1 1933, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Parole de Dieu et parole humaine, par Karl Barth (30 décembre 1933)
1 Parole de Dieu et parole humaine, par Karl Barth (30 décembre 1933)a b La th
2 b La théologie chrétienne a-t-elle pour tâche de rendre acceptable le message de l’Évangile, d’en atténuer le scandale
3 t-elle pour tâche de rendre acceptable le message de l’Évangile, d’en atténuer le scandale, d’intégrer largement les décou
4 he de rendre acceptable le message de l’Évangile, d’ en atténuer le scandale, d’intégrer largement les découvertes de l’esp
5 message de l’Évangile, d’en atténuer le scandale, d’ intégrer largement les découvertes de l’esprit humain, quitte à laisse
6 le scandale, d’intégrer largement les découvertes de l’esprit humain, quitte à laisser tomber certains dogmes décidément i
7 r aux hommes une vérité qui n’est pas justiciable de leurs mesures puisqu’elle est le jugement de tous nos jugements et la
8 able de leurs mesures puisqu’elle est le jugement de tous nos jugements et la « crise » de tous nos problèmes ? Mais si l’
9 le jugement de tous nos jugements et la « crise » de tous nos problèmes ? Mais si l’on opte pour le scandale et non pour l
10 age ? « L’âme moderne » décontenancée par l’échec de ses idéaux, demande des apaisements ou des directions positives. Faut
11 étaient les questions que se posait, vers la fin de la guerre, dans le presbytère d’un village de la Suisse allemande, un
12 ait, vers la fin de la guerre, dans le presbytère d’ un village de la Suisse allemande, un jeune pasteur, Karl Barth. Autou
13 fin de la guerre, dans le presbytère d’un village de la Suisse allemande, un jeune pasteur, Karl Barth. Autour de lui, c’é
14 lui, c’était l’écho des bombardements, les cartes de pain, des menaces de violences sociales. Que devenaient, dans tout ce
15 es bombardements, les cartes de pain, des menaces de violences sociales. Que devenaient, dans tout cela, les belles synthè
16 devenaient, dans tout cela, les belles synthèses de la théologie libérale ? L’arrière-plan de bourgeoisie et d’optimisme
17 nthèses de la théologie libérale ? L’arrière-plan de bourgeoisie et d’optimisme culturel sur lequel, trop souvent, elles s
18 logie libérale ? L’arrière-plan de bourgeoisie et d’ optimisme culturel sur lequel, trop souvent, elles s’étaient appuyées,
19 hommes aux prises avec les contradictions inouïes de la vie, et leur parler du message non moins inouï de la Bible, de cet
20 la vie, et leur parler du message non moins inouï de la Bible, de cette Bible qui se pose comme une nouvelle énigme en fac
21 ur parler du message non moins inouï de la Bible, de cette Bible qui se pose comme une nouvelle énigme en face des contrad
22 me une nouvelle énigme en face des contradictions de la vie. Souvent ces deux grandeurs, la vie et la Bible, m’ont fait l’
23 fait l’effet — ne me le font-elles pas encore ? —  d’ être Charybde et Scylla. Si c’est cela l’origine et le but de la prédi
24 ybde et Scylla. Si c’est cela l’origine et le but de la prédication chrétienne, me disais-je, qui donc doit, qui donc peut
25 ans doute, pour notre esprit critique. Il résulte de cette étude un gros livre que trois éditeurs refusent mais qui paraît
26 rie après la guerre. Aventure étonnante que celle de ce commentaire né de la détresse quotidienne d’un obscur pasteur de c
27 Aventure étonnante que celle de ce commentaire né de la détresse quotidienne d’un obscur pasteur de campagne, et dans lequ
28 e de ce commentaire né de la détresse quotidienne d’ un obscur pasteur de campagne, et dans lequel, soudain, toute l’Allema
29 né de la détresse quotidienne d’un obscur pasteur de campagne, et dans lequel, soudain, toute l’Allemagne intellectuelle d
30 ne intellectuelle découvre l’expression poignante de son angoisse intime, mais aussi, et enfin, une réponse. Une réponse p
31 et enfin, une réponse. Une réponse plus soucieuse de ce qui est vrai que de ce qui rassure, une réponse qui ne veut s’adre
32 Une réponse plus soucieuse de ce qui est vrai que de ce qui rassure, une réponse qui ne veut s’adresser qu’à ces « questio
33 veut s’adresser qu’à ces « questions dernières » de notre vie, celle devant lesquelles nous fuyons toujours — et c’est là
34 yons toujours — et c’est là justement le principe de notre inquiétude. « Nos auditeurs attendent de nous que nous les comp
35 pe de notre inquiétude. « Nos auditeurs attendent de nous que nous les comprenions mieux qu’ils ne se comprennent eux-même
36 enons pas les hommes au sérieux quand la détresse de leur existence les a conduits à nous, je le répète, si nous ne les pr
37 le font eux-mêmes, comment aurions-nous le droit de nous étonner que, pour la plupart, ils prennent peu à peu l’habitude
38 our la plupart, ils prennent peu à peu l’habitude de délaisser l’Église et de nous abandonner, seuls avec ces bien-disposé
39 ent peu à peu l’habitude de délaisser l’Église et de nous abandonner, seuls avec ces bien-disposés et ces timorés dont j’a
40 r. Il y avait là un homme, une puissance. Le défi de Marx et de Nietzsche était relevé. Le tirage du Römerbrief alla au vi
41 it là un homme, une puissance. Le défi de Marx et de Nietzsche était relevé. Le tirage du Römerbrief alla au vingtième mil
42 ème mille. Barth, nommé professeur à l’Université de Bonn, exerce depuis dix ans une influence qu’on peut qualifier de rév
43 depuis dix ans une influence qu’on peut qualifier de révolutionnaire sur la pensée protestante dans le monde entier. Quel
44 te dans le monde entier. Quel est donc le contenu de cette œuvre, où est le secret de son incomparable virulence ? Les ess
45 donc le contenu de cette œuvre, où est le secret de son incomparable virulence ? Les essais que viennent de traduire MM.
46 Pierre Maury et A. Lavanchy sous le titre Parole de Dieu et Parole humaine donneraient une idée sinon de la pensée barthi
47 Dieu et Parole humaine donneraient une idée sinon de la pensée barthienne dans son plein développement, du moins de ses th
48 barthienne dans son plein développement, du moins de ses thèmes initiaux, de sa « problématique » particulière. Il n’est p
49 n développement, du moins de ses thèmes initiaux, de sa « problématique » particulière. Il n’est pas facile de résumer san
50 problématique » particulière. Il n’est pas facile de résumer sans la trahir une pensée à ce point hostile à tout système.
51 e à ce point hostile à tout système. La théologie de Barth se donne en effet pour une simple « note marginale » à tous les
52 osité. Elles consistent tout d’abord en une série de points d’interrogation que Barth place derrière des mots comme religi
53 es consistent tout d’abord en une série de points d’ interrogation que Barth place derrière des mots comme religion, piété,
54 religion, piété, expérience religieuse, problème de Dieu. Il n’en faut pas plus pour que se lèvent de toutes parts de tro
55 faut pas plus pour que se lèvent de toutes parts de troublants paradoxes. La Bible nous parle-t-elle de religion ? Ne nou
56 troublants paradoxes. La Bible nous parle-t-elle de religion ? Ne nous montre-t-elle pas plutôt, avec une insistance sign
57 ns, ont toujours été les premiers à refuser, sous de très pieux prétextes, les ordres de la Parole de Dieu ? « Alors que t
58 refuser, sous de très pieux prétextes, les ordres de la Parole de Dieu ? « Alors que toujours, et aujourd’hui encore, la p
59 de très pieux prétextes, les ordres de la Parole de Dieu ? « Alors que toujours, et aujourd’hui encore, la polémique de l
60 que toujours, et aujourd’hui encore, la polémique de la “religion” est dirigée contre le monde qui vit sans Dieu, la polém
61 e contre le monde qui vit sans Dieu, la polémique de la Bible au contraire, vise le monde religieux, qu’il soit placé sous
62 e monde religieux, qu’il soit placé sous le signe de Baal ou de Yaveh. » La Bible nous parle-t-elle de ces « expériences r
63 igieux, qu’il soit placé sous le signe de Baal ou de Yaveh. » La Bible nous parle-t-elle de ces « expériences religieuses 
64 de Baal ou de Yaveh. » La Bible nous parle-t-elle de ces « expériences religieuses » sur lesquelles les modernes exercent
65 biblique, rien n’est moins important que le mode de l’expérience. Elle est charge et mission, et non pas but et accomplis
66 logique, elle est élémentaire, à peine consciente d’ elle-même. » Les prophètes n’ont pas de biographie : « L’homme bibliqu
67 consciente d’elle-même. » Les prophètes n’ont pas de biographie : « L’homme biblique se lève et tombe avec sa mission ». I
68 iblique, loin de mettre en scène le développement d’ une « tradition » spirituelle, figure la négation absolue de toute his
69 adition » spirituelle, figure la négation absolue de toute histoire : « Vue d’en haut, c’est une série de libres actions d
70 ure la négation absolue de toute histoire : « Vue d’ en haut, c’est une série de libres actions divines : vue d’en bas, une
71 toute histoire : « Vue d’en haut, c’est une série de libres actions divines : vue d’en bas, une série d’essais sans résult
72 , c’est une série de libres actions divines : vue d’ en bas, une série d’essais sans résultats au cours d’une impossible en
73 libres actions divines : vue d’en bas, une série d’ essais sans résultats au cours d’une impossible entreprise. » Le chris
74 n bas, une série d’essais sans résultats au cours d’ une impossible entreprise. » Le christianisme : une impossible entrepr
75 e Barth, après Kierkegaard, remet au premier plan de la pensée théologique. C’est de cette situation profondément paradoxa
76 t au premier plan de la pensée théologique. C’est de cette situation profondément paradoxale, assumée dans sa tragique iro
77 ir conscience, s’il veut parler valablement. Mais de quoi va-t-il encore pouvoir parler ? Ici le paradoxe devient plus aig
78 doxe devient plus aigu. Le théologien doit parler de Dieu, son nom l’indique. De quel Dieu ? De celui que la Bible nomme l
79 héologien doit parler de Dieu, son nom l’indique. De quel Dieu ? De celui que la Bible nomme l’Éternel, alors que nous som
80 parler de Dieu, son nom l’indique. De quel Dieu ? De celui que la Bible nomme l’Éternel, alors que nous sommes tout entier
81 el, alors que nous sommes tout entiers temporels. De celui qui transcende toutes nos idées de la transcendance. De celui q
82 mporels. De celui qui transcende toutes nos idées de la transcendance. De celui qui vient à nous, mais auquel l’homme ne p
83 transcende toutes nos idées de la transcendance. De celui qui vient à nous, mais auquel l’homme ne peut aller. Du totalit
84 aliter aliter. Si donc la tâche du théologien est de parler de Dieu, il s’avère qu’en tant qu’homme il ne le peut : « Car
85 ter. Si donc la tâche du théologien est de parler de Dieu, il s’avère qu’en tant qu’homme il ne le peut : « Car parler de
86 qu’en tant qu’homme il ne le peut : « Car parler de Dieu voudrait dire, pour toute conscience sérieuse… parler de la Paro
87 rait dire, pour toute conscience sérieuse… parler de la Parole de Dieu, la parole où dieu devient homme. Nous pouvons répé
88 ur toute conscience sérieuse… parler de la Parole de Dieu, la parole où dieu devient homme. Nous pouvons répéter ces quatr
89 s en les répétant, nous n’avons pas dit la parole de Dieu, dans laquelle cette idée devient une réalité, une vérité. » À l
90 verbi Dei, l’homme pécheur n’est pas « capable » de la Parole de Dieu. Ainsi Barth rejoint Calvin, Luther, et au-delà, ju
91 ’homme pécheur n’est pas « capable » de la Parole de Dieu. Ainsi Barth rejoint Calvin, Luther, et au-delà, jusqu’à saint P
92 blié : que l’homme n’est pas capable par lui-même de faire le bien, que la foi seule lui donne la promesse du salut, que c
93 du salut, que cette foi n’est pas le couronnement de sa « vie religieuse », mais le don gratuit que Dieu fait à tout homme
94 n gratuit que Dieu fait à tout homme qui n’a plus d’ autre attente. Qu’on n’aille pas croire cependant que le barthisme est
95  » à quelque orthodoxie, ou par exemple une sorte de pendant protestant au néo-thomisme. Il est avant tout un rappel viole
96 t tout un rappel violent à la nouveauté éternelle de l’Évangile ; une remise en question radicale et intime de notre exist
97 ngile ; une remise en question radicale et intime de notre existence devant Dieu. À la suite de Kierkegaard il nous fait v
98 hristianisme, c’est l’immédiat, l’instant éternel de la foi, et non l’histoire de l’homme pieux ; un événement et non une
99 t, l’instant éternel de la foi, et non l’histoire de l’homme pieux ; un événement et non une croyance, une rencontre perso
100 hrist, et non point une morale prudente, garantie de bonheur terrestre ou céleste. Car cette rencontre est mortelle à l’ho
101 ’homme. Et c’est par là même qu’elle lui apporte, de l’extérieur, le gage de la résurrection. (La grâce n’est pas accordée
102 même qu’elle lui apporte, de l’extérieur, le gage de la résurrection. (La grâce n’est pas accordée aux « justes », mais bi
103 à cette mort, se refuse aussi à la vie. Il meurt de ne pas mourir, selon la parole profondément « dialectique » de Thérès
104 rir, selon la parole profondément « dialectique » de Thérèse d’Avila. Qu’est-ce donc en définitive que le point de vue bar
105 nt de vue barthien ? Une prise au sérieux du fait de Dieu. Dieu n’est pas un problème, n’est pas l’objet de nos recherches
106 eu. Dieu n’est pas un problème, n’est pas l’objet de nos recherches, mais le Sujet de toute existence et de toute recherch
107 ’est pas l’objet de nos recherches, mais le Sujet de toute existence et de toute recherche. Il est la présupposition de to
108 s recherches, mais le Sujet de toute existence et de toute recherche. Il est la présupposition de toute vie, la synthèse q
109 e et de toute recherche. Il est la présupposition de toute vie, la synthèse qui précède éternellement nos thèses et nos an
110 que Dieu lui adresse et qui le meut. On a coutume de nommer la pensée de Barth une théologie de la crise, une théologie di
111 et qui le meut. On a coutume de nommer la pensée de Barth une théologie de la crise, une théologie dialectique. Elle est
112 outume de nommer la pensée de Barth une théologie de la crise, une théologie dialectique. Elle est surtout et avant tout c
113 Elle est surtout et avant tout cela une théologie de la parole de Dieu. Insuffisance radicale de l’humanisme, du piétisme,
114 out et avant tout cela une théologie de la parole de Dieu. Insuffisance radicale de l’humanisme, du piétisme, du moralisme
115 logie de la parole de Dieu. Insuffisance radicale de l’humanisme, du piétisme, du moralisme, du spiritualisme, de l’histor
116 sme, du piétisme, du moralisme, du spiritualisme, de l’historicisme, de tout ce qui est œuvre de l’homme, pour atteindre l
117 u moralisme, du spiritualisme, de l’historicisme, de tout ce qui est œuvre de l’homme, pour atteindre l’œuvre du Dieu « to
118 isme, de l’historicisme, de tout ce qui est œuvre de l’homme, pour atteindre l’œuvre du Dieu « tout autre ». Distinction r
119 et par là même caractère essentiellement profane de la vérité biblique — tels sont les thèmes autour desquels s’organisen
120 utour desquels s’organisent ces essais. Est-ce là de la théologie ? C’est plutôt une réflexion puissante et intrépide sur
121 te et intrépide sur les possibilités et la valeur de l’activité théologique. Barth compare à plusieurs reprises la théolog
122 sieurs reprises la théologie à cette étrange main de Jean Baptiste dans la Crucifixion de Grünewald, cette main énorme qui
123 étrange main de Jean Baptiste dans la Crucifixion de Grünewald, cette main énorme qui désigne le Christ en croix. La théol
124 as la parole. Elle ne peut que l’indiquer au-delà d’ elle-même. Nous n’avons rien dit des qualités humaines de ce livre, de
125 même. Nous n’avons rien dit des qualités humaines de ce livre, de son éloquence martelante (que les traducteurs ont fort b
126 avons rien dit des qualités humaines de ce livre, de son éloquence martelante (que les traducteurs ont fort bien rendue, e
127 rt bien rendue, et la tâche n’était pas facile) ; de son réalisme agressif, de cette obstination à rechercher le sens réel
128 e n’était pas facile) ; de son réalisme agressif, de cette obstination à rechercher le sens réel des mots d’ordre que l’on
129 sens réel des mots d’ordre que l’on va répétant, de cette puissance de sérieux, de prise au sérieux des situations humain
130 d’ordre que l’on va répétant, de cette puissance de sérieux, de prise au sérieux des situations humaines telles qu’elles
131 l’on va répétant, de cette puissance de sérieux, de prise au sérieux des situations humaines telles qu’elles sont, qui se
132 s sont, qui seule permet un humour souvent rude ; de cette puissance critique enfin, au sens le plus créateur du terme, et
133 ens le plus créateur du terme, et qui met en état de crise toutes nos sécurités morales. (Ce n’est qu’à certains degrés de
134 sécurités morales. (Ce n’est qu’à certains degrés de tension que la réalité de nos réalités quotidiennes peut être démasqu
135 st qu’à certains degrés de tension que la réalité de nos réalités quotidiennes peut être démasquée, éprouvée.) Une prise f
136 . Personne n’est plus loin de « l’inquiétude » ou de l’emballement. Barth est l’un des hommes les plus solides de notre te
137 ement. Barth est l’un des hommes les plus solides de notre temps. C’est pour cela qu’il peut poser les questions les plus
138 puissant parti des Chrétiens allemands, fraction de l’hitlérisme qui prétend faire main basse sur les églises et utiliser
139 nique. Alors que la grande majorité des chrétiens d’ Allemagne, rangée derrière les plus fameux docteurs, appuyée par Hitle
140 puissions garder dans la restauration spirituelle d’ une Allemagne profondément paganisée. Il est aussi la plus éclatante r
141 e à tous ceux qui accusaient la pensée barthienne d’ être purement négative et désespérée. « Ici le paradoxe joue à plein —
142 ans un récent article1 — la théologie dialectique de Barth à laquelle on reproche (comme à ceux de Port-Royal !) d’effraye
143 que de Barth à laquelle on reproche (comme à ceux de Port-Royal !) d’effrayer celui qui vient au Christ, peut seule répond
144 quelle on reproche (comme à ceux de Port-Royal !) d’ effrayer celui qui vient au Christ, peut seule répondre à l’angoisse h
145 1. Albert Béguin, « Karl Barth et la situation de l’Église allemande », Revue d’Allemagne du 15 septembre 1933. a. Ro
146 th et la situation de l’Église allemande », Revue d’ Allemagne du 15 septembre 1933. a. Rougemont Denis de, « [Compte ren
147 emagne du 15 septembre 1933. a. Rougemont Denis de , « [Compte rendu] Karl Barth, Parole de Dieu et parole humaine  », Le
148 ont Denis de, « [Compte rendu] Karl Barth, Parole de Dieu et parole humaine  », Les Nouvelles littéraires, Paris, 30 décem
149 aires, Paris, 30 décembre 1933, p. 4. b. Traduit de l’allemand par Pierre Maury et Alexandre Lavanchy (Éditions “Je sers”
2 1934, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). D’un humour romand (24 février 1934)
150 D’ un humour romand (24 février 1934)c Le Suisse romand est-il sérieux
151 romand est-il sérieux ? Je crains que mes raisons d’ en douter n’ébranlent guère la solide réputation de gravité qu’on lui
152 ’en douter n’ébranlent guère la solide réputation de gravité qu’on lui a faite, et qui lui vaut l’estime des personnes de
153 i a faite, et qui lui vaut l’estime des personnes de sens. Mais après tout, ne serait-il pas étrange d’apporter des preuve
154 e sens. Mais après tout, ne serait-il pas étrange d’ apporter des preuves sérieuses de la fantaisie de ce peuple ? Rousseau
155 t-il pas étrange d’apporter des preuves sérieuses de la fantaisie de ce peuple ? Rousseau, Madame de Staël, Constant, Vine
156 d’apporter des preuves sérieuses de la fantaisie de ce peuple ? Rousseau, Madame de Staël, Constant, Vinet… Cette énuméra
157 bon sens. Pourquoi ne pas glisser, entre l’auteur d’ Adolphe et celui des Discours religieux, par exemple, cet excellent To
158 ? Je ne songe pas tant aux traditionnelles farces de père de famille en liberté dont il assaisonnait ses Voyages en zigzag
159 songe pas tant aux traditionnelles farces de père de famille en liberté dont il assaisonnait ses Voyages en zigzag pour am
160 rboristes, un lord tout nu, les enfants terribles de Monsieur Crépin, et la silhouette élégante du Dr Festus, toujours si
161 e dans l’adversité, bien qu’il lui arrive parfois de pousser « un immense cri en vingt-deux langues ». La satire de Toepff
162 un immense cri en vingt-deux langues ». La satire de Toepffer n’est pas méchante, elle n’est pas même « spirituelle » ; c’
163 ndrit sur ses bonhommes, n’est-ce pas une manière de dégonfler les sentencieux ? Une impeccable dignité bourgeoise ne cess
164 ieux ? Une impeccable dignité bourgeoise ne cesse d’ inspirer les attitudes de ses héros, en dépit des carambolages du sort
165 nité bourgeoise ne cesse d’inspirer les attitudes de ses héros, en dépit des carambolages du sort. Il y a donc Toepffer. P
166 rd Rod, qui entrerait difficilement dans le cadre de cette étude. Le mince filet d’humour suisse romand rentre sous terre,
167 ment dans le cadre de cette étude. Le mince filet d’ humour suisse romand rentre sous terre, pour éviter Amiel. Faut-il dés
168 sous terre, pour éviter Amiel. Faut-il désespérer de le revoir jamais ? Mais non, il faut lire d’abord Pierre Girard et Ch
169 Thuringe et Connaissez mieux le cœur des femmes, de Girard, et de Cingria, ce que vous aurez la chance d’en trouver, une
170 onnaissez mieux le cœur des femmes, de Girard, et de Cingria, ce que vous aurez la chance d’en trouver, une note ici ou là
171 irard, et de Cingria, ce que vous aurez la chance d’ en trouver, une note ici ou là, quelques petits livres à tirage limité
172 tirage limité. N’allez pas croire qu’il s’agisse d’ auteurs comiques : il s’agit d’abord de poètes. Je crains même de leur
173 l s’agisse d’auteurs comiques : il s’agit d’abord de poètes. Je crains même de leur faire du tort en écrivant qu’ils sont
174 ues : il s’agit d’abord de poètes. Je crains même de leur faire du tort en écrivant qu’ils sont drôles. (Des gens viennent
175 ral on est plutôt déçu.) Pour comprendre l’humour de Pierre Girard, il faut avoir aimé Charlot, celui des Lumières de la V
176 d, il faut avoir aimé Charlot, celui des Lumières de la Ville et du Cirque. Les héros de Pierre Girard sont de doux ahuris
177 des Lumières de la Ville et du Cirque. Les héros de Pierre Girard sont de doux ahuris, qui partent dans la vie avec une c
178 lle et du Cirque. Les héros de Pierre Girard sont de doux ahuris, qui partent dans la vie avec une conscience pure et des
179 leur fait perdre toute mesure. Le monde est plein de malins, de gens qui ont l’air d’avoir compris de quoi il s’agit. Il n
180 erdre toute mesure. Le monde est plein de malins, de gens qui ont l’air d’avoir compris de quoi il s’agit. Il n’y a plus q
181 monde est plein de malins, de gens qui ont l’air d’ avoir compris de quoi il s’agit. Il n’y a plus qu’à perpétrer une horr
182 de malins, de gens qui ont l’air d’avoir compris de quoi il s’agit. Il n’y a plus qu’à perpétrer une horrible inconvenanc
183 plus qu’à perpétrer une horrible inconvenance, un de ces scandales héroïques qui vous valent l’amour des femmes et quelque
184 emmes et quelque honneur parmi les hommes. Autant de gags chaplinesques, involontaires, touchants, entraînés dans une déri
185 tiques allemands, aussi peut-être dans la musique de Schubert, dans tout ce qui sourd de cette Weltschmerz qui n’a pas de
186 ns la musique de Schubert, dans tout ce qui sourd de cette Weltschmerz qui n’a pas de nom dans notre langue, et c’est pour
187 out ce qui sourd de cette Weltschmerz qui n’a pas de nom dans notre langue, et c’est pourquoi sans doute elle ne s’y manif
188 devant le printemps et les femmes, cette aisance de l’écriture, sans égale parmi nous, cette musique d’un cœur qui s’aban
189 l’écriture, sans égale parmi nous, cette musique d’ un cœur qui s’abandonne, qui s’accepte. C’est cela qui fait la qualité
190 s’accepte. C’est cela qui fait la qualité lyrique de l’humour de Pierre Girard. Lisez, ou relisez, dans la Rose de Thuring
191 ’est cela qui fait la qualité lyrique de l’humour de Pierre Girard. Lisez, ou relisez, dans la Rose de Thuringe, le récit
192 ez, dans la Rose de Thuringe, le récit du mariage de Virginie présidé par son oncle âgé de 102 ans (« Il avait arpenté tou
193 du mariage de Virginie présidé par son oncle âgé de 102 ans (« Il avait arpenté tous les camps de la guerre de Sécession,
194 âgé de 102 ans (« Il avait arpenté tous les camps de la guerre de Sécession, mais il n’en parla pas »), et servi par un ga
195 s (« Il avait arpenté tous les camps de la guerre de Sécession, mais il n’en parla pas »), et servi par un garçon triste q
196 qui perd le vol-au-vent, inexplicablement. Tâchez de ne pas rire ; si vous réussissez, soyez tranquilles : vous ne pleurer
197 rez pas non plus aux chapitres suivants. L’humour de Pierre Girard est bien plus romand que la pompeuse drôlerie de Cingri
198 ard est bien plus romand que la pompeuse drôlerie de Cingria, lequel n’est Suisse que par accident, j’ose à peine dire par
199 ’ose à peine dire par l’état civil. « Je n’ai pas de passeport ; je n’en ai jamais eu ; s’il doit être que j’en doive un a
200 que j’en doive un avoir un, je veux qu’il ne soit de ceux que j’aie fabriqués moi-même. » Ainsi s’exprime Bruno Pomposo, d
201 ue, pétrarquisant, musicien, humain, enfin maître d’ un style incomparable de précision et de verve, Cingria est un phénomè
202 ien, humain, enfin maître d’un style incomparable de précision et de verve, Cingria est un phénomène dont Claudel, Max Jac
203 in maître d’un style incomparable de précision et de verve, Cingria est un phénomène dont Claudel, Max Jacob et Ramuz ont
204 r et dire l’importance, et dont je me contenterai de signaler ici l’humour absolument original. Cingria fit partie du grou
205 ’est par cela surtout qu’il est Suisse, au mépris de tous les racismes.) On avait, dans ce groupe, une espèce de mystique
206 s racismes.) On avait, dans ce groupe, une espèce de mystique des objets, du détail authentique, de l’aspect brut des chos
207 ce de mystique des objets, du détail authentique, de l’aspect brut des choses et des mots. Imaginez, dans cette vision du
208 s cette vision du monde, ce que donnerait l’usage d’ un style savant et poli, coupé de « véhémences nobles » et de triviali
209 onnerait l’usage d’un style savant et poli, coupé de « véhémences nobles » et de trivialités qualifiées, et vous aurez une
210 savant et poli, coupé de « véhémences nobles » et de trivialités qualifiées, et vous aurez une idée du comique de Cingria.
211 tés qualifiées, et vous aurez une idée du comique de Cingria. Un humour romand… Trois auteurs seulement, me dira-t-on ? Tr
212 naître — une légèreté nouvelle dans l’atmosphère de ce pays de pédagogues. J’ai oublié, exprès, de dire que c’est aussi l
213 ne légèreté nouvelle dans l’atmosphère de ce pays de pédagogues. J’ai oublié, exprès, de dire que c’est aussi le pays d’or
214 re de ce pays de pédagogues. J’ai oublié, exprès, de dire que c’est aussi le pays d’origine de Michel Simon et de Grock. C
215 i oublié, exprès, de dire que c’est aussi le pays d’ origine de Michel Simon et de Grock. C’étaient là de trop sérieux argu
216 exprès, de dire que c’est aussi le pays d’origine de Michel Simon et de Grock. C’étaient là de trop sérieux arguments. c
217 c’est aussi le pays d’origine de Michel Simon et de Grock. C’étaient là de trop sérieux arguments. c. Rougemont Denis
218 origine de Michel Simon et de Grock. C’étaient là de trop sérieux arguments. c. Rougemont Denis de, « D’un humour roman
219 de trop sérieux arguments. c. Rougemont Denis de , « D’un humour romand », Les Nouvelles littéraires, Paris, 24 février
220 op sérieux arguments. c. Rougemont Denis de, «  D’ un humour romand », Les Nouvelles littéraires, Paris, 24 février 1934,
3 1934, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). L’Humanité de Jésus d’après Calvin, par Max Dominicé (24 mars 1934)
221 L’Humanité de Jésus d’après Calvin, par Max Dominicé (24 mars 1934)d M. Max Domi
222 s 1934)d M. Max Dominicé nous donne L’Humanité de Jésus d’après Calvin comme un simple commentaire de la pensée du réfo
223 Jésus d’après Calvin comme un simple commentaire de la pensée du réformateur. N’allons pas commenter à notre tour cette g
224 nicé à l’écrire, et qu’il expose en une vingtaine de pages précises, mesurées, et convaincantes. Il me semble que cette pr
225 antes. Il me semble que cette préface caractérise d’ une façon remarquable l’évolution accomplie par toute une génération d
226 le l’évolution accomplie par toute une génération de protestants, celle qui commence à s’exprimer dans des revues comme F
227 istes reprennent le vocabulaire et certains tours de la pensée de Kierkegaard ou de Karl Barth, M. Dominicé, qui n’ignore
228 ent le vocabulaire et certains tours de la pensée de Kierkegaard ou de Karl Barth, M. Dominicé, qui n’ignore pas ces influ
229 et certains tours de la pensée de Kierkegaard ou de Karl Barth, M. Dominicé, qui n’ignore pas ces influences, s’est limit
230 ectement accessible au lecteur français. Essayons de marquer les étapes de sa recherche. ⁂ Le protestantisme du début de c
231 lecteur français. Essayons de marquer les étapes de sa recherche. ⁂ Le protestantisme du début de ce siècle accordait à l
232 pes de sa recherche. ⁂ Le protestantisme du début de ce siècle accordait à la personne de Jésus une place à juste titre ce
233 sme du début de ce siècle accordait à la personne de Jésus une place à juste titre centrale, mais exclusive de toute dogma
234 une place à juste titre centrale, mais exclusive de toute dogmatique. « La foi n’est pas une adhésion intellectuelle à de
235 -elle avoir lieu ? Deux voies s’offraient : celle de l’histoire et celle de l’expérience religieuse. Prendre la voie de l’
236 voies s’offraient : celle de l’histoire et celle de l’expérience religieuse. Prendre la voie de l’histoire, c’était d’abo
237 celle de l’expérience religieuse. Prendre la voie de l’histoire, c’était d’abord chercher à s’approcher de l’homme Jésus t
238 ’histoire, c’était d’abord chercher à s’approcher de l’homme Jésus tel que le décrivent les évangiles. Mais, dit M. Domini
239 racles. Aussi bien, se méfiait-on de plus en plus de ces miracles, pour s’attacher au seul caractère de Jésus. Mais alors,
240 e ces miracles, pour s’attacher au seul caractère de Jésus. Mais alors, n’était-ce pas un abus de langage que de prétendre
241 tère de Jésus. Mais alors, n’était-ce pas un abus de langage que de prétendre voir une personne morale dont on récusait pa
242 Mais alors, n’était-ce pas un abus de langage que de prétendre voir une personne morale dont on récusait par avance les ac
243 ractéristiques ? N’était-ce point là selon le mot de Théodore Flournoy, tenter de « faire une guirlande en mettant bout à
244 oint là selon le mot de Théodore Flournoy, tenter de « faire une guirlande en mettant bout à bout des fleurs des champs et
245 t bout à bout des fleurs des champs et des fleurs de rhétorique ? » Ce Jésus « reconstitué » par les historiens négateurs
246 iens négateurs du surnaturel, M. Dominicé n’a pas de peine à montrer qu’il devenait « foncièrement irréel et sans intérêt 
247 nisait le Christ sous prétexte de nous rapprocher de lui, l’histoire prêtait une réalité insurmontable aux dix-neuf siècle
248 urmontable aux dix-neuf siècles qui nous séparent de l’Évangile. Du même coup, l’expérience religieuse, dialogue vivant av
249 t des évangiles, se réduisait à une contemplation de sa vie. Dans cette difficulté, le jeune théologien interroge Calvin.
250 tout incapables par nous-mêmes — mais sur l’amour de Dieu pour nous. C’est Dieu qui vient à nous, impies, non point nous q
251 mpies, non point nous qui le rencontrons au terme d’ une pieuse « élévation ». Et c’est le mystère du Dieu-homme (du Christ
252 comme on retrouve la véritable et profonde acuité d’ une dialectique à résoudre en actes. C’est l’un des traits les plus fr
253 ette insistance à mettre en lumière le « scandale de Jésus » à seule fin de nous « enseigner à révérence ». On peut dire d
254 e en lumière le « scandale de Jésus » à seule fin de nous « enseigner à révérence ». On peut dire dans ce sens que l’exégè
255 érence ». On peut dire dans ce sens que l’exégèse de Calvin est toute didactique : elle veut sans cesse transformer nos qu
256 e, Calvin n’admet et ne pratique qu’une « exégèse d’ obéissance » — il se laisse juger par le texte. On ne saurait imaginer
257 oulu faire l’apanage du protestantisme. L’ouvrage de M. Dominicé s’inspire évidemment des mêmes principes exégétiques. Cer
258 principes exégétiques. Certes, l’auteur n’est pas de ceux qui conçoivent le commentaire comme une effervescence lyrique au
259 ommentaire comme une effervescence lyrique autour d’ un texte. Son sujet d’ailleurs s’y prête peu. Mais on regrette parfois
260 t pas moins vrai que Calvin sut parler un langage d’ une verdeur assez peu sorbonnique. Max Dominicé ne sera pas le dernier
261 enouvelle jusque dans le style la verve créatrice de la Réforme. d. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Max Dominicé,
262 ve créatrice de la Réforme. d. Rougemont Denis de , « [Compte rendu] Max Dominicé, L’Humanité de Jésus d’après Calvin  »
263 nis de, « [Compte rendu] Max Dominicé, L’Humanité de Jésus d’après Calvin  », Les Nouvelles littéraires, Paris, 24 mars 19
4 1934, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Quelques œuvres et une biographie de Kierkegaard (26 mai 1934)
264 Quelques œuvres et une biographie de Kierkegaard (26 mai 1934)e On rêverait, parfois, d’un protocole d’
265 erkegaard (26 mai 1934)e On rêverait, parfois, d’ un protocole d’introduction des grands génies de l’étranger dans la cu
266 ai 1934)e On rêverait, parfois, d’un protocole d’ introduction des grands génies de l’étranger dans la culture de ce pay
267 , d’un protocole d’introduction des grands génies de l’étranger dans la culture de ce pays. La présentation d’un esprit de
268 n des grands génies de l’étranger dans la culture de ce pays. La présentation d’un esprit de l’envergure de Kierkegaard eu
269 anger dans la culture de ce pays. La présentation d’ un esprit de l’envergure de Kierkegaard eut légitimé, à elle seule, la
270 a culture de ce pays. La présentation d’un esprit de l’envergure de Kierkegaard eut légitimé, à elle seule, la création de
271 pays. La présentation d’un esprit de l’envergure de Kierkegaard eut légitimé, à elle seule, la création de cet Office et
272 erkegaard eut légitimé, à elle seule, la création de cet Office et ses soins les plus diligents. Que d’impairs n’a-t-on pa
273 e cet Office et ses soins les plus diligents. Que d’ impairs n’a-t-on pas commis à l’endroit de ce revenant du xixe siècle
274 siècle, depuis quelques années qu’on nous parle de lui dans les revues philosophiques et littéraires ! Probablement, il
275 n proche de la mystification. Il eut peut-être ri de se voir présenté tantôt comme anarchiste et pourfendeur de prêtres, t
276 r présenté tantôt comme anarchiste et pourfendeur de prêtres, tantôt comme réactionnaire de stricte observance, dogmatique
277 ourfendeur de prêtres, tantôt comme réactionnaire de stricte observance, dogmatique ; ici comme individualiste forcené, là
278 ascisme français » ! (au camarade Nizan l’honneur de la trouvaille.) Mais il eût certainement protesté contre une erreur q
279 ment protesté contre une erreur qui ne relève pas de l’interprétation partisane, mais d’un simple défaut d’information, et
280 ne relève pas de l’interprétation partisane, mais d’ un simple défaut d’information, et qui consiste à faire de lui une esp
281 interprétation partisane, mais d’un simple défaut d’ information, et qui consiste à faire de lui une espèce de psychologue
282 ple défaut d’information, et qui consiste à faire de lui une espèce de psychologue nihiliste, un esthète retors et tourmen
283 mation, et qui consiste à faire de lui une espèce de psychologue nihiliste, un esthète retors et tourmenté, l’ancêtre du g
284 hète retors et tourmenté, l’ancêtre du gidisme et de l’« inquiétude » littéraire. Kierkegaard, avant tout, est un chrétien
285 chrétien ; un chrétien peu rassurant, certes, et d’ une trempe exceptionnelle ; mais non pas un inquiet au sens moderne, e
286 n pas un inquiet au sens moderne, et le contraire d’ un esthète. Comme Nietzsche, avec lequel il a pas mal de traits commun
287 sthète. Comme Nietzsche, avec lequel il a pas mal de traits communs, Kierkegaard nous laisse un ouvrage d’autocritique2 où
288 raits communs, Kierkegaard nous laisse un ouvrage d’ autocritique2 où il dégage le sens général de son œuvre. On peut y lir
289 rage d’autocritique2 où il dégage le sens général de son œuvre. On peut y lire ceci, en matière d’introduction : « Je suis
290 ral de son œuvre. On peut y lire ceci, en matière d’ introduction : « Je suis et j’ai toujours été un auteur religieux ; to
291 d, il faut l’avouer, le Traité du désespoir 3 est de beaucoup la plus centrale, la plus révélatrice, mais aussi la plus pr
292 romantisme dans cette analyse, aucune exaltation de nos démons obscurs. Au fond du désespoir, et quelles que soient les f
293 al jusqu’au péché contre l’esprit, jusqu’au refus d’ être sauvé, il y a toujours une révolte de l’homme contre sa condition
294 u refus d’être sauvé, il y a toujours une révolte de l’homme contre sa condition telle que Dieu l’a voulue, une négation d
295 lle que Dieu l’a voulue, une négation du paradoxe de l’Amour. L’universalité du désespoir, qui est la thèse maîtresse de c
296 ersalité du désespoir, qui est la thèse maîtresse de cette œuvre, conduirait l’homme au nihilisme absolu : mais ce péril e
297 ut promis par le Christ peut nous amener à l’aveu de la réalité de notre condition. Ainsi, le chrétien, seul, connaît tout
298 le Christ peut nous amener à l’aveu de la réalité de notre condition. Ainsi, le chrétien, seul, connaît toute la misère de
299 Ainsi, le chrétien, seul, connaît toute la misère de l’homme : elle lui est révélée par l’Évangile qui sauve. ⁂ La lecture
300 rablement concrète. Le génie familier et ironique de Kierkegaard a créé dans cette œuvre une abondance d’illustrations ino
301 Kierkegaard a créé dans cette œuvre une abondance d’ illustrations inoubliables. Par ailleurs, cette descente aux enfers de
302 bliables. Par ailleurs, cette descente aux enfers de notre âme fait songer à Dostoïevski. Dans La Répétition 4, on trouver
303 la réponse terrible faite à Job. Et ce sont alors d’ étranges et magnifiques lettres sur la détresse humaine devant Dieu, q
304 ages les plus éloquentes et les plus irréfutables d’ un penseur qui sut devancer tous les problèmes de notre siècle. Le ton
305 d’un penseur qui sut devancer tous les problèmes de notre siècle. Le ton s’y élève à la hauteur de l’invective prophétiqu
306 es de notre siècle. Le ton s’y élève à la hauteur de l’invective prophétique : Plains-toi, l’Éternel ne craint rien, il p
307 est une réponse, une explication certaine, digne de foi, de première source, une réponse de Dieu, qui, même si elle foudr
308 réponse, une explication certaine, digne de foi, de première source, une réponse de Dieu, qui, même si elle foudroie, est
309 ne, digne de foi, de première source, une réponse de Dieu, qui, même si elle foudroie, est plus magnifique que les comméra
310 e que les commérages et les potins sur la justice de la Providence inventés par la sagesse humaine et colportés par de vie
311 inventés par la sagesse humaine et colportés par de vieilles bavardes et des eunuques ! Nous voici plus près de Shakespe
312 rès de Shakespeare que du piétisme sentimental et de l’unctio spiritualis des dévots… Mais plus près de Luther, aussi. Je
313 no veritas 5. Non point que cet ouvrage ne mérite d’ être lu par tous les amateurs de grand lyrisme intellectuel (le style
314 ouvrage ne mérite d’être lu par tous les amateurs de grand lyrisme intellectuel (le style admirable de ces pages a été ren
315 de grand lyrisme intellectuel (le style admirable de ces pages a été rendu aussi bien qu’il était possible par le traducte
316 cteur). Mais il ne s’agit là que du premier volet d’ un triptyque dont il nous faut attendre les deux autres parties pour s
317 s, une analyse détaillée des Stades sur le chemin de la vie, dont In Vino Veritas constitue l’introduction, dans l’étude b
318 troduction, dans l’étude biographique et critique de Carl Koch6, qui vient combler la plus grave lacune de la littérature
319 arl Koch6, qui vient combler la plus grave lacune de la littérature kierkegaardienne en France. On ne saurait trop insiste
320 France. On ne saurait trop insister sur l’utilité de ce livre. Il rendra vaines, désormais, les introductions que les diff
321 ucteurs nous ont prodiguées jusqu’ici avec autant de science que de conscience, mais qui se répétaient fastidieusement. Su
322 t prodiguées jusqu’ici avec autant de science que de conscience, mais qui se répétaient fastidieusement. Surtout, il situe
323 laquelle il faut considérer l’ensemble des écrits de Kierkegaard, et qui est celle du Point de vue explicatif. Le livre de
324 ui est celle du Point de vue explicatif. Le livre de Carl Koch est la démonstration de l’emprise que peut exercer Kierkega
325 catif. Le livre de Carl Koch est la démonstration de l’emprise que peut exercer Kierkegaard sur un chrétien sincère, peu s
326 Kierkegaard sur un chrétien sincère, peu suspect de complaisance pour les subtilités du « Séducteur », et qui n’a pas la
327 qu’un « honnête homme » peut espérer. Du mélange d’ humour et d’angoisse insondable qui nous bouleverse à la lecture des S
328 nête homme » peut espérer. Du mélange d’humour et d’ angoisse insondable qui nous bouleverse à la lecture des Stades, on tr
329 remué. On le croira sans peine : il n’a pas l’air d’ avoir pu inventer ce qu’il raconte. Cela donne envie d’aller voir. Or,
330 ir pu inventer ce qu’il raconte. Cela donne envie d’ aller voir. Or, je tiens qu’il n’y a rien de plus urgent pour nous que
331 ens qu’il n’y a rien de plus urgent pour nous que d’ aller voir ce qui se passe dans l’œuvre du danois prophétique, ressusc
332 ra. 2. Point de vue explicatif sur ma carrière d’ auteur, non traduit. 3. Trad. J. Gateau et K. Ferlov. Gallimard, coll
333 nson (Éditions « Je sers »). e. Rougemont Denis de , « Quelques œuvres et une biographie de Kierkegaard », Les Nouvelles
334 ont Denis de, « Quelques œuvres et une biographie de Kierkegaard », Les Nouvelles littéraires, Paris, 26 mai 1934, p. 3.
5 1934, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Le mouvement des groupes — Kagawa (4 août 1934)
335 4)f Le « Mouvement des Groupes », ou Mouvement d’ Oxford, est un des faits spirituels qui serviront à fixer la significa
336 spirituels qui serviront à fixer la signification de notre époque. Son influence, limitée d’abord aux pays anglo-saxons, s
337 réoccupations des intellectuels, mais il y répond de telle sorte qu’il abolit rapidement les barrières convenues entre int
338 s barrières convenues entre intellectuels, hommes d’ affaires, prolétaires et bourgeois. J’ai assisté cet hiver, à Paris, à
339 ontres du Mouvement : il y avait là une vingtaine de personnes, un pasteur, une bouchère, un banquier, une dactylo, un pei
340 c’était dans son atelier — et une grande vedette de music-hall dont la présence discrète n’étonna personne. De quoi s’agi
341 hall dont la présence discrète n’étonna personne. De quoi s’agissait-il ? Ni de théologie, ni de problèmes sociaux, ni de
342 ète n’étonna personne. De quoi s’agissait-il ? Ni de théologie, ni de problèmes sociaux, ni de morale ; ni même d’évangéli
343 onne. De quoi s’agissait-il ? Ni de théologie, ni de problèmes sociaux, ni de morale ; ni même d’évangélisation. Il s’agis
344 il ? Ni de théologie, ni de problèmes sociaux, ni de morale ; ni même d’évangélisation. Il s’agissait de mettre en commun
345 , ni de problèmes sociaux, ni de morale ; ni même d’ évangélisation. Il s’agissait de mettre en commun des difficultés inti
346 morale ; ni même d’évangélisation. Il s’agissait de mettre en commun des difficultés intimes, d’entrer dans le concret du
347 sait de mettre en commun des difficultés intimes, d’ entrer dans le concret du christianisme. Une dizaine d’entre nous parl
348 nous parlèrent, sans artifices ni gêne, ni excès d’ aucune sorte. À plus d’une reprise, j’eus l’impression, qu’on a rareme
349 rtifices ni gêne, ni excès d’aucune sorte. À plus d’ une reprise, j’eus l’impression, qu’on a rarement de nos jours, d’ente
350 une reprise, j’eus l’impression, qu’on a rarement de nos jours, d’entendre des gens dire la vérité sur eux-mêmes. Je sorti
351 ’eus l’impression, qu’on a rarement de nos jours, d’ entendre des gens dire la vérité sur eux-mêmes. Je sortis assez déçu,
352 s. Je sortis assez déçu, comme on sort en général de toutes les rencontres prévues. Ce que je savais du Mouvement m’avait
353 et l’on s’en convaincra en lisant le petit livre d’ Harold Begbie, Vies transformées 7, qui raconte les origines du Mouvem
354 ste en français, et il contient un certain nombre de faits assez bouleversants pour qu’on passe sur les interprétations pe
355 lles que nous en propose l’auteur. (Begbie est un de ces « informateurs » brillants et cordiaux, un peu trop souriants, co
356 Le Mouvement des Groupes est né après la guerre, de l’activité purement individuelle d’un jeune pasteur américain, Frank
357 ès la guerre, de l’activité purement individuelle d’ un jeune pasteur américain, Frank Buchman. On a écrit de lui : « Ce qu
358 eune pasteur américain, Frank Buchman. On a écrit de lui : « Ce qui frappe chez Buchman, c’est son incapacité proprement g
359 est essentiellement personnaliste. La rénovation de l’homme ne se fera jamais par le moyen de mouvements de masse, ni par
360 ovation de l’homme ne se fera jamais par le moyen de mouvements de masse, ni par des organisations, ni par des corps const
361 omme ne se fera jamais par le moyen de mouvements de masse, ni par des organisations, ni par des corps constitués mais par
362 hommes concrets, agissant dans le cercle concret de leur vie. La seule question qu’il y ait donc lieu de poser est celle-
363 leur vie. La seule question qu’il y ait donc lieu de poser est celle-ci : comment atteindre les hommes dans le concret de
364 ci : comment atteindre les hommes dans le concret de leur existence ? Buchman constate la faillite lamentable de l’évangél
365 istence ? Buchman constate la faillite lamentable de l’évangélisation standardisée à l’américaine, et de toutes les « méth
366 l’évangélisation standardisée à l’américaine, et de toutes les « méthodes morales », puritaines. Volontaristes, pragmatis
367 mentale du christianisme primitif dans le contact d’ homme à homme, dans la confession mutuelle des péchés et le « partage 
368 activement. N’allons pas croire qu’il s’agisse là d’ une nouvelle forme de pragmatisme américain. Dire que la foi n’est rée
369 pas croire qu’il s’agisse là d’une nouvelle forme de pragmatisme américain. Dire que la foi n’est réelle que là où elle se
370 chrétiens, trop souvent, c’est qu’ils s’efforcent d’ endoctriner ceux qu’ils rencontrent. Le « partage » préconisé par Buch
371 isé par Buchman ne ressemble pas à ces tentatives de violation de domicile moral. Pour entrer en contact avec les hommes,
372 an ne ressemble pas à ces tentatives de violation de domicile moral. Pour entrer en contact avec les hommes, il n’y a qu’u
373 act avec les hommes, il n’y a qu’un moyen : c’est de leur ouvrir sa maison. D’où les confessions privées ou publiques, qui
374 y a qu’un moyen : c’est de leur ouvrir sa maison. D’ où les confessions privées ou publiques, qui sont l’un des traits marq
375 ou publiques, qui sont l’un des traits marquants de l’activité des Groupes. Qu’il y ait là un danger réel d’exhibitionnis
376 tivité des Groupes. Qu’il y ait là un danger réel d’ exhibitionnisme, les membres des Groupes ne sauraient le nier. Mais qu
377 aient le nier. Mais qu’il y ait là aussi le moyen de faire tomber les barrières morales qui séparent nos contemporains, l’
378 n s’en persuadera facilement en lisant les récits de Begbie. Les disciples de Buchmann, — il refuserait cette expression —
379 ent en lisant les récits de Begbie. Les disciples de Buchmann, — il refuserait cette expression — n’ont pas constitué d’or
380 refuserait cette expression — n’ont pas constitué d’ organisation. Ils n’ont pas de registre des membres, ils ne nomment pa
381 n’ont pas constitué d’organisation. Ils n’ont pas de registre des membres, ils ne nomment pas de comités, ils ne publient
382 t pas de registre des membres, ils ne nomment pas de comités, ils ne publient pas de revues, ils ne sont pas une secte ni
383 ls ne nomment pas de comités, ils ne publient pas de revues, ils ne sont pas une secte ni une nouvelle Église. Ils travail
384 ouvoir être utiles à tel endroit où Dieu leur dit d’ aller. La chronique des rencontres miraculeuses qu’ils ont ainsi vécue
385 , For Sinners only (Pour les pécheurs seulement), de J. Russell, on découvre des possibilités humaines que le conformisme
386 nt avoir abolies dans le monde. C’est l’irruption de Dostoïevski dans la bourgeoisie bien-pensante. Le pittoresque, le pat
387 isie bien-pensante. Le pittoresque, le pathétique de l’aventure que vivent quotidiennement les membres des Groupes pourrai
388 sez grave. Il y a là un risque indéniable : celui de naturaliser la foi, de s’attacher aux résultats visibles et frappants
389 risque indéniable : celui de naturaliser la foi, de s’attacher aux résultats visibles et frappants, de retomber ainsi dan
390 e s’attacher aux résultats visibles et frappants, de retomber ainsi dans la vieille croyance à la sanctification par les œ
391 s œuvres. Karl Barth et ses amis n’ont pas manqué de critiquer vivement certaines des suppositions théologiques qu’impliqu
392 suppositions théologiques qu’implique l’attitude de Buchman. Car ce n’est pas assez que de se refuser à parler de théolog
393 l’attitude de Buchman. Car ce n’est pas assez que de se refuser à parler de théologie sous prétexte que c’est abstrait : e
394 Car ce n’est pas assez que de se refuser à parler de théologie sous prétexte que c’est abstrait : encore faudrait-il se ga
395 que c’est abstrait : encore faudrait-il se garder de vivre une théologie équivoque. À quoi les membres du Mouvement des Gr
396 e que leur œuvre se développe dans une atmosphère de franchise, d’autocritique, de sobriété spirituelle qui la préserve de
397 re se développe dans une atmosphère de franchise, d’ autocritique, de sobriété spirituelle qui la préserve de la plupart de
398 dans une atmosphère de franchise, d’autocritique, de sobriété spirituelle qui la préserve de la plupart des excès qu’on im
399 critique, de sobriété spirituelle qui la préserve de la plupart des excès qu’on imagine. Peut-être la plus sûre leçon des
400 on des Groupes est-elle dans leur vision concrète de l’homme et de l’action de Dieu sur l’homme. Dans l’incroyable verbali
401 est-elle dans leur vision concrète de l’homme et de l’action de Dieu sur l’homme. Dans l’incroyable verbalisme de notre t
402 ns leur vision concrète de l’homme et de l’action de Dieu sur l’homme. Dans l’incroyable verbalisme de notre temps, dans c
403 de Dieu sur l’homme. Dans l’incroyable verbalisme de notre temps, dans cet embouteillage de doctrines et de programmes où
404 verbalisme de notre temps, dans cet embouteillage de doctrines et de programmes où nous sommes pris, le seul message utile
405 tre temps, dans cet embouteillage de doctrines et de programmes où nous sommes pris, le seul message utile est celui qui n
406 être le prochain. Et quand ce livre n’aurait pas d’ autre valeur, il a celle-là, qui compte, de nous montrer comment les h
407 it pas d’autre valeur, il a celle-là, qui compte, de nous montrer comment les hommes de ce temps peuvent devenir des homme
408 à, qui compte, de nous montrer comment les hommes de ce temps peuvent devenir des hommes réels. ⁂ Il se peut que Kagawa so
409 ⁂ Il se peut que Kagawa soit l’homme le plus réel d’ aujourd’hui. Je dirais qu’il est le plus grand, si la mesure de la gra
410 . Je dirais qu’il est le plus grand, si la mesure de la grandeur, dans sa vision, n’était pas exclusivement dans la réalit
411 aux ignorent quelques-uns des événements décisifs de l’histoire contemporaine. Kagawa est le chef du Jeune Japon, l’écriva
412 n, l’écrivain le plus fécond et le plus populaire de son pays, une puissance sociale et religieuse dont l’Occident ne conn
413 iale et religieuse dont l’Occident ne connaît pas d’ exemple. Un récit autobiographique et romancé de sa jeunesse a paru en
414 s d’exemple. Un récit autobiographique et romancé de sa jeunesse a paru en français, il y a deux ansg. Aujourd’hui, l’un d
415 en français, il y a deux ansg. Aujourd’hui, l’un de ses collaborateurs nous donne un portrait plus complet et quelques ex
416 nne un portrait plus complet et quelques extraits de ses œuvres8. Fils d’un conseiller de l’empereur et d’une danseuse, Ka
417 complet et quelques extraits de ses œuvres8. Fils d’ un conseiller de l’empereur et d’une danseuse, Kagawa se convertit au
418 ues extraits de ses œuvres8. Fils d’un conseiller de l’empereur et d’une danseuse, Kagawa se convertit au christianisme pe
419 es œuvres8. Fils d’un conseiller de l’empereur et d’ une danseuse, Kagawa se convertit au christianisme pendant ses études
420 renoncer à toute fortune. Sa famille le destitue de ses privilèges aristocratiques. Il embrasse la pauvreté, s’enfonce da
421 Il embrasse la pauvreté, s’enfonce dans les slums de Kobé, décide qu’il n’aura pas d’habitation plus vaste que celle du pl
422 e dans les slums de Kobé, décide qu’il n’aura pas d’ habitation plus vaste que celle du plus pauvre habitant du quartier, e
423 plus pauvre habitant du quartier, et non content d’ y vivre dans un dénuement absolu, ouvre sa chambre aux misérables sans
424 un galeux, un alcoolique qu’il nomme la « statue de cuivre » à cause de son immobilité presque totale, et un assassin don
425 n dont les nuits sont hantées par les apparitions de sa victime. Ils dorment côte à côte. D’autres viennent : il faut écar
426 e. D’autres viennent : il faut écarter les parois de la pièce pour permettre à chacun de se coucher. Kagawa les nourrit de
427 er les parois de la pièce pour permettre à chacun de se coucher. Kagawa les nourrit de son travail. Parfois, ils se révolt
428 mettre à chacun de se coucher. Kagawa les nourrit de son travail. Parfois, ils se révoltent contre sa bonté souriante, fra
429 re pendant ses discours. Il écrit une Psychologie de la pauvreté et un roman dont le tirage atteint 250 000 exemplaires. S
430 mouvement ouvrier. Il conduit une première grève de 30 000 dockers et rédige leur manifeste. « Les ouvriers sont des être
431 des articles dont on trafique suivant une échelle de salaires basés sur l’état du marché. » On le met en prison. Il y écri
432 er tirant contre le soleil. Accueilli à sa sortie de prison par une foule en fête, il entraîne une centaine d’enfants au b
433 n par une foule en fête, il entraîne une centaine d’ enfants au bord de la mer pour célébrer la liberté. Sa ligne de batail
434 bord de la mer pour célébrer la liberté. Sa ligne de bataille s’étend. Il crée l’Union des paysans. Il évangélise. Il devi
435 stianisation du Japon, une autre contre la guerre de Chine. « La société contemporaine est une invalide, mentalement dégén
436 érée, écrit-il. Les banques, l’armée, les maisons de prostitution, les cabarets, les magasins de tabac, les journaux, ne s
437 isons de prostitution, les cabarets, les magasins de tabac, les journaux, ne sont-ils pas autant de symptômes d’aliénation
438 ns de tabac, les journaux, ne sont-ils pas autant de symptômes d’aliénation mentale ? La société de nos jours manifeste un
439 les journaux, ne sont-ils pas autant de symptômes d’ aliénation mentale ? La société de nos jours manifeste une tendance au
440 nt de symptômes d’aliénation mentale ? La société de nos jours manifeste une tendance au crime. Elle est devenue folle par
441 Enterrez Kagawa ! », proclame le parti communiste de Kobé en 1925. Et quelques années plus tard, une ligue réactionnaire f
442 d mystique, c’est-à-dire un grand poète. Le livre d’ Axling nous donne d’admirables citations de ses Méditations. Si les ro
443 dire un grand poète. Le livre d’Axling nous donne d’ admirables citations de ses Méditations. Si les romans de Kagawa l’ont
444 livre d’Axling nous donne d’admirables citations de ses Méditations. Si les romans de Kagawa l’ont fait comparer à Gorki,
445 ables citations de ses Méditations. Si les romans de Kagawa l’ont fait comparer à Gorki, ses poèmes en prose sont d’un fra
446 t fait comparer à Gorki, ses poèmes en prose sont d’ un franciscain. Il y a en lui un amour des objets, un sens de la natur
447 scain. Il y a en lui un amour des objets, un sens de la nature, une compréhension des symboles qui appartiennent au génie
448 7. Vies transformées, par Harold Begbie, trad. de l’anglais par D. Junod (La Concorde). 8. Kagawa, par William AxIing
449 Concorde). 8. Kagawa, par William AxIing, trad. de l’anglais par H. Ecuyer (La Concorde). f. Rougemont Denis de, « Le
450 par H. Ecuyer (La Concorde). f. Rougemont Denis de , « Le Mouvement des Groupes. — Kagawa », Les Nouvelles littéraires, P
451 934, p. 3. g. Comme l’indique la note, il s’agit d’ Avant l’aube (Éditions « Je sers ») dont Rougemont donne une recension
6 1934, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Au sujet d’un roman : Sara Alelia (3 novembre 1934)
452 Au sujet d’ un roman : Sara Alelia (3 novembre 1934)h i Voulez-vous un paradoxe
453 lais, les Allemands, les Scandinaves, et le roman d’ analyse français, de Rousseau jusqu’à Gide, en passant par Constant. Q
454 les Scandinaves, et le roman d’analyse français, de Rousseau jusqu’à Gide, en passant par Constant. Quand on parle du rom
455 e dis romanciers protestants, entendez romanciers de climats protestants. Que faut-il pour faire un roman ? Des caractères
456 Que faut-il pour faire un roman ? Des caractères, de la vie intérieure, une morale qui mette des obstacles et qui crée des
457 its dramatiques dans les vies les plus dépourvues d’ apparences. N’est-ce point-là l’image habituelle que l’on se fait de n
458 t-ce point-là l’image habituelle que l’on se fait de nos climats ? Et voici un dernier argument. Prenez une liste des roma
459 çais contemporains. Vous y trouverez un bon quart de protestants, c’est-à-dire dix fois plus que vous n’en attendiez, puis
460 ous n’en attendiez, puisqu’il n’y a qu’un million de réformés en France. Imaginez la proportion si l’édit de Nantes n’avai
461 ers dont j’allais vous citer les noms n’ont guère de protestant que l’origine, et quelques tics de psychologues. Ils sont,
462 ère de protestant que l’origine, et quelques tics de psychologues. Ils sont, comme l’on dit « sortis du protestantisme » ;
463 » est bien le mot ! C’est-à-dire qu’ils n’ont pas de foi, et qu’est-ce qu’un protestant sans foi ? Dans toutes leurs œuvre
464 é ». Un grand roman, je crois. C’est Sara Alelia, de Mme Hildur Dixelius. On vient de le traduire du suédois9. ⁂ Qu’est-ce
465 le monde « se conduit bien » ? Il n’y aurait pas de roman. Une histoire dont le personnage principal est « la main du Sei
466 « l’insondable Providence » mise en action au gré d’ un moraliste qui se donne l’air de l’avoir bel et bien sondée ? Ce ser
467 n action au gré d’un moraliste qui se donne l’air de l’avoir bel et bien sondée ? Ce serait un conte bleu, ou un volume de
468 en sondée ? Ce serait un conte bleu, ou un volume de la Bibliothèque Rose. Est-ce une histoire qui finit bien, comme le cr
469 en conséquence de quoi les romans des « païens », d’ un Thomas Hardy, par exemple, se devaient de finir aussi mal que possi
470 ns », d’un Thomas Hardy, par exemple, se devaient de finir aussi mal que possible ? Non, car le christianisme se passe dan
471 est pas le christianisme. Et l’on serait en droit de prétendre qu’un roman pessimiste à la Thomas Hardy a plus de chances
472 e qu’un roman pessimiste à la Thomas Hardy a plus de chances d’être chrétien qu’un quelconque happy end soi-disant édifian
473 an pessimiste à la Thomas Hardy a plus de chances d’ être chrétien qu’un quelconque happy end soi-disant édifiant s’il est
474 s’il est certain que l’Évangile et ses promesses de salut sont seuls capables de donner à l’homme une vision réaliste de
475 ile et ses promesses de salut sont seuls capables de donner à l’homme une vision réaliste de son sort terrestre, et le sob
476 capables de donner à l’homme une vision réaliste de son sort terrestre, et le sobre courage d’avouer sa dégradation. Un v
477 aliste de son sort terrestre, et le sobre courage d’ avouer sa dégradation. Un vrai roman chrétien est d’abord réaliste. Ca
478 la nature et ses abîmes, si l’on veut être à même d’ y voir les marques du surnaturel. La grâce n’intervient pas ailleurs q
479 érance qui le transcende et qui le juge. On a dit de Sara Alelia que c’est un roman de la grâce : oui, mais c’est aussi, e
480 juge. On a dit de Sara Alelia que c’est un roman de la grâce : oui, mais c’est aussi, et d’abord, un roman de la perditio
481 âce : oui, mais c’est aussi, et d’abord, un roman de la perdition. J’y vois une suite d’illustrations vivantes du fameux p
482 ord, un roman de la perdition. J’y vois une suite d’ illustrations vivantes du fameux paradoxe luthérien qui est au centre
483 es du fameux paradoxe luthérien qui est au centre de la Réforme : simul peccator et justus. Kierkegaard nous rappelle que
484 s prendre où nous sommes. C’est le charme profond de Selma Lagerlöf qui revit dans ces peintures d’une Laponie lointaine e
485 nd de Selma Lagerlöf qui revit dans ces peintures d’ une Laponie lointaine et d’une humanité si proche. Moins d’art peut-êt
486 vit dans ces peintures d’une Laponie lointaine et d’ une humanité si proche. Moins d’art peut-être, je veux dire moins d’ap
487 onie lointaine et d’une humanité si proche. Moins d’ art peut-être, je veux dire moins d’apparent lyrisme que chez l’auteur
488 proche. Moins d’art peut-être, je veux dire moins d’ apparent lyrisme que chez l’auteur de Gösta Berling ; mais une sobriét
489 x dire moins d’apparent lyrisme que chez l’auteur de Gösta Berling ; mais une sobriété qui vous saisit le cœur, à chaque p
490 vous saisit le cœur, à chaque page. Toute une vie de femme se déroule sur un rythme large à travers un peuple de personnag
491 e déroule sur un rythme large à travers un peuple de personnages vivement contrastés, et des paysages baignés d’une longue
492 ages vivement contrastés, et des paysages baignés d’ une longue lumière boréale. Cette femme n’est pas un ange ni une saint
493 te. Elle a péché gravement, elle a touché le fond de la détresse humaine. C’est un vieux pasteur un peu ivrogne, un vieil
494 ubliable création, ce Norenius ! — qui prend soin d’ elle au temps de son malheur. Puis une grâce vient dans sa vie, et dés
495 et désormais l’accompagne en secret tout au long de cette chronique. On voit naître et grandir un fils, puis les enfants
496 voit naître et grandir un fils, puis les enfants d’ une troisième génération. (C’est un des grands pouvoirs des romanciers
497 un des grands pouvoirs des romanciers du Nord que d’ introduire la durée d’une vie comme protagoniste du drame.) Des fragme
498 des romanciers du Nord que d’introduire la durée d’ une vie comme protagoniste du drame.) Des fragments du journal de Sara
499 protagoniste du drame.) Des fragments du journal de Sara commentent et rythment le déroulement de cette légende de la vie
500 nal de Sara commentent et rythment le déroulement de cette légende de la vie quotidienne. Vie quotidienne, réalisme, pessi
501 ntent et rythment le déroulement de cette légende de la vie quotidienne. Vie quotidienne, réalisme, pessimisme. Je vois bi
502 e ces expressions dans nos esprits encore marqués de préjugés naturalistes. On a voulu nous faire croire que la vie quotid
503 croire que la vie quotidienne était le contraire de la poésie, et qu’être réaliste c’était ne rien voir d’autre que le se
504 poésie, et qu’être réaliste c’était ne rien voir d’ autre que le sexe et l’argent dans l’existence humaine. Cette espèce d
505 t l’argent dans l’existence humaine. Cette espèce de naturalisme est le fruit d’un ressentiment que les excès idéalistes e
506 humaine. Cette espèce de naturalisme est le fruit d’ un ressentiment que les excès idéalistes expliquent sans le légitimer.
507 leversante, une poésie qui naît des faits, jamais d’ un commentaire de l’auteur. La danse de la petite Eva Margareta, chaus
508 oésie qui naît des faits, jamais d’un commentaire de l’auteur. La danse de la petite Eva Margareta, chaussée de galoches t
509 ts, jamais d’un commentaire de l’auteur. La danse de la petite Eva Margareta, chaussée de galoches trop grandes, dans le t
510 ur. La danse de la petite Eva Margareta, chaussée de galoches trop grandes, dans le taudis où son vieux père se saoule et
511 qu’on porte sur le monde. Le regard « objectif » de nos naturalistes appauvrit tout, faute de vouloir imaginer. Ils croie
512 e alors qu’ils décrivent simplement l’impuissance de leur propre cœur. Le regard « réaliste » de Hildur Dixetius a su voir
513 sance de leur propre cœur. Le regard « réaliste » de Hildur Dixetius a su voir dans la vie quotidienne des drames singulie
514 ir dans la vie quotidienne des drames singuliers, de bizarres et profondes folies, l’originalité bouleversante des êtres,
515 iginalité bouleversante des êtres, qu’il s’agisse d’ un grand évêque ou de cette fille de ferme « au mince visage de belett
516 te des êtres, qu’il s’agisse d’un grand évêque ou de cette fille de ferme « au mince visage de belette » qui enterre son e
517 u’il s’agisse d’un grand évêque ou de cette fille de ferme « au mince visage de belette » qui enterre son enfant dans la n
518 êque ou de cette fille de ferme « au mince visage de belette » qui enterre son enfant dans la neige avec une sorte d’innoc
519 i enterre son enfant dans la neige avec une sorte d’ innocence animale. La superstition rôde dans ces campagnes désertiques
520 la neige tombe, effaçant toutes traces », symbole d’ une miséricorde lumineuse, dont on dirait qu’elle est le vrai sujet de
521 mineuse, dont on dirait qu’elle est le vrai sujet de ce grand livre. Le silence à peu près général de la critique à propos
522 de ce grand livre. Le silence à peu près général de la critique à propos d’une telle œuvre donnerait lieu à des conclusio
523 tis. (Éditions « Je sers ».) h. Rougemont Denis de , « [Compte rendu] Au sujet d’un roman : Sara Alelia  », Les Nouvelles
524 h. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Au sujet d’ un roman : Sara Alelia  », Les Nouvelles littéraires, Paris, 3 novembr
525 ires, Paris, 3 novembre 1934, p. 3. i. Une note de lecture plus courte du même roman a également paru dans le Journal de
526 te du même roman a également paru dans le Journal de Genève du 25 mai 1934.
7 1934, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Une histoire de la Réforme en France (15 décembre 1934)
527 Une histoire de la Réforme en France (15 décembre 1934)j Certes, la grandeur d’une
528 France (15 décembre 1934)j Certes, la grandeur d’ une Église et sa force ne résident pas dans son histoire, mais dans sa
529 e, mais dans sa vérité, c’est-à-dire dans l’objet de sa foi. Mais de cette force et de cette grandeur il est permis de rec
530 vérité, c’est-à-dire dans l’objet de sa foi. Mais de cette force et de cette grandeur il est permis de rechercher les témo
531 re dans l’objet de sa foi. Mais de cette force et de cette grandeur il est permis de rechercher les témoignages dans l’ord
532 de cette force et de cette grandeur il est permis de rechercher les témoignages dans l’ordre de la civilisation, et il est
533 permis de rechercher les témoignages dans l’ordre de la civilisation, et il est légitime d’en restaurer la mémoire, pourvu
534 ns l’ordre de la civilisation, et il est légitime d’ en restaurer la mémoire, pourvu que l’on n’y cherche pas de vains prét
535 aurer la mémoire, pourvu que l’on n’y cherche pas de vains prétextes à se glorifier d’un passé bien passé, et dont il rest
536 n’y cherche pas de vains prétextes à se glorifier d’ un passé bien passé, et dont il resterait à prouver qu’on est digne. L
537 rait à prouver qu’on est digne. Le meilleur moyen d’ éviter ce danger serait sans doute d’envisager l’histoire d’une religi
538 illeur moyen d’éviter ce danger serait sans doute d’ envisager l’histoire d’une religion dans la perspective de sa théologi
539 e danger serait sans doute d’envisager l’histoire d’ une religion dans la perspective de sa théologie ; le rappel constant
540 ger l’histoire d’une religion dans la perspective de sa théologie ; le rappel constant du dogme suffirait, dans le cas de
541 e rappel constant du dogme suffirait, dans le cas de l’Église protestante, à rétablir la valeur relative des faits, valeur
542 , à rétablir la valeur relative des faits, valeur de témoignage, sans cesse rapportée à la foi, dont Dieu seul juge. John
543 le seul reproche sérieux que je me sente le droit de formuler devant sa monumentale Histoire de la Réforme française. Plus
544 droit de formuler devant sa monumentale Histoire de la Réforme française. Plus encore que le premier tome de cet ouvrage
545 éforme française. Plus encore que le premier tome de cet ouvrage (des origines à l’édit de Nantes), le second tome qui vie
546 , le second tome qui vient de paraître10 témoigne de la volonté qu’avait l’auteur de ne décrire que les effets sociaux, po
547 raître10 témoigne de la volonté qu’avait l’auteur de ne décrire que les effets sociaux, politiques et culturels de la Réfo
548 e que les effets sociaux, politiques et culturels de la Réforme, sans les rapporter à l’évolution parallèle du dogme dans
549 ’Église. De même, John Viénot laisse délibérément de côté tout ce que l’abbé Bremond appelait l’histoire du sentiment reli
550 re du sentiment religieux, et il nous sera permis de souhaiter que cette lacune suscite un Bremond protestant, ne fût-ce q
551 oit de Calvin. John Viénot, pasteur et professeur de théologie, a réussi le tour de force de parler de la Réforme d’une ma
552 teur et professeur de théologie, a réussi le tour de force de parler de la Réforme d’une manière si objective, si impartia
553 rofesseur de théologie, a réussi le tour de force de parler de la Réforme d’une manière si objective, si impartiale, si sp
554 de théologie, a réussi le tour de force de parler de la Réforme d’une manière si objective, si impartiale, si spectaculair
555 a réussi le tour de force de parler de la Réforme d’ une manière si objective, si impartiale, si spectaculaire, pourrait-on
556 n ne voit guère en quoi son Histoire se distingue de celle qu’eût pu écrire un savant laïque épris de tolérance, teinté de
557 de celle qu’eût pu écrire un savant laïque épris de tolérance, teinté de renanisme, et considérant les conquêtes de la Ré
558 crire un savant laïque épris de tolérance, teinté de renanisme, et considérant les conquêtes de la Réforme comme autant de
559 teinté de renanisme, et considérant les conquêtes de la Réforme comme autant de conquêtes de la liberté de conscience en g
560 sidérant les conquêtes de la Réforme comme autant de conquêtes de la liberté de conscience en général, plutôt que de la fo
561 conquêtes de la Réforme comme autant de conquêtes de la liberté de conscience en général, plutôt que de la foi. Ceci dit,
562 a Réforme comme autant de conquêtes de la liberté de conscience en général, plutôt que de la foi. Ceci dit, l’on ne saurai
563 e la liberté de conscience en général, plutôt que de la foi. Ceci dit, l’on ne saurait assez louer la science et les scrup
564 sez louer la science et les scrupules historiques de Viénot. La réserve dont il fait preuve dans tous ses jugements, l’att
565 ntaire des condamnations qu’il ne peut s’empêcher de porter parfois, tout cet effort d’impartialité systématique qui reste
566 eut s’empêcher de porter parfois, tout cet effort d’ impartialité systématique qui restera la marque des historiens du xixe
567 cle finissant, n’enlève rien à l’intérêt puissant de ce gros volume. Mais aussi, la substance historique qu’il nous offre
568 ssi, la substance historique qu’il nous offre est de celles qui n’ont pas besoin de condiments pour produire leur brûlante
569 ’il nous offre est de celles qui n’ont pas besoin de condiments pour produire leur brûlante saveur. Rien de plus excitant
570 ment à cause des plongées directes qu’elle permet d’ opérer dans la vie publique et privée du xviie siècle, mais encore pa
571 eur se voit incité à imaginer ce qu’il fut advenu de la France si l’édit avait été observé, s’il n’avait pas été révoqué,
572 autres meurtriers, un Ravaillac… Le bel irénisme de Viénot, la réserve qu’il observe avec constance dans son récit ne peu
573 ans son récit ne peuvent en somme que donner plus de vigueur au langage des faits, cités ici en très grand nombre à chaque
574 d siècle » tel que nous l’ont décrit les fervents de Louis XIV et certains défenseurs de la politique romaine. La persécut
575 les fervents de Louis XIV et certains défenseurs de la politique romaine. La persécution des protestants ne fut pas l’œuv
576 patriotes savaient bien que la présence à la cour d’ un Sully ou d’un Duplessis-Mornay, représentants d’une Église légale e
577 ient bien que la présence à la cour d’un Sully ou d’ un Duplessis-Mornay, représentants d’une Église légale et particulière
578 ’un Sully ou d’un Duplessis-Mornay, représentants d’ une Église légale et particulièrement fidèle au roi, ne pouvait nuire
579 au roi, ne pouvait nuire au prestige et à l’ordre de l’État. D’autre part, tout ce qui fut entrepris de bon, sous Henri IV
580 e l’État. D’autre part, tout ce qui fut entrepris de bon, sous Henri IV, dans le domaine de la politique européenne, fut l
581 entrepris de bon, sous Henri IV, dans le domaine de la politique européenne, fut l’œuvre personnelle des réformés. Le « g
582 nd dessein » qu’avait conçu Béthune pouvait faire de la France la première organisatrice d’une Europe fédéralisée. Mais le
583 vait faire de la France la première organisatrice d’ une Europe fédéralisée. Mais le virus qu’un Mazarin, un Concini ou un
584 France au début du xviie siècle, c’est le virus de l’étatisme totalitaire, c’est l’idée fort peu française de l’unité à
585 isme totalitaire, c’est l’idée fort peu française de l’unité à tout prix et dans tous les ordres, au mépris de toutes les
586 té à tout prix et dans tous les ordres, au mépris de toutes les diversités organiques et fécondes. C’est cette idéologie i
587 et qui finit par triompher lors de la révocation de l’édit de Nantes. Mais alors cette révocation n’apparaît plus que com
588 e comme un épisode, le plus marquant il est vrai, de toute l’évolution politique de la royauté absolue vers « l’État total
589 quant il est vrai, de toute l’évolution politique de la royauté absolue vers « l’État totalitaire ». Il faut ici risquer u
590 t sans doute anachronique, mais que tout le livre de Viénot nous autorise à prononcer ; c’est le mot de fascisme. Le paral
591 e Viénot nous autorise à prononcer ; c’est le mot de fascisme. Le parallélisme qu’on peut facilement établir entre la « ré
592 nt établir entre la « révocation » et les mesures de « mise au pas » prises par Hitler me paraît riche d’enseignements trè
593 « mise au pas » prises par Hitler me paraît riche d’ enseignements très actuels. Chez Louis XIV comme chez Hitler, ce n’est
594 ouis XIV comme chez Hitler, ce n’est pas un souci d’ unité religieuse qui domine : la religion leur est simple prétexte ; m
595 eligion leur est simple prétexte ; mais il s’agit d’ établir à tout prix un cadre national centralisé, géométrique, conçu d
596 violence. Pour soutenir un tel dessein, il s’agit d’ établir un droit nouveau qui ne soit plus fondé que sur la seule volon
597 ue sur la seule volonté du dictateur. Déjà ce mot de Mazarin paraît donner comme une formule anticipée du droit « nazi » :
598 de ces prétentions toutes nouvelles, les réformés de France ne cessèrent, dès le début, de dresser une protestation dont l
599 es réformés de France ne cessèrent, dès le début, de dresser une protestation dont les termes n’ont, hélas ! pas vieilli.
600 , à ce propos, un texte assez frappant. Il s’agit de la requête adressée au roi par des protestants auxquels on refusait l
601 point étrangers. Ce sont François, vrais François de nature comme vous, mieux que vous d’affection, s’il est vrai que l’hu
602 ais François de nature comme vous, mieux que vous d’ affection, s’il est vrai que l’humanité est la propre affection des Fr
603 ieu ! parmi quels tigres vivons-nous… qu’une cour de Parlement se licencie ainsi contre le droit naturel, contre l’honnête
604 universellement humain, n’est-il pas significatif de la nature du danger qu’on courait ? La conclusion de cette requête mé
605 la nature du danger qu’on courait ? La conclusion de cette requête mérite d’ailleurs d’être citée aussi, pour sa seule bea
606 La conclusion de cette requête mérite d’ailleurs d’ être citée aussi, pour sa seule beauté : Lequel nous vaudra donc mieu
607 rès avoir décrit l’enterrement nocturne et secret d’ une de ses coreligionnaires, il conclut par ces mots : Nous sommes ch
608 oir décrit l’enterrement nocturne et secret d’une de ses coreligionnaires, il conclut par ces mots : Nous sommes chassés
609 s, il conclut par ces mots : Nous sommes chassés de la ville et jetés comme des ordures dans un coin. C’est bien d’ailleu
610 Louange à Dieu aux siècles des siècles. Le livre de John Viénot nous donne toute une anthologie de pareils traits. Grâce
611 re de John Viénot nous donne toute une anthologie de pareils traits. Grâce à quoi l’on ressort de cette lecture plus édifi
612 ogie de pareils traits. Grâce à quoi l’on ressort de cette lecture plus édifié encore que révolté. Mais ce n’est pas peu d
613 olté. Mais ce n’est pas peu dire. 10. Histoire de la Réforme française, tome II : De l’édit de Nantes à sa révocation,
614 10. Histoire de la Réforme française, tome II : De l’édit de Nantes à sa révocation, Librairie Fischbacher. La même libr
615 même librairie publie une intéressante plaquette de H. Dartigue sur la vie et l’œuvre de J. Viénot. j. Rougemont Denis
616 te plaquette de H. Dartigue sur la vie et l’œuvre de J. Viénot. j. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Une histoire de
617 vie et l’œuvre de J. Viénot. j. Rougemont Denis de , « [Compte rendu] Une histoire de la Réforme en France », Les Nouvell
618 Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Une histoire de la Réforme en France », Les Nouvelles littéraires, Paris, 15 décembre
8 1935, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Kierkegaard, Dostoïevski, Barth (23 février 1935)
619 les apporte au temps marqué. Peut-être, l’examen de ces « témoins » à la fois si divers et si profondément semblables nou
620 dément semblables nous permettra-t-il aujourd’hui de préciser la direction et la nature de ce courant. L’Esprit souffle où
621 aujourd’hui de préciser la direction et la nature de ce courant. L’Esprit souffle où il veut. Les prévisions des historien
622 souffle où il veut. Les prévisions des historiens de la pensée ne semblent pas peser bien lourd sur ses décisions souverai
623 e tant de bons esprits, chez nous, vers la pensée de Kierkegaard, surgissant lentement, terriblement, des ombres du Siècle
624 de ? Qui prévoyait, voici dix ans, l’intervention de ce génie considérable, la position de cette question plutôt gênante q
625 ntervention de ce génie considérable, la position de cette question plutôt gênante qu’est son œuvre en plein cœur de nos r
626 ion plutôt gênante qu’est son œuvre en plein cœur de nos ratiocinations de clercs retraités de la vie ? Mais le plus curie
627 est son œuvre en plein cœur de nos ratiocinations de clercs retraités de la vie ? Mais le plus curieux de l’affaire, n’est
628 in cœur de nos ratiocinations de clercs retraités de la vie ? Mais le plus curieux de l’affaire, n’est-ce pas que Kierkega
629 clercs retraités de la vie ? Mais le plus curieux de l’affaire, n’est-ce pas que Kierkegaard nous soit présenté aujourd’hu
630 ophes laïques tout à fait libérés des disciplines de la foi, au moment décisif où, d’autre part, la pensée de son grand di
631 oi, au moment décisif où, d’autre part, la pensée de son grand disciple et continuateur, Karl Barth, pénètre et fait reviv
632 une vive lumière sur le secret dernier du message d’ un romancier : Dostoïevski. Prenons-y garde, une nouvelle constellatio
633 garde, une nouvelle constellation monte au zénith de notre âge. Il s’agit maintenant d’interpréter son signe. ⁂ Crainte e
634 onte au zénith de notre âge. Il s’agit maintenant d’ interpréter son signe. ⁂ Crainte et Tremblement, qui vient de paraîtr
635 e paraître dans la belle collection philosophique de MM. Lavelle et Le Senne, appartient à la première période de la pensé
636 lle et Le Senne, appartient à la première période de la pensée kierkegaardienne. La question que pose cette œuvre, c’est c
637 ne. La question que pose cette œuvre, c’est celle de la foi, dans l’absolu. Ce n’est pas encore la question que Kierkegaar
638 e Kierkegaard adressera plus tard à la chrétienté de son temps : la foi étant ce que j’ai dit – le paradoxe le plus inouï
639 iens ? Servez-vous Dieu, ou bien vous servez-vous de Dieu ? Question terriblement gênante, insupportable. La vocation sing
640 nt gênante, insupportable. La vocation singulière de cet homme s’épuisera dans le seul acte de l’imposer. Après cet acte,
641 gulière de cet homme s’épuisera dans le seul acte de l’imposer. Après cet acte, semblable au prince Hamlet — autre Danois 
642 nce Hamlet — autre Danois ! — il tombera, certain d’ avoir accompli sa mission. Dans Crainte et Tremblement, Kierkegaard se
643 , dont la philosophie obsède à ce moment l’esprit de Kierkegaard, Hegel esquive la question, la supprime implicitement. Il
644 e fait pas une théorie, elle répond par l’exemple d’ Abraham. Et c’est à la méditation de cet exemple que Kierkegaard va co
645 par l’exemple d’Abraham. Et c’est à la méditation de cet exemple que Kierkegaard va consacrer son livre. Abraham, le « pèr
646 osé l’absurde. Dieu lui a donné un fils, à l’âge de 70 ans. Il n’a pas ri — comme Sarah, sa femme — de ce miracle. Et mai
647 e 70 ans. Il n’a pas ri — comme Sarah, sa femme — de ce miracle. Et maintenant Dieu lui commande d’offrir Isaac en sacrifi
648 — de ce miracle. Et maintenant Dieu lui commande d’ offrir Isaac en sacrifice ! Abraham ne se révolte pas. Il croit en Die
649 maine. Il selle son âne et s’en va vers les monts de Morija, pour sacrifier son fils unique. Il le fait « en vertu de l’ab
650 ait-il au-dessus du général ? Serait-il affranchi de l’éthique ? Mais alors, comment donc comprendrait-il son acte ? Vingt
651 t ce paradoxe monstrueux. Il n’y a donc personne de la taille d’Abraham, personne qui puisse le comprendre ? Si, pourtan
652 monstrueux. Il n’y a donc personne de la taille d’ Abraham, personne qui puisse le comprendre ? Si, pourtant. Les pasteu
653 prendre ? Si, pourtant. Les pasteurs ont coutume de l’offrir en exemple. Car enfin il n’a pas tué : Dieu l’arrête au dern
654 lier prêt pour le sacrifice… On célèbre la grâce de Dieu qui a donné Isaac pour la seconde fois ; on ne voit, dans toute
655 oublie qu’Abraham fit le chemin lentement, au pas de son âne, qu’il eut trois jours de voyage et qu’il lui fallut un peu d
656 ntement, au pas de son âne, qu’il eut trois jours de voyage et qu’il lui fallut un peu de temps pour fendre le bois, lier
657 et aiguiser le couteau. On oublie cela, on fait d’ Abraham « un personnage insignifiant » et le comique c’est qu’on persi
658 ffrir en exemple aux chrétiens ! Mais la grandeur d’ Abraham, sa signification démesurée et impensable, c’est qu’il reçut I
659 impensable, c’est qu’il reçut Isaac en récompense d’ un acte « fou » et revint avec lui dans la vie comme si rien ne s’étai
660 u de l’absurde ». C’est là le sort du « chevalier de la foi », le sort du chrétien véritable. Mais qui peut dire : j’ai ce
661 hilosophique que Kierkegaard enchaîne à l’exemple d’ Abraham est admirablement analysée dans l’introduction de Jean Wahl qu
662 am est admirablement analysée dans l’introduction de Jean Wahl qui réussit ce tour de force d’exposer clairement, sans la
663 s l’introduction de Jean Wahl qui réussit ce tour de force d’exposer clairement, sans la trahir, la dialectique « abyssale
664 duction de Jean Wahl qui réussit ce tour de force d’ exposer clairement, sans la trahir, la dialectique « abyssale » de cet
665 ment, sans la trahir, la dialectique « abyssale » de cette œuvre. Personne n’a fait plus que Jean Wahl pour faire connaîtr
666 our faire connaître à l’élite française la pensée de Søren Kierkegaard : c’est un titre qui compte, et dont la pensée prot
667 dont le titre contraste singulièrement avec celui de Kierkegaard. Barth s’adresse à des auditeurs chrétiens, à des hommes
668 u divinisé, échappant en quelque manière aux lois de ce monde perdu. Sa sanctification ne doit pas le conduire à je ne sai
669 s une construction qui s’élève au-dessus du reste de la vie. C’est toute profane et banale, la vie que chacun doit vivre à
670 Mais en quoi le chrétien se distinguera-t-il donc de l’incroyant ? En rien d’autre qu’en ceci : qu’il est appelé à rendre
671 se distinguera-t-il donc de l’incroyant ? En rien d’ autre qu’en ceci : qu’il est appelé à rendre témoignage « d’une part c
672 « d’une part contre la forme du siècle présent ; de l’autre, pour la forme du monde à venir ». Il reste dans le monde et
673 ion. Et voici que nous rejoignons l’idée centrale de Crainte et Tremblement. Qu’est-ce, en effet, que le « chevalier de la
674 mblement. Qu’est-ce, en effet, que le « chevalier de la foi », sinon celui qui vit pleinement cette vie, toutefois « en ve
675 ’est-à-dire en vertu de la transformation promise de ce monde. Apparemment il ne diffère des autres en rien. Mais il est o
676 alisme fondé dans le même paradoxe. La même façon de considérer l’homme à la fois tel qu’il est devant Dieu, hic et nunc,
677 et tel qu’il est revendiqué par Dieu à la limite de ses possibilités, là où paraît la grâce, in extremis. Car c’est à cha
678 la grâce, in extremis. Car c’est à chaque instant de la vie de la foi que se posent les questions dernières. Mais cette v
679 in extremis. Car c’est à chaque instant de la vie de la foi que se posent les questions dernières. Mais cette vision de l
680 osent les questions dernières. Mais cette vision de l’homme sans cesse mis en question par l’Autre, n’est-ce point encore
681 tion par l’Autre, n’est-ce point encore la vision de Dostoïevski ? Ses héros ne viennent-ils pas à nous comme de grands qu
682 vski ? Ses héros ne viennent-ils pas à nous comme de grands questionneurs, comme des êtres orientés vers autre chose qu’eu
683 s son essai intitulé : Dostoïevski ou les confins de l’homme. Le grand succès qu’a remporté ce petit livre en Allemagne mé
684 qu’a remporté ce petit livre en Allemagne mérite d’ être confirmé par notre public littéraire. En quelques chapitres très
685 s très simples, Thurneysen sait atteindre au cœur d’ une œuvre entre toutes complexe. C’est que, plus nettement encore que
686 plus nettement encore que Berdiaev dans L’Esprit de Dostoïevski, le professeur de Bâle a su l’envisager dans une perspect
687 diaev dans L’Esprit de Dostoïevski, le professeur de Bâle a su l’envisager dans une perspective chrétienne, hors de laquel
688 ne, hors de laquelle cette œuvre resterait privée de sens, ou seulement chaotique, morbide. Ce que nous avons cherché dan
689 même qu’une seule et grande question, la question de l’origine de sa vie, la question de Dieu. Tous les héros de Dostoïevs
690 eule et grande question, la question de l’origine de sa vie, la question de Dieu. Tous les héros de Dostoïevski apparaisse
691 , la question de l’origine de sa vie, la question de Dieu. Tous les héros de Dostoïevski apparaissent malades, comme bless
692 ne de sa vie, la question de Dieu. Tous les héros de Dostoïevski apparaissent malades, comme blessés d’une atteinte profon
693 e Dostoïevski apparaissent malades, comme blessés d’ une atteinte profonde, portant comme une plaie béante le problème de l
694 fonde, portant comme une plaie béante le problème de leur existence, ce problème qu’ils ne peuvent résoudre jusqu’à ce que
695 hurneysen soutient avec une passion convaincante. De divers côtés l’on m’a demandé de préciser, à propos d’une de mes réce
696 on convaincante. De divers côtés l’on m’a demandé de préciser, à propos d’une de mes récentes chroniques, ce qu’il fallait
697 ôtés l’on m’a demandé de préciser, à propos d’une de mes récentes chroniques, ce qu’il fallait entendre par le protestanti
698 , ce qu’il fallait entendre par le protestantisme de Dostoïevski. Je ne saurais mieux répondre qu’en renvoyant au livre de
699 e saurais mieux répondre qu’en renvoyant au livre de M. Thurneysen. La conception « dialectique » de l’homme illustrée par
700 e de M. Thurneysen. La conception « dialectique » de l’homme illustrée par les personnages de Dostoïevski, commentée sur l
701 ctique » de l’homme illustrée par les personnages de Dostoïevski, commentée sur le plan théologique par Karl Barth, et sur
702 e plan théologique par Karl Barth, et sur le plan d’ une poésie philosophique par Kierkegaard, c’est la conception même de
703 ophique par Kierkegaard, c’est la conception même de la vie du chrétien selon Calvin, c’est surtout le simul peccator et j
704 itions « Je sers »). – Dostoïevski ou les confins de l’homme, par Édouard Thurneysen, traduit par P. Maury (Éditions « Je
705 aury (Éditions « Je sers »). k. Rougemont Denis de , « [Compte rendu] Kierkegaard, Dostoïevski, Barth », Les Nouvelles li
9 1935, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Trois traités de Jean Calvin (20 juillet 1935)
706 Trois traités de Jean Calvin (20 juillet 1935)l On nous montre un Calvin maigre et
707 loin de revenir sur le premier jugement, on fait de cette image un nouveau cliché polémique : la Réforme se voit assimilé
708 ur ceux qui jugent des vérités les plus profondes de la foi selon le poids de leurs représentants ! Or, cette espèce est p
709 rités les plus profondes de la foi selon le poids de leurs représentants ! Or, cette espèce est plus nombreuse qu’on ne pe
710 ce est plus nombreuse qu’on ne pense. Que sait-on de Calvin dans notre grand public, sinon qu’il avait les joues creuses,
711 a donné lieu par contre à une véritable débauche de considérations très vaguement physiognomoniques sur le teint et la co
712 t physiognomoniques sur le teint et la complexion de l’auteur de l’Institution. Ce qui ne fait guère honneur à notre liber
713 oniques sur le teint et la complexion de l’auteur de l’Institution. Ce qui ne fait guère honneur à notre liberté d’esprit.
714 ion. Ce qui ne fait guère honneur à notre liberté d’ esprit. Mais je m’en voudrais de déplorer la décadence culturelle qui
715 r à notre liberté d’esprit. Mais je m’en voudrais de déplorer la décadence culturelle qui marque la plupart des écrits de
716 dence culturelle qui marque la plupart des écrits de ce temps, au moment où certaine renaissance du calvinisme laisse espé
717 ur les années qui viennent, un essor tout nouveau de la pensée chrétienne. On aurait tort d’assimiler cette renaissance à
718 t nouveau de la pensée chrétienne. On aurait tort d’ assimiler cette renaissance à la belle floraison néo-thomiste. Il n’es
719 elle floraison néo-thomiste. Il n’est pas inutile de marquer les raisons qui, du point de vue protestant, rendent ce paral
720 ce parallèle irrecevable. Les grands théologiens de la Réforme ne sont pas à nos yeux des chefs d’école ; ni des docteurs
721 ns de la Réforme ne sont pas à nos yeux des chefs d’ école ; ni des docteurs dont la pensée fait loi, une fois sanctionnée
722 témoin ? C’est un homme qui n’est pas l’inventeur de son message, mais qui renvoie sans trêve au-delà de lui-même, au-delà
723 son message, mais qui renvoie sans trêve au-delà de lui-même, au-delà des formules humaines de ce message, à la réalité q
724 u-delà de lui-même, au-delà des formules humaines de ce message, à la réalité qui le juge et nous sauve. Faire retour à Ca
725 taines formules dogmatiques ; mais c’est, au-delà de ces formules et dans l’orientation où elles nous placent, remonter à
726 nous placent, remonter à cette origine permanente de l’Église qu’est la révélation évangélique. Le calvinisme ou le luthér
727 e ou le luthérisme, ce sont bien moins des normes de pensée que des chemins vers l’Évangile. L’Évangile seul, éclairé par
728 angile seul, éclairé par l’Esprit, reste la norme de toute théologie, fût-elle la plus orthodoxe. Barth, on le sait, ne se
729 lus orthodoxe. Barth, on le sait, ne se lasse pas de comparer le rôle de ces témoins théologiques au Jean-Baptiste de la C
730 , on le sait, ne se lasse pas de comparer le rôle de ces témoins théologiques au Jean-Baptiste de la Crucifixion de Grünew
731 isse et que je diminue. » C’est donc sous l’angle de leur vocation particulière, et sous cet angle seul, qu’il nous devien
732 sous cet angle seul, qu’il nous devient loisible de parler de ces hommes sans tomber dans l’extravagance. Calvin homme, C
733 angle seul, qu’il nous devient loisible de parler de ces hommes sans tomber dans l’extravagance. Calvin homme, Calvin écri
734 omme, Calvin écrivain, nous ne nous priverons pas de l’estimer à nos mesures humaines et littéraires ; mais ce qui importe
735 raires ; mais ce qui importe plus que tout, c’est d’ indiquer d’abord la « clé » qui donne leur exacte valeur à nos variati
736 ette clé, c’est la vocation que Jean Calvin reçut de réformer l’Église. Tout ceci est fort bien exposé par M. Albert-Mari
737 tés que l’on vient de rééditer12. Le grand mérite de cette introduction, c’est qu’elle nous ouvre, en une quinzaine de pag
738 ction, c’est qu’elle nous ouvre, en une quinzaine de pages, les principales perspectives de « l’univers » calvinien. Il fa
739 quinzaine de pages, les principales perspectives de « l’univers » calvinien. Il faut bien avouer que les commentateurs no
740 avaient donné jusqu’ici une image assez étriquée de cette Weltanschauung à la fois biblique et classique, au sens le plus
741 biblique et classique, au sens le plus vigoureux de ce terme. En la replaçant dans l’atmosphère violente et trouble de la
742 a replaçant dans l’atmosphère violente et trouble de la Renaissance, M. Schmidt va lui restituer ses trois dimensions prim
743 ons alors Calvin faire face d’une part à l’Église de Rome et c’est l’Épître à Sadolet ; d’autre part, aux premières déviat
744 Sadolet ; d’autre part, aux premières déviations de la doctrine sacramentaire à l’intérieur de la Réforme et c’est le Tra
745 re à l’intérieur de la Réforme et c’est le Traité de la cène ; enfin, aux diverses mystiques de l’humanisme antichrétien e
746 Traité de la cène ; enfin, aux diverses mystiques de l’humanisme antichrétien et c’est le Traité des scandales. Ce troisiè
747 é depuis sa parution en 1550. « Originale mixture de passion contenue et de raison déchaînée », il sera pour beaucoup l’oc
748 1550. « Originale mixture de passion contenue et de raison déchaînée », il sera pour beaucoup l’occasion d’une véritable
749 son déchaînée », il sera pour beaucoup l’occasion d’ une véritable découverte de Calvin. Il nous donne un puissant raccourc
750 ur beaucoup l’occasion d’une véritable découverte de Calvin. Il nous donne un puissant raccourci de toute la polémique de
751 te de Calvin. Il nous donne un puissant raccourci de toute la polémique de la Réforme contre les libertins et les anabapti
752 donne un puissant raccourci de toute la polémique de la Réforme contre les libertins et les anabaptistes, contre les occul
753 rtins et les anabaptistes, contre les occultistes de l’école d’Agrippa, contre les Rabelais et Des Périers qui abandonnent
754 s anabaptistes, contre les occultistes de l’école d’ Agrippa, contre les Rabelais et Des Périers qui abandonnent la cause p
755 Il y a ceux pour lesquels les dogmes sont autant d’ occasions de chopper : Quant à ce que la Prédestination est comme une
756 pour lesquels les dogmes sont autant d’occasions de chopper : Quant à ce que la Prédestination est comme une mer de scan
757 uant à ce que la Prédestination est comme une mer de scandales, d’où vient cela sinon de la folle curiosité des hommes ou
758 la Prédestination est comme une mer de scandales, d’ où vient cela sinon de la folle curiosité des hommes ou de leur outrec
759 comme une mer de scandales, d’où vient cela sinon de la folle curiosité des hommes ou de leur outrecuidance débordée ? Ca
760 nt cela sinon de la folle curiosité des hommes ou de leur outrecuidance débordée ? Calvin n’est guère partisan, on le voi
761 ordée ? Calvin n’est guère partisan, on le voit, de ce fameux libre examen dont on persiste à lui attribuer l’invention,
762 ur assez inexplicable. Mais les pires adversaires de l’Église ne sont pas toujours au-dehors. Voici ceux qui préfèrent la
763 attante : Je m’adresse à ceux qui abusent du nom de la chrétienté pour nourrir une paix fardée ! Voici ceux qui voudraie
764 ux qui voudraient confondre la véritable grandeur de l’Église avec « une façon de royaume mondain ». À ceux-là, Calvin rap
765 a véritable grandeur de l’Église avec « une façon de royaume mondain ». À ceux-là, Calvin rappellera que notre condition c
766 ctique : L’Église est ordonnée à cette condition de batailler continuellement sous la croix, tant qu’elle aura à cheminer
767 « baveries », et ceux « qui se ruent contre Dieu d’ une impétuosité enragée à la façon des frénétiques, et tombent en de g
768 enragée à la façon des frénétiques, et tombent en de grands abîmes ou se rompent le col en s’aheurtant ». Cet étonnant tra
769 rme contre Renaissance. Mais toutes les richesses de style que produisit ce siècle bouillonnant ont passé dans l’attaque d
770 t ce siècle bouillonnant ont passé dans l’attaque de Calvin : il a su prendre à l’adversaire ses meilleures armes. Au suje
771 comprendre, dans son essence, le génie littéraire de Calvin, ne doit jamais omettre que celui-ci se considérait comme mini
772 ns engager le dialogue avec toutes les catégories d’ hommes, avec toutes les espèces de créatures. Dialoguant toujours avec
773 les catégories d’hommes, avec toutes les espèces de créatures. Dialoguant toujours avec les plus divers interlocuteurs, i
774 eurs, il ne se range jamais, comme un littérateur de second ordre, aux lois d’une esthétique préconçue, mais il adopte tou
775 s, comme un littérateur de second ordre, aux lois d’ une esthétique préconçue, mais il adopte toujours la forme de discours
776 tique préconçue, mais il adopte toujours la forme de discours la plus propre, sinon à charmer du moins à toucher son antag
777 harmer du moins à toucher son antagoniste ; l’art de Calvin est fait de soumission absolue à l’objet proposé : tout en por
778 oucher son antagoniste ; l’art de Calvin est fait de soumission absolue à l’objet proposé : tout en portant la marque d’un
779 lue à l’objet proposé : tout en portant la marque d’ une des plus puissantes personnalités qui fut jamais, il se recrée tou
780 t dominé : telle serait la formule du classicisme de Calvin. D’une vivacité presque baroque dans les Scandales, orné et po
781 telle serait la formule du classicisme de Calvin. D’ une vivacité presque baroque dans les Scandales, orné et pompeux dans
782 peux dans l’Épître, sobre et grave dans le Traité de la Cène, ce style garde partout les vertus qui, sans doute, font le p
783 ans l’exposé des sic et non, enfin ce ton naturel de grandeur qui s’accommode des plus savoureux contrastes, coupant court
784 lus savoureux contrastes, coupant court aux élans de pure rhétorique, cet accent dont un romantisme tour à tour alangui ou
785 voluptueuse du xixe . Il m’apparaît que le style d’ un Calvin peut nous être un puissant roboratif. Et ceci pour deux bonn
786 ur deux bonnes raisons. D’abord Calvin était chef de parti ; qui plus est, fondateur d’Église ; donc doublement conscient
787 vin était chef de parti ; qui plus est, fondateur d’ Église ; donc doublement conscient de la responsabilité de ses paroles
788 t, fondateur d’Église ; donc doublement conscient de la responsabilité de ses paroles. Or, rien ne confère au langage une
789  ; donc doublement conscient de la responsabilité de ses paroles. Or, rien ne confère au langage une aussi poignante vertu
790 ge une aussi poignante vertu que cette conscience d’ une mission à remplir et d’un dialogue à soutenir avec l’époque. Notre
791 u que cette conscience d’une mission à remplir et d’ un dialogue à soutenir avec l’époque. Notre culture périt d’être par t
792 gue à soutenir avec l’époque. Notre culture périt d’ être par trop « irresponsable ». Peut-être nous faut-il revenir vers l
793 n’oublions pas que la plupart des écrits français de Calvin — c’est le cas de ces Trois traités — furent traduits par lui-
794 part des écrits français de Calvin — c’est le cas de ces Trois traités — furent traduits par lui-même du latin. D’où la je
795 traités — furent traduits par lui-même du latin. D’ où la jeunesse de cette langue et sa sobriété monumentale. Là encore,
796 traduits par lui-même du latin. D’où la jeunesse de cette langue et sa sobriété monumentale. Là encore, la leçon de Calvi
797 e et sa sobriété monumentale. Là encore, la leçon de Calvin serait celle d’un retour aux origines. Voilà la seule révoluti
798 ntale. Là encore, la leçon de Calvin serait celle d’ un retour aux origines. Voilà la seule révolution qui compte pour l’es
799 commander toutes les autres. 12. Trois traités de Jean Calvin. Préface de Jacques Pannier. Introduction de A.-M. Schmid
800 res. 12. Trois traités de Jean Calvin. Préface de Jacques Pannier. Introduction de A.-M. Schmidt. (Éditions « Je sers »
801 Calvin. Préface de Jacques Pannier. Introduction de A.-M. Schmidt. (Éditions « Je sers », Paris.) l. Rougemont Denis de
802 ditions « Je sers », Paris.) l. Rougemont Denis de , « [Compte rendu] Trois traités de Jean Calvin », Les Nouvelles litté
803 ougemont Denis de, « [Compte rendu] Trois traités de Jean Calvin », Les Nouvelles littéraires, Paris, 20 juillet 1935, p. 
10 1935, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Les mystiques allemands du xiiie au xixe siècle, par Jean Chuzeville (2 novembre 1935)
804 bre 1935)m n L’esprit occidental n’a jamais eu d’ unité harmonieuse : il est toujours tension entre deux pôles, qui d’ai
805 se déplacent sans cesse et parfois aussi changent de nom. On est tenté de résumer toutes ces tensions en une seule et uniq
806 se et parfois aussi changent de nom. On est tenté de résumer toutes ces tensions en une seule et unique opposition : mysti
807 tien fondamental : la foi. La foi est acte humain d’ obéissance en même temps qu’elle est don de Dieu ; elle s’oppose donc
808 humain d’obéissance en même temps qu’elle est don de Dieu ; elle s’oppose donc à toute mystique qui ne serait qu’une fuite
809 e, comme à toute action en révolte contre l’ordre de la Parole. En confondant la foi et la mystique, comme le fait par mal
810 i laisserons ses rêveries et nous nous chargerons de l’homme « dans ses limites charnelles et temporelles ». C’est aussi c
811 i ce que dit l’Évangile, où il n’est pas question de mysticisme. Ceci marqué, qui est plus qu’une réserve, il convient de
812 marqué, qui est plus qu’une réserve, il convient de remercier M. Chuzeville de nous avoir ouvert par son anthologie tout
813 e réserve, il convient de remercier M. Chuzeville de nous avoir ouvert par son anthologie tout un monde spirituel et poéti
814 hologie tout un monde spirituel et poétique plein de dangers et de merveilles. Le choix des textes me paraît des plus heur
815 n monde spirituel et poétique plein de dangers et de merveilles. Le choix des textes me paraît des plus heureux, la traduc
816 valis et Ruysbroeck mis à part ; et beaucoup sont de grands poètes, des philosophes terriblement concrets : Suso, Tauler,
817 ostique. Pour Paracelse, on s’étonnera sans doute de le voir figurer dans un choix de « mystiques », alors qu’il est le pr
818 nnera sans doute de le voir figurer dans un choix de « mystiques », alors qu’il est le premier défenseur de l’expérience.
819 mystiques », alors qu’il est le premier défenseur de l’expérience. Mais la beauté des textes cités fait pardonner bien vol
820 cités fait pardonner bien volontiers cette erreur de classification. En vérité, les mystiques allemands nous apparaissent
821 ure où ils annoncent le lyrisme et la philosophie d’ une des plus hautes périodes de l’esprit humain. J’entends le premier
822 et la philosophie d’une des plus hautes périodes de l’esprit humain. J’entends le premier romantisme allemand, encore si
823 d temps que nous rendions hommage à ce ver sacrum de l’esprit germanique. Il est grand temps que nous relevions ces titres
824 Il est grand temps que nous relevions ces titres de noblesse spirituelle momentanément méprisés par leurs héritiers direc
825 directs. Et cela vaudrait mieux, à coup sûr, que de rééditer des calomnies usées sur un Luther qu’on n’a jamais lu ; l’in
826 ur un Luther qu’on n’a jamais lu ; l’introduction de cette anthologie contient, à cet égard, de navrantes divagations ; Lu
827 uction de cette anthologie contient, à cet égard, de navrantes divagations ; Luther ancêtre du racisme, par exemple ! m.
828 e du racisme, par exemple ! m. Rougemont Denis de , « [Compte rendu] Jean Chuzeville, Les Mystiques allemands du XIIIe a
829 ires, Paris, 2 novembre 1935, p. 5. n. Une note de lecture sur le même livre a également paru dans la Nouvelle Revue fra
830 a également paru dans la Nouvelle Revue française d’ octobre 1935.
11 1936, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Le Problème du bien (12 septembre 1936)
831 n (12 septembre 1936)o Couronnant une carrière d’ auteur déjà longue — quarante-cinq volumes, sauf erreur — M. le pasteu
832 est actuellement le représentant le plus marquant d’ une famille dont les destins se confondirent durant tout le siècle der
833 voulut s’en prendre aux réformés, ne trouva rien de mieux que d’écrire un pamphlet contre la race des Monod, les traditio
834 prendre aux réformés, ne trouva rien de mieux que d’ écrire un pamphlet contre la race des Monod, les traditions, l’esprit
835 es Monod, les traditions, l’esprit et l’idéologie de cette « tribu ». Il semble que l’auteur du Problème du Bien 13 se soi
836 n glorieux devoir, et peut-être un malin plaisir, de soutenir les causes les plus vilipendées par ce furieux censeur païen
837 ndées par ce furieux censeur païen. Qu’il suffise de rappeler que le nom de Wilfred Monod évoque immédiatement, dans l’esp
838 nseur païen. Qu’il suffise de rappeler que le nom de Wilfred Monod évoque immédiatement, dans l’esprit de tout protestant,
839 Wilfred Monod évoque immédiatement, dans l’esprit de tout protestant, deux grands mouvements de pensée et d’action dont il
840 esprit de tout protestant, deux grands mouvements de pensée et d’action dont il fut l’un des principaux initiateurs : le c
841 t protestant, deux grands mouvements de pensée et d’ action dont il fut l’un des principaux initiateurs : le christianisme
842 énique et internationale née dans le « désarroi » de l’après-guerre, et qui trouva lors du fameux congrès de Stockholm sa
843 près-guerre, et qui trouva lors du fameux congrès de Stockholm sa première réalisation concrète. À ces deux causes illustr
844 e troisième, qui les commande directement : celle d’ un certain humanisme chrétien. L’ouvrage littéralement énorme (hors de
845 un titre dont l’apparence paradoxale est typique de l’esprit de M. Monod, figure sans aucun doute le document le plus com
846 nt l’apparence paradoxale est typique de l’esprit de M. Monod, figure sans aucun doute le document le plus complet que le
847 dépassement. Ces 3000 pages contiennent la somme de la problématique particulière à une école — est-ce trop dire — qui va
848 ticulière à une école — est-ce trop dire — qui va de Schleiermacher à Harnack, en passant par Charles Secrétan, Frommel et
849 même Renouvier, et à laquelle les récents livres de Bergson viennent apporter un ultime renouveau. À cet égard, le Problè
850 Bien mériterait un examen critique dont le cadre de ma chronique ne saurait supporter même l’esquisse. Mais le sous-titre
851 ait supporter même l’esquisse. Mais le sous-titre de cette œuvre nous engage à l’aborder très librement : « essai de théod
852 nous engage à l’aborder très librement : « essai de théodicée et journal d’un pasteur ». Nous n’avons pas affaire ici à u
853 très librement : « essai de théodicée et journal d’ un pasteur ». Nous n’avons pas affaire ici à une construction doctrina
854 une construction doctrinale. L’auteur prend soin de nous en avertir à maintes reprises : L’intérêt du présent ouvrage ne
855 ent ouvrage ne réside pas seulement dans le récit d’ une exploration hasardée en des régions peu connues, mais aussi dans l
856 onnues, mais aussi dans la constante présentation d’ un double cheminement : la recherche du penseur et le ministère du pas
857 alistes, ni à l’Église, comme ce serait le devoir d’ un traité dogmatique. Je m’adresse aux chrétiens, mais plus encore au
858 mes qui ne sont pas synonymes) et je leur propose de méditer le problème du Bien. Si des croyants peuvent douter de leur c
859 problème du Bien. Si des croyants peuvent douter de leur croyance à cause du mal, que des incroyants apprennent à douter
860 se du mal, que des incroyants apprennent à douter de leur incroyance, à cause du Bien. D’une part, en effet, dit M. Monod
861 alvin disait : « libertin spirituel ».) Il s’agit de confondre les philosophes incroyants au moyen de leurs propres argume
862 à une piété plus libre. On sait que pour l’école de Barth, tout au contraire, le rôle de la théologie sera purement et si
863 pour l’école de Barth, tout au contraire, le rôle de la théologie sera purement et simplement de critiquer, au sein de l’É
864 rôle de la théologie sera purement et simplement de critiquer, au sein de l’Église, la prédication de l’Église, pour la d
865 de critiquer, au sein de l’Église, la prédication de l’Église, pour la débarrasser des intrusions de philosophies passagèr
866 n de l’Église, pour la débarrasser des intrusions de philosophies passagères quelles qu’elles soient. Pour Barth, c’est Di
867 t l’homme en question. M. Monod part au contraire d’ une mise en question de « Dieu » par la conscience morale de l’homme.
868 M. Monod part au contraire d’une mise en question de « Dieu » par la conscience morale de l’homme. L’opposition apparaît a
869 en question de « Dieu » par la conscience morale de l’homme. L’opposition apparaît absolue. Mais l’une des grandes surpri
870 us réserve le Problème du Bien, c’est qu’au moyen d’ une méthode « libérale » et partant d’un point de vue « libéral » — en
871 qu’au moyen d’une méthode « libérale » et partant d’ un point de vue « libéral » — encore que l’auteur s’en défende, l’adje
872 t-elle pas comme un signe, une promesse émouvante de l’unité future des chrétiens, par-delà les funestes divisions de l’or
873 re des chrétiens, par-delà les funestes divisions de l’orthodoxie et du libéralisme ? Mais revenons à la situation de dépa
874 et du libéralisme ? Mais revenons à la situation de départ de notre auteur. Contre l’un et l’autre adversaire — l’athée e
875 éralisme ? Mais revenons à la situation de départ de notre auteur. Contre l’un et l’autre adversaire — l’athée et l’orthod
876 t l’orthodoxe desséché — M. Monod recourt au fait de son expérience intérieure. Après avoir montré que cette expérience di
877 . Après avoir montré que cette expérience diffère de tout processus psychique, il précise : l’expérience religieuse ne dev
878 nous montre la Nature, c’est bien plutôt l’action d’ un « démiurge » sauvage, omnivore, amateur de catastrophes et de crime
879 tion d’un « démiurge » sauvage, omnivore, amateur de catastrophes et de crimes. Les animaux se mangent entre eux, les homm
880 e » sauvage, omnivore, amateur de catastrophes et de crimes. Les animaux se mangent entre eux, les hommes périssent par ac
881 ent, la terre tremble : est-ce là l’œuvre du Dieu d’ amour dont parle l’Évangile ? « La fourmi périssant de mort violente s
882 our dont parle l’Évangile ? « La fourmi périssant de mort violente sous le talon d’un chrétien qui prie en marchant », — v
883 a fourmi périssant de mort violente sous le talon d’ un chrétien qui prie en marchant », — voilà qui pose à M. Monod le pro
884 , — voilà qui pose à M. Monod le problème central de ce livre. Faudra-t-il donc revenir à Marcion, hérétique condamné par
885 ienne pour avoir affirmé que le monde est l’œuvre d’ un esprit mauvais, d’un démiourgos que le Christ, fils de Dieu, est ve
886 rmé que le monde est l’œuvre d’un esprit mauvais, d’ un démiourgos que le Christ, fils de Dieu, est venu pour combattre et
887 prit mauvais, d’un démiourgos que le Christ, fils de Dieu, est venu pour combattre et pour vaincre ? M. Monod le pense. Jé
888 carnait dans un crucifié vaincu ». Par une espèce de paradoxe — personne n’a chéri davantage le paradoxe depuis Kierkegaar
889 le paradoxe depuis Kierkegaard — M. Monod déduit de cette « hypothèse de travail » une réaffirmation du dogme trinitaire 
890 ierkegaard — M. Monod déduit de cette « hypothèse de travail » une réaffirmation du dogme trinitaire : Dieu est un X qui n
891 ce au Saint-Esprit. Laissons l’aspect théologique de cet ouvrage : son style de pensée, sa démarche insolite et dramatique
892 s l’aspect théologique de cet ouvrage : son style de pensée, sa démarche insolite et dramatique ont bien de quoi retenir l
893 nsée, sa démarche insolite et dramatique ont bien de quoi retenir le lecteur même incroyant ou ignorant de ces débats. Wil
894 uoi retenir le lecteur même incroyant ou ignorant de ces débats. Wilfred Monod nous apparaît ici comme une espèce de père
895 Wilfred Monod nous apparaît ici comme une espèce de père Hugo du modernisme : même invention verbale, même goût des grand
896 me générosité humanitaire. Et quelle surabondance d’ images ! La TSF, les rayons X, l’automobile et la structure des atomes
897 atériel métaphorique inépuisable. Je n’y vois pas d’ inconvénient à priori, mais à coup sûr, il s’agit là de littérature, b
898 onvénient à priori, mais à coup sûr, il s’agit là de littérature, bien que l’auteur s’en défende dans sa préface. Cela nou
899 évations romantiques, telle description poignante de réalisme, d’un ensevelissement dans la fosse commune. Le mérite capit
900 ntiques, telle description poignante de réalisme, d’ un ensevelissement dans la fosse commune. Le mérite capital de cette v
901 issement dans la fosse commune. Le mérite capital de cette vision totalitaire du réel, c’est qu’elle replace l’homme dans
902 cet égard, on peut bien dire que M. Monod revient de loin. Les Soliloques dans la nuit, fragments d’un journal de jeunesse
903 t de loin. Les Soliloques dans la nuit, fragments d’ un journal de jeunesse qui remplissent 200 pages du premier tome, témo
904 s Soliloques dans la nuit, fragments d’un journal de jeunesse qui remplissent 200 pages du premier tome, témoignent d’une
905 remplissent 200 pages du premier tome, témoignent d’ une véritable frénésie de problèmes, d’un état de controverse intérieu
906 premier tome, témoignent d’une véritable frénésie de problèmes, d’un état de controverse intérieure et abstraite, où je cr
907 témoignent d’une véritable frénésie de problèmes, d’ un état de controverse intérieure et abstraite, où je crains bien que
908 d’une véritable frénésie de problèmes, d’un état de controverse intérieure et abstraite, où je crains bien que la jeuness
909 e et abstraite, où je crains bien que la jeunesse d’ aujourd’hui ne voie plus qu’une fièvre morbide. Mais la forme excessiv
910 fièvre morbide. Mais la forme excessivement libre de cet ouvrage le sauve de l’ennui inhérent aux gros livres. C’est une s
911 forme excessivement libre de cet ouvrage le sauve de l’ennui inhérent aux gros livres. C’est une somme, ai-je dit, une étr
912 me, ai-je dit, une étrange et vivante compilation de notes, de journaux, de lettres, de fragments de sermons, de boutades,
913 dit, une étrange et vivante compilation de notes, de journaux, de lettres, de fragments de sermons, de boutades, d’analyse
914 nge et vivante compilation de notes, de journaux, de lettres, de fragments de sermons, de boutades, d’analyses philosophiq
915 te compilation de notes, de journaux, de lettres, de fragments de sermons, de boutades, d’analyses philosophiques, de poèm
916 n de notes, de journaux, de lettres, de fragments de sermons, de boutades, d’analyses philosophiques, de poèmes, d’anecdot
917 de journaux, de lettres, de fragments de sermons, de boutades, d’analyses philosophiques, de poèmes, d’anecdotes, d’aphori
918 de lettres, de fragments de sermons, de boutades, d’ analyses philosophiques, de poèmes, d’anecdotes, d’aphorismes. On s’y
919 sermons, de boutades, d’analyses philosophiques, de poèmes, d’anecdotes, d’aphorismes. On s’y perd bien souvent, on y app
920 e boutades, d’analyses philosophiques, de poèmes, d’ anecdotes, d’aphorismes. On s’y perd bien souvent, on y apprend beauco
921 ’analyses philosophiques, de poèmes, d’anecdotes, d’ aphorismes. On s’y perd bien souvent, on y apprend beaucoup. On craint
922 apprend beaucoup. On craint aussi qu’à la faveur de tant de richesses disparates, le sérieux proprement théologique du ra
923 rs cet argument : comment un protestant se libère d’ un intellectualisme intempérant par la considération hardie du cosmos.
924 mos. Quant à sa thèse théologique, je me contente de suggérer qu’on l’admettrait plus aisément si l’auteur ne cherchait à
925 ’auteur ne cherchait à l’imposer par le spectacle de ses propres luttes — où nous ne reconnaissons pas forcément les nôtre
926 ntends le criticisme à peine critiqué. Le contenu de la Révélation, malgré toutes les philosophies, doit rester pour tous
927 nt indispensable, est-il même permis au chrétien, de fonder cette Révélation sur le système d’un autre Emmanuel — Kant en
928 rétien, de fonder cette Révélation sur le système d’ un autre Emmanuel — Kant en l’espèce ? M. Monod ne saurait m’en vouloi
929 nt en l’espèce ? M. Monod ne saurait m’en vouloir de lui retourner une boutade qui porte évidemment sa marquep. 13. Wilf
930 13. Wilfred Monod, Le Problème du Bien : essai de théodicée et journal d’un pasteur, 3 volumes, chez Alcan. o. Rougem
931 Problème du Bien : essai de théodicée et journal d’ un pasteur, 3 volumes, chez Alcan. o. Rougemont Denis de, « [Compte
932 teur, 3 volumes, chez Alcan. o. Rougemont Denis de , « [Compte rendu] Wilfred Monod, Le Problème du bien  », Les Nouvelle
933 Paris, 12 septembre 1936, p. 5. p. Une critique de l’ouvrage de Wilfred Monod paraît également dans Hic et Nunc de mai
934 ptembre 1936, p. 5. p. Une critique de l’ouvrage de Wilfred Monod paraît également dans Hic et Nunc de mai 1935, sous l
935 Wilfred Monod paraît également dans Hic et Nunc de mai 1935, sous le titre : « Soirée chez Nicodème ».
12 1937, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Luther contre Érasme (19 juin 1937)
936 er contre Érasme (19 juin 1937)q r Que sait-on de Luther en France ? Qu’il rompu l’unité de l’Église. Mais dans quelles
937 sait-on de Luther en France ? Qu’il rompu l’unité de l’Église. Mais dans quelles circonstances ? Poussé par quelles raison
938 e « moine qui voulait se marier », il serait sage de parcourir au moins les œuvres capitales du grand réformateur. Or, il
939 la liberté chrétienne : et les trop fameux Propos de Table, absolument insignifiants quant à la doctrine religieuse : voil
940 eligieuse : voilà tout ce qui nous est accessible d’ une œuvre dont on sait pourtant qu’elle a changé plus qu’aucune autre
941 ’elle a changé plus qu’aucune autre les destinées de l’Occident. (Je ne fais là, bien entendu, qu’une constatation histori
942 .) Remercions donc le courageux éditeur qui vient d’ entreprendre la réparation de cette inconcevable lacune, en publiant l
943 ux éditeur qui vient d’entreprendre la réparation de cette inconcevable lacune, en publiant l’ouvrage central de la réform
944 nconcevable lacune, en publiant l’ouvrage central de la réforme luthérienne, le Traité du serf arbitre 14. Ne fût-ce que s
945 ité du serf arbitre 14. Ne fût-ce que sur le plan de la culture générale, une telle publication est appelée à rendre des s
946 ace au cœur même du grand débat occidental, celui de la pensée « pure » et de la pensée « engagée ». Elle met entre nos ma
947 débat occidental, celui de la pensée « pure » et de la pensée « engagée ». Elle met entre nos mains la pièce capitale du
948 re nos mains la pièce capitale du procès : l’acte d’ accusation du clerc actif qu’était Luther, contre le clerc « désintére
949 que croyait pouvoir être Érasme. Elle nous permet de connaître l’une des origines historiques de cette opposition fondamen
950 ermet de connaître l’une des origines historiques de cette opposition fondamentale, de cette discussion séculaire, de cett
951 nes historiques de cette opposition fondamentale, de cette discussion séculaire, de cette grande tension spirituelle dans
952 tion fondamentale, de cette discussion séculaire, de cette grande tension spirituelle dans laquelle l’Europe a puisé son d
953 détaché. Le point de vue du « clerc pur », celui d’ Érasme, nous est suffisamment connu. Qu’on se reporte en particulier à
954 reporte en particulier à la brillante biographie de Stefan Zweig, et j’ajouterais : à toute l’œuvre récente du parfait di
955 ais : à toute l’œuvre récente du parfait disciple d’ Érasme que se trouve être M. Benda. Érasme dit le vrai, puis se lave l
956 me dit le vrai, puis se lave les mains, et refuse d’ endosser les conséquences de sa vérité : il souhaite même qu’il n’y en
957 les mains, et refuse d’endosser les conséquences de sa vérité : il souhaite même qu’il n’y en ait pas. Et tous les pruden
958 e même qu’il n’y en ait pas. Et tous les prudents d’ applaudir, non sans apparences de raison : on a commis tant de crimes
959 ous les prudents d’applaudir, non sans apparences de raison : on a commis tant de crimes au nom de la vérité ! On s’en est
960 st plus servi qu’on ne l’a servie… L’intervention de Luther en personne va-t-elle changer une fois de plus la face des cho
961 bondir. Car personne n’a mieux incarné la volonté de pensée militante que ce petit moine qui, à Worms, osa dresser contre
962 al et sacerdotal l’inflexible, l’urgente exigence de la vérité en action. Que trouvera le lecteur profane, et peu au fait
963 . Que trouvera le lecteur profane, et peu au fait de la problématique chrétienne, dans cet ouvrage, qui est avant tout cel
964 ienne, dans cet ouvrage, qui est avant tout celui d’ un grand théologien ? Une verdeur de polémique qui peut flatter en nou
965 nt tout celui d’un grand théologien ? Une verdeur de polémique qui peut flatter en nous le goût du pittoresque ; l’élan gé
966 u pittoresque ; l’élan génial, la violence loyale d’ une certitude pesante, vraiment « grave », d’une dialectique sobre et
967 yale d’une certitude pesante, vraiment « grave », d’ une dialectique sobre et têtue qui va droit au point décisif, envisage
968 in conférer à son choix la force et la simplicité d’ une constatation évidente. D’un point de vue purement esthétique, ces
969 rce et la simplicité d’une constatation évidente. D’ un point de vue purement esthétique, ces qualités sont assez rares, et
970 teur qui refuse l’essentiel — c’est-à-dire la foi de Luther — soit tout de même attiré et subjugué par le style, par le to
971 même attiré et subjugué par le style, par le ton de l’ouvrage. Mais on ne saurait réduire le Traité du serf arbitre à la
972 arbitre à la querelle avec Érasme, qui lui servit de prétexte et d’aiguillon, et qui lui donne sa verve, son accent person
973 erelle avec Érasme, qui lui servit de prétexte et d’ aiguillon, et qui lui donne sa verve, son accent personnel tour à tour
974 t. En fait, toutes les affirmations fondamentales de la Réforme sont ici reposées par Luther : justification par la foi, q
975 fication par la foi, qui est don gratuit et œuvre de Dieu seul en nous ; opposition de la justice donnée par Dieu à la jus
976 ratuit et œuvre de Dieu seul en nous ; opposition de la justice donnée par Dieu à la justice acquise par nos mérites ; opp
977 à la justice acquise par nos mérites ; opposition de la Parole vivante à la tradition codifiée ; sens de la décision total
978 la Parole vivante à la tradition codifiée ; sens de la décision totale entre un oui et un non absolus, et refus de tout m
979 n totale entre un oui et un non absolus, et refus de tout moyen terme entre les règnes en guerre ouverte du Dieu de la foi
980 terme entre les règnes en guerre ouverte du Dieu de la foi et du Prince de ce monde ; nécessité du témoignage, et du témo
981 en guerre ouverte du Dieu de la foi et du Prince de ce monde ; nécessité du témoignage, et du témoignage fidèle, certifié
982 ure au-dehors, et constituant la véritable action de l’homme entre les mains de Dieu. À cet égard, il n’est nullement exag
983 nt la véritable action de l’homme entre les mains de Dieu. À cet égard, il n’est nullement exagéré de voir dans le Traité
984 de Dieu. À cet égard, il n’est nullement exagéré de voir dans le Traité du serf arbitre une sorte de résumé — très peu sy
985 de voir dans le Traité du serf arbitre une sorte de résumé — très peu systématique, et c’est heureux — des positions maît
986 ique, et c’est heureux — des positions maîtresses de la Réforme. Quant à la thèse particulière, qui est la négation du lib
987 igieux, c’est-à-dire du pouvoir qu’aurait l’homme de gagner le salut par ses propres efforts de volonté, ce n’est pas ici
988 ’homme de gagner le salut par ses propres efforts de volonté, ce n’est pas ici le lieu de l’examiner. Notons seulement, po
989 pres efforts de volonté, ce n’est pas ici le lieu de l’examiner. Notons seulement, pour écarter le pire malentendu, que Lu
990 entendu, que Luther ne nie pas du tout la réalité de notre volonté. Il nie seulement que cette volonté puisse s’appliquer
991 choses qui concernent le salut. Elle fait partie de notre nature, et comme telle, ne désire vraiment que le péché. La lib
992 oisit, substituant à un destin fatal une vocation d’ un tout autre ordre. Fatalité et liberté : le problème ne peut être éc
993  : le problème ne peut être écarté comme relevant de la seule théologie. Il est au cœur de la pensée humaine. Tout homme q
994 me relevant de la seule théologie. Il est au cœur de la pensée humaine. Tout homme qui veut penser son existence en termes
995 ce dilemme, ou plutôt à l’acceptation simultanée de ses deux termes. Et l’on sait que Nietzsche lui-même aboutit à un par
996 même aboutit à un paradoxe tout semblable à celui de Luther : la liberté est à ses yeux dans la connaissance virile d’une
997 iberté est à ses yeux dans la connaissance virile d’ une nécessité immuable, acceptée et aimée comme telle. Mais cette néce
998 fatum, la fatalité sans visage du Retour éternel de toutes choses. Pour Luther, elle est au contraire la Providence, la p
999 est au contraire la Providence, la personne même de Dieu, éternellement active, et qui nous aime. Il faut choisir. Mais l
1000 Mais le choix est-il libre ? On retombe au débat de Luther et d’Érasme. Le trop prudent humaniste eût-il saisi dans son s
1001 x est-il libre ? On retombe au débat de Luther et d’ Érasme. Le trop prudent humaniste eût-il saisi dans son sérieux dernie
1002 eût-il saisi dans son sérieux dernier la réalité d’ un dilemme qui sacrifie l’homme à la vérité ? 14. Traduit du latin,
1003 aduit du latin, aux Éditions « Je sers ». Préface de M. le professeur A. Jundi. q. Rougemont Denis de, « [Compte rendu]
1004 e M. le professeur A. Jundi. q. Rougemont Denis de , « [Compte rendu] Luther contre Érasme », Les Nouvelles littéraires,
1005 éraires, Paris, 19 juin 1937, p. 5. r. Il s’agit d’ une recension de Traité du aerf arbitre de Martin Luther, traduit pour
1006 19 juin 1937, p. 5. r. Il s’agit d’une recension de Traité du aerf arbitre de Martin Luther, traduit pour la première foi
1007 s’agit d’une recension de Traité du aerf arbitre de Martin Luther, traduit pour la première fois en français par Denis de
13 1937, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Selma Lagerlöf, conteur de légende (3 juillet 1937)
1008 Selma Lagerlöf, conteur de légende (3 juillet 1937)s L’art de conter pour le plaisir se perd.
1009 öf, conteur de légende (3 juillet 1937)s L’art de conter pour le plaisir se perd. Et peut-être, avec lui, l’art tout co
1010 Dans la littérature du xxe siècle, il n’y a plus de grands mythes, il y a des analyses. On part de « faits d’observation 
1011 us de grands mythes, il y a des analyses. On part de « faits d’observation » et l’on essaie d’en tirer de la vie. Mais ne
1012 s mythes, il y a des analyses. On part de « faits d’ observation » et l’on essaie d’en tirer de la vie. Mais ne serait-ce p
1013 On part de « faits d’observation » et l’on essaie d’ en tirer de la vie. Mais ne serait-ce pas que l’on ne sait plus créer
1014 « faits d’observation » et l’on essaie d’en tirer de la vie. Mais ne serait-ce pas que l’on ne sait plus créer de la vie ?
1015 Mais ne serait-ce pas que l’on ne sait plus créer de la vie ? On s’efforce de la décrire, ou pis encore, de l’expliquer… L
1016 l’on ne sait plus créer de la vie ? On s’efforce de la décrire, ou pis encore, de l’expliquer… Le romancier moderne appar
1017 vie ? On s’efforce de la décrire, ou pis encore, de l’expliquer… Le romancier moderne apparaît étrangement dépourvu de ce
1018 e romancier moderne apparaît étrangement dépourvu de ce pouvoir « fabulateur » qu’il était censé détenir. (Déjà M. Weidlé,
1019 censé détenir. (Déjà M. Weidlé, dans ses Abeilles d’ Aristée, constate le « crépuscule des mondes imaginaires ».) On n’aime
1020 , mais on veut découvrir, à la manière de l’homme de science. Et tout l’effort de l’écrivain se porte alors sur l’analyse
1021 a manière de l’homme de science. Et tout l’effort de l’écrivain se porte alors sur l’analyse des motifs secrets d’une acti
1022 n se porte alors sur l’analyse des motifs secrets d’ une action. La méthode consistant trop souvent, il faut le dire, à ten
1023 lus bas. Ainsi l’on en vient peu à peu, par désir de se montrer original, à tenir pour acquis que les « vertus » sont de c
1024 inal, à tenir pour acquis que les « vertus » sont de ces illusions qui ne résistent pas à l’analyse, et qu’un auteur sincè
1025 pas à l’analyse, et qu’un auteur sincère se doit de démasquer. Tout se ramènerait à la physiologie, ou à l’argent. Il ne
1026 rgent. Il ne fallait pas moins que le génie plein de malices d’une Lagerlöf pour renverser d’un coup cette apparente fatal
1027 e fallait pas moins que le génie plein de malices d’ une Lagerlöf pour renverser d’un coup cette apparente fatalité. Kiplin
1028 ie plein de malices d’une Lagerlöf pour renverser d’ un coup cette apparente fatalité. Kipling meurt, et l’on dit : c’était
1029 5. Et, grâce à lui, nous pourrons rire de nouveau de cette « défense d’inventer » qui terrorise les romanciers du xxe siè
1030 nous pourrons rire de nouveau de cette « défense d’ inventer » qui terrorise les romanciers du xxe siècle. Selma Lagerlöf
1031 siècle. Selma Lagerlöf sait encore que l’origine de tout l’art du récit, c’est la légende. Une atmosphère d’enfance retro
1032 l’art du récit, c’est la légende. Une atmosphère d’ enfance retrouvée — qu’on lise les souvenirs qui composent Morbacka 16
1033 qui composent Morbacka 16 — voilà le milieu-mère de l’imagination. C’est une légende, Gösta Berling, qui inaugure l’œuvre
1034 ende, Gösta Berling, qui inaugure l’œuvre entière de l’auteurt. C’est une légende encore qui donne le départ à ce roman de
1035 épart à ce roman des Löwensköld, et porte sur lui de grandes ombres. Il y puise sa vie secrète, il en reçoit des dimension
1036 imensions nouvelles : mystère, fatalité, présence d’ une tradition. À vrai dire, on ne croit guère à ce pouvoir mortel d’un
1037 vrai dire, on ne croit guère à ce pouvoir mortel d’ un anneau dérobé dans une tombe (L’Anneau des Löwensköld). L’auteur lu
1038 journaux, par exemple, et s’en indigne, et refuse de marcher !) Le vrai « miracle », ici, c’est le parti romanesque que Se
1039 psychologie la plus secrète des héros. L’on prie de croire, d’ailleurs, que ces héros sont bien assez complexes pour notr
1040 moderne ! Et que l’« analyse des motifs » est ici d’ une fort malicieuse lucidité. Mais elle s’opère par le seul jeu des fa
1041 en marge de l’action, sous forme de méditation ou d’ analyse. Toutes les ressources du conte populaire et de l’imagerie sen
1042 lyse. Toutes les ressources du conte populaire et de l’imagerie sentimentale et romanesque, qu’on croyait épuisées depuis
1043 ge. Une ironie sereine, à peine amère, les décape de toute niaiserie, et déjoue toutes les conven­tions. Surtout, un rythm
1044 les conven­tions. Surtout, un rythme merveilleux de souplesse, d’imprévu et d’aisance, entretient tout au long de la lect
1045 ons. Surtout, un rythme merveilleux de souplesse, d’ imprévu et d’aisance, entretient tout au long de la lecture une euphor
1046 un rythme merveilleux de souplesse, d’imprévu et d’ aisance, entretient tout au long de la lecture une euphorie de l’imagi
1047 , d’imprévu et d’aisance, entretient tout au long de la lecture une euphorie de l’imagination dont nous pensions que le se
1048 ntretient tout au long de la lecture une euphorie de l’imagination dont nous pensions que le secret s’était perdu avec l’e
1049 vec l’enfance. Comme on sent que l’auteur s’amuse de sa maîtrise : Lagerlöf, ou la gloire de conter ! Plusieurs douzaines
1050 r s’amuse de sa maîtrise : Lagerlöf, ou la gloire de conter ! Plusieurs douzaines de personnages, des familles et des isol
1051 löf, ou la gloire de conter ! Plusieurs douzaines de personnages, des familles et des isolés, des monstres, des bourgeois,
1052 des bourgeois, des paysans, une belle jeune fille de la noblesse, une bohémienne, un jeune pasteur fanatique, une dévote é
1053 — cela suffirait pour animer un roman romantique de la grande tradition. Mais tout ce pittoresque humain revêt un drame s
1054 oresque humain revêt un drame spirituel, le drame de l’absolu chrétien qui détruit tout dès qu’il agit sans charité (thème
1055 avant-dernière page seulement que le sens profond de l’œuvre entière est formulé : « Celui qui veut être un disciple du Ch
1056 ce moment aussi, l’on s’aperçoit que la fatalité de la légende a bel et bien dominé tous ces êtres, malgré leur scepticis
1057 ui n’ont pas la foi. Seule une prière désespérée, de pur amour, rompt le charme forgé par le péché. Au symbole de l’anneau
1058 r, rompt le charme forgé par le péché. Au symbole de l’anneau volé, maintenant privé de son pouvoir maléfique, répond le s
1059 hé. Au symbole de l’anneau volé, maintenant privé de son pouvoir maléfique, répond le symbole d’un engagement humain libre
1060 privé de son pouvoir maléfique, répond le symbole d’ un engagement humain librement consenti devant Dieu ; un anneau nuptia
1061 ome — L’Anneau des Löwensköld — contient le récit de la légende. Les deux tomes suivants — Charlotte Löwensköld et Anna Sv
1062 résumé imaginable, j’aimerais citer ici une seule de ces « situations » que Lagerlöf noue et dénoue dans chaque chapitre a
1063 iée, deviendra sa compagne. Il sort. Il s’en faut de peu qu’il ne rencontre dès les premiers pas une vieille mendiante sou
1064 peu plus loin, il entend chanter : c’est la fille de l’aubergiste, qui a fort mauvaise réputation. Mais elle ne s’engage p
1065 village ; elle est défigurée par une énorme tache de vin. Faudra-t-il accepter ce martyre ? Déjà, le jeune homme s’y résig
1066 Déjà, le jeune homme s’y résigne… À quelques pas de lui, elle tourne à droite. Il poursuit son chemin dans une exaltation
1067 e lui ; une jeune Dalécarlienne, dans son costume de marchande ambulante. « Elle brillait comme une rose sauvage. » Il s’a
1068 dre, dans cette scène étonnante, l’un des secrets de l’art de Selma Lagerlöf. L’invention romanesque n’est ici que la « mi
1069 cette scène étonnante, l’un des secrets de l’art de Selma Lagerlöf. L’invention romanesque n’est ici que la « mise en pra
1070 romanesque n’est ici que la « mise en pratique » d’ une attitude spirituelle extrême. La phrase de Karl-Artur lâchée, il s
1071 e » d’une attitude spirituelle extrême. La phrase de Karl-Artur lâchée, il suffit de la prendre au mot : elle commande tou
1072 xtrême. La phrase de Karl-Artur lâchée, il suffit de la prendre au mot : elle commande tout naturellement une suite d’inci
1073 mot : elle commande tout naturellement une suite d’ incidents pittoresques ou dramatiques, à quoi l’auteur ne se prive pas
1074 s ou dramatiques, à quoi l’auteur ne se prive pas d’ ajouter quelques traces d’humour, comme pour purifier l’émotion. Mais
1075 ’auteur ne se prive pas d’ajouter quelques traces d’ humour, comme pour purifier l’émotion. Mais pour qu’une telle phrase s
1076 aisemblance, il faut que ce héros soit un croyant d’ une certaine trempe. Derrière Karl-Artur, en effet, il y a la traditio
1077 si tout l’absolutisme religieux du Brand d’Ibsen, de Kierkegaard, de Luther. Et à côté du fanatique, voici Charlotte, avec
1078 tisme religieux du Brand d’Ibsen, de Kierkegaard, de Luther. Et à côté du fanatique, voici Charlotte, avec sa piété sobre
1079 la Réforme, c’est un pays entier sous la lumière de la Parole, qui trouve ici son expression. Tout respire largement, tou
1080 é, souvent plus folle encore, des âmes. Plénitude de la poésie ! Et le spectacle le plus émouvant que nous donne cette œuv
1081 nne cette œuvre admirable, c’est celui du travail de la foi dans la réalité totale d’un peuple, qu’elle trouble, assemble,
1082 celui du travail de la foi dans la réalité totale d’ un peuple, qu’elle trouble, assemble, juge et sauve. ⁂ Rien de plus pa
1083 nnant, pour qui vient de lire les Löwensköld, que de retrouver dans les souvenirs publiés sous le titre de Morbacka les or
1084 etrouver dans les souvenirs publiés sous le titre de Morbacka les origines biographiques, les sources vives de ce jailliss
1085 cka les origines biographiques, les sources vives de ce jaillissement d’inventions. Morbacka, c’est comme une anthologie d
1086 graphiques, les sources vives de ce jaillissement d’ inventions. Morbacka, c’est comme une anthologie de scènes mineures de
1087 ’inventions. Morbacka, c’est comme une anthologie de scènes mineures des grands romans de Lagerlöf. On y admire, appliquée
1088 e anthologie de scènes mineures des grands romans de Lagerlöf. On y admire, appliquées au réel, toutes les vertus subtiles
1089 l, toutes les vertus subtiles, tout le « métier » de l’écrivain : cette façon de ne pas insister, de laisser le lecteur se
1090 s, tout le « métier » de l’écrivain : cette façon de ne pas insister, de laisser le lecteur seul avec l’émotion, cette mal
1091 » de l’écrivain : cette façon de ne pas insister, de laisser le lecteur seul avec l’émotion, cette malice cordiale, cette
1092 iale, cette variété et, à la fois, cette économie de moyens. On y retrouve aussi, décrits l’un après l’autre, tous les élé
1093 e le rythme, c’est-à-dire la part libre du génie, de l’imagination fabulatrice. Et c’est là que je vois le très grand inté
1094 ce. Et c’est là que je vois le très grand intérêt de ces souvenirs — dont le charme, d’ailleurs, suffirait bien à nous ret
1095 ffirait bien à nous retenir : ils nous permettent de mesurer d’un seul coup d’œil l’apport proprement artistique, la créat
1096 r : ils nous permettent de mesurer d’un seul coup d’ œil l’apport proprement artistique, la création, le don au double sens
1097 tique, la création, le don au double sens du mot, de l’auteur du triptyque des Löwensköld. Il faut avouer que le milieu où
1098 r plus qu’aucun autre le déploiement des pouvoirs de la fable. Ces presbytères campagnards — que de pasteurs dans la famil
1099 rs de la fable. Ces presbytères campagnards — que de pasteurs dans la famille des romanciers du Nord ! — environnés de pay
1100 la famille des romanciers du Nord ! — environnés de paysages de rêve, de superstitions folles, de folles vertus, de coutu
1101 des romanciers du Nord ! — environnés de paysages de rêve, de superstitions folles, de folles vertus, de coutumes doucemen
1102 ciers du Nord ! — environnés de paysages de rêve, de superstitions folles, de folles vertus, de coutumes doucement tyranni
1103 nés de paysages de rêve, de superstitions folles, de folles vertus, de coutumes doucement tyranniques, tout cela semble di
1104 rêve, de superstitions folles, de folles vertus, de coutumes doucement tyranniques, tout cela semble disposé pour que se
1105 ages. Considérez ces trois facteurs dans le roman de la grande époque (xixe siècle) et voyez si leur décadence ne suffit
1106 mêmes traducteurs. (Stock.) s. Rougemont Denis de , « [Compte rendu] Selma Lagerlöf, conteur de légende », Les Nouvelles
1107 enis de, « [Compte rendu] Selma Lagerlöf, conteur de légende », Les Nouvelles littéraires, Paris, 3 juillet 1937, p. 8. t
1108 . t. Rougemont en fait la recension dans la NRF de novembre 1937.
14 1939, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Non, Tristan et Iseut ne s’aiment pas, nous dit Denis de Rougemont (12 février 1939)
1109 t (12 février 1939)u v Avec l’audace souriante de ces guides helvétiques qui mènent au bord du précipice le touriste st
1110 ées. Ce jeune écrivain suisse, qui joint le souci de l’actualité et le goût des questions sociales à la lucidité sensible
1111 oût des questions sociales à la lucidité sensible d’ un compatriote d’Amiel, a déjà derrière lui une œuvre solide. Il est l
1112 sociales à la lucidité sensible d’un compatriote d’ Amiel, a déjà derrière lui une œuvre solide. Il est l’un des principau
1113 solide. Il est l’un des principaux collaborateurs de la revue Esprit , écrit dans plusieurs revues des articles qui ne so
1114 rents. Il a tenu, dans notre journal, la rubrique de la vie protestante. Ayant fait de solides études à Vienne et en Allem
1115 al, la rubrique de la vie protestante. Ayant fait de solides études à Vienne et en Allemagne, il a enseigné dans une ville
1116 universitaire où il rédigea, en 1936, ce Journal d’ Allemagne , qui, paru au printemps dernier, est un des témoignages les
1117 aucoup de Français notre province : il a séjourné de longs mois en Vendée et dans le Midi. Son Journal d’un intellectuel
1118 ongs mois en Vendée et dans le Midi. Son Journal d’ un intellectuel en chômage témoigne de la curiosité, et aussi de la d
1119 n Journal d’un intellectuel en chômage témoigne de la curiosité, et aussi de la discrétion avec laquelle il s’efforce de
1120 el en chômage témoigne de la curiosité, et aussi de la discrétion avec laquelle il s’efforce de dégager l’âme secrète de
1121 aussi de la discrétion avec laquelle il s’efforce de dégager l’âme secrète de nos campagnes. Denis de Rougemont n’aime pas
1122 ec laquelle il s’efforce de dégager l’âme secrète de nos campagnes. Denis de Rougemont n’aime pas les villes, il n’a pas b
1123 ime pas les villes, il n’a pas besoin pour écrire de ces conversations, de ces échanges qui stimulent tant d’écrivains, et
1124 n’a pas besoin pour écrire de ces conversations, de ces échanges qui stimulent tant d’écrivains, et leur tiennent souvent
1125 conversations, de ces échanges qui stimulent tant d’ écrivains, et leur tiennent souvent lieu de vie intérieure. Il me reço
1126 t tant d’écrivains, et leur tiennent souvent lieu de vie intérieure. Il me reçoit dans la maison de M. Charles Du Bos, à L
1127 eu de vie intérieure. Il me reçoit dans la maison de M. Charles Du Bos, à La Celle-Saint-Cloud, maison simple, sans austér
1128 t quand je lui parle du petit scandale que risque de provoquer son dernier livre : n’y affirme-t-il pas, avec preuves à l’
1129 istan et Iseut, les amants légendaires, les héros de la passion, ne s’aimaient pas ? Quand j’ai commencé à écrire mon livr
1130 ne peuvent plus se supporter au bout de trois ans de vie commune dans la forêt et qui, Tristan ayant épousé Iseut aux blan
1131 où la mort le défigure déjà… tout cela est rempli de bizarreries, de contradictions, pressenties au siècle dernier, mais d
1132 figure déjà… tout cela est rempli de bizarreries, de contradictions, pressenties au siècle dernier, mais dont personne n’a
1133 ser une explication. J’ai beaucoup réfléchi avant d’ arriver à cette conviction, que je suis prêt à défendre : ce que Trist
1134 e : ce que Tristan et Iseut aiment, c’est le fait d’ aimer. Jamais Tristan ne dit à Iseut qu’il l’aime, il se borne à répét
1135 ique une subtilité, des raffinements, une absence de sensualité qui s’opposaient aux mœurs de l’époque. Qui s’opposait sur
1136 absence de sensualité qui s’opposaient aux mœurs de l’époque. Qui s’opposait surtout, complète Denis de Rougemont, à la c
1137 senti le danger, puisqu’elle a développé le culte de Notre-Dame pour répondre au culte de la « Dame » des troubadours. Cet
1138 ppé le culte de Notre-Dame pour répondre au culte de la « Dame » des troubadours. Cet amour courtois ne fleurit que parmi
1139 leurit que parmi les obstacles, exclut toute idée de progéniture, de famille ; il va contre les appétits de l’homme et les
1140 les obstacles, exclut toute idée de progéniture, de famille ; il va contre les appétits de l’homme et les directives de l
1141 ogéniture, de famille ; il va contre les appétits de l’homme et les directives de l’Église. Comment a-t-il pu, en moins de
1142 contre les appétits de l’homme et les directives de l’Église. Comment a-t-il pu, en moins de vingt ans, dominer ainsi tou
1143 rectives de l’Église. Comment a-t-il pu, en moins de vingt ans, dominer ainsi toute la littérature ? Beaucoup d’historiens
1144 ns, dominer ainsi toute la littérature ? Beaucoup d’ historiens, d’érudits, se sont posé la question sans pouvoir la résoud
1145 nsi toute la littérature ? Beaucoup d’historiens, d’ érudits, se sont posé la question sans pouvoir la résoudre. Pour moi,
1146 bigeois réprima sans l’anéantir, eut des millions de partisans. Venue de Macédoine, elle gagna la France par le Piémont. L
1147 e par le Piémont. Les cathares rejettent le dogme de l’incarnation, se fondent sur une interprétation purement spiritualis
1148 Saint-Esprit la Mère de Dieu, le principe féminin de l’amour. En embrassant le catharisme, le néophyte s’engageait, s’il é
1149 phyte s’engageait, s’il était marié, à s’abstenir de tout contact avec sa femme. Les cathares admettaient le suicide. Glor
1150 es cathares admettaient le suicide. Glorification de l’esprit d’amour, chasteté et mépris de la chair, goût de la mort que
1151 admettaient le suicide. Glorification de l’esprit d’ amour, chasteté et mépris de la chair, goût de la mort que l’on préfèr
1152 ification de l’esprit d’amour, chasteté et mépris de la chair, goût de la mort que l’on préfère aux biens de ce monde, pro
1153 rit d’amour, chasteté et mépris de la chair, goût de la mort que l’on préfère aux biens de ce monde, profusion de symboles
1154 chair, goût de la mort que l’on préfère aux biens de ce monde, profusion de symboles… Nous retrouvons la religion cathare,
1155 que l’on préfère aux biens de ce monde, profusion de symboles… Nous retrouvons la religion cathare, telle que les procès d
1156 rouvons la religion cathare, telle que les procès de l’Inquisition permettent de la connaître, tous les thèmes des troubad
1157 telle que les procès de l’Inquisition permettent de la connaître, tous les thèmes des troubadours, développés avec un lyr
1158 t nombreux, et qui adoptaient cette hé­résie avec d’ autant plus d’enthousiasme qu’ils étaient souvent jaloux de l’autorité
1159 qui adoptaient cette hé­résie avec d’autant plus d’ enthousiasme qu’ils étaient souvent jaloux de l’autorité temporelle ex
1160 plus d’enthousiasme qu’ils étaient souvent jaloux de l’autorité temporelle exercée par le clergé. Donc l’amour-passion ser
1161 littérature, reprend Denis de Rougemont. Le mythe de Tristan et Iseut, qui pose pour la première fois ce fameux triangle,
1162 , la femme et l’amant, qui est le sujet essentiel de toute la littérature occidentale, n’a surgi dans la littérature orien
1163 urit avec malice : Les philologues ont un respect de la lettre qui leur cache parfois le sens profond des textes… Ils répu
1164 hodes freudiennes. Or j’ai été frappé par le goût de la mort que l’on retrouve à la fois dans le catharisme, dans Tristan
1165 ues courtois, goût qui n’est autre que l’instinct de la mort tel que Freud l’a analysé. À une époque où le statut du maria
1166 chit : Non, je crois que nous sommes à une époque de transition, que ce mythe risque de disparaître. Mais c’est encore lui
1167 s à une époque de transition, que ce mythe risque de disparaître. Mais c’est encore lui qui pèse sur toute la crise du mar
1168 Comment cela ? C’est très simple. Nous souffrons d’ avoir été élevés dans une double contradiction. Romans, poèmes, musiqu
1169 us montre le mariage comme le fondement essentiel de notre société. Mais la passion, par définition, reste extérieure au m
1170 reste extérieure au mariage, puisqu’elle a besoin d’ obstacles, et ne résiste pas à la facilité, à l’habitude. Exclue de la
1171 e résiste pas à la facilité, à l’habitude. Exclue de la vie conjugale, la passion se réfugie dans l’adultère. Maris et fem
1172 réfugie dans l’adultère. Maris et femmes, chacun de leur côté, rêvent de l’aventure qui leur apparaît comme la seule évas
1173 ère. Maris et femmes, chacun de leur côté, rêvent de l’aventure qui leur apparaît comme la seule évasion. Croyez-vous que
1174 roblème du mariage. Croyez-vous que les problèmes de la vie sentimentale et sexuelle puissent trouver une solution nouvell
1175 une solution : le mariage chrétien, mais présenté d’ une manière nouvelle. C’est-à-dire qu’au lieu d’en faire un acte raiso
1176 ui me paraît en même temps le véritable fondement de la personnalité. Mais pour moi cette fidélité doit être observée en v
1177 assion, mais s’en distingue par un refus constant de subir ses rêves, par une constante prise sur le réel. Elle reste une
1178 obre et la plus quotidienne. Votre réhabilitation de la fidélité, si conforme à la conception chrétienne du ma­riage, supp
1179 les femmes, qui doivent être sans cesse capables de se renouveler, un ensemble de vertus solides et de qualités agréa­ble
1180 sans cesse capables de se renouveler, un ensemble de vertus solides et de qualités agréa­bles assez difficiles à concilier
1181 e se renouveler, un ensemble de vertus solides et de qualités agréa­bles assez difficiles à concilier. Je le sais, je suis
1182 tre tout de suite. J’ai aussi terminé deux livres d’ essais : Doctrine fabuleuse et Les Personnages du dram e. Et en ce
1183 évolution. Mais je l’ai un peu délaissé au profit d’ un drame que j’écris pour l’Exposition de Zurich. Je veux mettre en sc
1184 u profit d’un drame que j’écris pour l’Exposition de Zurich. Je veux mettre en scène un héros suisse, le bienheureux Nicol
1185 ta sa grotte, et rétablit la paix par le covenant de 1481. Puis il se retourna dans son ermitage et y mourut. C’est un bea
1186 beau sujet. N’est-ce pas ? Ce drame, avec musique d’ Honegger, sera représenté dans un théâtre en plein air, devant cinq ou
1187 ix-mille spectateurs. La scène aura trente mètres de large, et trois étages, qu’il faut ne jamais laisser vides. J’écris d
1188 riosité les réactions que vont susciter certaines de ses théories un peu révolutionnaires. Il sourit avant de répondre, pu
1189 mon livre, paru il y a huit jours, m’a déjà valu de nombreuses lettres d’hommes et de femmes qui se trouvaient mal mariés
1190 a huit jours, m’a déjà valu de nombreuses lettres d’ hommes et de femmes qui se trouvaient mal mariés. Ils me disent que mo
1191 , m’a déjà valu de nombreuses lettres d’hommes et de femmes qui se trouvaient mal mariés. Ils me disent que mon livre les
1192 sent que mon livre les aide à comprendre la cause de leur désarroi, qu’ils savent mieux maintenant comment ils pourraient
1193 chrétien, la véritable intelligence, n’est-ce pas de voir les limites d’où l’on ne peut s’échapper ? u. Rougemont Denis
1194 le intelligence, n’est-ce pas de voir les limites d’ où l’on ne peut s’échapper ? u. Rougemont Denis de, « [Entretien] N
1195 ù l’on ne peut s’échapper ? u. Rougemont Denis de , « [Entretien] Non, Tristan et Iseut ne s’aiment pas », Les Nouvelles
15 1963, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Mais qui est donc Denis de Rougemont (7 novembre 1963)
1196 Pour beaucoup, Denis de Rougemont est l’auteur d’ une thèse retentissante, intitulée L’Amour et l’Occident et dans laq
1197 cident et dans laquelle il démontrait que l’idée de passion amoureuse trouvait ses origines dans la poésie cathare. Pour
1198 igines dans la poésie cathare. Pour les disciples d’ Emmanuel Mounier, il est surtout le philosophe de Politique de la per
1199 d’Emmanuel Mounier, il est surtout le philosophe de Politique de la personne . Pour quelques autres, il est l’écrivain q
1200 unier, il est surtout le philosophe de Politique de la personne . Pour quelques autres, il est l’écrivain qui a le mieux
1201 in qui a le mieux analysé la résistible ascension d’ Adolf Hitler (dans Journal d’Allemagne et Journal des deux mondes
1202 ésistible ascension d’Adolf Hitler (dans Journal d’ Allemagne et Journal des deux mondes notamment). Pour les mélomanes
1203 notamment). Pour les mélomanes, il est le poète de Nicolas de Flue , dont Honegger tira un oratorio. Pour tous enfin, i
1204 ine dernière, le lauréat du Grand Prix littéraire de Monaco. Mais qui est en réalité Denis de Rougemont ? On a dit beaucou
1205 p plus prudent, j’ai demandé à Denis de Rougemont de commenter librement et, au besoin, de rectifier ce que je me proposai
1206 e Rougemont de commenter librement et, au besoin, de rectifier ce que je me proposais d’écrire sur lui. Voici ce qu’a donn
1207 t, au besoin, de rectifier ce que je me proposais d’ écrire sur lui. Voici ce qu’a donné cette entrevue. Né en 1906 à Neuch
1208 châtel, Denis de Rougemont est un écrivain suisse d’ expression française… Je déteste cette formule ! Elle me fait penser à
1209 e cette formule ! Elle me fait penser à une sorte d’ animal, qui penserait dans un idiome bizarre et incompréhensible, et c
1210 ensible, et choisirait, quand il ouvre la bouche, de s’exprimer en français plutôt qu’en miaulant ou en barrissant. Je sui
1211 in français, un point c’est tout. Il est l’auteur d’ un certain nombre d’ouvrages qui, tenant à la fois du journal, de l’es
1212 t c’est tout. Il est l’auteur d’un certain nombre d’ ouvrages qui, tenant à la fois du journal, de l’essai, de la polémique
1213 mbre d’ouvrages qui, tenant à la fois du journal, de l’essai, de la polémique et du récit, ne correspondent à aucun genre
1214 ges qui, tenant à la fois du journal, de l’essai, de la polémique et du récit, ne correspondent à aucun genre littéraire p
1215 tiquette, disons que je suis un essayiste, espèce d’ écrivain de plus en plus répandue de nos jours. Montesquieu, Pascal ét
1216 yiste, espèce d’écrivain de plus en plus répandue de nos jours. Montesquieu, Pascal étaient des essayistes. Ce n’est pas q
1217 rer à eux, mais la forme est la même : un mélange d’ idées pures, de poésie, de descriptions et d’anecdotes. En 1933, Denis
1218 la forme est la même : un mélange d’idées pures, de poésie, de descriptions et d’anecdotes. En 1933, Denis de Rougemont p
1219 st la même : un mélange d’idées pures, de poésie, de descriptions et d’anecdotes. En 1933, Denis de Rougemont participe, a
1220 ange d’idées pures, de poésie, de descriptions et d’ anecdotes. En 1933, Denis de Rougemont participe, aux côtés d’Emmanuel
1221 En 1933, Denis de Rougemont participe, aux côtés d’ Emmanuel Mounier, à la fondation de deux revues personnalistes : L’Ord
1222 ipe, aux côtés d’Emmanuel Mounier, à la fondation de deux revues personnalistes : L’Ordre nouveau et Esprit. C’est à cette
1223 raliste ». … illustrée par son livre : Politique de la personne . Politique de la personne était un manifeste qui décl
1224 n livre : Politique de la personne . Politique de la personne était un manifeste qui déclencha une polémique à laquell
1225 ividu refermé sur lui-même ni la minuscule partie d’ une masse, mais un homme ouvert aux idées, à la fois libre et responsa
1226 la fois libre et responsable. Il y a une vocation de la personne, vocation qui, à la fois, distingue l’homme et le relie à
1227 ù il l’exerce. C’est d’ailleurs dans cette notion de l’homme que je place le point d’insertion de Dieu. Je suis tout à fai
1228 ans cette notion de l’homme que je place le point d’ insertion de Dieu. Je suis tout à fait opposé aux doctrines providenti
1229 tion de l’homme que je place le point d’insertion de Dieu. Je suis tout à fait opposé aux doctrines providentialistes qui
1230 t opposé aux doctrines providentialistes qui font de Dieu un Jéhovah jugeant et agissant de l’extérieur. Dieu est en l’hom
1231 s qui font de Dieu un Jéhovah jugeant et agissant de l’extérieur. Dieu est en l’homme. En 1935, il est nommé lecteur à l’U
1232 mme. En 1935, il est nommé lecteur à l’Université de Francfort et séjournera un an en Allemagne hitlérienne. Je me trouvai
1233 sans activité à Paris, où j’écrivais le Journal d’ un intellectuel en chômage , quand je rencontrai Abetz. Il m’offrit de
1234 chômage , quand je rencontrai Abetz. Il m’offrit de passer un an en Allemagne en me disant : « Vous qui pensez pis que pe
1235 e en me disant : « Vous qui pensez pis que pendre de notre régime, allez donc l’observer de plus près. » J’acceptai à une
1236 de plus près. » J’acceptai à une condition, celle d’ écrire en rentrant exactement ce que je pensais du nazisme. J’en ai ef
1237 nt pensé et dit beaucoup de mal dans mon Journal d’ Allemagne , paru en 1938. J’eus d’ailleurs d’autres démêlés avec les a
1238 andes, quand j’écrivis un article dans la Gazette de Lausanne sur l’entrée de Hitler dans Paris. Les Allemands demandèrent
1239 article dans la Gazette de Lausanne sur l’entrée de Hitler dans Paris. Les Allemands demandèrent que je sois puni et j’ai
1240 dèrent que je sois puni et j’ai reçu quinze jours de prison militaire sous le prétexte qu’un officier neutre n’a pas le dr
1241 e prétexte qu’un officier neutre n’a pas le droit d’ outrager un chef d’État étranger ! De Suisse, Denis de Rougemont est e
1242 pas le droit d’outrager un chef d’État étranger ! De Suisse, Denis de Rougemont est envoyé en Amérique où il passera six a
1243 New York, je rédigeais les émissions en français de « La Voix de l’Amérique ». J’avais plusieurs équipes de speakers, don
1244 rédigeais les émissions en français de « La Voix de l’Amérique ». J’avais plusieurs équipes de speakers, dont faisaient p
1245 a Voix de l’Amérique ». J’avais plusieurs équipes de speakers, dont faisaient partie André Breton, Marcel Ozenfant, un fil
1246 tait des textes. Je fis également la connaissance de Saint-John Perse et du peintre Marcel Duchamp, qui réalisa une extrao
1247 aordinaire vitrine surréaliste dans une librairie de la 5e Avenue pour l’exposition de mon livre : La Part du diable . Re
1248 s une librairie de la 5e Avenue pour l’exposition de mon livre : La Part du diable . Rentré en Europe en 1946, Denis de R
1249 et président du Congrès européen pour la liberté de la culturey, son activité se situera désormais sur deux plans : l’écr
1250 eux plans : l’écrivain d’une part, le fédéralisme de l’autre. Je vous arrête : il n’y a pas, il n’y a jamais eu chez moi (
1251 Je suis passé tout naturellement et sans rupture de ma définition de la « personne » à la théorie fédéraliste. L’homme, v
1252 ut naturellement et sans rupture de ma définition de la « personne » à la théorie fédéraliste. L’homme, vous ai-je dit, do
1253 i n’est que la transposition à une échelle géante de la Confédération helvétique. Je ne souhaite en effet ni une aggloméra
1254 que. Je ne souhaite en effet ni une agglomération d’ États soumis à un pouvoir unique et dictatorial ni une Europe des État
1255 ial ni une Europe des États, mais une association de républiques autonomes, libres de leur gestion intérieure et responsab
1256 une association de républiques autonomes, libres de leur gestion intérieure et responsables les unes des autres devant le
1257 le danger commun. Nous serions ainsi 350 millions d’ Européens solidaires, ce qui représente presque autant que les populat
1258 sque autant que les populations des États-Unis et de l’URSS réunies. Comprenez-moi donc bien : personnalisme et fédéralism
1259 mains du Prince Rainier le Grand Prix littéraire de Monaco. Selon la formule consacrée, je suis ravi d’avoir reçu ce prix
1260 Monaco. Selon la formule consacrée, je suis ravi d’ avoir reçu ce prix, malgré une petite ombre au tableau. Je viens en ef
1261 ré une petite ombre au tableau. Je viens en effet d’ apprendre que je me suis trouvé opposé à Eugène Ionesco qui est un ami
1262 e propos, savez-vous où Ionesco a trouvé le sujet de son Rhinocéros ? Dans mon Journal d’Allemagne , c’est lui-même qui m
1263 vé le sujet de son Rhinocéros ? Dans mon Journal d’ Allemagne , c’est lui-même qui me l’a dit. w. Rougemont Denis de, «
1264 st lui-même qui me l’a dit. w. Rougemont Denis de , « [Entretien] Mais qui est donc Denis de Rougemont ? », Les Nouvelle
1265 e à partir de 1950, et le Congrès pour la liberté de la culture, dans lequel Rougemont s’engagea en parallèle, mais dont i
1266 l ne fut « que » le président du comité exécutif, de 1951 à 1966.
16 1970, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Les prophètes de la décadence (24 septembre 1970)
1267 Les prophètes de la décadence (24 septembre 1970)z aa Le xxe siècle a vu la civili
1268 , le xxe siècle a vu se multiplier les prophètes de la décadence européenne : et ils sont tous, ou presque tous, Européen
1269 ne sur le monde entier, ils préfèrent nous parler de notre éclipse. Au lendemain de la Première Guerre mondiale déclenchée
1270 fèrent nous parler de notre éclipse. Au lendemain de la Première Guerre mondiale déclenchée par l’Europe, en 1919, Paul Va
1271 Et il ajoutait : Elam, Ninive, Babylone étaient de beaux noms vagues, et la ruine totale de ces mondes avait aussi peu d
1272 étaient de beaux noms vagues, et la ruine totale de ces mondes avait aussi peu de signification pour nous que leur existe
1273 ais France, Angleterre, Russie, ce seraient aussi de beaux noms. Lusitania aussi est un beau nom. Et nous voyons maintenan
1274 n beau nom. Et nous voyons maintenant que l’abîme de l’Histoire est assez grand pour tout le monde. Nous sentons qu’une ci
1275 vie. Les circonstances qui enverraient les œuvres de Keats et celles de Baudelaire rejoindre les œuvres de Ménandre ne son
1276 ces qui enverraient les œuvres de Keats et celles de Baudelaire rejoindre les œuvres de Ménandre ne sont plus du tout inco
1277 eats et celles de Baudelaire rejoindre les œuvres de Ménandre ne sont plus du tout inconcevables : elles sont dans les jou
1278 ncevables : elles sont dans les journaux. L’écho de cette page fut immense et je sais peu de phrases plus fréquemment cit
1279 , à mon sens, l’une des erreurs les plus célèbres de l’époque. Mais comment expliquer son succès ? Observons tout d’abord
1280 lle résume et condense une assez longue tradition de pessimisme européen. Dès 1971, Volney, méditant sur la mort des civil
1281 : Que sont devenues tant de brillantes créations de la main de l’homme ? Où sont-ils, ces remparts de Ninive, ces murs de
1282 devenues tant de brillantes créations de la main de l’homme ? Où sont-ils, ces remparts de Ninive, ces murs de Babylone,
1283 de la main de l’homme ? Où sont-ils, ces remparts de Ninive, ces murs de Babylone, ces palais de Persépolis ?… Hélas, j’ai
1284 e ? Où sont-ils, ces remparts de Ninive, ces murs de Babylone, ces palais de Persépolis ?… Hélas, j’ai visité les lieux qu
1285 parts de Ninive, ces murs de Babylone, ces palais de Persépolis ?… Hélas, j’ai visité les lieux qui furent le théâtre de t
1286 élas, j’ai visité les lieux qui furent le théâtre de tant de splendeur, et je n’ai vu qu’abandon et que solitude… Qui sait
1287 ndon et que solitude… Qui sait si sur les rivages de la Seine, de la Tamise ou du Zuydersee… qui sait si un voyageur comme
1288 olitude… Qui sait si sur les rivages de la Seine, de la Tamise ou du Zuydersee… qui sait si un voyageur comme moi ne s’ass
1289 n voyageur comme moi ne s’assiéra pas un jour sur de muettes ruines, et ne pleurera pas solitaire sur la cendre des peuple
1290 solitaire sur la cendre des peuples et la mémoire de leur grandeur ? Une trentaine d’armées plus tard, Hegel introduisait
1291 s et la mémoire de leur grandeur ? Une trentaine d’ armées plus tard, Hegel introduisait l’idée que chaque peuple est « un
1292 ue chaque peuple est « un individu dans la marche de l’histoire » et qu’il obéit donc, comme tout individu, à une loi de c
1293 qu’il obéit donc, comme tout individu, à une loi de croissance, d’épanouissement et de déclin fatal. Hegel pensait d’aill
1294 nc, comme tout individu, à une loi de croissance, d’ épanouissement et de déclin fatal. Hegel pensait d’ailleurs que la civ
1295 idu, à une loi de croissance, d’épanouissement et de déclin fatal. Hegel pensait d’ailleurs que la civilisation européenne
1296 ation européenne marquait l’aboutissement suprême de l’Histoire. Mais si l’on appliquait sa dialectique aux civilisations,
1297 civilisations, on en venait à penser que chacune d’ elles devait fatalement décliner et mourir après une période d’apogée
1298 t fatalement décliner et mourir après une période d’ apogée — la nôtre aussi. Aux débuts du xxe siècle, Spengler va plus l
1299 e culture est mortelle, et l’on rejoint la phrase de Valéry. Enfin, dans un effort tout à fait admirable pour embrasser l’
1300 é jusqu’ici, les lois complexes, mais constantes, de leur genèse, de leur croissance et de leur dissolution inévitable. Ce
1301 lois complexes, mais constantes, de leur genèse, de leur croissance et de leur dissolution inévitable. Ces historiens et
1302 constantes, de leur genèse, de leur croissance et de leur dissolution inévitable. Ces historiens et philosophes, armés d’u
1303 inévitable. Ces historiens et philosophes, armés d’ une vaste érudition, ont d’autant moins de peine à nous convaincre que
1304 et philosophes, armés d’une vaste érudition, ont d’ autant moins de peine à nous convaincre que, d’une part, ils rejoignen
1305 , armés d’une vaste érudition, ont d’autant moins de peine à nous convaincre que, d’une part, ils rejoignent, par leurs co
1306 onclusions, notre angoisse quant à l’état présent de l’Europe dans le monde, et que, d’autre part, les plus grands esprits
1307 us grands esprits du siècle précédent n’ont cessé d’ annoncer les catastrophes qui ont fondu de nos jours sur l’Europe : de
1308 t cessé d’annoncer les catastrophes qui ont fondu de nos jours sur l’Europe : de Kierkegaard à Nietzsche et à Dostoïevski,
1309 trophes qui ont fondu de nos jours sur l’Europe : de Kierkegaard à Nietzsche et à Dostoïevski, de Tocqueville à Jacob Burc
1310 pe : de Kierkegaard à Nietzsche et à Dostoïevski, de Tocqueville à Jacob Burckhardt et de Donoso Cortès à Georges Sorel, t
1311 Dostoïevski, de Tocqueville à Jacob Burckhardt et de Donoso Cortès à Georges Sorel, tous ont décrit depuis cent ans les mo
1312 Sorel, tous ont décrit depuis cent ans les motifs de craindre le pire pour notre civilisation. Or voici que leurs prédicti
1313 agne. Les nationalismes et les racismes, dénoncés d’ avance par Nietzsche, prolifèrent sur les ruines de l’Empire austro-ho
1314 ’avance par Nietzsche, prolifèrent sur les ruines de l’Empire austro-hongrois. Et bientôt cette Europe occupée à se déchir
1315 voit pas encore, mais elle pressent déjà la perte de sa longue royauté mondiale. Déjà le communisme lui dispute, non seule
1316 on seulement en Asie et en Afrique, mais aux yeux d’ une partie de sa propre jeunesse, son rôle de porteur du « flambeau de
1317 en Asie et en Afrique, mais aux yeux d’une partie de sa propre jeunesse, son rôle de porteur du « flambeau de la civilisat
1318 yeux d’une partie de sa propre jeunesse, son rôle de porteur du « flambeau de la civilisation ». La Seconde Guerre mondial
1319 ropre jeunesse, son rôle de porteur du « flambeau de la civilisation ». La Seconde Guerre mondiale, née de cette crise int
1320 a civilisation ». La Seconde Guerre mondiale, née de cette crise interne, va précipiter l’écroulement de l’hégémonie polit
1321 cette crise interne, va précipiter l’écroulement de l’hégémonie politique de l’Europe, et même le rendre, à vues humaines
1322 précipiter l’écroulement de l’hégémonie politique de l’Europe, et même le rendre, à vues humaines, définitif. Au surplus,
1323 es peuples émancipés proclament déjà leur volonté de retourner contre nous nos propres armes, tant sociales et morales que
1324 Que faudrait-il de plus, pour qu’on ait le droit de parler d’une éclipse ou d’une mort prévisible de notre civilisation ?
1325 ait-il de plus, pour qu’on ait le droit de parler d’ une éclipse ou d’une mort prévisible de notre civilisation ? Avant de
1326 our qu’on ait le droit de parler d’une éclipse ou d’ une mort prévisible de notre civilisation ? Avant de répondre, formulo
1327 de parler d’une éclipse ou d’une mort prévisible de notre civilisation ? Avant de répondre, formulons deux remarques dict
1328 pas toujours et nécessairement liée à la vitalité d’ une civilisation. L’une peut exister sans l’autre. L’une peut être per
1329 s les cultures dans tous les temps. Les prophètes de la décadence de l’Occident, Spengler, Valéry et Toynbee, se fondaient
1330 ans tous les temps. Les prophètes de la décadence de l’Occident, Spengler, Valéry et Toynbee, se fondaient sur le précéden
1331 Valéry et Toynbee, se fondaient sur le précédent de civilisations antiques aujourd’hui « disparues », et particulièrement
1332 sur l’exemple le mieux connu des Européens, celui de la chute de Rome, qui est censée avoir entraîné la disparition de la
1333 e le mieux connu des Européens, celui de la chute de Rome, qui est censée avoir entraîné la disparition de la civilisation
1334 ome, qui est censée avoir entraîné la disparition de la civilisation gréco-romaine dans la partie occidentale de l’Empire.
1335 lisation gréco-romaine dans la partie occidentale de l’Empire. L’exemple est-il valable pour l’Europe ? La civilisation eu
1336 omparable, et même tout à fait différent à partir d’ un certain moment, d’un certain seuil… Les civilisations antiques de l
1337 ut à fait différent à partir d’un certain moment, d’ un certain seuil… Les civilisations antiques de l’Égypte des Pharaons,
1338 t, d’un certain seuil… Les civilisations antiques de l’Égypte des Pharaons, de Sumer, de l’Inde védantique ou des Mayas, f
1339 civilisations antiques de l’Égypte des Pharaons, de Sumer, de l’Inde védantique ou des Mayas, fondaient leur unité origin
1340 ions antiques de l’Égypte des Pharaons, de Sumer, de l’Inde védantique ou des Mayas, fondaient leur unité originelle sur u
1341 unique, le Sacré. Les civilisations totalitaires d’ aujourd’hui, URSS ou Chine de Mao, tiennent leur unité d’une doctrine
1342 rd’hui, URSS ou Chine de Mao, tiennent leur unité d’ une doctrine uniforme, imposée à tous par l’État. Comparée à ces deux
1343 ée à tous par l’État. Comparée à ces deux groupes de cultures homogènes, uniformes et sacrées, la culture de l’Europe nous
1344 tures homogènes, uniformes et sacrées, la culture de l’Europe nous apparaît immédiatement comme à la fois pluraliste et pr
1345 n européenne s’est trouvée fondée sur une culture de dialogue et de contestation. Elle n’a jamais pu, et surtout, elle n’a
1346 est trouvée fondée sur une culture de dialogue et de contestation. Elle n’a jamais pu, et surtout, elle n’a jamais voulu,
1347 a beau citer le Moyen Âge comme une période bénie d’ unité des esprits et des cœurs, telle que l’a décrite Novalis : nous s
1348 moins violents que ceux que nous vivons. L’unité de notre culture et de la civilisation créée par cette culture n’a jamai
1349 ceux que nous vivons. L’unité de notre culture et de la civilisation créée par cette culture n’a jamais été autre chose qu
1350 e consistant dans la seule volonté commune à tous de refuser l’uniformité. Où sont les candidats à la relève ? Aux pr
1351 sont les candidats à la relève ? Aux prophètes de la décadence européenne, j’opposerai trois raisons majeures d’espérer
1352 ce européenne, j’opposerai trois raisons majeures d’ espérer, c’est-à-dire d’agir pour l’Europe. Première raison : La civil
1353 ai trois raisons majeures d’espérer, c’est-à-dire d’ agir pour l’Europe. Première raison : La civilisation européenne est l
1354 enue universelle. Bien d’autres avaient cru cela d’ elles-mêmes, avant la nôtre. Elles se trompaient, mais cette erreur ne
1355 ok suffirait aujourd’hui pour les mettre à l’abri de ce genre d’illusion. Nous, les Européens du xxe siècle, nous savons
1356 aujourd’hui pour les mettre à l’abri de ce genre d’ illusion. Nous, les Européens du xxe siècle, nous savons bien que nou
1357 rique imitent nos villes modernes, leurs procédés de construction, leurs rues, leurs places, et leurs mairies, leurs hôpit
1358 hôtels et leurs journaux, et même leurs embarras de circulation. Nous savons bien que tous les pays neufs imitent nos par
1359 s nos dictatures. Et nous savons que ce mouvement d’ imitation s’opère à sens unique et n’est plus réversible. Mais comment
1360 Nous avons vu que la civilisation européenne, née de la confluence des sources les plus diverses, se distinguait par là de
1361 sources les plus diverses, se distinguait par là de toutes les autres, monolithiques et homogènes. Voilà pourquoi elle s’
1362 s vu aussi que l’Europe envoie dans le monde plus de machines et d’assistants techniques que de livres et de missionnaires
1363 l’Europe envoie dans le monde plus de machines et d’ assistants techniques que de livres et de missionnaires. Elle s’est la
1364 e plus de machines et d’assistants techniques que de livres et de missionnaires. Elle s’est laïcisée, ou sécularisée, et d
1365 hines et d’assistants techniques que de livres et de missionnaires. Elle s’est laïcisée, ou sécularisée, et détachée du ch
1366 risée, et détachée du christianisme qui contribua de tant de manières à la former. Par là même — et c’est bien son drame,
1367 st bien son drame, en même temps que la condition de son « succès » le plus visible — elle s’est rendue plus transportable
1368 devenir universelle qu’en vertu de quelque chose de très fondamental qui l’y prédisposait dès l’origine : j’entends la cr
1369 entends la croyance chrétienne en la valeur égale de tout homme devant Dieu, quelle que soit sa nation, sa couleur ou sa r
1370 eur ou sa race. L’Égypte ancienne ne croyait rien de tel. Le mot homme y était synonyme d’habitant de la vallée et du delt
1371 royait rien de tel. Le mot homme y était synonyme d’ habitant de la vallée et du delta du Nil, il y avait un mot différent
1372 de tel. Le mot homme y était synonyme d’habitant de la vallée et du delta du Nil, il y avait un mot différent pour désign
1373 s également, il existait deux espèces différentes de bipèdes verticaux ; les Grecs ou les Chinois, d’une part, et les barb
1374 demeurer régionales et décliner dans les limites de leur empire. En revanche, la conception chrétienne exprimée par saint
1375 res, ni hommes ni femmes, car vous êtes tous fils de Dieu, vous êtes tous un en Jésus-Christ. »), cette conception devait
1376 ule permettre à ceux qu’elle formerait intimement de considérer tous les hommes comme dignes et capables, un jour ou l’aut
1377 mes comme dignes et capables, un jour ou l’autre, de participer pleinement à l’effort civilisateur. Maintenant que c’est f
1378 ation européenne a créé les conditions techniques de sa conservation et de sa transmission aux âges futurs, en même temps
1379 é les conditions techniques de sa conservation et de sa transmission aux âges futurs, en même temps qu’elle redécouvrait e
1380 faisait revivre des cultures disparues ou en voie d’ extinction. Valéry nous disait que « les circonstances qui enverraient
1381 ue « les circonstances qui enverraient les œuvres de Keats et celles de Baudelaire rejoindre les œuvres de Ménandre ne son
1382 ces qui enverraient les œuvres de Keats et celles de Baudelaire rejoindre les œuvres de Ménandre ne sont plus du tout inco
1383 eats et celles de Baudelaire rejoindre les œuvres de Ménandre ne sont plus du tout inconcevables : elles sont dans les jou
1384 on a retrouvé — et même joué — plusieurs comédies de Ménandre. Quant aux œuvres de Keats et de Baudelaire, et de Paul Valé
1385 plusieurs comédies de Ménandre. Quant aux œuvres de Keats et de Baudelaire, et de Paul Valéry lui-même, reproduites dans
1386 omédies de Ménandre. Quant aux œuvres de Keats et de Baudelaire, et de Paul Valéry lui-même, reproduites dans le monde ent
1387 e. Quant aux œuvres de Keats et de Baudelaire, et de Paul Valéry lui-même, reproduites dans le monde entier, enregistrées
1388 bandes et sur microsillons, elles sont en mesure de résister au temps beaucoup mieux que les fresques de Lascaux, les sta
1389 résister au temps beaucoup mieux que les fresques de Lascaux, les statues grecques et les temples des Pharaons menacés par
1390 et les temples des Pharaons menacés par les eaux d’ un barrage. La mortalité des civilisations nous apparaît donc très var
1391 . Certes, plusieurs ont disparu sans nous laisser d’ autre héritage actif que celui de leurs œuvres d’art : ainsi celle des
1392 ans nous laisser d’autre héritage actif que celui de leurs œuvres d’art : ainsi celle des Aurignaciens, ou plus près de no
1393 et des Aztèques. Mais les civilisations anciennes de l’Égypte et du Proche-Orient, prolongées par la grecque et la romaine
1394 et le laboratoire européens, pour être diffusées de nos jours sur toute la terre. Il s’en faut de beaucoup que leurs riva
1395 ées de nos jours sur toute la terre. Il s’en faut de beaucoup que leurs rivales asiatiques, qu’on dit plus raffinées, aien
1396 s, aient connu pareille fortune. Ce sont les lois de Minos, de Dracon et de Solon, venues de la Crète et de l’Égypte ancie
1397 onnu pareille fortune. Ce sont les lois de Minos, de Dracon et de Solon, venues de la Crète et de l’Égypte ancienne par la
1398 fortune. Ce sont les lois de Minos, de Dracon et de Solon, venues de la Crète et de l’Égypte ancienne par la Grèce, ce so
1399 les lois de Minos, de Dracon et de Solon, venues de la Crète et de l’Égypte ancienne par la Grèce, ce sont le Décalogue e
1400 nos, de Dracon et de Solon, venues de la Crète et de l’Égypte ancienne par la Grèce, ce sont le Décalogue et les Béatitude
1401 Décalogue et les Béatitudes, c’est enfin le code de Justinien, d’où dérivent l’Habeas Corpus et la Déclaration des droits
1402 les Béatitudes, c’est enfin le code de Justinien, d’ où dérivent l’Habeas Corpus et la Déclaration des droits de l’homme, q
1403 euples du tiers-monde à peine moins que pour ceux de l’OTAN, la dignité de la personne humaine et les fondements de tout p
1404 à peine moins que pour ceux de l’OTAN, la dignité de la personne humaine et les fondements de tout progrès social ; et non
1405 dignité de la personne humaine et les fondements de tout progrès social ; et non pas le système des castes, ni le mandari
1406 t non sans drôlerie à propos de la fameuse phrase de Valéry : « Si les civilisations mouraient tout à fait, Valéry ne pour
1407 e dire, car il n’en saurait rien. » Et il propose de corriger comme suit le passage que j’ai cité : « Nous autres civilisa
1408 civilisations qu’on croyait endormies sont tirées de l’oubli au xxe siècle, si tant d’écoles antiques de sagesse et de my
1409 es sont tirées de l’oubli au xxe siècle, si tant d’ écoles antiques de sagesse et de mystiques voient leurs livres sacrés
1410 l’oubli au xxe siècle, si tant d’écoles antiques de sagesse et de mystiques voient leurs livres sacrés publiés de nos jou
1411 siècle, si tant d’écoles antiques de sagesse et de mystiques voient leurs livres sacrés publiés de nos jours et retrouve
1412 t de mystiques voient leurs livres sacrés publiés de nos jours et retrouvent partout des fidèles, c’est par le fait des et
1413 ait des ethnographes, archéologues et philosophes de l’Europe, qui poursuivent l’inventaire mondial initié à la Renaissanc
1414 ndial initié à la Renaissance par nos découvreurs de l’espace et du temps de l’humanité. Troisième raison : On ne voit pas
1415 sance par nos découvreurs de l’espace et du temps de l’humanité. Troisième raison : On ne voit pas de candidats sérieux à
1416 de l’humanité. Troisième raison : On ne voit pas de candidats sérieux à la relève d’une civilisation devenue mondiale. No
1417 : On ne voit pas de candidats sérieux à la relève d’ une civilisation devenue mondiale. Nous connaissons les circonstances
1418 enue mondiale. Nous connaissons les circonstances de la chute de celles qui nous ont précédées : c’était parfois une catas
1419 e. Nous connaissons les circonstances de la chute de celles qui nous ont précédées : c’était parfois une catastrophe natur
1420 vaient rien. Mais ce fut plus souvent l’agression d’ une civilisation rivale, plus primitive et plus brutale, Doriens détrô
1421 e et l’Ibérie romaines, ou les quelques centaines d’ Espagnols s’emparant de l’empire des Aztèques. Il s’agissait dans tous
1422 ou les quelques centaines d’Espagnols s’emparant de l’empire des Aztèques. Il s’agissait dans tous ces cas de civilisatio
1423 ire des Aztèques. Il s’agissait dans tous ces cas de civilisations locales, entourées de « barbares » mal connus. Les cand
1424 tous ces cas de civilisations locales, entourées de « barbares » mal connus. Les candidats à la relève étaient nombreux.
1425 oblitération ou simplement la reprise des charges de notre civilisation, avec quelques chances de succès ? Les États-Unis 
1426 rges de notre civilisation, avec quelques chances de succès ? Les États-Unis ? dira-t-on. Mais ils sont nés de la substanc
1427 s ? Les États-Unis ? dira-t-on. Mais ils sont nés de la substance même de l’Europe, et je les vois s’européaniser par la c
1428 dira-t-on. Mais ils sont nés de la substance même de l’Europe, et je les vois s’européaniser par la culture plus profondém
1429 ? Est-elle une autre civilisation ? Lénine disait de sa Révolution : « C’est le marxisme plus l’électricité. » Or, le marx
1430 artie du Kapital. Le marxisme est né en Europe et de l’Europe, au carrefour d’un débat séculaire entre la théologie et la
1431 sme est né en Europe et de l’Europe, au carrefour d’ un débat séculaire entre la théologie et la philosophie, au moment où
1432 es qui en vivent. On ne saurait imaginer complexe de forces spirituelles, morales et matérielles plus spécifiquement europ
1433 t le pays, le communisme a renouvelé l’entreprise de Pierre le Grand : il a pour la seconde fois européanisé la Russie. Et
1434 sie. Et c’est l’URSS à son tour qui s’est chargée d’ aider la Chine à liquider la civilisation des mandarins, c’est l’URSS
1435 introduit dans l’Empire emmuré ce nouveau cheval de Troie occidental : la technique, et tout ce qu’elle entraîne dans les
1436 t ce qu’elle entraîne dans les mœurs et les modes de penser d’une nation. Le fameux « bon en avant » de la Chine n’a guère
1437 le entraîne dans les mœurs et les modes de penser d’ une nation. Le fameux « bon en avant » de la Chine n’a guère été qu’un
1438 e penser d’une nation. Le fameux « bon en avant » de la Chine n’a guère été qu’un bond vers l’industrie et vers le sociali
1439 sme, inventés par l’Europe et parties intégrantes de sa culture. Quant à l’Afrique, observons simplement que son émancipat
1440 n actuelle ne consiste nullement dans l’avènement d’ une civilisation originale, ou de quelque néo-tribalisme, mais au cont
1441 dans l’avènement d’une civilisation originale, ou de quelque néo-tribalisme, mais au contraire dans l’adoption bien trop r
1442 raire dans l’adoption bien trop rapide des formes de vie politique, sociale et économique, élaborées par l’Europe moderne.
1443 e du Sud, sous-développée, courir après l’exemple de la Chine, qui essaie d’imiter la Russie, laquelle veut rejoindre l’Am
1444 e, courir après l’exemple de la Chine, qui essaie d’ imiter la Russie, laquelle veut rejoindre l’Amérique, qui est une inve
1445 veut rejoindre l’Amérique, qui est une invention de l’Europe… z. Rougemont Denis de, « Les prophètes de la décadence 
1446 une invention de l’Europe… z. Rougemont Denis de , « Les prophètes de la décadence », Les Nouvelles littéraires, Paris,
1447 urope… z. Rougemont Denis de, « Les prophètes de la décadence », Les Nouvelles littéraires, Paris, 24 septembre 1970,
1448 incu et militant est Denis de Rougemont. L’auteur de L’Amour et l’Occident , Penser avec les mains , de L’Aventure occi
1449 L’Amour et l’Occident , Penser avec les mains , de L’Aventure occidentale de l’homme , plaide une nouvelle fois pour le
1450 enser avec les mains , de L’Aventure occidentale de l’homme , plaide une nouvelle fois pour le Vieux Continent, dont il n
1451 garde, comme on va le voir, contre les prophètes de la décadence avant de nous proposer des candidats à la relève.
17 1970, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Denis de Rougemont : l’amour et l’Europe en expert (24 décembre 1970)
1452 ac Denis de Rougemont, les deux grands thèmes de votre vie ont été l’Amour et l’Europe. Quel était le Denis de Rougemo
1453 our et l’Europe. Quel était le Denis de Rougemont de ses 17 ans ? Si vous me disiez 17 ans et demi, je vous dirai : l’âge
1454 s me disiez 17 ans et demi, je vous dirai : l’âge de mon premier article. J’étais au gymnase de ma ville natale, Neuchâtel
1455 l’âge de mon premier article. J’étais au gymnase de ma ville natale, Neuchâtel. Le trait caractéristique de cet endroit o
1456 ville natale, Neuchâtel. Le trait caractéristique de cet endroit où je suis né est d’être un carrefour, une petite princip
1457 caractéristique de cet endroit où je suis né est d’ être un carrefour, une petite principauté placée entre les influences
1458 is que des poèmes, persuadé que toute autre forme de littérature était inférieure et méprisable. En même temps je jouais a
1459 même temps je jouais au football. J’étais gardien de but. C’était pour moi le poste idéal car le gardien de but n’intervie
1460 t. C’était pour moi le poste idéal car le gardien de but n’intervient qu’aux moments de crises, au sommet de l’effort. Plu
1461 car le gardien de but n’intervient qu’aux moments de crises, au sommet de l’effort. Plus tard, j’ai appris que Montherlant
1462 n’intervient qu’aux moments de crises, au sommet de l’effort. Plus tard, j’ai appris que Montherlant et Albert Camus avai
1463 erlant et Albert Camus avaient aussi été gardiens de but. Comment avez-vous découvert l’Europe ? C’est entre 17 et 25 ans
1464 des troubadours, j’éprouvais un curieux sentiment de reconnaissance. Quand je lisais les romans bretons je me sentais curi
1465 dans tous ces pays-là. Si je regarde l’ascendance de mon père, je m’aperçois qu’à la génération où nous avons 64 ancêtres,
1466 me, il y a 28 Suisses neuchâtelois et 36 ancêtres de Normandie ou du Midi, mais aussi quelques Allemands et plusieurs Holl
1467 luences qui se sont exercées sur notre petit coin de Suisse romande. Vous avez consacré de nombreuses et passionnantes pag
1468 petit coin de Suisse romande. Vous avez consacré de nombreuses et passionnantes pages à l’amour. Qu’est-ce que l’amour po
1469 on livre L’Amour et l’Occident . L’amour au sens de l’amour-passion que j’ai décrit dans mon livre fut quelque chose de t
1470 que j’ai décrit dans mon livre fut quelque chose de très important dans ma vie. L’opposition entre l’amour-passion et le
1471 r-passion et le mariage est au fond le sujet même de ce livre. J’ai été entraîné à écrire cet ouvrage par toute une suite
1472 entraîné à écrire cet ouvrage par toute une suite de circonstances. La plus ancienne était un numéro de la revue Esprit
1473 e circonstances. La plus ancienne était un numéro de la revue Esprit consacré à la femme et l’amour aujourd’hui, et qui
1474 paraissait éclatante entre l’amour dans le mythe de Tristan et l’amour dans le mariagead. Daniel-Rops, qui dirigeait la c
1475 i un petit livre en deux volets opposant le mythe de Tristan et l’amour dans le mariage. Et nous avons pris date. Je devai
1476 ais lui donner mon livre en février 1938. Le mois de février arriva et je n’avais pas écrit une ligne. Je reçus une lettre
1477 écrit une ligne. Je reçus une lettre recommandée de Daniel-Rops, que j’ouvris avec un peu d’anxiété. Il me disait : « Vou
1478 ommandée de Daniel-Rops, que j’ouvris avec un peu d’ anxiété. Il me disait : « Voudriez-vous me rendre un grand service ? A
1479 ous me rendre un grand service ? Accepteriez-vous de céder le tour de parution de votre manuscrit, que j’attends d’un jour
1480 grand service ? Accepteriez-vous de céder le tour de parution de votre manuscrit, que j’attends d’un jour à l’autre, car j
1481 e ? Accepteriez-vous de céder le tour de parution de votre manuscrit, que j’attends d’un jour à l’autre, car je dois publi
1482 our de parution de votre manuscrit, que j’attends d’ un jour à l’autre, car je dois publier le plus tôt possible le manuscr
1483 je dois publier le plus tôt possible le manuscrit d’ un essai d’une grande actualité intitulé La France et son armée, et do
1484 lier le plus tôt possible le manuscrit d’un essai d’ une grande actualité intitulé La France et son armée, et dont l’auteur
1485 réface, c’est un livre qui m’a demandé trois mois de travail et toute la vie. J’étais devenu, hélas ! aux yeux de beaucoup
1486 ns dans beaucoup de pays un expert sur les choses de l’amour. Quand les gens me rencontraient ils me disaient : « C’est vo
1487 ontraient ils me disaient : « C’est vous l’auteur de L’Amour et l’Occident  ? Je croyais que vous aviez une grande barbe
1488 e votre livre a transformé ma vie ! »… Cette idée d’ avoir transformé tant de vies m’a beaucoup impressionné. J’ai tâché de
1489 ant de vies m’a beaucoup impressionné. J’ai tâché de suivre un peu ce qui se passait dans la vie de ces gens qui m’avaient
1490 hé de suivre un peu ce qui se passait dans la vie de ces gens qui m’avaient fait des confidences et je me suis aperçu que
1491 er avant de m’avoir lu puis qu’ils avaient décidé de ne pas divorcer, de s’en tenir à la dernière partie de mon livre. Mai
1492 lu puis qu’ils avaient décidé de ne pas divorcer, de s’en tenir à la dernière partie de mon livre. Mais voilà que, en les
1493 pas divorcer, de s’en tenir à la dernière partie de mon livre. Mais voilà que, en les suivant un peu plus longtemps, je m
1494 uand même par divorcer, c’est-à-dire que l’action de mon livre était généralement de retarder les divorces de quelques ann
1495 dire que l’action de mon livre était généralement de retarder les divorces de quelques années, ce qui provoquait pas mal d
1496 livre était généralement de retarder les divorces de quelques années, ce qui provoquait pas mal de souffrances, mais peut-
1497 ces de quelques années, ce qui provoquait pas mal de souffrances, mais peut-être aussi des prises de conscience fort utile
1498 l de souffrances, mais peut-être aussi des prises de conscience fort utiles. Mon premier mariage s’est terminé par un divo
1499 age s’est terminé par un divorce après mes années d’ Amérique. C’est pourquoi dans la nouvelle édition qui a paru en 1954ae
1500 tre sur le divorce. Depuis lors je n’ai cas cessé de récrire ce livre. Mon deuxième livre sur ce thème, Comme toi-même ,
1501 e thème, Comme toi-même , qui est édité en livre de poche sous le titre Les Mythes de l’amour, donne à la passion plus de
1502 édité en livre de poche sous le titre Les Mythes de l’amour, donne à la passion plus de droits que je ne lui en laissais
1503 re Les Mythes de l’amour, donne à la passion plus de droits que je ne lui en laissais dans mon premier livre. Que pensez-v
1504 udrait élever les gens dans une méfiance profonde de ce que représente la passion. C’est au fond contre la vulgarisation d
1505 n. C’est au fond contre la vulgarisation du mythe de Tristan que je m’élevais, surtout dans L’Amour et l’Occident , et no
1506 t , et non pas contre le mythe. Cela n’aurait pas de sens de dire que l’on est contre la passion qui est l’une des choses
1507 on pas contre le mythe. Cela n’aurait pas de sens de dire que l’on est contre la passion qui est l’une des choses glorieus
1508 emment parce que l’on sait que c’est la condition de réussite de quelque chose de durable. Si je fais un plaidoyer pour la
1509 que l’on sait que c’est la condition de réussite de quelque chose de durable. Si je fais un plaidoyer pour la fidélité, c
1510 e c’est la condition de réussite de quelque chose de durable. Si je fais un plaidoyer pour la fidélité, ce n’est pas au no
1511 omme certains l’ont cru, mais au nom d’une morale d’ artiste. Tout homme est amené à être créateur d’une œuvre, ne fût-ce q
1512 e d’artiste. Tout homme est amené à être créateur d’ une œuvre, ne fût-ce que de soi-même et surtout de son couple. Je pens
1513 amené à être créateur d’une œuvre, ne fût-ce que de soi-même et surtout de son couple. Je pense que c’est l’œuvre la plus
1514 d’une œuvre, ne fût-ce que de soi-même et surtout de son couple. Je pense que c’est l’œuvre la plus belle. Et la passion ?
1515 s pas, mais je pense qu’elle doit être réservée à de très rares personnes qui seront probablement le sel de la terre ou qu
1516 ès rares personnes qui seront probablement le sel de la terre ou qui seront quelquefois des criminels. Revenons à l’Europe
1517 à l’Europe. Vous vivez à Ferney-Voltaire entouré de frontières… Un jour j’ai passé la frontière avec Robert Schuman en vo
1518  : « Ah ! ça, c’est l’Europe !… passez… » Le fait d’ être obligé de passer une et souvent plusieurs fois par jour la fronti
1519 c’est l’Europe !… passez… » Le fait d’être obligé de passer une et souvent plusieurs fois par jour la frontière est bien f
1520 le cordon douanier derrière le Jura et faisaient de l’ensemble du pays de Gex, Savoie et Genève, de nouveau une région na
1521 rrière le Jura et faisaient de l’ensemble du pays de Gex, Savoie et Genève, de nouveau une région naturelle comme la géogr
1522 dessinée. Mais en 1923, Poincaré, par une espèce de coup d’État, a décidé de porter à la frontière politique sa ligne de
1523 e. Mais en 1923, Poincaré, par une espèce de coup d’ État, a décidé de porter à la frontière politique sa ligne de douanier
1524 Poincaré, par une espèce de coup d’État, a décidé de porter à la frontière politique sa ligne de douaniers et il en a résu
1525 écidé de porter à la frontière politique sa ligne de douaniers et il en a résulté que dans la région que j’habite, qui est
1526 » Denis de Rougemont, quelle est votre définition de la gloire ? C’est le salut. C’est ce qui vient après la mort. C’est l
1527 ssement. C’est un triomphal accord clamé à la fin de la IXe Symphonie, c’est quelque chose que probablement tout homme a s
1528 que probablement tout homme a senti dans le fond de soi-même comme l’achèvement. Cela n’a rien à voir avec la publicité.
1529 e secret. Je crois beaucoup à une notion secrète de la gloire. La gloire n’est pas donnée par la foule, elle n’est pas do
1530 ’est pas donnée par le succès. C’est un sentiment d’ épanouissement suprême, une floraison dans le ciel accompagnée d’une g
1531 t suprême, une floraison dans le ciel accompagnée d’ une grande euphorie et d’un grand bonheur. Et votre définition de la m
1532 dans le ciel accompagnée d’une grande euphorie et d’ un grand bonheur. Et votre définition de la mort ? Si un homme pouvait
1533 phorie et d’un grand bonheur. Et votre définition de la mort ? Si un homme pouvait penser complètement la mort, il mourrai
1534 rien dire. J’ai des idées folles, comme beaucoup d’ hommes, sur la mort, sur la chronologie, si vous voulez. Je pense que
1535 et que nous y sommes déjà maintenant. Plutôt que de me demander ce que c’est que la mort, je m’interroge sur ce qu’est la
1536 e peux dire quelque chose : c’est un certain laps de temps pendant lequel une personne peut se constituer pour essayer de
1537 quel une personne peut se constituer pour essayer de découvrir sa vocation. Si elle découvre sa vocation, si elle la réali
1538 nne pas Dieu comme quelque chose dont chacun sait de quoi il s’agit, mais que j’insiste pour indiquer que nous nous trouvo
1539 vons devant un problème. J’ai écrit des centaines de pages de notes sur ce que ce mot Dieu peut évoquer pour l’esprit d’un
1540 nt un problème. J’ai écrit des centaines de pages de notes sur ce que ce mot Dieu peut évoquer pour l’esprit d’un homme du
1541 sur ce que ce mot Dieu peut évoquer pour l’esprit d’ un homme du xxe siècle, moi, par exemple. J’écris généralement quelqu
1542 tout, mon incroyance, ma croyance, ma difficulté de croire, mon impossibilité de ne pas croire. Tout cela avec la plus gr
1543 yance, ma difficulté de croire, mon impossibilité de ne pas croire. Tout cela avec la plus grande précision dans le détail
1544 essante ; en évitant tout ce qui peut avoir l’air de faire croire aux gens que pour moi croire en Dieu est bien, ne pas y
1545 Pour être complètement sincère, j’éprouve autant de difficultés à ne pas croire en Dieu qu’à y croire, et ce n’est pas pe
1546 ’est à ceci : Dieu, c’est le sens. S’il n’y a pas de Dieu, il n’y a pas de sens. Certains savants aujourd’hui disent qu’il
1547 est le sens. S’il n’y a pas de Dieu, il n’y a pas de sens. Certains savants aujourd’hui disent qu’ils ne tiennent pas du t
1548 uis ils finissent par vous faire un petit couplet de morale scientifique. On pourrait leur demander : Qu’est-ce que cela v
1549 rquoi ne me comporterais-je pas comme le surhomme de Nietzsche ? Au nom de quoi venez-vous me dire qu’il faut être sociali
1550 ire qu’il faut être socialiste ou qu’il faut être de gauche ? Nous entrons dans l’arbitraire total. Si, au contraire, j’en
1551 alors il y a un sens, il y a quelque chose qui va d’ un arrière à un avant. Si vous voulez, je pense que Dieu n’est pas une
1552 z, je pense que Dieu n’est pas une cause au début de tout mais qu’il est une cause finale de l’humanité, qu’il appelle le
1553 au début de tout mais qu’il est une cause finale de l’humanité, qu’il appelle le développement de l’homme. D’autre part,
1554 ale de l’humanité, qu’il appelle le développement de l’homme. D’autre part, je crois qu’il y a une grande naïveté à discut
1555 té à discuter sur l’existence ou la non-existence de Dieu étant donné que nous savons la place infime que nous tenons dans
1556 t bien ce qu’elle veut dire : comment une cellule de notre corps pourrait croire à l’existence de ce corps ? Elle n’a aucu
1557 lule de notre corps pourrait croire à l’existence de ce corps ? Elle n’a aucun moyen d’en prendre connaissance. Elle peut
1558 à l’existence de ce corps ? Elle n’a aucun moyen d’ en prendre connaissance. Elle peut savoir à peu près qu’elle fait part
1559 . Elle peut savoir à peu près qu’elle fait partie d’ un organe, mais elle ne peut pas savoir que cet organe fait partie d’u
1560 lle ne peut pas savoir que cet organe fait partie d’ un corps. Elle peut donc parfaitement nier l’existence du corps. ab.
1561 nier l’existence du corps. ab. Rougemont Denis de , « [Entretien] L’amour et l’Europe en expert », Les Nouvelles littéra
1562 ens , nous ne trouvons pas seulement confirmation de l’idéal de toute sa vie ; les hommes qui demain auront la charge du m
1563 ne trouvons pas seulement confirmation de l’idéal de toute sa vie ; les hommes qui demain auront la charge du monde pourro
1564 er tout un programme politique inspiré par l’idée d’ union fédérale. Denis de Rougemont s’est fait l’apôtre de cette croisa
1565 fédérale. Denis de Rougemont s’est fait l’apôtre de cette croisade ; il n’est donc pas étonnant qu’on en réentende l’écho
1566 re 1938, et non en 1936. ae. La deuxième édition de L’Amour et l’Occident date en fait de 1956.
1567 me édition de L’Amour et l’Occident date en fait de 1956.
18 1972, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). De l’unité de culture à l’union politique (17-23 avril 1972)
1568 De l’unité de culture à l’union politique (17-23 avril 1972)af ag L’
1569 De l’unité de culture à l’union politique (17-23 avril 1972)af ag L’unité de l’
1570 ion politique (17-23 avril 1972)af ag L’unité de l’Europe ne se fera ni uniquement ni principalement par des instituti
1571 pour se défendre seule, n’a pas la moindre chance de résister d’une part à la colonisation idéologique et militaire par le
1572 e et militaire par les Russes — je songe aux pays de l’Est européen — d’autre part à la colonisation de notre économie et
1573 e l’Est européen — d’autre part à la colonisation de notre économie et de nos coutumes sociales par les Américains. Mais l
1574 autre part à la colonisation de notre économie et de nos coutumes sociales par les Américains. Mais l’Europe ne pourra jam
1575 formule fédéraliste, respectueuse des diversités de tous ordres et des autonomies régionales. Une Europe unifiée et unifo
1576 pe unifiée et uniformisée, deux hommes ont essayé de la faire : Napoléon et Hitler. Dans les deux cas, l’expérience sécula
1577 même temps la seule qui corresponde aux réalités de la culture européenne, aux conditions de sa vitalité. Mais l’obstacle
1578 réalités de la culture européenne, aux conditions de sa vitalité. Mais l’obstacle majeur que l’on dresse sans relâche cont
1579 ontre toute union fédérale, c’est l’État national de type xixe siècle, jacobin et napoléonien, copié par plus de cent pay
1580 e siècle, jacobin et napoléonien, copié par plus de cent pays dans le monde entier, l’État-nation à souveraineté théoriqu
1581 omenté par la culture. Car ce sont bien des faits de culture : l’école, aux trois degrés, la presse, les livres, qui nous
1582 ui nous font croire, depuis plusieurs générations de bons élèves et de maîtres eux-mêmes trop crédules, que l’État nationa
1583 e, depuis plusieurs générations de bons élèves et de maîtres eux-mêmes trop crédules, que l’État national centralisé et ab
1584 l’aboutissement nécessaire, inévitable et naturel de toute l’évolution humaine. L’école, surtout secondaire, apprend depui
1585 re, apprend depuis un siècle aux jeunes Européens de nos divers pays — contre toute évidence historique — que leur nation
1586 immortelle, ce qui suggère qu’elle aurait existé de toute éternité ; alors qu’en vérité, pour la plupart, en tant qu’État
1587 t en moyenne, nos nations n’ont même pas cent ans d’ âge. Seules la France, l’Angleterre et l’Espagne comptent plusieurs si
1588 et Malte, dix. L’école nous a raconté que chacun de nos États-nations correspond à une langue, à une ethnie, à un ensembl
1589 ut est faux dans cet enseignement. Il n’y a pas de cultures nationales La culture européenne n’est pas la somme de vi
1590 nales La culture européenne n’est pas la somme de vingt-cinq cultures nationales, puisqu’elle existait bien avant la fo
1591 ant la formation, récente nous venons de le voir, de nos États-nations. Le mot nation, natio en latin, désignait au Moyen
1592 n Âge, dans une ville universitaire, les colonies d’ étudiants venus d’une même région d’Europe et parlant entre eux la mêm
1593 lle universitaire, les colonies d’étudiants venus d’ une même région d’Europe et parlant entre eux la même langue : nation
1594 les colonies d’étudiants venus d’une même région d’ Europe et parlant entre eux la même langue : nation anglaise, nation f
1595 de culture commune, bien antérieure à l’idée même d’ État-nation. Mais dira-t-on, le mot « nation » désignait, dès ce temps
1596 t même langue ? Oui, mais il n’était pas question de les enfermer pour autant dans les frontières d’un même État. D’ailleu
1597 n de les enfermer pour autant dans les frontières d’ un même État. D’ailleurs, il n’est pas vrai que nos États-nations mode
1598 nos États-nations modernes correspondent à l’aire de diffusion d’une langue. Prenez la France : on parle huit langues à l’
1599 ions modernes correspondent à l’aire de diffusion d’ une langue. Prenez la France : on parle huit langues à l’intérieur de
1600 comme seule langue officielle dès 1539 par l’édit de Villers-Cotterêts. Si la France entendait revendiquer la Wallonie, la
1601 endiquer la Wallonie, la Suisse romande et le Val d’ Aoste au nom de l’unité linguistique, elle devrait s’amputer, pour le
1602 ique, elle devrait s’amputer, pour le même motif, de près de la moitié de ses territoires actuels. Prenez la langue allema
1603 amputer, pour le même motif, de près de la moitié de ses territoires actuels. Prenez la langue allemande : si elle devait
1604 manique, les Sudètes, les minorités germanophones de la Belgique, de l’Alsace, de la Transylvanie, de la Slovénie, de la P
1605 ètes, les minorités germanophones de la Belgique, de l’Alsace, de la Transylvanie, de la Slovénie, de la Pologne, des pays
1606 orités germanophones de la Belgique, de l’Alsace, de la Transylvanie, de la Slovénie, de la Pologne, des pays baltes et de
1607 de la Belgique, de l’Alsace, de la Transylvanie, de la Slovénie, de la Pologne, des pays baltes et de la Volga. On m’obje
1608 de l’Alsace, de la Transylvanie, de la Slovénie, de la Pologne, des pays baltes et de la Volga. On m’objecte souvent que
1609 de la Slovénie, de la Pologne, des pays baltes et de la Volga. On m’objecte souvent que nos langues sont trop différentes
1610 ères les unes aux autres, si bien que les Chinois de provinces différentes ne peuvent communiquer entre eux qu’au moyen d’
1611 ntes ne peuvent communiquer entre eux qu’au moyen d’ idéogrammes dessinés dans la paume de leur main, les Européens retrouv
1612 qu’au moyen d’idéogrammes dessinés dans la paume de leur main, les Européens retrouvent sans peine dans leurs langues non
1613 gues non seulement les formes et les mots dérivés de leur commune origine indo-européenne, mais encore tout ce que leur hi
1614 viennent se superposer les influences dominantes de l’italien à la fin du Moyen Âge, du français au xviiie siècle, de l’
1615 fin du Moyen Âge, du français au xviiie siècle, de l’allemand des philosophes et des savants au xixe , et de l’anglo-amé
1616 emand des philosophes et des savants au xixe , et de l’anglo-américain de nos jours. Le mot « évêque », par exemple, véhic
1617 et des savants au xixe , et de l’anglo-américain de nos jours. Le mot « évêque », par exemple, véhiculé par l’usage ecclé
1618 de même des termes militaires comme « canon », et de tous les termes techniques. Vues de loin, de l’Asie ou de l’Afrique,
1619 « canon », et de tous les termes techniques. Vues de loin, de l’Asie ou de l’Afrique, toutes nos langues se ressemblent co
1620 , et de tous les termes techniques. Vues de loin, de l’Asie ou de l’Afrique, toutes nos langues se ressemblent comme des s
1621 les termes techniques. Vues de loin, de l’Asie ou de l’Afrique, toutes nos langues se ressemblent comme des sœurs. Vue de
1622 s nos langues se ressemblent comme des sœurs. Vue de loin, l’unité culturelle de l’Europe est un fait que personne ne cont
1623 comme des sœurs. Vue de loin, l’unité culturelle de l’Europe est un fait que personne ne conteste. Enfin, il y a l’affair
1624 française, et elle a triomphé dans l’enseignement de la géographie au xixe , là encore contre toute évidence, mais au serv
1625 core contre toute évidence, mais au service dévot de l’État-nation. C’est ainsi qu’on nous a inculqué que le Rhin sépare l
1626 on nous a inculqué que le Rhin sépare les peuples de ses rives, mais que le Rhône les unit, allez savoir pourquoi ! De mêm
1627 ) ne vienne pas remarquer que l’on trouve à l’est de cette chaîne les mêmes Catalans sur les deux versants, et les mêmes B
1628 ôtés à la hauteur des vallées vaudoises et du Val d’ Aoste, plus loin l’allemand, puis le ladin, puis de nouveau l’allemand
1629 a vérité qu’on nous cachait, c’est que la culture de tous nos peuples est une, quoique tissée de contradictions dans sa ge
1630 lture de tous nos peuples est une, quoique tissée de contradictions dans sa genèse même, qu’elle s’est formée à partir d’i
1631 ans sa genèse même, qu’elle s’est formée à partir d’ influences indo-européennes, gréco-latines, celtes et germaniques, ara
1632 es et slaves, souvent incompatibles entre elles — de là le caractère essentiellement contestataire de son génie — mais qui
1633 de là le caractère essentiellement contestataire de son génie — mais qui nous ont tous affectés à doses variables, et qui
1634 ns « cultivés » ou non. Toutes les grandes écoles d’ art, d’architecture, de musique, de philosophie, de littérature et de
1635 ltivés » ou non. Toutes les grandes écoles d’art, d’ architecture, de musique, de philosophie, de littérature et de doctrin
1636 Toutes les grandes écoles d’art, d’architecture, de musique, de philosophie, de littérature et de doctrine sociologique o
1637 grandes écoles d’art, d’architecture, de musique, de philosophie, de littérature et de doctrine sociologique ou politique,
1638 ’art, d’architecture, de musique, de philosophie, de littérature et de doctrine sociologique ou politique, ont été paneuro
1639 re, de musique, de philosophie, de littérature et de doctrine sociologique ou politique, ont été paneuropéennes, et non pa
1640 Les grands courants européens, les grandes écoles d’ art et de pensée : c’est l’unité de notre culture commune. Mais qu’en
1641 s courants européens, les grandes écoles d’art et de pensée : c’est l’unité de notre culture commune. Mais qu’en est-il de
1642 grandes écoles d’art et de pensée : c’est l’unité de notre culture commune. Mais qu’en est-il de nos diversités tant vanté
1643 unité de notre culture commune. Mais qu’en est-il de nos diversités tant vantées, et à juste titre ? Est-il vrai, comme le
1644 titre ? Est-il vrai, comme le disent trop souvent d’ éloquents ministres à Bruxelles ou à Strasbourg, que ces « précieuses
1645 rg, que ces « précieuses diversités » sont celles de nos nations ? Je propose là-dessus deux observations faciles à vérifi
1646 ervations faciles à vérifier. Non, les frontières de nos États n’ont jamais été « naturelles ». Elles sont accidentelles e
1647 storien français, le résultat des « viols répétés de la géographie par l’histoire », comme je le vois tous les jours autou
1648 ert à rien, ne protège contre rien, n’arrête rien de ce qu’il faudrait arrêter — tempêtes, épidémies, pollution de l’air e
1649 faudrait arrêter — tempêtes, épidémies, pollution de l’air et de l’eau — mais gêne les échanges qu’il faudrait promouvoir
1650 êter — tempêtes, épidémies, pollution de l’air et de l’eau — mais gêne les échanges qu’il faudrait promouvoir et vexe tout
1651 t promouvoir et vexe tout le monde ; beau symbole de la souveraineté stato-nationale, qui ne peut plus avoir d’effets que
1652 veraineté stato-nationale, qui ne peut plus avoir d’ effets que négatifs ! En nous présentant l’Europe comme un puzzle de n
1653 ifs ! En nous présentant l’Europe comme un puzzle de nations en teintes pâles, et la culture de l’Europe comme une additio
1654 puzzle de nations en teintes pâles, et la culture de l’Europe comme une addition de prétendues « cultures nationales », le
1655 les, et la culture de l’Europe comme une addition de prétendues « cultures nationales », les manuels de notre enfance non
1656 e prétendues « cultures nationales », les manuels de notre enfance non seulement se trouvaient justifier les pires chauvin
1657 vaient justifier les pires chauvinismes, fauteurs de deux guerres mondiales où l’Europe a failli périr, mais encore ils fa
1658 li périr, mais encore ils faussaient notre vision de l’histoire et le sens même de la vie de l’esprit. 1° Chacun de nos pa
1659 saient notre vision de l’histoire et le sens même de la vie de l’esprit. 1° Chacun de nos pays a un nord et un midi : dans
1660 re vision de l’histoire et le sens même de la vie de l’esprit. 1° Chacun de nos pays a un nord et un midi : dans chacun vo
1661 et le sens même de la vie de l’esprit. 1° Chacun de nos pays a un nord et un midi : dans chacun vous trouverez des croyan
1662 uverez des croyants et des incroyants, des hommes de gauche et des hommes de droite, des romantiques et des classiques, de
1663 es incroyants, des hommes de gauche et des hommes de droite, des romantiques et des classiques, des progressistes et des c
1664 en fait que dans la plupart des cas, les libéraux de pays différents se ressemblent davantage et s’entendront mieux entre
1665 tre eux qu’ils ne s’entendent avec les fanatiques de leur propre nation ; que les hippies d’un pays s’accorderont mieux av
1666 anatiques de leur propre nation ; que les hippies d’ un pays s’accorderont mieux avec ceux de n’importe où qu’avec les conf
1667 s hippies d’un pays s’accorderont mieux avec ceux de n’importe où qu’avec les conformistes de leur propre nation, etc. Ce
1668 vec ceux de n’importe où qu’avec les conformistes de leur propre nation, etc. Ce ne sont pas nos appartenances nationales
1669 s qui nous diversifient vraiment, mais les écoles de pensée, les styles de vie. Supprimez les frontières nationales, vous
1670 t vraiment, mais les écoles de pensée, les styles de vie. Supprimez les frontières nationales, vous n’appauvrirez en rien
1671 l’Europe. 2° La création culturelle en Europe est d’ autant plus riche et plus intense qu’elle est moins centralisée et que
1672 yers sont plus nombreux. Au Moyen Âge, ces foyers de création sont les universités, à la Renaissance les cités du Nord de
1673 ance les cités du Nord de l’Italie, des Flandres, de la Bourgogne et de la Rhénanie, du Languedoc et de la Castille. On sa
1674 ord de l’Italie, des Flandres, de la Bourgogne et de la Rhénanie, du Languedoc et de la Castille. On sait le rôle merveill
1675 e la Bourgogne et de la Rhénanie, du Languedoc et de la Castille. On sait le rôle merveilleusement fécondant de petites vi
1676 tille. On sait le rôle merveilleusement fécondant de petites villes comme Tubingue, Iéna, Weimar ou Dresde dans les Allema
1677 ou Dresde dans les Allemagnes romantiques, celles de Hegel ou de Schelling, de Hölderlin ou de Humboldt, au moment même où
1678 ns les Allemagnes romantiques, celles de Hegel ou de Schelling, de Hölderlin ou de Humboldt, au moment même où Napoléon fa
1679 nes romantiques, celles de Hegel ou de Schelling, de Hölderlin ou de Humboldt, au moment même où Napoléon fait de la Franc
1680 celles de Hegel ou de Schelling, de Hölderlin ou de Humboldt, au moment même où Napoléon fait de la France un désert cult
1681 n ou de Humboldt, au moment même où Napoléon fait de la France un désert culturel en mobilisant à Paris tous les esprits d
1682 distingués qu’il n’a pas bannis. Le grand secret de la vitalité inégalée de notre culture européenne, il est dans cette i
1683 s bannis. Le grand secret de la vitalité inégalée de notre culture européenne, il est dans cette interaction perpétuelle d
1684 e unité vivante et dynamique et des foyers locaux de création qui sans cesse remettent en question et renouvellent les don
1685 spose en termes politiques mon équation : Europe de la culture : foyers de création initiant des courants continentaux. c
1686 ues mon équation : Europe de la culture : foyers de création initiant des courants continentaux. cela va donner : Europe
1687 on continentale. Voici donc le modèle fédéraliste de l’Europe que je préconise : la complexité des régions rendra justice
1688 a justice à ses fécondes diversités, et l’ampleur de la fédération exprimera l’unité millénaire de sa culture. af. Rou
1689 eur de la fédération exprimera l’unité millénaire de sa culture. af. Rougemont Denis de, « De l’unité de culture à l’u
1690 millénaire de sa culture. af. Rougemont Denis de , « De l’unité de culture à l’union politique », Les Nouvelles littéra
1691 aire de sa culture. af. Rougemont Denis de, «  De l’unité de culture à l’union politique », Les Nouvelles littéraires,
1692 culture. af. Rougemont Denis de, « De l’unité de culture à l’union politique », Les Nouvelles littéraires, Paris, 17 a
1693 1972–23 avril 1971, p. 13-14. ag. Version revue de l’article paru sous le titre : « L’Europe est d’abord une unité de cu
1694 sous le titre : « L’Europe est d’abord une unité de culture », Intégration : Vierteljahreshefte zur Europaforschung, Brux