1 1933, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Parole de Dieu et parole humaine, par Karl Barth (30 décembre 1933)
1 humaine, par Karl Barth (30 décembre 1933)a b La théologie chrétienne a-t-elle pour tâche de rendre acceptable le mess
2 rétienne a-t-elle pour tâche de rendre acceptable le message de l’Évangile, d’en atténuer le scandale, d’intégrer largemen
3 lle pour tâche de rendre acceptable le message de l’ Évangile, d’en atténuer le scandale, d’intégrer largement les découver
4 cceptable le message de l’Évangile, d’en atténuer le scandale, d’intégrer largement les découvertes de l’esprit humain, qu
5 , d’en atténuer le scandale, d’intégrer largement les découvertes de l’esprit humain, quitte à laisser tomber certains dogm
6 scandale, d’intégrer largement les découvertes de l’ esprit humain, quitte à laisser tomber certains dogmes décidément inco
7 s ? Ou bien doit-elle, tout au contraire, assumer le scandale, montrer sa permanente et salutaire nécessité, annoncer aux
8 pas justiciable de leurs mesures puisqu’elle est le jugement de tous nos jugements et la « crise » de tous nos problèmes 
9 squ’elle est le jugement de tous nos jugements et la « crise » de tous nos problèmes ? Mais si l’on opte pour le scandale
10 s et la « crise » de tous nos problèmes ? Mais si l’ on opte pour le scandale et non pour les adaptations, qui voudra recev
11  » de tous nos problèmes ? Mais si l’on opte pour le scandale et non pour les adaptations, qui voudra recevoir ce message 
12  ? Mais si l’on opte pour le scandale et non pour les adaptations, qui voudra recevoir ce message ? « L’âme moderne » décon
13 s adaptations, qui voudra recevoir ce message ? «  L’ âme moderne » décontenancée par l’échec de ses idéaux, demande des apa
14 ce message ? « L’âme moderne » décontenancée par l’ échec de ses idéaux, demande des apaisements ou des directions positiv
15 positives. Faut-il encore ajouter à son trouble, l’ aggraver, le rendre littéralement insupportable ? Telles étaient les q
16 Faut-il encore ajouter à son trouble, l’aggraver, le rendre littéralement insupportable ? Telles étaient les questions que
17 ndre littéralement insupportable ? Telles étaient les questions que se posait, vers la fin de la guerre, dans le presbytère
18 Telles étaient les questions que se posait, vers la fin de la guerre, dans le presbytère d’un village de la Suisse allema
19 aient les questions que se posait, vers la fin de la guerre, dans le presbytère d’un village de la Suisse allemande, un je
20 ons que se posait, vers la fin de la guerre, dans le presbytère d’un village de la Suisse allemande, un jeune pasteur, Kar
21 de la guerre, dans le presbytère d’un village de la Suisse allemande, un jeune pasteur, Karl Barth. Autour de lui, c’étai
22 jeune pasteur, Karl Barth. Autour de lui, c’était l’ écho des bombardements, les cartes de pain, des menaces de violences s
23 Autour de lui, c’était l’écho des bombardements, les cartes de pain, des menaces de violences sociales. Que devenaient, da
24 olences sociales. Que devenaient, dans tout cela, les belles synthèses de la théologie libérale ? L’arrière-plan de bourgeo
25 venaient, dans tout cela, les belles synthèses de la théologie libérale ? L’arrière-plan de bourgeoisie et d’optimisme cul
26 , les belles synthèses de la théologie libérale ? L’ arrière-plan de bourgeoisie et d’optimisme culturel sur lequel, trop s
27 r lequel, trop souvent, elles s’étaient appuyées, la guerre et la révolution le bouleversaient brutalement, mettant à nu l
28 p souvent, elles s’étaient appuyées, la guerre et la révolution le bouleversaient brutalement, mettant à nu les vraies rai
29 es s’étaient appuyées, la guerre et la révolution le bouleversaient brutalement, mettant à nu les vraies raisons, les vrai
30 ution le bouleversaient brutalement, mettant à nu les vraies raisons, les vrais problèmes. « Pasteur, je devais parler à de
31 ent brutalement, mettant à nu les vraies raisons, les vrais problèmes. « Pasteur, je devais parler à des hommes aux prises
32 ur, je devais parler à des hommes aux prises avec les contradictions inouïes de la vie, et leur parler du message non moins
33 mes aux prises avec les contradictions inouïes de la vie, et leur parler du message non moins inouï de la Bible, de cette
34 vie, et leur parler du message non moins inouï de la Bible, de cette Bible qui se pose comme une nouvelle énigme en face d
35 une nouvelle énigme en face des contradictions de la vie. Souvent ces deux grandeurs, la vie et la Bible, m’ont fait l’eff
36 radictions de la vie. Souvent ces deux grandeurs, la vie et la Bible, m’ont fait l’effet — ne me le font-elles pas encore 
37 de la vie. Souvent ces deux grandeurs, la vie et la Bible, m’ont fait l’effet — ne me le font-elles pas encore ? — d’être
38 es deux grandeurs, la vie et la Bible, m’ont fait l’ effet — ne me le font-elles pas encore ? — d’être Charybde et Scylla.
39 s, la vie et la Bible, m’ont fait l’effet — ne me le font-elles pas encore ? — d’être Charybde et Scylla. Si c’est cela l’
40 core ? — d’être Charybde et Scylla. Si c’est cela l’ origine et le but de la prédication chrétienne, me disais-je, qui donc
41 re Charybde et Scylla. Si c’est cela l’origine et le but de la prédication chrétienne, me disais-je, qui donc doit, qui do
42 e et Scylla. Si c’est cela l’origine et le but de la prédication chrétienne, me disais-je, qui donc doit, qui donc peut êt
43 ne veut se soustraire, Karl Barth se met à relire l’ Épître aux Romains, la plus inquiétante sans doute, pour notre esprit
44 Karl Barth se met à relire l’Épître aux Romains, la plus inquiétante sans doute, pour notre esprit critique. Il résulte d
45 ent mais qui paraît finalement en librairie après la guerre. Aventure étonnante que celle de ce commentaire né de la détre
46 nture étonnante que celle de ce commentaire né de la détresse quotidienne d’un obscur pasteur de campagne, et dans lequel,
47 steur de campagne, et dans lequel, soudain, toute l’ Allemagne intellectuelle découvre l’expression poignante de son angois
48 oudain, toute l’Allemagne intellectuelle découvre l’ expression poignante de son angoisse intime, mais aussi, et enfin, une
49 lles nous fuyons toujours — et c’est là justement le principe de notre inquiétude. « Nos auditeurs attendent de nous que n
50 étude. « Nos auditeurs attendent de nous que nous les comprenions mieux qu’ils ne se comprennent eux-mêmes… Si nous ne pren
51 se comprennent eux-mêmes… Si nous ne prenons pas les hommes au sérieux quand la détresse de leur existence les a conduits
52 i nous ne prenons pas les hommes au sérieux quand la détresse de leur existence les a conduits à nous, je le répète, si no
53 es au sérieux quand la détresse de leur existence les a conduits à nous, je le répète, si nous ne les prenons pas davantage
54 resse de leur existence les a conduits à nous, je le répète, si nous ne les prenons pas davantage au sérieux qu’ils ne le
55 e les a conduits à nous, je le répète, si nous ne les prenons pas davantage au sérieux qu’ils ne le font eux-mêmes, comment
56 ne les prenons pas davantage au sérieux qu’ils ne le font eux-mêmes, comment aurions-nous le droit de nous étonner que, po
57 qu’ils ne le font eux-mêmes, comment aurions-nous le droit de nous étonner que, pour la plupart, ils prennent peu à peu l’
58 nner que, pour la plupart, ils prennent peu à peu l’ habitude de délaisser l’Église et de nous abandonner, seuls avec ces b
59 t, ils prennent peu à peu l’habitude de délaisser l’ Église et de nous abandonner, seuls avec ces bien-disposés et ces timo
60 s tromper. Il y avait là un homme, une puissance. Le défi de Marx et de Nietzsche était relevé. Le tirage du Römerbrief al
61 ce. Le défi de Marx et de Nietzsche était relevé. Le tirage du Römerbrief alla au vingtième mille. Barth, nommé professeur
62 lla au vingtième mille. Barth, nommé professeur à l’ Université de Bonn, exerce depuis dix ans une influence qu’on peut qua
63 uence qu’on peut qualifier de révolutionnaire sur la pensée protestante dans le monde entier. Quel est donc le contenu de
64 de révolutionnaire sur la pensée protestante dans le monde entier. Quel est donc le contenu de cette œuvre, où est le secr
65 e protestante dans le monde entier. Quel est donc le contenu de cette œuvre, où est le secret de son incomparable virulenc
66 . Quel est donc le contenu de cette œuvre, où est le secret de son incomparable virulence ? Les essais que viennent de tra
67 où est le secret de son incomparable virulence ? Les essais que viennent de traduire MM. Pierre Maury et A. Lavanchy sous
68 de traduire MM. Pierre Maury et A. Lavanchy sous le titre Parole de Dieu et Parole humaine donneraient une idée sinon de
69 u et Parole humaine donneraient une idée sinon de la pensée barthienne dans son plein développement, du moins de ses thème
70 particulière. Il n’est pas facile de résumer sans la trahir une pensée à ce point hostile à tout système. La théologie de
71 hir une pensée à ce point hostile à tout système. La théologie de Barth se donne en effet pour une simple « note marginale
72 n effet pour une simple « note marginale » à tous les systèmes existants. Barth lui-même l’a nommée, avec une sobriété peu
73 e » à tous les systèmes existants. Barth lui-même l’ a nommée, avec une sobriété peu rassurante, une théologie du correctif
74 théologie du correctif. Disons tout de suite que les corrections qu’elle apporte constituent une sérieuse attaque contre t
75 e lèvent de toutes parts de troublants paradoxes. La Bible nous parle-t-elle de religion ? Ne nous montre-t-elle pas plutô
76 as plutôt, avec une insistance significative, que les hommes religieux, prêtres et pharisiens, ont toujours été les premier
77 premiers à refuser, sous de très pieux prétextes, les ordres de la Parole de Dieu ? « Alors que toujours, et aujourd’hui en
78 user, sous de très pieux prétextes, les ordres de la Parole de Dieu ? « Alors que toujours, et aujourd’hui encore, la polé
79 eu ? « Alors que toujours, et aujourd’hui encore, la polémique de la “religion” est dirigée contre le monde qui vit sans D
80 toujours, et aujourd’hui encore, la polémique de la “religion” est dirigée contre le monde qui vit sans Dieu, la polémiqu
81 la polémique de la “religion” est dirigée contre le monde qui vit sans Dieu, la polémique de la Bible au contraire, vise
82 n” est dirigée contre le monde qui vit sans Dieu, la polémique de la Bible au contraire, vise le monde religieux, qu’il so
83 ontre le monde qui vit sans Dieu, la polémique de la Bible au contraire, vise le monde religieux, qu’il soit placé sous le
84 Dieu, la polémique de la Bible au contraire, vise le monde religieux, qu’il soit placé sous le signe de Baal ou de Yaveh. 
85 e, vise le monde religieux, qu’il soit placé sous le signe de Baal ou de Yaveh. » La Bible nous parle-t-elle de ces « expé
86 l soit placé sous le signe de Baal ou de Yaveh. » La Bible nous parle-t-elle de ces « expériences religieuses » sur lesque
87 de ces « expériences religieuses » sur lesquelles les modernes exercent leurs psychologies et leurs ratiocinations plus ou
88 ins sceptiques, plus ou moins édifiantes ? « Dans l’ expérience biblique, rien n’est moins important que le mode de l’expér
89 périence biblique, rien n’est moins important que le mode de l’expérience. Elle est charge et mission, et non pas but et a
90 blique, rien n’est moins important que le mode de l’ expérience. Elle est charge et mission, et non pas but et accomplissem
91 st élémentaire, à peine consciente d’elle-même. » Les prophètes n’ont pas de biographie : « L’homme biblique se lève et tom
92 même. » Les prophètes n’ont pas de biographie : «  L’ homme biblique se lève et tombe avec sa mission ». Il y a plus. L’hist
93 se lève et tombe avec sa mission ». Il y a plus. L’ histoire biblique, loin de mettre en scène le développement d’une « tr
94 lus. L’histoire biblique, loin de mettre en scène le développement d’une « tradition » spirituelle, figure la négation abs
95 loppement d’une « tradition » spirituelle, figure la négation absolue de toute histoire : « Vue d’en haut, c’est une série
96 résultats au cours d’une impossible entreprise. » Le christianisme : une impossible entreprise. Telle est bien la constata
97 nisme : une impossible entreprise. Telle est bien la constatation cruciale que Barth, après Kierkegaard, remet au premier
98 arth, après Kierkegaard, remet au premier plan de la pensée théologique. C’est de cette situation profondément paradoxale,
99 paradoxale, assumée dans sa tragique ironie, que le théologien doit avoir conscience, s’il veut parler valablement. Mais
100 Mais de quoi va-t-il encore pouvoir parler ? Ici le paradoxe devient plus aigu. Le théologien doit parler de Dieu, son no
101 uvoir parler ? Ici le paradoxe devient plus aigu. Le théologien doit parler de Dieu, son nom l’indique. De quel Dieu ? De
102 aigu. Le théologien doit parler de Dieu, son nom l’ indique. De quel Dieu ? De celui que la Bible nomme l’Éternel, alors q
103 u, son nom l’indique. De quel Dieu ? De celui que la Bible nomme l’Éternel, alors que nous sommes tout entiers temporels.
104 dique. De quel Dieu ? De celui que la Bible nomme l’ Éternel, alors que nous sommes tout entiers temporels. De celui qui tr
105 rels. De celui qui transcende toutes nos idées de la transcendance. De celui qui vient à nous, mais auquel l’homme ne peut
106 scendance. De celui qui vient à nous, mais auquel l’ homme ne peut aller. Du totaliter aliter. Si donc la tâche du théologi
107 homme ne peut aller. Du totaliter aliter. Si donc la tâche du théologien est de parler de Dieu, il s’avère qu’en tant qu’h
108 ler de Dieu, il s’avère qu’en tant qu’homme il ne le peut : « Car parler de Dieu voudrait dire, pour toute conscience séri
109 t dire, pour toute conscience sérieuse… parler de la Parole de Dieu, la parole où dieu devient homme. Nous pouvons répéter
110 conscience sérieuse… parler de la Parole de Dieu, la parole où dieu devient homme. Nous pouvons répéter ces quatre mots, m
111 me. Nous pouvons répéter ces quatre mots, mais en les répétant, nous n’avons pas dit la parole de Dieu, dans laquelle cette
112 mots, mais en les répétant, nous n’avons pas dit la parole de Dieu, dans laquelle cette idée devient une réalité, une vér
113 e cette idée devient une réalité, une vérité. » À la formule philosophique homo finitus non capax infiniti, Barth répond p
114 homo finitus non capax infiniti, Barth répond par la formule chrétienne homo peccator non capax verbi Dei, l’homme pécheur
115 ule chrétienne homo peccator non capax verbi Dei, l’ homme pécheur n’est pas « capable » de la Parole de Dieu. Ainsi Barth
116 rbi Dei, l’homme pécheur n’est pas « capable » de la Parole de Dieu. Ainsi Barth rejoint Calvin, Luther, et au-delà, jusqu
117 t connu ce que nous avons à peu près oublié : que l’ homme n’est pas capable par lui-même de faire le bien, que la foi seul
118 e l’homme n’est pas capable par lui-même de faire le bien, que la foi seule lui donne la promesse du salut, que cette foi
119 st pas capable par lui-même de faire le bien, que la foi seule lui donne la promesse du salut, que cette foi n’est pas le
120 même de faire le bien, que la foi seule lui donne la promesse du salut, que cette foi n’est pas le couronnement de sa « vi
121 nne la promesse du salut, que cette foi n’est pas le couronnement de sa « vie religieuse », mais le don gratuit que Dieu f
122 as le couronnement de sa « vie religieuse », mais le don gratuit que Dieu fait à tout homme qui n’a plus d’autre attente.
123 e attente. Qu’on n’aille pas croire cependant que le barthisme est un « retour » à quelque orthodoxie, ou par exemple une
124 o-thomisme. Il est avant tout un rappel violent à la nouveauté éternelle de l’Évangile ; une remise en question radicale e
125 out un rappel violent à la nouveauté éternelle de l’ Évangile ; une remise en question radicale et intime de notre existenc
126 . À la suite de Kierkegaard il nous fait voir que le christianisme, c’est l’immédiat, l’instant éternel de la foi, et non
127 ard il nous fait voir que le christianisme, c’est l’ immédiat, l’instant éternel de la foi, et non l’histoire de l’homme pi
128 fait voir que le christianisme, c’est l’immédiat, l’ instant éternel de la foi, et non l’histoire de l’homme pieux ; un évé
129 stianisme, c’est l’immédiat, l’instant éternel de la foi, et non l’histoire de l’homme pieux ; un événement et non une cro
130 t l’immédiat, l’instant éternel de la foi, et non l’ histoire de l’homme pieux ; un événement et non une croyance, une renc
131 l’instant éternel de la foi, et non l’histoire de l’ homme pieux ; un événement et non une croyance, une rencontre personne
132 e, une rencontre personnelle et inconcevable avec le Christ, et non point une morale prudente, garantie de bonheur terrest
133 re ou céleste. Car cette rencontre est mortelle à l’ homme. Et c’est par là même qu’elle lui apporte, de l’extérieur, le ga
134 mme. Et c’est par là même qu’elle lui apporte, de l’ extérieur, le gage de la résurrection. (La grâce n’est pas accordée au
135 par là même qu’elle lui apporte, de l’extérieur, le gage de la résurrection. (La grâce n’est pas accordée aux « justes »,
136 e qu’elle lui apporte, de l’extérieur, le gage de la résurrection. (La grâce n’est pas accordée aux « justes », mais bien
137 rte, de l’extérieur, le gage de la résurrection. ( La grâce n’est pas accordée aux « justes », mais bien aux condamnés à mo
138 aux « justes », mais bien aux condamnés à mort.) L’ homme religieux qui se refuse à cette mort, se refuse aussi à la vie.
139 eux qui se refuse à cette mort, se refuse aussi à la vie. Il meurt de ne pas mourir, selon la parole profondément « dialec
140 aussi à la vie. Il meurt de ne pas mourir, selon la parole profondément « dialectique » de Thérèse d’Avila. Qu’est-ce don
141 Thérèse d’Avila. Qu’est-ce donc en définitive que le point de vue barthien ? Une prise au sérieux du fait de Dieu. Dieu n’
142 it de Dieu. Dieu n’est pas un problème, n’est pas l’ objet de nos recherches, mais le Sujet de toute existence et de toute
143 oblème, n’est pas l’objet de nos recherches, mais le Sujet de toute existence et de toute recherche. Il est la présupposit
144 de toute existence et de toute recherche. Il est la présupposition de toute vie, la synthèse qui précède éternellement no
145 recherche. Il est la présupposition de toute vie, la synthèse qui précède éternellement nos thèses et nos antithèses, tous
146 éternellement nos thèses et nos antithèses, tous les oui et tous les non que nous pouvons dire au monde. L’homme ne reçoit
147 os thèses et nos antithèses, tous les oui et tous les non que nous pouvons dire au monde. L’homme ne reçoit son existence v
148 i et tous les non que nous pouvons dire au monde. L’ homme ne reçoit son existence véritable que dans la parole que Dieu lu
149 ’homme ne reçoit son existence véritable que dans la parole que Dieu lui adresse et qui le meut. On a coutume de nommer la
150 le que dans la parole que Dieu lui adresse et qui le meut. On a coutume de nommer la pensée de Barth une théologie de la c
151 ui adresse et qui le meut. On a coutume de nommer la pensée de Barth une théologie de la crise, une théologie dialectique.
152 ume de nommer la pensée de Barth une théologie de la crise, une théologie dialectique. Elle est surtout et avant tout cela
153 e est surtout et avant tout cela une théologie de la parole de Dieu. Insuffisance radicale de l’humanisme, du piétisme, du
154 ie de la parole de Dieu. Insuffisance radicale de l’ humanisme, du piétisme, du moralisme, du spiritualisme, de l’historici
155 , du piétisme, du moralisme, du spiritualisme, de l’ historicisme, de tout ce qui est œuvre de l’homme, pour atteindre l’œu
156 e, de l’historicisme, de tout ce qui est œuvre de l’ homme, pour atteindre l’œuvre du Dieu « tout autre ». Distinction radi
157 tout ce qui est œuvre de l’homme, pour atteindre l’ œuvre du Dieu « tout autre ». Distinction radicale entre toutes les pa
158 « tout autre ». Distinction radicale entre toutes les paroles humaines sur Dieu, et la Parole qui vient de Dieu à l’homme.
159 le entre toutes les paroles humaines sur Dieu, et la Parole qui vient de Dieu à l’homme. Universalité du rapport établi en
160 maines sur Dieu, et la Parole qui vient de Dieu à l’ homme. Universalité du rapport établi entre Dieu et l’homme, que l’hom
161 mme. Universalité du rapport établi entre Dieu et l’ homme, que l’homme le sache ou non, l’accepte ou non ; et par là même
162 lité du rapport établi entre Dieu et l’homme, que l’ homme le sache ou non, l’accepte ou non ; et par là même caractère ess
163 rapport établi entre Dieu et l’homme, que l’homme le sache ou non, l’accepte ou non ; et par là même caractère essentielle
164 tre Dieu et l’homme, que l’homme le sache ou non, l’ accepte ou non ; et par là même caractère essentiellement profane de l
165 par là même caractère essentiellement profane de la vérité biblique — tels sont les thèmes autour desquels s’organisent c
166 llement profane de la vérité biblique — tels sont les thèmes autour desquels s’organisent ces essais. Est-ce là de la théol
167 ur desquels s’organisent ces essais. Est-ce là de la théologie ? C’est plutôt une réflexion puissante et intrépide sur les
168 t plutôt une réflexion puissante et intrépide sur les possibilités et la valeur de l’activité théologique. Barth compare à
169 on puissante et intrépide sur les possibilités et la valeur de l’activité théologique. Barth compare à plusieurs reprises
170 et intrépide sur les possibilités et la valeur de l’ activité théologique. Barth compare à plusieurs reprises la théologie
171 é théologique. Barth compare à plusieurs reprises la théologie à cette étrange main de Jean Baptiste dans la Crucifixion d
172 ologie à cette étrange main de Jean Baptiste dans la Crucifixion de Grünewald, cette main énorme qui désigne le Christ en
173 ixion de Grünewald, cette main énorme qui désigne le Christ en croix. La théologie n’est pas la parole. Elle ne peut que l
174 cette main énorme qui désigne le Christ en croix. La théologie n’est pas la parole. Elle ne peut que l’indiquer au-delà d’
175 ésigne le Christ en croix. La théologie n’est pas la parole. Elle ne peut que l’indiquer au-delà d’elle-même. Nous n’avons
176 a théologie n’est pas la parole. Elle ne peut que l’ indiquer au-delà d’elle-même. Nous n’avons rien dit des qualités humai
177 nes de ce livre, de son éloquence martelante (que les traducteurs ont fort bien rendue, et la tâche n’était pas facile) ; d
178 nte (que les traducteurs ont fort bien rendue, et la tâche n’était pas facile) ; de son réalisme agressif, de cette obstin
179 lisme agressif, de cette obstination à rechercher le sens réel des mots d’ordre que l’on va répétant, de cette puissance d
180 on à rechercher le sens réel des mots d’ordre que l’ on va répétant, de cette puissance de sérieux, de prise au sérieux des
181 rude ; de cette puissance critique enfin, au sens le plus créateur du terme, et qui met en état de crise toutes nos sécuri
182 es. (Ce n’est qu’à certains degrés de tension que la réalité de nos réalités quotidiennes peut être démasquée, éprouvée.)
183 ut être démasquée, éprouvée.) Une prise ferme sur le concret, mais en même temps un regard qui dépasse les contingences hu
184 concret, mais en même temps un regard qui dépasse les contingences humaines, et qui interroge virilement. Personne n’est pl
185 terroge virilement. Personne n’est plus loin de «  l’ inquiétude » ou de l’emballement. Barth est l’un des hommes les plus s
186 ersonne n’est plus loin de « l’inquiétude » ou de l’ emballement. Barth est l’un des hommes les plus solides de notre temps
187  » ou de l’emballement. Barth est l’un des hommes les plus solides de notre temps. C’est pour cela qu’il peut poser les que
188 de notre temps. C’est pour cela qu’il peut poser les questions les plus gênantes qui soient. ⁂ On l’a bien vu récemment, l
189 s. C’est pour cela qu’il peut poser les questions les plus gênantes qui soient. ⁂ On l’a bien vu récemment, lors du conflit
190 les questions les plus gênantes qui soient. ⁂ On l’ a bien vu récemment, lors du conflit dramatique qui l’a opposé, seul o
191 bien vu récemment, lors du conflit dramatique qui l’ a opposé, seul ou à peu près, au puissant parti des Chrétiens allemand
192 issant parti des Chrétiens allemands, fraction de l’ hitlérisme qui prétend faire main basse sur les églises et utiliser la
193 de l’hitlérisme qui prétend faire main basse sur les églises et utiliser la religion aux fins de la renaissance germanique
194 tend faire main basse sur les églises et utiliser la religion aux fins de la renaissance germanique. Alors que la grande m
195 r les églises et utiliser la religion aux fins de la renaissance germanique. Alors que la grande majorité des chrétiens d’
196 aux fins de la renaissance germanique. Alors que la grande majorité des chrétiens d’Allemagne, rangée derrière les plus f
197 jorité des chrétiens d’Allemagne, rangée derrière les plus fameux docteurs, appuyée par Hitler lui-même et par toute l’opin
198 octeurs, appuyée par Hitler lui-même et par toute l’ opinion publique, votait la clause aryenne et trahissait sa foi, Barth
199 lui-même et par toute l’opinion publique, votait la clause aryenne et trahissait sa foi, Barth s’est dressé dans une prot
200 ge courageux et authentiquement chrétien : il est le seul espoir que nous puissions garder dans la restauration spirituell
201 est le seul espoir que nous puissions garder dans la restauration spirituelle d’une Allemagne profondément paganisée. Il e
202 ne Allemagne profondément paganisée. Il est aussi la plus éclatante réponse à tous ceux qui accusaient la pensée barthienn
203 plus éclatante réponse à tous ceux qui accusaient la pensée barthienne d’être purement négative et désespérée. « Ici le pa
204 nne d’être purement négative et désespérée. « Ici le paradoxe joue à plein — écrivait-on à ce propos dans un récent articl
205 écrivait-on à ce propos dans un récent article1 — la théologie dialectique de Barth à laquelle on reproche (comme à ceux d
206 celui qui vient au Christ, peut seule répondre à l’ angoisse humaine, tandis que l’optimisme naturiste, plongeant l’humani
207 t seule répondre à l’angoisse humaine, tandis que l’ optimisme naturiste, plongeant l’humanité dans un devenir sans issue,
208 aine, tandis que l’optimisme naturiste, plongeant l’ humanité dans un devenir sans issue, aboutit au désespoir. » 1. Albe
209 désespoir. » 1. Albert Béguin, « Karl Barth et la situation de l’Église allemande », Revue d’Allemagne du 15 septembre
210 1. Albert Béguin, « Karl Barth et la situation de l’ Église allemande », Revue d’Allemagne du 15 septembre 1933. a. Rouge
211 Karl Barth, Parole de Dieu et parole humaine  », Les Nouvelles littéraires, Paris, 30 décembre 1933, p. 4. b. Traduit de
212 es, Paris, 30 décembre 1933, p. 4. b. Traduit de l’ allemand par Pierre Maury et Alexandre Lavanchy (Éditions “Je sers”) »
213 ury et Alexandre Lavanchy (Éditions “Je sers”) », Les Nouvelles littéraires, Paris, n° 585, 30 décembre 1933, p. 4.
2 1934, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). D’un humour romand (24 février 1934)
214 D’un humour romand (24 février 1934)c Le Suisse romand est-il sérieux ? Je crains que mes raisons d’en douter
215 ins que mes raisons d’en douter n’ébranlent guère la solide réputation de gravité qu’on lui a faite, et qui lui vaut l’est
216 ion de gravité qu’on lui a faite, et qui lui vaut l’ estime des personnes de sens. Mais après tout, ne serait-il pas étrang
217 l pas étrange d’apporter des preuves sérieuses de la fantaisie de ce peuple ? Rousseau, Madame de Staël, Constant, Vinet…
218 dépit du bon sens. Pourquoi ne pas glisser, entre l’ auteur d’Adolphe et celui des Discours religieux, par exemple, cet exc
219 cet excellent Toepffer dont on peut espérer qu’il les faire rire tous les deux ? Je ne songe pas tant aux traditionnelles f
220 er dont on peut espérer qu’il les faire rire tous les deux ? Je ne songe pas tant aux traditionnelles farces de père de fam
221 s phrénologues, des herboristes, un lord tout nu, les enfants terribles de Monsieur Crépin, et la silhouette élégante du Dr
222 nu, les enfants terribles de Monsieur Crépin, et la silhouette élégante du Dr Festus, toujours si digne dans l’adversité,
223 tte élégante du Dr Festus, toujours si digne dans l’ adversité, bien qu’il lui arrive parfois de pousser « un immense cri e
224 pousser « un immense cri en vingt-deux langues ». La satire de Toepffer n’est pas méchante, elle n’est pas même « spiritue
225 est pas même « spirituelle » ; c’est plutôt, dans l’ espièglerie la plus folle, un humour apitoyé. Si Toepffer s’attendrit
226  spirituelle » ; c’est plutôt, dans l’espièglerie la plus folle, un humour apitoyé. Si Toepffer s’attendrit sur ses bonhom
227 bonhommes, n’est-ce pas une manière de dégonfler les sentencieux ? Une impeccable dignité bourgeoise ne cesse d’inspirer l
228 impeccable dignité bourgeoise ne cesse d’inspirer les attitudes de ses héros, en dépit des carambolages du sort. Il y a don
229 sur Édouard Rod, qui entrerait difficilement dans le cadre de cette étude. Le mince filet d’humour suisse romand rentre so
230 erait difficilement dans le cadre de cette étude. Le mince filet d’humour suisse romand rentre sous terre, pour éviter Ami
231 s terre, pour éviter Amiel. Faut-il désespérer de le revoir jamais ? Mais non, il faut lire d’abord Pierre Girard et Charl
232 d’abord Pierre Girard et Charles-Albert Cingria : La Rose de Thuringe et Connaissez mieux le cœur des femmes, de Girard, e
233 Cingria : La Rose de Thuringe et Connaissez mieux le cœur des femmes, de Girard, et de Cingria, ce que vous aurez la chanc
234 mmes, de Girard, et de Cingria, ce que vous aurez la chance d’en trouver, une note ici ou là, quelques petits livres à tir
235 . En général on est plutôt déçu.) Pour comprendre l’ humour de Pierre Girard, il faut avoir aimé Charlot, celui des Lumière
236 il faut avoir aimé Charlot, celui des Lumières de la Ville et du Cirque. Les héros de Pierre Girard sont de doux ahuris, q
237 lot, celui des Lumières de la Ville et du Cirque. Les héros de Pierre Girard sont de doux ahuris, qui partent dans la vie a
238 erre Girard sont de doux ahuris, qui partent dans la vie avec une conscience pure et des gants beurre-frais. Ils ne tarden
239 ne jeune femme qui leur fait perdre toute mesure. Le monde est plein de malins, de gens qui ont l’air d’avoir compris de q
240 ce, un de ces scandales héroïques qui vous valent l’ amour des femmes et quelque honneur parmi les hommes. Autant de gags c
241 alent l’amour des femmes et quelque honneur parmi les hommes. Autant de gags chaplinesques, involontaires, touchants, entra
242 ants, entraînés dans une dérive mélancolique dont la source pourrait bien être chez les conteurs romantiques allemands, au
243 lancolique dont la source pourrait bien être chez les conteurs romantiques allemands, aussi peut-être dans la musique de Sc
244 teurs romantiques allemands, aussi peut-être dans la musique de Schubert, dans tout ce qui sourd de cette Weltschmerz qui
245 ouvants, dont nous rions faute de réflexe appris. L’ humour du romantique jaillit des échecs du sentiment. Et certes, c’est
246 jaillit des échecs du sentiment. Et certes, c’est le sentiment d’abord qui nous retient chez Pierre Girard, cette merveill
247 ierre Girard, cette merveilleuse ingénuité devant le printemps et les femmes, cette aisance de l’écriture, sans égale parm
248 tte merveilleuse ingénuité devant le printemps et les femmes, cette aisance de l’écriture, sans égale parmi nous, cette mus
249 vant le printemps et les femmes, cette aisance de l’ écriture, sans égale parmi nous, cette musique d’un cœur qui s’abandon
250 i s’abandonne, qui s’accepte. C’est cela qui fait la qualité lyrique de l’humour de Pierre Girard. Lisez, ou relisez, dans
251 ccepte. C’est cela qui fait la qualité lyrique de l’ humour de Pierre Girard. Lisez, ou relisez, dans la Rose de Thuringe,
252 ’humour de Pierre Girard. Lisez, ou relisez, dans la Rose de Thuringe, le récit du mariage de Virginie présidé par son onc
253 ard. Lisez, ou relisez, dans la Rose de Thuringe, le récit du mariage de Virginie présidé par son oncle âgé de 102 ans (« 
254 son oncle âgé de 102 ans (« Il avait arpenté tous les camps de la guerre de Sécession, mais il n’en parla pas »), et servi
255 de 102 ans (« Il avait arpenté tous les camps de la guerre de Sécession, mais il n’en parla pas »), et servi par un garço
256 la pas »), et servi par un garçon triste qui perd le vol-au-vent, inexplicablement. Tâchez de ne pas rire ; si vous réussi
257 ne pleurerez pas non plus aux chapitres suivants. L’ humour de Pierre Girard est bien plus romand que la pompeuse drôlerie
258 ’humour de Pierre Girard est bien plus romand que la pompeuse drôlerie de Cingria, lequel n’est Suisse que par accident, j
259 t Suisse que par accident, j’ose à peine dire par l’ état civil. « Je n’ai pas de passeport ; je n’en ai jamais eu ; s’il d
260 prime Bruno Pomposo, dont Cingria, naguère, donna les Autobiographies désordonnées. Pomposo, certes ! baroque, poli jusqu’à
261 rdonnées. Pomposo, certes ! baroque, poli jusqu’à l’ impertinence, jusqu’à la férocité, savant, aimable, macaronique, pétra
262 s ! baroque, poli jusqu’à l’impertinence, jusqu’à la férocité, savant, aimable, macaronique, pétrarquisant, musicien, huma
263 t Claudel, Max Jacob et Ramuz ont su voir et dire l’ importance, et dont je me contenterai de signaler ici l’humour absolum
264 rtance, et dont je me contenterai de signaler ici l’ humour absolument original. Cingria fit partie du groupe des Cahiers v
265 es Cahiers vaudois, réuni autour de Ramuz pendant la guerre. (C’est par cela surtout qu’il est Suisse, au mépris de tous l
266 cela surtout qu’il est Suisse, au mépris de tous les racismes.) On avait, dans ce groupe, une espèce de mystique des objet
267 de mystique des objets, du détail authentique, de l’ aspect brut des choses et des mots. Imaginez, dans cette vision du mon
268 nez, dans cette vision du monde, ce que donnerait l’ usage d’un style savant et poli, coupé de « véhémences nobles » et de
269 une invite à naître — une légèreté nouvelle dans l’ atmosphère de ce pays de pédagogues. J’ai oublié, exprès, de dire que
270 ues. J’ai oublié, exprès, de dire que c’est aussi le pays d’origine de Michel Simon et de Grock. C’étaient là de trop séri
271 c. Rougemont Denis de, « D’un humour romand », Les Nouvelles littéraires, Paris, 24 février 1934, p. 4.
3 1934, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). L’Humanité de Jésus d’après Calvin, par Max Dominicé (24 mars 1934)
272 L’ Humanité de Jésus d’après Calvin, par Max Dominicé (24 mars 1934)d
273 icé (24 mars 1934)d M. Max Dominicé nous donne L’ Humanité de Jésus d’après Calvin comme un simple commentaire de la pen
274 sus d’après Calvin comme un simple commentaire de la pensée du réformateur. N’allons pas commenter à notre tour cette glos
275 Ce qu’il y a d’ailleurs de plus significatif dans le livre, ce sont les motifs qui ont poussé M. Dominicé à l’écrire, et q
276 leurs de plus significatif dans le livre, ce sont les motifs qui ont poussé M. Dominicé à l’écrire, et qu’il expose en une
277 , ce sont les motifs qui ont poussé M. Dominicé à l’ écrire, et qu’il expose en une vingtaine de pages précises, mesurées,
278 cette préface caractérise d’une façon remarquable l’ évolution accomplie par toute une génération de protestants, celle qui
279 à s’exprimer dans des revues comme Foi et Vie , Le Semeur , Hic et Nunc . Si, par ailleurs, ces jeunes théologiens et e
280 , ces jeunes théologiens et essayistes reprennent le vocabulaire et certains tours de la pensée de Kierkegaard ou de Karl
281 es reprennent le vocabulaire et certains tours de la pensée de Kierkegaard ou de Karl Barth, M. Dominicé, qui n’ignore pas
282 uences, s’est limité dans son étude au calvinisme le plus strict. Par là même, il se rend plus directement accessible au l
283 cessible au lecteur français. Essayons de marquer les étapes de sa recherche. ⁂ Le protestantisme du début de ce siècle acc
284 Essayons de marquer les étapes de sa recherche. ⁂ Le protestantisme du début de ce siècle accordait à la personne de Jésus
285 protestantisme du début de ce siècle accordait à la personne de Jésus une place à juste titre centrale, mais exclusive de
286 e centrale, mais exclusive de toute dogmatique. «  La foi n’est pas une adhésion intellectuelle à des doctrines, mais la co
287 une adhésion intellectuelle à des doctrines, mais la communion avec le Christ vivant », répétaient les théologiens libérau
288 lectuelle à des doctrines, mais la communion avec le Christ vivant », répétaient les théologiens libéraux. La question éta
289 la communion avec le Christ vivant », répétaient les théologiens libéraux. La question était ainsi nettement posée : pour
290 st vivant », répétaient les théologiens libéraux. La question était ainsi nettement posée : pour devenir chrétien, il fall
291 chrétien, il fallait « rencontrer personnellement le Christ ». Mais comment cette rencontre pouvait-elle avoir lieu ? Deux
292 le avoir lieu ? Deux voies s’offraient : celle de l’ histoire et celle de l’expérience religieuse. Prendre la voie de l’his
293 ies s’offraient : celle de l’histoire et celle de l’ expérience religieuse. Prendre la voie de l’histoire, c’était d’abord
294 oire et celle de l’expérience religieuse. Prendre la voie de l’histoire, c’était d’abord chercher à s’approcher de l’homme
295 le de l’expérience religieuse. Prendre la voie de l’ histoire, c’était d’abord chercher à s’approcher de l’homme Jésus tel
296 stoire, c’était d’abord chercher à s’approcher de l’ homme Jésus tel que le décrivent les évangiles. Mais, dit M. Dominicé,
297 d chercher à s’approcher de l’homme Jésus tel que le décrivent les évangiles. Mais, dit M. Dominicé, deux obstacles très g
298 s’approcher de l’homme Jésus tel que le décrivent les évangiles. Mais, dit M. Dominicé, deux obstacles très graves se dress
299 ves se dressaient aussitôt. Le premier, c’étaient les miracles. Aussi bien, se méfiait-on de plus en plus de ces miracles,
300 r une personne morale dont on récusait par avance les actes caractéristiques ? N’était-ce point là selon le mot de Théodore
301 ctes caractéristiques ? N’était-ce point là selon le mot de Théodore Flournoy, tenter de « faire une guirlande en mettant
302 rs de rhétorique ? » Ce Jésus « reconstitué » par les historiens négateurs du surnaturel, M. Dominicé n’a pas de peine à mo
303 el et sans intérêt ». À mesure qu’elle humanisait le Christ sous prétexte de nous rapprocher de lui, l’histoire prêtait un
304 e Christ sous prétexte de nous rapprocher de lui, l’ histoire prêtait une réalité insurmontable aux dix-neuf siècles qui no
305 ontable aux dix-neuf siècles qui nous séparent de l’ Évangile. Du même coup, l’expérience religieuse, dialogue vivant avec
306 es qui nous séparent de l’Évangile. Du même coup, l’ expérience religieuse, dialogue vivant avec le Christ des évangiles, s
307 up, l’expérience religieuse, dialogue vivant avec le Christ des évangiles, se réduisait à une contemplation de sa vie. Dan
308 e contemplation de sa vie. Dans cette difficulté, le jeune théologien interroge Calvin. Que trouve-t-il ? Des arguments, u
309 us sait tout incapables par nous-mêmes — mais sur l’ amour de Dieu pour nous. C’est Dieu qui vient à nous, impies, non poin
310 Dieu qui vient à nous, impies, non point nous qui le rencontrons au terme d’une pieuse « élévation ». Et c’est le mystère
311 ons au terme d’une pieuse « élévation ». Et c’est le mystère du Dieu-homme (du Christ-Jésus) hors duquel toute communion e
312 quel toute communion est impossible. Mystère dont l’ Évangile répète plusieurs fois : « Heureux celui qui ne s’en scandalis
313 per aux faux problèmes du modernisme et revenir à l’ orthodoxie réformée. Non point comme on revient aux solutions toutes f
314 olutions toutes faites : plutôt comme on retrouve la véritable et profonde acuité d’une dialectique à résoudre en actes. C
315 ctique à résoudre en actes. C’est l’un des traits les plus frappants du Calvin commentateur des évangiles, tel que nous le
316 u Calvin commentateur des évangiles, tel que nous le restitue M. Dominicé, que cette insistance à mettre en lumière le « s
317 ominicé, que cette insistance à mettre en lumière le « scandale de Jésus » à seule fin de nous « enseigner à révérence ».
318 gner à révérence ». On peut dire dans ce sens que l’ exégèse de Calvin est toute didactique : elle veut sans cesse transfor
319 cesse transformer nos questions en questions que le texte sacré nous adresse. Tout au contraire du critique moderne, qui
320 « exégèse d’obéissance » — il se laisse juger par le texte. On ne saurait imaginer rien de plus opposé au trop fameux « li
321 plus opposé au trop fameux « libre examen » dont les rationalistes ont voulu faire l’apanage du protestantisme. L’ouvrage
322 e examen » dont les rationalistes ont voulu faire l’ apanage du protestantisme. L’ouvrage de M. Dominicé s’inspire évidemme
323 stes ont voulu faire l’apanage du protestantisme. L’ ouvrage de M. Dominicé s’inspire évidemment des mêmes principes exégét
324 idemment des mêmes principes exégétiques. Certes, l’ auteur n’est pas de ceux qui conçoivent le commentaire comme une effer
325 Certes, l’auteur n’est pas de ceux qui conçoivent le commentaire comme une effervescence lyrique autour d’un texte. Son su
326 qu’il suive à pas si prudents son modèle, et que l’ admiration que lui inspire Calvin s’exprime en termes aussi respectueu
327 ne sera pas le dernier à souhaiter avec nous que le retour des doctrines du xvie siècle renouvelle jusque dans le style
328 doctrines du xvie siècle renouvelle jusque dans le style la verve créatrice de la Réforme. d. Rougemont Denis de, « [
329 s du xvie siècle renouvelle jusque dans le style la verve créatrice de la Réforme. d. Rougemont Denis de, « [Compte re
330 uvelle jusque dans le style la verve créatrice de la Réforme. d. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Max Dominicé, L’H
331 ougemont Denis de, « [Compte rendu] Max Dominicé, L’ Humanité de Jésus d’après Calvin  », Les Nouvelles littéraires, Paris,
332 Dominicé, L’Humanité de Jésus d’après Calvin  », Les Nouvelles littéraires, Paris, 24 mars 1934, p. 4.
4 1934, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Quelques œuvres et une biographie de Kierkegaard (26 mai 1934)
333 ’un protocole d’introduction des grands génies de l’ étranger dans la culture de ce pays. La présentation d’un esprit de l’
334 introduction des grands génies de l’étranger dans la culture de ce pays. La présentation d’un esprit de l’envergure de Kie
335 génies de l’étranger dans la culture de ce pays. La présentation d’un esprit de l’envergure de Kierkegaard eut légitimé,
336 ulture de ce pays. La présentation d’un esprit de l’ envergure de Kierkegaard eut légitimé, à elle seule, la création de ce
337 ergure de Kierkegaard eut légitimé, à elle seule, la création de cet Office et ses soins les plus diligents. Que d’impairs
338 lle seule, la création de cet Office et ses soins les plus diligents. Que d’impairs n’a-t-on pas commis à l’endroit de ce r
339 puis quelques années qu’on nous parle de lui dans les revues philosophiques et littéraires ! Probablement, il s’en fût amus
340 ement, il s’en fût amusé : tout ce qui touchait à l’ opinion publique était pour lui bien proche de la mystification. Il eu
341 l’opinion publique était pour lui bien proche de la mystification. Il eut peut-être ri de se voir présenté tantôt comme a
342 tre du « fascisme français » ! (au camarade Nizan l’ honneur de la trouvaille.) Mais il eût certainement protesté contre un
343 isme français » ! (au camarade Nizan l’honneur de la trouvaille.) Mais il eût certainement protesté contre une erreur qui
344 t protesté contre une erreur qui ne relève pas de l’ interprétation partisane, mais d’un simple défaut d’information, et qu
345 ologue nihiliste, un esthète retors et tourmenté, l’ ancêtre du gidisme et de l’« inquiétude » littéraire. Kierkegaard, ava
346 e retors et tourmenté, l’ancêtre du gidisme et de l’ « inquiétude » littéraire. Kierkegaard, avant tout, est un chrétien ;
347 lle ; mais non pas un inquiet au sens moderne, et le contraire d’un esthète. Comme Nietzsche, avec lequel il a pas mal de
348 us laisse un ouvrage d’autocritique2 où il dégage le sens général de son œuvre. On peut y lire ceci, en matière d’introduc
349 comment peut-on devenir chrétien ? » Car, enfin, l’ on ne naît pas chrétien. Des quelques œuvres traduites jusqu’ici, un p
350 es traduites jusqu’ici, un peu au hasard, il faut l’ avouer, le Traité du désespoir 3 est de beaucoup la plus centrale, la
351 es jusqu’ici, un peu au hasard, il faut l’avouer, le Traité du désespoir 3 est de beaucoup la plus centrale, la plus révél
352 ’avouer, le Traité du désespoir 3 est de beaucoup la plus centrale, la plus révélatrice, mais aussi la plus propre à créer
353 du désespoir 3 est de beaucoup la plus centrale, la plus révélatrice, mais aussi la plus propre à créer du malentendu. Le
354 la plus centrale, la plus révélatrice, mais aussi la plus propre à créer du malentendu. Le titre même, que lui a donné le
355 mais aussi la plus propre à créer du malentendu. Le titre même, que lui a donné le traducteur, prête à certaines confusio
356 éer du malentendu. Le titre même, que lui a donné le traducteur, prête à certaines confusions : l’œuvre, en danois, s’appe
357 nné le traducteur, prête à certaines confusions : l’ œuvre, en danois, s’appelle La Maladie mortelle, et cette maladie, c’e
358 taines confusions : l’œuvre, en danois, s’appelle La Maladie mortelle, et cette maladie, c’est le péché. L’impitoyable maî
359 elle La Maladie mortelle, et cette maladie, c’est le péché. L’impitoyable maîtrise que Kierkegaard apporte dans l’analyse
360 ladie mortelle, et cette maladie, c’est le péché. L’ impitoyable maîtrise que Kierkegaard apporte dans l’analyse psychologi
361 impitoyable maîtrise que Kierkegaard apporte dans l’ analyse psychologique du désespoir, considéré comme une maladie univer
362 maladie universelle ne doit pas nous tromper sur le dessein du livre. Nul romantisme dans cette analyse, aucune exaltatio
363 curs. Au fond du désespoir, et quelles que soient les formes qu’il revête, du spleen banal jusqu’au péché contre l’esprit,
364 ’il revête, du spleen banal jusqu’au péché contre l’ esprit, jusqu’au refus d’être sauvé, il y a toujours une révolte de l’
365 efus d’être sauvé, il y a toujours une révolte de l’ homme contre sa condition telle que Dieu l’a voulue, une négation du p
366 lte de l’homme contre sa condition telle que Dieu l’ a voulue, une négation du paradoxe de l’Amour. L’universalité du déses
367 que Dieu l’a voulue, une négation du paradoxe de l’ Amour. L’universalité du désespoir, qui est la thèse maîtresse de cett
368 l’a voulue, une négation du paradoxe de l’Amour. L’ universalité du désespoir, qui est la thèse maîtresse de cette œuvre,
369 de l’Amour. L’universalité du désespoir, qui est la thèse maîtresse de cette œuvre, conduirait l’homme au nihilisme absol
370 est la thèse maîtresse de cette œuvre, conduirait l’ homme au nihilisme absolu : mais ce péril est tout imaginaire. Car seu
371 lu : mais ce péril est tout imaginaire. Car seule la connaissance du salut promis par le Christ peut nous amener à l’aveu
372 re. Car seule la connaissance du salut promis par le Christ peut nous amener à l’aveu de la réalité de notre condition. Ai
373 du salut promis par le Christ peut nous amener à l’ aveu de la réalité de notre condition. Ainsi, le chrétien, seul, conna
374 promis par le Christ peut nous amener à l’aveu de la réalité de notre condition. Ainsi, le chrétien, seul, connaît toute l
375 à l’aveu de la réalité de notre condition. Ainsi, le chrétien, seul, connaît toute la misère de l’homme : elle lui est rév
376 ondition. Ainsi, le chrétien, seul, connaît toute la misère de l’homme : elle lui est révélée par l’Évangile qui sauve. ⁂
377 si, le chrétien, seul, connaît toute la misère de l’ homme : elle lui est révélée par l’Évangile qui sauve. ⁂ La lecture du
378 e la misère de l’homme : elle lui est révélée par l’ Évangile qui sauve. ⁂ La lecture du Traité n’est pas des plus aisées.
379 elle lui est révélée par l’Évangile qui sauve. ⁂ La lecture du Traité n’est pas des plus aisées. Les termes hégéliens qui
380 ⁂ La lecture du Traité n’est pas des plus aisées. Les termes hégéliens qui abondent dans les premiers chapitres donnent à c
381 rence abstraite qui contraste singulièrement avec le réalisme brutal du sujet. Que le lecteur, pourtant, ne se laisse poin
382 gulièrement avec le réalisme brutal du sujet. Que le lecteur, pourtant, ne se laisse point arrêter par des définitions don
383 se laisse point arrêter par des définitions dont la substance, tôt après, se révèle admirablement concrète. Le génie fami
384 nce, tôt après, se révèle admirablement concrète. Le génie familier et ironique de Kierkegaard a créé dans cette œuvre une
385 fers de notre âme fait songer à Dostoïevski. Dans La Répétition 4, on trouvera confondus le poète, le philosophe, l’ironis
386 vski. Dans La Répétition 4, on trouvera confondus le poète, le philosophe, l’ironiste et le théologien. Kierkegaard nous m
387 La Répétition 4, on trouvera confondus le poète, le philosophe, l’ironiste et le théologien. Kierkegaard nous montre un h
388 4, on trouvera confondus le poète, le philosophe, l’ ironiste et le théologien. Kierkegaard nous montre un homme aux prises
389 confondus le poète, le philosophe, l’ironiste et le théologien. Kierkegaard nous montre un homme aux prises avec un probl
390 problème sentimental douloureux, et qui cherche à le résoudre, d’abord par le plaisir, dans ses formes supérieures, puis p
391 oureux, et qui cherche à le résoudre, d’abord par le plaisir, dans ses formes supérieures, puis par la sagesse morale cour
392 le plaisir, dans ses formes supérieures, puis par la sagesse morale courante. L’un et l’autre le conduisent à des impasses
393 s par la sagesse morale courante. L’un et l’autre le conduisent à des impasses tragiques ; mais voici que Dieu intervient,
394 tragiques ; mais voici que Dieu intervient, avec la réponse terrible faite à Job. Et ce sont alors d’étranges et magnifiq
395 sont alors d’étranges et magnifiques lettres sur la détresse humaine devant Dieu, que le héros adresse à « son muet confi
396 lettres sur la détresse humaine devant Dieu, que le héros adresse à « son muet confident », l’auteur. Peut-être avons-nou
397 u, que le héros adresse à « son muet confident », l’ auteur. Peut-être avons-nous ici les pages les plus éloquentes et les
398 t confident », l’auteur. Peut-être avons-nous ici les pages les plus éloquentes et les plus irréfutables d’un penseur qui s
399 t », l’auteur. Peut-être avons-nous ici les pages les plus éloquentes et les plus irréfutables d’un penseur qui sut devance
400 e avons-nous ici les pages les plus éloquentes et les plus irréfutables d’un penseur qui sut devancer tous les problèmes de
401 s irréfutables d’un penseur qui sut devancer tous les problèmes de notre siècle. Le ton s’y élève à la hauteur de l’invecti
402 sut devancer tous les problèmes de notre siècle. Le ton s’y élève à la hauteur de l’invective prophétique : Plains-toi,
403 les problèmes de notre siècle. Le ton s’y élève à la hauteur de l’invective prophétique : Plains-toi, l’Éternel ne craint
404 de notre siècle. Le ton s’y élève à la hauteur de l’ invective prophétique : Plains-toi, l’Éternel ne craint rien, il peut
405 hauteur de l’invective prophétique : Plains-toi, l’ Éternel ne craint rien, il peut bien se défendre ; mais comment le pou
406 int rien, il peut bien se défendre ; mais comment le pourrait-il quand personne n’ose se plaindre comme il sied à un homme
407 plaindre comme il sied à un homme ? Parle, élève la voix, parle fort, Dieu peut bien parler plus fort, lui qui dispose du
408 rler plus fort, lui qui dispose du tonnerre. Mais le tonnerre est une réponse, une explication certaine, digne de foi, de
409 i, même si elle foudroie, est plus magnifique que les commérages et les potins sur la justice de la Providence inventés par
410 udroie, est plus magnifique que les commérages et les potins sur la justice de la Providence inventés par la sagesse humain
411 s magnifique que les commérages et les potins sur la justice de la Providence inventés par la sagesse humaine et colportés
412 ue les commérages et les potins sur la justice de la Providence inventés par la sagesse humaine et colportés par de vieill
413 tins sur la justice de la Providence inventés par la sagesse humaine et colportés par de vieilles bavardes et des eunuques
414 de Shakespeare que du piétisme sentimental et de l’ unctio spiritualis des dévots… Mais plus près de Luther, aussi. Je me
415 oint que cet ouvrage ne mérite d’être lu par tous les amateurs de grand lyrisme intellectuel (le style admirable de ces pag
416 tous les amateurs de grand lyrisme intellectuel ( le style admirable de ces pages a été rendu aussi bien qu’il était possi
417 s a été rendu aussi bien qu’il était possible par le traducteur). Mais il ne s’agit là que du premier volet d’un triptyque
418 r volet d’un triptyque dont il nous faut attendre les deux autres parties pour saisir la pleine signification. On trouvera,
419 faut attendre les deux autres parties pour saisir la pleine signification. On trouvera, d’ailleurs, une analyse détaillée
420 d’ailleurs, une analyse détaillée des Stades sur le chemin de la vie, dont In Vino Veritas constitue l’introduction, dans
421 une analyse détaillée des Stades sur le chemin de la vie, dont In Vino Veritas constitue l’introduction, dans l’étude biog
422 chemin de la vie, dont In Vino Veritas constitue l’ introduction, dans l’étude biographique et critique de Carl Koch6, qui
423 nt In Vino Veritas constitue l’introduction, dans l’ étude biographique et critique de Carl Koch6, qui vient combler la plu
424 ique et critique de Carl Koch6, qui vient combler la plus grave lacune de la littérature kierkegaardienne en France. On ne
425 Koch6, qui vient combler la plus grave lacune de la littérature kierkegaardienne en France. On ne saurait trop insister s
426 dienne en France. On ne saurait trop insister sur l’ utilité de ce livre. Il rendra vaines, désormais, les introductions qu
427 utilité de ce livre. Il rendra vaines, désormais, les introductions que les différents traducteurs nous ont prodiguées jusq
428 l rendra vaines, désormais, les introductions que les différents traducteurs nous ont prodiguées jusqu’ici avec autant de s
429 ieusement. Surtout, il situera, définitivement je l’ espère, la perspective dans laquelle il faut considérer l’ensemble des
430 Surtout, il situera, définitivement je l’espère, la perspective dans laquelle il faut considérer l’ensemble des écrits de
431 , la perspective dans laquelle il faut considérer l’ ensemble des écrits de Kierkegaard, et qui est celle du Point de vue e
432 ard, et qui est celle du Point de vue explicatif. Le livre de Carl Koch est la démonstration de l’emprise que peut exercer
433 oint de vue explicatif. Le livre de Carl Koch est la démonstration de l’emprise que peut exercer Kierkegaard sur un chréti
434 if. Le livre de Carl Koch est la démonstration de l’ emprise que peut exercer Kierkegaard sur un chrétien sincère, peu susp
435 hrétien sincère, peu suspect de complaisance pour les subtilités du « Séducteur », et qui n’a pas la tête philosophique. Ce
436 r les subtilités du « Séducteur », et qui n’a pas la tête philosophique. Cette monographie est à la fois la plus objective
437 te philosophique. Cette monographie est à la fois la plus objective et la plus sympathique qu’un « honnête homme » peut es
438 te monographie est à la fois la plus objective et la plus sympathique qu’un « honnête homme » peut espérer. Du mélange d’h
439 ur et d’angoisse insondable qui nous bouleverse à la lecture des Stades, on trouvera ici l’exposé judicieux, parfois même
440 uleverse à la lecture des Stades, on trouvera ici l’ exposé judicieux, parfois même bonhomique : ce n’est pas le moindre pi
441 judicieux, parfois même bonhomique : ce n’est pas le moindre piquant du livre. Fallait-il souhaiter à Kierkegaard une intr
442 egaard une introduction plus systématique ? Je ne le pense pas. Kierkegaard est un événement. Voici un homme qui vient nou
443 vient nous dire, en toute simplicité, qu’il a vu l’ événement, et qu’il en est encore tout remué. On le croira sans peine 
444 ’événement, et qu’il en est encore tout remué. On le croira sans peine : il n’a pas l’air d’avoir pu inventer ce qu’il rac
445 t pour nous que d’aller voir ce qui se passe dans l’ œuvre du danois prophétique, ressuscité par l’angoisse moderne. Koch n
446 ans l’œuvre du danois prophétique, ressuscité par l’ angoisse moderne. Koch n’a pas simplifié ce qui n’est pas simple chez
447 i n’est pas simple chez Kierkegaard. Mais il a su le décrire clairement et fidèlement, sans pédantisme et sans littérature
448 Trad. J. Gateau et K. Ferlov. Gallimard, collec. Les Essais. 4. Trad. P.-H. Tisseau (Alcan). 5. Trad. A. Babelon et C. L
449 Trad. A. Babelon et C. Lund (Éditions Cavalier). Le même ouvrage vient de paraître chez Alcan, traduit par P.-H. Tisseau,
450 P.-H. Tisseau, sous ce titre d’ailleurs inexact : Le Banquet. 6. Søren Kierkegaard, traduit du danois par A. Nicolet et
451 elques œuvres et une biographie de Kierkegaard », Les Nouvelles littéraires, Paris, 26 mai 1934, p. 3.
5 1934, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Le mouvement des groupes — Kagawa (4 août 1934)
452 Le mouvement des groupes — Kagawa (4 août 1934)f Le « Mouvement des G
453 mouvement des groupes — Kagawa (4 août 1934)f Le « Mouvement des Groupes », ou Mouvement d’Oxford, est un des faits sp
454 est un des faits spirituels qui serviront à fixer la signification de notre époque. Son influence, limitée d’abord aux pay
455 is en Allemagne, en Suisse, à Paris même. Né dans les universités, il paraît destiné à répondre d’abord aux préoccupations
456 l y répond de telle sorte qu’il abolit rapidement les barrières convenues entre intellectuels, hommes d’affaires, prolétair
457 telier — et une grande vedette de music-hall dont la présence discrète n’étonna personne. De quoi s’agissait-il ? Ni de th
458 en commun des difficultés intimes, d’entrer dans le concret du christianisme. Une dizaine d’entre nous parlèrent, sans ar
459 excès d’aucune sorte. À plus d’une reprise, j’eus l’ impression, qu’on a rarement de nos jours, d’entendre des gens dire la
460 a rarement de nos jours, d’entendre des gens dire la vérité sur eux-mêmes. Je sortis assez déçu, comme on sort en général
461 is assez déçu, comme on sort en général de toutes les rencontres prévues. Ce que je savais du Mouvement m’avait fait espére
462 des confessions sensationnelles. J’avais tort, et l’ on s’en convaincra en lisant le petit livre d’Harold Begbie, Vies tran
463 . J’avais tort, et l’on s’en convaincra en lisant le petit livre d’Harold Begbie, Vies transformées 7, qui raconte les ori
464 d’Harold Begbie, Vies transformées 7, qui raconte les origines du Mouvement et cherche à décrire son esprit. Ce n’est pas l
465 ent et cherche à décrire son esprit. Ce n’est pas le meilleur livre qu’on ait écrit sur les Groupes. Mais enfin, c’est le
466 e n’est pas le meilleur livre qu’on ait écrit sur les Groupes. Mais enfin, c’est le seul qui existe en français, et il cont
467 u’on ait écrit sur les Groupes. Mais enfin, c’est le seul qui existe en français, et il contient un certain nombre de fait
468 de faits assez bouleversants pour qu’on passe sur les interprétations personnelles que nous en propose l’auteur. (Begbie es
469 interprétations personnelles que nous en propose l’ auteur. (Begbie est un de ces « informateurs » brillants et cordiaux,
470 x, un peu trop souriants, comme on en trouve dans les pays anglo-saxons. On lui doit, entre autres, un ouvrage fameux sur l
471 On lui doit, entre autres, un ouvrage fameux sur l’ Armée du salut.) Le Mouvement des Groupes est né après la guerre, de l
472 autres, un ouvrage fameux sur l’Armée du salut.) Le Mouvement des Groupes est né après la guerre, de l’activité purement
473 du salut.) Le Mouvement des Groupes est né après la guerre, de l’activité purement individuelle d’un jeune pasteur améric
474 Mouvement des Groupes est né après la guerre, de l’ activité purement individuelle d’un jeune pasteur américain, Frank Buc
475 proprement géniale à penser abstraitement. » Dès le début sa pensée directrice est essentiellement personnaliste. La réno
476 sée directrice est essentiellement personnaliste. La rénovation de l’homme ne se fera jamais par le moyen de mouvements de
477 t essentiellement personnaliste. La rénovation de l’ homme ne se fera jamais par le moyen de mouvements de masse, ni par de
478 e. La rénovation de l’homme ne se fera jamais par le moyen de mouvements de masse, ni par des organisations, ni par des co
479 itués mais par des hommes concrets, agissant dans le cercle concret de leur vie. La seule question qu’il y ait donc lieu d
480 ets, agissant dans le cercle concret de leur vie. La seule question qu’il y ait donc lieu de poser est celle-ci : comment
481 nc lieu de poser est celle-ci : comment atteindre les hommes dans le concret de leur existence ? Buchman constate la failli
482 est celle-ci : comment atteindre les hommes dans le concret de leur existence ? Buchman constate la faillite lamentable d
483 s le concret de leur existence ? Buchman constate la faillite lamentable de l’évangélisation standardisée à l’américaine,
484 ence ? Buchman constate la faillite lamentable de l’ évangélisation standardisée à l’américaine, et de toutes les « méthode
485 ite lamentable de l’évangélisation standardisée à l’ américaine, et de toutes les « méthodes morales », puritaines. Volonta
486 isation standardisée à l’américaine, et de toutes les « méthodes morales », puritaines. Volontaristes, pragmatistes, optimi
487 matistes, optimistes, scientifiques, etc. Il voit la réalité fondamentale du christianisme primitif dans le contact d’homm
488 alité fondamentale du christianisme primitif dans le contact d’homme à homme, dans la confession mutuelle des péchés et le
489 me primitif dans le contact d’homme à homme, dans la confession mutuelle des péchés et le « partage » (sharing) des grâces
490 homme, dans la confession mutuelle des péchés et le « partage » (sharing) des grâces reçues, il sait qu’on ne peut être c
491 nouvelle forme de pragmatisme américain. Dire que la foi n’est réelle que là où elle se réalise ne signifie pas qu’il fail
492 se ne signifie pas qu’il faille agir à tout prix. L’ activiste moderne n’est souvent qu’un agité. Le philanthrope et le pur
493 x. L’activiste moderne n’est souvent qu’un agité. Le philanthrope et le puritain rigide ne sont souvent que des acteurs. S
494 rne n’est souvent qu’un agité. Le philanthrope et le puritain rigide ne sont souvent que des acteurs. Seule la foi peut no
495 ain rigide ne sont souvent que des acteurs. Seule la foi peut nous rendre actifs lorsqu’elle nous engage dans une relation
496 ’elle nous engage dans une relation concrète avec le prochain. Mais comment s’engager dans cette relation ? L’erreur des c
497 ain. Mais comment s’engager dans cette relation ? L’ erreur des chrétiens, trop souvent, c’est qu’ils s’efforcent d’endoctr
498 ’efforcent d’endoctriner ceux qu’ils rencontrent. Le « partage » préconisé par Buchman ne ressemble pas à ces tentatives d
499 on de domicile moral. Pour entrer en contact avec les hommes, il n’y a qu’un moyen : c’est de leur ouvrir sa maison. D’où l
500 u’un moyen : c’est de leur ouvrir sa maison. D’où les confessions privées ou publiques, qui sont l’un des traits marquants
501 publiques, qui sont l’un des traits marquants de l’ activité des Groupes. Qu’il y ait là un danger réel d’exhibitionnisme,
502 Qu’il y ait là un danger réel d’exhibitionnisme, les membres des Groupes ne sauraient le nier. Mais qu’il y ait là aussi l
503 bitionnisme, les membres des Groupes ne sauraient le nier. Mais qu’il y ait là aussi le moyen de faire tomber les barrière
504 s ne sauraient le nier. Mais qu’il y ait là aussi le moyen de faire tomber les barrières morales qui séparent nos contempo
505 ais qu’il y ait là aussi le moyen de faire tomber les barrières morales qui séparent nos contemporains, l’on s’en persuader
506 barrières morales qui séparent nos contemporains, l’ on s’en persuadera facilement en lisant les récits de Begbie. Les disc
507 orains, l’on s’en persuadera facilement en lisant les récits de Begbie. Les disciples de Buchmann, — il refuserait cette ex
508 uadera facilement en lisant les récits de Begbie. Les disciples de Buchmann, — il refuserait cette expression — n’ont pas c
509 petites équipes. Ils voyagent beaucoup et vont où l’ Esprit les appelle. Ils partent bien souvent sans autre raison que la
510 quipes. Ils voyagent beaucoup et vont où l’Esprit les appelle. Ils partent bien souvent sans autre raison que la certitude
511 e. Ils partent bien souvent sans autre raison que la certitude qui leur vient de pouvoir être utiles à tel endroit où Dieu
512 re utiles à tel endroit où Dieu leur dit d’aller. La chronique des rencontres miraculeuses qu’ils ont ainsi vécues remplir
513 tains récits du meilleur livre qu’on ait fait sur le Mouvement, For Sinners only (Pour les pécheurs seulement), de J. Russ
514 ait fait sur le Mouvement, For Sinners only (Pour les pécheurs seulement), de J. Russell, on découvre des possibilités huma
515 ussell, on découvre des possibilités humaines que le conformisme et la psychologie modernes semblaient avoir abolies dans
516 e des possibilités humaines que le conformisme et la psychologie modernes semblaient avoir abolies dans le monde. C’est l’
517 sychologie modernes semblaient avoir abolies dans le monde. C’est l’irruption de Dostoïevski dans la bourgeoisie bien-pens
518 nes semblaient avoir abolies dans le monde. C’est l’ irruption de Dostoïevski dans la bourgeoisie bien-pensante. Le pittore
519 s le monde. C’est l’irruption de Dostoïevski dans la bourgeoisie bien-pensante. Le pittoresque, le pathétique de l’aventur
520 de Dostoïevski dans la bourgeoisie bien-pensante. Le pittoresque, le pathétique de l’aventure que vivent quotidiennement l
521 ans la bourgeoisie bien-pensante. Le pittoresque, le pathétique de l’aventure que vivent quotidiennement les membres des G
522 e bien-pensante. Le pittoresque, le pathétique de l’ aventure que vivent quotidiennement les membres des Groupes pourraient
523 thétique de l’aventure que vivent quotidiennement les membres des Groupes pourraient devenir pour eux un danger assez grave
524 a là un risque indéniable : celui de naturaliser la foi, de s’attacher aux résultats visibles et frappants, de retomber a
525 ats visibles et frappants, de retomber ainsi dans la vieille croyance à la sanctification par les œuvres. Karl Barth et se
526 nts, de retomber ainsi dans la vieille croyance à la sanctification par les œuvres. Karl Barth et ses amis n’ont pas manqu
527 dans la vieille croyance à la sanctification par les œuvres. Karl Barth et ses amis n’ont pas manqué de critiquer vivement
528 rtaines des suppositions théologiques qu’implique l’ attitude de Buchman. Car ce n’est pas assez que de se refuser à parler
529 e garder de vivre une théologie équivoque. À quoi les membres du Mouvement des Groupes peuvent répondre que leur œuvre se d
530 hise, d’autocritique, de sobriété spirituelle qui la préserve de la plupart des excès qu’on imagine. Peut-être la plus sûr
531 de la plupart des excès qu’on imagine. Peut-être la plus sûre leçon des Groupes est-elle dans leur vision concrète de l’h
532 des Groupes est-elle dans leur vision concrète de l’ homme et de l’action de Dieu sur l’homme. Dans l’incroyable verbalisme
533 t-elle dans leur vision concrète de l’homme et de l’ action de Dieu sur l’homme. Dans l’incroyable verbalisme de notre temp
534 on concrète de l’homme et de l’action de Dieu sur l’ homme. Dans l’incroyable verbalisme de notre temps, dans cet embouteil
535 l’homme et de l’action de Dieu sur l’homme. Dans l’ incroyable verbalisme de notre temps, dans cet embouteillage de doctri
536 e doctrines et de programmes où nous sommes pris, le seul message utile est celui qui nous révèle une tâche proche, des ho
537 che, des hommes pour lesquels nous puissions être le prochain. Et quand ce livre n’aurait pas d’autre valeur, il a celle-l
538 l a celle-là, qui compte, de nous montrer comment les hommes de ce temps peuvent devenir des hommes réels. ⁂ Il se peut que
539 ir des hommes réels. ⁂ Il se peut que Kagawa soit l’ homme le plus réel d’aujourd’hui. Je dirais qu’il est le plus grand, s
540 ommes réels. ⁂ Il se peut que Kagawa soit l’homme le plus réel d’aujourd’hui. Je dirais qu’il est le plus grand, si la mes
541 e le plus réel d’aujourd’hui. Je dirais qu’il est le plus grand, si la mesure de la grandeur, dans sa vision, n’était pas
542 ujourd’hui. Je dirais qu’il est le plus grand, si la mesure de la grandeur, dans sa vision, n’était pas exclusivement dans
543 e dirais qu’il est le plus grand, si la mesure de la grandeur, dans sa vision, n’était pas exclusivement dans la réalité q
544 r, dans sa vision, n’était pas exclusivement dans la réalité qu’un homme incarne. Qui le connaît en France ? Claudel, quel
545 sivement dans la réalité qu’un homme incarne. Qui le connaît en France ? Claudel, quelques revues protestantes en ont parl
546 ignorent quelques-uns des événements décisifs de l’ histoire contemporaine. Kagawa est le chef du Jeune Japon, l’écrivain
547 décisifs de l’histoire contemporaine. Kagawa est le chef du Jeune Japon, l’écrivain le plus fécond et le plus populaire d
548 contemporaine. Kagawa est le chef du Jeune Japon, l’ écrivain le plus fécond et le plus populaire de son pays, une puissanc
549 ne. Kagawa est le chef du Jeune Japon, l’écrivain le plus fécond et le plus populaire de son pays, une puissance sociale e
550 chef du Jeune Japon, l’écrivain le plus fécond et le plus populaire de son pays, une puissance sociale et religieuse dont
551 on pays, une puissance sociale et religieuse dont l’ Occident ne connaît pas d’exemple. Un récit autobiographique et romanc
552 extraits de ses œuvres8. Fils d’un conseiller de l’ empereur et d’une danseuse, Kagawa se convertit au christianisme penda
553 s et déclare renoncer à toute fortune. Sa famille le destitue de ses privilèges aristocratiques. Il embrasse la pauvreté,
554 ue de ses privilèges aristocratiques. Il embrasse la pauvreté, s’enfonce dans les slums de Kobé, décide qu’il n’aura pas d
555 ratiques. Il embrasse la pauvreté, s’enfonce dans les slums de Kobé, décide qu’il n’aura pas d’habitation plus vaste que ce
556 s hôtes sont un galeux, un alcoolique qu’il nomme la « statue de cuivre » à cause de son immobilité presque totale, et un
557 on immobilité presque totale, et un assassin dont les nuits sont hantées par les apparitions de sa victime. Ils dorment côt
558 e, et un assassin dont les nuits sont hantées par les apparitions de sa victime. Ils dorment côte à côte. D’autres viennent
559 côte à côte. D’autres viennent : il faut écarter les parois de la pièce pour permettre à chacun de se coucher. Kagawa les
560 D’autres viennent : il faut écarter les parois de la pièce pour permettre à chacun de se coucher. Kagawa les nourrit de so
561 èce pour permettre à chacun de se coucher. Kagawa les nourrit de son travail. Parfois, ils se révoltent contre sa bonté sou
562 selle, lui tirent dessus. Il s’échappe et revient le lendemain. Il prêche dans le quartier des prostituées, souvent lapidé
563 s’échappe et revient le lendemain. Il prêche dans le quartier des prostituées, souvent lapidé. Épuisé par la tuberculose e
564 rtier des prostituées, souvent lapidé. Épuisé par la tuberculose et une maladie des yeux, il arrive qu’il s’effondre penda
565 pendant ses discours. Il écrit une Psychologie de la pauvreté et un roman dont le tirage atteint 250 000 exemplaires. Son
566 t une Psychologie de la pauvreté et un roman dont le tirage atteint 250 000 exemplaires. Son œuvre s’étend dans les slums.
567 teint 250 000 exemplaires. Son œuvre s’étend dans les slums. Mais à ce moment le machinisme s’introduit au Japon, augmentan
568 on œuvre s’étend dans les slums. Mais à ce moment le machinisme s’introduit au Japon, augmentant la misère avec le nombre
569 nt le machinisme s’introduit au Japon, augmentant la misère avec le nombre des ouvriers. Kagawa fonde la fédération japona
570 e s’introduit au Japon, augmentant la misère avec le nombre des ouvriers. Kagawa fonde la fédération japonaise du travail
571 misère avec le nombre des ouvriers. Kagawa fonde la fédération japonaise du travail et prend la tête du mouvement ouvrier
572 fonde la fédération japonaise du travail et prend la tête du mouvement ouvrier. Il conduit une première grève de 30 000 do
573 ève de 30 000 dockers et rédige leur manifeste. «  Les ouvriers sont des êtres humains et non pas des articles dont on trafi
574 rafique suivant une échelle de salaires basés sur l’ état du marché. » On le met en prison. Il y écrit en treize jours un r
575 elle de salaires basés sur l’état du marché. » On le met en prison. Il y écrit en treize jours un roman : L’Archer tirant
576 en prison. Il y écrit en treize jours un roman : L’ Archer tirant contre le soleil. Accueilli à sa sortie de prison par un
577 en treize jours un roman : L’Archer tirant contre le soleil. Accueilli à sa sortie de prison par une foule en fête, il ent
578 te, il entraîne une centaine d’enfants au bord de la mer pour célébrer la liberté. Sa ligne de bataille s’étend. Il crée l
579 entaine d’enfants au bord de la mer pour célébrer la liberté. Sa ligne de bataille s’étend. Il crée l’Union des paysans. I
580 la liberté. Sa ligne de bataille s’étend. Il crée l’ Union des paysans. Il évangélise. Il devient le « fou du Christ ». À p
581 ée l’Union des paysans. Il évangélise. Il devient le « fou du Christ ». À peine a-t-il réussi à faire reconnaître légaleme
582 eine a-t-il réussi à faire reconnaître légalement le syndicalisme qu’il a créé, le voilà qui lance une campagne pour la ch
583 onnaître légalement le syndicalisme qu’il a créé, le voilà qui lance une campagne pour la christianisation du Japon, une a
584 u’il a créé, le voilà qui lance une campagne pour la christianisation du Japon, une autre contre la guerre de Chine. « La
585 ur la christianisation du Japon, une autre contre la guerre de Chine. « La société contemporaine est une invalide, mentale
586 du Japon, une autre contre la guerre de Chine. «  La société contemporaine est une invalide, mentalement dégénérée, écrit-
587 st une invalide, mentalement dégénérée, écrit-il. Les banques, l’armée, les maisons de prostitution, les cabarets, les maga
588 de, mentalement dégénérée, écrit-il. Les banques, l’ armée, les maisons de prostitution, les cabarets, les magasins de taba
589 lement dégénérée, écrit-il. Les banques, l’armée, les maisons de prostitution, les cabarets, les magasins de tabac, les jou
590 es banques, l’armée, les maisons de prostitution, les cabarets, les magasins de tabac, les journaux, ne sont-ils pas autant
591 armée, les maisons de prostitution, les cabarets, les magasins de tabac, les journaux, ne sont-ils pas autant de symptômes
592 rostitution, les cabarets, les magasins de tabac, les journaux, ne sont-ils pas autant de symptômes d’aliénation mentale ?
593 ls pas autant de symptômes d’aliénation mentale ? La société de nos jours manifeste une tendance au crime. Elle est devenu
594 le est devenue folle par sa faute, Dieu seul peut la guérir. » Les marxistes n’aiment pas ce radicalisme, qui n’est pas co
595 e folle par sa faute, Dieu seul peut la guérir. » Les marxistes n’aiment pas ce radicalisme, qui n’est pas conforme à leur
596 isme, qui n’est pas conforme à leur doctrine. Ils l’ attaquent violemment : « Enterrez-le ! Enterrez Kagawa ! », proclame l
597 doctrine. Ils l’attaquent violemment : « Enterrez- le  ! Enterrez Kagawa ! », proclame le parti communiste de Kobé en 1925.
598 t : « Enterrez-le ! Enterrez Kagawa ! », proclame le parti communiste de Kobé en 1925. Et quelques années plus tard, une l
599 où elle reprend des termes semblables : « Brûlez- le , brûlez Kagawa ! C’est un révolutionnaire redoutable. » Ainsi criait-
600 olutionnaire redoutable. » Ainsi criait-on contre les prophètes. Kagawa est aussi un grand mystique, c’est-à-dire un grand
601 i un grand mystique, c’est-à-dire un grand poète. Le livre d’Axling nous donne d’admirables citations de ses Méditations.
602 nne d’admirables citations de ses Méditations. Si les romans de Kagawa l’ont fait comparer à Gorki, ses poèmes en prose son
603 tions de ses Méditations. Si les romans de Kagawa l’ ont fait comparer à Gorki, ses poèmes en prose sont d’un franciscain.
604 in. Il y a en lui un amour des objets, un sens de la nature, une compréhension des symboles qui appartiennent au génie jap
605 artiennent au génie japonais tel que Claudel nous l’ a décrit, mais auquel le génie chrétien ajoute une dimension humaine p
606 nais tel que Claudel nous l’a décrit, mais auquel le génie chrétien ajoute une dimension humaine particulièrement émouvant
607 . Vies transformées, par Harold Begbie, trad. de l’ anglais par D. Junod (La Concorde). 8. Kagawa, par William AxIing, t
608 r Harold Begbie, trad. de l’anglais par D. Junod ( La Concorde). 8. Kagawa, par William AxIing, trad. de l’anglais par H.
609 corde). 8. Kagawa, par William AxIing, trad. de l’ anglais par H. Ecuyer (La Concorde). f. Rougemont Denis de, « Le Mou
610 William AxIing, trad. de l’anglais par H. Ecuyer ( La Concorde). f. Rougemont Denis de, « Le Mouvement des Groupes. — Kag
611 Ecuyer (La Concorde). f. Rougemont Denis de, «  Le Mouvement des Groupes. — Kagawa », Les Nouvelles littéraires, Paris,
612 Denis de, « Le Mouvement des Groupes. — Kagawa », Les Nouvelles littéraires, Paris, 4 août 1934, p. 3. g. Comme l’indique
613 littéraires, Paris, 4 août 1934, p. 3. g. Comme l’ indique la note, il s’agit d’Avant l’aube (Éditions « Je sers ») dont
614 es, Paris, 4 août 1934, p. 3. g. Comme l’indique la note, il s’agit d’Avant l’aube (Éditions « Je sers ») dont Rougemont
615 3. g. Comme l’indique la note, il s’agit d’Avant l’ aube (Éditions « Je sers ») dont Rougemont donne une recension dans Fo
6 1934, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Au sujet d’un roman : Sara Alelia (3 novembre 1934)
616 éraire ? Je détiendrais volontiers celui-ci : que le roman est un genre protestant. — Et Balzac ? dites-vous, car vous ête
617 ous êtes Français. Eh bien, Balzac n’est pas tout le roman. Il n’est même pas tout le roman français. Balzac, c’est le rom
618 c n’est pas tout le roman. Il n’est même pas tout le roman français. Balzac, c’est le roman social. Balzac — et Stendhal,
619 st même pas tout le roman français. Balzac, c’est le roman social. Balzac — et Stendhal, bien sûr — ce sera l’honorable, l
620 social. Balzac — et Stendhal, bien sûr — ce sera l’ honorable, la géniale exception. Il me reste à vous démontrer, ce qui
621 ac — et Stendhal, bien sûr — ce sera l’honorable, la géniale exception. Il me reste à vous démontrer, ce qui n’est pas tro
622 et Tolstoï sont plus protestants qu’on ne croit. Le reste est évident. — Quel reste ? — Les Anglais, les Allemands, les S
623 ne croit. Le reste est évident. — Quel reste ? —  Les Anglais, les Allemands, les Scandinaves, et le roman d’analyse frança
624 reste est évident. — Quel reste ? — Les Anglais, les Allemands, les Scandinaves, et le roman d’analyse français, de Rousse
625 ent. — Quel reste ? — Les Anglais, les Allemands, les Scandinaves, et le roman d’analyse français, de Rousseau jusqu’à Gide
626 — Les Anglais, les Allemands, les Scandinaves, et le roman d’analyse français, de Rousseau jusqu’à Gide, en passant par Co
627 , vous ne voyez que Balzac et Zola. Je vois aussi le pasteur Sterne, le Goethe des Affinités, Jacobsen, George Eliot et le
628 Balzac et Zola. Je vois aussi le pasteur Sterne, le Goethe des Affinités, Jacobsen, George Eliot et les sœurs Brontë, Dic
629 e Goethe des Affinités, Jacobsen, George Eliot et les sœurs Brontë, Dickens, Strindberg, Hamsun et Lagerlöf, Henry James, G
630 faut-il pour faire un roman ? Des caractères, de la vie intérieure, une morale qui mette des obstacles et qui crée des co
631 stacles et qui crée des conflits dramatiques dans les vies les plus dépourvues d’apparences. N’est-ce point-là l’image habi
632 t qui crée des conflits dramatiques dans les vies les plus dépourvues d’apparences. N’est-ce point-là l’image habituelle qu
633 s plus dépourvues d’apparences. N’est-ce point-là l’ image habituelle que l’on se fait de nos climats ? Et voici un dernier
634 arences. N’est-ce point-là l’image habituelle que l’ on se fait de nos climats ? Et voici un dernier argument. Prenez une l
635 y a qu’un million de réformés en France. Imaginez la proportion si l’édit de Nantes n’avait pas été révoqué ! — Je vous ac
636 de réformés en France. Imaginez la proportion si l’ édit de Nantes n’avait pas été révoqué ! — Je vous accorde volontiers
637 avantage y voyez-vous pour votre foi ? — Oh ! Pas le moindre ! Je constate un fait. Mais laissons là le paradoxe. Vous n’i
638 e moindre ! Je constate un fait. Mais laissons là le paradoxe. Vous n’ignorez pas plus que moi que la plupart des romancie
639 a plupart des romanciers dont j’allais vous citer les noms n’ont guère de protestant que l’origine, et quelques tics de psy
640 vous citer les noms n’ont guère de protestant que l’ origine, et quelques tics de psychologues. Ils sont, comme l’on dit « 
641 et quelques tics de psychologues. Ils sont, comme l’ on dit « sortis du protestantisme » ; « sortis » est bien le mot ! C’e
642  sortis du protestantisme » ; « sortis » est bien le mot ! C’est-à-dire qu’ils n’ont pas de foi, et qu’est-ce qu’un protes
643 rcheriez en vain un roman véritablement chrétien. La Porte étroite ne décrit guère qu’une aberration janséniste. Et je ne
644 e qu’une aberration janséniste. Et je ne retrouve le calvinisme véritable que dans l’Adam et Ève de Ramuz, mais Ramuz acce
645 t je ne retrouve le calvinisme véritable que dans l’ Adam et Ève de Ramuz, mais Ramuz accepterait-il une étiquette aussi co
646 Sara Alelia, de Mme Hildur Dixelius. On vient de le traduire du suédois9. ⁂ Qu’est-ce qu’un roman chrétien ? Une histoire
647 » ? Il n’y aurait pas de roman. Une histoire dont le personnage principal est « la main du Seigneur », ou encore « l’inson
648 . Une histoire dont le personnage principal est «  la main du Seigneur », ou encore « l’insondable Providence » mise en act
649 rincipal est « la main du Seigneur », ou encore «  l’ insondable Providence » mise en action au gré d’un moraliste qui se do
650 mise en action au gré d’un moraliste qui se donne l’ air de l’avoir bel et bien sondée ? Ce serait un conte bleu, ou un vol
651 ction au gré d’un moraliste qui se donne l’air de l’ avoir bel et bien sondée ? Ce serait un conte bleu, ou un volume de la
652 sondée ? Ce serait un conte bleu, ou un volume de la Bibliothèque Rose. Est-ce une histoire qui finit bien, comme le croya
653 e Rose. Est-ce une histoire qui finit bien, comme le croyaient les écrivains anglais du xixe siècle — en conséquence de q
654 e une histoire qui finit bien, comme le croyaient les écrivains anglais du xixe siècle — en conséquence de quoi les romans
655 anglais du xixe siècle — en conséquence de quoi les romans des « païens », d’un Thomas Hardy, par exemple, se devaient de
656 vaient de finir aussi mal que possible ? Non, car le christianisme se passe dans cette vie ou bien n’est pas le christiani
657 ianisme se passe dans cette vie ou bien n’est pas le christianisme. Et l’on serait en droit de prétendre qu’un roman pessi
658 cette vie ou bien n’est pas le christianisme. Et l’ on serait en droit de prétendre qu’un roman pessimiste à la Thomas Har
659 it en droit de prétendre qu’un roman pessimiste à la Thomas Hardy a plus de chances d’être chrétien qu’un quelconque happy
660 appy end soi-disant édifiant s’il est certain que l’ Évangile et ses promesses de salut sont seuls capables de donner à l’h
661 romesses de salut sont seuls capables de donner à l’ homme une vision réaliste de son sort terrestre, et le sobre courage d
662 mme une vision réaliste de son sort terrestre, et le sobre courage d’avouer sa dégradation. Un vrai roman chrétien est d’a
663 est d’abord réaliste. Car il faut bien connaître la nature et ses abîmes, si l’on veut être à même d’y voir les marques d
664 l faut bien connaître la nature et ses abîmes, si l’ on veut être à même d’y voir les marques du surnaturel. La grâce n’int
665 et ses abîmes, si l’on veut être à même d’y voir les marques du surnaturel. La grâce n’intervient pas ailleurs que dans l’
666 t être à même d’y voir les marques du surnaturel. La grâce n’intervient pas ailleurs que dans l’« abîme ». On la pressent
667 urel. La grâce n’intervient pas ailleurs que dans l’ « abîme ». On la pressent d’abord dans l’œuvre d’art à certaine qualit
668 ’intervient pas ailleurs que dans l’« abîme ». On la pressent d’abord dans l’œuvre d’art à certaine qualité du pessimisme
669 que dans l’« abîme ». On la pressent d’abord dans l’ œuvre d’art à certaine qualité du pessimisme qui s’en dégage : pessimi
670 e et désespoir jamais complaisant à lui-même, car l’ aveu même qu’on en fait est la preuve qu’on l’a traversé, et qu’on a s
671 ant à lui-même, car l’aveu même qu’on en fait est la preuve qu’on l’a traversé, et qu’on a saisi l’espérance qui le transc
672 car l’aveu même qu’on en fait est la preuve qu’on l’ a traversé, et qu’on a saisi l’espérance qui le transcende et qui le j
673 st la preuve qu’on l’a traversé, et qu’on a saisi l’ espérance qui le transcende et qui le juge. On a dit de Sara Alelia qu
674 on l’a traversé, et qu’on a saisi l’espérance qui le transcende et qui le juge. On a dit de Sara Alelia que c’est un roman
675 u’on a saisi l’espérance qui le transcende et qui le juge. On a dit de Sara Alelia que c’est un roman de la grâce : oui, m
676 ge. On a dit de Sara Alelia que c’est un roman de la grâce : oui, mais c’est aussi, et d’abord, un roman de la perdition.
677  : oui, mais c’est aussi, et d’abord, un roman de la perdition. J’y vois une suite d’illustrations vivantes du fameux para
678 du fameux paradoxe luthérien qui est au centre de la Réforme : simul peccator et justus. Kierkegaard nous rappelle que pou
679 justus. Kierkegaard nous rappelle que pour aider les hommes, il faut d’abord les trouver là où ils sont. Ainsi ce livre es
680 ppelle que pour aider les hommes, il faut d’abord les trouver là où ils sont. Ainsi ce livre est consolant, parce qu’il ne
681 ce qu’il vient nous prendre où nous sommes. C’est le charme profond de Selma Lagerlöf qui revit dans ces peintures d’une L
682 e, je veux dire moins d’apparent lyrisme que chez l’ auteur de Gösta Berling ; mais une sobriété qui vous saisit le cœur, à
683 Gösta Berling ; mais une sobriété qui vous saisit le cœur, à chaque page. Toute une vie de femme se déroule sur un rythme
684 une sainte. Elle a péché gravement, elle a touché le fond de la détresse humaine. C’est un vieux pasteur un peu ivrogne, u
685 Elle a péché gravement, elle a touché le fond de la détresse humaine. C’est un vieux pasteur un peu ivrogne, un vieil our
686 un vieil ours intraitable, toujours dressé contre les conventions civilisées — inoubliable création, ce Norenius ! — qui pr
687 r. Puis une grâce vient dans sa vie, et désormais l’ accompagne en secret tout au long de cette chronique. On voit naître e
688 hronique. On voit naître et grandir un fils, puis les enfants d’une troisième génération. (C’est un des grands pouvoirs des
689 pouvoirs des romanciers du Nord que d’introduire la durée d’une vie comme protagoniste du drame.) Des fragments du journa
690 agments du journal de Sara commentent et rythment le déroulement de cette légende de la vie quotidienne. Vie quotidienne,
691 nt et rythment le déroulement de cette légende de la vie quotidienne. Vie quotidienne, réalisme, pessimisme. Je vois bien
692 e quotidienne, réalisme, pessimisme. Je vois bien les malentendus que font naître ces expressions dans nos esprits encore m
693 és naturalistes. On a voulu nous faire croire que la vie quotidienne était le contraire de la poésie, et qu’être réaliste
694 lu nous faire croire que la vie quotidienne était le contraire de la poésie, et qu’être réaliste c’était ne rien voir d’au
695 oire que la vie quotidienne était le contraire de la poésie, et qu’être réaliste c’était ne rien voir d’autre que le sexe
696 qu’être réaliste c’était ne rien voir d’autre que le sexe et l’argent dans l’existence humaine. Cette espèce de naturalism
697 liste c’était ne rien voir d’autre que le sexe et l’ argent dans l’existence humaine. Cette espèce de naturalisme est le fr
698 ne rien voir d’autre que le sexe et l’argent dans l’ existence humaine. Cette espèce de naturalisme est le fruit d’un resse
699 xistence humaine. Cette espèce de naturalisme est le fruit d’un ressentiment que les excès idéalistes expliquent sans le l
700 de naturalisme est le fruit d’un ressentiment que les excès idéalistes expliquent sans le légitimer. L’homme n’est pas un a
701 entiment que les excès idéalistes expliquent sans le légitimer. L’homme n’est pas un ange, c’est entendu, mais ne dites pa
702 es excès idéalistes expliquent sans le légitimer. L’ homme n’est pas un ange, c’est entendu, mais ne dites pas qu’il n’est
703 ie qui naît des faits, jamais d’un commentaire de l’ auteur. La danse de la petite Eva Margareta, chaussée de galoches trop
704 t des faits, jamais d’un commentaire de l’auteur. La danse de la petite Eva Margareta, chaussée de galoches trop grandes,
705 jamais d’un commentaire de l’auteur. La danse de la petite Eva Margareta, chaussée de galoches trop grandes, dans le taud
706 argareta, chaussée de galoches trop grandes, dans le taudis où son vieux père se saoule et sacre, dix autres scènes enfant
707 a réalité : elle dépend du regard qu’on porte sur le monde. Le regard « objectif » de nos naturalistes appauvrit tout, fau
708 : elle dépend du regard qu’on porte sur le monde. Le regard « objectif » de nos naturalistes appauvrit tout, faute de voul
709 tout, faute de vouloir imaginer. Ils croient voir l’ existence réelle alors qu’ils décrivent simplement l’impuissance de le
710 xistence réelle alors qu’ils décrivent simplement l’ impuissance de leur propre cœur. Le regard « réaliste » de Hildur Dixe
711 ent simplement l’impuissance de leur propre cœur. Le regard « réaliste » de Hildur Dixetius a su voir dans la vie quotidie
712 rd « réaliste » de Hildur Dixetius a su voir dans la vie quotidienne des drames singuliers, de bizarres et profondes folie
713 ames singuliers, de bizarres et profondes folies, l’ originalité bouleversante des êtres, qu’il s’agisse d’un grand évêque
714 e visage de belette » qui enterre son enfant dans la neige avec une sorte d’innocence animale. La superstition rôde dans c
715 dans la neige avec une sorte d’innocence animale. La superstition rôde dans ces campagnes désertiques ; il y a des fous, d
716 s, des femmes possédées ; des ivrognes qui citent les Écritures ; peut-être aussi des saints, mais qu’on ignore et qui s’ig
717 ignore et qui s’ignorent. Partout et jusque dans les choses, un mystère inquiétant se révèle aux yeux de celui qui sait vo
718 menacées, harmonieuses ou durement rabrouées par le sort, « la neige tombe, effaçant toutes traces », symbole d’une misér
719 harmonieuses ou durement rabrouées par le sort, «  la neige tombe, effaçant toutes traces », symbole d’une miséricorde lumi
720 miséricorde lumineuse, dont on dirait qu’elle est le vrai sujet de ce grand livre. Le silence à peu près général de la cri
721 rait qu’elle est le vrai sujet de ce grand livre. Le silence à peu près général de la critique à propos d’une telle œuvre
722 ce grand livre. Le silence à peu près général de la critique à propos d’une telle œuvre donnerait lieu à des conclusions
723 nerait lieu à des conclusions amères. Amères pour la critique surtout, je crois. Car Sara Alelia trouvera son public ; c’e
724 Alelia trouvera son public ; c’est un livre qui a le temps pour lui. 9. Hildur Dixelius von Aster : Sara Alelia, traduit
725 mpte rendu] Au sujet d’un roman : Sara Alelia  », Les Nouvelles littéraires, Paris, 3 novembre 1934, p. 3. i. Une note de
726 e plus courte du même roman a également paru dans le Journal de Genève du 25 mai 1934.
7 1934, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Une histoire de la Réforme en France (15 décembre 1934)
727 Une histoire de la Réforme en France (15 décembre 1934)j Certes, la grandeur d’une Ég
728 Réforme en France (15 décembre 1934)j Certes, la grandeur d’une Église et sa force ne résident pas dans son histoire,
729 histoire, mais dans sa vérité, c’est-à-dire dans l’ objet de sa foi. Mais de cette force et de cette grandeur il est permi
730 et de cette grandeur il est permis de rechercher les témoignages dans l’ordre de la civilisation, et il est légitime d’en
731 il est permis de rechercher les témoignages dans l’ ordre de la civilisation, et il est légitime d’en restaurer la mémoire
732 mis de rechercher les témoignages dans l’ordre de la civilisation, et il est légitime d’en restaurer la mémoire, pourvu qu
733 a civilisation, et il est légitime d’en restaurer la mémoire, pourvu que l’on n’y cherche pas de vains prétextes à se glor
734 st légitime d’en restaurer la mémoire, pourvu que l’ on n’y cherche pas de vains prétextes à se glorifier d’un passé bien p
735 , et dont il resterait à prouver qu’on est digne. Le meilleur moyen d’éviter ce danger serait sans doute d’envisager l’his
736 d’éviter ce danger serait sans doute d’envisager l’ histoire d’une religion dans la perspective de sa théologie ; le rappe
737 doute d’envisager l’histoire d’une religion dans la perspective de sa théologie ; le rappel constant du dogme suffirait,
738 ne religion dans la perspective de sa théologie ; le rappel constant du dogme suffirait, dans le cas de l’Église protestan
739 gie ; le rappel constant du dogme suffirait, dans le cas de l’Église protestante, à rétablir la valeur relative des faits,
740 appel constant du dogme suffirait, dans le cas de l’ Église protestante, à rétablir la valeur relative des faits, valeur de
741 , dans le cas de l’Église protestante, à rétablir la valeur relative des faits, valeur de témoignage, sans cesse rapportée
742 its, valeur de témoignage, sans cesse rapportée à la foi, dont Dieu seul juge. John Viénot — qui vient de mourir presque e
743 dopté un parti tout différent, et c’est peut-être le seul reproche sérieux que je me sente le droit de formuler devant sa
744 eut-être le seul reproche sérieux que je me sente le droit de formuler devant sa monumentale Histoire de la Réforme frança
745 oit de formuler devant sa monumentale Histoire de la Réforme française. Plus encore que le premier tome de cet ouvrage (de
746 ue le premier tome de cet ouvrage (des origines à l’ édit de Nantes), le second tome qui vient de paraître10 témoigne de la
747 e second tome qui vient de paraître10 témoigne de la volonté qu’avait l’auteur de ne décrire que les effets sociaux, polit
748 ent de paraître10 témoigne de la volonté qu’avait l’ auteur de ne décrire que les effets sociaux, politiques et culturels d
749 de la volonté qu’avait l’auteur de ne décrire que les effets sociaux, politiques et culturels de la Réforme, sans les rappo
750 ue les effets sociaux, politiques et culturels de la Réforme, sans les rapporter à l’évolution parallèle du dogme dans l’É
751 iaux, politiques et culturels de la Réforme, sans les rapporter à l’évolution parallèle du dogme dans l’Église. De même, Jo
752 et culturels de la Réforme, sans les rapporter à l’ évolution parallèle du dogme dans l’Église. De même, John Viénot laiss
753 s rapporter à l’évolution parallèle du dogme dans l’ Église. De même, John Viénot laisse délibérément de côté tout ce que l
754 hn Viénot laisse délibérément de côté tout ce que l’ abbé Bremond appelait l’histoire du sentiment religieux, et il nous se
755 ément de côté tout ce que l’abbé Bremond appelait l’ histoire du sentiment religieux, et il nous sera permis de souhaiter q
756 n Bremond protestant, ne fût-ce que pour corriger les souriantes injustices du catholique à l’endroit de Calvin. John Viéno
757 not, pasteur et professeur de théologie, a réussi le tour de force de parler de la Réforme d’une manière si objective, si
758 théologie, a réussi le tour de force de parler de la Réforme d’une manière si objective, si impartiale, si spectaculaire,
759 de tolérance, teinté de renanisme, et considérant les conquêtes de la Réforme comme autant de conquêtes de la liberté de co
760 nté de renanisme, et considérant les conquêtes de la Réforme comme autant de conquêtes de la liberté de conscience en géné
761 quêtes de la Réforme comme autant de conquêtes de la liberté de conscience en général, plutôt que de la foi. Ceci dit, l’o
762 a liberté de conscience en général, plutôt que de la foi. Ceci dit, l’on ne saurait assez louer la science et les scrupule
763 ience en général, plutôt que de la foi. Ceci dit, l’ on ne saurait assez louer la science et les scrupules historiques de V
764 de la foi. Ceci dit, l’on ne saurait assez louer la science et les scrupules historiques de Viénot. La réserve dont il fa
765 ci dit, l’on ne saurait assez louer la science et les scrupules historiques de Viénot. La réserve dont il fait preuve dans
766 a science et les scrupules historiques de Viénot. La réserve dont il fait preuve dans tous ses jugements, l’atténuation vo
767 erve dont il fait preuve dans tous ses jugements, l’ atténuation volontaire des condamnations qu’il ne peut s’empêcher de p
768 et effort d’impartialité systématique qui restera la marque des historiens du xixe siècle finissant, n’enlève rien à l’in
769 oriens du xixe siècle finissant, n’enlève rien à l’ intérêt puissant de ce gros volume. Mais aussi, la substance historiqu
770 l’intérêt puissant de ce gros volume. Mais aussi, la substance historique qu’il nous offre est de celles qui n’ont pas bes
771 leur brûlante saveur. Rien de plus excitant pour l’ esprit que cette lecture, passionnante non seulement à cause du pittor
772 es plongées directes qu’elle permet d’opérer dans la vie publique et privée du xviie siècle, mais encore parce que, à tou
773 ie siècle, mais encore parce que, à tout moment, le lecteur se voit incité à imaginer ce qu’il fut advenu de la France si
774 se voit incité à imaginer ce qu’il fut advenu de la France si l’édit avait été observé, s’il n’avait pas été révoqué, si
775 té à imaginer ce qu’il fut advenu de la France si l’ édit avait été observé, s’il n’avait pas été révoqué, si Sully avait é
776 it pas été révoqué, si Sully avait été écouté, si les jésuites n’étaient pas revenus, s’ils n’avaient pas armé, après quinz
777 mé, après quinze autres meurtriers, un Ravaillac… Le bel irénisme de Viénot, la réserve qu’il observe avec constance dans
778 rtriers, un Ravaillac… Le bel irénisme de Viénot, la réserve qu’il observe avec constance dans son récit ne peuvent en som
779 ière fois, et propres à modifier considérablement l’ opinion que nous pouvions avoir du « grand siècle » tel que nous l’ont
780 s pouvions avoir du « grand siècle » tel que nous l’ ont décrit les fervents de Louis XIV et certains défenseurs de la poli
781 oir du « grand siècle » tel que nous l’ont décrit les fervents de Louis XIV et certains défenseurs de la politique romaine.
782 s fervents de Louis XIV et certains défenseurs de la politique romaine. La persécution des protestants ne fut pas l’œuvre
783 V et certains défenseurs de la politique romaine. La persécution des protestants ne fut pas l’œuvre du parti catholique fr
784 omaine. La persécution des protestants ne fut pas l’ œuvre du parti catholique français, mais bien des conseillers étranger
785 rs des rois et du haut clergé. Il semble bien que la pensée dominante, dans toute cette guerre faite à la foi évangélique,
786 pensée dominante, dans toute cette guerre faite à la foi évangélique, ait été celle des Espagnols et des Romains. Les cath
787 ique, ait été celle des Espagnols et des Romains. Les catholiques patriotes savaient bien que la présence à la cour d’un Su
788 ains. Les catholiques patriotes savaient bien que la présence à la cour d’un Sully ou d’un Duplessis-Mornay, représentants
789 oliques patriotes savaient bien que la présence à la cour d’un Sully ou d’un Duplessis-Mornay, représentants d’une Église
790 fidèle au roi, ne pouvait nuire au prestige et à l’ ordre de l’État. D’autre part, tout ce qui fut entrepris de bon, sous
791 roi, ne pouvait nuire au prestige et à l’ordre de l’ État. D’autre part, tout ce qui fut entrepris de bon, sous Henri IV, d
792 ce qui fut entrepris de bon, sous Henri IV, dans le domaine de la politique européenne, fut l’œuvre personnelle des réfor
793 trepris de bon, sous Henri IV, dans le domaine de la politique européenne, fut l’œuvre personnelle des réformés. Le « gran
794 , dans le domaine de la politique européenne, fut l’ œuvre personnelle des réformés. Le « grand dessein » qu’avait conçu Bé
795 européenne, fut l’œuvre personnelle des réformés. Le « grand dessein » qu’avait conçu Béthune pouvait faire de la France l
796 dessein » qu’avait conçu Béthune pouvait faire de la France la première organisatrice d’une Europe fédéralisée. Mais le vi
797 ière organisatrice d’une Europe fédéralisée. Mais le virus qu’un Mazarin, un Concini ou un Ubaldini (nonce papal) introdui
798 uisent en France au début du xviie siècle, c’est le virus de l’étatisme totalitaire, c’est l’idée fort peu française de l
799 ance au début du xviie siècle, c’est le virus de l’ étatisme totalitaire, c’est l’idée fort peu française de l’unité à tou
800 , c’est le virus de l’étatisme totalitaire, c’est l’ idée fort peu française de l’unité à tout prix et dans tous les ordres
801 e totalitaire, c’est l’idée fort peu française de l’ unité à tout prix et dans tous les ordres, au mépris de toutes les div
802 peu française de l’unité à tout prix et dans tous les ordres, au mépris de toutes les diversités organiques et fécondes. C’
803 prix et dans tous les ordres, au mépris de toutes les diversités organiques et fécondes. C’est cette idéologie importée qui
804 idéologie importée qui influence de plus en plus la cour, et qui finit par triompher lors de la révocation de l’édit de N
805 plus la cour, et qui finit par triompher lors de la révocation de l’édit de Nantes. Mais alors cette révocation n’apparaî
806 qui finit par triompher lors de la révocation de l’ édit de Nantes. Mais alors cette révocation n’apparaît plus que comme
807 révocation n’apparaît plus que comme un épisode, le plus marquant il est vrai, de toute l’évolution politique de la royau
808 n épisode, le plus marquant il est vrai, de toute l’ évolution politique de la royauté absolue vers « l’État totalitaire ».
809 nt il est vrai, de toute l’évolution politique de la royauté absolue vers « l’État totalitaire ». Il faut ici risquer un m
810 ’évolution politique de la royauté absolue vers «  l’ État totalitaire ». Il faut ici risquer un mot sans doute anachronique
811 uer un mot sans doute anachronique, mais que tout le livre de Viénot nous autorise à prononcer ; c’est le mot de fascisme.
812 livre de Viénot nous autorise à prononcer ; c’est le mot de fascisme. Le parallélisme qu’on peut facilement établir entre
813 autorise à prononcer ; c’est le mot de fascisme. Le parallélisme qu’on peut facilement établir entre la « révocation » et
814 parallélisme qu’on peut facilement établir entre la « révocation » et les mesures de « mise au pas » prises par Hitler me
815 eut facilement établir entre la « révocation » et les mesures de « mise au pas » prises par Hitler me paraît riche d’enseig
816 ’est pas un souci d’unité religieuse qui domine : la religion leur est simple prétexte ; mais il s’agit d’établir à tout p
817 adre national centralisé, géométrique, conçu dans l’ abstraction et imposé par la violence. Pour soutenir un tel dessein, i
818 ométrique, conçu dans l’abstraction et imposé par la violence. Pour soutenir un tel dessein, il s’agit d’établir un droit
819 r un droit nouveau qui ne soit plus fondé que sur la seule volonté du dictateur. Déjà ce mot de Mazarin paraît donner comm
820 mme une formule anticipée du droit « nazi » : Si le roi, disait-il, ne voulait point qu’on portât des glands à son collet
821 drait point porter, parce que ce n’est point tant la chose défendue que la défense qui fait le crime. En face de ces prét
822 rce que ce n’est point tant la chose défendue que la défense qui fait le crime. En face de ces prétentions toutes nouvell
823 nt tant la chose défendue que la défense qui fait le crime. En face de ces prétentions toutes nouvelles, les réformés de
824 me. En face de ces prétentions toutes nouvelles, les réformés de France ne cessèrent, dès le début, de dresser une protest
825 uvelles, les réformés de France ne cessèrent, dès le début, de dresser une protestation dont les termes n’ont, hélas ! pas
826 t, dès le début, de dresser une protestation dont les termes n’ont, hélas ! pas vieilli. Viénot cite, à ce propos, un texte
827 ce propos, un texte assez frappant. Il s’agit de la requête adressée au roi par des protestants auxquels on refusait l’us
828 e au roi par des protestants auxquels on refusait l’ usage des cimetières (on allait même jusqu’à violer les sépultures des
829 age des cimetières (on allait même jusqu’à violer les sépultures des religionnaires) : Ceux que vous déterrez, dit la requ
830 es religionnaires) : Ceux que vous déterrez, dit la requête, ne sont point étrangers. Ce sont François, vrais François de
831 us, mieux que vous d’affection, s’il est vrai que l’ humanité est la propre affection des François… Bon Dieu ! parmi quels
832 ous d’affection, s’il est vrai que l’humanité est la propre affection des François… Bon Dieu ! parmi quels tigres vivons-n
833 qu’une cour de Parlement se licencie ainsi contre le droit naturel, contre l’honnêteté civile ! Ce recours à un droit uni
834 se licencie ainsi contre le droit naturel, contre l’ honnêteté civile ! Ce recours à un droit universellement humain, n’es
835 versellement humain, n’est-il pas significatif de la nature du danger qu’on courait ? La conclusion de cette requête mérit
836 gnificatif de la nature du danger qu’on courait ? La conclusion de cette requête mérite d’ailleurs d’être citée aussi, pou
837 n’est pas moins grand lorsque, après avoir décrit l’ enterrement nocturne et secret d’une de ses coreligionnaires, il concl
838 il conclut par ces mots : Nous sommes chassés de la ville et jetés comme des ordures dans un coin. C’est bien d’ailleurs.
839 s cieux. Louange à Dieu aux siècles des siècles. Le livre de John Viénot nous donne toute une anthologie de pareils trait
840 te une anthologie de pareils traits. Grâce à quoi l’ on ressort de cette lecture plus édifié encore que révolté. Mais ce n’
841 é. Mais ce n’est pas peu dire. 10. Histoire de la Réforme française, tome II : De l’édit de Nantes à sa révocation, Lib
842 . Histoire de la Réforme française, tome II : De l’ édit de Nantes à sa révocation, Librairie Fischbacher. La même librair
843 de Nantes à sa révocation, Librairie Fischbacher. La même librairie publie une intéressante plaquette de H. Dartigue sur l
844 lie une intéressante plaquette de H. Dartigue sur la vie et l’œuvre de J. Viénot. j. Rougemont Denis de, « [Compte rendu
845 téressante plaquette de H. Dartigue sur la vie et l’ œuvre de J. Viénot. j. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Une hist
846 gemont Denis de, « [Compte rendu] Une histoire de la Réforme en France », Les Nouvelles littéraires, Paris, 15 décembre 19
847 te rendu] Une histoire de la Réforme en France », Les Nouvelles littéraires, Paris, 15 décembre 1934, p. 5.
8 1935, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Kierkegaard, Dostoïevski, Barth (23 février 1935)
848 iennent du Nord11. Un même courant spirituel nous les apporte au temps marqué. Peut-être, l’examen de ces « témoins » à la
849 tuel nous les apporte au temps marqué. Peut-être, l’ examen de ces « témoins » à la fois si divers et si profondément sembl
850 ables nous permettra-t-il aujourd’hui de préciser la direction et la nature de ce courant. L’Esprit souffle où il veut. Le
851 ttra-t-il aujourd’hui de préciser la direction et la nature de ce courant. L’Esprit souffle où il veut. Les prévisions des
852 préciser la direction et la nature de ce courant. L’ Esprit souffle où il veut. Les prévisions des historiens de la pensée
853 ature de ce courant. L’Esprit souffle où il veut. Les prévisions des historiens de la pensée ne semblent pas peser bien lou
854 ffle où il veut. Les prévisions des historiens de la pensée ne semblent pas peser bien lourd sur ses décisions souveraines
855 ions souveraines. Comment expliquer, par exemple, la soudaine passion qui porte tant de bons esprits, chez nous, vers la p
856 n qui porte tant de bons esprits, chez nous, vers la pensée de Kierkegaard, surgissant lentement, terriblement, des ombres
857 du Siècle Stupide ? Qui prévoyait, voici dix ans, l’ intervention de ce génie considérable, la position de cette question p
858 dix ans, l’intervention de ce génie considérable, la position de cette question plutôt gênante qu’est son œuvre en plein c
859 cœur de nos ratiocinations de clercs retraités de la vie ? Mais le plus curieux de l’affaire, n’est-ce pas que Kierkegaard
860 tiocinations de clercs retraités de la vie ? Mais le plus curieux de l’affaire, n’est-ce pas que Kierkegaard nous soit pré
861 rcs retraités de la vie ? Mais le plus curieux de l’ affaire, n’est-ce pas que Kierkegaard nous soit présenté aujourd’hui p
862 es laïques tout à fait libérés des disciplines de la foi, au moment décisif où, d’autre part, la pensée de son grand disci
863 es de la foi, au moment décisif où, d’autre part, la pensée de son grand disciple et continuateur, Karl Barth, pénètre et
864 he et du théologien projette une vive lumière sur le secret dernier du message d’un romancier : Dostoïevski. Prenons-y gar
865 rainte et Tremblement, qui vient de paraître dans la belle collection philosophique de MM. Lavelle et Le Senne, appartient
866 belle collection philosophique de MM. Lavelle et Le Senne, appartient à la première période de la pensée kierkegaardienne
867 et Le Senne, appartient à la première période de la pensée kierkegaardienne. La question que pose cette œuvre, c’est cell
868 a première période de la pensée kierkegaardienne. La question que pose cette œuvre, c’est celle de la foi, dans l’absolu.
869 La question que pose cette œuvre, c’est celle de la foi, dans l’absolu. Ce n’est pas encore la question que Kierkegaard a
870 que pose cette œuvre, c’est celle de la foi, dans l’ absolu. Ce n’est pas encore la question que Kierkegaard adressera plus
871 lle de la foi, dans l’absolu. Ce n’est pas encore la question que Kierkegaard adressera plus tard à la chrétienté de son t
872 la question que Kierkegaard adressera plus tard à la chrétienté de son temps : la foi étant ce que j’ai dit – le paradoxe
873 dressera plus tard à la chrétienté de son temps : la foi étant ce que j’ai dit – le paradoxe le plus inouï – avez-vous cet
874 nté de son temps : la foi étant ce que j’ai dit – le paradoxe le plus inouï – avez-vous cette foi, êtes-vous vraiment chré
875 emps : la foi étant ce que j’ai dit – le paradoxe le plus inouï – avez-vous cette foi, êtes-vous vraiment chrétiens ? Serv
876 u ? Question terriblement gênante, insupportable. La vocation singulière de cet homme s’épuisera dans le seul acte de l’im
877 vocation singulière de cet homme s’épuisera dans le seul acte de l’imposer. Après cet acte, semblable au prince Hamlet —
878 ière de cet homme s’épuisera dans le seul acte de l’ imposer. Après cet acte, semblable au prince Hamlet — autre Danois ! —
879 Kierkegaard se débat encore avec lui-même. A-t-il la foi ? Qu’est-ce que la foi ? Hegel, dont la philosophie obsède à ce m
880 core avec lui-même. A-t-il la foi ? Qu’est-ce que la foi ? Hegel, dont la philosophie obsède à ce moment l’esprit de Kierk
881 -t-il la foi ? Qu’est-ce que la foi ? Hegel, dont la philosophie obsède à ce moment l’esprit de Kierkegaard, Hegel esquive
882 i ? Hegel, dont la philosophie obsède à ce moment l’ esprit de Kierkegaard, Hegel esquive la question, la supprime implicit
883 ce moment l’esprit de Kierkegaard, Hegel esquive la question, la supprime implicitement. Il réduit tout au général. Mais
884 esprit de Kierkegaard, Hegel esquive la question, la supprime implicitement. Il réduit tout au général. Mais la Bible, que
885 me implicitement. Il réduit tout au général. Mais la Bible, que nous dit-elle ? Elle ne fait pas une théorie, elle répond
886 e ? Elle ne fait pas une théorie, elle répond par l’ exemple d’Abraham. Et c’est à la méditation de cet exemple que Kierkeg
887 , elle répond par l’exemple d’Abraham. Et c’est à la méditation de cet exemple que Kierkegaard va consacrer son livre. Abr
888 que Kierkegaard va consacrer son livre. Abraham, le « père des croyants », c’est l’homme qui a osé l’absurde. Dieu lui a
889 n livre. Abraham, le « père des croyants », c’est l’ homme qui a osé l’absurde. Dieu lui a donné un fils, à l’âge de 70 ans
890 le « père des croyants », c’est l’homme qui a osé l’ absurde. Dieu lui a donné un fils, à l’âge de 70 ans. Il n’a pas ri —
891 qui a osé l’absurde. Dieu lui a donné un fils, à l’ âge de 70 ans. Il n’a pas ri — comme Sarah, sa femme — de ce miracle.
892 raison humaine. Il selle son âne et s’en va vers les monts de Morija, pour sacrifier son fils unique. Il le fait « en vert
893 nts de Morija, pour sacrifier son fils unique. Il le fait « en vertu de l’absurde », c’est-à-dire en vertu de la foi, cont
894 crifier son fils unique. Il le fait « en vertu de l’ absurde », c’est-à-dire en vertu de la foi, contre toute morale et tou
895 en vertu de l’absurde », c’est-à-dire en vertu de la foi, contre toute morale et toute règle « générale ». Il va commettre
896 Il va commettre un meurtre, et c’est parce qu’il l’ accepte qu’on l’appellera le père des croyants ? L’individu serait-il
897 un meurtre, et c’est parce qu’il l’accepte qu’on l’ appellera le père des croyants ? L’individu serait-il au-dessus du gén
898 et c’est parce qu’il l’accepte qu’on l’appellera le père des croyants ? L’individu serait-il au-dessus du général ? Serai
899 ’accepte qu’on l’appellera le père des croyants ? L’ individu serait-il au-dessus du général ? Serait-il affranchi de l’éth
900 -il au-dessus du général ? Serait-il affranchi de l’ éthique ? Mais alors, comment donc comprendrait-il son acte ? Vingt fo
901 son acte ? Vingt fois, Kierkegaard y revient par les biais les plus différents et vingt fois il échoue devant ce paradoxe
902 ? Vingt fois, Kierkegaard y revient par les biais les plus différents et vingt fois il échoue devant ce paradoxe monstrueux
903 e paradoxe monstrueux. Il n’y a donc personne de la taille d’Abraham, personne qui puisse le comprendre ? Si, pourtant.
904 sonne de la taille d’Abraham, personne qui puisse le comprendre ? Si, pourtant. Les pasteurs ont coutume de l’offrir en e
905 ersonne qui puisse le comprendre ? Si, pourtant. Les pasteurs ont coutume de l’offrir en exemple. Car enfin il n’a pas tué
906 ndre ? Si, pourtant. Les pasteurs ont coutume de l’ offrir en exemple. Car enfin il n’a pas tué : Dieu l’arrête au dernier
907 ffrir en exemple. Car enfin il n’a pas tué : Dieu l’ arrête au dernier moment et lui montre un bélier prêt pour le sacrific
908 dernier moment et lui montre un bélier prêt pour le sacrifice… On célèbre la grâce de Dieu qui a donné Isaac pour la sec
909 tre un bélier prêt pour le sacrifice… On célèbre la grâce de Dieu qui a donné Isaac pour la seconde fois ; on ne voit, da
910 aac pour la seconde fois ; on ne voit, dans toute l’ histoire, qu’une épreuve. Une épreuve : c’est beaucoup dire, et peu de
911 est beaucoup dire, et peu de chose ; et cependant la chose est aussi vite passée que dite. On enfourche Pégase, en un clin
912 n un clin d’œil on est à Morija, on voit aussitôt le bélier ; on oublie qu’Abraham fit le chemin lentement, au pas de son
913 oit aussitôt le bélier ; on oublie qu’Abraham fit le chemin lentement, au pas de son âne, qu’il eut trois jours de voyage
914 e et qu’il lui fallut un peu de temps pour fendre le bois, lier Isaac et aiguiser le couteau. On oublie cela, on fait d’A
915 temps pour fendre le bois, lier Isaac et aiguiser le couteau. On oublie cela, on fait d’Abraham « un personnage insignifi
916 fait d’Abraham « un personnage insignifiant » et le comique c’est qu’on persiste à l’offrir en exemple aux chrétiens ! Ma
917 signifiant » et le comique c’est qu’on persiste à l’ offrir en exemple aux chrétiens ! Mais la grandeur d’Abraham, sa signi
918 rsiste à l’offrir en exemple aux chrétiens ! Mais la grandeur d’Abraham, sa signification démesurée et impensable, c’est q
919 ompense d’un acte « fou » et revint avec lui dans la vie comme si rien ne s’était passé. Voilà le paradoxe des paradoxes :
920 dans la vie comme si rien ne s’était passé. Voilà le paradoxe des paradoxes : vivre comme tout le monde, mais « en vertu d
921 s : vivre comme tout le monde, mais « en vertu de l’ absurde ». C’est là le sort du « chevalier de la foi », le sort du chr
922 e monde, mais « en vertu de l’absurde ». C’est là le sort du « chevalier de la foi », le sort du chrétien véritable. Mais
923 e l’absurde ». C’est là le sort du « chevalier de la foi », le sort du chrétien véritable. Mais qui peut dire : j’ai cette
924 e ». C’est là le sort du « chevalier de la foi », le sort du chrétien véritable. Mais qui peut dire : j’ai cette foi-là ?
925 ritable. Mais qui peut dire : j’ai cette foi-là ? La réflexion philosophique que Kierkegaard enchaîne à l’exemple d’Abraha
926 éflexion philosophique que Kierkegaard enchaîne à l’ exemple d’Abraham est admirablement analysée dans l’introduction de Je
927 exemple d’Abraham est admirablement analysée dans l’ introduction de Jean Wahl qui réussit ce tour de force d’exposer clair
928 ussit ce tour de force d’exposer clairement, sans la trahir, la dialectique « abyssale » de cette œuvre. Personne n’a fait
929 ur de force d’exposer clairement, sans la trahir, la dialectique « abyssale » de cette œuvre. Personne n’a fait plus que J
930 ’a fait plus que Jean Wahl pour faire connaître à l’ élite française la pensée de Søren Kierkegaard : c’est un titre qui co
931 ean Wahl pour faire connaître à l’élite française la pensée de Søren Kierkegaard : c’est un titre qui compte, et dont la p
932 Kierkegaard : c’est un titre qui compte, et dont la pensée protestante saura mesurer la valeur. ⁂ Qu’est-ce que la foi ?
933 mpte, et dont la pensée protestante saura mesurer la valeur. ⁂ Qu’est-ce que la foi ? demandait Kierkegaard dans Crainte e
934 testante saura mesurer la valeur. ⁂ Qu’est-ce que la foi ? demandait Kierkegaard dans Crainte et Tremblement. Qu’est-ce qu
935 egaard dans Crainte et Tremblement. Qu’est-ce que la vie chrétienne ? demande Karl Barth dans Culte raisonnable dont le ti
936  ? demande Karl Barth dans Culte raisonnable dont le titre contraste singulièrement avec celui de Kierkegaard. Barth s’adr
937 hrétiens, à des hommes qui se posent sérieusement la question : en quoi ma foi doit-elle transformer ma vie ? Or, toute l’
938 i ma foi doit-elle transformer ma vie ? Or, toute l’ insistance du grand théologien se porte dans ce livre sur un seul poin
939 logien se porte dans ce livre sur un seul point : l’ homme chrétien reste un homme comme les autres. Il n’a pas à devenir,
940 eul point : l’homme chrétien reste un homme comme les autres. Il n’a pas à devenir, dès ici-bas, un être un peu divin, un p
941 de ce monde perdu. Sa sanctification ne doit pas le conduire à je ne sais quelle « spiritualisation » tout illusoire ou é
942 soire ou évasive. Elle consiste d’abord en ce que le chrétien se reconnaît de plus en plus pécheur, de plus en plus livré
943 de plus en plus pécheur, de plus en plus livré à la seule grâce divine. La vie chrétienne, c’est simplement la vie humain
944 r, de plus en plus livré à la seule grâce divine. La vie chrétienne, c’est simplement la vie humaine éclairée par la foi d
945 grâce divine. La vie chrétienne, c’est simplement la vie humaine éclairée par la foi dans sa réalité, puis offerte telle q
946 nne, c’est simplement la vie humaine éclairée par la foi dans sa réalité, puis offerte telle quelle « en sacrifice saint e
947 formés en quelque essence radieuse et esthétique. La vie chrétienne n’est pas une construction qui s’élève au-dessus du re
948 ne construction qui s’élève au-dessus du reste de la vie. C’est toute profane et banale, la vie que chacun doit vivre à sa
949 u reste de la vie. C’est toute profane et banale, la vie que chacun doit vivre à sa place, et dans sa situation. Mais en
950 e à sa place, et dans sa situation. Mais en quoi le chrétien se distinguera-t-il donc de l’incroyant ? En rien d’autre qu
951 s en quoi le chrétien se distinguera-t-il donc de l’ incroyant ? En rien d’autre qu’en ceci : qu’il est appelé à rendre tém
952 st appelé à rendre témoignage « d’une part contre la forme du siècle présent ; de l’autre, pour la forme du monde à venir 
953 tre la forme du siècle présent ; de l’autre, pour la forme du monde à venir ». Il reste dans le monde et soumis à ses lois
954 , pour la forme du monde à venir ». Il reste dans le monde et soumis à ses lois, sachant pourtant qu’il n’appartient plus
955 à sa transformation. Et voici que nous rejoignons l’ idée centrale de Crainte et Tremblement. Qu’est-ce, en effet, que le «
956 Crainte et Tremblement. Qu’est-ce, en effet, que le « chevalier de la foi », sinon celui qui vit pleinement cette vie, to
957 ement. Qu’est-ce, en effet, que le « chevalier de la foi », sinon celui qui vit pleinement cette vie, toutefois « en vertu
958 vit pleinement cette vie, toutefois « en vertu de l’ absurde », c’est-à-dire en vertu de la transformation promise de ce mo
959 en vertu de l’absurde », c’est-à-dire en vertu de la transformation promise de ce monde. Apparemment il ne diffère des aut
960 il est orienté autrement — converti. Il vit dans les mêmes servitudes, mais il s’attend à Dieu, non à lui-même ni au monde
961 . Ainsi, chez Barth et Kierkegaard, nous trouvons le même réalisme fondé dans le même paradoxe. La même façon de considére
962 egaard, nous trouvons le même réalisme fondé dans le même paradoxe. La même façon de considérer l’homme à la fois tel qu’i
963 ons le même réalisme fondé dans le même paradoxe. La même façon de considérer l’homme à la fois tel qu’il est devant Dieu,
964 ans le même paradoxe. La même façon de considérer l’ homme à la fois tel qu’il est devant Dieu, hic et nunc, et tel qu’il e
965 c et nunc, et tel qu’il est revendiqué par Dieu à la limite de ses possibilités, là où paraît la grâce, in extremis. Car c
966 ieu à la limite de ses possibilités, là où paraît la grâce, in extremis. Car c’est à chaque instant de la vie de la foi qu
967 grâce, in extremis. Car c’est à chaque instant de la vie de la foi que se posent les questions dernières. Mais cette visi
968 extremis. Car c’est à chaque instant de la vie de la foi que se posent les questions dernières. Mais cette vision de l’ho
969 chaque instant de la vie de la foi que se posent les questions dernières. Mais cette vision de l’homme sans cesse mis en
970 nt les questions dernières. Mais cette vision de l’ homme sans cesse mis en question par l’Autre, n’est-ce point encore la
971 is en question par l’Autre, n’est-ce point encore la vision de Dostoïevski ? Ses héros ne viennent-ils pas à nous comme de
972 urneysen dans son essai intitulé : Dostoïevski ou les confins de l’homme. Le grand succès qu’a remporté ce petit livre en A
973 on essai intitulé : Dostoïevski ou les confins de l’ homme. Le grand succès qu’a remporté ce petit livre en Allemagne mérit
974 intitulé : Dostoïevski ou les confins de l’homme. Le grand succès qu’a remporté ce petit livre en Allemagne mérite d’être
975 ’est que, plus nettement encore que Berdiaev dans L’ Esprit de Dostoïevski, le professeur de Bâle a su l’envisager dans une
976 encore que Berdiaev dans L’Esprit de Dostoïevski, le professeur de Bâle a su l’envisager dans une perspective chrétienne,
977 Esprit de Dostoïevski, le professeur de Bâle a su l’ envisager dans une perspective chrétienne, hors de laquelle cette œuvr
978 Ce que nous avons cherché dans Dostoïevski, c’est la réponse à cette question : qu’est-ce qu’un homme ? Et cette réponse,
979 qu’est-ce qu’un homme ? Et cette réponse, il nous l’ a donnée en nous découvrant que l’homme n’est lui-même qu’une seule et
980 éponse, il nous l’a donnée en nous découvrant que l’ homme n’est lui-même qu’une seule et grande question, la question de l
981 e n’est lui-même qu’une seule et grande question, la question de l’origine de sa vie, la question de Dieu. Tous les héros
982 e qu’une seule et grande question, la question de l’ origine de sa vie, la question de Dieu. Tous les héros de Dostoïevski 
983 nde question, la question de l’origine de sa vie, la question de Dieu. Tous les héros de Dostoïevski apparaissent malades,
984 de l’origine de sa vie, la question de Dieu. Tous les héros de Dostoïevski apparaissent malades, comme blessés d’une attein
985 atteinte profonde, portant comme une plaie béante le problème de leur existence, ce problème qu’ils ne peuvent résoudre ju
986 ritable guérison. Ces phrases résument fort bien la thèse que Thurneysen soutient avec une passion convaincante. De diver
987 nt avec une passion convaincante. De divers côtés l’ on m’a demandé de préciser, à propos d’une de mes récentes chroniques,
988 écentes chroniques, ce qu’il fallait entendre par le protestantisme de Dostoïevski. Je ne saurais mieux répondre qu’en ren
989 pondre qu’en renvoyant au livre de M. Thurneysen. La conception « dialectique » de l’homme illustrée par les personnages d
990 e M. Thurneysen. La conception « dialectique » de l’ homme illustrée par les personnages de Dostoïevski, commentée sur le p
991 nception « dialectique » de l’homme illustrée par les personnages de Dostoïevski, commentée sur le plan théologique par Kar
992 d’une poésie philosophique par Kierkegaard, c’est la conception même de la vie du chrétien selon Calvin, c’est surtout le
993 ique par Kierkegaard, c’est la conception même de la vie du chrétien selon Calvin, c’est surtout le simul peccator et just
994 de la vie du chrétien selon Calvin, c’est surtout le simul peccator et justus qui fonda la Réforme luthérienne. 11. Cra
995 est surtout le simul peccator et justus qui fonda la Réforme luthérienne. 11. Crainte et Tremblement, par Kierkegaard,
996 danois par P.-H. Tisseau (Éditions Montaigne). –  Le Culte raisonnable, par Karl Barth, traduit par P. Maury (Éditions « J
997 P. Maury (Éditions « Je sers »). – Dostoïevski ou les confins de l’homme, par Édouard Thurneysen, traduit par P. Maury (Édi
998 ons « Je sers »). – Dostoïevski ou les confins de l’ homme, par Édouard Thurneysen, traduit par P. Maury (Éditions « Je ser
999 [Compte rendu] Kierkegaard, Dostoïevski, Barth », Les Nouvelles littéraires, Paris, 23 février 1935, p. 5.
9 1935, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Trois traités de Jean Calvin (20 juillet 1935)
1000 5)l On nous montre un Calvin maigre et sec, et l’ on conclut incontinent à l’ascétisme puritain. On nous montre un Luthe
1001 lvin maigre et sec, et l’on conclut incontinent à l’ ascétisme puritain. On nous montre un Luther adipeux, et loin de reven
1002 fait de cette image un nouveau cliché polémique : la Réforme se voit assimilée au « fays ce que vouldras » des Renaissants
1003 ilée au « fays ce que vouldras » des Renaissants. Les protestants sont-ils trop maigres ou trop gras ? Grave question pour
1004 ? Grave question pour ceux qui jugent des vérités les plus profondes de la foi selon le poids de leurs représentants ! Or,
1005 ceux qui jugent des vérités les plus profondes de la foi selon le poids de leurs représentants ! Or, cette espèce est plus
1006 nt des vérités les plus profondes de la foi selon le poids de leurs représentants ! Or, cette espèce est plus nombreuse qu
1007 Calvin dans notre grand public, sinon qu’il avait les joues creuses, une barbiche pointue et un profil coupant ? N’est-ce p
1008 assez pour juger son système ? Ne sait-on pas que les gros hommes sont toujours les plus populaires ? Comment se dire calvi
1009 Ne sait-on pas que les gros hommes sont toujours les plus populaires ? Comment se dire calviniste ? L’exposition Calvin à
1010 es plus populaires ? Comment se dire calviniste ? L’ exposition Calvin à la Bibliothèque nationale, si elle a permis à beau
1011 omment se dire calviniste ? L’exposition Calvin à la Bibliothèque nationale, si elle a permis à beaucoup de réviser quelqu
1012 beaucoup de réviser quelque peu leurs notions sur l’ importance intellectuelle et littéraire du calvinisme, a donné lieu pa
1013 nsidérations très vaguement physiognomoniques sur le teint et la complexion de l’auteur de l’Institution. Ce qui ne fait g
1014 très vaguement physiognomoniques sur le teint et la complexion de l’auteur de l’Institution. Ce qui ne fait guère honneur
1015 hysiognomoniques sur le teint et la complexion de l’ auteur de l’Institution. Ce qui ne fait guère honneur à notre liberté
1016 ques sur le teint et la complexion de l’auteur de l’ Institution. Ce qui ne fait guère honneur à notre liberté d’esprit. Ma
1017 berté d’esprit. Mais je m’en voudrais de déplorer la décadence culturelle qui marque la plupart des écrits de ce temps, au
1018 ne renaissance du calvinisme laisse espérer, pour les années qui viennent, un essor tout nouveau de la pensée chrétienne. O
1019 les années qui viennent, un essor tout nouveau de la pensée chrétienne. On aurait tort d’assimiler cette renaissance à la
1020 e. On aurait tort d’assimiler cette renaissance à la belle floraison néo-thomiste. Il n’est pas inutile de marquer les rai
1021 son néo-thomiste. Il n’est pas inutile de marquer les raisons qui, du point de vue protestant, rendent ce parallèle irrecev
1022 vue protestant, rendent ce parallèle irrecevable. Les grands théologiens de la Réforme ne sont pas à nos yeux des chefs d’é
1023 parallèle irrecevable. Les grands théologiens de la Réforme ne sont pas à nos yeux des chefs d’école ; ni des docteurs do
1024 nos yeux des chefs d’école ; ni des docteurs dont la pensée fait loi, une fois sanctionnée par l’Église. Ils sont avant to
1025 dont la pensée fait loi, une fois sanctionnée par l’ Église. Ils sont avant tout des témoins. On ne saurait trop insister s
1026 ter sur cette distinction fondamentale pour toute la pensée réformée. Qu’est-ce qu’un témoin ? C’est un homme qui n’est pa
1027 st-ce qu’un témoin ? C’est un homme qui n’est pas l’ inventeur de son message, mais qui renvoie sans trêve au-delà de lui-m
1028 e, au-delà des formules humaines de ce message, à la réalité qui le juge et nous sauve. Faire retour à Calvin, ce n’est pa
1029 formules humaines de ce message, à la réalité qui le juge et nous sauve. Faire retour à Calvin, ce n’est pas faire retour
1030 ues ; mais c’est, au-delà de ces formules et dans l’ orientation où elles nous placent, remonter à cette origine permanente
1031 s placent, remonter à cette origine permanente de l’ Église qu’est la révélation évangélique. Le calvinisme ou le luthérism
1032 ter à cette origine permanente de l’Église qu’est la révélation évangélique. Le calvinisme ou le luthérisme, ce sont bien
1033 nte de l’Église qu’est la révélation évangélique. Le calvinisme ou le luthérisme, ce sont bien moins des normes de pensée
1034 u’est la révélation évangélique. Le calvinisme ou le luthérisme, ce sont bien moins des normes de pensée que des chemins v
1035 n moins des normes de pensée que des chemins vers l’ Évangile. L’Évangile seul, éclairé par l’Esprit, reste la norme de tou
1036 normes de pensée que des chemins vers l’Évangile. L’ Évangile seul, éclairé par l’Esprit, reste la norme de toute théologie
1037 ins vers l’Évangile. L’Évangile seul, éclairé par l’ Esprit, reste la norme de toute théologie, fût-elle la plus orthodoxe.
1038 ile. L’Évangile seul, éclairé par l’Esprit, reste la norme de toute théologie, fût-elle la plus orthodoxe. Barth, on le sa
1039 prit, reste la norme de toute théologie, fût-elle la plus orthodoxe. Barth, on le sait, ne se lasse pas de comparer le rôl
1040 théologie, fût-elle la plus orthodoxe. Barth, on le sait, ne se lasse pas de comparer le rôle de ces témoins théologiques
1041 e. Barth, on le sait, ne se lasse pas de comparer le rôle de ces témoins théologiques au Jean-Baptiste de la Crucifixion d
1042 ean-Baptiste de la Crucifixion de Grünewald, dont la main prodigieuse se détachant sur le ciel noir désigne le Sauveur en
1043 newald, dont la main prodigieuse se détachant sur le ciel noir désigne le Sauveur en croix : « Il faut qu’il croisse et qu
1044 prodigieuse se détachant sur le ciel noir désigne le Sauveur en croix : « Il faut qu’il croisse et que je diminue. » C’est
1045 u’il croisse et que je diminue. » C’est donc sous l’ angle de leur vocation particulière, et sous cet angle seul, qu’il nou
1046 loisible de parler de ces hommes sans tomber dans l’ extravagance. Calvin homme, Calvin écrivain, nous ne nous priverons pa
1047 e, Calvin écrivain, nous ne nous priverons pas de l’ estimer à nos mesures humaines et littéraires ; mais ce qui importe pl
1048 i importe plus que tout, c’est d’indiquer d’abord la « clé » qui donne leur exacte valeur à nos variations sur ce thème. E
1049 nos variations sur ce thème. Et cette clé, c’est la vocation que Jean Calvin reçut de réformer l’Église. Tout ceci est f
1050 est la vocation que Jean Calvin reçut de réformer l’ Église. Tout ceci est fort bien exposé par M. Albert-Marie Schmidt da
1051 hmidt dans son introduction aux Trois traités que l’ on vient de rééditer12. Le grand mérite de cette introduction, c’est q
1052 n aux Trois traités que l’on vient de rééditer12. Le grand mérite de cette introduction, c’est qu’elle nous ouvre, en une
1053 st qu’elle nous ouvre, en une quinzaine de pages, les principales perspectives de « l’univers » calvinien. Il faut bien avo
1054 zaine de pages, les principales perspectives de «  l’ univers » calvinien. Il faut bien avouer que les commentateurs nous av
1055 « l’univers » calvinien. Il faut bien avouer que les commentateurs nous avaient donné jusqu’ici une image assez étriquée d
1056 schauung à la fois biblique et classique, au sens le plus vigoureux de ce terme. En la replaçant dans l’atmosphère violent
1057 ssique, au sens le plus vigoureux de ce terme. En la replaçant dans l’atmosphère violente et trouble de la Renaissance, M.
1058 plus vigoureux de ce terme. En la replaçant dans l’ atmosphère violente et trouble de la Renaissance, M. Schmidt va lui re
1059 eplaçant dans l’atmosphère violente et trouble de la Renaissance, M. Schmidt va lui restituer ses trois dimensions primord
1060 Nous voyons alors Calvin faire face d’une part à l’ Église de Rome et c’est l’Épître à Sadolet ; d’autre part, aux premièr
1061 faire face d’une part à l’Église de Rome et c’est l’ Épître à Sadolet ; d’autre part, aux premières déviations de la doctri
1062 dolet ; d’autre part, aux premières déviations de la doctrine sacramentaire à l’intérieur de la Réforme et c’est le Traité
1063 ons de la doctrine sacramentaire à l’intérieur de la Réforme et c’est le Traité de la cène ; enfin, aux diverses mystiques
1064 acramentaire à l’intérieur de la Réforme et c’est le Traité de la cène ; enfin, aux diverses mystiques de l’humanisme anti
1065 à l’intérieur de la Réforme et c’est le Traité de la cène ; enfin, aux diverses mystiques de l’humanisme antichrétien et c
1066 ité de la cène ; enfin, aux diverses mystiques de l’ humanisme antichrétien et c’est le Traité des scandales. Ce troisième
1067 es mystiques de l’humanisme antichrétien et c’est le Traité des scandales. Ce troisième traité n’avait jamais été réimprim
1068 e et de raison déchaînée », il sera pour beaucoup l’ occasion d’une véritable découverte de Calvin. Il nous donne un puissa
1069 vin. Il nous donne un puissant raccourci de toute la polémique de la Réforme contre les libertins et les anabaptistes, con
1070 ne un puissant raccourci de toute la polémique de la Réforme contre les libertins et les anabaptistes, contre les occultis
1071 courci de toute la polémique de la Réforme contre les libertins et les anabaptistes, contre les occultistes de l’école d’Ag
1072 a polémique de la Réforme contre les libertins et les anabaptistes, contre les occultistes de l’école d’Agrippa, contre les
1073 contre les libertins et les anabaptistes, contre les occultistes de l’école d’Agrippa, contre les Rabelais et Des Périers
1074 ns et les anabaptistes, contre les occultistes de l’ école d’Agrippa, contre les Rabelais et Des Périers qui abandonnent la
1075 ntre les occultistes de l’école d’Agrippa, contre les Rabelais et Des Périers qui abandonnent la cause pour un idéal humani
1076 ontre les Rabelais et Des Périers qui abandonnent la cause pour un idéal humaniste. Or, tous ceux-là se scandalisent à gra
1077 ine qu’ils portent aux scandales que pour nuire à l’ Évangile et le diffamer comment que ce soit ». Il y a ceux pour lesque
1078 tent aux scandales que pour nuire à l’Évangile et le diffamer comment que ce soit ». Il y a ceux pour lesquels les dogmes
1079 comment que ce soit ». Il y a ceux pour lesquels les dogmes sont autant d’occasions de chopper : Quant à ce que la Prédes
1080 t autant d’occasions de chopper : Quant à ce que la Prédestination est comme une mer de scandales, d’où vient cela sinon
1081 me une mer de scandales, d’où vient cela sinon de la folle curiosité des hommes ou de leur outrecuidance débordée ? Calvi
1082 dance débordée ? Calvin n’est guère partisan, on le voit, de ce fameux libre examen dont on persiste à lui attribuer l’in
1083 eux libre examen dont on persiste à lui attribuer l’ invention, par une erreur assez inexplicable. Mais les pires adversair
1084 nvention, par une erreur assez inexplicable. Mais les pires adversaires de l’Église ne sont pas toujours au-dehors. Voici c
1085 assez inexplicable. Mais les pires adversaires de l’ Église ne sont pas toujours au-dehors. Voici ceux qui préfèrent la pai
1086 pas toujours au-dehors. Voici ceux qui préfèrent la paix selon le monde à la vérité combattante : Je m’adresse à ceux qu
1087 au-dehors. Voici ceux qui préfèrent la paix selon le monde à la vérité combattante : Je m’adresse à ceux qui abusent du n
1088 Voici ceux qui préfèrent la paix selon le monde à la vérité combattante : Je m’adresse à ceux qui abusent du nom de la ch
1089 ante : Je m’adresse à ceux qui abusent du nom de la chrétienté pour nourrir une paix fardée ! Voici ceux qui voudraient
1090 aix fardée ! Voici ceux qui voudraient confondre la véritable grandeur de l’Église avec « une façon de royaume mondain ».
1091 qui voudraient confondre la véritable grandeur de l’ Église avec « une façon de royaume mondain ». À ceux-là, Calvin rappel
1092 on chrétienne est celle du conflit dialectique : L’ Église est ordonnée à cette condition de batailler continuellement sou
1093 cette condition de batailler continuellement sous la croix, tant qu’elle aura à cheminer en ce monde. Voici enfin les « l
1094 qu’elle aura à cheminer en ce monde. Voici enfin les « libertins », ceux que nous appelons libéraux qui « gazouillent » à
1095 se ruent contre Dieu d’une impétuosité enragée à la façon des frénétiques, et tombent en de grands abîmes ou se rompent l
1096 ues, et tombent en de grands abîmes ou se rompent le col en s’aheurtant ». Cet étonnant traité, tour à tour éloquent à l’a
1097 nt ». Cet étonnant traité, tour à tour éloquent à l’ antique ou rabelaisien dans la satire, pourrait en somme s’intituler :
1098 r à tour éloquent à l’antique ou rabelaisien dans la satire, pourrait en somme s’intituler : Réforme contre Renaissance. M
1099 tituler : Réforme contre Renaissance. Mais toutes les richesses de style que produisit ce siècle bouillonnant ont passé dan
1100 e produisit ce siècle bouillonnant ont passé dans l’ attaque de Calvin : il a su prendre à l’adversaire ses meilleures arme
1101 assé dans l’attaque de Calvin : il a su prendre à l’ adversaire ses meilleures armes. Au sujet de ce style, dont l’exemple
1102 ses meilleures armes. Au sujet de ce style, dont l’ exemple n’est pas l’un des plus négligeables que comportent les Trois
1103 est pas l’un des plus négligeables que comportent les Trois traités, M. Schmidt nous propose quelques définitions fort bien
1104 venues : Qui veut comprendre, dans son essence, le génie littéraire de Calvin, ne doit jamais omettre que celui-ci se co
1105 onsidérait comme ministre du Verbe divin. Prêcher l’ Évangile, c’est à son sens engager le dialogue avec toutes les catégor
1106 vin. Prêcher l’Évangile, c’est à son sens engager le dialogue avec toutes les catégories d’hommes, avec toutes les espèces
1107 c’est à son sens engager le dialogue avec toutes les catégories d’hommes, avec toutes les espèces de créatures. Dialoguant
1108 avec toutes les catégories d’hommes, avec toutes les espèces de créatures. Dialoguant toujours avec les plus divers interl
1109 es espèces de créatures. Dialoguant toujours avec les plus divers interlocuteurs, il ne se range jamais, comme un littérate
1110 une esthétique préconçue, mais il adopte toujours la forme de discours la plus propre, sinon à charmer du moins à toucher
1111 çue, mais il adopte toujours la forme de discours la plus propre, sinon à charmer du moins à toucher son antagoniste ; l’a
1112 on à charmer du moins à toucher son antagoniste ; l’ art de Calvin est fait de soumission absolue à l’objet proposé : tout
1113 l’art de Calvin est fait de soumission absolue à l’ objet proposé : tout en portant la marque d’une des plus puissantes pe
1114 ssion absolue à l’objet proposé : tout en portant la marque d’une des plus puissantes personnalités qui fut jamais, il se
1115 ecrée toujours lui-même. Soumission du langage à l’ objet spirituellement dominé : telle serait la formule du classicisme
1116 e à l’objet spirituellement dominé : telle serait la formule du classicisme de Calvin. D’une vivacité presque baroque dans
1117 me de Calvin. D’une vivacité presque baroque dans les Scandales, orné et pompeux dans l’Épître, sobre et grave dans le Trai
1118 baroque dans les Scandales, orné et pompeux dans l’ Épître, sobre et grave dans le Traité de la Cène, ce style garde parto
1119 rné et pompeux dans l’Épître, sobre et grave dans le Traité de la Cène, ce style garde partout les vertus qui, sans doute,
1120 x dans l’Épître, sobre et grave dans le Traité de la Cène, ce style garde partout les vertus qui, sans doute, font le plus
1121 dans le Traité de la Cène, ce style garde partout les vertus qui, sans doute, font le plus grand défaut à notre siècle : un
1122 le garde partout les vertus qui, sans doute, font le plus grand défaut à notre siècle : une fermeté délibérée qui ne s’arr
1123 t à des trouvailles, une sobriété vigoureuse dans l’ exposé des sic et non, enfin ce ton naturel de grandeur qui s’accommod
1124 tour à tour alangui ou excité nous a fait perdre le secret. Notre langage moderne relève à peine de deux maladies graves 
1125 moderne relève à peine de deux maladies graves : la contention abstraite du xviie et la dissolution voluptueuse du xixe
1126 ies graves : la contention abstraite du xviie et la dissolution voluptueuse du xixe . Il m’apparaît que le style d’un Cal
1127 ssolution voluptueuse du xixe . Il m’apparaît que le style d’un Calvin peut nous être un puissant roboratif. Et ceci pour
1128 fondateur d’Église ; donc doublement conscient de la responsabilité de ses paroles. Or, rien ne confère au langage une aus
1129 ission à remplir et d’un dialogue à soutenir avec l’ époque. Notre culture périt d’être par trop « irresponsable ». Peut-êt
1130 esponsable ». Peut-être nous faut-il revenir vers les chefs pour apprendre à nouveau ce que parler veut dire. Ensuite, n’ou
1131 la plupart des écrits français de Calvin — c’est le cas de ces Trois traités — furent traduits par lui-même du latin. D’o
1132 tés — furent traduits par lui-même du latin. D’où la jeunesse de cette langue et sa sobriété monumentale. Là encore, la le
1133 tte langue et sa sobriété monumentale. Là encore, la leçon de Calvin serait celle d’un retour aux origines. Voilà la seule
1134 lvin serait celle d’un retour aux origines. Voilà la seule révolution qui compte pour l’esprit. Elle doit commander toutes
1135 igines. Voilà la seule révolution qui compte pour l’ esprit. Elle doit commander toutes les autres. 12. Trois traités de
1136 compte pour l’esprit. Elle doit commander toutes les autres. 12. Trois traités de Jean Calvin. Préface de Jacques Panni
1137 « [Compte rendu] Trois traités de Jean Calvin », Les Nouvelles littéraires, Paris, 20 juillet 1935, p. 5.
10 1935, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Les mystiques allemands du xiiie au xixe siècle, par Jean Chuzeville (2 novembre 1935)
1138 Les mystiques allemands du xiiie au xixe siècle, par Jean Chuzeville (2
1139 ècle, par Jean Chuzeville (2 novembre 1935)m n L’ esprit occidental n’a jamais eu d’unité harmonieuse : il est toujours
1140 trice. Cette vue des plus courantes omet pourtant le fait chrétien fondamental : la foi. La foi est acte humain d’obéissan
1141 ntes omet pourtant le fait chrétien fondamental : la foi. La foi est acte humain d’obéissance en même temps qu’elle est do
1142 t pourtant le fait chrétien fondamental : la foi. La foi est acte humain d’obéissance en même temps qu’elle est don de Die
1143 du monde, comme à toute action en révolte contre l’ ordre de la Parole. En confondant la foi et la mystique, comme le fait
1144 comme à toute action en révolte contre l’ordre de la Parole. En confondant la foi et la mystique, comme le fait par malheu
1145 évolte contre l’ordre de la Parole. En confondant la foi et la mystique, comme le fait par malheur M. Chuzeville, on contr
1146 tre l’ordre de la Parole. En confondant la foi et la mystique, comme le fait par malheur M. Chuzeville, on contribue à ren
1147 arole. En confondant la foi et la mystique, comme le fait par malheur M. Chuzeville, on contribue à renforcer un préjugé d
1148 zeville, on contribue à renforcer un préjugé dont le bénéfice ne saurait être pour la foi. La mystique, nous dit-il, en ef
1149 un préjugé dont le bénéfice ne saurait être pour la foi. La mystique, nous dit-il, en effet, c’est « la recherche des moy
1150 ugé dont le bénéfice ne saurait être pour la foi. La mystique, nous dit-il, en effet, c’est « la recherche des moyens par
1151 foi. La mystique, nous dit-il, en effet, c’est «  la recherche des moyens par lesquels l’âme arrive à transgresser ses lim
1152 fet, c’est « la recherche des moyens par lesquels l’ âme arrive à transgresser ses limites charnelles et temporelles ». For
1153 porelles ». Fort bien, répondrait un marxiste, si le christianisme est cela, nous lui laisserons ses rêveries et nous nous
1154 aisserons ses rêveries et nous nous chargerons de l’ homme « dans ses limites charnelles et temporelles ». C’est aussi ce q
1155 arnelles et temporelles ». C’est aussi ce que dit l’ Évangile, où il n’est pas question de mysticisme. Ceci marqué, qui est
1156 el et poétique plein de dangers et de merveilles. Le choix des textes me paraît des plus heureux, la traduction ferme et c
1157 . Le choix des textes me paraît des plus heureux, la traduction ferme et coulante. La plupart des mystiques que M. Chuzevi
1158 Suso, Tauler, Franck et Weigel, et surtout Boehme le gnostique. Pour Paracelse, on s’étonnera sans doute de le voir figure
1159 ique. Pour Paracelse, on s’étonnera sans doute de le voir figurer dans un choix de « mystiques », alors qu’il est le premi
1160 tiques », alors qu’il est le premier défenseur de l’ expérience. Mais la beauté des textes cités fait pardonner bien volont
1161 il est le premier défenseur de l’expérience. Mais la beauté des textes cités fait pardonner bien volontiers cette erreur d
1162 ntiers cette erreur de classification. En vérité, les mystiques allemands nous apparaissent surtout intéressants dans la me
1163 mands nous apparaissent surtout intéressants dans la mesure où ils annoncent le lyrisme et la philosophie d’une des plus h
1164 tout intéressants dans la mesure où ils annoncent le lyrisme et la philosophie d’une des plus hautes périodes de l’esprit
1165 nts dans la mesure où ils annoncent le lyrisme et la philosophie d’une des plus hautes périodes de l’esprit humain. J’ente
1166 la philosophie d’une des plus hautes périodes de l’ esprit humain. J’entends le premier romantisme allemand, encore si mal
1167 emps que nous rendions hommage à ce ver sacrum de l’ esprit germanique. Il est grand temps que nous relevions ces titres de
1168 lomnies usées sur un Luther qu’on n’a jamais lu ; l’ introduction de cette anthologie contient, à cet égard, de navrantes d
1169 emont Denis de, « [Compte rendu] Jean Chuzeville, Les Mystiques allemands du XIIIe au XIXe siècle  », Les Nouvelles littéra
1170 s Mystiques allemands du XIIIe au XIXe siècle  », Les Nouvelles littéraires, Paris, 2 novembre 1935, p. 5. n. Une note de
1171 novembre 1935, p. 5. n. Une note de lecture sur le même livre a également paru dans la Nouvelle Revue française d’octobr
1172 e lecture sur le même livre a également paru dans la Nouvelle Revue française d’octobre 1935.
11 1936, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Le Problème du bien (12 septembre 1936)
1173 Le Problème du bien (12 septembre 1936)o Couronnant une carrière d’au
1174 longue — quarante-cinq volumes, sauf erreur — M. le pasteur Wilfred Monod nous a donné une œuvre aussi exceptionnelle par
1175 par son style. M. Wilfred Monod est actuellement le représentant le plus marquant d’une famille dont les destins se confo
1176 M. Wilfred Monod est actuellement le représentant le plus marquant d’une famille dont les destins se confondirent durant t
1177 représentant le plus marquant d’une famille dont les destins se confondirent durant tout le siècle dernier avec ceux du pr
1178 ille dont les destins se confondirent durant tout le siècle dernier avec ceux du protestantisme français. Maurras, lorsqu’
1179 uva rien de mieux que d’écrire un pamphlet contre la race des Monod, les traditions, l’esprit et l’idéologie de cette « tr
1180 ue d’écrire un pamphlet contre la race des Monod, les traditions, l’esprit et l’idéologie de cette « tribu ». Il semble que
1181 amphlet contre la race des Monod, les traditions, l’ esprit et l’idéologie de cette « tribu ». Il semble que l’auteur du Pr
1182 re la race des Monod, les traditions, l’esprit et l’ idéologie de cette « tribu ». Il semble que l’auteur du Problème du Bi
1183 et l’idéologie de cette « tribu ». Il semble que l’ auteur du Problème du Bien 13 se soit fait un glorieux devoir, et peut
1184 evoir, et peut-être un malin plaisir, de soutenir les causes les plus vilipendées par ce furieux censeur païen. Qu’il suffi
1185 eut-être un malin plaisir, de soutenir les causes les plus vilipendées par ce furieux censeur païen. Qu’il suffise de rappe
1186 ieux censeur païen. Qu’il suffise de rappeler que le nom de Wilfred Monod évoque immédiatement, dans l’esprit de tout prot
1187 e nom de Wilfred Monod évoque immédiatement, dans l’ esprit de tout protestant, deux grands mouvements de pensée et d’actio
1188 ion dont il fut l’un des principaux initiateurs : le christianisme social, et l’union des églises non romaines, grande esp
1189 ncipaux initiateurs : le christianisme social, et l’ union des églises non romaines, grande espérance œcuménique et interna
1190 e espérance œcuménique et internationale née dans le « désarroi » de l’après-guerre, et qui trouva lors du fameux congrès
1191 que et internationale née dans le « désarroi » de l’ après-guerre, et qui trouva lors du fameux congrès de Stockholm sa pre
1192 tre auteur, il faut en ajouter une troisième, qui les commande directement : celle d’un certain humanisme chrétien. L’ouvra
1193 ectement : celle d’un certain humanisme chrétien. L’ ouvrage littéralement énorme (hors de la norme) qui vient de paraître
1194 chrétien. L’ouvrage littéralement énorme (hors de la norme) qui vient de paraître sous un titre dont l’apparence paradoxal
1195 a norme) qui vient de paraître sous un titre dont l’ apparence paradoxale est typique de l’esprit de M. Monod, figure sans
1196 titre dont l’apparence paradoxale est typique de l’ esprit de M. Monod, figure sans aucun doute le document le plus comple
1197 de l’esprit de M. Monod, figure sans aucun doute le document le plus complet que le modernisme protestant aura livré sur
1198 de M. Monod, figure sans aucun doute le document le plus complet que le modernisme protestant aura livré sur son époque.
1199 sans aucun doute le document le plus complet que le modernisme protestant aura livré sur son époque. Mais il marque en mê
1200 temps son dépassement. Ces 3000 pages contiennent la somme de la problématique particulière à une école — est-ce trop dire
1201 passement. Ces 3000 pages contiennent la somme de la problématique particulière à une école — est-ce trop dire — qui va de
1202 ecrétan, Frommel et même Renouvier, et à laquelle les récents livres de Bergson viennent apporter un ultime renouveau. À ce
1203 ennent apporter un ultime renouveau. À cet égard, le Problème du Bien mériterait un examen critique dont le cadre de ma ch
1204 oblème du Bien mériterait un examen critique dont le cadre de ma chronique ne saurait supporter même l’esquisse. Mais le s
1205 e cadre de ma chronique ne saurait supporter même l’ esquisse. Mais le sous-titre de cette œuvre nous engage à l’aborder tr
1206 onique ne saurait supporter même l’esquisse. Mais le sous-titre de cette œuvre nous engage à l’aborder très librement : « 
1207 . Mais le sous-titre de cette œuvre nous engage à l’ aborder très librement : « essai de théodicée et journal d’un pasteur 
1208 ns pas affaire ici à une construction doctrinale. L’ auteur prend soin de nous en avertir à maintes reprises : L’intérêt d
1209 end soin de nous en avertir à maintes reprises : L’ intérêt du présent ouvrage ne réside pas seulement dans le récit d’une
1210 t du présent ouvrage ne réside pas seulement dans le récit d’une exploration hasardée en des régions peu connues, mais aus
1211 ardée en des régions peu connues, mais aussi dans la constante présentation d’un double cheminement : la recherche du pens
1212 constante présentation d’un double cheminement : la recherche du penseur et le ministère du pasteur. Par ailleurs, il ne
1213 n double cheminement : la recherche du penseur et le ministère du pasteur. Par ailleurs, il ne s’adresse pas aux spéciali
1214 leurs, il ne s’adresse pas aux spécialistes, ni à l’ Église, comme ce serait le devoir d’un traité dogmatique. Je m’adress
1215 aux spécialistes, ni à l’Église, comme ce serait le devoir d’un traité dogmatique. Je m’adresse aux chrétiens, mais plus
1216 plus encore aux autres. Mon cœur est tourné vers les agnostiques, les sceptiques, les incrédules, les athées, les désespér
1217 autres. Mon cœur est tourné vers les agnostiques, les sceptiques, les incrédules, les athées, les désespérés (termes qui ne
1218 est tourné vers les agnostiques, les sceptiques, les incrédules, les athées, les désespérés (termes qui ne sont pas synony
1219 les agnostiques, les sceptiques, les incrédules, les athées, les désespérés (termes qui ne sont pas synonymes) et je leur
1220 ques, les sceptiques, les incrédules, les athées, les désespérés (termes qui ne sont pas synonymes) et je leur propose de m
1221 sont pas synonymes) et je leur propose de méditer le problème du Bien. Si des croyants peuvent douter de leur croyance à c
1222 e du Bien. D’une part, en effet, dit M. Monod, «  l’ athéisme n’explique pas la Beauté, la Joie, l’Amour, la Sainteté. Il s
1223 effet, dit M. Monod, « l’athéisme n’explique pas la Beauté, la Joie, l’Amour, la Sainteté. Il se brise contre le problème
1224 M. Monod, « l’athéisme n’explique pas la Beauté, la Joie, l’Amour, la Sainteté. Il se brise contre le problème du Bien. D
1225 , « l’athéisme n’explique pas la Beauté, la Joie, l’ Amour, la Sainteté. Il se brise contre le problème du Bien. D’autre pa
1226 éisme n’explique pas la Beauté, la Joie, l’Amour, la Sainteté. Il se brise contre le problème du Bien. D’autre part, l’ort
1227 la Joie, l’Amour, la Sainteté. Il se brise contre le problème du Bien. D’autre part, l’orthodoxie chrétienne, avec son Die
1228 e brise contre le problème du Bien. D’autre part, l’ orthodoxie chrétienne, avec son Dieu créateur omnipotent, omniprésent,
1229 nt, omniprésent, mais silencieux, se brise contre le problème du Mal ». Notons que cette position du problème, ce double f
1230 ette position du problème, ce double front contre l’ athéisme et contre le dogmatisme, définit d’emblée la situation typiqu
1231 lème, ce double front contre l’athéisme et contre le dogmatisme, définit d’emblée la situation typique du penseur « libéra
1232 théisme et contre le dogmatisme, définit d’emblée la situation typique du penseur « libéral ». (Calvin disait : « libertin
1233 : « libertin spirituel ».) Il s’agit de confondre les philosophes incroyants au moyen de leurs propres arguments, et les th
1234 ncroyants au moyen de leurs propres arguments, et les théologiens trop rigides par le recours à une piété plus libre. On sa
1235 es arguments, et les théologiens trop rigides par le recours à une piété plus libre. On sait que pour l’école de Barth, to
1236 recours à une piété plus libre. On sait que pour l’ école de Barth, tout au contraire, le rôle de la théologie sera pureme
1237 ait que pour l’école de Barth, tout au contraire, le rôle de la théologie sera purement et simplement de critiquer, au sei
1238 r l’école de Barth, tout au contraire, le rôle de la théologie sera purement et simplement de critiquer, au sein de l’Égli
1239 a purement et simplement de critiquer, au sein de l’ Église, la prédication de l’Église, pour la débarrasser des intrusions
1240 et simplement de critiquer, au sein de l’Église, la prédication de l’Église, pour la débarrasser des intrusions de philos
1241 critiquer, au sein de l’Église, la prédication de l’ Église, pour la débarrasser des intrusions de philosophies passagères
1242 ein de l’Église, la prédication de l’Église, pour la débarrasser des intrusions de philosophies passagères quelles qu’elle
1243 s qu’elles soient. Pour Barth, c’est Dieu qui met l’ homme en question. M. Monod part au contraire d’une mise en question d
1244 contraire d’une mise en question de « Dieu » par la conscience morale de l’homme. L’opposition apparaît absolue. Mais l’u
1245 question de « Dieu » par la conscience morale de l’ homme. L’opposition apparaît absolue. Mais l’une des grandes surprises
1246 de « Dieu » par la conscience morale de l’homme. L’ opposition apparaît absolue. Mais l’une des grandes surprises que nous
1247 Mais l’une des grandes surprises que nous réserve le Problème du Bien, c’est qu’au moyen d’une méthode « libérale » et par
1248 artant d’un point de vue « libéral » — encore que l’ auteur s’en défende, l’adjectif ayant pris peu à peu une signification
1249 e « libéral » — encore que l’auteur s’en défende, l’ adjectif ayant pris peu à peu une signification ecclésiastique plus pr
1250 lle pas comme un signe, une promesse émouvante de l’ unité future des chrétiens, par-delà les funestes divisions de l’ortho
1251 ouvante de l’unité future des chrétiens, par-delà les funestes divisions de l’orthodoxie et du libéralisme ? Mais revenons
1252 des chrétiens, par-delà les funestes divisions de l’ orthodoxie et du libéralisme ? Mais revenons à la situation de départ
1253 l’orthodoxie et du libéralisme ? Mais revenons à la situation de départ de notre auteur. Contre l’un et l’autre adversair
1254 notre auteur. Contre l’un et l’autre adversaire — l’ athée et l’orthodoxe desséché — M. Monod recourt au fait de son expéri
1255 r. Contre l’un et l’autre adversaire — l’athée et l’ orthodoxe desséché — M. Monod recourt au fait de son expérience intéri
1256 diffère de tout processus psychique, il précise : l’ expérience religieuse ne devient proprement chrétienne qu’en tant qu’e
1257 aît que son objet, c’est Dieu le Père, révélé par le Fils, et non ce Dieu omnipotent du dogme. En effet, Dieu n’est pas da
1258 mnipotent du dogme. En effet, Dieu n’est pas dans la Nature, il n’en est ni le maître ni l’auteur : voilà la thèse capital
1259 et, Dieu n’est pas dans la Nature, il n’en est ni le maître ni l’auteur : voilà la thèse capitale du livre. Ce que nous mo
1260 t pas dans la Nature, il n’en est ni le maître ni l’ auteur : voilà la thèse capitale du livre. Ce que nous montre la Natur
1261 ure, il n’en est ni le maître ni l’auteur : voilà la thèse capitale du livre. Ce que nous montre la Nature, c’est bien plu
1262 là la thèse capitale du livre. Ce que nous montre la Nature, c’est bien plutôt l’action d’un « démiurge » sauvage, omnivor
1263 . Ce que nous montre la Nature, c’est bien plutôt l’ action d’un « démiurge » sauvage, omnivore, amateur de catastrophes et
1264 , omnivore, amateur de catastrophes et de crimes. Les animaux se mangent entre eux, les hommes périssent par accident, la t
1265 s et de crimes. Les animaux se mangent entre eux, les hommes périssent par accident, la terre tremble : est-ce là l’œuvre d
1266 ent entre eux, les hommes périssent par accident, la terre tremble : est-ce là l’œuvre du Dieu d’amour dont parle l’Évangi
1267 issent par accident, la terre tremble : est-ce là l’ œuvre du Dieu d’amour dont parle l’Évangile ? « La fourmi périssant de
1268 le : est-ce là l’œuvre du Dieu d’amour dont parle l’ Évangile ? « La fourmi périssant de mort violente sous le talon d’un c
1269 l’œuvre du Dieu d’amour dont parle l’Évangile ? «  La fourmi périssant de mort violente sous le talon d’un chrétien qui pri
1270 ile ? « La fourmi périssant de mort violente sous le talon d’un chrétien qui prie en marchant », — voilà qui pose à M. Mon
1271 i prie en marchant », — voilà qui pose à M. Monod le problème central de ce livre. Faudra-t-il donc revenir à Marcion, hér
1272 c revenir à Marcion, hérétique condamné par toute la tradition chrétienne pour avoir affirmé que le monde est l’œuvre d’un
1273 te la tradition chrétienne pour avoir affirmé que le monde est l’œuvre d’un esprit mauvais, d’un démiourgos que le Christ,
1274 on chrétienne pour avoir affirmé que le monde est l’ œuvre d’un esprit mauvais, d’un démiourgos que le Christ, fils de Dieu
1275 l’œuvre d’un esprit mauvais, d’un démiourgos que le Christ, fils de Dieu, est venu pour combattre et pour vaincre ? M. Mo
1276 st venu pour combattre et pour vaincre ? M. Monod le pense. Jésus, dit-il, « n’est pas venu nous enseigner que l’univers a
1277 ésus, dit-il, « n’est pas venu nous enseigner que l’ univers a un créateur. Il a, au contraire, déboulonné l’idole effroyab
1278 ers a un créateur. Il a, au contraire, déboulonné l’ idole effroyable du Tout-Puissant ; il a enseigné que le vrai Dieu s’i
1279 e effroyable du Tout-Puissant ; il a enseigné que le vrai Dieu s’incarnait dans un crucifié vaincu ». Par une espèce de pa
1280 espèce de paradoxe — personne n’a chéri davantage le paradoxe depuis Kierkegaard — M. Monod déduit de cette « hypothèse de
1281 gme trinitaire : Dieu est un X qui ne se révèle à l’ homme comme le Père que par son incarnation dans le Fils, reconnue grâ
1282  : Dieu est un X qui ne se révèle à l’homme comme le Père que par son incarnation dans le Fils, reconnue grâce au Saint-Es
1283 ’homme comme le Père que par son incarnation dans le Fils, reconnue grâce au Saint-Esprit. Laissons l’aspect théologique d
1284 le Fils, reconnue grâce au Saint-Esprit. Laissons l’ aspect théologique de cet ouvrage : son style de pensée, sa démarche i
1285 e insolite et dramatique ont bien de quoi retenir le lecteur même incroyant ou ignorant de ces débats. Wilfred Monod nous
1286 té humanitaire. Et quelle surabondance d’images ! La TSF, les rayons X, l’automobile et la structure des atomes lui fourni
1287 itaire. Et quelle surabondance d’images ! La TSF, les rayons X, l’automobile et la structure des atomes lui fournissent un
1288 lle surabondance d’images ! La TSF, les rayons X, l’ automobile et la structure des atomes lui fournissent un matériel méta
1289 d’images ! La TSF, les rayons X, l’automobile et la structure des atomes lui fournissent un matériel métaphorique inépuis
1290 à coup sûr, il s’agit là de littérature, bien que l’ auteur s’en défende dans sa préface. Cela nous vaut des pages fort cur
1291 face. Cela nous vaut des pages fort curieuses sur la Nature, des élévations romantiques, telle description poignante de ré
1292 poignante de réalisme, d’un ensevelissement dans la fosse commune. Le mérite capital de cette vision totalitaire du réel,
1293 isme, d’un ensevelissement dans la fosse commune. Le mérite capital de cette vision totalitaire du réel, c’est qu’elle rep
1294 vision totalitaire du réel, c’est qu’elle replace l’ homme dans la perspective cosmique dont un maigre intellectualisme dog
1295 taire du réel, c’est qu’elle replace l’homme dans la perspective cosmique dont un maigre intellectualisme dogmatique nous
1296 e intellectualisme dogmatique nous faisait perdre l’ émouvant souci. À cet égard, on peut bien dire que M. Monod revient de
1297 , on peut bien dire que M. Monod revient de loin. Les Soliloques dans la nuit, fragments d’un journal de jeunesse qui rempl
1298 que M. Monod revient de loin. Les Soliloques dans la nuit, fragments d’un journal de jeunesse qui remplissent 200 pages du
1299 se intérieure et abstraite, où je crains bien que la jeunesse d’aujourd’hui ne voie plus qu’une fièvre morbide. Mais la fo
1300 ourd’hui ne voie plus qu’une fièvre morbide. Mais la forme excessivement libre de cet ouvrage le sauve de l’ennui inhérent
1301 Mais la forme excessivement libre de cet ouvrage le sauve de l’ennui inhérent aux gros livres. C’est une somme, ai-je dit
1302 me excessivement libre de cet ouvrage le sauve de l’ ennui inhérent aux gros livres. C’est une somme, ai-je dit, une étrang
1303 vent, on y apprend beaucoup. On craint aussi qu’à la faveur de tant de richesses disparates, le sérieux proprement théolog
1304 i qu’à la faveur de tant de richesses disparates, le sérieux proprement théologique du raisonnement ne soit parfois diminu
1305 te que certains fidèles ne soient gênés, comme je le suis, par l’affirmation répétée que l’auteur « écrit à genoux ». Au s
1306 ns fidèles ne soient gênés, comme je le suis, par l’ affirmation répétée que l’auteur « écrit à genoux ». Au sous-titre du
1307 , comme je le suis, par l’affirmation répétée que l’ auteur « écrit à genoux ». Au sous-titre du Problème du Bien, j’appose
1308 t se libère d’un intellectualisme intempérant par la considération hardie du cosmos. Quant à sa thèse théologique, je me c
1309 èse théologique, je me contente de suggérer qu’on l’ admettrait plus aisément si l’auteur ne cherchait à l’imposer par le s
1310 e de suggérer qu’on l’admettrait plus aisément si l’ auteur ne cherchait à l’imposer par le spectacle de ses propres luttes
1311 mettrait plus aisément si l’auteur ne cherchait à l’ imposer par le spectacle de ses propres luttes — où nous ne reconnaiss
1312 aisément si l’auteur ne cherchait à l’imposer par le spectacle de ses propres luttes — où nous ne reconnaissons pas forcém
1313 t les nôtres — et s’il ne tenait, par ailleurs, à l’ étayer par une philosophie qui ne saurait plus être la nôtre : j’enten
1314 ayer par une philosophie qui ne saurait plus être la nôtre : j’entends le criticisme à peine critiqué. Le contenu de la Ré
1315 hie qui ne saurait plus être la nôtre : j’entends le criticisme à peine critiqué. Le contenu de la Révélation, malgré tout
1316 nôtre : j’entends le criticisme à peine critiqué. Le contenu de la Révélation, malgré toutes les philosophies, doit rester
1317 nds le criticisme à peine critiqué. Le contenu de la Révélation, malgré toutes les philosophies, doit rester pour tous les
1318 tiqué. Le contenu de la Révélation, malgré toutes les philosophies, doit rester pour tous les croyants : « Emmanuel ! » qui
1319 ré toutes les philosophies, doit rester pour tous les croyants : « Emmanuel ! » qui signifie : Dieu avec nous ! Est-il vrai
1320 ermis au chrétien, de fonder cette Révélation sur le système d’un autre Emmanuel — Kant en l’espèce ? M. Monod ne saurait
1321 tion sur le système d’un autre Emmanuel — Kant en l’ espèce ? M. Monod ne saurait m’en vouloir de lui retourner une boutade
1322 porte évidemment sa marquep. 13. Wilfred Monod, Le Problème du Bien : essai de théodicée et journal d’un pasteur, 3 volu
1323 ugemont Denis de, « [Compte rendu] Wilfred Monod, Le Problème du bien  », Les Nouvelles littéraires, Paris, 12 septembre 1
1324 pte rendu] Wilfred Monod, Le Problème du bien  », Les Nouvelles littéraires, Paris, 12 septembre 1936, p. 5. p. Une critiq
1325 ris, 12 septembre 1936, p. 5. p. Une critique de l’ ouvrage de Wilfred Monod paraît également dans Hic et Nunc de mai 19
1326 ît également dans Hic et Nunc de mai 1935, sous le titre : « Soirée chez Nicodème ».
12 1937, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Luther contre Érasme (19 juin 1937)
1327 Que sait-on de Luther en France ? Qu’il rompu l’ unité de l’Église. Mais dans quelles circonstances ? Poussé par quelle
1328 t-on de Luther en France ? Qu’il rompu l’unité de l’ Église. Mais dans quelles circonstances ? Poussé par quelles raisons ?
1329 é par quelles raisons ? Et pour quelles fins ? Si l’ on ne veut pas s’en tenir à des appréciations du genre « moine qui vou
1330 se marier », il serait sage de parcourir au moins les œuvres capitales du grand réformateur. Or, il se trouve, et c’est pre
1331 pendice à une brève biographie ; une brochure sur la liberté chrétienne : et les trop fameux Propos de Table, absolument i
1332 hie ; une brochure sur la liberté chrétienne : et les trop fameux Propos de Table, absolument insignifiants quant à la doct
1333 Propos de Table, absolument insignifiants quant à la doctrine religieuse : voilà tout ce qui nous est accessible d’une œuv
1334 it pourtant qu’elle a changé plus qu’aucune autre les destinées de l’Occident. (Je ne fais là, bien entendu, qu’une constat
1335 le a changé plus qu’aucune autre les destinées de l’ Occident. (Je ne fais là, bien entendu, qu’une constatation historique
1336 qu’une constatation historique.) Remercions donc le courageux éditeur qui vient d’entreprendre la réparation de cette inc
1337 onc le courageux éditeur qui vient d’entreprendre la réparation de cette inconcevable lacune, en publiant l’ouvrage centra
1338 aration de cette inconcevable lacune, en publiant l’ ouvrage central de la réforme luthérienne, le Traité du serf arbitre 1
1339 ncevable lacune, en publiant l’ouvrage central de la réforme luthérienne, le Traité du serf arbitre 14. Ne fût-ce que sur
1340 iant l’ouvrage central de la réforme luthérienne, le Traité du serf arbitre 14. Ne fût-ce que sur le plan de la culture gé
1341 du serf arbitre 14. Ne fût-ce que sur le plan de la culture générale, une telle publication est appelée à rendre des serv
1342 au cœur même du grand débat occidental, celui de la pensée « pure » et de la pensée « engagée ». Elle met entre nos mains
1343 bat occidental, celui de la pensée « pure » et de la pensée « engagée ». Elle met entre nos mains la pièce capitale du pro
1344 e la pensée « engagée ». Elle met entre nos mains la pièce capitale du procès : l’acte d’accusation du clerc actif qu’étai
1345 met entre nos mains la pièce capitale du procès : l’ acte d’accusation du clerc actif qu’était Luther, contre le clerc « dé
1346 accusation du clerc actif qu’était Luther, contre le clerc « désintéressé » que croyait pouvoir être Érasme. Elle nous per
1347 de cette grande tension spirituelle dans laquelle l’ Europe a puisé son dynamisme créateur : l’opposition du témoin respons
1348 aquelle l’Europe a puisé son dynamisme créateur : l’ opposition du témoin responsable et du spectateur détaché. Le point de
1349 n du témoin responsable et du spectateur détaché. Le point de vue du « clerc pur », celui d’Érasme, nous est suffisamment
1350 isamment connu. Qu’on se reporte en particulier à la brillante biographie de Stefan Zweig, et j’ajouterais : à toute l’œuv
1351 raphie de Stefan Zweig, et j’ajouterais : à toute l’ œuvre récente du parfait disciple d’Érasme que se trouve être M. Benda
1352 d’Érasme que se trouve être M. Benda. Érasme dit le vrai, puis se lave les mains, et refuse d’endosser les conséquences d
1353 e être M. Benda. Érasme dit le vrai, puis se lave les mains, et refuse d’endosser les conséquences de sa vérité : il souhai
1354 rai, puis se lave les mains, et refuse d’endosser les conséquences de sa vérité : il souhaite même qu’il n’y en ait pas. Et
1355  : il souhaite même qu’il n’y en ait pas. Et tous les prudents d’applaudir, non sans apparences de raison : on a commis tan
1356 de raison : on a commis tant de crimes au nom de la vérité ! On s’en est plus servi qu’on ne l’a servie… L’intervention d
1357 om de la vérité ! On s’en est plus servi qu’on ne l’ a servie… L’intervention de Luther en personne va-t-elle changer une f
1358 ité ! On s’en est plus servi qu’on ne l’a servie… L’ intervention de Luther en personne va-t-elle changer une fois de plus
1359 er en personne va-t-elle changer une fois de plus la face des choses ? À tout le moins doit-elle passionner le débat, et l
1360 nger une fois de plus la face des choses ? À tout le moins doit-elle passionner le débat, et le faire puissamment rebondir
1361 des choses ? À tout le moins doit-elle passionner le débat, et le faire puissamment rebondir. Car personne n’a mieux incar
1362 À tout le moins doit-elle passionner le débat, et le faire puissamment rebondir. Car personne n’a mieux incarné la volonté
1363 ssamment rebondir. Car personne n’a mieux incarné la volonté de pensée militante que ce petit moine qui, à Worms, osa dres
1364 e ce petit moine qui, à Worms, osa dresser contre l’ opportunisme impérial et sacerdotal l’inflexible, l’urgente exigence d
1365 sser contre l’opportunisme impérial et sacerdotal l’ inflexible, l’urgente exigence de la vérité en action. Que trouvera le
1366 opportunisme impérial et sacerdotal l’inflexible, l’ urgente exigence de la vérité en action. Que trouvera le lecteur profa
1367 et sacerdotal l’inflexible, l’urgente exigence de la vérité en action. Que trouvera le lecteur profane, et peu au fait de
1368 nte exigence de la vérité en action. Que trouvera le lecteur profane, et peu au fait de la problématique chrétienne, dans
1369 ue trouvera le lecteur profane, et peu au fait de la problématique chrétienne, dans cet ouvrage, qui est avant tout celui
1370 Une verdeur de polémique qui peut flatter en nous le goût du pittoresque ; l’élan génial, la violence loyale d’une certitu
1371 qui peut flatter en nous le goût du pittoresque ; l’ élan génial, la violence loyale d’une certitude pesante, vraiment « gr
1372 r en nous le goût du pittoresque ; l’élan génial, la violence loyale d’une certitude pesante, vraiment « grave », d’une di
1373 i va droit au point décisif, envisage honnêtement les objections, donne à la thèse adverse toutes ses chances, non sans iro
1374 sif, envisage honnêtement les objections, donne à la thèse adverse toutes ses chances, non sans ironie toutefois, et sait
1375 nie toutefois, et sait enfin conférer à son choix la force et la simplicité d’une constatation évidente. D’un point de vue
1376 s, et sait enfin conférer à son choix la force et la simplicité d’une constatation évidente. D’un point de vue purement es
1377 r assez flagrantes, pour qu’un lecteur qui refuse l’ essentiel — c’est-à-dire la foi de Luther — soit tout de même attiré e
1378 ’un lecteur qui refuse l’essentiel — c’est-à-dire la foi de Luther — soit tout de même attiré et subjugué par le style, pa
1379 Luther — soit tout de même attiré et subjugué par le style, par le ton de l’ouvrage. Mais on ne saurait réduire le Traité
1380 tout de même attiré et subjugué par le style, par le ton de l’ouvrage. Mais on ne saurait réduire le Traité du serf arbitr
1381 me attiré et subjugué par le style, par le ton de l’ ouvrage. Mais on ne saurait réduire le Traité du serf arbitre à la que
1382 r le ton de l’ouvrage. Mais on ne saurait réduire le Traité du serf arbitre à la querelle avec Érasme, qui lui servit de p
1383 on ne saurait réduire le Traité du serf arbitre à la querelle avec Érasme, qui lui servit de prétexte et d’aiguillon, et q
1384 tour à tour ironique ou émouvant. En fait, toutes les affirmations fondamentales de la Réforme sont ici reposées par Luther
1385 En fait, toutes les affirmations fondamentales de la Réforme sont ici reposées par Luther : justification par la foi, qui
1386 sont ici reposées par Luther : justification par la foi, qui est don gratuit et œuvre de Dieu seul en nous ; opposition d
1387 uit et œuvre de Dieu seul en nous ; opposition de la justice donnée par Dieu à la justice acquise par nos mérites ; opposi
1388 nous ; opposition de la justice donnée par Dieu à la justice acquise par nos mérites ; opposition de la Parole vivante à l
1389 a justice acquise par nos mérites ; opposition de la Parole vivante à la tradition codifiée ; sens de la décision totale e
1390 r nos mérites ; opposition de la Parole vivante à la tradition codifiée ; sens de la décision totale entre un oui et un no
1391 Parole vivante à la tradition codifiée ; sens de la décision totale entre un oui et un non absolus, et refus de tout moye
1392 n non absolus, et refus de tout moyen terme entre les règnes en guerre ouverte du Dieu de la foi et du Prince de ce monde ;
1393 rme entre les règnes en guerre ouverte du Dieu de la foi et du Prince de ce monde ; nécessité du témoignage, et du témoign
1394 , et du témoignage fidèle, certifié au-dedans par l’ Esprit saint, et par l’Écriture au-dehors, et constituant la véritable
1395 le, certifié au-dedans par l’Esprit saint, et par l’ Écriture au-dehors, et constituant la véritable action de l’homme entr
1396 aint, et par l’Écriture au-dehors, et constituant la véritable action de l’homme entre les mains de Dieu. À cet égard, il
1397 au-dehors, et constituant la véritable action de l’ homme entre les mains de Dieu. À cet égard, il n’est nullement exagéré
1398 constituant la véritable action de l’homme entre les mains de Dieu. À cet égard, il n’est nullement exagéré de voir dans l
1399 et égard, il n’est nullement exagéré de voir dans le Traité du serf arbitre une sorte de résumé — très peu systématique, e
1400 e, et c’est heureux — des positions maîtresses de la Réforme. Quant à la thèse particulière, qui est la négation du libre
1401 — des positions maîtresses de la Réforme. Quant à la thèse particulière, qui est la négation du libre arbitre religieux, c
1402 a Réforme. Quant à la thèse particulière, qui est la négation du libre arbitre religieux, c’est-à-dire du pouvoir qu’aurai
1403 itre religieux, c’est-à-dire du pouvoir qu’aurait l’ homme de gagner le salut par ses propres efforts de volonté, ce n’est
1404 est-à-dire du pouvoir qu’aurait l’homme de gagner le salut par ses propres efforts de volonté, ce n’est pas ici le lieu de
1405 ses propres efforts de volonté, ce n’est pas ici le lieu de l’examiner. Notons seulement, pour écarter le pire malentendu
1406 s efforts de volonté, ce n’est pas ici le lieu de l’ examiner. Notons seulement, pour écarter le pire malentendu, que Luthe
1407 ieu de l’examiner. Notons seulement, pour écarter le pire malentendu, que Luther ne nie pas du tout la réalité de notre vo
1408 le pire malentendu, que Luther ne nie pas du tout la réalité de notre volonté. Il nie seulement que cette volonté puisse s
1409 e s’appliquer librement aux choses qui concernent le salut. Elle fait partie de notre nature, et comme telle, ne désire vr
1410 re nature, et comme telle, ne désire vraiment que le péché. La liberté n’est pas dans l’homme, mais dans l’acte par lequel
1411 et comme telle, ne désire vraiment que le péché. La liberté n’est pas dans l’homme, mais dans l’acte par lequel Dieu le c
1412 vraiment que le péché. La liberté n’est pas dans l’ homme, mais dans l’acte par lequel Dieu le choisit, substituant à un d
1413 ché. La liberté n’est pas dans l’homme, mais dans l’ acte par lequel Dieu le choisit, substituant à un destin fatal une voc
1414 as dans l’homme, mais dans l’acte par lequel Dieu le choisit, substituant à un destin fatal une vocation d’un tout autre o
1415 tion d’un tout autre ordre. Fatalité et liberté : le problème ne peut être écarté comme relevant de la seule théologie. Il
1416 le problème ne peut être écarté comme relevant de la seule théologie. Il est au cœur de la pensée humaine. Tout homme qui
1417 relevant de la seule théologie. Il est au cœur de la pensée humaine. Tout homme qui veut penser son existence en termes ra
1418 sérieux, se voit acculé à ce dilemme, ou plutôt à l’ acceptation simultanée de ses deux termes. Et l’on sait que Nietzsche
1419 à l’acceptation simultanée de ses deux termes. Et l’ on sait que Nietzsche lui-même aboutit à un paradoxe tout semblable à
1420 à un paradoxe tout semblable à celui de Luther : la liberté est à ses yeux dans la connaissance virile d’une nécessité im
1421 celui de Luther : la liberté est à ses yeux dans la connaissance virile d’une nécessité immuable, acceptée et aimée comme
1422 le. Mais cette nécessité s’appelle pour Nietzsche le fatum, la fatalité sans visage du Retour éternel de toutes choses. Po
1423 ette nécessité s’appelle pour Nietzsche le fatum, la fatalité sans visage du Retour éternel de toutes choses. Pour Luther,
1424 toutes choses. Pour Luther, elle est au contraire la Providence, la personne même de Dieu, éternellement active, et qui no
1425 Pour Luther, elle est au contraire la Providence, la personne même de Dieu, éternellement active, et qui nous aime. Il fau
1426 t active, et qui nous aime. Il faut choisir. Mais le choix est-il libre ? On retombe au débat de Luther et d’Érasme. Le tr
1427 ibre ? On retombe au débat de Luther et d’Érasme. Le trop prudent humaniste eût-il saisi dans son sérieux dernier la réali
1428 t humaniste eût-il saisi dans son sérieux dernier la réalité d’un dilemme qui sacrifie l’homme à la vérité ? 14. Traduit
1429 ieux dernier la réalité d’un dilemme qui sacrifie l’ homme à la vérité ? 14. Traduit du latin, aux Éditions « Je sers ».
1430 er la réalité d’un dilemme qui sacrifie l’homme à la vérité ? 14. Traduit du latin, aux Éditions « Je sers ». Préface de
1431 du latin, aux Éditions « Je sers ». Préface de M. le professeur A. Jundi. q. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Luther
1432 enis de, « [Compte rendu] Luther contre Érasme », Les Nouvelles littéraires, Paris, 19 juin 1937, p. 5. r. Il s’agit d’une
13 1937, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Selma Lagerlöf, conteur de légende (3 juillet 1937)
1433 Lagerlöf, conteur de légende (3 juillet 1937)s L’ art de conter pour le plaisir se perd. Et peut-être, avec lui, l’art t
1434 légende (3 juillet 1937)s L’art de conter pour le plaisir se perd. Et peut-être, avec lui, l’art tout court. Dans la li
1435 pour le plaisir se perd. Et peut-être, avec lui, l’ art tout court. Dans la littérature du xxe siècle, il n’y a plus de g
1436 d. Et peut-être, avec lui, l’art tout court. Dans la littérature du xxe siècle, il n’y a plus de grands mythes, il y a de
1437 s analyses. On part de « faits d’observation » et l’ on essaie d’en tirer de la vie. Mais ne serait-ce pas que l’on ne sait
1438 aits d’observation » et l’on essaie d’en tirer de la vie. Mais ne serait-ce pas que l’on ne sait plus créer de la vie ? On
1439 e d’en tirer de la vie. Mais ne serait-ce pas que l’ on ne sait plus créer de la vie ? On s’efforce de la décrire, ou pis e
1440 s ne serait-ce pas que l’on ne sait plus créer de la vie ? On s’efforce de la décrire, ou pis encore, de l’expliquer… Le r
1441 on ne sait plus créer de la vie ? On s’efforce de la décrire, ou pis encore, de l’expliquer… Le romancier moderne apparaît
1442 e ? On s’efforce de la décrire, ou pis encore, de l’ expliquer… Le romancier moderne apparaît étrangement dépourvu de ce po
1443 rce de la décrire, ou pis encore, de l’expliquer… Le romancier moderne apparaît étrangement dépourvu de ce pouvoir « fabul
1444 M. Weidlé, dans ses Abeilles d’Aristée, constate le « crépuscule des mondes imaginaires ».) On n’aime plus inventer, mais
1445 inventer, mais on veut découvrir, à la manière de l’ homme de science. Et tout l’effort de l’écrivain se porte alors sur l’
1446 vrir, à la manière de l’homme de science. Et tout l’ effort de l’écrivain se porte alors sur l’analyse des motifs secrets d
1447 anière de l’homme de science. Et tout l’effort de l’ écrivain se porte alors sur l’analyse des motifs secrets d’une action.
1448 Et tout l’effort de l’écrivain se porte alors sur l’ analyse des motifs secrets d’une action. La méthode consistant trop so
1449 rs sur l’analyse des motifs secrets d’une action. La méthode consistant trop souvent, il faut le dire, à tenir pour vrai c
1450 tion. La méthode consistant trop souvent, il faut le dire, à tenir pour vrai ce que l’on juge le plus bas. Ainsi l’on en v
1451 ouvent, il faut le dire, à tenir pour vrai ce que l’ on juge le plus bas. Ainsi l’on en vient peu à peu, par désir de se mo
1452 faut le dire, à tenir pour vrai ce que l’on juge le plus bas. Ainsi l’on en vient peu à peu, par désir de se montrer orig
1453 nir pour vrai ce que l’on juge le plus bas. Ainsi l’ on en vient peu à peu, par désir de se montrer original, à tenir pour
1454 r de se montrer original, à tenir pour acquis que les « vertus » sont de ces illusions qui ne résistent pas à l’analyse, et
1455 us » sont de ces illusions qui ne résistent pas à l’ analyse, et qu’un auteur sincère se doit de démasquer. Tout se ramèner
1456 incère se doit de démasquer. Tout se ramènerait à la physiologie, ou à l’argent. Il ne fallait pas moins que le génie plei
1457 asquer. Tout se ramènerait à la physiologie, ou à l’ argent. Il ne fallait pas moins que le génie plein de malices d’une La
1458 logie, ou à l’argent. Il ne fallait pas moins que le génie plein de malices d’une Lagerlöf pour renverser d’un coup cette
1459 coup cette apparente fatalité. Kipling meurt, et l’ on dit : c’était le dernier conteur. La même année paraît le grand tri
1460 meurt, et l’on dit : c’était le dernier conteur. La même année paraît le grand triptyque des Löwensköld 15. Et, grâce à l
1461 c’était le dernier conteur. La même année paraît le grand triptyque des Löwensköld 15. Et, grâce à lui, nous pourrons rir
1462 eau de cette « défense d’inventer » qui terrorise les romanciers du xxe siècle. Selma Lagerlöf sait encore que l’origine d
1463 rs du xxe siècle. Selma Lagerlöf sait encore que l’ origine de tout l’art du récit, c’est la légende. Une atmosphère d’enf
1464 Selma Lagerlöf sait encore que l’origine de tout l’ art du récit, c’est la légende. Une atmosphère d’enfance retrouvée — q
1465 ncore que l’origine de tout l’art du récit, c’est la légende. Une atmosphère d’enfance retrouvée — qu’on lise les souvenir
1466 . Une atmosphère d’enfance retrouvée — qu’on lise les souvenirs qui composent Morbacka 16 — voilà le milieu-mère de l’imagi
1467 e les souvenirs qui composent Morbacka 16 — voilà le milieu-mère de l’imagination. C’est une légende, Gösta Berling, qui i
1468 i composent Morbacka 16 — voilà le milieu-mère de l’ imagination. C’est une légende, Gösta Berling, qui inaugure l’œuvre en
1469 n. C’est une légende, Gösta Berling, qui inaugure l’ œuvre entière de l’auteurt. C’est une légende encore qui donne le dépa
1470 e, Gösta Berling, qui inaugure l’œuvre entière de l’ auteurt. C’est une légende encore qui donne le départ à ce roman des L
1471 de l’auteurt. C’est une légende encore qui donne le départ à ce roman des Löwensköld, et porte sur lui de grandes ombres.
1472 pouvoir mortel d’un anneau dérobé dans une tombe ( L’ Anneau des Löwensköld). L’auteur lui-même sourit entre les lignes. (Ma
1473 dérobé dans une tombe (L’Anneau des Löwensköld). L’ auteur lui-même sourit entre les lignes. (Mais, seule, la naïveté mode
1474 u des Löwensköld). L’auteur lui-même sourit entre les lignes. (Mais, seule, la naïveté moderne se figure qu’une légende doi
1475 r lui-même sourit entre les lignes. (Mais, seule, la naïveté moderne se figure qu’une légende doit être crue, comme on cro
1476 ure qu’une légende doit être crue, comme on croit les journaux, par exemple, et s’en indigne, et refuse de marcher !) Le vr
1477 exemple, et s’en indigne, et refuse de marcher !) Le vrai « miracle », ici, c’est le parti romanesque que Selma Lagerlöf a
1478 use de marcher !) Le vrai « miracle », ici, c’est le parti romanesque que Selma Lagerlöf a su tirer du mythe. Et c’est aus
1479 elma Lagerlöf a su tirer du mythe. Et c’est aussi la profusion géniale des inventions concrètes — une à chaque page, au mo
1480 chaque page, au moins — qui peu à peu illustrent la psychologie la plus secrète des héros. L’on prie de croire, d’ailleur
1481 u moins — qui peu à peu illustrent la psychologie la plus secrète des héros. L’on prie de croire, d’ailleurs, que ces héro
1482 ustrent la psychologie la plus secrète des héros. L’ on prie de croire, d’ailleurs, que ces héros sont bien assez complexes
1483 assez complexes pour notre goût moderne ! Et que l’ « analyse des motifs » est ici d’une fort malicieuse lucidité. Mais el
1484 e fort malicieuse lucidité. Mais elle s’opère par le seul jeu des faits, jamais en marge de l’action, sous forme de médita
1485 ère par le seul jeu des faits, jamais en marge de l’ action, sous forme de méditation ou d’analyse. Toutes les ressources d
1486 on, sous forme de méditation ou d’analyse. Toutes les ressources du conte populaire et de l’imagerie sentimentale et romane
1487 e. Toutes les ressources du conte populaire et de l’ imagerie sentimentale et romanesque, qu’on croyait épuisées depuis les
1488 tale et romanesque, qu’on croyait épuisées depuis les Victoriens, retrouvent ici leur grâce et leur prestige. Une ironie se
1489 leur prestige. Une ironie sereine, à peine amère, les décape de toute niaiserie, et déjoue toutes les conven­tions. Surtout
1490 , les décape de toute niaiserie, et déjoue toutes les conven­tions. Surtout, un rythme merveilleux de souplesse, d’imprévu
1491 ’imprévu et d’aisance, entretient tout au long de la lecture une euphorie de l’imagination dont nous pensions que le secre
1492 etient tout au long de la lecture une euphorie de l’ imagination dont nous pensions que le secret s’était perdu avec l’enfa
1493 euphorie de l’imagination dont nous pensions que le secret s’était perdu avec l’enfance. Comme on sent que l’auteur s’amu
1494 nt nous pensions que le secret s’était perdu avec l’ enfance. Comme on sent que l’auteur s’amuse de sa maîtrise : Lagerlöf,
1495 t s’était perdu avec l’enfance. Comme on sent que l’ auteur s’amuse de sa maîtrise : Lagerlöf, ou la gloire de conter ! Plu
1496 ue l’auteur s’amuse de sa maîtrise : Lagerlöf, ou la gloire de conter ! Plusieurs douzaines de personnages, des familles e
1497 bourgeois, des paysans, une belle jeune fille de la noblesse, une bohémienne, un jeune pasteur fanatique, une dévote écœu
1498 cela suffirait pour animer un roman romantique de la grande tradition. Mais tout ce pittoresque humain revêt un drame spir
1499 t ce pittoresque humain revêt un drame spirituel, le drame de l’absolu chrétien qui détruit tout dès qu’il agit sans chari
1500 sque humain revêt un drame spirituel, le drame de l’ absolu chrétien qui détruit tout dès qu’il agit sans charité (thème fr
1501 dès qu’il agit sans charité (thème fréquent dans la littérature nordique). C’est à l’avant-dernière page seulement que le
1502 e fréquent dans la littérature nordique). C’est à l’ avant-dernière page seulement que le sens profond de l’œuvre entière e
1503 que). C’est à l’avant-dernière page seulement que le sens profond de l’œuvre entière est formulé : « Celui qui veut être u
1504 nt-dernière page seulement que le sens profond de l’ œuvre entière est formulé : « Celui qui veut être un disciple du Chris
1505 ui qui veut être un disciple du Christ sans avoir l’ amour des hommes est condamné à aller à sa perte et à y conduire les a
1506 s est condamné à aller à sa perte et à y conduire les autres ». À ce moment aussi, l’on s’aperçoit que la fatalité de la lé
1507 et à y conduire les autres ». À ce moment aussi, l’ on s’aperçoit que la fatalité de la légende a bel et bien dominé tous
1508 autres ». À ce moment aussi, l’on s’aperçoit que la fatalité de la légende a bel et bien dominé tous ces êtres, malgré le
1509 moment aussi, l’on s’aperçoit que la fatalité de la légende a bel et bien dominé tous ces êtres, malgré leur scepticisme
1510 , malgré leur scepticisme ou leurs bravades, dans la mesure où les religions obscures dominent ceux qui n’ont pas la foi.
1511 scepticisme ou leurs bravades, dans la mesure où les religions obscures dominent ceux qui n’ont pas la foi. Seule une priè
1512 es religions obscures dominent ceux qui n’ont pas la foi. Seule une prière désespérée, de pur amour, rompt le charme forgé
1513 Seule une prière désespérée, de pur amour, rompt le charme forgé par le péché. Au symbole de l’anneau volé, maintenant pr
1514 sespérée, de pur amour, rompt le charme forgé par le péché. Au symbole de l’anneau volé, maintenant privé de son pouvoir m
1515 rompt le charme forgé par le péché. Au symbole de l’ anneau volé, maintenant privé de son pouvoir maléfique, répond le symb
1516 maintenant privé de son pouvoir maléfique, répond le symbole d’un engagement humain librement consenti devant Dieu ; un an
1517 u ; un anneau nuptial retrouvé. Le premier tome — L’ Anneau des Löwensköld — contient le récit de la légende. Les deux tome
1518 premier tome — L’Anneau des Löwensköld — contient le récit de la légende. Les deux tomes suivants — Charlotte Löwensköld e
1519 — L’Anneau des Löwensköld — contient le récit de la légende. Les deux tomes suivants — Charlotte Löwensköld et Anna Svärd
1520 des Löwensköld — contient le récit de la légende. Les deux tomes suivants — Charlotte Löwensköld et Anna Svärd — forment un
1521 e chapitre avec une prodigalité vraiment géniale. Le jeune pasteur Karl-Artur Eckenstedt vient de se brouiller avec sa bel
1522 r avec sa belle fiancée, Charlotte Löwensköld. En la quittant, il lui a crié qu’il n’épouserait qu’une femme que Dieu lui
1523 ers pas une vieille mendiante sourde. Une voiture le dépasse, conduite par une riche jeune fille des environs, mais cela n
1524 , mais cela ne compte pas, car il est entendu que la femme désignée par Dieu doit venir à sa rencontre. Un peu plus loin,
1525 ntre. Un peu plus loin, il entend chanter : c’est la fille de l’aubergiste, qui a fort mauvaise réputation. Mais elle ne s
1526 plus loin, il entend chanter : c’est la fille de l’ aubergiste, qui a fort mauvaise réputation. Mais elle ne s’engage pas
1527 auvaise réputation. Mais elle ne s’engage pas sur la route, elle s’arrête dans un pré voisin. Karl-Artur doute, tremble, e
1528 jours. Voici venir, à sa rencontre cette fois-ci, la plus pauvre orpheline du village ; elle est défigurée par une énorme
1529 e de vin. Faudra-t-il accepter ce martyre ? Déjà, le jeune homme s’y résigne… À quelques pas de lui, elle tourne à droite.
1530 que tu as rencontré un ours ! » C’est Anna Svärd, la femme que Dieu lui envoie, qu’il épousera envers et contre tous. Elle
1531 , dans cette scène étonnante, l’un des secrets de l’ art de Selma Lagerlöf. L’invention romanesque n’est ici que la « mise
1532 nte, l’un des secrets de l’art de Selma Lagerlöf. L’ invention romanesque n’est ici que la « mise en pratique » d’une attit
1533 ma Lagerlöf. L’invention romanesque n’est ici que la « mise en pratique » d’une attitude spirituelle extrême. La phrase de
1534 en pratique » d’une attitude spirituelle extrême. La phrase de Karl-Artur lâchée, il suffit de la prendre au mot : elle co
1535 ême. La phrase de Karl-Artur lâchée, il suffit de la prendre au mot : elle commande tout naturellement une suite d’inciden
1536 e d’incidents pittoresques ou dramatiques, à quoi l’ auteur ne se prive pas d’ajouter quelques traces d’humour, comme pour
1537 ter quelques traces d’humour, comme pour purifier l’ émotion. Mais pour qu’une telle phrase soit dite, il faut des âmes for
1538 te même phrase soit aussitôt mise en pratique par le héros, sans nulle invraisemblance, il faut que ce héros soit un croya
1539 ine trempe. Derrière Karl-Artur, en effet, il y a la tradition des puritains, mais aussi tout l’absolutisme religieux du B
1540 l y a la tradition des puritains, mais aussi tout l’ absolutisme religieux du Brand d’Ibsen, de Kierkegaard, de Luther. Et
1541 iété sobre et son bon sens impérieux, voici Théa, la sectaire doucereuse, et Anna Svärd, « distinguée entre toutes » par l
1542 e, et Anna Svärd, « distinguée entre toutes » par le miracle, et qui l’accepte avec humilité. Et cinquante autres personna
1543  distinguée entre toutes » par le miracle, et qui l’ accepte avec humilité. Et cinquante autres personnages, des foules aux
1544 quante autres personnages, des foules aux foires, la vie commune du bourg et des paroisses. C’est vraiment toute l’humanit
1545 e du bourg et des paroisses. C’est vraiment toute l’ humanité suscitée et instruite par la Réforme, c’est un pays entier so
1546 aiment toute l’humanité suscitée et instruite par la Réforme, c’est un pays entier sous la lumière de la Parole, qui trouv
1547 struite par la Réforme, c’est un pays entier sous la lumière de la Parole, qui trouve ici son expression. Tout respire lar
1548 Réforme, c’est un pays entier sous la lumière de la Parole, qui trouve ici son expression. Tout respire largement, tout v
1549 out vit et se transforme, non pas seulement selon les lois des passions, des cœurs et des corps, mais aussi selon la libert
1550 assions, des cœurs et des corps, mais aussi selon la liberté, souvent plus folle encore, des âmes. Plénitude de la poésie 
1551 souvent plus folle encore, des âmes. Plénitude de la poésie ! Et le spectacle le plus émouvant que nous donne cette œuvre
1552 lle encore, des âmes. Plénitude de la poésie ! Et le spectacle le plus émouvant que nous donne cette œuvre admirable, c’es
1553 es âmes. Plénitude de la poésie ! Et le spectacle le plus émouvant que nous donne cette œuvre admirable, c’est celui du tr
1554 cette œuvre admirable, c’est celui du travail de la foi dans la réalité totale d’un peuple, qu’elle trouble, assemble, ju
1555 admirable, c’est celui du travail de la foi dans la réalité totale d’un peuple, qu’elle trouble, assemble, juge et sauve.
1556 Rien de plus passionnant, pour qui vient de lire les Löwensköld, que de retrouver dans les souvenirs publiés sous le titre
1557 ent de lire les Löwensköld, que de retrouver dans les souvenirs publiés sous le titre de Morbacka les origines biographique
1558 que de retrouver dans les souvenirs publiés sous le titre de Morbacka les origines biographiques, les sources vives de ce
1559 s les souvenirs publiés sous le titre de Morbacka les origines biographiques, les sources vives de ce jaillissement d’inven
1560 le titre de Morbacka les origines biographiques, les sources vives de ce jaillissement d’inventions. Morbacka, c’est comme
1561 Lagerlöf. On y admire, appliquées au réel, toutes les vertus subtiles, tout le « métier » de l’écrivain : cette façon de ne
1562 liquées au réel, toutes les vertus subtiles, tout le « métier » de l’écrivain : cette façon de ne pas insister, de laisser
1563 toutes les vertus subtiles, tout le « métier » de l’ écrivain : cette façon de ne pas insister, de laisser le lecteur seul
1564 vain : cette façon de ne pas insister, de laisser le lecteur seul avec l’émotion, cette malice cordiale, cette variété et,
1565 ne pas insister, de laisser le lecteur seul avec l’ émotion, cette malice cordiale, cette variété et, à la fois, cette éco
1566 retrouve aussi, décrits l’un après l’autre, tous les éléments historiques, décors, personnages et coutumes, que les romans
1567 historiques, décors, personnages et coutumes, que les romans mettront en œuvre : il n’y manque rien que le rythme, c’est-à-
1568 romans mettront en œuvre : il n’y manque rien que le rythme, c’est-à-dire la part libre du génie, de l’imagination fabulat
1569  : il n’y manque rien que le rythme, c’est-à-dire la part libre du génie, de l’imagination fabulatrice. Et c’est là que je
1570 e rythme, c’est-à-dire la part libre du génie, de l’ imagination fabulatrice. Et c’est là que je vois le très grand intérêt
1571 ’imagination fabulatrice. Et c’est là que je vois le très grand intérêt de ces souvenirs — dont le charme, d’ailleurs, suf
1572 ois le très grand intérêt de ces souvenirs — dont le charme, d’ailleurs, suffirait bien à nous retenir : ils nous permette
1573 s nous permettent de mesurer d’un seul coup d’œil l’ apport proprement artistique, la création, le don au double sens du mo
1574 n seul coup d’œil l’apport proprement artistique, la création, le don au double sens du mot, de l’auteur du triptyque des
1575 ’œil l’apport proprement artistique, la création, le don au double sens du mot, de l’auteur du triptyque des Löwensköld. I
1576 ue, la création, le don au double sens du mot, de l’ auteur du triptyque des Löwensköld. Il faut avouer que le milieu où Se
1577 r du triptyque des Löwensköld. Il faut avouer que le milieu où Selma Lagerlöf a grandi paraît favoriser plus qu’aucun autr
1578 löf a grandi paraît favoriser plus qu’aucun autre le déploiement des pouvoirs de la fable. Ces presbytères campagnards — q
1579 lus qu’aucun autre le déploiement des pouvoirs de la fable. Ces presbytères campagnards — que de pasteurs dans la famille
1580 es presbytères campagnards — que de pasteurs dans la famille des romanciers du Nord ! — environnés de paysages de rêve, de
1581 ques, tout cela semble disposé pour que se nouent les drames complexes dont s’est nourri depuis cent ans le grand roman occ
1582 rames complexes dont s’est nourri depuis cent ans le grand roman occidental : vies intérieures profondes, structure social
1583 s personnages. Considérez ces trois facteurs dans le roman de la grande époque (xixe siècle) et voyez si leur décadence n
1584 s. Considérez ces trois facteurs dans le roman de la grande époque (xixe siècle) et voyez si leur décadence ne suffit pas
1585 voyez si leur décadence ne suffit pas à expliquer la crise actuelle du genre dans notre société. 15. L’Anneau des Lowen
1586 rise actuelle du genre dans notre société. 15. L’ Anneau des Lowensköld, Charlotte Lowensköld, Anna Svärd, romans tradui
1587 mpte rendu] Selma Lagerlöf, conteur de légende », Les Nouvelles littéraires, Paris, 3 juillet 1937, p. 8. t. Rougemont en
1588 aris, 3 juillet 1937, p. 8. t. Rougemont en fait la recension dans la NRF de novembre 1937.
1589 37, p. 8. t. Rougemont en fait la recension dans la NRF de novembre 1937.
14 1939, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Non, Tristan et Iseut ne s’aiment pas, nous dit Denis de Rougemont (12 février 1939)
1590 t Denis de Rougemont (12 février 1939)u v Avec l’ audace souriante de ces guides helvétiques qui mènent au bord du préci
1591 uides helvétiques qui mènent au bord du précipice le touriste stupéfait par le paysage et par le danger, M. Denis de Rouge
1592 nt au bord du précipice le touriste stupéfait par le paysage et par le danger, M. Denis de Rougemont vient de publier L’A
1593 ipice le touriste stupéfait par le paysage et par le danger, M. Denis de Rougemont vient de publier L’Amour et l’Occident
1594 e danger, M. Denis de Rougemont vient de publier L’ Amour et l’Occident , livre qui va, sans doute, susciter des polémique
1595 . Denis de Rougemont vient de publier L’Amour et l’ Occident , livre qui va, sans doute, susciter des polémiques passionné
1596 passionnées. Ce jeune écrivain suisse, qui joint le souci de l’actualité et le goût des questions sociales à la lucidité
1597 . Ce jeune écrivain suisse, qui joint le souci de l’ actualité et le goût des questions sociales à la lucidité sensible d’u
1598 vain suisse, qui joint le souci de l’actualité et le goût des questions sociales à la lucidité sensible d’un compatriote d
1599 e l’actualité et le goût des questions sociales à la lucidité sensible d’un compatriote d’Amiel, a déjà derrière lui une œ
1600 ide. Il est l’un des principaux collaborateurs de la revue Esprit , écrit dans plusieurs revues des articles qui ne sont
1601 mais indifférents. Il a tenu, dans notre journal, la rubrique de la vie protestante. Ayant fait de solides études à Vienne
1602 ts. Il a tenu, dans notre journal, la rubrique de la vie protestante. Ayant fait de solides études à Vienne et en Allemagn
1603 paru au printemps dernier, est un des témoignages les plus valables sur le national-socialisme. Étranger, M. Denis de Rouge
1604 ier, est un des témoignages les plus valables sur le national-socialisme. Étranger, M. Denis de Rougemont connaît mieux qu
1605 e : il a séjourné de longs mois en Vendée et dans le Midi. Son Journal d’un intellectuel en chômage témoigne de la curio
1606 Journal d’un intellectuel en chômage témoigne de la curiosité, et aussi de la discrétion avec laquelle il s’efforce de dé
1607 en chômage témoigne de la curiosité, et aussi de la discrétion avec laquelle il s’efforce de dégager l’âme secrète de nos
1608 discrétion avec laquelle il s’efforce de dégager l’ âme secrète de nos campagnes. Denis de Rougemont n’aime pas les villes
1609 e de nos campagnes. Denis de Rougemont n’aime pas les villes, il n’a pas besoin pour écrire de ces conversations, de ces éc
1610 souvent lieu de vie intérieure. Il me reçoit dans la maison de M. Charles Du Bos, à La Celle-Saint-Cloud, maison simple, s
1611 me reçoit dans la maison de M. Charles Du Bos, à La Celle-Saint-Cloud, maison simple, sans austérité, tout de suite famil
1612 s austérité, tout de suite familière, où il passe l’ hiver avec sa femme et Colinet, son petit garçon. Denis de Rougemont e
1613 arçon. Denis de Rougemont est grand, souple, il a la réserve affable des Suisses, et ce sourire des lèvres qui semble excu
1614 sses, et ce sourire des lèvres qui semble excuser le sérieux du regard. Il rit malicieusement quand je lui parle du petit
1615 nier livre : n’y affirme-t-il pas, avec preuves à l’ appui, que Tristan et Iseut, les amants légendaires, les héros de la p
1616 as, avec preuves à l’appui, que Tristan et Iseut, les amants légendaires, les héros de la passion, ne s’aimaient pas ? Quan
1617 ui, que Tristan et Iseut, les amants légendaires, les héros de la passion, ne s’aimaient pas ? Quand j’ai commencé à écrire
1618 an et Iseut, les amants légendaires, les héros de la passion, ne s’aimaient pas ? Quand j’ai commencé à écrire mon livre,
1619 e voulais simplement étudier ce mythe et analyser la crise du mariage à notre époque. Mais plus je relisais les différente
1620 du mariage à notre époque. Mais plus je relisais les différentes versions du roman, plus je me sentais gêné, mal à l’aise.
1621 première rencontre, ne s’aiment qu’après avoir bu le philtre, ne peuvent plus se supporter au bout de trois ans de vie com
1622 upporter au bout de trois ans de vie commune dans la forêt et qui, Tristan ayant épousé Iseut aux blanches mains, l’autre
1623 utre Iseut, ne reconnaissent plus leur amour qu’à l’ heure où la mort le défigure déjà… tout cela est rempli de bizarreries
1624 ne reconnaissent plus leur amour qu’à l’heure où la mort le défigure déjà… tout cela est rempli de bizarreries, de contra
1625 nnaissent plus leur amour qu’à l’heure où la mort le défigure déjà… tout cela est rempli de bizarreries, de contradictions
1626 défendre : ce que Tristan et Iseut aiment, c’est le fait d’aimer. Jamais Tristan ne dit à Iseut qu’il l’aime, il se borne
1627 fait d’aimer. Jamais Tristan ne dit à Iseut qu’il l’ aime, il se borne à répéter : « Amor par force me demeisne ». C’est la
1628 à répéter : « Amor par force me demeisne ». C’est la passion-catastrophe, qui ne peut se résoudre que dans la mort, et ins
1629 ion-catastrophe, qui ne peut se résoudre que dans la mort, et inspirera tout le romantisme. Mais elle inspire d’abord la l
1630 t se résoudre que dans la mort, et inspirera tout le romantisme. Mais elle inspire d’abord la littérature courtoise… Litté
1631 era tout le romantisme. Mais elle inspire d’abord la littérature courtoise… Littérature dont le succès rapide s’explique m
1632 ’abord la littérature courtoise… Littérature dont le succès rapide s’explique mal, car elle implique une subtilité, des ra
1633 sence de sensualité qui s’opposaient aux mœurs de l’ époque. Qui s’opposait surtout, complète Denis de Rougemont, à la conc
1634 ’opposait surtout, complète Denis de Rougemont, à la conception chrétienne du mariage. L’amour courtois est chaste, il acc
1635 Rougemont, à la conception chrétienne du mariage. L’ amour courtois est chaste, il accorde à la femme une prééminence dont
1636 ariage. L’amour courtois est chaste, il accorde à la femme une prééminence dont l’Église a bien senti le danger, puisqu’el
1637 haste, il accorde à la femme une prééminence dont l’ Église a bien senti le danger, puisqu’elle a développé le culte de Not
1638 femme une prééminence dont l’Église a bien senti le danger, puisqu’elle a développé le culte de Notre-Dame pour répondre
1639 e a bien senti le danger, puisqu’elle a développé le culte de Notre-Dame pour répondre au culte de la « Dame » des troubad
1640 le culte de Notre-Dame pour répondre au culte de la « Dame » des troubadours. Cet amour courtois ne fleurit que parmi les
1641 ubadours. Cet amour courtois ne fleurit que parmi les obstacles, exclut toute idée de progéniture, de famille ; il va contr
1642 te idée de progéniture, de famille ; il va contre les appétits de l’homme et les directives de l’Église. Comment a-t-il pu,
1643 niture, de famille ; il va contre les appétits de l’ homme et les directives de l’Église. Comment a-t-il pu, en moins de vi
1644 famille ; il va contre les appétits de l’homme et les directives de l’Église. Comment a-t-il pu, en moins de vingt ans, dom
1645 ntre les appétits de l’homme et les directives de l’ Église. Comment a-t-il pu, en moins de vingt ans, dominer ainsi toute
1646 il pu, en moins de vingt ans, dominer ainsi toute la littérature ? Beaucoup d’historiens, d’érudits, se sont posé la quest
1647 d’érudits, se sont posé la question sans pouvoir la résoudre. Pour moi, l’explication n’est pas douteuse. L’amour courtoi
1648 é la question sans pouvoir la résoudre. Pour moi, l’ explication n’est pas douteuse. L’amour courtois est directement issu
1649 udre. Pour moi, l’explication n’est pas douteuse. L’ amour courtois est directement issu du catharisme. Vous savez que l’hé
1650 st directement issu du catharisme. Vous savez que l’ hérésie cathare, que la croisade contre les albigeois réprima sans l’a
1651 catharisme. Vous savez que l’hérésie cathare, que la croisade contre les albigeois réprima sans l’anéantir, eut des millio
1652 vez que l’hérésie cathare, que la croisade contre les albigeois réprima sans l’anéantir, eut des millions de partisans. Ven
1653 que la croisade contre les albigeois réprima sans l’ anéantir, eut des millions de partisans. Venue de Macédoine, elle gagn
1654 ions de partisans. Venue de Macédoine, elle gagna la France par le Piémont. Les cathares rejettent le dogme de l’incarnati
1655 ans. Venue de Macédoine, elle gagna la France par le Piémont. Les cathares rejettent le dogme de l’incarnation, se fondent
1656 e Macédoine, elle gagna la France par le Piémont. Les cathares rejettent le dogme de l’incarnation, se fondent sur une inte
1657 la France par le Piémont. Les cathares rejettent le dogme de l’incarnation, se fondent sur une interprétation purement sp
1658 ar le Piémont. Les cathares rejettent le dogme de l’ incarnation, se fondent sur une interprétation purement spiritualiste
1659 ngiles. Ils font du Saint-Esprit la Mère de Dieu, le principe féminin de l’amour. En embrassant le catharisme, le néophyte
1660 nt-Esprit la Mère de Dieu, le principe féminin de l’ amour. En embrassant le catharisme, le néophyte s’engageait, s’il étai
1661 eu, le principe féminin de l’amour. En embrassant le catharisme, le néophyte s’engageait, s’il était marié, à s’abstenir d
1662 féminin de l’amour. En embrassant le catharisme, le néophyte s’engageait, s’il était marié, à s’abstenir de tout contact
1663 arié, à s’abstenir de tout contact avec sa femme. Les cathares admettaient le suicide. Glorification de l’esprit d’amour, c
1664 t contact avec sa femme. Les cathares admettaient le suicide. Glorification de l’esprit d’amour, chasteté et mépris de la
1665 cathares admettaient le suicide. Glorification de l’ esprit d’amour, chasteté et mépris de la chair, goût de la mort que l’
1666 cation de l’esprit d’amour, chasteté et mépris de la chair, goût de la mort que l’on préfère aux biens de ce monde, profus
1667 d’amour, chasteté et mépris de la chair, goût de la mort que l’on préfère aux biens de ce monde, profusion de symboles… N
1668 asteté et mépris de la chair, goût de la mort que l’ on préfère aux biens de ce monde, profusion de symboles… Nous retrouvo
1669 ce monde, profusion de symboles… Nous retrouvons la religion cathare, telle que les procès de l’Inquisition permettent de
1670 s… Nous retrouvons la religion cathare, telle que les procès de l’Inquisition permettent de la connaître, tous les thèmes d
1671 vons la religion cathare, telle que les procès de l’ Inquisition permettent de la connaître, tous les thèmes des troubadour
1672 lle que les procès de l’Inquisition permettent de la connaître, tous les thèmes des troubadours, développés avec un lyrism
1673 de l’Inquisition permettent de la connaître, tous les thèmes des troubadours, développés avec un lyrisme, un vocabulaire qu
1674 des siècles ceux des grands mystiques. Ainsi tous les troubadours étaient des cathares ? J’en suis persuadé, dit Denis de R
1675 théorie aussi originale. D’ailleurs, on sait que les troubadours n’allaient que chez les seigneurs cathares, fort nombreux
1676 , on sait que les troubadours n’allaient que chez les seigneurs cathares, fort nombreux, et qui adoptaient cette hé­résie a
1677 s d’enthousiasme qu’ils étaient souvent jaloux de l’ autorité temporelle exercée par le clergé. Donc l’amour-passion serait
1678 uvent jaloux de l’autorité temporelle exercée par le clergé. Donc l’amour-passion serait une hérésie chrétienne ? … Dont n
1679 l’autorité temporelle exercée par le clergé. Donc l’ amour-passion serait une hérésie chrétienne ? … Dont nous avons perdu
1680 une hérésie chrétienne ? … Dont nous avons perdu la clef, et qui a pourtant inspiré toute notre littérature, reprend Deni
1681 te notre littérature, reprend Denis de Rougemont. Le mythe de Tristan et Iseut, qui pose pour la première fois ce fameux t
1682 ui pose pour la première fois ce fameux triangle, le mari, la femme et l’amant, qui est le sujet essentiel de toute la lit
1683 our la première fois ce fameux triangle, le mari, la femme et l’amant, qui est le sujet essentiel de toute la littérature
1684 ère fois ce fameux triangle, le mari, la femme et l’ amant, qui est le sujet essentiel de toute la littérature occidentale,
1685 x triangle, le mari, la femme et l’amant, qui est le sujet essentiel de toute la littérature occidentale, n’a surgi dans l
1686 e et l’amant, qui est le sujet essentiel de toute la littérature occidentale, n’a surgi dans la littérature orientale que
1687 toute la littérature occidentale, n’a surgi dans la littérature orientale que tout dernièrement, à la suite du christiani
1688 la littérature orientale que tout dernièrement, à la suite du christianisme. J’avoue que votre démonstration me paraît con
1689 yen Âge ? Denis de Rougemont sourit avec malice : Les philologues ont un respect de la lettre qui leur cache parfois le sen
1690 t avec malice : Les philologues ont un respect de la lettre qui leur cache parfois le sens profond des textes… Ils répugne
1691 nt un respect de la lettre qui leur cache parfois le sens profond des textes… Ils répugnent à l’emploi des méthodes freudi
1692 rfois le sens profond des textes… Ils répugnent à l’ emploi des méthodes freudiennes. Or j’ai été frappé par le goût de la
1693 des méthodes freudiennes. Or j’ai été frappé par le goût de la mort que l’on retrouve à la fois dans le catharisme, dans
1694 es freudiennes. Or j’ai été frappé par le goût de la mort que l’on retrouve à la fois dans le catharisme, dans Tristan et
1695 es. Or j’ai été frappé par le goût de la mort que l’ on retrouve à la fois dans le catharisme, dans Tristan et Iseut et che
1696 goût de la mort que l’on retrouve à la fois dans le catharisme, dans Tristan et Iseut et chez les lyriques courtois, goût
1697 dans le catharisme, dans Tristan et Iseut et chez les lyriques courtois, goût qui n’est autre que l’instinct de la mort tel
1698 z les lyriques courtois, goût qui n’est autre que l’ instinct de la mort tel que Freud l’a analysé. À une époque où le stat
1699 courtois, goût qui n’est autre que l’instinct de la mort tel que Freud l’a analysé. À une époque où le statut du mariage
1700 est autre que l’instinct de la mort tel que Freud l’ a analysé. À une époque où le statut du mariage se modifie profondémen
1701 a mort tel que Freud l’a analysé. À une époque où le statut du mariage se modifie profondément, croyez-vous que ce fameux
1702 que ce fameux triangle, qui suppose en définitive le mariage, puisse encore inspirer la littérature ? Denis de Rougemont r
1703 en définitive le mariage, puisse encore inspirer la littérature ? Denis de Rougemont réfléchit : Non, je crois que nous s
1704 araître. Mais c’est encore lui qui pèse sur toute la crise du mariage. Comment cela ? C’est très simple. Nous souffrons d’
1705 ne double contradiction. Romans, poèmes, musique, l’ art et la littérature nous représentent la passion comme un paroxysme
1706 contradiction. Romans, poèmes, musique, l’art et la littérature nous représentent la passion comme un paroxysme désirable
1707 usique, l’art et la littérature nous représentent la passion comme un paroxysme désirable, comme un état d’exception où l’
1708 paroxysme désirable, comme un état d’exception où l’ être se dépasse lui-même. Nous aspirons donc à connaître cet état que,
1709 tan et peut-être inconsciemment, nous préférons à l’ être aimé. D’autre part, on nous montre le mariage comme le fondement
1710 érons à l’être aimé. D’autre part, on nous montre le mariage comme le fondement essentiel de notre société. Mais la passio
1711 mé. D’autre part, on nous montre le mariage comme le fondement essentiel de notre société. Mais la passion, par définition
1712 mme le fondement essentiel de notre société. Mais la passion, par définition, reste extérieure au mariage, puisqu’elle a b
1713 qu’elle a besoin d’obstacles, et ne résiste pas à la facilité, à l’habitude. Exclue de la vie conjugale, la passion se réf
1714 n d’obstacles, et ne résiste pas à la facilité, à l’ habitude. Exclue de la vie conjugale, la passion se réfugie dans l’adu
1715 ésiste pas à la facilité, à l’habitude. Exclue de la vie conjugale, la passion se réfugie dans l’adultère. Maris et femmes
1716 cilité, à l’habitude. Exclue de la vie conjugale, la passion se réfugie dans l’adultère. Maris et femmes, chacun de leur c
1717 e de la vie conjugale, la passion se réfugie dans l’ adultère. Maris et femmes, chacun de leur côté, rêvent de l’aventure q
1718 . Maris et femmes, chacun de leur côté, rêvent de l’ aventure qui leur apparaît comme la seule évasion. Croyez-vous que cel
1719 ôté, rêvent de l’aventure qui leur apparaît comme la seule évasion. Croyez-vous que cela puisse embellir, faciliter la vie
1720 . Croyez-vous que cela puisse embellir, faciliter la vie commune ? Certes, non. Mais aujourd’hui, les jeunes gens et les j
1721 r la vie commune ? Certes, non. Mais aujourd’hui, les jeunes gens et les jeunes filles se refusent à l’hypocrisie, ne conse
1722 Certes, non. Mais aujourd’hui, les jeunes gens et les jeunes filles se refusent à l’hypocrisie, ne consentent plus à refoul
1723 es jeunes gens et les jeunes filles se refusent à l’ hypocrisie, ne consentent plus à refouler leurs instincts naturels. En
1724 us à refouler leurs instincts naturels. En outre, les difficultés matérielles compliquent encore le problème du mariage. Cr
1725 e, les difficultés matérielles compliquent encore le problème du mariage. Croyez-vous que les problèmes de la vie sentimen
1726 nt encore le problème du mariage. Croyez-vous que les problèmes de la vie sentimentale et sexuelle puissent trouver une sol
1727 lème du mariage. Croyez-vous que les problèmes de la vie sentimentale et sexuelle puissent trouver une solution nouvelle ?
1728 e Rougemont, il ne peut y avoir qu’une solution : le mariage chrétien, mais présenté d’une manière nouvelle. C’est-à-dire
1729 u’au lieu d’en faire un acte raisonnable, il faut le montrer tel qu’il est en réalité : l’aventure la plus difficile. Si v
1730 le, il faut le montrer tel qu’il est en réalité : l’ aventure la plus difficile. Si vous ne fondez pas le mariage sur une d
1731 le montrer tel qu’il est en réalité : l’aventure la plus difficile. Si vous ne fondez pas le mariage sur une décision réf
1732 aventure la plus difficile. Si vous ne fondez pas le mariage sur une décision réfléchie, sur quoi le fondez-vous ? Sur la
1733 s le mariage sur une décision réfléchie, sur quoi le fondez-vous ? Sur la fidélité, qui me paraît en même temps le véritab
1734 décision réfléchie, sur quoi le fondez-vous ? Sur la fidélité, qui me paraît en même temps le véritable fondement de la pe
1735 us ? Sur la fidélité, qui me paraît en même temps le véritable fondement de la personnalité. Mais pour moi cette fidélité
1736 me paraît en même temps le véritable fondement de la personnalité. Mais pour moi cette fidélité doit être observée en vert
1737 moi cette fidélité doit être observée en vertu de l’ absurde. Elle est aussi absurde que la passion, mais s’en distingue pa
1738 en vertu de l’absurde. Elle est aussi absurde que la passion, mais s’en distingue par un refus constant de subir ses rêves
1739 t de subir ses rêves, par une constante prise sur le réel. Elle reste une folie, mais la plus sobre et la plus quotidienne
1740 nte prise sur le réel. Elle reste une folie, mais la plus sobre et la plus quotidienne. Votre réhabilitation de la fidélit
1741 réel. Elle reste une folie, mais la plus sobre et la plus quotidienne. Votre réhabilitation de la fidélité, si conforme à
1742 e et la plus quotidienne. Votre réhabilitation de la fidélité, si conforme à la conception chrétienne du ma­riage, suppose
1743 otre réhabilitation de la fidélité, si conforme à la conception chrétienne du ma­riage, suppose chez les femmes, qui doive
1744 a conception chrétienne du ma­riage, suppose chez les femmes, qui doivent être sans cesse capables de se renouveler, un ens
1745 lités agréa­bles assez difficiles à concilier. Je le sais, je suis très exigeant. Pour moi, le mariage devrait être une in
1746 ier. Je le sais, je suis très exigeant. Pour moi, le mariage devrait être une institution qui main­tient la passion non pa
1747 riage devrait être une institution qui main­tient la passion non par la morale, mais par l’amour. C’est un idéal qui mérit
1748 une institution qui main­tient la passion non par la morale, mais par l’amour. C’est un idéal qui mérite bien certains eff
1749 main­tient la passion non par la morale, mais par l’ amour. C’est un idéal qui mérite bien certains efforts et certains sac
1750 semble. Ne devez-vous pas publier un roman, dont le titre, La Folle Vertu, illustre bien votre pensée ? Oui, je l’ai écri
1751 e devez-vous pas publier un roman, dont le titre, La Folle Vertu, illustre bien votre pensée ? Oui, je l’ai écrit presque
1752 Folle Vertu, illustre bien votre pensée ? Oui, je l’ ai écrit presque en même temps que L’Amour et l’Occident . Mais je ne
1753 e ? Oui, je l’ai écrit presque en même temps que L’ Amour et l’Occident . Mais je ne le ferai pas paraître tout de suite.
1754 l’ai écrit presque en même temps que L’Amour et l’ Occident . Mais je ne le ferai pas paraître tout de suite. J’ai aussi
1755 ême temps que L’Amour et l’Occident . Mais je ne le ferai pas paraître tout de suite. J’ai aussi terminé deux livres d’es
1756 é deux livres d’essais : Doctrine fabuleuse et Les Personnages du dram e. Et en ce moment, à quoi travaillez-vous ? J’a
1757 i travaillez-vous ? J’ai en chantier un livre sur La Réforme comme Révolution. Mais je l’ai un peu délaissé au profit d’un
1758 un livre sur La Réforme comme Révolution. Mais je l’ ai un peu délaissé au profit d’un drame que j’écris pour l’Exposition
1759 eu délaissé au profit d’un drame que j’écris pour l’ Exposition de Zurich. Je veux mettre en scène un héros suisse, le bien
1760 Zurich. Je veux mettre en scène un héros suisse, le bienheureux Nicolas de Flue, qui eut une vie extraordinaire. D’abord
1761 rtifia, jeûnant complètement. Mais, apprenant que la guerre civile menaçait, il quitta sa grotte, et rétablit la paix par
1762 civile menaçait, il quitta sa grotte, et rétablit la paix par le covenant de 1481. Puis il se retourna dans son ermitage e
1763 ait, il quitta sa grotte, et rétablit la paix par le covenant de 1481. Puis il se retourna dans son ermitage et y mourut.
1764 plein air, devant cinq ou six-mille spectateurs. La scène aura trente mètres de large, et trois étages, qu’il faut ne jam
1765 s phrases très courtes, un peu comme des slogans. Le chœur jouera un rôle important dans l’action, comme dans la tragédie
1766 s slogans. Le chœur jouera un rôle important dans l’ action, comme dans la tragédie grecque. C’est un travail tout nouveau
1767 ouera un rôle important dans l’action, comme dans la tragédie grecque. C’est un travail tout nouveau pour moi, et très amu
1768 nde s’il n’attend pas avec une certaine curiosité les réactions que vont susciter certaines de ses théories un peu révoluti
1769 portance aux querelles que pourraient me chercher les savants. Ce qui me touche, c’est que mon livre, paru il y a huit jour
1770 rouvaient mal mariés. Ils me disent que mon livre les aide à comprendre la cause de leur désarroi, qu’ils savent mieux main
1771 Ils me disent que mon livre les aide à comprendre la cause de leur désarroi, qu’ils savent mieux maintenant comment ils po
1772 rop se blesser, ce sera ma plus belle récompense. Le véritable esprit chrétien, la véritable intelligence, n’est-ce pas de
1773 s belle récompense. Le véritable esprit chrétien, la véritable intelligence, n’est-ce pas de voir les limites d’où l’on ne
1774 , la véritable intelligence, n’est-ce pas de voir les limites d’où l’on ne peut s’échapper ? u. Rougemont Denis de, « [E
1775 telligence, n’est-ce pas de voir les limites d’où l’ on ne peut s’échapper ? u. Rougemont Denis de, « [Entretien] Non, T
1776 tretien] Non, Tristan et Iseut ne s’aiment pas », Les Nouvelles littéraires, Paris, 12 février 1939, p. 3. v. Interview pa
15 1963, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Mais qui est donc Denis de Rougemont (7 novembre 1963)
1777 1963)w x Pour beaucoup, Denis de Rougemont est l’ auteur d’une thèse retentissante, intitulée L’Amour et l’Occident et
1778 st l’auteur d’une thèse retentissante, intitulée L’ Amour et l’Occident et dans laquelle il démontrait que l’idée de pass
1779 d’une thèse retentissante, intitulée L’Amour et l’ Occident et dans laquelle il démontrait que l’idée de passion amoureu
1780 et l’Occident et dans laquelle il démontrait que l’ idée de passion amoureuse trouvait ses origines dans la poésie cathare
1781 e de passion amoureuse trouvait ses origines dans la poésie cathare. Pour les disciples d’Emmanuel Mounier, il est surtout
1782 rouvait ses origines dans la poésie cathare. Pour les disciples d’Emmanuel Mounier, il est surtout le philosophe de Politi
1783 les disciples d’Emmanuel Mounier, il est surtout le philosophe de Politique de la personne . Pour quelques autres, il es
1784 er, il est surtout le philosophe de Politique de la personne . Pour quelques autres, il est l’écrivain qui a le mieux ana
1785 que de la personne . Pour quelques autres, il est l’ écrivain qui a le mieux analysé la résistible ascension d’Adolf Hitler
1786 e . Pour quelques autres, il est l’écrivain qui a le mieux analysé la résistible ascension d’Adolf Hitler (dans Journal d
1787 autres, il est l’écrivain qui a le mieux analysé la résistible ascension d’Adolf Hitler (dans Journal d’Allemagne et J
1788 ne et Journal des deux mondes notamment). Pour les mélomanes, il est le poète de Nicolas de Flue , dont Honegger tira u
1789 ux mondes notamment). Pour les mélomanes, il est le poète de Nicolas de Flue , dont Honegger tira un oratorio. Pour tous
1790 tira un oratorio. Pour tous enfin, il est, depuis la semaine dernière, le lauréat du Grand Prix littéraire de Monaco. Mais
1791 r tous enfin, il est, depuis la semaine dernière, le lauréat du Grand Prix littéraire de Monaco. Mais qui est en réalité D
1792 ugemont ? On a dit beaucoup de bêtises — lui-même le déclare — sur l’homme et sur son œuvre, cette œuvre dont tout le mond
1793 t beaucoup de bêtises — lui-même le déclare — sur l’ homme et sur son œuvre, cette œuvre dont tout le monde parle et que pe
1794 t incompréhensible, et choisirait, quand il ouvre la bouche, de s’exprimer en français plutôt qu’en miaulant ou en barriss
1795 un écrivain français, un point c’est tout. Il est l’ auteur d’un certain nombre d’ouvrages qui, tenant à la fois du journal
1796 e d’ouvrages qui, tenant à la fois du journal, de l’ essai, de la polémique et du récit, ne correspondent à aucun genre lit
1797 qui, tenant à la fois du journal, de l’essai, de la polémique et du récit, ne correspondent à aucun genre littéraire préc
1798 mment définirait-on Nietzsche ou Kierkegaard ? Si l’ on veut absolument coller une étiquette, disons que je suis un essayis
1799 n’est pas que je veuille me comparer à eux, mais la forme est la même : un mélange d’idées pures, de poésie, de descripti
1800 e je veuille me comparer à eux, mais la forme est la même : un mélange d’idées pures, de poésie, de descriptions et d’anec
1801 gemont participe, aux côtés d’Emmanuel Mounier, à la fondation de deux revues personnalistes : L’Ordre nouveau et Esprit.
1802 u christianisme. Au mot « humaniste », je préfère le mot « moraliste ». … illustrée par son livre : Politique de la perso
1803 iste ». … illustrée par son livre : Politique de la personne . Politique de la personne était un manifeste qui déclenc
1804 ivre : Politique de la personne . Politique de la personne était un manifeste qui déclencha une polémique à laquelle p
1805 rt Berdiaev, Mounier et Gabriel Marcel. Pour moi, la « personne » n’est ni un individu refermé sur lui-même ni la minuscul
1806 ne » n’est ni un individu refermé sur lui-même ni la minuscule partie d’une masse, mais un homme ouvert aux idées, à la fo
1807 fois libre et responsable. Il y a une vocation de la personne, vocation qui, à la fois, distingue l’homme et le relie à la
1808 e la personne, vocation qui, à la fois, distingue l’ homme et le relie à la communauté où il l’exerce. C’est d’ailleurs dan
1809 ne, vocation qui, à la fois, distingue l’homme et le relie à la communauté où il l’exerce. C’est d’ailleurs dans cette not
1810 n qui, à la fois, distingue l’homme et le relie à la communauté où il l’exerce. C’est d’ailleurs dans cette notion de l’ho
1811 stingue l’homme et le relie à la communauté où il l’ exerce. C’est d’ailleurs dans cette notion de l’homme que je place le
1812 l l’exerce. C’est d’ailleurs dans cette notion de l’ homme que je place le point d’insertion de Dieu. Je suis tout à fait o
1813 illeurs dans cette notion de l’homme que je place le point d’insertion de Dieu. Je suis tout à fait opposé aux doctrines p
1814 ui font de Dieu un Jéhovah jugeant et agissant de l’ extérieur. Dieu est en l’homme. En 1935, il est nommé lecteur à l’Univ
1815 h jugeant et agissant de l’extérieur. Dieu est en l’ homme. En 1935, il est nommé lecteur à l’Université de Francfort et sé
1816 u est en l’homme. En 1935, il est nommé lecteur à l’ Université de Francfort et séjournera un an en Allemagne hitlérienne.
1817 me trouvais sans activité à Paris, où j’écrivais le Journal d’un intellectuel en chômage , quand je rencontrai Abetz. Il
1818 pensez pis que pendre de notre régime, allez donc l’ observer de plus près. » J’acceptai à une condition, celle d’écrire en
1819 u en 1938. J’eus d’ailleurs d’autres démêlés avec les autorités allemandes, quand j’écrivis un article dans la Gazette de L
1820 rités allemandes, quand j’écrivis un article dans la Gazette de Lausanne sur l’entrée de Hitler dans Paris. Les Allemands
1821 crivis un article dans la Gazette de Lausanne sur l’ entrée de Hitler dans Paris. Les Allemands demandèrent que je sois pun
1822 te de Lausanne sur l’entrée de Hitler dans Paris. Les Allemands demandèrent que je sois puni et j’ai reçu quinze jours de p
1823 t j’ai reçu quinze jours de prison militaire sous le prétexte qu’un officier neutre n’a pas le droit d’outrager un chef d’
1824 re sous le prétexte qu’un officier neutre n’a pas le droit d’outrager un chef d’État étranger ! De Suisse, Denis de Rougem
1825 envoyé en Amérique où il passera six ans, écrira La Part du diable et se liera avec plusieurs écrivains français. On déc
1826 n Amérique qu’en Europe. À New York, je rédigeais les émissions en français de « La Voix de l’Amérique ». J’avais plusieurs
1827 York, je rédigeais les émissions en français de «  La Voix de l’Amérique ». J’avais plusieurs équipes de speakers, dont fai
1828 digeais les émissions en français de « La Voix de l’ Amérique ». J’avais plusieurs équipes de speakers, dont faisaient part
1829 e André Breton, Marcel Ozenfant, un fils Pitoëff, le critique d’art Georges Duthuit, l’ethnologue Claude Lévi-Strauss. De
1830 fils Pitoëff, le critique d’art Georges Duthuit, l’ ethnologue Claude Lévi-Strauss. De temps en temps, Julien Green m’appo
1831 en Green m’apportait des textes. Je fis également la connaissance de Saint-John Perse et du peintre Marcel Duchamp, qui ré
1832 dinaire vitrine surréaliste dans une librairie de la 5e Avenue pour l’exposition de mon livre : La Part du diable . Rentr
1833 rréaliste dans une librairie de la 5e Avenue pour l’ exposition de mon livre : La Part du diable . Rentré en Europe en 194
1834 de la 5e Avenue pour l’exposition de mon livre : La Part du diable . Rentré en Europe en 1946, Denis de Rougemont s’engag
1835 e en 1946, Denis de Rougemont s’engage alors dans l’ action politique en militant pour la cause du fédéralisme européen. Fo
1836 ge alors dans l’action politique en militant pour la cause du fédéralisme européen. Fondateur et président du Congrès euro
1837 . Fondateur et président du Congrès européen pour la liberté de la culturey, son activité se situera désormais sur deux pl
1838 président du Congrès européen pour la liberté de la culturey, son activité se situera désormais sur deux plans : l’écriva
1839 on activité se situera désormais sur deux plans : l’ écrivain d’une part, le fédéralisme de l’autre. Je vous arrête : il n’
1840 désormais sur deux plans : l’écrivain d’une part, le fédéralisme de l’autre. Je vous arrête : il n’y a pas, il n’y a jamai
1841 naturellement et sans rupture de ma définition de la « personne » à la théorie fédéraliste. L’homme, vous ai-je dit, doit
1842 ans rupture de ma définition de la « personne » à la théorie fédéraliste. L’homme, vous ai-je dit, doit être à la fois lib
1843 tion de la « personne » à la théorie fédéraliste. L’ homme, vous ai-je dit, doit être à la fois libre et responsable ; de m
1844 et responsable ; de même pour chaque nation dans l’ Europe fédérée que je préconise et qui n’est que la transposition à un
1845 ’Europe fédérée que je préconise et qui n’est que la transposition à une échelle géante de la Confédération helvétique. Je
1846 ’est que la transposition à une échelle géante de la Confédération helvétique. Je ne souhaite en effet ni une agglomératio
1847 libres de leur gestion intérieure et responsables les unes des autres devant le danger commun. Nous serions ainsi 350 milli
1848 rieure et responsables les unes des autres devant le danger commun. Nous serions ainsi 350 millions d’Européens solidaires
1849 solidaires, ce qui représente presque autant que les populations des États-Unis et de l’URSS réunies. Comprenez-moi donc b
1850 e autant que les populations des États-Unis et de l’ URSS réunies. Comprenez-moi donc bien : personnalisme et fédéralisme,
1851 rsonnalisme et fédéralisme, c’est tout un. Enfin, le 28 octobre 1963, Denis de Rougemont a reçu des mains du Prince Rainie
1852 Rainier le Grand Prix littéraire de Monaco. Selon la formule consacrée, je suis ravi d’avoir reçu ce prix, malgré une peti
1853 vain. À ce propos, savez-vous où Ionesco a trouvé le sujet de son Rhinocéros ? Dans mon Journal d’Allemagne , c’est lui-m
1854 mon Journal d’Allemagne , c’est lui-même qui me l’ a dit. w. Rougemont Denis de, « [Entretien] Mais qui est donc Denis
1855 retien] Mais qui est donc Denis de Rougemont ? », Les Nouvelles littéraires, Paris, 7 novembre 1963, p. 3. x. Interview pa
1856 e 1963, p. 3. x. Interview par Pierre Ajame. y. Le journaliste commet ici manifestement une erreur, en confondant le Cen
1857 ommet ici manifestement une erreur, en confondant le Centre européen de la culture, que Rougemont fonda et dirigea à Genèv
1858 nt fonda et dirigea à Genève à partir de 1950, et le Congrès pour la liberté de la culture, dans lequel Rougemont s’engage
1859 gea à Genève à partir de 1950, et le Congrès pour la liberté de la culture, dans lequel Rougemont s’engagea en parallèle,
1860 partir de 1950, et le Congrès pour la liberté de la culture, dans lequel Rougemont s’engagea en parallèle, mais dont il n
1861 engagea en parallèle, mais dont il ne fut « que » le président du comité exécutif, de 1951 à 1966.
16 1970, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Les prophètes de la décadence (24 septembre 1970)
1862 Les prophètes de la décadence (24 septembre 1970)z aa Le xxe siècle a
1863 Les prophètes de la décadence (24 septembre 1970)z aa Le xxe siècle a vu la civilisat
1864 phètes de la décadence (24 septembre 1970)z aa Le xxe siècle a vu la civilisation — qui ne saurait être que la nôtre,
1865 ce (24 septembre 1970)z aa Le xxe siècle a vu la civilisation — qui ne saurait être que la nôtre, quand on en parle au
1866 le a vu la civilisation — qui ne saurait être que la nôtre, quand on en parle au singulier — étendre à toute la terre ses
1867 quand on en parle au singulier — étendre à toute la terre ses bienfaits, ses méfaits, ses produits, rarement ses valeurs,
1868 , et toujours ses vulgarités. Mais en même temps, le xxe siècle a vu se multiplier les prophètes de la décadence européen
1869 en même temps, le xxe siècle a vu se multiplier les prophètes de la décadence européenne : et ils sont tous, ou presque t
1870 e xxe siècle a vu se multiplier les prophètes de la décadence européenne : et ils sont tous, ou presque tous, Européens.
1871 ous, Européens. Loin de s’émerveiller du fait que le génie européen rayonne sur le monde entier, ils préfèrent nous parler
1872 veiller du fait que le génie européen rayonne sur le monde entier, ils préfèrent nous parler de notre éclipse. Au lendemai
1873 ain de la Première Guerre mondiale déclenchée par l’ Europe, en 1919, Paul Valéry écrivait cette phrase célèbre : Nous au
1874 Ninive, Babylone étaient de beaux noms vagues, et la ruine totale de ces mondes avait aussi peu de signification pour nous
1875 si est un beau nom. Et nous voyons maintenant que l’ abîme de l’Histoire est assez grand pour tout le monde. Nous sentons q
1876 eau nom. Et nous voyons maintenant que l’abîme de l’ Histoire est assez grand pour tout le monde. Nous sentons qu’une civil
1877 e l’abîme de l’Histoire est assez grand pour tout le monde. Nous sentons qu’une civilisation a la même fragilité qu’une vi
1878 tout le monde. Nous sentons qu’une civilisation a la même fragilité qu’une vie. Les circonstances qui enverraient les œuvr
1879 ’une civilisation a la même fragilité qu’une vie. Les circonstances qui enverraient les œuvres de Keats et celles de Baudel
1880 ité qu’une vie. Les circonstances qui enverraient les œuvres de Keats et celles de Baudelaire rejoindre les œuvres de Ménan
1881 œuvres de Keats et celles de Baudelaire rejoindre les œuvres de Ménandre ne sont plus du tout inconcevables : elles sont da
1882 sont plus du tout inconcevables : elles sont dans les journaux. L’écho de cette page fut immense et je sais peu de phrases
1883 ut inconcevables : elles sont dans les journaux. L’ écho de cette page fut immense et je sais peu de phrases plus fréquemm
1884 citées que celle qui annonce en somme que toutes les civilisations étant mortelles, la nôtre aussi pourrait périr, va donc
1885 mme que toutes les civilisations étant mortelles, la nôtre aussi pourrait périr, va donc probablement périr. Pour émouvant
1886 soit, elle exprime, à mon sens, l’une des erreurs les plus célèbres de l’époque. Mais comment expliquer son succès ? Observ
1887 mon sens, l’une des erreurs les plus célèbres de l’ époque. Mais comment expliquer son succès ? Observons tout d’abord qu’
1888 ssimisme européen. Dès 1971, Volney, méditant sur la mort des civilisations, citait à peu près les mêmes noms pour illustr
1889 sur la mort des civilisations, citait à peu près les mêmes noms pour illustrer le même argument que Valéry : Que sont dev
1890 , citait à peu près les mêmes noms pour illustrer le même argument que Valéry : Que sont devenues tant de brillantes créa
1891 Que sont devenues tant de brillantes créations de la main de l’homme ? Où sont-ils, ces remparts de Ninive, ces murs de Ba
1892 venues tant de brillantes créations de la main de l’ homme ? Où sont-ils, ces remparts de Ninive, ces murs de Babylone, ces
1893 e, ces palais de Persépolis ?… Hélas, j’ai visité les lieux qui furent le théâtre de tant de splendeur, et je n’ai vu qu’ab
1894 épolis ?… Hélas, j’ai visité les lieux qui furent le théâtre de tant de splendeur, et je n’ai vu qu’abandon et que solitud
1895 ai vu qu’abandon et que solitude… Qui sait si sur les rivages de la Seine, de la Tamise ou du Zuydersee… qui sait si un voy
1896 n et que solitude… Qui sait si sur les rivages de la Seine, de la Tamise ou du Zuydersee… qui sait si un voyageur comme mo
1897 tude… Qui sait si sur les rivages de la Seine, de la Tamise ou du Zuydersee… qui sait si un voyageur comme moi ne s’assiér
1898 muettes ruines, et ne pleurera pas solitaire sur la cendre des peuples et la mémoire de leur grandeur ? Une trentaine d’
1899 eurera pas solitaire sur la cendre des peuples et la mémoire de leur grandeur ? Une trentaine d’armées plus tard, Hegel i
1900 trentaine d’armées plus tard, Hegel introduisait l’ idée que chaque peuple est « un individu dans la marche de l’histoire 
1901 t l’idée que chaque peuple est « un individu dans la marche de l’histoire » et qu’il obéit donc, comme tout individu, à un
1902 chaque peuple est « un individu dans la marche de l’ histoire » et qu’il obéit donc, comme tout individu, à une loi de croi
1903 et de déclin fatal. Hegel pensait d’ailleurs que la civilisation européenne marquait l’aboutissement suprême de l’Histoir
1904 ’ailleurs que la civilisation européenne marquait l’ aboutissement suprême de l’Histoire. Mais si l’on appliquait sa dialec
1905 on européenne marquait l’aboutissement suprême de l’ Histoire. Mais si l’on appliquait sa dialectique aux civilisations, on
1906 it l’aboutissement suprême de l’Histoire. Mais si l’ on appliquait sa dialectique aux civilisations, on en venait à penser
1907 t décliner et mourir après une période d’apogée — la nôtre aussi. Aux débuts du xxe siècle, Spengler va plus loin ; il es
1908 inexorablement que toute culture est mortelle, et l’ on rejoint la phrase de Valéry. Enfin, dans un effort tout à fait admi
1909 t que toute culture est mortelle, et l’on rejoint la phrase de Valéry. Enfin, dans un effort tout à fait admirable pour em
1910 ns un effort tout à fait admirable pour embrasser l’ ensemble des cultures connues, Toynbee croit pouvoir établir empirique
1911 Toynbee croit pouvoir établir empiriquement, par l’ examen comparatif des vingt et une civilisations qui auraient existé j
1912 une civilisations qui auraient existé jusqu’ici, les lois complexes, mais constantes, de leur genèse, de leur croissance e
1913 nt, par leurs conclusions, notre angoisse quant à l’ état présent de l’Europe dans le monde, et que, d’autre part, les plus
1914 lusions, notre angoisse quant à l’état présent de l’ Europe dans le monde, et que, d’autre part, les plus grands esprits du
1915 angoisse quant à l’état présent de l’Europe dans le monde, et que, d’autre part, les plus grands esprits du siècle précéd
1916 de l’Europe dans le monde, et que, d’autre part, les plus grands esprits du siècle précédent n’ont cessé d’annoncer les ca
1917 sprits du siècle précédent n’ont cessé d’annoncer les catastrophes qui ont fondu de nos jours sur l’Europe : de Kierkegaard
1918 r les catastrophes qui ont fondu de nos jours sur l’ Europe : de Kierkegaard à Nietzsche et à Dostoïevski, de Tocqueville à
1919 à Georges Sorel, tous ont décrit depuis cent ans les motifs de craindre le pire pour notre civilisation. Or voici que leur
1920 ont décrit depuis cent ans les motifs de craindre le pire pour notre civilisation. Or voici que leurs prédictions semblent
1921 ici que leurs prédictions semblent confirmées par les faits. Au cours des années qui suivent la Première Guerre mondiale, l
1922 s années qui suivent la Première Guerre mondiale, les dictatures prévues par Burckhardt et Sorel s’instaurent en Russie, en
1923 quie, en Italie et en Allemagne, puis en Espagne. Les nationalismes et les racismes, dénoncés d’avance par Nietzsche, proli
1924 Allemagne, puis en Espagne. Les nationalismes et les racismes, dénoncés d’avance par Nietzsche, prolifèrent sur les ruines
1925 dénoncés d’avance par Nietzsche, prolifèrent sur les ruines de l’Empire austro-hongrois. Et bientôt cette Europe occupée à
1926 ance par Nietzsche, prolifèrent sur les ruines de l’ Empire austro-hongrois. Et bientôt cette Europe occupée à se déchirer
1927 Elle ne voit pas encore, mais elle pressent déjà la perte de sa longue royauté mondiale. Déjà le communisme lui dispute,
1928 déjà la perte de sa longue royauté mondiale. Déjà le communisme lui dispute, non seulement en Asie et en Afrique, mais aux
1929 re jeunesse, son rôle de porteur du « flambeau de la civilisation ». La Seconde Guerre mondiale, née de cette crise intern
1930 le de porteur du « flambeau de la civilisation ». La Seconde Guerre mondiale, née de cette crise interne, va précipiter l’
1931 ndiale, née de cette crise interne, va précipiter l’ écroulement de l’hégémonie politique de l’Europe, et même le rendre, à
1932 tte crise interne, va précipiter l’écroulement de l’ hégémonie politique de l’Europe, et même le rendre, à vues humaines, d
1933 cipiter l’écroulement de l’hégémonie politique de l’ Europe, et même le rendre, à vues humaines, définitif. Au surplus, les
1934 ent de l’hégémonie politique de l’Europe, et même le rendre, à vues humaines, définitif. Au surplus, les nouveaux empires
1935 e rendre, à vues humaines, définitif. Au surplus, les nouveaux empires et les peuples émancipés proclament déjà leur volont
1936 s, définitif. Au surplus, les nouveaux empires et les peuples émancipés proclament déjà leur volonté de retourner contre no
1937 érielles… Que faudrait-il de plus, pour qu’on ait le droit de parler d’une éclipse ou d’une mort prévisible de notre civil
1938 par une élémentaire prudence historique. Primo, l’ hégémonie politique n’est pas toujours et nécessairement liée à la vit
1939 tique n’est pas toujours et nécessairement liée à la vitalité d’une civilisation. L’une peut exister sans l’autre. L’une p
1940 autre soit ruinée du même coup. Tchingis-Khan eut l’ hégémonie sans la civilisation, tandis que l’Europe du Moyen Âge eut u
1941 du même coup. Tchingis-Khan eut l’hégémonie sans la civilisation, tandis que l’Europe du Moyen Âge eut une civilisation s
1942 eut l’hégémonie sans la civilisation, tandis que l’ Europe du Moyen Âge eut une civilisation sans hégémonie. Secundo, il
1943 monie. Secundo, il n’est pas du tout certain que les précédents historiques soient applicables dans notre situation, ni qu
1944 s soient applicables dans notre situation, ni que la courbe croissance-grandeur-décadence soit la même pour toutes les cul
1945 que la courbe croissance-grandeur-décadence soit la même pour toutes les cultures dans tous les temps. Les prophètes de l
1946 sance-grandeur-décadence soit la même pour toutes les cultures dans tous les temps. Les prophètes de la décadence de l’Occi
1947 e soit la même pour toutes les cultures dans tous les temps. Les prophètes de la décadence de l’Occident, Spengler, Valéry
1948 ême pour toutes les cultures dans tous les temps. Les prophètes de la décadence de l’Occident, Spengler, Valéry et Toynbee,
1949 es cultures dans tous les temps. Les prophètes de la décadence de l’Occident, Spengler, Valéry et Toynbee, se fondaient su
1950 tous les temps. Les prophètes de la décadence de l’ Occident, Spengler, Valéry et Toynbee, se fondaient sur le précédent d
1951 nt, Spengler, Valéry et Toynbee, se fondaient sur le précédent de civilisations antiques aujourd’hui « disparues », et par
1952 ujourd’hui « disparues », et particulièrement sur l’ exemple le mieux connu des Européens, celui de la chute de Rome, qui e
1953 « disparues », et particulièrement sur l’exemple le mieux connu des Européens, celui de la chute de Rome, qui est censée
1954 l’exemple le mieux connu des Européens, celui de la chute de Rome, qui est censée avoir entraîné la disparition de la civ
1955 e la chute de Rome, qui est censée avoir entraîné la disparition de la civilisation gréco-romaine dans la partie occidenta
1956 , qui est censée avoir entraîné la disparition de la civilisation gréco-romaine dans la partie occidentale de l’Empire. L’
1957 disparition de la civilisation gréco-romaine dans la partie occidentale de l’Empire. L’exemple est-il valable pour l’Europ
1958 ation gréco-romaine dans la partie occidentale de l’ Empire. L’exemple est-il valable pour l’Europe ? La civilisation europ
1959 o-romaine dans la partie occidentale de l’Empire. L’ exemple est-il valable pour l’Europe ? La civilisation européenne est-
1960 entale de l’Empire. L’exemple est-il valable pour l’ Europe ? La civilisation européenne est-elle une civilisation comme le
1961 ’Empire. L’exemple est-il valable pour l’Europe ? La civilisation européenne est-elle une civilisation comme les autres ?
1962 sation européenne est-elle une civilisation comme les autres ? Son destin peut-il être prédit par extrapolation des exemple
1963 à partir d’un certain moment, d’un certain seuil… Les civilisations antiques de l’Égypte des Pharaons, de Sumer, de l’Inde
1964 d’un certain seuil… Les civilisations antiques de l’ Égypte des Pharaons, de Sumer, de l’Inde védantique ou des Mayas, fond
1965 s antiques de l’Égypte des Pharaons, de Sumer, de l’ Inde védantique ou des Mayas, fondaient leur unité originelle sur un p
1966 nité originelle sur un principe formateur unique, le Sacré. Les civilisations totalitaires d’aujourd’hui, URSS ou Chine de
1967 nelle sur un principe formateur unique, le Sacré. Les civilisations totalitaires d’aujourd’hui, URSS ou Chine de Mao, tienn
1968 unité d’une doctrine uniforme, imposée à tous par l’ État. Comparée à ces deux groupes de cultures homogènes, uniformes et
1969 upes de cultures homogènes, uniformes et sacrées, la culture de l’Europe nous apparaît immédiatement comme à la fois plura
1970 es homogènes, uniformes et sacrées, la culture de l’ Europe nous apparaît immédiatement comme à la fois pluraliste et profa
1971 dictoires ou incompatibles qu’elle en a héritées, la civilisation européenne s’est trouvée fondée sur une culture de dialo
1972 morale, son économie et ses arts. On a beau citer le Moyen Âge comme une période bénie d’unité des esprits et des cœurs, t
1973 bénie d’unité des esprits et des cœurs, telle que l’ a décrite Novalis : nous savons aujourd’hui qu’il n’en fut rien, et qu
1974 us savons aujourd’hui qu’il n’en fut rien, et que les conflits qui déchirèrent le Moyen Âge ne furent pas moins violents qu
1975 ’en fut rien, et que les conflits qui déchirèrent le Moyen Âge ne furent pas moins violents que ceux que nous vivons. L’un
1976 rent pas moins violents que ceux que nous vivons. L’ unité de notre culture et de la civilisation créée par cette culture n
1977 x que nous vivons. L’unité de notre culture et de la civilisation créée par cette culture n’a jamais été autre chose qu’un
1978 tre chose qu’une unité paradoxale consistant dans la seule volonté commune à tous de refuser l’uniformité. Où sont les c
1979 t dans la seule volonté commune à tous de refuser l’ uniformité. Où sont les candidats à la relève ? Aux prophètes de
1980 commune à tous de refuser l’uniformité. Où sont les candidats à la relève ? Aux prophètes de la décadence européenne,
1981 e refuser l’uniformité. Où sont les candidats à la relève ? Aux prophètes de la décadence européenne, j’opposerai tro
1982 t les candidats à la relève ? Aux prophètes de la décadence européenne, j’opposerai trois raisons majeures d’espérer, c
1983 sons majeures d’espérer, c’est-à-dire d’agir pour l’ Europe. Première raison : La civilisation européenne est la seule qui
1984 st-à-dire d’agir pour l’Europe. Première raison : La civilisation européenne est la seule qui soit effectivement devenue u
1985 Première raison : La civilisation européenne est la seule qui soit effectivement devenue universelle. Bien d’autres avai
1986 en d’autres avaient cru cela d’elles-mêmes, avant la nôtre. Elles se trompaient, mais cette erreur ne saurait plus être co
1987 rreur ne saurait plus être commise, à présent que la terre entière est explorée dans ses derniers recoins. Alexandre le Gr
1988 dans ses derniers recoins. Alexandre le Grand et les empereurs chinois s’imaginèrent qu’ils dominaient le monde entier ; c
1989 empereurs chinois s’imaginèrent qu’ils dominaient le monde entier ; c’était moins orgueilleux que naïf, car chacun ignorai
1990 ue naïf, car chacun ignorait que l’autre existât. L’ agence Cook suffirait aujourd’hui pour les mettre à l’abri de ce genre
1991 existât. L’agence Cook suffirait aujourd’hui pour les mettre à l’abri de ce genre d’illusion. Nous, les Européens du xxe s
1992 ence Cook suffirait aujourd’hui pour les mettre à l’ abri de ce genre d’illusion. Nous, les Européens du xxe siècle, nous
1993 les mettre à l’abri de ce genre d’illusion. Nous, les Européens du xxe siècle, nous savons bien que nous ne dominons plus
1994 politiquement, mais nous savons aussi que toutes les villes nouvelles en Asie et en Afrique imitent nos villes modernes, l
1995 mbarras de circulation. Nous savons bien que tous les pays neufs imitent nos parlements, partis et syndicats, et même parfo
1996 expliquer ce phénomène sans précédent dans toute l’ Histoire ? Nous avons vu que la civilisation européenne, née de la con
1997 écédent dans toute l’Histoire ? Nous avons vu que la civilisation européenne, née de la confluence des sources les plus di
1998 s avons vu que la civilisation européenne, née de la confluence des sources les plus diverses, se distinguait par là de to
1999 tion européenne, née de la confluence des sources les plus diverses, se distinguait par là de toutes les autres, monolithiq
2000 es plus diverses, se distinguait par là de toutes les autres, monolithiques et homogènes. Voilà pourquoi elle s’est trouvé
2001 es et homogènes. Voilà pourquoi elle s’est trouvé la seule qui fût assez complexe et multiforme pour pouvoir, sinon satisf
2002 pouvoir, sinon satisfaire, du moins séduire tous les peuples du monde. Nous avons vu aussi que l’Europe envoie dans le mon
2003 ous les peuples du monde. Nous avons vu aussi que l’ Europe envoie dans le monde plus de machines et d’assistants technique
2004 nde. Nous avons vu aussi que l’Europe envoie dans le monde plus de machines et d’assistants techniques que de livres et de
2005 christianisme qui contribua de tant de manières à la former. Par là même — et c’est bien son drame, en même temps que la c
2006 même — et c’est bien son drame, en même temps que la condition de son « succès » le plus visible — elle s’est rendue plus
2007 en même temps que la condition de son « succès » le plus visible — elle s’est rendue plus transportable, plus acceptable
2008 en vertu de quelque chose de très fondamental qui l’ y prédisposait dès l’origine : j’entends la croyance chrétienne en la
2009 hose de très fondamental qui l’y prédisposait dès l’ origine : j’entends la croyance chrétienne en la valeur égale de tout
2010 al qui l’y prédisposait dès l’origine : j’entends la croyance chrétienne en la valeur égale de tout homme devant Dieu, que
2011 s l’origine : j’entends la croyance chrétienne en la valeur égale de tout homme devant Dieu, quelle que soit sa nation, sa
2012 quelle que soit sa nation, sa couleur ou sa race. L’ Égypte ancienne ne croyait rien de tel. Le mot homme y était synonyme
2013 a race. L’Égypte ancienne ne croyait rien de tel. Le mot homme y était synonyme d’habitant de la vallée et du delta du Nil
2014 tel. Le mot homme y était synonyme d’habitant de la vallée et du delta du Nil, il y avait un mot différent pour désigner
2015 du Nil, il y avait un mot différent pour désigner les habitants des terres voisines, à mi-chemin entre l’animal et l’Égypti
2016 habitants des terres voisines, à mi-chemin entre l’ animal et l’Égyptien. (Dans le même style, Bismarck définit le Bavaroi
2017 es terres voisines, à mi-chemin entre l’animal et l’ Égyptien. (Dans le même style, Bismarck définit le Bavarois comme « ce
2018 , à mi-chemin entre l’animal et l’Égyptien. (Dans le même style, Bismarck définit le Bavarois comme « cet être intermédiai
2019 l’Égyptien. (Dans le même style, Bismarck définit le Bavarois comme « cet être intermédiaire entre l’Autrichien et l’homme
2020 le Bavarois comme « cet être intermédiaire entre l’ Autrichien et l’homme ».) Pour les Grecs et les Chinois également, il
2021 me « cet être intermédiaire entre l’Autrichien et l’ homme ».) Pour les Grecs et les Chinois également, il existait deux es
2022 ermédiaire entre l’Autrichien et l’homme ».) Pour les Grecs et les Chinois également, il existait deux espèces différentes
2023 tre l’Autrichien et l’homme ».) Pour les Grecs et les Chinois également, il existait deux espèces différentes de bipèdes ve
2024 t deux espèces différentes de bipèdes verticaux ; les Grecs ou les Chinois, d’une part, et les barbares, c’est-à-dire tous
2025 s différentes de bipèdes verticaux ; les Grecs ou les Chinois, d’une part, et les barbares, c’est-à-dire tous les autres, q
2026 ticaux ; les Grecs ou les Chinois, d’une part, et les barbares, c’est-à-dire tous les autres, qui n’étaient pas vraiment et
2027 s, d’une part, et les barbares, c’est-à-dire tous les autres, qui n’étaient pas vraiment et complètement humains. Ces très
2028 cessairement demeurer régionales et décliner dans les limites de leur empire. En revanche, la conception chrétienne exprimé
2029 ner dans les limites de leur empire. En revanche, la conception chrétienne exprimée par saint Paul (« Il n’y a plus ni Jui
2030 x qu’elle formerait intimement de considérer tous les hommes comme dignes et capables, un jour ou l’autre, de participer pl
2031 s, un jour ou l’autre, de participer pleinement à l’ effort civilisateur. Maintenant que c’est fait ou en train de se faire
2032 ait ou en train de se faire, et que voilà franchi le « seuil mondial », comment imaginer que la civilisation diffusée par
2033 ranchi le « seuil mondial », comment imaginer que la civilisation diffusée par l’Europe à tous les peuples puisse s’éclips
2034 comment imaginer que la civilisation diffusée par l’ Europe à tous les peuples puisse s’éclipser ou disparaître, sans entra
2035 que la civilisation diffusée par l’Europe à tous les peuples puisse s’éclipser ou disparaître, sans entraîner le genre hum
2036 puisse s’éclipser ou disparaître, sans entraîner le genre humain dans son désastre ? Deuxième raison : La civilisation eu
2037 enre humain dans son désastre ? Deuxième raison : La civilisation européenne a créé les conditions techniques de sa conser
2038 uxième raison : La civilisation européenne a créé les conditions techniques de sa conservation et de sa transmission aux âg
2039 ou en voie d’extinction. Valéry nous disait que «  les circonstances qui enverraient les œuvres de Keats et celles de Baudel
2040 us disait que « les circonstances qui enverraient les œuvres de Keats et celles de Baudelaire rejoindre les œuvres de Ménan
2041 œuvres de Keats et celles de Baudelaire rejoindre les œuvres de Ménandre ne sont plus du tout inconcevables : elles sont da
2042 sont plus du tout inconcevables : elles sont dans les journaux ». Depuis lors, on a retrouvé — et même joué — plusieurs com
2043 ire, et de Paul Valéry lui-même, reproduites dans le monde entier, enregistrées sur bandes et sur microsillons, elles sont
2044 en mesure de résister au temps beaucoup mieux que les fresques de Lascaux, les statues grecques et les temples des Pharaons
2045 temps beaucoup mieux que les fresques de Lascaux, les statues grecques et les temples des Pharaons menacés par les eaux d’u
2046 les fresques de Lascaux, les statues grecques et les temples des Pharaons menacés par les eaux d’un barrage. La mortalité
2047 grecques et les temples des Pharaons menacés par les eaux d’un barrage. La mortalité des civilisations nous apparaît donc
2048 s des Pharaons menacés par les eaux d’un barrage. La mortalité des civilisations nous apparaît donc très variable. Certes,
2049 rès encore celles des Mayas et des Aztèques. Mais les civilisations anciennes de l’Égypte et du Proche-Orient, prolongées p
2050 des Aztèques. Mais les civilisations anciennes de l’ Égypte et du Proche-Orient, prolongées par la grecque et la romaine, d
2051 s de l’Égypte et du Proche-Orient, prolongées par la grecque et la romaine, dont l’essentiel vit dans la nôtre, sont-elles
2052 et du Proche-Orient, prolongées par la grecque et la romaine, dont l’essentiel vit dans la nôtre, sont-elles vraiment mort
2053 nt, prolongées par la grecque et la romaine, dont l’ essentiel vit dans la nôtre, sont-elles vraiment mortes ? Leurs conquê
2054 grecque et la romaine, dont l’essentiel vit dans la nôtre, sont-elles vraiment mortes ? Leurs conquêtes ont été préservée
2055 t mortes ? Leurs conquêtes ont été préservées par le musée et le laboratoire européens, pour être diffusées de nos jours s
2056 eurs conquêtes ont été préservées par le musée et le laboratoire européens, pour être diffusées de nos jours sur toute la
2057 péens, pour être diffusées de nos jours sur toute la terre. Il s’en faut de beaucoup que leurs rivales asiatiques, qu’on d
2058 raffinées, aient connu pareille fortune. Ce sont les lois de Minos, de Dracon et de Solon, venues de la Crète et de l’Égyp
2059 s lois de Minos, de Dracon et de Solon, venues de la Crète et de l’Égypte ancienne par la Grèce, ce sont le Décalogue et l
2060 , de Dracon et de Solon, venues de la Crète et de l’ Égypte ancienne par la Grèce, ce sont le Décalogue et les Béatitudes,
2061 n, venues de la Crète et de l’Égypte ancienne par la Grèce, ce sont le Décalogue et les Béatitudes, c’est enfin le code de
2062 ète et de l’Égypte ancienne par la Grèce, ce sont le Décalogue et les Béatitudes, c’est enfin le code de Justinien, d’où d
2063 te ancienne par la Grèce, ce sont le Décalogue et les Béatitudes, c’est enfin le code de Justinien, d’où dérivent l’Habeas
2064 sont le Décalogue et les Béatitudes, c’est enfin le code de Justinien, d’où dérivent l’Habeas Corpus et la Déclaration de
2065 , c’est enfin le code de Justinien, d’où dérivent l’ Habeas Corpus et la Déclaration des droits de l’homme, qui définissent
2066 de de Justinien, d’où dérivent l’Habeas Corpus et la Déclaration des droits de l’homme, qui définissent aujourd’hui, pour
2067 e l’homme, qui définissent aujourd’hui, pour tous les peuples du tiers-monde à peine moins que pour ceux de l’OTAN, la dign
2068 les du tiers-monde à peine moins que pour ceux de l’ OTAN, la dignité de la personne humaine et les fondements de tout prog
2069 iers-monde à peine moins que pour ceux de l’OTAN, la dignité de la personne humaine et les fondements de tout progrès soci
2070 eine moins que pour ceux de l’OTAN, la dignité de la personne humaine et les fondements de tout progrès social ; et non pa
2071 x de l’OTAN, la dignité de la personne humaine et les fondements de tout progrès social ; et non pas le système des castes,
2072 es fondements de tout progrès social ; et non pas le système des castes, ni le mandarinat, ni le Bushido. On peut le regre
2073 rès social ; et non pas le système des castes, ni le mandarinat, ni le Bushido. On peut le regretter, mais on doit le cons
2074 n pas le système des castes, ni le mandarinat, ni le Bushido. On peut le regretter, mais on doit le constater. Roger Caill
2075 castes, ni le mandarinat, ni le Bushido. On peut le regretter, mais on doit le constater. Roger Caillois a écrit non sans
2076 ni le Bushido. On peut le regretter, mais on doit le constater. Roger Caillois a écrit non sans drôlerie à propos de la fa
2077 er Caillois a écrit non sans drôlerie à propos de la fameuse phrase de Valéry : « Si les civilisations mouraient tout à fa
2078 ie à propos de la fameuse phrase de Valéry : « Si les civilisations mouraient tout à fait, Valéry ne pourrait pas le dire,
2079 ons mouraient tout à fait, Valéry ne pourrait pas le dire, car il n’en saurait rien. » Et il propose de corriger comme sui
2080 rait rien. » Et il propose de corriger comme suit le passage que j’ai cité : « Nous autres civilisations, nous avons depui
2081  Nous autres civilisations, nous avons depuis peu la certitude que nous ne mourrons jamais entièrement et que nos cendres
2082 ais entièrement et que nos cendres sont fécondes. Le temps est passé où les civilisations étaient mortelles. » J’ajouterai
2083 nos cendres sont fécondes. Le temps est passé où les civilisations étaient mortelles. » J’ajouterai cette simple remarque 
2084 ilisations qu’on croyait endormies sont tirées de l’ oubli au xxe siècle, si tant d’écoles antiques de sagesse et de mysti
2085 ours et retrouvent partout des fidèles, c’est par le fait des ethnographes, archéologues et philosophes de l’Europe, qui p
2086 des ethnographes, archéologues et philosophes de l’ Europe, qui poursuivent l’inventaire mondial initié à la Renaissance p
2087 ogues et philosophes de l’Europe, qui poursuivent l’ inventaire mondial initié à la Renaissance par nos découvreurs de l’es
2088 pe, qui poursuivent l’inventaire mondial initié à la Renaissance par nos découvreurs de l’espace et du temps de l’humanité
2089 al initié à la Renaissance par nos découvreurs de l’ espace et du temps de l’humanité. Troisième raison : On ne voit pas de
2090 ce par nos découvreurs de l’espace et du temps de l’ humanité. Troisième raison : On ne voit pas de candidats sérieux à la
2091 me raison : On ne voit pas de candidats sérieux à la relève d’une civilisation devenue mondiale. Nous connaissons les circ
2092 e civilisation devenue mondiale. Nous connaissons les circonstances de la chute de celles qui nous ont précédées : c’était
2093 e mondiale. Nous connaissons les circonstances de la chute de celles qui nous ont précédées : c’était parfois une catastro
2094 naturelle, comme la dernière période glaciaire ou le dessèchement du Sahara, affectant la région entière où avait fleuri u
2095 glaciaire ou le dessèchement du Sahara, affectant la région entière où avait fleuri une civilisation déterminée. Et les au
2096 e où avait fleuri une civilisation déterminée. Et les autres n’en savaient rien. Mais ce fut plus souvent l’agression d’une
2097 tres n’en savaient rien. Mais ce fut plus souvent l’ agression d’une civilisation rivale, plus primitive et plus brutale, D
2098 plus primitive et plus brutale, Doriens détrônant la Crète, Germains investissant la Gaule et l’Ibérie romaines, ou les qu
2099 Doriens détrônant la Crète, Germains investissant la Gaule et l’Ibérie romaines, ou les quelques centaines d’Espagnols s’e
2100 ônant la Crète, Germains investissant la Gaule et l’ Ibérie romaines, ou les quelques centaines d’Espagnols s’emparant de l
2101 ns investissant la Gaule et l’Ibérie romaines, ou les quelques centaines d’Espagnols s’emparant de l’empire des Aztèques. I
2102 les quelques centaines d’Espagnols s’emparant de l’ empire des Aztèques. Il s’agissait dans tous ces cas de civilisations
2103 ns locales, entourées de « barbares » mal connus. Les candidats à la relève étaient nombreux. En est-il un seul aujourd’hui
2104 urées de « barbares » mal connus. Les candidats à la relève étaient nombreux. En est-il un seul aujourd’hui qui réclame l’
2105 mbreux. En est-il un seul aujourd’hui qui réclame l’ oblitération ou simplement la reprise des charges de notre civilisatio
2106 ourd’hui qui réclame l’oblitération ou simplement la reprise des charges de notre civilisation, avec quelques chances de s
2107 e civilisation, avec quelques chances de succès ? Les États-Unis ? dira-t-on. Mais ils sont nés de la substance même de l’E
2108 Les États-Unis ? dira-t-on. Mais ils sont nés de la substance même de l’Europe, et je les vois s’européaniser par la cult
2109 a-t-on. Mais ils sont nés de la substance même de l’ Europe, et je les vois s’européaniser par la culture plus profondément
2110 sont nés de la substance même de l’Europe, et je les vois s’européaniser par la culture plus profondément que l’Europe ne
2111 me de l’Europe, et je les vois s’européaniser par la culture plus profondément que l’Europe ne s’américanise par le costum
2112 européaniser par la culture plus profondément que l’ Europe ne s’américanise par le costume et le décor urbain. L’URSS ? Ma
2113 us profondément que l’Europe ne s’américanise par le costume et le décor urbain. L’URSS ? Mais qu’apporte-t-elle de nouvea
2114 t que l’Europe ne s’américanise par le costume et le décor urbain. L’URSS ? Mais qu’apporte-t-elle de nouveau ? Est-elle u
2115 s’américanise par le costume et le décor urbain. L’ URSS ? Mais qu’apporte-t-elle de nouveau ? Est-elle une autre civilisa
2116 sation ? Lénine disait de sa Révolution : « C’est le marxisme plus l’électricité. » Or, le marxisme n’est pas un apport so
2117 isait de sa Révolution : « C’est le marxisme plus l’ électricité. » Or, le marxisme n’est pas un apport soviétique, ce n’es
2118 n : « C’est le marxisme plus l’électricité. » Or, le marxisme n’est pas un apport soviétique, ce n’est pas Popov qui l’a i
2119 pas un apport soviétique, ce n’est pas Popov qui l’ a inventé, mais bien un Juif allemand, dont le père était devenu prote
2120 qui l’a inventé, mais bien un Juif allemand, dont le père était devenu protestant, et qui rédigeait au British Muséum, pou
2121 testant, et qui rédigeait au British Muséum, pour le Herald Tribune de New York, des articles qui le faisaient vivre et qu
2122 r le Herald Tribune de New York, des articles qui le faisaient vivre et qui forment une partie du Kapital. Le marxisme est
2123 aient vivre et qui forment une partie du Kapital. Le marxisme est né en Europe et de l’Europe, au carrefour d’un débat séc
2124 ie du Kapital. Le marxisme est né en Europe et de l’ Europe, au carrefour d’un débat séculaire entre la théologie et la phi
2125 l’Europe, au carrefour d’un débat séculaire entre la théologie et la philosophie, au moment où se constituaient la sociolo
2126 refour d’un débat séculaire entre la théologie et la philosophie, au moment où se constituaient la sociologie et la techni
2127 et la philosophie, au moment où se constituaient la sociologie et la technique, l’industrie, la grande presse, l’école ob
2128 e, au moment où se constituaient la sociologie et la technique, l’industrie, la grande presse, l’école obligatoire, la con
2129 ù se constituaient la sociologie et la technique, l’ industrie, la grande presse, l’école obligatoire, la conscription univ
2130 aient la sociologie et la technique, l’industrie, la grande presse, l’école obligatoire, la conscription universelle et le
2131 e et la technique, l’industrie, la grande presse, l’ école obligatoire, la conscription universelle et les nationalismes qu
2132 industrie, la grande presse, l’école obligatoire, la conscription universelle et les nationalismes qui en vivent. On ne sa
2133 école obligatoire, la conscription universelle et les nationalismes qui en vivent. On ne saurait imaginer complexe de force
2134 matérielles plus spécifiquement européen. Quant à l’ électricité, dont parlait Lénine, elle symbolise l’industrialisation.
2135 ’électricité, dont parlait Lénine, elle symbolise l’ industrialisation. En électrifiant le pays, le communisme a renouvelé
2136 le symbolise l’industrialisation. En électrifiant le pays, le communisme a renouvelé l’entreprise de Pierre le Grand : il
2137 ise l’industrialisation. En électrifiant le pays, le communisme a renouvelé l’entreprise de Pierre le Grand : il a pour la
2138 n électrifiant le pays, le communisme a renouvelé l’ entreprise de Pierre le Grand : il a pour la seconde fois européanisé
2139 le Grand : il a pour la seconde fois européanisé la Russie. Et c’est l’URSS à son tour qui s’est chargée d’aider la Chine
2140 r la seconde fois européanisé la Russie. Et c’est l’ URSS à son tour qui s’est chargée d’aider la Chine à liquider la civil
2141 c’est l’URSS à son tour qui s’est chargée d’aider la Chine à liquider la civilisation des mandarins, c’est l’URSS qui a in
2142 our qui s’est chargée d’aider la Chine à liquider la civilisation des mandarins, c’est l’URSS qui a introduit dans l’Empir
2143 e à liquider la civilisation des mandarins, c’est l’ URSS qui a introduit dans l’Empire emmuré ce nouveau cheval de Troie o
2144 des mandarins, c’est l’URSS qui a introduit dans l’ Empire emmuré ce nouveau cheval de Troie occidental : la technique, et
2145 re emmuré ce nouveau cheval de Troie occidental : la technique, et tout ce qu’elle entraîne dans les mœurs et les modes de
2146  : la technique, et tout ce qu’elle entraîne dans les mœurs et les modes de penser d’une nation. Le fameux « bon en avant »
2147 ue, et tout ce qu’elle entraîne dans les mœurs et les modes de penser d’une nation. Le fameux « bon en avant » de la Chine
2148 ns les mœurs et les modes de penser d’une nation. Le fameux « bon en avant » de la Chine n’a guère été qu’un bond vers l’i
2149 enser d’une nation. Le fameux « bon en avant » de la Chine n’a guère été qu’un bond vers l’industrie et vers le socialisme
2150 avant » de la Chine n’a guère été qu’un bond vers l’ industrie et vers le socialisme, inventés par l’Europe et parties inté
2151 n’a guère été qu’un bond vers l’industrie et vers le socialisme, inventés par l’Europe et parties intégrantes de sa cultur
2152 s l’industrie et vers le socialisme, inventés par l’ Europe et parties intégrantes de sa culture. Quant à l’Afrique, observ
2153 ope et parties intégrantes de sa culture. Quant à l’ Afrique, observons simplement que son émancipation actuelle ne consist
2154 émancipation actuelle ne consiste nullement dans l’ avènement d’une civilisation originale, ou de quelque néo-tribalisme,
2155 de quelque néo-tribalisme, mais au contraire dans l’ adoption bien trop rapide des formes de vie politique, sociale et écon
2156 e politique, sociale et économique, élaborées par l’ Europe moderne. Résumons cela : je vois l’Asie du Sud, sous-développée
2157 ées par l’Europe moderne. Résumons cela : je vois l’ Asie du Sud, sous-développée, courir après l’exemple de la Chine, qui
2158 vois l’Asie du Sud, sous-développée, courir après l’ exemple de la Chine, qui essaie d’imiter la Russie, laquelle veut rejo
2159 u Sud, sous-développée, courir après l’exemple de la Chine, qui essaie d’imiter la Russie, laquelle veut rejoindre l’Améri
2160 après l’exemple de la Chine, qui essaie d’imiter la Russie, laquelle veut rejoindre l’Amérique, qui est une invention de
2161 ssaie d’imiter la Russie, laquelle veut rejoindre l’ Amérique, qui est une invention de l’Europe… z. Rougemont Denis de
2162 ut rejoindre l’Amérique, qui est une invention de l’ Europe… z. Rougemont Denis de, « Les prophètes de la décadence »,
2163 vention de l’Europe… z. Rougemont Denis de, «  Les prophètes de la décadence », Les Nouvelles littéraires, Paris, 24 sep
2164 pe… z. Rougemont Denis de, « Les prophètes de la décadence », Les Nouvelles littéraires, Paris, 24 septembre 1970, p. 
2165 mont Denis de, « Les prophètes de la décadence », Les Nouvelles littéraires, Paris, 24 septembre 1970, p. 3. aa. Le texte
2166 littéraires, Paris, 24 septembre 1970, p. 3. aa. Le texte est précédé du chapeau suivant : « On sait quel Européen convai
2167 éen convaincu et militant est Denis de Rougemont. L’ auteur de L’Amour et l’Occident , Penser avec les mains , de L’Aven
2168 et militant est Denis de Rougemont. L’auteur de L’ Amour et l’Occident , Penser avec les mains , de L’Aventure occident
2169 t est Denis de Rougemont. L’auteur de L’Amour et l’ Occident , Penser avec les mains , de L’Aventure occidentale de l’ho
2170 mour et l’Occident , Penser avec les mains , de L’ Aventure occidentale de l’homme , plaide une nouvelle fois pour le Vie
2171 er avec les mains , de L’Aventure occidentale de l’ homme , plaide une nouvelle fois pour le Vieux Continent, dont il ne c
2172 entale de l’homme , plaide une nouvelle fois pour le Vieux Continent, dont il ne croit pas le destin achevé, en publiant c
2173 ois pour le Vieux Continent, dont il ne croit pas le destin achevé, en publiant chez Albin Michel une Lettre ouverte aux
2174 re ouverte aux Européens , qui prendra place dans la collection dirigée par Jean-Pierre Dorlan. Dans cette Lettre , Denis
2175 ontre tout ce qui rapproche et tout ce qui divise les États de l’Europe ; il fixe également un programme pour les vingt ans
2176 de l’Europe ; il fixe également un programme pour les vingt ans à venir et nous met en garde, comme on va le voir, contre l
2177 ngt ans à venir et nous met en garde, comme on va le voir, contre les prophètes de la décadence avant de nous proposer des
2178 et nous met en garde, comme on va le voir, contre les prophètes de la décadence avant de nous proposer des candidats à la r
2179 rde, comme on va le voir, contre les prophètes de la décadence avant de nous proposer des candidats à la relève.
2180 décadence avant de nous proposer des candidats à la relève.
17 1970, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). Denis de Rougemont : l’amour et l’Europe en expert (24 décembre 1970)
2181 Denis de Rougemont : l’ amour et l’Europe en expert (24 décembre 1970)ab ac Denis de Rougem
2182 Denis de Rougemont : l’amour et l’ Europe en expert (24 décembre 1970)ab ac Denis de Rougemont, les de
2183 rt (24 décembre 1970)ab ac Denis de Rougemont, les deux grands thèmes de votre vie ont été l’Amour et l’Europe. Quel éta
2184 mont, les deux grands thèmes de votre vie ont été l’ Amour et l’Europe. Quel était le Denis de Rougemont de ses 17 ans ? Si
2185 eux grands thèmes de votre vie ont été l’Amour et l’ Europe. Quel était le Denis de Rougemont de ses 17 ans ? Si vous me di
2186 votre vie ont été l’Amour et l’Europe. Quel était le Denis de Rougemont de ses 17 ans ? Si vous me disiez 17 ans et demi,
2187 Si vous me disiez 17 ans et demi, je vous dirai : l’ âge de mon premier article. J’étais au gymnase de ma ville natale, Neu
2188 J’étais au gymnase de ma ville natale, Neuchâtel. Le trait caractéristique de cet endroit où je suis né est d’être un carr
2189 un carrefour, une petite principauté placée entre les influences françaises et allemandes, ce qui est très suisse, par défi
2190 ui est très suisse, par définition. 17 ans, c’est le moment où j’ai pris conscience que j’étais un littéraire. À cette épo
2191 ootball. J’étais gardien de but. C’était pour moi le poste idéal car le gardien de but n’intervient qu’aux moments de cris
2192 rdien de but. C’était pour moi le poste idéal car le gardien de but n’intervient qu’aux moments de crises, au sommet de l’
2193 intervient qu’aux moments de crises, au sommet de l’ effort. Plus tard, j’ai appris que Montherlant et Albert Camus avaient
2194 été gardiens de but. Comment avez-vous découvert l’ Europe ? C’est entre 17 et 25 ans que j’ai découvert un peu l’Europe.
2195 ’est entre 17 et 25 ans que j’ai découvert un peu l’ Europe. Quand j’allais dans le Midi des troubadours, j’éprouvais un cu
2196 ai découvert un peu l’Europe. Quand j’allais dans le Midi des troubadours, j’éprouvais un curieux sentiment de reconnaissa
2197 ieux sentiment de reconnaissance. Quand je lisais les romans bretons je me sentais curieusement chez moi. J’ai fini par com
2198 des ancêtres dans tous ces pays-là. Si je regarde l’ ascendance de mon père, je m’aperçois qu’à la génération où nous avons
2199 arde l’ascendance de mon père, je m’aperçois qu’à la génération où nous avons 64 ancêtres, la sixième, il y a 28 Suisses n
2200 z consacré de nombreuses et passionnantes pages à l’ amour. Qu’est-ce que l’amour pour vous ? L’amour c’est tout. Pour moi
2201 s et passionnantes pages à l’amour. Qu’est-ce que l’ amour pour vous ? L’amour c’est tout. Pour moi c’est plus spécialement
2202 ages à l’amour. Qu’est-ce que l’amour pour vous ? L’ amour c’est tout. Pour moi c’est plus spécialement mon livre L’Amour
2203 tout. Pour moi c’est plus spécialement mon livre L’ Amour et l’Occident . L’amour au sens de l’amour-passion que j’ai décr
2204 moi c’est plus spécialement mon livre L’Amour et l’ Occident . L’amour au sens de l’amour-passion que j’ai décrit dans mon
2205 s spécialement mon livre L’Amour et l’Occident . L’ amour au sens de l’amour-passion que j’ai décrit dans mon livre fut qu
2206 livre L’Amour et l’Occident . L’amour au sens de l’ amour-passion que j’ai décrit dans mon livre fut quelque chose de très
2207 fut quelque chose de très important dans ma vie. L’ opposition entre l’amour-passion et le mariage est au fond le sujet mê
2208 de très important dans ma vie. L’opposition entre l’ amour-passion et le mariage est au fond le sujet même de ce livre. J’a
2209 ans ma vie. L’opposition entre l’amour-passion et le mariage est au fond le sujet même de ce livre. J’ai été entraîné à éc
2210 n entre l’amour-passion et le mariage est au fond le sujet même de ce livre. J’ai été entraîné à écrire cet ouvrage par to
2211 cet ouvrage par toute une suite de circonstances. La plus ancienne était un numéro de la revue Esprit consacré à la femm
2212 irconstances. La plus ancienne était un numéro de la revue Esprit consacré à la femme et l’amour aujourd’hui, et qui por
2213 e était un numéro de la revue Esprit consacré à la femme et l’amour aujourd’hui, et qui portait comme titre : « La femme
2214 uméro de la revue Esprit consacré à la femme et l’ amour aujourd’hui, et qui portait comme titre : « La femme est aussi u
2215 amour aujourd’hui, et qui portait comme titre : «  La femme est aussi une personne ». Cela se passait en 1936 et Mounier s’
2216 é un précurseur. Il m’avait demandé une étude sur l’ opposition qui paraissait éclatante entre l’amour dans le mythe de Tri
2217 e sur l’opposition qui paraissait éclatante entre l’ amour dans le mythe de Tristan et l’amour dans le mariagead. Daniel-Ro
2218 ition qui paraissait éclatante entre l’amour dans le mythe de Tristan et l’amour dans le mariagead. Daniel-Rops, qui dirig
2219 latante entre l’amour dans le mythe de Tristan et l’ amour dans le mariagead. Daniel-Rops, qui dirigeait la collection Prés
2220 l’amour dans le mythe de Tristan et l’amour dans le mariagead. Daniel-Rops, qui dirigeait la collection Présence, chez Pl
2221 our dans le mariagead. Daniel-Rops, qui dirigeait la collection Présence, chez Plon, ayant lu mon article me demanda si je
2222 e pour lui un petit livre en deux volets opposant le mythe de Tristan et l’amour dans le mariage. Et nous avons pris date.
2223 re en deux volets opposant le mythe de Tristan et l’ amour dans le mariage. Et nous avons pris date. Je devais lui donner m
2224 lets opposant le mythe de Tristan et l’amour dans le mariage. Et nous avons pris date. Je devais lui donner mon livre en f
2225 . Je devais lui donner mon livre en février 1938. Le mois de février arriva et je n’avais pas écrit une ligne. Je reçus un
2226 ndre un grand service ? Accepteriez-vous de céder le tour de parution de votre manuscrit, que j’attends d’un jour à l’autr
2227 ’attends d’un jour à l’autre, car je dois publier le plus tôt possible le manuscrit d’un essai d’une grande actualité inti
2228 l’autre, car je dois publier le plus tôt possible le manuscrit d’un essai d’une grande actualité intitulé La France et son
2229 uscrit d’un essai d’une grande actualité intitulé La France et son armée, et dont l’auteur est un jeune lieutenant-colonel
2230 ctualité intitulé La France et son armée, et dont l’ auteur est un jeune lieutenant-colonel qui s’appelle Charles de Gaulle
2231 s mis instantanément à mon livre, et j’ai terminé les 450 pages en trois mois. Comme je l’ai écrit dans la préface, c’est u
2232 ’ai terminé les 450 pages en trois mois. Comme je l’ ai écrit dans la préface, c’est un livre qui m’a demandé trois mois de
2233 450 pages en trois mois. Comme je l’ai écrit dans la préface, c’est un livre qui m’a demandé trois mois de travail et tout
2234 re qui m’a demandé trois mois de travail et toute la vie. J’étais devenu, hélas ! aux yeux de beaucoup de gens dans beauco
2235 ucoup de gens dans beaucoup de pays un expert sur les choses de l’amour. Quand les gens me rencontraient ils me disaient :
2236 dans beaucoup de pays un expert sur les choses de l’ amour. Quand les gens me rencontraient ils me disaient : « C’est vous
2237 e pays un expert sur les choses de l’amour. Quand les gens me rencontraient ils me disaient : « C’est vous l’auteur de L’A
2238 s me rencontraient ils me disaient : « C’est vous l’ auteur de L’Amour et l’Occident  ? Je croyais que vous aviez une gran
2239 aient ils me disaient : « C’est vous l’auteur de L’ Amour et l’Occident  ? Je croyais que vous aviez une grande barbe blan
2240 e disaient : « C’est vous l’auteur de L’Amour et l’ Occident  ? Je croyais que vous aviez une grande barbe blanche. » C’ét
2241 ’ai tâché de suivre un peu ce qui se passait dans la vie de ces gens qui m’avaient fait des confidences et je me suis aper
2242 dernière partie de mon livre. Mais voilà que, en les suivant un peu plus longtemps, je m’aperçus qu’ils finissaient quand
2243 ssaient quand même par divorcer, c’est-à-dire que l’ action de mon livre était généralement de retarder les divorces de que
2244 ction de mon livre était généralement de retarder les divorces de quelques années, ce qui provoquait pas mal de souffrances
2245 après mes années d’Amérique. C’est pourquoi dans la nouvelle édition qui a paru en 1954ae j’ai ajouté un long chapitre su
2246 a paru en 1954ae j’ai ajouté un long chapitre sur le divorce. Depuis lors je n’ai cas cessé de récrire ce livre. Mon deuxi
2247 e toi-même , qui est édité en livre de poche sous le titre Les Mythes de l’amour, donne à la passion plus de droits que je
2248 e , qui est édité en livre de poche sous le titre Les Mythes de l’amour, donne à la passion plus de droits que je ne lui en
2249 ité en livre de poche sous le titre Les Mythes de l’ amour, donne à la passion plus de droits que je ne lui en laissais dan
2250 oche sous le titre Les Mythes de l’amour, donne à la passion plus de droits que je ne lui en laissais dans mon premier liv
2251 ’hui ? Je continue à penser qu’il faudrait élever les gens dans une méfiance profonde de ce que représente la passion. C’es
2252 s dans une méfiance profonde de ce que représente la passion. C’est au fond contre la vulgarisation du mythe de Tristan qu
2253 e que représente la passion. C’est au fond contre la vulgarisation du mythe de Tristan que je m’élevais, surtout dans L’A
2254 mythe de Tristan que je m’élevais, surtout dans L’ Amour et l’Occident , et non pas contre le mythe. Cela n’aurait pas de
2255 ristan que je m’élevais, surtout dans L’Amour et l’ Occident , et non pas contre le mythe. Cela n’aurait pas de sens de di
2256 t dans L’Amour et l’Occident , et non pas contre le mythe. Cela n’aurait pas de sens de dire que l’on est contre la passi
2257 e le mythe. Cela n’aurait pas de sens de dire que l’ on est contre la passion qui est l’une des choses glorieuses qui peut
2258 n’aurait pas de sens de dire que l’on est contre la passion qui est l’une des choses glorieuses qui peut arriver à un hom
2259 l’une qu’il faut enseigner aux enfants, par tous les moyens possibles et qui mène au mariage solide, fait pour durer sinon
2260 ne au mariage solide, fait pour durer sinon toute la vie, du moins le plus longtemps possible ; au mariage conçu comme une
2261 ide, fait pour durer sinon toute la vie, du moins le plus longtemps possible ; au mariage conçu comme une œuvre d’art qui
2262 a lui imposera des disciplines. Ces sacrifices on les fait très joyeusement et consciemment parce que l’on sait que c’est l
2263 s fait très joyeusement et consciemment parce que l’ on sait que c’est la condition de réussite de quelque chose de durable
2264 ent et consciemment parce que l’on sait que c’est la condition de réussite de quelque chose de durable. Si je fais un plai
2265 ue chose de durable. Si je fais un plaidoyer pour la fidélité, ce n’est pas au nom d’une morale puritaine, comme certains
2266 pas au nom d’une morale puritaine, comme certains l’ ont cru, mais au nom d’une morale d’artiste. Tout homme est amené à êt
2267 même et surtout de son couple. Je pense que c’est l’ œuvre la plus belle. Et la passion ? La passion, je ne l’exclus pas, m
2268 surtout de son couple. Je pense que c’est l’œuvre la plus belle. Et la passion ? La passion, je ne l’exclus pas, mais je p
2269 ple. Je pense que c’est l’œuvre la plus belle. Et la passion ? La passion, je ne l’exclus pas, mais je pense qu’elle doit
2270 que c’est l’œuvre la plus belle. Et la passion ? La passion, je ne l’exclus pas, mais je pense qu’elle doit être réservée
2271 la plus belle. Et la passion ? La passion, je ne l’ exclus pas, mais je pense qu’elle doit être réservée à de très rares p
2272 à de très rares personnes qui seront probablement le sel de la terre ou qui seront quelquefois des criminels. Revenons à l
2273 rares personnes qui seront probablement le sel de la terre ou qui seront quelquefois des criminels. Revenons à l’Europe. V
2274 qui seront quelquefois des criminels. Revenons à l’ Europe. Vous vivez à Ferney-Voltaire entouré de frontières… Un jour j’
2275 oltaire entouré de frontières… Un jour j’ai passé la frontière avec Robert Schuman en voiture et avec le photographe Pedra
2276 frontière avec Robert Schuman en voiture et avec le photographe Pedrazini qui faisait un reportage sur Robert Schuman che
2277 Centre européen de la culture à Genève. Arrivé à la frontière, le douanier a eu ce mot admirable : « Ah ! ça, c’est l’Eur
2278 en de la culture à Genève. Arrivé à la frontière, le douanier a eu ce mot admirable : « Ah ! ça, c’est l’Europe !… passez…
2279 douanier a eu ce mot admirable : « Ah ! ça, c’est l’ Europe !… passez… » Le fait d’être obligé de passer une et souvent plu
2280 dmirable : « Ah ! ça, c’est l’Europe !… passez… » Le fait d’être obligé de passer une et souvent plusieurs fois par jour l
2281 de passer une et souvent plusieurs fois par jour la frontière est bien fait pour entretenir l’indignation continuelle que
2282 r jour la frontière est bien fait pour entretenir l’ indignation continuelle que j’ai contre les frontières. Cette frontièr
2283 retenir l’indignation continuelle que j’ai contre les frontières. Cette frontière avait été à peu près supprimée par des tr
2284 u près supprimée par des traités qui repoussaient le cordon douanier derrière le Jura et faisaient de l’ensemble du pays d
2285 ités qui repoussaient le cordon douanier derrière le Jura et faisaient de l’ensemble du pays de Gex, Savoie et Genève, de
2286 cordon douanier derrière le Jura et faisaient de l’ ensemble du pays de Gex, Savoie et Genève, de nouveau une région natur
2287 et Genève, de nouveau une région naturelle comme la géographie l’avait dessinée. Mais en 1923, Poincaré, par une espèce d
2288 nouveau une région naturelle comme la géographie l’ avait dessinée. Mais en 1923, Poincaré, par une espèce de coup d’État,
2289 r une espèce de coup d’État, a décidé de porter à la frontière politique sa ligne de douaniers et il en a résulté que dans
2290 sa ligne de douaniers et il en a résulté que dans la région que j’habite, qui est prétendument zone franche, nous sommes e
2291 r me convaincre qu’on n’arrivera vraiment à faire l’ Europe que sur la base des régions, régions recréées en dépit des fron
2292 u’on n’arrivera vraiment à faire l’Europe que sur la base des régions, régions recréées en dépit des frontières, par-dessu
2293 ions recréées en dépit des frontières, par-dessus les frontières, à travers les frontières. Mon slogan est celui-ci : « Les
2294 frontières, par-dessus les frontières, à travers les frontières. Mon slogan est celui-ci : « Les frontières sont faites po
2295 avers les frontières. Mon slogan est celui-ci : «  Les frontières sont faites pour être transformées en écumoires. » Denis d
2296 enis de Rougemont, quelle est votre définition de la gloire ? C’est le salut. C’est ce qui vient après la mort. C’est l’ac
2297 quelle est votre définition de la gloire ? C’est le salut. C’est ce qui vient après la mort. C’est l’accomplissement. C’e
2298 gloire ? C’est le salut. C’est ce qui vient après la mort. C’est l’accomplissement. C’est un triomphal accord clamé à la f
2299 le salut. C’est ce qui vient après la mort. C’est l’ accomplissement. C’est un triomphal accord clamé à la fin de la IXe Sy
2300 ccomplissement. C’est un triomphal accord clamé à la fin de la IXe Symphonie, c’est quelque chose que probablement tout ho
2301 ment. C’est un triomphal accord clamé à la fin de la IXe Symphonie, c’est quelque chose que probablement tout homme a sent
2302 ue chose que probablement tout homme a senti dans le fond de soi-même comme l’achèvement. Cela n’a rien à voir avec la pub
2303 tout homme a senti dans le fond de soi-même comme l’ achèvement. Cela n’a rien à voir avec la publicité. Ça peut être secre
2304 ême comme l’achèvement. Cela n’a rien à voir avec la publicité. Ça peut être secret. Je crois beaucoup à une notion secrè
2305 ecret. Je crois beaucoup à une notion secrète de la gloire. La gloire n’est pas donnée par la foule, elle n’est pas donné
2306 crois beaucoup à une notion secrète de la gloire. La gloire n’est pas donnée par la foule, elle n’est pas donnée par le su
2307 rète de la gloire. La gloire n’est pas donnée par la foule, elle n’est pas donnée par le succès. C’est un sentiment d’épan
2308 as donnée par la foule, elle n’est pas donnée par le succès. C’est un sentiment d’épanouissement suprême, une floraison da
2309 ment d’épanouissement suprême, une floraison dans le ciel accompagnée d’une grande euphorie et d’un grand bonheur. Et votr
2310 rie et d’un grand bonheur. Et votre définition de la mort ? Si un homme pouvait penser complètement la mort, il mourrait à
2311 la mort ? Si un homme pouvait penser complètement la mort, il mourrait à cet instant-là. La mort c’est par essence l’incon
2312 mplètement la mort, il mourrait à cet instant-là. La mort c’est par essence l’inconcevable, donc c’est par essence quelque
2313 rrait à cet instant-là. La mort c’est par essence l’ inconcevable, donc c’est par essence quelque chose dont on ne peut rie
2314 ai des idées folles, comme beaucoup d’hommes, sur la mort, sur la chronologie, si vous voulez. Je pense que l’immortalité
2315 folles, comme beaucoup d’hommes, sur la mort, sur la chronologie, si vous voulez. Je pense que l’immortalité n’est pas que
2316 sur la chronologie, si vous voulez. Je pense que l’ immortalité n’est pas quelque chose qui commence quand on est mort, ni
2317 lque chose qui commence quand on est mort, ni que l’ âme sort par la bouche et va voleter on ne sait pas très bien où. Je m
2318 commence quand on est mort, ni que l’âme sort par la bouche et va voleter on ne sait pas très bien où. Je me dis que l’éte
2319 oleter on ne sait pas très bien où. Je me dis que l’ éternité, l’immortalité, c’est quelque chose qui englobe le temps, qui
2320 sait pas très bien où. Je me dis que l’éternité, l’ immortalité, c’est quelque chose qui englobe le temps, qui le pénètre
2321 é, l’immortalité, c’est quelque chose qui englobe le temps, qui le pénètre complètement et que nous y sommes déjà maintena
2322 té, c’est quelque chose qui englobe le temps, qui le pénètre complètement et que nous y sommes déjà maintenant. Plutôt que
2323 enant. Plutôt que de me demander ce que c’est que la mort, je m’interroge sur ce qu’est la vie. Là, je peux dire quelque c
2324 e c’est que la mort, je m’interroge sur ce qu’est la vie. Là, je peux dire quelque chose : c’est un certain laps de temps
2325 a vocation. Si elle découvre sa vocation, si elle la réalise plus ou moins bien, elle peut dire qu’elle a réussi sa vie et
2326 de notes sur ce que ce mot Dieu peut évoquer pour l’ esprit d’un homme du xxe siècle, moi, par exemple. J’écris généraleme
2327 on impossibilité de ne pas croire. Tout cela avec la plus grande précision dans le détail, car il n’y a là que la précisio
2328 ire. Tout cela avec la plus grande précision dans le détail, car il n’y a là que la précision qui est intéressante ; en év
2329 nde précision dans le détail, car il n’y a là que la précision qui est intéressante ; en évitant tout ce qui peut avoir l’
2330 n’est pas peu dire. Cela veut peut-être dire que le problème est mal posé dans ma tête, ou dans mon existence. À quoi j’e
2331 s toujours finalement, c’est à ceci : Dieu, c’est le sens. S’il n’y a pas de Dieu, il n’y a pas de sens. Certains savants
2332 ui disent qu’ils ne tiennent pas du tout à ce que le monde ait un sens, à ce que notre vie ait un sens, à ce que l’humanit
2333 un sens, à ce que notre vie ait un sens, à ce que l’ humanité ait un sens, puis ils finissent par vous faire un petit coupl
2334 emander : Qu’est-ce que cela veut dire pour vous, la vie, s’il n’y a aucun sens à rien ? Pourquoi ne me comporterais-je pa
2335 à rien ? Pourquoi ne me comporterais-je pas comme le surhomme de Nietzsche ? Au nom de quoi venez-vous me dire qu’il faut
2336 ou qu’il faut être de gauche ? Nous entrons dans l’ arbitraire total. Si, au contraire, j’entre dans le monde où Dieu exis
2337 ’arbitraire total. Si, au contraire, j’entre dans le monde où Dieu existe, alors il y a un sens, il y a quelque chose qui
2338 début de tout mais qu’il est une cause finale de l’ humanité, qu’il appelle le développement de l’homme. D’autre part, je
2339 est une cause finale de l’humanité, qu’il appelle le développement de l’homme. D’autre part, je crois qu’il y a une grande
2340 de l’humanité, qu’il appelle le développement de l’ homme. D’autre part, je crois qu’il y a une grande naïveté à discuter
2341 crois qu’il y a une grande naïveté à discuter sur l’ existence ou la non-existence de Dieu étant donné que nous savons la p
2342 une grande naïveté à discuter sur l’existence ou la non-existence de Dieu étant donné que nous savons la place infime que
2343 non-existence de Dieu étant donné que nous savons la place infime que nous tenons dans l’univers. Je fais quelquefois cett
2344 nous savons la place infime que nous tenons dans l’ univers. Je fais quelquefois cette comparaison un peu élémentaire, mai
2345 ment une cellule de notre corps pourrait croire à l’ existence de ce corps ? Elle n’a aucun moyen d’en prendre connaissance
2346 rtie d’un corps. Elle peut donc parfaitement nier l’ existence du corps. ab. Rougemont Denis de, « [Entretien] L’amour e
2347 u corps. ab. Rougemont Denis de, « [Entretien] L’ amour et l’Europe en expert », Les Nouvelles littéraires, Paris, 24 dé
2348 ab. Rougemont Denis de, « [Entretien] L’amour et l’ Europe en expert », Les Nouvelles littéraires, Paris, 24 décembre 1970
2349 e, « [Entretien] L’amour et l’Europe en expert », Les Nouvelles littéraires, Paris, 24 décembre 1970, p. 1 et 10. ac. Prop
2350 , nous ne trouvons pas seulement confirmation de l’ idéal de toute sa vie ; les hommes qui demain auront la charge du mond
2351 ulement confirmation de l’idéal de toute sa vie ; les hommes qui demain auront la charge du monde pourront y puiser tout un
2352 al de toute sa vie ; les hommes qui demain auront la charge du monde pourront y puiser tout un programme politique inspiré
2353 y puiser tout un programme politique inspiré par l’ idée d’union fédérale. Denis de Rougemont s’est fait l’apôtre de cette
2354 e d’union fédérale. Denis de Rougemont s’est fait l’ apôtre de cette croisade ; il n’est donc pas étonnant qu’on en réenten
2355 e ; il n’est donc pas étonnant qu’on en réentende l’ écho dans sa conversation avec Pierre Lhoste. » ad. Le texte auquel R
2356 o dans sa conversation avec Pierre Lhoste. » ad. Le texte auquel Rougemont fait référence, intitulé « La passion contre l
2357 texte auquel Rougemont fait référence, intitulé «  La passion contre le mariage », est paru en septembre 1938, et non en 19
2358 mont fait référence, intitulé « La passion contre le mariage », est paru en septembre 1938, et non en 1936. ae. La deuxiè
2359 1938, et non en 1936. ae. La deuxième édition de L’ Amour et l’Occident date en fait de 1956.
2360 n en 1936. ae. La deuxième édition de L’Amour et l’ Occident date en fait de 1956.
18 1972, Les Nouvelles littéraires, articles (1933–1972). De l’unité de culture à l’union politique (17-23 avril 1972)
2361 De l’ unité de culture à l’union politique (17-23 avril 1972)af ag L’uni
2362 De l’unité de culture à l’ union politique (17-23 avril 1972)af ag L’unité de l’Europe ne se
2363 e à l’union politique (17-23 avril 1972)af ag L’ unité de l’Europe ne se fera ni uniquement ni principalement par des i
2364 politique (17-23 avril 1972)af ag L’unité de l’ Europe ne se fera ni uniquement ni principalement par des institutions
2365 s institutions européennes ; leur création suivra le cheminement des esprits. Robert Schuman Il nous faut faire l’Europe
2366 des esprits. Robert Schuman Il nous faut faire l’ Europe afin de rester nous-mêmes, disons pour aller vite : ni moujiks
2367 acune trop petite pour se défendre seule, n’a pas la moindre chance de résister d’une part à la colonisation idéologique e
2368 ’a pas la moindre chance de résister d’une part à la colonisation idéologique et militaire par les Russes — je songe aux p
2369 rt à la colonisation idéologique et militaire par les Russes — je songe aux pays de l’Est européen — d’autre part à la colo
2370 t militaire par les Russes — je songe aux pays de l’ Est européen — d’autre part à la colonisation de notre économie et de
2371 songe aux pays de l’Est européen — d’autre part à la colonisation de notre économie et de nos coutumes sociales par les Am
2372 de notre économie et de nos coutumes sociales par les Américains. Mais l’Europe ne pourra jamais se faire que selon la form
2373 de nos coutumes sociales par les Américains. Mais l’ Europe ne pourra jamais se faire que selon la formule fédéraliste, res
2374 Mais l’Europe ne pourra jamais se faire que selon la formule fédéraliste, respectueuse des diversités de tous ordres et de
2375 unifiée et uniformisée, deux hommes ont essayé de la faire : Napoléon et Hitler. Dans les deux cas, l’expérience séculaire
2376 ont essayé de la faire : Napoléon et Hitler. Dans les deux cas, l’expérience séculaire ou millénaire qu’ils prétendaient in
2377 la faire : Napoléon et Hitler. Dans les deux cas, l’ expérience séculaire ou millénaire qu’ils prétendaient inaugurer n’a d
2378 n’a duré que dix à douze ans. Or il se trouve que la formule fédéraliste, seule pratiquement possible pour l’Europe, est e
2379 ule fédéraliste, seule pratiquement possible pour l’ Europe, est en même temps la seule qui corresponde aux réalités de la
2380 quement possible pour l’Europe, est en même temps la seule qui corresponde aux réalités de la culture européenne, aux cond
2381 me temps la seule qui corresponde aux réalités de la culture européenne, aux conditions de sa vitalité. Mais l’obstacle ma
2382 e européenne, aux conditions de sa vitalité. Mais l’ obstacle majeur que l’on dresse sans relâche contre toute union fédéra
2383 itions de sa vitalité. Mais l’obstacle majeur que l’ on dresse sans relâche contre toute union fédérale, c’est l’État natio
2384 e sans relâche contre toute union fédérale, c’est l’ État national de type xixe siècle, jacobin et napoléonien, copié par
2385 et napoléonien, copié par plus de cent pays dans le monde entier, l’État-nation à souveraineté théoriquement illimitée, s
2386 copié par plus de cent pays dans le monde entier, l’ État-nation à souveraineté théoriquement illimitée, sacro-sainte mais
2387 et obstacle politique, en retour, est fomenté par la culture. Car ce sont bien des faits de culture : l’école, aux trois d
2388 culture. Car ce sont bien des faits de culture : l’ école, aux trois degrés, la presse, les livres, qui nous font croire,
2389 des faits de culture : l’école, aux trois degrés, la presse, les livres, qui nous font croire, depuis plusieurs génération
2390 e culture : l’école, aux trois degrés, la presse, les livres, qui nous font croire, depuis plusieurs générations de bons él
2391 élèves et de maîtres eux-mêmes trop crédules, que l’ État national centralisé et absolument souverain est l’aboutissement n
2392 t national centralisé et absolument souverain est l’ aboutissement nécessaire, inévitable et naturel de toute l’évolution h
2393 sement nécessaire, inévitable et naturel de toute l’ évolution humaine. L’école, surtout secondaire, apprend depuis un sièc
2394 évitable et naturel de toute l’évolution humaine. L’ école, surtout secondaire, apprend depuis un siècle aux jeunes Europée
2395 nos nations n’ont même pas cent ans d’âge. Seules la France, l’Angleterre et l’Espagne comptent plusieurs siècles. Même si
2396 n’ont même pas cent ans d’âge. Seules la France, l’ Angleterre et l’Espagne comptent plusieurs siècles. Même si l’on peut
2397 cent ans d’âge. Seules la France, l’Angleterre et l’ Espagne comptent plusieurs siècles. Même si l’on peut admettre qu’un É
2398 et l’Espagne comptent plusieurs siècles. Même si l’ on peut admettre qu’un État français existe réellement depuis Philippe
2399 is Philippe le Bel, il est absolument certain que l’ Italie comme État n’a que cent-dix ans, l’Allemagne cent ans, la Norvè
2400 ain que l’Italie comme État n’a que cent-dix ans, l’ Allemagne cent ans, la Norvège soixante-six, la Tchécoslovaquie, la Yo
2401 État n’a que cent-dix ans, l’Allemagne cent ans, la Norvège soixante-six, la Tchécoslovaquie, la Yougoslavie, la Hongrie,
2402 s, l’Allemagne cent ans, la Norvège soixante-six, la Tchécoslovaquie, la Yougoslavie, la Hongrie, la Pologne cinquante-tro
2403 ans, la Norvège soixante-six, la Tchécoslovaquie, la Yougoslavie, la Hongrie, la Pologne cinquante-trois, la jeune Islande
2404 soixante-six, la Tchécoslovaquie, la Yougoslavie, la Hongrie, la Pologne cinquante-trois, la jeune Islande vingt-sept, et
2405 , la Tchécoslovaquie, la Yougoslavie, la Hongrie, la Pologne cinquante-trois, la jeune Islande vingt-sept, et Malte, dix.
2406 goslavie, la Hongrie, la Pologne cinquante-trois, la jeune Islande vingt-sept, et Malte, dix. L’école nous a raconté que c
2407 rois, la jeune Islande vingt-sept, et Malte, dix. L’ école nous a raconté que chacun de nos États-nations correspond à une
2408 que défini par des frontières naturelles. Et nous l’ avons cru ! Or tout est faux dans cet enseignement. Il n’y a pas de
2409 gnement. Il n’y a pas de cultures nationales La culture européenne n’est pas la somme de vingt-cinq cultures national
2410 res nationales La culture européenne n’est pas la somme de vingt-cinq cultures nationales, puisqu’elle existait bien av
2411 tures nationales, puisqu’elle existait bien avant la formation, récente nous venons de le voir, de nos États-nations. Le m
2412 t bien avant la formation, récente nous venons de le voir, de nos États-nations. Le mot nation, natio en latin, désignait
2413 nte nous venons de le voir, de nos États-nations. Le mot nation, natio en latin, désignait au Moyen Âge, dans une ville un
2414 gnait au Moyen Âge, dans une ville universitaire, les colonies d’étudiants venus d’une même région d’Europe et parlant entr
2415 s d’une même région d’Europe et parlant entre eux la même langue : nation anglaise, nation flamande, nation italienne, c’é
2416 ns nationales dans une cité universitaire. Mais à l’ Université même, on ne parlait qu’en latin. C’est ainsi qu’à la Sorbon
2417 même, on ne parlait qu’en latin. C’est ainsi qu’à la Sorbonne, vers 1270 — comme me le faisait observer un jour Étienne Gi
2418 ’est ainsi qu’à la Sorbonne, vers 1270 — comme me le faisait observer un jour Étienne Gilson — pas un seul des grands prof
2419 ait une grande culture commune, bien antérieure à l’ idée même d’État-nation. Mais dira-t-on, le mot « nation » désignait,
2420 eure à l’idée même d’État-nation. Mais dira-t-on, le mot « nation » désignait, dès ce temps, ceux qui parlaient même langu
2421 ême langue ? Oui, mais il n’était pas question de les enfermer pour autant dans les frontières d’un même État. D’ailleurs,
2422 ait pas question de les enfermer pour autant dans les frontières d’un même État. D’ailleurs, il n’est pas vrai que nos État
2423 ai que nos États-nations modernes correspondent à l’ aire de diffusion d’une langue. Prenez la France : on parle huit langu
2424 ondent à l’aire de diffusion d’une langue. Prenez la France : on parle huit langues à l’intérieur de ses frontières actuel
2425 actuelles ; breton et flamand au nord, allemand à l’ est, basque, occitan, catalan et italien au sud, et naturellement le f
2426 itan, catalan et italien au sud, et naturellement le français, imposé comme seule langue officielle dès 1539 par l’édit de
2427 imposé comme seule langue officielle dès 1539 par l’ édit de Villers-Cotterêts. Si la France entendait revendiquer la Wallo
2428 elle dès 1539 par l’édit de Villers-Cotterêts. Si la France entendait revendiquer la Wallonie, la Suisse romande et le Val
2429 ers-Cotterêts. Si la France entendait revendiquer la Wallonie, la Suisse romande et le Val d’Aoste au nom de l’unité lingu
2430 . Si la France entendait revendiquer la Wallonie, la Suisse romande et le Val d’Aoste au nom de l’unité linguistique, elle
2431 ait revendiquer la Wallonie, la Suisse romande et le Val d’Aoste au nom de l’unité linguistique, elle devrait s’amputer, p
2432 ie, la Suisse romande et le Val d’Aoste au nom de l’ unité linguistique, elle devrait s’amputer, pour le même motif, de prè
2433 ’unité linguistique, elle devrait s’amputer, pour le même motif, de près de la moitié de ses territoires actuels. Prenez l
2434 devrait s’amputer, pour le même motif, de près de la moitié de ses territoires actuels. Prenez la langue allemande : si el
2435 s de la moitié de ses territoires actuels. Prenez la langue allemande : si elle devait coïncider avec un État-nation, il f
2436 ncider avec un État-nation, il faudrait annexer à la République fédérale outre l’Allemagne de l’Est, la Suisse alémanique,
2437 l faudrait annexer à la République fédérale outre l’ Allemagne de l’Est, la Suisse alémanique, les Sudètes, les minorités g
2438 a République fédérale outre l’Allemagne de l’Est, la Suisse alémanique, les Sudètes, les minorités germanophones de la Bel
2439 outre l’Allemagne de l’Est, la Suisse alémanique, les Sudètes, les minorités germanophones de la Belgique, de l’Alsace, de
2440 agne de l’Est, la Suisse alémanique, les Sudètes, les minorités germanophones de la Belgique, de l’Alsace, de la Transylvan
2441 ique, les Sudètes, les minorités germanophones de la Belgique, de l’Alsace, de la Transylvanie, de la Slovénie, de la Polo
2442 s, les minorités germanophones de la Belgique, de l’ Alsace, de la Transylvanie, de la Slovénie, de la Pologne, des pays ba
2443 tés germanophones de la Belgique, de l’Alsace, de la Transylvanie, de la Slovénie, de la Pologne, des pays baltes et de la
2444 la Belgique, de l’Alsace, de la Transylvanie, de la Slovénie, de la Pologne, des pays baltes et de la Volga. On m’objecte
2445 l’Alsace, de la Transylvanie, de la Slovénie, de la Pologne, des pays baltes et de la Volga. On m’objecte souvent que nos
2446 la Slovénie, de la Pologne, des pays baltes et de la Volga. On m’objecte souvent que nos langues sont trop différentes pou
2447 arsovie et Madrid. C’est oublier que toutes (sauf le basque et le finno-ougrien) sont étroitement apparentées. Alors qu’en
2448 drid. C’est oublier que toutes (sauf le basque et le finno-ougrien) sont étroitement apparentées. Alors qu’en Chine on par
2449 on parle quatorze langues radicalement étrangères les unes aux autres, si bien que les Chinois de provinces différentes ne
2450 ement étrangères les unes aux autres, si bien que les Chinois de provinces différentes ne peuvent communiquer entre eux qu’
2451 entre eux qu’au moyen d’idéogrammes dessinés dans la paume de leur main, les Européens retrouvent sans peine dans leurs la
2452 ’idéogrammes dessinés dans la paume de leur main, les Européens retrouvent sans peine dans leurs langues non seulement les
2453 uvent sans peine dans leurs langues non seulement les formes et les mots dérivés de leur commune origine indo-européenne, m
2454 ne dans leurs langues non seulement les formes et les mots dérivés de leur commune origine indo-européenne, mais encore tou
2455 ires romaines, notions théologiques diffusées par l’ Église du Moyen Âge, notions scientifiques et techniques aujourd’hui,
2456 niques aujourd’hui, à quoi viennent se superposer les influences dominantes de l’italien à la fin du Moyen Âge, du français
2457 ennent se superposer les influences dominantes de l’ italien à la fin du Moyen Âge, du français au xviiie siècle, de l’all
2458 perposer les influences dominantes de l’italien à la fin du Moyen Âge, du français au xviiie siècle, de l’allemand des ph
2459 n du Moyen Âge, du français au xviiie siècle, de l’ allemand des philosophes et des savants au xixe , et de l’anglo-améric
2460 nd des philosophes et des savants au xixe , et de l’ anglo-américain de nos jours. Le mot « évêque », par exemple, véhiculé
2461 s au xixe , et de l’anglo-américain de nos jours. Le mot « évêque », par exemple, véhiculé par l’usage ecclésiastique, se
2462 urs. Le mot « évêque », par exemple, véhiculé par l’ usage ecclésiastique, se retrouve aisément dans toutes nos langues : é
2463 des termes militaires comme « canon », et de tous les termes techniques. Vues de loin, de l’Asie ou de l’Afrique, toutes no
2464 t de tous les termes techniques. Vues de loin, de l’ Asie ou de l’Afrique, toutes nos langues se ressemblent comme des sœur
2465 termes techniques. Vues de loin, de l’Asie ou de l’ Afrique, toutes nos langues se ressemblent comme des sœurs. Vue de loi
2466 gues se ressemblent comme des sœurs. Vue de loin, l’ unité culturelle de l’Europe est un fait que personne ne conteste. Enf
2467 mme des sœurs. Vue de loin, l’unité culturelle de l’ Europe est un fait que personne ne conteste. Enfin, il y a l’affaire d
2468 t un fait que personne ne conteste. Enfin, il y a l’ affaire des frontières naturelles, chères à l’école. Cette notion pren
2469 y a l’affaire des frontières naturelles, chères à l’ école. Cette notion prend son origine sous Louis XIV, dans les guerres
2470 tte notion prend son origine sous Louis XIV, dans les guerres contre l’Espagne et les Allemagnes au-delà du Rhin ; elle a é
2471 n origine sous Louis XIV, dans les guerres contre l’ Espagne et les Allemagnes au-delà du Rhin ; elle a été mise en forme p
2472 s Louis XIV, dans les guerres contre l’Espagne et les Allemagnes au-delà du Rhin ; elle a été mise en forme par la Révoluti
2473 es au-delà du Rhin ; elle a été mise en forme par la Révolution française, et elle a triomphé dans l’enseignement de la gé
2474 la Révolution française, et elle a triomphé dans l’ enseignement de la géographie au xixe , là encore contre toute évidenc
2475 nçaise, et elle a triomphé dans l’enseignement de la géographie au xixe , là encore contre toute évidence, mais au service
2476 e contre toute évidence, mais au service dévot de l’ État-nation. C’est ainsi qu’on nous a inculqué que le Rhin sépare les
2477 tat-nation. C’est ainsi qu’on nous a inculqué que le Rhin sépare les peuples de ses rives, mais que le Rhône les unit, all
2478 st ainsi qu’on nous a inculqué que le Rhin sépare les peuples de ses rives, mais que le Rhône les unit, allez savoir pourqu
2479 le Rhin sépare les peuples de ses rives, mais que le Rhône les unit, allez savoir pourquoi ! De même, les Pyrénées séparen
2480 épare les peuples de ses rives, mais que le Rhône les unit, allez savoir pourquoi ! De même, les Pyrénées séparent l’Espagn
2481 Rhône les unit, allez savoir pourquoi ! De même, les Pyrénées séparent l’Espagne de la France, voilà qui est clair, à cond
2482 savoir pourquoi ! De même, les Pyrénées séparent l’ Espagne de la France, voilà qui est clair, à condition qu’un esprit fo
2483 rit fort (ou un naïf) ne vienne pas remarquer que l’ on trouve à l’est de cette chaîne les mêmes Catalans sur les deux vers
2484 n naïf) ne vienne pas remarquer que l’on trouve à l’ est de cette chaîne les mêmes Catalans sur les deux versants, et les m
2485 remarquer que l’on trouve à l’est de cette chaîne les mêmes Catalans sur les deux versants, et les mêmes Basques à l’ouest.
2486 ve à l’est de cette chaîne les mêmes Catalans sur les deux versants, et les mêmes Basques à l’ouest. Quant aux Alpes, chacu
2487 aîne les mêmes Catalans sur les deux versants, et les mêmes Basques à l’ouest. Quant aux Alpes, chacun peut vérifier qu’on
2488 ans sur les deux versants, et les mêmes Basques à l’ ouest. Quant aux Alpes, chacun peut vérifier qu’on y parle italien des
2489 des deux côtés au sud, français des deux côtés à la hauteur des vallées vaudoises et du Val d’Aoste, plus loin l’allemand
2490 es vallées vaudoises et du Val d’Aoste, plus loin l’ allemand, puis le ladin, puis de nouveau l’allemand, toujours des deux
2491 ses et du Val d’Aoste, plus loin l’allemand, puis le ladin, puis de nouveau l’allemand, toujours des deux côtés. Et la Sui
2492 s loin l’allemand, puis le ladin, puis de nouveau l’ allemand, toujours des deux côtés. Et la Suisse est née du Gothard, au
2493 e nouveau l’allemand, toujours des deux côtés. Et la Suisse est née du Gothard, au cœur des Alpes. L’unité et les vraie
2494 Suisse est née du Gothard, au cœur des Alpes. L’ unité et les vraies diversités La vérité qu’on nous cachait, c’est
2495 née du Gothard, au cœur des Alpes. L’unité et les vraies diversités La vérité qu’on nous cachait, c’est que la cultu
2496 des Alpes. L’unité et les vraies diversités La vérité qu’on nous cachait, c’est que la culture de tous nos peuples e
2497 rsités La vérité qu’on nous cachait, c’est que la culture de tous nos peuples est une, quoique tissée de contradictions
2498 slaves, souvent incompatibles entre elles — de là le caractère essentiellement contestataire de son génie — mais qui nous
2499 et qui ont éduqué notre vision du réel, que nous le sachions ou non, que nous soyons « cultivés » ou non. Toutes les gran
2500 non, que nous soyons « cultivés » ou non. Toutes les grandes écoles d’art, d’architecture, de musique, de philosophie, de
2501 e, ont été paneuropéennes, et non pas nationales. Les grands courants européens, les grandes écoles d’art et de pensée : c’
2502 on pas nationales. Les grands courants européens, les grandes écoles d’art et de pensée : c’est l’unité de notre culture co
2503 ns, les grandes écoles d’art et de pensée : c’est l’ unité de notre culture commune. Mais qu’en est-il de nos diversités ta
2504 nt vantées, et à juste titre ? Est-il vrai, comme le disent trop souvent d’éloquents ministres à Bruxelles ou à Strasbourg
2505 dessus deux observations faciles à vérifier. Non, les frontières de nos États n’ont jamais été « naturelles ». Elles sont a
2506  ». Elles sont accidentelles et arbitraires comme les conflits armés dont elles figurent sur nos atlas les cicatrices. Elle
2507 conflits armés dont elles figurent sur nos atlas les cicatrices. Elles sont encore, disait un historien français, le résul
2508 Elles sont encore, disait un historien français, le résultat des « viols répétés de la géographie par l’histoire », comme
2509 rien français, le résultat des « viols répétés de la géographie par l’histoire », comme je le vois tous les jours autour d
2510 résultat des « viols répétés de la géographie par l’ histoire », comme je le vois tous les jours autour de Genève, en trave
2511 pétés de la géographie par l’histoire », comme je le vois tous les jours autour de Genève, en traversant cette frontière q
2512 éographie par l’histoire », comme je le vois tous les jours autour de Genève, en traversant cette frontière qui ne rime à r
2513 drait arrêter — tempêtes, épidémies, pollution de l’ air et de l’eau — mais gêne les échanges qu’il faudrait promouvoir et
2514 r — tempêtes, épidémies, pollution de l’air et de l’ eau — mais gêne les échanges qu’il faudrait promouvoir et vexe tout le
2515 émies, pollution de l’air et de l’eau — mais gêne les échanges qu’il faudrait promouvoir et vexe tout le monde ; beau symbo
2516 romouvoir et vexe tout le monde ; beau symbole de la souveraineté stato-nationale, qui ne peut plus avoir d’effets que nég
2517 avoir d’effets que négatifs ! En nous présentant l’ Europe comme un puzzle de nations en teintes pâles, et la culture de l
2518 e comme un puzzle de nations en teintes pâles, et la culture de l’Europe comme une addition de prétendues « cultures natio
2519 zle de nations en teintes pâles, et la culture de l’ Europe comme une addition de prétendues « cultures nationales », les m
2520 e addition de prétendues « cultures nationales », les manuels de notre enfance non seulement se trouvaient justifier les pi
2521 tre enfance non seulement se trouvaient justifier les pires chauvinismes, fauteurs de deux guerres mondiales où l’Europe a
2522 auvinismes, fauteurs de deux guerres mondiales où l’ Europe a failli périr, mais encore ils faussaient notre vision de l’hi
2523 périr, mais encore ils faussaient notre vision de l’ histoire et le sens même de la vie de l’esprit. 1° Chacun de nos pays
2524 core ils faussaient notre vision de l’histoire et le sens même de la vie de l’esprit. 1° Chacun de nos pays a un nord et u
2525 ent notre vision de l’histoire et le sens même de la vie de l’esprit. 1° Chacun de nos pays a un nord et un midi : dans ch
2526 vision de l’histoire et le sens même de la vie de l’ esprit. 1° Chacun de nos pays a un nord et un midi : dans chacun vous
2527 Or, je mets en fait que dans la plupart des cas, les libéraux de pays différents se ressemblent davantage et s’entendront
2528 ndront mieux entre eux qu’ils ne s’entendent avec les fanatiques de leur propre nation ; que les hippies d’un pays s’accord
2529 t avec les fanatiques de leur propre nation ; que les hippies d’un pays s’accorderont mieux avec ceux de n’importe où qu’av
2530 corderont mieux avec ceux de n’importe où qu’avec les conformistes de leur propre nation, etc. Ce ne sont pas nos appartena
2531 s nationales qui nous diversifient vraiment, mais les écoles de pensée, les styles de vie. Supprimez les frontières nationa
2532 diversifient vraiment, mais les écoles de pensée, les styles de vie. Supprimez les frontières nationales, vous n’appauvrire
2533 es écoles de pensée, les styles de vie. Supprimez les frontières nationales, vous n’appauvrirez en rien l’Europe. 2° La cré
2534 frontières nationales, vous n’appauvrirez en rien l’ Europe. 2° La création culturelle en Europe est d’autant plus riche et
2535 tionales, vous n’appauvrirez en rien l’Europe. 2° La création culturelle en Europe est d’autant plus riche et plus intense
2536 mbreux. Au Moyen Âge, ces foyers de création sont les universités, à la Renaissance les cités du Nord de l’Italie, des Flan
2537 e, ces foyers de création sont les universités, à la Renaissance les cités du Nord de l’Italie, des Flandres, de la Bourgo
2538 e création sont les universités, à la Renaissance les cités du Nord de l’Italie, des Flandres, de la Bourgogne et de la Rhé
2539 e les cités du Nord de l’Italie, des Flandres, de la Bourgogne et de la Rhénanie, du Languedoc et de la Castille. On sait
2540 de l’Italie, des Flandres, de la Bourgogne et de la Rhénanie, du Languedoc et de la Castille. On sait le rôle merveilleus
2541 a Bourgogne et de la Rhénanie, du Languedoc et de la Castille. On sait le rôle merveilleusement fécondant de petites ville
2542 Rhénanie, du Languedoc et de la Castille. On sait le rôle merveilleusement fécondant de petites villes comme Tubingue, Ién
2543 illes comme Tubingue, Iéna, Weimar ou Dresde dans les Allemagnes romantiques, celles de Hegel ou de Schelling, de Hölderlin
2544 u de Humboldt, au moment même où Napoléon fait de la France un désert culturel en mobilisant à Paris tous les esprits dist
2545 nce un désert culturel en mobilisant à Paris tous les esprits distingués qu’il n’a pas bannis. Le grand secret de la vitali
2546 tous les esprits distingués qu’il n’a pas bannis. Le grand secret de la vitalité inégalée de notre culture européenne, il
2547 stingués qu’il n’a pas bannis. Le grand secret de la vitalité inégalée de notre culture européenne, il est dans cette inte
2548 sans cesse remettent en question et renouvellent les données communes. Or dans ce jeu entre les grands courants et les foy
2549 ellent les données communes. Or dans ce jeu entre les grands courants et les foyers locaux, entre l’unité et la diversité,
2550 unes. Or dans ce jeu entre les grands courants et les foyers locaux, entre l’unité et la diversité, l’échelon national ne j
2551 e les grands courants et les foyers locaux, entre l’ unité et la diversité, l’échelon national ne joue aucun rôle, est simp
2552 s courants et les foyers locaux, entre l’unité et la diversité, l’échelon national ne joue aucun rôle, est simplement omis
2553 les foyers locaux, entre l’unité et la diversité, l’ échelon national ne joue aucun rôle, est simplement omis, inexistant.
2554 se en termes politiques mon équation : Europe de la culture : foyers de création initiant des courants continentaux. cela
2555 composant une fédération continentale. Voici donc le modèle fédéraliste de l’Europe que je préconise : la complexité des r
2556 continentale. Voici donc le modèle fédéraliste de l’ Europe que je préconise : la complexité des régions rendra justice à s
2557 modèle fédéraliste de l’Europe que je préconise : la complexité des régions rendra justice à ses fécondes diversités, et l
2558 ions rendra justice à ses fécondes diversités, et l’ ampleur de la fédération exprimera l’unité millénaire de sa culture.
2559 ustice à ses fécondes diversités, et l’ampleur de la fédération exprimera l’unité millénaire de sa culture. af. Rougem
2560 versités, et l’ampleur de la fédération exprimera l’ unité millénaire de sa culture. af. Rougemont Denis de, « De l’uni
2561 e de sa culture. af. Rougemont Denis de, « De l’ unité de culture à l’union politique », Les Nouvelles littéraires, Par
2562 f. Rougemont Denis de, « De l’unité de culture à l’ union politique », Les Nouvelles littéraires, Paris, 17 avril 1972–23
2563 e, « De l’unité de culture à l’union politique », Les Nouvelles littéraires, Paris, 17 avril 1972–23 avril 1971, p. 13-14.
2564 72–23 avril 1971, p. 13-14. ag. Version revue de l’ article paru sous le titre : « L’Europe est d’abord une unité de cultu
2565  13-14. ag. Version revue de l’article paru sous le titre : « L’Europe est d’abord une unité de culture », Intégration :
2566 Version revue de l’article paru sous le titre : «  L’ Europe est d’abord une unité de culture », Intégration : Vierteljahres