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Les
Éléments de la grandeur humaine, par Rudolf Kassner (octobre 1931)a
2
Les Éléments de
la
grandeur humaine, par Rudolf Kassner (octobre 1931)a Si l’existenc
3
humaine, par Rudolf Kassner (octobre 1931)a Si
l’
existence — le degré d’être — se mesure au pouvoir d’incarner sa vérit
4
udolf Kassner (octobre 1931)a Si l’existence —
le
degré d’être — se mesure au pouvoir d’incarner sa vérité, le mal du s
5
être — se mesure au pouvoir d’incarner sa vérité,
le
mal du siècle c’est l’impuissance. La proie de désirs divergents qui
6
voir d’incarner sa vérité, le mal du siècle c’est
l’
impuissance. La proie de désirs divergents qui prennent rarement assez
7
sa vérité, le mal du siècle c’est l’impuissance.
La
proie de désirs divergents qui prennent rarement assez de violence po
8
olence pour nous déchirer jusqu’au salut, et dont
la
composante réelle tend vers zéro, c’est d’une philosophie de l’existe
9
réelle tend vers zéro, c’est d’une philosophie de
l’
existence personnelle qu’avant tout nous avons besoin. Kierkegaard nou
10
ut nous avons besoin. Kierkegaard nous en propose
le
type le plus efficace. Et c’est ainsi par une nécessité organique — n
11
avons besoin. Kierkegaard nous en propose le type
le
plus efficace. Et c’est ainsi par une nécessité organique — nous somm
12
nécessiteux — que son œuvre entre en action parmi
les
forces spirituelles qui orientent l’Europe d’aujourd’hui. La France n
13
ction parmi les forces spirituelles qui orientent
l’
Europe d’aujourd’hui. La France ne l’ignorera plus longtemps. Quant à
14
pirituelles qui orientent l’Europe d’aujourd’hui.
La
France ne l’ignorera plus longtemps. Quant à l’Allemagne, elle s’est
15
ui orientent l’Europe d’aujourd’hui. La France ne
l’
ignorera plus longtemps. Quant à l’Allemagne, elle s’est depuis plusie
16
. La France ne l’ignorera plus longtemps. Quant à
l’
Allemagne, elle s’est depuis plusieurs années déjà pénétrée de cette p
17
nétrée de cette philosophie, ainsi qu’en témoigne
l’
accueil fait à la pensée d’un Karl Barth, génial disciple du Danois, e
18
hilosophie, ainsi qu’en témoigne l’accueil fait à
la
pensée d’un Karl Barth, génial disciple du Danois, et dont il est gra
19
qu’on nous traduise quelques essais théologiques.
L’
œuvre de Rudolf Kassner, de moindre envergure — à cause de sa rareté e
20
s non de moindre profondeur, manifeste elle aussi
l’
emprise de l’« Existenzphilosophie » et son extrême conséquence. Dans
21
dre profondeur, manifeste elle aussi l’emprise de
l’
« Existenzphilosophie » et son extrême conséquence. Dans la mesure mêm
22
enzphilosophie » et son extrême conséquence. Dans
la
mesure même où Kassner se montre disciple de Kierkegaard, sa pensée p
23
sur des formules explicites. Même dans son essai
le
plus discursif, relativement, celui qui donne son titre au recueil, l
24
lativement, celui qui donne son titre au recueil,
les
mots-clés : mesure, forme, grandeur, ne sont guère définis que par le
25
des thèmes essentiels du préromantisme allemand,
l’
opposition de l’antique et du moderne, non du point de vue littéraire
26
ntiels du préromantisme allemand, l’opposition de
l’
antique et du moderne, non du point de vue littéraire comme on le fit
27
moderne, non du point de vue littéraire comme on
le
fit en France, mais du point de vue des valeurs vitales (problème que
28
e notre xviie siècle se devait de ne pas poser).
L’
homme antique peut atteindre la grandeur parce qu’il possède la mesure
29
de ne pas poser). L’homme antique peut atteindre
la
grandeur parce qu’il possède la mesure au sein d’un tout fini : famil
30
ue peut atteindre la grandeur parce qu’il possède
la
mesure au sein d’un tout fini : famille, dieux, nature. Il ne se rech
31
ature. Il ne se recherche pas soi-même, il vise à
la
plénitude élémentaire, définie par la loi, par son astre. L’homme chr
32
, il vise à la plénitude élémentaire, définie par
la
loi, par son astre. L’homme chrétien au contraire, l’homme qui doit ê
33
e élémentaire, définie par la loi, par son astre.
L’
homme chrétien au contraire, l’homme qui doit être surpassé, vit dans
34
oi, par son astre. L’homme chrétien au contraire,
l’
homme qui doit être surpassé, vit dans la démesure, et lorsqu’il « veu
35
ntraire, l’homme qui doit être surpassé, vit dans
la
démesure, et lorsqu’il « veut prendre mesure de lui-même, il se sent
36
let et coupable. Il est donc possible de dire que
le
péché est la mesure du démesuré, et que pour le chrétien il n’est pas
37
le. Il est donc possible de dire que le péché est
la
mesure du démesuré, et que pour le chrétien il n’est pas d’autre gran
38
e le péché est la mesure du démesuré, et que pour
le
chrétien il n’est pas d’autre grandeur ». Ainsi le chrétien existe en
39
e chrétien il n’est pas d’autre grandeur ». Ainsi
le
chrétien existe en tant que le péché crée une tension entre lui et Di
40
grandeur ». Ainsi le chrétien existe en tant que
le
péché crée une tension entre lui et Dieu. Mais le péché ne devient ré
41
le péché crée une tension entre lui et Dieu. Mais
le
péché ne devient réalité que pour le converti ; c’est donc la convers
42
t Dieu. Mais le péché ne devient réalité que pour
le
converti ; c’est donc la conversion qui figure l’acte par excellence
43
devient réalité que pour le converti ; c’est donc
la
conversion qui figure l’acte par excellence du chrétien, hors duquel
44
le converti ; c’est donc la conversion qui figure
l’
acte par excellence du chrétien, hors duquel il n’est pour lui ni mesu
45
orme, mais seulement chimères et incohérence. Que
l’
on considère en effet l’homme moderne, l’homme sans mesure naturelle :
46
mères et incohérence. Que l’on considère en effet
l’
homme moderne, l’homme sans mesure naturelle : s’il ne retrouve pas de
47
nce. Que l’on considère en effet l’homme moderne,
l’
homme sans mesure naturelle : s’il ne retrouve pas de loi interne et d
48
ne retrouve pas de loi interne et de tension par
le
péché, il n’est plus qu’un être sans destinée, un « indiscret ». « Sa
49
ndiscret est distrait, et sa distraction vient de
l’
intérieur. Il ne peut jamais sortir de son moi sans trahison et chaque
50
lque côté à un outrage, voire à une impudeur. » À
l’
opposition du Beau objectif et de l’Intéressant sentimental qui pour S
51
impudeur. » À l’opposition du Beau objectif et de
l’
Intéressant sentimental qui pour Schiller et surtout pour Schlegel sym
52
ler et surtout pour Schlegel symbolisait celle de
l’
antique et du moderne, Kassner répondrait aujourd’hui par l’opposition
53
et du moderne, Kassner répondrait aujourd’hui par
l’
opposition de la grandeur mesurée et de l’indiscrétion journalistique.
54
assner répondrait aujourd’hui par l’opposition de
la
grandeur mesurée et de l’indiscrétion journalistique. La férocité réf
55
hui par l’opposition de la grandeur mesurée et de
l’
indiscrétion journalistique. La férocité réfléchie qui préside à son a
56
deur mesurée et de l’indiscrétion journalistique.
La
férocité réfléchie qui préside à son analyse de l’indiscret nous vaut
57
a férocité réfléchie qui préside à son analyse de
l’
indiscret nous vaut une description inégalable du mal du siècle. Ici l
58
une description inégalable du mal du siècle. Ici
le
mépris ne porte aucune atteinte à la perspicacité parce qu’il est vra
59
siècle. Ici le mépris ne porte aucune atteinte à
la
perspicacité parce qu’il est vraiment souverain. Peut-être faut-il re
60
eut-être faut-il reconnaître à ce seul philosophe
le
privilège d’avoir parlé sans complicité de ce qui nous détruit : Rudo
61
ité de ce qui nous détruit : Rudolf Kassner donne
la
sensation à peu près unique en ce temps d’une pensée autoritaire. Ent
62
rlementarisme intérieur qui nous mène lentement à
l’
impuissance. (Si Kassner exprime un tourment, c’est en tant que la réa
63
Si Kassner exprime un tourment, c’est en tant que
la
réalité humaine, non sa pensée privée, est tourmentée.) Penser n’est
64
forme. Quelques pages étranges et puissantes sur
les
chimères de Notre-Dame illustrent ce réalisme de la forme, hors de qu
65
chimères de Notre-Dame illustrent ce réalisme de
la
forme, hors de quoi il n’est qu’indiscrétion, et qui livre la clef de
66
rs de quoi il n’est qu’indiscrétion, et qui livre
la
clef de la pensée de Kassner, comme aussi de son apparente obscurité1
67
il n’est qu’indiscrétion, et qui livre la clef de
la
pensée de Kassner, comme aussi de son apparente obscurité1. Il faut s
68
intellectuellement sans « réaliser ». Il faut que
les
pensées créées ne soient concevables qu’en elles-mêmes et comme à l’é
69
e soient concevables qu’en elles-mêmes et comme à
l’
état sauvage, non par une explication qui les réduise et qui les domes
70
mme à l’état sauvage, non par une explication qui
les
réduise et qui les domestique. Une pensée neuve ne saurait être compr
71
e, non par une explication qui les réduise et qui
les
domestique. Une pensée neuve ne saurait être comprise à moins d’être
72
dans sa forme — ce dont certaine clarté dispense
le
lecteur. On pourrait dire aussi que l’indiscret est celui qui se préo
73
é dispense le lecteur. On pourrait dire aussi que
l’
indiscret est celui qui se préoccupe de défendre plutôt que d’illustre
74
kegaard, le premier homme qui s’avisa de défendre
la
religion mériterait-il d’être appelé Judas numéro deux. Car il ne s’a
75
ne s’agit pas de professer une chose mais d’être
la
chose. Le rare, c’est que chez Kassner comme chez Kierkegaard, cette
76
pas de professer une chose mais d’être la chose.
Le
rare, c’est que chez Kassner comme chez Kierkegaard, cette présence s
77
mode d’une ironie qui chez d’autres serait plutôt
le
fait du détachement. Une ironie à l’intérieur des choses, qui les fou
78
erait plutôt le fait du détachement. Une ironie à
l’
intérieur des choses, qui les fouille et les purifie, une ironie née d
79
chement. Une ironie à l’intérieur des choses, qui
les
fouille et les purifie, une ironie née de la rigueur et non du scepti
80
onie à l’intérieur des choses, qui les fouille et
les
purifie, une ironie née de la rigueur et non du scepticisme2. Le dial
81
qui les fouille et les purifie, une ironie née de
la
rigueur et non du scepticisme2. Le dialogue de Laurence Sterne et du
82
ironie née de la rigueur et non du scepticisme2.
Le
dialogue de Laurence Sterne et du recteur Krooks sur Judas et la Paro
83
Laurence Sterne et du recteur Krooks sur Judas et
la
Parole est à cet égard d’une saveur particulièrement riche et complex
84
e saveur particulièrement riche et complexe. (« …
les
bavards ne tirent pas d’eux-mêmes toutes les paroles qu’ils profèrent
85
(« … les bavards ne tirent pas d’eux-mêmes toutes
les
paroles qu’ils profèrent ; ils les reçoivent des prophètes ; s’il n’y
86
x-mêmes toutes les paroles qu’ils profèrent ; ils
les
reçoivent des prophètes ; s’il n’y avait pas de prophètes, les bavard
87
des prophètes ; s’il n’y avait pas de prophètes,
les
bavards seraient peut-être des créatures très silencieuses, comme les
88
peut-être des créatures très silencieuses, comme
les
belettes ou les étoiles filantes. ») Mais plus encore que leur concep
89
réatures très silencieuses, comme les belettes ou
les
étoiles filantes. ») Mais plus encore que leur conception de l’« exis
90
antes. ») Mais plus encore que leur conception de
l’
« existence » et que leur ironie, ce qui rapproche Kassner et son maît
91
t son maître c’est leur vision tragique du péché.
Le
Lépreux, journal apocryphe de l’empereur Alexandre Ier de Russie, n’e
92
agique du péché. Le Lépreux, journal apocryphe de
l’
empereur Alexandre Ier de Russie, n’est qu’une suite de méditations su
93
de Russie, n’est qu’une suite de méditations sur
le
thème du tout-ou-rien moral qui caractérise Kierkegaard. L’on y trouv
94
u tout-ou-rien moral qui caractérise Kierkegaard.
L’
on y trouvera moins de paradoxe et plus de délectation peut-être, une
95
lus de délectation peut-être, une acuité lente de
la
réflexion, un alliage précieux de hauteur, de rigueur et de pitié hum
96
enue presque solennelle mais qui sans cesse frôle
l’
humour, et parfois tourne en sournoise malice. On ne peut dire précisé
97
dversaires — Freud en particulier, dans Christ et
l’
âme du monde — mais bien plutôt qu’à force d’approfondir leur domaine
98
qu’à force d’approfondir leur domaine propre, il
les
mine et les ruine intérieurement ; ou encore les dissout dans une réa
99
d’approfondir leur domaine propre, il les mine et
les
ruine intérieurement ; ou encore les dissout dans une réalité plus ab
100
les mine et les ruine intérieurement ; ou encore
les
dissout dans une réalité plus absolue. Telle est la forme des dialogu
101
dissout dans une réalité plus absolue. Telle est
la
forme des dialogues où culmine son art. De ces dialogues, où chaque i
102
, où chaque interlocuteur, tour à tour, atteint à
l’
expression la plus virulente de sa vérité — si bien que la conclusion
103
nterlocuteur, tour à tour, atteint à l’expression
la
plus virulente de sa vérité — si bien que la conclusion ne peut être
104
sion la plus virulente de sa vérité — si bien que
la
conclusion ne peut être qu’implicite et fonction d’une hiérarchie de
105
e et fonction d’une hiérarchie de valeurs, non de
la
seule exactitude des pensées —, nous connaissons le modèle immortel,
106
seule exactitude des pensées —, nous connaissons
le
modèle immortel, le Livre de Job. Il serait curieux d’en suivre la fi
107
s pensées —, nous connaissons le modèle immortel,
le
Livre de Job. Il serait curieux d’en suivre la filiation, jusqu’au So
108
l, le Livre de Job. Il serait curieux d’en suivre
la
filiation, jusqu’au Soulier de Satin de Claudel : ce serait une sorte
109
me poétique. 1. Obscurité : Kassner ne pose pas
les
problèmes dans nos catégories psychologiques. Il prend tout par des b
110
Et puis enfin, voilà une philosophie qui postule
la
vision, c’est-à-dire l’appréhension poétique du monde. Rien n’est plu
111
e philosophie qui postule la vision, c’est-à-dire
l’
appréhension poétique du monde. Rien n’est plus étranger au nominalism
112
en n’est plus étranger au nominalisme qui envahit
la
critique sous l’influence du journal. 2. Ici encore, on ne peut oppo
113
anger au nominalisme qui envahit la critique sous
l’
influence du journal. 2. Ici encore, on ne peut opposer ce concept d’
114
er ce concept d’ironie qu’à celui que formulèrent
les
romantiques allemands. Rien de commun avec un Renan, un France. a.
115
gemont Denis de, « [Compte rendu] Rudolf Kassner,
Les
Éléments de la grandeur humaine », La Nouvelle Revue française, Pari
116
« [Compte rendu] Rudolf Kassner, Les Éléments de
la
grandeur humaine », La Nouvelle Revue française, Paris, octobre 1931
117
Kassner, Les Éléments de la grandeur humaine »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, octobre 1931, p. 640‑643.
118
(novembre 1931)b Quelque chose d’espagnol dans
la
démarche ; un tour qui ferait penser aux conteurs de la fin du xviiie
119
arche ; un tour qui ferait penser aux conteurs de
la
fin du xviiie ; des sujets dans le goût allemand, tels sont les élém
120
x conteurs de la fin du xviiie ; des sujets dans
le
goût allemand, tels sont les éléments qui composent non sans paradoxe
121
ie ; des sujets dans le goût allemand, tels sont
les
éléments qui composent non sans paradoxe ce recueil de « motifs » rom
122
motifs » romantiques et de frissons anarchiques.
Le
thème commun, c’est sans doute l’atrocité de la « vie normale », ou s
123
ns anarchiques. Le thème commun, c’est sans doute
l’
atrocité de la « vie normale », ou si l’on préfère, l’amertume du cœur
124
. Le thème commun, c’est sans doute l’atrocité de
la
« vie normale », ou si l’on préfère, l’amertume du cœur humain découv
125
ans doute l’atrocité de la « vie normale », ou si
l’
on préfère, l’amertume du cœur humain découvrant son impuissance à sus
126
rocité de la « vie normale », ou si l’on préfère,
l’
amertume du cœur humain découvrant son impuissance à susciter dans le
127
humain découvrant son impuissance à susciter dans
le
monde l’amour dont il aurait besoin, qu’il imagine et dont il meurt.
128
couvrant son impuissance à susciter dans le monde
l’
amour dont il aurait besoin, qu’il imagine et dont il meurt. Car la vi
129
urait besoin, qu’il imagine et dont il meurt. Car
la
vie est une espèce de marâtre et n’a que faire de nos tendresses. Les
130
ce de marâtre et n’a que faire de nos tendresses.
Les
sujets de Jean Cassou sont très particuliers — jusqu’à l’arbitraire p
131
s de Jean Cassou sont très particuliers — jusqu’à
l’
arbitraire parfois —, ce dont on hésite à lui faire reproche, car ce q
132
qui lui importe, comme à nous, c’est précisément
le
sentiment d’absurdité qui se dégage de pareils faits lorsque l’esprit
133
’absurdité qui se dégage de pareils faits lorsque
l’
esprit s’y attache et que l’amour ou la pitié essaient sur eux leurs f
134
pareils faits lorsque l’esprit s’y attache et que
l’
amour ou la pitié essaient sur eux leurs forces. Le monde est habité p
135
ts lorsque l’esprit s’y attache et que l’amour ou
la
pitié essaient sur eux leurs forces. Le monde est habité par des être
136
’amour ou la pitié essaient sur eux leurs forces.
Le
monde est habité par des êtres dont le « bonheur » consiste à ne pas
137
rs forces. Le monde est habité par des êtres dont
le
« bonheur » consiste à ne pas se rendre compte de ce qu’ils vivent. D
138
uns des plus significatifs de ces récits (Dieu et
le
sommeil, Les Fins dernières) l’on assiste à un réveil, explosion de r
139
significatifs de ces récits (Dieu et le sommeil,
Les
Fins dernières) l’on assiste à un réveil, explosion de révolte ou de
140
s récits (Dieu et le sommeil, Les Fins dernières)
l’
on assiste à un réveil, explosion de révolte ou de joie, tellement inc
141
e révolte ou de joie, tellement incompatible avec
les
« conditions » de la vie que mort s’en suit. Sarah est donc un recue
142
tellement incompatible avec les « conditions » de
la
vie que mort s’en suit. Sarah est donc un recueil de contes romantiq
143
de contes romantiques, cas tout à fait rare dans
la
littérature française, et qui comporte en soi quelque chose de déconc
144
l semble bien que Jean Cassou trouve ici sa forme
la
plus personnelle et persuasive. Son espagnolisme et son germanisme ré
145
ieurs endroits, c’est un certain tour désinvolte,
le
coup de pouce voltairien, l’élégance trop rapide. Il n’est pas bon qu
146
ain tour désinvolte, le coup de pouce voltairien,
l’
élégance trop rapide. Il n’est pas bon qu’un conteur laisse voir la mo
147
apide. Il n’est pas bon qu’un conteur laisse voir
la
moindre ironie vis-à-vis de ses personnages ; car il risque de les pr
148
e vis-à-vis de ses personnages ; car il risque de
les
priver par là de cette autorité mystique, absolue et naïve où gît leu
149
ù gît leur profonde raison d’être. C’est pourquoi
les
meilleurs contes du volume sont ceux dont la lenteur nous retient. Ai
150
uoi les meilleurs contes du volume sont ceux dont
la
lenteur nous retient. Ainsi Sarah, Monsieur Hoog, qui atteignent à un
151
alité d’émotion vraiment pure et insistante. Mais
le
mérite original et important d’un tel livre me paraît résider avant t
152
d’un tel livre me paraît résider avant tout dans
l’
ordre des faits qu’il met en jeu, dans la problématique qu’il parvient
153
out dans l’ordre des faits qu’il met en jeu, dans
la
problématique qu’il parvient à susciter au cours de ces brèves imagin
154
ant plus touchante qu’elle figure, je pense, pour
l’
auteur, une sorte de consolation un peu forcée que le cœur s’accorde e
155
uteur, une sorte de consolation un peu forcée que
le
cœur s’accorde en dépit de tout, tandis que l’esprit demeure évasif e
156
ue le cœur s’accorde en dépit de tout, tandis que
l’
esprit demeure évasif et lucide devant les conditions que le monde lui
157
ndis que l’esprit demeure évasif et lucide devant
les
conditions que le monde lui propose. b. Rougemont Denis de, « [Com
158
emeure évasif et lucide devant les conditions que
le
monde lui propose. b. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Jean Ca
159
Denis de, « [Compte rendu] Jean Cassou, Sarah »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, novembre 1931, p. 804-805.
160
Les
Signes parmi nous, par C. F. Ramuz (janvier 1932)c Il est remarqua
161
anvier 1932)c Il est remarquable que ceux dont
la
fonction serait d’exprimer notre civilisation, en un temps où elle se
162
i minimes. Je lis un article récent de Ramuz (sur
le
Travail), qui débute ainsi « Pourquoi est-ce qu’on travaille ? parce
163
é ? » Je vois que cet article en vient à formuler
le
dilemme sociologie-métaphysique ou si l’on veut marxisme-christianism
164
formuler le dilemme sociologie-métaphysique ou si
l’
on veut marxisme-christianisme, qui se trouve être le dilemme urgent d
165
n veut marxisme-christianisme, qui se trouve être
le
dilemme urgent de l’heure. Et je m’inquiète ; non pas de ces question
166
tianisme, qui se trouve être le dilemme urgent de
l’
heure. Et je m’inquiète ; non pas de ces questions ni de la prise de p
167
Et je m’inquiète ; non pas de ces questions ni de
la
prise de parti (antimarxiste) qu’elles déterminent chez Ramuz, mais b
168
: qu’il me semble entendre pour la première fois
la
voix d’un de nos aînés, interrogeant notre destin, lui poser en face
169
? Ai-je mal su lire tant de brillants essais sur
le
monde actuel et futur ? Est-ce le fait d’une disposition trop romanti
170
ants essais sur le monde actuel et futur ? Est-ce
le
fait d’une disposition trop romantique que d’avoir cru distinguer dan
171
ans ces œuvres je ne sais quelle complaisance qui
les
faisait éviter d’instinct tout point de vue pratiquement bouleversant
172
ement bouleversant ? D’autre part, n’est-ce point
le
fait d’un certain manque de tact intellectuel que de poser des questi
173
d’original, mais au contraire nous plongent dans
l’
humiliation, dans l’effroi ou dans la violence ? Le temps vient cepend
174
contraire nous plongent dans l’humiliation, dans
l’
effroi ou dans la violence ? Le temps vient cependant où la métaphysiq
175
longent dans l’humiliation, dans l’effroi ou dans
la
violence ? Le temps vient cependant où la métaphysique se posera ou s
176
’humiliation, dans l’effroi ou dans la violence ?
Le
temps vient cependant où la métaphysique se posera ou sera niée en te
177
ou dans la violence ? Le temps vient cependant où
la
métaphysique se posera ou sera niée en termes concrets, en termes de
178
sormais ceux qui savent dévisager notre condition
la
plus nue. « Alors on voit paraître le grand, c’est-à-dire on voit par
179
e condition la plus nue. « Alors on voit paraître
le
grand, c’est-à-dire on voit paraître l’homme dans sa grandeur, c’est-
180
paraître le grand, c’est-à-dire on voit paraître
l’
homme dans sa grandeur, c’est-à-dire dans l’élémentaire : un être qui
181
aître l’homme dans sa grandeur, c’est-à-dire dans
l’
élémentaire : un être qui est nu, qui a froid, qui a faim, qui a été j
182
rouve aucun écrivain plus naturellement libéré de
l’
idéologie bourgeoise, que Ramuz. Sa conception tragique du sort de l’h
183
ise, que Ramuz. Sa conception tragique du sort de
l’
homme suffirait à l’attester. Mais plus sûrement encore son acceptatio
184
onception tragique du sort de l’homme suffirait à
l’
attester. Mais plus sûrement encore son acceptation profonde d’aujourd
185
tation profonde d’aujourd’hui. Aujourd’hui, c’est
le
titre du journal grâce auquel chaque semaine ou presque, il reprend l
186
râce auquel chaque semaine ou presque, il reprend
le
dialogue avec son public et l’époque, de ce ton viril et simple qui e
187
resque, il reprend le dialogue avec son public et
l’
époque, de ce ton viril et simple qui est à lui, nullement irrité (com
188
un Bloy), nullement moralisant ou jacobin (comme
les
marxistes), ni victime ni juge d’une bourgeoisie à laquelle il échapp
189
naire, parce que trop radical, trop enraciné dans
l’
élémentaire ; élaborant son œuvre à un niveau d’où bourgeoisie et révo
190
me des localisations de surfaces et temporaires. (
Les
animaux et les arbres ne sont pas révolutionnaires.) Et ce n’est pas
191
tions de surfaces et temporaires. (Les animaux et
les
arbres ne sont pas révolutionnaires.) Et ce n’est pas qu’il ait jamai
192
elle tout un pays et son peuple ; car « c’est ici
le
pays de la solidité, parce que c’est le pays des ressemblances. Regar
193
n pays et son peuple ; car « c’est ici le pays de
la
solidité, parce que c’est le pays des ressemblances. Regarde, tout y
194
c’est ici le pays de la solidité, parce que c’est
le
pays des ressemblances. Regarde, tout y tient ensemble fortement, com
195
arde, tout y tient ensemble fortement, comme dans
le
tableau d’un grand peintre ». Ah ! la grandeur de ce peuple ramuzien,
196
comme dans le tableau d’un grand peintre ». Ah !
la
grandeur de ce peuple ramuzien, qui se meut dans je ne sais quelle lo
197
rdeur « originale » et unanime, en communion avec
les
éléments, avec l’effroi du monde. On a, non sans comique, loué « cet
198
et unanime, en communion avec les éléments, avec
l’
effroi du monde. On a, non sans comique, loué « cet artiste raffiné »
199
s de sa race. Il a cette même lenteur imposée par
la
nature, ce même besoin de précision utile. Ce n’est pas un art d’aprè
200
n de précision utile. Ce n’est pas un art d’après
le
peuple4, mais on dirait presque : d’avant. Il n’est pas jusqu’à son A
201
ne coïncide avec celle du pays de Vaud : non pas
la
grecque, qui est scolaire — pour eux — mais la biblique, qui est viva
202
as la grecque, qui est scolaire — pour eux — mais
la
biblique, qui est vivante. Ainsi tous parlent un même langage, qu’ils
203
vante. Ainsi tous parlent un même langage, qu’ils
l’
inscrivent sur le papier ou dans la terre. Un tel sens de la communaut
204
parlent un même langage, qu’ils l’inscrivent sur
le
papier ou dans la terre. Un tel sens de la communauté put induire cer
205
angage, qu’ils l’inscrivent sur le papier ou dans
la
terre. Un tel sens de la communauté put induire certains à parler de
206
nt sur le papier ou dans la terre. Un tel sens de
la
communauté put induire certains à parler de l’unanimisme de Ramuz. Ma
207
de la communauté put induire certains à parler de
l’
unanimisme de Ramuz. Mais comment Ramuz croirait-il à l’être collectif
208
imisme de Ramuz. Mais comment Ramuz croirait-il à
l’
être collectif, être sans racines, mythe cérébral. « Je ne distingue l
209
e sans racines, mythe cérébral. « Je ne distingue
l’
être qu’aux racines de l’élémentaire », écrivait-il dans ses Six Cahie
210
ébral. « Je ne distingue l’être qu’aux racines de
l’
élémentaire », écrivait-il dans ses Six Cahiers. Parlons plutôt de son
211
ctiviste d’ailleurs, mais originel et spirituel. (
La
révolution russe en tournant au marxisme, a provisoirement confondu c
212
marxisme, a provisoirement confondu ces notions.)
Le
communisme ramuzien, c’est celui qu’établissent la mort, la peur, la
213
e communisme ramuzien, c’est celui qu’établissent
la
mort, la peur, la maladie. Et la joie, ce point commun, « ce point qu
214
sme ramuzien, c’est celui qu’établissent la mort,
la
peur, la maladie. Et la joie, ce point commun, « ce point qui est au-
215
ien, c’est celui qu’établissent la mort, la peur,
la
maladie. Et la joie, ce point commun, « ce point qui est au-delà de l
216
i qu’établissent la mort, la peur, la maladie. Et
la
joie, ce point commun, « ce point qui est au-delà de la vie ». Le com
217
e, ce point commun, « ce point qui est au-delà de
la
vie ». Le communisme qui règne au jugement dernier et qui régnait aux
218
t commun, « ce point qui est au-delà de la vie ».
Le
communisme qui règne au jugement dernier et qui régnait aux Origines,
219
jugement dernier et qui régnait aux Origines, car
la
Fin et le Commencement « sont en ressemblance et voisinage ». Ce rega
220
ernier et qui régnait aux Origines, car la Fin et
le
Commencement « sont en ressemblance et voisinage ». Ce regard rajeuni
221
gagent certaines œuvres récentes des écrivains de
l’
URSS, je ne les retrouve que chez Ramuz. Mais purifiés de toute brutal
222
es œuvres récentes des écrivains de l’URSS, je ne
les
retrouve que chez Ramuz. Mais purifiés de toute brutalité, de ces tra
223
erve d’innocence » d’où peut-être un jour sortira
le
peuple-poète, « le peuple tous en un ». Mais son œuvre est bien au-de
224
d’où peut-être un jour sortira le peuple-poète, «
le
peuple tous en un ». Mais son œuvre est bien au-delà de l’ère machini
225
tous en un ». Mais son œuvre est bien au-delà de
l’
ère machiniste que traverse l’URSS, au-delà de l’insolence et de la ré
226
est bien au-delà de l’ère machiniste que traverse
l’
URSS, au-delà de l’insolence et de la révolte ; et ce trait profond de
227
l’ère machiniste que traverse l’URSS, au-delà de
l’
insolence et de la révolte ; et ce trait profond de son art m’en conva
228
que traverse l’URSS, au-delà de l’insolence et de
la
révolte ; et ce trait profond de son art m’en convainc : le sens de l
229
; et ce trait profond de son art m’en convainc :
le
sens de la vénération, qui est aussi celui de la lenteur des choses.
230
ait profond de son art m’en convainc : le sens de
la
vénération, qui est aussi celui de la lenteur des choses. Cet art, le
231
le sens de la vénération, qui est aussi celui de
la
lenteur des choses. Cet art, le sujet des Signes parmi nous, par sa s
232
st aussi celui de la lenteur des choses. Cet art,
le
sujet des Signes parmi nous, par sa simplicité même, le met en valeur
233
et des Signes parmi nous, par sa simplicité même,
le
met en valeur mieux que tout autre récit de Ramuz. Voici Caille, le c
234
ieux que tout autre récit de Ramuz. Voici Caille,
le
colporteur biblique, qui s’avance dès le matin à travers le pays, et
235
Caille, le colporteur biblique, qui s’avance dès
le
matin à travers le pays, et offre à tous la Parole, « ayant l’aspect
236
eur biblique, qui s’avance dès le matin à travers
le
pays, et offre à tous la Parole, « ayant l’aspect d’une brochure à co
237
e dès le matin à travers le pays, et offre à tous
la
Parole, « ayant l’aspect d’une brochure à couverture bleue », où les
238
avers le pays, et offre à tous la Parole, « ayant
l’
aspect d’une brochure à couverture bleue », où les événements actuels
239
l’aspect d’une brochure à couverture bleue », où
les
événements actuels — cela se passe un jour d’été de 1918 — sont expli
240
1918 — sont expliqués à la lumière des Écritures.
La
Fin des Temps est proche, il faut en témoigner. À tous il tend la Par
241
est proche, il faut en témoigner. À tous il tend
la
Parole « morte aux pages », mais voici que de toutes parts les Signes
242
morte aux pages », mais voici que de toutes parts
les
Signes paraissent sur la terre, les maladies, la famine, la révolte,
243
ici que de toutes parts les Signes paraissent sur
la
terre, les maladies, la famine, la révolte, la guerre et la mortalité
244
toutes parts les Signes paraissent sur la terre,
les
maladies, la famine, la révolte, la guerre et la mortalité. Caille s’
245
les Signes paraissent sur la terre, les maladies,
la
famine, la révolte, la guerre et la mortalité. Caille s’avance dans l
246
paraissent sur la terre, les maladies, la famine,
la
révolte, la guerre et la mortalité. Caille s’avance dans la journée,
247
ur la terre, les maladies, la famine, la révolte,
la
guerre et la mortalité. Caille s’avance dans la journée, et l’angoiss
248
les maladies, la famine, la révolte, la guerre et
la
mortalité. Caille s’avance dans la journée, et l’angoisse autour de l
249
, la guerre et la mortalité. Caille s’avance dans
la
journée, et l’angoisse autour de lui grandit. De partout l’orage s’am
250
la mortalité. Caille s’avance dans la journée, et
l’
angoisse autour de lui grandit. De partout l’orage s’amasse. Vers le s
251
, et l’angoisse autour de lui grandit. De partout
l’
orage s’amasse. Vers le soir, il éclate tragiquement. Est-ce la fin ?
252
de lui grandit. De partout l’orage s’amasse. Vers
le
soir, il éclate tragiquement. Est-ce la fin ? Grande heure de terreur
253
sse. Vers le soir, il éclate tragiquement. Est-ce
la
fin ? Grande heure de terreur et de prière. Puis, « la page du ciel a
254
n ? Grande heure de terreur et de prière. Puis, «
la
page du ciel a été tournée », ils se relèvent : « Il paraît bien qu’o
255
vent : « Il paraît bien qu’on n’est pas morts ! »
Le
monde renaît dans une soirée pure et le baiser d’un couple heureux. R
256
morts ! » Le monde renaît dans une soirée pure et
le
baiser d’un couple heureux. Rarement la forme authentique de Ramuz at
257
e pure et le baiser d’un couple heureux. Rarement
la
forme authentique de Ramuz atteignit une autorité comparable à celle
258
tièrement créé, entièrement « autorisé ». Art, on
le
sait, avant tout visuel, qui rend les choses à l’état naissant, rugue
259
é ». Art, on le sait, avant tout visuel, qui rend
les
choses à l’état naissant, rugueux, décapé de toute rhétorique5 et de
260
le sait, avant tout visuel, qui rend les choses à
l’
état naissant, rugueux, décapé de toute rhétorique5 et de toute explic
261
toute explication intellectuelle, atteignant par
la
une unité de style tellement têtue qu’elle évoque peu à peu on ne sai
262
ns sa fascinante et grandiose monotonie. Art dont
la
mesure ne doit pas être cherchée dans le pittoresque, ni dans l’ingén
263
Art dont la mesure ne doit pas être cherchée dans
le
pittoresque, ni dans l’ingéniosité, ni dans l’harmonie de sons, mais
264
it pas être cherchée dans le pittoresque, ni dans
l’
ingéniosité, ni dans l’harmonie de sons, mais bien dans la pesée. Tous
265
ns le pittoresque, ni dans l’ingéniosité, ni dans
l’
harmonie de sons, mais bien dans la pesée. Tous les procédés ramuziens
266
osité, ni dans l’harmonie de sons, mais bien dans
la
pesée. Tous les procédés ramuziens, juxtapositions brutales, interfér
267
l’harmonie de sons, mais bien dans la pesée. Tous
les
procédés ramuziens, juxtapositions brutales, interférences du récit,
268
œuvre mais toujours avec une probité singulière.
La
surimpression par exemple n’est jamais pour Ramuz ce qu’elle fut pour
269
tres : un moyen de créer du mystère en brouillant
les
plans ; mais un moyen de rendre plus totale la vision. Tout, par aill
270
t les plans ; mais un moyen de rendre plus totale
la
vision. Tout, par ailleurs, indique chez Ramuz la volonté de ne pas f
271
la vision. Tout, par ailleurs, indique chez Ramuz
la
volonté de ne pas faire prendre une chose pour une autre, ni certain
272
chose pour une autre, ni certain aspect usuel de
la
chose pour toute la chose. C’est pourquoi il s’attarde à décrire le c
273
e, ni certain aspect usuel de la chose pour toute
la
chose. C’est pourquoi il s’attarde à décrire le concret d’une façon c
274
e la chose. C’est pourquoi il s’attarde à décrire
le
concret d’une façon concrète : ainsi, le maniement d’un outil. D’où l
275
décrire le concret d’une façon concrète : ainsi,
le
maniement d’un outil. D’où le reproche de puérilité que lui adressent
276
n concrète : ainsi, le maniement d’un outil. D’où
le
reproche de puérilité que lui adressent ceux qui, par exemple, n’hési
277
as à prendre au sérieux une intrigue romanesque à
la
Bourget. On s’est trop arrêté à l’insolite du style chez Ramuz. Ce qu
278
e romanesque à la Bourget. On s’est trop arrêté à
l’
insolite du style chez Ramuz. Ce qu’il a d’insolite, ce n’est pas tant
279
u’il a d’insolite, ce n’est pas tant sa forme que
les
vertus qu’elle suppose : la sobriété, la solidité, le manque d’ironie
280
as tant sa forme que les vertus qu’elle suppose :
la
sobriété, la solidité, le manque d’ironie, la bonhomie sérieuse, l’ab
281
rme que les vertus qu’elle suppose : la sobriété,
la
solidité, le manque d’ironie, la bonhomie sérieuse, l’absence de tout
282
ertus qu’elle suppose : la sobriété, la solidité,
le
manque d’ironie, la bonhomie sérieuse, l’absence de toute complaisanc
283
e : la sobriété, la solidité, le manque d’ironie,
la
bonhomie sérieuse, l’absence de toute complaisance à soi. Certes, j’e
284
lidité, le manque d’ironie, la bonhomie sérieuse,
l’
absence de toute complaisance à soi. Certes, j’en vois les défauts, le
285
ce de toute complaisance à soi. Certes, j’en vois
les
défauts, le poncif ; ces détails par trop détaillés. Mais l’important
286
omplaisance à soi. Certes, j’en vois les défauts,
le
poncif ; ces détails par trop détaillés. Mais l’important, je pense,
287
le poncif ; ces détails par trop détaillés. Mais
l’
important, je pense, c’est qu’une page de Ramuz — même pas très réussi
288
c cette lenteur qu’elle impose, nous replace dans
la
vision grande et efficace des choses les plus simples. Mais il faut d
289
lace dans la vision grande et efficace des choses
les
plus simples. Mais il faut dire maintenant l’actualité tout à fait si
290
es les plus simples. Mais il faut dire maintenant
l’
actualité tout à fait singulière d’un tel livre. Il y a des sujets éte
291
, perpétuels — sujets d’étonnement perpétuel — et
la
Fin du Monde est l’un d’eux. Un vrai mythe, c’est-à-dire un événement
292
un événement perpétuellement possible, qui reçoit
la
vie comme un moule reçoit la matière en fusion et la réalise soudain
293
possible, qui reçoit la vie comme un moule reçoit
la
matière en fusion et la réalise soudain — la fait chose — en lui donn
294
vie comme un moule reçoit la matière en fusion et
la
réalise soudain — la fait chose — en lui donnant une forme ; l’actual
295
çoit la matière en fusion et la réalise soudain —
la
fait chose — en lui donnant une forme ; l’actualise — la fait acte —
296
dain — la fait chose — en lui donnant une forme ;
l’
actualise — la fait acte — en l’arrêtant dans cette forme et lui donna
297
chose — en lui donnant une forme ; l’actualise —
la
fait acte — en l’arrêtant dans cette forme et lui donnant une date. L
298
nnant une forme ; l’actualise — la fait acte — en
l’
arrêtant dans cette forme et lui donnant une date. Les périodes qui «
299
rrêtant dans cette forme et lui donnant une date.
Les
périodes qui « marquent » dans l’Histoire sont celles où la forme d’u
300
nant une date. Les périodes qui « marquent » dans
l’
Histoire sont celles où la forme d’un mythe affleure, s’incarne et dev
301
s qui « marquent » dans l’Histoire sont celles où
la
forme d’un mythe affleure, s’incarne et devient visible. Ce sont les
302
e affleure, s’incarne et devient visible. Ce sont
les
périodes de crise. Or toute crise est un jugement6, — un « arrêt dans
303
, — un « arrêt dans une forme ». Cela se voit par
l’
étymologie. Aussi, par le passage à la limite : car la plus grande cri
304
orme ». Cela se voit par l’étymologie. Aussi, par
le
passage à la limite : car la plus grande crise imaginable, c’est l’ar
305
se voit par l’étymologie. Aussi, par le passage à
la
limite : car la plus grande crise imaginable, c’est l’arrêt absolu, s
306
ymologie. Aussi, par le passage à la limite : car
la
plus grande crise imaginable, c’est l’arrêt absolu, suprême : le Juge
307
mite : car la plus grande crise imaginable, c’est
l’
arrêt absolu, suprême : le Jugement dernier. Le sens de l’actuelle cri
308
crise imaginable, c’est l’arrêt absolu, suprême :
le
Jugement dernier. Le sens de l’actuelle crise apparaît ainsi manifest
309
st l’arrêt absolu, suprême : le Jugement dernier.
Le
sens de l’actuelle crise apparaît ainsi manifeste : un jugement sur t
310
absolu, suprême : le Jugement dernier. Le sens de
l’
actuelle crise apparaît ainsi manifeste : un jugement sur tous les pla
311
e apparaît ainsi manifeste : un jugement sur tous
les
plans, financier, commercial, éthique et spirituel. Que les échanges
312
financier, commercial, éthique et spirituel. Que
les
échanges se ralentissent ou cessent : aussitôt perce l’interrogation
313
anges se ralentissent ou cessent : aussitôt perce
l’
interrogation que la réussite couvrait. Où va notre or, en réalité ? (
314
t ou cessent : aussitôt perce l’interrogation que
la
réussite couvrait. Où va notre or, en réalité ? (Dans quelle directio
315
n principale.) Où tend notre action centuplée par
les
machines ? Où tendent nos métaphysiques et nos philosophies mal embra
316
e voit-on mieux maintenant dans quel esprit Ramuz
les
pose, et que précisément c’est l’esprit de ces Signes. Aussi serait-i
317
l esprit Ramuz les pose, et que précisément c’est
l’
esprit de ces Signes. Aussi serait-il bien insuffisant de dire d’une t
318
e actualité accidentelle : c’est en quelque sorte
le
contraire qui est vrai ; c’est notre temps qui revêt une actualité7 e
319
e actualité7 et une réalité véritables du fait de
la
crise. Mais cet affleurement mystérieux de la forme mythique, le poèt
320
de la crise. Mais cet affleurement mystérieux de
la
forme mythique, le poète en tout temps a le pouvoir de le susciter da
321
cet affleurement mystérieux de la forme mythique,
le
poète en tout temps a le pouvoir de le susciter dans son œuvre, comme
322
ux de la forme mythique, le poète en tout temps a
le
pouvoir de le susciter dans son œuvre, comme le mystique dans sa priè
323
mythique, le poète en tout temps a le pouvoir de
le
susciter dans son œuvre, comme le mystique dans sa prière. Et c’est p
324
a le pouvoir de le susciter dans son œuvre, comme
le
mystique dans sa prière. Et c’est pourquoi le poète, Ramuz, l’homme q
325
mme le mystique dans sa prière. Et c’est pourquoi
le
poète, Ramuz, l’homme qui vit concrètement les grands mythes et les r
326
ans sa prière. Et c’est pourquoi le poète, Ramuz,
l’
homme qui vit concrètement les grands mythes et les réalise dans sa vi
327
uoi le poète, Ramuz, l’homme qui vit concrètement
les
grands mythes et les réalise dans sa vision, cet homme sera toujours
328
l’homme qui vit concrètement les grands mythes et
les
réalise dans sa vision, cet homme sera toujours en puissance d’aujour
329
Travail », dans Aujourd’hui, 29 octobre 1931. 4.
Le
populisme est d’après le peuple. Cette terne vision des choses en app
330
ui, 29 octobre 1931. 4. Le populisme est d’après
le
peuple. Cette terne vision des choses en apprend plus sur le compte d
331
Cette terne vision des choses en apprend plus sur
le
compte de la bourgeoisie que sur le peuple qu’elle prétend « observer
332
ision des choses en apprend plus sur le compte de
la
bourgeoisie que sur le peuple qu’elle prétend « observer ». 5. De to
333
rend plus sur le compte de la bourgeoisie que sur
le
peuple qu’elle prétend « observer ». 5. De tout bel canto, peut-on d
334
ver ». 5. De tout bel canto, peut-on dire. C’est
le
ton de la musique de Stravinsky, du Sacre et des Noces. Le ton de la
335
De tout bel canto, peut-on dire. C’est le ton de
la
musique de Stravinsky, du Sacre et des Noces. Le ton de la création d
336
la musique de Stravinsky, du Sacre et des Noces.
Le
ton de la création du monde. 6. S’il est vrai, comme l’a montré M. S
337
e de Stravinsky, du Sacre et des Noces. Le ton de
la
création du monde. 6. S’il est vrai, comme l’a montré M. Spaïer, que
338
de la création du monde. 6. S’il est vrai, comme
l’
a montré M. Spaïer, que toute pensée est judicatoire, le fait même de
339
ntré M. Spaïer, que toute pensée est judicatoire,
le
fait même de penser devient fauteur de crise. Informer le réel, c’est
340
même de penser devient fauteur de crise. Informer
le
réel, c’est en quelque sorte le mettre en état de crise ; et il n’y a
341
e crise. Informer le réel, c’est en quelque sorte
le
mettre en état de crise ; et il n’y a de réalité que par et dans la c
342
de crise ; et il n’y a de réalité que par et dans
la
crise… 7. On pourrait soutenir que l’époque 1900-1910 fut « inactuel
343
ar et dans la crise… 7. On pourrait soutenir que
l’
époque 1900-1910 fut « inactuelle » pour la grande masse de ceux qui l
344
ir que l’époque 1900-1910 fut « inactuelle » pour
la
grande masse de ceux qui la vécurent. c. Rougemont Denis de, « [Com
345
t « inactuelle » pour la grande masse de ceux qui
la
vécurent. c. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] C. F. Ramuz, Les
346
Rougemont Denis de, « [Compte rendu] C. F. Ramuz,
Les
Signes parmi nous », La Nouvelle Revue française, Paris, janvier 193
347
pte rendu] C. F. Ramuz, Les Signes parmi nous »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, janvier 1932, p. 144-149.
348
Le
silence de Goethe (mars 1932)d « L’homme, dit Goethe, ne reconnaît
349
Le silence de Goethe (mars 1932)d «
L’
homme, dit Goethe, ne reconnaît et n’apprécie que ce qu’il est lui-mêm
350
qu’il est lui-même en état de faire. » Telle est
la
cause du malentendu que soulèvera toujours à nouveau l’exemple de cet
351
se du malentendu que soulèvera toujours à nouveau
l’
exemple de cette vie. Ceux qui traitent Goethe de bourgeois ne prouven
352
tension ni grandeur : ils ne savent pas voir dans
la
sagesse faustienne qu’elle est surtout une défense contre le Démon ré
353
faustienne qu’elle est surtout une défense contre
le
Démon révolté et la Magie latente ; et s’ils ne le voient pas, c’est
354
st surtout une défense contre le Démon révolté et
la
Magie latente ; et s’ils ne le voient pas, c’est que précisément cett
355
e Démon révolté et la Magie latente ; et s’ils ne
le
voient pas, c’est que précisément cette défense a réussi. Par contre
356
éfense a réussi. Par contre ils veulent bien voir
la
révolte chez ceux-là qui la crient, et la magie chez ceux qui vaticin
357
ils veulent bien voir la révolte chez ceux-là qui
la
crient, et la magie chez ceux qui vaticinent, ayant été moins loin qu
358
en voir la révolte chez ceux-là qui la crient, et
la
magie chez ceux qui vaticinent, ayant été moins loin que Goethe dans
359
vaticinent, ayant été moins loin que Goethe dans
la
domination des mystères. Ainsi se réclament-ils de Rimbaud. Peut-être
360
res. Ainsi se réclament-ils de Rimbaud. Peut-être
la
confrontation du Sage et du Fou — d’un fou qui reste notre intime ten
361
te notre intime tentation — permettra-t-elle, par
la
vivacité même du paradoxe, une prise de conscience plus juste et plus
362
fant écrit des poèmes « magiques » puis renonce à
la
magie, et se tait. Goethe, initié dans sa jeunesse, commence d’écrire
363
jeunesse, commence d’écrire vers ce temps, mais,
la
fièvre tombée, poursuivra durant toute sa vie une « activité littérai
364
lles étaient superposables, ce qui n’est pas même
le
cas. De ce point de vue littéraire, la confrontation serait absurde,
365
t pas même le cas. De ce point de vue littéraire,
la
confrontation serait absurde, j’en conviens. Mais notre optique n’est
366
int faussée par un état d’esprit qui voudrait que
l’
on considère ces deux hommes avant tout comme des écrivains ? C’est pa
367
hommes avant tout comme des écrivains ? C’est par
la
chose écrite, par la lettre justement qu’ils s’opposent le plus. Pour
368
me des écrivains ? C’est par la chose écrite, par
la
lettre justement qu’ils s’opposent le plus. Pourtant Rimbaud ne fut j
369
écrite, par la lettre justement qu’ils s’opposent
le
plus. Pourtant Rimbaud ne fut jamais un écrivain, ni ne se soucia de
370
aud ne fut jamais un écrivain, ni ne se soucia de
l’
être. Et Goethe ne fut qu’entre autres choses un écrivain, et se souci
371
’entre autres choses un écrivain, et se soucia de
l’
être dans la mesure seulement où il portait en tous les domaines de so
372
s choses un écrivain, et se soucia de l’être dans
la
mesure seulement où il portait en tous les domaines de son activité u
373
re dans la mesure seulement où il portait en tous
les
domaines de son activité une application volontaire et soutenue. Ce n
374
ication volontaire et soutenue. Ce n’est donc pas
l’
aspect littéraire de leur expérience qui doit conditionner notre visio
375
instant négligeable, s’agissant de deux êtres que
l’
on connaît par leurs écrits d’abord. Mais, pour en tenir un juste comp
376
Mais, pour en tenir un juste compte, il s’agit de
le
subordonner au problème personnel de ces vies, à leur équation d’exis
377
un comme chez l’autre, une révolution profonde de
l’
esprit dont procèdent à la fois le refus de la magie et le goût passio
378
ion profonde de l’esprit dont procèdent à la fois
le
refus de la magie et le goût passionné de l’effort immédiat. Qu’un fa
379
de l’esprit dont procèdent à la fois le refus de
la
magie et le goût passionné de l’effort immédiat. Qu’un fait de cet or
380
dont procèdent à la fois le refus de la magie et
le
goût passionné de l’effort immédiat. Qu’un fait de cet ordre puisse ê
381
fois le refus de la magie et le goût passionné de
l’
effort immédiat. Qu’un fait de cet ordre puisse être tenu pour crucial
382
e être tenu pour crucial, je veux croire qu’on ne
le
contestera pas. Mais ce qu’on voudrait dire maintenant, ce qui ne ces
383
t, ce qui ne cesse de provoquer dans notre esprit
l’
étonnement du premier regard, c’est la similitude de forme, c’est-dire
384
otre esprit l’étonnement du premier regard, c’est
la
similitude de forme, c’est-dire la similitude essentielle, hors du te
385
regard, c’est la similitude de forme, c’est-dire
la
similitude essentielle, hors du temps, qui paraît dans ces deux expér
386
paraît dans ces deux expériences, à mesure qu’on
les
abstrait de toute la littérature dont elles enveloppèrent leurs manif
387
expériences, à mesure qu’on les abstrait de toute
la
littérature dont elles enveloppèrent leurs manifestations, — à quoi l
388
lles enveloppèrent leurs manifestations, — à quoi
l’
on ne s’est point privé d’ajouter quelques tomes depuis. Il convient d
389
l bien plus que dans leur commune grandeur. Seule
la
croyance en une analogie universelle des réactions profondes de l’âme
390
e analogie universelle des réactions profondes de
l’
âme devant son destin m’autorise à cette confrontation et me persuade
391
ur qui seule compte certaine « originalité » dans
l’
ordre — au mieux — esthétique, je ne m’en étonnerai point. Il s’agit s
392
s concrète, grâce au recoupement de deux vies qui
l’
ont réalisée selon des voies totalement divergentes, une attitude huma
393
qui me paraît commune. Que Goethe ait pratiqué «
le
devis des choses grandes et secrètes » comme parle Jérôme Cardan, l’o
394
grandes et secrètes » comme parle Jérôme Cardan,
l’
on en trouve dans toutes ses œuvres assez de signes irrévocables pour
395
révocables pour n’avoir plus besoin de solliciter
les
biographes. On a souvent rappelé l’amitié du jeune bourgeois de Franc
396
e solliciter les biographes. On a souvent rappelé
l’
amitié du jeune bourgeois de Francfort et de la sage et très fervente
397
lé l’amitié du jeune bourgeois de Francfort et de
la
sage et très fervente Mlle de Klettenberg. Mais bien plus que dans un
398
plus que dans une spiritualité facilement épurée,
le
mysticisme de celui qui, tout enfant, édifiait un autel à la Nature,
399
me de celui qui, tout enfant, édifiait un autel à
la
Nature, trouvait son aliment dans une méditation, renouvelée des rose
400
une méditation, renouvelée des rose-croix, et qui
le
porta même à quelques essais d’alchimie. Coquetteries, a-t-on dit, —
401
comme celui de Goethe. « On a peur que son feu ne
le
consume », écrit un de ses amis, vers ce temps. « Goethe vit sur un p
402
l et bien dans son évolution une de ces crises où
l’
être spirituel découvre sa forme véritable. Et si, comme chez Goethe,
403
celle du terrible « Meurs et deviens ! », et s’il
l’
assume en connaissance de cause, — c’est un événement qui ne peut norm
404
e qualité nouvelle de silence. Encore faut-il que
le
destin favorise concrètement cette assomption intérieure. Par quel «
405
cette assomption intérieure. Par quel « hasard »
l’
a-t-il provoquée chez Goethe ? Il est un fait de sa jeunesse dont on n
406
n fait de sa jeunesse dont on ne saurait exagérer
l’
importance à la fois historique et symbolique : les premiers contacts
407
symbolique : les premiers contacts de Goethe avec
le
mysticisme précédèrent de très peu une grave maladie, dont il ne fut
408
u une grave maladie, dont il ne fut sauvé que par
l’
intervention d’un médecin « alchimiste ». Retenons ceci : au seuil de
409
decin « alchimiste ». Retenons ceci : au seuil de
l’
initiation, chez Goethe, il n’y a pas une révolte, il y a un péril con
410
e ce qu’il nommera désormais son Daimon, contre «
l’
oppression despotique des éléments inquiétants qui gouvernent trop pui
411
ent trop puissamment dans son âme » qu’il appelle
les
arts d’une magie maîtrisée, c’est-à-dire incarnée. La question se pos
412
rts d’une magie maîtrisée, c’est-à-dire incarnée.
La
question se pose pour lui, dès l’abord, en termes matériels, urgents
413
-dire incarnée. La question se pose pour lui, dès
l’
abord, en termes matériels, urgents et contraignants. De là le sérieux
414
termes matériels, urgents et contraignants. De là
le
sérieux avec lequel il accepte les conditions de l’initiation : et d’
415
aignants. De là le sérieux avec lequel il accepte
les
conditions de l’initiation : et d’abord la plus difficile, le silence
416
sérieux avec lequel il accepte les conditions de
l’
initiation : et d’abord la plus difficile, le silence. Ainsi, les prem
417
cepte les conditions de l’initiation : et d’abord
la
plus difficile, le silence. Ainsi, les premières séductions du dépays
418
s de l’initiation : et d’abord la plus difficile,
le
silence. Ainsi, les premières séductions du dépaysement spirituel, de
419
premières séductions du dépaysement spirituel, de
la
connaissance ésotérique dans ce qu’elle peut avoir de purement « étra
420
voir de purement « étrange » ont à peine enfiévré
le
jeune Goethe, que déjà la faiblesse du corps le ramène à l’aspect con
421
» ont à peine enfiévré le jeune Goethe, que déjà
la
faiblesse du corps le ramène à l’aspect concret de notre condition. E
422
é le jeune Goethe, que déjà la faiblesse du corps
le
ramène à l’aspect concret de notre condition. Et c’est seulement en p
423
oethe, que déjà la faiblesse du corps le ramène à
l’
aspect concret de notre condition. Et c’est seulement en passant par u
424
ent en passant par une application matérielle que
la
magie, se reniant en tant que spéculation extra-terrestre, peut s’int
425
spéculation extra-terrestre, peut s’intégrer dans
l’
équilibre humain. Incident décisif qui figure en raccourci tout le dra
426
in. Incident décisif qui figure en raccourci tout
le
drame dialectique de sa vie. Mais cette maladie, et la convalescence,
427
ame dialectique de sa vie. Mais cette maladie, et
la
convalescence, ont éveillé dans son esprit les premières tentations c
428
son esprit les premières tentations créatrices. À
l’
origine de son œuvre, voici donc le fait de la magie domptée ; conçue
429
créatrices. À l’origine de son œuvre, voici donc
le
fait de la magie domptée ; conçue sous de tels auspices, c’est tout n
430
. À l’origine de son œuvre, voici donc le fait de
la
magie domptée ; conçue sous de tels auspices, c’est tout naturellemen
431
us de tels auspices, c’est tout naturellement que
la
littérature prendra plus tard chez Goethe l’allure d’une discipline d
432
que la littérature prendra plus tard chez Goethe
l’
allure d’une discipline de l’âme. Un exercice, une activité organique
433
lus tard chez Goethe l’allure d’une discipline de
l’
âme. Un exercice, une activité organique à objectifs limités et concrè
434
ulative. Un instrument et un style. Dès ce moment
le
choix de Goethe a trouvé sa forme. Il lui faudra maintenant le renouv
435
oethe a trouvé sa forme. Il lui faudra maintenant
le
renouveler perpétuellement durant toute sa vie. Et comprendre, éprouv
436
ant toute sa vie. Et comprendre, éprouver jusqu’à
la
souffrance — qui est la « substance » — à quel point le renoncement à
437
prendre, éprouver jusqu’à la souffrance — qui est
la
« substance » — à quel point le renoncement à la magie spéculative n’
438
ffrance — qui est la « substance » — à quel point
le
renoncement à la magie spéculative n’est, en fait, qu’un accomplissem
439
la « substance » — à quel point le renoncement à
la
magie spéculative n’est, en fait, qu’un accomplissement, le plus diff
440
péculative n’est, en fait, qu’un accomplissement,
le
plus difficile et le seul humainement fécond. Car un tel silence n’es
441
fait, qu’un accomplissement, le plus difficile et
le
seul humainement fécond. Car un tel silence n’est pas absence de mots
442
plus agissant, dans une œuvre marquée du signe de
la
maturité, que cette présence rayonnante dont on devine chaque phrase
443
on devine chaque phrase sous-tendue. Mais rien ne
la
trahirait mieux que la retenue même de l’expression. C’est pourquoi j
444
sous-tendue. Mais rien ne la trahirait mieux que
la
retenue même de l’expression. C’est pourquoi je l’éprouve plus viveme
445
rien ne la trahirait mieux que la retenue même de
l’
expression. C’est pourquoi je l’éprouve plus vivement dans certains pa
446
a retenue même de l’expression. C’est pourquoi je
l’
éprouve plus vivement dans certains passages des Affinités électives,
447
e apparente platitude, mais translucide, que dans
le
Conte du Serpent Vert, trop visiblement ésotérique. Équilibre si péri
448
isiblement ésotérique. Équilibre si périlleux que
la
longue patience géniale ne parviendrait pas seule à le sauvegarder. I
449
ngue patience géniale ne parviendrait pas seule à
le
sauvegarder. Il y faudra le dressage de la souffrance. L’excès verbal
450
viendrait pas seule à le sauvegarder. Il y faudra
le
dressage de la souffrance. L’excès verbal de Werther couvre d’abord l
451
eule à le sauvegarder. Il y faudra le dressage de
la
souffrance. L’excès verbal de Werther couvre d’abord la voix intérieu
452
garder. Il y faudra le dressage de la souffrance.
L’
excès verbal de Werther couvre d’abord la voix intérieure, la renie mê
453
ffrance. L’excès verbal de Werther couvre d’abord
la
voix intérieure, la renie même bruyamment. C’est là le fait d’une âme
454
bal de Werther couvre d’abord la voix intérieure,
la
renie même bruyamment. C’est là le fait d’une âme qui se refuse encor
455
ix intérieure, la renie même bruyamment. C’est là
le
fait d’une âme qui se refuse encore à la souffrance et la crie sur la
456
C’est là le fait d’une âme qui se refuse encore à
la
souffrance et la crie sur la place. Un peu plus de souffrance, plus i
457
d’une âme qui se refuse encore à la souffrance et
la
crie sur la place. Un peu plus de souffrance, plus intimement ancrée,
458
i se refuse encore à la souffrance et la crie sur
la
place. Un peu plus de souffrance, plus intimement ancrée, et voici l’
459
plus intimement ancrée, et voici l’autre danger :
la
délectation ascétique, l’obscurité glaciale des Mystères. Un peu plus
460
voici l’autre danger : la délectation ascétique,
l’
obscurité glaciale des Mystères. Un peu plus d’humilité, c’est-à-dire
461
es Mystères. Un peu plus d’humilité, c’est-à-dire
le
réel désir d’être « utile », et c’est le juste point : les Affinités.
462
t-à-dire le réel désir d’être « utile », et c’est
le
juste point : les Affinités. D’ailleurs, l’alternance des trois états
463
désir d’être « utile », et c’est le juste point :
les
Affinités. D’ailleurs, l’alternance des trois états, visible tout au
464
c’est le juste point : les Affinités. D’ailleurs,
l’
alternance des trois états, visible tout au long de l’œuvre, prouve qu
465
ternance des trois états, visible tout au long de
l’
œuvre, prouve que la question se pose sans cesse à nouveau et que sous
466
tats, visible tout au long de l’œuvre, prouve que
la
question se pose sans cesse à nouveau et que sous l’apparence de plus
467
question se pose sans cesse à nouveau et que sous
l’
apparence de plus en plus sereine, la tentation revient, l’agonie se p
468
et que sous l’apparence de plus en plus sereine,
la
tentation revient, l’agonie se poursuit. Seulement l’effort d’équilib
469
ce de plus en plus sereine, la tentation revient,
l’
agonie se poursuit. Seulement l’effort d’équilibre crée des énergies n
470
entation revient, l’agonie se poursuit. Seulement
l’
effort d’équilibre crée des énergies nouvelles. Le silence mûrit à la
471
l’effort d’équilibre crée des énergies nouvelles.
Le
silence mûrit à la faveur du secret, et dans la profondeur, des conce
472
e crée des énergies nouvelles. Le silence mûrit à
la
faveur du secret, et dans la profondeur, des conceptions s’opèrent. C
473
. Le silence mûrit à la faveur du secret, et dans
la
profondeur, des conceptions s’opèrent. C’est ainsi que la magie renié
474
ndeur, des conceptions s’opèrent. C’est ainsi que
la
magie reniée extérieurement au profit d’une expression « utile », ren
475
comme libérée intérieurement au « jour nouveau ».
L’
âme parvient à cette « connaissance », à cet acte de fécondation spiri
476
e », à cet acte de fécondation spirituelle par où
l’
homme pénètre dans la réalité mystique. Et cet acte ne peut se produir
477
condation spirituelle par où l’homme pénètre dans
la
réalité mystique. Et cet acte ne peut se produire que dans le plus pr
478
ystique. Et cet acte ne peut se produire que dans
le
plus profond silence de l’esprit, dans la région où seul accède celui
479
t se produire que dans le plus profond silence de
l’
esprit, dans la région où seul accède celui qui sait préserver sa pass
480
ue dans le plus profond silence de l’esprit, dans
la
région où seul accède celui qui sait préserver sa passion au sein d’u
481
éfonds dont parle Jacob Boehme, et qui « contient
l’
élément pur, mais aussi l’être sombre dans le mystère de la fureur ».
482
ehme, et qui « contient l’élément pur, mais aussi
l’
être sombre dans le mystère de la fureur ». Cette complexe dialectique
483
ient l’élément pur, mais aussi l’être sombre dans
le
mystère de la fureur ». Cette complexe dialectique de la magie, Goeth
484
pur, mais aussi l’être sombre dans le mystère de
la
fureur ». Cette complexe dialectique de la magie, Goethe lui-même l’a
485
ère de la fureur ». Cette complexe dialectique de
la
magie, Goethe lui-même l’a stylisée en symboles concrets dans le Faus
486
complexe dialectique de la magie, Goethe lui-même
l’
a stylisée en symboles concrets dans le Faust, œuvre longue comme sa v
487
e lui-même l’a stylisée en symboles concrets dans
le
Faust, œuvre longue comme sa vie de créateur exactement, et à tel poi
488
nt autobiographique qu’il put songer à incorporer
le
plan de certains actes à Vérité et Poésie. Le drame s’ouvre sur un ré
489
rer le plan de certains actes à Vérité et Poésie.
Le
drame s’ouvre sur un réveil : l’exercice sans frein des arts occultes
490
érité et Poésie. Le drame s’ouvre sur un réveil :
l’
exercice sans frein des arts occultes laisse l’esprit de Faust béant s
491
: l’exercice sans frein des arts occultes laisse
l’
esprit de Faust béant sur le vide : « Moi qui me suis cru plus grand q
492
arts occultes laisse l’esprit de Faust béant sur
le
vide : « Moi qui me suis cru plus grand que le Chérubin… qui pensais
493
ur le vide : « Moi qui me suis cru plus grand que
le
Chérubin… qui pensais en créant pouvoir jouir de la vie des dieux et
494
Chérubin… qui pensais en créant pouvoir jouir de
la
vie des dieux et m’y égaler… combien je dois expier tout cela ! » Fau
495
expier tout cela ! » Faust se reprend au seuil de
la
mort. Mais la vie ne lui sera plus qu’un profond renoncement ; même s
496
la ! » Faust se reprend au seuil de la mort. Mais
la
vie ne lui sera plus qu’un profond renoncement ; même si la passion l
497
lui sera plus qu’un profond renoncement ; même si
la
passion l’occupe un temps, c’est l’action, la Tätigkeit — le grand mo
498
us qu’un profond renoncement ; même si la passion
l’
occupe un temps, c’est l’action, la Tätigkeit — le grand mot goethéen
499
ent ; même si la passion l’occupe un temps, c’est
l’
action, la Tätigkeit — le grand mot goethéen — qui triomphera désormai
500
si la passion l’occupe un temps, c’est l’action,
la
Tätigkeit — le grand mot goethéen — qui triomphera désormais. Mais un
501
l’occupe un temps, c’est l’action, la Tätigkeit —
le
grand mot goethéen — qui triomphera désormais. Mais une action qui pa
502
spère du seul succès qui pour Faust serait réel :
la
possession bienheureuse de l’instant. Et lorsque, épuisé mais pacifié
503
Faust serait réel : la possession bienheureuse de
l’
instant. Et lorsque, épuisé mais pacifié, il va quitter son corps aveu
504
orps aveugle pour d’autres formes d’existence que
la
Nature se voit pour ainsi dire contrainte d’assigner à l’homme actif
505
e se voit pour ainsi dire contrainte d’assigner à
l’
homme actif 8, l’on découvre que c’est la magie encore qui n’a cessé d
506
nsi dire contrainte d’assigner à l’homme actif 8,
l’
on découvre que c’est la magie encore qui n’a cessé de l’entraver : K
507
signer à l’homme actif 8, l’on découvre que c’est
la
magie encore qui n’a cessé de l’entraver : Könnt ich Magie von meine
508
couvre que c’est la magie encore qui n’a cessé de
l’
entraver : Könnt ich Magie von meinem Pfad entfernen Die Zaübersprüch
509
der Mühe wert, ein Mensch zu sein.9 C’est tout
le
drame secret de l’œuvre qui s’avoue dans ce cri : chaque fois que Goe
510
Mensch zu sein.9 C’est tout le drame secret de
l’
œuvre qui s’avoue dans ce cri : chaque fois que Goethe invoque la caté
511
voue dans ce cri : chaque fois que Goethe invoque
la
catégorie sacrée de l’humain, comprenons qu’il y va de tout. Mais les
512
ue fois que Goethe invoque la catégorie sacrée de
l’
humain, comprenons qu’il y va de tout. Mais les anges enfin élèvent Fa
513
de l’humain, comprenons qu’il y va de tout. Mais
les
anges enfin élèvent Faust au-dessus de cette agonie symbolique de tou
514
et c’est leur chœur qui chante une dernière fois
la
loi, au moment où il reçoit la grâce de lui échapper : « Wer immer st
515
une dernière fois la loi, au moment où il reçoit
la
grâce de lui échapper : « Wer immer strebend sich bemüht, — Den könne
516
strebend sich bemüht, — Den können wir erlösen ».
Les
grandes entités symboliques l’accueillent dans leur harmonie : c’est
517
en wir erlösen ». Les grandes entités symboliques
l’
accueillent dans leur harmonie : c’est la « grande Magie » que Faust e
518
boliques l’accueillent dans leur harmonie : c’est
la
« grande Magie » que Faust enfin rejoint dans la pleine possession de
519
la « grande Magie » que Faust enfin rejoint dans
la
pleine possession de ses forces et l’assurance du regard. L’âme, puri
520
ejoint dans la pleine possession de ses forces et
l’
assurance du regard. L’âme, purifiée de sa « vieille dépouille » par l
521
ossession de ses forces et l’assurance du regard.
L’
âme, purifiée de sa « vieille dépouille » par l’effort aveuglant de la
522
. L’âme, purifiée de sa « vieille dépouille » par
l’
effort aveuglant de la vie, pénètre dans le Nouveau Jour et contemple
523
a « vieille dépouille » par l’effort aveuglant de
la
vie, pénètre dans le Nouveau Jour et contemple l’Indescriptible. Si F
524
» par l’effort aveuglant de la vie, pénètre dans
le
Nouveau Jour et contemple l’Indescriptible. Si Faust est le drame d’u
525
la vie, pénètre dans le Nouveau Jour et contemple
l’
Indescriptible. Si Faust est le drame d’une formidable patience sans c
526
Jour et contemple l’Indescriptible. Si Faust est
le
drame d’une formidable patience sans cesse remise en question, la Sai
527
ormidable patience sans cesse remise en question,
la
Saison en enfer est le drame d’une pureté avide, et son destin se jou
528
cesse remise en question, la Saison en enfer est
le
drame d’une pureté avide, et son destin se joue d’un coup. La grandeu
529
ne pureté avide, et son destin se joue d’un coup.
La
grandeur de Goethe est d’avoir su vieillir, celle de Rimbaud de s’y ê
530
celle de Rimbaud de s’y être refusé. Transportez
la
dialectique faustienne dans la vie d’un être jeune et libre encore de
531
efusé. Transportez la dialectique faustienne dans
la
vie d’un être jeune et libre encore de toute contrainte sociale, cult
532
rainte sociale, culturelle, voire physiologique ;
le
dessin se simplifiera jusqu’au schème unique, le rythme se précipiter
533
le dessin se simplifiera jusqu’au schème unique,
le
rythme se précipitera jusqu’à l’explosion, l’histoire se purifiera ju
534
u schème unique, le rythme se précipitera jusqu’à
l’
explosion, l’histoire se purifiera jusqu’au mythe. La donnée initiale
535
ue, le rythme se précipitera jusqu’à l’explosion,
l’
histoire se purifiera jusqu’au mythe. La donnée initiale est bien la m
536
xplosion, l’histoire se purifiera jusqu’au mythe.
La
donnée initiale est bien la même : c’est l’attrait d’une vision qui t
537
fiera jusqu’au mythe. La donnée initiale est bien
la
même : c’est l’attrait d’une vision qui transcende la vie médiocre. R
538
ythe. La donnée initiale est bien la même : c’est
l’
attrait d’une vision qui transcende la vie médiocre. Rimbaud s’y lance
539
ême : c’est l’attrait d’une vision qui transcende
la
vie médiocre. Rimbaud s’y lance avec l’emportement d’une révolte qui
540
ranscende la vie médiocre. Rimbaud s’y lance avec
l’
emportement d’une révolte qui traduit d’abord un excès féroce de vital
541
sement logique jusqu’au système de sa folie. Mais
l’
irruption de cette « magie » est si violente qu’elle a certainement an
542
» est si violente qu’elle a certainement angoissé
l’
enfant : n’est-ce point pour se défendre qu’il parle si fort, qu’il va
543
voirs avec une étrange exagération ? Et voici que
l’
hallucination le gagne et le submerge. « Je devins un opéra fabuleux.
544
trange exagération ? Et voici que l’hallucination
le
gagne et le submerge. « Je devins un opéra fabuleux. » Il a brûlé les
545
ration ? Et voici que l’hallucination le gagne et
le
submerge. « Je devins un opéra fabuleux. » Il a brûlé les étapes de l
546
erge. « Je devins un opéra fabuleux. » Il a brûlé
les
étapes de l’initiation. Mais on ne déchaîne pas de telles puissances
547
ins un opéra fabuleux. » Il a brûlé les étapes de
l’
initiation. Mais on ne déchaîne pas de telles puissances impunément. «
548
es puissances impunément. « Ma santé fut menacée.
La
terreur venait… J’étais mûr pour le trépas… » Alors paraît le doute,
549
fut menacée. La terreur venait… J’étais mûr pour
le
trépas… » Alors paraît le doute, entraînant la conscience. « Je vois
550
enait… J’étais mûr pour le trépas… » Alors paraît
le
doute, entraînant la conscience. « Je vois que mes malaises viennent
551
ur le trépas… » Alors paraît le doute, entraînant
la
conscience. « Je vois que mes malaises viennent de ne m’être pas figu
552
ne m’être pas figuré assez tôt que nous sommes à
l’
Occident. » L’Occident, c’est l’Esprit incarné. L’incarnation entraîne
553
figuré assez tôt que nous sommes à l’Occident. »
L’
Occident, c’est l’Esprit incarné. L’incarnation entraîne des « conditi
554
que nous sommes à l’Occident. » L’Occident, c’est
l’
Esprit incarné. L’incarnation entraîne des « conditions ». C’est la vi
555
l’Occident. » L’Occident, c’est l’Esprit incarné.
L’
incarnation entraîne des « conditions ». C’est la vision du travail hu
556
L’incarnation entraîne des « conditions ». C’est
la
vision du travail humain, inexorable et dégoûtant, mais comment échap
557
inexorable et dégoûtant, mais comment échapper ?
L’
hallucination est tombée, faisant place à une stupeur désolée. « Je ne
558
une stupeur désolée. « Je ne sais plus parler. »
Le
renoncement dès lors est fatal. « Moi ! moi qui me suis dit mage ou a
559
e suis rendu au sol, avec un devoir à chercher et
la
réalité rugueuse à étreindre. » C’est le cri même de Faust. « Il faut
560
rcher et la réalité rugueuse à étreindre. » C’est
le
cri même de Faust. « Il faut être absolument moderne. » Travailler. S
561
d’un seul tenant ; une seule et unique expérience
la
remplit : l’envahissement de la magie aboutissant au renoncement et à
562
ant ; une seule et unique expérience la remplit :
l’
envahissement de la magie aboutissant au renoncement et à l’action. Le
563
unique expérience la remplit : l’envahissement de
la
magie aboutissant au renoncement et à l’action. Le second Rimbaud est
564
ement de la magie aboutissant au renoncement et à
l’
action. Le second Rimbaud est vraiment le même que le premier, dans un
565
ent et à l’action. Le second Rimbaud est vraiment
le
même que le premier, dans une phase plus « réalisée ». L’homme modern
566
que le premier, dans une phase plus « réalisée ».
L’
homme moderne est peu fait pour comprendre cela, de même qu’il est peu
567
comprendre cela, de même qu’il est peu fait pour
la
grandeur et la pureté, et pour des paroles comme « Si ton œil te fait
568
a, de même qu’il est peu fait pour la grandeur et
la
pureté, et pour des paroles comme « Si ton œil te fait tomber dans le
569
es paroles comme « Si ton œil te fait tomber dans
le
péché, arrache-le et jette-le loin de toi ». Mais Rimbaud est d’une a
570
Si ton œil te fait tomber dans le péché, arrache-
le
et jette-le loin de toi ». Mais Rimbaud est d’une autre trempe : il a
571
te fait tomber dans le péché, arrache-le et jette-
le
loin de toi ». Mais Rimbaud est d’une autre trempe : il a déjà prouvé
572
d’une autre trempe : il a déjà prouvé en écrivant
les
Illuminations qu’il peut renoncer violemment à tout un monde faux pou
573
noncement. Nous aurions combiné tout cela avec de
la
littérature. Car il n’est pas donné à beaucoup d’hommes de devenir un
574
hommes de devenir un mythe à force de pureté dans
la
réalisation de leur destin. Rimbaud est notre mythe occidental : myth
575
cidental : mythe faustien. Il a vécu tragiquement
la
tentation orientale, l’a condamnée, l’a dépassée, acceptant comme Goe
576
n. Il a vécu tragiquement la tentation orientale,
l’
a condamnée, l’a dépassée, acceptant comme Goethe les conditions réell
577
agiquement la tentation orientale, l’a condamnée,
l’
a dépassée, acceptant comme Goethe les conditions réelles et données d
578
a condamnée, l’a dépassée, acceptant comme Goethe
les
conditions réelles et données de son effort particulier. Ce renonceme
579
un Orient de mythe, c’est cela même qui constitue
l’
Occident spirituel. C’est le refus de la magie qui fonde notre éthique
580
la même qui constitue l’Occident spirituel. C’est
le
refus de la magie qui fonde notre éthique, et ce dilemme est peut-êtr
581
constitue l’Occident spirituel. C’est le refus de
la
magie qui fonde notre éthique, et ce dilemme est peut-être le plus im
582
fonde notre éthique, et ce dilemme est peut-être
le
plus important qui se pose à l’esprit occidental, dès qu’il atteint l
583
mme est peut-être le plus important qui se pose à
l’
esprit occidental, dès qu’il atteint les régions de haute tension où l
584
se pose à l’esprit occidental, dès qu’il atteint
les
régions de haute tension où la seule « orientation » qu’il adopte suf
585
dès qu’il atteint les régions de haute tension où
la
seule « orientation » qu’il adopte suffit à déterminer une suite d’ac
586
ux. C’est une forme dialectique, « agonique », de
la
vie de l’âme, une forme cruciale, c’est-à-dire une de ces contradicti
587
une forme dialectique, « agonique », de la vie de
l’
âme, une forme cruciale, c’est-à-dire une de ces contradictions essent
588
ictions essentielles, en signe de croix, qui sont
la
marque même de la réalité dans une conscience occidentale. Supprimez
589
es, en signe de croix, qui sont la marque même de
la
réalité dans une conscience occidentale. Supprimez l’un des termes, e
590
cience occidentale. Supprimez l’un des termes, et
la
vie se détend, le tragique s’évanouit. Que ce mythe dialectique soit
591
. Supprimez l’un des termes, et la vie se détend,
le
tragique s’évanouit. Que ce mythe dialectique soit profondément const
592
ique soit profondément constitutif de notre être,
l’
extension et la diversité de ses aspects le prouvent. C’est l’oppositi
593
ndément constitutif de notre être, l’extension et
la
diversité de ses aspects le prouvent. C’est l’opposition du savoir et
594
être, l’extension et la diversité de ses aspects
le
prouvent. C’est l’opposition du savoir et du pouvoir, de la connaissa
595
et la diversité de ses aspects le prouvent. C’est
l’
opposition du savoir et du pouvoir, de la connaissance et de la souffr
596
t. C’est l’opposition du savoir et du pouvoir, de
la
connaissance et de la souffrance, de la spéculation et de l’existence
597
du savoir et du pouvoir, de la connaissance et de
la
souffrance, de la spéculation et de l’existence, de l’au-delà mystiqu
598
uvoir, de la connaissance et de la souffrance, de
la
spéculation et de l’existence, de l’au-delà mystique et de l’immédiat
599
ance et de la souffrance, de la spéculation et de
l’
existence, de l’au-delà mystique et de l’immédiat éthique. Et quels so
600
uffrance, de la spéculation et de l’existence, de
l’
au-delà mystique et de l’immédiat éthique. Et quels sont les plus gran
601
on et de l’existence, de l’au-delà mystique et de
l’
immédiat éthique. Et quels sont les plus grands Occidentaux ? Ceux qui
602
mystique et de l’immédiat éthique. Et quels sont
les
plus grands Occidentaux ? Ceux qui ont incarné le choix le plus audac
603
es plus grands Occidentaux ? Ceux qui ont incarné
le
choix le plus audacieux. Pascal choisit une fois pour toutes, dans un
604
rands Occidentaux ? Ceux qui ont incarné le choix
le
plus audacieux. Pascal choisit une fois pour toutes, dans une crise l
605
hoisit dans une crise instinctive qui ressemble à
la
chute soudaine de l’ivresse devant le mortel danger qui se lève à un
606
instinctive qui ressemble à la chute soudaine de
l’
ivresse devant le mortel danger qui se lève à un pas. Tous deux réalis
607
ressemble à la chute soudaine de l’ivresse devant
le
mortel danger qui se lève à un pas. Tous deux réalisent le renoncemen
608
danger qui se lève à un pas. Tous deux réalisent
le
renoncement, le deuxième temps de cette dialectique, dans un mouvemen
609
reviennent tous deux de loin, d’un long abandon à
l’
erreur. Goethe n’a pas connu de tels déchirements. Et c’est lui qui mé
610
u de tels déchirements. Et c’est lui qui méritera
la
phrase de la Saison : « Pas de partis de salut violents. » Dès les pr
611
hirements. Et c’est lui qui méritera la phrase de
la
Saison : « Pas de partis de salut violents. » Dès les premiers instan
612
défense et de lenteur. Il avance ainsi pas à pas,
l’
âme tendue dans une puissante circonspection, pendant soixante ans, sa
613
amais s’abandonner aux bienheureuses violences de
l’
orage, au repos de la démesure. On rit de ses allures compassées, des
614
x bienheureuses violences de l’orage, au repos de
la
démesure. On rit de ses allures compassées, des solennelles banalités
615
ssées, des solennelles banalités dont il gratifie
le
pauvre Eckermann. Je ne puis voir dans ces façons que la distraction
616
re Eckermann. Je ne puis voir dans ces façons que
la
distraction souveraine d’une âme tout occupée à dompter ses dieux. Un
617
dieux. Une haute menace, invisible à tout autre,
l’
accompagne sans trêve, et c’est d’elle qu’il tire ses forces, toujours
618
informe peu à peu une sorte d’instinct, libérant
l’
attention consciente. C’est ainsi que le voyant audacieux qui écrivit
619
libérant l’attention consciente. C’est ainsi que
le
voyant audacieux qui écrivit les chœurs mystiques du Second Faust peu
620
. C’est ainsi que le voyant audacieux qui écrivit
les
chœurs mystiques du Second Faust peut aussi faire figure de sage offi
621
st peut aussi faire figure de sage officiel parmi
les
philistins. Le somnambule est désormais protégé par une cotte d’invis
622
ire figure de sage officiel parmi les philistins.
Le
somnambule est désormais protégé par une cotte d’invisible silence. V
623
d’invisible silence. Vous pouvez lui parler sans
le
troubler : les mots n’atteignent plus son rêve profond. Et le cérémon
624
ilence. Vous pouvez lui parler sans le troubler :
les
mots n’atteignent plus son rêve profond. Et le cérémonieux silence du
625
: les mots n’atteignent plus son rêve profond. Et
le
cérémonieux silence du ministre renouvelle le vieux mythe germanique
626
Et le cérémonieux silence du ministre renouvelle
le
vieux mythe germanique de la « Tarnkappe », du manteau qui rend invis
627
ministre renouvelle le vieux mythe germanique de
la
« Tarnkappe », du manteau qui rend invisible. ⁂ Cette similitude de f
628
rend invisible. ⁂ Cette similitude de forme dans
le
cours de la magie chez Goethe et chez Rimbaud, et d’autre part le con
629
ble. ⁂ Cette similitude de forme dans le cours de
la
magie chez Goethe et chez Rimbaud, et d’autre part le contraste absol
630
agie chez Goethe et chez Rimbaud, et d’autre part
le
contraste absolu des rythmes, vont se traduire dans la similitude des
631
ntraste absolu des rythmes, vont se traduire dans
la
similitude des conclusions éthiques et dans la divergence des réalisa
632
ns la similitude des conclusions éthiques et dans
la
divergence des réalisations littéraires. « Bon esprit, prends garde !
633
de salut violents. Exerce-toi ». Objurgation que
l’
on croirait tirée de quelque journal intime du Goethe des années ascét
634
e du Goethe des années ascétiques, à Weimar avant
l’
Italie. Et le passage fameux de la Saison : « moi qui me suis dit mage
635
es années ascétiques, à Weimar avant l’Italie. Et
le
passage fameux de la Saison : « moi qui me suis dit mage ou ange… » r
636
à Weimar avant l’Italie. Et le passage fameux de
la
Saison : « moi qui me suis dit mage ou ange… » rappelle étrangement c
637
appelle étrangement ces vers du Premier Faust que
l’
on citait plus haut : « Moi qui me suis cru plus grand que le Chérubin
638
plus haut : « Moi qui me suis cru plus grand que
le
Chérubin. » « Point de cantiques : tenir le pas gagné… la réalité rug
639
d que le Chérubin. » « Point de cantiques : tenir
le
pas gagné… la réalité rugueuse à étreindre ». Certes, les sentences d
640
bin. » « Point de cantiques : tenir le pas gagné…
la
réalité rugueuse à étreindre ». Certes, les sentences du vieil Olympi
641
gagné… la réalité rugueuse à étreindre ». Certes,
les
sentences du vieil Olympien de la légende ont peu de consonance avec
642
dre ». Certes, les sentences du vieil Olympien de
la
légende ont peu de consonance avec un tel pathétique, mais quel écho
643
hétique, mais quel écho n’eût-il pas éveillé dans
l’
âme du jeune ministre de 32 ans, adonné vers ce temps au plus dur effo
644
ode de repliement et de refus, si douloureuse que
le
signe en devient visible sur ses traits. Je ne me lasse pas de médite
645
lasse pas de méditer ce visage dont Klauer modela
l’
effigie passionnément triste et dominatrice. Large bouche aux lèvres s
646
et dominatrice. Large bouche aux lèvres serrées,
l’
inférieure creusée comme d’un sanglot retenu, et relâchée aux commissu
647
hée aux commissures, — tristesse et volupté. Mais
le
front d’une plénitude royale s’avance fortement contre la lumière, et
648
d’une plénitude royale s’avance fortement contre
la
lumière, et les yeux, entre cette bouche et ce front, disent d’un sob
649
e royale s’avance fortement contre la lumière, et
les
yeux, entre cette bouche et ce front, disent d’un sobre et méditant r
650
et ce front, disent d’un sobre et méditant regard
le
mot suprême de la Saison, ce cri sourd du plus lucide héroïsme : « Et
651
t d’un sobre et méditant regard le mot suprême de
la
Saison, ce cri sourd du plus lucide héroïsme : « Et allons ! » Goethe
652
me : « Et allons ! » Goethe seul est allé jusqu’à
la
délivrance consciente. Il y a dans tout désespoir à la fois l’angoiss
653
consciente. Il y a dans tout désespoir à la fois
l’
angoisse de la catastrophe et la secrète, l’inavouable joie de la libé
654
l y a dans tout désespoir à la fois l’angoisse de
la
catastrophe et la secrète, l’inavouable joie de la libération. Imposs
655
sespoir à la fois l’angoisse de la catastrophe et
la
secrète, l’inavouable joie de la libération. Impossible d’isoler ces
656
fois l’angoisse de la catastrophe et la secrète,
l’
inavouable joie de la libération. Impossible d’isoler ces deux composa
657
a catastrophe et la secrète, l’inavouable joie de
la
libération. Impossible d’isoler ces deux composantes dans l’aventure
658
on. Impossible d’isoler ces deux composantes dans
l’
aventure rimbaldienne. Mais chez Goethe, c’est la longueur du temps qu
659
l’aventure rimbaldienne. Mais chez Goethe, c’est
la
longueur du temps qui les dénoncera. Et cette fameuse sérénité de sa
660
Mais chez Goethe, c’est la longueur du temps qui
les
dénoncera. Et cette fameuse sérénité de sa vieillesse, ce n’est rien
661
vieillesse, ce n’est rien d’autre, peut-être, que
le
triomphe de l’élément libérateur du désespoir. La longue peine de cel
662
n’est rien d’autre, peut-être, que le triomphe de
l’
élément libérateur du désespoir. La longue peine de celui « qui toujou
663
le triomphe de l’élément libérateur du désespoir.
La
longue peine de celui « qui toujours s’est efforcé » a purifié le cor
664
de celui « qui toujours s’est efforcé » a purifié
le
corps, et l’âme est prête à recevoir « l’amour d’en haut ». Car telle
665
i toujours s’est efforcé » a purifié le corps, et
l’
âme est prête à recevoir « l’amour d’en haut ». Car telle est le yoga
666
purifié le corps, et l’âme est prête à recevoir «
l’
amour d’en haut ». Car telle est le yoga occidental, dont le Second Fa
667
e à recevoir « l’amour d’en haut ». Car telle est
le
yoga occidental, dont le Second Faust restera comme le livre sacré. Q
668
ga occidental, dont le Second Faust restera comme
le
livre sacré. Que cette discipline libératrice comporte pour Rimbaud l
669
ette discipline libératrice comporte pour Rimbaud
le
silence, alors qu’elle propose à Goethe, comme un exercice de choix,
670
lle propose à Goethe, comme un exercice de choix,
l’
écriture, — cela n’a rien que de logique, et résulte de la définition
671
re, — cela n’a rien que de logique, et résulte de
la
définition même d’un tel yoga. Tout savoir doit être confirmé par un
672
Tout savoir doit être confirmé par un faire, qui
le
tait et l’exprime à la fois. Le « faire » de Rimbaud ne peut être la
673
r doit être confirmé par un faire, qui le tait et
l’
exprime à la fois. Le « faire » de Rimbaud ne peut être la littérature
674
par un faire, qui le tait et l’exprime à la fois.
Le
« faire » de Rimbaud ne peut être la littérature, puisque écrire sign
675
e à la fois. Le « faire » de Rimbaud ne peut être
la
littérature, puisque écrire signifie pour lui révéler, parler, crier,
676
gnifie pour lui révéler, parler, crier, miraculer
le
réel. Au contraire l’on peut considérer sans paradoxe que la littérat
677
r, parler, crier, miraculer le réel. Au contraire
l’
on peut considérer sans paradoxe que la littérature de Goethe est un d
678
contraire l’on peut considérer sans paradoxe que
la
littérature de Goethe est un des moyens de silence dont il dispose. N
679
de silence dont il dispose. Ni plus ni moins que
l’
étude des sciences naturelles, la régie d’un théâtre ou l’administrati
680
lus ni moins que l’étude des sciences naturelles,
la
régie d’un théâtre ou l’administration du Grand-Duché. « J’ai toujour
681
des sciences naturelles, la régie d’un théâtre ou
l’
administration du Grand-Duché. « J’ai toujours considéré mon activité
682
des assiettes »10. Si tout de même il a peiné sur
la
composition d’Iphigénie ou des Ballades, c’est que l’art est pour lui
683
omposition d’Iphigénie ou des Ballades, c’est que
l’
art est pour lui la tentation la plus aiguë de jouer avec les mystères
684
nie ou des Ballades, c’est que l’art est pour lui
la
tentation la plus aiguë de jouer avec les mystères, et par là même l’
685
llades, c’est que l’art est pour lui la tentation
la
plus aiguë de jouer avec les mystères, et par là même l’occasion de r
686
pour lui la tentation la plus aiguë de jouer avec
les
mystères, et par là même l’occasion de réaliser sans cesse à nouveau
687
aiguë de jouer avec les mystères, et par là même
l’
occasion de réaliser sans cesse à nouveau l’exigence dernière de la ma
688
même l’occasion de réaliser sans cesse à nouveau
l’
exigence dernière de la magie : son reniement au profit de l’action. I
689
liser sans cesse à nouveau l’exigence dernière de
la
magie : son reniement au profit de l’action. Insistons sur ce terme d
690
dernière de la magie : son reniement au profit de
l’
action. Insistons sur ce terme de profit, qu’on ne saurait ici taxer d
691
aurait ici taxer de vulgarité, puisqu’il concerne
les
fins les plus hautes de l’existence terrestre. « Un fait de notre vie
692
i taxer de vulgarité, puisqu’il concerne les fins
les
plus hautes de l’existence terrestre. « Un fait de notre vie ne vaut
693
é, puisqu’il concerne les fins les plus hautes de
l’
existence terrestre. « Un fait de notre vie ne vaut pas en tant qu’il
694
u’il signifie quelque chose… Il est bien rare que
l’
on soit apte à s’agréger ce qui est supérieur. C’est pourquoi l’on fai
695
à s’agréger ce qui est supérieur. C’est pourquoi
l’
on fait bien, dans la vie ordinaire, de garder ces choses-là pour soi
696
st supérieur. C’est pourquoi l’on fait bien, dans
la
vie ordinaire, de garder ces choses-là pour soi et de n’en découvrir
697
s puissent être de quelque avantage aux autres11…
L’
homme n’est pas né pour résoudre le problème de l’univers, mais bien p
698
aux autres11… L’homme n’est pas né pour résoudre
le
problème de l’univers, mais bien pour rechercher où tend ce problème,
699
L’homme n’est pas né pour résoudre le problème de
l’
univers, mais bien pour rechercher où tend ce problème, et ensuite se
700
ù tend ce problème, et ensuite se maintenir entre
les
limites de l’intelligible »12. L’on découvre ici la source de l’étran
701
ème, et ensuite se maintenir entre les limites de
l’
intelligible »12. L’on découvre ici la source de l’étrange refus de Go
702
aintenir entre les limites de l’intelligible »12.
L’
on découvre ici la source de l’étrange refus de Goethe, dès qu’il s’ag
703
limites de l’intelligible »12. L’on découvre ici
la
source de l’étrange refus de Goethe, dès qu’il s’agit de faire état d
704
’intelligible »12. L’on découvre ici la source de
l’
étrange refus de Goethe, dès qu’il s’agit de faire état des causes pre
705
pose aux dévots : « S’occuper d’idées relatives à
l’
immortalité, poursuivit Goethe, cela convient aux gens du monde et sur
706
ue chose ici-bas, et qui par conséquent doit tous
les
jours travailler, combattre, agir, laisse en paix le monde futur et s
707
jours travailler, combattre, agir, laisse en paix
le
monde futur et se contente d’être actif et utile en celui-ci »13. À q
708
confession mémorable : « Nous ne devons proférer
les
plus hautes maximes qu’autant qu’elles sont utiles pour le bien du mo
709
autes maximes qu’autant qu’elles sont utiles pour
le
bien du monde. Les autres, nous devons les garder pour nous ; elles s
710
utant qu’elles sont utiles pour le bien du monde.
Les
autres, nous devons les garder pour nous ; elles seront toujours là p
711
es pour le bien du monde. Les autres, nous devons
les
garder pour nous ; elles seront toujours là pour diffuser leur éclat
712
ser leur éclat sur tout ce que nous ferons, comme
la
douce lumière d’un soleil caché14. » Écrire, tout en se taisant. Et c
713
ls entendront ce silence, qui auront su percevoir
l’
accent dominateur et tendu des pages les plus égales et sereines du Fa
714
percevoir l’accent dominateur et tendu des pages
les
plus égales et sereines du Faust. Mais, qu’à ce tempérament démoniaqu
715
es du Faust. Mais, qu’à ce tempérament démoniaque
l’
on enlève la force plus grande encore du caractère, et voici la confes
716
Mais, qu’à ce tempérament démoniaque l’on enlève
la
force plus grande encore du caractère, et voici la confession éruptiv
717
a force plus grande encore du caractère, et voici
la
confession éruptive : les Illuminations naissent d’une telle rupture.
718
e du caractère, et voici la confession éruptive :
les
Illuminations naissent d’une telle rupture. Elles sont le champ même1
719
inations naissent d’une telle rupture. Elles sont
le
champ même15 où Rimbaud se livre à l’expérience spirituelle, où il se
720
Elles sont le champ même15 où Rimbaud se livre à
l’
expérience spirituelle, où il se livre tout entier. Et c’est là sa pur
721
r. Et c’est là sa pureté, mais c’est aussi ce qui
l’
accule en fin de compte à l’évasion. La rage avec laquelle il se rabat
722
is c’est aussi ce qui l’accule en fin de compte à
l’
évasion. La rage avec laquelle il se rabat sur le travail « à mains »,
723
ssi ce qui l’accule en fin de compte à l’évasion.
La
rage avec laquelle il se rabat sur le travail « à mains », rage de re
724
l’évasion. La rage avec laquelle il se rabat sur
le
travail « à mains », rage de revanche, par son excès même est encore
725
poque voudra-t-elle encore de ces évasions ? Elle
les
reproche au christianisme, avec moins de raison d’ailleurs (puisque l
726
ianisme, avec moins de raison d’ailleurs (puisque
le
christianisme affirme que l’éternité est dans l’instant : Aeternitas
727
d’ailleurs (puisque le christianisme affirme que
l’
éternité est dans l’instant : Aeternitas non est tempus sine fine, sed
728
le christianisme affirme que l’éternité est dans
l’
instant : Aeternitas non est tempus sine fine, sed nunc stans). Elle v
729
sed nunc stans). Elle veut cette vie-ci. Et tout
le
reste, qu’elle soit marxiste ou nietzschéenne, elle l’appelle « l’arr
730
ste, qu’elle soit marxiste ou nietzschéenne, elle
l’
appelle « l’arrière-monde » et le rejette, en ceci plus chrétienne, pl
731
soit marxiste ou nietzschéenne, elle l’appelle «
l’
arrière-monde » et le rejette, en ceci plus chrétienne, plus tragique
732
tzschéenne, elle l’appelle « l’arrière-monde » et
le
rejette, en ceci plus chrétienne, plus tragique que l’époque romantiq
733
jette, en ceci plus chrétienne, plus tragique que
l’
époque romantique (Nietzsche plus chrétien que son idée du christianis
734
rait de placer Goethe au-dessus de Rimbaud. C’est
la
pureté démesurée de Rimbaud qui nous juge, et la grandeur humaine de
735
la pureté démesurée de Rimbaud qui nous juge, et
la
grandeur humaine de Goethe. Et qui voudrait les opposer ? Que signifi
736
et la grandeur humaine de Goethe. Et qui voudrait
les
opposer ? Que signifierait un choix dont l’opération resterait pureme
737
rait les opposer ? Que signifierait un choix dont
l’
opération resterait purement imaginaire et vaniteuse pour nous, tant q
738
cette grandeur ne tenteront pas nos âmes jusqu’à
la
mort ? L’homme ne peut juger que plus bas que lui. C’est-à-dire qu’il
739
ndeur ne tenteront pas nos âmes jusqu’à la mort ?
L’
homme ne peut juger que plus bas que lui. C’est-à-dire qu’il n’en a pa
740
e plus bas que lui. C’est-à-dire qu’il n’en a pas
le
droit. Certes, il est d’autres recours, d’autres points de vision qu’
741
es recours, d’autres points de vision qu’humains.
La
révélation chrétienne déborde notre condition, si elle la comble par
742
ation chrétienne déborde notre condition, si elle
la
comble par ailleurs. Ce critère du salut, cette transcendance, en bon
743
tenait ses faiblesses pour des erreurs, non pour
le
péché, et d’autre part un orgueil assumé, puis renié avec la même vio
744
t d’autre part un orgueil assumé, puis renié avec
la
même violence, — celle dont il est écrit qu’elle force les portes du
745
violence, — celle dont il est écrit qu’elle force
les
portes du Royaume des Cieux. Il reste que les temps nous pressent de
746
rce les portes du Royaume des Cieux. Il reste que
les
temps nous pressent de toutes parts au choix, jusque dans nos admirat
747
1932, dans ce Francfort en proie au Carnaval et à
l’
angoisse, ce n’est pas moi qui pose la question : elle m’assiège. Le d
748
e, pour cette bourgeoisie dont je viens d’admirer
les
trésors patinés dans la haute demeure familiale des Goethe. Aujourd’h
749
dont je viens d’admirer les trésors patinés dans
la
haute demeure familiale des Goethe. Aujourd’hui… Un immense glisseme
750
es Goethe. Aujourd’hui… Un immense glissement de
la
réalité hors des cadres d’une logique statique et cartésienne nous po
751
artésienne nous porte en des régions nouvelles de
l’
esprit où l’action redevient notre seul critère de cohérence. C’est di
752
ous porte en des régions nouvelles de l’esprit où
l’
action redevient notre seul critère de cohérence. C’est dire que nous
753
lus, prenons garde de nous laisser convaincre par
les
seuls éclats d’un fanatisme à vrai dire splendide. (Qui me guérira de
754
natisme à vrai dire splendide. (Qui me guérira de
la
honte de n’être pas Rimbaud ?) Plus que jamais, il faudrait s’appliqu
755
faudrait s’appliquer à distinguer dans ce vertige
la
réelle puissance d’une voix volontairement assourdie. Le silence de G
756
le puissance d’une voix volontairement assourdie.
Le
silence de Goethe n’est pas moins dangereux, pour qui sait l’entendre
757
e Goethe n’est pas moins dangereux, pour qui sait
l’
entendre, que l’imprécation de Rimbaud : et tous deux nous contraignen
758
as moins dangereux, pour qui sait l’entendre, que
l’
imprécation de Rimbaud : et tous deux nous contraignent aux tâches imm
759
traignent aux tâches immédiates, c’est-à-dire : à
l’
actualisation de notre réalité. « Il faut être absolument moderne ».
760
mann, 4 février 1829. 9. Si je pouvais écarter
la
magie de mon chemin Oublier tout à fait les formules d’enchaînement S
761
carter la magie de mon chemin Oublier tout à fait
les
formules d’enchaînement Si j’étais devant toi, ô nature un homme soli
762
un homme solitaire, Sans doute vaudrait-il alors
la
peine d’être un homme. 10. Conversations avec Eckermann, 2 mai 18
763
t non plus symbolique. d. Rougemont Denis de, «
Le
silence de Goethe », La Nouvelle Revue française, Paris, mars 1932, p
764
d. Rougemont Denis de, « Le silence de Goethe »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, mars 1932, p. 480-494.
765
es de famille, par Georges Duhamel (mai 1932)e
L’
ambiguïté, c’est du paradoxe détendu ; ou si l’on veut, c’est une cont
766
L’ambiguïté, c’est du paradoxe détendu ; ou si
l’
on veut, c’est une contradiction intérieure dont les deux termes, faut
767
’on veut, c’est une contradiction intérieure dont
les
deux termes, faute d’être assumés sur le plan commun de la conscience
768
ermes, faute d’être assumés sur le plan commun de
la
conscience où ils s’exalteraient en s’opposant franchement, tirent à
769
sens, le dernier livre de M. Duhamel, consacré à
la
critique des aspects orduriers et bassement mécaniques de la vie mode
770
des aspects orduriers et bassement mécaniques de
la
vie moderne, illustre avec un talent qu’il n’est plus temps de discut
771
exemplairement ambiguë. Rien de plus légitime que
le
désir d’être entendu du grand public, et c’est pourquoi l’on ne voudr
772
d’être entendu du grand public, et c’est pourquoi
l’
on ne voudrait pas reprocher à M. Duhamel d’avoir adopté pour cette fo
773
el, ou plus exactement une certaine rhétorique de
l’
indignation dont les figures servent en France indifféremment à des fi
774
ent une certaine rhétorique de l’indignation dont
les
figures servent en France indifféremment à des fins électorales, jour
775
listiques ou philanthropiques. Il faut avouer que
l’
instrument révèle son insuffisance quand c’est un virtuose qui se mêle
776
virtuose qui se mêle d’en jouer. Mais sans doute
le
but serait-il atteint si M. Duhamel, visiblement gêné, ne coupait lui
777
pas dupe, qu’il n’est pas si furieux que ça, que
la
littérature enfin garde ses droits. Aussi n’est-ce point sans une gên
778
ssi n’est-ce point sans une gêne grandissante que
l’
on poursuit la lecture de ces pages où maints paragraphes apportent en
779
oint sans une gêne grandissante que l’on poursuit
la
lecture de ces pages où maints paragraphes apportent entre deux tours
780
ximations vulgaires qui « rendraient » mieux sous
la
rubrique Mon film 16. En d’autres passages, d’une expression plus ser
781
errée, M. Duhamel cherche ce qu’on appelait jadis
le
morceau de bravoure, la page sur « les bruits de mon village » qui se
782
e ce qu’on appelait jadis le morceau de bravoure,
la
page sur « les bruits de mon village » qui servira de modèle aux écol
783
elait jadis le morceau de bravoure, la page sur «
les
bruits de mon village » qui servira de modèle aux écoliers futurs. Ma
784
le aux écoliers futurs. Mais lorsqu’il stigmatise
les
méfaits des « grandes brutes mécaniques », sa verve — qu’il me pardon
785
brutes mécaniques », sa verve — qu’il me pardonne
l’
image technique — n’embraye pas, et paraît forcée. Ses laborieuses exa
786
sie qui enflammerait notre indignation. C’est que
l’
expression traditionnelle de la mauvaise humeur gauloise, héritage d’u
787
gnation. C’est que l’expression traditionnelle de
la
mauvaise humeur gauloise, héritage d’un classicisme nettement pessimi
788
ssicisme nettement pessimiste, s’accorde mal avec
l’
impénitente foi dans le genre humain que M. Duhamel ne cesse d’entrete
789
imiste, s’accorde mal avec l’impénitente foi dans
le
genre humain que M. Duhamel ne cesse d’entretenir17. Ce malaise dans
790
Duhamel ne cesse d’entretenir17. Ce malaise dans
l’
expression traduit d’ailleurs une équivoque foncière et qui porte sur
791
’ailleurs une équivoque foncière et qui porte sur
le
thème général du livre. Il est inquiétant de voir un esprit de cette
792
rop et trop peu. Car, ou bien M. Duhamel critique
l’
abus des mécaniques, ce qui revient à faire le vain procès de la bêtis
793
que l’abus des mécaniques, ce qui revient à faire
le
vain procès de la bêtise humaine. Ou bien sa réaction de dégoût est v
794
aniques, ce qui revient à faire le vain procès de
la
bêtise humaine. Ou bien sa réaction de dégoût est véritablement profo
795
véritablement profonde, mais alors elle implique
la
condamnation d’une conception du monde à la fois libérale et inconsci
796
d’une civilisation dont on refuserait de dénoncer
les
principes ou plutôt la carence de principes directeurs dignes de ce n
797
on refuserait de dénoncer les principes ou plutôt
la
carence de principes directeurs dignes de ce nom ? Serait-ce que la m
798
cipes directeurs dignes de ce nom ? Serait-ce que
la
mauvaise humeur du bourgeois dérangé agissant comme dérivatif, assure
799
oir une sorte de sublimation à rebours du sens de
la
révolte ? On serait en droit d’exiger d’un critique de son temps qu’i
800
que de son temps qu’il déclare ce qu’il attend de
l’
homme. Après quoi seulement l’on distinguerait l’ordre de grandeur du
801
ce qu’il attend de l’homme. Après quoi seulement
l’
on distinguerait l’ordre de grandeur du grief qu’il fait à ce temps. C
802
l’homme. Après quoi seulement l’on distinguerait
l’
ordre de grandeur du grief qu’il fait à ce temps. C’est ce qu’en vain
803
grief qu’il fait à ce temps. C’est ce qu’en vain
l’
on cherche au cours de cette suite de messages adressés aux Princes de
804
messages adressés aux Princes des Prêtres, à MM.
les
Députés, au chef du gouvernement. L’on s’étonne que M. Duhamel n’ait
805
tres, à MM. les Députés, au chef du gouvernement.
L’
on s’étonne que M. Duhamel n’ait joint à son recueil une épître au pré
806
à son recueil une épître au préfet de Police sur
les
Embarras de Paris. Sujet de pastiche facile : décrire l’état d’esprit
807
rras de Paris. Sujet de pastiche facile : décrire
l’
état d’esprit du Français moyen qui brandit son parapluie sous le nez
808
du Français moyen qui brandit son parapluie sous
le
nez de l’agent, invective les automobilistes, déclame au beau milieu
809
is moyen qui brandit son parapluie sous le nez de
l’
agent, invective les automobilistes, déclame au beau milieu de la chau
810
t son parapluie sous le nez de l’agent, invective
les
automobilistes, déclame au beau milieu de la chaussée des tirades gén
811
ive les automobilistes, déclame au beau milieu de
la
chaussée des tirades généreusement libertaires, enraye la circulation
812
sée des tirades généreusement libertaires, enraye
la
circulation, « mais traverse dans les clous ». 16. « La ménagère au
813
ires, enraye la circulation, « mais traverse dans
les
clous ». 16. « La ménagère aux mains cuites qui raccommode ses chau
814
lation, « mais traverse dans les clous ». 16. «
La
ménagère aux mains cuites qui raccommode ses chaussures, le casque au
815
e aux mains cuites qui raccommode ses chaussures,
le
casque aux cheveux, tête farcie, oui farcie de musique, de musique, d
816
ologue financier ou de hoquets publicitaires. “De
la
musique avant toute chose…” Oh ! vous ne diriez plus cela, Verlaine !
817
nsi se termine ce livre amer, sans qu’à vrai dire
l’
on distingue sur quoi s’appuie pareil optimisme — sinon sur la crainte
818
ue sur quoi s’appuie pareil optimisme — sinon sur
la
crainte instinctive de choquer un public, qui ne supporte que la mesu
819
inctive de choquer un public, qui ne supporte que
la
mesure, par l’affirmation de prévisions horribles, et cependant confo
820
uer un public, qui ne supporte que la mesure, par
l’
affirmation de prévisions horribles, et cependant conformes à la natur
821
de prévisions horribles, et cependant conformes à
la
nature des choses. e. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Georges
822
rendu] Georges Duhamel, Querelles de famille »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, mai 1932, p. 913-915.
823
fiante, d’une grande force d’expression concrète.
Le
petit chien Botte raconte ses journées, « des choses et des choses co
824
a seconde page, c’est à pousser des cris de joie.
Les
enfants comprendront-ils ? Dans la mesure seulement où le plan de dép
825
cris de joie. Les enfants comprendront-ils ? Dans
la
mesure seulement où le plan de dépoétisation de leur monde confié aux
826
ts comprendront-ils ? Dans la mesure seulement où
le
plan de dépoétisation de leur monde confié aux manuels primaires, rat
827
nuels primaires, rate. Lire à petites doses. Vers
la
fin, qui est émouvante, décider que ceux qui n’aimeront pas sont ferm
828
x qui n’aimeront pas sont fermés à toute poésie à
l’
état sauvage — la vraie. f. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Ru
829
pas sont fermés à toute poésie à l’état sauvage —
la
vraie. f. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Rudyard Kipling, Ce
830
ndu] Rudyard Kipling, Ce chien, ton serviteur »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, juillet 1932, p. 149.
831
Éloge de
l’
imprudence, par Marcel Jouhandeau (septembre 1932)g Si dans tous le
832
rcel Jouhandeau (septembre 1932)g Si dans tous
les
écrits de notre temps il est question de bien, de mal, de vice et de
833
e et de vertu, de péché même, parfois, quels sont
les
écrivains capables de déclarer leurs références, leurs poids et leurs
834
leurs poids et leurs mesures, enfin leur choix ?
L’
Occident cultive l’anarchie nominaliste la plus grave : il ne sait ou
835
rs mesures, enfin leur choix ? L’Occident cultive
l’
anarchie nominaliste la plus grave : il ne sait ou n’ose plus définir
836
choix ? L’Occident cultive l’anarchie nominaliste
la
plus grave : il ne sait ou n’ose plus définir et assumer son bien ni
837
bien ni son mal, — et sans cesse il en parle, car
la
Société vit sous le règne des jugements. Mais d’autre part, peut-on p
838
t sans cesse il en parle, car la Société vit sous
le
règne des jugements. Mais d’autre part, peut-on parler réellement du
839
resque plus personne n’y croit avec sérieux, ni à
l’
enfer ? Quand personne ne déclare un Bien si haut qu’on se fasse tuer
840
tuer pour ce Bien ? Ceci pour indiquer à la fois
l’
importance et les limites du petit livre si justement paradoxal de Jou
841
en ? Ceci pour indiquer à la fois l’importance et
les
limites du petit livre si justement paradoxal de Jouhandeau, — de cet
842
ierkegaard critique ses mesures morales, en donne
la
référence : ce Dieu terrible. Et sa vertu est choix. L’absolu d’un Ni
843
érence : ce Dieu terrible. Et sa vertu est choix.
L’
absolu d’un Nietzsche, c’est le Grand Midi ; et sa vertu : dépassement
844
a vertu est choix. L’absolu d’un Nietzsche, c’est
le
Grand Midi ; et sa vertu : dépassement. Jouhandeau à son tour se plac
845
ce dans ces marches extrêmes du bien et du mal où
l’
apologie de l’un équivaut presque à celle de l’autre. C’est là qu’écla
846
ut presque à celle de l’autre. C’est là qu’éclate
la
violence des contraires. Pour tous ceux qui ont l’audace de se mainte
847
a violence des contraires. Pour tous ceux qui ont
l’
audace de se maintenir dans une telle dialectique, il n’existe pas un
848
dialectique, il n’existe pas un choix préalable à
la
tentation, un choix universel et abstrait, mais des choix qui s’impos
849
qui s’imposent avec une violence égale à celle de
la
tentation — c’est la même violence — dans chaque situation existentie
850
ne violence égale à celle de la tentation — c’est
la
même violence — dans chaque situation existentielle. En sorte qu’il n
851
Bien par exemple, mais que dans chaque instant de
l’
existence le mal et le bien conservent toutes leurs chances d’être pré
852
mple, mais que dans chaque instant de l’existence
le
mal et le bien conservent toutes leurs chances d’être préférés, et to
853
que dans chaque instant de l’existence le mal et
le
bien conservent toutes leurs chances d’être préférés, et toutes leurs
854
référés, et toutes leurs tentations. En sorte que
l’
apologie de l’un évoque la grandeur de l’autre, et peut-être le secret
855
entations. En sorte que l’apologie de l’un évoque
la
grandeur de l’autre, et peut-être le secret désir de l’éveiller à la
856
l’un évoque la grandeur de l’autre, et peut-être
le
secret désir de l’éveiller à la conscience. Le but de ce débat, celui
857
ndeur de l’autre, et peut-être le secret désir de
l’
éveiller à la conscience. Le but de ce débat, celui de Kierkegaard, ce
858
tre, et peut-être le secret désir de l’éveiller à
la
conscience. Le but de ce débat, celui de Kierkegaard, celui de Nietzs
859
re le secret désir de l’éveiller à la conscience.
Le
but de ce débat, celui de Kierkegaard, celui de Nietzsche, celui prés
860
présentement de Jouhandeau, c’est de transcender
la
morale et ses canons donnés d’avance. L’audace du « choix » ou du « d
861
nscender la morale et ses canons donnés d’avance.
L’
audace du « choix » ou du « dépassement », cette vertu qui « supprime
862
ou du « dépassement », cette vertu qui « supprime
la
morale », Jouhandeau l’appelle imprudence ou générosité. Et ces mots
863
ette vertu qui « supprime la morale », Jouhandeau
l’
appelle imprudence ou générosité. Et ces mots ne désignent pas autre c
864
intensité ou une pureté toujours plus folle dans
le
bien comme dans le mal. « Je mettrais volontiers dans le même sac hon
865
ureté toujours plus folle dans le bien comme dans
le
mal. « Je mettrais volontiers dans le même sac honnêtes et malhonnête
866
comme dans le mal. « Je mettrais volontiers dans
le
même sac honnêtes et malhonnêtes gens, mais non pas le généreux avec
867
me sac honnêtes et malhonnêtes gens, mais non pas
le
généreux avec le pleutre, une âme triste avec une âme joyeuse. » Voil
868
t malhonnêtes gens, mais non pas le généreux avec
le
pleutre, une âme triste avec une âme joyeuse. » Voilà bien le leitmot
869
une âme triste avec une âme joyeuse. » Voilà bien
le
leitmotiv de l’œuvre entière de Jouhandeau. Et soudain il nous appara
870
vec une âme joyeuse. » Voilà bien le leitmotiv de
l’
œuvre entière de Jouhandeau. Et soudain il nous apparaît que cette œuv
871
n’aurait pas lu d’autres ouvrages de Jouhandeau,
les
aphorismes qui composent l’Éloge de l’imprudence paraîtront plus abst
872
rages de Jouhandeau, les aphorismes qui composent
l’
Éloge de l’imprudence paraîtront plus abstraits qu’ils ne le méritent.
873
uhandeau, les aphorismes qui composent l’Éloge de
l’
imprudence paraîtront plus abstraits qu’ils ne le méritent. C’est qu’i
874
l’imprudence paraîtront plus abstraits qu’ils ne
le
méritent. C’est qu’ils supposent l’existence d’un bien et d’un mal co
875
its qu’ils ne le méritent. C’est qu’ils supposent
l’
existence d’un bien et d’un mal concrets dont les Binche ou M. Godeau
876
t l’existence d’un bien et d’un mal concrets dont
les
Binche ou M. Godeau ou plus récemment les héros de l’Amateur d’imprud
877
ts dont les Binche ou M. Godeau ou plus récemment
les
héros de l’Amateur d’imprudence incarnèrent ailleurs toutes les compl
878
inche ou M. Godeau ou plus récemment les héros de
l’
Amateur d’imprudence incarnèrent ailleurs toutes les complexités. Il s
879
’Amateur d’imprudence incarnèrent ailleurs toutes
les
complexités. Il s’agit, on le sait, du bien et du mal selon l’Église.
880
nt ailleurs toutes les complexités. Il s’agit, on
le
sait, du bien et du mal selon l’Église. Mais l’émouvante et ironique
881
s. Il s’agit, on le sait, du bien et du mal selon
l’
Église. Mais l’émouvante et ironique dialectique de Jouhandeau est-ell
882
n le sait, du bien et du mal selon l’Église. Mais
l’
émouvante et ironique dialectique de Jouhandeau est-elle très catholiq
883
t-elle très catholique, ou même très chrétienne ?
La
dialectique paulinienne postule que bien et mal appartiennent au règn
884
postule que bien et mal appartiennent au règne de
la
loi (de la morale). Et c’est la foi qui en libère, non pas cette « gé
885
bien et mal appartiennent au règne de la loi (de
la
morale). Et c’est la foi qui en libère, non pas cette « générosité »
886
nnent au règne de la loi (de la morale). Et c’est
la
foi qui en libère, non pas cette « générosité » malgré tout équivoque
887
n pas cette « générosité » malgré tout équivoque.
La
foi révèle une réalité essentiellement différente et qui enveloppe to
888
llement différente et qui enveloppe tout ensemble
les
catégories du bien et du mal : le péché. Le contraire d’un péché, c’e
889
tout ensemble les catégories du bien et du mal :
le
péché. Le contraire d’un péché, c’est-à-dire ce qui le supprime, ce n
890
mble les catégories du bien et du mal : le péché.
Le
contraire d’un péché, c’est-à-dire ce qui le supprime, ce n’est pas u
891
ché. Le contraire d’un péché, c’est-à-dire ce qui
le
supprime, ce n’est pas une vertu, mais le pardon. La vertu comme le v
892
ce qui le supprime, ce n’est pas une vertu, mais
le
pardon. La vertu comme le vice naît de la loi et s’y réfère. Mais le
893
supprime, ce n’est pas une vertu, mais le pardon.
La
vertu comme le vice naît de la loi et s’y réfère. Mais le péché naît
894
est pas une vertu, mais le pardon. La vertu comme
le
vice naît de la loi et s’y réfère. Mais le péché naît où meurt la foi
895
u, mais le pardon. La vertu comme le vice naît de
la
loi et s’y réfère. Mais le péché naît où meurt la foi, et meurt là où
896
comme le vice naît de la loi et s’y réfère. Mais
le
péché naît où meurt la foi, et meurt là où vit la foi. Au bien vulgai
897
la loi et s’y réfère. Mais le péché naît où meurt
la
foi, et meurt là où vit la foi. Au bien vulgaire des moralistes, Jouh
898
le péché naît où meurt la foi, et meurt là où vit
la
foi. Au bien vulgaire des moralistes, Jouhandeau oppose le mal ; à ce
899
u bien vulgaire des moralistes, Jouhandeau oppose
le
mal ; à celui-ci le Bien ; d’où naissent le désir et la nécessité du
900
moralistes, Jouhandeau oppose le mal ; à celui-ci
le
Bien ; d’où naissent le désir et la nécessité du Mal absolu ; sur quo
901
ppose le mal ; à celui-ci le Bien ; d’où naissent
le
désir et la nécessité du Mal absolu ; sur quoi il reste béant. Mais l
902
; à celui-ci le Bien ; d’où naissent le désir et
la
nécessité du Mal absolu ; sur quoi il reste béant. Mais la réalité de
903
ité du Mal absolu ; sur quoi il reste béant. Mais
la
réalité de la foi est inverse. Elle fait voir le mal comme donnée imm
904
olu ; sur quoi il reste béant. Mais la réalité de
la
foi est inverse. Elle fait voir le mal comme donnée immédiate ; puis
905
la réalité de la foi est inverse. Elle fait voir
le
mal comme donnée immédiate ; puis le bien ; puis le péché et le pardo
906
le fait voir le mal comme donnée immédiate ; puis
le
bien ; puis le péché et le pardon. Et la grâce est déjà dans l’œil qu
907
mal comme donnée immédiate ; puis le bien ; puis
le
péché et le pardon. Et la grâce est déjà dans l’œil qui sait voir le
908
onnée immédiate ; puis le bien ; puis le péché et
le
pardon. Et la grâce est déjà dans l’œil qui sait voir le péché au sei
909
e ; puis le bien ; puis le péché et le pardon. Et
la
grâce est déjà dans l’œil qui sait voir le péché au sein du mal et du
910
le péché et le pardon. Et la grâce est déjà dans
l’
œil qui sait voir le péché au sein du mal et du bien à la fois. « Mal
911
on. Et la grâce est déjà dans l’œil qui sait voir
le
péché au sein du mal et du bien à la fois. « Mal » ou « péché » — le
912
mal et du bien à la fois. « Mal » ou « péché » —
le
débat se ramène sur cette page, à une question de vocabulaire. Une si
913
de, « [Compte rendu] Marcel Jouhandeau, Éloge de
l’
imprudence », La Nouvelle Revue française, Paris, septembre 1932, p.
914
ndu] Marcel Jouhandeau, Éloge de l’imprudence »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, septembre 1932, p. 442-444.
915
Klaus Mann (septembre 1932)h Ce n’est pas pour
l’
amour du laurier, mais pour l’amour de son ami Clitus, poète abstrait
916
Ce n’est pas pour l’amour du laurier, mais pour
l’
amour de son ami Clitus, poète abstrait à la mode de 1920, qu’Alexandr
917
pour l’amour de son ami Clitus, poète abstrait à
la
mode de 1920, qu’Alexandre a conquis le monde. Le défaut de ce point
918
bstrait à la mode de 1920, qu’Alexandre a conquis
le
monde. Le défaut de ce point de vue, c’est qu’il n’étonnera personne,
919
la mode de 1920, qu’Alexandre a conquis le monde.
Le
défaut de ce point de vue, c’est qu’il n’étonnera personne, alors qu’
920
ue d’ailleurs, avec, en plus, du sentimentalisme.
La
préface de Cocteau joue sur les thèmes, inépuisables, du profil de pl
921
u sentimentalisme. La préface de Cocteau joue sur
les
thèmes, inépuisables, du profil de plâtre, des boules de neige et du
922
is de, « [Compte rendu] Klaus Mann, Alexandre »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, septembre 1932, p. 477.
923
Est-il possible de définir une cause commune de
la
jeunesse française, une communauté d’attitude essentielle ? Il semble
924
communauté d’attitude essentielle ? Il semble que
la
solidarité du péril crée en nous une unité que n’ont su faire ni maît
925
re ni maîtres ni doctrines, unité de refus devant
la
consternante misère d’une époque où tout ce qu’un homme peut aimer et
926
celui de la Troisième Internationale. Toutefois,
la
doctrine marxiste, en dehors de laquelle il s’est constitué, forme l’
927
tifs respectifs sont communs… Déjà s’affirme dans
l’
attitude de tous ces groupes un véritable acte de présence à la misère
928
tous ces groupes un véritable acte de présence à
la
misère du siècle, assez nouveau parmi les intellectuels, et si violem
929
ésence à la misère du siècle, assez nouveau parmi
les
intellectuels, et si violemment accentué qu’il peut paraître suffisan
930
t été réunies — rapidement car tout nous presse —
les
déclarations que l’on va lire. i. Rougemont Denis de, « Cahier de
931
ement car tout nous presse — les déclarations que
l’
on va lire. i. Rougemont Denis de, « Cahier de revendications », La
932
Rougemont Denis de, « Cahier de revendications »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, décembre 1932, p. 801.
933
chose, dans une société organisée (et mal) contre
les
« risques-vie », livrée aux basses rigueurs d’un cadre policier. Que
934
op facilement admettre autour de nous. Voilà bien
l’
exigence que nous voulons rendre inconfortable, inadmissible, et dans
935
rendre inconfortable, inadmissible, et dans toute
l’
urgence du terme : actuelle. Il y va de la qualité même de notre vie ;
936
s toute l’urgence du terme : actuelle. Il y va de
la
qualité même de notre vie ; de notre choix. Il y va de cette qualité
937
de cette qualité même d’impossible qui seule rend
la
vie possible, c’est-à-dire grande. Devant les solutions qu’on nous pr
938
rend la vie possible, c’est-à-dire grande. Devant
les
solutions qu’on nous propose d’urgence, il est clair que toute impart
939
de grandeur, et comblée de risques mortels. Pour
la
jeunesse de 1932, le conflit de vivre, le paradoxe fondamental de tou
940
lée de risques mortels. Pour la jeunesse de 1932,
le
conflit de vivre, le paradoxe fondamental de toute « existence » se c
941
s. Pour la jeunesse de 1932, le conflit de vivre,
le
paradoxe fondamental de toute « existence » se concrétise dans une «
942
étise dans une « nécessité » révolutionnaire dont
l’
ampleur est sans précédent. Ce n’est plus de conflits d’idées qu’il s’
943
conflits d’intérêts. Mais pour nous, entrés dans
la
vie sous le coup d’une menace de faillite planétaire, il ne peut s’ag
944
intérêts. Mais pour nous, entrés dans la vie sous
le
coup d’une menace de faillite planétaire, il ne peut s’agir de rien d
945
agir de rien d’autre que de ceci : s’entendre sur
le
meilleur ou sur le seul moyen d’en réchapper, — l’imposer. Ce n’est p
946
e que de ceci : s’entendre sur le meilleur ou sur
le
seul moyen d’en réchapper, — l’imposer. Ce n’est plus pour quelque «
947
e meilleur ou sur le seul moyen d’en réchapper, —
l’
imposer. Ce n’est plus pour quelque « idéal » que nous avons à lutter
948
ue nous avons à lutter hic et nunc, mais pour que
les
hommes vivent et demeurent des hommes. Il y a deux camps : ceux qui
949
ient bien continuer, ayant certains intérêts dans
l’
affaire. Entre eux, la masse des braves gens persuadés qu’après tout ç
950
yant certains intérêts dans l’affaire. Entre eux,
la
masse des braves gens persuadés qu’après tout ça va se remettre, ça v
951
s cris. Il est vrai que certains, au lendemain de
la
guerre, ont trop souvent crié au loup, par goût des atmosphères tragi
952
s tout rien de mieux à faire. Et vous pensiez que
la
révolution, c’était une bande de méchants garçons. Puis vous avez pen
953
vides. Et maintenant, c’est vous qui glissez dans
l’
angoisse. Vous et vos maîtres. Bientôt vous chercherez des équipes de
954
chercherez des équipes de sauvetage. Ici paraît
le
communisme, comme une constatation de la faillite, une liquidation à
955
i paraît le communisme, comme une constatation de
la
faillite, une liquidation à un taux sous-humain. Voici le Plan, prêt
956
ite, une liquidation à un taux sous-humain. Voici
le
Plan, prêt à reprendre l’entreprise sur des bases plus rationnelles.
957
taux sous-humain. Voici le Plan, prêt à reprendre
l’
entreprise sur des bases plus rationnelles. Mais si c’était cette « ra
958
i c’était cette « raison » déjà qui se trouvait à
l’
origine de tout le mal ? Telles sont les composantes de notre situat
959
raison » déjà qui se trouvait à l’origine de tout
le
mal ? Telles sont les composantes de notre situation. Nous sommes l
960
ouvait à l’origine de tout le mal ? Telles sont
les
composantes de notre situation. Nous sommes là : n’y pouvant plus ten
961
un « ordre » et des « idéaux » criminels. Il y a
la
guerre proche. La ferons-nous ? pour qui ? Il y a la misère présente
962
es « idéaux » criminels. Il y a la guerre proche.
La
ferons-nous ? pour qui ? Il y a la misère présente : pourquoi la supp
963
guerre proche. La ferons-nous ? pour qui ? Il y a
la
misère présente : pourquoi la supporterons-nous ? La révolution, ce n
964
? pour qui ? Il y a la misère présente : pourquoi
la
supporterons-nous ? La révolution, ce n’est plus un état d’esprit, ni
965
misère présente : pourquoi la supporterons-nous ?
La
révolution, ce n’est plus un état d’esprit, ni un refus des tâches d’
966
t, ni un refus des tâches d’homme. Henri Lefebvre
l’
a montré, je n’ajouterai rien à sa déclaration si simple. La révolutio
967
, je n’ajouterai rien à sa déclaration si simple.
La
révolution est une nécessité au sens le plus banal du terme, et aussi
968
i simple. La révolution est une nécessité au sens
le
plus banal du terme, et aussi à son sens de « misère qui appelle ». N
969
autrui », mais des hommes menacés, qui dévisagent
la
menace et contre-attaquent. Et alors, toute une jeunesse va se dresse
970
ser ? Va prendre parti, et agir ?… — Paralysie. —
Le
salut qu’on lui offre, il faudrait qu’elle le paie du prix de l’âme m
971
. — Le salut qu’on lui offre, il faudrait qu’elle
le
paie du prix de l’âme même. On nous donne à choisir entre un régime b
972
lui offre, il faudrait qu’elle le paie du prix de
l’
âme même. On nous donne à choisir entre un régime bourgeois odieux, ra
973
utopie, qu’il nous est impossible d’accepter avec
le
« bon cœur » que préconise Philippe Lamour, parce que nous n’y voyons
974
te résistance interne, de cela justement que dans
le
désordre régnant, nous détestons de toute la force de notre âme : la
975
dans le désordre régnant, nous détestons de toute
la
force de notre âme : la primauté du matériel. Comment penser — si « p
976
, nous détestons de toute la force de notre âme :
la
primauté du matériel. Comment penser — si « penser » est inséparable
977
sie déchue et un marxisme faux ? Il reste à faire
la
révolution. Ni à gauche, ni à droite, il n’y a rien pour nous. Nous n
978
ite, il n’y a rien pour nous. Nous nous plaçons à
l’
origine de quelque chose d’autre, dont la réalité échappe encore à ceu
979
laçons à l’origine de quelque chose d’autre, dont
la
réalité échappe encore à ceux qui récitent Marx : une « utopie » sans
980
utopie » sans doute, — du moins vraie celle-là.
Les
témoignages qu’on a pu lire plus haut définissent deux positions révo
981
Tout le monde sait ce que signifie politiquement
le
vieil appel à la lutte des classes, ce pragmatisme, cet acte de foi o
982
it ce que signifie politiquement le vieil appel à
la
lutte des classes, ce pragmatisme, cet acte de foi optimiste dans le
983
s, ce pragmatisme, cet acte de foi optimiste dans
le
cours « dialectique » de l’Histoire, qui caractérisent la position ma
984
de foi optimiste dans le cours « dialectique » de
l’
Histoire, qui caractérisent la position marxiste. Par contre, les base
985
« dialectique » de l’Histoire, qui caractérisent
la
position marxiste. Par contre, les bases doctrinales exposées ici par
986
i caractérisent la position marxiste. Par contre,
les
bases doctrinales exposées ici par des membres d’Esprit, de Combat, d
987
entre un capitalisme plus ou moins fascistisé, et
le
communisme (plus ou moins fordisé). Les marxistes détiennent l’avanta
988
istisé, et le communisme (plus ou moins fordisé).
Les
marxistes détiennent l’avantage certain de tabler sur une « utopie »
989
(plus ou moins fordisé). Les marxistes détiennent
l’
avantage certain de tabler sur une « utopie » partiellement traduite e
990
rtiellement traduite en faits. C’est même, à voir
les
choses de près, leur unique argument contre les révolutionnaires non
991
r les choses de près, leur unique argument contre
les
révolutionnaires non marxistes. Mais comment nous laisser convaincre
992
lle, temporaire, et d’ailleurs discutable ? C’est
l’
homme qui se révolte en nous contre le marxiste. Vous n’y ferez rien.
993
ble ? C’est l’homme qui se révolte en nous contre
le
marxiste. Vous n’y ferez rien. Et nous ne trahirons pas l’homme tel q
994
te. Vous n’y ferez rien. Et nous ne trahirons pas
l’
homme tel qu’il est, sous prétexte qu’il faut se hâter, et qu’en Russi
995
her. Nous jouerons tout sur une révolution vraie.
Les
catastrophes sont proches. Nous ne sommes plus les seuls à le dire. B
996
es catastrophes sont proches. Nous ne sommes plus
les
seuls à le dire. Beaucoup de capitalistes l’ont si bien compris qu’on
997
hes sont proches. Nous ne sommes plus les seuls à
le
dire. Beaucoup de capitalistes l’ont si bien compris qu’on peut les v
998
lus les seuls à le dire. Beaucoup de capitalistes
l’
ont si bien compris qu’on peut les voir déjà préparer en sous-main des
999
de capitalistes l’ont si bien compris qu’on peut
les
voir déjà préparer en sous-main des terrains d’entente avec l’URSS. N
1000
préparer en sous-main des terrains d’entente avec
l’
URSS. Nous ne pensons pas que la guerre soit, comme l’écrit Lefebvre,
1001
ns d’entente avec l’URSS. Nous ne pensons pas que
la
guerre soit, comme l’écrit Lefebvre, la seule « chance » des capitali
1002
SS. Nous ne pensons pas que la guerre soit, comme
l’
écrit Lefebvre, la seule « chance » des capitalistes. Il en est une mo
1003
s pas que la guerre soit, comme l’écrit Lefebvre,
la
seule « chance » des capitalistes. Il en est une moins coûteuse à ris
1004
et qui consisterait à se laisser convaincre… Tout
les
y pousse, et l’on se demande en vain quelle idéologie les empêcherait
1005
it à se laisser convaincre… Tout les y pousse, et
l’
on se demande en vain quelle idéologie les empêcherait encore de répon
1006
usse, et l’on se demande en vain quelle idéologie
les
empêcherait encore de répondre aux invites de ces parents naguère ina
1007
nt mine de « réussir ». N’est-ce donc plus, comme
le
marque Th. Maulnier, qu’un conflit d’intérêts ? Et d’intérêts qui ne
1008
érêts qui ne sont pas les nôtres, qui ne sont pas
les
intérêts réels d’un être aux prises avec la condition humaine ? Ni po
1009
pas les intérêts réels d’un être aux prises avec
la
condition humaine ? Ni pour le mensonge d’hier, ni pour celui de dema
1010
re aux prises avec la condition humaine ? Ni pour
le
mensonge d’hier, ni pour celui de demain nous ne verserons notre sang
1011
ne vérité qui domine et condamne tout cela. Entre
le
communisme et la révolution personnaliste, l’opposition doctrinale pe
1012
ine et condamne tout cela. Entre le communisme et
la
révolution personnaliste, l’opposition doctrinale peut se définir sim
1013
tre le communisme et la révolution personnaliste,
l’
opposition doctrinale peut se définir simplement. Les uns croient, ave
1014
opposition doctrinale peut se définir simplement.
Les
uns croient, avec Marx, à la réalité d’une dialectique ternaire ; ils
1015
définir simplement. Les uns croient, avec Marx, à
la
réalité d’une dialectique ternaire ; ils placent leur espoir dans l’a
1016
alectique ternaire ; ils placent leur espoir dans
l’
avènement de synthèses successives, acheminant l’espèce vers un équili
1017
l’avènement de synthèses successives, acheminant
l’
espèce vers un équilibre final, morne réplique du millénium chrétien.
1018
ibre final, morne réplique du millénium chrétien.
Les
autres, avec Proudhon, refusent toute synthèse, toute solution mécani
1019
ital. Il n’y a pas de troisième terme, — ou c’est
la
mort19. Mais la coefficience de deux termes vrais, et assumés comme t
1020
as de troisième terme, — ou c’est la mort19. Mais
la
coefficience de deux termes vrais, et assumés comme tels, c’est la pe
1021
e deux termes vrais, et assumés comme tels, c’est
la
personne. L’opposition de Proudhon et de Marx, sur le terrain économi
1022
vrais, et assumés comme tels, c’est la personne.
L’
opposition de Proudhon et de Marx, sur le terrain économique, traduit
1023
ersonne. L’opposition de Proudhon et de Marx, sur
le
terrain économique, traduit exactement l’opposition de Kierkegaard et
1024
rx, sur le terrain économique, traduit exactement
l’
opposition de Kierkegaard et de Hegel dans le domaine religieux. Elle
1025
ment l’opposition de Kierkegaard et de Hegel dans
le
domaine religieux. Elle traduira demain l’opposition des nations coll
1026
l dans le domaine religieux. Elle traduira demain
l’
opposition des nations collectivistes et des patries personnalistes. M
1027
istes et des patries personnalistes. Mais où sont
les
motifs de notre choix ? J’en indiquerai trois. 1° — La seule révoluti
1028
tifs de notre choix ? J’en indiquerai trois. 1° —
La
seule révolution qui nous importe concerne l’homme, exprime ses donné
1029
° — La seule révolution qui nous importe concerne
l’
homme, exprime ses données élémentaires : elle n’est qu’une projection
1030
ires : elle n’est qu’une projection du conflit de
la
personne. Les marxistes nous accusent de mêler des notions « morales
1031
’est qu’une projection du conflit de la personne.
Les
marxistes nous accusent de mêler des notions « morales » — ainsi dési
1032
ler des notions « morales » — ainsi désignent-ils
la
notion de personne ! — aux forces politiques et historiques qui selon
1033
historiques qui selon eux déterminent entièrement
le
devenir révolutionnaire. Mais c’est de la mythomanie ; les « Forces é
1034
èrement le devenir révolutionnaire. Mais c’est de
la
mythomanie ; les « Forces économiques », dont ils parlent avec trembl
1035
ir révolutionnaire. Mais c’est de la mythomanie ;
les
« Forces économiques », dont ils parlent avec tremblement, n’existent
1036
t dans un monde athée. Quelle que soit d’ailleurs
la
conception historique que l’on ait, il faut pourtant reconnaître que
1037
que soit d’ailleurs la conception historique que
l’
on ait, il faut pourtant reconnaître que la personne est un facteur «
1038
ue que l’on ait, il faut pourtant reconnaître que
la
personne est un facteur « décisif », sinon suffisant, du processus ré
1039
onnaire, et que nier cette valeur « décisive » de
la
personne, c’est désarmer la révolution. Mais il y a plus. Si la perso
1040
aleur « décisive » de la personne, c’est désarmer
la
révolution. Mais il y a plus. Si la personne est véritablement l’élém
1041
’est désarmer la révolution. Mais il y a plus. Si
la
personne est véritablement l’élément décisif de la réalité humaine, t
1042
ais il y a plus. Si la personne est véritablement
l’
élément décisif de la réalité humaine, toute révolution est vaine qui
1043
a personne est véritablement l’élément décisif de
la
réalité humaine, toute révolution est vaine qui se fonde sur des fait
1044
est vaine qui se fonde sur des faits mortels pour
la
personne, même si « ces faits sont les faits » comme on voudrait nous
1045
ortels pour la personne, même si « ces faits sont
les
faits » comme on voudrait nous le faire croire. Une révolution n’agit
1046
ces faits sont les faits » comme on voudrait nous
le
faire croire. Une révolution n’agit pas dans le vide, mais contre que
1047
s le faire croire. Une révolution n’agit pas dans
le
vide, mais contre quelque chose : elle se fera contre ces faits. Elle
1048
e fera contre ces faits. Elle sera « acte ». 2e —
Le
matérialisme décrit un monde tel qu’on ne voit pas où l’acte peut s’y
1049
rialisme décrit un monde tel qu’on ne voit pas où
l’
acte peut s’y insérer. Comment croire que l’esprit puisse agir sur les
1050
as où l’acte peut s’y insérer. Comment croire que
l’
esprit puisse agir sur les faits autrement que par une suite de coups
1051
érer. Comment croire que l’esprit puisse agir sur
les
faits autrement que par une suite de coups de force, d’actes créateur
1052
ups de force, d’actes créateurs, — révolutionnant
le
déterminisme rigoureux de la matière abandonnée à elle-même ? La dial
1053
rs, — révolutionnant le déterminisme rigoureux de
la
matière abandonnée à elle-même ? La dialectique historique à trois te
1054
rigoureux de la matière abandonnée à elle-même ?
La
dialectique historique à trois temps est une arbitraire projection da
1055
à trois temps est une arbitraire projection dans
les
choses d’un mécanisme de « l’intelligence-outil ». Théorie dont le fa
1056
re projection dans les choses d’un mécanisme de «
l’
intelligence-outil ». Théorie dont le fatalisme interne reparaît sans
1057
canisme de « l’intelligence-outil ». Théorie dont
le
fatalisme interne reparaît sans cesse dans les propos des marxistes l
1058
ont le fatalisme interne reparaît sans cesse dans
les
propos des marxistes les plus émancipés, les moins « mécanistes » ; t
1059
reparaît sans cesse dans les propos des marxistes
les
plus émancipés, les moins « mécanistes » ; théorie qui ôte à l’acte t
1060
dans les propos des marxistes les plus émancipés,
les
moins « mécanistes » ; théorie qui ôte à l’acte toute efficacité créa
1061
pés, les moins « mécanistes » ; théorie qui ôte à
l’
acte toute efficacité créatrice et par là même doit être dénoncée comm
1062
e doit être dénoncée comme antirévolutionnaire20.
Le
matérialisme, c’est l’opium de la révolution. 3e — La conception pers
1063
mme antirévolutionnaire20. Le matérialisme, c’est
l’
opium de la révolution. 3e — La conception personnaliste est seule cap
1064
olutionnaire20. Le matérialisme, c’est l’opium de
la
révolution. 3e — La conception personnaliste est seule capable d’édif
1065
atérialisme, c’est l’opium de la révolution. 3e —
La
conception personnaliste est seule capable d’édifier un monde culture
1066
t social qu’anime un risque permanent, essentiel.
L’
état marxiste idéal ne laisse subsister que les risques accidentels. E
1067
el. L’état marxiste idéal ne laisse subsister que
les
risques accidentels. Et comme le marquait récemment T. S. Eliot, dans
1068
e subsister que les risques accidentels. Et comme
le
marquait récemment T. S. Eliot, dans un article21 où s’exprimaient de
1069
roches de celles d’Esprit ou de Combat, il réduit
l’
aventure humaine à un déroulement indéfini de changements, justiciable
1070
fini de changements, justiciables tout au plus de
la
statistique. ⁂ Mais les marxistes répugnent à nous suivre sur ce terr
1071
sticiables tout au plus de la statistique. ⁂ Mais
les
marxistes répugnent à nous suivre sur ce terrain. Suivons-les donc su
1072
s répugnent à nous suivre sur ce terrain. Suivons-
les
donc sur le leur. Ils opposent à nos « rêveries » l’action. Qu’appell
1073
nous suivre sur ce terrain. Suivons-les donc sur
le
leur. Ils opposent à nos « rêveries » l’action. Qu’appellent-ils l’ac
1074
donc sur le leur. Ils opposent à nos « rêveries »
l’
action. Qu’appellent-ils l’action ? Est-ce un opportunisme purement ta
1075
ent à nos « rêveries » l’action. Qu’appellent-ils
l’
action ? Est-ce un opportunisme purement tactique, d’allure électorale
1076
purement tactique, d’allure électorale ? « Toutes
les
tentatives qui ne se fondent pas sur la classe révolutionnaire ne com
1077
« Toutes les tentatives qui ne se fondent pas sur
la
classe révolutionnaire ne comportent pas de points d’application », é
1078
e points d’application », écrit Nizan. Voilà bien
la
suprême « évasion » de nos intellectuels, même marxistes. Abdication
1079
nos intellectuels, même marxistes. Abdication de
la
pensée entre les mains du prolétaire qui, justement, avait besoin d’ê
1080
ls, même marxistes. Abdication de la pensée entre
les
mains du prolétaire qui, justement, avait besoin d’être conduit par l
1081
e qui, justement, avait besoin d’être conduit par
la
pensée de quelques-uns22. Proposition antirévolutionnaire, il faut le
1082
s-uns22. Proposition antirévolutionnaire, il faut
le
dire, et niée par les faits dont elle se réclame implicitement, Lénin
1083
antirévolutionnaire, il faut le dire, et niée par
les
faits dont elle se réclame implicitement, Lénine réussit une révoluti
1084
uvriers sur une population de 160 millions, et où
la
bourgeoisie existe à peine en tant que classe, d’ailleurs brimée. En
1085
t que classe, d’ailleurs brimée. En février 1917,
les
bolchévistes sont 200. En octobre, ils s’emparent du pouvoir sur tout
1086
En octobre, ils s’emparent du pouvoir sur toutes
les
Russies. En 1932 le parti compte deux millions de membres sévèrement
1087
parent du pouvoir sur toutes les Russies. En 1932
le
parti compte deux millions de membres sévèrement contrôlés. « Mais, n
1088
embres sévèrement contrôlés. « Mais, nous dit-on,
les
constructions d’un Lénine n’étaient pas songes, elles s’appuyaient su
1089
nine n’étaient pas songes, elles s’appuyaient sur
le
mouvement de l’histoire ». Nous avons affaire ici à un véritable myst
1090
as songes, elles s’appuyaient sur le mouvement de
l’
histoire ». Nous avons affaire ici à un véritable mysticisme de la réu
1091
us avons affaire ici à un véritable mysticisme de
la
réussite, à un fatalisme, à un pragmatisme historique dont le fondeme
1092
à un fatalisme, à un pragmatisme historique dont
le
fondement matérialiste n’exige rien de moins qu’un acte de foi. Un te
1093
n acte de foi. Un tel mysticisme a-t-il en France
la
moindre chance de succès ? Où est sa tradition vivante en ce pays ? L
1094
succès ? Où est sa tradition vivante en ce pays ?
La
violence des communistes français reste le plus souvent verbale, élec
1095
pays ? La violence des communistes français reste
le
plus souvent verbale, électorale ; elle n’est pas dans leur doctrine
1096
des faits actuels, mais insuffisamment analysés.
Les
faits, demain, seront pour nous. L’Ordre nouveau, Combat, Esprit, tra
1097
L’Ordre nouveau, Combat, Esprit, travaillent dans
la
ligne des forces révolutionnaires profondes de la France. Cette révol
1098
la ligne des forces révolutionnaires profondes de
la
France. Cette révolte de la personne, c’est la révolte jacobine, c’es
1099
onnaires profondes de la France. Cette révolte de
la
personne, c’est la révolte jacobine, c’est la révolte de 89, dans ce
1100
de la France. Cette révolte de la personne, c’est
la
révolte jacobine, c’est la révolte de 89, dans ce qu’elle garde de va
1101
de la personne, c’est la révolte jacobine, c’est
la
révolte de 89, dans ce qu’elle garde de valable et de dynamique ; c’e
1102
de valable et de dynamique ; c’est dès à présent
le
ressort de la nouvelle Révolution française. La volonté, la possibili
1103
de dynamique ; c’est dès à présent le ressort de
la
nouvelle Révolution française. La volonté, la possibilité de rupture,
1104
t le ressort de la nouvelle Révolution française.
La
volonté, la possibilité de rupture, affirmée par les politiciens marx
1105
de la nouvelle Révolution française. La volonté,
la
possibilité de rupture, affirmée par les politiciens marxistes, mais
1106
volonté, la possibilité de rupture, affirmée par
les
politiciens marxistes, mais niée en sous-main par leur doctrine, est
1107
trine, est de leur part une duperie manifeste. Je
les
entends menacer le bourgeois : mais je ne vois pas en quoi la tyranni
1108
art une duperie manifeste. Je les entends menacer
le
bourgeois : mais je ne vois pas en quoi la tyrannie du matériel qu’il
1109
enacer le bourgeois : mais je ne vois pas en quoi
la
tyrannie du matériel qu’ils prônent est meilleure pour les hommes que
1110
nie du matériel qu’ils prônent est meilleure pour
les
hommes que le présent désordre. Je ne vois pas qu’ils connaissent l’h
1111
qu’ils prônent est meilleure pour les hommes que
le
présent désordre. Je ne vois pas qu’ils connaissent l’homme mieux que
1112
ésent désordre. Je ne vois pas qu’ils connaissent
l’
homme mieux que nous. Je ne les vois pas plus forts. Je vois bien l’ac
1113
qu’ils connaissent l’homme mieux que nous. Je ne
les
vois pas plus forts. Je vois bien l’accumulation de leurs griefs, — d
1114
nous. Je ne les vois pas plus forts. Je vois bien
l’
accumulation de leurs griefs, — dont beaucoup sont les nôtres, mais no
1115
age. Je vois clairement que leurs buts provoquent
le
refus, pour les mêmes raisons, aggravées23. Ils jouent sur une révolt
1116
airement que leurs buts provoquent le refus, pour
les
mêmes raisons, aggravées23. Ils jouent sur une révolte des hommes con
1117
s23. Ils jouent sur une révolte des hommes contre
le
capitalisme : mais cette révolte va se tourner contre eux. On va voir
1118
va se tourner contre eux. On va voir qu’ils font
la
même chose, c’est-à-dire qu’ils font pire que ceux qu’ils attaquent.
1119
nt ainsi triompher à la fois des bourgeois, et de
la
vérité humaine de nos doctrines antibourgeoises. Mais ils ne donnent
1120
ux certains mots d’ordre immédiats : lutte contre
le
capitalisme, le fascisme, leurs mystiques et leurs créations politiqu
1121
d’ordre immédiats : lutte contre le capitalisme,
le
fascisme, leurs mystiques et leurs créations politiques (nationalisme
1122
tiques (nationalisme, SDN, etc.), condamnation de
l’
individu, de la « pensée » bourgeoise (la pensée sans douleur !), des
1123
lisme, SDN, etc.), condamnation de l’individu, de
la
« pensée » bourgeoise (la pensée sans douleur !), des méthodes polici
1124
ation de l’individu, de la « pensée » bourgeoise (
la
pensée sans douleur !), des méthodes policières grâce auxquelles se m
1125
méthodes policières grâce auxquelles se maintient
le
désordre établi. Mais nous allons plus loin dans la critique de ce dé
1126
désordre établi. Mais nous allons plus loin dans
la
critique de ce désordre : jusqu’à ce point où le marxisme, révélant s
1127
la critique de ce désordre : jusqu’à ce point où
le
marxisme, révélant sa vraie nature, apparaît comme un cas privilégié
1128
vraie nature, apparaît comme un cas privilégié de
la
folie capitaliste-matérialiste. Non, ce n’est pas une classe que nous
1129
’est pas une classe que nous devons sauver, c’est
l’
homme menacé dans son intégrité. Sauver l’homme, ce n’est pas sauver d
1130
, c’est l’homme menacé dans son intégrité. Sauver
l’
homme, ce n’est pas sauver des consommateurs. Ce n’est pas sauver des
1131
Ce n’est pas sauver des entreprises, des nations,
les
intérêts (?) du monde. Sylveire demande : que signifie « sauver le mo
1132
u monde. Sylveire demande : que signifie « sauver
le
monde » ? Rien. Au sens fort du mot, le « salut » n’est pas à débattr
1133
« sauver le monde » ? Rien. Au sens fort du mot,
le
« salut » n’est pas à débattre sur le plan de l’humanité, mais entre
1134
le « salut » n’est pas à débattre sur le plan de
l’
humanité, mais entre l’homme, entre tel homme et la Réalité qui seule
1135
à débattre sur le plan de l’humanité, mais entre
l’
homme, entre tel homme et la Réalité qui seule peut garantir son être.
1136
’humanité, mais entre l’homme, entre tel homme et
la
Réalité qui seule peut garantir son être. — Encore faut-il que les co
1137
eule peut garantir son être. — Encore faut-il que
les
conditions matérielles permettent à ce suprême et quotidien débat d’a
1138
n débat d’avoir un sens, un point d’application :
la
personne. Tel est en dernière analyse, le fondement, l’enjeu de la ré
1139
ation : la personne. Tel est en dernière analyse,
le
fondement, l’enjeu de la révolution nouvelle. Ici, je ne dirai plus n
1140
sonne. Tel est en dernière analyse, le fondement,
l’
enjeu de la révolution nouvelle. Ici, je ne dirai plus nous, mais je.
1141
est en dernière analyse, le fondement, l’enjeu de
la
révolution nouvelle. Ici, je ne dirai plus nous, mais je. À la questi
1142
nouvelle. Ici, je ne dirai plus nous, mais je. À
la
question « Prenez-vous au sérieux vos idées, y croyez-vous ? », les h
1143
nez-vous au sérieux vos idées, y croyez-vous ? »,
les
hommes de ce temps n’aiment pas répondre, car c’est une question pers
1144
tion personnelle. Une mise en question réelle. Je
la
cherche. Ce qu’il faut pour légitimer un système d’idées en elles-mê
1145
lles-mêmes justes et opportunes (comme celles, je
le
crois, de L’Ordre nouveau, de Combat ou d’Esprit) c’est une violence
1146
une substance, une exigence impossible et qui est
la
seule chose que les hommes éprouvent dans le fond de leur être. Il fa
1147
exigence impossible et qui est la seule chose que
les
hommes éprouvent dans le fond de leur être. Il faut derrière ces idée
1148
est la seule chose que les hommes éprouvent dans
le
fond de leur être. Il faut derrière ces idées une masse volontaire, u
1149
e foi, une pureté terrible et humble. Loin de moi
la
pensée que par des arguments nous pourrons triompher d’autre chose qu
1150
urrons triompher d’autre chose que d’arguments. À
l’
effort admirable du peuple russe retrouvant la grandeur des luttes élé
1151
. À l’effort admirable du peuple russe retrouvant
la
grandeur des luttes élémentaires, n’aurions-nous à répondre qu’un dog
1152
s à répondre qu’un dogmatique « Tu te trompes » ?
Les
hommes n’entendront de nous que notre volonté de sacrifice, de pauvre
1153
té. C’est dangereux, c’est grave de penser juste.
La
vérité ne peut exister parmi nous que sous la forme d’une accusation
1154
te. La vérité ne peut exister parmi nous que sous
la
forme d’une accusation personnelle. Il faut savoir entendre ce mutism
1155
ntendre ce mutisme formidable. Je crois que seule
la
foi peut en donner jusqu’au bout le courage. Je parle de la foi chrét
1156
ois que seule la foi peut en donner jusqu’au bout
le
courage. Je parle de la foi chrétienne où je veux être, de ce suprême
1157
t en donner jusqu’au bout le courage. Je parle de
la
foi chrétienne où je veux être, de ce suprême « choix » qui ne vient
1158
monde qui n’ait pas besoin d’arguments pour juger
les
idoles du monde ; de cette seule chose pour laquelle j’accepte de me
1159
parce que ce ne serait pas crever bassement dans
la
haine, mais ce serait un acte enfin dans lequel je posséderais toute
1160
clatant. Je n’ai pas à sauver quoi que ce soit de
la
terre, mais seulement à recevoir le pardon. Or il n’est de pardon que
1161
ue ce soit de la terre, mais seulement à recevoir
le
pardon. Or il n’est de pardon que pour celui qui agit. On me dira san
1162
us retrouvez que trop bien dans les vôtres ! Déjà
les
hommes le pressentent : il n’y a rien d’autre à attendre que cette fo
1163
z que trop bien dans les vôtres ! Déjà les hommes
le
pressentent : il n’y a rien d’autre à attendre que cette force surhum
1164
attendre que cette force surhumaine d’entrer dans
l’
Ordre de la Pauvreté, qui vaincra toutes les révolutions — après les a
1165
e cette force surhumaine d’entrer dans l’Ordre de
la
Pauvreté, qui vaincra toutes les révolutions — après les avoir faites
1166
r dans l’Ordre de la Pauvreté, qui vaincra toutes
les
révolutions — après les avoir faites. 18. En Allemagne, un groupe e
1167
vreté, qui vaincra toutes les révolutions — après
les
avoir faites. 18. En Allemagne, un groupe en croissance rapide, le
1168
18. En Allemagne, un groupe en croissance rapide,
le
Gegner, s’efforce de créer une unité révolutionnaire au-dessus des pa
1169
nce), en Espagne, en Hollande, en Irlande et dans
les
pays latins de l’Amérique, cette « troisième force », anticapitaliste
1170
n Hollande, en Irlande et dans les pays latins de
l’
Amérique, cette « troisième force », anticapitaliste et non marxiste s
1171
stématique du vrai conflit nécessité-liberté dans
la
mesure où elle existe en sol et dans sa durée propre, comme un 3e ter
1172
e-nation culturelle, initiative privée-plan. 20.
La
seule révolution qu’elle légitimerait, en bonne logique, serait une r
1173
t, en bonne logique, serait une révolution contre
la
construction entreprise par le capitalisme d’État soviétique, contre
1174
révolution contre la construction entreprise par
le
capitalisme d’État soviétique, contre la mystique productiviste déjà
1175
rise par le capitalisme d’État soviétique, contre
la
mystique productiviste déjà « niée » par la crise américaine en parti
1176
ontre la mystique productiviste déjà « niée » par
la
crise américaine en particulier. 21. du Criterion. 22. Exemple frap
1177
lier. 21. du Criterion. 22. Exemple frappant de
l’
Allemagne : voici un pays enfin qui réunit toutes les conditions théor
1178
Allemagne : voici un pays enfin qui réunit toutes
les
conditions théoriques prévues par Marx pour qu’une révolution éclate.
1179
fs. Parce qu’il n’y a plus de « personnes ». 23.
Le
succès du communisme serait-il « de nous rendre la vie de caserne acc
1180
e succès du communisme serait-il « de nous rendre
la
vie de caserne acceptable » ? (Roland de Pury, dans Hic et Nunc , Pa
1181
j. Rougemont Denis de, « À prendre ou à tuer »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, décembre 1932, p. 838-845.
1182
ue, par Charles-Albert Cingria (avril 1933)k «
Les
modernes qui écrivent des livres sur Pétrarque voudraient pouvoir fai
1183
udraient pouvoir faire une part au Moyen Âge (qui
les
excite) et admirer en même temps le restaurateur du cicéronianisme da
1184
yen Âge (qui les excite) et admirer en même temps
le
restaurateur du cicéronianisme dans tout ce que l’officialité moderne
1185
e restaurateur du cicéronianisme dans tout ce que
l’
officialité moderne en représente — l’éloquence, l’érudition, les gran
1186
tout ce que l’officialité moderne en représente —
l’
éloquence, l’érudition, les grands sentiments, la morale en soi (pas l
1187
’officialité moderne en représente — l’éloquence,
l’
érudition, les grands sentiments, la morale en soi (pas la morale en v
1188
moderne en représente — l’éloquence, l’érudition,
les
grands sentiments, la morale en soi (pas la morale en vertu d’un dogm
1189
l’éloquence, l’érudition, les grands sentiments,
la
morale en soi (pas la morale en vertu d’un dogme), le nationalisme, l
1190
ion, les grands sentiments, la morale en soi (pas
la
morale en vertu d’un dogme), le nationalisme, l’ironie, le scepticism
1191
orale en soi (pas la morale en vertu d’un dogme),
le
nationalisme, l’ironie, le scepticisme, le pompiérisme, — mais ils sa
1192
la morale en vertu d’un dogme), le nationalisme,
l’
ironie, le scepticisme, le pompiérisme, — mais ils savent que cela est
1193
en vertu d’un dogme), le nationalisme, l’ironie,
le
scepticisme, le pompiérisme, — mais ils savent que cela est antipathi
1194
ogme), le nationalisme, l’ironie, le scepticisme,
le
pompiérisme, — mais ils savent que cela est antipathique, alors ils é
1195
i ». Charles-Albert Cingria est donc de ceux dont
l’
érudition, quitte à passer pour macaronique — comme elles le sont tout
1196
n, quitte à passer pour macaronique — comme elles
le
sont toutes, d’ailleurs, mais ridiculement quand elles ne l’avouent p
1197
tes, d’ailleurs, mais ridiculement quand elles ne
l’
avouent pas — se veut constamment significative. La publication de cet
1198
’avouent pas — se veut constamment significative.
La
publication de cet étonnant petit livre sur Pétrarque, venant après c
1199
Civilisation de Saint-Gall non moins remarquable,
le
met aux antipodes de ces historiens contemporains dont le succès cons
1200
ux antipodes de ces historiens contemporains dont
le
succès consiste, lorsqu’ils citent des textes, à donner l’impression
1201
nt, en somme, aucun sens relativement à celui qui
les
cite, car alors où serait l’Impartialité ? Ces gens-là voudraient bie
1202
ivement à celui qui les cite, car alors où serait
l’
Impartialité ? Ces gens-là voudraient bien nous faire croire qu’un tex
1203
ous faire croire qu’un texte est intéressant dans
la
mesure même où il est dépourvu de pittoresque, c’est-à-dire, dans ce
1204
est tout de même aller un peu loin, puisque ainsi
l’
on supprime la notion même d’intéressant. Donc Cingria défend une thès
1205
me aller un peu loin, puisque ainsi l’on supprime
la
notion même d’intéressant. Donc Cingria défend une thèse : « Je m’app
1206
rai à désassocier et à mettre en face de lui-même
le
poète lyrique — rattaché encore à une école provençale qui est, à l’o
1207
rattaché encore à une école provençale qui est, à
l’
origine, de propulsion musicale, donc romane-syrienne puisque le plain
1208
propulsion musicale, donc romane-syrienne puisque
le
plain-chant est roman-syrien — et le poète fabriqué à coups de platra
1209
enne puisque le plain-chant est roman-syrien — et
le
poète fabriqué à coups de platras à la manière antique ». Vous avez l
1210
yrien — et le poète fabriqué à coups de platras à
la
manière antique ». Vous avez le ton. Ajoutez-y le plus excitant foiso
1211
oups de platras à la manière antique ». Vous avez
le
ton. Ajoutez-y le plus excitant foisonnement de citations — poètes, c
1212
la manière antique ». Vous avez le ton. Ajoutez-y
le
plus excitant foisonnement de citations — poètes, chroniqueurs, music
1213
copale, d’une certaine politesse pompeuse qui est
la
forme particulière de son ironie24 et vous aurez ce petit volume de d
1214
ges qui, délayé en six-cents, se verrait décerner
le
titre de « monument critique ». Tel qu’il est, un petit chef-d’œuvre
1215
, un petit chef-d’œuvre d’humanisme poétique. Car
l’
« érudition » de Cingria reste si constamment précise et malicieuse qu
1216
précise et malicieuse qu’elle atteint à coup sûr
le
particulier de tout ce qu’elle aborde au cours de ses démonstrations
1217
lle » et multiple, ses incidences fréquentes dans
les
problèmes du temps et de tous les temps : la musique occidentale, les
1218
fréquentes dans les problèmes du temps et de tous
les
temps : la musique occidentale, les méfaits de Cicéron, le commerce d
1219
ans les problèmes du temps et de tous les temps :
la
musique occidentale, les méfaits de Cicéron, le commerce des vins dan
1220
ps et de tous les temps : la musique occidentale,
les
méfaits de Cicéron, le commerce des vins dans la vallée du Rhône, la
1221
: la musique occidentale, les méfaits de Cicéron,
le
commerce des vins dans la vallée du Rhône, la marche en montagne, le
1222
les méfaits de Cicéron, le commerce des vins dans
la
vallée du Rhône, la marche en montagne, le romantisme, le nationalism
1223
on, le commerce des vins dans la vallée du Rhône,
la
marche en montagne, le romantisme, le nationalisme, l’européanisme et
1224
s dans la vallée du Rhône, la marche en montagne,
le
romantisme, le nationalisme, l’européanisme et la révolution. (Sur la
1225
e du Rhône, la marche en montagne, le romantisme,
le
nationalisme, l’européanisme et la révolution. (Sur la confusion mode
1226
rche en montagne, le romantisme, le nationalisme,
l’
européanisme et la révolution. (Sur la confusion moderne entre le patr
1227
le romantisme, le nationalisme, l’européanisme et
la
révolution. (Sur la confusion moderne entre le patriotisme « chose mo
1228
tionalisme, l’européanisme et la révolution. (Sur
la
confusion moderne entre le patriotisme « chose motivée et avantageuse
1229
et la révolution. (Sur la confusion moderne entre
le
patriotisme « chose motivée et avantageuse », et le nationalisme arti
1230
patriotisme « chose motivée et avantageuse », et
le
nationalisme artificiel mais régnant qui fait de la chose publique la
1231
nationalisme artificiel mais régnant qui fait de
la
chose publique la chose désavantageuse 25, quelques pages brillantes
1232
ficiel mais régnant qui fait de la chose publique
la
chose désavantageuse 25, quelques pages brillantes et fortes qui rejo
1233
brillantes et fortes qui rejoignent curieusement
les
doctrines de L’Ordre nouveau). Un style doucement retors, dont les mo
1234
L’Ordre nouveau). Un style doucement retors, dont
les
moindres anicroches sont calculées jusqu’à restituer le naturel — tou
1235
ndres anicroches sont calculées jusqu’à restituer
le
naturel — tout cela sans effort, manifestant plutôt cette vivacité d’
1236
ifestant plutôt cette vivacité d’invention dont «
l’
écriture moderne » reste tristement dépourvue malgré ses velléités de
1237
ches un peu bourrues, un peu précieuses, il jette
l’
esprit du lecteur dans le vif d’un sujet, et loin d’exploiter l’avanta
1238
peu précieuses, il jette l’esprit du lecteur dans
le
vif d’un sujet, et loin d’exploiter l’avantage de cette surprise, pla
1239
cteur dans le vif d’un sujet, et loin d’exploiter
l’
avantage de cette surprise, place aussitôt une citation, oublie d’avoi
1240
oir raison, et nous laisse admirer cette prose de
la
Renaissance où palpite, sous une sérénité qui est plutôt de l’enthous
1241
e où palpite, sous une sérénité qui est plutôt de
l’
enthousiasme dominé, l’opulente diversité du monde. La qualité des tra
1242
sérénité qui est plutôt de l’enthousiasme dominé,
l’
opulente diversité du monde. La qualité des traductions du latin, du b
1243
thousiasme dominé, l’opulente diversité du monde.
La
qualité des traductions du latin, du bas latin et de l’italien dont c
1244
lité des traductions du latin, du bas latin et de
l’
italien dont ce livre est abondamment orné permettra de goûter dans le
1245
vre est abondamment orné permettra de goûter dans
le
détail ce que l’on vient de louer dans l’ensemble. C’est la même préc
1246
nt orné permettra de goûter dans le détail ce que
l’
on vient de louer dans l’ensemble. C’est la même précision savoureuse
1247
er dans le détail ce que l’on vient de louer dans
l’
ensemble. C’est la même précision savoureuse dans le rendu de l’esprit
1248
ce que l’on vient de louer dans l’ensemble. C’est
la
même précision savoureuse dans le rendu de l’esprit d’un texte, mais
1249
ensemble. C’est la même précision savoureuse dans
le
rendu de l’esprit d’un texte, mais cela toujours grâce à des inventio
1250
est la même précision savoureuse dans le rendu de
l’
esprit d’un texte, mais cela toujours grâce à des inventions poétiques
1251
jours grâce à des inventions poétiques jouant sur
la
lettre même, c’est-à-dire sur ce qu’il y a de plus significatif dans
1252
pas de petites férocités soudaines, raffinées, ni
le
bavardage, ni une espèce d’indignation morale aux sursauts fréquents.
1253
morale aux sursauts fréquents. 25. « Mais cela (
les
patriotismes de l’Europe diverse et une) était homogène et souple, vi
1254
fréquents. 25. « Mais cela (les patriotismes de
l’
Europe diverse et une) était homogène et souple, vivant, sans faux arr
1255
, sans cet arrêt d’illusoire devenu réel que font
les
actuels nationalismes, ayant pour effet qu’au lieu d’être avantageuse
1256
, ayant pour effet qu’au lieu d’être avantageuse,
la
chose publique empêche de communiquer, empêche de vivre, empêche de r
1257
mpte rendu] Charles-Albert Cingria, Pétrarque »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, avril 1933, p. 676-678.
1258
e de ces méprises qui peuvent servir à déterminer
le
niveau d’une certaine presse. Si l’on ne voit dans l’auteur d’Adam et
1259
à déterminer le niveau d’une certaine presse. Si
l’
on ne voit dans l’auteur d’Adam et Ève qu’une sorte de folkloriste, il
1260
iveau d’une certaine presse. Si l’on ne voit dans
l’
auteur d’Adam et Ève qu’une sorte de folkloriste, il faudra considérer
1261
qu’une sorte de folkloriste, il faudra considérer
l’
auteur de Phèdre comme un archéologue, auteur de drames historiques. Q
1262
aissance du particulier qui introduise à celle de
l’
élémentaire ; qui soit donc le contraire de la recherche du pittoresqu
1263
troduise à celle de l’élémentaire ; qui soit donc
le
contraire de la recherche du pittoresque. Aucune de ses œuvres mieux
1264
de l’élémentaire ; qui soit donc le contraire de
la
recherche du pittoresque. Aucune de ses œuvres mieux qu’Une Main n’en
1265
illeurs, sa pensée ; on y voit de tout près, dans
l’
intimité d’une chambre, comment sa pensée marche, insiste, souffre. Et
1266
, insiste, souffre. Et cela ne se passe plus dans
le
canton de Vaud, mais dans le domaine propre de Ramuz qui est l’élémen
1267
e se passe plus dans le canton de Vaud, mais dans
le
domaine propre de Ramuz qui est l’élémentaire. Jamais il ne fut mieux
1268
aud, mais dans le domaine propre de Ramuz qui est
l’
élémentaire. Jamais il ne fut mieux lui-même. Il y fallait un cas très
1269
Il y fallait un cas très simple, un de ces cas où
le
mot « concret » devient presque synonyme de matériel. Un bras cassé (
1270
ient presque synonyme de matériel. Un bras cassé (
le
gauche) ; l’humiliation de la chute, l’angoisse d’être diminué, les d
1271
synonyme de matériel. Un bras cassé (le gauche) ;
l’
humiliation de la chute, l’angoisse d’être diminué, les difficultés qu
1272
iel. Un bras cassé (le gauche) ; l’humiliation de
la
chute, l’angoisse d’être diminué, les difficultés qu’on découvre, déc
1273
as cassé (le gauche) ; l’humiliation de la chute,
l’
angoisse d’être diminué, les difficultés qu’on découvre, déconcertante
1274
miliation de la chute, l’angoisse d’être diminué,
les
difficultés qu’on découvre, déconcertantes ; puis l’esprit qui se met
1275
difficultés qu’on découvre, déconcertantes ; puis
l’
esprit qui se met à douter, parce qu’il n’a plus d’application, l’espr
1276
met à douter, parce qu’il n’a plus d’application,
l’
esprit qui prend peur. La guérison naîtra d’une résistance retrouvée26
1277
n’a plus d’application, l’esprit qui prend peur.
La
guérison naîtra d’une résistance retrouvée26. Et Ramuz, apaisé, regar
1278
nce retrouvée26. Et Ramuz, apaisé, regarde tomber
la
neige : les choses ont de nouveau leur sens. Ramuz parle de lui, c’es
1279
ée26. Et Ramuz, apaisé, regarde tomber la neige :
les
choses ont de nouveau leur sens. Ramuz parle de lui, c’est la premièr
1280
forcé d’ailleurs, interrogation accidentelle. Par
le
choix même du prétexte de cet écrit, il nous donne ce genre de pensée
1281
es pour ce qu’elles ont toujours été à ses yeux :
le
fait d’un défaut de présence au monde, d’une impuissance à saisir les
1282
de présence au monde, d’une impuissance à saisir
les
choses. Là réside la cause de la peur, qu’il avoue, et qui n’est sans
1283
d’une impuissance à saisir les choses. Là réside
la
cause de la peur, qu’il avoue, et qui n’est sans doute que la méditat
1284
ssance à saisir les choses. Là réside la cause de
la
peur, qu’il avoue, et qui n’est sans doute que la méditation d’un esp
1285
la peur, qu’il avoue, et qui n’est sans doute que
la
méditation d’un esprit dépourvu de prises sensibles. C’est un état d’
1286
s. C’est un état d’âme qui caractérise assez bien
le
monde moderne, le monde des hommes sans responsabilité et sans résist
1287
’âme qui caractérise assez bien le monde moderne,
le
monde des hommes sans responsabilité et sans résistance propre, le mo
1288
es sans responsabilité et sans résistance propre,
le
monde des hommes qui ne sont plus présents à eux-mêmes, hommes sans p
1289
facilement entraînés. Une Main nous donne ainsi
l’
analyse élémentaire d’un des phénomènes les plus importants d’aujourd’
1290
e ainsi l’analyse élémentaire d’un des phénomènes
les
plus importants d’aujourd’hui : la démoralisation. Démoraliser un hom
1291
es phénomènes les plus importants d’aujourd’hui :
la
démoralisation. Démoraliser un homme, c’est le priver de son pouvoir
1292
: la démoralisation. Démoraliser un homme, c’est
le
priver de son pouvoir créateur. C’est le priver de sa main, — ou asse
1293
e, c’est le priver de son pouvoir créateur. C’est
le
priver de sa main, — ou asservir cette main. Est-ce que ma main n’a p
1294
que de se lever avec cent-mille autres, de faire
le
poing avec cent-mille autres ? Cent-mille mains saluent le tyran, une
1295
avec cent-mille autres ? Cent-mille mains saluent
le
tyran, une main crée. Le temps est peut-être venu de penser avec ses
1296
Cent-mille mains saluent le tyran, une main crée.
Le
temps est peut-être venu de penser avec ses mains. 26. « J’aime que
1297
venu de penser avec ses mains. 26. « J’aime que
les
choses vous résistent et vous contredisent, comme par exemple une mai
1298
à allumer dans une cheminée qui tire mal. J’aime
les
choses qui sont à leur façon, tandis que je suis à la mienne. » l.
1299
is de, « [Compte rendu] C. F. Ramuz, Une main »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, juin 1933, p. 1001-1002.
1300
Saint-Évremond ou
L’
humaniste impur, par Albert-Marie Schmidt (octobre 1933)m Il est pl
1301
eur obtenir de nos jours un effet de surprise par
l’
emploi d’un style poli, nombreux, toujours plein d’onction, parfois mê
1302
mment et trop aisément son sujet. Non point qu’il
le
maintienne arbitrairement dans les cadres d’une dogmatique morale : c
1303
Non point qu’il le maintienne arbitrairement dans
les
cadres d’une dogmatique morale : c’est plutôt qu’il suit Saint-Évremo
1304
lutôt qu’il suit Saint-Évremond de trop près dans
les
méandres de son éthique. Certes, il en fait valoir ainsi toutes les n
1305
n éthique. Certes, il en fait valoir ainsi toutes
les
nuances, avec un art égal à son modèle. On voudrait pourtant qu’il lu
1306
qu’il lui donne parfois libre carrière, qu’il ne
le
garde point sans cesse à portée d’un coup de patte qu’il s’abandonne
1307
patte qu’il s’abandonne lui-même à sa fantaisie,
la
plus joyeusement érudite que je connaisse. Tel qu’il est, ce petit vo
1308
volume nous offre un jeu serré et subtil, et dont
le
spectacle n’est pas vain. M. Schmidt ne s’en laisse point imposer par
1309
vain. M. Schmidt ne s’en laisse point imposer par
la
« réussite classique ». Il place Saint-Évremond, théoricien spirituel
1310
Saint-Évremond, théoricien spirituel et serein de
la
sagesse du grand siècle, sous le coup de la question capitale qu’on v
1311
uel et serein de la sagesse du grand siècle, sous
le
coup de la question capitale qu’on voudrait poser sous cette forme :
1312
in de la sagesse du grand siècle, sous le coup de
la
question capitale qu’on voudrait poser sous cette forme : la vérité e
1313
capitale qu’on voudrait poser sous cette forme :
la
vérité est-elle en déca ou au-delà du désespoir, dans les mesures hum
1314
té est-elle en déca ou au-delà du désespoir, dans
les
mesures humaines ou dans la folie divine ? Il semble bien que Saint-É
1315
à du désespoir, dans les mesures humaines ou dans
la
folie divine ? Il semble bien que Saint-Évremond ait jusqu’au bout re
1316
es rapports de politesse. Cela pourrait bien être
la
formule du désordre intérieur maximum. Rien ne le dissimule mieux que
1317
la formule du désordre intérieur maximum. Rien ne
le
dissimule mieux que le demi-sourire d’une raison éclairée et mondaine
1318
intérieur maximum. Rien ne le dissimule mieux que
le
demi-sourire d’une raison éclairée et mondaine. La nouveauté de l’es
1319
demi-sourire d’une raison éclairée et mondaine.
La
nouveauté de l’essai d’Albert-Marie Schmidt est d’avoir su déceler la
1320
une raison éclairée et mondaine. La nouveauté de
l’
essai d’Albert-Marie Schmidt est d’avoir su déceler la corruption secr
1321
sai d’Albert-Marie Schmidt est d’avoir su déceler
la
corruption secrète de cet art trop parfait, « qui supprime les plus a
1322
n secrète de cet art trop parfait, « qui supprime
les
plus angoissants problèmes, à force de les éclaircir », et l’impureté
1323
pprime les plus angoissants problèmes, à force de
les
éclaircir », et l’impureté d’un humanisme que l’on croyait tempéré et
1324
issants problèmes, à force de les éclaircir », et
l’
impureté d’un humanisme que l’on croyait tempéré et limpide, mais que
1325
les éclaircir », et l’impureté d’un humanisme que
l’
on croyait tempéré et limpide, mais que l’on voit « s’échauffer, se br
1326
sme que l’on croyait tempéré et limpide, mais que
l’
on voit « s’échauffer, se brouiller » aux premières instances d’un cho
1327
d’un choix radical et véritablement ordonnateur.
Le
chapitre le plus remarquable de cette brève et dense biographie intel
1328
radical et véritablement ordonnateur. Le chapitre
le
plus remarquable de cette brève et dense biographie intellectuelle, l
1329
e cette brève et dense biographie intellectuelle,
le
plus juste aussi pour Saint-Évremond, expose ses idées sur la société
1330
e aussi pour Saint-Évremond, expose ses idées sur
la
société. On y verra comment il se peut faire que les tyrannies social
1331
société. On y verra comment il se peut faire que
les
tyrannies sociales, mondaines ou politiques, trahissent par leur raff
1332
e spirituelle dont elles constituent probablement
l’
unique remède. C’est comme la genèse individuelle et religieuse de ce
1333
tituent probablement l’unique remède. C’est comme
la
genèse individuelle et religieuse de ce fait trop actuel, qu’Albert-M
1334
te rendu] Albert-Marie Schmidt, Saint-Évremond ou
L’
humaniste impur », La Nouvelle Revue française, Paris, octobre 1933,
1335
Schmidt, Saint-Évremond ou L’humaniste impur »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, octobre 1933, p. 621-622.
1336
Le Deuxième Jour de
la
Création, par Ilya Ehrenbourg (décembre 1933)n Ce titre curieuseme
1337
1933)n Ce titre curieusement biblique désigne
le
plan quinquennal. Voici donc le roman type de l’Édification socialist
1338
biblique désigne le plan quinquennal. Voici donc
le
roman type de l’Édification socialiste. Bourré de petits faits vrais
1339
le plan quinquennal. Voici donc le roman type de
l’
Édification socialiste. Bourré de petits faits vrais dont l’intention
1340
ion socialiste. Bourré de petits faits vrais dont
l’
intention morale est évidente, il est doublement édifiant. Ceux qui on
1341
te, il est doublement édifiant. Ceux qui ont aimé
le
Chemin de la Vie retrouveront ici l’atmosphère salubre, la naïveté pu
1342
ublement édifiant. Ceux qui ont aimé le Chemin de
la
Vie retrouveront ici l’atmosphère salubre, la naïveté puissante de ce
1343
qui ont aimé le Chemin de la Vie retrouveront ici
l’
atmosphère salubre, la naïveté puissante de ce film, et le même parti
1344
de la Vie retrouveront ici l’atmosphère salubre,
la
naïveté puissante de ce film, et le même parti pris de bonne humeur h
1345
hère salubre, la naïveté puissante de ce film, et
le
même parti pris de bonne humeur héroïque. Tout ce qu’il faut pour ent
1346
umeur héroïque. Tout ce qu’il faut pour entraîner
l’
adolescence avide de servir une grande cause et de se sacrifier pour l
1347
e servir une grande cause et de se sacrifier pour
le
bonheur collectif. Chanson de Roland, fair-play, Baden-Powell, religi
1348
surréalistes, empêcheurs de danser en rond. Voici
l’
histoire en bref, — non pas l’intrigue ! tout cela est propre. Le jeun
1349
nser en rond. Voici l’histoire en bref, — non pas
l’
intrigue ! tout cela est propre. Le jeune Kolka, prolétaire de bonne s
1350
ref, — non pas l’intrigue ! tout cela est propre.
Le
jeune Kolka, prolétaire de bonne souche, part pour la Construction où
1351
eune Kolka, prolétaire de bonne souche, part pour
la
Construction où il ne tarde pas à se distinguer par diverses actions
1352
gré ses plus loyaux efforts, à se passionner pour
le
problème de la fonte, qui est le problème dominant dans cette région
1353
yaux efforts, à se passionner pour le problème de
la
fonte, qui est le problème dominant dans cette région de la Sibérie.
1354
passionner pour le problème de la fonte, qui est
le
problème dominant dans cette région de la Sibérie. Entre eux, une jeu
1355
qui est le problème dominant dans cette région de
la
Sibérie. Entre eux, une jeune et touchante Irina, qui choisira bien e
1356
e l’autre « n’est pas né quand il aurait fallu ».
L’
Histoire a de ces exigences. On conseille à Volodia de se brûler la ce
1357
es exigences. On conseille à Volodia de se brûler
la
cervelle. Il se pend. Ce résumé fait le plus grand tort à l’ouvrage.
1358
se brûler la cervelle. Il se pend. Ce résumé fait
le
plus grand tort à l’ouvrage. Il est cependant exact. Mais les faits,
1359
. Il se pend. Ce résumé fait le plus grand tort à
l’
ouvrage. Il est cependant exact. Mais les faits, même en Russie, ne so
1360
nd tort à l’ouvrage. Il est cependant exact. Mais
les
faits, même en Russie, ne sont rien sans la mystique. La force et le
1361
Mais les faits, même en Russie, ne sont rien sans
la
mystique. La force et le charme de ce roman sont ceux mêmes d’une jeu
1362
s, même en Russie, ne sont rien sans la mystique.
La
force et le charme de ce roman sont ceux mêmes d’une jeunesse fruste,
1363
ussie, ne sont rien sans la mystique. La force et
le
charme de ce roman sont ceux mêmes d’une jeunesse fruste, innocente j
1364
s cruautés ; tout jugement serait ici mesquin, on
l’
accordera volontiers à l’auteur. Ehrenbourg a utilisé pêle-mêle une ma
1365
t serait ici mesquin, on l’accordera volontiers à
l’
auteur. Ehrenbourg a utilisé pêle-mêle une masse de documents qui parl
1366
rutale, sentimentale, formidablement conformiste.
Le
puritanisme des komsomols a ceci de spécifiquement ennuyeux qu’il ne
1367
spécifiquement ennuyeux qu’il ne crée pas en eux
le
moindre refoulement. Ce qui suppose une remarquable absence d’imagina
1368
ui suppose une remarquable absence d’imagination.
Le
prochain plan y pourvoira peut-être. Tout cela est en pleine métamorp
1369
ivre montre, par vingt exemples irréfutables, que
la
classe joue chez les jeunes russes exactement le même rôle que la rac
1370
gt exemples irréfutables, que la classe joue chez
les
jeunes russes exactement le même rôle que la race chez les hitlériens
1371
la classe joue chez les jeunes russes exactement
le
même rôle que la race chez les hitlériens. Il n’y a pas plus de conve
1372
hez les jeunes russes exactement le même rôle que
la
race chez les hitlériens. Il n’y a pas plus de conversion possible au
1373
s russes exactement le même rôle que la race chez
les
hitlériens. Il n’y a pas plus de conversion possible au prolétariat q
1374
étariat qu’au germanisme. Voilà de quoi refroidir
les
sympathies trop spontanées. Il faudra, je crois, passer outre. Dans c
1375
est d’autant plus tragique qu’ils ne savent plus
le
formuler. À nous de les y aider ; et de comprendre que seule cette qu
1376
ique qu’ils ne savent plus le formuler. À nous de
les
y aider ; et de comprendre que seule cette question-là rétablit la co
1377
e comprendre que seule cette question-là rétablit
la
communion humaine. n. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Ilya Eh
1378
ompte rendu] Ilya Ehrenbourg, Le Deuxième Jour de
la
Création », La Nouvelle Revue française, Paris, décembre 1933, p. 92
1379
a Ehrenbourg, Le Deuxième Jour de la Création »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, décembre 1933, p. 927-929.
1380
Taille de
l’
homme, par C. F. Ramuz (avril 1934)o Après Une Main, confession rét
1381
cente, d’une discrétion presque farouche, et dans
la
même lignée que Le Grand Printemps et Raison d’Être, voici encore un
1382
tion presque farouche, et dans la même lignée que
Le
Grand Printemps et Raison d’Être, voici encore un essai de Ramuz, mai
1383
tre, voici encore un essai de Ramuz, mais de tous
le
moins ramuzien : il s’agit cette fois d’idées, et même d’idées généra
1384
ce qui est assez paradoxal dans une telle œuvre.
Le
sujet de Taille de l’Homme, c’est en effet l’opposition cosmique du m
1385
doxal dans une telle œuvre. Le sujet de Taille de
l’
Homme, c’est en effet l’opposition cosmique du monde marxiste et du mo
1386
re. Le sujet de Taille de l’Homme, c’est en effet
l’
opposition cosmique du monde marxiste et du monde chrétien. Ramuz fait
1387
qui d’ailleurs n’ébranleront pas, dans leur foi,
les
marxistes. Mais ce qu’il décrit avec une véritable puissance, c’est l
1388
qu’il décrit avec une véritable puissance, c’est
l’
aboutissement du marxisme : l’isolement cosmique de l’homme. Quoi qu’i
1389
le puissance, c’est l’aboutissement du marxisme :
l’
isolement cosmique de l’homme. Quoi qu’il dise, d’ailleurs, il dit plu
1390
outissement du marxisme : l’isolement cosmique de
l’
homme. Quoi qu’il dise, d’ailleurs, il dit plus que ses arguments. On
1391
On peut aller jusqu’à soutenir que s’il défendait
le
marxisme, il n’en resterait pas moins, par le fait de son être même,
1392
ait le marxisme, il n’en resterait pas moins, par
le
fait de son être même, une protestation contre le matérialisme dialec
1393
le fait de son être même, une protestation contre
le
matérialisme dialectique. Quand on possède, comme lui, le sens de la
1394
ialisme dialectique. Quand on possède, comme lui,
le
sens de la solitude et le sens de la communauté — indissolubles —, on
1395
lectique. Quand on possède, comme lui, le sens de
la
solitude et le sens de la communauté — indissolubles —, on est une ob
1396
on possède, comme lui, le sens de la solitude et
le
sens de la communauté — indissolubles —, on est une objection vivante
1397
, comme lui, le sens de la solitude et le sens de
la
communauté — indissolubles —, on est une objection vivante à tout ind
1398
out « isme ». Quand on est à ce point possédé par
la
vie des choses et des êtres, on n’a pas besoin d’arguments pour faire
1399
, on n’a pas besoin d’arguments pour faire sentir
l’
absurdité des « lois » qui, pour certains intellectuels, figurent la r
1400
lois » qui, pour certains intellectuels, figurent
la
réalité. Une œuvre comme Adam et Ève nous le fait voir tout aussi bie
1401
rent la réalité. Une œuvre comme Adam et Ève nous
le
fait voir tout aussi bien que cet essai : Ramuz est présent à ce mond
1402
uz est présent à ce monde, — eux, ils essaient de
le
recomposer au sein de leur absence insurmontable. Ramuz, mieux que pe
1403
ut se passer d’avoir raison, puisqu’il a pour lui
la
Nature27. C’est quand il parle d’elle qu’il est grand, qu’il donne et
1404
sa mesure, qu’il apparaît véritablement qualifié.
La
mode est au marxisme et au mépris de la Nature ? Mode bourgeoise, tyr
1405
qualifié. La mode est au marxisme et au mépris de
la
Nature ? Mode bourgeoise, tyrannie décadente, tout occupée à calculer
1406
ustification. À ceux qui croient aux fatalités de
l’
Histoire, il faut dire simplement qu’elles sont vraies pour eux-mêmes
1407
tous ceux de leur espèce. On ne calcule pas avec
la
vie, mais avec des quantités mortes. Ceux qui se vantent d’être calcu
1408
and ils se croient matérialistes28. Ils détestent
la
matière comme seuls les spiritualistes bourgeois savaient la détester
1409
rialistes28. Ils détestent la matière comme seuls
les
spiritualistes bourgeois savaient la détester. (Dix ans de discussion
1410
comme seuls les spiritualistes bourgeois savaient
la
détester. (Dix ans de discussions, chez les philosophes de Moscou, on
1411
vaient la détester. (Dix ans de discussions, chez
les
philosophes de Moscou, ont abouti, en 1932, à des définitions telleme
1412
aline s’est vu contraint, pour en finir, de fixer
la
saine doctrine par un ukase condamnant à la fois les mécanistes et le
1413
saine doctrine par un ukase condamnant à la fois
les
mécanistes et les dialecticiens. On parle encore du « diamat »29, mai
1414
r un ukase condamnant à la fois les mécanistes et
les
dialecticiens. On parle encore du « diamat »29, mais ce n’est plus qu
1415
plus qu’un conformisme d’État. C’est, à peu près,
l’
ukase en moins, ce qui s’est passé chez les bourgeois, au sujet du mot
1416
u près, l’ukase en moins, ce qui s’est passé chez
les
bourgeois, au sujet du mot « esprit ».) Le vrai matérialiste, c’est R
1417
chez les bourgeois, au sujet du mot « esprit ».)
Le
vrai matérialiste, c’est Ramuz. Parce qu’il aime les choses et détest
1418
vrai matérialiste, c’est Ramuz. Parce qu’il aime
les
choses et déteste les mécaniques interposées entre l’homme et les cho
1419
est Ramuz. Parce qu’il aime les choses et déteste
les
mécaniques interposées entre l’homme et les choses. Aussi bien n’épro
1420
hoses et déteste les mécaniques interposées entre
l’
homme et les choses. Aussi bien n’éprouve-t-il pas le besoin de s’affi
1421
teste les mécaniques interposées entre l’homme et
les
choses. Aussi bien n’éprouve-t-il pas le besoin de s’affirmer matéria
1422
omme et les choses. Aussi bien n’éprouve-t-il pas
le
besoin de s’affirmer matérialiste. La position de Ramuz paraît assez
1423
ve-t-il pas le besoin de s’affirmer matérialiste.
La
position de Ramuz paraît assez voisine de celle de Berdiaev. Tous deu
1424
isine de celle de Berdiaev. Tous deux considèrent
le
marxisme comme l’aboutissement logique de l’esprit bourgeois-capitali
1425
Berdiaev. Tous deux considèrent le marxisme comme
l’
aboutissement logique de l’esprit bourgeois-capitaliste. Tous deux sav
1426
rent le marxisme comme l’aboutissement logique de
l’
esprit bourgeois-capitaliste. Tous deux savent qu’il faut être pour Di
1427
savent qu’il faut être pour Dieu ou contre Dieu.
La
bourgeoisie a choisi dès longtemps, pratiquement athée sans le savoir
1428
e a choisi dès longtemps, pratiquement athée sans
le
savoir. Le marxisme est l’aveu de son choix. Mais Berdiaev parle en c
1429
dès longtemps, pratiquement athée sans le savoir.
Le
marxisme est l’aveu de son choix. Mais Berdiaev parle en chrétien, et
1430
ratiquement athée sans le savoir. Le marxisme est
l’
aveu de son choix. Mais Berdiaev parle en chrétien, et Ramuz ne veut e
1431
-ce possible ? Et peut-il y croire ? Il a bien vu
le
choix, mais l’a-t-il fait ? Il veut un monde à la taille de l’homme.
1432
Et peut-il y croire ? Il a bien vu le choix, mais
l’
a-t-il fait ? Il veut un monde à la taille de l’homme. Il sait aussi q
1433
le choix, mais l’a-t-il fait ? Il veut un monde à
la
taille de l’homme. Il sait aussi que la mesure de cette taille est da
1434
s l’a-t-il fait ? Il veut un monde à la taille de
l’
homme. Il sait aussi que la mesure de cette taille est dans une foi, d
1435
n monde à la taille de l’homme. Il sait aussi que
la
mesure de cette taille est dans une foi, dans « quelque chose qui dép
1436
st dans une foi, dans « quelque chose qui dépasse
l’
homme et le suppose en même temps », écrit-il. C’est lorsqu’il définit
1437
foi, dans « quelque chose qui dépasse l’homme et
le
suppose en même temps », écrit-il. C’est lorsqu’il définit ainsi la f
1438
temps », écrit-il. C’est lorsqu’il définit ainsi
la
foi qu’on hésite à le suivre, — et que peut-être il sert mal sa pensé
1439
est lorsqu’il définit ainsi la foi qu’on hésite à
le
suivre, — et que peut-être il sert mal sa pensée. Car cette définitio
1440
r cette définition ne vaut, précisément, que pour
la
foi marxiste-dialectique. Le « dépassement » peut aussi bien se faire
1441
récisément, que pour la foi marxiste-dialectique.
Le
« dépassement » peut aussi bien se faire dans l’immanence. La foi chr
1442
Le « dépassement » peut aussi bien se faire dans
l’
immanence. La foi chrétienne dépasse-t-elle vraiment l’homme ? N’est-e
1443
ment » peut aussi bien se faire dans l’immanence.
La
foi chrétienne dépasse-t-elle vraiment l’homme ? N’est-elle pas bien
1444
anence. La foi chrétienne dépasse-t-elle vraiment
l’
homme ? N’est-elle pas bien plutôt ce qui le juge et en même temps le
1445
iment l’homme ? N’est-elle pas bien plutôt ce qui
le
juge et en même temps le sauve dans ses limites, ici et maintenant ?
1446
e pas bien plutôt ce qui le juge et en même temps
le
sauve dans ses limites, ici et maintenant ? C’est là le sens de l’Inc
1447
ve dans ses limites, ici et maintenant ? C’est là
le
sens de l’Incarnation, en même temps que de la véritable transcendanc
1448
limites, ici et maintenant ? C’est là le sens de
l’
Incarnation, en même temps que de la véritable transcendance. C’est là
1449
là le sens de l’Incarnation, en même temps que de
la
véritable transcendance. C’est là le point de la rupture avec tout hu
1450
temps que de la véritable transcendance. C’est là
le
point de la rupture avec tout humanisme imaginable (l’homme sauvé par
1451
la véritable transcendance. C’est là le point de
la
rupture avec tout humanisme imaginable (l’homme sauvé par son progrès
1452
int de la rupture avec tout humanisme imaginable (
l’
homme sauvé par son progrès). 27. Pas la Nature de Rousseau, – la Na
1453
inable (l’homme sauvé par son progrès). 27. Pas
la
Nature de Rousseau, – la Nature des choses. 28. Certains écrivains m
1454
son progrès). 27. Pas la Nature de Rousseau, –
la
Nature des choses. 28. Certains écrivains marxistes français protest
1455
çais protestent avec la dernière énergie quand on
les
traite de matérialistes. Je crains que ce soit, chez la plupart d’ent
1456
du matériel ! », disait l’un d’eux. Qu’est-ce que
le
matériel peut bien précéder ? D’où nous viendrait alors ce « matériel
1457
Denis de, « [Compte rendu] C. F. Ramuz, Taille de
l’
homme », La Nouvelle Revue française, Paris, avril 1934, p. 709-711.
1458
[Compte rendu] C. F. Ramuz, Taille de l’homme »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, avril 1934, p. 709-711.
1459
Le
Procès, par Franz Kafka (mai 1934)p Je ne sais pas si le Procès es
1460
par Franz Kafka (mai 1934)p Je ne sais pas si
le
Procès est le chef-d’œuvre de Kafka, mais il est difficile d’imaginer
1461
ka (mai 1934)p Je ne sais pas si le Procès est
le
chef-d’œuvre de Kafka, mais il est difficile d’imaginer un livre plus
1462
icile d’imaginer un livre plus profond. On a même
l’
impression en le lisant, de lire pour la première fois un livre absolu
1463
un livre plus profond. On a même l’impression en
le
lisant, de lire pour la première fois un livre absolument profond. No
1464
vre absolument profond. Non qu’il prétende percer
les
apparences du monde pour s’enfoncer dans un ésotérisme, au contraire
1465
use à toute interprétation, c’est-à-dire à toutes
les
conventions inventées par les hommes pour étouffer le scandale. Josef
1466
est-à-dire à toutes les conventions inventées par
les
hommes pour étouffer le scandale. Josef K… fondé de pouvoir dans une
1467
onventions inventées par les hommes pour étouffer
le
scandale. Josef K… fondé de pouvoir dans une banque, se voit arrêté u
1468
s ne savent pas de quoi et n’ont pas qualité pour
le
savoir. Puis, on le rend à la liberté. Toute l’histoire sera celle, n
1469
uoi et n’ont pas qualité pour le savoir. Puis, on
le
rend à la liberté. Toute l’histoire sera celle, non pas du procès, qu
1470
nt pas qualité pour le savoir. Puis, on le rend à
la
liberté. Toute l’histoire sera celle, non pas du procès, qui n’a jama
1471
r le savoir. Puis, on le rend à la liberté. Toute
l’
histoire sera celle, non pas du procès, qui n’a jamais lieu, mais des
1472
, mais des préliminaires, des démarches que tente
l’
accusé auprès d’une justice insaisissable, infiniment pédante, corromp
1473
nfiniment pédante, corrompue et capricieuse, dont
les
bureaux sont installés dans des faubourgs ignobles ou des greniers. J
1474
ignobles ou des greniers. Jamais K… ne parvient à
l’
instance suprême ; jamais personne d’ailleurs n’a pu y parvenir. À la
1475
; jamais personne d’ailleurs n’a pu y parvenir. À
la
fin du cauchemar, on le tue dans des conditions trop déprimantes pour
1476
eurs n’a pu y parvenir. À la fin du cauchemar, on
le
tue dans des conditions trop déprimantes pour qu’il puisse songer mêm
1477
est ainsi une suspension du jugement qui est tout
le
drame du Procès. Constatation de la réalité telle qu’elle est, et en
1478
qui est tout le drame du Procès. Constatation de
la
réalité telle qu’elle est, et en même temps, au moment où la révolte
1479
telle qu’elle est, et en même temps, au moment où
la
révolte point, constatation de la vanité absolue de toute appréciatio
1480
s, au moment où la révolte point, constatation de
la
vanité absolue de toute appréciation, de toute prise de parti, — de t
1481
, — de tout acte. C’est ce qu’on pourrait appeler
la
vision métaphysique. Tous les efforts des hommes — y compris les phil
1482
’on pourrait appeler la vision métaphysique. Tous
les
efforts des hommes — y compris les philosophes — consistent peut-être
1483
physique. Tous les efforts des hommes — y compris
les
philosophes — consistent peut-être à échapper à cette vision, qui est
1484
tent peut-être à échapper à cette vision, qui est
l’
angoisse même. Est-ce pur hasard si la théologie chrétienne rend compt
1485
on, qui est l’angoisse même. Est-ce pur hasard si
la
théologie chrétienne rend compte de presque toutes les situations de
1486
héologie chrétienne rend compte de presque toutes
les
situations de ce livre ? Cette Loi qui nous condamne quoi que nous fa
1487
lent comme des prêtres, et qui sont de mèche avec
la
justice, ces prévenus en liberté, cette complicité générale, tout cel
1488
ette complicité générale, tout cela, ce n’est pas
la
« misère de l’homme sans Dieu », mais la misère de l’homme livré à un
1489
générale, tout cela, ce n’est pas la « misère de
l’
homme sans Dieu », mais la misère de l’homme livré à un Dieu qu’il ne
1490
’est pas la « misère de l’homme sans Dieu », mais
la
misère de l’homme livré à un Dieu qu’il ne connaît pas, parce qu’il n
1491
misère de l’homme sans Dieu », mais la misère de
l’
homme livré à un Dieu qu’il ne connaît pas, parce qu’il ne connaît pas
1492
qu’il ne connaît pas, parce qu’il ne connaît pas
le
Christ. « Nul ne vient au Père que par moi ». C’est par le Fils que D
1493
. « Nul ne vient au Père que par moi ». C’est par
le
Fils que Dieu devient pour nous le Père ; mais alors, l’acquittement
1494
i ». C’est par le Fils que Dieu devient pour nous
le
Père ; mais alors, l’acquittement est possible. « Je suis le chemin »
1495
que Dieu devient pour nous le Père ; mais alors,
l’
acquittement est possible. « Je suis le chemin » — mais alors l’acte a
1496
ais alors, l’acquittement est possible. « Je suis
le
chemin » — mais alors l’acte aussi est possible. Ainsi, la foi au Chr
1497
est possible. « Je suis le chemin » — mais alors
l’
acte aussi est possible. Ainsi, la foi au Christ est la seule possibil
1498
» — mais alors l’acte aussi est possible. Ainsi,
la
foi au Christ est la seule possibilité qui soit donnée à l’homme de m
1499
e aussi est possible. Ainsi, la foi au Christ est
la
seule possibilité qui soit donnée à l’homme de marcher, d’échapper à
1500
Christ est la seule possibilité qui soit donnée à
l’
homme de marcher, d’échapper à l’« arrêt » ; mais c’est aussi par cett
1501
ui soit donnée à l’homme de marcher, d’échapper à
l’
« arrêt » ; mais c’est aussi par cette foi, et parce qu’elle nous perm
1502
ue nous connaissons notre état, que nous mesurons
le
réel, et que nous pouvons l’avouer. p. Rougemont Denis de, « [Comp
1503
t, que nous mesurons le réel, et que nous pouvons
l’
avouer. p. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Franz Kafka, Le Pro
1504
Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Franz Kafka,
Le
Procès », La Nouvelle Revue française, Paris, mai 1934, p. 868-869.
1505
s de, « [Compte rendu] Franz Kafka, Le Procès »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, mai 1934, p. 868-869.
1506
ann à Valmy entraîne ses troupes au cri de « Vive
la
Nation ! » nation et peuple se confondaient alors dans la mystique de
1507
n ! » nation et peuple se confondaient alors dans
la
mystique de la révolution. Aujourd’hui l’on se voit sommé de choisir
1508
peuple se confondaient alors dans la mystique de
la
révolution. Aujourd’hui l’on se voit sommé de choisir entre un front
1509
rs dans la mystique de la révolution. Aujourd’hui
l’
on se voit sommé de choisir entre un front qui se dit « national » et
1510
se dit « populaire ». Faudrait-il en déduire que
le
peuple et la nation s’opposent ? Les mots l’indiqueraient, non les fa
1511
ulaire ». Faudrait-il en déduire que le peuple et
la
nation s’opposent ? Les mots l’indiqueraient, non les faits : voilà b
1512
n déduire que le peuple et la nation s’opposent ?
Les
mots l’indiqueraient, non les faits : voilà bien le désordre où nous
1513
que le peuple et la nation s’opposent ? Les mots
l’
indiqueraient, non les faits : voilà bien le désordre où nous vivons.
1514
nation s’opposent ? Les mots l’indiqueraient, non
les
faits : voilà bien le désordre où nous vivons. C’est une anarchie sém
1515
mots l’indiqueraient, non les faits : voilà bien
le
désordre où nous vivons. C’est une anarchie sémantique. On me fait ob
1516
une anarchie sémantique. On me fait observer que
l’
opposition n’est pas entre le peuple et la nation — entre les noms — m
1517
me fait observer que l’opposition n’est pas entre
le
peuple et la nation — entre les noms — mais entre « national » et « p
1518
ver que l’opposition n’est pas entre le peuple et
la
nation — entre les noms — mais entre « national » et « populaire », c
1519
on n’est pas entre le peuple et la nation — entre
les
noms — mais entre « national » et « populaire », c’est-à-dire entre l
1520
« national » et « populaire », c’est-à-dire entre
les
adjectifs. Je traduis : l’opposition n’est pas dans les faits, mais d
1521
», c’est-à-dire entre les adjectifs. Je traduis :
l’
opposition n’est pas dans les faits, mais dans les mystiques. Que vale
1522
jectifs. Je traduis : l’opposition n’est pas dans
les
faits, mais dans les mystiques. Que valent ces mystiques détachées du
1523
l’opposition n’est pas dans les faits, mais dans
les
mystiques. Que valent ces mystiques détachées du réel ? Je vois à gau
1524
es mystiques détachées du réel ? Je vois à gauche
la
peur de Chiappe, et à droite, la peur de la gauche. Je vois à droite
1525
Je vois à gauche la peur de Chiappe, et à droite,
la
peur de la gauche. Je vois à droite une tentation fasciste, trop faib
1526
auche la peur de Chiappe, et à droite, la peur de
la
gauche. Je vois à droite une tentation fasciste, trop faible encore p
1527
he une peur du fascisme assez forte déjà pour que
la
masse accepte l’idée d’une dictature… « antifasciste ». Tout cela se
1528
scisme assez forte déjà pour que la masse accepte
l’
idée d’une dictature… « antifasciste ». Tout cela se joue sur des mots
1529
s ne traduisent que des religions vagues, nées de
la
peur, et comme telles meurtrières. Les faits, ce sont M. de Wendel de
1530
es, nées de la peur, et comme telles meurtrières.
Les
faits, ce sont M. de Wendel derrière la droite, et M. Litvinoff derri
1531
trières. Les faits, ce sont M. de Wendel derrière
la
droite, et M. Litvinoff derrière la gauche. Je leur devine quelques i
1532
ndel derrière la droite, et M. Litvinoff derrière
la
gauche. Je leur devine quelques intérêts convergents, du côté d’Hitle
1533
e veut une armée française puissante, il approuve
la
loi de deux ans. « Staline a raison », affirme l’affiche communiste ;
1534
la loi de deux ans. « Staline a raison », affirme
l’
affiche communiste ; mais alors La Rocque n’a pas tort ? — Certes, il
1535
ison », affirme l’affiche communiste ; mais alors
La
Rocque n’a pas tort ? — Certes, il a tort disent les gauches ; et c’e
1536
Rocque n’a pas tort ? — Certes, il a tort disent
les
gauches ; et c’est à cause de la mystique. Et Staline, disent les dro
1537
l a tort disent les gauches ; et c’est à cause de
la
mystique. Et Staline, disent les droites, a tort : car nous voulons u
1538
c’est à cause de la mystique. Et Staline, disent
les
droites, a tort : car nous voulons une armée forte, mais non pas en v
1539
, mais non pas en vertu d’un conseil bolcheviste.
La
question se ramène à ceci : si tout le monde était mis d’accord par u
1540
ression hitlérienne, irait-on se battre au nom de
la
liberté nationale ou au nom de la liberté populaire ! Flatus vocis !
1541
attre au nom de la liberté nationale ou au nom de
la
liberté populaire ! Flatus vocis ! Il n’y a qu’une seule manière de t
1542
vocis ! Il n’y a qu’une seule manière de tirer à
la
mitrailleuse et de se faire casser la figure. On peut regretter que l
1543
de tirer à la mitrailleuse et de se faire casser
la
figure. On peut regretter que le Congrès pour la défense de la cultur
1544
se faire casser la figure. On peut regretter que
le
Congrès pour la défense de la culture n’ait rien tenté pour débrouill
1545
la figure. On peut regretter que le Congrès pour
la
défense de la culture n’ait rien tenté pour débrouiller un peu le com
1546
peut regretter que le Congrès pour la défense de
la
culture n’ait rien tenté pour débrouiller un peu le complexe de mots
1547
culture n’ait rien tenté pour débrouiller un peu
le
complexe de mots adultérés qui encombre la vie politique et qui empêc
1548
un peu le complexe de mots adultérés qui encombre
la
vie politique et qui empêche, à gauche comme à droite, de nommer les
1549
t qui empêche, à gauche comme à droite, de nommer
les
vrais adversaires. (Je ne vois que Chamson qui ait dénoncé l’équivoqu
1550
ersaires. (Je ne vois que Chamson qui ait dénoncé
l’
équivoque dont vit la droite, quand elle se proclame « nationale » tou
1551
que Chamson qui ait dénoncé l’équivoque dont vit
la
droite, quand elle se proclame « nationale » tout en restant capitali
1552
ationale » tout en restant capitaliste.) Défendre
la
culture, ce serait d’abord rendre aux mots-clés un sens commun. Mais
1553
emble qu’on a fait tout autre chose, au Palais de
la
Mutualité. Il me semble qu’on s’est entendu pour « cultiver » des équ
1554
tiver » des équivoques verbales assez grossières.
L’
équivoque sur le mot liberté par exemple : c’était jusqu’à présent le
1555
voques verbales assez grossières. L’équivoque sur
le
mot liberté par exemple : c’était jusqu’à présent le fait des ligues
1556
mot liberté par exemple : c’était jusqu’à présent
le
fait des ligues que de proclamer la liberté en préparant la dictature
1557
squ’à présent le fait des ligues que de proclamer
la
liberté en préparant la dictature. Jamais on n’a plus mal menti, jama
1558
s ligues que de proclamer la liberté en préparant
la
dictature. Jamais on n’a plus mal menti, jamais avec plus d’enthousia
1559
us mal menti, jamais avec plus d’enthousiasme. Ni
la
gauche ni la droite ne pourront aboutir à une doctrine constructive t
1560
jamais avec plus d’enthousiasme. Ni la gauche ni
la
droite ne pourront aboutir à une doctrine constructive tant qu’elles
1561
tructive tant qu’elles s’efforceront de dénaturer
les
grands mots d’ordre populaires, au nom de mystiques sans puissance co
1562
laires, au nom de mystiques sans puissance contre
les
menaces réelles, — qui sont la guerre et l’étatisme totalitaire. C’es
1563
puissance contre les menaces réelles, — qui sont
la
guerre et l’étatisme totalitaire. C’est très simple. Trop simple, san
1564
ntre les menaces réelles, — qui sont la guerre et
l’
étatisme totalitaire. C’est très simple. Trop simple, sans doute ? q
1565
q. Rougemont Denis de, « Ni gauche ni droite »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, août 1935, p. 305-306.
1566
5)r Paracelse ne fut pas un mage, ou plutôt si
l’
on veut qu’il l’ait été, au sens où l’on dirait qu’Einstein, interprèt
1567
ne fut pas un mage, ou plutôt si l’on veut qu’il
l’
ait été, au sens où l’on dirait qu’Einstein, interprète du cosmos, est
1568
u plutôt si l’on veut qu’il l’ait été, au sens où
l’
on dirait qu’Einstein, interprète du cosmos, est un mage, il ne fut pa
1569
és, suivi d’une troupe de disciples turbulents, à
la
recherche de secrets qu’il voulait rendre manifestes à tous, et qu’il
1570
and populaire et grossier30. Il faut se méfier de
la
gloire qu’on lui a faite. On nous rapporte par exemple que « déjà vie
1571
in de cheval, et de faire subir à son corps toute
la
gamme des combinaisons alchimiques afin de ressusciter ensuite sous l
1572
sons alchimiques afin de ressusciter ensuite sous
la
forme d’un beau jeune homme. Il se fit tailler en morceaux et enterre
1573
idèle serviteur. Mais celui-ci, impatient, ouvrit
la
tombe deux jours trop tôt. Paracelse y gisait, métamorphosé en bel ad
1574
racelse y gisait, métamorphosé en bel adolescent,
le
crâne seul n’avait pas tout à fait repoussé. Un peu d’air pénétra dan
1575
s tout à fait repoussé. Un peu d’air pénétra dans
le
cerveau et Paracelse dut mourir avant d’avoir ressuscité ». Rajeunir
1576
r ressuscité ». Rajeunir son corps et son âme par
l’
ordure, c’est un des thèmes favoris de notre temps. Mais combien, parm
1577
nous, se sont fait déterrer deux jours trop tôt !
L’
auteur de l’anecdote était bon prophète, mais il n’a rien compris à Pa
1578
t fait déterrer deux jours trop tôt ! L’auteur de
l’
anecdote était bon prophète, mais il n’a rien compris à Paracelse. Thé
1579
qui voulait harmoniser sa petite spécialité avec
les
sciences fondamentales qui doivent donner le ton à toutes les autres,
1580
vec les sciences fondamentales qui doivent donner
le
ton à toutes les autres, et qui sont, comme nul ne l’ignore ou ne pou
1581
fondamentales qui doivent donner le ton à toutes
les
autres, et qui sont, comme nul ne l’ignore ou ne pourra l’ignorer lon
1582
on à toutes les autres, et qui sont, comme nul ne
l’
ignore ou ne pourra l’ignorer longtemps, l’astrologie et la théologie.
1583
, et qui sont, comme nul ne l’ignore ou ne pourra
l’
ignorer longtemps, l’astrologie et la théologie. Un grand souci paraît
1584
nul ne l’ignore ou ne pourra l’ignorer longtemps,
l’
astrologie et la théologie. Un grand souci paraît dans toute son œuvre
1585
ou ne pourra l’ignorer longtemps, l’astrologie et
la
théologie. Un grand souci paraît dans toute son œuvre : il veut être
1586
utile. Clair ne signifie pas rationaliste, comme
le
veut le langage confus de ceux qui se croient cartésiens. Aussi a-t-o
1587
Clair ne signifie pas rationaliste, comme le veut
le
langage confus de ceux qui se croient cartésiens. Aussi a-t-on souven
1588
oient cartésiens. Aussi a-t-on souvent tendance à
le
rejeter du côté des mystiques, où cependant il n’a que faire, avec so
1589
, où cependant il n’a que faire, avec son goût de
l’
expérience et de l’application concrète. Mais justement cette fringale
1590
’a que faire, avec son goût de l’expérience et de
l’
application concrète. Mais justement cette fringale d’expérience qu’il
1591
tte fringale d’expérience qu’il promena par toute
l’
Europe, et peut-être même chez les Turcs, le rendit attentif à tant de
1592
romena par toute l’Europe, et peut-être même chez
les
Turcs, le rendit attentif à tant de phénomènes que son vocabulaire ne
1593
toute l’Europe, et peut-être même chez les Turcs,
le
rendit attentif à tant de phénomènes que son vocabulaire ne pouvait y
1594
ui savait voir de grandioses correspondances dans
le
détail bizarre de notre microcosme, manquait de la seule chose dont n
1595
e détail bizarre de notre microcosme, manquait de
la
seule chose dont nous soyons abondamment fournis : d’un attirail de c
1596
quer ce petit nègre médical et philosophique dont
la
saveur ne saurait satisfaire les esprits plus curieux de preuves que
1597
hilosophique dont la saveur ne saurait satisfaire
les
esprits plus curieux de preuves que de faits. J’en viens au petit liv
1598
aits. J’en viens au petit livre de Gundolf. C’est
l’
œuvre synthétique d’un philosophe des formes culturelles, plutôt que d
1599
formes culturelles, plutôt que d’un historien de
la
science. Les historiens font la grimace, mais les lettrés et les méde
1600
urelles, plutôt que d’un historien de la science.
Les
historiens font la grimace, mais les lettrés et les médecins de la je
1601
d’un historien de la science. Les historiens font
la
grimace, mais les lettrés et les médecins de la jeune école seront co
1602
la science. Les historiens font la grimace, mais
les
lettrés et les médecins de la jeune école seront comblés. Gundolf déc
1603
s historiens font la grimace, mais les lettrés et
les
médecins de la jeune école seront comblés. Gundolf décrit l’œuvre de
1604
t la grimace, mais les lettrés et les médecins de
la
jeune école seront comblés. Gundolf décrit l’œuvre de Paracelse comme
1605
de la jeune école seront comblés. Gundolf décrit
l’
œuvre de Paracelse comme un drame de l’expression, une tragédie de la
1606
olf décrit l’œuvre de Paracelse comme un drame de
l’
expression, une tragédie de la terminologie, une « lutte accablante po
1607
e comme un drame de l’expression, une tragédie de
la
terminologie, une « lutte accablante pour l’expression des choses jam
1608
e de la terminologie, une « lutte accablante pour
l’
expression des choses jamais dites ». Paracelse a vu plus de choses qu
1609
oses qu’il ne pouvait en exprimer. Son destin fut
l’
inverse du nôtre. La technique nous masque le vrai, nous sommes en ple
1610
t en exprimer. Son destin fut l’inverse du nôtre.
La
technique nous masque le vrai, nous sommes en pleine scolastique (au
1611
fut l’inverse du nôtre. La technique nous masque
le
vrai, nous sommes en pleine scolastique (au sens vulgaire). Ce défaut
1612
ns vulgaire). Ce défaut de mots propres aurait dû
le
contraindre à l’invention de métaphores. Mais Paracelse justement se
1613
défaut de mots propres aurait dû le contraindre à
l’
invention de métaphores. Mais Paracelse justement se méfie de ce mode
1614
ait sur chaque symptôme, Paracelse ne veut nommer
les
maladies que par le nom de leur remède. « Il ne faut pas dire que tel
1615
me, Paracelse ne veut nommer les maladies que par
le
nom de leur remède. « Il ne faut pas dire que tel état est colérique,
1616
utre saturnienne. » Ce langage en effet renvoie à
l’
origine cosmique du mal, où se trouve aussi le remède. Pour connaître
1617
e à l’origine cosmique du mal, où se trouve aussi
le
remède. Pour connaître et guérir une maladie, il ne suffit pas de voi
1618
e et guérir une maladie, il ne suffit pas de voir
l’
homme seul ; il faut considérer sa relation avec le monde, dont il n’e
1619
’homme seul ; il faut considérer sa relation avec
le
monde, dont il n’est qu’un membre, un reflet. So oben wie unten. L’as
1620
n’est qu’un membre, un reflet. So oben wie unten.
L’
astrologie de Paracelse n’est pas une superstition de devin, c’est une
1621
s une superstition de devin, c’est une science de
la
guérison fondée sur le principe hippocratique des similia similibus,
1622
evin, c’est une science de la guérison fondée sur
le
principe hippocratique des similia similibus, principe qu’on retrouve
1623
des similia similibus, principe qu’on retrouve à
la
base de l’homéopathie moderne, du traitement par la vaccination, et m
1624
a similibus, principe qu’on retrouve à la base de
l’
homéopathie moderne, du traitement par la vaccination, et même de la p
1625
base de l’homéopathie moderne, du traitement par
la
vaccination, et même de la psychanalyse. Paracelse s’était formé de l
1626
rne, du traitement par la vaccination, et même de
la
psychanalyse. Paracelse s’était formé de l’homme une conception spiri
1627
me de la psychanalyse. Paracelse s’était formé de
l’
homme une conception spirituelle et organique (théologique-astrologiqu
1628
s’opposait32 aux médecins galénistes qui voyaient
l’
homme sous l’aspect d’un concept. Il se fût opposé aussi aux médecins
1629
aux médecins galénistes qui voyaient l’homme sous
l’
aspect d’un concept. Il se fût opposé aussi aux médecins de la Renaiss
1630
n concept. Il se fût opposé aussi aux médecins de
la
Renaissance, à Léonard, à Cardan, à Vésale, aux techniciens de la dis
1631
à Léonard, à Cardan, à Vésale, aux techniciens de
la
dissection dont descend toute la science du xixe , et qui nous ont co
1632
x techniciens de la dissection dont descend toute
la
science du xixe , et qui nous ont conduits à considérer notre corps c
1633
orps comme une espèce de moteur démontable. Ainsi
le
grand docteur « macrocosmique », en appliquant l’astrologie, redécouv
1634
le grand docteur « macrocosmique », en appliquant
l’
astrologie, redécouvrit pour les générations futures « l’horizon primo
1635
e », en appliquant l’astrologie, redécouvrit pour
les
générations futures « l’horizon primordial de la médecine », comme l’
1636
logie, redécouvrit pour les générations futures «
l’
horizon primordial de la médecine », comme l’écrit le Dr Allendy dans
1637
les générations futures « l’horizon primordial de
la
médecine », comme l’écrit le Dr Allendy dans l’Essai sur la guérison,
1638
es « l’horizon primordial de la médecine », comme
l’
écrit le Dr Allendy dans l’Essai sur la guérison, ouvrage tout imprégn
1639
orizon primordial de la médecine », comme l’écrit
le
Dr Allendy dans l’Essai sur la guérison, ouvrage tout imprégné de l’e
1640
e la médecine », comme l’écrit le Dr Allendy dans
l’
Essai sur la guérison, ouvrage tout imprégné de l’esprit vitaliste de
1641
e », comme l’écrit le Dr Allendy dans l’Essai sur
la
guérison, ouvrage tout imprégné de l’esprit vitaliste de Paracelse, b
1642
l’Essai sur la guérison, ouvrage tout imprégné de
l’
esprit vitaliste de Paracelse, brève synthèse des idées les plus neuve
1643
vitaliste de Paracelse, brève synthèse des idées
les
plus neuves, qui sont aussi les plus antiques, sur la nature unique d
1644
ynthèse des idées les plus neuves, qui sont aussi
les
plus antiques, sur la nature unique de la maladie, ouvrage dont on pe
1645
lus neuves, qui sont aussi les plus antiques, sur
la
nature unique de la maladie, ouvrage dont on peut dire qu’il marque u
1646
aussi les plus antiques, sur la nature unique de
la
maladie, ouvrage dont on peut dire qu’il marque une date dans l’histo
1647
rage dont on peut dire qu’il marque une date dans
l’
histoire de la connaissance du monde par le corps, ou si l’on veut, du
1648
eut dire qu’il marque une date dans l’histoire de
la
connaissance du monde par le corps, ou si l’on veut, du corps par le
1649
e dans l’histoire de la connaissance du monde par
le
corps, ou si l’on veut, du corps par le monde. « L’homme ne saura jam
1650
e de la connaissance du monde par le corps, ou si
l’
on veut, du corps par le monde. « L’homme ne saura jamais assez combie
1651
monde par le corps, ou si l’on veut, du corps par
le
monde. « L’homme ne saura jamais assez combien il est anthropomorphe
1652
corps, ou si l’on veut, du corps par le monde. «
L’
homme ne saura jamais assez combien il est anthropomorphe », dit Goeth
1653
Il faudrait dire aussi, à la suite de Paracelse :
l’
homme ne saura jamais assez à quel point il est « cosmomorphe ». Le re
1654
jamais assez à quel point il est « cosmomorphe ».
Le
retour à Paracelse auquel nous assistons est un des signes marquants
1655
stons est un des signes marquants de ce temps-ci.
Le
symbole d’une révolution astronomique de la culture occidentale. Peut
1656
s-ci. Le symbole d’une révolution astronomique de
la
culture occidentale. Peut-être avons-nous passé l’âge de l’inhumaine,
1657
a culture occidentale. Peut-être avons-nous passé
l’
âge de l’inhumaine, de la blasphématoire mécanisation de la vie. Peut-
1658
occidentale. Peut-être avons-nous passé l’âge de
l’
inhumaine, de la blasphématoire mécanisation de la vie. Peut-être avon
1659
ut-être avons-nous passé l’âge de l’inhumaine, de
la
blasphématoire mécanisation de la vie. Peut-être avons-nous passé l’â
1660
l’inhumaine, de la blasphématoire mécanisation de
la
vie. Peut-être avons-nous passé l’âge des rationalismes trop courts,
1661
écanisation de la vie. Peut-être avons-nous passé
l’
âge des rationalismes trop courts, de la mythologie féroce des ismes,
1662
ous passé l’âge des rationalismes trop courts, de
la
mythologie féroce des ismes, de Marx et des capitalistes, des adorate
1663
s, de Marx et des capitalistes, des adorateurs de
la
mort, triomphe des chiffres et des laboratoires. Peut-être allons-nou
1664
ratoires. Peut-être allons-nous revenir non pas à
l’
humanisme mais à l’homme, considéré comme un miroir du ciel entier. Ce
1665
allons-nous revenir non pas à l’humanisme mais à
l’
homme, considéré comme un miroir du ciel entier. Certes, elle n’est pa
1666
ertes, elle n’est pas seulement cruelle et folle,
l’
époque qui nous offre de si grandes chances. Et c’est une ère favorabl
1667
Et c’est une ère favorable qui s’ouvre, celle où
l’
esprit se remet à chercher ce qu’est l’homme, et quelle est sa mesure
1668
, celle où l’esprit se remet à chercher ce qu’est
l’
homme, et quelle est sa mesure dans l’univers qu’il a cru concevoir !
1669
r ce qu’est l’homme, et quelle est sa mesure dans
l’
univers qu’il a cru concevoir ! 30. « La monumentale grossièreté lut
1670
re dans l’univers qu’il a cru concevoir ! 30. «
La
monumentale grossièreté luthérienne », dit Gundolf. 31. Gundolf écri
1671
ec sa vision nouvelle des choses, il étudia aussi
les
effets des métaux et des vapeurs sur les ouvriers, observa la démarch
1672
ia aussi les effets des métaux et des vapeurs sur
les
ouvriers, observa la démarche, le genre de vie et l’aspect des mineur
1673
s métaux et des vapeurs sur les ouvriers, observa
la
démarche, le genre de vie et l’aspect des mineurs et conçut ainsi, le
1674
es vapeurs sur les ouvriers, observa la démarche,
le
genre de vie et l’aspect des mineurs et conçut ainsi, le premier, l’i
1675
ouvriers, observa la démarche, le genre de vie et
l’
aspect des mineurs et conçut ainsi, le premier, l’importance de l’hygi
1676
l’aspect des mineurs et conçut ainsi, le premier,
l’
importance de l’hygiène professionnelle ». Voilà qui l’honore en tant
1677
eurs et conçut ainsi, le premier, l’importance de
l’
hygiène professionnelle ». Voilà qui l’honore en tant qu’homme. Mais o
1678
ortance de l’hygiène professionnelle ». Voilà qui
l’
honore en tant qu’homme. Mais on se représente aisément l’embarras qui
1679
en tant qu’homme. Mais on se représente aisément
l’
embarras qui eût été le sien si l’on eût exigé qu’il nommât l’activité
1680
ésente aisément l’embarras qui eût été le sien si
l’
on eût exigé qu’il nommât l’activité qu’il découvrait. Qui ne sait, de
1681
ui eût été le sien si l’on eût exigé qu’il nommât
l’
activité qu’il découvrait. Qui ne sait, de nos jours, parler d’« hygiè
1682
Galien et tous vos scribouillards (Scribenten) je
les
dissoudrai dans de l’Alkali !… » Il propose dans le même passage de l
1683
bouillards (Scribenten) je les dissoudrai dans de
l’
Alkali !… » Il propose dans le même passage de les brûler au four, de
1684
dissoudrai dans de l’Alkali !… » Il propose dans
le
même passage de les brûler au four, de les baptiser d’ordures, eux et
1685
l’Alkali !… » Il propose dans le même passage de
les
brûler au four, de les baptiser d’ordures, eux et leur parenté, de le
1686
se dans le même passage de les brûler au four, de
les
baptiser d’ordures, eux et leur parenté, de les jeter dans le lac de
1687
e les baptiser d’ordures, eux et leur parenté, de
les
jeter dans le lac de Schwyz, etc., « et ce sera pour la vertu, quarte
1688
d’ordures, eux et leur parenté, de les jeter dans
le
lac de Schwyz, etc., « et ce sera pour la vertu, quarte colonne de la
1689
er dans le lac de Schwyz, etc., « et ce sera pour
la
vertu, quarte colonne de la médecine, un grand spectacle ! » (Liber P
1690
c., « et ce sera pour la vertu, quarte colonne de
la
médecine, un grand spectacle ! » (Liber Paragranum). r. Rougemont D
1691
« [Compte rendu] Frédéric Gundolf, Paracelse »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, septembre 1935, p. 445-448.
1692
a jamais mieux mérité son titre. Je veux dire que
la
part de la dialectique professionnelle, professorale, la tractation c
1693
eux mérité son titre. Je veux dire que la part de
la
dialectique professionnelle, professorale, la tractation correcte et
1694
de la dialectique professionnelle, professorale,
la
tractation correcte et à mon sens parfaitement vaine de problèmes qui
1695
r, diminue nettement dans ce tome IV au profit de
la
recherche véritable, des imprudences passionnées, des « essais » ou d
1696
cher et non ratiociner. On ne saurait assez louer
les
directeurs des Recherches d’avoir pris au sérieux le risque philosoph
1697
directeurs des Recherches d’avoir pris au sérieux
le
risque philosophique. Et je ne pense pas trahir leur tendance en insi
1698
insistant ici exclusivement sur trois des écrits
les
moins « orthodoxes » qu’ils ont accueillis cette année. La belle étud
1699
« orthodoxes » qu’ils ont accueillis cette année.
La
belle étude de Karl Löwith sur Hegel, Marx et Kierkegaard fournit à l
1700
l Löwith sur Hegel, Marx et Kierkegaard fournit à
l’
orientation actuelle des Recherches une sorte de justification histori
1701
torique de grande envergure. Löwith voit en Hegel
l’
achèvement de la philosophie classique, aux deux sens du mot achèvemen
1702
e envergure. Löwith voit en Hegel l’achèvement de
la
philosophie classique, aux deux sens du mot achèvement. À partir de H
1703
ens du mot achèvement. À partir de Hegel, dit-il,
le
philosophe n’aura plus d’autre possibilité que celle de « réaliser »
1704
lus d’autre possibilité que celle de « réaliser »
la
philosophie. Réaliser, c’est s’engager dans l’aventure politique ou r
1705
» la philosophie. Réaliser, c’est s’engager dans
l’
aventure politique ou religieuse. Au grand Hegel qui philosophe « au d
1706
e. Au grand Hegel qui philosophe « au dimanche de
la
vie » au-dessus du « banc de sable de cette vie temporelle », Löwith
1707
Löwith oppose Marx et Kierkegaard qui pensent « à
la
banalité soucieuse, extérieure et intérieure, de l’homme ». Et je ne
1708
banalité soucieuse, extérieure et intérieure, de
l’
homme ». Et je ne dis pas que le parallèle Marx-Kierkegaard n’ait entr
1709
et intérieure, de l’homme ». Et je ne dis pas que
le
parallèle Marx-Kierkegaard n’ait entraîné l’auteur à déshumaniser à l
1710
que le parallèle Marx-Kierkegaard n’ait entraîné
l’
auteur à déshumaniser à l’excès Kierkegaard, et à forcer l’opposition
1711
rkegaard n’ait entraîné l’auteur à déshumaniser à
l’
excès Kierkegaard, et à forcer l’opposition de Marx à la doctrine hégé
1712
à déshumaniser à l’excès Kierkegaard, et à forcer
l’
opposition de Marx à la doctrine hégélienne de la médiation. Mais ce q
1713
s Kierkegaard, et à forcer l’opposition de Marx à
la
doctrine hégélienne de la médiation. Mais ce qui me paraît important,
1714
l’opposition de Marx à la doctrine hégélienne de
la
médiation. Mais ce qui me paraît important, c’est que Löwith dégage p
1715
ît important, c’est que Löwith dégage puissamment
l’
origine philosophique du conflit qui domine le monde présent. L’effond
1716
ent l’origine philosophique du conflit qui domine
le
monde présent. L’effondrement de l’idéalisme hégélien sous la pressio
1717
osophique du conflit qui domine le monde présent.
L’
effondrement de l’idéalisme hégélien sous la pression des réalités hum
1718
it qui domine le monde présent. L’effondrement de
l’
idéalisme hégélien sous la pression des réalités humaines élémentaires
1719
sent. L’effondrement de l’idéalisme hégélien sous
la
pression des réalités humaines élémentaires, voilà le fait historique
1720
ression des réalités humaines élémentaires, voilà
le
fait historique capital sur lequel se fonde l’attitude commune des in
1721
là le fait historique capital sur lequel se fonde
l’
attitude commune des intellectuels révolutionnaires, qu’ils soient hum
1722
hrétiens, marxistes ou personnalistes. Désormais,
la
philosophie cessera d’être une simple description : elle va devenir a
1723
a devenir action transformatrice, et productrice.
L’
esprit pur s’évanouit. L’âge qui s’ouvre sera celui du spirituel décis
1724
matrice, et productrice. L’esprit pur s’évanouit.
L’
âge qui s’ouvre sera celui du spirituel décisif. La seule doctrine, ou
1725
’âge qui s’ouvre sera celui du spirituel décisif.
La
seule doctrine, ou pour mieux dire, la seule attitude de pensée qui t
1726
l décisif. La seule doctrine, ou pour mieux dire,
la
seule attitude de pensée qui tienne compte de cette crise essentielle
1727
nne compte de cette crise essentielle révélée par
l’
échec des synthèses hégéliennes comme constitutive de l’humain, certai
1728
c des synthèses hégéliennes comme constitutive de
l’
humain, certains pensent que c’est aujourd’hui l’attitude personnalist
1729
l’humain, certains pensent que c’est aujourd’hui
l’
attitude personnaliste. Les pages qu’Alexandre Marc consacre à la situ
1730
t que c’est aujourd’hui l’attitude personnaliste.
Les
pages qu’Alexandre Marc consacre à la situation de la personne dans l
1731
onnaliste. Les pages qu’Alexandre Marc consacre à
la
situation de la personne dans le temps paraîtront par endroits un peu
1732
ages qu’Alexandre Marc consacre à la situation de
la
personne dans le temps paraîtront par endroits un peu sommaires, mais
1733
Marc consacre à la situation de la personne dans
le
temps paraîtront par endroits un peu sommaires, mais ce défaut procèd
1734
roits un peu sommaires, mais ce défaut procède de
la
vigueur joyeuse dont l’auteur fait preuve dans l’attaque d’un problèm
1735
mais ce défaut procède de la vigueur joyeuse dont
l’
auteur fait preuve dans l’attaque d’un problème entre tous urgent. Il
1736
la vigueur joyeuse dont l’auteur fait preuve dans
l’
attaque d’un problème entre tous urgent. Il se pourrait d’ailleurs que
1737
entre tous urgent. Il se pourrait d’ailleurs que
l’
apparence brutale des thèses personnalistes soit le fait, provisoire,
1738
’apparence brutale des thèses personnalistes soit
le
fait, provisoire, de toute philosophie naissante qui prétend restitue
1739
t bouleversant. À cet égard, on fera bien de lire
l’
essai de René Daumal sur les Limites du langage philosophique. C’est u
1740
, on fera bien de lire l’essai de René Daumal sur
les
Limites du langage philosophique. C’est une recherche des conditions
1741
C’est une recherche des conditions d’activité de
l’
imagerie philosophique, conduite avec un bon sens socratique, un sens
1742
vec un bon sens socratique, un sens du concret de
l’
esprit qui enchante en moi le disciple de Kierkegaard. Il apparaît de
1743
n sens du concret de l’esprit qui enchante en moi
le
disciple de Kierkegaard. Il apparaît de plus en plus nettement que le
1744
egaard. Il apparaît de plus en plus nettement que
les
prolégomènes à toute action réelle résident dans la restauration d’un
1745
prolégomènes à toute action réelle résident dans
la
restauration d’un langage efficace. C’est dire l’intérêt, au sens for
1746
la restauration d’un langage efficace. C’est dire
l’
intérêt, au sens fort, de l’apport des poètes à la philosophie et à l’
1747
efficace. C’est dire l’intérêt, au sens fort, de
l’
apport des poètes à la philosophie et à l’éthique. Les études de E. We
1748
l’intérêt, au sens fort, de l’apport des poètes à
la
philosophie et à l’éthique. Les études de E. Weil sur l’histoire, de
1749
ort, de l’apport des poètes à la philosophie et à
l’
éthique. Les études de E. Weil sur l’histoire, de M. Souriau sur la my
1750
pport des poètes à la philosophie et à l’éthique.
Les
études de E. Weil sur l’histoire, de M. Souriau sur la mystique de la
1751
osophie et à l’éthique. Les études de E. Weil sur
l’
histoire, de M. Souriau sur la mystique de la joie, les esquisses phén
1752
udes de E. Weil sur l’histoire, de M. Souriau sur
la
mystique de la joie, les esquisses phénoménologiques du Dr Minkowski,
1753
sur l’histoire, de M. Souriau sur la mystique de
la
joie, les esquisses phénoménologiques du Dr Minkowski, les approximat
1754
stoire, de M. Souriau sur la mystique de la joie,
les
esquisses phénoménologiques du Dr Minkowski, les approximations un pe
1755
les esquisses phénoménologiques du Dr Minkowski,
les
approximations un peu hésitantes — est-ce un reproche ? — de G. Marce
1756
itantes — est-ce un reproche ? — de G. Marcel sur
l’
acte et la personne, mériteraient beaucoup plus qu’une simple mention.
1757
est-ce un reproche ? — de G. Marcel sur l’acte et
la
personne, mériteraient beaucoup plus qu’une simple mention. J’aurais
1758
’une simple mention. J’aurais aimé analyser aussi
les
trois pages où Jean Wahl résume tout le vertige ontologique, et l’art
1759
er aussi les trois pages où Jean Wahl résume tout
le
vertige ontologique, et l’article de G. Stern sur l’a posteriori, bie
1760
Jean Wahl résume tout le vertige ontologique, et
l’
article de G. Stern sur l’a posteriori, bien caractéristique d’un cert
1761
vertige ontologique, et l’article de G. Stern sur
l’
a posteriori, bien caractéristique d’un certain renouveau du réalisme.
1762
du réalisme. Je me bornerai à signaler pour finir
les
pages très curieuses de P. Klossowski sur Sade, où il est démontré pa
1763
il est démontré par des voies imprévues, comment
la
négation de Dieu entraîne la négation du prochain, dans un esprit vou
1764
s imprévues, comment la négation de Dieu entraîne
la
négation du prochain, dans un esprit voué à la plus torturante logiqu
1765
ne la négation du prochain, dans un esprit voué à
la
plus torturante logique. s. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] R
1766
e, « [Compte rendu] Recherches philosophiques »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, septembre 1935, p. 460-462.
1767
s (poèmes), par D. H. Lawrence (octobre 1935)t
Les
souvenirs de Mabel Dodge sur Lawrence à Taos sont irritants à cause d
1768
ause du sujet, même maltraité. Miss Brett raconte
la
même période et n’irrite pas, ne passionne pas non plus, mais nous in
1769
uement et gagne en somme notre complicité. Elle a
l’
humour discret, sensible, qui convient à la confession d’un sentiment
1770
Elle a l’humour discret, sensible, qui convient à
la
confession d’un sentiment ni partagé ni rebuté, et résigné dès le déb
1771
un sentiment ni partagé ni rebuté, et résigné dès
le
début à cet état. Le plaisir le plus vif que réserve ce genre d’écrit
1772
gé ni rebuté, et résigné dès le début à cet état.
Le
plaisir le plus vif que réserve ce genre d’écrit, c’est de nous laiss
1773
é, et résigné dès le début à cet état. Le plaisir
le
plus vif que réserve ce genre d’écrit, c’est de nous laisser lire dan
1774
ce genre d’écrit, c’est de nous laisser lire dans
le
jeu d’un être humain : rien ne flatte mieux notre désir d’ubiquité. À
1775
flatte mieux notre désir d’ubiquité. À cet égard,
le
livre de Dorothy Brett est beaucoup plus satisfaisant que les diatrib
1776
Dorothy Brett est beaucoup plus satisfaisant que
les
diatribes intéressées de Mabel Dodge. Il parvient à ne rien cacher to
1777
ces dames. Pour quel Lawrence ? Je me demande si
le
souvenir de son œuvre est pour beaucoup dans l’intérêt que je prends
1778
i le souvenir de son œuvre est pour beaucoup dans
l’
intérêt que je prends aux chroniques minutieuses de sa vie33. A-t-on r
1779
roniques minutieuses de sa vie33. A-t-on remarqué
l’
extrême rareté des documents accessibles sur la manière de vivre de no
1780
ué l’extrême rareté des documents accessibles sur
la
manière de vivre de nos contemporains ? Nous avons des reportages et
1781
, c’est-à-dire des moyennes et des exceptions, de
la
statistique et du pittoresque. Mais où trouver la description des jou
1782
la statistique et du pittoresque. Mais où trouver
la
description des journées, des occupations, des manières de réagir d’u
1783
; avec des ustensiles, une scie, un cheval ; avec
les
sentiments et les idées des autres, et leurs histoires ; avec le trai
1784
les, une scie, un cheval ; avec les sentiments et
les
idées des autres, et leurs histoires ; avec le train banal des embête
1785
t les idées des autres, et leurs histoires ; avec
le
train banal des embêtements et des petites chances ? — Voici alors, e
1786
ns ses baquets que vous emplissez sans relâche de
l’
eau du puits. J’apporte, moi aussi, quelques seaux. Puis vous partez é
1787
ssi, quelques seaux. Puis vous partez écrire dans
les
bois, et moi taper à la machine. À déjeuner, vous me dites que Claren
1788
vous partez écrire dans les bois, et moi taper à
la
machine. À déjeuner, vous me dites que Clarence avait eu une conversa
1789
s de laquelle il lui avait déclaré que vous aviez
l’
intention de « détruire » Mabel, ce qui bouleverse Tony et vous boulev
1790
et chaleur : « Oui, c’est vrai, on ne devrait pas
les
lui dire » et vous soupirez profondément. Vous ne vous sentez pas bie
1791
dément. Vous ne vous sentez pas bien, aussi après
le
déjeuner vous vous mettez à frotter le parquet de la cuisine à genoux
1792
ussi après le déjeuner vous vous mettez à frotter
le
parquet de la cuisine à genoux ; à l’aide d’une petite brosse à mains
1793
déjeuner vous vous mettez à frotter le parquet de
la
cuisine à genoux ; à l’aide d’une petite brosse à mains, vous frottez
1794
z à frotter le parquet de la cuisine à genoux ; à
l’
aide d’une petite brosse à mains, vous frottez les vieilles planches p
1795
l’aide d’une petite brosse à mains, vous frottez
les
vieilles planches pourries. C’est cette vision de vous ainsi qui m’a
1796
ées plus tard, pour que vous n’ayez plus jamais à
les
frotter. Après le plancher vous brossez tout ce qui vous tombe sous l
1797
que vous n’ayez plus jamais à les frotter. Après
le
plancher vous brossez tout ce qui vous tombe sous la main et vous lav
1798
plancher vous brossez tout ce qui vous tombe sous
la
main et vous lavez des choses toute la journée. À cinq heures nous al
1799
tombe sous la main et vous lavez des choses toute
la
journée. À cinq heures nous allons chercher les chevaux qui se cachen
1800
te la journée. À cinq heures nous allons chercher
les
chevaux qui se cachent tout au bout du champ de pommes de terre, là-b
1801
bout du champ de pommes de terre, là-bas près de
la
barrière sud. Finalement, nous les pourchassons dans le corral, mais
1802
là-bas près de la barrière sud. Finalement, nous
les
pourchassons dans le corral, mais nous sommes plus éreintés que jamai
1803
rière sud. Finalement, nous les pourchassons dans
le
corral, mais nous sommes plus éreintés que jamais. Puis Poppy se cabr
1804
Poppy se cabre au-dessus du dos de Bessie et nous
la
perdons presque. Enfin nos montures sont sellées et nous partons cher
1805
os montures sont sellées et nous partons chercher
le
lait, mais vous êtes blême et fatigué. Un trait qui manque par hasar
1806
rd dans cette page, et qu’on retrouve dans toutes
les
autres, c’est la mauvaise humeur des Lawrence, leur humeur rageuse, f
1807
, et qu’on retrouve dans toutes les autres, c’est
la
mauvaise humeur des Lawrence, leur humeur rageuse, faut-il dire, coup
1808
faut-il dire, coupée d’accès de malice saugrenue.
Les
Pansies confirment d’ailleurs ce que nous disent Brett et les autres
1809
confirment d’ailleurs ce que nous disent Brett et
les
autres de cet état d’irritation perpétuelle où vivait Lawrence : « Je
1810
uelle où vivait Lawrence : « Je suis épuisé — Par
l’
effort que je fais pour aimer les gens — sans y parvenir. » Ou encore
1811
suis épuisé — Par l’effort que je fais pour aimer
les
gens — sans y parvenir. » Ou encore : « Oh ! ne me donnez pas votre c
1812
affaires ; — Ne me fourrez pas dans vos soucis. »
La
mauvaise humeur est sans doute la caractéristique générale des hommes
1813
s vos soucis. » La mauvaise humeur est sans doute
la
caractéristique générale des hommes d’aujourd’hui : c’est qu’ils croi
1814
ujourd’hui : c’est qu’ils croient au bonheur et à
l’
argent, les deux choses les plus irritantes du monde. (Un sous-produit
1815
: c’est qu’ils croient au bonheur et à l’argent,
les
deux choses les plus irritantes du monde. (Un sous-produit et un moye
1816
croient au bonheur et à l’argent, les deux choses
les
plus irritantes du monde. (Un sous-produit et un moyen pris pour fins
1817
son obstination absurde et touchante à vouloir «
les
gens » plus vivants, plus naturels, plus rayonnants, plus « solaires
1818
qu’ils ne sont. En somme, bien qu’il prêche tout
le
temps, il attend des autres beaucoup plus qu’il n’est disposé à leur
1819
Et non une lassante et exigeante personnalité. »
L’
homme moderne, dit Keyserling, n’a pas de prochains ; il n’a que des v
1820
n’a que des voisins inévitables. Voilà Lawrence,
l’
homme sans prochain. Car le prochain selon la définition évangélique,
1821
ables. Voilà Lawrence, l’homme sans prochain. Car
le
prochain selon la définition évangélique, c’est justement celui qui «
1822
nce, l’homme sans prochain. Car le prochain selon
la
définition évangélique, c’est justement celui qui « exige » de l’aide
1823
angélique, c’est justement celui qui « exige » de
l’
aide et auquel on vient en aide. Autrement, il serait deux fois insupp
1824
che qu’on ne veut pas entendre. Pauvre Lawrence à
la
recherche de sa communauté solaire !34 C’est son meilleur prétexte à
1825
té solaire !34 C’est son meilleur prétexte à fuir
les
hommes. Mais après tout, qui donc vint à son aide, à lui ? Il n’avait
1826
qui donc vint à son aide, à lui ? Il n’avait que
la
nature, les bêtes, les choses. Envers elles, il est plein d’une espèc
1827
int à son aide, à lui ? Il n’avait que la nature,
les
bêtes, les choses. Envers elles, il est plein d’une espèce de charité
1828
ide, à lui ? Il n’avait que la nature, les bêtes,
les
choses. Envers elles, il est plein d’une espèce de charité patiente e
1829
u récit de Brett : « Puis vous partez écrire dans
les
bois. » On allait oublier l’écrivain. Il est là, adossé à un pin, ave
1830
partez écrire dans les bois. » On allait oublier
l’
écrivain. Il est là, adossé à un pin, avec sa chemise bleue, ses culot
1831
u, en train d’écrire sur ses genoux. (Pendant que
les
autres font une carrière dans le « monde des lettres » et se composen
1832
x. (Pendant que les autres font une carrière dans
le
« monde des lettres » et se composent un prestige !) Il invente ses h
1833
invente ses histoires, secrètement animées par «
les
battements du cœur sauvage de l’Espace », il s’amuse, il s’effraie de
1834
t animées par « les battements du cœur sauvage de
l’
Espace », il s’amuse, il s’effraie de ses personnages, il les hait fur
1835
, il s’amuse, il s’effraie de ses personnages, il
les
hait furieusement, il les approche avec méfiance et tout d’un coup le
1836
de ses personnages, il les hait furieusement, il
les
approche avec méfiance et tout d’un coup les pousse par-derrière, et
1837
, il les approche avec méfiance et tout d’un coup
les
pousse par-derrière, et rit. C’est un long enfant maigre au regard na
1838
avoir l’air d’un faune. 33. Même question pour
les
Conversations avec Eckermann, pour le Journal de Byron, etc. 34. Je
1839
stion pour les Conversations avec Eckermann, pour
le
Journal de Byron, etc. 34. Je n’arrive pas à prendre au sérieux en s
1840
34. Je n’arrive pas à prendre au sérieux en soi
la
religion solaire que prêche Lawrence. C’est un rêve de compensation.
1841
he Lawrence. C’est un rêve de compensation. C’est
l’
expression de son impuissance à résoudre ce que j’appellerais le « pro
1842
e son impuissance à résoudre ce que j’appellerais
le
« problème des gens », qui est moins grandiose et beaucoup plus encom
1843
awrence, Matinées mexicaines suivi de Pansies »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, octobre 1935, p. 596-599.
1844
Les
Mystiques allemands du xiiie au xixe siècle, par Jean Chuzeville (o
1845
st une entreprise incertaine que celle d’offrir à
la
curiosité moderne les témoignages écrits de la mystique médiévale ou
1846
ertaine que celle d’offrir à la curiosité moderne
les
témoignages écrits de la mystique médiévale ou renaissante. Notre opt
1847
à la curiosité moderne les témoignages écrits de
la
mystique médiévale ou renaissante. Notre optique actuelle doit fatale
1848
naissante. Notre optique actuelle doit fatalement
les
déformer. C’est qu’elle est généralement conditionnée par notre roman
1849
sprit nous incite à séparer ce qui était lié chez
les
mystiques : la vision de foi et les symboles concrets qui essaient de
1850
e à séparer ce qui était lié chez les mystiques :
la
vision de foi et les symboles concrets qui essaient de l’envelopper p
1851
tait lié chez les mystiques : la vision de foi et
les
symboles concrets qui essaient de l’envelopper pour la transmettre. N
1852
n de foi et les symboles concrets qui essaient de
l’
envelopper pour la transmettre. Nous estimons alors les mystiques selo
1853
mboles concrets qui essaient de l’envelopper pour
la
transmettre. Nous estimons alors les mystiques selon les critères du
1854
velopper pour la transmettre. Nous estimons alors
les
mystiques selon les critères du lyrisme moderne, qui ne préjugent pas
1855
nsmettre. Nous estimons alors les mystiques selon
les
critères du lyrisme moderne, qui ne préjugent pas nécessairement l’in
1856
isme moderne, qui ne préjugent pas nécessairement
l’
intellection du contenu, et encore moins de sa vérité. Il y a donc de
1857
enu, et encore moins de sa vérité. Il y a donc de
l’
équivoque dans notre admiration (ou notre déception) devant les témoig
1858
dans notre admiration (ou notre déception) devant
les
témoignages qu’on nous propose. Un peu plus d’exigence philosophique
1859
it certainement la plupart d’entre nous à récuser
la
Vérité que les mystiques ont prétendu traduire, ce qui reviendrait à
1860
t la plupart d’entre nous à récuser la Vérité que
les
mystiques ont prétendu traduire, ce qui reviendrait à les taxer de my
1861
iques ont prétendu traduire, ce qui reviendrait à
les
taxer de mythomanie. La ferveur littéraire indiscrète, qui fera sans
1862
re, ce qui reviendrait à les taxer de mythomanie.
La
ferveur littéraire indiscrète, qui fera sans doute le succès de ce vo
1863
erveur littéraire indiscrète, qui fera sans doute
le
succès de ce volume, vaut-elle mieux que l’étroitesse positiviste, qu
1864
doute le succès de ce volume, vaut-elle mieux que
l’
étroitesse positiviste, qui réduira tout cela au jeu des complexes fre
1865
u des complexes freudiens ? Tout dépend de ce que
l’
on attend de l’homme et de son esprit : la puissance de tromper (art i
1866
freudiens ? Tout dépend de ce que l’on attend de
l’
homme et de son esprit : la puissance de tromper (art inclus) pour jou
1867
ce que l’on attend de l’homme et de son esprit :
la
puissance de tromper (art inclus) pour jouir, ou la puissance de fixe
1868
puissance de tromper (art inclus) pour jouir, ou
la
puissance de fixer le vrai par convention ou décret scientifique, pou
1869
(art inclus) pour jouir, ou la puissance de fixer
le
vrai par convention ou décret scientifique, pour agir. (Il y a d’autr
1870
ue, qui est tout de même décisif en ces matières,
l’
alternative que je viens d’indiquer ne se pose plus. Car la foi n’est
1871
tive que je viens d’indiquer ne se pose plus. Car
la
foi n’est pas davantage une évasion hors de ce monde qu’une limitatio
1872
une évasion hors de ce monde qu’une limitation de
l’
homme au temporel. La foi réelle, c’est la puissance active de l’Étern
1873
e monde qu’une limitation de l’homme au temporel.
La
foi réelle, c’est la puissance active de l’Éternel dans ce temps. Cet
1874
tion de l’homme au temporel. La foi réelle, c’est
la
puissance active de l’Éternel dans ce temps. Cette définition condamn
1875
orel. La foi réelle, c’est la puissance active de
l’
Éternel dans ce temps. Cette définition condamne tout mysticisme qui n
1876
ion condamne tout mysticisme qui ne serait, comme
le
veut M. Chuzeville, que la « recherche des moyens par lesquels l’âme
1877
e qui ne serait, comme le veut M. Chuzeville, que
la
« recherche des moyens par lesquels l’âme arrive à transgresser ses l
1878
ville, que la « recherche des moyens par lesquels
l’
âme arrive à transgresser ses limites charnelles et temporelles, à s’o
1879
temporelles, à s’oublier en Dieu, son principe ».
La
question est alors de savoir s’il existe une mystique vraiment chréti
1880
nos limites, contre lesquels s’élèvent sans cesse
les
Prophètes et les Apôtres. Il faut reconnaître que les pages les plus
1881
re lesquels s’élèvent sans cesse les Prophètes et
les
Apôtres. Il faut reconnaître que les pages les plus « belles » — du p
1882
Prophètes et les Apôtres. Il faut reconnaître que
les
pages les plus « belles » — du point de vue de l’art — de cette antho
1883
et les Apôtres. Il faut reconnaître que les pages
les
plus « belles » — du point de vue de l’art — de cette anthologie, son
1884
es pages les plus « belles » — du point de vue de
l’
art — de cette anthologie, sont souvent les plus hérétiques, celles au
1885
vue de l’art — de cette anthologie, sont souvent
les
plus hérétiques, celles aussi où l’hybris spirituelle se pare le mieu
1886
sont souvent les plus hérétiques, celles aussi où
l’
hybris spirituelle se pare le mieux d’humilité dévote. Ceci marqué, qu
1887
ues, celles aussi où l’hybris spirituelle se pare
le
mieux d’humilité dévote. Ceci marqué, qui est plus qu’une réserve, il
1888
tuel et poétique plein de dangereuses merveilles.
Le
choix des textes me paraît des plus heureux, la traduction ferme et c
1889
. Le choix des textes me paraît des plus heureux,
la
traduction ferme et coulante. La plupart des mystiques que M. Chuzevi
1890
Suso, Tauler, Franck et Weigel, et surtout Boehme
le
gnostique. Pour Paracelse, on s’étonnera sans doute de le voir figure
1891
ique. Pour Paracelse, on s’étonnera sans doute de
le
voir figurer dans un choix de « mystiques », alors qu’il est le premi
1892
tiques », alors qu’il est le premier défenseur de
l’
expériencev. Mais la beauté des textes cités fait pardonner bien volon
1893
l est le premier défenseur de l’expériencev. Mais
la
beauté des textes cités fait pardonner bien volontiers cette erreur d
1894
classification35. Par exemple, je m’explique mal
l’
omission de Hamann qui eût avantageusement remplacé la visionnaire Cat
1895
ission de Hamann qui eût avantageusement remplacé
la
visionnaire Catherine Emmerich, et qui mérite au moins autant que Nov
1896
rite au moins autant que Novalis de figurer parmi
les
grands mystiques modernes. Mais sans doute M. Chuzeville s’est-il lai
1897
ider dans son choix par un préjugé historique que
le
« Mage du Nord » eût trop évidemment déconcerté. Ce préjugé consiste
1898
e à rendre Luther responsable d’une scission dans
la
culture et la spiritualité allemandes, scission aboutissant par une s
1899
her responsable d’une scission dans la culture et
la
spiritualité allemandes, scission aboutissant par une série d’actions
1900
tiques « au romantisme, au révolutionnarisme et à
l’
anarchie » (selon M. Truc), à quoi M. Chuzeville ajoute pour sa part l
1901
. Truc), à quoi M. Chuzeville ajoute pour sa part
l’
étatisme absolu, le nationalisme, « l’individualisme effréné », le rac
1902
Chuzeville ajoute pour sa part l’étatisme absolu,
le
nationalisme, « l’individualisme effréné », le racisme et le marxisme
1903
our sa part l’étatisme absolu, le nationalisme, «
l’
individualisme effréné », le racisme et le marxisme. Voilà pourquoi le
1904
u, le nationalisme, « l’individualisme effréné »,
le
racisme et le marxisme. Voilà pourquoi le peuple allemand est un peup
1905
isme, « l’individualisme effréné », le racisme et
le
marxisme. Voilà pourquoi le peuple allemand est un peuple empoisonné
1906
réné », le racisme et le marxisme. Voilà pourquoi
le
peuple allemand est un peuple empoisonné (p. 19). Cette généalogie de
1907
qu’on aimait à croire périmée. M. Chuzeville a eu
le
tort de vouloir y réduire l’évolution du mysticisme allemand, qui jus
1908
. M. Chuzeville a eu le tort de vouloir y réduire
l’
évolution du mysticisme allemand, qui justement lui inflige le démenti
1909
du mysticisme allemand, qui justement lui inflige
le
démenti le plus formel. Car si l’on voit à la rigueur le passage de l
1910
me allemand, qui justement lui inflige le démenti
le
plus formel. Car si l’on voit à la rigueur le passage de la dialectiq
1911
ent lui inflige le démenti le plus formel. Car si
l’
on voit à la rigueur le passage de la dialectique de Boehme à la philo
1912
ige le démenti le plus formel. Car si l’on voit à
la
rigueur le passage de la dialectique de Boehme à la philosophie de Fi
1913
nti le plus formel. Car si l’on voit à la rigueur
le
passage de la dialectique de Boehme à la philosophie de Fichte et de
1914
rmel. Car si l’on voit à la rigueur le passage de
la
dialectique de Boehme à la philosophie de Fichte et de Hegel, d’où so
1915
rigueur le passage de la dialectique de Boehme à
la
philosophie de Fichte et de Hegel, d’où sont effectivement sortis un
1916
t effectivement sortis un certain nationalisme et
la
doctrine du jeune Marx, on ne voit pas du tout le passage de Luther à
1917
la doctrine du jeune Marx, on ne voit pas du tout
le
passage de Luther à Boehme, ce défenseur du libre arbitre persécuté p
1918
ehme, ce défenseur du libre arbitre persécuté par
les
pasteurs. Et d’autre part, on sait quels liens unissent Luther à Maît
1919
rtout à son cher Tauler, dont il cite constamment
les
sermons. M. Chuzeville serait sans doute mieux inspiré s’il développa
1920
de sa préface et nous donnait une bonne étude sur
le
lyrisme romantique considéré comme une sécularisation du mysticisme.
1921
’a semblé que cette perspective spirituelle était
la
seule que dégageât sans équivoque la confrontation des mystiques et d
1922
tuelle était la seule que dégageât sans équivoque
la
confrontation des mystiques et de la mentalité moderne. 35. Ce que
1923
ns équivoque la confrontation des mystiques et de
la
mentalité moderne. 35. Ce que je pardonne moins à M. Chuzeville, c’
1924
racelse « était de nature comédienne, et savait à
l’
occasion dissimuler, comme l’indique le choix même d’un pseudonyme. L’
1925
édienne, et savait à l’occasion dissimuler, comme
l’
indique le choix même d’un pseudonyme. L’alchimiste médecin Paracelse,
1926
t savait à l’occasion dissimuler, comme l’indique
le
choix même d’un pseudonyme. L’alchimiste médecin Paracelse, en réalit
1927
r, comme l’indique le choix même d’un pseudonyme.
L’
alchimiste médecin Paracelse, en réalité, se nommait Theophilus Bombas
1928
se Bombaste de Hohenheim, ce dont il n’eut jamais
l’
idée de se cacher. – L’érudition considérable de M. Chuzeville me para
1929
m, ce dont il n’eut jamais l’idée de se cacher. –
L’
érudition considérable de M. Chuzeville me paraît parfois hasardeuse.
1930
le de M. Chuzeville me paraît parfois hasardeuse.
Les
travaux de Jean Baruzi lui sont inconnus ; de même que les études de
1931
ux de Jean Baruzi lui sont inconnus ; de même que
les
études de A. Koyré sur Franck et Weigel. Quant à Luther, il le juge d
1932
A. Koyré sur Franck et Weigel. Quant à Luther, il
le
juge d’après un résumé, confectionné par Gonzague Truc, du pamphlet d
1933
ruc, du pamphlet de Maritain, lequel s’appuie sur
le
P. Denifle… Que de garanties accumulées ! u. Rougemont Denis de, «
1934
emont Denis de, « [Compte rendu] Jean Chuzeville,
Les
Mystiques allemands du XIIIe au XIXe siècle », La Nouvelle Revue fra
1935
s Mystiques allemands du XIIIe au XIXe siècle »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, octobre 1935, p. 599-601. v. Voir l
1936
nçaise, Paris, octobre 1935, p. 599-601. v. Voir
la
note de Rougemont sur le Paracelse de Frédéric Gundolf, dans la NRF d
1937
35, p. 599-601. v. Voir la note de Rougemont sur
le
Paracelse de Frédéric Gundolf, dans la NRF de septembre 1935.
1938
gemont sur le Paracelse de Frédéric Gundolf, dans
la
NRF de septembre 1935.
1939
«
Le
plus beau pays du monde » (octobre 1935)w Toujours ces mots. Quand
1940
perdu leur sens, il faut ajouter aussitôt qu’on a
le
tort de leur en accorder bien davantage qu’ils n’en gardent et que ce
1941
ien davantage qu’ils n’en gardent et que ceux qui
les
prononcent n’en conçoivent. Pour vous le prouver, voici une anecdote
1942
eux qui les prononcent n’en conçoivent. Pour vous
le
prouver, voici une anecdote d’Angleterre : elle doit donc être vraie.
1943
e Alice, écrit ceci dans son devoir d’anglais : «
L’
Angleterre est le plus beau pays du monde. » Un inspecteur passait par
1944
ci dans son devoir d’anglais : « L’Angleterre est
le
plus beau pays du monde. » Un inspecteur passait par là. Il lit le de
1945
du monde. » Un inspecteur passait par là. Il lit
le
devoir. Tonnerre et foudres de ce pacifiste, qui n’hésite pas à dénon
1946
es de ce pacifiste, qui n’hésite pas à dénoncer «
l’
impérialisme démodé » de l’instituteur d’Alice, tenu pour responsable
1947
ésite pas à dénoncer « l’impérialisme démodé » de
l’
instituteur d’Alice, tenu pour responsable du cliché. On blâme cet ins
1948
ui va se plaindre à son député. Lequel interpelle
les
communes. Qui à leur tour infligent un blâme à l’inspecteur ; car si
1949
es communes. Qui à leur tour infligent un blâme à
l’
inspecteur ; car si l’École se met à « décourager l’orgueil patriotiqu
1950
r tour infligent un blâme à l’inspecteur ; car si
l’
École se met à « décourager l’orgueil patriotique », où allons-nous ?
1951
inspecteur ; car si l’École se met à « décourager
l’
orgueil patriotique », où allons-nous ? Quelqu’un qui est bien content
1952
n qui est bien content, dans cette affaire, c’est
le
journaliste allemand qui la raconte, et qui ne manque pas de félicite
1953
cette affaire, c’est le journaliste allemand qui
la
raconte, et qui ne manque pas de féliciter la Chambre des communes. (
1954
qui la raconte, et qui ne manque pas de féliciter
la
Chambre des communes. (Gazette de Francfort, du 31 juillet). On dirai
1955
ble à la plupart des entretiens d’aujourd’hui sur
la
politique, à l’article du Temps, à un cerveau d’homme de gauche ou d’
1956
des entretiens d’aujourd’hui sur la politique, à
l’
article du Temps, à un cerveau d’homme de gauche ou d’homme de droite.
1957
sans nul doute « nationalisme » que voulait dire
l’
inspecteur (à moins qu’il n’ait une conception conquérante de la beaut
1958
à moins qu’il n’ait une conception conquérante de
la
beauté ?). « Démodé » : on se demande dans quel pays. « Pacifiste » ?
1959
s. « Pacifiste » ? Aujourd’hui, il n’y a plus que
les
pacifistes pour oser réclamer ouvertement la guerre (contre les régim
1960
que les pacifistes pour oser réclamer ouvertement
la
guerre (contre les régimes fascistes). « Orgueil patriotique » — c’es
1961
pour oser réclamer ouvertement la guerre (contre
les
régimes fascistes). « Orgueil patriotique » — c’est de nouveau nation
1962
ionaliste qu’il faudrait. Précisons, cela en vaut
la
peine. Le nationalisme existe parce qu’on l’enseigne ; c’est une myst
1963
qu’il faudrait. Précisons, cela en vaut la peine.
Le
nationalisme existe parce qu’on l’enseigne ; c’est une mystique, un i
1964
vaut la peine. Le nationalisme existe parce qu’on
l’
enseigne ; c’est une mystique, un idéal abstrait, un orgueil. Il exist
1965
ue, un idéal abstrait, un orgueil. Il existe dans
la
mesure où on l’exalte. Le patriotisme, c’est le contraire : il existe
1966
trait, un orgueil. Il existe dans la mesure où on
l’
exalte. Le patriotisme, c’est le contraire : il existe dans la seule m
1967
orgueil. Il existe dans la mesure où on l’exalte.
Le
patriotisme, c’est le contraire : il existe dans la seule mesure où i
1968
s la mesure où on l’exalte. Le patriotisme, c’est
le
contraire : il existe dans la seule mesure où il va de soi ; il faut
1969
patriotisme, c’est le contraire : il existe dans
la
seule mesure où il va de soi ; il faut qu’il reste un lien obscur, in
1970
ni aucune espèce de valeurs morales, de même que
la
digestion, si vous voulez. L’idée même de s’en vanter indique un trou
1971
orales, de même que la digestion, si vous voulez.
L’
idée même de s’en vanter indique un trouble. — Enfin, voilà les hitlér
1972
de s’en vanter indique un trouble. — Enfin, voilà
les
hitlériens qui trouvent très bon qu’on dise que l’Angleterre est le p
1973
s hitlériens qui trouvent très bon qu’on dise que
l’
Angleterre est le plus beau pays du monde ? Cela du moins ne manque pa
1974
trouvent très bon qu’on dise que l’Angleterre est
le
plus beau pays du monde ? Cela du moins ne manque pas de logique, mal
1975
que pas de logique, malgré la première apparence.
L’
erreur courante, qui est celle du libéral rationaliste, c’est de croir
1976
elle du libéral rationaliste, c’est de croire que
la
proposition « l’Angleterre est le plus beau pays du monde » comporte
1977
ationaliste, c’est de croire que la proposition «
l’
Angleterre est le plus beau pays du monde » comporte un sens rationnel
1978
t de croire que la proposition « l’Angleterre est
le
plus beau pays du monde » comporte un sens rationnel ; que c’est un j
1979
nclut d’une comparaison. Mais en réalité, lorsque
la
petite Alice écrit que l’Angleterre est le plus beau pays du monde, e
1980
ais en réalité, lorsque la petite Alice écrit que
l’
Angleterre est le plus beau pays du monde, elle veut dire simplement :
1981
orsque la petite Alice écrit que l’Angleterre est
le
plus beau pays du monde, elle veut dire simplement : j’aime mon pays.
1982
nde, elle veut dire simplement : j’aime mon pays.
L’
amour exclut toute comparaison. Dire que tel pays « est le plus beau d
1983
exclut toute comparaison. Dire que tel pays « est
le
plus beau du monde », ce n’est pas dire qu’après enquête on aboutit à
1984
e inconditionnelle. C’est reconnaître et accepter
le
fait concret d’un attachement qui ne comporte pas de choix délibéré.
1985
i ne comporte pas de choix délibéré. Par malheur,
l’
enseignement s’empare du fait patriotique et tente de le rationaliser
1986
ignement s’empare du fait patriotique et tente de
le
rationaliser : il en fait un objet de discours. Par là même il le ren
1987
: il en fait un objet de discours. Par là même il
le
rend absurde. Il le « mystifie ». Qui dit discours dit raison ; qui d
1988
t de discours. Par là même il le rend absurde. Il
le
« mystifie ». Qui dit discours dit raison ; qui dit raison suppose co
1989
pays à un autre, un amour à un autre, car où est
l’
étalon, où est la mesure commune, et qui connaît le modèle idéal ? Le
1990
un amour à un autre, car où est l’étalon, où est
la
mesure commune, et qui connaît le modèle idéal ? Le malfaisant nation
1991
’étalon, où est la mesure commune, et qui connaît
le
modèle idéal ? Le malfaisant nationalisme n’est rien d’autre qu’une r
1992
mesure commune, et qui connaît le modèle idéal ?
Le
malfaisant nationalisme n’est rien d’autre qu’une rationalisation men
1993
sation mensongère du sentiment patriotique. C’est
l’
intervention abusive de la raison comparative dans le domaine de l’inc
1994
ment patriotique. C’est l’intervention abusive de
la
raison comparative dans le domaine de l’incomparable. Si l’on tient c
1995
ntervention abusive de la raison comparative dans
le
domaine de l’incomparable. Si l’on tient compte du fait patriotique n
1996
usive de la raison comparative dans le domaine de
l’
incomparable. Si l’on tient compte du fait patriotique naturel, la seu
1997
comparative dans le domaine de l’incomparable. Si
l’
on tient compte du fait patriotique naturel, la seule formule « intern
1998
Si l’on tient compte du fait patriotique naturel,
la
seule formule « internationale » qui reste possible est celle-ci : «
1999
i reste possible est celle-ci : « Chaque pays est
le
plus beau du monde ». C’est la formule fédéraliste. — Inutile d’ajout
2000
« Chaque pays est le plus beau du monde ». C’est
la
formule fédéraliste. — Inutile d’ajouter que le salut temporel de l’E
2001
t la formule fédéraliste. — Inutile d’ajouter que
le
salut temporel de l’Europe dépend de sa faculté d’opérer de telles di
2002
ste. — Inutile d’ajouter que le salut temporel de
l’
Europe dépend de sa faculté d’opérer de telles distinctions. w. Rou
2003
telles distinctions. w. Rougemont Denis de, « “
Le
plus beau pays du monde” », La Nouvelle Revue française, Paris, octob
2004
emont Denis de, « “Le plus beau pays du monde” »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, octobre 1935, p. 633-634.
2005
Sur
l’
esprit incarné (février 1936)x M. Julien Benda écrit dans le numéro
2006
rné (février 1936)x M. Julien Benda écrit dans
le
numéro de janvier de la NRF la phrase suivante : « La religion de l’e
2007
. Julien Benda écrit dans le numéro de janvier de
la
NRF la phrase suivante : « La religion de l’esprit incarné est celle
2008
n Benda écrit dans le numéro de janvier de la NRF
la
phrase suivante : « La religion de l’esprit incarné est celle qui hon
2009
uméro de janvier de la NRF la phrase suivante : «
La
religion de l’esprit incarné est celle qui honore l’esprit en tant qu
2010
r de la NRF la phrase suivante : « La religion de
l’
esprit incarné est celle qui honore l’esprit en tant qu’il veut porter
2011
religion de l’esprit incarné est celle qui honore
l’
esprit en tant qu’il veut porter l’empreinte de certains intérêts terr
2012
lle qui honore l’esprit en tant qu’il veut porter
l’
empreinte de certains intérêts terrestres, et le méprise en tant qu’il
2013
r l’empreinte de certains intérêts terrestres, et
le
méprise en tant qu’il cherche à s’affranchir de ce genre de pression
2014
iberté. » Il écrit un peu plus loin qu’il déplore
la
disparition « des grandes disciplines intellectuelles, singulièrement
2015
peu de logique, je demanderai à M. Benda : 1° si
les
« docteurs » nationalistes qu’il attaque ont jamais prétendu que leur
2016
ndu que leur politique fût une « incarnation » de
l’
esprit ; 2° au cas où ils l’auraient fait, ce que j’ignore car je les
2017
ne « incarnation » de l’esprit ; 2° au cas où ils
l’
auraient fait, ce que j’ignore car je les pratique peu : s’il y a lieu
2018
as où ils l’auraient fait, ce que j’ignore car je
les
pratique peu : s’il y a lieu de reprendre à son compte cette erreur d
2019
, ou en langage théologique, ce blasphème ; 3° si
l’
incarnation de l’Esprit, c’est-à-dire Jésus-Christ, fils de Dieu, a ja
2020
héologique, ce blasphème ; 3° si l’incarnation de
l’
Esprit, c’est-à-dire Jésus-Christ, fils de Dieu, a jamais « porté l’em
2021
dire Jésus-Christ, fils de Dieu, a jamais « porté
l’
empreinte de certains intérêts terrestres », et conséquemment, si l’on
2022
tains intérêts terrestres », et conséquemment, si
l’
on a le droit d’opposer esprit pur à esprit incarné dans des termes te
2023
ntérêts terrestres », et conséquemment, si l’on a
le
droit d’opposer esprit pur à esprit incarné dans des termes tels qu’e
2024
trahison intéressée ; 4° si M. Benda conçoit que
l’
opposition esprit pur contre esprit asservi (aux intérêts politiques)
2025
s politiques) évoque précisément pour un chrétien
l’
opposition de Pilate et des docteurs nationalistes juifs qui criaient
2026
es docteurs nationalistes juifs qui criaient avec
la
populace : Crucifie ! et relâche Barabbas — opposition qui se résout
2027
on qui se résout pratiquement en unanimité contre
le
Christ, contre l’esprit incarné en Personne ; 5° si le clerc qui s’en
2028
ratiquement en unanimité contre le Christ, contre
l’
esprit incarné en Personne ; 5° si le clerc qui s’en lave les mains ne
2029
rist, contre l’esprit incarné en Personne ; 5° si
le
clerc qui s’en lave les mains ne risque pas de faire le jeu des clerc
2030
ncarné en Personne ; 5° si le clerc qui s’en lave
les
mains ne risque pas de faire le jeu des clercs qui crient avec les lo
2031
rc qui s’en lave les mains ne risque pas de faire
le
jeu des clercs qui crient avec les loups, et de trahir de la sorte do
2032
ue pas de faire le jeu des clercs qui crient avec
les
loups, et de trahir de la sorte doublement, étant admis toutefois que
2033
clercs qui crient avec les loups, et de trahir de
la
sorte doublement, étant admis toutefois que la mission de l’esprit es
2034
de la sorte doublement, étant admis toutefois que
la
mission de l’esprit est d’entrer dans le monde, non point pour s’y so
2035
ublement, étant admis toutefois que la mission de
l’
esprit est d’entrer dans le monde, non point pour s’y soumettre, mais
2036
fois que la mission de l’esprit est d’entrer dans
le
monde, non point pour s’y soumettre, mais pour le transformer en véri
2037
le monde, non point pour s’y soumettre, mais pour
le
transformer en vérité. Mission que l’Évangile et la théologie résumen
2038
, mais pour le transformer en vérité. Mission que
l’
Évangile et la théologie résument par le seul mot de Rédemption, et qu
2039
transformer en vérité. Mission que l’Évangile et
la
théologie résument par le seul mot de Rédemption, et que certains ant
2040
ssion que l’Évangile et la théologie résument par
le
seul mot de Rédemption, et que certains antichrétiens, plus pénétrés
2041
rétiens, plus pénétrés de christianisme qu’ils ne
le
croient, préfèrent appeler révolution. Ces questions me paraissent ca
2042
vacuata sit crux. x. Rougemont Denis de, « Sur
l’
esprit incarné », La Nouvelle Revue française, Paris, février 1936, p.
2043
x. Rougemont Denis de, « Sur l’esprit incarné »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, février 1936, p. 304-305.
2044
Dictature de
la
liberté, par Robert Aron (mars 1936)y « J’aime les titres mystérie
2045
liberté, par Robert Aron (mars 1936)y « J’aime
les
titres mystérieux ou pétard », disait Baudelaire. Celui d’Aron unit c
2046
de sa pensée, et à certains égards, du contenu de
la
doctrine qu’il défend. Dictature et liberté, le monde moderne se déba
2047
e la doctrine qu’il défend. Dictature et liberté,
le
monde moderne se débat tragiquement entre ces deux nécessités dont la
2048
érielle, et la seconde notre mission spirituelle.
La
dictature tue la liberté pour assurer l’ordre et le pain du corps (c’
2049
conde notre mission spirituelle. La dictature tue
la
liberté pour assurer l’ordre et le pain du corps (c’est le principe !
2050
ituelle. La dictature tue la liberté pour assurer
l’
ordre et le pain du corps (c’est le principe !). La liberté condamne l
2051
dictature tue la liberté pour assurer l’ordre et
le
pain du corps (c’est le principe !). La liberté condamne la dictature
2052
é pour assurer l’ordre et le pain du corps (c’est
le
principe !). La liberté condamne la dictature, mais dès qu’elle la su
2053
’ordre et le pain du corps (c’est le principe !).
La
liberté condamne la dictature, mais dès qu’elle la supprime pratiquem
2054
corps (c’est le principe !). La liberté condamne
la
dictature, mais dès qu’elle la supprime pratiquement, elle perd tout
2055
a liberté condamne la dictature, mais dès qu’elle
la
supprime pratiquement, elle perd tout point d’appui, son élan meurt e
2056
d tout point d’appui, son élan meurt en anarchie.
La
solution de ce conflit est évidente, c’est peut-être pourquoi bien pe
2057
t est évidente, c’est peut-être pourquoi bien peu
l’
ont vue jusqu’à présent : elle « crève les yeux ». Il faut organiser l
2058
bien peu l’ont vue jusqu’à présent : elle « crève
les
yeux ». Il faut organiser la liberté. Mais c’est encore là une ellips
2059
sent : elle « crève les yeux ». Il faut organiser
la
liberté. Mais c’est encore là une ellipse ; l’on dira qu’une liberté
2060
er la liberté. Mais c’est encore là une ellipse ;
l’
on dira qu’une liberté organisée n’en est plus une. Expliquons-nous ;
2061
est plus une. Expliquons-nous ; il faut organiser
le
matériel — la dictature36 seule y parvient — mais au profit de la lib
2062
Expliquons-nous ; il faut organiser le matériel —
la
dictature36 seule y parvient — mais au profit de la liberté, et à seu
2063
dictature36 seule y parvient — mais au profit de
la
liberté, et à seule fin de la laisser s’épanouir. Il faut soumettre l
2064
— mais au profit de la liberté, et à seule fin de
la
laisser s’épanouir. Il faut soumettre la dictature à la liberté, il f
2065
e fin de la laisser s’épanouir. Il faut soumettre
la
dictature à la liberté, il faut une dictature pour la liberté — une d
2066
sser s’épanouir. Il faut soumettre la dictature à
la
liberté, il faut une dictature pour la liberté — une dictature de la
2067
ictature à la liberté, il faut une dictature pour
la
liberté — une dictature de la liberté. Ce serait le plus beau « titre
2068
une dictature pour la liberté — une dictature de
la
liberté. Ce serait le plus beau « titre » du siècle. Ceci admis, et c
2069
liberté — une dictature de la liberté. Ce serait
le
plus beau « titre » du siècle. Ceci admis, et comment ne point l’adme
2070
itre » du siècle. Ceci admis, et comment ne point
l’
admettre — mais c’est admettre la révolution — se posent toutes les qu
2071
comment ne point l’admettre — mais c’est admettre
la
révolution — se posent toutes les questions « pratiques » ; celles qu
2072
s c’est admettre la révolution — se posent toutes
les
questions « pratiques » ; celles qui passionnent les hommes d’action
2073
questions « pratiques » ; celles qui passionnent
les
hommes d’action et qu’ils estiment purement techniques parce qu’ils e
2074
ment purement techniques parce qu’ils en ignorent
les
fins. Cette erreur des fameux techniciens nous vaut les tyrannies act
2075
ns. Cette erreur des fameux techniciens nous vaut
les
tyrannies actuelles. Considérant le désordre où nous sommes, ils prét
2076
ns nous vaut les tyrannies actuelles. Considérant
le
désordre où nous sommes, ils prétendent nous en tirer en parant, comm
2077
isent, au plus pressé, c’est-à-dire en organisant
l’
État, l’économie et les rapports sociaux selon les nécessités de l’heu
2078
u plus pressé, c’est-à-dire en organisant l’État,
l’
économie et les rapports sociaux selon les nécessités de l’heure, à le
2079
c’est-à-dire en organisant l’État, l’économie et
les
rapports sociaux selon les nécessités de l’heure, à leurs yeux « maté
2080
l’État, l’économie et les rapports sociaux selon
les
nécessités de l’heure, à leurs yeux « matérielles d’abord ». Cette vu
2081
e et les rapports sociaux selon les nécessités de
l’
heure, à leurs yeux « matérielles d’abord ». Cette vue des plus couran
2082
es, lesquelles, pour n’avoir pas été soumises dès
le
début à une volonté perspicace et fanatique de libération, ne tardent
2083
libération, ne tardent pas à se retourner contre
les
hommes, et à brimer nécessairement leurs vocations, leurs libertés ré
2084
ations, leurs libertés réelles, leur personne. Si
la
personne n’est pas déjà au début d’un calcul pratique, on ne la retro
2085
est pas déjà au début d’un calcul pratique, on ne
la
retrouvera jamais au terme ; et la rigueur même du calcul s’opposera
2086
ratique, on ne la retrouvera jamais au terme ; et
la
rigueur même du calcul s’opposera à son intrusion. Comme le prouve to
2087
même du calcul s’opposera à son intrusion. Comme
le
prouve toute l’histoire moderne, qui est celle des révolutions étrang
2088
s’opposera à son intrusion. Comme le prouve toute
l’
histoire moderne, qui est celle des révolutions étranglées par l’État
2089
rne, qui est celle des révolutions étranglées par
l’
État et sa police. Telles sont les bases — algébrisées — des recherche
2090
s étranglées par l’État et sa police. Telles sont
les
bases — algébrisées — des recherches de L’Ordre nouveau. Robert Aron
2091
— des recherches de L’Ordre nouveau. Robert Aron
les
a décrites avec une sobre et nerveuse précision37 qui tranche sur le
2092
une sobre et nerveuse précision37 qui tranche sur
le
verbiage technico-humanitaire de tous nos fabricants de « plans d’urg
2093
si un humour très personnel ne venait sans cesse
la
rabattre au concret. On peut reprocher à l’auteur d’avoir passé trop
2094
cesse la rabattre au concret. On peut reprocher à
l’
auteur d’avoir passé trop rapidement sur certaines questions dernières
2095
rop rapidement sur certaines questions dernières (
le
sens dernier de la liberté humaine, par exemple). Mais si l’on consid
2096
certaines questions dernières (le sens dernier de
la
liberté humaine, par exemple). Mais si l’on considère l’ampleur du de
2097
nier de la liberté humaine, par exemple). Mais si
l’
on considère l’ampleur du dessein de L’Ordre nouveau, et la difficulté
2098
rté humaine, par exemple). Mais si l’on considère
l’
ampleur du dessein de L’Ordre nouveau, et la difficulté de le résumer
2099
idère l’ampleur du dessein de L’Ordre nouveau, et
la
difficulté de le résumer à l’usage d’un public qu’il faut sans cesse
2100
u dessein de L’Ordre nouveau, et la difficulté de
le
résumer à l’usage d’un public qu’il faut sans cesse prévenir contre l
2101
L’Ordre nouveau, et la difficulté de le résumer à
l’
usage d’un public qu’il faut sans cesse prévenir contre les pires male
2102
d’un public qu’il faut sans cesse prévenir contre
les
pires malentendus, l’on jugera mieux de la qualité de tension et de d
2103
sans cesse prévenir contre les pires malentendus,
l’
on jugera mieux de la qualité de tension et de décision spirituelle qu
2104
ontre les pires malentendus, l’on jugera mieux de
la
qualité de tension et de décision spirituelle que supposait un tel ou
2105
lamait ici même une critique qui « contingentât »
l’
importation des mystiques étrangères. Oui, mais on ne se défend qu’en
2106
attaquant. Sachons gré à ce livre de poser enfin
les
questions que la France se doit de résoudre pour l’Europe, et de les
2107
s gré à ce livre de poser enfin les questions que
la
France se doit de résoudre pour l’Europe, et de les poser sous la for
2108
questions que la France se doit de résoudre pour
l’
Europe, et de les poser sous la forme concrète d’une série de tensions
2109
a France se doit de résoudre pour l’Europe, et de
les
poser sous la forme concrète d’une série de tensions qu’il s’agit d’o
2110
t de résoudre pour l’Europe, et de les poser sous
la
forme concrète d’une série de tensions qu’il s’agit d’orienter et de
2111
rnière « tension », à laquelle se ramènent toutes
les
autres, est en train de devenir une sorte de pont aux ânes de nos phi
2112
tiré, le premier, des conclusions pratiques dans
le
domaine du travail. Et sa première expérience de service civil, organ
2113
a première expérience de service civil, organisée
l’
été dernier, a fait voir que les ouvriers savent apprécier les conséqu
2114
e civil, organisée l’été dernier, a fait voir que
les
ouvriers savent apprécier les conséquences concrètes d’une distinctio
2115
er, a fait voir que les ouvriers savent apprécier
les
conséquences concrètes d’une distinction que bien des clercs estimaie
2116
e de tyrannie exercée par un seul homme dans tous
les
domaines. 37. Particulièrement efficace dans la polémique : voir les
2117
les domaines. 37. Particulièrement efficace dans
la
polémique : voir les pages du dernier chapitre sur le colonel de la R
2118
articulièrement efficace dans la polémique : voir
les
pages du dernier chapitre sur le colonel de la Rocque, « cet en avant
2119
olémique : voir les pages du dernier chapitre sur
le
colonel de la Rocque, « cet en avant qui ne sait pas où aller ». y.
2120
is de, « [Compte rendu] Robert Aron, Dictature de
la
liberté », La Nouvelle Revue française, Paris, mars 1936, p. 435-437
2121
e rendu] Robert Aron, Dictature de la liberté »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, mars 1936, p. 435-437.
2122
Kierkegaard en France (juin 1936)z
L’
introduction de Kierkegaard en France a les mêmes dates que la crise :
2123
36)z L’introduction de Kierkegaard en France a
les
mêmes dates que la crise : 1930-1935. Il a fallu bien près d’un siècl
2124
on de Kierkegaard en France a les mêmes dates que
la
crise : 1930-1935. Il a fallu bien près d’un siècle, il a fallu surto
2125
a fallu bien près d’un siècle, il a fallu surtout
le
double truchement de Heidegger et de Karl Barth pour imposer à l’atte
2126
ment de Heidegger et de Karl Barth pour imposer à
l’
attention de quelques-uns l’œuvre d’un écrivain dont, cependant, la pu
2127
Barth pour imposer à l’attention de quelques-uns
l’
œuvre d’un écrivain dont, cependant, la puissance de choc et d’interro
2128
elques-uns l’œuvre d’un écrivain dont, cependant,
la
puissance de choc et d’interrogation ne saurait être comparée qu’à ce
2129
’assure qu’il a même un public passionné. Mais si
l’
on juge de la façon dont il est lu par la façon dont il est trop souve
2130
a même un public passionné. Mais si l’on juge de
la
façon dont il est lu par la façon dont il est trop souvent cité, l’on
2131
Mais si l’on juge de la façon dont il est lu par
la
façon dont il est trop souvent cité, l’on pensera qu’il eût mieux val
2132
st lu par la façon dont il est trop souvent cité,
l’
on pensera qu’il eût mieux valu montrer plus de prudence à le répandre
2133
a qu’il eût mieux valu montrer plus de prudence à
le
répandre. Et pourtant il fallait qu’il fût traduit : c’était une des
2134
de notre état spirituel. Seulement, il eût fallu
le
traduire autrement, pour prévenir certains malentendus inévitables. J
2135
tains malentendus inévitables. Je ne vise pas ici
la
langue des traductions, encore qu’il y ait beaucoup à dire sur ce poi
2136
’il y ait beaucoup à dire sur ce point, mais bien
l’
ordre ou plutôt la succession désordonnée des œuvres qu’on nous a trad
2137
à dire sur ce point, mais bien l’ordre ou plutôt
la
succession désordonnée des œuvres qu’on nous a traduites. Kierkegaard
2138
œuvres qu’on nous a traduites. Kierkegaard donne
l’
exemple unique, je crois bien, d’un auteur qui attache autant d’import
2139
en, d’un auteur qui attache autant d’importance à
l’
opportunité spirituelle de ses œuvres qu’à leur contenu intrinsèque. P
2140
dire au bon moment ses vérités inactuelles. De là
le
rythme singulier de sa production ; de là ses nombreux masques et pse
2141
ses nombreux masques et pseudonymes, de là aussi
l’
impétuosité sans scrupules de ses dernières « attaques contre la chrét
2142
sans scrupules de ses dernières « attaques contre
la
chrétienté établie ». Toute une carrière de poète et de philosophe «
2143
à orientation religieuse » avait en effet préparé
le
climat et la juste portée de ces attaques, avec une patience ironique
2144
religieuse » avait en effet préparé le climat et
la
juste portée de ces attaques, avec une patience ironique, mais aussi
2145
ques, avec une patience ironique, mais aussi dans
la
crainte et le tremblement d’une foi sans cesse combattue, d’une vraie
2146
patience ironique, mais aussi dans la crainte et
le
tremblement d’une foi sans cesse combattue, d’une vraie foi. Publier
2147
ant ce terme, cela revient littéralement à priver
l’
œuvre, et ces fragments qu’on nous en donne, de toute espèce de sens r
2148
e de malentendus. 1. Parce qu’on a publié d’abord
le
Journal du séducteur, fragment d’un gros ouvrage intitulé De deux cho
2149
ne, puis In vino veritas, fragment des Stades sur
le
chemin de la vie, et cela, sans déclarer avec toute l’instance que re
2150
ino veritas, fragment des Stades sur le chemin de
la
vie, et cela, sans déclarer avec toute l’instance que requérait une o
2151
emin de la vie, et cela, sans déclarer avec toute
l’
instance que requérait une opération aussi risquée, que ces fragments
2152
ils devaient être radicalement niés, on a incité
le
lecteur, non prévenu ou mal prévenu, à tenir Kierkegaard pour une esp
2153
hète du paradoxe moral, pour un immoraliste avant
la
lettre nietzschéenne. Admettons que la suite ait fait voir l’énormité
2154
iste avant la lettre nietzschéenne. Admettons que
la
suite ait fait voir l’énormité de cette erreur. Je crains bien que ce
2155
etzschéenne. Admettons que la suite ait fait voir
l’
énormité de cette erreur. Je crains bien que ce n’ait été qu’au profit
2156
une erreur plus subtile. 2. Parce qu’on a traduit
la
Maladie à la mort sous le titre de Traité du désespoir, Kierkegaard a
2157
us subtile. 2. Parce qu’on a traduit la Maladie à
la
mort sous le titre de Traité du désespoir, Kierkegaard a passé bientô
2158
. Parce qu’on a traduit la Maladie à la mort sous
le
titre de Traité du désespoir, Kierkegaard a passé bientôt pour le cor
2159
té du désespoir, Kierkegaard a passé bientôt pour
le
coryphée du désespoir considéré comme un des beaux-arts. Or s’il est
2160
l est vrai que Kierkegaard s’est occupé à décrire
les
formes déclarées ou déguisées que revêt le désespoir fondamental du p
2161
crire les formes déclarées ou déguisées que revêt
le
désespoir fondamental du pécheur ; s’il est vrai qu’il a su montrer,
2162
qu’il a su montrer, avec une effrayante lucidité,
l’
universalité de cet état, c’est aussi que pour lui, le désespoir est l
2163
iversalité de cet état, c’est aussi que pour lui,
le
désespoir est le péché, la seule maladie vraiment mortelle, dont la f
2164
état, c’est aussi que pour lui, le désespoir est
le
péché, la seule maladie vraiment mortelle, dont la foi seule, non la
2165
st aussi que pour lui, le désespoir est le péché,
la
seule maladie vraiment mortelle, dont la foi seule, non la vertu, peu
2166
e péché, la seule maladie vraiment mortelle, dont
la
foi seule, non la vertu, peut nous guérir. Quant à ceux qui le qualif
2167
maladie vraiment mortelle, dont la foi seule, non
la
vertu, peut nous guérir. Quant à ceux qui le qualifient de « métaphys
2168
non la vertu, peut nous guérir. Quant à ceux qui
le
qualifient de « métaphysicien du néant », ils oublient de dire que le
2169
étaphysicien du néant », ils oublient de dire que
le
néant, dont ils lui prêtent ainsi le goût, est justement celui que Ki
2170
de dire que le néant, dont ils lui prêtent ainsi
le
goût, est justement celui que Kierkegaard dénonce au cœur des système
2171
t. 3. Parce que Kierkegaard s’est déchaîné contre
les
églises établies, les évêques de la cour, et la religion bourgeoise q
2172
gaard s’est déchaîné contre les églises établies,
les
évêques de la cour, et la religion bourgeoise qui veut prendre le chr
2173
haîné contre les églises établies, les évêques de
la
cour, et la religion bourgeoise qui veut prendre le christianisme « à
2174
les églises établies, les évêques de la cour, et
la
religion bourgeoise qui veut prendre le christianisme « à bon marché
2175
cour, et la religion bourgeoise qui veut prendre
le
christianisme « à bon marché » ; parce qu’il en appelle d’un christia
2176
rique à un christianisme existentiel — ce qui est
le
mouvement même de la Réforme — on a voulu le présenter comme une espè
2177
sme existentiel — ce qui est le mouvement même de
la
Réforme — on a voulu le présenter comme une espèce de nihiliste antic
2178
est le mouvement même de la Réforme — on a voulu
le
présenter comme une espèce de nihiliste antichrétien. Parce qu’en pré
2179
e nihiliste antichrétien. Parce qu’en présence de
l’
écœurante facilité avec laquelle tant de phraseurs ou de braves gens s
2180
nt de phraseurs ou de braves gens se réclament de
la
foi chrétienne — « chose inquiète, inquiétante », disait Luther — il
2181
e », disait Luther — il a voulu poser honnêtement
la
question tragique et réelle du doute inséparable de la foi ; parce qu
2182
estion tragique et réelle du doute inséparable de
la
foi ; parce que, « comme un oiseau s’envole anxieux aux approches de
2183
comme un oiseau s’envole anxieux aux approches de
l’
orage, ainsi, flairant le danger », il a dit : Je n’ai pas la foi, — c
2184
anxieux aux approches de l’orage, ainsi, flairant
le
danger », il a dit : Je n’ai pas la foi, — certains pensent qu’au fon
2185
nsi, flairant le danger », il a dit : Je n’ai pas
la
foi, — certains pensent qu’au fond, il n’a jamais pu croire. Et pourt
2186
qu’au fond, il n’a jamais pu croire. Et pourtant,
la
définition même de la foi dans l’Évangile n’est-elle pas justement ce
2187
ais pu croire. Et pourtant, la définition même de
la
foi dans l’Évangile n’est-elle pas justement ce cri : « Je crois, Sei
2188
e. Et pourtant, la définition même de la foi dans
l’
Évangile n’est-elle pas justement ce cri : « Je crois, Seigneur, viens
2189
Seigneur, viens au secours de mon incrédulité ».
L’
on eût évité ce grabuge en traduisant dès le début quelques-uns des ou
2190
té ». L’on eût évité ce grabuge en traduisant dès
le
début quelques-uns des ouvrages que Kierkegaard publia sous son vrai
2191
it directement son message décisif. Bien entendu,
le
« succès » de prestige eût été beaucoup plus restreint. Les raisons q
2192
ès » de prestige eût été beaucoup plus restreint.
Les
raisons qui poussèrent Kierkegaard à publier ses premières œuvres sou
2193
s de nos jours. Il se peut qu’il se fût réjoui de
la
maldonne. Que voulait donc Kierkegaard ? Peut-être, à la limite, le m
2194
onne. Que voulait donc Kierkegaard ? Peut-être, à
la
limite, le martyre — la preuve irréfutable de sa foi. (Encore qu’il s
2195
oulait donc Kierkegaard ? Peut-être, à la limite,
le
martyre — la preuve irréfutable de sa foi. (Encore qu’il s’en défende
2196
ierkegaard ? Peut-être, à la limite, le martyre —
la
preuve irréfutable de sa foi. (Encore qu’il s’en défende avec vigueur
2197
avec vigueur mais son action même témoigne contre
l’
humilité de son retrait.) La question qui se posait dès lors était cel
2198
même témoigne contre l’humilité de son retrait.)
La
question qui se posait dès lors était celle-ci : « Comment donner à u
2199
e-ci : « Comment donner à une époque plongée dans
la
plus grande mollesse spirituelle » l’amère passion de faire mourir un
2200
longée dans la plus grande mollesse spirituelle »
l’
amère passion de faire mourir un témoin de la vérité ? Si tu veux ce r
2201
le » l’amère passion de faire mourir un témoin de
la
vérité ? Si tu veux ce résultat… apprends d’abord à bien connaître ta
2202
r d’elle-même. Ainsi bien informé, fais-toi alors
le
porte-parole des idées, des passions qui sont dans l’air, avec l’enth
2203
orte-parole des idées, des passions qui sont dans
l’
air, avec l’enthousiasme d’une éloquence chaude et entraînante. Pour c
2204
des idées, des passions qui sont dans l’air, avec
l’
enthousiasme d’une éloquence chaude et entraînante. Pour cela, il te f
2205
e chaude et entraînante. Pour cela, il te faut de
la
force et du talent. Qu’arrive-t-il ? Tout simplement ceci : l’époque
2206
u talent. Qu’arrive-t-il ? Tout simplement ceci :
l’
époque s’engoue de tes discours et tu deviens son favori. Tu es alors
2207
nant de changer de direction ; tu restes animé de
la
même décision, mais tu te rends aussi rebutant que tu as été attirant
2208
ner et bientôt s’enflammer contre toi.38 Tel fut
le
sort que choisit Kierkegaard, lorsqu’au cours des années qui préparèr
2209
nt sa mort, il « changea de direction » et révéla
le
sens dernier de toute son œuvre. Il est juste que ce destin se répète
2210
ue ce destin se répète aujourd’hui parmi nous. Et
la
publication des écrits religieux entreprise par M. Paul Tisseau y con
2211
e par M. Paul Tisseau y contribuera certainement.
Les
graves malentendus que je signalais ont valu à l’auteur du Traité du
2212
es graves malentendus que je signalais ont valu à
l’
auteur du Traité du désespoir un « succès » dont il est peut-être temp
2213
tirer certaines conclusions propres à « repousser
l’
admiration ». Rien n’est plus conforme au style kierkegaardien que la
2214
n n’est plus conforme au style kierkegaardien que
la
manière dont M. Tisseau a publié ces quatre petits volumes de « disco
2215
de « discours édifiants » et d’essais religieux :
La
Pureté du cœur, Le Droit de mourir pour la vérité, Pour un examen de
2216
ants » et d’essais religieux : La Pureté du cœur,
Le
Droit de mourir pour la vérité, Pour un examen de conscience, Le Souv
2217
ieux : La Pureté du cœur, Le Droit de mourir pour
la
vérité, Pour un examen de conscience, Le Souverain sacrificateur. On
2218
rir pour la vérité, Pour un examen de conscience,
Le
Souverain sacrificateur. On les trouvera « chez le traducteur, à Bazo
2219
men de conscience, Le Souverain sacrificateur. On
les
trouvera « chez le traducteur, à Bazoges-en-Pareds », dans une petite
2220
e Souverain sacrificateur. On les trouvera « chez
le
traducteur, à Bazoges-en-Pareds », dans une petite ferme, tout au fon
2221
ant du snobisme qui naît autour de leur auteur. ⁂
Le
centre de Kierkegaard est dans cette phrase : « La subjectivité est l
2222
e centre de Kierkegaard est dans cette phrase : «
La
subjectivité est la vérité. » La subjectivité, ce n’est pas le subjec
2223
ard est dans cette phrase : « La subjectivité est
la
vérité. » La subjectivité, ce n’est pas le subjectivisme, ce n’est pa
2224
cette phrase : « La subjectivité est la vérité. »
La
subjectivité, ce n’est pas le subjectivisme, ce n’est pas le vague, l
2225
té est la vérité. » La subjectivité, ce n’est pas
le
subjectivisme, ce n’est pas le vague, le sentiment incontrôlé, le rom
2226
vité, ce n’est pas le subjectivisme, ce n’est pas
le
vague, le sentiment incontrôlé, le romantisme et l’anarchie, etc. La
2227
’est pas le subjectivisme, ce n’est pas le vague,
le
sentiment incontrôlé, le romantisme et l’anarchie, etc. La subjectivi
2228
, ce n’est pas le vague, le sentiment incontrôlé,
le
romantisme et l’anarchie, etc. La subjectivité, c’est le fait de deve
2229
vague, le sentiment incontrôlé, le romantisme et
l’
anarchie, etc. La subjectivité, c’est le fait de devenir le sujet de l
2230
ent incontrôlé, le romantisme et l’anarchie, etc.
La
subjectivité, c’est le fait de devenir le sujet de la vérité, et non
2231
ntisme et l’anarchie, etc. La subjectivité, c’est
le
fait de devenir le sujet de la vérité, et non pas seulement son admir
2232
e, etc. La subjectivité, c’est le fait de devenir
le
sujet de la vérité, et non pas seulement son admirateur enthousiaste.
2233
ubjectivité, c’est le fait de devenir le sujet de
la
vérité, et non pas seulement son admirateur enthousiaste. On dirait,
2234
ment son admirateur enthousiaste. On dirait, dans
le
langage d’aujourd’hui : c’est le fait de réaliser la vérité que l’on
2235
On dirait, dans le langage d’aujourd’hui : c’est
le
fait de réaliser la vérité que l’on connaît ; ou encore, de la prendr
2236
langage d’aujourd’hui : c’est le fait de réaliser
la
vérité que l’on connaît ; ou encore, de la prendre au sérieux et de l
2237
urd’hui : c’est le fait de réaliser la vérité que
l’
on connaît ; ou encore, de la prendre au sérieux et de la vouloir uniq
2238
aliser la vérité que l’on connaît ; ou encore, de
la
prendre au sérieux et de la vouloir uniquement. Mais on ne peut voulo
2239
nnaît ; ou encore, de la prendre au sérieux et de
la
vouloir uniquement. Mais on ne peut vouloir d’une manière totale et u
2240
t pas vrai comporte en soi une division et divise
la
volonté qu’on met à le réaliser. Tel est le sujet de la Pureté du cœu
2241
soi une division et divise la volonté qu’on met à
le
réaliser. Tel est le sujet de la Pureté du cœur. La plupart des écrit
2242
ivise la volonté qu’on met à le réaliser. Tel est
le
sujet de la Pureté du cœur. La plupart des écrits proprement religieu
2243
onté qu’on met à le réaliser. Tel est le sujet de
la
Pureté du cœur. La plupart des écrits proprement religieux de Kierkeg
2244
religieux de Kierkegaard développent ce thème et
l’
illustrent de la façon la plus familière et directe, tandis que ses éc
2245
erkegaard développent ce thème et l’illustrent de
la
façon la plus familière et directe, tandis que ses écrits littéraires
2246
développent ce thème et l’illustrent de la façon
la
plus familière et directe, tandis que ses écrits littéraires ou philo
2247
pour dessein, plus ou moins déguisé, de pousser à
l’
absurde les attitudes de vie ou de pensée qui ne se fondent pas dans c
2248
in, plus ou moins déguisé, de pousser à l’absurde
les
attitudes de vie ou de pensée qui ne se fondent pas dans cette vision
2249
ette vision centrale et unitive. Il me semble que
les
neuf discours traduits par M. Paul Tisseau en reviennent tous à la mê
2250
traduits par M. Paul Tisseau en reviennent tous à
la
même question, qui est celle du sérieux dernier, de la prise au série
2251
me question, qui est celle du sérieux dernier, de
la
prise au sérieux de la vérité. Du point de vue du sérieux humain, l’é
2252
lle du sérieux dernier, de la prise au sérieux de
la
vérité. Du point de vue du sérieux humain, l’éternité doit apparaître
2253
de la vérité. Du point de vue du sérieux humain,
l’
éternité doit apparaître comme une espèce d’ironie cruelle ; mais du p
2254
espèce d’ironie cruelle ; mais du point de vue de
l’
éternité, le sérieux humain apparaît affecté d’un humour désespéré. La
2255
nie cruelle ; mais du point de vue de l’éternité,
le
sérieux humain apparaît affecté d’un humour désespéré. La dialectique
2256
ux humain apparaît affecté d’un humour désespéré.
La
dialectique de Kierkegaard consiste alors à déconsidérer le sérieux e
2257
ique de Kierkegaard consiste alors à déconsidérer
le
sérieux et le pathétique purement humains, en les poussant à la limit
2258
gaard consiste alors à déconsidérer le sérieux et
le
pathétique purement humains, en les poussant à la limite où se révèle
2259
le sérieux et le pathétique purement humains, en
les
poussant à la limite où se révèle leur impuissance ; puis à montrer q
2260
le pathétique purement humains, en les poussant à
la
limite où se révèle leur impuissance ; puis à montrer que l’éternelle
2261
ù se révèle leur impuissance ; puis à montrer que
l’
éternelle vérité n’est encore qu’une grandiose ironie tant qu’elle n’e
2262
ose ironie tant qu’elle n’est pas actualisée dans
l’
acte de foi. Il n’y eut jamais de sérieux absolu39 que dans la vie et
2263
i. Il n’y eut jamais de sérieux absolu39 que dans
la
vie et dans la mort du Christ, homme et Dieu, car lui seul eut vraime
2264
amais de sérieux absolu39 que dans la vie et dans
la
mort du Christ, homme et Dieu, car lui seul eut vraiment « le droit d
2265
hrist, homme et Dieu, car lui seul eut vraiment «
le
droit de mourir pour la vérité », étant lui-même la vérité. C’est pou
2266
r lui seul eut vraiment « le droit de mourir pour
la
vérité », étant lui-même la vérité. C’est pourquoi l’acte de foi, qui
2267
droit de mourir pour la vérité », étant lui-même
la
vérité. C’est pourquoi l’acte de foi, qui saisit dans ce temps l’éter
2268
érité », étant lui-même la vérité. C’est pourquoi
l’
acte de foi, qui saisit dans ce temps l’éternel paradoxe de la vie et
2269
pourquoi l’acte de foi, qui saisit dans ce temps
l’
éternel paradoxe de la vie et de la mort du Christ, jette sur tous nos
2270
i, qui saisit dans ce temps l’éternel paradoxe de
la
vie et de la mort du Christ, jette sur tous nos sérieux, poses et amu
2271
dans ce temps l’éternel paradoxe de la vie et de
la
mort du Christ, jette sur tous nos sérieux, poses et amusettes, une i
2272
d’insondable ironie. Un soupçon : car peut-être,
l’
acte de foi n’existe pas ? Peut-être n’est-ce qu’une figure de rhétori
2273
e, une illusion, un mythe, ou encore un saut dans
le
vide ? Et alors il n’y aurait nulle part de vrai sérieux ? Peut-être
2274
ut-être aussi cet acte existe-t-il, peut-être que
l’
illic et tuc de cette Mort et de cette Résurrection peut devenir quelq
2275
rrection peut devenir quelque part, dans une vie,
le
hic et nunc de la foi ? Mais alors il n’y a pas de vrai sérieux dans
2276
nir quelque part, dans une vie, le hic et nunc de
la
foi ? Mais alors il n’y a pas de vrai sérieux dans ma vie, tant qu’il
2277
’ignore en certitude combattante — et combattue.
Le
sérieux de l’ironie, l’ironie du sérieux, voilà les pôles d’une diale
2278
titude combattante — et combattue. Le sérieux de
l’
ironie, l’ironie du sérieux, voilà les pôles d’une dialectique dont le
2279
battante — et combattue. Le sérieux de l’ironie,
l’
ironie du sérieux, voilà les pôles d’une dialectique dont le plus étra
2280
e sérieux de l’ironie, l’ironie du sérieux, voilà
les
pôles d’une dialectique dont le plus étrange, sans doute, est qu’elle
2281
u sérieux, voilà les pôles d’une dialectique dont
le
plus étrange, sans doute, est qu’elle embrasse avec une familiarité p
2282
t qu’elle embrasse avec une familiarité poignante
les
problèmes de la vie banale. Il y a dans ce passage perpétuel de l’abs
2283
e avec une familiarité poignante les problèmes de
la
vie banale. Il y a dans ce passage perpétuel de l’abstrait au concret
2284
a vie banale. Il y a dans ce passage perpétuel de
l’
abstrait au concret, ou plutôt dans cette mêlée shakespearienne de log
2285
otes, de boutades et d’échappées romantiques (sur
le
silence de la femme, par exemple, à la fin du Miroir de la Parole) un
2286
des et d’échappées romantiques (sur le silence de
la
femme, par exemple, à la fin du Miroir de la Parole) une appréhension
2287
iques (sur le silence de la femme, par exemple, à
la
fin du Miroir de la Parole) une appréhension si totale du réel que no
2288
e de la femme, par exemple, à la fin du Miroir de
la
Parole) une appréhension si totale du réel que notre langue, je le cr
2289
préhension si totale du réel que notre langue, je
le
crains, n’arrivera pas à la restituer sans bizarreries. Ceci suffit s
2290
que notre langue, je le crains, n’arrivera pas à
la
restituer sans bizarreries. Ceci suffit sans doute à excuser les obsc
2291
ans bizarreries. Ceci suffit sans doute à excuser
les
obscurités, les gaucheries qui arrêtent parfois le lecteur des meille
2292
Ceci suffit sans doute à excuser les obscurités,
les
gaucheries qui arrêtent parfois le lecteur des meilleures traductions
2293
s obscurités, les gaucheries qui arrêtent parfois
le
lecteur des meilleures traductions françaises de Kierkegaard. P.-S.
2294
chronique était déjà imprimée, quand j’ai lu dans
les
Cahiers du Sud une étude de Benjamin Fondane qui s’en prend avec éner
2295
ême. Je ne trouve pas cette violence déplacée, ni
l’
injustice qui l’accompagne plus onéreuse pour la vérité que ne serait
2296
e pas cette violence déplacée, ni l’injustice qui
l’
accompagne plus onéreuse pour la vérité que ne serait l’affectation d’
2297
i l’injustice qui l’accompagne plus onéreuse pour
la
vérité que ne serait l’affectation d’impartialité ; et je suis loin d
2298
mpagne plus onéreuse pour la vérité que ne serait
l’
affectation d’impartialité ; et je suis loin de trouver vaine la quest
2299
d’impartialité ; et je suis loin de trouver vaine
la
question que pose Fondane : « Ils suivent Kierkegaard du regard — mai
2300
gênante et sérieuse, et c’est pourquoi il fallait
la
poser. Et c’est aussi pourquoi je la retourne à son auteur. Mais peut
2301
i il fallait la poser. Et c’est aussi pourquoi je
la
retourne à son auteur. Mais peut-on y répondre par des mots ? Plusieu
2302
scours religieux ayant pour objet de « préparer à
la
Communion », je ne vois pour ma part qu’un seul moyen de s’engager de
2303
toute sa personne à la suite de Kierkegaard… Tout
le
reste est littérature, « littérature kierkegaardienne » évidemment, «
2304
peut-on publier autre chose que ce reste ? 38.
Le
droit de mourir pour la vérité, p. 57. Ou encore : « La supériorité v
2305
ose que ce reste ? 38. Le droit de mourir pour
la
vérité, p. 57. Ou encore : « La supériorité véritable produit elle-mê
2306
it de mourir pour la vérité, p. 57. Ou encore : «
La
supériorité véritable produit elle-même la provision de force qui cau
2307
re : « La supériorité véritable produit elle-même
la
provision de force qui cause sa perte. » Ibid., p. 53. 39. Dans sa b
2308
arquons que nous ne devons prendre au sérieux que
le
sérieux, que la personne, tout le reste peut devenir l’objet de notre
2309
ne devons prendre au sérieux que le sérieux, que
la
personne, tout le reste peut devenir l’objet de notre jeu. » p. 26.
2310
au sérieux que le sérieux, que la personne, tout
le
reste peut devenir l’objet de notre jeu. » p. 26. z. Rougemont Deni
2311
ieux, que la personne, tout le reste peut devenir
l’
objet de notre jeu. » p. 26. z. Rougemont Denis de, « Kierkegaard en
2312
. Rougemont Denis de, « Kierkegaard en France »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, juin 1936, p. 971-976.
2313
L’
Art poétique ou Qu’il faut penser avec les mains (décembre 1936)aa
2314
aut penser avec les mains (décembre 1936)aa De
l’
Art poétique de Claudel, qui domine de son poids les écritures du sièc
2315
’Art poétique de Claudel, qui domine de son poids
les
écritures du siècle, je retiendrai d’abord deux mots : « poétique » d
2316
retiendrai d’abord deux mots : « poétique » dans
le
titre ; et « connaissance », qui s’inscrit à chaque page. La rumeur q
2317
et « connaissance », qui s’inscrit à chaque page.
La
rumeur quotidienne tend à faire de « poète » une circonstance atténua
2318
ice du maladroit, s’il est aimable. Ou bien c’est
l’
ornement de nos loisirs. Mais Claudel dit : l’art poétique est art de
2319
est l’ornement de nos loisirs. Mais Claudel dit :
l’
art poétique est art de faire. Un gémissement célèbre, chez les clercs
2320
ue est art de faire. Un gémissement célèbre, chez
les
clercs, déplore l’antipathie tragique de la connaissance et de la Vie
2321
Un gémissement célèbre, chez les clercs, déplore
l’
antipathie tragique de la connaissance et de la Vie. Ceci tuerait cela
2322
chez les clercs, déplore l’antipathie tragique de
la
connaissance et de la Vie. Ceci tuerait cela. Et de cette dialectique
2323
re l’antipathie tragique de la connaissance et de
la
Vie. Ceci tuerait cela. Et de cette dialectique, on a tiré quelques r
2324
soi »… Il ne s’agit évidemment, ici et là, ni de
la
même poésie ni de la même connaissance. Claudel choisit, contre le se
2325
évidemment, ici et là, ni de la même poésie ni de
la
même connaissance. Claudel choisit, contre le sens banal, le sens qu’
2326
de la même connaissance. Claudel choisit, contre
le
sens banal, le sens qu’indiquent les étymologies. C’est-à-dire qu’il
2327
naissance. Claudel choisit, contre le sens banal,
le
sens qu’indiquent les étymologies. C’est-à-dire qu’il choisit de choi
2328
oisit, contre le sens banal, le sens qu’indiquent
les
étymologies. C’est-à-dire qu’il choisit de choisir, car l’étymologie
2329
ogies. C’est-à-dire qu’il choisit de choisir, car
l’
étymologie est trop loin d’être une science pour que l’adoption même d
2330
mologie est trop loin d’être une science pour que
l’
adoption même d’une « origine » soit autre chose qu’un choix délibéré,
2331
ées, pourvu qu’il en avertisse. » Cette phrase de
la
Logique de Port-Royal, dont Claudel, s’il est réaliste, doit récuser
2332
al, dont Claudel, s’il est réaliste, doit récuser
la
principale40, peut néanmoins servir à préciser ce qui oppose la langu
2333
0, peut néanmoins servir à préciser ce qui oppose
la
langue d’un poète aux divers jargons de son temps : c’est que l’une e
2334
», posant un perpétuel avertissement, tandis que
les
autres ont plutôt l’air de résulter d’une série d’oublis d’avertir, d
2335
l avertissement, tandis que les autres ont plutôt
l’
air de résulter d’une série d’oublis d’avertir, d’une série de contrav
2336
lis d’avertir, d’une série de contraventions dans
l’
impunité générale. Claudel montre partout son parti pris, qui est de s
2337
rigine, entre plusieurs probables, qui lui paraît
la
plus concrète, la plus active, la plus proche de la chose et du geste
2338
ieurs probables, qui lui paraît la plus concrète,
la
plus active, la plus proche de la chose et du geste. Poésie, de poiei
2339
qui lui paraît la plus concrète, la plus active,
la
plus proche de la chose et du geste. Poésie, de poiein, ce sera : fai
2340
plus concrète, la plus active, la plus proche de
la
chose et du geste. Poésie, de poiein, ce sera : faire. Connaître, de
2341
re. Il faut savoir ce que parler veut dire. (D’où
l’
on vient, où l’on va : tel est le sens.) Car le langage, parmi d’autre
2342
oir ce que parler veut dire. (D’où l’on vient, où
l’
on va : tel est le sens.) Car le langage, parmi d’autres fonctions, a
2343
veut dire. (D’où l’on vient, où l’on va : tel est
le
sens.) Car le langage, parmi d’autres fonctions, a celle-là de permet
2344
où l’on vient, où l’on va : tel est le sens.) Car
le
langage, parmi d’autres fonctions, a celle-là de permettre à nos pens
2345
ler. Claudel se donne un règlement, et il observe
les
signaux. Les autres (voyez leurs journaux) se sont jetés dans un énor
2346
se donne un règlement, et il observe les signaux.
Les
autres (voyez leurs journaux) se sont jetés dans un énorme embouteill
2347
llage, il n’y a plus qu’à se laisser pousser dans
le
sens incertain de la masse. Or ce sens, tellement incertain qu’il en
2348
qu’à se laisser pousser dans le sens incertain de
la
masse. Or ce sens, tellement incertain qu’il en devient presque indéf
2349
ien n’avance, c’est un sur-place exaspérant, tous
les
moteurs sont débrayés) ce sens partout évanouissant n’en est pas moin
2350
) ce sens partout évanouissant n’en est pas moins
le
sens « commun » — voire même, par antiphrase, le sens « courant ». Da
2351
le sens « commun » — voire même, par antiphrase,
le
sens « courant ». Dans cette affaire, celui qui sait où il va risque
2352
celui qui sait où il va risque encore d’augmenter
l’
embarras, et de se faire copieusement houspiller. Et pourtant, c’est l
2353
uspiller. Et pourtant, c’est lui seul qui détient
la
méthode efficace pour en sortir. Mais quittons là cette métaphore ava
2354
lle aussi s’embouteiller41. Ou encore essayons de
la
traduire. Les modes, l’usage, l’usure des mots aggravés par la press
2355
bouteiller41. Ou encore essayons de la traduire.
Les
modes, l’usage, l’usure des mots aggravés par la presse et par la pol
2356
1. Ou encore essayons de la traduire. Les modes,
l’
usage, l’usure des mots aggravés par la presse et par la politique, on
2357
ore essayons de la traduire. Les modes, l’usage,
l’
usure des mots aggravés par la presse et par la politique, ont peu à p
2358
Les modes, l’usage, l’usure des mots aggravés par
la
presse et par la politique, ont peu à peu fait passer pour communes d
2359
e, l’usure des mots aggravés par la presse et par
la
politique, ont peu à peu fait passer pour communes des significations
2360
munes des significations qui à vrai dire, et dans
le
fait, ruinent les bases de la communauté. On convient de s’entendre s
2361
cations qui à vrai dire, et dans le fait, ruinent
les
bases de la communauté. On convient de s’entendre sur des malentendus
2362
vrai dire, et dans le fait, ruinent les bases de
la
communauté. On convient de s’entendre sur des malentendus42. À ce pri
2363
t de s’entendre sur des malentendus42. À ce prix,
l’
on nourrit une paix sans racines. (Alors que toute communauté réelle n
2364
mmunauté réelle naît d’une entente passionnée sur
le
sens de certains maîtres-mots : esprit, nation, révolution, salut…) E
2365
comme pour protéger ces conventions précaires, on
les
rend aussi vagues et abstraites qu’on le peut. Opération inverse de c
2366
res, on les rend aussi vagues et abstraites qu’on
le
peut. Opération inverse de celle du poète : on s’arrête à l’acception
2367
ération inverse de celle du poète : on s’arrête à
l’
acception neutre, la moins active, la plus anecdotique — rompant ainsi
2368
elle du poète : on s’arrête à l’acception neutre,
la
moins active, la plus anecdotique — rompant ainsi le contact immédiat
2369
n s’arrête à l’acception neutre, la moins active,
la
plus anecdotique — rompant ainsi le contact immédiat entre le nom et
2370
moins active, la plus anecdotique — rompant ainsi
le
contact immédiat entre le nom et la chose qu’il exprime, entre le ver
2371
dotique — rompant ainsi le contact immédiat entre
le
nom et la chose qu’il exprime, entre le verbe et l’acte qu’il command
2372
rompant ainsi le contact immédiat entre le nom et
la
chose qu’il exprime, entre le verbe et l’acte qu’il commande43, entre
2373
iat entre le nom et la chose qu’il exprime, entre
le
verbe et l’acte qu’il commande43, entre le parler et le faire, — entr
2374
nom et la chose qu’il exprime, entre le verbe et
l’
acte qu’il commande43, entre le parler et le faire, — entre la pensée
2375
entre le verbe et l’acte qu’il commande43, entre
le
parler et le faire, — entre la pensée et la main. Cependant que l’eff
2376
be et l’acte qu’il commande43, entre le parler et
le
faire, — entre la pensée et la main. Cependant que l’effort d’un Clau
2377
commande43, entre le parler et le faire, — entre
la
pensée et la main. Cependant que l’effort d’un Claudel, restituant à
2378
entre le parler et le faire, — entre la pensée et
la
main. Cependant que l’effort d’un Claudel, restituant à chaque mot so
2379
aire, — entre la pensée et la main. Cependant que
l’
effort d’un Claudel, restituant à chaque mot son sens le plus poignant
2380
rt d’un Claudel, restituant à chaque mot son sens
le
plus poignant, par là même le plus apte à ranimer une communion vivan
2381
chaque mot son sens le plus poignant, par là même
le
plus apte à ranimer une communion vivante entre les hommes, se trouve
2382
e plus apte à ranimer une communion vivante entre
les
hommes, se trouve produire exactement l’effet contraire : son succès
2383
e entre les hommes, se trouve produire exactement
l’
effet contraire : son succès même va s’inscrire dans une œuvre incommu
2384
valeur d’appel, appeler sans cesse à grands cris
l’
univers (cette « version à l’unité »), la plénitude, le rassemblement
2385
cesse à grands cris l’univers (cette « version à
l’
unité »), la plénitude, le rassemblement de tous les êtres, le branle-
2386
nds cris l’univers (cette « version à l’unité »),
la
plénitude, le rassemblement de tous les êtres, le branle-bas de toute
2387
vers (cette « version à l’unité »), la plénitude,
le
rassemblement de tous les êtres, le branle-bas de toute la création v
2388
’unité »), la plénitude, le rassemblement de tous
les
êtres, le branle-bas de toute la création vers son achèvement intelli
2389
la plénitude, le rassemblement de tous les êtres,
le
branle-bas de toute la création vers son achèvement intelligible, c’e
2390
blement de tous les êtres, le branle-bas de toute
la
création vers son achèvement intelligible, c’est là vraiment « poétis
2391
ble, c’est là vraiment « poétiser », collaborer à
l’
ouvrage de Dieu, et recréer la catholicité. Mais c’est aussi, dans le
2392
ser », collaborer à l’ouvrage de Dieu, et recréer
la
catholicité. Mais c’est aussi, dans le monde d’aujourd’hui, se condam
2393
et recréer la catholicité. Mais c’est aussi, dans
le
monde d’aujourd’hui, se condamner à n’être pas compris. Paradoxe d’un
2394
compris. Paradoxe d’un génie catholique, isolé de
la
foule des hommes, par ce qui manifeste, justement, sa volonté de cath
2395
s parmi tant d’admirateurs, combien co-naissent à
la
raison de ses beautés, énoncée dans l’Art poétique ? De cet ouvrage t
2396
naissent à la raison de ses beautés, énoncée dans
l’
Art poétique ? De cet ouvrage très sévère, et sublime en tant de passa
2397
ublime en tant de passages, combien accepteraient
l’
inquisition ? Qu’on ne dise pas que la philosophie d’un grand poète im
2398
cepteraient l’inquisition ? Qu’on ne dise pas que
la
philosophie d’un grand poète importe moins que son humanité, que son
2399
ais quoi de bouleversant, obscurément, qui saisit
l’
auditeur le plus profane de Tête d’Or ou de l’Annonce. Ce serait aggra
2400
bouleversant, obscurément, qui saisit l’auditeur
le
plus profane de Tête d’Or ou de l’Annonce. Ce serait aggraver d’une s
2401
sit l’auditeur le plus profane de Tête d’Or ou de
l’
Annonce. Ce serait aggraver d’une sottise cette Séparation, notre péch
2402
te Séparation, notre péché, contre laquelle toute
l’
œuvre de Claudel se soulève à l’appel de la Joie. Le monde qu’interprè
2403
re laquelle toute l’œuvre de Claudel se soulève à
l’
appel de la Joie. Le monde qu’interprète l’Art poétique ne connaît pas
2404
toute l’œuvre de Claudel se soulève à l’appel de
la
Joie. Le monde qu’interprète l’Art poétique ne connaît pas Descartes
2405
œuvre de Claudel se soulève à l’appel de la Joie.
Le
monde qu’interprète l’Art poétique ne connaît pas Descartes le divise
2406
lève à l’appel de la Joie. Le monde qu’interprète
l’
Art poétique ne connaît pas Descartes le diviseur, ne connaît pas de l
2407
nterprète l’Art poétique ne connaît pas Descartes
le
diviseur, ne connaît pas de localisation du spirituel, ne connaît pas
2408
out sa fin, complément ou efférence, sa part dans
la
composition de l’image, le mot qui profère son sens. » C’est un unive
2409
ment ou efférence, sa part dans la composition de
l’
image, le mot qui profère son sens. » C’est un univers du discours, où
2410
fférence, sa part dans la composition de l’image,
le
mot qui profère son sens. » C’est un univers du discours, où les obje
2411
fère son sens. » C’est un univers du discours, où
les
objets qui « veulent dire » s’assemblent en propositions (à l’homme),
2412
« veulent dire » s’assemblent en propositions (à
l’
homme), seul discours proprement cohérent, puisqu’il ne tire ses règle
2413
isqu’il ne tire ses règles et sa nécessité que de
la
fin totale qu’il glorifie. Ce n’est pas notre monde tel qu’il est, ma
2414
e monde tel qu’il est sauvé, relié solidement par
la
Promesse et remis en marche vers elle, — le monde de la poésie. Divis
2415
t par la Promesse et remis en marche vers elle, —
le
monde de la poésie. Diviser, séparer, isoler, faire scission, ce n’es
2416
messe et remis en marche vers elle, — le monde de
la
poésie. Diviser, séparer, isoler, faire scission, ce n’est pas seulem
2417
t cartésien ; et Descartes n’a fait que constater
les
effets antipoétiques d’un relâchement originel. Rompre le lien de l’h
2418
s antipoétiques d’un relâchement originel. Rompre
le
lien de l’homme avec son origine, c’est rompre aussi sa communion ave
2419
ques d’un relâchement originel. Rompre le lien de
l’
homme avec son origine, c’est rompre aussi sa communion avec la fin un
2420
son origine, c’est rompre aussi sa communion avec
la
fin universelle. Alors l’homme se complaît dans une fin qu’il fait si
2421
aussi sa communion avec la fin universelle. Alors
l’
homme se complaît dans une fin qu’il fait sienne, c’est-à-dire qu’il s
2422
-dire qu’il s’isole et s’abstrait du mouvement de
la
Création. « Et c’est pourquoi une fin lui fut en effet donnée » — qui
2423
lui fut en effet donnée » — qui est sa mort. Mais
l’
œuvre du poète, la vocation de l’homme, la charité cosmique du chrétie
2424
onnée » — qui est sa mort. Mais l’œuvre du poète,
la
vocation de l’homme, la charité cosmique du chrétien (identiquement),
2425
st sa mort. Mais l’œuvre du poète, la vocation de
l’
homme, la charité cosmique du chrétien (identiquement), c’est alors d’
2426
t. Mais l’œuvre du poète, la vocation de l’homme,
la
charité cosmique du chrétien (identiquement), c’est alors d’embrasser
2427
qu’une durée mauvaise a disjoint et altéré. « Car
l’
attente ardente de la création attend la révélation des enfants de Die
2428
a disjoint et altéré. « Car l’attente ardente de
la
création attend la révélation des enfants de Dieu, parce que ce n’est
2429
ré. « Car l’attente ardente de la création attend
la
révélation des enfants de Dieu, parce que ce n’est pas de son propre
2430
(Rom. 8, 19-20). Ne fût-ce que par son style, et
l’
intention, partout, qu’il manifeste avec puissance, Claudel répond à l
2431
qu’il manifeste avec puissance, Claudel répond à
la
proposition universelle. Qu’on parle alors de procédé, si l’on y tien
2432
ion universelle. Qu’on parle alors de procédé, si
l’
on y tient, mais il faut en comprendre l’office. Traiter chaque mot se
2433
cédé, si l’on y tient, mais il faut en comprendre
l’
office. Traiter chaque mot selon la chose qu’il re-présente tout d’abo
2434
en comprendre l’office. Traiter chaque mot selon
la
chose qu’il re-présente tout d’abord, rendre un corps et refaire des
2435
ps et refaire des racines matérielles aux dérivés
les
plus exsangues, c’est rénover l’action cosmique de la parole. Comment
2436
les aux dérivés les plus exsangues, c’est rénover
l’
action cosmique de la parole. Comment cela ? « Le mot appelle, provoqu
2437
lus exsangues, c’est rénover l’action cosmique de
la
parole. Comment cela ? « Le mot appelle, provoque en nous l’état de c
2438
l’action cosmique de la parole. Comment cela ? «
Le
mot appelle, provoque en nous l’état de co-naissance qui répond à la
2439
Comment cela ? « Le mot appelle, provoque en nous
l’
état de co-naissance qui répond à la présence sensible des choses même
2440
voque en nous l’état de co-naissance qui répond à
la
présence sensible des choses mêmes. » Le nom, qui désigne la chose, a
2441
répond à la présence sensible des choses mêmes. »
Le
nom, qui désigne la chose, appelle un geste de l’homme pour cette cho
2442
sensible des choses mêmes. » Le nom, qui désigne
la
chose, appelle un geste de l’homme pour cette chose. Le verbe, désign
2443
Le nom, qui désigne la chose, appelle un geste de
l’
homme pour cette chose. Le verbe, désignant ce geste, appelle une phra
2444
se, appelle un geste de l’homme pour cette chose.
Le
verbe, désignant ce geste, appelle une phrase, un rythme d’actes conc
2445
le une phrase, un rythme d’actes concertés. Ainsi
l’
homme se trouve mis « en communication avec la source continue qu’il c
2446
nsi l’homme se trouve mis « en communication avec
la
source continue qu’il contient en lui dans son être : son geste n’est
2447
t en lui dans son être : son geste n’est plus que
la
traduction, dans l’univers matériel, du sanglot de l’origine ». En mê
2448
re : son geste n’est plus que la traduction, dans
l’
univers matériel, du sanglot de l’origine ». En même temps que la chos
2449
raduction, dans l’univers matériel, du sanglot de
l’
origine ». En même temps que la chose qui le provoque, le verbe exprim
2450
iel, du sanglot de l’origine ». En même temps que
la
chose qui le provoque, le verbe exprime ainsi la vocation de l’homme
2451
ot de l’origine ». En même temps que la chose qui
le
provoque, le verbe exprime ainsi la vocation de l’homme qui le profèr
2452
ne ». En même temps que la chose qui le provoque,
le
verbe exprime ainsi la vocation de l’homme qui le profère. « L’acte p
2453
la chose qui le provoque, le verbe exprime ainsi
la
vocation de l’homme qui le profère. « L’acte par lequel l’homme attes
2454
e provoque, le verbe exprime ainsi la vocation de
l’
homme qui le profère. « L’acte par lequel l’homme atteste la permanenc
2455
le verbe exprime ainsi la vocation de l’homme qui
le
profère. « L’acte par lequel l’homme atteste la permanence des choses
2456
me ainsi la vocation de l’homme qui le profère. «
L’
acte par lequel l’homme atteste la permanence des choses, par lequel,
2457
on de l’homme qui le profère. « L’acte par lequel
l’
homme atteste la permanence des choses, par lequel, en dehors du temps
2458
i le profère. « L’acte par lequel l’homme atteste
la
permanence des choses, par lequel, en dehors du temps, en dehors des
2459
des circonstances et causes secondes, il formule
l’
ensemble des conditions permanentes dont la réunion donne à chaque cho
2460
ormule l’ensemble des conditions permanentes dont
la
réunion donne à chaque chose son droit de devenir présente à l’esprit
2461
ne à chaque chose son droit de devenir présente à
l’
esprit, par lequel il la conçoit dans son cœur, et répète l’ordre qui
2462
oit de devenir présente à l’esprit, par lequel il
la
conçoit dans son cœur, et répète l’ordre qui l’a créée, s’appelle la
2463
par lequel il la conçoit dans son cœur, et répète
l’
ordre qui l’a créée, s’appelle la parole. » Nous voici donc « chargés
2464
l la conçoit dans son cœur, et répète l’ordre qui
l’
a créée, s’appelle la parole. » Nous voici donc « chargés du rôle d’or
2465
cœur, et répète l’ordre qui l’a créée, s’appelle
la
parole. » Nous voici donc « chargés du rôle d’origine ». L’homme est
2466
» Nous voici donc « chargés du rôle d’origine ».
L’
homme est « le sceau de l’authenticité ». Il est, par son action recré
2467
donc « chargés du rôle d’origine ». L’homme est «
le
sceau de l’authenticité ». Il est, par son action recréatrice, une ét
2468
és du rôle d’origine ». L’homme est « le sceau de
l’
authenticité ». Il est, par son action recréatrice, une étymologie viv
2469
connaître, il lui suffit d’agir sa vocation. Dans
l’
acte conscient de la fin qui l’englobe, il n’y a plus de distinction d
2470
ffit d’agir sa vocation. Dans l’acte conscient de
la
fin qui l’englobe, il n’y a plus de distinction du matériel et du spi
2471
sa vocation. Dans l’acte conscient de la fin qui
l’
englobe, il n’y a plus de distinction du matériel et du spirituel. L’h
2472
plus de distinction du matériel et du spirituel.
L’
homme « se connaît donc à son pas et à l’extension de ses mains, à la
2473
irituel. L’homme « se connaît donc à son pas et à
l’
extension de ses mains, à la facilité plus ou moindre grande qu’il épr
2474
t donc à son pas et à l’extension de ses mains, à
la
facilité plus ou moindre grande qu’il éprouve à se servir des instrum
2475
’il éprouve à se servir des instruments dont il a
la
propriété ». Et son corps lui est comme « un document où il suit les
2476
son corps lui est comme « un document où il suit
les
œuvres de l’esprit qui le remue ». Penser dans le train de la créatio
2477
est comme « un document où il suit les œuvres de
l’
esprit qui le remue ». Penser dans le train de la création, reformer s
2478
un document où il suit les œuvres de l’esprit qui
le
remue ». Penser dans le train de la création, reformer sans cesse tou
2479
es œuvres de l’esprit qui le remue ». Penser dans
le
train de la création, reformer sans cesse toutes les formes selon l’i
2480
l’esprit qui le remue ». Penser dans le train de
la
création, reformer sans cesse toutes les formes selon l’intention qu’
2481
train de la création, reformer sans cesse toutes
les
formes selon l’intention qu’elles expriment, c’est proprement penser
2482
tion, reformer sans cesse toutes les formes selon
l’
intention qu’elles expriment, c’est proprement penser avec les mains.
2483
our de sa Semaine, Du Bartas parlant de ses mains
les
appelle, assez curieusement, d’abord : « Singes de l’Éternel » et aus
2484
ppelle, assez curieusement, d’abord : « Singes de
l’
Éternel » et aussitôt… « Ministres de l’esprit ». Ô singerie géniale e
2485
Singes de l’Éternel » et aussitôt… « Ministres de
l’
esprit ». Ô singerie géniale et ministère manifeste ! Art poétique, ar
2486
inistère manifeste ! Art poétique, art de refaire
le
monde — tel que Dieu l’a connu de toute éternité ! 40. En effet, la
2487
poétique, art de refaire le monde — tel que Dieu
l’
a connu de toute éternité ! 40. En effet, la citation du Cratyle qu’
2488
ieu l’a connu de toute éternité ! 40. En effet,
la
citation du Cratyle qu’il donne dans l’Art poétique (p. 172) dit exac
2489
En effet, la citation du Cratyle qu’il donne dans
l’
Art poétique (p. 172) dit exactement le contraire. 41. On pourrait en
2490
donne dans l’Art poétique (p. 172) dit exactement
le
contraire. 41. On pourrait en tirer d’autres suites : faut-il attend
2491
t en tirer d’autres suites : faut-il attendre que
les
flics s’en mêlent, et viennent « mettre au pas » le langage — ou saur
2492
flics s’en mêlent, et viennent « mettre au pas »
le
langage — ou saurons-nous à temps nous débrouiller et nous entendre l
2493
sprit sans nulle définition, sans déclarer ce que
le
mot sous-entend, et qui se révélerait le plus souvent absurdement con
2494
r ce que le mot sous-entend, et qui se révélerait
le
plus souvent absurdement contradictoire. 43. Connaître commande naî
2495
out porte à conséquence, tout appelle, et d’abord
la
parole ! Mais l’usure des mots les édente, notre langage est débrayé.
2496
quence, tout appelle, et d’abord la parole ! Mais
l’
usure des mots les édente, notre langage est débrayé. Comment rétablir
2497
lle, et d’abord la parole ! Mais l’usure des mots
les
édente, notre langage est débrayé. Comment rétablir le contact ? Clau
2498
ente, notre langage est débrayé. Comment rétablir
le
contact ? Claudel n’écrira pas : je vais vous expliquer cela claireme
2499
vous expliquer cela clairement, mais : « Tel est
le
mystère qu’il s’agit présentement de reporter sur le papier de l’encr
2500
mystère qu’il s’agit présentement de reporter sur
le
papier de l’encre la plus noire. » Au lieu de : Réfléchissons, analys
2501
s’agit présentement de reporter sur le papier de
l’
encre la plus noire. » Au lieu de : Réfléchissons, analysons : « Rumin
2502
présentement de reporter sur le papier de l’encre
la
plus noire. » Au lieu de : Réfléchissons, analysons : « Ruminons la b
2503
u lieu de : Réfléchissons, analysons : « Ruminons
la
bouchée intelligible. » Toujours une chose-image, au lieu d’une formu
2504
u d’une formule faite, d’un terme abstrait. C’est
le
style du livre de Job. aa. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] L’
2505
Job. aa. Rougemont Denis de, « [Compte rendu]
L’
Art poétique ou Qu’il faut penser avec les mains », La Nouvelle Revue
2506
t poétique ou Qu’il faut penser avec les mains »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, décembre 1936, p. 992-997.
2507
Une idée de Law (janvier 1937)ab C’est dans
les
Œuvres de Law qu’on trouve cette remarque hardie : La victoire appart
2508
uvres de Law qu’on trouve cette remarque hardie :
La
victoire appartient toujours à celui qui a le dernier écu. On entreti
2509
ous en coûte pour guerroyer cinq ans. Quel en est
le
résultat ? car le succès définitif est incertain. Avec bien du bonheu
2510
guerroyer cinq ans. Quel en est le résultat ? car
le
succès définitif est incertain. Avec bien du bonheur, on peut espérer
2511
, on peut espérer de détruire 150 000 ennemis par
le
feu, le fer, l’eau, la faim, les fatigues, les maladies. Ainsi, la de
2512
t espérer de détruire 150 000 ennemis par le feu,
le
fer, l’eau, la faim, les fatigues, les maladies. Ainsi, la destructio
2513
r de détruire 150 000 ennemis par le feu, le fer,
l’
eau, la faim, les fatigues, les maladies. Ainsi, la destruction direct
2514
truire 150 000 ennemis par le feu, le fer, l’eau,
la
faim, les fatigues, les maladies. Ainsi, la destruction directe ou in
2515
0 000 ennemis par le feu, le fer, l’eau, la faim,
les
fatigues, les maladies. Ainsi, la destruction directe ou indirecte d’
2516
par le feu, le fer, l’eau, la faim, les fatigues,
les
maladies. Ainsi, la destruction directe ou indirecte d’un soldat alle
2517
’eau, la faim, les fatigues, les maladies. Ainsi,
la
destruction directe ou indirecte d’un soldat allemand nous coûte 20 0
2518
t allemand nous coûte 20 000 livres, sans compter
la
perte sur notre population, qui n’est réparée qu’au bout de vingt-cin
2519
permanente, ne vaudrait-il pas mieux en épargner
les
frais et acheter l’armée ennemie, lorsque l’occasion s’en présenterai
2520
ait-il pas mieux en épargner les frais et acheter
l’
armée ennemie, lorsque l’occasion s’en présenterait. Un Anglais estima
2521
ner les frais et acheter l’armée ennemie, lorsque
l’
occasion s’en présenterait. Un Anglais estimait un homme 480 livres st
2522
lais estimait un homme 480 livres sterling. C’est
la
plus forte évaluation, et ils ne sont pas tous aussi chers, comme on
2523
nt, on aurait un homme nouveau, au lieu que, dans
le
système actuel, on perd celui qu’on avait, sans profiter de celui qu’
2524
opération fort analogue lorsqu’il tenta d’acheter
le
sol que le Duce se préparait à conquérir : c’était là proprement « co
2525
ort analogue lorsqu’il tenta d’acheter le sol que
le
Duce se préparait à conquérir : c’était là proprement « couper l’herb
2526
rait à conquérir : c’était là proprement « couper
l’
herbe sous les pieds » à la guerre. Mais le geste du capitaliste, qui
2527
rir : c’était là proprement « couper l’herbe sous
les
pieds » à la guerre. Mais le geste du capitaliste, qui eût été la plu
2528
là proprement « couper l’herbe sous les pieds » à
la
guerre. Mais le geste du capitaliste, qui eût été la plus belle farce
2529
couper l’herbe sous les pieds » à la guerre. Mais
le
geste du capitaliste, qui eût été la plus belle farce de l’Histoire,
2530
guerre. Mais le geste du capitaliste, qui eût été
la
plus belle farce de l’Histoire, a soulevé d’universelles protestation
2531
u capitaliste, qui eût été la plus belle farce de
l’
Histoire, a soulevé d’universelles protestations. L’échec de Law et l’
2532
Histoire, a soulevé d’universelles protestations.
L’
échec de Law et l’échec de Rickett ne comportent pas de morale : je ve
2533
é d’universelles protestations. L’échec de Law et
l’
échec de Rickett ne comportent pas de morale : je veux le croire pour
2534
de Rickett ne comportent pas de morale : je veux
le
croire pour la morale. Mais ils permettent d’entrevoir l’une des rais
2535
comportent pas de morale : je veux le croire pour
la
morale. Mais ils permettent d’entrevoir l’une des raisons de notre an
2536
r l’une des raisons de notre anarchie économique.
Le
capitalisme ne serait peut-être pas un trop mauvais système si ses en
2537
rsées par celles d’une passion contraire, qui est
l’
honneur. Car il est clair que l’honneur seul — ou du moins ce qu’il no
2538
ontraire, qui est l’honneur. Car il est clair que
l’
honneur seul — ou du moins ce qu’il nous en reste, et ce n’est qu’une
2539
en reste, et ce n’est qu’une caricature — retient
les
gouvernants de suivre jusqu’au bout, et sans scrupules, la logique du
2540
nants de suivre jusqu’au bout, et sans scrupules,
la
logique du capitalisme. Or, ce système étant de ceux qui ne se peuven
2541
i rien d’arbitraire ou d’humain ne vient déranger
les
calculs, l’on voit qu’en vérité, ce qui nous ruine, c’est bien l’honn
2542
traire ou d’humain ne vient déranger les calculs,
l’
on voit qu’en vérité, ce qui nous ruine, c’est bien l’honneur — le bud
2543
voit qu’en vérité, ce qui nous ruine, c’est bien
l’
honneur — le budget de l’honneur — et non pas je ne sais quels scandal
2544
vérité, ce qui nous ruine, c’est bien l’honneur —
le
budget de l’honneur — et non pas je ne sais quels scandales… ab. R
2545
i nous ruine, c’est bien l’honneur — le budget de
l’
honneur — et non pas je ne sais quels scandales… ab. Rougemont Deni
2546
… ab. Rougemont Denis de, « Une idée de Law »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, janvier 1937, p. 149-150.
2547
De
la
propriété capitaliste à la propriété humaine et Manifeste au service
2548
De la propriété capitaliste à
la
propriété humaine et Manifeste au service du personnalisme, par Emman
2549
ssais publiés jusqu’ici par Mounier, ce traité de
la
propriété est sans doute le mieux venu, le plus précis et situé. On a
2550
Mounier, ce traité de la propriété est sans doute
le
mieux venu, le plus précis et situé. On aimera la mobilité, le glisse
2551
ité de la propriété est sans doute le mieux venu,
le
plus précis et situé. On aimera la mobilité, le glissement varié de c
2552
le mieux venu, le plus précis et situé. On aimera
la
mobilité, le glissement varié de ce style, l’agilité précise de ses c
2553
, le plus précis et situé. On aimera la mobilité,
le
glissement varié de ce style, l’agilité précise de ses coupes, qualit
2554
era la mobilité, le glissement varié de ce style,
l’
agilité précise de ses coupes, qualités nées, comme par décantation, d
2555
s qu’on a pu reprocher aux précédents ouvrages de
l’
auteur. Mais c’est la méthode qui doit retenir ici : il s’agissait pou
2556
r aux précédents ouvrages de l’auteur. Mais c’est
la
méthode qui doit retenir ici : il s’agissait pour Mounier de fonder l
2557
etenir ici : il s’agissait pour Mounier de fonder
la
théorie personnaliste de l’avoir sur les doctrines catholiques les pl
2558
our Mounier de fonder la théorie personnaliste de
l’
avoir sur les doctrines catholiques les plus solides à cet égard, cell
2559
de fonder la théorie personnaliste de l’avoir sur
les
doctrines catholiques les plus solides à cet égard, celles de Thomas
2560
nnaliste de l’avoir sur les doctrines catholiques
les
plus solides à cet égard, celles de Thomas d’Aquin et de Cajetan. On
2561
’utopie, mais au contraire on actualise, et enfin
l’
on prend au sérieux les admirables précisions thomistes que les siècle
2562
aire on actualise, et enfin l’on prend au sérieux
les
admirables précisions thomistes que les siècles jésuites avaient obnu
2563
u sérieux les admirables précisions thomistes que
les
siècles jésuites avaient obnubilées, et que la grande majorité des ca
2564
e les siècles jésuites avaient obnubilées, et que
la
grande majorité des catholiques d’aujourd’hui ignore avec persévéranc
2565
ore avec persévérance. À vrai dire, nul mieux que
l’
Aquinate ne pouvait servir et autoriser le dessein de Mounier : défend
2566
eux que l’Aquinate ne pouvait servir et autoriser
le
dessein de Mounier : défendre la propriété contre les mauvaises raiso
2567
vir et autoriser le dessein de Mounier : défendre
la
propriété contre les mauvaises raisons des capitalistes, ou comme il
2568
dessein de Mounier : défendre la propriété contre
les
mauvaises raisons des capitalistes, ou comme il dit : « libérer de la
2569
des capitalistes, ou comme il dit : « libérer de
la
dialectique des propriétaires les valeurs de propriété personnelle ».
2570
t : « libérer de la dialectique des propriétaires
les
valeurs de propriété personnelle ». La plupart des distinctions que f
2571
nnelle ». La plupart des distinctions que formule
la
Somme — usage commun et gestion personnelle des biens, nécessaire vit
2572
d’une utilité et d’une efficacité éclatantes dans
l’
embrouillamini politico-sentimental où nous ont plongés les doctrines
2573
illamini politico-sentimental où nous ont plongés
les
doctrines et les ressentiments secrétés par le capitalisme. Mounier p
2574
-sentimental où nous ont plongés les doctrines et
les
ressentiments secrétés par le capitalisme. Mounier part d’une phénomé
2575
s les doctrines et les ressentiments secrétés par
le
capitalisme. Mounier part d’une phénoménologie de la possession — pre
2576
capitalisme. Mounier part d’une phénoménologie de
la
possession — presque trop brillante par endroits —, s’engage dans un
2577
joint avec un naturel qui est succès de ce livre,
les
positions constructives d’Esprit, et même de L’Ordre nouveau (lequel
2578
était parti bien plutôt de Proudhon)44. En bref,
le
sens du livre est celui-ci : il s’agit de passer d’un mode de proprié
2579
é à Mounier d’avoir, chemin faisant, démontré que
la
propriété n’est pas un instinct permanent, mais au contraire un besoi
2580
nstinct permanent, mais au contraire un besoin de
l’
esprit — le nécessaire vital une fois assuré. Ce qui suffit à renverse
2581
manent, mais au contraire un besoin de l’esprit —
le
nécessaire vital une fois assuré. Ce qui suffit à renverser l’argumen
2582
vital une fois assuré. Ce qui suffit à renverser
l’
argument des propriétaires, trop souvent et hypocritement opposé à cer
2583
opposé à certain communisme — celui que redoutent
les
bourgeois, qui n’est pas celui de Staline… Mais si vigoureuse que soi
2584
cette analyse — et si utile sa lecture pour tous
les
possédants chrétiens — elle ne revêt sa signification totale que dans
2585
— elle ne revêt sa signification totale que dans
l’
ensemble de la construction personnaliste. Le récent Manifeste de Moun
2586
êt sa signification totale que dans l’ensemble de
la
construction personnaliste. Le récent Manifeste de Mounier permettra
2587
dans l’ensemble de la construction personnaliste.
Le
récent Manifeste de Mounier permettra de prendre une mesure rapide de
2588
ussi des lacunes provisoires45 — de ce mouvement.
Le
lecteur qui se souvient encore du Cahier de revendications, publié ic
2589
Ce terme de personne, que nous jetions alors dans
le
débat politique et culturel, et qu’on nous reprochait non sans aigreu
2590
non sans aigreur, quand il ne faisait pas sourire
les
réalistes, le voilà repris et galvaudé depuis deux ans par toutes les
2591
r, quand il ne faisait pas sourire les réalistes,
le
voilà repris et galvaudé depuis deux ans par toutes les ligues et par
2592
ilà repris et galvaudé depuis deux ans par toutes
les
ligues et partis, de La Rocque à Vaillant-Couturier ! (Je ne sais pou
2593
if pléonastique : « personne humaine ».) En 1932,
les
marxistes prononçaient ici même — contre les « petits personnalistes
2594
932, les marxistes prononçaient ici même — contre
les
« petits personnalistes » — que les problèmes de l’homme, et de l’esp
2595
même — contre les « petits personnalistes » — que
les
problèmes de l’homme, et de l’esprit, ne se poseraient plus durant le
2596
« petits personnalistes » — que les problèmes de
l’
homme, et de l’esprit, ne se poseraient plus durant le prochain demi-s
2597
nnalistes » — que les problèmes de l’homme, et de
l’
esprit, ne se poseraient plus durant le prochain demi-siècle. Parler d
2598
mme, et de l’esprit, ne se poseraient plus durant
le
prochain demi-siècle. Parler de la primauté du spirituel et de l’huma
2599
nt plus durant le prochain demi-siècle. Parler de
la
primauté du spirituel et de l’humain, c’était fasciste ! Mais voici q
2600
-siècle. Parler de la primauté du spirituel et de
l’
humain, c’était fasciste ! Mais voici que quatre ans plus tard, le por
2601
t fasciste ! Mais voici que quatre ans plus tard,
le
porte-parole officiel du parti communiste français publie une sorte d
2602
orte de discours-programme intitulé Au service de
l’
Esprit 46. Et l’on y lit que les fascistes sont les pires adversaires
2603
-programme intitulé Au service de l’Esprit 46. Et
l’
on y lit que les fascistes sont les pires adversaires « de la personne
2604
tulé Au service de l’Esprit 46. Et l’on y lit que
les
fascistes sont les pires adversaires « de la personne humaine, cette
2605
l’Esprit 46. Et l’on y lit que les fascistes sont
les
pires adversaires « de la personne humaine, cette grande force spirit
2606
que les fascistes sont les pires adversaires « de
la
personne humaine, cette grande force spirituelle ». Et aussi « qu’au-
2607
e spirituelle ». Et aussi « qu’au-dessus de tout,
les
communistes placent l’homme ». Et enfin que « c’est à l’Esprit que le
2608
i « qu’au-dessus de tout, les communistes placent
l’
homme ». Et enfin que « c’est à l’Esprit que le parti communiste franç
2609
unistes placent l’homme ». Et enfin que « c’est à
l’
Esprit que le parti communiste français fait confiance pour l’aider à
2610
nt l’homme ». Et enfin que « c’est à l’Esprit que
le
parti communiste français fait confiance pour l’aider à résoudre les
2611
le parti communiste français fait confiance pour
l’
aider à résoudre les problèmes de la paix, de la liberté et du pain de
2612
e français fait confiance pour l’aider à résoudre
les
problèmes de la paix, de la liberté et du pain des hommes »ad. À vrai
2613
onfiance pour l’aider à résoudre les problèmes de
la
paix, de la liberté et du pain des hommes »ad. À vrai dire, nous n’es
2614
r l’aider à résoudre les problèmes de la paix, de
la
liberté et du pain des hommes »ad. À vrai dire, nous n’espérions pas
2615
mots leur sens. Il n’y a que cela de sérieux dans
la
politique moderne. Et le Manifeste de Mounier peut y contribuer large
2616
que cela de sérieux dans la politique moderne. Et
le
Manifeste de Mounier peut y contribuer largement. Faut-il dire que to
2617
ribuer largement. Faut-il dire que tout usager de
la
culture, si apolitique qu’il se veuille, se trouve intéressé dans un
2618
i. 44. Je pense que Mounier ne se dissimule pas
le
caractère « théorique » des justifications qu’il va demander à certai
2619
ander à certaines traditions catholiques. Ainsi «
le
riche, dit Bossuet, n’est toléré dans l’Église que pour servir le pau
2620
Ainsi « le riche, dit Bossuet, n’est toléré dans
l’
Église que pour servir le pauvre ». Et selon saint Thomas, « n’importe
2621
ssuet, n’est toléré dans l’Église que pour servir
le
pauvre ». Et selon saint Thomas, « n’importe qui peut donner l’aumône
2622
t selon saint Thomas, « n’importe qui peut donner
l’
aumône au nécessiteux avec l’argent d’un autre, s’il ne peut le faire
2623
orte qui peut donner l’aumône au nécessiteux avec
l’
argent d’un autre, s’il ne peut le faire du sien ». (Car cet argent de
2624
écessiteux avec l’argent d’un autre, s’il ne peut
le
faire du sien ». (Car cet argent de l’autre devient dans ce cas bien
2625
ais songé à des théories de ce genre pour excuser
la
sécularisation des biens conventuels — biens dans lesquels Labriola p
2626
tuels — biens dans lesquels Labriola pouvait voir
l’
origine de l’accumulation capitaliste. (Centres de commerce des couven
2627
dans lesquels Labriola pouvait voir l’origine de
l’
accumulation capitaliste. (Centres de commerce des couvents anglais.)
2628
ue j’y suis, une autre remarque : Mounier exagère
l’
importance économique de l’usure, suivant l’erreur fréquente des écriv
2629
rque : Mounier exagère l’importance économique de
l’
usure, suivant l’erreur fréquente des écrivains catholiques. Marx a bi
2630
agère l’importance économique de l’usure, suivant
l’
erreur fréquente des écrivains catholiques. Marx a bien montré que l’u
2631
des écrivains catholiques. Marx a bien montré que
l’
usure n’est qu’un facteur secondaire, et très peu décisif, du capitali
2632
ndaire, et très peu décisif, du capitalisme. 45.
Le
Précis publié par L’Ordre nouveau dans son numéro d’octobre 1936 en c
2633
t Denis de, « [Compte rendu] Emmanuel Mounier, De
la
propriété capitaliste à la propriété humaine et Manifeste au service
2634
] Emmanuel Mounier, De la propriété capitaliste à
la
propriété humaine et Manifeste au service du personnalisme », La Nou
2635
aine et Manifeste au service du personnalisme »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, février 1937, p. 294-296. ad. Ce te
2636
er est plus amplement commenté par Rougemont dans
le
numéro d’Esprit de février 1937 : « Paul Vaillant-Couturier : Au serv
2637
1937 : « Paul Vaillant-Couturier : Au service de
l’
Esprit ».
2638
N’habitez pas
les
villes (Extrait d’un Journal) (juillet 1937)ae Je revois, je revis
2639
) (juillet 1937)ae Je revois, je revis si bien
la
traversée, cette étrange coupure qu’elle a faite dans ma vie, entre l
2640
trange coupure qu’elle a faite dans ma vie, entre
les
derniers jours passés à Paris non sans fièvre, et cette arrivée au so
2641
expliquer pourquoi nous venions dans cette île à
la
saison où il convient plutôt de la quitter quand on le peut. Si par c
2642
ns cette île à la saison où il convient plutôt de
la
quitter quand on le peut. Si par cette aube de novembre, sur les gran
2643
ison où il convient plutôt de la quitter quand on
le
peut. Si par cette aube de novembre, sur les grands quais de ce port
2644
nd on le peut. Si par cette aube de novembre, sur
les
grands quais de ce port atlantique, j’en étais à considérer d’un œil
2645
tique, j’en étais à considérer d’un œil brûlé par
l’
insomnie les flots de l’océan maussade et les pauvres rivages du détro
2646
étais à considérer d’un œil brûlé par l’insomnie
les
flots de l’océan maussade et les pauvres rivages du détroit, c’est fo
2647
idérer d’un œil brûlé par l’insomnie les flots de
l’
océan maussade et les pauvres rivages du détroit, c’est fort apparemme
2648
é par l’insomnie les flots de l’océan maussade et
les
pauvres rivages du détroit, c’est fort apparemment que je n’avais rie
2649
ait un abri quelque part, une maison vide pendant
l’
hiver, une occasion de solitude désirée en secret dès longtemps. Je vo
2650
ecret dès longtemps. Je voudrais bien n’avoir pas
l’
air trop romantique : mes dernières années de Paris m’avaient appris q
2651
s m’avaient appris que cette ville, au moins pour
la
jeunesse sans argent, est la ville des gérants ignobles et des concie
2652
ville, au moins pour la jeunesse sans argent, est
la
ville des gérants ignobles et des concierges, des lieux-sombres-et-po
2653
des lieux-sombres-et-populeux où il faut pénétrer
l’
âme basse et la petite enveloppe à la main. Tant d’autres disent : all
2654
es-et-populeux où il faut pénétrer l’âme basse et
la
petite enveloppe à la main. Tant d’autres disent : allons-nous-en, et
2655
aut pénétrer l’âme basse et la petite enveloppe à
la
main. Tant d’autres disent : allons-nous-en, et restent faute d’imagi
2656
. Et pourtant il suffit de bien peu pour partir :
la
France a des milliers de maisons vides. Dites autour de vous que vous
2657
répondre. Début de novembre Je commencerai par
l’
inventaire de mon domaine. Je ne suis pas propriétaire, c’est entendu.
2658
uvre à ma façon, et peu capable de comprendre que
l’
on veuille « avoir » autrement. Posséder, ce n’est pas avoir. Ce n’est
2659
éder, ce n’est pas avoir. Ce n’est pas même avoir
l’
usage éventuel de quelque chose. Mais c’est user en fait de cette chos
2660
nette, ce jardin et cette île, seront miens selon
la
puissance avec laquelle j’en saurai faire usage, pour une fin qui leu
2661
n qui leur est étrangère, et qui me commandera de
les
quitter le jour qu’ils y mettront obstacle. (Pour les bourgeois, l’id
2662
st étrangère, et qui me commandera de les quitter
le
jour qu’ils y mettront obstacle. (Pour les bourgeois, l’idée de propr
2663
quitter le jour qu’ils y mettront obstacle. (Pour
les
bourgeois, l’idée de propriété est liée à l’idée d’héritage. Par quel
2664
qu’ils y mettront obstacle. (Pour les bourgeois,
l’
idée de propriété est liée à l’idée d’héritage. Par quelle folie pense
2665
our les bourgeois, l’idée de propriété est liée à
l’
idée d’héritage. Par quelle folie pensent-ils pouvoir « hériter » des
2666
es biens de leurs pères ? Il faut tout ignorer de
la
vraie possession ! Une chose n’est mienne que pour un temps, et si je
2667
impropre. Je n’hérite pas même de moi ! Ou alors,
l’
héritage est cela dont on ne peut pas se délivrer à temps, et devrait
2668
e que coûte.) Mon domaine, c’est ce que j’ai sous
la
main. Voici d’abord la table que je me suis fabriquée : j’ai trouvé d
2669
ne, c’est ce que j’ai sous la main. Voici d’abord
la
table que je me suis fabriquée : j’ai trouvé dans le chai deux trétea
2670
table que je me suis fabriquée : j’ai trouvé dans
le
chai deux tréteaux et deux planches bien rabotées ; j’ai dressé cela
2671
planches bien rabotées ; j’ai dressé cela devant
la
fenêtre ouverte sur les verdures encore vivaces du jardin. Quand je l
2672
; j’ai dressé cela devant la fenêtre ouverte sur
les
verdures encore vivaces du jardin. Quand je lève le nez, je vois la c
2673
verdures encore vivaces du jardin. Quand je lève
le
nez, je vois la cour de terre battue à l’ombre de ses deux tilleuls,
2674
vivaces du jardin. Quand je lève le nez, je vois
la
cour de terre battue à l’ombre de ses deux tilleuls, la margelle du p
2675
r de terre battue à l’ombre de ses deux tilleuls,
la
margelle du puits à gauche, où repose une vieille chatte, le chai à d
2676
du puits à gauche, où repose une vieille chatte,
le
chai à droite. Au-delà de la cour, les planches incultes du potager,
2677
une vieille chatte, le chai à droite. Au-delà de
la
cour, les planches incultes du potager, de chaque côté d’une allée bo
2678
lle chatte, le chai à droite. Au-delà de la cour,
les
planches incultes du potager, de chaque côté d’une allée bordée de ro
2679
er, de chaque côté d’une allée bordée de rosiers.
L’
allée aboutit à une porte de bois à deux battants, à demi cachée par d
2680
sent de tous côtés ce jardin de curé, qui a juste
la
largeur de la maison. On ne voit rien que le ciel au-delà, un ciel la
2681
ôtés ce jardin de curé, qui a juste la largeur de
la
maison. On ne voit rien que le ciel au-delà, un ciel lavé, tissé d’oi
2682
uste la largeur de la maison. On ne voit rien que
le
ciel au-delà, un ciel lavé, tissé d’oiseaux, et parfois traversé par
2683
oiseaux, et parfois traversé par un nuage rapide.
La
maison compte deux chambres au rez-de-chaussée, séparées de la cuisin
2684
pte deux chambres au rez-de-chaussée, séparées de
la
cuisine par un couloir dallé. À l’étage, où l’on parvient par un peti
2685
e, séparées de la cuisine par un couloir dallé. À
l’
étage, où l’on parvient par un petit escalier qui prend au fond de la
2686
de la cuisine par un couloir dallé. À l’étage, où
l’
on parvient par un petit escalier qui prend au fond de la cuisine, deu
2687
rvient par un petit escalier qui prend au fond de
la
cuisine, deux autres chambres assez vastes et presque vides, auxquell
2688
hambres assez vastes et presque vides, auxquelles
le
toit sert de plafond. Très peu de meubles, comme j’aime. Des murs bla
2689
et gai, oui vraiment plus gai qu’ascétique. Dans
le
chai, à la porte un peu trop basse, règne une pénétrante odeur de lau
2690
i vraiment plus gai qu’ascétique. Dans le chai, à
la
porte un peu trop basse, règne une pénétrante odeur de laurier. 10
2691
ra rien d’intime. J’ai à gagner ma vie, non pas à
la
regarder. Toutefois, noter les faits précis qui me paraîtront frappan
2692
r ma vie, non pas à la regarder. Toutefois, noter
les
faits précis qui me paraîtront frappants ici ou là, c’est une sorte d
2693
pour plus tard — et c’est une bonne discipline de
l’
esprit que la description objective. Me voici pris dans une expérience
2694
d — et c’est une bonne discipline de l’esprit que
la
description objective. Me voici pris dans une expérience forcée de vi
2695
s du désert. Curiosité, comme au début d’un film.
La
situation est d’ailleurs excellente pour l’instant. Il nous reste enc
2696
film. La situation est d’ailleurs excellente pour
l’
instant. Il nous reste encore de quoi vivre pendant six semaines envir
2697
calculs sont justes : 900 francs, un bon toit, et
le
temps de voir venir. Du 10 au 17 novembre Pour parer au plus pressé
2698
ires et journaux. Grande facilité de travail dans
le
silence à peu près absolu. Mais aussi j’ai l’impression nette d’utili
2699
ans le silence à peu près absolu. Mais aussi j’ai
l’
impression nette d’utiliser la fin de l’élan intellectuel qui me soute
2700
lu. Mais aussi j’ai l’impression nette d’utiliser
la
fin de l’élan intellectuel qui me soutenait à Paris. Ces deux dernier
2701
ussi j’ai l’impression nette d’utiliser la fin de
l’
élan intellectuel qui me soutenait à Paris. Ces deux derniers jours dé
2702
s jours déjà, j’arrivais mal à prendre au sérieux
l’
actualité de ce que j’écrivais. Il faut avouer qu’il s’agissait, dans
2703
er qu’il s’agissait, dans ces articles, de ce que
les
gens croient être actuel, ou sont censés croire actuel, dans la litté
2704
t être actuel, ou sont censés croire actuel, dans
la
littérature ou les idées. C’est cela qui paie, et qui m’ennuie. Après
2705
sont censés croire actuel, dans la littérature ou
les
idées. C’est cela qui paie, et qui m’ennuie. Après quoi, je pourrai t
2706
ès quoi, je pourrai travailler. Aujourd’hui c’est
le
jour du repos. J’ai trouvé au fond d’une armoire, derrière une pile d
2707
, derrière une pile d’assiettes, deux volumes sur
l’
histoire de l’île, ses coutumes, et son dialecte. L’un est l’œuvre d’u
2708
pile d’assiettes, deux volumes sur l’histoire de
l’
île, ses coutumes, et son dialecte. L’un est l’œuvre d’un archiviste d
2709
de l’île, ses coutumes, et son dialecte. L’un est
l’
œuvre d’un archiviste du continent. Il affecte une douce ironie sorbon
2710
ent. Il affecte une douce ironie sorbonnarde pour
les
petits événements qui se déroulèrent dans ce coin du pays, et surtout
2711
déroulèrent dans ce coin du pays, et surtout pour
les
légendes, locales, qui ont fortement exagéré et embelli tout cela… La
2712
, qui ont fortement exagéré et embelli tout cela…
La
science réclame de petits faits vrais. Elle tend aussi, il faut l’avo
2713
e de petits faits vrais. Elle tend aussi, il faut
l’
avouer, à ne tenir pour vrai que ce qui est petit. Laissons donc de cô
2714
ons donc de côté ce petit travail qui a dû valoir
les
palmes à son auteur. Le second bouquin, c’est l’œuvre d’un vieux méde
2715
les palmes à son auteur. Le second bouquin, c’est
l’
œuvre d’un vieux médecin tout plein de verve et de gaillarde érudition
2716
comme il s’en trouve un peu partout pour sauver «
l’
esprit » d’un pays. J’ai passé tout l’après-midi dessus. — Cela commen
2717
ur sauver « l’esprit » d’un pays. J’ai passé tout
l’
après-midi dessus. — Cela commence par une chronique historique dont l
2718
— Cela commence par une chronique historique dont
l’
essentiel est naturellement l’énumération des débarquements qui ont ho
2719
que historique dont l’essentiel est naturellement
l’
énumération des débarquements qui ont honoré l’île, des premières galè
2720
nt l’énumération des débarquements qui ont honoré
l’
île, des premières galères romaines jusqu’au bateau à vapeur de Sadi C
2721
ment au point où il toucha terre — en passant par
les
drakkars norvégiens, les flottes anglaises des guerres de religion et
2722
a terre — en passant par les drakkars norvégiens,
les
flottes anglaises des guerres de religion et les expéditions de saumo
2723
les flottes anglaises des guerres de religion et
les
expéditions de saumoniers. Une période héroïque sous Richelieu. Depui
2724
éroïque sous Richelieu. Depuis lors, semble-t-il,
les
villages se dépeuplent, les traditions se perdent et les champs tombe
2725
is lors, semble-t-il, les villages se dépeuplent,
les
traditions se perdent et les champs tombent en friche. La Révolution
2726
lages se dépeuplent, les traditions se perdent et
les
champs tombent en friche. La Révolution seule a ranimé l’ardeur des h
2727
tions se perdent et les champs tombent en friche.
La
Révolution seule a ranimé l’ardeur des habitants, pour la plupart jac
2728
s tombent en friche. La Révolution seule a ranimé
l’
ardeur des habitants, pour la plupart jacobins. Plusieurs des discours
2729
eurs chefs ont été consignés par miracle : ils ne
le
cèdent en rien pour l’ampleur de leurs vues sur le monde, à l’éloquen
2730
ignés par miracle : ils ne le cèdent en rien pour
l’
ampleur de leurs vues sur le monde, à l’éloquence des conventionnels…
2731
e cèdent en rien pour l’ampleur de leurs vues sur
le
monde, à l’éloquence des conventionnels… On trouve encore dans ce liv
2732
rien pour l’ampleur de leurs vues sur le monde, à
l’
éloquence des conventionnels… On trouve encore dans ce livre des anecd
2733
laire. D’intéressantes précisions budgétaires sur
les
institutions de bienfaisance fondées par le docteur lui-même ou tout
2734
sur les institutions de bienfaisance fondées par
le
docteur lui-même ou tout au moins à son instigation. Enfin, et cela n
2735
ra des plus utiles, une minutieuse description de
la
faune et de la flore de l’île, du régime des marées, des courants et
2736
les, une minutieuse description de la faune et de
la
flore de l’île, du régime des marées, des courants et des vents. Merv
2737
utieuse description de la faune et de la flore de
l’
île, du régime des marées, des courants et des vents. Merveilleux livr
2738
ts et des vents. Merveilleux livre en vérité ! Et
la
merveilleuse bibliothèque que celle qui rassemblerait tous les ouvrag
2739
use bibliothèque que celle qui rassemblerait tous
les
ouvrages analogues que, dans chaque sous-préfecture, un vieux docteur
2740
ce hétéroclite de praticien et de collectionneur.
L’
esprit fort et l’esprit de clocher se font une guerre acharnée dans ce
2741
praticien et de collectionneur. L’esprit fort et
l’
esprit de clocher se font une guerre acharnée dans ces pages et ils l’
2742
se font une guerre acharnée dans ces pages et ils
l’
emportent tour à tour, jusqu’à la synthèse finale d’une envolée tout à
2743
ces pages et ils l’emportent tour à tour, jusqu’à
la
synthèse finale d’une envolée tout à la fois patriotique, républicain
2744
la fois patriotique, républicaine, et tolérante.
La
droite, la gauche, et une certaine espèce d’intelligence, ou d’ironie
2745
triotique, républicaine, et tolérante. La droite,
la
gauche, et une certaine espèce d’intelligence, ou d’ironie… Pour de t
2746
ible et nécessaire au cœur de chacun d’eux. Voilà
l’
espèce d’hommes français que je voudrais croire la plus authentique.
2747
l’espèce d’hommes français que je voudrais croire
la
plus authentique. 19 novembre Premiers contacts avec les gens. — L
2748
uthentique. 19 novembre Premiers contacts avec
les
gens. — Le village se termine au bout de notre jardin. Passée la port
2749
19 novembre Premiers contacts avec les gens. —
Le
village se termine au bout de notre jardin. Passée la porte, on enfil
2750
illage se termine au bout de notre jardin. Passée
la
porte, on enfile une petite rue toute blanche qui contourne la panse
2751
enfile une petite rue toute blanche qui contourne
la
panse de l’église et aboutit à la place principale. Au milieu de cett
2752
etite rue toute blanche qui contourne la panse de
l’
église et aboutit à la place principale. Au milieu de cette place, qui
2753
e qui contourne la panse de l’église et aboutit à
la
place principale. Au milieu de cette place, qui est un vaste rectangl
2754
place, qui est un vaste rectangle de terre jaune,
les
habitants plantèrent à la Révolution un arbre de la Liberté. Cet orme
2755
tangle de terre jaune, les habitants plantèrent à
la
Révolution un arbre de la Liberté. Cet orme est devenu gigantesque, m
2756
habitants plantèrent à la Révolution un arbre de
la
Liberté. Cet orme est devenu gigantesque, majestueux, exemplaire dans
2757
dans sa symétrie architecturale. Il domine toutes
les
maisons et le clocher. Il est seul au-dessus du pays. Je voudrais le
2758
e architecturale. Il domine toutes les maisons et
le
clocher. Il est seul au-dessus du pays. Je voudrais le dessiner dans
2759
ocher. Il est seul au-dessus du pays. Je voudrais
le
dessiner dans le style romantique, avec tous ses détails et toute son
2760
l au-dessus du pays. Je voudrais le dessiner dans
le
style romantique, avec tous ses détails et toute son opulence, frisé
2761
e une perruque du grand siècle. De trois côtés de
la
place généralement vide, les maisons s’alignent en ordre modeste, pei
2762
le. De trois côtés de la place généralement vide,
les
maisons s’alignent en ordre modeste, peintes en tons clairs et simple
2763
en tons clairs et simples, blanc, jaune ou vert.
La
couleur des volets s’harmonise avec chaque façade d’une manière subti
2764
ne manière subtile et précise qui en dit long sur
l’
âme de ce peuple discret. C’est l’impression que je veux retenir pour
2765
en dit long sur l’âme de ce peuple discret. C’est
l’
impression que je veux retenir pour le moment des gens d’ici. Elle cor
2766
cret. C’est l’impression que je veux retenir pour
le
moment des gens d’ici. Elle corrige la mauvaise humeur que m’a donnée
2767
tenir pour le moment des gens d’ici. Elle corrige
la
mauvaise humeur que m’a donnée notre épicière. Car il faut bien, héla
2768
épicière. Car il faut bien, hélas, commencer par
l’
épicière, quand on aborde le village où l’on va vivre. Celle-ci est én
2769
hélas, commencer par l’épicière, quand on aborde
le
village où l’on va vivre. Celle-ci est énorme et goutteuse. Elle a de
2770
cer par l’épicière, quand on aborde le village où
l’
on va vivre. Celle-ci est énorme et goutteuse. Elle a des douleurs dan
2771
est énorme et goutteuse. Elle a des douleurs dans
les
jambes, et m’en parle d’abord, pour me mettre en confiance. Je sens b
2772
bien qu’elle veut me faire causer avant de fixer
le
prix du chou-fleur, des enveloppes jaunes, du peloton de ficelle et d
2773
lo de riz. Mes vêtements, citadins mais râpés, ne
la
renseignent pas clairement. Et que penser d’un « Parisien » qui manif
2774
nt. Et que penser d’un « Parisien » qui manifeste
l’
intention de rester ici tout l’hiver ? C’est plutôt en été qu’on vient
2775
en » qui manifeste l’intention de rester ici tout
l’
hiver ? C’est plutôt en été qu’on vient chez nous, me fait-elle prudem
2776
chez nous, me fait-elle prudemment observer. — Je
le
sais bien, madame Aujard, mais je ne viens pas pour mes vacances ! J’
2777
m’en demander davantage. Et moi, je recule devant
l’
entreprise de lui expliquer la nature de mon travail. « Écrire », qu’e
2778
i, je recule devant l’entreprise de lui expliquer
la
nature de mon travail. « Écrire », qu’est-ce que cela signifie ? Écri
2779
rire », qu’est-ce que cela signifie ? Écrire pour
les
journaux, sans doute, mais il n’y en a pas tant à raconter sur ce pay
2780
s il n’y en a pas tant à raconter sur ce pays. Je
l’
ai laissée en plein mystère. Elle a dû en parler longuement avec les c
2781
lein mystère. Elle a dû en parler longuement avec
les
clients qui attendaient en silence, le nez sur leurs sabots, que je s
2782
ment avec les clients qui attendaient en silence,
le
nez sur leurs sabots, que je sois sorti. La mère Aujard n’a pas toujo
2783
ence, le nez sur leurs sabots, que je sois sorti.
La
mère Aujard n’a pas toujours ce qu’on voudrait. En hiver elle fait pe
2784
le fait peu de réserves de produits alimentaires,
les
habitants n’achetant guère autre chose que de la mercerie, des lainag
2785
les habitants n’achetant guère autre chose que de
la
mercerie, des lainages et des épices. Alors il faut aller de l’autre
2786
es épices. Alors il faut aller de l’autre côté de
la
place, chez Mélie. Ce n’est pas simple d’éviter d’être vu par l’une,
2787
, entrant chez l’autre. Mais c’est prudent, on me
l’
a dit. Car elles ne baisseront pas leurs prix pour garder un client, e
2788
eront pas leurs prix pour garder un client, elles
les
augmenteront bien plutôt pour le punir d’avoir été en face. Sans comp
2789
n client, elles les augmenteront bien plutôt pour
le
punir d’avoir été en face. Sans compter qu’on n’aime pas être accueil
2790
Sans compter qu’on n’aime pas être accueilli par
la
réprobation sournoise d’une épicière. 20 novembre Le bureau de post
2791
probation sournoise d’une épicière. 20 novembre
Le
bureau de poste. Trois mètres sur trois, et une grille épaisse au mil
2792
trois, et une grille épaisse au milieu. Derrière
la
grille, le long visage de Pédenaud. J’ai l’impression que je lui gâte
2793
une grille épaisse au milieu. Derrière la grille,
le
long visage de Pédenaud. J’ai l’impression que je lui gâte la vie. Tr
2794
rière la grille, le long visage de Pédenaud. J’ai
l’
impression que je lui gâte la vie. Trois fois la semaine au moins, il
2795
ge de Pédenaud. J’ai l’impression que je lui gâte
la
vie. Trois fois la semaine au moins, il me voit venir avec une grande
2796
i l’impression que je lui gâte la vie. Trois fois
la
semaine au moins, il me voit venir avec une grande enveloppe contenan
2797
? — Non. Est-ce un imprimé ? — Non. C’est tapé à
la
machine. — Est-ce qu’il n’y a rien d’écrit à la main ? Si, il y a des
2798
à la machine. — Est-ce qu’il n’y a rien d’écrit à
la
main ? Si, il y a des corrections écrites à la main. » Pédenaud relit
2799
à la main ? Si, il y a des corrections écrites à
la
main. » Pédenaud relit pour la énième fois son tarif, fait son calcul
2800
rections écrites à la main. » Pédenaud relit pour
la
énième fois son tarif, fait son calcul sur un bout de papier, et conc
2801
t pas aller. Il faut tout recommencer. Finalement
l’
on décide d’envoyer le manuscrit comme échantillon sans valeur. Port :
2802
out recommencer. Finalement l’on décide d’envoyer
le
manuscrit comme échantillon sans valeur. Port : quatre francs soixant
2803
aleur. Port : quatre francs soixante-quinze. Dans
l’
après-midi, tandis que j’écris à ma table, j’entends grincer la porte
2804
tandis que j’écris à ma table, j’entends grincer
la
porte du jardin. C’est la femme de Pédenaud qui brandit un papier. J’
2805
able, j’entends grincer la porte du jardin. C’est
la
femme de Pédenaud qui brandit un papier. J’accours : elle me tend une
2806
tification officielle d’avoir à verser sans délai
la
somme de francs 67,25, restant due sur l’envoi de ce matin. En effet,
2807
s délai la somme de francs 67,25, restant due sur
l’
envoi de ce matin. En effet, Pédenaud qui a voulu en avoir le cœur net
2808
ce matin. En effet, Pédenaud qui a voulu en avoir
le
cœur net, a pris des instructions par téléphone au chef-lieu. Son sup
2809
rcé « d’y aller de sa poche ». Me voilà courant à
l’
autobus pour arrêter le courrier. L’autobus vient de partir. Il faut t
2810
oche ». Me voilà courant à l’autobus pour arrêter
le
courrier. L’autobus vient de partir. Il faut téléphoner au chef-lieu,
2811
ilà courant à l’autobus pour arrêter le courrier.
L’
autobus vient de partir. Il faut téléphoner au chef-lieu, faire rouvri
2812
téléphoner au chef-lieu, faire rouvrir au passage
le
sac postal, discuter passionnément, trouver une formule d’apaisement
2813
rouver une formule d’apaisement qui ménage toutes
les
susceptibilités, et finalement ne rien payer de plus. Je cause un peu
2814
des lessives. En été ils pêchent des palourdes et
les
vendent aux baigneurs. Bien entendu, je n’arrive pas à savoir combien
2815
». 1er décembre Dépenses du premier mois dans
l’
île : ménage, manger et boire, 480 francs ; (en général tout est plus
2816
liées dans une revue. Reste : environ 200 francs.
Le
sentiment de dépendre entièrement de bonnes ou de mauvaises volontés
2817
dans nos pays », dit-on, et je crois bien que je
l’
ai dit quelquefois. Mais il y a aussi des exceptions, des cas sans pré
2818
secours. Pourtant je suis bien tranquille, je ne
l’
ai même jamais été aussi absolument. C’est peut-être à cause du bonheu
2819
heur de notre vie. Trouver son rythme naturel, et
les
moyens de s’y réduire, voilà le but de toute morale car le « bien pen
2820
thme naturel, et les moyens de s’y réduire, voilà
le
but de toute morale car le « bien penser » en dépend. 2 décembre Q
2821
de s’y réduire, voilà le but de toute morale car
le
« bien penser » en dépend. 2 décembre Questions. — Est-ce donc si
2822
si « naturel » de vivre sur une île ? Est-ce que
l’
insularité (géographique et morale) n’est pas une espèce de vice ? Est
2823
pas une espèce de vice ? Est-ce que ce n’est pas
la
racine de tout l’idéalisme dont les modernes doivent se guérir, s’ils
2824
vice ? Est-ce que ce n’est pas la racine de tout
l’
idéalisme dont les modernes doivent se guérir, s’ils veulent enfin dev
2825
e ce n’est pas la racine de tout l’idéalisme dont
les
modernes doivent se guérir, s’ils veulent enfin devenir « actuels » ?
2826
venir « actuels » ? Est-ce que ce n’est pas aussi
la
racine de cet esprit d’abstraction égoïste dont nous souffrons tous ?
2827
ction égoïste dont nous souffrons tous ? Pourquoi
les
hommes vivent-ils sur des îles ? Quand nous sortons pour une promenad
2828
ons pour une promenade et que nous mesurons toute
l’
étroitesse de notre domaine, la mer partout à dix minutes et ces maréc
2829
ous mesurons toute l’étroitesse de notre domaine,
la
mer partout à dix minutes et ces marécages hostiles, nous souffrons d
2830
sulaire est une liberté négative. Elle nous met à
l’
abri du monde et nous ramène tous physiquement à nos limites. Mais l’h
2831
nous ramène tous physiquement à nos limites. Mais
l’
homme est ainsi fait qu’il désire sans cesse se risquer au-delà de ce
2832
de ce qu’il peut, et franchir au moins en pensée
les
bornes de ses possessions pour aller se mêler aux « autres », à l’étr
2833
possessions pour aller se mêler aux « autres », à
l’
étranger… Tout ici me ramène à moi seul. J’ai beau faire, je ne parvie
2834
ai beau faire, je ne parviens pas à partager avec
les
hommes de ce village ce qui est essentiel et solide dans ma vie. Le s
2835
llage ce qui est essentiel et solide dans ma vie.
Le
simple fait que je ne puis pas les persuader que je travaille vraimen
2836
de dans ma vie. Le simple fait que je ne puis pas
les
persuader que je travaille vraiment en écrivant, cela met entre nous
2837
ont pu entrevoir de mon activité, une seule chose
les
a frappés : ma machine à écrire. La mère Renaud, qui est une vieille
2838
seule chose les a frappés : ma machine à écrire.
La
mère Renaud, qui est une vieille amie des propriétaires de notre mais
2839
mbrouillées si son fils pourrait venir aussi voir
la
machine. Je crois bien que sans cette machine, je n’arriverais jamais
2840
fais réellement quelque chose. Quand je vais chez
les
Renaud, c’est tout le contraire. Ils m’expliquent en détail ce qu’ils
2841
chose. Quand je vais chez les Renaud, c’est tout
le
contraire. Ils m’expliquent en détail ce qu’ils font, et je puis le c
2842
m’expliquent en détail ce qu’ils font, et je puis
le
comprendre et l’admirer. Ils ont ainsi sur moi une sorte de supériori
2843
étail ce qu’ils font, et je puis le comprendre et
l’
admirer. Ils ont ainsi sur moi une sorte de supériorité concrète dont
2844
hie humaine, d’échange direct sur pied d’égalité.
Le
père Renaud est un ancien marin, barbu, jovial, déjà touché par le gâ
2845
t un ancien marin, barbu, jovial, déjà touché par
le
gâtisme, mais agréablement si je puis dire. Cela met un peu de fantai
2846
n filet de quatre-vingts mètres, bel ouvrage dont
le
détail m’intéresse. Le fils compose des cartes postales illustrées av
2847
s mètres, bel ouvrage dont le détail m’intéresse.
Le
fils compose des cartes postales illustrées avec des bouts de timbres
2848
ourde table au centre, une autre plus petite vers
la
fenêtre, sur laquelle travaille le père Renaud. Le sol est de terre b
2849
us petite vers la fenêtre, sur laquelle travaille
le
père Renaud. Le sol est de terre battue recouverte d’une fine couche
2850
a fenêtre, sur laquelle travaille le père Renaud.
Le
sol est de terre battue recouverte d’une fine couche de sable. Sur le
2851
battue recouverte d’une fine couche de sable. Sur
les
murs blanchis, quelques petites gravures anciennes, encadrées de noir
2852
ureuse qui règnent ici avec tant d’aisance, ai-je
le
droit de les considérer comme les symboles visibles de l’univers inté
2853
ègnent ici avec tant d’aisance, ai-je le droit de
les
considérer comme les symboles visibles de l’univers intérieur de ces
2854
d’aisance, ai-je le droit de les considérer comme
les
symboles visibles de l’univers intérieur de ces gens ? 5 décembre I
2855
de les considérer comme les symboles visibles de
l’
univers intérieur de ces gens ? 5 décembre Ils me parlent de ce qui
2856
ces gens ? 5 décembre Ils me parlent de ce qui
les
intéresse, et je m’y intéresse avec eux. Mais je ne puis ou ne sais p
2857
e tout le monde ; de leur travail aux champs ou à
la
côte, et je les écoute avec toute l’attention d’un apprenti ; de leur
2858
; de leur travail aux champs ou à la côte, et je
les
écoute avec toute l’attention d’un apprenti ; de leurs souvenirs, par
2859
champs ou à la côte, et je les écoute avec toute
l’
attention d’un apprenti ; de leurs souvenirs, parfois touchants, parfo
2860
nd nous sommes en confiance, si j’essaie d’amener
l’
entretien sur leurs lectures, les journaux qu’ils achètent, la politiq
2861
j’essaie d’amener l’entretien sur leurs lectures,
les
journaux qu’ils achètent, la politique, ou la religion qu’ils suivent
2862
sur leurs lectures, les journaux qu’ils achètent,
la
politique, ou la religion qu’ils suivent, ils se taisent bien vite, o
2863
s, les journaux qu’ils achètent, la politique, ou
la
religion qu’ils suivent, ils se taisent bien vite, ou se remettent à
2864
que je puisse avoir une opinion plus avertie que
la
leur sur les sujets que je viens de nommer. Ils ne se doutent pas que
2865
se avoir une opinion plus avertie que la leur sur
les
sujets que je viens de nommer. Ils ne se doutent pas que c’est de cel
2866
écrivain peut faire sa « spécialité ». Et rien ne
les
étonnerait davantage que d’apprendre un beau jour que je m’intéresse
2867
on, à leurs problèmes, — et que j’en fais parfois
la
matière même de mon travail. J’ai quelque peine à exprimer ceci, — qu
2868
e absurdité, et si énorme que personne ne pense à
la
dire… Peut-être, dans un siècle ou deux, se demandera-t-on comment no
2869
e ma gêne qui est absurde ? Essayer de confronter
la
culture et la réalité, c’est peut-être prouver qu’on ignore l’une et
2870
est absurde ? Essayer de confronter la culture et
la
réalité, c’est peut-être prouver qu’on ignore l’une et l’autre ? Ou t
2871
tort, c’est-à-dire à donner raison au bon sens de
l’
époque présente. Il a trop souvent fait ses preuves. 15 décembre Déj
2872
nt fait ses preuves. 15 décembre Déjeuné, après
le
culte, chez M. Palut. Il n’est pas pasteur en titre, mais seulement «
2873
vangéliste » au service d’une œuvre missionnaire.
Les
évangélistes étant moins bien payés que les pasteurs, dont le traitem
2874
aire. Les évangélistes étant moins bien payés que
les
pasteurs, dont le traitement de base est de 10 000 francs, Mme Palut
2875
tes étant moins bien payés que les pasteurs, dont
le
traitement de base est de 10 000 francs, Mme Palut est obligée de fai
2876
ces. Ils ont déjà deux garçons, et ils ont trouvé
le
moyen de recueillir encore une vieille Bretonne sans ressources, qui
2877
eille Bretonne sans ressources, qui aide un peu à
la
cuisine et casse beaucoup d’assiettes. Dans cette île, qui fut presqu
2878
ens disséminés. Il en vient une dizaine au culte.
Les
autres habitent trop loin, ou sont indifférents. Il me raconte les ef
2879
nt trop loin, ou sont indifférents. Il me raconte
les
efforts qu’il a faits, pendant six ans, pour entrer en contact avec l
2880
its, pendant six ans, pour entrer en contact avec
la
population. Conférences, visites, colportage de bibles de porte en po
2881
e peut pas dire que tout ce travail épuisant dans
l’
inertie soit resté absolument vain : il y a eu quelques conversions. M
2882
ions. Mais c’est tout juste si elles ont compensé
les
abandons ou les départs. (Les protestants qui sont souvent l’élément
2883
tout juste si elles ont compensé les abandons ou
les
départs. (Les protestants qui sont souvent l’élément le plus actif de
2884
elles ont compensé les abandons ou les départs. (
Les
protestants qui sont souvent l’élément le plus actif de la population
2885
ou les départs. (Les protestants qui sont souvent
l’
élément le plus actif de la population s’expatrient volontiers, ou von
2886
arts. (Les protestants qui sont souvent l’élément
le
plus actif de la population s’expatrient volontiers, ou vont habiter
2887
tants qui sont souvent l’élément le plus actif de
la
population s’expatrient volontiers, ou vont habiter les villes.) En é
2888
pulation s’expatrient volontiers, ou vont habiter
les
villes.) En été, la petite ville se remplit de baigneurs et l’auditoi
2889
volontiers, ou vont habiter les villes.) En été,
la
petite ville se remplit de baigneurs et l’auditoire du temple est déc
2890
n été, la petite ville se remplit de baigneurs et
l’
auditoire du temple est décuplé : cela suffit pour qu’on maintienne le
2891
e est décuplé : cela suffit pour qu’on maintienne
le
poste… J’essaie de me représenter l’existence quotidienne de cet homm
2892
n maintienne le poste… J’essaie de me représenter
l’
existence quotidienne de cet homme aux prises avec la solitude la plus
2893
xistence quotidienne de cet homme aux prises avec
la
solitude la plus désespérante, celle que lui crée l’indifférence tran
2894
tidienne de cet homme aux prises avec la solitude
la
plus désespérante, celle que lui crée l’indifférence tranquille et ob
2895
solitude la plus désespérante, celle que lui crée
l’
indifférence tranquille et obstinée de ceux auprès desquels il devrait
2896
vrait exercer sa mission. Ils ne veulent pas même
l’
écouter, et toute sa raison d’être est cependant de leur parler. Il n’
2897
r. Il n’a rien d’autre à faire, et il ne peut pas
le
faire. Et de plus, il est seul à croire qu’il doit le faire. Il m’a d
2898
aire. Et de plus, il est seul à croire qu’il doit
le
faire. Il m’a décrit son existence sans amertume. Il ne se plaint que
2899
humainement absurde. Non qu’il n’en distingue pas
l’
absurdité, mais simplement il sait pourquoi il la subit. Fils d’un pet
2900
l’absurdité, mais simplement il sait pourquoi il
la
subit. Fils d’un petit hôtelier breton d’origine catholique, il s’est
2901
breton d’origine catholique, il s’est converti à
l’
âge de vingt ans et depuis lors il n’a jamais songé qu’il pût faire au
2902
ais songé qu’il pût faire autre chose qu’annoncer
l’
Évangile. Qu’importe qu’il n’y ait « à vues humaines » aucun espoir de
2903
humaines » aucun espoir de se faire entendre, si
le
seul espoir vrai réside dans la foi, qui ordonne de parler quand même
2904
aire entendre, si le seul espoir vrai réside dans
la
foi, qui ordonne de parler quand même ? Janvier (à T…) Ce séjour, p
2905
êtais d’écrire, par fatigue, je ne me sentais pas
la
bonne conscience de l’employé qui a fait sa journée et qui pense main
2906
igue, je ne me sentais pas la bonne conscience de
l’
employé qui a fait sa journée et qui pense maintenant à autre chose. U
2907
s préoccupations. Ce n’était pas cette vacance où
les
idées et sentiments changent de climat. Le loisir n’est pas simplemen
2908
ce où les idées et sentiments changent de climat.
Le
loisir n’est pas simplement la cessation du travail pour un repos néc
2909
hangent de climat. Le loisir n’est pas simplement
la
cessation du travail pour un repos nécessaire. Il se définit psycholo
2910
nt non par rapport au travail, mais par rapport à
la
sécurité matérielle qu’assurent soit le travail, soit la fortune, soi
2911
rapport à la sécurité matérielle qu’assurent soit
le
travail, soit la fortune, soit dans mon cas particulier, l’amitié. Un
2912
rité matérielle qu’assurent soit le travail, soit
la
fortune, soit dans mon cas particulier, l’amitié. Un chômeur intellec
2913
, soit la fortune, soit dans mon cas particulier,
l’
amitié. Un chômeur intellectuel peut encore travailler — et c’est cela
2914
ectuel peut encore travailler — et c’est cela qui
le
différencie profondément d’un chômeur industriel, par exemple — mais
2915
ît plus de vrais loisirs. 23 janvier (écrit sur
la
dune) Il ne faut pas se mettre en colère au mois de janvier. C’est un
2916
une saison abstraite, on n’atteint presque rien.
Le
soleil froid à travers une brume lointaine agrandit les regards sans
2917
leil froid à travers une brume lointaine agrandit
les
regards sans nourrir la vision. Pas de mouches dans la lumière au ras
2918
brume lointaine agrandit les regards sans nourrir
la
vision. Pas de mouches dans la lumière au ras des landes. Lucidité st
2919
gards sans nourrir la vision. Pas de mouches dans
la
lumière au ras des landes. Lucidité stérile du bel hiver ! La colère
2920
u ras des landes. Lucidité stérile du bel hiver !
La
colère y jaillit sans rencontrer personne. J’ai à craindre qu’elle ne
2921
sauver de cette tentation du désespoir, et c’est
l’
humilité. Si je ne suis pas important, le monde s’agrandit. Je puis en
2922
et c’est l’humilité. Si je ne suis pas important,
le
monde s’agrandit. Je puis encore aimer des paysages qui ne sont pas m
2923
pas mon état d’âme, mais une parole à déchiffrer.
L’
humilité m’apporte des nouvelles du monde. Ainsi je me renouvelle lent
2924
renouvelle lentement. C’est un moyen de sortir de
l’
impasse : non pas en changeant ses données, mais soi-même. 28 févrie
2925
travaillent sur leur parcelle, ce que signifient
les
méthodes productivistes et la démesure collective d’un plan quinquenn
2926
ce que signifient les méthodes productivistes et
la
démesure collective d’un plan quinquennal. Le silence de la lande et
2927
et la démesure collective d’un plan quinquennal.
Le
silence de la lande et des marais, la rumeur de la côte, les petits c
2928
e collective d’un plan quinquennal. Le silence de
la
lande et des marais, la rumeur de la côte, les petits chocs irrégulie
2929
uinquennal. Le silence de la lande et des marais,
la
rumeur de la côte, les petits chocs irréguliers des pioches et des bo
2930
e silence de la lande et des marais, la rumeur de
la
côte, les petits chocs irréguliers des pioches et des bouelles, tout
2931
de la lande et des marais, la rumeur de la côte,
les
petits chocs irréguliers des pioches et des bouelles, tout ce qu’il y
2932
à grand fracas de moteurs et de règlements de fer
les
rythmes de cette île et de ces vies ? 3 avril La solitude est une j
2933
s rythmes de cette île et de ces vies ? 3 avril
La
solitude est une jeunesse. Elle nous apprend cette chose nouvelle que
2934
lle au goût du souvenir, que trop de téléphones à
la
ville, d’heures de bureau, d’impitoyables rendez-vous, d’indifférence
2935
s ; cette chose toujours neuve et nouvelle qu’est
l’
attente d’on ne sait quoi. Condition véritable de l’homme : il est cel
2936
attente d’on ne sait quoi. Condition véritable de
l’
homme : il est celui qui agit dans l’attente. Il attend des révélation
2937
véritable de l’homme : il est celui qui agit dans
l’
attente. Il attend des révélations. C’est évident ! Ses actions les pl
2938
tend des révélations. C’est évident ! Ses actions
les
plus pures sont des appels et des incantations : leur sens est toujou
2939
es, invites angoissées ou séductions tentées dans
l’
inconnu. Autrement, comment supporter leur petitesse ? Si je gratte pe
2940
ison borgne ; c’est aussi pour gagner ma mort, je
le
sais bien. Toute notre attente imagine l’avenir — et l’imagine nécess
2941
ort, je le sais bien. Toute notre attente imagine
l’
avenir — et l’imagine nécessairement sur fond de mort. (La jeunesse qu
2942
s bien. Toute notre attente imagine l’avenir — et
l’
imagine nécessairement sur fond de mort. (La jeunesse qui est l’âge de
2943
— et l’imagine nécessairement sur fond de mort. (
La
jeunesse qui est l’âge de l’attente la plus ardente de la vie est aus
2944
ssairement sur fond de mort. (La jeunesse qui est
l’
âge de l’attente la plus ardente de la vie est aussi l’âge le plus fam
2945
t sur fond de mort. (La jeunesse qui est l’âge de
l’
attente la plus ardente de la vie est aussi l’âge le plus familier ave
2946
de mort. (La jeunesse qui est l’âge de l’attente
la
plus ardente de la vie est aussi l’âge le plus familier avec la mort.
2947
sse qui est l’âge de l’attente la plus ardente de
la
vie est aussi l’âge le plus familier avec la mort.) Ainsi nos gestes
2948
de l’attente la plus ardente de la vie est aussi
l’
âge le plus familier avec la mort.) Ainsi nos gestes se prolongent, et
2949
attente la plus ardente de la vie est aussi l’âge
le
plus familier avec la mort.) Ainsi nos gestes se prolongent, et leur
2950
e de la vie est aussi l’âge le plus familier avec
la
mort.) Ainsi nos gestes se prolongent, et leur grandeur est dans l’at
2951
s gestes se prolongent, et leur grandeur est dans
l’
attente qu’ils trahissent. Si le travail moderne est dégradant, c’est
2952
grandeur est dans l’attente qu’ils trahissent. Si
le
travail moderne est dégradant, c’est qu’on a limité ses gestes à l’im
2953
est dégradant, c’est qu’on a limité ses gestes à
l’
immédiat, et borné son attente au salaire. Or toute vie est absurde et
2954
t violemment inacceptable, qui ne s’ouvre pas sur
l’
attente d’une révélation à venir, et d’une « consolation » finale. (Co
2955
nsolation » finale. (Consolation signifiant selon
l’
étymologie : unification, harmonisation, c’est-à-dire résolution des d
2956
tion c’est de gagner peu. (J’ai écrit cela, je me
le
rappelle, peu de temps après notre arrivée, au haut d’une page que je
2957
’une page que je retrouve dans une pile de notes.
La
page est restée blanche. Et toute réflexion faite, c’est bien ainsi,
2958
complet.) 10 avril Je n’ai pas encore parlé de
la
poule, la triste et digne poule noire qui habite seule au bout du jar
2959
10 avril Je n’ai pas encore parlé de la poule,
la
triste et digne poule noire qui habite seule au bout du jardin. Elle
2960
puis notre arrivée, héritée du propriétaire. Nous
l’
avons nourrie sans espoir pendant des mois, la croyant trop vieille po
2961
ous l’avons nourrie sans espoir pendant des mois,
la
croyant trop vieille pour être mangée, sinon pour faire encore quelqu
2962
e très gros œufs, me semble-t-il. (Où va se loger
la
vanité !) 14 avril La culture et les gens. Souvent, quand je me ti
2963
le-t-il. (Où va se loger la vanité !) 14 avril
La
culture et les gens. Souvent, quand je me tire du livre que j’écris —
2964
a se loger la vanité !) 14 avril La culture et
les
gens. Souvent, quand je me tire du livre que j’écris — sur la crise d
2965
vent, quand je me tire du livre que j’écris — sur
la
crise de la cultureaf — pour causer avec la laitière ou la factrice,
2966
je me tire du livre que j’écris — sur la crise de
la
cultureaf — pour causer avec la laitière ou la factrice, ou le postie
2967
— sur la crise de la cultureaf — pour causer avec
la
laitière ou la factrice, ou le postier, ou un Renaud, j’éprouve une b
2968
de la cultureaf — pour causer avec la laitière ou
la
factrice, ou le postier, ou un Renaud, j’éprouve une brève angoisse :
2969
— pour causer avec la laitière ou la factrice, ou
le
postier, ou un Renaud, j’éprouve une brève angoisse : quel rapport en
2970
: quel rapport entre cet homme à qui je parle, et
le
mot « homme » dans ce que j’écris ? Non seulement ceux d’ici ne compr
2971
e que je fais, et ce serait assez normal : il y a
l’
obstacle du vocabulaire, d’une certaine technique des idées, etc., mai
2972
que terme. Ils n’y reconnaîtraient rien de ce qui
les
« soucie », amuse, occupe, ou intéresse. Vraiment non, ce chapitre su
2973
pe, ou intéresse. Vraiment non, ce chapitre sur «
l’
origine rationaliste de la scission entre la culture et le peuple », c
2974
non, ce chapitre sur « l’origine rationaliste de
la
scission entre la culture et le peuple », cela ne peut accrocher à ri
2975
sur « l’origine rationaliste de la scission entre
la
culture et le peuple », cela ne peut accrocher à rien dans cet être q
2976
e rationaliste de la scission entre la culture et
le
peuple », cela ne peut accrocher à rien dans cet être que j’ai devant
2977
e et sa casquette, et qui continue à me parler de
la
pêche, de son filet qui a été emporté hier, etc. Quel sens concret ce
2978
Quel sens concret cela peut-il avoir de parler de
la
« scission » entre cet homme et la culture ? N’y a-t-il pas là deux m
2979
r de parler de la « scission » entre cet homme et
la
culture ? N’y a-t-il pas là deux mondes qui n’ont jamais eu de contac
2980
ne mesure ? Je reviens à mes pages, bien décidé à
les
refaire de fond en comble, à simplifier, à concrétiser, à essayer de
2981
comble, à simplifier, à concrétiser, à essayer de
les
rendre telles qu’elles puissent, je ne dis pas être comprises, mais a
2982
sée, confrontées sans un ridicule angoissant avec
la
réalité des choses et des êtres dont elles utilisent le concept… Eh b
2983
lité des choses et des êtres dont elles utilisent
le
concept… Eh bien, voilà le résultat : après une demi-heure de relectu
2984
s dont elles utilisent le concept… Eh bien, voilà
le
résultat : après une demi-heure de relecture attentive, j’ai rajouté
2985
gues, barré cinq lignes et mis une note au bas de
la
page. Il me semble vraiment que cela se tient. Il me semble aussi que
2986
Je me dis que cette impression et celle de tout à
l’
heure s’excluent en fait. Mais je n’arrive plus du tout à retrouver ce
2987
t d’absurdité que provoquait en moi, précisément,
la
présence physique d’un homme, confrontée avec les idées que j’avais e
2988
la présence physique d’un homme, confrontée avec
les
idées que j’avais en tête. Il y a probablement une fatalité interne d
2989
ime elle-même. Elle a ses lois, qui se suffisent.
Les
concepts alors se combinent selon des affinités ou répulsions que les
2990
e combinent selon des affinités ou répulsions que
les
faits ou les êtres qu’ils sont censés représenter n’ont pas dans la r
2991
elon des affinités ou répulsions que les faits ou
les
êtres qu’ils sont censés représenter n’ont pas dans la réalité. À la
2992
res qu’ils sont censés représenter n’ont pas dans
la
réalité. À la fin on obtient l’absurdité que j’éprouvais, mais aussi
2993
t censés représenter n’ont pas dans la réalité. À
la
fin on obtient l’absurdité que j’éprouvais, mais aussi l’impossibilit
2994
er n’ont pas dans la réalité. À la fin on obtient
l’
absurdité que j’éprouvais, mais aussi l’impossibilité de la sentir ave
2995
n obtient l’absurdité que j’éprouvais, mais aussi
l’
impossibilité de la sentir avec quelque vivacité, sauf par éclairs, da
2996
té que j’éprouvais, mais aussi l’impossibilité de
la
sentir avec quelque vivacité, sauf par éclairs, dans la rue, par exem
2997
tir avec quelque vivacité, sauf par éclairs, dans
la
rue, par exemple. Déjà je ne puis en retrouver le souvenir autrement
2998
la rue, par exemple. Déjà je ne puis en retrouver
le
souvenir autrement que par un effort de réflexion qui me laisse assez
2999
un effort de réflexion qui me laisse assez froid.
La
culture m’a repris. Je suis dans le faux et tout y est correct : je d
3000
assez froid. La culture m’a repris. Je suis dans
le
faux et tout y est correct : je dis que la thèse que je défends est v
3001
s dans le faux et tout y est correct : je dis que
la
thèse que je défends est vraie !… Il y aurait de quoi s’arrêter de pe
3002
ie !… Il y aurait de quoi s’arrêter de penser, si
l’
on pouvait. Le principe de toute culture véritable n’est-il pas cette
3003
ait de quoi s’arrêter de penser, si l’on pouvait.
Le
principe de toute culture véritable n’est-il pas cette commune mesure
3004
tant effort entre nos belles séries de pensées et
la
diversité désordonnée des êtres et des choses, où nous vivons ? « Je
3005
ticipant de ce monde « mal compassé ». 16 avril
La
poule noire couve depuis hier ses treize œufs. J’ai semé des salades,
3006
une des graines de haricots dans un sillon tiré à
la
ficelle. Plaisir d’avoir les doigts et les ongles terreux ; toujours
3007
dans un sillon tiré à la ficelle. Plaisir d’avoir
les
doigts et les ongles terreux ; toujours ce goût d’enfance… Je ne me s
3008
tiré à la ficelle. Plaisir d’avoir les doigts et
les
ongles terreux ; toujours ce goût d’enfance… Je ne me sens plus « élo
3009
il, le long des murs du chai. Nous déjeunons sous
les
tilleuls. Il y a un grand bonheur dans la lumière qui baigne le jardi
3010
s sous les tilleuls. Il y a un grand bonheur dans
la
lumière qui baigne le jardin fleuri, éclate sur la façade de la maiso
3011
l y a un grand bonheur dans la lumière qui baigne
le
jardin fleuri, éclate sur la façade de la maison, plus claire que le
3012
a lumière qui baigne le jardin fleuri, éclate sur
la
façade de la maison, plus claire que le ciel vide, et illumine la gou
3013
baigne le jardin fleuri, éclate sur la façade de
la
maison, plus claire que le ciel vide, et illumine la goutte rose d’un
3014
clate sur la façade de la maison, plus claire que
le
ciel vide, et illumine la goutte rose d’une fourmi ailée qui danse au
3015
maison, plus claire que le ciel vide, et illumine
la
goutte rose d’une fourmi ailée qui danse au-dessus de mon verre de vi
3016
danse au-dessus de mon verre de vin blanc. Mai
La
mer est d’un vert bleu crayeux, très froide encore. On ne peut guère
3017
mper quelques instants, et se coucher ensuite sur
la
dune, au vent doux. Villages blancs au-dessus des lagunes. Une odeur
3018
amps et des vignes sablonneuses. 21 mai Pendant
les
jours de grande marée, entre deux flux, d’immenses plateaux rocheux,
3019
pourpres, jaunes et noirs se révèlent au-delà de
la
plage, nouveau pays tout grouillant de merveilles, d’eaux ruisselante
3020
lumière de midi. Armés de treilles à long manche,
les
jambes nues, nous courons sur les roches tapissées d’algues sombres d
3021
à long manche, les jambes nues, nous courons sur
les
roches tapissées d’algues sombres dont le crépitement sous nos pas fa
3022
ns sur les roches tapissées d’algues sombres dont
le
crépitement sous nos pas fait fuir et choir de tous côtés de petits c
3023
étueuses parcourent ce territoire compliqué. Nous
les
suivons, dans l’eau jusqu’aux genoux, les jambes caressées de courant
3024
t ce territoire compliqué. Nous les suivons, dans
l’
eau jusqu’aux genoux, les jambes caressées de courants froids, de cour
3025
é. Nous les suivons, dans l’eau jusqu’aux genoux,
les
jambes caressées de courants froids, de courants tièdes, de poissons,
3026
s, de crabiots et de laines. À quelques mètres de
la
mer qui affleure le tranchant du plateau, la rivière s’élargit en bas
3027
laines. À quelques mètres de la mer qui affleure
le
tranchant du plateau, la rivière s’élargit en bassins clairs aux prof
3028
s de la mer qui affleure le tranchant du plateau,
la
rivière s’élargit en bassins clairs aux profondeurs rougeâtres et dou
3029
doucement mouvantes. C’est là que nous commençons
la
pêche. Il faut se planter au centre du bassin, et fouiller et racler
3030
r au centre du bassin, et fouiller et racler sous
les
bords, dans le sable et les paquets d’algues, avec le cercle rigide d
3031
assin, et fouiller et racler sous les bords, dans
le
sable et les paquets d’algues, avec le cercle rigide du filet, puis r
3032
uiller et racler sous les bords, dans le sable et
les
paquets d’algues, avec le cercle rigide du filet, puis retirer viveme
3033
ords, dans le sable et les paquets d’algues, avec
le
cercle rigide du filet, puis retirer vivement la treille et l’égoutte
3034
le cercle rigide du filet, puis retirer vivement
la
treille et l’égoutter. On ramène un paquet de varech, un ou deux crab
3035
ide du filet, puis retirer vivement la treille et
l’
égoutter. On ramène un paquet de varech, un ou deux crabes tout terreu
3036
rabes tout terreux, et parfois en se penchant sur
la
treille, on voit bondir d’un bord à l’autre quelque chose de transpar
3037
er comme une mouche et qui vous saute encore dans
la
main et vous gratte la paume de ses antennes, de ses écailles et de s
3038
qui vous saute encore dans la main et vous gratte
la
paume de ses antennes, de ses écailles et de ses pattes. On fourre ce
3039
es écailles et de ses pattes. On fourre cela dans
le
sachet que l’on porte attaché à la ceinture et qui se remplit de tres
3040
de ses pattes. On fourre cela dans le sachet que
l’
on porte attaché à la ceinture et qui se remplit de tressaillements. N
3041
urre cela dans le sachet que l’on porte attaché à
la
ceinture et qui se remplit de tressaillements. Nous ne gardons que le
3042
e remplit de tressaillements. Nous ne gardons que
les
plus belles crevettes, grosses comme le doigt, d’un rose sombre, aux
3043
dons que les plus belles crevettes, grosses comme
le
doigt, d’un rose sombre, aux longues antennes grenat. — On cuit les c
3044
se sombre, aux longues antennes grenat. — On cuit
les
crevettes toutes vivantes, en les jetant dans de l’eau qui bout. Aprè
3045
enat. — On cuit les crevettes toutes vivantes, en
les
jetant dans de l’eau qui bout. Après des soubresauts terribles — une
3046
crevettes toutes vivantes, en les jetant dans de
l’
eau qui bout. Après des soubresauts terribles — une ou deux sautent ho
3047
ubresauts terribles — une ou deux sautent hors de
la
casserole —, elles se recroquevillent, rougissent, se durcissent. Je
3048
is qu’est-ce que cela veut dire ? Je parlais de «
l’
attente ardente » des créatures, songeant au passage où l’Apôtre nous
3049
e ardente » des créatures, songeant au passage où
l’
Apôtre nous fait entendre ce soupir de toute la Création vers la révél
3050
où l’Apôtre nous fait entendre ce soupir de toute
la
Création vers la révélation des « enfants de lumière », et la restaur
3051
fait entendre ce soupir de toute la Création vers
la
révélation des « enfants de lumière », et la restauration de l’ordre
3052
vers la révélation des « enfants de lumière », et
la
restauration de l’ordre originel. Et voilà pratiquement la réponse de
3053
des « enfants de lumière », et la restauration de
l’
ordre originel. Et voilà pratiquement la réponse de l’homme : pillage,
3054
ration de l’ordre originel. Et voilà pratiquement
la
réponse de l’homme : pillage, ruses, destruction, dévoration, le tout
3055
dre originel. Et voilà pratiquement la réponse de
l’
homme : pillage, ruses, destruction, dévoration, le tout accompagné de
3056
’homme : pillage, ruses, destruction, dévoration,
le
tout accompagné de sentiments « humains », admiration, répulsion, pit
3057
à une certaine « sympathie » (souffrir avec) que
l’
homme éprouve pour ses victimes : « Je regrette vraiment beaucoup, mai
3058
mange. Dure nécessité, et croyez que cela me fend
le
cœur ! » Voilà la dernière trace de la conscience cosmique en nous, d
3059
la me fend le cœur ! » Voilà la dernière trace de
la
conscience cosmique en nous, de la conscience de notre royauté nécess
3060
nière trace de la conscience cosmique en nous, de
la
conscience de notre royauté nécessaire et réparatrice. Il est probabl
3061
té nécessaire et réparatrice. Il est probable que
le
tigre en train de déchiqueter une jeune gazelle ne fait pas tant d’hi
3062
suffisante. Elle est plus juste, et plus digne de
l’
homme que ces vertus de carnassiers que nous partageons, d’ailleurs ma
3063
nous partageons, d’ailleurs maladroitement, avec
le
tigre et le requin. J’allais conclure : nos rapports avec la nature n
3064
eons, d’ailleurs maladroitement, avec le tigre et
le
requin. J’allais conclure : nos rapports avec la nature ne sont guère
3065
le requin. J’allais conclure : nos rapports avec
la
nature ne sont guère plus satisfaisants que nos rapports avec les hom
3066
nt guère plus satisfaisants que nos rapports avec
les
hommes. Mais attention. C’est uniquement s’il y a dans l’homme une vo
3067
s. Mais attention. C’est uniquement s’il y a dans
l’
homme une vocation surnaturelle, la mission de restaurer l’harmonie pr
3068
s’il y a dans l’homme une vocation surnaturelle,
la
mission de restaurer l’harmonie primitive, que mon scrupule se justif
3069
ne vocation surnaturelle, la mission de restaurer
l’
harmonie primitive, que mon scrupule se justifie : il apparaît alors c
3070
écho, le dernier reproche, la dernière plainte de
la
justice cosmique blessée. Comme une prière muette en moi, toute machi
3071
machinale et tout obscure. 24 mai On dirait que
l’
homme n’est pas fait pour durer : la vie étale nous ennuie, c’est ce q
3072
On dirait que l’homme n’est pas fait pour durer :
la
vie étale nous ennuie, c’est ce qui naît et ce qui meurt qui nous éme
3073
au poulailler. (Nous attendions depuis deux jours
l’
éclosion des œufs.) Il me semble qu’il se passe des choses au fond du
3074
’il se passe des choses au fond du réduit obscur.
La
poule grogne furieusement quand je passe la tête. Je vais chercher un
3075
scur. La poule grogne furieusement quand je passe
la
tête. Je vais chercher une bougie, je réveille ma femme. Nous essayon
3076
réveille ma femme. Nous essayons de soulever par
les
ailes la poule qui fait un caquet déchirant : elle serre entre ses pa
3077
ma femme. Nous essayons de soulever par les ailes
la
poule qui fait un caquet déchirant : elle serre entre ses pattes un œ
3078
ché, palpite au milieu des autres œufs. On entend
le
toc-toc des becs à l’intérieur. Je repose la lourde poule avec précau
3079
des autres œufs. On entend le toc-toc des becs à
l’
intérieur. Je repose la lourde poule avec précaution, craignant qu’ell
3080
tend le toc-toc des becs à l’intérieur. Je repose
la
lourde poule avec précaution, craignant qu’elle n’écrase ses petits :
3081
son aile, fait sortir une coque vide, et reprend,
l’
œil fixe, son travail invisible de mère. C’est beau. C’est fascinant.
3082
inant. C’est grave et mystérieux, pacifiant comme
la
démonstration d’une absolue sagesse à l’œuvre dans cette vie. Il y a
3083
nt comme la démonstration d’une absolue sagesse à
l’
œuvre dans cette vie. Il y a sur toute la terre de ces moments de pure
3084
agesse à l’œuvre dans cette vie. Il y a sur toute
la
terre de ces moments de pureté. Il faut penser à eux quand on juge «
3085
s de pureté. Il faut penser à eux quand on juge «
le
monde »… Nous mangeons les premiers légumes du jardin : salades et ra
3086
emiers légumes du jardin : salades et radis. Pour
les
carottes, il faut encore attendre, et les choux n’ont que quelques fe
3087
s. Pour les carottes, il faut encore attendre, et
les
choux n’ont que quelques feuilles. Mais avec le produit de nos pêches
3088
les choux n’ont que quelques feuilles. Mais avec
le
produit de nos pêches, les bons de pain, le reste du tonneau de vin b
3089
ues feuilles. Mais avec le produit de nos pêches,
les
bons de pain, le reste du tonneau de vin blanc, nous pourrions subsis
3090
avec le produit de nos pêches, les bons de pain,
le
reste du tonneau de vin blanc, nous pourrions subsister sans argent p
3091
re revue de nos possibilités de subsister pendant
les
semaines qui viennent. Articles, zéro. Traductions, zéro. Les chapitr
3092
qui viennent. Articles, zéro. Traductions, zéro.
Les
chapitres du livre en train, non détachables. Un essai philosophique
3093
rain, non détachables. Un essai philosophique sur
la
personne : destiné à une revue non payante. Autres ressources : néant
3094
décidé de réagir. Quand une auto risque de rater
le
tournant emportée par la force centrifuge, il ne faut pas freiner mai
3095
une auto risque de rater le tournant emportée par
la
force centrifuge, il ne faut pas freiner mais peser à fond sur l’accé
3096
uge, il ne faut pas freiner mais peser à fond sur
l’
accélérateur. Je suis allé à A. acheter des cigarettes. Et nous allion
3097
. Et nous allions nous mettre à table pour manger
le
canard des grandes occasions, quand la chose est arrivée. Apportée pa
3098
our manger le canard des grandes occasions, quand
la
chose est arrivée. Apportée par la factrice. Une grosse enveloppe cac
3099
casions, quand la chose est arrivée. Apportée par
la
factrice. Une grosse enveloppe cachetée, venant de l’étranger. En-têt
3100
actrice. Une grosse enveloppe cachetée, venant de
l’
étranger. En-tête d’une fondation littéraire. Il faut d’abord signer,
3101
t un prix. Un prix dont je connaissais tout juste
le
nom. Que je n’aurais jamais eu l’idée de solliciter. Et qui m’est oct
3102
sais tout juste le nom. Que je n’aurais jamais eu
l’
idée de solliciter. Et qui m’est octroyé pour un petit livre paru sans
3103
vre paru sans bruit il y a plus de dix-huit mois.
Les
hommes sont bons, du moins certains d’entre eux. Sur le moment, ce qu
3104
mes sont bons, du moins certains d’entre eux. Sur
le
moment, ce qui m’a le plus frappé c’est que je m’étais fâché hier soi
3105
s certains d’entre eux. Sur le moment, ce qui m’a
le
plus frappé c’est que je m’étais fâché hier soir, et que la Providenc
3106
appé c’est que je m’étais fâché hier soir, et que
la
Providence, évidemment, se payait ma tête. Ensuite j’ai calculé que c
3107
e j’ai calculé que cela nous permettait de passer
l’
été ici sans inquiétude. Ou encore, de le passer ailleurs, sans ennui.
3108
e passer l’été ici sans inquiétude. Ou encore, de
le
passer ailleurs, sans ennui. Cela probablement parce que j’étais à bo
3109
i patte et n’écrivais plus à personne. Je crois à
la
valeur d’appel de l’absence, ou plutôt du retrait. (Il ne faut pas qu
3110
plus à personne. Je crois à la valeur d’appel de
l’
absence, ou plutôt du retrait. (Il ne faut pas que ce soit une feinte,
3111
l faut un véritable non-espoir). Équivalent, pour
la
façon de traiter la vie, de la médecine des homéopathes. 16 juin La
3112
non-espoir). Équivalent, pour la façon de traiter
la
vie, de la médecine des homéopathes. 16 juin La banque d’A. n’est o
3113
. Équivalent, pour la façon de traiter la vie, de
la
médecine des homéopathes. 16 juin La banque d’A. n’est ouverte qu’u
3114
la vie, de la médecine des homéopathes. 16 juin
La
banque d’A. n’est ouverte qu’un jour par semaine. Ce n’est qu’aujourd
3115
i pu aller y négocier mon chèque. J’arrive devant
la
porte où il est écrit : Caisse. Je frappe et entre. Un homme penché v
3116
Caisse. Je frappe et entre. Un homme penché vers
le
guichet parle au gérant. Le gérant me fait un signe, et comme je ne c
3117
Un homme penché vers le guichet parle au gérant.
Le
gérant me fait un signe, et comme je ne comprends pas, il passe sa po
3118
vient me prier à voix basse d’aller attendre dans
la
pièce voisine. J’attends je ne sais combien de temps, je n’ai pas de
3119
e, mais c’est très long. Aucun bruit de voix dans
la
salle de la caisse. Le client est-il sorti ? Quel peut être le motif
3120
t très long. Aucun bruit de voix dans la salle de
la
caisse. Le client est-il sorti ? Quel peut être le motif de cette aud
3121
. Aucun bruit de voix dans la salle de la caisse.
Le
client est-il sorti ? Quel peut être le motif de cette audience privé
3122
a caisse. Le client est-il sorti ? Quel peut être
le
motif de cette audience privée ? Enfin j’entends qu’on sort, et le gé
3123
audience privée ? Enfin j’entends qu’on sort, et
le
gérant vient me chercher. Notre affaire réglée, il croit devoir s’exc
3124
ir s’excuser de m’avoir fait passer à côté tout à
l’
heure. « Vous savez, c’est la coutume, ici ils n’aiment pas qu’il y ai
3125
passer à côté tout à l’heure. « Vous savez, c’est
la
coutume, ici ils n’aiment pas qu’il y ait d’autres personnes dans la
3126
n’aiment pas qu’il y ait d’autres personnes dans
la
salle quand ils payent ou quand ils touchent de l’argent ! C’est qu’i
3127
a salle quand ils payent ou quand ils touchent de
l’
argent ! C’est qu’ils sont très spéciaux les gens d’ici ! Moi je n’y v
3128
ent de l’argent ! C’est qu’ils sont très spéciaux
les
gens d’ici ! Moi je n’y viens qu’une fois par semaine, mais je commen
3129
viens qu’une fois par semaine, mais je commence à
les
connaître. Je pourrais vous en dire. C’est partout différent, pour l’
3130
rrais vous en dire. C’est partout différent, pour
l’
argent. Si vous prenez N. par exemple (la ville prochaine sur le conti
3131
nt, pour l’argent. Si vous prenez N. par exemple (
la
ville prochaine sur le continent) ils n’auraient pas idée de ça, au c
3132
ous prenez N. par exemple (la ville prochaine sur
le
continent) ils n’auraient pas idée de ça, au contraire, ils sont tout
3133
ça, au contraire, ils sont tout fiers de venir à
la
banque. Ici, on a dû faire cette salle d’attente… » Autant que j’en p
3134
e d’attente… » Autant que j’en puis juger d’après
les
propos du gérant, ce n’est pas seulement la crainte, après tout légit
3135
près les propos du gérant, ce n’est pas seulement
la
crainte, après tout légitime, qu’on sache combien ils ont « mis de cô
3136
mbien ils ont « mis de côté », qui peut expliquer
le
comportement des gens d’ici. Il faut admettre que pour eux, une pudeu
3137
tout à fait particulière s’attache au commerce de
l’
argent. 20 juin Les gens. Je feuillette ce journal : voici des sema
3138
ère s’attache au commerce de l’argent. 20 juin
Les
gens. Je feuillette ce journal : voici des semaines qu’il n’y est à p
3139
ini par s’établir entre nous : et il ne reste que
l’
ennui de nos conversations toujours pareilles. Grande différence entre
3140
t adaptés à leur conduite et à leur milieu, comme
les
animaux. Ils ne se posent pas de questions gênantes. Or, c’est mon mé
3141
uand on en est là. Quand on en est à ne plus voir
le
prochain, la situation n’est plus humaine, elle ne pose plus de quest
3142
t là. Quand on en est à ne plus voir le prochain,
la
situation n’est plus humaine, elle ne pose plus de questions utiles.
3143
lle ne pose plus de questions utiles. 2 juillet
La
sécheresse a été la plus forte : malgré nos arrosages, les salades et
3144
questions utiles. 2 juillet La sécheresse a été
la
plus forte : malgré nos arrosages, les salades et les choux sont brûl
3145
resse a été la plus forte : malgré nos arrosages,
les
salades et les choux sont brûlés, la terre se craquèle, ou devient po
3146
plus forte : malgré nos arrosages, les salades et
les
choux sont brûlés, la terre se craquèle, ou devient poussiéreuse. Il
3147
arrosages, les salades et les choux sont brûlés,
la
terre se craquèle, ou devient poussiéreuse. Il n’y a plus que quelque
3148
ux pétales fatigués. — Et nous, nous n’avons plus
la
même patience, depuis qu’il y a de l’argent dans un tiroir. Cela sign
3149
’avons plus la même patience, depuis qu’il y a de
l’
argent dans un tiroir. Cela signifie que j’ai cessé d’être chômeur. Le
3150
oir. Cela signifie que j’ai cessé d’être chômeur.
Le
départ est fixé au 10. Il va falloir vendre la poule noire et les pou
3151
r. Le départ est fixé au 10. Il va falloir vendre
la
poule noire et les poulets encore trop jeunes pour être mangés. Régle
3152
ixé au 10. Il va falloir vendre la poule noire et
les
poulets encore trop jeunes pour être mangés. Régler vingt petites cho
3153
cloué. Il me reste à peu près deux heures, avant
le
départ, pour faire un peu de sentiment sur l’île, et le bilan de l’an
3154
ant le départ, pour faire un peu de sentiment sur
l’
île, et le bilan de l’année écoulée. Bilan. S’installer dans la pauvr
3155
art, pour faire un peu de sentiment sur l’île, et
le
bilan de l’année écoulée. Bilan. S’installer dans la pauvreté comme
3156
ire un peu de sentiment sur l’île, et le bilan de
l’
année écoulée. Bilan. S’installer dans la pauvreté comme dans un cham
3157
ilan de l’année écoulée. Bilan. S’installer dans
la
pauvreté comme dans un champ d’activité nouveau, avec l’ardeur et les
3158
reté comme dans un champ d’activité nouveau, avec
l’
ardeur et les curiosités naïves du débutant, cela suppose beaucoup moi
3159
ans un champ d’activité nouveau, avec l’ardeur et
les
curiosités naïves du débutant, cela suppose beaucoup moins de courage
3160
moins de courage que bien des jeunes bourgeois ne
l’
imaginent : ceux qui voudraient « partir », se « libérer » et qui recu
3161
», se « libérer » et qui reculent pourtant devant
le
saut. Peut-être leur suffirait-il, pour oser, d’une vision précise de
3162
e montrer qu’on peut sortir des villes où se font
les
« carrières » sans sortir de la vie véritable ; et qu’on peut vivre d
3163
illes où se font les « carrières » sans sortir de
la
vie véritable ; et qu’on peut vivre de très peu sans cesser de vivre
3164
ravaille sans fièvre et que je flâne sans vague à
l’
âme. C’est quelque chose. Je ne dis pas que c’est le bonheur, je n’ai
3165
âme. C’est quelque chose. Je ne dis pas que c’est
le
bonheur, je n’ai jamais très bien compris ce mot, que tant de gens in
3166
r de surprises multipliées : peu d’aventures dans
l’
existence d’un homme qui cherche à se posséder plutôt qu’à se fuir dan
3167
ui cherche à se posséder plutôt qu’à se fuir dans
les
hasards. C’est sans doute un effet de la trentaine qui approche : je
3168
ir dans les hasards. C’est sans doute un effet de
la
trentaine qui approche : je n’espère plus, comme à vingt ans, rencont
3169
: je n’espère plus, comme à vingt ans, rencontrer
le
« réel » ou la « vraie vie » dans je ne sais quelle embuscade du dest
3170
lus, comme à vingt ans, rencontrer le « réel » ou
la
« vraie vie » dans je ne sais quelle embuscade du destin, comme qui d
3171
comme qui dirait au coin d’un bois. Je crois que
le
réel est à portée de la main, et n’est que là. Alors il s’agit seulem
3172
n d’un bois. Je crois que le réel est à portée de
la
main, et n’est que là. Alors il s’agit seulement d’assurer la prise d
3173
n’est que là. Alors il s’agit seulement d’assurer
la
prise de cette main. C’est l’affaire d’une patience, ou d’une impatie
3174
seulement d’assurer la prise de cette main. C’est
l’
affaire d’une patience, ou d’une impatience dominée, — et sans doute q
3175
ement. ae. Rougemont Denis de, « N’habitez pas
les
villes (Extrait d’un journal) », La Nouvelle Revue française, Paris,
3176
’habitez pas les villes (Extrait d’un journal) »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, juillet 1937, p. 63-87. af. Il s’ag
3177
Berling, par Selma Lagerlöf (novembre 1937)ag
Le
monde entier connaît la geste de cette communauté de sans-foyers, d’â
3178
rlöf (novembre 1937)ag Le monde entier connaît
la
geste de cette communauté de sans-foyers, d’âmes sauvages et musicien
3179
é de sans-foyers, d’âmes sauvages et musiciennes,
les
douze « Cavaliers » d’Ekeby, qui régnèrent d’un Noël à l’autre sur la
3180
» d’Ekeby, qui régnèrent d’un Noël à l’autre sur
la
province du Warmland, s’étant juré de ne rien accomplir d’utile ni de
3181
e rien accomplir d’utile ni de raisonnable. Voici
l’
histoire, traduite tout entière pour la première fois en France47. Six
3182
fiques, tout cela digne du chef-d’œuvre épique de
la
littérature moderne. Kipling mort, il ne reste que Selma Lagerlöf pou
3183
alices et de profondes audaces. Des histoires que
l’
on croit intégralement parce qu’elles nous sont données pour ce qu’ell
3184
e « défense d’inventer », s’épuisent à rechercher
le
vraisemblable, en même temps que l’exceptionnel. Pour faire vrai, ils
3185
à rechercher le vraisemblable, en même temps que
l’
exceptionnel. Pour faire vrai, ils imitent la vie. Mais la vie est tou
3186
que l’exceptionnel. Pour faire vrai, ils imitent
la
vie. Mais la vie est toujours ailleurs, en train de s’inventer différ
3187
ionnel. Pour faire vrai, ils imitent la vie. Mais
la
vie est toujours ailleurs, en train de s’inventer différente. Elle n’
3188
’elle et qui n’en fait qu’à ses façons. Elle aime
les
grands rhétoriciens de l’imagination fabulatrice. Elle se précipite a
3189
ses façons. Elle aime les grands rhétoriciens de
l’
imagination fabulatrice. Elle se précipite avec fougue dans leurs pièg
3190
. Elle se précipite avec fougue dans leurs pièges
les
plus évidents. Elle adore se laisser attraper dans les figures qu’une
3191
lus évidents. Elle adore se laisser attraper dans
les
figures qu’une Lagerlöf s’amuse à rajeunir tour à tour : une au moins
3192
r : une au moins par chapitre48, et à chaque fois
le
coup est bon. Vous partez en pleine convention romantique, populaire
3193
mantique, populaire carte postale. Mais voici que
la
vie s’y prend, fait sauter le cadre, envahit tout à grands bonds émou
3194
ale. Mais voici que la vie s’y prend, fait sauter
le
cadre, envahit tout à grands bonds émouvants, et l’auteur s’esquive p
3195
cadre, envahit tout à grands bonds émouvants, et
l’
auteur s’esquive prestement avec une bonne espièglerie, pour vous lais
3196
baroque, impertinent et emphatique du mot — dans
la
virtuosité et les malices de ce génie de la fable nordique. Lagerlöf
3197
nent et emphatique du mot — dans la virtuosité et
les
malices de ce génie de la fable nordique. Lagerlöf ou la gloire de co
3198
dans la virtuosité et les malices de ce génie de
la
fable nordique. Lagerlöf ou la gloire de conter ! Jusqu’au moment où
3199
ces de ce génie de la fable nordique. Lagerlöf ou
la
gloire de conter ! Jusqu’au moment où l’imagination, ranimant les gra
3200
erlöf ou la gloire de conter ! Jusqu’au moment où
l’
imagination, ranimant les grands rythmes naturels, libérant les vertus
3201
nter ! Jusqu’au moment où l’imagination, ranimant
les
grands rythmes naturels, libérant les vertus et les vices des entrave
3202
n, ranimant les grands rythmes naturels, libérant
les
vertus et les vices des entraves du respect humain, nous jette dans l
3203
s grands rythmes naturels, libérant les vertus et
les
vices des entraves du respect humain, nous jette dans le grand jeu du
3204
s des entraves du respect humain, nous jette dans
le
grand jeu du péché et de la grâce, et se confond avec la Charité. Ima
3205
main, nous jette dans le grand jeu du péché et de
la
grâce, et se confond avec la Charité. Imaginer, à ce degré, c’est déj
3206
d jeu du péché et de la grâce, et se confond avec
la
Charité. Imaginer, à ce degré, c’est déjà presque pardonner au monde.
3207
gré, c’est déjà presque pardonner au monde. C’est
le
placer sous la lumière fantastique de la Promesse, au point où tout s
3208
presque pardonner au monde. C’est le placer sous
la
lumière fantastique de la Promesse, au point où tout se renverse, où
3209
e. C’est le placer sous la lumière fantastique de
la
Promesse, au point où tout se renverse, où le ciel s’ouvre sur le châ
3210
de la Promesse, au point où tout se renverse, où
le
ciel s’ouvre sur le châtiment, où le démon découvre que son œuvre a l
3211
point où tout se renverse, où le ciel s’ouvre sur
le
châtiment, où le démon découvre que son œuvre a libéré les hommes de
3212
renverse, où le ciel s’ouvre sur le châtiment, où
le
démon découvre que son œuvre a libéré les hommes de leur bonheur, et
3213
ment, où le démon découvre que son œuvre a libéré
les
hommes de leur bonheur, et la vie de l’obsession de vivre. Cette anné
3214
son œuvre a libéré les hommes de leur bonheur, et
la
vie de l’obsession de vivre. Cette année folle, inaugurée par un trai
3215
a libéré les hommes de leur bonheur, et la vie de
l’
obsession de vivre. Cette année folle, inaugurée par un traité avec le
3216
. Cette année folle, inaugurée par un traité avec
le
diable, vient mourir dans la nuit de Noël au rythme familier des mart
3217
e par un traité avec le diable, vient mourir dans
la
nuit de Noël au rythme familier des marteaux de la forge rebâtie. Les
3218
a nuit de Noël au rythme familier des marteaux de
la
forge rebâtie. Les Cavaliers, « appelés à faire vivre la joie dans le
3219
rythme familier des marteaux de la forge rebâtie.
Les
Cavaliers, « appelés à faire vivre la joie dans le pays du fer, à l’é
3220
e rebâtie. Les Cavaliers, « appelés à faire vivre
la
joie dans le pays du fer, à l’époque du fer » nous ont appris à leur
3221
s Cavaliers, « appelés à faire vivre la joie dans
le
pays du fer, à l’époque du fer » nous ont appris à leur façon « les r
3222
elés à faire vivre la joie dans le pays du fer, à
l’
époque du fer » nous ont appris à leur façon « les riches alternances
3223
l’époque du fer » nous ont appris à leur façon «
les
riches alternances de la vie ». Mais c’est aussi au peuple entier qu’
3224
t appris à leur façon « les riches alternances de
la
vie ». Mais c’est aussi au peuple entier qu’ils ont appris sa gloire
3225
romances et ses idylles d’une pureté dramatique.
Les
forges, les charrois de minerai, le trafic des chalands, l’économie a
3226
ses idylles d’une pureté dramatique. Les forges,
les
charrois de minerai, le trafic des chalands, l’économie agraire, tout
3227
dramatique. Les forges, les charrois de minerai,
le
trafic des chalands, l’économie agraire, tout cela ne joue pas un moi
3228
les charrois de minerai, le trafic des chalands,
l’
économie agraire, tout cela ne joue pas un moindre rôle que la nature,
3229
graire, tout cela ne joue pas un moindre rôle que
la
nature, les ours et les trolls des forêts, dans les exploits des Cava
3230
t cela ne joue pas un moindre rôle que la nature,
les
ours et les trolls des forêts, dans les exploits des Cavaliers. Ce n’
3231
ue pas un moindre rôle que la nature, les ours et
les
trolls des forêts, dans les exploits des Cavaliers. Ce n’est pas du r
3232
a nature, les ours et les trolls des forêts, dans
les
exploits des Cavaliers. Ce n’est pas du réalisme socialiste, c’est la
3233
liers. Ce n’est pas du réalisme socialiste, c’est
la
réalité sociale plus toutes les autres. Et l’amour d’une femme pour s
3234
socialiste, c’est la réalité sociale plus toutes
les
autres. Et l’amour d’une femme pour son peuple, au lieu de ces vantar
3235
est la réalité sociale plus toutes les autres. Et
l’
amour d’une femme pour son peuple, au lieu de ces vantardises en servi
3236
arnikis plus ou moins décorés. Selma Lagerlöf est
la
seule femme de la littérature européenne dont le génie ait eu la forc
3237
ins décorés. Selma Lagerlöf est la seule femme de
la
littérature européenne dont le génie ait eu la force de recréer un pa
3238
la seule femme de la littérature européenne dont
le
génie ait eu la force de recréer un pays tout entier, avec ses classe
3239
de la littérature européenne dont le génie ait eu
la
force de recréer un pays tout entier, avec ses classes et ses institu
3240
histoire, sa morale et sa foi. On peut penser que
l’
inscription qu’on lit au Pavillon de la Suède éclaire à sa façon les a
3241
penser que l’inscription qu’on lit au Pavillon de
la
Suède éclaire à sa façon les arrière-plans de ce miracle : « Il y a m
3242
on lit au Pavillon de la Suède éclaire à sa façon
les
arrière-plans de ce miracle : « Il y a mille ans que le peuple suédoi
3243
ière-plans de ce miracle : « Il y a mille ans que
le
peuple suédois est son propre maître. Tous les Suédois, hommes et fem
3244
que le peuple suédois est son propre maître. Tous
les
Suédois, hommes et femmes, jouissent des mêmes droits politiques. »
3245
issait jusqu’ici qu’une adaptation abrégée, selon
la
coutume détestable qu’appuient nos préjugés classiques et les problém
3246
détestable qu’appuient nos préjugés classiques et
les
problématiques nécessités du commerce le plus mal compris. 48. Descr
3247
ques et les problématiques nécessités du commerce
le
plus mal compris. 48. Descriptions, rétrospections, coups de théâtre
3248
s, coïncidences, catastrophes naturelles, et tous
les
emplois de la fable suédoise : trolls, sorcières, belles jeunes fille
3249
, catastrophes naturelles, et tous les emplois de
la
fable suédoise : trolls, sorcières, belles jeunes filles courtisées p
3250
[Compte rendu] Selma Lagerlöf, Gösta Berling »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, novembre 1937, p. 857-859.
3251
écrivait récemment qu’il faut se garder d’engager
la
raison dans une aventure — la vie — « où elle ne peut qu’être outragé
3252
se garder d’engager la raison dans une aventure —
la
vie — « où elle ne peut qu’être outragée » (car la vie est irrationne
3253
a vie — « où elle ne peut qu’être outragée » (car
la
vie est irrationnelle). D’autres clercs, conséquents, ne manqueront p
3254
prudents, ils feront bien de s’y comporter selon
les
usages du forum, et de crier avec les loups. « Préservant » ainsi la
3255
orter selon les usages du forum, et de crier avec
les
loups. « Préservant » ainsi la raison, autant que leur sécurité. On t
3256
et de crier avec les loups. « Préservant » ainsi
la
raison, autant que leur sécurité. On trouve dans la Logique de Port-R
3257
raison, autant que leur sécurité. On trouve dans
la
Logique de Port-Royal, un dilemme assez comparable, « par lequel un a
3258
it qu’on ne se devait point mêler des affaires de
la
République. Si on y agit bien — disait-il — on offensera les dieux ;
3259
que. Si on y agit bien — disait-il — on offensera
les
dieux ; donc on ne s’en doit point mêler. » Mais Aristote témoigne qu
3260
e qu’on lui répondit : « Si on s’y gouverne selon
les
règles corrompues des hommes, on contentera les hommes. Si on y garde
3261
n les règles corrompues des hommes, on contentera
les
hommes. Si on y garde la vraie justice, on contentera les dieux. Donc
3262
s hommes, on contentera les hommes. Si on y garde
la
vraie justice, on contentera les dieux. Donc on s’en doit mêler. » La
3263
es. Si on y garde la vraie justice, on contentera
les
dieux. Donc on s’en doit mêler. » La Logique observe à propos du prem
3264
contentera les dieux. Donc on s’en doit mêler. »
La
Logique observe à propos du premier dilemme — ou sophisme — « qu’il n
3265
sophisme — « qu’il n’est point fâcheux d’offenser
les
hommes, quand on ne le peut éviter qu’en offensant Dieu ». Et au suje
3266
point fâcheux d’offenser les hommes, quand on ne
le
peut éviter qu’en offensant Dieu ». Et au sujet du second : « qu’il n
3267
econd : « qu’il n’est pas avantageux de contenter
les
hommes en offensant Dieu ». J’en conclus qu’il est bon d’engager la r
3268
sant Dieu ». J’en conclus qu’il est bon d’engager
la
raison dans la vie : non point pour qu’elle y reçoive des outrages, m
3269
en conclus qu’il est bon d’engager la raison dans
la
vie : non point pour qu’elle y reçoive des outrages, mais pour qu’ell
3270
besoin. Que cela n’aille pas sans risques, c’est
l’
évidence. Mais il s’agit de savoir ce que l’on révère, de la vérité ou
3271
c’est l’évidence. Mais il s’agit de savoir ce que
l’
on révère, de la vérité ou de la sécurité. Ce serait une raison bien d
3272
. Mais il s’agit de savoir ce que l’on révère, de
la
vérité ou de la sécurité. Ce serait une raison bien débile, qui n’ose
3273
de savoir ce que l’on révère, de la vérité ou de
la
sécurité. Ce serait une raison bien débile, qui n’oserait s’exercer q
3274
l y a quelque part du rationnel (que ce soit dans
le
monde ou dans l’esprit) c’est que la raison s’est bel et bien risquée
3275
t du rationnel (que ce soit dans le monde ou dans
l’
esprit) c’est que la raison s’est bel et bien risquée et se risque enc
3276
ce soit dans le monde ou dans l’esprit) c’est que
la
raison s’est bel et bien risquée et se risque encore dans le chaos, e
3277
’est bel et bien risquée et se risque encore dans
le
chaos, et qu’elle a su y prévaloir sur quelques points. On ne voit pa
3278
pourquoi il faudrait s’arrêter. Et même, à faire
le
petit rentier du rationnel, on court le risque le plus onéreux : celu
3279
, à faire le petit rentier du rationnel, on court
le
risque le plus onéreux : celui de laisser perdre le peu qui fut gagné
3280
le petit rentier du rationnel, on court le risque
le
plus onéreux : celui de laisser perdre le peu qui fut gagné par d’aut
3281
risque le plus onéreux : celui de laisser perdre
le
peu qui fut gagné par d’autres, et dont on vit. ah. Rougemont Deni
3282
Denis de, « Au dossier d’une vieille querelle »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, novembre 1937, p. 873-874.
3283
Le
Monastère noir, par Aladár Kuncz (janvier 1938)ai Professeur, écri
3284
écrivain, traducteur d’ouvrages français, ami de
la
France, séjournant en France, Aladár Kuncz, sujet hongrois, se voit a
3285
se voit arrêté à Paris dès les premiers jours de
la
guerre. On l’envoie dans un camp à Perpignan. De là au « monastère no
3286
é à Paris dès les premiers jours de la guerre. On
l’
envoie dans un camp à Perpignan. De là au « monastère noir », la forte
3287
un camp à Perpignan. De là au « monastère noir »,
la
forteresse de Noirmoutier, puis à l’île d’Yeu. Il ne sera libéré qu’a
3288
tère noir », la forteresse de Noirmoutier, puis à
l’
île d’Yeu. Il ne sera libéré qu’après cinq ans de captivité, durant le
3289
cinq ans de captivité, durant lesquels il subira
les
manifestations, inépuisables d’imprévu, du patriotisme de l’arrière.
3290
ations, inépuisables d’imprévu, du patriotisme de
l’
arrière. Et voici le journal de cet intellectuel jeté dans un cul de b
3291
d’imprévu, du patriotisme de l’arrière. Et voici
le
journal de cet intellectuel jeté dans un cul de bassefosse par le jeu
3292
t intellectuel jeté dans un cul de bassefosse par
le
jeu de l’état civil. Qu’il ne s’y mêle aucune trace de hargne, c’est
3293
tuel jeté dans un cul de bassefosse par le jeu de
l’
état civil. Qu’il ne s’y mêle aucune trace de hargne, c’est un miracle
3294
ucune trace de hargne, c’est un miracle qui défie
l’
époque. M. de Lacretelle, dans sa préface, déclare fort justement qu’i
3295
Vous en ferez tous autant en lisant ce livre, en
le
faisant lire. Et vous ferez quelque chose contre la guerre, ne fût-ce
3296
faisant lire. Et vous ferez quelque chose contre
la
guerre, ne fût-ce que de la connaître mieux. Peut-être même prendrez-
3297
quelque chose contre la guerre, ne fût-ce que de
la
connaître mieux. Peut-être même prendrez-vous conscience d’une menace
3298
rale encore, qui concerne chacun de nous, et dont
l’
internement de guerre n’est qu’une conséquence entre mille, d’une viru
3299
ais au moins déclarée. Je veux parler du mythe de
l’
arrestation, de la psychose créée dans le monde actuel par ce phénomèn
3300
rée. Je veux parler du mythe de l’arrestation, de
la
psychose créée dans le monde actuel par ce phénomène multiforme, insa
3301
mythe de l’arrestation, de la psychose créée dans
le
monde actuel par ce phénomène multiforme, insaisissable et saisissant
3302
isons » collectives et obscures. Il me paraît que
le
livre de Kuncz tire son tragique le plus secret du fait qu’il symboli
3303
me paraît que le livre de Kuncz tire son tragique
le
plus secret du fait qu’il symbolise, illustre et concrétise une condi
3304
soumis aux lois d’une collectivité délirante. Sur
la
foi d’affiches officielles promettant aux internés une libération rap
3305
ut placés pour leur faire part de son état : mais
les
lettres n’arrivent jamais, ou demeurent sans réponse. Le courrier qu’
3306
res n’arrivent jamais, ou demeurent sans réponse.
Le
courrier qu’on lui adresse est retenu par les intendants, les paquets
3307
nse. Le courrier qu’on lui adresse est retenu par
les
intendants, les paquets vidés. Le régime disciplinaire est aggravé de
3308
qu’on lui adresse est retenu par les intendants,
les
paquets vidés. Le régime disciplinaire est aggravé de temps à autre,
3309
est retenu par les intendants, les paquets vidés.
Le
régime disciplinaire est aggravé de temps à autre, on ne sait pourquo
3310
e sait pourquoi, « par représailles ». Puis c’est
le
départ brusqué « pour X… ». Ni raisons ni points de repère : c’est la
3311
pour X… ». Ni raisons ni points de repère : c’est
la
guerre. C’est un mot sacré. C’est quelque chose qui se passe très loi
3312
souffre, mais dont on ne sait rien de précis, ni
l’
enjeu ni les causes véritables. Il ne reste que l’obscure certitude, a
3313
ais dont on ne sait rien de précis, ni l’enjeu ni
les
causes véritables. Il ne reste que l’obscure certitude, angoissante,
3314
l’enjeu ni les causes véritables. Il ne reste que
l’
obscure certitude, angoissante, que cette guerre « se fait toute seule
3315
elle. Comment ne point songer au Procès de Kafka,
la
plus géniale description du mythe de l’arrestationaj. On se rappelle
3316
de Kafka, la plus géniale description du mythe de
l’
arrestationaj. On se rappelle que c’était l’histoire d’un homme qui se
3317
he de l’arrestationaj. On se rappelle que c’était
l’
histoire d’un homme qui se voit inculpé, par une justice inaccessible,
3318
une signification théologique. Mais ce n’est pas
la
seule possible. Il y a aussi dans ce livre une parabole de l’homme tr
3319
sible. Il y a aussi dans ce livre une parabole de
l’
homme traqué par les tyrannies anonymes qui se multiplient dans notre
3320
dans ce livre une parabole de l’homme traqué par
les
tyrannies anonymes qui se multiplient dans notre siècle49, et tendent
3321
à faire du moindre d’entre nous un prévenu. C’est
le
cauchemar du xxe siècle. Le triomphe de l’État sur l’homme. D’ailleu
3322
us un prévenu. C’est le cauchemar du xxe siècle.
Le
triomphe de l’État sur l’homme. D’ailleurs on peut aussi ne rien voir
3323
C’est le cauchemar du xxe siècle. Le triomphe de
l’
État sur l’homme. D’ailleurs on peut aussi ne rien voir de tout cela d
3324
uchemar du xxe siècle. Le triomphe de l’État sur
l’
homme. D’ailleurs on peut aussi ne rien voir de tout cela dans le livr
3325
eurs on peut aussi ne rien voir de tout cela dans
le
livre de Kuncz : il nous apporte un document bien assez émouvant comm
3326
rte un document bien assez émouvant comme tel. Et
la
preuve, une fois de plus, que l’homme moderne ne se connaît jamais mi
3327
nt comme tel. Et la preuve, une fois de plus, que
l’
homme moderne ne se connaît jamais mieux qu’à la faveur de circonstanc
3328
e l’homme moderne ne se connaît jamais mieux qu’à
la
faveur de circonstances brutales, qui le rabattent à l’élémentaire.
3329
eux qu’à la faveur de circonstances brutales, qui
le
rabattent à l’élémentaire. 49. Police d’État, polices privées, doua
3330
eur de circonstances brutales, qui le rabattent à
l’
élémentaire. 49. Police d’État, polices privées, douaniers, passepor
3331
ougemont Denis de, « [Compte rendu] Aladár Kuncz,
Le
Monastère noir », La Nouvelle Revue française, Paris, janvier 1938,
3332
Compte rendu] Aladár Kuncz, Le Monastère noir »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, janvier 1938, p. 145-146. aj. Rouge
3333
p. 145-146. aj. Rougemont en a rendu compte dans
le
numéro de mai 1934 de la NRF : « Le Procès, par Franz Kafka, traduit
3334
t en a rendu compte dans le numéro de mai 1934 de
la
NRF : « Le Procès, par Franz Kafka, traduit par A. Vialatte (Gallima
3335
compte dans le numéro de mai 1934 de la NRF : «
Le
Procès, par Franz Kafka, traduit par A. Vialatte (Gallimard) ».
3336
qua et termina ses jours à Sainte-Hélène. Tel est
le
sujet. En somme, mettant un signe plus là où l’Histoire met un signe
3337
t le sujet. En somme, mettant un signe plus là où
l’
Histoire met un signe moins, l’auteur annule le facteur Waterloo, et n
3338
n signe plus là où l’Histoire met un signe moins,
l’
auteur annule le facteur Waterloo, et nous démontre que l’équation Nap
3339
où l’Histoire met un signe moins, l’auteur annule
le
facteur Waterloo, et nous démontre que l’équation Napoléon n’en doit
3340
annule le facteur Waterloo, et nous démontre que
l’
équation Napoléon n’en doit pas moins avoir pour second membre l’abdic
3341
léon n’en doit pas moins avoir pour second membre
l’
abdication. Il y a sans doute une théorie de l’Histoire à l’origine de
3342
re l’abdication. Il y a sans doute une théorie de
l’
Histoire à l’origine de cet ouvrage d’une passionnante ambiguïté, et q
3343
on. Il y a sans doute une théorie de l’Histoire à
l’
origine de cet ouvrage d’une passionnante ambiguïté, et qui se donne l
3344
age d’une passionnante ambiguïté, et qui se donne
l’
air d’une « fantaisie ». Prenons ce mot au sens allemand : une « imagi
3345
in des conséquences fausses de faits « prouvés ».
La
thèse peut se discuter. L’illustration m’en paraît convaincante. « Le
3346
de faits « prouvés ». La thèse peut se discuter.
L’
illustration m’en paraît convaincante. « Le grand étonnement que peut
3347
cuter. L’illustration m’en paraît convaincante. «
Le
grand étonnement que peut provoquer ce livre, dit la préface, est que
3348
grand étonnement que peut provoquer ce livre, dit
la
préface, est que pour transformer une défaite en victoire et une abdi
3349
ger et si peu imaginer. Il faut vraiment que dans
l’
histoire des hommes les faits interviennent moins qu’on ne croit commu
3350
. Il faut vraiment que dans l’histoire des hommes
les
faits interviennent moins qu’on ne croit communément. Il faut vraimen
3351
stinée, et non pas devant Blücher, ce hasard, que
l’
empereur devait succomber. Mais pourquoi cette victoire à Waterloo ? P
3352
oo ? Parce qu’au cours des journées qui précèdent
la
bataille, Napoléon a découvert la vie concrète d’un pays et des êtres
3353
s qui précèdent la bataille, Napoléon a découvert
la
vie concrète d’un pays et des êtres dont c’est la patrie. Il a conçu
3354
la vie concrète d’un pays et des êtres dont c’est
la
patrie. Il a conçu les premiers doutes humains sur la réalité de son
3355
atrie. Il a conçu les premiers doutes humains sur
la
réalité de son empire, sur son pouvoir abstrait et sa démesure géomét
3356
étrique. Et revenant à ses origines, au moment où
le
sort de la bataille vacille, il a retrouvé soudain le cri de la Révol
3357
revenant à ses origines, au moment où le sort de
la
bataille vacille, il a retrouvé soudain le cri de la Révolution : Viv
3358
ort de la bataille vacille, il a retrouvé soudain
le
cri de la Révolution : Vive la Nation ! Or ce cri qui lui donne la vi
3359
bataille vacille, il a retrouvé soudain le cri de
la
Révolution : Vive la Nation ! Or ce cri qui lui donne la victoire le
3360
a retrouvé soudain le cri de la Révolution : Vive
la
Nation ! Or ce cri qui lui donne la victoire le condamne. Je simplifi
3361
lution : Vive la Nation ! Or ce cri qui lui donne
la
victoire le condamne. Je simplifie encore la thèse : Napoléon gagne W
3362
e la Nation ! Or ce cri qui lui donne la victoire
le
condamne. Je simplifie encore la thèse : Napoléon gagne Waterloo parc
3363
onne la victoire le condamne. Je simplifie encore
la
thèse : Napoléon gagne Waterloo parce qu’il retrouve le « personnalis
3364
se : Napoléon gagne Waterloo parce qu’il retrouve
le
« personnalisme » mais cela même dénonce son pouvoir, préfiguration d
3365
s. (Lui aussi fut trois fois plébiscité !) Devant
les
Chambres, il s’écriera : « Prenez conscience, Messieurs, que depuis v
3366
pas été capables de fédérer nos communes. » Voilà
l’
épigraphe de l’ouvrage, qui par ailleurs compose bien d’autres thèmes
3367
s de fédérer nos communes. » Voilà l’épigraphe de
l’
ouvrage, qui par ailleurs compose bien d’autres thèmes : celui des île
3368
e bien d’autres thèmes : celui des îles, celui de
la
patrie perdue que Bonaparte cherche à se recréer, celui du schizophrè
3369
he à se recréer, celui du schizophrène qui « perd
le
sentiment », celui d’une société qu’il faut bâtir « à hauteur d’homme
3370
ur d’idéologies. Peut-être ai-je trop insisté sur
l’
actualité politique de cette méditation personnaliste. Car après tout,
3371
t, c’est une histoire, un des meilleurs romans de
l’
année, et qui se fait lire avec le plus constant plaisir, d’autant que
3372
leurs romans de l’année, et qui se fait lire avec
le
plus constant plaisir, d’autant que l’on pouvait redouter l’agacement
3373
lire avec le plus constant plaisir, d’autant que
l’
on pouvait redouter l’agacement de la facilité, le même que donne la l
3374
stant plaisir, d’autant que l’on pouvait redouter
l’
agacement de la facilité, le même que donne la lecture de romans d’ant
3375
d’autant que l’on pouvait redouter l’agacement de
la
facilité, le même que donne la lecture de romans d’anticipation. Il y
3376
l’on pouvait redouter l’agacement de la facilité,
le
même que donne la lecture de romans d’anticipation. Il y a bien plus
3377
ter l’agacement de la facilité, le même que donne
la
lecture de romans d’anticipation. Il y a bien plus que de l’ingéniosi
3378
de romans d’anticipation. Il y a bien plus que de
l’
ingéniosité dans ce livre : un sens de l’homme et des limites de sa gr
3379
s que de l’ingéniosité dans ce livre : un sens de
l’
homme et des limites de sa grandeur, un sens de l’humour du destin, un
3380
l’homme et des limites de sa grandeur, un sens de
l’
humour du destin, une vraie poésie de l’Histoire, libératrice et excit
3381
n sens de l’humour du destin, une vraie poésie de
l’
Histoire, libératrice et excitante pour l’esprit. À peine l’a-t-on fin
3382
ésie de l’Histoire, libératrice et excitante pour
l’
esprit. À peine l’a-t-on fini qu’on se jette sur Sorel, sur Madelin et
3383
, libératrice et excitante pour l’esprit. À peine
l’
a-t-on fini qu’on se jette sur Sorel, sur Madelin et sur Aubry, pour l
3384
Aubry, pour leur arracher des aveux à l’appui de
la
thèse d’Aron. 50. Jean-Paul rapporte un rêve où il disait à Napoléo
3385
ompte rendu] Robert Aron, Victoire à Waterloo »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, février 1938, p. 313-314.
3386
Est-il possible d’indiquer une raison simple de
l’
échec du Front populaire ? La psychanalyse nous propose un type d’expl
3387
une raison simple de l’échec du Front populaire ?
La
psychanalyse nous propose un type d’explication qui me paraît bien te
3388
d’explication qui me paraît bien tentant : c’est
le
mécanisme du « refoulement » d’où procèdent les « actes manqués ». S’
3389
st le mécanisme du « refoulement » d’où procèdent
les
« actes manqués ». S’il y a eu « expérience Blum », elle a consisté à
3390
u « expérience Blum », elle a consisté à empêcher
la
révolution. Juin 1936 était un espoir que les accords Matignon trompè
3391
cher la révolution. Juin 1936 était un espoir que
les
accords Matignon trompèrent. C’est tout ce que l’Histoire retiendra.
3392
es accords Matignon trompèrent. C’est tout ce que
l’
Histoire retiendra. Ce fait initial a déterminé la courbe de l’expérie
3393
l’Histoire retiendra. Ce fait initial a déterminé
la
courbe de l’expérience : il s’agissait d’affirmer une mystique, mais
3394
tiendra. Ce fait initial a déterminé la courbe de
l’
expérience : il s’agissait d’affirmer une mystique, mais de ne faire q
3395
ait d’affirmer une mystique, mais de ne faire que
les
réformes qu’imposait la pression des « masses ». Dans une telle situa
3396
ue, mais de ne faire que les réformes qu’imposait
la
pression des « masses ». Dans une telle situation historique, les réf
3397
« masses ». Dans une telle situation historique,
les
réformes vont toujours à l’encontre des buts allégués. Chacun sent tr
3398
lissement du sens civique tellement frappant dans
la
France actuelle. (Au moins dans celle qui se manifeste.) Et les réfor
3399
uelle. (Au moins dans celle qui se manifeste.) Et
les
réformes obtenues apparaissent comme les résultantes de deux lâchetés
3400
ste.) Et les réformes obtenues apparaissent comme
les
résultantes de deux lâchetés, non de deux volontés. Or, quand le sens
3401
de deux lâchetés, non de deux volontés. Or, quand
le
sens civique fléchit, c’est-à-dire quand chacun veut avoir plus qu’il
3402
e de faire aboutir des réformes. Mais personne ne
la
prépare. M. Staline a d’autres plans, et Ce soir a d’autres vertus. S
3403
ée, donc sanglante, donc destinée à se figer dans
le
rictus d’une dictature. Tout le monde le sent, tout le monde le crain
3404
ger dans le rictus d’une dictature. Tout le monde
le
sent, tout le monde le craint — et le désire sans se l’avouer. Voilà
3405
e dictature. Tout le monde le sent, tout le monde
le
craint — et le désire sans se l’avouer. Voilà pourquoi personne ne bo
3406
ut le monde le sent, tout le monde le craint — et
le
désire sans se l’avouer. Voilà pourquoi personne ne bouge. C’est effr
3407
t, tout le monde le craint — et le désire sans se
l’
avouer. Voilà pourquoi personne ne bouge. C’est effrayant, cette immob
3408
e bouge. C’est effrayant, cette immobilité devant
le
péril. La dictature fascine les masses, et les élites. Sous prétexte
3409
’est effrayant, cette immobilité devant le péril.
La
dictature fascine les masses, et les élites. Sous prétexte de lui rés
3410
immobilité devant le péril. La dictature fascine
les
masses, et les élites. Sous prétexte de lui résister, les voilà qui d
3411
ant le péril. La dictature fascine les masses, et
les
élites. Sous prétexte de lui résister, les voilà qui d’elles-mêmes se
3412
es, et les élites. Sous prétexte de lui résister,
les
voilà qui d’elles-mêmes se mettent en rang, lèvent le poing, acclamen
3413
oilà qui d’elles-mêmes se mettent en rang, lèvent
le
poing, acclament des caporaux. Ainsi l’Autriche fascinée s’est jetée
3414
g, lèvent le poing, acclament des caporaux. Ainsi
l’
Autriche fascinée s’est jetée dans la gueule du dragon, après avoir tr
3415
oraux. Ainsi l’Autriche fascinée s’est jetée dans
la
gueule du dragon, après avoir trompé et désarmé la résistance proléta
3416
a gueule du dragon, après avoir trompé et désarmé
la
résistance prolétarienne. On a refoulé dès sa naissance la révolution
3417
ance prolétarienne. On a refoulé dès sa naissance
la
révolution de 36. D’où le « complexe » qui s’est noué. Complexe fasci
3418
efoulé dès sa naissance la révolution de 36. D’où
le
« complexe » qui s’est noué. Complexe fasciste, avoué sous le nom d’a
3419
e » qui s’est noué. Complexe fasciste, avoué sous
le
nom d’antifascisme, c’est normal. On n’arrête pas une révolution lors
3420
e révolution lorsqu’elle est nécessaire, et c’est
le
cas. Mais il arrive qu’on la dénature en la refoulant trop longtemps.
3421
nécessaire, et c’est le cas. Mais il arrive qu’on
la
dénature en la refoulant trop longtemps. Elle cherche alors d’autres
3422
c’est le cas. Mais il arrive qu’on la dénature en
la
refoulant trop longtemps. Elle cherche alors d’autres voies, et les t
3423
longtemps. Elle cherche alors d’autres voies, et
les
trouve. Encore un peu de mystique Front populaire, encore quelques ré
3424
à contre-fins, quelques crises gouvernementales,
la
livre à 600, le chômage ; — et le premier dictateur venu tirera les c
3425
quelques crises gouvernementales, la livre à 600,
le
chômage ; — et le premier dictateur venu tirera les conclusions logiq
3426
e chômage ; — et le premier dictateur venu tirera
les
conclusions logiques. Sera-t-il Français ? Je voudrais me tromper, cr
3427
Rougemont Denis de, « Une révolution refoulée »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, juillet 1938, p. 158-159.
3428
merveilles, par Lewis Carroll (août 1938)am Si
l’
on songe que le conte est par essence un récit cocasse et en quelque m
3429
Lewis Carroll (août 1938)am Si l’on songe que
le
conte est par essence un récit cocasse et en quelque manière libérate
3430
et en quelque manière libérateur, on conçoit que
les
meilleurs sujets de contes sont les plus abstraitement logiques. La l
3431
n conçoit que les meilleurs sujets de contes sont
les
plus abstraitement logiques. La logique enfantine est bien plus proch
3432
s de contes sont les plus abstraitement logiques.
La
logique enfantine est bien plus proche du raisonnement mathématique q
3433
n plus proche du raisonnement mathématique que de
la
raison avertie, donc impure. Elle opère en toute liberté sur un nombr
3434
ombre restreint de données qu’elle considère dans
l’
absolu, et elle en tire des déductions exactes, qui se trouvent par là
3435
s exactes, qui se trouvent par là même contredire
l’
expérience vécue et les règles sociales. D’où le cocasse et le sentime
3436
vent par là même contredire l’expérience vécue et
les
règles sociales. D’où le cocasse et le sentiment de libération. En ou
3437
e l’expérience vécue et les règles sociales. D’où
le
cocasse et le sentiment de libération. En outre, quoi de plus importa
3438
vécue et les règles sociales. D’où le cocasse et
le
sentiment de libération. En outre, quoi de plus important pour un enf
3439
outre, quoi de plus important pour un enfant que
la
comparaison des grandeurs — « plus grand que » et « plus petit que »
3440
rand que » et « plus petit que » —, qui est aussi
le
fondement de toute mathématique. Ces remarques peuvent nous orienter
3441
hématicien —, et d’Alice en particulier. On dit à
l’
enfant : mange ta soupe et tu deviendras grand. Donc il peut exister d
3442
onc il peut exister des aliments qui produiraient
l’
effet inverse ? Et l’imagination peut aisément accélérer ces deux effe
3443
es aliments qui produiraient l’effet inverse ? Et
l’
imagination peut aisément accélérer ces deux effets. Qu’en résultera-t
3444
accélérer ces deux effets. Qu’en résultera-t-il ?
Le
rêve logique qu’est le conte de Carroll nous apparaît alors comme une
3445
ts. Qu’en résultera-t-il ? Le rêve logique qu’est
le
conte de Carroll nous apparaît alors comme une série de variations su
3446
apparaît alors comme une série de variations sur
le
thème de la relativité dans l’espace et le temps. Tantôt géante et ta
3447
ors comme une série de variations sur le thème de
la
relativité dans l’espace et le temps. Tantôt géante et tantôt naine,
3448
de variations sur le thème de la relativité dans
l’
espace et le temps. Tantôt géante et tantôt naine, Alice expérimente c
3449
ns sur le thème de la relativité dans l’espace et
le
temps. Tantôt géante et tantôt naine, Alice expérimente chaque fois u
3450
e fois elle se sent plus forte ou plus faible que
les
règles sociales admises. Supposées « justes » pour le niveau « normal
3451
ègles sociales admises. Supposées « justes » pour
le
niveau « normal », ces règles paraissent absurdes quand Alice est plu
3452
e, et vexatoires quand elle est plus petite. Dans
les
deux cas, elles lui deviennent problématiques. D’où les discussions q
3453
ux cas, elles lui deviennent problématiques. D’où
les
discussions qu’elle engage avec les animaux parlants, créatures curie
3454
atiques. D’où les discussions qu’elle engage avec
les
animaux parlants, créatures curieusement acharnées à lui opposer une
3455
rnées à lui opposer une logique qui, n’étant plus
le
fait des grandes personnes — « ce qui va de soi » — apparaît tantôt r
3456
» — apparaît tantôt ridicule, tantôt tyrannique à
l’
excès. Ce Lièvre de Mars, ce Loir et ce Chapelier fou, on croirait une
3457
u, on croirait une préfiguration des logiciens de
l’
école de Vienne. Et la discussion sur le temps, au cours du « Thé louf
3458
figuration des logiciens de l’école de Vienne. Et
la
discussion sur le temps, au cours du « Thé loufoque » où il est toujo
3459
iciens de l’école de Vienne. Et la discussion sur
le
temps, au cours du « Thé loufoque » où il est toujours cinq heures, a
3460
, constamment réfutée par un formalisme délirant.
Le
pire, c’est que la plupart des discussions pèchent par l’absence d’un
3461
c’est que la plupart des discussions pèchent par
l’
absence d’un élément de commune mesure : d’où l’impression d’entrave,
3462
r l’absence d’un élément de commune mesure : d’où
l’
impression d’entrave, de cauchemar. Impossible de savoir qui a gagné,
3463
rincipales du jeu est omise ou inobservée. (Ainsi
la
partie de croquet, la discussion avec le bourreau qui refuse de décap
3464
omise ou inobservée. (Ainsi la partie de croquet,
la
discussion avec le bourreau qui refuse de décapiter un chat dont la t
3465
. (Ainsi la partie de croquet, la discussion avec
le
bourreau qui refuse de décapiter un chat dont la tête seule est visib
3466
le bourreau qui refuse de décapiter un chat dont
la
tête seule est visible, etc.). Et pourtant, ce n’est que d’un jeu qu’
3467
e n’est que d’un jeu qu’il s’agit. Alice en garde
la
conscience secrète — comme dans le rêve — et peut s’en libérer dès qu
3468
Alice en garde la conscience secrète — comme dans
le
rêve — et peut s’en libérer dès que l’absurdité devient intolérable o
3469
comme dans le rêve — et peut s’en libérer dès que
l’
absurdité devient intolérable ou menaçante. D’ailleurs, on pourrait pr
3470
n pourrait proposer une explication parallèle par
le
langage, autre problème fondamental pour un enfant. Les deux hypothès
3471
ngage, autre problème fondamental pour un enfant.
Les
deux hypothèses rendent compte de la plupart des « gags » dont se com
3472
compte de la plupart des « gags » dont se compose
le
récit. Et parfois les pièges logiques ont une double détente par cale
3473
des « gags » dont se compose le récit. Et parfois
les
pièges logiques ont une double détente par calembour. Tout cela est a
3474
calembour. Tout cela est assez bien symbolisé par
la
déclaration de la Tortue à Tête de Veau, qui croit que les quatre opé
3475
la est assez bien symbolisé par la déclaration de
la
Tortue à Tête de Veau, qui croit que les quatre opérations arithmétiq
3476
ration de la Tortue à Tête de Veau, qui croit que
les
quatre opérations arithmétiques sont l’Ambition, la Distraction, la L
3477
roit que les quatre opérations arithmétiques sont
l’
Ambition, la Distraction, la Laidification et la Dérision. Mais ici se
3478
quatre opérations arithmétiques sont l’Ambition,
la
Distraction, la Laidification et la Dérision. Mais ici se poserait le
3479
ns arithmétiques sont l’Ambition, la Distraction,
la
Laidification et la Dérision. Mais ici se poserait le problème de la
3480
t l’Ambition, la Distraction, la Laidification et
la
Dérision. Mais ici se poserait le problème de la version française du
3481
aidification et la Dérision. Mais ici se poserait
le
problème de la version française du conte ; celle de René Bour me par
3482
la Dérision. Mais ici se poserait le problème de
la
version française du conte ; celle de René Bour me paraît scrupuleuse
3483
arée ici ou là par des préciosités indéfendables.
Les
dessins sont d’une meilleure plume. am. Rougemont Denis de, « [Com
3484
] Lewis Carroll, Alice au pays des merveilles »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, août 1938, p. 328-329.
3485
novembre 1938)an D’un manuel futur : Leçon sur
la
crise des minorités en 1938. 1. Caractérisez l’état politique de l’Eu
3486
r la crise des minorités en 1938. 1. Caractérisez
l’
état politique de l’Europe en 1938. — Les démocraties de l’Ouest avaie
3487
ités en 1938. 1. Caractérisez l’état politique de
l’
Europe en 1938. — Les démocraties de l’Ouest avaient fondé leur paix s
3488
actérisez l’état politique de l’Europe en 1938. —
Les
démocraties de l’Ouest avaient fondé leur paix sur deux principes : d
3489
litique de l’Europe en 1938. — Les démocraties de
l’
Ouest avaient fondé leur paix sur deux principes : droit des peuples à
3490
nternational. Au nom du premier principe fut créé
l’
État tchèque, au nom du second, la SDN. Mais le jacobinisme des démocr
3491
incipe fut créé l’État tchèque, au nom du second,
la
SDN. Mais le jacobinisme des démocraties (centralisation rigide, conf
3492
éé l’État tchèque, au nom du second, la SDN. Mais
le
jacobinisme des démocraties (centralisation rigide, confusion de l’Ét
3493
démocraties (centralisation rigide, confusion de
l’
État et de la Nation) s’opposait dans le fait à toute application honn
3494
(centralisation rigide, confusion de l’État et de
la
Nation) s’opposait dans le fait à toute application honnête des deux
3495
fusion de l’État et de la Nation) s’opposait dans
le
fait à toute application honnête des deux principes. D’une part la SD
3496
pplication honnête des deux principes. D’une part
la
SDN ne fut pas une fédération, aucun des États constituants n’ayant r
3497
noncé à aucune de ses prérogatives au bénéfice de
la
Société ; d’autre part l’État tchèque opprima ses propres minorités,
3498
ogatives au bénéfice de la Société ; d’autre part
l’
État tchèque opprima ses propres minorités, leur imposant un régime ce
3499
spiré du modèle français. 2. Sur quoi se basaient
les
revendications hitlériennes ? — Les dictateurs du Centre européen fur
3500
i se basaient les revendications hitlériennes ? —
Les
dictateurs du Centre européen furent les premiers à s’apercevoir du p
3501
politique que nous venons de définir. Ils eurent
l’
habileté de baser leurs revendications, à la fois sur l’un des princip
3502
endications, à la fois sur l’un des principes que
les
démocraties prétendaient défendre, et sur le système qu’elles pratiqu
3503
que les démocraties prétendaient défendre, et sur
le
système qu’elles pratiquaient en fait. C’est ainsi que l’Allemagne ex
3504
me qu’elles pratiquaient en fait. C’est ainsi que
l’
Allemagne exigea l’autonomie des Sudètes au nom du droit de libre disp
3505
aient en fait. C’est ainsi que l’Allemagne exigea
l’
autonomie des Sudètes au nom du droit de libre disposition des peuples
3506
ition des peuples, puis leur annexion au nom de «
l’
unité nationale ». 3. Quelle fut la réponse des démocraties ? — Il éta
3507
on au nom de « l’unité nationale ». 3. Quelle fut
la
réponse des démocraties ? — Il était fatal, dans ces conditions, que
3508
ties ? — Il était fatal, dans ces conditions, que
les
démocraties se laissassent convaincre par le « bon droit » des exigen
3509
que les démocraties se laissassent convaincre par
le
« bon droit » des exigences allemandes. Et c’est pourquoi, lorsqu’en
3510
des. Et c’est pourquoi, lorsqu’en septembre 1938,
l’
Allemagne appuya sa revendication de menaces militaires, les démocrati
3511
ne appuya sa revendication de menaces militaires,
les
démocraties cédèrent (entrevue de Berchtesgaden). 4. Pourquoi le conf
3512
cédèrent (entrevue de Berchtesgaden). 4. Pourquoi
le
conflit s’aggrava-t-il subitement ? — Le litige était réglé en princi
3513
Pourquoi le conflit s’aggrava-t-il subitement ? —
Le
litige était réglé en principe. Mais alors (entrevue de Godesberg), H
3514
is alors (entrevue de Godesberg), Hitler démasqua
l’
aspect original (et non plus jacobin) de la dictature totalitaire : l’
3515
masqua l’aspect original (et non plus jacobin) de
la
dictature totalitaire : l’impérialisme religieux, ou sacral. Il exige
3516
t non plus jacobin) de la dictature totalitaire :
l’
impérialisme religieux, ou sacral. Il exigea d’entrer en armes et sur
3517
ux, ou sacral. Il exigea d’entrer en armes et sur
le
champ dans les territoires sudètes. Une cession purement diplomatique
3518
Il exigea d’entrer en armes et sur le champ dans
les
territoires sudètes. Une cession purement diplomatique n’eût pas comp
3519
urement diplomatique n’eût pas compté à ses yeux.
La
religion dont il était le fondateur voulait le sacrifice sanglant (ou
3520
pas compté à ses yeux. La religion dont il était
le
fondateur voulait le sacrifice sanglant (ou son symbole), le viol de
3521
x. La religion dont il était le fondateur voulait
le
sacrifice sanglant (ou son symbole), le viol de la victime, la « libé
3522
r voulait le sacrifice sanglant (ou son symbole),
le
viol de la victime, la « libération » violente de la proie désirée (g
3523
e sacrifice sanglant (ou son symbole), le viol de
la
victime, la « libération » violente de la proie désirée (guerre limit
3524
sanglant (ou son symbole), le viol de la victime,
la
« libération » violente de la proie désirée (guerre limitée). 5. Quel
3525
viol de la victime, la « libération » violente de
la
proie désirée (guerre limitée). 5. Quelle fut la réaction de l’Europe
3526
la proie désirée (guerre limitée). 5. Quelle fut
la
réaction de l’Europe ? — L’opinion démocratique apparut désorientée p
3527
ée (guerre limitée). 5. Quelle fut la réaction de
l’
Europe ? — L’opinion démocratique apparut désorientée par cette exigen
3528
mitée). 5. Quelle fut la réaction de l’Europe ? —
L’
opinion démocratique apparut désorientée par cette exigence purement «
3529
rientée par cette exigence purement « rituelle ».
Les
uns remarquaient qu’il n’y avait guère de différence entre Berchtesga
3530
e de différence entre Berchtesgaden et Godesberg.
Les
autres pensaient que l’exigence d’entrer en armes était une « querell
3531
chtesgaden et Godesberg. Les autres pensaient que
l’
exigence d’entrer en armes était une « querelle d’Allemands », une rod
3532
ut voir et dire qu’il y avait là un fait nouveau,
le
signe d’une volonté d’hégémonie. C’était traduire en termes classique
3533
’hégémonie. C’était traduire en termes classiques
la
réalité pressentie de la nouvelle religion totalitaire. D’ailleurs, l
3534
ire en termes classiques la réalité pressentie de
la
nouvelle religion totalitaire. D’ailleurs, les réactions des masses n
3535
de la nouvelle religion totalitaire. D’ailleurs,
les
réactions des masses ne tardèrent pas à démontrer que Chamberlain ava
3536
ne des tendances fondamentales et instinctives de
l’
Occident : la résistance à toute hégémonie, au nom d’un idéal latent d
3537
ces fondamentales et instinctives de l’Occident :
la
résistance à toute hégémonie, au nom d’un idéal latent de fédération
3538
pied d’égalité. Une vague de fond s’éleva contre
la
prétention allemande, que l’on sentait, obscurément, ruineuse pour l’
3539
fond s’éleva contre la prétention allemande, que
l’
on sentait, obscurément, ruineuse pour l’avenir confédéral de l’Europe
3540
nde, que l’on sentait, obscurément, ruineuse pour
l’
avenir confédéral de l’Europe. Hitler comprit que son heure n’était pa
3541
obscurément, ruineuse pour l’avenir confédéral de
l’
Europe. Hitler comprit que son heure n’était pas encore venue. Il se v
3542
pas encore venue. Il se vit contraint d’accepter
la
réunion à Munich d’une « Diète » de gouvernements égaux, qui régla le
3543
d’une « Diète » de gouvernements égaux, qui régla
le
problème à l’avantage matériel de l’Allemagne, mais sur une base d’ar
3544
» de gouvernements égaux, qui régla le problème à
l’
avantage matériel de l’Allemagne, mais sur une base d’arbitrage intern
3545
x, qui régla le problème à l’avantage matériel de
l’
Allemagne, mais sur une base d’arbitrage international préfigurant ain
3546
exclusif de toute hégémonie. 6. À qui profitèrent
les
accords de Munich ? — Cette victoire symbolique du principe fédératif
3547
ue du principe fédératif ne fut pas exploitée par
les
nations qui l’avaient remportée comme malgré elles et en dépit de leu
3548
édératif ne fut pas exploitée par les nations qui
l’
avaient remportée comme malgré elles et en dépit de leurs intérêts nat
3549
. En proie à des luttes intestines sans grandeur,
les
démocraties de l’Ouest ne surent tirer d’un événement aussi considéra
3550
ttes intestines sans grandeur, les démocraties de
l’
Ouest ne surent tirer d’un événement aussi considérable que des conclu
3551
aient à faire état des pertes matérielles subies.
Le
bénéfice moral, incalculable, fut perdu. 7. Conclusion. — La voie éta
3552
moral, incalculable, fut perdu. 7. Conclusion. —
La
voie était dès lors ouverte aux ambitions totalitaires, les dictateur
3553
tait dès lors ouverte aux ambitions totalitaires,
les
dictateurs ne trouvant plus devant eux que des États demeurés central
3554
s ils empruntaient leurs vieux systèmes mais pour
les
appliquer avec rigueur. Personne ne sut opposer au Führer l’idéal qui
3555
r avec rigueur. Personne ne sut opposer au Führer
l’
idéal qui avait fait jusqu’alors la force et l’équilibre dynamique de
3556
oser au Führer l’idéal qui avait fait jusqu’alors
la
force et l’équilibre dynamique de l’Occident : l’utopie agissante d’u
3557
er l’idéal qui avait fait jusqu’alors la force et
l’
équilibre dynamique de l’Occident : l’utopie agissante d’une fédératio
3558
jusqu’alors la force et l’équilibre dynamique de
l’
Occident : l’utopie agissante d’une fédération des égaux, dont la seul
3559
la force et l’équilibre dynamique de l’Occident :
l’
utopie agissante d’une fédération des égaux, dont la seule Suisse figu
3560
utopie agissante d’une fédération des égaux, dont
la
seule Suisse figurait le microcosme. C’est dans cette perspective his
3561
dération des égaux, dont la seule Suisse figurait
le
microcosme. C’est dans cette perspective historique que les événement
3562
osme. C’est dans cette perspective historique que
les
événements ultérieurs (colonisation intra-européenne, état de guerre
3563
apparus en leur temps, trouvent leur explication
la
moins douteuse. an. Rougemont Denis de, « Page d’histoire », La No
3564
. an. Rougemont Denis de, « Page d’histoire »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, novembre 1938, p. 866-867.
3565
Propos sur
la
religion, par Alain (avril 1939)ao Ces « propos » s’égrènent de 19
3566
Ces « propos » s’égrènent de 1908 à 1935, mais
la
position de l’auteur n’a pas varié durant ce temps. Elle se ramène, m
3567
» s’égrènent de 1908 à 1935, mais la position de
l’
auteur n’a pas varié durant ce temps. Elle se ramène, me semble-t-il,
3568
e temps. Elle se ramène, me semble-t-il, à ceci :
la
religion, c’est la pratique moyenne du catholicisme français. Il s’ag
3569
mène, me semble-t-il, à ceci : la religion, c’est
la
pratique moyenne du catholicisme français. Il s’agit moins de la déni
3570
enne du catholicisme français. Il s’agit moins de
la
dénigrer que de la « réaliser » en la débarrassant de ses « croyances
3571
e français. Il s’agit moins de la dénigrer que de
la
« réaliser » en la débarrassant de ses « croyances fantastiques » et
3572
it moins de la dénigrer que de la « réaliser » en
la
débarrassant de ses « croyances fantastiques » et de sa « méthode arr
3573
» et de sa « méthode arriérée », qui est celle de
l’
autorité (p. 72). La « vraie foi », vous la trouverez donc aujourd’hui
3574
arriérée », qui est celle de l’autorité (p. 72).
La
« vraie foi », vous la trouverez donc aujourd’hui chez l’instituteur
3575
lle de l’autorité (p. 72). La « vraie foi », vous
la
trouverez donc aujourd’hui chez l’instituteur laïque. Cette déclarati
3576
ie foi », vous la trouverez donc aujourd’hui chez
l’
instituteur laïque. Cette déclaration ouvre et ferme le recueil (p. 23
3577
tituteur laïque. Cette déclaration ouvre et ferme
le
recueil (p. 23 et 286). Elle le situe dans les cadres de la Républiqu
3578
on ouvre et ferme le recueil (p. 23 et 286). Elle
le
situe dans les cadres de la République radicale. Ainsi le catholicism
3579
rme le recueil (p. 23 et 286). Elle le situe dans
les
cadres de la République radicale. Ainsi le catholicisme, interprété p
3580
(p. 23 et 286). Elle le situe dans les cadres de
la
République radicale. Ainsi le catholicisme, interprété par Alain, ser
3581
dans les cadres de la République radicale. Ainsi
le
catholicisme, interprété par Alain, serait une sagesse éternelle qu’i
3582
laïciser. Point d’anticléricalisme, car « devant
le
regard positif, toute religion finit par être vraie », et même « l’ob
3583
toute religion finit par être vraie », et même «
l’
obligation de croire ne digère pas beaucoup du devoir de penser » (com
3584
r compte des données concrètes du christianisme :
le
péché, le salut, le drame de la révolte et de l’amour. Mais elle spéc
3585
es données concrètes du christianisme : le péché,
le
salut, le drame de la révolte et de l’amour. Mais elle spécule volont
3586
concrètes du christianisme : le péché, le salut,
le
drame de la révolte et de l’amour. Mais elle spécule volontiers sur l
3587
u christianisme : le péché, le salut, le drame de
la
révolte et de l’amour. Mais elle spécule volontiers sur les avantages
3588
le péché, le salut, le drame de la révolte et de
l’
amour. Mais elle spécule volontiers sur les avantages et inconvénients
3589
e et de l’amour. Mais elle spécule volontiers sur
les
avantages et inconvénients des « preuves » ou de l’absence de preuves
3590
avantages et inconvénients des « preuves » ou de
l’
absence de preuves en matière de « croyance », débat dont je ne trouve
3591
royance », débat dont je ne trouve pas trace dans
les
évangiles, s’il est vrai qu’il encombre une bonne part de la théologi
3592
s, s’il est vrai qu’il encombre une bonne part de
la
théologie, surtout catholique. Tout cela, je le crains, relève d’un m
3593
e la théologie, surtout catholique. Tout cela, je
le
crains, relève d’un malentendu, courant sur le sens du mot « foi ». J
3594
je le crains, relève d’un malentendu, courant sur
le
sens du mot « foi ». Je voudrais au moins l’indiquer. Un chrétien sa
3595
sur le sens du mot « foi ». Je voudrais au moins
l’
indiquer. Un chrétien sait que sa foi n’est nullement le contraire du
3596
uer. Un chrétien sait que sa foi n’est nullement
le
contraire du doute intellectuel, mais le contraire du péché, lequel n
3597
ullement le contraire du doute intellectuel, mais
le
contraire du péché, lequel n’est nullement une erreur morale, mais un
3598
erreur morale, mais un état de révolte active de
la
créature (même lorsqu’il se déguise en bonne volonté souriante). La f
3599
lorsqu’il se déguise en bonne volonté souriante).
La
foi, au sens biblique, s’oppose expressément à la religion en général
3600
La foi, au sens biblique, s’oppose expressément à
la
religion en général, avec ses rites et ses croyances dont Alain respe
3601
ec ses rites et ses croyances dont Alain respecte
la
forme et laïcise le contenu. « La vraie religion est le culte des mor
3602
croyances dont Alain respecte la forme et laïcise
le
contenu. « La vraie religion est le culte des morts », dit-il après A
3603
Alain respecte la forme et laïcise le contenu. «
La
vraie religion est le culte des morts », dit-il après Auguste Comte.
3604
me et laïcise le contenu. « La vraie religion est
le
culte des morts », dit-il après Auguste Comte. Je le pense aussi. (Vo
3605
culte des morts », dit-il après Auguste Comte. Je
le
pense aussi. (Voyez le racisme.) Mais pour le chrétien, « la foi est
3606
il après Auguste Comte. Je le pense aussi. (Voyez
le
racisme.) Mais pour le chrétien, « la foi est la substance des choses
3607
Je le pense aussi. (Voyez le racisme.) Mais pour
le
chrétien, « la foi est la substance des choses espérées ». Ce qu’un e
3608
ssi. (Voyez le racisme.) Mais pour le chrétien, «
la
foi est la substance des choses espérées ». Ce qu’un esprit comme cel
3609
le racisme.) Mais pour le chrétien, « la foi est
la
substance des choses espérées ». Ce qu’un esprit comme celui d’Alain
3610
ne dis pas que ce soit négligeable.) Pour situer
la
sagesse d’Alain, qu’on songe à la folie d’un Kierkegaard. Alors éclat
3611
e.) Pour situer la sagesse d’Alain, qu’on songe à
la
folie d’un Kierkegaard. Alors éclate le conflit véritable entre l’hum
3612
n songe à la folie d’un Kierkegaard. Alors éclate
le
conflit véritable entre l’humanisme et la foi, le scandale au sens pa
3613
rkegaard. Alors éclate le conflit véritable entre
l’
humanisme et la foi, le scandale au sens paulinien, tout ce que le sag
3614
éclate le conflit véritable entre l’humanisme et
la
foi, le scandale au sens paulinien, tout ce que le sage jugera toujou
3615
le conflit véritable entre l’humanisme et la foi,
le
scandale au sens paulinien, tout ce que le sage jugera toujours « hor
3616
a foi, le scandale au sens paulinien, tout ce que
le
sage jugera toujours « hors de propos » d’envisager. Le sérieux même
3617
e jugera toujours « hors de propos » d’envisager.
Le
sérieux même du christianisme.51 Alain dit quelque part n’avoir jama
3618
ais connu de « vrai croyant » qui ne vive « selon
la
peur ». Serait-ce qu’il n’a jamais rencontré que des hommes « religie
3619
mes « religieux », non des chrétiens vivant selon
la
foi et capables de lui faire pressentir que ses observations toujours
3620
nieuses, souvent justes, ne portent guère que sur
les
résidus ou les empreintes psychologiques et historiques du catholicis
3621
t justes, ne portent guère que sur les résidus ou
les
empreintes psychologiques et historiques du catholicisme français, en
3622
es du catholicisme français, en tant que, vidé de
la
foi, il demeure une « religion » ? Qu’il poursuive donc son enquête,
3623
nt pas à avoir raison comme Napoléon, qui faisait
les
demandes et les réponses. 51. On me dira que mon point de vue est p
3624
aison comme Napoléon, qui faisait les demandes et
les
réponses. 51. On me dira que mon point de vue est partiel, dogmatiq
3625
iel, dogmatique, confessionnel, etc. Bien sûr. Je
le
donne pour tel. Il faut des repères pour juger. La critique moderne l
3626
e donne pour tel. Il faut des repères pour juger.
La
critique moderne l’oublie un peu, animée d’une méfiance étrange pour
3627
faut des repères pour juger. La critique moderne
l’
oublie un peu, animée d’une méfiance étrange pour celui qui déclare se
3628
our celui qui déclare ses valeurs, — en dehors de
la
politique, bien entendu. ao. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] A
3629
mont Denis de, « [Compte rendu] Alain, Propos sur
la
religion », La Nouvelle Revue française, Paris, avril 1939, p. 704-7
3630
[Compte rendu] Alain, Propos sur la religion »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, avril 1939, p. 704-705.
3631
et de soie, dressé sur ses ergots de grand ténor,
l’
on est tenté de ne voir en lui que le feu naturel du désir, — une espè
3632
grand ténor, l’on est tenté de ne voir en lui que
le
feu naturel du désir, — une espèce d’animalité véhémente, et comme in
3633
malité véhémente, et comme innocente… Mais jamais
la
Nature n’a rien produit de pareil. Vous sentez bien qu’il y a du démo
3634
de polémique anxieuse, de méchanceté et de défi :
la
main tendue au Commandeur, dans le dernier acte de Mozart. Non, ce n’
3635
dans le dernier acte de Mozart. Non, ce n’est pas
l’
animal, mais l’homme ; et non d’avant, mais d’après la morale. Point d
3636
acte de Mozart. Non, ce n’est pas l’animal, mais
l’
homme ; et non d’avant, mais d’après la morale. Point de Don Juan ni c
3637
imal, mais l’homme ; et non d’avant, mais d’après
la
morale. Point de Don Juan ni chez les « bons sauvages » ni chez les «
3638
mais d’après la morale. Point de Don Juan ni chez
les
« bons sauvages » ni chez les « primitifs » qu’on nous décrit. Don Ju
3639
de Don Juan ni chez les « bons sauvages » ni chez
les
« primitifs » qu’on nous décrit. Don Juan suppose une société encombr
3640
elle rêve moins de se délivrer que d’abuser. Dans
le
vertige de l’anarchie où il se plaît, ce grand seigneur n’oublie jama
3641
s de se délivrer que d’abuser. Dans le vertige de
l’
anarchie où il se plaît, ce grand seigneur n’oublie jamais son rang. S
3642
neur n’oublie jamais son rang. Son naturel, c’est
le
mépris ; rien n’est plus loin de la nature. Voyez comme il se sert de
3643
aturel, c’est le mépris ; rien n’est plus loin de
la
nature. Voyez comme il se sert des femmes : incapable de les posséder
3644
Voyez comme il se sert des femmes : incapable de
les
posséder, il les viole d’abord moralement pour s’imposer à l’animal,
3645
e sert des femmes : incapable de les posséder, il
les
viole d’abord moralement pour s’imposer à l’animal, et aussitôt prise
3646
il les viole d’abord moralement pour s’imposer à
l’
animal, et aussitôt prises les rejette, comme si c’était le fait du cr
3647
ent pour s’imposer à l’animal, et aussitôt prises
les
rejette, comme si c’était le fait du crime et non le plaisir qu’il ch
3648
et aussitôt prises les rejette, comme si c’était
le
fait du crime et non le plaisir qu’il cherchait. Polémiste perpétuel,
3649
rejette, comme si c’était le fait du crime et non
le
plaisir qu’il cherchait. Polémiste perpétuel, il se trouve entièremen
3650
perpétuel, il se trouve entièrement déterminé par
le
bon et le juste — contre eux. Si les lois de la morale n’existaient p
3651
il se trouve entièrement déterminé par le bon et
le
juste — contre eux. Si les lois de la morale n’existaient pas, il les
3652
déterminé par le bon et le juste — contre eux. Si
les
lois de la morale n’existaient pas, il les inventerait pour les viole
3653
r le bon et le juste — contre eux. Si les lois de
la
morale n’existaient pas, il les inventerait pour les violer. Et c’est
3654
ux. Si les lois de la morale n’existaient pas, il
les
inventerait pour les violer. Et c’est cela qui nous fait pressentir l
3655
morale n’existaient pas, il les inventerait pour
les
violer. Et c’est cela qui nous fait pressentir la nature spirituelle
3656
es violer. Et c’est cela qui nous fait pressentir
la
nature spirituelle de son secret, si bien masqué par le prétexte de l
3657
ure spirituelle de son secret, si bien masqué par
le
prétexte de l’instinct. Aux sommets de l’esprit révolté, on verra Nie
3658
de son secret, si bien masqué par le prétexte de
l’
instinct. Aux sommets de l’esprit révolté, on verra Nietzsche, cent an
3659
qué par le prétexte de l’instinct. Aux sommets de
l’
esprit révolté, on verra Nietzsche, cent ans plus tard, renouveler ce
3660
défi mortel. Mais quoi ? Faut-il aller si haut ?
La
recherche « toute naturelle » de l’intensité du désir ne peut-elle ex
3661
ler si haut ? La recherche « toute naturelle » de
l’
intensité du désir ne peut-elle expliquer à elle seule cette inconstan
3662
ette inconstance forcenée ? Alors Don Juan serait
l’
homme de la première rencontre, de la plus excitante victoire ? « La n
3663
Juan serait l’homme de la première rencontre, de
la
plus excitante victoire ? « La nouveauté est le tyran de notre âme »,
3664
ière rencontre, de la plus excitante victoire ? «
La
nouveauté est le tyran de notre âme », écrit le vieux Casanova. Mais
3665
e la plus excitante victoire ? « La nouveauté est
le
tyran de notre âme », écrit le vieux Casanova. Mais déjà ce n’est plu
3666
« La nouveauté est le tyran de notre âme », écrit
le
vieux Casanova. Mais déjà ce n’est plus l’homme du plaisir qui parle
3667
écrit le vieux Casanova. Mais déjà ce n’est plus
l’
homme du plaisir qui parle ainsi. La volupté du vrai sensuel commence
3668
ce n’est plus l’homme du plaisir qui parle ainsi.
La
volupté du vrai sensuel commence au-delà de ces moments que Don Juan
3669
ine atteints. Faudra-t-il se résoudre à soumettre
le
cas aux docteurs indiscrets de l’école viennoise ? Le beau sujet ! Il
3670
dre à soumettre le cas aux docteurs indiscrets de
l’
école viennoise ? Le beau sujet ! Ils ne l’ont pas manqué. Pour eux au
3671
as aux docteurs indiscrets de l’école viennoise ?
Le
beau sujet ! Ils ne l’ont pas manqué. Pour eux aussi, Don Juan serait
3672
ets de l’école viennoise ? Le beau sujet ! Ils ne
l’
ont pas manqué. Pour eux aussi, Don Juan serait le contraire de ce que
3673
l’ont pas manqué. Pour eux aussi, Don Juan serait
le
contraire de ce que l’on croit, il souffrirait d’une anxiété secrète
3674
eux aussi, Don Juan serait le contraire de ce que
l’
on croit, il souffrirait d’une anxiété secrète déjà voisine de l’impui
3675
souffrirait d’une anxiété secrète déjà voisine de
l’
impuissance. Et il est vrai que celui qui cède à cet attrait superfici
3676
cède à cet attrait superficiel que presque toutes
les
jolies femmes peuvent exercer sur presque tous les hommes, n’évoque p
3677
es jolies femmes peuvent exercer sur presque tous
les
hommes, n’évoque pas une idée de santé. Mais dans cette furie insolen
3678
critères spirituels ? Don Juan serait par exemple
le
type de l’homme qui n’atteint pas au plan de la personne, où pourrait
3679
irituels ? Don Juan serait par exemple le type de
l’
homme qui n’atteint pas au plan de la personne, où pourrait se manifes
3680
e le type de l’homme qui n’atteint pas au plan de
la
personne, où pourrait se manifester ce qu’il y a d’unique dans un êtr
3681
que dans un être. Pourquoi ne peut-il désirer que
la
nouveauté dans la femme ? Et pourquoi désire-t-on du nouveau, du nouv
3682
Pourquoi ne peut-il désirer que la nouveauté dans
la
femme ? Et pourquoi désire-t-on du nouveau, du nouveau à tout prix, q
3683
est pas ? Celui qui a, vit de sa possession et ne
l’
abandonne pas pour l’incertain, — entendez : s’il possède vraiment. Do
3684
, vit de sa possession et ne l’abandonne pas pour
l’
incertain, — entendez : s’il possède vraiment. Don Juan serait l’homme
3685
entendez : s’il possède vraiment. Don Juan serait
l’
homme qui ne peut pas aimer, parce qu’aimer c’est d’abord choisir, et
3686
r choisir il faudrait être, et il n’est pas. Mais
le
contraire n’est pas moins vraisemblable : Don Juan cherchant partout
3687
ype » de beauté féminine (souvenir inconscient de
la
mère) — trop vite séduit par la plus fugitive ressemblance, toujours
3688
ir inconscient de la mère) — trop vite séduit par
la
plus fugitive ressemblance, toujours déçu par la réalité dès qu’il l’
3689
la plus fugitive ressemblance, toujours déçu par
la
réalité dès qu’il l’approche, et déjà s’élançant vers d’autres appare
3690
semblance, toujours déçu par la réalité dès qu’il
l’
approche, et déjà s’élançant vers d’autres apparences, de plus en plus
3691
parences, de plus en plus angoissé et cruel… S’il
le
trouvait, ce « type » de femme rêvé ! J’imagine cette métamorphose. O
3692
de femme rêvé ! J’imagine cette métamorphose. On
le
voit interrompre sa course, changer soudain de contenance, baisser la
3693
sa course, changer soudain de contenance, baisser
la
tête, s’assombrir, comme saisi d’une timidité, et fasciné pour la pre
3694
ne timidité, et fasciné pour la première fois par
la
révélation d’amour, se muer en l’image de Tristan. Mais il ne trouver
3695
emière fois par la révélation d’amour, se muer en
l’
image de Tristan. Mais il ne trouvera pas. Il est Don Juan parce qu’on
3696
arente, sa furia, son rythme dionysiaque. ⁂ Or si
le
don juanisme est une passion de l’esprit et non pas comme nous aimion
3697
iaque. ⁂ Or si le don juanisme est une passion de
l’
esprit et non pas comme nous aimions le croire, une exultation de l’in
3698
passion de l’esprit et non pas comme nous aimions
le
croire, une exultation de l’instinct, tout porte à supposer que cette
3699
s comme nous aimions le croire, une exultation de
l’
instinct, tout porte à supposer que cette passion n’est pas toujours l
3700
ours liée au sexe. Et même il faut se demander si
la
sensualité, précisément, ne serait pas le domaine où Don Juan se révè
3701
nder si la sensualité, précisément, ne serait pas
le
domaine où Don Juan se révèle le moins dangereux. (Appelons ici dange
3702
t, ne serait pas le domaine où Don Juan se révèle
le
moins dangereux. (Appelons ici danger ce qui peut compromettre un cer
3703
peut compromettre un certain équilibre social que
les
mœurs ont pour but de maintenir, cet équilibre étant d’ailleurs bon o
3704
libre étant d’ailleurs bon ou mauvais.) C’est que
le
désir de nouveauté et de changement perpétuel, dès que l’esprit insat
3705
de nouveauté et de changement perpétuel, dès que
l’
esprit insatiable l’excite, devient une menace pour la vie. En dérivan
3706
changement perpétuel, dès que l’esprit insatiable
l’
excite, devient une menace pour la vie. En dérivant cette passion vers
3707
prit insatiable l’excite, devient une menace pour
la
vie. En dérivant cette passion vers le plaisir, la société se trouve
3708
enace pour la vie. En dérivant cette passion vers
le
plaisir, la société se trouve lui ménager des satisfactions qui l’épu
3709
a vie. En dérivant cette passion vers le plaisir,
la
société se trouve lui ménager des satisfactions qui l’épuisent, sans
3710
ciété se trouve lui ménager des satisfactions qui
l’
épuisent, sans que l’ordre des choses ait à souffrir d’une dépense imp
3711
énager des satisfactions qui l’épuisent, sans que
l’
ordre des choses ait à souffrir d’une dépense improductive. Certes Don
3712
est un tricheur, et même il ne vit que de cela. (
La
banque de pharaon était la source unique des revenus de Casanova : sy
3713
l ne vit que de cela. (La banque de pharaon était
la
source unique des revenus de Casanova : symbole dont il nous donne ma
3714
asanova : symbole dont il nous donne maintes fois
la
clé.) Mais une tricherie constante est moins dangereuse que les faibl
3715
une tricherie constante est moins dangereuse que
les
faiblesses subites d’un honnête homme. On est en garde, et l’on conna
3716
s subites d’un honnête homme. On est en garde, et
l’
on connaît le système, entièrement relatif aux règles du jeu. Imaginon
3717
n honnête homme. On est en garde, et l’on connaît
le
système, entièrement relatif aux règles du jeu. Imaginons un don juan
3718
don juanisme plus secret, une table de pharaon où
l’
on mette sur les cartes des « valeurs » invisibles au lieu d’espèces s
3719
us secret, une table de pharaon où l’on mette sur
les
cartes des « valeurs » invisibles au lieu d’espèces sonnantes. Alors
3720
» invisibles au lieu d’espèces sonnantes. Alors «
la
tricherie » cesse d’être une habileté vulgaire et profitable. Elle pe
3721
abileté vulgaire et profitable. Elle peut devenir
l’
acte héroïque d’une loyauté sans scrupules, toutefois ressentie comme
3722
crime, du fait qu’elle institue un ordre neuf par
le
décret de sa rigueur. ⁂ Nietzsche s’est dressé face au siècle. Et l’a
3723
ueur. ⁂ Nietzsche s’est dressé face au siècle. Et
l’
adversaire qu’il s’est choisi, c’est l’esprit de lourdeur, notre poids
3724
siècle. Et l’adversaire qu’il s’est choisi, c’est
l’
esprit de lourdeur, notre poids naturel, notre faculté naturelle de re
3725
urel, notre faculté naturelle de retombement dans
la
coutume. L’immoraliste est comme le moraliste un ennemi vigilant de l
3726
faculté naturelle de retombement dans la coutume.
L’
immoraliste est comme le moraliste un ennemi vigilant de l’instinct :
3727
ombement dans la coutume. L’immoraliste est comme
le
moraliste un ennemi vigilant de l’instinct : car s’il le glorifie c’e
3728
iste est comme le moraliste un ennemi vigilant de
l’
instinct : car s’il le glorifie c’est par esprit de polémique, c’est q
3729
liste un ennemi vigilant de l’instinct : car s’il
le
glorifie c’est par esprit de polémique, c’est qu’il veut forcer la na
3730
par esprit de polémique, c’est qu’il veut forcer
la
nature autrement qu’on ne l’a fait jusqu’à lui. Polémiste perpétuel,
3731
st qu’il veut forcer la nature autrement qu’on ne
l’
a fait jusqu’à lui. Polémiste perpétuel, Nietzsche se trouve entièreme
3732
el, Nietzsche se trouve entièrement déterminé par
le
bon et le juste — contre eux. Il va de défi en défi, excité puis exas
3733
che se trouve entièrement déterminé par le bon et
le
juste — contre eux. Il va de défi en défi, excité puis exaspéré par l
3734
. Il va de défi en défi, excité puis exaspéré par
le
silence ou les lâchetés de l’adversaire. Les idées se retournent au c
3735
i en défi, excité puis exaspéré par le silence ou
les
lâchetés de l’adversaire. Les idées se retournent au caprice de l’esp
3736
é puis exaspéré par le silence ou les lâchetés de
l’
adversaire. Les idées se retournent au caprice de l’esprit : il n’y a
3737
é par le silence ou les lâchetés de l’adversaire.
Les
idées se retournent au caprice de l’esprit : il n’y a plus de vérité
3738
adversaire. Les idées se retournent au caprice de
l’
esprit : il n’y a plus de vérité qui tienne. Les hommes se rendent ou
3739
de l’esprit : il n’y a plus de vérité qui tienne.
Les
hommes se rendent ou tombent dans le doute à la première séduction d’
3740
qui tienne. Les hommes se rendent ou tombent dans
le
doute à la première séduction d’une hypothèse scientifique. Il n’y a
3741
de foi qui affirme et qui maintienne en vertu de
l’
absurde. Ah ! comme on se lasse de gagner à tout coup, pour peu qu’on
3742
e lasse de gagner à tout coup, pour peu qu’on ait
l’
envie de nier des règles que personne n’ose plus dire inviolables ! Qu
3743
er pour une vertu dont on ne sait plus quelle est
la
fin ? Et toutes ces vérités qu’ils respectaient, voyez comme elles on
3744
ra donc s’en prendre à Dieu et à son Fils. Déjà «
le
Dieu moral est réfuté ». Que va dire l’Autre ? C’est, dans la vie du
3745
l est réfuté ». Que va dire l’Autre ? C’est, dans
la
vie du Don Juan des vérités, l’heure de l’invitation au Commandeur. O
3746
tre ? C’est, dans la vie du Don Juan des vérités,
l’
heure de l’invitation au Commandeur. Or Dieu se tait. Il ne relève pas
3747
, dans la vie du Don Juan des vérités, l’heure de
l’
invitation au Commandeur. Or Dieu se tait. Il ne relève pas le défi. N
3748
au Commandeur. Or Dieu se tait. Il ne relève pas
le
défi. Nietzsche attend dans la nuit désertique des hauteurs. Une aube
3749
. Il ne relève pas le défi. Nietzsche attend dans
la
nuit désertique des hauteurs. Une aube vient. C’est encore l’aube de
3750
rtique des hauteurs. Une aube vient. C’est encore
l’
aube de la terre. Personne n’a parlé. Dieu est mort ! De chaque idée,
3751
hauteurs. Une aube vient. C’est encore l’aube de
la
terre. Personne n’a parlé. Dieu est mort ! De chaque idée, de chaque
3752
yance, de chaque valeur, Nietzsche a voulu violer
le
secret ; et leur défaite rapide les rend toutes méprisables après la
3753
a voulu violer le secret ; et leur défaite rapide
les
rend toutes méprisables après la première possession. Pourquoi s’atta
3754
’attarderait-il ? Elles n’étaient excitantes pour
l’
esprit que par la fausse vertu qu’on leur prêtait. Mais aussitôt qu’el
3755
Elles n’étaient excitantes pour l’esprit que par
la
fausse vertu qu’on leur prêtait. Mais aussitôt qu’elles ont trahi leu
3756
ssitôt qu’elles ont trahi leur commune vulgarité,
le
triomphe perd toute saveur. Il faut détruire maintenant les valeurs n
3757
he perd toute saveur. Il faut détruire maintenant
les
valeurs neuves qu’on avait inventées pour la lutte. Il faut rejeter a
3758
ant les valeurs neuves qu’on avait inventées pour
la
lutte. Il faut rejeter avec dégoût ce que l’on désirait de toute sa f
3759
pour la lutte. Il faut rejeter avec dégoût ce que
l’
on désirait de toute sa fougue ; et se rire des suiveurs, des successe
3760
s, des successeurs, de ces disciples enhardis par
le
triomphe ardent d’un autre, et qui déjà croient pouvoir abuser de ses
3761
vérités se sont rendues, et pas une seule n’a su
le
retenir. Qu’importent les « contradictions » ! Ce n’est pas pour bâti
3762
et pas une seule n’a su le retenir. Qu’importent
les
« contradictions » ! Ce n’est pas pour bâtir un système qu’il réfute,
3763
tème qu’il réfute, dénonce et détruit, c’est pour
la
joie du viol intellectuel. Comme Don Juan l’image de la Mère, Nietzsc
3764
pour la joie du viol intellectuel. Comme Don Juan
l’
image de la Mère, Nietzsche poursuit l’image obscure, et à lui-même in
3765
e du viol intellectuel. Comme Don Juan l’image de
la
Mère, Nietzsche poursuit l’image obscure, et à lui-même infiniment se
3766
e Don Juan l’image de la Mère, Nietzsche poursuit
l’
image obscure, et à lui-même infiniment secrète, d’une Vérité qui ne s
3767
, d’une Vérité qui ne se rendrait point, mais qui
le
posséderait à tout jamais, digne enfin de sa vraie passion ! Il traqu
3768
t ce qui fait mine de résister. Voluptés brèves —
le
temps d’un aphorisme — fulgurations toujours décevantes : ce n’est pa
3769
t de posséder… Ô haine de leurs vérités faibles !
La
Vérité est morte ! Revivra-t-elle ? Car si ce Dieu est mort à tout j
3770
e haïr tout ce qui passe, tout ce qui cède, toute
l’
impudeur et la lourdeur du monde. C’est au point de fureur dionysiaque
3771
qui passe, tout ce qui cède, toute l’impudeur et
la
lourdeur du monde. C’est au point de fureur dionysiaque où la joie de
3772
du monde. C’est au point de fureur dionysiaque où
la
joie de détruire devient douleur, et dans l’angoisse d’une puissance
3773
e où la joie de détruire devient douleur, et dans
l’
angoisse d’une puissance anéantie par son succès, que Nietzsche a renc
3774
par son succès, que Nietzsche a rencontré soudain
la
fascinante idée du Retour éternel. Devant le roc de Sils-Maria on le
3775
dain la fascinante idée du Retour éternel. Devant
le
roc de Sils-Maria on le voit interrompre sa course, changer de conten
3776
du Retour éternel. Devant le roc de Sils-Maria on
le
voit interrompre sa course, changer de contenance, et pour la premièr
3777
r de contenance, et pour la première fois baisser
la
tête et adorer. Tout reviendra éternellement à cette minute, à cet in
3778
dra éternellement à cette minute, à cet instant !
L’
Éternité, c’est le retour des temps ; et non pas la victoire sur le te
3779
à cette minute, à cet instant ! L’Éternité, c’est
le
retour des temps ; et non pas la victoire sur le temps… Mais dans le
3780
’Éternité, c’est le retour des temps ; et non pas
la
victoire sur le temps… Mais dans le temps, disait-il, Dieu est mort.
3781
le retour des temps ; et non pas la victoire sur
le
temps… Mais dans le temps, disait-il, Dieu est mort. Si Dieu est mort
3782
; et non pas la victoire sur le temps… Mais dans
le
temps, disait-il, Dieu est mort. Si Dieu est mort, c’est donc qu’il a
3783
u revivra éternellement ! Ainsi Nietzsche devient
le
Tristan d’un Destin qu’il ne peut posséder que par l’amour éternellem
3784
ristan d’un Destin qu’il ne peut posséder que par
l’
amour éternellement lointain. ⁂ Don Juan, tricheur, aime sans amour. S
3785
ur, aime sans amour. S’il gagne, c’est en violant
la
vérité des êtres. Nietzsche pose des valeurs qui détruisent les règle
3786
êtres. Nietzsche pose des valeurs qui détruisent
les
règles anciennes, mais qui ne valent que par ces règles et dans la me
3787
es, mais qui ne valent que par ces règles et dans
la
mesure où l’on sent qu’elles les violent. Pour peu qu’il les impose,
3788
ne valent que par ces règles et dans la mesure où
l’
on sent qu’elles les violent. Pour peu qu’il les impose, elles perdent
3789
es règles et dans la mesure où l’on sent qu’elles
les
violent. Pour peu qu’il les impose, elles perdent leur sens, puisque
3790
où l’on sent qu’elles les violent. Pour peu qu’il
les
impose, elles perdent leur sens, puisque le système qui les mesurait
3791
u’il les impose, elles perdent leur sens, puisque
le
système qui les mesurait n’existe plus. Par-delà le bien et le mal, p
3792
, elles perdent leur sens, puisque le système qui
les
mesurait n’existe plus. Par-delà le bien et le mal, par-delà toutes l
3793
système qui les mesurait n’existe plus. Par-delà
le
bien et le mal, par-delà toutes les règles du jeu, il faut qu’une pas
3794
i les mesurait n’existe plus. Par-delà le bien et
le
mal, par-delà toutes les règles du jeu, il faut qu’une passion se rév
3795
plus. Par-delà le bien et le mal, par-delà toutes
les
règles du jeu, il faut qu’une passion se révèle ; ou la mort, ou la v
3796
les du jeu, il faut qu’une passion se révèle ; ou
la
mort, ou la vie éternelle. Il faut donc que Don Juan disparaisse (car
3797
il faut qu’une passion se révèle ; ou la mort, ou
la
vie éternelle. Il faut donc que Don Juan disparaisse (car Don Juan ne
3798
règles, on ne peut plus tricher). Voici peut-être
la
clé du mystère : c’est qu’en respectant toutes les règles, nous ne po
3799
la clé du mystère : c’est qu’en respectant toutes
les
règles, nous ne pourrons jamais que perdre. Alors : ou bien nous sero
3800
Mais Nietzsche et Don Juan doutent de leur grâce.
Les
voici donc contraints de gagner dans le temps de leur vie — d’où la t
3801
r grâce. Les voici donc contraints de gagner dans
le
temps de leur vie — d’où la tricherie ; ou bien encore, de nier la fi
3802
raints de gagner dans le temps de leur vie — d’où
la
tricherie ; ou bien encore, de nier la fin des temps, le règlement fi
3803
vie — d’où la tricherie ; ou bien encore, de nier
la
fin des temps, le règlement final, le Jugement dernier — d’où l’idée
3804
herie ; ou bien encore, de nier la fin des temps,
le
règlement final, le Jugement dernier — d’où l’idée du Retour éternel.
3805
re, de nier la fin des temps, le règlement final,
le
Jugement dernier — d’où l’idée du Retour éternel. ⁂ Comme je parlais
3806
s, le règlement final, le Jugement dernier — d’où
l’
idée du Retour éternel. ⁂ Comme je parlais de ces choses à une amie :
3807
s ajoute à ma liste des mille e tre”. » C’étaient
les
femmes qu’il n’avait pas eues, par fidélité à la sienne. Où est la tr
3808
’avait pas eues, par fidélité à la sienne. Où est
la
tricherie ? Dans ce défi installée au cœur de la règle ? ap. Rouge
3809
la tricherie ? Dans ce défi installée au cœur de
la
règle ? ap. Rougemont Denis de, « Don Juan », La Nouvelle Revue fr
3810
règle ? ap. Rougemont Denis de, « Don Juan »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, juillet 1939, p. 62-68.
3811
La
Poésie scientifique en France au xvie siècle, par Albert-Marie Schmi
3812
ie Schmidt (septembre 1939)aq Ronsard évoquant
les
démons, Maurice Scève spéculant sur l’Adam-microcosme, Belleau décriv
3813
évoquant les démons, Maurice Scève spéculant sur
l’
Adam-microcosme, Belleau décrivant les Amours des Pierres précieuses,
3814
péculant sur l’Adam-microcosme, Belleau décrivant
les
Amours des Pierres précieuses, Peletier du Mans versifiant l’Éloge du
3815
s Pierres précieuses, Peletier du Mans versifiant
l’
Éloge du Nombre Un, Du Chesne, calviniste paracelsien et physiologue p
3816
nt blasonnant des Visions hermétiques : tels sont
les
animaux étranges, bariolés et quasi monstrueux que nous ramène du fon
3817
onstrueux que nous ramène du fond du xvie siècle
le
coup de filet très savamment prémédité de M. Albert-Marie Schmidt. To
3818
nsions connaître. Ils n’ont pas été restaurés par
les
auteurs de manuels, ni patinés par nos lectures. Les voici avec toute
3819
auteurs de manuels, ni patinés par nos lectures.
Les
voici avec toutes leurs barbes et verrues, incongrus et antédiluviens
3820
rouillante d’une Renaissance pré-baroque. C’était
le
temps où la magie et la raison illuminée collaboraient dans un pédant
3821
’une Renaissance pré-baroque. C’était le temps où
la
magie et la raison illuminée collaboraient dans un pédant délire, la
3822
ance pré-baroque. C’était le temps où la magie et
la
raison illuminée collaboraient dans un pédant délire, la première nou
3823
ou grotesques. Qui sait où cela nous eut menés ?
Le
livre de Schmidt inventorie, avec une sorte d’ardente lucidité, les r
3824
dt inventorie, avec une sorte d’ardente lucidité,
les
richesses dont l’ère classique a voulu faire le sacrifice. Ce n’est p
3825
une sorte d’ardente lucidité, les richesses dont
l’
ère classique a voulu faire le sacrifice. Ce n’est pas rien ! Cela don
3826
les richesses dont l’ère classique a voulu faire
le
sacrifice. Ce n’est pas rien ! Cela donne à Phèdre un air de luxe fou
3827
ondre ce bijou de platine d’une suprême élégance,
la
plus discrète, il a fallu brûler le mobilier, les souvenirs de famill
3828
ême élégance, la plus discrète, il a fallu brûler
le
mobilier, les souvenirs de famille datant du Moyen Âge, un tas d’obje
3829
la plus discrète, il a fallu brûler le mobilier,
les
souvenirs de famille datant du Moyen Âge, un tas d’objets inutiles et
3830
magiques. Ensuite, au xviiie , il n’est resté que
la
nudité du décor. La discipline est devenue lésinerie. Comment louer a
3831
u xviiie , il n’est resté que la nudité du décor.
La
discipline est devenue lésinerie. Comment louer assez les mérites de
3832
ipline est devenue lésinerie. Comment louer assez
les
mérites de l’auteur, sa patiente intrépidité, la « volubilité infinie
3833
nue lésinerie. Comment louer assez les mérites de
l’
auteur, sa patiente intrépidité, la « volubilité infinie » de l’esprit
3834
les mérites de l’auteur, sa patiente intrépidité,
la
« volubilité infinie » de l’esprit que suppose son entreprise ? Car l
3835
atiente intrépidité, la « volubilité infinie » de
l’
esprit que suppose son entreprise ? Car l’étude des poètes hermétiques
3836
ie » de l’esprit que suppose son entreprise ? Car
l’
étude des poètes hermétiques exige une faculté d’interprétation recréa
3837
t une vision du monde, et des rapports du monde à
l’
homme, qu’il s’agit de concevoir à nouveau, si l’on veut entrer dans c
3838
l’homme, qu’il s’agit de concevoir à nouveau, si
l’
on veut entrer dans ces rythmes, goûter ce vocabulaire, et dégager le
3839
ns ces rythmes, goûter ce vocabulaire, et dégager
le
pittoresque enfoui sous des amas d’abstruse érudition. Il fallait êtr
3840
plus d’incitations aux créateurs qu’il ne comble
les
amateurs de beaux poèmes oubliés. Toutes ces tentatives constituent,
3841
ituent, pour reprendre une heureuse expression de
l’
auteur, autant « d’appels plastiques à l’avenir ». Un écrivain contemp
3842
ssion de l’auteur, autant « d’appels plastiques à
l’
avenir ». Un écrivain contemporain, conscient de l’impasse où l’a cond
3843
’avenir ». Un écrivain contemporain, conscient de
l’
impasse où l’a conduit l’idéal d’une poésie pure, pourrait trouver dan
3844
écrivain contemporain, conscient de l’impasse où
l’
a conduit l’idéal d’une poésie pure, pourrait trouver dans les thèmes
3845
ntemporain, conscient de l’impasse où l’a conduit
l’
idéal d’une poésie pure, pourrait trouver dans les thèmes et les forme
3846
l’idéal d’une poésie pure, pourrait trouver dans
les
thèmes et les formes qui foisonnèrent au xvie siècle des incitations
3847
poésie pure, pourrait trouver dans les thèmes et
les
formes qui foisonnèrent au xvie siècle des incitations très fécondes
3848
. Encore y faudrait-il une passion de culture que
les
facilités de l’après-guerre ont passablement déprimée. On imagine un
3849
it-il une passion de culture que les facilités de
l’
après-guerre ont passablement déprimée. On imagine un Valéry reprenant
3850
n Valéry reprenant tel dessein de Scève : décrire
la
naissance des figures puis des solides géométriques à partir du point
3851
point originel. Mais qui oserait encore envisager
l’
ambition d’un Guillaume du Bartas, d’un Peletier, d’un La Boderie et d
3852
ion d’un Guillaume du Bartas, d’un Peletier, d’un
La
Boderie et de tant d’autres, cet inventaire de la Création embrassant
3853
La Boderie et de tant d’autres, cet inventaire de
la
Création embrassant tous les arts et les métiers humains, de la magie
3854
es, cet inventaire de la Création embrassant tous
les
arts et les métiers humains, de la magie cérémonielle à l’anatomie, d
3855
ntaire de la Création embrassant tous les arts et
les
métiers humains, de la magie cérémonielle à l’anatomie, de la géograp
3856
brassant tous les arts et les métiers humains, de
la
magie cérémonielle à l’anatomie, de la géographie à l’acuponcture, de
3857
t les métiers humains, de la magie cérémonielle à
l’
anatomie, de la géographie à l’acuponcture, de la musique à la théolog
3858
umains, de la magie cérémonielle à l’anatomie, de
la
géographie à l’acuponcture, de la musique à la théologie, à l’agricul
3859
gie cérémonielle à l’anatomie, de la géographie à
l’
acuponcture, de la musique à la théologie, à l’agriculture, à l’obstét
3860
l’anatomie, de la géographie à l’acuponcture, de
la
musique à la théologie, à l’agriculture, à l’obstétrique, à la véneri
3861
de la géographie à l’acuponcture, de la musique à
la
théologie, à l’agriculture, à l’obstétrique, à la vénerie, à l’orfèvr
3862
à l’acuponcture, de la musique à la théologie, à
l’
agriculture, à l’obstétrique, à la vénerie, à l’orfèvrerie, à la mécan
3863
de la musique à la théologie, à l’agriculture, à
l’
obstétrique, à la vénerie, à l’orfèvrerie, à la mécanique, à l’astrono
3864
la théologie, à l’agriculture, à l’obstétrique, à
la
vénerie, à l’orfèvrerie, à la mécanique, à l’astronomie. Schmidt nous
3865
à l’agriculture, à l’obstétrique, à la vénerie, à
l’
orfèvrerie, à la mécanique, à l’astronomie. Schmidt nous aide à concev
3866
à l’obstétrique, à la vénerie, à l’orfèvrerie, à
la
mécanique, à l’astronomie. Schmidt nous aide à concevoir l’espèce de
3867
, à la vénerie, à l’orfèvrerie, à la mécanique, à
l’
astronomie. Schmidt nous aide à concevoir l’espèce de fureur titanique
3868
ue, à l’astronomie. Schmidt nous aide à concevoir
l’
espèce de fureur titanique qui animait ces Renaissants, leur volonté d
3869
nts, leur volonté de « singer Dieu », de recenser
les
objets et les formes, les rythmes et les lois cosmiques, afin de les
3870
nté de « singer Dieu », de recenser les objets et
les
formes, les rythmes et les lois cosmiques, afin de les parfaire par l
3871
ger Dieu », de recenser les objets et les formes,
les
rythmes et les lois cosmiques, afin de les parfaire par le Verbe et,
3872
recenser les objets et les formes, les rythmes et
les
lois cosmiques, afin de les parfaire par le Verbe et, finalement, de
3873
ormes, les rythmes et les lois cosmiques, afin de
les
parfaire par le Verbe et, finalement, de s’en rendre maîtres. Tous so
3874
s et les lois cosmiques, afin de les parfaire par
le
Verbe et, finalement, de s’en rendre maîtres. Tous sont soutenus par
3875
. Tous sont soutenus par une double croyance dans
le
pouvoir magique du langage, et dans la liberté infinie de l’homme, ca
3876
yance dans le pouvoir magique du langage, et dans
la
liberté infinie de l’homme, capable de refaire avec ses mains le Para
3877
magique du langage, et dans la liberté infinie de
l’
homme, capable de refaire avec ses mains le Paradis perdu et les « ges
3878
nie de l’homme, capable de refaire avec ses mains
le
Paradis perdu et les « gestes de Dieu ». Le poète a reçu la vocation
3879
ble de refaire avec ses mains le Paradis perdu et
les
« gestes de Dieu ». Le poète a reçu la vocation de restituer le cosmo
3880
mains le Paradis perdu et les « gestes de Dieu ».
Le
poète a reçu la vocation de restituer le cosmos à l’état adamique, d’
3881
perdu et les « gestes de Dieu ». Le poète a reçu
la
vocation de restituer le cosmos à l’état adamique, d’effacer les trac
3882
Dieu ». Le poète a reçu la vocation de restituer
le
cosmos à l’état adamique, d’effacer les traces du péché, de retrouver
3883
poète a reçu la vocation de restituer le cosmos à
l’
état adamique, d’effacer les traces du péché, de retrouver les noms ré
3884
restituer le cosmos à l’état adamique, d’effacer
les
traces du péché, de retrouver les noms réels et les « signatures » pr
3885
ique, d’effacer les traces du péché, de retrouver
les
noms réels et les « signatures » primitives dans le jeu des symboles
3886
s traces du péché, de retrouver les noms réels et
les
« signatures » primitives dans le jeu des symboles et des corresponda
3887
noms réels et les « signatures » primitives dans
le
jeu des symboles et des correspondances. C’est l’ambition que refoule
3888
le jeu des symboles et des correspondances. C’est
l’
ambition que refoulera trop aisément notre âge classique, et que ressu
3889
sément notre âge classique, et que ressusciteront
les
romantiques allemands, à partir de Hamann et de Herder. La création e
3890
iques allemands, à partir de Hamann et de Herder.
La
création entière, disait Hamann, est « un discours adressé à la créat
3891
tière, disait Hamann, est « un discours adressé à
la
créature au moyen de la créature : car un jour le redit au suivant, u
3892
t « un discours adressé à la créature au moyen de
la
créature : car un jour le redit au suivant, une nuit l’annonce à l’au
3893
la créature au moyen de la créature : car un jour
le
redit au suivant, une nuit l’annonce à l’autre. Cette parole traverse
3894
ature : car un jour le redit au suivant, une nuit
l’
annonce à l’autre. Cette parole traverse tous les climats, jusqu’aux c
3895
t l’annonce à l’autre. Cette parole traverse tous
les
climats, jusqu’aux confins du monde, et l’on perçoit sa voix dans cha
3896
tous les climats, jusqu’aux confins du monde, et
l’
on perçoit sa voix dans chaque dialecte ». Nous l’avons perçue de nos
3897
l’on perçoit sa voix dans chaque dialecte ». Nous
l’
avons perçue de nos jours, dans le dialecte d’un Claudel, parfois même
3898
ialecte ». Nous l’avons perçue de nos jours, dans
le
dialecte d’un Claudel, parfois même dans celui de tel surréaliste. Ma
3899
est-il encore formulable en noms et en rythmes ?
La
science moderne ne tend-elle point à nous le rendre proprement inimag
3900
es ? La science moderne ne tend-elle point à nous
le
rendre proprement inimaginable ? N’a-t-elle pas dissocié Nombre et Ve
3901
re et Verbe au point de rendre puérile à nos yeux
l’
ambition d’un lyrisme cosmique ? 52. Un exemple au hasard. Ce vers d
3902
? 52. Un exemple au hasard. Ce vers de Baïf : «
L’
huître dans son écaille essaie sa puissance » amène Schmidt à citer Ma
3903
de la Boderie, Ronsard, Psellos, M. Laumonier, et
les
philosophes mystiques de la Renaissance qui « considéraient l’huître
3904
os, M. Laumonier, et les philosophes mystiques de
la
Renaissance qui « considéraient l’huître comme un condensateur du flu
3905
s mystiques de la Renaissance qui « considéraient
l’
huître comme un condensateur du fluide vital circulant par l’univers »
3906
mme un condensateur du fluide vital circulant par
l’
univers ». Voilà de la belle érudition qui signifie. C’est une manière
3907
fluide vital circulant par l’univers ». Voilà de
la
belle érudition qui signifie. C’est une manière de poésie que bien pe
3908
Denis de, « [Compte rendu] Albert-Marie Schmidt,
La
Poésie scientifique en France au XVIe siècle », La Nouvelle Revue fr
3909
Poésie scientifique en France au XVIe siècle »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, septembre 1939, p. 486-488.
3910
nnête, et moins encore adroit, de ne point avouer
l’
incertitude où pareil livre entraîne le jugement. Gide a tant répété :
3911
int avouer l’incertitude où pareil livre entraîne
le
jugement. Gide a tant répété : Ne jugez pas ! qu’il a fini par se ren
3912
, et d’abord, quant à soi ? On renonce aisément à
le
fixer dans l’une ou l’autre des figures qu’il nous révèle au cours de
3913
s qu’il nous révèle au cours de ce Journal ; mais
le
malaise du critique commence au-delà de ce premier piège évité. Il na
3914
nce au-delà de ce premier piège évité. Il naît de
la
difficulté à découvrir l’intime hiérarchie qui trahirait la vraie per
3915
piège évité. Il naît de la difficulté à découvrir
l’
intime hiérarchie qui trahirait la vraie personne dans ce complexe ind
3916
lté à découvrir l’intime hiérarchie qui trahirait
la
vraie personne dans ce complexe individuel. D’autant plus que certain
3917
n drame secret, un nœud vital où peut-être réside
la
cause des plus étranges contradictions qu’il subit ou qu’il entretien
3918
fenêtres par excessive défiance d’une symétrie où
l’
on serait tenté de s’arrêter…) Faute d’un « jugement » que ces treize
3919
ythme, idées ou lyrisme —, mais bien plutôt c’est
la
complexité secrètement significative de l’ensemble. Pour qualifier ce
3920
c’est la complexité secrètement significative de
l’
ensemble. Pour qualifier cette harmonie involontaire, je ne puis évoqu
3921
tte harmonie involontaire, je ne puis évoquer que
l’
exemple de Goethe, dont ce n’est pas telle œuvre ou telle action que j
3922
telle œuvre ou telle action que j’aime, mais bien
le
paysage vital, avec ses temps voilés et ses soleils, ses parcs, ses f
3923
leils, ses parcs, ses friches et ses habitations.
Le
phénomène-Goethe, dans l’espace et le temps, voilà qui donnerait une
3924
hes et ses habitations. Le phénomène-Goethe, dans
l’
espace et le temps, voilà qui donnerait une idée de l’espèce d’intérêt
3925
abitations. Le phénomène-Goethe, dans l’espace et
le
temps, voilà qui donnerait une idée de l’espèce d’intérêt que l’on pr
3926
pace et le temps, voilà qui donnerait une idée de
l’
espèce d’intérêt que l’on prend à lire le Journal d’André Gide. Il est
3927
qui donnerait une idée de l’espèce d’intérêt que
l’
on prend à lire le Journal d’André Gide. Il est probable que, du seul
3928
idée de l’espèce d’intérêt que l’on prend à lire
le
Journal d’André Gide. Il est probable que, du seul point de vue de l’
3929
ide. Il est probable que, du seul point de vue de
l’
art, cet intérêt demeure impur : l’indiscrétion moderne va chercher de
3930
oint de vue de l’art, cet intérêt demeure impur :
l’
indiscrétion moderne va chercher derrière les formes et au-dessous d’e
3931
pur : l’indiscrétion moderne va chercher derrière
les
formes et au-dessous d’elles, dans le tout venant de confidences frag
3932
r derrière les formes et au-dessous d’elles, dans
le
tout venant de confidences fragmentaires, une vérité que les œuvres c
3933
nant de confidences fragmentaires, une vérité que
les
œuvres concertées avouaient peut-être beaucoup mieux. Il est probable
3934
ut-être beaucoup mieux. Il est probable aussi que
le
journal est un genre littéraire inférieur, pour cette raison qu’il es
3935
l est toujours trop facilement intéressant. Je ne
le
conçois, comme œuvre d’art, que limité au récit d’une crise, et soumi
3936
ne sorte d’unité qui fait nécessairement défaut à
la
chronique intermittente d’une existence. Malgré les pages plus élabor
3937
a chronique intermittente d’une existence. Malgré
les
pages plus élaborées que Gide a groupées ça et là sous des titres par
3938
es titres particuliers (Feuillets, Numquid et tu,
La
Marche turque, etc.), malgré la perfection constante de l’écriture, e
3939
s, Numquid et tu, La Marche turque, etc.), malgré
la
perfection constante de l’écriture, et toutes ces aquarelles et ces t
3940
turque, etc.), malgré la perfection constante de
l’
écriture, et toutes ces aquarelles et ces tableaux de genre où s’amuse
3941
et ces tableaux de genre où s’amuse et s’attarde
la
maîtrise, on peut prévoir que la valeur d’un tel ouvrage restera d’or
3942
use et s’attarde la maîtrise, on peut prévoir que
la
valeur d’un tel ouvrage restera d’ordre essentiellement biographique.
3943
re essentiellement biographique. Mais ici se pose
le
problème de la vérité du portrait, Gide note lui-même dès 1924 : « Si
3944
ent biographique. Mais ici se pose le problème de
la
vérité du portrait, Gide note lui-même dès 1924 : « Si plus tard on p
3945
u’il ne donne de moi une idée assez fausse. Je ne
l’
ai point tenu durant les longues périodes d’équilibre, de santé, de bo
3946
e idée assez fausse. Je ne l’ai point tenu durant
les
longues périodes d’équilibre, de santé, de bonheur ; mais bien durant
3947
jalousement qu’aucun autre. Est-ce vraiment pour
le
diminuer qu’il anticipe sur ce risque ? Ou pour déconcerter ses juges
3948
ée. J’imaginerais plutôt que Gide est fasciné par
l’
obstacle qu’il veut éviter. Son horreur du malentendu l’entraîne à liv
3949
acle qu’il veut éviter. Son horreur du malentendu
l’
entraîne à livrer au public treize cents pages d’explications qui mena
3950
ents pages d’explications qui menacent d’aggraver
l’
équivoque. Mais alors cela devient exemplaire. L’effort gidien pour éc
3951
l’équivoque. Mais alors cela devient exemplaire.
L’
effort gidien pour échapper aux trompeuses stylisations des morales et
3952
ut faits n’est plus seulement émouvant : il revêt
la
valeur d’une expérience cruciale sur les limites de la sincérité en g
3953
il revêt la valeur d’une expérience cruciale sur
les
limites de la sincérité en général, et du journal intime en particuli
3954
leur d’une expérience cruciale sur les limites de
la
sincérité en général, et du journal intime en particulier. La passion
3955
en général, et du journal intime en particulier.
La
passion d’être complètement vrai finit par altérer le naturel ; mais
3956
assion d’être complètement vrai finit par altérer
le
naturel ; mais par son excès même, elle nous rend attentifs aux défau
3957
réguliers de tout autoportrait. C’est nous donner
le
moyen d’y porter nos retouches. ⁂ Parfois, le secret d’une vie s’épui
3958
ner le moyen d’y porter nos retouches. ⁂ Parfois,
le
secret d’une vie s’épuise dans l’œuvre ; il ne reste pour le journal
3959
hes. ⁂ Parfois, le secret d’une vie s’épuise dans
l’
œuvre ; il ne reste pour le journal que les plus sèches notations (Byr
3960
’une vie s’épuise dans l’œuvre ; il ne reste pour
le
journal que les plus sèches notations (Byron, Stendhal). D’autres foi
3961
se dans l’œuvre ; il ne reste pour le journal que
les
plus sèches notations (Byron, Stendhal). D’autres fois, l’œuvre et le
3962
èches notations (Byron, Stendhal). D’autres fois,
l’
œuvre et le journal sont simplement des manières différentes de poursu
3963
ions (Byron, Stendhal). D’autres fois, l’œuvre et
le
journal sont simplement des manières différentes de poursuivre une mê
3964
oursuivre une même confidence. On ne sait plus si
le
journal est en marge de l’œuvre, ou si l’œuvre n’est qu’un moment pri
3965
ce. On ne sait plus si le journal est en marge de
l’
œuvre, ou si l’œuvre n’est qu’un moment privilégié de ce journal. Alor
3966
plus si le journal est en marge de l’œuvre, ou si
l’
œuvre n’est qu’un moment privilégié de ce journal. Alors le vrai portr
3967
’est qu’un moment privilégié de ce journal. Alors
le
vrai portrait de l’auteur n’est plus dans l’œuvre ni dans le journal,
3968
ivilégié de ce journal. Alors le vrai portrait de
l’
auteur n’est plus dans l’œuvre ni dans le journal, mais dans leur mutu
3969
lors le vrai portrait de l’auteur n’est plus dans
l’
œuvre ni dans le journal, mais dans leur mutuelle réfraction. Et par e
3970
trait de l’auteur n’est plus dans l’œuvre ni dans
le
journal, mais dans leur mutuelle réfraction. Et par exemple, les chos
3971
is dans leur mutuelle réfraction. Et par exemple,
les
choses tues dans ce recueil — Gide a marqué qu’une grave lacune mutil
3972
ecueil — Gide a marqué qu’une grave lacune mutile
l’
image qu’il nous y livre de lui-même53 —, il se peut qu’elles soient d
3973
i-même53 —, il se peut qu’elles soient dites dans
Les
Cahiers d’André Walter, et surtout dans La Porte étroite, ce roman ja
3974
dans Les Cahiers d’André Walter, et surtout dans
La
Porte étroite, ce roman janséniste et « cathare »… ⁂ D’autres causes
3975
D’autres causes d’erreur interviennent, faussant
les
proportions de l’autoportrait, si l’on se borne au seul journal. « Le
3976
erreur interviennent, faussant les proportions de
l’
autoportrait, si l’on se borne au seul journal. « Les choses les plus
3977
t, faussant les proportions de l’autoportrait, si
l’
on se borne au seul journal. « Les choses les plus importantes à dire
3978
autoportrait, si l’on se borne au seul journal. «
Les
choses les plus importantes à dire sont celles que souvent je n’ai pa
3979
t, si l’on se borne au seul journal. « Les choses
les
plus importantes à dire sont celles que souvent je n’ai pas cru devoi
3980
eption justement. Et comment ne céderait-on pas à
l’
invite d’une formule, d’une épigramme sur tel ami dont il semble inuti
3981
nt il semble inutile de répéter chaque fois qu’on
l’
aime ? Ainsi l’on se peint plus « rosse » que nature. Gide lui-même, à
3982
utile de répéter chaque fois qu’on l’aime ? Ainsi
l’
on se peint plus « rosse » que nature. Gide lui-même, à ce jeu, ne s’e
3983
qui s’amuse — doublé d’un pasteur protestant qui
l’
ennuie. » Type de boutade dont certains, contre lui, ne se priveront p
3984
iveront pas d’abuser. Voici qui va fort loin dans
la
critique du genre : « Je ne pense pas qu’il y ait grand profit à tire
3985
nd profit à tirer de ces examens de conscience où
l’
on parvient toujours à découvrir de mesquins ressorts à n’importe quel
3986
squins ressorts à n’importe quel comportement. On
les
inventerait même, pour la satisfaction de se paraître à soi-même plus
3987
quel comportement. On les inventerait même, pour
la
satisfaction de se paraître à soi-même plus perspicace, et l’on a gra
3988
ion de se paraître à soi-même plus perspicace, et
l’
on a grande tendance, par contre, à négliger, de peur de se surfaire,
3989
aimable. Mais à trop se regarder, on ne vit plus.
Le
regard, ici, crée ce qu’il cherche… » Or, en écrivant cela, Gide n’a-
3990
Or, en écrivant cela, Gide n’a-t-il point cédé à
la
tentation qu’il décrit ? Cercle vicieux de la sincérité. Ou bien l’on
3991
é à la tentation qu’il décrit ? Cercle vicieux de
la
sincérité. Ou bien l’on est banal pour rétablir les quotidiennes prop
3992
décrit ? Cercle vicieux de la sincérité. Ou bien
l’
on est banal pour rétablir les quotidiennes proportions — ou bien l’on
3993
a sincérité. Ou bien l’on est banal pour rétablir
les
quotidiennes proportions — ou bien l’on ne consent à noter que l’impo
3994
r rétablir les quotidiennes proportions — ou bien
l’
on ne consent à noter que l’important, c’est-à-dire ce qui frappe ce j
3995
proportions — ou bien l’on ne consent à noter que
l’
important, c’est-à-dire ce qui frappe ce jour-là, et l’on se fait trop
3996
ortant, c’est-à-dire ce qui frappe ce jour-là, et
l’
on se fait trop pittoresque. En somme, le journal exigerait une discip
3997
r-là, et l’on se fait trop pittoresque. En somme,
le
journal exigerait une discipline plus grande encore que celle de l’œu
3998
it une discipline plus grande encore que celle de
l’
œuvre : il faudrait s’imposer un rythme égal et sans lacunes, une rela
3999
et monotone des petits faits, situant exactement
l’
apparition de telle pensée ou de tel acte exceptionnel… ⁂ Les journaux
4000
on de telle pensée ou de tel acte exceptionnel… ⁂
Les
journaux d’écrivains sont vrais, mais d’une vérité indirecte, et parf
4001
indirecte, et parfois même négative. C’est moins
la
vie vécue qui s’y traduit, que le désir de compenser ou de parfaire c
4002
ve. C’est moins la vie vécue qui s’y traduit, que
le
désir de compenser ou de parfaire ce qui n’a pas été vécu, ou mal véc
4003
u. (« J’avais besoin de lui pour me ressaisir ».)
La
vie réelle n’y figure souvent qu’à la manière dont elle figure dans l
4004
ssaisir ».) La vie réelle n’y figure souvent qu’à
la
manière dont elle figure dans les rêves. Compensations, ratures, repr
4005
ure souvent qu’à la manière dont elle figure dans
les
rêves. Compensations, ratures, reprises d’actes manqués… Il s’agirait
4006
prises d’actes manqués… Il s’agirait de savoir si
la
vraie vie est dans ce qu’on fait, ou dans ce qu’on pense de ses actio
4007
ns ce qu’on pense de ses actions. (Voir là-dessus
la
note dramatique datée du 5 janvier 1902.) ⁂ Mais voici qu’à mon tour
4008
ici qu’à mon tour je succombe au désir de marquer
les
seules différences, oubliant ce qui va de soi : l’autoportrait de Gid
4009
s seules différences, oubliant ce qui va de soi :
l’
autoportrait de Gide est aussi ressemblant. On l’y retrouve aussi au n
4010
l’autoportrait de Gide est aussi ressemblant. On
l’
y retrouve aussi au naturel, avec toutes ses curiosités, son admirable
4011
le modestie et ses malices, son sens rythmique de
la
langue toujours si fermement articulée (habitude des lectures à haute
4012
sautes d’humeur, et ce besoin de donner raison à
l’
adversaire…54 On l’y retrouve naturaliste à la manière goethéenne, et
4013
t ce besoin de donner raison à l’adversaire…54 On
l’
y retrouve naturaliste à la manière goethéenne, et musicien comme Goet
4014
n à l’adversaire…54 On l’y retrouve naturaliste à
la
manière goethéenne, et musicien comme Goethe encore se voulait peintr
4015
peintre (mais Gide est, je crois, plus doué). On
l’
y découvre enfin, et cela me paraît nouveau, constamment occupé de pro
4016
e spécifier. ⁂ A-t-on remarqué jusqu’à quel point
l’
« antichristianisme » de Gide est chrétien dans ses déterminations ? J
4017
laissé prendre à sa perpétuelle polémique contre
les
convertis-convertisseurs. Il faudrait voir que pour lui, le problème
4018
is-convertisseurs. Il faudrait voir que pour lui,
le
problème proprement religieux s’est posé, et se pose encore, dans des
4019
s termes qui échappent, presque nécessairement, à
la
sollicitude des catholiques. Gide fut élevé dans un milieu où la reli
4020
des catholiques. Gide fut élevé dans un milieu où
la
religion paraissait se réduire à ces deux éléments que Calvin considè
4021
ns doute une propension fondamentale à préférer à
la
lettre du dogme l’esprit qui inspire et qualifie nos actions quotidie
4022
sion fondamentale à préférer à la lettre du dogme
l’
esprit qui inspire et qualifie nos actions quotidiennes, fussent-elles
4023
a bientôt fait de se muer à son tour en dogme, et
la
morale protestante succombe à ce danger plus qu’aucune autre dans les
4024
te succombe à ce danger plus qu’aucune autre dans
les
périodes de dépression théologique. D’où le ressentiment qu’à son éga
4025
dans les périodes de dépression théologique. D’où
le
ressentiment qu’à son égard conçoivent beaucoup de « protestants de n
4026
ucoup de « protestants de naissance » détachés de
la
vie de leur église, et subissant seulement la coutume d’un milieu. To
4027
de la vie de leur église, et subissant seulement
la
coutume d’un milieu. Tout à fait justifiée en soi, cette réaction gau
4028
on gauchit parfois certains jugements de Gide sur
la
Réforme. (Il la confond souvent, me semble-t-il, avec l’image courant
4029
is certains jugements de Gide sur la Réforme. (Il
la
confond souvent, me semble-t-il, avec l’image courante et fausse d’un
4030
rme. (Il la confond souvent, me semble-t-il, avec
l’
image courante et fausse d’un Calvin inhumain, presque manichéen.) L’é
4031
fausse d’un Calvin inhumain, presque manichéen.)
L’
évangélisme, hérité malgré tout de cette première éducation chrétienne
4032
lgré tout de cette première éducation chrétienne,
l’
a mis en garde contre certaines altérations, les plus fréquentes, du c
4033
e, l’a mis en garde contre certaines altérations,
les
plus fréquentes, du christianisme : le mépris de la nature, et d’autr
4034
érations, les plus fréquentes, du christianisme :
le
mépris de la nature, et d’autre part, le recours à l’orthodoxie comme
4035
plus fréquentes, du christianisme : le mépris de
la
nature, et d’autre part, le recours à l’orthodoxie comme à une assura
4036
anisme : le mépris de la nature, et d’autre part,
le
recours à l’orthodoxie comme à une assurance prise sur le Saint-Espri
4037
épris de la nature, et d’autre part, le recours à
l’
orthodoxie comme à une assurance prise sur le Saint-Esprit autant que
4038
rs à l’orthodoxie comme à une assurance prise sur
le
Saint-Esprit autant que sur le doute. (Il cite ce mot d’un catholique
4039
ssurance prise sur le Saint-Esprit autant que sur
le
doute. (Il cite ce mot d’un catholique à un pasteur : « Vous, vous cr
4040
s croyez, mais nous savons ! ») Ceci explique que
le
souci central de Gide ait été de débarrasser son christianisme de tou
4041
it été de débarrasser son christianisme de toutes
les
adjonctions « humaines — trop humaines » du moralisme néo-protestant
4042
certains chrétiens désireraient lui « révéler ».
Le
problème de la conversion devient pour lui le problème négatif du ref
4043
iens désireraient lui « révéler ». Le problème de
la
conversion devient pour lui le problème négatif du refus de la fausse
4044
». Le problème de la conversion devient pour lui
le
problème négatif du refus de la fausse conversion, ou de la conversio
4045
devient pour lui le problème négatif du refus de
la
fausse conversion, ou de la conversion trop « facile ». « Je ne suis
4046
e négatif du refus de la fausse conversion, ou de
la
conversion trop « facile ». « Je ne suis ni protestant ni catholique,
4047
al tel qu’il se développa au siècle dernier. « Je
l’
ai souvent dit à Claudel : Ce qui me retient [d’entrer dans l’église],
4048
dit à Claudel : Ce qui me retient [d’entrer dans
l’
église], ce n’est pas la libre pensée, c’est l’Évangile. » Mais n’y a-
4049
me retient [d’entrer dans l’église], ce n’est pas
la
libre pensée, c’est l’Évangile. » Mais n’y a-t-il pas, à l’origine de
4050
ns l’église], ce n’est pas la libre pensée, c’est
l’
Évangile. » Mais n’y a-t-il pas, à l’origine de ce refus de toute égli
4051
ensée, c’est l’Évangile. » Mais n’y a-t-il pas, à
l’
origine de ce refus de toute église (tant reformée que catholique), un
4052
forcé de s’asseoir au culte de famille. Sa gêne.
L’
horreur du geste qui puisse dépasser son sentiment… » Kierkegaard, lui
4053
’était par désir de sauver une conception pure de
la
foi, dont il ne s’estimait pas digne, et qu’il confessait par là même
4054
médiablement, s’éprouve complexe et réticente. Et
l’
acte de foi consistera toujours à passer outre au doute naturel, à con
4055
passer outre au doute naturel, à confesser ce que
la
chair ni le sang par eux-mêmes ne sauraient confesser. Alors seulemen
4056
au doute naturel, à confesser ce que la chair ni
le
sang par eux-mêmes ne sauraient confesser. Alors seulement pourrait s
4057
Alors seulement pourrait se poser en termes nets
le
problème de l’église visible, de l’obéissance à une orthodoxie qui ne
4058
t pourrait se poser en termes nets le problème de
l’
église visible, de l’obéissance à une orthodoxie qui ne prétende pas s
4059
n termes nets le problème de l’église visible, de
l’
obéissance à une orthodoxie qui ne prétende pas s’emparer de l’Évangil
4060
à une orthodoxie qui ne prétende pas s’emparer de
l’
Évangile, mais au contraire s’y ordonner. « Orthodoxie protestante — é
4061
et si j’en reconnaissais une, ce serait celle de
l’
Église » (donc de Rome). Allons donc ! Pour un protestant, ce dilemme
4062
un protestant, ce dilemme est aussi choquant que
le
serait pour un Anglais ou un Scandinave le dilemme entre l’anarchie e
4063
nt que le serait pour un Anglais ou un Scandinave
le
dilemme entre l’anarchie et l’étatisme totalitaire. Assimiler l’autor
4064
pour un Anglais ou un Scandinave le dilemme entre
l’
anarchie et l’étatisme totalitaire. Assimiler l’autorité au romanisme
4065
s ou un Scandinave le dilemme entre l’anarchie et
l’
étatisme totalitaire. Assimiler l’autorité au romanisme est d’ailleurs
4066
e l’anarchie et l’étatisme totalitaire. Assimiler
l’
autorité au romanisme est d’ailleurs une erreur des plus courantes, en
4067
chez certains protestants. Tout ce que je me sens
le
droit de dire ici, c’est que la Réforme a rejeté les prétentions du p
4068
ce que je me sens le droit de dire ici, c’est que
la
Réforme a rejeté les prétentions du pape de Rome non par dégoût de l’
4069
droit de dire ici, c’est que la Réforme a rejeté
les
prétentions du pape de Rome non par dégoût de l’autorité en soi, mais
4070
les prétentions du pape de Rome non par dégoût de
l’
autorité en soi, mais au contraire par grande fidélité à l’autorité de
4071
é en soi, mais au contraire par grande fidélité à
l’
autorité de l’Évangile, fondement unique et suffisant de la seule orth
4072
au contraire par grande fidélité à l’autorité de
l’
Évangile, fondement unique et suffisant de la seule orthodoxie libérat
4073
é de l’Évangile, fondement unique et suffisant de
la
seule orthodoxie libératrice. ⁂ Si, malgré son génie du scrupule, Gid
4074
èreté sur des problèmes infiniment complexes (tel
le
communisme, naguère), je pense qu’on le peut expliquer par une certai
4075
exes (tel le communisme, naguère), je pense qu’on
le
peut expliquer par une certaine défiance d’artiste à l’égard des « id
4076
e d’artiste à l’égard des « idées » en soi, et de
l’
information méthodique. C’est par là que je sens le mieux la distance
4077
’information méthodique. C’est par là que je sens
le
mieux la distance qui sépare de la sienne ma génération littéraire. N
4078
ion méthodique. C’est par là que je sens le mieux
la
distance qui sépare de la sienne ma génération littéraire. Notre cult
4079
raire. Non point par préférence, loin de là. Mais
les
problèmes qui se posent à nous, nous n’avons pas pu les choisir, et e
4080
oblèmes qui se posent à nous, nous n’avons pas pu
les
choisir, et encore moins les circonscrire dans un domaine privilégié.
4081
nous n’avons pas pu les choisir, et encore moins
les
circonscrire dans un domaine privilégié. Ils nous contraignent parfoi
4082
antage qu’ils ne servent nos goûts naturels, d’où
le
danger de didactisme que nous courons tous plus ou moins. À cet égard
4083
ous plus ou moins. À cet égard, il m’apparaît que
la
leçon de Gide, pour ceux de mon âge, est moins urgente dans l’ordre d
4084
ide, pour ceux de mon âge, est moins urgente dans
l’
ordre de l’éthique, que dans celui de l’esthétique. C’est le maître-ar
4085
eux de mon âge, est moins urgente dans l’ordre de
l’
éthique, que dans celui de l’esthétique. C’est le maître-artisan de la
4086
ente dans l’ordre de l’éthique, que dans celui de
l’
esthétique. C’est le maître-artisan de la langue, plus que l’immoralis
4087
l’éthique, que dans celui de l’esthétique. C’est
le
maître-artisan de la langue, plus que l’immoraliste, qui nous importe
4088
celui de l’esthétique. C’est le maître-artisan de
la
langue, plus que l’immoraliste, qui nous importe, et qui nous intéres
4089
e. C’est le maître-artisan de la langue, plus que
l’
immoraliste, qui nous importe, et qui nous intéresse au double sens du
4090
ienne encore. Elle n’exclut aucun revirement dans
les
générations qui nous suivront : je prévois le jour où nos cadets nous
4091
ns les générations qui nous suivront : je prévois
le
jour où nos cadets nous opposeront l’exemple du probe adversaire des
4092
je prévois le jour où nos cadets nous opposeront
l’
exemple du probe adversaire des orthodoxies orgueilleuses, « André Gid
4093
pos, qu’il faut se forcer pour n’abandonner point
les
positions auxquelles on tient, et qui ne sont pas exactement les sien
4094
Compte rendu] Au sujet du Journal d’André Gide »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, janvier 1940, p. 24-32.
4095
Hommage à C. F. Ramuz (mai 1940)as
Le
plus intéressant dans un recueil de mélanges ou d’hommages, c’est en
4096
cueil de mélanges ou d’hommages, c’est en général
le
sommaire : cette fois encore. Voici le noyau des premiers ramuziens (
4097
en général le sommaire : cette fois encore. Voici
le
noyau des premiers ramuziens (à peu près le groupe des Cahiers vaudoi
4098
Voici le noyau des premiers ramuziens (à peu près
le
groupe des Cahiers vaudois), les deux Cingria, le peintre Auberjonois
4099
ziens (à peu près le groupe des Cahiers vaudois),
les
deux Cingria, le peintre Auberjonois, Ansermet, Stravinsky. Claudel y
4100
le groupe des Cahiers vaudois), les deux Cingria,
le
peintre Auberjonois, Ansermet, Stravinsky. Claudel y touche de près.
4101
eau y a des souvenirs, Maritain des amitiés. Pour
la
fête, on a invité quelques étrangers de marque : Thomas Mann, Zweig,
4102
angers de marque : Thomas Mann, Zweig, Valéry. Et
les
quatre langues suisses — n’oubliez pas le ladin des Grisons — viennen
4103
ry. Et les quatre langues suisses — n’oubliez pas
le
ladin des Grisons — viennent dire au dessert leur couplet. Ce complex
4104
t. Ce complexe de mystique paysanne, de goût de «
l’
authentique », de musique russe, d’avant-garde ascétique, d’humour vau
4105
e Genève mais à celle des troubadours, voilà bien
la
constellation ramuzienne. Rien de plus « Suisse » que ces créations s
4106
Bâle au temps de Burckhardt et de Nietzsche… Mais
le
centre vaudois s’est distingué par sa méfiance à l’égard des « idées
4107
« idées ». Son particularisme approfondi rejoint
l’
universel par les racines. C’est, comme ils disent, de la vraie « cult
4108
particularisme approfondi rejoint l’universel par
les
racines. C’est, comme ils disent, de la vraie « culture ». Il faut me
4109
rsel par les racines. C’est, comme ils disent, de
la
vraie « culture ». Il faut mettre hors de pair, dans ce recueil, le P
4110
». Il faut mettre hors de pair, dans ce recueil,
le
Petit Ramusianum harmonique de Ch.-A. Cingria et Stravinsky : l’humou
4111
anum harmonique de Ch.-A. Cingria et Stravinsky :
l’
humour de l’authentique, si caractéristique du cercle ramuzien, s’y tr
4112
que de Ch.-A. Cingria et Stravinsky : l’humour de
l’
authentique, si caractéristique du cercle ramuzien, s’y traduit en mir
4113
ent travaillé et simplifié, cet œil halluciné par
le
réel, c’est tout l’art de Ramuz exposé. Ici, tout le mystère se mue e
4114
plifié, cet œil halluciné par le réel, c’est tout
l’
art de Ramuz exposé. Ici, tout le mystère se mue en forme et en physio
4115
réel, c’est tout l’art de Ramuz exposé. Ici, tout
le
mystère se mue en forme et en physionomie lisible. Enfin, l’on est au
4116
se mue en forme et en physionomie lisible. Enfin,
l’
on est au-delà de la psychologie. « N’allez pas chercher derrière la f
4117
n physionomie lisible. Enfin, l’on est au-delà de
la
psychologie. « N’allez pas chercher derrière la forme, disait Goethe,
4118
e la psychologie. « N’allez pas chercher derrière
la
forme, disait Goethe, elle est elle-même enseignement. » as. Rouge
4119
is de, « [Compte rendu] Hommage à C. F. Ramuz »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, mai 1940, p. 697-698.
4120
nous connaissions peu, ce jour de juin 39 où dans
le
hall de la rue Sébastien-Bottin, j’étais en train de téléphoner quand
4121
ssions peu, ce jour de juin 39 où dans le hall de
la
rue Sébastien-Bottin, j’étais en train de téléphoner quand je le vois
4122
n-Bottin, j’étais en train de téléphoner quand je
le
vois descendre l’escalier. Je parle en le suivant d’un œil. Il s’arrê
4123
en train de téléphoner quand je le vois descendre
l’
escalier. Je parle en le suivant d’un œil. Il s’arrête, il paraît atte
4124
uand je le vois descendre l’escalier. Je parle en
le
suivant d’un œil. Il s’arrête, il paraît attendre. Je pose le récepte
4125
’un œil. Il s’arrête, il paraît attendre. Je pose
le
récepteur et nous sortons. Nous voici sur un banc du boulevard Saint-
4126
ous voici sur un banc du boulevard Saint-Germain.
Les
autos passent tout près. Je l’entends dire, dans le bruit : « Où habi
4127
rd Saint-Germain. Les autos passent tout près. Je
l’
entends dire, dans le bruit : « Où habitez-vous maintenant ? » Je crie
4128
autos passent tout près. Je l’entends dire, dans
le
bruit : « Où habitez-vous maintenant ? » Je crie que je l’ignore, dev
4129
: « Où habitez-vous maintenant ? » Je crie que je
l’
ignore, devant quitter demain la maison de Charles Du Bos qui rentre d
4130
» Je crie que je l’ignore, devant quitter demain
la
maison de Charles Du Bos qui rentre d’Amérique, et je viens d’apprend
4131
en se levant : « Eh bien ! si c’est ainsi, allons
le
voir de ce pas, voulez-vous ? » Alors, seulement, je comprends qu’il
4132
e comprends qu’il avait dit : « J’ai un studio… »
Le
lendemain matin, très tôt, nous arrivons chez lui, ma femme et moi. L
4133
rès tôt, nous arrivons chez lui, ma femme et moi.
Le
studio est vaste et plaisant, agrémenté d’un escalier conduisant à un
4134
e galerie. Par une porte capitonnée qui donne sur
la
bibliothèque où il travaille, Gide apparaît en robe de chambre grise,
4135
ravaille, Gide apparaît en robe de chambre grise,
le
corps un peu tassé et de large carrure, sa belle tête de moine tibéta
4136
poches, il tire deux bouteilles de bière et nous
les
offre. Au milieu du studio pend un trapèze. Gide s’y appuie des deux
4137
c’est inquiétant. Cela me ferait presque croire à
la
Providence !… Mais dites-moi, Rougemont, quand on saura que vous habi
4138
n va dire que c’est un complot de protestants ! »
Le
mot ne manque pas de pertinence. Tous les matins, vers onze heures, i
4139
ants ! » Le mot ne manque pas de pertinence. Tous
les
matins, vers onze heures, il viendra entrouvrir la porte capitonnée,
4140
s matins, vers onze heures, il viendra entrouvrir
la
porte capitonnée, en s’annonçant par un profond « Allô ! Allô ! » et
4141
quelques instants. Et, chaque fois, il orientera
la
conversation vers des sujets religieux ou même théologiques, comme si
4142
tait précisément pour m’en parler qu’il m’offrait
l’
hospitalité. Saint Paul reste sa bête noire. Et l’idée même d’orthodox
4143
l’hospitalité. Saint Paul reste sa bête noire. Et
l’
idée même d’orthodoxie. Il nie vivement que le terme d’orthodoxie prot
4144
Et l’idée même d’orthodoxie. Il nie vivement que
le
terme d’orthodoxie protestante puisse avoir un sens. Le protestant, p
4145
me d’orthodoxie protestante puisse avoir un sens.
Le
protestant, pour lui, c’est l’opposant. (Comme on le croit généraleme
4146
sse avoir un sens. Le protestant, pour lui, c’est
l’
opposant. (Comme on le croit généralement en France.) Les gênes fécond
4147
protestant, pour lui, c’est l’opposant. (Comme on
le
croit généralement en France.) Les gênes fécondes qu’il demandait jad
4148
sant. (Comme on le croit généralement en France.)
Les
gênes fécondes qu’il demandait jadis qu’on rende à l’art, la « critiq
4149
ênes fécondes qu’il demandait jadis qu’on rende à
l’
art, la « critique dogmatique » des grandes époques, ne sont plus que
4150
condes qu’il demandait jadis qu’on rende à l’art,
la
« critique dogmatique » des grandes époques, ne sont plus que mensong
4151
es, ne sont plus que mensonges à ses yeux dès que
l’
on passe à l’ordre spirituel. Peut-être ne songe-t-il qu’à la morale ?
4152
lus que mensonges à ses yeux dès que l’on passe à
l’
ordre spirituel. Peut-être ne songe-t-il qu’à la morale ? « En somme,
4153
à l’ordre spirituel. Peut-être ne songe-t-il qu’à
la
morale ? « En somme, lui dis-je, vous vous en tenez au protestantisme
4154
, vous vous en tenez au protestantisme libéral de
la
fin du xixe siècle ? » — « Oui, c’est assez cela, la position du pas
4155
in du xixe siècle ? » — « Oui, c’est assez cela,
la
position du pasteur Roberty, que j’aimais bien. » Vite lassé par les
4156
teur Roberty, que j’aimais bien. » Vite lassé par
les
débats d’idées, il semble répugner à toute pensée qui par le style d’
4157
’idées, il semble répugner à toute pensée qui par
le
style d’abord ne l’ait séduit. Il me parle souvent des Variations de
4158
pugner à toute pensée qui par le style d’abord ne
l’
ait séduit. Il me parle souvent des Variations de Bossuet, avec une vi
4159
. Marquant ainsi bien franchement ses limites, et
les
moyens particuliers de sa recherche. Sur un seul de ces entretiens, j
4160
ris des notes. C’est celui du 20 juin. J’avais eu
l’
impression ce jour-là que Gide passait la prudence dans l’aveu, qu’il
4161
avais eu l’impression ce jour-là que Gide passait
la
prudence dans l’aveu, qu’il me disait ce qu’il ne pouvait dire, et n’
4162
sion ce jour-là que Gide passait la prudence dans
l’
aveu, qu’il me disait ce qu’il ne pouvait dire, et n’a peut-être jamai
4163
ne pouvait dire, et n’a peut-être jamais répété.
La
conversation s’engage sur L’Amour et l’Occident , qu’il est en train
4164
être jamais répété. La conversation s’engage sur
L’
Amour et l’Occident , qu’il est en train de lire, et dont il me déclar
4165
répété. La conversation s’engage sur L’Amour et
l’
Occident , qu’il est en train de lire, et dont il me déclare, à ma pro
4166
nces et de reniflements, il se met à parler sur «
le
drame de sa vie ». Jeune homme épris et puritain, il a voulu disjoind
4167
ne homme épris et puritain, il a voulu disjoindre
l’
amour et le plaisir. Il croyait que « l’amour hétérosexuel » était d’a
4168
ris et puritain, il a voulu disjoindre l’amour et
le
plaisir. Il croyait que « l’amour hétérosexuel » était d’autant plus
4169
isjoindre l’amour et le plaisir. Il croyait que «
l’
amour hétérosexuel » était d’autant plus pur que rien de charnel ne s’
4170
accentuant, circonflexant le dernier mot. Ce qui
l’
a souvent frappé chez bien des femmes, c’est leur manière « de s’offus
4171
, c’est leur manière « de s’offusquer du désir de
l’
homme ». Plusieurs, mariées, lui ont confié « qu’elles tenaient la lib
4172
eurs, mariées, lui ont confié « qu’elles tenaient
la
libido de leur mari pour quelque chose de morbide. “Cela recommence t
4173
r quelque chose de morbide. “Cela recommence tout
le
temps !” disaient-elles ». Il hoche la tête, trouve cela très curieux
4174
mence tout le temps !” disaient-elles ». Il hoche
la
tête, trouve cela très curieux, n’est-ce pas ? — un éclair de malice
4175
: « J’ai trop longtemps gardé cette illusion que
la
femme n’avait pas besoin du commerce physique, autant que nous. Hélas
4176
s, je ne voyais pas clair. On se trompe ainsi, et
les
conséquences. J’ai été assez bête pour croire cela ! Il ne faut jamai
4177
oué un rôle très grave dans ma vie. » (Frappé par
le
ton de confession, par le ton « c’était mal » de ses propos.) Et, sub
4178
s ma vie. » (Frappé par le ton de confession, par
le
ton « c’était mal » de ses propos.) Et, subitement, après un silence
4179
mer trop, et de n’arriver point à se contraindre.
Les
jours suivants, il me donne à lire, par paquets, les épreuves de son
4180
jours suivants, il me donne à lire, par paquets,
les
épreuves de son Journal en cours d’impression, et sur lequel je vais
4181
ion, et sur lequel je vais écrire un article pour
la
NRF. Il insiste comme il sait insister sur les suppressions qu’il y a
4182
our la NRF. Il insiste comme il sait insister sur
les
suppressions qu’il y a faites. Tout ce qui concerne intimement sa fem
4183
tes. Tout ce qui concerne intimement sa femme — «
le
seul être, dit-il, que j’ai vraiment aimé » — tous ces passages ont é
4184
ent aimé » — tous ces passages ont été coupés. On
les
lira plus tard. Il les a recopiés dans deux cahiers gris d’écolier. U
4185
assages ont été coupés. On les lira plus tard. Il
les
a recopiés dans deux cahiers gris d’écolier. Un soir, il vient m’aver
4186
o me restera ouvert ; que j’y vienne prendre tous
les
livres dont je pourrais avoir besoin… Dès le lendemain, j’y pénètre,
4187
ous les livres dont je pourrais avoir besoin… Dès
le
lendemain, j’y pénètre, bien sûr. Des housses couvrent les meubles, u
4188
main, j’y pénètre, bien sûr. Des housses couvrent
les
meubles, une sorte de vieux drap son grand bureau. Sur l’étoffe, bien
4189
es, une sorte de vieux drap son grand bureau. Sur
l’
étoffe, bien en évidence, un fort cahier gris d’écolier. J’ai lu les p
4190
ières lignes, pour vérifier, et j’ai vite refermé
la
couverture. Pudeur, ou répugnance à donner dans le piège ? Les deux s
4191
a couverture. Pudeur, ou répugnance à donner dans
le
piège ? Les deux sans doute. Combien de fois l’ai-je revu après la gu
4192
e. Pudeur, ou répugnance à donner dans le piège ?
Les
deux sans doute. Combien de fois l’ai-je revu après la guerre ? Souve
4193
s le piège ? Les deux sans doute. Combien de fois
l’
ai-je revu après la guerre ? Souvent, en somme, et dans les lieux les
4194
ux sans doute. Combien de fois l’ai-je revu après
la
guerre ? Souvent, en somme, et dans les lieux les plus divers, « Au V
4195
revu après la guerre ? Souvent, en somme, et dans
les
lieux les plus divers, « Au Vaneau », près de Lausanne, à Neuchâtel,
4196
la guerre ? Souvent, en somme, et dans les lieux
les
plus divers, « Au Vaneau », près de Lausanne, à Neuchâtel, à Berne. M
4197
mérite d’être rapportée, j’entends : qui modifie
le
moins du monde l’image que l’on connaît de lui. Nous parlions style,
4198
portée, j’entends : qui modifie le moins du monde
l’
image que l’on connaît de lui. Nous parlions style, tournures de phras
4199
tends : qui modifie le moins du monde l’image que
l’
on connaît de lui. Nous parlions style, tournures de phrases, Littré.
4200
ement, n’admirant plus, avec quelque ferveur, que
les
ouvrages qu’il se sentait le plus incapable d’écrire : ceux d’un Marc
4201
uelque ferveur, que les ouvrages qu’il se sentait
le
plus incapable d’écrire : ceux d’un Marcel Aymé, d’un Simenon.) À Ber
4202
is une réponse assez vague, m’étonnant surtout de
la
question. Huit jours plus tard, il recevait le prix Nobel. Chez Richa
4203
de la question. Huit jours plus tard, il recevait
le
prix Nobel. Chez Richard Heyd, un soir, à Neuchâtel, l’on jouait au «
4204
x Nobel. Chez Richard Heyd, un soir, à Neuchâtel,
l’
on jouait au « cadavre exquis ». (L’un écrit trois questions, l’autre
4205
me temps trois réponses, puis on lit à haute voix
les
papiers. Jeu de télépathie, plutôt que de hasard.) J’avais écrit, der
4206
’avais écrit, dernière question : « Qu’est-ce que
le
style ? » Catherine, sa fille, lut sa dernière réponse : « L’original
4207
Catherine, sa fille, lut sa dernière réponse : «
L’
originalité du Bipède. » (C’est ainsi qu’on l’appelait dans ce groupe.
4208
: « L’originalité du Bipède. » (C’est ainsi qu’on
l’
appelait dans ce groupe.) Gide s’éclaircit la voix pour observer que l
4209
u’on l’appelait dans ce groupe.) Gide s’éclaircit
la
voix pour observer que le jeu devenait bien personnel, et proposa des
4210
oupe.) Gide s’éclaircit la voix pour observer que
le
jeu devenait bien personnel, et proposa des bouts-rimés. Il y excella
4211
lait. ⁂ Peu d’hommes m’ont donné l’impression que
le
problème religieux existait dans leur vie en tant que problème perman
4212
tant que problème permanent. Écarté, refoulé chez
les
uns ; et chez les autres résolu, croient-ils. Je ne dis pas qu’il tor
4213
permanent. Écarté, refoulé chez les uns ; et chez
les
autres résolu, croient-ils. Je ne dis pas qu’il torturait Gide, hors
4214
turait Gide, hors quelques crises dont nous avons
les
témoignages, mais il restait, pour lui, problème. Gide avait peu d’in
4215
’instinct religieux, et moins encore de goût pour
la
métaphysique. Il préférait ce qu’il jugeait important à ce que d’autr
4216
yrisme.) Et c’est ainsi qu’il réussit à remplacer
le
tragique par la perplexité. Tout cela peut éclairer son attitude enve
4217
t ainsi qu’il réussit à remplacer le tragique par
la
perplexité. Tout cela peut éclairer son attitude envers le christiani
4218
xité. Tout cela peut éclairer son attitude envers
le
christianisme et son mystère. Peu d’instinct religieux chez cet homme
4219
eu d’instinct religieux chez cet homme, alors que
le
christianisme, l’Église et l’Évangile, furent ses constants sujets d’
4220
gieux chez cet homme, alors que le christianisme,
l’
Église et l’Évangile, furent ses constants sujets d’irritation, de nos
4221
et homme, alors que le christianisme, l’Église et
l’
Évangile, furent ses constants sujets d’irritation, de nostalgie ou de
4222
ets d’irritation, de nostalgie ou de perplexité ?
Le
paradoxe n’est qu’apparent. Qu’on n’oublie pas sa formation chrétienn
4223
lectures prolongées et sans cesse renouvelées de
l’
Écriture ; son amour pour le style biblique ; la confusion courante —
4224
cesse renouvelées de l’Écriture ; son amour pour
le
style biblique ; la confusion courante — non seulement puritaine — en
4225
e l’Écriture ; son amour pour le style biblique ;
la
confusion courante — non seulement puritaine — entretenue chez les je
4226
rante — non seulement puritaine — entretenue chez
les
jeunes bourgeois entre tabous sexuels et spiritualité, d’où sa polémi
4227
spiritualité, d’où sa polémique inlassable contre
l’
orthodoxie telle qu’il l’imaginait et dans laquelle il voyait (par err
4228
émique inlassable contre l’orthodoxie telle qu’il
l’
imaginait et dans laquelle il voyait (par erreur) la sanction d’une ce
4229
imaginait et dans laquelle il voyait (par erreur)
la
sanction d’une certaine éthique ; la conversion de quelques-uns de se
4230
(par erreur) la sanction d’une certaine éthique ;
la
conversion de quelques-uns de ses amis ; enfin la piété de sa femme.
4231
la conversion de quelques-uns de ses amis ; enfin
la
piété de sa femme. Ces données biographiques ne font point une nature
4232
ont point une nature. Elles expliquent simplement
l’
insistance du problème aux stades les plus variés de l’évolution de Gi
4233
nt simplement l’insistance du problème aux stades
les
plus variés de l’évolution de Gide. Ce qui l’a vraiment torturé, c’e
4234
istance du problème aux stades les plus variés de
l’
évolution de Gide. Ce qui l’a vraiment torturé, c’est l’éthique, non
4235
s les plus variés de l’évolution de Gide. Ce qui
l’
a vraiment torturé, c’est l’éthique, non le religieux ; la justice et
4236
tion de Gide. Ce qui l’a vraiment torturé, c’est
l’
éthique, non le religieux ; la justice et non le salut ; ce que l’on v
4237
Ce qui l’a vraiment torturé, c’est l’éthique, non
le
religieux ; la justice et non le salut ; ce que l’on vit et comment o
4238
ment torturé, c’est l’éthique, non le religieux ;
la
justice et non le salut ; ce que l’on vit et comment on juge, non la
4239
t l’éthique, non le religieux ; la justice et non
le
salut ; ce que l’on vit et comment on juge, non la connaissance pure,
4240
e religieux ; la justice et non le salut ; ce que
l’
on vit et comment on juge, non la connaissance pure, ni le mystère. Ré
4241
e salut ; ce que l’on vit et comment on juge, non
la
connaissance pure, ni le mystère. Réduisait-il la religion à la moral
4242
et comment on juge, non la connaissance pure, ni
le
mystère. Réduisait-il la religion à la morale ? Je pense plutôt que l
4243
la connaissance pure, ni le mystère. Réduisait-il
la
religion à la morale ? Je pense plutôt que la morale était le lieu de
4244
e pure, ni le mystère. Réduisait-il la religion à
la
morale ? Je pense plutôt que la morale était le lieu de son vrai dram
4245
-il la religion à la morale ? Je pense plutôt que
la
morale était le lieu de son vrai drame, et qu’il ne pouvait approcher
4246
à la morale ? Je pense plutôt que la morale était
le
lieu de son vrai drame, et qu’il ne pouvait approcher la religion que
4247
de son vrai drame, et qu’il ne pouvait approcher
la
religion que dans ce drame. Ainsi, devenir ou redevenir chrétien, ne
4248
venir chrétien, ne pouvait signifier pour lui que
la
sainteté, non l’accueil du mystère, ni l’adhésion à un credo. J’en do
4249
e pouvait signifier pour lui que la sainteté, non
l’
accueil du mystère, ni l’adhésion à un credo. J’en donne la preuve : a
4250
lui que la sainteté, non l’accueil du mystère, ni
l’
adhésion à un credo. J’en donne la preuve : avoir la foi sans être sai
4251
du mystère, ni l’adhésion à un credo. J’en donne
la
preuve : avoir la foi sans être saint lui paraissait la tricherie mêm
4252
adhésion à un credo. J’en donne la preuve : avoir
la
foi sans être saint lui paraissait la tricherie même, tandis qu’il eû
4253
uve : avoir la foi sans être saint lui paraissait
la
tricherie même, tandis qu’il eût admis la sainteté sans foi. Que dis-
4254
aissait la tricherie même, tandis qu’il eût admis
la
sainteté sans foi. Que dis-je ? Il l’a souhaitée expressément. Mais c
4255
l eût admis la sainteté sans foi. Que dis-je ? Il
l’
a souhaitée expressément. Mais comment définir un saint qui ne croit p
4256
rtis pris éthiques ? Ce débat nous éloignerait de
la
réalité de Gide. Une intense affectivité le liait, le reliait, au mon
4257
it de la réalité de Gide. Une intense affectivité
le
liait, le reliait, au monde du christianisme, même s’il en refusait l
4258
éalité de Gide. Une intense affectivité le liait,
le
reliait, au monde du christianisme, même s’il en refusait les dimensi
4259
au monde du christianisme, même s’il en refusait
les
dimensions profondes. J’ai dit qu’il se méfiait d’une certaine « prof
4260
d’une certaine « profondeur » qui mesure parfois
la
distance entre l’éthique et la mystique, mais qui souvent n’est qu’un
4261
profondeur » qui mesure parfois la distance entre
l’
éthique et la mystique, mais qui souvent n’est qu’un concept bâtard, e
4262
qui mesure parfois la distance entre l’éthique et
la
mystique, mais qui souvent n’est qu’un concept bâtard, engendré par l
4263
souvent n’est qu’un concept bâtard, engendré par
le
romantisme. Gide recherchait plutôt la rectitude, qu’il tenait pour l
4264
gendré par le romantisme. Gide recherchait plutôt
la
rectitude, qu’il tenait pour la vérité. Il lui arrivait ainsi de s’ar
4265
echerchait plutôt la rectitude, qu’il tenait pour
la
vérité. Il lui arrivait ainsi de s’arrêter à la logique exotérique d’
4266
r la vérité. Il lui arrivait ainsi de s’arrêter à
la
logique exotérique d’un texte, disons à son seul sens éthique. Pencha
4267
cte. Ses connaissances bibliques me stupéfiaient.
L’
usage qu’il en faisait me semblait décevant. Là où Claudel prend son é
4268
même chrétiens, nous ont montré pareil amour pour
l’
Évangile, et cela jusque dans les années où il doutait de l’existence
4269
pareil amour pour l’Évangile, et cela jusque dans
les
années où il doutait de l’existence de Dieu. Mais il croyait à l’homm
4270
, et cela jusque dans les années où il doutait de
l’
existence de Dieu. Mais il croyait à l’homme individuel, et cette croy
4271
doutait de l’existence de Dieu. Mais il croyait à
l’
homme individuel, et cette croyance est née de la synthèse du christia
4272
l’homme individuel, et cette croyance est née de
la
synthèse du christianisme. Elle n’existe pas hors de lui, et n’est pa
4273
était individualiste. Savons-nous encore mesurer
le
sens et la portée de cette banalité, en vérité bizarre et unique dans
4274
vidualiste. Savons-nous encore mesurer le sens et
la
portée de cette banalité, en vérité bizarre et unique dans l’Histoire
4275
cette banalité, en vérité bizarre et unique dans
l’
Histoire, une civilisation sur vingt et une connues l’ayant rendue pos
4276
stoire, une civilisation sur vingt et une connues
l’
ayant rendue possible et acceptable. « Hérétique entre les hérétiques
4277
rendue possible et acceptable. « Hérétique entre
les
hérétiques », toujours soucieux de différer mais de légitimer sa diff
4278
aditionnelles, au sens du mythe, des astres et de
l’
ordre cosmique, ou bien encore au sens de lois fatales et collectives
4279
ectives interprétées par un Parti. C’est pourquoi
le
problème religieux, tel qu’il se pose au monde christianisé, et à lui
4280
e au monde christianisé, et à lui seul, libéré de
l’
empire des mythes, n’a cessé d’occuper sa pensée. Et j’ignore si c’est
4281
ore si c’est mal ou bien : je constate simplement
le
phénomène. Je ne tiens pas la foi pour une vertu plus que l’absence d
4282
constate simplement le phénomène. Je ne tiens pas
la
foi pour une vertu plus que l’absence de foi pour une preuve de coura
4283
e. Je ne tiens pas la foi pour une vertu plus que
l’
absence de foi pour une preuve de courage. Des vertus et des vices, da
4284
n droit de juger au nom des normes établies. Mais
la
foi, le salut personnel n’ont rien à voir avec la bienséance, et ne s
4285
de juger au nom des normes établies. Mais la foi,
le
salut personnel n’ont rien à voir avec la bienséance, et ne sont pas
4286
la foi, le salut personnel n’ont rien à voir avec
la
bienséance, et ne sont pas de l’ordre des mérites. Et c’est pourquoi
4287
rien à voir avec la bienséance, et ne sont pas de
l’
ordre des mérites. Et c’est pourquoi il est écrit : « Ne jugez pas ! »
4288
l, ou plutôt que je réprouve, ces discussions sur
la
croyance ou non d’un homme connu, multipliées et prolongées après sa
4289
ne sont ni chrétiennes ni simplement honnêtes. «
Le
Seigneur seul connaît les siens », dit l’Écriture : si l’on est chrét
4290
êtes. « Le Seigneur seul connaît les siens », dit
l’
Écriture : si l’on est chrétien, qu’on croie cela, laissant aux incroy
4291
eur seul connaît les siens », dit l’Écriture : si
l’
on est chrétien, qu’on croie cela, laissant aux incroyants le droit de
4292
rétien, qu’on croie cela, laissant aux incroyants
le
droit de mieux savoir. Et qu’est-ce que cela peut bien nous faire ? S
4293
et qu’il n’est pas le premier venu. C’est usurper
la
place du Juge, ou mêler vanités et salut. Si Gide a refusé totalement
4294
refusé totalement quelque chose, c’est justement
le
totalitarisme, qui est l’esprit de parti logiquement développé. Et d’
4295
chose, c’est justement le totalitarisme, qui est
l’
esprit de parti logiquement développé. Et d’abord dans la religion. Le
4296
t de parti logiquement développé. Et d’abord dans
la
religion. Le vrai croyant demain, ne sera-t-il pas celui qui osera di
4297
giquement développé. Et d’abord dans la religion.
Le
vrai croyant demain, ne sera-t-il pas celui qui osera dire : « Je ne
4298
elui qui osera dire : « Je ne crois pas ! » quand
l’
État contre l’homme invoquera les Nécessités de l’Histoire ? Il n’est
4299
dire : « Je ne crois pas ! » quand l’État contre
l’
homme invoquera les Nécessités de l’Histoire ? Il n’est pas de vraie f
4300
ois pas ! » quand l’État contre l’homme invoquera
les
Nécessités de l’Histoire ? Il n’est pas de vraie foi sans vrai doute,
4301
l’État contre l’homme invoquera les Nécessités de
l’
Histoire ? Il n’est pas de vraie foi sans vrai doute, plus qu’il n’est
4302
ougemont Denis de, « Un complot de protestants »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, novembre 1951, p. 281-288.
4303
La
découverte du temps ou l’aventure occidentale (mars 1957)au Pour
4304
La découverte du temps ou
l’
aventure occidentale (mars 1957)au Pourquoi l’Europe a-t-elle cré
4305
’aventure occidentale (mars 1957)au Pourquoi
l’
Europe a-t-elle créé les sciences physiques, conçu l’Histoire et décou
4306
mars 1957)au Pourquoi l’Europe a-t-elle créé
les
sciences physiques, conçu l’Histoire et découvert la Terre ? D’autres
4307
urope a-t-elle créé les sciences physiques, conçu
l’
Histoire et découvert la Terre ? D’autres cultures et civilisations on
4308
sciences physiques, conçu l’Histoire et découvert
la
Terre ? D’autres cultures et civilisations ont trouvé mieux peut-être
4309
a. Est-il possible d’attribuer aux « inventions »
les
plus typiques de l’Occident (le concept de personne humaine et le dév
4310
attribuer aux « inventions » les plus typiques de
l’
Occident (le concept de personne humaine et le développement de la tec
4311
x « inventions » les plus typiques de l’Occident (
le
concept de personne humaine et le développement de la technique, par
4312
de l’Occident (le concept de personne humaine et
le
développement de la technique, par exemple) une origine ou une visée
4313
oncept de personne humaine et le développement de
la
technique, par exemple) une origine ou une visée communes, révélant u
4314
ncipe de cohérence parmi tant de contradictions ?
L’
unité de l’Europe n’est pas définissable par un contour géographique,
4315
hérence parmi tant de contradictions ? L’unité de
l’
Europe n’est pas définissable par un contour géographique, moins encor
4316
uples, ou par quelque essence éternelle, comme on
l’
a cru de l’unité de nos nations à partir du xixe siècle. L’Europe est
4317
ar quelque essence éternelle, comme on l’a cru de
l’
unité de nos nations à partir du xixe siècle. L’Europe est une longue
4318
l’unité de nos nations à partir du xixe siècle.
L’
Europe est une longue aventure, et l’esprit d’aventure y paraît plus s
4319
ixe siècle. L’Europe est une longue aventure, et
l’
esprit d’aventure y paraît plus sensible que l’objet de la quête n’est
4320
et l’esprit d’aventure y paraît plus sensible que
l’
objet de la quête n’est clairement connaissable. Pourtant, certaines o
4321
d’aventure y paraît plus sensible que l’objet de
la
quête n’est clairement connaissable. Pourtant, certaines options fond
4322
rtaines options fondamentales ont pu conditionner
l’
allure de l’odyssée. Ôtez le dogme de l’Incarnation, formulé au concil
4323
ons fondamentales ont pu conditionner l’allure de
l’
odyssée. Ôtez le dogme de l’Incarnation, formulé au concile de Nicée,
4324
s ont pu conditionner l’allure de l’odyssée. Ôtez
le
dogme de l’Incarnation, formulé au concile de Nicée, et vous ôtez la
4325
ditionner l’allure de l’odyssée. Ôtez le dogme de
l’
Incarnation, formulé au concile de Nicée, et vous ôtez la condition de
4326
nation, formulé au concile de Nicée, et vous ôtez
la
condition des sciences physiques et naturelles, qui est la reconnaiss
4327
ion des sciences physiques et naturelles, qui est
la
reconnaissance du corps, de la matière, et de la forme du monde en ta
4328
aturelles, qui est la reconnaissance du corps, de
la
matière, et de la forme du monde en tant que réalités. (L’Orient les
4329
la reconnaissance du corps, de la matière, et de
la
forme du monde en tant que réalités. (L’Orient les tient pour illusoi
4330
e, et de la forme du monde en tant que réalités. (
L’
Orient les tient pour illusoires.) Ôtez l’idée de la personne, déduite
4331
la forme du monde en tant que réalités. (L’Orient
les
tient pour illusoires.) Ôtez l’idée de la personne, déduite des grand
4332
lités. (L’Orient les tient pour illusoires.) Ôtez
l’
idée de la personne, déduite des grandes définitions trinitaires et ch
4333
Orient les tient pour illusoires.) Ôtez l’idée de
la
personne, déduite des grandes définitions trinitaires et christologiq
4334
et christologiques, vous avez quelque chose comme
l’
Inde et non l’Europe. De cette recherche d’un principe de cohérence r
4335
ques, vous avez quelque chose comme l’Inde et non
l’
Europe. De cette recherche d’un principe de cohérence révélé par la n
4336
e recherche d’un principe de cohérence révélé par
la
nature même des péripéties de l’Aventure, je détache ici le moment de
4337
rence révélé par la nature même des péripéties de
l’
Aventure, je détache ici le moment de l’exploration du temps, mère de
4338
même des péripéties de l’Aventure, je détache ici
le
moment de l’exploration du temps, mère de l’Histoire. 1. L’Occident
4339
péties de l’Aventure, je détache ici le moment de
l’
exploration du temps, mère de l’Histoire. 1. L’Occident découvre le
4340
l’exploration du temps, mère de l’Histoire. 1.
L’
Occident découvre le Temps De la Genèse mosaïque jusqu’aux débuts d
4341
mps, mère de l’Histoire. 1. L’Occident découvre
le
Temps De la Genèse mosaïque jusqu’aux débuts du siècle dernier, le
4342
Histoire. 1. L’Occident découvre le Temps De
la
Genèse mosaïque jusqu’aux débuts du siècle dernier, les Occidentaux n
4343
nèse mosaïque jusqu’aux débuts du siècle dernier,
les
Occidentaux n’ont presque pas varié quant à la date de naissance de l
4344
, les Occidentaux n’ont presque pas varié quant à
la
date de naissance de l’humanité. Un professeur de Cambridge, au xviii
4345
presque pas varié quant à la date de naissance de
l’
humanité. Un professeur de Cambridge, au xviiie siècle, crut pouvoir
4346
eur de Cambridge, au xviiie siècle, crut pouvoir
la
préciser : l’homme avait été créé en 4004 avant J.-C., le 23 octobre,
4347
ge, au xviiie siècle, crut pouvoir la préciser :
l’
homme avait été créé en 4004 avant J.-C., le 23 octobre, à 9 heures du
4348
ser : l’homme avait été créé en 4004 avant J.-C.,
le
23 octobre, à 9 heures du matin. Les professeurs d’Oxford tenaient po
4349
avant J.-C., le 23 octobre, à 9 heures du matin.
Les
professeurs d’Oxford tenaient pour le 23 mars, même heure et même ann
4350
du matin. Les professeurs d’Oxford tenaient pour
le
23 mars, même heure et même année. Buffon écrit un peu plus tard : «
4351
e année. Buffon écrit un peu plus tard : « Depuis
la
fin des ouvrages de Dieu, c’est-à-dire depuis la création de l’homme,
4352
la fin des ouvrages de Dieu, c’est-à-dire depuis
la
création de l’homme, il ne s’est écoulé que six ou huit-mille ans. »
4353
rages de Dieu, c’est-à-dire depuis la création de
l’
homme, il ne s’est écoulé que six ou huit-mille ans. » Cuvier partage
4354
helling suit encore en plein xixe siècle, et que
les
catéchismes ne cesseront d’enseigner à des générations dont notre enf
4355
gner à des générations dont notre enfance a connu
les
derniers représentants. Cependant, vers 1950, nul ne peut plus douter
4356
Cependant, vers 1950, nul ne peut plus douter que
l’
homme existe depuis environ cent-mille ans. Aux toutes dernières nouve
4357
il conviendrait d’admettre. Centupler brusquement
l’
âge de l’humanité peut paraître une révolution considérable. Mais ce n
4358
ndrait d’admettre. Centupler brusquement l’âge de
l’
humanité peut paraître une révolution considérable. Mais ce n’est guèr
4359
t guère qu’un détail dénué d’intérêt pour peu que
l’
on considère les dimensions du temps décrites par les anciennes cosmol
4360
étail dénué d’intérêt pour peu que l’on considère
les
dimensions du temps décrites par les anciennes cosmologies de l’Orien
4361
on considère les dimensions du temps décrites par
les
anciennes cosmologies de l’Orient. Pour l’Inde, l’unité de temps — le
4362
u temps décrites par les anciennes cosmologies de
l’
Orient. Pour l’Inde, l’unité de temps — le Kalpa ou Jour de Brahma — e
4363
s par les anciennes cosmologies de l’Orient. Pour
l’
Inde, l’unité de temps — le Kalpa ou Jour de Brahma — est de quatre-mi
4364
s anciennes cosmologies de l’Orient. Pour l’Inde,
l’
unité de temps — le Kalpa ou Jour de Brahma — est de quatre-milliards-
4365
gies de l’Orient. Pour l’Inde, l’unité de temps —
le
Kalpa ou Jour de Brahma — est de quatre-milliards-trois-cent-vingt-mi
4366
s-trois-cent-vingt-millions d’années solaires. Or
la
vie d’un Brahma est de cent et huit « années », dont chaque jour et c
4367
Après deux-cent-quarante-neuf-milliards d’années,
le
Brahma meurt, l’univers retourne au grand Chaos pour une durée égale,
4368
uarante-neuf-milliards d’années, le Brahma meurt,
l’
univers retourne au grand Chaos pour une durée égale, puis un autre Br
4369
ma inaugure une ère nouvelle, et ainsi de suite à
l’
infini. Quant au temps de notre humanité : chaque Jour de Brahma se di
4370
ou Kaliyuga, lequel a commencé à minuit précise,
le
18 février 3102 avant J.-C., et doit se terminer dans 426 941 ans par
4371
t J.-C., et doit se terminer dans 426 941 ans par
la
destruction du monde et sa reconstruction, qui sera l’œuvre de Kalki,
4372
struction du monde et sa reconstruction, qui sera
l’
œuvre de Kalki, dernier avatar de Vishnu. En regard des ordres de gran
4373
eur, si prodigieusement différents, attribués par
les
grandes religions de l’Orient et de l’Occident au temps cosmique comm
4374
ifférents, attribués par les grandes religions de
l’
Orient et de l’Occident au temps cosmique comme au temps des humains,
4375
ibués par les grandes religions de l’Orient et de
l’
Occident au temps cosmique comme au temps des humains, plaçons mainten
4376
des humains, plaçons maintenant ce double fait :
le
sens de l’Histoire est caractéristique de l’Occident, et il y tourne
4377
s, plaçons maintenant ce double fait : le sens de
l’
Histoire est caractéristique de l’Occident, et il y tourne même à l’ob
4378
it : le sens de l’Histoire est caractéristique de
l’
Occident, et il y tourne même à l’obsession si l’on en juge par notre
4379
actéristique de l’Occident, et il y tourne même à
l’
obsession si l’on en juge par notre siècle, tandis qu’il a toujours ma
4380
l’Occident, et il y tourne même à l’obsession si
l’
on en juge par notre siècle, tandis qu’il a toujours manqué aux Orient
4381
aient subi notre influence55. Toute réflexion sur
l’
Aventure occidentale se doit d’affronter ce contraste et d’essayer de
4382
se doit d’affronter ce contraste et d’essayer de
l’
interpréter. Et, en particulier, toute théorie de l’Histoire qui négli
4383
interpréter. Et, en particulier, toute théorie de
l’
Histoire qui négligerait d’en rendre compte ou s’en révélerait incapab
4384
déquate à son sujet. On verra mieux pourquoi, par
la
suite de ce chapitre. 2. Co-naissance de l’Histoire et de la Perso
4385
chapitre. 2. Co-naissance de l’Histoire et de
la
Personne Un fait quelconque n’est historique au sens exact qu’en v
4386
n unicité. S’il pouvait se répéter, revenir comme
les
saisons, il n’appartiendrait pas à l’Histoire, mais au Mythe. De même
4387
enir comme les saisons, il n’appartiendrait pas à
l’
Histoire, mais au Mythe. De même l’individu ne devient une personne qu
4388
iendrait pas à l’Histoire, mais au Mythe. De même
l’
individu ne devient une personne que par l’unicité que lui confère sa
4389
e même l’individu ne devient une personne que par
l’
unicité que lui confère sa vocation, autrement il est vu comme une rép
4390
poussière isolé d’un univers absurde relevant de
la
pure statistique, ou cellule transitoire d’un corps magique sans fin.
4391
un démographe génial pouvait nous dire demain que
la
réponse est « de l’ordre de trois-cents-milliards », nous en serions
4392
pouvait nous dire demain que la réponse est « de
l’
ordre de trois-cents-milliards », nous en serions moins étourdis que g
4393
s voir qu’il serait intimement lié, chez ceux qui
l’
éprouveraient, au sens de la personne ? Presque toutes les cultures et
4394
nt lié, chez ceux qui l’éprouveraient, au sens de
la
personne ? Presque toutes les cultures et civilisations que nous avon
4395
veraient, au sens de la personne ? Presque toutes
les
cultures et civilisations que nous avons exhumées du passé de la Terr
4396
civilisations que nous avons exhumées du passé de
la
Terre ou qui survivent dans notre siècle ont enseigné des théories du
4397
écrivent un temps cyclique. Elles croient aussi à
la
métempsycose, à l’astrologie et aux castes. Tout cela se tient et se
4398
yclique. Elles croient aussi à la métempsycose, à
l’
astrologie et aux castes. Tout cela se tient et se relie, tout cela es
4399
premier du terme56 — et ne laisse aucune place à
l’
Histoire, ni davantage à la personne. Seule la religion juive fait exc
4400
laisse aucune place à l’Histoire, ni davantage à
la
personne. Seule la religion juive fait exception dans le monde antiqu
4401
e à l’Histoire, ni davantage à la personne. Seule
la
religion juive fait exception dans le monde antique. Ses prophètes on
4402
onne. Seule la religion juive fait exception dans
le
monde antique. Ses prophètes ont cru que Iahvé intervenait par de lib
4403
que Iahvé intervenait par de libres actions dans
l’
existence terrestre du peuple élu : dès lors, celle-ci ne dépendait pl
4404
anifestée par une suite d’événements révélateurs.
L’
incarnation du Christ vint accomplir cette vocation unique du peuple d
4405
e vocation unique du peuple d’Israël. Et, certes,
l’
Évangile ignore absolument toute espèce de doctrine de l’Histoire : il
4406
ile ignore absolument toute espèce de doctrine de
l’
Histoire : il annonce la Résurrection, qui est victoire sur le temps c
4407
ute espèce de doctrine de l’Histoire : il annonce
la
Résurrection, qui est victoire sur le temps comme sur la mort. Mais c
4408
il annonce la Résurrection, qui est victoire sur
le
temps comme sur la mort. Mais c’est bien à partir de là que les homme
4409
rrection, qui est victoire sur le temps comme sur
la
mort. Mais c’est bien à partir de là que les hommes touchés par le me
4410
e sur la mort. Mais c’est bien à partir de là que
les
hommes touchés par le message évangélique ont découvert le temps irré
4411
st bien à partir de là que les hommes touchés par
le
message évangélique ont découvert le temps irréversible de l’Histoire
4412
touchés par le message évangélique ont découvert
le
temps irréversible de l’Histoire, et qu’ils ont osé l’accepter. La pr
4413
vangélique ont découvert le temps irréversible de
l’
Histoire, et qu’ils ont osé l’accepter. La prédication paulinienne, av
4414
mps irréversible de l’Histoire, et qu’ils ont osé
l’
accepter. La prédication paulinienne, avec son insistance extraordinai
4415
ible de l’Histoire, et qu’ils ont osé l’accepter.
La
prédication paulinienne, avec son insistance extraordinaire sur l’uni
4416
ulinienne, avec son insistance extraordinaire sur
l’
unicité absolue de l’Incarnation salvatrice, et cet « une fois pour to
4417
nsistance extraordinaire sur l’unicité absolue de
l’
Incarnation salvatrice, et cet « une fois pour toutes » qui sert de le
4418
« une fois pour toutes » qui sert de leitmotiv à
l’
Épître « aux Hébreux » précisément, voilà qui brise la croyance unanim
4419
ître « aux Hébreux » précisément, voilà qui brise
la
croyance unanime aux retours éternels du temps cyclique. Dans le prol
4420
nime aux retours éternels du temps cyclique. Dans
le
prolongement du temps dramatique des Prophètes s’ouvre alors le temps
4421
t du temps dramatique des Prophètes s’ouvre alors
le
temps du salut : temps de l’attente active, de l’espérance patiente e
4422
phètes s’ouvre alors le temps du salut : temps de
l’
attente active, de l’espérance patiente et de la foi dans un retour un
4423
le temps du salut : temps de l’attente active, de
l’
espérance patiente et de la foi dans un retour unique du Christ glorie
4424
e l’attente active, de l’espérance patiente et de
la
foi dans un retour unique du Christ glorieux. Et, dans ce temps nouve
4425
ue du Christ glorieux. Et, dans ce temps nouveau,
le
rôle de chaque personne devient unique et décisif, comme l’était sous
4426
chaque personne devient unique et décisif, comme
l’
était sous l’Ancienne Alliance le rôle collectif d’Israël. Le dialogue
4427
nne devient unique et décisif, comme l’était sous
l’
Ancienne Alliance le rôle collectif d’Israël. Le dialogue de Personne
4428
t décisif, comme l’était sous l’Ancienne Alliance
le
rôle collectif d’Israël. Le dialogue de Personne à personne entre Die
4429
s l’Ancienne Alliance le rôle collectif d’Israël.
Le
dialogue de Personne à personne entre Dieu qui appelle et l’âme qui r
4430
de Personne à personne entre Dieu qui appelle et
l’
âme qui répond libère celle-ci des décrets uniformes de la morale et d
4431
i répond libère celle-ci des décrets uniformes de
la
morale et de la tradition sacrée, comme aussi des caprices du hasard
4432
celle-ci des décrets uniformes de la morale et de
la
tradition sacrée, comme aussi des caprices du hasard insensé, comme e
4433
si des caprices du hasard insensé, comme enfin de
la
roue du karma et du vertige de la métempsycose, qui réduisaient toute
4434
comme enfin de la roue du karma et du vertige de
la
métempsycose, qui réduisaient toute vie dans le temps et la chair à l
4435
e la métempsycose, qui réduisaient toute vie dans
le
temps et la chair à l’insignifiance anonyme d’un passage éphémère dan
4436
ycose, qui réduisaient toute vie dans le temps et
la
chair à l’insignifiance anonyme d’un passage éphémère dans l’Illusion
4437
réduisaient toute vie dans le temps et la chair à
l’
insignifiance anonyme d’un passage éphémère dans l’Illusion. Ainsi l’H
4438
’insignifiance anonyme d’un passage éphémère dans
l’
Illusion. Ainsi l’Histoire, conscience nouvelle du temps des hommes, e
4439
nyme d’un passage éphémère dans l’Illusion. Ainsi
l’
Histoire, conscience nouvelle du temps des hommes, est née de la même
4440
nscience nouvelle du temps des hommes, est née de
la
même rupture des grands rythmes cosmiques et des fatalités astrologiq
4441
s cosmiques et des fatalités astrologiques, et de
la
même victoire sur les étoiles et sur la mort, qui libère et suscite l
4442
talités astrologiques, et de la même victoire sur
les
étoiles et sur la mort, qui libère et suscite la personne. Ce n’est p
4443
es, et de la même victoire sur les étoiles et sur
la
mort, qui libère et suscite la personne. Ce n’est pas un hasard si le
4444
les étoiles et sur la mort, qui libère et suscite
la
personne. Ce n’est pas un hasard si le premier auteur d’une philosoph
4445
hasard si le premier auteur d’une philosophie de
l’
Histoire — la Civitas Dei — fut aussi le premier auteur d’une biograph
4446
premier auteur d’une philosophie de l’Histoire —
la
Civitas Dei — fut aussi le premier auteur d’une biographie de sa pers
4447
premier auteur d’une biographie de sa personne :
les
Confessions. 3. Du Mythe à l’Histoire Mais il reste à mieux voi
4448
e sa personne : les Confessions. 3. Du Mythe à
l’
Histoire Mais il reste à mieux voir comment l’homme, délivré des «
4449
l’Histoire Mais il reste à mieux voir comment
l’
homme, délivré des « religions » par la foi, trouve alors le courage e
4450
ir comment l’homme, délivré des « religions » par
la
foi, trouve alors le courage exceptionnel d’accepter le temps et l’Hi
4451
élivré des « religions » par la foi, trouve alors
le
courage exceptionnel d’accepter le temps et l’Histoire. Si toutes les
4452
, trouve alors le courage exceptionnel d’accepter
le
temps et l’Histoire. Si toutes les religions traditionnelles ont déve
4453
rs le courage exceptionnel d’accepter le temps et
l’
Histoire. Si toutes les religions traditionnelles ont développé des my
4454
nnel d’accepter le temps et l’Histoire. Si toutes
les
religions traditionnelles ont développé des mythes du temps cyclique
4455
ont développé des mythes du temps cyclique et de
l’
éternel retour, c’est parce que l’homme a peur du temps. Voilà le fait
4456
cyclique et de l’éternel retour, c’est parce que
l’
homme a peur du temps. Voilà le fait fondamental. Car le temps est lié
4457
r, c’est parce que l’homme a peur du temps. Voilà
le
fait fondamental. Car le temps est lié à la mort comme à la perte des
4458
e a peur du temps. Voilà le fait fondamental. Car
le
temps est lié à la mort comme à la perte des paradis — Eden, âge d’or
4459
Voilà le fait fondamental. Car le temps est lié à
la
mort comme à la perte des paradis — Eden, âge d’or, enfance — vécus o
4460
ndamental. Car le temps est lié à la mort comme à
la
perte des paradis — Eden, âge d’or, enfance — vécus ou imaginaires. E
4461
, enfance — vécus ou imaginaires. Et il est lié à
la
menace toujours instante des catastrophes imprévisibles et arbitraire
4462
vraiment nouvelle, et donc dénuée de sens. Contre
le
malheur et son absurdité, l’homme n’a d’autre recours que d’attribuer
4463
nuée de sens. Contre le malheur et son absurdité,
l’
homme n’a d’autre recours que d’attribuer un sens à ce qu’il subit san
4464
urs que d’attribuer un sens à ce qu’il subit sans
l’
avoir « mérité ». Au scandale des souffrances et de la mort, il ne rép
4465
oir « mérité ». Au scandale des souffrances et de
la
mort, il ne répondra point par une révolte vaine, pure démence à ses
4466
émence à ses yeux de Grec ou d’Oriental, mais par
le
rêve immense des religions, transformant le réel insensé en un poème
4467
s par le rêve immense des religions, transformant
le
réel insensé en un poème de morts et de résurrections dominées par de
4468
s et par des archétypes qui s’accordent à ceux de
l’
âme. Ainsi le rêve universel du temps cyclique et du retour sans fin d
4469
archétypes qui s’accordent à ceux de l’âme. Ainsi
le
rêve universel du temps cyclique et du retour sans fin de toutes les
4470
du temps cyclique et du retour sans fin de toutes
les
situations dévalorise le temps vécu de la souffrance. Ce n’est plus l
4471
tour sans fin de toutes les situations dévalorise
le
temps vécu de la souffrance. Ce n’est plus la souffrance qui est vain
4472
toutes les situations dévalorise le temps vécu de
la
souffrance. Ce n’est plus la souffrance qui est vaine, dès lors qu’el
4473
ise le temps vécu de la souffrance. Ce n’est plus
la
souffrance qui est vaine, dès lors qu’elle prend un sens exemplaire d
4474
e, dès lors qu’elle prend un sens exemplaire dans
le
Mythe, mais c’est le temps lui-même qui perd sa réalité, puisqu’il n’
4475
rend un sens exemplaire dans le Mythe, mais c’est
le
temps lui-même qui perd sa réalité, puisqu’il n’apporte plus d’absolu
4476
bsolue nouveauté, ni par conséquent de scandale. (
L’
homme d’aujourd’hui, qui croit qu’il ne croit plus à rien, mime encore
4477
ne croit plus à rien, mime encore ce mouvement de
la
sagesse mythique, quand il dit pour se rassurer que « l’histoire se r
4478
sse mythique, quand il dit pour se rassurer que «
l’
histoire se répète », ou plus familièrement « Plus ça change, plus c’e
4479
u plus familièrement « Plus ça change, plus c’est
la
même chose. ») L’irruption dans ce monde des religions antiques du me
4480
nt « Plus ça change, plus c’est la même chose. »)
L’
irruption dans ce monde des religions antiques du message de l’Incarna
4481
ans ce monde des religions antiques du message de
l’
Incarnation figure donc le Scandale absolu, la nouveauté totale, propr
4482
antiques du message de l’Incarnation figure donc
le
Scandale absolu, la nouveauté totale, proprement impensable. Et c’est
4483
de l’Incarnation figure donc le Scandale absolu,
la
nouveauté totale, proprement impensable. Et c’est bien dans ces terme
4484
ble. Et c’est bien dans ces termes que saint Paul
la
présente. Que Dieu se soit manifesté comme une Personne ; par un gest
4485
e fois pour toutes » — voici ruiné d’un coup tout
l’
édifice mythique des protections de l’âme contre le temps de l’Histoir
4486
n coup tout l’édifice mythique des protections de
l’
âme contre le temps de l’Histoire. Il s’agit d’un vrai fait, non plus
4487
’édifice mythique des protections de l’âme contre
le
temps de l’Histoire. Il s’agit d’un vrai fait, non plus d’un avatar n
4488
hique des protections de l’âme contre le temps de
l’
Histoire. Il s’agit d’un vrai fait, non plus d’un avatar ni de l’épiph
4489
s’agit d’un vrai fait, non plus d’un avatar ni de
l’
épiphanie d’un archétype. Cette rupture du Cercle cosmique livre l’hom
4490
archétype. Cette rupture du Cercle cosmique livre
l’
homme à l’imprévisible, c’est-à-dire à la grâce de Dieu, mais aussi à
4491
Cette rupture du Cercle cosmique livre l’homme à
l’
imprévisible, c’est-à-dire à la grâce de Dieu, mais aussi à la liberté
4492
ue livre l’homme à l’imprévisible, c’est-à-dire à
la
grâce de Dieu, mais aussi à la liberté ; il devient responsable de so
4493
le, c’est-à-dire à la grâce de Dieu, mais aussi à
la
liberté ; il devient responsable de son temps sur la Terre. Ce serai
4494
liberté ; il devient responsable de son temps sur
la
Terre. Ce serait intolérable si la Révélation n’apportait en même te
4495
son temps sur la Terre. Ce serait intolérable si
la
Révélation n’apportait en même temps la certitude que le temps a été
4496
érable si la Révélation n’apportait en même temps
la
certitude que le temps a été vaincu au matin de Pâques, que l’homme n
4497
lation n’apportait en même temps la certitude que
le
temps a été vaincu au matin de Pâques, que l’homme ne lui appartient
4498
que le temps a été vaincu au matin de Pâques, que
l’
homme ne lui appartient que par la chair (étant au monde mais non du m
4499
de Pâques, que l’homme ne lui appartient que par
la
chair (étant au monde mais non du monde) et qu’un terme est promis à
4500
de mais non du monde) et qu’un terme est promis à
l’
Histoire, encore que nul n’en sache « le jour ni l’heure ». Seule donc
4501
promis à l’Histoire, encore que nul n’en sache «
le
jour ni l’heure ». Seule donc la négation réalisée du temps permet d’
4502
’Histoire, encore que nul n’en sache « le jour ni
l’
heure ». Seule donc la négation réalisée du temps permet d’assumer le
4503
nul n’en sache « le jour ni l’heure ». Seule donc
la
négation réalisée du temps permet d’assumer le temps dans sa réalité.
4504
nc la négation réalisée du temps permet d’assumer
le
temps dans sa réalité. Sans la Résurrection, l’homme n’aurait pas la
4505
s permet d’assumer le temps dans sa réalité. Sans
la
Résurrection, l’homme n’aurait pas la preuve d’une existence qui écha
4506
r le temps dans sa réalité. Sans la Résurrection,
l’
homme n’aurait pas la preuve d’une existence qui échappe au temps et à
4507
alité. Sans la Résurrection, l’homme n’aurait pas
la
preuve d’une existence qui échappe au temps et à la mort. « Si le Chr
4508
preuve d’une existence qui échappe au temps et à
la
mort. « Si le Christ n’est pas ressuscité, votre foi est vaine et vou
4509
existence qui échappe au temps et à la mort. « Si
le
Christ n’est pas ressuscité, votre foi est vaine et vous êtes encore
4510
échés. » Mais cette preuve n’est valable que pour
la
foi parfaite, et ce recours au Transcendant, non plus au Mythe, contr
4511
ecours au Transcendant, non plus au Mythe, contre
la
dictature du temps, n’est effectif que pour celui qui croit « que Die
4512
« que Dieu peut tout à tout instant », ainsi que
l’
écrit Kierkegaard. Or la foi n’est jamais parfaite, et dans l’homme co
4513
tout instant », ainsi que l’écrit Kierkegaard. Or
la
foi n’est jamais parfaite, et dans l’homme converti persiste « le vie
4514
kegaard. Or la foi n’est jamais parfaite, et dans
l’
homme converti persiste « le vieil homme ». Son mouvement naturel sera
4515
ais parfaite, et dans l’homme converti persiste «
le
vieil homme ». Son mouvement naturel sera donc de chercher et d’inven
4516
aturel sera donc de chercher et d’inventer contre
le
temps d’autres défenses. Il essaiera d’abord de mythifier le Christ e
4517
autres défenses. Il essaiera d’abord de mythifier
le
Christ en niant sa parfaite humanité : c’est l’intention commune à to
4518
r le Christ en niant sa parfaite humanité : c’est
l’
intention commune à toutes les hérésies gnostiques, manichéennes ou do
4519
ite humanité : c’est l’intention commune à toutes
les
hérésies gnostiques, manichéennes ou docétistes. Plus tard, au Moyen
4520
ichéennes ou docétistes. Plus tard, au Moyen Âge,
la
théorie des cycles et des rythmes cosmiques de l’Histoire sera repris
4521
la théorie des cycles et des rythmes cosmiques de
l’
Histoire sera reprise — contre l’esprit des Pères — par les plus grand
4522
mes cosmiques de l’Histoire sera reprise — contre
l’
esprit des Pères — par les plus grands docteurs occidentaux, tant orth
4523
re sera reprise — contre l’esprit des Pères — par
les
plus grands docteurs occidentaux, tant orthodoxes que semi-hérétiques
4524
Grand, Thomas d’Aquin, Dante, Roger Bacon et tous
les
astrologues, qui vont devenir avec Kepler les astronomes. La concepti
4525
ous les astrologues, qui vont devenir avec Kepler
les
astronomes. La conception linéaire du temps et du progrès continu de
4526
ues, qui vont devenir avec Kepler les astronomes.
La
conception linéaire du temps et du progrès continu de l’Histoire n’es
4527
eption linéaire du temps et du progrès continu de
l’
Histoire n’est guère soutenue que par un Joachim de Flore, dont les éc
4528
guère soutenue que par un Joachim de Flore, dont
les
écrits sont condamnés ou falsifiés. Dans la conscience populaire médi
4529
dont les écrits sont condamnés ou falsifiés. Dans
la
conscience populaire médiévale, comme aujourd’hui encore dans les mas
4530
opulaire médiévale, comme aujourd’hui encore dans
les
masses paysannes, l’idée d’une évolution imprévisible et progressive
4531
mme aujourd’hui encore dans les masses paysannes,
l’
idée d’une évolution imprévisible et progressive est généralement élim
4532
ressenti comme semblable à celui des saisons, de
la
végétation ou des étoiles. Et peut-être faut-il rattacher à cette mêm
4533
faut-il rattacher à cette même tendance naturelle
la
propension croissante du Moyen Âge à substituer la tradition, l’allég
4534
a propension croissante du Moyen Âge à substituer
la
tradition, l’allégorie mystique et la légende aux faits dont seules l
4535
roissante du Moyen Âge à substituer la tradition,
l’
allégorie mystique et la légende aux faits dont seules les Écritures,
4536
substituer la tradition, l’allégorie mystique et
la
légende aux faits dont seules les Écritures, fort peu lues en ce temp
4537
orie mystique et la légende aux faits dont seules
les
Écritures, fort peu lues en ce temps, attestent l’historicité57. Tout
4538
s Écritures, fort peu lues en ce temps, attestent
l’
historicité57. Tout ceci nous confirme dans la vue que le Moyen Âge, l
4539
ent l’historicité57. Tout ceci nous confirme dans
la
vue que le Moyen Âge, loin de représenter je ne sais quel « âge d’or
4540
ricité57. Tout ceci nous confirme dans la vue que
le
Moyen Âge, loin de représenter je ne sais quel « âge d’or du christia
4541
ais quel « âge d’or du christianisme » — comme on
l’
a ressassé depuis les romantiques — fut bien plutôt dans son ensemble
4542
du christianisme » — comme on l’a ressassé depuis
les
romantiques — fut bien plutôt dans son ensemble une longue réaction d
4543
on ensemble une longue réaction de défense contre
le
ferment de révolution introduit dans le monde par l’Évangile. (J’ai d
4544
se contre le ferment de révolution introduit dans
le
monde par l’Évangile. (J’ai dit plus haut que le Moyen Âge fut la pér
4545
ferment de révolution introduit dans le monde par
l’
Évangile. (J’ai dit plus haut que le Moyen Âge fut la période « orient
4546
le monde par l’Évangile. (J’ai dit plus haut que
le
Moyen Âge fut la période « orientale » de l’Europe.) Touchée en premi
4547
vangile. (J’ai dit plus haut que le Moyen Âge fut
la
période « orientale » de l’Europe.) Touchée en premier lieu par le me
4548
que le Moyen Âge fut la période « orientale » de
l’
Europe.) Touchée en premier lieu par le message chrétien, l’humanité o
4549
ntale » de l’Europe.) Touchée en premier lieu par
le
message chrétien, l’humanité occidentale a dû trouver les moyens de l
4550
Touchée en premier lieu par le message chrétien,
l’
humanité occidentale a dû trouver les moyens de l’accepter progressive
4551
age chrétien, l’humanité occidentale a dû trouver
les
moyens de l’accepter progressivement et d’y adapter ses conceptions.
4552
l’humanité occidentale a dû trouver les moyens de
l’
accepter progressivement et d’y adapter ses conceptions. Pour les prem
4553
r les premiers chrétiens, ce qui rend supportable
l’
idée d’un temps vidé de rythmes et de mythes, c’est la croyance à la F
4554
ée d’un temps vidé de rythmes et de mythes, c’est
la
croyance à la Fin imminente : encore « un peu de temps » et le Christ
4555
vidé de rythmes et de mythes, c’est la croyance à
la
Fin imminente : encore « un peu de temps » et le Christ reviendra. Ma
4556
la Fin imminente : encore « un peu de temps » et
le
Christ reviendra. Mais Rome s’écroule, l’Église s’installe, et les Ba
4557
ps » et le Christ reviendra. Mais Rome s’écroule,
l’
Église s’installe, et les Barbares se convertissent. Il va falloir tro
4558
dra. Mais Rome s’écroule, l’Église s’installe, et
les
Barbares se convertissent. Il va falloir trouver les moyens de penser
4559
Barbares se convertissent. Il va falloir trouver
les
moyens de penser cette durée non prévue, désormais indéniable. Saint
4560
évue, désormais indéniable. Saint Augustin résout
le
paradoxe en un dualisme à peine voilé : il y a l’Histoire de Dieu et
4561
le paradoxe en un dualisme à peine voilé : il y a
l’
Histoire de Dieu et celle des hommes, et si la première intervient dan
4562
bres, elle n’y détermine pas une loi d’évolution.
Le
Moyen Âge ira beaucoup plus loin, non pas dans le sens du risque, mai
4563
Le Moyen Âge ira beaucoup plus loin, non pas dans
le
sens du risque, mais dans celui des normes. C’est une vision réduite
4564
es normes. C’est une vision réduite et limitée de
l’
Histoire qui lui permet de rendre un rythme à sa durée. L’apparition d
4565
re qui lui permet de rendre un rythme à sa durée.
L’
apparition du Christ ne marque plus pour lui le commencement du temps
4566
e. L’apparition du Christ ne marque plus pour lui
le
commencement du temps de la Fin, mais le « milieu des temps », symbol
4567
marque plus pour lui le commencement du temps de
la
Fin, mais le « milieu des temps », symbole archétypique. Les temps so
4568
pour lui le commencement du temps de la Fin, mais
le
« milieu des temps », symbole archétypique. Les temps sont rétrécis à
4569
is le « milieu des temps », symbole archétypique.
Les
temps sont rétrécis à quelques millénaires dont la chronologie rester
4570
s temps sont rétrécis à quelques millénaires dont
la
chronologie restera symbolique jusqu’aux abords de la Renaissance. Et
4571
hronologie restera symbolique jusqu’aux abords de
la
Renaissance. Et dès lors elle ira se précisant, mais dans le même cad
4572
nce. Et dès lors elle ira se précisant, mais dans
le
même cadre indiscuté (d’où les excès qu’on signalait plus haut). Elle
4573
récisant, mais dans le même cadre indiscuté (d’où
les
excès qu’on signalait plus haut). Elle ne sera vraiment bouleversée q
4574
lus haut). Elle ne sera vraiment bouleversée qu’à
la
fin du xixe siècle. Relevons ici que la chronologie vertigineuse des
4575
sée qu’à la fin du xixe siècle. Relevons ici que
la
chronologie vertigineuse des hindous ne s’appliquait qu’aux cycles du
4576
hindous ne s’appliquait qu’aux cycles du cosmos :
les
événements de l’Histoire s’y trouvent tellement noyés que personne n’
4577
quait qu’aux cycles du cosmos : les événements de
l’
Histoire s’y trouvent tellement noyés que personne n’a le souci de les
4578
ire s’y trouvent tellement noyés que personne n’a
le
souci de les dater. C’est un mouvement exactement contraire qui s’est
4579
vent tellement noyés que personne n’a le souci de
les
dater. C’est un mouvement exactement contraire qui s’est produit dans
4580
ement exactement contraire qui s’est produit dans
l’
Occident moderne, où, à l’inverse de ce qui s’était passé durant l’int
4581
qui s’est produit dans l’Occident moderne, où, à
l’
inverse de ce qui s’était passé durant l’intermède médiéval, l’état ci
4582
e, où, à l’inverse de ce qui s’était passé durant
l’
intermède médiéval, l’état civil des hommes et des actions humaines n’
4583
ce qui s’était passé durant l’intermède médiéval,
l’
état civil des hommes et des actions humaines n’a cessé de se préciser
4584
ons humaines n’a cessé de se préciser, tandis que
la
Fin et le Commencement des temps ne cessaient de s’éloigner dans le v
4585
es n’a cessé de se préciser, tandis que la Fin et
le
Commencement des temps ne cessaient de s’éloigner dans le vague de l’
4586
ncement des temps ne cessaient de s’éloigner dans
le
vague de l’infini. Or le Credo prend soin de préciser la date de la P
4587
temps ne cessaient de s’éloigner dans le vague de
l’
infini. Or le Credo prend soin de préciser la date de la Passion uniqu
4588
aient de s’éloigner dans le vague de l’infini. Or
le
Credo prend soin de préciser la date de la Passion unique : « sous Po
4589
e de l’infini. Or le Credo prend soin de préciser
la
date de la Passion unique : « sous Ponce Pilate », mais il se tait su
4590
ni. Or le Credo prend soin de préciser la date de
la
Passion unique : « sous Ponce Pilate », mais il se tait sur celle du
4591
elle du Jugement dernier, « car nous ne savons ni
le
jour ni l’heure ». Et c’est pourquoi le progrès de la vision historiq
4592
ement dernier, « car nous ne savons ni le jour ni
l’
heure ». Et c’est pourquoi le progrès de la vision historique, loin de
4593
savons ni le jour ni l’heure ». Et c’est pourquoi
le
progrès de la vision historique, loin de séculariser le christianisme
4594
our ni l’heure ». Et c’est pourquoi le progrès de
la
vision historique, loin de séculariser le christianisme, comme beauco
4595
grès de la vision historique, loin de séculariser
le
christianisme, comme beaucoup le craignent, s’y conforme de plus en p
4596
n de séculariser le christianisme, comme beaucoup
le
craignent, s’y conforme de plus en plus, à mesure qu’il s’éloigne du
4597
l s’éloigne du mythe. Il n’en reste pas moins que
l’
extension soudaine des dimensions de l’Histoire, telle qu’elle vient d
4598
moins que l’extension soudaine des dimensions de
l’
Histoire, telle qu’elle vient de se produire au xxe siècle, provoque
4599
re au xxe siècle, provoque une crise profonde de
la
relation intime et proprement congénitale entre l’Histoire et la pers
4600
a relation intime et proprement congénitale entre
l’
Histoire et la personne humaine. Ceci pose un problème encore neuf.
4601
ime et proprement congénitale entre l’Histoire et
la
personne humaine. Ceci pose un problème encore neuf. 4. Être ou no
4602
e un problème encore neuf. 4. Être ou non dans
l’
Histoire Tout d’un coup (dans l’espace d’une quarantaine d’années)
4603
re ou non dans l’Histoire Tout d’un coup (dans
l’
espace d’une quarantaine d’années) il se révèle que notre humanité n’a
4604
lle ans, mais probablement six-cent-mille. Et que
la
Terre, avec ses quelque trois ou quatre milliards d’années, aurait dé
4605
rait déjà vécu presque un « jour de Brahma » dans
le
cosmos actuel. Je dis « cosmos actuel », car de nombreux savants nous
4606
déjà d’un mouvement de diastole et de systole de
l’
Univers, qui se répéterait à l’infini : nous serions dans une phase d’
4607
e et de systole de l’Univers, qui se répéterait à
l’
infini : nous serions dans une phase d’expansion. La cosmologie des hi
4608
infini : nous serions dans une phase d’expansion.
La
cosmologie des hindous paraît alors moins éloignée de la vérité que c
4609
ologie des hindous paraît alors moins éloignée de
la
vérité que celle du Moyen Âge « chrétien ». Il en résulte une suite d
4610
en fait — mais je ne pense pas en droit — contre
l’
idée occidentale de l’homme. L’importance apparente des collectivités,
4611
pense pas en droit — contre l’idée occidentale de
l’
homme. L’importance apparente des collectivités, des civilisations, de
4612
en droit — contre l’idée occidentale de l’homme.
L’
importance apparente des collectivités, des civilisations, des période
4613
, elles demeurent seules visibles et concevables.
L’
individu, en revanche, disparaît et s’annule. La même raison veut que
4614
. L’individu, en revanche, disparaît et s’annule.
La
même raison veut que les « lois de l’Histoire », nécessairement dédui
4615
e, disparaît et s’annule. La même raison veut que
les
« lois de l’Histoire », nécessairement déduites d’ensembles étendus,
4616
t s’annule. La même raison veut que les « lois de
l’
Histoire », nécessairement déduites d’ensembles étendus, négligent l’a
4617
sairement déduites d’ensembles étendus, négligent
l’
action de la personne et nous inclinent à douter de sa réalité. Le « r
4618
duites d’ensembles étendus, négligent l’action de
la
personne et nous inclinent à douter de sa réalité. Le « réel historiq
4619
ersonne et nous inclinent à douter de sa réalité.
Le
« réel historique », ainsi configuré, devient aussi distant de l’homm
4620
ique », ainsi configuré, devient aussi distant de
l’
homme concret que Brahma d’un paria sans voie. Et l’Histoire, dans l’e
4621
homme concret que Brahma d’un paria sans voie. Et
l’
Histoire, dans l’esprit de nos contemporains, prend la place de la Pro
4622
Brahma d’un paria sans voie. Et l’Histoire, dans
l’
esprit de nos contemporains, prend la place de la Providence, bien qu’
4623
stoire, dans l’esprit de nos contemporains, prend
la
place de la Providence, bien qu’elle n’en revête ni la justice ni la
4624
l’esprit de nos contemporains, prend la place de
la
Providence, bien qu’elle n’en revête ni la justice ni la bonté. Bossu
4625
ace de la Providence, bien qu’elle n’en revête ni
la
justice ni la bonté. Bossuet, dans l’Abrégé de l’Histoire de France,
4626
idence, bien qu’elle n’en revête ni la justice ni
la
bonté. Bossuet, dans l’Abrégé de l’Histoire de France, nous parle déj
4627
n revête ni la justice ni la bonté. Bossuet, dans
l’
Abrégé de l’Histoire de France, nous parle déjà d’une Histoire « maîtr
4628
la justice ni la bonté. Bossuet, dans l’Abrégé de
l’
Histoire de France, nous parle déjà d’une Histoire « maîtresse de la v
4629
ce, nous parle déjà d’une Histoire « maîtresse de
la
vie humaine et de la politique ». Il s’agit de préparer le Dauphin, s
4630
’une Histoire « maîtresse de la vie humaine et de
la
politique ». Il s’agit de préparer le Dauphin, son élève, à sa future
4631
maine et de la politique ». Il s’agit de préparer
le
Dauphin, son élève, à sa future tâche de roi. Cette Histoire pourvoye
4632
epteur. Ses « lois » ne sont encore que celles de
la
morale, et sa réalité celle d’un discours. Mais l’Histoire aujourd’hu
4633
a morale, et sa réalité celle d’un discours. Mais
l’
Histoire aujourd’hui n’est plus un conte, elle se distingue absolument
4634
ue absolument de son récit. Elle ne concerne plus
le
passé, ni ses « leçons », qu’on pourrait aussi bien ignorer. Elle est
4635
t aussi bien ignorer. Elle est tout autre chose :
le
devenir présent. Elle est plus vraie que nous, qui ne faisons que l’h
4636
Elle est plus vraie que nous, qui ne faisons que
l’
habiter pour un atome de temps insignifiant. Elle est devenue le cours
4637
un atome de temps insignifiant. Elle est devenue
le
cours de la réalité, où ce qu’il y a de plus réel, c’est le cours mêm
4638
temps insignifiant. Elle est devenue le cours de
la
réalité, où ce qu’il y a de plus réel, c’est le cours même. Et comme
4639
e la réalité, où ce qu’il y a de plus réel, c’est
le
cours même. Et comme ce mouvement pur « doit » être dépourvu d’origin
4640
sable, on ne peut savoir son sens, mais seulement
l’
épouser, et l’on ne peut le penser qu’en s’y abandonnant. Ce qui se pl
4641
eut savoir son sens, mais seulement l’épouser, et
l’
on ne peut le penser qu’en s’y abandonnant. Ce qui se place dans le se
4642
n sens, mais seulement l’épouser, et l’on ne peut
le
penser qu’en s’y abandonnant. Ce qui se place dans le sens de l’Histo
4643
enser qu’en s’y abandonnant. Ce qui se place dans
le
sens de l’Histoire en reçoit l’attribut d’exister. Ce qui résiste au
4644
s’y abandonnant. Ce qui se place dans le sens de
l’
Histoire en reçoit l’attribut d’exister. Ce qui résiste au sens est «
4645
qui se place dans le sens de l’Histoire en reçoit
l’
attribut d’exister. Ce qui résiste au sens est « mystification » aux y
4646
présence d’une doctrine politique ou sociale, de
l’
action d’un pays ou de l’option d’un homme, il n’est donc plus questio
4647
politique ou sociale, de l’action d’un pays ou de
l’
option d’un homme, il n’est donc plus question de demander si c’est «
4648
stion de demander si c’est « vrai ». C’est « dans
le
sens de l’Histoire », ou ce n’est rien qui vaille… Suis-je dans l’His
4649
mander si c’est « vrai ». C’est « dans le sens de
l’
Histoire », ou ce n’est rien qui vaille… Suis-je dans l’Histoire ? Es-
4650
oire », ou ce n’est rien qui vaille… Suis-je dans
l’
Histoire ? Es-tu dans l’Histoire ? Sont-ils dans l’Histoire ? ainsi co
4651
qui vaille… Suis-je dans l’Histoire ? Es-tu dans
l’
Histoire ? Sont-ils dans l’Histoire ? ainsi conjugue une bonne partie
4652
’Histoire ? Es-tu dans l’Histoire ? Sont-ils dans
l’
Histoire ? ainsi conjugue une bonne partie de l’intelligentsia occiden
4653
s l’Histoire ? ainsi conjugue une bonne partie de
l’
intelligentsia occidentale du xxe siècle. Comme il est clair qu’on ne
4654
omme il est clair qu’on ne peut pas « être » dans
l’
Histoire rédigée par les historiens, on voit qu’il s’agit d’autre chos
4655
ne peut pas « être » dans l’Histoire rédigée par
les
historiens, on voit qu’il s’agit d’autre chose : non de mémoire mais
4656
s d’attitude actuelle, et non d’une discipline de
l’
intellect mais bien d’une conception de l’Existence. Cette Histoire ab
4657
line de l’intellect mais bien d’une conception de
l’
Existence. Cette Histoire absolutisée, qui n’est plus connaissance des
4658
ui lui cèdent et ceux qui lui résistent — peut-on
la
distinguer encore du temps lui-même ? N’est-elle pas simplement une m
4659
i-même ? N’est-elle pas simplement une manière de
le
penser qui le ferme à toute transcendance, et qui du même coup nous e
4660
-elle pas simplement une manière de le penser qui
le
ferme à toute transcendance, et qui du même coup nous enferme et nous
4661
e n’étant pas du monde », disait saint Paul. Mais
l’
Histoire absolue veut que l’homme tout entier soit uniquement du monde
4662
sait saint Paul. Mais l’Histoire absolue veut que
l’
homme tout entier soit uniquement du monde : elle le coupe de l’esprit
4663
homme tout entier soit uniquement du monde : elle
le
coupe de l’esprit. Ce faisant, elle nie la personne, car la personne
4664
ntier soit uniquement du monde : elle le coupe de
l’
esprit. Ce faisant, elle nie la personne, car la personne se fonde dan
4665
: elle le coupe de l’esprit. Ce faisant, elle nie
la
personne, car la personne se fonde dans ce qui juge le temps, le détr
4666
e l’esprit. Ce faisant, elle nie la personne, car
la
personne se fonde dans ce qui juge le temps, le détruit et le renouve
4667
rsonne, car la personne se fonde dans ce qui juge
le
temps, le détruit et le renouvelle. Et, si l’on rêve un monde coupé d
4668
r la personne se fonde dans ce qui juge le temps,
le
détruit et le renouvelle. Et, si l’on rêve un monde coupé du transcen
4669
se fonde dans ce qui juge le temps, le détruit et
le
renouvelle. Et, si l’on rêve un monde coupé du transcendant, on évacu
4670
uge le temps, le détruit et le renouvelle. Et, si
l’
on rêve un monde coupé du transcendant, on évacue du même mouvement dé
4671
u même mouvement désespéré toute justification de
l’
action personnelle. Rien d’étonnant si l’homme, dès qu’il croit cette
4672
ation de l’action personnelle. Rien d’étonnant si
l’
homme, dès qu’il croit cette Histoire, se découvre impuissant devant e
4673
n’est plus répandu que ce sentiment anxieux dans
l’
intelligentsia comme dans les masses modernes, et c’est sur lui que le
4674
entiment anxieux dans l’intelligentsia comme dans
les
masses modernes, et c’est sur lui que les dictatures totalitaires fon
4675
me dans les masses modernes, et c’est sur lui que
les
dictatures totalitaires fondent leur pouvoir. Le droit d’opposition s
4676
les dictatures totalitaires fondent leur pouvoir.
Le
droit d’opposition se justifiait, en effet, par la seule conviction q
4677
e droit d’opposition se justifiait, en effet, par
la
seule conviction que la vocation d’un homme peut être plus vraie que
4678
justifiait, en effet, par la seule conviction que
la
vocation d’un homme peut être plus vraie que la règle — d’où les mart
4679
e la vocation d’un homme peut être plus vraie que
la
règle — d’où les martyrs des premiers temps du christianisme. Si, au
4680
un homme peut être plus vraie que la règle — d’où
les
martyrs des premiers temps du christianisme. Si, au contraire, le « s
4681
remiers temps du christianisme. Si, au contraire,
le
« sens » appartient à l’Histoire, et l’Histoire au César du moment, l
4682
nisme. Si, au contraire, le « sens » appartient à
l’
Histoire, et l’Histoire au César du moment, la police politique du Cés
4683
ontraire, le « sens » appartient à l’Histoire, et
l’
Histoire au César du moment, la police politique du César détient seul
4684
t à l’Histoire, et l’Histoire au César du moment,
la
police politique du César détient seule le vrai sens de nos vies. Nul
4685
oment, la police politique du César détient seule
le
vrai sens de nos vies. Nul scrupule de conscience ou sursaut de belle
4686
séquence, sans doute pénible, mais normale. 5.
Le
refus moderne du temps Cette description rapide d’une attitude nou
4687
t d’un état de conscience profondément typique de
l’
Occident au xxe siècle me semble incontestable en tant que diagnostic
4688
ncontestable en tant que diagnostic. Mais comment
la
situer dans l’ensemble de l’Aventure occidentale ? Est-elle le signe
4689
tant que diagnostic. Mais comment la situer dans
l’
ensemble de l’Aventure occidentale ? Est-elle le signe annonciateur d’
4690
nostic. Mais comment la situer dans l’ensemble de
l’
Aventure occidentale ? Est-elle le signe annonciateur d’une fin lugubr
4691
s l’ensemble de l’Aventure occidentale ? Est-elle
le
signe annonciateur d’une fin lugubre, ou seulement d’une crise de cro
4692
seulement d’une crise de croissance ? On a vu que
la
croyance à l’Histoire absolue, ce produit de remplacement de la Provi
4693
e crise de croissance ? On a vu que la croyance à
l’
Histoire absolue, ce produit de remplacement de la Providence, a pour
4694
l’Histoire absolue, ce produit de remplacement de
la
Providence, a pour effet normal d’éliminer la croyance à l’action per
4695
de la Providence, a pour effet normal d’éliminer
la
croyance à l’action personnelle. La personne est agent de liberté. Ce
4696
nce, a pour effet normal d’éliminer la croyance à
l’
action personnelle. La personne est agent de liberté. Cette Histoire n
4697
al d’éliminer la croyance à l’action personnelle.
La
personne est agent de liberté. Cette Histoire nous conduit au fatalis
4698
Cette Histoire nous conduit au fatalisme. Comment
l’
Histoire et la personne ont-elles pu devenir exclusives l’une de l’aut
4699
nous conduit au fatalisme. Comment l’Histoire et
la
personne ont-elles pu devenir exclusives l’une de l’autre, alors qu’e
4700
e acte libérateur ? Mais, d’abord, est-il sûr que
la
croyance moderne à l’Histoire comme devenir tout-puissant soit le dév
4701
is, d’abord, est-il sûr que la croyance moderne à
l’
Histoire comme devenir tout-puissant soit le développement normal et l
4702
rne à l’Histoire comme devenir tout-puissant soit
le
développement normal et la suite obligée de l’attitude chrétienne dev
4703
nir tout-puissant soit le développement normal et
la
suite obligée de l’attitude chrétienne devant le temps ? Notre époque
4704
it le développement normal et la suite obligée de
l’
attitude chrétienne devant le temps ? Notre époque aurait-elle simplem
4705
la suite obligée de l’attitude chrétienne devant
le
temps ? Notre époque aurait-elle simplement l’esprit « plus historiqu
4706
nt le temps ? Notre époque aurait-elle simplement
l’
esprit « plus historique » que toutes les précédentes ? Oui, s’il s’ag
4707
implement l’esprit « plus historique » que toutes
les
précédentes ? Oui, s’il s’agit du goût de connaître le passé, plus ré
4708
écédentes ? Oui, s’il s’agit du goût de connaître
le
passé, plus répandu que jamais dans le grand public : Toynbee est bes
4709
connaître le passé, plus répandu que jamais dans
le
grand public : Toynbee est best-seller, les revues et la presse nous
4710
s dans le grand public : Toynbee est best-seller,
les
revues et la presse nous parlent de Sumer, du paléolithique, des Maya
4711
d public : Toynbee est best-seller, les revues et
la
presse nous parlent de Sumer, du paléolithique, des Mayas ou du vase
4712
r, du paléolithique, des Mayas ou du vase de Vix,
les
mémoires font fureur, les biographies s’arrachent, et beaucoup n’atte
4713
ayas ou du vase de Vix, les mémoires font fureur,
les
biographies s’arrachent, et beaucoup n’attendent pas la cinquantaine
4714
graphies s’arrachent, et beaucoup n’attendent pas
la
cinquantaine pour se mettre au passé dans un livre. Mais la réponse e
4715
taine pour se mettre au passé dans un livre. Mais
la
réponse est non s’il s’agit de cette Histoire dans le « sens » de laq
4716
éponse est non s’il s’agit de cette Histoire dans
le
« sens » de laquelle on nous dit qu’il faut « être » de toute nécessi
4717
ne de n’être pas. Celle-ci marque un recul devant
le
risque du temps. La conscience de l’Histoire est née de l’acceptation
4718
lle-ci marque un recul devant le risque du temps.
La
conscience de l’Histoire est née de l’acceptation d’un temps radicale
4719
recul devant le risque du temps. La conscience de
l’
Histoire est née de l’acceptation d’un temps radicalement imprévisible
4720
du temps. La conscience de l’Histoire est née de
l’
acceptation d’un temps radicalement imprévisible. Et sa fin seule étai
4721
et serait bonne. Mais encore fallait-il croire à
l’
Apocalypse. D’ici là, nul soutien que la foi. À ce risque du temps, le
4722
croire à l’Apocalypse. D’ici là, nul soutien que
la
foi. À ce risque du temps, le Moyen Âge résiste par un retour aux con
4723
là, nul soutien que la foi. À ce risque du temps,
le
Moyen Âge résiste par un retour aux conceptions cycliques et par une
4724
ne nette limitation des dimensions du passé et de
l’
avenir : cette espèce de congélation du temps a pour effet d’éliminer
4725
e de congélation du temps a pour effet d’éliminer
le
devenir. Mais la Renaissance et les siècles suivants découvrent l’inf
4726
du temps a pour effet d’éliminer le devenir. Mais
la
Renaissance et les siècles suivants découvrent l’infini et le réintro
4727
fet d’éliminer le devenir. Mais la Renaissance et
les
siècles suivants découvrent l’infini et le réintroduisent dans l’imag
4728
la Renaissance et les siècles suivants découvrent
l’
infini et le réintroduisent dans l’imagination et la spéculation, puis
4729
ce et les siècles suivants découvrent l’infini et
le
réintroduisent dans l’imagination et la spéculation, puis dans le cal
4730
nts découvrent l’infini et le réintroduisent dans
l’
imagination et la spéculation, puis dans le calcul mathématique. On ne
4731
infini et le réintroduisent dans l’imagination et
la
spéculation, puis dans le calcul mathématique. On ne peut plus limite
4732
t dans l’imagination et la spéculation, puis dans
le
calcul mathématique. On ne peut plus limiter l’espace ni le temps, et
4733
s le calcul mathématique. On ne peut plus limiter
l’
espace ni le temps, et, lorsque au xxe siècle ils se dilatent soudain
4734
mathématique. On ne peut plus limiter l’espace ni
le
temps, et, lorsque au xxe siècle ils se dilatent soudain au-delà de
4735
delà de tout ce que notre esprit peut se figurer,
l’
idée d’évolution balaie nos repères et nous emporte sans espoir à l’av
4736
balaie nos repères et nous emporte sans espoir à
l’
aventure. Devant le risque béant, soudain total, l’homme qui n’a pas d
4737
et nous emporte sans espoir à l’aventure. Devant
le
risque béant, soudain total, l’homme qui n’a pas de foi cède au verti
4738
’aventure. Devant le risque béant, soudain total,
l’
homme qui n’a pas de foi cède au vertige. Sa dernière résistance à l’a
4739
de foi cède au vertige. Sa dernière résistance à
l’
angoisse du temps se manifeste alors par la manière dont il décide d’i
4740
ance à l’angoisse du temps se manifeste alors par
la
manière dont il décide d’identifier au devenir l’être et la vérité el
4741
la manière dont il décide d’identifier au devenir
l’
être et la vérité elle-même. Solution masochiste, pour un Occidental.
4742
dont il décide d’identifier au devenir l’être et
la
vérité elle-même. Solution masochiste, pour un Occidental. L’individu
4743
le-même. Solution masochiste, pour un Occidental.
L’
individu trouve le défi trop lourd. Dans un cosmos qui se calcule en c
4744
masochiste, pour un Occidental. L’individu trouve
le
défi trop lourd. Dans un cosmos qui se calcule en centaines de millio
4745
ns d’années-lumière, dans cette durée qui va vers
l’
infini, et dans une société où la technique, les « lois économiques »,
4746
urée qui va vers l’infini, et dans une société où
la
technique, les « lois économiques », la puissance de l’État, les mouv
4747
rs l’infini, et dans une société où la technique,
les
« lois économiques », la puissance de l’État, les mouvements de masse
4748
ociété où la technique, les « lois économiques »,
la
puissance de l’État, les mouvements de masse, etc., échappent à ses p
4749
hnique, les « lois économiques », la puissance de
l’
État, les mouvements de masse, etc., échappent à ses prises et l’enser
4750
les « lois économiques », la puissance de l’État,
les
mouvements de masse, etc., échappent à ses prises et l’enserrent — «
4751
vements de masse, etc., échappent à ses prises et
l’
enserrent — « il ne se retrouve plus » et démissionne. Que l’Histoire
4752
— « il ne se retrouve plus » et démissionne. Que
l’
Histoire décide à ma place, de toute façon je n’y puis rien. Que le di
4753
à ma place, de toute façon je n’y puis rien. Que
le
dictateur ou le Parti décrètent le vrai sens de ma vie, de toute faço
4754
toute façon je n’y puis rien. Que le dictateur ou
le
Parti décrètent le vrai sens de ma vie, de toute façon je ne pourrais
4755
puis rien. Que le dictateur ou le Parti décrètent
le
vrai sens de ma vie, de toute façon je ne pourrais plus le distinguer
4756
ens de ma vie, de toute façon je ne pourrais plus
le
distinguer. Je ne suis plus responsable, mais c’est l’Évolution, et j
4757
stinguer. Je ne suis plus responsable, mais c’est
l’
Évolution, et je n’ai plus d’autre choix que de m’en dire l’agent. Cet
4758
n, et je n’ai plus d’autre choix que de m’en dire
l’
agent. Cet abandon de l’être entier à la Maya, sans plus rêver la déli
4759
re choix que de m’en dire l’agent. Cet abandon de
l’
être entier à la Maya, sans plus rêver la délivrance du nirvana, cet e
4760
m’en dire l’agent. Cet abandon de l’être entier à
la
Maya, sans plus rêver la délivrance du nirvana, cet enlisement dans l
4761
andon de l’être entier à la Maya, sans plus rêver
la
délivrance du nirvana, cet enlisement dans la forme du monde, sans es
4762
ver la délivrance du nirvana, cet enlisement dans
la
forme du monde, sans espoir de salut individuel58 — je pressens qu’il
4763
moins autant qu’un fléchissement réel du sens de
la
personne et de la liberté. Ce n’est pas qu’on n’aime plus être soi li
4764
n fléchissement réel du sens de la personne et de
la
liberté. Ce n’est pas qu’on n’aime plus être soi librement, ni vraime
4765
plus être soi librement, ni vraiment qu’on renie
la
personne : mais on ne croit plus, on n’ose plus croire qu’elle puisse
4766
n sadisme. Dans cette abjecte humiliation du moi,
l’
orgueil fou trouve un alibi. L’Évolution fatale est en réalité celle q
4767
umiliation du moi, l’orgueil fou trouve un alibi.
L’
Évolution fatale est en réalité celle que l’on voudrait imposer. Les c
4768
libi. L’Évolution fatale est en réalité celle que
l’
on voudrait imposer. Les communistes affirment qu’ils sont les instrum
4769
e est en réalité celle que l’on voudrait imposer.
Les
communistes affirment qu’ils sont les instruments du sens inévitable
4770
it imposer. Les communistes affirment qu’ils sont
les
instruments du sens inévitable de l’Histoire, légitimant la mort de m
4771
qu’ils sont les instruments du sens inévitable de
l’
Histoire, légitimant la mort de millions de koulaks qui vivaient par h
4772
ents du sens inévitable de l’Histoire, légitimant
la
mort de millions de koulaks qui vivaient par hasard en travers. Mais
4773
koulaks qui vivaient par hasard en travers. Mais
les
« lois » révélées par Karl Marx n’ont jamais prévu rien de tel ; elle
4774
mplement au Dictateur d’accréditer son utopie. Si
le
sang de ses propres martyrs fut la semence de l’Église, c’est le sang
4775
son utopie. Si le sang de ses propres martyrs fut
la
semence de l’Église, c’est le sang des « païens », le sang des autres
4776
le sang de ses propres martyrs fut la semence de
l’
Église, c’est le sang des « païens », le sang des autres, qui cimente
4777
propres martyrs fut la semence de l’Église, c’est
le
sang des « païens », le sang des autres, qui cimente l’édifice de l’U
4778
emence de l’Église, c’est le sang des « païens »,
le
sang des autres, qui cimente l’édifice de l’Usine soviétique et donne
4779
g des « païens », le sang des autres, qui cimente
l’
édifice de l’Usine soviétique et donne la preuve démente de la réalité
4780
s », le sang des autres, qui cimente l’édifice de
l’
Usine soviétique et donne la preuve démente de la réalité des utopies
4781
cimente l’édifice de l’Usine soviétique et donne
la
preuve démente de la réalité des utopies au nom desquelles on l’a ver
4782
l’Usine soviétique et donne la preuve démente de
la
réalité des utopies au nom desquelles on l’a versé. Mais d’où vient c
4783
te de la réalité des utopies au nom desquelles on
l’
a versé. Mais d’où vient cette fureur d’anticiper l’avenir jusqu’à l’h
4784
a versé. Mais d’où vient cette fureur d’anticiper
l’
avenir jusqu’à l’hypothéquer sur des millions de crimes ? Elle vient d
4785
ù vient cette fureur d’anticiper l’avenir jusqu’à
l’
hypothéquer sur des millions de crimes ? Elle vient de notre angoisse
4786
s de crimes ? Elle vient de notre angoisse devant
le
temps. Anticiper l’avenir, c’est tenter de se convaincre que le temps
4787
ient de notre angoisse devant le temps. Anticiper
l’
avenir, c’est tenter de se convaincre que le temps ne va pas apporter
4788
ciper l’avenir, c’est tenter de se convaincre que
le
temps ne va pas apporter la négation de ce que je suis, de ce que j’a
4789
de se convaincre que le temps ne va pas apporter
la
négation de ce que je suis, de ce que j’attends, de mes croyances ou
4790
raisons de désespérer auxquelles je tiens contre
le
monde et contre Dieu — la négation de moi-même et du sens de ma vie.
4791
quelles je tiens contre le monde et contre Dieu —
la
négation de moi-même et du sens de ma vie. Anticiper l’avenir, c’est
4792
ation de moi-même et du sens de ma vie. Anticiper
l’
avenir, c’est le dernier refus de l’aventure du temps — la fuite dans
4793
ie. Anticiper l’avenir, c’est le dernier refus de
l’
aventure du temps — la fuite dans l’utopie. Utopies pessimistes, dans
4794
, c’est le dernier refus de l’aventure du temps —
la
fuite dans l’utopie. Utopies pessimistes, dans les démocraties : Orwe
4795
nier refus de l’aventure du temps — la fuite dans
l’
utopie. Utopies pessimistes, dans les démocraties : Orwell prévoit l’i
4796
la fuite dans l’utopie. Utopies pessimistes, dans
les
démocraties : Orwell prévoit l’instauration prochaine du contrôle des
4797
essimistes, dans les démocraties : Orwell prévoit
l’
instauration prochaine du contrôle des pensées par le Pouvoir. Utopies
4798
nstauration prochaine du contrôle des pensées par
le
Pouvoir. Utopies optimistes chez les totalitaires : ce sont les mêmes
4799
s pensées par le Pouvoir. Utopies optimistes chez
les
totalitaires : ce sont les mêmes, mais ils s’en félicitent. Et les un
4800
topies optimistes chez les totalitaires : ce sont
les
mêmes, mais ils s’en félicitent. Et les unes comme les autres, redout
4801
: ce sont les mêmes, mais ils s’en félicitent. Et
les
unes comme les autres, redoutées ou voulues, ne se confondent pas seu
4802
êmes, mais ils s’en félicitent. Et les unes comme
les
autres, redoutées ou voulues, ne se confondent pas seulement dans leu
4803
r fatal, mais dans une seule et même démission de
la
personne, qui désespère de ses pouvoirs d’innovation et de toute espè
4804
de recours au transcendant libérateur. Engendrer
l’
utopie est un mouvement de l’âme, sans doute inséparable de l’historic
4805
ibérateur. Engendrer l’utopie est un mouvement de
l’
âme, sans doute inséparable de l’historicité initiée par le christiani
4806
un mouvement de l’âme, sans doute inséparable de
l’
historicité initiée par le christianisme : il suffit que la foi faibli
4807
ns doute inséparable de l’historicité initiée par
le
christianisme : il suffit que la foi faiblisse, ou que le défi du tem
4808
cité initiée par le christianisme : il suffit que
la
foi faiblisse, ou que le défi du temps paraisse insurmontable. L’utop
4809
tianisme : il suffit que la foi faiblisse, ou que
le
défi du temps paraisse insurmontable. L’utopie est recul devant le te
4810
, ou que le défi du temps paraisse insurmontable.
L’
utopie est recul devant le temps ouvert, elle refuse d’affronter cette
4811
paraisse insurmontable. L’utopie est recul devant
le
temps ouvert, elle refuse d’affronter cette situation béante qui fut
4812
mais elle en reste tributaire — et c’est pourquoi
l’
Orient ne produit pas d’utopies. Concevoir une utopie et agir d’après
4813
r notre angoisse en avant, pour tenter d’asservir
l’
imprévu. Bien souvent la recherche historique projette nos désirs en a
4814
t, pour tenter d’asservir l’imprévu. Bien souvent
la
recherche historique projette nos désirs en arrière, mais les « leçon
4815
e historique projette nos désirs en arrière, mais
les
« leçons du passé » ont rarement justifié d’autres délits que ceux de
4816
ont rarement justifié d’autres délits que ceux de
la
routine. L’Histoire-devenir, qui est une conjuration du temps, exige
4817
justifié d’autres délits que ceux de la routine.
L’
Histoire-devenir, qui est une conjuration du temps, exige des sacrific
4818
glants bien plus massifs que n’en rêvèrent jamais
les
prêtres emplumés du grand dieu Huitzilopochtli. 6. Dilemme La c
4819
s du grand dieu Huitzilopochtli. 6. Dilemme
La
crise de notre sens du temps pose un dilemme. L’Occident, succombant
4820
La crise de notre sens du temps pose un dilemme.
L’
Occident, succombant au Devenir déifié, va-t-il se mettre hors d’état
4821
ir déifié, va-t-il se mettre hors d’état de faire
l’
Histoire ? Ou, surmontant le vertige cosmique et temporel où l’a plong
4822
hors d’état de faire l’Histoire ? Ou, surmontant
le
vertige cosmique et temporel où l’a plongé sa science par une mutatio
4823
Ou, surmontant le vertige cosmique et temporel où
l’
a plongé sa science par une mutation brusque, saura-t-il en tirer une
4824
-il en tirer une liberté nouvelle ? Je céderais à
la
tentation que j’ai décrite si j’essayais d’anticiper sur nos lendemai
4825
ême exactes, mais par nos choix fondamentaux. Car
la
question n’est pas de savoir « ce qui arrivera », mais de savoir dès
4826
s disposés à laisser arriver ou à faire arriver ;
la
question n’est pas de supputer le sens probable d’un devenir fatal, p
4827
faire arriver ; la question n’est pas de supputer
le
sens probable d’un devenir fatal, pour nous « ajuster » à ses « lois
4828
r » à ses « lois », mais au contraire d’affronter
le
temps au nom d’un sens qui ne peut s’originer qu’en la personne. Bref
4829
mps au nom d’un sens qui ne peut s’originer qu’en
la
personne. Bref, la question n’est pas de deviner l’Histoire, mais de
4830
s qui ne peut s’originer qu’en la personne. Bref,
la
question n’est pas de deviner l’Histoire, mais de la faire. Seules no
4831
personne. Bref, la question n’est pas de deviner
l’
Histoire, mais de la faire. Seules nos options présentes préparent un
4832
question n’est pas de deviner l’Histoire, mais de
la
faire. Seules nos options présentes préparent un sens, ménagent d’ava
4833
vient à nous. Et ces options n’agiront point par
la
violence de prises de position calculées dans l’abstrait59, mais par
4834
la violence de prises de position calculées dans
l’
abstrait59, mais par cette sorte de fascination qu’exerce sur l’avenir
4835
mais par cette sorte de fascination qu’exerce sur
l’
avenir encore intact, foisonnant d’imprévus réalisables, l’attente réa
4836
encore intact, foisonnant d’imprévus réalisables,
l’
attente réalisante d’une ferme vocation. 55. La première société d’
4837
xixe siècle par un Anglais, sir William Jones :
la
Société asiatique du Bengale. Et ce n’est guère que depuis la fin du
4838
siatique du Bengale. Et ce n’est guère que depuis
la
fin du xixe siècle qu’une science historique s’est constituée en Ind
4839
. 56. Religio, de religare, lier ensemble. 57.
La
nouveauté — le fait sans précédent archétypique — est la terreur de t
4840
, de religare, lier ensemble. 57. La nouveauté —
le
fait sans précédent archétypique — est la terreur de tous les « Moyen
4841
eauté — le fait sans précédent archétypique — est
la
terreur de tous les « Moyen Âge ». Quand elle survient, quand on se v
4842
s précédent archétypique — est la terreur de tous
les
« Moyen Âge ». Quand elle survient, quand on se voit contraint d’inno
4843
eau ou pour vaincre, on s’empresse d’en appeler à
la
coutume, et l’on prétend « renouveler la tradition ». Il suffit qu’un
4844
ncre, on s’empresse d’en appeler à la coutume, et
l’
on prétend « renouveler la tradition ». Il suffit qu’une charte, une c
4845
ppeler à la coutume, et l’on prétend « renouveler
la
tradition ». Il suffit qu’une charte, une coutume, un usage ait vingt
4846
ingt-cinq ou trente ans, au Moyen Âge, pour qu’on
l’
invoque sous le nom de « tradition ». 58. Il faut alors, de toute néc
4847
ente ans, au Moyen Âge, pour qu’on l’invoque sous
le
nom de « tradition ». 58. Il faut alors, de toute nécessité, que le
4848
on ». 58. Il faut alors, de toute nécessité, que
le
succès temporel prenne la place du salut et qu’il tienne lieu de but
4849
de toute nécessité, que le succès temporel prenne
la
place du salut et qu’il tienne lieu de but suprême. Succès individuel
4850
el ou collectif d’ailleurs ; mais le premier sent
la
tricherie. 59. Lits de Procuste des utopies toujours trop pauvres, o
4851
pauvres, ou de ces plans qui prévoient tout sauf
l’
essentiel humain, parce qu’on les a conçus non comme des directives, m
4852
évoient tout sauf l’essentiel humain, parce qu’on
les
a conçus non comme des directives, mais comme des cadres rassurants ;
4853
ent leur malfaisance. au. Rougemont Denis de, «
La
découverte du temps ou l’aventure occidentale », La Nouvelle Revue fr
4854
Rougemont Denis de, « La découverte du temps ou
l’
aventure occidentale », La Nouvelle Revue française, Paris, mars 1957,
4855
découverte du temps ou l’aventure occidentale »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, mars 1957, p. 400-415.
4856
La
personne, l’ange et l’absolu, ou le dialogue Occident-Orient (avril 1
4857
La personne,
l’
ange et l’absolu, ou le dialogue Occident-Orient (avril 1961)av U
4858
La personne, l’ange et
l’
absolu, ou le dialogue Occident-Orient (avril 1961)av Un dialogue
4859
La personne, l’ange et l’absolu, ou
le
dialogue Occident-Orient (avril 1961)av Un dialogue mal engagé
4860
ent (avril 1961)av Un dialogue mal engagé
L’
Occident découvre le zen au moment où les couvents zen se vident au Ja
4861
Un dialogue mal engagé L’Occident découvre
le
zen au moment où les couvents zen se vident au Japon. (Mais il y a be
4862
engagé L’Occident découvre le zen au moment où
les
couvents zen se vident au Japon. (Mais il y a beaucoup plus de chréti
4863
nais que de sectateurs du Dr Suzuki en Amérique.)
L’
Occident découvre la sagesse hindoue, grâce aux présentations quelque
4864
rs du Dr Suzuki en Amérique.) L’Occident découvre
la
sagesse hindoue, grâce aux présentations quelque peu christianisées q
4865
ntations quelque peu christianisées qu’en donnent
les
successeurs de Râmakrishna ; mais déjà l’intelligentsia de l’Inde se
4866
onnent les successeurs de Râmakrishna ; mais déjà
l’
intelligentsia de l’Inde se préoccupe des problèmes qui lui sont impos
4867
rs de Râmakrishna ; mais déjà l’intelligentsia de
l’
Inde se préoccupe des problèmes qui lui sont imposés par la technique
4868
préoccupe des problèmes qui lui sont imposés par
la
technique et par l’hygiène occidentales, et cherche à les résoudre à
4869
èmes qui lui sont imposés par la technique et par
l’
hygiène occidentales, et cherche à les résoudre à l’aide d’un socialis
4870
nique et par l’hygiène occidentales, et cherche à
les
résoudre à l’aide d’un socialisme qui ne doit rien à Shankara. L’Occi
4871
hygiène occidentales, et cherche à les résoudre à
l’
aide d’un socialisme qui ne doit rien à Shankara. L’Occident découvre
4872
aide d’un socialisme qui ne doit rien à Shankara.
L’
Occident découvre Zoroastre à la suite de Nietzsche, et publie les gra
4873
uvre Zoroastre à la suite de Nietzsche, et publie
les
grands textes des mystiques soufis, mais l’Iran et l’Arabie sont en p
4874
blie les grands textes des mystiques soufis, mais
l’
Iran et l’Arabie sont en pleine crise d’adaptation à l’habitus capital
4875
rands textes des mystiques soufis, mais l’Iran et
l’
Arabie sont en pleine crise d’adaptation à l’habitus capitaliste. L’Oc
4876
n et l’Arabie sont en pleine crise d’adaptation à
l’
habitus capitaliste. L’Occident découvre et publie le Hi-King, tandis
4877
leine crise d’adaptation à l’habitus capitaliste.
L’
Occident découvre et publie le Hi-King, tandis que la Chine s’industri
4878
abitus capitaliste. L’Occident découvre et publie
le
Hi-King, tandis que la Chine s’industrialise, s’impose notre marxisme
4879
ccident découvre et publie le Hi-King, tandis que
la
Chine s’industrialise, s’impose notre marxisme et oblitère son mandar
4880
notre marxisme et oblitère son mandarinat. Enfin,
l’
Occident n’a pas plus tôt découvert l’art nègre, les masques, la magie
4881
nat. Enfin, l’Occident n’a pas plus tôt découvert
l’
art nègre, les masques, la magie, le jazz, que l’Afrique noire se préc
4882
’Occident n’a pas plus tôt découvert l’art nègre,
les
masques, la magie, le jazz, que l’Afrique noire se précipite dans le
4883
pas plus tôt découvert l’art nègre, les masques,
la
magie, le jazz, que l’Afrique noire se précipite dans le nationalisme
4884
tôt découvert l’art nègre, les masques, la magie,
le
jazz, que l’Afrique noire se précipite dans le nationalisme, les jeux
4885
l’art nègre, les masques, la magie, le jazz, que
l’
Afrique noire se précipite dans le nationalisme, les jeux parlementair
4886
e, le jazz, que l’Afrique noire se précipite dans
le
nationalisme, les jeux parlementaires, et l’exploitation par elle-mêm
4887
’Afrique noire se précipite dans le nationalisme,
les
jeux parlementaires, et l’exploitation par elle-même de ses ressource
4888
dans le nationalisme, les jeux parlementaires, et
l’
exploitation par elle-même de ses ressources matérielles. Ce que nous
4889
rielles. Ce que nous découvrons avec passion dans
le
Tiers Monde, ce n’est pas ce dont il vivait, c’est ce qui manquait à
4890
s ne savaient plus trouver dans notre foi. Ce que
le
tiers-monde nous emprunte, ce n’est pas notre créativité, mais ses pr
4891
tuels en même temps que leur misère, qui en était
la
rançon. Ils adoptent nos formes sociales, nos procédés de gouvernemen
4892
s de gouvernement et nos techniques, mais non pas
les
tensions spirituelles qui en étaient le moteur secret. Ce qui était p
4893
non pas les tensions spirituelles qui en étaient
le
moteur secret. Ce qui était pour nous résultantes d’innombrables pous
4894
lectuels et spirituels ? Presque rien, sinon dire
l’
essentiel, qui n’agira guère sur l’histoire dans son devenir immédiat,
4895
en, sinon dire l’essentiel, qui n’agira guère sur
l’
histoire dans son devenir immédiat, mais peut orienter la conscience d
4896
ire dans son devenir immédiat, mais peut orienter
la
conscience de quelques-uns de ceux qui la feront demain. L’essentiel
4897
rienter la conscience de quelques-uns de ceux qui
la
feront demain. L’essentiel du dialogue nécessaire et désormais inévit
4898
nce de quelques-uns de ceux qui la feront demain.
L’
essentiel du dialogue nécessaire et désormais inévitable, pour si mal
4899
vitable, pour si mal engagé qu’il soit, porte sur
l’
homme et sa définition. S’il est vrai que l’Orient nie le moi, qui est
4900
e sur l’homme et sa définition. S’il est vrai que
l’
Orient nie le moi, qui est une valeur centrale pour l’Occident, il doi
4901
et sa définition. S’il est vrai que l’Orient nie
le
moi, qui est une valeur centrale pour l’Occident, il doit en résulter
4902
ient nie le moi, qui est une valeur centrale pour
l’
Occident, il doit en résulter d’infinies conséquences dans tous les do
4903
oit en résulter d’infinies conséquences dans tous
les
domaines du réel, du spirituel au politique ; mais dans quelle mesure
4904
; mais dans quelle mesure est-ce vrai ? Quel est
le
moi qui s’affirme d’une part et quel est le moi qu’on nie de l’autre
4905
l est le moi qui s’affirme d’une part et quel est
le
moi qu’on nie de l’autre ? Est-ce bien le même ? La Personne Le
4906
uel est le moi qu’on nie de l’autre ? Est-ce bien
le
même ? La Personne Le christianisme a formé l’Occident, en form
4907
i qu’on nie de l’autre ? Est-ce bien le même ?
La
Personne Le christianisme a formé l’Occident, en formant, dès les
4908
l’autre ? Est-ce bien le même ? La Personne
Le
christianisme a formé l’Occident, en formant, dès les premiers concil
4909
même ? La Personne Le christianisme a formé
l’
Occident, en formant, dès les premiers conciles, ses modèles de pensée
4910
nes divines à la fois distinctes et reliées. D’où
la
définition de la personne humaine ou du vrai moi, reprise et précisée
4911
fois distinctes et reliées. D’où la définition de
la
personne humaine ou du vrai moi, reprise et précisée par toutes les g
4912
ne ou du vrai moi, reprise et précisée par toutes
les
grandes époques de la théologie et de la philosophie, et toujours opp
4913
ise et précisée par toutes les grandes époques de
la
théologie et de la philosophie, et toujours opposée à l’homme naturel
4914
toutes les grandes époques de la théologie et de
la
philosophie, et toujours opposée à l’homme naturel, animal plus ou mo
4915
logie et de la philosophie, et toujours opposée à
l’
homme naturel, animal plus ou moins raisonnable et simple exemplaire d
4916
plus ou moins raisonnable et simple exemplaire de
l’
espèce. Pour saint Paul, le vrai moi est l’homme nouveau, « appelé » p
4917
t simple exemplaire de l’espèce. Pour saint Paul,
le
vrai moi est l’homme nouveau, « appelé » par un Dieu personnel, donc
4918
ire de l’espèce. Pour saint Paul, le vrai moi est
l’
homme nouveau, « appelé » par un Dieu personnel, donc créé par une voc
4919
nc créé par une vocation, et il ne tombe pas sous
le
sens comme le « vieil homme », puisque sa vie « nouvelle » est à la f
4920
e vocation, et il ne tombe pas sous le sens comme
le
« vieil homme », puisque sa vie « nouvelle » est à la fois dans le mo
4921
», puisque sa vie « nouvelle » est à la fois dans
le
monde et hors du monde, à la fois manifestée par son amour (Agapè) et
4922
manifestée par son amour (Agapè) et « cachée avec
le
Christ en Dieu ». (Colossiens, 3, 3.) Dès les Pères grecs et le latin
4923
avec le Christ en Dieu ». (Colossiens, 3, 3.) Dès
les
Pères grecs et le latin Boèce, à travers Jean Scot Érigène, jusqu’à R
4924
ieu ». (Colossiens, 3, 3.) Dès les Pères grecs et
le
latin Boèce, à travers Jean Scot Érigène, jusqu’à Richard de Saint-Vi
4925
rigène, jusqu’à Richard de Saint-Victor puis dans
le
thomisme, on peut suivre l’évolution du concept et du terme de person
4926
aint-Victor puis dans le thomisme, on peut suivre
l’
évolution du concept et du terme de personne, forgé par la doctrine tr
4927
ion du concept et du terme de personne, forgé par
la
doctrine trinitaire ; il s’appliquera de mieux en mieux à l’homme nou
4928
trinitaire ; il s’appliquera de mieux en mieux à
l’
homme nouveau, à l’ens sibi suscité par l’esprit dans l’individu natur
4929
appliquera de mieux en mieux à l’homme nouveau, à
l’
ens sibi suscité par l’esprit dans l’individu naturel. Pour Descartes,
4930
mieux à l’homme nouveau, à l’ens sibi suscité par
l’
esprit dans l’individu naturel. Pour Descartes, le vrai moi c’est « l’
4931
e nouveau, à l’ens sibi suscité par l’esprit dans
l’
individu naturel. Pour Descartes, le vrai moi c’est « l’âme », mais il
4932
l’esprit dans l’individu naturel. Pour Descartes,
le
vrai moi c’est « l’âme », mais il s’agit d’une âme tout intellectuell
4933
vidu naturel. Pour Descartes, le vrai moi c’est «
l’
âme », mais il s’agit d’une âme tout intellectuelle, dont « la nature
4934
s il s’agit d’une âme tout intellectuelle, dont «
la
nature n’est que de penser » et qui reste entièrement distincte du co
4935
reste entièrement distincte du corps. Avec Kant,
le
vrai moi, nouménal, s’oppose au moi phénoménal, et reprend le nom de
4936
nouménal, s’oppose au moi phénoménal, et reprend
le
nom de personne. Chez Renouvier, la personne apparaît comme « fonctio
4937
l, et reprend le nom de personne. Chez Renouvier,
la
personne apparaît comme « fonction à plusieurs variables », par là do
4938
s », par là douée d’une liberté que n’aura jamais
l’
individu, simple objet du déterminisme universel. Et quant à la scienc
4939
imple objet du déterminisme universel. Et quant à
la
science d’aujourd’hui, dont on a pu penser « qu’elle n’aborde le moi
4940
jourd’hui, dont on a pu penser « qu’elle n’aborde
le
moi que pour le disjoindre60 », il me semble plutôt qu’elle élague le
4941
on a pu penser « qu’elle n’aborde le moi que pour
le
disjoindre60 », il me semble plutôt qu’elle élague le vrai moi, qu’el
4942
isjoindre60 », il me semble plutôt qu’elle élague
le
vrai moi, qu’elle en disjoint ce qui appartient en propre au collecti
4943
isjoint ce qui appartient en propre au collectif (
l’
inconscient, le surmoi, les archétypes) ou au biologique (l’hérédité,
4944
appartient en propre au collectif (l’inconscient,
le
surmoi, les archétypes) ou au biologique (l’hérédité, l’équilibre end
4945
en propre au collectif (l’inconscient, le surmoi,
les
archétypes) ou au biologique (l’hérédité, l’équilibre endocrinien), e
4946
ent, le surmoi, les archétypes) ou au biologique (
l’
hérédité, l’équilibre endocrinien), et nous le montre d’autant plus di
4947
oi, les archétypes) ou au biologique (l’hérédité,
l’
équilibre endocrinien), et nous le montre d’autant plus distinct, dans
4948
ue (l’hérédité, l’équilibre endocrinien), et nous
le
montre d’autant plus distinct, dans sa fonction centrale, totalisante
4949
e, totalisante, dans son pouvoir d’intégration de
l’
être. Loin de dissocier le moi, les recherches psychologiques du xxe
4950
ouvoir d’intégration de l’être. Loin de dissocier
le
moi, les recherches psychologiques du xxe siècle nomment et dénoncen
4951
’intégration de l’être. Loin de dissocier le moi,
les
recherches psychologiques du xxe siècle nomment et dénoncent les for
4952
sychologiques du xxe siècle nomment et dénoncent
les
forces qui tendent à le dissocier, les névroses qui l’assiègent de to
4953
cle nomment et dénoncent les forces qui tendent à
le
dissocier, les névroses qui l’assiègent de toutes parts, et retrouven
4954
dénoncent les forces qui tendent à le dissocier,
les
névroses qui l’assiègent de toutes parts, et retrouvent par le détour
4955
rces qui tendent à le dissocier, les névroses qui
l’
assiègent de toutes parts, et retrouvent par le détour de leurs descri
4956
ui l’assiègent de toutes parts, et retrouvent par
le
détour de leurs descriptions « objectives » l’opposition paulinienne
4957
ar le détour de leurs descriptions « objectives »
l’
opposition paulinienne des « deux hommes en moi » : le naturel tyranni
4958
position paulinienne des « deux hommes en moi » :
le
naturel tyrannisant (et tyrannisé par la Loi) et le spirituel libérat
4959
moi » : le naturel tyrannisant (et tyrannisé par
la
Loi) et le spirituel libérateur. S’il est vrai que le langage courant
4960
naturel tyrannisant (et tyrannisé par la Loi) et
le
spirituel libérateur. S’il est vrai que le langage courant confond sa
4961
oi) et le spirituel libérateur. S’il est vrai que
le
langage courant confond sans l’ombre d’un scrupule la personne et tou
4962
S’il est vrai que le langage courant confond sans
l’
ombre d’un scrupule la personne et tout ce qu’elle n’est pas — l’indiv
4963
angage courant confond sans l’ombre d’un scrupule
la
personne et tout ce qu’elle n’est pas — l’individu, la persona, la «
4964
rupule la personne et tout ce qu’elle n’est pas —
l’
individu, la persona, la « forte individualité », l’âme sensitive, l’i
4965
rsonne et tout ce qu’elle n’est pas — l’individu,
la
persona, la « forte individualité », l’âme sensitive, l’intellect, l’
4966
ut ce qu’elle n’est pas — l’individu, la persona,
la
« forte individualité », l’âme sensitive, l’intellect, l’élémentaire
4967
individu, la persona, la « forte individualité »,
l’
âme sensitive, l’intellect, l’élémentaire et souvent si trompeuse cons
4968
ona, la « forte individualité », l’âme sensitive,
l’
intellect, l’élémentaire et souvent si trompeuse conscience de soi — r
4969
te individualité », l’âme sensitive, l’intellect,
l’
élémentaire et souvent si trompeuse conscience de soi — reste que la c
4970
ouvent si trompeuse conscience de soi — reste que
la
croyance au moi distinct et le recours à la « valeur absolue de la pe
4971
de soi — reste que la croyance au moi distinct et
le
recours à la « valeur absolue de la personne » sont à peu près univer
4972
e que la croyance au moi distinct et le recours à
la
« valeur absolue de la personne » sont à peu près universels en Occid
4973
i distinct et le recours à la « valeur absolue de
la
personne » sont à peu près universels en Occident. Comme l’attestent
4974
e » sont à peu près universels en Occident. Comme
l’
attestent tant de notions considérées comme allant de soi — et tant de
4975
lant de soi — et tant de réalités « bien vues » à
l’
Ouest, mais que l’Est se devait d’ignorer, voire de condamner, telles
4976
ant de réalités « bien vues » à l’Ouest, mais que
l’
Est se devait d’ignorer, voire de condamner, telles que l’originalité,
4977
devait d’ignorer, voire de condamner, telles que
l’
originalité, les droits de l’homme, le record, la gloire personnelle,
4978
er, voire de condamner, telles que l’originalité,
les
droits de l’homme, le record, la gloire personnelle, la biographie et
4979
telles que l’originalité, les droits de l’homme,
le
record, la gloire personnelle, la biographie et le portrait, la prièr
4980
l’originalité, les droits de l’homme, le record,
la
gloire personnelle, la biographie et le portrait, la prière pour un t
4981
its de l’homme, le record, la gloire personnelle,
la
biographie et le portrait, la prière pour un tel vivant ou pour les m
4982
e record, la gloire personnelle, la biographie et
le
portrait, la prière pour un tel vivant ou pour les morts… Comme l’att
4983
gloire personnelle, la biographie et le portrait,
la
prière pour un tel vivant ou pour les morts… Comme l’attestent non mo
4984
le portrait, la prière pour un tel vivant ou pour
les
morts… Comme l’attestent non moins la mauvaise réputation que nous fa
4985
rière pour un tel vivant ou pour les morts… Comme
l’
attestent non moins la mauvaise réputation que nous faisons à l’anonym
4986
nt ou pour les morts… Comme l’attestent non moins
la
mauvaise réputation que nous faisons à l’anonyme, la condamnation par
4987
n moins la mauvaise réputation que nous faisons à
l’
anonyme, la condamnation par nos critiques du style impersonnel ou de
4988
mauvaise réputation que nous faisons à l’anonyme,
la
condamnation par nos critiques du style impersonnel ou de la banalité
4989
tion par nos critiques du style impersonnel ou de
la
banalité, la dénonciation de l’on par nos philosophes, et les diatrib
4990
critiques du style impersonnel ou de la banalité,
la
dénonciation de l’on par nos philosophes, et les diatribes marxistes
4991
impersonnel ou de la banalité, la dénonciation de
l’
on par nos philosophes, et les diatribes marxistes contre l’aliénation
4992
, la dénonciation de l’on par nos philosophes, et
les
diatribes marxistes contre l’aliénation. Et comme l’atteste enfin not
4993
os philosophes, et les diatribes marxistes contre
l’
aliénation. Et comme l’atteste enfin notre notion de l’amour, — à quoi
4994
diatribes marxistes contre l’aliénation. Et comme
l’
atteste enfin notre notion de l’amour, — à quoi j’entends venir plus l
4995
énation. Et comme l’atteste enfin notre notion de
l’
amour, — à quoi j’entends venir plus loin. L’ange Quelle est cet
4996
e l’amour, — à quoi j’entends venir plus loin.
L’
ange Quelle est cette part de la personne dès maintenant libérée du
4997
plus loin. L’ange Quelle est cette part de
la
personne dès maintenant libérée du monde, où elle vit encore en exil,
4998
héritière du Royaume », dès maintenant « portant
l’
image céleste », « glorifiée », « revêtue de lumière », d’incorruptibi
4999
ortalité ; dès maintenant donc « ressuscitée avec
le
Christ », bien que « cachée avec le Christ en Dieu » jusqu’à l’avènem
5000
suscitée avec le Christ », bien que « cachée avec
le
Christ en Dieu » jusqu’à l’avènement de l’Amour ? C’est l’Ange, répon
5001
ien que « cachée avec le Christ en Dieu » jusqu’à
l’
avènement de l’Amour ? C’est l’Ange, répond l’Iran des spirituels, l’I
5002
e avec le Christ en Dieu » jusqu’à l’avènement de
l’
Amour ? C’est l’Ange, répond l’Iran des spirituels, l’Iran du mazdéism
5003
en Dieu » jusqu’à l’avènement de l’Amour ? C’est
l’
Ange, répond l’Iran des spirituels, l’Iran du mazdéisme et des mystiqu
5004
u’à l’avènement de l’Amour ? C’est l’Ange, répond
l’
Iran des spirituels, l’Iran du mazdéisme et des mystiques soufis, proc
5005
our ? C’est l’Ange, répond l’Iran des spirituels,
l’
Iran du mazdéisme et des mystiques soufis, proche de l’Inde mais enté
5006
n du mazdéisme et des mystiques soufis, proche de
l’
Inde mais enté sur le tronc abrahamique, d’où sont issus les juifs, le
5007
mystiques soufis, proche de l’Inde mais enté sur
le
tronc abrahamique, d’où sont issus les juifs, les chrétiens, et l’isl
5008
is enté sur le tronc abrahamique, d’où sont issus
les
juifs, les chrétiens, et l’islam. Que serait l’Ange pour nos psycholo
5009
le tronc abrahamique, d’où sont issus les juifs,
les
chrétiens, et l’islam. Que serait l’Ange pour nos psychologues ? Une
5010
que, d’où sont issus les juifs, les chrétiens, et
l’
islam. Que serait l’Ange pour nos psychologues ? Une projection du moi
5011
les juifs, les chrétiens, et l’islam. Que serait
l’
Ange pour nos psychologues ? Une projection du moi individuel ou colle
5012
e projection du moi individuel ou collectif. Pour
les
sages de l’Iran, il est ce moi. Barakat, juif passé à l’islam, écrit
5013
du moi individuel ou collectif. Pour les sages de
l’
Iran, il est ce moi. Barakat, juif passé à l’islam, écrit en 1165 : «
5014
s de l’Iran, il est ce moi. Barakat, juif passé à
l’
islam, écrit en 1165 : « … pour chaque âme individuelle, ou peut-être
5015
ollicitude et tendresse spéciales ; c’est lui qui
les
initie à la connaissance, les protège, les guide, les défend, les réc
5016
tendresse spéciales ; c’est lui qui les initie à
la
connaissance, les protège, les guide, les défend, les réconforte, les
5017
les ; c’est lui qui les initie à la connaissance,
les
protège, les guide, les défend, les réconforte, les fait triompher, e
5018
ui qui les initie à la connaissance, les protège,
les
guide, les défend, les réconforte, les fait triompher, et c’est cet ê
5019
initie à la connaissance, les protège, les guide,
les
défend, les réconforte, les fait triompher, et c’est cet être qu’ils
5020
connaissance, les protège, les guide, les défend,
les
réconforte, les fait triompher, et c’est cet être qu’ils appelaient N
5021
s protège, les guide, les défend, les réconforte,
les
fait triompher, et c’est cet être qu’ils appelaient Nature parfaite.
5022
t être qu’ils appelaient Nature parfaite. » C’est
le
vrai moi, c’est l’Ange. « Il ne s’agit plus du simple messager transm
5023
aient Nature parfaite. » C’est le vrai moi, c’est
l’
Ange. « Il ne s’agit plus du simple messager transmettant les ordres,
5024
Il ne s’agit plus du simple messager transmettant
les
ordres, ni de l’idée courante de l’Ange gardien », mais de ceci : « q
5025
du simple messager transmettant les ordres, ni de
l’
idée courante de l’Ange gardien », mais de ceci : « que la Forme sous
5026
transmettant les ordres, ni de l’idée courante de
l’
Ange gardien », mais de ceci : « que la Forme sous laquelle chacun des
5027
ourante de l’Ange gardien », mais de ceci : « que
la
Forme sous laquelle chacun des spirituels connaît Dieu est aussi la f
5028
elle chacun des spirituels connaît Dieu est aussi
la
forme sous laquelle Dieu le connaît, parce qu’elle est la forme sous
5029
onnaît Dieu est aussi la forme sous laquelle Dieu
le
connaît, parce qu’elle est la forme sous laquelle Dieu se révèle à so
5030
sous laquelle Dieu le connaît, parce qu’elle est
la
forme sous laquelle Dieu se révèle à soi-même en lui. C’est la “part
5031
laquelle Dieu se révèle à soi-même en lui. C’est
la
“part allotie” à chaque Spirituel, son individualité absolue, le Nom
5032
e” à chaque Spirituel, son individualité absolue,
le
Nom divin, investi en lui.61 » Ainsi donc, et selon les admirables co
5033
m divin, investi en lui.61 » Ainsi donc, et selon
les
admirables commentaires qu’Henry Corbin nous donne de la mystique sou
5034
rables commentaires qu’Henry Corbin nous donne de
la
mystique soufi, « la totalité de notre être, ce n’est pas seulement c
5035
u’Henry Corbin nous donne de la mystique soufi, «
la
totalité de notre être, ce n’est pas seulement cette partie que nous
5036
dividualité éternelle”, notre “Nom divin”, ce que
le
vieil Iran désignait comme Fravarti 62. » L’Ange des soufis n’évoque
5037
que le vieil Iran désignait comme Fravarti 62. »
L’
Ange des soufis n’évoque pas seulement cette part initiante de l’être
5038
is n’évoque pas seulement cette part initiante de
l’
être renouvelé qui demeure cachée en Dieu selon le christianisme, mais
5039
l’être renouvelé qui demeure cachée en Dieu selon
le
christianisme, mais encore, et d’une manière plus précise dans l’homo
5040
, mais encore, et d’une manière plus précise dans
l’
homologie, ces entités célestes, féminines, que la religion de Zaratho
5041
l’homologie, ces entités célestes, féminines, que
la
religion de Zarathoustra nommait les Fravartis, « celles qui ont choi
5042
éminines, que la religion de Zarathoustra nommait
les
Fravartis, « celles qui ont choisi » (c’est-à-dire choisi de combattr
5043
ur venir en aide à Ohrmazd) et qui sont à la fois
les
archétypes célestes des êtres et leurs anges tutélaires. Il y a plus
5044
es et leurs anges tutélaires. Il y a plus : selon
le
mazdéisme « chaque entité physique ou morale, chaque être complet ou
5045
nt au monde de Lumière a sa Fravarti » — Ohrmazd,
le
Dieu lumineux a lui-même la sienne63. La Terre physique et tous les ê
5046
Fravarti » — Ohrmazd, le Dieu lumineux a lui-même
la
sienne63. La Terre physique et tous les êtres qui l’habitent apparais
5047
Ohrmazd, le Dieu lumineux a lui-même la sienne63.
La
Terre physique et tous les êtres qui l’habitent apparaissent ainsi co
5048
a lui-même la sienne63. La Terre physique et tous
les
êtres qui l’habitent apparaissent ainsi comme la contrepartie visible
5049
sienne63. La Terre physique et tous les êtres qui
l’
habitent apparaissent ainsi comme la contrepartie visible du monde inv
5050
les êtres qui l’habitent apparaissent ainsi comme
la
contrepartie visible du monde invisible, mais premier, des archétypes
5051
du monde invisible, mais premier, des archétypes.
L’
événement majeur, la scène capitale du drame de la personne ainsi cons
5052
mais premier, des archétypes. L’événement majeur,
la
scène capitale du drame de la personne ainsi constituée se produit à
5053
L’événement majeur, la scène capitale du drame de
la
personne ainsi constituée se produit à l’aube de la troisième nuit qu
5054
rame de la personne ainsi constituée se produit à
l’
aube de la troisième nuit qui suit la mort terrestre : c’est la rencon
5055
se produit à l’aube de la troisième nuit qui suit
la
mort terrestre : c’est la rencontre de l’âme avec son moi céleste à l
5056
troisième nuit qui suit la mort terrestre : c’est
la
rencontre de l’âme avec son moi céleste à l’entrée du pont Chinvat. D
5057
ui suit la mort terrestre : c’est la rencontre de
l’
âme avec son moi céleste à l’entrée du pont Chinvat. Dans un paysage n
5058
’est la rencontre de l’âme avec son moi céleste à
l’
entrée du pont Chinvat. Dans un paysage nimbé de la Lumière-de-Gloire
5059
’entrée du pont Chinvat. Dans un paysage nimbé de
la
Lumière-de-Gloire restituant toutes choses et tous les êtres dans leu
5060
umière-de-Gloire restituant toutes choses et tous
les
êtres dans leur pureté paradisiaque, « dans un décor de montagnes fla
5061
mboyant aux aurores, d’eaux célestes où croissent
les
plantes d’immortalité », au centre du monde spirituel (qui est le mon
5062
ortalité », au centre du monde spirituel (qui est
le
monde réel des Archétypes), le pont Chinvat s’élance, reliant un somm
5063
spirituel (qui est le monde réel des Archétypes),
le
pont Chinvat s’élance, reliant un sommet au monde des Lumières infini
5064
Lumières infinies. À son entrée, se dresse devant
l’
âme sa Dâenâ, son moi céleste, jeune femme d’une beauté resplendissant
5065
nte et qui lui dit : — Je suis toi-même ! Mais si
l’
homme sur la Terre a maltraité son moi, au lieu de la Fravarti, c’est
5066
ui dit : — Je suis toi-même ! Mais si l’homme sur
la
Terre a maltraité son moi, au lieu de la Fravarti, c’est une appariti
5067
omme sur la Terre a maltraité son moi, au lieu de
la
Fravarti, c’est une apparition monstrueuse et défigurée qui reflète s
5068
strueuse et défigurée qui reflète son état déchu.
La
« rencontre aurorale » avec le moi céleste figure donc une pesée des
5069
te son état déchu. La « rencontre aurorale » avec
le
moi céleste figure donc une pesée des âmes. Le mazdéisme, comme plus
5070
ec le moi céleste figure donc une pesée des âmes.
Le
mazdéisme, comme plus tard les soufis, et comme le christianisme véri
5071
une pesée des âmes. Le mazdéisme, comme plus tard
les
soufis, et comme le christianisme véritable, ne demande pas d’abord c
5072
e mazdéisme, comme plus tard les soufis, et comme
le
christianisme véritable, ne demande pas d’abord ce qu’est l’homme, ma
5073
nisme véritable, ne demande pas d’abord ce qu’est
l’
homme, mais qui es-tu ? Toute réalité dernière est personnelle. Le vra
5074
i es-tu ? Toute réalité dernière est personnelle.
Le
vrai moi est ailleurs, mais son drame ici-bas. L’absolu, ou la nég
5075
vrai moi est ailleurs, mais son drame ici-bas.
L’
absolu, ou la négation du moi Les peuples des régions que l’Europe
5076
ailleurs, mais son drame ici-bas. L’absolu, ou
la
négation du moi Les peuples des régions que l’Europe nomme Asie di
5077
me ici-bas. L’absolu, ou la négation du moi
Les
peuples des régions que l’Europe nomme Asie diffèrent bien plus entre
5078
la négation du moi Les peuples des régions que
l’
Europe nomme Asie diffèrent bien plus entre eux que les peuples de l’E
5079
rope nomme Asie diffèrent bien plus entre eux que
les
peuples de l’Europe, mais s’il est une croyance qu’ils ont tous en co
5080
diffèrent bien plus entre eux que les peuples de
l’
Europe, mais s’il est une croyance qu’ils ont tous en commun c’est la
5081
est une croyance qu’ils ont tous en commun c’est
la
croyance à la métempsycose, à la transmigration des âmes. Or elle nou
5082
nce qu’ils ont tous en commun c’est la croyance à
la
métempsycose, à la transmigration des âmes. Or elle nous semble à pre
5083
en commun c’est la croyance à la métempsycose, à
la
transmigration des âmes. Or elle nous semble à première vue impliquer
5084
mble à première vue impliquer comme allant de soi
la
croyance en un moi reconnaissable au travers de ses vies successives.
5085
ssable au travers de ses vies successives. Car si
le
moi n’existe pas, qu’est-ce qui transmigre64 ? Mais ce moi, cet ego,
5086
cette entité distincte, voilà précisément ce que
les
doctrines de l’Inde, ou nées en Inde comme le bouddhisme, dénoncent d
5087
tincte, voilà précisément ce que les doctrines de
l’
Inde, ou nées en Inde comme le bouddhisme, dénoncent depuis des millén
5088
ue les doctrines de l’Inde, ou nées en Inde comme
le
bouddhisme, dénoncent depuis des millénaires comme l’illusion fondame
5089
ouddhisme, dénoncent depuis des millénaires comme
l’
illusion fondamentale. Il y aurait donc malentendu fondamental entre l
5090
le. Il y aurait donc malentendu fondamental entre
les
peuples et leurs sages, entre la religion des uns et la métaphysique
5091
ndamental entre les peuples et leurs sages, entre
la
religion des uns et la métaphysique des autres ? En fait, on ne voit
5092
ples et leurs sages, entre la religion des uns et
la
métaphysique des autres ? En fait, on ne voit pas les Sages de l’Asie
5093
métaphysique des autres ? En fait, on ne voit pas
les
Sages de l’Asie dénoncer sans relâche, comme on pourrait s’y attendre
5094
des autres ? En fait, on ne voit pas les Sages de
l’
Asie dénoncer sans relâche, comme on pourrait s’y attendre, les croyan
5095
cer sans relâche, comme on pourrait s’y attendre,
les
croyances populaires de leurs contrées ; c’est bien plutôt à notre id
5096
eurs contrées ; c’est bien plutôt à notre idée de
la
personne qu’ils opposent leur idée du non-moi. Le vrai malentendu se
5097
la personne qu’ils opposent leur idée du non-moi.
Le
vrai malentendu se serait-il instauré entre eux et nous ? Entre cela
5098
s pensent que nous croyons lorsque nous affirmons
le
moi réel, et cela que nous pensons qu’ils croient en le niant ? Nous
5099
réel, et cela que nous pensons qu’ils croient en
le
niant ? Nous avancerons peut-être un peu en cherchant à nous représen
5100
premiers commentaires aux Vedas, il apparaît que
la
négation du moi porte d’abord contre le moi « phénoménal », c’est-à-d
5101
araît que la négation du moi porte d’abord contre
le
moi « phénoménal », c’est-à-dire contre l’homme naturel, exemplaire a
5102
contre le moi « phénoménal », c’est-à-dire contre
l’
homme naturel, exemplaire animal transitoire et « aveugle », enveloppe
5103
scurcissante d’une âme divine. Ainsi parlent tous
les
upanishads, et les premiers écrits canoniques du bouddhisme : il faut
5104
crits canoniques du bouddhisme : il faut éteindre
le
désir individuel, cause de l’erreur, des souffrances et de la mort, d
5105
: il faut éteindre le désir individuel, cause de
l’
erreur, des souffrances et de la mort, dissiper cet écran de matière e
5106
ividuel, cause de l’erreur, des souffrances et de
la
mort, dissiper cet écran de matière entre l’âme et la Réalité. On peu
5107
t de la mort, dissiper cet écran de matière entre
l’
âme et la Réalité. On peut penser qu’il s’agit bien ici de la même « m
5108
ort, dissiper cet écran de matière entre l’âme et
la
Réalité. On peut penser qu’il s’agit bien ici de la même « mort au mo
5109
Réalité. On peut penser qu’il s’agit bien ici de
la
même « mort au monde et à soi-même » que le Christ exige de ses disci
5110
ci de la même « mort au monde et à soi-même » que
le
Christ exige de ses disciples, et qui est la condition de leur access
5111
que le Christ exige de ses disciples, et qui est
la
condition de leur accession à leur vrai moi spirituel, celui qui doit
5112
ndividuelle mais « obscurcie » par son union avec
le
corps. Elle doit tendre à se libérer du phénomène individuel au lieu
5113
à se libérer du phénomène individuel au lieu que
l’
âme chrétienne doit le transfigurer, — d’où la « résurrection de la ch
5114
mène individuel au lieu que l’âme chrétienne doit
le
transfigurer, — d’où la « résurrection de la chair ». Il en va de mêm
5115
que l’âme chrétienne doit le transfigurer, — d’où
la
« résurrection de la chair ». Il en va de même pour le bouddhisme ori
5116
doit le transfigurer, — d’où la « résurrection de
la
chair ». Il en va de même pour le bouddhisme originel. Qu’est-ce que
5117
résurrection de la chair ». Il en va de même pour
le
bouddhisme originel. Qu’est-ce que l’homme ? Un ensemble transitoire
5118
e même pour le bouddhisme originel. Qu’est-ce que
l’
homme ? Un ensemble transitoire d’agrégats matériels et de formations
5119
s mentales en proie au désir égoïste, qui naît de
l’
ignorance et qui entraîne fatalement les attachements à l’illusoire ;
5120
ui naît de l’ignorance et qui entraîne fatalement
les
attachements à l’illusoire ; d’où l’action, le devenir, la mort, et l
5121
nce et qui entraîne fatalement les attachements à
l’
illusoire ; d’où l’action, le devenir, la mort, et la roue des retours
5122
fatalement les attachements à l’illusoire ; d’où
l’
action, le devenir, la mort, et la roue des retours sans fin. « Inconn
5123
t les attachements à l’illusoire ; d’où l’action,
le
devenir, la mort, et la roue des retours sans fin. « Inconnaissable e
5124
ements à l’illusoire ; d’où l’action, le devenir,
la
mort, et la roue des retours sans fin. « Inconnaissable est le commen
5125
llusoire ; d’où l’action, le devenir, la mort, et
la
roue des retours sans fin. « Inconnaissable est le commencement des ê
5126
a roue des retours sans fin. « Inconnaissable est
le
commencement des êtres enveloppés par l’ignorance, et que le désir co
5127
able est le commencement des êtres enveloppés par
l’
ignorance, et que le désir conduit à de criminelles renaissances.65 »
5128
ment des êtres enveloppés par l’ignorance, et que
le
désir conduit à de criminelles renaissances.65 » Le but est donc « de
5129
désir conduit à de criminelles renaissances.65 »
Le
but est donc « de nous apprendre le moyen de ne pas renaître », nous
5130
issances.65 » Le but est donc « de nous apprendre
le
moyen de ne pas renaître », nous dit une moderne interprète du bouddh
5131
du continent, un interprète du zen fait écho : «
La
négation de l’Atman énoncée par les premiers bouddhistes porte sur l’
5132
un interprète du zen fait écho : « La négation de
l’
Atman énoncée par les premiers bouddhistes porte sur l’Atman de l’ego
5133
an énoncée par les premiers bouddhistes porte sur
l’
Atman de l’ego relatif, non sur l’Atman de l’ego absolu, l’ego d’après
5134
par les premiers bouddhistes porte sur l’Atman de
l’
ego relatif, non sur l’Atman de l’ego absolu, l’ego d’après l’expérien
5135
istes porte sur l’Atman de l’ego relatif, non sur
l’
Atman de l’ego absolu, l’ego d’après l’expérience illuminante.67 » Ou
5136
sur l’Atman de l’ego relatif, non sur l’Atman de
l’
ego absolu, l’ego d’après l’expérience illuminante.67 » Ou dans le san
5137
e l’ego relatif, non sur l’Atman de l’ego absolu,
l’
ego d’après l’expérience illuminante.67 » Ou dans le sanscrit du Boudd
5138
f, non sur l’Atman de l’ego absolu, l’ego d’après
l’
expérience illuminante.67 » Ou dans le sanscrit du Bouddha : Sabbe s
5139
ego d’après l’expérience illuminante.67 » Ou dans
le
sanscrit du Bouddha : Sabbe sankhara anicca Sabbe sankhara dukkha S
5140
s Toutes choses composées sont souffrantes Toutes
les
choses sont sans moi.68) Si D. T. Suzuki peut écrire après cela : «
5141
8) Si D. T. Suzuki peut écrire après cela : « On
le
voit, l’expérience personnelle est le fondement de la philosophie bou
5142
T. Suzuki peut écrire après cela : « On le voit,
l’
expérience personnelle est le fondement de la philosophie bouddhiste »
5143
cela : « On le voit, l’expérience personnelle est
le
fondement de la philosophie bouddhiste », comprenons qu’il s’agit pou
5144
oit, l’expérience personnelle est le fondement de
la
philosophie bouddhiste », comprenons qu’il s’agit pour lui d’une expé
5145
expérience rigoureusement spirituelle. En somme,
l’
adversaire principal des védantins comme des premiers bouddhistes, ce
5146
mme des premiers bouddhistes, ce n’est pas encore
la
personne, mais l’obstination de l’ego qui veut durer au-delà de la mo
5147
ouddhistes, ce n’est pas encore la personne, mais
l’
obstination de l’ego qui veut durer au-delà de la mort sans rien compr
5148
est pas encore la personne, mais l’obstination de
l’
ego qui veut durer au-delà de la mort sans rien comprendre aux conditi
5149
l’obstination de l’ego qui veut durer au-delà de
la
mort sans rien comprendre aux conditions de cette survie, sans purifi
5150
onditions de cette survie, sans purifier d’avance
le
jiva — sans s’ordonner d’avance, dirions-nous, aux exigences du vrai
5151
es buts majeurs des méthodes spirituelles soit de
l’
empêcher de renaître69 ! Mais vient le second stade, où les spirituel
5152
r de renaître69 ! Mais vient le second stade, où
les
spirituels s’opposent même à l’ego absolu, à la réalité de l’âme dist
5153
second stade, où les spirituels s’opposent même à
l’
ego absolu, à la réalité de l’âme distincte. Le soi de chacun se confo
5154
les spirituels s’opposent même à l’ego absolu, à
la
réalité de l’âme distincte. Le soi de chacun se confond avec le Soi d
5155
s s’opposent même à l’ego absolu, à la réalité de
l’
âme distincte. Le soi de chacun se confond avec le Soi de l’Immensité,
5156
à l’ego absolu, à la réalité de l’âme distincte.
Le
soi de chacun se confond avec le Soi de l’Immensité, ou du Brahma. Qu
5157
l’âme distincte. Le soi de chacun se confond avec
le
Soi de l’Immensité, ou du Brahma. Qu’est-ce que l’âme ? Une monade, d
5158
incte. Le soi de chacun se confond avec le Soi de
l’
Immensité, ou du Brahma. Qu’est-ce que l’âme ? Une monade, disent les
5159
e Soi de l’Immensité, ou du Brahma. Qu’est-ce que
l’
âme ? Une monade, disent les uns. Un reflet du Brahma, disent les autr
5160
Brahma. Qu’est-ce que l’âme ? Une monade, disent
les
uns. Un reflet du Brahma, disent les autres. Non, répondent les advaï
5161
nade, disent les uns. Un reflet du Brahma, disent
les
autres. Non, répondent les advaïtins : c’est Brahma ou ce n’est rien.
5162
flet du Brahma, disent les autres. Non, répondent
les
advaïtins : c’est Brahma ou ce n’est rien. Et tu n’es rien. Et de leu
5163
u ce n’est rien. Et tu n’es rien. Et de leur côté
les
bouddhistes (mais le tao chinois et le shinto nippon disent à peu prè
5164
n’es rien. Et de leur côté les bouddhistes (mais
le
tao chinois et le shinto nippon disent à peu près les mêmes phrases)
5165
leur côté les bouddhistes (mais le tao chinois et
le
shinto nippon disent à peu près les mêmes phrases) : « Nagasena, exis
5166
tao chinois et le shinto nippon disent à peu près
les
mêmes phrases) : « Nagasena, existe-t-il un être qui transmigre de ce
5167
ne réincarnation ? — Oui, c’est possible. » Voici
l’
explication : « Le Roi dit : Nagasena, y a-t-il quelqu’un qui ne repre
5168
— Oui, c’est possible. » Voici l’explication : «
Le
Roi dit : Nagasena, y a-t-il quelqu’un qui ne reprenne point l’indivi
5169
agasena, y a-t-il quelqu’un qui ne reprenne point
l’
individualité après la mort ? Nagasena répondit : Celui qui a péché r
5170
qu’un qui ne reprenne point l’individualité après
la
mort ? Nagasena répondit : Celui qui a péché reprend une individuali
5171
Nagasena, dis-moi s’il existe rien de semblable à
l’
âme ? — Il n’y a rien de semblable à l’âme.70 » Un texte zen chinois s
5172
emblable à l’âme ? — Il n’y a rien de semblable à
l’
âme.70 » Un texte zen chinois surenchérit : « Y a-t-il un enseignement
5173
ne jamais au peuple cette leçon. On s’en garde !)
Les
spirituels hindous cherchent le samadhi, qui est l’absorption totale
5174
On s’en garde !) Les spirituels hindous cherchent
le
samadhi, qui est l’absorption totale dans l’Absolu du Soi : le grand
5175
spirituels hindous cherchent le samadhi, qui est
l’
absorption totale dans l’Absolu du Soi : le grand sommeil, lentement a
5176
hent le samadhi, qui est l’absorption totale dans
l’
Absolu du Soi : le grand sommeil, lentement atteint, et qu’on peut app
5177
ui est l’absorption totale dans l’Absolu du Soi :
le
grand sommeil, lentement atteint, et qu’on peut appeler l’enstase. Et
5178
sommeil, lentement atteint, et qu’on peut appeler
l’
enstase. Et les mystiques chrétiens cherchent l’extase. Quant aux boud
5179
ment atteint, et qu’on peut appeler l’enstase. Et
les
mystiques chrétiens cherchent l’extase. Quant aux bouddhistes zen, on
5180
r l’enstase. Et les mystiques chrétiens cherchent
l’
extase. Quant aux bouddhistes zen, on dirait qu’ils s’en tiennent à la
5181
bouddhistes zen, on dirait qu’ils s’en tiennent à
la
stase pure et simple : faire face au fait, signe du Tout, et donc du
5182
, signe du Tout, et donc du Vide. Leur satori est
le
contraire du samadhi : c’est un éveil instantané. Éveil de quoi ? De
5183
i : c’est un éveil instantané. Éveil de quoi ? De
la
vision-en-soi, du Cela qui n’est pas personnel et se joue à travers n
5184
sonnel et se joue à travers notre moi. Ainsi tout
l’
Orient des doctrines, — et en même temps l’Orient des peuples et sa cr
5185
i tout l’Orient des doctrines, — et en même temps
l’
Orient des peuples et sa croyance en la transmigration… Mais voici le
5186
même temps l’Orient des peuples et sa croyance en
la
transmigration… Mais voici le moment d’ajuster la vision. Tout l’Orie
5187
s et sa croyance en la transmigration… Mais voici
le
moment d’ajuster la vision. Tout l’Orient exagère ses formules. Il di
5188
la transmigration… Mais voici le moment d’ajuster
la
vision. Tout l’Orient exagère ses formules. Il dit cent-mille-million
5189
n… Mais voici le moment d’ajuster la vision. Tout
l’
Orient exagère ses formules. Il dit cent-mille-millions pour dire beau
5190
évité. Notre hygiène, augmentant de cinquante ans
la
durée moyenne de la vie, serait alors une « recette d’immortalité ».
5191
, augmentant de cinquante ans la durée moyenne de
la
vie, serait alors une « recette d’immortalité ». Et même la seule qui
5192
rait alors une « recette d’immortalité ». Et même
la
seule qui ait réussi. Apprenons donc à lire dans leur optique. Le mêm
5193
réussi. Apprenons donc à lire dans leur optique.
Le
même Kitaro Nishida qui écrit ceci : « La valeur religieuse signifie
5194
ptique. Le même Kitaro Nishida qui écrit ceci : «
La
valeur religieuse signifie l’absolue négation du moi », ajoute trois
5195
qui écrit ceci : « La valeur religieuse signifie
l’
absolue négation du moi », ajoute trois pages plus loin « Nous devenon
5196
s plus loin « Nous devenons vraies personnes dans
la
mesure où nous faisons face à l’Un tout-transcendant.71 » (Ce qui est
5197
’Un tout-transcendant.71 » (Ce qui est chrétien.)
Le
même Chang Chen-Chi qui cite ce koan : Parfois, j’arrache la personn
5198
g Chen-Chi qui cite ce koan : Parfois, j’arrache
la
personne mais sauve l’objet. Parfois j’arrache l’objet, mais sauve la
5199
koan : Parfois, j’arrache la personne mais sauve
l’
objet. Parfois j’arrache l’objet, mais sauve la personne. Parfois, j’a
5200
la personne mais sauve l’objet. Parfois j’arrache
l’
objet, mais sauve la personne. Parfois, j’arrache en même temps l’obje
5201
ve l’objet. Parfois j’arrache l’objet, mais sauve
la
personne. Parfois, j’arrache en même temps l’objet et la personne. Pa
5202
uve la personne. Parfois, j’arrache en même temps
l’
objet et la personne. Parfois, je n’arrache ni l’objet ni la personne.
5203
onne. Parfois, j’arrache en même temps l’objet et
la
personne. Parfois, je n’arrache ni l’objet ni la personne. Le même c
5204
l’objet et la personne. Parfois, je n’arrache ni
l’
objet ni la personne. Le même commente : « Supprimer la personne et s
5205
la personne. Parfois, je n’arrache ni l’objet ni
la
personne. Le même commente : « Supprimer la personne et sauver l’obj
5206
Parfois, je n’arrache ni l’objet ni la personne.
Le
même commente : « Supprimer la personne et sauver l’objet signifie él
5207
t ni la personne. Le même commente : « Supprimer
la
personne et sauver l’objet signifie éliminer le questionneur, non sa
5208
même commente : « Supprimer la personne et sauver
l’
objet signifie éliminer le questionneur, non sa question. Et les trois
5209
r la personne et sauver l’objet signifie éliminer
le
questionneur, non sa question. Et les trois autres distinctions s’exp
5210
fie éliminer le questionneur, non sa question. Et
les
trois autres distinctions s’expliquent de la même manière. » Puis il
5211
Et les trois autres distinctions s’expliquent de
la
même manière. » Puis il ajoute : « Si le disciple est exceptionnellem
5212
quent de la même manière. » Puis il ajoute : « Si
le
disciple est exceptionnellement doué, le maître ne touche ni à la per
5213
e : « Si le disciple est exceptionnellement doué,
le
maître ne touche ni à la personne, ni à l’objet. » Enfin ceci : « Ain
5214
exceptionnellement doué, le maître ne touche ni à
la
personne, ni à l’objet. » Enfin ceci : « Ainsi que Bodhidharma (le fo
5215
doué, le maître ne touche ni à la personne, ni à
l’
objet. » Enfin ceci : « Ainsi que Bodhidharma (le fondateur du zen) l’
5216
l’objet. » Enfin ceci : « Ainsi que Bodhidharma (
le
fondateur du zen) l’a déclaré, zen ne se soucie pas de disserter sur
5217
i : « Ainsi que Bodhidharma (le fondateur du zen)
l’
a déclaré, zen ne se soucie pas de disserter sur des notions abstruses
5218
serter sur des notions abstruses telles que Dieu,
la
Vérité ; ce que zen demande au disciple, c’est de voir sa propre Phys
5219
, c’est de voir sa propre Physionomie. » Or comme
le
disait le sixième Patriarche de la secte (638-713) : « Ne pense pas a
5220
ie. » Or comme le disait le sixième Patriarche de
la
secte (638-713) : « Ne pense pas au bien ni au mal, mais regarde ce q
5221
partir d’un certain bouddhisme — et certainement
le
mazdéisme et les soufis : il s’agit d’une seule quête de l’esprit, do
5222
tain bouddhisme — et certainement le mazdéisme et
les
soufis : il s’agit d’une seule quête de l’esprit, dont le Graal, ou l
5223
me et les soufis : il s’agit d’une seule quête de
l’
esprit, dont le Graal, ou l’Ange, est : toi-même. ⁂ Les différences ne
5224
s : il s’agit d’une seule quête de l’esprit, dont
le
Graal, ou l’Ange, est : toi-même. ⁂ Les différences ne sont donc pas
5225
d’une seule quête de l’esprit, dont le Graal, ou
l’
Ange, est : toi-même. ⁂ Les différences ne sont donc pas où l’on croya
5226
prit, dont le Graal, ou l’Ange, est : toi-même. ⁂
Les
différences ne sont donc pas où l’on croyait, ne sont jamais exacteme
5227
: toi-même. ⁂ Les différences ne sont donc pas où
l’
on croyait, ne sont jamais exactement ce que l’on croyait. Si nous sou
5228
où l’on croyait, ne sont jamais exactement ce que
l’
on croyait. Si nous souhaitons préciser leur nature, c’est dans les no
5229
nous souhaitons préciser leur nature, c’est dans
les
notions de l’amour traduisant ces trois conceptions, que nous avons l
5230
s préciser leur nature, c’est dans les notions de
l’
amour traduisant ces trois conceptions, que nous avons les plus grande
5231
traduisant ces trois conceptions, que nous avons
les
plus grandes chances de les trouver. Dans ce domaine, toute différenc
5232
tions, que nous avons les plus grandes chances de
les
trouver. Dans ce domaine, toute différence reconnue peut être vérifié
5233
toute différence reconnue peut être vérifiée par
l’
expérience intime, et promet au dialogue des spirituels un élargisseme
5234
et au dialogue des spirituels un élargissement de
la
conscience que chacun prendra de son bien. Tandis qu’au plan de l’ant
5235
chacun prendra de son bien. Tandis qu’au plan de
l’
anthropologie plus ou moins « scientifique » de ce siècle, il semblera
5236
« scientifique » de ce siècle, il semblerait que
les
négations du moi selon les écoles orientales correspondent simplement
5237
cle, il semblerait que les négations du moi selon
les
écoles orientales correspondent simplement aux névroses de la psychan
5238
ientales correspondent simplement aux névroses de
la
psychanalyse freudienne : elles seraient autant de « rationalisations
5239
des attitudes « dysfonctionnelles » qui menacent
l’
intégrité du moi et qui nient ou détruisent la personne… Mais l’Orient
5240
ent l’intégrité du moi et qui nient ou détruisent
la
personne… Mais l’Oriental sourit et nous laisse « nos » problèmes.
5241
moi et qui nient ou détruisent la personne… Mais
l’
Oriental sourit et nous laisse « nos » problèmes. Trois écoles de l
5242
nous laisse « nos » problèmes. Trois écoles de
l’
amour Si l’amour est le premier moteur non seulement de l’homme mai
5243
nos » problèmes. Trois écoles de l’amour Si
l’
amour est le premier moteur non seulement de l’homme mais du monde, c’
5244
Si l’amour est le premier moteur non seulement de
l’
homme mais du monde, c’est son action qui configure l’idée du moi que
5245
mme mais du monde, c’est son action qui configure
l’
idée du moi que nous nous faisons, et cette idée du moi révèle l’amour
5246
ue nous nous faisons, et cette idée du moi révèle
l’
amour, comme la structure de l’atome traduit certaines propriétés de l
5247
isons, et cette idée du moi révèle l’amour, comme
la
structure de l’atome traduit certaines propriétés de l’énergie. « C’e
5248
idée du moi révèle l’amour, comme la structure de
l’
atome traduit certaines propriétés de l’énergie. « C’est l’amour domin
5249
ucture de l’atome traduit certaines propriétés de
l’
énergie. « C’est l’amour dominant qui fait l’homme… L’homme est absolu
5250
raduit certaines propriétés de l’énergie. « C’est
l’
amour dominant qui fait l’homme… L’homme est absolument tel qu’est l’a
5251
s de l’énergie. « C’est l’amour dominant qui fait
l’
homme… L’homme est absolument tel qu’est l’amour dominant de sa vie :
5252
ergie. « C’est l’amour dominant qui fait l’homme…
L’
homme est absolument tel qu’est l’amour dominant de sa vie : selon (ce
5253
i fait l’homme… L’homme est absolument tel qu’est
l’
amour dominant de sa vie : selon (cet amour) se fait son ciel, s’il es
5254
on enfer, s’il est mauvais », dit Swedenborg dans
La
Nouvelle Jérusalem. Et dans De Coelo, il ajoute : « Le corps de chaqu
5255
uvelle Jérusalem. Et dans De Coelo, il ajoute : «
Le
corps de chaque esprit et de chaque ange est la forme de son amour.73
5256
« Le corps de chaque esprit et de chaque ange est
la
forme de son amour.73 » Les trois notions de l’homme que l’on vient d
5257
et de chaque ange est la forme de son amour.73 »
Les
trois notions de l’homme que l’on vient d’évoquer nous apparaissent a
5258
t la forme de son amour.73 » Les trois notions de
l’
homme que l’on vient d’évoquer nous apparaissent alors comme autant de
5259
e son amour.73 » Les trois notions de l’homme que
l’
on vient d’évoquer nous apparaissent alors comme autant de modèles d’u
5260
lors comme autant de modèles d’une énergétique de
l’
amour, ou comme autant d’effets de son action configurante et composan
5261
de son action configurante et composante. Et nous
les
voyons différer d’une manière subtile mais précise par la forme des r
5262
s différer d’une manière subtile mais précise par
la
forme des rapports qu’elles imaginent entre le moi naturel et le vrai
5263
ar la forme des rapports qu’elles imaginent entre
le
moi naturel et le vrai moi, c’est-à-dire selon les langages, entre le
5264
pports qu’elles imaginent entre le moi naturel et
le
vrai moi, c’est-à-dire selon les langages, entre les phénomènes et le
5265
le moi naturel et le vrai moi, c’est-à-dire selon
les
langages, entre les phénomènes et le noumène, l’individu et la person
5266
vrai moi, c’est-à-dire selon les langages, entre
les
phénomènes et le noumène, l’individu et la personne, l’âme et l’ange,
5267
-dire selon les langages, entre les phénomènes et
le
noumène, l’individu et la personne, l’âme et l’ange, l’ego et le Soi.
5268
les langages, entre les phénomènes et le noumène,
l’
individu et la personne, l’âme et l’ange, l’ego et le Soi. Observons q
5269
entre les phénomènes et le noumène, l’individu et
la
personne, l’âme et l’ange, l’ego et le Soi. Observons que les trois p
5270
nomènes et le noumène, l’individu et la personne,
l’
âme et l’ange, l’ego et le Soi. Observons que les trois partent d’une
5271
t le noumène, l’individu et la personne, l’âme et
l’
ange, l’ego et le Soi. Observons que les trois partent d’une dualité s
5272
mène, l’individu et la personne, l’âme et l’ange,
l’
ego et le Soi. Observons que les trois partent d’une dualité sans laqu
5273
ndividu et la personne, l’âme et l’ange, l’ego et
le
Soi. Observons que les trois partent d’une dualité sans laquelle ni l
5274
, l’âme et l’ange, l’ego et le Soi. Observons que
les
trois partent d’une dualité sans laquelle ni l’homme ni l’amour ne se
5275
les trois partent d’une dualité sans laquelle ni
l’
homme ni l’amour ne seraient même concevables. Il ne s’agit ici ni du
5276
partent d’une dualité sans laquelle ni l’homme ni
l’
amour ne seraient même concevables. Il ne s’agit ici ni du dualisme tr
5277
ualisme trop facilement nommé manichéen, opposant
le
Bien et le Mal comme deux principes préexistants ; ni tout à fait des
5278
p facilement nommé manichéen, opposant le Bien et
le
Mal comme deux principes préexistants ; ni tout à fait des « deux hom
5279
; ni tout à fait des « deux hommes en moi » dont
la
lutte fait gémir saint Paul ; mais, préalablement à tout jugement mor
5280
préalablement à tout jugement moral, il s’agit de
la
reconnaissance d’une bipolarité, d’une tension permanente entre l’ind
5281
d’une bipolarité, d’une tension permanente entre
l’
individu et le « vrai moi ». (L’individu n’est pas le mal en soi : il
5282
ité, d’une tension permanente entre l’individu et
le
« vrai moi ». (L’individu n’est pas le mal en soi : il ne devient mau
5283
permanente entre l’individu et le « vrai moi ». (
L’
individu n’est pas le mal en soi : il ne devient mauvais que dans la s
5284
ndividu et le « vrai moi ». (L’individu n’est pas
le
mal en soi : il ne devient mauvais que dans la seule mesure où il se
5285
as le mal en soi : il ne devient mauvais que dans
la
seule mesure où il se referme sur soi, c’est-à-dire se refuse à l’amo
5286
ù il se referme sur soi, c’est-à-dire se refuse à
l’
amour. Et de même le « vrai moi » n’est pas le bien en soi, car il peu
5287
soi, c’est-à-dire se refuse à l’amour. Et de même
le
« vrai moi » n’est pas le bien en soi, car il peut devenir un monstre
5288
e à l’amour. Et de même le « vrai moi » n’est pas
le
bien en soi, car il peut devenir un monstre.) Pour aimer, il faut êtr
5289
r un monstre.) Pour aimer, il faut être deux, dit
la
sagesse des nations. Et cela vaut d’abord pour l’amour de soi-même, s
5290
la sagesse des nations. Et cela vaut d’abord pour
l’
amour de soi-même, sans lequel point d’amour du prochain. Tous les mor
5291
même, sans lequel point d’amour du prochain. Tous
les
moralistes du monde s’accordent avec les spirituels dans leur condamn
5292
in. Tous les moralistes du monde s’accordent avec
les
spirituels dans leur condamnation de l’égoïsme, qui est l’impérialism
5293
ent avec les spirituels dans leur condamnation de
l’
égoïsme, qui est l’impérialisme de l’ego naturel et sa fermeture autar
5294
uels dans leur condamnation de l’égoïsme, qui est
l’
impérialisme de l’ego naturel et sa fermeture autarcique. Mais les mot
5295
damnation de l’égoïsme, qui est l’impérialisme de
l’
ego naturel et sa fermeture autarcique. Mais les motifs de cette conda
5296
de l’ego naturel et sa fermeture autarcique. Mais
les
motifs de cette condamnation ne sont pas les mêmes : les moralistes j
5297
Mais les motifs de cette condamnation ne sont pas
les
mêmes : les moralistes jugent au nom de la société, les spirituels au
5298
ifs de cette condamnation ne sont pas les mêmes :
les
moralistes jugent au nom de la société, les spirituels au nom de l’am
5299
t pas les mêmes : les moralistes jugent au nom de
la
société, les spirituels au nom de l’amour. Nous n’invoquerons ici que
5300
mes : les moralistes jugent au nom de la société,
les
spirituels au nom de l’amour. Nous n’invoquerons ici que les seconds.
5301
nt au nom de la société, les spirituels au nom de
l’
amour. Nous n’invoquerons ici que les seconds. L’école chrétienne
5302
amour. Nous n’invoquerons ici que les seconds.
L’
école chrétienne Dans une vue chrétienne de l’homme, l’amour de soi
5303
L’école chrétienne Dans une vue chrétienne de
l’
homme, l’amour de soi est le rapport positif entre l’individu et le vr
5304
chrétienne Dans une vue chrétienne de l’homme,
l’
amour de soi est le rapport positif entre l’individu et le vrai moi. L
5305
une vue chrétienne de l’homme, l’amour de soi est
le
rapport positif entre l’individu et le vrai moi. Le second commandeme
5306
omme, l’amour de soi est le rapport positif entre
l’
individu et le vrai moi. Le second commandement qui résume toute la Lo
5307
de soi est le rapport positif entre l’individu et
le
vrai moi. Le second commandement qui résume toute la Loi et les Proph
5308
vrai moi. Le second commandement qui résume toute
la
Loi et les Prophètes : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même », su
5309
Le second commandement qui résume toute la Loi et
les
Prophètes : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même », suppose évide
5310
», suppose évidemment un moi duel, au sein duquel
l’
amour s’instaure d’une manière telle que s’aimer et aimer le prochain
5311
instaure d’une manière telle que s’aimer et aimer
le
prochain soit un même acte : sinon le comme n’aurait pas son plein se
5312
er et aimer le prochain soit un même acte : sinon
le
comme n’aurait pas son plein sens. Dans l’amour de soi-même, l’homme
5313
sinon le comme n’aurait pas son plein sens. Dans
l’
amour de soi-même, l’homme naturel s’ouvre à l’action du vrai moi spir
5314
ait pas son plein sens. Dans l’amour de soi-même,
l’
homme naturel s’ouvre à l’action du vrai moi spirituel et se laisse tr
5315
ns l’amour de soi-même, l’homme naturel s’ouvre à
l’
action du vrai moi spirituel et se laisse transformer, réorienter par
5316
se laisse transformer, réorienter par lui. C’est
le
vrai moi qui aime, qui est l’agent de l’amour. Ce vrai moi seul peut
5317
nter par lui. C’est le vrai moi qui aime, qui est
l’
agent de l’amour. Ce vrai moi seul peut aimer le prochain, parce que s
5318
i. C’est le vrai moi qui aime, qui est l’agent de
l’
amour. Ce vrai moi seul peut aimer le prochain, parce que seul il disc
5319
t l’agent de l’amour. Ce vrai moi seul peut aimer
le
prochain, parce que seul il discerne en l’autre le même amour. « Aime
5320
e prochain, parce que seul il discerne en l’autre
le
même amour. « Aimer, c’est soutenir, deviner, porter le meilleur de c
5321
e amour. « Aimer, c’est soutenir, deviner, porter
le
meilleur de ce qu’on aime », disait Alain. Or le meilleur de l’autre
5322
le meilleur de ce qu’on aime », disait Alain. Or
le
meilleur de l’autre — comme de soi — est sa vocation singulière. Aime
5323
comme de soi — est sa vocation singulière. Aimer
le
prochain dans sa personne, c’est discerner sa singularité, sa vocatio
5324
rner sa singularité, sa vocation, même virtuelle,
la
soutenir et l’aider à naître. Ainsi l’amour dans sa réalité totale, i
5325
rité, sa vocation, même virtuelle, la soutenir et
l’
aider à naître. Ainsi l’amour dans sa réalité totale, intégrant l’anim
5326
virtuelle, la soutenir et l’aider à naître. Ainsi
l’
amour dans sa réalité totale, intégrant l’animique au spirituel, va to
5327
. Ainsi l’amour dans sa réalité totale, intégrant
l’
animique au spirituel, va toujours de personne à personne. Mais alors,
5328
rs de personne à personne. Mais alors, d’où vient
la
personne ? Quel que soit le nom que lui ont donné les trois religions
5329
ais alors, d’où vient la personne ? Quel que soit
le
nom que lui ont donné les trois religions abrahamiques, le vrai moi e
5330
personne ? Quel que soit le nom que lui ont donné
les
trois religions abrahamiques, le vrai moi est toujours suscité par l’
5331
e lui ont donné les trois religions abrahamiques,
le
vrai moi est toujours suscité par l’Amour même : « Dieu nous a aimés
5332
brahamiques, le vrai moi est toujours suscité par
l’
Amour même : « Dieu nous a aimés le premier. » Pour le chrétien, c’est
5333
our même : « Dieu nous a aimés le premier. » Pour
le
chrétien, c’est parce que Dieu, qui est Amour, est un Dieu personnel,
5334
ur, est un Dieu personnel, dans sa tri-unité, que
l’
amour spirituel crée dans l’homme la personne. Si la plus haute valeur
5335
ans sa tri-unité, que l’amour spirituel crée dans
l’
homme la personne. Si la plus haute valeur de l’Occident chrétien n’es
5336
ri-unité, que l’amour spirituel crée dans l’homme
la
personne. Si la plus haute valeur de l’Occident chrétien n’est pas la
5337
amour spirituel crée dans l’homme la personne. Si
la
plus haute valeur de l’Occident chrétien n’est pas la connaissance dé
5338
s l’homme la personne. Si la plus haute valeur de
l’
Occident chrétien n’est pas la connaissance détachée mais le sacrifice
5339
lus haute valeur de l’Occident chrétien n’est pas
la
connaissance détachée mais le sacrifice personnel, et si le sacrifice
5340
chrétien n’est pas la connaissance détachée mais
le
sacrifice personnel, et si le sacrifice diffère du suicide — la natur
5341
sance détachée mais le sacrifice personnel, et si
le
sacrifice diffère du suicide — la nature de l’amour véritable l’expli
5342
ersonnel, et si le sacrifice diffère du suicide —
la
nature de l’amour véritable l’explique seule. « Personne n’a un plus
5343
si le sacrifice diffère du suicide — la nature de
l’
amour véritable l’explique seule. « Personne n’a un plus grand amour q
5344
ffère du suicide — la nature de l’amour véritable
l’
explique seule. « Personne n’a un plus grand amour que de donner sa vi
5345
c’est d’abord sacrifier son moi à son vrai moi, —
l’
ordonner à sa vocation. Ou c’est encore se sacrifier tel que l’on est,
5346
sa vocation. Ou c’est encore se sacrifier tel que
l’
on est, à soi-même tel qu’on va le devenir par l’esprit. C’est rejoind
5347
crifier tel que l’on est, à soi-même tel qu’on va
le
devenir par l’esprit. C’est rejoindre la forme immortelle de son être
5348
l’on est, à soi-même tel qu’on va le devenir par
l’
esprit. C’est rejoindre la forme immortelle de son être au travers d’u
5349
qu’on va le devenir par l’esprit. C’est rejoindre
la
forme immortelle de son être au travers d’une « mort à soi-même » tra
5350
« mort à soi-même » transfigurante. Ce modèle de
l’
amour et du vrai moi instaure le normal, le sublime, et la problématiq
5351
nte. Ce modèle de l’amour et du vrai moi instaure
le
normal, le sublime, et la problématique de l’Occident chrétien. Il co
5352
èle de l’amour et du vrai moi instaure le normal,
le
sublime, et la problématique de l’Occident chrétien. Il conditionne a
5353
et du vrai moi instaure le normal, le sublime, et
la
problématique de l’Occident chrétien. Il conditionne aussi les déviat
5354
ure le normal, le sublime, et la problématique de
l’
Occident chrétien. Il conditionne aussi les déviations de l’amour et l
5355
ique de l’Occident chrétien. Il conditionne aussi
les
déviations de l’amour et les formes particulières que prennent en Occ
5356
chrétien. Il conditionne aussi les déviations de
l’
amour et les formes particulières que prennent en Occident certaines t
5357
Il conditionne aussi les déviations de l’amour et
les
formes particulières que prennent en Occident certaines tendances mor
5358
ient parfois impossible d’en reconnaître ailleurs
les
homologues. En voici deux exemples extrêmes. Le masochisme religieux
5359
les homologues. En voici deux exemples extrêmes.
Le
masochisme religieux, ou haine de soi. Dans son langage dramatique, s
5360
n langage dramatique, saint Paul parle parfois de
la
haine de soi-même, formule reprise au pied de la lettre par tous les
5361
la haine de soi-même, formule reprise au pied de
la
lettre par tous les spirituels de tendance ascétique, avec une compla
5362
me, formule reprise au pied de la lettre par tous
les
spirituels de tendance ascétique, avec une complaisance croissante. J
5363
vec une complaisance croissante. Je sais bien que
la
haine est l’envers de l’amour, mais comment l’amour fasciné par le dé
5364
aisance croissante. Je sais bien que la haine est
l’
envers de l’amour, mais comment l’amour fasciné par le désir de ce qu’
5365
ssante. Je sais bien que la haine est l’envers de
l’
amour, mais comment l’amour fasciné par le désir de ce qu’il aime peut
5366
ue la haine est l’envers de l’amour, mais comment
l’
amour fasciné par le désir de ce qu’il aime peut-il haïr vraiment ce q
5367
vers de l’amour, mais comment l’amour fasciné par
le
désir de ce qu’il aime peut-il haïr vraiment ce qu’il lui sacrifie ?
5368
ime peut-il haïr vraiment ce qu’il lui sacrifie ?
Le
masochisme n’est-il pas le moment de retombement de l’âme frustrée, q
5369
e qu’il lui sacrifie ? Le masochisme n’est-il pas
le
moment de retombement de l’âme frustrée, quand l’esprit qui l’appelai
5370
sochisme n’est-il pas le moment de retombement de
l’
âme frustrée, quand l’esprit qui l’appelait cesse de la diriger dans s
5371
le moment de retombement de l’âme frustrée, quand
l’
esprit qui l’appelait cesse de la diriger dans son élan vers le vrai m
5372
retombement de l’âme frustrée, quand l’esprit qui
l’
appelait cesse de la diriger dans son élan vers le vrai moi ? Elle vou
5373
frustrée, quand l’esprit qui l’appelait cesse de
la
diriger dans son élan vers le vrai moi ? Elle voulait l’ange. Il lui
5374
l’appelait cesse de la diriger dans son élan vers
le
vrai moi ? Elle voulait l’ange. Il lui reste la nostalgie d’une fuite
5375
ger dans son élan vers le vrai moi ? Elle voulait
l’
ange. Il lui reste la nostalgie d’une fuite hors du moi naturel. Désor
5376
s le vrai moi ? Elle voulait l’ange. Il lui reste
la
nostalgie d’une fuite hors du moi naturel. Désormais le vieil homme e
5377
talgie d’une fuite hors du moi naturel. Désormais
le
vieil homme est jugé : n’ayant pu l’entraîner avec elle vers son bien
5378
l. Désormais le vieil homme est jugé : n’ayant pu
l’
entraîner avec elle vers son bien et l’animer de son amour, l’âme l’ac
5379
n’ayant pu l’entraîner avec elle vers son bien et
l’
animer de son amour, l’âme l’accuse de volonté mauvaise. Mais elle sai
5380
avec elle vers son bien et l’animer de son amour,
l’
âme l’accuse de volonté mauvaise. Mais elle sait bien qu’ils ont parti
5381
lle vers son bien et l’animer de son amour, l’âme
l’
accuse de volonté mauvaise. Mais elle sait bien qu’ils ont partie liée
5382
qu’ils ont partie liée, et qu’elle mourra si elle
le
tue. Elle se contente alors de le maudire, de le traiter en « corps d
5383
mourra si elle le tue. Elle se contente alors de
le
maudire, de le traiter en « corps de mort », et leurs relations s’emp
5384
le tue. Elle se contente alors de le maudire, de
le
traiter en « corps de mort », et leurs relations s’empoisonnent. La p
5385
dans cette discorde permanente, dans ce refus que
l’
âme oppose au corps, vu comme signe et symbole de la « prison » du moi
5386
âme oppose au corps, vu comme signe et symbole de
la
« prison » du moi. Et c’est que l’âme avait rêvé d’une métamorphose a
5387
et symbole de la « prison » du moi. Et c’est que
l’
âme avait rêvé d’une métamorphose angélique, quand l’esprit lui demand
5388
me avait rêvé d’une métamorphose angélique, quand
l’
esprit lui demandait seulement d’ordonner tout le moi terrestre et tem
5389
l’esprit lui demandait seulement d’ordonner tout
le
moi terrestre et temporel à la vocation de l’amour. Mais celui qui se
5390
nt d’ordonner tout le moi terrestre et temporel à
la
vocation de l’amour. Mais celui qui se hait de cette manière ne peut
5391
out le moi terrestre et temporel à la vocation de
l’
amour. Mais celui qui se hait de cette manière ne peut pas aimer le pr
5392
ui qui se hait de cette manière ne peut pas aimer
le
prochain : il ne peut voir en lui que son semblable — un corps « vil
5393
corps « vil » et une âme qui se veut ange —, non
le
vrai moi dans son autonomie. Si le corps lui paraît désirable, il ser
5394
ut ange —, non le vrai moi dans son autonomie. Si
le
corps lui paraît désirable, il sera parfois tenté d’attribuer ce mouv
5395
era parfois tenté d’attribuer ce mouvement, né de
l’
instinct, à la révélation d’un amour angélique. La passion romantique
5396
nté d’attribuer ce mouvement, né de l’instinct, à
la
révélation d’un amour angélique. La passion romantique trouve ici sa
5397
l’instinct, à la révélation d’un amour angélique.
La
passion romantique trouve ici sa genèse. Exaltée jusqu’à la mystique
5398
romantique trouve ici sa genèse. Exaltée jusqu’à
la
mystique de l’ascèse autopunitive, elle finit par confondre avec les
5399
uve ici sa genèse. Exaltée jusqu’à la mystique de
l’
ascèse autopunitive, elle finit par confondre avec les exigences de la
5400
scèse autopunitive, elle finit par confondre avec
les
exigences de la mort au faux-moi, l’instinct de mort… Contre cet ascé
5401
e, elle finit par confondre avec les exigences de
la
mort au faux-moi, l’instinct de mort… Contre cet ascétisme non-transf
5402
fondre avec les exigences de la mort au faux-moi,
l’
instinct de mort… Contre cet ascétisme non-transfigurant, Nietzsche n’
5403
indre celui qui se hait lui-même, car nous serons
les
victimes de sa colère et de sa vengeance. Ayons donc soin de l’induir
5404
sa colère et de sa vengeance. Ayons donc soin de
l’
induire à l’amour de lui-même.74 » L’érotisme sensuel est l’autre ext
5405
t de sa vengeance. Ayons donc soin de l’induire à
l’
amour de lui-même.74 » L’érotisme sensuel est l’autre extrême où se p
5406
onc soin de l’induire à l’amour de lui-même.74 »
L’
érotisme sensuel est l’autre extrême où se porte l’âme irritée mais no
5407
’érotisme sensuel est l’autre extrême où se porte
l’
âme irritée mais non pas convertie par l’esprit — comme l’a si bien vu
5408
se porte l’âme irritée mais non pas convertie par
l’
esprit — comme l’a si bien vu Kierkegaard. Tout amour véritable procèd
5409
ritée mais non pas convertie par l’esprit — comme
l’
a si bien vu Kierkegaard. Tout amour véritable procède du vrai moi et
5410
r véritable procède du vrai moi et se dirige vers
le
vrai moi de l’autre. Mais il peut arriver qu’il s’arrête en chemin, q
5411
river qu’il s’arrête en chemin, que son élan vers
la
personne singulière retombe au plan de l’individuel, du générique. Ca
5412
an vers la personne singulière retombe au plan de
l’
individuel, du générique. Capté par l’instinct qu’il excite au-delà de
5413
au plan de l’individuel, du générique. Capté par
l’
instinct qu’il excite au-delà des exigences naturelles, il ira fatalem
5414
nces naturelles, il ira fatalement s’épuiser dans
l’
illusoire multiplicité des « aventures sans lendemain ». Limitant son
5415
à ces désirs qu’une possession rapide anesthésie,
l’
âme retombe alors dans les liens de l’instinct, qui est la puissance i
5416
ssion rapide anesthésie, l’âme retombe alors dans
les
liens de l’instinct, qui est la puissance impersonnelle par excellenc
5417
anesthésie, l’âme retombe alors dans les liens de
l’
instinct, qui est la puissance impersonnelle par excellence, et s’épui
5418
tombe alors dans les liens de l’instinct, qui est
la
puissance impersonnelle par excellence, et s’épuise à s’en libérer pa
5419
le par excellence, et s’épuise à s’en libérer par
le
changement de l’excitation, par le défi perpétuel aux attachements. C
5420
, et s’épuise à s’en libérer par le changement de
l’
excitation, par le défi perpétuel aux attachements. C’est la liberté n
5421
en libérer par le changement de l’excitation, par
le
défi perpétuel aux attachements. C’est la liberté négative revendiqué
5422
on, par le défi perpétuel aux attachements. C’est
la
liberté négative revendiquée par Don Juan contre les conventions de l
5423
liberté négative revendiquée par Don Juan contre
les
conventions de la morale commune — qu’il est déjà trop « spirituel »
5424
evendiquée par Don Juan contre les conventions de
la
morale commune — qu’il est déjà trop « spirituel » pour respecter — m
5425
« spirituel » pour respecter — mais aussi contre
le
respect du mystère exigeant de l’Autre qu’il n’est pas assez « spirit
5426
st pas assez « spirituel » pour aimer. (Mais s’il
l’
était assez, il retrouverait aussi la justification de certaines conve
5427
. (Mais s’il l’était assez, il retrouverait aussi
la
justification de certaines conventions, protégeant chez la brute et l
5428
ication de certaines conventions, protégeant chez
la
brute et l’innocent les premières chances de l’esprit, — ou mettant à
5429
ertaines conventions, protégeant chez la brute et
l’
innocent les premières chances de l’esprit, — ou mettant à l’abri des
5430
z la brute et l’innocent les premières chances de
l’
esprit, — ou mettant à l’abri des atteintes de l’esprit l’indispensabl
5431
les premières chances de l’esprit, — ou mettant à
l’
abri des atteintes de l’esprit l’indispensable tissu conjonctif de tou
5432
l’esprit, — ou mettant à l’abri des atteintes de
l’
esprit l’indispensable tissu conjonctif de toutes les sociétés qui ne
5433
, — ou mettant à l’abri des atteintes de l’esprit
l’
indispensable tissu conjonctif de toutes les sociétés qui ne sont pas
5434
esprit l’indispensable tissu conjonctif de toutes
les
sociétés qui ne sont pas un ordre.) L’école iranienne Il n’exis
5435
toutes les sociétés qui ne sont pas un ordre.)
L’
école iranienne Il n’existe plus de communauté humaine, d’unité de
5436
de Zarathoustra ; et nulle ne s’inspira jamais de
la
mystique des soufis, et pour cause. Si je les fais intervenir ici, c’
5437
s de la mystique des soufis, et pour cause. Si je
les
fais intervenir ici, c’est à titre d’évocation d’une dimension virtue
5438
on virtuelle, intemporelle, et donc permanente de
l’
esprit : le mazdéisme et les soufis ont proposé des notions de l’homme
5439
e, intemporelle, et donc permanente de l’esprit :
le
mazdéisme et les soufis ont proposé des notions de l’homme et de l’am
5440
et donc permanente de l’esprit : le mazdéisme et
les
soufis ont proposé des notions de l’homme et de l’amour homologues au
5441
azdéisme et les soufis ont proposé des notions de
l’
homme et de l’amour homologues aux notions chrétiennes, mais comme tra
5442
s soufis ont proposé des notions de l’homme et de
l’
amour homologues aux notions chrétiennes, mais comme transposées terme
5443
s comme transposées terme à terme d’un degré vers
le
« ciel » des archétypes : ainsi la dualité ego-vrai moi y devient cel
5444
’un degré vers le « ciel » des archétypes : ainsi
la
dualité ego-vrai moi y devient celle de l’âme et de son ange. Pour si
5445
ainsi la dualité ego-vrai moi y devient celle de
l’
âme et de son ange. Pour situer dans son vrai climat spirituel le pers
5446
ange. Pour situer dans son vrai climat spirituel
le
personnalisme essentiel de ces doctrines, citons ce verset du Coran (
5447
e comme une clef musicale : « Chaque être connaît
le
mode de prière et de glorification qui lui est propre. » Toute person
5448
t propre. » Toute personne s’origine en Dieu, qui
l’
a créée afin d’être connu par elle et de « devenir en elle l’objet de
5449
fin d’être connu par elle et de « devenir en elle
l’
objet de sa propre connaissance.75 » C’est donc en Dieu que tout amour
5450
’est donc en Dieu que tout amour peut reconnaître
la
personne de l’autre et l’aimer « comme soi-même », — comme étant née
5451
amour peut reconnaître la personne de l’autre et
l’
aimer « comme soi-même », — comme étant née du même amour qui m’a créé
5452
ssible d’aimer un être sans se représenter en lui
la
divinité. Un être n’aime en réalité personne d’autre que son créateur
5453
créateur.76 » Ibn Arabi distingue trois amours :
l’
amour divin du Créateur pour sa créature, et d’elle pour Lui ; l’amour
5454
u Créateur pour sa créature, et d’elle pour Lui ;
l’
amour spirituel « dont le siège est en la créature toujours à la quête
5455
re, et d’elle pour Lui ; l’amour spirituel « dont
le
siège est en la créature toujours à la quête de l’être dont elle déco
5456
ur Lui ; l’amour spirituel « dont le siège est en
la
créature toujours à la quête de l’être dont elle découvre en elle l’I
5457
uel « dont le siège est en la créature toujours à
la
quête de l’être dont elle découvre en elle l’Image, ou dont elle se d
5458
e siège est en la créature toujours à la quête de
l’
être dont elle découvre en elle l’Image, ou dont elle se découvre comm
5459
s à la quête de l’être dont elle découvre en elle
l’
Image, ou dont elle se découvre comme étant l’Image » ; enfin l’amour
5460
lle l’Image, ou dont elle se découvre comme étant
l’
Image » ; enfin l’amour naturel, qui recherche la satisfaction de ses
5461
nt elle se découvre comme étant l’Image » ; enfin
l’
amour naturel, qui recherche la satisfaction de ses désirs sans souci
5462
l’Image » ; enfin l’amour naturel, qui recherche
la
satisfaction de ses désirs sans souci de l’agrément de l’Aimé. « Et t
5463
erche la satisfaction de ses désirs sans souci de
l’
agrément de l’Aimé. « Et telle est hélas ! dit Ibn Arabi, la manière d
5464
faction de ses désirs sans souci de l’agrément de
l’
Aimé. « Et telle est hélas ! dit Ibn Arabi, la manière dont la plupart
5465
de l’Aimé. « Et telle est hélas ! dit Ibn Arabi,
la
manière dont la plupart des gens d’aujourd’hui comprennent l’amour.77
5466
ont la plupart des gens d’aujourd’hui comprennent
l’
amour.77 » Comment réconcilier l’amour naturel (ou physique, comme on
5467
’hui comprennent l’amour.77 » Comment réconcilier
l’
amour naturel (ou physique, comme on le dit improprement) avec l’amour
5468
éconcilier l’amour naturel (ou physique, comme on
le
dit improprement) avec l’amour spirituel ? Qui aime en nous, et pour
5469
(ou physique, comme on le dit improprement) avec
l’
amour spirituel ? Qui aime en nous, et pour qui ? « Ibn Arabi observe
5470
me en nous, et pour qui ? « Ibn Arabi observe que
les
plus parfaits amants mystiques sont ceux qui aiment Dieu simultanémen
5471
x-mêmes, parce que cette capacité révèle chez eux
l’
unification de leur double nature (le dénouement de la « conscience ma
5472
èle chez eux l’unification de leur double nature (
le
dénouement de la « conscience malheureuse » en proie aux déchirements
5473
ification de leur double nature (le dénouement de
la
« conscience malheureuse » en proie aux déchirements). » Telle est do
5474
se » en proie aux déchirements). » Telle est donc
la
personne unifiée et tel est son amour de soi-même. Quant à l’amour-pa
5475
unifiée et tel est son amour de soi-même. Quant à
l’
amour-passion (ici, non romantique !) il se situe au point où le regar
5476
n (ici, non romantique !) il se situe au point où
le
regard de l’âme reconnaît soudain dans l’Aimé cette Forme sensible du
5477
omantique !) il se situe au point où le regard de
l’
âme reconnaît soudain dans l’Aimé cette Forme sensible du divin, cette
5478
oint où le regard de l’âme reconnaît soudain dans
l’
Aimé cette Forme sensible du divin, cette théophanie que l’âme peut ai
5479
tte Forme sensible du divin, cette théophanie que
l’
âme peut aimer dans toutes les dimensions de l’amour unifié. L’Aimé n’
5480
cette théophanie que l’âme peut aimer dans toutes
les
dimensions de l’amour unifié. L’Aimé n’est plus alors un simple objet
5481
ue l’âme peut aimer dans toutes les dimensions de
l’
amour unifié. L’Aimé n’est plus alors un simple objet — comme il est p
5482
mer dans toutes les dimensions de l’amour unifié.
L’
Aimé n’est plus alors un simple objet — comme il est pour l’amour natu
5483
st plus alors un simple objet — comme il est pour
l’
amour naturel, possessif — mais une virtualité divine que l’amant « im
5484
turel, possessif — mais une virtualité divine que
l’
amant « imagine » (dont il devine l’Image) et qu’il tend à faire exist
5485
té divine que l’amant « imagine » (dont il devine
l’
Image) et qu’il tend à faire exister dans l’être aimé, par l’efficace
5486
evine l’Image) et qu’il tend à faire exister dans
l’
être aimé, par l’efficace de son amour préfigurant. C’est précisément
5487
qu’il tend à faire exister dans l’être aimé, par
l’
efficace de son amour préfigurant. C’est précisément là que s’origine
5488
r préfigurant. C’est précisément là que s’origine
la
plus haute fonction de l’amour humain, celle-là même qui assure la co
5489
sément là que s’origine la plus haute fonction de
l’
amour humain, celle-là même qui assure la coalescence de ce que l’on a
5490
ction de l’amour humain, celle-là même qui assure
la
coalescence de ce que l’on a désigné historiquement comme amour court
5491
celle-là même qui assure la coalescence de ce que
l’
on a désigné historiquement comme amour courtois et amour mystique. Ca
5492
ement comme amour courtois et amour mystique. Car
l’
amour tend à la transfiguration de la figure aimée terrestre, en l’ado
5493
ur courtois et amour mystique. Car l’amour tend à
la
transfiguration de la figure aimée terrestre, en l’adossant à une lum
5494
ystique. Car l’amour tend à la transfiguration de
la
figure aimée terrestre, en l’adossant à une lumière qui en fasse éclo
5495
transfiguration de la figure aimée terrestre, en
l’
adossant à une lumière qui en fasse éclore toutes les virtualités surh
5496
adossant à une lumière qui en fasse éclore toutes
les
virtualités surhumaines, jusqu’à l’investir de la fonction théophaniq
5497
clore toutes les virtualités surhumaines, jusqu’à
l’
investir de la fonction théophanique de l’Ange (ainsi en a-t-il été de
5498
es virtualités surhumaines, jusqu’à l’investir de
la
fonction théophanique de l’Ange (ainsi en a-t-il été des Figures fémi
5499
jusqu’à l’investir de la fonction théophanique de
l’
Ange (ainsi en a-t-il été des Figures féminines célébrées par les Fede
5500
en a-t-il été des Figures féminines célébrées par
les
Fedeli d’amore, compagnons de Dante ; ainsi en a-t-il été de celle qu
5501
en a-t-il été de celle qui apparut à Ibn Arabi, à
la
Mekke, comme figure de la Sophia divine). L’analyse d’Ibn Arabi ne ce
5502
apparut à Ibn Arabi, à la Mekke, comme figure de
la
Sophia divine). L’analyse d’Ibn Arabi ne cesse de gagner en profondeu
5503
i, à la Mekke, comme figure de la Sophia divine).
L’
analyse d’Ibn Arabi ne cesse de gagner en profondeur : que l’amant ten
5504
’Ibn Arabi ne cesse de gagner en profondeur : que
l’
amant tende à contempler l’être aimé, à s’unir en lui, à en perpétuer
5505
er en profondeur : que l’amant tende à contempler
l’
être aimé, à s’unir en lui, à en perpétuer la présence, son amour tend
5506
pler l’être aimé, à s’unir en lui, à en perpétuer
la
présence, son amour tend toujours à faire exister quelque chose qui n
5507
quelque chose qui n’est pas encore existant dans
l’
Aimé.78 On reconnaît ici les « notes » de l’amour du prochain selon K
5508
encore existant dans l’Aimé.78 On reconnaît ici
les
« notes » de l’amour du prochain selon Kierkegaard79, mais aussi selo
5509
dans l’Aimé.78 On reconnaît ici les « notes » de
l’
amour du prochain selon Kierkegaard79, mais aussi selon Swedenborg : C
5510
Swedenborg : Comme tout bien procède du Seigneur,
le
Seigneur est, dans le sens suprême et au degré le plus éminent, le Pr
5511
t bien procède du Seigneur, le Seigneur est, dans
le
sens suprême et au degré le plus éminent, le Prochain ; c’est donc d’
5512
le Seigneur est, dans le sens suprême et au degré
le
plus éminent, le Prochain ; c’est donc d’après lui que s’établissent
5513
dans le sens suprême et au degré le plus éminent,
le
Prochain ; c’est donc d’après lui que s’établissent toutes les distin
5514
; c’est donc d’après lui que s’établissent toutes
les
distinctions relatives au prochain, c’est-à-dire que chacun est le pr
5515
elatives au prochain, c’est-à-dire que chacun est
le
prochain en proportion de ce qu’il a quelque chose du Seigneur en lui
5516
e du Seigneur en lui ; or, comme nul ne reçoit de
la
même manière le bien qui procède du Seigneur, il s’ensuit que l’un n’
5517
lui ; or, comme nul ne reçoit de la même manière
le
bien qui procède du Seigneur, il s’ensuit que l’un n’est pas le proch
5518
ocède du Seigneur, il s’ensuit que l’un n’est pas
le
prochain de la même manière que l’autre… ; il n’y a jamais chez deux
5519
ur, il s’ensuit que l’un n’est pas le prochain de
la
même manière que l’autre… ; il n’y a jamais chez deux personnes un bi
5520
eux personnes un bien absolument identique… C’est
l’
amour qui fait le prochain, et chacun est le prochain selon la qualité
5521
bien absolument identique… C’est l’amour qui fait
le
prochain, et chacun est le prochain selon la qualité de son amour.80
5522
C’est l’amour qui fait le prochain, et chacun est
le
prochain selon la qualité de son amour.80 En dépit de tout ce qui di
5523
fait le prochain, et chacun est le prochain selon
la
qualité de son amour.80 En dépit de tout ce qui distingue la transpa
5524
e son amour.80 En dépit de tout ce qui distingue
la
transparence (parfois trompeuse) du latin de l’ingénieur-philosophe S
5525
e la transparence (parfois trompeuse) du latin de
l’
ingénieur-philosophe Swedenborg et la poésie dense de l’Arabe, l’homol
5526
du latin de l’ingénieur-philosophe Swedenborg et
la
poésie dense de l’Arabe, l’homologie des énoncés est indéniable. Si l
5527
nieur-philosophe Swedenborg et la poésie dense de
l’
Arabe, l’homologie des énoncés est indéniable. Si le symbolisme concre
5528
losophe Swedenborg et la poésie dense de l’Arabe,
l’
homologie des énoncés est indéniable. Si le symbolisme concret des sou
5529
Arabe, l’homologie des énoncés est indéniable. Si
le
symbolisme concret des soufis transpose doublement tous les termes à
5530
isme concret des soufis transpose doublement tous
les
termes à la fois dans le surnaturel (ou monde céleste) et dans le sen
5531
anspose doublement tous les termes à la fois dans
le
surnaturel (ou monde céleste) et dans le sensible terrestre, la struc
5532
ois dans le surnaturel (ou monde céleste) et dans
le
sensible terrestre, la structure des relations entre Dieu, le vrai mo
5533
(ou monde céleste) et dans le sensible terrestre,
la
structure des relations entre Dieu, le vrai moi et le prochain, reste
5534
terrestre, la structure des relations entre Dieu,
le
vrai moi et le prochain, reste exactement comparable, comme le sont l
5535
tructure des relations entre Dieu, le vrai moi et
le
prochain, reste exactement comparable, comme le sont les trois formes
5536
t le prochain, reste exactement comparable, comme
le
sont les trois formes de l’amour que manifeste cette structure. Mais
5537
chain, reste exactement comparable, comme le sont
les
trois formes de l’amour que manifeste cette structure. Mais « l’Imagi
5538
ent comparable, comme le sont les trois formes de
l’
amour que manifeste cette structure. Mais « l’Imagination créatrice »
5539
de l’amour que manifeste cette structure. Mais «
l’
Imagination créatrice » des soufis, comme l’angélologie du mazdéisme,
5540
ais « l’Imagination créatrice » des soufis, comme
l’
angélologie du mazdéisme, nous fait voir combien plus vivement l’unité
5541
u mazdéisme, nous fait voir combien plus vivement
l’
unité première et finale de tout amour ! Peut-être aussi nous fera-t-e
5542
eut-être aussi nous fera-t-elle entrevoir comment
le
mythe de Tristan — en dépit du pseudo-bouddhisme tardivement emprunté
5543
ien » et trouve en lui ses origines archétypales.
La
passion du héros, que l’on peut interpréter (dans la légende primitiv
5544
s origines archétypales. La passion du héros, que
l’
on peut interpréter (dans la légende primitive et l’opéra) comme un am
5545
passion du héros, que l’on peut interpréter (dans
la
légende primitive et l’opéra) comme un amour dédié à sa propre âme81,
5546
on peut interpréter (dans la légende primitive et
l’
opéra) comme un amour dédié à sa propre âme81, dont Iseut ne serait qu
5547
dédié à sa propre âme81, dont Iseut ne serait que
l’
image sensible, — et c’est pourquoi j’ai osé dire que Tristan n’aimait
5548
Iseut — cette passion n’est-elle pas mieux vue si
l’
on évoque les Fravartis du mazdéisme, les figures angéliques du vrai m
5549
e passion n’est-elle pas mieux vue si l’on évoque
les
Fravartis du mazdéisme, les figures angéliques du vrai moi dans le my
5550
ux vue si l’on évoque les Fravartis du mazdéisme,
les
figures angéliques du vrai moi dans le mysticisme soufi et même la «
5551
azdéisme, les figures angéliques du vrai moi dans
le
mysticisme soufi et même la « rencontre aurorale » de l’âme et de sa
5552
ques du vrai moi dans le mysticisme soufi et même
la
« rencontre aurorale » de l’âme et de sa Dâenâ au pont Chinvat ? Et n
5553
icisme soufi et même la « rencontre aurorale » de
l’
âme et de sa Dâenâ au pont Chinvat ? Et n’est-ce pas pour avoir désiré
5554
pont Chinvat ? Et n’est-ce pas pour avoir désiré
l’
amour de l’Ange que les amants de la forêt du Morois en viennent à déc
5555
at ? Et n’est-ce pas pour avoir désiré l’amour de
l’
Ange que les amants de la forêt du Morois en viennent à découvrir que
5556
st-ce pas pour avoir désiré l’amour de l’Ange que
les
amants de la forêt du Morois en viennent à découvrir que c’est leur p
5557
avoir désiré l’amour de l’Ange que les amants de
la
forêt du Morois en viennent à découvrir que c’est leur passion même q
5558
re ? S’il est une « erreur de Tristan », motivant
le
malheur essentiel de sa passion, ce serait alors dans le mode de la t
5559
eur essentiel de sa passion, ce serait alors dans
le
mode de la transposition du « ciel » en Terre, et de l’Ange en la fem
5560
el de sa passion, ce serait alors dans le mode de
la
transposition du « ciel » en Terre, et de l’Ange en la femme, que l’o
5561
e de la transposition du « ciel » en Terre, et de
l’
Ange en la femme, que l’on pourrait en pressentir l’ultime secret. (Ic
5562
ansposition du « ciel » en Terre, et de l’Ange en
la
femme, que l’on pourrait en pressentir l’ultime secret. (Ici, donc, t
5563
« ciel » en Terre, et de l’Ange en la femme, que
l’
on pourrait en pressentir l’ultime secret. (Ici, donc, toute morale co
5564
Ange en la femme, que l’on pourrait en pressentir
l’
ultime secret. (Ici, donc, toute morale commune ou rationnelle, non st
5565
onnaliste, ne peut évidemment que se récuser.)
L’
école orientale La plupart des doctrines hindoues, et l’unanimité d
5566
rientale La plupart des doctrines hindoues, et
l’
unanimité des écoles bouddhistes, comme on l’a vu, nient la personne o
5567
, et l’unanimité des écoles bouddhistes, comme on
l’
a vu, nient la personne ou la survolent, ne connaissent que l’ego tout
5568
té des écoles bouddhistes, comme on l’a vu, nient
la
personne ou la survolent, ne connaissent que l’ego tout transitoire e
5569
ouddhistes, comme on l’a vu, nient la personne ou
la
survolent, ne connaissent que l’ego tout transitoire et le Soi tout i
5570
t la personne ou la survolent, ne connaissent que
l’
ego tout transitoire et le Soi tout impersonnel : « Il n’est qu’un Soi
5571
ent, ne connaissent que l’ego tout transitoire et
le
Soi tout impersonnel : « Il n’est qu’un Soi pour tous les êtres.82 »
5572
tout impersonnel : « Il n’est qu’un Soi pour tous
les
êtres.82 » L’individualité qui est là, qui tombe sous le sens, doit ê
5573
l : « Il n’est qu’un Soi pour tous les êtres.82 »
L’
individualité qui est là, qui tombe sous le sens, doit être exténuée m
5574
s.82 » L’individualité qui est là, qui tombe sous
le
sens, doit être exténuée méthodiquement (non point transfigurée ou gl
5575
n point transfigurée ou glorifiée) pour atteindre
le
Soi sans distinction, la Réalité sans visage, qui n’est ni ceci ni ce
5576
lorifiée) pour atteindre le Soi sans distinction,
la
Réalité sans visage, qui n’est ni ceci ni cela, mais qui est l’Immens
5577
s visage, qui n’est ni ceci ni cela, mais qui est
l’
Immensité, disent les hindous, et qui est le Vide, disent les bouddhis
5578
ni ceci ni cela, mais qui est l’Immensité, disent
les
hindous, et qui est le Vide, disent les bouddhistes. Du même coup se
5579
i est l’Immensité, disent les hindous, et qui est
le
Vide, disent les bouddhistes. Du même coup se trouvent évacués les pr
5580
é, disent les hindous, et qui est le Vide, disent
les
bouddhistes. Du même coup se trouvent évacués les problèmes de l’amou
5581
les bouddhistes. Du même coup se trouvent évacués
les
problèmes de l’amour de soi-même et de l’amour de Dieu et du prochain
5582
Du même coup se trouvent évacués les problèmes de
l’
amour de soi-même et de l’amour de Dieu et du prochain : faute de prot
5583
vacués les problèmes de l’amour de soi-même et de
l’
amour de Dieu et du prochain : faute de protagonistes bien réels, ces
5584
avoir lieu. (Ou tout au moins, pris au sérieux.)
L’
amour même est évacué. Il n’est plus que l’attrait des sexes agissant
5585
ieux.) L’amour même est évacué. Il n’est plus que
l’
attrait des sexes agissant fatalement sur des milliards d’agrégats éph
5586
s d’agrégats éphémères, combinés et défaits selon
le
cours des astres et le Karma. Il ne peut être, pour l’esprit, qu’indi
5587
combinés et défaits selon le cours des astres et
le
Karma. Il ne peut être, pour l’esprit, qu’indifférent. (Quoique la mo
5588
urs des astres et le Karma. Il ne peut être, pour
l’
esprit, qu’indifférent. (Quoique la morale sociale condamne radicaleme
5589
eut être, pour l’esprit, qu’indifférent. (Quoique
la
morale sociale condamne radicalement l’adultère de la femme mariée ;
5590
(Quoique la morale sociale condamne radicalement
l’
adultère de la femme mariée ; mais ce n’est pas au nom de l’amour, on
5591
orale sociale condamne radicalement l’adultère de
la
femme mariée ; mais ce n’est pas au nom de l’amour, on le pense bien.
5592
de la femme mariée ; mais ce n’est pas au nom de
l’
amour, on le pense bien.) « Écarte les choses, ô amant, ta voie est fu
5593
mariée ; mais ce n’est pas au nom de l’amour, on
le
pense bien.) « Écarte les choses, ô amant, ta voie est fuite ! » s’éc
5594
as au nom de l’amour, on le pense bien.) « Écarte
les
choses, ô amant, ta voie est fuite ! » s’écriait saint Jean de la Cro
5595
uite ! » s’écriait saint Jean de la Croix. Écarte
le
prochain ! ajoutent les spirituels du védantisme et du bouddhisme. S’
5596
t Jean de la Croix. Écarte le prochain ! ajoutent
les
spirituels du védantisme et du bouddhisme. S’il est vrai que « la not
5597
védantisme et du bouddhisme. S’il est vrai que «
la
notion de Moi n’a d’accès que dans la pensée des sots », comme le dit
5598
vrai que « la notion de Moi n’a d’accès que dans
la
pensée des sots », comme le dit un texte tibétain, la notion de Toi n
5599
n’a d’accès que dans la pensée des sots », comme
le
dit un texte tibétain, la notion de Toi ne vaut pas mieux. « La moral
5600
ensée des sots », comme le dit un texte tibétain,
la
notion de Toi ne vaut pas mieux. « La morale bouddhique, qui est une
5601
e tibétain, la notion de Toi ne vaut pas mieux. «
La
morale bouddhique, qui est une sorte d’hygiène spirituelle, tend à dé
5602
d’hygiène spirituelle, tend à détruire, en nous,
les
causes de souffrance pour autrui.83 » « On ne peut comprendre la natu
5603
uffrance pour autrui.83 » « On ne peut comprendre
la
nature de l’ultime réalité qu’après avoir détruit tout attachement in
5604
autrui.83 » « On ne peut comprendre la nature de
l’
ultime réalité qu’après avoir détruit tout attachement inné ou acquis,
5605
ement inné ou acquis, pour ses semblables…84 » Et
le
Bouddha lui-même : « Qui a cent sortes d’amours a cent sortes de doul
5606
ur ; qui n’a pas d’amour n’a pas de douleur. » Si
l’
on s’en tient aux textes, la cause est entendue : l’Asie métaphysique
5607
pas de douleur. » Si l’on s’en tient aux textes,
la
cause est entendue : l’Asie métaphysique ne connaît pas l’amour, — j’
5608
on s’en tient aux textes, la cause est entendue :
l’
Asie métaphysique ne connaît pas l’amour, — j’entends l’amour de Dieu,
5609
est entendue : l’Asie métaphysique ne connaît pas
l’
amour, — j’entends l’amour de Dieu, de soi et du prochain, l’amour-pas
5610
métaphysique ne connaît pas l’amour, — j’entends
l’
amour de Dieu, de soi et du prochain, l’amour-passion, et même l’amour
5611
j’entends l’amour de Dieu, de soi et du prochain,
l’
amour-passion, et même l’amour matrimonial. Mais on me dira que l’Asie
5612
, de soi et du prochain, l’amour-passion, et même
l’
amour matrimonial. Mais on me dira que l’Asie n’est pas toute spiritue
5613
et même l’amour matrimonial. Mais on me dira que
l’
Asie n’est pas toute spirituelle, et que la vie ne s’en tient pas aux
5614
ra que l’Asie n’est pas toute spirituelle, et que
la
vie ne s’en tient pas aux textes. On ajoutera peut-être qu’on ne voit
5615
a peut-être qu’on ne voit pas de raisons pour que
l’
Orient réel soit plus conforme aux sermons du Bouddha que l’Europe au
5616
éel soit plus conforme aux sermons du Bouddha que
l’
Europe au Sermon sur la Montagne. On aura tort. Car les grandes doctri
5617
aux sermons du Bouddha que l’Europe au Sermon sur
la
Montagne. On aura tort. Car les grandes doctrines religieuses de l’As
5618
rope au Sermon sur la Montagne. On aura tort. Car
les
grandes doctrines religieuses de l’Asie n’ont jamais été révolutionna
5619
ra tort. Car les grandes doctrines religieuses de
l’
Asie n’ont jamais été révolutionnaires. Elles n’ont jamais prétendu tr
5620
onnaires. Elles n’ont jamais prétendu transformer
l’
ensemble des réalités humaines : sociales, économiques et politiques,
5621
e religions), elles expriment ces réalités, elles
les
fixent et elles les consacrent (par les idoles et les yantras — signe
5622
expriment ces réalités, elles les fixent et elles
les
consacrent (par les idoles et les yantras — signes magiques et invari
5623
és, elles les fixent et elles les consacrent (par
les
idoles et les yantras — signes magiques et invariables —, par les rit
5624
fixent et elles les consacrent (par les idoles et
les
yantras — signes magiques et invariables —, par les rites quotidiens
5625
s yantras — signes magiques et invariables —, par
les
rites quotidiens omniprésents, par le régime des castes et la condamn
5626
les —, par les rites quotidiens omniprésents, par
le
régime des castes et la condamnation de toute curiosité du monde) ; d
5627
tidiens omniprésents, par le régime des castes et
la
condamnation de toute curiosité du monde) ; d’autre part, en tant que
5628
ant que doctrines, elles proposent aux spirituels
les
moyens de s’en évader en dérangeant le moins de choses possible. Les
5629
pirituels les moyens de s’en évader en dérangeant
le
moins de choses possible. Les religions abrahamiques, au contraire, m
5630
évader en dérangeant le moins de choses possible.
Les
religions abrahamiques, au contraire, monothéistes et communautaires,
5631
traire, monothéistes et communautaires, attaquent
l’
ensemble des relations humaines et prennent à partie, un à un, tout in
5632
un à un, tout individu tel qu’il est, décidées à
le
transformer en vérité85. Elles provoquent d’innombrables réactions. I
5633
rables réactions. Il est par suite inévitable que
l’
existence réelle, en Occident, ressemble moins à la doctrine que ce n’
5634
’existence réelle, en Occident, ressemble moins à
la
doctrine que ce n’était le cas, jusqu’à nos jours, en Asie. Prenons l
5635
ent, ressemble moins à la doctrine que ce n’était
le
cas, jusqu’à nos jours, en Asie. Prenons l’exemple de l’érotisme. Le
5636
était le cas, jusqu’à nos jours, en Asie. Prenons
l’
exemple de l’érotisme. Le shivaïsme explique le cosmos tout entier en
5637
jusqu’à nos jours, en Asie. Prenons l’exemple de
l’
érotisme. Le shivaïsme explique le cosmos tout entier en termes de sex
5638
jours, en Asie. Prenons l’exemple de l’érotisme.
Le
shivaïsme explique le cosmos tout entier en termes de sexualité : il
5639
ns l’exemple de l’érotisme. Le shivaïsme explique
le
cosmos tout entier en termes de sexualité : il pose le désir à la bas
5640
smos tout entier en termes de sexualité : il pose
le
désir à la base de tout. Nous ne désirons des choses que dans la mesu
5641
ntier en termes de sexualité : il pose le désir à
la
base de tout. Nous ne désirons des choses que dans la mesure où elles
5642
ase de tout. Nous ne désirons des choses que dans
la
mesure où elles nous procurent une jouissance. La divinité n’est un o
5643
la mesure où elles nous procurent une jouissance.
La
divinité n’est un objet d’amour que parce qu’elle représente une volu
5644
arce qu’elle représente une volupté sans mélange…
Le
désir du luxurieux pour la femme n’existe que parce qu’il voit en ell
5645
volupté sans mélange… Le désir du luxurieux pour
la
femme n’existe que parce qu’il voit en elle la forme de son plaisir,
5646
ur la femme n’existe que parce qu’il voit en elle
la
forme de son plaisir, la source de sa jouissance. Dans la joie de la
5647
parce qu’il voit en elle la forme de son plaisir,
la
source de sa jouissance. Dans la joie de la possession, la souffrance
5648
de son plaisir, la source de sa jouissance. Dans
la
joie de la possession, la souffrance du désir est pour un instant apa
5649
isir, la source de sa jouissance. Dans la joie de
la
possession, la souffrance du désir est pour un instant apaisée… et l’
5650
de sa jouissance. Dans la joie de la possession,
la
souffrance du désir est pour un instant apaisée… et l’homme perçoit d
5651
uffrance du désir est pour un instant apaisée… et
l’
homme perçoit dans le plaisir sa propre nature essentielle, qui est la
5652
pour un instant apaisée… et l’homme perçoit dans
le
plaisir sa propre nature essentielle, qui est la joie. Toute jouissan
5653
le plaisir sa propre nature essentielle, qui est
la
joie. Toute jouissance, tout plaisir est une expérience du divin… Mai
5654
e, tout plaisir est une expérience du divin… Mais
l’
amour parfait est celui dont l’objet n’est pas limité. C’est cet amour
5655
nce du divin… Mais l’amour parfait est celui dont
l’
objet n’est pas limité. C’est cet amour qui est l’amour pur, l’amour d
5656
l’objet n’est pas limité. C’est cet amour qui est
l’
amour pur, l’amour de l’amour même, l’amour de l’Être-de-volupté trans
5657
pas limité. C’est cet amour qui est l’amour pur,
l’
amour de l’amour même, l’amour de l’Être-de-volupté transcendant.86 K
5658
. C’est cet amour qui est l’amour pur, l’amour de
l’
amour même, l’amour de l’Être-de-volupté transcendant.86 Kâma, le die
5659
our qui est l’amour pur, l’amour de l’amour même,
l’
amour de l’Être-de-volupté transcendant.86 Kâma, le dieu du plaisir é
5660
l’amour pur, l’amour de l’amour même, l’amour de
l’
Être-de-volupté transcendant.86 Kâma, le dieu du plaisir érotique, es
5661
amour de l’Être-de-volupté transcendant.86 Kâma,
le
dieu du plaisir érotique, est vénéré par les yogis, « car c’est lui s
5662
Kâma, le dieu du plaisir érotique, est vénéré par
les
yogis, « car c’est lui seul, lorsqu’il est satisfait, qui peut libére
5663
i seul, lorsqu’il est satisfait, qui peut libérer
l’
esprit du désir… Ce n’est pas le plaisir mais le désir qui lie l’homme
5664
qui peut libérer l’esprit du désir… Ce n’est pas
le
plaisir mais le désir qui lie l’homme et qui est un obstacle à son pr
5665
r l’esprit du désir… Ce n’est pas le plaisir mais
le
désir qui lie l’homme et qui est un obstacle à son progrès spirituel8
5666
ir… Ce n’est pas le plaisir mais le désir qui lie
l’
homme et qui est un obstacle à son progrès spirituel87 ». Et encore :
5667
ès spirituel87 ». Et encore : « Celui qui cherche
l’
amour dans l’espoir d’une jouissance est la victime du désir. Le sage
5668
7 ». Et encore : « Celui qui cherche l’amour dans
l’
espoir d’une jouissance est la victime du désir. Le sage accepte les p
5669
herche l’amour dans l’espoir d’une jouissance est
la
victime du désir. Le sage accepte les plaisirs sensuels quand ils vie
5670
’espoir d’une jouissance est la victime du désir.
Le
sage accepte les plaisirs sensuels quand ils viennent, mais avec un c
5671
uissance est la victime du désir. Le sage accepte
les
plaisirs sensuels quand ils viennent, mais avec un cœur détaché. Il n
5672
n du plaisir comme expérience du divin, comparons-
les
aux diatribes d’un saint Paul annonçant la « colère de Dieu, révélée
5673
arons-les aux diatribes d’un saint Paul annonçant
la
« colère de Dieu, révélée du Ciel » contre les « impudiques » et les
5674
ant la « colère de Dieu, révélée du Ciel » contre
les
« impudiques » et les « infâmes », contre tous ceux « qui se sont liv
5675
u, révélée du Ciel » contre les « impudiques » et
les
« infâmes », contre tous ceux « qui se sont livrés à l’impureté, selo
5676
nfâmes », contre tous ceux « qui se sont livrés à
l’
impureté, selon les convoitises de leur cœur ». Comparons le Shiva Pur
5677
ous ceux « qui se sont livrés à l’impureté, selon
les
convoitises de leur cœur ». Comparons le Shiva Purana, le Kamasutra,
5678
, selon les convoitises de leur cœur ». Comparons
le
Shiva Purana, le Kamasutra, le Mahabharata, les copieux commentaires
5679
itises de leur cœur ». Comparons le Shiva Purana,
le
Kamasutra, le Mahabharata, les copieux commentaires sur le culte du p
5680
cœur ». Comparons le Shiva Purana, le Kamasutra,
le
Mahabharata, les copieux commentaires sur le culte du phallus, aux tr
5681
ns le Shiva Purana, le Kamasutra, le Mahabharata,
les
copieux commentaires sur le culte du phallus, aux traités des Pères d
5682
tra, le Mahabharata, les copieux commentaires sur
le
culte du phallus, aux traités des Pères de l’Église sur l’ascèse et s
5683
du phallus, aux traités des Pères de l’Église sur
l’
ascèse et sur la chasteté, et nous comprendrons à quel point Kierkegaa
5684
traités des Pères de l’Église sur l’ascèse et sur
la
chasteté, et nous comprendrons à quel point Kierkegaard voyait juste
5685
oint Kierkegaard voyait juste quand il disait que
le
christianisme, en condamnant la sensualité au nom de l’esprit, l’a po
5686
and il disait que le christianisme, en condamnant
la
sensualité au nom de l’esprit, l’a posée comme réalité et catégorie s
5687
istianisme, en condamnant la sensualité au nom de
l’
esprit, l’a posée comme réalité et catégorie spirituelle. Dans les lit
5688
, en condamnant la sensualité au nom de l’esprit,
l’
a posée comme réalité et catégorie spirituelle. Dans les littératures
5689
osée comme réalité et catégorie spirituelle. Dans
les
littératures de l’Asie, on trouvera peu d’exemples convaincants — pou
5690
t catégorie spirituelle. Dans les littératures de
l’
Asie, on trouvera peu d’exemples convaincants — pour ma part, je n’en
5691
oint — de ce que nous baptisons amour-passion, et
l’
on sait à quel point cette forme de l’amour est liée à ses expressions
5692
passion, et l’on sait à quel point cette forme de
l’
amour est liée à ses expressions. La passion et l’amour mystique, l’ér
5693
ette forme de l’amour est liée à ses expressions.
La
passion et l’amour mystique, l’érotisme et l’amour du prochain, sont
5694
l’amour est liée à ses expressions. La passion et
l’
amour mystique, l’érotisme et l’amour du prochain, sont des problèmes
5695
ses expressions. La passion et l’amour mystique,
l’
érotisme et l’amour du prochain, sont des problèmes occidentaux, posés
5696
ns. La passion et l’amour mystique, l’érotisme et
l’
amour du prochain, sont des problèmes occidentaux, posés à tous par le
5697
sont des problèmes occidentaux, posés à tous par
les
rigueurs mal tolérées de dogmes et de doctrines impératives, cependan
5698
dogmes et de doctrines impératives, cependant que
les
voies de sagesse asiatiques sont seulement proposées, — à quelques-un
5699
iques sont seulement proposées, — à quelques-uns.
Les
recettes de plaisir, ou d’immortalité par la rétention du semen, sont
5700
ns. Les recettes de plaisir, ou d’immortalité par
la
rétention du semen, sont liées en Asie à la piété, tandis que nos cou
5701
é par la rétention du semen, sont liées en Asie à
la
piété, tandis que nos coutumes viennent d’un vieux fond païen et que
5702
iène moderne se veut « scientifique ». À cause de
la
nature du christianisme et de la nature de l’hindouisme ou du bouddhi
5703
ue ». À cause de la nature du christianisme et de
la
nature de l’hindouisme ou du bouddhisme, la vie réelle de l’Occident
5704
de la nature du christianisme et de la nature de
l’
hindouisme ou du bouddhisme, la vie réelle de l’Occident est en confli
5705
et de la nature de l’hindouisme ou du bouddhisme,
la
vie réelle de l’Occident est en conflit avec la foi, tandis que la vi
5706
e l’hindouisme ou du bouddhisme, la vie réelle de
l’
Occident est en conflit avec la foi, tandis que la vie réelle de l’Asi
5707
, la vie réelle de l’Occident est en conflit avec
la
foi, tandis que la vie réelle de l’Asie est en symbiose avec ses reli
5708
l’Occident est en conflit avec la foi, tandis que
la
vie réelle de l’Asie est en symbiose avec ses religions. Et si la sym
5709
conflit avec la foi, tandis que la vie réelle de
l’
Asie est en symbiose avec ses religions. Et si la symétrie de ces form
5710
l’Asie est en symbiose avec ses religions. Et si
la
symétrie de ces formules inquiète, revenons au quotidien banal, pris
5711
s inquiète, revenons au quotidien banal, pris sur
le
vif : plutôt qu’une infinie bibliographie rameutée à l’appui de mes d
5712
te notation plaisante dans un roman moderne, dont
l’
auteur se trouve être un brahmane orthodoxe : « J’avais vécu en Europe
5713
usé une Européenne : apparemment, cela me donnait
l’
invraisemblable privilège de comprendre les choses de l’amour.89 » Ce
5714
donnait l’invraisemblable privilège de comprendre
les
choses de l’amour.89 » Ceci encore, le cliché Orient-Occident = non-
5715
aisemblable privilège de comprendre les choses de
l’
amour.89 » Ceci encore, le cliché Orient-Occident = non-moi-personne,
5716
mprendre les choses de l’amour.89 » Ceci encore,
le
cliché Orient-Occident = non-moi-personne, qui a peut-être moins cour
5717
de dogmes sublimes et qui prétendent transfigurer
la
vie concrète, l’Occident répond par des mythes symbolisant ses résist
5718
s et qui prétendent transfigurer la vie concrète,
l’
Occident répond par des mythes symbolisant ses résistances naturelles,
5719
mbolisant ses résistances naturelles, et qui font
l’
intérêt de sa vie amoureuse. Mais l’Orient se contente de proposer des
5720
, et qui font l’intérêt de sa vie amoureuse. Mais
l’
Orient se contente de proposer des voies aux Renonçants (ou sannyasins
5721
ies aux Renonçants (ou sannyasins) qui ont épuisé
la
coupe, ou la dédaignent. Pas de drame, encore moins de tragique, et s
5722
çants (ou sannyasins) qui ont épuisé la coupe, ou
la
dédaignent. Pas de drame, encore moins de tragique, et surtout pas de
5723
e tout ou rien, mais d’innombrables variétés dans
l’
approche de l’ultime réalité. Où nous verrions contradiction, antinomi
5724
, mais d’innombrables variétés dans l’approche de
l’
ultime réalité. Où nous verrions contradiction, antinomie, ils ne mont
5725
les nôtres (semblent bien affirmer, par exemple,
la
réalité de la personne ou du prochain) on n’en saurait déduire qu’ell
5726
emblent bien affirmer, par exemple, la réalité de
la
personne ou du prochain) on n’en saurait déduire qu’elles excluent le
5727
déduire qu’elles excluent leur contraire, ou que
l’
on s’était mépris sur le vrai sens de leurs affirmations répétées du c
5728
nt leur contraire, ou que l’on s’était mépris sur
le
vrai sens de leurs affirmations répétées du contraire (comme la non-e
5729
e leurs affirmations répétées du contraire (comme
la
non-existence du moi). Illustrons cela. L’idée de vocation personnell
5730
(comme la non-existence du moi). Illustrons cela.
L’
idée de vocation personnelle accomplie aux dépens de l’individu est lo
5731
e de vocation personnelle accomplie aux dépens de
l’
individu est loin d’être absente de la Bhagavad-Gita : Sois détaché e
5732
x dépens de l’individu est loin d’être absente de
la
Bhagavad-Gita : Sois détaché et accomplis l’action qui est ton devoi
5733
de la Bhagavad-Gita : Sois détaché et accomplis
l’
action qui est ton devoir, car en accomplissant l’action sans attachem
5734
l’action qui est ton devoir, car en accomplissant
l’
action sans attachement, l’homme obtient le but suprême. (III, 19) Not
5735
, car en accomplissant l’action sans attachement,
l’
homme obtient le but suprême. (III, 19) Notre propre devoir, si humble
5736
issant l’action sans attachement, l’homme obtient
le
but suprême. (III, 19) Notre propre devoir, si humble qu’il soit, vau
5737
opre devoir, si humble qu’il soit, vaut mieux que
le
devoir parfaitement accompli d’un autre. Le dharma d’un autre est ple
5738
x que le devoir parfaitement accompli d’un autre.
Le
dharma d’un autre est plein de dangers. (III, 35) Et dans les upanis
5739
un autre est plein de dangers. (III, 35) Et dans
les
upanishads : La vie n’a servi de rien à celui qui quitte ce monde san
5740
n de dangers. (III, 35) Et dans les upanishads :
La
vie n’a servi de rien à celui qui quitte ce monde sans avoir réalisé
5741
propre monde intérieur. Elle reste invécue, comme
les
Vedas non récités, ou toute action non accomplie. (Brihad-âranyaka Up
5742
toute action non accomplie. (Brihad-âranyaka Up.)
La
notion de l’amour du prochain, et l’injonction évangélique d’aimer au
5743
non accomplie. (Brihad-âranyaka Up.) La notion de
l’
amour du prochain, et l’injonction évangélique d’aimer aussi son ennem
5744
ranyaka Up.) La notion de l’amour du prochain, et
l’
injonction évangélique d’aimer aussi son ennemi ne sont pas absentes d
5745
son ennemi ne sont pas absentes du bouddhisme car
l’
ennemi et toi-même ne diffèrent que par les attachements du moi phénom
5746
sme car l’ennemi et toi-même ne diffèrent que par
les
attachements du moi phénoménal, tandis qu’ils participent du même Soi
5747
même Soi véritable, qui seul importe. « Surmonte
le
mal par le bien », dit le Bouddha. « Que ceux qui me calomnient, me n
5748
éritable, qui seul importe. « Surmonte le mal par
le
bien », dit le Bouddha. « Que ceux qui me calomnient, me nuisent, me
5749
eul importe. « Surmonte le mal par le bien », dit
le
Bouddha. « Que ceux qui me calomnient, me nuisent, me raillent, et to
5750
i me calomnient, me nuisent, me raillent, et tous
les
autres, obtiennent l’illumination spirituelle », dit Shantideva. Et S
5751
sent, me raillent, et tous les autres, obtiennent
l’
illumination spirituelle », dit Shantideva. Et Suzuki, qui enseigna le
5752
tuelle », dit Shantideva. Et Suzuki, qui enseigna
le
zen à toutes les Amériques dégoûtées de l’Occident, et de plus en plu
5753
antideva. Et Suzuki, qui enseigna le zen à toutes
les
Amériques dégoûtées de l’Occident, et de plus en plus à l’Europe, va
5754
seigna le zen à toutes les Amériques dégoûtées de
l’
Occident, et de plus en plus à l’Europe, va jusqu’à dire que la méthod
5755
ues dégoûtées de l’Occident, et de plus en plus à
l’
Europe, va jusqu’à dire que la méthode bouddhiste « consiste à transfo
5756
t de plus en plus à l’Europe, va jusqu’à dire que
la
méthode bouddhiste « consiste à transformer Éros en Agapè »90. Je rép
5757
e l’autre ? Elles ne se contredisent pas plus que
les
énoncés spirituels correspondant à différents niveaux d’évolution, à
5758
veaux d’évolution, à différents degrés d’éveil de
la
conscience… 2. Mise en question par l’expérience vécue. — Dans le rom
5759
d’éveil de la conscience… 2. Mise en question par
l’
expérience vécue. — Dans le roman de Raja Rao qu’on vient de citer, ce
5760
. Mise en question par l’expérience vécue. — Dans
le
roman de Raja Rao qu’on vient de citer, cette sentence d’un upanishad
5761
lusieurs reprises : En vérité, à quoi se rapporte
l’
amour d’un mari pour sa femme ? Non point à la femme, mais en vérité a
5762
rte l’amour d’un mari pour sa femme ? Non point à
la
femme, mais en vérité au Soi qui est en elle.91 En présence d’une te
5763
ence d’une telle phrase, j’éprouve d’abord ceci :
le
sentiment d’une immédiate et vive reconnaissance. Car toute vérité su
5764
iate et vive reconnaissance. Car toute vérité sur
l’
amour est immédiatement reconnue par celui qui s’est mis en quête d’un
5765
e par celui qui s’est mis en quête d’un savoir de
l’
amour qu’il vit. N’importe qui m’avertira que le Soi de l’Inde n’est p
5766
e l’amour qu’il vit. N’importe qui m’avertira que
le
Soi de l’Inde n’est pas le vrai Dieu des chrétiens, qui est personnel
5767
qu’il vit. N’importe qui m’avertira que le Soi de
l’
Inde n’est pas le vrai Dieu des chrétiens, qui est personnel. On conna
5768
rte qui m’avertira que le Soi de l’Inde n’est pas
le
vrai Dieu des chrétiens, qui est personnel. On connaît les définition
5769
Dieu des chrétiens, qui est personnel. On connaît
les
définitions. Mais je retrouve ici mon expérience. C’est seulement à p
5770
de réponses. Sur cette phrase des upanishads, sur
le
dialogue qui peut s’instituer à partir d’expériences re-connues, on p
5771
récisément, ici, touche à sa fin ?) Je disais que
l’
amour vrai, c’est discerner dans l’autre — pour l’avoir reconnu tout d
5772
l’amour vrai, c’est discerner dans l’autre — pour
l’
avoir reconnu tout d’abord en soi-même — le vrai moi, sujet de l’amour
5773
— pour l’avoir reconnu tout d’abord en soi-même —
le
vrai moi, sujet de l’amour, et l’aider à prendre conscience de ce qu’
5774
tout d’abord en soi-même — le vrai moi, sujet de
l’
amour, et l’aider à prendre conscience de ce qu’il est ou peut devenir
5775
d en soi-même — le vrai moi, sujet de l’amour, et
l’
aider à prendre conscience de ce qu’il est ou peut devenir. N’est-ce p
5776
nce de ce qu’il est ou peut devenir. N’est-ce pas
l’
aider à réfléchir la lumière de l’amour créateur ? Non, ce serait là t
5777
ou peut devenir. N’est-ce pas l’aider à réfléchir
la
lumière de l’amour créateur ? Non, ce serait là trop dire, et pas ass
5778
r. N’est-ce pas l’aider à réfléchir la lumière de
l’
amour créateur ? Non, ce serait là trop dire, et pas assez. Aimer, c’e
5779
st aider l’autre à se situer de telle manière que
la
lumière se voie en lui, mais qu’en même temps le vrai moi de l’amant
5780
la lumière se voie en lui, mais qu’en même temps
le
vrai moi de l’amant s’y découvre, autrement éclairé, et par là subtil
5781
voie en lui, mais qu’en même temps le vrai moi de
l’
amant s’y découvre, autrement éclairé, et par là subtilement changé, u
5782
gé, un peu plus lui-même qu’avant : amour mutuel.
L’
expérience est la même, ou du moins je la sens telle. Mais la lumière
5783
ui-même qu’avant : amour mutuel. L’expérience est
la
même, ou du moins je la sens telle. Mais la lumière ? Est-ce le Nom q
5784
mutuel. L’expérience est la même, ou du moins je
la
sens telle. Mais la lumière ? Est-ce le Nom qu’on lui donne qui diffè
5785
e est la même, ou du moins je la sens telle. Mais
la
lumière ? Est-ce le Nom qu’on lui donne qui diffère, — ou quoi d’autr
5786
moins je la sens telle. Mais la lumière ? Est-ce
le
Nom qu’on lui donne qui diffère, — ou quoi d’autre ? Le point du dial
5787
qu’on lui donne qui diffère, — ou quoi d’autre ?
Le
point du dialogue est ici. Un point seulement, sans étendue, mais sel
5788
ici. Un point seulement, sans étendue, mais selon
le
regard que nous portons sur lui, il en jaillit un monde ou l’autre :
5789
tons sur lui, il en jaillit un monde ou l’autre :
l’
Occidental ou l’Oriental. Tous les risques d’erreur sont de notre côté
5790
en jaillit un monde ou l’autre : l’Occidental ou
l’
Oriental. Tous les risques d’erreur sont de notre côté, nous les payon
5791
nde ou l’autre : l’Occidental ou l’Oriental. Tous
les
risques d’erreur sont de notre côté, nous les payons par les névroses
5792
ous les risques d’erreur sont de notre côté, nous
les
payons par les névroses ou l’abêtissement spirituel. Eux sont telleme
5793
d’erreur sont de notre côté, nous les payons par
les
névroses ou l’abêtissement spirituel. Eux sont tellement en garde con
5794
e notre côté, nous les payons par les névroses ou
l’
abêtissement spirituel. Eux sont tellement en garde contre l’illusion,
5795
ent spirituel. Eux sont tellement en garde contre
l’
illusion, qu’ils l’ont mise en facteur commun dans tout ce qui existe
5796
sont tellement en garde contre l’illusion, qu’ils
l’
ont mise en facteur commun dans tout ce qui existe ; (à tel point que
5797
commun dans tout ce qui existe ; (à tel point que
le
seul fait d’exister devient pour eux l’équivalent de notre péché orig
5798
point que le seul fait d’exister devient pour eux
l’
équivalent de notre péché originel). Ils en ont fait autant pour les n
5799
otre péché originel). Ils en ont fait autant pour
les
névroses qui s’attaquent à nos « agrégats » individuels : le cosmos a
5800
qui s’attaquent à nos « agrégats » individuels :
le
cosmos actuel tout entier semble résulter — selon leurs sages — d’une
5801
é, tout s’arrangera.) Ils en ont fait autant pour
les
personnes, potentialisées dans une seule Personne-cosmique, Purusha (
5802
s dans une seule Personne-cosmique, Purusha (dont
la
contrepartie actualisante est Prakriti) finalement dissociée et fondu
5803
est Prakriti) finalement dissociée et fondue dans
le
Soi : « Tu es Cela ». Le drame individuel est noyé dans le Tout. Mais
5804
dissociée et fondue dans le Soi : « Tu es Cela ».
Le
drame individuel est noyé dans le Tout. Mais le Tout est le contraire
5805
« Tu es Cela ». Le drame individuel est noyé dans
le
Tout. Mais le Tout est le contraire du drame. Tous les risques d’erre
5806
. Le drame individuel est noyé dans le Tout. Mais
le
Tout est le contraire du drame. Tous les risques d’erreur sont liés à
5807
ndividuel est noyé dans le Tout. Mais le Tout est
le
contraire du drame. Tous les risques d’erreur sont liés à notre amour
5808
out. Mais le Tout est le contraire du drame. Tous
les
risques d’erreur sont liés à notre amour ; et plus l’amour est passio
5809
isques d’erreur sont liés à notre amour ; et plus
l’
amour est passionné, exigeant, singulier, plus grand le risque. Ce que
5810
ur est passionné, exigeant, singulier, plus grand
le
risque. Ce que nous croyons aimer en elle, est-ce elle-même ou l’imag
5811
e nous croyons aimer en elle, est-ce elle-même ou
l’
image de notre ange ? Ce que nous avons cru voir en elle, et que nous
5812
à ses dépens, est-ce notre anima projetée ? Tous
les
psychanalystes nous l’ont dit : l’erreur sur la personne de l’être ai
5813
tre anima projetée ? Tous les psychanalystes nous
l’
ont dit : l’erreur sur la personne de l’être aimé est la source des pi
5814
ojetée ? Tous les psychanalystes nous l’ont dit :
l’
erreur sur la personne de l’être aimé est la source des pires conflits
5815
les psychanalystes nous l’ont dit : l’erreur sur
la
personne de l’être aimé est la source des pires conflits, une violenc
5816
stes nous l’ont dit : l’erreur sur la personne de
l’
être aimé est la source des pires conflits, une violence faite à l’âme
5817
dit : l’erreur sur la personne de l’être aimé est
la
source des pires conflits, une violence faite à l’âme de l’autre, à s
5818
a source des pires conflits, une violence faite à
l’
âme de l’autre, à son corps ou à son esprit — ou encore à son moi tota
5819
on reconnu, non respecté dans son autonomie. Ici,
le
brahmane intervient : — Si tu cherches le Soi à travers elle, si tu a
5820
e. Ici, le brahmane intervient : — Si tu cherches
le
Soi à travers elle, si tu as compris l’impermanence et t’exerces aux
5821
cherches le Soi à travers elle, si tu as compris
l’
impermanence et t’exerces aux « vues justes » comme disait le Bouddha,
5822
nce et t’exerces aux « vues justes » comme disait
le
Bouddha, — qui était l’un des nôtres, un Indien — si tu vois bien ce
5823
tu vois bien ce que tu vois et portes ton amour à
l’
immuable seul, toutes ces erreurs que tu craignais sont illusoires. Co
5824
s erreurs que tu craignais sont illusoires. Comme
le
moi. — La vue juste distingue et juge, mais ne peut pas nier le trou
5825
ue tu craignais sont illusoires. Comme le moi. —
La
vue juste distingue et juge, mais ne peut pas nier le trouble. Dans c
5826
ue juste distingue et juge, mais ne peut pas nier
le
trouble. Dans ce moi peu ou point différencié que la vie nous offre,
5827
trouble. Dans ce moi peu ou point différencié que
la
vie nous offre, avec son programme génétique insondablement plus anci
5828
notre individu naturel, et qui lui survivra dans
le
cours des siècles, sans surprises et mille fois réincarné — la vue ju
5829
siècles, sans surprises et mille fois réincarné —
la
vue juste imagine — au sens fort — la personne. Il ne faut pas jeter
5830
réincarné — la vue juste imagine — au sens fort —
la
personne. Il ne faut pas jeter la vie avec l’erreur, mais aimer mieux
5831
au sens fort — la personne. Il ne faut pas jeter
la
vie avec l’erreur, mais aimer mieux. Non pas éteindre ou dépasser, ma
5832
t — la personne. Il ne faut pas jeter la vie avec
l’
erreur, mais aimer mieux. Non pas éteindre ou dépasser, mais transmute
5833
igurer ! Aimer mieux, c’est apprendre à discerner
la
raison d’être — donc d’être unique — de l’autre aimé, comme de soi-mê
5834
ent animer un mouvement singulier et fascinant de
l’
être… « Aimer ce que jamais on ne verra deux fois ! » — Aimer, c’est v
5835
on ne verra deux fois ! » — Aimer, c’est vouloir
l’
immortel, non l’éphémère, lequel n’a rien en soi qui mérite l’amour. C
5836
x fois ! » — Aimer, c’est vouloir l’immortel, non
l’
éphémère, lequel n’a rien en soi qui mérite l’amour. Cela n’empêche pa
5837
non l’éphémère, lequel n’a rien en soi qui mérite
l’
amour. Cela n’empêche pas la poésie, les amours poétiques, ni le désir
5838
ien en soi qui mérite l’amour. Cela n’empêche pas
la
poésie, les amours poétiques, ni le désir, ni « cette adoration dont
5839
qui mérite l’amour. Cela n’empêche pas la poésie,
les
amours poétiques, ni le désir, ni « cette adoration dont la femme a b
5840
n’empêche pas la poésie, les amours poétiques, ni
le
désir, ni « cette adoration dont la femme a besoin pour s’accomplir,
5841
poétiques, ni le désir, ni « cette adoration dont
la
femme a besoin pour s’accomplir, et par ce culte que nous lui rendons
5842
e que nous lui rendons, nous arrivons à connaître
le
monde et à l’anéantir en l’absorbant. Mais que nous devenions Shiva,
5843
rendons, nous arrivons à connaître le monde et à
l’
anéantir en l’absorbant. Mais que nous devenions Shiva, la femme est d
5844
arrivons à connaître le monde et à l’anéantir en
l’
absorbant. Mais que nous devenions Shiva, la femme est dissoute et le
5845
ir en l’absorbant. Mais que nous devenions Shiva,
la
femme est dissoute et le monde avec elle. Car le monde ne doit pas êt
5846
ue nous devenions Shiva, la femme est dissoute et
le
monde avec elle. Car le monde ne doit pas être refusé mais dissous.92
5847
la femme est dissoute et le monde avec elle. Car
le
monde ne doit pas être refusé mais dissous.92 — Je veux voir l’autre
5848
le à la fois ce que je vois et ce qui fait que je
la
vois unique : ce vrai moi pressenti par l’amour seul, et qui est elle
5849
que je la vois unique : ce vrai moi pressenti par
l’
amour seul, et qui est elle-même. Tu dis le Soi, ce n’est personne. —
5850
ti par l’amour seul, et qui est elle-même. Tu dis
le
Soi, ce n’est personne. — Il n’y a personne. Personne ne peut aimer,
5851
— Il n’y a personne. Personne ne peut aimer, sauf
l’
égoïste. Il y a l’amour, et nous pouvons seulement devenir amour. Et t
5852
e. Personne ne peut aimer, sauf l’égoïste. Il y a
l’
amour, et nous pouvons seulement devenir amour. Et tu sais bien que tu
5853
e comme personnes bien distinctes. Tu ne vois pas
la
femme que tu crois aimer. — Quand je saurai aimer le Soi en elle, je
5854
femme que tu crois aimer. — Quand je saurai aimer
le
Soi en elle, je ne serai plus moi, elle ne sera plus elle, et les die
5855
je ne serai plus moi, elle ne sera plus elle, et
les
dieux mêmes me serviront. Tout et tous L’Orient voudrait exténu
5856
les dieux mêmes me serviront. Tout et tous
L’
Orient voudrait exténuer, « émacier le réel tangible »93, pour rejoind
5857
et tous L’Orient voudrait exténuer, « émacier
le
réel tangible »93, pour rejoindre l’Un primordial. Quand ses dieux mê
5858
nt fait leur office et fait leur temps, il y aura
le
Soi seul en tout. À la consommation des temps, répond saint Paul, « D
5859
fait leur temps, il y aura le Soi seul en tout. À
la
consommation des temps, répond saint Paul, « Dieu sera tout en tous »
5860
Dieu sera tout en tous ». Depuis six millénaires,
les
sages de l’Asie n’ont pas varié dans leur croyance à la dualité de l’
5861
t en tous ». Depuis six millénaires, les sages de
l’
Asie n’ont pas varié dans leur croyance à la dualité de l’Un et du Mul
5862
es de l’Asie n’ont pas varié dans leur croyance à
la
dualité de l’Un et du Multiple, dualité finalement illusoire puisqu’u
5863
lement illusoire puisqu’un jour — dont ils savent
la
date — la vie, le cosmos et les dieux seront résorbés dans l’Un seul,
5864
usoire puisqu’un jour — dont ils savent la date —
la
vie, le cosmos et les dieux seront résorbés dans l’Un seul, sans lais
5865
uisqu’un jour — dont ils savent la date — la vie,
le
cosmos et les dieux seront résorbés dans l’Un seul, sans laisser aucu
5866
— dont ils savent la date — la vie, le cosmos et
les
dieux seront résorbés dans l’Un seul, sans laisser aucune trace, comm
5867
laisser aucune trace, comme n’ayant pas eu lieu.
Le
triomphe de ces spirituels et de leur eschatologie se confondra ce jo
5868
de leur eschatologie se confondra ce jour-là avec
l’
aboutissement d’un processus entièrement matériel calculé par la scien
5869
t d’un processus entièrement matériel calculé par
la
science occidentale : mais personne ne sera là pour constater que leu
5870
ne sera là pour constater que leurs doctrines sur
la
Lumière finale et sur le Vide n’auront été, dans leur ensemble, qu’un
5871
que leurs doctrines sur la Lumière finale et sur
le
Vide n’auront été, dans leur ensemble, qu’une immense transposition s
5872
s leur ensemble, qu’une immense transposition sur
les
plans poétique et religieux du Second principe de la thermodynamique.
5873
plans poétique et religieux du Second principe de
la
thermodynamique. L’autre moitié de l’humanité croit dur comme fer à l
5874
principe de la thermodynamique. L’autre moitié de
l’
humanité croit dur comme fer à la réalité tangible, insuffisante, plei
5875
’autre moitié de l’humanité croit dur comme fer à
la
réalité tangible, insuffisante, pleine de mystères, des apparences ac
5876
nséquence à scruter et à modifier. Elle parie sur
la
vie et contre l’entropie94. Elle ne sait plus d’où lui vient cette pa
5877
er et à modifier. Elle parie sur la vie et contre
l’
entropie94. Elle ne sait plus d’où lui vient cette passion qui a produ
5878
t plus d’où lui vient cette passion qui a produit
la
technique et les sciences, mais aussi nos structures sociales et poli
5879
vient cette passion qui a produit la technique et
les
sciences, mais aussi nos structures sociales et politiques, les droit
5880
mais aussi nos structures sociales et politiques,
les
droits de l’homme et une extraordinaire avidité. Le sens réel de l’av
5881
droits de l’homme et une extraordinaire avidité.
Le
sens réel de l’aventure échappe à la majorité de ceux qu’elle entraîn
5882
me et une extraordinaire avidité. Le sens réel de
l’
aventure échappe à la majorité de ceux qu’elle entraîne. Et il est vra
5883
ire avidité. Le sens réel de l’aventure échappe à
la
majorité de ceux qu’elle entraîne. Et il est vrai qu’on ne saurait gu
5884
e entraîne. Et il est vrai qu’on ne saurait guère
le
concevoir sans une vision de sa fin anticipée. La petite phrase de sa
5885
le concevoir sans une vision de sa fin anticipée.
La
petite phrase de saint Paul au début de notre ère, « Dieu tout en tou
5886
ors, au duel de l’Un et du Multiple est substitué
le
drame de l’Un et des Uniques : — à l’anéantissement final dans l’unis
5887
t substitué le drame de l’Un et des Uniques : — à
l’
anéantissement final dans l’unisson, l’harmonie d’un chœur infini ; —
5888
et des Uniques : — à l’anéantissement final dans
l’
unisson, l’harmonie d’un chœur infini ; — à la régressive extinction d
5889
ques : — à l’anéantissement final dans l’unisson,
l’
harmonie d’un chœur infini ; — à la régressive extinction des différen
5890
ans l’unisson, l’harmonie d’un chœur infini ; — à
la
régressive extinction des différences éphémères, leur mort et transfi
5891
ces éphémères, leur mort et transfiguration ; — à
l’
individuel aboli par une longue aspiration de l’Atman, le personnel ét
5892
à l’individuel aboli par une longue aspiration de
l’
Atman, le personnel éternisé par l’effort vivifiant de l’Imagination.
5893
iduel aboli par une longue aspiration de l’Atman,
le
personnel éternisé par l’effort vivifiant de l’Imagination. Ce sont l
5894
aspiration de l’Atman, le personnel éternisé par
l’
effort vivifiant de l’Imagination. Ce sont là deux doctrines, deux vue
5895
, le personnel éternisé par l’effort vivifiant de
l’
Imagination. Ce sont là deux doctrines, deux vues des spirituels. Quel
5896
x doctrines, deux vues des spirituels. Quelle est
la
vraie ? Si les sages de l’Orient ont raison, personne ne pourra le vé
5897
eux vues des spirituels. Quelle est la vraie ? Si
les
sages de l’Orient ont raison, personne ne pourra le vérifier à la con
5898
spirituels. Quelle est la vraie ? Si les sages de
l’
Orient ont raison, personne ne pourra le vérifier à la consommation de
5899
sages de l’Orient ont raison, personne ne pourra
le
vérifier à la consommation des temps, pas même le Soi qui dormira dan
5900
ient ont raison, personne ne pourra le vérifier à
la
consommation des temps, pas même le Soi qui dormira dans un sommeil s
5901
le vérifier à la consommation des temps, pas même
le
Soi qui dormira dans un sommeil sans rêves — leur idée du bonheur — e
5902
r — entre deux Créations totalement insensées. Si
les
saints de l’Occident ont raison, ils seront seuls à être là pour le s
5903
Créations totalement insensées. Si les saints de
l’
Occident ont raison, ils seront seuls à être là pour le savoir. La doc
5904
ident ont raison, ils seront seuls à être là pour
le
savoir. La doctrine qui peut devenir vraie sera celle que nous choisi
5905
aison, ils seront seuls à être là pour le savoir.
La
doctrine qui peut devenir vraie sera celle que nous choisirons, en vé
5906
irons, en vérité vécue de conscience et d’action.
Les
résultats actuels et historiques sont ambigus à l’infini, pour nos me
5907
s résultats actuels et historiques sont ambigus à
l’
infini, pour nos mesures. Les peuples sont dans l’ignorance malheureus
5908
riques sont ambigus à l’infini, pour nos mesures.
Les
peuples sont dans l’ignorance malheureuse des origines et des fins de
5909
l’infini, pour nos mesures. Les peuples sont dans
l’
ignorance malheureuse des origines et des fins de ce qu’ils croient, b
5910
parfois pour leurs croyances. Nous voyons ce que
l’
Orient est resté jusqu’ici, et que ces doctrines d’extinction n’ont pa
5911
, et que ces doctrines d’extinction n’ont pas tué
l’
illusion du moi ; au contraire, ce moi sans valeur est en train de fai
5912
main de cerveaux à diriger. Nous pressentons dans
la
terreur et l’espérance ce que l’Occident peut devenir : soit s’englou
5913
ux à diriger. Nous pressentons dans la terreur et
l’
espérance ce que l’Occident peut devenir : soit s’engloutir dans l’Ill
5914
pressentons dans la terreur et l’espérance ce que
l’
Occident peut devenir : soit s’engloutir dans l’Illusion de la matière
5915
e l’Occident peut devenir : soit s’engloutir dans
l’
Illusion de la matière (et l’Orient aurait eu raison), soit accomplir
5916
eut devenir : soit s’engloutir dans l’Illusion de
la
matière (et l’Orient aurait eu raison), soit accomplir sa vocation av
5917
oit s’engloutir dans l’Illusion de la matière (et
l’
Orient aurait eu raison), soit accomplir sa vocation aventureuse, déch
5918
oit accomplir sa vocation aventureuse, déchiffrer
l’
Être dans le singulier et les structures de l’énergie universelle. Car
5919
r sa vocation aventureuse, déchiffrer l’Être dans
le
singulier et les structures de l’énergie universelle. Car c’est au se
5920
entureuse, déchiffrer l’Être dans le singulier et
les
structures de l’énergie universelle. Car c’est au secret des personne
5921
rer l’Être dans le singulier et les structures de
l’
énergie universelle. Car c’est au secret des personnes que nous tenton
5922
u secret des personnes que nous tentons d’écouter
la
Personne, mais c’est dans la matière que nous cherchons le Soi. La cr
5923
us tentons d’écouter la Personne, mais c’est dans
la
matière que nous cherchons le Soi. La création tout entière, « soumis
5924
ne, mais c’est dans la matière que nous cherchons
le
Soi. La création tout entière, « soumise à la vanité » mais travaillé
5925
c’est dans la matière que nous cherchons le Soi.
La
création tout entière, « soumise à la vanité » mais travaillée par «
5926
ons le Soi. La création tout entière, « soumise à
la
vanité » mais travaillée par « un ardent désir, attend la révélation
5927
é » mais travaillée par « un ardent désir, attend
la
révélation des fils de Dieu ». (Romains 8). Et saint Justin, l’œcumén
5928
des fils de Dieu ». (Romains 8). Et saint Justin,
l’
œcuménique du iie siècle, ose parler d’un salut de la Matière. À forc
5929
uménique du iie siècle, ose parler d’un salut de
la
Matière. À force de l’étreindre de ses mains, de la mesurer par la vu
5930
, ose parler d’un salut de la Matière. À force de
l’
étreindre de ses mains, de la mesurer par la vue, de la dissoudre et d
5931
Matière. À force de l’étreindre de ses mains, de
la
mesurer par la vue, de la dissoudre et de la recomposer, de l’épier d
5932
ce de l’étreindre de ses mains, de la mesurer par
la
vue, de la dissoudre et de la recomposer, de l’épier dans sa vie secr
5933
eindre de ses mains, de la mesurer par la vue, de
la
dissoudre et de la recomposer, de l’épier dans sa vie secrète, comme
5934
, de la mesurer par la vue, de la dissoudre et de
la
recomposer, de l’épier dans sa vie secrète, comme l’alchimiste, cette
5935
r la vue, de la dissoudre et de la recomposer, de
l’
épier dans sa vie secrète, comme l’alchimiste, cette matière du cosmos
5936
recomposer, de l’épier dans sa vie secrète, comme
l’
alchimiste, cette matière du cosmos en expansion, de l’atome élusif, d
5937
himiste, cette matière du cosmos en expansion, de
l’
atome élusif, des corps vivants, l’homme d’Occident ne cherche pas seu
5938
expansion, de l’atome élusif, des corps vivants,
l’
homme d’Occident ne cherche pas seulement à dévoiler ses lois secrètes
5939
cette voie, qu’il aille jusqu’au bout ! Pour lui
la
Réalité est dans l’individuel, et l’Être dans les raisons d’être des
5940
ille jusqu’au bout ! Pour lui la Réalité est dans
l’
individuel, et l’Être dans les raisons d’être des uniques. Or ce choix
5941
t ! Pour lui la Réalité est dans l’individuel, et
l’
Être dans les raisons d’être des uniques. Or ce choix est celui de l’a
5942
la Réalité est dans l’individuel, et l’Être dans
les
raisons d’être des uniques. Or ce choix est celui de l’amour, de la c
5943
sons d’être des uniques. Or ce choix est celui de
l’
amour, de la connaissance par l’amour, car tout ce qui existe est uniq
5944
des uniques. Or ce choix est celui de l’amour, de
la
connaissance par l’amour, car tout ce qui existe est unique, à voir d
5945
hoix est celui de l’amour, de la connaissance par
l’
amour, car tout ce qui existe est unique, à voir de près, comme voit l
5946
qui existe est unique, à voir de près, comme voit
l’
amour. 60. Cf. Charles Baudoin, Découverte de la Personne, 1940, p.
5947
’amour. 60. Cf. Charles Baudoin, Découverte de
la
Personne, 1940, p. 22. Cet ouvrage est le meilleur exposé du personna
5948
erte de la Personne, 1940, p. 22. Cet ouvrage est
le
meilleur exposé du personnalisme moderne, par un psychanalyste assez
5949
e, de son propre point de vue, D. T. Suzuki passe
la
mesure dans l’autre sens lorsqu’il écrit avec une évidente satisfacti
5950
orsqu’il écrit avec une évidente satisfaction : «
La
psychologie moderne, en fait, a éliminé l’ego comme entité. » (Mystic
5951
on : « La psychologie moderne, en fait, a éliminé
l’
ego comme entité. » (Mysticism : Christian and Bouddhist, p. 39.) La p
5952
. » (Mysticism : Christian and Bouddhist, p. 39.)
La
psychologie dont il parle est occidentale. Cherchant à guérir les « m
5953
dont il parle est occidentale. Cherchant à guérir
les
« maladies du moi », elle le confirme comme entité et le renforce, lo
5954
Cherchant à guérir les « maladies du moi », elle
le
confirme comme entité et le renforce, loin de l’éliminer. 61. Henry
5955
ladies du moi », elle le confirme comme entité et
le
renforce, loin de l’éliminer. 61. Henry Corbin, L’Imagination créatr
5956
le confirme comme entité et le renforce, loin de
l’
éliminer. 61. Henry Corbin, L’Imagination créatrice dans le soufisme
5957
renforce, loin de l’éliminer. 61. Henry Corbin,
L’
Imagination créatrice dans le soufisme d’Ibn Arabi, 1958, p. 28 et 50.
5958
. 61. Henry Corbin, L’Imagination créatrice dans
le
soufisme d’Ibn Arabi, 1958, p. 28 et 50. 62. Ibid., p. 131. 63. He
5959
e et corps de résurrection, 1960, p. 31. 64. Sur
les
solutions proposées à ce problème par l’Inde, le taoïsme, et le boudd
5960
64. Sur les solutions proposées à ce problème par
l’
Inde, le taoïsme, et le bouddhisme tibétain, voir Alexandra David-Neel
5961
les solutions proposées à ce problème par l’Inde,
le
taoïsme, et le bouddhisme tibétain, voir Alexandra David-Neel, Immort
5962
roposées à ce problème par l’Inde, le taoïsme, et
le
bouddhisme tibétain, voir Alexandra David-Neel, Immortalité et Réinca
5963
ion, 1961. 65. Parole attribuée au Bouddha, dans
la
tradition des Théravadins (hynayânistes). 66. Cf. Alexandra David-Ne
5964
ns (hynayânistes). 66. Cf. Alexandra David-Neel,
Le
Bouddhisme du Bouddha, 1960, p. 51-59. 67. D. T. Suzuki, Mysticism
5965
ticism Christian and Buddhist, 1956, p. 47. 68.
Le
Dhamma pada, trad. angl. Radakrishnan. 69. Alexandra David-Neel don
5966
xandra David-Neel donne une Parabole tibétaine de
la
« personne » dans l’op. cit. « Une “personne” ressemble à une assembl
5967
ne une Parabole tibétaine de la « personne » dans
l’
op. cit. « Une “personne” ressemble à une assemblée composée d’une qua
5968
une assemblée composée d’une quantité de membres.
La
discussion ne cesse jamais. Parfois, un de ses membres se lève, prono
5969
un discours, préconise une action ; ses collègues
l’
approuvent et il est décidé qu’il sera fait suivant ce qu’il a proposé
5970
il a proposé. D’autres fois, plusieurs membres de
l’
assemblée se lèvent ensemble, proposent des choses différentes et chac
5971
llègues. Il advient aussi que certains membres de
l’
assemblée la quittent d’eux-mêmes ; d’autres sont graduellement poussé
5972
advient aussi que certains membres de l’assemblée
la
quittent d’eux-mêmes ; d’autres sont graduellement poussés au-dehors
5973
t ce temps, de nouveaux venus s’introduisent dans
l’
assemblée, soit en s’y glissant doucement, soit en enfonçant les porte
5974
soit en s’y glissant doucement, soit en enfonçant
les
portes. On remarque encore que certains membres de l’assemblée dépéri
5975
ortes. On remarque encore que certains membres de
l’
assemblée dépérissent lentement ; leur voix devient faible, on finit p
5976
; leur voix devient faible, on finit par ne plus
l’
entendre. Au contraire, d’autres qui étaient débiles et timides se for
5977
dissent, et finissent par s’instituer dictateurs.
Les
membres de cette assemblée, ce sont les éléments physiques et mentaux
5978
ctateurs. Les membres de cette assemblée, ce sont
les
éléments physiques et mentaux qui constituent la “personne” ; ce sont
5979
les éléments physiques et mentaux qui constituent
la
“personne” ; ce sont nos instincts, nos tendances, nos idées, nos cro
5980
rs, etc. Chacun de ceux-ci se trouve être, de par
les
causes qui l’ont engendré, le descendant et l’héritier de multiples l
5981
de ceux-ci se trouve être, de par les causes qui
l’
ont engendré, le descendant et l’héritier de multiples lignes de cause
5982
rouve être, de par les causes qui l’ont engendré,
le
descendant et l’héritier de multiples lignes de causes, de multiples
5983
r les causes qui l’ont engendré, le descendant et
l’
héritier de multiples lignes de causes, de multiples séries de phénomè
5984
ultiples séries de phénomènes remontant loin dans
le
passé et dont les traces se perdent dans les profondeurs de l’éternit
5985
e phénomènes remontant loin dans le passé et dont
les
traces se perdent dans les profondeurs de l’éternité. » Nous connaiss
5986
dans le passé et dont les traces se perdent dans
les
profondeurs de l’éternité. » Nous connaissons assez bien cela en Occi
5987
ont les traces se perdent dans les profondeurs de
l’
éternité. » Nous connaissons assez bien cela en Occident. Bismarck écr
5988
sse comme dans une république. » À regarder ainsi
le
moi, on le perd assurément et par méthode. Car il est forme dominante
5989
ans une république. » À regarder ainsi le moi, on
le
perd assurément et par méthode. Car il est forme dominante et gouvern
5990
forme dominante et gouvernante. Si on tentait de
l’
observer à l’aide d’un microscope, l’éléphant lui aussi ne serait plus
5991
nte et gouvernante. Si on tentait de l’observer à
l’
aide d’un microscope, l’éléphant lui aussi ne serait plus qu’une vaste
5992
n tentait de l’observer à l’aide d’un microscope,
l’
éléphant lui aussi ne serait plus qu’une vaste illusion. 70. Les Qu
5993
ussi ne serait plus qu’une vaste illusion. 70.
Les
Questions de Milinda (Milindahunha), ier siècle A.D. Milinda est le r
5994
linda (Milindahunha), ier siècle A.D. Milinda est
le
roi indo-grec Ménandre, qui vivait au iie siècle avant J.-C. Nagasen
5995
ses sont à rapprocher de cette vue d’un soufi : «
Le
paradis du gnostique fidèle, c’est son corps même, et l’enfer de l’ho
5996
dis du gnostique fidèle, c’est son corps même, et
l’
enfer de l’homme sans foi ni connaissance c’est également son corps mê
5997
tique fidèle, c’est son corps même, et l’enfer de
l’
homme sans foi ni connaissance c’est également son corps même. » (Cit.
5998
e, p. 161.) 74. Aurore, 517. 75. Henry Corbin,
L’
Imagination créatrice dans le soufisme d’Ibn Arabi, p. 88. 76. Ibn Ar
5999
. 75. Henry Corbin, L’Imagination créatrice dans
le
soufisme d’Ibn Arabi, p. 88. 76. Ibn Arabi, in Henry Corbin, op. cit
6000
p. 117. 79. Cf. supra. 80. Emmanuel Swedenborg,
La
Nouvelle Jérusalem et sa doctrine céleste, § 86 à 89. 81. C’est à pe
6001
», et qui n’est tel qu’aux yeux de celui qui nie
l’
âme ; mais alors, d’où viendrait cet amour, à qui irait-il ? La passio
6002
alors, d’où viendrait cet amour, à qui irait-il ?
La
passion de Tristan est la preuve de l’âme, s’il en fut jamais. 82. K
6003
amour, à qui irait-il ? La passion de Tristan est
la
preuve de l’âme, s’il en fut jamais. 82. Katha upanishad. 83. Alexa
6004
irait-il ? La passion de Tristan est la preuve de
l’
âme, s’il en fut jamais. 82. Katha upanishad. 83. Alexandra David-Ne
6005
82. Katha upanishad. 83. Alexandra David-Neel,
Le
Bouddhisme du Bouddha, p. 45. 84. Chang Chen-Chi, The Practice of z
6006
hi, The Practice of zen. 85. Tout cela vaut pour
l’
islam, bien entendu, au moins autant que pour le christianisme et le j
6007
r l’islam, bien entendu, au moins autant que pour
le
christianisme et le judaïsme. « Dans l’Arabe, tout est colère », écri
6008
ndu, au moins autant que pour le christianisme et
le
judaïsme. « Dans l’Arabe, tout est colère », écrit Henri Michaux. « S
6009
que pour le christianisme et le judaïsme. « Dans
l’
Arabe, tout est colère », écrit Henri Michaux. « Son bonjour : “Que le
6010
lère », écrit Henri Michaux. « Son bonjour : “Que
le
salut soit sur quiconque suit la vraie religion.” (La vraie ! Aux aut
6011
n bonjour : “Que le salut soit sur quiconque suit
la
vraie religion.” (La vraie ! Aux autres, pas de bonjour.) » 86. Lin
6012
alut soit sur quiconque suit la vraie religion.” (
La
vraie ! Aux autres, pas de bonjour.) » 86. Lingopasanârahasya. 87.
6013
» 86. Lingopasanârahasya. 87. Alain Daniélou,
Le
Polythéisme hindou, p. 474. 88. Gopala-uttara-tapîni upanishad. 89
6014
. Gopala-uttara-tapîni upanishad. 89. Raja Rao,
Le
Serpent et la Corde, 1959, p. 28. Je ne saurais trop inciter mes lect
6015
ra-tapîni upanishad. 89. Raja Rao, Le Serpent et
la
Corde, 1959, p. 28. Je ne saurais trop inciter mes lecteurs à lire ce
6016
lecteurs à lire ce beau roman autobiographique :
la
fraîcheur poétique ou mieux, l’euphorie spirituelle qui baigne l’œuvr
6017
utobiographique : la fraîcheur poétique ou mieux,
l’
euphorie spirituelle qui baigne l’œuvre, situe dans la réalité ce que
6018
tique ou mieux, l’euphorie spirituelle qui baigne
l’
œuvre, situe dans la réalité ce que je n’entends ici que formuler. Je
6019
phorie spirituelle qui baigne l’œuvre, situe dans
la
réalité ce que je n’entends ici que formuler. Je ne connais rien dans
6020
entends ici que formuler. Je ne connais rien dans
la
littérature qui confronte avec plus de tendresse et de rigueur l’Est
6021
ui confronte avec plus de tendresse et de rigueur
l’
Est et l’Ouest. Lire aussi, mais c’est beaucoup moins tendre pour les
6022
nte avec plus de tendresse et de rigueur l’Est et
l’
Ouest. Lire aussi, mais c’est beaucoup moins tendre pour les deux, c’e
6023
Lire aussi, mais c’est beaucoup moins tendre pour
les
deux, c’est même féroce, le chef-d’œuvre d’Henri Michaux, Un Barbare
6024
up moins tendre pour les deux, c’est même féroce,
le
chef-d’œuvre d’Henri Michaux, Un Barbare en Asie. Lire enfin de Rudol
6025
Un Barbare en Asie. Lire enfin de Rudolf Kassner,
Le
Livre de ma Vie. Puis aller en Inde et sentir l’innombrable, le « cor
6026
Le Livre de ma Vie. Puis aller en Inde et sentir
l’
innombrable, le « corps magique ». 90. D. T. Suzuki, Mysticism : Chr
6027
Vie. Puis aller en Inde et sentir l’innombrable,
le
« corps magique ». 90. D. T. Suzuki, Mysticism : Christian and Budd
6028
sm : Christian and Buddhist, p. 73. Je crains que
l’
auteur ne vienne ici à la rencontre des catégories de L’Amour et l’Oc
6029
st, p. 73. Je crains que l’auteur ne vienne ici à
la
rencontre des catégories de L’Amour et l’Occident un peu plus qu’il
6030
r ne vienne ici à la rencontre des catégories de
L’
Amour et l’Occident un peu plus qu’il ne serait souhaitable, de son p
6031
ici à la rencontre des catégories de L’Amour et
l’
Occident un peu plus qu’il ne serait souhaitable, de son propre point
6032
de vue. 91. On pourra retrouver ce passage dans
la
Brihadaranyaka upanishad, au cours des dialogues entre l’illustre sag
6033
daranyaka upanishad, au cours des dialogues entre
l’
illustre sage Yajnavalkya et son épouse Maitreyi, qui l’interroge sur
6034
stre sage Yajnavalkya et son épouse Maitreyi, qui
l’
interroge sur l’immortalité. 92. Phrases empruntées comme plusieurs a
6035
alkya et son épouse Maitreyi, qui l’interroge sur
l’
immortalité. 92. Phrases empruntées comme plusieurs autres ici au rom
6036
comme plusieurs autres ici au roman de Raja Rao,
Le
Serpent et la Corde. 93. Pierre Teilhard de Chardin, La Route de l’O
6037
rs autres ici au roman de Raja Rao, Le Serpent et
la
Corde. 93. Pierre Teilhard de Chardin, La Route de l’Ouest (inédit).
6038
ent et la Corde. 93. Pierre Teilhard de Chardin,
La
Route de l’Ouest (inédit). 94. Il serait peut-être fécond d’interpré
6039
rde. 93. Pierre Teilhard de Chardin, La Route de
l’
Ouest (inédit). 94. Il serait peut-être fécond d’interpréter le princ
6040
t). 94. Il serait peut-être fécond d’interpréter
le
principe de Carnot-Clausius (accroissement général de l’entropie, mor
6041
cipe de Carnot-Clausius (accroissement général de
l’
entropie, mort lumineuse) en termes de métaphysique orientale, et le p
6042
umineuse) en termes de métaphysique orientale, et
le
principe d’exclusion de Pauli (individuation des électrons, condition
6043
Pauli (individuation des électrons, conditionnant
la
« vie ») en termes de métaphysique occidentale. Mais Stéphane Lupasco
6044
ura sans doute pensé. av. Rougemont Denis de, «
La
personne, l’ange et l’absolu, ou le dialogue Occident-Orient », La No
6045
e pensé. av. Rougemont Denis de, « La personne,
l’
ange et l’absolu, ou le dialogue Occident-Orient », La Nouvelle Revue
6046
av. Rougemont Denis de, « La personne, l’ange et
l’
absolu, ou le dialogue Occident-Orient », La Nouvelle Revue française,
6047
t Denis de, « La personne, l’ange et l’absolu, ou
le
dialogue Occident-Orient », La Nouvelle Revue française, Paris, avril
6048
ge et l’absolu, ou le dialogue Occident-Orient »,
La
Nouvelle Revue française, Paris, avril 1961, p. 586-617.