est-à-dire une
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définit aujourd’hui, dans le domaine littéraire,
que
d’une manière négative : c’est quelqu’un qui publie bien sûr, mais n’
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iment partie de la littérature ? Tel est le doute
qu’
en me donnant votre Grand Prix vous tranchez en faveur de l’essai comm
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s de l’essayiste et de l’engagement de l’écrivain
que
je vous proposerai quelques très brèves remarques. Depuis le xix e si
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ublic et la plupart des critiques semblent penser
que
la littérature c’est poésie, roman, théâtre, et création littéraire s
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er Caillois… Voilà ce qui compte à mes yeux, plus
que
tout, dans ma bibliothèque française. Seul Benjamin Constant est meil
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Seul Benjamin Constant est meilleur dans Adolphe
que
dans ses écrits politiques. Paul Valéry me paraît en revanche plus cr
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me paraît en revanche plus créateur dans sa prose
que
dans ses vers. On m’opposera sans doute Racine. Mais toute loi souffr
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ce n’est pas à ses romans mais bien à ses essais
qu’
on le jugera. Rendons leur place aux essayistes dans toute littérature
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c. On s’étonne souvent, ou l’on juge regrettable,
que
je donne le plus clair de mes journées, depuis plus de trente ans, à
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journées, depuis plus de trente ans, à l’action.
Qu’
est-ce à dire? Action pour l’Europe fédérée dès 1946, fondation et dir
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e et d’une dizaine d’autres actions… Avec tout ce
que
cela nécessite de tâches quotidiennes, d’animation, d’organisation et
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les comités »… Combien d’autres ont dit ou écrit
que
mes engagements européens étaient « au détriment de mon œuvre littéra
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e ». Je serais perdu pour la littérature… Le prix
que
vous me donnez aujourd’hui, non seulement réfute ces propos, mais me
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i donc aborder sans aucune précaution la question
que
beaucoup se posent à mon sujet : — Pourquoi s’occupe-t-il tant d’Euro
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citoyen. Je rappellerai d’abord la nature du défi
que
ma génération eut à relever. Arthur Kœstler l’a fort bien dit : ce fu
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onnalisme. Un jour, chez des amis, un jeune Russe
que
je venais de connaître, Alexandre Marc, me remit une page de manifest
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uvait répondre aux questions les plus lancinantes
que
me posaient alors l’époque, les carences de nos démocraties et le déf
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uelques dizaines de jeunes intellectuels, avec ce
que
l’on nomme aujourd’hui, d’après une thèse célèbre, « les non-conformi
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yer de l’état-major général, à Berne. C’est de là
que
j’envoyai le 15 juin à la Gazette de Lausanne un article sur l’entrée
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utile là-bas, pensait-on sans doute en haut lieu.
Qu’
ai-je fait durant mes six années américaines ? J’ai écrit quelques liv
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sonnalistes, puis inspiré la Résistance, j’ai dit
que
j’étais prêt à donner à leur cause deux ans de ma vie, et tant pis po
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raisons tout intérieures auxquelles il est temps
que
je vienne. Kierkegaard et Karl Barth Vers ma vingt-quatrième an
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e totalement différente, je le confesse, de celle
que
je gardais de mon école du dimanche. C’était l’idée très calvinienne
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la communauté. Paul Valéry nous convaincus de ce
que
« toute politique suppose une certaine idée de l’homme ». Nous en déd
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une certaine idée de l’homme ». Nous en déduisons
que
le communisme supposait un individu embrigadé, le komsomol ; que les
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me supposait un individu embrigadé, le komsomol ;
que
les fascismes, noir ou brun, impliquaient à peu près la même concepti
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de la race substitué à celui de la classe ; mais
qu’
en revanche une société vraiment démocratique et libertaire, supposait
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observions — nous les personnalistes, précisons —
que
l’homme n’est responsable qu’au sein d’une communauté où sa voix puis
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listes, précisons — que l’homme n’est responsable
qu’
au sein d’une communauté où sa voix puisse porter et où n’importe qui
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e de Stentor. Nous retrouvions l’idéal d’Aristote
qu’
il décrit dans sa Politique, l’idéal de Calvin du même coup, et le mod
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Calvin du même coup, et le modèle de cité idéale
que
Rousseau devait reprendre en l’appliquant aux citoyens de Genève réun
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— voir la Suisse justement — une idée de l’homme
que
nous appelions la personne, c’est-à-dire un individu à la fois libre
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Voilà pour la doctrine. J’ai dit les conséquences
qu’
elle a entraînées dans ma vie. M’ont-elles « perdu pour la littérature
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-elles « perdu pour la littérature » ? J’ose dire
que
non. De mon action européenne, j’ai tiré huit volumes, c’est près d’u
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ai tiré huit volumes, c’est près d’un quart de ce
que
j’ai publié jusqu’ici. as. Rougemont Denis de, « Suis-je perdu po