1
s urgente. La télévision est déjà aux États-Unis,
et
deviendra bientôt en Europe, le plus formidable (au sens propre) inst
2
le (au sens propre) instrument d’action affective
et
intellectuelle, artistique, sociale, psychologique et politique dont
3
ntellectuelle, artistique, sociale, psychologique
et
politique dont on ait jamais disposé. Cet instrument peut unir les pe
4
e standard de 405 ; la France, un lignage de 819,
et
la plupart des autres nations, y compris l’URSS, un lignage de 625. L
5
être diffusée dans toutes nos nations sera perdu,
et
cet instrument universel par définition se trouvera nationalisé à son
6
investissement de capitaux devrait être suspendu,
et
une réunion d’experts convoquée immédiatement pour introduire un peu
7
avec Emmanuel Mounier le mouvement personnaliste
et
la revue Esprit ; Denis de Rougemont est également président du Con
8
résident du Congrès pour la liberté de la culture
et
l’auteur de dix-sept ouvrages, dont les plus connus sont L’Amour et
9
sept ouvrages, dont les plus connus sont L’Amour
et
l’Occident , le Journal d’un intellectuel en chômage et Lettres su
10
ident , le Journal d’un intellectuel en chômage
et
Lettres sur la bombe atomique . Interrogé sur le sens qu’il attache
11
rend la vie digne d’être vécue. Le centre a créé
et
créera encore des associations de producteurs et de distributeurs dan
12
et créera encore des associations de producteurs
et
de distributeurs dans les domaines où cela se révèle utile et nécessa
13
buteurs dans les domaines où cela se révèle utile
et
nécessaire : sciences, musique, presse, histoire, enseignement, etc.
14
encourageons également les relations culturelles
et
les échanges intraeuropéens. Pourtant l’Unesco couvre ces domaines et
15
aeuropéens. Pourtant l’Unesco couvre ces domaines
et
vous parlez de nécessité… En voulant rester européen, notre Centre ne
16
avec l’Unesco, qui est une organisation mondiale
et
n’a pas spécialement de mission européenne. L’Unesco n’a pour but ni
17
lement à créer une conscience commune de l’Europe
et
de sa situation actuelle dans le monde. On peut appeler cela politiqu
18
ence internationale des compositeurs, interprètes
et
critiques, qui s’est tenue à Rome et a traité de la musique du xxe s
19
interprètes et critiques, qui s’est tenue à Rome
et
a traité de la musique du xxe siècle, et un Prix de littérature euro
20
à Rome et a traité de la musique du xxe siècle,
et
un Prix de littérature européenne. c. Rougemont Denis de, « Visite
21
Une longue
et
vieille histoire (7 juin 1969)d e On appelle la jeunesse à se libé
22
e à se libérer de toute espèce de tabous sexuels,
et
d’abord des tabous chrétiens. L’ennui, c’est que l’Évangile ne connaî
23
i, c’est que l’Évangile ne connaît pas de tabous,
et
que tout érotisme suppose un système de règles sociales : sans gênes,
24
joue qu’un rôle quelconque, à peu près invisible
et
sans drame. (Paroles de Jésus à une prostituée, ou à la femme de cinq
25
ne prostituée, ou à la femme de cinq maris : paix
et
pardon à cause de l’amour.) S’agirait-il d’un refoulement ? Non, car
26
rattrapée ? Très tardivement, très partiellement,
et
la désinvolture des papes de la Renaissance ou des évêques du xviiie
27
lais pour leurs maîtresses — agrémentés de farces
et
attrapes, comme à Salzbourg — contraste avec l’extrême sévérité que l
28
Les traités des Pères de l’Église sur le mariage
et
sur le sexe « rappellent des dissertations sur l’élevage », écrit Ber
29
ns sur l’élevage », écrit Berdiaev. « La destinée
et
l’amour personnels y font totalement défaut. Le phénomène de l’amour,
30
énomène physiologique de la satisfaction sexuelle
et
du phénomène social de la vie de l’espèce dans la famille, n’est ment
31
qu’est né le problème de l’érotisme en Occident.
Et
c’est la gnose qui lui a donné sa forme au xiie siècle. Malgré le ch
32
a forme au xiie siècle. Malgré le christianisme,
et
parfois contre lui, ce sont des influences gnostiques qui se trouvent
33
se trouvent avoir fomenté l’érotique occidentale
et
qui lui ont proposé des moyens d’expression, cependant que les mythes
34
des moyens d’expression, cependant que les mythes
et
les tabous païens (égyptiens, syriaques, helléniques) ne cessaient d’
35
lien quelconque entre la cortezia des troubadours
et
le catharisme — en dépit de la coïncidence des lieux, des dates, des
36
a coïncidence des lieux, des dates, des partisans
et
des ennemis, — il est certain que les spéculations sur l’amour sexuel
37
t certain que les spéculations sur l’amour sexuel
et
divin, constitutives de l’érotisme littéraire, sont le fait des gnost
38
’érotisme littéraire, sont le fait des gnostiques
et
non des scolastiques, des hérésies et non de l’orthodoxie, des poètes
39
gnostiques et non des scolastiques, des hérésies
et
non de l’orthodoxie, des poètes et des mystiques plutôt que des bons
40
, des hérésies et non de l’orthodoxie, des poètes
et
des mystiques plutôt que des bons moines ou des conteurs gaulois. L’a
41
ît au xiie siècle dans les romans anglo-normands
et
les chansons des troubadours comme dans le cœur d’Héloïse et l’esprit
42
sons des troubadours comme dans le cœur d’Héloïse
et
l’esprit d’Abélard, s’adresse à l’ange dans l’âme et à l’âme dans le
43
l’esprit d’Abélard, s’adresse à l’ange dans l’âme
et
à l’âme dans le corps. Il refuse toute facilité, cherche l’obstacle à
44
é, cherche l’obstacle à surmonter — social, moral
et
spirituel, — veut tous les raffinements du désir par l’ascèse et les
45
veut tous les raffinements du désir par l’ascèse
et
les exaltations du sentiment par son expression rhétorique. Toutes le
46
lèbre sont mariées, deviennent objet d’adoration,
et
reçoivent le serment d’allégeance dû au Seigneur. Dans le même temps,
47
mmaculée Conception de Notre-Dame à Lyon en 1140)
et
reçoit le titre de Regina Cœli. Cependant que la dame ou reine devien
48
reine devient la pièce maîtresse du jeu d’échecs,
et
que le premier troubadour ose écrire de la dame de ses pensées : « Pa
49
Tout cela — qui est d’abord occitan, arabe, celte
et
anglo-saxon — va donner en français, par Béroul et Chrétien, le modèl
50
t anglo-saxon — va donner en français, par Béroul
et
Chrétien, le modèle du roman d’amour mortel, théologico-poétique, thè
51
é, au service du plaisir raffiné, des beaux-arts,
et
surtout de la littérature, on peut dire que l’Astrée est la première
52
ndrins. Une allusion, un regard, un air, un rien,
et
flambe la passion. Conventions et signes suffisent. Les jeux de la co
53
n air, un rien, et flambe la passion. Conventions
et
signes suffisent. Les jeux de la cour ont remplacé les cours d’amour,
54
s jeux de la cour ont remplacé les cours d’amour,
et
la morale ou casuistique post-tridentine la courtoisie, exténuée en p
55
é. Le xviiie dissocie l’érotique. Tout est sexe,
et
le mariage nul, dans les Liaisons et dans Faublas. Tout est sexe, et
56
ut est sexe, et le mariage nul, dans les Liaisons
et
dans Faublas. Tout est sexe, et le sentiment nul, chez Sade, qui trad
57
dans les Liaisons et dans Faublas. Tout est sexe,
et
le sentiment nul, chez Sade, qui traduit cyniquement le système des v
58
solu, droit de la force, c’est-à-dire du prestige
et
de la richesse autant que de l’épée. Don Juan a remplacé Tristan. Seu
59
nspire de l’Astrée, de Pétrarque, des troubadours
et
d’Abélard, et rend au sentiment la primauté, mais il est Suisse et dé
60
trée, de Pétrarque, des troubadours et d’Abélard,
et
rend au sentiment la primauté, mais il est Suisse et démocrate. Sur l
61
rend au sentiment la primauté, mais il est Suisse
et
démocrate. Sur lui se fonde l’érotique protestante, mais hors de Fran
62
estante, mais hors de France : Goethe, Richardson
et
Laurence Sterne dans la première génération de ses disciples, les rom
63
ples, les romantiques allemands dans la deuxième,
et
les grands romanciers victoriens dans la troisième : retour en force
64
e la passion mortelle avec Les Hauts de Hurlevent
et
, plus tard, Tess d’Urberville. À la faveur de ces excès contraires, l
65
fait sur l’héritage (ce qui est souvent odieux),
et
tous les écrivains ignorent le sexe comme tel. Voici enfin le tabou r
66
auxquelles pensent parfois les jeunes gens, Marx
et
Freud, au tournant du siècle, apparaîtront comme des libérateurs : le
67
ne manière nouvelle de parler des choses du sexe.
Et
il a montré les relations profondes de l’érotisme avec le rêve — ce r
68
avec les enragés l’abolition du complexe d’Œdipe.
Et
l’érotisme, qui était en somme une forme littéraire de la sexualité,
69
sciences humaines. Certes, avec Georges Bataille
et
Pierre Klossowski, il a retrouvé sa problématique originelle, qui est
70
e même qu’Histoire d’O renouait avec une imagerie
et
des poncifs sadiques, mais tout cela se trouve curieusement transposé
71
depuis la fin du siècle dernier. (Voir Nietzsche
et
Lou Salomé, les symbolistes, La Porte étroite, Proust). Mais, au tota
72
la levée des censures sociales, les statistiques
et
la publicité. L’excitation de la nouveauté, ressort secret de l’éroti
73
i de se faire sentir dans les médias audiovisuels
et
tactiles, qu’en écriture. Il en sera sans doute ainsi jusqu’à ce qu’u
74
ire sur le sens de la personne, du rêve personnel
et
du mystère ultime de l’autre : le prochain dans son autonomie. d.
75
nt Denis de, « [Réponse à une enquête] Une longue
et
vieille histoire », Le Monde des livres, Paris, 7 juin 1969, p. V. e
76
s sociétés qui deviennent de plus en plus énormes
et
pareilles les unes aux autres ne tendent pas à recréer dans leur prop
77
écurisante de petites communautés restructurées ;
et
à la notion de frontières bornées, celle de foyers librement rayonnan
78
s plus diverses, dont je vais rappeler les étapes
et
la répartition continentale. Prenons l’idée de régions à sa naissance
79
pposer sérieusement que la fédération européenne,
et
que celle-ci implique de « dépasser le dogme de la souveraineté absol
80
tats », à la fois par des autorités continentales
et
par des pouvoirs régionaux. Ce manifeste (qu’on peut lire dans le pré
81
aliste des années 1930, Esprit d’Emmanuel Mounier
et
Georges Isard, et l’Ordre nouveau groupé autour d’Arnaud Dandieu (mor
82
1930, Esprit d’Emmanuel Mounier et Georges Isard,
et
l’Ordre nouveau groupé autour d’Arnaud Dandieu (mort en 1934), Robert
83
tour d’Arnaud Dandieu (mort en 1934), Robert Aron
et
Alexandre Marc. Dès 1938, Gabriel Marcel peut écrire : « Comme l’avai
84
faut garder les yeux fixés à la fois bien en deçà
et
bien au-delà de la nation. » La critique de l’État-nation — ou l’état
85
ion — ou l’étatisation manu militari des coutumes
et
des idéaux d’une communauté nationale — s’élabore et se consolide dan
86
des idéaux d’une communauté nationale — s’élabore
et
se consolide dans les mouvements fédéralistes européens de l’après-gu
87
puis un siècle, sur la science de ses professeurs
et
la croyance de ses sujets, par l’entremise des manuels scolaires, n’e
88
res, n’est en fait qu’une forme politique récente
et
déjà inadéquate, à la fois trop petite et trop grande par rapport aux
89
récente et déjà inadéquate, à la fois trop petite
et
trop grande par rapport aux réalités du monde actuel. Un modèle pér
90
un ne peut plus assurer seul sa défense militaire
et
sa prospérité, son équipement technologique et une aide effective au
91
re et sa prospérité, son équipement technologique
et
une aide effective au tiers-monde, la prévention des guerres nucléair
92
tiers-monde, la prévention des guerres nucléaires
et
des catastrophes écologiques. La constitution de pools européens de r
93
européens de recherche (comme le CERN, à Genève)
et
une action concertée dans le domaine économique (CECA, Marché commun)
94
s, qui seraient compétentes partout où les tâches
et
leur concertation se révéleraient d’échelle continentale — et là seul
95
ertation se révéleraient d’échelle continentale —
et
là seulement ? D’autre part, l’État-nation de type centralisé, imposa
96
ssi hétérogènes que la langue parlée à la surface
et
l’exploitation du sous-sol, l’économie moderne et le territoire hérit
97
et l’exploitation du sous-sol, l’économie moderne
et
le territoire hérité, les souvenirs collectifs et les espoirs individ
98
et le territoire hérité, les souvenirs collectifs
et
les espoirs individuels — ce carcan militaire, idéologique et douanie
99
rs individuels — ce carcan militaire, idéologique
et
douanier, qui a moins d’un siècle d’âge en moyenne, n’est plus capabl
100
lus capable d’assurer la prospérité des provinces
et
d’y permettre une vie civique digne du nom, une participation réelle.
101
dans le monde d’aujourd’hui, à la fois planétaire
et
local, c’est-à-dire plus universel et plus particulier que celui des
102
planétaire et local, c’est-à-dire plus universel
et
plus particulier que celui des nations modèle xixe siècle. À mesure
103
t en réalité à une prise de conscience européenne
et
d’horizon mondial. La conscience de la nécessité de fédérer l’Europe,
104
e l’Europe il faut ouvrir le cadre stato-national
et
dépasser ce modèle périmé. Tel est l’argument politique qui inspire l
105
. Mais le problème n’est pas seulement spéculatif
et
prospectif ! Il est posé en vrac, en termes concrets, mal comparables
106
deux classes de motifs principaux, les ethniques
et
les économiques — d’ailleurs en interaction fréquente. I. — Il y a le
107
— Il y a les problèmes linguistiques du Sud-Tyrol
et
du Val d’Aoste, de l’Alsace, de la grande Occitanie ou du petit Jura
108
Jura bernois ; les révoltes ethniques qui couvent
et
parfois éclatent en Bretagne ou en Flandres ; les poussées autonomist
109
au pays de Galles, au Pays basque, en Catalogne ;
et
tous les phénomènes similaires actuellement étouffés dans les pays de
110
utonomie régionale, quelques-unes leur séparation
et
leur rattachement immédiat à l’Europe fédérée de demain. II. — Les pl
111
études régionales au sein du Marché commun (1961)
et
ont abouti à la création d’une Direction générale de la politique rég
112
frontières politiques nées du hasard des guerres
et
qui ne correspondent plus à nulle réalité, ni ethnique ni économique.
113
res de nos États, les exemples abondent : Basques
et
Catalans divisés par les Pyrénées, régions de Bâle et de Genève broch
114
atalans divisés par les Pyrénées, régions de Bâle
et
de Genève brochant sur deux ou trois pays, Nord français coupé de la
115
ys, Nord français coupé de la Flandre occidentale
et
du Hainaut, triangle Aix-la-Chapelle-Maestricht-Liège, etc. Désormais
116
etc. Désormais, le problème est posé par les Six
et
par le Conseil de l’Europe de la constitution de régions transfrontal
117
partout où les conflits entre limites politiques
et
espaces économiques se révèlent intolérables ou « manifestement aberr
118
suite par ces exemples que les régions ethniques
et
les régions économiques ne sauraient coïncider spatialement par quelq
119
par quelque miracle qui ne s’est jamais produit,
et
qui aurait encore moins de chance de survenir dans le cas des régions
120
orts, l’énergie, les recherches, la défense, etc.
Et
les charger de la concertation continentale des régions à géométrie v
121
ar les échanges entre régions, former les régions
et
créer un tissu européen qui finira par se révéler plus solide que les
122
ens administratifs subsistant entre chaque région
et
sa capitale nationale. 3. Éduquer les nouvelles générations dès l’éco
123
dès l’école primaire dans l’optique régionaliste
et
non plus nationaliste, informer les populations, former des responsab
124
r les populations, former des responsables locaux
et
régionaux, combattre les routines mentales et laisser s’évanouir les
125
aux et régionaux, combattre les routines mentales
et
laisser s’évanouir les préjugés stato-nationalistes qui paralysent au
126
s, quinze à vingt ans, pour former une génération
et
créer les régions ne sont-ils pas trop longs, face à l’urgence des pé
127
l’ethnie, la confession, d’ensembles très divers
et
très variablement combinés. Les Suisses se trouvent ainsi protégés co
128
s des États nationaux post-napoléoniens, remaniés
et
multipliés au xxe siècle. En revanche, la vie culturelle atteint en
129
tits pays (ils occupent les cinq premiers rangs),
et
, parmi eux, l’avantage exceptionnel d’une fédération pluraliste intég
130
es, quatre sont d’origine étrangère. Contrastés
et
rapprochés Il m’a toujours semblé que l’absence de « culture natio
131
de « culture nationale », synthétique ou imposée,
et
la très forte densité culturelle n’étaient pas sans relations d’inter
132
culturelle de l’Europe tout entière dans l’espace
et
dans le temps, mais en Suisse, cela se voit mieux, se vérifie plus ai
133
ce principale de la musique européenne (séquences
et
tropes de Notker le Bègue, dès le viiie siècle), ni de l’Université
134
e Bâle au xve siècle (Érasme, Paracelse, Holbein
et
Frobenius), ni de la Genève de Calvin (ce Picard venu de Strasbourg e
135
la Genève de Calvin (ce Picard venu de Strasbourg
et
qui agira sur les élites intellectuelles et politiques de la France,
136
bourg et qui agira sur les élites intellectuelles
et
politiques de la France, de l’Écosse et de l’Angleterre, des Pays-Bas
137
ectuelles et politiques de la France, de l’Écosse
et
de l’Angleterre, des Pays-Bas et de la Rhénanie, de la Hongrie, de la
138
nce, de l’Écosse et de l’Angleterre, des Pays-Bas
et
de la Rhénanie, de la Hongrie, de la Pologne, puis de l’Amérique), re
139
nds courants d’idées Au xviiie siècle, Zurich
et
Bâle, puis Genève, seront les sources de trois grands courants d’idée
140
jusqu’aux floraisons géniales de la fin du siècle
et
du romantisme. Lessing, Herder, Goethe et Schiller vont découvrir par
141
siècle et du romantisme. Lessing, Herder, Goethe
et
Schiller vont découvrir par elle Homère, Dante, Shakespeare et Milton
142
ont découvrir par elle Homère, Dante, Shakespeare
et
Milton, mais aussi les Nibelungen et les minnesänger. Les célèbres Id
143
Shakespeare et Milton, mais aussi les Nibelungen
et
les minnesänger. Les célèbres Idylles de Salomon Gessner, la physiogn
144
iognomonie de Lavater, la pédagogie de Pestalozzi
et
la peinture de Füssli (qui deviendra « Fuseli, the Wild Swiss », lors
145
e de Londres au temps de William Blake) sont nées
et
se sont constituées dans le cercle du grand Bodmer. Bâle, dans le mêm
146
mprévus mais fidèles de ses traditions humanistes
et
piétistes, une pléiade de mathématiciens, physiciens et astronomes qu
147
tistes, une pléiade de mathématiciens, physiciens
et
astronomes qui rivalisent de génie : Léonard Euler et les huit Bernou
148
stronomes qui rivalisent de génie : Léonard Euler
et
les huit Bernouilli, ses cousins, font de leur ville « la capitale de
149
e, en Russie, le rayonnement de leurs découvertes
et
de leurs méthodes. Genève assiste alors aux combats homériques entre
150
elui qui signe ses lettres « le Suisse Voltaire »
et
celui qui signe ses livres « Rousseau, citoyen de Genève ». La dynast
151
le des Bernouilli de Bâle dans les mathématiques.
Et
puis, après Necker, Genève donne à la France les principaux secrétair
152
n trust de Mirabeau, formé d’avocats, de pasteurs
et
de politiciens genevois émigrés — Dumont, Reybaz, Du Roveray, Clavièr
153
ybaz, Du Roveray, Clavière, — comité de rédaction
et
usine idéologique qu’allaient sortir les grands discours du tribun et
154
qu’allaient sortir les grands discours du tribun
et
jusqu’au texte de la Déclaration des droits de l’homme ». Un peu plus
155
d’est en ouest les grands courants du romantisme
et
du libéralisme politique et économique, par Schlegel, Benjamin Consta
156
ourants du romantisme et du libéralisme politique
et
économique, par Schlegel, Benjamin Constant et Simonde de Sismondi. C
157
ue et économique, par Schlegel, Benjamin Constant
et
Simonde de Sismondi. Cinquante ans plus tard, c’est à Bâle que s’allu
158
Burckhardt restitue la virtu de la Renaissance ;
et
toute l’œuvre de son jeune collègue et fervent disciple, Nietzsche, s
159
aissance ; et toute l’œuvre de son jeune collègue
et
fervent disciple, Nietzsche, sera marquée par cet enseignement. En
160
ar cet enseignement. Entre la « civilisation »
et
la « Kultur » Au xxe siècle, face aux nationalismes culturels, pr
161
lturels, prise d’abord entre une « civilisation »
et
une « Kultur » qui s’expliquaient à coups de canon, puis entièrement
162
aires, qu’a pu donner la petite Suisse à l’Europe
et
au monde ? Il faudrait parler de Dada, qui explose à Zurich au moment
163
à partir en wagon plombé pour la Gare de Finlande
et
la révolution d’Octobre, tandis qu’à l’autre bout de la Suisse et aux
164
d’Octobre, tandis qu’à l’autre bout de la Suisse
et
aux antipodes de l’esprit Ramuz, Stravinski, Auberjonois et Ansermet
165
ipodes de l’esprit Ramuz, Stravinski, Auberjonois
et
Ansermet écrivent, composent, peignent et dirigent L’Histoire du Sold
166
rjonois et Ansermet écrivent, composent, peignent
et
dirigent L’Histoire du Soldat, inaugurant le « spectacle total ». Il
167
faudrait parler de la musique, d’Arthur Honegger
et
de Frank Martin à Rolf Liebermann ; des arts plastiques, de Ferdinand
168
s arts plastiques, de Ferdinand Hodler, Paul Klee
et
Max Bill à Giacometti et Tinguely ; du théâtre de Dürrenmatt, et des
169
dinand Hodler, Paul Klee et Max Bill à Giacometti
et
Tinguely ; du théâtre de Dürrenmatt, et des romans de Max Frisch… Mai
170
iacometti et Tinguely ; du théâtre de Dürrenmatt,
et
des romans de Max Frisch… Mais je dois me réduire à l’essentiel : la
171
la première moitié du xxe siècle. C’est à Berne
et
à Zurich qu’Einstein, alors naturalisé suisse, élabora sa première th
172
G. Jung crée les notions de complexe, d’archétype
et
d’inconscient collectif. C’est à Bâle que Karl Barth, refoulé par Hit
173
xe siècle — pas seulement chez les protestants —
et
lui ouvre les voies de l’aggiornamento, où un autre Suisse, Hans Küng
174
dinand de Saussure fonde la linguistique générale
et
inaugure la sémiologie, dont on connaît l’impact sur toutes les scien
175
nnaît l’impact sur toutes les sciences humaines —
et
pas seulement sur les récents structuralismes français. De Genève enc
176
re les théories de l’institut Rousseau (Claparède
et
Bovet), puis l’épistémologie génétique de Jean Piaget, qui révolution
177
, qui révolutionneront la psychologie de l’enfant
et
par suite la pédagogie dans le monde entier. Si l’on cherche les trai
178
i dans l’à priori d’une objectivité systématique.
Et
de là viennent sans doute le pragmatisme, la morale de la coopération
179
ale de la coopération dans la différence cultivée
et
le goût du dialogue qui caractérisent à la fois les sciences humaines
180
isent à la fois les sciences humaines, le civisme
et
la vie culturelle en Suisse. Stendhal voyait dans le cénacle de Coppe
181
, « les états généraux de l’opinion européenne »,
et
c’est bien là le rôle que rêvaient de reprendre, dès 1946, les Rencon
182
ritique. Sens de la coopération dans la diversité
et
besoin vital du dialogue expliquent enfin ce que je voudrais appeler
183
re le fédéralisme — terme clé de notre existence,
et
qui signifie beaucoup plus que l’union politique des cantons souverai
184
Paul Valéry
et
l’Europe (29 octobre 1971)h Ce qu’il y a de plus étonnant dans la
185
er (1896) en passant par Noblet, Brun, Lapie père
et
fils et vingt autres qui disent, en termes très semblables, que « l’E
186
) en passant par Noblet, Brun, Lapie père et fils
et
vingt autres qui disent, en termes très semblables, que « l’Europe, c
187
devenue la métropole du genre humain » (Mantelle
et
Brun, 1816). Lieux communs, mais tellement obnubilés par la religion
188
ubilés par la religion du seul progrès occidental
et
refoulés par nos nationalismes qu’il a fallu l’esprit intrépide et sc
189
os nationalismes qu’il a fallu l’esprit intrépide
et
sceptique de Valéry pour s’abstraire de l’Europe physique et politiqu
190
e de Valéry pour s’abstraire de l’Europe physique
et
politique et la réinventer comme à partir du monde et de ses effets d
191
our s’abstraire de l’Europe physique et politique
et
la réinventer comme à partir du monde et de ses effets dans le monde.
192
olitique et la réinventer comme à partir du monde
et
de ses effets dans le monde. Il s’en étonne lui-même : Je n’avais ja
193
me quelqu’un qui se relève dans les tôles tordues
et
ne sait pas s’il est encore vivant. Valéry nous parlait sans ménageme
194
? Valéry constatait : « Tout est venu à l’Europe,
et
tout en est venu, ou presque. » Et ce n’était nullement faire preuve
195
nu à l’Europe, et tout en est venu, ou presque. »
Et
ce n’était nullement faire preuve d’orgueil ni encore moins d’impéria
196
és indispensables à l’exercice de cette fonction,
et
que Valéry énumérait, en premier examen, comme suit : « L’avidité act
197
e suit : « L’avidité active, la curiosité ardente
et
désintéressée, un heureux mélange de l’imagination et de la rigueur l
198
ésintéressée, un heureux mélange de l’imagination
et
de la rigueur logique, un certain scepticisme non pessimiste, un myst
199
rive à sa théorie des trois sources : Toute race
et
toute terre qui a été successivement romanisée, christianisée, et sou
200
ui a été successivement romanisée, christianisée,
et
soumise, quant à l’esprit, à la discipline des Grecs, est absolument
201
lument européenne. Définition célèbre, lacunaire
et
féconde. La tendance bien connue de Valéry s’illustre ici : mathémati
202
yle est celle d’un théorème : absence d’ornements
et
réduction aux surprises de la simplicité.) Si l’on tient « les trois
203
ais on y a vu communément une définition générale
et
substantielle. À qui s’applique alors sa grille, d’une manière non pa
204
s à la Sicile, faite par les Vikings, Frédéric II
et
les Arabes, autant que par les Grecs et les Romains ; et pas à plus d
205
édéric II et les Arabes, autant que par les Grecs
et
les Romains ; et pas à plus de la moitié des habitants de ce continen
206
Arabes, autant que par les Grecs et les Romains ;
et
pas à plus de la moitié des habitants de ce continent, d’Édimbourg à
207
ent, d’Édimbourg à Sofia, de Stockholm à Grenade,
et
de Lisbonne à Varsovie. Tout ce « reste » atlantique et nordique, cel
208
Lisbonne à Varsovie. Tout ce « reste » atlantique
et
nordique, celte ou germain, arabe ou slave, ne serait donc pas europé
209
sie, toute la musique, des troubadours à Mallarmé
et
du Tristan de Béroul à celui de Wagner ! Il manque à la définition pa
210
le substantiel, physique, physiologique, affectif
et
lyrique. Tout cela qui n’était pas le fort de Valéry. Et tout cela ex
211
que. Tout cela qui n’était pas le fort de Valéry.
Et
tout cela explique peut-être son pessimisme quant à l’issue de l’aven
212
ces palais de Persépolis, ces temples de Baalbeck
et
de Jérusalem ? … Hélas ! je l’ai parcourue, cette terre ravagée ! J’a
213
ieux qui furent le théâtre de tant de splendeurs,
et
je n’ai vu qu’abandon et que solitude. […] Qui sait si sur les rives
214
e de tant de splendeurs, et je n’ai vu qu’abandon
et
que solitude. […] Qui sait si sur les rives de la Seine, de la Tamise
215
ans le tourbillon de tant de jouissances, le cœur
et
les yeux ne peuvent suffire à la multitude des sensations : qui sait
216
i ne s’assoira pas un jour sur de muettes ruines,
et
ne pleurera pas solitaire sur la cendre des peuples et la mémoire de
217
pleurera pas solitaire sur la cendre des peuples
et
la mémoire de leur grandeur ? Puis relisons La Crise de l’Esprit :
218
m, Ninive, Babylone étaient de beaux noms vagues,
et
la ruine totale de ces mondes avait aussi peu de signification pour n
219
i de beaux noms. Lusitania aussi est un beau nom.
Et
nous voyons maintenant que l’abîme de l’histoire est assez grand pour
220
t le monde. Tout peut être perdu, songe Valéry —
et
tout l’est peut-être déjà — par la faute des disputes périmées que no
221
bles Européens ont mieux aimé jouer aux Armagnacs
et
aux Bourguignons que de prendre sur toute la terre le grand rôle que
222
ue la concurrence européenne en matière politique
et
économique… Pendant que les efforts des meilleures têtes de l’Europe
223
on naïve de la politique historique de convoitise
et
d’arrière-pensées se poursuivait, et cet esprit de « Petits-Européens
224
e convoitise et d’arrière-pensées se poursuivait,
et
cet esprit de « Petits-Européens » livrait, par une sorte de trahison
225
ceux mêmes qu’on entendait dominer, les méthodes
et
les instruments de puissance. À cause de nos nationalismes et de leu
226
ments de puissance. À cause de nos nationalismes
et
de leur concurrence insane, qui réduit chacun d’eux à l’impuissance,
227
viduels raisonnables l’abjecte démission générale
et
rentable : L’Europe aspire visiblement à être gouvernée par une comm
228
ue l’État-nation était notre malheur fondamental.
Et
il n’a pas vécu pour constater que nos Armagnacs et Bourguignons sera
229
il n’a pas vécu pour constater que nos Armagnacs
et
Bourguignons seraient un jour nos Byzantins de gauche et de droite co
230
guignons seraient un jour nos Byzantins de gauche
et
de droite communiant dans le culte de la nation souveraine. (Communis
231
ns le culte de la nation souveraine. (Communistes
et
gaullistes contre l’Europe intégrée.) Mais il a été le premier, et le
232
tre l’Europe intégrée.) Mais il a été le premier,
et
le seul écrivain français de premier rang, au xxe siècle, à réfléchi
233
op tard. h. Rougemont Denis de, « Paul Valéry
et
l’Europe », Le Monde, Paris, 29 octobre 1971, p. 15 et 18.
234
Europe », Le Monde, Paris, 29 octobre 1971, p. 15
et
18.
235
ue Rhin, Rhône, Danube, Pô y prennent leur source
et
que de ce sommet une vallée descend vers l’Italie, une vers l’Allemag
236
s l’Allemagne, une vers l’est, une vers le Valais
et
le pays latin, disons la France. Comment et pourquoi avez-vous choisi
237
alais et le pays latin, disons la France. Comment
et
pourquoi avez-vous choisi le versant français de votre pays et de vou
238
vez-vous choisi le versant français de votre pays
et
de vous-même ? Mais je n’ai pas eu à choisir ! Le français est ma lan
239
ce n’est pas rien ! Plus modestement, entre 1830
et
1900, je compte septante-six ouvrages publiés par des Rougemont et qu
240
e septante-six ouvrages publiés par des Rougemont
et
qui vont d’un essai sur Socrate et Jésus-Christ à des Observations su
241
des Rougemont et qui vont d’un essai sur Socrate
et
Jésus-Christ à des Observations sur l’organe détonnant du Brachinus c
242
épée. L’origine de la famille est franc-comtoise,
et
il y a dans cette province deux villages qui se nomment Rougemont. Ju
243
scientifique où j’entrai par la vertu de ce goût
et
de ce laboratoire. Mais ce qui avait été passion devint devoir, et je
244
ire. Mais ce qui avait été passion devint devoir,
et
je le détestai aussitôt. D’où votre haine de l’école ? Cela remonte p
245
étiez engagé… Je ne rêvais pourtant que de poésie
et
d’écriture. Mes modèles d’alors étaient Valéry, Gide, les auteurs de
246
nt Valéry, Gide, les auteurs de la revue Commerce
et
de la NRF . C’était d’eux que je souhaitais être digne. Plutôt pour
247
… Car pour le fond, mes maîtres sont plus anciens
et
n’ont pas changé, Pascal et Rimbaud, pôles contraires d’une oppositio
248
res sont plus anciens et n’ont pas changé, Pascal
et
Rimbaud, pôles contraires d’une opposition violente qu’il me fallait
249
d’une opposition violente qu’il me fallait vivre
et
penser. Tous ces noms sont français ; c’est pourtant vers les Allemag
250
Novalis, Jean-Paul, Rilke. Surtout, je découvrais
et
lisais en allemand Kierkegaard. Les éditions que je devais diriger pl
251
France ce philosophe-poète qui reste mon maître,
et
peut-être mon juge ironique. Si Goethe a été pour moi la mesure et s’
252
juge ironique. Si Goethe a été pour moi la mesure
et
s’il m’a convaincu de la valeur de l’action, à laquelle je consacre l
253
é cela dans Le Paysan du Danube . L’engagement
et
le clerc C’est votre œuvre la plus romantique. Vous y découvrez le
254
romantique. Vous y découvrez le bonheur d’écrire
et
vous vous écoutez vivre et penser. Alors, le saut entre les pages de
255
ez le bonheur d’écrire et vous vous écoutez vivre
et
penser. Alors, le saut entre les pages de ce journal et celles de l’a
256
ser. Alors, le saut entre les pages de ce journal
et
celles de l’automne 32 dans la banlieue parisienne surprend, déroute.
257
est toujours agi pour moi d’une présence au monde
et
à moi-même conjointement… Il est vrai que beaucoup de choses changeai
258
d’autres noms, peut-être, comme le fédéralisme —
et
que nous baptisons le personnalisme. Nous créons, avec Mounier et Iza
259
isons le personnalisme. Nous créons, avec Mounier
et
Izard, Esprit , avec Dandieu, Robert Aron et Alexandre Marc, L’Ordr
260
ier et Izard, Esprit , avec Dandieu, Robert Aron
et
Alexandre Marc, L’Ordre nouveau , et je ne tarde pas à fonder ma pro
261
Robert Aron et Alexandre Marc, L’Ordre nouveau ,
et
je ne tarde pas à fonder ma propre revue, Hic et Nunc , où vont coll
262
e, Hic et Nunc , où vont collaborer Henry Corbin
et
Albert-Marie Schmidt, et où j’expose ma « politique du pessimisme act
263
collaborer Henry Corbin et Albert-Marie Schmidt,
et
où j’expose ma « politique du pessimisme actif » dont j’ai trouvé les
264
que chez Heidegger, que Corbin traduit pour nous
et
annote en arabe du xiie siècle. Tout cela dans ces années 1932 à 193
265
32 à 1936, qui voient triompher Hitler, Mussolini
et
Staline… Vous écriviez dans votre Cahier de revendications publié par
266
énération comblée. Comblée de chances de grandeur
et
comblée de risques mortels… Ce n’est plus pour quelque idéal que nous
267
utter maintenant, mais pour que les hommes vivent
et
demeurent des hommes… » Vous étiez engagé ! Je puis revendiquer la pa
268
n peut-il répondre ? De ce qu’il écrit, bien sûr,
et
de la manière dont il l’écrit. C’est ce que Penser avec les mains v
269
illustrer. J’ai posé là le problème de la culture
et
cherché une morale de la pensée — concept absolument nouveau. (Seul N
270
it : « Rougemont écrit un œil fixé sur l’Éternel
et
l’autre sur Jean Paulhan. » N’est-ce pas assez juste, et pas seulemen
271
tre sur Jean Paulhan. » N’est-ce pas assez juste,
et
pas seulement du Rougemont des années 1930, mais aussi de celui d’auj
272
ne exigence de synthèse. C’est sur le plan intime
et
philosophique ce qui correspond, sur le plan politique, à ce sens du
273
sens du fédéralisme dont mon pays est le produit,
et
auquel je demeure profondément attaché. La réalité est faite d’antino
274
tion de l’un à l’autre, qu’il s’agisse de l’homme
et
de la femme dans le couple, ou de la personne et de la communauté dan
275
et de la femme dans le couple, ou de la personne
et
de la communauté dans la cité. Le mariage est une vocation N’es
276
és à égale distance de la chronique impersonnelle
et
de la confidence. Pour moi, ces journaux de 1926 à 1946, et leur suit
277
onfidence. Pour moi, ces journaux de 1926 à 1946,
et
leur suite — le Journal d’un Européen — qui ne saurait tarder, ont po
278
prend vie que dans une relation avec le prochain,
et
cette relation que dans une relation avec la cité. Je résume ainsi ce
279
terme affectif à un terme géopolitique : L’Amour
et
l’Occident . Pour vous qui étiez si engagé dans une pensée politique
280
ous qui étiez si engagé dans une pensée politique
et
religieuse, comment se fait-il que l’amour vous ait intéressé ? Dites
281
(de nouveau, n’est-ce pas, une relation) l’amour
et
ses étymologies historiques et religieuses. Et je savais aussi que to
282
relation) l’amour et ses étymologies historiques
et
religieuses. Et je savais aussi que tout existe, virtuellement, mais
283
ur et ses étymologies historiques et religieuses.
Et
je savais aussi que tout existe, virtuellement, mais que tout ne se m
284
tibilité temporelle. Quant à l’occasion du livre,
et
pour passer du sublime au trivial, ce fut une commande. À ce sujet, i
285
je raconte dans le post-scriptum « non définitif
et
scientifico-polémique » à la nouvelle édition. J’avais esquissé, dans
286
ivre est, me dit-il, des plus urgents : La France
et
son armée, par Charles de Gaulle. Mais enfin, le livre fut écrit… En
287
qu’une liaison. Mais quand il y a engagement réel
et
fidélité à cet engagement, alors la personne peut s’épanouir. Il n’y
288
s’épanouir. Il n’y a mariage qu’entre personnes.
Et
c’est pourquoi le mariage est une vocation. Si bien que votre livre e
289
Lettres sur la bombe atomique , ou mes Méfaits …
Et
la Part du diable , où j’explique que la démocratie ne se distingue
290
e se distingue du totalitarisme que par l’humour,
et
par rien d’autre. … Votre pensée si soucieuse de cohérence paraît con
291
même de ma démarche. L’homme est à la fois libre
et
responsable : paradoxe ! Il ne devient lui-même que par la vocation,
292
rochain… paradoxe. Le fédéralisme : c’est l’union
et
l’autonomie… l’Un et le Divers… paradoxe. Voyez-vous, le respect du r
293
fédéralisme : c’est l’union et l’autonomie… l’Un
et
le Divers… paradoxe. Voyez-vous, le respect du réel, c’est le respect
294
ct des antinomies. Il est la légèreté de l’esprit
et
la tension nécessaire à son action. Choisir l’avenir… Avez-vous
295
es changements qui sont intervenus dans nos mœurs
et
dans nos pensées depuis sa première publication en 1939 ? On a même p
296
ement, ma responsabilité. Certes, le monde change
et
dans le domaine des mœurs l’évolution est même plus profonde qu’on ne
297
les signes avant-coureurs de l’avenir de l’Europe
et
du monde ! C’est qu’il faut partir de l’avenir si l’on veut comprendr
298
e voit contraint de choisir librement son avenir.
Et
il y est contraint du seul fait qu’il en a, pour la première fois, la
299
72, p. 20-21. j. Propos recueillis par Jean Blot
et
introduits par la note suivante : « Quatre ouvrages de Denis de Rouge
300
uvelles. C’est la preuve éclatante de l’actualité
et
de la vitalité de ce penseur engagé dans tous les grands débats du si
301
seur engagé dans tous les grands débats du siècle
et
qui a su apporter à chacun une réponse originale en un style et par d
302
porter à chacun une réponse originale en un style
et
par des formules où s’affirme un maître écrivain. Cette œuvre me para
303
ondé un refus instinctif de choisir entre l’homme
et
le monde, l’individu et la société, la vie privée et la vie publique,
304
de choisir entre l’homme et le monde, l’individu
et
la société, la vie privée et la vie publique, l’art et la politique.
305
le monde, l’individu et la société, la vie privée
et
la vie publique, l’art et la politique. Par elle seront conciliés le
306
société, la vie privée et la vie publique, l’art
et
la politique. Par elle seront conciliés le philosophe, le publiciste,
307
etrouver l’unité des termes que l’habitude oppose
et
découvrir en l’un la substance de l’autre. Individu et société doiven
308
couvrir en l’un la substance de l’autre. Individu
et
société doivent se fondre dans l’unité de la personne, dignité à laqu
309
ccède que par l’engagement dans le monde — source
et
théâtre de sa vocation. La relation est réciproque. La société n’a po
310
ation est réciproque. La société n’a pour réalité
et
pour fin que les personnes qui la composent et son organisation doit
311
té et pour fin que les personnes qui la composent
et
son organisation doit la transformer en un terrain fertile où les voc
312
. Elle suppose une organisation de l’État où l’un
et
les divers seront conciliés : le fédéralisme. Elle conduit son auteur
313
ment, fournit au monde les champions de cet art ;
et
comme j’étais alors une jeune recrue animée d’un extrême désir d’être
314
trême désir d’être promue au grade de lieutenant,
et
d’acquérir de la sorte au plus tôt le droit de faire taire les sergen
315
tirer. Mais je suivais les conseils d’ordonnance,
et
je tirais aussi mal que possible. Car je me trouvais embarrassé de ta
316
Car je me trouvais embarrassé de tant de recettes
et
d’ordres assénés qu’il me semblait, d’un exercice à l’autre, n’avoir
317
nnée. Je faisais tout ce que l’on me prescrivait,
et
que je voyais faire aux autres. Je prenais avec soin le cran d’arrêt,
318
l, reposant l’arme de temps à autre pour respirer
et
calmer ma nervosité, et, lorsque enfin je me croyais prêt selon la mé
319
mps à autre pour respirer et calmer ma nervosité,
et
, lorsque enfin je me croyais prêt selon la méthode des sergents, je m
320
des meilleurs tireurs. On négligeait les autres,
et
je me résolus à profiter de ce répit pour trouver par moi-même le sec
321
our trouver par moi-même le secret de mes erreurs
et
le moyen de les corriger, sans plus tenir compte des préceptes reçus.
322
. Il se baissa vers moi, me saisit la main droite
et
l’écarta de la garde du fusil. « Voyez, dit-il, comme vos doigts sont
323
Voulez-vous apprendre à tirer ? » Il me regarda,
et
voyant dans mes yeux une bonne volonté en détresse : « C’est très sim
324
vous le répète : pensez au but, oubliez le reste.
Et
maintenant vous allez essayer. Vous avez le noir ?… Vous ne voyez plu
325
in il me parut plus large, plus proche, bien mat,
et
immobile… La détonation me surprit. Je reposai mon arme en faisant sa
326
Je reposai mon arme en faisant sauter la douille
et
rechargeai machinalement. Et quand je levai les yeux, un petit disque
327
nt sauter la douille et rechargeai machinalement.
Et
quand je levai les yeux, un petit disque blanc d’où pendait un mince
328
ge surgit du bas de la cible, hésita une seconde,
et
marqua le centre du noir. Trois jours plus tard, au scandale du serge
329
x galon, insigne des champions de l’école de tir,
et
l’arborais sur la manche droite de la tunique. Quant aux conséquences
330
a tunique. Quant aux conséquences plus lointaines
et
aux implications décisives, à mon sens, du conseil en trois mots de c
331
ce premier coup au but avait, en un instant, posé
et
vérifié pour le restant de mes jours la juste relation des moyens et
332
restant de mes jours la juste relation des moyens
et
des fins. Je n’en tirai d’abord que des formules abstraites, mais don
333
e le soin d’en formuler les fondements théoriques
et
le mode d’emploi. 1) La considération minutieuse des moyens, la stric
334
stricte application d’une méthode réglant l’ordre
et
l’usage de ces moyens, la maîtrise d’une technique éprouvée, l’obéiss
335
nique éprouvée, l’obéissance aux préceptes légaux
et
coutumiers, ne suffisent pas pour atteindre le but, et peuvent être n
336
utumiers, ne suffisent pas pour atteindre le but,
et
peuvent être nuisibles dans la mesure exacte où ils absorbent l’atten
337
nt oublier. 2) L’appel du but doit nous rejoindre
et
nous mouvoir. C’est du but que d’abord la force vient à nous, déclenc
338
ante du but dicte ainsi les moyens de l’atteindre
et
les oriente plus strictement qu’aucune méthode, ou qu’aucun prétexte
339
mmuniquer plus de justice qu’elle n’en comporte ;
et
cela, aux seuls moyens qui portent à cette fin. Une fin sans justice
340
ce qu’elle inspire pour la rejoindre en vérité —
et
c’est Dieu seul1. Le jugement de bien ou de mal ne peut donc s’exerce
341
vaises, relativement à d’autres fins plus hautes,
et
dans la seule mesure où ces moyens servent nécessairement ces fins. C
342
es fins. Car un moyen vu sans sa fin est insensé,
et
ne saurait donc être jugé mauvais ou bon. 1. Relevons ici la simili
343
s au nom desquelles, au xvie siècle, calvinistes
et
jésuites se déchirèrent ; justification par la foi (la foi étant ferm
344
t ferme assurance, présence anticipée de la fin),
et
justification par la fin. k. Rougemont Denis de, « Descartes invers
345
mportera une doctrine de la personne, une morale,
et
une politique (histoire et prospective de la cité). L’auteur espère a
346
personne, une morale, et une politique (histoire
et
prospective de la cité). L’auteur espère achever cet ouvrage et le pu
347
de la cité). L’auteur espère achever cet ouvrage
et
le publier dans trois ans. »
348
r à un passé largement révolu, celui du Moyen Âge
et
de la féodalité », affirme M. Georges Pompidou. « Briser les nations
349
e six ou sept « nations » au sens ancien du terme
et
d’ethnies plus nombreuses encore par une autre nation qui leur impose
350
la seule qui exige encore des sacrifices humains,
et
les obtienne. Toutes ces déclarations traduisent une curieuse anxiété
351
ieuse anxiété dans l’esprit des hommes au pouvoir
et
une extrême nervosité de leurs polices, donc un danger, pour eux, rée
352
s fondamentaux dont ils me semblent les victimes.
Et
d’abord replaçons le concept de région dans le contexte de l’Europe d
353
gion dans le contexte de l’Europe d’aujourd’hui —
et
non pas du xixe siècle — hors duquel il ne serait, en effet, qu’« ab
354
ors duquel il ne serait, en effet, qu’« absurde »
et
« médiéval ». Il existe une raison majeure d’unir les Européens du xx
355
le : éviter leur colonisation politique par l’Est
et
leur colonisation économique par l’Ouest ; ou les deux ensemble. Non
356
t ; ou les deux ensemble. Non que les Soviétiques
et
les Américains soient de mauvaises gens, mais la colonisation est une
357
« faire l’Europe » que fédérale — non unitaire —,
et
les régions en fourniront le seul moyen ; Il est vital de rendre aux
358
ssibilité de participer aux décisions de la cité,
et
les régions en fourniront le seul moyen. L’Europe dite des patries, d
359
on voit très bien. Personne n’en veut d’ailleurs,
et
ses protagonistes moins que personne. Une Europe fédérale, au-dessus
360
sus du niveau des États-nations, suppose, appelle
et
implique des régions au-dessous de ce niveau. Trop petits pour jouer
361
ns devenait ainsi le précurseur de l’ère nouvelle
et
gagnait sur tous les tableaux de l’histoire du monde. C’était bien jo
362
gions périphériques doit s’arrêter à la frontière
et
s’exercer vers l’intérieur seulement. À Lyon, six ans plus tôt, le gé
363
égions d’entretenir « des relations plus directes
et
plus étroites avec l’extérieur » et il précisait : le Nord avec la Be
364
plus directes et plus étroites avec l’extérieur »
et
il précisait : le Nord avec la Belgique, la Lorraine et l’Alsace avec
365
précisait : le Nord avec la Belgique, la Lorraine
et
l’Alsace avec l’Allemagne, la Franche-Comté avec la Suisse, Rhône-Alp
366
-Comté avec la Suisse, Rhône-Alpes avec la Suisse
et
l’Italie, la Provence et le Languedoc avec le bassin méditerranéen, l
367
ône-Alpes avec la Suisse et l’Italie, la Provence
et
le Languedoc avec le bassin méditerranéen, l’Aquitaine avec l’Espagne
368
ine avec l’Espagne, la Bretagne avec l’Atlantique
et
la Normandie avec les Anglais. De Gaulle était un homme d’État, ses s
369
ouvoir aujourd’hui proclament qu’il faut la faire
et
font semblant de la vouloir, parce qu’ils savent bien que c’est impos
370
capitales, cela va de soi, mais aussi à Bruxelles
et
à Strasbourg, où l’on se veut avant tout « réaliste ». Ceux qui l’ont
371
ement, donnent 65,5 % en faveur de l’Europe unie.
Et
ce ne sont pas les difficultés économiques : elles seules ont contrai
372
se simultanément à la fédération (supranationale)
et
aux régions (infranationales) en vertu du complexe jacobin, hérité de
373
l consiste en une « équation entre le bien absolu
et
une collectivité correspondant à un espace territorial, à savoir la F
374
dans sa pensée le terme territorial de l’équation
et
met à la place un terme plus petit, comme la Bretagne, ou plus grand,
375
se principale de la crise actuelle de l’Occident,
et
l’obstacle principal à sa résolution. Là-dessus, tous les philosophes
376
. Là-dessus, tous les philosophes de la politique
et
la plupart des futurologistes se retrouvent d’accord, d’Herman Kahn à
377
nt d’accord, d’Herman Kahn à Bertrand de Jouvenel
et
de Toynbee à Georg Picht. Mais l’État-nation condamné se défend, avec
378
é, contre deux sortes d’adversaires : les ethnies
et
l’économie. Dès 1961, la Communauté économique européenne étudie le p
379
ent lieu à des activités de plus en plus intenses
et
variées, qui vont de la recherche historique et sociologique à la pos
380
s et variées, qui vont de la recherche historique
et
sociologique à la pose de charges de plastic aux quatre coins du cont
381
charges de plastic aux quatre coins du continent,
et
même en Suisse. Le danger majeur que représentent ces deux réactions
382
de reproduire en plus petit ce dont on a souffert
et
qu’on a décidé de détruire : des régions définies par une seule fonct
383
magine, au contraire, des régions fonctionnelles,
et
qui soient définies par un problème précis d’écologie, ou de transpor
384
rizon. Elles seront ouvertes les unes aux autres,
et
leur objectif général sera de nouer des liens, de créer un tissu de r
385
sme, qui se manifeste en Espagne comme en France,
et
en URSS comme dans le canton de Berne, est née des seuls excès de cen
386
mes sont insolubles dans le cadre stato-national,
et
qu’ils appellent la fédération du continent. Que cette révolte ait se
387
mouvement des régions en Europe — les États-Unis
et
l’empire russe suivront demain et après-demain — voilà qui suffit pou
388
les États-Unis et l’empire russe suivront demain
et
après-demain — voilà qui suffit pour qu’on pardonne leur nationalisme
389
la vie même sur ce globe. Le réveil régionaliste
et
fédéraliste en Europe est un mouvement puissant, profond et prometteu
390
iste en Europe est un mouvement puissant, profond
et
prometteur, dont il semble bien que les hommes politiques cités plus
391
ignorent à la fois les motivations, les finalités
et
l’ampleur. Non, messieurs, il ne s’agit pas d’une émeute, mais d’une
392
e s’agit pas d’une émeute, mais d’une révolution,
et
d’une espèce qui a de quoi surprendre. Il s’agit de recréer en Occide
393
ectuel que je découvrais au début des années 1930
et
où j’allais vivre ma jeunesse littéraire et politique. Je le revois,
394
1930 et où j’allais vivre ma jeunesse littéraire
et
politique. Je le revois, dans ces années décisives, où les ombres mon
395
démesurées, devant nos démocraties inconscientes
et
désuètes. Nous fondions les premières revues et groupes personnaliste
396
s et désuètes. Nous fondions les premières revues
et
groupes personnalistes. Il venait du surréalisme, dont il avait conse
397
t il avait conservé une sorte d’aura aventureuse,
et
il s’occupait, je crois, des Cahiers du cinéma chez Gallimard, où il
398
ec ses gros yeux mélancoliques aux larges cernes,
et
sa distraction proverbiale — il était, disait-il, le seul officier fr
399
avec de soudaines réparties d’un humour déroutant
et
rapide, et beaucoup de présence d’esprit politique. Il était, dans no
400
daines réparties d’un humour déroutant et rapide,
et
beaucoup de présence d’esprit politique. Il était, dans notre groupe,
401
res mémorables. Dandieu, c’était la rigueur même,
et
il avait tout lu ; Robert Aron, c’était l’imaginatif vagabond, et il
402
lu ; Robert Aron, c’était l’imaginatif vagabond,
et
il savait mettre en scène les idées. À eux deux, ils ont donné deux o
403
i actuelles de région, d’autogestion des communes
et
des entreprises, et de service civil conçu comme une relève de la cla
404
n, d’autogestion des communes et des entreprises,
et
de service civil conçu comme une relève de la classe ouvrière, mieux
405
etrouvé dans l’œuvre d’historien de la Résistance
et
de Vichy de Robert Aron les convictions politiques de notre jeunesse,
406
i se manifeste dans Les Années secrètes de Jésus,
et
qui me rappelle les discussions passionnées que nous menions, au temp
407
dominaient le groupe, les catholiques d’ Esprit
et
quelques protestants groupés autour de la petite revue de théologie e
408
ts groupés autour de la petite revue de théologie
et
de philosophie existentielle que j’avais intitulée Hic et Nunc . Que
409
ent pu siéger ensemble pour témoigner de la durée
et
de la renaissance des idées passionnées de notre génération. m. Ro
410
ire, Voltaire disait : « Il a lu tous les Pères —
et
il nous le fait payer ! » Jérôme Deshusses a lu non pas une fois mais
411
ses a lu non pas une fois mais six fois tout Kant
et
tout Hegel (c’est vingt mille pages chacun), puis Schelling, et même
412
(c’est vingt mille pages chacun), puis Schelling,
et
même Condillac et tous les autres. Marx en entier, mais jamais cela n
413
pages chacun), puis Schelling, et même Condillac
et
tous les autres. Marx en entier, mais jamais cela ne se sent à le lir
414
fin d’une phrase justifie seule son commencement,
et
toute arrivée est à la fois motif de départ et moteur de parcours… To
415
t, et toute arrivée est à la fois motif de départ
et
moteur de parcours… Tout se définit par sa fin ou se détermine par so
416
e quel événement est présent avant d’être passé »
et
que « la direction du temps n’est point passé-présent-futur, mais l’i
417
ient dans le passé, comme le croit le sens commun
et
le suppose la science, reviendrait à dire qu’« un bateau est propulsé
418
échets, de ce qui ne sert à rien mais qui empeste
et
contamine. En quatre-vingts pages bourrées de faits et crépitant de f
419
ntamine. En quatre-vingts pages bourrées de faits
et
crépitant de formules éclatantes, Deshusses nous donne une descriptio
420
nète, mis fin à cinq-cent-trente espèces animales
et
à vingt mille espèces végétales, empoisonné les lacs Érié, Baïkal, Ba
421
tales, empoisonné les lacs Érié, Baïkal, Balaton,
et
des fleuves comme le Rhin, pollué par cinq pays. (« L’Europe des nati
422
lie rien… Des coups, elle peut en supporter mille
et
rendre soudain non pas œil pour œil mais apocalypse pour chiquenaude.
423
ger l’eau douce contre du sucre raffiné pour rien
et
du papier d’emballage fabriqué pour personne ? Rien, justement, et pe
424
ballage fabriqué pour personne ? Rien, justement,
et
personne, les deux piliers de la grande famille humaine. » Entre le d
425
rande famille humaine. » Entre le désordre absolu
et
la démence, la surpopulation et la bombe H, tout se met en place pour
426
e désordre absolu et la démence, la surpopulation
et
la bombe H, tout se met en place pour le final : « Entre la famine et
427
se met en place pour le final : « Entre la famine
et
la guerre, nous n’aurons pas le choix : il faudra subir les deux. » S
428
ujours en avant, vers l’avenir. « L’environnement
et
la nature, c’est d’abord nous : du premier nous sommes le centre, et
429
d’abord nous : du premier nous sommes le centre,
et
de la seconde nous représentons la pointe. » Figure de proue de l’His
430
choix qu’entre l’horreur de son propre tintamarre
et
la voie des aveux… Depuis que l’homme existe, l’idéal n’a pas plus de
431
nent : il veut dire ‟révélation” ». Entre Géhenne
et
Parousie, six chapitres non moins implacables développent la logique
432
a conduits où nous sommes : la Foire d’empoigne,
et
c’est l’économie fondée sur la compétition ; la Cellule de base, ce «
433
la vie ; le Musée des faussaires : l’enseignement
et
l’art moderne ; l’Observatoire de Babel, ou la relativité et la psych
434
derne ; l’Observatoire de Babel, ou la relativité
et
la psychanalyse reconduites à leurs tautologies ou à leur misère phil
435
quel les religions instituées, la foi, les cultes
et
Marx se voient renvoyés au néant noétique de leur commun matérialisme
436
redoutable autant par la densité de l’information
et
la rigueur de la déduction que par l’insolence du style, ils ont fait
437
totale, dénonce le couple mais aussi Marx, Freud
et
la science (qui l’a formé). Les dieux modernes et ceux de naguère se
438
et la science (qui l’a formé). Les dieux modernes
et
ceux de naguère se vengent : silence sur ce blasphémateur universel q
439
de nos faux-fuyants, une telle rage de dire vrai
et
plus encore, peut-être, cette manière intrépide et joyeuse de faire f
440
t plus encore, peut-être, cette manière intrépide
et
joyeuse de faire face à la vérité dans tous ses risques, on n’avait p
441
shusses ? », Le Monde, Paris, 16 mars 1979, p. 17
et
23.
442
lvétique aux admirateurs de Colbert, des jacobins
et
de Napoléon, est peut-être une tâche impossible dès le principe. Essa
443
a vallée d’Uri, la commune de la vallée de Schwyz
et
la commune de ceux de la vallée inférieure d’Unterwald ». C’étaient l
444
r unique intersection, entre les sources du Rhône
et
du Rhin, reliant ainsi d’un seul trait les deux moitiés du Saint-Empi
445
t les deux moitiés du Saint-Empire, la germanique
et
la latine. S’unir pour rester libres Garder libre le col pour to
446
our toute l’Europe, telle est la mission initiale
et
fondatrice des vallées, qui reçoivent à cette fin l’« immédiateté imp
447
le, juré en 1291, « statué pour l’utilité commune
et
devant, s’il plaît à Dieu, durer à perpétuité ». Autour de ce premier
448
lles libres d’Empire, communes autonomes urbaines
et
rurales groupées en petites républiques oligarchiques ou populaires,
449
t dans plusieurs guerres civiles, jusqu’en 1848),
et
, avant tout, on est jaloux de préserver ses traditions particulières,
450
, au lendemain d’une dernière guerre de religion,
et
devant la montée, dans toute l’Europe, du mouvement de masses visant
451
ales uniformes. Contre ce double péril, intérieur
et
extérieur, les cantons vont faire mieux que renouveler leur pacte gén
452
trie contre l’étranger, maintenir la tranquillité
et
l’ordre à l’intérieur, protéger la liberté et les droits des confédér
453
ité et l’ordre à l’intérieur, protéger la liberté
et
les droits des confédérés, accroître leur prospérité commune. » L’art
454
n’est pas limitée par la Constitution fédérale »,
et
qu’ils exercent « tous les droits qui ne sont pas délégués au pouvoir
455
par l’article 3, leurs Constitutions, la liberté
et
les droits du peuple, les droits constitutionnels des citoyens, ainsi
456
fédération a seule le droit de déclarer la guerre
et
de conclure la paix, ainsi que de faire avec des États étrangers des
457
e de faire avec des États étrangers des alliances
et
des traités, notamment de douanes et de commerce. » L’autorité suprêm
458
es alliances et des traités, notamment de douanes
et
de commerce. » L’autorité suprême de la Confédération sera exercée pa
459
eil national, formé des députés du peuple suisse,
et
le Conseil des États (correspondant au Sénat américain), formé de deu
460
al composé de sept membres, élus par l’Assemblée,
et
qui dirigent chacun un département fédéral (ou ministère). Ces minist
461
e). Ces ministres ne représentent pas les cantons
et
ne sont pas renversés par les chambres. Si tel projet de loi qu’ils p
462
ans se retirer eux-mêmes. Les droits d’initiative
et
de référendum, tant en matière constitutionnelle que législative, son
463
nse, les relations avec les grands États voisins,
et
la politique économique générale. Situation en tous points comparable
464
culières, qui autrement resteraient sans défense,
et
que nul n’aurait charge d’assurer. Sans l’union fédérale, qui procure
465
elle eût subi le sort de Genève — l’annexion pure
et
simple, assaisonnée de préfets et de la lecture exclusive mais obliga
466
l’annexion pure et simple, assaisonnée de préfets
et
de la lecture exclusive mais obligatoire du Moniteur. On a trop dit q
467
en dépit de la diversité, mais pour la maintenir
et
perpétuer, parce qu’en elle seule, résident la santé et la vitalité d
468
pétuer, parce qu’en elle seule, résident la santé
et
la vitalité de l’ensemble. On voit ici la double erreur tragique des
469
la double erreur tragique des jacobins de gauche
et
de droite, qui s’imaginent, comme MM. Marchais et Debré, que le fédér
470
et de droite, qui s’imaginent, comme MM. Marchais
et
Debré, que le fédéralisme interne conduirait au séparatisme, tandis q
471
» primitives de la France, de la Grande-Bretagne
et
, dans une moindre mesure, de l’Espagne — ces trois prototypes de l’Ét
472
aculaires, avec la récente Constitution espagnole
et
le projet de Constitution belge. Mais, dira-t-on, toutes les fédérati
473
ux accordé aux dimensions de la tâche considérée,
et
toujours en partant des plus petites unités : communes, ateliers, coo
474
té peut faire, les États ne doivent pas le faire.
Et
ce que les États peuvent faire, le gouvernement fédéral ne doit pas l
475
tés ci-dessus) ou mondial (s’il s’agit des océans
et
des forêts de la planète, c’est-à-dire de l’air respirable par l’espè
476
e, ne correspond qu’à des définitions académiques
et
, par nature, conventionnelles. En revanche, lorsqu’on l’invoque avec
477
ération optent pour la formule méfiante, égoïste,
et
qui prévoit l’échec à terme, de la simple liaison : je ne m’engage à
478
elà de ce qui me convient, tant pis pour l’autre.
Et
ceux qui préconisent la fédération optent pour la formule créatrice e
479
nt la fédération optent pour la formule créatrice
et
confiante du mariage : nous nous engageons réciproquement « pour le m
480
nous engageons réciproquement « pour le meilleur
et
pour le pire […] jusqu’à ce que la mort nous sépare », donc sans limi
481
ntérêt ni de temps. Enfin quelque chose de grand,
et
qui serait en même temps raisonnable ! Fédéral ou confédéral, le modè
482
dernier témoin de l’antique unité de nos peuples
et
le présage d’un renouveau possible. p. Rougemont Denis de, « Le f
483
urd’hui », Le Monde, Paris, 24–25 juin 1979, p. 5
et
9.
484
L’amour, les régions
et
l’Occident (20 août 1982)q r Quel est le principe qui rassemble le
485
, qui s’est constituée dans ma jeunesse, entre 20
et
25 ans : l’homme considéré en tant que personne. Cela voulait dire po
486
urd’hui « les non-conformistes des années 1930 »,
et
que j’ai connus dès mon arrivée à Paris en 1931. Ils allaient publier
487
en 1931. Ils allaient publier les revues Esprit
et
L’Ordre nouveau 2, auxquelles j’ai collaboré dès leur naissance. J’
488
te revue protestante de « théologie dialectique »
et
de « philosophie existentielle », Hic et Nunc , qui introduisit en F
489
sit en France, en 1932, les œuvres de Kierkegaard
et
de Karl Barth, mais aussi de Heidegger et Jaspers. Politique de la
490
kegaard et de Karl Barth, mais aussi de Heidegger
et
Jaspers. Politique de la personne , 1934, Penser avec les mains ,
491
, 1936, ont développé les conséquences politiques
et
culturelles du personnalisme. Quant à L’Amour et l’Occident , paru e
492
et culturelles du personnalisme. Quant à L’Amour
et
l’Occident , paru en 1939, il est né de la rencontre dramatique de l’
493
est né de la rencontre dramatique de l’engagement
et
de la passion. Deux personnes qui s’engagent pour la vie, c’est le ma
494
en écrivant ce livre que les notions de personne
et
d’amour-passion n’existaient qu’en Europe, et c’est peut-être le poin
495
nne et d’amour-passion n’existaient qu’en Europe,
et
c’est peut-être le point de départ de cette longue interrogation sur
496
ropéenne que j’ai menée dans beaucoup d’ouvrages,
et
qui m’a conduit après la guerre à fonder, à Genève, le Centre europée
497
s. Une étude approfondie de la culture européenne
et
de ses sources m’a porté à des conclusions d’ordre politique. Pour dé
498
lle de la culture gréco-latine, judéo-chrétienne,
et
d’abord celtique et germanique, avec des apports arabes et slaves, co
499
éco-latine, judéo-chrétienne, et d’abord celtique
et
germanique, avec des apports arabes et slaves, contre l’anti-Europe d
500
d celtique et germanique, avec des apports arabes
et
slaves, contre l’anti-Europe des États-nations, une seule solution :
501
tion : le fédéralisme, l’union dans la diversité,
et
même l’union pour les diversités à protéger. Ce qui rejoint exactemen
502
tre même la seule, de nos théories personnalistes
et
fédéralistes. Et j’ai écrit pendant les premiers mois de la guerre M
503
, de nos théories personnalistes et fédéralistes.
Et
j’ai écrit pendant les premiers mois de la guerre Mission ou démissi
504
t le 15 juin 1940 sur l’entrée de Hitler à Paris,
et
qui a été considéré comme « insulte à chef d’État étranger », donc me
505
t que « la confrontation stupéfiante de cet homme
et
de cette ville était peut-être nécessaire pour faire comprendre au mo
506
vement de résistance à tout prix, à la fois civil
et
militaire, la Ligue du Gothard. Je devenais gênant. On m’a envoyé aux
507
a envoyé aux États-Unis faire connaître la Suisse
et
jouer l’oratorio Nicolas de Flue , dont j’avais écrit le texte pour
508
ocialisme dans tous mes livres d’avant la guerre,
et
surtout dans mon Journal d’Allemagne , qu’il se garde bien de citer.
509
Quels ont été les rapports entre le personnalisme
et
l’existentialisme ? L’existentialisme sartrien nous a beaucoup emprun
510
s formules comme : « L’engagement de l’écrivain »
et
« l’homme à la fois libre et responsable ». Sartre savait très bien o
511
ment de l’écrivain » et « l’homme à la fois libre
et
responsable ». Sartre savait très bien où il les avait prises, et me
512
. Sartre savait très bien où il les avait prises,
et
me l’a dit tout net à New York, mais ne l’a jamais répété à Paris, se
513
ant qu’en France, en Italie autant qu’en Hollande
et
en Belgique. Ils ont influencé plus ou moins profondément plusieurs c
514
plus ou moins profondément plusieurs chefs d’État
et
leaders politiques dès 1948, année du premier congrès de l’Europe à L
515
, année du premier congrès de l’Europe à La Haye,
et
jusqu’à nos jours. Et ce sont eux qui ont suscité un peu partout la r
516
grès de l’Europe à La Haye, et jusqu’à nos jours.
Et
ce sont eux qui ont suscité un peu partout la renaissance de l’idée r
517
eu partout la renaissance de l’idée régionaliste,
et
de l’idée de service civil. Nous avions tous en commun cette définiti
518
n : une personne responsable dans une communauté,
et
non pas un individu collectivisé malgré lui. Là-dessus, j’ai élaboré
519
e tous les hommes. Un sentier qui n’est pas tracé
et
que chacun doit inventer en y marchant. « Ma parole est une lampe à m
520
’a fait l’effet d’une résurgence de nos problèmes
et
de nos révoltes des années 1930. Mais sans lendemain. D’autre part, u
521
ut porter, c’est-à-dire à l’échelle d’une région,
et
que les régions, pour garantir leur autonomie, doivent s’unir en fédé
522
de la régionalisation sont protestants, Defferre
et
Rocard. Vous voyez un rapport entre protestantisme et régionalisme ?
523
ocard. Vous voyez un rapport entre protestantisme
et
régionalisme ? Bien sûr. Chacun sait que l’Église des papes a repris
524
ie siècle, sous la direction des princes du sang
et
de maréchaux protestants, ont été bien près de créer une république f
525
genossen, qui signifie « compagnons du serment »,
et
qui désignait alors les Suisses confédérés. Pour en revenir à la « dé
526
pas le faire. » Chaque problème doit être traité
et
résolu à son échelle, c’est tout le secret du système fédéraliste que
527
crise de notre civilisation. Depuis les jacobins
et
Napoléon, le mot d’ordre a été de tout centraliser. Nos États-nations
528
paix, dans les États d’abord, en Europe ensuite,
et
à l’échelle mondiale finalement. L’écrivain, fauteur de prises de
529
ce Pour beaucoup de gens, vous êtes avant tout
et
malgré tout le reste, l’auteur de L’Amour et l’Occident . Pensez-vou
530
out et malgré tout le reste, l’auteur de L’Amour
et
l’Occident . Pensez-vous que ce livre ait un impact différent aujourd
531
juge par le nombre de rééditions, de traductions
et
de préfaces nouvelles, au cours de ces trois dernières années, c’est-
532
ils prennent conscience de ce que sont la passion
et
le mariage, et de leur antinomie. Et cette lecture peut les aider à p
533
nscience de ce que sont la passion et le mariage,
et
de leur antinomie. Et cette lecture peut les aider à préciser des not
534
t la passion et le mariage, et de leur antinomie.
Et
cette lecture peut les aider à préciser des notions qui restaient con
535
, pour vous, ont le mieux exprimé les consciences
et
l’inconscient de notre époque ? Pour l’inconscient, par définition, i
536
is Spengler, Toynbee, Paul Valéry, Lewis Mumford,
et
j’oserais suggérer mes livres. Dès l’âge de 22 ans, j’ai écrit contre
537
res. Dès l’âge de 22 ans, j’ai écrit contre Ford,
et
quelques années plus tard contre Hitler : l’auto et le national-socia
538
quelques années plus tard contre Hitler : l’auto
et
le national-socialisme sont ce que j’ai appelé les deux « histoires d
539
lé les deux « histoires de fous » du xxe siècle,
et
les plus meurtrières. En militant pour une fédération de l’Europe des
540
l’économie, les « impératifs » de la technologie
et
la « fatalité » de la guerre, c’est-à-dire, dans l’ère nucléaire, dev
541
la menace d’une catastrophe totale de l’humanité.
Et
c’est pourtant le siècle où l’homme a conquis les moyens les plus fab
542
leux de sa liberté ! Car ces lois, ces structures
et
ces prétendus impératifs mortels, c’est nous les hommes qui les avons
543
mier ouvrage consacré à l’engagement de la pensée
et
du penseur, je répète que l’avenir est l’affaire de chacun de nous, i
544
que l’avenir est l’affaire de chacun de nous, ici
et
maintenant. Mais le fait est que mes contemporains ont plus peur qu’e
545
n train — car elle contribue à coup sûr à ma joie
et
peut-être à mon salut. Et merci Dieu si ce n’est pas seulement au mie
546
ue à coup sûr à ma joie et peut-être à mon salut.
Et
merci Dieu si ce n’est pas seulement au mien. 2. Rien à voir avec
547
mont Denis de, « [Entretien] L’amour, les régions
et
l’Occident », Le Monde, Paris, 20 août 1982, p. 11. r. Propos recuei
548
11. r. Propos recueillis par Jacqueline Demornex
et
introduits par le chapeau suivant : « Denis de Rougemont, qui est sui
549
travail — l’ancienne grange, — le sourcil oblique
et
sombre, un foulard gris et rose dans le col d’une chemise noire, il f
550
, — le sourcil oblique et sombre, un foulard gris
et
rose dans le col d’une chemise noire, il fait beaucoup plus jeune que
551
isait : “Comment, c’est vous l’auteur de L’Amour
et
l’Occident ? On vous imaginait avec une grande barbe blanche !” Il n
552
rbe blanche !” Il n’a toujours pas cette tête-là,
et
il déroute toujours autant le public, pour qui il est tantôt le théor