1 1937, Les Nouveaux Cahiers (1937-1939). Violence et brutalité (1er juin 1937)
1 n’y aurait ni effort, ni création. On aboutirait, dans le cas le plus favorable, à un banal échange d’informations, dans l’i
2 lus favorable, à un banal échange d’informations, dans l’indifférence générale. Il y a donc, me semble-t-il, un intérêt urge
3 ers, à préciser la signification du mot violence, dans la mesure où cela dépend de nous, c’est-à-dire à l’intérieur du group
4 de nous, c’est-à-dire à l’intérieur du groupe et dans ces pages. Sur le « pouvoir des mots » « Simple question de voca
5 es ; qu’elles sont mêlées à toutes nos activités, dans la mesure où la pensée y est mêlée ; qu’elles entraînent et symbolise
6 me de référence qui est en train de se constituer dans divers groupes. Les mots que nous étudions ici ne sont pas « vides »
7 e mesure » pour les diverses activités de l’homme dans le cadre de la nation. Essayons donc de définir le mot « violence »,
8 tenu qu’il paraît juste ou utile de lui attribuer dans l’ordre nouveau. Origine du préjugé contre la violence Il faut
9 a pu se produire. J’en vois la principale raison dans ce qu’on est convenu d’appeler la morale bourgeoise, ou mieux : dans
10 onvenu d’appeler la morale bourgeoise, ou mieux : dans la conception du monde née de l’établissement de la bourgeoisie au po
11 ie au pouvoir. Conception qui se fonde d’ailleurs dans une tendance permanente de l’homme ; le besoin de sécurité. Mais ce b
12 omme fixé, par suite des conditions particulières dans lesquelles la bourgeoisie a conquis le pouvoir et l’a gardé pendant u
13 domine ou étouffe, tels que la lutte des classes, dans l’ordre économico-social, ou les « idées subversives » que produit in
14 tte espèce d’optimisme désarmant qui se manifeste dans des expressions telles que : « Cela ne peut pas être vrai : ce serait
15 ndamner la brutalité —, on se met à abuser du mot dans le sens le plus péjoratif. J’en donnerai un exemple qui fait bien voi
16 seules véritables doctrines de violence apparues dans notre époque sont celles de Nietzsche et de Georges Sorel : elles s’a
17 tions sémantiques intéressées, et de le restaurer dans sa puissance active, libératrice. La violence est le fait même de l’e
18 ’esprit créateur. Dès que l’esprit fait irruption dans le monde, pour y réaliser ses vues, il fait violence à un état de cho
19 es, il fait violence à un état de choses. Et ceci dans n’importe quel domaine, qu’il s’agisse d’élever des blocs de pierre à
20 lle seule qui l’empêche de se laisser emprisonner dans ses propres institutions, lorsque celles-ci ont cessé de le servir. T
21 ée » de la loi de pesanteur, puis elle est placée dans une « organisation » nouvelle, et tout cela s’opère en vertu d’une dé
22 lles sont souvent liées. (Il y a peu de tons purs dans la vie.) La brutalité tue la violence Par opposition à la viole
23 êtir un aspect non matériel : par exemple, il y a dans la logique une certaine brutalité, reconnaissable à un caractère de c
24 Aussi se donne-t-elle pour première tâche de tuer dans la jeunesse toute velléité de violence spirituelle. L’éducation fasci
25 esquieu a dit l’essentiel sur cette brutalité-là, dans son fameux chapitre en trois lignes de L’Esprit des Lois : « Quand le
26 ndre la violence et la brutalité, c’est se placer dans une position spirituelle inférieure, pour autant que la défensive est
27 créations. Mais la méthode qui règne actuellement dans les « démocraties de l’Ouest » — comme dit le Führer — et qui consist
28 ussi d’analyser la valeur ambiguë de « violence » dans l’acte du viol, qui paraît une brutalité. Mais cela nous entraînerait
2 1937, Les Nouveaux Cahiers (1937-1939). Comment savoir à quoi ils pensent (Quelques remarques sur la méthode) (1er novembre 1937)
29 t que la curiosité, rien n’est moins désintéressé dans ses mobiles. Sans doute une analyse un peu poussée révélerait-elle à
30 sont la défense ou l’attaque, et qui apparaissent dans leur belle nudité lorsqu’un amant demande à l’autre : « À quoi penses
31 utre. Que savons-nous des résonances qu’éveillent dans « le peuple » les grands mots du langage politique ? Et du sens qu’il
32 être vrai statistiquement ne l’est presque jamais dans le détail. Plus on s’approche d’un groupement défini et concret, plus
33 ner une impression d’absurdité troublante. Je lis dans un livre récentc : L’autre jour, dans l’autocar, une femme dont j’ai
34 te. Je lis dans un livre récentc : L’autre jour, dans l’autocar, une femme dont j’ai cru comprendre qu’elle tient un petit
35 t, résume un drame. Ce drame est celui du langage dans notre société présente. Les mots que nous disons ou que nous écrivons
36 us écrivons, nous autres intellectuels, éveillent dans l’esprit populaire des harmoniques que nous ne savons plus prévoir. »
37 approchement absurde. Il fait erreur. Nous sommes dans le Midi, où un sentiment obscur de latinité a survécu. Et épices (d’o
38 norer qu’il ne s’agit que d’approximations, voire dans certains cas, de calembours. (Exemple : les sens contradictoires que
39 prennent au dépourvu. Il n’a pas formé de phrases dans sa tête sur ce sujet dont le journal ne parle jamais. Ou bien, sur te
40 rudence, d’informations hétéroclites, par repérer dans les grandes lignes la vraie nature de leurs soucis, mieux qu’ils ne s
41 ubitement révélatrice. En voici un petit exemple. Dans cette pauvre région de l’Ouest, je rencontre une vieille paysanne. El
42 alors on courra le risque inverse : on retombera dans les schémas, les généralisations banales et tendancieuses qui sont le
43 le Scylla du trop prévu, il faut savoir naviguer dans le « courant » c’est-à-dire se maintenir au niveau des phrases d’écha
44 uel pour que les petites déformations qu’il subit dans un groupe donné deviennent aisément perceptibles : ce sont elles qui
45 ocable usé, ou par l’emploi imprévu qu’il en fait dans le contexte de son discours, de son milieu, de sa vie quotidienne, qu
3 1937, Les Nouveaux Cahiers (1937-1939). Lectures dirigées dans le IIIe Reich (15 décembre 1937)
46 Lectures dirigées dans le IIIe Reich (15 décembre 1937)d J’ai sous les yeux deux document
47 dée raciale ; Race, droit, peuple ; Race et état dans le domaine Nord-Est ; Traits fondamentaux de l’histoire raciale allem
48 te d’autres maisons d’édition qui se spécialisent dans la littérature pure, et chez lesquelles on ne trouvera, sur cent titr
49 u lecteur allemand moyen. Il faut se rappeler que dans un état totalitaire, la question « à quoi pensent ?… » tend à se rédu
50 e littérature, de politique, et même de religion. Dans sa livraison de décembre, le rédacteur en chef, Wilhelm Stapel, publi
51 and », « germain », « nordique », reviennent donc dans 13 titres. Et la moitié des autres, au moins, évoquent de la façon la
52  ». d. Rougemont Denis de, « Lectures dirigées dans le IIIe Reich », Les Nouveaux Cahiers, Paris, 15 décembre 1937, p. 16
4 1938, Les Nouveaux Cahiers (1937-1939). Du danger de s’unir (15 avril 1938)
53 sacrée. Mais ce qui m’apparaît le plus dangereux dans cette affaire, ce n’est pas l’hypocrisie ni l’esprit partisan, c’est
54 rse au Sénat. Et que font ces trois partis réunis dans le Front populaire ? Leurs gouvernements successifs qualifient l’un a
55 elle annexion. Il ne manque pas de Seiss-Inquart, dans les deux camps, pour appeler au secours les troupes adverses et les p
56 e union de ce type, qui n’est qu’une unification. Dans la mesure où on la voudra, on voudra donc la force brutale. On voudra
57 aline, Mussolini. La force de la France n’est pas dans son union. Elle est dans sa capacité unique au monde de supporter les
58 e de la France n’est pas dans son union. Elle est dans sa capacité unique au monde de supporter les désunions, ou pour mieux
59 s franches oppositions. La force de la France est dans la création, et non pas dans la discipline ; dans l’invention, non da
60 rce de la France est dans la création, et non pas dans la discipline ; dans l’invention, non dans la marche en rangs. Un peu
61 dans la création, et non pas dans la discipline ; dans l’invention, non dans la marche en rangs. Un peuple qui accepte une d
62 on pas dans la discipline ; dans l’invention, non dans la marche en rangs. Un peuple qui accepte une dictature se décerne un
63 sens matérialiste et militaire que prend ce terme dans l’Europe fascisée. On ne défend bien que ce qui vaut d’être défendu.
64 de l’écrasante supériorité qu’elle peut signifier dans l’avenir, si nous cessons de nous énerver, si nous osons vivre la pai
5 1938, Les Nouveaux Cahiers (1937-1939). Vues sur le national-socialisme (1er juin 1938)
65 1935 et 1936 par l’auteur, alors chargé de cours dans une Université allemande de l’Ouest. On a choisi parmi ces observatio
66 ence du sens civique, loi générale qui se vérifie dans tout pays totalitaire. D’autre part, le régime nouveau a pris à tâche
67 r tout intérêt privé. Voilà la grande révolution, dans un pays ou la vie intérieure d’une part, et la séparation des classes
68 s tard. — Ce camp ? — Eh bien voilà : nous étions dans une grande maison, logeant deux par deux dans des chambres confortabl
69 ons dans une grande maison, logeant deux par deux dans des chambres confortables. J’avais pour compagnon un ouvrier de mon u
70 esté. (Note de 1938 : cet étudiant vient d’entrer dans le Parti.) Parents et enfants. — Déjeuner chez un avocat. Madame se
71 est celle que la tactique moderne exige du soldat dans le terrain. Contraindre, ce serait peu. Mais s’emparer de la liberté
72 eunes, voilà le totalitarisme. Un communiste. —  Dans sa petite cuisine, où nous sommes attablés, depuis deux heures il me
73 , comme s’ils ne sentaient pas ce je ne sais quoi dans l’atmosphère qui faisait que toutes les descriptions « objectives » d
74 cérémonie sacrée. — Trois heures de l’après-midi, dans un café près de l’Opéra. Je dis à mon compagnon, le dramaturge allema
75 ’ici là, ces hommes ne bougeront pas. Je me perds dans des labyrinthes de barrages jusqu’aux abords de la Festhalle — tout u
76 dix minutes 30 000 places assises ? Je me glisse dans des rangs compacts derrière les bancs. Je verrai très bien la tribune
77 s affiches annonçaient un appel général du Parti, dans les 45 salles de la ville, pour la même heure. Avec tout ce que les t
78 les trains spéciaux ont déversé depuis la veille dans cette cité de 700 000 habitants, et les autocars, et l’afflux des cam
79 pettes au-dehors. Toutes les lumières s’éteignent dans la salle, tandis que des flèches lumineuses s’allument sur la voûte,
80 ng. Personne ne peut remarquer que j’ai les mains dans mes poches : ils sont dressés, immobiles et hurlant en mesure, les ye
81 ire extasié, et des larmes coulent sur les faces, dans l’ombre. Et soudain tout s’apaise. Il a étendu le bras énergiquement
82 rouge et la Réaction tuèrent — marchent en esprit dans nos rangs. » J’ai compris. Cela ne peut se comprendre que par une sor
83 ommunisme. Ce qui m’effraye, c’est leur souplesse dans l’erreur. Il a fallu si peu changer pour « expliquer » à l’aide des m
84 au sens politique et légal, qui a jeté l’Autriche dans les bras du Führer. Mais c’est l’attraction passionnée qu’exerce une
85 ses décomposées par des siècles d’individualisme. Dans une société où tous les liens originels sont dissous ; où les religio
86 e mesure a disparu, — il est fatal que se répande dans les masses et que s’installe au cœur de chaque individu une angoisse,
87 s à y prendre. » Certes, Hitler a rétabli l’ordre dans la rue. Il fait régner la paix sociale. Il y avait six millions de ch
88 bénévole, à l’effort de la propagande totalitaire dans nos pays. Ils le font sans malice, et au nom du bon sens. Ils me rapp
89 e ne signifiait pas, justement, que tout se tient dans ce régime, et que rien ne peut en être détaché sous peine de perdre t
90 la volonté des hommes n’a jamais pesé si peu que dans les régimes totalitaires. Ce n’est pas le chef qui commande, et ce ne
91 de la liberté. Il n’y a de solution pratique que dans un vaste effort moral des grandes et des petites démocraties pour rés
92 ême goût des fêtes symboliques données par l’État dans l’intention — avouée par le conventionnel Cloots — de discipliner les
6 1939, Les Nouveaux Cahiers (1937-1939). Faire le jeu d’Hitler (1er janvier 1939)
93 tes aux armes, mais simplement pour leur montrer, dans la mesure de ses moyens, quelle était la réalité de la menace. Il con
94 Ie Reich pour y avoir vécu un an. Il estimait que dans l’intérêt même d’une défense efficace, il importait de faire connaîtr
95 aiblesse de l’adversaire. Il écrivait à ce sujet ( dans un langage qui, selon lui, ne devait point permettre d’équivoque) : «
96 », ce qu’il y a de bon et ce qu’il y a de mauvais dans l’hitlérisme. Et concluait sur une pressante mise en garde contre l’e
97 qui trahit la présence d’une passion inavouable. Dans un monde comme le nôtre, où si peu d’hommes connaissent leur vraie cr
98 fût-ce même par leur orthodoxie trop rigoureuse. Dans tous les cas et à tous les stades, c’est la tendance que l’on punit,
99 ental de la mentalité totalitaire que je retrouve dans les écrits et les propos de certains de nos « antifascistes ». Ceux q
100 ue le parallèle gauche-droite n’est pas rigoureux dans ce cas. L’écrivain « objectif » se voit traité d’hitlérien par certai