1 1950, Le Monde et Le Monde diplomatique (1950-1982). Pour un standard unique de la télévision (18 novembre 1950)
1 on sème l’anarchie dans l’un des domaines où elle serait le plus urgente. La télévision est déjà aux États-Unis, et deviendra
2 nes où elle serait le plus urgente. La télévision est déjà aux États-Unis, et deviendra bientôt en Europe, le plus formidab
3 S, un lignage de 625. Lorsque les capitaux auront été investis dans chacun de ces pays, tout espoir d’une télévision qui pu
4 ces pays, tout espoir d’une télévision qui puisse être diffusée dans toutes nos nations sera perdu, et cet instrument univer
5 qui puisse être diffusée dans toutes nos nations sera perdu, et cet instrument universel par définition se trouvera nationa
6 alisé à son tour. Nous ne prétendons décider quel est le meilleur standard. Mais nous affirmons qu’il faut absolument adopt
7 l’Europe. Tout investissement de capitaux devrait être suspendu, et une réunion d’experts convoquée immédiatement pour intro
2 1954, Le Monde et Le Monde diplomatique (1950-1982). Visite à M. Denis de Rougemont, directeur du Centre européen de la culture (septembre 1954)
8 fondé en octobre 1950 a son siège à Genève ; il n’ est rattaché à aucune institution internationale, ni à aucune instance go
9 à aucune instance gouvernementale. Son directeur est Denis de Rougemont, qui fonda avec Emmanuel Mounier le mouvement pers
10 naliste et la revue Esprit  ; Denis de Rougemont est également président du Congrès pour la liberté de la culture et l’aut
11 auteur de dix-sept ouvrages, dont les plus connus sont L’Amour et l’Occident , le Journal d’un intellectuel en chômage et
12 ini mieux que je ne saurais le faire : la culture est simplement ce qui rend la vie digne d’être vécue. Le centre a créé et
13 culture est simplement ce qui rend la vie digne d’ être vécue. Le centre a créé et créera encore des associations de producte
14 ntre ne fera pas double emploi avec l’Unesco, qui est une organisation mondiale et n’a pas spécialement de mission européen
15 ciation des instituts d’études européennes, qui a tenu son assemblée générale à Turin, le Bureau européen d’éducation popula
3 1969, Le Monde et Le Monde diplomatique (1950-1982). Une longue et vieille histoire (7 juin 1969)
16 un système de règles sociales : sans gênes, il n’ est pas de plaisirs. Pour aider quelques-uns à sortir d’une confusion trè
17 oulement ? Non, car la tentation correspondante n’ est pas sensible : la volupté ou la luxure ne figurent pas au nombre des
18 Christ dans le désert. On me dira que l’Église s’ est rattrapée ? Très tardivement, très partiellement, et la désinvolture
19 e social de la vie de l’espèce dans la famille, n’ est mentionné par personne. » C’est de l’absence, non de l’excès de rigue
20 un code de la sexualité dans le christianisme, qu’ est né le problème de l’érotisme en Occident. Et c’est la gnose qui lui a
21 algré le christianisme, et parfois contre lui, ce sont des influences gnostiques qui se trouvent avoir fomenté l’érotique oc
22 ux, des dates, des partisans et des ennemis, — il est certain que les spéculations sur l’amour sexuel et divin, constitutiv
23 et divin, constitutives de l’érotisme littéraire, sont le fait des gnostiques et non des scolastiques, des hérésies et non d
24 ssion rhétorique. Toutes les femmes qu’il célèbre sont mariées, deviennent objet d’adoration, et reçoivent le serment d’allé
25 e de la dame de ses pensées : « Par elle seule je serai sauvé ! » Tout cela — qui est d’abord occitan, arabe, celte et anglo-
26 Par elle seule je serai sauvé ! » Tout cela — qui est d’abord occitan, arabe, celte et anglo-saxon — va donner en français,
27 tout de la littérature, on peut dire que l’Astrée est la première version d’une érotique sentimentale dans la littérature f
28 que la sexualité en devient comme superflue, ce n’ est plus que « Vénus » dans les alexandrins. Une allusion, un regard, un
29 préciosité. Le xviiie dissocie l’érotique. Tout est sexe, et le mariage nul, dans les Liaisons et dans Faublas. Tout est
30 iage nul, dans les Liaisons et dans Faublas. Tout est sexe, et le sentiment nul, chez Sade, qui traduit cyniquement le syst
31 bélard, et rend au sentiment la primauté, mais il est Suisse et démocrate. Sur lui se fonde l’érotique protestante, mais ho
32 mariage en principe sur le seul sentiment (ce qui est absurde), en fait sur l’héritage (ce qui est souvent odieux), et tous
33 qui est absurde), en fait sur l’héritage (ce qui est souvent odieux), et tous les écrivains ignorent le sexe comme tel. Vo
34 mme tel. Voici enfin le tabou restauré ! Comme il est entendu qu’on ne doit parler ni de l’argent, ni de ces choses auxquel
35 rêve dont l’épanchement dans notre vie consciente est peut-être une obscure tentative de compenser la mécanisation de l’exi
36 abolition du complexe d’Œdipe. Et l’érotisme, qui était en somme une forme littéraire de la sexualité, tend à relever de plus
37 i, il a retrouvé sa problématique originelle, qui est religieuse (la gnose contre la raison), de même qu’Histoire d’O renou
38 s audiovisuels et tactiles, qu’en écriture. Il en sera sans doute ainsi jusqu’à ce qu’un jour se constitue une érotique fond
4 1971, Le Monde et Le Monde diplomatique (1950-1982). La poussée régionaliste en Europe occidentale (avril 1971)
39 ional. Que ces motifs, selon les cas ou les pays, soient de nature ethnique ou économique, linguistique ou géographique, tradi
40 ographique, traditionnelle ou prospective, ce qui est frappant, c’est qu’ils jouent tous dans le même sens. De leur ensembl
41 profondément Arnaud Dandieu, qui, sur ce point, a été vraiment un prophète, il faut garder les yeux fixés à la fois bien en
42 nie des « forces vives » de tous nos peuples. Ils sont unanimes à montrer que l’État-nation qui règne seul, depuis un siècle
43 sujets, par l’entremise des manuels scolaires, n’ est en fait qu’une forme politique récente et déjà inadéquate, à la fois
44 rimé L’État-nation qui se dit souverain absolu est manifestement trop petit pour jouer un rôle réel à l’échelle planétai
45 ie. Le seul remède aux trop petites dimensions ne serait -il pas la création d’agences fédérales européennes, qui seraient comp
46 la création d’agences fédérales européennes, qui seraient compétentes partout où les tâches et leur concertation se révéleraien
47 nier, qui a moins d’un siècle d’âge en moyenne, n’ est plus capable d’assurer la prospérité des provinces et d’y permettre u
48 t leur relief. Mais il y a plus : leur résurgence serait celle d’un chauvinisme local plus irrespirable que l’autre, si elle n
49 stato-national et dépasser ce modèle périmé. Tel est l’argument politique qui inspire l’action des fédéralistes. Leur visé
50 iophysique formulée plus haut. Mais le problème n’ est pas seulement spéculatif et prospectif ! Il est posé en vrac, en term
51 n’est pas seulement spéculatif et prospectif ! Il est posé en vrac, en termes concrets, mal comparables, voire contradictoi
52 milaires actuellement étouffés dans les pays de l’ Est européen. Presque partout, ces ethnies brimées déclarent souffrir d’u
53 lle-Maestricht-Liège, etc. Désormais, le problème est posé par les Six et par le Conseil de l’Europe de la constitution de
54 ïncider spatialement par quelque miracle qui ne s’ est jamais produit, et qui aurait encore moins de chance de survenir dans
55 our former une génération et créer les régions ne sont -ils pas trop longs, face à l’urgence des périls que court l’Europe —
56 pe — colonisation par une hégémonie politique à l’ Est , une hégémonie économique à l’Ouest ? f. Rougemont Denis de, « La
5 1971, Le Monde et Le Monde diplomatique (1950-1982). L’absence d’une « culture nationale », facteur du développement intellectuel (26-27 septembre 1971)
57 milieu du xixe siècle — selon laquelle l’Europe serait une addition de « cultures nationales » coïncidant comme par miracle
58 cette hypothèse. Le sociologue belge Léo Moulin s’ étant avisé de calculer « l’indice Nobel » d’une vingtaine de pays, c’est-à
59 les douze prix Nobel suisses de sciences, quatre sont d’origine étrangère. Contrastés et rapprochés Il m’a toujours se
60 ou imposée, et la très forte densité culturelle n’ étaient pas sans relations d’interaction, sinon même de cause à effet. Libres
61 oppent, d’autant plus contrastés en esprit qu’ils sont plus rapprochés dans l’espace. La vie culturelle suisse n’a pas d’aut
62 Au xviiie siècle, Zurich et Bâle, puis Genève, seront les sources de trois grands courants d’idées neuves en Europe, dans l
63 artistique de Londres au temps de William Blake) sont nées et se sont constituées dans le cercle du grand Bodmer. Bâle, dan
64 ondres au temps de William Blake) sont nées et se sont constituées dans le cercle du grand Bodmer. Bâle, dans le même temps,
65 ynastie des Saussure de Genève, durant un siècle, tiendra dans les sciences naturelles une place comparable à celle des Bernoui
66 ar Coppet, château de Necker où Germaine de Staël tient sa cour, que vont passer d’est en ouest les grands courants du romant
67 ermaine de Staël tient sa cour, que vont passer d’ est en ouest les grands courants du romantisme et du libéralisme politiqu
68 on jeune collègue et fervent disciple, Nietzsche, sera marquée par cet enseignement. Entre la « civilisation » et la « Ku
69 Mais je dois me réduire à l’essentiel : la Suisse est le pays des grandes « premières » alpestres mais aussi intellectuelle
70 ne éthique, une culture, dont la valeur suprême n’ est ni l’individu ni la nation, mais la personne librement reliée, l’auto
6 1971, Le Monde et Le Monde diplomatique (1950-1982). Paul Valéry et l’Europe (29 octobre 1971)
71 erle de la sphère, le cerveau d’un vaste corps », furent lieux communs des géographes français, de Moreri (1674) jusqu’à Schra
72 ure sur le globe que comme un appendice à l’Asie, est devenue la métropole du genre humain » (Mantelle et Brun, 1816). Lieu
73 d aux circonstances permanentes de cette vie. Ce sont les crises qui nous alertent. Celle de 14-18 venait de provoquer dans
74 relève dans les tôles tordues et ne sait pas s’il est encore vivant. Valéry nous parlait sans ménagements. Certes, réduire
75 s. Certes, réduire l’Europe à sa surface physique était bien fait pour angoisser, dans un monde où nous venions « étourdiment
76 les forces proportionnelles aux masses ». Mais qu’ était donc encore notre Europe « en puissance », déduction faite de nos ill
77 en puissance », déduction faite de nos illusions, soit vaniteuses ou masochistes ? Valéry constatait : « Tout est venu à l’E
78 euses ou masochistes ? Valéry constatait : « Tout est venu à l’Europe, et tout en est venu, ou presque. » Et ce n’était nul
79 nstatait : « Tout est venu à l’Europe, et tout en est venu, ou presque. » Et ce n’était nullement faire preuve d’orgueil ni
80 urope, et tout en est venu, ou presque. » Et ce n’ était nullement faire preuve d’orgueil ni encore moins d’impérialisme. C’ét
81 trois sources : Toute race et toute terre qui a été successivement romanisée, christianisée, et soumise, quant à l’esprit
82 ise, quant à l’esprit, à la discipline des Grecs, est absolument européenne. Définition célèbre, lacunaire et féconde. La
83 événement, mettre en figures, dont les propriétés soient énonçables en peu de mots, tout ce qui fascine son esprit. (L’éléganc
84 qui fascine son esprit. (L’élégance de son style est celle d’un théorème : absence d’ornements et réduction aux surprises
85 éduction aux surprises de la simplicité.) Si l’on tient « les trois sources » pour la définition d’un ensemble de caractères,
86 int d’objection : peu de contrées de l’Europe n’y seraient pas incluses. Mais on y a vu communément une définition générale et s
87 et nordique, celte ou germain, arabe ou slave, ne serait donc pas européen, ou de seconde zone ? Mais cela fait toute la poési
88 ysiologique, affectif et lyrique. Tout cela qui n’ était pas le fort de Valéry. Et tout cela explique peut-être son pessimisme
89 citées sur la mortalité des civilisations. Elles sont aux Ruines de Volney ce que les Pensées de Pasco sont aux Essais de M
90 aux Ruines de Volney ce que les Pensées de Pasco sont aux Essais de Montaigne : une série de raccourcis fulgurants, de cond
91 rtaine brièveté décisive. Lisons les Ruines : Où sont -ils, ces remparts de Ninive, ces murs de Babylone, ces palais de Pers
92 , cette terre ravagée ! J’ai visité ces lieux qui furent le théâtre de tant de splendeurs, et je n’ai vu qu’abandon et que sol
93 ns La Crise de l’Esprit : Elam, Ninive, Babylone étaient de beaux noms vagues, et la ruine totale de ces mondes avait aussi pe
94 istence même. Mais France, Angleterre, Russie… ce seraient aussi de beaux noms. Lusitania aussi est un beau nom. Et nous voyons
95 ce seraient aussi de beaux noms. Lusitania aussi est un beau nom. Et nous voyons maintenant que l’abîme de l’histoire est
96 nous voyons maintenant que l’abîme de l’histoire est assez grand pour tout le monde. Tout peut être perdu, songe Valéry —
97 re est assez grand pour tout le monde. Tout peut être perdu, songe Valéry — et tout l’est peut-être déjà — par la faute des
98 . Tout peut être perdu, songe Valéry — et tout l’ est peut-être déjà — par la faute des disputes périmées que nous prolonge
99 illeurs de plus en plus fictive — cette politique est aussi sotte que naïve : Il n’y aura rien eu de plus sot dans toute l
100 rale et rentable : L’Europe aspire visiblement à être gouvernée par une commission américaine. Toute sa politique s’y dirig
101 léry n’a peut-être pas envisagé que l’État-nation était notre malheur fondamental. Et il n’a pas vécu pour constater que nos
102 pour constater que nos Armagnacs et Bourguignons seraient un jour nos Byzantins de gauche et de droite communiant dans le culte
103 t gaullistes contre l’Europe intégrée.) Mais il a été le premier, et le seul écrivain français de premier rang, au xxe siè
104 l reste à souhaiter que l’interruption brusque ne soit pas seule capable de nous réveiller, car il serait trop tard. h.
105 soit pas seule capable de nous réveiller, car il serait trop tard. h. Rougemont Denis de, « Paul Valéry et l’Europe », Le
7 1972, Le Monde et Le Monde diplomatique (1950-1982). « Le respect du réel, c’est le revers du paradoxe » (14 décembre 1972)
106 d vers l’Italie, une vers l’Allemagne, une vers l’ est , une vers le Valais et le pays latin, disons la France. Comment et po
107 ême ? Mais je n’ai pas eu à choisir ! Le français est ma langue maternelle. Je me suis parfois moqué de l’accent de Neuchât
108 sir ! Le français est ma langue maternelle. Je me suis parfois moqué de l’accent de Neuchâtel. Mais enfin, c’est le français
109 de Reynold, pour ne pas parler des vivants, ce n’ est pas rien ! Plus modestement, entre 1830 et 1900, je compte septante-s
110 radition ? De fait, j’appartiens à une lignée qui est plus de robe que d’épée. L’origine de la famille est franc-comtoise,
111 plus de robe que d’épée. L’origine de la famille est franc-comtoise, et il y a dans cette province deux villages qui se no
112 nt des siècles ou, comme mon père, pasteurs, tels furent les Rougemont. Moi-même, je voulais devenir chimiste. J’avais transfo
113 enier de notre maison en laboratoire. Tout ce qui était germination me passionnait… Je fabriquais des plantes artificielles,
114 e ce goût et de ce laboratoire. Mais ce qui avait été passion devint devoir, et je le détestai aussitôt. D’où votre haine d
115 êmes termes. Ainsi, dès votre premier essai, vous étiez engagé… Je ne rêvais pourtant que de poésie et d’écriture. Mes modèle
116 que de poésie et d’écriture. Mes modèles d’alors étaient Valéry, Gide, les auteurs de la revue Commerce et de la NRF . C’étai
117 e et de la NRF . C’était d’eux que je souhaitais être digne. Plutôt pour le style, la rigueur formelle… Car pour le fond, m
118 a rigueur formelle… Car pour le fond, mes maîtres sont plus anciens et n’ont pas changé, Pascal et Rimbaud, pôles contraires
119 e qu’il me fallait vivre et penser. Tous ces noms sont français ; c’est pourtant vers les Allemagnes que vous partez, à ving
120 ître, et peut-être mon juge ironique. Si Goethe a été pour moi la mesure et s’il m’a convaincu de la valeur de l’action, à
121 r de mes jours depuis vingt-cinq ans, Kierkegaard est ma démesure, le signe de l’absolu, du peu de valeur de toute action,
122 de toute action, le rappel que « la subjectivité est la vérité ». J’ai fait une partie de mes études à Vienne, puis en Sou
123 oute. Le ton, peut-être. Le fond demeure ce qu’il était , car il s’est toujours agi pour moi d’une présence au monde et à moi-
124 ut-être. Le fond demeure ce qu’il était, car il s’ est toujours agi pour moi d’une présence au monde et à moi-même conjointe
125 présence au monde et à moi-même conjointement… Il est vrai que beaucoup de choses changeaient alors en très peu de temps. À
126 tions publié par la NRF en décembre 1932 : « Nous sommes une génération comblée. Comblée de chances de grandeur et comblée de
127 s de grandeur et comblée de risques mortels… Ce n’ est plus pour quelque idéal que nous avons à lutter maintenant, mais pour
128 les hommes vivent et demeurent des hommes… » Vous étiez engagé ! Je puis revendiquer la paternité du concept d’engagement, ma
129 t du clerc ». Mais, pour moi, l’écrivain engagé n’ est pas celui qui s’en remet à un parti quand il s’agit de prendre une po
130 xé sur l’Éternel et l’autre sur Jean Paulhan. » N’ est -ce pas assez juste, et pas seulement du Rougemont des années 1930, ma
131 dées ». En préparant cette nouvelle édition, j’ai été frappé de voir la continuité, d’autres diraient l’obstination, de ma
132 é aussi ce souci constant : qu’une pensée ne peut être juste que si sa forme la vérifie. Bref, j’écris n’importe quel texte,
133 pourtant des tendances divergentes. L’éclectisme est mal vu au temps des fanatiques, qui ont peut-être raison sur ce point
134 politique, à ce sens du fédéralisme dont mon pays est le produit, et auquel je demeure profondément attaché. La réalité est
135 uquel je demeure profondément attaché. La réalité est faite d’antinomies, dont il faut respecter chacun des termes en les m
136 e et de la communauté dans la cité. Le mariage est une vocation N’est-ce pas déjà ce qui s’annonce dans vos journaux,
137 dans la cité. Le mariage est une vocation N’ est -ce pas déjà ce qui s’annonce dans vos journaux, que vous avez recueil
138 e en soi, mais bien leurs rapports qui à mes yeux sont seuls vivants, réels, dignes d’intérêt. Ou si vous voulez, le vrai su
139 Ou si vous voulez, le vrai sujet de ma réflexion est l’époque, mais conçue comme le lieu de l’engagement personnel, le lie
140 olitique : L’Amour et l’Occident . Pour vous qui étiez si engagé dans une pensée politique et religieuse, comment se fait-il
141 er ! Le point de départ de ma réflexion aurait pu être cette maxime de La Rochefoucauld : « Combien d’hommes seraient amoure
142 e maxime de La Rochefoucauld : « Combien d’hommes seraient amoureux s’ils n’avaient jamais entendu parler d’amour ? » Il me paru
143 parut urgent de mettre en relation (de nouveau, n’ est -ce pas, une relation) l’amour et ses étymologies historiques et relig
144 mais que tout ne se manifeste pas, que l’histoire est l’histoire de manifestations successives… Il faut aussi se souvenir q
145 s… Il faut aussi se souvenir que mon historicisme est fondé en théologie. Le christianisme est une historicité. Christ a so
146 oricisme est fondé en théologie. Le christianisme est une historicité. Christ a souffert « sous Ponce Pilate ». J’ai vu l’a
147 u livre, et pour passer du sublime au trivial, ce fut une commande. À ce sujet, il y a une anecdote que je raconte dans le
148 tour à un jeune lieutenant-colonel dont le livre est , me dit-il, des plus urgents : La France et son armée, par Charles de
149 rmée, par Charles de Gaulle. Mais enfin, le livre fut écrit… En trois mois, dans une sorte de fièvre. Comme si tout, ma vie
150 qu’entre personnes. Et c’est pourquoi le mariage est une vocation. Si bien que votre livre est contre la passion… Pas du t
151 mariage est une vocation. Si bien que votre livre est contre la passion… Pas du tout ! Condamner la passion n’aurait pas de
152 ondamner la passion n’aurait pas de sens. Mais il est fou de vouloir fonder le mariage sur l’amour seul, car la passion est
153 onder le mariage sur l’amour seul, car la passion est née contre le mariage. C’est un paradoxe. Il en est d’autres. Votre p
154 t née contre le mariage. C’est un paradoxe. Il en est d’autres. Votre pensée si grave… C’est vous qui le dites ! N’oubliez
155 onnaître plus que le goût, le besoin du paradoxe. Est -ce pour le contraste, par souci esthétique, pour respirer un peu ou p
156 otre lecteur de respirer ? Nullement. Le paradoxe est essentiel. C’est le fondement même de ma démarche. L’homme est à la f
157 . C’est le fondement même de ma démarche. L’homme est à la fois libre et responsable : paradoxe ! Il ne devient lui-même qu
158 vrai qu’il correspond à un goût profond. Mais il est d’abord la condition de toutes les libertés, qui est le respect des a
159 d’abord la condition de toutes les libertés, qui est le respect des antinomies. Il est la légèreté de l’esprit et la tensi
160 s libertés, qui est le respect des antinomies. Il est la légèreté de l’esprit et la tension nécessaire à son action. Cho
161 e à son action. Choisir l’avenir… Avez-vous été amené à réviser votre livre eu égard à tous les changements qui sont
162 r votre livre eu égard à tous les changements qui sont intervenus dans nos mœurs et dans nos pensées depuis sa première publ
163 Révisé ? Non ! J’ai répondu aux critiques qui ont été formulées depuis trente ans. Parce que ce livre continue d’agir, d’êt
164 trente ans. Parce que ce livre continue d’agir, d’ être étudié, de provoquer des polémiques, il me paraissait nécessaire de l
165 e change et dans le domaine des mœurs l’évolution est même plus profonde qu’on ne le croit, mais elle va dans le sens que j
166 istes d’André Breton. Qui sait, peut-être n’ai-je été amené à tant m’intéresser au xiie siècle que parce que notre siècle
167 ou politique) ne peut venir que de l’avenir. Ce n’ est jamais une voix du passé. Dieu, qu’est-ce, sinon le futur éternel ? A
168 enir. Ce n’est jamais une voix du passé. Dieu, qu’ est -ce, sinon le futur éternel ? Avant toute chose, il faut considérer la
169 ment, il faut comprendre qu’une prévision passive est un non-sens. C’est folie que de vouloir prédire objectivement. Écouto
170 ectivement. Écoutons ce qui nous appelle. Nous ne sommes pas là pour prédire l’avenir, mais pour le faire ! Je disais naguère
171 ontraint de choisir librement son avenir. Et il y est contraint du seul fait qu’il en a, pour la première fois, la liberté.
172 nte : « Quatre ouvrages de Denis de Rougemont ont été réédités cette année, à quoi viennent s’ajouter quatre publications n
173 la vie publique, l’art et la politique. Par elle seront conciliés le philosophe, le publiciste, le poète, l’homme d’action en
174 e — source et théâtre de sa vocation. La relation est réciproque. La société n’a pour réalité et pour fin que les personnes
175 une organisation de l’État où l’un et les divers seront conciliés : le fédéralisme. Elle conduit son auteur à l’action. Denis
8 1972, Le Monde et Le Monde diplomatique (1950-1982). Descartes inversé ou le zen occidental (14 décembre 1972)
176 it au monde les champions de cet art ; et comme j’ étais alors une jeune recrue animée d’un extrême désir d’être promue au gra
177 lors une jeune recrue animée d’un extrême désir d’ être promue au grade de lieutenant, et d’acquérir de la sorte au plus tôt
178 garde du fusil. « Voyez, dit-il, comme vos doigts sont crispés. Rien d’étonnant si vous tirez trop bas. Vous arrachez… Voule
179 é en détresse : « C’est très simple, dit-il. Cela tient en trois mots : pensez au noir ! Ne pensez pas à votre main, ni à ce
180 it l’index qui a pris le cran d’arrêt. Quand vous serez assez concentré, laissez-vous simplement hypnotiser par ce petit disq
181 e suffisent pas pour atteindre le but, et peuvent être nuisibles dans la mesure exacte où ils absorbent l’attention, la déto
182 fin. 4) Si la fin ne justifie pas les moyens, qu’ est -ce qui les justifie ? Une autre fin, évidemment. C’est de la fin des
183 partir. 5) La fin seule justifie les moyens s’ils sont les vrais moyens d’une juste fin. Car nulle fin ne peut communiquer p
184 n justifier, si moraux, efficaces ou corrects que soient les moyens qu’on lui applique. Une fin toute juste justifie tout ce q
185 à partir des fins qui les dictent, selon qu’elles sont bonnes ou mauvaises, relativement à d’autres fins plus hautes, et dan
186 essairement ces fins. Car un moyen vu sans sa fin est insensé, et ne saurait donc être jugé mauvais ou bon. 1. Relevons i
187 en vu sans sa fin est insensé, et ne saurait donc être jugé mauvais ou bon. 1. Relevons ici la similitude étonnante des de
188 se déchirèrent ; justification par la foi (la foi étant ferme assurance, présence anticipée de la fin), et justification par
189 p. 21. l. Présenté par cette note : « Ces pages sont extraites du chapitre initial de la Morale du But, deuxième partie d’
9 1974, Le Monde et Le Monde diplomatique (1950-1982). La révolte des régions : l’État-nation contre l’Europe (mars 1974)
190 te de quatre mouvements régionalistes en France a été suivie de déclarations passionnées quoique officielles, non pas contr
191 l’Europe des régions — sans laquelle l’Europe ne sera pas, ni les régions. « L’expression ‟Europe des régions” non seulemen
192 tour M. Michel Debré. Ceux qui parlent de régions sont « des imbéciles ignorant l’histoire », « des inadaptés », « des gens
193 ythe européen, celui de l’Europe des régions, qui est une absurdité », déclare enfin M. Sanguinetti. Cet ilote ivre du nati
194 ber alles, pour prendre un autre exemple —, telle est la religion de l’État-nation, la seule qui exige encore des sacrifice
195 — et non pas du xixe siècle — hors duquel il ne serait , en effet, qu’« absurde » et « médiéval ». Il existe une raison majeu
196 siècle : éviter leur colonisation politique par l’ Est et leur colonisation économique par l’Ouest ; ou les deux ensemble. N
197 semble. Non que les Soviétiques et les Américains soient de mauvaises gens, mais la colonisation est une mauvaise chose. Non q
198 ns soient de mauvaises gens, mais la colonisation est une mauvaise chose. Non qu’ils soient pires que nous, mais la colonis
199 a colonisation est une mauvaise chose. Non qu’ils soient pires que nous, mais la colonisation est pire que tout. Il existe deu
200 u’ils soient pires que nous, mais la colonisation est pire que tout. Il existe deux raisons majeures de promouvoir les régi
201 , et les régions en fourniront le seul moyen ; Il est vital de rendre aux citoyens la possibilité de participer aux décisio
202 a vie civique de leurs régions, les États-nations sont condamnés par toute l’évolution du monde moderne. Le général de Gaull
203 tique et la Normandie avec les Anglais. De Gaulle était un homme d’État, ses successeurs ne sont que des hommes de l’État. L’
204 Gaulle était un homme d’État, ses successeurs ne sont que des hommes de l’État. L’Europe est inconcevable sans les régions.
205 sseurs ne sont que des hommes de l’État. L’Europe est inconcevable sans les régions. Tous les hommes politiques au pouvoir
206 ste ». Ceux qui l’ont crue possible sur ces bases sont morts sans l’avoir imposée : Schuman, Adenauer, De Gasperi. Si ces ho
207 ’ont rien pu faire, c’est vraiment que la formule est impossible. Ce n’est pas l’opinion populaire qui les a retenus. Tous
208 ’est vraiment que la formule est impossible. Ce n’ est pas l’opinion populaire qui les a retenus. Tous les sondages, réguliè
209 nnent 65,5 % en faveur de l’Europe unie. Et ce ne sont pas les difficultés économiques : elles seules ont contraint les État
210 tention à une souveraineté nationale absolue, qui serait incapable de se manifester par autre chose que par le refus périodiqu
211 comme la Bretagne, ou plus grand, comme l’Europe, est regardé comme un traître. Pourquoi cela ? C’est tout à fait arbitrair
212 alisation à tous autres égards quasi démentielle) est une formule anachronique au xxe siècle. Non seulement périmée, mais
213 ule fonction auxquelles toutes les autres doivent être subordonnées : fonction militaire dans le cas des États-nations, ling
214 es » dont s’occupe la CEE. Si la région ne devait être qu’un mini-État-nation, elle aggraverait encore cette néfaste formule
215 elle aggraverait encore cette néfaste formule, ne fût -ce qu’en multipliant ses points d’application. J’imagine, au contrair
216 au contraire, des régions fonctionnelles, et qui soient définies par un problème précis d’écologie, ou de transports, ou d’én
217 en une centaine d’États-nations en réduction, je serais contre, intégralement. Les régions ne seront pas de petits États-nati
218 , je serais contre, intégralement. Les régions ne seront pas de petits États-nations, ajoutant à l’absurdité de frontières com
219 és hétéroclites la médiocrité de l’horizon. Elles seront ouvertes les unes aux autres, et leur objectif général sera de nouer
220 tes les unes aux autres, et leur objectif général sera de nouer des liens, de créer un tissu de relations humaines. Allons a
221 France, et en URSS comme dans le canton de Berne, est née des seuls excès de centralisme. Elle traduit le sentiment de culp
222 La révolte des ethnies montre que leurs problèmes sont insolubles dans le cadre stato-national, et qu’ils appellent la fédér
223 n pardonne leur nationalisme souvent borné : il n’ est dangereux que pour elles seules, alors que le stato-nationalisme est
224 our elles seules, alors que le stato-nationalisme est dangereux pour le genre humain, pour la nature, pour la vie même sur
225 . Le réveil régionaliste et fédéraliste en Europe est un mouvement puissant, profond et prometteur, dont il semble bien que
226 éer en Occident le sens de la communauté, qu’elle soit de production ou d’usage, de langage, de recherche, de travail ou de
10 1974, Le Monde et Le Monde diplomatique (1950-1982). Robert Aron : le témoin d’une génération passionnée (9 mars 1974)
227 ces années décisives, où les ombres montaient à l’ est , démesurées, devant nos démocraties inconscientes et désuètes. Nous f
228 larges cernes, et sa distraction proverbiale — il était , disait-il, le seul officier français qui eût réussi avec son propre
229 e, et beaucoup de présence d’esprit politique. Il était , dans notre groupe, le complément parfait d’Arnaud Dandieu, avec lequ
230 sonnaliste dans sa tendance la plus radicale, qui était le groupe de l’Ordre nouveau. Soit dit en passant, c’était à peu près
231 radicale, qui était le groupe de l’Ordre nouveau. Soit dit en passant, c’était à peu près le contraire de la ligue d’extrême
232 raît d’une merveilleuse justesse. Mon seul regret est que ces deux amis n’aient pu siéger ensemble pour témoigner de la dur
11 1979, Le Monde et Le Monde diplomatique (1950-1982). Avez-vous lu Jérôme Deshusses ? (16 mars 1979)
233 les racines expliquent moins la fleur qu’elles ne sont impliquées par elle, la fin d’une phrase justifie seule son commencem
234 justifie seule son commencement, et toute arrivée est à la fois motif de départ et moteur de parcours… Tout se définit par
235 ainsi posé dès les premières phrases de l’ouvrage sera , sans relâche, explicité jusqu’à la dernière ligne : « Le passé se dé
236 a raison très simple que n’importe quel événement est présent avant d’être passé » et que « la direction du temps n’est poi
237 que n’importe quel événement est présent avant d’ être passé » et que « la direction du temps n’est point passé-présent-futu
238 t d’être passé » et que « la direction du temps n’ est point passé-présent-futur, mais l’inverse : passible-passant-passé ».
239 ssible-passant-passé ». Que les causes du présent soient dans le passé, comme le croit le sens commun et le suppose la science
240 ose la science, reviendrait à dire qu’« un bateau est propulsé par son sillage, ou, en termes plus clairs, que ce qui n’est
241 sillage, ou, en termes plus clairs, que ce qui n’ est plus produit ce qui est ». En vérité, toutes les vraies causes sont c
242 plus clairs, que ce qui n’est plus produit ce qui est  ». En vérité, toutes les vraies causes sont causes finales. Seul le p
243 ce qui est ». En vérité, toutes les vraies causes sont causes finales. Seul le présent produit du passé, non l’inverse. Mais
244 ésent produit du passé, non l’inverse. Mais qu’en est -il du présent de ce siècle ? Jérôme Deshusses le voit comme la Géhenn
245 donne une description dont il dit bien qu’elle n’ est pas la première — car « le dessein de faire pièce à des calamités obl
246 à répéter ce qu’elles ressassent », — mais que je tiens pour la plus signifiante, donc la plus terrifiante à ce jour. L’Eur
247 ’Europe des nations piétine, mais celle des virus est faite. ») Le plancton des océans, attaqué par le dégazage en mer des
248 iquenaude. » Huit habitants de la planète sur dix sont sous-alimentés, les deux autres mangent deux fois trop. On prévoit qu
249  ». Natura signifie ce qui doit naître. La nature est toujours en avant, vers l’avenir. « L’environnement et la nature, c’e
250 t la nature, c’est d’abord nous : du premier nous sommes le centre, et de la seconde nous représentons la pointe. » Figure de
251 nitif, au plus profond de la matière ». Nous nous sommes mis dans la situation de ne pouvoir plus échapper à la destruction nu
252 défi. « C’est la vie entière, cette fois, qui en est à tout risquer. Il faut donc que ce soit pour tout avoir… Ou bien la
253 s, qui en est à tout risquer. Il faut donc que ce soit pour tout avoir… Ou bien la terre n’est plus vouée qu’à la mort, ou b
254 c que ce soit pour tout avoir… Ou bien la terre n’ est plus vouée qu’à la mort, ou bien l’ère de la connaissance s’ouvrira a
255 a logique du mensonge qui nous a conduits où nous sommes  : la Foire d’empoigne, et c’est l’économie fondée sur la compétition 
256 le de base, ce « chassé-croisé de mensonges » qui serait (selon l’auteur) le couple, d’où la famille, d’où l’inégalité au dépa
257 es philosophiques, tout en ressentant l’absence — est -elle voulue ? — d’une Politique qui montrerait quelques moyens de rép
258 toute cette entreprise démesurée, qui pourrait n’ être qu’une nietzschéenne « philosophie à coups de marteau » est un appel
259 nietzschéenne « philosophie à coups de marteau » est un appel à délivrer Prométhée. L’Audacieux Souffrant préfigure l’huma
260 teur nouveau — moins de quarante ans, j’imagine — est de gauche ou de droite. Il condamne la propriété, exige l’égalité tot
261 ir un petit hebdo contestataire de son pays — qui est aussi le mien —, voici, loin de toutes modes, un vrai « penseur de fo
262 de toutes modes, un vrai « penseur de fond ». Il était temps. o. Rougemont Denis de, « Avez-vous lu Jérôme Deshusses ? »
12 1979, Le Monde et Le Monde diplomatique (1950-1982). Le fédéralisme helvétique dans l’Europe d’aujourd’hui (24-25 juin 1979)
263 irateurs de Colbert, des jacobins et de Napoléon, est peut-être une tâche impossible dès le principe. Essayons cependant, p
264 sayons cependant, pour voir. La fédération suisse est née au xiiie siècle d’un pacte (fœdus, d’où fœderatio) conclu entre
265 Garder libre le col pour toute l’Europe, telle est la mission initiale et fondatrice des vallées, qui reçoivent à cette
266 nent. À cette garantie, symbolique elle aussi, il est donc nécessaire d’ajouter l’assurance très concrète d’un pacte de déf
267 erres civiles, jusqu’en 1848), et, avant tout, on est jaloux de préserver ses traditions particulières, ses modes de vie so
268 commune. » L’article 3 précise que « les cantons sont souverains, en tant que leur souveraineté n’est pas limitée par la Co
269 sont souverains, en tant que leur souveraineté n’ est pas limitée par la Constitution fédérale », et qu’ils exercent « tous
270 le », et qu’ils exercent « tous les droits qui ne sont pas délégués au pouvoir fédéral ». Moyennant quoi l’article 5 — que j
271 mites posées à la souveraineté des cantons, elles sont définies par l’article 8 : « La Confédération a seule le droit de déc
272 ommerce. » L’autorité suprême de la Confédération sera exercée par l’Assemblée fédérale, qui se composera de deux chambres :
273 de deux députés par canton. L’autorité exécutive est exercée par un conseil fédéral composé de sept membres, élus par l’As
274 s ministres ne représentent pas les cantons et ne sont pas renversés par les chambres. Si tel projet de loi qu’ils présenten
275 hambres. Si tel projet de loi qu’ils présentent n’ est pas accepté, ils le retirent sans se retirer eux-mêmes. Les droits d’
276 ant en matière constitutionnelle que législative, sont exercés par le peuple dès qu’un nombre suffisant de citoyens en font
277 préoccupation déterminante de cette Constitution est de toute évidence la sauvegarde des autonomies cantonales, fût-ce au
278 évidence la sauvegarde des autonomies cantonales, fût -ce au prix de la délégation à un pouvoir fédéral de ceux des attribut
279 es moyens de défendre le tout, nulle partie n’eût été en mesure d’assurer son indépendance. Les cantons alémaniques eussent
280 son indépendance. Les cantons alémaniques eussent été revendiqués par le Deutschtum, le Tessin par l’Italianita. Quant à la
281 e du Moniteur. On a trop dit que l’union fédérale est une union dans la diversité comme s’il s’agissait là d’une prouesse p
282 que les nations étatisées de l’Europe actuelle ne soient traitées comme le furent les « nations » primitives de la France, de
283 de l’Europe actuelle ne soient traitées comme le furent les « nations » primitives de la France, de la Grande-Bretagne et, da
284 an formulait naguère à propos des USA, mais qu’il est facile de transposer en termes européens : « Ne confiez jamais à une
285 onfiez jamais à une plus grande unité ce qui peut être fait par une plus petite. Ce que la famille peut faire, la municipali
286 e gouvernement fédéral ne doit pas le faire. » Il est normal qu’à mesure qu’augmentent les dimensions des tâches — transpor
287 unauté la mieux équipée pour la mener à bien. Tel étant le fédéralisme, selon la pratique six fois séculaire des Suisses, que
288 pratique six fois séculaire des Suisses, quelles sont ses chances dans le monde de demain ? La réponse me paraît implicite
289 communisme, reconnaissons que « le fédéralisme n’ est plus possible dans un seul pays ». Ou bien la formule suisse va s’éte
290 e échelle. Un dernier mot. De grandes disputes se sont élevées en France sur le dilemme « fédération ou confédération ». La
291 ni de temps. Enfin quelque chose de grand, et qui serait en même temps raisonnable ! Fédéral ou confédéral, le modèle suisse f
13 1982, Le Monde et Le Monde diplomatique (1950-1982). L’amour, les régions et l’Occident (20 août 1982)
292 s régions et l’Occident (20 août 1982)q r Quel est le principe qui rassemble les divers aspects de votre personnalité ?
293 ité ? Disons que c’est une idée de l’homme, qui s’ est constituée dans ma jeunesse, entre 20 et 25 ans : l’homme considéré e
294 Quant à L’Amour et l’Occident , paru en 1939, il est né de la rencontre dramatique de l’engagement et de la passion. Deux
295 Genève, le Centre européen de la culture, dont je suis le président, puis l’Institut universitaire d’études européennes, où
296 t nos doctrines personnalistes des années 1930. N’ est -ce pas parce que vous êtes suisse que vous êtes fédéraliste ? Quand j
297 stes des années 1930. N’est-ce pas parce que vous êtes suisse que vous êtes fédéraliste ? Quand je suis arrivé à Paris, à 25
298 N’est-ce pas parce que vous êtes suisse que vous êtes fédéraliste ? Quand je suis arrivé à Paris, à 25 ans, la Suisse ne me
299 êtes suisse que vous êtes fédéraliste ? Quand je suis arrivé à Paris, à 25 ans, la Suisse ne me préoccupait guère, je ne pe
300 e ne pensais qu’à la littérature. Mais quand j’ai été mobilisé en 1939, comme officier, j’ai découvert que mon pays était l
301 1939, comme officier, j’ai découvert que mon pays était la meilleure approximation, ou la moins mauvaise, ou peut-être même l
302 uin 1940 sur l’entrée de Hitler à Paris, et qui a été considéré comme « insulte à chef d’État étranger », donc mettant en d
303 danger la sécurité de la Suisse. Cette accusation était la plus grave possible en temps de guerre. Je m’en suis tiré avec une
304 a plus grave possible en temps de guerre. Je m’en suis tiré avec une condamnation à quinze jours de forteresse, mais, après
305 cles autrement que par trois étoiles. Mon article est paru le 17 juin 1940, j’ose dire que j’ai devancé de Gaulle d’une jou
306 tation stupéfiante de cet homme et de cette ville était peut-être nécessaire pour faire comprendre au monde entier qu’il est
307 saire pour faire comprendre au monde entier qu’il est des victoires impossibles. On ne conquiert pas avec des chars les don
308 me ni les raisons de vivre dont on manque ». J’ai été l’un des initiateurs à ce moment-là, d’un mouvement de résistance à t
309 faire de moi un pronazi — il s’imagine que Hitler était un homme de droite — à coups de textes falsifiés, alors que j’ai été
310 ite — à coups de textes falsifiés, alors que j’ai été l’un des premiers à dénoncer le national-socialisme dans tous mes liv
311 e puis accepter que des jeunes gens d’aujourd’hui soient trompés à ce point sur mon compte par des « calomniateurs ignares »,
312 omme responsable dans une communauté Quels ont été les rapports entre le personnalisme et l’existentialisme ? L’existent
313 tateurs, le succès de Sartre dans le grand public serait dû à des formules comme : « L’engagement de l’écrivain » et « l’homme
314 e l’Europe à La Haye, et jusqu’à nos jours. Et ce sont eux qui ont suscité un peu partout la renaissance de l’idée régionali
315 ropre : personne égale individu plus vocation. Qu’ est -ce qu’une vocation ? C’est l’appel à inventer chacun pour soi son che
316 e but ultime de tous les hommes. Un sentier qui n’ est pas tracé et que chacun doit inventer en y marchant. « Ma parole est
317 e chacun doit inventer en y marchant. « Ma parole est une lampe à mes pieds, une lumière sur mon sentier », dit le psaume.
318 e réaliser que dans l’action, mais que l’action n’ est efficace qu’à l’échelle d’une petite communauté, où la voix d’un cito
319 annoncé son programme de décentralisation ? Je me suis dit : enfin ! la France elle-même y vient ! Bien moins par conviction
320 ! Bien moins par conviction que par nécessité, il est important de le marquer. Peut-être qu’elle y viendra vraiment, puisqu
321 les deux ministres chargés de la régionalisation sont protestants, Defferre et Rocard. Vous voyez un rapport entre protesta
322 main. Chez les protestants, c’est la paroisse qui est l’unité de base. L’Église est concrètement une fédération de paroisse
323 est la paroisse qui est l’unité de base. L’Église est concrètement une fédération de paroisses. Le calvinisme a toujours ét
324 fédération de paroisses. Le calvinisme a toujours été régionaliste. N’oubliez pas que les cal­vinistes, qui tenaient la moi
325 onaliste. N’oubliez pas que les cal­vinistes, qui tenaient la moitié sud de la France vers la fin du xvie siècle, sous la direc
326 princes du sang et de maréchaux protestants, ont été bien près de créer une république fédérale du Midi. Le mot huguenot n
327 ne république fédérale du Midi. Le mot huguenot n’ est vraisemblablement qu’une déformation du mot allemand Eidgenossen, qui
328 tennat, c’est un terme dont les personnalistes se sont toujours méfiés, car il suppose que c’est encore au centre qu’apparti
329 à-dire d’en bas. Le sénateur David Moynihan, qui fut le représentant des États-Unis à l’ONU, l’a exprimé avec une simplici
330 onfiez jamais à une plus grande unité ce qui peut être fait par une plus petite. Ce que la famille peut faire, la municipali
331 éral ne doit pas le faire. » Chaque problème doit être traité et résolu à son échelle, c’est tout le secret du système fédér
332 ’est tout le secret du système fédéraliste que je tiens pour seul capable de résoudre au concret les grands problèmes générat
333 Depuis les jacobins et Napoléon, le mot d’ordre a été de tout centraliser. Nos États-nations renfermés dans le carcan de le
334 ises de conscience Pour beaucoup de gens, vous êtes avant tout et malgré tout le reste, l’auteur de L’Amour et l’Occiden
335 rnière guerre : ils prennent conscience de ce que sont la passion et le mariage, et de leur antinomie. Et cette lecture peut
336 les tabous identifiés dans Les Mythes de l’amour soient encore vivants en 1932 ? Les obstacles à la passion, ou ses excitants
337 2 ? Les obstacles à la passion, ou ses excitants, sont -ils les mêmes ? Les tabous ne sont pas des modes. L’inceste a été con
338 ses excitants, sont-ils les mêmes ? Les tabous ne sont pas des modes. L’inceste a été condamné par toutes les civilisations.
339 s ? Les tabous ne sont pas des modes. L’inceste a été condamné par toutes les civilisations. Le complexe d’Œdipe n’a pas ch
340 ’a pas changé que je sache depuis Freud. Ce qui n’ est peut-être qu’une mode, ou en tout cas un phénomène culturel, donc sus
341 s long terme, c’est la permissivité actuelle, qui est à bien des égards un retour aux pratiques d’avant l’ère victorienne,
342 e époque ? Pour l’inconscient, par définition, il est impossible de vous répondre, du moins tout de suite. Aujourd’hui, san
343 contre Hitler : l’auto et le national-socialisme sont ce que j’ai appelé les deux « histoires de fous » du xxe siècle, et
344 s régions tellement d’actualité aujourd’hui —, je suis absolument certain de n’avoir pas perdu mon temps, comme écrivain, c’
345 est-à-dire comme fauteur de prises de conscience. Êtes -vous pessimiste ou optimiste ? Si je vous réponds que «  l’avenir est
346 ou optimiste ? Si je vous réponds que «  l’avenir est notre affaire  », me trouverez-vous pessimiste ou optimiste ? En fin
347 iècles de notre civilisation celui où les gens se sont sentis les plus impuissants non seulement devant le destin mais devan
348 est nous les hommes qui les avons créés ! Nous en sommes les seuls responsables, donc seuls libres de les changer ! Ça ne tien
349 nsables, donc seuls libres de les changer ! Ça ne tient qu’à nous ! Mais nous ne voulons pas y croire, nous avons une peur bl
350 voulons pas y croire, nous avons une peur bleue d’ être libres, parce qu’être libre cela veut dire prendre ses responsabilité
351 nous avons une peur bleue d’être libres, parce qu’ être libre cela veut dire prendre ses responsabilités. Depuis Penser avec
352 e la pensée et du penseur, je répète que l’avenir est l’affaire de chacun de nous, ici et maintenant. Mais le fait est que
353 e chacun de nous, ici et maintenant. Mais le fait est que mes contemporains ont plus peur qu’envie d’être libres. Pourtant,
354 st que mes contemporains ont plus peur qu’envie d’ être libres. Pourtant, quand on m’aura démontré que mes efforts resteront
355 e et peut-être à mon salut. Et merci Dieu si ce n’ est pas seulement au mien. 2. Rien à voir avec le groupuscule fascisan
356 ar le chapeau suivant : « Denis de Rougemont, qui est suisse, vit près de la frontière franco-genevoise, mais du côté franç
357 il déroute toujours autant le public, pour qui il est tantôt le théoricien de l’amour-passion, tantôt le militant d’une Eur