1
utalité (1er juin 1937)a À plusieurs reprises,
les
collaborateurs de ces Cahiers ont déclaré qu’ils rejetaient la violen
2
eurs de ces Cahiers ont déclaré qu’ils rejetaient
la
violence, les méthodes de violence, les solutions de violence, et qu’
3
ahiers ont déclaré qu’ils rejetaient la violence,
les
méthodes de violence, les solutions de violence, et qu’ils s’efforçai
4
rejetaient la violence, les méthodes de violence,
les
solutions de violence, et qu’ils s’efforçaient d’y substituer une mét
5
léments réellement divers, c’est-à-dire opposés à
l’
origine. Toute collaboration créatrice suppose un but nouveau, que des
6
hommes auparavant antagonistes (c’est-à-dire dont
les
intérêts et les desseins divergeaient) s’imposent et cherchent à atte
7
t antagonistes (c’est-à-dire dont les intérêts et
les
desseins divergeaient) s’imposent et cherchent à atteindre au moyen d
8
quantitatif d’éléments semblables ou apparentés.
La
compréhension réciproque ne serait qu’une constatation pure et simple
9
urait ni effort, ni création. On aboutirait, dans
le
cas le plus favorable, à un banal échange d’informations, dans l’indi
10
i effort, ni création. On aboutirait, dans le cas
le
plus favorable, à un banal échange d’informations, dans l’indifférenc
11
avorable, à un banal échange d’informations, dans
l’
indifférence générale. Il y a donc, me semble-t-il, un intérêt urgent
12
y a donc, me semble-t-il, un intérêt urgent pour
le
groupe des Nouveaux Cahiers, à préciser la signification du mot viole
13
t pour le groupe des Nouveaux Cahiers, à préciser
la
signification du mot violence, dans la mesure où cela dépend de nous,
14
à préciser la signification du mot violence, dans
la
mesure où cela dépend de nous, c’est-à-dire à l’intérieur du groupe e
15
la mesure où cela dépend de nous, c’est-à-dire à
l’
intérieur du groupe et dans ces pages. Sur le « pouvoir des mots »
16
à l’intérieur du groupe et dans ces pages. Sur
le
« pouvoir des mots » « Simple question de vocabulaire », a-t-on co
17
e répliquer, de nos jours. Mais nous avons ouvert
la
rubrique intitulée « Pouvoir des mots » pour montrer justement que le
18
e « Pouvoir des mots » pour montrer justement que
les
questions de vocabulaire ne sont ni simples ni indifférentes ; qu’ell
19
qu’elles sont mêlées à toutes nos activités, dans
la
mesure où la pensée y est mêlée ; qu’elles entraînent et symbolisent
20
mêlées à toutes nos activités, dans la mesure où
la
pensée y est mêlée ; qu’elles entraînent et symbolisent à peu près to
21
elles entraînent et symbolisent à peu près toutes
les
« questions actuelles » ; bref, que rien n’est plus immédiatement imp
22
ue rien n’est plus immédiatement important pour «
l’
action » que la définition des mots qui la désignent, ou qui la trahis
23
lus immédiatement important pour « l’action » que
la
définition des mots qui la désignent, ou qui la trahissent ; qui en a
24
pour « l’action » que la définition des mots qui
la
désignent, ou qui la trahissent ; qui en assurent la signification et
25
e la définition des mots qui la désignent, ou qui
la
trahissent ; qui en assurent la signification et l’efficacité, ou qui
26
désignent, ou qui la trahissent ; qui en assurent
la
signification et l’efficacité, ou qui faussent cette signification et
27
trahissent ; qui en assurent la signification et
l’
efficacité, ou qui faussent cette signification et masquent une ineffi
28
efficacité réelle. Toute définition de mot, qu’on
le
sache ou non, suppose et définit une attitude générale, une certaine
29
une attitude générale, une certaine conception de
la
vie. C’est ainsi — entre autres — que le « pouvoir des mots » est rée
30
ption de la vie. C’est ainsi — entre autres — que
le
« pouvoir des mots » est réel. Peut-être dira-t-on qu’il n’est que tr
31
qui paraissent « anarchiques » ou « faux » selon
le
système de référence qui est en train de se constituer dans divers gr
32
st en train de se constituer dans divers groupes.
Les
mots que nous étudions ici ne sont pas « vides » — le vocabulaire a h
33
ots que nous étudions ici ne sont pas « vides » —
le
vocabulaire a horreur du vide — mais ils ont été mal remplis, ou remp
34
lus haut point de redéfinir et de réorganiser, si
l’
on entend recréer un corps social vivant, et une « commune mesure » po
35
rps social vivant, et une « commune mesure » pour
les
diverses activités de l’homme dans le cadre de la nation. Essayons do
36
« commune mesure » pour les diverses activités de
l’
homme dans le cadre de la nation. Essayons donc de définir le mot « vi
37
ure » pour les diverses activités de l’homme dans
le
cadre de la nation. Essayons donc de définir le mot « violence », c’e
38
es diverses activités de l’homme dans le cadre de
la
nation. Essayons donc de définir le mot « violence », c’est-à-dire de
39
s le cadre de la nation. Essayons donc de définir
le
mot « violence », c’est-à-dire de décrire son contenu actuel d’une pa
40
re son contenu actuel d’une part, et d’autre part
le
contenu qu’il paraît juste ou utile de lui attribuer dans l’ordre nou
41
ans l’ordre nouveau. Origine du préjugé contre
la
violence Il faut reconnaître, tout d’abord, que la violence est gé
42
iolence Il faut reconnaître, tout d’abord, que
la
violence est généralement « mal vue » de la majorité des Français. (M
43
, que la violence est généralement « mal vue » de
la
majorité des Français. (Mais c’est peut-être, justement, parce qu’on
44
is. (Mais c’est peut-être, justement, parce qu’on
la
regarde mal ?) On en est venu à assimiler violence à brutalité, à con
45
assimiler violence à brutalité, à contrainte par
la
force matérielle : on parle des « violences policières ». On la consi
46
ielle : on parle des « violences policières ». On
la
considère comme une passion basse et vulgaire, ou comme une nécessité
47
te attaque apparaît d’ailleurs injuste à ceux qui
la
subissent). Un homme violent, c’est une espèce de brute qui refuse de
48
de donner ses raisons, et qui frappe du poing sur
la
table. Ainsi violence ne se confond pas seulement avec brutalité, mai
49
expliquer comment il a pu se produire. J’en vois
la
principale raison dans ce qu’on est convenu d’appeler la morale bourg
50
cipale raison dans ce qu’on est convenu d’appeler
la
morale bourgeoise, ou mieux : dans la conception du monde née de l’ét
51
u d’appeler la morale bourgeoise, ou mieux : dans
la
conception du monde née de l’établissement de la bourgeoisie au pouvo
52
se, ou mieux : dans la conception du monde née de
l’
établissement de la bourgeoisie au pouvoir. Conception qui se fonde d’
53
la conception du monde née de l’établissement de
la
bourgeoisie au pouvoir. Conception qui se fonde d’ailleurs dans une t
54
fonde d’ailleurs dans une tendance permanente de
l’
homme ; le besoin de sécurité. Mais ce besoin s’est exagérément dévelo
55
illeurs dans une tendance permanente de l’homme ;
le
besoin de sécurité. Mais ce besoin s’est exagérément développé, et co
56
uite des conditions particulières dans lesquelles
la
bourgeoisie a conquis le pouvoir et l’a gardé pendant un siècle et de
57
culières dans lesquelles la bourgeoisie a conquis
le
pouvoir et l’a gardé pendant un siècle et demi. La bourgeoisie établi
58
lesquelles la bourgeoisie a conquis le pouvoir et
l’
a gardé pendant un siècle et demi. La bourgeoisie établie sur l’argent
59
e pouvoir et l’a gardé pendant un siècle et demi.
La
bourgeoisie établie sur l’argent, et sur un « capital » de traditions
60
ant un siècle et demi. La bourgeoisie établie sur
l’
argent, et sur un « capital » de traditions, a doublement « intérêt »
61
dre public et culturel immuable. (Préservé contre
les
mutations brusques.) Elle a donc tout avantage à nier ou à dissimuler
62
Elle a donc tout avantage à nier ou à dissimuler
les
antagonismes qu’elle domine ou étouffe, tels que la lutte des classes
63
antagonismes qu’elle domine ou étouffe, tels que
la
lutte des classes, dans l’ordre économico-social, ou les « idées subv
64
e ou étouffe, tels que la lutte des classes, dans
l’
ordre économico-social, ou les « idées subversives » que produit inévi
65
te des classes, dans l’ordre économico-social, ou
les
« idées subversives » que produit inévitablement la culture créatrice
66
« idées subversives » que produit inévitablement
la
culture créatrice. Elle tend à substituer aux conflits déclarés des «
67
prix une évolution continue et sans heurts. (D’où
le
retard permanent et voulu de l’enseignement officiel sur la culture d
68
ans heurts. (D’où le retard permanent et voulu de
l’
enseignement officiel sur la culture d’avant-garde, et ce vaste systèm
69
permanent et voulu de l’enseignement officiel sur
la
culture d’avant-garde, et ce vaste système de contrôle méfiant des id
70
stème de contrôle méfiant des idées que constitue
la
filière universitaire.) Il faut à tout prix que « tout s’arrange » (c
71
e que rien ne change vraiment) ; il faut « sauver
la
face » (c’est-à-dire les situations acquises). D’où cette espèce d’op
72
iment) ; il faut « sauver la face » (c’est-à-dire
les
situations acquises). D’où cette espèce d’optimisme désarmant qui se
73
ble » (c’est-à-dire : cela obligerait à envisager
le
monde d’une façon nouvelle). En même temps, les organismes de l’écono
74
er le monde d’une façon nouvelle). En même temps,
les
organismes de l’économie et de la culture sont devenus si complexes e
75
façon nouvelle). En même temps, les organismes de
l’
économie et de la culture sont devenus si complexes et délicats qu’on
76
En même temps, les organismes de l’économie et de
la
culture sont devenus si complexes et délicats qu’on a l’impression qu
77
ure sont devenus si complexes et délicats qu’on a
l’
impression que toute intervention d’une nouveauté réelle entraînerait
78
mesurables, où « tout risquerait de sombrer ». Et
l’
on perd peu à peu de vue cette vérité fondamentale : que les instituti
79
peu à peu de vue cette vérité fondamentale : que
les
institutions ne durent qu’à force d’être recréées, réinventées, repri
80
re recréées, réinventées, reprises sans relâche à
la
base… Ayant peur de la chose, on rabaisse le mot qui la désigne : c’e
81
s, reprises sans relâche à la base… Ayant peur de
la
chose, on rabaisse le mot qui la désigne : c’est une espèce de conjur
82
he à la base… Ayant peur de la chose, on rabaisse
le
mot qui la désigne : c’est une espèce de conjuration magique. Nous re
83
e… Ayant peur de la chose, on rabaisse le mot qui
la
désigne : c’est une espèce de conjuration magique. Nous retrouvons ic
84
spèce de conjuration magique. Nous retrouvons ici
le
glissement sémantique de « violence » à « brutalité ». Puis, ayant de
85
e de « violence » à « brutalité ». Puis, ayant de
la
sorte disqualifié la violence — car tout le monde est d’accord pour c
86
brutalité ». Puis, ayant de la sorte disqualifié
la
violence — car tout le monde est d’accord pour condamner la brutalité
87
e — car tout le monde est d’accord pour condamner
la
brutalité —, on se met à abuser du mot dans le sens le plus péjoratif
88
er la brutalité —, on se met à abuser du mot dans
le
sens le plus péjoratif. J’en donnerai un exemple qui fait bien voir t
89
utalité —, on se met à abuser du mot dans le sens
le
plus péjoratif. J’en donnerai un exemple qui fait bien voir toute l’é
90
J’en donnerai un exemple qui fait bien voir toute
l’
équivoque de la situation : on a coutume, à droite et au centre, de vi
91
n exemple qui fait bien voir toute l’équivoque de
la
situation : on a coutume, à droite et au centre, de vilipender le mar
92
n a coutume, à droite et au centre, de vilipender
le
marxisme en le traitant de « doctrine de violence ». Or, rien n’est m
93
droite et au centre, de vilipender le marxisme en
le
traitant de « doctrine de violence ». Or, rien n’est moins « violent
94
violence ». Or, rien n’est moins « violent » que
la
doctrine de Marx, rigoureusement évolutive en tant que doctrine1, et
95
et par là même, conforme au mouvement profond de
la
pensée bourgeoise, sinon aux intérêts immédiats des bourgeois. Les se
96
oise, sinon aux intérêts immédiats des bourgeois.
Les
seules véritables doctrines de violence apparues dans notre époque so
97
eorges Sorel : elles s’accordent au plus mal avec
le
style de la pensée marxiste. La vraie violence Nous pouvons mai
98
: elles s’accordent au plus mal avec le style de
la
pensée marxiste. La vraie violence Nous pouvons maintenant essa
99
plus mal avec le style de la pensée marxiste.
La
vraie violence Nous pouvons maintenant essayer de préciser une dis
100
tion radicale entre violence et brutalité, — avec
l’
espoir de sauver le mot « violence » de ses déviations sémantiques int
101
violence et brutalité, — avec l’espoir de sauver
le
mot « violence » de ses déviations sémantiques intéressées, et de le
102
de ses déviations sémantiques intéressées, et de
le
restaurer dans sa puissance active, libératrice. La violence est le f
103
restaurer dans sa puissance active, libératrice.
La
violence est le fait même de l’esprit, j’entends de l’esprit créateur
104
sa puissance active, libératrice. La violence est
le
fait même de l’esprit, j’entends de l’esprit créateur. Dès que l’espr
105
ive, libératrice. La violence est le fait même de
l’
esprit, j’entends de l’esprit créateur. Dès que l’esprit fait irruptio
106
olence est le fait même de l’esprit, j’entends de
l’
esprit créateur. Dès que l’esprit fait irruption dans le monde, pour y
107
l’esprit, j’entends de l’esprit créateur. Dès que
l’
esprit fait irruption dans le monde, pour y réaliser ses vues, il fait
108
it créateur. Dès que l’esprit fait irruption dans
le
monde, pour y réaliser ses vues, il fait violence à un état de choses
109
ne, qu’il s’agisse d’élever des blocs de pierre à
la
hauteur d’un cintre, de labourer la terre, ou d’écrire un ouvrage don
110
s de pierre à la hauteur d’un cintre, de labourer
la
terre, ou d’écrire un ouvrage dont la nécessité n’est sentie tout d’a
111
de labourer la terre, ou d’écrire un ouvrage dont
la
nécessité n’est sentie tout d’abord que par l’auteur qui l’imposera.
112
nt la nécessité n’est sentie tout d’abord que par
l’
auteur qui l’imposera. Tout acte créateur de l’esprit — et c’est l’esp
113
té n’est sentie tout d’abord que par l’auteur qui
l’
imposera. Tout acte créateur de l’esprit — et c’est l’esprit seul qui
114
ar l’auteur qui l’imposera. Tout acte créateur de
l’
esprit — et c’est l’esprit seul qui crée — est une « transgression » d
115
posera. Tout acte créateur de l’esprit — et c’est
l’
esprit seul qui crée — est une « transgression » des lois admises jusq
116
ansgression » des lois admises jusqu’alors : d’où
le
malaise que crée naturellement cet acte, malaise qui est à l’origine
117
ue crée naturellement cet acte, malaise qui est à
l’
origine de l’état d’esprit conservateur que nous décrivions tout à l’h
118
ellement cet acte, malaise qui est à l’origine de
l’
état d’esprit conservateur que nous décrivions tout à l’heure. D’où au
119
d’esprit conservateur que nous décrivions tout à
l’
heure. D’où aussi le risque que l’acte institue pour celui qui l’ose.
120
ur que nous décrivions tout à l’heure. D’où aussi
le
risque que l’acte institue pour celui qui l’ose. Mais c’est préciséme
121
crivions tout à l’heure. D’où aussi le risque que
l’
acte institue pour celui qui l’ose. Mais c’est précisément ce sentimen
122
ussi le risque que l’acte institue pour celui qui
l’
ose. Mais c’est précisément ce sentiment de malaise, lié à l’euphorie
123
c’est précisément ce sentiment de malaise, lié à
l’
euphorie du risque encouru, qui est le signe normal d’une création de
124
aise, lié à l’euphorie du risque encouru, qui est
le
signe normal d’une création de l’esprit humain. Les époques de décade
125
ncouru, qui est le signe normal d’une création de
l’
esprit humain. Les époques de décadence sont celles où l’on en vient à
126
e signe normal d’une création de l’esprit humain.
Les
époques de décadence sont celles où l’on en vient à redouter par-dess
127
t humain. Les époques de décadence sont celles où
l’
on en vient à redouter par-dessus tout ce malaise (à le qualifier de s
128
en vient à redouter par-dessus tout ce malaise (à
le
qualifier de scandale) et à l’éprouver plus fortement que l’euphorie
129
tout ce malaise (à le qualifier de scandale) et à
l’
éprouver plus fortement que l’euphorie du risque, du jeu. C’est un aff
130
r de scandale) et à l’éprouver plus fortement que
l’
euphorie du risque, du jeu. C’est un affadissement et une trahison cer
131
’est un affadissement et une trahison certaine de
l’
Évangile qui ont conduit les chrétiens moyens à insister uniquement su
132
e trahison certaine de l’Évangile qui ont conduit
les
chrétiens moyens à insister uniquement sur la douceur et la subtile a
133
it les chrétiens moyens à insister uniquement sur
la
douceur et la subtile aménité de l’esprit. Cette fausse « charité » s
134
ns moyens à insister uniquement sur la douceur et
la
subtile aménité de l’esprit. Cette fausse « charité » sentimentale es
135
niquement sur la douceur et la subtile aménité de
l’
esprit. Cette fausse « charité » sentimentale est nettement condamnée
136
harité » sentimentale est nettement condamnée par
l’
Évangile : « Je ne suis pas venu apporter la paix, mais le glaive. » E
137
e par l’Évangile : « Je ne suis pas venu apporter
la
paix, mais le glaive. » Et le terme même de violence que la plupart d
138
le : « Je ne suis pas venu apporter la paix, mais
le
glaive. » Et le terme même de violence que la plupart des moralistes
139
s pas venu apporter la paix, mais le glaive. » Et
le
terme même de violence que la plupart des moralistes chrétiens d’aujo
140
d’aujourd’hui ont coutume de condamner au nom de
la
« charité », se trouve avoir été glorifié par l’Évangile : Violenti r
141
la « charité », se trouve avoir été glorifié par
l’
Évangile : Violenti rapiunt illud, le Royaume de Dieu est promis aux v
142
glorifié par l’Évangile : Violenti rapiunt illud,
le
Royaume de Dieu est promis aux violents. Là encore, c’est l’influence
143
de Dieu est promis aux violents. Là encore, c’est
l’
influence de la morale bourgeoise qui a fait perdre sa vigueur au chri
144
mis aux violents. Là encore, c’est l’influence de
la
morale bourgeoise qui a fait perdre sa vigueur au christianisme, et n
145
a fait perdre sa vigueur au christianisme, et non
l’
inverse, comme le soutiennent des polémistes ignorants. La violence ét
146
vigueur au christianisme, et non l’inverse, comme
le
soutiennent des polémistes ignorants. La violence étant le fait de l’
147
e, comme le soutiennent des polémistes ignorants.
La
violence étant le fait de l’esprit, elle se confond avec la liberté.
148
nnent des polémistes ignorants. La violence étant
le
fait de l’esprit, elle se confond avec la liberté. C’est elle seule q
149
olémistes ignorants. La violence étant le fait de
l’
esprit, elle se confond avec la liberté. C’est elle seule qui délivre
150
e étant le fait de l’esprit, elle se confond avec
la
liberté. C’est elle seule qui délivre l’homme de la chaîne des routin
151
ond avec la liberté. C’est elle seule qui délivre
l’
homme de la chaîne des routines et des lois qu’il se forge, c’est elle
152
liberté. C’est elle seule qui délivre l’homme de
la
chaîne des routines et des lois qu’il se forge, c’est elle seule qui
153
et des lois qu’il se forge, c’est elle seule qui
l’
empêche de se laisser emprisonner dans ses propres institutions, lorsq
154
pres institutions, lorsque celles-ci ont cessé de
le
servir. Telle est l’origine du concept occidental de révolution. La r
155
rsque celles-ci ont cessé de le servir. Telle est
l’
origine du concept occidental de révolution. La révolution est toujour
156
st l’origine du concept occidental de révolution.
La
révolution est toujours spirituelle : elle est l’acte de l’homme qui
157
La révolution est toujours spirituelle : elle est
l’
acte de l’homme qui rejette ses vieilles commodités, qui violente ses
158
ion est toujours spirituelle : elle est l’acte de
l’
homme qui rejette ses vieilles commodités, qui violente ses habitudes
159
es tyrannies, et qui crée des possibles nouveaux.
La
révolution ainsi comprise est aussi indispensable à la vie sociale qu
160
volution ainsi comprise est aussi indispensable à
la
vie sociale que l’imagination l’est à la vie individuelle. D’ailleurs
161
rise est aussi indispensable à la vie sociale que
l’
imagination l’est à la vie individuelle. D’ailleurs, si la violence es
162
indispensable à la vie sociale que l’imagination
l’
est à la vie individuelle. D’ailleurs, si la violence est libératrice,
163
nsable à la vie sociale que l’imagination l’est à
la
vie individuelle. D’ailleurs, si la violence est libératrice, elle n’
164
ation l’est à la vie individuelle. D’ailleurs, si
la
violence est libératrice, elle n’est pas pour autant anarchique. Elle
165
que j’y verrais plutôt deux synonymes. Reprenons
l’
exemple du bloc de pierre élevé jusqu’au cintre : on y retrouve ces tr
166
au cintre : on y retrouve ces trois caractères de
la
vraie violence spirituelle, ou de la vraie création révolutionnaire :
167
aractères de la vraie violence spirituelle, ou de
la
vraie création révolutionnaire : la pierre est élevée, c’est-à-dire «
168
tuelle, ou de la vraie création révolutionnaire :
la
pierre est élevée, c’est-à-dire « libérée » de la loi de pesanteur, p
169
la pierre est élevée, c’est-à-dire « libérée » de
la
loi de pesanteur, puis elle est placée dans une « organisation » nouv
170
, et tout cela s’opère en vertu d’une décision de
l’
esprit2. Enfin, la vraie violence n’exclut nullement la délicatesse (v
171
père en vertu d’une décision de l’esprit2. Enfin,
la
vraie violence n’exclut nullement la délicatesse (voir Nietzsche), ni
172
rit2. Enfin, la vraie violence n’exclut nullement
la
délicatesse (voir Nietzsche), ni la subtilité des moyens, ni la sérén
173
lut nullement la délicatesse (voir Nietzsche), ni
la
subtilité des moyens, ni la sérénité du ton. Bien au contraire ! Tout
174
(voir Nietzsche), ni la subtilité des moyens, ni
la
sérénité du ton. Bien au contraire ! Tout ceci n’apparaîtrait paradox
175
adoxal qu’à ceux qui n’auraient pas su distinguer
la
vraie violence de la brutalité, du simple fait qu’elles sont souvent
176
n’auraient pas su distinguer la vraie violence de
la
brutalité, du simple fait qu’elles sont souvent liées. (Il y a peu de
177
sont souvent liées. (Il y a peu de tons purs dans
la
vie.) La brutalité tue la violence Par opposition à la violence
178
liées. (Il y a peu de tons purs dans la vie.)
La
brutalité tue la violence Par opposition à la violence, signe de l
179
eu de tons purs dans la vie.) La brutalité tue
la
violence Par opposition à la violence, signe de l’esprit agissant,
180
La brutalité tue la violence Par opposition à
la
violence, signe de l’esprit agissant, la brutalité peut être définie
181
iolence Par opposition à la violence, signe de
l’
esprit agissant, la brutalité peut être définie comme un aspect et un
182
sition à la violence, signe de l’esprit agissant,
la
brutalité peut être définie comme un aspect et un caractère avant tou
183
ct et un caractère avant tout matériels. Elle est
le
fait d’une contrainte purement extérieure, donc incapable en soi de r
184
c incapable en soi de rien créer et animer. C’est
la
brimade, la vexation, le choc qui blesse sans régénérer, la suppressi
185
en soi de rien créer et animer. C’est la brimade,
la
vexation, le choc qui blesse sans régénérer, la suppression inutile e
186
n créer et animer. C’est la brimade, la vexation,
le
choc qui blesse sans régénérer, la suppression inutile et absurde, l’
187
, la vexation, le choc qui blesse sans régénérer,
la
suppression inutile et absurde, l’interdiction qui offense la vitalit
188
ans régénérer, la suppression inutile et absurde,
l’
interdiction qui offense la vitalité, qui nie la signification profond
189
on inutile et absurde, l’interdiction qui offense
la
vitalité, qui nie la signification profonde de toute existence. C’est
190
, l’interdiction qui offense la vitalité, qui nie
la
signification profonde de toute existence. C’est tout d’abord un proc
191
s discernement, sans « signification » précise, —
le
sens étant toujours donné par l’esprit. Ôte-toi de là que je m’y mett
192
ion » précise, — le sens étant toujours donné par
l’
esprit. Ôte-toi de là que je m’y mette, et je n’ai pas de raisons à te
193
donner, il n’y en a pas, ou pas d’avouables… Mais
la
brutalité peut aussi revêtir un aspect non matériel : par exemple, il
194
un aspect non matériel : par exemple, il y a dans
la
logique une certaine brutalité, reconnaissable à un caractère de cont
195
e, comme mécanique, et qui ne tient pas compte de
la
nature spirituelle, passionnelle ou vitale des réalités auxquelles s’
196
elle ou vitale des réalités auxquelles s’applique
le
règlement. La sensibilité féminine réagit d’ordinaire avec précision
197
des réalités auxquelles s’applique le règlement.
La
sensibilité féminine réagit d’ordinaire avec précision à cette brutal
198
t d’ordinaire avec précision à cette brutalité de
la
logique ; elle la déteste absolument, tandis que la violence l’effray
199
précision à cette brutalité de la logique ; elle
la
déteste absolument, tandis que la violence l’effraye mais la tente en
200
logique ; elle la déteste absolument, tandis que
la
violence l’effraye mais la tente en même temps. La définition la plus
201
lle la déteste absolument, tandis que la violence
l’
effraye mais la tente en même temps. La définition la plus frappante e
202
absolument, tandis que la violence l’effraye mais
la
tente en même temps. La définition la plus frappante et la plus voyan
203
a violence l’effraye mais la tente en même temps.
La
définition la plus frappante et la plus voyante, si je puis dire, de
204
ffraye mais la tente en même temps. La définition
la
plus frappante et la plus voyante, si je puis dire, de la brutalité,
205
en même temps. La définition la plus frappante et
la
plus voyante, si je puis dire, de la brutalité, est fournie par les r
206
frappante et la plus voyante, si je puis dire, de
la
brutalité, est fournie par les régimes totalitaires. La dictature tot
207
si je puis dire, de la brutalité, est fournie par
les
régimes totalitaires. La dictature totalitaire est la brutalité même,
208
talité, est fournie par les régimes totalitaires.
La
dictature totalitaire est la brutalité même, en ce qu’elle est fondée
209
égimes totalitaires. La dictature totalitaire est
la
brutalité même, en ce qu’elle est fondée sur le principe de la contra
210
t la brutalité même, en ce qu’elle est fondée sur
le
principe de la contrainte par corps, — même lorsqu’il s’agit des chos
211
même, en ce qu’elle est fondée sur le principe de
la
contrainte par corps, — même lorsqu’il s’agit des choses de l’esprit.
212
par corps, — même lorsqu’il s’agit des choses de
l’
esprit. Elle ne déteste rien tant que la vraie violence, inventive et
213
choses de l’esprit. Elle ne déteste rien tant que
la
vraie violence, inventive et imprévue, qui viendrait déranger ses con
214
la fois matérielles et abstraites, géométriques.
La
libre manifestation des antagonismes réels lui est encore plus intolé
215
réels lui est encore plus intolérable qu’elle ne
l’
était à l’ordre bourgeois. Aussi se donne-t-elle pour première tâche d
216
est encore plus intolérable qu’elle ne l’était à
l’
ordre bourgeois. Aussi se donne-t-elle pour première tâche de tuer dan
217
se donne-t-elle pour première tâche de tuer dans
la
jeunesse toute velléité de violence spirituelle. L’éducation fasciste
218
jeunesse toute velléité de violence spirituelle.
L’
éducation fasciste ou stalinienne a pour effet systématique de substit
219
inienne a pour effet systématique de substituer à
l’
esprit d’autonomie, de responsabilité spirituelle et de risque personn
220
e et de risque personnel, des instincts brutaux :
l’
instinct de puissance, l’instinct de conformité au grand nombre, l’ins
221
des instincts brutaux : l’instinct de puissance,
l’
instinct de conformité au grand nombre, l’instinct d’obéissance aveugl
222
ssance, l’instinct de conformité au grand nombre,
l’
instinct d’obéissance aveugle. Mais il se produit là un phénomène curi
223
il se produit là un phénomène curieux : alors que
la
bourgeoisie disqualifiait la violence en la confondant avec la brutal
224
curieux : alors que la bourgeoisie disqualifiait
la
violence en la confondant avec la brutalité, les dictatures totalitai
225
s que la bourgeoisie disqualifiait la violence en
la
confondant avec la brutalité, les dictatures totalitaires tentent de
226
e disqualifiait la violence en la confondant avec
la
brutalité, les dictatures totalitaires tentent de requalifier la brut
227
t la violence en la confondant avec la brutalité,
les
dictatures totalitaires tentent de requalifier la brutalité en la bap
228
es dictatures totalitaires tentent de requalifier
la
brutalité en la baptisant violence. D’où le recours constant des nati
229
talitaires tentent de requalifier la brutalité en
la
baptisant violence. D’où le recours constant des nationaux-socialiste
230
ifier la brutalité en la baptisant violence. D’où
le
recours constant des nationaux-socialistes à Nietzsche, abus flagrant
231
socialistes à Nietzsche, abus flagrant (que toute
la
pensée du poète-philosophe dénonce). Là encore, il semble qu’une cert
232
es externes, un « rendement social » immédiat, et
l’
on ne s’aperçoit pas que ce faisant, l’on détruit les racines de l’esp
233
médiat, et l’on ne s’aperçoit pas que ce faisant,
l’
on détruit les racines de l’esprit créateur, les promesses de fécondit
234
on ne s’aperçoit pas que ce faisant, l’on détruit
les
racines de l’esprit créateur, les promesses de fécondité révolutionna
235
t pas que ce faisant, l’on détruit les racines de
l’
esprit créateur, les promesses de fécondité révolutionnaire de l’aveni
236
t, l’on détruit les racines de l’esprit créateur,
les
promesses de fécondité révolutionnaire de l’avenir. Montesquieu a dit
237
ur, les promesses de fécondité révolutionnaire de
l’
avenir. Montesquieu a dit l’essentiel sur cette brutalité-là, dans son
238
té révolutionnaire de l’avenir. Montesquieu a dit
l’
essentiel sur cette brutalité-là, dans son fameux chapitre en trois li
239
é-là, dans son fameux chapitre en trois lignes de
L’
Esprit des Lois : « Quand les sauvages de la Louisiane veulent avoir d
240
re en trois lignes de L’Esprit des Lois : « Quand
les
sauvages de la Louisiane veulent avoir du fruit, ils coupent l’arbre
241
es de L’Esprit des Lois : « Quand les sauvages de
la
Louisiane veulent avoir du fruit, ils coupent l’arbre au pied et cuei
242
la Louisiane veulent avoir du fruit, ils coupent
l’
arbre au pied et cueillent le fruit. Voilà le gouvernement despotique.
243
u fruit, ils coupent l’arbre au pied et cueillent
le
fruit. Voilà le gouvernement despotique. » Le refus de la violence
244
pent l’arbre au pied et cueillent le fruit. Voilà
le
gouvernement despotique. » Le refus de la violence appelle la brut
245
le fruit. Voilà le gouvernement despotique. »
Le
refus de la violence appelle la brutalité Confondre la violence et
246
oilà le gouvernement despotique. » Le refus de
la
violence appelle la brutalité Confondre la violence et la brutalit
247
despotique. » Le refus de la violence appelle
la
brutalité Confondre la violence et la brutalité, c’est se placer d
248
de la violence appelle la brutalité Confondre
la
violence et la brutalité, c’est se placer dans une position spirituel
249
appelle la brutalité Confondre la violence et
la
brutalité, c’est se placer dans une position spirituelle inférieure,
250
position spirituelle inférieure, pour autant que
la
défensive est en principe inférieure à l’agressivité. Se méfier de la
251
ant que la défensive est en principe inférieure à
l’
agressivité. Se méfier de la violence, avoir peur des risques féconds
252
principe inférieure à l’agressivité. Se méfier de
la
violence, avoir peur des risques féconds qu’elle institue, c’est se p
253
des meilleures armes dont nous disposions contre
la
brutalité. La vraie violence est en définitive pacifiante : elle acce
254
s armes dont nous disposions contre la brutalité.
La
vraie violence est en définitive pacifiante : elle accepte les confli
255
lence est en définitive pacifiante : elle accepte
les
conflits, les fait mûrir et les résout en créations. Mais la méthode
256
éfinitive pacifiante : elle accepte les conflits,
les
fait mûrir et les résout en créations. Mais la méthode qui règne actu
257
te : elle accepte les conflits, les fait mûrir et
les
résout en créations. Mais la méthode qui règne actuellement dans les
258
, les fait mûrir et les résout en créations. Mais
la
méthode qui règne actuellement dans les « démocraties de l’Ouest » —
259
ions. Mais la méthode qui règne actuellement dans
les
« démocraties de l’Ouest » — comme dit le Führer — et qui consiste à
260
qui règne actuellement dans les « démocraties de
l’
Ouest » — comme dit le Führer — et qui consiste à biaiser avec les dif
261
t dans les « démocraties de l’Ouest » — comme dit
le
Führer — et qui consiste à biaiser avec les difficultés, à masquer le
262
me dit le Führer — et qui consiste à biaiser avec
les
difficultés, à masquer les antagonismes de fait, et à les déconcerter
263
onsiste à biaiser avec les difficultés, à masquer
les
antagonismes de fait, et à les déconcerter provisoirement à force de
264
icultés, à masquer les antagonismes de fait, et à
les
déconcerter provisoirement à force de « combines » et de compromis, c
265
ent, ne peut conduire qu’à un état de désordre où
la
brutalité ne trouvera plus de résistance sérieuse. L’histoire de l’ap
266
rutalité ne trouvera plus de résistance sérieuse.
L’
histoire de l’après-guerre et de l’établissement des trois fascismes l
267
ouvera plus de résistance sérieuse. L’histoire de
l’
après-guerre et de l’établissement des trois fascismes le démontre ave
268
ance sérieuse. L’histoire de l’après-guerre et de
l’
établissement des trois fascismes le démontre avec éclat : la crainte
269
-guerre et de l’établissement des trois fascismes
le
démontre avec éclat : la crainte de la violence suscite mécaniquement
270
ment des trois fascismes le démontre avec éclat :
la
crainte de la violence suscite mécaniquement une brutalité qui, à son
271
fascismes le démontre avec éclat : la crainte de
la
violence suscite mécaniquement une brutalité qui, à son tour, ne peut
272
brutalité qui, à son tour, ne peut pas supporter
la
vraie violence. Le libéralisme et la dictature affectent l’un et l’au
273
on tour, ne peut pas supporter la vraie violence.
Le
libéralisme et la dictature affectent l’un et l’autre la violence (sp
274
as supporter la vraie violence. Le libéralisme et
la
dictature affectent l’un et l’autre la violence (spirituelle) du sign
275
ralisme et la dictature affectent l’un et l’autre
la
violence (spirituelle) du signe moins (en fait sinon en théorie). C’e
276
redoute, et se trouve désarmé lorsqu’il survient.
Le
destin des démocraties est lié à l’éducation ; celui des dictatures à
277
’il survient. Le destin des démocraties est lié à
l’
éducation ; celui des dictatures à la contrainte. Le seul moyen de pré
278
es est lié à l’éducation ; celui des dictatures à
la
contrainte. Le seul moyen de prévenir cette contrainte, c’est d’orien
279
éducation ; celui des dictatures à la contrainte.
Le
seul moyen de prévenir cette contrainte, c’est d’orienter l’éducation
280
en de prévenir cette contrainte, c’est d’orienter
l’
éducation vers une prise de conscience vigoureuse de la valeur libérat
281
cation vers une prise de conscience vigoureuse de
la
valeur libératrice de la violence. Que ceux qui pensent qu’il est déj
282
conscience vigoureuse de la valeur libératrice de
la
violence. Que ceux qui pensent qu’il est déjà trop tard sachent qu’il
283
ent qu’ils sont par là même les premiers à rendre
le
tyran fatal. 1. Ce qui a pu faire illusion, reconnaissons-le, c’es
284
. 1. Ce qui a pu faire illusion, reconnaissons-
le
, c’est la théorie de la dictature du prolétariat d’une part, et le to
285
qui a pu faire illusion, reconnaissons-le, c’est
la
théorie de la dictature du prolétariat d’une part, et le ton « brutal
286
e illusion, reconnaissons-le, c’est la théorie de
la
dictature du prolétariat d’une part, et le ton « brutal » des polémiq
287
rie de la dictature du prolétariat d’une part, et
le
ton « brutal » des polémiques de Marx. Mais la dictature du prolétari
288
et le ton « brutal » des polémiques de Marx. Mais
la
dictature du prolétariat n’est pour Marx que la riposte nécessaire du
289
s la dictature du prolétariat n’est pour Marx que
la
riposte nécessaire du socialisme au capitalisme qui voudrait prolonge
290
statut en s’appuyant sur des moyens brutaux. Pour
le
fond, la doctrine de Marx a été fort bien caractérisée comme celle d’
291
s’appuyant sur des moyens brutaux. Pour le fond,
la
doctrine de Marx a été fort bien caractérisée comme celle d’un « évol
292
t Dandieu). 2. Il y aurait lieu aussi d’analyser
la
valeur ambiguë de « violence » dans l’acte du viol, qui paraît une br
293
d’analyser la valeur ambiguë de « violence » dans
l’
acte du viol, qui paraît une brutalité. Mais cela nous entraînerait as
294
a nous entraînerait assez loin. Notons simplement
le
caractère essentiellement viril de la violence, et d’ailleurs de l’es
295
simplement le caractère essentiellement viril de
la
violence, et d’ailleurs de l’esprit créateur en général. Et, d’autre
296
tiellement viril de la violence, et d’ailleurs de
l’
esprit créateur en général. Et, d’autre part, l’effémination de la bou
297
e l’esprit créateur en général. Et, d’autre part,
l’
effémination de la bourgeoisie qui attend un dictateur comme la femell
298
r en général. Et, d’autre part, l’effémination de
la
bourgeoisie qui attend un dictateur comme la femelle s’offre au viol
299
n de la bourgeoisie qui attend un dictateur comme
la
femelle s’offre au viol redouté. a. Rougemont Denis de, « Violence
300
. Rougemont Denis de, « Violence et brutalité »,
Les
Nouveaux Cahiers, Paris, 1 juin 1937, p. 14-17.
301
savoir à quoi ils pensent (Quelques remarques sur
la
méthode) (1er novembre 1937)b (Quelques remarques sur la méthode
302
(1er novembre 1937)b (Quelques remarques sur
la
méthode) Le désir de savoir à quoi pense le voisin trahit sans dou
303
937)b (Quelques remarques sur la méthode)
Le
désir de savoir à quoi pense le voisin trahit sans doute, à l’origine
304
ur la méthode) Le désir de savoir à quoi pense
le
voisin trahit sans doute, à l’origine, une crainte obscure qu’on a de
305
avoir à quoi pense le voisin trahit sans doute, à
l’
origine, une crainte obscure qu’on a de lui ; révèle ensuite que l’on
306
ainte obscure qu’on a de lui ; révèle ensuite que
l’
on nourrit soi-même à son endroit quelque intention bonne ou mauvaise.
307
aque sont prudemment dissimulés et confondus sous
le
vocable de curiosité. « Pourquoi me demandez-vous cela ? — Pour rien,
308
ela ? — Pour rien, par pure curiosité. » Au vrai,
le
mot curiosité est vide de sens, s’il ne recouvre pas cette crainte ou
309
e crainte ou cette entreprise projetée, ou encore
les
deux à la fois. En dépit de l’opinion convenue, et justifiée d’ailleu
310
ojetée, ou encore les deux à la fois. En dépit de
l’
opinion convenue, et justifiée d’ailleurs en tant que convention, rien
311
ant que convention, rien n’est moins innocent que
la
curiosité, rien n’est moins désintéressé dans ses mobiles. Sans doute
312
oute une analyse un peu poussée révélerait-elle à
l’
origine de la recherche la plus abstraite, de la soif de savoir la plu
313
yse un peu poussée révélerait-elle à l’origine de
la
recherche la plus abstraite, de la soif de savoir la plus purement sp
314
ussée révélerait-elle à l’origine de la recherche
la
plus abstraite, de la soif de savoir la plus purement spéculative, l’
315
à l’origine de la recherche la plus abstraite, de
la
soif de savoir la plus purement spéculative, l’un au moins de ces int
316
recherche la plus abstraite, de la soif de savoir
la
plus purement spéculative, l’un au moins de ces intérêts fondamentaux
317
un au moins de ces intérêts fondamentaux que sont
la
défense ou l’attaque, et qui apparaissent dans leur belle nudité lors
318
ces intérêts fondamentaux que sont la défense ou
l’
attaque, et qui apparaissent dans leur belle nudité lorsqu’un amant de
319
x. (Pour eux, contre eux, ou avec eux.) Constater
les
préoccupations d’une classe, d’une profession, d’un groupe humain que
320
profession, d’un groupe humain quelconque, c’est
l’
opération nécessaire à laquelle doivent se livrer tous ceux qui sont s
321
soucieux, en politique ou en économie, d’adapter
l’
offre à la demande. Mais ce peut être aussi un moyen efficace de se li
322
en politique ou en économie, d’adapter l’offre à
la
demande. Mais ce peut être aussi un moyen efficace de se libérer des
323
et des caricatures obsédantes sur lesquelles joue
la
politique. Un moyen de trouver des arguments qui portent, qui atteign
324
ment notre rubrique. Il reste alors à reconnaître
les
dangers d’une semblable méthode, et les limites de sa fécondité. ⁂ Ta
325
connaître les dangers d’une semblable méthode, et
les
limites de sa fécondité. ⁂ Tant qu’on n’aura pas inventé la machine à
326
de sa fécondité. ⁂ Tant qu’on n’aura pas inventé
la
machine à lire les pensées, nous serons bien forcés de nous contenter
327
⁂ Tant qu’on n’aura pas inventé la machine à lire
les
pensées, nous serons bien forcés de nous contenter de leur expression
328
n forcés de nous contenter de leur expression par
le
langage. À quoi ils pensent… pour nous, c’est : Ce qu’ils disent. En
329
, c’est sans doute autre chose. Voici tendus tous
les
pièges du langage. Les mêmes mots n’ont pas le même sens, ne trahisse
330
e chose. Voici tendus tous les pièges du langage.
Les
mêmes mots n’ont pas le même sens, ne trahissent pas les mêmes pensée
331
s les pièges du langage. Les mêmes mots n’ont pas
le
même sens, ne trahissent pas les mêmes pensées, si l’on passe d’un gr
332
es mots n’ont pas le même sens, ne trahissent pas
les
mêmes pensées, si l’on passe d’un groupe à un autre, d’une classe soc
333
ême sens, ne trahissent pas les mêmes pensées, si
l’
on passe d’un groupe à un autre, d’une classe sociale, d’une région à
334
ue savons-nous des résonances qu’éveillent dans «
le
peuple » les grands mots du langage politique ? Et du sens qu’il leur
335
us des résonances qu’éveillent dans « le peuple »
les
grands mots du langage politique ? Et du sens qu’il leur donne lorsqu
336
politique ? Et du sens qu’il leur donne lorsqu’il
les
répète ? À distance et en gros, l’on peut croire que tous les Françai
337
nne lorsqu’il les répète ? À distance et en gros,
l’
on peut croire que tous les Français, par exemple, traduisent les même
338
À distance et en gros, l’on peut croire que tous
les
Français, par exemple, traduisent les mêmes réalités ou les mêmes idé
339
re que tous les Français, par exemple, traduisent
les
mêmes réalités ou les mêmes idéaux par les mêmes mots ; et qu’un même
340
is, par exemple, traduisent les mêmes réalités ou
les
mêmes idéaux par les mêmes mots ; et qu’un même son éveille les mêmes
341
uisent les mêmes réalités ou les mêmes idéaux par
les
mêmes mots ; et qu’un même son éveille les mêmes échos. La politique
342
ux par les mêmes mots ; et qu’un même son éveille
les
mêmes échos. La politique se fonde sur cette croyance, et la presse a
343
mots ; et qu’un même son éveille les mêmes échos.
La
politique se fonde sur cette croyance, et la presse arrive parfois à
344
hos. La politique se fonde sur cette croyance, et
la
presse arrive parfois à lui donner une certaine consistance. Mais ce
345
ce. Mais ce qui peut être vrai statistiquement ne
l’
est presque jamais dans le détail. Plus on s’approche d’un groupement
346
vrai statistiquement ne l’est presque jamais dans
le
détail. Plus on s’approche d’un groupement défini et concret, plus on
347
un groupement défini et concret, plus on constate
l’
absence de commune mesure entre son langage et celui des journaux et d
348
e lis dans un livre récentc : L’autre jour, dans
l’
autocar, une femme dont j’ai cru comprendre qu’elle tient un petit hôt
349
jamais fait ce rapprochement ? Ce petit fait, si
l’
on y réfléchit, résume un drame. Ce drame est celui du langage dans no
350
est celui du langage dans notre société présente.
Les
mots que nous disons ou que nous écrivons, nous autres intellectuels,
351
rivons, nous autres intellectuels, éveillent dans
l’
esprit populaire des harmoniques que nous ne savons plus prévoir. » L
352
s harmoniques que nous ne savons plus prévoir. »
L’
auteur ne croyait pas si bien dire : en recevant les épreuves de son l
353
’auteur ne croyait pas si bien dire : en recevant
les
épreuves de son livre, il y trouva jointe une petite note écrite à l’
354
ivre, il y trouva jointe une petite note écrite à
l’
encre rouge par le correcteur de l’imprimerie : Épicerie et spéciali
355
jointe une petite note écrite à l’encre rouge par
le
correcteur de l’imprimerie : Épicerie et spécialiste. L’auteur para
356
note écrite à l’encre rouge par le correcteur de
l’
imprimerie : Épicerie et spécialiste. L’auteur paraît croire à un ra
357
teur de l’imprimerie : Épicerie et spécialiste.
L’
auteur paraît croire à un rapprochement absurde. Il fait erreur. Nous
358
chement absurde. Il fait erreur. Nous sommes dans
le
Midi, où un sentiment obscur de latinité a survécu. Et épices (d’où é
359
d’où épicerie) et espèces (d’où spécialiste) sont
le
même mot. Tous deux remontent à species (latin). Les espèces, devenue
360
même mot. Tous deux remontent à species (latin).
Les
espèces, devenues épices, étaient : gingembre, muscade, cannelle, poi
361
étaient : gingembre, muscade, cannelle, poivre. «
Les
quatre espèces » (épices). J’amenderais cette partie, si j’étais l’au
362
» (épices). J’amenderais cette partie, si j’étais
l’
auteur… D’où je déduirais que rien n’est simple, en ce domaine, ni ab
363
en n’est simple, en ce domaine, ni absurde malgré
les
apparences, mais que « comprendre » les paroles d’un homme suppose un
364
de malgré les apparences, mais que « comprendre »
les
paroles d’un homme suppose une science presque surhumaine. Pour concl
365
bien se résoudre à de grossières approximations.
Le
danger serait alors d’ignorer qu’il ne s’agit que d’approximations, v
366
oire dans certains cas, de calembours. (Exemple :
les
sens contradictoires que prend la revendication de liberté selon les
367
rs. (Exemple : les sens contradictoires que prend
la
revendication de liberté selon les classes ou les nations). ⁂ Autre d
368
oires que prend la revendication de liberté selon
les
classes ou les nations). ⁂ Autre danger : si l’on questionne directem
369
la revendication de liberté selon les classes ou
les
nations). ⁂ Autre danger : si l’on questionne directement les gens su
370
les classes ou les nations). ⁂ Autre danger : si
l’
on questionne directement les gens sur leurs « pensées » et préoccupat
371
. ⁂ Autre danger : si l’on questionne directement
les
gens sur leurs « pensées » et préoccupations, ils ne disent rien de b
372
hentique. Ou bien vous obtenez des variations sur
la
réponse des amoureux (« à rien ») ou bien des phrases toutes faites e
373
es phrases toutes faites empruntées au journal, à
la
campagne électorale. C’est que l’homme-moyen n’a pas coutume de se fo
374
s au journal, à la campagne électorale. C’est que
l’
homme-moyen n’a pas coutume de se formuler clairement ce qu’il vit. Pr
375
pour peu qu’elles sortent du cadre de son métier,
le
prennent au dépourvu. Il n’a pas formé de phrases dans sa tête sur ce
376
s formé de phrases dans sa tête sur ce sujet dont
le
journal ne parle jamais. Ou bien, sur tel autre sujet, il vous rend c
377
— presse ou partis — lui ont prêté, c’est-à-dire
la
monnaie de votre pièce, non la substance de sa vie. Il faut donc évit
378
rêté, c’est-à-dire la monnaie de votre pièce, non
la
substance de sa vie. Il faut donc éviter tout ce qui ressemblerait à
379
à une enquête : d’abord à cause du malentendu sur
les
mots, ensuite à cause de ce défaut de moyens d’expression, ou de ces
380
essairement inadéquates. Mais laissez donc parler
les
gens longtemps, souvent, à bâtons rompus, et sur n’importe quel sujet
381
ce, d’informations hétéroclites, par repérer dans
les
grandes lignes la vraie nature de leurs soucis, mieux qu’ils ne saura
382
hétéroclites, par repérer dans les grandes lignes
la
vraie nature de leurs soucis, mieux qu’ils ne sauraient le dire, just
383
nature de leurs soucis, mieux qu’ils ne sauraient
le
dire, justement. Quelquefois, il suffit d’une chance, d’une bizarreri
384
ici un petit exemple. Dans cette pauvre région de
l’
Ouest, je rencontre une vieille paysanne. Elle se plaint : c’est la ja
385
ntre une vieille paysanne. Elle se plaint : c’est
la
jambe qui ne va plus ! D’où cela vient-il ? — C’est depuis qu’ils m’o
386
le. Je lui demande comment c’est arrivé, et voici
le
récit, noté sur l’heure : C’était le 26 de juillet, l’anniversaire d
387
comment c’est arrivé, et voici le récit, noté sur
l’
heure : C’était le 26 de juillet, l’anniversaire de ma défunte mère.
388
é, et voici le récit, noté sur l’heure : C’était
le
26 de juillet, l’anniversaire de ma défunte mère. Le matin je me dis
389
it, noté sur l’heure : C’était le 26 de juillet,
l’
anniversaire de ma défunte mère. Le matin je me dis : qu’est-ce qu’on
390
26 de juillet, l’anniversaire de ma défunte mère.
Le
matin je me dis : qu’est-ce qu’on va manger, ce jour ? Je n’avais pas
391
va manger, ce jour ? Je n’avais pas grand-chose.
Le
père et les deux fils disent : on est plus jeunes que toi, on va alle
392
ce jour ? Je n’avais pas grand-chose. Le père et
les
deux fils disent : on est plus jeunes que toi, on va aller au travail
393
que toi, on va aller au travail, et toi tu iras à
la
pêche. Ils partent pour le marais, vont tirer le sel, font ce qu’ils
394
vail, et toi tu iras à la pêche. Ils partent pour
le
marais, vont tirer le sel, font ce qu’ils avaient à faire. Moi je vai
395
la pêche. Ils partent pour le marais, vont tirer
le
sel, font ce qu’ils avaient à faire. Moi je vais à l’écluse, je ramas
396
el, font ce qu’ils avaient à faire. Moi je vais à
l’
écluse, je ramasse des anguilles, quelques crabes, deux ou trois jambe
397
qu’il faut pour manger. Ils rentrent d’avoir tiré
le
sel et mangent la pêche. J’avais ajouté deux ou trois jambes, donc, m
398
nger. Ils rentrent d’avoir tiré le sel et mangent
la
pêche. J’avais ajouté deux ou trois jambes, donc, mais moi je n’en ma
399
ge, moi je reste ici. Ils rentrent vers 6 heures,
les
jeunes d’abord, parce qu’ils ont des bicyclettes, ils vont plus vite.
400
e qu’ils ont des bicyclettes, ils vont plus vite.
Le
père rentre un peu plus tard. Le plus vieux dit : j’ai bien faim. Le
401
vont plus vite. Le père rentre un peu plus tard.
Le
plus vieux dit : j’ai bien faim. Le plus jeune, il a toujours faim, a
402
eu plus tard. Le plus vieux dit : j’ai bien faim.
Le
plus jeune, il a toujours faim, alors c’est pareil. Je dis : oh ! vou
403
— une belle soupe aux pommes de terre ! Oh ! dit
le
plus vieux, s’il y a une soupe aux pommes de terre, je vais en manger
404
coucher ! Ils mangent et on va se coucher. C’est
le
lendemain matin que j’ai vu qu’ils avaient pris la chèvre. Je n’imag
405
e lendemain matin que j’ai vu qu’ils avaient pris
la
chèvre. Je n’imagine pas de question directe qui eût ainsi pu faire
406
out, c’est au pain quotidien. » ⁂ Il est rare que
le
film d’une conversation, non retouché, offre une image significative,
407
d’absurdité, de décousu, est même ce qui garantit
l’
authenticité de la relation d’un entretien. Mais cela ne saurait satis
408
cousu, est même ce qui garantit l’authenticité de
la
relation d’un entretien. Mais cela ne saurait satisfaire entièrement
409
r se préparer à une action non encore déterminée,
l’
esprit a besoin de conclusions, de données simples, c’est-à-dire de ré
410
-dire de résumés simplifiés. Mais alors on courra
le
risque inverse : on retombera dans les schémas, les généralisations b
411
s on courra le risque inverse : on retombera dans
les
schémas, les généralisations banales et tendancieuses qui sont les vi
412
e risque inverse : on retombera dans les schémas,
les
généralisations banales et tendancieuses qui sont les vices de toute
413
généralisations banales et tendancieuses qui sont
les
vices de toute enquête. La signification des propos recueillis et sty
414
endancieuses qui sont les vices de toute enquête.
La
signification des propos recueillis et stylisés pouvant toujours être
415
pouvant toujours être attribuée au parti pris de
l’
enquêteur. Entre ces deux écueils, le Charybde de l’incohérence et le
416
arti pris de l’enquêteur. Entre ces deux écueils,
le
Charybde de l’incohérence et le Scylla du trop prévu, il faut savoir
417
enquêteur. Entre ces deux écueils, le Charybde de
l’
incohérence et le Scylla du trop prévu, il faut savoir naviguer dans l
418
ces deux écueils, le Charybde de l’incohérence et
le
Scylla du trop prévu, il faut savoir naviguer dans le « courant » c’e
419
cylla du trop prévu, il faut savoir naviguer dans
le
« courant » c’est-à-dire se maintenir au niveau des phrases d’échange
420
d’échange quotidien, des propos qu’on entend chez
le
bistrot ou autour d’une table de famille. À considérer de trop près l
421
p près leur langage, on conclurait volontiers que
les
gens ne pensent rien de clair ni de raisonnable ; à le considérer tro
422
ns ne pensent rien de clair ni de raisonnable ; à
le
considérer trop superficiellement, qu’ils ne pensent qu’à l’instar du
423
er trop superficiellement, qu’ils ne pensent qu’à
l’
instar du journal. Il faut essayer de se maintenir à mi-distance entre
424
faut essayer de se maintenir à mi-distance entre
les
bizarreries individuelles et les lieux communs éculés, à mi-distance
425
i-distance entre les bizarreries individuelles et
les
lieux communs éculés, à mi-distance entre le pittoresque et la statis
426
et les lieux communs éculés, à mi-distance entre
le
pittoresque et la statistique, à ce niveau où le langage est suffisam
427
uns éculés, à mi-distance entre le pittoresque et
la
statistique, à ce niveau où le langage est suffisamment habituel pour
428
le pittoresque et la statistique, à ce niveau où
le
langage est suffisamment habituel pour que les petites déformations q
429
où le langage est suffisamment habituel pour que
les
petites déformations qu’il subit dans un groupe donné deviennent aisé
430
isément perceptibles : ce sont elles qui révèlent
la
vraie pensée du groupe. Nous en sommes là aujourd’hui : tout le monde
431
en sommes là aujourd’hui : tout le monde réclame
la
liberté, des libertés, et s’en réclame à droite et à gauche, à Moscou
432
ussi bien qu’à Berlin. Mais ce n’est plus que par
l’
intonation, l’élan, la mimique de l’homme qui émet ce vocable usé, ou
433
Berlin. Mais ce n’est plus que par l’intonation,
l’
élan, la mimique de l’homme qui émet ce vocable usé, ou par l’emploi i
434
Mais ce n’est plus que par l’intonation, l’élan,
la
mimique de l’homme qui émet ce vocable usé, ou par l’emploi imprévu q
435
plus que par l’intonation, l’élan, la mimique de
l’
homme qui émet ce vocable usé, ou par l’emploi imprévu qu’il en fait d
436
imique de l’homme qui émet ce vocable usé, ou par
l’
emploi imprévu qu’il en fait dans le contexte de son discours, de son
437
e usé, ou par l’emploi imprévu qu’il en fait dans
le
contexte de son discours, de son milieu, de sa vie quotidienne, que v
438
ous pourrez deviner comment il pense ce mot, s’il
le
souffre, s’il l’aime de tout son être ou s’il ne fait qu’y rêvasser m
439
er comment il pense ce mot, s’il le souffre, s’il
l’
aime de tout son être ou s’il ne fait qu’y rêvasser machinalement.
440
voir à quoi ils pensent ? (Quelques remarques sur
la
méthode) », Les Nouveaux Cahiers, Paris, 1 novembre 1937, p. 18-19.
441
pensent ? (Quelques remarques sur la méthode) »,
Les
Nouveaux Cahiers, Paris, 1 novembre 1937, p. 18-19. c. Il s’agit du
442
Lectures dirigées dans
le
IIIe Reich (15 décembre 1937)d J’ai sous les yeux deux documents q
443
ns le IIIe Reich (15 décembre 1937)d J’ai sous
les
yeux deux documents qui n’ont rien de secret : un article de revue et
444
logue d’éditeur, tous deux publiés en Allemagne à
l’
occasion des fêtes. Le catalogue comporte environ 80 titres (publicati
445
deux publiés en Allemagne à l’occasion des fêtes.
Le
catalogue comporte environ 80 titres (publications récentes et rappel
446
rs, littéraires, historiques, anecdotiques. Voici
la
liste des titres contenant le mot ou l’idée de race : La Beauté nord
447
anecdotiques. Voici la liste des titres contenant
le
mot ou l’idée de race : La Beauté nordique ; Art et race ; Le visage
448
es. Voici la liste des titres contenant le mot ou
l’
idée de race : La Beauté nordique ; Art et race ; Le visage des chefs
449
des titres contenant le mot ou l’idée de race :
La
Beauté nordique ; Art et race ; Le visage des chefs allemands (22e mi
450
dée de race : La Beauté nordique ; Art et race ;
Le
visage des chefs allemands (22e mille) ; Race et humour ; La mère all
451
es chefs allemands (22e mille) ; Race et humour ;
La
mère allemande (80e mille) ; Le livre des femmes nationales-socialist
452
Race et humour ; La mère allemande (80e mille) ;
Le
livre des femmes nationales-socialistes ; Race, peuple, soldat ; La p
453
s nationales-socialistes ; Race, peuple, soldat ;
La
paysannerie, source de la race nordique. L’âme nordique (30e mille) ;
454
Race, peuple, soldat ; La paysannerie, source de
la
race nordique. L’âme nordique (30e mille) ; Race et âme (43e mille) ;
455
dat ; La paysannerie, source de la race nordique.
L’
âme nordique (30e mille) ; Race et âme (43e mille) ; Hygiène raciale ;
456
ivers. — 99e mille en moyenne). Musique et race ;
La
France et l’idée raciale ; Race, droit, peuple ; Race et état dans l
457
mille en moyenne). Musique et race ; La France et
l’
idée raciale ; Race, droit, peuple ; Race et état dans le domaine Nor
458
aciale ; Race, droit, peuple ; Race et état dans
le
domaine Nord-Est ; Traits fondamentaux de l’histoire raciale allemand
459
dans le domaine Nord-Est ; Traits fondamentaux de
l’
histoire raciale allemande ; Race et patrie chez les Indo-Germains ; P
460
’histoire raciale allemande ; Race et patrie chez
les
Indo-Germains ; Peuple et race (revue). Comme il ne s’agit là que du
461
de ces chiffres aucune conclusion définitive sur
le
pourcentage d’intérêt — si j’ose dire — que manifestent les lecteurs
462
ntage d’intérêt — si j’ose dire — que manifestent
les
lecteurs allemands. Il existe d’autres maisons d’édition qui se spéci
463
autres maisons d’édition qui se spécialisent dans
la
littérature pure, et chez lesquelles on ne trouvera, sur cent titres,
464
r cent titres, que quatre ou cinq se rapportant à
la
race. Par contre, la liste que je viens de recopier ne donne qu’une f
465
atre ou cinq se rapportant à la race. Par contre,
la
liste que je viens de recopier ne donne qu’une faible idée de l’ensem
466
viens de recopier ne donne qu’une faible idée de
l’
ensemble des publications allemandes sur ce sujet, depuis 1933. J’ajou
467
llemandes sur ce sujet, depuis 1933. J’ajoute que
la
maison d’édition en question n’est nullement spécialisée, au sens fra
468
ts de recherche. Du moins sont-ils présentés sous
l’
aspect le plus populaire. Et les chiffres de tirage sont significatifs
469
herche. Du moins sont-ils présentés sous l’aspect
le
plus populaire. Et les chiffres de tirage sont significatifs à cet ég
470
ils présentés sous l’aspect le plus populaire. Et
les
chiffres de tirage sont significatifs à cet égard, même si l’on tient
471
de tirage sont significatifs à cet égard, même si
l’
on tient compte de la diffusion moyenne du livre allemand, très supéri
472
icatifs à cet égard, même si l’on tient compte de
la
diffusion moyenne du livre allemand, très supérieure à celle du livre
473
it à une demande réelle du public ; s’il traduit
la
pensée réelle du lecteur allemand moyen. Il faut se rappeler que dans
474
Il faut se rappeler que dans un état totalitaire,
la
question « à quoi pensent ?… » tend à se réduire à la question : « à
475
uestion « à quoi pensent ?… » tend à se réduire à
la
question : « à quoi leur dit-on de penser ? » C’est-à-dire qu’on a re
476
it-on de penser ? » C’est-à-dire qu’on a remplacé
la
mode — maîtresse des goûts moyens en France — par la volonté de l’Éta
477
mode — maîtresse des goûts moyens en France — par
la
volonté de l’État (Hitler, Goebbels et Rosenberg). Il peut donc être
478
se des goûts moyens en France — par la volonté de
l’
État (Hitler, Goebbels et Rosenberg). Il peut donc être intéressant de
479
à un organe qui s’efforce de traduire fidèlement
les
désirs officiels du Parti : la revue Deutsches Volkstum par exemple.
480
aduire fidèlement les désirs officiels du Parti :
la
revue Deutsches Volkstum par exemple. Ce périodique s’occupe d’art et
481
même de religion. Dans sa livraison de décembre,
le
rédacteur en chef, Wilhelm Stapel, publie, comme chaque année, un art
482
comme chaque année, un article destiné à diriger
le
goût de ses lecteurs au moment des achats de Noël. Voici les vingt-de
483
ses lecteurs au moment des achats de Noël. Voici
les
vingt-deux titres qu’il propose : Une traduction de Wolfram von Esche
484
ction de Wolfram von Eschenbach. Une Histoire de
la
poésie allemande ; La Musique allemande de l’époque ; Eugène Diesel
485
chenbach. Une Histoire de la poésie allemande ;
La
Musique allemande de l’époque ; Eugène Diesel (biographie) ; Ballad
486
de la poésie allemande ; La Musique allemande de
l’
époque ; Eugène Diesel (biographie) ; Ballades germaniques ; Cultur
487
; Œuvres complètes de F. Blunck (littérature) ;
Les
Grands Allemands ; Histoire de notre peuple ; Figures du passé alle
488
e de notre peuple ; Figures du passé allemand ;
Le
caractère populaire allemand ; Le monde nordique ; Esprit allemand
489
sé allemand ; Le caractère populaire allemand ;
Le
monde nordique ; Esprit allemand ; Sparte ; Arndt (héros des guerr
490
du Moyen Âge ; Histoire des Allemands Sudètes ;
Le
soldat allemand (lettres de guerre) ; et quatre romans (dont un sur l
491
ettres de guerre) ; et quatre romans (dont un sur
la
guerre, et un sur le Moyen Âge allemand). Les mots « allemand », « ge
492
t quatre romans (dont un sur la guerre, et un sur
le
Moyen Âge allemand). Les mots « allemand », « germain », « nordique »
493
sur la guerre, et un sur le Moyen Âge allemand).
Les
mots « allemand », « germain », « nordique », reviennent donc dans 13
494
« nordique », reviennent donc dans 13 titres. Et
la
moitié des autres, au moins, évoquent de la façon la plus précise l’i
495
s. Et la moitié des autres, au moins, évoquent de
la
façon la plus précise l’idéologie du Parti : technique, morale sparti
496
moitié des autres, au moins, évoquent de la façon
la
plus précise l’idéologie du Parti : technique, morale spartiate, cult
497
s, au moins, évoquent de la façon la plus précise
l’
idéologie du Parti : technique, morale spartiate, culte des héros mili
498
u Moyen Âge germanique. Je vous laisse à imaginer
les
rêves du lecteur allemand, heureux bénéficiaire de ces « cadeaux de N
499
d. Rougemont Denis de, « Lectures dirigées dans
le
IIIe Reich », Les Nouveaux Cahiers, Paris, 15 décembre 1937, p. 16.
500
nis de, « Lectures dirigées dans le IIIe Reich »,
Les
Nouveaux Cahiers, Paris, 15 décembre 1937, p. 16.
501
Du danger de s’unir (15 avril 1938)e
Le
ministère Blum a vécu l’espace d’une parenthèse ouverte par l’Anschlu
502
unir (15 avril 1938)e Le ministère Blum a vécu
l’
espace d’une parenthèse ouverte par l’Anschluss et fermée par le plébi
503
Blum a vécu l’espace d’une parenthèse ouverte par
l’
Anschluss et fermée par le plébiscite grand-allemand. Face à l’affirma
504
parenthèse ouverte par l’Anschluss et fermée par
le
plébiscite grand-allemand. Face à l’affirmation de l’unité germanique
505
t fermée par le plébiscite grand-allemand. Face à
l’
affirmation de l’unité germanique, faite et scellée en deux coups de p
506
lébiscite grand-allemand. Face à l’affirmation de
l’
unité germanique, faite et scellée en deux coups de poing, la France,
507
manique, faite et scellée en deux coups de poing,
la
France, un mois durant, s’est énervée à discourir sur sa désunion. J’
508
is sur un ton qui, de toute évidence, en excluait
la
possibilité. Car quand la droite propose l’union à condition que la g
509
e évidence, en excluait la possibilité. Car quand
la
droite propose l’union à condition que la gauche renonce à ses réform
510
luait la possibilité. Car quand la droite propose
l’
union à condition que la gauche renonce à ses réformes, et quand la ga
511
r quand la droite propose l’union à condition que
la
gauche renonce à ses réformes, et quand la gauche propose l’union à c
512
on que la gauche renonce à ses réformes, et quand
la
gauche propose l’union à condition que la droite adopte son programme
513
enonce à ses réformes, et quand la gauche propose
l’
union à condition que la droite adopte son programme, c’est que, de pa
514
t quand la gauche propose l’union à condition que
la
droite adopte son programme, c’est que, de part et d’autre, on est tr
515
e double hypocrisie est sans doute un hommage que
l’
esprit partisan rend à l’union sacrée. Mais ce qui m’apparaît le plus
516
ans doute un hommage que l’esprit partisan rend à
l’
union sacrée. Mais ce qui m’apparaît le plus dangereux dans cette affa
517
san rend à l’union sacrée. Mais ce qui m’apparaît
le
plus dangereux dans cette affaire, ce n’est pas l’hypocrisie ni l’esp
518
e plus dangereux dans cette affaire, ce n’est pas
l’
hypocrisie ni l’esprit partisan, c’est l’hommage et l’union sacrée. L’
519
dans cette affaire, ce n’est pas l’hypocrisie ni
l’
esprit partisan, c’est l’hommage et l’union sacrée. L’hypocrisie est t
520
’est pas l’hypocrisie ni l’esprit partisan, c’est
l’
hommage et l’union sacrée. L’hypocrisie est trop grossière pour trompe
521
pocrisie ni l’esprit partisan, c’est l’hommage et
l’
union sacrée. L’hypocrisie est trop grossière pour tromper, et l’espri
522
prit partisan, c’est l’hommage et l’union sacrée.
L’
hypocrisie est trop grossière pour tromper, et l’esprit partisan est c
523
L’hypocrisie est trop grossière pour tromper, et
l’
esprit partisan est comme déconcerté par ses propres excès. Mais cette
524
ion sacrée qu’on invoque, craignons qu’à force de
l’
invoquer l’on finisse par la vouloir et par la faire. ⁂ Il est vrai qu
525
qu’on invoque, craignons qu’à force de l’invoquer
l’
on finisse par la vouloir et par la faire. ⁂ Il est vrai qu’on n’en es
526
aignons qu’à force de l’invoquer l’on finisse par
la
vouloir et par la faire. ⁂ Il est vrai qu’on n’en est encore qu’à s’e
527
de l’invoquer l’on finisse par la vouloir et par
la
faire. ⁂ Il est vrai qu’on n’en est encore qu’à s’en servir comme d’u
528
à part, que fait-on depuis un mois pour préparer
les
voies de la réconciliation ? Les socialistes du Populaire soulèvent l
529
fait-on depuis un mois pour préparer les voies de
la
réconciliation ? Les socialistes du Populaire soulèvent leurs troupes
530
is pour préparer les voies de la réconciliation ?
Les
socialistes du Populaire soulèvent leurs troupes contre le Sénat, pro
531
istes du Populaire soulèvent leurs troupes contre
le
Sénat, provoquant une manifestation qu’ils interdisent en tant que mi
532
station qu’ils interdisent en tant que ministres.
Le
Parti communiste fait crier : « À bas Blum ! » au Vélodrome d’Hiver,
533
crier : « À bas Blum ! » au Vélodrome d’Hiver, et
le
lendemain, fait publier par Ce Soir : « Les élus communistes exigent
534
er, et le lendemain, fait publier par Ce Soir : «
Les
élus communistes exigent que Blum reste au pouvoir ! » Le Parti radic
535
communistes exigent que Blum reste au pouvoir ! »
Le
Parti radical, à la Chambre, soutient un ministère qu’il renverse au
536
que Blum reste au pouvoir ! » Le Parti radical, à
la
Chambre, soutient un ministère qu’il renverse au Sénat. Et que font c
537
u Sénat. Et que font ces trois partis réunis dans
le
Front populaire ? Leurs gouvernements successifs qualifient l’un aprè
538
cessifs qualifient l’un après l’autre d’illégales
les
occupations d’usines, et refusent l’un après l’autre d’intervenir pou
539
nt l’un après l’autre d’intervenir pour appliquer
la
loi dont ils sont les auteurs. L’habitude de la non-intervention se p
540
d’intervenir pour appliquer la loi dont ils sont
les
auteurs. L’habitude de la non-intervention se prend décidément très v
541
pour appliquer la loi dont ils sont les auteurs.
L’
habitude de la non-intervention se prend décidément très vite. Quant à
542
r la loi dont ils sont les auteurs. L’habitude de
la
non-intervention se prend décidément très vite. Quant à la droite, on
543
tervention se prend décidément très vite. Quant à
la
droite, on renonce à résumer son jeu ; sans doute n’en sait-elle plus
544
on jeu ; sans doute n’en sait-elle plus elle-même
les
règles. Patriote, elle exporte ses capitaux. Antisémite, elle oppose
545
n tout le monde est devenu fou, c’est-à-dire fait
le
contraire de ce qu’il veut faire ; ou bien personne, en réalité, ne v
546
eut faire ; ou bien personne, en réalité, ne veut
l’
union qu’on dit vouloir, et alors tout s’explique aisément. ⁂ Or, ce q
547
alors tout s’explique aisément. ⁂ Or, ce qui est
le
plus à redouter, ce n’est pas tant qu’on triche sous prétexte d’union
548
utre part dupé par ce grand mot dont on lui rebat
les
oreilles, le peuple de France, un beau jour, ne se décide à jouer sér
549
par ce grand mot dont on lui rebat les oreilles,
le
peuple de France, un beau jour, ne se décide à jouer sérieusement, —
550
our, ne se décide à jouer sérieusement, — à jouer
le
jeu de l’union sacrée. Ce qui est grave, ce qu’il faut redouter, c’es
551
décide à jouer sérieusement, — à jouer le jeu de
l’
union sacrée. Ce qui est grave, ce qu’il faut redouter, c’est que le d
552
qui est grave, ce qu’il faut redouter, c’est que
le
désir de riposter au coup d’Hitler n’amène les droites et les gauches
553
que le désir de riposter au coup d’Hitler n’amène
les
droites et les gauches en même temps à ne plus concevoir leur union q
554
riposter au coup d’Hitler n’amène les droites et
les
gauches en même temps à ne plus concevoir leur union que sous la form
555
ême temps à ne plus concevoir leur union que sous
la
forme d’un Anschluss, d’une mutuelle annexion. Il ne manque pas de Se
556
annexion. Il ne manque pas de Seiss-Inquart, dans
les
deux camps, pour appeler au secours les troupes adverses et les prier
557
art, dans les deux camps, pour appeler au secours
les
troupes adverses et les prier de venir rétablir l’ordre. Il ne manque
558
, pour appeler au secours les troupes adverses et
les
prier de venir rétablir l’ordre. Il ne manque pas de fascistes incons
559
s troupes adverses et les prier de venir rétablir
l’
ordre. Il ne manque pas de fascistes inconscients pour confondre ordre
560
e gauche pour proclamer qu’en présence du danger,
l’
exercice de la pensée libre, ou simplement de l’intelligence, équivaut
561
proclamer qu’en présence du danger, l’exercice de
la
pensée libre, ou simplement de l’intelligence, équivaut à une trahiso
562
, l’exercice de la pensée libre, ou simplement de
l’
intelligence, équivaut à une trahison… Enfin, il ne manque pas de poli
563
que leur programme d’union est celui qui supprime
les
problèmes au lieu d’essayer de les résoudre, et fait converger des re
564
i qui supprime les problèmes au lieu d’essayer de
les
résoudre, et fait converger des refus au lieu de composer des efforts
565
oser des efforts. Programme de M. Daladier (selon
le
Journal du 10 avril) : exclusion des communistes ; non-intervention e
566
e du réarmement à outrance, et même au-delà. Mais
la
presse n’en parlera pas, cela va de soi, c’est le seul but commun à t
567
la presse n’en parlera pas, cela va de soi, c’est
le
seul but commun à tous les partis existants. On peut se payer l’éléga
568
, cela va de soi, c’est le seul but commun à tous
les
partis existants. On peut se payer l’élégance de le taire. Toutes les
569
mun à tous les partis existants. On peut se payer
l’
élégance de le taire. Toutes les unions sacrées se font ainsi. Pour év
570
partis existants. On peut se payer l’élégance de
le
taire. Toutes les unions sacrées se font ainsi. Pour éviter de mourir
571
. On peut se payer l’élégance de le taire. Toutes
les
unions sacrées se font ainsi. Pour éviter de mourir, cessons de vivre
572
es nos raisons d’être, et armons-nous pour sauver
le
reste. Hitler menace la paix de l’Europe ? Qu’à cela ne tienne, décré
573
t armons-nous pour sauver le reste. Hitler menace
la
paix de l’Europe ? Qu’à cela ne tienne, décrétons l’état de guerre et
574
us pour sauver le reste. Hitler menace la paix de
l’
Europe ? Qu’à cela ne tienne, décrétons l’état de guerre et c’est Hitl
575
paix de l’Europe ? Qu’à cela ne tienne, décrétons
l’
état de guerre et c’est Hitler qui sera bien attrapé ! Trois dictature
576
nos libertés démocratiques ? Eh bien ! cessons de
les
exercer, ces libertés, et comme cela les dictateurs n’auront plus rie
577
ssons de les exercer, ces libertés, et comme cela
les
dictateurs n’auront plus rien à supprimer chez nous ! Les primitifs s
578
ateurs n’auront plus rien à supprimer chez nous !
Les
primitifs s’accordent à tenir pour sacrée l’absence totale de raison
579
s ! Les primitifs s’accordent à tenir pour sacrée
l’
absence totale de raison chez un être doté d’une apparence humaine. Es
580
r, sous prétexte d’union « sacrée » ? ⁂ Concevoir
l’
union comme l’annexion d’une moitié de la France par l’autre, c’est la
581
te d’union « sacrée » ? ⁂ Concevoir l’union comme
l’
annexion d’une moitié de la France par l’autre, c’est la rendre irréal
582
oncevoir l’union comme l’annexion d’une moitié de
la
France par l’autre, c’est la rendre irréalisable, dans l’état actuel
583
xion d’une moitié de la France par l’autre, c’est
la
rendre irréalisable, dans l’état actuel des choses. J’en conclus que
584
t actuel des choses. J’en conclus que personne ne
la
veut sérieusement. Mais comme tout le monde en parle, et non sans émo
585
ce rêve qui peut tourner au cauchemar. Car seule
la
force brutale peut opérer une union de ce type, qui n’est qu’une unif
586
on de ce type, qui n’est qu’une unification. Dans
la
mesure où on la voudra, on voudra donc la force brutale. On voudra do
587
ui n’est qu’une unification. Dans la mesure où on
la
voudra, on voudra donc la force brutale. On voudra donc la fin des li
588
n. Dans la mesure où on la voudra, on voudra donc
la
force brutale. On voudra donc la fin des libertés françaises. Et pour
589
, on voudra donc la force brutale. On voudra donc
la
fin des libertés françaises. Et pour sauver la France, on perdra les
590
nc la fin des libertés françaises. Et pour sauver
la
France, on perdra les meilleures raisons de la défendre. Disons plus
591
s françaises. Et pour sauver la France, on perdra
les
meilleures raisons de la défendre. Disons plus : on perdra ses meille
592
er la France, on perdra les meilleures raisons de
la
défendre. Disons plus : on perdra ses meilleures forces. L’union qui
593
e. Disons plus : on perdra ses meilleures forces.
L’
union qui se fait par la force n’est pas l’union qui fait la force. Ou
594
ra ses meilleures forces. L’union qui se fait par
la
force n’est pas l’union qui fait la force. Ou alors, cessons de criti
595
orces. L’union qui se fait par la force n’est pas
l’
union qui fait la force. Ou alors, cessons de critiquer Hitler, Stalin
596
i se fait par la force n’est pas l’union qui fait
la
force. Ou alors, cessons de critiquer Hitler, Staline, Mussolini. La
597
cessons de critiquer Hitler, Staline, Mussolini.
La
force de la France n’est pas dans son union. Elle est dans sa capacit
598
critiquer Hitler, Staline, Mussolini. La force de
la
France n’est pas dans son union. Elle est dans sa capacité unique au
599
est dans sa capacité unique au monde de supporter
les
désunions, ou pour mieux dire : le libre jeu des plus franches opposi
600
de supporter les désunions, ou pour mieux dire :
le
libre jeu des plus franches oppositions. La force de la France est da
601
ire : le libre jeu des plus franches oppositions.
La
force de la France est dans la création, et non pas dans la disciplin
602
re jeu des plus franches oppositions. La force de
la
France est dans la création, et non pas dans la discipline ; dans l’i
603
nches oppositions. La force de la France est dans
la
création, et non pas dans la discipline ; dans l’invention, non dans
604
e la France est dans la création, et non pas dans
la
discipline ; dans l’invention, non dans la marche en rangs. Un peuple
605
la création, et non pas dans la discipline ; dans
l’
invention, non dans la marche en rangs. Un peuple qui accepte une dict
606
s dans la discipline ; dans l’invention, non dans
la
marche en rangs. Un peuple qui accepte une dictature se décerne un ce
607
royons pas surtout qu’il en soit aussi fier qu’il
le
paraît, et aussi satisfait qu’il le proclame. Ne croyons pas qu’il co
608
si fier qu’il le paraît, et aussi satisfait qu’il
le
proclame. Ne croyons pas qu’il considère sans envie notre périlleuse
609
e notre périlleuse liberté, dont sa presse raille
les
abus, mais dont il espère en secret que sortira sa propre délivrance.
610
n secret que sortira sa propre délivrance. Ce que
le
monde attend de la France, en vérité, ce n’est pas un Führer de plus,
611
a sa propre délivrance. Ce que le monde attend de
la
France, en vérité, ce n’est pas un Führer de plus, mais au contraire,
612
t pas un Führer de plus, mais au contraire, c’est
la
solution des problèmes que d’autres, n’ayant pu résoudre, ont essayé
613
yé de supprimer en se donnant à un Führer. Ce que
le
monde attend de la France, c’est une audace libératrice. L’audace d’a
614
se donnant à un Führer. Ce que le monde attend de
la
France, c’est une audace libératrice. L’audace d’assumer tous les ris
615
ttend de la France, c’est une audace libératrice.
L’
audace d’assumer tous les risques de la liberté politique, l’audace de
616
t une audace libératrice. L’audace d’assumer tous
les
risques de la liberté politique, l’audace de pousser les conflits jus
617
bératrice. L’audace d’assumer tous les risques de
la
liberté politique, l’audace de pousser les conflits jusqu’à leur plei
618
assumer tous les risques de la liberté politique,
l’
audace de pousser les conflits jusqu’à leur pleine maturation, jusqu’à
619
ques de la liberté politique, l’audace de pousser
les
conflits jusqu’à leur pleine maturation, jusqu’à leur solution réelle
620
pleine maturation, jusqu’à leur solution réelle.
L’
audace de faire passer cette mission créatrice avant l’intérêt « natio
621
ace de faire passer cette mission créatrice avant
l’
intérêt « national » au sens matérialiste et militaire que prend ce te
622
matérialiste et militaire que prend ce terme dans
l’
Europe fascisée. On ne défend bien que ce qui vaut d’être défendu. Et
623
ne défend bien que ce qui vaut d’être défendu. Et
la
plus forte armée du monde n’est rien, si le pays qu’elle entend proté
624
u. Et la plus forte armée du monde n’est rien, si
le
pays qu’elle entend protéger abdique ses raisons de vivre avant même
625
ger abdique ses raisons de vivre avant même qu’on
l’
attaque, sous prétexte de mieux se défendre. Avec vingt ans de retard,
626
Avec vingt ans de retard, Hitler vient de gagner
la
guerre à Vienne. Avec vingt ans d’avance sur Hitler, la France va-t-e
627
rre à Vienne. Avec vingt ans d’avance sur Hitler,
la
France va-t-elle enfin gagner sa paix ? ⁂ Ce n’est point sans raisons
628
sons que je termine sur une question. S’opposer à
l’
union sacrée, ce n’est pas faire l’éloge du désordre présent, du désor
629
n. S’opposer à l’union sacrée, ce n’est pas faire
l’
éloge du désordre présent, du désordre honteux de lui-même, et que ses
630
rêver d’un fascisme. Mais il s’agit de savoir si
la
France, réellement, saura retrouver l’usage concret et positif des li
631
savoir si la France, réellement, saura retrouver
l’
usage concret et positif des libertés qu’elle s’est conquises. Il s’ag
632
s qu’elle s’est conquises. Il s’agit de savoir si
le
désordre va devenir la seule expression de nos libertés dégénérées, o
633
es. Il s’agit de savoir si le désordre va devenir
la
seule expression de nos libertés dégénérées, ou si nous saurons retro
634
s, une commune mesure spirituelle qui ne soit pas
les
armements, qui ne soit pas la défense nationale mais d’abord l’idéal
635
le qui ne soit pas les armements, qui ne soit pas
la
défense nationale mais d’abord l’idéal national. Il n’en faudrait pas
636
qui ne soit pas la défense nationale mais d’abord
l’
idéal national. Il n’en faudrait pas davantage — ni moins — pour trans
637
ue chose d’incomparablement plus beau et fort que
l’
ordre apparent des fascismes. Enfin, toute la question est là : — la l
638
que l’ordre apparent des fascismes. Enfin, toute
la
question est là : — la liberté fait-elle plus peur qu’envie ? Ne sait
639
es fascismes. Enfin, toute la question est là : —
la
liberté fait-elle plus peur qu’envie ? Ne sait-on plus en voir que le
640
plus peur qu’envie ? Ne sait-on plus en voir que
les
revers ? Ou prendrons-nous enfin conscience de l’écrasante supériorit
641
es revers ? Ou prendrons-nous enfin conscience de
l’
écrasante supériorité qu’elle peut signifier dans l’avenir, si nous ce
642
écrasante supériorité qu’elle peut signifier dans
l’
avenir, si nous cessons de nous énerver, si nous osons vivre la paix ?
643
nous cessons de nous énerver, si nous osons vivre
la
paix ? e. Rougemont Denis de, « Du danger de s’unir », Les Nouveau
644
e. Rougemont Denis de, « Du danger de s’unir »,
Les
Nouveaux Cahiers, Paris, 15 avril 1938, p. 21-22.
645
Vues sur
le
national-socialisme (1er juin 1938)f Les notes qui suivent sont ex
646
es sur le national-socialisme (1er juin 1938)f
Les
notes qui suivent sont extraites d’un « journal » tenu en 1935 et 193
647
traites d’un « journal » tenu en 1935 et 1936 par
l’
auteur, alors chargé de cours dans une Université allemande de l’Ouest
648
chargé de cours dans une Université allemande de
l’
Ouest. On a choisi parmi ces observations celles qui paraissent garder
649
ualité après deux ans. I. — À quoi pensent…
Les
bourgeois. — J’arrivais de Paris persuadé que l’hitlérisme est un mou
650
Les bourgeois. — J’arrivais de Paris persuadé que
l’
hitlérisme est un mouvement « de droite », une dernière tentative pour
651
« de droite », une dernière tentative pour sauver
le
capitalisme et les privilèges bourgeois, comme disent les socialistes
652
dernière tentative pour sauver le capitalisme et
les
privilèges bourgeois, comme disent les socialistes, ou encore : un re
653
talisme et les privilèges bourgeois, comme disent
les
socialistes, ou encore : un rempart contre le bolchévisme, comme dise
654
nt les socialistes, ou encore : un rempart contre
le
bolchévisme, comme disent les réactionnaires. Je vois beaucoup de bou
655
: un rempart contre le bolchévisme, comme disent
les
réactionnaires. Je vois beaucoup de bourgeois : professeurs, médecins
656
me faut bien reconnaître qu’ils sont tous contre
le
régime. C’est un bolchévisme déguisé, répètent-ils. Drôle de « rempar
657
de « rempart ». Ils se plaignent de ce que toutes
les
réformes soient en faveur des ouvriers et des paysans ; et que les im
658
nt en faveur des ouvriers et des paysans ; et que
les
impôts prennent les proportions d’une confiscation de capital ; et qu
659
riers et des paysans ; et que les impôts prennent
les
proportions d’une confiscation de capital ; et que la vie de famille
660
roportions d’une confiscation de capital ; et que
la
vie de famille soit détruite, l’autorité des parents sapée, la religi
661
capital ; et que la vie de famille soit détruite,
l’
autorité des parents sapée, la religion dénaturée, éliminée de l’éduca
662
ille soit détruite, l’autorité des parents sapée,
la
religion dénaturée, éliminée de l’éducation, persécutée par mille moy
663
parents sapée, la religion dénaturée, éliminée de
l’
éducation, persécutée par mille moyens sournois, méthodiquement. Mais
664
mille moyens sournois, méthodiquement. Mais si je
les
interroge sur leurs projets de résistance, ils se dérobent. Je parvie
665
se dérobent. Je parviens à leur faire avouer que
le
bolchévisme brun est tout de même, à leurs yeux, moins affreux que le
666
est tout de même, à leurs yeux, moins affreux que
le
rouge. Il n’y a pas eu de massacres. Tout se passe d’une manière prog
667
s et leurs fonctions, sous des maîtres nouveaux. (
Le
gouverneur de la province est un ancien employé de postes, ventripote
668
ons, sous des maîtres nouveaux. (Le gouverneur de
la
province est un ancien employé de postes, ventripotent et qu’on juge
669
ntripotent et qu’on juge très vulgaire.) Partout,
la
même crainte paralyse en germe tout essai de résister : si ce n’étaie
670
erme tout essai de résister : si ce n’étaient pas
les
bruns qui avaient le pouvoir, ce seraient les rouges. Ils n’imaginent
671
ister : si ce n’étaient pas les bruns qui avaient
le
pouvoir, ce seraient les rouges. Ils n’imaginent pas d’autre alternat
672
pas les bruns qui avaient le pouvoir, ce seraient
les
rouges. Ils n’imaginent pas d’autre alternative. De fait, ces « possé
673
ute pas, en Europe, de classe plus indifférente à
la
vie politique, plus passive vis-à-vis de l’État, plus lâche devant le
674
nte à la vie politique, plus passive vis-à-vis de
l’
État, plus lâche devant le fait accompli — et toujours accompli par d’
675
us passive vis-à-vis de l’État, plus lâche devant
le
fait accompli — et toujours accompli par d’autres, forcément — plus d
676
e, pour tout dire. Par un curieux paradoxe, c’est
le
régime national-socialiste qui est en train de leur faire découvrir l
677
cialiste qui est en train de leur faire découvrir
le
fait social et les problèmes qu’il pose. D’une part, la force et la r
678
n train de leur faire découvrir le fait social et
les
problèmes qu’il pose. D’une part, la force et la rapidité de l’ascens
679
t social et les problèmes qu’il pose. D’une part,
la
force et la rapidité de l’ascension hitlérienne ont été l’expression
680
les problèmes qu’il pose. D’une part, la force et
la
rapidité de l’ascension hitlérienne ont été l’expression directe d’un
681
u’il pose. D’une part, la force et la rapidité de
l’
ascension hitlérienne ont été l’expression directe d’une carence du se
682
et la rapidité de l’ascension hitlérienne ont été
l’
expression directe d’une carence du sens civique, loi générale qui se
683
vérifie dans tout pays totalitaire. D’autre part,
le
régime nouveau a pris à tâche d’éduquer tout ce monde : d’où le didac
684
eau a pris à tâche d’éduquer tout ce monde : d’où
le
didactisme pesant des innombrables discours politiques et des leaders
685
nnombrables discours politiques et des leaders de
la
presse mise au pas. Certes, les Allemands ont toujours eu le sens du
686
et des leaders de la presse mise au pas. Certes,
les
Allemands ont toujours eu le sens du groupe, et l’on est trop souvent
687
ise au pas. Certes, les Allemands ont toujours eu
le
sens du groupe, et l’on est trop souvent tenté d’expliquer le nationa
688
s Allemands ont toujours eu le sens du groupe, et
l’
on est trop souvent tenté d’expliquer le national-socialisme par ce be
689
roupe, et l’on est trop souvent tenté d’expliquer
le
national-socialisme par ce besoin de marcher ensemble, de chanter ens
690
ble. En réalité, ce phénomène est aussi vieux que
les
Allemagnes ; il ne peut donc rien expliquer de ce qui s’y passe de to
691
uveau. Un régime totalitaire n’exprime point tant
l’
âme collective d’un peuple que le besoin de porter remède à ses carenc
692
prime point tant l’âme collective d’un peuple que
le
besoin de porter remède à ses carences profondes, et de les compenser
693
de porter remède à ses carences profondes, et de
les
compenser. Hitler est en train d’opérer un dressage du peuple alleman
694
mme Staline, un dressage du russe), dressage dont
les
buts n’ont rien de traditionnel, bien au contraire. Tous les efforts
695
ont rien de traditionnel, bien au contraire. Tous
les
efforts de la propagande pour restaurer je ne sais quel hypothétique
696
ditionnel, bien au contraire. Tous les efforts de
la
propagande pour restaurer je ne sais quel hypothétique et préhistoriq
697
destinés — plus ou moins consciemment — à masquer
le
caractère antiallemand des méthodes qu’on applique en fait. Méthodes
698
on applique en fait. Méthodes prussiennes, disent
les
Allemands du Sud ; méthodes slaves, grognent les Prussiens. Méthodes
699
les Allemands du Sud ; méthodes slaves, grognent
les
Prussiens. Méthodes jacobines, à mon sens3. Car ce qu’il s’agit d’inc
700
nculquer à cette inerte bourgeoisie, ce n’est pas
le
sens du groupe qu’elle avait, mais le sens de l’État, qu’elle n’a pas
701
e n’est pas le sens du groupe qu’elle avait, mais
le
sens de l’État, qu’elle n’a pas. Le sens de l’unité allemande, de la
702
le sens du groupe qu’elle avait, mais le sens de
l’
État, qu’elle n’a pas. Le sens de l’unité allemande, de la prépondéran
703
e avait, mais le sens de l’État, qu’elle n’a pas.
Le
sens de l’unité allemande, de la prépondérance de l’intérêt allemand
704
is le sens de l’État, qu’elle n’a pas. Le sens de
l’
unité allemande, de la prépondérance de l’intérêt allemand sur les int
705
qu’elle n’a pas. Le sens de l’unité allemande, de
la
prépondérance de l’intérêt allemand sur les intérêts de classe, et su
706
sens de l’unité allemande, de la prépondérance de
l’
intérêt allemand sur les intérêts de classe, et sur tout intérêt privé
707
de, de la prépondérance de l’intérêt allemand sur
les
intérêts de classe, et sur tout intérêt privé. Voilà la grande révolu
708
érêts de classe, et sur tout intérêt privé. Voilà
la
grande révolution, dans un pays ou la vie intérieure d’une part, et l
709
rivé. Voilà la grande révolution, dans un pays ou
la
vie intérieure d’une part, et la séparation des classes de l’autre, é
710
dans un pays ou la vie intérieure d’une part, et
la
séparation des classes de l’autre, étaient les vrais fondements des m
711
et la séparation des classes de l’autre, étaient
les
vrais fondements des mœurs. Seulement, il y a cette différence profon
712
Seulement, il y a cette différence profonde entre
le
jacobinisme et le national-socialisme : c’est que le premier parlait
713
cette différence profonde entre le jacobinisme et
le
national-socialisme : c’est que le premier parlait des droits du cito
714
que de ses devoirs. Serais-je déjà contaminé par
l’
optimisme de commande en ce pays ? Je me dis parfois que si l’on parvi
715
de commande en ce pays ? Je me dis parfois que si
l’
on parvient à éviter de nouveaux conflits armés, il se peut que l’hitl
716
éviter de nouveaux conflits armés, il se peut que
l’
hitlérisme apparaisse aux yeux des historiens futurs, comme une école
717
peuple allemand ce qui lui manquait pour désirer
la
vraie démocratie. Et pour réaliser ses premières conditions, qui sont
718
pour réaliser ses premières conditions, qui sont
le
sens vulgarisé de l’État et le sens du service social. Staline procla
719
emières conditions, qui sont le sens vulgarisé de
l’
État et le sens du service social. Staline proclame une religion du tr
720
nditions, qui sont le sens vulgarisé de l’État et
le
sens du service social. Staline proclame une religion du travail, et
721
ial. Staline proclame une religion du travail, et
les
Russes sont les plus paresseux des hommes ; Mussolini une religion de
722
clame une religion du travail, et les Russes sont
les
plus paresseux des hommes ; Mussolini une religion de l’Empire, et c’
723
paresseux des hommes ; Mussolini une religion de
l’
Empire, et c’est à peine si les Italiens avaient jamais été une nation
724
ini une religion de l’Empire, et c’est à peine si
les
Italiens avaient jamais été une nation ; Hitler une religion de l’Éta
725
nt jamais été une nation ; Hitler une religion de
l’
État, et les Allemands l’apprennent péniblement, avec un pédantisme pa
726
té une nation ; Hitler une religion de l’État, et
les
Allemands l’apprennent péniblement, avec un pédantisme pathétique… N’
727
; Hitler une religion de l’État, et les Allemands
l’
apprennent péniblement, avec un pédantisme pathétique… N’allons pas fa
728
étique… N’allons pas faire, nous, une religion de
la
Liberté ! Ce serait le signe que nous en perdons le goût et l’usage n
729
ire, nous, une religion de la Liberté ! Ce serait
le
signe que nous en perdons le goût et l’usage naturel, spontané. Un
730
Liberté ! Ce serait le signe que nous en perdons
le
goût et l’usage naturel, spontané. Un petit industriel. — Avant 193
731
Ce serait le signe que nous en perdons le goût et
l’
usage naturel, spontané. Un petit industriel. — Avant 1933, sa vie é
732
part des extrémistes, discussions épuisantes avec
le
syndicat, trésorerie en délire. C’était la « liberté ». Maintenant, p
733
s avec le syndicat, trésorerie en délire. C’était
la
« liberté ». Maintenant, plus rien n’est libre, mais tout marche. Plu
734
est libre, mais tout marche. Plus de discussions.
Le
« Führer d’entreprise » n’a pas le droit de renvoyer ses ouvriers, ma
735
e discussions. Le « Führer d’entreprise » n’a pas
le
droit de renvoyer ses ouvriers, mais ceux-ci n’ont pas le droit de se
736
de renvoyer ses ouvriers, mais ceux-ci n’ont pas
le
droit de se mettre en grève. La paix sociale a été obtenue par la fix
737
ceux-ci n’ont pas le droit de se mettre en grève.
La
paix sociale a été obtenue par la fixation des devoirs réciproques à
738
ettre en grève. La paix sociale a été obtenue par
la
fixation des devoirs réciproques à un niveau de justice fort médiocre
739
mme, vous êtes content ? Il sourit, hausse un peu
les
épaules, fait oui de la tête. Demain, il doit partir pour un Schulung
740
Il sourit, hausse un peu les épaules, fait oui de
la
tête. Demain, il doit partir pour un Schulungslager (camp d’éducation
741
Schulungslager (camp d’éducation sociale). Ça ne
l’
enchante pas. Je le revois trois semaines plus tard. — Ce camp ? — Eh
742
p d’éducation sociale). Ça ne l’enchante pas. Je
le
revois trois semaines plus tard. — Ce camp ? — Eh bien voilà : nous é
743
on usine. On apprend à se connaître en partageant
la
même chambre. Nous suivions des cours de politique et d’économie. Nou
744
interrogeait. La plupart des soirées libres, nous
les
passions en commun, à l’auberge du village… Je le sens tout rajeuni :
745
es soirées libres, nous les passions en commun, à
l’
auberge du village… Je le sens tout rajeuni : il est retourné à l’écol
746
es passions en commun, à l’auberge du village… Je
le
sens tout rajeuni : il est retourné à l’école ; et tout délivré : ces
747
lage… Je le sens tout rajeuni : il est retourné à
l’
école ; et tout délivré : ces ouvriers sont au fond des braves types,
748
es braves types, on peut leur parler sans relever
le
menton… Un « opposant ». — Je me promène avec un de mes étudiants.
749
Maintenant il est disciple de Nicolaï Hartmann :
la
volonté, le réel, l’orgueil de l’homme… Le régime le dégoûte et le re
750
il est disciple de Nicolaï Hartmann : la volonté,
le
réel, l’orgueil de l’homme… Le régime le dégoûte et le repousse. C’es
751
sciple de Nicolaï Hartmann : la volonté, le réel,
l’
orgueil de l’homme… Le régime le dégoûte et le repousse. C’est la dict
752
olaï Hartmann : la volonté, le réel, l’orgueil de
l’
homme… Le régime le dégoûte et le repousse. C’est la dictature des but
753
mann : la volonté, le réel, l’orgueil de l’homme…
Le
régime le dégoûte et le repousse. C’est la dictature des butors et de
754
volonté, le réel, l’orgueil de l’homme… Le régime
le
dégoûte et le repousse. C’est la dictature des butors et des imbécile
755
el, l’orgueil de l’homme… Le régime le dégoûte et
le
repousse. C’est la dictature des butors et des imbéciles. Je lui pose
756
homme… Le régime le dégoûte et le repousse. C’est
la
dictature des butors et des imbéciles. Je lui pose ma question habitu
757
vieux, vous ? Quel âge avez-vous ? — 27 ans. Mais
le
Führer l’a bien dit, l’autre jour : les hommes qui avaient plus de vi
758
s ? Quel âge avez-vous ? — 27 ans. Mais le Führer
l’
a bien dit, l’autre jour : les hommes qui avaient plus de vingt ans en
759
ans. Mais le Führer l’a bien dit, l’autre jour :
les
hommes qui avaient plus de vingt ans en 1933 ne comprendront jamais l
760
plus de vingt ans en 1933 ne comprendront jamais
les
temps nouveaux. Il prépare pour le séminaire un travail sur Barrès :
761
ndront jamais les temps nouveaux. Il prépare pour
le
séminaire un travail sur Barrès : « la terre et les morts », c’est à
762
épare pour le séminaire un travail sur Barrès : «
la
terre et les morts », c’est à peu près le Blut und Boden (sang et sol
763
e séminaire un travail sur Barrès : « la terre et
les
morts », c’est à peu près le Blut und Boden (sang et sol) des nazis.
764
rès : « la terre et les morts », c’est à peu près
le
Blut und Boden (sang et sol) des nazis. Comme il aime Barrès, cela le
765
ang et sol) des nazis. Comme il aime Barrès, cela
le
rassure. C’est une voie d’approche, un compromis avec le régime détes
766
ure. C’est une voie d’approche, un compromis avec
le
régime détesté. (Note de 1938 : cet étudiant vient d’entrer dans le P
767
(Note de 1938 : cet étudiant vient d’entrer dans
le
Parti.) Parents et enfants. — Déjeuner chez un avocat. Madame se pl
768
de vie de famille possible, avec ce système. Tous
les
soirs, deux de mes enfants sur trois sont pris par le Parti. Ma fille
769
oirs, deux de mes enfants sur trois sont pris par
le
Parti. Ma fille aînée a 18 ans. Elle est Führerin d’un groupe de jeun
770
gymnastique et culture politique. De plus, elle a
la
charge de trouver des places pour ses subordonnées, de s’occuper des
771
occuper des secours à donner aux plus pauvres, de
les
visiter quand elles sont malades (c’est un contrôle), et même, c’est
772
me comprenez. Vous imaginez qu’avec cela, nous ne
la
voyons plus guère. Et comment voulez-vous que les parents gardent leu
773
la voyons plus guère. Et comment voulez-vous que
les
parents gardent leur autorité ? Le Parti passe avant tout. Si nous vo
774
ulez-vous que les parents gardent leur autorité ?
Le
Parti passe avant tout. Si nous voulions empêcher notre fils, qui a 1
775
mple, nous risquerions une mauvaise histoire avec
les
autorités du Parti. Nous ne sommes que des civils pour nos enfants. E
776
nt des militaires. » Plainte vingt fois entendue.
Les
enfants sont ravis, naturellement. Ils se sentent libres. Car la libe
777
ravis, naturellement. Ils se sentent libres. Car
la
liberté, pour un adolescent, c’est tout ce qui ne dépend pas de la fa
778
un adolescent, c’est tout ce qui ne dépend pas de
la
famille, fut-ce la plus dure discipline, pourvu qu’elle soit extérieu
779
t tout ce qui ne dépend pas de la famille, fut-ce
la
plus dure discipline, pourvu qu’elle soit extérieure au foyer. Je ne
780
le soit extérieure au foyer. Je ne dirai plus que
le
« fascisme » tue l’esprit d’initiative. C’est le contraire. Comparez
781
u foyer. Je ne dirai plus que le « fascisme » tue
l’
esprit d’initiative. C’est le contraire. Comparez la jeune Führerin à
782
le « fascisme » tue l’esprit d’initiative. C’est
le
contraire. Comparez la jeune Führerin à une jeune fille du même âge,
783
esprit d’initiative. C’est le contraire. Comparez
la
jeune Führerin à une jeune fille du même âge, chez nous ! Mais l’init
784
n à une jeune fille du même âge, chez nous ! Mais
l’
initiative qu’on exige, c’est celle qui sert l’État et qui est prévue
785
is l’initiative qu’on exige, c’est celle qui sert
l’
État et qui est prévue par lui ; c’est celle que la tactique moderne e
786
’État et qui est prévue par lui ; c’est celle que
la
tactique moderne exige du soldat dans le terrain. Contraindre, ce ser
787
elle que la tactique moderne exige du soldat dans
le
terrain. Contraindre, ce serait peu. Mais s’emparer de la liberté mêm
788
in. Contraindre, ce serait peu. Mais s’emparer de
la
liberté même des jeunes, voilà le totalitarisme. Un communiste. — D
789
is s’emparer de la liberté même des jeunes, voilà
le
totalitarisme. Un communiste. — Dans sa petite cuisine, où nous som
790
epuis deux heures il me raconte ses bagarres avec
les
nazis, avant 1933, quand il était en feldgrau (l’uniforme des communi
791
es nazis, avant 1933, quand il était en feldgrau (
l’
uniforme des communistes) et les autres en brun. C’est un dur. Chômeur
792
était en feldgrau (l’uniforme des communistes) et
les
autres en brun. C’est un dur. Chômeur depuis sept ans. Ancien chef d’
793
mpagnie de miliciens rouges). Irréductible, il me
l’
affirme solennellement. Mais lui aussi se sent trop vieux pour continu
794
Mais lui aussi se sent trop vieux pour continuer
la
lutte, il a 50 ans. Se bagarrer encore ? Ils ne sont pas comme ça, le
795
s. Se bagarrer encore ? Ils ne sont pas comme ça,
les
ouvriers allemands. « Vous autres Français, me dit-il, vous ne rêvez
796
voulons du travail et notre tasse de café au lait
le
matin. Qu’on nous donne ça, Hitler ou un autre, ça suffira. La politi
797
on nous donne ça, Hitler ou un autre, ça suffira.
La
politique n’intéresse pas les ouvriers quand ils ont de quoi manger e
798
n autre, ça suffira. La politique n’intéresse pas
les
ouvriers quand ils ont de quoi manger et travailler. Hitler ? Il n’a
799
gramme, maintenant qu’il a gagné. C’était presque
le
même programme que le nôtre ! Mais il a été plus malin, il a rassuré
800
le nôtre ! Mais il a été plus malin, il a rassuré
les
bourgeois en n’attaquant pas tout de suite la religion… » Tout d’un c
801
ré les bourgeois en n’attaquant pas tout de suite
la
religion… » Tout d’un coup il se lève de son tabouret et avec un gran
802
l se lève de son tabouret et avec un grand geste,
le
doigt pointé en l’air : « Je vais vous dire une chose : si tous l’aba
803
bouret et avec un grand geste, le doigt pointé en
l’
air : « Je vais vous dire une chose : si tous l’abandonnent, tous ces
804
n l’air : « Je vais vous dire une chose : si tous
l’
abandonnent, tous ces gros cochons qui sont autour de lui (et il nomme
805
gros cochons qui sont autour de lui (et il nomme
les
principaux chefs du régime) eh bien moi ! (il se frappe la poitrine)
806
paux chefs du régime) eh bien moi ! (il se frappe
la
poitrine) moi je me ferai tuer pour lui ! » Et il répète : « Lui au m
807
« Lui au moins, c’est un homme sincère, et c’est
le
seul… » II. — Le fait central J’en étais là de mes étonnements.
808
st un homme sincère, et c’est le seul… » II. —
Le
fait central J’en étais là de mes étonnements. Je collectionnais d
809
es, vraies et vraisemblables une à une, mais dont
l’
ensemble me laissait une impression assez confuse. Capitalisme et soci
810
me s’ils ne sentaient pas ce je ne sais quoi dans
l’
atmosphère qui faisait que toutes les descriptions « objectives » de n
811
ais quoi dans l’atmosphère qui faisait que toutes
les
descriptions « objectives » de nos journalistes paraissaient, lues d’
812
vais-je à ce moment. C’est alors que se produisit
le
coup d’audace du 7 mars, l’occupation de la Rhénanie par la Reichsweh
813
lors que se produisit le coup d’audace du 7 mars,
l’
occupation de la Rhénanie par la Reichswehr. Deux jours plus tard, des
814
uisit le coup d’audace du 7 mars, l’occupation de
la
Rhénanie par la Reichswehr. Deux jours plus tard, des affiches rouges
815
audace du 7 mars, l’occupation de la Rhénanie par
la
Reichswehr. Deux jours plus tard, des affiches rouges annonçaient pou
816
s plus tard, des affiches rouges annonçaient pour
le
surlendemain : « Le Führer parle ! » On plantait des mâts sur les pla
817
iches rouges annonçaient pour le surlendemain : «
Le
Führer parle ! » On plantait des mâts sur les places. On installait d
818
: « Le Führer parle ! » On plantait des mâts sur
les
places. On installait des haut-parleurs tous les cent mètres le long
819
les places. On installait des haut-parleurs tous
les
cent mètres le long des avenues. Et le tambour se mit à battre — deux
820
eurs tous les cent mètres le long des avenues. Et
le
tambour se mit à battre — deux coups lents, trois coups rapprochés —
821
e — deux coups lents, trois coups rapprochés — on
l’
entendait encore au milieu de la nuit. Je reprends mes notes du 11 mar
822
s rapprochés — on l’entendait encore au milieu de
la
nuit. Je reprends mes notes du 11 mars 1936. Une cérémonie sacrée.
823
s 1936. Une cérémonie sacrée. — Trois heures de
l’
après-midi, dans un café près de l’Opéra. Je dis à mon compagnon, le d
824
rois heures de l’après-midi, dans un café près de
l’
Opéra. Je dis à mon compagnon, le dramaturge allemand L. : — Vous y cr
825
un café près de l’Opéra. Je dis à mon compagnon,
le
dramaturge allemand L. : — Vous y croyez, vous, à l’âme collective ?
826
dramaturge allemand L. : — Vous y croyez, vous, à
l’
âme collective ? Est-ce que ce n’est pas une formule grandiloquente po
827
’est pas une formule grandiloquente pour désigner
l’
absence d’âme personnelle chez les individus charriés par les mouvemen
828
te pour désigner l’absence d’âme personnelle chez
les
individus charriés par les mouvements mécaniques d’une foule ? L. hoc
829
d’âme personnelle chez les individus charriés par
les
mouvements mécaniques d’une foule ? L. hoche la tête : — Allez écoute
830
les mouvements mécaniques d’une foule ? L. hoche
la
tête : — Allez écouter le Führer, nous en reparlerons demain. Seuleme
831
d’une foule ? L. hoche la tête : — Allez écouter
le
Führer, nous en reparlerons demain. Seulement allez-y tout de suite,
832
rons demain. Seulement allez-y tout de suite, car
les
portes s’ouvrent à 5 heures. — Mais il n’est annoncé que pour 9 heure
833
e pour 9 heures. — Venez voir ! Du seuil du café,
l’
on aperçoit toute la place de l’Opéra. Des milliers de SA et de SS y s
834
enez voir ! Du seuil du café, l’on aperçoit toute
la
place de l’Opéra. Des milliers de SA et de SS y sont déjà rangés, imm
835
Du seuil du café, l’on aperçoit toute la place de
l’
Opéra. Des milliers de SA et de SS y sont déjà rangés, immobiles. Le F
836
ers de SA et de SS y sont déjà rangés, immobiles.
Le
Führer viendra au balcon à 11 heures. D’ici là, ces hommes ne bougero
837
s des labyrinthes de barrages jusqu’aux abords de
la
Festhalle — tout un peuple campe alentour, depuis le matin — et je ne
838
Festhalle — tout un peuple campe alentour, depuis
le
matin — et je ne puis franchir les portes qu’à 5 heures 10. Comment f
839
lentour, depuis le matin — et je ne puis franchir
les
portes qu’à 5 heures 10. Comment fait-on pour occuper en dix minutes
840
s ? Je me glisse dans des rangs compacts derrière
les
bancs. Je verrai très bien la tribune, qui se dresse au centre de l’o
841
compacts derrière les bancs. Je verrai très bien
la
tribune, qui se dresse au centre de l’ovale, comme une tour carrée, t
842
très bien la tribune, qui se dresse au centre de
l’
ovale, comme une tour carrée, tendue de rouge et violemment éclairée p
843
es brunes s’étagent jusqu’à la troisième galerie,
les
visages indistincts. Immense roulement de tambour, rarement interromp
844
s formations du front de travail viennent occuper
les
couloirs, la pelle sur l’épaule. Les affiches annonçaient un appel gé
845
u front de travail viennent occuper les couloirs,
la
pelle sur l’épaule. Les affiches annonçaient un appel général du Part
846
avail viennent occuper les couloirs, la pelle sur
l’
épaule. Les affiches annonçaient un appel général du Parti, dans les 4
847
nent occuper les couloirs, la pelle sur l’épaule.
Les
affiches annonçaient un appel général du Parti, dans les 45 salles de
848
iches annonçaient un appel général du Parti, dans
les
45 salles de la ville, pour la même heure. Avec tout ce que les train
849
un appel général du Parti, dans les 45 salles de
la
ville, pour la même heure. Avec tout ce que les trains spéciaux ont d
850
al du Parti, dans les 45 salles de la ville, pour
la
même heure. Avec tout ce que les trains spéciaux ont déversé depuis l
851
de la ville, pour la même heure. Avec tout ce que
les
trains spéciaux ont déversé depuis la veille dans cette cité de 700 0
852
out ce que les trains spéciaux ont déversé depuis
la
veille dans cette cité de 700 000 habitants, et les autocars, et l’af
853
a veille dans cette cité de 700 000 habitants, et
les
autocars, et l’afflux des campagnards venus à pied, il y aura un mill
854
te cité de 700 000 habitants, et les autocars, et
l’
afflux des campagnards venus à pied, il y aura un million d’auditeurs
855
urs immédiats. Quelques femmes s’évanouissent, on
les
emporte, et cela fait un peu de place pour respirer. Sept heures. Per
856
rsonne ne s’impatiente, ni ne parle. Huit heures.
Les
dignitaires du Reich apparaissent, annoncés par les clameurs de l’ext
857
s dignitaires du Reich apparaissent, annoncés par
les
clameurs de l’extérieur. Goering, Blomberg, des généraux, salués par
858
Reich apparaissent, annoncés par les clameurs de
l’
extérieur. Goering, Blomberg, des généraux, salués par des heil joyeux
859
omberg, des généraux, salués par des heil joyeux.
Le
gouverneur de la province nasille des lieux communs, mal écouté. Je s
860
aux, salués par des heil joyeux. Le gouverneur de
la
province nasille des lieux communs, mal écouté. Je suis debout, malax
861
mal écouté. Je suis debout, malaxé et soutenu par
la
foule, depuis bientôt quatre fois soixante minutes. Est-ce que cela v
862
uatre fois soixante minutes. Est-ce que cela vaut
la
peine ? Mais voici une rumeur de marée, des trompettes au-dehors. Tou
863
rumeur de marée, des trompettes au-dehors. Toutes
les
lumières s’éteignent dans la salle, tandis que des flèches lumineuses
864
s au-dehors. Toutes les lumières s’éteignent dans
la
salle, tandis que des flèches lumineuses s’allument sur la voûte, poi
865
tandis que des flèches lumineuses s’allument sur
la
voûte, pointant vers une porte à la hauteur des premières galeries. U
866
’allument sur la voûte, pointant vers une porte à
la
hauteur des premières galeries. Un coup de projecteur fait apparaître
867
leries. Un coup de projecteur fait apparaître sur
le
seuil un petit homme en brun, tête nue, au sourire extatique. Quarant
868
mes, quarante mille bras se sont levés d’un coup.
L’
homme avance très lentement, saluant d’un geste lent, épiscopal, sous
869
t de heil rythmés. (Je n’entends bientôt plus que
les
cris rauques de mes voisins.) Pas à pas il s’avance, il accueille l’h
870
mes voisins.) Pas à pas il s’avance, il accueille
l’
hommage, le long de la passerelle qui mène à la tribune. Pendant six m
871
s il s’avance, il accueille l’hommage, le long de
la
passerelle qui mène à la tribune. Pendant six minutes, c’est très lon
872
le l’hommage, le long de la passerelle qui mène à
la
tribune. Pendant six minutes, c’est très long. Personne ne peut remar
873
st très long. Personne ne peut remarquer que j’ai
les
mains dans mes poches : ils sont dressés, immobiles et hurlant en mes
874
ils sont dressés, immobiles et hurlant en mesure,
les
yeux fixés sur ce point lumineux, sur ce visage au sourire extasié, e
875
age au sourire extasié, et des larmes coulent sur
les
faces, dans l’ombre. Et soudain tout s’apaise. Il a étendu le bras én
876
xtasié, et des larmes coulent sur les faces, dans
l’
ombre. Et soudain tout s’apaise. Il a étendu le bras énergiquement — l
877
ns l’ombre. Et soudain tout s’apaise. Il a étendu
le
bras énergiquement — les yeux au ciel — et le Horst Wessel Lied monte
878
out s’apaise. Il a étendu le bras énergiquement —
les
yeux au ciel — et le Horst Wessel Lied monte sourdement du parterre.
879
ndu le bras énergiquement — les yeux au ciel — et
le
Horst Wessel Lied monte sourdement du parterre. « Les camarades que l
880
Horst Wessel Lied monte sourdement du parterre. «
Les
camarades que le Front rouge et la Réaction tuèrent — marchent en esp
881
monte sourdement du parterre. « Les camarades que
le
Front rouge et la Réaction tuèrent — marchent en esprit dans nos rang
882
u parterre. « Les camarades que le Front rouge et
la
Réaction tuèrent — marchent en esprit dans nos rangs. » J’ai compris.
883
e frisson et de battement de cœur — cependant que
l’
esprit demeure lucide. Ce que j’éprouve maintenant, c’est cela qu’on d
884
éprouve maintenant, c’est cela qu’on doit appeler
l’
horreur sacrée. Je me croyais à un meeting de masses, à quelque manife
885
célèbrent ! Et c’est une liturgie qui se déroule,
la
grande cérémonie sacrale d’une religion dont je ne suis pas, et qui m
886
s ensemble. III. — Une religion nouvelle Si
l’
on n’a pas senti cela, on ne comprendra jamais la raison simple des tr
887
l’on n’a pas senti cela, on ne comprendra jamais
la
raison simple des triomphes totalitaires. Évidemment, il sera toujour
888
Évidemment, il sera toujours possible d’invoquer
les
lois économiques, les forces relatives des partis et des classes avan
889
oujours possible d’invoquer les lois économiques,
les
forces relatives des partis et des classes avant 1933, les circonstan
890
s relatives des partis et des classes avant 1933,
les
circonstances politiques de l’Europe, le traité de Versailles, la déc
891
asses avant 1933, les circonstances politiques de
l’
Europe, le traité de Versailles, la décomposition des gauches, le doub
892
t 1933, les circonstances politiques de l’Europe,
le
traité de Versailles, la décomposition des gauches, le double jeu du
893
politiques de l’Europe, le traité de Versailles,
la
décomposition des gauches, le double jeu du grand capital soutenant H
894
aité de Versailles, la décomposition des gauches,
le
double jeu du grand capital soutenant Hitler contre les marxistes et
895
uble jeu du grand capital soutenant Hitler contre
les
marxistes et papen contre Hitler : tout cela est bel et bon, et fourn
896
Hitler : tout cela est bel et bon, et fournit de
la
copie aux marxistes et aux libéraux. À les lire, on conçoit très bien
897
rnit de la copie aux marxistes et aux libéraux. À
les
lire, on conçoit très bien comment la mécanique a joué en fait, et qu
898
ibéraux. À les lire, on conçoit très bien comment
la
mécanique a joué en fait, et que c’était fatal, et que c’est très dan
899
é. Car on ne nous parle jamais que du comment. Et
les
« explications » qu’on nous fournit se réduisent en définitive à une
900
es. Mais ce qu’on laisse toujours échapper, c’est
le
principe d’actualisation des phénomènes, ou si j’ose dire : c’est la
901
lisation des phénomènes, ou si j’ose dire : c’est
la
grâce efficace. Les choses ont tourné de telle sorte ; et l’on expliq
902
ènes, ou si j’ose dire : c’est la grâce efficace.
Les
choses ont tourné de telle sorte ; et l’on explique au nom d’une doct
903
ficace. Les choses ont tourné de telle sorte ; et
l’
on explique au nom d’une doctrine convenablement réadaptée, qu’elles n
904
tte sorte. Voilà pourquoi votre fille est muette.
Les
mêmes théoriciens, en 1932, vous démontraient, le Capital en main, qu
905
es mêmes théoriciens, en 1932, vous démontraient,
le
Capital en main, que la situation allemande conduisait droit au commu
906
1932, vous démontraient, le Capital en main, que
la
situation allemande conduisait droit au communisme. Ce qui m’effraye,
907
isme. Ce qui m’effraye, c’est leur souplesse dans
l’
erreur. Il a fallu si peu changer pour « expliquer » à l’aide des même
908
r. Il a fallu si peu changer pour « expliquer » à
l’
aide des mêmes schémas que le contraire se soit produit en fait… Derni
909
pour « expliquer » à l’aide des mêmes schémas que
le
contraire se soit produit en fait… Dernière défense du capital, récit
910
nière défense du capital, récitent sans se lasser
les
marxistes. Hystérie collective, disent les rationalistes. Tyrannie, d
911
lasser les marxistes. Hystérie collective, disent
les
rationalistes. Tyrannie, disent les démocrates. Autant de mots vides
912
ctive, disent les rationalistes. Tyrannie, disent
les
démocrates. Autant de mots vides ou de mensonges pour les fidèles du
913
crates. Autant de mots vides ou de mensonges pour
les
fidèles du culte allemand. Il ne s’agit ici que de religion. Ce n’est
914
t ici que de religion. Ce n’est pas pour défendre
le
capitalisme que les mineurs de la Sarre ont voté leur rattachement au
915
on. Ce n’est pas pour défendre le capitalisme que
les
mineurs de la Sarre ont voté leur rattachement au IIIe Reich. Ce n’es
916
s pour défendre le capitalisme que les mineurs de
la
Sarre ont voté leur rattachement au IIIe Reich. Ce n’est pas en parla
917
t pas en parlant d’hystérie qu’on peut comprendre
le
phénomène fondamental de la reconstruction d’une communauté autour d’
918
qu’on peut comprendre le phénomène fondamental de
la
reconstruction d’une communauté autour d’un sentiment « sacré ». Et c
919
autour d’un sentiment « sacré ». Et ce n’est pas
la
soif d’une tyrannie, au sens politique et légal, qui a jeté l’Autrich
920
tyrannie, au sens politique et légal, qui a jeté
l’
Autriche dans les bras du Führer. Mais c’est l’attraction passionnée q
921
ns politique et légal, qui a jeté l’Autriche dans
les
bras du Führer. Mais c’est l’attraction passionnée qu’exerce une reli
922
té l’Autriche dans les bras du Führer. Mais c’est
l’
attraction passionnée qu’exerce une religion naissante, si basse qu’el
923
ne religion naissante, si basse qu’elle soit, sur
les
masses décomposées par des siècles d’individualisme. Dans une société
924
iècles d’individualisme. Dans une société où tous
les
liens originels sont dissous ; où les religions n’apparaissent plus a
925
été où tous les liens originels sont dissous ; où
les
religions n’apparaissent plus au peuple et aux élites que sous l’aspe
926
pparaissent plus au peuple et aux élites que sous
l’
aspect de survivances sociales ; où les classes nées du développement
927
es que sous l’aspect de survivances sociales ; où
les
classes nées du développement économique rassemblent abstraitement de
928
blent abstraitement des masses inorganiques, dont
les
individus n’ont en commun que l’argent ou le défaut d’argent ; où les
929
rganiques, dont les individus n’ont en commun que
l’
argent ou le défaut d’argent ; où les partis se multiplient et s’entre
930
ont les individus n’ont en commun que l’argent ou
le
défaut d’argent ; où les partis se multiplient et s’entredéchirent au
931
en commun que l’argent ou le défaut d’argent ; où
les
partis se multiplient et s’entredéchirent au hasard d’un jeu politiqu
932
rent au hasard d’un jeu politique de surface ; où
les
élites parlent un langage que les masses sont en mesure d’entendre, m
933
de surface ; où les élites parlent un langage que
les
masses sont en mesure d’entendre, mais non pas de comprendre ; où l’É
934
esure d’entendre, mais non pas de comprendre ; où
l’
État devient le seul représentant du bien commun, mais ne se manifeste
935
e, mais non pas de comprendre ; où l’État devient
le
seul représentant du bien commun, mais ne se manifeste plus que par l
936
du bien commun, mais ne se manifeste plus que par
les
feuilles d’impôt, l’armée et la police ; où tout principe d’union soc
937
e se manifeste plus que par les feuilles d’impôt,
l’
armée et la police ; où tout principe d’union sociale et spirituelle,
938
ste plus que par les feuilles d’impôt, l’armée et
la
police ; où tout principe d’union sociale et spirituelle, toute commu
939
ure a disparu, — il est fatal que se répande dans
les
masses et que s’installe au cœur de chaque individu une angoisse, — d
940
un principe d’union, donc vers une religion, que
les
dictateurs ont su répondre. Tout le reste est littérature, bavardage
941
eligion, que les dictateurs ont su répondre. Tout
le
reste est littérature, bavardage de théoriciens, ou ce qui est pire,
942
héoriciens, ou ce qui est pire, de « réalistes ».
L’
auteur de cet article a reçu récemment d’Allemagne (janvier 1938) une
943
ar hasard un de ses livres, entreprend de réfuter
les
critiques qui s’y trouvent formulées à l’endroit du régime hitlérien.
944
éfuter les critiques qui s’y trouvent formulées à
l’
endroit du régime hitlérien. Il explique tout d’abord que ce régime es
945
Il explique tout d’abord que ce régime est né de
la
pauvreté et du malheur de son pays, — ce qui est très juste. Et il aj
946
ys, — ce qui est très juste. Et il ajoute : Mais
la
pauvreté et le malheur ne peuvent expliquer que des phénomènes extéri
947
t très juste. Et il ajoute : Mais la pauvreté et
le
malheur ne peuvent expliquer que des phénomènes extérieurs. La raison
948
peuvent expliquer que des phénomènes extérieurs.
La
raison profonde d’un mouvement comme le nôtre est irrationnelle. Nous
949
i qui nous apportait cette possibilité de croire.
Le
christianisme, probablement par la faute de ses ministres, ne satisfa
950
ité de croire. Le christianisme, probablement par
la
faute de ses ministres, ne satisfaisait plus depuis bien longtemps au
951
plus depuis bien longtemps au besoin de croire de
la
majorité du peuple. Nous voulons croire à la mission du peuple allema
952
e de la majorité du peuple. Nous voulons croire à
la
mission du peuple allemand. Nous voulons croire à l’immortalité du pe
953
mission du peuple allemand. Nous voulons croire à
l’
immortalité du peuple (un arbre dont nous ne sommes que les feuilles q
954
alité du peuple (un arbre dont nous ne sommes que
les
feuilles qui tombent à chaque génération) et peut-être réussirons-nou
955
e présente — fût-elle aussi invraisemblable que «
l’
immortalité » d’un peuple — on ne peut pas exprimer d’une manière plus
956
s exprimer d’une manière plus précise et ramassée
la
nature proprement religieuse du phénomène totalitaire allemand. (Et c
957
e allemand. (Et cela vaut, avec des nuances, pour
l’
Italie et la Russie.) Mesurons maintenant la naïveté des libéraux qui
958
(Et cela vaut, avec des nuances, pour l’Italie et
la
Russie.) Mesurons maintenant la naïveté des libéraux qui tiennent fré
959
pour l’Italie et la Russie.) Mesurons maintenant
la
naïveté des libéraux qui tiennent fréquemment ce propos : « Tout n’es
960
es choses à y prendre. » Certes, Hitler a rétabli
l’
ordre dans la rue. Il fait régner la paix sociale. Il y avait six mill
961
prendre. » Certes, Hitler a rétabli l’ordre dans
la
rue. Il fait régner la paix sociale. Il y avait six millions de chôme
962
ler a rétabli l’ordre dans la rue. Il fait régner
la
paix sociale. Il y avait six millions de chômeurs en 1933, tandis qu’
963
933, tandis qu’on manque de main-d’œuvre en 1938.
La
dignité de la nation est rétablie. L’autorité est restaurée. « Et nou
964
’on manque de main-d’œuvre en 1938. La dignité de
la
nation est rétablie. L’autorité est restaurée. « Et nous voici sauvés
965
re en 1938. La dignité de la nation est rétablie.
L’
autorité est restaurée. « Et nous voici sauvés du communisme. » C’est
966
es gens croient trouver un terrain d’entente avec
les
dictatures qu’ils condamnent en principe. C’est ainsi qu’ils apporten
967
rtent leur petite contribution, toute bénévole, à
l’
effort de la propagande totalitaire dans nos pays. Ils le font sans ma
968
etite contribution, toute bénévole, à l’effort de
la
propagande totalitaire dans nos pays. Ils le font sans malice, et au
969
t de la propagande totalitaire dans nos pays. Ils
le
font sans malice, et au nom du bon sens. Ils me rappellent cette bonn
970
bûcher du supplice de Jean Huss : ce que voyant,
le
martyr prononça : O sancta simplicitas ! Oui, réellement, il faut une
971
n puisse détacher telle ou telle mesure prise par
le
régime pour l’admirer isolément, ou pour essayer de l’imiter. C’est u
972
er telle ou telle mesure prise par le régime pour
l’
admirer isolément, ou pour essayer de l’imiter. C’est une belle ironie
973
gime pour l’admirer isolément, ou pour essayer de
l’
imiter. C’est une belle ironie sur le libéralisme impénitent que cette
974
r essayer de l’imiter. C’est une belle ironie sur
le
libéralisme impénitent que cette manière libérale de « rendre justice
975
de « rendre justice » au totalitarisme. Comme si
le
mot totalitaire ne signifiait pas, justement, que tout se tient dans
976
ine de perdre toute espèce de sens ! Croit-on que
l’
ordre social qu’on admire en Allemagne puisse être obtenu à bas prix,
977
s » ? Ne voit-on pas que cet ordre est simplement
la
suppression brutale et militaire de toute expression libre des antago
978
libre des antagonismes qui chez nous sont encore
la
réalité même du social ? Que la paix est obtenue par l’écrasement des
979
nous sont encore la réalité même du social ? Que
la
paix est obtenue par l’écrasement des faibles ? Que l’unanimité des o
980
lité même du social ? Que la paix est obtenue par
l’
écrasement des faibles ? Que l’unanimité des ouvriers résulte de la mi
981
ix est obtenue par l’écrasement des faibles ? Que
l’
unanimité des ouvriers résulte de la mise au pas des syndicats ? Que t
982
faibles ? Que l’unanimité des ouvriers résulte de
la
mise au pas des syndicats ? Que tout cela n’est devenu possible que p
983
ats ? Que tout cela n’est devenu possible que par
le
fait d’une complicité quasi universelle et inconsciente, fût-ce de la
984
une angoisse religieuse plus puissante que toutes
les
« raisons », que tous les « intérêts » du monde ? Et qu’enfin ce qui
985
us puissante que toutes les « raisons », que tous
les
« intérêts » du monde ? Et qu’enfin ce qui importe au dictateur, ce n
986
n’est pas telle mesure en soi, mais au contraire
le
sens qu’elle prend par rapport au mouvement total, à la religion de l
987
s qu’elle prend par rapport au mouvement total, à
la
religion de la nation, et au contenu de cette religion, la volonté co
988
par rapport au mouvement total, à la religion de
la
nation, et au contenu de cette religion, la volonté collective de pui
989
on de la nation, et au contenu de cette religion,
la
volonté collective de puissance ? Devant cette volonté religieuse, to
990
issance ? Devant cette volonté religieuse, toutes
les
résistances ont cédé. L’internationale ouvrière s’est effondrée sans
991
onté religieuse, toutes les résistances ont cédé.
L’
internationale ouvrière s’est effondrée sans faire usage de ses armes.
992
re s’est effondrée sans faire usage de ses armes.
Le
capital est en bonne voie d’étatisation sans douleur. Idéalisme et ré
993
douleur. Idéalisme et réalisme ont fait faillite.
Le
seul adversaire du régime demeure, en fait, l’Église confessionnelle
994
e. Le seul adversaire du régime demeure, en fait,
l’
Église confessionnelle ; c’est-à-dire qu’à la religion de la nation et
995
ait, l’Église confessionnelle ; c’est-à-dire qu’à
la
religion de la nation et de la Race ne s’oppose plus que la foi propr
996
onfessionnelle ; c’est-à-dire qu’à la religion de
la
nation et de la Race ne s’oppose plus que la foi proprement dite : co
997
c’est-à-dire qu’à la religion de la nation et de
la
Race ne s’oppose plus que la foi proprement dite : contre-épreuve du
998
n de la nation et de la Race ne s’oppose plus que
la
foi proprement dite : contre-épreuve du diagnostic que l’on vient d’e
999
roprement dite : contre-épreuve du diagnostic que
l’
on vient d’esquisser. IV. — Perspectives À Berlin, les milieux q
1000
t d’esquisser. IV. — Perspectives À Berlin,
les
milieux qui se disent bien informés prophétisent la chute du régime p
1001
milieux qui se disent bien informés prophétisent
la
chute du régime pour le mois suivant, — depuis cinq ans. Or, chaque m
1002
ien informés prophétisent la chute du régime pour
le
mois suivant, — depuis cinq ans. Or, chaque mois apporte, régulièreme
1003
de raisons de douter que son régime ne conduise à
la
guerre. Non pas que les chefs et les troupes veuillent la guerre ! Le
1004
e son régime ne conduise à la guerre. Non pas que
les
chefs et les troupes veuillent la guerre ! Les hommes ne sont pas si
1005
ne conduise à la guerre. Non pas que les chefs et
les
troupes veuillent la guerre ! Les hommes ne sont pas si méchants, ni
1006
e. Non pas que les chefs et les troupes veuillent
la
guerre ! Les hommes ne sont pas si méchants, ni même si bêtes. Mais c
1007
ue les chefs et les troupes veuillent la guerre !
Les
hommes ne sont pas si méchants, ni même si bêtes. Mais ce qu’il faut
1008
même si bêtes. Mais ce qu’il faut voir, c’est que
la
volonté des hommes n’a jamais pesé si peu que dans les régimes totali
1009
olonté des hommes n’a jamais pesé si peu que dans
les
régimes totalitaires. Ce n’est pas le chef qui commande, et ce ne son
1010
u que dans les régimes totalitaires. Ce n’est pas
le
chef qui commande, et ce ne sont pas les désirs conscients et avoués
1011
n’est pas le chef qui commande, et ce ne sont pas
les
désirs conscients et avoués qui sont puissants. Ce qui est puissant,
1012
Ce qui est puissant, ce qui commande tout, c’est
le
mécanisme de la dictature totalitaire, c’est la structure du régime.
1013
sant, ce qui commande tout, c’est le mécanisme de
la
dictature totalitaire, c’est la structure du régime. Or, la structure
1014
t le mécanisme de la dictature totalitaire, c’est
la
structure du régime. Or, la structure de l’État totalitaire — quelle
1015
re totalitaire, c’est la structure du régime. Or,
la
structure de l’État totalitaire — quelle que soit sa doctrine — c’est
1016
c’est la structure du régime. Or, la structure de
l’
État totalitaire — quelle que soit sa doctrine — c’est l’état de guerr
1017
totalitaire — quelle que soit sa doctrine — c’est
l’
état de guerre. Tout ce que l’on fait là-bas se fait au nom de l’union
1018
sa doctrine — c’est l’état de guerre. Tout ce que
l’
on fait là-bas se fait au nom de l’union sacrée, morale de guerre ; et
1019
e. Tout ce que l’on fait là-bas se fait au nom de
l’
union sacrée, morale de guerre ; et toutes les mesures d’oppression so
1020
m de l’union sacrée, morale de guerre ; et toutes
les
mesures d’oppression sont « joyeusement acceptées » pour peu que l’un
1021
ssion sont « joyeusement acceptées » pour peu que
l’
union sacrée les légitime. Ils ont des canons, mais pas de beurre, dit
1022
yeusement acceptées » pour peu que l’union sacrée
les
légitime. Ils ont des canons, mais pas de beurre, dit-on en France d’
1023
e, dit-on en France d’un air malin. On oublie que
le
mot est de Goering lui-même. « Du beurre ou des canons », c’est un sl
1024
. « Du beurre ou des canons », c’est un slogan de
la
propagande nazie, et qui déchaîne régulièrement l’enthousiasme des fo
1025
a propagande nazie, et qui déchaîne régulièrement
l’
enthousiasme des foules allemandes — pour les canons. Ces foules peuve
1026
ement l’enthousiasme des foules allemandes — pour
les
canons. Ces foules peuvent très bien être composées de pacifistes. Ce
1027
a n’a aucune importance. Car ce qui compte, c’est
la
Nation, et non pas les individus. Or la Nation, pratiquement c’est l’
1028
e. Car ce qui compte, c’est la Nation, et non pas
les
individus. Or la Nation, pratiquement c’est l’État. Et cet État est n
1029
te, c’est la Nation, et non pas les individus. Or
la
Nation, pratiquement c’est l’État. Et cet État est né de la guerre ;
1030
s les individus. Or la Nation, pratiquement c’est
l’
État. Et cet État est né de la guerre ; il y prépare du simple fait qu
1031
pratiquement c’est l’État. Et cet État est né de
la
guerre ; il y prépare du simple fait que ses conditions d’existence s
1032
ne mobilisation ; il compte à chaque instant avec
l’
éventualité d’une guerre, et il y puise sa force de cohésion. Quelle q
1033
puise sa force de cohésion. Quelle que soit donc
la
volonté consciente et avouée du Führer et du peuple, il n’y a pas de
1034
t du peuple, il n’y a pas de raison de penser que
l’
aventure puisse bien finir. Tout se ramène donc, pour nous, à un probl
1035
de force. Mais non pas de forces pour « gagner »
la
guerre : car toute guerre engagée avec les États totalitaires est une
1036
agner » la guerre : car toute guerre engagée avec
les
États totalitaires est une guerre perdue, quelle que soit son issue,
1037
ne guerre perdue, quelle que soit son issue, pour
les
nations démocratiques. D’une guerre totale, telle que nous imposerait
1038
s. D’une guerre totale, telle que nous imposerait
l’
Allemagne, ne peut sortir qu’un État totalitaire. Il s’agit donc d’emp
1039
cher cette guerre, de se montrer assez forts pour
l’
empêcher, et de condamner ainsi le régime adverse à une autodestructio
1040
ssez forts pour l’empêcher, et de condamner ainsi
le
régime adverse à une autodestruction de ses énergies belliqueuses. Or
1041
ans de « réarmement », c’est introduire chez nous
le
Cheval de Troie. Car pour s’armer autant que l’adversaire, il faudrai
1042
s le Cheval de Troie. Car pour s’armer autant que
l’
adversaire, il faudrait imposer au pays une discipline équivalente à c
1043
pays une discipline équivalente à celle qui régit
les
Allemands. À supposer que l’on y réussisse, on se trouverait encore e
1044
e à celle qui régit les Allemands. À supposer que
l’
on y réussisse, on se trouverait encore en arrière : de deux grands pa
1045
ys également surarmés, c’est celui qui dispose de
la
plus forte mystique qui doit fatalement triompher. Et en s’armant aut
1046
t fatalement triompher. Et en s’armant autant que
l’
État totalitaire, l’État démocratique perdrait ses meilleures forces m
1047
er. Et en s’armant autant que l’État totalitaire,
l’
État démocratique perdrait ses meilleures forces morales ; sa « mystiq
1048
es meilleures forces morales ; sa « mystique » de
la
liberté. Il n’y a de solution pratique que dans un vaste effort moral
1049
s démocraties pour résoudre à leur manière propre
le
problème religieux (plus que social) qu’ont résolu, vaille que vaille
1050
lus que social) qu’ont résolu, vaille que vaille,
les
dictateurs. Refaire une commune mesure vivante. Restaurer le sens civ
1051
rs. Refaire une commune mesure vivante. Restaurer
le
sens civique décadent. Retrouver une foi qui ne soit pas cette volont
1052
ui ne soit pas cette volonté anxieuse de croire à
la
Nation… Le seul problème pratique, sérieux, urgent et réellement fond
1053
pas cette volonté anxieuse de croire à la Nation…
Le
seul problème pratique, sérieux, urgent et réellement fondamental, c’
1054
réellement fondamental, c’est celui que nous pose
l’
angoisse des individus isolés, et l’appel religieux qui naît de cette
1055
que nous pose l’angoisse des individus isolés, et
l’
appel religieux qui naît de cette angoisse — même s’il est encore inco
1056
ngoisse — même s’il est encore inconscient. Toute
la
question est de savoir si nous saurons mettre à profit pour le résoud
1057
st de savoir si nous saurons mettre à profit pour
le
résoudre le délai que nous accordent encore une situation matérielle
1058
si nous saurons mettre à profit pour le résoudre
le
délai que nous accordent encore une situation matérielle supportable,
1059
uelques restes de traditions civiques. 3. Pour
le
semestre d’été, je fus autorisé à choisir comme sujet de cours : la l
1060
je fus autorisé à choisir comme sujet de cours :
la
littérature de la Révolution française. Je m’appliquai à démontrer qu
1061
choisir comme sujet de cours : la littérature de
la
Révolution française. Je m’appliquai à démontrer que le national-soci
1062
olution française. Je m’appliquai à démontrer que
le
national-socialisme est un jacobinisme allemand ; même esprit central
1063
; même esprit centralisateur ; même exaltation de
la
nation considérée comme missionnaire d’une idée ; même goût des fêtes
1064
dée ; même goût des fêtes symboliques données par
l’
État dans l’intention — avouée par le conventionnel Cloots — de discip
1065
oût des fêtes symboliques données par l’État dans
l’
intention — avouée par le conventionnel Cloots — de discipliner les es
1066
données par l’État dans l’intention — avouée par
le
conventionnel Cloots — de discipliner les esprits ; mêmes tentatives
1067
ouée par le conventionnel Cloots — de discipliner
les
esprits ; mêmes tentatives pour instaurer une religion purement natio
1068
urement nationale et civique destinée à remplacer
les
confessions « vieillies » et « divisées ». Il faut créer une « religi
1069
geon, une « foi concrète et patriotique », disait
l’
abbé Grégoire : c’est le « christianisme positif et allemand » des naz
1070
et patriotique », disait l’abbé Grégoire : c’est
le
« christianisme positif et allemand » des nazis… Tout cela fut écouté
1071
on accepte de tels écarts. Grande différence avec
le
régime russe. f. Rougemont Denis de, « Vues sur le national-sociali
1072
régime russe. f. Rougemont Denis de, « Vues sur
le
national-socialisme », Les Nouveaux Cahiers, Paris, 1 juin 1938, p. 5
1073
nt Denis de, « Vues sur le national-socialisme »,
Les
Nouveaux Cahiers, Paris, 1 juin 1938, p. 5-10.
1074
Faire
le
jeu d’Hitler (1er janvier 1939)g Au cours de l’été dernier, et dev
1075
e jeu d’Hitler (1er janvier 1939)g Au cours de
l’
été dernier, et devant la menace hitlérienne, un écrivain de nos amis
1076
er 1939)g Au cours de l’été dernier, et devant
la
menace hitlérienne, un écrivain de nos amis se sentit pressé de parle
1077
e sentit pressé de parler, non point pour appeler
les
démocrates aux armes, mais simplement pour leur montrer, dans la mesu
1078
ux armes, mais simplement pour leur montrer, dans
la
mesure de ses moyens, quelle était la réalité de la menace. Il connai
1079
ntrer, dans la mesure de ses moyens, quelle était
la
réalité de la menace. Il connaissait le IIIe Reich pour y avoir vécu
1080
mesure de ses moyens, quelle était la réalité de
la
menace. Il connaissait le IIIe Reich pour y avoir vécu un an. Il esti
1081
lle était la réalité de la menace. Il connaissait
le
IIIe Reich pour y avoir vécu un an. Il estimait que dans l’intérêt mê
1082
ich pour y avoir vécu un an. Il estimait que dans
l’
intérêt même d’une défense efficace, il importait de faire connaître l
1083
défense efficace, il importait de faire connaître
la
nature de l’attaque qui se préparait, et donc la force autant que la
1084
ace, il importait de faire connaître la nature de
l’
attaque qui se préparait, et donc la force autant que la faiblesse de
1085
la nature de l’attaque qui se préparait, et donc
la
force autant que la faiblesse de l’adversaire. Il écrivait à ce sujet
1086
que qui se préparait, et donc la force autant que
la
faiblesse de l’adversaire. Il écrivait à ce sujet (dans un langage qu
1087
rait, et donc la force autant que la faiblesse de
l’
adversaire. Il écrivait à ce sujet (dans un langage qui, selon lui, ne
1088
permettre d’équivoque) : « Un général qui étudie
le
terrain de sa bataille décisive n’est pas précisément ce qu’on nomme
1089
, mais s’il est incapable d’estimer objectivement
les
forces en présence, il ferait mieux de s’occuper de politique. » Il m
1090
qu’il y a de bon et ce qu’il y a de mauvais dans
l’
hitlérisme. Et concluait sur une pressante mise en garde contre l’espr
1091
concluait sur une pressante mise en garde contre
l’
esprit totalitaire. Or, à peine ce livre paru, certains critiques sign
1092
ce livre paru, certains critiques signifièrent à
l’
auteur qu’en « prétendant être objectif », il « faisait en réalité le
1093
étendant être objectif », il « faisait en réalité
le
jeu d’Hitler ». Cette petite aventure nous apparaît révélatrice d’un
1094
nous apparaît révélatrice d’un état d’esprit dont
la
seule existence suffit à justifier l’effort de nos Cahiers. ⁂ Qu’une
1095
esprit dont la seule existence suffit à justifier
l’
effort de nos Cahiers. ⁂ Qu’une « prise de parti » efficace suppose né
1096
i » efficace suppose nécessairement et avant tout
la
connaissance « objective » des faits en discussion, voilà qui, semble
1097
iscussion, voilà qui, semble-t-il, ne souffre pas
le
doute un seul instant. Mais que cette vérité très évidente soit en pr
1098
éconnue, contestée avec passion, voilà qui mérite
l’
examen. Posons la question sous sa forme la plus simple. Comment se pe
1099
mérite l’examen. Posons la question sous sa forme
la
plus simple. Comment se peut-il, en général, qu’un homme refuse de vo
1100
que, délibérément, un publiciste qui entend juger
l’
Allemagne, commence par récuser les témoins « objectifs » en les accus
1101
ui entend juger l’Allemagne, commence par récuser
les
témoins « objectifs » en les accusant de « complicité » ? La réponse
1102
commence par récuser les témoins « objectifs » en
les
accusant de « complicité » ? La réponse est fournie par la psychologi
1103
« objectifs » en les accusant de « complicité » ?
La
réponse est fournie par la psychologie courante de l’enfance. J’inte
1104
nt de « complicité » ? La réponse est fournie par
la
psychologie courante de l’enfance. J’interdis à mon fils, âgé de tro
1105
ponse est fournie par la psychologie courante de
l’
enfance. J’interdis à mon fils, âgé de trois, ans, de s’approcher du f
1106
naturellement. Je lui dis : « Tu sais que je te
l’
ai défendu, tu vas te brûler. — Non, dit-il, ça ne brûle pas. — Mon p
1107
ec certains « antifascistes » dès que j’essaie de
les
avertir de ce qui se passe en Allemagne. Je leur expose des faits « b
1108
auvais ». Je dis : il faut connaître ces faits si
l’
on veut agir sur eux sans se laisser contaminer. Ils me répondent : vo
1109
i mon fils prétend-il, contre toute évidence, que
le
feu ne brûle pas ? C’est parce qu’il n’ose ni ne peut dire : j’ai env
1110
’il n’ose ni ne peut dire : j’ai envie de toucher
le
feu bien que je sache qu’il brûle. Cette contradiction insurmontable
1111
rmontable se résout pratiquement par un mensonge (
le
feu ne brûle pas), et par un transfert de la « méchanceté » du feu su
1112
nge (le feu ne brûle pas), et par un transfert de
la
« méchanceté » du feu sur celui qui en avertit. Refuser de reconnaîtr
1113
sur celui qui en avertit. Refuser de reconnaître
les
faits (mensonge) et accuser celui qui les décrit d’être complice de l
1114
nnaître les faits (mensonge) et accuser celui qui
les
décrit d’être complice de leur menace (transfert), tel est le mécanis
1115
être complice de leur menace (transfert), tel est
le
mécanisme régulier qui trahit la présence d’une passion inavouable. D
1116
nsfert), tel est le mécanisme régulier qui trahit
la
présence d’une passion inavouable. Dans un monde comme le nôtre, où s
1117
développe au plus haut point ce que j’appellerai
le
chantage à la tendance. Chantage qui consiste à dire : si vous préten
1118
plus haut point ce que j’appellerai le chantage à
la
tendance. Chantage qui consiste à dire : si vous prétendez rester obj
1119
telle réalité, c’est que vous avez une tendance à
la
favoriser. Toutes les fois que ce chantage se manifeste, je suis cert
1120
se manifeste, je suis certain que son auteur est
la
proie d’une passion inavouable — à ses propres yeux — pour la réalit
1121
e passion inavouable — à ses propres yeux — pour
la
réalité qu’il m’interdit d’examiner. Je prétends donc que les antifas
1122
qu’il m’interdit d’examiner. Je prétends donc que
les
antifascistes « aveugles » sont des totalitaires qui s’ignorent. ⁂ Qu
1123
alitaires qui s’ignorent. ⁂ Quelle est, en effet,
la
caractéristique de toute mentalité « totalitaire » ? C’est le refus d
1124
stique de toute mentalité « totalitaire » ? C’est
le
refus de discuter. Et de là vient le terrorisme. La Terreur (jacobine
1125
re » ? C’est le refus de discuter. Et de là vient
le
terrorisme. La Terreur (jacobine, bolchéviste ou fasciste) a toujours
1126
refus de discuter. Et de là vient le terrorisme.
La
Terreur (jacobine, bolchéviste ou fasciste) a toujours dénoncé à la v
1127
ne, bolchéviste ou fasciste) a toujours dénoncé à
la
vindicte publique les « individus », c’est-à-dire ceux qui discutent
1128
sciste) a toujours dénoncé à la vindicte publique
les
« individus », c’est-à-dire ceux qui discutent ; ceux qui, sans être
1129
me par leur orthodoxie trop rigoureuse. Dans tous
les
cas et à tous les stades, c’est la tendance que l’on punit, non pas l
1130
oxie trop rigoureuse. Dans tous les cas et à tous
les
stades, c’est la tendance que l’on punit, non pas les actes ou les op
1131
se. Dans tous les cas et à tous les stades, c’est
la
tendance que l’on punit, non pas les actes ou les opinions déclarées.
1132
s cas et à tous les stades, c’est la tendance que
l’
on punit, non pas les actes ou les opinions déclarées. On ne réfute pa
1133
stades, c’est la tendance que l’on punit, non pas
les
actes ou les opinions déclarées. On ne réfute pas ; on jette la suspi
1134
la tendance que l’on punit, non pas les actes ou
les
opinions déclarées. On ne réfute pas ; on jette la suspicion. Or, c’e
1135
s opinions déclarées. On ne réfute pas ; on jette
la
suspicion. Or, c’est ce trait fondamental de la mentalité totalitaire
1136
e la suspicion. Or, c’est ce trait fondamental de
la
mentalité totalitaire que je retrouve dans les écrits et les propos d
1137
de la mentalité totalitaire que je retrouve dans
les
écrits et les propos de certains de nos « antifascistes ». Ceux qui j
1138
té totalitaire que je retrouve dans les écrits et
les
propos de certains de nos « antifascistes ». Ceux qui jugent la tenda
1139
ertains de nos « antifascistes ». Ceux qui jugent
la
tendance supposée, non le fait, se trouvent participer, d’ores et déj
1140
stes ». Ceux qui jugent la tendance supposée, non
le
fait, se trouvent participer, d’ores et déjà, de l’état d’esprit fasc
1141
fait, se trouvent participer, d’ores et déjà, de
l’
état d’esprit fasciste qu’ils s’imaginent combattre. Pourquoi refusent
1142
quoi refusent-ils de s’informer objectivement sur
le
fascisme ? Parce qu’ils pressentent que sa réalité est très complexe,
1143
lité est très complexe, et qu’elle introduit donc
la
nécessité de distinguer avant de juger ; c’est-à-dire la nécessité de
1144
ssité de distinguer avant de juger ; c’est-à-dire
la
nécessité de discuter et de déclarer ses critères. Et je précise : no
1145
ères. Et je précise : non de discuter pour éluder
la
prise de parti, mais au contraire pour situer cette prise de parti av
1146
ils étaient amenés à discuter, par suite à donner
les
raisons de leur jugement, ils s’apercevraient qu’en réalité, ils sont
1147
percevraient qu’en réalité, ils sont tout près de
l’
adversaire, et qu’ils partagent sinon toutes ses vues, du moins sa man
1148
inon toutes ses vues, du moins sa manière de voir
la
vie. (Ou à l’inverse : qu’ils sont très loin de leurs alliés.) Si les
1149
s vues, du moins sa manière de voir la vie. (Ou à
l’
inverse : qu’ils sont très loin de leurs alliés.) Si les hommes de gau
1150
erse : qu’ils sont très loin de leurs alliés.) Si
les
hommes de gauche, d’une part, et les hommes de droite d’autre part, a
1151
alliés.) Si les hommes de gauche, d’une part, et
les
hommes de droite d’autre part, acceptaient de voir l’Allemagne telle
1152
ommes de droite d’autre part, acceptaient de voir
l’
Allemagne telle qu’elle est, ils s’apercevraient que le socialisme y e
1153
emagne telle qu’elle est, ils s’apercevraient que
le
socialisme y est mieux réalisé qu’en France : dès lors, les premiers
1154
ce : dès lors, les premiers verraient s’effondrer
la
meilleure raison de leur refus de l’hitlérisme, tandis que les second
1155
s’effondrer la meilleure raison de leur refus de
l’
hitlérisme, tandis que les seconds verraient s’effondrer la seule rais
1156
sme, tandis que les seconds verraient s’effondrer
la
seule raison qu’ils avaient d’admirer Hitler, « rempart contre le bol
1157
qu’ils avaient d’admirer Hitler, « rempart contre
le
bolchévisme ». Or, ils tiennent essentiellement, les uns et les autre
1158
bolchévisme ». Or, ils tiennent essentiellement,
les
uns et les autres, à condamner ou à défendre Hitler non point pour ce
1159
e ». Or, ils tiennent essentiellement, les uns et
les
autres, à condamner ou à défendre Hitler non point pour ce qu’il est,
1160
eut qu’il soit. Ils sont donc contraints de jeter
la
suspicion sur l’écrivain « objectif » qui leur rappelle les faits. Il
1161
ls sont donc contraints de jeter la suspicion sur
l’
écrivain « objectif » qui leur rappelle les faits. Il me faut souligne
1162
ion sur l’écrivain « objectif » qui leur rappelle
les
faits. Il me faut souligner, d’ailleurs, que le parallèle gauche-droi
1163
les faits. Il me faut souligner, d’ailleurs, que
le
parallèle gauche-droite n’est pas rigoureux dans ce cas. L’écrivain «
1164
le gauche-droite n’est pas rigoureux dans ce cas.
L’
écrivain « objectif » se voit traité d’hitlérien par certains critique
1165
tiques de gauche, mais non pas de bolchévique par
les
droites. Pour des raisons trop complexes à examiner ici, il se trouve
1166
s trop complexes à examiner ici, il se trouve que
la
droite jouit en France, provisoirement et comme par accident, d’une p
1167
accident, d’une plus grande liberté d’esprit que
la
gauche. (À de nombreuses exceptions près, bien sûr. J’en citerais d’a
1168
citerais d’assez éclatantes des deux côtés.) ⁂ Si
l’
on veut conserver un sens à l’expression « faire le jeu d’Hitler », il
1169
s deux côtés.) ⁂ Si l’on veut conserver un sens à
l’
expression « faire le jeu d’Hitler », il me paraît indispensable de dé
1170
’on veut conserver un sens à l’expression « faire
le
jeu d’Hitler », il me paraît indispensable de définir le jeu d’Hitler
1171
d’Hitler », il me paraît indispensable de définir
le
jeu d’Hitler. Car sinon l’expression peut flétrir tout ce que l’on ve
1172
dispensable de définir le jeu d’Hitler. Car sinon
l’
expression peut flétrir tout ce que l’on veut et le contraire aussi, M
1173
. Car sinon l’expression peut flétrir tout ce que
l’
on veut et le contraire aussi, Mussolini fait le jeu d’Hitler en l’app
1174
’expression peut flétrir tout ce que l’on veut et
le
contraire aussi, Mussolini fait le jeu d’Hitler en l’appuyant, mais l
1175
e l’on veut et le contraire aussi, Mussolini fait
le
jeu d’Hitler en l’appuyant, mais les communistes le font en poussant
1176
ontraire aussi, Mussolini fait le jeu d’Hitler en
l’
appuyant, mais les communistes le font en poussant à la guerre, M. Fla
1177
ussolini fait le jeu d’Hitler en l’appuyant, mais
les
communistes le font en poussant à la guerre, M. Flandin fait le jeu d
1178
jeu d’Hitler en l’appuyant, mais les communistes
le
font en poussant à la guerre, M. Flandin fait le jeu d’Hitler en le f
1179
uyant, mais les communistes le font en poussant à
la
guerre, M. Flandin fait le jeu d’Hitler en le félicitant, mais Mme Ta
1180
le font en poussant à la guerre, M. Flandin fait
le
jeu d’Hitler en le félicitant, mais Mme Tabouis le fait aussi en le c
1181
t à la guerre, M. Flandin fait le jeu d’Hitler en
le
félicitant, mais Mme Tabouis le fait aussi en le calomniant d’une faç
1182
e jeu d’Hitler en le félicitant, mais Mme Tabouis
le
fait aussi en le calomniant d’une façon maladroite, etc. Quel est le
1183
le félicitant, mais Mme Tabouis le fait aussi en
le
calomniant d’une façon maladroite, etc. Quel est le jeu qu’il s’agit
1184
calomniant d’une façon maladroite, etc. Quel est
le
jeu qu’il s’agit de ne pas faire ? Voici : Hitler est le symbole et l
1185
qu’il s’agit de ne pas faire ? Voici : Hitler est
le
symbole et l’instrument principal de la mentalité totalitaire. Cette
1186
e ne pas faire ? Voici : Hitler est le symbole et
l’
instrument principal de la mentalité totalitaire. Cette mentalité se d
1187
itler est le symbole et l’instrument principal de
la
mentalité totalitaire. Cette mentalité se définit par le refus de rec
1188
alité totalitaire. Cette mentalité se définit par
le
refus de reconnaître les faits gênants (donc de discuter objectivemen
1189
mentalité se définit par le refus de reconnaître
les
faits gênants (donc de discuter objectivement) et par la passion de c
1190
s gênants (donc de discuter objectivement) et par
la
passion de condamner à priori des « tendances » supposées hostiles (p
1191
tes de Turcs et de boucs émissaires). Introduisez
la
discussion, vous rendez impossible le régime totalitaire. Je revendiq
1192
Introduisez la discussion, vous rendez impossible
le
régime totalitaire. Je revendique pour ma part le droit de discuter,
1193
le régime totalitaire. Je revendique pour ma part
le
droit de discuter, et j’en fais même un devoir civique. Si vous me le
1194
, et j’en fais même un devoir civique. Si vous me
le
contestez, je vous jugerai là-dessus. Sur cette déclaration, sur ce f
1195
fasciste, non pas d’intention mais de fait. Et je
le
dirai encore si vous me contestez le droit de discuter le fascisme lu
1196
fait. Et je le dirai encore si vous me contestez
le
droit de discuter le fascisme lui-même. Car je prétends que ma meille
1197
encore si vous me contestez le droit de discuter
le
fascisme lui-même. Car je prétends que ma meilleure arme contre lui e
1198
fasciste honteux, qui sera certainement battu par
le
fasciste glorieux. ⁂ Je conçois très bien qu’un communiste n’admette
1199
n qu’un communiste n’admette point que je décrive
le
régime nazi tel qu’il est. Car s’il l’admettait, il serait contraint
1200
je décrive le régime nazi tel qu’il est. Car s’il
l’
admettait, il serait contraint de voir l’identité des actes qu’il repr
1201
Car s’il l’admettait, il serait contraint de voir
l’
identité des actes qu’il reproche à Hitler, et des actes qu’il loue ch
1202
es actes qu’il loue chez Staline. (Je néglige ici
les
prétextes.) L’un massacre des hommes parce qu’ils ont une ascendance
1203
utre parce qu’ils ont une ascendance koulak. Tous
les
deux persécutent les chrétiens. Tous les deux privent le citoyen de s
1204
une ascendance koulak. Tous les deux persécutent
les
chrétiens. Tous les deux privent le citoyen de ses libertés, etc. Le
1205
ak. Tous les deux persécutent les chrétiens. Tous
les
deux privent le citoyen de ses libertés, etc. Le communiste me refuse
1206
persécutent les chrétiens. Tous les deux privent
le
citoyen de ses libertés, etc. Le communiste me refuse le droit d’être
1207
les deux privent le citoyen de ses libertés, etc.
Le
communiste me refuse le droit d’être objectif parce que, en l’étant,
1208
yen de ses libertés, etc. Le communiste me refuse
le
droit d’être objectif parce que, en l’étant, je démasque sa vraie pas
1209
me refuse le droit d’être objectif parce que, en
l’
étant, je démasque sa vraie passion, sa passion inavouable, qui est id
1210
ement, en déclarant ses critères, et en acceptant
la
discussion des faits. Dès lors, le départ entre « totalitaires » (con
1211
t en acceptant la discussion des faits. Dès lors,
le
départ entre « totalitaires » (conscients ou non) et véritables non-f
1212
isé. Il coïncide, à très peu de choses près, avec
la
distinction entre ceux qui préconisent la bêtise comme méthode d’acti
1213
s, avec la distinction entre ceux qui préconisent
la
bêtise comme méthode d’action, et ceux qui préfèrent l’intelligence.
1214
ise comme méthode d’action, et ceux qui préfèrent
l’
intelligence. Ceci n’est pas une pointe, mais une conclusion réfléchie
1215
réfléchie. 4. Refuser de discuter Hitler, c’est
le
« tabouer », le considérer comme l’adversaire sacré. Le sacré, c’est
1216
Refuser de discuter Hitler, c’est le « tabouer »,
le
considérer comme l’adversaire sacré. Le sacré, c’est ce qu’on ne disc
1217
Hitler, c’est le « tabouer », le considérer comme
l’
adversaire sacré. Le sacré, c’est ce qu’on ne discute pas. Mais le sac
1218
abouer », le considérer comme l’adversaire sacré.
Le
sacré, c’est ce qu’on ne discute pas. Mais le sacré est toujours ambi
1219
ré. Le sacré, c’est ce qu’on ne discute pas. Mais
le
sacré est toujours ambigu : l’horreur toujours liée à l’attirance. En
1220
discute pas. Mais le sacré est toujours ambigu :
l’
horreur toujours liée à l’attirance. En discutant Hitler, je le profan
1221
é est toujours ambigu : l’horreur toujours liée à
l’
attirance. En discutant Hitler, je le profane. C’est beaucoup plus dan
1222
jours liée à l’attirance. En discutant Hitler, je
le
profane. C’est beaucoup plus dangereux pour son mythe que les vocifér
1223
C’est beaucoup plus dangereux pour son mythe que
les
vociférations sacrées de quelques « antifascistes ». g. Rougemont D
1224
antifascistes ». g. Rougemont Denis de, « Faire
le
jeu d’Hitler », Les Nouveaux Cahiers, Paris, 1 janvier 1939, p. 14-15
1225
. Rougemont Denis de, « Faire le jeu d’Hitler »,
Les
Nouveaux Cahiers, Paris, 1 janvier 1939, p. 14-15.