1 1931, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Les Éléments de la grandeur humaine, par Rudolf Kassner (octobre 1931)
1 Les Éléments de la grandeur humaine, par Rudolf Kassner (octobre 1931)a
2 Les Éléments de la grandeur humaine, par Rudolf Kassner (octobre 1931)a Si l’existenc
3 humaine, par Rudolf Kassner (octobre 1931)a Si l’ existence — le degré d’être — se mesure au pouvoir d’incarner sa vérit
4 udolf Kassner (octobre 1931)a Si l’existence — le degré d’être — se mesure au pouvoir d’incarner sa vérité, le mal du s
5 être — se mesure au pouvoir d’incarner sa vérité, le mal du siècle c’est l’impuissance. La proie de désirs divergents qui
6 voir d’incarner sa vérité, le mal du siècle c’est l’ impuissance. La proie de désirs divergents qui prennent rarement assez
7 sa vérité, le mal du siècle c’est l’impuissance. La proie de désirs divergents qui prennent rarement assez de violence po
8 olence pour nous déchirer jusqu’au salut, et dont la composante réelle tend vers zéro, c’est d’une philosophie de l’existe
9 réelle tend vers zéro, c’est d’une philosophie de l’ existence personnelle qu’avant tout nous avons besoin. Kierkegaard nou
10 ut nous avons besoin. Kierkegaard nous en propose le type le plus efficace. Et c’est ainsi par une nécessité organique — n
11 avons besoin. Kierkegaard nous en propose le type le plus efficace. Et c’est ainsi par une nécessité organique — nous somm
12 nécessiteux — que son œuvre entre en action parmi les forces spirituelles qui orientent l’Europe d’aujourd’hui. La France n
13 ction parmi les forces spirituelles qui orientent l’ Europe d’aujourd’hui. La France ne l’ignorera plus longtemps. Quant à
14 pirituelles qui orientent l’Europe d’aujourd’hui. La France ne l’ignorera plus longtemps. Quant à l’Allemagne, elle s’est
15 ui orientent l’Europe d’aujourd’hui. La France ne l’ ignorera plus longtemps. Quant à l’Allemagne, elle s’est depuis plusie
16 . La France ne l’ignorera plus longtemps. Quant à l’ Allemagne, elle s’est depuis plusieurs années déjà pénétrée de cette p
17 nétrée de cette philosophie, ainsi qu’en témoigne l’ accueil fait à la pensée d’un Karl Barth, génial disciple du Danois, e
18 hilosophie, ainsi qu’en témoigne l’accueil fait à la pensée d’un Karl Barth, génial disciple du Danois, et dont il est gra
19 qu’on nous traduise quelques essais théologiques. L’ œuvre de Rudolf Kassner, de moindre envergure — à cause de sa rareté e
20 s non de moindre profondeur, manifeste elle aussi l’ emprise de l’« Existenzphilosophie » et son extrême conséquence. Dans
21 dre profondeur, manifeste elle aussi l’emprise de l’ « Existenzphilosophie » et son extrême conséquence. Dans la mesure mêm
22 enzphilosophie » et son extrême conséquence. Dans la mesure même où Kassner se montre disciple de Kierkegaard, sa pensée p
23 sur des formules explicites. Même dans son essai le plus discursif, relativement, celui qui donne son titre au recueil, l
24 lativement, celui qui donne son titre au recueil, les mots-clés : mesure, forme, grandeur, ne sont guère définis que par le
25 des thèmes essentiels du préromantisme allemand, l’ opposition de l’antique et du moderne, non du point de vue littéraire
26 ntiels du préromantisme allemand, l’opposition de l’ antique et du moderne, non du point de vue littéraire comme on le fit
27 moderne, non du point de vue littéraire comme on le fit en France, mais du point de vue des valeurs vitales (problème que
28 e notre xviie siècle se devait de ne pas poser). L’ homme antique peut atteindre la grandeur parce qu’il possède la mesure
29 de ne pas poser). L’homme antique peut atteindre la grandeur parce qu’il possède la mesure au sein d’un tout fini : famil
30 ue peut atteindre la grandeur parce qu’il possède la mesure au sein d’un tout fini : famille, dieux, nature. Il ne se rech
31 ature. Il ne se recherche pas soi-même, il vise à la plénitude élémentaire, définie par la loi, par son astre. L’homme chr
32 , il vise à la plénitude élémentaire, définie par la loi, par son astre. L’homme chrétien au contraire, l’homme qui doit ê
33 e élémentaire, définie par la loi, par son astre. L’ homme chrétien au contraire, l’homme qui doit être surpassé, vit dans
34 oi, par son astre. L’homme chrétien au contraire, l’ homme qui doit être surpassé, vit dans la démesure, et lorsqu’il « veu
35 ntraire, l’homme qui doit être surpassé, vit dans la démesure, et lorsqu’il « veut prendre mesure de lui-même, il se sent
36 let et coupable. Il est donc possible de dire que le péché est la mesure du démesuré, et que pour le chrétien il n’est pas
37 le. Il est donc possible de dire que le péché est la mesure du démesuré, et que pour le chrétien il n’est pas d’autre gran
38 e le péché est la mesure du démesuré, et que pour le chrétien il n’est pas d’autre grandeur ». Ainsi le chrétien existe en
39 e chrétien il n’est pas d’autre grandeur ». Ainsi le chrétien existe en tant que le péché crée une tension entre lui et Di
40 grandeur ». Ainsi le chrétien existe en tant que le péché crée une tension entre lui et Dieu. Mais le péché ne devient ré
41 le péché crée une tension entre lui et Dieu. Mais le péché ne devient réalité que pour le converti ; c’est donc la convers
42 t Dieu. Mais le péché ne devient réalité que pour le converti ; c’est donc la conversion qui figure l’acte par excellence
43 devient réalité que pour le converti ; c’est donc la conversion qui figure l’acte par excellence du chrétien, hors duquel
44 le converti ; c’est donc la conversion qui figure l’ acte par excellence du chrétien, hors duquel il n’est pour lui ni mesu
45 orme, mais seulement chimères et incohérence. Que l’ on considère en effet l’homme moderne, l’homme sans mesure naturelle :
46 mères et incohérence. Que l’on considère en effet l’ homme moderne, l’homme sans mesure naturelle : s’il ne retrouve pas de
47 nce. Que l’on considère en effet l’homme moderne, l’ homme sans mesure naturelle : s’il ne retrouve pas de loi interne et d
48 ne retrouve pas de loi interne et de tension par le péché, il n’est plus qu’un être sans destinée, un « indiscret ». « Sa
49 ndiscret est distrait, et sa distraction vient de l’ intérieur. Il ne peut jamais sortir de son moi sans trahison et chaque
50 lque côté à un outrage, voire à une impudeur. » À l’ opposition du Beau objectif et de l’Intéressant sentimental qui pour S
51 impudeur. » À l’opposition du Beau objectif et de l’ Intéressant sentimental qui pour Schiller et surtout pour Schlegel sym
52 ler et surtout pour Schlegel symbolisait celle de l’ antique et du moderne, Kassner répondrait aujourd’hui par l’opposition
53 et du moderne, Kassner répondrait aujourd’hui par l’ opposition de la grandeur mesurée et de l’indiscrétion journalistique.
54 assner répondrait aujourd’hui par l’opposition de la grandeur mesurée et de l’indiscrétion journalistique. La férocité réf
55 hui par l’opposition de la grandeur mesurée et de l’ indiscrétion journalistique. La férocité réfléchie qui préside à son a
56 deur mesurée et de l’indiscrétion journalistique. La férocité réfléchie qui préside à son analyse de l’indiscret nous vaut
57 a férocité réfléchie qui préside à son analyse de l’ indiscret nous vaut une description inégalable du mal du siècle. Ici l
58 une description inégalable du mal du siècle. Ici le mépris ne porte aucune atteinte à la perspicacité parce qu’il est vra
59 siècle. Ici le mépris ne porte aucune atteinte à la perspicacité parce qu’il est vraiment souverain. Peut-être faut-il re
60 eut-être faut-il reconnaître à ce seul philosophe le privilège d’avoir parlé sans complicité de ce qui nous détruit : Rudo
61 ité de ce qui nous détruit : Rudolf Kassner donne la sensation à peu près unique en ce temps d’une pensée autoritaire. Ent
62 rlementarisme intérieur qui nous mène lentement à l’ impuissance. (Si Kassner exprime un tourment, c’est en tant que la réa
63 Si Kassner exprime un tourment, c’est en tant que la réalité humaine, non sa pensée privée, est tourmentée.) Penser n’est
64 forme. Quelques pages étranges et puissantes sur les chimères de Notre-Dame illustrent ce réalisme de la forme, hors de qu
65 chimères de Notre-Dame illustrent ce réalisme de la forme, hors de quoi il n’est qu’indiscrétion, et qui livre la clef de
66 rs de quoi il n’est qu’indiscrétion, et qui livre la clef de la pensée de Kassner, comme aussi de son apparente obscurité1
67 il n’est qu’indiscrétion, et qui livre la clef de la pensée de Kassner, comme aussi de son apparente obscurité1. Il faut s
68 intellectuellement sans « réaliser ». Il faut que les pensées créées ne soient concevables qu’en elles-mêmes et comme à l’é
69 e soient concevables qu’en elles-mêmes et comme à l’ état sauvage, non par une explication qui les réduise et qui les domes
70 mme à l’état sauvage, non par une explication qui les réduise et qui les domestique. Une pensée neuve ne saurait être compr
71 e, non par une explication qui les réduise et qui les domestique. Une pensée neuve ne saurait être comprise à moins d’être
72 dans sa forme — ce dont certaine clarté dispense le lecteur. On pourrait dire aussi que l’indiscret est celui qui se préo
73 é dispense le lecteur. On pourrait dire aussi que l’ indiscret est celui qui se préoccupe de défendre plutôt que d’illustre
74 kegaard, le premier homme qui s’avisa de défendre la religion mériterait-il d’être appelé Judas numéro deux. Car il ne s’a
75 ne s’agit pas de professer une chose mais d’être la chose. Le rare, c’est que chez Kassner comme chez Kierkegaard, cette
76 pas de professer une chose mais d’être la chose. Le rare, c’est que chez Kassner comme chez Kierkegaard, cette présence s
77 mode d’une ironie qui chez d’autres serait plutôt le fait du détachement. Une ironie à l’intérieur des choses, qui les fou
78 erait plutôt le fait du détachement. Une ironie à l’ intérieur des choses, qui les fouille et les purifie, une ironie née d
79 chement. Une ironie à l’intérieur des choses, qui les fouille et les purifie, une ironie née de la rigueur et non du scepti
80 onie à l’intérieur des choses, qui les fouille et les purifie, une ironie née de la rigueur et non du scepticisme2. Le dial
81 qui les fouille et les purifie, une ironie née de la rigueur et non du scepticisme2. Le dialogue de Laurence Sterne et du
82 ironie née de la rigueur et non du scepticisme2. Le dialogue de Laurence Sterne et du recteur Krooks sur Judas et la Paro
83 Laurence Sterne et du recteur Krooks sur Judas et la Parole est à cet égard d’une saveur particulièrement riche et complex
84 e saveur particulièrement riche et complexe. (« … les bavards ne tirent pas d’eux-mêmes toutes les paroles qu’ils profèrent
85 (« … les bavards ne tirent pas d’eux-mêmes toutes les paroles qu’ils profèrent ; ils les reçoivent des prophètes ; s’il n’y
86 x-mêmes toutes les paroles qu’ils profèrent ; ils les reçoivent des prophètes ; s’il n’y avait pas de prophètes, les bavard
87 des prophètes ; s’il n’y avait pas de prophètes, les bavards seraient peut-être des créatures très silencieuses, comme les
88 peut-être des créatures très silencieuses, comme les belettes ou les étoiles filantes. ») Mais plus encore que leur concep
89 réatures très silencieuses, comme les belettes ou les étoiles filantes. ») Mais plus encore que leur conception de l’« exis
90 antes. ») Mais plus encore que leur conception de l’ « existence » et que leur ironie, ce qui rapproche Kassner et son maît
91 t son maître c’est leur vision tragique du péché. Le Lépreux, journal apocryphe de l’empereur Alexandre Ier de Russie, n’e
92 agique du péché. Le Lépreux, journal apocryphe de l’ empereur Alexandre Ier de Russie, n’est qu’une suite de méditations su
93 de Russie, n’est qu’une suite de méditations sur le thème du tout-ou-rien moral qui caractérise Kierkegaard. L’on y trouv
94 u tout-ou-rien moral qui caractérise Kierkegaard. L’ on y trouvera moins de paradoxe et plus de délectation peut-être, une
95 lus de délectation peut-être, une acuité lente de la réflexion, un alliage précieux de hauteur, de rigueur et de pitié hum
96 enue presque solennelle mais qui sans cesse frôle l’ humour, et parfois tourne en sournoise malice. On ne peut dire précisé
97 dversaires — Freud en particulier, dans Christ et l’ âme du monde — mais bien plutôt qu’à force d’approfondir leur domaine
98 qu’à force d’approfondir leur domaine propre, il les mine et les ruine intérieurement ; ou encore les dissout dans une réa
99 d’approfondir leur domaine propre, il les mine et les ruine intérieurement ; ou encore les dissout dans une réalité plus ab
100 les mine et les ruine intérieurement ; ou encore les dissout dans une réalité plus absolue. Telle est la forme des dialogu
101 dissout dans une réalité plus absolue. Telle est la forme des dialogues où culmine son art. De ces dialogues, où chaque i
102 , où chaque interlocuteur, tour à tour, atteint à l’ expression la plus virulente de sa vérité — si bien que la conclusion
103 nterlocuteur, tour à tour, atteint à l’expression la plus virulente de sa vérité — si bien que la conclusion ne peut être
104 sion la plus virulente de sa vérité — si bien que la conclusion ne peut être qu’implicite et fonction d’une hiérarchie de
105 e et fonction d’une hiérarchie de valeurs, non de la seule exactitude des pensées —, nous connaissons le modèle immortel,
106 seule exactitude des pensées —, nous connaissons le modèle immortel, le Livre de Job. Il serait curieux d’en suivre la fi
107 s pensées —, nous connaissons le modèle immortel, le Livre de Job. Il serait curieux d’en suivre la filiation, jusqu’au So
108 l, le Livre de Job. Il serait curieux d’en suivre la filiation, jusqu’au Soulier de Satin de Claudel : ce serait une sorte
109 me poétique. 1. Obscurité : Kassner ne pose pas les problèmes dans nos catégories psychologiques. Il prend tout par des b
110 Et puis enfin, voilà une philosophie qui postule la vision, c’est-à-dire l’appréhension poétique du monde. Rien n’est plu
111 e philosophie qui postule la vision, c’est-à-dire l’ appréhension poétique du monde. Rien n’est plus étranger au nominalism
112 en n’est plus étranger au nominalisme qui envahit la critique sous l’influence du journal. 2. Ici encore, on ne peut oppo
113 anger au nominalisme qui envahit la critique sous l’ influence du journal. 2. Ici encore, on ne peut opposer ce concept d’
114 er ce concept d’ironie qu’à celui que formulèrent les romantiques allemands. Rien de commun avec un Renan, un France. a.
115 gemont Denis de, « [Compte rendu] Rudolf Kassner, Les Éléments de la grandeur humaine  », La Nouvelle Revue française, Pari
116 « [Compte rendu] Rudolf Kassner, Les Éléments de la grandeur humaine  », La Nouvelle Revue française, Paris, octobre 1931
117 Kassner, Les Éléments de la grandeur humaine  », La Nouvelle Revue française, Paris, octobre 1931, p. 640‑643.
2 1931, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Sarah, par Jean Cassou (novembre 1931)
118 (novembre 1931)b Quelque chose d’espagnol dans la démarche ; un tour qui ferait penser aux conteurs de la fin du xviiie
119 arche ; un tour qui ferait penser aux conteurs de la fin du xviiie  ; des sujets dans le goût allemand, tels sont les élém
120 x conteurs de la fin du xviiie  ; des sujets dans le goût allemand, tels sont les éléments qui composent non sans paradoxe
121 ie  ; des sujets dans le goût allemand, tels sont les éléments qui composent non sans paradoxe ce recueil de « motifs » rom
122  motifs » romantiques et de frissons anarchiques. Le thème commun, c’est sans doute l’atrocité de la « vie normale », ou s
123 ns anarchiques. Le thème commun, c’est sans doute l’ atrocité de la « vie normale », ou si l’on préfère, l’amertume du cœur
124 . Le thème commun, c’est sans doute l’atrocité de la « vie normale », ou si l’on préfère, l’amertume du cœur humain découv
125 ans doute l’atrocité de la « vie normale », ou si l’ on préfère, l’amertume du cœur humain découvrant son impuissance à sus
126 rocité de la « vie normale », ou si l’on préfère, l’ amertume du cœur humain découvrant son impuissance à susciter dans le
127 humain découvrant son impuissance à susciter dans le monde l’amour dont il aurait besoin, qu’il imagine et dont il meurt.
128 couvrant son impuissance à susciter dans le monde l’ amour dont il aurait besoin, qu’il imagine et dont il meurt. Car la vi
129 urait besoin, qu’il imagine et dont il meurt. Car la vie est une espèce de marâtre et n’a que faire de nos tendresses. Les
130 ce de marâtre et n’a que faire de nos tendresses. Les sujets de Jean Cassou sont très particuliers — jusqu’à l’arbitraire p
131 s de Jean Cassou sont très particuliers — jusqu’à l’ arbitraire parfois —, ce dont on hésite à lui faire reproche, car ce q
132 qui lui importe, comme à nous, c’est précisément le sentiment d’absurdité qui se dégage de pareils faits lorsque l’esprit
133 ’absurdité qui se dégage de pareils faits lorsque l’ esprit s’y attache et que l’amour ou la pitié essaient sur eux leurs f
134 pareils faits lorsque l’esprit s’y attache et que l’ amour ou la pitié essaient sur eux leurs forces. Le monde est habité p
135 ts lorsque l’esprit s’y attache et que l’amour ou la pitié essaient sur eux leurs forces. Le monde est habité par des être
136 ’amour ou la pitié essaient sur eux leurs forces. Le monde est habité par des êtres dont le « bonheur » consiste à ne pas
137 rs forces. Le monde est habité par des êtres dont le « bonheur » consiste à ne pas se rendre compte de ce qu’ils vivent. D
138 uns des plus significatifs de ces récits (Dieu et le sommeil, Les Fins dernières) l’on assiste à un réveil, explosion de r
139 significatifs de ces récits (Dieu et le sommeil, Les Fins dernières) l’on assiste à un réveil, explosion de révolte ou de
140 s récits (Dieu et le sommeil, Les Fins dernières) l’ on assiste à un réveil, explosion de révolte ou de joie, tellement inc
141 e révolte ou de joie, tellement incompatible avec les « conditions » de la vie que mort s’en suit. Sarah est donc un recue
142 tellement incompatible avec les « conditions » de la vie que mort s’en suit. Sarah est donc un recueil de contes romantiq
143 de contes romantiques, cas tout à fait rare dans la littérature française, et qui comporte en soi quelque chose de déconc
144 l semble bien que Jean Cassou trouve ici sa forme la plus personnelle et persuasive. Son espagnolisme et son germanisme ré
145 ieurs endroits, c’est un certain tour désinvolte, le coup de pouce voltairien, l’élégance trop rapide. Il n’est pas bon qu
146 ain tour désinvolte, le coup de pouce voltairien, l’ élégance trop rapide. Il n’est pas bon qu’un conteur laisse voir la mo
147 apide. Il n’est pas bon qu’un conteur laisse voir la moindre ironie vis-à-vis de ses personnages ; car il risque de les pr
148 e vis-à-vis de ses personnages ; car il risque de les priver par là de cette autorité mystique, absolue et naïve où gît leu
149 ù gît leur profonde raison d’être. C’est pourquoi les meilleurs contes du volume sont ceux dont la lenteur nous retient. Ai
150 uoi les meilleurs contes du volume sont ceux dont la lenteur nous retient. Ainsi Sarah, Monsieur Hoog, qui atteignent à un
151 alité d’émotion vraiment pure et insistante. Mais le mérite original et important d’un tel livre me paraît résider avant t
152 d’un tel livre me paraît résider avant tout dans l’ ordre des faits qu’il met en jeu, dans la problématique qu’il parvient
153 out dans l’ordre des faits qu’il met en jeu, dans la problématique qu’il parvient à susciter au cours de ces brèves imagin
154 ant plus touchante qu’elle figure, je pense, pour l’ auteur, une sorte de consolation un peu forcée que le cœur s’accorde e
155 uteur, une sorte de consolation un peu forcée que le cœur s’accorde en dépit de tout, tandis que l’esprit demeure évasif e
156 ue le cœur s’accorde en dépit de tout, tandis que l’ esprit demeure évasif et lucide devant les conditions que le monde lui
157 ndis que l’esprit demeure évasif et lucide devant les conditions que le monde lui propose. b. Rougemont Denis de, « [Com
158 emeure évasif et lucide devant les conditions que le monde lui propose. b. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Jean Ca
159 Denis de, « [Compte rendu] Jean Cassou, Sarah  », La Nouvelle Revue française, Paris, novembre 1931, p. 804-805.
3 1932, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Les Signes parmi nous, par C. F. Ramuz (janvier 1932)
160 Les Signes parmi nous, par C. F. Ramuz (janvier 1932)c Il est remarqua
161 anvier 1932)c Il est remarquable que ceux dont la fonction serait d’exprimer notre civilisation, en un temps où elle se
162 i minimes. Je lis un article récent de Ramuz (sur le Travail), qui débute ainsi « Pourquoi est-ce qu’on travaille ? parce
163 é ? » Je vois que cet article en vient à formuler le dilemme sociologie-métaphysique ou si l’on veut marxisme-christianism
164 formuler le dilemme sociologie-métaphysique ou si l’ on veut marxisme-christianisme, qui se trouve être le dilemme urgent d
165 n veut marxisme-christianisme, qui se trouve être le dilemme urgent de l’heure. Et je m’inquiète ; non pas de ces question
166 tianisme, qui se trouve être le dilemme urgent de l’ heure. Et je m’inquiète ; non pas de ces questions ni de la prise de p
167 Et je m’inquiète ; non pas de ces questions ni de la prise de parti (antimarxiste) qu’elles déterminent chez Ramuz, mais b
168  : qu’il me semble entendre pour la première fois la voix d’un de nos aînés, interrogeant notre destin, lui poser en face
169  ? Ai-je mal su lire tant de brillants essais sur le monde actuel et futur ? Est-ce le fait d’une disposition trop romanti
170 ants essais sur le monde actuel et futur ? Est-ce le fait d’une disposition trop romantique que d’avoir cru distinguer dan
171 ans ces œuvres je ne sais quelle complaisance qui les faisait éviter d’instinct tout point de vue pratiquement bouleversant
172 ement bouleversant ? D’autre part, n’est-ce point le fait d’un certain manque de tact intellectuel que de poser des questi
173 d’original, mais au contraire nous plongent dans l’ humiliation, dans l’effroi ou dans la violence ? Le temps vient cepend
174 contraire nous plongent dans l’humiliation, dans l’ effroi ou dans la violence ? Le temps vient cependant où la métaphysiq
175 longent dans l’humiliation, dans l’effroi ou dans la violence ? Le temps vient cependant où la métaphysique se posera ou s
176 ’humiliation, dans l’effroi ou dans la violence ? Le temps vient cependant où la métaphysique se posera ou sera niée en te
177 ou dans la violence ? Le temps vient cependant où la métaphysique se posera ou sera niée en termes concrets, en termes de
178 sormais ceux qui savent dévisager notre condition la plus nue. « Alors on voit paraître le grand, c’est-à-dire on voit par
179 e condition la plus nue. « Alors on voit paraître le grand, c’est-à-dire on voit paraître l’homme dans sa grandeur, c’est-
180 paraître le grand, c’est-à-dire on voit paraître l’ homme dans sa grandeur, c’est-à-dire dans l’élémentaire : un être qui
181 aître l’homme dans sa grandeur, c’est-à-dire dans l’ élémentaire : un être qui est nu, qui a froid, qui a faim, qui a été j
182 rouve aucun écrivain plus naturellement libéré de l’ idéologie bourgeoise, que Ramuz. Sa conception tragique du sort de l’h
183 ise, que Ramuz. Sa conception tragique du sort de l’ homme suffirait à l’attester. Mais plus sûrement encore son acceptatio
184 onception tragique du sort de l’homme suffirait à l’ attester. Mais plus sûrement encore son acceptation profonde d’aujourd
185 tation profonde d’aujourd’hui. Aujourd’hui, c’est le titre du journal grâce auquel chaque semaine ou presque, il reprend l
186 râce auquel chaque semaine ou presque, il reprend le dialogue avec son public et l’époque, de ce ton viril et simple qui e
187 resque, il reprend le dialogue avec son public et l’ époque, de ce ton viril et simple qui est à lui, nullement irrité (com
188 un Bloy), nullement moralisant ou jacobin (comme les marxistes), ni victime ni juge d’une bourgeoisie à laquelle il échapp
189 naire, parce que trop radical, trop enraciné dans l’ élémentaire ; élaborant son œuvre à un niveau d’où bourgeoisie et révo
190 me des localisations de surfaces et temporaires. ( Les animaux et les arbres ne sont pas révolutionnaires.) Et ce n’est pas
191 tions de surfaces et temporaires. (Les animaux et les arbres ne sont pas révolutionnaires.) Et ce n’est pas qu’il ait jamai
192 elle tout un pays et son peuple ; car « c’est ici le pays de la solidité, parce que c’est le pays des ressemblances. Regar
193 n pays et son peuple ; car « c’est ici le pays de la solidité, parce que c’est le pays des ressemblances. Regarde, tout y
194 c’est ici le pays de la solidité, parce que c’est le pays des ressemblances. Regarde, tout y tient ensemble fortement, com
195 arde, tout y tient ensemble fortement, comme dans le tableau d’un grand peintre ». Ah ! la grandeur de ce peuple ramuzien,
196 comme dans le tableau d’un grand peintre ». Ah ! la grandeur de ce peuple ramuzien, qui se meut dans je ne sais quelle lo
197 rdeur « originale » et unanime, en communion avec les éléments, avec l’effroi du monde. On a, non sans comique, loué « cet
198 et unanime, en communion avec les éléments, avec l’ effroi du monde. On a, non sans comique, loué « cet artiste raffiné »
199 s de sa race. Il a cette même lenteur imposée par la nature, ce même besoin de précision utile. Ce n’est pas un art d’aprè
200 n de précision utile. Ce n’est pas un art d’après le peuple4, mais on dirait presque : d’avant. Il n’est pas jusqu’à son A
201 ne coïncide avec celle du pays de Vaud : non pas la grecque, qui est scolaire — pour eux — mais la biblique, qui est viva
202 as la grecque, qui est scolaire — pour eux — mais la biblique, qui est vivante. Ainsi tous parlent un même langage, qu’ils
203 vante. Ainsi tous parlent un même langage, qu’ils l’ inscrivent sur le papier ou dans la terre. Un tel sens de la communaut
204 parlent un même langage, qu’ils l’inscrivent sur le papier ou dans la terre. Un tel sens de la communauté put induire cer
205 angage, qu’ils l’inscrivent sur le papier ou dans la terre. Un tel sens de la communauté put induire certains à parler de
206 nt sur le papier ou dans la terre. Un tel sens de la communauté put induire certains à parler de l’unanimisme de Ramuz. Ma
207 de la communauté put induire certains à parler de l’ unanimisme de Ramuz. Mais comment Ramuz croirait-il à l’être collectif
208 imisme de Ramuz. Mais comment Ramuz croirait-il à l’ être collectif, être sans racines, mythe cérébral. « Je ne distingue l
209 e sans racines, mythe cérébral. « Je ne distingue l’ être qu’aux racines de l’élémentaire », écrivait-il dans ses Six Cahie
210 ébral. « Je ne distingue l’être qu’aux racines de l’ élémentaire », écrivait-il dans ses Six Cahiers. Parlons plutôt de son
211 ctiviste d’ailleurs, mais originel et spirituel. ( La révolution russe en tournant au marxisme, a provisoirement confondu c
212 marxisme, a provisoirement confondu ces notions.) Le communisme ramuzien, c’est celui qu’établissent la mort, la peur, la
213 e communisme ramuzien, c’est celui qu’établissent la mort, la peur, la maladie. Et la joie, ce point commun, « ce point qu
214 sme ramuzien, c’est celui qu’établissent la mort, la peur, la maladie. Et la joie, ce point commun, « ce point qui est au-
215 ien, c’est celui qu’établissent la mort, la peur, la maladie. Et la joie, ce point commun, « ce point qui est au-delà de l
216 i qu’établissent la mort, la peur, la maladie. Et la joie, ce point commun, « ce point qui est au-delà de la vie ». Le com
217 e, ce point commun, « ce point qui est au-delà de la vie ». Le communisme qui règne au jugement dernier et qui régnait aux
218 t commun, « ce point qui est au-delà de la vie ». Le communisme qui règne au jugement dernier et qui régnait aux Origines,
219 jugement dernier et qui régnait aux Origines, car la Fin et le Commencement « sont en ressemblance et voisinage ». Ce rega
220 ernier et qui régnait aux Origines, car la Fin et le Commencement « sont en ressemblance et voisinage ». Ce regard rajeuni
221 gagent certaines œuvres récentes des écrivains de l’ URSS, je ne les retrouve que chez Ramuz. Mais purifiés de toute brutal
222 es œuvres récentes des écrivains de l’URSS, je ne les retrouve que chez Ramuz. Mais purifiés de toute brutalité, de ces tra
223 erve d’innocence » d’où peut-être un jour sortira le peuple-poète, « le peuple tous en un ». Mais son œuvre est bien au-de
224 d’où peut-être un jour sortira le peuple-poète, «  le peuple tous en un ». Mais son œuvre est bien au-delà de l’ère machini
225 tous en un ». Mais son œuvre est bien au-delà de l’ ère machiniste que traverse l’URSS, au-delà de l’insolence et de la ré
226 est bien au-delà de l’ère machiniste que traverse l’ URSS, au-delà de l’insolence et de la révolte ; et ce trait profond de
227 l’ère machiniste que traverse l’URSS, au-delà de l’ insolence et de la révolte ; et ce trait profond de son art m’en conva
228 que traverse l’URSS, au-delà de l’insolence et de la révolte ; et ce trait profond de son art m’en convainc : le sens de l
229  ; et ce trait profond de son art m’en convainc : le sens de la vénération, qui est aussi celui de la lenteur des choses.
230 ait profond de son art m’en convainc : le sens de la vénération, qui est aussi celui de la lenteur des choses. Cet art, le
231 le sens de la vénération, qui est aussi celui de la lenteur des choses. Cet art, le sujet des Signes parmi nous, par sa s
232 st aussi celui de la lenteur des choses. Cet art, le sujet des Signes parmi nous, par sa simplicité même, le met en valeur
233 et des Signes parmi nous, par sa simplicité même, le met en valeur mieux que tout autre récit de Ramuz. Voici Caille, le c
234 ieux que tout autre récit de Ramuz. Voici Caille, le colporteur biblique, qui s’avance dès le matin à travers le pays, et
235 Caille, le colporteur biblique, qui s’avance dès le matin à travers le pays, et offre à tous la Parole, « ayant l’aspect
236 eur biblique, qui s’avance dès le matin à travers le pays, et offre à tous la Parole, « ayant l’aspect d’une brochure à co
237 e dès le matin à travers le pays, et offre à tous la Parole, « ayant l’aspect d’une brochure à couverture bleue », où les
238 avers le pays, et offre à tous la Parole, « ayant l’ aspect d’une brochure à couverture bleue », où les événements actuels
239 l’aspect d’une brochure à couverture bleue », où les événements actuels — cela se passe un jour d’été de 1918 — sont expli
240 1918 — sont expliqués à la lumière des Écritures. La Fin des Temps est proche, il faut en témoigner. À tous il tend la Par
241 est proche, il faut en témoigner. À tous il tend la Parole « morte aux pages », mais voici que de toutes parts les Signes
242 morte aux pages », mais voici que de toutes parts les Signes paraissent sur la terre, les maladies, la famine, la révolte,
243 ici que de toutes parts les Signes paraissent sur la terre, les maladies, la famine, la révolte, la guerre et la mortalité
244 toutes parts les Signes paraissent sur la terre, les maladies, la famine, la révolte, la guerre et la mortalité. Caille s’
245 les Signes paraissent sur la terre, les maladies, la famine, la révolte, la guerre et la mortalité. Caille s’avance dans l
246 paraissent sur la terre, les maladies, la famine, la révolte, la guerre et la mortalité. Caille s’avance dans la journée,
247 ur la terre, les maladies, la famine, la révolte, la guerre et la mortalité. Caille s’avance dans la journée, et l’angoiss
248 les maladies, la famine, la révolte, la guerre et la mortalité. Caille s’avance dans la journée, et l’angoisse autour de l
249 , la guerre et la mortalité. Caille s’avance dans la journée, et l’angoisse autour de lui grandit. De partout l’orage s’am
250 la mortalité. Caille s’avance dans la journée, et l’ angoisse autour de lui grandit. De partout l’orage s’amasse. Vers le s
251 , et l’angoisse autour de lui grandit. De partout l’ orage s’amasse. Vers le soir, il éclate tragiquement. Est-ce la fin ?
252 de lui grandit. De partout l’orage s’amasse. Vers le soir, il éclate tragiquement. Est-ce la fin ? Grande heure de terreur
253 sse. Vers le soir, il éclate tragiquement. Est-ce la fin ? Grande heure de terreur et de prière. Puis, « la page du ciel a
254 n ? Grande heure de terreur et de prière. Puis, «  la page du ciel a été tournée », ils se relèvent : « Il paraît bien qu’o
255 vent : « Il paraît bien qu’on n’est pas morts ! » Le monde renaît dans une soirée pure et le baiser d’un couple heureux. R
256 morts ! » Le monde renaît dans une soirée pure et le baiser d’un couple heureux. Rarement la forme authentique de Ramuz at
257 e pure et le baiser d’un couple heureux. Rarement la forme authentique de Ramuz atteignit une autorité comparable à celle
258 tièrement créé, entièrement « autorisé ». Art, on le sait, avant tout visuel, qui rend les choses à l’état naissant, rugue
259 é ». Art, on le sait, avant tout visuel, qui rend les choses à l’état naissant, rugueux, décapé de toute rhétorique5 et de
260 le sait, avant tout visuel, qui rend les choses à l’ état naissant, rugueux, décapé de toute rhétorique5 et de toute explic
261 toute explication intellectuelle, atteignant par la une unité de style tellement têtue qu’elle évoque peu à peu on ne sai
262 ns sa fascinante et grandiose monotonie. Art dont la mesure ne doit pas être cherchée dans le pittoresque, ni dans l’ingén
263 Art dont la mesure ne doit pas être cherchée dans le pittoresque, ni dans l’ingéniosité, ni dans l’harmonie de sons, mais
264 it pas être cherchée dans le pittoresque, ni dans l’ ingéniosité, ni dans l’harmonie de sons, mais bien dans la pesée. Tous
265 ns le pittoresque, ni dans l’ingéniosité, ni dans l’ harmonie de sons, mais bien dans la pesée. Tous les procédés ramuziens
266 osité, ni dans l’harmonie de sons, mais bien dans la pesée. Tous les procédés ramuziens, juxtapositions brutales, interfér
267 l’harmonie de sons, mais bien dans la pesée. Tous les procédés ramuziens, juxtapositions brutales, interférences du récit,
268 œuvre mais toujours avec une probité singulière. La surimpression par exemple n’est jamais pour Ramuz ce qu’elle fut pour
269 tres : un moyen de créer du mystère en brouillant les plans ; mais un moyen de rendre plus totale la vision. Tout, par aill
270 t les plans ; mais un moyen de rendre plus totale la vision. Tout, par ailleurs, indique chez Ramuz la volonté de ne pas f
271 la vision. Tout, par ailleurs, indique chez Ramuz la volonté de ne pas faire prendre une chose pour une autre, ni certain
272 chose pour une autre, ni certain aspect usuel de la chose pour toute la chose. C’est pourquoi il s’attarde à décrire le c
273 e, ni certain aspect usuel de la chose pour toute la chose. C’est pourquoi il s’attarde à décrire le concret d’une façon c
274 e la chose. C’est pourquoi il s’attarde à décrire le concret d’une façon concrète : ainsi, le maniement d’un outil. D’où l
275 décrire le concret d’une façon concrète : ainsi, le maniement d’un outil. D’où le reproche de puérilité que lui adressent
276 n concrète : ainsi, le maniement d’un outil. D’où le reproche de puérilité que lui adressent ceux qui, par exemple, n’hési
277 as à prendre au sérieux une intrigue romanesque à la Bourget. On s’est trop arrêté à l’insolite du style chez Ramuz. Ce qu
278 e romanesque à la Bourget. On s’est trop arrêté à l’ insolite du style chez Ramuz. Ce qu’il a d’insolite, ce n’est pas tant
279 u’il a d’insolite, ce n’est pas tant sa forme que les vertus qu’elle suppose : la sobriété, la solidité, le manque d’ironie
280 as tant sa forme que les vertus qu’elle suppose : la sobriété, la solidité, le manque d’ironie, la bonhomie sérieuse, l’ab
281 rme que les vertus qu’elle suppose : la sobriété, la solidité, le manque d’ironie, la bonhomie sérieuse, l’absence de tout
282 ertus qu’elle suppose : la sobriété, la solidité, le manque d’ironie, la bonhomie sérieuse, l’absence de toute complaisanc
283 e : la sobriété, la solidité, le manque d’ironie, la bonhomie sérieuse, l’absence de toute complaisance à soi. Certes, j’e
284 lidité, le manque d’ironie, la bonhomie sérieuse, l’ absence de toute complaisance à soi. Certes, j’en vois les défauts, le
285 ce de toute complaisance à soi. Certes, j’en vois les défauts, le poncif ; ces détails par trop détaillés. Mais l’important
286 omplaisance à soi. Certes, j’en vois les défauts, le poncif ; ces détails par trop détaillés. Mais l’important, je pense,
287 le poncif ; ces détails par trop détaillés. Mais l’ important, je pense, c’est qu’une page de Ramuz — même pas très réussi
288 c cette lenteur qu’elle impose, nous replace dans la vision grande et efficace des choses les plus simples. Mais il faut d
289 lace dans la vision grande et efficace des choses les plus simples. Mais il faut dire maintenant l’actualité tout à fait si
290 es les plus simples. Mais il faut dire maintenant l’ actualité tout à fait singulière d’un tel livre. Il y a des sujets éte
291 , perpétuels — sujets d’étonnement perpétuel — et la Fin du Monde est l’un d’eux. Un vrai mythe, c’est-à-dire un événement
292 un événement perpétuellement possible, qui reçoit la vie comme un moule reçoit la matière en fusion et la réalise soudain
293 possible, qui reçoit la vie comme un moule reçoit la matière en fusion et la réalise soudain — la fait chose — en lui donn
294 vie comme un moule reçoit la matière en fusion et la réalise soudain — la fait chose — en lui donnant une forme ; l’actual
295 çoit la matière en fusion et la réalise soudain — la fait chose — en lui donnant une forme ; l’actualise — la fait acte —
296 dain — la fait chose — en lui donnant une forme ; l’ actualise — la fait acte — en l’arrêtant dans cette forme et lui donna
297 chose — en lui donnant une forme ; l’actualise — la fait acte — en l’arrêtant dans cette forme et lui donnant une date. L
298 nnant une forme ; l’actualise — la fait acte — en l’ arrêtant dans cette forme et lui donnant une date. Les périodes qui « 
299 rrêtant dans cette forme et lui donnant une date. Les périodes qui « marquent » dans l’Histoire sont celles où la forme d’u
300 nant une date. Les périodes qui « marquent » dans l’ Histoire sont celles où la forme d’un mythe affleure, s’incarne et dev
301 s qui « marquent » dans l’Histoire sont celles où la forme d’un mythe affleure, s’incarne et devient visible. Ce sont les
302 e affleure, s’incarne et devient visible. Ce sont les périodes de crise. Or toute crise est un jugement6, — un « arrêt dans
303 , — un « arrêt dans une forme ». Cela se voit par l’ étymologie. Aussi, par le passage à la limite : car la plus grande cri
304 orme ». Cela se voit par l’étymologie. Aussi, par le passage à la limite : car la plus grande crise imaginable, c’est l’ar
305 se voit par l’étymologie. Aussi, par le passage à la limite : car la plus grande crise imaginable, c’est l’arrêt absolu, s
306 ymologie. Aussi, par le passage à la limite : car la plus grande crise imaginable, c’est l’arrêt absolu, suprême : le Juge
307 mite : car la plus grande crise imaginable, c’est l’ arrêt absolu, suprême : le Jugement dernier. Le sens de l’actuelle cri
308 crise imaginable, c’est l’arrêt absolu, suprême : le Jugement dernier. Le sens de l’actuelle crise apparaît ainsi manifest
309 st l’arrêt absolu, suprême : le Jugement dernier. Le sens de l’actuelle crise apparaît ainsi manifeste : un jugement sur t
310 absolu, suprême : le Jugement dernier. Le sens de l’ actuelle crise apparaît ainsi manifeste : un jugement sur tous les pla
311 e apparaît ainsi manifeste : un jugement sur tous les plans, financier, commercial, éthique et spirituel. Que les échanges
312 financier, commercial, éthique et spirituel. Que les échanges se ralentissent ou cessent : aussitôt perce l’interrogation
313 anges se ralentissent ou cessent : aussitôt perce l’ interrogation que la réussite couvrait. Où va notre or, en réalité ? (
314 t ou cessent : aussitôt perce l’interrogation que la réussite couvrait. Où va notre or, en réalité ? (Dans quelle directio
315 n principale.) Où tend notre action centuplée par les machines ? Où tendent nos métaphysiques et nos philosophies mal embra
316 e voit-on mieux maintenant dans quel esprit Ramuz les pose, et que précisément c’est l’esprit de ces Signes. Aussi serait-i
317 l esprit Ramuz les pose, et que précisément c’est l’ esprit de ces Signes. Aussi serait-il bien insuffisant de dire d’une t
318 e actualité accidentelle : c’est en quelque sorte le contraire qui est vrai ; c’est notre temps qui revêt une actualité7 e
319 e actualité7 et une réalité véritables du fait de la crise. Mais cet affleurement mystérieux de la forme mythique, le poèt
320 de la crise. Mais cet affleurement mystérieux de la forme mythique, le poète en tout temps a le pouvoir de le susciter da
321 cet affleurement mystérieux de la forme mythique, le poète en tout temps a le pouvoir de le susciter dans son œuvre, comme
322 ux de la forme mythique, le poète en tout temps a le pouvoir de le susciter dans son œuvre, comme le mystique dans sa priè
323 mythique, le poète en tout temps a le pouvoir de le susciter dans son œuvre, comme le mystique dans sa prière. Et c’est p
324 a le pouvoir de le susciter dans son œuvre, comme le mystique dans sa prière. Et c’est pourquoi le poète, Ramuz, l’homme q
325 mme le mystique dans sa prière. Et c’est pourquoi le poète, Ramuz, l’homme qui vit concrètement les grands mythes et les r
326 ans sa prière. Et c’est pourquoi le poète, Ramuz, l’ homme qui vit concrètement les grands mythes et les réalise dans sa vi
327 uoi le poète, Ramuz, l’homme qui vit concrètement les grands mythes et les réalise dans sa vision, cet homme sera toujours
328 l’homme qui vit concrètement les grands mythes et les réalise dans sa vision, cet homme sera toujours en puissance d’aujour
329 Travail », dans Aujourd’hui, 29 octobre 1931. 4. Le populisme est d’après le peuple. Cette terne vision des choses en app
330 ui, 29 octobre 1931. 4. Le populisme est d’après le peuple. Cette terne vision des choses en apprend plus sur le compte d
331 Cette terne vision des choses en apprend plus sur le compte de la bourgeoisie que sur le peuple qu’elle prétend « observer
332 ision des choses en apprend plus sur le compte de la bourgeoisie que sur le peuple qu’elle prétend « observer ». 5. De to
333 rend plus sur le compte de la bourgeoisie que sur le peuple qu’elle prétend « observer ». 5. De tout bel canto, peut-on d
334 ver ». 5. De tout bel canto, peut-on dire. C’est le ton de la musique de Stravinsky, du Sacre et des Noces. Le ton de la
335 De tout bel canto, peut-on dire. C’est le ton de la musique de Stravinsky, du Sacre et des Noces. Le ton de la création d
336 la musique de Stravinsky, du Sacre et des Noces. Le ton de la création du monde. 6. S’il est vrai, comme l’a montré M. S
337 e de Stravinsky, du Sacre et des Noces. Le ton de la création du monde. 6. S’il est vrai, comme l’a montré M. Spaïer, que
338 de la création du monde. 6. S’il est vrai, comme l’ a montré M. Spaïer, que toute pensée est judicatoire, le fait même de
339 ntré M. Spaïer, que toute pensée est judicatoire, le fait même de penser devient fauteur de crise. Informer le réel, c’est
340 même de penser devient fauteur de crise. Informer le réel, c’est en quelque sorte le mettre en état de crise ; et il n’y a
341 e crise. Informer le réel, c’est en quelque sorte le mettre en état de crise ; et il n’y a de réalité que par et dans la c
342 de crise ; et il n’y a de réalité que par et dans la crise… 7. On pourrait soutenir que l’époque 1900-1910 fut « inactuel
343 ar et dans la crise… 7. On pourrait soutenir que l’ époque 1900-1910 fut « inactuelle » pour la grande masse de ceux qui l
344 ir que l’époque 1900-1910 fut « inactuelle » pour la grande masse de ceux qui la vécurent. c. Rougemont Denis de, « [Com
345 t « inactuelle » pour la grande masse de ceux qui la vécurent. c. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] C. F. Ramuz, Les
346 Rougemont Denis de, « [Compte rendu] C. F. Ramuz, Les Signes parmi nous  », La Nouvelle Revue française, Paris, janvier 193
347 pte rendu] C. F. Ramuz, Les Signes parmi nous  », La Nouvelle Revue française, Paris, janvier 1932, p. 144-149.
4 1932, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Le silence de Goethe (mars 1932)
348 Le silence de Goethe (mars 1932)d « L’homme, dit Goethe, ne reconnaît
349 Le silence de Goethe (mars 1932)d «  L’ homme, dit Goethe, ne reconnaît et n’apprécie que ce qu’il est lui-mêm
350 qu’il est lui-même en état de faire. » Telle est la cause du malentendu que soulèvera toujours à nouveau l’exemple de cet
351 se du malentendu que soulèvera toujours à nouveau l’ exemple de cette vie. Ceux qui traitent Goethe de bourgeois ne prouven
352 tension ni grandeur : ils ne savent pas voir dans la sagesse faustienne qu’elle est surtout une défense contre le Démon ré
353 faustienne qu’elle est surtout une défense contre le Démon révolté et la Magie latente ; et s’ils ne le voient pas, c’est
354 st surtout une défense contre le Démon révolté et la Magie latente ; et s’ils ne le voient pas, c’est que précisément cett
355 e Démon révolté et la Magie latente ; et s’ils ne le voient pas, c’est que précisément cette défense a réussi. Par contre
356 éfense a réussi. Par contre ils veulent bien voir la révolte chez ceux-là qui la crient, et la magie chez ceux qui vaticin
357 ils veulent bien voir la révolte chez ceux-là qui la crient, et la magie chez ceux qui vaticinent, ayant été moins loin qu
358 en voir la révolte chez ceux-là qui la crient, et la magie chez ceux qui vaticinent, ayant été moins loin que Goethe dans
359 vaticinent, ayant été moins loin que Goethe dans la domination des mystères. Ainsi se réclament-ils de Rimbaud. Peut-être
360 res. Ainsi se réclament-ils de Rimbaud. Peut-être la confrontation du Sage et du Fou — d’un fou qui reste notre intime ten
361 te notre intime tentation — permettra-t-elle, par la vivacité même du paradoxe, une prise de conscience plus juste et plus
362 fant écrit des poèmes « magiques » puis renonce à la magie, et se tait. Goethe, initié dans sa jeunesse, commence d’écrire
363 jeunesse, commence d’écrire vers ce temps, mais, la fièvre tombée, poursuivra durant toute sa vie une « activité littérai
364 lles étaient superposables, ce qui n’est pas même le cas. De ce point de vue littéraire, la confrontation serait absurde,
365 t pas même le cas. De ce point de vue littéraire, la confrontation serait absurde, j’en conviens. Mais notre optique n’est
366 int faussée par un état d’esprit qui voudrait que l’ on considère ces deux hommes avant tout comme des écrivains ? C’est pa
367 hommes avant tout comme des écrivains ? C’est par la chose écrite, par la lettre justement qu’ils s’opposent le plus. Pour
368 me des écrivains ? C’est par la chose écrite, par la lettre justement qu’ils s’opposent le plus. Pourtant Rimbaud ne fut j
369 écrite, par la lettre justement qu’ils s’opposent le plus. Pourtant Rimbaud ne fut jamais un écrivain, ni ne se soucia de
370 aud ne fut jamais un écrivain, ni ne se soucia de l’ être. Et Goethe ne fut qu’entre autres choses un écrivain, et se souci
371 ’entre autres choses un écrivain, et se soucia de l’ être dans la mesure seulement où il portait en tous les domaines de so
372 s choses un écrivain, et se soucia de l’être dans la mesure seulement où il portait en tous les domaines de son activité u
373 re dans la mesure seulement où il portait en tous les domaines de son activité une application volontaire et soutenue. Ce n
374 ication volontaire et soutenue. Ce n’est donc pas l’ aspect littéraire de leur expérience qui doit conditionner notre visio
375 instant négligeable, s’agissant de deux êtres que l’ on connaît par leurs écrits d’abord. Mais, pour en tenir un juste comp
376 Mais, pour en tenir un juste compte, il s’agit de le subordonner au problème personnel de ces vies, à leur équation d’exis
377 un comme chez l’autre, une révolution profonde de l’ esprit dont procèdent à la fois le refus de la magie et le goût passio
378 ion profonde de l’esprit dont procèdent à la fois le refus de la magie et le goût passionné de l’effort immédiat. Qu’un fa
379 de l’esprit dont procèdent à la fois le refus de la magie et le goût passionné de l’effort immédiat. Qu’un fait de cet or
380 dont procèdent à la fois le refus de la magie et le goût passionné de l’effort immédiat. Qu’un fait de cet ordre puisse ê
381 fois le refus de la magie et le goût passionné de l’ effort immédiat. Qu’un fait de cet ordre puisse être tenu pour crucial
382 e être tenu pour crucial, je veux croire qu’on ne le contestera pas. Mais ce qu’on voudrait dire maintenant, ce qui ne ces
383 t, ce qui ne cesse de provoquer dans notre esprit l’ étonnement du premier regard, c’est la similitude de forme, c’est-dire
384 otre esprit l’étonnement du premier regard, c’est la similitude de forme, c’est-dire la similitude essentielle, hors du te
385 regard, c’est la similitude de forme, c’est-dire la similitude essentielle, hors du temps, qui paraît dans ces deux expér
386 paraît dans ces deux expériences, à mesure qu’on les abstrait de toute la littérature dont elles enveloppèrent leurs manif
387 expériences, à mesure qu’on les abstrait de toute la littérature dont elles enveloppèrent leurs manifestations, — à quoi l
388 lles enveloppèrent leurs manifestations, — à quoi l’ on ne s’est point privé d’ajouter quelques tomes depuis. Il convient d
389 l bien plus que dans leur commune grandeur. Seule la croyance en une analogie universelle des réactions profondes de l’âme
390 e analogie universelle des réactions profondes de l’ âme devant son destin m’autorise à cette confrontation et me persuade
391 ur qui seule compte certaine « originalité » dans l’ ordre — au mieux — esthétique, je ne m’en étonnerai point. Il s’agit s
392 s concrète, grâce au recoupement de deux vies qui l’ ont réalisée selon des voies totalement divergentes, une attitude huma
393 qui me paraît commune. Que Goethe ait pratiqué «  le devis des choses grandes et secrètes » comme parle Jérôme Cardan, l’o
394 grandes et secrètes » comme parle Jérôme Cardan, l’ on en trouve dans toutes ses œuvres assez de signes irrévocables pour
395 révocables pour n’avoir plus besoin de solliciter les biographes. On a souvent rappelé l’amitié du jeune bourgeois de Franc
396 e solliciter les biographes. On a souvent rappelé l’ amitié du jeune bourgeois de Francfort et de la sage et très fervente
397 lé l’amitié du jeune bourgeois de Francfort et de la sage et très fervente Mlle de Klettenberg. Mais bien plus que dans un
398 plus que dans une spiritualité facilement épurée, le mysticisme de celui qui, tout enfant, édifiait un autel à la Nature,
399 me de celui qui, tout enfant, édifiait un autel à la Nature, trouvait son aliment dans une méditation, renouvelée des rose
400 une méditation, renouvelée des rose-croix, et qui le porta même à quelques essais d’alchimie. Coquetteries, a-t-on dit, — 
401 comme celui de Goethe. « On a peur que son feu ne le consume », écrit un de ses amis, vers ce temps. « Goethe vit sur un p
402 l et bien dans son évolution une de ces crises où l’ être spirituel découvre sa forme véritable. Et si, comme chez Goethe,
403 celle du terrible « Meurs et deviens ! », et s’il l’ assume en connaissance de cause, — c’est un événement qui ne peut norm
404 e qualité nouvelle de silence. Encore faut-il que le destin favorise concrètement cette assomption intérieure. Par quel « 
405 cette assomption intérieure. Par quel « hasard » l’ a-t-il provoquée chez Goethe ? Il est un fait de sa jeunesse dont on n
406 n fait de sa jeunesse dont on ne saurait exagérer l’ importance à la fois historique et symbolique : les premiers contacts
407 symbolique : les premiers contacts de Goethe avec le mysticisme précédèrent de très peu une grave maladie, dont il ne fut
408 u une grave maladie, dont il ne fut sauvé que par l’ intervention d’un médecin « alchimiste ». Retenons ceci : au seuil de
409 decin « alchimiste ». Retenons ceci : au seuil de l’ initiation, chez Goethe, il n’y a pas une révolte, il y a un péril con
410 e ce qu’il nommera désormais son Daimon, contre «  l’ oppression despotique des éléments inquiétants qui gouvernent trop pui
411 ent trop puissamment dans son âme » qu’il appelle les arts d’une magie maîtrisée, c’est-à-dire incarnée. La question se pos
412 rts d’une magie maîtrisée, c’est-à-dire incarnée. La question se pose pour lui, dès l’abord, en termes matériels, urgents
413 -dire incarnée. La question se pose pour lui, dès l’ abord, en termes matériels, urgents et contraignants. De là le sérieux
414 termes matériels, urgents et contraignants. De là le sérieux avec lequel il accepte les conditions de l’initiation : et d’
415 aignants. De là le sérieux avec lequel il accepte les conditions de l’initiation : et d’abord la plus difficile, le silence
416 sérieux avec lequel il accepte les conditions de l’ initiation : et d’abord la plus difficile, le silence. Ainsi, les prem
417 cepte les conditions de l’initiation : et d’abord la plus difficile, le silence. Ainsi, les premières séductions du dépays
418 s de l’initiation : et d’abord la plus difficile, le silence. Ainsi, les premières séductions du dépaysement spirituel, de
419 premières séductions du dépaysement spirituel, de la connaissance ésotérique dans ce qu’elle peut avoir de purement « étra
420 voir de purement « étrange » ont à peine enfiévré le jeune Goethe, que déjà la faiblesse du corps le ramène à l’aspect con
421  » ont à peine enfiévré le jeune Goethe, que déjà la faiblesse du corps le ramène à l’aspect concret de notre condition. E
422 é le jeune Goethe, que déjà la faiblesse du corps le ramène à l’aspect concret de notre condition. Et c’est seulement en p
423 oethe, que déjà la faiblesse du corps le ramène à l’ aspect concret de notre condition. Et c’est seulement en passant par u
424 ent en passant par une application matérielle que la magie, se reniant en tant que spéculation extra-terrestre, peut s’int
425 spéculation extra-terrestre, peut s’intégrer dans l’ équilibre humain. Incident décisif qui figure en raccourci tout le dra
426 in. Incident décisif qui figure en raccourci tout le drame dialectique de sa vie. Mais cette maladie, et la convalescence,
427 ame dialectique de sa vie. Mais cette maladie, et la convalescence, ont éveillé dans son esprit les premières tentations c
428 son esprit les premières tentations créatrices. À l’ origine de son œuvre, voici donc le fait de la magie domptée ; conçue
429 créatrices. À l’origine de son œuvre, voici donc le fait de la magie domptée ; conçue sous de tels auspices, c’est tout n
430 . À l’origine de son œuvre, voici donc le fait de la magie domptée ; conçue sous de tels auspices, c’est tout naturellemen
431 us de tels auspices, c’est tout naturellement que la littérature prendra plus tard chez Goethe l’allure d’une discipline d
432 que la littérature prendra plus tard chez Goethe l’ allure d’une discipline de l’âme. Un exercice, une activité organique
433 lus tard chez Goethe l’allure d’une discipline de l’ âme. Un exercice, une activité organique à objectifs limités et concrè
434 ulative. Un instrument et un style. Dès ce moment le choix de Goethe a trouvé sa forme. Il lui faudra maintenant le renouv
435 oethe a trouvé sa forme. Il lui faudra maintenant le renouveler perpétuellement durant toute sa vie. Et comprendre, éprouv
436 ant toute sa vie. Et comprendre, éprouver jusqu’à la souffrance — qui est la « substance » — à quel point le renoncement à
437 prendre, éprouver jusqu’à la souffrance — qui est la « substance » — à quel point le renoncement à la magie spéculative n’
438 ffrance — qui est la « substance » — à quel point le renoncement à la magie spéculative n’est, en fait, qu’un accomplissem
439 la « substance » — à quel point le renoncement à la magie spéculative n’est, en fait, qu’un accomplissement, le plus diff
440 péculative n’est, en fait, qu’un accomplissement, le plus difficile et le seul humainement fécond. Car un tel silence n’es
441 fait, qu’un accomplissement, le plus difficile et le seul humainement fécond. Car un tel silence n’est pas absence de mots
442 plus agissant, dans une œuvre marquée du signe de la maturité, que cette présence rayonnante dont on devine chaque phrase
443 on devine chaque phrase sous-tendue. Mais rien ne la trahirait mieux que la retenue même de l’expression. C’est pourquoi j
444 sous-tendue. Mais rien ne la trahirait mieux que la retenue même de l’expression. C’est pourquoi je l’éprouve plus viveme
445 rien ne la trahirait mieux que la retenue même de l’ expression. C’est pourquoi je l’éprouve plus vivement dans certains pa
446 a retenue même de l’expression. C’est pourquoi je l’ éprouve plus vivement dans certains passages des Affinités électives,
447 e apparente platitude, mais translucide, que dans le Conte du Serpent Vert, trop visiblement ésotérique. Équilibre si péri
448 isiblement ésotérique. Équilibre si périlleux que la longue patience géniale ne parviendrait pas seule à le sauvegarder. I
449 ngue patience géniale ne parviendrait pas seule à le sauvegarder. Il y faudra le dressage de la souffrance. L’excès verbal
450 viendrait pas seule à le sauvegarder. Il y faudra le dressage de la souffrance. L’excès verbal de Werther couvre d’abord l
451 eule à le sauvegarder. Il y faudra le dressage de la souffrance. L’excès verbal de Werther couvre d’abord la voix intérieu
452 garder. Il y faudra le dressage de la souffrance. L’ excès verbal de Werther couvre d’abord la voix intérieure, la renie mê
453 ffrance. L’excès verbal de Werther couvre d’abord la voix intérieure, la renie même bruyamment. C’est là le fait d’une âme
454 bal de Werther couvre d’abord la voix intérieure, la renie même bruyamment. C’est là le fait d’une âme qui se refuse encor
455 ix intérieure, la renie même bruyamment. C’est là le fait d’une âme qui se refuse encore à la souffrance et la crie sur la
456 C’est là le fait d’une âme qui se refuse encore à la souffrance et la crie sur la place. Un peu plus de souffrance, plus i
457 d’une âme qui se refuse encore à la souffrance et la crie sur la place. Un peu plus de souffrance, plus intimement ancrée,
458 i se refuse encore à la souffrance et la crie sur la place. Un peu plus de souffrance, plus intimement ancrée, et voici l’
459 plus intimement ancrée, et voici l’autre danger : la délectation ascétique, l’obscurité glaciale des Mystères. Un peu plus
460 voici l’autre danger : la délectation ascétique, l’ obscurité glaciale des Mystères. Un peu plus d’humilité, c’est-à-dire
461 es Mystères. Un peu plus d’humilité, c’est-à-dire le réel désir d’être « utile », et c’est le juste point : les Affinités.
462 t-à-dire le réel désir d’être « utile », et c’est le juste point : les Affinités. D’ailleurs, l’alternance des trois états
463 désir d’être « utile », et c’est le juste point : les Affinités. D’ailleurs, l’alternance des trois états, visible tout au
464 c’est le juste point : les Affinités. D’ailleurs, l’ alternance des trois états, visible tout au long de l’œuvre, prouve qu
465 ternance des trois états, visible tout au long de l’ œuvre, prouve que la question se pose sans cesse à nouveau et que sous
466 tats, visible tout au long de l’œuvre, prouve que la question se pose sans cesse à nouveau et que sous l’apparence de plus
467 question se pose sans cesse à nouveau et que sous l’ apparence de plus en plus sereine, la tentation revient, l’agonie se p
468 et que sous l’apparence de plus en plus sereine, la tentation revient, l’agonie se poursuit. Seulement l’effort d’équilib
469 ce de plus en plus sereine, la tentation revient, l’ agonie se poursuit. Seulement l’effort d’équilibre crée des énergies n
470 entation revient, l’agonie se poursuit. Seulement l’ effort d’équilibre crée des énergies nouvelles. Le silence mûrit à la
471 l’effort d’équilibre crée des énergies nouvelles. Le silence mûrit à la faveur du secret, et dans la profondeur, des conce
472 e crée des énergies nouvelles. Le silence mûrit à la faveur du secret, et dans la profondeur, des conceptions s’opèrent. C
473 . Le silence mûrit à la faveur du secret, et dans la profondeur, des conceptions s’opèrent. C’est ainsi que la magie renié
474 ndeur, des conceptions s’opèrent. C’est ainsi que la magie reniée extérieurement au profit d’une expression « utile », ren
475 comme libérée intérieurement au « jour nouveau ». L’ âme parvient à cette « connaissance », à cet acte de fécondation spiri
476 e », à cet acte de fécondation spirituelle par où l’ homme pénètre dans la réalité mystique. Et cet acte ne peut se produir
477 condation spirituelle par où l’homme pénètre dans la réalité mystique. Et cet acte ne peut se produire que dans le plus pr
478 ystique. Et cet acte ne peut se produire que dans le plus profond silence de l’esprit, dans la région où seul accède celui
479 t se produire que dans le plus profond silence de l’ esprit, dans la région où seul accède celui qui sait préserver sa pass
480 ue dans le plus profond silence de l’esprit, dans la région où seul accède celui qui sait préserver sa passion au sein d’u
481 éfonds dont parle Jacob Boehme, et qui « contient l’ élément pur, mais aussi l’être sombre dans le mystère de la fureur ».
482 ehme, et qui « contient l’élément pur, mais aussi l’ être sombre dans le mystère de la fureur ». Cette complexe dialectique
483 ient l’élément pur, mais aussi l’être sombre dans le mystère de la fureur ». Cette complexe dialectique de la magie, Goeth
484 pur, mais aussi l’être sombre dans le mystère de la fureur ». Cette complexe dialectique de la magie, Goethe lui-même l’a
485 ère de la fureur ». Cette complexe dialectique de la magie, Goethe lui-même l’a stylisée en symboles concrets dans le Faus
486 complexe dialectique de la magie, Goethe lui-même l’ a stylisée en symboles concrets dans le Faust, œuvre longue comme sa v
487 e lui-même l’a stylisée en symboles concrets dans le Faust, œuvre longue comme sa vie de créateur exactement, et à tel poi
488 nt autobiographique qu’il put songer à incorporer le plan de certains actes à Vérité et Poésie. Le drame s’ouvre sur un ré
489 rer le plan de certains actes à Vérité et Poésie. Le drame s’ouvre sur un réveil : l’exercice sans frein des arts occultes
490 érité et Poésie. Le drame s’ouvre sur un réveil : l’ exercice sans frein des arts occultes laisse l’esprit de Faust béant s
491  : l’exercice sans frein des arts occultes laisse l’ esprit de Faust béant sur le vide : « Moi qui me suis cru plus grand q
492 arts occultes laisse l’esprit de Faust béant sur le vide : « Moi qui me suis cru plus grand que le Chérubin… qui pensais
493 ur le vide : « Moi qui me suis cru plus grand que le Chérubin… qui pensais en créant pouvoir jouir de la vie des dieux et
494 Chérubin… qui pensais en créant pouvoir jouir de la vie des dieux et m’y égaler… combien je dois expier tout cela ! » Fau
495 expier tout cela ! » Faust se reprend au seuil de la mort. Mais la vie ne lui sera plus qu’un profond renoncement ; même s
496 la ! » Faust se reprend au seuil de la mort. Mais la vie ne lui sera plus qu’un profond renoncement ; même si la passion l
497 lui sera plus qu’un profond renoncement ; même si la passion l’occupe un temps, c’est l’action, la Tätigkeit — le grand mo
498 us qu’un profond renoncement ; même si la passion l’ occupe un temps, c’est l’action, la Tätigkeit — le grand mot goethéen
499 ent ; même si la passion l’occupe un temps, c’est l’ action, la Tätigkeit — le grand mot goethéen — qui triomphera désormai
500 si la passion l’occupe un temps, c’est l’action, la Tätigkeit — le grand mot goethéen — qui triomphera désormais. Mais un
501 l’occupe un temps, c’est l’action, la Tätigkeit — le grand mot goethéen — qui triomphera désormais. Mais une action qui pa
502 spère du seul succès qui pour Faust serait réel : la possession bienheureuse de l’instant. Et lorsque, épuisé mais pacifié
503 Faust serait réel : la possession bienheureuse de l’ instant. Et lorsque, épuisé mais pacifié, il va quitter son corps aveu
504 orps aveugle pour d’autres formes d’existence que la Nature se voit pour ainsi dire contrainte d’assigner à l’homme actif
505 e se voit pour ainsi dire contrainte d’assigner à l’ homme actif 8, l’on découvre que c’est la magie encore qui n’a cessé d
506 nsi dire contrainte d’assigner à l’homme actif 8, l’ on découvre que c’est la magie encore qui n’a cessé de l’entraver : K
507 signer à l’homme actif 8, l’on découvre que c’est la magie encore qui n’a cessé de l’entraver : Könnt ich Magie von meine
508 couvre que c’est la magie encore qui n’a cessé de l’ entraver : Könnt ich Magie von meinem Pfad entfernen Die Zaübersprüch
509 der Mühe wert, ein Mensch zu sein.9 C’est tout le drame secret de l’œuvre qui s’avoue dans ce cri : chaque fois que Goe
510 Mensch zu sein.9 C’est tout le drame secret de l’ œuvre qui s’avoue dans ce cri : chaque fois que Goethe invoque la caté
511 voue dans ce cri : chaque fois que Goethe invoque la catégorie sacrée de l’humain, comprenons qu’il y va de tout. Mais les
512 ue fois que Goethe invoque la catégorie sacrée de l’ humain, comprenons qu’il y va de tout. Mais les anges enfin élèvent Fa
513 de l’humain, comprenons qu’il y va de tout. Mais les anges enfin élèvent Faust au-dessus de cette agonie symbolique de tou
514 et c’est leur chœur qui chante une dernière fois la loi, au moment où il reçoit la grâce de lui échapper : « Wer immer st
515 une dernière fois la loi, au moment où il reçoit la grâce de lui échapper : « Wer immer strebend sich bemüht, — Den könne
516 strebend sich bemüht, — Den können wir erlösen ». Les grandes entités symboliques l’accueillent dans leur harmonie : c’est
517 en wir erlösen ». Les grandes entités symboliques l’ accueillent dans leur harmonie : c’est la « grande Magie » que Faust e
518 boliques l’accueillent dans leur harmonie : c’est la « grande Magie » que Faust enfin rejoint dans la pleine possession de
519 la « grande Magie » que Faust enfin rejoint dans la pleine possession de ses forces et l’assurance du regard. L’âme, puri
520 ejoint dans la pleine possession de ses forces et l’ assurance du regard. L’âme, purifiée de sa « vieille dépouille » par l
521 ossession de ses forces et l’assurance du regard. L’ âme, purifiée de sa « vieille dépouille » par l’effort aveuglant de la
522 . L’âme, purifiée de sa « vieille dépouille » par l’ effort aveuglant de la vie, pénètre dans le Nouveau Jour et contemple
523 a « vieille dépouille » par l’effort aveuglant de la vie, pénètre dans le Nouveau Jour et contemple l’Indescriptible. Si F
524  » par l’effort aveuglant de la vie, pénètre dans le Nouveau Jour et contemple l’Indescriptible. Si Faust est le drame d’u
525 la vie, pénètre dans le Nouveau Jour et contemple l’ Indescriptible. Si Faust est le drame d’une formidable patience sans c
526 Jour et contemple l’Indescriptible. Si Faust est le drame d’une formidable patience sans cesse remise en question, la Sai
527 ormidable patience sans cesse remise en question, la Saison en enfer est le drame d’une pureté avide, et son destin se jou
528 cesse remise en question, la Saison en enfer est le drame d’une pureté avide, et son destin se joue d’un coup. La grandeu
529 ne pureté avide, et son destin se joue d’un coup.  La grandeur de Goethe est d’avoir su vieillir, celle de Rimbaud de s’y ê
530 celle de Rimbaud de s’y être refusé. Transportez la dialectique faustienne dans la vie d’un être jeune et libre encore de
531 efusé. Transportez la dialectique faustienne dans la vie d’un être jeune et libre encore de toute contrainte sociale, cult
532 rainte sociale, culturelle, voire physiologique ; le dessin se simplifiera jusqu’au schème unique, le rythme se précipiter
533 le dessin se simplifiera jusqu’au schème unique, le rythme se précipitera jusqu’à l’explosion, l’histoire se purifiera ju
534 u schème unique, le rythme se précipitera jusqu’à l’ explosion, l’histoire se purifiera jusqu’au mythe. La donnée initiale
535 ue, le rythme se précipitera jusqu’à l’explosion, l’ histoire se purifiera jusqu’au mythe. La donnée initiale est bien la m
536 xplosion, l’histoire se purifiera jusqu’au mythe. La donnée initiale est bien la même : c’est l’attrait d’une vision qui t
537 fiera jusqu’au mythe. La donnée initiale est bien la même : c’est l’attrait d’une vision qui transcende la vie médiocre. R
538 ythe. La donnée initiale est bien la même : c’est l’ attrait d’une vision qui transcende la vie médiocre. Rimbaud s’y lance
539 ême : c’est l’attrait d’une vision qui transcende la vie médiocre. Rimbaud s’y lance avec l’emportement d’une révolte qui
540 ranscende la vie médiocre. Rimbaud s’y lance avec l’ emportement d’une révolte qui traduit d’abord un excès féroce de vital
541 sement logique jusqu’au système de sa folie. Mais l’ irruption de cette « magie » est si violente qu’elle a certainement an
542 » est si violente qu’elle a certainement angoissé l’ enfant : n’est-ce point pour se défendre qu’il parle si fort, qu’il va
543 voirs avec une étrange exagération ? Et voici que l’ hallucination le gagne et le submerge. « Je devins un opéra fabuleux. 
544 trange exagération ? Et voici que l’hallucination le gagne et le submerge. « Je devins un opéra fabuleux. » Il a brûlé les
545 ration ? Et voici que l’hallucination le gagne et le submerge. « Je devins un opéra fabuleux. » Il a brûlé les étapes de l
546 erge. « Je devins un opéra fabuleux. » Il a brûlé les étapes de l’initiation. Mais on ne déchaîne pas de telles puissances
547 ins un opéra fabuleux. » Il a brûlé les étapes de l’ initiation. Mais on ne déchaîne pas de telles puissances impunément. «
548 es puissances impunément. « Ma santé fut menacée. La terreur venait… J’étais mûr pour le trépas… » Alors paraît le doute,
549 fut menacée. La terreur venait… J’étais mûr pour le trépas… » Alors paraît le doute, entraînant la conscience. « Je vois
550 enait… J’étais mûr pour le trépas… » Alors paraît le doute, entraînant la conscience. « Je vois que mes malaises viennent
551 ur le trépas… » Alors paraît le doute, entraînant la conscience. « Je vois que mes malaises viennent de ne m’être pas figu
552 ne m’être pas figuré assez tôt que nous sommes à l’ Occident. » L’Occident, c’est l’Esprit incarné. L’incarnation entraîne
553 figuré assez tôt que nous sommes à l’Occident. » L’ Occident, c’est l’Esprit incarné. L’incarnation entraîne des « conditi
554 que nous sommes à l’Occident. » L’Occident, c’est l’ Esprit incarné. L’incarnation entraîne des « conditions ». C’est la vi
555 l’Occident. » L’Occident, c’est l’Esprit incarné. L’ incarnation entraîne des « conditions ». C’est la vision du travail hu
556 L’incarnation entraîne des « conditions ». C’est la vision du travail humain, inexorable et dégoûtant, mais comment échap
557 inexorable et dégoûtant, mais comment échapper ? L’ hallucination est tombée, faisant place à une stupeur désolée. « Je ne
558 une stupeur désolée. « Je ne sais plus parler. » Le renoncement dès lors est fatal. « Moi ! moi qui me suis dit mage ou a
559 e suis rendu au sol, avec un devoir à chercher et la réalité rugueuse à étreindre. » C’est le cri même de Faust. « Il faut
560 rcher et la réalité rugueuse à étreindre. » C’est le cri même de Faust. « Il faut être absolument moderne. » Travailler. S
561 d’un seul tenant ; une seule et unique expérience la remplit : l’envahissement de la magie aboutissant au renoncement et à
562 ant ; une seule et unique expérience la remplit : l’ envahissement de la magie aboutissant au renoncement et à l’action. Le
563 unique expérience la remplit : l’envahissement de la magie aboutissant au renoncement et à l’action. Le second Rimbaud est
564 ement de la magie aboutissant au renoncement et à l’ action. Le second Rimbaud est vraiment le même que le premier, dans un
565 ent et à l’action. Le second Rimbaud est vraiment le même que le premier, dans une phase plus « réalisée ». L’homme modern
566 que le premier, dans une phase plus « réalisée ». L’ homme moderne est peu fait pour comprendre cela, de même qu’il est peu
567 comprendre cela, de même qu’il est peu fait pour la grandeur et la pureté, et pour des paroles comme « Si ton œil te fait
568 a, de même qu’il est peu fait pour la grandeur et la pureté, et pour des paroles comme « Si ton œil te fait tomber dans le
569 es paroles comme « Si ton œil te fait tomber dans le péché, arrache-le et jette-le loin de toi ». Mais Rimbaud est d’une a
570  Si ton œil te fait tomber dans le péché, arrache- le et jette-le loin de toi ». Mais Rimbaud est d’une autre trempe : il a
571 te fait tomber dans le péché, arrache-le et jette- le loin de toi ». Mais Rimbaud est d’une autre trempe : il a déjà prouvé
572 d’une autre trempe : il a déjà prouvé en écrivant les Illuminations qu’il peut renoncer violemment à tout un monde faux pou
573 noncement. Nous aurions combiné tout cela avec de la littérature. Car il n’est pas donné à beaucoup d’hommes de devenir un
574 hommes de devenir un mythe à force de pureté dans la réalisation de leur destin. Rimbaud est notre mythe occidental : myth
575 cidental : mythe faustien. Il a vécu tragiquement la tentation orientale, l’a condamnée, l’a dépassée, acceptant comme Goe
576 n. Il a vécu tragiquement la tentation orientale, l’ a condamnée, l’a dépassée, acceptant comme Goethe les conditions réell
577 agiquement la tentation orientale, l’a condamnée, l’ a dépassée, acceptant comme Goethe les conditions réelles et données d
578 a condamnée, l’a dépassée, acceptant comme Goethe les conditions réelles et données de son effort particulier. Ce renonceme
579 un Orient de mythe, c’est cela même qui constitue l’ Occident spirituel. C’est le refus de la magie qui fonde notre éthique
580 la même qui constitue l’Occident spirituel. C’est le refus de la magie qui fonde notre éthique, et ce dilemme est peut-êtr
581 constitue l’Occident spirituel. C’est le refus de la magie qui fonde notre éthique, et ce dilemme est peut-être le plus im
582 fonde notre éthique, et ce dilemme est peut-être le plus important qui se pose à l’esprit occidental, dès qu’il atteint l
583 mme est peut-être le plus important qui se pose à l’ esprit occidental, dès qu’il atteint les régions de haute tension où l
584 se pose à l’esprit occidental, dès qu’il atteint les régions de haute tension où la seule « orientation » qu’il adopte suf
585 dès qu’il atteint les régions de haute tension où la seule « orientation » qu’il adopte suffit à déterminer une suite d’ac
586 ux. C’est une forme dialectique, « agonique », de la vie de l’âme, une forme cruciale, c’est-à-dire une de ces contradicti
587 une forme dialectique, « agonique », de la vie de l’ âme, une forme cruciale, c’est-à-dire une de ces contradictions essent
588 ictions essentielles, en signe de croix, qui sont la marque même de la réalité dans une conscience occidentale. Supprimez
589 es, en signe de croix, qui sont la marque même de la réalité dans une conscience occidentale. Supprimez l’un des termes, e
590 cience occidentale. Supprimez l’un des termes, et la vie se détend, le tragique s’évanouit. Que ce mythe dialectique soit
591 . Supprimez l’un des termes, et la vie se détend, le tragique s’évanouit. Que ce mythe dialectique soit profondément const
592 ique soit profondément constitutif de notre être, l’ extension et la diversité de ses aspects le prouvent. C’est l’oppositi
593 ndément constitutif de notre être, l’extension et la diversité de ses aspects le prouvent. C’est l’opposition du savoir et
594 être, l’extension et la diversité de ses aspects le prouvent. C’est l’opposition du savoir et du pouvoir, de la connaissa
595 et la diversité de ses aspects le prouvent. C’est l’ opposition du savoir et du pouvoir, de la connaissance et de la souffr
596 t. C’est l’opposition du savoir et du pouvoir, de la connaissance et de la souffrance, de la spéculation et de l’existence
597 du savoir et du pouvoir, de la connaissance et de la souffrance, de la spéculation et de l’existence, de l’au-delà mystiqu
598 uvoir, de la connaissance et de la souffrance, de la spéculation et de l’existence, de l’au-delà mystique et de l’immédiat
599 ance et de la souffrance, de la spéculation et de l’ existence, de l’au-delà mystique et de l’immédiat éthique. Et quels so
600 uffrance, de la spéculation et de l’existence, de l’ au-delà mystique et de l’immédiat éthique. Et quels sont les plus gran
601 on et de l’existence, de l’au-delà mystique et de l’ immédiat éthique. Et quels sont les plus grands Occidentaux ? Ceux qui
602 mystique et de l’immédiat éthique. Et quels sont les plus grands Occidentaux ? Ceux qui ont incarné le choix le plus audac
603 es plus grands Occidentaux ? Ceux qui ont incarné le choix le plus audacieux. Pascal choisit une fois pour toutes, dans un
604 rands Occidentaux ? Ceux qui ont incarné le choix le plus audacieux. Pascal choisit une fois pour toutes, dans une crise l
605 hoisit dans une crise instinctive qui ressemble à la chute soudaine de l’ivresse devant le mortel danger qui se lève à un
606 instinctive qui ressemble à la chute soudaine de l’ ivresse devant le mortel danger qui se lève à un pas. Tous deux réalis
607 ressemble à la chute soudaine de l’ivresse devant le mortel danger qui se lève à un pas. Tous deux réalisent le renoncemen
608 danger qui se lève à un pas. Tous deux réalisent le renoncement, le deuxième temps de cette dialectique, dans un mouvemen
609 reviennent tous deux de loin, d’un long abandon à l’ erreur. Goethe n’a pas connu de tels déchirements. Et c’est lui qui mé
610 u de tels déchirements. Et c’est lui qui méritera la phrase de la Saison : « Pas de partis de salut violents. » Dès les pr
611 hirements. Et c’est lui qui méritera la phrase de la Saison : « Pas de partis de salut violents. » Dès les premiers instan
612 défense et de lenteur. Il avance ainsi pas à pas, l’ âme tendue dans une puissante circonspection, pendant soixante ans, sa
613 amais s’abandonner aux bienheureuses violences de l’ orage, au repos de la démesure. On rit de ses allures compassées, des
614 x bienheureuses violences de l’orage, au repos de la démesure. On rit de ses allures compassées, des solennelles banalités
615 ssées, des solennelles banalités dont il gratifie le pauvre Eckermann. Je ne puis voir dans ces façons que la distraction
616 re Eckermann. Je ne puis voir dans ces façons que la distraction souveraine d’une âme tout occupée à dompter ses dieux. Un
617 dieux. Une haute menace, invisible à tout autre, l’ accompagne sans trêve, et c’est d’elle qu’il tire ses forces, toujours
618 informe peu à peu une sorte d’instinct, libérant l’ attention consciente. C’est ainsi que le voyant audacieux qui écrivit
619 libérant l’attention consciente. C’est ainsi que le voyant audacieux qui écrivit les chœurs mystiques du Second Faust peu
620 . C’est ainsi que le voyant audacieux qui écrivit les chœurs mystiques du Second Faust peut aussi faire figure de sage offi
621 st peut aussi faire figure de sage officiel parmi les philistins. Le somnambule est désormais protégé par une cotte d’invis
622 ire figure de sage officiel parmi les philistins. Le somnambule est désormais protégé par une cotte d’invisible silence. V
623 d’invisible silence. Vous pouvez lui parler sans le troubler : les mots n’atteignent plus son rêve profond. Et le cérémon
624 ilence. Vous pouvez lui parler sans le troubler : les mots n’atteignent plus son rêve profond. Et le cérémonieux silence du
625 : les mots n’atteignent plus son rêve profond. Et le cérémonieux silence du ministre renouvelle le vieux mythe germanique
626 Et le cérémonieux silence du ministre renouvelle le vieux mythe germanique de la « Tarnkappe », du manteau qui rend invis
627 ministre renouvelle le vieux mythe germanique de la « Tarnkappe », du manteau qui rend invisible. ⁂ Cette similitude de f
628 rend invisible. ⁂ Cette similitude de forme dans le cours de la magie chez Goethe et chez Rimbaud, et d’autre part le con
629 ble. ⁂ Cette similitude de forme dans le cours de la magie chez Goethe et chez Rimbaud, et d’autre part le contraste absol
630 agie chez Goethe et chez Rimbaud, et d’autre part le contraste absolu des rythmes, vont se traduire dans la similitude des
631 ntraste absolu des rythmes, vont se traduire dans la similitude des conclusions éthiques et dans la divergence des réalisa
632 ns la similitude des conclusions éthiques et dans la divergence des réalisations littéraires. « Bon esprit, prends garde !
633 de salut violents. Exerce-toi ». Objurgation que l’ on croirait tirée de quelque journal intime du Goethe des années ascét
634 e du Goethe des années ascétiques, à Weimar avant l’ Italie. Et le passage fameux de la Saison : « moi qui me suis dit mage
635 es années ascétiques, à Weimar avant l’Italie. Et le passage fameux de la Saison : « moi qui me suis dit mage ou ange… » r
636 à Weimar avant l’Italie. Et le passage fameux de la Saison : « moi qui me suis dit mage ou ange… » rappelle étrangement c
637 appelle étrangement ces vers du Premier Faust que l’ on citait plus haut : « Moi qui me suis cru plus grand que le Chérubin
638 plus haut : « Moi qui me suis cru plus grand que le Chérubin. » « Point de cantiques : tenir le pas gagné… la réalité rug
639 d que le Chérubin. » « Point de cantiques : tenir le pas gagné… la réalité rugueuse à étreindre ». Certes, les sentences d
640 bin. » « Point de cantiques : tenir le pas gagné… la réalité rugueuse à étreindre ». Certes, les sentences du vieil Olympi
641 gagné… la réalité rugueuse à étreindre ». Certes, les sentences du vieil Olympien de la légende ont peu de consonance avec
642 dre ». Certes, les sentences du vieil Olympien de la légende ont peu de consonance avec un tel pathétique, mais quel écho
643 hétique, mais quel écho n’eût-il pas éveillé dans l’ âme du jeune ministre de 32 ans, adonné vers ce temps au plus dur effo
644 ode de repliement et de refus, si douloureuse que le signe en devient visible sur ses traits. Je ne me lasse pas de médite
645 lasse pas de méditer ce visage dont Klauer modela l’ effigie passionnément triste et dominatrice. Large bouche aux lèvres s
646 et dominatrice. Large bouche aux lèvres serrées, l’ inférieure creusée comme d’un sanglot retenu, et relâchée aux commissu
647 hée aux commissures, — tristesse et volupté. Mais le front d’une plénitude royale s’avance fortement contre la lumière, et
648 d’une plénitude royale s’avance fortement contre la lumière, et les yeux, entre cette bouche et ce front, disent d’un sob
649 e royale s’avance fortement contre la lumière, et les yeux, entre cette bouche et ce front, disent d’un sobre et méditant r
650 et ce front, disent d’un sobre et méditant regard le mot suprême de la Saison, ce cri sourd du plus lucide héroïsme : « Et
651 t d’un sobre et méditant regard le mot suprême de la Saison, ce cri sourd du plus lucide héroïsme : « Et allons ! » Goethe
652 me : « Et allons ! » Goethe seul est allé jusqu’à la délivrance consciente. Il y a dans tout désespoir à la fois l’angoiss
653 consciente. Il y a dans tout désespoir à la fois l’ angoisse de la catastrophe et la secrète, l’inavouable joie de la libé
654 l y a dans tout désespoir à la fois l’angoisse de la catastrophe et la secrète, l’inavouable joie de la libération. Imposs
655 sespoir à la fois l’angoisse de la catastrophe et la secrète, l’inavouable joie de la libération. Impossible d’isoler ces
656 fois l’angoisse de la catastrophe et la secrète, l’ inavouable joie de la libération. Impossible d’isoler ces deux composa
657 a catastrophe et la secrète, l’inavouable joie de la libération. Impossible d’isoler ces deux composantes dans l’aventure
658 on. Impossible d’isoler ces deux composantes dans l’ aventure rimbaldienne. Mais chez Goethe, c’est la longueur du temps qu
659 l’aventure rimbaldienne. Mais chez Goethe, c’est la longueur du temps qui les dénoncera. Et cette fameuse sérénité de sa
660 Mais chez Goethe, c’est la longueur du temps qui les dénoncera. Et cette fameuse sérénité de sa vieillesse, ce n’est rien
661 vieillesse, ce n’est rien d’autre, peut-être, que le triomphe de l’élément libérateur du désespoir. La longue peine de cel
662 n’est rien d’autre, peut-être, que le triomphe de l’ élément libérateur du désespoir. La longue peine de celui « qui toujou
663 le triomphe de l’élément libérateur du désespoir. La longue peine de celui « qui toujours s’est efforcé » a purifié le cor
664 de celui « qui toujours s’est efforcé » a purifié le corps, et l’âme est prête à recevoir « l’amour d’en haut ». Car telle
665 i toujours s’est efforcé » a purifié le corps, et l’ âme est prête à recevoir « l’amour d’en haut ». Car telle est le yoga
666 purifié le corps, et l’âme est prête à recevoir «  l’ amour d’en haut ». Car telle est le yoga occidental, dont le Second Fa
667 e à recevoir « l’amour d’en haut ». Car telle est le yoga occidental, dont le Second Faust restera comme le livre sacré. Q
668 ga occidental, dont le Second Faust restera comme le livre sacré. Que cette discipline libératrice comporte pour Rimbaud l
669 ette discipline libératrice comporte pour Rimbaud le silence, alors qu’elle propose à Goethe, comme un exercice de choix,
670 lle propose à Goethe, comme un exercice de choix, l’ écriture, — cela n’a rien que de logique, et résulte de la définition
671 re, — cela n’a rien que de logique, et résulte de la définition même d’un tel yoga. Tout savoir doit être confirmé par un
672 Tout savoir doit être confirmé par un faire, qui le tait et l’exprime à la fois. Le « faire » de Rimbaud ne peut être la
673 r doit être confirmé par un faire, qui le tait et l’ exprime à la fois. Le « faire » de Rimbaud ne peut être la littérature
674 par un faire, qui le tait et l’exprime à la fois. Le « faire » de Rimbaud ne peut être la littérature, puisque écrire sign
675 e à la fois. Le « faire » de Rimbaud ne peut être la littérature, puisque écrire signifie pour lui révéler, parler, crier,
676 gnifie pour lui révéler, parler, crier, miraculer le réel. Au contraire l’on peut considérer sans paradoxe que la littérat
677 r, parler, crier, miraculer le réel. Au contraire l’ on peut considérer sans paradoxe que la littérature de Goethe est un d
678 contraire l’on peut considérer sans paradoxe que la littérature de Goethe est un des moyens de silence dont il dispose. N
679 de silence dont il dispose. Ni plus ni moins que l’ étude des sciences naturelles, la régie d’un théâtre ou l’administrati
680 lus ni moins que l’étude des sciences naturelles, la régie d’un théâtre ou l’administration du Grand-Duché. « J’ai toujour
681 des sciences naturelles, la régie d’un théâtre ou l’ administration du Grand-Duché. « J’ai toujours considéré mon activité
682 des assiettes »10. Si tout de même il a peiné sur la composition d’Iphigénie ou des Ballades, c’est que l’art est pour lui
683 omposition d’Iphigénie ou des Ballades, c’est que l’ art est pour lui la tentation la plus aiguë de jouer avec les mystères
684 nie ou des Ballades, c’est que l’art est pour lui la tentation la plus aiguë de jouer avec les mystères, et par là même l’
685 llades, c’est que l’art est pour lui la tentation la plus aiguë de jouer avec les mystères, et par là même l’occasion de r
686 pour lui la tentation la plus aiguë de jouer avec les mystères, et par là même l’occasion de réaliser sans cesse à nouveau
687 aiguë de jouer avec les mystères, et par là même l’ occasion de réaliser sans cesse à nouveau l’exigence dernière de la ma
688 même l’occasion de réaliser sans cesse à nouveau l’ exigence dernière de la magie : son reniement au profit de l’action. I
689 liser sans cesse à nouveau l’exigence dernière de la magie : son reniement au profit de l’action. Insistons sur ce terme d
690 dernière de la magie : son reniement au profit de l’ action. Insistons sur ce terme de profit, qu’on ne saurait ici taxer d
691 aurait ici taxer de vulgarité, puisqu’il concerne les fins les plus hautes de l’existence terrestre. « Un fait de notre vie
692 i taxer de vulgarité, puisqu’il concerne les fins les plus hautes de l’existence terrestre. « Un fait de notre vie ne vaut
693 é, puisqu’il concerne les fins les plus hautes de l’ existence terrestre. « Un fait de notre vie ne vaut pas en tant qu’il
694 u’il signifie quelque chose… Il est bien rare que l’ on soit apte à s’agréger ce qui est supérieur. C’est pourquoi l’on fai
695 à s’agréger ce qui est supérieur. C’est pourquoi l’ on fait bien, dans la vie ordinaire, de garder ces choses-là pour soi
696 st supérieur. C’est pourquoi l’on fait bien, dans la vie ordinaire, de garder ces choses-là pour soi et de n’en découvrir
697 s puissent être de quelque avantage aux autres11… L’ homme n’est pas né pour résoudre le problème de l’univers, mais bien p
698 aux autres11… L’homme n’est pas né pour résoudre le problème de l’univers, mais bien pour rechercher où tend ce problème,
699 L’homme n’est pas né pour résoudre le problème de l’ univers, mais bien pour rechercher où tend ce problème, et ensuite se
700 ù tend ce problème, et ensuite se maintenir entre les limites de l’intelligible »12. L’on découvre ici la source de l’étran
701 ème, et ensuite se maintenir entre les limites de l’ intelligible »12. L’on découvre ici la source de l’étrange refus de Go
702 aintenir entre les limites de l’intelligible »12. L’ on découvre ici la source de l’étrange refus de Goethe, dès qu’il s’ag
703 limites de l’intelligible »12. L’on découvre ici la source de l’étrange refus de Goethe, dès qu’il s’agit de faire état d
704 ’intelligible »12. L’on découvre ici la source de l’ étrange refus de Goethe, dès qu’il s’agit de faire état des causes pre
705 pose aux dévots : « S’occuper d’idées relatives à l’ immortalité, poursuivit Goethe, cela convient aux gens du monde et sur
706 ue chose ici-bas, et qui par conséquent doit tous les jours travailler, combattre, agir, laisse en paix le monde futur et s
707 jours travailler, combattre, agir, laisse en paix le monde futur et se contente d’être actif et utile en celui-ci »13. À q
708 confession mémorable : « Nous ne devons proférer les plus hautes maximes qu’autant qu’elles sont utiles pour le bien du mo
709 autes maximes qu’autant qu’elles sont utiles pour le bien du monde. Les autres, nous devons les garder pour nous ; elles s
710 utant qu’elles sont utiles pour le bien du monde. Les autres, nous devons les garder pour nous ; elles seront toujours là p
711 es pour le bien du monde. Les autres, nous devons les garder pour nous ; elles seront toujours là pour diffuser leur éclat
712 ser leur éclat sur tout ce que nous ferons, comme la douce lumière d’un soleil caché14. » Écrire, tout en se taisant. Et c
713 ls entendront ce silence, qui auront su percevoir l’ accent dominateur et tendu des pages les plus égales et sereines du Fa
714 percevoir l’accent dominateur et tendu des pages les plus égales et sereines du Faust. Mais, qu’à ce tempérament démoniaqu
715 es du Faust. Mais, qu’à ce tempérament démoniaque l’ on enlève la force plus grande encore du caractère, et voici la confes
716 Mais, qu’à ce tempérament démoniaque l’on enlève la force plus grande encore du caractère, et voici la confession éruptiv
717 a force plus grande encore du caractère, et voici la confession éruptive : les Illuminations naissent d’une telle rupture.
718 e du caractère, et voici la confession éruptive : les Illuminations naissent d’une telle rupture. Elles sont le champ même1
719 inations naissent d’une telle rupture. Elles sont le champ même15 où Rimbaud se livre à l’expérience spirituelle, où il se
720 Elles sont le champ même15 où Rimbaud se livre à l’ expérience spirituelle, où il se livre tout entier. Et c’est là sa pur
721 r. Et c’est là sa pureté, mais c’est aussi ce qui l’ accule en fin de compte à l’évasion. La rage avec laquelle il se rabat
722 is c’est aussi ce qui l’accule en fin de compte à l’ évasion. La rage avec laquelle il se rabat sur le travail « à mains »,
723 ssi ce qui l’accule en fin de compte à l’évasion. La rage avec laquelle il se rabat sur le travail « à mains », rage de re
724 l’évasion. La rage avec laquelle il se rabat sur le travail « à mains », rage de revanche, par son excès même est encore
725 poque voudra-t-elle encore de ces évasions ? Elle les reproche au christianisme, avec moins de raison d’ailleurs (puisque l
726 ianisme, avec moins de raison d’ailleurs (puisque le christianisme affirme que l’éternité est dans l’instant : Aeternitas
727 d’ailleurs (puisque le christianisme affirme que l’ éternité est dans l’instant : Aeternitas non est tempus sine fine, sed
728 le christianisme affirme que l’éternité est dans l’ instant : Aeternitas non est tempus sine fine, sed nunc stans). Elle v
729 sed nunc stans). Elle veut cette vie-ci. Et tout le reste, qu’elle soit marxiste ou nietzschéenne, elle l’appelle « l’arr
730 ste, qu’elle soit marxiste ou nietzschéenne, elle l’ appelle « l’arrière-monde » et le rejette, en ceci plus chrétienne, pl
731 soit marxiste ou nietzschéenne, elle l’appelle «  l’ arrière-monde » et le rejette, en ceci plus chrétienne, plus tragique
732 tzschéenne, elle l’appelle « l’arrière-monde » et le rejette, en ceci plus chrétienne, plus tragique que l’époque romantiq
733 jette, en ceci plus chrétienne, plus tragique que l’ époque romantique (Nietzsche plus chrétien que son idée du christianis
734 rait de placer Goethe au-dessus de Rimbaud. C’est la pureté démesurée de Rimbaud qui nous juge, et la grandeur humaine de
735 la pureté démesurée de Rimbaud qui nous juge, et la grandeur humaine de Goethe. Et qui voudrait les opposer ? Que signifi
736 et la grandeur humaine de Goethe. Et qui voudrait les opposer ? Que signifierait un choix dont l’opération resterait pureme
737 rait les opposer ? Que signifierait un choix dont l’ opération resterait purement imaginaire et vaniteuse pour nous, tant q
738 cette grandeur ne tenteront pas nos âmes jusqu’à la mort ? L’homme ne peut juger que plus bas que lui. C’est-à-dire qu’il
739 ndeur ne tenteront pas nos âmes jusqu’à la mort ? L’ homme ne peut juger que plus bas que lui. C’est-à-dire qu’il n’en a pa
740 e plus bas que lui. C’est-à-dire qu’il n’en a pas le droit. Certes, il est d’autres recours, d’autres points de vision qu’
741 es recours, d’autres points de vision qu’humains. La révélation chrétienne déborde notre condition, si elle la comble par
742 ation chrétienne déborde notre condition, si elle la comble par ailleurs. Ce critère du salut, cette transcendance, en bon
743 tenait ses faiblesses pour des erreurs, non pour le péché, et d’autre part un orgueil assumé, puis renié avec la même vio
744 t d’autre part un orgueil assumé, puis renié avec la même violence, — celle dont il est écrit qu’elle force les portes du
745 violence, — celle dont il est écrit qu’elle force les portes du Royaume des Cieux. Il reste que les temps nous pressent de
746 rce les portes du Royaume des Cieux. Il reste que les temps nous pressent de toutes parts au choix, jusque dans nos admirat
747 1932, dans ce Francfort en proie au Carnaval et à l’ angoisse, ce n’est pas moi qui pose la question : elle m’assiège. Le d
748 e, pour cette bourgeoisie dont je viens d’admirer les trésors patinés dans la haute demeure familiale des Goethe. Aujourd’h
749 dont je viens d’admirer les trésors patinés dans la haute demeure familiale des Goethe. Aujourd’hui… Un immense glisseme
750 es Goethe. Aujourd’hui… Un immense glissement de la réalité hors des cadres d’une logique statique et cartésienne nous po
751 artésienne nous porte en des régions nouvelles de l’ esprit où l’action redevient notre seul critère de cohérence. C’est di
752 ous porte en des régions nouvelles de l’esprit où l’ action redevient notre seul critère de cohérence. C’est dire que nous
753 lus, prenons garde de nous laisser convaincre par les seuls éclats d’un fanatisme à vrai dire splendide. (Qui me guérira de
754 natisme à vrai dire splendide. (Qui me guérira de la honte de n’être pas Rimbaud ?) Plus que jamais, il faudrait s’appliqu
755 faudrait s’appliquer à distinguer dans ce vertige la réelle puissance d’une voix volontairement assourdie. Le silence de G
756 le puissance d’une voix volontairement assourdie. Le silence de Goethe n’est pas moins dangereux, pour qui sait l’entendre
757 e Goethe n’est pas moins dangereux, pour qui sait l’ entendre, que l’imprécation de Rimbaud : et tous deux nous contraignen
758 as moins dangereux, pour qui sait l’entendre, que l’ imprécation de Rimbaud : et tous deux nous contraignent aux tâches imm
759 traignent aux tâches immédiates, c’est-à-dire : à l’ actualisation de notre réalité. « Il faut être absolument moderne ».
760 mann, 4 février 1829. 9. Si je pouvais écarter la magie de mon chemin Oublier tout à fait les formules d’enchaînement S
761 carter la magie de mon chemin Oublier tout à fait les formules d’enchaînement Si j’étais devant toi, ô nature un homme soli
762 un homme solitaire, Sans doute vaudrait-il alors la peine d’être un homme. 10. Conversations avec Eckermann, 2 mai 18
763 t non plus symbolique. d. Rougemont Denis de, «  Le silence de Goethe », La Nouvelle Revue française, Paris, mars 1932, p
764 d. Rougemont Denis de, « Le silence de Goethe », La Nouvelle Revue française, Paris, mars 1932, p. 480-494.
5 1932, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Querelles de famille, par Georges Duhamel (mai 1932)
765 es de famille, par Georges Duhamel (mai 1932)e L’ ambiguïté, c’est du paradoxe détendu ; ou si l’on veut, c’est une cont
766 L’ambiguïté, c’est du paradoxe détendu ; ou si l’ on veut, c’est une contradiction intérieure dont les deux termes, faut
767 ’on veut, c’est une contradiction intérieure dont les deux termes, faute d’être assumés sur le plan commun de la conscience
768 ermes, faute d’être assumés sur le plan commun de la conscience où ils s’exalteraient en s’opposant franchement, tirent à
769 sens, le dernier livre de M. Duhamel, consacré à la critique des aspects orduriers et bassement mécaniques de la vie mode
770 des aspects orduriers et bassement mécaniques de la vie moderne, illustre avec un talent qu’il n’est plus temps de discut
771 exemplairement ambiguë. Rien de plus légitime que le désir d’être entendu du grand public, et c’est pourquoi l’on ne voudr
772 d’être entendu du grand public, et c’est pourquoi l’ on ne voudrait pas reprocher à M. Duhamel d’avoir adopté pour cette fo
773 el, ou plus exactement une certaine rhétorique de l’ indignation dont les figures servent en France indifféremment à des fi
774 ent une certaine rhétorique de l’indignation dont les figures servent en France indifféremment à des fins électorales, jour
775 listiques ou philanthropiques. Il faut avouer que l’ instrument révèle son insuffisance quand c’est un virtuose qui se mêle
776 virtuose qui se mêle d’en jouer. Mais sans doute le but serait-il atteint si M. Duhamel, visiblement gêné, ne coupait lui
777 pas dupe, qu’il n’est pas si furieux que ça, que la littérature enfin garde ses droits. Aussi n’est-ce point sans une gên
778 ssi n’est-ce point sans une gêne grandissante que l’ on poursuit la lecture de ces pages où maints paragraphes apportent en
779 oint sans une gêne grandissante que l’on poursuit la lecture de ces pages où maints paragraphes apportent entre deux tours
780 ximations vulgaires qui « rendraient » mieux sous la rubrique Mon film 16. En d’autres passages, d’une expression plus ser
781 errée, M. Duhamel cherche ce qu’on appelait jadis le morceau de bravoure, la page sur « les bruits de mon village » qui se
782 e ce qu’on appelait jadis le morceau de bravoure, la page sur « les bruits de mon village » qui servira de modèle aux écol
783 elait jadis le morceau de bravoure, la page sur «  les bruits de mon village » qui servira de modèle aux écoliers futurs. Ma
784 le aux écoliers futurs. Mais lorsqu’il stigmatise les méfaits des « grandes brutes mécaniques », sa verve — qu’il me pardon
785 brutes mécaniques », sa verve — qu’il me pardonne l’ image technique — n’embraye pas, et paraît forcée. Ses laborieuses exa
786 sie qui enflammerait notre indignation. C’est que l’ expression traditionnelle de la mauvaise humeur gauloise, héritage d’u
787 gnation. C’est que l’expression traditionnelle de la mauvaise humeur gauloise, héritage d’un classicisme nettement pessimi
788 ssicisme nettement pessimiste, s’accorde mal avec l’ impénitente foi dans le genre humain que M. Duhamel ne cesse d’entrete
789 imiste, s’accorde mal avec l’impénitente foi dans le genre humain que M. Duhamel ne cesse d’entretenir17. Ce malaise dans
790 Duhamel ne cesse d’entretenir17. Ce malaise dans l’ expression traduit d’ailleurs une équivoque foncière et qui porte sur
791 ’ailleurs une équivoque foncière et qui porte sur le thème général du livre. Il est inquiétant de voir un esprit de cette
792 rop et trop peu. Car, ou bien M. Duhamel critique l’ abus des mécaniques, ce qui revient à faire le vain procès de la bêtis
793 que l’abus des mécaniques, ce qui revient à faire le vain procès de la bêtise humaine. Ou bien sa réaction de dégoût est v
794 aniques, ce qui revient à faire le vain procès de la bêtise humaine. Ou bien sa réaction de dégoût est véritablement profo
795 véritablement profonde, mais alors elle implique la condamnation d’une conception du monde à la fois libérale et inconsci
796 d’une civilisation dont on refuserait de dénoncer les principes ou plutôt la carence de principes directeurs dignes de ce n
797 on refuserait de dénoncer les principes ou plutôt la carence de principes directeurs dignes de ce nom ? Serait-ce que la m
798 cipes directeurs dignes de ce nom ? Serait-ce que la mauvaise humeur du bourgeois dérangé agissant comme dérivatif, assure
799 oir une sorte de sublimation à rebours du sens de la révolte ? On serait en droit d’exiger d’un critique de son temps qu’i
800 que de son temps qu’il déclare ce qu’il attend de l’ homme. Après quoi seulement l’on distinguerait l’ordre de grandeur du
801 ce qu’il attend de l’homme. Après quoi seulement l’ on distinguerait l’ordre de grandeur du grief qu’il fait à ce temps. C
802 l’homme. Après quoi seulement l’on distinguerait l’ ordre de grandeur du grief qu’il fait à ce temps. C’est ce qu’en vain
803 grief qu’il fait à ce temps. C’est ce qu’en vain l’ on cherche au cours de cette suite de messages adressés aux Princes de
804 messages adressés aux Princes des Prêtres, à MM. les Députés, au chef du gouvernement. L’on s’étonne que M. Duhamel n’ait
805 tres, à MM. les Députés, au chef du gouvernement. L’ on s’étonne que M. Duhamel n’ait joint à son recueil une épître au pré
806 à son recueil une épître au préfet de Police sur les Embarras de Paris. Sujet de pastiche facile : décrire l’état d’esprit
807 rras de Paris. Sujet de pastiche facile : décrire l’ état d’esprit du Français moyen qui brandit son parapluie sous le nez
808 du Français moyen qui brandit son parapluie sous le nez de l’agent, invective les automobilistes, déclame au beau milieu
809 is moyen qui brandit son parapluie sous le nez de l’ agent, invective les automobilistes, déclame au beau milieu de la chau
810 t son parapluie sous le nez de l’agent, invective les automobilistes, déclame au beau milieu de la chaussée des tirades gén
811 ive les automobilistes, déclame au beau milieu de la chaussée des tirades généreusement libertaires, enraye la circulation
812 sée des tirades généreusement libertaires, enraye la circulation, « mais traverse dans les clous ». 16. « La ménagère au
813 ires, enraye la circulation, « mais traverse dans les clous ». 16. « La ménagère aux mains cuites qui raccommode ses chau
814 lation, « mais traverse dans les clous ». 16. «  La ménagère aux mains cuites qui raccommode ses chaussures, le casque au
815 e aux mains cuites qui raccommode ses chaussures, le casque aux cheveux, tête farcie, oui farcie de musique, de musique, d
816 ologue financier ou de hoquets publicitaires. “De la musique avant toute chose…” Oh ! vous ne diriez plus cela, Verlaine !
817 nsi se termine ce livre amer, sans qu’à vrai dire l’ on distingue sur quoi s’appuie pareil optimisme — sinon sur la crainte
818 ue sur quoi s’appuie pareil optimisme — sinon sur la crainte instinctive de choquer un public, qui ne supporte que la mesu
819 inctive de choquer un public, qui ne supporte que la mesure, par l’affirmation de prévisions horribles, et cependant confo
820 uer un public, qui ne supporte que la mesure, par l’ affirmation de prévisions horribles, et cependant conformes à la natur
821 de prévisions horribles, et cependant conformes à la nature des choses. e. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Georges
822 rendu] Georges Duhamel, Querelles de famille  », La Nouvelle Revue française, Paris, mai 1932, p. 913-915.
6 1932, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Ce chien, ton serviteur, par Rudyard Kipling (juillet 1932)
823 fiante, d’une grande force d’expression concrète. Le petit chien Botte raconte ses journées, « des choses et des choses co
824 a seconde page, c’est à pousser des cris de joie. Les enfants comprendront-ils ? Dans la mesure seulement où le plan de dép
825 cris de joie. Les enfants comprendront-ils ? Dans la mesure seulement où le plan de dépoétisation de leur monde confié aux
826 ts comprendront-ils ? Dans la mesure seulement où le plan de dépoétisation de leur monde confié aux manuels primaires, rat
827 nuels primaires, rate. Lire à petites doses. Vers la fin, qui est émouvante, décider que ceux qui n’aimeront pas sont ferm
828 x qui n’aimeront pas sont fermés à toute poésie à l’ état sauvage — la vraie. f. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Ru
829 pas sont fermés à toute poésie à l’état sauvage — la vraie. f. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Rudyard Kipling, Ce
830 ndu] Rudyard Kipling, Ce chien, ton serviteur  », La Nouvelle Revue française, Paris, juillet 1932, p. 149.
7 1932, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Éloge de l’imprudence, par Marcel Jouhandeau (septembre 1932)
831 Éloge de l’ imprudence, par Marcel Jouhandeau (septembre 1932)g Si dans tous le
832 rcel Jouhandeau (septembre 1932)g Si dans tous les écrits de notre temps il est question de bien, de mal, de vice et de
833 e et de vertu, de péché même, parfois, quels sont les écrivains capables de déclarer leurs références, leurs poids et leurs
834 leurs poids et leurs mesures, enfin leur choix ? L’ Occident cultive l’anarchie nominaliste la plus grave : il ne sait ou
835 rs mesures, enfin leur choix ? L’Occident cultive l’ anarchie nominaliste la plus grave : il ne sait ou n’ose plus définir
836 choix ? L’Occident cultive l’anarchie nominaliste la plus grave : il ne sait ou n’ose plus définir et assumer son bien ni
837 bien ni son mal, — et sans cesse il en parle, car la Société vit sous le règne des jugements. Mais d’autre part, peut-on p
838 t sans cesse il en parle, car la Société vit sous le règne des jugements. Mais d’autre part, peut-on parler réellement du
839 resque plus personne n’y croit avec sérieux, ni à l’ enfer ? Quand personne ne déclare un Bien si haut qu’on se fasse tuer
840 tuer pour ce Bien ? Ceci pour indiquer à la fois l’ importance et les limites du petit livre si justement paradoxal de Jou
841 en ? Ceci pour indiquer à la fois l’importance et les limites du petit livre si justement paradoxal de Jouhandeau, — de cet
842 ierkegaard critique ses mesures morales, en donne la référence : ce Dieu terrible. Et sa vertu est choix. L’absolu d’un Ni
843 érence : ce Dieu terrible. Et sa vertu est choix. L’ absolu d’un Nietzsche, c’est le Grand Midi ; et sa vertu : dépassement
844 a vertu est choix. L’absolu d’un Nietzsche, c’est le Grand Midi ; et sa vertu : dépassement. Jouhandeau à son tour se plac
845 ce dans ces marches extrêmes du bien et du mal où l’ apologie de l’un équivaut presque à celle de l’autre. C’est là qu’écla
846 ut presque à celle de l’autre. C’est là qu’éclate la violence des contraires. Pour tous ceux qui ont l’audace de se mainte
847 a violence des contraires. Pour tous ceux qui ont l’ audace de se maintenir dans une telle dialectique, il n’existe pas un
848 dialectique, il n’existe pas un choix préalable à la tentation, un choix universel et abstrait, mais des choix qui s’impos
849 qui s’imposent avec une violence égale à celle de la tentation — c’est la même violence — dans chaque situation existentie
850 ne violence égale à celle de la tentation — c’est la même violence — dans chaque situation existentielle. En sorte qu’il n
851 Bien par exemple, mais que dans chaque instant de l’ existence le mal et le bien conservent toutes leurs chances d’être pré
852 mple, mais que dans chaque instant de l’existence le mal et le bien conservent toutes leurs chances d’être préférés, et to
853 que dans chaque instant de l’existence le mal et le bien conservent toutes leurs chances d’être préférés, et toutes leurs
854 référés, et toutes leurs tentations. En sorte que l’ apologie de l’un évoque la grandeur de l’autre, et peut-être le secret
855 entations. En sorte que l’apologie de l’un évoque la grandeur de l’autre, et peut-être le secret désir de l’éveiller à la
856 l’un évoque la grandeur de l’autre, et peut-être le secret désir de l’éveiller à la conscience. Le but de ce débat, celui
857 ndeur de l’autre, et peut-être le secret désir de l’ éveiller à la conscience. Le but de ce débat, celui de Kierkegaard, ce
858 tre, et peut-être le secret désir de l’éveiller à la conscience. Le but de ce débat, celui de Kierkegaard, celui de Nietzs
859 re le secret désir de l’éveiller à la conscience. Le but de ce débat, celui de Kierkegaard, celui de Nietzsche, celui prés
860 présentement de Jouhandeau, c’est de transcender la morale et ses canons donnés d’avance. L’audace du « choix » ou du « d
861 nscender la morale et ses canons donnés d’avance. L’ audace du « choix » ou du « dépassement », cette vertu qui « supprime
862 ou du « dépassement », cette vertu qui « supprime la morale », Jouhandeau l’appelle imprudence ou générosité. Et ces mots
863 ette vertu qui « supprime la morale », Jouhandeau l’ appelle imprudence ou générosité. Et ces mots ne désignent pas autre c
864 intensité ou une pureté toujours plus folle dans le bien comme dans le mal. « Je mettrais volontiers dans le même sac hon
865 ureté toujours plus folle dans le bien comme dans le mal. « Je mettrais volontiers dans le même sac honnêtes et malhonnête
866 comme dans le mal. « Je mettrais volontiers dans le même sac honnêtes et malhonnêtes gens, mais non pas le généreux avec
867 me sac honnêtes et malhonnêtes gens, mais non pas le généreux avec le pleutre, une âme triste avec une âme joyeuse. » Voil
868 t malhonnêtes gens, mais non pas le généreux avec le pleutre, une âme triste avec une âme joyeuse. » Voilà bien le leitmot
869 une âme triste avec une âme joyeuse. » Voilà bien le leitmotiv de l’œuvre entière de Jouhandeau. Et soudain il nous appara
870 vec une âme joyeuse. » Voilà bien le leitmotiv de l’ œuvre entière de Jouhandeau. Et soudain il nous apparaît que cette œuv
871 n’aurait pas lu d’autres ouvrages de Jouhandeau, les aphorismes qui composent l’Éloge de l’imprudence paraîtront plus abst
872 rages de Jouhandeau, les aphorismes qui composent l’ Éloge de l’imprudence paraîtront plus abstraits qu’ils ne le méritent.
873 uhandeau, les aphorismes qui composent l’Éloge de l’ imprudence paraîtront plus abstraits qu’ils ne le méritent. C’est qu’i
874 l’imprudence paraîtront plus abstraits qu’ils ne le méritent. C’est qu’ils supposent l’existence d’un bien et d’un mal co
875 its qu’ils ne le méritent. C’est qu’ils supposent l’ existence d’un bien et d’un mal concrets dont les Binche ou M. Godeau
876 t l’existence d’un bien et d’un mal concrets dont les Binche ou M. Godeau ou plus récemment les héros de l’Amateur d’imprud
877 ts dont les Binche ou M. Godeau ou plus récemment les héros de l’Amateur d’imprudence incarnèrent ailleurs toutes les compl
878 inche ou M. Godeau ou plus récemment les héros de l’ Amateur d’imprudence incarnèrent ailleurs toutes les complexités. Il s
879 ’Amateur d’imprudence incarnèrent ailleurs toutes les complexités. Il s’agit, on le sait, du bien et du mal selon l’Église.
880 nt ailleurs toutes les complexités. Il s’agit, on le sait, du bien et du mal selon l’Église. Mais l’émouvante et ironique
881 s. Il s’agit, on le sait, du bien et du mal selon l’ Église. Mais l’émouvante et ironique dialectique de Jouhandeau est-ell
882 n le sait, du bien et du mal selon l’Église. Mais l’ émouvante et ironique dialectique de Jouhandeau est-elle très catholiq
883 t-elle très catholique, ou même très chrétienne ? La dialectique paulinienne postule que bien et mal appartiennent au règn
884 postule que bien et mal appartiennent au règne de la loi (de la morale). Et c’est la foi qui en libère, non pas cette « gé
885 bien et mal appartiennent au règne de la loi (de la morale). Et c’est la foi qui en libère, non pas cette « générosité »
886 nnent au règne de la loi (de la morale). Et c’est la foi qui en libère, non pas cette « générosité » malgré tout équivoque
887 n pas cette « générosité » malgré tout équivoque. La foi révèle une réalité essentiellement différente et qui enveloppe to
888 llement différente et qui enveloppe tout ensemble les catégories du bien et du mal : le péché. Le contraire d’un péché, c’e
889 tout ensemble les catégories du bien et du mal : le péché. Le contraire d’un péché, c’est-à-dire ce qui le supprime, ce n
890 mble les catégories du bien et du mal : le péché. Le contraire d’un péché, c’est-à-dire ce qui le supprime, ce n’est pas u
891 ché. Le contraire d’un péché, c’est-à-dire ce qui le supprime, ce n’est pas une vertu, mais le pardon. La vertu comme le v
892 ce qui le supprime, ce n’est pas une vertu, mais le pardon. La vertu comme le vice naît de la loi et s’y réfère. Mais le
893 supprime, ce n’est pas une vertu, mais le pardon. La vertu comme le vice naît de la loi et s’y réfère. Mais le péché naît
894 est pas une vertu, mais le pardon. La vertu comme le vice naît de la loi et s’y réfère. Mais le péché naît où meurt la foi
895 u, mais le pardon. La vertu comme le vice naît de la loi et s’y réfère. Mais le péché naît où meurt la foi, et meurt là où
896 comme le vice naît de la loi et s’y réfère. Mais le péché naît où meurt la foi, et meurt là où vit la foi. Au bien vulgai
897 la loi et s’y réfère. Mais le péché naît où meurt la foi, et meurt là où vit la foi. Au bien vulgaire des moralistes, Jouh
898 le péché naît où meurt la foi, et meurt là où vit la foi. Au bien vulgaire des moralistes, Jouhandeau oppose le mal ; à ce
899 u bien vulgaire des moralistes, Jouhandeau oppose le mal ; à celui-ci le Bien ; d’où naissent le désir et la nécessité du
900 moralistes, Jouhandeau oppose le mal ; à celui-ci le Bien ; d’où naissent le désir et la nécessité du Mal absolu ; sur quo
901 ppose le mal ; à celui-ci le Bien ; d’où naissent le désir et la nécessité du Mal absolu ; sur quoi il reste béant. Mais l
902  ; à celui-ci le Bien ; d’où naissent le désir et la nécessité du Mal absolu ; sur quoi il reste béant. Mais la réalité de
903 ité du Mal absolu ; sur quoi il reste béant. Mais la réalité de la foi est inverse. Elle fait voir le mal comme donnée imm
904 olu ; sur quoi il reste béant. Mais la réalité de la foi est inverse. Elle fait voir le mal comme donnée immédiate ; puis
905 la réalité de la foi est inverse. Elle fait voir le mal comme donnée immédiate ; puis le bien ; puis le péché et le pardo
906 le fait voir le mal comme donnée immédiate ; puis le bien ; puis le péché et le pardon. Et la grâce est déjà dans l’œil qu
907 mal comme donnée immédiate ; puis le bien ; puis le péché et le pardon. Et la grâce est déjà dans l’œil qui sait voir le
908 onnée immédiate ; puis le bien ; puis le péché et le pardon. Et la grâce est déjà dans l’œil qui sait voir le péché au sei
909 e ; puis le bien ; puis le péché et le pardon. Et la grâce est déjà dans l’œil qui sait voir le péché au sein du mal et du
910 le péché et le pardon. Et la grâce est déjà dans l’ œil qui sait voir le péché au sein du mal et du bien à la fois. « Mal 
911 on. Et la grâce est déjà dans l’œil qui sait voir le péché au sein du mal et du bien à la fois. « Mal » ou « péché » — le
912 mal et du bien à la fois. « Mal » ou « péché » — le débat se ramène sur cette page, à une question de vocabulaire. Une si
913 de, « [Compte rendu] Marcel Jouhandeau, Éloge de l’ imprudence  », La Nouvelle Revue française, Paris, septembre 1932, p. 
914 ndu] Marcel Jouhandeau, Éloge de l’imprudence  », La Nouvelle Revue française, Paris, septembre 1932, p. 442-444.
8 1932, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Alexandre, par Klaus Mann (septembre 1932)
915 Klaus Mann (septembre 1932)h Ce n’est pas pour l’ amour du laurier, mais pour l’amour de son ami Clitus, poète abstrait
916 Ce n’est pas pour l’amour du laurier, mais pour l’ amour de son ami Clitus, poète abstrait à la mode de 1920, qu’Alexandr
917 pour l’amour de son ami Clitus, poète abstrait à la mode de 1920, qu’Alexandre a conquis le monde. Le défaut de ce point
918 bstrait à la mode de 1920, qu’Alexandre a conquis le monde. Le défaut de ce point de vue, c’est qu’il n’étonnera personne,
919 la mode de 1920, qu’Alexandre a conquis le monde. Le défaut de ce point de vue, c’est qu’il n’étonnera personne, alors qu’
920 ue d’ailleurs, avec, en plus, du sentimentalisme. La préface de Cocteau joue sur les thèmes, inépuisables, du profil de pl
921 u sentimentalisme. La préface de Cocteau joue sur les thèmes, inépuisables, du profil de plâtre, des boules de neige et du
922 is de, « [Compte rendu] Klaus Mann, Alexandre  », La Nouvelle Revue française, Paris, septembre 1932, p. 477.
9 1932, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Cahier de revendications [Présentation] (décembre 1932)
923 Est-il possible de définir une cause commune de la jeunesse française, une communauté d’attitude essentielle ? Il semble
924 communauté d’attitude essentielle ? Il semble que la solidarité du péril crée en nous une unité que n’ont su faire ni maît
925 re ni maîtres ni doctrines, unité de refus devant la consternante misère d’une époque où tout ce qu’un homme peut aimer et
926 celui de la Troisième Internationale. Toutefois, la doctrine marxiste, en dehors de laquelle il s’est constitué, forme l’
927 tifs respectifs sont communs… Déjà s’affirme dans l’ attitude de tous ces groupes un véritable acte de présence à la misère
928 tous ces groupes un véritable acte de présence à la misère du siècle, assez nouveau parmi les intellectuels, et si violem
929 ésence à la misère du siècle, assez nouveau parmi les intellectuels, et si violemment accentué qu’il peut paraître suffisan
930 t été réunies — rapidement car tout nous presse — les déclarations que l’on va lire. i. Rougemont Denis de, « Cahier de
931 ement car tout nous presse — les déclarations que l’ on va lire. i. Rougemont Denis de, « Cahier de revendications », La
932 Rougemont Denis de, « Cahier de revendications », La Nouvelle Revue française, Paris, décembre 1932, p. 801.
10 1932, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). À prendre ou à tuer (décembre 1932)
933 chose, dans une société organisée (et mal) contre les « risques-vie », livrée aux basses rigueurs d’un cadre policier. Que
934 op facilement admettre autour de nous. Voilà bien l’ exigence que nous voulons rendre inconfortable, inadmissible, et dans
935 rendre inconfortable, inadmissible, et dans toute l’ urgence du terme : actuelle. Il y va de la qualité même de notre vie ;
936 s toute l’urgence du terme : actuelle. Il y va de la qualité même de notre vie ; de notre choix. Il y va de cette qualité
937 de cette qualité même d’impossible qui seule rend la vie possible, c’est-à-dire grande. Devant les solutions qu’on nous pr
938 rend la vie possible, c’est-à-dire grande. Devant les solutions qu’on nous propose d’urgence, il est clair que toute impart
939 de grandeur, et comblée de risques mortels. Pour la jeunesse de 1932, le conflit de vivre, le paradoxe fondamental de tou
940 lée de risques mortels. Pour la jeunesse de 1932, le conflit de vivre, le paradoxe fondamental de toute « existence » se c
941 s. Pour la jeunesse de 1932, le conflit de vivre, le paradoxe fondamental de toute « existence » se concrétise dans une « 
942 étise dans une « nécessité » révolutionnaire dont l’ ampleur est sans précédent. Ce n’est plus de conflits d’idées qu’il s’
943 conflits d’intérêts. Mais pour nous, entrés dans la vie sous le coup d’une menace de faillite planétaire, il ne peut s’ag
944 intérêts. Mais pour nous, entrés dans la vie sous le coup d’une menace de faillite planétaire, il ne peut s’agir de rien d
945 agir de rien d’autre que de ceci : s’entendre sur le meilleur ou sur le seul moyen d’en réchapper, — l’imposer. Ce n’est p
946 e que de ceci : s’entendre sur le meilleur ou sur le seul moyen d’en réchapper, — l’imposer. Ce n’est plus pour quelque « 
947 e meilleur ou sur le seul moyen d’en réchapper, —  l’ imposer. Ce n’est plus pour quelque « idéal » que nous avons à lutter
948 ue nous avons à lutter hic et nunc, mais pour que les hommes vivent et demeurent des hommes. Il y a deux camps : ceux qui
949 ient bien continuer, ayant certains intérêts dans l’ affaire. Entre eux, la masse des braves gens persuadés qu’après tout ç
950 yant certains intérêts dans l’affaire. Entre eux, la masse des braves gens persuadés qu’après tout ça va se remettre, ça v
951 s cris. Il est vrai que certains, au lendemain de la guerre, ont trop souvent crié au loup, par goût des atmosphères tragi
952 s tout rien de mieux à faire. Et vous pensiez que la révolution, c’était une bande de méchants garçons. Puis vous avez pen
953 vides. Et maintenant, c’est vous qui glissez dans l’ angoisse. Vous et vos maîtres. Bientôt vous chercherez des équipes de
954 chercherez des équipes de sauvetage.   Ici paraît le communisme, comme une constatation de la faillite, une liquidation à
955 i paraît le communisme, comme une constatation de la faillite, une liquidation à un taux sous-humain. Voici le Plan, prêt
956 ite, une liquidation à un taux sous-humain. Voici le Plan, prêt à reprendre l’entreprise sur des bases plus rationnelles.
957 taux sous-humain. Voici le Plan, prêt à reprendre l’ entreprise sur des bases plus rationnelles. Mais si c’était cette « ra
958 i c’était cette « raison » déjà qui se trouvait à l’ origine de tout le mal ?   Telles sont les composantes de notre situat
959 raison » déjà qui se trouvait à l’origine de tout le mal ?   Telles sont les composantes de notre situation. Nous sommes l
960 ouvait à l’origine de tout le mal ?   Telles sont les composantes de notre situation. Nous sommes là : n’y pouvant plus ten
961 un « ordre » et des « idéaux » criminels. Il y a la guerre proche. La ferons-nous ? pour qui ? Il y a la misère présente 
962 es « idéaux » criminels. Il y a la guerre proche. La ferons-nous ? pour qui ? Il y a la misère présente : pourquoi la supp
963 guerre proche. La ferons-nous ? pour qui ? Il y a la misère présente : pourquoi la supporterons-nous ? La révolution, ce n
964 ? pour qui ? Il y a la misère présente : pourquoi la supporterons-nous ? La révolution, ce n’est plus un état d’esprit, ni
965 misère présente : pourquoi la supporterons-nous ? La révolution, ce n’est plus un état d’esprit, ni un refus des tâches d’
966 t, ni un refus des tâches d’homme. Henri Lefebvre l’ a montré, je n’ajouterai rien à sa déclaration si simple. La révolutio
967 , je n’ajouterai rien à sa déclaration si simple. La révolution est une nécessité au sens le plus banal du terme, et aussi
968 i simple. La révolution est une nécessité au sens le plus banal du terme, et aussi à son sens de « misère qui appelle ». N
969 autrui », mais des hommes menacés, qui dévisagent la menace et contre-attaquent. Et alors, toute une jeunesse va se dresse
970 ser ? Va prendre parti, et agir ?… — Paralysie. —  Le salut qu’on lui offre, il faudrait qu’elle le paie du prix de l’âme m
971 . — Le salut qu’on lui offre, il faudrait qu’elle le paie du prix de l’âme même. On nous donne à choisir entre un régime b
972 lui offre, il faudrait qu’elle le paie du prix de l’ âme même. On nous donne à choisir entre un régime bourgeois odieux, ra
973 utopie, qu’il nous est impossible d’accepter avec le « bon cœur » que préconise Philippe Lamour, parce que nous n’y voyons
974 te résistance interne, de cela justement que dans le désordre régnant, nous détestons de toute la force de notre âme : la
975 dans le désordre régnant, nous détestons de toute la force de notre âme : la primauté du matériel. Comment penser — si « p
976 , nous détestons de toute la force de notre âme : la primauté du matériel. Comment penser — si « penser » est inséparable
977 sie déchue et un marxisme faux ? Il reste à faire la révolution. Ni à gauche, ni à droite, il n’y a rien pour nous. Nous n
978 ite, il n’y a rien pour nous. Nous nous plaçons à l’ origine de quelque chose d’autre, dont la réalité échappe encore à ceu
979 laçons à l’origine de quelque chose d’autre, dont la réalité échappe encore à ceux qui récitent Marx : une « utopie » sans
980 utopie » sans doute, — du moins vraie celle-là.   Les témoignages qu’on a pu lire plus haut définissent deux positions révo
981 Tout le monde sait ce que signifie politiquement le vieil appel à la lutte des classes, ce pragmatisme, cet acte de foi o
982 it ce que signifie politiquement le vieil appel à la lutte des classes, ce pragmatisme, cet acte de foi optimiste dans le
983 s, ce pragmatisme, cet acte de foi optimiste dans le cours « dialectique » de l’Histoire, qui caractérisent la position ma
984 de foi optimiste dans le cours « dialectique » de l’ Histoire, qui caractérisent la position marxiste. Par contre, les base
985 « dialectique » de l’Histoire, qui caractérisent la position marxiste. Par contre, les bases doctrinales exposées ici par
986 i caractérisent la position marxiste. Par contre, les bases doctrinales exposées ici par des membres d’Esprit, de Combat, d
987 entre un capitalisme plus ou moins fascistisé, et le communisme (plus ou moins fordisé). Les marxistes détiennent l’avanta
988 istisé, et le communisme (plus ou moins fordisé). Les marxistes détiennent l’avantage certain de tabler sur une « utopie »
989 (plus ou moins fordisé). Les marxistes détiennent l’ avantage certain de tabler sur une « utopie » partiellement traduite e
990 rtiellement traduite en faits. C’est même, à voir les choses de près, leur unique argument contre les révolutionnaires non
991 r les choses de près, leur unique argument contre les révolutionnaires non marxistes. Mais comment nous laisser convaincre
992 lle, temporaire, et d’ailleurs discutable ? C’est l’ homme qui se révolte en nous contre le marxiste. Vous n’y ferez rien.
993 ble ? C’est l’homme qui se révolte en nous contre le marxiste. Vous n’y ferez rien. Et nous ne trahirons pas l’homme tel q
994 te. Vous n’y ferez rien. Et nous ne trahirons pas l’ homme tel qu’il est, sous prétexte qu’il faut se hâter, et qu’en Russi
995 her. Nous jouerons tout sur une révolution vraie. Les catastrophes sont proches. Nous ne sommes plus les seuls à le dire. B
996 es catastrophes sont proches. Nous ne sommes plus les seuls à le dire. Beaucoup de capitalistes l’ont si bien compris qu’on
997 hes sont proches. Nous ne sommes plus les seuls à le dire. Beaucoup de capitalistes l’ont si bien compris qu’on peut les v
998 lus les seuls à le dire. Beaucoup de capitalistes l’ ont si bien compris qu’on peut les voir déjà préparer en sous-main des
999 de capitalistes l’ont si bien compris qu’on peut les voir déjà préparer en sous-main des terrains d’entente avec l’URSS. N
1000 préparer en sous-main des terrains d’entente avec l’ URSS. Nous ne pensons pas que la guerre soit, comme l’écrit Lefebvre,
1001 ns d’entente avec l’URSS. Nous ne pensons pas que la guerre soit, comme l’écrit Lefebvre, la seule « chance » des capitali
1002 SS. Nous ne pensons pas que la guerre soit, comme l’ écrit Lefebvre, la seule « chance » des capitalistes. Il en est une mo
1003 s pas que la guerre soit, comme l’écrit Lefebvre, la seule « chance » des capitalistes. Il en est une moins coûteuse à ris
1004 et qui consisterait à se laisser convaincre… Tout les y pousse, et l’on se demande en vain quelle idéologie les empêcherait
1005 it à se laisser convaincre… Tout les y pousse, et l’ on se demande en vain quelle idéologie les empêcherait encore de répon
1006 usse, et l’on se demande en vain quelle idéologie les empêcherait encore de répondre aux invites de ces parents naguère ina
1007 nt mine de « réussir ». N’est-ce donc plus, comme le marque Th. Maulnier, qu’un conflit d’intérêts ? Et d’intérêts qui ne
1008 érêts qui ne sont pas les nôtres, qui ne sont pas les intérêts réels d’un être aux prises avec la condition humaine ? Ni po
1009 pas les intérêts réels d’un être aux prises avec la condition humaine ? Ni pour le mensonge d’hier, ni pour celui de dema
1010 re aux prises avec la condition humaine ? Ni pour le mensonge d’hier, ni pour celui de demain nous ne verserons notre sang
1011 ne vérité qui domine et condamne tout cela. Entre le communisme et la révolution personnaliste, l’opposition doctrinale pe
1012 ine et condamne tout cela. Entre le communisme et la révolution personnaliste, l’opposition doctrinale peut se définir sim
1013 tre le communisme et la révolution personnaliste, l’ opposition doctrinale peut se définir simplement. Les uns croient, ave
1014 opposition doctrinale peut se définir simplement. Les uns croient, avec Marx, à la réalité d’une dialectique ternaire ; ils
1015 définir simplement. Les uns croient, avec Marx, à la réalité d’une dialectique ternaire ; ils placent leur espoir dans l’a
1016 alectique ternaire ; ils placent leur espoir dans l’ avènement de synthèses successives, acheminant l’espèce vers un équili
1017 l’avènement de synthèses successives, acheminant l’ espèce vers un équilibre final, morne réplique du millénium chrétien.
1018 ibre final, morne réplique du millénium chrétien. Les autres, avec Proudhon, refusent toute synthèse, toute solution mécani
1019 ital. Il n’y a pas de troisième terme, — ou c’est la mort19. Mais la coefficience de deux termes vrais, et assumés comme t
1020 as de troisième terme, — ou c’est la mort19. Mais la coefficience de deux termes vrais, et assumés comme tels, c’est la pe
1021 e deux termes vrais, et assumés comme tels, c’est la personne. L’opposition de Proudhon et de Marx, sur le terrain économi
1022 vrais, et assumés comme tels, c’est la personne. L’ opposition de Proudhon et de Marx, sur le terrain économique, traduit
1023 ersonne. L’opposition de Proudhon et de Marx, sur le terrain économique, traduit exactement l’opposition de Kierkegaard et
1024 rx, sur le terrain économique, traduit exactement l’ opposition de Kierkegaard et de Hegel dans le domaine religieux. Elle
1025 ment l’opposition de Kierkegaard et de Hegel dans le domaine religieux. Elle traduira demain l’opposition des nations coll
1026 l dans le domaine religieux. Elle traduira demain l’ opposition des nations collectivistes et des patries personnalistes. M
1027 istes et des patries personnalistes. Mais où sont les motifs de notre choix ? J’en indiquerai trois. 1° — La seule révoluti
1028 tifs de notre choix ? J’en indiquerai trois. 1° — La seule révolution qui nous importe concerne l’homme, exprime ses donné
1029 ° — La seule révolution qui nous importe concerne l’ homme, exprime ses données élémentaires : elle n’est qu’une projection
1030 ires : elle n’est qu’une projection du conflit de la personne. Les marxistes nous accusent de mêler des notions « morales 
1031 ’est qu’une projection du conflit de la personne. Les marxistes nous accusent de mêler des notions « morales » — ainsi dési
1032 ler des notions « morales » — ainsi désignent-ils la notion de personne ! — aux forces politiques et historiques qui selon
1033 historiques qui selon eux déterminent entièrement le devenir révolutionnaire. Mais c’est de la mythomanie ; les « Forces é
1034 èrement le devenir révolutionnaire. Mais c’est de la mythomanie ; les « Forces économiques », dont ils parlent avec trembl
1035 ir révolutionnaire. Mais c’est de la mythomanie ; les « Forces économiques », dont ils parlent avec tremblement, n’existent
1036 t dans un monde athée. Quelle que soit d’ailleurs la conception historique que l’on ait, il faut pourtant reconnaître que
1037 que soit d’ailleurs la conception historique que l’ on ait, il faut pourtant reconnaître que la personne est un facteur « 
1038 ue que l’on ait, il faut pourtant reconnaître que la personne est un facteur « décisif », sinon suffisant, du processus ré
1039 onnaire, et que nier cette valeur « décisive » de la personne, c’est désarmer la révolution. Mais il y a plus. Si la perso
1040 aleur « décisive » de la personne, c’est désarmer la révolution. Mais il y a plus. Si la personne est véritablement l’élém
1041 ’est désarmer la révolution. Mais il y a plus. Si la personne est véritablement l’élément décisif de la réalité humaine, t
1042 ais il y a plus. Si la personne est véritablement l’ élément décisif de la réalité humaine, toute révolution est vaine qui
1043 a personne est véritablement l’élément décisif de la réalité humaine, toute révolution est vaine qui se fonde sur des fait
1044 est vaine qui se fonde sur des faits mortels pour la personne, même si « ces faits sont les faits » comme on voudrait nous
1045 ortels pour la personne, même si « ces faits sont les faits » comme on voudrait nous le faire croire. Une révolution n’agit
1046 ces faits sont les faits » comme on voudrait nous le faire croire. Une révolution n’agit pas dans le vide, mais contre que
1047 s le faire croire. Une révolution n’agit pas dans le vide, mais contre quelque chose : elle se fera contre ces faits. Elle
1048 e fera contre ces faits. Elle sera « acte ». 2e — Le matérialisme décrit un monde tel qu’on ne voit pas où l’acte peut s’y
1049 rialisme décrit un monde tel qu’on ne voit pas où l’ acte peut s’y insérer. Comment croire que l’esprit puisse agir sur les
1050 as où l’acte peut s’y insérer. Comment croire que l’ esprit puisse agir sur les faits autrement que par une suite de coups
1051 érer. Comment croire que l’esprit puisse agir sur les faits autrement que par une suite de coups de force, d’actes créateur
1052 ups de force, d’actes créateurs, — révolutionnant le déterminisme rigoureux de la matière abandonnée à elle-même ? La dial
1053 rs, — révolutionnant le déterminisme rigoureux de la matière abandonnée à elle-même ? La dialectique historique à trois te
1054 rigoureux de la matière abandonnée à elle-même ? La dialectique historique à trois temps est une arbitraire projection da
1055 à trois temps est une arbitraire projection dans les choses d’un mécanisme de « l’intelligence-outil ». Théorie dont le fa
1056 re projection dans les choses d’un mécanisme de «  l’ intelligence-outil ». Théorie dont le fatalisme interne reparaît sans
1057 canisme de « l’intelligence-outil ». Théorie dont le fatalisme interne reparaît sans cesse dans les propos des marxistes l
1058 ont le fatalisme interne reparaît sans cesse dans les propos des marxistes les plus émancipés, les moins « mécanistes » ; t
1059 reparaît sans cesse dans les propos des marxistes les plus émancipés, les moins « mécanistes » ; théorie qui ôte à l’acte t
1060 dans les propos des marxistes les plus émancipés, les moins « mécanistes » ; théorie qui ôte à l’acte toute efficacité créa
1061 pés, les moins « mécanistes » ; théorie qui ôte à l’ acte toute efficacité créatrice et par là même doit être dénoncée comm
1062 e doit être dénoncée comme antirévolutionnaire20. Le matérialisme, c’est l’opium de la révolution. 3e — La conception pers
1063 mme antirévolutionnaire20. Le matérialisme, c’est l’ opium de la révolution. 3e — La conception personnaliste est seule cap
1064 olutionnaire20. Le matérialisme, c’est l’opium de la révolution. 3e — La conception personnaliste est seule capable d’édif
1065 atérialisme, c’est l’opium de la révolution. 3e — La conception personnaliste est seule capable d’édifier un monde culture
1066 t social qu’anime un risque permanent, essentiel. L’ état marxiste idéal ne laisse subsister que les risques accidentels. E
1067 el. L’état marxiste idéal ne laisse subsister que les risques accidentels. Et comme le marquait récemment T. S. Eliot, dans
1068 e subsister que les risques accidentels. Et comme le marquait récemment T. S. Eliot, dans un article21 où s’exprimaient de
1069 roches de celles d’Esprit ou de Combat, il réduit l’ aventure humaine à un déroulement indéfini de changements, justiciable
1070 fini de changements, justiciables tout au plus de la statistique. ⁂ Mais les marxistes répugnent à nous suivre sur ce terr
1071 sticiables tout au plus de la statistique. ⁂ Mais les marxistes répugnent à nous suivre sur ce terrain. Suivons-les donc su
1072 s répugnent à nous suivre sur ce terrain. Suivons- les donc sur le leur. Ils opposent à nos « rêveries » l’action. Qu’appell
1073 nous suivre sur ce terrain. Suivons-les donc sur le leur. Ils opposent à nos « rêveries » l’action. Qu’appellent-ils l’ac
1074 donc sur le leur. Ils opposent à nos « rêveries » l’ action. Qu’appellent-ils l’action ? Est-ce un opportunisme purement ta
1075 ent à nos « rêveries » l’action. Qu’appellent-ils l’ action ? Est-ce un opportunisme purement tactique, d’allure électorale
1076 purement tactique, d’allure électorale ? « Toutes les tentatives qui ne se fondent pas sur la classe révolutionnaire ne com
1077 « Toutes les tentatives qui ne se fondent pas sur la classe révolutionnaire ne comportent pas de points d’application », é
1078 e points d’application », écrit Nizan. Voilà bien la suprême « évasion » de nos intellectuels, même marxistes. Abdication
1079 nos intellectuels, même marxistes. Abdication de la pensée entre les mains du prolétaire qui, justement, avait besoin d’ê
1080 ls, même marxistes. Abdication de la pensée entre les mains du prolétaire qui, justement, avait besoin d’être conduit par l
1081 e qui, justement, avait besoin d’être conduit par la pensée de quelques-uns22. Proposition antirévolutionnaire, il faut le
1082 s-uns22. Proposition antirévolutionnaire, il faut le dire, et niée par les faits dont elle se réclame implicitement, Lénin
1083 antirévolutionnaire, il faut le dire, et niée par les faits dont elle se réclame implicitement, Lénine réussit une révoluti
1084 uvriers sur une population de 160 millions, et où la bourgeoisie existe à peine en tant que classe, d’ailleurs brimée. En
1085 t que classe, d’ailleurs brimée. En février 1917, les bolchévistes sont 200. En octobre, ils s’emparent du pouvoir sur tout
1086 En octobre, ils s’emparent du pouvoir sur toutes les Russies. En 1932 le parti compte deux millions de membres sévèrement
1087 parent du pouvoir sur toutes les Russies. En 1932 le parti compte deux millions de membres sévèrement contrôlés. « Mais, n
1088 embres sévèrement contrôlés. « Mais, nous dit-on, les constructions d’un Lénine n’étaient pas songes, elles s’appuyaient su
1089 nine n’étaient pas songes, elles s’appuyaient sur le mouvement de l’histoire ». Nous avons affaire ici à un véritable myst
1090 as songes, elles s’appuyaient sur le mouvement de l’ histoire ». Nous avons affaire ici à un véritable mysticisme de la réu
1091 us avons affaire ici à un véritable mysticisme de la réussite, à un fatalisme, à un pragmatisme historique dont le fondeme
1092 à un fatalisme, à un pragmatisme historique dont le fondement matérialiste n’exige rien de moins qu’un acte de foi. Un te
1093 n acte de foi. Un tel mysticisme a-t-il en France la moindre chance de succès ? Où est sa tradition vivante en ce pays ? L
1094 succès ? Où est sa tradition vivante en ce pays ? La violence des communistes français reste le plus souvent verbale, élec
1095 pays ? La violence des communistes français reste le plus souvent verbale, électorale ; elle n’est pas dans leur doctrine
1096 des faits actuels, mais insuffisamment analysés. Les faits, demain, seront pour nous. L’Ordre nouveau, Combat, Esprit, tra
1097 L’Ordre nouveau, Combat, Esprit, travaillent dans la ligne des forces révolutionnaires profondes de la France. Cette révol
1098 la ligne des forces révolutionnaires profondes de la France. Cette révolte de la personne, c’est la révolte jacobine, c’es
1099 onnaires profondes de la France. Cette révolte de la personne, c’est la révolte jacobine, c’est la révolte de 89, dans ce
1100 de la France. Cette révolte de la personne, c’est la révolte jacobine, c’est la révolte de 89, dans ce qu’elle garde de va
1101 de la personne, c’est la révolte jacobine, c’est la révolte de 89, dans ce qu’elle garde de valable et de dynamique ; c’e
1102 de valable et de dynamique ; c’est dès à présent le ressort de la nouvelle Révolution française. La volonté, la possibili
1103 de dynamique ; c’est dès à présent le ressort de la nouvelle Révolution française. La volonté, la possibilité de rupture,
1104 t le ressort de la nouvelle Révolution française. La volonté, la possibilité de rupture, affirmée par les politiciens marx
1105 de la nouvelle Révolution française. La volonté, la possibilité de rupture, affirmée par les politiciens marxistes, mais
1106 volonté, la possibilité de rupture, affirmée par les politiciens marxistes, mais niée en sous-main par leur doctrine, est
1107 trine, est de leur part une duperie manifeste. Je les entends menacer le bourgeois : mais je ne vois pas en quoi la tyranni
1108 art une duperie manifeste. Je les entends menacer le bourgeois : mais je ne vois pas en quoi la tyrannie du matériel qu’il
1109 enacer le bourgeois : mais je ne vois pas en quoi la tyrannie du matériel qu’ils prônent est meilleure pour les hommes que
1110 nie du matériel qu’ils prônent est meilleure pour les hommes que le présent désordre. Je ne vois pas qu’ils connaissent l’h
1111 qu’ils prônent est meilleure pour les hommes que le présent désordre. Je ne vois pas qu’ils connaissent l’homme mieux que
1112 ésent désordre. Je ne vois pas qu’ils connaissent l’ homme mieux que nous. Je ne les vois pas plus forts. Je vois bien l’ac
1113 qu’ils connaissent l’homme mieux que nous. Je ne les vois pas plus forts. Je vois bien l’accumulation de leurs griefs, — d
1114 nous. Je ne les vois pas plus forts. Je vois bien l’ accumulation de leurs griefs, — dont beaucoup sont les nôtres, mais no
1115 age. Je vois clairement que leurs buts provoquent le refus, pour les mêmes raisons, aggravées23. Ils jouent sur une révolt
1116 airement que leurs buts provoquent le refus, pour les mêmes raisons, aggravées23. Ils jouent sur une révolte des hommes con
1117 s23. Ils jouent sur une révolte des hommes contre le capitalisme : mais cette révolte va se tourner contre eux. On va voir
1118 va se tourner contre eux. On va voir qu’ils font la même chose, c’est-à-dire qu’ils font pire que ceux qu’ils attaquent.
1119 nt ainsi triompher à la fois des bourgeois, et de la vérité humaine de nos doctrines antibourgeoises. Mais ils ne donnent
1120 ux certains mots d’ordre immédiats : lutte contre le capitalisme, le fascisme, leurs mystiques et leurs créations politiqu
1121 d’ordre immédiats : lutte contre le capitalisme, le fascisme, leurs mystiques et leurs créations politiques (nationalisme
1122 tiques (nationalisme, SDN, etc.), condamnation de l’ individu, de la « pensée » bourgeoise (la pensée sans douleur !), des
1123 lisme, SDN, etc.), condamnation de l’individu, de la « pensée » bourgeoise (la pensée sans douleur !), des méthodes polici
1124 ation de l’individu, de la « pensée » bourgeoise ( la pensée sans douleur !), des méthodes policières grâce auxquelles se m
1125 méthodes policières grâce auxquelles se maintient le désordre établi. Mais nous allons plus loin dans la critique de ce dé
1126 désordre établi. Mais nous allons plus loin dans la critique de ce désordre : jusqu’à ce point où le marxisme, révélant s
1127 la critique de ce désordre : jusqu’à ce point où le marxisme, révélant sa vraie nature, apparaît comme un cas privilégié
1128 vraie nature, apparaît comme un cas privilégié de la folie capitaliste-matérialiste. Non, ce n’est pas une classe que nous
1129 ’est pas une classe que nous devons sauver, c’est l’ homme menacé dans son intégrité. Sauver l’homme, ce n’est pas sauver d
1130 , c’est l’homme menacé dans son intégrité. Sauver l’ homme, ce n’est pas sauver des consommateurs. Ce n’est pas sauver des
1131 Ce n’est pas sauver des entreprises, des nations, les intérêts (?) du monde. Sylveire demande : que signifie « sauver le mo
1132 u monde. Sylveire demande : que signifie « sauver le monde » ? Rien. Au sens fort du mot, le « salut » n’est pas à débattr
1133 « sauver le monde » ? Rien. Au sens fort du mot, le « salut » n’est pas à débattre sur le plan de l’humanité, mais entre
1134 le « salut » n’est pas à débattre sur le plan de l’ humanité, mais entre l’homme, entre tel homme et la Réalité qui seule
1135 à débattre sur le plan de l’humanité, mais entre l’ homme, entre tel homme et la Réalité qui seule peut garantir son être.
1136 ’humanité, mais entre l’homme, entre tel homme et la Réalité qui seule peut garantir son être. — Encore faut-il que les co
1137 eule peut garantir son être. — Encore faut-il que les conditions matérielles permettent à ce suprême et quotidien débat d’a
1138 n débat d’avoir un sens, un point d’application : la personne. Tel est en dernière analyse, le fondement, l’enjeu de la ré
1139 ation : la personne. Tel est en dernière analyse, le fondement, l’enjeu de la révolution nouvelle. Ici, je ne dirai plus n
1140 sonne. Tel est en dernière analyse, le fondement, l’ enjeu de la révolution nouvelle. Ici, je ne dirai plus nous, mais je.
1141 est en dernière analyse, le fondement, l’enjeu de la révolution nouvelle. Ici, je ne dirai plus nous, mais je. À la questi
1142 nouvelle. Ici, je ne dirai plus nous, mais je. À la question « Prenez-vous au sérieux vos idées, y croyez-vous ? », les h
1143 nez-vous au sérieux vos idées, y croyez-vous ? », les hommes de ce temps n’aiment pas répondre, car c’est une question pers
1144 tion personnelle. Une mise en question réelle. Je la cherche. Ce qu’il faut pour légitimer un système d’idées en elles-mê
1145 lles-mêmes justes et opportunes (comme celles, je le crois, de L’Ordre nouveau, de Combat ou d’Esprit) c’est une violence
1146 une substance, une exigence impossible et qui est la seule chose que les hommes éprouvent dans le fond de leur être. Il fa
1147 exigence impossible et qui est la seule chose que les hommes éprouvent dans le fond de leur être. Il faut derrière ces idée
1148 est la seule chose que les hommes éprouvent dans le fond de leur être. Il faut derrière ces idées une masse volontaire, u
1149 e foi, une pureté terrible et humble. Loin de moi la pensée que par des arguments nous pourrons triompher d’autre chose qu
1150 urrons triompher d’autre chose que d’arguments. À l’ effort admirable du peuple russe retrouvant la grandeur des luttes élé
1151 . À l’effort admirable du peuple russe retrouvant la grandeur des luttes élémentaires, n’aurions-nous à répondre qu’un dog
1152 s à répondre qu’un dogmatique « Tu te trompes » ? Les hommes n’entendront de nous que notre volonté de sacrifice, de pauvre
1153 té. C’est dangereux, c’est grave de penser juste. La vérité ne peut exister parmi nous que sous la forme d’une accusation
1154 te. La vérité ne peut exister parmi nous que sous la forme d’une accusation personnelle. Il faut savoir entendre ce mutism
1155 ntendre ce mutisme formidable. Je crois que seule la foi peut en donner jusqu’au bout le courage. Je parle de la foi chrét
1156 ois que seule la foi peut en donner jusqu’au bout le courage. Je parle de la foi chrétienne où je veux être, de ce suprême
1157 t en donner jusqu’au bout le courage. Je parle de la foi chrétienne où je veux être, de ce suprême « choix » qui ne vient
1158 monde qui n’ait pas besoin d’arguments pour juger les idoles du monde ; de cette seule chose pour laquelle j’accepte de me
1159 parce que ce ne serait pas crever bassement dans la haine, mais ce serait un acte enfin dans lequel je posséderais toute
1160 clatant. Je n’ai pas à sauver quoi que ce soit de la terre, mais seulement à recevoir le pardon. Or il n’est de pardon que
1161 ue ce soit de la terre, mais seulement à recevoir le pardon. Or il n’est de pardon que pour celui qui agit. On me dira san
1162 us retrouvez que trop bien dans les vôtres ! Déjà les hommes le pressentent : il n’y a rien d’autre à attendre que cette fo
1163 z que trop bien dans les vôtres ! Déjà les hommes le pressentent : il n’y a rien d’autre à attendre que cette force surhum
1164 attendre que cette force surhumaine d’entrer dans l’ Ordre de la Pauvreté, qui vaincra toutes les révolutions — après les a
1165 e cette force surhumaine d’entrer dans l’Ordre de la Pauvreté, qui vaincra toutes les révolutions — après les avoir faites
1166 r dans l’Ordre de la Pauvreté, qui vaincra toutes les révolutions — après les avoir faites. 18. En Allemagne, un groupe e
1167 vreté, qui vaincra toutes les révolutions — après les avoir faites. 18. En Allemagne, un groupe en croissance rapide, le
1168 18. En Allemagne, un groupe en croissance rapide, le Gegner, s’efforce de créer une unité révolutionnaire au-dessus des pa
1169 nce), en Espagne, en Hollande, en Irlande et dans les pays latins de l’Amérique, cette « troisième force », anticapitaliste
1170 n Hollande, en Irlande et dans les pays latins de l’ Amérique, cette « troisième force », anticapitaliste et non marxiste s
1171 stématique du vrai conflit nécessité-liberté dans la mesure où elle existe en sol et dans sa durée propre, comme un 3e ter
1172 e-nation culturelle, initiative privée-plan. 20. La seule révolution qu’elle légitimerait, en bonne logique, serait une r
1173 t, en bonne logique, serait une révolution contre la construction entreprise par le capitalisme d’État soviétique, contre
1174 révolution contre la construction entreprise par le capitalisme d’État soviétique, contre la mystique productiviste déjà
1175 rise par le capitalisme d’État soviétique, contre la mystique productiviste déjà « niée » par la crise américaine en parti
1176 ontre la mystique productiviste déjà « niée » par la crise américaine en particulier. 21. du Criterion. 22. Exemple frap
1177 lier. 21. du Criterion. 22. Exemple frappant de l’ Allemagne : voici un pays enfin qui réunit toutes les conditions théor
1178 Allemagne : voici un pays enfin qui réunit toutes les conditions théoriques prévues par Marx pour qu’une révolution éclate.
1179 fs. Parce qu’il n’y a plus de « personnes ». 23. Le succès du communisme serait-il « de nous rendre la vie de caserne acc
1180 e succès du communisme serait-il « de nous rendre la vie de caserne acceptable » ? (Roland de Pury, dans Hic et Nunc , Pa
1181 j. Rougemont Denis de, « À prendre ou à tuer », La Nouvelle Revue française, Paris, décembre 1932, p. 838-845.
11 1933, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Pétrarque, par Charles-Albert Cingria (avril 1933)
1182 ue, par Charles-Albert Cingria (avril 1933)k «  Les modernes qui écrivent des livres sur Pétrarque voudraient pouvoir fai
1183 udraient pouvoir faire une part au Moyen Âge (qui les excite) et admirer en même temps le restaurateur du cicéronianisme da
1184 yen Âge (qui les excite) et admirer en même temps le restaurateur du cicéronianisme dans tout ce que l’officialité moderne
1185 e restaurateur du cicéronianisme dans tout ce que l’ officialité moderne en représente — l’éloquence, l’érudition, les gran
1186 tout ce que l’officialité moderne en représente — l’ éloquence, l’érudition, les grands sentiments, la morale en soi (pas l
1187 ’officialité moderne en représente — l’éloquence, l’ érudition, les grands sentiments, la morale en soi (pas la morale en v
1188 moderne en représente — l’éloquence, l’érudition, les grands sentiments, la morale en soi (pas la morale en vertu d’un dogm
1189 l’éloquence, l’érudition, les grands sentiments, la morale en soi (pas la morale en vertu d’un dogme), le nationalisme, l
1190 ion, les grands sentiments, la morale en soi (pas la morale en vertu d’un dogme), le nationalisme, l’ironie, le scepticism
1191 orale en soi (pas la morale en vertu d’un dogme), le nationalisme, l’ironie, le scepticisme, le pompiérisme, — mais ils sa
1192 la morale en vertu d’un dogme), le nationalisme, l’ ironie, le scepticisme, le pompiérisme, — mais ils savent que cela est
1193 en vertu d’un dogme), le nationalisme, l’ironie, le scepticisme, le pompiérisme, — mais ils savent que cela est antipathi
1194 ogme), le nationalisme, l’ironie, le scepticisme, le pompiérisme, — mais ils savent que cela est antipathique, alors ils é
1195 i ». Charles-Albert Cingria est donc de ceux dont l’ érudition, quitte à passer pour macaronique — comme elles le sont tout
1196 n, quitte à passer pour macaronique — comme elles le sont toutes, d’ailleurs, mais ridiculement quand elles ne l’avouent p
1197 tes, d’ailleurs, mais ridiculement quand elles ne l’ avouent pas — se veut constamment significative. La publication de cet
1198 ’avouent pas — se veut constamment significative. La publication de cet étonnant petit livre sur Pétrarque, venant après c
1199 Civilisation de Saint-Gall non moins remarquable, le met aux antipodes de ces historiens contemporains dont le succès cons
1200 ux antipodes de ces historiens contemporains dont le succès consiste, lorsqu’ils citent des textes, à donner l’impression
1201 nt, en somme, aucun sens relativement à celui qui les cite, car alors où serait l’Impartialité ? Ces gens-là voudraient bie
1202 ivement à celui qui les cite, car alors où serait l’ Impartialité ? Ces gens-là voudraient bien nous faire croire qu’un tex
1203 ous faire croire qu’un texte est intéressant dans la mesure même où il est dépourvu de pittoresque, c’est-à-dire, dans ce
1204 est tout de même aller un peu loin, puisque ainsi l’ on supprime la notion même d’intéressant. Donc Cingria défend une thès
1205 me aller un peu loin, puisque ainsi l’on supprime la notion même d’intéressant. Donc Cingria défend une thèse : « Je m’app
1206 rai à désassocier et à mettre en face de lui-même le poète lyrique — rattaché encore à une école provençale qui est, à l’o
1207 rattaché encore à une école provençale qui est, à l’ origine, de propulsion musicale, donc romane-syrienne puisque le plain
1208 propulsion musicale, donc romane-syrienne puisque le plain-chant est roman-syrien — et le poète fabriqué à coups de platra
1209 enne puisque le plain-chant est roman-syrien — et le poète fabriqué à coups de platras à la manière antique ». Vous avez l
1210 yrien — et le poète fabriqué à coups de platras à la manière antique ». Vous avez le ton. Ajoutez-y le plus excitant foiso
1211 oups de platras à la manière antique ». Vous avez le ton. Ajoutez-y le plus excitant foisonnement de citations — poètes, c
1212 la manière antique ». Vous avez le ton. Ajoutez-y le plus excitant foisonnement de citations — poètes, chroniqueurs, music
1213 copale, d’une certaine politesse pompeuse qui est la forme particulière de son ironie24 et vous aurez ce petit volume de d
1214 ges qui, délayé en six-cents, se verrait décerner le titre de « monument critique ». Tel qu’il est, un petit chef-d’œuvre
1215 , un petit chef-d’œuvre d’humanisme poétique. Car l’ « érudition » de Cingria reste si constamment précise et malicieuse qu
1216 précise et malicieuse qu’elle atteint à coup sûr le particulier de tout ce qu’elle aborde au cours de ses démonstrations 
1217 lle » et multiple, ses incidences fréquentes dans les problèmes du temps et de tous les temps : la musique occidentale, les
1218 fréquentes dans les problèmes du temps et de tous les temps : la musique occidentale, les méfaits de Cicéron, le commerce d
1219 ans les problèmes du temps et de tous les temps : la musique occidentale, les méfaits de Cicéron, le commerce des vins dan
1220 ps et de tous les temps : la musique occidentale, les méfaits de Cicéron, le commerce des vins dans la vallée du Rhône, la
1221 : la musique occidentale, les méfaits de Cicéron, le commerce des vins dans la vallée du Rhône, la marche en montagne, le
1222 les méfaits de Cicéron, le commerce des vins dans la vallée du Rhône, la marche en montagne, le romantisme, le nationalism
1223 on, le commerce des vins dans la vallée du Rhône, la marche en montagne, le romantisme, le nationalisme, l’européanisme et
1224 s dans la vallée du Rhône, la marche en montagne, le romantisme, le nationalisme, l’européanisme et la révolution. (Sur la
1225 e du Rhône, la marche en montagne, le romantisme, le nationalisme, l’européanisme et la révolution. (Sur la confusion mode
1226 rche en montagne, le romantisme, le nationalisme, l’ européanisme et la révolution. (Sur la confusion moderne entre le patr
1227 le romantisme, le nationalisme, l’européanisme et la révolution. (Sur la confusion moderne entre le patriotisme « chose mo
1228 tionalisme, l’européanisme et la révolution. (Sur la confusion moderne entre le patriotisme « chose motivée et avantageuse
1229 et la révolution. (Sur la confusion moderne entre le patriotisme « chose motivée et avantageuse », et le nationalisme arti
1230 patriotisme « chose motivée et avantageuse », et le nationalisme artificiel mais régnant qui fait de la chose publique la
1231 nationalisme artificiel mais régnant qui fait de la chose publique la chose désavantageuse 25, quelques pages brillantes
1232 ficiel mais régnant qui fait de la chose publique la chose désavantageuse 25, quelques pages brillantes et fortes qui rejo
1233 brillantes et fortes qui rejoignent curieusement les doctrines de L’Ordre nouveau). Un style doucement retors, dont les mo
1234 L’Ordre nouveau). Un style doucement retors, dont les moindres anicroches sont calculées jusqu’à restituer le naturel — tou
1235 ndres anicroches sont calculées jusqu’à restituer le naturel — tout cela sans effort, manifestant plutôt cette vivacité d’
1236 ifestant plutôt cette vivacité d’invention dont «  l’ écriture moderne » reste tristement dépourvue malgré ses velléités de
1237 ches un peu bourrues, un peu précieuses, il jette l’ esprit du lecteur dans le vif d’un sujet, et loin d’exploiter l’avanta
1238 peu précieuses, il jette l’esprit du lecteur dans le vif d’un sujet, et loin d’exploiter l’avantage de cette surprise, pla
1239 cteur dans le vif d’un sujet, et loin d’exploiter l’ avantage de cette surprise, place aussitôt une citation, oublie d’avoi
1240 oir raison, et nous laisse admirer cette prose de la Renaissance où palpite, sous une sérénité qui est plutôt de l’enthous
1241 e où palpite, sous une sérénité qui est plutôt de l’ enthousiasme dominé, l’opulente diversité du monde. La qualité des tra
1242 sérénité qui est plutôt de l’enthousiasme dominé, l’ opulente diversité du monde. La qualité des traductions du latin, du b
1243 thousiasme dominé, l’opulente diversité du monde. La qualité des traductions du latin, du bas latin et de l’italien dont c
1244 lité des traductions du latin, du bas latin et de l’ italien dont ce livre est abondamment orné permettra de goûter dans le
1245 vre est abondamment orné permettra de goûter dans le détail ce que l’on vient de louer dans l’ensemble. C’est la même préc
1246 nt orné permettra de goûter dans le détail ce que l’ on vient de louer dans l’ensemble. C’est la même précision savoureuse
1247 er dans le détail ce que l’on vient de louer dans l’ ensemble. C’est la même précision savoureuse dans le rendu de l’esprit
1248 ce que l’on vient de louer dans l’ensemble. C’est la même précision savoureuse dans le rendu de l’esprit d’un texte, mais
1249 ensemble. C’est la même précision savoureuse dans le rendu de l’esprit d’un texte, mais cela toujours grâce à des inventio
1250 est la même précision savoureuse dans le rendu de l’ esprit d’un texte, mais cela toujours grâce à des inventions poétiques
1251 jours grâce à des inventions poétiques jouant sur la lettre même, c’est-à-dire sur ce qu’il y a de plus significatif dans
1252 pas de petites férocités soudaines, raffinées, ni le bavardage, ni une espèce d’indignation morale aux sursauts fréquents.
1253 morale aux sursauts fréquents. 25. « Mais cela ( les patriotismes de l’Europe diverse et une) était homogène et souple, vi
1254 fréquents. 25. « Mais cela (les patriotismes de l’ Europe diverse et une) était homogène et souple, vivant, sans faux arr
1255 , sans cet arrêt d’illusoire devenu réel que font les actuels nationalismes, ayant pour effet qu’au lieu d’être avantageuse
1256 , ayant pour effet qu’au lieu d’être avantageuse, la chose publique empêche de communiquer, empêche de vivre, empêche de r
1257 mpte rendu] Charles-Albert Cingria, Pétrarque  », La Nouvelle Revue française, Paris, avril 1933, p. 676-678.
12 1933, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Une main, par C. F. Ramuz (juin 1933)
1258 e de ces méprises qui peuvent servir à déterminer le niveau d’une certaine presse. Si l’on ne voit dans l’auteur d’Adam et
1259 à déterminer le niveau d’une certaine presse. Si l’ on ne voit dans l’auteur d’Adam et Ève qu’une sorte de folkloriste, il
1260 iveau d’une certaine presse. Si l’on ne voit dans l’ auteur d’Adam et Ève qu’une sorte de folkloriste, il faudra considérer
1261 qu’une sorte de folkloriste, il faudra considérer l’ auteur de Phèdre comme un archéologue, auteur de drames historiques. Q
1262 aissance du particulier qui introduise à celle de l’ élémentaire ; qui soit donc le contraire de la recherche du pittoresqu
1263 troduise à celle de l’élémentaire ; qui soit donc le contraire de la recherche du pittoresque. Aucune de ses œuvres mieux
1264 de l’élémentaire ; qui soit donc le contraire de la recherche du pittoresque. Aucune de ses œuvres mieux qu’Une Main n’en
1265 illeurs, sa pensée ; on y voit de tout près, dans l’ intimité d’une chambre, comment sa pensée marche, insiste, souffre. Et
1266 , insiste, souffre. Et cela ne se passe plus dans le canton de Vaud, mais dans le domaine propre de Ramuz qui est l’élémen
1267 e se passe plus dans le canton de Vaud, mais dans le domaine propre de Ramuz qui est l’élémentaire. Jamais il ne fut mieux
1268 aud, mais dans le domaine propre de Ramuz qui est l’ élémentaire. Jamais il ne fut mieux lui-même. Il y fallait un cas très
1269 Il y fallait un cas très simple, un de ces cas où le mot « concret » devient presque synonyme de matériel. Un bras cassé (
1270 ient presque synonyme de matériel. Un bras cassé ( le gauche) ; l’humiliation de la chute, l’angoisse d’être diminué, les d
1271 synonyme de matériel. Un bras cassé (le gauche) ; l’ humiliation de la chute, l’angoisse d’être diminué, les difficultés qu
1272 iel. Un bras cassé (le gauche) ; l’humiliation de la chute, l’angoisse d’être diminué, les difficultés qu’on découvre, déc
1273 as cassé (le gauche) ; l’humiliation de la chute, l’ angoisse d’être diminué, les difficultés qu’on découvre, déconcertante
1274 miliation de la chute, l’angoisse d’être diminué, les difficultés qu’on découvre, déconcertantes ; puis l’esprit qui se met
1275 difficultés qu’on découvre, déconcertantes ; puis l’ esprit qui se met à douter, parce qu’il n’a plus d’application, l’espr
1276 met à douter, parce qu’il n’a plus d’application, l’ esprit qui prend peur. La guérison naîtra d’une résistance retrouvée26
1277 n’a plus d’application, l’esprit qui prend peur. La guérison naîtra d’une résistance retrouvée26. Et Ramuz, apaisé, regar
1278 nce retrouvée26. Et Ramuz, apaisé, regarde tomber la neige : les choses ont de nouveau leur sens. Ramuz parle de lui, c’es
1279 ée26. Et Ramuz, apaisé, regarde tomber la neige : les choses ont de nouveau leur sens. Ramuz parle de lui, c’est la premièr
1280 forcé d’ailleurs, interrogation accidentelle. Par le choix même du prétexte de cet écrit, il nous donne ce genre de pensée
1281 es pour ce qu’elles ont toujours été à ses yeux : le fait d’un défaut de présence au monde, d’une impuissance à saisir les
1282 de présence au monde, d’une impuissance à saisir les choses. Là réside la cause de la peur, qu’il avoue, et qui n’est sans
1283 d’une impuissance à saisir les choses. Là réside la cause de la peur, qu’il avoue, et qui n’est sans doute que la méditat
1284 ssance à saisir les choses. Là réside la cause de la peur, qu’il avoue, et qui n’est sans doute que la méditation d’un esp
1285 la peur, qu’il avoue, et qui n’est sans doute que la méditation d’un esprit dépourvu de prises sensibles. C’est un état d’
1286 s. C’est un état d’âme qui caractérise assez bien le monde moderne, le monde des hommes sans responsabilité et sans résist
1287 ’âme qui caractérise assez bien le monde moderne, le monde des hommes sans responsabilité et sans résistance propre, le mo
1288 es sans responsabilité et sans résistance propre, le monde des hommes qui ne sont plus présents à eux-mêmes, hommes sans p
1289 facilement entraînés. Une Main nous donne ainsi l’ analyse élémentaire d’un des phénomènes les plus importants d’aujourd’
1290 e ainsi l’analyse élémentaire d’un des phénomènes les plus importants d’aujourd’hui : la démoralisation. Démoraliser un hom
1291 es phénomènes les plus importants d’aujourd’hui : la démoralisation. Démoraliser un homme, c’est le priver de son pouvoir
1292  : la démoralisation. Démoraliser un homme, c’est le priver de son pouvoir créateur. C’est le priver de sa main, — ou asse
1293 e, c’est le priver de son pouvoir créateur. C’est le priver de sa main, — ou asservir cette main. Est-ce que ma main n’a p
1294 que de se lever avec cent-mille autres, de faire le poing avec cent-mille autres ? Cent-mille mains saluent le tyran, une
1295 avec cent-mille autres ? Cent-mille mains saluent le tyran, une main crée. Le temps est peut-être venu de penser avec ses
1296 Cent-mille mains saluent le tyran, une main crée. Le temps est peut-être venu de penser avec ses mains. 26. « J’aime que
1297 venu de penser avec ses mains. 26. « J’aime que les choses vous résistent et vous contredisent, comme par exemple une mai
1298 à allumer dans une cheminée qui tire mal. J’aime les choses qui sont à leur façon, tandis que je suis à la mienne. » l.
1299 is de, « [Compte rendu] C. F. Ramuz, Une main  », La Nouvelle Revue française, Paris, juin 1933, p. 1001-1002.
13 1933, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Saint-Évremond ou L’humaniste impur, par Albert-Marie Schmidt (octobre 1933)
1300 Saint-Évremond ou L’ humaniste impur, par Albert-Marie Schmidt (octobre 1933)m Il est pl
1301 eur obtenir de nos jours un effet de surprise par l’ emploi d’un style poli, nombreux, toujours plein d’onction, parfois mê
1302 mment et trop aisément son sujet. Non point qu’il le maintienne arbitrairement dans les cadres d’une dogmatique morale : c
1303 Non point qu’il le maintienne arbitrairement dans les cadres d’une dogmatique morale : c’est plutôt qu’il suit Saint-Évremo
1304 lutôt qu’il suit Saint-Évremond de trop près dans les méandres de son éthique. Certes, il en fait valoir ainsi toutes les n
1305 n éthique. Certes, il en fait valoir ainsi toutes les nuances, avec un art égal à son modèle. On voudrait pourtant qu’il lu
1306 qu’il lui donne parfois libre carrière, qu’il ne le garde point sans cesse à portée d’un coup de patte qu’il s’abandonne
1307 patte qu’il s’abandonne lui-même à sa fantaisie, la plus joyeusement érudite que je connaisse. Tel qu’il est, ce petit vo
1308 volume nous offre un jeu serré et subtil, et dont le spectacle n’est pas vain. M. Schmidt ne s’en laisse point imposer par
1309 vain. M. Schmidt ne s’en laisse point imposer par la « réussite classique ». Il place Saint-Évremond, théoricien spirituel
1310 Saint-Évremond, théoricien spirituel et serein de la sagesse du grand siècle, sous le coup de la question capitale qu’on v
1311 uel et serein de la sagesse du grand siècle, sous le coup de la question capitale qu’on voudrait poser sous cette forme :
1312 in de la sagesse du grand siècle, sous le coup de la question capitale qu’on voudrait poser sous cette forme : la vérité e
1313 capitale qu’on voudrait poser sous cette forme : la vérité est-elle en déca ou au-delà du désespoir, dans les mesures hum
1314 té est-elle en déca ou au-delà du désespoir, dans les mesures humaines ou dans la folie divine ? Il semble bien que Saint-É
1315 à du désespoir, dans les mesures humaines ou dans la folie divine ? Il semble bien que Saint-Évremond ait jusqu’au bout re
1316 es rapports de politesse. Cela pourrait bien être la formule du désordre intérieur maximum. Rien ne le dissimule mieux que
1317 la formule du désordre intérieur maximum. Rien ne le dissimule mieux que le demi-sourire d’une raison éclairée et mondaine
1318 intérieur maximum. Rien ne le dissimule mieux que le demi-sourire d’une raison éclairée et mondaine. La nouveauté de l’es
1319 demi-sourire d’une raison éclairée et mondaine. La nouveauté de l’essai d’Albert-Marie Schmidt est d’avoir su déceler la
1320 une raison éclairée et mondaine. La nouveauté de l’ essai d’Albert-Marie Schmidt est d’avoir su déceler la corruption secr
1321 sai d’Albert-Marie Schmidt est d’avoir su déceler la corruption secrète de cet art trop parfait, « qui supprime les plus a
1322 n secrète de cet art trop parfait, « qui supprime les plus angoissants problèmes, à force de les éclaircir », et l’impureté
1323 pprime les plus angoissants problèmes, à force de les éclaircir », et l’impureté d’un humanisme que l’on croyait tempéré et
1324 issants problèmes, à force de les éclaircir », et l’ impureté d’un humanisme que l’on croyait tempéré et limpide, mais que
1325 les éclaircir », et l’impureté d’un humanisme que l’ on croyait tempéré et limpide, mais que l’on voit « s’échauffer, se br
1326 sme que l’on croyait tempéré et limpide, mais que l’ on voit « s’échauffer, se brouiller » aux premières instances d’un cho
1327 d’un choix radical et véritablement ordonnateur. Le chapitre le plus remarquable de cette brève et dense biographie intel
1328 radical et véritablement ordonnateur. Le chapitre le plus remarquable de cette brève et dense biographie intellectuelle, l
1329 e cette brève et dense biographie intellectuelle, le plus juste aussi pour Saint-Évremond, expose ses idées sur la société
1330 e aussi pour Saint-Évremond, expose ses idées sur la société. On y verra comment il se peut faire que les tyrannies social
1331 société. On y verra comment il se peut faire que les tyrannies sociales, mondaines ou politiques, trahissent par leur raff
1332 e spirituelle dont elles constituent probablement l’ unique remède. C’est comme la genèse individuelle et religieuse de ce
1333 tituent probablement l’unique remède. C’est comme la genèse individuelle et religieuse de ce fait trop actuel, qu’Albert-M
1334 te rendu] Albert-Marie Schmidt, Saint-Évremond ou L’ humaniste impur  », La Nouvelle Revue française, Paris, octobre 1933,
1335 Schmidt, Saint-Évremond ou L’humaniste impur  », La Nouvelle Revue française, Paris, octobre 1933, p. 621-622.
14 1933, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Le Deuxième Jour de la Création, par Ilya Ehrenbourg (décembre 1933)
1336 Le Deuxième Jour de la Création, par Ilya Ehrenbourg (décembre 1933)n Ce titre curieuseme
1337 1933)n Ce titre curieusement biblique désigne le plan quinquennal. Voici donc le roman type de l’Édification socialist
1338 biblique désigne le plan quinquennal. Voici donc le roman type de l’Édification socialiste. Bourré de petits faits vrais
1339 le plan quinquennal. Voici donc le roman type de l’ Édification socialiste. Bourré de petits faits vrais dont l’intention
1340 ion socialiste. Bourré de petits faits vrais dont l’ intention morale est évidente, il est doublement édifiant. Ceux qui on
1341 te, il est doublement édifiant. Ceux qui ont aimé le Chemin de la Vie retrouveront ici l’atmosphère salubre, la naïveté pu
1342 ublement édifiant. Ceux qui ont aimé le Chemin de la Vie retrouveront ici l’atmosphère salubre, la naïveté puissante de ce
1343 qui ont aimé le Chemin de la Vie retrouveront ici l’ atmosphère salubre, la naïveté puissante de ce film, et le même parti
1344 de la Vie retrouveront ici l’atmosphère salubre, la naïveté puissante de ce film, et le même parti pris de bonne humeur h
1345 hère salubre, la naïveté puissante de ce film, et le même parti pris de bonne humeur héroïque. Tout ce qu’il faut pour ent
1346 umeur héroïque. Tout ce qu’il faut pour entraîner l’ adolescence avide de servir une grande cause et de se sacrifier pour l
1347 e servir une grande cause et de se sacrifier pour le bonheur collectif. Chanson de Roland, fair-play, Baden-Powell, religi
1348 surréalistes, empêcheurs de danser en rond. Voici l’ histoire en bref, — non pas l’intrigue ! tout cela est propre. Le jeun
1349 nser en rond. Voici l’histoire en bref, — non pas l’ intrigue ! tout cela est propre. Le jeune Kolka, prolétaire de bonne s
1350 ref, — non pas l’intrigue ! tout cela est propre. Le jeune Kolka, prolétaire de bonne souche, part pour la Construction où
1351 eune Kolka, prolétaire de bonne souche, part pour la Construction où il ne tarde pas à se distinguer par diverses actions
1352 gré ses plus loyaux efforts, à se passionner pour le problème de la fonte, qui est le problème dominant dans cette région
1353 yaux efforts, à se passionner pour le problème de la fonte, qui est le problème dominant dans cette région de la Sibérie.
1354 passionner pour le problème de la fonte, qui est le problème dominant dans cette région de la Sibérie. Entre eux, une jeu
1355 qui est le problème dominant dans cette région de la Sibérie. Entre eux, une jeune et touchante Irina, qui choisira bien e
1356 e l’autre « n’est pas né quand il aurait fallu ». L’ Histoire a de ces exigences. On conseille à Volodia de se brûler la ce
1357 es exigences. On conseille à Volodia de se brûler la cervelle. Il se pend. Ce résumé fait le plus grand tort à l’ouvrage.
1358 se brûler la cervelle. Il se pend. Ce résumé fait le plus grand tort à l’ouvrage. Il est cependant exact. Mais les faits,
1359 . Il se pend. Ce résumé fait le plus grand tort à l’ ouvrage. Il est cependant exact. Mais les faits, même en Russie, ne so
1360 nd tort à l’ouvrage. Il est cependant exact. Mais les faits, même en Russie, ne sont rien sans la mystique. La force et le
1361 Mais les faits, même en Russie, ne sont rien sans la mystique. La force et le charme de ce roman sont ceux mêmes d’une jeu
1362 s, même en Russie, ne sont rien sans la mystique. La force et le charme de ce roman sont ceux mêmes d’une jeunesse fruste,
1363 ussie, ne sont rien sans la mystique. La force et le charme de ce roman sont ceux mêmes d’une jeunesse fruste, innocente j
1364 s cruautés ; tout jugement serait ici mesquin, on l’ accordera volontiers à l’auteur. Ehrenbourg a utilisé pêle-mêle une ma
1365 t serait ici mesquin, on l’accordera volontiers à l’ auteur. Ehrenbourg a utilisé pêle-mêle une masse de documents qui parl
1366 rutale, sentimentale, formidablement conformiste. Le puritanisme des komsomols a ceci de spécifiquement ennuyeux qu’il ne
1367 spécifiquement ennuyeux qu’il ne crée pas en eux le moindre refoulement. Ce qui suppose une remarquable absence d’imagina
1368 ui suppose une remarquable absence d’imagination. Le prochain plan y pourvoira peut-être. Tout cela est en pleine métamorp
1369 ivre montre, par vingt exemples irréfutables, que la classe joue chez les jeunes russes exactement le même rôle que la rac
1370 gt exemples irréfutables, que la classe joue chez les jeunes russes exactement le même rôle que la race chez les hitlériens
1371 la classe joue chez les jeunes russes exactement le même rôle que la race chez les hitlériens. Il n’y a pas plus de conve
1372 hez les jeunes russes exactement le même rôle que la race chez les hitlériens. Il n’y a pas plus de conversion possible au
1373 s russes exactement le même rôle que la race chez les hitlériens. Il n’y a pas plus de conversion possible au prolétariat q
1374 étariat qu’au germanisme. Voilà de quoi refroidir les sympathies trop spontanées. Il faudra, je crois, passer outre. Dans c
1375 est d’autant plus tragique qu’ils ne savent plus le formuler. À nous de les y aider ; et de comprendre que seule cette qu
1376 ique qu’ils ne savent plus le formuler. À nous de les y aider ; et de comprendre que seule cette question-là rétablit la co
1377 e comprendre que seule cette question-là rétablit la communion humaine. n. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Ilya Eh
1378 ompte rendu] Ilya Ehrenbourg, Le Deuxième Jour de la Création  », La Nouvelle Revue française, Paris, décembre 1933, p. 92
1379 a Ehrenbourg, Le Deuxième Jour de la Création  », La Nouvelle Revue française, Paris, décembre 1933, p. 927-929.
15 1934, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Taille de l’homme, par C. F. Ramuz (avril 1934)
1380 Taille de l’ homme, par C. F. Ramuz (avril 1934)o Après Une Main, confession rét
1381 cente, d’une discrétion presque farouche, et dans la même lignée que Le Grand Printemps et Raison d’Être, voici encore un
1382 tion presque farouche, et dans la même lignée que Le Grand Printemps et Raison d’Être, voici encore un essai de Ramuz, mai
1383 tre, voici encore un essai de Ramuz, mais de tous le moins ramuzien : il s’agit cette fois d’idées, et même d’idées généra
1384 ce qui est assez paradoxal dans une telle œuvre. Le sujet de Taille de l’Homme, c’est en effet l’opposition cosmique du m
1385 doxal dans une telle œuvre. Le sujet de Taille de l’ Homme, c’est en effet l’opposition cosmique du monde marxiste et du mo
1386 re. Le sujet de Taille de l’Homme, c’est en effet l’ opposition cosmique du monde marxiste et du monde chrétien. Ramuz fait
1387 qui d’ailleurs n’ébranleront pas, dans leur foi, les marxistes. Mais ce qu’il décrit avec une véritable puissance, c’est l
1388 qu’il décrit avec une véritable puissance, c’est l’ aboutissement du marxisme : l’isolement cosmique de l’homme. Quoi qu’i
1389 le puissance, c’est l’aboutissement du marxisme : l’ isolement cosmique de l’homme. Quoi qu’il dise, d’ailleurs, il dit plu
1390 outissement du marxisme : l’isolement cosmique de l’ homme. Quoi qu’il dise, d’ailleurs, il dit plus que ses arguments. On
1391 On peut aller jusqu’à soutenir que s’il défendait le marxisme, il n’en resterait pas moins, par le fait de son être même,
1392 ait le marxisme, il n’en resterait pas moins, par le fait de son être même, une protestation contre le matérialisme dialec
1393 le fait de son être même, une protestation contre le matérialisme dialectique. Quand on possède, comme lui, le sens de la
1394 ialisme dialectique. Quand on possède, comme lui, le sens de la solitude et le sens de la communauté — indissolubles —, on
1395 lectique. Quand on possède, comme lui, le sens de la solitude et le sens de la communauté — indissolubles —, on est une ob
1396 on possède, comme lui, le sens de la solitude et le sens de la communauté — indissolubles —, on est une objection vivante
1397 , comme lui, le sens de la solitude et le sens de la communauté — indissolubles —, on est une objection vivante à tout ind
1398 out « isme ». Quand on est à ce point possédé par la vie des choses et des êtres, on n’a pas besoin d’arguments pour faire
1399 , on n’a pas besoin d’arguments pour faire sentir l’ absurdité des « lois » qui, pour certains intellectuels, figurent la r
1400 lois » qui, pour certains intellectuels, figurent la réalité. Une œuvre comme Adam et Ève nous le fait voir tout aussi bie
1401 rent la réalité. Une œuvre comme Adam et Ève nous le fait voir tout aussi bien que cet essai : Ramuz est présent à ce mond
1402 uz est présent à ce monde, — eux, ils essaient de le recomposer au sein de leur absence insurmontable. Ramuz, mieux que pe
1403 ut se passer d’avoir raison, puisqu’il a pour lui la Nature27. C’est quand il parle d’elle qu’il est grand, qu’il donne et
1404 sa mesure, qu’il apparaît véritablement qualifié. La mode est au marxisme et au mépris de la Nature ? Mode bourgeoise, tyr
1405 qualifié. La mode est au marxisme et au mépris de la Nature ? Mode bourgeoise, tyrannie décadente, tout occupée à calculer
1406 ustification. À ceux qui croient aux fatalités de l’ Histoire, il faut dire simplement qu’elles sont vraies pour eux-mêmes
1407 tous ceux de leur espèce. On ne calcule pas avec la vie, mais avec des quantités mortes. Ceux qui se vantent d’être calcu
1408 and ils se croient matérialistes28. Ils détestent la matière comme seuls les spiritualistes bourgeois savaient la détester
1409 rialistes28. Ils détestent la matière comme seuls les spiritualistes bourgeois savaient la détester. (Dix ans de discussion
1410 comme seuls les spiritualistes bourgeois savaient la détester. (Dix ans de discussions, chez les philosophes de Moscou, on
1411 vaient la détester. (Dix ans de discussions, chez les philosophes de Moscou, ont abouti, en 1932, à des définitions telleme
1412 aline s’est vu contraint, pour en finir, de fixer la saine doctrine par un ukase condamnant à la fois les mécanistes et le
1413 saine doctrine par un ukase condamnant à la fois les mécanistes et les dialecticiens. On parle encore du « diamat »29, mai
1414 r un ukase condamnant à la fois les mécanistes et les dialecticiens. On parle encore du « diamat »29, mais ce n’est plus qu
1415 plus qu’un conformisme d’État. C’est, à peu près, l’ ukase en moins, ce qui s’est passé chez les bourgeois, au sujet du mot
1416 u près, l’ukase en moins, ce qui s’est passé chez les bourgeois, au sujet du mot « esprit ».) Le vrai matérialiste, c’est R
1417 chez les bourgeois, au sujet du mot « esprit ».) Le vrai matérialiste, c’est Ramuz. Parce qu’il aime les choses et détest
1418 vrai matérialiste, c’est Ramuz. Parce qu’il aime les choses et déteste les mécaniques interposées entre l’homme et les cho
1419 est Ramuz. Parce qu’il aime les choses et déteste les mécaniques interposées entre l’homme et les choses. Aussi bien n’épro
1420 hoses et déteste les mécaniques interposées entre l’ homme et les choses. Aussi bien n’éprouve-t-il pas le besoin de s’affi
1421 teste les mécaniques interposées entre l’homme et les choses. Aussi bien n’éprouve-t-il pas le besoin de s’affirmer matéria
1422 omme et les choses. Aussi bien n’éprouve-t-il pas le besoin de s’affirmer matérialiste. La position de Ramuz paraît assez
1423 ve-t-il pas le besoin de s’affirmer matérialiste. La position de Ramuz paraît assez voisine de celle de Berdiaev. Tous deu
1424 isine de celle de Berdiaev. Tous deux considèrent le marxisme comme l’aboutissement logique de l’esprit bourgeois-capitali
1425 Berdiaev. Tous deux considèrent le marxisme comme l’ aboutissement logique de l’esprit bourgeois-capitaliste. Tous deux sav
1426 rent le marxisme comme l’aboutissement logique de l’ esprit bourgeois-capitaliste. Tous deux savent qu’il faut être pour Di
1427 savent qu’il faut être pour Dieu ou contre Dieu. La bourgeoisie a choisi dès longtemps, pratiquement athée sans le savoir
1428 e a choisi dès longtemps, pratiquement athée sans le savoir. Le marxisme est l’aveu de son choix. Mais Berdiaev parle en c
1429 dès longtemps, pratiquement athée sans le savoir. Le marxisme est l’aveu de son choix. Mais Berdiaev parle en chrétien, et
1430 ratiquement athée sans le savoir. Le marxisme est l’ aveu de son choix. Mais Berdiaev parle en chrétien, et Ramuz ne veut e
1431 -ce possible ? Et peut-il y croire ? Il a bien vu le choix, mais l’a-t-il fait ? Il veut un monde à la taille de l’homme.
1432 Et peut-il y croire ? Il a bien vu le choix, mais l’ a-t-il fait ? Il veut un monde à la taille de l’homme. Il sait aussi q
1433 le choix, mais l’a-t-il fait ? Il veut un monde à la taille de l’homme. Il sait aussi que la mesure de cette taille est da
1434 s l’a-t-il fait ? Il veut un monde à la taille de l’ homme. Il sait aussi que la mesure de cette taille est dans une foi, d
1435 n monde à la taille de l’homme. Il sait aussi que la mesure de cette taille est dans une foi, dans « quelque chose qui dép
1436 st dans une foi, dans « quelque chose qui dépasse l’ homme et le suppose en même temps », écrit-il. C’est lorsqu’il définit
1437 foi, dans « quelque chose qui dépasse l’homme et le suppose en même temps », écrit-il. C’est lorsqu’il définit ainsi la f
1438 temps », écrit-il. C’est lorsqu’il définit ainsi la foi qu’on hésite à le suivre, — et que peut-être il sert mal sa pensé
1439 est lorsqu’il définit ainsi la foi qu’on hésite à le suivre, — et que peut-être il sert mal sa pensée. Car cette définitio
1440 r cette définition ne vaut, précisément, que pour la foi marxiste-dialectique. Le « dépassement » peut aussi bien se faire
1441 récisément, que pour la foi marxiste-dialectique. Le « dépassement » peut aussi bien se faire dans l’immanence. La foi chr
1442 Le « dépassement » peut aussi bien se faire dans l’ immanence. La foi chrétienne dépasse-t-elle vraiment l’homme ? N’est-e
1443 ment » peut aussi bien se faire dans l’immanence. La foi chrétienne dépasse-t-elle vraiment l’homme ? N’est-elle pas bien
1444 anence. La foi chrétienne dépasse-t-elle vraiment l’ homme ? N’est-elle pas bien plutôt ce qui le juge et en même temps le
1445 iment l’homme ? N’est-elle pas bien plutôt ce qui le juge et en même temps le sauve dans ses limites, ici et maintenant ?
1446 e pas bien plutôt ce qui le juge et en même temps le sauve dans ses limites, ici et maintenant ? C’est là le sens de l’Inc
1447 ve dans ses limites, ici et maintenant ? C’est là le sens de l’Incarnation, en même temps que de la véritable transcendanc
1448 limites, ici et maintenant ? C’est là le sens de l’ Incarnation, en même temps que de la véritable transcendance. C’est là
1449 là le sens de l’Incarnation, en même temps que de la véritable transcendance. C’est là le point de la rupture avec tout hu
1450 temps que de la véritable transcendance. C’est là le point de la rupture avec tout humanisme imaginable (l’homme sauvé par
1451 la véritable transcendance. C’est là le point de la rupture avec tout humanisme imaginable (l’homme sauvé par son progrès
1452 int de la rupture avec tout humanisme imaginable ( l’ homme sauvé par son progrès). 27. Pas la Nature de Rousseau, – la Na
1453 inable (l’homme sauvé par son progrès). 27. Pas la Nature de Rousseau, – la Nature des choses. 28. Certains écrivains m
1454 son progrès). 27. Pas la Nature de Rousseau, –  la Nature des choses. 28. Certains écrivains marxistes français protest
1455 çais protestent avec la dernière énergie quand on les traite de matérialistes. Je crains que ce soit, chez la plupart d’ent
1456 du matériel ! », disait l’un d’eux. Qu’est-ce que le matériel peut bien précéder ? D’où nous viendrait alors ce « matériel
1457 Denis de, « [Compte rendu] C. F. Ramuz, Taille de l’ homme  », La Nouvelle Revue française, Paris, avril 1934, p. 709-711.
1458 [Compte rendu] C. F. Ramuz, Taille de l’homme  », La Nouvelle Revue française, Paris, avril 1934, p. 709-711.
16 1934, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Le Procès, par Franz Kafka (mai 1934)
1459 Le Procès, par Franz Kafka (mai 1934)p Je ne sais pas si le Procès es
1460 par Franz Kafka (mai 1934)p Je ne sais pas si le Procès est le chef-d’œuvre de Kafka, mais il est difficile d’imaginer
1461 ka (mai 1934)p Je ne sais pas si le Procès est le chef-d’œuvre de Kafka, mais il est difficile d’imaginer un livre plus
1462 icile d’imaginer un livre plus profond. On a même l’ impression en le lisant, de lire pour la première fois un livre absolu
1463 un livre plus profond. On a même l’impression en le lisant, de lire pour la première fois un livre absolument profond. No
1464 vre absolument profond. Non qu’il prétende percer les apparences du monde pour s’enfoncer dans un ésotérisme, au contraire 
1465 use à toute interprétation, c’est-à-dire à toutes les conventions inventées par les hommes pour étouffer le scandale. Josef
1466 est-à-dire à toutes les conventions inventées par les hommes pour étouffer le scandale. Josef K… fondé de pouvoir dans une
1467 onventions inventées par les hommes pour étouffer le scandale. Josef K… fondé de pouvoir dans une banque, se voit arrêté u
1468 s ne savent pas de quoi et n’ont pas qualité pour le savoir. Puis, on le rend à la liberté. Toute l’histoire sera celle, n
1469 uoi et n’ont pas qualité pour le savoir. Puis, on le rend à la liberté. Toute l’histoire sera celle, non pas du procès, qu
1470 nt pas qualité pour le savoir. Puis, on le rend à la liberté. Toute l’histoire sera celle, non pas du procès, qui n’a jama
1471 r le savoir. Puis, on le rend à la liberté. Toute l’ histoire sera celle, non pas du procès, qui n’a jamais lieu, mais des
1472 , mais des préliminaires, des démarches que tente l’ accusé auprès d’une justice insaisissable, infiniment pédante, corromp
1473 nfiniment pédante, corrompue et capricieuse, dont les bureaux sont installés dans des faubourgs ignobles ou des greniers. J
1474 ignobles ou des greniers. Jamais K… ne parvient à l’ instance suprême ; jamais personne d’ailleurs n’a pu y parvenir. À la
1475 ; jamais personne d’ailleurs n’a pu y parvenir. À la fin du cauchemar, on le tue dans des conditions trop déprimantes pour
1476 eurs n’a pu y parvenir. À la fin du cauchemar, on le tue dans des conditions trop déprimantes pour qu’il puisse songer mêm
1477 est ainsi une suspension du jugement qui est tout le drame du Procès. Constatation de la réalité telle qu’elle est, et en
1478 qui est tout le drame du Procès. Constatation de la réalité telle qu’elle est, et en même temps, au moment où la révolte
1479 telle qu’elle est, et en même temps, au moment où la révolte point, constatation de la vanité absolue de toute appréciatio
1480 s, au moment où la révolte point, constatation de la vanité absolue de toute appréciation, de toute prise de parti, — de t
1481 , — de tout acte. C’est ce qu’on pourrait appeler la vision métaphysique. Tous les efforts des hommes — y compris les phil
1482 ’on pourrait appeler la vision métaphysique. Tous les efforts des hommes — y compris les philosophes — consistent peut-être
1483 physique. Tous les efforts des hommes — y compris les philosophes — consistent peut-être à échapper à cette vision, qui est
1484 tent peut-être à échapper à cette vision, qui est l’ angoisse même. Est-ce pur hasard si la théologie chrétienne rend compt
1485 on, qui est l’angoisse même. Est-ce pur hasard si la théologie chrétienne rend compte de presque toutes les situations de
1486 héologie chrétienne rend compte de presque toutes les situations de ce livre ? Cette Loi qui nous condamne quoi que nous fa
1487 lent comme des prêtres, et qui sont de mèche avec la justice, ces prévenus en liberté, cette complicité générale, tout cel
1488 ette complicité générale, tout cela, ce n’est pas la « misère de l’homme sans Dieu », mais la misère de l’homme livré à un
1489 générale, tout cela, ce n’est pas la « misère de l’ homme sans Dieu », mais la misère de l’homme livré à un Dieu qu’il ne
1490 ’est pas la « misère de l’homme sans Dieu », mais la misère de l’homme livré à un Dieu qu’il ne connaît pas, parce qu’il n
1491  misère de l’homme sans Dieu », mais la misère de l’ homme livré à un Dieu qu’il ne connaît pas, parce qu’il ne connaît pas
1492 qu’il ne connaît pas, parce qu’il ne connaît pas le Christ. « Nul ne vient au Père que par moi ». C’est par le Fils que D
1493 . « Nul ne vient au Père que par moi ». C’est par le Fils que Dieu devient pour nous le Père ; mais alors, l’acquittement
1494 i ». C’est par le Fils que Dieu devient pour nous le Père ; mais alors, l’acquittement est possible. « Je suis le chemin »
1495 que Dieu devient pour nous le Père ; mais alors, l’ acquittement est possible. « Je suis le chemin » — mais alors l’acte a
1496 ais alors, l’acquittement est possible. « Je suis le chemin » — mais alors l’acte aussi est possible. Ainsi, la foi au Chr
1497 est possible. « Je suis le chemin » — mais alors l’ acte aussi est possible. Ainsi, la foi au Christ est la seule possibil
1498  » — mais alors l’acte aussi est possible. Ainsi, la foi au Christ est la seule possibilité qui soit donnée à l’homme de m
1499 e aussi est possible. Ainsi, la foi au Christ est la seule possibilité qui soit donnée à l’homme de marcher, d’échapper à
1500 Christ est la seule possibilité qui soit donnée à l’ homme de marcher, d’échapper à l’« arrêt » ; mais c’est aussi par cett
1501 ui soit donnée à l’homme de marcher, d’échapper à l’ « arrêt » ; mais c’est aussi par cette foi, et parce qu’elle nous perm
1502 ue nous connaissons notre état, que nous mesurons le réel, et que nous pouvons l’avouer. p. Rougemont Denis de, « [Comp
1503 t, que nous mesurons le réel, et que nous pouvons l’ avouer. p. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Franz Kafka, Le Pro
1504 Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Franz Kafka, Le Procès  », La Nouvelle Revue française, Paris, mai 1934, p. 868-869.
1505 s de, « [Compte rendu] Franz Kafka, Le Procès  », La Nouvelle Revue française, Paris, mai 1934, p. 868-869.
17 1935, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Ni gauche ni droite (août 1935)
1506 ann à Valmy entraîne ses troupes au cri de « Vive la Nation ! » nation et peuple se confondaient alors dans la mystique de
1507 n ! » nation et peuple se confondaient alors dans la mystique de la révolution. Aujourd’hui l’on se voit sommé de choisir
1508 peuple se confondaient alors dans la mystique de la révolution. Aujourd’hui l’on se voit sommé de choisir entre un front
1509 rs dans la mystique de la révolution. Aujourd’hui l’ on se voit sommé de choisir entre un front qui se dit « national » et
1510 se dit « populaire ». Faudrait-il en déduire que le peuple et la nation s’opposent ? Les mots l’indiqueraient, non les fa
1511 ulaire ». Faudrait-il en déduire que le peuple et la nation s’opposent ? Les mots l’indiqueraient, non les faits : voilà b
1512 n déduire que le peuple et la nation s’opposent ? Les mots l’indiqueraient, non les faits : voilà bien le désordre où nous
1513 que le peuple et la nation s’opposent ? Les mots l’ indiqueraient, non les faits : voilà bien le désordre où nous vivons.
1514 nation s’opposent ? Les mots l’indiqueraient, non les faits : voilà bien le désordre où nous vivons. C’est une anarchie sém
1515 mots l’indiqueraient, non les faits : voilà bien le désordre où nous vivons. C’est une anarchie sémantique. On me fait ob
1516 une anarchie sémantique. On me fait observer que l’ opposition n’est pas entre le peuple et la nation — entre les noms — m
1517 me fait observer que l’opposition n’est pas entre le peuple et la nation — entre les noms — mais entre « national » et « p
1518 ver que l’opposition n’est pas entre le peuple et la nation — entre les noms — mais entre « national » et « populaire », c
1519 on n’est pas entre le peuple et la nation — entre les noms — mais entre « national » et « populaire », c’est-à-dire entre l
1520 « national » et « populaire », c’est-à-dire entre les adjectifs. Je traduis : l’opposition n’est pas dans les faits, mais d
1521 », c’est-à-dire entre les adjectifs. Je traduis : l’ opposition n’est pas dans les faits, mais dans les mystiques. Que vale
1522 jectifs. Je traduis : l’opposition n’est pas dans les faits, mais dans les mystiques. Que valent ces mystiques détachées du
1523 l’opposition n’est pas dans les faits, mais dans les mystiques. Que valent ces mystiques détachées du réel ? Je vois à gau
1524 es mystiques détachées du réel ? Je vois à gauche la peur de Chiappe, et à droite, la peur de la gauche. Je vois à droite
1525 Je vois à gauche la peur de Chiappe, et à droite, la peur de la gauche. Je vois à droite une tentation fasciste, trop faib
1526 auche la peur de Chiappe, et à droite, la peur de la gauche. Je vois à droite une tentation fasciste, trop faible encore p
1527 he une peur du fascisme assez forte déjà pour que la masse accepte l’idée d’une dictature… « antifasciste ». Tout cela se
1528 scisme assez forte déjà pour que la masse accepte l’ idée d’une dictature… « antifasciste ». Tout cela se joue sur des mots
1529 s ne traduisent que des religions vagues, nées de la peur, et comme telles meurtrières. Les faits, ce sont M. de Wendel de
1530 es, nées de la peur, et comme telles meurtrières. Les faits, ce sont M. de Wendel derrière la droite, et M. Litvinoff derri
1531 trières. Les faits, ce sont M. de Wendel derrière la droite, et M. Litvinoff derrière la gauche. Je leur devine quelques i
1532 ndel derrière la droite, et M. Litvinoff derrière la gauche. Je leur devine quelques intérêts convergents, du côté d’Hitle
1533 e veut une armée française puissante, il approuve la loi de deux ans. « Staline a raison », affirme l’affiche communiste ;
1534 la loi de deux ans. « Staline a raison », affirme l’ affiche communiste ; mais alors La Rocque n’a pas tort ? — Certes, il
1535 ison », affirme l’affiche communiste ; mais alors La Rocque n’a pas tort ? — Certes, il a tort disent les gauches ; et c’e
1536 Rocque n’a pas tort ? — Certes, il a tort disent les gauches ; et c’est à cause de la mystique. Et Staline, disent les dro
1537 l a tort disent les gauches ; et c’est à cause de la mystique. Et Staline, disent les droites, a tort : car nous voulons u
1538 c’est à cause de la mystique. Et Staline, disent les droites, a tort : car nous voulons une armée forte, mais non pas en v
1539 , mais non pas en vertu d’un conseil bolcheviste. La question se ramène à ceci : si tout le monde était mis d’accord par u
1540 ression hitlérienne, irait-on se battre au nom de la liberté nationale ou au nom de la liberté populaire ! Flatus vocis !
1541 attre au nom de la liberté nationale ou au nom de la liberté populaire ! Flatus vocis ! Il n’y a qu’une seule manière de t
1542 vocis ! Il n’y a qu’une seule manière de tirer à la mitrailleuse et de se faire casser la figure. On peut regretter que l
1543 de tirer à la mitrailleuse et de se faire casser la figure. On peut regretter que le Congrès pour la défense de la cultur
1544 se faire casser la figure. On peut regretter que le Congrès pour la défense de la culture n’ait rien tenté pour débrouill
1545 la figure. On peut regretter que le Congrès pour la défense de la culture n’ait rien tenté pour débrouiller un peu le com
1546 peut regretter que le Congrès pour la défense de la culture n’ait rien tenté pour débrouiller un peu le complexe de mots
1547 culture n’ait rien tenté pour débrouiller un peu le complexe de mots adultérés qui encombre la vie politique et qui empêc
1548 un peu le complexe de mots adultérés qui encombre la vie politique et qui empêche, à gauche comme à droite, de nommer les
1549 t qui empêche, à gauche comme à droite, de nommer les vrais adversaires. (Je ne vois que Chamson qui ait dénoncé l’équivoqu
1550 ersaires. (Je ne vois que Chamson qui ait dénoncé l’ équivoque dont vit la droite, quand elle se proclame « nationale » tou
1551 que Chamson qui ait dénoncé l’équivoque dont vit la droite, quand elle se proclame « nationale » tout en restant capitali
1552 ationale » tout en restant capitaliste.) Défendre la culture, ce serait d’abord rendre aux mots-clés un sens commun. Mais
1553 emble qu’on a fait tout autre chose, au Palais de la Mutualité. Il me semble qu’on s’est entendu pour « cultiver » des équ
1554 tiver » des équivoques verbales assez grossières. L’ équivoque sur le mot liberté par exemple : c’était jusqu’à présent le
1555 voques verbales assez grossières. L’équivoque sur le mot liberté par exemple : c’était jusqu’à présent le fait des ligues
1556 mot liberté par exemple : c’était jusqu’à présent le fait des ligues que de proclamer la liberté en préparant la dictature
1557 squ’à présent le fait des ligues que de proclamer la liberté en préparant la dictature. Jamais on n’a plus mal menti, jama
1558 s ligues que de proclamer la liberté en préparant la dictature. Jamais on n’a plus mal menti, jamais avec plus d’enthousia
1559 us mal menti, jamais avec plus d’enthousiasme. Ni la gauche ni la droite ne pourront aboutir à une doctrine constructive t
1560 jamais avec plus d’enthousiasme. Ni la gauche ni la droite ne pourront aboutir à une doctrine constructive tant qu’elles
1561 tructive tant qu’elles s’efforceront de dénaturer les grands mots d’ordre populaires, au nom de mystiques sans puissance co
1562 laires, au nom de mystiques sans puissance contre les menaces réelles, — qui sont la guerre et l’étatisme totalitaire. C’es
1563 puissance contre les menaces réelles, — qui sont la guerre et l’étatisme totalitaire. C’est très simple. Trop simple, san
1564 ntre les menaces réelles, — qui sont la guerre et l’ étatisme totalitaire. C’est très simple. Trop simple, sans doute ? q
1565 q. Rougemont Denis de, « Ni gauche ni droite », La Nouvelle Revue française, Paris, août 1935, p. 305-306.
18 1935, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Paracelse, par Frédéric Gundolf (septembre 1935)
1566 5)r Paracelse ne fut pas un mage, ou plutôt si l’ on veut qu’il l’ait été, au sens où l’on dirait qu’Einstein, interprèt
1567 ne fut pas un mage, ou plutôt si l’on veut qu’il l’ ait été, au sens où l’on dirait qu’Einstein, interprète du cosmos, est
1568 u plutôt si l’on veut qu’il l’ait été, au sens où l’ on dirait qu’Einstein, interprète du cosmos, est un mage, il ne fut pa
1569 és, suivi d’une troupe de disciples turbulents, à la recherche de secrets qu’il voulait rendre manifestes à tous, et qu’il
1570 and populaire et grossier30. Il faut se méfier de la gloire qu’on lui a faite. On nous rapporte par exemple que « déjà vie
1571 in de cheval, et de faire subir à son corps toute la gamme des combinaisons alchimiques afin de ressusciter ensuite sous l
1572 sons alchimiques afin de ressusciter ensuite sous la forme d’un beau jeune homme. Il se fit tailler en morceaux et enterre
1573 idèle serviteur. Mais celui-ci, impatient, ouvrit la tombe deux jours trop tôt. Paracelse y gisait, métamorphosé en bel ad
1574 racelse y gisait, métamorphosé en bel adolescent, le crâne seul n’avait pas tout à fait repoussé. Un peu d’air pénétra dan
1575 s tout à fait repoussé. Un peu d’air pénétra dans le cerveau et Paracelse dut mourir avant d’avoir ressuscité ». Rajeunir
1576 r ressuscité ». Rajeunir son corps et son âme par l’ ordure, c’est un des thèmes favoris de notre temps. Mais combien, parm
1577 nous, se sont fait déterrer deux jours trop tôt ! L’ auteur de l’anecdote était bon prophète, mais il n’a rien compris à Pa
1578 t fait déterrer deux jours trop tôt ! L’auteur de l’ anecdote était bon prophète, mais il n’a rien compris à Paracelse. Thé
1579 qui voulait harmoniser sa petite spécialité avec les sciences fondamentales qui doivent donner le ton à toutes les autres,
1580 vec les sciences fondamentales qui doivent donner le ton à toutes les autres, et qui sont, comme nul ne l’ignore ou ne pou
1581 fondamentales qui doivent donner le ton à toutes les autres, et qui sont, comme nul ne l’ignore ou ne pourra l’ignorer lon
1582 on à toutes les autres, et qui sont, comme nul ne l’ ignore ou ne pourra l’ignorer longtemps, l’astrologie et la théologie.
1583 , et qui sont, comme nul ne l’ignore ou ne pourra l’ ignorer longtemps, l’astrologie et la théologie. Un grand souci paraît
1584 nul ne l’ignore ou ne pourra l’ignorer longtemps, l’ astrologie et la théologie. Un grand souci paraît dans toute son œuvre
1585 ou ne pourra l’ignorer longtemps, l’astrologie et la théologie. Un grand souci paraît dans toute son œuvre : il veut être
1586 utile. Clair ne signifie pas rationaliste, comme le veut le langage confus de ceux qui se croient cartésiens. Aussi a-t-o
1587 Clair ne signifie pas rationaliste, comme le veut le langage confus de ceux qui se croient cartésiens. Aussi a-t-on souven
1588 oient cartésiens. Aussi a-t-on souvent tendance à le rejeter du côté des mystiques, où cependant il n’a que faire, avec so
1589 , où cependant il n’a que faire, avec son goût de l’ expérience et de l’application concrète. Mais justement cette fringale
1590 ’a que faire, avec son goût de l’expérience et de l’ application concrète. Mais justement cette fringale d’expérience qu’il
1591 tte fringale d’expérience qu’il promena par toute l’ Europe, et peut-être même chez les Turcs, le rendit attentif à tant de
1592 romena par toute l’Europe, et peut-être même chez les Turcs, le rendit attentif à tant de phénomènes que son vocabulaire ne
1593 toute l’Europe, et peut-être même chez les Turcs, le rendit attentif à tant de phénomènes que son vocabulaire ne pouvait y
1594 ui savait voir de grandioses correspondances dans le détail bizarre de notre microcosme, manquait de la seule chose dont n
1595 e détail bizarre de notre microcosme, manquait de la seule chose dont nous soyons abondamment fournis : d’un attirail de c
1596 quer ce petit nègre médical et philosophique dont la saveur ne saurait satisfaire les esprits plus curieux de preuves que
1597 hilosophique dont la saveur ne saurait satisfaire les esprits plus curieux de preuves que de faits. J’en viens au petit liv
1598 aits. J’en viens au petit livre de Gundolf. C’est l’ œuvre synthétique d’un philosophe des formes culturelles, plutôt que d
1599 formes culturelles, plutôt que d’un historien de la science. Les historiens font la grimace, mais les lettrés et les méde
1600 urelles, plutôt que d’un historien de la science. Les historiens font la grimace, mais les lettrés et les médecins de la je
1601 d’un historien de la science. Les historiens font la grimace, mais les lettrés et les médecins de la jeune école seront co
1602 la science. Les historiens font la grimace, mais les lettrés et les médecins de la jeune école seront comblés. Gundolf déc
1603 s historiens font la grimace, mais les lettrés et les médecins de la jeune école seront comblés. Gundolf décrit l’œuvre de
1604 t la grimace, mais les lettrés et les médecins de la jeune école seront comblés. Gundolf décrit l’œuvre de Paracelse comme
1605 de la jeune école seront comblés. Gundolf décrit l’ œuvre de Paracelse comme un drame de l’expression, une tragédie de la
1606 olf décrit l’œuvre de Paracelse comme un drame de l’ expression, une tragédie de la terminologie, une « lutte accablante po
1607 e comme un drame de l’expression, une tragédie de la terminologie, une « lutte accablante pour l’expression des choses jam
1608 e de la terminologie, une « lutte accablante pour l’ expression des choses jamais dites ». Paracelse a vu plus de choses qu
1609 oses qu’il ne pouvait en exprimer. Son destin fut l’ inverse du nôtre. La technique nous masque le vrai, nous sommes en ple
1610 t en exprimer. Son destin fut l’inverse du nôtre. La technique nous masque le vrai, nous sommes en pleine scolastique (au
1611 fut l’inverse du nôtre. La technique nous masque le vrai, nous sommes en pleine scolastique (au sens vulgaire). Ce défaut
1612 ns vulgaire). Ce défaut de mots propres aurait dû le contraindre à l’invention de métaphores. Mais Paracelse justement se
1613 défaut de mots propres aurait dû le contraindre à l’ invention de métaphores. Mais Paracelse justement se méfie de ce mode
1614 ait sur chaque symptôme, Paracelse ne veut nommer les maladies que par le nom de leur remède. « Il ne faut pas dire que tel
1615 me, Paracelse ne veut nommer les maladies que par le nom de leur remède. « Il ne faut pas dire que tel état est colérique,
1616 utre saturnienne. » Ce langage en effet renvoie à l’ origine cosmique du mal, où se trouve aussi le remède. Pour connaître
1617 e à l’origine cosmique du mal, où se trouve aussi le remède. Pour connaître et guérir une maladie, il ne suffit pas de voi
1618 e et guérir une maladie, il ne suffit pas de voir l’ homme seul ; il faut considérer sa relation avec le monde, dont il n’e
1619 ’homme seul ; il faut considérer sa relation avec le monde, dont il n’est qu’un membre, un reflet. So oben wie unten. L’as
1620 n’est qu’un membre, un reflet. So oben wie unten. L’ astrologie de Paracelse n’est pas une superstition de devin, c’est une
1621 s une superstition de devin, c’est une science de la guérison fondée sur le principe hippocratique des similia similibus,
1622 evin, c’est une science de la guérison fondée sur le principe hippocratique des similia similibus, principe qu’on retrouve
1623 des similia similibus, principe qu’on retrouve à la base de l’homéopathie moderne, du traitement par la vaccination, et m
1624 a similibus, principe qu’on retrouve à la base de l’ homéopathie moderne, du traitement par la vaccination, et même de la p
1625 base de l’homéopathie moderne, du traitement par la vaccination, et même de la psychanalyse. Paracelse s’était formé de l
1626 rne, du traitement par la vaccination, et même de la psychanalyse. Paracelse s’était formé de l’homme une conception spiri
1627 me de la psychanalyse. Paracelse s’était formé de l’ homme une conception spirituelle et organique (théologique-astrologiqu
1628 s’opposait32 aux médecins galénistes qui voyaient l’ homme sous l’aspect d’un concept. Il se fût opposé aussi aux médecins
1629 aux médecins galénistes qui voyaient l’homme sous l’ aspect d’un concept. Il se fût opposé aussi aux médecins de la Renaiss
1630 n concept. Il se fût opposé aussi aux médecins de la Renaissance, à Léonard, à Cardan, à Vésale, aux techniciens de la dis
1631 à Léonard, à Cardan, à Vésale, aux techniciens de la dissection dont descend toute la science du xixe , et qui nous ont co
1632 x techniciens de la dissection dont descend toute la science du xixe , et qui nous ont conduits à considérer notre corps c
1633 orps comme une espèce de moteur démontable. Ainsi le grand docteur « macrocosmique », en appliquant l’astrologie, redécouv
1634 le grand docteur « macrocosmique », en appliquant l’ astrologie, redécouvrit pour les générations futures « l’horizon primo
1635 e », en appliquant l’astrologie, redécouvrit pour les générations futures « l’horizon primordial de la médecine », comme l’
1636 logie, redécouvrit pour les générations futures «  l’ horizon primordial de la médecine », comme l’écrit le Dr Allendy dans
1637 les générations futures « l’horizon primordial de la médecine », comme l’écrit le Dr Allendy dans l’Essai sur la guérison,
1638 es « l’horizon primordial de la médecine », comme l’ écrit le Dr Allendy dans l’Essai sur la guérison, ouvrage tout imprégn
1639 orizon primordial de la médecine », comme l’écrit le Dr Allendy dans l’Essai sur la guérison, ouvrage tout imprégné de l’e
1640 e la médecine », comme l’écrit le Dr Allendy dans l’ Essai sur la guérison, ouvrage tout imprégné de l’esprit vitaliste de
1641 e », comme l’écrit le Dr Allendy dans l’Essai sur la guérison, ouvrage tout imprégné de l’esprit vitaliste de Paracelse, b
1642 l’Essai sur la guérison, ouvrage tout imprégné de l’ esprit vitaliste de Paracelse, brève synthèse des idées les plus neuve
1643 vitaliste de Paracelse, brève synthèse des idées les plus neuves, qui sont aussi les plus antiques, sur la nature unique d
1644 ynthèse des idées les plus neuves, qui sont aussi les plus antiques, sur la nature unique de la maladie, ouvrage dont on pe
1645 lus neuves, qui sont aussi les plus antiques, sur la nature unique de la maladie, ouvrage dont on peut dire qu’il marque u
1646 aussi les plus antiques, sur la nature unique de la maladie, ouvrage dont on peut dire qu’il marque une date dans l’histo
1647 rage dont on peut dire qu’il marque une date dans l’ histoire de la connaissance du monde par le corps, ou si l’on veut, du
1648 eut dire qu’il marque une date dans l’histoire de la connaissance du monde par le corps, ou si l’on veut, du corps par le
1649 e dans l’histoire de la connaissance du monde par le corps, ou si l’on veut, du corps par le monde. « L’homme ne saura jam
1650 e de la connaissance du monde par le corps, ou si l’ on veut, du corps par le monde. « L’homme ne saura jamais assez combie
1651 monde par le corps, ou si l’on veut, du corps par le monde. « L’homme ne saura jamais assez combien il est anthropomorphe 
1652 corps, ou si l’on veut, du corps par le monde. «  L’ homme ne saura jamais assez combien il est anthropomorphe », dit Goeth
1653 Il faudrait dire aussi, à la suite de Paracelse : l’ homme ne saura jamais assez à quel point il est « cosmomorphe ». Le re
1654 jamais assez à quel point il est « cosmomorphe ». Le retour à Paracelse auquel nous assistons est un des signes marquants
1655 stons est un des signes marquants de ce temps-ci. Le symbole d’une révolution astronomique de la culture occidentale. Peut
1656 s-ci. Le symbole d’une révolution astronomique de la culture occidentale. Peut-être avons-nous passé l’âge de l’inhumaine,
1657 a culture occidentale. Peut-être avons-nous passé l’ âge de l’inhumaine, de la blasphématoire mécanisation de la vie. Peut-
1658 occidentale. Peut-être avons-nous passé l’âge de l’ inhumaine, de la blasphématoire mécanisation de la vie. Peut-être avon
1659 ut-être avons-nous passé l’âge de l’inhumaine, de la blasphématoire mécanisation de la vie. Peut-être avons-nous passé l’â
1660 l’inhumaine, de la blasphématoire mécanisation de la vie. Peut-être avons-nous passé l’âge des rationalismes trop courts,
1661 écanisation de la vie. Peut-être avons-nous passé l’ âge des rationalismes trop courts, de la mythologie féroce des ismes,
1662 ous passé l’âge des rationalismes trop courts, de la mythologie féroce des ismes, de Marx et des capitalistes, des adorate
1663 s, de Marx et des capitalistes, des adorateurs de la mort, triomphe des chiffres et des laboratoires. Peut-être allons-nou
1664 ratoires. Peut-être allons-nous revenir non pas à l’ humanisme mais à l’homme, considéré comme un miroir du ciel entier. Ce
1665 allons-nous revenir non pas à l’humanisme mais à l’ homme, considéré comme un miroir du ciel entier. Certes, elle n’est pa
1666 ertes, elle n’est pas seulement cruelle et folle, l’ époque qui nous offre de si grandes chances. Et c’est une ère favorabl
1667 Et c’est une ère favorable qui s’ouvre, celle où l’ esprit se remet à chercher ce qu’est l’homme, et quelle est sa mesure
1668 , celle où l’esprit se remet à chercher ce qu’est l’ homme, et quelle est sa mesure dans l’univers qu’il a cru concevoir !
1669 r ce qu’est l’homme, et quelle est sa mesure dans l’ univers qu’il a cru concevoir ! 30. « La monumentale grossièreté lut
1670 re dans l’univers qu’il a cru concevoir ! 30. «  La monumentale grossièreté luthérienne », dit Gundolf. 31. Gundolf écri
1671 ec sa vision nouvelle des choses, il étudia aussi les effets des métaux et des vapeurs sur les ouvriers, observa la démarch
1672 ia aussi les effets des métaux et des vapeurs sur les ouvriers, observa la démarche, le genre de vie et l’aspect des mineur
1673 s métaux et des vapeurs sur les ouvriers, observa la démarche, le genre de vie et l’aspect des mineurs et conçut ainsi, le
1674 es vapeurs sur les ouvriers, observa la démarche, le genre de vie et l’aspect des mineurs et conçut ainsi, le premier, l’i
1675 ouvriers, observa la démarche, le genre de vie et l’ aspect des mineurs et conçut ainsi, le premier, l’importance de l’hygi
1676 l’aspect des mineurs et conçut ainsi, le premier, l’ importance de l’hygiène professionnelle ». Voilà qui l’honore en tant
1677 eurs et conçut ainsi, le premier, l’importance de l’ hygiène professionnelle ». Voilà qui l’honore en tant qu’homme. Mais o
1678 ortance de l’hygiène professionnelle ». Voilà qui l’ honore en tant qu’homme. Mais on se représente aisément l’embarras qui
1679 en tant qu’homme. Mais on se représente aisément l’ embarras qui eût été le sien si l’on eût exigé qu’il nommât l’activité
1680 ésente aisément l’embarras qui eût été le sien si l’ on eût exigé qu’il nommât l’activité qu’il découvrait. Qui ne sait, de
1681 ui eût été le sien si l’on eût exigé qu’il nommât l’ activité qu’il découvrait. Qui ne sait, de nos jours, parler d’« hygiè
1682 Galien et tous vos scribouillards (Scribenten) je les dissoudrai dans de l’Alkali !… » Il propose dans le même passage de l
1683 bouillards (Scribenten) je les dissoudrai dans de l’ Alkali !… » Il propose dans le même passage de les brûler au four, de
1684 dissoudrai dans de l’Alkali !… » Il propose dans le même passage de les brûler au four, de les baptiser d’ordures, eux et
1685 l’Alkali !… » Il propose dans le même passage de les brûler au four, de les baptiser d’ordures, eux et leur parenté, de le
1686 se dans le même passage de les brûler au four, de les baptiser d’ordures, eux et leur parenté, de les jeter dans le lac de
1687 e les baptiser d’ordures, eux et leur parenté, de les jeter dans le lac de Schwyz, etc., « et ce sera pour la vertu, quarte
1688 d’ordures, eux et leur parenté, de les jeter dans le lac de Schwyz, etc., « et ce sera pour la vertu, quarte colonne de la
1689 er dans le lac de Schwyz, etc., « et ce sera pour la vertu, quarte colonne de la médecine, un grand spectacle ! » (Liber P
1690 c., « et ce sera pour la vertu, quarte colonne de la médecine, un grand spectacle ! » (Liber Paragranum). r. Rougemont D
1691 « [Compte rendu] Frédéric Gundolf, Paracelse  », La Nouvelle Revue française, Paris, septembre 1935, p. 445-448.
19 1935, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Recherches philosophiques (septembre 1935)
1692 a jamais mieux mérité son titre. Je veux dire que la part de la dialectique professionnelle, professorale, la tractation c
1693 eux mérité son titre. Je veux dire que la part de la dialectique professionnelle, professorale, la tractation correcte et
1694 de la dialectique professionnelle, professorale, la tractation correcte et à mon sens parfaitement vaine de problèmes qui
1695 r, diminue nettement dans ce tome IV au profit de la recherche véritable, des imprudences passionnées, des « essais » ou d
1696 cher et non ratiociner. On ne saurait assez louer les directeurs des Recherches d’avoir pris au sérieux le risque philosoph
1697 directeurs des Recherches d’avoir pris au sérieux le risque philosophique. Et je ne pense pas trahir leur tendance en insi
1698 insistant ici exclusivement sur trois des écrits les moins « orthodoxes » qu’ils ont accueillis cette année. La belle étud
1699 « orthodoxes » qu’ils ont accueillis cette année. La belle étude de Karl Löwith sur Hegel, Marx et Kierkegaard fournit à l
1700 l Löwith sur Hegel, Marx et Kierkegaard fournit à l’ orientation actuelle des Recherches une sorte de justification histori
1701 torique de grande envergure. Löwith voit en Hegel l’ achèvement de la philosophie classique, aux deux sens du mot achèvemen
1702 e envergure. Löwith voit en Hegel l’achèvement de la philosophie classique, aux deux sens du mot achèvement. À partir de H
1703 ens du mot achèvement. À partir de Hegel, dit-il, le philosophe n’aura plus d’autre possibilité que celle de « réaliser »
1704 lus d’autre possibilité que celle de « réaliser » la philosophie. Réaliser, c’est s’engager dans l’aventure politique ou r
1705  » la philosophie. Réaliser, c’est s’engager dans l’ aventure politique ou religieuse. Au grand Hegel qui philosophe « au d
1706 e. Au grand Hegel qui philosophe « au dimanche de la vie » au-dessus du « banc de sable de cette vie temporelle », Löwith
1707 Löwith oppose Marx et Kierkegaard qui pensent « à la banalité soucieuse, extérieure et intérieure, de l’homme ». Et je ne
1708 banalité soucieuse, extérieure et intérieure, de l’ homme ». Et je ne dis pas que le parallèle Marx-Kierkegaard n’ait entr
1709 et intérieure, de l’homme ». Et je ne dis pas que le parallèle Marx-Kierkegaard n’ait entraîné l’auteur à déshumaniser à l
1710 que le parallèle Marx-Kierkegaard n’ait entraîné l’ auteur à déshumaniser à l’excès Kierkegaard, et à forcer l’opposition
1711 rkegaard n’ait entraîné l’auteur à déshumaniser à l’ excès Kierkegaard, et à forcer l’opposition de Marx à la doctrine hégé
1712 à déshumaniser à l’excès Kierkegaard, et à forcer l’ opposition de Marx à la doctrine hégélienne de la médiation. Mais ce q
1713 s Kierkegaard, et à forcer l’opposition de Marx à la doctrine hégélienne de la médiation. Mais ce qui me paraît important,
1714 l’opposition de Marx à la doctrine hégélienne de la médiation. Mais ce qui me paraît important, c’est que Löwith dégage p
1715 ît important, c’est que Löwith dégage puissamment l’ origine philosophique du conflit qui domine le monde présent. L’effond
1716 ent l’origine philosophique du conflit qui domine le monde présent. L’effondrement de l’idéalisme hégélien sous la pressio
1717 osophique du conflit qui domine le monde présent. L’ effondrement de l’idéalisme hégélien sous la pression des réalités hum
1718 it qui domine le monde présent. L’effondrement de l’ idéalisme hégélien sous la pression des réalités humaines élémentaires
1719 sent. L’effondrement de l’idéalisme hégélien sous la pression des réalités humaines élémentaires, voilà le fait historique
1720 ression des réalités humaines élémentaires, voilà le fait historique capital sur lequel se fonde l’attitude commune des in
1721 là le fait historique capital sur lequel se fonde l’ attitude commune des intellectuels révolutionnaires, qu’ils soient hum
1722 hrétiens, marxistes ou personnalistes. Désormais, la philosophie cessera d’être une simple description : elle va devenir a
1723 a devenir action transformatrice, et productrice. L’ esprit pur s’évanouit. L’âge qui s’ouvre sera celui du spirituel décis
1724 matrice, et productrice. L’esprit pur s’évanouit. L’ âge qui s’ouvre sera celui du spirituel décisif. La seule doctrine, ou
1725 ’âge qui s’ouvre sera celui du spirituel décisif. La seule doctrine, ou pour mieux dire, la seule attitude de pensée qui t
1726 l décisif. La seule doctrine, ou pour mieux dire, la seule attitude de pensée qui tienne compte de cette crise essentielle
1727 nne compte de cette crise essentielle révélée par l’ échec des synthèses hégéliennes comme constitutive de l’humain, certai
1728 c des synthèses hégéliennes comme constitutive de l’ humain, certains pensent que c’est aujourd’hui l’attitude personnalist
1729 l’humain, certains pensent que c’est aujourd’hui l’ attitude personnaliste. Les pages qu’Alexandre Marc consacre à la situ
1730 t que c’est aujourd’hui l’attitude personnaliste. Les pages qu’Alexandre Marc consacre à la situation de la personne dans l
1731 onnaliste. Les pages qu’Alexandre Marc consacre à la situation de la personne dans le temps paraîtront par endroits un peu
1732 ages qu’Alexandre Marc consacre à la situation de la personne dans le temps paraîtront par endroits un peu sommaires, mais
1733 Marc consacre à la situation de la personne dans le temps paraîtront par endroits un peu sommaires, mais ce défaut procèd
1734 roits un peu sommaires, mais ce défaut procède de la vigueur joyeuse dont l’auteur fait preuve dans l’attaque d’un problèm
1735 mais ce défaut procède de la vigueur joyeuse dont l’ auteur fait preuve dans l’attaque d’un problème entre tous urgent. Il
1736 la vigueur joyeuse dont l’auteur fait preuve dans l’ attaque d’un problème entre tous urgent. Il se pourrait d’ailleurs que
1737 entre tous urgent. Il se pourrait d’ailleurs que l’ apparence brutale des thèses personnalistes soit le fait, provisoire,
1738 ’apparence brutale des thèses personnalistes soit le fait, provisoire, de toute philosophie naissante qui prétend restitue
1739 t bouleversant. À cet égard, on fera bien de lire l’ essai de René Daumal sur les Limites du langage philosophique. C’est u
1740 , on fera bien de lire l’essai de René Daumal sur les Limites du langage philosophique. C’est une recherche des conditions
1741 C’est une recherche des conditions d’activité de l’ imagerie philosophique, conduite avec un bon sens socratique, un sens
1742 vec un bon sens socratique, un sens du concret de l’ esprit qui enchante en moi le disciple de Kierkegaard. Il apparaît de
1743 n sens du concret de l’esprit qui enchante en moi le disciple de Kierkegaard. Il apparaît de plus en plus nettement que le
1744 egaard. Il apparaît de plus en plus nettement que les prolégomènes à toute action réelle résident dans la restauration d’un
1745 prolégomènes à toute action réelle résident dans la restauration d’un langage efficace. C’est dire l’intérêt, au sens for
1746 la restauration d’un langage efficace. C’est dire l’ intérêt, au sens fort, de l’apport des poètes à la philosophie et à l’
1747 efficace. C’est dire l’intérêt, au sens fort, de l’ apport des poètes à la philosophie et à l’éthique. Les études de E. We
1748 l’intérêt, au sens fort, de l’apport des poètes à la philosophie et à l’éthique. Les études de E. Weil sur l’histoire, de
1749 ort, de l’apport des poètes à la philosophie et à l’ éthique. Les études de E. Weil sur l’histoire, de M. Souriau sur la my
1750 pport des poètes à la philosophie et à l’éthique. Les études de E. Weil sur l’histoire, de M. Souriau sur la mystique de la
1751 osophie et à l’éthique. Les études de E. Weil sur l’ histoire, de M. Souriau sur la mystique de la joie, les esquisses phén
1752 udes de E. Weil sur l’histoire, de M. Souriau sur la mystique de la joie, les esquisses phénoménologiques du Dr Minkowski,
1753 sur l’histoire, de M. Souriau sur la mystique de la joie, les esquisses phénoménologiques du Dr Minkowski, les approximat
1754 stoire, de M. Souriau sur la mystique de la joie, les esquisses phénoménologiques du Dr Minkowski, les approximations un pe
1755 les esquisses phénoménologiques du Dr Minkowski, les approximations un peu hésitantes — est-ce un reproche ? — de G. Marce
1756 itantes — est-ce un reproche ? — de G. Marcel sur l’ acte et la personne, mériteraient beaucoup plus qu’une simple mention.
1757 est-ce un reproche ? — de G. Marcel sur l’acte et la personne, mériteraient beaucoup plus qu’une simple mention. J’aurais
1758 ’une simple mention. J’aurais aimé analyser aussi les trois pages où Jean Wahl résume tout le vertige ontologique, et l’art
1759 er aussi les trois pages où Jean Wahl résume tout le vertige ontologique, et l’article de G. Stern sur l’a posteriori, bie
1760 Jean Wahl résume tout le vertige ontologique, et l’ article de G. Stern sur l’a posteriori, bien caractéristique d’un cert
1761 vertige ontologique, et l’article de G. Stern sur l’ a posteriori, bien caractéristique d’un certain renouveau du réalisme.
1762 du réalisme. Je me bornerai à signaler pour finir les pages très curieuses de P. Klossowski sur Sade, où il est démontré pa
1763 il est démontré par des voies imprévues, comment la négation de Dieu entraîne la négation du prochain, dans un esprit vou
1764 s imprévues, comment la négation de Dieu entraîne la négation du prochain, dans un esprit voué à la plus torturante logiqu
1765 ne la négation du prochain, dans un esprit voué à la plus torturante logique. s. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] R
1766 e, « [Compte rendu] Recherches philosophiques  », La Nouvelle Revue française, Paris, septembre 1935, p. 460-462.
20 1935, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Lawrence et Brett par Dorothy Brett ; Matinées mexicaines suivi de Pansies (poèmes), par D. H. Lawrence (octobre 1935)
1767 s (poèmes), par D. H. Lawrence (octobre 1935)t Les souvenirs de Mabel Dodge sur Lawrence à Taos sont irritants à cause d
1768 ause du sujet, même maltraité. Miss Brett raconte la même période et n’irrite pas, ne passionne pas non plus, mais nous in
1769 uement et gagne en somme notre complicité. Elle a l’ humour discret, sensible, qui convient à la confession d’un sentiment
1770 Elle a l’humour discret, sensible, qui convient à la confession d’un sentiment ni partagé ni rebuté, et résigné dès le déb
1771 un sentiment ni partagé ni rebuté, et résigné dès le début à cet état. Le plaisir le plus vif que réserve ce genre d’écrit
1772 gé ni rebuté, et résigné dès le début à cet état. Le plaisir le plus vif que réserve ce genre d’écrit, c’est de nous laiss
1773 é, et résigné dès le début à cet état. Le plaisir le plus vif que réserve ce genre d’écrit, c’est de nous laisser lire dan
1774 ce genre d’écrit, c’est de nous laisser lire dans le jeu d’un être humain : rien ne flatte mieux notre désir d’ubiquité. À
1775 flatte mieux notre désir d’ubiquité. À cet égard, le livre de Dorothy Brett est beaucoup plus satisfaisant que les diatrib
1776 Dorothy Brett est beaucoup plus satisfaisant que les diatribes intéressées de Mabel Dodge. Il parvient à ne rien cacher to
1777 ces dames. Pour quel Lawrence ? Je me demande si le souvenir de son œuvre est pour beaucoup dans l’intérêt que je prends
1778 i le souvenir de son œuvre est pour beaucoup dans l’ intérêt que je prends aux chroniques minutieuses de sa vie33. A-t-on r
1779 roniques minutieuses de sa vie33. A-t-on remarqué l’ extrême rareté des documents accessibles sur la manière de vivre de no
1780 ué l’extrême rareté des documents accessibles sur la manière de vivre de nos contemporains ? Nous avons des reportages et
1781 , c’est-à-dire des moyennes et des exceptions, de la statistique et du pittoresque. Mais où trouver la description des jou
1782 la statistique et du pittoresque. Mais où trouver la description des journées, des occupations, des manières de réagir d’u
1783 ; avec des ustensiles, une scie, un cheval ; avec les sentiments et les idées des autres, et leurs histoires ; avec le trai
1784 les, une scie, un cheval ; avec les sentiments et les idées des autres, et leurs histoires ; avec le train banal des embête
1785 t les idées des autres, et leurs histoires ; avec le train banal des embêtements et des petites chances ? — Voici alors, e
1786 ns ses baquets que vous emplissez sans relâche de l’ eau du puits. J’apporte, moi aussi, quelques seaux. Puis vous partez é
1787 ssi, quelques seaux. Puis vous partez écrire dans les bois, et moi taper à la machine. À déjeuner, vous me dites que Claren
1788 vous partez écrire dans les bois, et moi taper à la machine. À déjeuner, vous me dites que Clarence avait eu une conversa
1789 s de laquelle il lui avait déclaré que vous aviez l’ intention de « détruire » Mabel, ce qui bouleverse Tony et vous boulev
1790 et chaleur : « Oui, c’est vrai, on ne devrait pas les lui dire » et vous soupirez profondément. Vous ne vous sentez pas bie
1791 dément. Vous ne vous sentez pas bien, aussi après le déjeuner vous vous mettez à frotter le parquet de la cuisine à genoux
1792 ussi après le déjeuner vous vous mettez à frotter le parquet de la cuisine à genoux ; à l’aide d’une petite brosse à mains
1793 déjeuner vous vous mettez à frotter le parquet de la cuisine à genoux ; à l’aide d’une petite brosse à mains, vous frottez
1794 z à frotter le parquet de la cuisine à genoux ; à l’ aide d’une petite brosse à mains, vous frottez les vieilles planches p
1795 l’aide d’une petite brosse à mains, vous frottez les vieilles planches pourries. C’est cette vision de vous ainsi qui m’a
1796 ées plus tard, pour que vous n’ayez plus jamais à les frotter. Après le plancher vous brossez tout ce qui vous tombe sous l
1797 que vous n’ayez plus jamais à les frotter. Après le plancher vous brossez tout ce qui vous tombe sous la main et vous lav
1798 plancher vous brossez tout ce qui vous tombe sous la main et vous lavez des choses toute la journée. À cinq heures nous al
1799 tombe sous la main et vous lavez des choses toute la journée. À cinq heures nous allons chercher les chevaux qui se cachen
1800 te la journée. À cinq heures nous allons chercher les chevaux qui se cachent tout au bout du champ de pommes de terre, là-b
1801 bout du champ de pommes de terre, là-bas près de la barrière sud. Finalement, nous les pourchassons dans le corral, mais
1802 là-bas près de la barrière sud. Finalement, nous les pourchassons dans le corral, mais nous sommes plus éreintés que jamai
1803 rière sud. Finalement, nous les pourchassons dans le corral, mais nous sommes plus éreintés que jamais. Puis Poppy se cabr
1804 Poppy se cabre au-dessus du dos de Bessie et nous la perdons presque. Enfin nos montures sont sellées et nous partons cher
1805 os montures sont sellées et nous partons chercher le lait, mais vous êtes blême et fatigué. Un trait qui manque par hasar
1806 rd dans cette page, et qu’on retrouve dans toutes les autres, c’est la mauvaise humeur des Lawrence, leur humeur rageuse, f
1807 , et qu’on retrouve dans toutes les autres, c’est la mauvaise humeur des Lawrence, leur humeur rageuse, faut-il dire, coup
1808 faut-il dire, coupée d’accès de malice saugrenue. Les Pansies confirment d’ailleurs ce que nous disent Brett et les autres
1809 confirment d’ailleurs ce que nous disent Brett et les autres de cet état d’irritation perpétuelle où vivait Lawrence : « Je
1810 uelle où vivait Lawrence : « Je suis épuisé — Par l’ effort que je fais pour aimer les gens — sans y parvenir. » Ou encore 
1811 suis épuisé — Par l’effort que je fais pour aimer les gens — sans y parvenir. » Ou encore : « Oh ! ne me donnez pas votre c
1812 affaires ; — Ne me fourrez pas dans vos soucis. » La mauvaise humeur est sans doute la caractéristique générale des hommes
1813 s vos soucis. » La mauvaise humeur est sans doute la caractéristique générale des hommes d’aujourd’hui : c’est qu’ils croi
1814 ujourd’hui : c’est qu’ils croient au bonheur et à l’ argent, les deux choses les plus irritantes du monde. (Un sous-produit
1815  : c’est qu’ils croient au bonheur et à l’argent, les deux choses les plus irritantes du monde. (Un sous-produit et un moye
1816 croient au bonheur et à l’argent, les deux choses les plus irritantes du monde. (Un sous-produit et un moyen pris pour fins
1817 son obstination absurde et touchante à vouloir «  les gens » plus vivants, plus naturels, plus rayonnants, plus « solaires 
1818 qu’ils ne sont. En somme, bien qu’il prêche tout le temps, il attend des autres beaucoup plus qu’il n’est disposé à leur
1819 Et non une lassante et exigeante personnalité. » L’ homme moderne, dit Keyserling, n’a pas de prochains ; il n’a que des v
1820 n’a que des voisins inévitables. Voilà Lawrence, l’ homme sans prochain. Car le prochain selon la définition évangélique,
1821 ables. Voilà Lawrence, l’homme sans prochain. Car le prochain selon la définition évangélique, c’est justement celui qui «
1822 nce, l’homme sans prochain. Car le prochain selon la définition évangélique, c’est justement celui qui « exige » de l’aide
1823 angélique, c’est justement celui qui « exige » de l’ aide et auquel on vient en aide. Autrement, il serait deux fois insupp
1824 che qu’on ne veut pas entendre. Pauvre Lawrence à la recherche de sa communauté solaire !34 C’est son meilleur prétexte à
1825 té solaire !34 C’est son meilleur prétexte à fuir les hommes. Mais après tout, qui donc vint à son aide, à lui ? Il n’avait
1826 qui donc vint à son aide, à lui ? Il n’avait que la nature, les bêtes, les choses. Envers elles, il est plein d’une espèc
1827 int à son aide, à lui ? Il n’avait que la nature, les bêtes, les choses. Envers elles, il est plein d’une espèce de charité
1828 ide, à lui ? Il n’avait que la nature, les bêtes, les choses. Envers elles, il est plein d’une espèce de charité patiente e
1829 u récit de Brett : « Puis vous partez écrire dans les bois. » On allait oublier l’écrivain. Il est là, adossé à un pin, ave
1830 partez écrire dans les bois. » On allait oublier l’ écrivain. Il est là, adossé à un pin, avec sa chemise bleue, ses culot
1831 u, en train d’écrire sur ses genoux. (Pendant que les autres font une carrière dans le « monde des lettres » et se composen
1832 x. (Pendant que les autres font une carrière dans le « monde des lettres » et se composent un prestige !) Il invente ses h
1833 invente ses histoires, secrètement animées par «  les battements du cœur sauvage de l’Espace », il s’amuse, il s’effraie de
1834 t animées par « les battements du cœur sauvage de l’ Espace », il s’amuse, il s’effraie de ses personnages, il les hait fur
1835 , il s’amuse, il s’effraie de ses personnages, il les hait furieusement, il les approche avec méfiance et tout d’un coup le
1836 de ses personnages, il les hait furieusement, il les approche avec méfiance et tout d’un coup les pousse par-derrière, et
1837 , il les approche avec méfiance et tout d’un coup les pousse par-derrière, et rit. C’est un long enfant maigre au regard na
1838 avoir l’air d’un faune. 33. Même question pour les Conversations avec Eckermann, pour le Journal de Byron, etc. 34. Je
1839 stion pour les Conversations avec Eckermann, pour le Journal de Byron, etc. 34. Je n’arrive pas à prendre au sérieux en s
1840 34. Je n’arrive pas à prendre au sérieux en soi la religion solaire que prêche Lawrence. C’est un rêve de compensation.
1841 he Lawrence. C’est un rêve de compensation. C’est l’ expression de son impuissance à résoudre ce que j’appellerais le « pro
1842 e son impuissance à résoudre ce que j’appellerais le « problème des gens », qui est moins grandiose et beaucoup plus encom
1843 awrence, Matinées mexicaines suivi de Pansies  », La Nouvelle Revue française, Paris, octobre 1935, p. 596-599.
21 1935, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Les Mystiques allemands du xiiie au xixe siècle, par Jean Chuzeville (octobre 1935)
1844 Les Mystiques allemands du xiiie au xixe siècle, par Jean Chuzeville (o
1845 st une entreprise incertaine que celle d’offrir à la curiosité moderne les témoignages écrits de la mystique médiévale ou
1846 ertaine que celle d’offrir à la curiosité moderne les témoignages écrits de la mystique médiévale ou renaissante. Notre opt
1847 à la curiosité moderne les témoignages écrits de la mystique médiévale ou renaissante. Notre optique actuelle doit fatale
1848 naissante. Notre optique actuelle doit fatalement les déformer. C’est qu’elle est généralement conditionnée par notre roman
1849 sprit nous incite à séparer ce qui était lié chez les mystiques : la vision de foi et les symboles concrets qui essaient de
1850 e à séparer ce qui était lié chez les mystiques : la vision de foi et les symboles concrets qui essaient de l’envelopper p
1851 tait lié chez les mystiques : la vision de foi et les symboles concrets qui essaient de l’envelopper pour la transmettre. N
1852 n de foi et les symboles concrets qui essaient de l’ envelopper pour la transmettre. Nous estimons alors les mystiques selo
1853 mboles concrets qui essaient de l’envelopper pour la transmettre. Nous estimons alors les mystiques selon les critères du
1854 velopper pour la transmettre. Nous estimons alors les mystiques selon les critères du lyrisme moderne, qui ne préjugent pas
1855 nsmettre. Nous estimons alors les mystiques selon les critères du lyrisme moderne, qui ne préjugent pas nécessairement l’in
1856 isme moderne, qui ne préjugent pas nécessairement l’ intellection du contenu, et encore moins de sa vérité. Il y a donc de
1857 enu, et encore moins de sa vérité. Il y a donc de l’ équivoque dans notre admiration (ou notre déception) devant les témoig
1858 dans notre admiration (ou notre déception) devant les témoignages qu’on nous propose. Un peu plus d’exigence philosophique
1859 it certainement la plupart d’entre nous à récuser la Vérité que les mystiques ont prétendu traduire, ce qui reviendrait à
1860 t la plupart d’entre nous à récuser la Vérité que les mystiques ont prétendu traduire, ce qui reviendrait à les taxer de my
1861 iques ont prétendu traduire, ce qui reviendrait à les taxer de mythomanie. La ferveur littéraire indiscrète, qui fera sans
1862 re, ce qui reviendrait à les taxer de mythomanie. La ferveur littéraire indiscrète, qui fera sans doute le succès de ce vo
1863 erveur littéraire indiscrète, qui fera sans doute le succès de ce volume, vaut-elle mieux que l’étroitesse positiviste, qu
1864 doute le succès de ce volume, vaut-elle mieux que l’ étroitesse positiviste, qui réduira tout cela au jeu des complexes fre
1865 u des complexes freudiens ? Tout dépend de ce que l’ on attend de l’homme et de son esprit : la puissance de tromper (art i
1866 freudiens ? Tout dépend de ce que l’on attend de l’ homme et de son esprit : la puissance de tromper (art inclus) pour jou
1867 ce que l’on attend de l’homme et de son esprit : la puissance de tromper (art inclus) pour jouir, ou la puissance de fixe
1868 puissance de tromper (art inclus) pour jouir, ou la puissance de fixer le vrai par convention ou décret scientifique, pou
1869 (art inclus) pour jouir, ou la puissance de fixer le vrai par convention ou décret scientifique, pour agir. (Il y a d’autr
1870 ue, qui est tout de même décisif en ces matières, l’ alternative que je viens d’indiquer ne se pose plus. Car la foi n’est
1871 tive que je viens d’indiquer ne se pose plus. Car la foi n’est pas davantage une évasion hors de ce monde qu’une limitatio
1872 une évasion hors de ce monde qu’une limitation de l’ homme au temporel. La foi réelle, c’est la puissance active de l’Étern
1873 e monde qu’une limitation de l’homme au temporel. La foi réelle, c’est la puissance active de l’Éternel dans ce temps. Cet
1874 tion de l’homme au temporel. La foi réelle, c’est la puissance active de l’Éternel dans ce temps. Cette définition condamn
1875 orel. La foi réelle, c’est la puissance active de l’ Éternel dans ce temps. Cette définition condamne tout mysticisme qui n
1876 ion condamne tout mysticisme qui ne serait, comme le veut M. Chuzeville, que la « recherche des moyens par lesquels l’âme
1877 e qui ne serait, comme le veut M. Chuzeville, que la « recherche des moyens par lesquels l’âme arrive à transgresser ses l
1878 ville, que la « recherche des moyens par lesquels l’ âme arrive à transgresser ses limites charnelles et temporelles, à s’o
1879 temporelles, à s’oublier en Dieu, son principe ». La question est alors de savoir s’il existe une mystique vraiment chréti
1880 nos limites, contre lesquels s’élèvent sans cesse les Prophètes et les Apôtres. Il faut reconnaître que les pages les plus
1881 re lesquels s’élèvent sans cesse les Prophètes et les Apôtres. Il faut reconnaître que les pages les plus « belles » — du p
1882 Prophètes et les Apôtres. Il faut reconnaître que les pages les plus « belles » — du point de vue de l’art — de cette antho
1883 et les Apôtres. Il faut reconnaître que les pages les plus « belles » — du point de vue de l’art — de cette anthologie, son
1884 es pages les plus « belles » — du point de vue de l’ art — de cette anthologie, sont souvent les plus hérétiques, celles au
1885 vue de l’art — de cette anthologie, sont souvent les plus hérétiques, celles aussi où l’hybris spirituelle se pare le mieu
1886 sont souvent les plus hérétiques, celles aussi où l’ hybris spirituelle se pare le mieux d’humilité dévote. Ceci marqué, qu
1887 ues, celles aussi où l’hybris spirituelle se pare le mieux d’humilité dévote. Ceci marqué, qui est plus qu’une réserve, il
1888 tuel et poétique plein de dangereuses merveilles. Le choix des textes me paraît des plus heureux, la traduction ferme et c
1889 . Le choix des textes me paraît des plus heureux, la traduction ferme et coulante. La plupart des mystiques que M. Chuzevi
1890 Suso, Tauler, Franck et Weigel, et surtout Boehme le gnostique. Pour Paracelse, on s’étonnera sans doute de le voir figure
1891 ique. Pour Paracelse, on s’étonnera sans doute de le voir figurer dans un choix de « mystiques », alors qu’il est le premi
1892 tiques », alors qu’il est le premier défenseur de l’ expériencev. Mais la beauté des textes cités fait pardonner bien volon
1893 l est le premier défenseur de l’expériencev. Mais la beauté des textes cités fait pardonner bien volontiers cette erreur d
1894 classification35. Par exemple, je m’explique mal l’ omission de Hamann qui eût avantageusement remplacé la visionnaire Cat
1895 ission de Hamann qui eût avantageusement remplacé la visionnaire Catherine Emmerich, et qui mérite au moins autant que Nov
1896 rite au moins autant que Novalis de figurer parmi les grands mystiques modernes. Mais sans doute M. Chuzeville s’est-il lai
1897 ider dans son choix par un préjugé historique que le « Mage du Nord » eût trop évidemment déconcerté. Ce préjugé consiste
1898 e à rendre Luther responsable d’une scission dans la culture et la spiritualité allemandes, scission aboutissant par une s
1899 her responsable d’une scission dans la culture et la spiritualité allemandes, scission aboutissant par une série d’actions
1900 tiques « au romantisme, au révolutionnarisme et à l’ anarchie » (selon M. Truc), à quoi M. Chuzeville ajoute pour sa part l
1901 . Truc), à quoi M. Chuzeville ajoute pour sa part l’ étatisme absolu, le nationalisme, « l’individualisme effréné », le rac
1902 Chuzeville ajoute pour sa part l’étatisme absolu, le nationalisme, « l’individualisme effréné », le racisme et le marxisme
1903 our sa part l’étatisme absolu, le nationalisme, «  l’ individualisme effréné », le racisme et le marxisme. Voilà pourquoi le
1904 u, le nationalisme, « l’individualisme effréné », le racisme et le marxisme. Voilà pourquoi le peuple allemand est un peup
1905 isme, « l’individualisme effréné », le racisme et le marxisme. Voilà pourquoi le peuple allemand est un peuple empoisonné
1906 réné », le racisme et le marxisme. Voilà pourquoi le peuple allemand est un peuple empoisonné (p. 19). Cette généalogie de
1907 qu’on aimait à croire périmée. M. Chuzeville a eu le tort de vouloir y réduire l’évolution du mysticisme allemand, qui jus
1908 . M. Chuzeville a eu le tort de vouloir y réduire l’ évolution du mysticisme allemand, qui justement lui inflige le démenti
1909 du mysticisme allemand, qui justement lui inflige le démenti le plus formel. Car si l’on voit à la rigueur le passage de l
1910 me allemand, qui justement lui inflige le démenti le plus formel. Car si l’on voit à la rigueur le passage de la dialectiq
1911 ent lui inflige le démenti le plus formel. Car si l’ on voit à la rigueur le passage de la dialectique de Boehme à la philo
1912 ige le démenti le plus formel. Car si l’on voit à la rigueur le passage de la dialectique de Boehme à la philosophie de Fi
1913 nti le plus formel. Car si l’on voit à la rigueur le passage de la dialectique de Boehme à la philosophie de Fichte et de
1914 rmel. Car si l’on voit à la rigueur le passage de la dialectique de Boehme à la philosophie de Fichte et de Hegel, d’où so
1915 rigueur le passage de la dialectique de Boehme à la philosophie de Fichte et de Hegel, d’où sont effectivement sortis un
1916 t effectivement sortis un certain nationalisme et la doctrine du jeune Marx, on ne voit pas du tout le passage de Luther à
1917 la doctrine du jeune Marx, on ne voit pas du tout le passage de Luther à Boehme, ce défenseur du libre arbitre persécuté p
1918 ehme, ce défenseur du libre arbitre persécuté par les pasteurs. Et d’autre part, on sait quels liens unissent Luther à Maît
1919 rtout à son cher Tauler, dont il cite constamment les sermons. M. Chuzeville serait sans doute mieux inspiré s’il développa
1920 de sa préface et nous donnait une bonne étude sur le lyrisme romantique considéré comme une sécularisation du mysticisme.
1921 ’a semblé que cette perspective spirituelle était la seule que dégageât sans équivoque la confrontation des mystiques et d
1922 tuelle était la seule que dégageât sans équivoque la confrontation des mystiques et de la mentalité moderne. 35. Ce que
1923 ns équivoque la confrontation des mystiques et de la mentalité moderne. 35. Ce que je pardonne moins à M. Chuzeville, c’
1924 racelse « était de nature comédienne, et savait à l’ occasion dissimuler, comme l’indique le choix même d’un pseudonyme. L’
1925 édienne, et savait à l’occasion dissimuler, comme l’ indique le choix même d’un pseudonyme. L’alchimiste médecin Paracelse,
1926 t savait à l’occasion dissimuler, comme l’indique le choix même d’un pseudonyme. L’alchimiste médecin Paracelse, en réalit
1927 r, comme l’indique le choix même d’un pseudonyme. L’ alchimiste médecin Paracelse, en réalité, se nommait Theophilus Bombas
1928 se Bombaste de Hohenheim, ce dont il n’eut jamais l’ idée de se cacher. – L’érudition considérable de M. Chuzeville me para
1929 m, ce dont il n’eut jamais l’idée de se cacher. –  L’ érudition considérable de M. Chuzeville me paraît parfois hasardeuse.
1930 le de M. Chuzeville me paraît parfois hasardeuse. Les travaux de Jean Baruzi lui sont inconnus ; de même que les études de
1931 ux de Jean Baruzi lui sont inconnus ; de même que les études de A. Koyré sur Franck et Weigel. Quant à Luther, il le juge d
1932 A. Koyré sur Franck et Weigel. Quant à Luther, il le juge d’après un résumé, confectionné par Gonzague Truc, du pamphlet d
1933 ruc, du pamphlet de Maritain, lequel s’appuie sur le P. Denifle… Que de garanties accumulées ! u. Rougemont Denis de, « 
1934 emont Denis de, « [Compte rendu] Jean Chuzeville, Les Mystiques allemands du XIIIe au XIXe siècle  », La Nouvelle Revue fra
1935 s Mystiques allemands du XIIIe au XIXe siècle  », La Nouvelle Revue française, Paris, octobre 1935, p. 599-601. v. Voir l
1936 nçaise, Paris, octobre 1935, p. 599-601. v. Voir la note de Rougemont sur le Paracelse de Frédéric Gundolf, dans la NRF d
1937 35, p. 599-601. v. Voir la note de Rougemont sur le Paracelse de Frédéric Gundolf, dans la NRF de septembre 1935.
1938 gemont sur le Paracelse de Frédéric Gundolf, dans la NRF de septembre 1935.
22 1935, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). « Le plus beau pays du monde » (octobre 1935)
1939 «  Le plus beau pays du monde » (octobre 1935)w Toujours ces mots. Quand
1940 perdu leur sens, il faut ajouter aussitôt qu’on a le tort de leur en accorder bien davantage qu’ils n’en gardent et que ce
1941 ien davantage qu’ils n’en gardent et que ceux qui les prononcent n’en conçoivent. Pour vous le prouver, voici une anecdote
1942 eux qui les prononcent n’en conçoivent. Pour vous le prouver, voici une anecdote d’Angleterre : elle doit donc être vraie.
1943 e Alice, écrit ceci dans son devoir d’anglais : «  L’ Angleterre est le plus beau pays du monde. » Un inspecteur passait par
1944 ci dans son devoir d’anglais : « L’Angleterre est le plus beau pays du monde. » Un inspecteur passait par là. Il lit le de
1945 du monde. » Un inspecteur passait par là. Il lit le devoir. Tonnerre et foudres de ce pacifiste, qui n’hésite pas à dénon
1946 es de ce pacifiste, qui n’hésite pas à dénoncer «  l’ impérialisme démodé » de l’instituteur d’Alice, tenu pour responsable
1947 ésite pas à dénoncer « l’impérialisme démodé » de l’ instituteur d’Alice, tenu pour responsable du cliché. On blâme cet ins
1948 ui va se plaindre à son député. Lequel interpelle les communes. Qui à leur tour infligent un blâme à l’inspecteur ; car si
1949 es communes. Qui à leur tour infligent un blâme à l’ inspecteur ; car si l’École se met à « décourager l’orgueil patriotiqu
1950 r tour infligent un blâme à l’inspecteur ; car si l’ École se met à « décourager l’orgueil patriotique », où allons-nous ?
1951 inspecteur ; car si l’École se met à « décourager l’ orgueil patriotique », où allons-nous ? Quelqu’un qui est bien content
1952 n qui est bien content, dans cette affaire, c’est le journaliste allemand qui la raconte, et qui ne manque pas de félicite
1953 cette affaire, c’est le journaliste allemand qui la raconte, et qui ne manque pas de féliciter la Chambre des communes. (
1954 qui la raconte, et qui ne manque pas de féliciter la Chambre des communes. (Gazette de Francfort, du 31 juillet). On dirai
1955 ble à la plupart des entretiens d’aujourd’hui sur la politique, à l’article du Temps, à un cerveau d’homme de gauche ou d’
1956 des entretiens d’aujourd’hui sur la politique, à l’ article du Temps, à un cerveau d’homme de gauche ou d’homme de droite.
1957 sans nul doute « nationalisme » que voulait dire l’ inspecteur (à moins qu’il n’ait une conception conquérante de la beaut
1958 à moins qu’il n’ait une conception conquérante de la beauté ?). « Démodé » : on se demande dans quel pays. « Pacifiste » ?
1959 s. « Pacifiste » ? Aujourd’hui, il n’y a plus que les pacifistes pour oser réclamer ouvertement la guerre (contre les régim
1960 que les pacifistes pour oser réclamer ouvertement la guerre (contre les régimes fascistes). « Orgueil patriotique » — c’es
1961 pour oser réclamer ouvertement la guerre (contre les régimes fascistes). « Orgueil patriotique » — c’est de nouveau nation
1962 ionaliste qu’il faudrait. Précisons, cela en vaut la peine. Le nationalisme existe parce qu’on l’enseigne ; c’est une myst
1963 qu’il faudrait. Précisons, cela en vaut la peine. Le nationalisme existe parce qu’on l’enseigne ; c’est une mystique, un i
1964 vaut la peine. Le nationalisme existe parce qu’on l’ enseigne ; c’est une mystique, un idéal abstrait, un orgueil. Il exist
1965 ue, un idéal abstrait, un orgueil. Il existe dans la mesure où on l’exalte. Le patriotisme, c’est le contraire : il existe
1966 trait, un orgueil. Il existe dans la mesure où on l’ exalte. Le patriotisme, c’est le contraire : il existe dans la seule m
1967 orgueil. Il existe dans la mesure où on l’exalte. Le patriotisme, c’est le contraire : il existe dans la seule mesure où i
1968 s la mesure où on l’exalte. Le patriotisme, c’est le contraire : il existe dans la seule mesure où il va de soi ; il faut
1969 patriotisme, c’est le contraire : il existe dans la seule mesure où il va de soi ; il faut qu’il reste un lien obscur, in
1970 ni aucune espèce de valeurs morales, de même que la digestion, si vous voulez. L’idée même de s’en vanter indique un trou
1971 orales, de même que la digestion, si vous voulez. L’ idée même de s’en vanter indique un trouble. — Enfin, voilà les hitlér
1972 de s’en vanter indique un trouble. — Enfin, voilà les hitlériens qui trouvent très bon qu’on dise que l’Angleterre est le p
1973 s hitlériens qui trouvent très bon qu’on dise que l’ Angleterre est le plus beau pays du monde ? Cela du moins ne manque pa
1974 trouvent très bon qu’on dise que l’Angleterre est le plus beau pays du monde ? Cela du moins ne manque pas de logique, mal
1975 que pas de logique, malgré la première apparence. L’ erreur courante, qui est celle du libéral rationaliste, c’est de croir
1976 elle du libéral rationaliste, c’est de croire que la proposition « l’Angleterre est le plus beau pays du monde » comporte
1977 ationaliste, c’est de croire que la proposition «  l’ Angleterre est le plus beau pays du monde » comporte un sens rationnel
1978 t de croire que la proposition « l’Angleterre est le plus beau pays du monde » comporte un sens rationnel ; que c’est un j
1979 nclut d’une comparaison. Mais en réalité, lorsque la petite Alice écrit que l’Angleterre est le plus beau pays du monde, e
1980 ais en réalité, lorsque la petite Alice écrit que l’ Angleterre est le plus beau pays du monde, elle veut dire simplement :
1981 orsque la petite Alice écrit que l’Angleterre est le plus beau pays du monde, elle veut dire simplement : j’aime mon pays.
1982 nde, elle veut dire simplement : j’aime mon pays. L’ amour exclut toute comparaison. Dire que tel pays « est le plus beau d
1983 exclut toute comparaison. Dire que tel pays « est le plus beau du monde », ce n’est pas dire qu’après enquête on aboutit à
1984 e inconditionnelle. C’est reconnaître et accepter le fait concret d’un attachement qui ne comporte pas de choix délibéré.
1985 i ne comporte pas de choix délibéré. Par malheur, l’ enseignement s’empare du fait patriotique et tente de le rationaliser 
1986 ignement s’empare du fait patriotique et tente de le rationaliser : il en fait un objet de discours. Par là même il le ren
1987 : il en fait un objet de discours. Par là même il le rend absurde. Il le « mystifie ». Qui dit discours dit raison ; qui d
1988 t de discours. Par là même il le rend absurde. Il le « mystifie ». Qui dit discours dit raison ; qui dit raison suppose co
1989 pays à un autre, un amour à un autre, car où est l’ étalon, où est la mesure commune, et qui connaît le modèle idéal ? Le
1990 un amour à un autre, car où est l’étalon, où est la mesure commune, et qui connaît le modèle idéal ? Le malfaisant nation
1991 ’étalon, où est la mesure commune, et qui connaît le modèle idéal ? Le malfaisant nationalisme n’est rien d’autre qu’une r
1992 mesure commune, et qui connaît le modèle idéal ? Le malfaisant nationalisme n’est rien d’autre qu’une rationalisation men
1993 sation mensongère du sentiment patriotique. C’est l’ intervention abusive de la raison comparative dans le domaine de l’inc
1994 ment patriotique. C’est l’intervention abusive de la raison comparative dans le domaine de l’incomparable. Si l’on tient c
1995 ntervention abusive de la raison comparative dans le domaine de l’incomparable. Si l’on tient compte du fait patriotique n
1996 usive de la raison comparative dans le domaine de l’ incomparable. Si l’on tient compte du fait patriotique naturel, la seu
1997 comparative dans le domaine de l’incomparable. Si l’ on tient compte du fait patriotique naturel, la seule formule « intern
1998 Si l’on tient compte du fait patriotique naturel, la seule formule « internationale » qui reste possible est celle-ci : « 
1999 i reste possible est celle-ci : « Chaque pays est le plus beau du monde ». C’est la formule fédéraliste. — Inutile d’ajout
2000 « Chaque pays est le plus beau du monde ». C’est la formule fédéraliste. — Inutile d’ajouter que le salut temporel de l’E
2001 t la formule fédéraliste. — Inutile d’ajouter que le salut temporel de l’Europe dépend de sa faculté d’opérer de telles di
2002 ste. — Inutile d’ajouter que le salut temporel de l’ Europe dépend de sa faculté d’opérer de telles distinctions. w. Rou
2003 telles distinctions. w. Rougemont Denis de, « “ Le plus beau pays du monde” », La Nouvelle Revue française, Paris, octob
2004 emont Denis de, « “Le plus beau pays du monde” », La Nouvelle Revue française, Paris, octobre 1935, p. 633-634.
23 1936, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Sur l’esprit incarné (février 1936)
2005 Sur l’ esprit incarné (février 1936)x M. Julien Benda écrit dans le numéro
2006 rné (février 1936)x M. Julien Benda écrit dans le numéro de janvier de la NRF la phrase suivante : « La religion de l’e
2007 . Julien Benda écrit dans le numéro de janvier de la NRF la phrase suivante : « La religion de l’esprit incarné est celle
2008 n Benda écrit dans le numéro de janvier de la NRF la phrase suivante : « La religion de l’esprit incarné est celle qui hon
2009 uméro de janvier de la NRF la phrase suivante : «  La religion de l’esprit incarné est celle qui honore l’esprit en tant qu
2010 r de la NRF la phrase suivante : « La religion de l’ esprit incarné est celle qui honore l’esprit en tant qu’il veut porter
2011 religion de l’esprit incarné est celle qui honore l’ esprit en tant qu’il veut porter l’empreinte de certains intérêts terr
2012 lle qui honore l’esprit en tant qu’il veut porter l’ empreinte de certains intérêts terrestres, et le méprise en tant qu’il
2013 r l’empreinte de certains intérêts terrestres, et le méprise en tant qu’il cherche à s’affranchir de ce genre de pression
2014 iberté. » Il écrit un peu plus loin qu’il déplore la disparition « des grandes disciplines intellectuelles, singulièrement
2015 peu de logique, je demanderai à M. Benda : 1° si les « docteurs » nationalistes qu’il attaque ont jamais prétendu que leur
2016 ndu que leur politique fût une « incarnation » de l’ esprit ; 2° au cas où ils l’auraient fait, ce que j’ignore car je les
2017 ne « incarnation » de l’esprit ; 2° au cas où ils l’ auraient fait, ce que j’ignore car je les pratique peu : s’il y a lieu
2018 as où ils l’auraient fait, ce que j’ignore car je les pratique peu : s’il y a lieu de reprendre à son compte cette erreur d
2019 , ou en langage théologique, ce blasphème ; 3° si l’ incarnation de l’Esprit, c’est-à-dire Jésus-Christ, fils de Dieu, a ja
2020 héologique, ce blasphème ; 3° si l’incarnation de l’ Esprit, c’est-à-dire Jésus-Christ, fils de Dieu, a jamais « porté l’em
2021 dire Jésus-Christ, fils de Dieu, a jamais « porté l’ empreinte de certains intérêts terrestres », et conséquemment, si l’on
2022 tains intérêts terrestres », et conséquemment, si l’ on a le droit d’opposer esprit pur à esprit incarné dans des termes te
2023 ntérêts terrestres », et conséquemment, si l’on a le droit d’opposer esprit pur à esprit incarné dans des termes tels qu’e
2024 trahison intéressée ; 4° si M. Benda conçoit que l’ opposition esprit pur contre esprit asservi (aux intérêts politiques)
2025 s politiques) évoque précisément pour un chrétien l’ opposition de Pilate et des docteurs nationalistes juifs qui criaient
2026 es docteurs nationalistes juifs qui criaient avec la populace : Crucifie ! et relâche Barabbas — opposition qui se résout
2027 on qui se résout pratiquement en unanimité contre le Christ, contre l’esprit incarné en Personne ; 5° si le clerc qui s’en
2028 ratiquement en unanimité contre le Christ, contre l’ esprit incarné en Personne ; 5° si le clerc qui s’en lave les mains ne
2029 rist, contre l’esprit incarné en Personne ; 5° si le clerc qui s’en lave les mains ne risque pas de faire le jeu des clerc
2030 ncarné en Personne ; 5° si le clerc qui s’en lave les mains ne risque pas de faire le jeu des clercs qui crient avec les lo
2031 rc qui s’en lave les mains ne risque pas de faire le jeu des clercs qui crient avec les loups, et de trahir de la sorte do
2032 ue pas de faire le jeu des clercs qui crient avec les loups, et de trahir de la sorte doublement, étant admis toutefois que
2033 clercs qui crient avec les loups, et de trahir de la sorte doublement, étant admis toutefois que la mission de l’esprit es
2034 de la sorte doublement, étant admis toutefois que la mission de l’esprit est d’entrer dans le monde, non point pour s’y so
2035 ublement, étant admis toutefois que la mission de l’ esprit est d’entrer dans le monde, non point pour s’y soumettre, mais
2036 fois que la mission de l’esprit est d’entrer dans le monde, non point pour s’y soumettre, mais pour le transformer en véri
2037 le monde, non point pour s’y soumettre, mais pour le transformer en vérité. Mission que l’Évangile et la théologie résumen
2038 , mais pour le transformer en vérité. Mission que l’ Évangile et la théologie résument par le seul mot de Rédemption, et qu
2039 transformer en vérité. Mission que l’Évangile et la théologie résument par le seul mot de Rédemption, et que certains ant
2040 ssion que l’Évangile et la théologie résument par le seul mot de Rédemption, et que certains antichrétiens, plus pénétrés
2041 rétiens, plus pénétrés de christianisme qu’ils ne le croient, préfèrent appeler révolution. Ces questions me paraissent ca
2042 vacuata sit crux. x. Rougemont Denis de, « Sur l’ esprit incarné », La Nouvelle Revue française, Paris, février 1936, p.
2043 x. Rougemont Denis de, « Sur l’esprit incarné », La Nouvelle Revue française, Paris, février 1936, p. 304-305.
24 1936, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Dictature de la liberté, par Robert Aron (mars 1936)
2044 Dictature de la liberté, par Robert Aron (mars 1936)y « J’aime les titres mystérie
2045 liberté, par Robert Aron (mars 1936)y « J’aime les titres mystérieux ou pétard », disait Baudelaire. Celui d’Aron unit c
2046 de sa pensée, et à certains égards, du contenu de la doctrine qu’il défend. Dictature et liberté, le monde moderne se déba
2047 e la doctrine qu’il défend. Dictature et liberté, le monde moderne se débat tragiquement entre ces deux nécessités dont la
2048 érielle, et la seconde notre mission spirituelle. La dictature tue la liberté pour assurer l’ordre et le pain du corps (c’
2049 conde notre mission spirituelle. La dictature tue la liberté pour assurer l’ordre et le pain du corps (c’est le principe !
2050 ituelle. La dictature tue la liberté pour assurer l’ ordre et le pain du corps (c’est le principe !). La liberté condamne l
2051 dictature tue la liberté pour assurer l’ordre et le pain du corps (c’est le principe !). La liberté condamne la dictature
2052 é pour assurer l’ordre et le pain du corps (c’est le principe !). La liberté condamne la dictature, mais dès qu’elle la su
2053 ’ordre et le pain du corps (c’est le principe !). La liberté condamne la dictature, mais dès qu’elle la supprime pratiquem
2054 corps (c’est le principe !). La liberté condamne la dictature, mais dès qu’elle la supprime pratiquement, elle perd tout
2055 a liberté condamne la dictature, mais dès qu’elle la supprime pratiquement, elle perd tout point d’appui, son élan meurt e
2056 d tout point d’appui, son élan meurt en anarchie. La solution de ce conflit est évidente, c’est peut-être pourquoi bien pe
2057 t est évidente, c’est peut-être pourquoi bien peu l’ ont vue jusqu’à présent : elle « crève les yeux ». Il faut organiser l
2058 bien peu l’ont vue jusqu’à présent : elle « crève les yeux ». Il faut organiser la liberté. Mais c’est encore là une ellips
2059 sent : elle « crève les yeux ». Il faut organiser la liberté. Mais c’est encore là une ellipse ; l’on dira qu’une liberté
2060 er la liberté. Mais c’est encore là une ellipse ; l’ on dira qu’une liberté organisée n’en est plus une. Expliquons-nous ;
2061 est plus une. Expliquons-nous ; il faut organiser le matériel — la dictature36 seule y parvient — mais au profit de la lib
2062 Expliquons-nous ; il faut organiser le matériel — la dictature36 seule y parvient — mais au profit de la liberté, et à seu
2063 dictature36 seule y parvient — mais au profit de la liberté, et à seule fin de la laisser s’épanouir. Il faut soumettre l
2064 — mais au profit de la liberté, et à seule fin de la laisser s’épanouir. Il faut soumettre la dictature à la liberté, il f
2065 e fin de la laisser s’épanouir. Il faut soumettre la dictature à la liberté, il faut une dictature pour la liberté — une d
2066 sser s’épanouir. Il faut soumettre la dictature à la liberté, il faut une dictature pour la liberté — une dictature de la
2067 ictature à la liberté, il faut une dictature pour la liberté — une dictature de la liberté. Ce serait le plus beau « titre
2068 une dictature pour la liberté — une dictature de la liberté. Ce serait le plus beau « titre » du siècle. Ceci admis, et c
2069 liberté — une dictature de la liberté. Ce serait le plus beau « titre » du siècle. Ceci admis, et comment ne point l’adme
2070 itre » du siècle. Ceci admis, et comment ne point l’ admettre — mais c’est admettre la révolution — se posent toutes les qu
2071 comment ne point l’admettre — mais c’est admettre la révolution — se posent toutes les questions « pratiques » ; celles qu
2072 s c’est admettre la révolution — se posent toutes les questions « pratiques » ; celles qui passionnent les hommes d’action
2073 questions « pratiques » ; celles qui passionnent les hommes d’action et qu’ils estiment purement techniques parce qu’ils e
2074 ment purement techniques parce qu’ils en ignorent les fins. Cette erreur des fameux techniciens nous vaut les tyrannies act
2075 ns. Cette erreur des fameux techniciens nous vaut les tyrannies actuelles. Considérant le désordre où nous sommes, ils prét
2076 ns nous vaut les tyrannies actuelles. Considérant le désordre où nous sommes, ils prétendent nous en tirer en parant, comm
2077 isent, au plus pressé, c’est-à-dire en organisant l’ État, l’économie et les rapports sociaux selon les nécessités de l’heu
2078 u plus pressé, c’est-à-dire en organisant l’État, l’ économie et les rapports sociaux selon les nécessités de l’heure, à le
2079 c’est-à-dire en organisant l’État, l’économie et les rapports sociaux selon les nécessités de l’heure, à leurs yeux « maté
2080 l’État, l’économie et les rapports sociaux selon les nécessités de l’heure, à leurs yeux « matérielles d’abord ». Cette vu
2081 e et les rapports sociaux selon les nécessités de l’ heure, à leurs yeux « matérielles d’abord ». Cette vue des plus couran
2082 es, lesquelles, pour n’avoir pas été soumises dès le début à une volonté perspicace et fanatique de libération, ne tardent
2083 libération, ne tardent pas à se retourner contre les hommes, et à brimer nécessairement leurs vocations, leurs libertés ré
2084 ations, leurs libertés réelles, leur personne. Si la personne n’est pas déjà au début d’un calcul pratique, on ne la retro
2085 est pas déjà au début d’un calcul pratique, on ne la retrouvera jamais au terme ; et la rigueur même du calcul s’opposera
2086 ratique, on ne la retrouvera jamais au terme ; et la rigueur même du calcul s’opposera à son intrusion. Comme le prouve to
2087 même du calcul s’opposera à son intrusion. Comme le prouve toute l’histoire moderne, qui est celle des révolutions étrang
2088 s’opposera à son intrusion. Comme le prouve toute l’ histoire moderne, qui est celle des révolutions étranglées par l’État
2089 rne, qui est celle des révolutions étranglées par l’ État et sa police. Telles sont les bases — algébrisées — des recherche
2090 s étranglées par l’État et sa police. Telles sont les bases — algébrisées — des recherches de L’Ordre nouveau. Robert Aron
2091 — des recherches de L’Ordre nouveau. Robert Aron les a décrites avec une sobre et nerveuse précision37 qui tranche sur le
2092 une sobre et nerveuse précision37 qui tranche sur le verbiage technico-humanitaire de tous nos fabricants de « plans d’urg
2093 si un humour très personnel ne venait sans cesse la rabattre au concret. On peut reprocher à l’auteur d’avoir passé trop
2094 cesse la rabattre au concret. On peut reprocher à l’ auteur d’avoir passé trop rapidement sur certaines questions dernières
2095 rop rapidement sur certaines questions dernières ( le sens dernier de la liberté humaine, par exemple). Mais si l’on consid
2096 certaines questions dernières (le sens dernier de la liberté humaine, par exemple). Mais si l’on considère l’ampleur du de
2097 nier de la liberté humaine, par exemple). Mais si l’ on considère l’ampleur du dessein de L’Ordre nouveau, et la difficulté
2098 rté humaine, par exemple). Mais si l’on considère l’ ampleur du dessein de L’Ordre nouveau, et la difficulté de le résumer
2099 idère l’ampleur du dessein de L’Ordre nouveau, et la difficulté de le résumer à l’usage d’un public qu’il faut sans cesse
2100 u dessein de L’Ordre nouveau, et la difficulté de le résumer à l’usage d’un public qu’il faut sans cesse prévenir contre l
2101 L’Ordre nouveau, et la difficulté de le résumer à l’ usage d’un public qu’il faut sans cesse prévenir contre les pires male
2102 d’un public qu’il faut sans cesse prévenir contre les pires malentendus, l’on jugera mieux de la qualité de tension et de d
2103 sans cesse prévenir contre les pires malentendus, l’ on jugera mieux de la qualité de tension et de décision spirituelle qu
2104 ontre les pires malentendus, l’on jugera mieux de la qualité de tension et de décision spirituelle que supposait un tel ou
2105 lamait ici même une critique qui « contingentât » l’ importation des mystiques étrangères. Oui, mais on ne se défend qu’en
2106 attaquant. Sachons gré à ce livre de poser enfin les questions que la France se doit de résoudre pour l’Europe, et de les
2107 s gré à ce livre de poser enfin les questions que la France se doit de résoudre pour l’Europe, et de les poser sous la for
2108 questions que la France se doit de résoudre pour l’ Europe, et de les poser sous la forme concrète d’une série de tensions
2109 a France se doit de résoudre pour l’Europe, et de les poser sous la forme concrète d’une série de tensions qu’il s’agit d’o
2110 t de résoudre pour l’Europe, et de les poser sous la forme concrète d’une série de tensions qu’il s’agit d’orienter et de
2111 rnière « tension », à laquelle se ramènent toutes les autres, est en train de devenir une sorte de pont aux ânes de nos phi
2112 tiré, le premier, des conclusions pratiques dans le domaine du travail. Et sa première expérience de service civil, organ
2113 a première expérience de service civil, organisée l’ été dernier, a fait voir que les ouvriers savent apprécier les conséqu
2114 e civil, organisée l’été dernier, a fait voir que les ouvriers savent apprécier les conséquences concrètes d’une distinctio
2115 er, a fait voir que les ouvriers savent apprécier les conséquences concrètes d’une distinction que bien des clercs estimaie
2116 e de tyrannie exercée par un seul homme dans tous les domaines. 37. Particulièrement efficace dans la polémique : voir les
2117 les domaines. 37. Particulièrement efficace dans la polémique : voir les pages du dernier chapitre sur le colonel de la R
2118 articulièrement efficace dans la polémique : voir les pages du dernier chapitre sur le colonel de la Rocque, « cet en avant
2119 olémique : voir les pages du dernier chapitre sur le colonel de la Rocque, « cet en avant qui ne sait pas où aller ». y.
2120 is de, « [Compte rendu] Robert Aron, Dictature de la liberté  », La Nouvelle Revue française, Paris, mars 1936, p. 435-437
2121 e rendu] Robert Aron, Dictature de la liberté  », La Nouvelle Revue française, Paris, mars 1936, p. 435-437.
25 1936, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Kierkegaard en France (juin 1936)
2122 Kierkegaard en France (juin 1936)z L’ introduction de Kierkegaard en France a les mêmes dates que la crise :
2123 36)z L’introduction de Kierkegaard en France a les mêmes dates que la crise : 1930-1935. Il a fallu bien près d’un siècl
2124 on de Kierkegaard en France a les mêmes dates que la crise : 1930-1935. Il a fallu bien près d’un siècle, il a fallu surto
2125 a fallu bien près d’un siècle, il a fallu surtout le double truchement de Heidegger et de Karl Barth pour imposer à l’atte
2126 ment de Heidegger et de Karl Barth pour imposer à l’ attention de quelques-uns l’œuvre d’un écrivain dont, cependant, la pu
2127 Barth pour imposer à l’attention de quelques-uns l’ œuvre d’un écrivain dont, cependant, la puissance de choc et d’interro
2128 elques-uns l’œuvre d’un écrivain dont, cependant, la puissance de choc et d’interrogation ne saurait être comparée qu’à ce
2129 ’assure qu’il a même un public passionné. Mais si l’ on juge de la façon dont il est lu par la façon dont il est trop souve
2130 a même un public passionné. Mais si l’on juge de la façon dont il est lu par la façon dont il est trop souvent cité, l’on
2131 Mais si l’on juge de la façon dont il est lu par la façon dont il est trop souvent cité, l’on pensera qu’il eût mieux val
2132 st lu par la façon dont il est trop souvent cité, l’ on pensera qu’il eût mieux valu montrer plus de prudence à le répandre
2133 a qu’il eût mieux valu montrer plus de prudence à le répandre. Et pourtant il fallait qu’il fût traduit : c’était une des
2134 de notre état spirituel. Seulement, il eût fallu le traduire autrement, pour prévenir certains malentendus inévitables. J
2135 tains malentendus inévitables. Je ne vise pas ici la langue des traductions, encore qu’il y ait beaucoup à dire sur ce poi
2136 ’il y ait beaucoup à dire sur ce point, mais bien l’ ordre ou plutôt la succession désordonnée des œuvres qu’on nous a trad
2137 à dire sur ce point, mais bien l’ordre ou plutôt la succession désordonnée des œuvres qu’on nous a traduites. Kierkegaard
2138 œuvres qu’on nous a traduites. Kierkegaard donne l’ exemple unique, je crois bien, d’un auteur qui attache autant d’import
2139 en, d’un auteur qui attache autant d’importance à l’ opportunité spirituelle de ses œuvres qu’à leur contenu intrinsèque. P
2140 dire au bon moment ses vérités inactuelles. De là le rythme singulier de sa production ; de là ses nombreux masques et pse
2141 ses nombreux masques et pseudonymes, de là aussi l’ impétuosité sans scrupules de ses dernières « attaques contre la chrét
2142 sans scrupules de ses dernières « attaques contre la chrétienté établie ». Toute une carrière de poète et de philosophe « 
2143 à orientation religieuse » avait en effet préparé le climat et la juste portée de ces attaques, avec une patience ironique
2144 religieuse » avait en effet préparé le climat et la juste portée de ces attaques, avec une patience ironique, mais aussi
2145 ques, avec une patience ironique, mais aussi dans la crainte et le tremblement d’une foi sans cesse combattue, d’une vraie
2146 patience ironique, mais aussi dans la crainte et le tremblement d’une foi sans cesse combattue, d’une vraie foi. Publier
2147 ant ce terme, cela revient littéralement à priver l’ œuvre, et ces fragments qu’on nous en donne, de toute espèce de sens r
2148 e de malentendus. 1. Parce qu’on a publié d’abord le Journal du séducteur, fragment d’un gros ouvrage intitulé De deux cho
2149 ne, puis In vino veritas, fragment des Stades sur le chemin de la vie, et cela, sans déclarer avec toute l’instance que re
2150 ino veritas, fragment des Stades sur le chemin de la vie, et cela, sans déclarer avec toute l’instance que requérait une o
2151 emin de la vie, et cela, sans déclarer avec toute l’ instance que requérait une opération aussi risquée, que ces fragments
2152 ils devaient être radicalement niés, on a incité le lecteur, non prévenu ou mal prévenu, à tenir Kierkegaard pour une esp
2153 hète du paradoxe moral, pour un immoraliste avant la lettre nietzschéenne. Admettons que la suite ait fait voir l’énormité
2154 iste avant la lettre nietzschéenne. Admettons que la suite ait fait voir l’énormité de cette erreur. Je crains bien que ce
2155 etzschéenne. Admettons que la suite ait fait voir l’ énormité de cette erreur. Je crains bien que ce n’ait été qu’au profit
2156 une erreur plus subtile. 2. Parce qu’on a traduit la Maladie à la mort sous le titre de Traité du désespoir, Kierkegaard a
2157 us subtile. 2. Parce qu’on a traduit la Maladie à la mort sous le titre de Traité du désespoir, Kierkegaard a passé bientô
2158 . Parce qu’on a traduit la Maladie à la mort sous le titre de Traité du désespoir, Kierkegaard a passé bientôt pour le cor
2159 té du désespoir, Kierkegaard a passé bientôt pour le coryphée du désespoir considéré comme un des beaux-arts. Or s’il est
2160 l est vrai que Kierkegaard s’est occupé à décrire les formes déclarées ou déguisées que revêt le désespoir fondamental du p
2161 crire les formes déclarées ou déguisées que revêt le désespoir fondamental du pécheur ; s’il est vrai qu’il a su montrer,
2162 qu’il a su montrer, avec une effrayante lucidité, l’ universalité de cet état, c’est aussi que pour lui, le désespoir est l
2163 iversalité de cet état, c’est aussi que pour lui, le désespoir est le péché, la seule maladie vraiment mortelle, dont la f
2164 état, c’est aussi que pour lui, le désespoir est le péché, la seule maladie vraiment mortelle, dont la foi seule, non la
2165 st aussi que pour lui, le désespoir est le péché, la seule maladie vraiment mortelle, dont la foi seule, non la vertu, peu
2166 e péché, la seule maladie vraiment mortelle, dont la foi seule, non la vertu, peut nous guérir. Quant à ceux qui le qualif
2167 maladie vraiment mortelle, dont la foi seule, non la vertu, peut nous guérir. Quant à ceux qui le qualifient de « métaphys
2168 non la vertu, peut nous guérir. Quant à ceux qui le qualifient de « métaphysicien du néant », ils oublient de dire que le
2169 étaphysicien du néant », ils oublient de dire que le néant, dont ils lui prêtent ainsi le goût, est justement celui que Ki
2170 de dire que le néant, dont ils lui prêtent ainsi le goût, est justement celui que Kierkegaard dénonce au cœur des système
2171 t. 3. Parce que Kierkegaard s’est déchaîné contre les églises établies, les évêques de la cour, et la religion bourgeoise q
2172 gaard s’est déchaîné contre les églises établies, les évêques de la cour, et la religion bourgeoise qui veut prendre le chr
2173 haîné contre les églises établies, les évêques de la cour, et la religion bourgeoise qui veut prendre le christianisme « à
2174 les églises établies, les évêques de la cour, et la religion bourgeoise qui veut prendre le christianisme « à bon marché 
2175 cour, et la religion bourgeoise qui veut prendre le christianisme « à bon marché » ; parce qu’il en appelle d’un christia
2176 rique à un christianisme existentiel — ce qui est le mouvement même de la Réforme — on a voulu le présenter comme une espè
2177 sme existentiel — ce qui est le mouvement même de la Réforme — on a voulu le présenter comme une espèce de nihiliste antic
2178 est le mouvement même de la Réforme — on a voulu le présenter comme une espèce de nihiliste antichrétien. Parce qu’en pré
2179 e nihiliste antichrétien. Parce qu’en présence de l’ écœurante facilité avec laquelle tant de phraseurs ou de braves gens s
2180 nt de phraseurs ou de braves gens se réclament de la foi chrétienne — « chose inquiète, inquiétante », disait Luther — il
2181 e », disait Luther — il a voulu poser honnêtement la question tragique et réelle du doute inséparable de la foi ; parce qu
2182 estion tragique et réelle du doute inséparable de la foi ; parce que, « comme un oiseau s’envole anxieux aux approches de
2183 comme un oiseau s’envole anxieux aux approches de l’ orage, ainsi, flairant le danger », il a dit : Je n’ai pas la foi, — c
2184 anxieux aux approches de l’orage, ainsi, flairant le danger », il a dit : Je n’ai pas la foi, — certains pensent qu’au fon
2185 nsi, flairant le danger », il a dit : Je n’ai pas la foi, — certains pensent qu’au fond, il n’a jamais pu croire. Et pourt
2186 qu’au fond, il n’a jamais pu croire. Et pourtant, la définition même de la foi dans l’Évangile n’est-elle pas justement ce
2187 ais pu croire. Et pourtant, la définition même de la foi dans l’Évangile n’est-elle pas justement ce cri : « Je crois, Sei
2188 e. Et pourtant, la définition même de la foi dans l’ Évangile n’est-elle pas justement ce cri : « Je crois, Seigneur, viens
2189 Seigneur, viens au secours de mon incrédulité ». L’ on eût évité ce grabuge en traduisant dès le début quelques-uns des ou
2190 té ». L’on eût évité ce grabuge en traduisant dès le début quelques-uns des ouvrages que Kierkegaard publia sous son vrai
2191 it directement son message décisif. Bien entendu, le « succès » de prestige eût été beaucoup plus restreint. Les raisons q
2192 ès » de prestige eût été beaucoup plus restreint. Les raisons qui poussèrent Kierkegaard à publier ses premières œuvres sou
2193 s de nos jours. Il se peut qu’il se fût réjoui de la maldonne. Que voulait donc Kierkegaard ? Peut-être, à la limite, le m
2194 onne. Que voulait donc Kierkegaard ? Peut-être, à la limite, le martyre — la preuve irréfutable de sa foi. (Encore qu’il s
2195 oulait donc Kierkegaard ? Peut-être, à la limite, le martyre — la preuve irréfutable de sa foi. (Encore qu’il s’en défende
2196 ierkegaard ? Peut-être, à la limite, le martyre — la preuve irréfutable de sa foi. (Encore qu’il s’en défende avec vigueur
2197 avec vigueur mais son action même témoigne contre l’ humilité de son retrait.) La question qui se posait dès lors était cel
2198 même témoigne contre l’humilité de son retrait.) La question qui se posait dès lors était celle-ci : « Comment donner à u
2199 e-ci : « Comment donner à une époque plongée dans la plus grande mollesse spirituelle » l’amère passion de faire mourir un
2200 longée dans la plus grande mollesse spirituelle » l’ amère passion de faire mourir un témoin de la vérité ? Si tu veux ce r
2201 le » l’amère passion de faire mourir un témoin de la vérité ? Si tu veux ce résultat… apprends d’abord à bien connaître ta
2202 r d’elle-même. Ainsi bien informé, fais-toi alors le porte-parole des idées, des passions qui sont dans l’air, avec l’enth
2203 orte-parole des idées, des passions qui sont dans l’ air, avec l’enthousiasme d’une éloquence chaude et entraînante. Pour c
2204 des idées, des passions qui sont dans l’air, avec l’ enthousiasme d’une éloquence chaude et entraînante. Pour cela, il te f
2205 e chaude et entraînante. Pour cela, il te faut de la force et du talent. Qu’arrive-t-il ? Tout simplement ceci : l’époque
2206 u talent. Qu’arrive-t-il ? Tout simplement ceci : l’ époque s’engoue de tes discours et tu deviens son favori. Tu es alors
2207 nant de changer de direction ; tu restes animé de la même décision, mais tu te rends aussi rebutant que tu as été attirant
2208 ner et bientôt s’enflammer contre toi.38 Tel fut le sort que choisit Kierkegaard, lorsqu’au cours des années qui préparèr
2209 nt sa mort, il « changea de direction » et révéla le sens dernier de toute son œuvre. Il est juste que ce destin se répète
2210 ue ce destin se répète aujourd’hui parmi nous. Et la publication des écrits religieux entreprise par M. Paul Tisseau y con
2211 e par M. Paul Tisseau y contribuera certainement. Les graves malentendus que je signalais ont valu à l’auteur du Traité du
2212 es graves malentendus que je signalais ont valu à l’ auteur du Traité du désespoir un « succès » dont il est peut-être temp
2213 tirer certaines conclusions propres à « repousser l’ admiration ». Rien n’est plus conforme au style kierkegaardien que la
2214 n n’est plus conforme au style kierkegaardien que la manière dont M. Tisseau a publié ces quatre petits volumes de « disco
2215 de « discours édifiants » et d’essais religieux : La Pureté du cœur, Le Droit de mourir pour la vérité, Pour un examen de
2216 ants » et d’essais religieux : La Pureté du cœur, Le Droit de mourir pour la vérité, Pour un examen de conscience, Le Souv
2217 ieux : La Pureté du cœur, Le Droit de mourir pour la vérité, Pour un examen de conscience, Le Souverain sacrificateur. On
2218 rir pour la vérité, Pour un examen de conscience, Le Souverain sacrificateur. On les trouvera « chez le traducteur, à Bazo
2219 men de conscience, Le Souverain sacrificateur. On les trouvera « chez le traducteur, à Bazoges-en-Pareds », dans une petite
2220 e Souverain sacrificateur. On les trouvera « chez le traducteur, à Bazoges-en-Pareds », dans une petite ferme, tout au fon
2221 ant du snobisme qui naît autour de leur auteur. ⁂ Le centre de Kierkegaard est dans cette phrase : « La subjectivité est l
2222 e centre de Kierkegaard est dans cette phrase : «  La subjectivité est la vérité. » La subjectivité, ce n’est pas le subjec
2223 ard est dans cette phrase : « La subjectivité est la vérité. » La subjectivité, ce n’est pas le subjectivisme, ce n’est pa
2224 cette phrase : « La subjectivité est la vérité. » La subjectivité, ce n’est pas le subjectivisme, ce n’est pas le vague, l
2225 té est la vérité. » La subjectivité, ce n’est pas le subjectivisme, ce n’est pas le vague, le sentiment incontrôlé, le rom
2226 vité, ce n’est pas le subjectivisme, ce n’est pas le vague, le sentiment incontrôlé, le romantisme et l’anarchie, etc. La
2227 ’est pas le subjectivisme, ce n’est pas le vague, le sentiment incontrôlé, le romantisme et l’anarchie, etc. La subjectivi
2228 , ce n’est pas le vague, le sentiment incontrôlé, le romantisme et l’anarchie, etc. La subjectivité, c’est le fait de deve
2229 vague, le sentiment incontrôlé, le romantisme et l’ anarchie, etc. La subjectivité, c’est le fait de devenir le sujet de l
2230 ent incontrôlé, le romantisme et l’anarchie, etc. La subjectivité, c’est le fait de devenir le sujet de la vérité, et non
2231 ntisme et l’anarchie, etc. La subjectivité, c’est le fait de devenir le sujet de la vérité, et non pas seulement son admir
2232 e, etc. La subjectivité, c’est le fait de devenir le sujet de la vérité, et non pas seulement son admirateur enthousiaste.
2233 ubjectivité, c’est le fait de devenir le sujet de la vérité, et non pas seulement son admirateur enthousiaste. On dirait,
2234 ment son admirateur enthousiaste. On dirait, dans le langage d’aujourd’hui : c’est le fait de réaliser la vérité que l’on
2235 On dirait, dans le langage d’aujourd’hui : c’est le fait de réaliser la vérité que l’on connaît ; ou encore, de la prendr
2236 langage d’aujourd’hui : c’est le fait de réaliser la vérité que l’on connaît ; ou encore, de la prendre au sérieux et de l
2237 urd’hui : c’est le fait de réaliser la vérité que l’ on connaît ; ou encore, de la prendre au sérieux et de la vouloir uniq
2238 aliser la vérité que l’on connaît ; ou encore, de la prendre au sérieux et de la vouloir uniquement. Mais on ne peut voulo
2239 nnaît ; ou encore, de la prendre au sérieux et de la vouloir uniquement. Mais on ne peut vouloir d’une manière totale et u
2240 t pas vrai comporte en soi une division et divise la volonté qu’on met à le réaliser. Tel est le sujet de la Pureté du cœu
2241 soi une division et divise la volonté qu’on met à le réaliser. Tel est le sujet de la Pureté du cœur. La plupart des écrit
2242 ivise la volonté qu’on met à le réaliser. Tel est le sujet de la Pureté du cœur. La plupart des écrits proprement religieu
2243 onté qu’on met à le réaliser. Tel est le sujet de la Pureté du cœur. La plupart des écrits proprement religieux de Kierkeg
2244 religieux de Kierkegaard développent ce thème et l’ illustrent de la façon la plus familière et directe, tandis que ses éc
2245 erkegaard développent ce thème et l’illustrent de la façon la plus familière et directe, tandis que ses écrits littéraires
2246 développent ce thème et l’illustrent de la façon la plus familière et directe, tandis que ses écrits littéraires ou philo
2247 pour dessein, plus ou moins déguisé, de pousser à l’ absurde les attitudes de vie ou de pensée qui ne se fondent pas dans c
2248 in, plus ou moins déguisé, de pousser à l’absurde les attitudes de vie ou de pensée qui ne se fondent pas dans cette vision
2249 ette vision centrale et unitive. Il me semble que les neuf discours traduits par M. Paul Tisseau en reviennent tous à la mê
2250 traduits par M. Paul Tisseau en reviennent tous à la même question, qui est celle du sérieux dernier, de la prise au série
2251 me question, qui est celle du sérieux dernier, de la prise au sérieux de la vérité. Du point de vue du sérieux humain, l’é
2252 lle du sérieux dernier, de la prise au sérieux de la vérité. Du point de vue du sérieux humain, l’éternité doit apparaître
2253 de la vérité. Du point de vue du sérieux humain, l’ éternité doit apparaître comme une espèce d’ironie cruelle ; mais du p
2254 espèce d’ironie cruelle ; mais du point de vue de l’ éternité, le sérieux humain apparaît affecté d’un humour désespéré. La
2255 nie cruelle ; mais du point de vue de l’éternité, le sérieux humain apparaît affecté d’un humour désespéré. La dialectique
2256 ux humain apparaît affecté d’un humour désespéré. La dialectique de Kierkegaard consiste alors à déconsidérer le sérieux e
2257 ique de Kierkegaard consiste alors à déconsidérer le sérieux et le pathétique purement humains, en les poussant à la limit
2258 gaard consiste alors à déconsidérer le sérieux et le pathétique purement humains, en les poussant à la limite où se révèle
2259 le sérieux et le pathétique purement humains, en les poussant à la limite où se révèle leur impuissance ; puis à montrer q
2260 le pathétique purement humains, en les poussant à la limite où se révèle leur impuissance ; puis à montrer que l’éternelle
2261 ù se révèle leur impuissance ; puis à montrer que l’ éternelle vérité n’est encore qu’une grandiose ironie tant qu’elle n’e
2262 ose ironie tant qu’elle n’est pas actualisée dans l’ acte de foi. Il n’y eut jamais de sérieux absolu39 que dans la vie et
2263 i. Il n’y eut jamais de sérieux absolu39 que dans la vie et dans la mort du Christ, homme et Dieu, car lui seul eut vraime
2264 amais de sérieux absolu39 que dans la vie et dans la mort du Christ, homme et Dieu, car lui seul eut vraiment « le droit d
2265 hrist, homme et Dieu, car lui seul eut vraiment «  le droit de mourir pour la vérité », étant lui-même la vérité. C’est pou
2266 r lui seul eut vraiment « le droit de mourir pour la vérité », étant lui-même la vérité. C’est pourquoi l’acte de foi, qui
2267 droit de mourir pour la vérité », étant lui-même la vérité. C’est pourquoi l’acte de foi, qui saisit dans ce temps l’éter
2268 érité », étant lui-même la vérité. C’est pourquoi l’ acte de foi, qui saisit dans ce temps l’éternel paradoxe de la vie et
2269 pourquoi l’acte de foi, qui saisit dans ce temps l’ éternel paradoxe de la vie et de la mort du Christ, jette sur tous nos
2270 i, qui saisit dans ce temps l’éternel paradoxe de la vie et de la mort du Christ, jette sur tous nos sérieux, poses et amu
2271 dans ce temps l’éternel paradoxe de la vie et de la mort du Christ, jette sur tous nos sérieux, poses et amusettes, une i
2272 d’insondable ironie. Un soupçon : car peut-être, l’ acte de foi n’existe pas ? Peut-être n’est-ce qu’une figure de rhétori
2273 e, une illusion, un mythe, ou encore un saut dans le vide ? Et alors il n’y aurait nulle part de vrai sérieux ? Peut-être
2274 ut-être aussi cet acte existe-t-il, peut-être que l’ illic et tuc de cette Mort et de cette Résurrection peut devenir quelq
2275 rrection peut devenir quelque part, dans une vie, le hic et nunc de la foi ? Mais alors il n’y a pas de vrai sérieux dans
2276 nir quelque part, dans une vie, le hic et nunc de la foi ? Mais alors il n’y a pas de vrai sérieux dans ma vie, tant qu’il
2277 ’ignore en certitude combattante — et combattue. Le sérieux de l’ironie, l’ironie du sérieux, voilà les pôles d’une diale
2278 titude combattante — et combattue. Le sérieux de l’ ironie, l’ironie du sérieux, voilà les pôles d’une dialectique dont le
2279 battante — et combattue. Le sérieux de l’ironie, l’ ironie du sérieux, voilà les pôles d’une dialectique dont le plus étra
2280 e sérieux de l’ironie, l’ironie du sérieux, voilà les pôles d’une dialectique dont le plus étrange, sans doute, est qu’elle
2281 u sérieux, voilà les pôles d’une dialectique dont le plus étrange, sans doute, est qu’elle embrasse avec une familiarité p
2282 t qu’elle embrasse avec une familiarité poignante les problèmes de la vie banale. Il y a dans ce passage perpétuel de l’abs
2283 e avec une familiarité poignante les problèmes de la vie banale. Il y a dans ce passage perpétuel de l’abstrait au concret
2284 a vie banale. Il y a dans ce passage perpétuel de l’ abstrait au concret, ou plutôt dans cette mêlée shakespearienne de log
2285 otes, de boutades et d’échappées romantiques (sur le silence de la femme, par exemple, à la fin du Miroir de la Parole) un
2286 des et d’échappées romantiques (sur le silence de la femme, par exemple, à la fin du Miroir de la Parole) une appréhension
2287 iques (sur le silence de la femme, par exemple, à la fin du Miroir de la Parole) une appréhension si totale du réel que no
2288 e de la femme, par exemple, à la fin du Miroir de la Parole) une appréhension si totale du réel que notre langue, je le cr
2289 préhension si totale du réel que notre langue, je le crains, n’arrivera pas à la restituer sans bizarreries. Ceci suffit s
2290 que notre langue, je le crains, n’arrivera pas à la restituer sans bizarreries. Ceci suffit sans doute à excuser les obsc
2291 ans bizarreries. Ceci suffit sans doute à excuser les obscurités, les gaucheries qui arrêtent parfois le lecteur des meille
2292 Ceci suffit sans doute à excuser les obscurités, les gaucheries qui arrêtent parfois le lecteur des meilleures traductions
2293 s obscurités, les gaucheries qui arrêtent parfois le lecteur des meilleures traductions françaises de Kierkegaard.   P.-S.
2294 chronique était déjà imprimée, quand j’ai lu dans les Cahiers du Sud une étude de Benjamin Fondane qui s’en prend avec éner
2295 ême. Je ne trouve pas cette violence déplacée, ni l’ injustice qui l’accompagne plus onéreuse pour la vérité que ne serait
2296 e pas cette violence déplacée, ni l’injustice qui l’ accompagne plus onéreuse pour la vérité que ne serait l’affectation d’
2297 i l’injustice qui l’accompagne plus onéreuse pour la vérité que ne serait l’affectation d’impartialité ; et je suis loin d
2298 mpagne plus onéreuse pour la vérité que ne serait l’ affectation d’impartialité ; et je suis loin de trouver vaine la quest
2299 d’impartialité ; et je suis loin de trouver vaine la question que pose Fondane : « Ils suivent Kierkegaard du regard — mai
2300 gênante et sérieuse, et c’est pourquoi il fallait la poser. Et c’est aussi pourquoi je la retourne à son auteur. Mais peut
2301 i il fallait la poser. Et c’est aussi pourquoi je la retourne à son auteur. Mais peut-on y répondre par des mots ? Plusieu
2302 scours religieux ayant pour objet de « préparer à la Communion », je ne vois pour ma part qu’un seul moyen de s’engager de
2303 toute sa personne à la suite de Kierkegaard… Tout le reste est littérature, « littérature kierkegaardienne » évidemment, «
2304 peut-on publier autre chose que ce reste ? 38. Le droit de mourir pour la vérité, p. 57. Ou encore : « La supériorité v
2305 ose que ce reste ? 38. Le droit de mourir pour la vérité, p. 57. Ou encore : « La supériorité véritable produit elle-mê
2306 it de mourir pour la vérité, p. 57. Ou encore : «  La supériorité véritable produit elle-même la provision de force qui cau
2307 re : « La supériorité véritable produit elle-même la provision de force qui cause sa perte. » Ibid., p. 53. 39. Dans sa b
2308 arquons que nous ne devons prendre au sérieux que le sérieux, que la personne, tout le reste peut devenir l’objet de notre
2309 ne devons prendre au sérieux que le sérieux, que la personne, tout le reste peut devenir l’objet de notre jeu. » p. 26.
2310 au sérieux que le sérieux, que la personne, tout le reste peut devenir l’objet de notre jeu. » p. 26. z. Rougemont Deni
2311 ieux, que la personne, tout le reste peut devenir l’ objet de notre jeu. » p. 26. z. Rougemont Denis de, « Kierkegaard en
2312 . Rougemont Denis de, « Kierkegaard en France », La Nouvelle Revue française, Paris, juin 1936, p. 971-976.
26 1936, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). L’Art poétique ou Qu’il faut penser avec les mains (décembre 1936)
2313 L’ Art poétique ou Qu’il faut penser avec les mains (décembre 1936)aa
2314 aut penser avec les mains (décembre 1936)aa De l’ Art poétique de Claudel, qui domine de son poids les écritures du sièc
2315 ’Art poétique de Claudel, qui domine de son poids les écritures du siècle, je retiendrai d’abord deux mots : « poétique » d
2316 retiendrai d’abord deux mots : « poétique » dans le titre ; et « connaissance », qui s’inscrit à chaque page. La rumeur q
2317 et « connaissance », qui s’inscrit à chaque page. La rumeur quotidienne tend à faire de « poète » une circonstance atténua
2318 ice du maladroit, s’il est aimable. Ou bien c’est l’ ornement de nos loisirs. Mais Claudel dit : l’art poétique est art de
2319 est l’ornement de nos loisirs. Mais Claudel dit : l’ art poétique est art de faire. Un gémissement célèbre, chez les clercs
2320 ue est art de faire. Un gémissement célèbre, chez les clercs, déplore l’antipathie tragique de la connaissance et de la Vie
2321 Un gémissement célèbre, chez les clercs, déplore l’ antipathie tragique de la connaissance et de la Vie. Ceci tuerait cela
2322 chez les clercs, déplore l’antipathie tragique de la connaissance et de la Vie. Ceci tuerait cela. Et de cette dialectique
2323 re l’antipathie tragique de la connaissance et de la Vie. Ceci tuerait cela. Et de cette dialectique, on a tiré quelques r
2324 soi »… Il ne s’agit évidemment, ici et là, ni de la même poésie ni de la même connaissance. Claudel choisit, contre le se
2325 évidemment, ici et là, ni de la même poésie ni de la même connaissance. Claudel choisit, contre le sens banal, le sens qu’
2326 de la même connaissance. Claudel choisit, contre le sens banal, le sens qu’indiquent les étymologies. C’est-à-dire qu’il
2327 naissance. Claudel choisit, contre le sens banal, le sens qu’indiquent les étymologies. C’est-à-dire qu’il choisit de choi
2328 oisit, contre le sens banal, le sens qu’indiquent les étymologies. C’est-à-dire qu’il choisit de choisir, car l’étymologie
2329 ogies. C’est-à-dire qu’il choisit de choisir, car l’ étymologie est trop loin d’être une science pour que l’adoption même d
2330 mologie est trop loin d’être une science pour que l’ adoption même d’une « origine » soit autre chose qu’un choix délibéré,
2331 ées, pourvu qu’il en avertisse. » Cette phrase de la Logique de Port-Royal, dont Claudel, s’il est réaliste, doit récuser
2332 al, dont Claudel, s’il est réaliste, doit récuser la principale40, peut néanmoins servir à préciser ce qui oppose la langu
2333 0, peut néanmoins servir à préciser ce qui oppose la langue d’un poète aux divers jargons de son temps : c’est que l’une e
2334  », posant un perpétuel avertissement, tandis que les autres ont plutôt l’air de résulter d’une série d’oublis d’avertir, d
2335 l avertissement, tandis que les autres ont plutôt l’ air de résulter d’une série d’oublis d’avertir, d’une série de contrav
2336 lis d’avertir, d’une série de contraventions dans l’ impunité générale. Claudel montre partout son parti pris, qui est de s
2337 rigine, entre plusieurs probables, qui lui paraît la plus concrète, la plus active, la plus proche de la chose et du geste
2338 ieurs probables, qui lui paraît la plus concrète, la plus active, la plus proche de la chose et du geste. Poésie, de poiei
2339 qui lui paraît la plus concrète, la plus active, la plus proche de la chose et du geste. Poésie, de poiein, ce sera : fai
2340 plus concrète, la plus active, la plus proche de la chose et du geste. Poésie, de poiein, ce sera : faire. Connaître, de
2341 re. Il faut savoir ce que parler veut dire. (D’où l’ on vient, où l’on va : tel est le sens.) Car le langage, parmi d’autre
2342 oir ce que parler veut dire. (D’où l’on vient, où l’ on va : tel est le sens.) Car le langage, parmi d’autres fonctions, a
2343 veut dire. (D’où l’on vient, où l’on va : tel est le sens.) Car le langage, parmi d’autres fonctions, a celle-là de permet
2344 où l’on vient, où l’on va : tel est le sens.) Car le langage, parmi d’autres fonctions, a celle-là de permettre à nos pens
2345 ler. Claudel se donne un règlement, et il observe les signaux. Les autres (voyez leurs journaux) se sont jetés dans un énor
2346 se donne un règlement, et il observe les signaux. Les autres (voyez leurs journaux) se sont jetés dans un énorme embouteill
2347 llage, il n’y a plus qu’à se laisser pousser dans le sens incertain de la masse. Or ce sens, tellement incertain qu’il en
2348 qu’à se laisser pousser dans le sens incertain de la masse. Or ce sens, tellement incertain qu’il en devient presque indéf
2349 ien n’avance, c’est un sur-place exaspérant, tous les moteurs sont débrayés) ce sens partout évanouissant n’en est pas moin
2350 ) ce sens partout évanouissant n’en est pas moins le sens « commun » — voire même, par antiphrase, le sens « courant ». Da
2351 le sens « commun » — voire même, par antiphrase, le sens « courant ». Dans cette affaire, celui qui sait où il va risque
2352 celui qui sait où il va risque encore d’augmenter l’ embarras, et de se faire copieusement houspiller. Et pourtant, c’est l
2353 uspiller. Et pourtant, c’est lui seul qui détient la méthode efficace pour en sortir. Mais quittons là cette métaphore ava
2354 lle aussi s’embouteiller41. Ou encore essayons de la traduire. Les modes, l’usage, l’usure des mots aggravés par la press
2355 bouteiller41. Ou encore essayons de la traduire. Les modes, l’usage, l’usure des mots aggravés par la presse et par la pol
2356 1. Ou encore essayons de la traduire. Les modes, l’ usage, l’usure des mots aggravés par la presse et par la politique, on
2357 ore essayons de la traduire. Les modes, l’usage, l’ usure des mots aggravés par la presse et par la politique, ont peu à p
2358 Les modes, l’usage, l’usure des mots aggravés par la presse et par la politique, ont peu à peu fait passer pour communes d
2359 e, l’usure des mots aggravés par la presse et par la politique, ont peu à peu fait passer pour communes des significations
2360 munes des significations qui à vrai dire, et dans le fait, ruinent les bases de la communauté. On convient de s’entendre s
2361 cations qui à vrai dire, et dans le fait, ruinent les bases de la communauté. On convient de s’entendre sur des malentendus
2362 vrai dire, et dans le fait, ruinent les bases de la communauté. On convient de s’entendre sur des malentendus42. À ce pri
2363 t de s’entendre sur des malentendus42. À ce prix, l’ on nourrit une paix sans racines. (Alors que toute communauté réelle n
2364 mmunauté réelle naît d’une entente passionnée sur le sens de certains maîtres-mots : esprit, nation, révolution, salut…) E
2365 comme pour protéger ces conventions précaires, on les rend aussi vagues et abstraites qu’on le peut. Opération inverse de c
2366 res, on les rend aussi vagues et abstraites qu’on le peut. Opération inverse de celle du poète : on s’arrête à l’acception
2367 ération inverse de celle du poète : on s’arrête à l’ acception neutre, la moins active, la plus anecdotique — rompant ainsi
2368 elle du poète : on s’arrête à l’acception neutre, la moins active, la plus anecdotique — rompant ainsi le contact immédiat
2369 n s’arrête à l’acception neutre, la moins active, la plus anecdotique — rompant ainsi le contact immédiat entre le nom et
2370 moins active, la plus anecdotique — rompant ainsi le contact immédiat entre le nom et la chose qu’il exprime, entre le ver
2371 dotique — rompant ainsi le contact immédiat entre le nom et la chose qu’il exprime, entre le verbe et l’acte qu’il command
2372 rompant ainsi le contact immédiat entre le nom et la chose qu’il exprime, entre le verbe et l’acte qu’il commande43, entre
2373 iat entre le nom et la chose qu’il exprime, entre le verbe et l’acte qu’il commande43, entre le parler et le faire, — entr
2374 nom et la chose qu’il exprime, entre le verbe et l’ acte qu’il commande43, entre le parler et le faire, — entre la pensée
2375 entre le verbe et l’acte qu’il commande43, entre le parler et le faire, — entre la pensée et la main. Cependant que l’eff
2376 be et l’acte qu’il commande43, entre le parler et le faire, — entre la pensée et la main. Cependant que l’effort d’un Clau
2377 commande43, entre le parler et le faire, — entre la pensée et la main. Cependant que l’effort d’un Claudel, restituant à
2378 entre le parler et le faire, — entre la pensée et la main. Cependant que l’effort d’un Claudel, restituant à chaque mot so
2379 aire, — entre la pensée et la main. Cependant que l’ effort d’un Claudel, restituant à chaque mot son sens le plus poignant
2380 rt d’un Claudel, restituant à chaque mot son sens le plus poignant, par là même le plus apte à ranimer une communion vivan
2381 chaque mot son sens le plus poignant, par là même le plus apte à ranimer une communion vivante entre les hommes, se trouve
2382 e plus apte à ranimer une communion vivante entre les hommes, se trouve produire exactement l’effet contraire : son succès
2383 e entre les hommes, se trouve produire exactement l’ effet contraire : son succès même va s’inscrire dans une œuvre incommu
2384 valeur d’appel, appeler sans cesse à grands cris l’ univers (cette « version à l’unité »), la plénitude, le rassemblement
2385 cesse à grands cris l’univers (cette « version à l’ unité »), la plénitude, le rassemblement de tous les êtres, le branle-
2386 nds cris l’univers (cette « version à l’unité »), la plénitude, le rassemblement de tous les êtres, le branle-bas de toute
2387 vers (cette « version à l’unité »), la plénitude, le rassemblement de tous les êtres, le branle-bas de toute la création v
2388 ’unité »), la plénitude, le rassemblement de tous les êtres, le branle-bas de toute la création vers son achèvement intelli
2389 la plénitude, le rassemblement de tous les êtres, le branle-bas de toute la création vers son achèvement intelligible, c’e
2390 blement de tous les êtres, le branle-bas de toute la création vers son achèvement intelligible, c’est là vraiment « poétis
2391 ble, c’est là vraiment « poétiser », collaborer à l’ ouvrage de Dieu, et recréer la catholicité. Mais c’est aussi, dans le
2392 ser », collaborer à l’ouvrage de Dieu, et recréer la catholicité. Mais c’est aussi, dans le monde d’aujourd’hui, se condam
2393 et recréer la catholicité. Mais c’est aussi, dans le monde d’aujourd’hui, se condamner à n’être pas compris. Paradoxe d’un
2394 compris. Paradoxe d’un génie catholique, isolé de la foule des hommes, par ce qui manifeste, justement, sa volonté de cath
2395 s parmi tant d’admirateurs, combien co-naissent à la raison de ses beautés, énoncée dans l’Art poétique ? De cet ouvrage t
2396 naissent à la raison de ses beautés, énoncée dans l’ Art poétique ? De cet ouvrage très sévère, et sublime en tant de passa
2397 ublime en tant de passages, combien accepteraient l’ inquisition ? Qu’on ne dise pas que la philosophie d’un grand poète im
2398 cepteraient l’inquisition ? Qu’on ne dise pas que la philosophie d’un grand poète importe moins que son humanité, que son
2399 ais quoi de bouleversant, obscurément, qui saisit l’ auditeur le plus profane de Tête d’Or ou de l’Annonce. Ce serait aggra
2400 bouleversant, obscurément, qui saisit l’auditeur le plus profane de Tête d’Or ou de l’Annonce. Ce serait aggraver d’une s
2401 sit l’auditeur le plus profane de Tête d’Or ou de l’ Annonce. Ce serait aggraver d’une sottise cette Séparation, notre péch
2402 te Séparation, notre péché, contre laquelle toute l’ œuvre de Claudel se soulève à l’appel de la Joie. Le monde qu’interprè
2403 re laquelle toute l’œuvre de Claudel se soulève à l’ appel de la Joie. Le monde qu’interprète l’Art poétique ne connaît pas
2404 toute l’œuvre de Claudel se soulève à l’appel de la Joie. Le monde qu’interprète l’Art poétique ne connaît pas Descartes
2405 œuvre de Claudel se soulève à l’appel de la Joie. Le monde qu’interprète l’Art poétique ne connaît pas Descartes le divise
2406 lève à l’appel de la Joie. Le monde qu’interprète l’ Art poétique ne connaît pas Descartes le diviseur, ne connaît pas de l
2407 nterprète l’Art poétique ne connaît pas Descartes le diviseur, ne connaît pas de localisation du spirituel, ne connaît pas
2408 out sa fin, complément ou efférence, sa part dans la composition de l’image, le mot qui profère son sens. » C’est un unive
2409 ment ou efférence, sa part dans la composition de l’ image, le mot qui profère son sens. » C’est un univers du discours, où
2410 fférence, sa part dans la composition de l’image, le mot qui profère son sens. » C’est un univers du discours, où les obje
2411 fère son sens. » C’est un univers du discours, où les objets qui « veulent dire » s’assemblent en propositions (à l’homme),
2412 « veulent dire » s’assemblent en propositions (à l’ homme), seul discours proprement cohérent, puisqu’il ne tire ses règle
2413 isqu’il ne tire ses règles et sa nécessité que de la fin totale qu’il glorifie. Ce n’est pas notre monde tel qu’il est, ma
2414 e monde tel qu’il est sauvé, relié solidement par la Promesse et remis en marche vers elle, — le monde de la poésie. Divis
2415 t par la Promesse et remis en marche vers elle, —  le monde de la poésie. Diviser, séparer, isoler, faire scission, ce n’es
2416 messe et remis en marche vers elle, — le monde de la poésie. Diviser, séparer, isoler, faire scission, ce n’est pas seulem
2417 t cartésien ; et Descartes n’a fait que constater les effets antipoétiques d’un relâchement originel. Rompre le lien de l’h
2418 s antipoétiques d’un relâchement originel. Rompre le lien de l’homme avec son origine, c’est rompre aussi sa communion ave
2419 ques d’un relâchement originel. Rompre le lien de l’ homme avec son origine, c’est rompre aussi sa communion avec la fin un
2420 son origine, c’est rompre aussi sa communion avec la fin universelle. Alors l’homme se complaît dans une fin qu’il fait si
2421 aussi sa communion avec la fin universelle. Alors l’ homme se complaît dans une fin qu’il fait sienne, c’est-à-dire qu’il s
2422 -dire qu’il s’isole et s’abstrait du mouvement de la Création. « Et c’est pourquoi une fin lui fut en effet donnée » — qui
2423 lui fut en effet donnée » — qui est sa mort. Mais l’ œuvre du poète, la vocation de l’homme, la charité cosmique du chrétie
2424 onnée » — qui est sa mort. Mais l’œuvre du poète, la vocation de l’homme, la charité cosmique du chrétien (identiquement),
2425 st sa mort. Mais l’œuvre du poète, la vocation de l’ homme, la charité cosmique du chrétien (identiquement), c’est alors d’
2426 t. Mais l’œuvre du poète, la vocation de l’homme, la charité cosmique du chrétien (identiquement), c’est alors d’embrasser
2427 qu’une durée mauvaise a disjoint et altéré. « Car l’ attente ardente de la création attend la révélation des enfants de Die
2428 a disjoint et altéré. « Car l’attente ardente de la création attend la révélation des enfants de Dieu, parce que ce n’est
2429 ré. « Car l’attente ardente de la création attend la révélation des enfants de Dieu, parce que ce n’est pas de son propre
2430 (Rom. 8, 19-20). Ne fût-ce que par son style, et l’ intention, partout, qu’il manifeste avec puissance, Claudel répond à l
2431 qu’il manifeste avec puissance, Claudel répond à la proposition universelle. Qu’on parle alors de procédé, si l’on y tien
2432 ion universelle. Qu’on parle alors de procédé, si l’ on y tient, mais il faut en comprendre l’office. Traiter chaque mot se
2433 cédé, si l’on y tient, mais il faut en comprendre l’ office. Traiter chaque mot selon la chose qu’il re-présente tout d’abo
2434 en comprendre l’office. Traiter chaque mot selon la chose qu’il re-présente tout d’abord, rendre un corps et refaire des
2435 ps et refaire des racines matérielles aux dérivés les plus exsangues, c’est rénover l’action cosmique de la parole. Comment
2436 les aux dérivés les plus exsangues, c’est rénover l’ action cosmique de la parole. Comment cela ? « Le mot appelle, provoqu
2437 lus exsangues, c’est rénover l’action cosmique de la parole. Comment cela ? « Le mot appelle, provoque en nous l’état de c
2438 l’action cosmique de la parole. Comment cela ? «  Le mot appelle, provoque en nous l’état de co-naissance qui répond à la
2439 Comment cela ? « Le mot appelle, provoque en nous l’ état de co-naissance qui répond à la présence sensible des choses même
2440 voque en nous l’état de co-naissance qui répond à la présence sensible des choses mêmes. » Le nom, qui désigne la chose, a
2441 répond à la présence sensible des choses mêmes. » Le nom, qui désigne la chose, appelle un geste de l’homme pour cette cho
2442 sensible des choses mêmes. » Le nom, qui désigne la chose, appelle un geste de l’homme pour cette chose. Le verbe, désign
2443 Le nom, qui désigne la chose, appelle un geste de l’ homme pour cette chose. Le verbe, désignant ce geste, appelle une phra
2444 se, appelle un geste de l’homme pour cette chose. Le verbe, désignant ce geste, appelle une phrase, un rythme d’actes conc
2445 le une phrase, un rythme d’actes concertés. Ainsi l’ homme se trouve mis « en communication avec la source continue qu’il c
2446 nsi l’homme se trouve mis « en communication avec la source continue qu’il contient en lui dans son être : son geste n’est
2447 t en lui dans son être : son geste n’est plus que la traduction, dans l’univers matériel, du sanglot de l’origine ». En mê
2448 re : son geste n’est plus que la traduction, dans l’ univers matériel, du sanglot de l’origine ». En même temps que la chos
2449 raduction, dans l’univers matériel, du sanglot de l’ origine ». En même temps que la chose qui le provoque, le verbe exprim
2450 iel, du sanglot de l’origine ». En même temps que la chose qui le provoque, le verbe exprime ainsi la vocation de l’homme
2451 ot de l’origine ». En même temps que la chose qui le provoque, le verbe exprime ainsi la vocation de l’homme qui le profèr
2452 ne ». En même temps que la chose qui le provoque, le verbe exprime ainsi la vocation de l’homme qui le profère. « L’acte p
2453 la chose qui le provoque, le verbe exprime ainsi la vocation de l’homme qui le profère. « L’acte par lequel l’homme attes
2454 e provoque, le verbe exprime ainsi la vocation de l’ homme qui le profère. « L’acte par lequel l’homme atteste la permanenc
2455 le verbe exprime ainsi la vocation de l’homme qui le profère. « L’acte par lequel l’homme atteste la permanence des choses
2456 me ainsi la vocation de l’homme qui le profère. «  L’ acte par lequel l’homme atteste la permanence des choses, par lequel,
2457 on de l’homme qui le profère. « L’acte par lequel l’ homme atteste la permanence des choses, par lequel, en dehors du temps
2458 i le profère. « L’acte par lequel l’homme atteste la permanence des choses, par lequel, en dehors du temps, en dehors des
2459 des circonstances et causes secondes, il formule l’ ensemble des conditions permanentes dont la réunion donne à chaque cho
2460 ormule l’ensemble des conditions permanentes dont la réunion donne à chaque chose son droit de devenir présente à l’esprit
2461 ne à chaque chose son droit de devenir présente à l’ esprit, par lequel il la conçoit dans son cœur, et répète l’ordre qui
2462 oit de devenir présente à l’esprit, par lequel il la conçoit dans son cœur, et répète l’ordre qui l’a créée, s’appelle la
2463 par lequel il la conçoit dans son cœur, et répète l’ ordre qui l’a créée, s’appelle la parole. » Nous voici donc « chargés
2464 l la conçoit dans son cœur, et répète l’ordre qui l’ a créée, s’appelle la parole. » Nous voici donc « chargés du rôle d’or
2465 cœur, et répète l’ordre qui l’a créée, s’appelle la parole. » Nous voici donc « chargés du rôle d’origine ». L’homme est
2466  » Nous voici donc « chargés du rôle d’origine ». L’ homme est « le sceau de l’authenticité ». Il est, par son action recré
2467 donc « chargés du rôle d’origine ». L’homme est «  le sceau de l’authenticité ». Il est, par son action recréatrice, une ét
2468 és du rôle d’origine ». L’homme est « le sceau de l’ authenticité ». Il est, par son action recréatrice, une étymologie viv
2469 connaître, il lui suffit d’agir sa vocation. Dans l’ acte conscient de la fin qui l’englobe, il n’y a plus de distinction d
2470 ffit d’agir sa vocation. Dans l’acte conscient de la fin qui l’englobe, il n’y a plus de distinction du matériel et du spi
2471 sa vocation. Dans l’acte conscient de la fin qui l’ englobe, il n’y a plus de distinction du matériel et du spirituel. L’h
2472 plus de distinction du matériel et du spirituel. L’ homme « se connaît donc à son pas et à l’extension de ses mains, à la
2473 irituel. L’homme « se connaît donc à son pas et à l’ extension de ses mains, à la facilité plus ou moindre grande qu’il épr
2474 t donc à son pas et à l’extension de ses mains, à la facilité plus ou moindre grande qu’il éprouve à se servir des instrum
2475 ’il éprouve à se servir des instruments dont il a la propriété ». Et son corps lui est comme « un document où il suit les
2476 son corps lui est comme « un document où il suit les œuvres de l’esprit qui le remue ». Penser dans le train de la créatio
2477 est comme « un document où il suit les œuvres de l’ esprit qui le remue ». Penser dans le train de la création, reformer s
2478 un document où il suit les œuvres de l’esprit qui le remue ». Penser dans le train de la création, reformer sans cesse tou
2479 es œuvres de l’esprit qui le remue ». Penser dans le train de la création, reformer sans cesse toutes les formes selon l’i
2480 l’esprit qui le remue ». Penser dans le train de la création, reformer sans cesse toutes les formes selon l’intention qu’
2481 train de la création, reformer sans cesse toutes les formes selon l’intention qu’elles expriment, c’est proprement penser
2482 tion, reformer sans cesse toutes les formes selon l’ intention qu’elles expriment, c’est proprement penser avec les mains.
2483 our de sa Semaine, Du Bartas parlant de ses mains les appelle, assez curieusement, d’abord : « Singes de l’Éternel » et aus
2484 ppelle, assez curieusement, d’abord : « Singes de l’ Éternel » et aussitôt… « Ministres de l’esprit ». Ô singerie géniale e
2485 Singes de l’Éternel » et aussitôt… « Ministres de l’ esprit ». Ô singerie géniale et ministère manifeste ! Art poétique, ar
2486 inistère manifeste ! Art poétique, art de refaire le monde — tel que Dieu l’a connu de toute éternité ! 40. En effet, la
2487 poétique, art de refaire le monde — tel que Dieu l’ a connu de toute éternité ! 40. En effet, la citation du Cratyle qu’
2488 ieu l’a connu de toute éternité ! 40. En effet, la citation du Cratyle qu’il donne dans l’Art poétique (p. 172) dit exac
2489 En effet, la citation du Cratyle qu’il donne dans l’ Art poétique (p. 172) dit exactement le contraire. 41. On pourrait en
2490 donne dans l’Art poétique (p. 172) dit exactement le contraire. 41. On pourrait en tirer d’autres suites : faut-il attend
2491 t en tirer d’autres suites : faut-il attendre que les flics s’en mêlent, et viennent « mettre au pas » le langage — ou saur
2492 flics s’en mêlent, et viennent « mettre au pas » le langage — ou saurons-nous à temps nous débrouiller et nous entendre l
2493 sprit sans nulle définition, sans déclarer ce que le mot sous-entend, et qui se révélerait le plus souvent absurdement con
2494 r ce que le mot sous-entend, et qui se révélerait le plus souvent absurdement contradictoire. 43. Connaître commande naî
2495 out porte à conséquence, tout appelle, et d’abord la parole ! Mais l’usure des mots les édente, notre langage est débrayé.
2496 quence, tout appelle, et d’abord la parole ! Mais l’ usure des mots les édente, notre langage est débrayé. Comment rétablir
2497 lle, et d’abord la parole ! Mais l’usure des mots les édente, notre langage est débrayé. Comment rétablir le contact ? Clau
2498 ente, notre langage est débrayé. Comment rétablir le contact ? Claudel n’écrira pas : je vais vous expliquer cela claireme
2499 vous expliquer cela clairement, mais : « Tel est le mystère qu’il s’agit présentement de reporter sur le papier de l’encr
2500 mystère qu’il s’agit présentement de reporter sur le papier de l’encre la plus noire. » Au lieu de : Réfléchissons, analys
2501 s’agit présentement de reporter sur le papier de l’ encre la plus noire. » Au lieu de : Réfléchissons, analysons : « Rumin
2502 présentement de reporter sur le papier de l’encre la plus noire. » Au lieu de : Réfléchissons, analysons : « Ruminons la b
2503 u lieu de : Réfléchissons, analysons : « Ruminons la bouchée intelligible. » Toujours une chose-image, au lieu d’une formu
2504 u d’une formule faite, d’un terme abstrait. C’est le style du livre de Job. aa. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] L’
2505 Job. aa. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] L’ Art poétique ou Qu’il faut penser avec les mains », La Nouvelle Revue
2506 t poétique ou Qu’il faut penser avec les mains », La Nouvelle Revue française, Paris, décembre 1936, p. 992-997.
27 1937, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Une idée de Law (janvier 1937)
2507 Une idée de Law (janvier 1937)ab C’est dans les Œuvres de Law qu’on trouve cette remarque hardie : La victoire appart
2508 uvres de Law qu’on trouve cette remarque hardie : La victoire appartient toujours à celui qui a le dernier écu. On entreti
2509 ous en coûte pour guerroyer cinq ans. Quel en est le résultat ? car le succès définitif est incertain. Avec bien du bonheu
2510 guerroyer cinq ans. Quel en est le résultat ? car le succès définitif est incertain. Avec bien du bonheur, on peut espérer
2511 , on peut espérer de détruire 150 000 ennemis par le feu, le fer, l’eau, la faim, les fatigues, les maladies. Ainsi, la de
2512 t espérer de détruire 150 000 ennemis par le feu, le fer, l’eau, la faim, les fatigues, les maladies. Ainsi, la destructio
2513 r de détruire 150 000 ennemis par le feu, le fer, l’ eau, la faim, les fatigues, les maladies. Ainsi, la destruction direct
2514 truire 150 000 ennemis par le feu, le fer, l’eau, la faim, les fatigues, les maladies. Ainsi, la destruction directe ou in
2515 0 000 ennemis par le feu, le fer, l’eau, la faim, les fatigues, les maladies. Ainsi, la destruction directe ou indirecte d’
2516 par le feu, le fer, l’eau, la faim, les fatigues, les maladies. Ainsi, la destruction directe ou indirecte d’un soldat alle
2517 ’eau, la faim, les fatigues, les maladies. Ainsi, la destruction directe ou indirecte d’un soldat allemand nous coûte 20 0
2518 t allemand nous coûte 20 000 livres, sans compter la perte sur notre population, qui n’est réparée qu’au bout de vingt-cin
2519 permanente, ne vaudrait-il pas mieux en épargner les frais et acheter l’armée ennemie, lorsque l’occasion s’en présenterai
2520 ait-il pas mieux en épargner les frais et acheter l’ armée ennemie, lorsque l’occasion s’en présenterait. Un Anglais estima
2521 ner les frais et acheter l’armée ennemie, lorsque l’ occasion s’en présenterait. Un Anglais estimait un homme 480 livres st
2522 lais estimait un homme 480 livres sterling. C’est la plus forte évaluation, et ils ne sont pas tous aussi chers, comme on
2523 nt, on aurait un homme nouveau, au lieu que, dans le système actuel, on perd celui qu’on avait, sans profiter de celui qu’
2524 opération fort analogue lorsqu’il tenta d’acheter le sol que le Duce se préparait à conquérir : c’était là proprement « co
2525 ort analogue lorsqu’il tenta d’acheter le sol que le Duce se préparait à conquérir : c’était là proprement « couper l’herb
2526 rait à conquérir : c’était là proprement « couper l’ herbe sous les pieds » à la guerre. Mais le geste du capitaliste, qui
2527 rir : c’était là proprement « couper l’herbe sous les pieds » à la guerre. Mais le geste du capitaliste, qui eût été la plu
2528 là proprement « couper l’herbe sous les pieds » à la guerre. Mais le geste du capitaliste, qui eût été la plus belle farce
2529 couper l’herbe sous les pieds » à la guerre. Mais le geste du capitaliste, qui eût été la plus belle farce de l’Histoire,
2530 guerre. Mais le geste du capitaliste, qui eût été la plus belle farce de l’Histoire, a soulevé d’universelles protestation
2531 u capitaliste, qui eût été la plus belle farce de l’ Histoire, a soulevé d’universelles protestations. L’échec de Law et l’
2532 Histoire, a soulevé d’universelles protestations. L’ échec de Law et l’échec de Rickett ne comportent pas de morale : je ve
2533 é d’universelles protestations. L’échec de Law et l’ échec de Rickett ne comportent pas de morale : je veux le croire pour
2534 de Rickett ne comportent pas de morale : je veux le croire pour la morale. Mais ils permettent d’entrevoir l’une des rais
2535 comportent pas de morale : je veux le croire pour la morale. Mais ils permettent d’entrevoir l’une des raisons de notre an
2536 r l’une des raisons de notre anarchie économique. Le capitalisme ne serait peut-être pas un trop mauvais système si ses en
2537 rsées par celles d’une passion contraire, qui est l’ honneur. Car il est clair que l’honneur seul — ou du moins ce qu’il no
2538 ontraire, qui est l’honneur. Car il est clair que l’ honneur seul — ou du moins ce qu’il nous en reste, et ce n’est qu’une
2539 en reste, et ce n’est qu’une caricature — retient les gouvernants de suivre jusqu’au bout, et sans scrupules, la logique du
2540 nants de suivre jusqu’au bout, et sans scrupules, la logique du capitalisme. Or, ce système étant de ceux qui ne se peuven
2541 i rien d’arbitraire ou d’humain ne vient déranger les calculs, l’on voit qu’en vérité, ce qui nous ruine, c’est bien l’honn
2542 traire ou d’humain ne vient déranger les calculs, l’ on voit qu’en vérité, ce qui nous ruine, c’est bien l’honneur — le bud
2543 voit qu’en vérité, ce qui nous ruine, c’est bien l’ honneur — le budget de l’honneur — et non pas je ne sais quels scandal
2544 vérité, ce qui nous ruine, c’est bien l’honneur — le budget de l’honneur — et non pas je ne sais quels scandales… ab. R
2545 i nous ruine, c’est bien l’honneur — le budget de l’ honneur — et non pas je ne sais quels scandales… ab. Rougemont Deni
2546 … ab. Rougemont Denis de, « Une idée de Law », La Nouvelle Revue française, Paris, janvier 1937, p. 149-150.
28 1937, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). De la propriété capitaliste à la propriété humaine et Manifeste au service du personnalisme, par Emmanuel Mounier (février 1937)
2547 De la propriété capitaliste à la propriété humaine et Manifeste au service
2548 De la propriété capitaliste à la propriété humaine et Manifeste au service du personnalisme, par Emman
2549 ssais publiés jusqu’ici par Mounier, ce traité de la propriété est sans doute le mieux venu, le plus précis et situé. On a
2550 Mounier, ce traité de la propriété est sans doute le mieux venu, le plus précis et situé. On aimera la mobilité, le glisse
2551 ité de la propriété est sans doute le mieux venu, le plus précis et situé. On aimera la mobilité, le glissement varié de c
2552 le mieux venu, le plus précis et situé. On aimera la mobilité, le glissement varié de ce style, l’agilité précise de ses c
2553 , le plus précis et situé. On aimera la mobilité, le glissement varié de ce style, l’agilité précise de ses coupes, qualit
2554 era la mobilité, le glissement varié de ce style, l’ agilité précise de ses coupes, qualités nées, comme par décantation, d
2555 s qu’on a pu reprocher aux précédents ouvrages de l’ auteur. Mais c’est la méthode qui doit retenir ici : il s’agissait pou
2556 r aux précédents ouvrages de l’auteur. Mais c’est la méthode qui doit retenir ici : il s’agissait pour Mounier de fonder l
2557 etenir ici : il s’agissait pour Mounier de fonder la théorie personnaliste de l’avoir sur les doctrines catholiques les pl
2558 our Mounier de fonder la théorie personnaliste de l’ avoir sur les doctrines catholiques les plus solides à cet égard, cell
2559 de fonder la théorie personnaliste de l’avoir sur les doctrines catholiques les plus solides à cet égard, celles de Thomas
2560 nnaliste de l’avoir sur les doctrines catholiques les plus solides à cet égard, celles de Thomas d’Aquin et de Cajetan. On
2561 ’utopie, mais au contraire on actualise, et enfin l’ on prend au sérieux les admirables précisions thomistes que les siècle
2562 aire on actualise, et enfin l’on prend au sérieux les admirables précisions thomistes que les siècles jésuites avaient obnu
2563 u sérieux les admirables précisions thomistes que les siècles jésuites avaient obnubilées, et que la grande majorité des ca
2564 e les siècles jésuites avaient obnubilées, et que la grande majorité des catholiques d’aujourd’hui ignore avec persévéranc
2565 ore avec persévérance. À vrai dire, nul mieux que l’ Aquinate ne pouvait servir et autoriser le dessein de Mounier : défend
2566 eux que l’Aquinate ne pouvait servir et autoriser le dessein de Mounier : défendre la propriété contre les mauvaises raiso
2567 vir et autoriser le dessein de Mounier : défendre la propriété contre les mauvaises raisons des capitalistes, ou comme il
2568 dessein de Mounier : défendre la propriété contre les mauvaises raisons des capitalistes, ou comme il dit : « libérer de la
2569 des capitalistes, ou comme il dit : « libérer de la dialectique des propriétaires les valeurs de propriété personnelle ».
2570 t : « libérer de la dialectique des propriétaires les valeurs de propriété personnelle ». La plupart des distinctions que f
2571 nnelle ». La plupart des distinctions que formule la Somme — usage commun et gestion personnelle des biens, nécessaire vit
2572 d’une utilité et d’une efficacité éclatantes dans l’ embrouillamini politico-sentimental où nous ont plongés les doctrines
2573 illamini politico-sentimental où nous ont plongés les doctrines et les ressentiments secrétés par le capitalisme. Mounier p
2574 -sentimental où nous ont plongés les doctrines et les ressentiments secrétés par le capitalisme. Mounier part d’une phénomé
2575 s les doctrines et les ressentiments secrétés par le capitalisme. Mounier part d’une phénoménologie de la possession — pre
2576 capitalisme. Mounier part d’une phénoménologie de la possession — presque trop brillante par endroits —, s’engage dans un
2577 joint avec un naturel qui est succès de ce livre, les positions constructives d’Esprit, et même de L’Ordre nouveau (lequel
2578 était parti bien plutôt de Proudhon)44. En bref, le sens du livre est celui-ci : il s’agit de passer d’un mode de proprié
2579 é à Mounier d’avoir, chemin faisant, démontré que la propriété n’est pas un instinct permanent, mais au contraire un besoi
2580 nstinct permanent, mais au contraire un besoin de l’ esprit — le nécessaire vital une fois assuré. Ce qui suffit à renverse
2581 manent, mais au contraire un besoin de l’esprit — le nécessaire vital une fois assuré. Ce qui suffit à renverser l’argumen
2582 vital une fois assuré. Ce qui suffit à renverser l’ argument des propriétaires, trop souvent et hypocritement opposé à cer
2583 opposé à certain communisme — celui que redoutent les bourgeois, qui n’est pas celui de Staline… Mais si vigoureuse que soi
2584 cette analyse — et si utile sa lecture pour tous les possédants chrétiens — elle ne revêt sa signification totale que dans
2585 — elle ne revêt sa signification totale que dans l’ ensemble de la construction personnaliste. Le récent Manifeste de Moun
2586 êt sa signification totale que dans l’ensemble de la construction personnaliste. Le récent Manifeste de Mounier permettra
2587 dans l’ensemble de la construction personnaliste. Le récent Manifeste de Mounier permettra de prendre une mesure rapide de
2588 ussi des lacunes provisoires45 — de ce mouvement. Le lecteur qui se souvient encore du Cahier de revendications, publié ic
2589 Ce terme de personne, que nous jetions alors dans le débat politique et culturel, et qu’on nous reprochait non sans aigreu
2590 non sans aigreur, quand il ne faisait pas sourire les réalistes, le voilà repris et galvaudé depuis deux ans par toutes les
2591 r, quand il ne faisait pas sourire les réalistes, le voilà repris et galvaudé depuis deux ans par toutes les ligues et par
2592 ilà repris et galvaudé depuis deux ans par toutes les ligues et partis, de La Rocque à Vaillant-Couturier ! (Je ne sais pou
2593 if pléonastique : « personne humaine ».) En 1932, les marxistes prononçaient ici même — contre les « petits personnalistes 
2594 932, les marxistes prononçaient ici même — contre les « petits personnalistes » — que les problèmes de l’homme, et de l’esp
2595 même — contre les « petits personnalistes » — que les problèmes de l’homme, et de l’esprit, ne se poseraient plus durant le
2596 « petits personnalistes » — que les problèmes de l’ homme, et de l’esprit, ne se poseraient plus durant le prochain demi-s
2597 nnalistes » — que les problèmes de l’homme, et de l’ esprit, ne se poseraient plus durant le prochain demi-siècle. Parler d
2598 mme, et de l’esprit, ne se poseraient plus durant le prochain demi-siècle. Parler de la primauté du spirituel et de l’huma
2599 nt plus durant le prochain demi-siècle. Parler de la primauté du spirituel et de l’humain, c’était fasciste ! Mais voici q
2600 -siècle. Parler de la primauté du spirituel et de l’ humain, c’était fasciste ! Mais voici que quatre ans plus tard, le por
2601 t fasciste ! Mais voici que quatre ans plus tard, le porte-parole officiel du parti communiste français publie une sorte d
2602 orte de discours-programme intitulé Au service de l’ Esprit 46. Et l’on y lit que les fascistes sont les pires adversaires
2603 -programme intitulé Au service de l’Esprit 46. Et l’ on y lit que les fascistes sont les pires adversaires « de la personne
2604 tulé Au service de l’Esprit 46. Et l’on y lit que les fascistes sont les pires adversaires « de la personne humaine, cette
2605 l’Esprit 46. Et l’on y lit que les fascistes sont les pires adversaires « de la personne humaine, cette grande force spirit
2606 que les fascistes sont les pires adversaires « de la personne humaine, cette grande force spirituelle ». Et aussi « qu’au-
2607 e spirituelle ». Et aussi « qu’au-dessus de tout, les communistes placent l’homme ». Et enfin que « c’est à l’Esprit que le
2608 i « qu’au-dessus de tout, les communistes placent l’ homme ». Et enfin que « c’est à l’Esprit que le parti communiste franç
2609 unistes placent l’homme ». Et enfin que « c’est à l’ Esprit que le parti communiste français fait confiance pour l’aider à
2610 nt l’homme ». Et enfin que « c’est à l’Esprit que le parti communiste français fait confiance pour l’aider à résoudre les
2611 le parti communiste français fait confiance pour l’ aider à résoudre les problèmes de la paix, de la liberté et du pain de
2612 e français fait confiance pour l’aider à résoudre les problèmes de la paix, de la liberté et du pain des hommes »ad. À vrai
2613 onfiance pour l’aider à résoudre les problèmes de la paix, de la liberté et du pain des hommes »ad. À vrai dire, nous n’es
2614 r l’aider à résoudre les problèmes de la paix, de la liberté et du pain des hommes »ad. À vrai dire, nous n’espérions pas
2615 mots leur sens. Il n’y a que cela de sérieux dans la politique moderne. Et le Manifeste de Mounier peut y contribuer large
2616 que cela de sérieux dans la politique moderne. Et le Manifeste de Mounier peut y contribuer largement. Faut-il dire que to
2617 ribuer largement. Faut-il dire que tout usager de la culture, si apolitique qu’il se veuille, se trouve intéressé dans un
2618 i. 44. Je pense que Mounier ne se dissimule pas le caractère « théorique » des justifications qu’il va demander à certai
2619 ander à certaines traditions catholiques. Ainsi «  le riche, dit Bossuet, n’est toléré dans l’Église que pour servir le pau
2620 Ainsi « le riche, dit Bossuet, n’est toléré dans l’ Église que pour servir le pauvre ». Et selon saint Thomas, « n’importe
2621 ssuet, n’est toléré dans l’Église que pour servir le pauvre ». Et selon saint Thomas, « n’importe qui peut donner l’aumône
2622 t selon saint Thomas, « n’importe qui peut donner l’ aumône au nécessiteux avec l’argent d’un autre, s’il ne peut le faire
2623 orte qui peut donner l’aumône au nécessiteux avec l’ argent d’un autre, s’il ne peut le faire du sien ». (Car cet argent de
2624 écessiteux avec l’argent d’un autre, s’il ne peut le faire du sien ». (Car cet argent de l’autre devient dans ce cas bien
2625 ais songé à des théories de ce genre pour excuser la sécularisation des biens conventuels — biens dans lesquels Labriola p
2626 tuels — biens dans lesquels Labriola pouvait voir l’ origine de l’accumulation capitaliste. (Centres de commerce des couven
2627 dans lesquels Labriola pouvait voir l’origine de l’ accumulation capitaliste. (Centres de commerce des couvents anglais.)
2628 ue j’y suis, une autre remarque : Mounier exagère l’ importance économique de l’usure, suivant l’erreur fréquente des écriv
2629 rque : Mounier exagère l’importance économique de l’ usure, suivant l’erreur fréquente des écrivains catholiques. Marx a bi
2630 agère l’importance économique de l’usure, suivant l’ erreur fréquente des écrivains catholiques. Marx a bien montré que l’u
2631 des écrivains catholiques. Marx a bien montré que l’ usure n’est qu’un facteur secondaire, et très peu décisif, du capitali
2632 ndaire, et très peu décisif, du capitalisme. 45. Le Précis publié par L’Ordre nouveau dans son numéro d’octobre 1936 en c
2633 t Denis de, « [Compte rendu] Emmanuel Mounier, De la propriété capitaliste à la propriété humaine et Manifeste au service
2634 ] Emmanuel Mounier, De la propriété capitaliste à la propriété humaine et Manifeste au service du personnalisme  », La Nou
2635 aine et Manifeste au service du personnalisme  », La Nouvelle Revue française, Paris, février 1937, p. 294-296. ad. Ce te
2636 er est plus amplement commenté par Rougemont dans le numéro d’Esprit de février 1937 : « Paul Vaillant-Couturier : Au serv
2637 1937 : « Paul Vaillant-Couturier : Au service de l’ Esprit  ».
29 1937, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). N’habitez pas les villes (Extrait d’un Journal) (juillet 1937)
2638 N’habitez pas les villes (Extrait d’un Journal) (juillet 1937)ae Je revois, je revis
2639 ) (juillet 1937)ae Je revois, je revis si bien la traversée, cette étrange coupure qu’elle a faite dans ma vie, entre l
2640 trange coupure qu’elle a faite dans ma vie, entre les derniers jours passés à Paris non sans fièvre, et cette arrivée au so
2641 expliquer pourquoi nous venions dans cette île à la saison où il convient plutôt de la quitter quand on le peut. Si par c
2642 ns cette île à la saison où il convient plutôt de la quitter quand on le peut. Si par cette aube de novembre, sur les gran
2643 ison où il convient plutôt de la quitter quand on le peut. Si par cette aube de novembre, sur les grands quais de ce port
2644 nd on le peut. Si par cette aube de novembre, sur les grands quais de ce port atlantique, j’en étais à considérer d’un œil
2645 tique, j’en étais à considérer d’un œil brûlé par l’ insomnie les flots de l’océan maussade et les pauvres rivages du détro
2646 étais à considérer d’un œil brûlé par l’insomnie les flots de l’océan maussade et les pauvres rivages du détroit, c’est fo
2647 idérer d’un œil brûlé par l’insomnie les flots de l’ océan maussade et les pauvres rivages du détroit, c’est fort apparemme
2648 é par l’insomnie les flots de l’océan maussade et les pauvres rivages du détroit, c’est fort apparemment que je n’avais rie
2649 ait un abri quelque part, une maison vide pendant l’ hiver, une occasion de solitude désirée en secret dès longtemps. Je vo
2650 ecret dès longtemps. Je voudrais bien n’avoir pas l’ air trop romantique : mes dernières années de Paris m’avaient appris q
2651 s m’avaient appris que cette ville, au moins pour la jeunesse sans argent, est la ville des gérants ignobles et des concie
2652 ville, au moins pour la jeunesse sans argent, est la ville des gérants ignobles et des concierges, des lieux-sombres-et-po
2653 des lieux-sombres-et-populeux où il faut pénétrer l’ âme basse et la petite enveloppe à la main. Tant d’autres disent : all
2654 es-et-populeux où il faut pénétrer l’âme basse et la petite enveloppe à la main. Tant d’autres disent : allons-nous-en, et
2655 aut pénétrer l’âme basse et la petite enveloppe à la main. Tant d’autres disent : allons-nous-en, et restent faute d’imagi
2656 . Et pourtant il suffit de bien peu pour partir : la France a des milliers de maisons vides. Dites autour de vous que vous
2657 répondre.   Début de novembre Je commencerai par l’ inventaire de mon domaine. Je ne suis pas propriétaire, c’est entendu.
2658 uvre à ma façon, et peu capable de comprendre que l’ on veuille « avoir » autrement. Posséder, ce n’est pas avoir. Ce n’est
2659 éder, ce n’est pas avoir. Ce n’est pas même avoir l’ usage éventuel de quelque chose. Mais c’est user en fait de cette chos
2660 nette, ce jardin et cette île, seront miens selon la puissance avec laquelle j’en saurai faire usage, pour une fin qui leu
2661 n qui leur est étrangère, et qui me commandera de les quitter le jour qu’ils y mettront obstacle. (Pour les bourgeois, l’id
2662 st étrangère, et qui me commandera de les quitter le jour qu’ils y mettront obstacle. (Pour les bourgeois, l’idée de propr
2663 quitter le jour qu’ils y mettront obstacle. (Pour les bourgeois, l’idée de propriété est liée à l’idée d’héritage. Par quel
2664 qu’ils y mettront obstacle. (Pour les bourgeois, l’ idée de propriété est liée à l’idée d’héritage. Par quelle folie pense
2665 our les bourgeois, l’idée de propriété est liée à l’ idée d’héritage. Par quelle folie pensent-ils pouvoir « hériter » des
2666 es biens de leurs pères ? Il faut tout ignorer de la vraie possession ! Une chose n’est mienne que pour un temps, et si je
2667 impropre. Je n’hérite pas même de moi ! Ou alors, l’ héritage est cela dont on ne peut pas se délivrer à temps, et devrait
2668 e que coûte.) Mon domaine, c’est ce que j’ai sous la main. Voici d’abord la table que je me suis fabriquée : j’ai trouvé d
2669 ne, c’est ce que j’ai sous la main. Voici d’abord la table que je me suis fabriquée : j’ai trouvé dans le chai deux trétea
2670 table que je me suis fabriquée : j’ai trouvé dans le chai deux tréteaux et deux planches bien rabotées ; j’ai dressé cela
2671 planches bien rabotées ; j’ai dressé cela devant la fenêtre ouverte sur les verdures encore vivaces du jardin. Quand je l
2672  ; j’ai dressé cela devant la fenêtre ouverte sur les verdures encore vivaces du jardin. Quand je lève le nez, je vois la c
2673 verdures encore vivaces du jardin. Quand je lève le nez, je vois la cour de terre battue à l’ombre de ses deux tilleuls,
2674 vivaces du jardin. Quand je lève le nez, je vois la cour de terre battue à l’ombre de ses deux tilleuls, la margelle du p
2675 r de terre battue à l’ombre de ses deux tilleuls, la margelle du puits à gauche, où repose une vieille chatte, le chai à d
2676 du puits à gauche, où repose une vieille chatte, le chai à droite. Au-delà de la cour, les planches incultes du potager,
2677 une vieille chatte, le chai à droite. Au-delà de la cour, les planches incultes du potager, de chaque côté d’une allée bo
2678 lle chatte, le chai à droite. Au-delà de la cour, les planches incultes du potager, de chaque côté d’une allée bordée de ro
2679 er, de chaque côté d’une allée bordée de rosiers. L’ allée aboutit à une porte de bois à deux battants, à demi cachée par d
2680 sent de tous côtés ce jardin de curé, qui a juste la largeur de la maison. On ne voit rien que le ciel au-delà, un ciel la
2681 ôtés ce jardin de curé, qui a juste la largeur de la maison. On ne voit rien que le ciel au-delà, un ciel lavé, tissé d’oi
2682 uste la largeur de la maison. On ne voit rien que le ciel au-delà, un ciel lavé, tissé d’oiseaux, et parfois traversé par
2683 oiseaux, et parfois traversé par un nuage rapide. La maison compte deux chambres au rez-de-chaussée, séparées de la cuisin
2684 pte deux chambres au rez-de-chaussée, séparées de la cuisine par un couloir dallé. À l’étage, où l’on parvient par un peti
2685 e, séparées de la cuisine par un couloir dallé. À l’ étage, où l’on parvient par un petit escalier qui prend au fond de la
2686 de la cuisine par un couloir dallé. À l’étage, où l’ on parvient par un petit escalier qui prend au fond de la cuisine, deu
2687 rvient par un petit escalier qui prend au fond de la cuisine, deux autres chambres assez vastes et presque vides, auxquell
2688 hambres assez vastes et presque vides, auxquelles le toit sert de plafond. Très peu de meubles, comme j’aime. Des murs bla
2689 et gai, oui vraiment plus gai qu’ascétique. Dans le chai, à la porte un peu trop basse, règne une pénétrante odeur de lau
2690 i vraiment plus gai qu’ascétique. Dans le chai, à la porte un peu trop basse, règne une pénétrante odeur de laurier.   10
2691 ra rien d’intime. J’ai à gagner ma vie, non pas à la regarder. Toutefois, noter les faits précis qui me paraîtront frappan
2692 r ma vie, non pas à la regarder. Toutefois, noter les faits précis qui me paraîtront frappants ici ou là, c’est une sorte d
2693 pour plus tard — et c’est une bonne discipline de l’ esprit que la description objective. Me voici pris dans une expérience
2694 d — et c’est une bonne discipline de l’esprit que la description objective. Me voici pris dans une expérience forcée de vi
2695 s du désert. Curiosité, comme au début d’un film. La situation est d’ailleurs excellente pour l’instant. Il nous reste enc
2696 film. La situation est d’ailleurs excellente pour l’ instant. Il nous reste encore de quoi vivre pendant six semaines envir
2697 calculs sont justes : 900 francs, un bon toit, et le temps de voir venir.   Du 10 au 17 novembre Pour parer au plus pressé
2698 ires et journaux. Grande facilité de travail dans le silence à peu près absolu. Mais aussi j’ai l’impression nette d’utili
2699 ans le silence à peu près absolu. Mais aussi j’ai l’ impression nette d’utiliser la fin de l’élan intellectuel qui me soute
2700 lu. Mais aussi j’ai l’impression nette d’utiliser la fin de l’élan intellectuel qui me soutenait à Paris. Ces deux dernier
2701 ussi j’ai l’impression nette d’utiliser la fin de l’ élan intellectuel qui me soutenait à Paris. Ces deux derniers jours dé
2702 s jours déjà, j’arrivais mal à prendre au sérieux l’ actualité de ce que j’écrivais. Il faut avouer qu’il s’agissait, dans
2703 er qu’il s’agissait, dans ces articles, de ce que les gens croient être actuel, ou sont censés croire actuel, dans la litté
2704 t être actuel, ou sont censés croire actuel, dans la littérature ou les idées. C’est cela qui paie, et qui m’ennuie. Après
2705 sont censés croire actuel, dans la littérature ou les idées. C’est cela qui paie, et qui m’ennuie. Après quoi, je pourrai t
2706 ès quoi, je pourrai travailler. Aujourd’hui c’est le jour du repos. J’ai trouvé au fond d’une armoire, derrière une pile d
2707 , derrière une pile d’assiettes, deux volumes sur l’ histoire de l’île, ses coutumes, et son dialecte. L’un est l’œuvre d’u
2708 pile d’assiettes, deux volumes sur l’histoire de l’ île, ses coutumes, et son dialecte. L’un est l’œuvre d’un archiviste d
2709 de l’île, ses coutumes, et son dialecte. L’un est l’ œuvre d’un archiviste du continent. Il affecte une douce ironie sorbon
2710 ent. Il affecte une douce ironie sorbonnarde pour les petits événements qui se déroulèrent dans ce coin du pays, et surtout
2711 déroulèrent dans ce coin du pays, et surtout pour les légendes, locales, qui ont fortement exagéré et embelli tout cela… La
2712 , qui ont fortement exagéré et embelli tout cela… La science réclame de petits faits vrais. Elle tend aussi, il faut l’avo
2713 e de petits faits vrais. Elle tend aussi, il faut l’ avouer, à ne tenir pour vrai que ce qui est petit. Laissons donc de cô
2714 ons donc de côté ce petit travail qui a dû valoir les palmes à son auteur. Le second bouquin, c’est l’œuvre d’un vieux méde
2715 les palmes à son auteur. Le second bouquin, c’est l’ œuvre d’un vieux médecin tout plein de verve et de gaillarde érudition
2716 comme il s’en trouve un peu partout pour sauver «  l’ esprit » d’un pays. J’ai passé tout l’après-midi dessus. — Cela commen
2717 ur sauver « l’esprit » d’un pays. J’ai passé tout l’ après-midi dessus. — Cela commence par une chronique historique dont l
2718 — Cela commence par une chronique historique dont l’ essentiel est naturellement l’énumération des débarquements qui ont ho
2719 que historique dont l’essentiel est naturellement l’ énumération des débarquements qui ont honoré l’île, des premières galè
2720 nt l’énumération des débarquements qui ont honoré l’ île, des premières galères romaines jusqu’au bateau à vapeur de Sadi C
2721 ment au point où il toucha terre — en passant par les drakkars norvégiens, les flottes anglaises des guerres de religion et
2722 a terre — en passant par les drakkars norvégiens, les flottes anglaises des guerres de religion et les expéditions de saumo
2723 les flottes anglaises des guerres de religion et les expéditions de saumoniers. Une période héroïque sous Richelieu. Depui
2724 éroïque sous Richelieu. Depuis lors, semble-t-il, les villages se dépeuplent, les traditions se perdent et les champs tombe
2725 is lors, semble-t-il, les villages se dépeuplent, les traditions se perdent et les champs tombent en friche. La Révolution
2726 lages se dépeuplent, les traditions se perdent et les champs tombent en friche. La Révolution seule a ranimé l’ardeur des h
2727 tions se perdent et les champs tombent en friche. La Révolution seule a ranimé l’ardeur des habitants, pour la plupart jac
2728 s tombent en friche. La Révolution seule a ranimé l’ ardeur des habitants, pour la plupart jacobins. Plusieurs des discours
2729 eurs chefs ont été consignés par miracle : ils ne le cèdent en rien pour l’ampleur de leurs vues sur le monde, à l’éloquen
2730 ignés par miracle : ils ne le cèdent en rien pour l’ ampleur de leurs vues sur le monde, à l’éloquence des conventionnels…
2731 e cèdent en rien pour l’ampleur de leurs vues sur le monde, à l’éloquence des conventionnels… On trouve encore dans ce liv
2732 rien pour l’ampleur de leurs vues sur le monde, à l’ éloquence des conventionnels… On trouve encore dans ce livre des anecd
2733 laire. D’intéressantes précisions budgétaires sur les institutions de bienfaisance fondées par le docteur lui-même ou tout
2734 sur les institutions de bienfaisance fondées par le docteur lui-même ou tout au moins à son instigation. Enfin, et cela n
2735 ra des plus utiles, une minutieuse description de la faune et de la flore de l’île, du régime des marées, des courants et
2736 les, une minutieuse description de la faune et de la flore de l’île, du régime des marées, des courants et des vents. Merv
2737 utieuse description de la faune et de la flore de l’ île, du régime des marées, des courants et des vents. Merveilleux livr
2738 ts et des vents. Merveilleux livre en vérité ! Et la merveilleuse bibliothèque que celle qui rassemblerait tous les ouvrag
2739 use bibliothèque que celle qui rassemblerait tous les ouvrages analogues que, dans chaque sous-préfecture, un vieux docteur
2740 ce hétéroclite de praticien et de collectionneur. L’ esprit fort et l’esprit de clocher se font une guerre acharnée dans ce
2741 praticien et de collectionneur. L’esprit fort et l’ esprit de clocher se font une guerre acharnée dans ces pages et ils l’
2742 se font une guerre acharnée dans ces pages et ils l’ emportent tour à tour, jusqu’à la synthèse finale d’une envolée tout à
2743 ces pages et ils l’emportent tour à tour, jusqu’à la synthèse finale d’une envolée tout à la fois patriotique, républicain
2744 la fois patriotique, républicaine, et tolérante. La droite, la gauche, et une certaine espèce d’intelligence, ou d’ironie
2745 triotique, républicaine, et tolérante. La droite, la gauche, et une certaine espèce d’intelligence, ou d’ironie… Pour de t
2746 ible et nécessaire au cœur de chacun d’eux. Voilà l’ espèce d’hommes français que je voudrais croire la plus authentique.  
2747 l’espèce d’hommes français que je voudrais croire la plus authentique.   19 novembre Premiers contacts avec les gens. — L
2748 uthentique.   19 novembre Premiers contacts avec les gens. — Le village se termine au bout de notre jardin. Passée la port
2749   19 novembre Premiers contacts avec les gens. — Le village se termine au bout de notre jardin. Passée la porte, on enfil
2750 illage se termine au bout de notre jardin. Passée la porte, on enfile une petite rue toute blanche qui contourne la panse
2751 enfile une petite rue toute blanche qui contourne la panse de l’église et aboutit à la place principale. Au milieu de cett
2752 etite rue toute blanche qui contourne la panse de l’ église et aboutit à la place principale. Au milieu de cette place, qui
2753 e qui contourne la panse de l’église et aboutit à la place principale. Au milieu de cette place, qui est un vaste rectangl
2754 place, qui est un vaste rectangle de terre jaune, les habitants plantèrent à la Révolution un arbre de la Liberté. Cet orme
2755 tangle de terre jaune, les habitants plantèrent à la Révolution un arbre de la Liberté. Cet orme est devenu gigantesque, m
2756 habitants plantèrent à la Révolution un arbre de la Liberté. Cet orme est devenu gigantesque, majestueux, exemplaire dans
2757 dans sa symétrie architecturale. Il domine toutes les maisons et le clocher. Il est seul au-dessus du pays. Je voudrais le
2758 e architecturale. Il domine toutes les maisons et le clocher. Il est seul au-dessus du pays. Je voudrais le dessiner dans
2759 ocher. Il est seul au-dessus du pays. Je voudrais le dessiner dans le style romantique, avec tous ses détails et toute son
2760 l au-dessus du pays. Je voudrais le dessiner dans le style romantique, avec tous ses détails et toute son opulence, frisé
2761 e une perruque du grand siècle. De trois côtés de la place généralement vide, les maisons s’alignent en ordre modeste, pei
2762 le. De trois côtés de la place généralement vide, les maisons s’alignent en ordre modeste, peintes en tons clairs et simple
2763 en tons clairs et simples, blanc, jaune ou vert. La couleur des volets s’harmonise avec chaque façade d’une manière subti
2764 ne manière subtile et précise qui en dit long sur l’ âme de ce peuple discret. C’est l’impression que je veux retenir pour
2765 en dit long sur l’âme de ce peuple discret. C’est l’ impression que je veux retenir pour le moment des gens d’ici. Elle cor
2766 cret. C’est l’impression que je veux retenir pour le moment des gens d’ici. Elle corrige la mauvaise humeur que m’a donnée
2767 tenir pour le moment des gens d’ici. Elle corrige la mauvaise humeur que m’a donnée notre épicière. Car il faut bien, héla
2768 épicière. Car il faut bien, hélas, commencer par l’ épicière, quand on aborde le village où l’on va vivre. Celle-ci est én
2769 hélas, commencer par l’épicière, quand on aborde le village où l’on va vivre. Celle-ci est énorme et goutteuse. Elle a de
2770 cer par l’épicière, quand on aborde le village où l’ on va vivre. Celle-ci est énorme et goutteuse. Elle a des douleurs dan
2771 est énorme et goutteuse. Elle a des douleurs dans les jambes, et m’en parle d’abord, pour me mettre en confiance. Je sens b
2772 bien qu’elle veut me faire causer avant de fixer le prix du chou-fleur, des enveloppes jaunes, du peloton de ficelle et d
2773 lo de riz. Mes vêtements, citadins mais râpés, ne la renseignent pas clairement. Et que penser d’un « Parisien » qui manif
2774 nt. Et que penser d’un « Parisien » qui manifeste l’ intention de rester ici tout l’hiver ? C’est plutôt en été qu’on vient
2775 en » qui manifeste l’intention de rester ici tout l’ hiver ? C’est plutôt en été qu’on vient chez nous, me fait-elle prudem
2776 chez nous, me fait-elle prudemment observer. — Je le sais bien, madame Aujard, mais je ne viens pas pour mes vacances ! J’
2777 m’en demander davantage. Et moi, je recule devant l’ entreprise de lui expliquer la nature de mon travail. « Écrire », qu’e
2778 i, je recule devant l’entreprise de lui expliquer la nature de mon travail. « Écrire », qu’est-ce que cela signifie ? Écri
2779 rire », qu’est-ce que cela signifie ? Écrire pour les journaux, sans doute, mais il n’y en a pas tant à raconter sur ce pay
2780 s il n’y en a pas tant à raconter sur ce pays. Je l’ ai laissée en plein mystère. Elle a dû en parler longuement avec les c
2781 lein mystère. Elle a dû en parler longuement avec les clients qui attendaient en silence, le nez sur leurs sabots, que je s
2782 ment avec les clients qui attendaient en silence, le nez sur leurs sabots, que je sois sorti. La mère Aujard n’a pas toujo
2783 ence, le nez sur leurs sabots, que je sois sorti. La mère Aujard n’a pas toujours ce qu’on voudrait. En hiver elle fait pe
2784 le fait peu de réserves de produits alimentaires, les habitants n’achetant guère autre chose que de la mercerie, des lainag
2785 les habitants n’achetant guère autre chose que de la mercerie, des lainages et des épices. Alors il faut aller de l’autre
2786 es épices. Alors il faut aller de l’autre côté de la place, chez Mélie. Ce n’est pas simple d’éviter d’être vu par l’une,
2787 , entrant chez l’autre. Mais c’est prudent, on me l’ a dit. Car elles ne baisseront pas leurs prix pour garder un client, e
2788 eront pas leurs prix pour garder un client, elles les augmenteront bien plutôt pour le punir d’avoir été en face. Sans comp
2789 n client, elles les augmenteront bien plutôt pour le punir d’avoir été en face. Sans compter qu’on n’aime pas être accueil
2790 Sans compter qu’on n’aime pas être accueilli par la réprobation sournoise d’une épicière.   20 novembre Le bureau de post
2791 probation sournoise d’une épicière.   20 novembre Le bureau de poste. Trois mètres sur trois, et une grille épaisse au mil
2792 trois, et une grille épaisse au milieu. Derrière la grille, le long visage de Pédenaud. J’ai l’impression que je lui gâte
2793 une grille épaisse au milieu. Derrière la grille, le long visage de Pédenaud. J’ai l’impression que je lui gâte la vie. Tr
2794 rière la grille, le long visage de Pédenaud. J’ai l’ impression que je lui gâte la vie. Trois fois la semaine au moins, il
2795 ge de Pédenaud. J’ai l’impression que je lui gâte la vie. Trois fois la semaine au moins, il me voit venir avec une grande
2796 i l’impression que je lui gâte la vie. Trois fois la semaine au moins, il me voit venir avec une grande enveloppe contenan
2797  ? — Non. Est-ce un imprimé ? — Non. C’est tapé à la machine. — Est-ce qu’il n’y a rien d’écrit à la main ? Si, il y a des
2798 à la machine. — Est-ce qu’il n’y a rien d’écrit à la main ? Si, il y a des corrections écrites à la main. » Pédenaud relit
2799 à la main ? Si, il y a des corrections écrites à la main. » Pédenaud relit pour la énième fois son tarif, fait son calcul
2800 rections écrites à la main. » Pédenaud relit pour la énième fois son tarif, fait son calcul sur un bout de papier, et conc
2801 t pas aller. Il faut tout recommencer. Finalement l’ on décide d’envoyer le manuscrit comme échantillon sans valeur. Port :
2802 out recommencer. Finalement l’on décide d’envoyer le manuscrit comme échantillon sans valeur. Port : quatre francs soixant
2803 aleur. Port : quatre francs soixante-quinze. Dans l’ après-midi, tandis que j’écris à ma table, j’entends grincer la porte
2804 tandis que j’écris à ma table, j’entends grincer la porte du jardin. C’est la femme de Pédenaud qui brandit un papier. J’
2805 able, j’entends grincer la porte du jardin. C’est la femme de Pédenaud qui brandit un papier. J’accours : elle me tend une
2806 tification officielle d’avoir à verser sans délai la somme de francs 67,25, restant due sur l’envoi de ce matin. En effet,
2807 s délai la somme de francs 67,25, restant due sur l’ envoi de ce matin. En effet, Pédenaud qui a voulu en avoir le cœur net
2808 ce matin. En effet, Pédenaud qui a voulu en avoir le cœur net, a pris des instructions par téléphone au chef-lieu. Son sup
2809 rcé « d’y aller de sa poche ». Me voilà courant à l’ autobus pour arrêter le courrier. L’autobus vient de partir. Il faut t
2810 oche ». Me voilà courant à l’autobus pour arrêter le courrier. L’autobus vient de partir. Il faut téléphoner au chef-lieu,
2811 ilà courant à l’autobus pour arrêter le courrier. L’ autobus vient de partir. Il faut téléphoner au chef-lieu, faire rouvri
2812 téléphoner au chef-lieu, faire rouvrir au passage le sac postal, discuter passionnément, trouver une formule d’apaisement
2813 rouver une formule d’apaisement qui ménage toutes les susceptibilités, et finalement ne rien payer de plus. Je cause un peu
2814 des lessives. En été ils pêchent des palourdes et les vendent aux baigneurs. Bien entendu, je n’arrive pas à savoir combien
2815  ».   1er décembre Dépenses du premier mois dans l’ île : ménage, manger et boire, 480 francs ; (en général tout est plus
2816 liées dans une revue. Reste : environ 200 francs. Le sentiment de dépendre entièrement de bonnes ou de mauvaises volontés
2817 dans nos pays », dit-on, et je crois bien que je l’ ai dit quelquefois. Mais il y a aussi des exceptions, des cas sans pré
2818 secours. Pourtant je suis bien tranquille, je ne l’ ai même jamais été aussi absolument. C’est peut-être à cause du bonheu
2819 heur de notre vie. Trouver son rythme naturel, et les moyens de s’y réduire, voilà le but de toute morale car le « bien pen
2820 thme naturel, et les moyens de s’y réduire, voilà le but de toute morale car le « bien penser » en dépend.   2 décembre Q
2821 de s’y réduire, voilà le but de toute morale car le « bien penser » en dépend.   2 décembre Questions. — Est-ce donc si
2822 si « naturel » de vivre sur une île ? Est-ce que l’ insularité (géographique et morale) n’est pas une espèce de vice ? Est
2823 pas une espèce de vice ? Est-ce que ce n’est pas la racine de tout l’idéalisme dont les modernes doivent se guérir, s’ils
2824 vice ? Est-ce que ce n’est pas la racine de tout l’ idéalisme dont les modernes doivent se guérir, s’ils veulent enfin dev
2825 e ce n’est pas la racine de tout l’idéalisme dont les modernes doivent se guérir, s’ils veulent enfin devenir « actuels » ?
2826 venir « actuels » ? Est-ce que ce n’est pas aussi la racine de cet esprit d’abstraction égoïste dont nous souffrons tous ?
2827 ction égoïste dont nous souffrons tous ? Pourquoi les hommes vivent-ils sur des îles ? Quand nous sortons pour une promenad
2828 ons pour une promenade et que nous mesurons toute l’ étroitesse de notre domaine, la mer partout à dix minutes et ces maréc
2829 ous mesurons toute l’étroitesse de notre domaine, la mer partout à dix minutes et ces marécages hostiles, nous souffrons d
2830 sulaire est une liberté négative. Elle nous met à l’ abri du monde et nous ramène tous physiquement à nos limites. Mais l’h
2831 nous ramène tous physiquement à nos limites. Mais l’ homme est ainsi fait qu’il désire sans cesse se risquer au-delà de ce
2832 de ce qu’il peut, et franchir au moins en pensée les bornes de ses possessions pour aller se mêler aux « autres », à l’étr
2833 possessions pour aller se mêler aux « autres », à l’ étranger… Tout ici me ramène à moi seul. J’ai beau faire, je ne parvie
2834 ai beau faire, je ne parviens pas à partager avec les hommes de ce village ce qui est essentiel et solide dans ma vie. Le s
2835 llage ce qui est essentiel et solide dans ma vie. Le simple fait que je ne puis pas les persuader que je travaille vraimen
2836 de dans ma vie. Le simple fait que je ne puis pas les persuader que je travaille vraiment en écrivant, cela met entre nous
2837 ont pu entrevoir de mon activité, une seule chose les a frappés : ma machine à écrire. La mère Renaud, qui est une vieille
2838 seule chose les a frappés : ma machine à écrire. La mère Renaud, qui est une vieille amie des propriétaires de notre mais
2839 mbrouillées si son fils pourrait venir aussi voir la machine. Je crois bien que sans cette machine, je n’arriverais jamais
2840 fais réellement quelque chose. Quand je vais chez les Renaud, c’est tout le contraire. Ils m’expliquent en détail ce qu’ils
2841 chose. Quand je vais chez les Renaud, c’est tout le contraire. Ils m’expliquent en détail ce qu’ils font, et je puis le c
2842 m’expliquent en détail ce qu’ils font, et je puis le comprendre et l’admirer. Ils ont ainsi sur moi une sorte de supériori
2843 étail ce qu’ils font, et je puis le comprendre et l’ admirer. Ils ont ainsi sur moi une sorte de supériorité concrète dont
2844 hie humaine, d’échange direct sur pied d’égalité. Le père Renaud est un ancien marin, barbu, jovial, déjà touché par le gâ
2845 t un ancien marin, barbu, jovial, déjà touché par le gâtisme, mais agréablement si je puis dire. Cela met un peu de fantai
2846 n filet de quatre-vingts mètres, bel ouvrage dont le détail m’intéresse. Le fils compose des cartes postales illustrées av
2847 s mètres, bel ouvrage dont le détail m’intéresse. Le fils compose des cartes postales illustrées avec des bouts de timbres
2848 ourde table au centre, une autre plus petite vers la fenêtre, sur laquelle travaille le père Renaud. Le sol est de terre b
2849 us petite vers la fenêtre, sur laquelle travaille le père Renaud. Le sol est de terre battue recouverte d’une fine couche
2850 a fenêtre, sur laquelle travaille le père Renaud. Le sol est de terre battue recouverte d’une fine couche de sable. Sur le
2851 battue recouverte d’une fine couche de sable. Sur les murs blanchis, quelques petites gravures anciennes, encadrées de noir
2852 ureuse qui règnent ici avec tant d’aisance, ai-je le droit de les considérer comme les symboles visibles de l’univers inté
2853 ègnent ici avec tant d’aisance, ai-je le droit de les considérer comme les symboles visibles de l’univers intérieur de ces
2854 d’aisance, ai-je le droit de les considérer comme les symboles visibles de l’univers intérieur de ces gens ?   5 décembre I
2855 de les considérer comme les symboles visibles de l’ univers intérieur de ces gens ?   5 décembre Ils me parlent de ce qui
2856 ces gens ?   5 décembre Ils me parlent de ce qui les intéresse, et je m’y intéresse avec eux. Mais je ne puis ou ne sais p
2857 e tout le monde ; de leur travail aux champs ou à la côte, et je les écoute avec toute l’attention d’un apprenti ; de leur
2858  ; de leur travail aux champs ou à la côte, et je les écoute avec toute l’attention d’un apprenti ; de leurs souvenirs, par
2859 champs ou à la côte, et je les écoute avec toute l’ attention d’un apprenti ; de leurs souvenirs, parfois touchants, parfo
2860 nd nous sommes en confiance, si j’essaie d’amener l’ entretien sur leurs lectures, les journaux qu’ils achètent, la politiq
2861 j’essaie d’amener l’entretien sur leurs lectures, les journaux qu’ils achètent, la politique, ou la religion qu’ils suivent
2862 sur leurs lectures, les journaux qu’ils achètent, la politique, ou la religion qu’ils suivent, ils se taisent bien vite, o
2863 s, les journaux qu’ils achètent, la politique, ou la religion qu’ils suivent, ils se taisent bien vite, ou se remettent à
2864 que je puisse avoir une opinion plus avertie que la leur sur les sujets que je viens de nommer. Ils ne se doutent pas que
2865 se avoir une opinion plus avertie que la leur sur les sujets que je viens de nommer. Ils ne se doutent pas que c’est de cel
2866 écrivain peut faire sa « spécialité ». Et rien ne les étonnerait davantage que d’apprendre un beau jour que je m’intéresse
2867 on, à leurs problèmes, — et que j’en fais parfois la matière même de mon travail. J’ai quelque peine à exprimer ceci, — qu
2868 e absurdité, et si énorme que personne ne pense à la dire… Peut-être, dans un siècle ou deux, se demandera-t-on comment no
2869 e ma gêne qui est absurde ? Essayer de confronter la culture et la réalité, c’est peut-être prouver qu’on ignore l’une et
2870 est absurde ? Essayer de confronter la culture et la réalité, c’est peut-être prouver qu’on ignore l’une et l’autre ? Ou t
2871 tort, c’est-à-dire à donner raison au bon sens de l’ époque présente. Il a trop souvent fait ses preuves.   15 décembre Déj
2872 nt fait ses preuves.   15 décembre Déjeuné, après le culte, chez M. Palut. Il n’est pas pasteur en titre, mais seulement «
2873 vangéliste » au service d’une œuvre missionnaire. Les évangélistes étant moins bien payés que les pasteurs, dont le traitem
2874 aire. Les évangélistes étant moins bien payés que les pasteurs, dont le traitement de base est de 10 000 francs, Mme Palut
2875 tes étant moins bien payés que les pasteurs, dont le traitement de base est de 10 000 francs, Mme Palut est obligée de fai
2876 ces. Ils ont déjà deux garçons, et ils ont trouvé le moyen de recueillir encore une vieille Bretonne sans ressources, qui
2877 eille Bretonne sans ressources, qui aide un peu à la cuisine et casse beaucoup d’assiettes. Dans cette île, qui fut presqu
2878 ens disséminés. Il en vient une dizaine au culte. Les autres habitent trop loin, ou sont indifférents. Il me raconte les ef
2879 nt trop loin, ou sont indifférents. Il me raconte les efforts qu’il a faits, pendant six ans, pour entrer en contact avec l
2880 its, pendant six ans, pour entrer en contact avec la population. Conférences, visites, colportage de bibles de porte en po
2881 e peut pas dire que tout ce travail épuisant dans l’ inertie soit resté absolument vain : il y a eu quelques conversions. M
2882 ions. Mais c’est tout juste si elles ont compensé les abandons ou les départs. (Les protestants qui sont souvent l’élément
2883 tout juste si elles ont compensé les abandons ou les départs. (Les protestants qui sont souvent l’élément le plus actif de
2884 elles ont compensé les abandons ou les départs. ( Les protestants qui sont souvent l’élément le plus actif de la population
2885 ou les départs. (Les protestants qui sont souvent l’ élément le plus actif de la population s’expatrient volontiers, ou von
2886 arts. (Les protestants qui sont souvent l’élément le plus actif de la population s’expatrient volontiers, ou vont habiter
2887 tants qui sont souvent l’élément le plus actif de la population s’expatrient volontiers, ou vont habiter les villes.) En é
2888 pulation s’expatrient volontiers, ou vont habiter les villes.) En été, la petite ville se remplit de baigneurs et l’auditoi
2889 volontiers, ou vont habiter les villes.) En été, la petite ville se remplit de baigneurs et l’auditoire du temple est déc
2890 n été, la petite ville se remplit de baigneurs et l’ auditoire du temple est décuplé : cela suffit pour qu’on maintienne le
2891 e est décuplé : cela suffit pour qu’on maintienne le poste… J’essaie de me représenter l’existence quotidienne de cet homm
2892 n maintienne le poste… J’essaie de me représenter l’ existence quotidienne de cet homme aux prises avec la solitude la plus
2893 xistence quotidienne de cet homme aux prises avec la solitude la plus désespérante, celle que lui crée l’indifférence tran
2894 tidienne de cet homme aux prises avec la solitude la plus désespérante, celle que lui crée l’indifférence tranquille et ob
2895 solitude la plus désespérante, celle que lui crée l’ indifférence tranquille et obstinée de ceux auprès desquels il devrait
2896 vrait exercer sa mission. Ils ne veulent pas même l’ écouter, et toute sa raison d’être est cependant de leur parler. Il n’
2897 r. Il n’a rien d’autre à faire, et il ne peut pas le faire. Et de plus, il est seul à croire qu’il doit le faire. Il m’a d
2898 aire. Et de plus, il est seul à croire qu’il doit le faire. Il m’a décrit son existence sans amertume. Il ne se plaint que
2899 humainement absurde. Non qu’il n’en distingue pas l’ absurdité, mais simplement il sait pourquoi il la subit. Fils d’un pet
2900 l’absurdité, mais simplement il sait pourquoi il la subit. Fils d’un petit hôtelier breton d’origine catholique, il s’est
2901 breton d’origine catholique, il s’est converti à l’ âge de vingt ans et depuis lors il n’a jamais songé qu’il pût faire au
2902 ais songé qu’il pût faire autre chose qu’annoncer l’ Évangile. Qu’importe qu’il n’y ait « à vues humaines » aucun espoir de
2903 humaines » aucun espoir de se faire entendre, si le seul espoir vrai réside dans la foi, qui ordonne de parler quand même
2904 aire entendre, si le seul espoir vrai réside dans la foi, qui ordonne de parler quand même ?   Janvier (à T…) Ce séjour, p
2905 êtais d’écrire, par fatigue, je ne me sentais pas la bonne conscience de l’employé qui a fait sa journée et qui pense main
2906 igue, je ne me sentais pas la bonne conscience de l’ employé qui a fait sa journée et qui pense maintenant à autre chose. U
2907 s préoccupations. Ce n’était pas cette vacance où les idées et sentiments changent de climat. Le loisir n’est pas simplemen
2908 ce où les idées et sentiments changent de climat. Le loisir n’est pas simplement la cessation du travail pour un repos néc
2909 hangent de climat. Le loisir n’est pas simplement la cessation du travail pour un repos nécessaire. Il se définit psycholo
2910 nt non par rapport au travail, mais par rapport à la sécurité matérielle qu’assurent soit le travail, soit la fortune, soi
2911 rapport à la sécurité matérielle qu’assurent soit le travail, soit la fortune, soit dans mon cas particulier, l’amitié. Un
2912 rité matérielle qu’assurent soit le travail, soit la fortune, soit dans mon cas particulier, l’amitié. Un chômeur intellec
2913 , soit la fortune, soit dans mon cas particulier, l’ amitié. Un chômeur intellectuel peut encore travailler — et c’est cela
2914 ectuel peut encore travailler — et c’est cela qui le différencie profondément d’un chômeur industriel, par exemple — mais
2915 ît plus de vrais loisirs.   23 janvier (écrit sur la dune) Il ne faut pas se mettre en colère au mois de janvier. C’est un
2916 une saison abstraite, on n’atteint presque rien. Le soleil froid à travers une brume lointaine agrandit les regards sans
2917 leil froid à travers une brume lointaine agrandit les regards sans nourrir la vision. Pas de mouches dans la lumière au ras
2918 brume lointaine agrandit les regards sans nourrir la vision. Pas de mouches dans la lumière au ras des landes. Lucidité st
2919 gards sans nourrir la vision. Pas de mouches dans la lumière au ras des landes. Lucidité stérile du bel hiver ! La colère
2920 u ras des landes. Lucidité stérile du bel hiver ! La colère y jaillit sans rencontrer personne. J’ai à craindre qu’elle ne
2921 sauver de cette tentation du désespoir, et c’est l’ humilité. Si je ne suis pas important, le monde s’agrandit. Je puis en
2922 et c’est l’humilité. Si je ne suis pas important, le monde s’agrandit. Je puis encore aimer des paysages qui ne sont pas m
2923 pas mon état d’âme, mais une parole à déchiffrer. L’ humilité m’apporte des nouvelles du monde. Ainsi je me renouvelle lent
2924 renouvelle lentement. C’est un moyen de sortir de l’ impasse : non pas en changeant ses données, mais soi-même.   28 févrie
2925 travaillent sur leur parcelle, ce que signifient les méthodes productivistes et la démesure collective d’un plan quinquenn
2926 ce que signifient les méthodes productivistes et la démesure collective d’un plan quinquennal. Le silence de la lande et
2927 et la démesure collective d’un plan quinquennal. Le silence de la lande et des marais, la rumeur de la côte, les petits c
2928 e collective d’un plan quinquennal. Le silence de la lande et des marais, la rumeur de la côte, les petits chocs irrégulie
2929 uinquennal. Le silence de la lande et des marais, la rumeur de la côte, les petits chocs irréguliers des pioches et des bo
2930 e silence de la lande et des marais, la rumeur de la côte, les petits chocs irréguliers des pioches et des bouelles, tout
2931 de la lande et des marais, la rumeur de la côte, les petits chocs irréguliers des pioches et des bouelles, tout ce qu’il y
2932 à grand fracas de moteurs et de règlements de fer les rythmes de cette île et de ces vies ?   3 avril La solitude est une j
2933 s rythmes de cette île et de ces vies ?   3 avril La solitude est une jeunesse. Elle nous apprend cette chose nouvelle que
2934 lle au goût du souvenir, que trop de téléphones à la ville, d’heures de bureau, d’impitoyables rendez-vous, d’indifférence
2935 s ; cette chose toujours neuve et nouvelle qu’est l’ attente d’on ne sait quoi. Condition véritable de l’homme : il est cel
2936 attente d’on ne sait quoi. Condition véritable de l’ homme : il est celui qui agit dans l’attente. Il attend des révélation
2937 véritable de l’homme : il est celui qui agit dans l’ attente. Il attend des révélations. C’est évident ! Ses actions les pl
2938 tend des révélations. C’est évident ! Ses actions les plus pures sont des appels et des incantations : leur sens est toujou
2939 es, invites angoissées ou séductions tentées dans l’ inconnu. Autrement, comment supporter leur petitesse ? Si je gratte pe
2940 ison borgne ; c’est aussi pour gagner ma mort, je le sais bien. Toute notre attente imagine l’avenir — et l’imagine nécess
2941 ort, je le sais bien. Toute notre attente imagine l’ avenir — et l’imagine nécessairement sur fond de mort. (La jeunesse qu
2942 s bien. Toute notre attente imagine l’avenir — et l’ imagine nécessairement sur fond de mort. (La jeunesse qui est l’âge de
2943 — et l’imagine nécessairement sur fond de mort. ( La jeunesse qui est l’âge de l’attente la plus ardente de la vie est aus
2944 ssairement sur fond de mort. (La jeunesse qui est l’ âge de l’attente la plus ardente de la vie est aussi l’âge le plus fam
2945 t sur fond de mort. (La jeunesse qui est l’âge de l’ attente la plus ardente de la vie est aussi l’âge le plus familier ave
2946 de mort. (La jeunesse qui est l’âge de l’attente la plus ardente de la vie est aussi l’âge le plus familier avec la mort.
2947 sse qui est l’âge de l’attente la plus ardente de la vie est aussi l’âge le plus familier avec la mort.) Ainsi nos gestes
2948 de l’attente la plus ardente de la vie est aussi l’ âge le plus familier avec la mort.) Ainsi nos gestes se prolongent, et
2949 attente la plus ardente de la vie est aussi l’âge le plus familier avec la mort.) Ainsi nos gestes se prolongent, et leur
2950 e de la vie est aussi l’âge le plus familier avec la mort.) Ainsi nos gestes se prolongent, et leur grandeur est dans l’at
2951 s gestes se prolongent, et leur grandeur est dans l’ attente qu’ils trahissent. Si le travail moderne est dégradant, c’est
2952 grandeur est dans l’attente qu’ils trahissent. Si le travail moderne est dégradant, c’est qu’on a limité ses gestes à l’im
2953 est dégradant, c’est qu’on a limité ses gestes à l’ immédiat, et borné son attente au salaire. Or toute vie est absurde et
2954 t violemment inacceptable, qui ne s’ouvre pas sur l’ attente d’une révélation à venir, et d’une « consolation » finale. (Co
2955 nsolation » finale. (Consolation signifiant selon l’ étymologie : unification, harmonisation, c’est-à-dire résolution des d
2956 tion c’est de gagner peu. (J’ai écrit cela, je me le rappelle, peu de temps après notre arrivée, au haut d’une page que je
2957 ’une page que je retrouve dans une pile de notes. La page est restée blanche. Et toute réflexion faite, c’est bien ainsi,
2958 complet.)   10 avril Je n’ai pas encore parlé de la poule, la triste et digne poule noire qui habite seule au bout du jar
2959   10 avril Je n’ai pas encore parlé de la poule, la triste et digne poule noire qui habite seule au bout du jardin. Elle
2960 puis notre arrivée, héritée du propriétaire. Nous l’ avons nourrie sans espoir pendant des mois, la croyant trop vieille po
2961 ous l’avons nourrie sans espoir pendant des mois, la croyant trop vieille pour être mangée, sinon pour faire encore quelqu
2962 e très gros œufs, me semble-t-il. (Où va se loger la vanité !)   14 avril La culture et les gens. Souvent, quand je me ti
2963 le-t-il. (Où va se loger la vanité !)   14 avril La culture et les gens. Souvent, quand je me tire du livre que j’écris —
2964 a se loger la vanité !)   14 avril La culture et les gens. Souvent, quand je me tire du livre que j’écris — sur la crise d
2965 vent, quand je me tire du livre que j’écris — sur la crise de la cultureaf — pour causer avec la laitière ou la factrice,
2966 je me tire du livre que j’écris — sur la crise de la cultureaf — pour causer avec la laitière ou la factrice, ou le postie
2967 — sur la crise de la cultureaf — pour causer avec la laitière ou la factrice, ou le postier, ou un Renaud, j’éprouve une b
2968 de la cultureaf — pour causer avec la laitière ou la factrice, ou le postier, ou un Renaud, j’éprouve une brève angoisse :
2969 — pour causer avec la laitière ou la factrice, ou le postier, ou un Renaud, j’éprouve une brève angoisse : quel rapport en
2970 : quel rapport entre cet homme à qui je parle, et le mot « homme » dans ce que j’écris ? Non seulement ceux d’ici ne compr
2971 e que je fais, et ce serait assez normal : il y a l’ obstacle du vocabulaire, d’une certaine technique des idées, etc., mai
2972 que terme. Ils n’y reconnaîtraient rien de ce qui les « soucie », amuse, occupe, ou intéresse. Vraiment non, ce chapitre su
2973 pe, ou intéresse. Vraiment non, ce chapitre sur «  l’ origine rationaliste de la scission entre la culture et le peuple », c
2974 non, ce chapitre sur « l’origine rationaliste de la scission entre la culture et le peuple », cela ne peut accrocher à ri
2975 sur « l’origine rationaliste de la scission entre la culture et le peuple », cela ne peut accrocher à rien dans cet être q
2976 e rationaliste de la scission entre la culture et le peuple », cela ne peut accrocher à rien dans cet être que j’ai devant
2977 e et sa casquette, et qui continue à me parler de la pêche, de son filet qui a été emporté hier, etc. Quel sens concret ce
2978 Quel sens concret cela peut-il avoir de parler de la « scission » entre cet homme et la culture ? N’y a-t-il pas là deux m
2979 r de parler de la « scission » entre cet homme et la culture ? N’y a-t-il pas là deux mondes qui n’ont jamais eu de contac
2980 ne mesure ? Je reviens à mes pages, bien décidé à les refaire de fond en comble, à simplifier, à concrétiser, à essayer de
2981 comble, à simplifier, à concrétiser, à essayer de les rendre telles qu’elles puissent, je ne dis pas être comprises, mais a
2982 sée, confrontées sans un ridicule angoissant avec la réalité des choses et des êtres dont elles utilisent le concept… Eh b
2983 lité des choses et des êtres dont elles utilisent le concept… Eh bien, voilà le résultat : après une demi-heure de relectu
2984 s dont elles utilisent le concept… Eh bien, voilà le résultat : après une demi-heure de relecture attentive, j’ai rajouté
2985 gues, barré cinq lignes et mis une note au bas de la page. Il me semble vraiment que cela se tient. Il me semble aussi que
2986 Je me dis que cette impression et celle de tout à l’ heure s’excluent en fait. Mais je n’arrive plus du tout à retrouver ce
2987 t d’absurdité que provoquait en moi, précisément, la présence physique d’un homme, confrontée avec les idées que j’avais e
2988 la présence physique d’un homme, confrontée avec les idées que j’avais en tête. Il y a probablement une fatalité interne d
2989 ime elle-même. Elle a ses lois, qui se suffisent. Les concepts alors se combinent selon des affinités ou répulsions que les
2990 e combinent selon des affinités ou répulsions que les faits ou les êtres qu’ils sont censés représenter n’ont pas dans la r
2991 elon des affinités ou répulsions que les faits ou les êtres qu’ils sont censés représenter n’ont pas dans la réalité. À la
2992 res qu’ils sont censés représenter n’ont pas dans la réalité. À la fin on obtient l’absurdité que j’éprouvais, mais aussi
2993 t censés représenter n’ont pas dans la réalité. À la fin on obtient l’absurdité que j’éprouvais, mais aussi l’impossibilit
2994 er n’ont pas dans la réalité. À la fin on obtient l’ absurdité que j’éprouvais, mais aussi l’impossibilité de la sentir ave
2995 n obtient l’absurdité que j’éprouvais, mais aussi l’ impossibilité de la sentir avec quelque vivacité, sauf par éclairs, da
2996 té que j’éprouvais, mais aussi l’impossibilité de la sentir avec quelque vivacité, sauf par éclairs, dans la rue, par exem
2997 tir avec quelque vivacité, sauf par éclairs, dans la rue, par exemple. Déjà je ne puis en retrouver le souvenir autrement
2998 la rue, par exemple. Déjà je ne puis en retrouver le souvenir autrement que par un effort de réflexion qui me laisse assez
2999 un effort de réflexion qui me laisse assez froid. La culture m’a repris. Je suis dans le faux et tout y est correct : je d
3000 assez froid. La culture m’a repris. Je suis dans le faux et tout y est correct : je dis que la thèse que je défends est v
3001 s dans le faux et tout y est correct : je dis que la thèse que je défends est vraie !… Il y aurait de quoi s’arrêter de pe
3002 ie !… Il y aurait de quoi s’arrêter de penser, si l’ on pouvait. Le principe de toute culture véritable n’est-il pas cette
3003 ait de quoi s’arrêter de penser, si l’on pouvait. Le principe de toute culture véritable n’est-il pas cette commune mesure
3004 tant effort entre nos belles séries de pensées et la diversité désordonnée des êtres et des choses, où nous vivons ? « Je
3005 ticipant de ce monde « mal compassé ».   16 avril La poule noire couve depuis hier ses treize œufs. J’ai semé des salades,
3006 une des graines de haricots dans un sillon tiré à la ficelle. Plaisir d’avoir les doigts et les ongles terreux ; toujours
3007 dans un sillon tiré à la ficelle. Plaisir d’avoir les doigts et les ongles terreux ; toujours ce goût d’enfance… Je ne me s
3008 tiré à la ficelle. Plaisir d’avoir les doigts et les ongles terreux ; toujours ce goût d’enfance… Je ne me sens plus « élo
3009 il, le long des murs du chai. Nous déjeunons sous les tilleuls. Il y a un grand bonheur dans la lumière qui baigne le jardi
3010 s sous les tilleuls. Il y a un grand bonheur dans la lumière qui baigne le jardin fleuri, éclate sur la façade de la maiso
3011 l y a un grand bonheur dans la lumière qui baigne le jardin fleuri, éclate sur la façade de la maison, plus claire que le
3012 a lumière qui baigne le jardin fleuri, éclate sur la façade de la maison, plus claire que le ciel vide, et illumine la gou
3013 baigne le jardin fleuri, éclate sur la façade de la maison, plus claire que le ciel vide, et illumine la goutte rose d’un
3014 clate sur la façade de la maison, plus claire que le ciel vide, et illumine la goutte rose d’une fourmi ailée qui danse au
3015 maison, plus claire que le ciel vide, et illumine la goutte rose d’une fourmi ailée qui danse au-dessus de mon verre de vi
3016 danse au-dessus de mon verre de vin blanc.   Mai La mer est d’un vert bleu crayeux, très froide encore. On ne peut guère
3017 mper quelques instants, et se coucher ensuite sur la dune, au vent doux. Villages blancs au-dessus des lagunes. Une odeur
3018 amps et des vignes sablonneuses.   21 mai Pendant les jours de grande marée, entre deux flux, d’immenses plateaux rocheux,
3019 pourpres, jaunes et noirs se révèlent au-delà de la plage, nouveau pays tout grouillant de merveilles, d’eaux ruisselante
3020 lumière de midi. Armés de treilles à long manche, les jambes nues, nous courons sur les roches tapissées d’algues sombres d
3021 à long manche, les jambes nues, nous courons sur les roches tapissées d’algues sombres dont le crépitement sous nos pas fa
3022 ns sur les roches tapissées d’algues sombres dont le crépitement sous nos pas fait fuir et choir de tous côtés de petits c
3023 étueuses parcourent ce territoire compliqué. Nous les suivons, dans l’eau jusqu’aux genoux, les jambes caressées de courant
3024 t ce territoire compliqué. Nous les suivons, dans l’ eau jusqu’aux genoux, les jambes caressées de courants froids, de cour
3025 é. Nous les suivons, dans l’eau jusqu’aux genoux, les jambes caressées de courants froids, de courants tièdes, de poissons,
3026 s, de crabiots et de laines. À quelques mètres de la mer qui affleure le tranchant du plateau, la rivière s’élargit en bas
3027 laines. À quelques mètres de la mer qui affleure le tranchant du plateau, la rivière s’élargit en bassins clairs aux prof
3028 s de la mer qui affleure le tranchant du plateau, la rivière s’élargit en bassins clairs aux profondeurs rougeâtres et dou
3029 doucement mouvantes. C’est là que nous commençons la pêche. Il faut se planter au centre du bassin, et fouiller et racler
3030 r au centre du bassin, et fouiller et racler sous les bords, dans le sable et les paquets d’algues, avec le cercle rigide d
3031 assin, et fouiller et racler sous les bords, dans le sable et les paquets d’algues, avec le cercle rigide du filet, puis r
3032 uiller et racler sous les bords, dans le sable et les paquets d’algues, avec le cercle rigide du filet, puis retirer viveme
3033 ords, dans le sable et les paquets d’algues, avec le cercle rigide du filet, puis retirer vivement la treille et l’égoutte
3034 le cercle rigide du filet, puis retirer vivement la treille et l’égoutter. On ramène un paquet de varech, un ou deux crab
3035 ide du filet, puis retirer vivement la treille et l’ égoutter. On ramène un paquet de varech, un ou deux crabes tout terreu
3036 rabes tout terreux, et parfois en se penchant sur la treille, on voit bondir d’un bord à l’autre quelque chose de transpar
3037 er comme une mouche et qui vous saute encore dans la main et vous gratte la paume de ses antennes, de ses écailles et de s
3038 qui vous saute encore dans la main et vous gratte la paume de ses antennes, de ses écailles et de ses pattes. On fourre ce
3039 es écailles et de ses pattes. On fourre cela dans le sachet que l’on porte attaché à la ceinture et qui se remplit de tres
3040 de ses pattes. On fourre cela dans le sachet que l’ on porte attaché à la ceinture et qui se remplit de tressaillements. N
3041 urre cela dans le sachet que l’on porte attaché à la ceinture et qui se remplit de tressaillements. Nous ne gardons que le
3042 e remplit de tressaillements. Nous ne gardons que les plus belles crevettes, grosses comme le doigt, d’un rose sombre, aux
3043 dons que les plus belles crevettes, grosses comme le doigt, d’un rose sombre, aux longues antennes grenat. — On cuit les c
3044 se sombre, aux longues antennes grenat. — On cuit les crevettes toutes vivantes, en les jetant dans de l’eau qui bout. Aprè
3045 enat. — On cuit les crevettes toutes vivantes, en les jetant dans de l’eau qui bout. Après des soubresauts terribles — une
3046 crevettes toutes vivantes, en les jetant dans de l’ eau qui bout. Après des soubresauts terribles — une ou deux sautent ho
3047 ubresauts terribles — une ou deux sautent hors de la casserole —, elles se recroquevillent, rougissent, se durcissent. Je
3048 is qu’est-ce que cela veut dire ? Je parlais de «  l’ attente ardente » des créatures, songeant au passage où l’Apôtre nous
3049 e ardente » des créatures, songeant au passage où l’ Apôtre nous fait entendre ce soupir de toute la Création vers la révél
3050 où l’Apôtre nous fait entendre ce soupir de toute la Création vers la révélation des « enfants de lumière », et la restaur
3051 fait entendre ce soupir de toute la Création vers la révélation des « enfants de lumière », et la restauration de l’ordre
3052 vers la révélation des « enfants de lumière », et la restauration de l’ordre originel. Et voilà pratiquement la réponse de
3053 des « enfants de lumière », et la restauration de l’ ordre originel. Et voilà pratiquement la réponse de l’homme : pillage,
3054 ration de l’ordre originel. Et voilà pratiquement la réponse de l’homme : pillage, ruses, destruction, dévoration, le tout
3055 dre originel. Et voilà pratiquement la réponse de l’ homme : pillage, ruses, destruction, dévoration, le tout accompagné de
3056 ’homme : pillage, ruses, destruction, dévoration, le tout accompagné de sentiments « humains », admiration, répulsion, pit
3057 à une certaine « sympathie » (souffrir avec) que l’ homme éprouve pour ses victimes : « Je regrette vraiment beaucoup, mai
3058 mange. Dure nécessité, et croyez que cela me fend le cœur ! » Voilà la dernière trace de la conscience cosmique en nous, d
3059 la me fend le cœur ! » Voilà la dernière trace de la conscience cosmique en nous, de la conscience de notre royauté nécess
3060 nière trace de la conscience cosmique en nous, de la conscience de notre royauté nécessaire et réparatrice. Il est probabl
3061 té nécessaire et réparatrice. Il est probable que le tigre en train de déchiqueter une jeune gazelle ne fait pas tant d’hi
3062 suffisante. Elle est plus juste, et plus digne de l’ homme que ces vertus de carnassiers que nous partageons, d’ailleurs ma
3063 nous partageons, d’ailleurs maladroitement, avec le tigre et le requin. J’allais conclure : nos rapports avec la nature n
3064 eons, d’ailleurs maladroitement, avec le tigre et le requin. J’allais conclure : nos rapports avec la nature ne sont guère
3065 le requin. J’allais conclure : nos rapports avec la nature ne sont guère plus satisfaisants que nos rapports avec les hom
3066 nt guère plus satisfaisants que nos rapports avec les hommes. Mais attention. C’est uniquement s’il y a dans l’homme une vo
3067 s. Mais attention. C’est uniquement s’il y a dans l’ homme une vocation surnaturelle, la mission de restaurer l’harmonie pr
3068 s’il y a dans l’homme une vocation surnaturelle, la mission de restaurer l’harmonie primitive, que mon scrupule se justif
3069 ne vocation surnaturelle, la mission de restaurer l’ harmonie primitive, que mon scrupule se justifie : il apparaît alors c
3070 écho, le dernier reproche, la dernière plainte de la justice cosmique blessée. Comme une prière muette en moi, toute machi
3071 machinale et tout obscure.   24 mai On dirait que l’ homme n’est pas fait pour durer : la vie étale nous ennuie, c’est ce q
3072 On dirait que l’homme n’est pas fait pour durer : la vie étale nous ennuie, c’est ce qui naît et ce qui meurt qui nous éme
3073 au poulailler. (Nous attendions depuis deux jours l’ éclosion des œufs.) Il me semble qu’il se passe des choses au fond du
3074 ’il se passe des choses au fond du réduit obscur. La poule grogne furieusement quand je passe la tête. Je vais chercher un
3075 scur. La poule grogne furieusement quand je passe la tête. Je vais chercher une bougie, je réveille ma femme. Nous essayon
3076 réveille ma femme. Nous essayons de soulever par les ailes la poule qui fait un caquet déchirant : elle serre entre ses pa
3077 ma femme. Nous essayons de soulever par les ailes la poule qui fait un caquet déchirant : elle serre entre ses pattes un œ
3078 ché, palpite au milieu des autres œufs. On entend le toc-toc des becs à l’intérieur. Je repose la lourde poule avec précau
3079 des autres œufs. On entend le toc-toc des becs à l’ intérieur. Je repose la lourde poule avec précaution, craignant qu’ell
3080 tend le toc-toc des becs à l’intérieur. Je repose la lourde poule avec précaution, craignant qu’elle n’écrase ses petits :
3081 son aile, fait sortir une coque vide, et reprend, l’ œil fixe, son travail invisible de mère. C’est beau. C’est fascinant.
3082 inant. C’est grave et mystérieux, pacifiant comme la démonstration d’une absolue sagesse à l’œuvre dans cette vie. Il y a
3083 nt comme la démonstration d’une absolue sagesse à l’ œuvre dans cette vie. Il y a sur toute la terre de ces moments de pure
3084 agesse à l’œuvre dans cette vie. Il y a sur toute la terre de ces moments de pureté. Il faut penser à eux quand on juge « 
3085 s de pureté. Il faut penser à eux quand on juge «  le monde »… Nous mangeons les premiers légumes du jardin : salades et ra
3086 emiers légumes du jardin : salades et radis. Pour les carottes, il faut encore attendre, et les choux n’ont que quelques fe
3087 s. Pour les carottes, il faut encore attendre, et les choux n’ont que quelques feuilles. Mais avec le produit de nos pêches
3088 les choux n’ont que quelques feuilles. Mais avec le produit de nos pêches, les bons de pain, le reste du tonneau de vin b
3089 ues feuilles. Mais avec le produit de nos pêches, les bons de pain, le reste du tonneau de vin blanc, nous pourrions subsis
3090 avec le produit de nos pêches, les bons de pain, le reste du tonneau de vin blanc, nous pourrions subsister sans argent p
3091 re revue de nos possibilités de subsister pendant les semaines qui viennent. Articles, zéro. Traductions, zéro. Les chapitr
3092 qui viennent. Articles, zéro. Traductions, zéro. Les chapitres du livre en train, non détachables. Un essai philosophique
3093 rain, non détachables. Un essai philosophique sur la personne : destiné à une revue non payante. Autres ressources : néant
3094 décidé de réagir. Quand une auto risque de rater le tournant emportée par la force centrifuge, il ne faut pas freiner mai
3095 une auto risque de rater le tournant emportée par la force centrifuge, il ne faut pas freiner mais peser à fond sur l’accé
3096 uge, il ne faut pas freiner mais peser à fond sur l’ accélérateur. Je suis allé à A. acheter des cigarettes. Et nous allion
3097 . Et nous allions nous mettre à table pour manger le canard des grandes occasions, quand la chose est arrivée. Apportée pa
3098 our manger le canard des grandes occasions, quand la chose est arrivée. Apportée par la factrice. Une grosse enveloppe cac
3099 casions, quand la chose est arrivée. Apportée par la factrice. Une grosse enveloppe cachetée, venant de l’étranger. En-têt
3100 actrice. Une grosse enveloppe cachetée, venant de l’ étranger. En-tête d’une fondation littéraire. Il faut d’abord signer,
3101 t un prix. Un prix dont je connaissais tout juste le nom. Que je n’aurais jamais eu l’idée de solliciter. Et qui m’est oct
3102 sais tout juste le nom. Que je n’aurais jamais eu l’ idée de solliciter. Et qui m’est octroyé pour un petit livre paru sans
3103 vre paru sans bruit il y a plus de dix-huit mois. Les hommes sont bons, du moins certains d’entre eux. Sur le moment, ce qu
3104 mes sont bons, du moins certains d’entre eux. Sur le moment, ce qui m’a le plus frappé c’est que je m’étais fâché hier soi
3105 s certains d’entre eux. Sur le moment, ce qui m’a le plus frappé c’est que je m’étais fâché hier soir, et que la Providenc
3106 appé c’est que je m’étais fâché hier soir, et que la Providence, évidemment, se payait ma tête. Ensuite j’ai calculé que c
3107 e j’ai calculé que cela nous permettait de passer l’ été ici sans inquiétude. Ou encore, de le passer ailleurs, sans ennui.
3108 e passer l’été ici sans inquiétude. Ou encore, de le passer ailleurs, sans ennui. Cela probablement parce que j’étais à bo
3109 i patte et n’écrivais plus à personne. Je crois à la valeur d’appel de l’absence, ou plutôt du retrait. (Il ne faut pas qu
3110 plus à personne. Je crois à la valeur d’appel de l’ absence, ou plutôt du retrait. (Il ne faut pas que ce soit une feinte,
3111 l faut un véritable non-espoir). Équivalent, pour la façon de traiter la vie, de la médecine des homéopathes.   16 juin La
3112 non-espoir). Équivalent, pour la façon de traiter la vie, de la médecine des homéopathes.   16 juin La banque d’A. n’est o
3113 . Équivalent, pour la façon de traiter la vie, de la médecine des homéopathes.   16 juin La banque d’A. n’est ouverte qu’u
3114 la vie, de la médecine des homéopathes.   16 juin La banque d’A. n’est ouverte qu’un jour par semaine. Ce n’est qu’aujourd
3115 i pu aller y négocier mon chèque. J’arrive devant la porte où il est écrit : Caisse. Je frappe et entre. Un homme penché v
3116 Caisse. Je frappe et entre. Un homme penché vers le guichet parle au gérant. Le gérant me fait un signe, et comme je ne c
3117 Un homme penché vers le guichet parle au gérant. Le gérant me fait un signe, et comme je ne comprends pas, il passe sa po
3118 vient me prier à voix basse d’aller attendre dans la pièce voisine. J’attends je ne sais combien de temps, je n’ai pas de
3119 e, mais c’est très long. Aucun bruit de voix dans la salle de la caisse. Le client est-il sorti ? Quel peut être le motif
3120 t très long. Aucun bruit de voix dans la salle de la caisse. Le client est-il sorti ? Quel peut être le motif de cette aud
3121 . Aucun bruit de voix dans la salle de la caisse. Le client est-il sorti ? Quel peut être le motif de cette audience privé
3122 a caisse. Le client est-il sorti ? Quel peut être le motif de cette audience privée ? Enfin j’entends qu’on sort, et le gé
3123 audience privée ? Enfin j’entends qu’on sort, et le gérant vient me chercher. Notre affaire réglée, il croit devoir s’exc
3124 ir s’excuser de m’avoir fait passer à côté tout à l’ heure. « Vous savez, c’est la coutume, ici ils n’aiment pas qu’il y ai
3125 passer à côté tout à l’heure. « Vous savez, c’est la coutume, ici ils n’aiment pas qu’il y ait d’autres personnes dans la
3126 n’aiment pas qu’il y ait d’autres personnes dans la salle quand ils payent ou quand ils touchent de l’argent ! C’est qu’i
3127 a salle quand ils payent ou quand ils touchent de l’ argent ! C’est qu’ils sont très spéciaux les gens d’ici ! Moi je n’y v
3128 ent de l’argent ! C’est qu’ils sont très spéciaux les gens d’ici ! Moi je n’y viens qu’une fois par semaine, mais je commen
3129 viens qu’une fois par semaine, mais je commence à les connaître. Je pourrais vous en dire. C’est partout différent, pour l’
3130 rrais vous en dire. C’est partout différent, pour l’ argent. Si vous prenez N. par exemple (la ville prochaine sur le conti
3131 nt, pour l’argent. Si vous prenez N. par exemple ( la ville prochaine sur le continent) ils n’auraient pas idée de ça, au c
3132 ous prenez N. par exemple (la ville prochaine sur le continent) ils n’auraient pas idée de ça, au contraire, ils sont tout
3133 ça, au contraire, ils sont tout fiers de venir à la banque. Ici, on a dû faire cette salle d’attente… » Autant que j’en p
3134 e d’attente… » Autant que j’en puis juger d’après les propos du gérant, ce n’est pas seulement la crainte, après tout légit
3135 près les propos du gérant, ce n’est pas seulement la crainte, après tout légitime, qu’on sache combien ils ont « mis de cô
3136 mbien ils ont « mis de côté », qui peut expliquer le comportement des gens d’ici. Il faut admettre que pour eux, une pudeu
3137 tout à fait particulière s’attache au commerce de l’ argent.   20 juin Les gens. Je feuillette ce journal : voici des sema
3138 ère s’attache au commerce de l’argent.   20 juin Les gens. Je feuillette ce journal : voici des semaines qu’il n’y est à p
3139 ini par s’établir entre nous : et il ne reste que l’ ennui de nos conversations toujours pareilles. Grande différence entre
3140 t adaptés à leur conduite et à leur milieu, comme les animaux. Ils ne se posent pas de questions gênantes. Or, c’est mon mé
3141 uand on en est là. Quand on en est à ne plus voir le prochain, la situation n’est plus humaine, elle ne pose plus de quest
3142 t là. Quand on en est à ne plus voir le prochain, la situation n’est plus humaine, elle ne pose plus de questions utiles.
3143 lle ne pose plus de questions utiles.   2 juillet La sécheresse a été la plus forte : malgré nos arrosages, les salades et
3144 questions utiles.   2 juillet La sécheresse a été la plus forte : malgré nos arrosages, les salades et les choux sont brûl
3145 resse a été la plus forte : malgré nos arrosages, les salades et les choux sont brûlés, la terre se craquèle, ou devient po
3146 plus forte : malgré nos arrosages, les salades et les choux sont brûlés, la terre se craquèle, ou devient poussiéreuse. Il
3147 arrosages, les salades et les choux sont brûlés, la terre se craquèle, ou devient poussiéreuse. Il n’y a plus que quelque
3148 ux pétales fatigués. — Et nous, nous n’avons plus la même patience, depuis qu’il y a de l’argent dans un tiroir. Cela sign
3149 ’avons plus la même patience, depuis qu’il y a de l’ argent dans un tiroir. Cela signifie que j’ai cessé d’être chômeur. Le
3150 oir. Cela signifie que j’ai cessé d’être chômeur. Le départ est fixé au 10. Il va falloir vendre la poule noire et les pou
3151 r. Le départ est fixé au 10. Il va falloir vendre la poule noire et les poulets encore trop jeunes pour être mangés. Régle
3152 ixé au 10. Il va falloir vendre la poule noire et les poulets encore trop jeunes pour être mangés. Régler vingt petites cho
3153 cloué. Il me reste à peu près deux heures, avant le départ, pour faire un peu de sentiment sur l’île, et le bilan de l’an
3154 ant le départ, pour faire un peu de sentiment sur l’ île, et le bilan de l’année écoulée. Bilan. S’installer dans la pauvr
3155 art, pour faire un peu de sentiment sur l’île, et le bilan de l’année écoulée. Bilan. S’installer dans la pauvreté comme
3156 ire un peu de sentiment sur l’île, et le bilan de l’ année écoulée. Bilan. S’installer dans la pauvreté comme dans un cham
3157 ilan de l’année écoulée. Bilan. S’installer dans la pauvreté comme dans un champ d’activité nouveau, avec l’ardeur et les
3158 reté comme dans un champ d’activité nouveau, avec l’ ardeur et les curiosités naïves du débutant, cela suppose beaucoup moi
3159 ans un champ d’activité nouveau, avec l’ardeur et les curiosités naïves du débutant, cela suppose beaucoup moins de courage
3160 moins de courage que bien des jeunes bourgeois ne l’ imaginent : ceux qui voudraient « partir », se « libérer » et qui recu
3161 », se « libérer » et qui reculent pourtant devant le saut. Peut-être leur suffirait-il, pour oser, d’une vision précise de
3162 e montrer qu’on peut sortir des villes où se font les « carrières » sans sortir de la vie véritable ; et qu’on peut vivre d
3163 illes où se font les « carrières » sans sortir de la vie véritable ; et qu’on peut vivre de très peu sans cesser de vivre
3164 ravaille sans fièvre et que je flâne sans vague à l’ âme. C’est quelque chose. Je ne dis pas que c’est le bonheur, je n’ai
3165 âme. C’est quelque chose. Je ne dis pas que c’est le bonheur, je n’ai jamais très bien compris ce mot, que tant de gens in
3166 r de surprises multipliées : peu d’aventures dans l’ existence d’un homme qui cherche à se posséder plutôt qu’à se fuir dan
3167 ui cherche à se posséder plutôt qu’à se fuir dans les hasards. C’est sans doute un effet de la trentaine qui approche : je
3168 ir dans les hasards. C’est sans doute un effet de la trentaine qui approche : je n’espère plus, comme à vingt ans, rencont
3169 : je n’espère plus, comme à vingt ans, rencontrer le « réel » ou la « vraie vie » dans je ne sais quelle embuscade du dest
3170 lus, comme à vingt ans, rencontrer le « réel » ou la « vraie vie » dans je ne sais quelle embuscade du destin, comme qui d
3171 comme qui dirait au coin d’un bois. Je crois que le réel est à portée de la main, et n’est que là. Alors il s’agit seulem
3172 n d’un bois. Je crois que le réel est à portée de la main, et n’est que là. Alors il s’agit seulement d’assurer la prise d
3173 n’est que là. Alors il s’agit seulement d’assurer la prise de cette main. C’est l’affaire d’une patience, ou d’une impatie
3174 seulement d’assurer la prise de cette main. C’est l’ affaire d’une patience, ou d’une impatience dominée, — et sans doute q
3175 ement. ae. Rougemont Denis de, « N’habitez pas les villes (Extrait d’un journal) », La Nouvelle Revue française, Paris,
3176 ’habitez pas les villes (Extrait d’un journal) », La Nouvelle Revue française, Paris, juillet 1937, p. 63-87. af. Il s’ag
30 1937, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Gösta Berling, par Selma Lagerlöf (novembre 1937)
3177 Berling, par Selma Lagerlöf (novembre 1937)ag Le monde entier connaît la geste de cette communauté de sans-foyers, d’â
3178 rlöf (novembre 1937)ag Le monde entier connaît la geste de cette communauté de sans-foyers, d’âmes sauvages et musicien
3179 é de sans-foyers, d’âmes sauvages et musiciennes, les douze « Cavaliers » d’Ekeby, qui régnèrent d’un Noël à l’autre sur la
3180  » d’Ekeby, qui régnèrent d’un Noël à l’autre sur la province du Warmland, s’étant juré de ne rien accomplir d’utile ni de
3181 e rien accomplir d’utile ni de raisonnable. Voici l’ histoire, traduite tout entière pour la première fois en France47. Six
3182 fiques, tout cela digne du chef-d’œuvre épique de la littérature moderne. Kipling mort, il ne reste que Selma Lagerlöf pou
3183 alices et de profondes audaces. Des histoires que l’ on croit intégralement parce qu’elles nous sont données pour ce qu’ell
3184 e « défense d’inventer », s’épuisent à rechercher le vraisemblable, en même temps que l’exceptionnel. Pour faire vrai, ils
3185 à rechercher le vraisemblable, en même temps que l’ exceptionnel. Pour faire vrai, ils imitent la vie. Mais la vie est tou
3186 que l’exceptionnel. Pour faire vrai, ils imitent la vie. Mais la vie est toujours ailleurs, en train de s’inventer différ
3187 ionnel. Pour faire vrai, ils imitent la vie. Mais la vie est toujours ailleurs, en train de s’inventer différente. Elle n’
3188 ’elle et qui n’en fait qu’à ses façons. Elle aime les grands rhétoriciens de l’imagination fabulatrice. Elle se précipite a
3189 ses façons. Elle aime les grands rhétoriciens de l’ imagination fabulatrice. Elle se précipite avec fougue dans leurs pièg
3190 . Elle se précipite avec fougue dans leurs pièges les plus évidents. Elle adore se laisser attraper dans les figures qu’une
3191 lus évidents. Elle adore se laisser attraper dans les figures qu’une Lagerlöf s’amuse à rajeunir tour à tour : une au moins
3192 r : une au moins par chapitre48, et à chaque fois le coup est bon. Vous partez en pleine convention romantique, populaire
3193 mantique, populaire carte postale. Mais voici que la vie s’y prend, fait sauter le cadre, envahit tout à grands bonds émou
3194 ale. Mais voici que la vie s’y prend, fait sauter le cadre, envahit tout à grands bonds émouvants, et l’auteur s’esquive p
3195 cadre, envahit tout à grands bonds émouvants, et l’ auteur s’esquive prestement avec une bonne espièglerie, pour vous lais
3196 baroque, impertinent et emphatique du mot — dans la virtuosité et les malices de ce génie de la fable nordique. Lagerlöf
3197 nent et emphatique du mot — dans la virtuosité et les malices de ce génie de la fable nordique. Lagerlöf ou la gloire de co
3198 dans la virtuosité et les malices de ce génie de la fable nordique. Lagerlöf ou la gloire de conter ! Jusqu’au moment où
3199 ces de ce génie de la fable nordique. Lagerlöf ou la gloire de conter ! Jusqu’au moment où l’imagination, ranimant les gra
3200 erlöf ou la gloire de conter ! Jusqu’au moment où l’ imagination, ranimant les grands rythmes naturels, libérant les vertus
3201 nter ! Jusqu’au moment où l’imagination, ranimant les grands rythmes naturels, libérant les vertus et les vices des entrave
3202 n, ranimant les grands rythmes naturels, libérant les vertus et les vices des entraves du respect humain, nous jette dans l
3203 s grands rythmes naturels, libérant les vertus et les vices des entraves du respect humain, nous jette dans le grand jeu du
3204 s des entraves du respect humain, nous jette dans le grand jeu du péché et de la grâce, et se confond avec la Charité. Ima
3205 main, nous jette dans le grand jeu du péché et de la grâce, et se confond avec la Charité. Imaginer, à ce degré, c’est déj
3206 d jeu du péché et de la grâce, et se confond avec la Charité. Imaginer, à ce degré, c’est déjà presque pardonner au monde.
3207 gré, c’est déjà presque pardonner au monde. C’est le placer sous la lumière fantastique de la Promesse, au point où tout s
3208 presque pardonner au monde. C’est le placer sous la lumière fantastique de la Promesse, au point où tout se renverse, où
3209 e. C’est le placer sous la lumière fantastique de la Promesse, au point où tout se renverse, où le ciel s’ouvre sur le châ
3210 de la Promesse, au point où tout se renverse, où le ciel s’ouvre sur le châtiment, où le démon découvre que son œuvre a l
3211 point où tout se renverse, où le ciel s’ouvre sur le châtiment, où le démon découvre que son œuvre a libéré les hommes de
3212 renverse, où le ciel s’ouvre sur le châtiment, où le démon découvre que son œuvre a libéré les hommes de leur bonheur, et
3213 ment, où le démon découvre que son œuvre a libéré les hommes de leur bonheur, et la vie de l’obsession de vivre. Cette anné
3214 son œuvre a libéré les hommes de leur bonheur, et la vie de l’obsession de vivre. Cette année folle, inaugurée par un trai
3215 a libéré les hommes de leur bonheur, et la vie de l’ obsession de vivre. Cette année folle, inaugurée par un traité avec le
3216 . Cette année folle, inaugurée par un traité avec le diable, vient mourir dans la nuit de Noël au rythme familier des mart
3217 e par un traité avec le diable, vient mourir dans la nuit de Noël au rythme familier des marteaux de la forge rebâtie. Les
3218 a nuit de Noël au rythme familier des marteaux de la forge rebâtie. Les Cavaliers, « appelés à faire vivre la joie dans le
3219 rythme familier des marteaux de la forge rebâtie. Les Cavaliers, « appelés à faire vivre la joie dans le pays du fer, à l’é
3220 e rebâtie. Les Cavaliers, « appelés à faire vivre la joie dans le pays du fer, à l’époque du fer » nous ont appris à leur
3221 s Cavaliers, « appelés à faire vivre la joie dans le pays du fer, à l’époque du fer » nous ont appris à leur façon « les r
3222 elés à faire vivre la joie dans le pays du fer, à l’ époque du fer » nous ont appris à leur façon « les riches alternances
3223 l’époque du fer » nous ont appris à leur façon «  les riches alternances de la vie ». Mais c’est aussi au peuple entier qu’
3224 t appris à leur façon « les riches alternances de la vie ». Mais c’est aussi au peuple entier qu’ils ont appris sa gloire
3225 romances et ses idylles d’une pureté dramatique. Les forges, les charrois de minerai, le trafic des chalands, l’économie a
3226 ses idylles d’une pureté dramatique. Les forges, les charrois de minerai, le trafic des chalands, l’économie agraire, tout
3227 dramatique. Les forges, les charrois de minerai, le trafic des chalands, l’économie agraire, tout cela ne joue pas un moi
3228 les charrois de minerai, le trafic des chalands, l’ économie agraire, tout cela ne joue pas un moindre rôle que la nature,
3229 graire, tout cela ne joue pas un moindre rôle que la nature, les ours et les trolls des forêts, dans les exploits des Cava
3230 t cela ne joue pas un moindre rôle que la nature, les ours et les trolls des forêts, dans les exploits des Cavaliers. Ce n’
3231 ue pas un moindre rôle que la nature, les ours et les trolls des forêts, dans les exploits des Cavaliers. Ce n’est pas du r
3232 a nature, les ours et les trolls des forêts, dans les exploits des Cavaliers. Ce n’est pas du réalisme socialiste, c’est la
3233 liers. Ce n’est pas du réalisme socialiste, c’est la réalité sociale plus toutes les autres. Et l’amour d’une femme pour s
3234 socialiste, c’est la réalité sociale plus toutes les autres. Et l’amour d’une femme pour son peuple, au lieu de ces vantar
3235 est la réalité sociale plus toutes les autres. Et l’ amour d’une femme pour son peuple, au lieu de ces vantardises en servi
3236 arnikis plus ou moins décorés. Selma Lagerlöf est la seule femme de la littérature européenne dont le génie ait eu la forc
3237 ins décorés. Selma Lagerlöf est la seule femme de la littérature européenne dont le génie ait eu la force de recréer un pa
3238 la seule femme de la littérature européenne dont le génie ait eu la force de recréer un pays tout entier, avec ses classe
3239 de la littérature européenne dont le génie ait eu la force de recréer un pays tout entier, avec ses classes et ses institu
3240 histoire, sa morale et sa foi. On peut penser que l’ inscription qu’on lit au Pavillon de la Suède éclaire à sa façon les a
3241 penser que l’inscription qu’on lit au Pavillon de la Suède éclaire à sa façon les arrière-plans de ce miracle : « Il y a m
3242 on lit au Pavillon de la Suède éclaire à sa façon les arrière-plans de ce miracle : « Il y a mille ans que le peuple suédoi
3243 ière-plans de ce miracle : « Il y a mille ans que le peuple suédois est son propre maître. Tous les Suédois, hommes et fem
3244 que le peuple suédois est son propre maître. Tous les Suédois, hommes et femmes, jouissent des mêmes droits politiques. »
3245 issait jusqu’ici qu’une adaptation abrégée, selon la coutume détestable qu’appuient nos préjugés classiques et les problém
3246 détestable qu’appuient nos préjugés classiques et les problématiques nécessités du commerce le plus mal compris. 48. Descr
3247 ques et les problématiques nécessités du commerce le plus mal compris. 48. Descriptions, rétrospections, coups de théâtre
3248 s, coïncidences, catastrophes naturelles, et tous les emplois de la fable suédoise : trolls, sorcières, belles jeunes fille
3249 , catastrophes naturelles, et tous les emplois de la fable suédoise : trolls, sorcières, belles jeunes filles courtisées p
3250  [Compte rendu] Selma Lagerlöf, Gösta Berling  », La Nouvelle Revue française, Paris, novembre 1937, p. 857-859.
31 1937, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Au dossier d’une vieille querelle (novembre 1937)
3251 écrivait récemment qu’il faut se garder d’engager la raison dans une aventure — la vie — « où elle ne peut qu’être outragé
3252 se garder d’engager la raison dans une aventure — la vie — « où elle ne peut qu’être outragée » (car la vie est irrationne
3253 a vie — « où elle ne peut qu’être outragée » (car la vie est irrationnelle). D’autres clercs, conséquents, ne manqueront p
3254 prudents, ils feront bien de s’y comporter selon les usages du forum, et de crier avec les loups. « Préservant » ainsi la
3255 orter selon les usages du forum, et de crier avec les loups. « Préservant » ainsi la raison, autant que leur sécurité. On t
3256 et de crier avec les loups. « Préservant » ainsi la raison, autant que leur sécurité. On trouve dans la Logique de Port-R
3257 raison, autant que leur sécurité. On trouve dans la Logique de Port-Royal, un dilemme assez comparable, « par lequel un a
3258 it qu’on ne se devait point mêler des affaires de la République. Si on y agit bien — disait-il — on offensera les dieux ;
3259 que. Si on y agit bien — disait-il — on offensera les dieux ; donc on ne s’en doit point mêler. » Mais Aristote témoigne qu
3260 e qu’on lui répondit : « Si on s’y gouverne selon les règles corrompues des hommes, on contentera les hommes. Si on y garde
3261 n les règles corrompues des hommes, on contentera les hommes. Si on y garde la vraie justice, on contentera les dieux. Donc
3262 s hommes, on contentera les hommes. Si on y garde la vraie justice, on contentera les dieux. Donc on s’en doit mêler. » La
3263 es. Si on y garde la vraie justice, on contentera les dieux. Donc on s’en doit mêler. » La Logique observe à propos du prem
3264 contentera les dieux. Donc on s’en doit mêler. » La Logique observe à propos du premier dilemme — ou sophisme — « qu’il n
3265 sophisme — « qu’il n’est point fâcheux d’offenser les hommes, quand on ne le peut éviter qu’en offensant Dieu ». Et au suje
3266 point fâcheux d’offenser les hommes, quand on ne le peut éviter qu’en offensant Dieu ». Et au sujet du second : « qu’il n
3267 econd : « qu’il n’est pas avantageux de contenter les hommes en offensant Dieu ». J’en conclus qu’il est bon d’engager la r
3268 sant Dieu ». J’en conclus qu’il est bon d’engager la raison dans la vie : non point pour qu’elle y reçoive des outrages, m
3269 en conclus qu’il est bon d’engager la raison dans la vie : non point pour qu’elle y reçoive des outrages, mais pour qu’ell
3270 besoin. Que cela n’aille pas sans risques, c’est l’ évidence. Mais il s’agit de savoir ce que l’on révère, de la vérité ou
3271 c’est l’évidence. Mais il s’agit de savoir ce que l’ on révère, de la vérité ou de la sécurité. Ce serait une raison bien d
3272 . Mais il s’agit de savoir ce que l’on révère, de la vérité ou de la sécurité. Ce serait une raison bien débile, qui n’ose
3273 de savoir ce que l’on révère, de la vérité ou de la sécurité. Ce serait une raison bien débile, qui n’oserait s’exercer q
3274 l y a quelque part du rationnel (que ce soit dans le monde ou dans l’esprit) c’est que la raison s’est bel et bien risquée
3275 t du rationnel (que ce soit dans le monde ou dans l’ esprit) c’est que la raison s’est bel et bien risquée et se risque enc
3276 ce soit dans le monde ou dans l’esprit) c’est que la raison s’est bel et bien risquée et se risque encore dans le chaos, e
3277 ’est bel et bien risquée et se risque encore dans le chaos, et qu’elle a su y prévaloir sur quelques points. On ne voit pa
3278 pourquoi il faudrait s’arrêter. Et même, à faire le petit rentier du rationnel, on court le risque le plus onéreux : celu
3279 , à faire le petit rentier du rationnel, on court le risque le plus onéreux : celui de laisser perdre le peu qui fut gagné
3280 le petit rentier du rationnel, on court le risque le plus onéreux : celui de laisser perdre le peu qui fut gagné par d’aut
3281 risque le plus onéreux : celui de laisser perdre le peu qui fut gagné par d’autres, et dont on vit. ah. Rougemont Deni
3282 Denis de, « Au dossier d’une vieille querelle », La Nouvelle Revue française, Paris, novembre 1937, p. 873-874.
32 1938, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Le Monastère noir, par Aladár Kuncz (janvier 1938)
3283 Le Monastère noir, par Aladár Kuncz (janvier 1938)ai Professeur, écri
3284 écrivain, traducteur d’ouvrages français, ami de la France, séjournant en France, Aladár Kuncz, sujet hongrois, se voit a
3285 se voit arrêté à Paris dès les premiers jours de la guerre. On l’envoie dans un camp à Perpignan. De là au « monastère no
3286 é à Paris dès les premiers jours de la guerre. On l’ envoie dans un camp à Perpignan. De là au « monastère noir », la forte
3287 un camp à Perpignan. De là au « monastère noir », la forteresse de Noirmoutier, puis à l’île d’Yeu. Il ne sera libéré qu’a
3288 tère noir », la forteresse de Noirmoutier, puis à l’ île d’Yeu. Il ne sera libéré qu’après cinq ans de captivité, durant le
3289 cinq ans de captivité, durant lesquels il subira les manifestations, inépuisables d’imprévu, du patriotisme de l’arrière.
3290 ations, inépuisables d’imprévu, du patriotisme de l’ arrière. Et voici le journal de cet intellectuel jeté dans un cul de b
3291 d’imprévu, du patriotisme de l’arrière. Et voici le journal de cet intellectuel jeté dans un cul de bassefosse par le jeu
3292 t intellectuel jeté dans un cul de bassefosse par le jeu de l’état civil. Qu’il ne s’y mêle aucune trace de hargne, c’est
3293 tuel jeté dans un cul de bassefosse par le jeu de l’ état civil. Qu’il ne s’y mêle aucune trace de hargne, c’est un miracle
3294 ucune trace de hargne, c’est un miracle qui défie l’ époque. M. de Lacretelle, dans sa préface, déclare fort justement qu’i
3295 Vous en ferez tous autant en lisant ce livre, en le faisant lire. Et vous ferez quelque chose contre la guerre, ne fût-ce
3296 faisant lire. Et vous ferez quelque chose contre la guerre, ne fût-ce que de la connaître mieux. Peut-être même prendrez-
3297 quelque chose contre la guerre, ne fût-ce que de la connaître mieux. Peut-être même prendrez-vous conscience d’une menace
3298 rale encore, qui concerne chacun de nous, et dont l’ internement de guerre n’est qu’une conséquence entre mille, d’une viru
3299 ais au moins déclarée. Je veux parler du mythe de l’ arrestation, de la psychose créée dans le monde actuel par ce phénomèn
3300 rée. Je veux parler du mythe de l’arrestation, de la psychose créée dans le monde actuel par ce phénomène multiforme, insa
3301 mythe de l’arrestation, de la psychose créée dans le monde actuel par ce phénomène multiforme, insaisissable et saisissant
3302 isons » collectives et obscures. Il me paraît que le livre de Kuncz tire son tragique le plus secret du fait qu’il symboli
3303 me paraît que le livre de Kuncz tire son tragique le plus secret du fait qu’il symbolise, illustre et concrétise une condi
3304 soumis aux lois d’une collectivité délirante. Sur la foi d’affiches officielles promettant aux internés une libération rap
3305 ut placés pour leur faire part de son état : mais les lettres n’arrivent jamais, ou demeurent sans réponse. Le courrier qu’
3306 res n’arrivent jamais, ou demeurent sans réponse. Le courrier qu’on lui adresse est retenu par les intendants, les paquets
3307 nse. Le courrier qu’on lui adresse est retenu par les intendants, les paquets vidés. Le régime disciplinaire est aggravé de
3308 qu’on lui adresse est retenu par les intendants, les paquets vidés. Le régime disciplinaire est aggravé de temps à autre,
3309 est retenu par les intendants, les paquets vidés. Le régime disciplinaire est aggravé de temps à autre, on ne sait pourquo
3310 e sait pourquoi, « par représailles ». Puis c’est le départ brusqué « pour X… ». Ni raisons ni points de repère : c’est la
3311 pour X… ». Ni raisons ni points de repère : c’est la guerre. C’est un mot sacré. C’est quelque chose qui se passe très loi
3312 souffre, mais dont on ne sait rien de précis, ni l’ enjeu ni les causes véritables. Il ne reste que l’obscure certitude, a
3313 ais dont on ne sait rien de précis, ni l’enjeu ni les causes véritables. Il ne reste que l’obscure certitude, angoissante,
3314 l’enjeu ni les causes véritables. Il ne reste que l’ obscure certitude, angoissante, que cette guerre « se fait toute seule
3315 elle. Comment ne point songer au Procès de Kafka, la plus géniale description du mythe de l’arrestationaj. On se rappelle
3316 de Kafka, la plus géniale description du mythe de l’ arrestationaj. On se rappelle que c’était l’histoire d’un homme qui se
3317 he de l’arrestationaj. On se rappelle que c’était l’ histoire d’un homme qui se voit inculpé, par une justice inaccessible,
3318 une signification théologique. Mais ce n’est pas la seule possible. Il y a aussi dans ce livre une parabole de l’homme tr
3319 sible. Il y a aussi dans ce livre une parabole de l’ homme traqué par les tyrannies anonymes qui se multiplient dans notre
3320 dans ce livre une parabole de l’homme traqué par les tyrannies anonymes qui se multiplient dans notre siècle49, et tendent
3321 à faire du moindre d’entre nous un prévenu. C’est le cauchemar du xxe siècle. Le triomphe de l’État sur l’homme. D’ailleu
3322 us un prévenu. C’est le cauchemar du xxe siècle. Le triomphe de l’État sur l’homme. D’ailleurs on peut aussi ne rien voir
3323 C’est le cauchemar du xxe siècle. Le triomphe de l’ État sur l’homme. D’ailleurs on peut aussi ne rien voir de tout cela d
3324 uchemar du xxe siècle. Le triomphe de l’État sur l’ homme. D’ailleurs on peut aussi ne rien voir de tout cela dans le livr
3325 eurs on peut aussi ne rien voir de tout cela dans le livre de Kuncz : il nous apporte un document bien assez émouvant comm
3326 rte un document bien assez émouvant comme tel. Et la preuve, une fois de plus, que l’homme moderne ne se connaît jamais mi
3327 nt comme tel. Et la preuve, une fois de plus, que l’ homme moderne ne se connaît jamais mieux qu’à la faveur de circonstanc
3328 e l’homme moderne ne se connaît jamais mieux qu’à la faveur de circonstances brutales, qui le rabattent à l’élémentaire.
3329 eux qu’à la faveur de circonstances brutales, qui le rabattent à l’élémentaire. 49. Police d’État, polices privées, doua
3330 eur de circonstances brutales, qui le rabattent à l’ élémentaire. 49. Police d’État, polices privées, douaniers, passepor
3331 ougemont Denis de, « [Compte rendu] Aladár Kuncz, Le Monastère noir  », La Nouvelle Revue française, Paris, janvier 1938,
3332 Compte rendu] Aladár Kuncz, Le Monastère noir  », La Nouvelle Revue française, Paris, janvier 1938, p. 145-146. aj. Rouge
3333 p. 145-146. aj. Rougemont en a rendu compte dans le numéro de mai 1934 de la NRF : «  Le Procès, par Franz Kafka, traduit
3334 t en a rendu compte dans le numéro de mai 1934 de la NRF : «  Le Procès, par Franz Kafka, traduit par A. Vialatte (Gallima
3335 compte dans le numéro de mai 1934 de la NRF : «  Le Procès, par Franz Kafka, traduit par A. Vialatte (Gallimard) ».
33 1938, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Victoire à Waterloo, par Robert Aron (février 1938)
3336 qua et termina ses jours à Sainte-Hélène. Tel est le sujet. En somme, mettant un signe plus là où l’Histoire met un signe
3337 t le sujet. En somme, mettant un signe plus là où l’ Histoire met un signe moins, l’auteur annule le facteur Waterloo, et n
3338 n signe plus là où l’Histoire met un signe moins, l’ auteur annule le facteur Waterloo, et nous démontre que l’équation Nap
3339 où l’Histoire met un signe moins, l’auteur annule le facteur Waterloo, et nous démontre que l’équation Napoléon n’en doit
3340 annule le facteur Waterloo, et nous démontre que l’ équation Napoléon n’en doit pas moins avoir pour second membre l’abdic
3341 léon n’en doit pas moins avoir pour second membre l’ abdication. Il y a sans doute une théorie de l’Histoire à l’origine de
3342 re l’abdication. Il y a sans doute une théorie de l’ Histoire à l’origine de cet ouvrage d’une passionnante ambiguïté, et q
3343 on. Il y a sans doute une théorie de l’Histoire à l’ origine de cet ouvrage d’une passionnante ambiguïté, et qui se donne l
3344 age d’une passionnante ambiguïté, et qui se donne l’ air d’une « fantaisie ». Prenons ce mot au sens allemand : une « imagi
3345 in des conséquences fausses de faits « prouvés ». La thèse peut se discuter. L’illustration m’en paraît convaincante. « Le
3346 de faits « prouvés ». La thèse peut se discuter. L’ illustration m’en paraît convaincante. « Le grand étonnement que peut
3347 cuter. L’illustration m’en paraît convaincante. «  Le grand étonnement que peut provoquer ce livre, dit la préface, est que
3348 grand étonnement que peut provoquer ce livre, dit la préface, est que pour transformer une défaite en victoire et une abdi
3349 ger et si peu imaginer. Il faut vraiment que dans l’ histoire des hommes les faits interviennent moins qu’on ne croit commu
3350 . Il faut vraiment que dans l’histoire des hommes les faits interviennent moins qu’on ne croit communément. Il faut vraimen
3351 stinée, et non pas devant Blücher, ce hasard, que l’ empereur devait succomber. Mais pourquoi cette victoire à Waterloo ? P
3352 oo ? Parce qu’au cours des journées qui précèdent la bataille, Napoléon a découvert la vie concrète d’un pays et des êtres
3353 s qui précèdent la bataille, Napoléon a découvert la vie concrète d’un pays et des êtres dont c’est la patrie. Il a conçu
3354 la vie concrète d’un pays et des êtres dont c’est la patrie. Il a conçu les premiers doutes humains sur la réalité de son
3355 atrie. Il a conçu les premiers doutes humains sur la réalité de son empire, sur son pouvoir abstrait et sa démesure géomét
3356 étrique. Et revenant à ses origines, au moment où le sort de la bataille vacille, il a retrouvé soudain le cri de la Révol
3357 revenant à ses origines, au moment où le sort de la bataille vacille, il a retrouvé soudain le cri de la Révolution : Viv
3358 ort de la bataille vacille, il a retrouvé soudain le cri de la Révolution : Vive la Nation ! Or ce cri qui lui donne la vi
3359 bataille vacille, il a retrouvé soudain le cri de la Révolution : Vive la Nation ! Or ce cri qui lui donne la victoire le
3360 a retrouvé soudain le cri de la Révolution : Vive la Nation ! Or ce cri qui lui donne la victoire le condamne. Je simplifi
3361 lution : Vive la Nation ! Or ce cri qui lui donne la victoire le condamne. Je simplifie encore la thèse : Napoléon gagne W
3362 e la Nation ! Or ce cri qui lui donne la victoire le condamne. Je simplifie encore la thèse : Napoléon gagne Waterloo parc
3363 onne la victoire le condamne. Je simplifie encore la thèse : Napoléon gagne Waterloo parce qu’il retrouve le « personnalis
3364 se : Napoléon gagne Waterloo parce qu’il retrouve le « personnalisme » mais cela même dénonce son pouvoir, préfiguration d
3365 s. (Lui aussi fut trois fois plébiscité !) Devant les Chambres, il s’écriera : « Prenez conscience, Messieurs, que depuis v
3366 pas été capables de fédérer nos communes. » Voilà l’ épigraphe de l’ouvrage, qui par ailleurs compose bien d’autres thèmes 
3367 s de fédérer nos communes. » Voilà l’épigraphe de l’ ouvrage, qui par ailleurs compose bien d’autres thèmes : celui des île
3368 e bien d’autres thèmes : celui des îles, celui de la patrie perdue que Bonaparte cherche à se recréer, celui du schizophrè
3369 he à se recréer, celui du schizophrène qui « perd le sentiment », celui d’une société qu’il faut bâtir « à hauteur d’homme
3370 ur d’idéologies. Peut-être ai-je trop insisté sur l’ actualité politique de cette méditation personnaliste. Car après tout,
3371 t, c’est une histoire, un des meilleurs romans de l’ année, et qui se fait lire avec le plus constant plaisir, d’autant que
3372 leurs romans de l’année, et qui se fait lire avec le plus constant plaisir, d’autant que l’on pouvait redouter l’agacement
3373 lire avec le plus constant plaisir, d’autant que l’ on pouvait redouter l’agacement de la facilité, le même que donne la l
3374 stant plaisir, d’autant que l’on pouvait redouter l’ agacement de la facilité, le même que donne la lecture de romans d’ant
3375 d’autant que l’on pouvait redouter l’agacement de la facilité, le même que donne la lecture de romans d’anticipation. Il y
3376 l’on pouvait redouter l’agacement de la facilité, le même que donne la lecture de romans d’anticipation. Il y a bien plus
3377 ter l’agacement de la facilité, le même que donne la lecture de romans d’anticipation. Il y a bien plus que de l’ingéniosi
3378 de romans d’anticipation. Il y a bien plus que de l’ ingéniosité dans ce livre : un sens de l’homme et des limites de sa gr
3379 s que de l’ingéniosité dans ce livre : un sens de l’ homme et des limites de sa grandeur, un sens de l’humour du destin, un
3380 l’homme et des limites de sa grandeur, un sens de l’ humour du destin, une vraie poésie de l’Histoire, libératrice et excit
3381 n sens de l’humour du destin, une vraie poésie de l’ Histoire, libératrice et excitante pour l’esprit. À peine l’a-t-on fin
3382 ésie de l’Histoire, libératrice et excitante pour l’ esprit. À peine l’a-t-on fini qu’on se jette sur Sorel, sur Madelin et
3383 , libératrice et excitante pour l’esprit. À peine l’ a-t-on fini qu’on se jette sur Sorel, sur Madelin et sur Aubry, pour l
3384 Aubry, pour leur arracher des aveux à l’appui de la thèse d’Aron. 50. Jean-Paul rapporte un rêve où il disait à Napoléo
3385 ompte rendu] Robert Aron, Victoire à Waterloo  », La Nouvelle Revue française, Paris, février 1938, p. 313-314.
34 1938, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Une révolution refoulée (juillet 1938)
3386 Est-il possible d’indiquer une raison simple de l’ échec du Front populaire ? La psychanalyse nous propose un type d’expl
3387 une raison simple de l’échec du Front populaire ? La psychanalyse nous propose un type d’explication qui me paraît bien te
3388 d’explication qui me paraît bien tentant : c’est le mécanisme du « refoulement » d’où procèdent les « actes manqués ». S’
3389 st le mécanisme du « refoulement » d’où procèdent les « actes manqués ». S’il y a eu « expérience Blum », elle a consisté à
3390 u « expérience Blum », elle a consisté à empêcher la révolution. Juin 1936 était un espoir que les accords Matignon trompè
3391 cher la révolution. Juin 1936 était un espoir que les accords Matignon trompèrent. C’est tout ce que l’Histoire retiendra.
3392 es accords Matignon trompèrent. C’est tout ce que l’ Histoire retiendra. Ce fait initial a déterminé la courbe de l’expérie
3393 l’Histoire retiendra. Ce fait initial a déterminé la courbe de l’expérience : il s’agissait d’affirmer une mystique, mais
3394 tiendra. Ce fait initial a déterminé la courbe de l’ expérience : il s’agissait d’affirmer une mystique, mais de ne faire q
3395 ait d’affirmer une mystique, mais de ne faire que les réformes qu’imposait la pression des « masses ». Dans une telle situa
3396 ue, mais de ne faire que les réformes qu’imposait la pression des « masses ». Dans une telle situation historique, les réf
3397 « masses ». Dans une telle situation historique, les réformes vont toujours à l’encontre des buts allégués. Chacun sent tr
3398 lissement du sens civique tellement frappant dans la France actuelle. (Au moins dans celle qui se manifeste.) Et les réfor
3399 uelle. (Au moins dans celle qui se manifeste.) Et les réformes obtenues apparaissent comme les résultantes de deux lâchetés
3400 ste.) Et les réformes obtenues apparaissent comme les résultantes de deux lâchetés, non de deux volontés. Or, quand le sens
3401 de deux lâchetés, non de deux volontés. Or, quand le sens civique fléchit, c’est-à-dire quand chacun veut avoir plus qu’il
3402 e de faire aboutir des réformes. Mais personne ne la prépare. M. Staline a d’autres plans, et Ce soir a d’autres vertus. S
3403 ée, donc sanglante, donc destinée à se figer dans le rictus d’une dictature. Tout le monde le sent, tout le monde le crain
3404 ger dans le rictus d’une dictature. Tout le monde le sent, tout le monde le craint — et le désire sans se l’avouer. Voilà
3405 e dictature. Tout le monde le sent, tout le monde le craint — et le désire sans se l’avouer. Voilà pourquoi personne ne bo
3406 ut le monde le sent, tout le monde le craint — et le désire sans se l’avouer. Voilà pourquoi personne ne bouge. C’est effr
3407 t, tout le monde le craint — et le désire sans se l’ avouer. Voilà pourquoi personne ne bouge. C’est effrayant, cette immob
3408 e bouge. C’est effrayant, cette immobilité devant le péril. La dictature fascine les masses, et les élites. Sous prétexte
3409 ’est effrayant, cette immobilité devant le péril. La dictature fascine les masses, et les élites. Sous prétexte de lui rés
3410 immobilité devant le péril. La dictature fascine les masses, et les élites. Sous prétexte de lui résister, les voilà qui d
3411 ant le péril. La dictature fascine les masses, et les élites. Sous prétexte de lui résister, les voilà qui d’elles-mêmes se
3412 es, et les élites. Sous prétexte de lui résister, les voilà qui d’elles-mêmes se mettent en rang, lèvent le poing, acclamen
3413 oilà qui d’elles-mêmes se mettent en rang, lèvent le poing, acclament des caporaux. Ainsi l’Autriche fascinée s’est jetée
3414 g, lèvent le poing, acclament des caporaux. Ainsi l’ Autriche fascinée s’est jetée dans la gueule du dragon, après avoir tr
3415 oraux. Ainsi l’Autriche fascinée s’est jetée dans la gueule du dragon, après avoir trompé et désarmé la résistance proléta
3416 a gueule du dragon, après avoir trompé et désarmé la résistance prolétarienne. On a refoulé dès sa naissance la révolution
3417 ance prolétarienne. On a refoulé dès sa naissance la révolution de 36. D’où le « complexe » qui s’est noué. Complexe fasci
3418 efoulé dès sa naissance la révolution de 36. D’où le « complexe » qui s’est noué. Complexe fasciste, avoué sous le nom d’a
3419 e » qui s’est noué. Complexe fasciste, avoué sous le nom d’antifascisme, c’est normal. On n’arrête pas une révolution lors
3420 e révolution lorsqu’elle est nécessaire, et c’est le cas. Mais il arrive qu’on la dénature en la refoulant trop longtemps.
3421 nécessaire, et c’est le cas. Mais il arrive qu’on la dénature en la refoulant trop longtemps. Elle cherche alors d’autres
3422 c’est le cas. Mais il arrive qu’on la dénature en la refoulant trop longtemps. Elle cherche alors d’autres voies, et les t
3423 longtemps. Elle cherche alors d’autres voies, et les trouve. Encore un peu de mystique Front populaire, encore quelques ré
3424 à contre-fins, quelques crises gouvernementales, la livre à 600, le chômage ; — et le premier dictateur venu tirera les c
3425 quelques crises gouvernementales, la livre à 600, le chômage ; — et le premier dictateur venu tirera les conclusions logiq
3426 e chômage ; — et le premier dictateur venu tirera les conclusions logiques. Sera-t-il Français ? Je voudrais me tromper, cr
3427 Rougemont Denis de, « Une révolution refoulée », La Nouvelle Revue française, Paris, juillet 1938, p. 158-159.
35 1938, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Alice au pays des merveilles, par Lewis Carroll (août 1938)
3428 merveilles, par Lewis Carroll (août 1938)am Si l’ on songe que le conte est par essence un récit cocasse et en quelque m
3429 Lewis Carroll (août 1938)am Si l’on songe que le conte est par essence un récit cocasse et en quelque manière libérate
3430 et en quelque manière libérateur, on conçoit que les meilleurs sujets de contes sont les plus abstraitement logiques. La l
3431 n conçoit que les meilleurs sujets de contes sont les plus abstraitement logiques. La logique enfantine est bien plus proch
3432 s de contes sont les plus abstraitement logiques. La logique enfantine est bien plus proche du raisonnement mathématique q
3433 n plus proche du raisonnement mathématique que de la raison avertie, donc impure. Elle opère en toute liberté sur un nombr
3434 ombre restreint de données qu’elle considère dans l’ absolu, et elle en tire des déductions exactes, qui se trouvent par là
3435 s exactes, qui se trouvent par là même contredire l’ expérience vécue et les règles sociales. D’où le cocasse et le sentime
3436 vent par là même contredire l’expérience vécue et les règles sociales. D’où le cocasse et le sentiment de libération. En ou
3437 e l’expérience vécue et les règles sociales. D’où le cocasse et le sentiment de libération. En outre, quoi de plus importa
3438 vécue et les règles sociales. D’où le cocasse et le sentiment de libération. En outre, quoi de plus important pour un enf
3439 outre, quoi de plus important pour un enfant que la comparaison des grandeurs — « plus grand que » et « plus petit que »
3440 rand que » et « plus petit que » —, qui est aussi le fondement de toute mathématique. Ces remarques peuvent nous orienter
3441 hématicien —, et d’Alice en particulier. On dit à l’ enfant : mange ta soupe et tu deviendras grand. Donc il peut exister d
3442 onc il peut exister des aliments qui produiraient l’ effet inverse ? Et l’imagination peut aisément accélérer ces deux effe
3443 es aliments qui produiraient l’effet inverse ? Et l’ imagination peut aisément accélérer ces deux effets. Qu’en résultera-t
3444 accélérer ces deux effets. Qu’en résultera-t-il ? Le rêve logique qu’est le conte de Carroll nous apparaît alors comme une
3445 ts. Qu’en résultera-t-il ? Le rêve logique qu’est le conte de Carroll nous apparaît alors comme une série de variations su
3446 apparaît alors comme une série de variations sur le thème de la relativité dans l’espace et le temps. Tantôt géante et ta
3447 ors comme une série de variations sur le thème de la relativité dans l’espace et le temps. Tantôt géante et tantôt naine,
3448 de variations sur le thème de la relativité dans l’ espace et le temps. Tantôt géante et tantôt naine, Alice expérimente c
3449 ns sur le thème de la relativité dans l’espace et le temps. Tantôt géante et tantôt naine, Alice expérimente chaque fois u
3450 e fois elle se sent plus forte ou plus faible que les règles sociales admises. Supposées « justes » pour le niveau « normal
3451 ègles sociales admises. Supposées « justes » pour le niveau « normal », ces règles paraissent absurdes quand Alice est plu
3452 e, et vexatoires quand elle est plus petite. Dans les deux cas, elles lui deviennent problématiques. D’où les discussions q
3453 ux cas, elles lui deviennent problématiques. D’où les discussions qu’elle engage avec les animaux parlants, créatures curie
3454 atiques. D’où les discussions qu’elle engage avec les animaux parlants, créatures curieusement acharnées à lui opposer une
3455 rnées à lui opposer une logique qui, n’étant plus le fait des grandes personnes — « ce qui va de soi » — apparaît tantôt r
3456 » — apparaît tantôt ridicule, tantôt tyrannique à l’ excès. Ce Lièvre de Mars, ce Loir et ce Chapelier fou, on croirait une
3457 u, on croirait une préfiguration des logiciens de l’ école de Vienne. Et la discussion sur le temps, au cours du « Thé louf
3458 figuration des logiciens de l’école de Vienne. Et la discussion sur le temps, au cours du « Thé loufoque » où il est toujo
3459 iciens de l’école de Vienne. Et la discussion sur le temps, au cours du « Thé loufoque » où il est toujours cinq heures, a
3460 , constamment réfutée par un formalisme délirant. Le pire, c’est que la plupart des discussions pèchent par l’absence d’un
3461 c’est que la plupart des discussions pèchent par l’ absence d’un élément de commune mesure : d’où l’impression d’entrave,
3462 r l’absence d’un élément de commune mesure : d’où l’ impression d’entrave, de cauchemar. Impossible de savoir qui a gagné,
3463 rincipales du jeu est omise ou inobservée. (Ainsi la partie de croquet, la discussion avec le bourreau qui refuse de décap
3464 omise ou inobservée. (Ainsi la partie de croquet, la discussion avec le bourreau qui refuse de décapiter un chat dont la t
3465 . (Ainsi la partie de croquet, la discussion avec le bourreau qui refuse de décapiter un chat dont la tête seule est visib
3466 le bourreau qui refuse de décapiter un chat dont la tête seule est visible, etc.). Et pourtant, ce n’est que d’un jeu qu’
3467 e n’est que d’un jeu qu’il s’agit. Alice en garde la conscience secrète — comme dans le rêve — et peut s’en libérer dès qu
3468 Alice en garde la conscience secrète — comme dans le rêve — et peut s’en libérer dès que l’absurdité devient intolérable o
3469 comme dans le rêve — et peut s’en libérer dès que l’ absurdité devient intolérable ou menaçante. D’ailleurs, on pourrait pr
3470 n pourrait proposer une explication parallèle par le langage, autre problème fondamental pour un enfant. Les deux hypothès
3471 ngage, autre problème fondamental pour un enfant. Les deux hypothèses rendent compte de la plupart des « gags » dont se com
3472 compte de la plupart des « gags » dont se compose le récit. Et parfois les pièges logiques ont une double détente par cale
3473 des « gags » dont se compose le récit. Et parfois les pièges logiques ont une double détente par calembour. Tout cela est a
3474 calembour. Tout cela est assez bien symbolisé par la déclaration de la Tortue à Tête de Veau, qui croit que les quatre opé
3475 la est assez bien symbolisé par la déclaration de la Tortue à Tête de Veau, qui croit que les quatre opérations arithmétiq
3476 ration de la Tortue à Tête de Veau, qui croit que les quatre opérations arithmétiques sont l’Ambition, la Distraction, la L
3477 roit que les quatre opérations arithmétiques sont l’ Ambition, la Distraction, la Laidification et la Dérision. Mais ici se
3478 quatre opérations arithmétiques sont l’Ambition, la Distraction, la Laidification et la Dérision. Mais ici se poserait le
3479 ns arithmétiques sont l’Ambition, la Distraction, la Laidification et la Dérision. Mais ici se poserait le problème de la
3480 t l’Ambition, la Distraction, la Laidification et la Dérision. Mais ici se poserait le problème de la version française du
3481 aidification et la Dérision. Mais ici se poserait le problème de la version française du conte ; celle de René Bour me par
3482 la Dérision. Mais ici se poserait le problème de la version française du conte ; celle de René Bour me paraît scrupuleuse
3483 arée ici ou là par des préciosités indéfendables. Les dessins sont d’une meilleure plume. am. Rougemont Denis de, « [Com
3484 ] Lewis Carroll, Alice au pays des merveilles  », La Nouvelle Revue française, Paris, août 1938, p. 328-329.
36 1938, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Page d’histoire (novembre 1938)
3485 novembre 1938)an D’un manuel futur : Leçon sur la crise des minorités en 1938. 1. Caractérisez l’état politique de l’Eu
3486 r la crise des minorités en 1938. 1. Caractérisez l’ état politique de l’Europe en 1938. — Les démocraties de l’Ouest avaie
3487 ités en 1938. 1. Caractérisez l’état politique de l’ Europe en 1938. — Les démocraties de l’Ouest avaient fondé leur paix s
3488 actérisez l’état politique de l’Europe en 1938. —  Les démocraties de l’Ouest avaient fondé leur paix sur deux principes : d
3489 litique de l’Europe en 1938. — Les démocraties de l’ Ouest avaient fondé leur paix sur deux principes : droit des peuples à
3490 nternational. Au nom du premier principe fut créé l’ État tchèque, au nom du second, la SDN. Mais le jacobinisme des démocr
3491 incipe fut créé l’État tchèque, au nom du second, la SDN. Mais le jacobinisme des démocraties (centralisation rigide, conf
3492 éé l’État tchèque, au nom du second, la SDN. Mais le jacobinisme des démocraties (centralisation rigide, confusion de l’Ét
3493 démocraties (centralisation rigide, confusion de l’ État et de la Nation) s’opposait dans le fait à toute application honn
3494 (centralisation rigide, confusion de l’État et de la Nation) s’opposait dans le fait à toute application honnête des deux
3495 fusion de l’État et de la Nation) s’opposait dans le fait à toute application honnête des deux principes. D’une part la SD
3496 pplication honnête des deux principes. D’une part la SDN ne fut pas une fédération, aucun des États constituants n’ayant r
3497 noncé à aucune de ses prérogatives au bénéfice de la Société ; d’autre part l’État tchèque opprima ses propres minorités,
3498 ogatives au bénéfice de la Société ; d’autre part l’ État tchèque opprima ses propres minorités, leur imposant un régime ce
3499 spiré du modèle français. 2. Sur quoi se basaient les revendications hitlériennes ? — Les dictateurs du Centre européen fur
3500 i se basaient les revendications hitlériennes ? —  Les dictateurs du Centre européen furent les premiers à s’apercevoir du p
3501 politique que nous venons de définir. Ils eurent l’ habileté de baser leurs revendications, à la fois sur l’un des princip
3502 endications, à la fois sur l’un des principes que les démocraties prétendaient défendre, et sur le système qu’elles pratiqu
3503 que les démocraties prétendaient défendre, et sur le système qu’elles pratiquaient en fait. C’est ainsi que l’Allemagne ex
3504 me qu’elles pratiquaient en fait. C’est ainsi que l’ Allemagne exigea l’autonomie des Sudètes au nom du droit de libre disp
3505 aient en fait. C’est ainsi que l’Allemagne exigea l’ autonomie des Sudètes au nom du droit de libre disposition des peuples
3506 ition des peuples, puis leur annexion au nom de «  l’ unité nationale ». 3. Quelle fut la réponse des démocraties ? — Il éta
3507 on au nom de « l’unité nationale ». 3. Quelle fut la réponse des démocraties ? — Il était fatal, dans ces conditions, que
3508 ties ? — Il était fatal, dans ces conditions, que les démocraties se laissassent convaincre par le « bon droit » des exigen
3509 que les démocraties se laissassent convaincre par le « bon droit » des exigences allemandes. Et c’est pourquoi, lorsqu’en
3510 des. Et c’est pourquoi, lorsqu’en septembre 1938, l’ Allemagne appuya sa revendication de menaces militaires, les démocrati
3511 ne appuya sa revendication de menaces militaires, les démocraties cédèrent (entrevue de Berchtesgaden). 4. Pourquoi le conf
3512 cédèrent (entrevue de Berchtesgaden). 4. Pourquoi le conflit s’aggrava-t-il subitement ? — Le litige était réglé en princi
3513 Pourquoi le conflit s’aggrava-t-il subitement ? —  Le litige était réglé en principe. Mais alors (entrevue de Godesberg), H
3514 is alors (entrevue de Godesberg), Hitler démasqua l’ aspect original (et non plus jacobin) de la dictature totalitaire : l’
3515 masqua l’aspect original (et non plus jacobin) de la dictature totalitaire : l’impérialisme religieux, ou sacral. Il exige
3516 t non plus jacobin) de la dictature totalitaire : l’ impérialisme religieux, ou sacral. Il exigea d’entrer en armes et sur
3517 ux, ou sacral. Il exigea d’entrer en armes et sur le champ dans les territoires sudètes. Une cession purement diplomatique
3518 Il exigea d’entrer en armes et sur le champ dans les territoires sudètes. Une cession purement diplomatique n’eût pas comp
3519 urement diplomatique n’eût pas compté à ses yeux. La religion dont il était le fondateur voulait le sacrifice sanglant (ou
3520 pas compté à ses yeux. La religion dont il était le fondateur voulait le sacrifice sanglant (ou son symbole), le viol de
3521 x. La religion dont il était le fondateur voulait le sacrifice sanglant (ou son symbole), le viol de la victime, la « libé
3522 r voulait le sacrifice sanglant (ou son symbole), le viol de la victime, la « libération » violente de la proie désirée (g
3523 e sacrifice sanglant (ou son symbole), le viol de la victime, la « libération » violente de la proie désirée (guerre limit
3524 sanglant (ou son symbole), le viol de la victime, la « libération » violente de la proie désirée (guerre limitée). 5. Quel
3525 viol de la victime, la « libération » violente de la proie désirée (guerre limitée). 5. Quelle fut la réaction de l’Europe
3526 la proie désirée (guerre limitée). 5. Quelle fut la réaction de l’Europe ? — L’opinion démocratique apparut désorientée p
3527 ée (guerre limitée). 5. Quelle fut la réaction de l’ Europe ? — L’opinion démocratique apparut désorientée par cette exigen
3528 mitée). 5. Quelle fut la réaction de l’Europe ? —  L’ opinion démocratique apparut désorientée par cette exigence purement «
3529 rientée par cette exigence purement « rituelle ». Les uns remarquaient qu’il n’y avait guère de différence entre Berchtesga
3530 e de différence entre Berchtesgaden et Godesberg. Les autres pensaient que l’exigence d’entrer en armes était une « querell
3531 chtesgaden et Godesberg. Les autres pensaient que l’ exigence d’entrer en armes était une « querelle d’Allemands », une rod
3532 ut voir et dire qu’il y avait là un fait nouveau, le signe d’une volonté d’hégémonie. C’était traduire en termes classique
3533 ’hégémonie. C’était traduire en termes classiques la réalité pressentie de la nouvelle religion totalitaire. D’ailleurs, l
3534 ire en termes classiques la réalité pressentie de la nouvelle religion totalitaire. D’ailleurs, les réactions des masses n
3535 de la nouvelle religion totalitaire. D’ailleurs, les réactions des masses ne tardèrent pas à démontrer que Chamberlain ava
3536 ne des tendances fondamentales et instinctives de l’ Occident : la résistance à toute hégémonie, au nom d’un idéal latent d
3537 ces fondamentales et instinctives de l’Occident : la résistance à toute hégémonie, au nom d’un idéal latent de fédération
3538 pied d’égalité. Une vague de fond s’éleva contre la prétention allemande, que l’on sentait, obscurément, ruineuse pour l’
3539 fond s’éleva contre la prétention allemande, que l’ on sentait, obscurément, ruineuse pour l’avenir confédéral de l’Europe
3540 nde, que l’on sentait, obscurément, ruineuse pour l’ avenir confédéral de l’Europe. Hitler comprit que son heure n’était pa
3541 obscurément, ruineuse pour l’avenir confédéral de l’ Europe. Hitler comprit que son heure n’était pas encore venue. Il se v
3542 pas encore venue. Il se vit contraint d’accepter la réunion à Munich d’une « Diète » de gouvernements égaux, qui régla le
3543 d’une « Diète » de gouvernements égaux, qui régla le problème à l’avantage matériel de l’Allemagne, mais sur une base d’ar
3544 » de gouvernements égaux, qui régla le problème à l’ avantage matériel de l’Allemagne, mais sur une base d’arbitrage intern
3545 x, qui régla le problème à l’avantage matériel de l’ Allemagne, mais sur une base d’arbitrage international préfigurant ain
3546 exclusif de toute hégémonie. 6. À qui profitèrent les accords de Munich ? — Cette victoire symbolique du principe fédératif
3547 ue du principe fédératif ne fut pas exploitée par les nations qui l’avaient remportée comme malgré elles et en dépit de leu
3548 édératif ne fut pas exploitée par les nations qui l’ avaient remportée comme malgré elles et en dépit de leurs intérêts nat
3549 . En proie à des luttes intestines sans grandeur, les démocraties de l’Ouest ne surent tirer d’un événement aussi considéra
3550 ttes intestines sans grandeur, les démocraties de l’ Ouest ne surent tirer d’un événement aussi considérable que des conclu
3551 aient à faire état des pertes matérielles subies. Le bénéfice moral, incalculable, fut perdu. 7. Conclusion. — La voie éta
3552 moral, incalculable, fut perdu. 7. Conclusion. —  La voie était dès lors ouverte aux ambitions totalitaires, les dictateur
3553 tait dès lors ouverte aux ambitions totalitaires, les dictateurs ne trouvant plus devant eux que des États demeurés central
3554 s ils empruntaient leurs vieux systèmes mais pour les appliquer avec rigueur. Personne ne sut opposer au Führer l’idéal qui
3555 r avec rigueur. Personne ne sut opposer au Führer l’ idéal qui avait fait jusqu’alors la force et l’équilibre dynamique de
3556 oser au Führer l’idéal qui avait fait jusqu’alors la force et l’équilibre dynamique de l’Occident : l’utopie agissante d’u
3557 er l’idéal qui avait fait jusqu’alors la force et l’ équilibre dynamique de l’Occident : l’utopie agissante d’une fédératio
3558 jusqu’alors la force et l’équilibre dynamique de l’ Occident : l’utopie agissante d’une fédération des égaux, dont la seul
3559 la force et l’équilibre dynamique de l’Occident : l’ utopie agissante d’une fédération des égaux, dont la seule Suisse figu
3560 utopie agissante d’une fédération des égaux, dont la seule Suisse figurait le microcosme. C’est dans cette perspective his
3561 dération des égaux, dont la seule Suisse figurait le microcosme. C’est dans cette perspective historique que les événement
3562 osme. C’est dans cette perspective historique que les événements ultérieurs (colonisation intra-européenne, état de guerre
3563 apparus en leur temps, trouvent leur explication la moins douteuse. an. Rougemont Denis de, « Page d’histoire », La No
3564 . an. Rougemont Denis de, « Page d’histoire », La Nouvelle Revue française, Paris, novembre 1938, p. 866-867.
37 1939, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Propos sur la religion, par Alain (avril 1939)
3565 Propos sur la religion, par Alain (avril 1939)ao Ces « propos » s’égrènent de 19
3566 Ces « propos » s’égrènent de 1908 à 1935, mais la position de l’auteur n’a pas varié durant ce temps. Elle se ramène, m
3567  » s’égrènent de 1908 à 1935, mais la position de l’ auteur n’a pas varié durant ce temps. Elle se ramène, me semble-t-il,
3568 e temps. Elle se ramène, me semble-t-il, à ceci : la religion, c’est la pratique moyenne du catholicisme français. Il s’ag
3569 mène, me semble-t-il, à ceci : la religion, c’est la pratique moyenne du catholicisme français. Il s’agit moins de la déni
3570 enne du catholicisme français. Il s’agit moins de la dénigrer que de la « réaliser » en la débarrassant de ses « croyances
3571 e français. Il s’agit moins de la dénigrer que de la « réaliser » en la débarrassant de ses « croyances fantastiques » et
3572 it moins de la dénigrer que de la « réaliser » en la débarrassant de ses « croyances fantastiques » et de sa « méthode arr
3573 » et de sa « méthode arriérée », qui est celle de l’ autorité (p. 72). La « vraie foi », vous la trouverez donc aujourd’hui
3574 arriérée », qui est celle de l’autorité (p. 72). La « vraie foi », vous la trouverez donc aujourd’hui chez l’instituteur
3575 lle de l’autorité (p. 72). La « vraie foi », vous la trouverez donc aujourd’hui chez l’instituteur laïque. Cette déclarati
3576 ie foi », vous la trouverez donc aujourd’hui chez l’ instituteur laïque. Cette déclaration ouvre et ferme le recueil (p. 23
3577 tituteur laïque. Cette déclaration ouvre et ferme le recueil (p. 23 et 286). Elle le situe dans les cadres de la Républiqu
3578 on ouvre et ferme le recueil (p. 23 et 286). Elle le situe dans les cadres de la République radicale. Ainsi le catholicism
3579 rme le recueil (p. 23 et 286). Elle le situe dans les cadres de la République radicale. Ainsi le catholicisme, interprété p
3580 (p. 23 et 286). Elle le situe dans les cadres de la République radicale. Ainsi le catholicisme, interprété par Alain, ser
3581 dans les cadres de la République radicale. Ainsi le catholicisme, interprété par Alain, serait une sagesse éternelle qu’i
3582 laïciser. Point d’anticléricalisme, car « devant le regard positif, toute religion finit par être vraie », et même « l’ob
3583 toute religion finit par être vraie », et même «  l’ obligation de croire ne digère pas beaucoup du devoir de penser » (com
3584 r compte des données concrètes du christianisme : le péché, le salut, le drame de la révolte et de l’amour. Mais elle spéc
3585 es données concrètes du christianisme : le péché, le salut, le drame de la révolte et de l’amour. Mais elle spécule volont
3586 concrètes du christianisme : le péché, le salut, le drame de la révolte et de l’amour. Mais elle spécule volontiers sur l
3587 u christianisme : le péché, le salut, le drame de la révolte et de l’amour. Mais elle spécule volontiers sur les avantages
3588 le péché, le salut, le drame de la révolte et de l’ amour. Mais elle spécule volontiers sur les avantages et inconvénients
3589 e et de l’amour. Mais elle spécule volontiers sur les avantages et inconvénients des « preuves » ou de l’absence de preuves
3590 avantages et inconvénients des « preuves » ou de l’ absence de preuves en matière de « croyance », débat dont je ne trouve
3591 royance », débat dont je ne trouve pas trace dans les évangiles, s’il est vrai qu’il encombre une bonne part de la théologi
3592 s, s’il est vrai qu’il encombre une bonne part de la théologie, surtout catholique. Tout cela, je le crains, relève d’un m
3593 e la théologie, surtout catholique. Tout cela, je le crains, relève d’un malentendu, courant sur le sens du mot « foi ». J
3594 je le crains, relève d’un malentendu, courant sur le sens du mot « foi ». Je voudrais au moins l’indiquer. Un chrétien sa
3595 sur le sens du mot « foi ». Je voudrais au moins l’ indiquer. Un chrétien sait que sa foi n’est nullement le contraire du
3596 uer. Un chrétien sait que sa foi n’est nullement le contraire du doute intellectuel, mais le contraire du péché, lequel n
3597 ullement le contraire du doute intellectuel, mais le contraire du péché, lequel n’est nullement une erreur morale, mais un
3598 erreur morale, mais un état de révolte active de la créature (même lorsqu’il se déguise en bonne volonté souriante). La f
3599 lorsqu’il se déguise en bonne volonté souriante). La foi, au sens biblique, s’oppose expressément à la religion en général
3600 La foi, au sens biblique, s’oppose expressément à la religion en général, avec ses rites et ses croyances dont Alain respe
3601 ec ses rites et ses croyances dont Alain respecte la forme et laïcise le contenu. « La vraie religion est le culte des mor
3602 croyances dont Alain respecte la forme et laïcise le contenu. « La vraie religion est le culte des morts », dit-il après A
3603 Alain respecte la forme et laïcise le contenu. «  La vraie religion est le culte des morts », dit-il après Auguste Comte.
3604 me et laïcise le contenu. « La vraie religion est le culte des morts », dit-il après Auguste Comte. Je le pense aussi. (Vo
3605 culte des morts », dit-il après Auguste Comte. Je le pense aussi. (Voyez le racisme.) Mais pour le chrétien, « la foi est
3606 il après Auguste Comte. Je le pense aussi. (Voyez le racisme.) Mais pour le chrétien, « la foi est la substance des choses
3607 Je le pense aussi. (Voyez le racisme.) Mais pour le chrétien, « la foi est la substance des choses espérées ». Ce qu’un e
3608 ssi. (Voyez le racisme.) Mais pour le chrétien, «  la foi est la substance des choses espérées ». Ce qu’un esprit comme cel
3609 le racisme.) Mais pour le chrétien, « la foi est la substance des choses espérées ». Ce qu’un esprit comme celui d’Alain
3610 ne dis pas que ce soit négligeable.) Pour situer la sagesse d’Alain, qu’on songe à la folie d’un Kierkegaard. Alors éclat
3611 e.) Pour situer la sagesse d’Alain, qu’on songe à la folie d’un Kierkegaard. Alors éclate le conflit véritable entre l’hum
3612 n songe à la folie d’un Kierkegaard. Alors éclate le conflit véritable entre l’humanisme et la foi, le scandale au sens pa
3613 rkegaard. Alors éclate le conflit véritable entre l’ humanisme et la foi, le scandale au sens paulinien, tout ce que le sag
3614 éclate le conflit véritable entre l’humanisme et la foi, le scandale au sens paulinien, tout ce que le sage jugera toujou
3615 le conflit véritable entre l’humanisme et la foi, le scandale au sens paulinien, tout ce que le sage jugera toujours « hor
3616 a foi, le scandale au sens paulinien, tout ce que le sage jugera toujours « hors de propos » d’envisager. Le sérieux même
3617 e jugera toujours « hors de propos » d’envisager. Le sérieux même du christianisme.51 Alain dit quelque part n’avoir jama
3618 ais connu de « vrai croyant » qui ne vive « selon la peur ». Serait-ce qu’il n’a jamais rencontré que des hommes « religie
3619 mes « religieux », non des chrétiens vivant selon la foi et capables de lui faire pressentir que ses observations toujours
3620 nieuses, souvent justes, ne portent guère que sur les résidus ou les empreintes psychologiques et historiques du catholicis
3621 t justes, ne portent guère que sur les résidus ou les empreintes psychologiques et historiques du catholicisme français, en
3622 es du catholicisme français, en tant que, vidé de la foi, il demeure une « religion » ? Qu’il poursuive donc son enquête,
3623 nt pas à avoir raison comme Napoléon, qui faisait les demandes et les réponses. 51. On me dira que mon point de vue est p
3624 aison comme Napoléon, qui faisait les demandes et les réponses. 51. On me dira que mon point de vue est partiel, dogmatiq
3625 iel, dogmatique, confessionnel, etc. Bien sûr. Je le donne pour tel. Il faut des repères pour juger. La critique moderne l
3626 e donne pour tel. Il faut des repères pour juger. La critique moderne l’oublie un peu, animée d’une méfiance étrange pour
3627 faut des repères pour juger. La critique moderne l’ oublie un peu, animée d’une méfiance étrange pour celui qui déclare se
3628 our celui qui déclare ses valeurs, — en dehors de la politique, bien entendu. ao. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] A
3629 mont Denis de, « [Compte rendu] Alain, Propos sur la religion  », La Nouvelle Revue française, Paris, avril 1939, p. 704-7
3630  [Compte rendu] Alain, Propos sur la religion  », La Nouvelle Revue française, Paris, avril 1939, p. 704-705.
38 1939, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Don Juan (juillet 1939)
3631 et de soie, dressé sur ses ergots de grand ténor, l’ on est tenté de ne voir en lui que le feu naturel du désir, — une espè
3632 grand ténor, l’on est tenté de ne voir en lui que le feu naturel du désir, — une espèce d’animalité véhémente, et comme in
3633 malité véhémente, et comme innocente… Mais jamais la Nature n’a rien produit de pareil. Vous sentez bien qu’il y a du démo
3634 de polémique anxieuse, de méchanceté et de défi : la main tendue au Commandeur, dans le dernier acte de Mozart. Non, ce n’
3635 dans le dernier acte de Mozart. Non, ce n’est pas l’ animal, mais l’homme ; et non d’avant, mais d’après la morale. Point d
3636 acte de Mozart. Non, ce n’est pas l’animal, mais l’ homme ; et non d’avant, mais d’après la morale. Point de Don Juan ni c
3637 imal, mais l’homme ; et non d’avant, mais d’après la morale. Point de Don Juan ni chez les « bons sauvages » ni chez les «
3638 mais d’après la morale. Point de Don Juan ni chez les « bons sauvages » ni chez les « primitifs » qu’on nous décrit. Don Ju
3639 de Don Juan ni chez les « bons sauvages » ni chez les « primitifs » qu’on nous décrit. Don Juan suppose une société encombr
3640 elle rêve moins de se délivrer que d’abuser. Dans le vertige de l’anarchie où il se plaît, ce grand seigneur n’oublie jama
3641 s de se délivrer que d’abuser. Dans le vertige de l’ anarchie où il se plaît, ce grand seigneur n’oublie jamais son rang. S
3642 neur n’oublie jamais son rang. Son naturel, c’est le mépris ; rien n’est plus loin de la nature. Voyez comme il se sert de
3643 aturel, c’est le mépris ; rien n’est plus loin de la nature. Voyez comme il se sert des femmes : incapable de les posséder
3644 Voyez comme il se sert des femmes : incapable de les posséder, il les viole d’abord moralement pour s’imposer à l’animal,
3645 e sert des femmes : incapable de les posséder, il les viole d’abord moralement pour s’imposer à l’animal, et aussitôt prise
3646 il les viole d’abord moralement pour s’imposer à l’ animal, et aussitôt prises les rejette, comme si c’était le fait du cr
3647 ent pour s’imposer à l’animal, et aussitôt prises les rejette, comme si c’était le fait du crime et non le plaisir qu’il ch
3648 et aussitôt prises les rejette, comme si c’était le fait du crime et non le plaisir qu’il cherchait. Polémiste perpétuel,
3649 rejette, comme si c’était le fait du crime et non le plaisir qu’il cherchait. Polémiste perpétuel, il se trouve entièremen
3650 perpétuel, il se trouve entièrement déterminé par le bon et le juste — contre eux. Si les lois de la morale n’existaient p
3651 il se trouve entièrement déterminé par le bon et le juste — contre eux. Si les lois de la morale n’existaient pas, il les
3652 déterminé par le bon et le juste — contre eux. Si les lois de la morale n’existaient pas, il les inventerait pour les viole
3653 r le bon et le juste — contre eux. Si les lois de la morale n’existaient pas, il les inventerait pour les violer. Et c’est
3654 ux. Si les lois de la morale n’existaient pas, il les inventerait pour les violer. Et c’est cela qui nous fait pressentir l
3655 morale n’existaient pas, il les inventerait pour les violer. Et c’est cela qui nous fait pressentir la nature spirituelle
3656 es violer. Et c’est cela qui nous fait pressentir la nature spirituelle de son secret, si bien masqué par le prétexte de l
3657 ure spirituelle de son secret, si bien masqué par le prétexte de l’instinct. Aux sommets de l’esprit révolté, on verra Nie
3658 de son secret, si bien masqué par le prétexte de l’ instinct. Aux sommets de l’esprit révolté, on verra Nietzsche, cent an
3659 qué par le prétexte de l’instinct. Aux sommets de l’ esprit révolté, on verra Nietzsche, cent ans plus tard, renouveler ce
3660 défi mortel. Mais quoi ? Faut-il aller si haut ? La recherche « toute naturelle » de l’intensité du désir ne peut-elle ex
3661 ler si haut ? La recherche « toute naturelle » de l’ intensité du désir ne peut-elle expliquer à elle seule cette inconstan
3662 ette inconstance forcenée ? Alors Don Juan serait l’ homme de la première rencontre, de la plus excitante victoire ? « La n
3663 Juan serait l’homme de la première rencontre, de la plus excitante victoire ? « La nouveauté est le tyran de notre âme »,
3664 ière rencontre, de la plus excitante victoire ? «  La nouveauté est le tyran de notre âme », écrit le vieux Casanova. Mais
3665 e la plus excitante victoire ? « La nouveauté est le tyran de notre âme », écrit le vieux Casanova. Mais déjà ce n’est plu
3666 « La nouveauté est le tyran de notre âme », écrit le vieux Casanova. Mais déjà ce n’est plus l’homme du plaisir qui parle
3667 écrit le vieux Casanova. Mais déjà ce n’est plus l’ homme du plaisir qui parle ainsi. La volupté du vrai sensuel commence
3668 ce n’est plus l’homme du plaisir qui parle ainsi. La volupté du vrai sensuel commence au-delà de ces moments que Don Juan
3669 ine atteints. Faudra-t-il se résoudre à soumettre le cas aux docteurs indiscrets de l’école viennoise ? Le beau sujet ! Il
3670 dre à soumettre le cas aux docteurs indiscrets de l’ école viennoise ? Le beau sujet ! Ils ne l’ont pas manqué. Pour eux au
3671 as aux docteurs indiscrets de l’école viennoise ? Le beau sujet ! Ils ne l’ont pas manqué. Pour eux aussi, Don Juan serait
3672 ets de l’école viennoise ? Le beau sujet ! Ils ne l’ ont pas manqué. Pour eux aussi, Don Juan serait le contraire de ce que
3673 l’ont pas manqué. Pour eux aussi, Don Juan serait le contraire de ce que l’on croit, il souffrirait d’une anxiété secrète
3674 eux aussi, Don Juan serait le contraire de ce que l’ on croit, il souffrirait d’une anxiété secrète déjà voisine de l’impui
3675 souffrirait d’une anxiété secrète déjà voisine de l’ impuissance. Et il est vrai que celui qui cède à cet attrait superfici
3676 cède à cet attrait superficiel que presque toutes les jolies femmes peuvent exercer sur presque tous les hommes, n’évoque p
3677 es jolies femmes peuvent exercer sur presque tous les hommes, n’évoque pas une idée de santé. Mais dans cette furie insolen
3678 critères spirituels ? Don Juan serait par exemple le type de l’homme qui n’atteint pas au plan de la personne, où pourrait
3679 irituels ? Don Juan serait par exemple le type de l’ homme qui n’atteint pas au plan de la personne, où pourrait se manifes
3680 e le type de l’homme qui n’atteint pas au plan de la personne, où pourrait se manifester ce qu’il y a d’unique dans un êtr
3681 que dans un être. Pourquoi ne peut-il désirer que la nouveauté dans la femme ? Et pourquoi désire-t-on du nouveau, du nouv
3682 Pourquoi ne peut-il désirer que la nouveauté dans la femme ? Et pourquoi désire-t-on du nouveau, du nouveau à tout prix, q
3683 est pas ? Celui qui a, vit de sa possession et ne l’ abandonne pas pour l’incertain, — entendez : s’il possède vraiment. Do
3684 , vit de sa possession et ne l’abandonne pas pour l’ incertain, — entendez : s’il possède vraiment. Don Juan serait l’homme
3685 entendez : s’il possède vraiment. Don Juan serait l’ homme qui ne peut pas aimer, parce qu’aimer c’est d’abord choisir, et
3686 r choisir il faudrait être, et il n’est pas. Mais le contraire n’est pas moins vraisemblable : Don Juan cherchant partout
3687 ype » de beauté féminine (souvenir inconscient de la mère) — trop vite séduit par la plus fugitive ressemblance, toujours
3688 ir inconscient de la mère) — trop vite séduit par la plus fugitive ressemblance, toujours déçu par la réalité dès qu’il l’
3689 la plus fugitive ressemblance, toujours déçu par la réalité dès qu’il l’approche, et déjà s’élançant vers d’autres appare
3690 semblance, toujours déçu par la réalité dès qu’il l’ approche, et déjà s’élançant vers d’autres apparences, de plus en plus
3691 parences, de plus en plus angoissé et cruel… S’il le trouvait, ce « type » de femme rêvé ! J’imagine cette métamorphose. O
3692 de femme rêvé ! J’imagine cette métamorphose. On le voit interrompre sa course, changer soudain de contenance, baisser la
3693 sa course, changer soudain de contenance, baisser la tête, s’assombrir, comme saisi d’une timidité, et fasciné pour la pre
3694 ne timidité, et fasciné pour la première fois par la révélation d’amour, se muer en l’image de Tristan. Mais il ne trouver
3695 emière fois par la révélation d’amour, se muer en l’ image de Tristan. Mais il ne trouvera pas. Il est Don Juan parce qu’on
3696 arente, sa furia, son rythme dionysiaque. ⁂ Or si le don juanisme est une passion de l’esprit et non pas comme nous aimion
3697 iaque. ⁂ Or si le don juanisme est une passion de l’ esprit et non pas comme nous aimions le croire, une exultation de l’in
3698 passion de l’esprit et non pas comme nous aimions le croire, une exultation de l’instinct, tout porte à supposer que cette
3699 s comme nous aimions le croire, une exultation de l’ instinct, tout porte à supposer que cette passion n’est pas toujours l
3700 ours liée au sexe. Et même il faut se demander si la sensualité, précisément, ne serait pas le domaine où Don Juan se révè
3701 nder si la sensualité, précisément, ne serait pas le domaine où Don Juan se révèle le moins dangereux. (Appelons ici dange
3702 t, ne serait pas le domaine où Don Juan se révèle le moins dangereux. (Appelons ici danger ce qui peut compromettre un cer
3703 peut compromettre un certain équilibre social que les mœurs ont pour but de maintenir, cet équilibre étant d’ailleurs bon o
3704 libre étant d’ailleurs bon ou mauvais.) C’est que le désir de nouveauté et de changement perpétuel, dès que l’esprit insat
3705 de nouveauté et de changement perpétuel, dès que l’ esprit insatiable l’excite, devient une menace pour la vie. En dérivan
3706 changement perpétuel, dès que l’esprit insatiable l’ excite, devient une menace pour la vie. En dérivant cette passion vers
3707 prit insatiable l’excite, devient une menace pour la vie. En dérivant cette passion vers le plaisir, la société se trouve
3708 enace pour la vie. En dérivant cette passion vers le plaisir, la société se trouve lui ménager des satisfactions qui l’épu
3709 a vie. En dérivant cette passion vers le plaisir, la société se trouve lui ménager des satisfactions qui l’épuisent, sans
3710 ciété se trouve lui ménager des satisfactions qui l’ épuisent, sans que l’ordre des choses ait à souffrir d’une dépense imp
3711 énager des satisfactions qui l’épuisent, sans que l’ ordre des choses ait à souffrir d’une dépense improductive. Certes Don
3712 est un tricheur, et même il ne vit que de cela. ( La banque de pharaon était la source unique des revenus de Casanova : sy
3713 l ne vit que de cela. (La banque de pharaon était la source unique des revenus de Casanova : symbole dont il nous donne ma
3714 asanova : symbole dont il nous donne maintes fois la clé.) Mais une tricherie constante est moins dangereuse que les faibl
3715 une tricherie constante est moins dangereuse que les faiblesses subites d’un honnête homme. On est en garde, et l’on conna
3716 s subites d’un honnête homme. On est en garde, et l’ on connaît le système, entièrement relatif aux règles du jeu. Imaginon
3717 n honnête homme. On est en garde, et l’on connaît le système, entièrement relatif aux règles du jeu. Imaginons un don juan
3718 don juanisme plus secret, une table de pharaon où l’ on mette sur les cartes des « valeurs » invisibles au lieu d’espèces s
3719 us secret, une table de pharaon où l’on mette sur les cartes des « valeurs » invisibles au lieu d’espèces sonnantes. Alors
3720 » invisibles au lieu d’espèces sonnantes. Alors «  la tricherie » cesse d’être une habileté vulgaire et profitable. Elle pe
3721 abileté vulgaire et profitable. Elle peut devenir l’ acte héroïque d’une loyauté sans scrupules, toutefois ressentie comme
3722 crime, du fait qu’elle institue un ordre neuf par le décret de sa rigueur. ⁂ Nietzsche s’est dressé face au siècle. Et l’a
3723 ueur. ⁂ Nietzsche s’est dressé face au siècle. Et l’ adversaire qu’il s’est choisi, c’est l’esprit de lourdeur, notre poids
3724 siècle. Et l’adversaire qu’il s’est choisi, c’est l’ esprit de lourdeur, notre poids naturel, notre faculté naturelle de re
3725 urel, notre faculté naturelle de retombement dans la coutume. L’immoraliste est comme le moraliste un ennemi vigilant de l
3726 faculté naturelle de retombement dans la coutume. L’ immoraliste est comme le moraliste un ennemi vigilant de l’instinct :
3727 ombement dans la coutume. L’immoraliste est comme le moraliste un ennemi vigilant de l’instinct : car s’il le glorifie c’e
3728 iste est comme le moraliste un ennemi vigilant de l’ instinct : car s’il le glorifie c’est par esprit de polémique, c’est q
3729 liste un ennemi vigilant de l’instinct : car s’il le glorifie c’est par esprit de polémique, c’est qu’il veut forcer la na
3730 par esprit de polémique, c’est qu’il veut forcer la nature autrement qu’on ne l’a fait jusqu’à lui. Polémiste perpétuel,
3731 st qu’il veut forcer la nature autrement qu’on ne l’ a fait jusqu’à lui. Polémiste perpétuel, Nietzsche se trouve entièreme
3732 el, Nietzsche se trouve entièrement déterminé par le bon et le juste — contre eux. Il va de défi en défi, excité puis exas
3733 che se trouve entièrement déterminé par le bon et le juste — contre eux. Il va de défi en défi, excité puis exaspéré par l
3734 . Il va de défi en défi, excité puis exaspéré par le silence ou les lâchetés de l’adversaire. Les idées se retournent au c
3735 i en défi, excité puis exaspéré par le silence ou les lâchetés de l’adversaire. Les idées se retournent au caprice de l’esp
3736 é puis exaspéré par le silence ou les lâchetés de l’ adversaire. Les idées se retournent au caprice de l’esprit : il n’y a
3737 é par le silence ou les lâchetés de l’adversaire. Les idées se retournent au caprice de l’esprit : il n’y a plus de vérité
3738 adversaire. Les idées se retournent au caprice de l’ esprit : il n’y a plus de vérité qui tienne. Les hommes se rendent ou
3739 de l’esprit : il n’y a plus de vérité qui tienne. Les hommes se rendent ou tombent dans le doute à la première séduction d’
3740 qui tienne. Les hommes se rendent ou tombent dans le doute à la première séduction d’une hypothèse scientifique. Il n’y a
3741 de foi qui affirme et qui maintienne en vertu de l’ absurde. Ah ! comme on se lasse de gagner à tout coup, pour peu qu’on
3742 e lasse de gagner à tout coup, pour peu qu’on ait l’ envie de nier des règles que personne n’ose plus dire inviolables ! Qu
3743 er pour une vertu dont on ne sait plus quelle est la fin ? Et toutes ces vérités qu’ils respectaient, voyez comme elles on
3744 ra donc s’en prendre à Dieu et à son Fils. Déjà «  le Dieu moral est réfuté ». Que va dire l’Autre ? C’est, dans la vie du
3745 l est réfuté ». Que va dire l’Autre ? C’est, dans la vie du Don Juan des vérités, l’heure de l’invitation au Commandeur. O
3746 tre ? C’est, dans la vie du Don Juan des vérités, l’ heure de l’invitation au Commandeur. Or Dieu se tait. Il ne relève pas
3747 , dans la vie du Don Juan des vérités, l’heure de l’ invitation au Commandeur. Or Dieu se tait. Il ne relève pas le défi. N
3748 au Commandeur. Or Dieu se tait. Il ne relève pas le défi. Nietzsche attend dans la nuit désertique des hauteurs. Une aube
3749 . Il ne relève pas le défi. Nietzsche attend dans la nuit désertique des hauteurs. Une aube vient. C’est encore l’aube de
3750 rtique des hauteurs. Une aube vient. C’est encore l’ aube de la terre. Personne n’a parlé. Dieu est mort ! De chaque idée,
3751 hauteurs. Une aube vient. C’est encore l’aube de la terre. Personne n’a parlé. Dieu est mort ! De chaque idée, de chaque
3752 yance, de chaque valeur, Nietzsche a voulu violer le secret ; et leur défaite rapide les rend toutes méprisables après la
3753 a voulu violer le secret ; et leur défaite rapide les rend toutes méprisables après la première possession. Pourquoi s’atta
3754 ’attarderait-il ? Elles n’étaient excitantes pour l’ esprit que par la fausse vertu qu’on leur prêtait. Mais aussitôt qu’el
3755 Elles n’étaient excitantes pour l’esprit que par la fausse vertu qu’on leur prêtait. Mais aussitôt qu’elles ont trahi leu
3756 ssitôt qu’elles ont trahi leur commune vulgarité, le triomphe perd toute saveur. Il faut détruire maintenant les valeurs n
3757 he perd toute saveur. Il faut détruire maintenant les valeurs neuves qu’on avait inventées pour la lutte. Il faut rejeter a
3758 ant les valeurs neuves qu’on avait inventées pour la lutte. Il faut rejeter avec dégoût ce que l’on désirait de toute sa f
3759 pour la lutte. Il faut rejeter avec dégoût ce que l’ on désirait de toute sa fougue ; et se rire des suiveurs, des successe
3760 s, des successeurs, de ces disciples enhardis par le triomphe ardent d’un autre, et qui déjà croient pouvoir abuser de ses
3761 vérités se sont rendues, et pas une seule n’a su le retenir. Qu’importent les « contradictions » ! Ce n’est pas pour bâti
3762 et pas une seule n’a su le retenir. Qu’importent les « contradictions » ! Ce n’est pas pour bâtir un système qu’il réfute,
3763 tème qu’il réfute, dénonce et détruit, c’est pour la joie du viol intellectuel. Comme Don Juan l’image de la Mère, Nietzsc
3764 pour la joie du viol intellectuel. Comme Don Juan l’ image de la Mère, Nietzsche poursuit l’image obscure, et à lui-même in
3765 e du viol intellectuel. Comme Don Juan l’image de la Mère, Nietzsche poursuit l’image obscure, et à lui-même infiniment se
3766 e Don Juan l’image de la Mère, Nietzsche poursuit l’ image obscure, et à lui-même infiniment secrète, d’une Vérité qui ne s
3767 , d’une Vérité qui ne se rendrait point, mais qui le posséderait à tout jamais, digne enfin de sa vraie passion ! Il traqu
3768 t ce qui fait mine de résister. Voluptés brèves — le temps d’un aphorisme — fulgurations toujours décevantes : ce n’est pa
3769 t de posséder… Ô haine de leurs vérités faibles ! La Vérité est morte ! Revivra-t-elle ? Car si ce Dieu est mort à tout j
3770 e haïr tout ce qui passe, tout ce qui cède, toute l’ impudeur et la lourdeur du monde. C’est au point de fureur dionysiaque
3771 qui passe, tout ce qui cède, toute l’impudeur et la lourdeur du monde. C’est au point de fureur dionysiaque où la joie de
3772 du monde. C’est au point de fureur dionysiaque où la joie de détruire devient douleur, et dans l’angoisse d’une puissance
3773 e où la joie de détruire devient douleur, et dans l’ angoisse d’une puissance anéantie par son succès, que Nietzsche a renc
3774 par son succès, que Nietzsche a rencontré soudain la fascinante idée du Retour éternel. Devant le roc de Sils-Maria on le
3775 dain la fascinante idée du Retour éternel. Devant le roc de Sils-Maria on le voit interrompre sa course, changer de conten
3776 du Retour éternel. Devant le roc de Sils-Maria on le voit interrompre sa course, changer de contenance, et pour la premièr
3777 r de contenance, et pour la première fois baisser la tête et adorer. Tout reviendra éternellement à cette minute, à cet in
3778 dra éternellement à cette minute, à cet instant ! L’ Éternité, c’est le retour des temps ; et non pas la victoire sur le te
3779 à cette minute, à cet instant ! L’Éternité, c’est le retour des temps ; et non pas la victoire sur le temps… Mais dans le
3780 ’Éternité, c’est le retour des temps ; et non pas la victoire sur le temps… Mais dans le temps, disait-il, Dieu est mort.
3781 le retour des temps ; et non pas la victoire sur le temps… Mais dans le temps, disait-il, Dieu est mort. Si Dieu est mort
3782  ; et non pas la victoire sur le temps… Mais dans le temps, disait-il, Dieu est mort. Si Dieu est mort, c’est donc qu’il a
3783 u revivra éternellement ! Ainsi Nietzsche devient le Tristan d’un Destin qu’il ne peut posséder que par l’amour éternellem
3784 ristan d’un Destin qu’il ne peut posséder que par l’ amour éternellement lointain. ⁂ Don Juan, tricheur, aime sans amour. S
3785 ur, aime sans amour. S’il gagne, c’est en violant la vérité des êtres. Nietzsche pose des valeurs qui détruisent les règle
3786 êtres. Nietzsche pose des valeurs qui détruisent les règles anciennes, mais qui ne valent que par ces règles et dans la me
3787 es, mais qui ne valent que par ces règles et dans la mesure où l’on sent qu’elles les violent. Pour peu qu’il les impose,
3788 ne valent que par ces règles et dans la mesure où l’ on sent qu’elles les violent. Pour peu qu’il les impose, elles perdent
3789 es règles et dans la mesure où l’on sent qu’elles les violent. Pour peu qu’il les impose, elles perdent leur sens, puisque
3790 où l’on sent qu’elles les violent. Pour peu qu’il les impose, elles perdent leur sens, puisque le système qui les mesurait
3791 u’il les impose, elles perdent leur sens, puisque le système qui les mesurait n’existe plus. Par-delà le bien et le mal, p
3792 , elles perdent leur sens, puisque le système qui les mesurait n’existe plus. Par-delà le bien et le mal, par-delà toutes l
3793 système qui les mesurait n’existe plus. Par-delà le bien et le mal, par-delà toutes les règles du jeu, il faut qu’une pas
3794 i les mesurait n’existe plus. Par-delà le bien et le mal, par-delà toutes les règles du jeu, il faut qu’une passion se rév
3795 plus. Par-delà le bien et le mal, par-delà toutes les règles du jeu, il faut qu’une passion se révèle ; ou la mort, ou la v
3796 les du jeu, il faut qu’une passion se révèle ; ou la mort, ou la vie éternelle. Il faut donc que Don Juan disparaisse (car
3797 il faut qu’une passion se révèle ; ou la mort, ou la vie éternelle. Il faut donc que Don Juan disparaisse (car Don Juan ne
3798 règles, on ne peut plus tricher). Voici peut-être la clé du mystère : c’est qu’en respectant toutes les règles, nous ne po
3799 la clé du mystère : c’est qu’en respectant toutes les règles, nous ne pourrons jamais que perdre. Alors : ou bien nous sero
3800 Mais Nietzsche et Don Juan doutent de leur grâce. Les voici donc contraints de gagner dans le temps de leur vie — d’où la t
3801 r grâce. Les voici donc contraints de gagner dans le temps de leur vie — d’où la tricherie ; ou bien encore, de nier la fi
3802 raints de gagner dans le temps de leur vie — d’où la tricherie ; ou bien encore, de nier la fin des temps, le règlement fi
3803 vie — d’où la tricherie ; ou bien encore, de nier la fin des temps, le règlement final, le Jugement dernier — d’où l’idée
3804 herie ; ou bien encore, de nier la fin des temps, le règlement final, le Jugement dernier — d’où l’idée du Retour éternel.
3805 re, de nier la fin des temps, le règlement final, le Jugement dernier — d’où l’idée du Retour éternel. ⁂ Comme je parlais
3806 s, le règlement final, le Jugement dernier — d’où l’ idée du Retour éternel. ⁂ Comme je parlais de ces choses à une amie :
3807 s ajoute à ma liste des mille e tre”. » C’étaient les femmes qu’il n’avait pas eues, par fidélité à la sienne. Où est la tr
3808 ’avait pas eues, par fidélité à la sienne. Où est la tricherie ? Dans ce défi installée au cœur de la règle ? ap. Rouge
3809 la tricherie ? Dans ce défi installée au cœur de la règle ? ap. Rougemont Denis de, « Don Juan », La Nouvelle Revue fr
3810 règle ? ap. Rougemont Denis de, « Don Juan », La Nouvelle Revue française, Paris, juillet 1939, p. 62-68.
39 1939, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). La Poésie scientifique en France au xvie siècle, par Albert-Marie Schmidt (septembre 1939)
3811 La Poésie scientifique en France au xvie siècle, par Albert-Marie Schmi
3812 ie Schmidt (septembre 1939)aq Ronsard évoquant les démons, Maurice Scève spéculant sur l’Adam-microcosme, Belleau décriv
3813 évoquant les démons, Maurice Scève spéculant sur l’ Adam-microcosme, Belleau décrivant les Amours des Pierres précieuses,
3814 péculant sur l’Adam-microcosme, Belleau décrivant les Amours des Pierres précieuses, Peletier du Mans versifiant l’Éloge du
3815 s Pierres précieuses, Peletier du Mans versifiant l’ Éloge du Nombre Un, Du Chesne, calviniste paracelsien et physiologue p
3816 nt blasonnant des Visions hermétiques : tels sont les animaux étranges, bariolés et quasi monstrueux que nous ramène du fon
3817 onstrueux que nous ramène du fond du xvie siècle le coup de filet très savamment prémédité de M. Albert-Marie Schmidt. To
3818 nsions connaître. Ils n’ont pas été restaurés par les auteurs de manuels, ni patinés par nos lectures. Les voici avec toute
3819 auteurs de manuels, ni patinés par nos lectures. Les voici avec toutes leurs barbes et verrues, incongrus et antédiluviens
3820 rouillante d’une Renaissance pré-baroque. C’était le temps où la magie et la raison illuminée collaboraient dans un pédant
3821 ’une Renaissance pré-baroque. C’était le temps où la magie et la raison illuminée collaboraient dans un pédant délire, la
3822 ance pré-baroque. C’était le temps où la magie et la raison illuminée collaboraient dans un pédant délire, la première nou
3823 ou grotesques. Qui sait où cela nous eut menés ? Le livre de Schmidt inventorie, avec une sorte d’ardente lucidité, les r
3824 dt inventorie, avec une sorte d’ardente lucidité, les richesses dont l’ère classique a voulu faire le sacrifice. Ce n’est p
3825 une sorte d’ardente lucidité, les richesses dont l’ ère classique a voulu faire le sacrifice. Ce n’est pas rien ! Cela don
3826 les richesses dont l’ère classique a voulu faire le sacrifice. Ce n’est pas rien ! Cela donne à Phèdre un air de luxe fou
3827 ondre ce bijou de platine d’une suprême élégance, la plus discrète, il a fallu brûler le mobilier, les souvenirs de famill
3828 ême élégance, la plus discrète, il a fallu brûler le mobilier, les souvenirs de famille datant du Moyen Âge, un tas d’obje
3829 la plus discrète, il a fallu brûler le mobilier, les souvenirs de famille datant du Moyen Âge, un tas d’objets inutiles et
3830 magiques. Ensuite, au xviiie , il n’est resté que la nudité du décor. La discipline est devenue lésinerie. Comment louer a
3831 u xviiie , il n’est resté que la nudité du décor. La discipline est devenue lésinerie. Comment louer assez les mérites de
3832 ipline est devenue lésinerie. Comment louer assez les mérites de l’auteur, sa patiente intrépidité, la « volubilité infinie
3833 nue lésinerie. Comment louer assez les mérites de l’ auteur, sa patiente intrépidité, la « volubilité infinie » de l’esprit
3834 les mérites de l’auteur, sa patiente intrépidité, la « volubilité infinie » de l’esprit que suppose son entreprise ? Car l
3835 atiente intrépidité, la « volubilité infinie » de l’ esprit que suppose son entreprise ? Car l’étude des poètes hermétiques
3836 ie » de l’esprit que suppose son entreprise ? Car l’ étude des poètes hermétiques exige une faculté d’interprétation recréa
3837 t une vision du monde, et des rapports du monde à l’ homme, qu’il s’agit de concevoir à nouveau, si l’on veut entrer dans c
3838 l’homme, qu’il s’agit de concevoir à nouveau, si l’ on veut entrer dans ces rythmes, goûter ce vocabulaire, et dégager le
3839 ns ces rythmes, goûter ce vocabulaire, et dégager le pittoresque enfoui sous des amas d’abstruse érudition. Il fallait êtr
3840 plus d’incitations aux créateurs qu’il ne comble les amateurs de beaux poèmes oubliés. Toutes ces tentatives constituent,
3841 ituent, pour reprendre une heureuse expression de l’ auteur, autant « d’appels plastiques à l’avenir ». Un écrivain contemp
3842 ssion de l’auteur, autant « d’appels plastiques à l’ avenir ». Un écrivain contemporain, conscient de l’impasse où l’a cond
3843 ’avenir ». Un écrivain contemporain, conscient de l’ impasse où l’a conduit l’idéal d’une poésie pure, pourrait trouver dan
3844 écrivain contemporain, conscient de l’impasse où l’ a conduit l’idéal d’une poésie pure, pourrait trouver dans les thèmes
3845 ntemporain, conscient de l’impasse où l’a conduit l’ idéal d’une poésie pure, pourrait trouver dans les thèmes et les forme
3846 l’idéal d’une poésie pure, pourrait trouver dans les thèmes et les formes qui foisonnèrent au xvie siècle des incitations
3847 poésie pure, pourrait trouver dans les thèmes et les formes qui foisonnèrent au xvie siècle des incitations très fécondes
3848 . Encore y faudrait-il une passion de culture que les facilités de l’après-guerre ont passablement déprimée. On imagine un
3849 it-il une passion de culture que les facilités de l’ après-guerre ont passablement déprimée. On imagine un Valéry reprenant
3850 n Valéry reprenant tel dessein de Scève : décrire la naissance des figures puis des solides géométriques à partir du point
3851 point originel. Mais qui oserait encore envisager l’ ambition d’un Guillaume du Bartas, d’un Peletier, d’un La Boderie et d
3852 ion d’un Guillaume du Bartas, d’un Peletier, d’un La Boderie et de tant d’autres, cet inventaire de la Création embrassant
3853 La Boderie et de tant d’autres, cet inventaire de la Création embrassant tous les arts et les métiers humains, de la magie
3854 es, cet inventaire de la Création embrassant tous les arts et les métiers humains, de la magie cérémonielle à l’anatomie, d
3855 ntaire de la Création embrassant tous les arts et les métiers humains, de la magie cérémonielle à l’anatomie, de la géograp
3856 brassant tous les arts et les métiers humains, de la magie cérémonielle à l’anatomie, de la géographie à l’acuponcture, de
3857 t les métiers humains, de la magie cérémonielle à l’ anatomie, de la géographie à l’acuponcture, de la musique à la théolog
3858 umains, de la magie cérémonielle à l’anatomie, de la géographie à l’acuponcture, de la musique à la théologie, à l’agricul
3859 gie cérémonielle à l’anatomie, de la géographie à l’ acuponcture, de la musique à la théologie, à l’agriculture, à l’obstét
3860 l’anatomie, de la géographie à l’acuponcture, de la musique à la théologie, à l’agriculture, à l’obstétrique, à la véneri
3861 de la géographie à l’acuponcture, de la musique à la théologie, à l’agriculture, à l’obstétrique, à la vénerie, à l’orfèvr
3862 à l’acuponcture, de la musique à la théologie, à l’ agriculture, à l’obstétrique, à la vénerie, à l’orfèvrerie, à la mécan
3863 de la musique à la théologie, à l’agriculture, à l’ obstétrique, à la vénerie, à l’orfèvrerie, à la mécanique, à l’astrono
3864 la théologie, à l’agriculture, à l’obstétrique, à la vénerie, à l’orfèvrerie, à la mécanique, à l’astronomie. Schmidt nous
3865 à l’agriculture, à l’obstétrique, à la vénerie, à l’ orfèvrerie, à la mécanique, à l’astronomie. Schmidt nous aide à concev
3866 à l’obstétrique, à la vénerie, à l’orfèvrerie, à la mécanique, à l’astronomie. Schmidt nous aide à concevoir l’espèce de
3867 , à la vénerie, à l’orfèvrerie, à la mécanique, à l’ astronomie. Schmidt nous aide à concevoir l’espèce de fureur titanique
3868 ue, à l’astronomie. Schmidt nous aide à concevoir l’ espèce de fureur titanique qui animait ces Renaissants, leur volonté d
3869 nts, leur volonté de « singer Dieu », de recenser les objets et les formes, les rythmes et les lois cosmiques, afin de les
3870 nté de « singer Dieu », de recenser les objets et les formes, les rythmes et les lois cosmiques, afin de les parfaire par l
3871 ger Dieu », de recenser les objets et les formes, les rythmes et les lois cosmiques, afin de les parfaire par le Verbe et,
3872 recenser les objets et les formes, les rythmes et les lois cosmiques, afin de les parfaire par le Verbe et, finalement, de
3873 ormes, les rythmes et les lois cosmiques, afin de les parfaire par le Verbe et, finalement, de s’en rendre maîtres. Tous so
3874 s et les lois cosmiques, afin de les parfaire par le Verbe et, finalement, de s’en rendre maîtres. Tous sont soutenus par
3875 . Tous sont soutenus par une double croyance dans le pouvoir magique du langage, et dans la liberté infinie de l’homme, ca
3876 yance dans le pouvoir magique du langage, et dans la liberté infinie de l’homme, capable de refaire avec ses mains le Para
3877 magique du langage, et dans la liberté infinie de l’ homme, capable de refaire avec ses mains le Paradis perdu et les « ges
3878 nie de l’homme, capable de refaire avec ses mains le Paradis perdu et les « gestes de Dieu ». Le poète a reçu la vocation
3879 ble de refaire avec ses mains le Paradis perdu et les « gestes de Dieu ». Le poète a reçu la vocation de restituer le cosmo
3880 mains le Paradis perdu et les « gestes de Dieu ». Le poète a reçu la vocation de restituer le cosmos à l’état adamique, d’
3881 perdu et les « gestes de Dieu ». Le poète a reçu la vocation de restituer le cosmos à l’état adamique, d’effacer les trac
3882 Dieu ». Le poète a reçu la vocation de restituer le cosmos à l’état adamique, d’effacer les traces du péché, de retrouver
3883 poète a reçu la vocation de restituer le cosmos à l’ état adamique, d’effacer les traces du péché, de retrouver les noms ré
3884 restituer le cosmos à l’état adamique, d’effacer les traces du péché, de retrouver les noms réels et les « signatures » pr
3885 ique, d’effacer les traces du péché, de retrouver les noms réels et les « signatures » primitives dans le jeu des symboles
3886 s traces du péché, de retrouver les noms réels et les « signatures » primitives dans le jeu des symboles et des corresponda
3887 noms réels et les « signatures » primitives dans le jeu des symboles et des correspondances. C’est l’ambition que refoule
3888 le jeu des symboles et des correspondances. C’est l’ ambition que refoulera trop aisément notre âge classique, et que ressu
3889 sément notre âge classique, et que ressusciteront les romantiques allemands, à partir de Hamann et de Herder. La création e
3890 iques allemands, à partir de Hamann et de Herder. La création entière, disait Hamann, est « un discours adressé à la créat
3891 tière, disait Hamann, est « un discours adressé à la créature au moyen de la créature : car un jour le redit au suivant, u
3892 t « un discours adressé à la créature au moyen de la créature : car un jour le redit au suivant, une nuit l’annonce à l’au
3893 la créature au moyen de la créature : car un jour le redit au suivant, une nuit l’annonce à l’autre. Cette parole traverse
3894 ature : car un jour le redit au suivant, une nuit l’ annonce à l’autre. Cette parole traverse tous les climats, jusqu’aux c
3895 t l’annonce à l’autre. Cette parole traverse tous les climats, jusqu’aux confins du monde, et l’on perçoit sa voix dans cha
3896 tous les climats, jusqu’aux confins du monde, et l’ on perçoit sa voix dans chaque dialecte ». Nous l’avons perçue de nos
3897 l’on perçoit sa voix dans chaque dialecte ». Nous l’ avons perçue de nos jours, dans le dialecte d’un Claudel, parfois même
3898 ialecte ». Nous l’avons perçue de nos jours, dans le dialecte d’un Claudel, parfois même dans celui de tel surréaliste. Ma
3899 est-il encore formulable en noms et en rythmes ? La science moderne ne tend-elle point à nous le rendre proprement inimag
3900 es ? La science moderne ne tend-elle point à nous le rendre proprement inimaginable ? N’a-t-elle pas dissocié Nombre et Ve
3901 re et Verbe au point de rendre puérile à nos yeux l’ ambition d’un lyrisme cosmique ? 52. Un exemple au hasard. Ce vers d
3902 ? 52. Un exemple au hasard. Ce vers de Baïf : «  L’ huître dans son écaille essaie sa puissance » amène Schmidt à citer Ma
3903 de la Boderie, Ronsard, Psellos, M. Laumonier, et les philosophes mystiques de la Renaissance qui « considéraient l’huître
3904 os, M. Laumonier, et les philosophes mystiques de la Renaissance qui « considéraient l’huître comme un condensateur du flu
3905 s mystiques de la Renaissance qui « considéraient l’ huître comme un condensateur du fluide vital circulant par l’univers »
3906 mme un condensateur du fluide vital circulant par l’ univers ». Voilà de la belle érudition qui signifie. C’est une manière
3907 fluide vital circulant par l’univers ». Voilà de la belle érudition qui signifie. C’est une manière de poésie que bien pe
3908 Denis de, « [Compte rendu] Albert-Marie Schmidt, La Poésie scientifique en France au XVIe siècle  », La Nouvelle Revue fr
3909 Poésie scientifique en France au XVIe siècle  », La Nouvelle Revue française, Paris, septembre 1939, p. 486-488.
40 1940, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Au sujet du Journal d’André Gide (janvier 1940)
3910 nnête, et moins encore adroit, de ne point avouer l’ incertitude où pareil livre entraîne le jugement. Gide a tant répété :
3911 int avouer l’incertitude où pareil livre entraîne le jugement. Gide a tant répété : Ne jugez pas ! qu’il a fini par se ren
3912 , et d’abord, quant à soi ? On renonce aisément à le fixer dans l’une ou l’autre des figures qu’il nous révèle au cours de
3913 s qu’il nous révèle au cours de ce Journal ; mais le malaise du critique commence au-delà de ce premier piège évité. Il na
3914 nce au-delà de ce premier piège évité. Il naît de la difficulté à découvrir l’intime hiérarchie qui trahirait la vraie per
3915 piège évité. Il naît de la difficulté à découvrir l’ intime hiérarchie qui trahirait la vraie personne dans ce complexe ind
3916 lté à découvrir l’intime hiérarchie qui trahirait la vraie personne dans ce complexe individuel. D’autant plus que certain
3917 n drame secret, un nœud vital où peut-être réside la cause des plus étranges contradictions qu’il subit ou qu’il entretien
3918 fenêtres par excessive défiance d’une symétrie où l’ on serait tenté de s’arrêter…) Faute d’un « jugement » que ces treize
3919 ythme, idées ou lyrisme —, mais bien plutôt c’est la complexité secrètement significative de l’ensemble. Pour qualifier ce
3920 c’est la complexité secrètement significative de l’ ensemble. Pour qualifier cette harmonie involontaire, je ne puis évoqu
3921 tte harmonie involontaire, je ne puis évoquer que l’ exemple de Goethe, dont ce n’est pas telle œuvre ou telle action que j
3922 telle œuvre ou telle action que j’aime, mais bien le paysage vital, avec ses temps voilés et ses soleils, ses parcs, ses f
3923 leils, ses parcs, ses friches et ses habitations. Le phénomène-Goethe, dans l’espace et le temps, voilà qui donnerait une
3924 hes et ses habitations. Le phénomène-Goethe, dans l’ espace et le temps, voilà qui donnerait une idée de l’espèce d’intérêt
3925 abitations. Le phénomène-Goethe, dans l’espace et le temps, voilà qui donnerait une idée de l’espèce d’intérêt que l’on pr
3926 pace et le temps, voilà qui donnerait une idée de l’ espèce d’intérêt que l’on prend à lire le Journal d’André Gide. Il est
3927 qui donnerait une idée de l’espèce d’intérêt que l’ on prend à lire le Journal d’André Gide. Il est probable que, du seul
3928 idée de l’espèce d’intérêt que l’on prend à lire le Journal d’André Gide. Il est probable que, du seul point de vue de l’
3929 ide. Il est probable que, du seul point de vue de l’ art, cet intérêt demeure impur : l’indiscrétion moderne va chercher de
3930 oint de vue de l’art, cet intérêt demeure impur : l’ indiscrétion moderne va chercher derrière les formes et au-dessous d’e
3931 pur : l’indiscrétion moderne va chercher derrière les formes et au-dessous d’elles, dans le tout venant de confidences frag
3932 r derrière les formes et au-dessous d’elles, dans le tout venant de confidences fragmentaires, une vérité que les œuvres c
3933 nant de confidences fragmentaires, une vérité que les œuvres concertées avouaient peut-être beaucoup mieux. Il est probable
3934 ut-être beaucoup mieux. Il est probable aussi que le journal est un genre littéraire inférieur, pour cette raison qu’il es
3935 l est toujours trop facilement intéressant. Je ne le conçois, comme œuvre d’art, que limité au récit d’une crise, et soumi
3936 ne sorte d’unité qui fait nécessairement défaut à la chronique intermittente d’une existence. Malgré les pages plus élabor
3937 a chronique intermittente d’une existence. Malgré les pages plus élaborées que Gide a groupées ça et là sous des titres par
3938 es titres particuliers (Feuillets, Numquid et tu, La Marche turque, etc.), malgré la perfection constante de l’écriture, e
3939 s, Numquid et tu, La Marche turque, etc.), malgré la perfection constante de l’écriture, et toutes ces aquarelles et ces t
3940 turque, etc.), malgré la perfection constante de l’ écriture, et toutes ces aquarelles et ces tableaux de genre où s’amuse
3941 et ces tableaux de genre où s’amuse et s’attarde la maîtrise, on peut prévoir que la valeur d’un tel ouvrage restera d’or
3942 use et s’attarde la maîtrise, on peut prévoir que la valeur d’un tel ouvrage restera d’ordre essentiellement biographique.
3943 re essentiellement biographique. Mais ici se pose le problème de la vérité du portrait, Gide note lui-même dès 1924 : « Si
3944 ent biographique. Mais ici se pose le problème de la vérité du portrait, Gide note lui-même dès 1924 : « Si plus tard on p
3945 u’il ne donne de moi une idée assez fausse. Je ne l’ ai point tenu durant les longues périodes d’équilibre, de santé, de bo
3946 e idée assez fausse. Je ne l’ai point tenu durant les longues périodes d’équilibre, de santé, de bonheur ; mais bien durant
3947 jalousement qu’aucun autre. Est-ce vraiment pour le diminuer qu’il anticipe sur ce risque ? Ou pour déconcerter ses juges
3948 ée. J’imaginerais plutôt que Gide est fasciné par l’ obstacle qu’il veut éviter. Son horreur du malentendu l’entraîne à liv
3949 acle qu’il veut éviter. Son horreur du malentendu l’ entraîne à livrer au public treize cents pages d’explications qui mena
3950 ents pages d’explications qui menacent d’aggraver l’ équivoque. Mais alors cela devient exemplaire. L’effort gidien pour éc
3951 l’équivoque. Mais alors cela devient exemplaire. L’ effort gidien pour échapper aux trompeuses stylisations des morales et
3952 ut faits n’est plus seulement émouvant : il revêt la valeur d’une expérience cruciale sur les limites de la sincérité en g
3953 il revêt la valeur d’une expérience cruciale sur les limites de la sincérité en général, et du journal intime en particuli
3954 leur d’une expérience cruciale sur les limites de la sincérité en général, et du journal intime en particulier. La passion
3955 en général, et du journal intime en particulier. La passion d’être complètement vrai finit par altérer le naturel ; mais
3956 assion d’être complètement vrai finit par altérer le naturel ; mais par son excès même, elle nous rend attentifs aux défau
3957 réguliers de tout autoportrait. C’est nous donner le moyen d’y porter nos retouches. ⁂ Parfois, le secret d’une vie s’épui
3958 ner le moyen d’y porter nos retouches. ⁂ Parfois, le secret d’une vie s’épuise dans l’œuvre ; il ne reste pour le journal
3959 hes. ⁂ Parfois, le secret d’une vie s’épuise dans l’ œuvre ; il ne reste pour le journal que les plus sèches notations (Byr
3960 ’une vie s’épuise dans l’œuvre ; il ne reste pour le journal que les plus sèches notations (Byron, Stendhal). D’autres foi
3961 se dans l’œuvre ; il ne reste pour le journal que les plus sèches notations (Byron, Stendhal). D’autres fois, l’œuvre et le
3962 èches notations (Byron, Stendhal). D’autres fois, l’ œuvre et le journal sont simplement des manières différentes de poursu
3963 ions (Byron, Stendhal). D’autres fois, l’œuvre et le journal sont simplement des manières différentes de poursuivre une mê
3964 oursuivre une même confidence. On ne sait plus si le journal est en marge de l’œuvre, ou si l’œuvre n’est qu’un moment pri
3965 ce. On ne sait plus si le journal est en marge de l’ œuvre, ou si l’œuvre n’est qu’un moment privilégié de ce journal. Alor
3966 plus si le journal est en marge de l’œuvre, ou si l’ œuvre n’est qu’un moment privilégié de ce journal. Alors le vrai portr
3967 ’est qu’un moment privilégié de ce journal. Alors le vrai portrait de l’auteur n’est plus dans l’œuvre ni dans le journal,
3968 ivilégié de ce journal. Alors le vrai portrait de l’ auteur n’est plus dans l’œuvre ni dans le journal, mais dans leur mutu
3969 lors le vrai portrait de l’auteur n’est plus dans l’ œuvre ni dans le journal, mais dans leur mutuelle réfraction. Et par e
3970 trait de l’auteur n’est plus dans l’œuvre ni dans le journal, mais dans leur mutuelle réfraction. Et par exemple, les chos
3971 is dans leur mutuelle réfraction. Et par exemple, les choses tues dans ce recueil — Gide a marqué qu’une grave lacune mutil
3972 ecueil — Gide a marqué qu’une grave lacune mutile l’ image qu’il nous y livre de lui-même53 —, il se peut qu’elles soient d
3973 i-même53 —, il se peut qu’elles soient dites dans Les Cahiers d’André Walter, et surtout dans La Porte étroite, ce roman ja
3974 dans Les Cahiers d’André Walter, et surtout dans La Porte étroite, ce roman janséniste et « cathare »… ⁂ D’autres causes
3975 D’autres causes d’erreur interviennent, faussant les proportions de l’autoportrait, si l’on se borne au seul journal. « Le
3976 erreur interviennent, faussant les proportions de l’ autoportrait, si l’on se borne au seul journal. « Les choses les plus
3977 t, faussant les proportions de l’autoportrait, si l’ on se borne au seul journal. « Les choses les plus importantes à dire
3978 autoportrait, si l’on se borne au seul journal. «  Les choses les plus importantes à dire sont celles que souvent je n’ai pa
3979 t, si l’on se borne au seul journal. « Les choses les plus importantes à dire sont celles que souvent je n’ai pas cru devoi
3980 eption justement. Et comment ne céderait-on pas à l’ invite d’une formule, d’une épigramme sur tel ami dont il semble inuti
3981 nt il semble inutile de répéter chaque fois qu’on l’ aime ? Ainsi l’on se peint plus « rosse » que nature. Gide lui-même, à
3982 utile de répéter chaque fois qu’on l’aime ? Ainsi l’ on se peint plus « rosse » que nature. Gide lui-même, à ce jeu, ne s’e
3983 qui s’amuse — doublé d’un pasteur protestant qui l’ ennuie. » Type de boutade dont certains, contre lui, ne se priveront p
3984 iveront pas d’abuser. Voici qui va fort loin dans la critique du genre : « Je ne pense pas qu’il y ait grand profit à tire
3985 nd profit à tirer de ces examens de conscience où l’ on parvient toujours à découvrir de mesquins ressorts à n’importe quel
3986 squins ressorts à n’importe quel comportement. On les inventerait même, pour la satisfaction de se paraître à soi-même plus
3987 quel comportement. On les inventerait même, pour la satisfaction de se paraître à soi-même plus perspicace, et l’on a gra
3988 ion de se paraître à soi-même plus perspicace, et l’ on a grande tendance, par contre, à négliger, de peur de se surfaire,
3989 aimable. Mais à trop se regarder, on ne vit plus. Le regard, ici, crée ce qu’il cherche… » Or, en écrivant cela, Gide n’a-
3990 Or, en écrivant cela, Gide n’a-t-il point cédé à la tentation qu’il décrit ? Cercle vicieux de la sincérité. Ou bien l’on
3991 é à la tentation qu’il décrit ? Cercle vicieux de la sincérité. Ou bien l’on est banal pour rétablir les quotidiennes prop
3992 décrit ? Cercle vicieux de la sincérité. Ou bien l’ on est banal pour rétablir les quotidiennes proportions — ou bien l’on
3993 a sincérité. Ou bien l’on est banal pour rétablir les quotidiennes proportions — ou bien l’on ne consent à noter que l’impo
3994 r rétablir les quotidiennes proportions — ou bien l’ on ne consent à noter que l’important, c’est-à-dire ce qui frappe ce j
3995 proportions — ou bien l’on ne consent à noter que l’ important, c’est-à-dire ce qui frappe ce jour-là, et l’on se fait trop
3996 ortant, c’est-à-dire ce qui frappe ce jour-là, et l’ on se fait trop pittoresque. En somme, le journal exigerait une discip
3997 r-là, et l’on se fait trop pittoresque. En somme, le journal exigerait une discipline plus grande encore que celle de l’œu
3998 it une discipline plus grande encore que celle de l’ œuvre : il faudrait s’imposer un rythme égal et sans lacunes, une rela
3999 et monotone des petits faits, situant exactement l’ apparition de telle pensée ou de tel acte exceptionnel… ⁂ Les journaux
4000 on de telle pensée ou de tel acte exceptionnel… ⁂ Les journaux d’écrivains sont vrais, mais d’une vérité indirecte, et parf
4001 indirecte, et parfois même négative. C’est moins la vie vécue qui s’y traduit, que le désir de compenser ou de parfaire c
4002 ve. C’est moins la vie vécue qui s’y traduit, que le désir de compenser ou de parfaire ce qui n’a pas été vécu, ou mal véc
4003 u. (« J’avais besoin de lui pour me ressaisir ».) La vie réelle n’y figure souvent qu’à la manière dont elle figure dans l
4004 ssaisir ».) La vie réelle n’y figure souvent qu’à la manière dont elle figure dans les rêves. Compensations, ratures, repr
4005 ure souvent qu’à la manière dont elle figure dans les rêves. Compensations, ratures, reprises d’actes manqués… Il s’agirait
4006 prises d’actes manqués… Il s’agirait de savoir si la vraie vie est dans ce qu’on fait, ou dans ce qu’on pense de ses actio
4007 ns ce qu’on pense de ses actions. (Voir là-dessus la note dramatique datée du 5 janvier 1902.) ⁂ Mais voici qu’à mon tour
4008 ici qu’à mon tour je succombe au désir de marquer les seules différences, oubliant ce qui va de soi : l’autoportrait de Gid
4009 s seules différences, oubliant ce qui va de soi : l’ autoportrait de Gide est aussi ressemblant. On l’y retrouve aussi au n
4010 l’autoportrait de Gide est aussi ressemblant. On l’ y retrouve aussi au naturel, avec toutes ses curiosités, son admirable
4011 le modestie et ses malices, son sens rythmique de la langue toujours si fermement articulée (habitude des lectures à haute
4012 sautes d’humeur, et ce besoin de donner raison à l’ adversaire…54 On l’y retrouve naturaliste à la manière goethéenne, et
4013 t ce besoin de donner raison à l’adversaire…54 On l’ y retrouve naturaliste à la manière goethéenne, et musicien comme Goet
4014 n à l’adversaire…54 On l’y retrouve naturaliste à la manière goethéenne, et musicien comme Goethe encore se voulait peintr
4015 peintre (mais Gide est, je crois, plus doué). On l’ y découvre enfin, et cela me paraît nouveau, constamment occupé de pro
4016 e spécifier. ⁂ A-t-on remarqué jusqu’à quel point l’ « antichristianisme » de Gide est chrétien dans ses déterminations ? J
4017 laissé prendre à sa perpétuelle polémique contre les convertis-convertisseurs. Il faudrait voir que pour lui, le problème
4018 is-convertisseurs. Il faudrait voir que pour lui, le problème proprement religieux s’est posé, et se pose encore, dans des
4019 s termes qui échappent, presque nécessairement, à la sollicitude des catholiques. Gide fut élevé dans un milieu où la reli
4020 des catholiques. Gide fut élevé dans un milieu où la religion paraissait se réduire à ces deux éléments que Calvin considè
4021 ns doute une propension fondamentale à préférer à la lettre du dogme l’esprit qui inspire et qualifie nos actions quotidie
4022 sion fondamentale à préférer à la lettre du dogme l’ esprit qui inspire et qualifie nos actions quotidiennes, fussent-elles
4023 a bientôt fait de se muer à son tour en dogme, et la morale protestante succombe à ce danger plus qu’aucune autre dans les
4024 te succombe à ce danger plus qu’aucune autre dans les périodes de dépression théologique. D’où le ressentiment qu’à son éga
4025 dans les périodes de dépression théologique. D’où le ressentiment qu’à son égard conçoivent beaucoup de « protestants de n
4026 ucoup de « protestants de naissance » détachés de la vie de leur église, et subissant seulement la coutume d’un milieu. To
4027 de la vie de leur église, et subissant seulement la coutume d’un milieu. Tout à fait justifiée en soi, cette réaction gau
4028 on gauchit parfois certains jugements de Gide sur la Réforme. (Il la confond souvent, me semble-t-il, avec l’image courant
4029 is certains jugements de Gide sur la Réforme. (Il la confond souvent, me semble-t-il, avec l’image courante et fausse d’un
4030 rme. (Il la confond souvent, me semble-t-il, avec l’ image courante et fausse d’un Calvin inhumain, presque manichéen.) L’é
4031 fausse d’un Calvin inhumain, presque manichéen.) L’ évangélisme, hérité malgré tout de cette première éducation chrétienne
4032 lgré tout de cette première éducation chrétienne, l’ a mis en garde contre certaines altérations, les plus fréquentes, du c
4033 e, l’a mis en garde contre certaines altérations, les plus fréquentes, du christianisme : le mépris de la nature, et d’autr
4034 érations, les plus fréquentes, du christianisme : le mépris de la nature, et d’autre part, le recours à l’orthodoxie comme
4035 plus fréquentes, du christianisme : le mépris de la nature, et d’autre part, le recours à l’orthodoxie comme à une assura
4036 anisme : le mépris de la nature, et d’autre part, le recours à l’orthodoxie comme à une assurance prise sur le Saint-Espri
4037 épris de la nature, et d’autre part, le recours à l’ orthodoxie comme à une assurance prise sur le Saint-Esprit autant que
4038 rs à l’orthodoxie comme à une assurance prise sur le Saint-Esprit autant que sur le doute. (Il cite ce mot d’un catholique
4039 ssurance prise sur le Saint-Esprit autant que sur le doute. (Il cite ce mot d’un catholique à un pasteur : « Vous, vous cr
4040 s croyez, mais nous savons ! ») Ceci explique que le souci central de Gide ait été de débarrasser son christianisme de tou
4041 it été de débarrasser son christianisme de toutes les adjonctions « humaines — trop humaines » du moralisme néo-protestant
4042 certains chrétiens désireraient lui « révéler ». Le problème de la conversion devient pour lui le problème négatif du ref
4043 iens désireraient lui « révéler ». Le problème de la conversion devient pour lui le problème négatif du refus de la fausse
4044  ». Le problème de la conversion devient pour lui le problème négatif du refus de la fausse conversion, ou de la conversio
4045 devient pour lui le problème négatif du refus de la fausse conversion, ou de la conversion trop « facile ». « Je ne suis
4046 e négatif du refus de la fausse conversion, ou de la conversion trop « facile ». « Je ne suis ni protestant ni catholique,
4047 al tel qu’il se développa au siècle dernier. « Je l’ ai souvent dit à Claudel : Ce qui me retient [d’entrer dans l’église],
4048 dit à Claudel : Ce qui me retient [d’entrer dans l’ église], ce n’est pas la libre pensée, c’est l’Évangile. » Mais n’y a-
4049 me retient [d’entrer dans l’église], ce n’est pas la libre pensée, c’est l’Évangile. » Mais n’y a-t-il pas, à l’origine de
4050 ns l’église], ce n’est pas la libre pensée, c’est l’ Évangile. » Mais n’y a-t-il pas, à l’origine de ce refus de toute égli
4051 ensée, c’est l’Évangile. » Mais n’y a-t-il pas, à l’ origine de ce refus de toute église (tant reformée que catholique), un
4052  forcé de s’asseoir au culte de famille. Sa gêne. L’ horreur du geste qui puisse dépasser son sentiment… » Kierkegaard, lui
4053 ’était par désir de sauver une conception pure de la foi, dont il ne s’estimait pas digne, et qu’il confessait par là même
4054 médiablement, s’éprouve complexe et réticente. Et l’ acte de foi consistera toujours à passer outre au doute naturel, à con
4055 passer outre au doute naturel, à confesser ce que la chair ni le sang par eux-mêmes ne sauraient confesser. Alors seulemen
4056 au doute naturel, à confesser ce que la chair ni le sang par eux-mêmes ne sauraient confesser. Alors seulement pourrait s
4057 Alors seulement pourrait se poser en termes nets le problème de l’église visible, de l’obéissance à une orthodoxie qui ne
4058 t pourrait se poser en termes nets le problème de l’ église visible, de l’obéissance à une orthodoxie qui ne prétende pas s
4059 n termes nets le problème de l’église visible, de l’ obéissance à une orthodoxie qui ne prétende pas s’emparer de l’Évangil
4060 à une orthodoxie qui ne prétende pas s’emparer de l’ Évangile, mais au contraire s’y ordonner. « Orthodoxie protestante — é
4061 et si j’en reconnaissais une, ce serait celle de l’ Église » (donc de Rome). Allons donc ! Pour un protestant, ce dilemme
4062 un protestant, ce dilemme est aussi choquant que le serait pour un Anglais ou un Scandinave le dilemme entre l’anarchie e
4063 nt que le serait pour un Anglais ou un Scandinave le dilemme entre l’anarchie et l’étatisme totalitaire. Assimiler l’autor
4064 pour un Anglais ou un Scandinave le dilemme entre l’ anarchie et l’étatisme totalitaire. Assimiler l’autorité au romanisme
4065 s ou un Scandinave le dilemme entre l’anarchie et l’ étatisme totalitaire. Assimiler l’autorité au romanisme est d’ailleurs
4066 e l’anarchie et l’étatisme totalitaire. Assimiler l’ autorité au romanisme est d’ailleurs une erreur des plus courantes, en
4067 chez certains protestants. Tout ce que je me sens le droit de dire ici, c’est que la Réforme a rejeté les prétentions du p
4068 ce que je me sens le droit de dire ici, c’est que la Réforme a rejeté les prétentions du pape de Rome non par dégoût de l’
4069 droit de dire ici, c’est que la Réforme a rejeté les prétentions du pape de Rome non par dégoût de l’autorité en soi, mais
4070 les prétentions du pape de Rome non par dégoût de l’ autorité en soi, mais au contraire par grande fidélité à l’autorité de
4071 é en soi, mais au contraire par grande fidélité à l’ autorité de l’Évangile, fondement unique et suffisant de la seule orth
4072 au contraire par grande fidélité à l’autorité de l’ Évangile, fondement unique et suffisant de la seule orthodoxie libérat
4073 é de l’Évangile, fondement unique et suffisant de la seule orthodoxie libératrice. ⁂ Si, malgré son génie du scrupule, Gid
4074 èreté sur des problèmes infiniment complexes (tel le communisme, naguère), je pense qu’on le peut expliquer par une certai
4075 exes (tel le communisme, naguère), je pense qu’on le peut expliquer par une certaine défiance d’artiste à l’égard des « id
4076 e d’artiste à l’égard des « idées » en soi, et de l’ information méthodique. C’est par là que je sens le mieux la distance
4077 ’information méthodique. C’est par là que je sens le mieux la distance qui sépare de la sienne ma génération littéraire. N
4078 ion méthodique. C’est par là que je sens le mieux la distance qui sépare de la sienne ma génération littéraire. Notre cult
4079 raire. Non point par préférence, loin de là. Mais les problèmes qui se posent à nous, nous n’avons pas pu les choisir, et e
4080 oblèmes qui se posent à nous, nous n’avons pas pu les choisir, et encore moins les circonscrire dans un domaine privilégié.
4081 nous n’avons pas pu les choisir, et encore moins les circonscrire dans un domaine privilégié. Ils nous contraignent parfoi
4082 antage qu’ils ne servent nos goûts naturels, d’où le danger de didactisme que nous courons tous plus ou moins. À cet égard
4083 ous plus ou moins. À cet égard, il m’apparaît que la leçon de Gide, pour ceux de mon âge, est moins urgente dans l’ordre d
4084 ide, pour ceux de mon âge, est moins urgente dans l’ ordre de l’éthique, que dans celui de l’esthétique. C’est le maître-ar
4085 eux de mon âge, est moins urgente dans l’ordre de l’ éthique, que dans celui de l’esthétique. C’est le maître-artisan de la
4086 ente dans l’ordre de l’éthique, que dans celui de l’ esthétique. C’est le maître-artisan de la langue, plus que l’immoralis
4087 l’éthique, que dans celui de l’esthétique. C’est le maître-artisan de la langue, plus que l’immoraliste, qui nous importe
4088 celui de l’esthétique. C’est le maître-artisan de la langue, plus que l’immoraliste, qui nous importe, et qui nous intéres
4089 e. C’est le maître-artisan de la langue, plus que l’ immoraliste, qui nous importe, et qui nous intéresse au double sens du
4090 ienne encore. Elle n’exclut aucun revirement dans les générations qui nous suivront : je prévois le jour où nos cadets nous
4091 ns les générations qui nous suivront : je prévois le jour où nos cadets nous opposeront l’exemple du probe adversaire des
4092 je prévois le jour où nos cadets nous opposeront l’ exemple du probe adversaire des orthodoxies orgueilleuses, « André Gid
4093 pos, qu’il faut se forcer pour n’abandonner point les positions auxquelles on tient, et qui ne sont pas exactement les sien
4094 Compte rendu] Au sujet du Journal d’André Gide », La Nouvelle Revue française, Paris, janvier 1940, p. 24-32.
41 1940, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Hommage à C. F. Ramuz (mai 1940)
4095 Hommage à C. F. Ramuz (mai 1940)as Le plus intéressant dans un recueil de mélanges ou d’hommages, c’est en
4096 cueil de mélanges ou d’hommages, c’est en général le sommaire : cette fois encore. Voici le noyau des premiers ramuziens (
4097 en général le sommaire : cette fois encore. Voici le noyau des premiers ramuziens (à peu près le groupe des Cahiers vaudoi
4098 Voici le noyau des premiers ramuziens (à peu près le groupe des Cahiers vaudois), les deux Cingria, le peintre Auberjonois
4099 ziens (à peu près le groupe des Cahiers vaudois), les deux Cingria, le peintre Auberjonois, Ansermet, Stravinsky. Claudel y
4100 le groupe des Cahiers vaudois), les deux Cingria, le peintre Auberjonois, Ansermet, Stravinsky. Claudel y touche de près.
4101 eau y a des souvenirs, Maritain des amitiés. Pour la fête, on a invité quelques étrangers de marque : Thomas Mann, Zweig,
4102 angers de marque : Thomas Mann, Zweig, Valéry. Et les quatre langues suisses — n’oubliez pas le ladin des Grisons — viennen
4103 ry. Et les quatre langues suisses — n’oubliez pas le ladin des Grisons — viennent dire au dessert leur couplet. Ce complex
4104 t. Ce complexe de mystique paysanne, de goût de «  l’ authentique », de musique russe, d’avant-garde ascétique, d’humour vau
4105 e Genève mais à celle des troubadours, voilà bien la constellation ramuzienne. Rien de plus « Suisse » que ces créations s
4106 Bâle au temps de Burckhardt et de Nietzsche… Mais le centre vaudois s’est distingué par sa méfiance à l’égard des « idées 
4107 « idées ». Son particularisme approfondi rejoint l’ universel par les racines. C’est, comme ils disent, de la vraie « cult
4108 particularisme approfondi rejoint l’universel par les racines. C’est, comme ils disent, de la vraie « culture ». Il faut me
4109 rsel par les racines. C’est, comme ils disent, de la vraie « culture ». Il faut mettre hors de pair, dans ce recueil, le P
4110  ». Il faut mettre hors de pair, dans ce recueil, le Petit Ramusianum harmonique de Ch.-A. Cingria et Stravinsky : l’humou
4111 anum harmonique de Ch.-A. Cingria et Stravinsky : l’ humour de l’authentique, si caractéristique du cercle ramuzien, s’y tr
4112 que de Ch.-A. Cingria et Stravinsky : l’humour de l’ authentique, si caractéristique du cercle ramuzien, s’y traduit en mir
4113 ent travaillé et simplifié, cet œil halluciné par le réel, c’est tout l’art de Ramuz exposé. Ici, tout le mystère se mue e
4114 plifié, cet œil halluciné par le réel, c’est tout l’ art de Ramuz exposé. Ici, tout le mystère se mue en forme et en physio
4115 réel, c’est tout l’art de Ramuz exposé. Ici, tout le mystère se mue en forme et en physionomie lisible. Enfin, l’on est au
4116 se mue en forme et en physionomie lisible. Enfin, l’ on est au-delà de la psychologie. « N’allez pas chercher derrière la f
4117 n physionomie lisible. Enfin, l’on est au-delà de la psychologie. « N’allez pas chercher derrière la forme, disait Goethe,
4118 e la psychologie. « N’allez pas chercher derrière la forme, disait Goethe, elle est elle-même enseignement. » as. Rouge
4119 is de, « [Compte rendu] Hommage à C. F. Ramuz  », La Nouvelle Revue française, Paris, mai 1940, p. 697-698.
42 1951, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Un complot de protestants (novembre 1951)
4120 nous connaissions peu, ce jour de juin 39 où dans le hall de la rue Sébastien-Bottin, j’étais en train de téléphoner quand
4121 ssions peu, ce jour de juin 39 où dans le hall de la rue Sébastien-Bottin, j’étais en train de téléphoner quand je le vois
4122 n-Bottin, j’étais en train de téléphoner quand je le vois descendre l’escalier. Je parle en le suivant d’un œil. Il s’arrê
4123 en train de téléphoner quand je le vois descendre l’ escalier. Je parle en le suivant d’un œil. Il s’arrête, il paraît atte
4124 uand je le vois descendre l’escalier. Je parle en le suivant d’un œil. Il s’arrête, il paraît attendre. Je pose le récepte
4125 ’un œil. Il s’arrête, il paraît attendre. Je pose le récepteur et nous sortons. Nous voici sur un banc du boulevard Saint-
4126 ous voici sur un banc du boulevard Saint-Germain. Les autos passent tout près. Je l’entends dire, dans le bruit : « Où habi
4127 rd Saint-Germain. Les autos passent tout près. Je l’ entends dire, dans le bruit : « Où habitez-vous maintenant ? » Je crie
4128 autos passent tout près. Je l’entends dire, dans le bruit : « Où habitez-vous maintenant ? » Je crie que je l’ignore, dev
4129 : « Où habitez-vous maintenant ? » Je crie que je l’ ignore, devant quitter demain la maison de Charles Du Bos qui rentre d
4130  » Je crie que je l’ignore, devant quitter demain la maison de Charles Du Bos qui rentre d’Amérique, et je viens d’apprend
4131 en se levant : « Eh bien ! si c’est ainsi, allons le voir de ce pas, voulez-vous ? » Alors, seulement, je comprends qu’il
4132 e comprends qu’il avait dit : « J’ai un studio… » Le lendemain matin, très tôt, nous arrivons chez lui, ma femme et moi. L
4133 rès tôt, nous arrivons chez lui, ma femme et moi. Le studio est vaste et plaisant, agrémenté d’un escalier conduisant à un
4134 e galerie. Par une porte capitonnée qui donne sur la bibliothèque où il travaille, Gide apparaît en robe de chambre grise,
4135 ravaille, Gide apparaît en robe de chambre grise, le corps un peu tassé et de large carrure, sa belle tête de moine tibéta
4136 poches, il tire deux bouteilles de bière et nous les offre. Au milieu du studio pend un trapèze. Gide s’y appuie des deux
4137 c’est inquiétant. Cela me ferait presque croire à la Providence !… Mais dites-moi, Rougemont, quand on saura que vous habi
4138 n va dire que c’est un complot de protestants ! » Le mot ne manque pas de pertinence. Tous les matins, vers onze heures, i
4139 ants ! » Le mot ne manque pas de pertinence. Tous les matins, vers onze heures, il viendra entrouvrir la porte capitonnée,
4140 s matins, vers onze heures, il viendra entrouvrir la porte capitonnée, en s’annonçant par un profond « Allô ! Allô ! » et
4141 quelques instants. Et, chaque fois, il orientera la conversation vers des sujets religieux ou même théologiques, comme si
4142 tait précisément pour m’en parler qu’il m’offrait l’ hospitalité. Saint Paul reste sa bête noire. Et l’idée même d’orthodox
4143 l’hospitalité. Saint Paul reste sa bête noire. Et l’ idée même d’orthodoxie. Il nie vivement que le terme d’orthodoxie prot
4144 Et l’idée même d’orthodoxie. Il nie vivement que le terme d’orthodoxie protestante puisse avoir un sens. Le protestant, p
4145 me d’orthodoxie protestante puisse avoir un sens. Le protestant, pour lui, c’est l’opposant. (Comme on le croit généraleme
4146 sse avoir un sens. Le protestant, pour lui, c’est l’ opposant. (Comme on le croit généralement en France.) Les gênes fécond
4147 protestant, pour lui, c’est l’opposant. (Comme on le croit généralement en France.) Les gênes fécondes qu’il demandait jad
4148 sant. (Comme on le croit généralement en France.) Les gênes fécondes qu’il demandait jadis qu’on rende à l’art, la « critiq
4149 ênes fécondes qu’il demandait jadis qu’on rende à l’ art, la « critique dogmatique » des grandes époques, ne sont plus que
4150 condes qu’il demandait jadis qu’on rende à l’art, la « critique dogmatique » des grandes époques, ne sont plus que mensong
4151 es, ne sont plus que mensonges à ses yeux dès que l’ on passe à l’ordre spirituel. Peut-être ne songe-t-il qu’à la morale ?
4152 lus que mensonges à ses yeux dès que l’on passe à l’ ordre spirituel. Peut-être ne songe-t-il qu’à la morale ? « En somme,
4153 à l’ordre spirituel. Peut-être ne songe-t-il qu’à la morale ? « En somme, lui dis-je, vous vous en tenez au protestantisme
4154 , vous vous en tenez au protestantisme libéral de la fin du xixe siècle ? » — « Oui, c’est assez cela, la position du pas
4155 in du xixe siècle ? » — « Oui, c’est assez cela, la position du pasteur Roberty, que j’aimais bien. » Vite lassé par les
4156 teur Roberty, que j’aimais bien. » Vite lassé par les débats d’idées, il semble répugner à toute pensée qui par le style d’
4157 ’idées, il semble répugner à toute pensée qui par le style d’abord ne l’ait séduit. Il me parle souvent des Variations de
4158 pugner à toute pensée qui par le style d’abord ne l’ ait séduit. Il me parle souvent des Variations de Bossuet, avec une vi
4159 . Marquant ainsi bien franchement ses limites, et les moyens particuliers de sa recherche. Sur un seul de ces entretiens, j
4160 ris des notes. C’est celui du 20 juin. J’avais eu l’ impression ce jour-là que Gide passait la prudence dans l’aveu, qu’il
4161 avais eu l’impression ce jour-là que Gide passait la prudence dans l’aveu, qu’il me disait ce qu’il ne pouvait dire, et n’
4162 sion ce jour-là que Gide passait la prudence dans l’ aveu, qu’il me disait ce qu’il ne pouvait dire, et n’a peut-être jamai
4163 ne pouvait dire, et n’a peut-être jamais répété. La conversation s’engage sur L’Amour et l’Occident , qu’il est en train
4164 être jamais répété. La conversation s’engage sur L’ Amour et l’Occident , qu’il est en train de lire, et dont il me déclar
4165 répété. La conversation s’engage sur L’Amour et l’ Occident , qu’il est en train de lire, et dont il me déclare, à ma pro
4166 nces et de reniflements, il se met à parler sur «  le drame de sa vie ». Jeune homme épris et puritain, il a voulu disjoind
4167 ne homme épris et puritain, il a voulu disjoindre l’ amour et le plaisir. Il croyait que « l’amour hétérosexuel » était d’a
4168 ris et puritain, il a voulu disjoindre l’amour et le plaisir. Il croyait que « l’amour hétérosexuel » était d’autant plus
4169 isjoindre l’amour et le plaisir. Il croyait que «  l’ amour hétérosexuel » était d’autant plus pur que rien de charnel ne s’
4170 accentuant, circonflexant le dernier mot. Ce qui l’ a souvent frappé chez bien des femmes, c’est leur manière « de s’offus
4171 , c’est leur manière « de s’offusquer du désir de l’ homme ». Plusieurs, mariées, lui ont confié « qu’elles tenaient la lib
4172 eurs, mariées, lui ont confié « qu’elles tenaient la libido de leur mari pour quelque chose de morbide. “Cela recommence t
4173 r quelque chose de morbide. “Cela recommence tout le temps !” disaient-elles ». Il hoche la tête, trouve cela très curieux
4174 mence tout le temps !” disaient-elles ». Il hoche la tête, trouve cela très curieux, n’est-ce pas ? — un éclair de malice
4175  : « J’ai trop longtemps gardé cette illusion que la femme n’avait pas besoin du commerce physique, autant que nous. Hélas
4176 s, je ne voyais pas clair. On se trompe ainsi, et les conséquences. J’ai été assez bête pour croire cela ! Il ne faut jamai
4177 oué un rôle très grave dans ma vie. » (Frappé par le ton de confession, par le ton « c’était mal » de ses propos.) Et, sub
4178 s ma vie. » (Frappé par le ton de confession, par le ton « c’était mal » de ses propos.) Et, subitement, après un silence 
4179 mer trop, et de n’arriver point à se contraindre. Les jours suivants, il me donne à lire, par paquets, les épreuves de son
4180 jours suivants, il me donne à lire, par paquets, les épreuves de son Journal en cours d’impression, et sur lequel je vais
4181 ion, et sur lequel je vais écrire un article pour la NRF. Il insiste comme il sait insister sur les suppressions qu’il y a
4182 our la NRF. Il insiste comme il sait insister sur les suppressions qu’il y a faites. Tout ce qui concerne intimement sa fem
4183 tes. Tout ce qui concerne intimement sa femme — «  le seul être, dit-il, que j’ai vraiment aimé » — tous ces passages ont é
4184 ent aimé » — tous ces passages ont été coupés. On les lira plus tard. Il les a recopiés dans deux cahiers gris d’écolier. U
4185 assages ont été coupés. On les lira plus tard. Il les a recopiés dans deux cahiers gris d’écolier. Un soir, il vient m’aver
4186 o me restera ouvert ; que j’y vienne prendre tous les livres dont je pourrais avoir besoin… Dès le lendemain, j’y pénètre,
4187 ous les livres dont je pourrais avoir besoin… Dès le lendemain, j’y pénètre, bien sûr. Des housses couvrent les meubles, u
4188 main, j’y pénètre, bien sûr. Des housses couvrent les meubles, une sorte de vieux drap son grand bureau. Sur l’étoffe, bien
4189 es, une sorte de vieux drap son grand bureau. Sur l’ étoffe, bien en évidence, un fort cahier gris d’écolier. J’ai lu les p
4190 ières lignes, pour vérifier, et j’ai vite refermé la couverture. Pudeur, ou répugnance à donner dans le piège ? Les deux s
4191 a couverture. Pudeur, ou répugnance à donner dans le piège ? Les deux sans doute. Combien de fois l’ai-je revu après la gu
4192 e. Pudeur, ou répugnance à donner dans le piège ? Les deux sans doute. Combien de fois l’ai-je revu après la guerre ? Souve
4193 s le piège ? Les deux sans doute. Combien de fois l’ ai-je revu après la guerre ? Souvent, en somme, et dans les lieux les
4194 ux sans doute. Combien de fois l’ai-je revu après la guerre ? Souvent, en somme, et dans les lieux les plus divers, « Au V
4195 revu après la guerre ? Souvent, en somme, et dans les lieux les plus divers, « Au Vaneau », près de Lausanne, à Neuchâtel,
4196 la guerre ? Souvent, en somme, et dans les lieux les plus divers, « Au Vaneau », près de Lausanne, à Neuchâtel, à Berne. M
4197 mérite d’être rapportée, j’entends : qui modifie le moins du monde l’image que l’on connaît de lui. Nous parlions style,
4198 portée, j’entends : qui modifie le moins du monde l’ image que l’on connaît de lui. Nous parlions style, tournures de phras
4199 tends : qui modifie le moins du monde l’image que l’ on connaît de lui. Nous parlions style, tournures de phrases, Littré.
4200 ement, n’admirant plus, avec quelque ferveur, que les ouvrages qu’il se sentait le plus incapable d’écrire : ceux d’un Marc
4201 uelque ferveur, que les ouvrages qu’il se sentait le plus incapable d’écrire : ceux d’un Marcel Aymé, d’un Simenon.) À Ber
4202 is une réponse assez vague, m’étonnant surtout de la question. Huit jours plus tard, il recevait le prix Nobel. Chez Richa
4203 de la question. Huit jours plus tard, il recevait le prix Nobel. Chez Richard Heyd, un soir, à Neuchâtel, l’on jouait au «
4204 x Nobel. Chez Richard Heyd, un soir, à Neuchâtel, l’ on jouait au « cadavre exquis ». (L’un écrit trois questions, l’autre
4205 me temps trois réponses, puis on lit à haute voix les papiers. Jeu de télépathie, plutôt que de hasard.) J’avais écrit, der
4206 ’avais écrit, dernière question : « Qu’est-ce que le style ? » Catherine, sa fille, lut sa dernière réponse : « L’original
4207 Catherine, sa fille, lut sa dernière réponse : «  L’ originalité du Bipède. » (C’est ainsi qu’on l’appelait dans ce groupe.
4208 : « L’originalité du Bipède. » (C’est ainsi qu’on l’ appelait dans ce groupe.) Gide s’éclaircit la voix pour observer que l
4209 u’on l’appelait dans ce groupe.) Gide s’éclaircit la voix pour observer que le jeu devenait bien personnel, et proposa des
4210 oupe.) Gide s’éclaircit la voix pour observer que le jeu devenait bien personnel, et proposa des bouts-rimés. Il y excella
4211 lait. ⁂ Peu d’hommes m’ont donné l’impression que le problème religieux existait dans leur vie en tant que problème perman
4212 tant que problème permanent. Écarté, refoulé chez les uns ; et chez les autres résolu, croient-ils. Je ne dis pas qu’il tor
4213 permanent. Écarté, refoulé chez les uns ; et chez les autres résolu, croient-ils. Je ne dis pas qu’il torturait Gide, hors
4214 turait Gide, hors quelques crises dont nous avons les témoignages, mais il restait, pour lui, problème. Gide avait peu d’in
4215 ’instinct religieux, et moins encore de goût pour la métaphysique. Il préférait ce qu’il jugeait important à ce que d’autr
4216 yrisme.) Et c’est ainsi qu’il réussit à remplacer le tragique par la perplexité. Tout cela peut éclairer son attitude enve
4217 t ainsi qu’il réussit à remplacer le tragique par la perplexité. Tout cela peut éclairer son attitude envers le christiani
4218 xité. Tout cela peut éclairer son attitude envers le christianisme et son mystère. Peu d’instinct religieux chez cet homme
4219 eu d’instinct religieux chez cet homme, alors que le christianisme, l’Église et l’Évangile, furent ses constants sujets d’
4220 gieux chez cet homme, alors que le christianisme, l’ Église et l’Évangile, furent ses constants sujets d’irritation, de nos
4221 et homme, alors que le christianisme, l’Église et l’ Évangile, furent ses constants sujets d’irritation, de nostalgie ou de
4222 ets d’irritation, de nostalgie ou de perplexité ? Le paradoxe n’est qu’apparent. Qu’on n’oublie pas sa formation chrétienn
4223 lectures prolongées et sans cesse renouvelées de l’ Écriture ; son amour pour le style biblique ; la confusion courante —
4224 cesse renouvelées de l’Écriture ; son amour pour le style biblique ; la confusion courante — non seulement puritaine — en
4225 e l’Écriture ; son amour pour le style biblique ; la confusion courante — non seulement puritaine — entretenue chez les je
4226 rante — non seulement puritaine — entretenue chez les jeunes bourgeois entre tabous sexuels et spiritualité, d’où sa polémi
4227 spiritualité, d’où sa polémique inlassable contre l’ orthodoxie telle qu’il l’imaginait et dans laquelle il voyait (par err
4228 émique inlassable contre l’orthodoxie telle qu’il l’ imaginait et dans laquelle il voyait (par erreur) la sanction d’une ce
4229 imaginait et dans laquelle il voyait (par erreur) la sanction d’une certaine éthique ; la conversion de quelques-uns de se
4230 (par erreur) la sanction d’une certaine éthique ; la conversion de quelques-uns de ses amis ; enfin la piété de sa femme.
4231 la conversion de quelques-uns de ses amis ; enfin la piété de sa femme. Ces données biographiques ne font point une nature
4232 ont point une nature. Elles expliquent simplement l’ insistance du problème aux stades les plus variés de l’évolution de Gi
4233 nt simplement l’insistance du problème aux stades les plus variés de l’évolution de Gide. Ce qui l’a vraiment torturé, c’e
4234 istance du problème aux stades les plus variés de l’ évolution de Gide. Ce qui l’a vraiment torturé, c’est l’éthique, non
4235 s les plus variés de l’évolution de Gide. Ce qui l’ a vraiment torturé, c’est l’éthique, non le religieux ; la justice et
4236 tion de Gide. Ce qui l’a vraiment torturé, c’est l’ éthique, non le religieux ; la justice et non le salut ; ce que l’on v
4237 Ce qui l’a vraiment torturé, c’est l’éthique, non le religieux ; la justice et non le salut ; ce que l’on vit et comment o
4238 ment torturé, c’est l’éthique, non le religieux ; la justice et non le salut ; ce que l’on vit et comment on juge, non la
4239 t l’éthique, non le religieux ; la justice et non le salut ; ce que l’on vit et comment on juge, non la connaissance pure,
4240 e religieux ; la justice et non le salut ; ce que l’ on vit et comment on juge, non la connaissance pure, ni le mystère. Ré
4241 e salut ; ce que l’on vit et comment on juge, non la connaissance pure, ni le mystère. Réduisait-il la religion à la moral
4242 et comment on juge, non la connaissance pure, ni le mystère. Réduisait-il la religion à la morale ? Je pense plutôt que l
4243 la connaissance pure, ni le mystère. Réduisait-il la religion à la morale ? Je pense plutôt que la morale était le lieu de
4244 e pure, ni le mystère. Réduisait-il la religion à la morale ? Je pense plutôt que la morale était le lieu de son vrai dram
4245 -il la religion à la morale ? Je pense plutôt que la morale était le lieu de son vrai drame, et qu’il ne pouvait approcher
4246 à la morale ? Je pense plutôt que la morale était le lieu de son vrai drame, et qu’il ne pouvait approcher la religion que
4247 de son vrai drame, et qu’il ne pouvait approcher la religion que dans ce drame. Ainsi, devenir ou redevenir chrétien, ne
4248 venir chrétien, ne pouvait signifier pour lui que la sainteté, non l’accueil du mystère, ni l’adhésion à un credo. J’en do
4249 e pouvait signifier pour lui que la sainteté, non l’ accueil du mystère, ni l’adhésion à un credo. J’en donne la preuve : a
4250 lui que la sainteté, non l’accueil du mystère, ni l’ adhésion à un credo. J’en donne la preuve : avoir la foi sans être sai
4251 du mystère, ni l’adhésion à un credo. J’en donne la preuve : avoir la foi sans être saint lui paraissait la tricherie mêm
4252 adhésion à un credo. J’en donne la preuve : avoir la foi sans être saint lui paraissait la tricherie même, tandis qu’il eû
4253 uve : avoir la foi sans être saint lui paraissait la tricherie même, tandis qu’il eût admis la sainteté sans foi. Que dis-
4254 aissait la tricherie même, tandis qu’il eût admis la sainteté sans foi. Que dis-je ? Il l’a souhaitée expressément. Mais c
4255 l eût admis la sainteté sans foi. Que dis-je ? Il l’ a souhaitée expressément. Mais comment définir un saint qui ne croit p
4256 rtis pris éthiques ? Ce débat nous éloignerait de la réalité de Gide. Une intense affectivité le liait, le reliait, au mon
4257 it de la réalité de Gide. Une intense affectivité le liait, le reliait, au monde du christianisme, même s’il en refusait l
4258 éalité de Gide. Une intense affectivité le liait, le reliait, au monde du christianisme, même s’il en refusait les dimensi
4259 au monde du christianisme, même s’il en refusait les dimensions profondes. J’ai dit qu’il se méfiait d’une certaine « prof
4260 d’une certaine « profondeur » qui mesure parfois la distance entre l’éthique et la mystique, mais qui souvent n’est qu’un
4261 profondeur » qui mesure parfois la distance entre l’ éthique et la mystique, mais qui souvent n’est qu’un concept bâtard, e
4262 qui mesure parfois la distance entre l’éthique et la mystique, mais qui souvent n’est qu’un concept bâtard, engendré par l
4263 souvent n’est qu’un concept bâtard, engendré par le romantisme. Gide recherchait plutôt la rectitude, qu’il tenait pour l
4264 gendré par le romantisme. Gide recherchait plutôt la rectitude, qu’il tenait pour la vérité. Il lui arrivait ainsi de s’ar
4265 echerchait plutôt la rectitude, qu’il tenait pour la vérité. Il lui arrivait ainsi de s’arrêter à la logique exotérique d’
4266 r la vérité. Il lui arrivait ainsi de s’arrêter à la logique exotérique d’un texte, disons à son seul sens éthique. Pencha
4267 cte. Ses connaissances bibliques me stupéfiaient. L’ usage qu’il en faisait me semblait décevant. Là où Claudel prend son é
4268 même chrétiens, nous ont montré pareil amour pour l’ Évangile, et cela jusque dans les années où il doutait de l’existence
4269 pareil amour pour l’Évangile, et cela jusque dans les années où il doutait de l’existence de Dieu. Mais il croyait à l’homm
4270 , et cela jusque dans les années où il doutait de l’ existence de Dieu. Mais il croyait à l’homme individuel, et cette croy
4271 doutait de l’existence de Dieu. Mais il croyait à l’ homme individuel, et cette croyance est née de la synthèse du christia
4272 l’homme individuel, et cette croyance est née de la synthèse du christianisme. Elle n’existe pas hors de lui, et n’est pa
4273 était individualiste. Savons-nous encore mesurer le sens et la portée de cette banalité, en vérité bizarre et unique dans
4274 vidualiste. Savons-nous encore mesurer le sens et la portée de cette banalité, en vérité bizarre et unique dans l’Histoire
4275 cette banalité, en vérité bizarre et unique dans l’ Histoire, une civilisation sur vingt et une connues l’ayant rendue pos
4276 stoire, une civilisation sur vingt et une connues l’ ayant rendue possible et acceptable. « Hérétique entre les hérétiques 
4277 rendue possible et acceptable. « Hérétique entre les hérétiques », toujours soucieux de différer mais de légitimer sa diff
4278 aditionnelles, au sens du mythe, des astres et de l’ ordre cosmique, ou bien encore au sens de lois fatales et collectives
4279 ectives interprétées par un Parti. C’est pourquoi le problème religieux, tel qu’il se pose au monde christianisé, et à lui
4280 e au monde christianisé, et à lui seul, libéré de l’ empire des mythes, n’a cessé d’occuper sa pensée. Et j’ignore si c’est
4281 ore si c’est mal ou bien : je constate simplement le phénomène. Je ne tiens pas la foi pour une vertu plus que l’absence d
4282 constate simplement le phénomène. Je ne tiens pas la foi pour une vertu plus que l’absence de foi pour une preuve de coura
4283 e. Je ne tiens pas la foi pour une vertu plus que l’ absence de foi pour une preuve de courage. Des vertus et des vices, da
4284 n droit de juger au nom des normes établies. Mais la foi, le salut personnel n’ont rien à voir avec la bienséance, et ne s
4285 de juger au nom des normes établies. Mais la foi, le salut personnel n’ont rien à voir avec la bienséance, et ne sont pas
4286 la foi, le salut personnel n’ont rien à voir avec la bienséance, et ne sont pas de l’ordre des mérites. Et c’est pourquoi
4287 rien à voir avec la bienséance, et ne sont pas de l’ ordre des mérites. Et c’est pourquoi il est écrit : « Ne jugez pas ! »
4288 l, ou plutôt que je réprouve, ces discussions sur la croyance ou non d’un homme connu, multipliées et prolongées après sa
4289 ne sont ni chrétiennes ni simplement honnêtes. «  Le Seigneur seul connaît les siens », dit l’Écriture : si l’on est chrét
4290 êtes. « Le Seigneur seul connaît les siens », dit l’ Écriture : si l’on est chrétien, qu’on croie cela, laissant aux incroy
4291 eur seul connaît les siens », dit l’Écriture : si l’ on est chrétien, qu’on croie cela, laissant aux incroyants le droit de
4292 rétien, qu’on croie cela, laissant aux incroyants le droit de mieux savoir. Et qu’est-ce que cela peut bien nous faire ? S
4293 et qu’il n’est pas le premier venu. C’est usurper la place du Juge, ou mêler vanités et salut. Si Gide a refusé totalement
4294 refusé totalement quelque chose, c’est justement le totalitarisme, qui est l’esprit de parti logiquement développé. Et d’
4295 chose, c’est justement le totalitarisme, qui est l’ esprit de parti logiquement développé. Et d’abord dans la religion. Le
4296 t de parti logiquement développé. Et d’abord dans la religion. Le vrai croyant demain, ne sera-t-il pas celui qui osera di
4297 giquement développé. Et d’abord dans la religion. Le vrai croyant demain, ne sera-t-il pas celui qui osera dire : « Je ne
4298 elui qui osera dire : « Je ne crois pas ! » quand l’ État contre l’homme invoquera les Nécessités de l’Histoire ? Il n’est
4299 dire : « Je ne crois pas ! » quand l’État contre l’ homme invoquera les Nécessités de l’Histoire ? Il n’est pas de vraie f
4300 ois pas ! » quand l’État contre l’homme invoquera les Nécessités de l’Histoire ? Il n’est pas de vraie foi sans vrai doute,
4301 l’État contre l’homme invoquera les Nécessités de l’ Histoire ? Il n’est pas de vraie foi sans vrai doute, plus qu’il n’est
4302 ougemont Denis de, « Un complot de protestants », La Nouvelle Revue française, Paris, novembre 1951, p. 281-288.
43 1957, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). La découverte du temps ou l’aventure occidentale (mars 1957)
4303 La découverte du temps ou l’aventure occidentale (mars 1957)au Pour
4304 La découverte du temps ou l’ aventure occidentale (mars 1957)au Pourquoi l’Europe a-t-elle cré
4305 ’aventure occidentale (mars 1957)au Pourquoi l’ Europe a-t-elle créé les sciences physiques, conçu l’Histoire et décou
4306 mars 1957)au Pourquoi l’Europe a-t-elle créé les sciences physiques, conçu l’Histoire et découvert la Terre ? D’autres
4307 urope a-t-elle créé les sciences physiques, conçu l’ Histoire et découvert la Terre ? D’autres cultures et civilisations on
4308 sciences physiques, conçu l’Histoire et découvert la Terre ? D’autres cultures et civilisations ont trouvé mieux peut-être
4309 a. Est-il possible d’attribuer aux « inventions » les plus typiques de l’Occident (le concept de personne humaine et le dév
4310 attribuer aux « inventions » les plus typiques de l’ Occident (le concept de personne humaine et le développement de la tec
4311 x « inventions » les plus typiques de l’Occident ( le concept de personne humaine et le développement de la technique, par
4312 de l’Occident (le concept de personne humaine et le développement de la technique, par exemple) une origine ou une visée
4313 oncept de personne humaine et le développement de la technique, par exemple) une origine ou une visée communes, révélant u
4314 ncipe de cohérence parmi tant de contradictions ? L’ unité de l’Europe n’est pas définissable par un contour géographique,
4315 hérence parmi tant de contradictions ? L’unité de l’ Europe n’est pas définissable par un contour géographique, moins encor
4316 uples, ou par quelque essence éternelle, comme on l’ a cru de l’unité de nos nations à partir du xixe siècle. L’Europe est
4317 ar quelque essence éternelle, comme on l’a cru de l’ unité de nos nations à partir du xixe siècle. L’Europe est une longue
4318 l’unité de nos nations à partir du xixe siècle. L’ Europe est une longue aventure, et l’esprit d’aventure y paraît plus s
4319 ixe siècle. L’Europe est une longue aventure, et l’ esprit d’aventure y paraît plus sensible que l’objet de la quête n’est
4320 et l’esprit d’aventure y paraît plus sensible que l’ objet de la quête n’est clairement connaissable. Pourtant, certaines o
4321 d’aventure y paraît plus sensible que l’objet de la quête n’est clairement connaissable. Pourtant, certaines options fond
4322 rtaines options fondamentales ont pu conditionner l’ allure de l’odyssée. Ôtez le dogme de l’Incarnation, formulé au concil
4323 ons fondamentales ont pu conditionner l’allure de l’ odyssée. Ôtez le dogme de l’Incarnation, formulé au concile de Nicée,
4324 s ont pu conditionner l’allure de l’odyssée. Ôtez le dogme de l’Incarnation, formulé au concile de Nicée, et vous ôtez la
4325 ditionner l’allure de l’odyssée. Ôtez le dogme de l’ Incarnation, formulé au concile de Nicée, et vous ôtez la condition de
4326 nation, formulé au concile de Nicée, et vous ôtez la condition des sciences physiques et naturelles, qui est la reconnaiss
4327 ion des sciences physiques et naturelles, qui est la reconnaissance du corps, de la matière, et de la forme du monde en ta
4328 aturelles, qui est la reconnaissance du corps, de la matière, et de la forme du monde en tant que réalités. (L’Orient les
4329 la reconnaissance du corps, de la matière, et de la forme du monde en tant que réalités. (L’Orient les tient pour illusoi
4330 e, et de la forme du monde en tant que réalités. ( L’ Orient les tient pour illusoires.) Ôtez l’idée de la personne, déduite
4331 la forme du monde en tant que réalités. (L’Orient les tient pour illusoires.) Ôtez l’idée de la personne, déduite des grand
4332 lités. (L’Orient les tient pour illusoires.) Ôtez l’ idée de la personne, déduite des grandes définitions trinitaires et ch
4333 Orient les tient pour illusoires.) Ôtez l’idée de la personne, déduite des grandes définitions trinitaires et christologiq
4334 et christologiques, vous avez quelque chose comme l’ Inde et non l’Europe. De cette recherche d’un principe de cohérence r
4335 ques, vous avez quelque chose comme l’Inde et non l’ Europe. De cette recherche d’un principe de cohérence révélé par la n
4336 e recherche d’un principe de cohérence révélé par la nature même des péripéties de l’Aventure, je détache ici le moment de
4337 rence révélé par la nature même des péripéties de l’ Aventure, je détache ici le moment de l’exploration du temps, mère de
4338 même des péripéties de l’Aventure, je détache ici le moment de l’exploration du temps, mère de l’Histoire. 1. L’Occident
4339 péties de l’Aventure, je détache ici le moment de l’ exploration du temps, mère de l’Histoire. 1. L’Occident découvre le
4340 l’exploration du temps, mère de l’Histoire. 1. L’ Occident découvre le Temps De la Genèse mosaïque jusqu’aux débuts d
4341 mps, mère de l’Histoire. 1. L’Occident découvre le Temps De la Genèse mosaïque jusqu’aux débuts du siècle dernier, le
4342 Histoire. 1. L’Occident découvre le Temps De la Genèse mosaïque jusqu’aux débuts du siècle dernier, les Occidentaux n
4343 nèse mosaïque jusqu’aux débuts du siècle dernier, les Occidentaux n’ont presque pas varié quant à la date de naissance de l
4344 , les Occidentaux n’ont presque pas varié quant à la date de naissance de l’humanité. Un professeur de Cambridge, au xviii
4345 presque pas varié quant à la date de naissance de l’ humanité. Un professeur de Cambridge, au xviiie siècle, crut pouvoir
4346 eur de Cambridge, au xviiie siècle, crut pouvoir la préciser : l’homme avait été créé en 4004 avant J.-C., le 23 octobre,
4347 ge, au xviiie siècle, crut pouvoir la préciser : l’ homme avait été créé en 4004 avant J.-C., le 23 octobre, à 9 heures du
4348 ser : l’homme avait été créé en 4004 avant J.-C., le 23 octobre, à 9 heures du matin. Les professeurs d’Oxford tenaient po
4349 avant J.-C., le 23 octobre, à 9 heures du matin. Les professeurs d’Oxford tenaient pour le 23 mars, même heure et même ann
4350 du matin. Les professeurs d’Oxford tenaient pour le 23 mars, même heure et même année. Buffon écrit un peu plus tard : « 
4351 e année. Buffon écrit un peu plus tard : « Depuis la fin des ouvrages de Dieu, c’est-à-dire depuis la création de l’homme,
4352 la fin des ouvrages de Dieu, c’est-à-dire depuis la création de l’homme, il ne s’est écoulé que six ou huit-mille ans. »
4353 rages de Dieu, c’est-à-dire depuis la création de l’ homme, il ne s’est écoulé que six ou huit-mille ans. » Cuvier partage
4354 helling suit encore en plein xixe siècle, et que les catéchismes ne cesseront d’enseigner à des générations dont notre enf
4355 gner à des générations dont notre enfance a connu les derniers représentants. Cependant, vers 1950, nul ne peut plus douter
4356 Cependant, vers 1950, nul ne peut plus douter que l’ homme existe depuis environ cent-mille ans. Aux toutes dernières nouve
4357 il conviendrait d’admettre. Centupler brusquement l’ âge de l’humanité peut paraître une révolution considérable. Mais ce n
4358 ndrait d’admettre. Centupler brusquement l’âge de l’ humanité peut paraître une révolution considérable. Mais ce n’est guèr
4359 t guère qu’un détail dénué d’intérêt pour peu que l’ on considère les dimensions du temps décrites par les anciennes cosmol
4360 étail dénué d’intérêt pour peu que l’on considère les dimensions du temps décrites par les anciennes cosmologies de l’Orien
4361 on considère les dimensions du temps décrites par les anciennes cosmologies de l’Orient. Pour l’Inde, l’unité de temps — le
4362 u temps décrites par les anciennes cosmologies de l’ Orient. Pour l’Inde, l’unité de temps — le Kalpa ou Jour de Brahma — e
4363 s par les anciennes cosmologies de l’Orient. Pour l’ Inde, l’unité de temps — le Kalpa ou Jour de Brahma — est de quatre-mi
4364 s anciennes cosmologies de l’Orient. Pour l’Inde, l’ unité de temps — le Kalpa ou Jour de Brahma — est de quatre-milliards-
4365 gies de l’Orient. Pour l’Inde, l’unité de temps — le Kalpa ou Jour de Brahma — est de quatre-milliards-trois-cent-vingt-mi
4366 s-trois-cent-vingt-millions d’années solaires. Or la vie d’un Brahma est de cent et huit « années », dont chaque jour et c
4367 Après deux-cent-quarante-neuf-milliards d’années, le Brahma meurt, l’univers retourne au grand Chaos pour une durée égale,
4368 uarante-neuf-milliards d’années, le Brahma meurt, l’ univers retourne au grand Chaos pour une durée égale, puis un autre Br
4369 ma inaugure une ère nouvelle, et ainsi de suite à l’ infini. Quant au temps de notre humanité : chaque Jour de Brahma se di
4370 ou Kaliyuga, lequel a commencé à minuit précise, le 18 février 3102 avant J.-C., et doit se terminer dans 426 941 ans par
4371 t J.-C., et doit se terminer dans 426 941 ans par la destruction du monde et sa reconstruction, qui sera l’œuvre de Kalki,
4372 struction du monde et sa reconstruction, qui sera l’ œuvre de Kalki, dernier avatar de Vishnu. En regard des ordres de gran
4373 eur, si prodigieusement différents, attribués par les grandes religions de l’Orient et de l’Occident au temps cosmique comm
4374 ifférents, attribués par les grandes religions de l’ Orient et de l’Occident au temps cosmique comme au temps des humains,
4375 ibués par les grandes religions de l’Orient et de l’ Occident au temps cosmique comme au temps des humains, plaçons mainten
4376 des humains, plaçons maintenant ce double fait : le sens de l’Histoire est caractéristique de l’Occident, et il y tourne
4377 s, plaçons maintenant ce double fait : le sens de l’ Histoire est caractéristique de l’Occident, et il y tourne même à l’ob
4378 it : le sens de l’Histoire est caractéristique de l’ Occident, et il y tourne même à l’obsession si l’on en juge par notre
4379 actéristique de l’Occident, et il y tourne même à l’ obsession si l’on en juge par notre siècle, tandis qu’il a toujours ma
4380 l’Occident, et il y tourne même à l’obsession si l’ on en juge par notre siècle, tandis qu’il a toujours manqué aux Orient
4381 aient subi notre influence55. Toute réflexion sur l’ Aventure occidentale se doit d’affronter ce contraste et d’essayer de
4382 se doit d’affronter ce contraste et d’essayer de l’ interpréter. Et, en particulier, toute théorie de l’Histoire qui négli
4383 interpréter. Et, en particulier, toute théorie de l’ Histoire qui négligerait d’en rendre compte ou s’en révélerait incapab
4384 déquate à son sujet. On verra mieux pourquoi, par la suite de ce chapitre. 2. Co-naissance de l’Histoire et de la Perso
4385 chapitre. 2. Co-naissance de l’Histoire et de la Personne Un fait quelconque n’est historique au sens exact qu’en v
4386 n unicité. S’il pouvait se répéter, revenir comme les saisons, il n’appartiendrait pas à l’Histoire, mais au Mythe. De même
4387 enir comme les saisons, il n’appartiendrait pas à l’ Histoire, mais au Mythe. De même l’individu ne devient une personne qu
4388 iendrait pas à l’Histoire, mais au Mythe. De même l’ individu ne devient une personne que par l’unicité que lui confère sa
4389 e même l’individu ne devient une personne que par l’ unicité que lui confère sa vocation, autrement il est vu comme une rép
4390 poussière isolé d’un univers absurde relevant de la pure statistique, ou cellule transitoire d’un corps magique sans fin.
4391 un démographe génial pouvait nous dire demain que la réponse est « de l’ordre de trois-cents-milliards », nous en serions
4392 pouvait nous dire demain que la réponse est « de l’ ordre de trois-cents-milliards », nous en serions moins étourdis que g
4393 s voir qu’il serait intimement lié, chez ceux qui l’ éprouveraient, au sens de la personne ? Presque toutes les cultures et
4394 nt lié, chez ceux qui l’éprouveraient, au sens de la personne ? Presque toutes les cultures et civilisations que nous avon
4395 veraient, au sens de la personne ? Presque toutes les cultures et civilisations que nous avons exhumées du passé de la Terr
4396 civilisations que nous avons exhumées du passé de la Terre ou qui survivent dans notre siècle ont enseigné des théories du
4397 écrivent un temps cyclique. Elles croient aussi à la métempsycose, à l’astrologie et aux castes. Tout cela se tient et se
4398 yclique. Elles croient aussi à la métempsycose, à l’ astrologie et aux castes. Tout cela se tient et se relie, tout cela es
4399 premier du terme56 — et ne laisse aucune place à l’ Histoire, ni davantage à la personne. Seule la religion juive fait exc
4400 laisse aucune place à l’Histoire, ni davantage à la personne. Seule la religion juive fait exception dans le monde antiqu
4401 e à l’Histoire, ni davantage à la personne. Seule la religion juive fait exception dans le monde antique. Ses prophètes on
4402 onne. Seule la religion juive fait exception dans le monde antique. Ses prophètes ont cru que Iahvé intervenait par de lib
4403 que Iahvé intervenait par de libres actions dans l’ existence terrestre du peuple élu : dès lors, celle-ci ne dépendait pl
4404 anifestée par une suite d’événements révélateurs. L’ incarnation du Christ vint accomplir cette vocation unique du peuple d
4405 e vocation unique du peuple d’Israël. Et, certes, l’ Évangile ignore absolument toute espèce de doctrine de l’Histoire : il
4406 ile ignore absolument toute espèce de doctrine de l’ Histoire : il annonce la Résurrection, qui est victoire sur le temps c
4407 ute espèce de doctrine de l’Histoire : il annonce la Résurrection, qui est victoire sur le temps comme sur la mort. Mais c
4408 il annonce la Résurrection, qui est victoire sur le temps comme sur la mort. Mais c’est bien à partir de là que les homme
4409 rrection, qui est victoire sur le temps comme sur la mort. Mais c’est bien à partir de là que les hommes touchés par le me
4410 e sur la mort. Mais c’est bien à partir de là que les hommes touchés par le message évangélique ont découvert le temps irré
4411 st bien à partir de là que les hommes touchés par le message évangélique ont découvert le temps irréversible de l’Histoire
4412 touchés par le message évangélique ont découvert le temps irréversible de l’Histoire, et qu’ils ont osé l’accepter. La pr
4413 vangélique ont découvert le temps irréversible de l’ Histoire, et qu’ils ont osé l’accepter. La prédication paulinienne, av
4414 mps irréversible de l’Histoire, et qu’ils ont osé l’ accepter. La prédication paulinienne, avec son insistance extraordinai
4415 ible de l’Histoire, et qu’ils ont osé l’accepter. La prédication paulinienne, avec son insistance extraordinaire sur l’uni
4416 ulinienne, avec son insistance extraordinaire sur l’ unicité absolue de l’Incarnation salvatrice, et cet « une fois pour to
4417 nsistance extraordinaire sur l’unicité absolue de l’ Incarnation salvatrice, et cet « une fois pour toutes » qui sert de le
4418 « une fois pour toutes » qui sert de leitmotiv à l’ Épître « aux Hébreux » précisément, voilà qui brise la croyance unanim
4419 ître « aux Hébreux » précisément, voilà qui brise la croyance unanime aux retours éternels du temps cyclique. Dans le prol
4420 nime aux retours éternels du temps cyclique. Dans le prolongement du temps dramatique des Prophètes s’ouvre alors le temps
4421 t du temps dramatique des Prophètes s’ouvre alors le temps du salut : temps de l’attente active, de l’espérance patiente e
4422 phètes s’ouvre alors le temps du salut : temps de l’ attente active, de l’espérance patiente et de la foi dans un retour un
4423 le temps du salut : temps de l’attente active, de l’ espérance patiente et de la foi dans un retour unique du Christ glorie
4424 e l’attente active, de l’espérance patiente et de la foi dans un retour unique du Christ glorieux. Et, dans ce temps nouve
4425 ue du Christ glorieux. Et, dans ce temps nouveau, le rôle de chaque personne devient unique et décisif, comme l’était sous
4426 chaque personne devient unique et décisif, comme l’ était sous l’Ancienne Alliance le rôle collectif d’Israël. Le dialogue
4427 nne devient unique et décisif, comme l’était sous l’ Ancienne Alliance le rôle collectif d’Israël. Le dialogue de Personne
4428 t décisif, comme l’était sous l’Ancienne Alliance le rôle collectif d’Israël. Le dialogue de Personne à personne entre Die
4429 s l’Ancienne Alliance le rôle collectif d’Israël. Le dialogue de Personne à personne entre Dieu qui appelle et l’âme qui r
4430 de Personne à personne entre Dieu qui appelle et l’ âme qui répond libère celle-ci des décrets uniformes de la morale et d
4431 i répond libère celle-ci des décrets uniformes de la morale et de la tradition sacrée, comme aussi des caprices du hasard
4432 celle-ci des décrets uniformes de la morale et de la tradition sacrée, comme aussi des caprices du hasard insensé, comme e
4433 si des caprices du hasard insensé, comme enfin de la roue du karma et du vertige de la métempsycose, qui réduisaient toute
4434 comme enfin de la roue du karma et du vertige de la métempsycose, qui réduisaient toute vie dans le temps et la chair à l
4435 e la métempsycose, qui réduisaient toute vie dans le temps et la chair à l’insignifiance anonyme d’un passage éphémère dan
4436 ycose, qui réduisaient toute vie dans le temps et la chair à l’insignifiance anonyme d’un passage éphémère dans l’Illusion
4437 réduisaient toute vie dans le temps et la chair à l’ insignifiance anonyme d’un passage éphémère dans l’Illusion. Ainsi l’H
4438 ’insignifiance anonyme d’un passage éphémère dans l’ Illusion. Ainsi l’Histoire, conscience nouvelle du temps des hommes, e
4439 nyme d’un passage éphémère dans l’Illusion. Ainsi l’ Histoire, conscience nouvelle du temps des hommes, est née de la même
4440 nscience nouvelle du temps des hommes, est née de la même rupture des grands rythmes cosmiques et des fatalités astrologiq
4441 s cosmiques et des fatalités astrologiques, et de la même victoire sur les étoiles et sur la mort, qui libère et suscite l
4442 talités astrologiques, et de la même victoire sur les étoiles et sur la mort, qui libère et suscite la personne. Ce n’est p
4443 es, et de la même victoire sur les étoiles et sur la mort, qui libère et suscite la personne. Ce n’est pas un hasard si le
4444 les étoiles et sur la mort, qui libère et suscite la personne. Ce n’est pas un hasard si le premier auteur d’une philosoph
4445 hasard si le premier auteur d’une philosophie de l’ Histoire — la Civitas Dei — fut aussi le premier auteur d’une biograph
4446 premier auteur d’une philosophie de l’Histoire — la Civitas Dei — fut aussi le premier auteur d’une biographie de sa pers
4447 premier auteur d’une biographie de sa personne : les Confessions. 3. Du Mythe à l’Histoire Mais il reste à mieux voi
4448 e sa personne : les Confessions. 3. Du Mythe à l’ Histoire Mais il reste à mieux voir comment l’homme, délivré des « 
4449 l’Histoire Mais il reste à mieux voir comment l’ homme, délivré des « religions » par la foi, trouve alors le courage e
4450 ir comment l’homme, délivré des « religions » par la foi, trouve alors le courage exceptionnel d’accepter le temps et l’Hi
4451 élivré des « religions » par la foi, trouve alors le courage exceptionnel d’accepter le temps et l’Histoire. Si toutes les
4452 , trouve alors le courage exceptionnel d’accepter le temps et l’Histoire. Si toutes les religions traditionnelles ont déve
4453 rs le courage exceptionnel d’accepter le temps et l’ Histoire. Si toutes les religions traditionnelles ont développé des my
4454 nnel d’accepter le temps et l’Histoire. Si toutes les religions traditionnelles ont développé des mythes du temps cyclique
4455 ont développé des mythes du temps cyclique et de l’ éternel retour, c’est parce que l’homme a peur du temps. Voilà le fait
4456 cyclique et de l’éternel retour, c’est parce que l’ homme a peur du temps. Voilà le fait fondamental. Car le temps est lié
4457 r, c’est parce que l’homme a peur du temps. Voilà le fait fondamental. Car le temps est lié à la mort comme à la perte des
4458 e a peur du temps. Voilà le fait fondamental. Car le temps est lié à la mort comme à la perte des paradis — Eden, âge d’or
4459 Voilà le fait fondamental. Car le temps est lié à la mort comme à la perte des paradis — Eden, âge d’or, enfance — vécus o
4460 ndamental. Car le temps est lié à la mort comme à la perte des paradis — Eden, âge d’or, enfance — vécus ou imaginaires. E
4461 , enfance — vécus ou imaginaires. Et il est lié à la menace toujours instante des catastrophes imprévisibles et arbitraire
4462 vraiment nouvelle, et donc dénuée de sens. Contre le malheur et son absurdité, l’homme n’a d’autre recours que d’attribuer
4463 nuée de sens. Contre le malheur et son absurdité, l’ homme n’a d’autre recours que d’attribuer un sens à ce qu’il subit san
4464 urs que d’attribuer un sens à ce qu’il subit sans l’ avoir « mérité ». Au scandale des souffrances et de la mort, il ne rép
4465 oir « mérité ». Au scandale des souffrances et de la mort, il ne répondra point par une révolte vaine, pure démence à ses
4466 émence à ses yeux de Grec ou d’Oriental, mais par le rêve immense des religions, transformant le réel insensé en un poème
4467 s par le rêve immense des religions, transformant le réel insensé en un poème de morts et de résurrections dominées par de
4468 s et par des archétypes qui s’accordent à ceux de l’ âme. Ainsi le rêve universel du temps cyclique et du retour sans fin d
4469 archétypes qui s’accordent à ceux de l’âme. Ainsi le rêve universel du temps cyclique et du retour sans fin de toutes les
4470 du temps cyclique et du retour sans fin de toutes les situations dévalorise le temps vécu de la souffrance. Ce n’est plus l
4471 tour sans fin de toutes les situations dévalorise le temps vécu de la souffrance. Ce n’est plus la souffrance qui est vain
4472 toutes les situations dévalorise le temps vécu de la souffrance. Ce n’est plus la souffrance qui est vaine, dès lors qu’el
4473 ise le temps vécu de la souffrance. Ce n’est plus la souffrance qui est vaine, dès lors qu’elle prend un sens exemplaire d
4474 e, dès lors qu’elle prend un sens exemplaire dans le Mythe, mais c’est le temps lui-même qui perd sa réalité, puisqu’il n’
4475 rend un sens exemplaire dans le Mythe, mais c’est le temps lui-même qui perd sa réalité, puisqu’il n’apporte plus d’absolu
4476 bsolue nouveauté, ni par conséquent de scandale. ( L’ homme d’aujourd’hui, qui croit qu’il ne croit plus à rien, mime encore
4477 ne croit plus à rien, mime encore ce mouvement de la sagesse mythique, quand il dit pour se rassurer que « l’histoire se r
4478 sse mythique, quand il dit pour se rassurer que «  l’ histoire se répète », ou plus familièrement « Plus ça change, plus c’e
4479 u plus familièrement « Plus ça change, plus c’est la même chose. ») L’irruption dans ce monde des religions antiques du me
4480 nt « Plus ça change, plus c’est la même chose. ») L’ irruption dans ce monde des religions antiques du message de l’Incarna
4481 ans ce monde des religions antiques du message de l’ Incarnation figure donc le Scandale absolu, la nouveauté totale, propr
4482 antiques du message de l’Incarnation figure donc le Scandale absolu, la nouveauté totale, proprement impensable. Et c’est
4483 de l’Incarnation figure donc le Scandale absolu, la nouveauté totale, proprement impensable. Et c’est bien dans ces terme
4484 ble. Et c’est bien dans ces termes que saint Paul la présente. Que Dieu se soit manifesté comme une Personne ; par un gest
4485 e fois pour toutes » — voici ruiné d’un coup tout l’ édifice mythique des protections de l’âme contre le temps de l’Histoir
4486 n coup tout l’édifice mythique des protections de l’ âme contre le temps de l’Histoire. Il s’agit d’un vrai fait, non plus
4487 ’édifice mythique des protections de l’âme contre le temps de l’Histoire. Il s’agit d’un vrai fait, non plus d’un avatar n
4488 hique des protections de l’âme contre le temps de l’ Histoire. Il s’agit d’un vrai fait, non plus d’un avatar ni de l’épiph
4489 s’agit d’un vrai fait, non plus d’un avatar ni de l’ épiphanie d’un archétype. Cette rupture du Cercle cosmique livre l’hom
4490 archétype. Cette rupture du Cercle cosmique livre l’ homme à l’imprévisible, c’est-à-dire à la grâce de Dieu, mais aussi à
4491 Cette rupture du Cercle cosmique livre l’homme à l’ imprévisible, c’est-à-dire à la grâce de Dieu, mais aussi à la liberté
4492 ue livre l’homme à l’imprévisible, c’est-à-dire à la grâce de Dieu, mais aussi à la liberté ; il devient responsable de so
4493 le, c’est-à-dire à la grâce de Dieu, mais aussi à la liberté ; il devient responsable de son temps sur la Terre. Ce serai
4494 liberté ; il devient responsable de son temps sur la Terre. Ce serait intolérable si la Révélation n’apportait en même te
4495 son temps sur la Terre. Ce serait intolérable si la Révélation n’apportait en même temps la certitude que le temps a été
4496 érable si la Révélation n’apportait en même temps la certitude que le temps a été vaincu au matin de Pâques, que l’homme n
4497 lation n’apportait en même temps la certitude que le temps a été vaincu au matin de Pâques, que l’homme ne lui appartient
4498 que le temps a été vaincu au matin de Pâques, que l’ homme ne lui appartient que par la chair (étant au monde mais non du m
4499 de Pâques, que l’homme ne lui appartient que par la chair (étant au monde mais non du monde) et qu’un terme est promis à
4500 de mais non du monde) et qu’un terme est promis à l’ Histoire, encore que nul n’en sache « le jour ni l’heure ». Seule donc
4501 promis à l’Histoire, encore que nul n’en sache «  le jour ni l’heure ». Seule donc la négation réalisée du temps permet d’
4502 ’Histoire, encore que nul n’en sache « le jour ni l’ heure ». Seule donc la négation réalisée du temps permet d’assumer le
4503 nul n’en sache « le jour ni l’heure ». Seule donc la négation réalisée du temps permet d’assumer le temps dans sa réalité.
4504 nc la négation réalisée du temps permet d’assumer le temps dans sa réalité. Sans la Résurrection, l’homme n’aurait pas la
4505 s permet d’assumer le temps dans sa réalité. Sans la Résurrection, l’homme n’aurait pas la preuve d’une existence qui écha
4506 r le temps dans sa réalité. Sans la Résurrection, l’ homme n’aurait pas la preuve d’une existence qui échappe au temps et à
4507 alité. Sans la Résurrection, l’homme n’aurait pas la preuve d’une existence qui échappe au temps et à la mort. « Si le Chr
4508 preuve d’une existence qui échappe au temps et à la mort. « Si le Christ n’est pas ressuscité, votre foi est vaine et vou
4509 existence qui échappe au temps et à la mort. « Si le Christ n’est pas ressuscité, votre foi est vaine et vous êtes encore
4510 échés. » Mais cette preuve n’est valable que pour la foi parfaite, et ce recours au Transcendant, non plus au Mythe, contr
4511 ecours au Transcendant, non plus au Mythe, contre la dictature du temps, n’est effectif que pour celui qui croit « que Die
4512 « que Dieu peut tout à tout instant », ainsi que l’ écrit Kierkegaard. Or la foi n’est jamais parfaite, et dans l’homme co
4513 tout instant », ainsi que l’écrit Kierkegaard. Or la foi n’est jamais parfaite, et dans l’homme converti persiste « le vie
4514 kegaard. Or la foi n’est jamais parfaite, et dans l’ homme converti persiste « le vieil homme ». Son mouvement naturel sera
4515 ais parfaite, et dans l’homme converti persiste «  le vieil homme ». Son mouvement naturel sera donc de chercher et d’inven
4516 aturel sera donc de chercher et d’inventer contre le temps d’autres défenses. Il essaiera d’abord de mythifier le Christ e
4517 autres défenses. Il essaiera d’abord de mythifier le Christ en niant sa parfaite humanité : c’est l’intention commune à to
4518 r le Christ en niant sa parfaite humanité : c’est l’ intention commune à toutes les hérésies gnostiques, manichéennes ou do
4519 ite humanité : c’est l’intention commune à toutes les hérésies gnostiques, manichéennes ou docétistes. Plus tard, au Moyen
4520 ichéennes ou docétistes. Plus tard, au Moyen Âge, la théorie des cycles et des rythmes cosmiques de l’Histoire sera repris
4521 la théorie des cycles et des rythmes cosmiques de l’ Histoire sera reprise — contre l’esprit des Pères — par les plus grand
4522 mes cosmiques de l’Histoire sera reprise — contre l’ esprit des Pères — par les plus grands docteurs occidentaux, tant orth
4523 re sera reprise — contre l’esprit des Pères — par les plus grands docteurs occidentaux, tant orthodoxes que semi-hérétiques
4524 Grand, Thomas d’Aquin, Dante, Roger Bacon et tous les astrologues, qui vont devenir avec Kepler les astronomes. La concepti
4525 ous les astrologues, qui vont devenir avec Kepler les astronomes. La conception linéaire du temps et du progrès continu de
4526 ues, qui vont devenir avec Kepler les astronomes. La conception linéaire du temps et du progrès continu de l’Histoire n’es
4527 eption linéaire du temps et du progrès continu de l’ Histoire n’est guère soutenue que par un Joachim de Flore, dont les éc
4528 guère soutenue que par un Joachim de Flore, dont les écrits sont condamnés ou falsifiés. Dans la conscience populaire médi
4529 dont les écrits sont condamnés ou falsifiés. Dans la conscience populaire médiévale, comme aujourd’hui encore dans les mas
4530 opulaire médiévale, comme aujourd’hui encore dans les masses paysannes, l’idée d’une évolution imprévisible et progressive
4531 mme aujourd’hui encore dans les masses paysannes, l’ idée d’une évolution imprévisible et progressive est généralement élim
4532 ressenti comme semblable à celui des saisons, de la végétation ou des étoiles. Et peut-être faut-il rattacher à cette mêm
4533 faut-il rattacher à cette même tendance naturelle la propension croissante du Moyen Âge à substituer la tradition, l’allég
4534 a propension croissante du Moyen Âge à substituer la tradition, l’allégorie mystique et la légende aux faits dont seules l
4535 roissante du Moyen Âge à substituer la tradition, l’ allégorie mystique et la légende aux faits dont seules les Écritures,
4536 substituer la tradition, l’allégorie mystique et la légende aux faits dont seules les Écritures, fort peu lues en ce temp
4537 orie mystique et la légende aux faits dont seules les Écritures, fort peu lues en ce temps, attestent l’historicité57. Tout
4538 s Écritures, fort peu lues en ce temps, attestent l’ historicité57. Tout ceci nous confirme dans la vue que le Moyen Âge, l
4539 ent l’historicité57. Tout ceci nous confirme dans la vue que le Moyen Âge, loin de représenter je ne sais quel « âge d’or
4540 ricité57. Tout ceci nous confirme dans la vue que le Moyen Âge, loin de représenter je ne sais quel « âge d’or du christia
4541 ais quel « âge d’or du christianisme » — comme on l’ a ressassé depuis les romantiques — fut bien plutôt dans son ensemble
4542 du christianisme » — comme on l’a ressassé depuis les romantiques — fut bien plutôt dans son ensemble une longue réaction d
4543 on ensemble une longue réaction de défense contre le ferment de révolution introduit dans le monde par l’Évangile. (J’ai d
4544 se contre le ferment de révolution introduit dans le monde par l’Évangile. (J’ai dit plus haut que le Moyen Âge fut la pér
4545 ferment de révolution introduit dans le monde par l’ Évangile. (J’ai dit plus haut que le Moyen Âge fut la période « orient
4546 le monde par l’Évangile. (J’ai dit plus haut que le Moyen Âge fut la période « orientale » de l’Europe.) Touchée en premi
4547 vangile. (J’ai dit plus haut que le Moyen Âge fut la période « orientale » de l’Europe.) Touchée en premier lieu par le me
4548 que le Moyen Âge fut la période « orientale » de l’ Europe.) Touchée en premier lieu par le message chrétien, l’humanité o
4549 ntale » de l’Europe.) Touchée en premier lieu par le message chrétien, l’humanité occidentale a dû trouver les moyens de l
4550 Touchée en premier lieu par le message chrétien, l’ humanité occidentale a dû trouver les moyens de l’accepter progressive
4551 age chrétien, l’humanité occidentale a dû trouver les moyens de l’accepter progressivement et d’y adapter ses conceptions.
4552 l’humanité occidentale a dû trouver les moyens de l’ accepter progressivement et d’y adapter ses conceptions. Pour les prem
4553 r les premiers chrétiens, ce qui rend supportable l’ idée d’un temps vidé de rythmes et de mythes, c’est la croyance à la F
4554 ée d’un temps vidé de rythmes et de mythes, c’est la croyance à la Fin imminente : encore « un peu de temps » et le Christ
4555 vidé de rythmes et de mythes, c’est la croyance à la Fin imminente : encore « un peu de temps » et le Christ reviendra. Ma
4556 la Fin imminente : encore « un peu de temps » et le Christ reviendra. Mais Rome s’écroule, l’Église s’installe, et les Ba
4557 ps » et le Christ reviendra. Mais Rome s’écroule, l’ Église s’installe, et les Barbares se convertissent. Il va falloir tro
4558 dra. Mais Rome s’écroule, l’Église s’installe, et les Barbares se convertissent. Il va falloir trouver les moyens de penser
4559 Barbares se convertissent. Il va falloir trouver les moyens de penser cette durée non prévue, désormais indéniable. Saint
4560 évue, désormais indéniable. Saint Augustin résout le paradoxe en un dualisme à peine voilé : il y a l’Histoire de Dieu et
4561 le paradoxe en un dualisme à peine voilé : il y a l’ Histoire de Dieu et celle des hommes, et si la première intervient dan
4562 bres, elle n’y détermine pas une loi d’évolution. Le Moyen Âge ira beaucoup plus loin, non pas dans le sens du risque, mai
4563 Le Moyen Âge ira beaucoup plus loin, non pas dans le sens du risque, mais dans celui des normes. C’est une vision réduite
4564 es normes. C’est une vision réduite et limitée de l’ Histoire qui lui permet de rendre un rythme à sa durée. L’apparition d
4565 re qui lui permet de rendre un rythme à sa durée. L’ apparition du Christ ne marque plus pour lui le commencement du temps
4566 e. L’apparition du Christ ne marque plus pour lui le commencement du temps de la Fin, mais le « milieu des temps », symbol
4567 marque plus pour lui le commencement du temps de la Fin, mais le « milieu des temps », symbole archétypique. Les temps so
4568 pour lui le commencement du temps de la Fin, mais le « milieu des temps », symbole archétypique. Les temps sont rétrécis à
4569 is le « milieu des temps », symbole archétypique. Les temps sont rétrécis à quelques millénaires dont la chronologie rester
4570 s temps sont rétrécis à quelques millénaires dont la chronologie restera symbolique jusqu’aux abords de la Renaissance. Et
4571 hronologie restera symbolique jusqu’aux abords de la Renaissance. Et dès lors elle ira se précisant, mais dans le même cad
4572 nce. Et dès lors elle ira se précisant, mais dans le même cadre indiscuté (d’où les excès qu’on signalait plus haut). Elle
4573 récisant, mais dans le même cadre indiscuté (d’où les excès qu’on signalait plus haut). Elle ne sera vraiment bouleversée q
4574 lus haut). Elle ne sera vraiment bouleversée qu’à la fin du xixe siècle. Relevons ici que la chronologie vertigineuse des
4575 sée qu’à la fin du xixe siècle. Relevons ici que la chronologie vertigineuse des hindous ne s’appliquait qu’aux cycles du
4576 hindous ne s’appliquait qu’aux cycles du cosmos : les événements de l’Histoire s’y trouvent tellement noyés que personne n’
4577 quait qu’aux cycles du cosmos : les événements de l’ Histoire s’y trouvent tellement noyés que personne n’a le souci de les
4578 ire s’y trouvent tellement noyés que personne n’a le souci de les dater. C’est un mouvement exactement contraire qui s’est
4579 vent tellement noyés que personne n’a le souci de les dater. C’est un mouvement exactement contraire qui s’est produit dans
4580 ement exactement contraire qui s’est produit dans l’ Occident moderne, où, à l’inverse de ce qui s’était passé durant l’int
4581 qui s’est produit dans l’Occident moderne, où, à l’ inverse de ce qui s’était passé durant l’intermède médiéval, l’état ci
4582 e, où, à l’inverse de ce qui s’était passé durant l’ intermède médiéval, l’état civil des hommes et des actions humaines n’
4583 ce qui s’était passé durant l’intermède médiéval, l’ état civil des hommes et des actions humaines n’a cessé de se préciser
4584 ons humaines n’a cessé de se préciser, tandis que la Fin et le Commencement des temps ne cessaient de s’éloigner dans le v
4585 es n’a cessé de se préciser, tandis que la Fin et le Commencement des temps ne cessaient de s’éloigner dans le vague de l’
4586 ncement des temps ne cessaient de s’éloigner dans le vague de l’infini. Or le Credo prend soin de préciser la date de la P
4587 temps ne cessaient de s’éloigner dans le vague de l’ infini. Or le Credo prend soin de préciser la date de la Passion uniqu
4588 aient de s’éloigner dans le vague de l’infini. Or le Credo prend soin de préciser la date de la Passion unique : « sous Po
4589 e de l’infini. Or le Credo prend soin de préciser la date de la Passion unique : « sous Ponce Pilate », mais il se tait su
4590 ni. Or le Credo prend soin de préciser la date de la Passion unique : « sous Ponce Pilate », mais il se tait sur celle du
4591 elle du Jugement dernier, « car nous ne savons ni le jour ni l’heure ». Et c’est pourquoi le progrès de la vision historiq
4592 ement dernier, « car nous ne savons ni le jour ni l’ heure ». Et c’est pourquoi le progrès de la vision historique, loin de
4593 savons ni le jour ni l’heure ». Et c’est pourquoi le progrès de la vision historique, loin de séculariser le christianisme
4594 our ni l’heure ». Et c’est pourquoi le progrès de la vision historique, loin de séculariser le christianisme, comme beauco
4595 grès de la vision historique, loin de séculariser le christianisme, comme beaucoup le craignent, s’y conforme de plus en p
4596 n de séculariser le christianisme, comme beaucoup le craignent, s’y conforme de plus en plus, à mesure qu’il s’éloigne du
4597 l s’éloigne du mythe. Il n’en reste pas moins que l’ extension soudaine des dimensions de l’Histoire, telle qu’elle vient d
4598 moins que l’extension soudaine des dimensions de l’ Histoire, telle qu’elle vient de se produire au xxe siècle, provoque
4599 re au xxe siècle, provoque une crise profonde de la relation intime et proprement congénitale entre l’Histoire et la pers
4600 a relation intime et proprement congénitale entre l’ Histoire et la personne humaine. Ceci pose un problème encore neuf.
4601 ime et proprement congénitale entre l’Histoire et la personne humaine. Ceci pose un problème encore neuf. 4. Être ou no
4602 e un problème encore neuf. 4. Être ou non dans l’ Histoire Tout d’un coup (dans l’espace d’une quarantaine d’années)
4603 re ou non dans l’Histoire Tout d’un coup (dans l’ espace d’une quarantaine d’années) il se révèle que notre humanité n’a
4604 lle ans, mais probablement six-cent-mille. Et que la Terre, avec ses quelque trois ou quatre milliards d’années, aurait dé
4605 rait déjà vécu presque un « jour de Brahma » dans le cosmos actuel. Je dis « cosmos actuel », car de nombreux savants nous
4606 déjà d’un mouvement de diastole et de systole de l’ Univers, qui se répéterait à l’infini : nous serions dans une phase d’
4607 e et de systole de l’Univers, qui se répéterait à l’ infini : nous serions dans une phase d’expansion. La cosmologie des hi
4608 infini : nous serions dans une phase d’expansion. La cosmologie des hindous paraît alors moins éloignée de la vérité que c
4609 ologie des hindous paraît alors moins éloignée de la vérité que celle du Moyen Âge « chrétien ». Il en résulte une suite d
4610 en fait — mais je ne pense pas en droit — contre l’ idée occidentale de l’homme. L’importance apparente des collectivités,
4611 pense pas en droit — contre l’idée occidentale de l’ homme. L’importance apparente des collectivités, des civilisations, de
4612 en droit — contre l’idée occidentale de l’homme. L’ importance apparente des collectivités, des civilisations, des période
4613 , elles demeurent seules visibles et concevables. L’ individu, en revanche, disparaît et s’annule. La même raison veut que
4614 . L’individu, en revanche, disparaît et s’annule. La même raison veut que les « lois de l’Histoire », nécessairement dédui
4615 e, disparaît et s’annule. La même raison veut que les « lois de l’Histoire », nécessairement déduites d’ensembles étendus,
4616 t s’annule. La même raison veut que les « lois de l’ Histoire », nécessairement déduites d’ensembles étendus, négligent l’a
4617 sairement déduites d’ensembles étendus, négligent l’ action de la personne et nous inclinent à douter de sa réalité. Le « r
4618 duites d’ensembles étendus, négligent l’action de la personne et nous inclinent à douter de sa réalité. Le « réel historiq
4619 ersonne et nous inclinent à douter de sa réalité. Le « réel historique », ainsi configuré, devient aussi distant de l’homm
4620 ique », ainsi configuré, devient aussi distant de l’ homme concret que Brahma d’un paria sans voie. Et l’Histoire, dans l’e
4621 homme concret que Brahma d’un paria sans voie. Et l’ Histoire, dans l’esprit de nos contemporains, prend la place de la Pro
4622 Brahma d’un paria sans voie. Et l’Histoire, dans l’ esprit de nos contemporains, prend la place de la Providence, bien qu’
4623 stoire, dans l’esprit de nos contemporains, prend la place de la Providence, bien qu’elle n’en revête ni la justice ni la
4624 l’esprit de nos contemporains, prend la place de la Providence, bien qu’elle n’en revête ni la justice ni la bonté. Bossu
4625 ace de la Providence, bien qu’elle n’en revête ni la justice ni la bonté. Bossuet, dans l’Abrégé de l’Histoire de France,
4626 idence, bien qu’elle n’en revête ni la justice ni la bonté. Bossuet, dans l’Abrégé de l’Histoire de France, nous parle déj
4627 n revête ni la justice ni la bonté. Bossuet, dans l’ Abrégé de l’Histoire de France, nous parle déjà d’une Histoire « maîtr
4628 la justice ni la bonté. Bossuet, dans l’Abrégé de l’ Histoire de France, nous parle déjà d’une Histoire « maîtresse de la v
4629 ce, nous parle déjà d’une Histoire « maîtresse de la vie humaine et de la politique ». Il s’agit de préparer le Dauphin, s
4630 ’une Histoire « maîtresse de la vie humaine et de la politique ». Il s’agit de préparer le Dauphin, son élève, à sa future
4631 maine et de la politique ». Il s’agit de préparer le Dauphin, son élève, à sa future tâche de roi. Cette Histoire pourvoye
4632 epteur. Ses « lois » ne sont encore que celles de la morale, et sa réalité celle d’un discours. Mais l’Histoire aujourd’hu
4633 a morale, et sa réalité celle d’un discours. Mais l’ Histoire aujourd’hui n’est plus un conte, elle se distingue absolument
4634 ue absolument de son récit. Elle ne concerne plus le passé, ni ses « leçons », qu’on pourrait aussi bien ignorer. Elle est
4635 t aussi bien ignorer. Elle est tout autre chose : le devenir présent. Elle est plus vraie que nous, qui ne faisons que l’h
4636 Elle est plus vraie que nous, qui ne faisons que l’ habiter pour un atome de temps insignifiant. Elle est devenue le cours
4637 un atome de temps insignifiant. Elle est devenue le cours de la réalité, où ce qu’il y a de plus réel, c’est le cours mêm
4638 temps insignifiant. Elle est devenue le cours de la réalité, où ce qu’il y a de plus réel, c’est le cours même. Et comme
4639 e la réalité, où ce qu’il y a de plus réel, c’est le cours même. Et comme ce mouvement pur « doit » être dépourvu d’origin
4640 sable, on ne peut savoir son sens, mais seulement l’ épouser, et l’on ne peut le penser qu’en s’y abandonnant. Ce qui se pl
4641 eut savoir son sens, mais seulement l’épouser, et l’ on ne peut le penser qu’en s’y abandonnant. Ce qui se place dans le se
4642 n sens, mais seulement l’épouser, et l’on ne peut le penser qu’en s’y abandonnant. Ce qui se place dans le sens de l’Histo
4643 enser qu’en s’y abandonnant. Ce qui se place dans le sens de l’Histoire en reçoit l’attribut d’exister. Ce qui résiste au
4644 s’y abandonnant. Ce qui se place dans le sens de l’ Histoire en reçoit l’attribut d’exister. Ce qui résiste au sens est « 
4645 qui se place dans le sens de l’Histoire en reçoit l’ attribut d’exister. Ce qui résiste au sens est « mystification » aux y
4646 présence d’une doctrine politique ou sociale, de l’ action d’un pays ou de l’option d’un homme, il n’est donc plus questio
4647 politique ou sociale, de l’action d’un pays ou de l’ option d’un homme, il n’est donc plus question de demander si c’est « 
4648 stion de demander si c’est « vrai ». C’est « dans le sens de l’Histoire », ou ce n’est rien qui vaille… Suis-je dans l’His
4649 mander si c’est « vrai ». C’est « dans le sens de l’ Histoire », ou ce n’est rien qui vaille… Suis-je dans l’Histoire ? Es-
4650 oire », ou ce n’est rien qui vaille… Suis-je dans l’ Histoire ? Es-tu dans l’Histoire ? Sont-ils dans l’Histoire ? ainsi co
4651 qui vaille… Suis-je dans l’Histoire ? Es-tu dans l’ Histoire ? Sont-ils dans l’Histoire ? ainsi conjugue une bonne partie
4652 ’Histoire ? Es-tu dans l’Histoire ? Sont-ils dans l’ Histoire ? ainsi conjugue une bonne partie de l’intelligentsia occiden
4653 s l’Histoire ? ainsi conjugue une bonne partie de l’ intelligentsia occidentale du xxe siècle. Comme il est clair qu’on ne
4654 omme il est clair qu’on ne peut pas « être » dans l’ Histoire rédigée par les historiens, on voit qu’il s’agit d’autre chos
4655 ne peut pas « être » dans l’Histoire rédigée par les historiens, on voit qu’il s’agit d’autre chose : non de mémoire mais
4656 s d’attitude actuelle, et non d’une discipline de l’ intellect mais bien d’une conception de l’Existence. Cette Histoire ab
4657 line de l’intellect mais bien d’une conception de l’ Existence. Cette Histoire absolutisée, qui n’est plus connaissance des
4658 ui lui cèdent et ceux qui lui résistent — peut-on la distinguer encore du temps lui-même ? N’est-elle pas simplement une m
4659 i-même ? N’est-elle pas simplement une manière de le penser qui le ferme à toute transcendance, et qui du même coup nous e
4660 -elle pas simplement une manière de le penser qui le ferme à toute transcendance, et qui du même coup nous enferme et nous
4661 e n’étant pas du monde », disait saint Paul. Mais l’ Histoire absolue veut que l’homme tout entier soit uniquement du monde
4662 sait saint Paul. Mais l’Histoire absolue veut que l’ homme tout entier soit uniquement du monde : elle le coupe de l’esprit
4663 homme tout entier soit uniquement du monde : elle le coupe de l’esprit. Ce faisant, elle nie la personne, car la personne
4664 ntier soit uniquement du monde : elle le coupe de l’ esprit. Ce faisant, elle nie la personne, car la personne se fonde dan
4665 : elle le coupe de l’esprit. Ce faisant, elle nie la personne, car la personne se fonde dans ce qui juge le temps, le détr
4666 e l’esprit. Ce faisant, elle nie la personne, car la personne se fonde dans ce qui juge le temps, le détruit et le renouve
4667 rsonne, car la personne se fonde dans ce qui juge le temps, le détruit et le renouvelle. Et, si l’on rêve un monde coupé d
4668 r la personne se fonde dans ce qui juge le temps, le détruit et le renouvelle. Et, si l’on rêve un monde coupé du transcen
4669 se fonde dans ce qui juge le temps, le détruit et le renouvelle. Et, si l’on rêve un monde coupé du transcendant, on évacu
4670 uge le temps, le détruit et le renouvelle. Et, si l’ on rêve un monde coupé du transcendant, on évacue du même mouvement dé
4671 u même mouvement désespéré toute justification de l’ action personnelle. Rien d’étonnant si l’homme, dès qu’il croit cette
4672 ation de l’action personnelle. Rien d’étonnant si l’ homme, dès qu’il croit cette Histoire, se découvre impuissant devant e
4673 n’est plus répandu que ce sentiment anxieux dans l’ intelligentsia comme dans les masses modernes, et c’est sur lui que le
4674 entiment anxieux dans l’intelligentsia comme dans les masses modernes, et c’est sur lui que les dictatures totalitaires fon
4675 me dans les masses modernes, et c’est sur lui que les dictatures totalitaires fondent leur pouvoir. Le droit d’opposition s
4676 les dictatures totalitaires fondent leur pouvoir. Le droit d’opposition se justifiait, en effet, par la seule conviction q
4677 e droit d’opposition se justifiait, en effet, par la seule conviction que la vocation d’un homme peut être plus vraie que
4678 justifiait, en effet, par la seule conviction que la vocation d’un homme peut être plus vraie que la règle — d’où les mart
4679 e la vocation d’un homme peut être plus vraie que la règle — d’où les martyrs des premiers temps du christianisme. Si, au
4680 un homme peut être plus vraie que la règle — d’où les martyrs des premiers temps du christianisme. Si, au contraire, le « s
4681 remiers temps du christianisme. Si, au contraire, le « sens » appartient à l’Histoire, et l’Histoire au César du moment, l
4682 nisme. Si, au contraire, le « sens » appartient à l’ Histoire, et l’Histoire au César du moment, la police politique du Cés
4683 ontraire, le « sens » appartient à l’Histoire, et l’ Histoire au César du moment, la police politique du César détient seul
4684 t à l’Histoire, et l’Histoire au César du moment, la police politique du César détient seule le vrai sens de nos vies. Nul
4685 oment, la police politique du César détient seule le vrai sens de nos vies. Nul scrupule de conscience ou sursaut de belle
4686 séquence, sans doute pénible, mais normale. 5. Le refus moderne du temps Cette description rapide d’une attitude nou
4687 t d’un état de conscience profondément typique de l’ Occident au xxe siècle me semble incontestable en tant que diagnostic
4688 ncontestable en tant que diagnostic. Mais comment la situer dans l’ensemble de l’Aventure occidentale ? Est-elle le signe
4689 tant que diagnostic. Mais comment la situer dans l’ ensemble de l’Aventure occidentale ? Est-elle le signe annonciateur d’
4690 nostic. Mais comment la situer dans l’ensemble de l’ Aventure occidentale ? Est-elle le signe annonciateur d’une fin lugubr
4691 s l’ensemble de l’Aventure occidentale ? Est-elle le signe annonciateur d’une fin lugubre, ou seulement d’une crise de cro
4692 seulement d’une crise de croissance ? On a vu que la croyance à l’Histoire absolue, ce produit de remplacement de la Provi
4693 e crise de croissance ? On a vu que la croyance à l’ Histoire absolue, ce produit de remplacement de la Providence, a pour
4694 l’Histoire absolue, ce produit de remplacement de la Providence, a pour effet normal d’éliminer la croyance à l’action per
4695 de la Providence, a pour effet normal d’éliminer la croyance à l’action personnelle. La personne est agent de liberté. Ce
4696 nce, a pour effet normal d’éliminer la croyance à l’ action personnelle. La personne est agent de liberté. Cette Histoire n
4697 al d’éliminer la croyance à l’action personnelle. La personne est agent de liberté. Cette Histoire nous conduit au fatalis
4698 Cette Histoire nous conduit au fatalisme. Comment l’ Histoire et la personne ont-elles pu devenir exclusives l’une de l’aut
4699 nous conduit au fatalisme. Comment l’Histoire et la personne ont-elles pu devenir exclusives l’une de l’autre, alors qu’e
4700 e acte libérateur ? Mais, d’abord, est-il sûr que la croyance moderne à l’Histoire comme devenir tout-puissant soit le dév
4701 is, d’abord, est-il sûr que la croyance moderne à l’ Histoire comme devenir tout-puissant soit le développement normal et l
4702 rne à l’Histoire comme devenir tout-puissant soit le développement normal et la suite obligée de l’attitude chrétienne dev
4703 nir tout-puissant soit le développement normal et la suite obligée de l’attitude chrétienne devant le temps ? Notre époque
4704 it le développement normal et la suite obligée de l’ attitude chrétienne devant le temps ? Notre époque aurait-elle simplem
4705 la suite obligée de l’attitude chrétienne devant le temps ? Notre époque aurait-elle simplement l’esprit « plus historiqu
4706 nt le temps ? Notre époque aurait-elle simplement l’ esprit « plus historique » que toutes les précédentes ? Oui, s’il s’ag
4707 implement l’esprit « plus historique » que toutes les précédentes ? Oui, s’il s’agit du goût de connaître le passé, plus ré
4708 écédentes ? Oui, s’il s’agit du goût de connaître le passé, plus répandu que jamais dans le grand public : Toynbee est bes
4709 connaître le passé, plus répandu que jamais dans le grand public : Toynbee est best-seller, les revues et la presse nous
4710 s dans le grand public : Toynbee est best-seller, les revues et la presse nous parlent de Sumer, du paléolithique, des Maya
4711 d public : Toynbee est best-seller, les revues et la presse nous parlent de Sumer, du paléolithique, des Mayas ou du vase
4712 r, du paléolithique, des Mayas ou du vase de Vix, les mémoires font fureur, les biographies s’arrachent, et beaucoup n’atte
4713 ayas ou du vase de Vix, les mémoires font fureur, les biographies s’arrachent, et beaucoup n’attendent pas la cinquantaine
4714 graphies s’arrachent, et beaucoup n’attendent pas la cinquantaine pour se mettre au passé dans un livre. Mais la réponse e
4715 taine pour se mettre au passé dans un livre. Mais la réponse est non s’il s’agit de cette Histoire dans le « sens » de laq
4716 éponse est non s’il s’agit de cette Histoire dans le « sens » de laquelle on nous dit qu’il faut « être » de toute nécessi
4717 ne de n’être pas. Celle-ci marque un recul devant le risque du temps. La conscience de l’Histoire est née de l’acceptation
4718 lle-ci marque un recul devant le risque du temps. La conscience de l’Histoire est née de l’acceptation d’un temps radicale
4719 recul devant le risque du temps. La conscience de l’ Histoire est née de l’acceptation d’un temps radicalement imprévisible
4720 du temps. La conscience de l’Histoire est née de l’ acceptation d’un temps radicalement imprévisible. Et sa fin seule étai
4721 et serait bonne. Mais encore fallait-il croire à l’ Apocalypse. D’ici là, nul soutien que la foi. À ce risque du temps, le
4722 croire à l’Apocalypse. D’ici là, nul soutien que la foi. À ce risque du temps, le Moyen Âge résiste par un retour aux con
4723 là, nul soutien que la foi. À ce risque du temps, le Moyen Âge résiste par un retour aux conceptions cycliques et par une
4724 ne nette limitation des dimensions du passé et de l’ avenir : cette espèce de congélation du temps a pour effet d’éliminer
4725 e de congélation du temps a pour effet d’éliminer le devenir. Mais la Renaissance et les siècles suivants découvrent l’inf
4726 du temps a pour effet d’éliminer le devenir. Mais la Renaissance et les siècles suivants découvrent l’infini et le réintro
4727 fet d’éliminer le devenir. Mais la Renaissance et les siècles suivants découvrent l’infini et le réintroduisent dans l’imag
4728 la Renaissance et les siècles suivants découvrent l’ infini et le réintroduisent dans l’imagination et la spéculation, puis
4729 ce et les siècles suivants découvrent l’infini et le réintroduisent dans l’imagination et la spéculation, puis dans le cal
4730 nts découvrent l’infini et le réintroduisent dans l’ imagination et la spéculation, puis dans le calcul mathématique. On ne
4731 infini et le réintroduisent dans l’imagination et la spéculation, puis dans le calcul mathématique. On ne peut plus limite
4732 t dans l’imagination et la spéculation, puis dans le calcul mathématique. On ne peut plus limiter l’espace ni le temps, et
4733 s le calcul mathématique. On ne peut plus limiter l’ espace ni le temps, et, lorsque au xxe siècle ils se dilatent soudain
4734 mathématique. On ne peut plus limiter l’espace ni le temps, et, lorsque au xxe siècle ils se dilatent soudain au-delà de
4735 delà de tout ce que notre esprit peut se figurer, l’ idée d’évolution balaie nos repères et nous emporte sans espoir à l’av
4736 balaie nos repères et nous emporte sans espoir à l’ aventure. Devant le risque béant, soudain total, l’homme qui n’a pas d
4737 et nous emporte sans espoir à l’aventure. Devant le risque béant, soudain total, l’homme qui n’a pas de foi cède au verti
4738 ’aventure. Devant le risque béant, soudain total, l’ homme qui n’a pas de foi cède au vertige. Sa dernière résistance à l’a
4739 de foi cède au vertige. Sa dernière résistance à l’ angoisse du temps se manifeste alors par la manière dont il décide d’i
4740 ance à l’angoisse du temps se manifeste alors par la manière dont il décide d’identifier au devenir l’être et la vérité el
4741 la manière dont il décide d’identifier au devenir l’ être et la vérité elle-même. Solution masochiste, pour un Occidental.
4742 dont il décide d’identifier au devenir l’être et la vérité elle-même. Solution masochiste, pour un Occidental. L’individu
4743 le-même. Solution masochiste, pour un Occidental. L’ individu trouve le défi trop lourd. Dans un cosmos qui se calcule en c
4744 masochiste, pour un Occidental. L’individu trouve le défi trop lourd. Dans un cosmos qui se calcule en centaines de millio
4745 ns d’années-lumière, dans cette durée qui va vers l’ infini, et dans une société où la technique, les « lois économiques »,
4746 urée qui va vers l’infini, et dans une société où la technique, les « lois économiques », la puissance de l’État, les mouv
4747 rs l’infini, et dans une société où la technique, les « lois économiques », la puissance de l’État, les mouvements de masse
4748 ociété où la technique, les « lois économiques », la puissance de l’État, les mouvements de masse, etc., échappent à ses p
4749 hnique, les « lois économiques », la puissance de l’ État, les mouvements de masse, etc., échappent à ses prises et l’enser
4750 les « lois économiques », la puissance de l’État, les mouvements de masse, etc., échappent à ses prises et l’enserrent — « 
4751 vements de masse, etc., échappent à ses prises et l’ enserrent — « il ne se retrouve plus » et démissionne. Que l’Histoire
4752 — « il ne se retrouve plus » et démissionne. Que l’ Histoire décide à ma place, de toute façon je n’y puis rien. Que le di
4753 à ma place, de toute façon je n’y puis rien. Que le dictateur ou le Parti décrètent le vrai sens de ma vie, de toute faço
4754 toute façon je n’y puis rien. Que le dictateur ou le Parti décrètent le vrai sens de ma vie, de toute façon je ne pourrais
4755 puis rien. Que le dictateur ou le Parti décrètent le vrai sens de ma vie, de toute façon je ne pourrais plus le distinguer
4756 ens de ma vie, de toute façon je ne pourrais plus le distinguer. Je ne suis plus responsable, mais c’est l’Évolution, et j
4757 stinguer. Je ne suis plus responsable, mais c’est l’ Évolution, et je n’ai plus d’autre choix que de m’en dire l’agent. Cet
4758 n, et je n’ai plus d’autre choix que de m’en dire l’ agent. Cet abandon de l’être entier à la Maya, sans plus rêver la déli
4759 re choix que de m’en dire l’agent. Cet abandon de l’ être entier à la Maya, sans plus rêver la délivrance du nirvana, cet e
4760 m’en dire l’agent. Cet abandon de l’être entier à la Maya, sans plus rêver la délivrance du nirvana, cet enlisement dans l
4761 andon de l’être entier à la Maya, sans plus rêver la délivrance du nirvana, cet enlisement dans la forme du monde, sans es
4762 ver la délivrance du nirvana, cet enlisement dans la forme du monde, sans espoir de salut individuel58 — je pressens qu’il
4763 moins autant qu’un fléchissement réel du sens de la personne et de la liberté. Ce n’est pas qu’on n’aime plus être soi li
4764 n fléchissement réel du sens de la personne et de la liberté. Ce n’est pas qu’on n’aime plus être soi librement, ni vraime
4765 plus être soi librement, ni vraiment qu’on renie la personne : mais on ne croit plus, on n’ose plus croire qu’elle puisse
4766 n sadisme. Dans cette abjecte humiliation du moi, l’ orgueil fou trouve un alibi. L’Évolution fatale est en réalité celle q
4767 umiliation du moi, l’orgueil fou trouve un alibi. L’ Évolution fatale est en réalité celle que l’on voudrait imposer. Les c
4768 libi. L’Évolution fatale est en réalité celle que l’ on voudrait imposer. Les communistes affirment qu’ils sont les instrum
4769 e est en réalité celle que l’on voudrait imposer. Les communistes affirment qu’ils sont les instruments du sens inévitable
4770 it imposer. Les communistes affirment qu’ils sont les instruments du sens inévitable de l’Histoire, légitimant la mort de m
4771 qu’ils sont les instruments du sens inévitable de l’ Histoire, légitimant la mort de millions de koulaks qui vivaient par h
4772 ents du sens inévitable de l’Histoire, légitimant la mort de millions de koulaks qui vivaient par hasard en travers. Mais
4773 koulaks qui vivaient par hasard en travers. Mais les « lois » révélées par Karl Marx n’ont jamais prévu rien de tel ; elle
4774 mplement au Dictateur d’accréditer son utopie. Si le sang de ses propres martyrs fut la semence de l’Église, c’est le sang
4775 son utopie. Si le sang de ses propres martyrs fut la semence de l’Église, c’est le sang des « païens », le sang des autres
4776 le sang de ses propres martyrs fut la semence de l’ Église, c’est le sang des « païens », le sang des autres, qui cimente
4777 propres martyrs fut la semence de l’Église, c’est le sang des « païens », le sang des autres, qui cimente l’édifice de l’U
4778 emence de l’Église, c’est le sang des « païens », le sang des autres, qui cimente l’édifice de l’Usine soviétique et donne
4779 g des « païens », le sang des autres, qui cimente l’ édifice de l’Usine soviétique et donne la preuve démente de la réalité
4780 s », le sang des autres, qui cimente l’édifice de l’ Usine soviétique et donne la preuve démente de la réalité des utopies
4781 cimente l’édifice de l’Usine soviétique et donne la preuve démente de la réalité des utopies au nom desquelles on l’a ver
4782 l’Usine soviétique et donne la preuve démente de la réalité des utopies au nom desquelles on l’a versé. Mais d’où vient c
4783 te de la réalité des utopies au nom desquelles on l’ a versé. Mais d’où vient cette fureur d’anticiper l’avenir jusqu’à l’h
4784 a versé. Mais d’où vient cette fureur d’anticiper l’ avenir jusqu’à l’hypothéquer sur des millions de crimes ? Elle vient d
4785 ù vient cette fureur d’anticiper l’avenir jusqu’à l’ hypothéquer sur des millions de crimes ? Elle vient de notre angoisse
4786 s de crimes ? Elle vient de notre angoisse devant le temps. Anticiper l’avenir, c’est tenter de se convaincre que le temps
4787 ient de notre angoisse devant le temps. Anticiper l’ avenir, c’est tenter de se convaincre que le temps ne va pas apporter
4788 ciper l’avenir, c’est tenter de se convaincre que le temps ne va pas apporter la négation de ce que je suis, de ce que j’a
4789 de se convaincre que le temps ne va pas apporter la négation de ce que je suis, de ce que j’attends, de mes croyances ou
4790 raisons de désespérer auxquelles je tiens contre le monde et contre Dieu — la négation de moi-même et du sens de ma vie.
4791 quelles je tiens contre le monde et contre Dieu — la négation de moi-même et du sens de ma vie. Anticiper l’avenir, c’est
4792 ation de moi-même et du sens de ma vie. Anticiper l’ avenir, c’est le dernier refus de l’aventure du temps — la fuite dans
4793 ie. Anticiper l’avenir, c’est le dernier refus de l’ aventure du temps — la fuite dans l’utopie. Utopies pessimistes, dans
4794 , c’est le dernier refus de l’aventure du temps — la fuite dans l’utopie. Utopies pessimistes, dans les démocraties : Orwe
4795 nier refus de l’aventure du temps — la fuite dans l’ utopie. Utopies pessimistes, dans les démocraties : Orwell prévoit l’i
4796 la fuite dans l’utopie. Utopies pessimistes, dans les démocraties : Orwell prévoit l’instauration prochaine du contrôle des
4797 essimistes, dans les démocraties : Orwell prévoit l’ instauration prochaine du contrôle des pensées par le Pouvoir. Utopies
4798 nstauration prochaine du contrôle des pensées par le Pouvoir. Utopies optimistes chez les totalitaires : ce sont les mêmes
4799 s pensées par le Pouvoir. Utopies optimistes chez les totalitaires : ce sont les mêmes, mais ils s’en félicitent. Et les un
4800 topies optimistes chez les totalitaires : ce sont les mêmes, mais ils s’en félicitent. Et les unes comme les autres, redout
4801 : ce sont les mêmes, mais ils s’en félicitent. Et les unes comme les autres, redoutées ou voulues, ne se confondent pas seu
4802 êmes, mais ils s’en félicitent. Et les unes comme les autres, redoutées ou voulues, ne se confondent pas seulement dans leu
4803 r fatal, mais dans une seule et même démission de la personne, qui désespère de ses pouvoirs d’innovation et de toute espè
4804 de recours au transcendant libérateur. Engendrer l’ utopie est un mouvement de l’âme, sans doute inséparable de l’historic
4805 ibérateur. Engendrer l’utopie est un mouvement de l’ âme, sans doute inséparable de l’historicité initiée par le christiani
4806 un mouvement de l’âme, sans doute inséparable de l’ historicité initiée par le christianisme : il suffit que la foi faibli
4807 ns doute inséparable de l’historicité initiée par le christianisme : il suffit que la foi faiblisse, ou que le défi du tem
4808 cité initiée par le christianisme : il suffit que la foi faiblisse, ou que le défi du temps paraisse insurmontable. L’utop
4809 tianisme : il suffit que la foi faiblisse, ou que le défi du temps paraisse insurmontable. L’utopie est recul devant le te
4810 , ou que le défi du temps paraisse insurmontable. L’ utopie est recul devant le temps ouvert, elle refuse d’affronter cette
4811 paraisse insurmontable. L’utopie est recul devant le temps ouvert, elle refuse d’affronter cette situation béante qui fut
4812 mais elle en reste tributaire — et c’est pourquoi l’ Orient ne produit pas d’utopies. Concevoir une utopie et agir d’après
4813 r notre angoisse en avant, pour tenter d’asservir l’ imprévu. Bien souvent la recherche historique projette nos désirs en a
4814 t, pour tenter d’asservir l’imprévu. Bien souvent la recherche historique projette nos désirs en arrière, mais les « leçon
4815 e historique projette nos désirs en arrière, mais les « leçons du passé » ont rarement justifié d’autres délits que ceux de
4816 ont rarement justifié d’autres délits que ceux de la routine. L’Histoire-devenir, qui est une conjuration du temps, exige
4817 justifié d’autres délits que ceux de la routine. L’ Histoire-devenir, qui est une conjuration du temps, exige des sacrific
4818 glants bien plus massifs que n’en rêvèrent jamais les prêtres emplumés du grand dieu Huitzilopochtli. 6. Dilemme La c
4819 s du grand dieu Huitzilopochtli. 6. Dilemme La crise de notre sens du temps pose un dilemme. L’Occident, succombant
4820 La crise de notre sens du temps pose un dilemme. L’ Occident, succombant au Devenir déifié, va-t-il se mettre hors d’état
4821 ir déifié, va-t-il se mettre hors d’état de faire l’ Histoire ? Ou, surmontant le vertige cosmique et temporel où l’a plong
4822 hors d’état de faire l’Histoire ? Ou, surmontant le vertige cosmique et temporel où l’a plongé sa science par une mutatio
4823 Ou, surmontant le vertige cosmique et temporel où l’ a plongé sa science par une mutation brusque, saura-t-il en tirer une
4824 -il en tirer une liberté nouvelle ? Je céderais à la tentation que j’ai décrite si j’essayais d’anticiper sur nos lendemai
4825 ême exactes, mais par nos choix fondamentaux. Car la question n’est pas de savoir « ce qui arrivera », mais de savoir dès
4826 s disposés à laisser arriver ou à faire arriver ; la question n’est pas de supputer le sens probable d’un devenir fatal, p
4827 faire arriver ; la question n’est pas de supputer le sens probable d’un devenir fatal, pour nous « ajuster » à ses « lois 
4828 r » à ses « lois », mais au contraire d’affronter le temps au nom d’un sens qui ne peut s’originer qu’en la personne. Bref
4829 mps au nom d’un sens qui ne peut s’originer qu’en la personne. Bref, la question n’est pas de deviner l’Histoire, mais de
4830 s qui ne peut s’originer qu’en la personne. Bref, la question n’est pas de deviner l’Histoire, mais de la faire. Seules no
4831 personne. Bref, la question n’est pas de deviner l’ Histoire, mais de la faire. Seules nos options présentes préparent un
4832 question n’est pas de deviner l’Histoire, mais de la faire. Seules nos options présentes préparent un sens, ménagent d’ava
4833 vient à nous. Et ces options n’agiront point par la violence de prises de position calculées dans l’abstrait59, mais par
4834 la violence de prises de position calculées dans l’ abstrait59, mais par cette sorte de fascination qu’exerce sur l’avenir
4835 mais par cette sorte de fascination qu’exerce sur l’ avenir encore intact, foisonnant d’imprévus réalisables, l’attente réa
4836 encore intact, foisonnant d’imprévus réalisables, l’ attente réalisante d’une ferme vocation. 55. La première société d’
4837 xixe siècle par un Anglais, sir William Jones : la Société asiatique du Bengale. Et ce n’est guère que depuis la fin du
4838 siatique du Bengale. Et ce n’est guère que depuis la fin du xixe siècle qu’une science historique s’est constituée en Ind
4839 . 56. Religio, de religare, lier ensemble. 57. La nouveauté — le fait sans précédent archétypique — est la terreur de t
4840 , de religare, lier ensemble. 57. La nouveauté — le fait sans précédent archétypique — est la terreur de tous les « Moyen
4841 eauté — le fait sans précédent archétypique — est la terreur de tous les « Moyen Âge ». Quand elle survient, quand on se v
4842 s précédent archétypique — est la terreur de tous les « Moyen Âge ». Quand elle survient, quand on se voit contraint d’inno
4843 eau ou pour vaincre, on s’empresse d’en appeler à la coutume, et l’on prétend « renouveler la tradition ». Il suffit qu’un
4844 ncre, on s’empresse d’en appeler à la coutume, et l’ on prétend « renouveler la tradition ». Il suffit qu’une charte, une c
4845 ppeler à la coutume, et l’on prétend « renouveler la tradition ». Il suffit qu’une charte, une coutume, un usage ait vingt
4846 ingt-cinq ou trente ans, au Moyen Âge, pour qu’on l’ invoque sous le nom de « tradition ». 58. Il faut alors, de toute néc
4847 ente ans, au Moyen Âge, pour qu’on l’invoque sous le nom de « tradition ». 58. Il faut alors, de toute nécessité, que le
4848 on ». 58. Il faut alors, de toute nécessité, que le succès temporel prenne la place du salut et qu’il tienne lieu de but
4849 de toute nécessité, que le succès temporel prenne la place du salut et qu’il tienne lieu de but suprême. Succès individuel
4850 el ou collectif d’ailleurs ; mais le premier sent la tricherie. 59. Lits de Procuste des utopies toujours trop pauvres, o
4851 pauvres, ou de ces plans qui prévoient tout sauf l’ essentiel humain, parce qu’on les a conçus non comme des directives, m
4852 évoient tout sauf l’essentiel humain, parce qu’on les a conçus non comme des directives, mais comme des cadres rassurants ;
4853 ent leur malfaisance. au. Rougemont Denis de, «  La découverte du temps ou l’aventure occidentale », La Nouvelle Revue fr
4854 Rougemont Denis de, « La découverte du temps ou l’ aventure occidentale », La Nouvelle Revue française, Paris, mars 1957,
4855 découverte du temps ou l’aventure occidentale », La Nouvelle Revue française, Paris, mars 1957, p. 400-415.
44 1961, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). La personne, l’ange et l’absolu, ou le dialogue Occident-Orient (avril 1961)
4856 La personne, l’ange et l’absolu, ou le dialogue Occident-Orient (avril 1
4857 La personne, l’ ange et l’absolu, ou le dialogue Occident-Orient (avril 1961)av U
4858 La personne, l’ange et l’ absolu, ou le dialogue Occident-Orient (avril 1961)av Un dialogue
4859 La personne, l’ange et l’absolu, ou le dialogue Occident-Orient (avril 1961)av Un dialogue mal engagé
4860 ent (avril 1961)av Un dialogue mal engagé L’ Occident découvre le zen au moment où les couvents zen se vident au Ja
4861 Un dialogue mal engagé L’Occident découvre le zen au moment où les couvents zen se vident au Japon. (Mais il y a be
4862 engagé L’Occident découvre le zen au moment où les couvents zen se vident au Japon. (Mais il y a beaucoup plus de chréti
4863 nais que de sectateurs du Dr Suzuki en Amérique.) L’ Occident découvre la sagesse hindoue, grâce aux présentations quelque
4864 rs du Dr Suzuki en Amérique.) L’Occident découvre la sagesse hindoue, grâce aux présentations quelque peu christianisées q
4865 ntations quelque peu christianisées qu’en donnent les successeurs de Râmakrishna ; mais déjà l’intelligentsia de l’Inde se
4866 onnent les successeurs de Râmakrishna ; mais déjà l’ intelligentsia de l’Inde se préoccupe des problèmes qui lui sont impos
4867 rs de Râmakrishna ; mais déjà l’intelligentsia de l’ Inde se préoccupe des problèmes qui lui sont imposés par la technique
4868 préoccupe des problèmes qui lui sont imposés par la technique et par l’hygiène occidentales, et cherche à les résoudre à
4869 èmes qui lui sont imposés par la technique et par l’ hygiène occidentales, et cherche à les résoudre à l’aide d’un socialis
4870 nique et par l’hygiène occidentales, et cherche à les résoudre à l’aide d’un socialisme qui ne doit rien à Shankara. L’Occi
4871 hygiène occidentales, et cherche à les résoudre à l’ aide d’un socialisme qui ne doit rien à Shankara. L’Occident découvre
4872 aide d’un socialisme qui ne doit rien à Shankara. L’ Occident découvre Zoroastre à la suite de Nietzsche, et publie les gra
4873 uvre Zoroastre à la suite de Nietzsche, et publie les grands textes des mystiques soufis, mais l’Iran et l’Arabie sont en p
4874 blie les grands textes des mystiques soufis, mais l’ Iran et l’Arabie sont en pleine crise d’adaptation à l’habitus capital
4875 rands textes des mystiques soufis, mais l’Iran et l’ Arabie sont en pleine crise d’adaptation à l’habitus capitaliste. L’Oc
4876 n et l’Arabie sont en pleine crise d’adaptation à l’ habitus capitaliste. L’Occident découvre et publie le Hi-King, tandis
4877 leine crise d’adaptation à l’habitus capitaliste. L’ Occident découvre et publie le Hi-King, tandis que la Chine s’industri
4878 abitus capitaliste. L’Occident découvre et publie le Hi-King, tandis que la Chine s’industrialise, s’impose notre marxisme
4879 ccident découvre et publie le Hi-King, tandis que la Chine s’industrialise, s’impose notre marxisme et oblitère son mandar
4880 notre marxisme et oblitère son mandarinat. Enfin, l’ Occident n’a pas plus tôt découvert l’art nègre, les masques, la magie
4881 nat. Enfin, l’Occident n’a pas plus tôt découvert l’ art nègre, les masques, la magie, le jazz, que l’Afrique noire se préc
4882 ’Occident n’a pas plus tôt découvert l’art nègre, les masques, la magie, le jazz, que l’Afrique noire se précipite dans le
4883 pas plus tôt découvert l’art nègre, les masques, la magie, le jazz, que l’Afrique noire se précipite dans le nationalisme
4884 tôt découvert l’art nègre, les masques, la magie, le jazz, que l’Afrique noire se précipite dans le nationalisme, les jeux
4885 l’art nègre, les masques, la magie, le jazz, que l’ Afrique noire se précipite dans le nationalisme, les jeux parlementair
4886 e, le jazz, que l’Afrique noire se précipite dans le nationalisme, les jeux parlementaires, et l’exploitation par elle-mêm
4887 ’Afrique noire se précipite dans le nationalisme, les jeux parlementaires, et l’exploitation par elle-même de ses ressource
4888 dans le nationalisme, les jeux parlementaires, et l’ exploitation par elle-même de ses ressources matérielles. Ce que nous
4889 rielles. Ce que nous découvrons avec passion dans le Tiers Monde, ce n’est pas ce dont il vivait, c’est ce qui manquait à
4890 s ne savaient plus trouver dans notre foi. Ce que le tiers-monde nous emprunte, ce n’est pas notre créativité, mais ses pr
4891 tuels en même temps que leur misère, qui en était la rançon. Ils adoptent nos formes sociales, nos procédés de gouvernemen
4892 s de gouvernement et nos techniques, mais non pas les tensions spirituelles qui en étaient le moteur secret. Ce qui était p
4893 non pas les tensions spirituelles qui en étaient le moteur secret. Ce qui était pour nous résultantes d’innombrables pous
4894 lectuels et spirituels ? Presque rien, sinon dire l’ essentiel, qui n’agira guère sur l’histoire dans son devenir immédiat,
4895 en, sinon dire l’essentiel, qui n’agira guère sur l’ histoire dans son devenir immédiat, mais peut orienter la conscience d
4896 ire dans son devenir immédiat, mais peut orienter la conscience de quelques-uns de ceux qui la feront demain. L’essentiel
4897 rienter la conscience de quelques-uns de ceux qui la feront demain. L’essentiel du dialogue nécessaire et désormais inévit
4898 nce de quelques-uns de ceux qui la feront demain. L’ essentiel du dialogue nécessaire et désormais inévitable, pour si mal
4899 vitable, pour si mal engagé qu’il soit, porte sur l’ homme et sa définition. S’il est vrai que l’Orient nie le moi, qui est
4900 e sur l’homme et sa définition. S’il est vrai que l’ Orient nie le moi, qui est une valeur centrale pour l’Occident, il doi
4901 et sa définition. S’il est vrai que l’Orient nie le moi, qui est une valeur centrale pour l’Occident, il doit en résulter
4902 ient nie le moi, qui est une valeur centrale pour l’ Occident, il doit en résulter d’infinies conséquences dans tous les do
4903 oit en résulter d’infinies conséquences dans tous les domaines du réel, du spirituel au politique ; mais dans quelle mesure
4904  ; mais dans quelle mesure est-ce vrai ? Quel est le moi qui s’affirme d’une part et quel est le moi qu’on nie de l’autre 
4905 l est le moi qui s’affirme d’une part et quel est le moi qu’on nie de l’autre ? Est-ce bien le même ? La Personne Le
4906 uel est le moi qu’on nie de l’autre ? Est-ce bien le même ? La Personne Le christianisme a formé l’Occident, en form
4907 i qu’on nie de l’autre ? Est-ce bien le même ? La Personne Le christianisme a formé l’Occident, en formant, dès les
4908 l’autre ? Est-ce bien le même ? La Personne Le christianisme a formé l’Occident, en formant, dès les premiers concil
4909 même ? La Personne Le christianisme a formé l’ Occident, en formant, dès les premiers conciles, ses modèles de pensée
4910 nes divines à la fois distinctes et reliées. D’où la définition de la personne humaine ou du vrai moi, reprise et précisée
4911 fois distinctes et reliées. D’où la définition de la personne humaine ou du vrai moi, reprise et précisée par toutes les g
4912 ne ou du vrai moi, reprise et précisée par toutes les grandes époques de la théologie et de la philosophie, et toujours opp
4913 ise et précisée par toutes les grandes époques de la théologie et de la philosophie, et toujours opposée à l’homme naturel
4914 toutes les grandes époques de la théologie et de la philosophie, et toujours opposée à l’homme naturel, animal plus ou mo
4915 logie et de la philosophie, et toujours opposée à l’ homme naturel, animal plus ou moins raisonnable et simple exemplaire d
4916 plus ou moins raisonnable et simple exemplaire de l’ espèce. Pour saint Paul, le vrai moi est l’homme nouveau, « appelé » p
4917 t simple exemplaire de l’espèce. Pour saint Paul, le vrai moi est l’homme nouveau, « appelé » par un Dieu personnel, donc
4918 ire de l’espèce. Pour saint Paul, le vrai moi est l’ homme nouveau, « appelé » par un Dieu personnel, donc créé par une voc
4919 nc créé par une vocation, et il ne tombe pas sous le sens comme le « vieil homme », puisque sa vie « nouvelle » est à la f
4920 e vocation, et il ne tombe pas sous le sens comme le « vieil homme », puisque sa vie « nouvelle » est à la fois dans le mo
4921 », puisque sa vie « nouvelle » est à la fois dans le monde et hors du monde, à la fois manifestée par son amour (Agapè) et
4922 manifestée par son amour (Agapè) et « cachée avec le Christ en Dieu ». (Colossiens, 3, 3.) Dès les Pères grecs et le latin
4923 avec le Christ en Dieu ». (Colossiens, 3, 3.) Dès les Pères grecs et le latin Boèce, à travers Jean Scot Érigène, jusqu’à R
4924 ieu ». (Colossiens, 3, 3.) Dès les Pères grecs et le latin Boèce, à travers Jean Scot Érigène, jusqu’à Richard de Saint-Vi
4925 rigène, jusqu’à Richard de Saint-Victor puis dans le thomisme, on peut suivre l’évolution du concept et du terme de person
4926 aint-Victor puis dans le thomisme, on peut suivre l’ évolution du concept et du terme de personne, forgé par la doctrine tr
4927 ion du concept et du terme de personne, forgé par la doctrine trinitaire ; il s’appliquera de mieux en mieux à l’homme nou
4928 trinitaire ; il s’appliquera de mieux en mieux à l’ homme nouveau, à l’ens sibi suscité par l’esprit dans l’individu natur
4929 appliquera de mieux en mieux à l’homme nouveau, à l’ ens sibi suscité par l’esprit dans l’individu naturel. Pour Descartes,
4930 mieux à l’homme nouveau, à l’ens sibi suscité par l’ esprit dans l’individu naturel. Pour Descartes, le vrai moi c’est « l’
4931 e nouveau, à l’ens sibi suscité par l’esprit dans l’ individu naturel. Pour Descartes, le vrai moi c’est « l’âme », mais il
4932 l’esprit dans l’individu naturel. Pour Descartes, le vrai moi c’est « l’âme », mais il s’agit d’une âme tout intellectuell
4933 vidu naturel. Pour Descartes, le vrai moi c’est «  l’ âme », mais il s’agit d’une âme tout intellectuelle, dont « la nature
4934 s il s’agit d’une âme tout intellectuelle, dont «  la nature n’est que de penser » et qui reste entièrement distincte du co
4935 reste entièrement distincte du corps. Avec Kant, le vrai moi, nouménal, s’oppose au moi phénoménal, et reprend le nom de
4936 nouménal, s’oppose au moi phénoménal, et reprend le nom de personne. Chez Renouvier, la personne apparaît comme « fonctio
4937 l, et reprend le nom de personne. Chez Renouvier, la personne apparaît comme « fonction à plusieurs variables », par là do
4938 s », par là douée d’une liberté que n’aura jamais l’ individu, simple objet du déterminisme universel. Et quant à la scienc
4939 imple objet du déterminisme universel. Et quant à la science d’aujourd’hui, dont on a pu penser « qu’elle n’aborde le moi
4940 jourd’hui, dont on a pu penser « qu’elle n’aborde le moi que pour le disjoindre60 », il me semble plutôt qu’elle élague le
4941 on a pu penser « qu’elle n’aborde le moi que pour le disjoindre60 », il me semble plutôt qu’elle élague le vrai moi, qu’el
4942 isjoindre60 », il me semble plutôt qu’elle élague le vrai moi, qu’elle en disjoint ce qui appartient en propre au collecti
4943 isjoint ce qui appartient en propre au collectif ( l’ inconscient, le surmoi, les archétypes) ou au biologique (l’hérédité,
4944 appartient en propre au collectif (l’inconscient, le surmoi, les archétypes) ou au biologique (l’hérédité, l’équilibre end
4945 en propre au collectif (l’inconscient, le surmoi, les archétypes) ou au biologique (l’hérédité, l’équilibre endocrinien), e
4946 ent, le surmoi, les archétypes) ou au biologique ( l’ hérédité, l’équilibre endocrinien), et nous le montre d’autant plus di
4947 oi, les archétypes) ou au biologique (l’hérédité, l’ équilibre endocrinien), et nous le montre d’autant plus distinct, dans
4948 ue (l’hérédité, l’équilibre endocrinien), et nous le montre d’autant plus distinct, dans sa fonction centrale, totalisante
4949 e, totalisante, dans son pouvoir d’intégration de l’ être. Loin de dissocier le moi, les recherches psychologiques du xxe
4950 ouvoir d’intégration de l’être. Loin de dissocier le moi, les recherches psychologiques du xxe siècle nomment et dénoncen
4951 ’intégration de l’être. Loin de dissocier le moi, les recherches psychologiques du xxe siècle nomment et dénoncent les for
4952 sychologiques du xxe siècle nomment et dénoncent les forces qui tendent à le dissocier, les névroses qui l’assiègent de to
4953 cle nomment et dénoncent les forces qui tendent à le dissocier, les névroses qui l’assiègent de toutes parts, et retrouven
4954 dénoncent les forces qui tendent à le dissocier, les névroses qui l’assiègent de toutes parts, et retrouvent par le détour
4955 rces qui tendent à le dissocier, les névroses qui l’ assiègent de toutes parts, et retrouvent par le détour de leurs descri
4956 ui l’assiègent de toutes parts, et retrouvent par le détour de leurs descriptions « objectives » l’opposition paulinienne
4957 ar le détour de leurs descriptions « objectives » l’ opposition paulinienne des « deux hommes en moi » : le naturel tyranni
4958 position paulinienne des « deux hommes en moi » : le naturel tyrannisant (et tyrannisé par la Loi) et le spirituel libérat
4959 moi » : le naturel tyrannisant (et tyrannisé par la Loi) et le spirituel libérateur. S’il est vrai que le langage courant
4960 naturel tyrannisant (et tyrannisé par la Loi) et le spirituel libérateur. S’il est vrai que le langage courant confond sa
4961 oi) et le spirituel libérateur. S’il est vrai que le langage courant confond sans l’ombre d’un scrupule la personne et tou
4962 S’il est vrai que le langage courant confond sans l’ ombre d’un scrupule la personne et tout ce qu’elle n’est pas — l’indiv
4963 angage courant confond sans l’ombre d’un scrupule la personne et tout ce qu’elle n’est pas — l’individu, la persona, la « 
4964 rupule la personne et tout ce qu’elle n’est pas — l’ individu, la persona, la « forte individualité », l’âme sensitive, l’i
4965 rsonne et tout ce qu’elle n’est pas — l’individu, la persona, la « forte individualité », l’âme sensitive, l’intellect, l’
4966 ut ce qu’elle n’est pas — l’individu, la persona, la « forte individualité », l’âme sensitive, l’intellect, l’élémentaire
4967 individu, la persona, la « forte individualité », l’ âme sensitive, l’intellect, l’élémentaire et souvent si trompeuse cons
4968 ona, la « forte individualité », l’âme sensitive, l’ intellect, l’élémentaire et souvent si trompeuse conscience de soi — r
4969 te individualité », l’âme sensitive, l’intellect, l’ élémentaire et souvent si trompeuse conscience de soi — reste que la c
4970 ouvent si trompeuse conscience de soi — reste que la croyance au moi distinct et le recours à la « valeur absolue de la pe
4971 de soi — reste que la croyance au moi distinct et le recours à la « valeur absolue de la personne » sont à peu près univer
4972 e que la croyance au moi distinct et le recours à la « valeur absolue de la personne » sont à peu près universels en Occid
4973 i distinct et le recours à la « valeur absolue de la personne » sont à peu près universels en Occident. Comme l’attestent
4974 e » sont à peu près universels en Occident. Comme l’ attestent tant de notions considérées comme allant de soi — et tant de
4975 lant de soi — et tant de réalités « bien vues » à l’ Ouest, mais que l’Est se devait d’ignorer, voire de condamner, telles
4976 ant de réalités « bien vues » à l’Ouest, mais que l’ Est se devait d’ignorer, voire de condamner, telles que l’originalité,
4977 devait d’ignorer, voire de condamner, telles que l’ originalité, les droits de l’homme, le record, la gloire personnelle,
4978 er, voire de condamner, telles que l’originalité, les droits de l’homme, le record, la gloire personnelle, la biographie et
4979 telles que l’originalité, les droits de l’homme, le record, la gloire personnelle, la biographie et le portrait, la prièr
4980 l’originalité, les droits de l’homme, le record, la gloire personnelle, la biographie et le portrait, la prière pour un t
4981 its de l’homme, le record, la gloire personnelle, la biographie et le portrait, la prière pour un tel vivant ou pour les m
4982 e record, la gloire personnelle, la biographie et le portrait, la prière pour un tel vivant ou pour les morts… Comme l’att
4983 gloire personnelle, la biographie et le portrait, la prière pour un tel vivant ou pour les morts… Comme l’attestent non mo
4984 le portrait, la prière pour un tel vivant ou pour les morts… Comme l’attestent non moins la mauvaise réputation que nous fa
4985 rière pour un tel vivant ou pour les morts… Comme l’ attestent non moins la mauvaise réputation que nous faisons à l’anonym
4986 nt ou pour les morts… Comme l’attestent non moins la mauvaise réputation que nous faisons à l’anonyme, la condamnation par
4987 n moins la mauvaise réputation que nous faisons à l’ anonyme, la condamnation par nos critiques du style impersonnel ou de
4988 mauvaise réputation que nous faisons à l’anonyme, la condamnation par nos critiques du style impersonnel ou de la banalité
4989 tion par nos critiques du style impersonnel ou de la banalité, la dénonciation de l’on par nos philosophes, et les diatrib
4990 critiques du style impersonnel ou de la banalité, la dénonciation de l’on par nos philosophes, et les diatribes marxistes
4991 impersonnel ou de la banalité, la dénonciation de l’ on par nos philosophes, et les diatribes marxistes contre l’aliénation
4992 , la dénonciation de l’on par nos philosophes, et les diatribes marxistes contre l’aliénation. Et comme l’atteste enfin not
4993 os philosophes, et les diatribes marxistes contre l’ aliénation. Et comme l’atteste enfin notre notion de l’amour, — à quoi
4994 diatribes marxistes contre l’aliénation. Et comme l’ atteste enfin notre notion de l’amour, — à quoi j’entends venir plus l
4995 énation. Et comme l’atteste enfin notre notion de l’ amour, — à quoi j’entends venir plus loin. L’ange Quelle est cet
4996 e l’amour, — à quoi j’entends venir plus loin. L’ ange Quelle est cette part de la personne dès maintenant libérée du
4997 plus loin. L’ange Quelle est cette part de la personne dès maintenant libérée du monde, où elle vit encore en exil,
4998  héritière du Royaume », dès maintenant « portant l’ image céleste », « glorifiée », « revêtue de lumière », d’incorruptibi
4999 ortalité ; dès maintenant donc « ressuscitée avec le Christ », bien que « cachée avec le Christ en Dieu » jusqu’à l’avènem
5000 suscitée avec le Christ », bien que « cachée avec le Christ en Dieu » jusqu’à l’avènement de l’Amour ? C’est l’Ange, répon
5001 ien que « cachée avec le Christ en Dieu » jusqu’à l’ avènement de l’Amour ? C’est l’Ange, répond l’Iran des spirituels, l’I
5002 e avec le Christ en Dieu » jusqu’à l’avènement de l’ Amour ? C’est l’Ange, répond l’Iran des spirituels, l’Iran du mazdéism
5003 en Dieu » jusqu’à l’avènement de l’Amour ? C’est l’ Ange, répond l’Iran des spirituels, l’Iran du mazdéisme et des mystiqu
5004 u’à l’avènement de l’Amour ? C’est l’Ange, répond l’ Iran des spirituels, l’Iran du mazdéisme et des mystiques soufis, proc
5005 our ? C’est l’Ange, répond l’Iran des spirituels, l’ Iran du mazdéisme et des mystiques soufis, proche de l’Inde mais enté
5006 n du mazdéisme et des mystiques soufis, proche de l’ Inde mais enté sur le tronc abrahamique, d’où sont issus les juifs, le
5007 mystiques soufis, proche de l’Inde mais enté sur le tronc abrahamique, d’où sont issus les juifs, les chrétiens, et l’isl
5008 is enté sur le tronc abrahamique, d’où sont issus les juifs, les chrétiens, et l’islam. Que serait l’Ange pour nos psycholo
5009 le tronc abrahamique, d’où sont issus les juifs, les chrétiens, et l’islam. Que serait l’Ange pour nos psychologues ? Une
5010 que, d’où sont issus les juifs, les chrétiens, et l’ islam. Que serait l’Ange pour nos psychologues ? Une projection du moi
5011 les juifs, les chrétiens, et l’islam. Que serait l’ Ange pour nos psychologues ? Une projection du moi individuel ou colle
5012 e projection du moi individuel ou collectif. Pour les sages de l’Iran, il est ce moi. Barakat, juif passé à l’islam, écrit
5013 du moi individuel ou collectif. Pour les sages de l’ Iran, il est ce moi. Barakat, juif passé à l’islam, écrit en 1165 : « 
5014 s de l’Iran, il est ce moi. Barakat, juif passé à l’ islam, écrit en 1165 : « … pour chaque âme individuelle, ou peut-être
5015 ollicitude et tendresse spéciales ; c’est lui qui les initie à la connaissance, les protège, les guide, les défend, les réc
5016 tendresse spéciales ; c’est lui qui les initie à la connaissance, les protège, les guide, les défend, les réconforte, les
5017 les ; c’est lui qui les initie à la connaissance, les protège, les guide, les défend, les réconforte, les fait triompher, e
5018 ui qui les initie à la connaissance, les protège, les guide, les défend, les réconforte, les fait triompher, et c’est cet ê
5019 initie à la connaissance, les protège, les guide, les défend, les réconforte, les fait triompher, et c’est cet être qu’ils
5020 connaissance, les protège, les guide, les défend, les réconforte, les fait triompher, et c’est cet être qu’ils appelaient N
5021 s protège, les guide, les défend, les réconforte, les fait triompher, et c’est cet être qu’ils appelaient Nature parfaite. 
5022 t être qu’ils appelaient Nature parfaite. » C’est le vrai moi, c’est l’Ange. « Il ne s’agit plus du simple messager transm
5023 aient Nature parfaite. » C’est le vrai moi, c’est l’ Ange. « Il ne s’agit plus du simple messager transmettant les ordres,
5024 Il ne s’agit plus du simple messager transmettant les ordres, ni de l’idée courante de l’Ange gardien », mais de ceci : « q
5025 du simple messager transmettant les ordres, ni de l’ idée courante de l’Ange gardien », mais de ceci : « que la Forme sous
5026 transmettant les ordres, ni de l’idée courante de l’ Ange gardien », mais de ceci : « que la Forme sous laquelle chacun des
5027 ourante de l’Ange gardien », mais de ceci : « que la Forme sous laquelle chacun des spirituels connaît Dieu est aussi la f
5028 elle chacun des spirituels connaît Dieu est aussi la forme sous laquelle Dieu le connaît, parce qu’elle est la forme sous
5029 onnaît Dieu est aussi la forme sous laquelle Dieu le connaît, parce qu’elle est la forme sous laquelle Dieu se révèle à so
5030 sous laquelle Dieu le connaît, parce qu’elle est la forme sous laquelle Dieu se révèle à soi-même en lui. C’est la “part
5031 laquelle Dieu se révèle à soi-même en lui. C’est la “part allotie” à chaque Spirituel, son individualité absolue, le Nom
5032 e” à chaque Spirituel, son individualité absolue, le Nom divin, investi en lui.61 » Ainsi donc, et selon les admirables co
5033 m divin, investi en lui.61 » Ainsi donc, et selon les admirables commentaires qu’Henry Corbin nous donne de la mystique sou
5034 rables commentaires qu’Henry Corbin nous donne de la mystique soufi, « la totalité de notre être, ce n’est pas seulement c
5035 u’Henry Corbin nous donne de la mystique soufi, «  la totalité de notre être, ce n’est pas seulement cette partie que nous
5036 dividualité éternelle”, notre “Nom divin”, ce que le vieil Iran désignait comme Fravarti 62. » L’Ange des soufis n’évoque
5037 que le vieil Iran désignait comme Fravarti 62. » L’ Ange des soufis n’évoque pas seulement cette part initiante de l’être
5038 is n’évoque pas seulement cette part initiante de l’ être renouvelé qui demeure cachée en Dieu selon le christianisme, mais
5039 l’être renouvelé qui demeure cachée en Dieu selon le christianisme, mais encore, et d’une manière plus précise dans l’homo
5040 , mais encore, et d’une manière plus précise dans l’ homologie, ces entités célestes, féminines, que la religion de Zaratho
5041 l’homologie, ces entités célestes, féminines, que la religion de Zarathoustra nommait les Fravartis, « celles qui ont choi
5042 éminines, que la religion de Zarathoustra nommait les Fravartis, « celles qui ont choisi » (c’est-à-dire choisi de combattr
5043 ur venir en aide à Ohrmazd) et qui sont à la fois les archétypes célestes des êtres et leurs anges tutélaires. Il y a plus 
5044 es et leurs anges tutélaires. Il y a plus : selon le mazdéisme « chaque entité physique ou morale, chaque être complet ou
5045 nt au monde de Lumière a sa Fravarti » — Ohrmazd, le Dieu lumineux a lui-même la sienne63. La Terre physique et tous les ê
5046 Fravarti » — Ohrmazd, le Dieu lumineux a lui-même la sienne63. La Terre physique et tous les êtres qui l’habitent apparais
5047 Ohrmazd, le Dieu lumineux a lui-même la sienne63. La Terre physique et tous les êtres qui l’habitent apparaissent ainsi co
5048 a lui-même la sienne63. La Terre physique et tous les êtres qui l’habitent apparaissent ainsi comme la contrepartie visible
5049 sienne63. La Terre physique et tous les êtres qui l’ habitent apparaissent ainsi comme la contrepartie visible du monde inv
5050 les êtres qui l’habitent apparaissent ainsi comme la contrepartie visible du monde invisible, mais premier, des archétypes
5051 du monde invisible, mais premier, des archétypes. L’ événement majeur, la scène capitale du drame de la personne ainsi cons
5052 mais premier, des archétypes. L’événement majeur, la scène capitale du drame de la personne ainsi constituée se produit à
5053 L’événement majeur, la scène capitale du drame de la personne ainsi constituée se produit à l’aube de la troisième nuit qu
5054 rame de la personne ainsi constituée se produit à l’ aube de la troisième nuit qui suit la mort terrestre : c’est la rencon
5055 se produit à l’aube de la troisième nuit qui suit la mort terrestre : c’est la rencontre de l’âme avec son moi céleste à l
5056 troisième nuit qui suit la mort terrestre : c’est la rencontre de l’âme avec son moi céleste à l’entrée du pont Chinvat. D
5057 ui suit la mort terrestre : c’est la rencontre de l’ âme avec son moi céleste à l’entrée du pont Chinvat. Dans un paysage n
5058 ’est la rencontre de l’âme avec son moi céleste à l’ entrée du pont Chinvat. Dans un paysage nimbé de la Lumière-de-Gloire
5059 ’entrée du pont Chinvat. Dans un paysage nimbé de la Lumière-de-Gloire restituant toutes choses et tous les êtres dans leu
5060 umière-de-Gloire restituant toutes choses et tous les êtres dans leur pureté paradisiaque, « dans un décor de montagnes fla
5061 mboyant aux aurores, d’eaux célestes où croissent les plantes d’immortalité », au centre du monde spirituel (qui est le mon
5062 ortalité », au centre du monde spirituel (qui est le monde réel des Archétypes), le pont Chinvat s’élance, reliant un somm
5063 spirituel (qui est le monde réel des Archétypes), le pont Chinvat s’élance, reliant un sommet au monde des Lumières infini
5064 Lumières infinies. À son entrée, se dresse devant l’ âme sa Dâenâ, son moi céleste, jeune femme d’une beauté resplendissant
5065 nte et qui lui dit : — Je suis toi-même ! Mais si l’ homme sur la Terre a maltraité son moi, au lieu de la Fravarti, c’est
5066 ui dit : — Je suis toi-même ! Mais si l’homme sur la Terre a maltraité son moi, au lieu de la Fravarti, c’est une appariti
5067 omme sur la Terre a maltraité son moi, au lieu de la Fravarti, c’est une apparition monstrueuse et défigurée qui reflète s
5068 strueuse et défigurée qui reflète son état déchu. La « rencontre aurorale » avec le moi céleste figure donc une pesée des
5069 te son état déchu. La « rencontre aurorale » avec le moi céleste figure donc une pesée des âmes. Le mazdéisme, comme plus
5070 ec le moi céleste figure donc une pesée des âmes. Le mazdéisme, comme plus tard les soufis, et comme le christianisme véri
5071 une pesée des âmes. Le mazdéisme, comme plus tard les soufis, et comme le christianisme véritable, ne demande pas d’abord c
5072 e mazdéisme, comme plus tard les soufis, et comme le christianisme véritable, ne demande pas d’abord ce qu’est l’homme, ma
5073 nisme véritable, ne demande pas d’abord ce qu’est l’ homme, mais qui es-tu ? Toute réalité dernière est personnelle. Le vra
5074 i es-tu ? Toute réalité dernière est personnelle. Le vrai moi est ailleurs, mais son drame ici-bas. L’absolu, ou la nég
5075 vrai moi est ailleurs, mais son drame ici-bas. L’ absolu, ou la négation du moi Les peuples des régions que l’Europe
5076 ailleurs, mais son drame ici-bas. L’absolu, ou la négation du moi Les peuples des régions que l’Europe nomme Asie di
5077 me ici-bas. L’absolu, ou la négation du moi Les peuples des régions que l’Europe nomme Asie diffèrent bien plus entre
5078 la négation du moi Les peuples des régions que l’ Europe nomme Asie diffèrent bien plus entre eux que les peuples de l’E
5079 rope nomme Asie diffèrent bien plus entre eux que les peuples de l’Europe, mais s’il est une croyance qu’ils ont tous en co
5080 diffèrent bien plus entre eux que les peuples de l’ Europe, mais s’il est une croyance qu’ils ont tous en commun c’est la
5081 est une croyance qu’ils ont tous en commun c’est la croyance à la métempsycose, à la transmigration des âmes. Or elle nou
5082 nce qu’ils ont tous en commun c’est la croyance à la métempsycose, à la transmigration des âmes. Or elle nous semble à pre
5083 en commun c’est la croyance à la métempsycose, à la transmigration des âmes. Or elle nous semble à première vue impliquer
5084 mble à première vue impliquer comme allant de soi la croyance en un moi reconnaissable au travers de ses vies successives.
5085 ssable au travers de ses vies successives. Car si le moi n’existe pas, qu’est-ce qui transmigre64 ? Mais ce moi, cet ego,
5086 cette entité distincte, voilà précisément ce que les doctrines de l’Inde, ou nées en Inde comme le bouddhisme, dénoncent d
5087 tincte, voilà précisément ce que les doctrines de l’ Inde, ou nées en Inde comme le bouddhisme, dénoncent depuis des millén
5088 ue les doctrines de l’Inde, ou nées en Inde comme le bouddhisme, dénoncent depuis des millénaires comme l’illusion fondame
5089 ouddhisme, dénoncent depuis des millénaires comme l’ illusion fondamentale. Il y aurait donc malentendu fondamental entre l
5090 le. Il y aurait donc malentendu fondamental entre les peuples et leurs sages, entre la religion des uns et la métaphysique
5091 ndamental entre les peuples et leurs sages, entre la religion des uns et la métaphysique des autres ? En fait, on ne voit
5092 ples et leurs sages, entre la religion des uns et la métaphysique des autres ? En fait, on ne voit pas les Sages de l’Asie
5093 métaphysique des autres ? En fait, on ne voit pas les Sages de l’Asie dénoncer sans relâche, comme on pourrait s’y attendre
5094 des autres ? En fait, on ne voit pas les Sages de l’ Asie dénoncer sans relâche, comme on pourrait s’y attendre, les croyan
5095 cer sans relâche, comme on pourrait s’y attendre, les croyances populaires de leurs contrées ; c’est bien plutôt à notre id
5096 eurs contrées ; c’est bien plutôt à notre idée de la personne qu’ils opposent leur idée du non-moi. Le vrai malentendu se
5097 la personne qu’ils opposent leur idée du non-moi. Le vrai malentendu se serait-il instauré entre eux et nous ? Entre cela
5098 s pensent que nous croyons lorsque nous affirmons le moi réel, et cela que nous pensons qu’ils croient en le niant ? Nous
5099 réel, et cela que nous pensons qu’ils croient en le niant ? Nous avancerons peut-être un peu en cherchant à nous représen
5100 premiers commentaires aux Vedas, il apparaît que la négation du moi porte d’abord contre le moi « phénoménal », c’est-à-d
5101 araît que la négation du moi porte d’abord contre le moi « phénoménal », c’est-à-dire contre l’homme naturel, exemplaire a
5102 contre le moi « phénoménal », c’est-à-dire contre l’ homme naturel, exemplaire animal transitoire et « aveugle », enveloppe
5103 scurcissante d’une âme divine. Ainsi parlent tous les upanishads, et les premiers écrits canoniques du bouddhisme : il faut
5104 crits canoniques du bouddhisme : il faut éteindre le désir individuel, cause de l’erreur, des souffrances et de la mort, d
5105  : il faut éteindre le désir individuel, cause de l’ erreur, des souffrances et de la mort, dissiper cet écran de matière e
5106 ividuel, cause de l’erreur, des souffrances et de la mort, dissiper cet écran de matière entre l’âme et la Réalité. On peu
5107 t de la mort, dissiper cet écran de matière entre l’ âme et la Réalité. On peut penser qu’il s’agit bien ici de la même « m
5108 ort, dissiper cet écran de matière entre l’âme et la Réalité. On peut penser qu’il s’agit bien ici de la même « mort au mo
5109 Réalité. On peut penser qu’il s’agit bien ici de la même « mort au monde et à soi-même » que le Christ exige de ses disci
5110 ci de la même « mort au monde et à soi-même » que le Christ exige de ses disciples, et qui est la condition de leur access
5111 que le Christ exige de ses disciples, et qui est la condition de leur accession à leur vrai moi spirituel, celui qui doit
5112 ndividuelle mais « obscurcie » par son union avec le corps. Elle doit tendre à se libérer du phénomène individuel au lieu
5113 à se libérer du phénomène individuel au lieu que l’ âme chrétienne doit le transfigurer, — d’où la « résurrection de la ch
5114 mène individuel au lieu que l’âme chrétienne doit le transfigurer, — d’où la « résurrection de la chair ». Il en va de mêm
5115 que l’âme chrétienne doit le transfigurer, — d’où la « résurrection de la chair ». Il en va de même pour le bouddhisme ori
5116 doit le transfigurer, — d’où la « résurrection de la chair ». Il en va de même pour le bouddhisme originel. Qu’est-ce que
5117 résurrection de la chair ». Il en va de même pour le bouddhisme originel. Qu’est-ce que l’homme ? Un ensemble transitoire
5118 e même pour le bouddhisme originel. Qu’est-ce que l’ homme ? Un ensemble transitoire d’agrégats matériels et de formations
5119 s mentales en proie au désir égoïste, qui naît de l’ ignorance et qui entraîne fatalement les attachements à l’illusoire ;
5120 ui naît de l’ignorance et qui entraîne fatalement les attachements à l’illusoire ; d’où l’action, le devenir, la mort, et l
5121 nce et qui entraîne fatalement les attachements à l’ illusoire ; d’où l’action, le devenir, la mort, et la roue des retours
5122 fatalement les attachements à l’illusoire ; d’où l’ action, le devenir, la mort, et la roue des retours sans fin. « Inconn
5123 t les attachements à l’illusoire ; d’où l’action, le devenir, la mort, et la roue des retours sans fin. « Inconnaissable e
5124 ements à l’illusoire ; d’où l’action, le devenir, la mort, et la roue des retours sans fin. « Inconnaissable est le commen
5125 llusoire ; d’où l’action, le devenir, la mort, et la roue des retours sans fin. « Inconnaissable est le commencement des ê
5126 a roue des retours sans fin. « Inconnaissable est le commencement des êtres enveloppés par l’ignorance, et que le désir co
5127 able est le commencement des êtres enveloppés par l’ ignorance, et que le désir conduit à de criminelles renaissances.65 »
5128 ment des êtres enveloppés par l’ignorance, et que le désir conduit à de criminelles renaissances.65 » Le but est donc « de
5129 désir conduit à de criminelles renaissances.65 » Le but est donc « de nous apprendre le moyen de ne pas renaître », nous
5130 issances.65 » Le but est donc « de nous apprendre le moyen de ne pas renaître », nous dit une moderne interprète du bouddh
5131 du continent, un interprète du zen fait écho : «  La négation de l’Atman énoncée par les premiers bouddhistes porte sur l’
5132 un interprète du zen fait écho : « La négation de l’ Atman énoncée par les premiers bouddhistes porte sur l’Atman de l’ego
5133 an énoncée par les premiers bouddhistes porte sur l’ Atman de l’ego relatif, non sur l’Atman de l’ego absolu, l’ego d’après
5134 par les premiers bouddhistes porte sur l’Atman de l’ ego relatif, non sur l’Atman de l’ego absolu, l’ego d’après l’expérien
5135 istes porte sur l’Atman de l’ego relatif, non sur l’ Atman de l’ego absolu, l’ego d’après l’expérience illuminante.67 » Ou
5136 sur l’Atman de l’ego relatif, non sur l’Atman de l’ ego absolu, l’ego d’après l’expérience illuminante.67 » Ou dans le san
5137 e l’ego relatif, non sur l’Atman de l’ego absolu, l’ ego d’après l’expérience illuminante.67 » Ou dans le sanscrit du Boudd
5138 f, non sur l’Atman de l’ego absolu, l’ego d’après l’ expérience illuminante.67 » Ou dans le sanscrit du Bouddha : Sabbe s
5139 ego d’après l’expérience illuminante.67 » Ou dans le sanscrit du Bouddha : Sabbe sankhara anicca Sabbe sankhara dukkha S
5140 s Toutes choses composées sont souffrantes Toutes les choses sont sans moi.68) Si D. T. Suzuki peut écrire après cela : « 
5141 8) Si D. T. Suzuki peut écrire après cela : « On le voit, l’expérience personnelle est le fondement de la philosophie bou
5142 T. Suzuki peut écrire après cela : « On le voit, l’ expérience personnelle est le fondement de la philosophie bouddhiste »
5143 cela : « On le voit, l’expérience personnelle est le fondement de la philosophie bouddhiste », comprenons qu’il s’agit pou
5144 oit, l’expérience personnelle est le fondement de la philosophie bouddhiste », comprenons qu’il s’agit pour lui d’une expé
5145 expérience rigoureusement spirituelle. En somme, l’ adversaire principal des védantins comme des premiers bouddhistes, ce
5146 mme des premiers bouddhistes, ce n’est pas encore la personne, mais l’obstination de l’ego qui veut durer au-delà de la mo
5147 ouddhistes, ce n’est pas encore la personne, mais l’ obstination de l’ego qui veut durer au-delà de la mort sans rien compr
5148 est pas encore la personne, mais l’obstination de l’ ego qui veut durer au-delà de la mort sans rien comprendre aux conditi
5149 l’obstination de l’ego qui veut durer au-delà de la mort sans rien comprendre aux conditions de cette survie, sans purifi
5150 onditions de cette survie, sans purifier d’avance le jiva — sans s’ordonner d’avance, dirions-nous, aux exigences du vrai
5151 es buts majeurs des méthodes spirituelles soit de l’ empêcher de renaître69 ! Mais vient le second stade, où les spirituel
5152 r de renaître69 ! Mais vient le second stade, où les spirituels s’opposent même à l’ego absolu, à la réalité de l’âme dist
5153 second stade, où les spirituels s’opposent même à l’ ego absolu, à la réalité de l’âme distincte. Le soi de chacun se confo
5154 les spirituels s’opposent même à l’ego absolu, à la réalité de l’âme distincte. Le soi de chacun se confond avec le Soi d
5155 s s’opposent même à l’ego absolu, à la réalité de l’ âme distincte. Le soi de chacun se confond avec le Soi de l’Immensité,
5156 à l’ego absolu, à la réalité de l’âme distincte. Le soi de chacun se confond avec le Soi de l’Immensité, ou du Brahma. Qu
5157 l’âme distincte. Le soi de chacun se confond avec le Soi de l’Immensité, ou du Brahma. Qu’est-ce que l’âme ? Une monade, d
5158 incte. Le soi de chacun se confond avec le Soi de l’ Immensité, ou du Brahma. Qu’est-ce que l’âme ? Une monade, disent les
5159 e Soi de l’Immensité, ou du Brahma. Qu’est-ce que l’ âme ? Une monade, disent les uns. Un reflet du Brahma, disent les autr
5160 Brahma. Qu’est-ce que l’âme ? Une monade, disent les uns. Un reflet du Brahma, disent les autres. Non, répondent les advaï
5161 nade, disent les uns. Un reflet du Brahma, disent les autres. Non, répondent les advaïtins : c’est Brahma ou ce n’est rien.
5162 flet du Brahma, disent les autres. Non, répondent les advaïtins : c’est Brahma ou ce n’est rien. Et tu n’es rien. Et de leu
5163 u ce n’est rien. Et tu n’es rien. Et de leur côté les bouddhistes (mais le tao chinois et le shinto nippon disent à peu prè
5164 n’es rien. Et de leur côté les bouddhistes (mais le tao chinois et le shinto nippon disent à peu près les mêmes phrases) 
5165 leur côté les bouddhistes (mais le tao chinois et le shinto nippon disent à peu près les mêmes phrases) : « Nagasena, exis
5166 tao chinois et le shinto nippon disent à peu près les mêmes phrases) : « Nagasena, existe-t-il un être qui transmigre de ce
5167 ne réincarnation ? — Oui, c’est possible. » Voici l’ explication : « Le Roi dit : Nagasena, y a-t-il quelqu’un qui ne repre
5168 — Oui, c’est possible. » Voici l’explication : «  Le Roi dit : Nagasena, y a-t-il quelqu’un qui ne reprenne point l’indivi
5169 agasena, y a-t-il quelqu’un qui ne reprenne point l’ individualité après la mort ? Nagasena répondit : Celui qui a péché r
5170 qu’un qui ne reprenne point l’individualité après la mort ? Nagasena répondit : Celui qui a péché reprend une individuali
5171 Nagasena, dis-moi s’il existe rien de semblable à l’ âme ? — Il n’y a rien de semblable à l’âme.70 » Un texte zen chinois s
5172 emblable à l’âme ? — Il n’y a rien de semblable à l’ âme.70 » Un texte zen chinois surenchérit : « Y a-t-il un enseignement
5173 ne jamais au peuple cette leçon. On s’en garde !) Les spirituels hindous cherchent le samadhi, qui est l’absorption totale
5174 On s’en garde !) Les spirituels hindous cherchent le samadhi, qui est l’absorption totale dans l’Absolu du Soi : le grand
5175 spirituels hindous cherchent le samadhi, qui est l’ absorption totale dans l’Absolu du Soi : le grand sommeil, lentement a
5176 hent le samadhi, qui est l’absorption totale dans l’ Absolu du Soi : le grand sommeil, lentement atteint, et qu’on peut app
5177 ui est l’absorption totale dans l’Absolu du Soi : le grand sommeil, lentement atteint, et qu’on peut appeler l’enstase. Et
5178 sommeil, lentement atteint, et qu’on peut appeler l’ enstase. Et les mystiques chrétiens cherchent l’extase. Quant aux boud
5179 ment atteint, et qu’on peut appeler l’enstase. Et les mystiques chrétiens cherchent l’extase. Quant aux bouddhistes zen, on
5180 r l’enstase. Et les mystiques chrétiens cherchent l’ extase. Quant aux bouddhistes zen, on dirait qu’ils s’en tiennent à la
5181 bouddhistes zen, on dirait qu’ils s’en tiennent à la stase pure et simple : faire face au fait, signe du Tout, et donc du
5182 , signe du Tout, et donc du Vide. Leur satori est le contraire du samadhi : c’est un éveil instantané. Éveil de quoi ? De
5183 i : c’est un éveil instantané. Éveil de quoi ? De la vision-en-soi, du Cela qui n’est pas personnel et se joue à travers n
5184 sonnel et se joue à travers notre moi. Ainsi tout l’ Orient des doctrines, — et en même temps l’Orient des peuples et sa cr
5185 i tout l’Orient des doctrines, — et en même temps l’ Orient des peuples et sa croyance en la transmigration… Mais voici le
5186 même temps l’Orient des peuples et sa croyance en la transmigration… Mais voici le moment d’ajuster la vision. Tout l’Orie
5187 s et sa croyance en la transmigration… Mais voici le moment d’ajuster la vision. Tout l’Orient exagère ses formules. Il di
5188 la transmigration… Mais voici le moment d’ajuster la vision. Tout l’Orient exagère ses formules. Il dit cent-mille-million
5189 n… Mais voici le moment d’ajuster la vision. Tout l’ Orient exagère ses formules. Il dit cent-mille-millions pour dire beau
5190 évité. Notre hygiène, augmentant de cinquante ans la durée moyenne de la vie, serait alors une « recette d’immortalité ».
5191 , augmentant de cinquante ans la durée moyenne de la vie, serait alors une « recette d’immortalité ». Et même la seule qui
5192 rait alors une « recette d’immortalité ». Et même la seule qui ait réussi. Apprenons donc à lire dans leur optique. Le mêm
5193 réussi. Apprenons donc à lire dans leur optique. Le même Kitaro Nishida qui écrit ceci : « La valeur religieuse signifie
5194 ptique. Le même Kitaro Nishida qui écrit ceci : «  La valeur religieuse signifie l’absolue négation du moi », ajoute trois
5195 qui écrit ceci : « La valeur religieuse signifie l’ absolue négation du moi », ajoute trois pages plus loin « Nous devenon
5196 s plus loin « Nous devenons vraies personnes dans la mesure où nous faisons face à l’Un tout-transcendant.71 » (Ce qui est
5197 ’Un tout-transcendant.71 » (Ce qui est chrétien.) Le même Chang Chen-Chi qui cite ce koan : Parfois, j’arrache la personn
5198 g Chen-Chi qui cite ce koan : Parfois, j’arrache la personne mais sauve l’objet. Parfois j’arrache l’objet, mais sauve la
5199 koan : Parfois, j’arrache la personne mais sauve l’ objet. Parfois j’arrache l’objet, mais sauve la personne. Parfois, j’a
5200 la personne mais sauve l’objet. Parfois j’arrache l’ objet, mais sauve la personne. Parfois, j’arrache en même temps l’obje
5201 ve l’objet. Parfois j’arrache l’objet, mais sauve la personne. Parfois, j’arrache en même temps l’objet et la personne. Pa
5202 uve la personne. Parfois, j’arrache en même temps l’ objet et la personne. Parfois, je n’arrache ni l’objet ni la personne.
5203 onne. Parfois, j’arrache en même temps l’objet et la personne. Parfois, je n’arrache ni l’objet ni la personne. Le même c
5204 l’objet et la personne. Parfois, je n’arrache ni l’ objet ni la personne. Le même commente : « Supprimer la personne et s
5205 la personne. Parfois, je n’arrache ni l’objet ni la personne. Le même commente : « Supprimer la personne et sauver l’obj
5206 Parfois, je n’arrache ni l’objet ni la personne. Le même commente : « Supprimer la personne et sauver l’objet signifie él
5207 t ni la personne. Le même commente : « Supprimer la personne et sauver l’objet signifie éliminer le questionneur, non sa
5208 même commente : « Supprimer la personne et sauver l’ objet signifie éliminer le questionneur, non sa question. Et les trois
5209 r la personne et sauver l’objet signifie éliminer le questionneur, non sa question. Et les trois autres distinctions s’exp
5210 fie éliminer le questionneur, non sa question. Et les trois autres distinctions s’expliquent de la même manière. » Puis il
5211 Et les trois autres distinctions s’expliquent de la même manière. » Puis il ajoute : « Si le disciple est exceptionnellem
5212 quent de la même manière. » Puis il ajoute : « Si le disciple est exceptionnellement doué, le maître ne touche ni à la per
5213 e : « Si le disciple est exceptionnellement doué, le maître ne touche ni à la personne, ni à l’objet. » Enfin ceci : « Ain
5214 exceptionnellement doué, le maître ne touche ni à la personne, ni à l’objet. » Enfin ceci : « Ainsi que Bodhidharma (le fo
5215 doué, le maître ne touche ni à la personne, ni à l’ objet. » Enfin ceci : « Ainsi que Bodhidharma (le fondateur du zen) l’
5216 l’objet. » Enfin ceci : « Ainsi que Bodhidharma ( le fondateur du zen) l’a déclaré, zen ne se soucie pas de disserter sur
5217 i : « Ainsi que Bodhidharma (le fondateur du zen) l’ a déclaré, zen ne se soucie pas de disserter sur des notions abstruses
5218 serter sur des notions abstruses telles que Dieu, la Vérité ; ce que zen demande au disciple, c’est de voir sa propre Phys
5219 , c’est de voir sa propre Physionomie. » Or comme le disait le sixième Patriarche de la secte (638-713) : « Ne pense pas a
5220 ie. » Or comme le disait le sixième Patriarche de la secte (638-713) : « Ne pense pas au bien ni au mal, mais regarde ce q
5221 partir d’un certain bouddhisme — et certainement le mazdéisme et les soufis : il s’agit d’une seule quête de l’esprit, do
5222 tain bouddhisme — et certainement le mazdéisme et les soufis : il s’agit d’une seule quête de l’esprit, dont le Graal, ou l
5223 me et les soufis : il s’agit d’une seule quête de l’ esprit, dont le Graal, ou l’Ange, est : toi-même. ⁂ Les différences ne
5224 s : il s’agit d’une seule quête de l’esprit, dont le Graal, ou l’Ange, est : toi-même. ⁂ Les différences ne sont donc pas
5225 d’une seule quête de l’esprit, dont le Graal, ou l’ Ange, est : toi-même. ⁂ Les différences ne sont donc pas où l’on croya
5226 prit, dont le Graal, ou l’Ange, est : toi-même. ⁂ Les différences ne sont donc pas où l’on croyait, ne sont jamais exacteme
5227 : toi-même. ⁂ Les différences ne sont donc pas où l’ on croyait, ne sont jamais exactement ce que l’on croyait. Si nous sou
5228 où l’on croyait, ne sont jamais exactement ce que l’ on croyait. Si nous souhaitons préciser leur nature, c’est dans les no
5229 nous souhaitons préciser leur nature, c’est dans les notions de l’amour traduisant ces trois conceptions, que nous avons l
5230 s préciser leur nature, c’est dans les notions de l’ amour traduisant ces trois conceptions, que nous avons les plus grande
5231 traduisant ces trois conceptions, que nous avons les plus grandes chances de les trouver. Dans ce domaine, toute différenc
5232 tions, que nous avons les plus grandes chances de les trouver. Dans ce domaine, toute différence reconnue peut être vérifié
5233 toute différence reconnue peut être vérifiée par l’ expérience intime, et promet au dialogue des spirituels un élargisseme
5234 et au dialogue des spirituels un élargissement de la conscience que chacun prendra de son bien. Tandis qu’au plan de l’ant
5235 chacun prendra de son bien. Tandis qu’au plan de l’ anthropologie plus ou moins « scientifique » de ce siècle, il semblera
5236 « scientifique » de ce siècle, il semblerait que les négations du moi selon les écoles orientales correspondent simplement
5237 cle, il semblerait que les négations du moi selon les écoles orientales correspondent simplement aux névroses de la psychan
5238 ientales correspondent simplement aux névroses de la psychanalyse freudienne : elles seraient autant de « rationalisations
5239 des attitudes « dysfonctionnelles » qui menacent l’ intégrité du moi et qui nient ou détruisent la personne… Mais l’Orient
5240 ent l’intégrité du moi et qui nient ou détruisent la personne… Mais l’Oriental sourit et nous laisse « nos » problèmes.
5241 moi et qui nient ou détruisent la personne… Mais l’ Oriental sourit et nous laisse « nos » problèmes. Trois écoles de l
5242 nous laisse « nos » problèmes. Trois écoles de l’ amour Si l’amour est le premier moteur non seulement de l’homme mai
5243 nos » problèmes. Trois écoles de l’amour Si l’ amour est le premier moteur non seulement de l’homme mais du monde, c’
5244 Si l’amour est le premier moteur non seulement de l’ homme mais du monde, c’est son action qui configure l’idée du moi que
5245 mme mais du monde, c’est son action qui configure l’ idée du moi que nous nous faisons, et cette idée du moi révèle l’amour
5246 ue nous nous faisons, et cette idée du moi révèle l’ amour, comme la structure de l’atome traduit certaines propriétés de l
5247 isons, et cette idée du moi révèle l’amour, comme la structure de l’atome traduit certaines propriétés de l’énergie. « C’e
5248 idée du moi révèle l’amour, comme la structure de l’ atome traduit certaines propriétés de l’énergie. « C’est l’amour domin
5249 ucture de l’atome traduit certaines propriétés de l’ énergie. « C’est l’amour dominant qui fait l’homme… L’homme est absolu
5250 raduit certaines propriétés de l’énergie. « C’est l’ amour dominant qui fait l’homme… L’homme est absolument tel qu’est l’a
5251 s de l’énergie. « C’est l’amour dominant qui fait l’ homme… L’homme est absolument tel qu’est l’amour dominant de sa vie :
5252 ergie. « C’est l’amour dominant qui fait l’homme… L’ homme est absolument tel qu’est l’amour dominant de sa vie : selon (ce
5253 i fait l’homme… L’homme est absolument tel qu’est l’ amour dominant de sa vie : selon (cet amour) se fait son ciel, s’il es
5254 on enfer, s’il est mauvais », dit Swedenborg dans La Nouvelle Jérusalem. Et dans De Coelo, il ajoute : « Le corps de chaqu
5255 uvelle Jérusalem. Et dans De Coelo, il ajoute : «  Le corps de chaque esprit et de chaque ange est la forme de son amour.73
5256 « Le corps de chaque esprit et de chaque ange est la forme de son amour.73 » Les trois notions de l’homme que l’on vient d
5257 et de chaque ange est la forme de son amour.73 » Les trois notions de l’homme que l’on vient d’évoquer nous apparaissent a
5258 t la forme de son amour.73 » Les trois notions de l’ homme que l’on vient d’évoquer nous apparaissent alors comme autant de
5259 e son amour.73 » Les trois notions de l’homme que l’ on vient d’évoquer nous apparaissent alors comme autant de modèles d’u
5260 lors comme autant de modèles d’une énergétique de l’ amour, ou comme autant d’effets de son action configurante et composan
5261 de son action configurante et composante. Et nous les voyons différer d’une manière subtile mais précise par la forme des r
5262 s différer d’une manière subtile mais précise par la forme des rapports qu’elles imaginent entre le moi naturel et le vrai
5263 ar la forme des rapports qu’elles imaginent entre le moi naturel et le vrai moi, c’est-à-dire selon les langages, entre le
5264 pports qu’elles imaginent entre le moi naturel et le vrai moi, c’est-à-dire selon les langages, entre les phénomènes et le
5265 le moi naturel et le vrai moi, c’est-à-dire selon les langages, entre les phénomènes et le noumène, l’individu et la person
5266 vrai moi, c’est-à-dire selon les langages, entre les phénomènes et le noumène, l’individu et la personne, l’âme et l’ange,
5267 -dire selon les langages, entre les phénomènes et le noumène, l’individu et la personne, l’âme et l’ange, l’ego et le Soi.
5268 les langages, entre les phénomènes et le noumène, l’ individu et la personne, l’âme et l’ange, l’ego et le Soi. Observons q
5269 entre les phénomènes et le noumène, l’individu et la personne, l’âme et l’ange, l’ego et le Soi. Observons que les trois p
5270 nomènes et le noumène, l’individu et la personne, l’ âme et l’ange, l’ego et le Soi. Observons que les trois partent d’une
5271 t le noumène, l’individu et la personne, l’âme et l’ ange, l’ego et le Soi. Observons que les trois partent d’une dualité s
5272 mène, l’individu et la personne, l’âme et l’ange, l’ ego et le Soi. Observons que les trois partent d’une dualité sans laqu
5273 ndividu et la personne, l’âme et l’ange, l’ego et le Soi. Observons que les trois partent d’une dualité sans laquelle ni l
5274 , l’âme et l’ange, l’ego et le Soi. Observons que les trois partent d’une dualité sans laquelle ni l’homme ni l’amour ne se
5275 les trois partent d’une dualité sans laquelle ni l’ homme ni l’amour ne seraient même concevables. Il ne s’agit ici ni du
5276 partent d’une dualité sans laquelle ni l’homme ni l’ amour ne seraient même concevables. Il ne s’agit ici ni du dualisme tr
5277 ualisme trop facilement nommé manichéen, opposant le Bien et le Mal comme deux principes préexistants ; ni tout à fait des
5278 p facilement nommé manichéen, opposant le Bien et le Mal comme deux principes préexistants ; ni tout à fait des « deux hom
5279  ; ni tout à fait des « deux hommes en moi » dont la lutte fait gémir saint Paul ; mais, préalablement à tout jugement mor
5280 préalablement à tout jugement moral, il s’agit de la reconnaissance d’une bipolarité, d’une tension permanente entre l’ind
5281 d’une bipolarité, d’une tension permanente entre l’ individu et le « vrai moi ». (L’individu n’est pas le mal en soi : il
5282 ité, d’une tension permanente entre l’individu et le « vrai moi ». (L’individu n’est pas le mal en soi : il ne devient mau
5283 permanente entre l’individu et le « vrai moi ». ( L’ individu n’est pas le mal en soi : il ne devient mauvais que dans la s
5284 ndividu et le « vrai moi ». (L’individu n’est pas le mal en soi : il ne devient mauvais que dans la seule mesure où il se
5285 as le mal en soi : il ne devient mauvais que dans la seule mesure où il se referme sur soi, c’est-à-dire se refuse à l’amo
5286 ù il se referme sur soi, c’est-à-dire se refuse à l’ amour. Et de même le « vrai moi » n’est pas le bien en soi, car il peu
5287 soi, c’est-à-dire se refuse à l’amour. Et de même le « vrai moi » n’est pas le bien en soi, car il peut devenir un monstre
5288 e à l’amour. Et de même le « vrai moi » n’est pas le bien en soi, car il peut devenir un monstre.) Pour aimer, il faut êtr
5289 r un monstre.) Pour aimer, il faut être deux, dit la sagesse des nations. Et cela vaut d’abord pour l’amour de soi-même, s
5290 la sagesse des nations. Et cela vaut d’abord pour l’ amour de soi-même, sans lequel point d’amour du prochain. Tous les mor
5291 même, sans lequel point d’amour du prochain. Tous les moralistes du monde s’accordent avec les spirituels dans leur condamn
5292 in. Tous les moralistes du monde s’accordent avec les spirituels dans leur condamnation de l’égoïsme, qui est l’impérialism
5293 ent avec les spirituels dans leur condamnation de l’ égoïsme, qui est l’impérialisme de l’ego naturel et sa fermeture autar
5294 uels dans leur condamnation de l’égoïsme, qui est l’ impérialisme de l’ego naturel et sa fermeture autarcique. Mais les mot
5295 damnation de l’égoïsme, qui est l’impérialisme de l’ ego naturel et sa fermeture autarcique. Mais les motifs de cette conda
5296 de l’ego naturel et sa fermeture autarcique. Mais les motifs de cette condamnation ne sont pas les mêmes : les moralistes j
5297 Mais les motifs de cette condamnation ne sont pas les mêmes : les moralistes jugent au nom de la société, les spirituels au
5298 ifs de cette condamnation ne sont pas les mêmes : les moralistes jugent au nom de la société, les spirituels au nom de l’am
5299 t pas les mêmes : les moralistes jugent au nom de la société, les spirituels au nom de l’amour. Nous n’invoquerons ici que
5300 mes : les moralistes jugent au nom de la société, les spirituels au nom de l’amour. Nous n’invoquerons ici que les seconds.
5301 nt au nom de la société, les spirituels au nom de l’ amour. Nous n’invoquerons ici que les seconds. L’école chrétienne
5302 amour. Nous n’invoquerons ici que les seconds. L’ école chrétienne Dans une vue chrétienne de l’homme, l’amour de soi
5303 L’école chrétienne Dans une vue chrétienne de l’ homme, l’amour de soi est le rapport positif entre l’individu et le vr
5304 chrétienne Dans une vue chrétienne de l’homme, l’ amour de soi est le rapport positif entre l’individu et le vrai moi. L
5305 une vue chrétienne de l’homme, l’amour de soi est le rapport positif entre l’individu et le vrai moi. Le second commandeme
5306 omme, l’amour de soi est le rapport positif entre l’ individu et le vrai moi. Le second commandement qui résume toute la Lo
5307 de soi est le rapport positif entre l’individu et le vrai moi. Le second commandement qui résume toute la Loi et les Proph
5308 vrai moi. Le second commandement qui résume toute la Loi et les Prophètes : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même », su
5309 Le second commandement qui résume toute la Loi et les Prophètes : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même », suppose évide
5310 », suppose évidemment un moi duel, au sein duquel l’ amour s’instaure d’une manière telle que s’aimer et aimer le prochain
5311 instaure d’une manière telle que s’aimer et aimer le prochain soit un même acte : sinon le comme n’aurait pas son plein se
5312 er et aimer le prochain soit un même acte : sinon le comme n’aurait pas son plein sens. Dans l’amour de soi-même, l’homme
5313 sinon le comme n’aurait pas son plein sens. Dans l’ amour de soi-même, l’homme naturel s’ouvre à l’action du vrai moi spir
5314 ait pas son plein sens. Dans l’amour de soi-même, l’ homme naturel s’ouvre à l’action du vrai moi spirituel et se laisse tr
5315 ns l’amour de soi-même, l’homme naturel s’ouvre à l’ action du vrai moi spirituel et se laisse transformer, réorienter par
5316 se laisse transformer, réorienter par lui. C’est le vrai moi qui aime, qui est l’agent de l’amour. Ce vrai moi seul peut
5317 nter par lui. C’est le vrai moi qui aime, qui est l’ agent de l’amour. Ce vrai moi seul peut aimer le prochain, parce que s
5318 i. C’est le vrai moi qui aime, qui est l’agent de l’ amour. Ce vrai moi seul peut aimer le prochain, parce que seul il disc
5319 t l’agent de l’amour. Ce vrai moi seul peut aimer le prochain, parce que seul il discerne en l’autre le même amour. « Aime
5320 e prochain, parce que seul il discerne en l’autre le même amour. « Aimer, c’est soutenir, deviner, porter le meilleur de c
5321 e amour. « Aimer, c’est soutenir, deviner, porter le meilleur de ce qu’on aime », disait Alain. Or le meilleur de l’autre
5322 le meilleur de ce qu’on aime », disait Alain. Or le meilleur de l’autre — comme de soi — est sa vocation singulière. Aime
5323 comme de soi — est sa vocation singulière. Aimer le prochain dans sa personne, c’est discerner sa singularité, sa vocatio
5324 rner sa singularité, sa vocation, même virtuelle, la soutenir et l’aider à naître. Ainsi l’amour dans sa réalité totale, i
5325 rité, sa vocation, même virtuelle, la soutenir et l’ aider à naître. Ainsi l’amour dans sa réalité totale, intégrant l’anim
5326 virtuelle, la soutenir et l’aider à naître. Ainsi l’ amour dans sa réalité totale, intégrant l’animique au spirituel, va to
5327 . Ainsi l’amour dans sa réalité totale, intégrant l’ animique au spirituel, va toujours de personne à personne. Mais alors,
5328 rs de personne à personne. Mais alors, d’où vient la personne ? Quel que soit le nom que lui ont donné les trois religions
5329 ais alors, d’où vient la personne ? Quel que soit le nom que lui ont donné les trois religions abrahamiques, le vrai moi e
5330 personne ? Quel que soit le nom que lui ont donné les trois religions abrahamiques, le vrai moi est toujours suscité par l’
5331 e lui ont donné les trois religions abrahamiques, le vrai moi est toujours suscité par l’Amour même : « Dieu nous a aimés
5332 brahamiques, le vrai moi est toujours suscité par l’ Amour même : « Dieu nous a aimés le premier. » Pour le chrétien, c’est
5333 our même : « Dieu nous a aimés le premier. » Pour le chrétien, c’est parce que Dieu, qui est Amour, est un Dieu personnel,
5334 ur, est un Dieu personnel, dans sa tri-unité, que l’ amour spirituel crée dans l’homme la personne. Si la plus haute valeur
5335 ans sa tri-unité, que l’amour spirituel crée dans l’ homme la personne. Si la plus haute valeur de l’Occident chrétien n’es
5336 ri-unité, que l’amour spirituel crée dans l’homme la personne. Si la plus haute valeur de l’Occident chrétien n’est pas la
5337 amour spirituel crée dans l’homme la personne. Si la plus haute valeur de l’Occident chrétien n’est pas la connaissance dé
5338 s l’homme la personne. Si la plus haute valeur de l’ Occident chrétien n’est pas la connaissance détachée mais le sacrifice
5339 lus haute valeur de l’Occident chrétien n’est pas la connaissance détachée mais le sacrifice personnel, et si le sacrifice
5340 chrétien n’est pas la connaissance détachée mais le sacrifice personnel, et si le sacrifice diffère du suicide — la natur
5341 sance détachée mais le sacrifice personnel, et si le sacrifice diffère du suicide — la nature de l’amour véritable l’expli
5342 ersonnel, et si le sacrifice diffère du suicide — la nature de l’amour véritable l’explique seule. « Personne n’a un plus
5343 si le sacrifice diffère du suicide — la nature de l’ amour véritable l’explique seule. « Personne n’a un plus grand amour q
5344 ffère du suicide — la nature de l’amour véritable l’ explique seule. « Personne n’a un plus grand amour que de donner sa vi
5345 c’est d’abord sacrifier son moi à son vrai moi, —  l’ ordonner à sa vocation. Ou c’est encore se sacrifier tel que l’on est,
5346 sa vocation. Ou c’est encore se sacrifier tel que l’ on est, à soi-même tel qu’on va le devenir par l’esprit. C’est rejoind
5347 crifier tel que l’on est, à soi-même tel qu’on va le devenir par l’esprit. C’est rejoindre la forme immortelle de son être
5348 l’on est, à soi-même tel qu’on va le devenir par l’ esprit. C’est rejoindre la forme immortelle de son être au travers d’u
5349 qu’on va le devenir par l’esprit. C’est rejoindre la forme immortelle de son être au travers d’une « mort à soi-même » tra
5350 « mort à soi-même » transfigurante. Ce modèle de l’ amour et du vrai moi instaure le normal, le sublime, et la problématiq
5351 nte. Ce modèle de l’amour et du vrai moi instaure le normal, le sublime, et la problématique de l’Occident chrétien. Il co
5352 èle de l’amour et du vrai moi instaure le normal, le sublime, et la problématique de l’Occident chrétien. Il conditionne a
5353 et du vrai moi instaure le normal, le sublime, et la problématique de l’Occident chrétien. Il conditionne aussi les déviat
5354 ure le normal, le sublime, et la problématique de l’ Occident chrétien. Il conditionne aussi les déviations de l’amour et l
5355 ique de l’Occident chrétien. Il conditionne aussi les déviations de l’amour et les formes particulières que prennent en Occ
5356 chrétien. Il conditionne aussi les déviations de l’ amour et les formes particulières que prennent en Occident certaines t
5357 Il conditionne aussi les déviations de l’amour et les formes particulières que prennent en Occident certaines tendances mor
5358 ient parfois impossible d’en reconnaître ailleurs les homologues. En voici deux exemples extrêmes. Le masochisme religieux
5359 les homologues. En voici deux exemples extrêmes. Le masochisme religieux, ou haine de soi. Dans son langage dramatique, s
5360 n langage dramatique, saint Paul parle parfois de la haine de soi-même, formule reprise au pied de la lettre par tous les
5361 la haine de soi-même, formule reprise au pied de la lettre par tous les spirituels de tendance ascétique, avec une compla
5362 me, formule reprise au pied de la lettre par tous les spirituels de tendance ascétique, avec une complaisance croissante. J
5363 vec une complaisance croissante. Je sais bien que la haine est l’envers de l’amour, mais comment l’amour fasciné par le dé
5364 aisance croissante. Je sais bien que la haine est l’ envers de l’amour, mais comment l’amour fasciné par le désir de ce qu’
5365 ssante. Je sais bien que la haine est l’envers de l’ amour, mais comment l’amour fasciné par le désir de ce qu’il aime peut
5366 ue la haine est l’envers de l’amour, mais comment l’ amour fasciné par le désir de ce qu’il aime peut-il haïr vraiment ce q
5367 vers de l’amour, mais comment l’amour fasciné par le désir de ce qu’il aime peut-il haïr vraiment ce qu’il lui sacrifie ?
5368 ime peut-il haïr vraiment ce qu’il lui sacrifie ? Le masochisme n’est-il pas le moment de retombement de l’âme frustrée, q
5369 e qu’il lui sacrifie ? Le masochisme n’est-il pas le moment de retombement de l’âme frustrée, quand l’esprit qui l’appelai
5370 sochisme n’est-il pas le moment de retombement de l’ âme frustrée, quand l’esprit qui l’appelait cesse de la diriger dans s
5371 le moment de retombement de l’âme frustrée, quand l’ esprit qui l’appelait cesse de la diriger dans son élan vers le vrai m
5372 retombement de l’âme frustrée, quand l’esprit qui l’ appelait cesse de la diriger dans son élan vers le vrai moi ? Elle vou
5373 frustrée, quand l’esprit qui l’appelait cesse de la diriger dans son élan vers le vrai moi ? Elle voulait l’ange. Il lui
5374 l’appelait cesse de la diriger dans son élan vers le vrai moi ? Elle voulait l’ange. Il lui reste la nostalgie d’une fuite
5375 ger dans son élan vers le vrai moi ? Elle voulait l’ ange. Il lui reste la nostalgie d’une fuite hors du moi naturel. Désor
5376 s le vrai moi ? Elle voulait l’ange. Il lui reste la nostalgie d’une fuite hors du moi naturel. Désormais le vieil homme e
5377 talgie d’une fuite hors du moi naturel. Désormais le vieil homme est jugé : n’ayant pu l’entraîner avec elle vers son bien
5378 l. Désormais le vieil homme est jugé : n’ayant pu l’ entraîner avec elle vers son bien et l’animer de son amour, l’âme l’ac
5379 n’ayant pu l’entraîner avec elle vers son bien et l’ animer de son amour, l’âme l’accuse de volonté mauvaise. Mais elle sai
5380 avec elle vers son bien et l’animer de son amour, l’ âme l’accuse de volonté mauvaise. Mais elle sait bien qu’ils ont parti
5381 lle vers son bien et l’animer de son amour, l’âme l’ accuse de volonté mauvaise. Mais elle sait bien qu’ils ont partie liée
5382 qu’ils ont partie liée, et qu’elle mourra si elle le tue. Elle se contente alors de le maudire, de le traiter en « corps d
5383 mourra si elle le tue. Elle se contente alors de le maudire, de le traiter en « corps de mort », et leurs relations s’emp
5384 le tue. Elle se contente alors de le maudire, de le traiter en « corps de mort », et leurs relations s’empoisonnent. La p
5385 dans cette discorde permanente, dans ce refus que l’ âme oppose au corps, vu comme signe et symbole de la « prison » du moi
5386 âme oppose au corps, vu comme signe et symbole de la « prison » du moi. Et c’est que l’âme avait rêvé d’une métamorphose a
5387 et symbole de la « prison » du moi. Et c’est que l’ âme avait rêvé d’une métamorphose angélique, quand l’esprit lui demand
5388 me avait rêvé d’une métamorphose angélique, quand l’ esprit lui demandait seulement d’ordonner tout le moi terrestre et tem
5389 l’esprit lui demandait seulement d’ordonner tout le moi terrestre et temporel à la vocation de l’amour. Mais celui qui se
5390 nt d’ordonner tout le moi terrestre et temporel à la vocation de l’amour. Mais celui qui se hait de cette manière ne peut
5391 out le moi terrestre et temporel à la vocation de l’ amour. Mais celui qui se hait de cette manière ne peut pas aimer le pr
5392 ui qui se hait de cette manière ne peut pas aimer le prochain : il ne peut voir en lui que son semblable — un corps « vil 
5393 corps « vil » et une âme qui se veut ange —, non le vrai moi dans son autonomie. Si le corps lui paraît désirable, il ser
5394 ut ange —, non le vrai moi dans son autonomie. Si le corps lui paraît désirable, il sera parfois tenté d’attribuer ce mouv
5395 era parfois tenté d’attribuer ce mouvement, né de l’ instinct, à la révélation d’un amour angélique. La passion romantique
5396 nté d’attribuer ce mouvement, né de l’instinct, à la révélation d’un amour angélique. La passion romantique trouve ici sa
5397 l’instinct, à la révélation d’un amour angélique. La passion romantique trouve ici sa genèse. Exaltée jusqu’à la mystique
5398 romantique trouve ici sa genèse. Exaltée jusqu’à la mystique de l’ascèse autopunitive, elle finit par confondre avec les
5399 uve ici sa genèse. Exaltée jusqu’à la mystique de l’ ascèse autopunitive, elle finit par confondre avec les exigences de la
5400 scèse autopunitive, elle finit par confondre avec les exigences de la mort au faux-moi, l’instinct de mort… Contre cet ascé
5401 e, elle finit par confondre avec les exigences de la mort au faux-moi, l’instinct de mort… Contre cet ascétisme non-transf
5402 fondre avec les exigences de la mort au faux-moi, l’ instinct de mort… Contre cet ascétisme non-transfigurant, Nietzsche n’
5403 indre celui qui se hait lui-même, car nous serons les victimes de sa colère et de sa vengeance. Ayons donc soin de l’induir
5404 sa colère et de sa vengeance. Ayons donc soin de l’ induire à l’amour de lui-même.74 » L’érotisme sensuel est l’autre ext
5405 t de sa vengeance. Ayons donc soin de l’induire à l’ amour de lui-même.74 » L’érotisme sensuel est l’autre extrême où se p
5406 onc soin de l’induire à l’amour de lui-même.74 » L’ érotisme sensuel est l’autre extrême où se porte l’âme irritée mais no
5407 ’érotisme sensuel est l’autre extrême où se porte l’ âme irritée mais non pas convertie par l’esprit — comme l’a si bien vu
5408 se porte l’âme irritée mais non pas convertie par l’ esprit — comme l’a si bien vu Kierkegaard. Tout amour véritable procèd
5409 ritée mais non pas convertie par l’esprit — comme l’ a si bien vu Kierkegaard. Tout amour véritable procède du vrai moi et
5410 r véritable procède du vrai moi et se dirige vers le vrai moi de l’autre. Mais il peut arriver qu’il s’arrête en chemin, q
5411 river qu’il s’arrête en chemin, que son élan vers la personne singulière retombe au plan de l’individuel, du générique. Ca
5412 an vers la personne singulière retombe au plan de l’ individuel, du générique. Capté par l’instinct qu’il excite au-delà de
5413 au plan de l’individuel, du générique. Capté par l’ instinct qu’il excite au-delà des exigences naturelles, il ira fatalem
5414 nces naturelles, il ira fatalement s’épuiser dans l’ illusoire multiplicité des « aventures sans lendemain ». Limitant son
5415 à ces désirs qu’une possession rapide anesthésie, l’ âme retombe alors dans les liens de l’instinct, qui est la puissance i
5416 ssion rapide anesthésie, l’âme retombe alors dans les liens de l’instinct, qui est la puissance impersonnelle par excellenc
5417 anesthésie, l’âme retombe alors dans les liens de l’ instinct, qui est la puissance impersonnelle par excellence, et s’épui
5418 tombe alors dans les liens de l’instinct, qui est la puissance impersonnelle par excellence, et s’épuise à s’en libérer pa
5419 le par excellence, et s’épuise à s’en libérer par le changement de l’excitation, par le défi perpétuel aux attachements. C
5420 , et s’épuise à s’en libérer par le changement de l’ excitation, par le défi perpétuel aux attachements. C’est la liberté n
5421 en libérer par le changement de l’excitation, par le défi perpétuel aux attachements. C’est la liberté négative revendiqué
5422 on, par le défi perpétuel aux attachements. C’est la liberté négative revendiquée par Don Juan contre les conventions de l
5423 liberté négative revendiquée par Don Juan contre les conventions de la morale commune — qu’il est déjà trop « spirituel »
5424 evendiquée par Don Juan contre les conventions de la morale commune — qu’il est déjà trop « spirituel » pour respecter — m
5425 « spirituel » pour respecter — mais aussi contre le respect du mystère exigeant de l’Autre qu’il n’est pas assez « spirit
5426 st pas assez « spirituel » pour aimer. (Mais s’il l’ était assez, il retrouverait aussi la justification de certaines conve
5427 . (Mais s’il l’était assez, il retrouverait aussi la justification de certaines conventions, protégeant chez la brute et l
5428 ication de certaines conventions, protégeant chez la brute et l’innocent les premières chances de l’esprit, — ou mettant à
5429 ertaines conventions, protégeant chez la brute et l’ innocent les premières chances de l’esprit, — ou mettant à l’abri des
5430 z la brute et l’innocent les premières chances de l’ esprit, — ou mettant à l’abri des atteintes de l’esprit l’indispensabl
5431 les premières chances de l’esprit, — ou mettant à l’ abri des atteintes de l’esprit l’indispensable tissu conjonctif de tou
5432 l’esprit, — ou mettant à l’abri des atteintes de l’ esprit l’indispensable tissu conjonctif de toutes les sociétés qui ne
5433 , — ou mettant à l’abri des atteintes de l’esprit l’ indispensable tissu conjonctif de toutes les sociétés qui ne sont pas
5434 esprit l’indispensable tissu conjonctif de toutes les sociétés qui ne sont pas un ordre.) L’école iranienne Il n’exis
5435 toutes les sociétés qui ne sont pas un ordre.) L’ école iranienne Il n’existe plus de communauté humaine, d’unité de
5436 de Zarathoustra ; et nulle ne s’inspira jamais de la mystique des soufis, et pour cause. Si je les fais intervenir ici, c’
5437 s de la mystique des soufis, et pour cause. Si je les fais intervenir ici, c’est à titre d’évocation d’une dimension virtue
5438 on virtuelle, intemporelle, et donc permanente de l’ esprit : le mazdéisme et les soufis ont proposé des notions de l’homme
5439 e, intemporelle, et donc permanente de l’esprit : le mazdéisme et les soufis ont proposé des notions de l’homme et de l’am
5440 et donc permanente de l’esprit : le mazdéisme et les soufis ont proposé des notions de l’homme et de l’amour homologues au
5441 azdéisme et les soufis ont proposé des notions de l’ homme et de l’amour homologues aux notions chrétiennes, mais comme tra
5442 s soufis ont proposé des notions de l’homme et de l’ amour homologues aux notions chrétiennes, mais comme transposées terme
5443 s comme transposées terme à terme d’un degré vers le « ciel » des archétypes : ainsi la dualité ego-vrai moi y devient cel
5444 ’un degré vers le « ciel » des archétypes : ainsi la dualité ego-vrai moi y devient celle de l’âme et de son ange. Pour si
5445 ainsi la dualité ego-vrai moi y devient celle de l’ âme et de son ange. Pour situer dans son vrai climat spirituel le pers
5446 ange. Pour situer dans son vrai climat spirituel le personnalisme essentiel de ces doctrines, citons ce verset du Coran (
5447 e comme une clef musicale : « Chaque être connaît le mode de prière et de glorification qui lui est propre. » Toute person
5448 t propre. » Toute personne s’origine en Dieu, qui l’ a créée afin d’être connu par elle et de « devenir en elle l’objet de
5449 fin d’être connu par elle et de « devenir en elle l’ objet de sa propre connaissance.75 » C’est donc en Dieu que tout amour
5450 ’est donc en Dieu que tout amour peut reconnaître la personne de l’autre et l’aimer « comme soi-même », — comme étant née
5451 amour peut reconnaître la personne de l’autre et l’ aimer « comme soi-même », — comme étant née du même amour qui m’a créé
5452 ssible d’aimer un être sans se représenter en lui la divinité. Un être n’aime en réalité personne d’autre que son créateur
5453 créateur.76 » Ibn Arabi distingue trois amours : l’ amour divin du Créateur pour sa créature, et d’elle pour Lui ; l’amour
5454 u Créateur pour sa créature, et d’elle pour Lui ; l’ amour spirituel « dont le siège est en la créature toujours à la quête
5455 re, et d’elle pour Lui ; l’amour spirituel « dont le siège est en la créature toujours à la quête de l’être dont elle déco
5456 ur Lui ; l’amour spirituel « dont le siège est en la créature toujours à la quête de l’être dont elle découvre en elle l’I
5457 uel « dont le siège est en la créature toujours à la quête de l’être dont elle découvre en elle l’Image, ou dont elle se d
5458 e siège est en la créature toujours à la quête de l’ être dont elle découvre en elle l’Image, ou dont elle se découvre comm
5459 s à la quête de l’être dont elle découvre en elle l’ Image, ou dont elle se découvre comme étant l’Image » ; enfin l’amour
5460 lle l’Image, ou dont elle se découvre comme étant l’ Image » ; enfin l’amour naturel, qui recherche la satisfaction de ses
5461 nt elle se découvre comme étant l’Image » ; enfin l’ amour naturel, qui recherche la satisfaction de ses désirs sans souci
5462 l’Image » ; enfin l’amour naturel, qui recherche la satisfaction de ses désirs sans souci de l’agrément de l’Aimé. « Et t
5463 erche la satisfaction de ses désirs sans souci de l’ agrément de l’Aimé. « Et telle est hélas ! dit Ibn Arabi, la manière d
5464 faction de ses désirs sans souci de l’agrément de l’ Aimé. « Et telle est hélas ! dit Ibn Arabi, la manière dont la plupart
5465 de l’Aimé. « Et telle est hélas ! dit Ibn Arabi, la manière dont la plupart des gens d’aujourd’hui comprennent l’amour.77
5466 ont la plupart des gens d’aujourd’hui comprennent l’ amour.77 » Comment réconcilier l’amour naturel (ou physique, comme on
5467 ’hui comprennent l’amour.77 » Comment réconcilier l’ amour naturel (ou physique, comme on le dit improprement) avec l’amour
5468 éconcilier l’amour naturel (ou physique, comme on le dit improprement) avec l’amour spirituel ? Qui aime en nous, et pour
5469 (ou physique, comme on le dit improprement) avec l’ amour spirituel ? Qui aime en nous, et pour qui ? « Ibn Arabi observe
5470 me en nous, et pour qui ? « Ibn Arabi observe que les plus parfaits amants mystiques sont ceux qui aiment Dieu simultanémen
5471 x-mêmes, parce que cette capacité révèle chez eux l’ unification de leur double nature (le dénouement de la « conscience ma
5472 èle chez eux l’unification de leur double nature ( le dénouement de la « conscience malheureuse » en proie aux déchirements
5473 ification de leur double nature (le dénouement de la « conscience malheureuse » en proie aux déchirements). » Telle est do
5474 se » en proie aux déchirements). » Telle est donc la personne unifiée et tel est son amour de soi-même. Quant à l’amour-pa
5475 unifiée et tel est son amour de soi-même. Quant à l’ amour-passion (ici, non romantique !) il se situe au point où le regar
5476 n (ici, non romantique !) il se situe au point où le regard de l’âme reconnaît soudain dans l’Aimé cette Forme sensible du
5477 omantique !) il se situe au point où le regard de l’ âme reconnaît soudain dans l’Aimé cette Forme sensible du divin, cette
5478 oint où le regard de l’âme reconnaît soudain dans l’ Aimé cette Forme sensible du divin, cette théophanie que l’âme peut ai
5479 tte Forme sensible du divin, cette théophanie que l’ âme peut aimer dans toutes les dimensions de l’amour unifié. L’Aimé n’
5480 cette théophanie que l’âme peut aimer dans toutes les dimensions de l’amour unifié. L’Aimé n’est plus alors un simple objet
5481 ue l’âme peut aimer dans toutes les dimensions de l’ amour unifié. L’Aimé n’est plus alors un simple objet — comme il est p
5482 mer dans toutes les dimensions de l’amour unifié. L’ Aimé n’est plus alors un simple objet — comme il est pour l’amour natu
5483 st plus alors un simple objet — comme il est pour l’ amour naturel, possessif — mais une virtualité divine que l’amant « im
5484 turel, possessif — mais une virtualité divine que l’ amant « imagine » (dont il devine l’Image) et qu’il tend à faire exist
5485 té divine que l’amant « imagine » (dont il devine l’ Image) et qu’il tend à faire exister dans l’être aimé, par l’efficace
5486 evine l’Image) et qu’il tend à faire exister dans l’ être aimé, par l’efficace de son amour préfigurant. C’est précisément
5487 qu’il tend à faire exister dans l’être aimé, par l’ efficace de son amour préfigurant. C’est précisément là que s’origine
5488 r préfigurant. C’est précisément là que s’origine la plus haute fonction de l’amour humain, celle-là même qui assure la co
5489 sément là que s’origine la plus haute fonction de l’ amour humain, celle-là même qui assure la coalescence de ce que l’on a
5490 ction de l’amour humain, celle-là même qui assure la coalescence de ce que l’on a désigné historiquement comme amour court
5491 celle-là même qui assure la coalescence de ce que l’ on a désigné historiquement comme amour courtois et amour mystique. Ca
5492 ement comme amour courtois et amour mystique. Car l’ amour tend à la transfiguration de la figure aimée terrestre, en l’ado
5493 ur courtois et amour mystique. Car l’amour tend à la transfiguration de la figure aimée terrestre, en l’adossant à une lum
5494 ystique. Car l’amour tend à la transfiguration de la figure aimée terrestre, en l’adossant à une lumière qui en fasse éclo
5495 transfiguration de la figure aimée terrestre, en l’ adossant à une lumière qui en fasse éclore toutes les virtualités surh
5496 adossant à une lumière qui en fasse éclore toutes les virtualités surhumaines, jusqu’à l’investir de la fonction théophaniq
5497 clore toutes les virtualités surhumaines, jusqu’à l’ investir de la fonction théophanique de l’Ange (ainsi en a-t-il été de
5498 es virtualités surhumaines, jusqu’à l’investir de la fonction théophanique de l’Ange (ainsi en a-t-il été des Figures fémi
5499 jusqu’à l’investir de la fonction théophanique de l’ Ange (ainsi en a-t-il été des Figures féminines célébrées par les Fede
5500 en a-t-il été des Figures féminines célébrées par les Fedeli d’amore, compagnons de Dante ; ainsi en a-t-il été de celle qu
5501 en a-t-il été de celle qui apparut à Ibn Arabi, à la Mekke, comme figure de la Sophia divine). L’analyse d’Ibn Arabi ne ce
5502 apparut à Ibn Arabi, à la Mekke, comme figure de la Sophia divine). L’analyse d’Ibn Arabi ne cesse de gagner en profondeu
5503 i, à la Mekke, comme figure de la Sophia divine). L’ analyse d’Ibn Arabi ne cesse de gagner en profondeur : que l’amant ten
5504 ’Ibn Arabi ne cesse de gagner en profondeur : que l’ amant tende à contempler l’être aimé, à s’unir en lui, à en perpétuer
5505 er en profondeur : que l’amant tende à contempler l’ être aimé, à s’unir en lui, à en perpétuer la présence, son amour tend
5506 pler l’être aimé, à s’unir en lui, à en perpétuer la présence, son amour tend toujours à faire exister quelque chose qui n
5507 quelque chose qui n’est pas encore existant dans l’ Aimé.78 On reconnaît ici les « notes » de l’amour du prochain selon K
5508 encore existant dans l’Aimé.78 On reconnaît ici les « notes » de l’amour du prochain selon Kierkegaard79, mais aussi selo
5509 dans l’Aimé.78 On reconnaît ici les « notes » de l’ amour du prochain selon Kierkegaard79, mais aussi selon Swedenborg : C
5510 Swedenborg : Comme tout bien procède du Seigneur, le Seigneur est, dans le sens suprême et au degré le plus éminent, le Pr
5511 t bien procède du Seigneur, le Seigneur est, dans le sens suprême et au degré le plus éminent, le Prochain ; c’est donc d’
5512 le Seigneur est, dans le sens suprême et au degré le plus éminent, le Prochain ; c’est donc d’après lui que s’établissent
5513 dans le sens suprême et au degré le plus éminent, le Prochain ; c’est donc d’après lui que s’établissent toutes les distin
5514 ; c’est donc d’après lui que s’établissent toutes les distinctions relatives au prochain, c’est-à-dire que chacun est le pr
5515 elatives au prochain, c’est-à-dire que chacun est le prochain en proportion de ce qu’il a quelque chose du Seigneur en lui
5516 e du Seigneur en lui ; or, comme nul ne reçoit de la même manière le bien qui procède du Seigneur, il s’ensuit que l’un n’
5517 lui ; or, comme nul ne reçoit de la même manière le bien qui procède du Seigneur, il s’ensuit que l’un n’est pas le proch
5518 ocède du Seigneur, il s’ensuit que l’un n’est pas le prochain de la même manière que l’autre… ; il n’y a jamais chez deux
5519 ur, il s’ensuit que l’un n’est pas le prochain de la même manière que l’autre… ; il n’y a jamais chez deux personnes un bi
5520 eux personnes un bien absolument identique… C’est l’ amour qui fait le prochain, et chacun est le prochain selon la qualité
5521 bien absolument identique… C’est l’amour qui fait le prochain, et chacun est le prochain selon la qualité de son amour.80
5522 C’est l’amour qui fait le prochain, et chacun est le prochain selon la qualité de son amour.80 En dépit de tout ce qui di
5523 fait le prochain, et chacun est le prochain selon la qualité de son amour.80 En dépit de tout ce qui distingue la transpa
5524 e son amour.80 En dépit de tout ce qui distingue la transparence (parfois trompeuse) du latin de l’ingénieur-philosophe S
5525 e la transparence (parfois trompeuse) du latin de l’ ingénieur-philosophe Swedenborg et la poésie dense de l’Arabe, l’homol
5526 du latin de l’ingénieur-philosophe Swedenborg et la poésie dense de l’Arabe, l’homologie des énoncés est indéniable. Si l
5527 nieur-philosophe Swedenborg et la poésie dense de l’ Arabe, l’homologie des énoncés est indéniable. Si le symbolisme concre
5528 losophe Swedenborg et la poésie dense de l’Arabe, l’ homologie des énoncés est indéniable. Si le symbolisme concret des sou
5529 Arabe, l’homologie des énoncés est indéniable. Si le symbolisme concret des soufis transpose doublement tous les termes à
5530 isme concret des soufis transpose doublement tous les termes à la fois dans le surnaturel (ou monde céleste) et dans le sen
5531 anspose doublement tous les termes à la fois dans le surnaturel (ou monde céleste) et dans le sensible terrestre, la struc
5532 ois dans le surnaturel (ou monde céleste) et dans le sensible terrestre, la structure des relations entre Dieu, le vrai mo
5533 (ou monde céleste) et dans le sensible terrestre, la structure des relations entre Dieu, le vrai moi et le prochain, reste
5534 terrestre, la structure des relations entre Dieu, le vrai moi et le prochain, reste exactement comparable, comme le sont l
5535 tructure des relations entre Dieu, le vrai moi et le prochain, reste exactement comparable, comme le sont les trois formes
5536 t le prochain, reste exactement comparable, comme le sont les trois formes de l’amour que manifeste cette structure. Mais
5537 chain, reste exactement comparable, comme le sont les trois formes de l’amour que manifeste cette structure. Mais « l’Imagi
5538 ent comparable, comme le sont les trois formes de l’ amour que manifeste cette structure. Mais « l’Imagination créatrice »
5539 de l’amour que manifeste cette structure. Mais «  l’ Imagination créatrice » des soufis, comme l’angélologie du mazdéisme,
5540 ais « l’Imagination créatrice » des soufis, comme l’ angélologie du mazdéisme, nous fait voir combien plus vivement l’unité
5541 u mazdéisme, nous fait voir combien plus vivement l’ unité première et finale de tout amour ! Peut-être aussi nous fera-t-e
5542 eut-être aussi nous fera-t-elle entrevoir comment le mythe de Tristan — en dépit du pseudo-bouddhisme tardivement emprunté
5543 ien » et trouve en lui ses origines archétypales. La passion du héros, que l’on peut interpréter (dans la légende primitiv
5544 s origines archétypales. La passion du héros, que l’ on peut interpréter (dans la légende primitive et l’opéra) comme un am
5545 passion du héros, que l’on peut interpréter (dans la légende primitive et l’opéra) comme un amour dédié à sa propre âme81,
5546 on peut interpréter (dans la légende primitive et l’ opéra) comme un amour dédié à sa propre âme81, dont Iseut ne serait qu
5547 dédié à sa propre âme81, dont Iseut ne serait que l’ image sensible, — et c’est pourquoi j’ai osé dire que Tristan n’aimait
5548 Iseut — cette passion n’est-elle pas mieux vue si l’ on évoque les Fravartis du mazdéisme, les figures angéliques du vrai m
5549 e passion n’est-elle pas mieux vue si l’on évoque les Fravartis du mazdéisme, les figures angéliques du vrai moi dans le my
5550 ux vue si l’on évoque les Fravartis du mazdéisme, les figures angéliques du vrai moi dans le mysticisme soufi et même la « 
5551 azdéisme, les figures angéliques du vrai moi dans le mysticisme soufi et même la « rencontre aurorale » de l’âme et de sa
5552 ques du vrai moi dans le mysticisme soufi et même la « rencontre aurorale » de l’âme et de sa Dâenâ au pont Chinvat ? Et n
5553 icisme soufi et même la « rencontre aurorale » de l’ âme et de sa Dâenâ au pont Chinvat ? Et n’est-ce pas pour avoir désiré
5554 pont Chinvat ? Et n’est-ce pas pour avoir désiré l’ amour de l’Ange que les amants de la forêt du Morois en viennent à déc
5555 at ? Et n’est-ce pas pour avoir désiré l’amour de l’ Ange que les amants de la forêt du Morois en viennent à découvrir que
5556 st-ce pas pour avoir désiré l’amour de l’Ange que les amants de la forêt du Morois en viennent à découvrir que c’est leur p
5557 avoir désiré l’amour de l’Ange que les amants de la forêt du Morois en viennent à découvrir que c’est leur passion même q
5558 re ? S’il est une « erreur de Tristan », motivant le malheur essentiel de sa passion, ce serait alors dans le mode de la t
5559 eur essentiel de sa passion, ce serait alors dans le mode de la transposition du « ciel » en Terre, et de l’Ange en la fem
5560 el de sa passion, ce serait alors dans le mode de la transposition du « ciel » en Terre, et de l’Ange en la femme, que l’o
5561 e de la transposition du « ciel » en Terre, et de l’ Ange en la femme, que l’on pourrait en pressentir l’ultime secret. (Ic
5562 ansposition du « ciel » en Terre, et de l’Ange en la femme, que l’on pourrait en pressentir l’ultime secret. (Ici, donc, t
5563 « ciel » en Terre, et de l’Ange en la femme, que l’ on pourrait en pressentir l’ultime secret. (Ici, donc, toute morale co
5564 Ange en la femme, que l’on pourrait en pressentir l’ ultime secret. (Ici, donc, toute morale commune ou rationnelle, non st
5565 onnaliste, ne peut évidemment que se récuser.) L’ école orientale La plupart des doctrines hindoues, et l’unanimité d
5566 rientale La plupart des doctrines hindoues, et l’ unanimité des écoles bouddhistes, comme on l’a vu, nient la personne o
5567 , et l’unanimité des écoles bouddhistes, comme on l’ a vu, nient la personne ou la survolent, ne connaissent que l’ego tout
5568 té des écoles bouddhistes, comme on l’a vu, nient la personne ou la survolent, ne connaissent que l’ego tout transitoire e
5569 ouddhistes, comme on l’a vu, nient la personne ou la survolent, ne connaissent que l’ego tout transitoire et le Soi tout i
5570 t la personne ou la survolent, ne connaissent que l’ ego tout transitoire et le Soi tout impersonnel : « Il n’est qu’un Soi
5571 ent, ne connaissent que l’ego tout transitoire et le Soi tout impersonnel : « Il n’est qu’un Soi pour tous les êtres.82 »
5572 tout impersonnel : « Il n’est qu’un Soi pour tous les êtres.82 » L’individualité qui est là, qui tombe sous le sens, doit ê
5573 l : « Il n’est qu’un Soi pour tous les êtres.82 » L’ individualité qui est là, qui tombe sous le sens, doit être exténuée m
5574 s.82 » L’individualité qui est là, qui tombe sous le sens, doit être exténuée méthodiquement (non point transfigurée ou gl
5575 n point transfigurée ou glorifiée) pour atteindre le Soi sans distinction, la Réalité sans visage, qui n’est ni ceci ni ce
5576 lorifiée) pour atteindre le Soi sans distinction, la Réalité sans visage, qui n’est ni ceci ni cela, mais qui est l’Immens
5577 s visage, qui n’est ni ceci ni cela, mais qui est l’ Immensité, disent les hindous, et qui est le Vide, disent les bouddhis
5578 ni ceci ni cela, mais qui est l’Immensité, disent les hindous, et qui est le Vide, disent les bouddhistes. Du même coup se
5579 i est l’Immensité, disent les hindous, et qui est le Vide, disent les bouddhistes. Du même coup se trouvent évacués les pr
5580 é, disent les hindous, et qui est le Vide, disent les bouddhistes. Du même coup se trouvent évacués les problèmes de l’amou
5581 les bouddhistes. Du même coup se trouvent évacués les problèmes de l’amour de soi-même et de l’amour de Dieu et du prochain
5582 Du même coup se trouvent évacués les problèmes de l’ amour de soi-même et de l’amour de Dieu et du prochain : faute de prot
5583 vacués les problèmes de l’amour de soi-même et de l’ amour de Dieu et du prochain : faute de protagonistes bien réels, ces
5584 avoir lieu. (Ou tout au moins, pris au sérieux.) L’ amour même est évacué. Il n’est plus que l’attrait des sexes agissant
5585 ieux.) L’amour même est évacué. Il n’est plus que l’ attrait des sexes agissant fatalement sur des milliards d’agrégats éph
5586 s d’agrégats éphémères, combinés et défaits selon le cours des astres et le Karma. Il ne peut être, pour l’esprit, qu’indi
5587 combinés et défaits selon le cours des astres et le Karma. Il ne peut être, pour l’esprit, qu’indifférent. (Quoique la mo
5588 urs des astres et le Karma. Il ne peut être, pour l’ esprit, qu’indifférent. (Quoique la morale sociale condamne radicaleme
5589 eut être, pour l’esprit, qu’indifférent. (Quoique la morale sociale condamne radicalement l’adultère de la femme mariée ;
5590 (Quoique la morale sociale condamne radicalement l’ adultère de la femme mariée ; mais ce n’est pas au nom de l’amour, on
5591 orale sociale condamne radicalement l’adultère de la femme mariée ; mais ce n’est pas au nom de l’amour, on le pense bien.
5592 de la femme mariée ; mais ce n’est pas au nom de l’ amour, on le pense bien.) « Écarte les choses, ô amant, ta voie est fu
5593 mariée ; mais ce n’est pas au nom de l’amour, on le pense bien.) « Écarte les choses, ô amant, ta voie est fuite ! » s’éc
5594 as au nom de l’amour, on le pense bien.) « Écarte les choses, ô amant, ta voie est fuite ! » s’écriait saint Jean de la Cro
5595 uite ! » s’écriait saint Jean de la Croix. Écarte le prochain ! ajoutent les spirituels du védantisme et du bouddhisme. S’
5596 t Jean de la Croix. Écarte le prochain ! ajoutent les spirituels du védantisme et du bouddhisme. S’il est vrai que « la not
5597 védantisme et du bouddhisme. S’il est vrai que «  la notion de Moi n’a d’accès que dans la pensée des sots », comme le dit
5598 vrai que « la notion de Moi n’a d’accès que dans la pensée des sots », comme le dit un texte tibétain, la notion de Toi n
5599 n’a d’accès que dans la pensée des sots », comme le dit un texte tibétain, la notion de Toi ne vaut pas mieux. « La moral
5600 ensée des sots », comme le dit un texte tibétain, la notion de Toi ne vaut pas mieux. « La morale bouddhique, qui est une
5601 e tibétain, la notion de Toi ne vaut pas mieux. «  La morale bouddhique, qui est une sorte d’hygiène spirituelle, tend à dé
5602 d’hygiène spirituelle, tend à détruire, en nous, les causes de souffrance pour autrui.83 » « On ne peut comprendre la natu
5603 uffrance pour autrui.83 » « On ne peut comprendre la nature de l’ultime réalité qu’après avoir détruit tout attachement in
5604 autrui.83 » « On ne peut comprendre la nature de l’ ultime réalité qu’après avoir détruit tout attachement inné ou acquis,
5605 ement inné ou acquis, pour ses semblables…84 » Et le Bouddha lui-même : « Qui a cent sortes d’amours a cent sortes de doul
5606 ur ; qui n’a pas d’amour n’a pas de douleur. » Si l’ on s’en tient aux textes, la cause est entendue : l’Asie métaphysique
5607 pas de douleur. » Si l’on s’en tient aux textes, la cause est entendue : l’Asie métaphysique ne connaît pas l’amour, — j’
5608 on s’en tient aux textes, la cause est entendue : l’ Asie métaphysique ne connaît pas l’amour, — j’entends l’amour de Dieu,
5609 est entendue : l’Asie métaphysique ne connaît pas l’ amour, — j’entends l’amour de Dieu, de soi et du prochain, l’amour-pas
5610 métaphysique ne connaît pas l’amour, — j’entends l’ amour de Dieu, de soi et du prochain, l’amour-passion, et même l’amour
5611 j’entends l’amour de Dieu, de soi et du prochain, l’ amour-passion, et même l’amour matrimonial. Mais on me dira que l’Asie
5612 , de soi et du prochain, l’amour-passion, et même l’ amour matrimonial. Mais on me dira que l’Asie n’est pas toute spiritue
5613 et même l’amour matrimonial. Mais on me dira que l’ Asie n’est pas toute spirituelle, et que la vie ne s’en tient pas aux
5614 ra que l’Asie n’est pas toute spirituelle, et que la vie ne s’en tient pas aux textes. On ajoutera peut-être qu’on ne voit
5615 a peut-être qu’on ne voit pas de raisons pour que l’ Orient réel soit plus conforme aux sermons du Bouddha que l’Europe au
5616 éel soit plus conforme aux sermons du Bouddha que l’ Europe au Sermon sur la Montagne. On aura tort. Car les grandes doctri
5617 aux sermons du Bouddha que l’Europe au Sermon sur la Montagne. On aura tort. Car les grandes doctrines religieuses de l’As
5618 rope au Sermon sur la Montagne. On aura tort. Car les grandes doctrines religieuses de l’Asie n’ont jamais été révolutionna
5619 ra tort. Car les grandes doctrines religieuses de l’ Asie n’ont jamais été révolutionnaires. Elles n’ont jamais prétendu tr
5620 onnaires. Elles n’ont jamais prétendu transformer l’ ensemble des réalités humaines : sociales, économiques et politiques,
5621 e religions), elles expriment ces réalités, elles les fixent et elles les consacrent (par les idoles et les yantras — signe
5622 expriment ces réalités, elles les fixent et elles les consacrent (par les idoles et les yantras — signes magiques et invari
5623 és, elles les fixent et elles les consacrent (par les idoles et les yantras — signes magiques et invariables —, par les rit
5624 fixent et elles les consacrent (par les idoles et les yantras — signes magiques et invariables —, par les rites quotidiens
5625 s yantras — signes magiques et invariables —, par les rites quotidiens omniprésents, par le régime des castes et la condamn
5626 les —, par les rites quotidiens omniprésents, par le régime des castes et la condamnation de toute curiosité du monde) ; d
5627 tidiens omniprésents, par le régime des castes et la condamnation de toute curiosité du monde) ; d’autre part, en tant que
5628 ant que doctrines, elles proposent aux spirituels les moyens de s’en évader en dérangeant le moins de choses possible. Les
5629 pirituels les moyens de s’en évader en dérangeant le moins de choses possible. Les religions abrahamiques, au contraire, m
5630 évader en dérangeant le moins de choses possible. Les religions abrahamiques, au contraire, monothéistes et communautaires,
5631 traire, monothéistes et communautaires, attaquent l’ ensemble des relations humaines et prennent à partie, un à un, tout in
5632 un à un, tout individu tel qu’il est, décidées à le transformer en vérité85. Elles provoquent d’innombrables réactions. I
5633 rables réactions. Il est par suite inévitable que l’ existence réelle, en Occident, ressemble moins à la doctrine que ce n’
5634 ’existence réelle, en Occident, ressemble moins à la doctrine que ce n’était le cas, jusqu’à nos jours, en Asie. Prenons l
5635 ent, ressemble moins à la doctrine que ce n’était le cas, jusqu’à nos jours, en Asie. Prenons l’exemple de l’érotisme. Le
5636 était le cas, jusqu’à nos jours, en Asie. Prenons l’ exemple de l’érotisme. Le shivaïsme explique le cosmos tout entier en
5637 jusqu’à nos jours, en Asie. Prenons l’exemple de l’ érotisme. Le shivaïsme explique le cosmos tout entier en termes de sex
5638 jours, en Asie. Prenons l’exemple de l’érotisme. Le shivaïsme explique le cosmos tout entier en termes de sexualité : il
5639 ns l’exemple de l’érotisme. Le shivaïsme explique le cosmos tout entier en termes de sexualité : il pose le désir à la bas
5640 smos tout entier en termes de sexualité : il pose le désir à la base de tout. Nous ne désirons des choses que dans la mesu
5641 ntier en termes de sexualité : il pose le désir à la base de tout. Nous ne désirons des choses que dans la mesure où elles
5642 ase de tout. Nous ne désirons des choses que dans la mesure où elles nous procurent une jouissance. La divinité n’est un o
5643 la mesure où elles nous procurent une jouissance. La divinité n’est un objet d’amour que parce qu’elle représente une volu
5644 arce qu’elle représente une volupté sans mélange… Le désir du luxurieux pour la femme n’existe que parce qu’il voit en ell
5645 volupté sans mélange… Le désir du luxurieux pour la femme n’existe que parce qu’il voit en elle la forme de son plaisir,
5646 ur la femme n’existe que parce qu’il voit en elle la forme de son plaisir, la source de sa jouissance. Dans la joie de la
5647 parce qu’il voit en elle la forme de son plaisir, la source de sa jouissance. Dans la joie de la possession, la souffrance
5648 de son plaisir, la source de sa jouissance. Dans la joie de la possession, la souffrance du désir est pour un instant apa
5649 isir, la source de sa jouissance. Dans la joie de la possession, la souffrance du désir est pour un instant apaisée… et l’
5650 de sa jouissance. Dans la joie de la possession, la souffrance du désir est pour un instant apaisée… et l’homme perçoit d
5651 uffrance du désir est pour un instant apaisée… et l’ homme perçoit dans le plaisir sa propre nature essentielle, qui est la
5652 pour un instant apaisée… et l’homme perçoit dans le plaisir sa propre nature essentielle, qui est la joie. Toute jouissan
5653 le plaisir sa propre nature essentielle, qui est la joie. Toute jouissance, tout plaisir est une expérience du divin… Mai
5654 e, tout plaisir est une expérience du divin… Mais l’ amour parfait est celui dont l’objet n’est pas limité. C’est cet amour
5655 nce du divin… Mais l’amour parfait est celui dont l’ objet n’est pas limité. C’est cet amour qui est l’amour pur, l’amour d
5656 l’objet n’est pas limité. C’est cet amour qui est l’ amour pur, l’amour de l’amour même, l’amour de l’Être-de-volupté trans
5657 pas limité. C’est cet amour qui est l’amour pur, l’ amour de l’amour même, l’amour de l’Être-de-volupté transcendant.86 K
5658 . C’est cet amour qui est l’amour pur, l’amour de l’ amour même, l’amour de l’Être-de-volupté transcendant.86 Kâma, le die
5659 our qui est l’amour pur, l’amour de l’amour même, l’ amour de l’Être-de-volupté transcendant.86 Kâma, le dieu du plaisir é
5660 l’amour pur, l’amour de l’amour même, l’amour de l’ Être-de-volupté transcendant.86 Kâma, le dieu du plaisir érotique, es
5661 amour de l’Être-de-volupté transcendant.86 Kâma, le dieu du plaisir érotique, est vénéré par les yogis, « car c’est lui s
5662 Kâma, le dieu du plaisir érotique, est vénéré par les yogis, « car c’est lui seul, lorsqu’il est satisfait, qui peut libére
5663 i seul, lorsqu’il est satisfait, qui peut libérer l’ esprit du désir… Ce n’est pas le plaisir mais le désir qui lie l’homme
5664 qui peut libérer l’esprit du désir… Ce n’est pas le plaisir mais le désir qui lie l’homme et qui est un obstacle à son pr
5665 r l’esprit du désir… Ce n’est pas le plaisir mais le désir qui lie l’homme et qui est un obstacle à son progrès spirituel8
5666 ir… Ce n’est pas le plaisir mais le désir qui lie l’ homme et qui est un obstacle à son progrès spirituel87 ». Et encore :
5667 ès spirituel87 ». Et encore : « Celui qui cherche l’ amour dans l’espoir d’une jouissance est la victime du désir. Le sage
5668 7 ». Et encore : « Celui qui cherche l’amour dans l’ espoir d’une jouissance est la victime du désir. Le sage accepte les p
5669 herche l’amour dans l’espoir d’une jouissance est la victime du désir. Le sage accepte les plaisirs sensuels quand ils vie
5670 ’espoir d’une jouissance est la victime du désir. Le sage accepte les plaisirs sensuels quand ils viennent, mais avec un c
5671 uissance est la victime du désir. Le sage accepte les plaisirs sensuels quand ils viennent, mais avec un cœur détaché. Il n
5672 n du plaisir comme expérience du divin, comparons- les aux diatribes d’un saint Paul annonçant la « colère de Dieu, révélée
5673 arons-les aux diatribes d’un saint Paul annonçant la « colère de Dieu, révélée du Ciel » contre les « impudiques » et les
5674 ant la « colère de Dieu, révélée du Ciel » contre les « impudiques » et les « infâmes », contre tous ceux « qui se sont liv
5675 u, révélée du Ciel » contre les « impudiques » et les « infâmes », contre tous ceux « qui se sont livrés à l’impureté, selo
5676 nfâmes », contre tous ceux « qui se sont livrés à l’ impureté, selon les convoitises de leur cœur ». Comparons le Shiva Pur
5677 ous ceux « qui se sont livrés à l’impureté, selon les convoitises de leur cœur ». Comparons le Shiva Purana, le Kamasutra,
5678 , selon les convoitises de leur cœur ». Comparons le Shiva Purana, le Kamasutra, le Mahabharata, les copieux commentaires
5679 itises de leur cœur ». Comparons le Shiva Purana, le Kamasutra, le Mahabharata, les copieux commentaires sur le culte du p
5680 cœur ». Comparons le Shiva Purana, le Kamasutra, le Mahabharata, les copieux commentaires sur le culte du phallus, aux tr
5681 ns le Shiva Purana, le Kamasutra, le Mahabharata, les copieux commentaires sur le culte du phallus, aux traités des Pères d
5682 tra, le Mahabharata, les copieux commentaires sur le culte du phallus, aux traités des Pères de l’Église sur l’ascèse et s
5683 du phallus, aux traités des Pères de l’Église sur l’ ascèse et sur la chasteté, et nous comprendrons à quel point Kierkegaa
5684 traités des Pères de l’Église sur l’ascèse et sur la chasteté, et nous comprendrons à quel point Kierkegaard voyait juste
5685 oint Kierkegaard voyait juste quand il disait que le christianisme, en condamnant la sensualité au nom de l’esprit, l’a po
5686 and il disait que le christianisme, en condamnant la sensualité au nom de l’esprit, l’a posée comme réalité et catégorie s
5687 istianisme, en condamnant la sensualité au nom de l’ esprit, l’a posée comme réalité et catégorie spirituelle. Dans les lit
5688 , en condamnant la sensualité au nom de l’esprit, l’ a posée comme réalité et catégorie spirituelle. Dans les littératures
5689 osée comme réalité et catégorie spirituelle. Dans les littératures de l’Asie, on trouvera peu d’exemples convaincants — pou
5690 t catégorie spirituelle. Dans les littératures de l’ Asie, on trouvera peu d’exemples convaincants — pour ma part, je n’en
5691 oint — de ce que nous baptisons amour-passion, et l’ on sait à quel point cette forme de l’amour est liée à ses expressions
5692 passion, et l’on sait à quel point cette forme de l’ amour est liée à ses expressions. La passion et l’amour mystique, l’ér
5693 ette forme de l’amour est liée à ses expressions. La passion et l’amour mystique, l’érotisme et l’amour du prochain, sont
5694 l’amour est liée à ses expressions. La passion et l’ amour mystique, l’érotisme et l’amour du prochain, sont des problèmes
5695 ses expressions. La passion et l’amour mystique, l’ érotisme et l’amour du prochain, sont des problèmes occidentaux, posés
5696 ns. La passion et l’amour mystique, l’érotisme et l’ amour du prochain, sont des problèmes occidentaux, posés à tous par le
5697 sont des problèmes occidentaux, posés à tous par les rigueurs mal tolérées de dogmes et de doctrines impératives, cependan
5698 dogmes et de doctrines impératives, cependant que les voies de sagesse asiatiques sont seulement proposées, — à quelques-un
5699 iques sont seulement proposées, — à quelques-uns. Les recettes de plaisir, ou d’immortalité par la rétention du semen, sont
5700 ns. Les recettes de plaisir, ou d’immortalité par la rétention du semen, sont liées en Asie à la piété, tandis que nos cou
5701 é par la rétention du semen, sont liées en Asie à la piété, tandis que nos coutumes viennent d’un vieux fond païen et que
5702 iène moderne se veut « scientifique ». À cause de la nature du christianisme et de la nature de l’hindouisme ou du bouddhi
5703 ue ». À cause de la nature du christianisme et de la nature de l’hindouisme ou du bouddhisme, la vie réelle de l’Occident
5704 de la nature du christianisme et de la nature de l’ hindouisme ou du bouddhisme, la vie réelle de l’Occident est en confli
5705 et de la nature de l’hindouisme ou du bouddhisme, la vie réelle de l’Occident est en conflit avec la foi, tandis que la vi
5706 e l’hindouisme ou du bouddhisme, la vie réelle de l’ Occident est en conflit avec la foi, tandis que la vie réelle de l’Asi
5707 , la vie réelle de l’Occident est en conflit avec la foi, tandis que la vie réelle de l’Asie est en symbiose avec ses reli
5708 l’Occident est en conflit avec la foi, tandis que la vie réelle de l’Asie est en symbiose avec ses religions. Et si la sym
5709 conflit avec la foi, tandis que la vie réelle de l’ Asie est en symbiose avec ses religions. Et si la symétrie de ces form
5710 l’Asie est en symbiose avec ses religions. Et si la symétrie de ces formules inquiète, revenons au quotidien banal, pris
5711 s inquiète, revenons au quotidien banal, pris sur le vif : plutôt qu’une infinie bibliographie rameutée à l’appui de mes d
5712 te notation plaisante dans un roman moderne, dont l’ auteur se trouve être un brahmane orthodoxe : « J’avais vécu en Europe
5713 usé une Européenne : apparemment, cela me donnait l’ invraisemblable privilège de comprendre les choses de l’amour.89 » Ce
5714 donnait l’invraisemblable privilège de comprendre les choses de l’amour.89 » Ceci encore, le cliché Orient-Occident = non-
5715 aisemblable privilège de comprendre les choses de l’ amour.89 » Ceci encore, le cliché Orient-Occident = non-moi-personne,
5716 mprendre les choses de l’amour.89 » Ceci encore, le cliché Orient-Occident = non-moi-personne, qui a peut-être moins cour
5717 de dogmes sublimes et qui prétendent transfigurer la vie concrète, l’Occident répond par des mythes symbolisant ses résist
5718 s et qui prétendent transfigurer la vie concrète, l’ Occident répond par des mythes symbolisant ses résistances naturelles,
5719 mbolisant ses résistances naturelles, et qui font l’ intérêt de sa vie amoureuse. Mais l’Orient se contente de proposer des
5720 , et qui font l’intérêt de sa vie amoureuse. Mais l’ Orient se contente de proposer des voies aux Renonçants (ou sannyasins
5721 ies aux Renonçants (ou sannyasins) qui ont épuisé la coupe, ou la dédaignent. Pas de drame, encore moins de tragique, et s
5722 çants (ou sannyasins) qui ont épuisé la coupe, ou la dédaignent. Pas de drame, encore moins de tragique, et surtout pas de
5723 e tout ou rien, mais d’innombrables variétés dans l’ approche de l’ultime réalité. Où nous verrions contradiction, antinomi
5724 , mais d’innombrables variétés dans l’approche de l’ ultime réalité. Où nous verrions contradiction, antinomie, ils ne mont
5725 les nôtres (semblent bien affirmer, par exemple, la réalité de la personne ou du prochain) on n’en saurait déduire qu’ell
5726 emblent bien affirmer, par exemple, la réalité de la personne ou du prochain) on n’en saurait déduire qu’elles excluent le
5727 déduire qu’elles excluent leur contraire, ou que l’ on s’était mépris sur le vrai sens de leurs affirmations répétées du c
5728 nt leur contraire, ou que l’on s’était mépris sur le vrai sens de leurs affirmations répétées du contraire (comme la non-e
5729 e leurs affirmations répétées du contraire (comme la non-existence du moi). Illustrons cela. L’idée de vocation personnell
5730 (comme la non-existence du moi). Illustrons cela. L’ idée de vocation personnelle accomplie aux dépens de l’individu est lo
5731 e de vocation personnelle accomplie aux dépens de l’ individu est loin d’être absente de la Bhagavad-Gita : Sois détaché e
5732 x dépens de l’individu est loin d’être absente de la Bhagavad-Gita : Sois détaché et accomplis l’action qui est ton devoi
5733 de la Bhagavad-Gita : Sois détaché et accomplis l’ action qui est ton devoir, car en accomplissant l’action sans attachem
5734 l’action qui est ton devoir, car en accomplissant l’ action sans attachement, l’homme obtient le but suprême. (III, 19) Not
5735 , car en accomplissant l’action sans attachement, l’ homme obtient le but suprême. (III, 19) Notre propre devoir, si humble
5736 issant l’action sans attachement, l’homme obtient le but suprême. (III, 19) Notre propre devoir, si humble qu’il soit, vau
5737 opre devoir, si humble qu’il soit, vaut mieux que le devoir parfaitement accompli d’un autre. Le dharma d’un autre est ple
5738 x que le devoir parfaitement accompli d’un autre. Le dharma d’un autre est plein de dangers. (III, 35) Et dans les upanis
5739 un autre est plein de dangers. (III, 35) Et dans les upanishads : La vie n’a servi de rien à celui qui quitte ce monde san
5740 n de dangers. (III, 35) Et dans les upanishads : La vie n’a servi de rien à celui qui quitte ce monde sans avoir réalisé
5741 propre monde intérieur. Elle reste invécue, comme les Vedas non récités, ou toute action non accomplie. (Brihad-âranyaka Up
5742 toute action non accomplie. (Brihad-âranyaka Up.) La notion de l’amour du prochain, et l’injonction évangélique d’aimer au
5743 non accomplie. (Brihad-âranyaka Up.) La notion de l’ amour du prochain, et l’injonction évangélique d’aimer aussi son ennem
5744 ranyaka Up.) La notion de l’amour du prochain, et l’ injonction évangélique d’aimer aussi son ennemi ne sont pas absentes d
5745 son ennemi ne sont pas absentes du bouddhisme car l’ ennemi et toi-même ne diffèrent que par les attachements du moi phénom
5746 sme car l’ennemi et toi-même ne diffèrent que par les attachements du moi phénoménal, tandis qu’ils participent du même Soi
5747 même Soi véritable, qui seul importe. « Surmonte le mal par le bien », dit le Bouddha. « Que ceux qui me calomnient, me n
5748 éritable, qui seul importe. « Surmonte le mal par le bien », dit le Bouddha. « Que ceux qui me calomnient, me nuisent, me
5749 eul importe. « Surmonte le mal par le bien », dit le Bouddha. « Que ceux qui me calomnient, me nuisent, me raillent, et to
5750 i me calomnient, me nuisent, me raillent, et tous les autres, obtiennent l’illumination spirituelle », dit Shantideva. Et S
5751 sent, me raillent, et tous les autres, obtiennent l’ illumination spirituelle », dit Shantideva. Et Suzuki, qui enseigna le
5752 tuelle », dit Shantideva. Et Suzuki, qui enseigna le zen à toutes les Amériques dégoûtées de l’Occident, et de plus en plu
5753 antideva. Et Suzuki, qui enseigna le zen à toutes les Amériques dégoûtées de l’Occident, et de plus en plus à l’Europe, va
5754 seigna le zen à toutes les Amériques dégoûtées de l’ Occident, et de plus en plus à l’Europe, va jusqu’à dire que la méthod
5755 ues dégoûtées de l’Occident, et de plus en plus à l’ Europe, va jusqu’à dire que la méthode bouddhiste « consiste à transfo
5756 t de plus en plus à l’Europe, va jusqu’à dire que la méthode bouddhiste « consiste à transformer Éros en Agapè »90. Je rép
5757 e l’autre ? Elles ne se contredisent pas plus que les énoncés spirituels correspondant à différents niveaux d’évolution, à
5758 veaux d’évolution, à différents degrés d’éveil de la conscience… 2. Mise en question par l’expérience vécue. — Dans le rom
5759 d’éveil de la conscience… 2. Mise en question par l’ expérience vécue. — Dans le roman de Raja Rao qu’on vient de citer, ce
5760 . Mise en question par l’expérience vécue. — Dans le roman de Raja Rao qu’on vient de citer, cette sentence d’un upanishad
5761 lusieurs reprises : En vérité, à quoi se rapporte l’ amour d’un mari pour sa femme ? Non point à la femme, mais en vérité a
5762 rte l’amour d’un mari pour sa femme ? Non point à la femme, mais en vérité au Soi qui est en elle.91 En présence d’une te
5763 ence d’une telle phrase, j’éprouve d’abord ceci : le sentiment d’une immédiate et vive reconnaissance. Car toute vérité su
5764 iate et vive reconnaissance. Car toute vérité sur l’ amour est immédiatement reconnue par celui qui s’est mis en quête d’un
5765 e par celui qui s’est mis en quête d’un savoir de l’ amour qu’il vit. N’importe qui m’avertira que le Soi de l’Inde n’est p
5766 e l’amour qu’il vit. N’importe qui m’avertira que le Soi de l’Inde n’est pas le vrai Dieu des chrétiens, qui est personnel
5767 qu’il vit. N’importe qui m’avertira que le Soi de l’ Inde n’est pas le vrai Dieu des chrétiens, qui est personnel. On conna
5768 rte qui m’avertira que le Soi de l’Inde n’est pas le vrai Dieu des chrétiens, qui est personnel. On connaît les définition
5769 Dieu des chrétiens, qui est personnel. On connaît les définitions. Mais je retrouve ici mon expérience. C’est seulement à p
5770 de réponses. Sur cette phrase des upanishads, sur le dialogue qui peut s’instituer à partir d’expériences re-connues, on p
5771 récisément, ici, touche à sa fin ?) Je disais que l’ amour vrai, c’est discerner dans l’autre — pour l’avoir reconnu tout d
5772 l’amour vrai, c’est discerner dans l’autre — pour l’ avoir reconnu tout d’abord en soi-même — le vrai moi, sujet de l’amour
5773 — pour l’avoir reconnu tout d’abord en soi-même — le vrai moi, sujet de l’amour, et l’aider à prendre conscience de ce qu’
5774 tout d’abord en soi-même — le vrai moi, sujet de l’ amour, et l’aider à prendre conscience de ce qu’il est ou peut devenir
5775 d en soi-même — le vrai moi, sujet de l’amour, et l’ aider à prendre conscience de ce qu’il est ou peut devenir. N’est-ce p
5776 nce de ce qu’il est ou peut devenir. N’est-ce pas l’ aider à réfléchir la lumière de l’amour créateur ? Non, ce serait là t
5777 ou peut devenir. N’est-ce pas l’aider à réfléchir la lumière de l’amour créateur ? Non, ce serait là trop dire, et pas ass
5778 r. N’est-ce pas l’aider à réfléchir la lumière de l’ amour créateur ? Non, ce serait là trop dire, et pas assez. Aimer, c’e
5779 st aider l’autre à se situer de telle manière que la lumière se voie en lui, mais qu’en même temps le vrai moi de l’amant
5780 la lumière se voie en lui, mais qu’en même temps le vrai moi de l’amant s’y découvre, autrement éclairé, et par là subtil
5781 voie en lui, mais qu’en même temps le vrai moi de l’ amant s’y découvre, autrement éclairé, et par là subtilement changé, u
5782 gé, un peu plus lui-même qu’avant : amour mutuel. L’ expérience est la même, ou du moins je la sens telle. Mais la lumière 
5783 ui-même qu’avant : amour mutuel. L’expérience est la même, ou du moins je la sens telle. Mais la lumière ? Est-ce le Nom q
5784 mutuel. L’expérience est la même, ou du moins je la sens telle. Mais la lumière ? Est-ce le Nom qu’on lui donne qui diffè
5785 e est la même, ou du moins je la sens telle. Mais la lumière ? Est-ce le Nom qu’on lui donne qui diffère, — ou quoi d’autr
5786 moins je la sens telle. Mais la lumière ? Est-ce le Nom qu’on lui donne qui diffère, — ou quoi d’autre ? Le point du dial
5787 qu’on lui donne qui diffère, — ou quoi d’autre ? Le point du dialogue est ici. Un point seulement, sans étendue, mais sel
5788 ici. Un point seulement, sans étendue, mais selon le regard que nous portons sur lui, il en jaillit un monde ou l’autre :
5789 tons sur lui, il en jaillit un monde ou l’autre : l’ Occidental ou l’Oriental. Tous les risques d’erreur sont de notre côté
5790 en jaillit un monde ou l’autre : l’Occidental ou l’ Oriental. Tous les risques d’erreur sont de notre côté, nous les payon
5791 nde ou l’autre : l’Occidental ou l’Oriental. Tous les risques d’erreur sont de notre côté, nous les payons par les névroses
5792 ous les risques d’erreur sont de notre côté, nous les payons par les névroses ou l’abêtissement spirituel. Eux sont telleme
5793 d’erreur sont de notre côté, nous les payons par les névroses ou l’abêtissement spirituel. Eux sont tellement en garde con
5794 e notre côté, nous les payons par les névroses ou l’ abêtissement spirituel. Eux sont tellement en garde contre l’illusion,
5795 ent spirituel. Eux sont tellement en garde contre l’ illusion, qu’ils l’ont mise en facteur commun dans tout ce qui existe 
5796 sont tellement en garde contre l’illusion, qu’ils l’ ont mise en facteur commun dans tout ce qui existe ; (à tel point que
5797 commun dans tout ce qui existe ; (à tel point que le seul fait d’exister devient pour eux l’équivalent de notre péché orig
5798 point que le seul fait d’exister devient pour eux l’ équivalent de notre péché originel). Ils en ont fait autant pour les n
5799 otre péché originel). Ils en ont fait autant pour les névroses qui s’attaquent à nos « agrégats » individuels : le cosmos a
5800 qui s’attaquent à nos « agrégats » individuels : le cosmos actuel tout entier semble résulter — selon leurs sages — d’une
5801 é, tout s’arrangera.) Ils en ont fait autant pour les personnes, potentialisées dans une seule Personne-cosmique, Purusha (
5802 s dans une seule Personne-cosmique, Purusha (dont la contrepartie actualisante est Prakriti) finalement dissociée et fondu
5803 est Prakriti) finalement dissociée et fondue dans le Soi : « Tu es Cela ». Le drame individuel est noyé dans le Tout. Mais
5804 dissociée et fondue dans le Soi : « Tu es Cela ». Le drame individuel est noyé dans le Tout. Mais le Tout est le contraire
5805 « Tu es Cela ». Le drame individuel est noyé dans le Tout. Mais le Tout est le contraire du drame. Tous les risques d’erre
5806 . Le drame individuel est noyé dans le Tout. Mais le Tout est le contraire du drame. Tous les risques d’erreur sont liés à
5807 ndividuel est noyé dans le Tout. Mais le Tout est le contraire du drame. Tous les risques d’erreur sont liés à notre amour
5808 out. Mais le Tout est le contraire du drame. Tous les risques d’erreur sont liés à notre amour ; et plus l’amour est passio
5809 isques d’erreur sont liés à notre amour ; et plus l’ amour est passionné, exigeant, singulier, plus grand le risque. Ce que
5810 ur est passionné, exigeant, singulier, plus grand le risque. Ce que nous croyons aimer en elle, est-ce elle-même ou l’imag
5811 e nous croyons aimer en elle, est-ce elle-même ou l’ image de notre ange ? Ce que nous avons cru voir en elle, et que nous
5812 à ses dépens, est-ce notre anima projetée ? Tous les psychanalystes nous l’ont dit : l’erreur sur la personne de l’être ai
5813 tre anima projetée ? Tous les psychanalystes nous l’ ont dit : l’erreur sur la personne de l’être aimé est la source des pi
5814 ojetée ? Tous les psychanalystes nous l’ont dit : l’ erreur sur la personne de l’être aimé est la source des pires conflits
5815 les psychanalystes nous l’ont dit : l’erreur sur la personne de l’être aimé est la source des pires conflits, une violenc
5816 stes nous l’ont dit : l’erreur sur la personne de l’ être aimé est la source des pires conflits, une violence faite à l’âme
5817 dit : l’erreur sur la personne de l’être aimé est la source des pires conflits, une violence faite à l’âme de l’autre, à s
5818 a source des pires conflits, une violence faite à l’ âme de l’autre, à son corps ou à son esprit — ou encore à son moi tota
5819 on reconnu, non respecté dans son autonomie. Ici, le brahmane intervient : — Si tu cherches le Soi à travers elle, si tu a
5820 e. Ici, le brahmane intervient : — Si tu cherches le Soi à travers elle, si tu as compris l’impermanence et t’exerces aux
5821 cherches le Soi à travers elle, si tu as compris l’ impermanence et t’exerces aux « vues justes » comme disait le Bouddha,
5822 nce et t’exerces aux « vues justes » comme disait le Bouddha, — qui était l’un des nôtres, un Indien — si tu vois bien ce
5823 tu vois bien ce que tu vois et portes ton amour à l’ immuable seul, toutes ces erreurs que tu craignais sont illusoires. Co
5824 s erreurs que tu craignais sont illusoires. Comme le moi. — La vue juste distingue et juge, mais ne peut pas nier le trou
5825 ue tu craignais sont illusoires. Comme le moi. — La vue juste distingue et juge, mais ne peut pas nier le trouble. Dans c
5826 ue juste distingue et juge, mais ne peut pas nier le trouble. Dans ce moi peu ou point différencié que la vie nous offre,
5827 trouble. Dans ce moi peu ou point différencié que la vie nous offre, avec son programme génétique insondablement plus anci
5828 notre individu naturel, et qui lui survivra dans le cours des siècles, sans surprises et mille fois réincarné — la vue ju
5829 siècles, sans surprises et mille fois réincarné —  la vue juste imagine — au sens fort — la personne. Il ne faut pas jeter
5830 réincarné — la vue juste imagine — au sens fort — la personne. Il ne faut pas jeter la vie avec l’erreur, mais aimer mieux
5831 au sens fort — la personne. Il ne faut pas jeter la vie avec l’erreur, mais aimer mieux. Non pas éteindre ou dépasser, ma
5832 t — la personne. Il ne faut pas jeter la vie avec l’ erreur, mais aimer mieux. Non pas éteindre ou dépasser, mais transmute
5833 igurer ! Aimer mieux, c’est apprendre à discerner la raison d’être — donc d’être unique — de l’autre aimé, comme de soi-mê
5834 ent animer un mouvement singulier et fascinant de l’ être… « Aimer ce que jamais on ne verra deux fois ! » — Aimer, c’est v
5835 on ne verra deux fois ! » — Aimer, c’est vouloir l’ immortel, non l’éphémère, lequel n’a rien en soi qui mérite l’amour. C
5836 x fois ! » — Aimer, c’est vouloir l’immortel, non l’ éphémère, lequel n’a rien en soi qui mérite l’amour. Cela n’empêche pa
5837 non l’éphémère, lequel n’a rien en soi qui mérite l’ amour. Cela n’empêche pas la poésie, les amours poétiques, ni le désir
5838 ien en soi qui mérite l’amour. Cela n’empêche pas la poésie, les amours poétiques, ni le désir, ni « cette adoration dont
5839 qui mérite l’amour. Cela n’empêche pas la poésie, les amours poétiques, ni le désir, ni « cette adoration dont la femme a b
5840 n’empêche pas la poésie, les amours poétiques, ni le désir, ni « cette adoration dont la femme a besoin pour s’accomplir,
5841 poétiques, ni le désir, ni « cette adoration dont la femme a besoin pour s’accomplir, et par ce culte que nous lui rendons
5842 e que nous lui rendons, nous arrivons à connaître le monde et à l’anéantir en l’absorbant. Mais que nous devenions Shiva,
5843 rendons, nous arrivons à connaître le monde et à l’ anéantir en l’absorbant. Mais que nous devenions Shiva, la femme est d
5844 arrivons à connaître le monde et à l’anéantir en l’ absorbant. Mais que nous devenions Shiva, la femme est dissoute et le
5845 ir en l’absorbant. Mais que nous devenions Shiva, la femme est dissoute et le monde avec elle. Car le monde ne doit pas êt
5846 ue nous devenions Shiva, la femme est dissoute et le monde avec elle. Car le monde ne doit pas être refusé mais dissous.92
5847 la femme est dissoute et le monde avec elle. Car le monde ne doit pas être refusé mais dissous.92 — Je veux voir l’autre
5848 le à la fois ce que je vois et ce qui fait que je la vois unique : ce vrai moi pressenti par l’amour seul, et qui est elle
5849 que je la vois unique : ce vrai moi pressenti par l’ amour seul, et qui est elle-même. Tu dis le Soi, ce n’est personne. —
5850 ti par l’amour seul, et qui est elle-même. Tu dis le Soi, ce n’est personne. — Il n’y a personne. Personne ne peut aimer,
5851 — Il n’y a personne. Personne ne peut aimer, sauf l’ égoïste. Il y a l’amour, et nous pouvons seulement devenir amour. Et t
5852 e. Personne ne peut aimer, sauf l’égoïste. Il y a l’ amour, et nous pouvons seulement devenir amour. Et tu sais bien que tu
5853 e comme personnes bien distinctes. Tu ne vois pas la femme que tu crois aimer. — Quand je saurai aimer le Soi en elle, je
5854 femme que tu crois aimer. — Quand je saurai aimer le Soi en elle, je ne serai plus moi, elle ne sera plus elle, et les die
5855 je ne serai plus moi, elle ne sera plus elle, et les dieux mêmes me serviront. Tout et tous L’Orient voudrait exténu
5856 les dieux mêmes me serviront. Tout et tous L’ Orient voudrait exténuer, « émacier le réel tangible »93, pour rejoind
5857 et tous L’Orient voudrait exténuer, « émacier le réel tangible »93, pour rejoindre l’Un primordial. Quand ses dieux mê
5858 nt fait leur office et fait leur temps, il y aura le Soi seul en tout. À la consommation des temps, répond saint Paul, « D
5859 fait leur temps, il y aura le Soi seul en tout. À la consommation des temps, répond saint Paul, « Dieu sera tout en tous »
5860 Dieu sera tout en tous ». Depuis six millénaires, les sages de l’Asie n’ont pas varié dans leur croyance à la dualité de l’
5861 t en tous ». Depuis six millénaires, les sages de l’ Asie n’ont pas varié dans leur croyance à la dualité de l’Un et du Mul
5862 es de l’Asie n’ont pas varié dans leur croyance à la dualité de l’Un et du Multiple, dualité finalement illusoire puisqu’u
5863 lement illusoire puisqu’un jour — dont ils savent la date — la vie, le cosmos et les dieux seront résorbés dans l’Un seul,
5864 usoire puisqu’un jour — dont ils savent la date — la vie, le cosmos et les dieux seront résorbés dans l’Un seul, sans lais
5865 uisqu’un jour — dont ils savent la date — la vie, le cosmos et les dieux seront résorbés dans l’Un seul, sans laisser aucu
5866 — dont ils savent la date — la vie, le cosmos et les dieux seront résorbés dans l’Un seul, sans laisser aucune trace, comm
5867 laisser aucune trace, comme n’ayant pas eu lieu. Le triomphe de ces spirituels et de leur eschatologie se confondra ce jo
5868 de leur eschatologie se confondra ce jour-là avec l’ aboutissement d’un processus entièrement matériel calculé par la scien
5869 t d’un processus entièrement matériel calculé par la science occidentale : mais personne ne sera là pour constater que leu
5870 ne sera là pour constater que leurs doctrines sur la Lumière finale et sur le Vide n’auront été, dans leur ensemble, qu’un
5871 que leurs doctrines sur la Lumière finale et sur le Vide n’auront été, dans leur ensemble, qu’une immense transposition s
5872 s leur ensemble, qu’une immense transposition sur les plans poétique et religieux du Second principe de la thermodynamique.
5873 plans poétique et religieux du Second principe de la thermodynamique. L’autre moitié de l’humanité croit dur comme fer à l
5874 principe de la thermodynamique. L’autre moitié de l’ humanité croit dur comme fer à la réalité tangible, insuffisante, plei
5875 ’autre moitié de l’humanité croit dur comme fer à la réalité tangible, insuffisante, pleine de mystères, des apparences ac
5876 nséquence à scruter et à modifier. Elle parie sur la vie et contre l’entropie94. Elle ne sait plus d’où lui vient cette pa
5877 er et à modifier. Elle parie sur la vie et contre l’ entropie94. Elle ne sait plus d’où lui vient cette passion qui a produ
5878 t plus d’où lui vient cette passion qui a produit la technique et les sciences, mais aussi nos structures sociales et poli
5879 vient cette passion qui a produit la technique et les sciences, mais aussi nos structures sociales et politiques, les droit
5880 mais aussi nos structures sociales et politiques, les droits de l’homme et une extraordinaire avidité. Le sens réel de l’av
5881 droits de l’homme et une extraordinaire avidité. Le sens réel de l’aventure échappe à la majorité de ceux qu’elle entraîn
5882 me et une extraordinaire avidité. Le sens réel de l’ aventure échappe à la majorité de ceux qu’elle entraîne. Et il est vra
5883 ire avidité. Le sens réel de l’aventure échappe à la majorité de ceux qu’elle entraîne. Et il est vrai qu’on ne saurait gu
5884 e entraîne. Et il est vrai qu’on ne saurait guère le concevoir sans une vision de sa fin anticipée. La petite phrase de sa
5885 le concevoir sans une vision de sa fin anticipée. La petite phrase de saint Paul au début de notre ère, « Dieu tout en tou
5886 ors, au duel de l’Un et du Multiple est substitué le drame de l’Un et des Uniques : — à l’anéantissement final dans l’unis
5887 t substitué le drame de l’Un et des Uniques : — à l’ anéantissement final dans l’unisson, l’harmonie d’un chœur infini ; —
5888 et des Uniques : — à l’anéantissement final dans l’ unisson, l’harmonie d’un chœur infini ; — à la régressive extinction d
5889 ques : — à l’anéantissement final dans l’unisson, l’ harmonie d’un chœur infini ; — à la régressive extinction des différen
5890 ans l’unisson, l’harmonie d’un chœur infini ; — à la régressive extinction des différences éphémères, leur mort et transfi
5891 ces éphémères, leur mort et transfiguration ; — à l’ individuel aboli par une longue aspiration de l’Atman, le personnel ét
5892 à l’individuel aboli par une longue aspiration de l’ Atman, le personnel éternisé par l’effort vivifiant de l’Imagination.
5893 iduel aboli par une longue aspiration de l’Atman, le personnel éternisé par l’effort vivifiant de l’Imagination. Ce sont l
5894 aspiration de l’Atman, le personnel éternisé par l’ effort vivifiant de l’Imagination. Ce sont là deux doctrines, deux vue
5895 , le personnel éternisé par l’effort vivifiant de l’ Imagination. Ce sont là deux doctrines, deux vues des spirituels. Quel
5896 x doctrines, deux vues des spirituels. Quelle est la vraie ? Si les sages de l’Orient ont raison, personne ne pourra le vé
5897 eux vues des spirituels. Quelle est la vraie ? Si les sages de l’Orient ont raison, personne ne pourra le vérifier à la con
5898 spirituels. Quelle est la vraie ? Si les sages de l’ Orient ont raison, personne ne pourra le vérifier à la consommation de
5899 sages de l’Orient ont raison, personne ne pourra le vérifier à la consommation des temps, pas même le Soi qui dormira dan
5900 ient ont raison, personne ne pourra le vérifier à la consommation des temps, pas même le Soi qui dormira dans un sommeil s
5901 le vérifier à la consommation des temps, pas même le Soi qui dormira dans un sommeil sans rêves — leur idée du bonheur — e
5902 r — entre deux Créations totalement insensées. Si les saints de l’Occident ont raison, ils seront seuls à être là pour le s
5903 Créations totalement insensées. Si les saints de l’ Occident ont raison, ils seront seuls à être là pour le savoir. La doc
5904 ident ont raison, ils seront seuls à être là pour le savoir. La doctrine qui peut devenir vraie sera celle que nous choisi
5905 aison, ils seront seuls à être là pour le savoir. La doctrine qui peut devenir vraie sera celle que nous choisirons, en vé
5906 irons, en vérité vécue de conscience et d’action. Les résultats actuels et historiques sont ambigus à l’infini, pour nos me
5907 s résultats actuels et historiques sont ambigus à l’ infini, pour nos mesures. Les peuples sont dans l’ignorance malheureus
5908 riques sont ambigus à l’infini, pour nos mesures. Les peuples sont dans l’ignorance malheureuse des origines et des fins de
5909 l’infini, pour nos mesures. Les peuples sont dans l’ ignorance malheureuse des origines et des fins de ce qu’ils croient, b
5910 parfois pour leurs croyances. Nous voyons ce que l’ Orient est resté jusqu’ici, et que ces doctrines d’extinction n’ont pa
5911 , et que ces doctrines d’extinction n’ont pas tué l’ illusion du moi ; au contraire, ce moi sans valeur est en train de fai
5912 main de cerveaux à diriger. Nous pressentons dans la terreur et l’espérance ce que l’Occident peut devenir : soit s’englou
5913 ux à diriger. Nous pressentons dans la terreur et l’ espérance ce que l’Occident peut devenir : soit s’engloutir dans l’Ill
5914 pressentons dans la terreur et l’espérance ce que l’ Occident peut devenir : soit s’engloutir dans l’Illusion de la matière
5915 e l’Occident peut devenir : soit s’engloutir dans l’ Illusion de la matière (et l’Orient aurait eu raison), soit accomplir
5916 eut devenir : soit s’engloutir dans l’Illusion de la matière (et l’Orient aurait eu raison), soit accomplir sa vocation av
5917 oit s’engloutir dans l’Illusion de la matière (et l’ Orient aurait eu raison), soit accomplir sa vocation aventureuse, déch
5918 oit accomplir sa vocation aventureuse, déchiffrer l’ Être dans le singulier et les structures de l’énergie universelle. Car
5919 r sa vocation aventureuse, déchiffrer l’Être dans le singulier et les structures de l’énergie universelle. Car c’est au se
5920 entureuse, déchiffrer l’Être dans le singulier et les structures de l’énergie universelle. Car c’est au secret des personne
5921 rer l’Être dans le singulier et les structures de l’ énergie universelle. Car c’est au secret des personnes que nous tenton
5922 u secret des personnes que nous tentons d’écouter la Personne, mais c’est dans la matière que nous cherchons le Soi. La cr
5923 us tentons d’écouter la Personne, mais c’est dans la matière que nous cherchons le Soi. La création tout entière, « soumis
5924 ne, mais c’est dans la matière que nous cherchons le Soi. La création tout entière, « soumise à la vanité » mais travaillé
5925 c’est dans la matière que nous cherchons le Soi. La création tout entière, « soumise à la vanité » mais travaillée par « 
5926 ons le Soi. La création tout entière, « soumise à la vanité » mais travaillée par « un ardent désir, attend la révélation
5927 é » mais travaillée par « un ardent désir, attend la révélation des fils de Dieu ». (Romains 8). Et saint Justin, l’œcumén
5928 des fils de Dieu ». (Romains 8). Et saint Justin, l’ œcuménique du iie siècle, ose parler d’un salut de la Matière. À forc
5929 uménique du iie siècle, ose parler d’un salut de la Matière. À force de l’étreindre de ses mains, de la mesurer par la vu
5930 , ose parler d’un salut de la Matière. À force de l’ étreindre de ses mains, de la mesurer par la vue, de la dissoudre et d
5931 Matière. À force de l’étreindre de ses mains, de la mesurer par la vue, de la dissoudre et de la recomposer, de l’épier d
5932 ce de l’étreindre de ses mains, de la mesurer par la vue, de la dissoudre et de la recomposer, de l’épier dans sa vie secr
5933 eindre de ses mains, de la mesurer par la vue, de la dissoudre et de la recomposer, de l’épier dans sa vie secrète, comme
5934 , de la mesurer par la vue, de la dissoudre et de la recomposer, de l’épier dans sa vie secrète, comme l’alchimiste, cette
5935 r la vue, de la dissoudre et de la recomposer, de l’ épier dans sa vie secrète, comme l’alchimiste, cette matière du cosmos
5936 recomposer, de l’épier dans sa vie secrète, comme l’ alchimiste, cette matière du cosmos en expansion, de l’atome élusif, d
5937 himiste, cette matière du cosmos en expansion, de l’ atome élusif, des corps vivants, l’homme d’Occident ne cherche pas seu
5938 expansion, de l’atome élusif, des corps vivants, l’ homme d’Occident ne cherche pas seulement à dévoiler ses lois secrètes
5939 cette voie, qu’il aille jusqu’au bout ! Pour lui la Réalité est dans l’individuel, et l’Être dans les raisons d’être des
5940 ille jusqu’au bout ! Pour lui la Réalité est dans l’ individuel, et l’Être dans les raisons d’être des uniques. Or ce choix
5941 t ! Pour lui la Réalité est dans l’individuel, et l’ Être dans les raisons d’être des uniques. Or ce choix est celui de l’a
5942 la Réalité est dans l’individuel, et l’Être dans les raisons d’être des uniques. Or ce choix est celui de l’amour, de la c
5943 sons d’être des uniques. Or ce choix est celui de l’ amour, de la connaissance par l’amour, car tout ce qui existe est uniq
5944 des uniques. Or ce choix est celui de l’amour, de la connaissance par l’amour, car tout ce qui existe est unique, à voir d
5945 hoix est celui de l’amour, de la connaissance par l’ amour, car tout ce qui existe est unique, à voir de près, comme voit l
5946 qui existe est unique, à voir de près, comme voit l’ amour. 60. Cf. Charles Baudoin, Découverte de la Personne, 1940, p.
5947 ’amour. 60. Cf. Charles Baudoin, Découverte de la Personne, 1940, p. 22. Cet ouvrage est le meilleur exposé du personna
5948 erte de la Personne, 1940, p. 22. Cet ouvrage est le meilleur exposé du personnalisme moderne, par un psychanalyste assez
5949 e, de son propre point de vue, D. T. Suzuki passe la mesure dans l’autre sens lorsqu’il écrit avec une évidente satisfacti
5950 orsqu’il écrit avec une évidente satisfaction : «  La psychologie moderne, en fait, a éliminé l’ego comme entité. » (Mystic
5951 on : « La psychologie moderne, en fait, a éliminé l’ ego comme entité. » (Mysticism : Christian and Bouddhist, p. 39.) La p
5952 . » (Mysticism : Christian and Bouddhist, p. 39.) La psychologie dont il parle est occidentale. Cherchant à guérir les « m
5953 dont il parle est occidentale. Cherchant à guérir les « maladies du moi », elle le confirme comme entité et le renforce, lo
5954 Cherchant à guérir les « maladies du moi », elle le confirme comme entité et le renforce, loin de l’éliminer. 61. Henry
5955 ladies du moi », elle le confirme comme entité et le renforce, loin de l’éliminer. 61. Henry Corbin, L’Imagination créatr
5956 le confirme comme entité et le renforce, loin de l’ éliminer. 61. Henry Corbin, L’Imagination créatrice dans le soufisme
5957 renforce, loin de l’éliminer. 61. Henry Corbin, L’ Imagination créatrice dans le soufisme d’Ibn Arabi, 1958, p. 28 et 50.
5958 . 61. Henry Corbin, L’Imagination créatrice dans le soufisme d’Ibn Arabi, 1958, p. 28 et 50. 62. Ibid., p. 131. 63. He
5959 e et corps de résurrection, 1960, p. 31. 64. Sur les solutions proposées à ce problème par l’Inde, le taoïsme, et le boudd
5960 64. Sur les solutions proposées à ce problème par l’ Inde, le taoïsme, et le bouddhisme tibétain, voir Alexandra David-Neel
5961 les solutions proposées à ce problème par l’Inde, le taoïsme, et le bouddhisme tibétain, voir Alexandra David-Neel, Immort
5962 roposées à ce problème par l’Inde, le taoïsme, et le bouddhisme tibétain, voir Alexandra David-Neel, Immortalité et Réinca
5963 ion, 1961. 65. Parole attribuée au Bouddha, dans la tradition des Théravadins (hynayânistes). 66. Cf. Alexandra David-Ne
5964 ns (hynayânistes). 66. Cf. Alexandra David-Neel, Le Bouddhisme du Bouddha, 1960, p. 51-59. 67. D. T. Suzuki, Mysticism
5965 ticism Christian and Buddhist, 1956, p. 47. 68. Le Dhamma pada, trad. angl. Radakrishnan. 69. Alexandra David-Neel don
5966 xandra David-Neel donne une Parabole tibétaine de la « personne » dans l’op. cit. « Une “personne” ressemble à une assembl
5967 ne une Parabole tibétaine de la « personne » dans l’ op. cit. « Une “personne” ressemble à une assemblée composée d’une qua
5968 une assemblée composée d’une quantité de membres. La discussion ne cesse jamais. Parfois, un de ses membres se lève, prono
5969 un discours, préconise une action ; ses collègues l’ approuvent et il est décidé qu’il sera fait suivant ce qu’il a proposé
5970 il a proposé. D’autres fois, plusieurs membres de l’ assemblée se lèvent ensemble, proposent des choses différentes et chac
5971 llègues. Il advient aussi que certains membres de l’ assemblée la quittent d’eux-mêmes ; d’autres sont graduellement poussé
5972 advient aussi que certains membres de l’assemblée la quittent d’eux-mêmes ; d’autres sont graduellement poussés au-dehors
5973 t ce temps, de nouveaux venus s’introduisent dans l’ assemblée, soit en s’y glissant doucement, soit en enfonçant les porte
5974 soit en s’y glissant doucement, soit en enfonçant les portes. On remarque encore que certains membres de l’assemblée dépéri
5975 ortes. On remarque encore que certains membres de l’ assemblée dépérissent lentement ; leur voix devient faible, on finit p
5976  ; leur voix devient faible, on finit par ne plus l’ entendre. Au contraire, d’autres qui étaient débiles et timides se for
5977 dissent, et finissent par s’instituer dictateurs. Les membres de cette assemblée, ce sont les éléments physiques et mentaux
5978 ctateurs. Les membres de cette assemblée, ce sont les éléments physiques et mentaux qui constituent la “personne” ; ce sont
5979 les éléments physiques et mentaux qui constituent la “personne” ; ce sont nos instincts, nos tendances, nos idées, nos cro
5980 rs, etc. Chacun de ceux-ci se trouve être, de par les causes qui l’ont engendré, le descendant et l’héritier de multiples l
5981 de ceux-ci se trouve être, de par les causes qui l’ ont engendré, le descendant et l’héritier de multiples lignes de cause
5982 rouve être, de par les causes qui l’ont engendré, le descendant et l’héritier de multiples lignes de causes, de multiples
5983 r les causes qui l’ont engendré, le descendant et l’ héritier de multiples lignes de causes, de multiples séries de phénomè
5984 ultiples séries de phénomènes remontant loin dans le passé et dont les traces se perdent dans les profondeurs de l’éternit
5985 e phénomènes remontant loin dans le passé et dont les traces se perdent dans les profondeurs de l’éternité. » Nous connaiss
5986 dans le passé et dont les traces se perdent dans les profondeurs de l’éternité. » Nous connaissons assez bien cela en Occi
5987 ont les traces se perdent dans les profondeurs de l’ éternité. » Nous connaissons assez bien cela en Occident. Bismarck écr
5988 sse comme dans une république. » À regarder ainsi le moi, on le perd assurément et par méthode. Car il est forme dominante
5989 ans une république. » À regarder ainsi le moi, on le perd assurément et par méthode. Car il est forme dominante et gouvern
5990 forme dominante et gouvernante. Si on tentait de l’ observer à l’aide d’un microscope, l’éléphant lui aussi ne serait plus
5991 nte et gouvernante. Si on tentait de l’observer à l’ aide d’un microscope, l’éléphant lui aussi ne serait plus qu’une vaste
5992 n tentait de l’observer à l’aide d’un microscope, l’ éléphant lui aussi ne serait plus qu’une vaste illusion. 70. Les Qu
5993 ussi ne serait plus qu’une vaste illusion. 70. Les Questions de Milinda (Milindahunha), ier siècle A.D. Milinda est le r
5994 linda (Milindahunha), ier siècle A.D. Milinda est le roi indo-grec Ménandre, qui vivait au iie siècle avant J.-C. Nagasen
5995 ses sont à rapprocher de cette vue d’un soufi : «  Le paradis du gnostique fidèle, c’est son corps même, et l’enfer de l’ho
5996 dis du gnostique fidèle, c’est son corps même, et l’ enfer de l’homme sans foi ni connaissance c’est également son corps mê
5997 tique fidèle, c’est son corps même, et l’enfer de l’ homme sans foi ni connaissance c’est également son corps même. » (Cit.
5998 e, p. 161.) 74. Aurore, 517. 75. Henry Corbin, L’ Imagination créatrice dans le soufisme d’Ibn Arabi, p. 88. 76. Ibn Ar
5999 . 75. Henry Corbin, L’Imagination créatrice dans le soufisme d’Ibn Arabi, p. 88. 76. Ibn Arabi, in Henry Corbin, op. cit
6000 p. 117. 79. Cf. supra. 80. Emmanuel Swedenborg, La Nouvelle Jérusalem et sa doctrine céleste, § 86 à 89. 81. C’est à pe
6001  », et qui n’est tel qu’aux yeux de celui qui nie l’ âme ; mais alors, d’où viendrait cet amour, à qui irait-il ? La passio
6002 alors, d’où viendrait cet amour, à qui irait-il ? La passion de Tristan est la preuve de l’âme, s’il en fut jamais. 82. K
6003 amour, à qui irait-il ? La passion de Tristan est la preuve de l’âme, s’il en fut jamais. 82. Katha upanishad. 83. Alexa
6004 irait-il ? La passion de Tristan est la preuve de l’ âme, s’il en fut jamais. 82. Katha upanishad. 83. Alexandra David-Ne
6005 82. Katha upanishad. 83. Alexandra David-Neel, Le Bouddhisme du Bouddha, p. 45. 84. Chang Chen-Chi, The Practice of z
6006 hi, The Practice of zen. 85. Tout cela vaut pour l’ islam, bien entendu, au moins autant que pour le christianisme et le j
6007 r l’islam, bien entendu, au moins autant que pour le christianisme et le judaïsme. « Dans l’Arabe, tout est colère », écri
6008 ndu, au moins autant que pour le christianisme et le judaïsme. « Dans l’Arabe, tout est colère », écrit Henri Michaux. « S
6009 que pour le christianisme et le judaïsme. « Dans l’ Arabe, tout est colère », écrit Henri Michaux. « Son bonjour : “Que le
6010 lère », écrit Henri Michaux. « Son bonjour : “Que le salut soit sur quiconque suit la vraie religion.” (La vraie ! Aux aut
6011 n bonjour : “Que le salut soit sur quiconque suit la vraie religion.” (La vraie ! Aux autres, pas de bonjour.) » 86. Lin
6012 alut soit sur quiconque suit la vraie religion.” ( La vraie ! Aux autres, pas de bonjour.) » 86. Lingopasanârahasya. 87.
6013  » 86. Lingopasanârahasya. 87. Alain Daniélou, Le Polythéisme hindou, p. 474. 88. Gopala-uttara-tapîni upanishad. 89
6014 . Gopala-uttara-tapîni upanishad. 89. Raja Rao, Le Serpent et la Corde, 1959, p. 28. Je ne saurais trop inciter mes lect
6015 ra-tapîni upanishad. 89. Raja Rao, Le Serpent et la Corde, 1959, p. 28. Je ne saurais trop inciter mes lecteurs à lire ce
6016 lecteurs à lire ce beau roman autobiographique : la fraîcheur poétique ou mieux, l’euphorie spirituelle qui baigne l’œuvr
6017 utobiographique : la fraîcheur poétique ou mieux, l’ euphorie spirituelle qui baigne l’œuvre, situe dans la réalité ce que
6018 tique ou mieux, l’euphorie spirituelle qui baigne l’ œuvre, situe dans la réalité ce que je n’entends ici que formuler. Je
6019 phorie spirituelle qui baigne l’œuvre, situe dans la réalité ce que je n’entends ici que formuler. Je ne connais rien dans
6020 entends ici que formuler. Je ne connais rien dans la littérature qui confronte avec plus de tendresse et de rigueur l’Est
6021 ui confronte avec plus de tendresse et de rigueur l’ Est et l’Ouest. Lire aussi, mais c’est beaucoup moins tendre pour les
6022 nte avec plus de tendresse et de rigueur l’Est et l’ Ouest. Lire aussi, mais c’est beaucoup moins tendre pour les deux, c’e
6023 Lire aussi, mais c’est beaucoup moins tendre pour les deux, c’est même féroce, le chef-d’œuvre d’Henri Michaux, Un Barbare
6024 up moins tendre pour les deux, c’est même féroce, le chef-d’œuvre d’Henri Michaux, Un Barbare en Asie. Lire enfin de Rudol
6025 Un Barbare en Asie. Lire enfin de Rudolf Kassner, Le Livre de ma Vie. Puis aller en Inde et sentir l’innombrable, le « cor
6026 Le Livre de ma Vie. Puis aller en Inde et sentir l’ innombrable, le « corps magique ». 90. D. T. Suzuki, Mysticism : Chr
6027 Vie. Puis aller en Inde et sentir l’innombrable, le « corps magique ». 90. D. T. Suzuki, Mysticism : Christian and Budd
6028 sm : Christian and Buddhist, p. 73. Je crains que l’ auteur ne vienne ici à la rencontre des catégories de L’Amour et l’Oc
6029 st, p. 73. Je crains que l’auteur ne vienne ici à la rencontre des catégories de L’Amour et l’Occident un peu plus qu’il
6030 r ne vienne ici à la rencontre des catégories de L’ Amour et l’Occident un peu plus qu’il ne serait souhaitable, de son p
6031 ici à la rencontre des catégories de L’Amour et l’ Occident un peu plus qu’il ne serait souhaitable, de son propre point
6032 de vue. 91. On pourra retrouver ce passage dans la Brihadaranyaka upanishad, au cours des dialogues entre l’illustre sag
6033 daranyaka upanishad, au cours des dialogues entre l’ illustre sage Yajnavalkya et son épouse Maitreyi, qui l’interroge sur
6034 stre sage Yajnavalkya et son épouse Maitreyi, qui l’ interroge sur l’immortalité. 92. Phrases empruntées comme plusieurs a
6035 alkya et son épouse Maitreyi, qui l’interroge sur l’ immortalité. 92. Phrases empruntées comme plusieurs autres ici au rom
6036 comme plusieurs autres ici au roman de Raja Rao, Le Serpent et la Corde. 93. Pierre Teilhard de Chardin, La Route de l’O
6037 rs autres ici au roman de Raja Rao, Le Serpent et la Corde. 93. Pierre Teilhard de Chardin, La Route de l’Ouest (inédit).
6038 ent et la Corde. 93. Pierre Teilhard de Chardin, La Route de l’Ouest (inédit). 94. Il serait peut-être fécond d’interpré
6039 rde. 93. Pierre Teilhard de Chardin, La Route de l’ Ouest (inédit). 94. Il serait peut-être fécond d’interpréter le princ
6040 t). 94. Il serait peut-être fécond d’interpréter le principe de Carnot-Clausius (accroissement général de l’entropie, mor
6041 cipe de Carnot-Clausius (accroissement général de l’ entropie, mort lumineuse) en termes de métaphysique orientale, et le p
6042 umineuse) en termes de métaphysique orientale, et le principe d’exclusion de Pauli (individuation des électrons, condition
6043 Pauli (individuation des électrons, conditionnant la « vie ») en termes de métaphysique occidentale. Mais Stéphane Lupasco
6044 ura sans doute pensé. av. Rougemont Denis de, «  La personne, l’ange et l’absolu, ou le dialogue Occident-Orient », La No
6045 e pensé. av. Rougemont Denis de, « La personne, l’ ange et l’absolu, ou le dialogue Occident-Orient », La Nouvelle Revue
6046 av. Rougemont Denis de, « La personne, l’ange et l’ absolu, ou le dialogue Occident-Orient », La Nouvelle Revue française,
6047 t Denis de, « La personne, l’ange et l’absolu, ou le dialogue Occident-Orient », La Nouvelle Revue française, Paris, avril
6048 ge et l’absolu, ou le dialogue Occident-Orient », La Nouvelle Revue française, Paris, avril 1961, p. 586-617.