1 1926, Journal de Genève, articles (1926–1982). Le Dépaysement oriental (16 juillet 1926)
1 sans que cela nuise en rien à un don de sympathie qui est parfois la plus subtile de ses ruses de psychologue. C’est parce
2 arfois — je pense à certaines pages sur Jérusalem qui touchent particulièrement une sensibilité protestante — si passionné.
3 Nul n’est moins oriental que de Traz, et c’est ce qui donne à ses notations tout leur prix. Elles ne nous renseignent pas s
4 e de l’Orient. Tandis que s’accumulent les traits qui composent le portrait moral de l’Oriental, celui de l’Européen se pré
5 une « préférence irréductible pour le vrai ». Ce qui lui permet de voir profond dans cet islam qu’il qualifie de « religio
6 r. » Et encore ceci que je trouve si juste : « Ce qui définit le plus profondément l’Occidental, c’est peut-être la fidélit
7 pothèses hardies — de la hardiesse de ce bon sens qui est le plus éloigné du sens commun — mais qui reste trop méfiant de t
8 ens qui est le plus éloigné du sens commun — mais qui reste trop méfiant de tout romantisme pour édifier aucun système. Le
9 raît, ici, comme le type du voyageur intelligent, qui n’accepte d’être séduit que pour « mieux comprendre », assez « fidèle
2 1929, Journal de Genève, articles (1926–1982). Panorama de Budapest (23 mai 1929)
10 quoi vivent ces bourgeois aimables et insipides, qui passent des après-midi entiers devant les deux verres d’eau que le ga
11 tes que portent les femmes), encombrée de piétons qui traversent en tous sens, évitant vivement les trams qui sonnent avec
12 aversent en tous sens, évitant vivement les trams qui sonnent avec frénésie et les petits taxis rouges qui déferlent sur le
13 sonnent avec frénésie et les petits taxis rouges qui déferlent sur les boulevards comme une nuée d’insectes affolés. Les m
14 ascadantes, à l’orientale (on pense au mot bazar, qui sonne rouge et jaune aussi). Soudain se dresse une énorme maison de p
15 ntions munichoises. Puis un palais gothique 1880, qui est le Parlement. Et voici la trouée du Danube, Bude solidement amarr
16 se briser avec un fracas sourd les îlots de glace qui descendent lentement le fleuve. Au cœur de Prophète chauve s’élève la
17 s’amuse. Vous avez dîné au paprika chez des gens qui vous ont reçu comme un cadeau de Dieu, — c’est leur formule de saluta
18 ci transporté dans un bal costumé, parmi des gens qui parlent une langue totalement incompréhensible, rient et s’enivrent c
19 e, et dansent à tout propos de folles « czardas » qui deviennent tourbillonnantes et finissent en chutes ivres sur des diva
3 1934, Journal de Genève, articles (1926–1982). Sara Alelia (25 mai 1934)
20 Providence » mise en action au gré d’un moraliste qui se donne l’air de l’avoir bel et bien sondée ? Ce serait un conte ble
21 lume de la Bibliothèque Rose. Est-ce une histoire qui finit bien, comme le croyaient les écrivains anglais du xixe — en co
22 lia 2. La puissante mélancolie, le réalisme total qui éclatent dans ce chef-d’œuvre vous consoleront des réalités artificie
23 œuvre vous consoleront des réalités artificielles qui énervent nos vies de soucis dégradants. J’ai fait lire ce livre à des
24 hez l’auteur de Gösta Berling : mais une sobriété qui vous saisit le cœur, à chaque page. Toute une vie de femme se déroule
25 ivilisées — inoubliable création, ce Norenius ! —  qui prend soin d’elle au temps de sa misère. Puis une grâce vient dans sa
26 tte fille de ferme « au mince visage de belette » qui enterre son enfant dans la neige avec une sorte d’innocence animale.
27 y a des fous, des femmes possédées ; des ivrognes qui citent les Écritures ; peut-être aussi des saints qui se croient plus
28 citent les Écritures ; peut-être aussi des saints qui se croient plus mauvais que tous ; surtout et jusque dans les choses,
29 un mystère inquiétant se révèle aux yeux de celui qui sait voir parce que, mieux que d’autres, il sait aimer. Et sur ce mon
30 chronique d’une vie de femme n’est pas de celles qui se résument. Il y a là vingt figures qui mériteraient d’être citées,
31 e celles qui se résument. Il y a là vingt figures qui mériteraient d’être citées, et qui vivent dans la mémoire avec leurs
32 vingt figures qui mériteraient d’être citées, et qui vivent dans la mémoire avec leurs gestes lents et leurs passions étra
33 leurs passions étranges. Aussi, quelques enfants qui semblent incarner toute la poésie des contes scandinaves, une merveil
34 ccès depuis quelques années à tant de traductions qui ne valent pas dix pages de ce roman ! La mode passe, le public se fat
4 1937, Journal de Genève, articles (1926–1982). Condition de l’écrivain (I) (15 février 1937)
35 deux ans le mot d’ordre Défense de la culture. Ce qui n’a pas manqué de leur attirer de nombreuses et retentissantes « adhé
36 ne. N’y a-t-il pas là (comme disent les étrangers qui ont appris le français dans leur dictionnaire) « anguille sous roche 
37 Que signifie, notamment de la part des marxistes, qui soutinrent si longtemps la primauté du matériel cette subite conversi
38 ure française est malade elle aussi d’une maladie qui n’est pas le fascisme. Elle me paraît souffrir en premier lieu de l’i
39 Jean Ajalbert, citait l’autre jour quelques faits qui peuvent donner une idée assez juste du sort réel de l’écrivain. Parmi
40 pas à nourrir son homme. Et l’on cite M. Duhamel, qui est médecin. Voire ! Outre que les cas de « second métier » sont rare
41 : que l’écrivain vive de sa plume. Or, c’est cela qui devient impraticable ; ou si praticable, néfaste. Impraticable : l’éc
42 qu’il s’agit encore d’écrire, mais dans un style qui ne saurait être celui du poète ou du philosophe, par exemple. Ce qui
43 celui du poète ou du philosophe, par exemple. Ce qui ne va pas sans risques graves, pour la plupart. Tout cela, que je rés
44 ment les coupables, individus ou institutions. Ce qui oblige en fin de compte l’écrivain à déclarer pathétiquement que c’es
45 in à déclarer pathétiquement que c’est la société qui est mal faite dans son ensemble, étant faite de telle sorte qu’il n’y
46 encore, habilement exploités par des politiciens qui , par ailleurs, se moquent un peu de la culture ! En vérité, il est gr
5 1937, Journal de Genève, articles (1926–1982). Condition de l’écrivain (II) : La grande misère de l’édition (22 février 1937)
47 de Constant, ce serait bien court… Et Nietzsche ? Qui voudrait de ce Zarathoustra dont on vendit, lorsqu’il parut, 15 exemp
48 oser son manuscrit, on lui fait signer un contrat qui l’engage pour cinq ou dix volumes à venir. La propriété de ces ouvrag
49 serve en outre le droit de refuser les manuscrits qui ne lui plaisent pas. (Et qui trouveront difficilement à se faire acce
50 fuser les manuscrits qui ne lui plaisent pas. (Et qui trouveront difficilement à se faire accepter par un confrère, on l’im
51 ers ouvrages seront sans doute déficitaires, mais qui plus tard, si la célébrité se dessine, se verra prisonnier d’un contr
52 du public, ou même de la culture et de la nation, qui se pose enfin dans son urgence et son ampleur. Pourquoi lit-on si peu
53 e persiste à croire, malgré tout, que c’est elles qui résoudront le mieux le problème de la culture, — si toutefois elles s
6 1937, Journal de Genève, articles (1926–1982). Condition de l’écrivain (III) : Mission civique de la culture (1er mars 1937)
54 s compte de l’importance réelle de cette crise, à qui la faute, disions-nous ? Au public ou aux écrivains ? On objectera sa
55 vrai responsable, c’est la paresse intellectuelle qui sévit dans toutes les classes et qu’entretiennent le cinéma, la TSF,
56 evient libre pour une « littérature » commerciale qui , elle, ne sera soucieuse que de plaire à bon compte, c’est-à-dire de
57 faibles succès. C’est le sens même de la lecture qui s’est perdu. Et s’il s’est perdu, je le répète, c’est que les plus gr
58 Dans les deux cas, ce sont d’abord les écrivains qui ont manqué à leur fonction de guides des esprits, et ruiné leur autor
59 journaux, ce n’est pas pour prêcher les écrivains qui le lisent, mais dans l’espoir d’attirer l’attention de ceux qui sont
60 mais dans l’espoir d’attirer l’attention de ceux qui sont du côté du public sur l’importance civique de ces problèmes. On
61 e pays d’avoir des écrivains représentatifs de ce qui fait sa force véritable. La raison d’être des petites démocraties n’e
62 ine matériel, mais dans le principe communautaire qui anime la fédération. Or, la force d’un tel principe se mesure au nive
63 , plus vitaux encore que pour les grandes nations qui nous entourent. Et c’est pourquoi enfin, j’y reviens, acheter des liv
7 1937, Journal de Genève, articles (1926–1982). L’Âme romantique et le rêve (23 mars 1937)
64 , le romantisme ? Et traités en deux gros volumes qui , au surplus, sont une thèse de doctorat ?3 Quoi de moins actuel, sera
65 ’un peuple, ses ambitions démesurées, ses utopies qui le consolent d’un présent beaucoup moins héroïque… En vérité, rien n’
66 que de savoir la qualité, et la nature, des rêves qui mènent le monde, à un moment donné de son évolution. À cette raison t
67 Béguin vient de nous le donner, avec une maîtrise qui le met du coup au premier rang des historiens modernes de la culture.
68 eut étudier la source véritable de préoccupations qui parurent fort nouvelles lorsque se vulgarisa l’œuvre de Freud. M. Bég
69 gés ancrés dans nos esprits, notamment le préjugé qui veut que les romantiques allemands n’aient été que de « doux rêveurs 
8 1940, Journal de Genève, articles (1926–1982). Veille d’élection présidentielle (14 novembre 1940)
70 New York, 25 octobre. La campagne électorale qui prendra fin au moment où cet article atteindra la Suisse est l’une de
71 taires. Mais Willkie réplique que c’est Roosevelt qui , en prétendant demeurer au pouvoir pour un « third term » — une trois
72 ’on ne saurait prévoir l’issue de la campagne. Ce qui rend cette dernière si « excitante » pour les masses, c’est préciséme
73 d’autre. En Amérique, il s’agit de quelque chose qui rappelle beaucoup plus la violence d’un match de football. M. Willkie
74 un et l’autre des adversaires : c’est le meilleur qui gagnera. Bien que la presse, à peu d’exceptions près, soutienne Willk
75 sistaient longuement sur la sympathie personnelle qui les liait au candidat contre lequel ils proposaient cependant de vote
76 ls proposaient cependant de voter. Fair play ! Ce qui frappe le plus un Européen fraîchement débarqué, c’est l’absence quas
77 on. Il délègue donc ce soin à un bouton tricolore qui proclame sur sa poitrine, avec une sobre éloquence : « Je désire Will
78 ces antidémocratiques. La seule conclusion claire qui se dégage de ces paradoxes politiques me paraît être la suivante : Qu
9 1941, Journal de Genève, articles (1926–1982). Santé de la démocratie américaine (17 janvier 1941)
79 voix de majorité. » Je n’oublierai pas la rumeur qui monta lentement des masses, à mesure que la nouvelle faisait le tour
80 le square presque déserté, cette femme du peuple qui chantait à pleine voix le Star-Spangled Banner, avec la ferveur d’une
81 Le lendemain même de l’élection, toute la presse qui venait de soutenir Willkie avec ensemble, et qui n’avait pas cessé de
82 qui venait de soutenir Willkie avec ensemble, et qui n’avait pas cessé de démontrer que Roosevelt signifiait ruine, divisi
83 e de la constante circulation d’idées et d’hommes qui s’est établie dans ce pays entre le gouvernement et la population. L’
84 ant les auditeurs de la radio : voilà le problème qui se pose, voilà ce que nous avons fait, voilà ce qui reste à faire. Le
85 i se pose, voilà ce que nous avons fait, voilà ce qui reste à faire. Le président et ses secrétaires d’État tiennent des co
86 des conférences régulières avec les journalistes, qui ont le droit de leur poser n’importe quelle question. Rien de plus fr
87 que l’absence de démagogie et d’effets oratoires qui caractérise ces communications publiques : un ton familier, humain ;
88 ses, on se contrôle davantage. Contrairement à ce qui se passe dans d’autres républiques, l’opinion américaine discute réel
89 civique, de ce dynamisme et de cette efficience, qui contrastent si fortement avec les scléroses et les vieilles rancunes
10 1941, Journal de Genève, articles (1926–1982). Religion et vie publique aux États-Unis (18 février 1941)
90 en étonner, me dit-on. De fait, pour un Américain qui connaît tant soit peu son histoire, rien n’apparaît plus naturel. Les
91 d’ailleurs avec les apports raciaux. Un Américain qui appartient à l’Église réformée a bien des chances d’être Hollandais d
92 n) est surtout citadine et « fashionable ». Voilà qui explique, d’une part, l’étonnante multiplicité des dénominations reli
93 urd’hui à la décrire comme un fait, un grand fait qui mérite d’être connu et médité en Suisse, d’autant plus qu’il s’est vu
94 ollaborer aux magazines politiques à gros tirages qui forment l’opinion moyenne du pays. Ce qui est étonnant, c’est précisé
95 tirages qui forment l’opinion moyenne du pays. Ce qui est étonnant, c’est précisément que cela n’étonne personne ici. Je so
96  » qu’elles plantent à l’entrée de leur ville, et qui promettent des jeux de loto le mardi soir et de la danse le samedi, m
97 puis matériels s’il le faut. Dans ce pays énorme, qui manque de cadres traditionnels, et dont la population est si nomade e
11 1946, Journal de Genève, articles (1926–1982). Journal d’un retour (11-12 mai 1946)
98 rtant, me voici bien assis dans une Constellation qui vient de décoller d’un champ neigeux de Terre-Neuve, sous l’œil indif
99 parce qu’elle provoquait des tempêtes magnétiques qui ont pour effet d’aveugler les avions aux appareils plus délicats que
100 fuseau clair y traîne sa fumée, c’est un paquebot qui en est à la troisième journée du trajet que nous ferons à rebours en
101 Le restaurant ne manque pas d’élégance. Une dame qui vient de passer le temps de la guerre en Amérique frémit de toutes se
102 ouvent désespéré, après cet au revoir en juin 40, qui sonnait malgré moi comme un adieu… Le jour point derrière les rideaux
103 après six ans de New York, qu’il y a des cloches qui sonnent les heures, et qui s’accordent à la suavité aiguë du petit jo
104 qu’il y a des cloches qui sonnent les heures, et qui s’accordent à la suavité aiguë du petit jour. Et cette rumeur soudain
105 Point d’autres sons… Si ! je ne rêve pas : un coq qui crie, tout là-bas vers les Invalides. L’or pâle du Dôme s’avive au-de
106 lair ou de noir achèvent de composer une harmonie qui fait venir les larmes aux yeux. Premier bruit de pas dans la rue. Sem
12 1946, Journal de Genève, articles (1926–1982). Journal d’un retour (fin) (18-19 mai 1946)
107 é à voir : l’un des deux grands et le Tout Petit, qui est la dernière paroisse intacte du Continent. Un peu plus loin, j’ir
108 s’affrontent sournoisement les seules Puissances qui comptent. Fin et Suite J’ai revu Genève et sa cyclophilie torre
109 ns fantômes. Pourtant, cette grande figure voûtée qui lui ressemblait à s’y méprendre, c’était bien, finalement, lord Cecil
110 on. Elle tient ses dernières assises dans le pays qui lui offrait son modèle, mais qui est le seul, ou presque, d’entre nou
111 ses dans le pays qui lui offrait son modèle, mais qui est le seul, ou presque, d’entre nous, à ne point faire partie de la
112 aire partie de la Ligue nouvelle. Les deux grands qui , là-bas, occupent la scène ne sont pas représentés dans cette enceint
113 certains d’entrer dans l’ère de la Terre unifiée, qui était le but de nos travaux diserts. Nous y touchons, Messieurs, vrai
13 1950, Journal de Genève, articles (1926–1982). Lettre aux députés européens (15 août 1950)
114 ifie pas grand-chose. Comment fédérer des nations qui se croient encore souveraines ? Voyons l’Histoire. Les Suisses ont ré
115 ui de notre Europe, sauf pour le péril extérieur, qui n’était rien au regard de celui que nous courons. Une partie de l’opi
116 dommages locaux. C’était répandre, aux utopistes qui proposaient d’éteindre l’incendie, que l’eau peut abîmer les meubles.
117 eubles. Il y eut une guerre civile entre cantons, qui fit voir l’impuissance du Pacte. Il y eut un long branle-bas de socié
118 il y a cent-trois ans : il n’en est pas une seule qui se soit vérifiée, mais pas une seule non plus qui ne reparaisse dans
119 qui se soit vérifiée, mais pas une seule non plus qui ne reparaisse dans la bouche même de ceux qui affirment que nos réali
120 lus qui ne reparaisse dans la bouche même de ceux qui affirment que nos réalités sont tellement différentes… Certes, compar
14 1950, Journal de Genève, articles (1926–1982). Deuxième lettre aux députés européens (16 août 1950)
121 e centaine de milliers de militants fédéralistes, qui pensent comme des millions que le temps presse, et que les lenteurs d
122 ar tempérament, comme nous le reprochent certains qui , par principe ceux-là, ont décidé une fois pour toutes qu’il faut all
123 votre route vers l’unité. Elles sont connues. Ce qui l’est moins, c’est votre volonté de les surmonter. L’un d’entre vous
124 des ministres néglige donc son premier devoir. À qui la faute ? L’opinion, sur ce point, entretient des soupçons qu’il vou
125 s vous avancer au-delà de ce qu’on vous a permis, qui est moins que rien, arrêtés par un alinéa, déconcertés par un éternue
126 n comité lui-même consultatif, formé de ministres qui se refusent d’ailleurs à transmettre vos consultations, consulte à so
127 on se trompe et méconnaît vos sentiments intimes, qui sont très purs : qu’elle distingue mal les forces colossales qui para
128 urs : qu’elle distingue mal les forces colossales qui paralysent jusqu’à votre éloquence et vous empêchent d’articuler des
129 tous raison à la fois, quand il n’en est pas deux qui tombent d’accord sur autre chose que ne rien faire. Parlons un peu de
130 En somme, que risquez-vous ? Je cherche à voir ce qui peut vous faire peur, ce qui peut être plus dangereux que l’inaction
131 Je cherche à voir ce qui peut vous faire peur, ce qui peut être plus dangereux que l’inaction totale où vous glissez, plus
132 este, l’Europe existe depuis plus de 2000 ans. Ce qui lui manque est justement un toit. Pour tout dire en style familier, c
133 e minute à perdre. Tout est prématuré, pour celui qui ne veut rien. Chi va piano perd la Corée. La prudence est le vice de
134 voulez pas fédérer l’Europe, vous ne voulez rien qui l’intéresse. Si vous ne faites rien cet été, vous serez oubliés cet a
135 l’Europe ; allez-vous-en. Laissez la place à ceux qui ont décidé d’agir. Avouez que rien ne vous paraît possible, on compre
136 gera dans un instant. Il s’agit d’une révolution, qui est le passage des vœux aux volontés. q. Rougemont Denis de, « Deu
15 1950, Journal de Genève, articles (1926–1982). Troisième lettre aux députés européens : L’orgueil de l’Europe (17 août 1950)
137 vos succès jusqu’à cette date, mais pour le rôle qui vous est dévolu, et pour le nom qu’il vous convient de revendiquer, c
138 r de ce titre. Députés de l’Europe entière, voilà qui signifie, Messieurs, que vous avez perdu le droit d’être étrangers su
139 es, dans aucun de nos peuples, comme à rien de ce qui forme l’héritage deux fois millénaire de nos fils. Vous n’êtes pas se
140 , et de cent-vingt provinces, et de la génération qui les peuple aujourd’hui, plus de deux-cents-millions d’hommes et de fe
141 passions, par-delà les croyances et les révoltes qui rassemblent ou divisent les vivants, vous êtes les députés d’une aven
142 nts, vous êtes les députés d’une aventure humaine qui tente à travers vous, dans l’angoisse et l’espoir, le risque et la gr
143 4 % de la superficie du globe, mais bien de cela qui a fait au cours des âges, d’un cap médiocre en dimensions physiques,
144 civilisation que rien ne s’offre à remplacer, et qui a su remplacer toutes les autres. D’où vient, Messieurs, que ce cap d
145 monter jusqu’au déluge, ni même jusqu’aux Anciens qui manquent à l’Amérique, ou à la Renaissance qui manque aux Russes — se
146 ns qui manquent à l’Amérique, ou à la Renaissance qui manque aux Russes — sens de la mesure et sens critique — qu’avons-nou
147 noms sont des noms de l’Europe, et les très rares qui n’en sont pas ont appris leur métier de nos maîtres, dans nos écoles,
148 nous. Que sont en fin de compte les deux empires qui prétendent partager notre monde ? L’Amérique, la Russie moderne, sont
149 ture, de Calvin et de Marx, et de notre industrie qui est née de nos savants et de nos philosophes. De tout cela, Messieurs
150 s êtes les Députés. On attend de vous l’invention qui sauve la paix du monde, et qui maintienne l’Europe dans une fonction
151 e vous l’invention qui sauve la paix du monde, et qui maintienne l’Europe dans une fonction qu’aucun Empire nouveau n’ose l
152 s vif de mon néant devant l’ampleur de la mission qui vous anime, ou qui peut-être vous écrase. En vérité, je ne sais comme
153 devant l’ampleur de la mission qui vous anime, ou qui peut-être vous écrase. En vérité, je ne sais comment j’ose vous parle
154 s, et pas seulement ceux de notre continent, pour qui le nom d’Europe a représenté la beauté dans la vie, l’intelligence, l
155 ussi, et ce grand risque de la liberté, tout cela qui vous délègue en ce lieu décisif, dans l’histoire concrète de ce temps
156 moins votre but ! Nous sommes plusieurs millions qui n’attendons qu’un signe. r. Rougemont Denis de, « Troisième lettre
16 1950, Journal de Genève, articles (1926–1982). Quatrième lettre aux députés européens : En lisant le pamphlet du Labour Party (18 août 1950)
157 Messieurs de l’Assemblée consultative, Quelqu’un qui ne se sent pas le député de Mozart, ni d’Athènes, ni de Rome, ni de r
158 eux continent, il n’y voit, si j’ose dire, que ce qui n’y est pas ; il voit que ça n’est pas rouge, et que ça n’est pas ang
159 glais. Il distingue un ensemble de pays peu sûrs, qui d’une part ne font point partie du Commonwealth, d’autre part ne sont
160 méthode : étatiser les industries ; un seul pays qui ait su le faire : la Grande-Bretagne ; et ce pays n’est pas européen.
161 e l’Europe se convertit à l’étatisme illimité. Ce qui n’offre aucune base de compromis, c’est-à-dire d’action positive. À c
162 re. Car dans le fait, où sont nos souverainetés ? Qui les a vues depuis quelques décennies ? Qui donc ose les défendre ouve
163 etés ? Qui les a vues depuis quelques décennies ? Qui donc ose les défendre ouvertement, à part nos staliniens sur l’ordre
164 mlin ? Et comment se définissent-elles ? Toynbee, qui est un grand historien, écrit au Times qu’elles ne font point partie
165 us dire que l’opinion y tient. Quelle opinion, et qui l’exprime ? Les peuples, interrogés sur la question, seraient bien en
166 n’est donc plus qu’un prétexte au droit de veto, qui revient à donner le seul pouvoir réel, quoique négatif, à la minorité
167 , ce serait pure folie que d’essayer de sauver ce qui s’en va, au prix de l’avenir de ce qui est. La question n’est pas de
168 sauver ce qui s’en va, au prix de l’avenir de ce qui est. La question n’est pas de renoncer à des souverainetés illusoires
169 une fois pour toutes, à invoquer ce mauvais motif qui en cache de pires, pour arrêter l’élan vers notre union. N’attaquez p
170 elle de l’Europe ! Il y va de notre indépendance, qui vaut mieux qu’elles, et qu’elles sabotent. Le peuple suisse, il y a c
171 , parce qu’un groupe d’Imprudents et d’Utopistes, qui voyaient et qui aimaient toutes les couleurs du prisme, leur a donné
172 oupe d’Imprudents et d’Utopistes, qui voyaient et qui aimaient toutes les couleurs du prisme, leur a donné presque sans qu’
17 1950, Journal de Genève, articles (1926–1982). Cinquième lettre aux députés européens : « Méritez votre nom ! » (19-20 août 1950)
173 Messieurs les députés de l’Europe à sauver ! Ceux qui disent que « l’Europe sera socialiste ou ne sera pas », savent très b
174 non point Vichinsky. Et cela vaut pour tous ceux qui pourraient déclarer que l’Europe sera toute catholique, ou protestant
175 promis elle ne sera pas. C’est clair. Seuls, ceux qui veulent passionnément le But se résoudront aux compromis vitaux. Quan
176 se résoudront aux compromis vitaux. Quant à ceux qui n’ont point cette passion de l’Europe, ceux dont le regard s’attarde
177 s l’opinion veut qu’on l’entraîne. « On suit ceux qui marchent », dit Péguy. Elle ne vous suivra pas si vous êtes daltonien
178 nions, celle que l’on invoque, et la vraie. L’une qui sert d’alibi aux démagogues, et l’autre qui les laisse tomber ; l’une
179 L’une qui sert d’alibi aux démagogues, et l’autre qui les laisse tomber ; l’une qui fait des discours, l’autre qui vote. La
180 agogues, et l’autre qui les laisse tomber ; l’une qui fait des discours, l’autre qui vote. La première est exactement ce qu
181 sse tomber ; l’une qui fait des discours, l’autre qui vote. La première est exactement ce que la presse et la radio déclare
182 tendant à renforcer le sentiment d’une solidarité qui ne saurait nuire à « l’avènement d’une union plus intime entre ses me
183 e. Mais cela en fait aux principes. Or une Europe qui se moque des principes vaut beaucoup moins qu’une Amérique qui les pr
184 des principes vaut beaucoup moins qu’une Amérique qui les professe, et ne vaut rien en face des Russes qui les assènent. Il
185 les professe, et ne vaut rien en face des Russes qui les assènent. Il faut des actes, dit-on. La phrase est vague. Les act
186 i l’acte que je vous propose, au nom de l’opinion qui ne parle pas encore. Messieurs les députés, vous le savez bien, vous
187 (Les ministres dépendent aussi de vos parlements, qui restent les seuls juges d’un conflit éventuel.) Si vous acceptez cela
188 uvoir que de vous adjurer de la part des millions qui se taisent mais qui ont peur ? Pardonnez mes violences et mes imperti
189 jurer de la part des millions qui se taisent mais qui ont peur ? Pardonnez mes violences et mes impertinences : comprenez l
190 lences et mes impertinences : comprenez l’anxiété qui les dicte. Je ne vous écrirais pas si je ne savais très bien qu’une p
191 e politique, une doctrine partisane ou une autre, qui résoudra le problème du chômage, mais l’union de nos sacrifices. Qui
192 blème du chômage, mais l’union de nos sacrifices. Qui peut nous l’imposer ? Qui peut faire reculer les intérêts puissants,
193 nion de nos sacrifices. Qui peut nous l’imposer ? Qui peut faire reculer les intérêts puissants, et parfois légitimes, qui
194 ler les intérêts puissants, et parfois légitimes, qui se révèlent contraires au salut de l’ensemble ? Je veux avoir parlé p
195 urs les députés européens, je vous salue d’un vœu qui voudrait résumer celui de tous nos peuples aux écoutes de l’avenir, u
18 1952, Journal de Genève, articles (1926–1982). Au pays du Patriarche (29-30 novembre 1952)
196 étaché vers l’est et la Suisse par un département qui se tourne vers l’ouest, le pays de Gex est-il une arrière-garde ou un
197 siste un tapis de brume. Aux bords de ce ruisseau qui longe mon jardin, qui l’inonde aux crues de printemps, Chateaubriand
198 e. Aux bords de ce ruisseau qui longe mon jardin, qui l’inonde aux crues de printemps, Chateaubriand passa des heures d’heu
199 s maigre, et ce rire édenté de vieillard polisson qui le rendent présent parmi nous. Plutôt ces inscriptions, que je copie
200 ort riche et souvent généreux, pourvu d’une plume qui valait une armée, et d’un mauvais esprit qui valait cent vertus. « Ma
201 lume qui valait une armée, et d’un mauvais esprit qui valait cent vertus. « Marchez toujours en ricanant dans le chemin de
202 réussir que vingt arbres, c’est toujours un bien qui ne sera pas perdu. » Les cèdres du Caucase, envoyés par la grande Cat
203 ’horlogers, de céramistes, tous protestants, mais qui vécurent en paix avec ceux qu’ils enrichissaient. En même temps, il f
204 , une seule fois, et montrez ensuite vos jambes à qui vous voudrez ». À ses amis de Paris : « On fabrique ici beaucoup mieu
205 sse de cinquante foyers à plus de mille habitants qui deviennent propriétaires, par un système qu’on nommerait de nos jours
206 nt des œufs, du lait, des fruits. Une jeune fille qui se tient au milieu d’eux, porteuse d’une corbeille fleurie, figure « 
207 valeurs de toute l’Europe (et déjà de l’Amérique) qui fait rumeur à Genève. Le tout survolé trente fois par jour par des av
208 . Ils vont se poser derrière le bois tout proche, qui assourdit tout d’un coup leur grondement. Vous voyez que ce pays est
19 1953, Journal de Genève, articles (1926–1982). Aller et retour (21 mai 1953)
209 miques, militaires, culturelles, il y a celle-ci, qui n’est pas négligeable : rendre nos différentes nations indépendantes
210 ponsables de la politique mondiale des États-Unis qui souhaite nous réduire à l’état de satellites. Mais nos faiblesses, né
211 es inspirateurs de cette campagne insensée — mais qui se branche sur le sentiment spontané de larges masses, latines surtou
212 Ils ont créé entre eux le « grand marché commun » qui est la condition nécessaire de toute existence autonome dans notre mo
213 istoire de cette union. En 1787, les treize États qui venaient de se libérer de la tutelle britannique décidèrent que leur
214 éticent. Il fut le dernier à se rallier au régime qui devait assurer son essor et sa longue primauté dans l’Union. C’est do
215 urent à la formation d’un grand système américain qui soit au-dessus du contrôle de toute force ou de toute influence europ
216 toute force ou de toute influence européenne, et qui leur permette de dicter les termes des relations entre l’Ancien et le
217 s articles de Life, dans cette histoire de chiens qui n’aboient plus !) Dans la mesure où les mêmes causes sont susceptible
20 1955, Journal de Genève, articles (1926–1982). Pour un désarmement moral (19 juillet 1955)
218 e nos communistes occidentaux et des neutralistes qui les suivent ? En proposant un système de sécurité européenne, Moscou
219 autres, Moscou désavoue implicitement les partis qui agissent à son service dans nos pays. En insistant enfin sur l’import
220 ion. Or celle-ci serait ruineuse pour le principe qui a fait la force principale du stalinisme dans l’intelligentsia europé
221 re au mot. Ils proposent en effet trois principes qui n’ont jamais cessé d’être les nôtres. Nous sommes d’accord. Nous part
222 lque forme d’union occidentale. On ne voit pas ce qui empêcherait les 435 millions d’Européens ainsi réunis de se déclarer
223 nge des hommes, des œuvres et des idées. Et voilà qui n’a l’air de rien, mais qui équivaut en fait à lever le rideau de fer
224 t des idées. Et voilà qui n’a l’air de rien, mais qui équivaut en fait à lever le rideau de fer. Je pars de là. Je ne suis
225 litiques ou économiques. Car ce sont elles seules qui permettent l’élaboration de l’instrument sans lequel il n’est point d
226 dire un langage commun. On a reconnu l’expression qui revient par deux fois, fortement soulignée, dans la déclaration que M
227 premier est la force brutale : c’est le vainqueur qui impose à tous le sens des mots qu’il juge convenable. On se rappelle
228 al de l’Histoire. Le malentendu avec l’Occident — qui se traduisait alors par une ingérence qualifiée dans les affaires d’u
229 était pas question d’en discuter, ce fut la force qui trancha. Le second moyen d’instaurer un langage commun, c’est le dial
230 r la première fois depuis la naissance du conflit qui oppose le bolchévisme à l’Occident. Je cite : D’aucuns estiment que l
231 points de vue et leurs défenseurs. Allons voir ce qui se fait chez l’autre, ce qu’il dit et comment il le sent ; et que l’a
232 dialectique » du partenaire : ce n’est pas à ceux qui croient cela que les Russes demanderont à parler ! Les contempteurs d
233 ence qu’ils en ont. Le Père des peuples est mort, qui tenait tout ensemble. Le chef du MVD l’a suivi dans la tombe. Et le K
234 o, un Adenauer. C’est vers eux que s’en vont ceux qui parlent pour les Russes — comme aujourd’hui Joukov va vers Eisenhower
21 1956, Journal de Genève, articles (1926–1982). « Oserons-nous encore… » (6 novembre 1956)
235 oste de radio, à nos oreilles, appelant l’Europe, qui ne pouvait pas répondre, appelant l’Europe sans chefs et sans armée,
236 à l’appel de tous nos frères de l’Est une réponse qui ne dépende plus des élections locales d’un peuple d’outre-mer, mais d
237 lisent les négociations pour arrêter et tuer ceux qui viennent négocier. Le communiste actuel, plus encore que le fasciste,
238 , c’est un criminel en puissance : c’est un homme qui approuve, excuse et justifie, les massacres de Budapest ; qui trouve
239 , excuse et justifie, les massacres de Budapest ; qui trouve cela moins grave que d’arrêter Nasser, s’il prétend écraser Is
240 vouloir avant tout, mais ce n’est pas un article qui pourrait y suffire, il faut agir. Je parlais d’une action vigilante,
241 n vigilante, obstinée. Nous vivons en démocratie, qui veut dire souveraineté du peuple. Or le peuple, c’est vous et moi. Pr
242 est vous et moi. Profitant du silence ignominieux qui succède aux flagrants délits, exigeons de nos gouvernements une ruptu
243 e saluer du nom d’homme un communiste quelconque, qui n’aurait pas d’abord abjuré publiquement la cause du crime qu’il a se
244 ons en même temps de faire l’Europe. Cette Europe qui aurait pu, en s’unissant plus tôt, cette Europe qui pouvait, en rasse
245 i aurait pu, en s’unissant plus tôt, cette Europe qui pouvait, en rassemblant ses forces à l’appel angoissé de la liberté,
246 angoissé de la liberté, éviter la honte éternelle qui accable désormais toute cette génération — la Hongrie massacrée sous
22 1958, Journal de Genève, articles (1926–1982). Hommage à Pasternak (31 octobre 1958)
247 . Son refus le juge moins qu’il ne juge un régime qui ôte à l’homme le courage d’être lui-même, et le rabat au mutisme sans
23 1963, Journal de Genève, articles (1926–1982). « Le Dieu immanent, qui s’annonce à leur cœur » (9-10 novembre 1963)
248 « Le Dieu immanent, qui s’annonce à leur cœur » (9-10 novembre 1963)z Descartes estimait q
249 que ce qu’il nomme sa « phénoménologie de Dieu », qui est en même temps une théologie, il a recours à une méthode philosoph
250 son expérience de musicien. Ce chapitre sur Dieu, qui occupe une place centrale et dont l’écho s’entend dans tout l’ouvrage
251 rouve d’emblée vidée de sens. « Dieu n’est pas ce qui est vu, mais ce qui voit », écrit très justement J.-C. Piguet, commen
252 de sens. « Dieu n’est pas ce qui est vu, mais ce qui voit », écrit très justement J.-C. Piguet, commentateur et assistant
253 nt qu’être psychique. » Et la norme de l’éthique, qui est l’Amour, « appétit d’unité… modalité affective fondamentale ». Et
254 être. Et la prière, acte de recueillement dans ce qui fonde l’homme et le transcende. Et la foi, qui « se porte sur Dieu »
255 ce qui fonde l’homme et le transcende. Et la foi, qui « se porte sur Dieu » comme sur le fondement de notre lien au monde.
256 ls s’étaient révélé jusqu’alors, au Dieu immanent qui s’annonce en leur cœur ». Sur une telle phrase, on imagine d’admirabl
257 égélienne. Mais qu’en dirait Karl Barth lui-même, qui n’a pas fini de nous surprendre ? C’est sans doute par rapport à Pasc
258 rès bien que ce n’est pas le Dieu des philosophes qui sera d’un grand secours à l’homme d’aujourd’hui. (Paragraphe sur « l’
259 être vraie musique chez ceux de nos contemporains qui ont sciemment abandonné « le projet d’être à la ressemblance de Dieu 
260 la foi active, fondée sur la doctrine chrétienne, qui a engendré la civilisation occidentale » (p. 209). Je suis bien placé
261 l’extrême l’intériorisation des réalités de foi, qui fut le mouvement intime de la Réforme. Voilà de grandes raisons de se
262 s. z. Rougemont Denis de, « “Le Dieu immanent, qui s’annonce en leur cœur” (À propos d’Ernest Ansermet) », Journal de Ge
24 1968, Journal de Genève, articles (1926–1982). Denis de Rougemont nous écrit (6-7 juillet 1968)
263  ». Car c’est là m’accuser d’un acte bien défini, qui m’eût valu un peu plus, croyez-moi, que les quinze jours de forteress
264 rée d’Hitler à Paris. Soyons précis : un officier qui quitte la Suisse à la fin d’août de 1940 en mission et muni d’un pass
265 ire déserté, peu de jours auparavant. Un critique qui l’en accuserait, à ce moment-là, serait requis de s’en expliquer sur
266 teurs de mon livre, m’a paru nécessaire pour ceux qui n’auraient lu que l’article du Samedi littéraire. aa. Rougemont De
25 1969, Journal de Genève, articles (1926–1982). Denis de Rougemont et l’objection de conscience (30 juin 1969)
267 Monsieur le président, Un étudiant en théologie, qui suit depuis deux ans mes cours, René Bugnot, comparaîtra le 27 juin d
268 es idéaux, ou si nous condamnons à la prison ceux qui se réclament en toute conscience, qu’aurons-nous encore à défendre en
269 s lieu de se faire tuer pour si peu que de savoir qui administrerait une société préalablement amputée de son idéal, j’ente
270 r par une application routinière de ses lois ceux qui commettent la faute de croire à ses fondements moraux et politiques.
271 u’ils sont au moins d’aussi bons Suisses que ceux qui , trop souvent, en toute indifférence et ignorance quant aux bases mêm
272 re pays, par la parole et par l’écrit, à un monde qui le connaît mal et ne le comprend pas toujours ? Nous avons en commun
273 t à subir sous la forme des arrêts répressifs. Ce qui l’autorisera, en vertu des nouveaux règlements qui marquent à cet éga
274 ui l’autorisera, en vertu des nouveaux règlements qui marquent à cet égard une évolution certaine, à travailler durant la j
275 jurisprudence du tribunal militaire de cassation qui permet désormais également l’exclusion pour les objecteurs de conscie
276 té nationale des hommes comme Denis de Rougemont, qui ne sont pas eux-mêmes objecteurs, qui ne sont eux-mêmes “ni subversif
277 Rougemont, qui ne sont pas eux-mêmes objecteurs, qui ne sont eux-mêmes “ni subversifs, ni anarchistes, ni crypto-communist
278 ougemont a raison de demander, au nom des valeurs qui étayent son patriotisme, que ce problème soit étudié. En revanche, no
279 nous ne pouvons le suivre dans ce “tout ou rien” qui voudrait qu’à défaut d’un statut des objecteurs de conscience, la Sui
280 gitime défense que personne ne peut contester, et qui rassure valablement des hommes qui acceptent leur service non dans l’
281 contester, et qui rassure valablement des hommes qui acceptent leur service non dans l’indifférence ou l’ignorance, mais d
26 1969, Journal de Genève, articles (1926–1982). Objection de conscience : Denis de Rougemont répond (4 juillet 1969)
282 ux de l’être — si l’on est sérieux, toutefois, ce qui n’est pas le cas, nécessairement, de tout contestataire de nos instit
283 ter que l’objecteur est lâche, un mauvais citoyen qui trahit ses devoirs de solidarité. Quant à votre sous-titre « Tout ou
284 l’attention de vos lecteurs sur le grave problème qui l’avait motivée : c’est ce problème qui importe seul, et qu’il faut p
285 problème qui l’avait motivée : c’est ce problème qui importe seul, et qu’il faut prendre soin de poser dans ses termes les
27 1969, Journal de Genève, articles (1926–1982). « Non, notre civilisation n’est pas mortelle ! » (30-31 août 1969)
286 à fait d’accord avec l’historien anglais Toynbee qui dit que la plus petite unité d’étude intelligible qu’on puisse prendr
287 nt ans, ce sont essentiellement des bourgeois. Ce qui n’empêche pas les ouvriers d’avoir des goûts plus bourgeois que les b
288 puis cinquante ans officiellement, Le pompiérisme qui tranquillise les gouvernements n’est pas toujours bourgeois, mais il
289 dans tous les pays. La bourgeoisie est une classe qui a été et qui est encore au pouvoir dans la plupart des pays, mais ce
290 pays. La bourgeoisie est une classe qui a été et qui est encore au pouvoir dans la plupart des pays, mais ce n’est pas ell
291 dans la plupart des pays, mais ce n’est pas elle qui donne ce ton-là, puisque vous le retrouverez dans toutes les dictatur
292 évolutions ? Il y a une nécessité révolutionnaire qui vient de cette mauvaise adaptation de nos unités de base aux tâches n
293 tation de nos unités de base aux tâches nouvelles qui seraient à accomplir. Comme disent les Américains : « It doesn’t work
294 est absurde. Il me fait penser à ces grands-pères qui veulent se rendre populaires auprès de leurs petits enfants en leur c
295 plutôt leur dire de créer une nouvelle Université qui soit digne de ce nom. Vers quoi va l’homme ? une mutation tant physiq
296 lisations du Moyen-Orient, de la Grèce et de Rome qui continuent à vivre en elles. En deuxième lieu, la civilisation occide
297 me lieu, la civilisation occidentale est la seule qui ait conquis le monde entier. Si on déclare qu’elle va mourir, cela re
298 es pour une autre culture, une autre civilisation qui pourrait s’épanouir ? Je n’en vois aucune. Et la Chine ? Encore faudr
299 ce soit une civilisation vraiment différente, et qui ait de meilleures solutions que les nôtres. Or nous constatons un gig
300 des révolutions. Il n’y en a jamais eu une seule qui ait réussi. Elles ont toutes abouti à des tyrannies. Une révolution a
301 nglante est une révolution mal préparée. La seule qui pourrait réussir serait celle qui apporterait, un ordre nouveau, prêt
302 parée. La seule qui pourrait réussir serait celle qui apporterait, un ordre nouveau, prêt à prendre la relève du désordre a
303 sonnel ? Le cas des quatre Républiques françaises qui étaient des pouvoirs impersonnels nous instruit grandement. La premiè
304 s que les civilisations soient comme les plantes, qui poussent, donnent des fruits, fanent et meurent. Hegel, Spengler et T
305 elle n’est pas à la merci des forces extérieures qui pourraient la détruire. Elle s’alimente par elle-même. Elle est deven
306 pas pessimiste à son sujet, mais je le suis en ce qui concerne les effets de ce que l’Homme, indépendamment de la nature, a
307 es ; il est esclave de certaines de ses tendances qui prennent les machines comme paravent. L’homme n’est pas esclave de sa
308 ans un monde en transformation ? Dans une société qui s’agrandit follement, qui perd ses mesures, la fonction de l’art pour
309 tion ? Dans une société qui s’agrandit follement, qui perd ses mesures, la fonction de l’art pourrait être d’illustrer des
310 ncepts, des angles de vision qu’on lui propose et qui s’imposent plus ou moins aux esprits et aux sensibilités. Mais encore
311 temps, ce n’est pas mon souci, ni ma vocation. Ce qui m’intéresse, ce n’est pas le passé de notre désordre, mais de trouver
28 1969, Journal de Genève, articles (1926–1982). Un débat sur l’objection de conscience : entre Dieu et l’État (4 octobre 1969)
312 xiste. Non pas par l’importance du nombre de ceux qui professent l’objection et en portent témoignage, mais par la valeur d
313 guerre. Si l’on met à part les Témoins de Jéhova qui constituent un cas particulier, le « portrait-robot » des soixante-qu
314 imilitariste. Cela doit être dit car la procédure qui conduit à la sanction peut faire croire qu’il s’agit uniquement d’une
315 diverses catégories d’objecteurs. Je pense que ce qui est important, c’est ce qu’ils demandent, ce qu’ils préconisent, et q
316 e une œuvre antimilitariste — je précise que ceux qui font du service ne sont pas nécessairement militaristes… — ou une œuv
317 e puisqu’il accepte le jugement des tribunaux (ce qui n’est d’ailleurs pas le cas de tous les objecteurs). D’autre part je
318 onnellement je me sens très proche des militaires qui , à l’intérieur de l’édifice, font le même travail d’une autre manière
319 é par la lecture de cet article 49, paragraphe 5, qui dit que dans le cas d’un conflit entre les devoirs civiques et ce que
320 s devoirs religieux, ce sont les devoirs civiques qui l’emportent. Que veut dire alors « Au nom du Dieu Tout-Puissant », in
321 pas nous raconter d’histoires, c’est la religion qui aboutit, dans certains régimes, à ce qu’on sait : au régime totalitai
322 ucun recours à une transcendance, à quelque chose qui soit au-dessus de l’État et des intérêts de l’État. Ce qui me paraît
323 au-dessus de l’État et des intérêts de l’État. Ce qui me paraît absolument hypocrite, c’est de mettre « Au nom du Dieu Tout
324 dant le Dieu chrétien, en tête d’une Constitution qui n’est absolument pas chrétienne. Bernard Béguin. — Est-elle antichrét
325 … Denis de Rougemont. — C’est la religion civique qui triomphe. Si l’objecteur invoque son christianisme, on lui dira : « T
326 du christianisme face à celui d’une collectivité, qui , elle, a jugé le christianisme compatible avec le service militaire d
327 mais êtes-vous conscient aussi du danger inverse, qui est le danger de l’obéissance inconditionnelle ? La compétence de
328 st beaucoup plus grave. Le conformisme du citoyen qui se croit bon citoyen parce qu’il fait tout ce qu’on lui dit, ce confo
329 t à la dictature. C’est la démission des citoyens qui fait la force des dictateurs. Bernard Béguin. — C’est le désordre dan
330 rd Béguin. — C’est le désordre dans la démocratie qui appelle les dictateurs. Et quand le citoyen récuse les lois d’une col
331 ratie, il fait le lit de la dictature. C’est cela qui nous fait peur dans un militantisme qui attaque à sa base une constit
332 ’est cela qui nous fait peur dans un militantisme qui attaque à sa base une constitution démocratique au lieu de chercher l
333 tution qu’avec l’armée. Or en effet c’est l’armée qui accueille les objecteurs au moment du recrutement, et c’est l’armée q
334 cteurs au moment du recrutement, et c’est l’armée qui les juge. Le colonel divisionnaire Dénéréaz a commandé la section du
335 Dans quel cadre agissent les colonels recruteurs qui font face à l’objecteur pour la première fois, quand il n’a même pas
336 e Dénéréaz. — Nous avons quelque 35 000 conscrits qui se présentent au recrutement chaque année. Sur ce nombre, environ 300
337 s d’incorporer dans le service de santé tous ceux qui le désirent. Nous avons besoin d’eux, et cela montre que si nous n’av
338 et défi à l’armée, lorsqu’il s’agit de juger ceux qui ne sont pas encore citoyens, pas encore soldats, et qu’on lui envoie
339 préférerais être jugé par un tribunal militaire, qui juge essentiellement des honnêtes gens, que par des tribunaux ordinai
340 s honnêtes gens, que par des tribunaux ordinaires qui jugent en majorité des gens plus ou moins malhonnêtes. Colonel divisi
341 peut obtenir un sursis… Michel Barde. — Il y en a qui se présentent à 19 ans devant les tribunaux. Ils bénéficient de leur
342 sionnaire Dénéréaz. — Alors, il y a quelque chose qui pour moi n’est pas très clair. Colonel Vaucher. — Nous n’y pouvons ri
343  Nous n’y pouvons rien du tout, ce n’est pas nous qui déterminons notre compétence. Nous ne pouvons pas la récuser. Bernard
344 nête homme — va loger trois mois à Saint-Antoine, qui est une prison de droit commun. Colonel Vaucher. — Nous ne sommes pas
345 s pas chargés de l’exécution. Ce sont les cantons qui en sont chargés. Et nous n’avons, je dois dire, jamais eu de plainte
346 cteurs de conscience. Je pense à tous les soldats qui ont commis des actes d’indiscipline, qui n’ont pas fait leur service
347 soldats qui ont commis des actes d’indiscipline, qui n’ont pas fait leur service par négligence, ou parce que les conditio
348 tendre votre définition et dire que tous les gens qui vont devant les tribunaux, ou à peu près, viennent pour des fautes de
349 éguin. — Mais si. Il y a un délit constitutionnel qui n’est pas un délit pénal. Il y a un Code pénal qui définit l’honnêtet
350 ui n’est pas un délit pénal. Il y a un Code pénal qui définit l’honnêteté. Vous pouvez le considérer comme arbitraire, mais
351 iste. Et d’autre part nous avons une Constitution qui définit des obéissances. Par conséquent il y a une très grande différ
352 ur service. L’article 32 du Code pénal militaire, qui est absolument pareil au Code pénal suisse sur ce point, précise que
353 ibunaux ? Colonel Vaucher. — C’est le législateur qui a modifié la loi, à la suite de débats concernant l’objection de cons
354 uis intervenu à propos d’un de mes étudiants pour qui j’avais de l’estime, parce qu’il avait déjà été condamné une fois, et
355 la loi, et à modifier l’esprit du législateur. Ce qui malgré tout peut se faire, puisque les lois changent. Colonel Vaucher
356 ictions. Ce ne sont pas des officiers de carrière qui , en règle générale, sont juges militaires, ce sont des miliciens. Den
357 ns de contraindre au service militaire des hommes qui ont l’objection chevillée à l’âme ? Colonel divisionnaire Dénéréaz. —
358 pas l’objecteur de conscience. Il juge le citoyen qui ne veut pas servir — parce qu’il est objecteur. Ce n’est pas la même
359 . — L’objecteur de conscience n’est pas quelqu’un qui trouve que l’armée est mal faite. Il veut manifester contre la guerre
360 er contre la guerre. C’est un problème formidable qui est posé aujourd’hui, surtout dans la période atomique qui change tou
361 osé aujourd’hui, surtout dans la période atomique qui change tout à mon sens. Bernard Béguin. — Quand vous dites que l’obje
362 c’est qu’on a le sentiment qu’il vise l’appareil qui défendra les institutions. Ce que l’objecteur nous explique mal quand
363 tures excluent toute initiative à l’extérieur, et qui ne peut agir qu’en autodéfense. Service civil et milice incompatib
364 us contentons d’appliquer les recettes du passé —  qui ont toujours si bien marché — ou bien est-ce que nous avons autre cho
365 fficier de métier, un technicien, si vous voulez, qui fait des additions et des soustractions pour savoir si notre défense
366 Nous avons l’armée la plus nombreuse d’Europe. Ce qui est déjà un signe de puissance. Je vous fais sourire peut-être ? Chri
367 Mais pour d’aucuns, il y aurait de bons chrétiens qui ne portent pas les armes, et de mauvais chrétiens qui portent les arm
368 ne portent pas les armes, et de mauvais chrétiens qui portent les armes. Il faut faire très attention quand on aborde ce pr
369 quand on aborde ce problème, en dépit de tout ce qui a été fait à l’étranger. D’ailleurs, vous savez qu’en France un objec
370 tomique. Il n’y a aucune espèce de valeur humaine qui vaille les destructions physiques et morales qu’entraînerait la bombe
371 ions auxquelles je ne prétends pas répondre, mais qui me paraissent tellement graves qu’on doit reconnaître une fonction ci
29 1973, Journal de Genève, articles (1926–1982). « Denis de Rougemont, l’amour et l’Europe » (3-4 mars 1973)
372 r — que j’ai aussi écrit un roman, et des poèmes, qui peut-être, un jour ou l’autre, paraîtront… Mais enfin, le centre de m
373 ectique de l’amour-passion, exalté par l’obstacle qui le nie, se retrouve dans la vie du couple le plus « fidèle ». S’il es
374 nous pourrions appeler l’éclatement de l’Éros, ce qui entraîne une sorte de dépréciation de l’amour-passion compris comme a
375 a mort du couple. Que pensez-vous de ce phénomène qui met votre œuvre à l’ordre du jour ? La jeunesse, dans son ensemble, n
376 nesse, dans son ensemble, ne me paraît vivre rien qui ressemble à un « l’éclatement de l’Éros », si j’en crois mes yeux et
377 é à maintenir dans ma dernière édition une phrase qui se termine ainsi : « … la moitié du malheur humain se résume dans le
378 ion fût « dépassée ». Mais le Nouvel Observateur, qui la cite, ajoute : « Trente-cinq ans plus tard, il y a sûrement un cha
379 Bataille. Fasciné par la problématique de l’amour qui vous a permis de toucher aux phénomènes religieux, culturels et artis
380 ié à Paris en 1934, Politique de la personne et qui est exactement le contraire du sens actuel, qui est passif : embrigad
381 t qui est exactement le contraire du sens actuel, qui est passif : embrigadement dans un parti. Le premier chapitre était i
382 », le second : « Ridicule et impuissance du clerc qui s’engage ». Le tout était un appel à l’engagement de l’écrivain en ta
383 e aux Européens  : « La révolution que j’appelle, qui fera seule l’Europe et qui ne peut être faite que par l’Europe en tra
384 olution que j’appelle, qui fera seule l’Europe et qui ne peut être faite que par l’Europe en train de se faire, consiste à
385 mon petit pamphlet, avouons-le, car c’est l’école qui a fabriqué nos nationalismes. C’est un écrit de jeunesse que je renie
386 il a gardé la vertu réjouissante d’exaspérer ceux qui aujourd’hui encore justifient ses injustes sévérités et ceux-là seuls
30 1973, Journal de Genève, articles (1926–1982). Genève, exemple européen ? (10-11 novembre 1973)
387 es, pénalisées ou bloquées par un cordon douanier qui ne sert à rien ni à personne, mais qui symbolise la « souveraineté »
388 n douanier qui ne sert à rien ni à personne, mais qui symbolise la « souveraineté » (d’ailleurs de plus en plus fictive) de
389 ctive) des États. Or, tous les problèmes concrets qui se posent dans cette région appellent des solutions transfrontalières
390 cologique. Il y a enfin une région universitaire, qui va de Neuchâtel à Saint-Étienne et d’Aoste à Besançon, en passant par
391 de Lyon — une sorte de mini-État-nation nouveau, qui ajouterait aux défauts de la centralisation ceux des trop petites dim
31 1978, Journal de Genève, articles (1926–1982). Débat sur la voiture dans la société moderne (février 1978)
392 débordé le cadre social, économique et politique qui lui avait été fixé au départ. Pour faire le point sur la « voiture da
393 nève, tout en ne niant pas certains inconvénients qui se rattachent à la voiture, n’en demeure pas moins un farouche partis
394 ord, mécanicien têtu et sans culture, dites-vous, qui est parvenu à ses fins en créant dans ses usines des sortes de circui
395 nté de toute pièce, aurait-elle connu l’expansion qui est la sienne depuis bientôt 100 ans ? Denis de Rougemont : d’entrée
396 . Et j’espère qu’il n’y en aura pas une troisième qui serait celle des centrales nucléaires… La première grande entreprise
397 à Detroit : c’est la création du jeune Henry Ford qui s’est lancé dans cette aventure contre laquelle tous ses amis le mett
398 mis le mettaient en garde. Dans son livre Ma vie, qui fut un immense best-seller, je lis cette phrase absolument stupéfiant
399 ion de l’auto équivaut à l’imposition d’un besoin qui n’existait pas avant. Les premières années, Ford n’a vendu que cent o
400 ançois Peyrot : Il n’y a pas d’invention au monde qui n’ait été faite sans un besoin et sans des années et des années de re
401 pas une démonstration suffisante. Les financiers qui mettent des capitaux à la construction d’une usine, demandent bien év
402 x contre cette interprétation. Ce n’était pas lui qui a affirmé qu’il n’y avait pas de besoin pour la voiture, mais tous se
403 l y a eu avant Ford une cinquantaine d’inventeurs qui ont fait à peu près soixante voitures en tout… Il n’y avait presque p
404 Hubert de Senarclens : On parle de la voiture qui rapproche, qui libère, qui rend indépendant. Aujourd’hui pourtant le
405 enarclens : On parle de la voiture qui rapproche, qui libère, qui rend indépendant. Aujourd’hui pourtant le développement e
406 On parle de la voiture qui rapproche, qui libère, qui rend indépendant. Aujourd’hui pourtant le développement effréné de la
407 nt de destination. C’est un instrument de travail qui permet de vous rendre à votre bureau, un instrument de plaisir, de to
408 e. Une personne sur trois ou quatre en Suisse, ce qui est considérable. Mais bien entendu cela comporte aussi des inconvéni
409 r : Vous avez énuméré les avantages de la voiture qui soi-disant rendrait libre. Mais vous savez très bien que lorsque vous
410 puérile. La voiture est l’exemple type du danger qui consiste à accepter ou promouvoir des innovations technologiques dans
411 entrave. Il opposait la voiture au chemin de fer qui lui est réglé et n’offre aucune possibilité de détour. Mais à partir
412 t l’inverse d’un succès. C’est l’une des machines qui a le plus mauvais rendement qui soit. Les Américains ont calculé que
413 ’une des machines qui a le plus mauvais rendement qui soit. Les Américains ont calculé que leurs voitures rejettent le 87 %
414 is était de 4 km à l’heure. Donc à partir de buts qui étaient au départ parfaitement acceptables, même à la limite romantiq
415 ement, il faut reconnaître qu’il y a trop de gens qui font de la voiture un usage abusif. Un urbanisme dense permet, par ex
416 beaucoup trop grande faite à la voiture et à ceux qui l’utilisent. C’est ce qui explique que des zones de verdure continuen
417 à la voiture et à ceux qui l’utilisent. C’est ce qui explique que des zones de verdure continuent chaque année de disparaî
418 t très importante. Il faut faire façon d’elle. Ce qui me choque c’est qu’on veut absolument la charger de tous les péchés d
419 t véritablement la General Motors et ensuite Ford qui sont depuis fort longtemps les numéro un et deux de toutes les grande
420 es industries. C’est personnellement un phénomène qui m’impressionne beaucoup. Car si on me demande face à cette réalité si
421 ssentielle cette prise de conscience de la menace qui pèse sur la démocratie. L’utilisation abusive de l’automobile entrave
422 onstruire davantage de routes et d’autoroutes. Ce qui nous fait déboucher sur un cercle vicieux qu’il nous faut briser. Fra
423 enez-moi bien, je ne suis pas contre l’initiative qui est constitutionnelle. Mais je suis contre le but qu’elle vise. Denis
424 ue ce soit. Nous le ferons ! disent ces messieurs qui forment ce qu’on a appelé la « chevalerie du nucléaire ». Les expropr
425 i, une illustration parfaite de la démocratie. Ce qui me paraît en revanche démocratique, c’est de laisser le droit aux pop
426 llement de droit divin ! François Peyrot : La loi qui a été votée à l’époque sur les autoroutes a été soumise à un délai ré
427 té on nous demande de décharger le réseau routier qui n’est pas conçu pour ce genre de trafic mais, lorsque l’on veut const
428 l’on veut construire des routes de contournement, qui sont d’un degré de sécurité beaucoup plus élevé, et qui offrent des n
429 nt d’un degré de sécurité beaucoup plus élevé, et qui offrent des nuisances bien moindres, alors on crie au massacre de not
430 prononcer. François Peyrot : Rétroactivement, ce qui est contraire à tous nos us et coutumes ! Denis de Rougemont : Vous s
431 ruit une seconde autoroute de l’autre côté du lac qui fera gagner 3,5 kilomètres aux automobilistes… Alors face à de telles
432 en commun. Hubert de Senarclens : Pourtant en ce qui concerne les transports en commun, l’État n’a pas été particulièremen
433 les empêcher sont encore plus impopulaires ». Ce qui ne veut pas dire, bien sûr, qu’il ne faille pas lutter par une meille
434 n marche des mouvements pendulaires avec des gens qui vont à leur travail et qui en reviennent. Ces mouvements amènent par
435 dulaires avec des gens qui vont à leur travail et qui en reviennent. Ces mouvements amènent par conséquent des véhicules en
436 e de Paris sont devenus complètement morts. En ce qui concerne les parkings périphériques un point d’interrogation demeure
437 tion demeure selon moi : est-ce que le conducteur qui va faire ses achats, acceptera de s’extraire de sa voiture qu’il aura
438 itique des parkings autour de la petite ceinture, qui risque de créer une dévitalisation du centre commercial de la ville.
439 gne, c’est que la ville est devenue invivable. Ce qui se passe en Occident, à cet égard, est juste l’inverse de ce que l’on
440 s-dortoirs où les gens se connaissent à peine, ce qui débouche tôt ou tard sur des problèmes psychologiques. Hubert de Sena
441 um romain et aux places des communes au Moyen Âge qui ont joué un rôle si important. Voilà encore un certain nombre d’effet
442 ets objectifs que personne n’avait pu prévoir, et qui repose le problème de l’automobile de manière beaucoup plus globale.
443 up plus globale. Alfred Sauvy dans un petit livre qui date de 1968 — les choses se sont aggravées depuis — dit que le 40 %
444 On amène une circulation moderne dans des villes qui n’étaient pas faites pour la recevoir. Il en résulte, c’est clair, de
445 er, tout en gardant ce qu’elle a d’authentique et qui doit absolument être préservé IV Hubert de Senarclens : Il exi
446 dépend d’un nombre considérable de sous-traitants qui eux-mêmes sont les fournisseurs de bien d’autres industries, allant d
447 une quantité d’emplois. Rien que pour la Suisse —  qui pourtant ne fabrique pas directement d’automobiles — , cela représent
448 ’hui mieux qu’il n’y a un ou deux siècles. Moi ce qui me frappe, M. de Rougemont, dans la critique que vous faites du systè
449 er. Il y a par le monde plus de 200 000 personnes qui meurent chaque année sur les routes, sans compter des millions de gen
450 sur les routes, sans compter des millions de gens qui sont blessés. À cela s’ajoute le coût social. Je reconnais qu’actuell
451 moins, envisager de mettre au point des véhicules qui au lieu de durer cinq ans, si tout va bien, durent vingt ou trente an
452 — c’est un pur gaspillage — de voir ces voitures qui ne durent pas et auxquelles l’on doit continuellement changer des piè
453 nt changer des pièces. Denis de Rougemont : En ce qui concerne l’économie, je pense qu’il faut rester humain. Il y a des li
454 ense qu’il faut rester humain. Il y a des limites qui commencent à être atteintes : celles où l’on subordonne l’économie et
455 pas redevable de la réponse. Car ce n’est pas moi qui ai conçu l’auto, ce n’est pas moi qui pousse à sa multiplication ou à
456 est pas moi qui ai conçu l’auto, ce n’est pas moi qui pousse à sa multiplication ou à la construction d’autoroutes. Pour le
457 certains phénomènes sont connus, c’est un secteur qui démarre et il y a encore relativement peu de médecins qui se soient v
458 rre et il y a encore relativement peu de médecins qui se soient véritablement penchés sur la question de la voiture et de l
459 ux de plomb déposé chaque année sur nos routes et qui se retrouve dans l’air ou dans l’eau. L’effet du plomb sur le système
460 es est épouvantablement élevé. D’autre part en ce qui concerne les accidents, je pense qu’il ne faut pas prendre uniquement
461 ils ne sont jamais responsables de nos crimes. Ce qui est dangereux c’est l’homme. La bombe atomique seule n’est pas danger
32 1980, Journal de Genève, articles (1926–1982). Les journalistes sportifs ? On dirait qu’ils aiment les tyrans (31 mai-1er juin 1980)
462 e. Curieusement, d’ailleurs, mon premier article, qui fut publié dans une revue — j’avais alors un peu plus de 17 ans — éta
463 e rencontrer à maintes reprises Albert Camus avec qui j’ai beaucoup parlé football. Il jouait, lui aussi, au poste de gardi
464 olympiques ? Je suis violemment opposé à tout ce qui exalte le nationalisme lors des JO : hymnes nationaux, drapeaux, bref
465 e toute façon, je ne vois vraiment pas le rapport qui existe entre la performance de l’athlète et le pays d’où il vient. Ce
466 parallèles entre les JO de Berlin de 1936 et ceux qui vont se dérouler à Moscou. Je pense qu’en 1936, les démocraties occid
467 our les mêmes raisons, j’approuve totalement ceux qui refusent d’aller à Moscou tant que le régime soviétique continue à fa
468 rédiger une charte olympique totalement nouvelle, qui élimine expressément toute forme de nationalisme. Mais certains ne se
33 1982, Journal de Genève, articles (1926–1982). Mes amis et Nerval (9 octobre 1982)
469 , livres d’amis, reçus depuis des mois, et livres qui m’aident à travailler, comme la série des petits volumes d’Après l’ex
34 1982, Journal de Genève, articles (1926–1982). Suis-je perdu pour la littérature ? (30 octobre 1982)
470 son remerciement, avant de parler de cette Europe qui lui « tient au cœur, au corps et à l’âme » et de réaffirmer avec forc
471 » et de réaffirmer avec force sa foi en un avenir qui sera ce que nous en ferons, Denis de Rougemont expliqua pourquoi l’es
472 « essayiste », c’est-à-dire une espèce d’écrivain qui ne se définit aujourd’hui, dans le domaine littéraire, que d’une mani
473 ire, que d’une manière négative : c’est quelqu’un qui publie bien sûr, mais n’a pas publié un seul roman, un seul recueil d
474 dans mon cas, puisque c’est le cas d’un essayiste qui n’écrit même pas sur la chose littéraire, ou à la rigueur philosophiq
475 tion littéraire serait synonyme de fiction. Voilà qui est méconnaître à tout le moins l’histoire de la littérature français
476 hommes, Jean Paulhan et Roger Caillois… Voilà ce qui compte à mes yeux, plus que tout, dans ma bibliothèque française. Seu
477 aire face, et d’autre part l’évolution intérieure qui fut la mienne dans le même temps, je veux dire dans les années 1930 à
478 t s’est joué, à la fois hors de moi et en moi. Ce qui m’importe ici, c’est de vous faire entrevoir l’interaction de ces deu
479 ausanne un article sur l’entrée d’Hitler à Paris, qui parut le 17 juin, lendemain de l’arrivée au pouvoir de Pétain et veil
480 t-quatrième année, j’avais découvert deux auteurs qui furent décisifs pour ma vie : Kierkegaard et Karl Barth. À travers eu
481 à-dire d’un individu chargé d’une vocation unique qui le relie à la communauté. Paul Valéry nous convaincus de ce que « tou
482 cratique et libertaire, supposait un type d’homme qui serait à la fois pleinement libre et pleinement responsable de ses ac
483 mmunauté où sa voix puisse porter et où n’importe qui puisse lui répondre sans avoir l’organe de Stentor. Nous retrouvions
484 communes, s’associant en régions pour les tâches qui dépassent leur compétence ; ces régions à leur tour se fédérant, et a