1 1931, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Les Éléments de la grandeur humaine, par Rudolf Kassner (octobre 1931)
1 t de l’intérieur. Il ne peut jamais sortir de son moi sans trahison et chaque manifestation de son essence intime ressemble
2 1931, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Sarah, par Jean Cassou (novembre 1931)
2 is le mérite original et important d’un tel livre me paraît résider avant tout dans l’ordre des faits qu’il met en jeu, da
3 bonhomie d’autant plus touchante qu’elle figure, je pense, pour l’auteur, une sorte de consolation un peu forcée que le c
3 1932, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Les Signes parmi nous, par C. F. Ramuz (janvier 1932)
4 eux-mêmes si peu de questions, ou de si minimes. Je lis un article récent de Ramuz (sur le Travail), qui débute ainsi « P
5 ce qu’on y est forcé. Pourquoi y est-on forcé ? » Je vois que cet article en vient à formuler le dilemme sociologie-métaph
6 i se trouve être le dilemme urgent de l’heure. Et je m’inquiète ; non pas de ces questions ni de la prise de parti (antima
7 e trouve être le dilemme urgent de l’heure. Et je m’ inquiète ; non pas de ces questions ni de la prise de parti (antimarxi
8 hez Ramuz, mais bien au contraire de ceci : qu’il me semble entendre pour la première fois la voix d’un de nos aînés, inte
9 n face des questions d’une accablante simplicité. Me tromperais-je ? Ai-je mal su lire tant de brillants essais sur le mon
10 stions d’une accablante simplicité. Me tromperais- je  ? Ai-je mal su lire tant de brillants essais sur le monde actuel et f
11 ’une accablante simplicité. Me tromperais-je ? Ai- je mal su lire tant de brillants essais sur le monde actuel et futur ? E
12 ntique que d’avoir cru distinguer dans ces œuvres je ne sais quelle complaisance qui les faisait éviter d’instinct tout po
13 ue peu de repos de son adolescence à sa mort. »3 Je cherche : je ne trouve aucun écrivain plus naturellement libéré de l’
14 os de son adolescence à sa mort. »3 Je cherche : je ne trouve aucun écrivain plus naturellement libéré de l’idéologie bou
15 grandeur de ce peuple ramuzien, qui se meut dans je ne sais quelle lourdeur « originale » et unanime, en communion avec l
16 e collectif, être sans racines, mythe cérébral. «  Je ne distingue l’être qu’aux racines de l’élémentaire », écrivait-il da
17 ertaines œuvres récentes des écrivains de l’URSS, je ne les retrouve que chez Ramuz. Mais purifiés de toute brutalité, de
18 et de la révolte ; et ce trait profond de son art m’ en convainc : le sens de la vénération, qui est aussi celui de la lent
19 e, l’absence de toute complaisance à soi. Certes, j’ en vois les défauts, le poncif ; ces détails par trop détaillés. Mais
20 ces détails par trop détaillés. Mais l’important, je pense, c’est qu’une page de Ramuz — même pas très réussie, et il y en
4 1932, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Le silence de Goethe (mars 1932)
21 vue littéraire, la confrontation serait absurde, j’ en conviens. Mais notre optique n’est-elle point faussée par un état d
22 fait de cet ordre puisse être tenu pour crucial, je veux croire qu’on ne le contestera pas. Mais ce qu’on voudrait dire m
23 es réactions profondes de l’âme devant son destin m’ autorise à cette confrontation et me persuade de son intérêt humain. E
24 nt son destin m’autorise à cette confrontation et me persuade de son intérêt humain. Et si tout cela reste absurde aux yeu
25 iginalité » dans l’ordre — au mieux — esthétique, je ne m’en étonnerai point. Il s’agit simplement, ici, de rendre plus co
26 ité » dans l’ordre — au mieux — esthétique, je ne m’ en étonnerai point. Il s’agit simplement, ici, de rendre plus concrète
27 totalement divergentes, une attitude humaine qui me paraît commune. Que Goethe ait pratiqué « le devis des choses grandes
28 , avec une sombre joie : « Sort misérable, qui ne me permet rien que d’extrême ». Jacob Boehme, Paracelse, Swedenborg, lec
29 e la retenue même de l’expression. C’est pourquoi je l’éprouve plus vivement dans certains passages des Affinités élective
30 es laisse l’esprit de Faust béant sur le vide : «  Moi qui me suis cru plus grand que le Chérubin… qui pensais en créant pou
31 e l’esprit de Faust béant sur le vide : « Moi qui me suis cru plus grand que le Chérubin… qui pensais en créant pouvoir jo
32 is en créant pouvoir jouir de la vie des dieux et m’ y égaler… combien je dois expier tout cela ! » Faust se reprend au seu
33 jouir de la vie des dieux et m’y égaler… combien je dois expier tout cela ! » Faust se reprend au seuil de la mort. Mais
34 ci que l’hallucination le gagne et le submerge. «  Je devins un opéra fabuleux. » Il a brûlé les étapes de l’initiation. Ma
35 e déchaîne pas de telles puissances impunément. «  Ma santé fut menacée. La terreur venait… J’étais mûr pour le trépas… » A
36 ément. « Ma santé fut menacée. La terreur venait… J’ étais mûr pour le trépas… » Alors paraît le doute, entraînant la consc
37 lors paraît le doute, entraînant la conscience. «  Je vois que mes malaises viennent de ne m’être pas figuré assez tôt que
38 le doute, entraînant la conscience. « Je vois que mes malaises viennent de ne m’être pas figuré assez tôt que nous sommes à
39 cience. « Je vois que mes malaises viennent de ne m’ être pas figuré assez tôt que nous sommes à l’Occident. » L’Occident,
40 st tombée, faisant place à une stupeur désolée. «  Je ne sais plus parler. » Le renoncement dès lors est fatal. « Moi ! moi
41 us parler. » Le renoncement dès lors est fatal. «  Moi  ! moi qui me suis dit mage ou ange, dispensé de toute morale, je suis
42 ler. » Le renoncement dès lors est fatal. « Moi ! moi qui me suis dit mage ou ange, dispensé de toute morale, je suis rendu
43 e renoncement dès lors est fatal. « Moi ! moi qui me suis dit mage ou ange, dispensé de toute morale, je suis rendu au sol
44 suis dit mage ou ange, dispensé de toute morale, je suis rendu au sol, avec un devoir à chercher et la réalité rugueuse à
45 s banalités dont il gratifie le pauvre Eckermann. Je ne puis voir dans ces façons que la distraction souveraine d’une âme
46 t l’Italie. Et le passage fameux de la Saison : «  moi qui me suis dit mage ou ange… » rappelle étrangement ces vers du Prem
47 ie. Et le passage fameux de la Saison : « moi qui me suis dit mage ou ange… » rappelle étrangement ces vers du Premier Fau
48 rs du Premier Faust que l’on citait plus haut : «  Moi qui me suis cru plus grand que le Chérubin. » « Point de cantiques :
49 emier Faust que l’on citait plus haut : « Moi qui me suis cru plus grand que le Chérubin. » « Point de cantiques : tenir l
50 e que le signe en devient visible sur ses traits. Je ne me lasse pas de méditer ce visage dont Klauer modela l’effigie pas
51 le signe en devient visible sur ses traits. Je ne me lasse pas de méditer ce visage dont Klauer modela l’effigie passionné
52 ’un théâtre ou l’administration du Grand-Duché. «  J’ ai toujours considéré mon activité extérieure et ma production comme p
53 tration du Grand-Duché. « J’ai toujours considéré mon activité extérieure et ma production comme purement symboliques, et,
54 ’ai toujours considéré mon activité extérieure et ma production comme purement symboliques, et, au fond, il m’est assez in
55 ction comme purement symboliques, et, au fond, il m’ est assez indifférent d’avoir fait des pots ou des assiettes »10. Si t
56 théenne aussi. Mais gardons-nous de tirer de ceci je ne sais quel critère de « jugement » qui permettrait de placer Goethe
57 n proie au Carnaval et à l’angoisse, ce n’est pas moi qui pose la question : elle m’assiège. Le dernier carnaval, peut-être
58 sse, ce n’est pas moi qui pose la question : elle m’ assiège. Le dernier carnaval, peut-être, pour cette bourgeoisie dont j
59 carnaval, peut-être, pour cette bourgeoisie dont je viens d’admirer les trésors patinés dans la haute demeure familiale d
60 éclats d’un fanatisme à vrai dire splendide. (Qui me guérira de la honte de n’être pas Rimbaud ?) Plus que jamais, il faud
61 rsations avec Eckermann, 4 février 1829. 9. Si je pouvais écarter la magie de mon chemin Oublier tout à fait les formul
62 ier 1829. 9. Si je pouvais écarter la magie de mon chemin Oublier tout à fait les formules d’enchaînement Si j’étais dev
63 ublier tout à fait les formules d’enchaînement Si j’ étais devant toi, ô nature un homme solitaire, Sans doute vaudrait-il
5 1932, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Querelles de famille, par Georges Duhamel (mai 1932)
64 lgaires qui « rendraient » mieux sous la rubrique Mon film 16. En d’autres passages, d’une expression plus serrée, M. Duham
65 morceau de bravoure, la page sur « les bruits de mon village » qui servira de modèle aux écoliers futurs. Mais lorsqu’il s
66 s « grandes brutes mécaniques », sa verve — qu’il me pardonne l’image technique — n’embraye pas, et paraît forcée. Ses lab
67 riez plus cela, Verlaine ! » (page 16). 17. « Si je cherche querelle au monde, c’est que, jusqu’à nouvel ordre, je lui fa
68 erelle au monde, c’est que, jusqu’à nouvel ordre, je lui fais encore confiance ». Ainsi se termine ce livre amer, sans qu’
6 1932, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Éloge de l’imprudence, par Marcel Jouhandeau (septembre 1932)
69 ours plus folle dans le bien comme dans le mal. «  Je mettrais volontiers dans le même sac honnêtes et malhonnêtes gens, ma
7 1932, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). À prendre ou à tuer (décembre 1932)
70 us des tâches d’homme. Henri Lefebvre l’a montré, je n’ajouterai rien à sa déclaration si simple. La révolution est une né
71 alistes. Mais où sont les motifs de notre choix ? J’ en indiquerai trois. 1° — La seule révolution qui nous importe concern
72 doctrine, est de leur part une duperie manifeste. Je les entends menacer le bourgeois : mais je ne vois pas en quoi la tyr
73 feste. Je les entends menacer le bourgeois : mais je ne vois pas en quoi la tyrannie du matériel qu’ils prônent est meille
74 eilleure pour les hommes que le présent désordre. Je ne vois pas qu’ils connaissent l’homme mieux que nous. Je ne les vois
75 is pas qu’ils connaissent l’homme mieux que nous. Je ne les vois pas plus forts. Je vois bien l’accumulation de leurs grie
76 me mieux que nous. Je ne les vois pas plus forts. Je vois bien l’accumulation de leurs griefs, — dont beaucoup sont les nô
77 up sont les nôtres, mais nous en avons davantage. Je vois clairement que leurs buts provoquent le refus, pour les mêmes ra
78 ondement, l’enjeu de la révolution nouvelle. Ici, je ne dirai plus nous, mais je. À la question « Prenez-vous au sérieux v
79 lution nouvelle. Ici, je ne dirai plus nous, mais je . À la question « Prenez-vous au sérieux vos idées, y croyez-vous ? »,
80 uestion personnelle. Une mise en question réelle. Je la cherche. Ce qu’il faut pour légitimer un système d’idées en elles
81 n elles-mêmes justes et opportunes (comme celles, je le crois, de L’Ordre nouveau, de Combat ou d’Esprit) c’est une violen
82 te de foi, une pureté terrible et humble. Loin de moi la pensée que par des arguments nous pourrons triompher d’autre chose
83 e. Il faut savoir entendre ce mutisme formidable. Je crois que seule la foi peut en donner jusqu’au bout le courage. Je pa
84 e la foi peut en donner jusqu’au bout le courage. Je parle de la foi chrétienne où je veux être, de ce suprême « choix » q
85 bout le courage. Je parle de la foi chrétienne où je veux être, de ce suprême « choix » qui ne vient pas de moi, mais qui
86 être, de ce suprême « choix » qui ne vient pas de moi , mais qui soudain me choisit, me saisit. Je parle de cette seule chos
87 choix » qui ne vient pas de moi, mais qui soudain me choisit, me saisit. Je parle de cette seule chose au monde qui n’ait
88 ne vient pas de moi, mais qui soudain me choisit, me saisit. Je parle de cette seule chose au monde qui n’ait pas besoin d
89 s de moi, mais qui soudain me choisit, me saisit. Je parle de cette seule chose au monde qui n’ait pas besoin d’arguments
90 les du monde ; de cette seule chose pour laquelle j’ accepte de me faire tuer, parce que ce ne serait pas crever bassement
91 ; de cette seule chose pour laquelle j’accepte de me faire tuer, parce que ce ne serait pas crever bassement dans la haine
92 a haine, mais ce serait un acte enfin dans lequel je posséderais toute ma vie, d’un seul coup éclatant. Je n’ai pas à sauv
93 it un acte enfin dans lequel je posséderais toute ma vie, d’un seul coup éclatant. Je n’ai pas à sauver quoi que ce soit d
94 osséderais toute ma vie, d’un seul coup éclatant. Je n’ai pas à sauver quoi que ce soit de la terre, mais seulement à rece
95 Or il n’est de pardon que pour celui qui agit. On me dira sans doute que je me perds dans ma mystique ? Allez, vous ne vou
96 ue pour celui qui agit. On me dira sans doute que je me perds dans ma mystique ? Allez, vous ne vous retrouvez que trop bi
97 pour celui qui agit. On me dira sans doute que je me perds dans ma mystique ? Allez, vous ne vous retrouvez que trop bien
98 agit. On me dira sans doute que je me perds dans ma mystique ? Allez, vous ne vous retrouvez que trop bien dans les vôtre
8 1933, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Pétrarque, par Charles-Albert Cingria (avril 1933)
99 ique, alors ils émettent on ne sait quelle sauce. Je ne veux pas être de ceux-ci ». Charles-Albert Cingria est donc de ceu
100 d’intéressant. Donc Cingria défend une thèse : «  Je m’appliquerai à désassocier et à mettre en face de lui-même le poète
101 intéressant. Donc Cingria défend une thèse : « Je m’ appliquerai à désassocier et à mettre en face de lui-même le poète lyr
9 1933, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Une main, par C. F. Ramuz (juin 1933)
102 d’une confidence encore contrainte : « Ah ! comme je suis mal fait pour ma part, si j’ose ainsi parler de moi, mais je ne
103  : « Ah ! comme je suis mal fait pour ma part, si j’ ose ainsi parler de moi, mais je ne parle pas de moi, ou je ne parle p
104 s mal fait pour ma part, si j’ose ainsi parler de moi , mais je ne parle pas de moi, ou je ne parle pas que de moi, parce qu
105 pour ma part, si j’ose ainsi parler de moi, mais je ne parle pas de moi, ou je ne parle pas que de moi, parce que nous so
106 ’ose ainsi parler de moi, mais je ne parle pas de moi , ou je ne parle pas que de moi, parce que nous sommes tous mal faits.
107 si parler de moi, mais je ne parle pas de moi, ou je ne parle pas que de moi, parce que nous sommes tous mal faits. » On n
108 je ne parle pas de moi, ou je ne parle pas que de moi , parce que nous sommes tous mal faits. » On n’attendait pas de Ramuz
109 de sa main, — ou asservir cette main. Est-ce que ma main n’a pas sa vocation ? Est-ce qu’elle n’a rien de mieux à faire q
110 peut-être venu de penser avec ses mains. 26. «  J’ aime que les choses vous résistent et vous contredisent, comme par exe
111 ingénie à allumer dans une cheminée qui tire mal. J’ aime les choses qui sont à leur façon, tandis que je suis à la mienne.
112 aime les choses qui sont à leur façon, tandis que je suis à la mienne. » l. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] C. F. R
10 1933, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Saint-Évremond ou L’humaniste impur, par Albert-Marie Schmidt (octobre 1933)
113 e à sa fantaisie, la plus joyeusement érudite que je connaisse. Tel qu’il est, ce petit volume nous offre un jeu serré et
11 1933, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Le Deuxième Jour de la Création, par Ilya Ehrenbourg (décembre 1933)
114 roidir les sympathies trop spontanées. Il faudra, je crois, passer outre. Dans ce déchaînement d’orgueil humain, de scient
12 1934, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Taille de l’homme, par C. F. Ramuz (avril 1934)
115 ère énergie quand on les traite de matérialistes. Je crains que ce soit, chez la plupart d’entre eux, un réflexe de bourge
13 1934, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Le Procès, par Franz Kafka (mai 1934)
116 Le Procès, par Franz Kafka (mai 1934)p Je ne sais pas si le Procès est le chef-d’œuvre de Kafka, mais il est di
117 aît pas le Christ. « Nul ne vient au Père que par moi  ». C’est par le Fils que Dieu devient pour nous le Père ; mais alors,
118 Père ; mais alors, l’acquittement est possible. «  Je suis le chemin » — mais alors l’acte aussi est possible. Ainsi, la fo
14 1935, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Ni gauche ni droite (août 1935)
119 où nous vivons. C’est une anarchie sémantique. On me fait observer que l’opposition n’est pas entre le peuple et la nation
120 « populaire », c’est-à-dire entre les adjectifs. Je traduis : l’opposition n’est pas dans les faits, mais dans les mystiq
121 ues. Que valent ces mystiques détachées du réel ? Je vois à gauche la peur de Chiappe, et à droite, la peur de la gauche.
122 ur de Chiappe, et à droite, la peur de la gauche. Je vois à droite une tentation fasciste, trop faible encore pour oser s’
123 re la droite, et M. Litvinoff derrière la gauche. Je leur devine quelques intérêts convergents, du côté d’Hitler par exemp
124 comme à droite, de nommer les vrais adversaires. ( Je ne vois que Chamson qui ait dénoncé l’équivoque dont vit la droite, q
125 bord rendre aux mots-clés un sens commun. Mais il me semble qu’on a fait tout autre chose, au Palais de la Mutualité. Il m
126 t tout autre chose, au Palais de la Mutualité. Il me semble qu’on s’est entendu pour « cultiver » des équivoques verbales
15 1935, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Paracelse, par Frédéric Gundolf (septembre 1935)
127 les esprits plus curieux de preuves que de faits. J’ en viens au petit livre de Gundolf. C’est l’œuvre synthétique d’un phi
128 re Galien et tous vos scribouillards (Scribenten) je les dissoudrai dans de l’Alkali !… » Il propose dans le même passage
16 1935, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Recherches philosophiques (septembre 1935)
129 recueil annuel n’a jamais mieux mérité son titre. Je veux dire que la part de la dialectique professionnelle, professorale
130 nnelle, professorale, la tractation correcte et à mon sens parfaitement vaine de problèmes qui n’empêchent personne de dorm
131 avoir pris au sérieux le risque philosophique. Et je ne pense pas trahir leur tendance en insistant ici exclusivement sur
132 ieuse, extérieure et intérieure, de l’homme ». Et je ne dis pas que le parallèle Marx-Kierkegaard n’ait entraîné l’auteur
133 doctrine hégélienne de la médiation. Mais ce qui me paraît important, c’est que Löwith dégage puissamment l’origine philo
134 e, un sens du concret de l’esprit qui enchante en moi le disciple de Kierkegaard. Il apparaît de plus en plus nettement que
135 mériteraient beaucoup plus qu’une simple mention. J’ aurais aimé analyser aussi les trois pages où Jean Wahl résume tout le
136 ractéristique d’un certain renouveau du réalisme. Je me bornerai à signaler pour finir les pages très curieuses de P. Klos
137 téristique d’un certain renouveau du réalisme. Je me bornerai à signaler pour finir les pages très curieuses de P. Klossow
17 1935, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Lawrence et Brett par Dorothy Brett ; Matinées mexicaines suivi de Pansies (poèmes), par D. H. Lawrence (octobre 1935)
138 awrence qu’on lit ces dames. Pour quel Lawrence ? Je me demande si le souvenir de son œuvre est pour beaucoup dans l’intér
139 ence qu’on lit ces dames. Pour quel Lawrence ? Je me demande si le souvenir de son œuvre est pour beaucoup dans l’intérêt
140 de son œuvre est pour beaucoup dans l’intérêt que je prends aux chroniques minutieuses de sa vie33. A-t-on remarqué l’extr
141 ue vous emplissez sans relâche de l’eau du puits. J’ apporte, moi aussi, quelques seaux. Puis vous partez écrire dans les b
142 lissez sans relâche de l’eau du puits. J’apporte, moi aussi, quelques seaux. Puis vous partez écrire dans les bois, et moi
143 seaux. Puis vous partez écrire dans les bois, et moi taper à la machine. À déjeuner, vous me dites que Clarence avait eu u
144 bois, et moi taper à la machine. À déjeuner, vous me dites que Clarence avait eu une conversation avec Tony au cours de la
145 elà de toute expression. Vous êtes très peiné, et je dis, moi, qu’on ne devrait pas raconter de pareilles histoires à Tony
146 oute expression. Vous êtes très peiné, et je dis, moi , qu’on ne devrait pas raconter de pareilles histoires à Tony. Vous ré
147 es pourries. C’est cette vision de vous ainsi qui m’ a fait peindre ces planchers, des années plus tard, pour que vous n’ay
148 t d’irritation perpétuelle où vivait Lawrence : «  Je suis épuisé — Par l’effort que je fais pour aimer les gens — sans y p
149 it Lawrence : « Je suis épuisé — Par l’effort que je fais pour aimer les gens — sans y parvenir. » Ou encore : « Oh ! ne m
150 s gens — sans y parvenir. » Ou encore : « Oh ! ne me donnez pas votre confiance — Pour me charger du poids de votre vie, d
151  : « Oh ! ne me donnez pas votre confiance — Pour me charger du poids de votre vie, de vos affaires ; — Ne me fourrez pas
152 ger du poids de votre vie, de vos affaires ; — Ne me fourrez pas dans vos soucis. » La mauvaise humeur est sans doute la c
153 leur donner. « Soyez ! Ah ! Soyez un soleil pour moi — Et non une lassante et exigeante personnalité. » L’homme moderne, d
154 ec Eckermann, pour le Journal de Byron, etc. 34. Je n’arrive pas à prendre au sérieux en soi la religion solaire que prêc
155 l’expression de son impuissance à résoudre ce que j’ appellerais le « problème des gens », qui est moins grandiose et beauc
18 1935, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Les Mystiques allemands du xiiie au xixe siècle, par Jean Chuzeville (octobre 1935)
156 e même décisif en ces matières, l’alternative que je viens d’indiquer ne se pose plus. Car la foi n’est pas davantage une
157 in de dangereuses merveilles. Le choix des textes me paraît des plus heureux, la traduction ferme et coulante. La plupart
158 rs cette erreur de classification35. Par exemple, je m’explique mal l’omission de Hamann qui eût avantageusement remplacé
159 cette erreur de classification35. Par exemple, je m’ explique mal l’omission de Hamann qui eût avantageusement remplacé la
160 sidéré comme une sécularisation du mysticisme. Il m’ a semblé que cette perspective spirituelle était la seule que dégageât
161 ystiques et de la mentalité moderne. 35. Ce que je pardonne moins à M. Chuzeville, c’est d’écrire que Paracelse « était
162 cher. – L’érudition considérable de M. Chuzeville me paraît parfois hasardeuse. Les travaux de Jean Baruzi lui sont inconn
19 1935, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). « Le plus beau pays du monde » (octobre 1935)
163 nde » (octobre 1935)w Toujours ces mots. Quand je dis qu’ils ont perdu leur sens, il faut ajouter aussitôt qu’on a le t
164 s beau pays du monde, elle veut dire simplement : j’ aime mon pays. L’amour exclut toute comparaison. Dire que tel pays « e
165 pays du monde, elle veut dire simplement : j’aime mon pays. L’amour exclut toute comparaison. Dire que tel pays « est le pl
20 1936, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Sur l’esprit incarné (février 1936)
166 tudes théologiques ou simplement logiques ». S’il m’ est permis de faire ici un peu de théologie et un peu de logique, je d
167 ire ici un peu de théologie et un peu de logique, je demanderai à M. Benda : 1° si les « docteurs » nationalistes qu’il at
168 esprit ; 2° au cas où ils l’auraient fait, ce que j’ ignore car je les pratique peu : s’il y a lieu de reprendre à son comp
169 u cas où ils l’auraient fait, ce que j’ignore car je les pratique peu : s’il y a lieu de reprendre à son compte cette erre
170 ient, préfèrent appeler révolution. Ces questions me paraissent capitales. Et je ne vois pas comment il serait possible d’
171 lution. Ces questions me paraissent capitales. Et je ne vois pas comment il serait possible d’y échapper. Depuis huit ans
21 1936, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Dictature de la liberté, par Robert Aron (mars 1936)
172 de la liberté, par Robert Aron (mars 1936)y «  J’ aime les titres mystérieux ou pétard », disait Baudelaire. Celui d’Aro
173 , préface de Malraux à son dernier ouvrage, etc.) J’ ai quelques raisons de m’en réjouir. L’Ordre nouveau en a tiré, le pre
174 n dernier ouvrage, etc.) J’ai quelques raisons de m’ en réjouir. L’Ordre nouveau en a tiré, le premier, des conclusions pra
22 1936, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Kierkegaard en France (juin 1936)
175 rd’hui Kierkegaard est cité par tout le monde. On m’ assure qu’il a même un public passionné. Mais si l’on juge de la façon
176 , pour prévenir certains malentendus inévitables. Je ne vise pas ici la langue des traductions, encore qu’il y ait beaucou
177 a traduites. Kierkegaard donne l’exemple unique, je crois bien, d’un auteur qui attache autant d’importance à l’opportuni
178 n donne, de toute espèce de sens réel, — par quoi j’ entends d’orientation intime, de fidélité essentielle, en un mot, de f
179 a suite ait fait voir l’énormité de cette erreur. Je crains bien que ce n’ait été qu’au profit d’une erreur plus subtile.
180 l’orage, ainsi, flairant le danger », il a dit : Je n’ai pas la foi, — certains pensent qu’au fond, il n’a jamais pu croi
181 ns l’Évangile n’est-elle pas justement ce cri : «  Je crois, Seigneur, viens au secours de mon incrédulité ». L’on eût évit
182 e cri : « Je crois, Seigneur, viens au secours de mon incrédulité ». L’on eût évité ce grabuge en traduisant dès le début q
183 tribuera certainement. Les graves malentendus que je signalais ont valu à l’auteur du Traité du désespoir un « succès » do
184 ent pas dans cette vision centrale et unitive. Il me semble que les neuf discours traduits par M. Paul Tisseau en revienne
185 oi ? Mais alors il n’y a pas de vrai sérieux dans ma vie, tant qu’il n’y a pas eu cet acte de foi, ce renversement du dése
186 appréhension si totale du réel que notre langue, je le crains, n’arrivera pas à la restituer sans bizarreries. Ceci suffi
187 P.-S. Cette chronique était déjà imprimée, quand j’ ai lu dans les Cahiers du Sud une étude de Benjamin Fondane qui s’en p
188 Jean Wahl, par Mme R. Bespaloff, et par moi-même. Je ne trouve pas cette violence déplacée, ni l’injustice qui l’accompagn
189 é que ne serait l’affectation d’impartialité ; et je suis loin de trouver vaine la question que pose Fondane : « Ils suive
190 quoi il fallait la poser. Et c’est aussi pourquoi je la retourne à son auteur. Mais peut-on y répondre par des mots ? Plus
191 ayant pour objet de « préparer à la Communion », je ne vois pour ma part qu’un seul moyen de s’engager de toute sa person
23 1936, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). L’Art poétique ou Qu’il faut penser avec les mains (décembre 1936)
192 qui domine de son poids les écritures du siècle, je retiendrai d’abord deux mots : « poétique » dans le titre ; et « conn
193 oins que son humanité, que son lyrisme, ou que ce je ne sais quoi de bouleversant, obscurément, qui saisit l’auditeur le p
194 ment rétablir le contact ? Claudel n’écrira pas : je vais vous expliquer cela clairement, mais : « Tel est le mystère qu’i
24 1937, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Une idée de Law (janvier 1937)
195 l’échec de Rickett ne comportent pas de morale : je veux le croire pour la morale. Mais ils permettent d’entrevoir l’une
196 n l’honneur — le budget de l’honneur — et non pas je ne sais quels scandales… ab. Rougemont Denis de, « Une idée de Law
25 1937, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). De la propriété capitaliste à la propriété humaine et Manifeste au service du personnalisme, par Emmanuel Mounier (février 1937)
197 e et tyrannique à un mode spirituel, donc humain. Je sais gré à Mounier d’avoir, chemin faisant, démontré que la propriété
198 s et partis, de La Rocque à Vaillant-Couturier ! ( Je ne sais pourquoi, d’ailleurs, ils s’obstinent à lui accoler un adject
199 essé dans un pareil débat ? Cela va de soi. 44. Je pense que Mounier ne se dissimule pas le caractère « théorique » des
200 de l’autre devient dans ce cas bien commun.) Mais je ne sache pas qu’on ait jamais songé à des théories de ce genre pour e
201 de commerce des couvents anglais.) — Pendant que j’ y suis, une autre remarque : Mounier exagère l’importance économique d
26 1937, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). N’habitez pas les villes (Extrait d’un Journal) (juillet 1937)
202 villes (Extrait d’un Journal) (juillet 1937)ae Je revois, je revis si bien la traversée, cette étrange coupure qu’elle
203 rait d’un Journal) (juillet 1937)ae Je revois, je revis si bien la traversée, cette étrange coupure qu’elle a faite dan
204 ersée, cette étrange coupure qu’elle a faite dans ma vie, entre les derniers jours passés à Paris non sans fièvre, et cett
205 une liberté naïve et nue, pauvre et joyeuse. Mais je vois bien qu’il me faut expliquer pourquoi nous venions dans cette îl
206 t nue, pauvre et joyeuse. Mais je vois bien qu’il me faut expliquer pourquoi nous venions dans cette île à la saison où il
207 mbre, sur les grands quais de ce port atlantique, j’ en étais à considérer d’un œil brûlé par l’insomnie les flots de l’océ
208 es rivages du détroit, c’est fort apparemment que je n’avais rien de mieux à faire. J’étais chômeur depuis trois mois. On
209 apparemment que je n’avais rien de mieux à faire. J’ étais chômeur depuis trois mois. On m’offrait un abri quelque part, un
210 ux à faire. J’étais chômeur depuis trois mois. On m’ offrait un abri quelque part, une maison vide pendant l’hiver, une occ
211 sion de solitude désirée en secret dès longtemps. Je voudrais bien n’avoir pas l’air trop romantique : mes dernières année
212 voudrais bien n’avoir pas l’air trop romantique : mes dernières années de Paris m’avaient appris que cette ville, au moins
213 r trop romantique : mes dernières années de Paris m’ avaient appris que cette ville, au moins pour la jeunesse sans argent,
214 « vivre » ? C’est à cette question judicieuse que j’ ai voulu répondre.   Début de novembre Je commencerai par l’inventaire
215 euse que j’ai voulu répondre.   Début de novembre Je commencerai par l’inventaire de mon domaine. Je ne suis pas propriéta
216 ut de novembre Je commencerai par l’inventaire de mon domaine. Je ne suis pas propriétaire, c’est entendu. Je ne possède lé
217 e Je commencerai par l’inventaire de mon domaine. Je ne suis pas propriétaire, c’est entendu. Je ne possède légalement que
218 aine. Je ne suis pas propriétaire, c’est entendu. Je ne possède légalement que des valises, de quoi me vêtir, et quelques
219 Je ne possède légalement que des valises, de quoi me vêtir, et quelques livres. Mais aussi, je ne puis vivre nulle part sa
220 de quoi me vêtir, et quelques livres. Mais aussi, je ne puis vivre nulle part sans me créer des possessions, appelant ains
221 res. Mais aussi, je ne puis vivre nulle part sans me créer des possessions, appelant ainsi toute chose que je sais mettre
222 r des possessions, appelant ainsi toute chose que je sais mettre en œuvre à ma façon, et peu capable de comprendre que l’o
223 t ainsi toute chose que je sais mettre en œuvre à ma façon, et peu capable de comprendre que l’on veuille « avoir » autrem
224 le, seront miens selon la puissance avec laquelle j’ en saurai faire usage, pour une fin qui leur est étrangère, et qui me
225 sage, pour une fin qui leur est étrangère, et qui me commandera de les quitter le jour qu’ils y mettront obstacle. (Pour l
226 ! Une chose n’est mienne que pour un temps, et si je change, elle me devient impropre. Je n’hérite pas même de moi ! Ou al
227 t mienne que pour un temps, et si je change, elle me devient impropre. Je n’hérite pas même de moi ! Ou alors, l’héritage
228 temps, et si je change, elle me devient impropre. Je n’hérite pas même de moi ! Ou alors, l’héritage est cela dont on ne p
229 elle me devient impropre. Je n’hérite pas même de moi  ! Ou alors, l’héritage est cela dont on ne peut pas se délivrer à tem
230 t il faut tâcher de se délivrer coûte que coûte.) Mon domaine, c’est ce que j’ai sous la main. Voici d’abord la table que j
231 ivrer coûte que coûte.) Mon domaine, c’est ce que j’ ai sous la main. Voici d’abord la table que je me suis fabriquée : j’a
232 que j’ai sous la main. Voici d’abord la table que je me suis fabriquée : j’ai trouvé dans le chai deux tréteaux et deux pl
233 j’ai sous la main. Voici d’abord la table que je me suis fabriquée : j’ai trouvé dans le chai deux tréteaux et deux planc
234 Voici d’abord la table que je me suis fabriquée : j’ ai trouvé dans le chai deux tréteaux et deux planches bien rabotées ;
235 ai deux tréteaux et deux planches bien rabotées ; j’ ai dressé cela devant la fenêtre ouverte sur les verdures encore vivac
236 sur les verdures encore vivaces du jardin. Quand je lève le nez, je vois la cour de terre battue à l’ombre de ses deux ti
237 s encore vivaces du jardin. Quand je lève le nez, je vois la cour de terre battue à l’ombre de ses deux tilleuls, la marge
238 toit sert de plafond. Très peu de meubles, comme j’ aime. Des murs blanchis ou teintés de bleu clair, des planchers rudes.
239 r.   10 novembre Ce journal n’aura rien d’intime. J’ ai à gagner ma vie, non pas à la regarder. Toutefois, noter les faits
240 re Ce journal n’aura rien d’intime. J’ai à gagner ma vie, non pas à la regarder. Toutefois, noter les faits précis qui me
241 a regarder. Toutefois, noter les faits précis qui me paraîtront frappants ici ou là, c’est une sorte de contrôle amusant e
242 cipline de l’esprit que la description objective. Me voici pris dans une expérience forcée de vie pauvre, libre et solitai
243 pays dénué de ressources, pratiquement analogue, j’ imagine, à un poste colonial aux limites du désert. Curiosité, comme a
244 ail dans le silence à peu près absolu. Mais aussi j’ ai l’impression nette d’utiliser la fin de l’élan intellectuel qui me
245 ette d’utiliser la fin de l’élan intellectuel qui me soutenait à Paris. Ces deux derniers jours déjà, j’arrivais mal à pre
246 soutenait à Paris. Ces deux derniers jours déjà, j’ arrivais mal à prendre au sérieux l’actualité de ce que j’écrivais. Il
247 is mal à prendre au sérieux l’actualité de ce que j’ écrivais. Il faut avouer qu’il s’agissait, dans ces articles, de ce qu
248 érature ou les idées. C’est cela qui paie, et qui m’ ennuie. Après quoi, je pourrai travailler. Aujourd’hui c’est le jour d
249 C’est cela qui paie, et qui m’ennuie. Après quoi, je pourrai travailler. Aujourd’hui c’est le jour du repos. J’ai trouvé a
250 i travailler. Aujourd’hui c’est le jour du repos. J’ ai trouvé au fond d’une armoire, derrière une pile d’assiettes, deux v
251 n peu partout pour sauver « l’esprit » d’un pays. J’ ai passé tout l’après-midi dessus. — Cela commence par une chronique h
252 hacun d’eux. Voilà l’espèce d’hommes français que je voudrais croire la plus authentique.   19 novembre Premiers contacts
253 ons et le clocher. Il est seul au-dessus du pays. Je voudrais le dessiner dans le style romantique, avec tous ses détails
254 ’âme de ce peuple discret. C’est l’impression que je veux retenir pour le moment des gens d’ici. Elle corrige la mauvaise
255 s gens d’ici. Elle corrige la mauvaise humeur que m’ a donnée notre épicière. Car il faut bien, hélas, commencer par l’épic
256 outteuse. Elle a des douleurs dans les jambes, et m’ en parle d’abord, pour me mettre en confiance. Je sens bien qu’elle ve
257 eurs dans les jambes, et m’en parle d’abord, pour me mettre en confiance. Je sens bien qu’elle veut me faire causer avant
258 m’en parle d’abord, pour me mettre en confiance. Je sens bien qu’elle veut me faire causer avant de fixer le prix du chou
259 me mettre en confiance. Je sens bien qu’elle veut me faire causer avant de fixer le prix du chou-fleur, des enveloppes jau
260 jaunes, du peloton de ficelle et du kilo de riz. Mes vêtements, citadins mais râpés, ne la renseignent pas clairement. Et
261 iver ? C’est plutôt en été qu’on vient chez nous, me fait-elle prudemment observer. — Je le sais bien, madame Aujard, mais
262 nt chez nous, me fait-elle prudemment observer. — Je le sais bien, madame Aujard, mais je ne viens pas pour mes vacances !
263 observer. — Je le sais bien, madame Aujard, mais je ne viens pas pour mes vacances ! J’ai du travail à faire chez moi, de
264 is bien, madame Aujard, mais je ne viens pas pour mes vacances ! J’ai du travail à faire chez moi, des tas de choses à écri
265 Aujard, mais je ne viens pas pour mes vacances ! J’ ai du travail à faire chez moi, des tas de choses à écrire… Elle n’ose
266 pour mes vacances ! J’ai du travail à faire chez moi , des tas de choses à écrire… Elle n’ose pas m’en demander davantage.
267 z moi, des tas de choses à écrire… Elle n’ose pas m’ en demander davantage. Et moi, je recule devant l’entreprise de lui ex
268 crire… Elle n’ose pas m’en demander davantage. Et moi , je recule devant l’entreprise de lui expliquer la nature de mon trav
269 … Elle n’ose pas m’en demander davantage. Et moi, je recule devant l’entreprise de lui expliquer la nature de mon travail.
270 devant l’entreprise de lui expliquer la nature de mon travail. « Écrire », qu’est-ce que cela signifie ? Écrire pour les jo
271 mais il n’y en a pas tant à raconter sur ce pays. Je l’ai laissée en plein mystère. Elle a dû en parler longuement avec le
272 endaient en silence, le nez sur leurs sabots, que je sois sorti. La mère Aujard n’a pas toujours ce qu’on voudrait. En hiv
273 une, entrant chez l’autre. Mais c’est prudent, on me l’a dit. Car elles ne baisseront pas leurs prix pour garder un client
274 . Derrière la grille, le long visage de Pédenaud. J’ ai l’impression que je lui gâte la vie. Trois fois la semaine au moins
275 le long visage de Pédenaud. J’ai l’impression que je lui gâte la vie. Trois fois la semaine au moins, il me voit venir ave
276 i gâte la vie. Trois fois la semaine au moins, il me voit venir avec une grande enveloppe contenant un manuscrit. « Est-ce
277 son calcul sur un bout de papier, et conclut que j’ ai à payer 72 francs pour un envoi, ce jour-là, d’une centaine de feui
278 ine de feuilles. Il en paraît lui-même consterné. J’ affirme avec vivacité que ça ne peut pas aller. Il faut tout recommenc
279 cs soixante-quinze. Dans l’après-midi, tandis que j’ écris à ma table, j’entends grincer la porte du jardin. C’est la femme
280 e-quinze. Dans l’après-midi, tandis que j’écris à ma table, j’entends grincer la porte du jardin. C’est la femme de Pédena
281 Dans l’après-midi, tandis que j’écris à ma table, j’ entends grincer la porte du jardin. C’est la femme de Pédenaud qui bra
282 C’est la femme de Pédenaud qui brandit un papier. J’ accours : elle me tend une formule de télégramme, mais ce n’est pas un
283 Pédenaud qui brandit un papier. J’accours : elle me tend une formule de télégramme, mais ce n’est pas un télégramme, c’es
284 t s’affranchit comme une lettre. Il faut donc que je m’exécute, sinon c’est lui qui sera forcé « d’y aller de sa poche ».
285 ’affranchit comme une lettre. Il faut donc que je m’ exécute, sinon c’est lui qui sera forcé « d’y aller de sa poche ». Me
286 est lui qui sera forcé « d’y aller de sa poche ». Me voilà courant à l’autobus pour arrêter le courrier. L’autobus vient d
287 eptibilités, et finalement ne rien payer de plus. Je cause un peu, pour me faire pardonner. Pédenaud est mutilé de guerre.
288 ment ne rien payer de plus. Je cause un peu, pour me faire pardonner. Pédenaud est mutilé de guerre. Il boite. On lui a do
289 urdes et les vendent aux baigneurs. Bien entendu, je n’arrive pas à savoir combien ce petit commerce lui rapporte, « ça dé
290 un sentiment de liberté, de gratuité aventureuse. Mon sort ne dépend plus de ce que je puis faire ou imaginer : libération.
291 té aventureuse. Mon sort ne dépend plus de ce que je puis faire ou imaginer : libération. Il faut qu’il arrive quelque cho
292 ne meurt pas de faim dans nos pays », dit-on, et je crois bien que je l’ai dit quelquefois. Mais il y a aussi des excepti
293 aim dans nos pays », dit-on, et je crois bien que je l’ai dit quelquefois. Mais il y a aussi des exceptions, des cas sans
294 rsonnelles de ne pas appeler au secours. Pourtant je suis bien tranquille, je ne l’ai même jamais été aussi absolument. C’
295 ler au secours. Pourtant je suis bien tranquille, je ne l’ai même jamais été aussi absolument. C’est peut-être à cause du
296 r se mêler aux « autres », à l’étranger… Tout ici me ramène à moi seul. J’ai beau faire, je ne parviens pas à partager ave
297 ux « autres », à l’étranger… Tout ici me ramène à moi seul. J’ai beau faire, je ne parviens pas à partager avec les hommes
298 s », à l’étranger… Tout ici me ramène à moi seul. J’ ai beau faire, je ne parviens pas à partager avec les hommes de ce vil
299 … Tout ici me ramène à moi seul. J’ai beau faire, je ne parviens pas à partager avec les hommes de ce village ce qui est e
300 de ce village ce qui est essentiel et solide dans ma vie. Le simple fait que je ne puis pas les persuader que je travaille
301 sentiel et solide dans ma vie. Le simple fait que je ne puis pas les persuader que je travaille vraiment en écrivant, cela
302 simple fait que je ne puis pas les persuader que je travaille vraiment en écrivant, cela met entre nous une barrière sent
303 e sentimentale, une gêne constamment sensible. Et je n’ai nulle envie d’en prendre mon parti. Dans ce qu’ils ont pu entrev
304 ent sensible. Et je n’ai nulle envie d’en prendre mon parti. Dans ce qu’ils ont pu entrevoir de mon activité, une seule cho
305 dre mon parti. Dans ce qu’ils ont pu entrevoir de mon activité, une seule chose les a frappés : ma machine à écrire. La mèr
306 de mon activité, une seule chose les a frappés : ma machine à écrire. La mère Renaud, qui est une vieille amie des propri
307 n, est venue plusieurs fois nous voir. Hier, elle m’ a demandé avec toutes sortes de précautions oratoires embrouillées si
308 si son fils pourrait venir aussi voir la machine. Je crois bien que sans cette machine, je n’arriverais jamais à leur prou
309 la machine. Je crois bien que sans cette machine, je n’arriverais jamais à leur prouver que je fais réellement quelque cho
310 achine, je n’arriverais jamais à leur prouver que je fais réellement quelque chose. Quand je vais chez les Renaud, c’est t
311 ouver que je fais réellement quelque chose. Quand je vais chez les Renaud, c’est tout le contraire. Ils m’expliquent en dé
312 ais chez les Renaud, c’est tout le contraire. Ils m’ expliquent en détail ce qu’ils font, et je puis le comprendre et l’adm
313 re. Ils m’expliquent en détail ce qu’ils font, et je puis le comprendre et l’admirer. Ils ont ainsi sur moi une sorte de s
314 uis le comprendre et l’admirer. Ils ont ainsi sur moi une sorte de supériorité concrète dont je ne souffre pas dans ma vani
315 si sur moi une sorte de supériorité concrète dont je ne souffre pas dans ma vanité, c’est entendu, mais bien dans mon dési
316 supériorité concrète dont je ne souffre pas dans ma vanité, c’est entendu, mais bien dans mon désir de sympathie humaine,
317 pas dans ma vanité, c’est entendu, mais bien dans mon désir de sympathie humaine, d’échange direct sur pied d’égalité. Le p
318 déjà touché par le gâtisme, mais agréablement si je puis dire. Cela met un peu de fantaisie dans ses souvenirs, trop souv
319 quatre-vingts mètres, bel ouvrage dont le détail m’ intéresse. Le fils compose des cartes postales illustrées avec des bou
320 ustrées avec des bouts de timbres-poste découpés. Je m’attarde à causer dans leur cuisine, qui est leur habitation ordinai
321 rées avec des bouts de timbres-poste découpés. Je m’ attarde à causer dans leur cuisine, qui est leur habitation ordinaire.
322 igoureuse qui règnent ici avec tant d’aisance, ai- je le droit de les considérer comme les symboles visibles de l’univers i
323 ’univers intérieur de ces gens ?   5 décembre Ils me parlent de ce qui les intéresse, et je m’y intéresse avec eux. Mais j
324 cembre Ils me parlent de ce qui les intéresse, et je m’y intéresse avec eux. Mais je ne puis ou ne sais pas encore leur pa
325 bre Ils me parlent de ce qui les intéresse, et je m’ y intéresse avec eux. Mais je ne puis ou ne sais pas encore leur parle
326 les intéresse, et je m’y intéresse avec eux. Mais je ne puis ou ne sais pas encore leur parler de ce qui moi, m’intéresse 
327 puis ou ne sais pas encore leur parler de ce qui moi , m’intéresse : je sens trop bien qu’ils n’en sont pas curieux. De quo
328 ou ne sais pas encore leur parler de ce qui moi, m’ intéresse : je sens trop bien qu’ils n’en sont pas curieux. De quoi do
329 s encore leur parler de ce qui moi, m’intéresse : je sens trop bien qu’ils n’en sont pas curieux. De quoi donc me parlent-
330 p bien qu’ils n’en sont pas curieux. De quoi donc me parlent-ils ? Du temps, et j’aime cela comme tout le monde ; de leur
331 rieux. De quoi donc me parlent-ils ? Du temps, et j’ aime cela comme tout le monde ; de leur travail aux champs ou à la côt
332 nde ; de leur travail aux champs ou à la côte, et je les écoute avec toute l’attention d’un apprenti ; de leurs souvenirs,
333 ants, parfois comiques, toujours révélateurs pour moi d’un monde non pas absolument nouveau, mais nouvellement intéressant.
334 ntéressant. Et quand nous sommes en confiance, si j’ essaie d’amener l’entretien sur leurs lectures, les journaux qu’ils ac
335 à raconter des anecdotes subitement sans intérêt. Je ne sens pas qu’ils se méfient de moi. Simplement, ils n’ont jamais fo
336 sans intérêt. Je ne sens pas qu’ils se méfient de moi . Simplement, ils n’ont jamais formé de phrases, dans leur tête, à pro
337 ur tête, à propos de ces choses-là. Non seulement je ne sens pas qu’ils se méfient de moi en tant qu’intellectuel ou « spé
338 Non seulement je ne sens pas qu’ils se méfient de moi en tant qu’intellectuel ou « spécialiste », mais encore je devine qu’
339 t qu’intellectuel ou « spécialiste », mais encore je devine qu’ils n’estiment pas que je puisse avoir une opinion plus ave
340 , mais encore je devine qu’ils n’estiment pas que je puisse avoir une opinion plus avertie que la leur sur les sujets que
341 inion plus avertie que la leur sur les sujets que je viens de nommer. Ils ne se doutent pas que c’est de cela précisément
342 nerait davantage que d’apprendre un beau jour que je m’intéresse à leurs « idées », à leur situation, à leurs problèmes, —
343 ait davantage que d’apprendre un beau jour que je m’ intéresse à leurs « idées », à leur situation, à leurs problèmes, — et
344  », à leur situation, à leurs problèmes, — et que j’ en fais parfois la matière même de mon travail. J’ai quelque peine à e
345 es, — et que j’en fais parfois la matière même de mon travail. J’ai quelque peine à exprimer ceci, — qui n’est précisément
346 j’en fais parfois la matière même de mon travail. J’ ai quelque peine à exprimer ceci, — qui n’est précisément qu’un sentim
347  qui n’est précisément qu’un sentiment de gêne en moi . Sentiment qu’il y a là quelque absurdité, et si énorme que personne
348 rester si parfaitement aveugles ? Ou bien est-ce ma gêne qui est absurde ? Essayer de confronter la culture et la réalité
349 moigner d’une naïveté impardonnable ? — Pourtant, je ne suis pas prêt à me donner tort, c’est-à-dire à donner raison au bo
350 impardonnable ? — Pourtant, je ne suis pas prêt à me donner tort, c’est-à-dire à donner raison au bon sens de l’époque pré
351 tres habitent trop loin, ou sont indifférents. Il me raconte les efforts qu’il a faits, pendant six ans, pour entrer en co
352 plé : cela suffit pour qu’on maintienne le poste… J’ essaie de me représenter l’existence quotidienne de cet homme aux pris
353 uffit pour qu’on maintienne le poste… J’essaie de me représenter l’existence quotidienne de cet homme aux prises avec la s
354 lus, il est seul à croire qu’il doit le faire. Il m’ a décrit son existence sans amertume. Il ne se plaint que de son isole
355 T…) Ce séjour, par ailleurs plein d’agrément, ne m’ a permis de faire jusqu’ici qu’une seule expérience précise et utile :
356 le expérience précise et utile : celle du loisir. Je m’aperçois que je ne savais plus, ou ne pouvais plus, « perdre » une
357 expérience précise et utile : celle du loisir. Je m’ aperçois que je ne savais plus, ou ne pouvais plus, « perdre » une soi
358 ise et utile : celle du loisir. Je m’aperçois que je ne savais plus, ou ne pouvais plus, « perdre » une soirée, depuis six
359 plus, « perdre » une soirée, depuis six mois que je n’ai plus de travail fixe. Quand je m’arrêtais d’écrire, par fatigue,
360 six mois que je n’ai plus de travail fixe. Quand je m’arrêtais d’écrire, par fatigue, je ne me sentais pas la bonne consc
361 x mois que je n’ai plus de travail fixe. Quand je m’ arrêtais d’écrire, par fatigue, je ne me sentais pas la bonne conscien
362 fixe. Quand je m’arrêtais d’écrire, par fatigue, je ne me sentais pas la bonne conscience de l’employé qui a fait sa jour
363 Quand je m’arrêtais d’écrire, par fatigue, je ne me sentais pas la bonne conscience de l’employé qui a fait sa journée et
364 maintenant à autre chose. Une sorte d’impatience me tarabustait encore, me ramenait sans cesse aux mêmes préoccupations.
365 se. Une sorte d’impatience me tarabustait encore, me ramenait sans cesse aux mêmes préoccupations. Ce n’était pas cette va
366 urent soit le travail, soit la fortune, soit dans mon cas particulier, l’amitié. Un chômeur intellectuel peut encore travai
367 r ! La colère y jaillit sans rencontrer personne. J’ ai à craindre qu’elle ne m’attaque par désir famélique de créer du nou
368 s rencontrer personne. J’ai à craindre qu’elle ne m’ attaque par désir famélique de créer du nouveau. Car c’est une consola
369 use raison d’abandonner cette partie mal engagée, ma vie, et de se retrouver neuf, enfantin, ou tout simplement jeune deva
370 e tentation du désespoir, et c’est l’humilité. Si je ne suis pas important, le monde s’agrandit. Je puis encore aimer des
371 Si je ne suis pas important, le monde s’agrandit. Je puis encore aimer des paysages qui ne sont pas mon état d’âme, mais u
372 Je puis encore aimer des paysages qui ne sont pas mon état d’âme, mais une parole à déchiffrer. L’humilité m’apporte des no
373 t d’âme, mais une parole à déchiffrer. L’humilité m’ apporte des nouvelles du monde. Ainsi je me renouvelle lentement. C’es
374 ’humilité m’apporte des nouvelles du monde. Ainsi je me renouvelle lentement. C’est un moyen de sortir de l’impasse : non
375 milité m’apporte des nouvelles du monde. Ainsi je me renouvelle lentement. C’est un moyen de sortir de l’impasse : non pas
376 Autrement, comment supporter leur petitesse ? Si je gratte pendant des heures ce coin réduit de terre caillouteuse, c’est
377 pour un printemps qui viendra. C’est pour gagner ma vie, dit une raison borgne ; c’est aussi pour gagner ma mort, je le s
378 , dit une raison borgne ; c’est aussi pour gagner ma mort, je le sais bien. Toute notre attente imagine l’avenir — et l’im
379 raison borgne ; c’est aussi pour gagner ma mort, je le sais bien. Toute notre attente imagine l’avenir — et l’imagine néc
380 peu. La première condition c’est de gagner peu. ( J’ ai écrit cela, je me le rappelle, peu de temps après notre arrivée, au
381 condition c’est de gagner peu. (J’ai écrit cela, je me le rappelle, peu de temps après notre arrivée, au haut d’une page
382 ndition c’est de gagner peu. (J’ai écrit cela, je me le rappelle, peu de temps après notre arrivée, au haut d’une page que
383 temps après notre arrivée, au haut d’une page que je retrouve dans une pile de notes. La page est restée blanche. Et toute
384 e, c’est bien ainsi, et très complet.)   10 avril Je n’ai pas encore parlé de la poule, la triste et digne poule noire qui
385 pondu. Et ce matin de nouveau. De très gros œufs, me semble-t-il. (Où va se loger la vanité !)   14 avril La culture et l
386 14 avril La culture et les gens. Souvent, quand je me tire du livre que j’écris — sur la crise de la cultureaf — pour ca
387 avril La culture et les gens. Souvent, quand je me tire du livre que j’écris — sur la crise de la cultureaf — pour cause
388 les gens. Souvent, quand je me tire du livre que j’ écris — sur la crise de la cultureaf — pour causer avec la laitière ou
389 ière ou la factrice, ou le postier, ou un Renaud, j’ éprouve une brève angoisse : quel rapport entre cet homme à qui je par
390 ève angoisse : quel rapport entre cet homme à qui je parle, et le mot « homme » dans ce que j’écris ? Non seulement ceux d
391 e à qui je parle, et le mot « homme » dans ce que j’ écris ? Non seulement ceux d’ici ne comprendraient rien à ce que je fa
392 lement ceux d’ici ne comprendraient rien à ce que je fais, et ce serait assez normal : il y a l’obstacle du vocabulaire, d
393 e comprendraient pas même de quoi il s’agit quand je parle d’eux précisément, et des problèmes qui intéressent leur existe
394 et des problèmes qui intéressent leur existence. J’ aurais beau leur expliquer chaque terme. Ils n’y reconnaîtraient rien
395 , cela ne peut accrocher à rien dans cet être que j’ ai devant moi, avec ses rides, sa barbe et sa casquette, et qui contin
396 ut accrocher à rien dans cet être que j’ai devant moi , avec ses rides, sa barbe et sa casquette, et qui continue à me parle
397 ides, sa barbe et sa casquette, et qui continue à me parler de la pêche, de son filet qui a été emporté hier, etc. Quel se
398 mais eu de contact, ni jamais de commune mesure ? Je reviens à mes pages, bien décidé à les refaire de fond en comble, à s
399 ntact, ni jamais de commune mesure ? Je reviens à mes pages, bien décidé à les refaire de fond en comble, à simplifier, à c
400 à essayer de les rendre telles qu’elles puissent, je ne dis pas être comprises, mais au moins, en pensée, confrontées sans
401 at : après une demi-heure de relecture attentive, j’ ai rajouté quelques virgules, précisé quelques termes trop vagues, bar
402 cinq lignes et mis une note au bas de la page. Il me semble vraiment que cela se tient. Il me semble aussi que c’est concr
403 page. Il me semble vraiment que cela se tient. Il me semble aussi que c’est concret. Je me dis que cette impression et cel
404 a se tient. Il me semble aussi que c’est concret. Je me dis que cette impression et celle de tout à l’heure s’excluent en
405 e tient. Il me semble aussi que c’est concret. Je me dis que cette impression et celle de tout à l’heure s’excluent en fai
406 celle de tout à l’heure s’excluent en fait. Mais je n’arrive plus du tout à retrouver ce sentiment d’absurdité que provoq
407 rouver ce sentiment d’absurdité que provoquait en moi , précisément, la présence physique d’un homme, confrontée avec les id
408 hysique d’un homme, confrontée avec les idées que j’ avais en tête. Il y a probablement une fatalité interne dans notre cul
409 s la réalité. À la fin on obtient l’absurdité que j’ éprouvais, mais aussi l’impossibilité de la sentir avec quelque vivaci
410 sauf par éclairs, dans la rue, par exemple. Déjà je ne puis en retrouver le souvenir autrement que par un effort de réfle
411 enir autrement que par un effort de réflexion qui me laisse assez froid. La culture m’a repris. Je suis dans le faux et to
412 e réflexion qui me laisse assez froid. La culture m’ a repris. Je suis dans le faux et tout y est correct : je dis que la t
413 qui me laisse assez froid. La culture m’a repris. Je suis dans le faux et tout y est correct : je dis que la thèse que je
414 ris. Je suis dans le faux et tout y est correct : je dis que la thèse que je défends est vraie !… Il y aurait de quoi s’ar
415 x et tout y est correct : je dis que la thèse que je défends est vraie !… Il y aurait de quoi s’arrêter de penser, si l’on
416 onnée des êtres et des choses, où nous vivons ? «  Je pense, donc j’en suis ». Et je ne suis guère, si je n’en suis pas. Et
417 et des choses, où nous vivons ? « Je pense, donc j’ en suis ». Et je ne suis guère, si je n’en suis pas. Et je ne pense bi
418 où nous vivons ? « Je pense, donc j’en suis ». Et je ne suis guère, si je n’en suis pas. Et je ne pense bien, valablement,
419 pense, donc j’en suis ». Et je ne suis guère, si je n’en suis pas. Et je ne pense bien, valablement, en vérité, que si je
420 s ». Et je ne suis guère, si je n’en suis pas. Et je ne pense bien, valablement, en vérité, que si je me sens et me connai
421 je ne pense bien, valablement, en vérité, que si je me sens et me connais participant de ce monde « mal compassé ».   16
422 ne pense bien, valablement, en vérité, que si je me sens et me connais participant de ce monde « mal compassé ».   16 avr
423 ien, valablement, en vérité, que si je me sens et me connais participant de ce monde « mal compassé ».   16 avril La poule
424 La poule noire couve depuis hier ses treize œufs. J’ ai semé des salades, planté des choux, enfoncé une à une des graines d
425 les ongles terreux ; toujours ce goût d’enfance… Je ne me sens plus « éloigné de Paris », mais au centre de mon domaine ;
426 ngles terreux ; toujours ce goût d’enfance… Je ne me sens plus « éloigné de Paris », mais au centre de mon domaine ; et c’
427 sens plus « éloigné de Paris », mais au centre de mon domaine ; et c’est Paris qui est loin maintenant, peu vraisemblable ;
428 loin maintenant, peu vraisemblable ; et non plus moi . Premières roses au soleil, le long des murs du chai. Nous déjeunons
429 te rose d’une fourmi ailée qui danse au-dessus de mon verre de vin blanc.   Mai La mer est d’un vert bleu crayeux, très fro
430 es se recroquevillent, rougissent, se durcissent. Je ne puis voir cela sans honte et sans révolte. Sensiblerie évidemment,
431 e évidemment, mais qu’est-ce que cela veut dire ? Je parlais de « l’attente ardente » des créatures, songeant au passage o
432 r avec) que l’homme éprouve pour ses victimes : «  Je regrette vraiment beaucoup, mais il faut que je vous mange. Dure néce
433 « Je regrette vraiment beaucoup, mais il faut que je vous mange. Dure nécessité, et croyez que cela me fend le cœur ! » Vo
434 je vous mange. Dure nécessité, et croyez que cela me fend le cœur ! » Voilà la dernière trace de la conscience cosmique en
435 histoires, ne fait pas de sentiment. Et pourtant, ma sensiblerie n’est hypocrite que parce qu’elle reste pratiquement insu
436 leurs maladroitement, avec le tigre et le requin. J’ allais conclure : nos rapports avec la nature ne sont guère plus satis
437 la mission de restaurer l’harmonie primitive, que mon scrupule se justifie : il apparaît alors comme le dernier écho, le de
438 tice cosmique blessée. Comme une prière muette en moi , toute machinale et tout obscure.   24 mai On dirait que l’homme n’es
439 i meurt qui nous émeut. Cette nuit, avant d’aller me coucher, j’ai été voir au poulailler. (Nous attendions depuis deux jo
440 nous émeut. Cette nuit, avant d’aller me coucher, j’ ai été voir au poulailler. (Nous attendions depuis deux jours l’éclosi
441 ndions depuis deux jours l’éclosion des œufs.) Il me semble qu’il se passe des choses au fond du réduit obscur. La poule g
442 réduit obscur. La poule grogne furieusement quand je passe la tête. Je vais chercher une bougie, je réveille ma femme. Nou
443 poule grogne furieusement quand je passe la tête. Je vais chercher une bougie, je réveille ma femme. Nous essayons de soul
444 nd je passe la tête. Je vais chercher une bougie, je réveille ma femme. Nous essayons de soulever par les ailes la poule q
445 la tête. Je vais chercher une bougie, je réveille ma femme. Nous essayons de soulever par les ailes la poule qui fait un c
446 ufs. On entend le toc-toc des becs à l’intérieur. Je repose la lourde poule avec précaution, craignant qu’elle n’écrase se
447 sans argent pendant quelques semaines encore. Il me reste environ 300 francs. Mais de nouveau plus rien à espérer avant l
448 mps en fait de « rentrées ».   14 juin Hier soir, j’ avais fait une dernière revue de nos possibilités de subsister pendant
449 pas freiner mais peser à fond sur l’accélérateur. Je suis allé à A. acheter des cigarettes. Et nous allions nous mettre à
450 lettre et un chèque. C’est un prix. Un prix dont je connaissais tout juste le nom. Que je n’aurais jamais eu l’idée de so
451 n prix dont je connaissais tout juste le nom. Que je n’aurais jamais eu l’idée de solliciter. Et qui m’est octroyé pour un
452 e n’aurais jamais eu l’idée de solliciter. Et qui m’ est octroyé pour un petit livre paru sans bruit il y a plus de dix-hui
453 moins certains d’entre eux. Sur le moment, ce qui m’ a le plus frappé c’est que je m’étais fâché hier soir, et que la Provi
454 ur le moment, ce qui m’a le plus frappé c’est que je m’étais fâché hier soir, et que la Providence, évidemment, se payait
455 le moment, ce qui m’a le plus frappé c’est que je m’ étais fâché hier soir, et que la Providence, évidemment, se payait ma
456 soir, et que la Providence, évidemment, se payait ma tête. Ensuite j’ai calculé que cela nous permettait de passer l’été i
457 rovidence, évidemment, se payait ma tête. Ensuite j’ ai calculé que cela nous permettait de passer l’été ici sans inquiétud
458 ailleurs, sans ennui. Cela probablement parce que j’ étais à bout de ressources, ne bougeais plus ni pied ni patte et n’écr
459 s ni pied ni patte et n’écrivais plus à personne. Je crois à la valeur d’appel de l’absence, ou plutôt du retrait. (Il ne
460 ’un jour par semaine. Ce n’est qu’aujourd’hui que j’ ai pu aller y négocier mon chèque. J’arrive devant la porte où il est
461 n’est qu’aujourd’hui que j’ai pu aller y négocier mon chèque. J’arrive devant la porte où il est écrit : Caisse. Je frappe
462 ourd’hui que j’ai pu aller y négocier mon chèque. J’ arrive devant la porte où il est écrit : Caisse. Je frappe et entre. U
463 ’arrive devant la porte où il est écrit : Caisse. Je frappe et entre. Un homme penché vers le guichet parle au gérant. Le
464 penché vers le guichet parle au gérant. Le gérant me fait un signe, et comme je ne comprends pas, il passe sa portette et
465 e au gérant. Le gérant me fait un signe, et comme je ne comprends pas, il passe sa portette et vient me prier à voix basse
466 e ne comprends pas, il passe sa portette et vient me prier à voix basse d’aller attendre dans la pièce voisine. J’attends
467 oix basse d’aller attendre dans la pièce voisine. J’ attends je ne sais combien de temps, je n’ai pas de montre, mais c’est
468 d’aller attendre dans la pièce voisine. J’attends je ne sais combien de temps, je n’ai pas de montre, mais c’est très long
469 e voisine. J’attends je ne sais combien de temps, je n’ai pas de montre, mais c’est très long. Aucun bruit de voix dans la
470 ut être le motif de cette audience privée ? Enfin j’ entends qu’on sort, et le gérant vient me chercher. Notre affaire régl
471  ? Enfin j’entends qu’on sort, et le gérant vient me chercher. Notre affaire réglée, il croit devoir s’excuser de m’avoir
472 otre affaire réglée, il croit devoir s’excuser de m’ avoir fait passer à côté tout à l’heure. « Vous savez, c’est la coutum
473 C’est qu’ils sont très spéciaux les gens d’ici ! Moi je n’y viens qu’une fois par semaine, mais je commence à les connaîtr
474 st qu’ils sont très spéciaux les gens d’ici ! Moi je n’y viens qu’une fois par semaine, mais je commence à les connaître.
475  ! Moi je n’y viens qu’une fois par semaine, mais je commence à les connaître. Je pourrais vous en dire. C’est partout dif
476 is par semaine, mais je commence à les connaître. Je pourrais vous en dire. C’est partout différent, pour l’argent. Si vou
477 on a dû faire cette salle d’attente… » Autant que j’ en puis juger d’après les propos du gérant, ce n’est pas seulement la
478 che au commerce de l’argent.   20 juin Les gens. Je feuillette ce journal : voici des semaines qu’il n’y est à peu près p
479 à peu près plus question des « gens ». En somme, je ne m’intéresse plus guère à leurs affaires. J’ai pris mon parti de ce
480 près plus question des « gens ». En somme, je ne m’ intéresse plus guère à leurs affaires. J’ai pris mon parti de cet équi
481 e, je ne m’intéresse plus guère à leurs affaires. J’ ai pris mon parti de cet équilibre indifférent et cordial qui a fini p
482 ’intéresse plus guère à leurs affaires. J’ai pris mon parti de cet équilibre indifférent et cordial qui a fini par s’établi
483 oujours pareilles. Grande différence entre eux et moi  : ils sont adaptés à leur conduite et à leur milieu, comme les animau
484 ne se posent pas de questions gênantes. Or, c’est mon métier d’en poser… Il vaut mieux partir quand on en est là. Quand on
485 y a de l’argent dans un tiroir. Cela signifie que j’ ai cessé d’être chômeur. Le départ est fixé au 10. Il va falloir vendr
486 …   10 juillet Tout est bouclé, ficelé, cloué. Il me reste à peu près deux heures, avant le départ, pour faire un peu de s
487 n précise de cet état qu’ils rêvent et craignent. J’ ai pensé plus d’une fois qu’il pourrait être utile de décrire ma petit
488 s d’une fois qu’il pourrait être utile de décrire ma petite expérience d’intellectuel en chômage ; qu’il pourrait être uti
489 esser de vivre son plein. Voici un an bientôt que j’ ai quitté Paris. Voici un an que je dors bien, que je travaille sans f
490 an bientôt que j’ai quitté Paris. Voici un an que je dors bien, que je travaille sans fièvre et que je flâne sans vague à
491 i quitté Paris. Voici un an que je dors bien, que je travaille sans fièvre et que je flâne sans vague à l’âme. C’est quelq
492 je dors bien, que je travaille sans fièvre et que je flâne sans vague à l’âme. C’est quelque chose. Je ne dis pas que c’es
493 je flâne sans vague à l’âme. C’est quelque chose. Je ne dis pas que c’est le bonheur, je n’ai jamais très bien compris ce
494 uelque chose. Je ne dis pas que c’est le bonheur, je n’ai jamais très bien compris ce mot, que tant de gens invoquent avec
495 que tant de gens invoquent avec un accent triste. Je suis devenu tout doucement amoureux de ma vie, et je crois bien que c
496 triste. Je suis devenu tout doucement amoureux de ma vie, et je crois bien que c’est un penchant qu’elle agrée. Non point
497 suis devenu tout doucement amoureux de ma vie, et je crois bien que c’est un penchant qu’elle agrée. Non point qu’elle me
498 ’est un penchant qu’elle agrée. Non point qu’elle me paye en retour de surprises multipliées : peu d’aventures dans l’exis
499 ans doute un effet de la trentaine qui approche : je n’espère plus, comme à vingt ans, rencontrer le « réel » ou la « vrai
500 , rencontrer le « réel » ou la « vraie vie » dans je ne sais quelle embuscade du destin, comme qui dirait au coin d’un boi
501 de du destin, comme qui dirait au coin d’un bois. Je crois que le réel est à portée de la main, et n’est que là. Alors il
502 sans doute qu’une certaine pauvreté pouvait seule m’ y forcer utilement. ae. Rougemont Denis de, « N’habitez pas les vil
27 1937, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Au dossier d’une vieille querelle (novembre 1937)
503 geux de contenter les hommes en offensant Dieu ». J’ en conclus qu’il est bon d’engager la raison dans la vie : non point p
28 1938, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Le Monastère noir, par Aladár Kuncz (janvier 1938)
504 e virulence particulière, mais au moins déclarée. Je veux parler du mythe de l’arrestation, de la psychose créée dans le m
505 pour des « raisons » collectives et obscures. Il me paraît que le livre de Kuncz tire son tragique le plus secret du fait
29 1938, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Victoire à Waterloo, par Robert Aron (février 1938)
506 uvés ». La thèse peut se discuter. L’illustration m’ en paraît convaincante. « Le grand étonnement que peut provoquer ce li
507 Or ce cri qui lui donne la victoire le condamne. Je simplifie encore la thèse : Napoléon gagne Waterloo parce qu’il retro
508 » et non pas à hauteur d’idéologies. Peut-être ai- je trop insisté sur l’actualité politique de cette méditation personnali
509 Paul rapporte un rêve où il disait à Napoléon : «  Je ne suis jamais plus intelligent qu’au lit, quand je rêve de vous, car
510 ne suis jamais plus intelligent qu’au lit, quand je rêve de vous, car alors je dois vous créer moi-même vous et vos idées
511 igent qu’au lit, quand je rêve de vous, car alors je dois vous créer moi-même vous et vos idées. » ak. Rougemont Denis d
30 1938, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Une révolution refoulée (juillet 1938)
512 ychanalyse nous propose un type d’explication qui me paraît bien tentant : c’est le mécanisme du « refoulement » d’où proc
513 ra les conclusions logiques. Sera-t-il Français ? Je voudrais me tromper, croire au miracle. Je préfère opposer un pessimi
514 usions logiques. Sera-t-il Français ? Je voudrais me tromper, croire au miracle. Je préfère opposer un pessimisme actif à
515 çais ? Je voudrais me tromper, croire au miracle. Je préfère opposer un pessimisme actif à tant d’espérances bernées. al
31 1938, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Alice au pays des merveilles, par Lewis Carroll (août 1938)
516 a version française du conte ; celle de René Bour me paraît scrupuleuse, encore que déparée ici ou là par des préciosités
32 1939, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Propos sur la religion, par Alain (avril 1939)
517 ur n’a pas varié durant ce temps. Elle se ramène, me semble-t-il, à ceci : la religion, c’est la pratique moyenne du catho
518 de preuves en matière de « croyance », débat dont je ne trouve pas trace dans les évangiles, s’il est vrai qu’il encombre
519 t de la théologie, surtout catholique. Tout cela, je le crains, relève d’un malentendu, courant sur le sens du mot « foi »
520 n malentendu, courant sur le sens du mot « foi ». Je voudrais au moins l’indiquer. Un chrétien sait que sa foi n’est null
521 le culte des morts », dit-il après Auguste Comte. Je le pense aussi. (Voyez le racisme.) Mais pour le chrétien, « la foi e
522 om de sa foi : tout ce qui n’est que sociologie. ( Je ne dis pas que ce soit négligeable.) Pour situer la sagesse d’Alain,
523 ui faisait les demandes et les réponses. 51. On me dira que mon point de vue est partiel, dogmatique, confessionnel, etc
524 es demandes et les réponses. 51. On me dira que mon point de vue est partiel, dogmatique, confessionnel, etc. Bien sûr. J
525 artiel, dogmatique, confessionnel, etc. Bien sûr. Je le donne pour tel. Il faut des repères pour juger. La critique modern
33 1939, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Don Juan (juillet 1939)
526 el… S’il le trouvait, ce « type » de femme rêvé ! J’ imagine cette métamorphose. On le voit interrompre sa course, changer
527 dernier — d’où l’idée du Retour éternel. ⁂ Comme je parlais de ces choses à une amie : « J’ai connu, me dit-elle, un homm
528 . ⁂ Comme je parlais de ces choses à une amie : «  J’ ai connu, me dit-elle, un homme marié avec lequel ayant été coquette e
529 parlais de ces choses à une amie : « J’ai connu, me dit-elle, un homme marié avec lequel ayant été coquette en vain, il m
530 marié avec lequel ayant été coquette en vain, il me dit en me quittant : “Je vous ajoute à ma liste des mille e tre”. » C
531 c lequel ayant été coquette en vain, il me dit en me quittant : “Je vous ajoute à ma liste des mille e tre”. » C’étaient l
532 été coquette en vain, il me dit en me quittant : “ Je vous ajoute à ma liste des mille e tre”. » C’étaient les femmes qu’il
533 ain, il me dit en me quittant : “Je vous ajoute à ma liste des mille e tre”. » C’étaient les femmes qu’il n’avait pas eues
34 1939, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). La Poésie scientifique en France au xvie siècle, par Albert-Marie Schmidt (septembre 1939)
534 our en extraire un matériel encore utilisable. Il me semble d’ailleurs que ce travail apporte plus d’incitations aux créat
35 1940, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Au sujet du Journal d’André Gide (janvier 1940)
535 mble. Pour qualifier cette harmonie involontaire, je ne puis évoquer que l’exemple de Goethe, dont ce n’est pas telle œuvr
536 dont ce n’est pas telle œuvre ou telle action que j’ aime, mais bien le paysage vital, avec ses temps voilés et ses soleils
537 n qu’il est toujours trop facilement intéressant. Je ne le conçois, comme œuvre d’art, que limité au récit d’une crise, et
538 note lui-même dès 1924 : « Si plus tard on publie mon journal, je crains qu’il ne donne de moi une idée assez fausse. Je ne
539 dès 1924 : « Si plus tard on publie mon journal, je crains qu’il ne donne de moi une idée assez fausse. Je ne l’ai point
540 n publie mon journal, je crains qu’il ne donne de moi une idée assez fausse. Je ne l’ai point tenu durant les longues pério
541 ains qu’il ne donne de moi une idée assez fausse. Je ne l’ai point tenu durant les longues périodes d’équilibre, de santé,
542  ; mais bien durant ces périodes de dépression où j’ avais besoin de lui pour me ressaisir, et où je me montre dolent, geig
543 iodes de dépression où j’avais besoin de lui pour me ressaisir, et où je me montre dolent, geignant, pitoyable. » « Si plu
544 où j’avais besoin de lui pour me ressaisir, et où je me montre dolent, geignant, pitoyable. » « Si plus tard on publie mon
545 j’avais besoin de lui pour me ressaisir, et où je me montre dolent, geignant, pitoyable. » « Si plus tard on publie mon jo
546 , geignant, pitoyable. » « Si plus tard on publie mon journal… » Voilà qu’il y pourvoit lui-même. Et cependant, « donner de
547 el pourrait encore passer pour une pose raffinée. J’ imaginerais plutôt que Gide est fasciné par l’obstacle qu’il veut évit
548 s plus importantes à dire sont celles que souvent je n’ai pas cru devoir dire — parce qu’elles me paraissaient trop éviden
549 vent je n’ai pas cru devoir dire — parce qu’elles me paraissaient trop évidentes. » Si sincère qu’on se veuille en relatan
550 Gide lui-même, à ce jeu, ne s’est pas épargné : «  Je ne suis qu’un petit garçon qui s’amuse — doublé d’un pasteur protesta
551 ci qui va fort loin dans la critique du genre : «  Je ne pense pas qu’il y ait grand profit à tirer de ces examens de consc
552 parfaire ce qui n’a pas été vécu, ou mal vécu. («  J’ avais besoin de lui pour me ressaisir ».) La vie réelle n’y figure sou
553 vécu, ou mal vécu. (« J’avais besoin de lui pour me ressaisir ».) La vie réelle n’y figure souvent qu’à la manière dont e
554 tique datée du 5 janvier 1902.) ⁂ Mais voici qu’à mon tour je succombe au désir de marquer les seules différences, oubliant
555 ée du 5 janvier 1902.) ⁂ Mais voici qu’à mon tour je succombe au désir de marquer les seules différences, oubliant ce qui
556 Goethe encore se voulait peintre (mais Gide est, je crois, plus doué). On l’y découvre enfin, et cela me paraît nouveau,
557 crois, plus doué). On l’y découvre enfin, et cela me paraît nouveau, constamment occupé de problèmes religieux. Mais d’une
558  » de Gide est chrétien dans ses déterminations ? Je crois qu’on s’est trop laissé prendre à sa perpétuelle polémique cont
559 s de Gide sur la Réforme. (Il la confond souvent, me semble-t-il, avec l’image courante et fausse d’un Calvin inhumain, pr
560 onversion, ou de la conversion trop « facile ». «  Je ne suis ni protestant ni catholique, je suis chrétien tout simplement
561 cile ». « Je ne suis ni protestant ni catholique, je suis chrétien tout simplement. » Position caractéristique du protesta
562 béral tel qu’il se développa au siècle dernier. «  Je l’ai souvent dit à Claudel : Ce qui me retient [d’entrer dans l’églis
563 dernier. « Je l’ai souvent dit à Claudel : Ce qui me retient [d’entrer dans l’église], ce n’est pas la libre pensée, c’est
564 qu’individualiste, ou même rationaliste ? Certes, je m’en voudrais de critiquer une exigence d’honnêteté qui rappelle si f
565 individualiste, ou même rationaliste ? Certes, je m’ en voudrais de critiquer une exigence d’honnêteté qui rappelle si fort
566 n sentiment… » Kierkegaard, lui aussi, répétait : je ne suis pas chrétien. Mais c’était par désir de sauver une conception
567 e protestante — écrit Gide —, ces mots n’ont pour moi aucun sens. Je ne reconnais point d’autorité, et si j’en reconnaissai
568 écrit Gide —, ces mots n’ont pour moi aucun sens. Je ne reconnais point d’autorité, et si j’en reconnaissais une, ce serai
569 cun sens. Je ne reconnais point d’autorité, et si j’ en reconnaissais une, ce serait celle de l’Église » (donc de Rome). Al
570 t, et même chez certains protestants. Tout ce que je me sens le droit de dire ici, c’est que la Réforme a rejeté les préte
571 et même chez certains protestants. Tout ce que je me sens le droit de dire ici, c’est que la Réforme a rejeté les prétenti
572 nfiniment complexes (tel le communisme, naguère), je pense qu’on le peut expliquer par une certaine défiance d’artiste à l
573 et de l’information méthodique. C’est par là que je sens le mieux la distance qui sépare de la sienne ma génération litté
574 sens le mieux la distance qui sépare de la sienne ma génération littéraire. Notre culture est beaucoup plus philosophique
575 . Notre culture est beaucoup plus philosophique — je simplifie — que littéraire. Non point par préférence, loin de là. Mai
576 nous courons tous plus ou moins. À cet égard, il m’ apparaît que la leçon de Gide, pour ceux de mon âge, est moins urgente
577 il m’apparaît que la leçon de Gide, pour ceux de mon âge, est moins urgente dans l’ordre de l’éthique, que dans celui de l
578 virement dans les générations qui nous suivront : je prévois le jour où nos cadets nous opposeront l’exemple du probe adve
36 1951, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Un complot de protestants (novembre 1951)
579 in 39 où dans le hall de la rue Sébastien-Bottin, j’ étais en train de téléphoner quand je le vois descendre l’escalier. Je
580 tien-Bottin, j’étais en train de téléphoner quand je le vois descendre l’escalier. Je parle en le suivant d’un œil. Il s’a
581 téléphoner quand je le vois descendre l’escalier. Je parle en le suivant d’un œil. Il s’arrête, il paraît attendre. Je pos
582 uivant d’un œil. Il s’arrête, il paraît attendre. Je pose le récepteur et nous sortons. Nous voici sur un banc du boulevar
583 evard Saint-Germain. Les autos passent tout près. Je l’entends dire, dans le bruit : « Où habitez-vous maintenant ? » Je c
584 dans le bruit : « Où habitez-vous maintenant ? » Je crie que je l’ignore, devant quitter demain la maison de Charles Du B
585 it : « Où habitez-vous maintenant ? » Je crie que je l’ignore, devant quitter demain la maison de Charles Du Bos qui rentr
586 aison de Charles Du Bos qui rentre d’Amérique, et je viens d’apprendre au téléphone que « cela ne va plus » pour un appart
587 appartement promis. Il dit encore (mais vraiment j’ entends mal) : « Vous cherchez un studio ? » — « Oui, c’est exactement
588 un studio ? » — « Oui, c’est exactement ce qu’il me faut. » Il a l’air étonné, puis amusé. Et, soudain, en se levant : « 
589 voir de ce pas, voulez-vous ? » Alors, seulement, je comprends qu’il avait dit : « J’ai un studio… » Le lendemain matin, t
590 lors, seulement, je comprends qu’il avait dit : «  J’ ai un studio… » Le lendemain matin, très tôt, nous arrivons chez lui,
591 endemain matin, très tôt, nous arrivons chez lui, ma femme et moi. Le studio est vaste et plaisant, agrémenté d’un escalie
592 in, très tôt, nous arrivons chez lui, ma femme et moi . Le studio est vaste et plaisant, agrémenté d’un escalier conduisant
593 é si soudainement, dit-il, c’est inquiétant. Cela me ferait presque croire à la Providence !… Mais dites-moi, Rougemont, q
594 rait presque croire à la Providence !… Mais dites- moi , Rougemont, quand on saura que vous habitez ici, qu’est-ce qu’on va d
595 e qu’on va dire ?… » avec un sourire inquisiteur. Je me garde de répondre. Finalement, Gide en riant : « On va dire que c’
596 u’on va dire ?… » avec un sourire inquisiteur. Je me garde de répondre. Finalement, Gide en riant : « On va dire que c’est
597 n s’annonçant par un profond « Allô ! Allô ! » et me demandera de passer chez lui pour quelques instants. Et, chaque fois,
598 e théologiques, comme si c’était précisément pour m’ en parler qu’il m’offrait l’hospitalité. Saint Paul reste sa bête noir
599 mme si c’était précisément pour m’en parler qu’il m’ offrait l’hospitalité. Saint Paul reste sa bête noire. Et l’idée même
600 e songe-t-il qu’à la morale ? « En somme, lui dis- je , vous vous en tenez au protestantisme libéral de la fin du xixe sièc
601 t assez cela, la position du pasteur Roberty, que j’ aimais bien. » Vite lassé par les débats d’idées, il semble répugner à
602 nsée qui par le style d’abord ne l’ait séduit. Il me parle souvent des Variations de Bossuet, avec une vive admiration, ma
603 s de sa recherche. Sur un seul de ces entretiens, j’ ai pris des notes. C’est celui du 20 juin. J’avais eu l’impression ce
604 ens, j’ai pris des notes. C’est celui du 20 juin. J’ avais eu l’impression ce jour-là que Gide passait la prudence dans l’a
605 à que Gide passait la prudence dans l’aveu, qu’il me disait ce qu’il ne pouvait dire, et n’a peut-être jamais répété. La c
606 Occident , qu’il est en train de lire, et dont il me déclare, à ma profonde surprise, qu’il y trouve une explication des «
607 il est en train de lire, et dont il me déclare, à ma profonde surprise, qu’il y trouve une explication des « erreurs de sa
608 rien de charnel ne s’y mêlait. « C’est ainsi que je me suis complètement blousé », répète-t-il en accentuant, circonflexa
609 en de charnel ne s’y mêlait. « C’est ainsi que je me suis complètement blousé », répète-t-il en accentuant, circonflexant
610 pparemment contradictoires avec ce qu’il vient de me dire : « J’ai trop longtemps gardé cette illusion que la femme n’avai
611 ontradictoires avec ce qu’il vient de me dire : «  J’ ai trop longtemps gardé cette illusion que la femme n’avait pas besoin
612 oin du commerce physique, autant que nous. Hélas, je ne voyais pas clair. On se trompe ainsi, et les conséquences. J’ai ét
613 s clair. On se trompe ainsi, et les conséquences. J’ ai été assez bête pour croire cela ! Il ne faut jamais croire ce qu’el
614 Il a pris une expression angoissée et crispée. «  Je vous parle très sincèrement, je vous parle de choses qui ont joué un
615 sée et crispée. « Je vous parle très sincèrement, je vous parle de choses qui ont joué un rôle très grave dans ma vie. » (
616 le de choses qui ont joué un rôle très grave dans ma vie. » (Frappé par le ton de confession, par le ton « c’était mal » d
617 subitement, après un silence : « C’est ainsi que j’ ai commis, à cette époque — je parle de mon premier séjour en Afrique,
618 : « C’est ainsi que j’ai commis, à cette époque — je parle de mon premier séjour en Afrique, — une terrible erreur d’aigui
619 nsi que j’ai commis, à cette époque — je parle de mon premier séjour en Afrique, — une terrible erreur d’aiguillage ! » Pui
620 er point à se contraindre. Les jours suivants, il me donne à lire, par paquets, les épreuves de son Journal en cours d’imp
621 son Journal en cours d’impression, et sur lequel je vais écrire un article pour la NRF. Il insiste comme il sait insister
622 intimement sa femme — « le seul être, dit-il, que j’ ai vraiment aimé » — tous ces passages ont été coupés. On les lira plu
623 ns deux cahiers gris d’écolier. Un soir, il vient m’ avertir qu’il compte s’absenter pour huit jours. Mais son studio me re
624 ompte s’absenter pour huit jours. Mais son studio me restera ouvert ; que j’y vienne prendre tous les livres dont je pourr
625 it jours. Mais son studio me restera ouvert ; que j’ y vienne prendre tous les livres dont je pourrais avoir besoin… Dès le
626 ert ; que j’y vienne prendre tous les livres dont je pourrais avoir besoin… Dès le lendemain, j’y pénètre, bien sûr. Des h
627 dont je pourrais avoir besoin… Dès le lendemain, j’ y pénètre, bien sûr. Des housses couvrent les meubles, une sorte de vi
628 bien en évidence, un fort cahier gris d’écolier. J’ ai lu les premières lignes, pour vérifier, et j’ai vite refermé la cou
629 . J’ai lu les premières lignes, pour vérifier, et j’ ai vite refermé la couverture. Pudeur, ou répugnance à donner dans le
630 piège ? Les deux sans doute. Combien de fois l’ai- je revu après la guerre ? Souvent, en somme, et dans les lieux les plus
631 u », près de Lausanne, à Neuchâtel, à Berne. Mais je n’ai plus souvenir d’aucune conversation qui mérite d’être rapportée,
632 ’aucune conversation qui mérite d’être rapportée, j’ entends : qui modifie le moins du monde l’image que l’on connaît de lu
633 ndant un déjeuner, il s’enquit avec insistance de mon opinion sur Strindberg, et je lui fis une réponse assez vague, m’éton
634 avec insistance de mon opinion sur Strindberg, et je lui fis une réponse assez vague, m’étonnant surtout de la question. H
635 trindberg, et je lui fis une réponse assez vague, m’ étonnant surtout de la question. Huit jours plus tard, il recevait le
636 apiers. Jeu de télépathie, plutôt que de hasard.) J’ avais écrit, dernière question : « Qu’est-ce que le style ? » Catherin
637 a des bouts-rimés. Il y excellait. ⁂ Peu d’hommes m’ ont donné l’impression que le problème religieux existait dans leur vi
638 les uns ; et chez les autres résolu, croient-ils. Je ne dis pas qu’il torturait Gide, hors quelques crises dont nous avons
639 utres jugent profond. Son défaut de sens poétique me paraît presque inégalé depuis Montaigne. (Je ne nie pas un instant so
640 ique me paraît presque inégalé depuis Montaigne. ( Je ne nie pas un instant son lyrisme.) Et c’est ainsi qu’il réussit à re
641 e mystère. Réduisait-il la religion à la morale ? Je pense plutôt que la morale était le lieu de son vrai drame, et qu’il
642 n l’accueil du mystère, ni l’adhésion à un credo. J’ en donne la preuve : avoir la foi sans être saint lui paraissait la tr
643 dis qu’il eût admis la sainteté sans foi. Que dis- je  ? Il l’a souhaitée expressément. Mais comment définir un saint qui ne
644 , même s’il en refusait les dimensions profondes. J’ ai dit qu’il se méfiait d’une certaine « profondeur » qui mesure parfo
645 une sobriété stricte. Ses connaissances bibliques me stupéfiaient. L’usage qu’il en faisait me semblait décevant. Là où Cl
646 bliques me stupéfiaient. L’usage qu’il en faisait me semblait décevant. Là où Claudel prend son élan pour caramboler des s
647 s hors de lui, et n’est pas explicable sans lui. ( Je ne dis pas qu’elle soit chrétienne pour autant.) Gide était individua
648 ire des mythes, n’a cessé d’occuper sa pensée. Et j’ ignore si c’est mal ou bien : je constate simplement le phénomène. Je
649 per sa pensée. Et j’ignore si c’est mal ou bien : je constate simplement le phénomène. Je ne tiens pas la foi pour une ver
650 al ou bien : je constate simplement le phénomène. Je ne tiens pas la foi pour une vertu plus que l’absence de foi pour une
651 c’est pourquoi il est écrit : « Ne jugez pas ! » J’ avoue que je comprends mal, ou plutôt que je réprouve, ces discussions
652 uoi il est écrit : « Ne jugez pas ! » J’avoue que je comprends mal, ou plutôt que je réprouve, ces discussions sur la croy
653 s ! » J’avoue que je comprends mal, ou plutôt que je réprouve, ces discussions sur la croyance ou non d’un homme connu, mu
654 demain, ne sera-t-il pas celui qui osera dire : «  Je ne crois pas ! » quand l’État contre l’homme invoquera les Nécessités
655 doute, plus qu’il n’est de lumière sans ombre. Et je n’entends pas dire que Gide fut un croyant, mais il reste un douteur
37 1957, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). La découverte du temps ou l’aventure occidentale (mars 1957)
656 par la nature même des péripéties de l’Aventure, je détache ici le moment de l’exploration du temps, mère de l’Histoire.
657 dans la vue que le Moyen Âge, loin de représenter je ne sais quel « âge d’or du christianisme » — comme on l’a ressassé de
658 volution introduit dans le monde par l’Évangile. ( J’ ai dit plus haut que le Moyen Âge fut la période « orientale » de l’Eu
659 sque un « jour de Brahma » dans le cosmos actuel. Je dis « cosmos actuel », car de nombreux savants nous parlent déjà d’un
660 e suite de conséquences qui jouent en fait — mais je ne pense pas en droit — contre l’idée occidentale de l’homme. L’impor
661 e l’Histoire », ou ce n’est rien qui vaille… Suis- je dans l’Histoire ? Es-tu dans l’Histoire ? Sont-ils dans l’Histoire ?
662 profondément typique de l’Occident au xxe siècle me semble incontestable en tant que diagnostic. Mais comment la situer d
663 ve plus » et démissionne. Que l’Histoire décide à ma place, de toute façon je n’y puis rien. Que le dictateur ou le Parti
664 Que l’Histoire décide à ma place, de toute façon je n’y puis rien. Que le dictateur ou le Parti décrètent le vrai sens de
665 e dictateur ou le Parti décrètent le vrai sens de ma vie, de toute façon je ne pourrais plus le distinguer. Je ne suis plu
666 décrètent le vrai sens de ma vie, de toute façon je ne pourrais plus le distinguer. Je ne suis plus responsable, mais c’e
667 de toute façon je ne pourrais plus le distinguer. Je ne suis plus responsable, mais c’est l’Évolution, et je n’ai plus d’a
668 suis plus responsable, mais c’est l’Évolution, et je n’ai plus d’autre choix que de m’en dire l’agent. Cet abandon de l’êt
669 l’Évolution, et je n’ai plus d’autre choix que de m’ en dire l’agent. Cet abandon de l’être entier à la Maya, sans plus rêv
670 rme du monde, sans espoir de salut individuel58 — je pressens qu’ils trahissent un dépit amoureux au moins autant qu’un fl
671 rs, un sadisme. Dans cette abjecte humiliation du moi , l’orgueil fou trouve un alibi. L’Évolution fatale est en réalité cel
672 le temps ne va pas apporter la négation de ce que je suis, de ce que j’attends, de mes croyances ou de mon incroyance, ou
673 apporter la négation de ce que je suis, de ce que j’ attends, de mes croyances ou de mon incroyance, ou même de ces raisons
674 gation de ce que je suis, de ce que j’attends, de mes croyances ou de mon incroyance, ou même de ces raisons de désespérer
675 suis, de ce que j’attends, de mes croyances ou de mon incroyance, ou même de ces raisons de désespérer auxquelles je tiens
676 , ou même de ces raisons de désespérer auxquelles je tiens contre le monde et contre Dieu — la négation de moi-même et du
677 ntre Dieu — la négation de moi-même et du sens de ma vie. Anticiper l’avenir, c’est le dernier refus de l’aventure du temp
678 usque, saura-t-il en tirer une liberté nouvelle ? Je céderais à la tentation que j’ai décrite si j’essayais d’anticiper su
679 liberté nouvelle ? Je céderais à la tentation que j’ ai décrite si j’essayais d’anticiper sur nos lendemains, et ceux-ci ne
680  ? Je céderais à la tentation que j’ai décrite si j’ essayais d’anticiper sur nos lendemains, et ceux-ci ne seront point ma
38 1961, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). La personne, l’ange et l’absolu, ou le dialogue Occident-Orient (avril 1961)
681 sa définition. S’il est vrai que l’Orient nie le moi , qui est une valeur centrale pour l’Occident, il doit en résulter d’i
682 mais dans quelle mesure est-ce vrai ? Quel est le moi qui s’affirme d’une part et quel est le moi qu’on nie de l’autre ? Es
683 st le moi qui s’affirme d’une part et quel est le moi qu’on nie de l’autre ? Est-ce bien le même ? La Personne Le chr
684 ù la définition de la personne humaine ou du vrai moi , reprise et précisée par toutes les grandes époques de la théologie e
685 exemplaire de l’espèce. Pour saint Paul, le vrai moi est l’homme nouveau, « appelé » par un Dieu personnel, donc créé par
686 dans l’individu naturel. Pour Descartes, le vrai moi c’est « l’âme », mais il s’agit d’une âme tout intellectuelle, dont «
687 ntièrement distincte du corps. Avec Kant, le vrai moi , nouménal, s’oppose au moi phénoménal, et reprend le nom de personne.
688 ps. Avec Kant, le vrai moi, nouménal, s’oppose au moi phénoménal, et reprend le nom de personne. Chez Renouvier, la personn
689 rd’hui, dont on a pu penser « qu’elle n’aborde le moi que pour le disjoindre60 », il me semble plutôt qu’elle élague le vra
690 le n’aborde le moi que pour le disjoindre60 », il me semble plutôt qu’elle élague le vrai moi, qu’elle en disjoint ce qui
691 e60 », il me semble plutôt qu’elle élague le vrai moi , qu’elle en disjoint ce qui appartient en propre au collectif (l’inco
692 oir d’intégration de l’être. Loin de dissocier le moi , les recherches psychologiques du xxe siècle nomment et dénoncent le
693 s » l’opposition paulinienne des « deux hommes en moi  » : le naturel tyrannisant (et tyrannisé par la Loi) et le spirituel
694 euse conscience de soi — reste que la croyance au moi distinct et le recours à la « valeur absolue de la personne » sont à
695 l’atteste enfin notre notion de l’amour, — à quoi j’ entends venir plus loin. L’ange Quelle est cette part de la pers
696 l’Ange pour nos psychologues ? Une projection du moi individuel ou collectif. Pour les sages de l’Iran, il est ce moi. Bar
697 ou collectif. Pour les sages de l’Iran, il est ce moi . Barakat, juif passé à l’islam, écrit en 1165 : « … pour chaque âme i
698 u’ils appelaient Nature parfaite. » C’est le vrai moi , c’est l’Ange. « Il ne s’agit plus du simple messager transmettant le
699 terrestre : c’est la rencontre de l’âme avec son moi céleste à l’entrée du pont Chinvat. Dans un paysage nimbé de la Lumiè
700 son entrée, se dresse devant l’âme sa Dâenâ, son moi céleste, jeune femme d’une beauté resplendissante et qui lui dit : —
701 e d’une beauté resplendissante et qui lui dit : — Je suis toi-même ! Mais si l’homme sur la Terre a maltraité son moi, au
702 me ! Mais si l’homme sur la Terre a maltraité son moi , au lieu de la Fravarti, c’est une apparition monstrueuse et défiguré
703 son état déchu. La « rencontre aurorale » avec le moi céleste figure donc une pesée des âmes. Le mazdéisme, comme plus tard
704 ? Toute réalité dernière est personnelle. Le vrai moi est ailleurs, mais son drame ici-bas. L’absolu, ou la négation du
705 son drame ici-bas. L’absolu, ou la négation du moi Les peuples des régions que l’Europe nomme Asie diffèrent bien plu
706 e impliquer comme allant de soi la croyance en un moi reconnaissable au travers de ses vies successives. Car si le moi n’ex
707 ble au travers de ses vies successives. Car si le moi n’existe pas, qu’est-ce qui transmigre64 ? Mais ce moi, cet ego, cett
708 ’existe pas, qu’est-ce qui transmigre64 ? Mais ce moi , cet ego, cette entité distincte, voilà précisément ce que les doctri
709 e de la personne qu’ils opposent leur idée du non- moi . Le vrai malentendu se serait-il instauré entre eux et nous ? Entre c
710 ensent que nous croyons lorsque nous affirmons le moi réel, et cela que nous pensons qu’ils croient en le niant ? Nous avan
711 ntaires aux Vedas, il apparaît que la négation du moi porte d’abord contre le moi « phénoménal », c’est-à-dire contre l’hom
712 ît que la négation du moi porte d’abord contre le moi « phénoménal », c’est-à-dire contre l’homme naturel, exemplaire anima
713 ui est la condition de leur accession à leur vrai moi spirituel, celui qui doit ressusciter en corps glorieux. Védantistes,
714 sées sont souffrantes Toutes les choses sont sans moi .68) Si D. T. Suzuki peut écrire après cela : « On le voit, l’expérie
715 ner d’avance, dirions-nous, aux exigences du vrai moi , qui est notre répondant céleste. Et faut-il qu’il existe et qu’il so
716 e. Et faut-il qu’il existe et qu’il soit fort, ce moi qu’on répute illusoire, pour qu’un des buts majeurs des méthodes spir
717 idualité, mais non un être pur. — Ô Nagasena, dis- moi s’il existe rien de semblable à l’âme ? — Il n’y a rien de semblable
718 ui n’est pas personnel et se joue à travers notre moi . Ainsi tout l’Orient des doctrines, — et en même temps l’Orient des p
719 valeur religieuse signifie l’absolue négation du moi  », ajoute trois pages plus loin « Nous devenons vraies personnes dans
720 même Chang Chen-Chi qui cite ce koan : Parfois, j’ arrache la personne mais sauve l’objet. Parfois j’arrache l’objet, mai
721 j’arrache la personne mais sauve l’objet. Parfois j’ arrache l’objet, mais sauve la personne. Parfois, j’arrache en même te
722 arrache l’objet, mais sauve la personne. Parfois, j’ arrache en même temps l’objet et la personne. Parfois, je n’arrache ni
723 he en même temps l’objet et la personne. Parfois, je n’arrache ni l’objet ni la personne. Le même commente : « Supprimer
724 de ce siècle, il semblerait que les négations du moi selon les écoles orientales correspondent simplement aux névroses de
725 « dysfonctionnelles » qui menacent l’intégrité du moi et qui nient ou détruisent la personne… Mais l’Oriental sourit et nou
726 u monde, c’est son action qui configure l’idée du moi que nous nous faisons, et cette idée du moi révèle l’amour, comme la
727 ée du moi que nous nous faisons, et cette idée du moi révèle l’amour, comme la structure de l’atome traduit certaines propr
728 la forme des rapports qu’elles imaginent entre le moi naturel et le vrai moi, c’est-à-dire selon les langages, entre les ph
729 u’elles imaginent entre le moi naturel et le vrai moi , c’est-à-dire selon les langages, entre les phénomènes et le noumène,
730 réexistants ; ni tout à fait des « deux hommes en moi  » dont la lutte fait gémir saint Paul ; mais, préalablement à tout ju
731 tension permanente entre l’individu et le « vrai moi  ». (L’individu n’est pas le mal en soi : il ne devient mauvais que da
732 -à-dire se refuse à l’amour. Et de même le « vrai moi  » n’est pas le bien en soi, car il peut devenir un monstre.) Pour aim
733 st le rapport positif entre l’individu et le vrai moi . Le second commandement qui résume toute la Loi et les Prophètes : « 
734 prochain comme toi-même », suppose évidemment un moi duel, au sein duquel l’amour s’instaure d’une manière telle que s’aim
735 -même, l’homme naturel s’ouvre à l’action du vrai moi spirituel et se laisse transformer, réorienter par lui. C’est le vrai
736 se transformer, réorienter par lui. C’est le vrai moi qui aime, qui est l’agent de l’amour. Ce vrai moi seul peut aimer le
737 moi qui aime, qui est l’agent de l’amour. Ce vrai moi seul peut aimer le prochain, parce que seul il discerne en l’autre le
738 t donné les trois religions abrahamiques, le vrai moi est toujours suscité par l’Amour même : « Dieu nous a aimés le premie
739 er pour l’autre aimé, c’est d’abord sacrifier son moi à son vrai moi, — l’ordonner à sa vocation. Ou c’est encore se sacrif
740 aimé, c’est d’abord sacrifier son moi à son vrai moi , — l’ordonner à sa vocation. Ou c’est encore se sacrifier tel que l’o
741 » transfigurante. Ce modèle de l’amour et du vrai moi instaure le normal, le sublime, et la problématique de l’Occident chr
742 ance ascétique, avec une complaisance croissante. Je sais bien que la haine est l’envers de l’amour, mais comment l’amour
743 it cesse de la diriger dans son élan vers le vrai moi  ? Elle voulait l’ange. Il lui reste la nostalgie d’une fuite hors du
744 ge. Il lui reste la nostalgie d’une fuite hors du moi naturel. Désormais le vieil homme est jugé : n’ayant pu l’entraîner a
745 ps, vu comme signe et symbole de la « prison » du moi . Et c’est que l’âme avait rêvé d’une métamorphose angélique, quand l’
746 esprit lui demandait seulement d’ordonner tout le moi terrestre et temporel à la vocation de l’amour. Mais celui qui se hai
747  vil » et une âme qui se veut ange —, non le vrai moi dans son autonomie. Si le corps lui paraît désirable, il sera parfois
748 r confondre avec les exigences de la mort au faux- moi , l’instinct de mort… Contre cet ascétisme non-transfigurant, Nietzsch
749 Kierkegaard. Tout amour véritable procède du vrai moi et se dirige vers le vrai moi de l’autre. Mais il peut arriver qu’il
750 ble procède du vrai moi et se dirige vers le vrai moi de l’autre. Mais il peut arriver qu’il s’arrête en chemin, que son él
751 mais de la mystique des soufis, et pour cause. Si je les fais intervenir ici, c’est à titre d’évocation d’une dimension vi
752 ciel » des archétypes : ainsi la dualité ego-vrai moi y devient celle de l’âme et de son ange. Pour situer dans son vrai cl
753 e soi-même », — comme étant née du même amour qui m’ a créé. « (Dieu) est celui qui dans chaque être aimé se manifeste au r
754 e, la structure des relations entre Dieu, le vrai moi et le prochain, reste exactement comparable, comme le sont les trois
755 serait que l’image sensible, — et c’est pourquoi j’ ai osé dire que Tristan n’aimait pas Iseut — cette passion n’est-elle
756 rtis du mazdéisme, les figures angéliques du vrai moi dans le mysticisme soufi et même la « rencontre aurorale » de l’âme e
757 t du bouddhisme. S’il est vrai que « la notion de Moi n’a d’accès que dans la pensée des sots », comme le dit un texte tibé
758 e : l’Asie métaphysique ne connaît pas l’amour, —  j’ entends l’amour de Dieu, de soi et du prochain, l’amour-passion, et mê
759 our-passion, et même l’amour matrimonial. Mais on me dira que l’Asie n’est pas toute spirituelle, et que la vie ne s’en ti
760 uvera peu d’exemples convaincants — pour ma part, je n’en connais point — de ce que nous baptisons amour-passion, et l’on
761 u’une infinie bibliographie rameutée à l’appui de mes dires, cette notation plaisante dans un roman moderne, dont l’auteur
762 l’auteur se trouve être un brahmane orthodoxe : «  J’ avais vécu en Europe, j’avais épousé une Européenne : apparemment, cel
763 un brahmane orthodoxe : « J’avais vécu en Europe, j’ avais épousé une Européenne : apparemment, cela me donnait l’invraisem
764 j’avais épousé une Européenne : apparemment, cela me donnait l’invraisemblable privilège de comprendre les choses de l’amo
765 érique sérieusement éperdus de sagesse asiatique, me paraît appeler deux remarques, à vrai dire d’inégale importance, et q
766 répétées du contraire (comme la non-existence du moi ). Illustrons cela. L’idée de vocation personnelle accomplie aux dépen
767 toi-même ne diffèrent que par les attachements du moi phénoménal, tandis qu’ils participent du même Soi véritable, qui seul
768 mal par le bien », dit le Bouddha. « Que ceux qui me calomnient, me nuisent, me raillent, et tous les autres, obtiennent l
769  », dit le Bouddha. « Que ceux qui me calomnient, me nuisent, me raillent, et tous les autres, obtiennent l’illumination s
770 ouddha. « Que ceux qui me calomnient, me nuisent, me raillent, et tous les autres, obtiennent l’illumination spirituelle »
771 histe « consiste à transformer Éros en Agapè »90. Je répète que tout cela n’est pas contradictoire, dans une philosophie s
772 i est en elle.91 En présence d’une telle phrase, j’ éprouve d’abord ceci : le sentiment d’une immédiate et vive reconnaiss
773 e d’un savoir de l’amour qu’il vit. N’importe qui m’ avertira que le Soi de l’Inde n’est pas le vrai Dieu des chrétiens, qu
774 i est personnel. On connaît les définitions. Mais je retrouve ici mon expérience. C’est seulement à partir de là que nos q
775 On connaît les définitions. Mais je retrouve ici mon expérience. C’est seulement à partir de là que nos questions devienne
776 écrire tout un livre. (Mais si c’était celui que je suis en train d’écrire ? Et qui, précisément, ici, touche à sa fin ?)
777 re ? Et qui, précisément, ici, touche à sa fin ?) Je disais que l’amour vrai, c’est discerner dans l’autre — pour l’avoir
778 ’avoir reconnu tout d’abord en soi-même — le vrai moi , sujet de l’amour, et l’aider à prendre conscience de ce qu’il est ou
779 ère se voie en lui, mais qu’en même temps le vrai moi de l’amant s’y découvre, autrement éclairé, et par là subtilement cha
780 our mutuel. L’expérience est la même, ou du moins je la sens telle. Mais la lumière ? Est-ce le Nom qu’on lui donne qui di
781 re, à son corps ou à son esprit — ou encore à son moi total non reconnu, non respecté dans son autonomie. Ici, le brahmane
782 rreurs que tu craignais sont illusoires. Comme le moi . — La vue juste distingue et juge, mais ne peut pas nier le trouble.
783 t juge, mais ne peut pas nier le trouble. Dans ce moi peu ou point différencié que la vie nous offre, avec son programme gé
784 monde ne doit pas être refusé mais dissous.92 — Je veux voir l’autre en sa réalité, qui est unique. J’aime en elle à la
785 veux voir l’autre en sa réalité, qui est unique. J’ aime en elle à la fois ce que je vois et ce qui fait que je la vois un
786 , qui est unique. J’aime en elle à la fois ce que je vois et ce qui fait que je la vois unique : ce vrai moi pressenti par
787 elle à la fois ce que je vois et ce qui fait que je la vois unique : ce vrai moi pressenti par l’amour seul, et qui est e
788 is et ce qui fait que je la vois unique : ce vrai moi pressenti par l’amour seul, et qui est elle-même. Tu dis le Soi, ce n
789 ne vois pas la femme que tu crois aimer. — Quand je saurai aimer le Soi en elle, je ne serai plus moi, elle ne sera plus
790 is aimer. — Quand je saurai aimer le Soi en elle, je ne serai plus moi, elle ne sera plus elle, et les dieux mêmes me serv
791 je saurai aimer le Soi en elle, je ne serai plus moi , elle ne sera plus elle, et les dieux mêmes me serviront. Tout et
792 s moi, elle ne sera plus elle, et les dieux mêmes me serviront. Tout et tous L’Orient voudrait exténuer, « émacier l
793 octrines d’extinction n’ont pas tué l’illusion du moi  ; au contraire, ce moi sans valeur est en train de faire valoir ses r
794 ’ont pas tué l’illusion du moi ; au contraire, ce moi sans valeur est en train de faire valoir ses revendications, par plus
795 e assez proche de C. G. Jung. Mais si Ch. Baudoin me paraît un peu trop pessimiste, de son propre point de vue, D. T. Suzu
796 occidentale. Cherchant à guérir les « maladies du moi  », elle le confirme comme entité et le renforce, loin de l’éliminer.
797  : « Faust se plaignait d’avoir deux âmes en lui. J’ ai en moi une foule d’âmes turbulentes. Et tout se passe comme dans un
798 st se plaignait d’avoir deux âmes en lui. J’ai en moi une foule d’âmes turbulentes. Et tout se passe comme dans une républi
799 comme dans une république. » À regarder ainsi le moi , on le perd assurément et par méthode. Car il est forme dominante et
800 9. Raja Rao, Le Serpent et la Corde, 1959, p. 28. Je ne saurais trop inciter mes lecteurs à lire ce beau roman autobiograp
801 la Corde, 1959, p. 28. Je ne saurais trop inciter mes lecteurs à lire ce beau roman autobiographique : la fraîcheur poétiqu
802 qui baigne l’œuvre, situe dans la réalité ce que je n’entends ici que formuler. Je ne connais rien dans la littérature qu
803 la réalité ce que je n’entends ici que formuler. Je ne connais rien dans la littérature qui confronte avec plus de tendre
804 n Asie. Lire enfin de Rudolf Kassner, Le Livre de ma Vie. Puis aller en Inde et sentir l’innombrable, le « corps magique »
805 uzuki, Mysticism : Christian and Buddhist, p. 73. Je crains que l’auteur ne vienne ici à la rencontre des catégories de L