1
insupportable ? Telles étaient les questions que
se
posait, vers la fin de la guerre, dans le presbytère d’un village de
2
ptimisme culturel sur lequel, trop souvent, elles
s’
étaient appuyées, la guerre et la révolution le bouleversaient brutale
3
e non moins inouï de la Bible, de cette Bible qui
se
pose comme une nouvelle énigme en face des contradictions de la vie.
4
r cette question à laquelle il ne peut ni ne veut
se
soustraire, Karl Barth se met à relire l’Épître aux Romains, la plus
5
e il ne peut ni ne veut se soustraire, Karl Barth
se
met à relire l’Épître aux Romains, la plus inquiétante sans doute, po
6
ai que de ce qui rassure, une réponse qui ne veut
s’
adresser qu’à ces « questions dernières » de notre vie, celle devant l
7
de nous que nous les comprenions mieux qu’ils ne
se
comprennent eux-mêmes… Si nous ne prenons pas les hommes au sérieux q
8
int hostile à tout système. La théologie de Barth
se
donne en effet pour une simple « note marginale » à tous les systèmes
9
problème de Dieu. Il n’en faut pas plus pour que
se
lèvent de toutes parts de troublants paradoxes. La Bible nous parle-t
10
ètes n’ont pas de biographie : « L’homme biblique
se
lève et tombe avec sa mission ». Il y a plus. L’histoire biblique, lo
11
ironie, que le théologien doit avoir conscience,
s’
il veut parler valablement. Mais de quoi va-t-il encore pouvoir parler
12
la tâche du théologien est de parler de Dieu, il
s’
avère qu’en tant qu’homme il ne le peut : « Car parler de Dieu voudrai
13
bien aux condamnés à mort.) L’homme religieux qui
se
refuse à cette mort, se refuse aussi à la vie. Il meurt de ne pas mou
14
t.) L’homme religieux qui se refuse à cette mort,
se
refuse aussi à la vie. Il meurt de ne pas mourir, selon la parole pro
15
é biblique — tels sont les thèmes autour desquels
s’
organisent ces essais. Est-ce là de la théologie ? C’est plutôt une ré
16
ait la clause aryenne et trahissait sa foi, Barth
s’
est dressé dans une protestation retentissante, que personne n’a osé f
17
t, Vinet… Cette énumération, pourtant inévitable,
se
révèle, pour mon entreprise, catastrophique. Persistons en dépit du b
18
rie la plus folle, un humour apitoyé. Si Toepffer
s’
attendrit sur ses bonhommes, n’est-ce pas une manière de dégonfler les
19
livres à tirage limité. N’allez pas croire qu’il
s’
agisse d’auteurs comiques : il s’agit d’abord de poètes. Je crains mêm
20
pas croire qu’il s’agisse d’auteurs comiques : il
s’
agit d’abord de poètes. Je crains même de leur faire du tort en écriva
21
de gens qui ont l’air d’avoir compris de quoi il
s’
agit. Il n’y a plus qu’à perpétrer une horrible inconvenance, un de ce
22
otre langue, et c’est pourquoi sans doute elle ne
s’
y manifeste que par ces « ratés » émouvants, dont nous rions faute de
23
ans égale parmi nous, cette musique d’un cœur qui
s’
abandonne, qui s’accepte. C’est cela qui fait la qualité lyrique de l’
24
ous, cette musique d’un cœur qui s’abandonne, qui
s’
accepte. C’est cela qui fait la qualité lyrique de l’humour de Pierre
25
Je n’ai pas de passeport ; je n’en ai jamais eu ;
s’
il doit être que j’en doive un avoir un, je veux qu’il ne soit de ceux
26
oit de ceux que j’aie fabriqués moi-même. » Ainsi
s’
exprime Bruno Pomposo, dont Cingria, naguère, donna les Autobiographie
27
e génération de protestants, celle qui commence à
s’
exprimer dans des revues comme Foi et Vie , Le Semeur , Hic et Nunc
28
th, M. Dominicé, qui n’ignore pas ces influences,
s’
est limité dans son étude au calvinisme le plus strict. Par là même, i
29
ude au calvinisme le plus strict. Par là même, il
se
rend plus directement accessible au lecteur français. Essayons de mar
30
te rencontre pouvait-elle avoir lieu ? Deux voies
s’
offraient : celle de l’histoire et celle de l’expérience religieuse. P
31
la voie de l’histoire, c’était d’abord chercher à
s’
approcher de l’homme Jésus tel que le décrivent les évangiles. Mais, d
32
Mais, dit M. Dominicé, deux obstacles très graves
se
dressaient aussitôt. Le premier, c’étaient les miracles. Aussi bien,
33
. Le premier, c’étaient les miracles. Aussi bien,
se
méfiait-on de plus en plus de ces miracles, pour s’attacher au seul c
34
méfiait-on de plus en plus de ces miracles, pour
s’
attacher au seul caractère de Jésus. Mais alors, n’était-ce pas un abu
35
se, dialogue vivant avec le Christ des évangiles,
se
réduisait à une contemplation de sa vie. Dans cette difficulté, le je
36
le répète plusieurs fois : « Heureux celui qui ne
s’
en scandalise pas. » ⁂ Retrouver cette réalité, c’était du même coup p
37
resse. Tout au contraire du critique moderne, qui
se
pose en juge du texte, Calvin n’admet et ne pratique qu’une « exégèse
38
ne pratique qu’une « exégèse d’obéissance » — il
se
laisse juger par le texte. On ne saurait imaginer rien de plus opposé
39
anage du protestantisme. L’ouvrage de M. Dominicé
s’
inspire évidemment des mêmes principes exégétiques. Certes, l’auteur n
40
e lyrique autour d’un texte. Son sujet d’ailleurs
s’
y prête peu. Mais on regrette parfois qu’il suive à pas si prudents so
41
odèle, et que l’admiration que lui inspire Calvin
s’
exprime en termes aussi respectueux des objections possibles. Il est v
42
philosophiques et littéraires ! Probablement, il
s’
en fût amusé : tout ce qui touchait à l’opinion publique était pour lu
43
roche de la mystification. Il eut peut-être ri de
se
voir présenté tantôt comme anarchiste et pourfendeur de prêtres, tant
44
n auteur religieux ; toute ma carrière littéraire
se
rapporte au christianisme, et en particulier à ce problème : comment
45
rête à certaines confusions : l’œuvre, en danois,
s’
appelle La Maladie mortelle, et cette maladie, c’est le péché. L’impit
46
sme brutal du sujet. Que le lecteur, pourtant, ne
se
laisse point arrêter par des définitions dont la substance, tôt après
47
par des définitions dont la substance, tôt après,
se
révèle admirablement concrète. Le génie familier et ironique de Kierk
48
vancer tous les problèmes de notre siècle. Le ton
s’
y élève à la hauteur de l’invective prophétique : Plains-toi, l’Étern
49
lains-toi, l’Éternel ne craint rien, il peut bien
se
défendre ; mais comment le pourrait-il quand personne n’ose se plaind
50
mais comment le pourrait-il quand personne n’ose
se
plaindre comme il sied à un homme ? Parle, élève la voix, parle fort,
51
’il était possible par le traducteur). Mais il ne
s’
agit là que du premier volet d’un triptyque dont il nous faut attendre
52
vec autant de science que de conscience, mais qui
se
répétaient fastidieusement. Surtout, il situera, définitivement je l’
53
de plus urgent pour nous que d’aller voir ce qui
se
passe dans l’œuvre du danois prophétique, ressuscité par l’angoisse m
54
influence, limitée d’abord aux pays anglo-saxons,
s’
étend rapidement depuis quelques mois en Allemagne, en Suisse, à Paris
55
t la présence discrète n’étonna personne. De quoi
s’
agissait-il ? Ni de théologie, ni de problèmes sociaux, ni de morale ;
56
iaux, ni de morale ; ni même d’évangélisation. Il
s’
agissait de mettre en commun des difficultés intimes, d’entrer dans le
57
onfessions sensationnelles. J’avais tort, et l’on
s’
en convaincra en lisant le petit livre d’Harold Begbie, Vies transform
58
lement personnaliste. La rénovation de l’homme ne
se
fera jamais par le moyen de mouvements de masse, ni par des organisat
59
nnellement, activement. N’allons pas croire qu’il
s’
agisse là d’une nouvelle forme de pragmatisme américain. Dire que la f
60
cain. Dire que la foi n’est réelle que là où elle
se
réalise ne signifie pas qu’il faille agir à tout prix. L’activiste mo
61
relation concrète avec le prochain. Mais comment
s’
engager dans cette relation ? L’erreur des chrétiens, trop souvent, c’
62
’erreur des chrétiens, trop souvent, c’est qu’ils
s’
efforcent d’endoctriner ceux qu’ils rencontrent. Le « partage » précon
63
ères morales qui séparent nos contemporains, l’on
s’
en persuadera facilement en lisant les récits de Begbie. Les disciples
64
sque indéniable : celui de naturaliser la foi, de
s’
attacher aux résultats visibles et frappants, de retomber ainsi dans l
65
ttitude de Buchman. Car ce n’est pas assez que de
se
refuser à parler de théologie sous prétexte que c’est abstrait : enco
66
prétexte que c’est abstrait : encore faudrait-il
se
garder de vivre une théologie équivoque. À quoi les membres du Mouvem
67
ement des Groupes peuvent répondre que leur œuvre
se
développe dans une atmosphère de franchise, d’autocritique, de sobrié
68
e ce temps peuvent devenir des hommes réels. ⁂ Il
se
peut que Kagawa soit l’homme le plus réel d’aujourd’hui. Je dirais qu
69
onseiller de l’empereur et d’une danseuse, Kagawa
se
convertit au christianisme pendant ses études et déclare renoncer à t
70
vilèges aristocratiques. Il embrasse la pauvreté,
s’
enfonce dans les slums de Kobé, décide qu’il n’aura pas d’habitation p
71
les parois de la pièce pour permettre à chacun de
se
coucher. Kagawa les nourrit de son travail. Parfois, ils se révoltent
72
. Kagawa les nourrit de son travail. Parfois, ils
se
révoltent contre sa bonté souriante, fracassent sa vaisselle, lui tir
73
e, fracassent sa vaisselle, lui tirent dessus. Il
s’
échappe et revient le lendemain. Il prêche dans le quartier des prosti
74
erculose et une maladie des yeux, il arrive qu’il
s’
effondre pendant ses discours. Il écrit une Psychologie de la pauvreté
75
le tirage atteint 250 000 exemplaires. Son œuvre
s’
étend dans les slums. Mais à ce moment le machinisme s’introduit au Ja
76
nd dans les slums. Mais à ce moment le machinisme
s’
introduit au Japon, augmentant la misère avec le nombre des ouvriers.
77
er pour célébrer la liberté. Sa ligne de bataille
s’
étend. Il crée l’Union des paysans. Il évangélise. Il devient le « fou
78
août 1934, p. 3. g. Comme l’indique la note, il
s’
agit d’Avant l’aube (Éditions « Je sers ») dont Rougemont donne une re
79
es. N’est-ce point-là l’image habituelle que l’on
se
fait de nos climats ? Et voici un dernier argument. Prenez une liste
80
roman chrétien ? Une histoire où tout le monde «
se
conduit bien » ? Il n’y aurait pas de roman. Une histoire dont le per
81
idence » mise en action au gré d’un moraliste qui
se
donne l’air de l’avoir bel et bien sondée ? Ce serait un conte bleu,
82
s des « païens », d’un Thomas Hardy, par exemple,
se
devaient de finir aussi mal que possible ? Non, car le christianisme
83
ussi mal que possible ? Non, car le christianisme
se
passe dans cette vie ou bien n’est pas le christianisme. Et l’on sera
84
en qu’un quelconque happy end soi-disant édifiant
s’
il est certain que l’Évangile et ses promesses de salut sont seuls cap
85
’œuvre d’art à certaine qualité du pessimisme qui
s’
en dégage : pessimisme jamais cynique et désespoir jamais complaisant
86
it le cœur, à chaque page. Toute une vie de femme
se
déroule sur un rythme large à travers un peuple de personnages viveme
87
es trop grandes, dans le taudis où son vieux père
se
saoule et sacre, dix autres scènes enfantines : c’est Andersen, en pl
88
ies, l’originalité bouleversante des êtres, qu’il
s’
agisse d’un grand évêque ou de cette fille de ferme « au mince visage
89
t-être aussi des saints, mais qu’on ignore et qui
s’
ignorent. Partout et jusque dans les choses, un mystère inquiétant se
90
et jusque dans les choses, un mystère inquiétant
se
révèle aux yeux de celui qui sait voir, parce que, mieux que d’autres
91
rvu que l’on n’y cherche pas de vains prétextes à
se
glorifier d’un passé bien passé, et dont il resterait à prouver qu’on
92
on dire, qu’on ne voit guère en quoi son Histoire
se
distingue de celle qu’eût pu écrire un savant laïque épris de toléran
93
uation volontaire des condamnations qu’il ne peut
s’
empêcher de porter parfois, tout cet effort d’impartialité systématiqu
94
mais encore parce que, à tout moment, le lecteur
se
voit incité à imaginer ce qu’il fut advenu de la France si l’édit ava
95
advenu de la France si l’édit avait été observé,
s’
il n’avait pas été révoqué, si Sully avait été écouté, si les jésuites
96
té écouté, si les jésuites n’étaient pas revenus,
s’
ils n’avaient pas armé, après quinze autres meurtriers, un Ravaillac…
97
: la religion leur est simple prétexte ; mais il
s’
agit d’établir à tout prix un cadre national centralisé, géométrique,
98
par la violence. Pour soutenir un tel dessein, il
s’
agit d’établir un droit nouveau qui ne soit plus fondé que sur la seul
99
ot cite, à ce propos, un texte assez frappant. Il
s’
agit de la requête adressée au roi par des protestants auxquels on ref
100
de nature comme vous, mieux que vous d’affection,
s’
il est vrai que l’humanité est la propre affection des François… Bon D
101
uels tigres vivons-nous… qu’une cour de Parlement
se
licencie ainsi contre le droit naturel, contre l’honnêteté civile !
102
le constellation monte au zénith de notre âge. Il
s’
agit maintenant d’interpréter son signe. ⁂ Crainte et Tremblement, qu
103
nsupportable. La vocation singulière de cet homme
s’
épuisera dans le seul acte de l’imposer. Après cet acte, semblable au
104
mission. Dans Crainte et Tremblement, Kierkegaard
se
débat encore avec lui-même. A-t-il la foi ? Qu’est-ce que la foi ? He
105
commande d’offrir Isaac en sacrifice ! Abraham ne
se
révolte pas. Il croit en Dieu, non point en sa raison humaine. Il sel
106
n point en sa raison humaine. Il selle son âne et
s’
en va vers les monts de Morija, pour sacrifier son fils unique. Il le
107
» et revint avec lui dans la vie comme si rien ne
s’
était passé. Voilà le paradoxe des paradoxes : vivre comme tout le mon
108
e singulièrement avec celui de Kierkegaard. Barth
s’
adresse à des auditeurs chrétiens, à des hommes qui se posent sérieuse
109
resse à des auditeurs chrétiens, à des hommes qui
se
posent sérieusement la question : en quoi ma foi doit-elle transforme
110
vie ? Or, toute l’insistance du grand théologien
se
porte dans ce livre sur un seul point : l’homme chrétien reste un hom
111
sive. Elle consiste d’abord en ce que le chrétien
se
reconnaît de plus en plus pécheur, de plus en plus livré à la seule g
112
La vie chrétienne n’est pas une construction qui
s’
élève au-dessus du reste de la vie. C’est toute profane et banale, la
113
, et dans sa situation. Mais en quoi le chrétien
se
distinguera-t-il donc de l’incroyant ? En rien d’autre qu’en ceci : q
114
nverti. Il vit dans les mêmes servitudes, mais il
s’
attend à Dieu, non à lui-même ni au monde. Ainsi, chez Barth et Kierke
115
ar c’est à chaque instant de la vie de la foi que
se
posent les questions dernières. Mais cette vision de l’homme sans ce
116
te image un nouveau cliché polémique : la Réforme
se
voit assimilée au « fays ce que vouldras » des Renaissants. Les prote
117
ommes sont toujours les plus populaires ? Comment
se
dire calviniste ? L’exposition Calvin à la Bibliothèque nationale, si
118
fût-elle la plus orthodoxe. Barth, on le sait, ne
se
lasse pas de comparer le rôle de ces témoins théologiques au Jean-Bap
119
rucifixion de Grünewald, dont la main prodigieuse
se
détachant sur le ciel noir désigne le Sauveur en croix : « Il faut qu
120
a cause pour un idéal humaniste. Or, tous ceux-là
se
scandalisent à grand bruit, « non tant pour haine qu’ils portent aux
121
béraux qui « gazouillent » à tort et à travers et
se
répandent en orgueilleuses « baveries », et ceux « qui se ruent contr
122
dent en orgueilleuses « baveries », et ceux « qui
se
ruent contre Dieu d’une impétuosité enragée à la façon des frénétique
123
es frénétiques, et tombent en de grands abîmes ou
se
rompent le col en s’aheurtant ». Cet étonnant traité, tour à tour élo
124
mbent en de grands abîmes ou se rompent le col en
s’
aheurtant ». Cet étonnant traité, tour à tour éloquent à l’antique ou
125
ou rabelaisien dans la satire, pourrait en somme
s’
intituler : Réforme contre Renaissance. Mais toutes les richesses de s
126
re de Calvin, ne doit jamais omettre que celui-ci
se
considérait comme ministre du Verbe divin. Prêcher l’Évangile, c’est
127
ujours avec les plus divers interlocuteurs, il ne
se
range jamais, comme un littérateur de second ordre, aux lois d’une es
128
plus puissantes personnalités qui fut jamais, il
se
recrée toujours lui-même. Soumission du langage à l’objet spirituell
129
aut à notre siècle : une fermeté délibérée qui ne
s’
arrête pas complaisamment à des trouvailles, une sobriété vigoureuse d
130
sic et non, enfin ce ton naturel de grandeur qui
s’
accommode des plus savoureux contrastes, coupant court aux élans de pu
131
toujours tension entre deux pôles, qui d’ailleurs
se
déplacent sans cesse et parfois aussi changent de nom. On est tenté d
132
ance en même temps qu’elle est don de Dieu ; elle
s’
oppose donc à toute mystique qui ne serait qu’une fuite hors du monde,
133
t surtout Boehme le gnostique. Pour Paracelse, on
s’
étonnera sans doute de le voir figurer dans un choix de « mystiques »,
134
t le plus marquant d’une famille dont les destins
se
confondirent durant tout le siècle dernier avec ceux du protestantism
135
rotestantisme français. Maurras, lorsqu’il voulut
s’
en prendre aux réformés, ne trouva rien de mieux que d’écrire un pamph
136
». Il semble que l’auteur du Problème du Bien 13
se
soit fait un glorieux devoir, et peut-être un malin plaisir, de soute
137
et le ministère du pasteur. Par ailleurs, il ne
s’
adresse pas aux spécialistes, ni à l’Église, comme ce serait le devoir
138
pas la Beauté, la Joie, l’Amour, la Sainteté. Il
se
brise contre le problème du Bien. D’autre part, l’orthodoxie chrétien
139
réateur omnipotent, omniprésent, mais silencieux,
se
brise contre le problème du Mal ». Notons que cette position du probl
140
l ». (Calvin disait : « libertin spirituel ».) Il
s’
agit de confondre les philosophes incroyants au moyen de leurs propres
141
un point de vue « libéral » — encore que l’auteur
s’
en défende, l’adjectif ayant pris peu à peu une signification ecclésia
142
amateur de catastrophes et de crimes. Les animaux
se
mangent entre eux, les hommes périssent par accident, la terre trembl
143
du Tout-Puissant ; il a enseigné que le vrai Dieu
s’
incarnait dans un crucifié vaincu ». Par une espèce de paradoxe — pers
144
mation du dogme trinitaire : Dieu est un X qui ne
se
révèle à l’homme comme le Père que par son incarnation dans le Fils,
145
pas d’inconvénient à priori, mais à coup sûr, il
s’
agit là de littérature, bien que l’auteur s’en défende dans sa préface
146
r, il s’agit là de littérature, bien que l’auteur
s’
en défende dans sa préface. Cela nous vaut des pages fort curieuses su
147
phiques, de poèmes, d’anecdotes, d’aphorismes. On
s’
y perd bien souvent, on y apprend beaucoup. On craint aussi qu’à la fa
148
s volontiers cet argument : comment un protestant
se
libère d’un intellectualisme intempérant par la considération hardie
149
us ne reconnaissons pas forcément les nôtres — et
s’
il ne tenait, par ailleurs, à l’étayer par une philosophie qui ne saur
150
sons ? Et pour quelles fins ? Si l’on ne veut pas
s’
en tenir à des appréciations du genre « moine qui voulait se marier »,
151
à des appréciations du genre « moine qui voulait
se
marier », il serait sage de parcourir au moins les œuvres capitales d
152
elui d’Érasme, nous est suffisamment connu. Qu’on
se
reporte en particulier à la brillante biographie de Stefan Zweig, et
153
se trouve être M. Benda. Érasme dit le vrai, puis
se
lave les mains, et refuse d’endosser les conséquences de sa vérité :
154
a commis tant de crimes au nom de la vérité ! On
s’
en est plus servi qu’on ne l’a servie… L’intervention de Luther en per
155
olonté. Il nie seulement que cette volonté puisse
s’
appliquer librement aux choses qui concernent le salut. Elle fait part
156
n existence en termes radicaux, vraiment sérieux,
se
voit acculé à ce dilemme, ou plutôt à l’acceptation simultanée de ses
157
ceptée et aimée comme telle. Mais cette nécessité
s’
appelle pour Nietzsche le fatum, la fatalité sans visage du Retour éte
158
es littéraires, Paris, 19 juin 1937, p. 5. r. Il
s’
agit d’une recension de Traité du aerf arbitre de Martin Luther, tradu
159
juillet 1937)s L’art de conter pour le plaisir
se
perd. Et peut-être, avec lui, l’art tout court. Dans la littérature d
160
ce pas que l’on ne sait plus créer de la vie ? On
s’
efforce de la décrire, ou pis encore, de l’expliquer… Le romancier mod
161
’homme de science. Et tout l’effort de l’écrivain
se
porte alors sur l’analyse des motifs secrets d’une action. La méthode
162
bas. Ainsi l’on en vient peu à peu, par désir de
se
montrer original, à tenir pour acquis que les « vertus » sont de ces
163
ésistent pas à l’analyse, et qu’un auteur sincère
se
doit de démasquer. Tout se ramènerait à la physiologie, ou à l’argent
164
t qu’un auteur sincère se doit de démasquer. Tout
se
ramènerait à la physiologie, ou à l’argent. Il ne fallait pas moins q
165
ntre les lignes. (Mais, seule, la naïveté moderne
se
figure qu’une légende doit être crue, comme on croit les journaux, pa
166
rue, comme on croit les journaux, par exemple, et
s’
en indigne, et refuse de marcher !) Le vrai « miracle », ici, c’est le
167
est ici d’une fort malicieuse lucidité. Mais elle
s’
opère par le seul jeu des faits, jamais en marge de l’action, sous for
168
de l’imagination dont nous pensions que le secret
s’
était perdu avec l’enfance. Comme on sent que l’auteur s’amuse de sa m
169
perdu avec l’enfance. Comme on sent que l’auteur
s’
amuse de sa maîtrise : Lagerlöf, ou la gloire de conter ! Plusieurs do
170
y conduire les autres ». À ce moment aussi, l’on
s’
aperçoit que la fatalité de la légende a bel et bien dominé tous ces ê
171
. Le jeune pasteur Karl-Artur Eckenstedt vient de
se
brouiller avec sa belle fiancée, Charlotte Löwensköld. En la quittant
172
st pas mariée, deviendra sa compagne. Il sort. Il
s’
en faut de peu qu’il ne rencontre dès les premiers pas une vieille men
173
ste, qui a fort mauvaise réputation. Mais elle ne
s’
engage pas sur la route, elle s’arrête dans un pré voisin. Karl-Artur
174
ion. Mais elle ne s’engage pas sur la route, elle
s’
arrête dans un pré voisin. Karl-Artur doute, tremble, et marche toujou
175
a-t-il accepter ce martyre ? Déjà, le jeune homme
s’
y résigne… À quelques pas de lui, elle tourne à droite. Il poursuit so
176
nte. « Elle brillait comme une rose sauvage. » Il
s’
arrête. « Tu me regardes comme si j’étais une bête curieuse, dit-elle.
177
s pittoresques ou dramatiques, à quoi l’auteur ne
se
prive pas d’ajouter quelques traces d’humour, comme pour purifier l’é
178
n expression. Tout respire largement, tout vit et
se
transforme, non pas seulement selon les lois des passions, des cœurs
179
nt tyranniques, tout cela semble disposé pour que
se
nouent les drames complexes dont s’est nourri depuis cent ans le gran
180
posé pour que se nouent les drames complexes dont
s’
est nourri depuis cent ans le grand roman occidental : vies intérieure
181
Non, Tristan et Iseut ne
s’
aiment pas, nous dit Denis de Rougemont (12 février 1939)u v Avec l
182
osité, et aussi de la discrétion avec laquelle il
s’
efforce de dégager l’âme secrète de nos campagnes. Denis de Rougemont
183
s amants légendaires, les héros de la passion, ne
s’
aimaient pas ? Quand j’ai commencé à écrire mon livre, je voulais simp
184
indifférents pendant leur première rencontre, ne
s’
aiment qu’après avoir bu le philtre, ne peuvent plus se supporter au b
185
ent qu’après avoir bu le philtre, ne peuvent plus
se
supporter au bout de trois ans de vie commune dans la forêt et qui, T
186
r. Jamais Tristan ne dit à Iseut qu’il l’aime, il
se
borne à répéter : « Amor par force me demeisne ». C’est la passion-ca
187
isne ». C’est la passion-catastrophe, qui ne peut
se
résoudre que dans la mort, et inspirera tout le romantisme. Mais elle
188
ture courtoise… Littérature dont le succès rapide
s’
explique mal, car elle implique une subtilité, des raffinements, une a
189
, des raffinements, une absence de sensualité qui
s’
opposaient aux mœurs de l’époque. Qui s’opposait surtout, complète Den
190
alité qui s’opposaient aux mœurs de l’époque. Qui
s’
opposait surtout, complète Denis de Rougemont, à la conception chrétie
191
a littérature ? Beaucoup d’historiens, d’érudits,
se
sont posé la question sans pouvoir la résoudre. Pour moi, l’explicati
192
Les cathares rejettent le dogme de l’incarnation,
se
fondent sur une interprétation purement spiritualiste des évangiles.
193
l’amour. En embrassant le catharisme, le néophyte
s’
engageait, s’il était marié, à s’abstenir de tout contact avec sa femm
194
mbrassant le catharisme, le néophyte s’engageait,
s’
il était marié, à s’abstenir de tout contact avec sa femme. Les cathar
195
sme, le néophyte s’engageait, s’il était marié, à
s’
abstenir de tout contact avec sa femme. Les cathares admettaient le su
196
? J’en suis persuadé, dit Denis de Rougemont, qui
s’
anime en exposant une théorie aussi originale. D’ailleurs, on sait que
197
l’a analysé. À une époque où le statut du mariage
se
modifie profondément, croyez-vous que ce fameux triangle, qui suppose
198
me désirable, comme un état d’exception où l’être
se
dépasse lui-même. Nous aspirons donc à connaître cet état que, comme
199
’habitude. Exclue de la vie conjugale, la passion
se
réfugie dans l’adultère. Maris et femmes, chacun de leur côté, rêvent
200
aujourd’hui, les jeunes gens et les jeunes filles
se
refusent à l’hypocrisie, ne consentent plus à refouler leurs instinct
201
urde. Elle est aussi absurde que la passion, mais
s’
en distingue par un refus constant de subir ses rêves, par une constan
202
s femmes, qui doivent être sans cesse capables de
se
renouveler, un ensemble de vertus solides et de qualités agréables a
203
eiller à Sachseln, où il eut dix enfants. Puis il
se
retira dans un ermitage, où pendant vingt ans il se mortifia, jeûnant
204
retira dans un ermitage, où pendant vingt ans il
se
mortifia, jeûnant complètement. Mais, apprenant que la guerre civile
205
rétablit la paix par le covenant de 1481. Puis il
se
retourna dans son ermitage et y mourut. C’est un beau sujet. N’est-ce
206
ant de quitter Denis de Rougemont, je lui demande
s’
il n’attend pas avec une certaine curiosité les réactions que vont sus
207
ls savent mieux maintenant comment ils pourraient
se
rapprocher. Si j’aide des êtres troublés à vivre à deux sans trop se
208
’aide des êtres troublés à vivre à deux sans trop
se
blesser, ce sera ma plus belle récompense. Le véritable esprit chréti
209
’est-ce pas de voir les limites d’où l’on ne peut
s’
échapper ? u. Rougemont Denis de, « [Entretien] Non, Tristan et Ise
210
Denis de, « [Entretien] Non, Tristan et Iseut ne
s’
aiment pas », Les Nouvelles littéraires, Paris, 12 février 1939, p. 3.
211
ible, et choisirait, quand il ouvre la bouche, de
s’
exprimer en français plutôt qu’en miaulant ou en barrissant. Je suis u
212
il passera six ans, écrira La Part du diable et
se
liera avec plusieurs écrivains français. On décida que je serais moin
213
le . Rentré en Europe en 1946, Denis de Rougemont
s’
engage alors dans l’action politique en militant pour la cause du fédé
214
péen pour la liberté de la culturey, son activité
se
situera désormais sur deux plans : l’écrivain d’une part, le fédérali
215
r la liberté de la culture, dans lequel Rougemont
s’
engagea en parallèle, mais dont il ne fut « que » le président du comi
216
lgarités. Mais en même temps, le xxe siècle a vu
se
multiplier les prophètes de la décadence européenne : et ils sont tou
217
ls sont tous, ou presque tous, Européens. Loin de
s’
émerveiller du fait que le génie européen rayonne sur le monde entier,
218
u Zuydersee… qui sait si un voyageur comme moi ne
s’
assiéra pas un jour sur de muettes ruines, et ne pleurera pas solitair
219
e, les dictatures prévues par Burckhardt et Sorel
s’
instaurent en Russie, en Turquie, en Italie et en Allemagne, puis en E
220
ustro-hongrois. Et bientôt cette Europe occupée à
se
déchirer à belles dents va se laisser arracher l’une après l’autre se
221
te Europe occupée à se déchirer à belles dents va
se
laisser arracher l’une après l’autre ses conquêtes coloniales et ses
222
dence de l’Occident, Spengler, Valéry et Toynbee,
se
fondaient sur le précédent de civilisations antiques aujourd’hui « di
223
édit par extrapolation des exemples antiques ? Il
se
pourrait, bien au contraire, que notre culture présente des caractère
224
qu’elle en a héritées, la civilisation européenne
s’
est trouvée fondée sur une culture de dialogue et de contestation. Ell
225
n’a jamais pu, et surtout, elle n’a jamais voulu,
se
laisser ordonner à une seule doctrine qui eût régi à la fois ses inst
226
ent cru cela d’elles-mêmes, avant la nôtre. Elles
se
trompaient, mais cette erreur ne saurait plus être commise, à présent
227
oins. Alexandre le Grand et les empereurs chinois
s’
imaginèrent qu’ils dominaient le monde entier ; c’était moins orgueill
228
ures. Et nous savons que ce mouvement d’imitation
s’
opère à sens unique et n’est plus réversible. Mais comment expliquer c
229
e de la confluence des sources les plus diverses,
se
distinguait par là de toutes les autres, monolithiques et homogènes.
230
, monolithiques et homogènes. Voilà pourquoi elle
s’
est trouvé la seule qui fût assez complexe et multiforme pour pouvoir,
231
echniques que de livres et de missionnaires. Elle
s’
est laïcisée, ou sécularisée, et détachée du christianisme qui contrib
232
ondition de son « succès » le plus visible — elle
s’
est rendue plus transportable, plus acceptable et imitable qu’aucune a
233
isateur. Maintenant que c’est fait ou en train de
se
faire, et que voilà franchi le « seuil mondial », comment imaginer qu
234
n diffusée par l’Europe à tous les peuples puisse
s’
éclipser ou disparaître, sans entraîner le genre humain dans son désas
235
tre diffusées de nos jours sur toute la terre. Il
s’
en faut de beaucoup que leurs rivales asiatiques, qu’on dit plus raffi
236
e romaines, ou les quelques centaines d’Espagnols
s’
emparant de l’empire des Aztèques. Il s’agissait dans tous ces cas de
237
Espagnols s’emparant de l’empire des Aztèques. Il
s’
agissait dans tous ces cas de civilisations locales, entourées de « ba
238
de la substance même de l’Europe, et je les vois
s’
européaniser par la culture plus profondément que l’Europe ne s’améric
239
par la culture plus profondément que l’Europe ne
s’
américanise par le costume et le décor urbain. L’URSS ? Mais qu’apport
240
ntre la théologie et la philosophie, au moment où
se
constituaient la sociologie et la technique, l’industrie, la grande p
241
péanisé la Russie. Et c’est l’URSS à son tour qui
s’
est chargée d’aider la Chine à liquider la civilisation des mandarins,
242
une fois une idée assez exacte des influences qui
se
sont exercées sur notre petit coin de Suisse romande. Vous avez consa
243
titre : « La femme est aussi une personne ». Cela
se
passait en 1936 et Mounier s’était montré un précurseur. Il m’avait d
244
ne personne ». Cela se passait en 1936 et Mounier
s’
était montré un précurseur. Il m’avait demandé une étude sur l’opposit
245
dont l’auteur est un jeune lieutenant-colonel qui
s’
appelle Charles de Gaulle. » Ayant cédé mon tour, je me suis mis insta
246
impressionné. J’ai tâché de suivre un peu ce qui
se
passait dans la vie de ces gens qui m’avaient fait des confidences et
247
puis qu’ils avaient décidé de ne pas divorcer, de
s’
en tenir à la dernière partie de mon livre. Mais voilà que, en les sui
248
es de conscience fort utiles. Mon premier mariage
s’
est terminé par un divorce après mes années d’Amérique. C’est pourquoi
249
in laps de temps pendant lequel une personne peut
se
constituer pour essayer de découvrir sa vocation. Si elle découvre sa
250
u comme quelque chose dont chacun sait de quoi il
s’
agit, mais que j’insiste pour indiquer que nous nous trouvons devant u
251
s finalement, c’est à ceci : Dieu, c’est le sens.
S’
il n’y a pas de Dieu, il n’y a pas de sens. Certains savants aujourd’h
252
: Qu’est-ce que cela veut dire pour vous, la vie,
s’
il n’y a aucun sens à rien ? Pourquoi ne me comporterais-je pas comme
253
é par l’idée d’union fédérale. Denis de Rougemont
s’
est fait l’apôtre de cette croisade ; il n’est donc pas étonnant qu’on
254
17-23 avril 1972)af ag L’unité de l’Europe ne
se
fera ni uniquement ni principalement par des institutions européennes
255
e en vingt-cinq nations, chacune trop petite pour
se
défendre seule, n’a pas la moindre chance de résister d’une part à la
256
ar les Américains. Mais l’Europe ne pourra jamais
se
faire que selon la formule fédéraliste, respectueuse des diversités d
257
oste au nom de l’unité linguistique, elle devrait
s’
amputer, pour le même motif, de près de la moitié de ses territoires a
258
fiques et techniques aujourd’hui, à quoi viennent
se
superposer les influences dominantes de l’italien à la fin du Moyen Â
259
par exemple, véhiculé par l’usage ecclésiastique,
se
retrouve aisément dans toutes nos langues : évêque, vescovo, obispo,
260
in, de l’Asie ou de l’Afrique, toutes nos langues
se
ressemblent comme des sœurs. Vue de loin, l’unité culturelle de l’Eur
261
ée de contradictions dans sa genèse même, qu’elle
s’
est formée à partir d’influences indo-européennes, gréco-latines, celt
262
plupart des cas, les libéraux de pays différents
se
ressemblent davantage et s’entendront mieux entre eux qu’ils ne s’ent
263
ux de pays différents se ressemblent davantage et
s’
entendront mieux entre eux qu’ils ne s’entendent avec les fanatiques d
264
vantage et s’entendront mieux entre eux qu’ils ne
s’
entendent avec les fanatiques de leur propre nation ; que les hippies
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de leur propre nation ; que les hippies d’un pays
s’
accorderont mieux avec ceux de n’importe où qu’avec les conformistes d