1 1937, Les Nouveaux Cahiers (1937-1939). Violence et brutalité (1er juin 1937)
1 Violence et brutalité (1er juin 1937)a À plusieurs reprises, les collaborateur
2 méthodes de violence, les solutions de violence, et qu’ils s’efforçaient d’y substituer une méthode de collaboration et d
3 aient d’y substituer une méthode de collaboration et de compréhension réciproque. Or, une collaboration et une compréhensi
4 e compréhension réciproque. Or, une collaboration et une compréhension réciproques ne peuvent être fécondes que si elles r
5 vant antagonistes (c’est-à-dire dont les intérêts et les desseins divergeaient) s’imposent et cherchent à atteindre au moy
6 intérêts et les desseins divergeaient) s’imposent et cherchent à atteindre au moyen d’une discipline commune. Mais toute n
7 des antagonismes, c’est leur « faire violence » ; et s’imposer une discipline en vue d’atteindre un but commun, c’est enco
8 ion réciproque ne serait qu’une constatation pure et simple, une tautologie, une formalité ennuyeuse. Il n’y aurait ni eff
9 end de nous, c’est-à-dire à l’intérieur du groupe et dans ces pages. Sur le « pouvoir des mots » « Simple question de
10 re où la pensée y est mêlée ; qu’elles entraînent et symbolisent à peu près toutes les « questions actuelles » ; bref, que
11 la trahissent ; qui en assurent la signification et l’efficacité, ou qui faussent cette signification et masquent une ine
12 l’efficacité, ou qui faussent cette signification et masquent une inefficacité réelle. Toute définition de mot, qu’on le s
13 définition de mot, qu’on le sache ou non, suppose et définit une attitude générale, une certaine conception de la vie. C’e
14 du sens — primitif ou secondaire — qu’une société et une culture, aujourd’hui fortement compromises, s’accordaient à leur
15 l définis, souvent contraires aux usages anciens, et qui paraissent « anarchiques » ou « faux » selon le système de référe
16 ils ont été mal remplis, ou remplis au hasard, —  et en tout cas, ils ont pris des valeurs ou des sens nouveaux qu’il impo
17 aux qu’il importe au plus haut point de redéfinir et de réorganiser, si l’on entend recréer un corps social vivant, et une
18 r, si l’on entend recréer un corps social vivant, et une « commune mesure » pour les diverses activités de l’homme dans le
19 -à-dire de décrire son contenu actuel d’une part, et d’autre part le contenu qu’il paraît juste ou utile de lui attribuer
20 cières ». On la considère comme une passion basse et vulgaire, ou comme une nécessité désespérée à laquelle il faut recour
21 te qui refuse de discuter, de donner ses raisons, et qui frappe du poing sur la table. Ainsi violence ne se confond pas se
22 rité. Mais ce besoin s’est exagérément développé, et comme fixé, par suite des conditions particulières dans lesquelles la
23 ns lesquelles la bourgeoisie a conquis le pouvoir et l’a gardé pendant un siècle et demi. La bourgeoisie établie sur l’arg
24 conquis le pouvoir et l’a gardé pendant un siècle et demi. La bourgeoisie établie sur l’argent, et sur un « capital » de t
25 cle et demi. La bourgeoisie établie sur l’argent, et sur un « capital » de traditions, a doublement « intérêt » au maintie
26 blement « intérêt » au maintien d’un ordre public et culturel immuable. (Préservé contre les mutations brusques.) Elle a d
27 de sauvegarder à tout prix une évolution continue et sans heurts. (D’où le retard permanent et voulu de l’enseignement off
28 ontinue et sans heurts. (D’où le retard permanent et voulu de l’enseignement officiel sur la culture d’avant-garde, et ce
29 seignement officiel sur la culture d’avant-garde, et ce vaste système de contrôle méfiant des idées que constitue la filiè
30 lle). En même temps, les organismes de l’économie et de la culture sont devenus si complexes et délicats qu’on a l’impress
31 onomie et de la culture sont devenus si complexes et délicats qu’on a l’impression que toute intervention d’une nouveauté
32 éelle entraînerait des conséquences imprévisibles et non mesurables, où « tout risquerait de sombrer ». Et l’on perd peu à
33 on mesurables, où « tout risquerait de sombrer ». Et l’on perd peu à peu de vue cette vérité fondamentale : que les instit
34 quivoque de la situation : on a coutume, à droite et au centre, de vilipender le marxisme en le traitant de « doctrine de
35 , rigoureusement évolutive en tant que doctrine1, et par là même, conforme au mouvement profond de la pensée bourgeoise, s
36 parues dans notre époque sont celles de Nietzsche et de Georges Sorel : elles s’accordent au plus mal avec le style de la
37 préciser une distinction radicale entre violence et brutalité, — avec l’espoir de sauver le mot « violence » de ses dévia
38 ence » de ses déviations sémantiques intéressées, et de le restaurer dans sa puissance active, libératrice. La violence es
39 r ses vues, il fait violence à un état de choses. Et ceci dans n’importe quel domaine, qu’il s’agisse d’élever des blocs d
40 qui l’imposera. Tout acte créateur de l’esprit —  et c’est l’esprit seul qui crée — est une « transgression » des lois adm
41 ssus tout ce malaise (à le qualifier de scandale) et à l’éprouver plus fortement que l’euphorie du risque, du jeu. C’est u
42 uphorie du risque, du jeu. C’est un affadissement et une trahison certaine de l’Évangile qui ont conduit les chrétiens moy
43 tiens moyens à insister uniquement sur la douceur et la subtile aménité de l’esprit. Cette fausse « charité » sentimentale
44 suis pas venu apporter la paix, mais le glaive. » Et le terme même de violence que la plupart des moralistes chrétiens d’a
45 se qui a fait perdre sa vigueur au christianisme, et non l’inverse, comme le soutiennent des polémistes ignorants. La viol
46 ule qui délivre l’homme de la chaîne des routines et des lois qu’il se forge, c’est elle seule qui l’empêche de se laisser
47 s, qui violente ses habitudes devenues tyrannies, et qui crée des possibles nouveaux. La révolution ainsi comprise est aus
48 nstruire, elle détruit pour ré-ordonner. Violence et construction sont si loin de s’opposer que j’y verrais plutôt deux sy
49 le est placée dans une « organisation » nouvelle, et tout cela s’opère en vertu d’une décision de l’esprit2. Enfin, la vra
50 t, la brutalité peut être définie comme un aspect et un caractère avant tout matériels. Elle est le fait d’une contrainte
51 t extérieure, donc incapable en soi de rien créer et animer. C’est la brimade, la vexation, le choc qui blesse sans régéné
52 qui blesse sans régénérer, la suppression inutile et absurde, l’interdiction qui offense la vitalité, qui nie la significa
53 C’est tout d’abord un processus matériel grossier et brusque, qui se produit comme au hasard, sans discernement, sans « si
54 nné par l’esprit. Ôte-toi de là que je m’y mette, et je n’ai pas de raisons à te donner, il n’y en a pas, ou pas d’avouabl
55 caractère de contrainte externe, comme mécanique, et qui ne tient pas compte de la nature spirituelle, passionnelle ou vit
56 te en même temps. La définition la plus frappante et la plus voyante, si je puis dire, de la brutalité, est fournie par le
57 éteste rien tant que la vraie violence, inventive et imprévue, qui viendrait déranger ses constructions à la fois matériel
58 déranger ses constructions à la fois matérielles et abstraites, géométriques. La libre manifestation des antagonismes rée
59 esprit d’autonomie, de responsabilité spirituelle et de risque personnel, des instincts brutaux : l’instinct de puissance,
60 isation profonde des jeunes générations fascistes et staliniennes : on cherche à obtenir par des moyens brutaux, par des c
61 intes externes, un « rendement social » immédiat, et l’on ne s’aperçoit pas que ce faisant, l’on détruit les racines de l’
62 ulent avoir du fruit, ils coupent l’arbre au pied et cueillent le fruit. Voilà le gouvernement despotique. » Le refus d
63 nce appelle la brutalité Confondre la violence et la brutalité, c’est se placer dans une position spirituelle inférieur
64 iante : elle accepte les conflits, les fait mûrir et les résout en créations. Mais la méthode qui règne actuellement dans
65  démocraties de l’Ouest » — comme dit le Führer — et qui consiste à biaiser avec les difficultés, à masquer les antagonism
66 difficultés, à masquer les antagonismes de fait, et à les déconcerter provisoirement à force de « combines » et de compro
67 éconcerter provisoirement à force de « combines » et de compromis, cette méthode qui ne crée rien, n’ordonne rien, tempori
68 résistance sérieuse. L’histoire de l’après-guerre et de l’établissement des trois fascismes le démontre avec éclat : la cr
69 t pas supporter la vraie violence. Le libéralisme et la dictature affectent l’un et l’autre la violence (spirituelle) du s
70 ce. Le libéralisme et la dictature affectent l’un et l’autre la violence (spirituelle) du signe moins (en fait sinon en th
71 est pourquoi l’un prépare l’autre, qu’il redoute, et se trouve désarmé lorsqu’il survient. Le destin des démocraties est l
72 héorie de la dictature du prolétariat d’une part, et le ton « brutal » des polémiques de Marx. Mais la dictature du prolét
73 comme celle d’un « évolutionniste brutal » (Aron et Dandieu). 2. Il y aurait lieu aussi d’analyser la valeur ambiguë de
74 e caractère essentiellement viril de la violence, et d’ailleurs de l’esprit créateur en général. Et, d’autre part, l’effém
75 e, et d’ailleurs de l’esprit créateur en général. Et , d’autre part, l’effémination de la bourgeoisie qui attend un dictate
76 viol redouté. a. Rougemont Denis de, « Violence et brutalité », Les Nouveaux Cahiers, Paris, 1 juin 1937, p. 14-17.
2 1937, Les Nouveaux Cahiers (1937-1939). Comment savoir à quoi ils pensent (Quelques remarques sur la méthode) (1er novembre 1937)
77 bonne ou mauvaise. Ces deux mouvements de défense et d’attaque sont prudemment dissimulés et confondus sous le vocable de
78 e défense et d’attaque sont prudemment dissimulés et confondus sous le vocable de curiosité. « Pourquoi me demandez-vous c
79 s deux à la fois. En dépit de l’opinion convenue, et justifiée d’ailleurs en tant que convention, rien n’est moins innocen
80 ts fondamentaux que sont la défense ou l’attaque, et qui apparaissent dans leur belle nudité lorsqu’un amant demande à l’a
81 moyen efficace de se libérer des schémas démodés et des caricatures obsédantes sur lesquelles joue la politique. Un moyen
82 ouver des arguments qui portent, qui atteignent ; et de se refaire un langage qui soit réellement entendu. Tout cela est a
83 réellement entendu. Tout cela est assez évident, et justifie suffisamment notre rubrique. Il reste alors à reconnaître le
84 reconnaître les dangers d’une semblable méthode, et les limites de sa fécondité. ⁂ Tant qu’on n’aura pas inventé la machi
85 e peuple » les grands mots du langage politique ? Et du sens qu’il leur donne lorsqu’il les répète ? À distance et en gros
86 u’il leur donne lorsqu’il les répète ? À distance et en gros, l’on peut croire que tous les Français, par exemple, traduis
87 réalités ou les mêmes idéaux par les mêmes mots ; et qu’un même son éveille les mêmes échos. La politique se fonde sur cet
88 échos. La politique se fonde sur cette croyance, et la presse arrive parfois à lui donner une certaine consistance. Mais
89 détail. Plus on s’approche d’un groupement défini et concret, plus on constate l’absence de commune mesure entre son langa
90 ate l’absence de commune mesure entre son langage et celui des journaux et des politiciens, ou des intellectuels. De tout
91 ne mesure entre son langage et celui des journaux et des politiciens, ou des intellectuels. De tout près, cela peut donner
92 ge par le correcteur de l’imprimerie : Épicerie et spécialiste. L’auteur paraît croire à un rapprochement absurde. Il fa
93 di, où un sentiment obscur de latinité a survécu. Et épices (d’où épicerie) et espèces (d’où spécialiste) sont le même mot
94 de latinité a survécu. Et épices (d’où épicerie) et espèces (d’où spécialiste) sont le même mot. Tous deux remontent à sp
95 tionne directement les gens sur leurs « pensées » et préoccupations, ils ne disent rien de bien intéressant ou d’authentiq
96 ler les gens longtemps, souvent, à bâtons rompus, et sur n’importe quel sujet ; vous finirez peut-être, à force de recoupe
97 répond-elle. Je lui demande comment c’est arrivé, et voici le récit, noté sur l’heure : C’était le 26 de juillet, l’anniv
98 er, ce jour ? Je n’avais pas grand-chose. Le père et les deux fils disent : on est plus jeunes que toi, on va aller au tra
99 est plus jeunes que toi, on va aller au travail, et toi tu iras à la pêche. Ils partent pour le marais, vont tirer le sel
100 aut pour manger. Ils rentrent d’avoir tiré le sel et mangent la pêche. J’avais ajouté deux ou trois jambes, donc, mais moi
101 ger une grande assiettée, ça arrange, ça délasse, et avec ça on peut aller se coucher ! Ils mangent et on va se coucher. C
102 et avec ça on peut aller se coucher ! Ils mangent et on va se coucher. C’est le lendemain matin que j’ai vu qu’ils avaient
103 nt soit peu claire. Cette absence de sens général et simple, cette espèce d’absurdité, de décousu, est même ce qui garanti
104 era dans les schémas, les généralisations banales et tendancieuses qui sont les vices de toute enquête. La signification d
105 e enquête. La signification des propos recueillis et stylisés pouvant toujours être attribuée au parti pris de l’enquêteur
106 re ces deux écueils, le Charybde de l’incohérence et le Scylla du trop prévu, il faut savoir naviguer dans le « courant »
107 à mi-distance entre les bizarreries individuelles et les lieux communs éculés, à mi-distance entre le pittoresque et la st
108 ommuns éculés, à mi-distance entre le pittoresque et la statistique, à ce niveau où le langage est suffisamment habituel p
109 : tout le monde réclame la liberté, des libertés, et s’en réclame à droite et à gauche, à Moscou aussi bien qu’à Berlin. M
110 a liberté, des libertés, et s’en réclame à droite et à gauche, à Moscou aussi bien qu’à Berlin. Mais ce n’est plus que par
3 1937, Les Nouveaux Cahiers (1937-1939). Lectures dirigées dans le IIIe Reich (15 décembre 1937)
111 ts qui n’ont rien de secret : un article de revue et un catalogue d’éditeur, tous deux publiés en Allemagne à l’occasion d
112 comporte environ 80 titres (publications récentes et rappels d’œuvres importantes). Ces titres se répartissent, approximat
113 ons militaires ; un quart aux coutumes allemandes et aux vieux germains ; un quart à des sujets divers, littéraires, histo
114 mot ou l’idée de race : La Beauté nordique ; Art et race ; Le visage des chefs allemands (22e mille) ; Race et humour ; L
115 Le visage des chefs allemands (22e mille) ; Race et humour ; La mère allemande (80e mille) ; Le livre des femmes national
116 race nordique. L’âme nordique (30e mille) ; Race et âme (43e mille) ; Hygiène raciale ; Science raciale du peuple alleman
117 e titres divers. — 99e mille en moyenne). Musique et race ; La France et l’idée raciale ; Race, droit, peuple ; Race et é
118 9e mille en moyenne). Musique et race ; La France et l’idée raciale ; Race, droit, peuple ; Race et état dans le domaine
119 e et l’idée raciale ; Race, droit, peuple ; Race et état dans le domaine Nord-Est ; Traits fondamentaux de l’histoire rac
120 ndamentaux de l’histoire raciale allemande ; Race et patrie chez les Indo-Germains ; Peuple et race (revue). Comme il ne
121  ; Race et patrie chez les Indo-Germains ; Peuple et race (revue). Comme il ne s’agit là que du catalogue d’une seule mai
122 ion qui se spécialisent dans la littérature pure, et chez lesquelles on ne trouvera, sur cent titres, que quatre ou cinq s
123 ion n’est nullement spécialisée, au sens français et scientifique du terme. Tous ces ouvrages sont des essais de vulgarisa
124 nt-ils présentés sous l’aspect le plus populaire. Et les chiffres de tirage sont significatifs à cet égard, même si l’on t
125 ance — par la volonté de l’État (Hitler, Goebbels et Rosenberg). Il peut donc être intéressant de se reporter maintenant à
126 olkstum par exemple. Ce périodique s’occupe d’art et de littérature, de politique, et même de religion. Dans sa livraison
127 e s’occupe d’art et de littérature, de politique, et même de religion. Dans sa livraison de décembre, le rédacteur en chef
128 l (biographie) ; Ballades germaniques ; Culture et religion des Germains ; Œuvres complètes de F. Blunck (littérature) 
129 dètes ; Le soldat allemand (lettres de guerre) ; et quatre romans (dont un sur la guerre, et un sur le Moyen Âge allemand
130 uerre) ; et quatre romans (dont un sur la guerre, et un sur le Moyen Âge allemand). Les mots « allemand », « germain », « 
131  », « nordique », reviennent donc dans 13 titres. Et la moitié des autres, au moins, évoquent de la façon la plus précise
4 1938, Les Nouveaux Cahiers (1937-1939). Du danger de s’unir (15 avril 1938)
132 l’espace d’une parenthèse ouverte par l’Anschluss et fermée par le plébiscite grand-allemand. Face à l’affirmation de l’un
133 Face à l’affirmation de l’unité germanique, faite et scellée en deux coups de poing, la France, un mois durant, s’est éner
134 à condition que la gauche renonce à ses réformes, et quand la gauche propose l’union à condition que la droite adopte son
135 a droite adopte son programme, c’est que, de part et d’autre, on est très fermement décidé à ne pas s’unir. Cette double h
136 ’hypocrisie ni l’esprit partisan, c’est l’hommage et l’union sacrée. L’hypocrisie est trop grossière pour tromper, et l’es
137 ée. L’hypocrisie est trop grossière pour tromper, et l’esprit partisan est comme déconcerté par ses propres excès. Mais ce
138 à force de l’invoquer l’on finisse par la vouloir et par la faire. ⁂ Il est vrai qu’on n’en est encore qu’à s’en servir co
139 it crier : « À bas Blum ! » au Vélodrome d’Hiver, et le lendemain, fait publier par Ce Soir : « Les élus communistes exige
140 e, soutient un ministère qu’il renverse au Sénat. Et que font ces trois partis réunis dans le Front populaire ? Leurs gouv
141 rès l’autre d’illégales les occupations d’usines, et refusent l’un après l’autre d’intervenir pour appliquer la loi dont i
142 utient Franco, agent d’Hitler, qui est un ennemi, et elle attaque Thorez, agent de Staline, qui est un allié. Cet ensemble
143 e, en réalité, ne veut l’union qu’on dit vouloir, et alors tout s’explique aisément. ⁂ Or, ce qui est le plus à redouter,
144 xte d’union, mais bien que las de ces tricheries, et d’autre part dupé par ce grand mot dont on lui rebat les oreilles, le
145 de riposter au coup d’Hitler n’amène les droites et les gauches en même temps à ne plus concevoir leur union que sous la
146 mps, pour appeler au secours les troupes adverses et les prier de venir rétablir l’ordre. Il ne manque pas de fascistes in
147 as de fascistes inconscients pour confondre ordre et mise au pas. Il ne manque pas d’intellectuels de droite et de gauche
148 u pas. Il ne manque pas d’intellectuels de droite et de gauche pour proclamer qu’en présence du danger, l’exercice de la p
149 les problèmes au lieu d’essayer de les résoudre, et fait converger des refus au lieu de composer des efforts. Programme d
150 irmation, qui est celle du réarmement à outrance, et même au-delà. Mais la presse n’en parlera pas, cela va de soi, c’est
151 nt ainsi. Pour éviter de mourir, cessons de vivre et armons-nous. Abdiquons toutes nos raisons d’être, et armons-nous pour
152 armons-nous. Abdiquons toutes nos raisons d’être, et armons-nous pour sauver le reste. Hitler menace la paix de l’Europe ?
153 ? Qu’à cela ne tienne, décrétons l’état de guerre et c’est Hitler qui sera bien attrapé ! Trois dictatures menacent nos li
154 ? Eh bien ! cessons de les exercer, ces libertés, et comme cela les dictateurs n’auront plus rien à supprimer chez nous !
155 sérieusement. Mais comme tout le monde en parle, et non sans émotion, j’en conclus que beaucoup y rêvent. C’est ce rêve q
156 e. On voudra donc la fin des libertés françaises. Et pour sauver la France, on perdra les meilleures raisons de la défendr
157 ions. La force de la France est dans la création, et non pas dans la discipline ; dans l’invention, non dans la marche en
158 surtout qu’il en soit aussi fier qu’il le paraît, et aussi satisfait qu’il le proclame. Ne croyons pas qu’il considère san
159 avant l’intérêt « national » au sens matérialiste et militaire que prend ce terme dans l’Europe fascisée. On ne défend bie
160 On ne défend bien que ce qui vaut d’être défendu. Et la plus forte armée du monde n’est rien, si le pays qu’elle entend pr
161 ésordre présent, du désordre honteux de lui-même, et que ses excès conduisent à rêver d’un fascisme. Mais il s’agit de sav
162 ance, réellement, saura retrouver l’usage concret et positif des libertés qu’elle s’est conquises. Il s’agit de savoir si
163 dre en quelque chose d’incomparablement plus beau et fort que l’ordre apparent des fascismes. Enfin, toute la question est
5 1938, Les Nouveaux Cahiers (1937-1939). Vues sur le national-socialisme (1er juin 1938)
164 vent sont extraites d’un « journal » tenu en 1935 et 1936 par l’auteur, alors chargé de cours dans une Université allemand
165 s celles qui paraissent garder leur signification et leur actualité après deux ans. I. — À quoi pensent… Les bourgeo
166 une dernière tentative pour sauver le capitalisme et les privilèges bourgeois, comme disent les socialistes, ou encore : u
167 toutes les réformes soient en faveur des ouvriers et des paysans ; et que les impôts prennent les proportions d’une confis
168 es soient en faveur des ouvriers et des paysans ; et que les impôts prennent les proportions d’une confiscation de capital
169 t les proportions d’une confiscation de capital ; et que la vie de famille soit détruite, l’autorité des parents sapée, la
170 assacres. Tout se passe d’une manière progressive et ordonnée : bientôt ils n’auront plus de fortune, mais ils conserveron
171 ais ils conserveront pour la plupart leurs titres et leurs fonctions, sous des maîtres nouveaux. (Le gouverneur de la prov
172 nce est un ancien employé de postes, ventripotent et qu’on juge très vulgaire.) Partout, la même crainte paralyse en germe
173 e fait, ces « possédants » n’ont jamais gouverné. Et ils n’ont jamais cru au régime de Weimar. Il n’y a sans doute pas, en
174 s de l’État, plus lâche devant le fait accompli — et toujours accompli par d’autres, forcément — plus dénuée d’esprit civi
175 t en train de leur faire découvrir le fait social et les problèmes qu’il pose. D’une part, la force et la rapidité de l’as
176 et les problèmes qu’il pose. D’une part, la force et la rapidité de l’ascension hitlérienne ont été l’expression directe d
177 tisme pesant des innombrables discours politiques et des leaders de la presse mise au pas. Certes, les Allemands ont toujo
178 les Allemands ont toujours eu le sens du groupe, et l’on est trop souvent tenté d’expliquer le national-socialisme par ce
179 e marcher ensemble, de chanter ensemble, de boire et de penser ensemble. En réalité, ce phénomène est aussi vieux que les
180 besoin de porter remède à ses carences profondes, et de les compenser. Hitler est en train d’opérer un dressage du peuple
181 gande pour restaurer je ne sais quel hypothétique et préhistorique germanisme sont destinés — plus ou moins consciemment —
182 de l’intérêt allemand sur les intérêts de classe, et sur tout intérêt privé. Voilà la grande révolution, dans un pays ou l
183 on, dans un pays ou la vie intérieure d’une part, et la séparation des classes de l’autre, étaient les vrais fondements de
184 a cette différence profonde entre le jacobinisme et le national-socialisme : c’est que le premier parlait des droits du c
185 ui lui manquait pour désirer la vraie démocratie. Et pour réaliser ses premières conditions, qui sont le sens vulgarisé de
186 conditions, qui sont le sens vulgarisé de l’État et le sens du service social. Staline proclame une religion du travail,
187 social. Staline proclame une religion du travail, et les Russes sont les plus paresseux des hommes ; Mussolini une religio
188 des hommes ; Mussolini une religion de l’Empire, et c’est à peine si les Italiens avaient jamais été une nation ; Hitler
189 s été une nation ; Hitler une religion de l’État, et les Allemands l’apprennent péniblement, avec un pédantisme pathétique
190  ! Ce serait le signe que nous en perdons le goût et l’usage naturel, spontané. Un petit industriel. — Avant 1933, sa vi
191 ême chambre. Nous suivions des cours de politique et d’économie. Nous chantions ensemble. On nous interrogeait. La plupart
192 e sens tout rajeuni : il est retourné à l’école ; et tout délivré : ces ouvriers sont au fond des braves types, on peut le
193 ec un de mes étudiants. Il est déjà doktor phil., et il voudrait se perfectionner en français, en attendant une situation.
194 réel, l’orgueil de l’homme… Le régime le dégoûte et le repousse. C’est la dictature des butors et des imbéciles. Je lui p
195 ûte et le repousse. C’est la dictature des butors et des imbéciles. Je lui pose ma question habituelle : Que comptez-vous
196 tre cet état de choses ? — On ne peut rien faire. Et en tout cas, je suis déjà trop vieux. — Trop vieux, vous ? Quel âge a
197 r le séminaire un travail sur Barrès : « la terre et les morts », c’est à peu près le Blut und Boden (sang et sol) des naz
198 morts », c’est à peu près le Blut und Boden (sang et sol) des nazis. Comme il aime Barrès, cela le rassure. C’est une voie
199 étudiant vient d’entrer dans le Parti.) Parents et enfants. — Déjeuner chez un avocat. Madame se plaint : « Il n’y a plu
200 oit commander deux fois par semaine : gymnastique et culture politique. De plus, elle a la charge de trouver des places po
201 ter quand elles sont malades (c’est un contrôle), et même, c’est arrivé une ou deux fois, de régler des questions très dél
202 ginez qu’avec cela, nous ne la voyons plus guère. Et comment voulez-vous que les parents gardent leur autorité ? Le Parti
203 itiative qu’on exige, c’est celle qui sert l’État et qui est prévue par lui ; c’est celle que la tactique moderne exige du
204 il était en feldgrau (l’uniforme des communistes) et les autres en brun. C’est un dur. Chômeur depuis sept ans. Ancien che
205 rançais, me dit-il, vous ne rêvez que révolutions et émeutes. Vous ne savez pas ce que c’est. Nous en avons eu assez chez
206 sez chez nous. Maintenant nous voulons du travail et notre tasse de café au lait le matin. Qu’on nous donne ça, Hitler ou
207 sse pas les ouvriers quand ils ont de quoi manger et travailler. Hitler ? Il n’a qu’à appliquer son programme, maintenant
208 gion… » Tout d’un coup il se lève de son tabouret et avec un grand geste, le doigt pointé en l’air : « Je vais vous dire u
209 nt, tous ces gros cochons qui sont autour de lui ( et il nomme les principaux chefs du régime) eh bien moi ! (il se frappe
210 pe la poitrine) moi je me ferai tuer pour lui ! » Et il répète : « Lui au moins, c’est un homme sincère, et c’est le seul…
211 répète : « Lui au moins, c’est un homme sincère, et c’est le seul… » II. — Le fait central J’en étais là de mes éto
212 nts. Je collectionnais des observations de détail et des interprétations théoriques, vraies et vraisemblables une à une, m
213 détail et des interprétations théoriques, vraies et vraisemblables une à une, mais dont l’ensemble me laissait une impres
214 aissait une impression assez confuse. Capitalisme et socialisme, bellicisme et passivité, esprit spartiate et goût du conf
215 ez confuse. Capitalisme et socialisme, bellicisme et passivité, esprit spartiate et goût du confort, jeunesse cynique et v
216 alisme, bellicisme et passivité, esprit spartiate et goût du confort, jeunesse cynique et vieux bateaux réactionnaires, bo
217 it spartiate et goût du confort, jeunesse cynique et vieux bateaux réactionnaires, bourgeois inquiets, opposants complices
218 nnaires, bourgeois inquiets, opposants complices. Et seuls mes amis juifs me donnaient du régime une interprétation étonna
219 arleurs tous les cent mètres le long des avenues. Et le tambour se mit à battre — deux coups lents, trois coups rapprochés
220 oit toute la place de l’Opéra. Des milliers de SA et de SS y sont déjà rangés, immobiles. Le Führer viendra au balcon à 11
221 tout un peuple campe alentour, depuis le matin — et je ne puis franchir les portes qu’à 5 heures 10. Comment fait-on pour
222 e l’ovale, comme une tour carrée, tendue de rouge et violemment éclairée par des projecteurs convergents. Des masses brune
223 s la veille dans cette cité de 700 000 habitants, et les autocars, et l’afflux des campagnards venus à pied, il y aura un
224 cette cité de 700 000 habitants, et les autocars, et l’afflux des campagnards venus à pied, il y aura un million d’auditeu
225 . Quelques femmes s’évanouissent, on les emporte, et cela fait un peu de place pour respirer. Sept heures. Personne ne s’i
226 lieux communs, mal écouté. Je suis debout, malaxé et soutenu par la foule, depuis bientôt quatre fois soixante minutes. Es
227 ins dans mes poches : ils sont dressés, immobiles et hurlant en mesure, les yeux fixés sur ce point lumineux, sur ce visag
228 point lumineux, sur ce visage au sourire extasié, et des larmes coulent sur les faces, dans l’ombre. Et soudain tout s’apa
229 t des larmes coulent sur les faces, dans l’ombre. Et soudain tout s’apaise. Il a étendu le bras énergiquement — les yeux a
230 étendu le bras énergiquement — les yeux au ciel — et le Horst Wessel Lied monte sourdement du parterre. « Les camarades qu
231 t du parterre. « Les camarades que le Front rouge et la Réaction tuèrent — marchent en esprit dans nos rangs. » J’ai compr
232 prendre que par une sorte particulière de frisson et de battement de cœur — cependant que l’esprit demeure lucide. Ce que
233 litique. Mais c’est leur culte qu’ils célèbrent ! Et c’est une liturgie qui se déroule, la grande cérémonie sacrale d’une
234 monie sacrale d’une religion dont je ne suis pas, et qui m’écrase et me repousse avec bien plus de puissance même physique
235 une religion dont je ne suis pas, et qui m’écrase et me repousse avec bien plus de puissance même physique, que tous ces c
236 tous ces corps horriblement tendus. Je suis seul et ils sont tous ensemble. III. — Une religion nouvelle Si l’on n’
237 lois économiques, les forces relatives des partis et des classes avant 1933, les circonstances politiques de l’Europe, le
238 and capital soutenant Hitler contre les marxistes et papen contre Hitler : tout cela est bel et bon, et fournit de la copi
239 xistes et papen contre Hitler : tout cela est bel et bon, et fournit de la copie aux marxistes et aux libéraux. À les lire
240 t papen contre Hitler : tout cela est bel et bon, et fournit de la copie aux marxistes et aux libéraux. À les lire, on con
241 bel et bon, et fournit de la copie aux marxistes et aux libéraux. À les lire, on conçoit très bien comment la mécanique a
242 it très bien comment la mécanique a joué en fait, et que c’était fatal, et que c’est très dangereux. Reste à savoir pourqu
243 a mécanique a joué en fait, et que c’était fatal, et que c’est très dangereux. Reste à savoir pourquoi cela s’est réalisé.
244 lisé. Car on ne nous parle jamais que du comment. Et les « explications » qu’on nous fournit se réduisent en définitive à
245 omènes apparents, c’est-à-dire à une description. Et dès lors qu’il s’agit de phénomènes aussi complexes, on n’a pas de ma
246 efficace. Les choses ont tourné de telle sorte ; et l’on explique au nom d’une doctrine convenablement réadaptée, qu’elle
247 d’une communauté autour d’un sentiment « sacré ». Et ce n’est pas la soif d’une tyrannie, au sens politique et légal, qui
248 est pas la soif d’une tyrannie, au sens politique et légal, qui a jeté l’Autriche dans les bras du Führer. Mais c’est l’at
249  ; où les religions n’apparaissent plus au peuple et aux élites que sous l’aspect de survivances sociales ; où les classes
250 le défaut d’argent ; où les partis se multiplient et s’entredéchirent au hasard d’un jeu politique de surface ; où les éli
251 ifeste plus que par les feuilles d’impôt, l’armée et la police ; où tout principe d’union sociale et spirituelle, toute co
252 e et la police ; où tout principe d’union sociale et spirituelle, toute commune mesure a disparu, — il est fatal que se ré
253 ru, — il est fatal que se répande dans les masses et que s’installe au cœur de chaque individu une angoisse, — d’où naît u
254 tout d’abord que ce régime est né de la pauvreté et du malheur de son pays, — ce qui est très juste. Et il ajoute : Mais
255 du malheur de son pays, — ce qui est très juste. Et il ajoute : Mais la pauvreté et le malheur ne peuvent expliquer que
256 est très juste. Et il ajoute : Mais la pauvreté et le malheur ne peuvent expliquer que des phénomènes extérieurs. La rai
257 que les feuilles qui tombent à chaque génération) et peut-être réussirons-nous à y croire. Ruine des croyances communes,
258 n ne peut pas exprimer d’une manière plus précise et ramassée la nature proprement religieuse du phénomène totalitaire all
259 nt religieuse du phénomène totalitaire allemand. ( Et cela vaut, avec des nuances, pour l’Italie et la Russie.) Mesurons ma
260 d. (Et cela vaut, avec des nuances, pour l’Italie et la Russie.) Mesurons maintenant la naïveté des libéraux qui tiennent
261 nation est rétablie. L’autorité est restaurée. «  Et nous voici sauvés du communisme. » C’est ainsi que beaucoup de braves
262 talitaire dans nos pays. Ils le font sans malice, et au nom du bon sens. Ils me rappellent cette bonne vieille femme qui a
263 pas, justement, que tout se tient dans ce régime, et que rien ne peut en être détaché sous peine de perdre toute espèce de
264 e cet ordre est simplement la suppression brutale et militaire de toute expression libre des antagonismes qui chez nous so
265 ue par le fait d’une complicité quasi universelle et inconsciente, fût-ce de la part des opposants ? Que cette complicité
266 « raisons », que tous les « intérêts » du monde ? Et qu’enfin ce qui importe au dictateur, ce n’est pas telle mesure en so
267 t au mouvement total, à la religion de la nation, et au contenu de cette religion, la volonté collective de puissance ? De
268 bonne voie d’étatisation sans douleur. Idéalisme et réalisme ont fait faillite. Le seul adversaire du régime demeure, en
269 elle ; c’est-à-dire qu’à la religion de la nation et de la Race ne s’oppose plus que la foi proprement dite : contre-épreu
270 me ne conduise à la guerre. Non pas que les chefs et les troupes veuillent la guerre ! Les hommes ne sont pas si méchants,
271 totalitaires. Ce n’est pas le chef qui commande, et ce ne sont pas les désirs conscients et avoués qui sont puissants. Ce
272 commande, et ce ne sont pas les désirs conscients et avoués qui sont puissants. Ce qui est puissant, ce qui commande tout,
273 fait au nom de l’union sacrée, morale de guerre ; et toutes les mesures d’oppression sont « joyeusement acceptées » pour p
274 canons », c’est un slogan de la propagande nazie, et qui déchaîne régulièrement l’enthousiasme des foules allemandes — pou
275 e importance. Car ce qui compte, c’est la Nation, et non pas les individus. Or la Nation, pratiquement c’est l’État. Et ce
276 dividus. Or la Nation, pratiquement c’est l’État. Et cet État est né de la guerre ; il y prépare du simple fait que ses co
277 à chaque instant avec l’éventualité d’une guerre, et il y puise sa force de cohésion. Quelle que soit donc la volonté cons
278 ésion. Quelle que soit donc la volonté consciente et avouée du Führer et du peuple, il n’y a pas de raison de penser que l
279 it donc la volonté consciente et avouée du Führer et du peuple, il n’y a pas de raison de penser que l’aventure puisse bie
280 uerre, de se montrer assez forts pour l’empêcher, et de condamner ainsi le régime adverse à une autodestruction de ses éne
281 lus forte mystique qui doit fatalement triompher. Et en s’armant autant que l’État totalitaire, l’État démocratique perdra
282 atique que dans un vaste effort moral des grandes et des petites démocraties pour résoudre à leur manière propre le problè
283 ation… Le seul problème pratique, sérieux, urgent et réellement fondamental, c’est celui que nous pose l’angoisse des indi
284 ui que nous pose l’angoisse des individus isolés, et l’appel religieux qui naît de cette angoisse — même s’il est encore i
285 dent encore une situation matérielle supportable, et quelques restes de traditions civiques. 3. Pour le semestre d’été,
286 es pour instaurer une religion purement nationale et civique destinée à remplacer les confessions « vieillies » et « divis
287 estinée à remplacer les confessions « vieillies » et « divisées ». Il faut créer une « religion d’hommes sans Dieu », disa
288 s sans Dieu », disait Naigeon, une « foi concrète et patriotique », disait l’abbé Grégoire : c’est le « christianisme posi
289 ’abbé Grégoire : c’est le « christianisme positif et allemand » des nazis… Tout cela fut écouté avec un intérêt courtois,
6 1939, Les Nouveaux Cahiers (1937-1939). Faire le jeu d’Hitler (1er janvier 1939)
290 (1er janvier 1939)g Au cours de l’été dernier, et devant la menace hitlérienne, un écrivain de nos amis se sentit press
291 onnaître la nature de l’attaque qui se préparait, et donc la force autant que la faiblesse de l’adversaire. Il écrivait à
292 rait donc, « objectivement », ce qu’il y a de bon et ce qu’il y a de mauvais dans l’hitlérisme. Et concluait sur une press
293 bon et ce qu’il y a de mauvais dans l’hitlérisme. Et concluait sur une pressante mise en garde contre l’esprit totalitaire
294  prise de parti » efficace suppose nécessairement et avant tout la connaissance « objective » des faits en discussion, voi
295 e vérité très évidente soit en pratique méconnue, et plus que méconnue, contestée avec passion, voilà qui mérite l’examen.
296 général, qu’un homme refuse de voir ce qui est ? Et en particulier : comment se peut-il que, délibérément, un publiciste
297 atiquement par un mensonge (le feu ne brûle pas), et par un transfert de la « méchanceté » du feu sur celui qui en avertit
298 rtit. Refuser de reconnaître les faits (mensonge) et accuser celui qui les décrit d’être complice de leur menace (transfer
299 ù si peu d’hommes connaissent leur vraie croyance et leurs vrais désirs, il est fatal que se développe au plus haut point
300 ité « totalitaire » ? C’est le refus de discuter. Et de là vient le terrorisme. La Terreur (jacobine, bolchéviste ou fasci
301 manifestent pas une volonté de soumission aveugle et joyeuse aux mots d’ordre du Parti. Plus encore : ceux qu’on soupçonne
302 ui n’ont pas donné assez de preuves du contraire. Et finalement, tous ceux qui se « distinguent » par quelque trait marqué
303 eur orthodoxie trop rigoureuse. Dans tous les cas et à tous les stades, c’est la tendance que l’on punit, non pas les acte
304 alité totalitaire que je retrouve dans les écrits et les propos de certains de nos « antifascistes ». Ceux qui jugent la t
305 ils pressentent que sa réalité est très complexe, et qu’elle introduit donc la nécessité de distinguer avant de juger ; c’
306 de juger ; c’est-à-dire la nécessité de discuter et de déclarer ses critères. Et je précise : non de discuter pour éluder
307 écessité de discuter et de déclarer ses critères. Et je précise : non de discuter pour éluder la prise de parti, mais au c
308 u’en réalité, ils sont tout près de l’adversaire, et qu’ils partagent sinon toutes ses vues, du moins sa manière de voir l
309 urs alliés.) Si les hommes de gauche, d’une part, et les hommes de droite d’autre part, acceptaient de voir l’Allemagne te
310 isme ». Or, ils tiennent essentiellement, les uns et les autres, à condamner ou à défendre Hitler non point pour ce qu’il
311 uve que la droite jouit en France, provisoirement et comme par accident, d’une plus grande liberté d’esprit que la gauche.
312 n l’expression peut flétrir tout ce que l’on veut et le contraire aussi, Mussolini fait le jeu d’Hitler en l’appuyant, mai
313 t de ne pas faire ? Voici : Hitler est le symbole et l’instrument principal de la mentalité totalitaire. Cette mentalité s
314 es faits gênants (donc de discuter objectivement) et par la passion de condamner à priori des « tendances » supposées host
315 ées hostiles (passion créatrice de têtes de Turcs et de boucs émissaires). Introduisez la discussion, vous rendez impossib
316 Je revendique pour ma part le droit de discuter, et j’en fais même un devoir civique. Si vous me le contestez, je vous ju
317 es profasciste, non pas d’intention mais de fait. Et je le dirai encore si vous me contestez le droit de discuter le fasci
318 est justement ma faculté de distinguer ses forces et ses faiblesses « objectivement »4. Si vous me retirez cette arme, vou
319 oir l’identité des actes qu’il reproche à Hitler, et des actes qu’il loue chez Staline. (Je néglige ici les prétextes.) L’
320 e puéril ? Simplement, en déclarant ses critères, et en acceptant la discussion des faits. Dès lors, le départ entre « tot
321 départ entre « totalitaires » (conscients ou non) et véritables non-fascistes devient très aisé. Il coïncide, à très peu d
322 qui préconisent la bêtise comme méthode d’action, et ceux qui préfèrent l’intelligence. Ceci n’est pas une pointe, mais un