1 1950, Le Monde et Le Monde diplomatique (1950-1982). Pour un standard unique de la télévision (18 novembre 1950)
1 ion, on sème l’anarchie dans l’un des domaines où elle serait le plus urgente. La télévision est déjà aux États-Unis, et dev
2 est le meilleur standard. Mais nous affirmons qu’ il faut absolument adopter un standard unique, tout au moins pour l’Euro
2 1954, Le Monde et Le Monde diplomatique (1950-1982). Visite à M. Denis de Rougemont, directeur du Centre européen de la culture (septembre 1954)
3 ture fondé en octobre 1950 a son siège à Genève ; il n’est rattaché à aucune institution internationale, ni à aucune insta
4 sur la bombe atomique . Interrogé sur le sens qu’ il attache au mot « culture », M. de Rougemont nous répond : T. S. Eliot
5 ismes créés par le Centre européen de la culture, il convient de relever : l’Association des instituts d’études européenne
3 1969, Le Monde et Le Monde diplomatique (1950-1982). Une longue et vieille histoire (7 juin 1969)
6 ppose un système de règles sociales : sans gênes, il n’est pas de plaisirs. Pour aider quelques-uns à sortir d’une confusi
7 les, pas une recette de fécondité ni de plaisir ; il admet simplement les rites judaïques (la circoncision notamment). La
8 s : paix et pardon à cause de l’amour.) S’agirait- il d’un refoulement ? Non, car la tentation correspondante n’est pas sen
9 lieux, des dates, des partisans et des ennemis, —  il est certain que les spéculations sur l’amour sexuel et divin, constit
10 sse à l’ange dans l’âme et à l’âme dans le corps. Il refuse toute facilité, cherche l’obstacle à surmonter — social, moral
11 r son expression rhétorique. Toutes les femmes qu’ il célèbre sont mariées, deviennent objet d’adoration, et reçoivent le s
12 dour ose écrire de la dame de ses pensées : « Par elle seule je serai sauvé ! » Tout cela — qui est d’abord occitan, arabe,
13 d’Abélard, et rend au sentiment la primauté, mais il est Suisse et démocrate. Sur lui se fonde l’érotique protestante, mai
14 comme tel. Voici enfin le tabou restauré ! Comme il est entendu qu’on ne doit parler ni de l’argent, ni de ces choses aux
15 érateurs : leur doctrine « explique tout » puisqu’ elle rend compte d’un grand nombre de faits précis à partir de ce que l’on
16 répètent ceux qui l’attaquent sans le connaître : il a seulement autorisé une manière nouvelle de parler des choses du sex
17 manière nouvelle de parler des choses du sexe. Et il a montré les relations profondes de l’érotisme avec le rêve — ce rêve
18 rtes, avec Georges Bataille et Pierre Klossowski, il a retrouvé sa problématique originelle, qui est religieuse (la gnose
19 médias audiovisuels et tactiles, qu’en écriture. Il en sera sans doute ainsi jusqu’à ce qu’un jour se constitue une éroti
4 1971, Le Monde et Le Monde diplomatique (1950-1982). La poussée régionaliste en Europe occidentale (avril 1971)
20 lle ou prospective, ce qui est frappant, c’est qu’ ils jouent tous dans le même sens. De leur ensemble on ne peut plus hétér
21 u, qui, sur ce point, a été vraiment un prophète, il faut garder les yeux fixés à la fois bien en deçà et bien au-delà de
22 nt unie des « forces vives » de tous nos peuples. Ils sont unanimes à montrer que l’État-nation qui règne seul, depuis un s
23 seul remède aux trop petites dimensions ne serait- il pas la création d’agences fédérales européennes, qui seraient compéte
24 on trop petit appelle la fédération ; trop grand, il appelle les régions. Ces deux tendances, loin de se contredire, se co
25 auvinisme local plus irrespirable que l’autre, si elle ne répondait en réalité à une prise de conscience européenne et d’hor
26 eté sans limites, qui ne peut plus rien animer si elle peut encore tout bloquer, amènent à constater que si l’on veut faire
27 ènent à constater que si l’on veut faire l’Europe il faut ouvrir le cadre stato-national et dépasser ce modèle périmé. Tel
28 me n’est pas seulement spéculatif et prospectif ! Il est posé en vrac, en termes concrets, mal comparables, voire contradi
29 onomique (par rapport à l’ensemble national) dont elles rendent responsable l’État centralisateur. Les unes exigent une aide
30 ormer une génération et créer les régions ne sont- ils pas trop longs, face à l’urgence des périls que court l’Europe — colo
5 1971, Le Monde et Le Monde diplomatique (1950-1982). L’absence d’une « culture nationale », facteur du développement intellectuel (26-27 septembre 1971)
31 loppement intellectuel (26-27 septembre 1971)g Il n’y a pas de « culture suisse », parce que nos cantons fédérés relève
32 isons dans ce tableau l’avantage des petits pays ( ils occupent les cinq premiers rangs), et, parmi eux, l’avantage exceptio
33 ’origine étrangère. Contrastés et rapprochés Il m’a toujours semblé que l’absence de « culture nationale », synthétiq
34 éveloppent, d’autant plus contrastés en esprit qu’ ils sont plus rapprochés dans l’espace. La vie culturelle suisse n’a pas
35 Bodmer révolutionne la littérature allemande, qu’ elle dominera sans conteste jusqu’aux floraisons géniales de la fin du siè
36 ng, Herder, Goethe et Schiller vont découvrir par elle Homère, Dante, Shakespeare et Milton, mais aussi les Nibelungen et le
37 (qui deviendra « Fuseli, the Wild Swiss », lorsqu’ il régira la vie artistique de Londres au temps de William Blake) sont n
38 a capitale des sciences exactes » de leur époque. Ils propagent au loin par leur enseignement, en Hollande, en Prusse, en R
39 donner la petite Suisse à l’Europe et au monde ? Il faudrait parler de Dada, qui explose à Zurich au moment où Lénine s’y
40 ire du Soldat, inaugurant le « spectacle total ». Il faudrait parler de la musique, d’Arthur Honegger et de Frank Martin à
6 1971, Le Monde et Le Monde diplomatique (1950-1982). Paul Valéry et l’Europe (29 octobre 1971)
41 l’Europe, « petit cap de l’Asie », c’est bien qu’ elle nous ait étonnés. Car ce « cap », cette « péninsule », cet « appendic
42 s occidental et refoulés par nos nationalismes qu’ il a fallu l’esprit intrépide et sceptique de Valéry pour s’abstraire de
43 à partir du monde et de ses effets dans le monde. Il s’en étonne lui-même : Je n’avais jamais songé qu’il existât véritab
44 ’en étonne lui-même : Je n’avais jamais songé qu’ il existât véritablement une « Europe »… Nous ne pensons que par hasard
45 se relève dans les tôles tordues et ne sait pas s’ il est encore vivant. Valéry nous parlait sans ménagements. Certes, rédu
46 larmé et du Tristan de Béroul à celui de Wagner ! Il manque à la définition par les trois sources, non l’essentiel mais bi
47 ujours citées sur la mortalité des civilisations. Elles sont aux Ruines de Volney ce que les Pensées de Pasco sont aux Essais
48 e brièveté décisive. Lisons les Ruines : Où sont- ils , ces remparts de Ninive, ces murs de Babylone, ces palais de Persépol
49 ve — cette politique est aussi sotte que naïve : Il n’y aura rien eu de plus sot dans toute l’histoire que la concurrence
50 insane, qui réduit chacun d’eux à l’impuissance, il faut prévoir que nous préférerons aux sacrifices individuels raisonna
51 l’État-nation était notre malheur fondamental. Et il n’a pas vécu pour constater que nos Armagnacs et Bourguignons seraien
52 tes et gaullistes contre l’Europe intégrée.) Mais il a été le premier, et le seul écrivain français de premier rang, au xx
53 es « circonstances permanentes de nos vies » dont il reste à souhaiter que l’interruption brusque ne soit pas seule capabl
54 ne soit pas seule capable de nous réveiller, car il serait trop tard. h. Rougemont Denis de, « Paul Valéry et l’Europ
7 1972, Le Monde et Le Monde diplomatique (1950-1982). « Le respect du réel, c’est le revers du paradoxe » (14 décembre 1972)
55 ssant par les Nombres rythmiques de la Prophétie. Il n’y avait donc qu’à suivre une tradition ? De fait, j’appartiens à un
56 ud, pôles contraires d’une opposition violente qu’ il me fallait vivre et penser. Tous ces noms sont français ; c’est pourt
57 ironique. Si Goethe a été pour moi la mesure et s’ il m’a convaincu de la valeur de l’action, à laquelle je consacre le plu
58 déroute. Le ton, peut-être. Le fond demeure ce qu’ il était, car il s’est toujours agi pour moi d’une présence au monde et
59 n, peut-être. Le fond demeure ce qu’il était, car il s’est toujours agi pour moi d’une présence au monde et à moi-même con
60 ne présence au monde et à moi-même conjointement… Il est vrai que beaucoup de choses changeaient alors en très peu de temp
61 ’entre en relation avec un groupe de jeunes gens. Ils ont mon âge, mes préoccupations. En quelques mois se trouve fondé un
62 e fondé un mouvement dont je demeure convaincu qu’ il se révélera le plus fécond de notre temps — sous d’autres noms, peut-
63 é n’est pas celui qui s’en remet à un parti quand il s’agit de prendre une position publique. Au contraire, c’est un homme
64 ire : j’en réponds ! Mais de quoi l’écrivain peut- il répondre ? De ce qu’il écrit, bien sûr, et de la manière dont il l’éc
65 is de quoi l’écrivain peut-il répondre ? De ce qu’ il écrit, bien sûr, et de la manière dont il l’écrit. C’est ce que Pens
66 e ce qu’il écrit, bien sûr, et de la manière dont il l’écrit. C’est ce que Penser avec les mains veut illustrer. J’ai po
67 ant lu ma première version, Paulhan m’écrivit : «  Il faut choisir : ou bien vous exposez des idées, ou bien vous jouez du
68 e quel texte, même de doctrine politique, comme s’ il s’agissait d’un poème. Dans les années 1930, vous dirigiez ou, au moi
69 rois revues. Vous collaboriez à plusieurs autres. Elles représentaient pourtant des tendances divergentes. L’éclectisme est m
70 attaché. La réalité est faite d’antinomies, dont il faut respecter chacun des termes en les maintenant en tension, sans c
71 séparation ni subordination de l’un à l’autre, qu’ il s’agisse de l’homme et de la femme dans le couple, ou de la personne
72 Journal d’une époque  ? J’ai toujours précisé qu’ il s’agissait là de journaux non intimes, situés à égale distance de la
73 nt de reparaître en édition « définitive » puisqu’ il réunit un terme affectif à un terme géopolitique : L’Amour et l’Occi
74 e pensée politique et religieuse, comment se fait- il que l’amour vous ait intéressé ? Dites-moi plutôt comment il faudrait
75 our vous ait intéressé ? Dites-moi plutôt comment il faudrait faire pour ne pas s’y intéresser ! Le point de départ de ma
76 foucauld : « Combien d’hommes seraient amoureux s’ ils n’avaient jamais entendu parler d’amour ? » Il me parut urgent de met
77 s’ils n’avaient jamais entendu parler d’amour ? » Il me parut urgent de mettre en relation (de nouveau, n’est-ce pas, une
78 ire est l’histoire de manifestations successives… Il faut aussi se souvenir que mon historicisme est fondé en théologie. L
79 procurateur de Judée, assez récemment découverte. Il ne s’agit pas d’un mythe, mais bien d’une irréductibilité temporelle.
80 propose d’en faire un livre pour la collection qu’ il dirige. Je promets, je ne fais rien. La date approche. Quel soulageme
81 eune lieutenant-colonel dont le livre est, me dit- il , des plus urgents : La France et son armée, par Charles de Gaulle. Ma
82 , m’avait préparé à l’écrire. C’est qu’en un sens il s’agissait d’appliquer le personnalisme au domaine de l’érotique. Ent
83 e au domaine de l’érotique. Entre deux individus, il ne peut y avoir qu’une liaison. Mais quand il y a engagement réel et
84 et engagement, alors la personne peut s’épanouir. Il n’y a mariage qu’entre personnes. Et c’est pourquoi le mariage est un
85 ! Condamner la passion n’aurait pas de sens. Mais il est fou de vouloir fonder le mariage sur l’amour seul, car la passion
86 ion est née contre le mariage. C’est un paradoxe. Il en est d’autres. Votre pensée si grave… C’est vous qui le dites ! N’o
87 e est à la fois libre et responsable : paradoxe ! Il ne devient lui-même que par la vocation, ce sentier qui se crée sous
88 réel, c’est le respect du paradoxe. C’est vrai qu’ il m’amuse, vrai qu’il correspond à un goût profond. Mais il est d’abord
89 ct du paradoxe. C’est vrai qu’il m’amuse, vrai qu’ il correspond à un goût profond. Mais il est d’abord la condition de tou
90 se, vrai qu’il correspond à un goût profond. Mais il est d’abord la condition de toutes les libertés, qui est le respect d
91 les libertés, qui est le respect des antinomies. Il est la légèreté de l’esprit et la tension nécessaire à son action.
92 agir, d’être étudié, de provoquer des polémiques, il me paraissait nécessaire de le réassumer, de renouveler mon engagemen
93 on est même plus profonde qu’on ne le croit, mais elle va dans le sens que j’annonçais. Il me semble que nous assistons à un
94 croit, mais elle va dans le sens que j’annonçais. Il me semble que nous assistons à un nouveau surgissement du principe fé
95 rs de l’avenir de l’Europe et du monde ! C’est qu’ il faut partir de l’avenir si l’on veut comprendre l’aujourd’hui. La voc
96 t-ce, sinon le futur éternel ? Avant toute chose, il faut considérer la fin ! C’est vrai que je collabore aux études sur l
97 je collabore aux études sur l’an 2000. Seulement, il faut comprendre qu’une prévision passive est un non-sens. C’est folie
98 oit contraint de choisir librement son avenir. Et il y est contraint du seul fait qu’il en a, pour la première fois, la li
99 son avenir. Et il y est contraint du seul fait qu’ il en a, pour la première fois, la liberté. » Vous me direz que c’est en
100 ée et la vie publique, l’art et la politique. Par elle seront conciliés le philosophe, le publiciste, le poète, l’homme d’ac
101 débouche naturellement sur la scène politique, où elle se fera connaître sous le nom de personnalisme. Elle suppose une orga
102 e se fera connaître sous le nom de personnalisme. Elle suppose une organisation de l’État où l’un et les divers seront conci
103 et les divers seront conciliés : le fédéralisme. Elle conduit son auteur à l’action. Denis de Rougemont a consacré à la cau
104 Rougemont a consacré à la cause de l’Europe, dont il connaît les visages différents, dont il a vécu les terribles déchirem
105 ope, dont il connaît les visages différents, dont il a vécu les terribles déchirements, une part importante de son temps,
106 ateur, en 1950, du Centre européen de la culture, il en assure depuis la direction, anime les campagnes d’éducation civiqu
8 1972, Le Monde et Le Monde diplomatique (1950-1982). Descartes inversé ou le zen occidental (14 décembre 1972)
107 rrassé de tant de recettes et d’ordres assénés qu’ il me semblait, d’un exercice à l’autre, n’avoir fait de progrès que dan
108 tout jeune lieutenant. — « Vous tirez mal », dit- il avec une douceur froide, au moment où je me félicitais d’avoir encore
109 int, très loin du noir, mais enfin dans la cible. Il se baissa vers moi, me saisit la main droite et l’écarta de la garde
110 te et l’écarta de la garde du fusil. « Voyez, dit- il , comme vos doigts sont crispés. Rien d’étonnant si vous tirez trop ba
111 Vous arrachez… Voulez-vous apprendre à tirer ? » Il me regarda, et voyant dans mes yeux une bonne volonté en détresse : «
112 ne volonté en détresse : « C’est très simple, dit- il . Cela tient en trois mots : pensez au noir ! Ne pensez pas à votre ma
113 s moi tandis que je gonflais mes poumons. Soudain il me parut plus large, plus proche, bien mat, et immobile… La détonatio
114 mots de ce jeune officier — « pensez au noir » —, elles ne devaient m’apparaître qu’après bien des années, à l’épreuve de bie
115 t peuvent être nuisibles dans la mesure exacte où ils absorbent l’attention, la détournent du but, ou le font oublier. 2) L
116 cace commence donc par la fin. Avant toute chose, il faut considérer la fin. 4) Si la fin ne justifie pas les moyens, qu’e
117 utre fin, évidemment. C’est de la fin des fins qu’ il nous faut donc partir. 5) La fin seule justifie les moyens s’ils sont
118 onc partir. 5) La fin seule justifie les moyens s’ ils sont les vrais moyens d’une juste fin. Car nulle fin ne peut communiq
119 nulle fin ne peut communiquer plus de justice qu’ elle n’en comporte ; et cela, aux seuls moyens qui portent à cette fin. Un
120 applique. Une fin toute juste justifie tout ce qu’ elle inspire pour la rejoindre en vérité — et c’est Dieu seul1. Le jugemen
121 ns qu’à partir des fins qui les dictent, selon qu’ elles sont bonnes ou mauvaises, relativement à d’autres fins plus hautes, e
9 1974, Le Monde et Le Monde diplomatique (1950-1982). La révolte des régions : l’État-nation contre l’Europe (mars 1974)
122 ébrouiller quelques malentendus fondamentaux dont ils me semblent les victimes. Et d’abord replaçons le concept de région d
123 rd’hui — et non pas du xixe siècle — hors duquel il ne serait, en effet, qu’« absurde » et « médiéval ». Il existe une ra
124 serait, en effet, qu’« absurde » et « médiéval ». Il existe une raison majeure d’unir les Européens du xxe siècle : évite
125 is la colonisation est une mauvaise chose. Non qu’ ils soient pires que nous, mais la colonisation est pire que tout. Il exi
126 que nous, mais la colonisation est pire que tout. Il existe deux raisons majeures de promouvoir les régions en Europe : On
127 e —, et les régions en fourniront le seul moyen ; Il est vital de rendre aux citoyens la possibilité de participer aux déc
128 onde moderne. Le général de Gaulle l’avait senti. Il a choisi de tomber sur « l’affaire des régions ». Le paladin de l’Eur
129 joué. Ses successeurs, hélas, l’ont mal compris. Ils ferment tout ce que le général voulait ouvrir. M. Messmer explique, à
130 s directes et plus étroites avec l’extérieur » et il précisait : le Nord avec la Belgique, la Lorraine et l’Alsace avec l’
131 s politiques au pouvoir aujourd’hui proclament qu’ il faut la faire et font semblant de la vouloir, parce qu’ils savent bie
132 la faire et font semblant de la vouloir, parce qu’ ils savent bien que c’est impossible sur les bases stato-nationales, seul
133 . Et ce ne sont pas les difficultés économiques : elles seules ont contraint les États à quelques lents progrès dans le sens
134 par M. Pompidou dans son discours de Poitiers : «  Il a fallu mille ans, ou presque, d’efforts pour créer une existence nat
135 ale de la politique régionale. Quant aux ethnies, elles donnent lieu à des activités de plus en plus intenses et variées, qui
136 la région ne devait être qu’un mini-État-nation, elle aggraverait encore cette néfaste formule, ne fût-ce qu’en multipliant
137 réalités hétéroclites la médiocrité de l’horizon. Elles seront ouvertes les unes aux autres, et leur objectif général sera de
138 de Berne, est née des seuls excès de centralisme. Elle traduit le sentiment de culpabilité de l’ethnie qui a réduit les autr
139 à son « unité nationale », — valeur suprême pour elle , oppression pour les autres. La révolte des ethnies montre que leurs
140 nt insolubles dans le cadre stato-national, et qu’ ils appellent la fédération du continent. Que cette révolte ait servi de
141 qu’on pardonne leur nationalisme souvent borné : il n’est dangereux que pour elles seules, alors que le stato-nationalism
142 lisme souvent borné : il n’est dangereux que pour elles seules, alors que le stato-nationalisme est dangereux pour le genre h
143 n mouvement puissant, profond et prometteur, dont il semble bien que les hommes politiques cités plus haut ignorent à la f
144 ions, les finalités et l’ampleur. Non, messieurs, il ne s’agit pas d’une émeute, mais d’une révolution, et d’une espèce qu
145 lution, et d’une espèce qui a de quoi surprendre. Il s’agit de recréer en Occident le sens de la communauté, qu’elle soit
146 recréer en Occident le sens de la communauté, qu’ elle soit de production ou d’usage, de langage, de recherche, de travail o
147 travail ou de jeu, ou même d’attente spirituelle. Il s’agit de rendre un sens à ces mots de notre langue que vos calculs o
10 1974, Le Monde et Le Monde diplomatique (1950-1982). Robert Aron : le témoin d’une génération passionnée (9 mars 1974)
148 s les premières revues et groupes personnalistes. Il venait du surréalisme, dont il avait conservé une sorte d’aura aventu
149 es personnalistes. Il venait du surréalisme, dont il avait conservé une sorte d’aura aventureuse, et il s’occupait, je cro
150 l avait conservé une sorte d’aura aventureuse, et il s’occupait, je crois, des Cahiers du cinéma chez Gallimard, où il dis
151 e crois, des Cahiers du cinéma chez Gallimard, où il disposait d’un bureau contigu à la mansarde où Jean Paulhan, seul ave
152 ux larges cernes, et sa distraction proverbiale — il était, disait-il, le seul officier français qui eût réussi avec son p
153 et sa distraction proverbiale — il était, disait- il , le seul officier français qui eût réussi avec son propre sabre, — ma
154 pide, et beaucoup de présence d’esprit politique. Il était, dans notre groupe, le complément parfait d’Arnaud Dandieu, ave
155 complément parfait d’Arnaud Dandieu, avec lequel il allait signer trois livres mémorables. Dandieu, c’était la rigueur mê
156 mémorables. Dandieu, c’était la rigueur même, et il avait tout lu ; Robert Aron, c’était l’imaginatif vagabond, et il sav
157  ; Robert Aron, c’était l’imaginatif vagabond, et il savait mettre en scène les idées. À eux deux, ils ont donné deux ou t
158 il savait mettre en scène les idées. À eux deux, ils ont donné deux ou trois des ouvrages de base du mouvement personnalis
159 es convictions politiques de notre jeunesse, mais il s’y ajoutait une dimension nouvelle de recherche religieuse : celle q
11 1979, Le Monde et Le Monde diplomatique (1950-1982). Avez-vous lu Jérôme Deshusses ? (16 mars 1979)
160 ui lui servait de secrétaire, Voltaire disait : «  Il a lu tous les Pères — et il nous le fait payer ! » Jérôme Deshusses a
161 , Voltaire disait : « Il a lu tous les Pères — et il nous le fait payer ! » Jérôme Deshusses a lu non pas une fois mais si
162 e, plus efficace, ni plus radicale, en ce sens qu’ elle nous réfère sans cesse à ses racines, ce qui ne veut nullement dire a
163 même que les racines expliquent moins la fleur qu’ elles ne sont impliquées par elle, la fin d’une phrase justifie seule son c
164 nt moins la fleur qu’elles ne sont impliquées par elle , la fin d’une phrase justifie seule son commencement, et toute arrivé
165 t produit du passé, non l’inverse. Mais qu’en est- il du présent de ce siècle ? Jérôme Deshusses le voit comme la Géhenne,
166 tantes, Deshusses nous donne une description dont il dit bien qu’elle n’est pas la première — car « le dessein de faire pi
167 es nous donne une description dont il dit bien qu’ elle n’est pas la première — car « le dessein de faire pièce à des calamit
168 aire pièce à des calamités oblige à répéter ce qu’ elles ressassent », — mais que je tiens pour la plus signifiante, donc la p
169 nature ne pardonne pas, n’oublie rien… Des coups, elle peut en supporter mille et rendre soudain non pas œil pour œil mais a
170 famine et la guerre, nous n’aurons pas le choix : il faudra subir les deux. » Surtout qu’on ne parle pas de « retour à la
171 e entière, cette fois, qui en est à tout risquer. Il faut donc que ce soit pour tout avoir… Ou bien la terre n’est plus vo
172 strophe, même si les catastrophes l’environnent : il veut dire ‟révélation” ». Entre Géhenne et Parousie, six chapitres no
173 étation éthique d’un grand nombre des exemples qu’ il allègue, je coïncide pour l’essentiel avec ses vues philosophiques, t
174 hilosophiques, tout en ressentant l’absence — est- elle voulue ? — d’une Politique qui montrerait quelques moyens de répondre
175 eur de la déduction que par l’insolence du style, ils ont fait reculer jusqu’ici les critiques cherchant des repères mais q
176 ante ans, j’imagine — est de gauche ou de droite. Il condamne la propriété, exige l’égalité totale, dénonce le couple mais
177 Jérôme Deshusses a le temps pour — à supposer qu’ il nous en reste. Comme vient de le définir un petit hebdo contestataire
178 oin de toutes modes, un vrai « penseur de fond ». Il était temps. o. Rougemont Denis de, « Avez-vous lu Jérôme Deshuss
12 1979, Le Monde et Le Monde diplomatique (1950-1982). Le fédéralisme helvétique dans l’Europe d’aujourd’hui (24-25 juin 1979)
179 ette fin l’« immédiateté impériale » : désormais, elles ne relèveront plus des seigneuries ni des puissances voisines, mais d
180 unauté du continent. À cette garantie, symbolique elle aussi, il est donc nécessaire d’ajouter l’assurance très concrète d’u
181 ntinent. À cette garantie, symbolique elle aussi, il est donc nécessaire d’ajouter l’assurance très concrète d’un pacte de
182 291, « statué pour l’utilité commune et devant, s’ il plaît à Dieu, durer à perpétuité ». Autour de ce premier noyau fédéra
183 vallées comme les ligues grisonnes, qui forment à elles seules un microcosme des ligues suisses. Dans cet ensemble hétéroclit
184 , s’organisent en cantons ou en États souverains. Elles n’éprouveront la nécessité de consolider leurs liens séculaires qu’en
185 t faire mieux que renouveler leur pacte général : ils se dotent en neuf mois d’une Constitution fédérale dont il importe de
186 ent en neuf mois d’une Constitution fédérale dont il importe de rappeler ici les caractéristiques mémorables. L’article pr
187 pas limitée par la Constitution fédérale », et qu’ ils exercent « tous les droits qui ne sont pas délégués au pouvoir fédéra
188 aux limites posées à la souveraineté des cantons, elles sont définies par l’article 8 : « La Confédération a seule le droit d
189 nversés par les chambres. Si tel projet de loi qu’ ils présentent n’est pas accepté, ils le retirent sans se retirer eux-mêm
190 rojet de loi qu’ils présentent n’est pas accepté, ils le retirent sans se retirer eux-mêmes. Les droits d’initiative et de
191 solutions. L’union pour la diversité Ce qu’ il importe de souligner, c’est que la fédération n’a pas pour but la cré
192 le Tessin par l’Italianita. Quant à la Romandie, elle eût subi le sort de Genève — l’annexion pure et simple, assaisonnée d
193 fédérale est une union dans la diversité comme s’ il s’agissait là d’une prouesse paradoxale ou d’un compromis empirique.
194 mais pour la maintenir et perpétuer, parce qu’en elle seule, résident la santé et la vitalité de l’ensemble. On voit ici la
195 un magma informe », comme certains le ressassent. Il n’y a en vérité aucune raison pour qu’une Europe fédérale fasse aux É
196 n, toutes les fédérations existantes ne se voient- elles pas contraintes, sous la pression des faits, à renforcer les mesures
197 s mesures de centralisation ? La Suisse même peut- elle échapper à ce processus ? C’est oublier que le principe de répartitio
198 nihan formulait naguère à propos des USA, mais qu’ il est facile de transposer en termes européens : « Ne confiez jamais à
199 , le gouvernement fédéral ne doit pas le faire. » Il est normal qu’à mesure qu’augmentent les dimensions des tâches — tran
200 l (pour les objets cités ci-dessus) ou mondial (s’ il s’agit des océans et des forêts de la planète, c’est-à-dire de l’air
201 t de plus en plus continentales, voire mondiales, il apparaît que la formule fédérale qui a fait la Suisse ne peut plus se
202 campagne pour l’élection de l’Assemblée des Neuf, elle devient très révélatrice du taux de sincérité des partisans de l’unio
13 1982, Le Monde et Le Monde diplomatique (1950-1982). L’amour, les régions et l’Occident (20 août 1982)
203 que j’ai connus dès mon arrivée à Paris en 1931. Ils allaient publier les revues Esprit et L’Ordre nouveau 2, auxquell
204 e. Quant à L’Amour et l’Occident , paru en 1939, il est né de la rencontre dramatique de l’engagement et de la passion. D
205 n à quinze jours de forteresse, mais, après cela, il me devenait difficile de signer mes articles autrement que par trois
206 cessaire pour faire comprendre au monde entier qu’ il est des victoires impossibles. On ne conquiert pas avec des chars les
207 us votre réputation d’homme d’extrême droite ? — ( Il se fâche.) Où prenez-vous ça ? Il faudrait n’avoir rien lu de moi, sa
208 ême droite ? — (Il se fâche.) Où prenez-vous ça ? Il faudrait n’avoir rien lu de moi, sauf quelques citations dans un libe
209 BHL3, qui croit pouvoir faire de moi un pronazi — il s’imagine que Hitler était un homme de droite — à coups de textes fal
210 re, et surtout dans mon Journal d’Allemagne , qu’ il se garde bien de citer. Moi, j’ai cité, mais en correctionnelle, un c
211 ar signifier embrigadement, le contraire de ce qu’ il signifiait pour nous. Selon ses commentateurs, le succès de Sartre da
212 ibre et responsable ». Sartre savait très bien où il les avait prises, et me l’a dit tout net à New York, mais ne l’a jama
213 York, mais ne l’a jamais répété à Paris, semble-t- il . Du personnalisme, des personnalistes, que reste-t-il aujourd’hui ? I
214 Du personnalisme, des personnalistes, que reste-t- il aujourd’hui ? Ils ont donné à la Résistance son idéologie d’union des
215 des personnalistes, que reste-t-il aujourd’hui ? Ils ont donné à la Résistance son idéologie d’union des peuples européens
216 , en Italie autant qu’en Hollande et en Belgique. Ils ont influencé plus ou moins profondément plusieurs chefs d’État et le
217 ’avenir du personnalisme ? Eh bien, j’ose dire qu’ il se confond désormais avec l’avenir de la fédération européenne, ce qu
218 nt ! Bien moins par conviction que par nécessité, il est important de le marquer. Peut-être qu’elle y viendra vraiment, pu
219 ité, il est important de le marquer. Peut-être qu’ elle y viendra vraiment, puisque les deux ministres chargés de la régional
220 t les personnalistes se sont toujours méfiés, car il suppose que c’est encore au centre qu’appartient la distribution des
221 oc. Mais les régions s’articulent tout autrement. Elles se groupent, se recouvrent, vivent en symbiose comme les cellules d’u
222 ceux qui le lisaient pendant la dernière guerre : ils prennent conscience de ce que sont la passion et le mariage, et de le
223 es obstacles à la passion, ou ses excitants, sont- ils les mêmes ? Les tabous ne sont pas des modes. L’inceste a été condamn
224 otre époque ? Pour l’inconscient, par définition, il est impossible de vous répondre, du moins tout de suite. Aujourd’hui,
225 aura démontré que mes efforts resteront vains, qu’ ils ne changeront en rien les destins de ce siècle, je persisterai dans m
226 œuvre — j’ai encore douze volumes en train — car elle contribue à coup sûr à ma joie et peut-être à mon salut. Et merci Die
227 vec le groupuscule fascisant d’après-guerre, faut- il le préciser. 3. L’Idéologie française, de Bernard-Henri Lévy. 4. V
228 au pied du Jura, près de Saint-Genis-Pouilly, où il a rénové une grande ferme du xviiie siècle. Assis près de la haute c
229 ard gris et rose dans le col d’une chemise noire, il fait beaucoup plus jeune que ses soixante-quinze ans. Déjà, à New Yor
230 n vous imaginait avec une grande barbe blanche !” Il n’a toujours pas cette tête-là, et il déroute toujours autant le publ
231 blanche !” Il n’a toujours pas cette tête-là, et il déroute toujours autant le public, pour qui il est tantôt le théorici
232 et il déroute toujours autant le public, pour qui il est tantôt le théoricien de l’amour-passion, tantôt le militant d’une