1 1937, Les Nouveaux Cahiers (1937-1939). Violence et brutalité (1er juin 1937)
1 utalité (1er juin 1937)a À plusieurs reprises, les collaborateurs de ces Cahiers ont déclaré qu’ils rejetaient la violen
2 eurs de ces Cahiers ont déclaré qu’ils rejetaient la violence, les méthodes de violence, les solutions de violence, et qu’
3 ahiers ont déclaré qu’ils rejetaient la violence, les méthodes de violence, les solutions de violence, et qu’ils s’efforçai
4 rejetaient la violence, les méthodes de violence, les solutions de violence, et qu’ils s’efforçaient d’y substituer une mét
5 léments réellement divers, c’est-à-dire opposés à l’ origine. Toute collaboration créatrice suppose un but nouveau, que des
6 hommes auparavant antagonistes (c’est-à-dire dont les intérêts et les desseins divergeaient) s’imposent et cherchent à atte
7 t antagonistes (c’est-à-dire dont les intérêts et les desseins divergeaient) s’imposent et cherchent à atteindre au moyen d
8 quantitatif d’éléments semblables ou apparentés. La compréhension réciproque ne serait qu’une constatation pure et simple
9 urait ni effort, ni création. On aboutirait, dans le cas le plus favorable, à un banal échange d’informations, dans l’indi
10 i effort, ni création. On aboutirait, dans le cas le plus favorable, à un banal échange d’informations, dans l’indifférenc
11 avorable, à un banal échange d’informations, dans l’ indifférence générale. Il y a donc, me semble-t-il, un intérêt urgent
12 y a donc, me semble-t-il, un intérêt urgent pour le groupe des Nouveaux Cahiers, à préciser la signification du mot viole
13 t pour le groupe des Nouveaux Cahiers, à préciser la signification du mot violence, dans la mesure où cela dépend de nous,
14 à préciser la signification du mot violence, dans la mesure où cela dépend de nous, c’est-à-dire à l’intérieur du groupe e
15 la mesure où cela dépend de nous, c’est-à-dire à l’ intérieur du groupe et dans ces pages. Sur le « pouvoir des mots »
16 à l’intérieur du groupe et dans ces pages. Sur le « pouvoir des mots » « Simple question de vocabulaire », a-t-on co
17 e répliquer, de nos jours. Mais nous avons ouvert la rubrique intitulée « Pouvoir des mots » pour montrer justement que le
18 e « Pouvoir des mots » pour montrer justement que les questions de vocabulaire ne sont ni simples ni indifférentes ; qu’ell
19 qu’elles sont mêlées à toutes nos activités, dans la mesure où la pensée y est mêlée ; qu’elles entraînent et symbolisent
20 mêlées à toutes nos activités, dans la mesure où la pensée y est mêlée ; qu’elles entraînent et symbolisent à peu près to
21 elles entraînent et symbolisent à peu près toutes les « questions actuelles » ; bref, que rien n’est plus immédiatement imp
22 ue rien n’est plus immédiatement important pour «  l’ action » que la définition des mots qui la désignent, ou qui la trahis
23 lus immédiatement important pour « l’action » que la définition des mots qui la désignent, ou qui la trahissent ; qui en a
24 pour « l’action » que la définition des mots qui la désignent, ou qui la trahissent ; qui en assurent la signification et
25 e la définition des mots qui la désignent, ou qui la trahissent ; qui en assurent la signification et l’efficacité, ou qui
26 désignent, ou qui la trahissent ; qui en assurent la signification et l’efficacité, ou qui faussent cette signification et
27 trahissent ; qui en assurent la signification et l’ efficacité, ou qui faussent cette signification et masquent une ineffi
28 efficacité réelle. Toute définition de mot, qu’on le sache ou non, suppose et définit une attitude générale, une certaine
29 une attitude générale, une certaine conception de la vie. C’est ainsi — entre autres — que le « pouvoir des mots » est rée
30 ption de la vie. C’est ainsi — entre autres — que le « pouvoir des mots » est réel. Peut-être dira-t-on qu’il n’est que tr
31 qui paraissent « anarchiques » ou « faux » selon le système de référence qui est en train de se constituer dans divers gr
32 st en train de se constituer dans divers groupes. Les mots que nous étudions ici ne sont pas « vides » — le vocabulaire a h
33 ots que nous étudions ici ne sont pas « vides » — le vocabulaire a horreur du vide — mais ils ont été mal remplis, ou remp
34 lus haut point de redéfinir et de réorganiser, si l’ on entend recréer un corps social vivant, et une « commune mesure » po
35 rps social vivant, et une « commune mesure » pour les diverses activités de l’homme dans le cadre de la nation. Essayons do
36 « commune mesure » pour les diverses activités de l’ homme dans le cadre de la nation. Essayons donc de définir le mot « vi
37 ure » pour les diverses activités de l’homme dans le cadre de la nation. Essayons donc de définir le mot « violence », c’e
38 es diverses activités de l’homme dans le cadre de la nation. Essayons donc de définir le mot « violence », c’est-à-dire de
39 s le cadre de la nation. Essayons donc de définir le mot « violence », c’est-à-dire de décrire son contenu actuel d’une pa
40 re son contenu actuel d’une part, et d’autre part le contenu qu’il paraît juste ou utile de lui attribuer dans l’ordre nou
41 ans l’ordre nouveau. Origine du préjugé contre la violence Il faut reconnaître, tout d’abord, que la violence est gé
42 iolence Il faut reconnaître, tout d’abord, que la violence est généralement « mal vue » de la majorité des Français. (M
43 , que la violence est généralement « mal vue » de la majorité des Français. (Mais c’est peut-être, justement, parce qu’on
44 is. (Mais c’est peut-être, justement, parce qu’on la regarde mal ?) On en est venu à assimiler violence à brutalité, à con
45 assimiler violence à brutalité, à contrainte par la force matérielle : on parle des « violences policières ». On la consi
46 ielle : on parle des « violences policières ». On la considère comme une passion basse et vulgaire, ou comme une nécessité
47 te attaque apparaît d’ailleurs injuste à ceux qui la subissent). Un homme violent, c’est une espèce de brute qui refuse de
48 de donner ses raisons, et qui frappe du poing sur la table. Ainsi violence ne se confond pas seulement avec brutalité, mai
49 expliquer comment il a pu se produire. J’en vois la principale raison dans ce qu’on est convenu d’appeler la morale bourg
50 cipale raison dans ce qu’on est convenu d’appeler la morale bourgeoise, ou mieux : dans la conception du monde née de l’ét
51 u d’appeler la morale bourgeoise, ou mieux : dans la conception du monde née de l’établissement de la bourgeoisie au pouvo
52 se, ou mieux : dans la conception du monde née de l’ établissement de la bourgeoisie au pouvoir. Conception qui se fonde d’
53 la conception du monde née de l’établissement de la bourgeoisie au pouvoir. Conception qui se fonde d’ailleurs dans une t
54 fonde d’ailleurs dans une tendance permanente de l’ homme ; le besoin de sécurité. Mais ce besoin s’est exagérément dévelo
55 illeurs dans une tendance permanente de l’homme ; le besoin de sécurité. Mais ce besoin s’est exagérément développé, et co
56 uite des conditions particulières dans lesquelles la bourgeoisie a conquis le pouvoir et l’a gardé pendant un siècle et de
57 culières dans lesquelles la bourgeoisie a conquis le pouvoir et l’a gardé pendant un siècle et demi. La bourgeoisie établi
58 lesquelles la bourgeoisie a conquis le pouvoir et l’ a gardé pendant un siècle et demi. La bourgeoisie établie sur l’argent
59 e pouvoir et l’a gardé pendant un siècle et demi. La bourgeoisie établie sur l’argent, et sur un « capital » de traditions
60 ant un siècle et demi. La bourgeoisie établie sur l’ argent, et sur un « capital » de traditions, a doublement « intérêt »
61 dre public et culturel immuable. (Préservé contre les mutations brusques.) Elle a donc tout avantage à nier ou à dissimuler
62 Elle a donc tout avantage à nier ou à dissimuler les antagonismes qu’elle domine ou étouffe, tels que la lutte des classes
63 antagonismes qu’elle domine ou étouffe, tels que la lutte des classes, dans l’ordre économico-social, ou les « idées subv
64 e ou étouffe, tels que la lutte des classes, dans l’ ordre économico-social, ou les « idées subversives » que produit inévi
65 te des classes, dans l’ordre économico-social, ou les « idées subversives » que produit inévitablement la culture créatrice
66 « idées subversives » que produit inévitablement la culture créatrice. Elle tend à substituer aux conflits déclarés des «
67 prix une évolution continue et sans heurts. (D’où le retard permanent et voulu de l’enseignement officiel sur la culture d
68 ans heurts. (D’où le retard permanent et voulu de l’ enseignement officiel sur la culture d’avant-garde, et ce vaste systèm
69 permanent et voulu de l’enseignement officiel sur la culture d’avant-garde, et ce vaste système de contrôle méfiant des id
70 stème de contrôle méfiant des idées que constitue la filière universitaire.) Il faut à tout prix que « tout s’arrange » (c
71 e que rien ne change vraiment) ; il faut « sauver la face » (c’est-à-dire les situations acquises). D’où cette espèce d’op
72 iment) ; il faut « sauver la face » (c’est-à-dire les situations acquises). D’où cette espèce d’optimisme désarmant qui se
73 ble » (c’est-à-dire : cela obligerait à envisager le monde d’une façon nouvelle). En même temps, les organismes de l’écono
74 er le monde d’une façon nouvelle). En même temps, les organismes de l’économie et de la culture sont devenus si complexes e
75 façon nouvelle). En même temps, les organismes de l’ économie et de la culture sont devenus si complexes et délicats qu’on
76 En même temps, les organismes de l’économie et de la culture sont devenus si complexes et délicats qu’on a l’impression qu
77 ure sont devenus si complexes et délicats qu’on a l’ impression que toute intervention d’une nouveauté réelle entraînerait
78 mesurables, où « tout risquerait de sombrer ». Et l’ on perd peu à peu de vue cette vérité fondamentale : que les instituti
79 peu à peu de vue cette vérité fondamentale : que les institutions ne durent qu’à force d’être recréées, réinventées, repri
80 re recréées, réinventées, reprises sans relâche à la base… Ayant peur de la chose, on rabaisse le mot qui la désigne : c’e
81 s, reprises sans relâche à la base… Ayant peur de la chose, on rabaisse le mot qui la désigne : c’est une espèce de conjur
82 he à la base… Ayant peur de la chose, on rabaisse le mot qui la désigne : c’est une espèce de conjuration magique. Nous re
83 e… Ayant peur de la chose, on rabaisse le mot qui la désigne : c’est une espèce de conjuration magique. Nous retrouvons ic
84 spèce de conjuration magique. Nous retrouvons ici le glissement sémantique de « violence » à « brutalité ». Puis, ayant de
85 e de « violence » à « brutalité ». Puis, ayant de la sorte disqualifié la violence — car tout le monde est d’accord pour c
86  brutalité ». Puis, ayant de la sorte disqualifié la violence — car tout le monde est d’accord pour condamner la brutalité
87 e — car tout le monde est d’accord pour condamner la brutalité —, on se met à abuser du mot dans le sens le plus péjoratif
88 er la brutalité —, on se met à abuser du mot dans le sens le plus péjoratif. J’en donnerai un exemple qui fait bien voir t
89 utalité —, on se met à abuser du mot dans le sens le plus péjoratif. J’en donnerai un exemple qui fait bien voir toute l’é
90 J’en donnerai un exemple qui fait bien voir toute l’ équivoque de la situation : on a coutume, à droite et au centre, de vi
91 n exemple qui fait bien voir toute l’équivoque de la situation : on a coutume, à droite et au centre, de vilipender le mar
92 n a coutume, à droite et au centre, de vilipender le marxisme en le traitant de « doctrine de violence ». Or, rien n’est m
93 droite et au centre, de vilipender le marxisme en le traitant de « doctrine de violence ». Or, rien n’est moins « violent 
94 violence ». Or, rien n’est moins « violent » que la doctrine de Marx, rigoureusement évolutive en tant que doctrine1, et
95 et par là même, conforme au mouvement profond de la pensée bourgeoise, sinon aux intérêts immédiats des bourgeois. Les se
96 oise, sinon aux intérêts immédiats des bourgeois. Les seules véritables doctrines de violence apparues dans notre époque so
97 eorges Sorel : elles s’accordent au plus mal avec le style de la pensée marxiste. La vraie violence Nous pouvons mai
98  : elles s’accordent au plus mal avec le style de la pensée marxiste. La vraie violence Nous pouvons maintenant essa
99 plus mal avec le style de la pensée marxiste. La vraie violence Nous pouvons maintenant essayer de préciser une dis
100 tion radicale entre violence et brutalité, — avec l’ espoir de sauver le mot « violence » de ses déviations sémantiques int
101 violence et brutalité, — avec l’espoir de sauver le mot « violence » de ses déviations sémantiques intéressées, et de le
102 de ses déviations sémantiques intéressées, et de le restaurer dans sa puissance active, libératrice. La violence est le f
103 restaurer dans sa puissance active, libératrice. La violence est le fait même de l’esprit, j’entends de l’esprit créateur
104 sa puissance active, libératrice. La violence est le fait même de l’esprit, j’entends de l’esprit créateur. Dès que l’espr
105 ive, libératrice. La violence est le fait même de l’ esprit, j’entends de l’esprit créateur. Dès que l’esprit fait irruptio
106 olence est le fait même de l’esprit, j’entends de l’ esprit créateur. Dès que l’esprit fait irruption dans le monde, pour y
107 l’esprit, j’entends de l’esprit créateur. Dès que l’ esprit fait irruption dans le monde, pour y réaliser ses vues, il fait
108 it créateur. Dès que l’esprit fait irruption dans le monde, pour y réaliser ses vues, il fait violence à un état de choses
109 ne, qu’il s’agisse d’élever des blocs de pierre à la hauteur d’un cintre, de labourer la terre, ou d’écrire un ouvrage don
110 s de pierre à la hauteur d’un cintre, de labourer la terre, ou d’écrire un ouvrage dont la nécessité n’est sentie tout d’a
111 de labourer la terre, ou d’écrire un ouvrage dont la nécessité n’est sentie tout d’abord que par l’auteur qui l’imposera.
112 nt la nécessité n’est sentie tout d’abord que par l’ auteur qui l’imposera. Tout acte créateur de l’esprit — et c’est l’esp
113 té n’est sentie tout d’abord que par l’auteur qui l’ imposera. Tout acte créateur de l’esprit — et c’est l’esprit seul qui
114 ar l’auteur qui l’imposera. Tout acte créateur de l’ esprit — et c’est l’esprit seul qui crée — est une « transgression » d
115 posera. Tout acte créateur de l’esprit — et c’est l’ esprit seul qui crée — est une « transgression » des lois admises jusq
116 ansgression » des lois admises jusqu’alors : d’où le malaise que crée naturellement cet acte, malaise qui est à l’origine
117 ue crée naturellement cet acte, malaise qui est à l’ origine de l’état d’esprit conservateur que nous décrivions tout à l’h
118 ellement cet acte, malaise qui est à l’origine de l’ état d’esprit conservateur que nous décrivions tout à l’heure. D’où au
119 d’esprit conservateur que nous décrivions tout à l’ heure. D’où aussi le risque que l’acte institue pour celui qui l’ose.
120 ur que nous décrivions tout à l’heure. D’où aussi le risque que l’acte institue pour celui qui l’ose. Mais c’est préciséme
121 crivions tout à l’heure. D’où aussi le risque que l’ acte institue pour celui qui l’ose. Mais c’est précisément ce sentimen
122 ussi le risque que l’acte institue pour celui qui l’ ose. Mais c’est précisément ce sentiment de malaise, lié à l’euphorie
123 c’est précisément ce sentiment de malaise, lié à l’ euphorie du risque encouru, qui est le signe normal d’une création de
124 aise, lié à l’euphorie du risque encouru, qui est le signe normal d’une création de l’esprit humain. Les époques de décade
125 ncouru, qui est le signe normal d’une création de l’ esprit humain. Les époques de décadence sont celles où l’on en vient à
126 e signe normal d’une création de l’esprit humain. Les époques de décadence sont celles où l’on en vient à redouter par-dess
127 t humain. Les époques de décadence sont celles où l’ on en vient à redouter par-dessus tout ce malaise (à le qualifier de s
128 en vient à redouter par-dessus tout ce malaise (à le qualifier de scandale) et à l’éprouver plus fortement que l’euphorie
129 tout ce malaise (à le qualifier de scandale) et à l’ éprouver plus fortement que l’euphorie du risque, du jeu. C’est un aff
130 r de scandale) et à l’éprouver plus fortement que l’ euphorie du risque, du jeu. C’est un affadissement et une trahison cer
131 ’est un affadissement et une trahison certaine de l’ Évangile qui ont conduit les chrétiens moyens à insister uniquement su
132 e trahison certaine de l’Évangile qui ont conduit les chrétiens moyens à insister uniquement sur la douceur et la subtile a
133 it les chrétiens moyens à insister uniquement sur la douceur et la subtile aménité de l’esprit. Cette fausse « charité » s
134 ns moyens à insister uniquement sur la douceur et la subtile aménité de l’esprit. Cette fausse « charité » sentimentale es
135 niquement sur la douceur et la subtile aménité de l’ esprit. Cette fausse « charité » sentimentale est nettement condamnée
136 harité » sentimentale est nettement condamnée par l’ Évangile : « Je ne suis pas venu apporter la paix, mais le glaive. » E
137 e par l’Évangile : « Je ne suis pas venu apporter la paix, mais le glaive. » Et le terme même de violence que la plupart d
138 le : « Je ne suis pas venu apporter la paix, mais le glaive. » Et le terme même de violence que la plupart des moralistes
139 s pas venu apporter la paix, mais le glaive. » Et le terme même de violence que la plupart des moralistes chrétiens d’aujo
140 d’aujourd’hui ont coutume de condamner au nom de la « charité », se trouve avoir été glorifié par l’Évangile : Violenti r
141 la « charité », se trouve avoir été glorifié par l’ Évangile : Violenti rapiunt illud, le Royaume de Dieu est promis aux v
142 glorifié par l’Évangile : Violenti rapiunt illud, le Royaume de Dieu est promis aux violents. Là encore, c’est l’influence
143 de Dieu est promis aux violents. Là encore, c’est l’ influence de la morale bourgeoise qui a fait perdre sa vigueur au chri
144 mis aux violents. Là encore, c’est l’influence de la morale bourgeoise qui a fait perdre sa vigueur au christianisme, et n
145 a fait perdre sa vigueur au christianisme, et non l’ inverse, comme le soutiennent des polémistes ignorants. La violence ét
146 vigueur au christianisme, et non l’inverse, comme le soutiennent des polémistes ignorants. La violence étant le fait de l’
147 e, comme le soutiennent des polémistes ignorants. La violence étant le fait de l’esprit, elle se confond avec la liberté.
148 nnent des polémistes ignorants. La violence étant le fait de l’esprit, elle se confond avec la liberté. C’est elle seule q
149 olémistes ignorants. La violence étant le fait de l’ esprit, elle se confond avec la liberté. C’est elle seule qui délivre
150 e étant le fait de l’esprit, elle se confond avec la liberté. C’est elle seule qui délivre l’homme de la chaîne des routin
151 ond avec la liberté. C’est elle seule qui délivre l’ homme de la chaîne des routines et des lois qu’il se forge, c’est elle
152 liberté. C’est elle seule qui délivre l’homme de la chaîne des routines et des lois qu’il se forge, c’est elle seule qui
153 et des lois qu’il se forge, c’est elle seule qui l’ empêche de se laisser emprisonner dans ses propres institutions, lorsq
154 pres institutions, lorsque celles-ci ont cessé de le servir. Telle est l’origine du concept occidental de révolution. La r
155 rsque celles-ci ont cessé de le servir. Telle est l’ origine du concept occidental de révolution. La révolution est toujour
156 st l’origine du concept occidental de révolution. La révolution est toujours spirituelle : elle est l’acte de l’homme qui
157 La révolution est toujours spirituelle : elle est l’ acte de l’homme qui rejette ses vieilles commodités, qui violente ses
158 ion est toujours spirituelle : elle est l’acte de l’ homme qui rejette ses vieilles commodités, qui violente ses habitudes
159 es tyrannies, et qui crée des possibles nouveaux. La révolution ainsi comprise est aussi indispensable à la vie sociale qu
160 volution ainsi comprise est aussi indispensable à la vie sociale que l’imagination l’est à la vie individuelle. D’ailleurs
161 rise est aussi indispensable à la vie sociale que l’ imagination l’est à la vie individuelle. D’ailleurs, si la violence es
162 indispensable à la vie sociale que l’imagination l’ est à la vie individuelle. D’ailleurs, si la violence est libératrice,
163 nsable à la vie sociale que l’imagination l’est à la vie individuelle. D’ailleurs, si la violence est libératrice, elle n’
164 ation l’est à la vie individuelle. D’ailleurs, si la violence est libératrice, elle n’est pas pour autant anarchique. Elle
165 que j’y verrais plutôt deux synonymes. Reprenons l’ exemple du bloc de pierre élevé jusqu’au cintre : on y retrouve ces tr
166 au cintre : on y retrouve ces trois caractères de la vraie violence spirituelle, ou de la vraie création révolutionnaire :
167 aractères de la vraie violence spirituelle, ou de la vraie création révolutionnaire : la pierre est élevée, c’est-à-dire «
168 tuelle, ou de la vraie création révolutionnaire : la pierre est élevée, c’est-à-dire « libérée » de la loi de pesanteur, p
169 la pierre est élevée, c’est-à-dire « libérée » de la loi de pesanteur, puis elle est placée dans une « organisation » nouv
170 , et tout cela s’opère en vertu d’une décision de l’ esprit2. Enfin, la vraie violence n’exclut nullement la délicatesse (v
171 père en vertu d’une décision de l’esprit2. Enfin, la vraie violence n’exclut nullement la délicatesse (voir Nietzsche), ni
172 rit2. Enfin, la vraie violence n’exclut nullement la délicatesse (voir Nietzsche), ni la subtilité des moyens, ni la sérén
173 lut nullement la délicatesse (voir Nietzsche), ni la subtilité des moyens, ni la sérénité du ton. Bien au contraire ! Tout
174 (voir Nietzsche), ni la subtilité des moyens, ni la sérénité du ton. Bien au contraire ! Tout ceci n’apparaîtrait paradox
175 adoxal qu’à ceux qui n’auraient pas su distinguer la vraie violence de la brutalité, du simple fait qu’elles sont souvent
176 n’auraient pas su distinguer la vraie violence de la brutalité, du simple fait qu’elles sont souvent liées. (Il y a peu de
177 sont souvent liées. (Il y a peu de tons purs dans la vie.) La brutalité tue la violence Par opposition à la violence
178 liées. (Il y a peu de tons purs dans la vie.) La brutalité tue la violence Par opposition à la violence, signe de l
179 eu de tons purs dans la vie.) La brutalité tue la violence Par opposition à la violence, signe de l’esprit agissant,
180 La brutalité tue la violence Par opposition à la violence, signe de l’esprit agissant, la brutalité peut être définie
181 iolence Par opposition à la violence, signe de l’ esprit agissant, la brutalité peut être définie comme un aspect et un
182 sition à la violence, signe de l’esprit agissant, la brutalité peut être définie comme un aspect et un caractère avant tou
183 ct et un caractère avant tout matériels. Elle est le fait d’une contrainte purement extérieure, donc incapable en soi de r
184 c incapable en soi de rien créer et animer. C’est la brimade, la vexation, le choc qui blesse sans régénérer, la suppressi
185 en soi de rien créer et animer. C’est la brimade, la vexation, le choc qui blesse sans régénérer, la suppression inutile e
186 n créer et animer. C’est la brimade, la vexation, le choc qui blesse sans régénérer, la suppression inutile et absurde, l’
187 , la vexation, le choc qui blesse sans régénérer, la suppression inutile et absurde, l’interdiction qui offense la vitalit
188 ans régénérer, la suppression inutile et absurde, l’ interdiction qui offense la vitalité, qui nie la signification profond
189 on inutile et absurde, l’interdiction qui offense la vitalité, qui nie la signification profonde de toute existence. C’est
190 , l’interdiction qui offense la vitalité, qui nie la signification profonde de toute existence. C’est tout d’abord un proc
191 s discernement, sans « signification » précise, —  le sens étant toujours donné par l’esprit. Ôte-toi de là que je m’y mett
192 ion » précise, — le sens étant toujours donné par l’ esprit. Ôte-toi de là que je m’y mette, et je n’ai pas de raisons à te
193 donner, il n’y en a pas, ou pas d’avouables… Mais la brutalité peut aussi revêtir un aspect non matériel : par exemple, il
194 un aspect non matériel : par exemple, il y a dans la logique une certaine brutalité, reconnaissable à un caractère de cont
195 e, comme mécanique, et qui ne tient pas compte de la nature spirituelle, passionnelle ou vitale des réalités auxquelles s’
196 elle ou vitale des réalités auxquelles s’applique le règlement. La sensibilité féminine réagit d’ordinaire avec précision
197 des réalités auxquelles s’applique le règlement. La sensibilité féminine réagit d’ordinaire avec précision à cette brutal
198 t d’ordinaire avec précision à cette brutalité de la logique ; elle la déteste absolument, tandis que la violence l’effray
199 précision à cette brutalité de la logique ; elle la déteste absolument, tandis que la violence l’effraye mais la tente en
200 logique ; elle la déteste absolument, tandis que la violence l’effraye mais la tente en même temps. La définition la plus
201 lle la déteste absolument, tandis que la violence l’ effraye mais la tente en même temps. La définition la plus frappante e
202 absolument, tandis que la violence l’effraye mais la tente en même temps. La définition la plus frappante et la plus voyan
203 a violence l’effraye mais la tente en même temps. La définition la plus frappante et la plus voyante, si je puis dire, de
204 ffraye mais la tente en même temps. La définition la plus frappante et la plus voyante, si je puis dire, de la brutalité,
205 en même temps. La définition la plus frappante et la plus voyante, si je puis dire, de la brutalité, est fournie par les r
206 frappante et la plus voyante, si je puis dire, de la brutalité, est fournie par les régimes totalitaires. La dictature tot
207 si je puis dire, de la brutalité, est fournie par les régimes totalitaires. La dictature totalitaire est la brutalité même,
208 talité, est fournie par les régimes totalitaires. La dictature totalitaire est la brutalité même, en ce qu’elle est fondée
209 égimes totalitaires. La dictature totalitaire est la brutalité même, en ce qu’elle est fondée sur le principe de la contra
210 t la brutalité même, en ce qu’elle est fondée sur le principe de la contrainte par corps, — même lorsqu’il s’agit des chos
211 même, en ce qu’elle est fondée sur le principe de la contrainte par corps, — même lorsqu’il s’agit des choses de l’esprit.
212 par corps, — même lorsqu’il s’agit des choses de l’ esprit. Elle ne déteste rien tant que la vraie violence, inventive et
213 choses de l’esprit. Elle ne déteste rien tant que la vraie violence, inventive et imprévue, qui viendrait déranger ses con
214 la fois matérielles et abstraites, géométriques. La libre manifestation des antagonismes réels lui est encore plus intolé
215 réels lui est encore plus intolérable qu’elle ne l’ était à l’ordre bourgeois. Aussi se donne-t-elle pour première tâche d
216 est encore plus intolérable qu’elle ne l’était à l’ ordre bourgeois. Aussi se donne-t-elle pour première tâche de tuer dan
217 se donne-t-elle pour première tâche de tuer dans la jeunesse toute velléité de violence spirituelle. L’éducation fasciste
218 jeunesse toute velléité de violence spirituelle. L’ éducation fasciste ou stalinienne a pour effet systématique de substit
219 inienne a pour effet systématique de substituer à l’ esprit d’autonomie, de responsabilité spirituelle et de risque personn
220 e et de risque personnel, des instincts brutaux : l’ instinct de puissance, l’instinct de conformité au grand nombre, l’ins
221 des instincts brutaux : l’instinct de puissance, l’ instinct de conformité au grand nombre, l’instinct d’obéissance aveugl
222 ssance, l’instinct de conformité au grand nombre, l’ instinct d’obéissance aveugle. Mais il se produit là un phénomène curi
223 il se produit là un phénomène curieux : alors que la bourgeoisie disqualifiait la violence en la confondant avec la brutal
224 curieux : alors que la bourgeoisie disqualifiait la violence en la confondant avec la brutalité, les dictatures totalitai
225 s que la bourgeoisie disqualifiait la violence en la confondant avec la brutalité, les dictatures totalitaires tentent de
226 e disqualifiait la violence en la confondant avec la brutalité, les dictatures totalitaires tentent de requalifier la brut
227 t la violence en la confondant avec la brutalité, les dictatures totalitaires tentent de requalifier la brutalité en la bap
228 es dictatures totalitaires tentent de requalifier la brutalité en la baptisant violence. D’où le recours constant des nati
229 talitaires tentent de requalifier la brutalité en la baptisant violence. D’où le recours constant des nationaux-socialiste
230 ifier la brutalité en la baptisant violence. D’où le recours constant des nationaux-socialistes à Nietzsche, abus flagrant
231 socialistes à Nietzsche, abus flagrant (que toute la pensée du poète-philosophe dénonce). Là encore, il semble qu’une cert
232 es externes, un « rendement social » immédiat, et l’ on ne s’aperçoit pas que ce faisant, l’on détruit les racines de l’esp
233 médiat, et l’on ne s’aperçoit pas que ce faisant, l’ on détruit les racines de l’esprit créateur, les promesses de fécondit
234 on ne s’aperçoit pas que ce faisant, l’on détruit les racines de l’esprit créateur, les promesses de fécondité révolutionna
235 t pas que ce faisant, l’on détruit les racines de l’ esprit créateur, les promesses de fécondité révolutionnaire de l’aveni
236 t, l’on détruit les racines de l’esprit créateur, les promesses de fécondité révolutionnaire de l’avenir. Montesquieu a dit
237 ur, les promesses de fécondité révolutionnaire de l’ avenir. Montesquieu a dit l’essentiel sur cette brutalité-là, dans son
238 té révolutionnaire de l’avenir. Montesquieu a dit l’ essentiel sur cette brutalité-là, dans son fameux chapitre en trois li
239 é-là, dans son fameux chapitre en trois lignes de L’ Esprit des Lois : « Quand les sauvages de la Louisiane veulent avoir d
240 re en trois lignes de L’Esprit des Lois : « Quand les sauvages de la Louisiane veulent avoir du fruit, ils coupent l’arbre
241 es de L’Esprit des Lois : « Quand les sauvages de la Louisiane veulent avoir du fruit, ils coupent l’arbre au pied et cuei
242 la Louisiane veulent avoir du fruit, ils coupent l’ arbre au pied et cueillent le fruit. Voilà le gouvernement despotique.
243 u fruit, ils coupent l’arbre au pied et cueillent le fruit. Voilà le gouvernement despotique. » Le refus de la violence
244 pent l’arbre au pied et cueillent le fruit. Voilà le gouvernement despotique. » Le refus de la violence appelle la brut
245 le fruit. Voilà le gouvernement despotique. » Le refus de la violence appelle la brutalité Confondre la violence et
246 oilà le gouvernement despotique. » Le refus de la violence appelle la brutalité Confondre la violence et la brutalit
247 despotique. » Le refus de la violence appelle la brutalité Confondre la violence et la brutalité, c’est se placer d
248 de la violence appelle la brutalité Confondre la violence et la brutalité, c’est se placer dans une position spirituel
249 appelle la brutalité Confondre la violence et la brutalité, c’est se placer dans une position spirituelle inférieure,
250 position spirituelle inférieure, pour autant que la défensive est en principe inférieure à l’agressivité. Se méfier de la
251 ant que la défensive est en principe inférieure à l’ agressivité. Se méfier de la violence, avoir peur des risques féconds
252 principe inférieure à l’agressivité. Se méfier de la violence, avoir peur des risques féconds qu’elle institue, c’est se p
253 des meilleures armes dont nous disposions contre la brutalité. La vraie violence est en définitive pacifiante : elle acce
254 s armes dont nous disposions contre la brutalité. La vraie violence est en définitive pacifiante : elle accepte les confli
255 lence est en définitive pacifiante : elle accepte les conflits, les fait mûrir et les résout en créations. Mais la méthode
256 éfinitive pacifiante : elle accepte les conflits, les fait mûrir et les résout en créations. Mais la méthode qui règne actu
257 te : elle accepte les conflits, les fait mûrir et les résout en créations. Mais la méthode qui règne actuellement dans les
258 , les fait mûrir et les résout en créations. Mais la méthode qui règne actuellement dans les « démocraties de l’Ouest » —
259 ions. Mais la méthode qui règne actuellement dans les « démocraties de l’Ouest » — comme dit le Führer — et qui consiste à
260 qui règne actuellement dans les « démocraties de l’ Ouest » — comme dit le Führer — et qui consiste à biaiser avec les dif
261 t dans les « démocraties de l’Ouest » — comme dit le Führer — et qui consiste à biaiser avec les difficultés, à masquer le
262 me dit le Führer — et qui consiste à biaiser avec les difficultés, à masquer les antagonismes de fait, et à les déconcerter
263 onsiste à biaiser avec les difficultés, à masquer les antagonismes de fait, et à les déconcerter provisoirement à force de
264 icultés, à masquer les antagonismes de fait, et à les déconcerter provisoirement à force de « combines » et de compromis, c
265 ent, ne peut conduire qu’à un état de désordre où la brutalité ne trouvera plus de résistance sérieuse. L’histoire de l’ap
266 rutalité ne trouvera plus de résistance sérieuse. L’ histoire de l’après-guerre et de l’établissement des trois fascismes l
267 ouvera plus de résistance sérieuse. L’histoire de l’ après-guerre et de l’établissement des trois fascismes le démontre ave
268 ance sérieuse. L’histoire de l’après-guerre et de l’ établissement des trois fascismes le démontre avec éclat : la crainte
269 -guerre et de l’établissement des trois fascismes le démontre avec éclat : la crainte de la violence suscite mécaniquement
270 ment des trois fascismes le démontre avec éclat : la crainte de la violence suscite mécaniquement une brutalité qui, à son
271 fascismes le démontre avec éclat : la crainte de la violence suscite mécaniquement une brutalité qui, à son tour, ne peut
272 brutalité qui, à son tour, ne peut pas supporter la vraie violence. Le libéralisme et la dictature affectent l’un et l’au
273 on tour, ne peut pas supporter la vraie violence. Le libéralisme et la dictature affectent l’un et l’autre la violence (sp
274 as supporter la vraie violence. Le libéralisme et la dictature affectent l’un et l’autre la violence (spirituelle) du sign
275 ralisme et la dictature affectent l’un et l’autre la violence (spirituelle) du signe moins (en fait sinon en théorie). C’e
276 redoute, et se trouve désarmé lorsqu’il survient. Le destin des démocraties est lié à l’éducation ; celui des dictatures à
277 ’il survient. Le destin des démocraties est lié à l’ éducation ; celui des dictatures à la contrainte. Le seul moyen de pré
278 es est lié à l’éducation ; celui des dictatures à la contrainte. Le seul moyen de prévenir cette contrainte, c’est d’orien
279 éducation ; celui des dictatures à la contrainte. Le seul moyen de prévenir cette contrainte, c’est d’orienter l’éducation
280 en de prévenir cette contrainte, c’est d’orienter l’ éducation vers une prise de conscience vigoureuse de la valeur libérat
281 cation vers une prise de conscience vigoureuse de la valeur libératrice de la violence. Que ceux qui pensent qu’il est déj
282 conscience vigoureuse de la valeur libératrice de la violence. Que ceux qui pensent qu’il est déjà trop tard sachent qu’il
283 ent qu’ils sont par là même les premiers à rendre le tyran fatal. 1. Ce qui a pu faire illusion, reconnaissons-le, c’es
284 . 1. Ce qui a pu faire illusion, reconnaissons- le , c’est la théorie de la dictature du prolétariat d’une part, et le to
285 qui a pu faire illusion, reconnaissons-le, c’est la théorie de la dictature du prolétariat d’une part, et le ton « brutal
286 e illusion, reconnaissons-le, c’est la théorie de la dictature du prolétariat d’une part, et le ton « brutal » des polémiq
287 rie de la dictature du prolétariat d’une part, et le ton « brutal » des polémiques de Marx. Mais la dictature du prolétari
288 et le ton « brutal » des polémiques de Marx. Mais la dictature du prolétariat n’est pour Marx que la riposte nécessaire du
289 s la dictature du prolétariat n’est pour Marx que la riposte nécessaire du socialisme au capitalisme qui voudrait prolonge
290 statut en s’appuyant sur des moyens brutaux. Pour le fond, la doctrine de Marx a été fort bien caractérisée comme celle d’
291 s’appuyant sur des moyens brutaux. Pour le fond, la doctrine de Marx a été fort bien caractérisée comme celle d’un « évol
292 t Dandieu). 2. Il y aurait lieu aussi d’analyser la valeur ambiguë de « violence » dans l’acte du viol, qui paraît une br
293 d’analyser la valeur ambiguë de « violence » dans l’ acte du viol, qui paraît une brutalité. Mais cela nous entraînerait as
294 a nous entraînerait assez loin. Notons simplement le caractère essentiellement viril de la violence, et d’ailleurs de l’es
295 simplement le caractère essentiellement viril de la violence, et d’ailleurs de l’esprit créateur en général. Et, d’autre
296 tiellement viril de la violence, et d’ailleurs de l’ esprit créateur en général. Et, d’autre part, l’effémination de la bou
297 e l’esprit créateur en général. Et, d’autre part, l’ effémination de la bourgeoisie qui attend un dictateur comme la femell
298 r en général. Et, d’autre part, l’effémination de la bourgeoisie qui attend un dictateur comme la femelle s’offre au viol
299 n de la bourgeoisie qui attend un dictateur comme la femelle s’offre au viol redouté. a. Rougemont Denis de, « Violence
300 . Rougemont Denis de, « Violence et brutalité », Les Nouveaux Cahiers, Paris, 1 juin 1937, p. 14-17.
2 1937, Les Nouveaux Cahiers (1937-1939). Comment savoir à quoi ils pensent (Quelques remarques sur la méthode) (1er novembre 1937)
301 savoir à quoi ils pensent (Quelques remarques sur la méthode) (1er novembre 1937)b (Quelques remarques sur la méthode
302 (1er novembre 1937)b (Quelques remarques sur la méthode) Le désir de savoir à quoi pense le voisin trahit sans dou
303 937)b (Quelques remarques sur la méthode) Le désir de savoir à quoi pense le voisin trahit sans doute, à l’origine
304 ur la méthode) Le désir de savoir à quoi pense le voisin trahit sans doute, à l’origine, une crainte obscure qu’on a de
305 avoir à quoi pense le voisin trahit sans doute, à l’ origine, une crainte obscure qu’on a de lui ; révèle ensuite que l’on
306 ainte obscure qu’on a de lui ; révèle ensuite que l’ on nourrit soi-même à son endroit quelque intention bonne ou mauvaise.
307 aque sont prudemment dissimulés et confondus sous le vocable de curiosité. « Pourquoi me demandez-vous cela ? — Pour rien,
308 ela ? — Pour rien, par pure curiosité. » Au vrai, le mot curiosité est vide de sens, s’il ne recouvre pas cette crainte ou
309 e crainte ou cette entreprise projetée, ou encore les deux à la fois. En dépit de l’opinion convenue, et justifiée d’ailleu
310 ojetée, ou encore les deux à la fois. En dépit de l’ opinion convenue, et justifiée d’ailleurs en tant que convention, rien
311 ant que convention, rien n’est moins innocent que la curiosité, rien n’est moins désintéressé dans ses mobiles. Sans doute
312 oute une analyse un peu poussée révélerait-elle à l’ origine de la recherche la plus abstraite, de la soif de savoir la plu
313 yse un peu poussée révélerait-elle à l’origine de la recherche la plus abstraite, de la soif de savoir la plus purement sp
314 ussée révélerait-elle à l’origine de la recherche la plus abstraite, de la soif de savoir la plus purement spéculative, l’
315 à l’origine de la recherche la plus abstraite, de la soif de savoir la plus purement spéculative, l’un au moins de ces int
316 recherche la plus abstraite, de la soif de savoir la plus purement spéculative, l’un au moins de ces intérêts fondamentaux
317 un au moins de ces intérêts fondamentaux que sont la défense ou l’attaque, et qui apparaissent dans leur belle nudité lors
318 ces intérêts fondamentaux que sont la défense ou l’ attaque, et qui apparaissent dans leur belle nudité lorsqu’un amant de
319 x. (Pour eux, contre eux, ou avec eux.) Constater les préoccupations d’une classe, d’une profession, d’un groupe humain que
320 profession, d’un groupe humain quelconque, c’est l’ opération nécessaire à laquelle doivent se livrer tous ceux qui sont s
321 soucieux, en politique ou en économie, d’adapter l’ offre à la demande. Mais ce peut être aussi un moyen efficace de se li
322 en politique ou en économie, d’adapter l’offre à la demande. Mais ce peut être aussi un moyen efficace de se libérer des
323 et des caricatures obsédantes sur lesquelles joue la politique. Un moyen de trouver des arguments qui portent, qui atteign
324 ment notre rubrique. Il reste alors à reconnaître les dangers d’une semblable méthode, et les limites de sa fécondité. ⁂ Ta
325 connaître les dangers d’une semblable méthode, et les limites de sa fécondité. ⁂ Tant qu’on n’aura pas inventé la machine à
326 de sa fécondité. ⁂ Tant qu’on n’aura pas inventé la machine à lire les pensées, nous serons bien forcés de nous contenter
327 ⁂ Tant qu’on n’aura pas inventé la machine à lire les pensées, nous serons bien forcés de nous contenter de leur expression
328 n forcés de nous contenter de leur expression par le langage. À quoi ils pensent… pour nous, c’est : Ce qu’ils disent. En
329 , c’est sans doute autre chose. Voici tendus tous les pièges du langage. Les mêmes mots n’ont pas le même sens, ne trahisse
330 e chose. Voici tendus tous les pièges du langage. Les mêmes mots n’ont pas le même sens, ne trahissent pas les mêmes pensée
331 s les pièges du langage. Les mêmes mots n’ont pas le même sens, ne trahissent pas les mêmes pensées, si l’on passe d’un gr
332 es mots n’ont pas le même sens, ne trahissent pas les mêmes pensées, si l’on passe d’un groupe à un autre, d’une classe soc
333 ême sens, ne trahissent pas les mêmes pensées, si l’ on passe d’un groupe à un autre, d’une classe sociale, d’une région à
334 ue savons-nous des résonances qu’éveillent dans «  le peuple » les grands mots du langage politique ? Et du sens qu’il leur
335 us des résonances qu’éveillent dans « le peuple » les grands mots du langage politique ? Et du sens qu’il leur donne lorsqu
336 politique ? Et du sens qu’il leur donne lorsqu’il les répète ? À distance et en gros, l’on peut croire que tous les Françai
337 nne lorsqu’il les répète ? À distance et en gros, l’ on peut croire que tous les Français, par exemple, traduisent les même
338 À distance et en gros, l’on peut croire que tous les Français, par exemple, traduisent les mêmes réalités ou les mêmes idé
339 re que tous les Français, par exemple, traduisent les mêmes réalités ou les mêmes idéaux par les mêmes mots ; et qu’un même
340 is, par exemple, traduisent les mêmes réalités ou les mêmes idéaux par les mêmes mots ; et qu’un même son éveille les mêmes
341 uisent les mêmes réalités ou les mêmes idéaux par les mêmes mots ; et qu’un même son éveille les mêmes échos. La politique
342 ux par les mêmes mots ; et qu’un même son éveille les mêmes échos. La politique se fonde sur cette croyance, et la presse a
343 mots ; et qu’un même son éveille les mêmes échos. La politique se fonde sur cette croyance, et la presse arrive parfois à
344 hos. La politique se fonde sur cette croyance, et la presse arrive parfois à lui donner une certaine consistance. Mais ce
345 ce. Mais ce qui peut être vrai statistiquement ne l’ est presque jamais dans le détail. Plus on s’approche d’un groupement
346 vrai statistiquement ne l’est presque jamais dans le détail. Plus on s’approche d’un groupement défini et concret, plus on
347 un groupement défini et concret, plus on constate l’ absence de commune mesure entre son langage et celui des journaux et d
348 e lis dans un livre récentc : L’autre jour, dans l’ autocar, une femme dont j’ai cru comprendre qu’elle tient un petit hôt
349 jamais fait ce rapprochement ? Ce petit fait, si l’ on y réfléchit, résume un drame. Ce drame est celui du langage dans no
350 est celui du langage dans notre société présente. Les mots que nous disons ou que nous écrivons, nous autres intellectuels,
351 rivons, nous autres intellectuels, éveillent dans l’ esprit populaire des harmoniques que nous ne savons plus prévoir. » L
352 s harmoniques que nous ne savons plus prévoir. » L’ auteur ne croyait pas si bien dire : en recevant les épreuves de son l
353 ’auteur ne croyait pas si bien dire : en recevant les épreuves de son livre, il y trouva jointe une petite note écrite à l’
354 ivre, il y trouva jointe une petite note écrite à l’ encre rouge par le correcteur de l’imprimerie : Épicerie et spéciali
355 jointe une petite note écrite à l’encre rouge par le correcteur de l’imprimerie : Épicerie et spécialiste. L’auteur para
356 note écrite à l’encre rouge par le correcteur de l’ imprimerie : Épicerie et spécialiste. L’auteur paraît croire à un ra
357 teur de l’imprimerie : Épicerie et spécialiste. L’ auteur paraît croire à un rapprochement absurde. Il fait erreur. Nous
358 chement absurde. Il fait erreur. Nous sommes dans le Midi, où un sentiment obscur de latinité a survécu. Et épices (d’où é
359 d’où épicerie) et espèces (d’où spécialiste) sont le même mot. Tous deux remontent à species (latin). Les espèces, devenue
360 même mot. Tous deux remontent à species (latin). Les espèces, devenues épices, étaient : gingembre, muscade, cannelle, poi
361 étaient : gingembre, muscade, cannelle, poivre. «  Les quatre espèces » (épices). J’amenderais cette partie, si j’étais l’au
362 » (épices). J’amenderais cette partie, si j’étais l’ auteur… D’où je déduirais que rien n’est simple, en ce domaine, ni ab
363 en n’est simple, en ce domaine, ni absurde malgré les apparences, mais que « comprendre » les paroles d’un homme suppose un
364 de malgré les apparences, mais que « comprendre » les paroles d’un homme suppose une science presque surhumaine. Pour concl
365 bien se résoudre à de grossières approximations. Le danger serait alors d’ignorer qu’il ne s’agit que d’approximations, v
366 oire dans certains cas, de calembours. (Exemple : les sens contradictoires que prend la revendication de liberté selon les
367 rs. (Exemple : les sens contradictoires que prend la revendication de liberté selon les classes ou les nations). ⁂ Autre d
368 oires que prend la revendication de liberté selon les classes ou les nations). ⁂ Autre danger : si l’on questionne directem
369 la revendication de liberté selon les classes ou les nations). ⁂ Autre danger : si l’on questionne directement les gens su
370 les classes ou les nations). ⁂ Autre danger : si l’ on questionne directement les gens sur leurs « pensées » et préoccupat
371 . ⁂ Autre danger : si l’on questionne directement les gens sur leurs « pensées » et préoccupations, ils ne disent rien de b
372 hentique. Ou bien vous obtenez des variations sur la réponse des amoureux (« à rien ») ou bien des phrases toutes faites e
373 es phrases toutes faites empruntées au journal, à la campagne électorale. C’est que l’homme-moyen n’a pas coutume de se fo
374 s au journal, à la campagne électorale. C’est que l’ homme-moyen n’a pas coutume de se formuler clairement ce qu’il vit. Pr
375 pour peu qu’elles sortent du cadre de son métier, le prennent au dépourvu. Il n’a pas formé de phrases dans sa tête sur ce
376 s formé de phrases dans sa tête sur ce sujet dont le journal ne parle jamais. Ou bien, sur tel autre sujet, il vous rend c
377 — presse ou partis — lui ont prêté, c’est-à-dire la monnaie de votre pièce, non la substance de sa vie. Il faut donc évit
378 rêté, c’est-à-dire la monnaie de votre pièce, non la substance de sa vie. Il faut donc éviter tout ce qui ressemblerait à
379 à une enquête : d’abord à cause du malentendu sur les mots, ensuite à cause de ce défaut de moyens d’expression, ou de ces
380 essairement inadéquates. Mais laissez donc parler les gens longtemps, souvent, à bâtons rompus, et sur n’importe quel sujet
381 ce, d’informations hétéroclites, par repérer dans les grandes lignes la vraie nature de leurs soucis, mieux qu’ils ne saura
382 hétéroclites, par repérer dans les grandes lignes la vraie nature de leurs soucis, mieux qu’ils ne sauraient le dire, just
383 nature de leurs soucis, mieux qu’ils ne sauraient le dire, justement. Quelquefois, il suffit d’une chance, d’une bizarreri
384 ici un petit exemple. Dans cette pauvre région de l’ Ouest, je rencontre une vieille paysanne. Elle se plaint : c’est la ja
385 ntre une vieille paysanne. Elle se plaint : c’est la jambe qui ne va plus ! D’où cela vient-il ? — C’est depuis qu’ils m’o
386 le. Je lui demande comment c’est arrivé, et voici le récit, noté sur l’heure : C’était le 26 de juillet, l’anniversaire d
387 comment c’est arrivé, et voici le récit, noté sur l’ heure : C’était le 26 de juillet, l’anniversaire de ma défunte mère.
388 é, et voici le récit, noté sur l’heure : C’était le 26 de juillet, l’anniversaire de ma défunte mère. Le matin je me dis 
389 it, noté sur l’heure : C’était le 26 de juillet, l’ anniversaire de ma défunte mère. Le matin je me dis : qu’est-ce qu’on
390 26 de juillet, l’anniversaire de ma défunte mère. Le matin je me dis : qu’est-ce qu’on va manger, ce jour ? Je n’avais pas
391 va manger, ce jour ? Je n’avais pas grand-chose. Le père et les deux fils disent : on est plus jeunes que toi, on va alle
392 ce jour ? Je n’avais pas grand-chose. Le père et les deux fils disent : on est plus jeunes que toi, on va aller au travail
393 que toi, on va aller au travail, et toi tu iras à la pêche. Ils partent pour le marais, vont tirer le sel, font ce qu’ils
394 vail, et toi tu iras à la pêche. Ils partent pour le marais, vont tirer le sel, font ce qu’ils avaient à faire. Moi je vai
395 la pêche. Ils partent pour le marais, vont tirer le sel, font ce qu’ils avaient à faire. Moi je vais à l’écluse, je ramas
396 el, font ce qu’ils avaient à faire. Moi je vais à l’ écluse, je ramasse des anguilles, quelques crabes, deux ou trois jambe
397 qu’il faut pour manger. Ils rentrent d’avoir tiré le sel et mangent la pêche. J’avais ajouté deux ou trois jambes, donc, m
398 nger. Ils rentrent d’avoir tiré le sel et mangent la pêche. J’avais ajouté deux ou trois jambes, donc, mais moi je n’en ma
399 ge, moi je reste ici. Ils rentrent vers 6 heures, les jeunes d’abord, parce qu’ils ont des bicyclettes, ils vont plus vite.
400 e qu’ils ont des bicyclettes, ils vont plus vite. Le père rentre un peu plus tard. Le plus vieux dit : j’ai bien faim. Le
401 vont plus vite. Le père rentre un peu plus tard. Le plus vieux dit : j’ai bien faim. Le plus jeune, il a toujours faim, a
402 eu plus tard. Le plus vieux dit : j’ai bien faim. Le plus jeune, il a toujours faim, alors c’est pareil. Je dis : oh ! vou
403 — une belle soupe aux pommes de terre ! Oh ! dit le plus vieux, s’il y a une soupe aux pommes de terre, je vais en manger
404 coucher ! Ils mangent et on va se coucher. C’est le lendemain matin que j’ai vu qu’ils avaient pris la chèvre. Je n’imag
405 e lendemain matin que j’ai vu qu’ils avaient pris la chèvre. Je n’imagine pas de question directe qui eût ainsi pu faire
406 out, c’est au pain quotidien. » ⁂ Il est rare que le film d’une conversation, non retouché, offre une image significative,
407 d’absurdité, de décousu, est même ce qui garantit l’ authenticité de la relation d’un entretien. Mais cela ne saurait satis
408 cousu, est même ce qui garantit l’authenticité de la relation d’un entretien. Mais cela ne saurait satisfaire entièrement
409 r se préparer à une action non encore déterminée, l’ esprit a besoin de conclusions, de données simples, c’est-à-dire de ré
410 -dire de résumés simplifiés. Mais alors on courra le risque inverse : on retombera dans les schémas, les généralisations b
411 s on courra le risque inverse : on retombera dans les schémas, les généralisations banales et tendancieuses qui sont les vi
412 e risque inverse : on retombera dans les schémas, les généralisations banales et tendancieuses qui sont les vices de toute
413 généralisations banales et tendancieuses qui sont les vices de toute enquête. La signification des propos recueillis et sty
414 endancieuses qui sont les vices de toute enquête. La signification des propos recueillis et stylisés pouvant toujours être
415 pouvant toujours être attribuée au parti pris de l’ enquêteur. Entre ces deux écueils, le Charybde de l’incohérence et le
416 arti pris de l’enquêteur. Entre ces deux écueils, le Charybde de l’incohérence et le Scylla du trop prévu, il faut savoir
417 enquêteur. Entre ces deux écueils, le Charybde de l’ incohérence et le Scylla du trop prévu, il faut savoir naviguer dans l
418 ces deux écueils, le Charybde de l’incohérence et le Scylla du trop prévu, il faut savoir naviguer dans le « courant » c’e
419 cylla du trop prévu, il faut savoir naviguer dans le « courant » c’est-à-dire se maintenir au niveau des phrases d’échange
420 d’échange quotidien, des propos qu’on entend chez le bistrot ou autour d’une table de famille. À considérer de trop près l
421 p près leur langage, on conclurait volontiers que les gens ne pensent rien de clair ni de raisonnable ; à le considérer tro
422 ns ne pensent rien de clair ni de raisonnable ; à le considérer trop superficiellement, qu’ils ne pensent qu’à l’instar du
423 er trop superficiellement, qu’ils ne pensent qu’à l’ instar du journal. Il faut essayer de se maintenir à mi-distance entre
424 faut essayer de se maintenir à mi-distance entre les bizarreries individuelles et les lieux communs éculés, à mi-distance
425 i-distance entre les bizarreries individuelles et les lieux communs éculés, à mi-distance entre le pittoresque et la statis
426 et les lieux communs éculés, à mi-distance entre le pittoresque et la statistique, à ce niveau où le langage est suffisam
427 uns éculés, à mi-distance entre le pittoresque et la statistique, à ce niveau où le langage est suffisamment habituel pour
428 le pittoresque et la statistique, à ce niveau où le langage est suffisamment habituel pour que les petites déformations q
429 où le langage est suffisamment habituel pour que les petites déformations qu’il subit dans un groupe donné deviennent aisé
430 isément perceptibles : ce sont elles qui révèlent la vraie pensée du groupe. Nous en sommes là aujourd’hui : tout le monde
431 en sommes là aujourd’hui : tout le monde réclame la liberté, des libertés, et s’en réclame à droite et à gauche, à Moscou
432 ussi bien qu’à Berlin. Mais ce n’est plus que par l’ intonation, l’élan, la mimique de l’homme qui émet ce vocable usé, ou
433 Berlin. Mais ce n’est plus que par l’intonation, l’ élan, la mimique de l’homme qui émet ce vocable usé, ou par l’emploi i
434 Mais ce n’est plus que par l’intonation, l’élan, la mimique de l’homme qui émet ce vocable usé, ou par l’emploi imprévu q
435 plus que par l’intonation, l’élan, la mimique de l’ homme qui émet ce vocable usé, ou par l’emploi imprévu qu’il en fait d
436 imique de l’homme qui émet ce vocable usé, ou par l’ emploi imprévu qu’il en fait dans le contexte de son discours, de son
437 e usé, ou par l’emploi imprévu qu’il en fait dans le contexte de son discours, de son milieu, de sa vie quotidienne, que v
438 ous pourrez deviner comment il pense ce mot, s’il le souffre, s’il l’aime de tout son être ou s’il ne fait qu’y rêvasser m
439 er comment il pense ce mot, s’il le souffre, s’il l’ aime de tout son être ou s’il ne fait qu’y rêvasser machinalement.
440 voir à quoi ils pensent ? (Quelques remarques sur la méthode) », Les Nouveaux Cahiers, Paris, 1 novembre 1937, p. 18-19.
441 pensent ? (Quelques remarques sur la méthode) », Les Nouveaux Cahiers, Paris, 1 novembre 1937, p. 18-19. c. Il s’agit du
3 1937, Les Nouveaux Cahiers (1937-1939). Lectures dirigées dans le IIIe Reich (15 décembre 1937)
442 Lectures dirigées dans le IIIe Reich (15 décembre 1937)d J’ai sous les yeux deux documents q
443 ns le IIIe Reich (15 décembre 1937)d J’ai sous les yeux deux documents qui n’ont rien de secret : un article de revue et
444 logue d’éditeur, tous deux publiés en Allemagne à l’ occasion des fêtes. Le catalogue comporte environ 80 titres (publicati
445 deux publiés en Allemagne à l’occasion des fêtes. Le catalogue comporte environ 80 titres (publications récentes et rappel
446 rs, littéraires, historiques, anecdotiques. Voici la liste des titres contenant le mot ou l’idée de race : La Beauté nord
447 anecdotiques. Voici la liste des titres contenant le mot ou l’idée de race : La Beauté nordique ; Art et race ; Le visage
448 es. Voici la liste des titres contenant le mot ou l’ idée de race : La Beauté nordique ; Art et race ; Le visage des chefs
449 des titres contenant le mot ou l’idée de race : La Beauté nordique ; Art et race ; Le visage des chefs allemands (22e mi
450 dée de race : La Beauté nordique ; Art et race ; Le visage des chefs allemands (22e mille) ; Race et humour ; La mère all
451 es chefs allemands (22e mille) ; Race et humour ; La mère allemande (80e mille) ; Le livre des femmes nationales-socialist
452 Race et humour ; La mère allemande (80e mille) ; Le livre des femmes nationales-socialistes ; Race, peuple, soldat ; La p
453 s nationales-socialistes ; Race, peuple, soldat ; La paysannerie, source de la race nordique. L’âme nordique (30e mille) ;
454 Race, peuple, soldat ; La paysannerie, source de la race nordique. L’âme nordique (30e mille) ; Race et âme (43e mille) ;
455 dat ; La paysannerie, source de la race nordique. L’ âme nordique (30e mille) ; Race et âme (43e mille) ; Hygiène raciale ;
456 ivers. — 99e mille en moyenne). Musique et race ; La France et l’idée raciale ; Race, droit, peuple ; Race et état dans l
457 mille en moyenne). Musique et race ; La France et l’ idée raciale ; Race, droit, peuple ; Race et état dans le domaine Nor
458 aciale ; Race, droit, peuple ; Race et état dans le domaine Nord-Est ; Traits fondamentaux de l’histoire raciale allemand
459 dans le domaine Nord-Est ; Traits fondamentaux de l’ histoire raciale allemande ; Race et patrie chez les Indo-Germains ; P
460 ’histoire raciale allemande ; Race et patrie chez les Indo-Germains ; Peuple et race (revue). Comme il ne s’agit là que du
461 de ces chiffres aucune conclusion définitive sur le pourcentage d’intérêt — si j’ose dire — que manifestent les lecteurs
462 ntage d’intérêt — si j’ose dire — que manifestent les lecteurs allemands. Il existe d’autres maisons d’édition qui se spéci
463 autres maisons d’édition qui se spécialisent dans la littérature pure, et chez lesquelles on ne trouvera, sur cent titres,
464 r cent titres, que quatre ou cinq se rapportant à la race. Par contre, la liste que je viens de recopier ne donne qu’une f
465 atre ou cinq se rapportant à la race. Par contre, la liste que je viens de recopier ne donne qu’une faible idée de l’ensem
466 viens de recopier ne donne qu’une faible idée de l’ ensemble des publications allemandes sur ce sujet, depuis 1933. J’ajou
467 llemandes sur ce sujet, depuis 1933. J’ajoute que la maison d’édition en question n’est nullement spécialisée, au sens fra
468 ts de recherche. Du moins sont-ils présentés sous l’ aspect le plus populaire. Et les chiffres de tirage sont significatifs
469 herche. Du moins sont-ils présentés sous l’aspect le plus populaire. Et les chiffres de tirage sont significatifs à cet ég
470 ils présentés sous l’aspect le plus populaire. Et les chiffres de tirage sont significatifs à cet égard, même si l’on tient
471 de tirage sont significatifs à cet égard, même si l’ on tient compte de la diffusion moyenne du livre allemand, très supéri
472 icatifs à cet égard, même si l’on tient compte de la diffusion moyenne du livre allemand, très supérieure à celle du livre
473 it à une de­mande réelle du public ; s’il traduit la pensée réelle du lecteur allemand moyen. Il faut se rappeler que dans
474 Il faut se rappeler que dans un état totalitaire, la question « à quoi pensent ?… » tend à se réduire à la question : « à
475 uestion « à quoi pensent ?… » tend à se réduire à la question : « à quoi leur dit-on de penser ? » C’est-à-dire qu’on a re
476 it-on de penser ? » C’est-à-dire qu’on a remplacé la mode — maîtresse des goûts moyens en France — par la volonté de l’Éta
477 mode — maîtresse des goûts moyens en France — par la volonté de l’État (Hitler, Goebbels et Rosenberg). Il peut donc être
478 se des goûts moyens en France — par la volonté de l’ État (Hitler, Goebbels et Rosenberg). Il peut donc être intéressant de
479 à un organe qui s’efforce de traduire fidèlement les désirs officiels du Parti : la revue Deutsches Volkstum par exemple.
480 aduire fidèlement les désirs officiels du Parti : la revue Deutsches Volkstum par exemple. Ce périodique s’occupe d’art et
481 même de religion. Dans sa livraison de décembre, le rédacteur en chef, Wilhelm Stapel, publie, comme chaque année, un art
482 comme chaque année, un article destiné à diriger le goût de ses lecteurs au moment des achats de Noël. Voici les vingt-de
483 ses lecteurs au moment des achats de Noël. Voici les vingt-deux titres qu’il propose : Une traduction de Wolfram von Esche
484 ction de Wolfram von Eschenbach. Une Histoire de la poésie allemande ; La Musique allemande de l’époque ; Eugène Diesel
485 chenbach. Une Histoire de la poésie allemande ; La Musique allemande de l’époque ; Eugène Diesel (biographie) ; Ballad
486 de la poésie allemande ; La Musique allemande de l’ époque ; Eugène Diesel (biographie) ; Ballades germaniques ; Cultur
487 ; Œuvres complètes de F. Blunck (littérature) ; Les Grands Allemands ; Histoire de notre peuple ; Figures du passé alle
488 e de notre peuple ; Figures du passé allemand ; Le caractère populaire allemand ; Le monde nordique ; Esprit allemand 
489 sé allemand ; Le caractère populaire allemand ; Le monde nordique ; Esprit allemand ; Sparte ; Arndt (héros des guerr
490 du Moyen Âge ; Histoire des Allemands Sudètes ; Le soldat allemand (lettres de guerre) ; et quatre romans (dont un sur l
491 ettres de guerre) ; et quatre romans (dont un sur la guerre, et un sur le Moyen Âge allemand). Les mots « allemand », « ge
492 t quatre romans (dont un sur la guerre, et un sur le Moyen Âge allemand). Les mots « allemand », « germain », « nordique »
493 sur la guerre, et un sur le Moyen Âge allemand). Les mots « allemand », « germain », « nordique », reviennent donc dans 13
494 « nordique », reviennent donc dans 13 titres. Et la moitié des autres, au moins, évoquent de la façon la plus précise l’i
495 s. Et la moitié des autres, au moins, évoquent de la façon la plus précise l’idéologie du Parti : technique, morale sparti
496 moitié des autres, au moins, évoquent de la façon la plus précise l’idéologie du Parti : technique, morale spartiate, cult
497 s, au moins, évoquent de la façon la plus précise l’ idéologie du Parti : technique, morale spartiate, culte des héros mili
498 u Moyen Âge germanique. Je vous laisse à imaginer les rêves du lecteur allemand, heureux bénéficiaire de ces « cadeaux de N
499 d. Rougemont Denis de, « Lectures dirigées dans le IIIe Reich », Les Nouveaux Cahiers, Paris, 15 décembre 1937, p. 16.
500 nis de, « Lectures dirigées dans le IIIe Reich », Les Nouveaux Cahiers, Paris, 15 décembre 1937, p. 16.
4 1938, Les Nouveaux Cahiers (1937-1939). Du danger de s’unir (15 avril 1938)
501 Du danger de s’unir (15 avril 1938)e Le ministère Blum a vécu l’espace d’une parenthèse ouverte par l’Anschlu
502 unir (15 avril 1938)e Le ministère Blum a vécu l’ espace d’une parenthèse ouverte par l’Anschluss et fermée par le plébi
503 Blum a vécu l’espace d’une parenthèse ouverte par l’ Anschluss et fermée par le plébiscite grand-allemand. Face à l’affirma
504 parenthèse ouverte par l’Anschluss et fermée par le plébiscite grand-allemand. Face à l’affirmation de l’unité germanique
505 t fermée par le plébiscite grand-allemand. Face à l’ affirmation de l’unité germanique, faite et scellée en deux coups de p
506 lébiscite grand-allemand. Face à l’affirmation de l’ unité germanique, faite et scellée en deux coups de poing, la France,
507 manique, faite et scellée en deux coups de poing, la France, un mois durant, s’est énervée à discourir sur sa désunion. J’
508 is sur un ton qui, de toute évidence, en excluait la possibilité. Car quand la droite propose l’union à condition que la g
509 e évidence, en excluait la possibilité. Car quand la droite propose l’union à condition que la gauche renonce à ses réform
510 luait la possibilité. Car quand la droite propose l’ union à condition que la gauche renonce à ses réformes, et quand la ga
511 r quand la droite propose l’union à condition que la gauche renonce à ses réformes, et quand la gauche propose l’union à c
512 on que la gauche renonce à ses réformes, et quand la gauche propose l’union à condition que la droite adopte son programme
513 enonce à ses réformes, et quand la gauche propose l’ union à condition que la droite adopte son programme, c’est que, de pa
514 t quand la gauche propose l’union à condition que la droite adopte son programme, c’est que, de part et d’autre, on est tr
515 e double hypocrisie est sans doute un hommage que l’ esprit partisan rend à l’union sacrée. Mais ce qui m’apparaît le plus
516 ans doute un hommage que l’esprit partisan rend à l’ union sacrée. Mais ce qui m’apparaît le plus dangereux dans cette affa
517 san rend à l’union sacrée. Mais ce qui m’apparaît le plus dangereux dans cette affaire, ce n’est pas l’hypocrisie ni l’esp
518 e plus dangereux dans cette affaire, ce n’est pas l’ hypocrisie ni l’esprit partisan, c’est l’hommage et l’union sacrée. L’
519 dans cette affaire, ce n’est pas l’hypocrisie ni l’ esprit partisan, c’est l’hommage et l’union sacrée. L’hypocrisie est t
520 ’est pas l’hypocrisie ni l’esprit partisan, c’est l’ hommage et l’union sacrée. L’hypocrisie est trop grossière pour trompe
521 pocrisie ni l’esprit partisan, c’est l’hommage et l’ union sacrée. L’hypocrisie est trop grossière pour tromper, et l’espri
522 prit partisan, c’est l’hommage et l’union sacrée. L’ hypocrisie est trop grossière pour tromper, et l’esprit partisan est c
523 L’hypocrisie est trop grossière pour tromper, et l’ esprit partisan est comme déconcerté par ses propres excès. Mais cette
524 ion sacrée qu’on invoque, craignons qu’à force de l’ invoquer l’on finisse par la vouloir et par la faire. ⁂ Il est vrai qu
525 qu’on invoque, craignons qu’à force de l’invoquer l’ on finisse par la vouloir et par la faire. ⁂ Il est vrai qu’on n’en es
526 aignons qu’à force de l’invoquer l’on finisse par la vouloir et par la faire. ⁂ Il est vrai qu’on n’en est encore qu’à s’e
527 de l’invoquer l’on finisse par la vouloir et par la faire. ⁂ Il est vrai qu’on n’en est encore qu’à s’en servir comme d’u
528 à part, que fait-on depuis un mois pour préparer les voies de la réconciliation ? Les socialistes du Populaire soulèvent l
529 fait-on depuis un mois pour préparer les voies de la réconciliation ? Les socialistes du Populaire soulèvent leurs troupes
530 is pour préparer les voies de la réconciliation ? Les socialistes du Populaire soulèvent leurs troupes contre le Sénat, pro
531 istes du Populaire soulèvent leurs troupes contre le Sénat, provoquant une manifestation qu’ils interdisent en tant que mi
532 station qu’ils interdisent en tant que ministres. Le Parti communiste fait crier : « À bas Blum ! » au Vélodrome d’Hiver,
533 crier : « À bas Blum ! » au Vélodrome d’Hiver, et le lendemain, fait publier par Ce Soir : « Les élus communistes exigent
534 er, et le lendemain, fait publier par Ce Soir : «  Les élus communistes exigent que Blum reste au pouvoir ! » Le Parti radic
535 communistes exigent que Blum reste au pouvoir ! » Le Parti radical, à la Chambre, soutient un ministère qu’il renverse au
536 que Blum reste au pouvoir ! » Le Parti radical, à la Chambre, soutient un ministère qu’il renverse au Sénat. Et que font c
537 u Sénat. Et que font ces trois partis réunis dans le Front populaire ? Leurs gouvernements successifs qualifient l’un aprè
538 cessifs qualifient l’un après l’autre d’illégales les occupations d’usines, et refusent l’un après l’autre d’intervenir pou
539 nt l’un après l’autre d’intervenir pour appliquer la loi dont ils sont les auteurs. L’habitude de la non-intervention se p
540 d’intervenir pour appliquer la loi dont ils sont les auteurs. L’habitude de la non-intervention se prend décidément très v
541 pour appliquer la loi dont ils sont les auteurs. L’ habitude de la non-intervention se prend décidément très vite. Quant à
542 r la loi dont ils sont les auteurs. L’habitude de la non-intervention se prend décidément très vite. Quant à la droite, on
543 tervention se prend décidément très vite. Quant à la droite, on renonce à résumer son jeu ; sans doute n’en sait-elle plus
544 on jeu ; sans doute n’en sait-elle plus elle-même les règles. Patriote, elle exporte ses capitaux. Antisémite, elle oppose
545 n tout le monde est devenu fou, c’est-à-dire fait le contraire de ce qu’il veut faire ; ou bien personne, en réalité, ne v
546 eut faire ; ou bien personne, en réalité, ne veut l’ union qu’on dit vouloir, et alors tout s’explique aisément. ⁂ Or, ce q
547 alors tout s’explique aisément. ⁂ Or, ce qui est le plus à redouter, ce n’est pas tant qu’on triche sous prétexte d’union
548 utre part dupé par ce grand mot dont on lui rebat les oreilles, le peuple de France, un beau jour, ne se décide à jouer sér
549 par ce grand mot dont on lui rebat les oreilles, le peuple de France, un beau jour, ne se décide à jouer sérieusement, — 
550 our, ne se décide à jouer sérieusement, — à jouer le jeu de l’union sacrée. Ce qui est grave, ce qu’il faut redouter, c’es
551 décide à jouer sérieusement, — à jouer le jeu de l’ union sacrée. Ce qui est grave, ce qu’il faut redouter, c’est que le d
552 qui est grave, ce qu’il faut redouter, c’est que le désir de riposter au coup d’Hitler n’amène les droites et les gauches
553 que le désir de riposter au coup d’Hitler n’amène les droites et les gauches en même temps à ne plus concevoir leur union q
554 riposter au coup d’Hitler n’amène les droites et les gauches en même temps à ne plus concevoir leur union que sous la form
555 ême temps à ne plus concevoir leur union que sous la forme d’un Anschluss, d’une mutuelle annexion. Il ne manque pas de Se
556 annexion. Il ne manque pas de Seiss-Inquart, dans les deux camps, pour appeler au secours les troupes adverses et les prier
557 art, dans les deux camps, pour appeler au secours les troupes adverses et les prier de venir rétablir l’ordre. Il ne manque
558 , pour appeler au secours les troupes adverses et les prier de venir rétablir l’ordre. Il ne manque pas de fascistes incons
559 s troupes adverses et les prier de venir rétablir l’ ordre. Il ne manque pas de fascistes inconscients pour confondre ordre
560 e gauche pour proclamer qu’en présence du danger, l’ exercice de la pensée libre, ou simplement de l’intelligence, équivaut
561 proclamer qu’en présence du danger, l’exercice de la pensée libre, ou simplement de l’intelligence, équivaut à une trahiso
562 , l’exercice de la pensée libre, ou simplement de l’ intelligence, équivaut à une trahison… Enfin, il ne manque pas de poli
563 que leur programme d’union est celui qui supprime les problèmes au lieu d’essayer de les résoudre, et fait converger des re
564 i qui supprime les problèmes au lieu d’essayer de les résoudre, et fait converger des refus au lieu de composer des efforts
565 oser des efforts. Programme de M. Daladier (selon le Journal du 10 avril) : exclusion des communistes ; non-intervention e
566 e du réarmement à outrance, et même au-delà. Mais la presse n’en parlera pas, cela va de soi, c’est le seul but commun à t
567 la presse n’en parlera pas, cela va de soi, c’est le seul but commun à tous les partis existants. On peut se payer l’éléga
568 , cela va de soi, c’est le seul but commun à tous les partis existants. On peut se payer l’élégance de le taire. Toutes les
569 mun à tous les partis existants. On peut se payer l’ élégance de le taire. Toutes les unions sacrées se font ainsi. Pour év
570 partis existants. On peut se payer l’élégance de le taire. Toutes les unions sacrées se font ainsi. Pour éviter de mourir
571 . On peut se payer l’élégance de le taire. Toutes les unions sacrées se font ainsi. Pour éviter de mourir, cessons de vivre
572 es nos raisons d’être, et armons-nous pour sauver le reste. Hitler menace la paix de l’Europe ? Qu’à cela ne tienne, décré
573 t armons-nous pour sauver le reste. Hitler menace la paix de l’Europe ? Qu’à cela ne tienne, décrétons l’état de guerre et
574 us pour sauver le reste. Hitler menace la paix de l’ Europe ? Qu’à cela ne tienne, décrétons l’état de guerre et c’est Hitl
575 paix de l’Europe ? Qu’à cela ne tienne, décrétons l’ état de guerre et c’est Hitler qui sera bien attrapé ! Trois dictature
576 nos libertés démocratiques ? Eh bien ! cessons de les exercer, ces libertés, et comme cela les dictateurs n’auront plus rie
577 ssons de les exercer, ces libertés, et comme cela les dictateurs n’auront plus rien à supprimer chez nous ! Les primitifs s
578 ateurs n’auront plus rien à supprimer chez nous ! Les primitifs s’accordent à tenir pour sacrée l’absence totale de raison
579 s ! Les primitifs s’accordent à tenir pour sacrée l’ absence totale de raison chez un être doté d’une apparence humaine. Es
580 r, sous prétexte d’union « sacrée » ? ⁂ Concevoir l’ union comme l’annexion d’une moitié de la France par l’autre, c’est la
581 te d’union « sacrée » ? ⁂ Concevoir l’union comme l’ annexion d’une moitié de la France par l’autre, c’est la rendre irréal
582 oncevoir l’union comme l’annexion d’une moitié de la France par l’autre, c’est la rendre irréalisable, dans l’état actuel
583 xion d’une moitié de la France par l’autre, c’est la rendre irréalisable, dans l’état actuel des choses. J’en conclus que
584 t actuel des choses. J’en conclus que personne ne la veut sérieusement. Mais comme tout le monde en parle, et non sans émo
585 ce rêve qui peut tourner au cauchemar. Car seule la force brutale peut opérer une union de ce type, qui n’est qu’une unif
586 on de ce type, qui n’est qu’une unification. Dans la mesure où on la voudra, on voudra donc la force brutale. On voudra do
587 ui n’est qu’une unification. Dans la mesure où on la voudra, on voudra donc la force brutale. On voudra donc la fin des li
588 n. Dans la mesure où on la voudra, on voudra donc la force brutale. On voudra donc la fin des libertés françaises. Et pour
589 , on voudra donc la force brutale. On voudra donc la fin des libertés françaises. Et pour sauver la France, on perdra les
590 nc la fin des libertés françaises. Et pour sauver la France, on perdra les meilleures raisons de la défendre. Disons plus 
591 s françaises. Et pour sauver la France, on perdra les meilleures raisons de la défendre. Disons plus : on perdra ses meille
592 er la France, on perdra les meilleures raisons de la défendre. Disons plus : on perdra ses meilleures forces. L’union qui
593 e. Disons plus : on perdra ses meilleures forces. L’ union qui se fait par la force n’est pas l’union qui fait la force. Ou
594 ra ses meilleures forces. L’union qui se fait par la force n’est pas l’union qui fait la force. Ou alors, cessons de criti
595 orces. L’union qui se fait par la force n’est pas l’ union qui fait la force. Ou alors, cessons de critiquer Hitler, Stalin
596 i se fait par la force n’est pas l’union qui fait la force. Ou alors, cessons de critiquer Hitler, Staline, Mussolini. La
597 cessons de critiquer Hitler, Staline, Mussolini. La force de la France n’est pas dans son union. Elle est dans sa capacit
598 critiquer Hitler, Staline, Mussolini. La force de la France n’est pas dans son union. Elle est dans sa capacité unique au
599 est dans sa capacité unique au monde de supporter les désunions, ou pour mieux dire : le libre jeu des plus franches opposi
600 de supporter les désunions, ou pour mieux dire : le libre jeu des plus franches oppositions. La force de la France est da
601 ire : le libre jeu des plus franches oppositions. La force de la France est dans la création, et non pas dans la disciplin
602 re jeu des plus franches oppositions. La force de la France est dans la création, et non pas dans la discipline ; dans l’i
603 nches oppositions. La force de la France est dans la création, et non pas dans la discipline ; dans l’invention, non dans
604 e la France est dans la création, et non pas dans la discipline ; dans l’invention, non dans la marche en rangs. Un peuple
605 la création, et non pas dans la discipline ; dans l’ invention, non dans la marche en rangs. Un peuple qui accepte une dict
606 s dans la discipline ; dans l’invention, non dans la marche en rangs. Un peuple qui accepte une dictature se décerne un ce
607 royons pas surtout qu’il en soit aussi fier qu’il le paraît, et aussi satisfait qu’il le proclame. Ne croyons pas qu’il co
608 si fier qu’il le paraît, et aussi satisfait qu’il le proclame. Ne croyons pas qu’il considère sans envie notre périlleuse
609 e notre périlleuse liberté, dont sa presse raille les abus, mais dont il espère en secret que sortira sa propre délivrance.
610 n secret que sortira sa propre délivrance. Ce que le monde attend de la France, en vérité, ce n’est pas un Führer de plus,
611 a sa propre délivrance. Ce que le monde attend de la France, en vérité, ce n’est pas un Führer de plus, mais au contraire,
612 t pas un Führer de plus, mais au contraire, c’est la solution des problèmes que d’autres, n’ayant pu résoudre, ont essayé
613 yé de supprimer en se donnant à un Führer. Ce que le monde attend de la France, c’est une audace libératrice. L’audace d’a
614 se donnant à un Führer. Ce que le monde attend de la France, c’est une audace libératrice. L’audace d’assumer tous les ris
615 ttend de la France, c’est une audace libératrice. L’ audace d’assumer tous les risques de la liberté politique, l’audace de
616 t une audace libératrice. L’audace d’assumer tous les risques de la liberté politique, l’audace de pousser les conflits jus
617 bératrice. L’audace d’assumer tous les risques de la liberté politique, l’audace de pousser les conflits jusqu’à leur plei
618 assumer tous les risques de la liberté politique, l’ audace de pousser les conflits jusqu’à leur pleine maturation, jusqu’à
619 ques de la liberté politique, l’audace de pousser les conflits jusqu’à leur pleine maturation, jusqu’à leur solution réelle
620 pleine maturation, jusqu’à leur solution réelle. L’ audace de faire passer cette mission créatrice avant l’intérêt « natio
621 ace de faire passer cette mission créatrice avant l’ intérêt « national » au sens matérialiste et militaire que prend ce te
622 matérialiste et militaire que prend ce terme dans l’ Europe fascisée. On ne défend bien que ce qui vaut d’être défendu. Et
623 ne défend bien que ce qui vaut d’être défendu. Et la plus forte armée du monde n’est rien, si le pays qu’elle entend proté
624 u. Et la plus forte armée du monde n’est rien, si le pays qu’elle entend protéger abdique ses raisons de vivre avant même
625 ger abdique ses raisons de vivre avant même qu’on l’ attaque, sous prétexte de mieux se défendre. Avec vingt ans de retard,
626 Avec vingt ans de retard, Hitler vient de gagner la guerre à Vienne. Avec vingt ans d’avance sur Hitler, la France va-t-e
627 rre à Vienne. Avec vingt ans d’avance sur Hitler, la France va-t-elle enfin gagner sa paix ? ⁂ Ce n’est point sans raisons
628 sons que je termine sur une question. S’opposer à l’ union sacrée, ce n’est pas faire l’éloge du désordre présent, du désor
629 n. S’opposer à l’union sacrée, ce n’est pas faire l’ éloge du désordre présent, du désordre honteux de lui-même, et que ses
630 rêver d’un fascisme. Mais il s’agit de savoir si la France, réellement, saura retrouver l’usage concret et positif des li
631 savoir si la France, réellement, saura retrouver l’ usage concret et positif des libertés qu’elle s’est conquises. Il s’ag
632 s qu’elle s’est conquises. Il s’agit de savoir si le désordre va devenir la seule expression de nos libertés dégénérées, o
633 es. Il s’agit de savoir si le désordre va devenir la seule expression de nos libertés dégénérées, ou si nous saurons retro
634 s, une commune mesure spirituelle qui ne soit pas les armements, qui ne soit pas la défense nationale mais d’abord l’idéal
635 le qui ne soit pas les armements, qui ne soit pas la défense nationale mais d’abord l’idéal national. Il n’en faudrait pas
636 qui ne soit pas la défense nationale mais d’abord l’ idéal national. Il n’en faudrait pas davantage — ni moins — pour trans
637 ue chose d’incomparablement plus beau et fort que l’ ordre apparent des fascismes. Enfin, toute la question est là : — la l
638 que l’ordre apparent des fascismes. Enfin, toute la question est là : — la liberté fait-elle plus peur qu’envie ? Ne sait
639 es fascismes. Enfin, toute la question est là : — la liberté fait-elle plus peur qu’envie ? Ne sait-on plus en voir que le
640 plus peur qu’envie ? Ne sait-on plus en voir que les revers ? Ou prendrons-nous enfin conscience de l’écrasante supériorit
641 es revers ? Ou prendrons-nous enfin conscience de l’ écrasante supériorité qu’elle peut signifier dans l’avenir, si nous ce
642 écrasante supériorité qu’elle peut signifier dans l’ avenir, si nous cessons de nous énerver, si nous osons vivre la paix ?
643 nous cessons de nous énerver, si nous osons vivre la paix ? e. Rougemont Denis de, « Du danger de s’unir », Les Nouveau
644 e. Rougemont Denis de, « Du danger de s’unir », Les Nouveaux Cahiers, Paris, 15 avril 1938, p. 21-22.
5 1938, Les Nouveaux Cahiers (1937-1939). Vues sur le national-socialisme (1er juin 1938)
645 Vues sur le national-socialisme (1er juin 1938)f Les notes qui suivent sont ex
646 es sur le national-socialisme (1er juin 1938)f Les notes qui suivent sont extraites d’un « journal » tenu en 1935 et 193
647 traites d’un « journal » tenu en 1935 et 1936 par l’ auteur, alors chargé de cours dans une Université allemande de l’Ouest
648 chargé de cours dans une Université allemande de l’ Ouest. On a choisi parmi ces observations celles qui paraissent garder
649 ualité après deux ans. I. — À quoi pensent… Les bourgeois. — J’arrivais de Paris persuadé que l’hitlérisme est un mou
650 Les bourgeois. — J’arrivais de Paris persuadé que l’ hitlérisme est un mouvement « de droite », une dernière tentative pour
651 « de droite », une dernière tentative pour sauver le capitalisme et les privilèges bourgeois, comme disent les socialistes
652 dernière tentative pour sauver le capitalisme et les privilèges bourgeois, comme disent les socialistes, ou encore : un re
653 talisme et les privilèges bourgeois, comme disent les socialistes, ou encore : un rempart contre le bolchévisme, comme dise
654 nt les socialistes, ou encore : un rempart contre le bolchévisme, comme disent les réactionnaires. Je vois beaucoup de bou
655  : un rempart contre le bolchévisme, comme disent les réactionnaires. Je vois beaucoup de bourgeois : professeurs, médecins
656 me faut bien reconnaître qu’ils sont tous contre le régime. C’est un bolchévisme déguisé, répètent-ils. Drôle de « rempar
657 de « rempart ». Ils se plaignent de ce que toutes les réformes soient en faveur des ouvriers et des paysans ; et que les im
658 nt en faveur des ouvriers et des paysans ; et que les impôts prennent les proportions d’une confiscation de capital ; et qu
659 riers et des paysans ; et que les impôts prennent les proportions d’une confiscation de capital ; et que la vie de famille
660 roportions d’une confiscation de capital ; et que la vie de famille soit détruite, l’autorité des parents sapée, la religi
661 capital ; et que la vie de famille soit détruite, l’ autorité des parents sapée, la religion dénaturée, éliminée de l’éduca
662 ille soit détruite, l’autorité des parents sapée, la religion dénaturée, éliminée de l’éducation, persécutée par mille moy
663 parents sapée, la religion dénaturée, éliminée de l’ éducation, persécutée par mille moyens sournois, méthodiquement. Mais
664 mille moyens sournois, méthodiquement. Mais si je les interroge sur leurs projets de résistance, ils se dérobent. Je parvie
665 se dérobent. Je parviens à leur faire avouer que le bolchévisme brun est tout de même, à leurs yeux, moins affreux que le
666 est tout de même, à leurs yeux, moins affreux que le rouge. Il n’y a pas eu de massacres. Tout se passe d’une manière prog
667 s et leurs fonctions, sous des maîtres nouveaux. ( Le gouverneur de la province est un ancien employé de postes, ventripote
668 ons, sous des maîtres nouveaux. (Le gouverneur de la province est un ancien employé de postes, ventripotent et qu’on juge
669 ntripotent et qu’on juge très vulgaire.) Partout, la même crainte paralyse en germe tout essai de résister : si ce n’étaie
670 erme tout essai de résister : si ce n’étaient pas les bruns qui avaient le pouvoir, ce seraient les rouges. Ils n’imaginent
671 ister : si ce n’étaient pas les bruns qui avaient le pouvoir, ce seraient les rouges. Ils n’imaginent pas d’autre alternat
672 pas les bruns qui avaient le pouvoir, ce seraient les rouges. Ils n’imaginent pas d’autre alternative. De fait, ces « possé
673 ute pas, en Europe, de classe plus indifférente à la vie politique, plus passive vis-à-vis de l’État, plus lâche devant le
674 nte à la vie politique, plus passive vis-à-vis de l’ État, plus lâche devant le fait accompli — et toujours accompli par d’
675 us passive vis-à-vis de l’État, plus lâche devant le fait accompli — et toujours accompli par d’autres, forcément — plus d
676 e, pour tout dire. Par un curieux paradoxe, c’est le régime national-socialiste qui est en train de leur faire découvrir l
677 cialiste qui est en train de leur faire découvrir le fait social et les problèmes qu’il pose. D’une part, la force et la r
678 n train de leur faire découvrir le fait social et les problèmes qu’il pose. D’une part, la force et la rapidité de l’ascens
679 t social et les problèmes qu’il pose. D’une part, la force et la rapidité de l’ascension hitlérienne ont été l’expression
680 les problèmes qu’il pose. D’une part, la force et la rapidité de l’ascension hitlérienne ont été l’expression directe d’un
681 u’il pose. D’une part, la force et la rapidité de l’ ascension hitlérienne ont été l’expression directe d’une carence du se
682 et la rapidité de l’ascension hitlérienne ont été l’ expression directe d’une carence du sens civique, loi générale qui se
683 vérifie dans tout pays totalitaire. D’autre part, le régime nouveau a pris à tâche d’éduquer tout ce monde : d’où le didac
684 eau a pris à tâche d’éduquer tout ce monde : d’où le didactisme pesant des innombrables discours politiques et des leaders
685 nnombrables discours politiques et des leaders de la presse mise au pas. Certes, les Allemands ont toujours eu le sens du
686 et des leaders de la presse mise au pas. Certes, les Allemands ont toujours eu le sens du groupe, et l’on est trop souvent
687 ise au pas. Certes, les Allemands ont toujours eu le sens du groupe, et l’on est trop souvent tenté d’expliquer le nationa
688 s Allemands ont toujours eu le sens du groupe, et l’ on est trop souvent tenté d’expliquer le national-socialisme par ce be
689 roupe, et l’on est trop souvent tenté d’expliquer le national-socialisme par ce besoin de marcher ensemble, de chanter ens
690 ble. En réalité, ce phénomène est aussi vieux que les Allemagnes ; il ne peut donc rien expliquer de ce qui s’y passe de to
691 uveau. Un régime totalitaire n’exprime point tant l’ âme collective d’un peuple que le besoin de porter remède à ses carenc
692 prime point tant l’âme collective d’un peuple que le besoin de porter remède à ses carences profondes, et de les compenser
693 de porter remède à ses carences profondes, et de les compenser. Hitler est en train d’opérer un dressage du peuple alleman
694 mme Staline, un dressage du russe), dressage dont les buts n’ont rien de traditionnel, bien au contraire. Tous les efforts
695 ont rien de traditionnel, bien au contraire. Tous les efforts de la propagande pour restaurer je ne sais quel hypothétique
696 ditionnel, bien au contraire. Tous les efforts de la propagande pour restaurer je ne sais quel hypothétique et préhistoriq
697 destinés — plus ou moins consciemment — à masquer le caractère antiallemand des méthodes qu’on applique en fait. Méthodes
698 on applique en fait. Méthodes prussiennes, disent les Allemands du Sud ; méthodes slaves, grognent les Prussiens. Méthodes
699 les Allemands du Sud ; méthodes slaves, grognent les Prussiens. Méthodes jacobines, à mon sens3. Car ce qu’il s’agit d’inc
700 nculquer à cette inerte bourgeoisie, ce n’est pas le sens du groupe qu’elle avait, mais le sens de l’État, qu’elle n’a pas
701 e n’est pas le sens du groupe qu’elle avait, mais le sens de l’État, qu’elle n’a pas. Le sens de l’unité allemande, de la
702 le sens du groupe qu’elle avait, mais le sens de l’ État, qu’elle n’a pas. Le sens de l’unité allemande, de la prépondéran
703 e avait, mais le sens de l’État, qu’elle n’a pas. Le sens de l’unité allemande, de la prépondérance de l’intérêt allemand
704 is le sens de l’État, qu’elle n’a pas. Le sens de l’ unité allemande, de la prépondérance de l’intérêt allemand sur les int
705 qu’elle n’a pas. Le sens de l’unité allemande, de la prépondérance de l’intérêt allemand sur les intérêts de classe, et su
706 sens de l’unité allemande, de la prépondérance de l’ intérêt allemand sur les intérêts de classe, et sur tout intérêt privé
707 de, de la prépondérance de l’intérêt allemand sur les intérêts de classe, et sur tout intérêt privé. Voilà la grande révolu
708 érêts de classe, et sur tout intérêt privé. Voilà la grande révolution, dans un pays ou la vie intérieure d’une part, et l
709 rivé. Voilà la grande révolution, dans un pays ou la vie intérieure d’une part, et la séparation des classes de l’autre, é
710 dans un pays ou la vie intérieure d’une part, et la séparation des classes de l’autre, étaient les vrais fondements des m
711 et la séparation des classes de l’autre, étaient les vrais fondements des mœurs. Seulement, il y a cette différence profon
712 Seulement, il y a cette différence profonde entre le jacobinisme et le national-socialisme : c’est que le premier parlait
713 cette différence profonde entre le jacobinisme et le national-socialisme : c’est que le premier parlait des droits du cito
714 que de ses devoirs. Serais-je déjà contaminé par l’ optimisme de commande en ce pays ? Je me dis parfois que si l’on parvi
715 de commande en ce pays ? Je me dis parfois que si l’ on parvient à éviter de nouveaux conflits armés, il se peut que l’hitl
716 éviter de nouveaux conflits armés, il se peut que l’ hitlérisme apparaisse aux yeux des historiens futurs, comme une école
717 peuple allemand ce qui lui manquait pour désirer la vraie démocratie. Et pour réaliser ses premières conditions, qui sont
718 pour réaliser ses premières conditions, qui sont le sens vulgarisé de l’État et le sens du service social. Staline procla
719 emières conditions, qui sont le sens vulgarisé de l’ État et le sens du service social. Staline proclame une religion du tr
720 nditions, qui sont le sens vulgarisé de l’État et le sens du service social. Staline proclame une religion du travail, et
721 ial. Staline proclame une religion du travail, et les Russes sont les plus paresseux des hommes ; Mussolini une religion de
722 clame une religion du travail, et les Russes sont les plus paresseux des hommes ; Mussolini une religion de l’Empire, et c’
723 paresseux des hommes ; Mussolini une religion de l’ Empire, et c’est à peine si les Italiens avaient jamais été une nation
724 ini une religion de l’Empire, et c’est à peine si les Italiens avaient jamais été une nation ; Hitler une religion de l’Éta
725 nt jamais été une nation ; Hitler une religion de l’ État, et les Allemands l’apprennent péniblement, avec un pédantisme pa
726 té une nation ; Hitler une religion de l’État, et les Allemands l’apprennent péniblement, avec un pédantisme pathétique… N’
727 ; Hitler une religion de l’État, et les Allemands l’ apprennent péniblement, avec un pédantisme pathétique… N’allons pas fa
728 étique… N’allons pas faire, nous, une religion de la Liberté ! Ce serait le signe que nous en perdons le goût et l’usage n
729 ire, nous, une religion de la Liberté ! Ce serait le signe que nous en perdons le goût et l’usage naturel, spontané. Un
730 Liberté ! Ce serait le signe que nous en perdons le goût et l’usage naturel, spontané. Un petit industriel. — Avant 193
731 Ce serait le signe que nous en perdons le goût et l’ usage naturel, spontané. Un petit industriel. — Avant 1933, sa vie é
732 part des extrémistes, discussions épuisantes avec le syndicat, trésorerie en délire. C’était la « liberté ». Maintenant, p
733 s avec le syndicat, trésorerie en délire. C’était la « liberté ». Maintenant, plus rien n’est libre, mais tout marche. Plu
734 est libre, mais tout marche. Plus de discussions. Le « Führer d’entreprise » n’a pas le droit de renvoyer ses ouvriers, ma
735 e discussions. Le « Führer d’entreprise » n’a pas le droit de renvoyer ses ouvriers, mais ceux-ci n’ont pas le droit de se
736 de renvoyer ses ouvriers, mais ceux-ci n’ont pas le droit de se mettre en grève. La paix sociale a été obtenue par la fix
737 ceux-ci n’ont pas le droit de se mettre en grève. La paix sociale a été obtenue par la fixation des devoirs réciproques à
738 ettre en grève. La paix sociale a été obtenue par la fixation des devoirs réciproques à un niveau de justice fort médiocre
739 mme, vous êtes content ? Il sourit, hausse un peu les épaules, fait oui de la tête. Demain, il doit partir pour un Schulung
740 Il sourit, hausse un peu les épaules, fait oui de la tête. Demain, il doit partir pour un Schulungslager (camp d’éducation
741 Schulungslager (camp d’éducation sociale). Ça ne l’ enchante pas. Je le revois trois semaines plus tard. — Ce camp ? — Eh
742 p d’éducation sociale). Ça ne l’enchante pas. Je le revois trois semaines plus tard. — Ce camp ? — Eh bien voilà : nous é
743 on usine. On apprend à se connaître en partageant la même chambre. Nous suivions des cours de politique et d’économie. Nou
744 interrogeait. La plupart des soirées libres, nous les passions en commun, à l’auberge du village… Je le sens tout rajeuni :
745 es soirées libres, nous les passions en commun, à l’ auberge du village… Je le sens tout rajeuni : il est retourné à l’écol
746 es passions en commun, à l’auberge du village… Je le sens tout rajeuni : il est retourné à l’école ; et tout délivré : ces
747 lage… Je le sens tout rajeuni : il est retourné à l’ école ; et tout délivré : ces ouvriers sont au fond des braves types,
748 es braves types, on peut leur parler sans relever le menton… Un « opposant ». — Je me promène avec un de mes étudiants.
749 Maintenant il est disciple de Nicolaï Hartmann : la volonté, le réel, l’orgueil de l’homme… Le régime le dégoûte et le re
750 il est disciple de Nicolaï Hartmann : la volonté, le réel, l’orgueil de l’homme… Le régime le dégoûte et le repousse. C’es
751 sciple de Nicolaï Hartmann : la volonté, le réel, l’ orgueil de l’homme… Le régime le dégoûte et le repousse. C’est la dict
752 olaï Hartmann : la volonté, le réel, l’orgueil de l’ homme… Le régime le dégoûte et le repousse. C’est la dictature des but
753 mann : la volonté, le réel, l’orgueil de l’homme… Le régime le dégoûte et le repousse. C’est la dictature des butors et de
754 volonté, le réel, l’orgueil de l’homme… Le régime le dégoûte et le repousse. C’est la dictature des butors et des imbécile
755 el, l’orgueil de l’homme… Le régime le dégoûte et le repousse. C’est la dictature des butors et des imbéciles. Je lui pose
756 homme… Le régime le dégoûte et le repousse. C’est la dictature des butors et des imbéciles. Je lui pose ma question habitu
757 vieux, vous ? Quel âge avez-vous ? — 27 ans. Mais le Führer l’a bien dit, l’autre jour : les hommes qui avaient plus de vi
758 s ? Quel âge avez-vous ? — 27 ans. Mais le Führer l’ a bien dit, l’autre jour : les hommes qui avaient plus de vingt ans en
759 ans. Mais le Führer l’a bien dit, l’autre jour : les hommes qui avaient plus de vingt ans en 1933 ne comprendront jamais l
760 plus de vingt ans en 1933 ne comprendront jamais les temps nouveaux. Il prépare pour le séminaire un travail sur Barrès :
761 ndront jamais les temps nouveaux. Il prépare pour le séminaire un travail sur Barrès : « la terre et les morts », c’est à
762 épare pour le séminaire un travail sur Barrès : «  la terre et les morts », c’est à peu près le Blut und Boden (sang et sol
763 e séminaire un travail sur Barrès : « la terre et les morts », c’est à peu près le Blut und Boden (sang et sol) des nazis.
764 rès : « la terre et les morts », c’est à peu près le Blut und Boden (sang et sol) des nazis. Comme il aime Barrès, cela le
765 ang et sol) des nazis. Comme il aime Barrès, cela le rassure. C’est une voie d’approche, un compromis avec le régime détes
766 ure. C’est une voie d’approche, un compromis avec le régime détesté. (Note de 1938 : cet étudiant vient d’entrer dans le P
767 (Note de 1938 : cet étudiant vient d’entrer dans le Parti.) Parents et enfants. — Déjeuner chez un avocat. Madame se pl
768 de vie de famille possible, avec ce système. Tous les soirs, deux de mes enfants sur trois sont pris par le Parti. Ma fille
769 oirs, deux de mes enfants sur trois sont pris par le Parti. Ma fille aînée a 18 ans. Elle est Führerin d’un groupe de jeun
770 gymnastique et culture politique. De plus, elle a la charge de trouver des places pour ses subordonnées, de s’occuper des
771 occuper des secours à donner aux plus pauvres, de les visiter quand elles sont malades (c’est un contrôle), et même, c’est
772 me comprenez. Vous imaginez qu’avec cela, nous ne la voyons plus guère. Et comment voulez-vous que les parents gardent leu
773 la voyons plus guère. Et comment voulez-vous que les parents gardent leur autorité ? Le Parti passe avant tout. Si nous vo
774 ulez-vous que les parents gardent leur autorité ? Le Parti passe avant tout. Si nous voulions empêcher notre fils, qui a 1
775 mple, nous risquerions une mauvaise histoire avec les autorités du Parti. Nous ne sommes que des civils pour nos enfants. E
776 nt des militaires. » Plainte vingt fois entendue. Les enfants sont ravis, naturellement. Ils se sentent libres. Car la libe
777 ravis, naturellement. Ils se sentent libres. Car la liberté, pour un adolescent, c’est tout ce qui ne dépend pas de la fa
778 un adolescent, c’est tout ce qui ne dépend pas de la famille, fut-ce la plus dure discipline, pourvu qu’elle soit extérieu
779 t tout ce qui ne dépend pas de la famille, fut-ce la plus dure discipline, pourvu qu’elle soit extérieure au foyer. Je ne
780 le soit extérieure au foyer. Je ne dirai plus que le « fascisme » tue l’esprit d’initiative. C’est le contraire. Comparez
781 u foyer. Je ne dirai plus que le « fascisme » tue l’ esprit d’initiative. C’est le contraire. Comparez la jeune Führerin à
782 le « fascisme » tue l’esprit d’initiative. C’est le contraire. Comparez la jeune Führerin à une jeune fille du même âge,
783 esprit d’initiative. C’est le contraire. Comparez la jeune Führerin à une jeune fille du même âge, chez nous ! Mais l’init
784 n à une jeune fille du même âge, chez nous ! Mais l’ initiative qu’on exige, c’est celle qui sert l’État et qui est prévue
785 is l’initiative qu’on exige, c’est celle qui sert l’ État et qui est prévue par lui ; c’est celle que la tactique moderne e
786 ’État et qui est prévue par lui ; c’est celle que la tactique moderne exige du soldat dans le terrain. Contraindre, ce ser
787 elle que la tactique moderne exige du soldat dans le terrain. Contraindre, ce serait peu. Mais s’emparer de la liberté mêm
788 in. Contraindre, ce serait peu. Mais s’emparer de la liberté même des jeunes, voilà le totalitarisme. Un communiste. — D
789 is s’emparer de la liberté même des jeunes, voilà le totalitarisme. Un communiste. — Dans sa petite cuisine, où nous som
790 epuis deux heures il me raconte ses bagarres avec les nazis, avant 1933, quand il était en feldgrau (l’uniforme des communi
791 es nazis, avant 1933, quand il était en feldgrau ( l’ uniforme des communistes) et les autres en brun. C’est un dur. Chômeur
792 était en feldgrau (l’uniforme des communistes) et les autres en brun. C’est un dur. Chômeur depuis sept ans. Ancien chef d’
793 mpagnie de miliciens rouges). Irréductible, il me l’ affirme solennellement. Mais lui aussi se sent trop vieux pour continu
794 Mais lui aussi se sent trop vieux pour continuer la lutte, il a 50 ans. Se bagarrer encore ? Ils ne sont pas comme ça, le
795 s. Se bagarrer encore ? Ils ne sont pas comme ça, les ouvriers allemands. « Vous autres Français, me dit-il, vous ne rêvez
796 voulons du travail et notre tasse de café au lait le matin. Qu’on nous donne ça, Hitler ou un autre, ça suffira. La politi
797 on nous donne ça, Hitler ou un autre, ça suffira. La politique n’intéresse pas les ouvriers quand ils ont de quoi manger e
798 n autre, ça suffira. La politique n’intéresse pas les ouvriers quand ils ont de quoi manger et travailler. Hitler ? Il n’a
799 gramme, maintenant qu’il a gagné. C’était presque le même programme que le nôtre ! Mais il a été plus malin, il a rassuré
800 le nôtre ! Mais il a été plus malin, il a rassuré les bourgeois en n’attaquant pas tout de suite la religion… » Tout d’un c
801 ré les bourgeois en n’attaquant pas tout de suite la religion… » Tout d’un coup il se lève de son tabouret et avec un gran
802 l se lève de son tabouret et avec un grand geste, le doigt pointé en l’air : « Je vais vous dire une chose : si tous l’aba
803 bouret et avec un grand geste, le doigt pointé en l’ air : « Je vais vous dire une chose : si tous l’abandonnent, tous ces
804 n l’air : « Je vais vous dire une chose : si tous l’ abandonnent, tous ces gros cochons qui sont autour de lui (et il nomme
805 gros cochons qui sont autour de lui (et il nomme les principaux chefs du régime) eh bien moi ! (il se frappe la poitrine)
806 paux chefs du régime) eh bien moi ! (il se frappe la poitrine) moi je me ferai tuer pour lui ! » Et il répète : « Lui au m
807 « Lui au moins, c’est un homme sincère, et c’est le seul… » II. — Le fait central J’en étais là de mes étonnements.
808 st un homme sincère, et c’est le seul… » II. —  Le fait central J’en étais là de mes étonnements. Je collectionnais d
809 es, vraies et vraisemblables une à une, mais dont l’ ensemble me laissait une impression assez confuse. Capitalisme et soci
810 me s’ils ne sentaient pas ce je ne sais quoi dans l’ atmosphère qui faisait que toutes les descriptions « objectives » de n
811 ais quoi dans l’atmosphère qui faisait que toutes les descriptions « objectives » de nos journalistes paraissaient, lues d’
812 vais-je à ce moment. C’est alors que se produisit le coup d’audace du 7 mars, l’occupation de la Rhénanie par la Reichsweh
813 lors que se produisit le coup d’audace du 7 mars, l’ occupation de la Rhénanie par la Reichswehr. Deux jours plus tard, des
814 uisit le coup d’audace du 7 mars, l’occupation de la Rhénanie par la Reichswehr. Deux jours plus tard, des affiches rouges
815 audace du 7 mars, l’occupation de la Rhénanie par la Reichswehr. Deux jours plus tard, des affiches rouges annonçaient pou
816 s plus tard, des affiches rouges annonçaient pour le surlendemain : « Le Führer parle ! » On plantait des mâts sur les pla
817 iches rouges annonçaient pour le surlendemain : «  Le Führer parle ! » On plantait des mâts sur les places. On installait d
818  : « Le Führer parle ! » On plantait des mâts sur les places. On installait des haut-parleurs tous les cent mètres le long
819 les places. On installait des haut-parleurs tous les cent mètres le long des avenues. Et le tambour se mit à battre — deux
820 eurs tous les cent mètres le long des avenues. Et le tambour se mit à battre — deux coups lents, trois coups rapprochés —
821 e — deux coups lents, trois coups rapprochés — on l’ entendait encore au milieu de la nuit. Je reprends mes notes du 11 mar
822 s rapprochés — on l’entendait encore au milieu de la nuit. Je reprends mes notes du 11 mars 1936. Une cérémonie sacrée.
823 s 1936. Une cérémonie sacrée. — Trois heures de l’ après-midi, dans un café près de l’Opéra. Je dis à mon compagnon, le d
824 rois heures de l’après-midi, dans un café près de l’ Opéra. Je dis à mon compagnon, le dramaturge allemand L. : — Vous y cr
825 un café près de l’Opéra. Je dis à mon compagnon, le dramaturge allemand L. : — Vous y croyez, vous, à l’âme collective ?
826 dramaturge allemand L. : — Vous y croyez, vous, à l’ âme collective ? Est-ce que ce n’est pas une formule grandiloquente po
827 ’est pas une formule grandiloquente pour désigner l’ absence d’âme personnelle chez les individus charriés par les mouvemen
828 te pour désigner l’absence d’âme personnelle chez les individus charriés par les mouvements mécaniques d’une foule ? L. hoc
829 d’âme personnelle chez les individus charriés par les mouvements mécaniques d’une foule ? L. hoche la tête : — Allez écoute
830 les mouvements mécaniques d’une foule ? L. hoche la tête : — Allez écouter le Führer, nous en reparlerons demain. Seuleme
831 d’une foule ? L. hoche la tête : — Allez écouter le Führer, nous en reparlerons demain. Seulement allez-y tout de suite,
832 rons demain. Seulement allez-y tout de suite, car les portes s’ouvrent à 5 heures. — Mais il n’est annoncé que pour 9 heure
833 e pour 9 heures. — Venez voir ! Du seuil du café, l’ on aperçoit toute la place de l’Opéra. Des milliers de SA et de SS y s
834 enez voir ! Du seuil du café, l’on aperçoit toute la place de l’Opéra. Des milliers de SA et de SS y sont déjà rangés, imm
835 Du seuil du café, l’on aperçoit toute la place de l’ Opéra. Des milliers de SA et de SS y sont déjà rangés, immobiles. Le F
836 ers de SA et de SS y sont déjà rangés, immobiles. Le Führer viendra au balcon à 11 heures. D’ici là, ces hommes ne bougero
837 s des labyrinthes de barrages jusqu’aux abords de la Festhalle — tout un peuple campe alentour, depuis le matin — et je ne
838 Festhalle — tout un peuple campe alentour, depuis le matin — et je ne puis franchir les portes qu’à 5 heures 10. Comment f
839 lentour, depuis le matin — et je ne puis franchir les portes qu’à 5 heures 10. Comment fait-on pour occuper en dix minutes
840 s ? Je me glisse dans des rangs compacts derrière les bancs. Je verrai très bien la tribune, qui se dresse au centre de l’o
841 compacts derrière les bancs. Je verrai très bien la tribune, qui se dresse au centre de l’ovale, comme une tour carrée, t
842 très bien la tribune, qui se dresse au centre de l’ ovale, comme une tour carrée, tendue de rouge et violemment éclairée p
843 es brunes s’étagent jusqu’à la troisième galerie, les visages indistincts. Immense roulement de tambour, rarement interromp
844 s formations du front de travail viennent occuper les couloirs, la pelle sur l’épaule. Les affiches annonçaient un appel gé
845 u front de travail viennent occuper les couloirs, la pelle sur l’épaule. Les affiches annonçaient un appel général du Part
846 avail viennent occuper les couloirs, la pelle sur l’ épaule. Les affiches annonçaient un appel général du Parti, dans les 4
847 nent occuper les couloirs, la pelle sur l’épaule. Les affiches annonçaient un appel général du Parti, dans les 45 salles de
848 iches annonçaient un appel général du Parti, dans les 45 salles de la ville, pour la même heure. Avec tout ce que les train
849 un appel général du Parti, dans les 45 salles de la ville, pour la même heure. Avec tout ce que les trains spéciaux ont d
850 al du Parti, dans les 45 salles de la ville, pour la même heure. Avec tout ce que les trains spéciaux ont déversé depuis l
851 de la ville, pour la même heure. Avec tout ce que les trains spéciaux ont déversé depuis la veille dans cette cité de 700 0
852 out ce que les trains spéciaux ont déversé depuis la veille dans cette cité de 700 000 habitants, et les autocars, et l’af
853 a veille dans cette cité de 700 000 habitants, et les autocars, et l’afflux des campagnards venus à pied, il y aura un mill
854 te cité de 700 000 habitants, et les autocars, et l’ afflux des campagnards venus à pied, il y aura un million d’auditeurs
855 urs immédiats. Quelques femmes s’évanouissent, on les emporte, et cela fait un peu de place pour respirer. Sept heures. Per
856 rsonne ne s’impatiente, ni ne parle. Huit heures. Les dignitaires du Reich apparaissent, annoncés par les clameurs de l’ext
857 s dignitaires du Reich apparaissent, annoncés par les clameurs de l’extérieur. Goering, Blomberg, des généraux, salués par
858 Reich apparaissent, annoncés par les clameurs de l’ extérieur. Goering, Blomberg, des généraux, salués par des heil joyeux
859 omberg, des généraux, salués par des heil joyeux. Le gouverneur de la province nasille des lieux communs, mal écouté. Je s
860 aux, salués par des heil joyeux. Le gouverneur de la province nasille des lieux communs, mal écouté. Je suis debout, malax
861 mal écouté. Je suis debout, malaxé et soutenu par la foule, depuis bientôt quatre fois soixante minutes. Est-ce que cela v
862 uatre fois soixante minutes. Est-ce que cela vaut la peine ? Mais voici une rumeur de marée, des trompettes au-dehors. Tou
863 rumeur de marée, des trompettes au-dehors. Toutes les lumières s’éteignent dans la salle, tandis que des flèches lumineuses
864 s au-dehors. Toutes les lumières s’éteignent dans la salle, tandis que des flèches lumineuses s’allument sur la voûte, poi
865 tandis que des flèches lumineuses s’allument sur la voûte, pointant vers une porte à la hauteur des premières galeries. U
866 ’allument sur la voûte, pointant vers une porte à la hauteur des premières galeries. Un coup de projecteur fait apparaître
867 leries. Un coup de projecteur fait apparaître sur le seuil un petit homme en brun, tête nue, au sourire extatique. Quarant
868 mes, quarante mille bras se sont levés d’un coup. L’ homme avance très lentement, saluant d’un geste lent, épiscopal, sous
869 t de heil rythmés. (Je n’entends bientôt plus que les cris rauques de mes voisins.) Pas à pas il s’avance, il accueille l’h
870 mes voisins.) Pas à pas il s’avance, il accueille l’ hommage, le long de la passerelle qui mène à la tribune. Pendant six m
871 s il s’avance, il accueille l’hommage, le long de la passerelle qui mène à la tribune. Pendant six minutes, c’est très lon
872 le l’hommage, le long de la passerelle qui mène à la tribune. Pendant six minutes, c’est très long. Personne ne peut remar
873 st très long. Personne ne peut remarquer que j’ai les mains dans mes poches : ils sont dressés, immobiles et hurlant en mes
874 ils sont dressés, immobiles et hurlant en mesure, les yeux fixés sur ce point lumineux, sur ce visage au sourire extasié, e
875 age au sourire extasié, et des larmes coulent sur les faces, dans l’ombre. Et soudain tout s’apaise. Il a étendu le bras én
876 xtasié, et des larmes coulent sur les faces, dans l’ ombre. Et soudain tout s’apaise. Il a étendu le bras énergiquement — l
877 ns l’ombre. Et soudain tout s’apaise. Il a étendu le bras énergiquement — les yeux au ciel — et le Horst Wessel Lied monte
878 out s’apaise. Il a étendu le bras énergiquement — les yeux au ciel — et le Horst Wessel Lied monte sourdement du parterre.
879 ndu le bras énergiquement — les yeux au ciel — et le Horst Wessel Lied monte sourdement du parterre. « Les camarades que l
880 Horst Wessel Lied monte sourdement du parterre. «  Les camarades que le Front rouge et la Réaction tuèrent — marchent en esp
881 monte sourdement du parterre. « Les camarades que le Front rouge et la Réaction tuèrent — marchent en esprit dans nos rang
882 u parterre. « Les camarades que le Front rouge et la Réaction tuèrent — marchent en esprit dans nos rangs. » J’ai compris.
883 e frisson et de battement de cœur — cependant que l’ esprit demeure lucide. Ce que j’éprouve maintenant, c’est cela qu’on d
884 éprouve maintenant, c’est cela qu’on doit appeler l’ horreur sacrée. Je me croyais à un meeting de masses, à quelque manife
885 célèbrent ! Et c’est une liturgie qui se déroule, la grande cérémonie sacrale d’une religion dont je ne suis pas, et qui m
886 s ensemble. III. — Une religion nouvelle Si l’ on n’a pas senti cela, on ne comprendra jamais la raison simple des tr
887 l’on n’a pas senti cela, on ne comprendra jamais la raison simple des triomphes totalitaires. Évidemment, il sera toujour
888 Évidemment, il sera toujours possible d’invoquer les lois économiques, les forces relatives des partis et des classes avan
889 oujours possible d’invoquer les lois économiques, les forces relatives des partis et des classes avant 1933, les circonstan
890 s relatives des partis et des classes avant 1933, les circonstances politiques de l’Europe, le traité de Versailles, la déc
891 asses avant 1933, les circonstances politiques de l’ Europe, le traité de Versailles, la décomposition des gauches, le doub
892 t 1933, les circonstances politiques de l’Europe, le traité de Versailles, la décomposition des gauches, le double jeu du
893 politiques de l’Europe, le traité de Versailles, la décomposition des gauches, le double jeu du grand capital soutenant H
894 aité de Versailles, la décomposition des gauches, le double jeu du grand capital soutenant Hitler contre les marxistes et
895 uble jeu du grand capital soutenant Hitler contre les marxistes et papen contre Hitler : tout cela est bel et bon, et fourn
896 Hitler : tout cela est bel et bon, et fournit de la copie aux marxistes et aux libéraux. À les lire, on conçoit très bien
897 rnit de la copie aux marxistes et aux libéraux. À les lire, on conçoit très bien comment la mécanique a joué en fait, et qu
898 ibéraux. À les lire, on conçoit très bien comment la mécanique a joué en fait, et que c’était fatal, et que c’est très dan
899 é. Car on ne nous parle jamais que du comment. Et les « explications » qu’on nous fournit se réduisent en définitive à une
900 es. Mais ce qu’on laisse toujours échapper, c’est le principe d’actualisation des phénomènes, ou si j’ose dire : c’est la
901 lisation des phénomènes, ou si j’ose dire : c’est la grâce efficace. Les choses ont tourné de telle sorte ; et l’on expliq
902 ènes, ou si j’ose dire : c’est la grâce efficace. Les choses ont tourné de telle sorte ; et l’on explique au nom d’une doct
903 ficace. Les choses ont tourné de telle sorte ; et l’ on explique au nom d’une doctrine convenablement réadaptée, qu’elles n
904 tte sorte. Voilà pourquoi votre fille est muette. Les mêmes théoriciens, en 1932, vous démontraient, le Capital en main, qu
905 es mêmes théoriciens, en 1932, vous démontraient, le Capital en main, que la situation allemande conduisait droit au commu
906 1932, vous démontraient, le Capital en main, que la situation allemande conduisait droit au communisme. Ce qui m’effraye,
907 isme. Ce qui m’effraye, c’est leur souplesse dans l’ erreur. Il a fallu si peu changer pour « expliquer » à l’aide des même
908 r. Il a fallu si peu changer pour « expliquer » à l’ aide des mêmes schémas que le contraire se soit produit en fait… Derni
909 pour « expliquer » à l’aide des mêmes schémas que le contraire se soit produit en fait… Dernière défense du capital, récit
910 nière défense du capital, récitent sans se lasser les marxistes. Hystérie collective, disent les rationalistes. Tyrannie, d
911 lasser les marxistes. Hystérie collective, disent les rationalistes. Tyrannie, disent les démocrates. Autant de mots vides
912 ctive, disent les rationalistes. Tyrannie, disent les démocrates. Autant de mots vides ou de mensonges pour les fidèles du
913 crates. Autant de mots vides ou de mensonges pour les fidèles du culte allemand. Il ne s’agit ici que de religion. Ce n’est
914 t ici que de religion. Ce n’est pas pour défendre le capitalisme que les mineurs de la Sarre ont voté leur rattachement au
915 on. Ce n’est pas pour défendre le capitalisme que les mineurs de la Sarre ont voté leur rattachement au IIIe Reich. Ce n’es
916 s pour défendre le capitalisme que les mineurs de la Sarre ont voté leur rattachement au IIIe Reich. Ce n’est pas en parla
917 t pas en parlant d’hystérie qu’on peut comprendre le phénomène fondamental de la reconstruction d’une communauté autour d’
918 qu’on peut comprendre le phénomène fondamental de la reconstruction d’une communauté autour d’un sentiment « sacré ». Et c
919 autour d’un sentiment « sacré ». Et ce n’est pas la soif d’une tyrannie, au sens politique et légal, qui a jeté l’Autrich
920 tyrannie, au sens politique et légal, qui a jeté l’ Autriche dans les bras du Führer. Mais c’est l’attraction passionnée q
921 ns politique et légal, qui a jeté l’Autriche dans les bras du Führer. Mais c’est l’attraction passionnée qu’exerce une reli
922 té l’Autriche dans les bras du Führer. Mais c’est l’ attraction passionnée qu’exerce une religion naissante, si basse qu’el
923 ne religion naissante, si basse qu’elle soit, sur les masses décomposées par des siècles d’individualisme. Dans une société
924 iècles d’individualisme. Dans une société où tous les liens originels sont dissous ; où les religions n’apparaissent plus a
925 été où tous les liens originels sont dissous ; où les religions n’apparaissent plus au peuple et aux élites que sous l’aspe
926 pparaissent plus au peuple et aux élites que sous l’ aspect de survivances sociales ; où les classes nées du développement
927 es que sous l’aspect de survivances sociales ; où les classes nées du développement économique rassemblent abstraitement de
928 blent abstraitement des masses inorganiques, dont les individus n’ont en commun que l’argent ou le défaut d’argent ; où les
929 rganiques, dont les individus n’ont en commun que l’ argent ou le défaut d’argent ; où les partis se multiplient et s’entre
930 ont les individus n’ont en commun que l’argent ou le défaut d’argent ; où les partis se multiplient et s’entredéchirent au
931 en commun que l’argent ou le défaut d’argent ; où les partis se multiplient et s’entredéchirent au hasard d’un jeu politiqu
932 rent au hasard d’un jeu politique de surface ; où les élites parlent un langage que les masses sont en mesure d’entendre, m
933 de surface ; où les élites parlent un langage que les masses sont en mesure d’entendre, mais non pas de comprendre ; où l’É
934 esure d’entendre, mais non pas de comprendre ; où l’ État devient le seul représentant du bien commun, mais ne se manifeste
935 e, mais non pas de comprendre ; où l’État devient le seul représentant du bien commun, mais ne se manifeste plus que par l
936 du bien commun, mais ne se manifeste plus que par les feuilles d’impôt, l’armée et la police ; où tout principe d’union soc
937 e se manifeste plus que par les feuilles d’impôt, l’ armée et la police ; où tout principe d’union sociale et spirituelle,
938 ste plus que par les feuilles d’impôt, l’armée et la police ; où tout principe d’union sociale et spirituelle, toute commu
939 ure a disparu, — il est fatal que se répande dans les masses et que s’installe au cœur de chaque individu une angoisse, — d
940 un principe d’union, donc vers une religion, que les dictateurs ont su répondre. Tout le reste est littérature, bavardage
941 eligion, que les dictateurs ont su répondre. Tout le reste est littérature, bavardage de théoriciens, ou ce qui est pire,
942 héoriciens, ou ce qui est pire, de « réalistes ». L’ auteur de cet article a reçu récemment d’Allemagne (janvier 1938) une
943 ar hasard un de ses livres, entreprend de réfuter les critiques qui s’y trouvent formulées à l’endroit du régime hitlérien.
944 éfuter les critiques qui s’y trouvent formulées à l’ endroit du régime hitlérien. Il explique tout d’abord que ce régime es
945 Il explique tout d’abord que ce régime est né de la pauvreté et du malheur de son pays, — ce qui est très juste. Et il aj
946 ys, — ce qui est très juste. Et il ajoute : Mais la pauvreté et le malheur ne peuvent expliquer que des phénomènes extéri
947 t très juste. Et il ajoute : Mais la pauvreté et le malheur ne peuvent expliquer que des phénomènes extérieurs. La raison
948 peuvent expliquer que des phénomènes extérieurs. La raison profonde d’un mouvement comme le nôtre est irrationnelle. Nous
949 i qui nous apportait cette possibilité de croire. Le christianisme, probablement par la faute de ses ministres, ne satisfa
950 ité de croire. Le christianisme, probablement par la faute de ses ministres, ne satisfaisait plus depuis bien longtemps au
951 plus depuis bien longtemps au besoin de croire de la majorité du peuple. Nous voulons croire à la mission du peuple allema
952 e de la majorité du peuple. Nous voulons croire à la mission du peuple allemand. Nous voulons croire à l’immortalité du pe
953 mission du peuple allemand. Nous voulons croire à l’ immortalité du peuple (un arbre dont nous ne sommes que les feuilles q
954 alité du peuple (un arbre dont nous ne sommes que les feuilles qui tombent à chaque génération) et peut-être réussirons-nou
955 e présente — fût-elle aussi invraisemblable que «  l’ immortalité » d’un peuple — on ne peut pas exprimer d’une manière plus
956 s exprimer d’une manière plus précise et ramassée la nature proprement religieuse du phénomène totalitaire allemand. (Et c
957 e allemand. (Et cela vaut, avec des nuances, pour l’ Italie et la Russie.) Mesurons maintenant la naïveté des libéraux qui
958 (Et cela vaut, avec des nuances, pour l’Italie et la Russie.) Mesurons maintenant la naïveté des libéraux qui tiennent fré
959 pour l’Italie et la Russie.) Mesurons maintenant la naïveté des libéraux qui tiennent fréquemment ce propos : « Tout n’es
960 es choses à y prendre. » Certes, Hitler a rétabli l’ ordre dans la rue. Il fait régner la paix sociale. Il y avait six mill
961 prendre. » Certes, Hitler a rétabli l’ordre dans la rue. Il fait régner la paix sociale. Il y avait six millions de chôme
962 ler a rétabli l’ordre dans la rue. Il fait régner la paix sociale. Il y avait six millions de chômeurs en 1933, tandis qu’
963 933, tandis qu’on manque de main-d’œuvre en 1938. La dignité de la nation est rétablie. L’autorité est restaurée. « Et nou
964 ’on manque de main-d’œuvre en 1938. La dignité de la nation est rétablie. L’autorité est restaurée. « Et nous voici sauvés
965 re en 1938. La dignité de la nation est rétablie. L’ autorité est restaurée. « Et nous voici sauvés du communisme. » C’est
966 es gens croient trouver un terrain d’entente avec les dictatures qu’ils condamnent en principe. C’est ainsi qu’ils apporten
967 rtent leur petite contribution, toute bénévole, à l’ effort de la propagande totalitaire dans nos pays. Ils le font sans ma
968 etite contribution, toute bénévole, à l’effort de la propagande totalitaire dans nos pays. Ils le font sans malice, et au
969 t de la propagande totalitaire dans nos pays. Ils le font sans malice, et au nom du bon sens. Ils me rappellent cette bonn
970 bûcher du supplice de Jean Huss : ce que voyant, le martyr prononça : O sancta simplicitas ! Oui, réellement, il faut une
971 n puisse détacher telle ou telle mesure prise par le régime pour l’admirer isolément, ou pour essayer de l’imiter. C’est u
972 er telle ou telle mesure prise par le régime pour l’ admirer isolément, ou pour essayer de l’imiter. C’est une belle ironie
973 gime pour l’admirer isolément, ou pour essayer de l’ imiter. C’est une belle ironie sur le libéralisme impénitent que cette
974 r essayer de l’imiter. C’est une belle ironie sur le libéralisme impénitent que cette manière libérale de « rendre justice
975 de « rendre justice » au totalitarisme. Comme si le mot totalitaire ne signifiait pas, justement, que tout se tient dans
976 ine de perdre toute espèce de sens ! Croit-on que l’ ordre social qu’on admire en Allemagne puisse être obtenu à bas prix,
977 s » ? Ne voit-on pas que cet ordre est simplement la suppression brutale et militaire de toute expression libre des antago
978 libre des antagonismes qui chez nous sont encore la réalité même du social ? Que la paix est obtenue par l’écrasement des
979 nous sont encore la réalité même du social ? Que la paix est obtenue par l’écrasement des faibles ? Que l’unanimité des o
980 lité même du social ? Que la paix est obtenue par l’ écrasement des faibles ? Que l’unanimité des ouvriers résulte de la mi
981 ix est obtenue par l’écrasement des faibles ? Que l’ unanimité des ouvriers résulte de la mise au pas des syndicats ? Que t
982 faibles ? Que l’unanimité des ouvriers résulte de la mise au pas des syndicats ? Que tout cela n’est devenu possible que p
983 ats ? Que tout cela n’est devenu possible que par le fait d’une complicité quasi universelle et inconsciente, fût-ce de la
984 une angoisse religieuse plus puissante que toutes les « raisons », que tous les « intérêts » du monde ? Et qu’enfin ce qui
985 us puissante que toutes les « raisons », que tous les « intérêts » du monde ? Et qu’enfin ce qui importe au dictateur, ce n
986 n’est pas telle mesure en soi, mais au contraire le sens qu’elle prend par rapport au mouvement total, à la religion de l
987 s qu’elle prend par rapport au mouvement total, à la religion de la nation, et au contenu de cette religion, la volonté co
988 par rapport au mouvement total, à la religion de la nation, et au contenu de cette religion, la volonté collective de pui
989 on de la nation, et au contenu de cette religion, la volonté collective de puissance ? Devant cette volonté religieuse, to
990 issance ? Devant cette volonté religieuse, toutes les résistances ont cédé. L’internationale ouvrière s’est effondrée sans
991 onté religieuse, toutes les résistances ont cédé. L’ internationale ouvrière s’est effondrée sans faire usage de ses armes.
992 re s’est effondrée sans faire usage de ses armes. Le capital est en bonne voie d’étatisation sans douleur. Idéalisme et ré
993 douleur. Idéalisme et réalisme ont fait faillite. Le seul adversaire du régime demeure, en fait, l’Église confessionnelle 
994 e. Le seul adversaire du régime demeure, en fait, l’ Église confessionnelle ; c’est-à-dire qu’à la religion de la nation et
995 ait, l’Église confessionnelle ; c’est-à-dire qu’à la religion de la nation et de la Race ne s’oppose plus que la foi propr
996 onfessionnelle ; c’est-à-dire qu’à la religion de la nation et de la Race ne s’oppose plus que la foi proprement dite : co
997 c’est-à-dire qu’à la religion de la nation et de la Race ne s’oppose plus que la foi proprement dite : contre-épreuve du
998 n de la nation et de la Race ne s’oppose plus que la foi proprement dite : contre-épreuve du diagnostic que l’on vient d’e
999 roprement dite : contre-épreuve du diagnostic que l’ on vient d’esquisser. IV. — Perspectives À Berlin, les milieux q
1000 t d’esquisser. IV. — Perspectives À Berlin, les milieux qui se disent bien informés prophétisent la chute du régime p
1001 milieux qui se disent bien informés prophétisent la chute du régime pour le mois suivant, — depuis cinq ans. Or, chaque m
1002 ien informés prophétisent la chute du régime pour le mois suivant, — depuis cinq ans. Or, chaque mois apporte, régulièreme
1003 de raisons de douter que son régime ne conduise à la guerre. Non pas que les chefs et les troupes veuillent la guerre ! Le
1004 e son régime ne conduise à la guerre. Non pas que les chefs et les troupes veuillent la guerre ! Les hommes ne sont pas si
1005 ne conduise à la guerre. Non pas que les chefs et les troupes veuillent la guerre ! Les hommes ne sont pas si méchants, ni
1006 e. Non pas que les chefs et les troupes veuillent la guerre ! Les hommes ne sont pas si méchants, ni même si bêtes. Mais c
1007 ue les chefs et les troupes veuillent la guerre ! Les hommes ne sont pas si méchants, ni même si bêtes. Mais ce qu’il faut
1008 même si bêtes. Mais ce qu’il faut voir, c’est que la volonté des hommes n’a jamais pesé si peu que dans les régimes totali
1009 olonté des hommes n’a jamais pesé si peu que dans les régimes totalitaires. Ce n’est pas le chef qui commande, et ce ne son
1010 u que dans les régimes totalitaires. Ce n’est pas le chef qui commande, et ce ne sont pas les désirs conscients et avoués
1011 n’est pas le chef qui commande, et ce ne sont pas les désirs conscients et avoués qui sont puissants. Ce qui est puissant,
1012 Ce qui est puissant, ce qui commande tout, c’est le mécanisme de la dictature totalitaire, c’est la structure du régime.
1013 sant, ce qui commande tout, c’est le mécanisme de la dictature totalitaire, c’est la structure du régime. Or, la structure
1014 t le mécanisme de la dictature totalitaire, c’est la structure du régime. Or, la structure de l’État totalitaire — quelle
1015 re totalitaire, c’est la structure du régime. Or, la structure de l’État totalitaire — quelle que soit sa doctrine — c’est
1016 c’est la structure du régime. Or, la structure de l’ État totalitaire — quelle que soit sa doctrine — c’est l’état de guerr
1017 totalitaire — quelle que soit sa doctrine — c’est l’ état de guerre. Tout ce que l’on fait là-bas se fait au nom de l’union
1018 sa doctrine — c’est l’état de guerre. Tout ce que l’ on fait là-bas se fait au nom de l’union sacrée, morale de guerre ; et
1019 e. Tout ce que l’on fait là-bas se fait au nom de l’ union sacrée, morale de guerre ; et toutes les mesures d’oppression so
1020 m de l’union sacrée, morale de guerre ; et toutes les mesures d’oppression sont « joyeusement acceptées » pour peu que l’un
1021 ssion sont « joyeusement acceptées » pour peu que l’ union sacrée les légitime. Ils ont des canons, mais pas de beurre, dit
1022 yeusement acceptées » pour peu que l’union sacrée les légitime. Ils ont des canons, mais pas de beurre, dit-on en France d’
1023 e, dit-on en France d’un air malin. On oublie que le mot est de Goering lui-même. « Du beurre ou des canons », c’est un sl
1024 . « Du beurre ou des canons », c’est un slogan de la propagande nazie, et qui déchaîne régulièrement l’enthousiasme des fo
1025 a propagande nazie, et qui déchaîne régulièrement l’ enthousiasme des foules allemandes — pour les canons. Ces foules peuve
1026 ement l’enthousiasme des foules allemandes — pour les canons. Ces foules peuvent très bien être composées de pacifistes. Ce
1027 a n’a aucune importance. Car ce qui compte, c’est la Nation, et non pas les individus. Or la Nation, pratiquement c’est l’
1028 e. Car ce qui compte, c’est la Nation, et non pas les individus. Or la Nation, pratiquement c’est l’État. Et cet État est n
1029 te, c’est la Nation, et non pas les individus. Or la Nation, pratiquement c’est l’État. Et cet État est né de la guerre ;
1030 s les individus. Or la Nation, pratiquement c’est l’ État. Et cet État est né de la guerre ; il y prépare du simple fait qu
1031 pratiquement c’est l’État. Et cet État est né de la guerre ; il y prépare du simple fait que ses conditions d’existence s
1032 ne mobilisation ; il compte à chaque instant avec l’ éventualité d’une guerre, et il y puise sa force de cohésion. Quelle q
1033 puise sa force de cohésion. Quelle que soit donc la volonté consciente et avouée du Führer et du peuple, il n’y a pas de
1034 t du peuple, il n’y a pas de raison de penser que l’ aventure puisse bien finir. Tout se ramène donc, pour nous, à un probl
1035 de force. Mais non pas de forces pour « gagner » la guerre : car toute guerre engagée avec les États totalitaires est une
1036 agner » la guerre : car toute guerre engagée avec les États totalitaires est une guerre perdue, quelle que soit son issue,
1037 ne guerre perdue, quelle que soit son issue, pour les nations démocratiques. D’une guerre totale, telle que nous imposerait
1038 s. D’une guerre totale, telle que nous imposerait l’ Allemagne, ne peut sortir qu’un État totalitaire. Il s’agit donc d’emp
1039 cher cette guerre, de se montrer assez forts pour l’ empêcher, et de condamner ainsi le régime adverse à une autodestructio
1040 ssez forts pour l’empêcher, et de condamner ainsi le régime adverse à une autodestruction de ses énergies belliqueuses. Or
1041 ans de « réarmement », c’est introduire chez nous le Cheval de Troie. Car pour s’armer autant que l’adversaire, il faudrai
1042 s le Cheval de Troie. Car pour s’armer autant que l’ adversaire, il faudrait imposer au pays une discipline équivalente à c
1043 pays une discipline équivalente à celle qui régit les Allemands. À supposer que l’on y réussisse, on se trouverait encore e
1044 e à celle qui régit les Allemands. À supposer que l’ on y réussisse, on se trouverait encore en arrière : de deux grands pa
1045 ys également surarmés, c’est celui qui dispose de la plus forte mystique qui doit fatalement triompher. Et en s’armant aut
1046 t fatalement triompher. Et en s’armant autant que l’ État totalitaire, l’État démocratique perdrait ses meilleures forces m
1047 er. Et en s’armant autant que l’État totalitaire, l’ État démocratique perdrait ses meilleures forces morales ; sa « mystiq
1048 es meilleures forces morales ; sa « mystique » de la liberté. Il n’y a de solution pratique que dans un vaste effort moral
1049 s démocraties pour résoudre à leur manière propre le problème religieux (plus que social) qu’ont résolu, vaille que vaille
1050 lus que social) qu’ont résolu, vaille que vaille, les dictateurs. Refaire une commune mesure vivante. Restaurer le sens civ
1051 rs. Refaire une commune mesure vivante. Restaurer le sens civique décadent. Retrouver une foi qui ne soit pas cette volont
1052 ui ne soit pas cette volonté anxieuse de croire à la Nation… Le seul problème pratique, sérieux, urgent et réellement fond
1053 pas cette volonté anxieuse de croire à la Nation… Le seul problème pratique, sérieux, urgent et réellement fondamental, c’
1054 réellement fondamental, c’est celui que nous pose l’ angoisse des individus isolés, et l’appel religieux qui naît de cette
1055 que nous pose l’angoisse des individus isolés, et l’ appel religieux qui naît de cette angoisse — même s’il est encore inco
1056 ngoisse — même s’il est encore inconscient. Toute la question est de savoir si nous saurons mettre à profit pour le résoud
1057 st de savoir si nous saurons mettre à profit pour le résoudre le délai que nous accordent encore une situation matérielle
1058 si nous saurons mettre à profit pour le résoudre le délai que nous accordent encore une situation matérielle supportable,
1059 uelques restes de traditions civiques. 3. Pour le semestre d’été, je fus autorisé à choisir comme sujet de cours : la l
1060 je fus autorisé à choisir comme sujet de cours : la littérature de la Révolution française. Je m’appliquai à démontrer qu
1061 choisir comme sujet de cours : la littérature de la Révolution française. Je m’appliquai à démontrer que le national-soci
1062 olution française. Je m’appliquai à démontrer que le national-socialisme est un jacobinisme allemand ; même esprit central
1063 ; même esprit centralisateur ; même exaltation de la nation considérée comme missionnaire d’une idée ; même goût des fêtes
1064 dée ; même goût des fêtes symboliques données par l’ État dans l’intention — avouée par le conventionnel Cloots — de discip
1065 oût des fêtes symboliques données par l’État dans l’ intention — avouée par le conventionnel Cloots — de discipliner les es
1066 données par l’État dans l’intention — avouée par le conventionnel Cloots — de discipliner les esprits ; mêmes tentatives
1067 ouée par le conventionnel Cloots — de discipliner les esprits ; mêmes tentatives pour instaurer une religion purement natio
1068 urement nationale et civique destinée à remplacer les confessions « vieillies » et « divisées ». Il faut créer une « religi
1069 geon, une « foi concrète et patriotique », disait l’ abbé Grégoire : c’est le « christianisme positif et allemand » des naz
1070 et patriotique », disait l’abbé Grégoire : c’est le « christianisme positif et allemand » des nazis… Tout cela fut écouté
1071 on accepte de tels écarts. Grande différence avec le régime russe. f. Rougemont Denis de, « Vues sur le national-sociali
1072 régime russe. f. Rougemont Denis de, « Vues sur le national-socialisme », Les Nouveaux Cahiers, Paris, 1 juin 1938, p. 5
1073 nt Denis de, « Vues sur le national-socialisme », Les Nouveaux Cahiers, Paris, 1 juin 1938, p. 5-10.
6 1939, Les Nouveaux Cahiers (1937-1939). Faire le jeu d’Hitler (1er janvier 1939)
1074 Faire le jeu d’Hitler (1er janvier 1939)g Au cours de l’été dernier, et dev
1075 e jeu d’Hitler (1er janvier 1939)g Au cours de l’ été dernier, et devant la menace hitlérienne, un écrivain de nos amis
1076 er 1939)g Au cours de l’été dernier, et devant la menace hitlérienne, un écrivain de nos amis se sentit pressé de parle
1077 e sentit pressé de parler, non point pour appeler les démocrates aux armes, mais simplement pour leur montrer, dans la mesu
1078 ux armes, mais simplement pour leur montrer, dans la mesure de ses moyens, quelle était la réalité de la menace. Il connai
1079 ntrer, dans la mesure de ses moyens, quelle était la réalité de la menace. Il connaissait le IIIe Reich pour y avoir vécu
1080 mesure de ses moyens, quelle était la réalité de la menace. Il connaissait le IIIe Reich pour y avoir vécu un an. Il esti
1081 lle était la réalité de la menace. Il connaissait le IIIe Reich pour y avoir vécu un an. Il estimait que dans l’intérêt mê
1082 ich pour y avoir vécu un an. Il estimait que dans l’ intérêt même d’une défense efficace, il importait de faire connaître l
1083 défense efficace, il importait de faire connaître la nature de l’attaque qui se préparait, et donc la force autant que la
1084 ace, il importait de faire connaître la nature de l’ attaque qui se préparait, et donc la force autant que la faiblesse de
1085 la nature de l’attaque qui se préparait, et donc la force autant que la faiblesse de l’adversaire. Il écrivait à ce sujet
1086 que qui se préparait, et donc la force autant que la faiblesse de l’adversaire. Il écrivait à ce sujet (dans un langage qu
1087 rait, et donc la force autant que la faiblesse de l’ adversaire. Il écrivait à ce sujet (dans un langage qui, selon lui, ne
1088 permettre d’équivoque) : « Un général qui étudie le terrain de sa bataille décisive n’est pas précisément ce qu’on nomme
1089 , mais s’il est incapable d’estimer objectivement les forces en présence, il ferait mieux de s’occuper de politique. » Il m
1090 qu’il y a de bon et ce qu’il y a de mauvais dans l’ hitlérisme. Et concluait sur une pressante mise en garde contre l’espr
1091 concluait sur une pressante mise en garde contre l’ esprit totalitaire. Or, à peine ce livre paru, certains critiques sign
1092 ce livre paru, certains critiques signifièrent à l’ auteur qu’en « prétendant être objectif », il « faisait en réalité le
1093 étendant être objectif », il « faisait en réalité le jeu d’Hitler ». Cette petite aventure nous apparaît révélatrice d’un
1094 nous apparaît révélatrice d’un état d’esprit dont la seule existence suffit à justifier l’effort de nos Cahiers. ⁂ Qu’une
1095 esprit dont la seule existence suffit à justifier l’ effort de nos Cahiers. ⁂ Qu’une « prise de parti » efficace suppose né
1096 i » efficace suppose nécessairement et avant tout la connaissance « objective » des faits en discussion, voilà qui, semble
1097 iscussion, voilà qui, semble-t-il, ne souffre pas le doute un seul instant. Mais que cette vérité très évidente soit en pr
1098 éconnue, contestée avec passion, voilà qui mérite l’ examen. Posons la question sous sa forme la plus simple. Comment se pe
1099 mérite l’examen. Posons la question sous sa forme la plus simple. Comment se peut-il, en général, qu’un homme refuse de vo
1100 que, délibérément, un publiciste qui entend juger l’ Allemagne, commence par récuser les témoins « objectifs » en les accus
1101 ui entend juger l’Allemagne, commence par récuser les témoins « objectifs » en les accusant de « complicité » ? La réponse
1102 commence par récuser les témoins « objectifs » en les accusant de « complicité » ? La réponse est fournie par la psychologi
1103 « objectifs » en les accusant de « complicité » ? La réponse est fournie par la psychologie cou­rante de l’enfance. J’inte
1104 nt de « complicité » ? La réponse est fournie par la psychologie cou­rante de l’enfance. J’interdis à mon fils, âgé de tro
1105 ponse est fournie par la psychologie cou­rante de l’ enfance. J’interdis à mon fils, âgé de trois, ans, de s’approcher du f
1106 natu­rellement. Je lui dis : « Tu sais que je te l’ ai dé­fendu, tu vas te brûler. — Non, dit-il, ça ne brûle pas. — Mon p
1107 ec certains « antifascistes » dès que j’essaie de les avertir de ce qui se passe en Allemagne. Je leur expose des faits « b
1108 auvais ». Je dis : il faut connaître ces faits si l’ on veut agir sur eux sans se laisser contaminer. Ils me répondent : vo
1109 i mon fils prétend-il, contre toute évidence, que le feu ne brûle pas ? C’est parce qu’il n’ose ni ne peut dire : j’ai env
1110 ’il n’ose ni ne peut dire : j’ai envie de toucher le feu bien que je sache qu’il brûle. Cette contradiction insurmontable
1111 rmontable se résout pratiquement par un mensonge ( le feu ne brûle pas), et par un transfert de la « méchanceté » du feu su
1112 nge (le feu ne brûle pas), et par un transfert de la « méchanceté » du feu sur celui qui en avertit. Refuser de reconnaîtr
1113 sur celui qui en avertit. Refuser de reconnaître les faits (mensonge) et accuser celui qui les décrit d’être complice de l
1114 nnaître les faits (mensonge) et accuser celui qui les décrit d’être complice de leur menace (transfert), tel est le mécanis
1115 être complice de leur menace (transfert), tel est le mécanisme régulier qui trahit la présence d’une passion inavouable. D
1116 nsfert), tel est le mécanisme régulier qui trahit la présence d’une passion inavouable. Dans un monde comme le nôtre, où s
1117 développe au plus haut point ce que j’appellerai le chantage à la tendance. Chantage qui consiste à dire : si vous préten
1118 plus haut point ce que j’appellerai le chantage à la tendance. Chantage qui consiste à dire : si vous prétendez rester obj
1119 telle réalité, c’est que vous avez une tendance à la favoriser. Toutes les fois que ce chantage se manifeste, je suis cert
1120 se manifeste, je suis certain que son auteur est la proie d’une pas­sion inavouable — à ses propres yeux — pour la réalit
1121 e pas­sion inavouable — à ses propres yeux — pour la réalité qu’il m’interdit d’examiner. Je prétends donc que les antifas
1122 qu’il m’interdit d’examiner. Je prétends donc que les antifascistes « aveugles » sont des totalitaires qui s’ignorent. ⁂ Qu
1123 alitaires qui s’ignorent. ⁂ Quelle est, en effet, la caractéristique de toute mentalité « totalitaire » ? C’est le refus d
1124 stique de toute mentalité « totalitaire » ? C’est le refus de discuter. Et de là vient le terrorisme. La Terreur (jacobine
1125 re » ? C’est le refus de discuter. Et de là vient le terrorisme. La Terreur (jacobine, bolchéviste ou fasciste) a toujours
1126 refus de discuter. Et de là vient le terrorisme. La Terreur (jacobine, bolchéviste ou fasciste) a toujours dénoncé à la v
1127 ne, bolchéviste ou fasciste) a toujours dénoncé à la vindicte publique les « individus », c’est-à-dire ceux qui discutent 
1128 sciste) a toujours dénoncé à la vindicte publique les « individus », c’est-à-dire ceux qui discutent ; ceux qui, sans être
1129 me par leur orthodoxie trop rigoureuse. Dans tous les cas et à tous les stades, c’est la tendance que l’on punit, non pas l
1130 oxie trop rigoureuse. Dans tous les cas et à tous les stades, c’est la tendance que l’on punit, non pas les actes ou les op
1131 se. Dans tous les cas et à tous les stades, c’est la tendance que l’on punit, non pas les actes ou les opinions déclarées.
1132 s cas et à tous les stades, c’est la tendance que l’ on punit, non pas les actes ou les opinions déclarées. On ne réfute pa
1133 stades, c’est la tendance que l’on punit, non pas les actes ou les opinions déclarées. On ne réfute pas ; on jette la suspi
1134 la tendance que l’on punit, non pas les actes ou les opinions déclarées. On ne réfute pas ; on jette la suspicion. Or, c’e
1135 s opinions déclarées. On ne réfute pas ; on jette la suspicion. Or, c’est ce trait fondamental de la mentalité totalitaire
1136 e la suspicion. Or, c’est ce trait fondamental de la mentalité totalitaire que je retrouve dans les écrits et les propos d
1137 de la mentalité totalitaire que je retrouve dans les écrits et les propos de certains de nos « antifascistes ». Ceux qui j
1138 té totalitaire que je retrouve dans les écrits et les propos de certains de nos « antifascistes ». Ceux qui jugent la tenda
1139 ertains de nos « antifascistes ». Ceux qui jugent la tendance supposée, non le fait, se trouvent participer, d’ores et déj
1140 stes ». Ceux qui jugent la tendance supposée, non le fait, se trouvent participer, d’ores et déjà, de l’état d’esprit fasc
1141 fait, se trouvent participer, d’ores et déjà, de l’ état d’esprit fasciste qu’ils s’imaginent combattre. Pourquoi refusent
1142 quoi refusent-ils de s’informer objectivement sur le fascisme ? Parce qu’ils pressentent que sa réalité est très complexe,
1143 lité est très complexe, et qu’elle introduit donc la nécessité de distinguer avant de juger ; c’est-à-dire la nécessité de
1144 ssité de distinguer avant de juger ; c’est-à-dire la nécessité de discuter et de déclarer ses critères. Et je précise : no
1145 ères. Et je précise : non de discuter pour éluder la prise de parti, mais au contraire pour situer cette prise de parti av
1146 ils étaient amenés à discuter, par suite à donner les raisons de leur jugement, ils s’apercevraient qu’en réalité, ils sont
1147 percevraient qu’en réalité, ils sont tout près de l’ adversaire, et qu’ils partagent sinon toutes ses vues, du moins sa man
1148 inon toutes ses vues, du moins sa manière de voir la vie. (Ou à l’inverse : qu’ils sont très loin de leurs alliés.) Si les
1149 s vues, du moins sa manière de voir la vie. (Ou à l’ inverse : qu’ils sont très loin de leurs alliés.) Si les hommes de gau
1150 erse : qu’ils sont très loin de leurs alliés.) Si les hommes de gauche, d’une part, et les hommes de droite d’autre part, a
1151 alliés.) Si les hommes de gauche, d’une part, et les hommes de droite d’autre part, acceptaient de voir l’Allemagne telle
1152 ommes de droite d’autre part, acceptaient de voir l’ Allemagne telle qu’elle est, ils s’apercevraient que le socialisme y e
1153 emagne telle qu’elle est, ils s’apercevraient que le socialisme y est mieux réalisé qu’en France : dès lors, les premiers
1154 ce : dès lors, les premiers verraient s’effondrer la meilleure raison de leur refus de l’hitlérisme, tandis que les second
1155 s’effondrer la meilleure raison de leur refus de l’ hitlérisme, tandis que les seconds verraient s’effondrer la seule rais
1156 sme, tandis que les seconds verraient s’effondrer la seule raison qu’ils avaient d’admirer Hitler, « rempart contre le bol
1157 qu’ils avaient d’admirer Hitler, « rempart contre le bolchévisme ». Or, ils tiennent essentiellement, les uns et les autre
1158 bolchévisme ». Or, ils tiennent essentiellement, les uns et les autres, à condamner ou à défendre Hitler non point pour ce
1159 e ». Or, ils tiennent essentiellement, les uns et les autres, à condamner ou à défendre Hitler non point pour ce qu’il est,
1160 eut qu’il soit. Ils sont donc contraints de jeter la suspicion sur l’écrivain « objectif » qui leur rappelle les faits. Il
1161 ls sont donc contraints de jeter la suspicion sur l’ écrivain « objectif » qui leur rappelle les faits. Il me faut souligne
1162 ion sur l’écrivain « objectif » qui leur rappelle les faits. Il me faut souligner, d’ailleurs, que le parallèle gauche-droi
1163 les faits. Il me faut souligner, d’ailleurs, que le parallèle gauche-droite n’est pas rigoureux dans ce cas. L’écrivain «
1164 le gauche-droite n’est pas rigoureux dans ce cas. L’ écrivain « objectif » se voit traité d’hitlérien par certains critique
1165 tiques de gauche, mais non pas de bolchévique par les droites. Pour des raisons trop complexes à examiner ici, il se trouve
1166 s trop complexes à examiner ici, il se trouve que la droite jouit en France, provisoirement et comme par accident, d’une p
1167 accident, d’une plus grande liberté d’esprit que la gauche. (À de nombreuses exceptions près, bien sûr. J’en citerais d’a
1168 citerais d’assez éclatantes des deux côtés.) ⁂ Si l’ on veut conserver un sens à l’expression « faire le jeu d’Hitler », il
1169 s deux côtés.) ⁂ Si l’on veut conserver un sens à l’ expression « faire le jeu d’Hitler », il me paraît indispensable de dé
1170 ’on veut conserver un sens à l’expression « faire le jeu d’Hitler », il me paraît indispensable de définir le jeu d’Hitler
1171 d’Hitler », il me paraît indispensable de définir le jeu d’Hitler. Car sinon l’expression peut flétrir tout ce que l’on ve
1172 dispensable de définir le jeu d’Hitler. Car sinon l’ expression peut flétrir tout ce que l’on veut et le contraire aussi, M
1173 . Car sinon l’expression peut flétrir tout ce que l’ on veut et le contraire aussi, Mussolini fait le jeu d’Hitler en l’app
1174 ’expression peut flétrir tout ce que l’on veut et le contraire aussi, Mussolini fait le jeu d’Hitler en l’appuyant, mais l
1175 e l’on veut et le contraire aussi, Mussolini fait le jeu d’Hitler en l’appuyant, mais les communistes le font en poussant
1176 ontraire aussi, Mussolini fait le jeu d’Hitler en l’ appuyant, mais les communistes le font en poussant à la guerre, M. Fla
1177 ussolini fait le jeu d’Hitler en l’appuyant, mais les communistes le font en poussant à la guerre, M. Flandin fait le jeu d
1178 jeu d’Hitler en l’appuyant, mais les communistes le font en poussant à la guerre, M. Flandin fait le jeu d’Hitler en le f
1179 uyant, mais les communistes le font en poussant à la guerre, M. Flandin fait le jeu d’Hitler en le félicitant, mais Mme Ta
1180 le font en poussant à la guerre, M. Flandin fait le jeu d’Hitler en le félicitant, mais Mme Tabouis le fait aussi en le c
1181 t à la guerre, M. Flandin fait le jeu d’Hitler en le félicitant, mais Mme Tabouis le fait aussi en le calomniant d’une faç
1182 e jeu d’Hitler en le félicitant, mais Mme Tabouis le fait aussi en le calomniant d’une façon maladroite, etc. Quel est le
1183 le félicitant, mais Mme Tabouis le fait aussi en le calomniant d’une façon maladroite, etc. Quel est le jeu qu’il s’agit
1184 calomniant d’une façon maladroite, etc. Quel est le jeu qu’il s’agit de ne pas faire ? Voici : Hitler est le symbole et l
1185 qu’il s’agit de ne pas faire ? Voici : Hitler est le symbole et l’instrument principal de la mentalité totalitaire. Cette
1186 e ne pas faire ? Voici : Hitler est le symbole et l’ instrument principal de la mentalité totalitaire. Cette mentalité se d
1187 itler est le symbole et l’instrument principal de la mentalité totalitaire. Cette mentalité se définit par le refus de rec
1188 alité totalitaire. Cette mentalité se définit par le refus de reconnaître les faits gênants (donc de discuter objectivemen
1189 mentalité se définit par le refus de reconnaître les faits gênants (donc de discuter objectivement) et par la passion de c
1190 s gênants (donc de discuter objectivement) et par la passion de condamner à priori des « tendances » supposées hostiles (p
1191 tes de Turcs et de boucs émissaires). Introduisez la discussion, vous rendez impossible le régime totalitaire. Je revendiq
1192 Introduisez la discussion, vous rendez impossible le régime totalitaire. Je revendique pour ma part le droit de discuter,
1193 le régime totalitaire. Je revendique pour ma part le droit de discuter, et j’en fais même un devoir civique. Si vous me le
1194 , et j’en fais même un devoir civique. Si vous me le contestez, je vous jugerai là-dessus. Sur cette déclaration, sur ce f
1195 fasciste, non pas d’intention mais de fait. Et je le dirai encore si vous me contestez le droit de discuter le fascisme lu
1196 fait. Et je le dirai encore si vous me contestez le droit de discuter le fascisme lui-même. Car je prétends que ma meille
1197 encore si vous me contestez le droit de discuter le fascisme lui-même. Car je prétends que ma meilleure arme contre lui e
1198 fasciste honteux, qui sera certainement battu par le fasciste glorieux. ⁂ Je conçois très bien qu’un communiste n’admette
1199 n qu’un communiste n’admette point que je décrive le régime nazi tel qu’il est. Car s’il l’admettait, il serait contraint
1200 je décrive le régime nazi tel qu’il est. Car s’il l’ admettait, il serait contraint de voir l’identité des actes qu’il repr
1201 Car s’il l’admettait, il serait contraint de voir l’ identité des actes qu’il reproche à Hitler, et des actes qu’il loue ch
1202 es actes qu’il loue chez Staline. (Je néglige ici les prétextes.) L’un massacre des hommes parce qu’ils ont une ascendance
1203 utre parce qu’ils ont une ascendance koulak. Tous les deux persécutent les chrétiens. Tous les deux privent le citoyen de s
1204 une ascendance koulak. Tous les deux persécutent les chrétiens. Tous les deux privent le citoyen de ses libertés, etc. Le
1205 ak. Tous les deux persécutent les chrétiens. Tous les deux privent le citoyen de ses libertés, etc. Le communiste me refuse
1206 persécutent les chrétiens. Tous les deux privent le citoyen de ses libertés, etc. Le communiste me refuse le droit d’être
1207 les deux privent le citoyen de ses libertés, etc. Le communiste me refuse le droit d’être objectif parce que, en l’étant,
1208 yen de ses libertés, etc. Le communiste me refuse le droit d’être objectif parce que, en l’étant, je démasque sa vraie pas
1209 me refuse le droit d’être objectif parce que, en l’ étant, je démasque sa vraie passion, sa passion inavouable, qui est id
1210 ement, en déclarant ses critères, et en acceptant la discussion des faits. Dès lors, le départ entre « totalitaires » (con
1211 t en acceptant la discussion des faits. Dès lors, le départ entre « totalitaires » (conscients ou non) et véritables non-f
1212 isé. Il coïncide, à très peu de choses près, avec la distinction entre ceux qui préconisent la bêtise comme méthode d’acti
1213 s, avec la distinction entre ceux qui préconisent la bêtise comme méthode d’action, et ceux qui préfèrent l’intelligence.
1214 ise comme méthode d’action, et ceux qui préfèrent l’ intelligence. Ceci n’est pas une pointe, mais une conclusion réfléchie
1215 réfléchie. 4. Refuser de discuter Hitler, c’est le « tabouer », le considérer comme l’adversaire sacré. Le sacré, c’est
1216 Refuser de discuter Hitler, c’est le « tabouer », le considérer comme l’adversaire sacré. Le sacré, c’est ce qu’on ne disc
1217 Hitler, c’est le « tabouer », le considérer comme l’ adversaire sacré. Le sacré, c’est ce qu’on ne discute pas. Mais le sac
1218 abouer », le considérer comme l’adversaire sacré. Le sacré, c’est ce qu’on ne discute pas. Mais le sacré est toujours ambi
1219 ré. Le sacré, c’est ce qu’on ne discute pas. Mais le sacré est toujours ambigu : l’horreur toujours liée à l’attirance. En
1220 discute pas. Mais le sacré est toujours ambigu : l’ horreur toujours liée à l’attirance. En discutant Hitler, je le profan
1221 é est toujours ambigu : l’horreur toujours liée à l’ attirance. En discutant Hitler, je le profane. C’est beaucoup plus dan
1222 jours liée à l’attirance. En discutant Hitler, je le profane. C’est beaucoup plus dangereux pour son mythe que les vocifér
1223 C’est beaucoup plus dangereux pour son mythe que les vociférations sacrées de quelques « antifascistes ». g. Rougemont D
1224 antifascistes ». g. Rougemont Denis de, « Faire le jeu d’Hitler », Les Nouveaux Cahiers, Paris, 1 janvier 1939, p. 14-15
1225 . Rougemont Denis de, « Faire le jeu d’Hitler », Les Nouveaux Cahiers, Paris, 1 janvier 1939, p. 14-15.