1 1929, Journal de Genève, articles (1926–1982). Panorama de Budapest (23 mai 1929)
1 s dans l’une et l’autre de ces capitales suffit à vous en donner la sensation : ce que vous pourrez voir durant le reste de
2 les suffit à vous en donner la sensation : ce que vous pourrez voir durant le reste de votre séjour ne fera que confirmer ce
3 ion : ce que vous pourrez voir durant le reste de votre séjour ne fera que confirmer cette première impression. Vienne : assi
4 ouettée ? Budapest : une vague de musique tzigane vous emporte dès l’entrée. Un violon vient vous siffler à l’oreille les no
5 zigane vous emporte dès l’entrée. Un violon vient vous siffler à l’oreille les notes les plus aiguës d’une chanson populaire
6 ement rauques… Sortez pour en suivre une, arrêtez- vous à ses côtés devant cet étalage pour admirer un coussin aux curieux de
7 ir et portant, en cœur noir, la nouvelle… « Savez- vous qu’on nous a pris les deux tiers de notre pays ?… Non, non, jamais ! 
8 … Rentrons dans la ville un soir qu’elle s’amuse. Vous avez dîné au paprika chez des gens qui vous ont reçu comme un cadeau
9 muse. Vous avez dîné au paprika chez des gens qui vous ont reçu comme un cadeau de Dieu, — c’est leur formule de salutation
10 eau de Dieu, — c’est leur formule de salutation — vous constatez que cette profusion de liqueurs légères facilite singulière
11 facilite singulièrement les rapports sociaux. On vous mène au Théâtre, vous n’y comprenez rien, mais le charme des voix hon
12 nt les rapports sociaux. On vous mène au Théâtre, vous n’y comprenez rien, mais le charme des voix hongroises féminines suff
13 le charme des voix hongroises féminines suffit à votre bonheur et vous voyez bien que Mme Varshany est une grande artiste. V
14 ix hongroises féminines suffit à votre bonheur et vous voyez bien que Mme Varshany est une grande artiste. Vous vous êtes le
15 yez bien que Mme Varshany est une grande artiste. Vous vous êtes levé, comme tout le monde, à l’entrée d’un des archiducs. C
16 ien que Mme Varshany est une grande artiste. Vous vous êtes levé, comme tout le monde, à l’entrée d’un des archiducs. Car ce
17 le, seul en Europe, attend le retour d’un roi. Et vous voici transporté dans un bal costumé, parmi des gens qui parlent une
2 1934, Journal de Genève, articles (1926–1982). Sara Alelia (25 mai 1934)
18 touches du surnaturel. Si les scandales du temps vous laissent quelque loisir pour vous occuper de vous-mêmes et de l’enjeu
19 ndales du temps vous laissent quelque loisir pour vous occuper de vous-mêmes et de l’enjeu de l’existence, vous lirez Sara A
20 cuper de vous-mêmes et de l’enjeu de l’existence, vous lirez Sara Alelia 2. La puissante mélancolie, le réalisme total qui é
21 réalisme total qui éclatent dans ce chef-d’œuvre vous consoleront des réalités artificielles qui énervent nos vies de souci
22 ait Péguy. Et dix fois, en me le rendant, « Je ne vous dirai pas à quelle heure je l’ai terminé cette nuit ». — « Des livres
23 l’auteur de Gösta Berling : mais une sobriété qui vous saisit le cœur, à chaque page. Toute une vie de femme se déroule sur
24 u’elle est le vrai sujet de ce grand livre. Je ne vous conterai pas « l’histoire ». Cette chronique d’une vie de femme n’est
3 1940, Journal de Genève, articles (1926–1982). Veille d’élection présidentielle (14 novembre 1940)
25 . C’est ainsi que, dans chaque journal américain, vous pourrez lire quelques articles sérieusement documentés sur les défaut
26 illeurs des intérêts matériels et non des idées — vous trouverez des articles d’un ton beaucoup plus mordant, relatifs aux c
4 1941, Journal de Genève, articles (1926–1982). Santé de la démocratie américaine (17 janvier 1941)
27 rent à s’orner de bandes de papier portant : « Je vous l’avais bien dit ! » Une neige de papiers multicolores descendait len
28 e remplis mes caves de conserves. Car ce sera, je vous le dis, la famine et le bolchévisme ! » Cette dame s’occupe aujourd’h
5 1941, Journal de Genève, articles (1926–1982). Religion et vie publique aux États-Unis (18 février 1941)
29 ropéens de l’Amérique. Ouvrez le New York Times : vous y trouverez, le samedi, deux grandes pages consacrées aux choses reli
30 érenciers les plus en vogue. Tournez le bouton de votre radio : à 14 h chaque jour, vous entendrez un choix « d’hymnes de tou
31 ez le bouton de votre radio : à 14 h chaque jour, vous entendrez un choix « d’hymnes de toutes les Églises ». Plus tard, un
32 zaine de cultes relayés par différentes stations. Vous passerez d’une liturgie solennelle de l’Église épiscopale à quelque r
33 éservée aux lieux de culte. En tête : « Préservez votre privilège américain : allez au culte de votre paroisse. » Certes, l’o
34 vez votre privilège américain : allez au culte de votre paroisse. » Certes, l’on peut sourire de la publicité qu’étalent les
6 1946, Journal de Genève, articles (1926–1982). Journal d’un retour (11-12 mai 1946)
35 ar les Américains pendant la guerre… » — « Taisez- vous , me crie-t-elle, je retrouve l’Europe ! Ce n’est pas le moment d’être
36 -ils non sans inquiétude. — Et New York donc ? Si vous y connaissez des chambres libres, faites-moi signe. (Comme les Améric
37 ment dormirais-je cette nuit ? J’arrive au rendez- vous après sept ans, furtivement, à la faveur d’une nuit déserte. Un rende
38 vement, à la faveur d’une nuit déserte. Un rendez- vous dont j’avais bien souvent désespéré, après cet au revoir en juin 40,
7 1946, Journal de Genève, articles (1926–1982). Journal d’un retour (fin) (18-19 mai 1946)
39 règlements « pareils pour tous », non point avec votre situation d’usager perplexe ou anxieux. La bonhomie des mêmes employé
8 1950, Journal de Genève, articles (1926–1982). Lettre aux députés européens (15 août 1950)
40 5 août 1950)p Messieurs les députés européens, Vous êtes ici pour faire l’Europe, et non pour faire semblant de la faire.
41 pour fédérer vingt-cinq États souverains… Pensez- vous que l’Histoire vous en laisse beaucoup plus, pour unir vos États dans
42 cinq États souverains… Pensez-vous que l’Histoire vous en laisse beaucoup plus, pour unir vos États dans un plus grand péril
43 ’Histoire vous en laisse beaucoup plus, pour unir vos États dans un plus grand péril ? Vous me direz que l’Europe est plus
44 s, pour unir vos États dans un plus grand péril ? Vous me direz que l’Europe est plus grande que la Suisse ; qu’il fallut un
45 ourd’hui soit plus grande que la Suisse d’alors : vous êtes venus de Stockholm à Strasbourg — ou de Rome, ou même d’Ankara —
46 nève ou des Grisons à Berne. Pour la guerre entre vos pays, les deux dont vous sortez suffisent. Vos Nations vivent ensembl
47 rne. Pour la guerre entre vos pays, les deux dont vous sortez suffisent. Vos Nations vivent ensemble depuis autant de siècle
48 re vos pays, les deux dont vous sortez suffisent. Vos Nations vivent ensemble depuis autant de siècles, et souvent davantag
49 s cantons. Leurs sorts ne sont pas moins liés, si vous regardez l’Europe dans l’ensemble du monde. Vos cordons de douanes ne
50 vous regardez l’Europe dans l’ensemble du monde. Vos cordons de douanes ne sont pas plus nombreux, ni moins strangulatoire
51 strangulatoires, que ne l’étaient les nôtres. Et vos économies ne sont pas plus disparates que celle de Zurich par exemple
52 incipe, mais pratique. C’est assez pour que j’ose vous supplier d’y réfléchir quelques minutes. La Suisse s’est unie en neuf
53 Car le temps fait beaucoup à l’affaire. Celui que vous n’auriez pas, Staline le prend. C’est le temps de méditer avant d’agi
54 le temps de méditer avant d’agir. Mais celui que vous risquez de perdre, cet été, soyez bien sûr qu’il le retrouvera : c’es
9 1950, Journal de Genève, articles (1926–1982). Deuxième lettre aux députés européens (16 août 1950)
55 de revendications. Et je n’ai point de conseils à vous donner. Mais je vous écris au nom d’une centaine de milliers de milit
56 je n’ai point de conseils à vous donner. Mais je vous écris au nom d’une centaine de milliers de militants fédéralistes, qu
57 là. Même s’il est prononcé avec l’accent anglais. Vous allez me parler, je le sais bien, des grandes difficultés accumulées
58 sais bien, des grandes difficultés accumulées sur votre route vers l’unité. Elles sont connues. Ce qui l’est moins, c’est vot
59 té. Elles sont connues. Ce qui l’est moins, c’est votre volonté de les surmonter. L’un d’entre vous le rappelait récemment :
60 ’est votre volonté de les surmonter. L’un d’entre vous le rappelait récemment : le premier devoir de l’obstacle, c’est de se
61 evoir de l’obstacle, c’est de se laisser vaincre. Votre Comité des ministres néglige donc son premier devoir. À qui la faute 
62 nion, sur ce point, entretient des soupçons qu’il vous faut dissiper. Vous allez, paraît-il, réviser prudemment les statuts
63 entretient des soupçons qu’il vous faut dissiper. Vous allez, paraît-il, réviser prudemment les statuts du Conseil de l’Euro
64 ent les statuts du Conseil de l’Europe, ainsi que vos rapports internes avec le comité ministériel. Permettez-moi de vous d
65 rnes avec le comité ministériel. Permettez-moi de vous dire que l’opinion s’en moque, parce qu’elle a ses doutes motivés sur
66 ’en moque, parce qu’elle a ses doutes motivés sur vos intentions véritables. Elle n’est pas sûre qu’une fois dotés d’un ins
67 biné pour s’enrayer sans faute avant le départ —, vous en ferez l’usage qu’elle attend. Elle n’a pas l’impression très nette
68 attend. Elle n’a pas l’impression très nette que vous êtes décidés à faire l’Europe envers et contre toutes ses routines dé
69 nt, et pour tout dire d’un mot, à gouverner. Elle vous voit réticents pour la plupart, inquiets de ne pas vous avancer au-de
70 oit réticents pour la plupart, inquiets de ne pas vous avancer au-delà de ce qu’on vous a permis, qui est moins que rien, ar
71 quiets de ne pas vous avancer au-delà de ce qu’on vous a permis, qui est moins que rien, arrêtés par un alinéa, déconcertés
72 par un éternuement des daltoniens. Elle voit que votre Assemblée consultative d’un comité lui-même consultatif, formé de min
73 inistres qui se refusent d’ailleurs à transmettre vos consultations, consulte à son tour des experts. Ces consultés à la tr
74 entends bien que l’opinion se trompe et méconnaît vos sentiments intimes, qui sont très purs : qu’elle distingue mal les fo
75 mal les forces colossales qui paralysent jusqu’à votre éloquence et vous empêchent d’articuler des intentions peut-être subv
76 ossales qui paralysent jusqu’à votre éloquence et vous empêchent d’articuler des intentions peut-être subversives (on chucho
77 intentions peut-être subversives (on chuchote que vous tenez en réserve un projet de timbre-poste européen). Certes, il conv
78 fameuse prudence dont l’éloge inlassable embellit vos discours. En somme, que risquez-vous ? Je cherche à voir ce qui peut
79 able embellit vos discours. En somme, que risquez- vous  ? Je cherche à voir ce qui peut vous faire peur, ce qui peut être plu
80 que risquez-vous ? Je cherche à voir ce qui peut vous faire peur, ce qui peut être plus dangereux que l’inaction totale où
81 peut être plus dangereux que l’inaction totale où vous glissez, plus utopique que le maintien du statu quo, plus follement i
82 intien du statu quo, plus follement imprudent que vos prudences ? Je ne trouve pas. On dirait que vous avez le trac. Vous r
83 e vos prudences ? Je ne trouve pas. On dirait que vous avez le trac. Vous répétez qu’il faut être prudents quand on s’engage
84 e ne trouve pas. On dirait que vous avez le trac. Vous répétez qu’il faut être prudents quand on s’engage dans une entrepris
85  » (je m’excuse de parler comme un ministre). Car vous ne vous êtes, jusqu’ici, engagés dans rien que l’on sache. Quand vous
86 ’excuse de parler comme un ministre). Car vous ne vous êtes, jusqu’ici, engagés dans rien que l’on sache. Quand vous y serez
87 usqu’ici, engagés dans rien que l’on sache. Quand vous y serez, il sera temps de voir si la prudence, ou au contraire un peu
88 s pieds. On trouverait dans les procès-verbaux de votre première session consultative (au second degré) de quoi faire un coll
89 er. Les vieillards ont l’humeur proverbiale, mais votre assemblée est trop jeune. Je lui propose quelques slogans nouveaux et
90 out faire en deux pas, sauf franchir un abîme. Si votre œuvre est de longue haleine, il n’y a pas une minute à perdre. Tout e
91 t la vertu des audacieux. Je me résume. L’opinion vous regarde. Elle n’entre pas dans les subtilités. Elle vous demande « Qu
92 garde. Elle n’entre pas dans les subtilités. Elle vous demande « Que voulez-vous faire ? » Si vous ne voulez pas fédérer l’E
93 ns les subtilités. Elle vous demande « Que voulez- vous faire ? » Si vous ne voulez pas fédérer l’Europe, vous ne voulez rien
94 Elle vous demande « Que voulez-vous faire ? » Si vous ne voulez pas fédérer l’Europe, vous ne voulez rien qui l’intéresse.
95 faire ? » Si vous ne voulez pas fédérer l’Europe, vous ne voulez rien qui l’intéresse. Si vous ne faites rien cet été, vous
96 l’Europe, vous ne voulez rien qui l’intéresse. Si vous ne faites rien cet été, vous serez oubliés cet automne. Si vous croye
97 qui l’intéresse. Si vous ne faites rien cet été, vous serez oubliés cet automne. Si vous croyez qu’il vaut mieux ne rien fa
98 rien cet été, vous serez oubliés cet automne. Si vous croyez qu’il vaut mieux ne rien faire, ou qu’on ne peut rien faire de
99 en faire, ou qu’on ne peut rien faire de sérieux, vous pouvez encore rendre un service à l’Europe ; allez-vous-en. Laissez l
100 à ceux qui ont décidé d’agir. Avouez que rien ne vous paraît possible, on comprendra que vous n’êtes plus nécessaires. Mais
101 e rien ne vous paraît possible, on comprendra que vous n’êtes plus nécessaires. Mais cessez de faire semblant d’être là. Con
102 un édifice inachevé. Mais si quelques-uns d’entre vous , comme je le crois, sont fédéralistes, qu’ils le disent, qu’ils procl
10 1950, Journal de Genève, articles (1926–1982). Troisième lettre aux députés européens : L’orgueil de l’Europe (17 août 1950)
103 hacun peut voir de ses yeux. Et plusieurs d’entre vous , je le sais, s’en affligent. (On peut penser que ce n’est pas suffisa
104 ce n’est pas suffisant.) Aujourd’hui, je voudrais vous dire l’admiration et le respect que j’éprouve, non point hélas ! pour
105 le respect que j’éprouve, non point hélas ! pour vos succès jusqu’à cette date, mais pour le rôle qui vous est dévolu, et
106 succès jusqu’à cette date, mais pour le rôle qui vous est dévolu, et pour le nom qu’il vous convient de revendiquer, celui
107 le rôle qui vous est dévolu, et pour le nom qu’il vous convient de revendiquer, celui dont, par avance, je vous salue. Vous
108 nvient de revendiquer, celui dont, par avance, je vous salue. Vous êtes, Messieurs, Députés de l’Europe. Essayons de mesurer
109 vendiquer, celui dont, par avance, je vous salue. Vous êtes, Messieurs, Députés de l’Europe. Essayons de mesurer la grandeur
110 urope entière, voilà qui signifie, Messieurs, que vous avez perdu le droit d’être étrangers sur aucune de nos terres, dans a
111 orme l’héritage deux fois millénaire de nos fils. Vous n’êtes pas seulement les députés de quinze villes capitales, et de ce
112 révoltes qui rassemblent ou divisent les vivants, vous êtes les députés d’une aventure humaine qui tente à travers vous, dan
113 éputés d’une aventure humaine qui tente à travers vous , dans l’angoisse et l’espoir, le risque et la grandeur d’une liberté
114 risque et la grandeur d’une liberté nouvelle. Que vous le sachiez ou non, vous êtes les députés d’Athènes, de Rome et de Jér
115 une liberté nouvelle. Que vous le sachiez ou non, vous êtes les députés d’Athènes, de Rome et de Jérusalem. Les députés de l
116 s et de nos philosophes. De tout cela, Messieurs, vous êtes les Députés. On attend de vous l’invention qui sauve la paix du
117 a, Messieurs, vous êtes les Députés. On attend de vous l’invention qui sauve la paix du monde, et qui maintienne l’Europe da
118 te la musique est née du contrepoint de l’Europe. Vous êtes, Messieurs, les députés de Mozart, de l’opéra, des symphonies et
119 rment du Jeu de Paume… Ce grand passé, Messieurs, vous charge de l’avenir. Par l’un, vous êtes à l’autre députés. Me voici p
120 sé, Messieurs, vous charge de l’avenir. Par l’un, vous êtes à l’autre députés. Me voici partagé entre l’envie de rire de vos
121 éputés. Me voici partagé entre l’envie de rire de vos craintes dérisoires, de vos alinéas, et le sentiment très vif de mon
122 re l’envie de rire de vos craintes dérisoires, de vos alinéas, et le sentiment très vif de mon néant devant l’ampleur de la
123 f de mon néant devant l’ampleur de la mission qui vous anime, ou qui peut-être vous écrase. En vérité, je ne sais comment j’
124 ur de la mission qui vous anime, ou qui peut-être vous écrase. En vérité, je ne sais comment j’ose vous parler, si ce n’est
125 vous écrase. En vérité, je ne sais comment j’ose vous parler, si ce n’est par angoisse et en dernier recours, soulevé par l
126 , et ce grand risque de la liberté, tout cela qui vous délègue en ce lieu décisif, dans l’histoire concrète de ce temps, tou
127 emps, tout cela peut disparaître à tout jamais si vous manquez à une mission précise, celle de fédérer nos faiblesses pour e
128 u siècle. Messieurs les députés européens, saurez- vous mériter votre nom ? On attend de vous la grandeur. Les chances de l’E
129 sieurs les députés européens, saurez-vous mériter votre nom ? On attend de vous la grandeur. Les chances de l’Europe, aujourd
130 ens, saurez-vous mériter votre nom ? On attend de vous la grandeur. Les chances de l’Europe, aujourd’hui, sont confondues av
131 nd pour répondre au défi d’un tel destin. Groupez- vous . Dites au moins votre but ! Nous sommes plusieurs millions qui n’atte
132 éfi d’un tel destin. Groupez-vous. Dites au moins votre but ! Nous sommes plusieurs millions qui n’attendons qu’un signe. r
11 1950, Journal de Genève, articles (1926–1982). Quatrième lettre aux députés européens : En lisant le pamphlet du Labour Party (18 août 1950)
133 l’Europe. Et cela produit des résultats bizarres. Votre Assemblée, selon lui, peut faire du bon travail, pourvu qu’elle n’ait
134 e super-nationale. Cet ami de l’unité siège parmi vous . Il va trouver sur vos banquettes des adversaires et des alliés inatt
135 mi de l’unité siège parmi vous. Il va trouver sur vos banquettes des adversaires et des alliés inattendus. Les socialistes
136 ous n’attendons rien de plus, ni rien de moins de vous . s. Rougemont Denis de, « Quatrième lettre aux députés européens :
12 1950, Journal de Genève, articles (1926–1982). Cinquième lettre aux députés européens : « Méritez votre nom ! » (19-20 août 1950)
137 inquième lettre aux députés européens : « Méritez votre nom ! » (19-20 août 1950)t Messieurs les députés de l’Europe à sau
138 nde, ou de gauche, ou de droite — ou ne sera pas. Vous êtes là pour qu’elle soit, pour qu’elle dure, dans ses diversités de
139 « On suit ceux qui marchent », dit Péguy. Elle ne vous suivra pas si vous êtes daltoniens, et les sceptiques, alors, pourron
140 marchent », dit Péguy. Elle ne vous suivra pas si vous êtes daltoniens, et les sceptiques, alors, pourront bien dire : J’ava
141 ens, c’est l’Europe. Mais elle ne bougera pas, si vous ne faites presque rien. Elle laissera les sceptiques parler « au nom
142 çus, et Staline très content. Voici l’acte que je vous propose, au nom de l’opinion qui ne parle pas encore. Messieurs les d
143 n qui ne parle pas encore. Messieurs les députés, vous le savez bien, vous n’êtes pas de vrais députés, car les vrais sont é
144 ncore. Messieurs les députés, vous le savez bien, vous n’êtes pas de vrais députés, car les vrais sont élus, et vous êtes si
145 pas de vrais députés, car les vrais sont élus, et vous êtes simplement délégués pour consultation. Décidez de vous faire éli
146 simplement délégués pour consultation. Décidez de vous faire élire. Un raisonnement très simple appuie cette suggestion. On
147 titution fédérale de l’Europe. Ce projet, c’est à vous de l’élaborer. Cet été, en septembre, à Strasbourg. Il faut une Commi
148 septembre, à Strasbourg. Il faut une Commission ? Vous pouvez la nommer. Le Comité ministériel va s’y opposer ? Vous pouvez
149 la nommer. Le Comité ministériel va s’y opposer ? Vous pouvez passer outre, et jurer de rester où vos parlements vous envoie
150 ? Vous pouvez passer outre, et jurer de rester où vos parlements vous envoient. (Les ministres dépendent aussi de vos parle
151 asser outre, et jurer de rester où vos parlements vous envoient. (Les ministres dépendent aussi de vos parlements, qui reste
152 vous envoient. (Les ministres dépendent aussi de vos parlements, qui restent les seuls juges d’un conflit éventuel.) Si vo
153 estent les seuls juges d’un conflit éventuel.) Si vous acceptez cela, vous aurez avec vous l’opinion vraie dans sa majorité,
154 es d’un conflit éventuel.) Si vous acceptez cela, vous aurez avec vous l’opinion vraie dans sa majorité, les militants de l’
155 éventuel.) Si vous acceptez cela, vous aurez avec vous l’opinion vraie dans sa majorité, les militants de l’Europe, la logiq
156 e de l’Histoire, le réveil de notre espérance. Si vous n’acceptez pas, vous ne trouverez derrière vous que le vide et l’indi
157 éveil de notre espérance. Si vous n’acceptez pas, vous ne trouverez derrière vous que le vide et l’indifférence ; et devant
158 i vous n’acceptez pas, vous ne trouverez derrière vous que le vide et l’indifférence ; et devant vous, le rire des hommes d’
159 re vous que le vide et l’indifférence ; et devant vous , le rire des hommes d’acier ! Si vous me dites que c’est prématuré, j
160 ; et devant vous, le rire des hommes d’acier ! Si vous me dites que c’est prématuré, je vous supplierai de déclarer claireme
161 ’acier ! Si vous me dites que c’est prématuré, je vous supplierai de déclarer clairement à quel moment, et sous quelles cond
162 les conditions, cela cessera d’être prématuré. Si vous me dites que c’est très joli, mais qu’il faut qu’on vous laisse du te
163 dites que c’est très joli, mais qu’il faut qu’on vous laisse du temps, je vous proposerai de l’obtenir de Staline. Car en E
164 i, mais qu’il faut qu’on vous laisse du temps, je vous proposerai de l’obtenir de Staline. Car en Europe, il y en a peu. Si
165 enir de Staline. Car en Europe, il y en a peu. Si vous me dites enfin que c’est plus difficile que je n’ai l’air de le pense
166 n’ai l’air de le penser dans ma candeur naïve, je vous demanderai si quelque chose au monde est plus difficile à concevoir q
167 tre Europe divisée, devant toutes les menaces que vous savez : un régime social déficient, le chômage étendu, la ruine à bre
168 il n’y a presque plus rien à perdre. Que risquez- vous à tenter l’impossible ? D’autre part, il est sûr qu’il y aurait tout
169 uer la dernière chance européenne. Voilà le pari. Vous êtes acculés à l’audace. Donnez-nous la Constitution ! Messieurs les
170 la Constitution ! Messieurs les députés, faut-il vous dire encore que je ne suis rien qu’une voix presque désespérée, et sa
171 presque désespérée, et sans autre pouvoir que de vous adjurer de la part des millions qui se taisent mais qui ont peur ? Pa
172 nences : comprenez l’anxiété qui les dicte. Je ne vous écrirais pas si je ne savais très bien qu’une partie d’entre vous m’a
173 s si je ne savais très bien qu’une partie d’entre vous m’approuve, et qu’une autre ne dit pas non. Dans un mouvement de pass
174 vement de passion, je m’écriais l’autre jour : si vous ne voulez rien faire, allez-vous-en ! Mais beaucoup d’entre vous veul
175 rien faire, allez-vous-en ! Mais beaucoup d’entre vous veulent agir, et je les supplie maintenant, au nom de l’Europe, de re
176 ant d’avoir dressé, pour notre espoir, un signe ! Vous n’êtes pas encore l’espoir des peuples libres, ni des peuples muets d
177 res, ni des peuples muets de l’Est européen. Mais vous pouvez le devenir et sonner le ralliement, cet été, en septembre, à S
178 re, à Strasbourg. Tout tient à cela, tout tient à votre sage audace. Car si l’Europe unie n’est pas un grand espoir renaissan
179 us des États. Messieurs les députés européens, je vous salue d’un vœu qui voudrait résumer celui de tous nos peuples aux éco
180 un vœu mêlé d’angoisse et d’espérances : méritez votre nom, faites-vous élire, et fédérez l’Europe pendant qu’il en est temp
181 oisse et d’espérances : méritez votre nom, faites- vous élire, et fédérez l’Europe pendant qu’il en est temps. Cet été, en se
182 Cinquième lettre aux députés européens : “Méritez votre nom !” », Journal de Genève, Genève, 19–20 août 1950, p. 1.
13 1952, Journal de Genève, articles (1926–1982). Au pays du Patriarche (29-30 novembre 1952)
183 ettre, Madame, une seule fois, et montrez ensuite vos jambes à qui vous voudrez ». À ses amis de Paris : « On fabrique ici
184 e seule fois, et montrez ensuite vos jambes à qui vous voudrez ». À ses amis de Paris : « On fabrique ici beaucoup mieux qu’
185 n fabrique ici beaucoup mieux qu’à Genève… Donnez vos ordres ; vous serez servis… Vous aurez de très belles montres et de t
186 i beaucoup mieux qu’à Genève… Donnez vos ordres ; vous serez servis… Vous aurez de très belles montres et de très mauvais ve
187 ’à Genève… Donnez vos ordres ; vous serez servis… Vous aurez de très belles montres et de très mauvais vers quand il vous pl
188 s belles montres et de très mauvais vers quand il vous plaira. » En vingt ans, le village passe de cinquante foyers à plus d
189 arçons défilent à cheval, en uniformes. « Sont-ce vos soldats ? » demande le prince de Hesse. « Non, mes amis ! », dit le g
190 he, qui assourdit tout d’un coup leur grondement. Vous voyez que ce pays est le centre du monde. C’est ce que l’on pense tou
14 1953, Journal de Genève, articles (1926–1982). Aller et retour (21 mai 1953)
191 relations entre l’Ancien et le Nouveau Monde. Je vous laisse le soin de commenter le parallélisme qu’un tel texte suggère,
15 1956, Journal de Genève, articles (1926–1982). « Oserons-nous encore… » (6 novembre 1956)
192 dire souveraineté du peuple. Or le peuple, c’est vous et moi. Profitant du silence ignominieux qui succède aux flagrants dé
16 1968, Journal de Genève, articles (1926–1982). Denis de Rougemont nous écrit (6-7 juillet 1968)
193 (6-7 juillet 1968)aa M. P.-O. Walzer suggère à vos lecteurs ( Samedi littéraire, 22 juin 1968) que pendant six ans d’Amé
17 1969, Journal de Genève, articles (1926–1982). Denis de Rougemont et l’objection de conscience (30 juin 1969)
194 aîtra le 27 juin devant le tribunal militaire que vous présidez. J’ai beaucoup d’estime pour M. Bugnot. Équilibré, maître de
195 s : voir Budapest et Prague. Si c’est la liberté, vous acquitterez René Bugnot. Ou plutôt, il faudrait l’acquitter, et peut-
196 il faudrait l’acquitter, et peut-être le voudriez- vous mais je sais bien que vous n’avez pas le droit formel. Dans ces condi
197 peut-être le voudriez-vous mais je sais bien que vous n’avez pas le droit formel. Dans ces conditions, pourquoi ne pas cond
198 e sorcières. J’espère, Monsieur le président, que vous voudrez bien excuser la liberté que je prends en m’adressant à vous s
199 excuser la liberté que je prends en m’adressant à vous si franchement et longuement. Je ne voulais être qu’un témoin de mora
200 n témoin de moralité, et je n’ai pu m’empêcher de vous faire part de mes convictions de citoyen. Me le pardonnerez-vous en p
201 de mes convictions de citoyen. Me le pardonnerez- vous en pensant aux efforts que j’ai faits — et ne cesserai de faire — pou
202 C’est de cette conviction que je m’autorise pour vous communiquer mes réflexions sur ce cas de conscience difficile. Veuill
18 1969, Journal de Genève, articles (1926–1982). Objection de conscience : Denis de Rougemont répond (4 juillet 1969)
203 onsieur le rédacteur en chef, J’ai été surpris de vous voir répondre à une lettre que j’avais adressée au président d’un tri
204 essée au président d’un tribunal militaire et que vous publiez à mon insu, sous un titre trompeur, je le crains. Car ce titr
205 yen qui trahit ses devoirs de solidarité. Quant à votre sous-titre « Tout ou rien », je ne le crois pas justifié par mon text
206  », je ne le crois pas justifié par mon texte, et vous avez raison de refuser de me suivre dans une direction où jamais je n
207 cela bien mieux que nous. Cela dit, il me reste à vous remercier d’avoir, en publiant ma lettre, ramené l’attention de vos l
208 oir, en publiant ma lettre, ramené l’attention de vos lecteurs sur le grave problème qui l’avait motivée : c’est ce problèm
19 1969, Journal de Genève, articles (1926–1982). « Non, notre civilisation n’est pas mortelle ! » (30-31 août 1969)
209 pas mortelle ! » (30-31 août 1969)ag ah Pensez- vous qu’il existe une culture bourgeoise ? Le terme de « culture bourgeois
210 par exemple, sont communes à tous les Européens. Vous trouvez dans toute l’Europe des romans, des sonnets, des tableaux de
211 leaux de chevalet, le concerto, la symphonie, que vous ne trouvez pas en dehors de l’Europe. Les grandes écoles d’art ont ét
212 e de le faire. C’est uniquement l’avant-garde que vous trouvez dans les prisons russes. Vous n’y trouverez pas un seul repré
213 t-garde que vous trouvez dans les prisons russes. Vous n’y trouverez pas un seul représentant de l’art pompier, parce qu’il
214 is ce n’est pas elle qui donne ce ton-là, puisque vous le retrouverez dans toutes les dictatures communistes. Pensez-vous qu
215 ez dans toutes les dictatures communistes. Pensez- vous que nous sommes entrés dans une ère de révolutions ? Il y a une néces
216 ça ne fonctionne pas, ça ne joue plus. Ne pensez- vous pas que les revendications ne sont pas assez bien formulées ? C’est e
217 l’augmentation des possibilités de choix. Pensez- vous que nous assistons à la mort de la civilisation occidentale ? C’est i
218 e qu’il n’y aura plus de civilisation du tout. Et vous ne croyez pas qu’il y aurait des indices pour une autre culture, une
219 cidentale : le marxisme. Quelle différence faites- vous entre marxisme et maoïsme ? Le maoïsme prétend être le vrai marxisme.
220 ïsme aucun germe de civilisation nouvelle. Croyez- vous plus au succès des révolutions que des évolutions ? Je ne crois pas d
221 nduit à un régime impersonnel ? Comment expliquez- vous l’apogée et la chute des civilisations ? Personnellement, je ne crois
222 n’est pas dangereuse du tout. C’est un objet. Si vous la laissez tranquille dans sa caisse, elle ne va pas en sortir toute
223 traverse notre siècle a-t-elle été préparée ? Je vous dirais sans trop réfléchir : par le nationalisme militarisé, l’étatis
20 1969, Journal de Genève, articles (1926–1982). Un débat sur l’objection de conscience : entre Dieu et l’État (4 octobre 1969)
224 re « Au Dieu Tout-Puissant ». Christian Schaller, vous avez objecté pour des motifs religieux… La religion n’est pas le mo
225 dre strictement religieux. Bernard Béguin. — Donc vous n’invoquez pas le préambule de la Constitution pour vous autoriser à
226 invoquez pas le préambule de la Constitution pour vous autoriser à objecter autrement que les autres ? Christian Schaller. —
227 gieux, humanitaire ou autre. Michel Barde. — Avez- vous eu le sentiment, en objectant, de faire une œuvre antimilitariste — j
228 peut conduire à l’anarchie. Christian Schaller. —  Vous êtes conscient de ce danger-là, mais êtes-vous conscient aussi du dan
229 — Vous êtes conscient de ce danger-là, mais êtes- vous conscient aussi du danger inverse, qui est le danger de l’obéissance
230 ence de la justice militaire Bernard Béguin. —  Vous ne connaissez pas les troupes genevoises si vous parlez d’obéissance
231  Vous ne connaissez pas les troupes genevoises si vous parlez d’obéissance inconditionnelle… Denis de Rougemont. — Au point
232 tibles, une majorité sont des Témoins de Jéhovah. Vous connaissez leur doctrine — je simplifie : il y a le royaume de Dieu,
233 honnêtes. Colonel divisionnaire Dénéréaz. — Jugez- vous des mineurs dans les tribunaux militaires ? Colonel Vaucher. — Si, no
234 pouvons pas la récuser. Bernard Béguin. — Pouvez- vous maintenant définir la punition ? Colonel Vaucher. — La punition de l’
235 de 20 ans condamné pour objection de conscience —  vous avez dit que c’est un honnête homme — va loger trois mois à Saint-Ant
236 tian Schaller. — À la limite, on pourrait étendre votre définition et dire que tous les gens qui vont devant les tribunaux, o
237 al. Il y a un Code pénal qui définit l’honnêteté. Vous pouvez le considérer comme arbitraire, mais il existe. Et d’autre par
238 ue les conditions objectives sont réunies, disiez- vous  ? Colonel Vaucher. — L’intention subjective de faire défaut au servic
239 et c’est fini. Colonel divisionnaire Dénéréaz. —  Vous parlez de tribunaux militaires et de tribunaux civils. Je crois que d
240 l’armée et le peuple sont si intimement mêlés que vous retrouvez les mêmes personnages dans les deux juridictions. Ce ne son
241 ts. Ils n’ont absolument pas la compréhension que vous avez. Ils sont violemment contre : « Ce sont des lavettes, ce sont de
242 lâches, de mauvais citoyens. » Colonel Vaucher. —  Vous trouverez exactement le contraire dans nos jugements. Denis de Rougem
243 Bernard Béguin. — Colonel divisionnaire Dénéréaz, vous commandez maintenant une division mécanisée. Vous êtes officier de ca
244 vous commandez maintenant une division mécanisée. Vous êtes officier de carrière. Est-ce qu’il ne serait pas plus simple, po
245 ère. Est-ce qu’il ne serait pas plus simple, pour vous , d’admettre un service civil ? Est-ce que ça a un sens de contraindre
246 Nous ne manquons pas de leur dire chaque fois : «  Vous avez le droit de critiquer l’armée. Tout ce qu’on vous demande c’est
247 avez le droit de critiquer l’armée. Tout ce qu’on vous demande c’est de faire votre service. Nous ne vous demandons pas de l
248 ’armée. Tout ce qu’on vous demande c’est de faire votre service. Nous ne vous demandons pas de l’aimer, ni d’en être partisan
249 ous demande c’est de faire votre service. Nous ne vous demandons pas de l’aimer, ni d’en être partisan. » Denis de Rougemont
250 i change tout à mon sens. Bernard Béguin. — Quand vous dites que l’objection n’est pas de l’antimilitarisme, il faut bien vo
251 Je suis un officier de métier, un technicien, si vous voulez, qui fait des additions et des soustractions pour savoir si no
252 Europe. Ce qui est déjà un signe de puissance. Je vous fais sourire peut-être ? Christian Schaller. — Pas du tout. Avec les
253 tout ce qui a été fait à l’étranger. D’ailleurs, vous savez qu’en France un objecteur doit se déclarer comme tel au recrute
254 ivisionnaire Dénéréaz. — Ce n’est pas un progrès. Vous dites, la guerre est un mal. C’est ma conviction intime, à moi milita
255 ian Schaller. — On peut précisément s’étonner que vous ayez pu le tolérer si bien sans changer de mentalité. Bernard Béguin.
256 rce que la solidarité implique d’abord la survie. Vous ne pouvez pas être solidaire si vous courez le risque de l’anéantisse
257 d la survie. Vous ne pouvez pas être solidaire si vous courez le risque de l’anéantissement. Christian Schaller. — Parfaitem
21 1973, Journal de Genève, articles (1926–1982). « Denis de Rougemont, l’amour et l’Europe » (3-4 mars 1973)
258 st-il devenu l’une des préoccupations majeures de votre pensée ? Pourquoi j’ai écrit sur l’amour ? C’est la question posée le
259 e répondre : Dites-moi plutôt pourquoi et comment vous imaginez que j’aurais pu ne pas le faire, étant écrivain, et Européen
260 elles, dont l’exemple privilégié reste le couple. Votre livre Comme toi-même (ou Les Mythes de l’amour) s’inscrit dans le p
261 mier, toutefois il le rectifie. Comment expliquez- vous cette mutation ? Dans L’Amour et l’Occident je soulignais les contr
262 tant, il s’agit de la mort du couple. Que pensez- vous de ce phénomène qui met votre œuvre à l’ordre du jour ? La jeunesse,
263 u couple. Que pensez-vous de ce phénomène qui met votre œuvre à l’ordre du jour ? La jeunesse, dans son ensemble, ne me paraî
264 ille. Fasciné par la problématique de l’amour qui vous a permis de toucher aux phénomènes religieux, culturels et artistique
265 , culturels et artistiques de notre civilisation, vous avez parallèlement développé vos propres thèses sur l’Europe. Y a-t-i
266 e civilisation, vous avez parallèlement développé vos propres thèses sur l’Europe. Y a-t-il un lien entre ces deux pôles d’
267 n entre ces deux pôles d’attraction que sont pour vous l’amour d’une part, l’Europe d’autre part ? Mon titre vous répond :
268 our d’une part, l’Europe d’autre part ? Mon titre vous répond : L’Amour et l’Occident . On m’a reproché d’avoir passé trop
269 rce : le socialiste Henri de Man l’avait bien vu. Vous avez été, vous êtes un écrivain engagé. Comment continuez-vous à « fé
270 iste Henri de Man l’avait bien vu. Vous avez été, vous êtes un écrivain engagé. Comment continuez-vous à « fédérer les peupl
271 , vous êtes un écrivain engagé. Comment continuez- vous à « fédérer les peuples » depuis le Centre européen de la culture tel
272 » depuis le Centre européen de la culture tel que vous vouliez le faire à votre retour d’Amérique en Europe en 1946 ? Je sui
273 éen de la culture tel que vous vouliez le faire à votre retour d’Amérique en Europe en 1946 ? Je suis un écrivain engagé au s
274 est tourné vers la révolution à venir. Comment à votre avis celle-ci pourrait-elle s’opérer ? Peut-être ai-je répondu à cett
275 Y’a-t-il un rapport entre cette « révolution » et votre pamphlet de jeunesse, qu’on vient de rééditer, Les Méfaits de l’inst
276 stifient ses injustes sévérités et ceux-là seuls. Vous avez donc confiance dans cet avenir ? Nous n’avons pas à prédire l’av
22 1978, Journal de Genève, articles (1926–1982). Débat sur la voiture dans la société moderne (février 1978)
277 Hubert de Senarclens : Denis de Rougemont, dans votre livre, L’Avenir est notre affaire, vous décrivez une voiture née non
278 nt, dans votre livre, L’Avenir est notre affaire, vous décrivez une voiture née non pas d’une nécessité économique quelconqu
279 enry Ford, mécanicien têtu et sans culture, dites- vous , qui est parvenu à ses fins en créant dans ses usines des sortes de c
280 publicitaires de Ford, il est dit : « L’auto peut vous conduire n’importe où il vous plaira d’aller, pour vous reposer le ce
281 dit : « L’auto peut vous conduire n’importe où il vous plaira d’aller, pour vous reposer le cerveau par de longues promenade
282 onduire n’importe où il vous plaira d’aller, pour vous reposer le cerveau par de longues promenades au grand air et vous raf
283 cerveau par de longues promenades au grand air et vous rafraîchir les poumons grâce à ce tonique des toniques, une atmosphèr
284 e tonique des toniques, une atmosphère salubre. » Vous remarquerez l’humour noir, lorsque l’on pense à la pollution de nos v
285 ma part convaincu — et n’importe quel industriel vous le confirmera — que là où il n’y a pas de besoin, il n’y a pas de fab
286 e besoin d’utiliser la voiture, notamment lorsque vous habitez la campagne et que vous devez vous rendre en ville pour trava
287 notamment lorsque vous habitez la campagne et que vous devez vous rendre en ville pour travailler. Mais aussi sur le plan de
288 orsque vous habitez la campagne et que vous devez vous rendre en ville pour travailler. Mais aussi sur le plan des loisirs.
289 rs. Regardez l’affiche du Salon 78 : « La voiture vous rend indépendant. » Mais rien n’est plus faux. En auto, vous devez re
290 ndépendant. » Mais rien n’est plus faux. En auto, vous devez respecter des horaires au même titre que si vous preniez le tra
291 devez respecter des horaires au même titre que si vous preniez le train. Vous partez en vacance non pas le samedi matin, mai
292 aires au même titre que si vous preniez le train. Vous partez en vacance non pas le samedi matin, mais le vendredi soir pour
293 r éviter les embouteillages. Denis de Rougemont : Vous dites, M. Peyrot, là où il n’y pas de besoin, il n’y a pas de product
294 qu’aucun autre mode de transport ne peut donner. Vous sortez de chez vous, vous entrez dans votre voiture, vous arrivez au
295 de transport ne peut donner. Vous sortez de chez vous , vous entrez dans votre voiture, vous arrivez au point de destination
296 ansport ne peut donner. Vous sortez de chez vous, vous entrez dans votre voiture, vous arrivez au point de destination. C’es
297 onner. Vous sortez de chez vous, vous entrez dans votre voiture, vous arrivez au point de destination. C’est un instrument de
298 tez de chez vous, vous entrez dans votre voiture, vous arrivez au point de destination. C’est un instrument de travail qui p
299 ion. C’est un instrument de travail qui permet de vous rendre à votre bureau, un instrument de plaisir, de tourisme, de cult
300 instrument de travail qui permet de vous rendre à votre bureau, un instrument de plaisir, de tourisme, de culture même. Grâce
301 la peine à découvrir autrement, à pied ou à vélo. Vous demandez si la prolifération des autos n’en a pas réduit les avantage
302 iberté des peuples. C’est un point primordial. Si vous comparez le nombre de véhicules par habitant en Occident par rapport
303 % de la population en URSS, 50 % aux USA. Dès que vous créez la voiture, vous appelez la liberté. Le jour où 50 % des Soviét
304 RSS, 50 % aux USA. Dès que vous créez la voiture, vous appelez la liberté. Le jour où 50 % des Soviétiques pourront aussi se
305 mètres de leur lieu d’habitation. Jacob Roffler : Vous avez énuméré les avantages de la voiture qui soi-disant rendrait libr
306 de la voiture qui soi-disant rendrait libre. Mais vous savez très bien que lorsque vous prenez votre véhicule le matin pour
307 rait libre. Mais vous savez très bien que lorsque vous prenez votre véhicule le matin pour aller travailler, vous êtes conti
308 Mais vous savez très bien que lorsque vous prenez votre véhicule le matin pour aller travailler, vous êtes continuellement pr
309 ez votre véhicule le matin pour aller travailler, vous êtes continuellement pressés, stoppés aux feux, bloqués dans des file
310 c’est finalement bien davantage un « stress » que vous ressentez. Vous avez évoqué la culture. Je parlerais plutôt d’anti-cu
311 bien davantage un « stress » que vous ressentez. Vous avez évoqué la culture. Je parlerais plutôt d’anti-culture, car quoi
312 ait d’absence totale de prospective. J’ai omis de vous dire à propos de Ford qu’il avait douze ans, lorsqu’il a rencontré sa
313 ait à ses ouvriers : « achetez des voitures, cela vous rendra libres », en fait leur véhicule leur servait essentiellement à
314 de cette dernière, comme de n’importe quel objet, vous pouvez en faire une bonne ou une mauvaise utilisation. On vit dans un
315 l’économie occidentale dépend aujourd’hui. Pensez- vous qu’à l’origine on avait compté avec cela ? Est-ce qu’on aurait accept
316 me répondre : « Mais Monsieur de Rougemont, avez- vous une voiture ? ». C’est grotesque, c’est de l’enfantillage. III
317 tain équilibre entre les activités des individus. Vous avez fait allusion à la démocratisation des décisions de l’État. Je s
318 er la population à une prise de conscience. Comme vous le savez, chaque année, le nombre de voitures augmente ; donc il faut
319 Weber ne vise rien d’autre. J’ai peur que lorsque vous dites, M. Peyrot, que la démocratie dépend des corps constitués, vous
320 t, que la démocratie dépend des corps constitués, vous parliez d’oligarchie. Mais la démocratie part d’en bas, des communes.
321 de Rougemont : Je suis parfaitement d’accord avec vous . Seulement pour en revenir à l’initiative Weber, elle ne demande rien
322 à tous nos us et coutumes ! Denis de Rougemont : Vous savez bien pourquoi au départ il avait demandé cela. C’est pour oblig
323 négatifs de la voiture sur le visage des villes. Vous avez souvent écrit, M. de Rougemont, que l’automobile avait détruit l
324 ion abusive de la voiture. Déjà en 1968, rappelez- vous , la notion de « petite ceinture » a été introduite. Le Conseil d’État
325 re les transports en commun. Denis de Rougemont : Vous me rappelez ce que disait Alfred Sauvy dans son petit livre sur l’aut
326 enbühl à propos de l’urbanisme est juste. Dès que vous avez créé des zones d’habitation extérieures à la ville, vous avez mi
327 éé des zones d’habitation extérieures à la ville, vous avez mis en marche des mouvements pendulaires avec des gens qui vont
328 l aura laissée dans un de ces parkings, alors que vous avez de plus en plus aujourd’hui des centres commerciaux où l’on peut
329 te dans les pays en voie de développement. Là-bas vous assistez à un afflux des populations vers la ville, où se déroulent l
330 tivité des lieux de loisirs. L’homme est un tout. Vous n’avez qu’à constater les effets catastrophiques des cités-dortoirs o
331 problèmes psychologiques. Hubert de Senarclens : Vous avez fréquemment écrit Denis de Rougemont, que la voiture avait tué l
332 alité économique ? François Peyrot : En effet, si vous avez eu l’occasion de visiter une usine d’automobiles, vous aurez con
333 eu l’occasion de visiter une usine d’automobiles, vous aurez constaté qu’elle dépend d’un nombre considérable de sous-traita
334 a représente 80 000 emplois. C’est considérable ! Vous ne pouvez aujourd’hui brancher votre télévision sans entendre parler
335 onsidérable ! Vous ne pouvez aujourd’hui brancher votre télévision sans entendre parler d’emplois et de niveau de vie. La voi
336 me frappe, M. de Rougemont, dans la critique que vous faites du système en général c’est que vous insistez beaucoup sur l’o
337 e que vous faites du système en général c’est que vous insistez beaucoup sur l’objet — en l’occurrence la voiture — mais vou
338 p sur l’objet — en l’occurrence la voiture — mais vous insistez beaucoup moins sur le sujet. Jacob Roffler : Quatre mille pe
339 es chroniques, mais aussi des accidentés. Lorsque votre voiture va sortir de son usine, il ne faut pas oublier qu’elle risque
340 t à le bloquer. Écoutez la radio le week-end : on vous conseille d’éviter les autoroutes pour emprunter les parcours « Émera
341 recherches ont débuté il y a cinq ou dix ans. Je vous signale qu’un groupe d’ingénieurs de Lausanne a calculé que 900 tonne
342 les eaux de pluie avec les effets biologiques que vous devinez. Le reste par le vent. Or on sait — pour l’avoir testé sur de
343 t pas dangereuse. Mais le risque apparaît lorsque vous donnez aux hommes tels qu’ils sont — finalement assez dangereux et bê
344 modeste l’automobile. Car même en les baratinant, vous n’obtiendrez pas qu’ils restent « gentils ». Cela me rappelle ce que
345 du Conseil fédéral en la matière. Tout était, je vous l’assure, plutôt obscur. Jacob Roffler : Mais alors pourquoi le Conse
346 Denis de Rougemont : Je dois dire, M. Peyrot, que vous avez systématiquement, au cours de ce débat, minimisé les inconvénien
347 inconvénients de la voiture. François Peyrot : Et vous , ses avantages… an. Rougemont Denis de, « Débat sur la voiture da
23 1980, Journal de Genève, articles (1926–1982). Les journalistes sportifs ? On dirait qu’ils aiment les tyrans (31 mai-1er juin 1980)
348 gardiens de but. C’est tout de même étonnant. Si vous deviez définir le rôle du sport… Je crois que le sport doit être pour
349 s, des JO en particulier. Précisément, que pensez- vous des Jeux olympiques ? Je suis violemment opposé à tout ce qui exalte
350 primer les hymnes et les drapeaux serait-il selon vous suffisant pour sauver les JO ? Non. Il faut repartir sur un autre pie
24 1982, Journal de Genève, articles (1926–1982). Suis-je perdu pour la littérature ? (30 octobre 1982)
351 e romande, que tous les vingt ans en moyenne — je vous dirai qu’il me rassure au moins autant qu’il m’honore. Il distingue e
352 a littérature ? Tel est le doute qu’en me donnant votre Grand Prix vous tranchez en faveur de l’essai comme genre légitime de
353 el est le doute qu’en me donnant votre Grand Prix vous tranchez en faveur de l’essai comme genre légitime de la littérature.
354 essayiste et de l’engagement de l’écrivain que je vous proposerai quelques très brèves remarques. Depuis le xix e siècle rom
355 tion, et de présidences de comités : je n’ose pas vous dire combien depuis trente ans, plusieurs centaines, je le crains. D’
356 Je serais perdu pour la littérature… Le prix que vous me donnez aujourd’hui, non seulement réfute ces propos, mais me donne
357 de moi et en moi. Ce qui m’importe ici, c’est de vous faire entrevoir l’interaction de ces deux séries de motifs dans mon t