1 1931, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Les Éléments de la grandeur humaine, par Rudolf Kassner (octobre 1931)
1 ’est l’impuissance. La proie de désirs divergents qui prennent rarement assez de violence pour nous déchirer jusqu’au salut
2 vre entre en action parmi les forces spirituelles qui orientent l’Europe d’aujourd’hui. La France ne l’ignorera plus longte
3 son essai le plus discursif, relativement, celui qui donne son titre au recueil, les mots-clés : mesure, forme, grandeur,
4 son astre. L’homme chrétien au contraire, l’homme qui doit être surpassé, vit dans la démesure, et lorsqu’il « veut prendre
5 é que pour le converti ; c’est donc la conversion qui figure l’acte par excellence du chrétien, hors duquel il n’est pour l
6 du Beau objectif et de l’Intéressant sentimental qui pour Schiller et surtout pour Schlegel symbolisait celle de l’antique
7 ndiscrétion journalistique. La férocité réfléchie qui préside à son analyse de l’indiscret nous vaut une description inégal
8 le privilège d’avoir parlé sans complicité de ce qui nous détruit : Rudolf Kassner donne la sensation à peu près unique en
9 adictions personnelles, parlementarisme intérieur qui nous mène lentement à l’impuissance. (Si Kassner exprime un tourment,
10 forme, hors de quoi il n’est qu’indiscrétion, et qui livre la clef de la pensée de Kassner, comme aussi de son apparente o
11 our penser avec autorité. Il faut savoir taire ce qui permettrait aux indiscrets de comprendre intellectuellement sans « ré
12 t comme à l’état sauvage, non par une explication qui les réduise et qui les domestique. Une pensée neuve ne saurait être c
13 uvage, non par une explication qui les réduise et qui les domestique. Une pensée neuve ne saurait être comprise à moins d’ê
14 On pourrait dire aussi que l’indiscret est celui qui se préoccupe de défendre plutôt que d’illustrer. Ainsi selon Kierkega
15 ustrer. Ainsi selon Kierkegaard, le premier homme qui s’avisa de défendre la religion mériterait-il d’être appelé Judas num
16 rkegaard, cette présence s’accommode d’une ironie qui chez d’autres serait plutôt le fait du détachement. Une ironie à l’in
17 détachement. Une ironie à l’intérieur des choses, qui les fouille et les purifie, une ironie née de la rigueur et non du sc
18 ception de l’« existence » et que leur ironie, ce qui rapproche Kassner et son maître c’est leur vision tragique du péché.
19 de méditations sur le thème du tout-ou-rien moral qui caractérise Kierkegaard. L’on y trouvera moins de paradoxe et plus de
20 itié humaine, une retenue presque solennelle mais qui sans cesse frôle l’humour, et parfois tourne en sournoise malice. On
21 ories psychologiques. Il prend tout par des biais qui nous sont peu familiers. Et puis enfin, voilà une philosophie qui pos
22 u familiers. Et puis enfin, voilà une philosophie qui postule la vision, c’est-à-dire l’appréhension poétique du monde. Rie
23 du monde. Rien n’est plus étranger au nominalisme qui envahit la critique sous l’influence du journal. 2. Ici encore, on n
2 1931, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Sarah, par Jean Cassou (novembre 1931)
24 elque chose d’espagnol dans la démarche ; un tour qui ferait penser aux conteurs de la fin du xviiie  ; des sujets dans le
25 ets dans le goût allemand, tels sont les éléments qui composent non sans paradoxe ce recueil de « motifs » romantiques et d
26 —, ce dont on hésite à lui faire reproche, car ce qui lui importe, comme à nous, c’est précisément le sentiment d’absurdité
27 nous, c’est précisément le sentiment d’absurdité qui se dégage de pareils faits lorsque l’esprit s’y attache et que l’amou
28 out à fait rare dans la littérature française, et qui comporte en soi quelque chose de déconcertant. Il semble bien que Jea
29 ent ici d’heureuses complicités sentimentales. Ce qui gêne pourtant, en plusieurs endroits, c’est un certain tour désinvolt
30 lenteur nous retient. Ainsi Sarah, Monsieur Hoog, qui atteignent à une qualité d’émotion vraiment pure et insistante. Mais
3 1932, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Les Signes parmi nous, par C. F. Ramuz (janvier 1932)
31 lis un article récent de Ramuz (sur le Travail), qui débute ainsi « Pourquoi est-ce qu’on travaille ? parce qu’on y est fo
32 aphysique ou si l’on veut marxisme-christianisme, qui se trouve être le dilemme urgent de l’heure. Et je m’inquiète ; non p
33 er dans ces œuvres je ne sais quelle complaisance qui les faisait éviter d’instinct tout point de vue pratiquement boulever
34 es, si peu élaborées, des questions que n’importe qui pourrait poser et qui ne peuvent tirer de nous rien d’exquis ni d’ori
35 des questions que n’importe qui pourrait poser et qui ne peuvent tirer de nous rien d’exquis ni d’original, mais au contrai
36 ou convenables. Nous rechercherons désormais ceux qui savent dévisager notre condition la plus nue. « Alors on voit paraîtr
37 andeur, c’est-à-dire dans l’élémentaire : un être qui est nu, qui a froid, qui a faim, qui a été jeté au sein d’une nature
38 t-à-dire dans l’élémentaire : un être qui est nu, qui a froid, qui a faim, qui a été jeté au sein d’une nature hostile, de
39 l’élémentaire : un être qui est nu, qui a froid, qui a faim, qui a été jeté au sein d’une nature hostile, de sorte qu’il l
40 re : un être qui est nu, qui a froid, qui a faim, qui a été jeté au sein d’une nature hostile, de sorte qu’il lui faut sans
41 son public et l’époque, de ce ton viril et simple qui est à lui, nullement irrité (comme un Bloy), nullement moralisant ou
42 eintre ». Ah ! la grandeur de ce peuple ramuzien, qui se meut dans je ne sais quelle lourdeur « originale » et unanime, en
43 que : d’avant. Il n’est pas jusqu’à son Antiquité qui ne coïncide avec celle du pays de Vaud : non pas la grecque, qui est
44 avec celle du pays de Vaud : non pas la grecque, qui est scolaire — pour eux — mais la biblique, qui est vivante. Ainsi to
45 , qui est scolaire — pour eux — mais la biblique, qui est vivante. Ainsi tous parlent un même langage, qu’ils l’inscrivent
46 maladie. Et la joie, ce point commun, « ce point qui est au-delà de la vie ». Le communisme qui règne au jugement dernier
47 point qui est au-delà de la vie ». Le communisme qui règne au jugement dernier et qui régnait aux Origines, car la Fin et
48 ». Le communisme qui règne au jugement dernier et qui régnait aux Origines, car la Fin et le Commencement « sont en ressemb
49 son art m’en convainc : le sens de la vénération, qui est aussi celui de la lenteur des choses. Cet art, le sujet des Signe
50 t de Ramuz. Voici Caille, le colporteur biblique, qui s’avance dès le matin à travers le pays, et offre à tous la Parole, «
51 e Ramuz atteignit une autorité comparable à celle qui éclate dans cet ouvrage entièrement créé, entièrement « autorisé ». A
52 « autorisé ». Art, on le sait, avant tout visuel, qui rend les choses à l’état naissant, rugueux, décapé de toute rhétoriqu
53 ù le reproche de puérilité que lui adressent ceux qui , par exemple, n’hésitent pas à prendre au sérieux une intrigue romane
54 ge de Ramuz — même pas très réussie, et il y en a qui ont un air raté, un air pastiche de Ramuz —, c’est qu’une seule page
55 est-à-dire un événement perpétuellement possible, qui reçoit la vie comme un moule reçoit la matière en fusion et la réalis
56 cette forme et lui donnant une date. Les périodes qui « marquent » dans l’Histoire sont celles où la forme d’un mythe affle
57 ccidentelle : c’est en quelque sorte le contraire qui est vrai ; c’est notre temps qui revêt une actualité7 et une réalité
58 rte le contraire qui est vrai ; c’est notre temps qui revêt une actualité7 et une réalité véritables du fait de la crise. M
59 rière. Et c’est pourquoi le poète, Ramuz, l’homme qui vit concrètement les grands mythes et les réalise dans sa vision, cet
60 0 fut « inactuelle » pour la grande masse de ceux qui la vécurent. c. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] C. F. Ramuz, L
4 1932, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Le silence de Goethe (mars 1932)
61 a toujours à nouveau l’exemple de cette vie. Ceux qui traitent Goethe de bourgeois ne prouvent rien de plus que leur propre
62 tre ils veulent bien voir la révolte chez ceux-là qui la crient, et la magie chez ceux qui vaticinent, ayant été moins loin
63 chez ceux-là qui la crient, et la magie chez ceux qui vaticinent, ayant été moins loin que Goethe dans la domination des my
64 tre la confrontation du Sage et du Fou — d’un fou qui reste notre intime tentation — permettra-t-elle, par la vivacité même
65 antithétiques si elles étaient superposables, ce qui n’est pas même le cas. De ce point de vue littéraire, la confrontatio
66 que n’est-elle point faussée par un état d’esprit qui voudrait que l’on considère ces deux hommes avant tout comme des écri
67 t donc pas l’aspect littéraire de leur expérience qui doit conditionner notre vision. Non point qu’il soit un seul instant
68 a pas. Mais ce qu’on voudrait dire maintenant, ce qui ne cesse de provoquer dans notre esprit l’étonnement du premier regar
69 st-dire la similitude essentielle, hors du temps, qui paraît dans ces deux expériences, à mesure qu’on les abstrait de tout
70 si tout cela reste absurde aux yeux de ceux pour qui seule compte certaine « originalité » dans l’ordre — au mieux — esthé
71 plus concrète, grâce au recoupement de deux vies qui l’ont réalisée selon des voies totalement divergentes, une attitude h
72 oies totalement divergentes, une attitude humaine qui me paraît commune. Que Goethe ait pratiqué « le devis des choses gran
73 tualité facilement épurée, le mysticisme de celui qui , tout enfant, édifiait un autel à la Nature, trouvait son aliment dan
74 ans une méditation, renouvelée des rose-croix, et qui le porta même à quelques essais d’alchimie. Coquetteries, a-t-on dit,
75  mais il n’est point de sentiments intermédiaires qui ne conduisent réellement vers une plénitude, pour un esprit comme cel
76 e gémit, avec une sombre joie : « Sort misérable, qui ne me permet rien que d’extrême ». Jacob Boehme, Paracelse, Swedenbor
77 me en connaissance de cause, — c’est un événement qui ne peut normalement se traduire que par une qualité nouvelle de silen
78  l’oppression despotique des éléments inquiétants qui gouvernent trop puissamment dans son âme » qu’il appelle les arts d’u
79 ntégrer dans l’équilibre humain. Incident décisif qui figure en raccourci tout le drame dialectique de sa vie. Mais cette m
80 . Et comprendre, éprouver jusqu’à la souffrance — qui est la « substance » — à quel point le renoncement à la magie spécula
81 renie même bruyamment. C’est là le fait d’une âme qui se refuse encore à la souffrance et la crie sur la place. Un peu plus
82 de l’esprit, dans la région où seul accède celui qui sait préserver sa passion au sein d’une interminable patience. N’est-
83 -ce point ce tréfonds dont parle Jacob Boehme, et qui « contient l’élément pur, mais aussi l’être sombre dans le mystère de
84 aisse l’esprit de Faust béant sur le vide : « Moi qui me suis cru plus grand que le Chérubin… qui pensais en créant pouvoir
85 « Moi qui me suis cru plus grand que le Chérubin… qui pensais en créant pouvoir jouir de la vie des dieux et m’y égaler… co
86 l’action, la Tätigkeit — le grand mot goethéen — qui triomphera désormais. Mais une action qui par avance désespère du seu
87 théen — qui triomphera désormais. Mais une action qui par avance désespère du seul succès qui pour Faust serait réel : la p
88 ne action qui par avance désespère du seul succès qui pour Faust serait réel : la possession bienheureuse de l’instant. Et
89 actif 8, l’on découvre que c’est la magie encore qui n’a cessé de l’entraver : Könnt ich Magie von meinem Pfad entfernen
90 zu sein.9 C’est tout le drame secret de l’œuvre qui s’avoue dans ce cri : chaque fois que Goethe invoque la catégorie sac
91 lique de toute son existence, et c’est leur chœur qui chante une dernière fois la loi, au moment où il reçoit la grâce de l
92 e est bien la même : c’est l’attrait d’une vision qui transcende la vie médiocre. Rimbaud s’y lance avec l’emportement d’un
93 imbaud s’y lance avec l’emportement d’une révolte qui traduit d’abord un excès féroce de vitalité plutôt qu’une souffrance
94  » Le renoncement dès lors est fatal. « Moi ! moi qui me suis dit mage ou ange, dispensé de toute morale, je suis rendu au
95 renoncement à un Orient de mythe, c’est cela même qui constitue l’Occident spirituel. C’est le refus de la magie qui fonde
96 l’Occident spirituel. C’est le refus de la magie qui fonde notre éthique, et ce dilemme est peut-être le plus important qu
97 ue, et ce dilemme est peut-être le plus important qui se pose à l’esprit occidental, dès qu’il atteint les régions de haute
98 s contradictions essentielles, en signe de croix, qui sont la marque même de la réalité dans une conscience occidentale. Su
99 Et quels sont les plus grands Occidentaux ? Ceux qui ont incarné le choix le plus audacieux. Pascal choisit une fois pour
100 total. Rimbaud choisit dans une crise instinctive qui ressemble à la chute soudaine de l’ivresse devant le mortel danger qu
101 ute soudaine de l’ivresse devant le mortel danger qui se lève à un pas. Tous deux réalisent le renoncement, le deuxième tem
102 n’a pas connu de tels déchirements. Et c’est lui qui méritera la phrase de la Saison : « Pas de partis de salut violents. 
103 n consciente. C’est ainsi que le voyant audacieux qui écrivit les chœurs mystiques du Second Faust peut aussi faire figure
104 mythe germanique de la « Tarnkappe », du manteau qui rend invisible. ⁂ Cette similitude de forme dans le cours de la magie
105 Italie. Et le passage fameux de la Saison : « moi qui me suis dit mage ou ange… » rappelle étrangement ces vers du Premier
106 u Premier Faust que l’on citait plus haut : « Moi qui me suis cru plus grand que le Chérubin. » « Point de cantiques : teni
107 nne. Mais chez Goethe, c’est la longueur du temps qui les dénoncera. Et cette fameuse sérénité de sa vieillesse, ce n’est r
108 bérateur du désespoir. La longue peine de celui «  qui toujours s’est efforcé » a purifié le corps, et l’âme est prête à rec
109 oga. Tout savoir doit être confirmé par un faire, qui le tait et l’exprime à la fois. Le « faire » de Rimbaud ne peut être
110 l est bien rare que l’on soit apte à s’agréger ce qui est supérieur. C’est pourquoi l’on fait bien, dans la vie ordinaire,
111 ent aux gens du monde et surtout aux belles dames qui n’ont rien à faire. Mais un homme supérieur, qui a déjà conscience d’
112 qui n’ont rien à faire. Mais un homme supérieur, qui a déjà conscience d’être quelque chose ici-bas, et qui par conséquent
113 déjà conscience d’être quelque chose ici-bas, et qui par conséquent doit tous les jours travailler, combattre, agir, laiss
114 taisant. Et ceux-là seuls entendront ce silence, qui auront su percevoir l’accent dominateur et tendu des pages les plus é
115 ntier. Et c’est là sa pureté, mais c’est aussi ce qui l’accule en fin de compte à l’évasion. La rage avec laquelle il se ra
116 r de ceci je ne sais quel critère de « jugement » qui permettrait de placer Goethe au-dessus de Rimbaud. C’est la pureté dé
117 de Rimbaud. C’est la pureté démesurée de Rimbaud qui nous juge, et la grandeur humaine de Goethe. Et qui voudrait les oppo
118 i nous juge, et la grandeur humaine de Goethe. Et qui voudrait les opposer ? Que signifierait un choix dont l’opération res
119 oie au Carnaval et à l’angoisse, ce n’est pas moi qui pose la question : elle m’assiège. Le dernier carnaval, peut-être, po
120 uls éclats d’un fanatisme à vrai dire splendide. ( Qui me guérira de la honte de n’être pas Rimbaud ?) Plus que jamais, il f
121 silence de Goethe n’est pas moins dangereux, pour qui sait l’entendre, que l’imprécation de Rimbaud : et tous deux nous con
5 1932, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Querelles de famille, par Georges Duhamel (mai 1932)
122 t révèle son insuffisance quand c’est un virtuose qui se mêle d’en jouer. Mais sans doute le but serait-il atteint si M. Du
123 eurs auteurs, une de ces approximations vulgaires qui « rendraient » mieux sous la rubrique Mon film 16. En d’autres passag
124 avoure, la page sur « les bruits de mon village » qui servira de modèle aux écoliers futurs. Mais lorsqu’il stigmatise les
125 dépourvues du minimum de cynisme et de fantaisie qui enflammerait notre indignation. C’est que l’expression traditionnelle
126 sion traduit d’ailleurs une équivoque foncière et qui porte sur le thème général du livre. Il est inquiétant de voir un esp
127 inquiétant de voir un esprit de cette qualité, et qui certes veut être honnête, se complaire expressément dans une hargne t
128 ien M. Duhamel critique l’abus des mécaniques, ce qui revient à faire le vain procès de la bêtise humaine. Ou bien sa réact
129 à la fois libérale et inconsciemment matérialiste qui permet et favorise tout ce dont il s’indigne, conception à laquelle,
130 acile : décrire l’état d’esprit du Français moyen qui brandit son parapluie sous le nez de l’agent, invective les automobil
131 les clous ». 16. « La ménagère aux mains cuites qui raccommode ses chaussures, le casque aux cheveux, tête farcie, oui fa
132 sur la crainte instinctive de choquer un public, qui ne supporte que la mesure, par l’affirmation de prévisions horribles,
6 1932, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Ce chien, ton serviteur, par Rudyard Kipling (juillet 1932)
133 urnées, « des choses et des choses comme des rats qui courent ». — « On est des pauvres tout petits chiens qu’on habite tou
134 imaires, rate. Lire à petites doses. Vers la fin, qui est émouvante, décider que ceux qui n’aimeront pas sont fermés à tout
135 Vers la fin, qui est émouvante, décider que ceux qui n’aimeront pas sont fermés à toute poésie à l’état sauvage — la vraie
7 1932, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Éloge de l’imprudence, par Marcel Jouhandeau (septembre 1932)
136 éclate la violence des contraires. Pour tous ceux qui ont l’audace de se maintenir dans une telle dialectique, il n’existe
137 n, un choix universel et abstrait, mais des choix qui s’imposent avec une violence égale à celle de la tentation — c’est la
138 e du « choix » ou du « dépassement », cette vertu qui « supprime la morale », Jouhandeau l’appelle imprudence ou générosité
139 mplaisance, du « pecca fortiter » de Luther. Pour qui n’aurait pas lu d’autres ouvrages de Jouhandeau, les aphorismes qui c
140 u d’autres ouvrages de Jouhandeau, les aphorismes qui composent l’Éloge de l’imprudence paraîtront plus abstraits qu’ils ne
141 u règne de la loi (de la morale). Et c’est la foi qui en libère, non pas cette « générosité » malgré tout équivoque. La foi
142 révèle une réalité essentiellement différente et qui enveloppe tout ensemble les catégories du bien et du mal : le péché.
143 e péché. Le contraire d’un péché, c’est-à-dire ce qui le supprime, ce n’est pas une vertu, mais le pardon. La vertu comme l
144 ché et le pardon. Et la grâce est déjà dans l’œil qui sait voir le péché au sein du mal et du bien à la fois. « Mal » ou « 
8 1932, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). À prendre ou à tuer (décembre 1932)
145 ivre — telle est notre révolution — dans un monde qui nous préparait pour autre chose, dans une société organisée (et mal)
146 choix. Il y va de cette qualité même d’impossible qui seule rend la vie possible, c’est-à-dire grande. Devant les solutions
147 t demeurent des hommes. Il y a deux camps : ceux qui veulent en sortir, — et ceux qui voudraient bien continuer, ayant cer
148 eux camps : ceux qui veulent en sortir, — et ceux qui voudraient bien continuer, ayant certains intérêts dans l’affaire. En
149 ns dangereux et avides. Et maintenant, c’est vous qui glissez dans l’angoisse. Vous et vos maîtres. Bientôt vous chercherez
150 tionnelles. Mais si c’était cette « raison » déjà qui se trouvait à l’origine de tout le mal ?   Telles sont les composante
151 s. Il y a la guerre proche. La ferons-nous ? pour qui  ? Il y a la misère présente : pourquoi la supporterons-nous ? La révo
152 s banal du terme, et aussi à son sens de « misère qui appelle ». Nous ne sommes pas des « bourgeois-dégoûtés » ou des « pro
153 es-richesses-d’autrui », mais des hommes menacés, qui dévisagent la menace et contre-attaquent. Et alors, toute une jeuness
154 se d’autre, dont la réalité échappe encore à ceux qui récitent Marx : une « utopie » sans doute, — du moins vraie celle-là.
155 iste dans le cours « dialectique » de l’Histoire, qui caractérisent la position marxiste. Par contre, les bases doctrinales
156 es18, ne peuvent manquer de déconcerter tous ceux qui n’imaginent de choix possible qu’entre un capitalisme plus ou moins f
157 poraire, et d’ailleurs discutable ? C’est l’homme qui se révolte en nous contre le marxiste. Vous n’y ferez rien. Et nous n
158 listes. Il en est une moins coûteuse à risquer et qui consisterait à se laisser convaincre… Tout les y pousse, et l’on se d
159 invites de ces parents naguère inavouables, mais qui soudain font mine de « réussir ». N’est-ce donc plus, comme le marque
160 aulnier, qu’un conflit d’intérêts ? Et d’intérêts qui ne sont pas les nôtres, qui ne sont pas les intérêts réels d’un être
161 érêts ? Et d’intérêts qui ne sont pas les nôtres, qui ne sont pas les intérêts réels d’un être aux prises avec la condition
162 n nous ne verserons notre sang. Il y a une vérité qui domine et condamne tout cela. Entre le communisme et la révolution pe
163 ? J’en indiquerai trois. 1° — La seule révolution qui nous importe concerne l’homme, exprime ses données élémentaires : ell
164 personne ! — aux forces politiques et historiques qui selon eux déterminent entièrement le devenir révolutionnaire. Mais c’
165 les font partie de ces créations pseudo-mystiques qui pullulent dans un monde athée. Quelle que soit d’ailleurs la concepti
166 de la réalité humaine, toute révolution est vaine qui se fonde sur des faits mortels pour la personne, même si « ces faits
167 lus émancipés, les moins « mécanistes » ; théorie qui ôte à l’acte toute efficacité créatrice et par là même doit être déno
168 ue, d’allure électorale ? « Toutes les tentatives qui ne se fondent pas sur la classe révolutionnaire ne comportent pas de
169 cation de la pensée entre les mains du prolétaire qui , justement, avait besoin d’être conduit par la pensée de quelques-uns
170 ussit une révolution d’intellectuels dans un pays qui compte à cette époque moins de 3 millions d’ouvriers sur une populati
171 ourgeoises. Mais ils ne donnent pas de pain. Ceux qui ne promettent que du pain, finalement n’en donnent jamais. Nous avons
172 mais entre l’homme, entre tel homme et la Réalité qui seule peut garantir son être. — Encore faut-il que les conditions mat
173 ombat ou d’Esprit) c’est une violence spirituelle qui existe déjà au-delà des bouleversements nécessaires ; une substance,
174 aires ; une substance, une exigence impossible et qui est la seule chose que les hommes éprouvent dans le fond de leur être
175 rétienne où je veux être, de ce suprême « choix » qui ne vient pas de moi, mais qui soudain me choisit, me saisit. Je parle
176 e suprême « choix » qui ne vient pas de moi, mais qui soudain me choisit, me saisit. Je parle de cette seule chose au monde
177 me saisit. Je parle de cette seule chose au monde qui n’ait pas besoin d’arguments pour juger les idoles du monde ; de cett
178 r le pardon. Or il n’est de pardon que pour celui qui agit. On me dira sans doute que je me perds dans ma mystique ? Allez,
179 surhumaine d’entrer dans l’Ordre de la Pauvreté, qui vaincra toutes les révolutions — après les avoir faites. 18. En All
180 ple frappant de l’Allemagne : voici un pays enfin qui réunit toutes les conditions théoriques prévues par Marx pour qu’une
9 1933, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Pétrarque, par Charles-Albert Cingria (avril 1933)
181 es-Albert Cingria (avril 1933)k « Les modernes qui écrivent des livres sur Pétrarque voudraient pouvoir faire une part a
182 e voudraient pouvoir faire une part au Moyen Âge ( qui les excite) et admirer en même temps le restaurateur du cicéronianism
183 n’ont, en somme, aucun sens relativement à celui qui les cite, car alors où serait l’Impartialité ? Ces gens-là voudraient
184 e, dans ce cas, de traits humains révélateurs, ce qui est tout de même aller un peu loin, puisque ainsi l’on supprime la no
185 lyrique — rattaché encore à une école provençale qui est, à l’origine, de propulsion musicale, donc romane-syrienne puisqu
186 er, Dante, Nietzsche —, une pétulance idéologique qui s’exprime en notes, digressions et plaisanteries jamais dépourvues d’
187 ion épiscopale, d’une certaine politesse pompeuse qui est la forme particulière de son ironie24 et vous aurez ce petit volu
188 et vous aurez ce petit volume de deux-cents pages qui , délayé en six-cents, se verrait décerner le titre de « monument crit
189 use », et le nationalisme artificiel mais régnant qui fait de la chose publique la chose désavantageuse 25, quelques pages
190 antageuse 25, quelques pages brillantes et fortes qui rejoignent curieusement les doctrines de L’Ordre nouveau). Un style d
191 e de la Renaissance où palpite, sous une sérénité qui est plutôt de l’enthousiasme dominé, l’opulente diversité du monde. L
192 us significatif dans un écrit « signé ». 24. Et qui d’ailleurs n’exclut pas de petites férocités soudaines, raffinées, ni
10 1933, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Une main, par C. F. Ramuz (juin 1933)
193 ur un « régionaliste », c’est une de ces méprises qui peuvent servir à déterminer le niveau d’une certaine presse. Si l’on
194 e cherche Ramuz ? Une connaissance du particulier qui introduise à celle de l’élémentaire ; qui soit donc le contraire de l
195 iculier qui introduise à celle de l’élémentaire ; qui soit donc le contraire de la recherche du pittoresque. Aucune de ses
196 ton de Vaud, mais dans le domaine propre de Ramuz qui est l’élémentaire. Jamais il ne fut mieux lui-même. Il y fallait un c
197 és qu’on découvre, déconcertantes ; puis l’esprit qui se met à douter, parce qu’il n’a plus d’application, l’esprit qui pre
198 ter, parce qu’il n’a plus d’application, l’esprit qui prend peur. La guérison naîtra d’une résistance retrouvée26. Et Ramuz
199 s. Là réside la cause de la peur, qu’il avoue, et qui n’est sans doute que la méditation d’un esprit dépourvu de prises sen
200 dépourvu de prises sensibles. C’est un état d’âme qui caractérise assez bien le monde moderne, le monde des hommes sans res
201 té et sans résistance propre, le monde des hommes qui ne sont plus présents à eux-mêmes, hommes sans pesée, hommes de peu d
202 vert qu’on s’ingénie à allumer dans une cheminée qui tire mal. J’aime les choses qui sont à leur façon, tandis que je suis
203 dans une cheminée qui tire mal. J’aime les choses qui sont à leur façon, tandis que je suis à la mienne. » l. Rougemont D
11 1933, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Saint-Évremond ou L’humaniste impur, par Albert-Marie Schmidt (octobre 1933)
204 la corruption secrète de cet art trop parfait, «  qui supprime les plus angoissants problèmes, à force de les éclaircir »,
12 1933, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Le Deuxième Jour de la Création, par Ilya Ehrenbourg (décembre 1933)
205 le est évidente, il est doublement édifiant. Ceux qui ont aimé le Chemin de la Vie retrouveront ici l’atmosphère salubre, l
206 ts, à se passionner pour le problème de la fonte, qui est le problème dominant dans cette région de la Sibérie. Entre eux,
207 Sibérie. Entre eux, une jeune et touchante Irina, qui choisira bien entendu Kolka dès qu’elle aura compris que l’autre « n’
208 nbourg a utilisé pêle-mêle une masse de documents qui parlent d’eux-mêmes. Ils parlent peut-être plus qu’ils ne devraient.
209 ’il ne crée pas en eux le moindre refoulement. Ce qui suppose une remarquable absence d’imagination. Le prochain plan y pou
210 ne question. Non pas un doute, mais quelque chose qui veut une réponse, et qui est d’autant plus tragique qu’ils ne savent
211 oute, mais quelque chose qui veut une réponse, et qui est d’autant plus tragique qu’ils ne savent plus le formuler. À nous
13 1934, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Taille de l’homme, par C. F. Ramuz (avril 1934)
212 cette fois d’idées, et même d’idées générales, ce qui est assez paradoxal dans une telle œuvre. Le sujet de Taille de l’Hom
213 és, avec plus de mordant et plus de précision, et qui d’ailleurs n’ébranleront pas, dans leur foi, les marxistes. Mais ce q
214 uments pour faire sentir l’absurdité des « lois » qui , pour certains intellectuels, figurent la réalité. Une œuvre comme Ad
215 résence, et porte en soi sa justification. À ceux qui croient aux fatalités de l’Histoire, il faut dire simplement qu’elles
216 avec la vie, mais avec des quantités mortes. Ceux qui se vantent d’être calculables ont très probablement raison : c’est un
217 e d’État. C’est, à peu près, l’ukase en moins, ce qui s’est passé chez les bourgeois, au sujet du mot « esprit ».) Le vrai
218 tte taille est dans une foi, dans « quelque chose qui dépasse l’homme et le suppose en même temps », écrit-il. C’est lorsqu
219 vraiment l’homme ? N’est-elle pas bien plutôt ce qui le juge et en même temps le sauve dans ses limites, ici et maintenant
14 1934, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Le Procès, par Franz Kafka (mai 1934)
220 e borne à décrire ces apparences avec une minutie qui suffit à dénoncer leur absurdité réelle, en même temps qu’il se refus
221 . Toute l’histoire sera celle, non pas du procès, qui n’a jamais lieu, mais des préliminaires, des démarches que tente l’ac
222 résister. C’est ainsi une suspension du jugement qui est tout le drame du Procès. Constatation de la réalité telle qu’elle
223 — consistent peut-être à échapper à cette vision, qui est l’angoisse même. Est-ce pur hasard si la théologie chrétienne ren
224 que toutes les situations de ce livre ? Cette Loi qui nous condamne quoi que nous fassions, ce Juge impitoyable, cette inst
225 tance suprême qu’on n’atteint jamais, ces avocats qui parlent comme des prêtres, et qui sont de mèche avec la justice, ces
226 is, ces avocats qui parlent comme des prêtres, et qui sont de mèche avec la justice, ces prévenus en liberté, cette complic
227 Ainsi, la foi au Christ est la seule possibilité qui soit donnée à l’homme de marcher, d’échapper à l’« arrêt » ; mais c’e
15 1935, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Ni gauche ni droite (août 1935)
228 ’hui l’on se voit sommé de choisir entre un front qui se dit « national » et un front qui se dit « populaire ». Faudrait-il
229 ntre un front qui se dit « national » et un front qui se dit « populaire ». Faudrait-il en déduire que le peuple et la nati
230 débrouiller un peu le complexe de mots adultérés qui encombre la vie politique et qui empêche, à gauche comme à droite, de
231 e mots adultérés qui encombre la vie politique et qui empêche, à gauche comme à droite, de nommer les vrais adversaires. (J
232 er les vrais adversaires. (Je ne vois que Chamson qui ait dénoncé l’équivoque dont vit la droite, quand elle se proclame « 
233 ques sans puissance contre les menaces réelles, —  qui sont la guerre et l’étatisme totalitaire. C’est très simple. Trop sim
16 1935, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Paracelse, par Frédéric Gundolf (septembre 1935)
234 et ne voulant pas mourir, il s’adressa au diable qui lui conseilla de se faire enterrer pour une année, coupé en petits mo
235 lse. Théophraste Paracelse Bombaste de Hohenheim, qui était né en Suisse allemande, n’était pas un énergumène, mais un sava
236 espérer que nous en reverrons bientôt, un savant qui voulait harmoniser sa petite spécialité avec les sciences fondamental
237 petite spécialité avec les sciences fondamentales qui doivent donner le ton à toutes les autres, et qui sont, comme nul ne
238 qui doivent donner le ton à toutes les autres, et qui sont, comme nul ne l’ignore ou ne pourra l’ignorer longtemps, l’astro
239 onaliste, comme le veut le langage confus de ceux qui se croient cartésiens. Aussi a-t-on souvent tendance à le rejeter du
240 vocabulaire ne pouvait y suffire. Ce grand esprit qui savait voir de grandioses correspondances dans le détail bizarre de n
241 méfie de ce mode — de cette mode — d’expression, qui lui paraît peu scientifique. Il s’en tire au moyen d’allégories, et t
242 rialiste. Il s’opposait32 aux médecins galénistes qui voyaient l’homme sous l’aspect d’un concept. Il se fût opposé aussi a
243 ection dont descend toute la science du xixe , et qui nous ont conduits à considérer notre corps comme une espèce de moteur
244 acelse, brève synthèse des idées les plus neuves, qui sont aussi les plus antiques, sur la nature unique de la maladie, ouv
245 le n’est pas seulement cruelle et folle, l’époque qui nous offre de si grandes chances. Et c’est une ère favorable qui s’ou
246 de si grandes chances. Et c’est une ère favorable qui s’ouvre, celle où l’esprit se remet à chercher ce qu’est l’homme, et
247 ’importance de l’hygiène professionnelle ». Voilà qui l’honore en tant qu’homme. Mais on se représente aisément l’embarras
248 ’homme. Mais on se représente aisément l’embarras qui eût été le sien si l’on eût exigé qu’il nommât l’activité qu’il décou
249 t exigé qu’il nommât l’activité qu’il découvrait. Qui ne sait, de nos jours, parler d’« hygiène professionnelle » ? 32. Eu
17 1935, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Recherches philosophiques (septembre 1935)
250 cte et à mon sens parfaitement vaine de problèmes qui n’empêchent personne de dormir, diminue nettement dans ce tome IV au
251 ’aventure politique ou religieuse. Au grand Hegel qui philosophe « au dimanche de la vie » au-dessus du « banc de sable de
252 e temporelle », Löwith oppose Marx et Kierkegaard qui pensent « à la banalité soucieuse, extérieure et intérieure, de l’hom
253 à la doctrine hégélienne de la médiation. Mais ce qui me paraît important, c’est que Löwith dégage puissamment l’origine ph
254 ge puissamment l’origine philosophique du conflit qui domine le monde présent. L’effondrement de l’idéalisme hégélien sous
255 e, et productrice. L’esprit pur s’évanouit. L’âge qui s’ouvre sera celui du spirituel décisif. La seule doctrine, ou pour m
256 , ou pour mieux dire, la seule attitude de pensée qui tienne compte de cette crise essentielle révélée par l’échec des synt
257 fait, provisoire, de toute philosophie naissante qui prétend restituer aux mots leur pouvoir pratiquement bouleversant. À
258 n sens socratique, un sens du concret de l’esprit qui enchante en moi le disciple de Kierkegaard. Il apparaît de plus en pl
18 1935, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Lawrence et Brett par Dorothy Brett ; Matinées mexicaines suivi de Pansies (poèmes), par D. H. Lawrence (octobre 1935)
259 re complicité. Elle a l’humour discret, sensible, qui convient à la confession d’un sentiment ni partagé ni rebuté, et rési
260 vous aviez l’intention de « détruire » Mabel, ce qui bouleverse Tony et vous bouleverse au-delà de toute expression. Vous
261 anches pourries. C’est cette vision de vous ainsi qui m’a fait peindre ces planchers, des années plus tard, pour que vous n
262 s frotter. Après le plancher vous brossez tout ce qui vous tombe sous la main et vous lavez des choses toute la journée. À
263 e. À cinq heures nous allons chercher les chevaux qui se cachent tout au bout du champ de pommes de terre, là-bas près de l
264 lait, mais vous êtes blême et fatigué. Un trait qui manque par hasard dans cette page, et qu’on retrouve dans toutes les
265 la définition évangélique, c’est justement celui qui « exige » de l’aide et auquel on vient en aide. Autrement, il serait
266 leur prétexte à fuir les hommes. Mais après tout, qui donc vint à son aide, à lui ? Il n’avait que la nature, les bêtes, le
267 g enfant maigre au regard narquois et inquiet, et qui s’est mis une barbe rousse pour avoir l’air d’un faune. 33. Même qu
268 re ce que j’appellerais le « problème des gens », qui est moins grandiose et beaucoup plus encombrant… t. Rougemont Denis
19 1935, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Les Mystiques allemands du xiiie au xixe siècle, par Jean Chuzeville (octobre 1935)
269 lle disposition d’esprit nous incite à séparer ce qui était lié chez les mystiques : la vision de foi et les symboles concr
270 iques : la vision de foi et les symboles concrets qui essaient de l’envelopper pour la transmettre. Nous estimons alors les
271 mystiques selon les critères du lyrisme moderne, qui ne préjugent pas nécessairement l’intellection du contenu, et encore
272 érité que les mystiques ont prétendu traduire, ce qui reviendrait à les taxer de mythomanie. La ferveur littéraire indiscrè
273 de mythomanie. La ferveur littéraire indiscrète, qui fera sans doute le succès de ce volume, vaut-elle mieux que l’étroite
274 me, vaut-elle mieux que l’étroitesse positiviste, qui réduira tout cela au jeu des complexes freudiens ? Tout dépend de ce
275 siècle.) Du point de vue strictement théologique, qui est tout de même décisif en ces matières, l’alternative que je viens
276 temps. Cette définition condamne tout mysticisme qui ne serait, comme le veut M. Chuzeville, que la « recherche des moyens
277 te une mystique vraiment chrétienne, une mystique qui ne soit pas cette « transgression » et cet oubli de nos limites, cont
278 se pare le mieux d’humilité dévote. Ceci marqué, qui est plus qu’une réserve, il convient de remercier M. Chuzeville de no
279 r exemple, je m’explique mal l’omission de Hamann qui eût avantageusement remplacé la visionnaire Catherine Emmerich, et qu
280 nt remplacé la visionnaire Catherine Emmerich, et qui mérite au moins autant que Novalis de figurer parmi les grands mystiq
281 oir y réduire l’évolution du mysticisme allemand, qui justement lui inflige le démenti le plus formel. Car si l’on voit à l
282 pseudonyme, mais un des trois prénoms du médecin, qui se nommait, « en réalité », Théophraste Paracelse Bombaste de Hohenhe
20 1935, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). « Le plus beau pays du monde » (octobre 1935)
283 er bien davantage qu’ils n’en gardent et que ceux qui les prononcent n’en conçoivent. Pour vous le prouver, voici une anecd
284 t le devoir. Tonnerre et foudres de ce pacifiste, qui n’hésite pas à dénoncer « l’impérialisme démodé » de l’instituteur d’
285 responsable du cliché. On blâme cet instituteur. Qui va se plaindre à son député. Lequel interpelle les communes. Qui à le
286 dre à son député. Lequel interpelle les communes. Qui à leur tour infligent un blâme à l’inspecteur ; car si l’École se met
287 orgueil patriotique », où allons-nous ? Quelqu’un qui est bien content, dans cette affaire, c’est le journaliste allemand q
288 dans cette affaire, c’est le journaliste allemand qui la raconte, et qui ne manque pas de féliciter la Chambre des communes
289 c’est le journaliste allemand qui la raconte, et qui ne manque pas de féliciter la Chambre des communes. (Gazette de Franc
290 t tellurique, un ensemble de goûts et d’habitudes qui ne comporte ni orgueil ni modestie, ni aucune espèce de valeurs moral
291 indique un trouble. — Enfin, voilà les hitlériens qui trouvent très bon qu’on dise que l’Angleterre est le plus beau pays d
292 malgré la première apparence. L’erreur courante, qui est celle du libéral rationaliste, c’est de croire que la proposition
293 omporte un sens rationnel ; que c’est un jugement qui conclut d’une comparaison. Mais en réalité, lorsque la petite Alice é
294 ître et accepter le fait concret d’un attachement qui ne comporte pas de choix délibéré. Par malheur, l’enseignement s’empa
295 r là même il le rend absurde. Il le « mystifie ». Qui dit discours dit raison ; qui dit raison suppose comparaison, et rien
296 Il le « mystifie ». Qui dit discours dit raison ; qui dit raison suppose comparaison, et rien n’est plus absurde que de com
297 car où est l’étalon, où est la mesure commune, et qui connaît le modèle idéal ? Le malfaisant nationalisme n’est rien d’aut
298 ique naturel, la seule formule « internationale » qui reste possible est celle-ci : « Chaque pays est le plus beau du monde
21 1936, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Sur l’esprit incarné (février 1936)
299 nte : « La religion de l’esprit incarné est celle qui honore l’esprit en tant qu’il veut porter l’empreinte de certains int
300 ion de Pilate et des docteurs nationalistes juifs qui criaient avec la populace : Crucifie ! et relâche Barabbas — oppositi
301 ace : Crucifie ! et relâche Barabbas — opposition qui se résout pratiquement en unanimité contre le Christ, contre l’esprit
302 tre l’esprit incarné en Personne ; 5° si le clerc qui s’en lave les mains ne risque pas de faire le jeu des clercs qui crie
303 es mains ne risque pas de faire le jeu des clercs qui crient avec les loups, et de trahir de la sorte doublement, étant adm
304 trop clair. Il n’y manque plus qu’une épigraphe, qui conviendrait d’ailleurs à tous ses livres : ut evacuata sit crux. x
22 1936, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Dictature de la liberté, par Robert Aron (mars 1936)
305 osent toutes les questions « pratiques » ; celles qui passionnent les hommes d’action et qu’ils estiment purement technique
306 rusion. Comme le prouve toute l’histoire moderne, qui est celle des révolutions étranglées par l’État et sa police. Telles
307 a décrites avec une sobre et nerveuse précision37 qui tranche sur le verbiage technico-humanitaire de tous nos fabricants d
308 nos fabricants de « plans d’urgence ». Précision qui d’ailleurs n’exclut pas une éloquence qu’on dirait jacobine si un hum
309 age. M. Thibaudet réclamait ici même une critique qui « contingentât » l’importation des mystiques étrangères. Oui, mais on
310 pitre sur le colonel de la Rocque, « cet en avant qui ne sait pas où aller ». y. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Rob
23 1936, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Kierkegaard en France (juin 1936)
311 onne l’exemple unique, je crois bien, d’un auteur qui attache autant d’importance à l’opportunité spirituelle de ses œuvres
312 ule, non la vertu, peut nous guérir. Quant à ceux qui le qualifient de « métaphysicien du néant », ils oublient de dire que
313 les évêques de la cour, et la religion bourgeoise qui veut prendre le christianisme « à bon marché » ; parce qu’il en appel
314 sme théorique à un christianisme existentiel — ce qui est le mouvement même de la Réforme — on a voulu le présenter comme u
315 tige eût été beaucoup plus restreint. Les raisons qui poussèrent Kierkegaard à publier ses premières œuvres sous des masque
316 ne contre l’humilité de son retrait.) La question qui se posait dès lors était celle-ci : « Comment donner à une époque plo
317 toi alors le porte-parole des idées, des passions qui sont dans l’air, avec l’enthousiasme d’une éloquence chaude et entraî
318 e choisit Kierkegaard, lorsqu’au cours des années qui préparèrent sa mort, il « changea de direction » et révéla le sens de
319 , ce ne peut être qu’à contre-courant du snobisme qui naît autour de leur auteur. ⁂ Le centre de Kierkegaard est dans cette
320 eut vouloir d’une manière totale et unique que ce qui est vrai. Car tout ce qui n’est pas vrai comporte en soi une division
321 totale et unique que ce qui est vrai. Car tout ce qui n’est pas vrai comporte en soi une division et divise la volonté qu’o
322 ser à l’absurde les attitudes de vie ou de pensée qui ne se fondent pas dans cette vision centrale et unitive. Il me semble
323 ul Tisseau en reviennent tous à la même question, qui est celle du sérieux dernier, de la prise au sérieux de la vérité. Du
324 lui-même la vérité. C’est pourquoi l’acte de foi, qui saisit dans ce temps l’éternel paradoxe de la vie et de la mort du Ch
325 os sérieux, poses et amusettes, une ironie, ou ce qui est pire, un soupçon d’insondable ironie. Un soupçon : car peut-être,
326 eu cet acte de foi, ce renversement du désespoir qui s’ignore en certitude combattante — et combattue. Le sérieux de l’ir
327 ns doute à excuser les obscurités, les gaucheries qui arrêtent parfois le lecteur des meilleures traductions françaises de
328 les Cahiers du Sud une étude de Benjamin Fondane qui s’en prend avec énergie aux interprétations de Kierkegaard proposées
329 rouve pas cette violence déplacée, ni l’injustice qui l’accompagne plus onéreuse pour la vérité que ne serait l’affectation
330 véritable produit elle-même la provision de force qui cause sa perte. » Ibid., p. 53. 39. Dans sa belle préface au Concept
24 1936, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). L’Art poétique ou Qu’il faut penser avec les mains (décembre 1936)
331 décembre 1936)aa De l’Art poétique de Claudel, qui domine de son poids les écritures du siècle, je retiendrai d’abord de
332 « poétique » dans le titre ; et « connaissance », qui s’inscrit à chaque page. La rumeur quotidienne tend à faire de « poèt
333 principale40, peut néanmoins servir à préciser ce qui oppose la langue d’un poète aux divers jargons de son temps : c’est q
334 générale. Claudel montre partout son parti pris, qui est de s’en tenir aux origines, et à cette origine, entre plusieurs p
335 s, et à cette origine, entre plusieurs probables, qui lui paraît la plus concrète, la plus active, la plus proche de la cho
336 e, le sens « courant ». Dans cette affaire, celui qui sait où il va risque encore d’augmenter l’embarras, et de se faire co
337 ieusement houspiller. Et pourtant, c’est lui seul qui détient la méthode efficace pour en sortir. Mais quittons là cette mé
338 peu fait passer pour communes des significations qui à vrai dire, et dans le fait, ruinent les bases de la communauté. On
339 catholique, isolé de la foule des hommes, par ce qui manifeste, justement, sa volonté de catholicité ! ⁂ Non qu’il soit « 
340 ce je ne sais quoi de bouleversant, obscurément, qui saisit l’auditeur le plus profane de Tête d’Or ou de l’Annonce. Ce se
341 e, sa part dans la composition de l’image, le mot qui profère son sens. » C’est un univers du discours, où les objets qui «
342 ns. » C’est un univers du discours, où les objets qui « veulent dire » s’assemblent en propositions (à l’homme), seul disco
343 ’est pourquoi une fin lui fut en effet donnée » — qui est sa mort. Mais l’œuvre du poète, la vocation de l’homme, la charit
344 appelle, provoque en nous l’état de co-naissance qui répond à la présence sensible des choses mêmes. » Le nom, qui désigne
345 la présence sensible des choses mêmes. » Le nom, qui désigne la chose, appelle un geste de l’homme pour cette chose. Le ve
346 anglot de l’origine ». En même temps que la chose qui le provoque, le verbe exprime ainsi la vocation de l’homme qui le pro
347 ue, le verbe exprime ainsi la vocation de l’homme qui le profère. « L’acte par lequel l’homme atteste la permanence des cho
348 el il la conçoit dans son cœur, et répète l’ordre qui l’a créée, s’appelle la parole. » Nous voici donc « chargés du rôle d
349 on recréatrice, une étymologie vivante de tout ce qui est. Et maintenant, pour se connaître, il lui suffit d’agir sa vocati
350 agir sa vocation. Dans l’acte conscient de la fin qui l’englobe, il n’y a plus de distinction du matériel et du spirituel.
351 e « un document où il suit les œuvres de l’esprit qui le remue ». Penser dans le train de la création, reformer sans cesse
352 tion, sans déclarer ce que le mot sous-entend, et qui se révélerait le plus souvent absurdement contradictoire. 43. Conna
25 1937, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Une idée de Law (janvier 1937)
353 hardie : La victoire appartient toujours à celui qui a le dernier écu. On entretient en France une armée qui coûte 100 mil
354 le dernier écu. On entretient en France une armée qui coûte 100 millions par an ; c’est 2 milliards pour vingt ans. Nous n’
355 vres, sans compter la perte sur notre population, qui n’est réparée qu’au bout de vingt-cinq ans. Au lieu de cet attirail d
356 ieds » à la guerre. Mais le geste du capitaliste, qui eût été la plus belle farce de l’Histoire, a soulevé d’universelles p
357 nt traversées par celles d’une passion contraire, qui est l’honneur. Car il est clair que l’honneur seul — ou du moins ce q
358 ique du capitalisme. Or, ce système étant de ceux qui ne se peuvent soutenir que si rien d’arbitraire ou d’humain ne vient
359 déranger les calculs, l’on voit qu’en vérité, ce qui nous ruine, c’est bien l’honneur — le budget de l’honneur — et non pa
26 1937, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). De la propriété capitaliste à la propriété humaine et Manifeste au service du personnalisme, par Emmanuel Mounier (février 1937)
360 dents ouvrages de l’auteur. Mais c’est la méthode qui doit retenir ici : il s’agissait pour Mounier de fonder la théorie pe
361 s doctrines thomistes, et rejoint avec un naturel qui est succès de ce livre, les positions constructives d’Esprit, et même
362 ’esprit — le nécessaire vital une fois assuré. Ce qui suffit à renverser l’argument des propriétaires, trop souvent et hypo
363 n communisme — celui que redoutent les bourgeois, qui n’est pas celui de Staline… Mais si vigoureuse que soit cette analyse
364 cunes provisoires45 — de ce mouvement. Le lecteur qui se souvient encore du Cahier de revendications, publié ici même en 19
365 r le pauvre ». Et selon saint Thomas, « n’importe qui peut donner l’aumône au nécessiteux avec l’argent d’un autre, s’il ne
27 1937, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). N’habitez pas les villes (Extrait d’un Journal) (juillet 1937)
366 t un droit. Et ce n’est pas une sécurité, ni rien qui dure au-delà du temps qu’on en jouit. Cette maisonnette, ce jardin et
367 ec laquelle j’en saurai faire usage, pour une fin qui leur est étrangère, et qui me commandera de les quitter le jour qu’il
368 re usage, pour une fin qui leur est étrangère, et qui me commandera de les quitter le jour qu’ils y mettront obstacle. (Pou
369 emps, et devrait être défini franchement comme ce qui est incommode ou impropre, et dont il faut tâcher de se délivrer coût
370 blancs enclosent de tous côtés ce jardin de curé, qui a juste la largeur de la maison. On ne voit rien que le ciel au-delà,
371 À l’étage, où l’on parvient par un petit escalier qui prend au fond de la cuisine, deux autres chambres assez vastes et pre
372 à la regarder. Toutefois, noter les faits précis qui me paraîtront frappants ici ou là, c’est une sorte de contrôle amusan
373 on nette d’utiliser la fin de l’élan intellectuel qui me soutenait à Paris. Ces deux derniers jours déjà, j’arrivais mal à
374 uel, dans la littérature ou les idées. C’est cela qui paie, et qui m’ennuie. Après quoi, je pourrai travailler. Aujourd’hui
375 littérature ou les idées. C’est cela qui paie, et qui m’ennuie. Après quoi, je pourrai travailler. Aujourd’hui c’est le jou
376 uce ironie sorbonnarde pour les petits événements qui se déroulèrent dans ce coin du pays, et surtout pour les légendes, lo
377 n du pays, et surtout pour les légendes, locales, qui ont fortement exagéré et embelli tout cela… La science réclame de pet
378 si, il faut l’avouer, à ne tenir pour vrai que ce qui est petit. Laissons donc de côté ce petit travail qui a dû valoir les
379 est petit. Laissons donc de côté ce petit travail qui a dû valoir les palmes à son auteur. Le second bouquin, c’est l’œuvre
380 est naturellement l’énumération des débarquements qui ont honoré l’île, des premières galères romaines jusqu’au bateau à va
381 érité ! Et la merveilleuse bibliothèque que celle qui rassemblerait tous les ouvrages analogues que, dans chaque sous-préfe
382 la porte, on enfile une petite rue toute blanche qui contourne la panse de l’église et aboutit à la place principale. Au m
383 à la place principale. Au milieu de cette place, qui est un vaste rectangle de terre jaune, les habitants plantèrent à la
384 ec chaque façade d’une manière subtile et précise qui en dit long sur l’âme de ce peuple discret. C’est l’impression que je
385 t pas clairement. Et que penser d’un « Parisien » qui manifeste l’intention de rester ici tout l’hiver ? C’est plutôt en ét
386 . Elle a dû en parler longuement avec les clients qui attendaient en silence, le nez sur leurs sabots, que je sois sorti. L
387 er la porte du jardin. C’est la femme de Pédenaud qui brandit un papier. J’accours : elle me tend une formule de télégramme
388 t due sur l’envoi de ce matin. En effet, Pédenaud qui a voulu en avoir le cœur net, a pris des instructions par téléphone a
389 e. Il faut donc que je m’exécute, sinon c’est lui qui sera forcé « d’y aller de sa poche ». Me voilà courant à l’autobus po
390 r passionnément, trouver une formule d’apaisement qui ménage toutes les susceptibilités, et finalement ne rien payer de plu
391 s pas à partager avec les hommes de ce village ce qui est essentiel et solide dans ma vie. Le simple fait que je ne puis pa
392 a frappés : ma machine à écrire. La mère Renaud, qui est une vieille amie des propriétaires de notre maison, est venue plu
393 écoupés. Je m’attarde à causer dans leur cuisine, qui est leur habitation ordinaire. On ne peut rien désirer de plus plaisa
394 pâlies. Cet ordre gai, cette propreté rigoureuse qui règnent ici avec tant d’aisance, ai-je le droit de les considérer com
395 r de ces gens ?   5 décembre Ils me parlent de ce qui les intéresse, et je m’y intéresse avec eux. Mais je ne puis ou ne sa
396 e ne puis ou ne sais pas encore leur parler de ce qui moi, m’intéresse : je sens trop bien qu’ils n’en sont pas curieux. De
397 on travail. J’ai quelque peine à exprimer ceci, —  qui n’est précisément qu’un sentiment de gêne en moi. Sentiment qu’il y a
398 si parfaitement aveugles ? Ou bien est-ce ma gêne qui est absurde ? Essayer de confronter la culture et la réalité, c’est p
399 llir encore une vieille Bretonne sans ressources, qui aide un peu à la cuisine et casse beaucoup d’assiettes. Dans cette îl
400 ne et casse beaucoup d’assiettes. Dans cette île, qui fut presque entièrement protestante au xvie siècle, M. Palut n’a plu
401 nsé les abandons ou les départs. (Les protestants qui sont souvent l’élément le plus actif de la population s’expatrient vo
402 endre, si le seul espoir vrai réside dans la foi, qui ordonne de parler quand même ?   Janvier (à T…) Ce séjour, par ailleu
403 e me sentais pas la bonne conscience de l’employé qui a fait sa journée et qui pense maintenant à autre chose. Une sorte d’
404 conscience de l’employé qui a fait sa journée et qui pense maintenant à autre chose. Une sorte d’impatience me tarabustait
405 tellectuel peut encore travailler — et c’est cela qui le différencie profondément d’un chômeur industriel, par exemple — ma
406 nde s’agrandit. Je puis encore aimer des paysages qui ne sont pas mon état d’âme, mais une parole à déchiffrer. L’humilité
407 oi. Condition véritable de l’homme : il est celui qui agit dans l’attente. Il attend des révélations. C’est évident ! Ses a
408 it de terre caillouteuse, c’est pour un printemps qui viendra. C’est pour gagner ma vie, dit une raison borgne ; c’est auss
409 ine nécessairement sur fond de mort. (La jeunesse qui est l’âge de l’attente la plus ardente de la vie est aussi l’âge le p
410 toute vie est absurde et violemment inacceptable, qui ne s’ouvre pas sur l’attente d’une révélation à venir, et d’une « con
411 st-à-dire résolution des dissonances en un accord qui comble toute attente.)   7 avril Recette pour vivre de peu. La premi
412 parlé de la poule, la triste et digne poule noire qui habite seule au bout du jardin. Elle y est pourtant depuis notre arri
413 e brève angoisse : quel rapport entre cet homme à qui je parle, et le mot « homme » dans ce que j’écris ? Non seulement ceu
414 uand je parle d’eux précisément, et des problèmes qui intéressent leur existence. J’aurais beau leur expliquer chaque terme
415 chaque terme. Ils n’y reconnaîtraient rien de ce qui les « soucie », amuse, occupe, ou intéresse. Vraiment non, ce chapitr
416 moi, avec ses rides, sa barbe et sa casquette, et qui continue à me parler de la pêche, de son filet qui a été emporté hier
417 ui continue à me parler de la pêche, de son filet qui a été emporté hier, etc. Quel sens concret cela peut-il avoir de parl
418 mme et la culture ? N’y a-t-il pas là deux mondes qui n’ont jamais eu de contact, ni jamais de commune mesure ? Je reviens
419 critique, se légitime elle-même. Elle a ses lois, qui se suffisent. Les concepts alors se combinent selon des affinités ou
420 souvenir autrement que par un effort de réflexion qui me laisse assez froid. La culture m’a repris. Je suis dans le faux et
421 », mais au centre de mon domaine ; et c’est Paris qui est loin maintenant, peu vraisemblable ; et non plus moi. Premières r
422 tilleuls. Il y a un grand bonheur dans la lumière qui baigne le jardin fleuri, éclate sur la façade de la maison, plus clai
423 de, et illumine la goutte rose d’une fourmi ailée qui danse au-dessus de mon verre de vin blanc.   Mai La mer est d’un vert
424 rabiots et de laines. À quelques mètres de la mer qui affleure le tranchant du plateau, la rivière s’élargit en bassins cla
425 verdâtre, qu’il faut attraper comme une mouche et qui vous saute encore dans la main et vous gratte la paume de ses antenne
426 le sachet que l’on porte attaché à la ceinture et qui se remplit de tressaillements. Nous ne gardons que les plus belles cr
427 ttes toutes vivantes, en les jetant dans de l’eau qui bout. Après des soubresauts terribles — une ou deux sautent hors de l
428 t pour durer : la vie étale nous ennuie, c’est ce qui naît et ce qui meurt qui nous émeut. Cette nuit, avant d’aller me cou
429 la vie étale nous ennuie, c’est ce qui naît et ce qui meurt qui nous émeut. Cette nuit, avant d’aller me coucher, j’ai été
430 le nous ennuie, c’est ce qui naît et ce qui meurt qui nous émeut. Cette nuit, avant d’aller me coucher, j’ai été voir au po
431 Nous essayons de soulever par les ailes la poule qui fait un caquet déchirant : elle serre entre ses pattes un œuf à demi
432 os possibilités de subsister pendant les semaines qui viennent. Articles, zéro. Traductions, zéro. Les chapitres du livre e
433 ue je n’aurais jamais eu l’idée de solliciter. Et qui m’est octroyé pour un petit livre paru sans bruit il y a plus de dix-
434 du moins certains d’entre eux. Sur le moment, ce qui m’a le plus frappé c’est que je m’étais fâché hier soir, et que la Pr
435 ime, qu’on sache combien ils ont « mis de côté », qui peut expliquer le comportement des gens d’ici. Il faut admettre que p
436 mon parti de cet équilibre indifférent et cordial qui a fini par s’établir entre nous : et il ne reste que l’ennui de nos c
437 e bien des jeunes bourgeois ne l’imaginent : ceux qui voudraient « partir », se « libérer » et qui reculent pourtant devant
438 ceux qui voudraient « partir », se « libérer » et qui reculent pourtant devant le saut. Peut-être leur suffirait-il, pour o
439 ées : peu d’aventures dans l’existence d’un homme qui cherche à se posséder plutôt qu’à se fuir dans les hasards. C’est san
440 asards. C’est sans doute un effet de la trentaine qui approche : je n’espère plus, comme à vingt ans, rencontrer le « réel 
441 dans je ne sais quelle embuscade du destin, comme qui dirait au coin d’un bois. Je crois que le réel est à portée de la mai
28 1937, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Gösta Berling, par Selma Lagerlöf (novembre 1937)
442 et musiciennes, les douze « Cavaliers » d’Ekeby, qui régnèrent d’un Noël à l’autre sur la province du Warmland, s’étant ju
443 n de s’inventer différente. Elle n’aime que celui qui se moque d’elle et qui n’en fait qu’à ses façons. Elle aime les grand
444 nte. Elle n’aime que celui qui se moque d’elle et qui n’en fait qu’à ses façons. Elle aime les grands rhétoriciens de l’ima
29 1937, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Au dossier d’une vieille querelle (novembre 1937)
445 ’elle-même en fasse subir de salutaires à une vie qui en a grand besoin. Que cela n’aille pas sans risques, c’est l’évidenc
446 de la sécurité. Ce serait une raison bien débile, qui n’oserait s’exercer que sur du rationnel tout fait. S’il y a quelque
447 le plus onéreux : celui de laisser perdre le peu qui fut gagné par d’autres, et dont on vit. ah. Rougemont Denis de, « 
30 1938, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Le Monastère noir, par Aladár Kuncz (janvier 1938)
448 s’y mêle aucune trace de hargne, c’est un miracle qui défie l’époque. M. de Lacretelle, dans sa préface, déclare fort juste
449 ous conscience d’une menace plus générale encore, qui concerne chacun de nous, et dont l’internement de guerre n’est qu’une
450 insaisissable et saisissant : qu’un innocent, ou qui se croit tel, se voie privé de sa liberté pour des « raisons » collec
451 l symbolise, illustre et concrétise une condition qui n’est pas seulement celle du prisonnier proprement dit, mais, peu ou
452 a guerre. C’est un mot sacré. C’est quelque chose qui se passe très loin, partout, et qui doit être réel puisqu’on en souff
453 quelque chose qui se passe très loin, partout, et qui doit être réel puisqu’on en souffre, mais dont on ne sait rien de pré
454 On se rappelle que c’était l’histoire d’un homme qui se voit inculpé, par une justice inaccessible, d’une faute indétermin
455 bole de l’homme traqué par les tyrannies anonymes qui se multiplient dans notre siècle49, et tendent à faire du moindre d’e
456 s mieux qu’à la faveur de circonstances brutales, qui le rabattent à l’élémentaire. 49. Police d’État, polices privées, d
457 e suspects, procès de tendance faits à ceux mêmes qui se taisent, etc., etc. ai. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Ala
31 1938, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Victoire à Waterloo, par Robert Aron (février 1938)
458 e de cet ouvrage d’une passionnante ambiguïté, et qui se donne l’air d’une « fantaisie ». Prenons ce mot au sens allemand :
459 toire à Waterloo ? Parce qu’au cours des journées qui précèdent la bataille, Napoléon a découvert la vie concrète d’un pays
460 cri de la Révolution : Vive la Nation ! Or ce cri qui lui donne la victoire le condamne. Je simplifie encore la thèse : Nap
461 r nos communes. » Voilà l’épigraphe de l’ouvrage, qui par ailleurs compose bien d’autres thèmes : celui des îles, celui de
462 parte cherche à se recréer, celui du schizophrène qui « perd le sentiment », celui d’une société qu’il faut bâtir « à haute
463 histoire, un des meilleurs romans de l’année, et qui se fait lire avec le plus constant plaisir, d’autant que l’on pouvait
32 1938, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Une révolution refoulée (juillet 1938)
464 a psychanalyse nous propose un type d’explication qui me paraît bien tentant : c’est le mécanisme du « refoulement » d’où p
465 ant dans la France actuelle. (Au moins dans celle qui se manifeste.) Et les réformes obtenues apparaissent comme les résult
466 élites. Sous prétexte de lui résister, les voilà qui d’elles-mêmes se mettent en rang, lèvent le poing, acclament des capo
467 issance la révolution de 36. D’où le « complexe » qui s’est noué. Complexe fasciste, avoué sous le nom d’antifascisme, c’es
33 1938, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Alice au pays des merveilles, par Lewis Carroll (août 1938)
468 l’absolu, et elle en tire des déductions exactes, qui se trouvent par là même contredire l’expérience vécue et les règles s
469 urs — « plus grand que » et « plus petit que » —, qui est aussi le fondement de toute mathématique. Ces remarques peuvent n
470 préhension nouvelle des contes de Lewis Carroll — qui était un mathématicien —, et d’Alice en particulier. On dit à l’enfan
471 viendras grand. Donc il peut exister des aliments qui produiraient l’effet inverse ? Et l’imagination peut aisément accélér
472 curieusement acharnées à lui opposer une logique qui , n’étant plus le fait des grandes personnes — « ce qui va de soi » —
473 n’étant plus le fait des grandes personnes — « ce qui va de soi » — apparaît tantôt ridicule, tantôt tyrannique à l’excès.
474 ion d’entrave, de cauchemar. Impossible de savoir qui a gagné, quand une des règles principales du jeu est omise ou inobser
475 partie de croquet, la discussion avec le bourreau qui refuse de décapiter un chat dont la tête seule est visible, etc.). Et
476 é par la déclaration de la Tortue à Tête de Veau, qui croit que les quatre opérations arithmétiques sont l’Ambition, la Dis
34 1938, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Page d’histoire (novembre 1938)
477 à Munich d’une « Diète » de gouvernements égaux, qui régla le problème à l’avantage matériel de l’Allemagne, mais sur une
478 statut fédéral exclusif de toute hégémonie. 6. À qui profitèrent les accords de Munich ? — Cette victoire symbolique du pr
479 pe fédératif ne fut pas exploitée par les nations qui l’avaient remportée comme malgré elles et en dépit de leurs intérêts
480 de calculs qu’on appelait alors « réalistes », et qui se bornaient à faire état des pertes matérielles subies. Le bénéfice
481 igueur. Personne ne sut opposer au Führer l’idéal qui avait fait jusqu’alors la force et l’équilibre dynamique de l’Occiden
35 1939, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Propos sur la religion, par Alain (avril 1939)
482 ces fantastiques » et de sa « méthode arriérée », qui est celle de l’autorité (p. 72). La « vraie foi », vous la trouverez
483 re, vous finirez par penser)… Comme toute sagesse qui se respecte, celle d’Alain ne peut pas tenir compte des données concr
484 , par exemple, rejette au nom de sa foi : tout ce qui n’est que sociologie. (Je ne dis pas que ce soit négligeable.) Pour s
485 que part n’avoir jamais connu de « vrai croyant » qui ne vive « selon la peur ». Serait-ce qu’il n’a jamais rencontré que d
486 is il ne tient pas à avoir raison comme Napoléon, qui faisait les demandes et les réponses. 51. On me dira que mon point
487 un peu, animée d’une méfiance étrange pour celui qui déclare ses valeurs, — en dehors de la politique, bien entendu. ao.
36 1939, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Don Juan (juillet 1939)
488 il les inventerait pour les violer. Et c’est cela qui nous fait pressentir la nature spirituelle de son secret, si bien mas
489 anova. Mais déjà ce n’est plus l’homme du plaisir qui parle ainsi. La volupté du vrai sensuel commence au-delà de ces momen
490 oisine de l’impuissance. Et il est vrai que celui qui cède à cet attrait superficiel que presque toutes les jolies femmes p
491  ? Don Juan serait par exemple le type de l’homme qui n’atteint pas au plan de la personne, où pourrait se manifester ce qu
492 , du nouveau à tout prix, quel qu’il soit ? Celui qui cherche, c’est qu’il n’a pas ; mais peut-être aussi qu’il n’est pas ?
493 as ; mais peut-être aussi qu’il n’est pas ? Celui qui a, vit de sa possession et ne l’abandonne pas pour l’incertain, — ent
494  : s’il possède vraiment. Don Juan serait l’homme qui ne peut pas aimer, parce qu’aimer c’est d’abord choisir, et pour choi
495 évèle le moins dangereux. (Appelons ici danger ce qui peut compromettre un certain équilibre social que les mœurs ont pour
496 a société se trouve lui ménager des satisfactions qui l’épuisent, sans que l’ordre des choses ait à souffrir d’une dépense
497 au caprice de l’esprit : il n’y a plus de vérité qui tienne. Les hommes se rendent ou tombent dans le doute à la première
498 ’une hypothèse scientifique. Il n’y a plus de foi qui affirme et qui maintienne en vertu de l’absurde. Ah ! comme on se las
499 scientifique. Il n’y a plus de foi qui affirme et qui maintienne en vertu de l’absurde. Ah ! comme on se lasse de gagner à
500 règles que personne n’ose plus dire inviolables ! Qui donc se ferait tuer pour une vertu dont on ne sait plus quelle est la
501 es enhardis par le triomphe ardent d’un autre, et qui déjà croient pouvoir abuser de ses victimes. Mille et trois vérités s
502 e, et à lui-même infiniment secrète, d’une Vérité qui ne se rendrait point, mais qui le posséderait à tout jamais, digne en
503 rète, d’une Vérité qui ne se rendrait point, mais qui le posséderait à tout jamais, digne enfin de sa vraie passion ! Il tr
504 sa vraie passion ! Il traque sans relâche tout ce qui bouge, tout ce qui s’arrête, tout ce qui fait mine de résister. Volup
505 Il traque sans relâche tout ce qui bouge, tout ce qui s’arrête, tout ce qui fait mine de résister. Voluptés brèves — le tem
506 tout ce qui bouge, tout ce qui s’arrête, tout ce qui fait mine de résister. Voluptés brèves — le temps d’un aphorisme — fu
507 plus d’amour possible. Il faut inventer un amour qui permette au moins de haïr tout ce qui passe, tout ce qui cède, toute
508 er un amour qui permette au moins de haïr tout ce qui passe, tout ce qui cède, toute l’impudeur et la lourdeur du monde. C’
509 mette au moins de haïr tout ce qui passe, tout ce qui cède, toute l’impudeur et la lourdeur du monde. C’est au point de fur
510 t la vérité des êtres. Nietzsche pose des valeurs qui détruisent les règles anciennes, mais qui ne valent que par ces règle
511 valeurs qui détruisent les règles anciennes, mais qui ne valent que par ces règles et dans la mesure où l’on sent qu’elles
512 pose, elles perdent leur sens, puisque le système qui les mesurait n’existe plus. Par-delà le bien et le mal, par-delà tout
37 1939, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). La Poésie scientifique en France au xvie siècle, par Albert-Marie Schmidt (septembre 1939)
513 la seconde de tentations fécondes ou grotesques. Qui sait où cela nous eut menés ? Le livre de Schmidt inventorie, avec un
514 e, pourrait trouver dans les thèmes et les formes qui foisonnèrent au xvie siècle des incitations très fécondes. Encore y
515 des géométriques à partir du point originel. Mais qui oserait encore envisager l’ambition d’un Guillaume du Bartas, d’un Pe
516 ous aide à concevoir l’espèce de fureur titanique qui animait ces Renaissants, leur volonté de « singer Dieu », de recenser
517 r, et les philosophes mystiques de la Renaissance qui « considéraient l’huître comme un condensateur du fluide vital circul
518 lant par l’univers ». Voilà de la belle érudition qui signifie. C’est une manière de poésie que bien peu savent allier à ta
38 1940, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Au sujet du Journal d’André Gide (janvier 1940)
519  ». Comment prendrait-on position devant un homme qui récuse sans cesse tout parti pris, et d’abord, quant à soi ? On renon
520 de la difficulté à découvrir l’intime hiérarchie qui trahirait la vraie personne dans ce complexe individuel. D’autant plu
521 ture, à quelques réactions impressionnistes. ⁂ Ce qui séduit, ce qui fascine dans ce Journal, ce n’est rien qui puisse être
522 s réactions impressionnistes. ⁂ Ce qui séduit, ce qui fascine dans ce Journal, ce n’est rien qui puisse être défini séparém
523 it, ce qui fascine dans ce Journal, ce n’est rien qui puisse être défini séparément — style, sujets abordés, rythme, idées
524 hénomène-Goethe, dans l’espace et le temps, voilà qui donnerait une idée de l’espèce d’intérêt que l’on prend à lire le Jou
525 crise, et soumis par lui-même à une sorte d’unité qui fait nécessairement défaut à la chronique intermittente d’une existen
526 ivrer au public treize cents pages d’explications qui menacent d’aggraver l’équivoque. Mais alors cela devient exemplaire.
527 comment ne serait-on pas tenté de dire surtout ce qui a frappé, ce qui est bizarre, ce qui fait exception justement. Et com
528 -on pas tenté de dire surtout ce qui a frappé, ce qui est bizarre, ce qui fait exception justement. Et comment ne céderait-
529 e surtout ce qui a frappé, ce qui est bizarre, ce qui fait exception justement. Et comment ne céderait-on pas à l’invite d’
530 est pas épargné : « Je ne suis qu’un petit garçon qui s’amuse — doublé d’un pasteur protestant qui l’ennuie. » Type de bout
531 rçon qui s’amuse — doublé d’un pasteur protestant qui l’ennuie. » Type de boutade dont certains, contre lui, ne se priveron
532 , contre lui, ne se priveront pas d’abuser. Voici qui va fort loin dans la critique du genre : « Je ne pense pas qu’il y ai
533 ntre, à négliger, de peur de se surfaire, tout ce qui peut entrer en jeu de bonté naturelle ou de sociabilité, disons mieux
534 consent à noter que l’important, c’est-à-dire ce qui frappe ce jour-là, et l’on se fait trop pittoresque. En somme, le jou
535 t parfois même négative. C’est moins la vie vécue qui s’y traduit, que le désir de compenser ou de parfaire ce qui n’a pas
536 duit, que le désir de compenser ou de parfaire ce qui n’a pas été vécu, ou mal vécu. (« J’avais besoin de lui pour me ressa
537 ir de marquer les seules différences, oubliant ce qui va de soi : l’autoportrait de Gide est aussi ressemblant. On l’y retr
538 ux s’est posé, et se pose encore, dans des termes qui échappent, presque nécessairement, à la sollicitude des catholiques.
539 amentale à préférer à la lettre du dogme l’esprit qui inspire et qualifie nos actions quotidiennes, fussent-elles non confo
540 cle dernier. « Je l’ai souvent dit à Claudel : Ce qui me retient [d’entrer dans l’église], ce n’est pas la libre pensée, c’
541 ue catholique), un attachement à sa vérité propre qui est moins évangélique qu’individualiste, ou même rationaliste ? Certe
542 en voudrais de critiquer une exigence d’honnêteté qui rappelle si fort Kierkegaard. Gide répugne à paraître plus qu’il n’es
543 au culte de famille. Sa gêne. L’horreur du geste qui puisse dépasser son sentiment… » Kierkegaard, lui aussi, répétait : j
544 ’église visible, de l’obéissance à une orthodoxie qui ne prétende pas s’emparer de l’Évangile, mais au contraire s’y ordonn
545 ue. C’est par là que je sens le mieux la distance qui sépare de la sienne ma génération littéraire. Notre culture est beauc
546 nt par préférence, loin de là. Mais les problèmes qui se posent à nous, nous n’avons pas pu les choisir, et encore moins le
547 tre-artisan de la langue, plus que l’immoraliste, qui nous importe, et qui nous intéresse au double sens du mot. Conclusion
548 gue, plus que l’immoraliste, qui nous importe, et qui nous intéresse au double sens du mot. Conclusion provisoire, paradoxa
549 le n’exclut aucun revirement dans les générations qui nous suivront : je prévois le jour où nos cadets nous opposeront l’ex
550 onner point les positions auxquelles on tient, et qui ne sont pas exactement les siennes… ar. Rougemont Denis de, « [Comp
39 1951, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Un complot de protestants (novembre 1951)
551 devant quitter demain la maison de Charles Du Bos qui rentre d’Amérique, et je viens d’apprendre au téléphone que « cela ne
552 ant à une large galerie. Par une porte capitonnée qui donne sur la bibliothèque où il travaille, Gide apparaît en robe de c
553 débats d’idées, il semble répugner à toute pensée qui par le style d’abord ne l’ait séduit. Il me parle souvent des Variati
554 l en accentuant, circonflexant le dernier mot. Ce qui l’a souvent frappé chez bien des femmes, c’est leur manière « de s’of
555 s parle très sincèrement, je vous parle de choses qui ont joué un rôle très grave dans ma vie. » (Frappé par le ton de conf
556 er sur les suppressions qu’il y a faites. Tout ce qui concerne intimement sa femme — « le seul être, dit-il, que j’ai vraim
557 Mais je n’ai plus souvenir d’aucune conversation qui mérite d’être rapportée, j’entends : qui modifie le moins du monde l’
558 ersation qui mérite d’être rapportée, j’entends : qui modifie le moins du monde l’image que l’on connaît de lui. Nous parli
559 tades les plus variés de l’évolution de Gide. Ce qui l’a vraiment torturé, c’est l’éthique, non le religieux ; la justice
560 aitée expressément. Mais comment définir un saint qui ne croit pas ? Un saint privé de foi autant que de religion, ni chrét
561 it qu’il se méfiait d’une certaine « profondeur » qui mesure parfois la distance entre l’éthique et la mystique, mais qui s
562 la distance entre l’éthique et la mystique, mais qui souvent n’est qu’un concept bâtard, engendré par le romantisme. Gide
563 quelque chose, c’est justement le totalitarisme, qui est l’esprit de parti logiquement développé. Et d’abord dans la relig
564 n. Le vrai croyant demain, ne sera-t-il pas celui qui osera dire : « Je ne crois pas ! » quand l’État contre l’homme invoqu
40 1957, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). La découverte du temps ou l’aventure occidentale (mars 1957)
565 a condition des sciences physiques et naturelles, qui est la reconnaissance du corps, de la matière, et de la forme du mond
566 cent-mille ans. Aux toutes dernières nouvelles — qui dira mieux ? — c’est au moins six-cent-mille qu’il conviendrait d’adm
567 par la destruction du monde et sa reconstruction, qui sera l’œuvre de Kalki, dernier avatar de Vishnu. En regard des ordres
568 . Et, en particulier, toute théorie de l’Histoire qui négligerait d’en rendre compte ou s’en révélerait incapable apparaîtr
569 e pas voir qu’il serait intimement lié, chez ceux qui l’éprouveraient, au sens de la personne ? Presque toutes les cultures
570 s que nous avons exhumées du passé de la Terre ou qui survivent dans notre siècle ont enseigné des théories du temps, et pr
571 trine de l’Histoire : il annonce la Résurrection, qui est victoire sur le temps comme sur la mort. Mais c’est bien à partir
572 ation salvatrice, et cet « une fois pour toutes » qui sert de leitmotiv à l’Épître « aux Hébreux » précisément, voilà qui b
573 tiv à l’Épître « aux Hébreux » précisément, voilà qui brise la croyance unanime aux retours éternels du temps cyclique. Dan
574 ël. Le dialogue de Personne à personne entre Dieu qui appelle et l’âme qui répond libère celle-ci des décrets uniformes de
575 rsonne à personne entre Dieu qui appelle et l’âme qui répond libère celle-ci des décrets uniformes de la morale et de la tr
576 a roue du karma et du vertige de la métempsycose, qui réduisaient toute vie dans le temps et la chair à l’insignifiance ano
577 la même victoire sur les étoiles et sur la mort, qui libère et suscite la personne. Ce n’est pas un hasard si le premier a
578 ns dominées par des rythmes et par des archétypes qui s’accordent à ceux de l’âme. Ainsi le rêve universel du temps cycliqu
579 écu de la souffrance. Ce n’est plus la souffrance qui est vaine, dès lors qu’elle prend un sens exemplaire dans le Mythe, m
580 laire dans le Mythe, mais c’est le temps lui-même qui perd sa réalité, puisqu’il n’apporte plus d’absolue nouveauté, ni par
581 r conséquent de scandale. (L’homme d’aujourd’hui, qui croit qu’il ne croit plus à rien, mime encore ce mouvement de la sage
582 n, l’homme n’aurait pas la preuve d’une existence qui échappe au temps et à la mort. « Si le Christ n’est pas ressuscité, v
583 dictature du temps, n’est effectif que pour celui qui croit « que Dieu peut tout à tout instant », ainsi que l’écrit Kierke
584 quin, Dante, Roger Bacon et tous les astrologues, qui vont devenir avec Kepler les astronomes. La conception linéaire du te
585 ses conceptions. Pour les premiers chrétiens, ce qui rend supportable l’idée d’un temps vidé de rythmes et de mythes, c’es
586 C’est une vision réduite et limitée de l’Histoire qui lui permet de rendre un rythme à sa durée. L’apparition du Christ ne
587 es dater. C’est un mouvement exactement contraire qui s’est produit dans l’Occident moderne, où, à l’inverse de ce qui s’ét
588 it dans l’Occident moderne, où, à l’inverse de ce qui s’était passé durant l’intermède médiéval, l’état civil des hommes et
589 mouvement de diastole et de systole de l’Univers, qui se répéterait à l’infini : nous serions dans une phase d’expansion. L
590 rétien ». Il en résulte une suite de conséquences qui jouent en fait — mais je ne pense pas en droit — contre l’idée occide
591 le devenir présent. Elle est plus vraie que nous, qui ne faisons que l’habiter pour un atome de temps insignifiant. Elle es
592 l’on ne peut le penser qu’en s’y abandonnant. Ce qui se place dans le sens de l’Histoire en reçoit l’attribut d’exister. C
593 de l’Histoire en reçoit l’attribut d’exister. Ce qui résiste au sens est « mystification » aux yeux des théoriciens et pol
594 « dans le sens de l’Histoire », ou ce n’est rien qui vaille… Suis-je dans l’Histoire ? Es-tu dans l’Histoire ? Sont-ils da
595 ption de l’Existence. Cette Histoire absolutisée, qui n’est plus connaissance des actes du passé, mais flux irrésistible en
596 mais flux irrésistible entraînant à la fois ceux qui lui cèdent et ceux qui lui résistent — peut-on la distinguer encore d
597 entraînant à la fois ceux qui lui cèdent et ceux qui lui résistent — peut-on la distinguer encore du temps lui-même ? N’es
598 ’est-elle pas simplement une manière de le penser qui le ferme à toute transcendance, et qui du même coup nous enferme et n
599 le penser qui le ferme à toute transcendance, et qui du même coup nous enferme et nous interdit tout recours ? « Au monde
600 nie la personne, car la personne se fonde dans ce qui juge le temps, le détruit et le renouvelle. Et, si l’on rêve un monde
601 e. Devant le risque béant, soudain total, l’homme qui n’a pas de foi cède au vertige. Sa dernière résistance à l’angoisse d
602 ndividu trouve le défi trop lourd. Dans un cosmos qui se calcule en centaines de millions d’années-lumière, dans cette duré
603 es de millions d’années-lumière, dans cette durée qui va vers l’infini, et dans une société où la technique, les « lois éco
604 stoire, légitimant la mort de millions de koulaks qui vivaient par hasard en travers. Mais les « lois » révélées par Karl M
605 c’est le sang des « païens », le sang des autres, qui cimente l’édifice de l’Usine soviétique et donne la preuve démente de
606 dans une seule et même démission de la personne, qui désespère de ses pouvoirs d’innovation et de toute espèce de recours
607 t, elle refuse d’affronter cette situation béante qui fut celle des premiers chrétiens, mais elle en reste tributaire — et
608 élits que ceux de la routine. L’Histoire-devenir, qui est une conjuration du temps, exige des sacrifices sanglants bien plu
609 mentaux. Car la question n’est pas de savoir « ce qui arrivera », mais de savoir dès maintenant ce que nous sommes disposés
610 u contraire d’affronter le temps au nom d’un sens qui ne peut s’originer qu’en la personne. Bref, la question n’est pas de
611 d’avance une signification aux surprises du temps qui vient à nous. Et ces options n’agiront point par la violence de prise
612 es utopies toujours trop pauvres, ou de ces plans qui prévoient tout sauf l’essentiel humain, parce qu’on les a conçus non
41 1961, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). La personne, l’ange et l’absolu, ou le dialogue Occident-Orient (avril 1961)
613 telligentsia de l’Inde se préoccupe des problèmes qui lui sont imposés par la technique et par l’hygiène occidentales, et c
614 t cherche à les résoudre à l’aide d’un socialisme qui ne doit rien à Shankara. L’Occident découvre Zoroastre à la suite de
615 s Monde, ce n’est pas ce dont il vivait, c’est ce qui manquait à nos élites, ou qu’elles ne savaient plus trouver dans notr
616 secrets spirituels en même temps que leur misère, qui en était la rançon. Ils adoptent nos formes sociales, nos procédés de
617 echniques, mais non pas les tensions spirituelles qui en étaient le moteur secret. Ce qui était pour nous résultantes d’inn
618 spirituelles qui en étaient le moteur secret. Ce qui était pour nous résultantes d’innombrables poussées et résistances, m
619 pirituels ? Presque rien, sinon dire l’essentiel, qui n’agira guère sur l’histoire dans son devenir immédiat, mais peut ori
620 ut orienter la conscience de quelques-uns de ceux qui la feront demain. L’essentiel du dialogue nécessaire et désormais iné
621 éfinition. S’il est vrai que l’Orient nie le moi, qui est une valeur centrale pour l’Occident, il doit en résulter d’infini
622 dans quelle mesure est-ce vrai ? Quel est le moi qui s’affirme d’une part et quel est le moi qu’on nie de l’autre ? Est-ce
623 tuelle, dont « la nature n’est que de penser » et qui reste entièrement distincte du corps. Avec Kant, le vrai moi, nouména
624 u’elle élague le vrai moi, qu’elle en disjoint ce qui appartient en propre au collectif (l’inconscient, le surmoi, les arch
625 es du xxe siècle nomment et dénoncent les forces qui tendent à le dissocier, les névroses qui l’assiègent de toutes parts,
626 s forces qui tendent à le dissocier, les névroses qui l’assiègent de toutes parts, et retrouvent par le détour de leurs des
627 même nature ou affinité, il y a un être spirituel qui tout au long de leur existence assume envers cette âme ou ce groupe d
628 ne sollicitude et tendresse spéciales ; c’est lui qui les initie à la connaissance, les protège, les guide, les défend, les
629 ne autre personne, une contrepartie transcendante qui nous demeure invisible, ce qu’Ibn Arabi désigne comme notre “individu
630 eulement cette part initiante de l’être renouvelé qui demeure cachée en Dieu selon le christianisme, mais encore, et d’une
631 n de Zarathoustra nommait les Fravartis, « celles qui ont choisi » (c’est-à-dire choisi de combattre pour venir en aide à O
632 isi de combattre pour venir en aide à Ohrmazd) et qui sont à la fois les archétypes célestes des êtres et leurs anges tutél
633 la sienne63. La Terre physique et tous les êtres qui l’habitent apparaissent ainsi comme la contrepartie visible du monde
634 nstituée se produit à l’aube de la troisième nuit qui suit la mort terrestre : c’est la rencontre de l’âme avec son moi cél
635 es d’immortalité », au centre du monde spirituel ( qui est le monde réel des Archétypes), le pont Chinvat s’élance, reliant
636 este, jeune femme d’une beauté resplendissante et qui lui dit : — Je suis toi-même ! Mais si l’homme sur la Terre a maltrai
637 ti, c’est une apparition monstrueuse et défigurée qui reflète son état déchu. La « rencontre aurorale » avec le moi céleste
638 e, ne demande pas d’abord ce qu’est l’homme, mais qui es-tu ? Toute réalité dernière est personnelle. Le vrai moi est aille
639 uccessives. Car si le moi n’existe pas, qu’est-ce qui transmigre64 ? Mais ce moi, cet ego, cette entité distincte, voilà pr
640 i-même » que le Christ exige de ses disciples, et qui est la condition de leur accession à leur vrai moi spirituel, celui q
641 e leur accession à leur vrai moi spirituel, celui qui doit ressusciter en corps glorieux. Védantistes, vishnouites et shiva
642 de formations mentales en proie au désir égoïste, qui naît de l’ignorance et qui entraîne fatalement les attachements à l’i
643 roie au désir égoïste, qui naît de l’ignorance et qui entraîne fatalement les attachements à l’illusoire ; d’où l’action, l
644 s encore la personne, mais l’obstination de l’ego qui veut durer au-delà de la mort sans rien comprendre aux conditions de
645 ’avance, dirions-nous, aux exigences du vrai moi, qui est notre répondant céleste. Et faut-il qu’il existe et qu’il soit fo
646 mêmes phrases) : « Nagasena, existe-t-il un être qui transmigre de ce corps dans un autre ? — Non, il n’y en a point. — S’
647 ion : « Le Roi dit : Nagasena, y a-t-il quelqu’un qui ne reprenne point l’individualité après la mort ? Nagasena répondit 
648 ualité après la mort ? Nagasena répondit : Celui qui a péché reprend une individualité, mais non un être pur. — Ô Nagasena
649 — Il n’y a ni esprit, ni Bouddha, ni aucune chose qui existe. » (Mais on ne donne jamais au peuple cette leçon. On s’en gar
650 e !) Les spirituels hindous cherchent le samadhi, qui est l’absorption totale dans l’Absolu du Soi : le grand sommeil, lent
651 ané. Éveil de quoi ? De la vision-en-soi, du Cela qui n’est pas personnel et se joue à travers notre moi. Ainsi tout l’Orie
652 s une « recette d’immortalité ». Et même la seule qui ait réussi. Apprenons donc à lire dans leur optique. Le même Kitaro N
653 à lire dans leur optique. Le même Kitaro Nishida qui écrit ceci : « La valeur religieuse signifie l’absolue négation du mo
654 us faisons face à l’Un tout-transcendant.71 » (Ce qui est chrétien.) Le même Chang Chen-Chi qui cite ce koan : Parfois, j’
655 1 » (Ce qui est chrétien.) Le même Chang Chen-Chi qui cite ce koan : Parfois, j’arrache la personne mais sauve l’objet. Pa
656 nalisations » des attitudes « dysfonctionnelles » qui menacent l’intégrité du moi et qui nient ou détruisent la personne… M
657 nctionnelles » qui menacent l’intégrité du moi et qui nient ou détruisent la personne… Mais l’Oriental sourit et nous laiss
658 lement de l’homme mais du monde, c’est son action qui configure l’idée du moi que nous nous faisons, et cette idée du moi r
659 propriétés de l’énergie. « C’est l’amour dominant qui fait l’homme… L’homme est absolument tel qu’est l’amour dominant de s
660 s spirituels dans leur condamnation de l’égoïsme, qui est l’impérialisme de l’ego naturel et sa fermeture autarcique. Mais
661 l’individu et le vrai moi. Le second commandement qui résume toute la Loi et les Prophètes : « Tu aimeras ton prochain comm
662 ransformer, réorienter par lui. C’est le vrai moi qui aime, qui est l’agent de l’amour. Ce vrai moi seul peut aimer le proc
663 , réorienter par lui. C’est le vrai moi qui aime, qui est l’agent de l’amour. Ce vrai moi seul peut aimer le prochain, parc
664 remier. » Pour le chrétien, c’est parce que Dieu, qui est Amour, est un Dieu personnel, dans sa tri-unité, que l’amour spir
665 de retombement de l’âme frustrée, quand l’esprit qui l’appelait cesse de la diriger dans son élan vers le vrai moi ? Elle
666 et temporel à la vocation de l’amour. Mais celui qui se hait de cette manière ne peut pas aimer le prochain : il ne peut v
667 i que son semblable — un corps « vil » et une âme qui se veut ange —, non le vrai moi dans son autonomie. Si le corps lui p
668 ’écrit pas sans raison : « Il faut craindre celui qui se hait lui-même, car nous serons les victimes de sa colère et de sa
669 l’âme retombe alors dans les liens de l’instinct, qui est la puissance impersonnelle par excellence, et s’épuise à s’en lib
670 spensable tissu conjonctif de toutes les sociétés qui ne sont pas un ordre.) L’école iranienne Il n’existe plus de co
671 us de communauté humaine, d’unité de civilisation qui s’inspire du mazdéisme de Zarathoustra ; et nulle ne s’inspira jamais
672 ces doctrines, citons ce verset du Coran (24-41) qui pose comme une clef musicale : « Chaque être connaît le mode de prièr
673 tre connaît le mode de prière et de glorification qui lui est propre. » Toute personne s’origine en Dieu, qui l’a créée afi
674 i est propre. » Toute personne s’origine en Dieu, qui l’a créée afin d’être connu par elle et de « devenir en elle l’objet
675 comme soi-même », — comme étant née du même amour qui m’a créé. « (Dieu) est celui qui dans chaque être aimé se manifeste a
676 ée du même amour qui m’a créé. « (Dieu) est celui qui dans chaque être aimé se manifeste au regard de chaque amant… car il
677 re comme étant l’Image » ; enfin l’amour naturel, qui recherche la satisfaction de ses désirs sans souci de l’agrément de l
678 on le dit improprement) avec l’amour spirituel ? Qui aime en nous, et pour qui ? « Ibn Arabi observe que les plus parfaits
679 vec l’amour spirituel ? Qui aime en nous, et pour qui  ? « Ibn Arabi observe que les plus parfaits amants mystiques sont ceu
680 que les plus parfaits amants mystiques sont ceux qui aiment Dieu simultanément pour lui-même et pour eux-mêmes, parce que
681 s haute fonction de l’amour humain, celle-là même qui assure la coalescence de ce que l’on a désigné historiquement comme a
682 gure aimée terrestre, en l’adossant à une lumière qui en fasse éclore toutes les virtualités surhumaines, jusqu’à l’investi
683 ompagnons de Dante ; ainsi en a-t-il été de celle qui apparut à Ibn Arabi, à la Mekke, comme figure de la Sophia divine). L
684 amour tend toujours à faire exister quelque chose qui n’est pas encore existant dans l’Aimé.78 On reconnaît ici les « note
685 r, comme nul ne reçoit de la même manière le bien qui procède du Seigneur, il s’ensuit que l’un n’est pas le prochain de la
686 onnes un bien absolument identique… C’est l’amour qui fait le prochain, et chacun est le prochain selon la qualité de son a
687 n la qualité de son amour.80 En dépit de tout ce qui distingue la transparence (parfois trompeuse) du latin de l’ingénieur
688 viennent à découvrir que c’est leur passion même qui exige leur séparation, parce que « leur engagement — comme dira Noval
689 u’un Soi pour tous les êtres.82 » L’individualité qui est là, qui tombe sous le sens, doit être exténuée méthodiquement (no
690 r tous les êtres.82 » L’individualité qui est là, qui tombe sous le sens, doit être exténuée méthodiquement (non point tran
691 le Soi sans distinction, la Réalité sans visage, qui n’est ni ceci ni cela, mais qui est l’Immensité, disent les hindous,
692 lité sans visage, qui n’est ni ceci ni cela, mais qui est l’Immensité, disent les hindous, et qui est le Vide, disent les b
693 mais qui est l’Immensité, disent les hindous, et qui est le Vide, disent les bouddhistes. Du même coup se trouvent évacués
694 de Toi ne vaut pas mieux. « La morale bouddhique, qui est une sorte d’hygiène spirituelle, tend à détruire, en nous, les ca
695 ur ses semblables…84 » Et le Bouddha lui-même : «  Qui a cent sortes d’amours a cent sortes de douleurs ; qui a un amour a u
696 cent sortes d’amours a cent sortes de douleurs ; qui a un amour a une douleur ; qui n’a pas d’amour n’a pas de douleur. »
697 rtes de douleurs ; qui a un amour a une douleur ; qui n’a pas d’amour n’a pas de douleur. » Si l’on s’en tient aux textes,
698 oit dans le plaisir sa propre nature essentielle, qui est la joie. Toute jouissance, tout plaisir est une expérience du div
699 ui dont l’objet n’est pas limité. C’est cet amour qui est l’amour pur, l’amour de l’amour même, l’amour de l’Être-de-volupt
700 s, « car c’est lui seul, lorsqu’il est satisfait, qui peut libérer l’esprit du désir… Ce n’est pas le plaisir mais le désir
701 t du désir… Ce n’est pas le plaisir mais le désir qui lie l’homme et qui est un obstacle à son progrès spirituel87 ». Et en
702 t pas le plaisir mais le désir qui lie l’homme et qui est un obstacle à son progrès spirituel87 ». Et encore : « Celui qui
703 à son progrès spirituel87 ». Et encore : « Celui qui cherche l’amour dans l’espoir d’une jouissance est la victime du dési
704 pudiques » et les « infâmes », contre tous ceux «  qui se sont livrés à l’impureté, selon les convoitises de leur cœur ». Co
705 re, le cliché Orient-Occident = non-moi-personne, qui a peut-être moins cours en Orient que dans certains milieux d’Europe
706 hode dialectique. — Au défi de dogmes sublimes et qui prétendent transfigurer la vie concrète, l’Occident répond par des my
707 mythes symbolisant ses résistances naturelles, et qui font l’intérêt de sa vie amoureuse. Mais l’Orient se contente de prop
708 proposer des voies aux Renonçants (ou sannyasins) qui ont épuisé la coupe, ou la dédaignent. Pas de drame, encore moins de
709 agavad-Gita : Sois détaché et accomplis l’action qui est ton devoir, car en accomplissant l’action sans attachement, l’hom
710 les upanishads : La vie n’a servi de rien à celui qui quitte ce monde sans avoir réalisé son propre monde intérieur. Elle r
711 tandis qu’ils participent du même Soi véritable, qui seul importe. « Surmonte le mal par le bien », dit le Bouddha. « Que
712 le mal par le bien », dit le Bouddha. « Que ceux qui me calomnient, me nuisent, me raillent, et tous les autres, obtiennen
713 ination spirituelle », dit Shantideva. Et Suzuki, qui enseigna le zen à toutes les Amériques dégoûtées de l’Occident, et de
714 mme ? Non point à la femme, mais en vérité au Soi qui est en elle.91 En présence d’une telle phrase, j’éprouve d’abord cec
715 sur l’amour est immédiatement reconnue par celui qui s’est mis en quête d’un savoir de l’amour qu’il vit. N’importe qui m’
716 quête d’un savoir de l’amour qu’il vit. N’importe qui m’avertira que le Soi de l’Inde n’est pas le vrai Dieu des chrétiens,
717 i de l’Inde n’est pas le vrai Dieu des chrétiens, qui est personnel. On connaît les définitions. Mais je retrouve ici mon e
718 Sur cette phrase des upanishads, sur le dialogue qui peut s’instituer à partir d’expériences re-connues, on pourrait écrir
719 c’était celui que je suis en train d’écrire ? Et qui , précisément, ici, touche à sa fin ?) Je disais que l’amour vrai, c’e
720 . Mais la lumière ? Est-ce le Nom qu’on lui donne qui diffère, — ou quoi d’autre ? Le point du dialogue est ici. Un point s
721 qu’ils l’ont mise en facteur commun dans tout ce qui existe ; (à tel point que le seul fait d’exister devient pour eux l’é
722 iginel). Ils en ont fait autant pour les névroses qui s’attaquent à nos « agrégats » individuels : le cosmos actuel tout en
723 es aux « vues justes » comme disait le Bouddha, —  qui était l’un des nôtres, un Indien — si tu vois bien ce que tu vois et
724 lement plus ancien que notre individu naturel, et qui lui survivra dans le cours des siècles, sans surprises et mille fois
725 ’immortel, non l’éphémère, lequel n’a rien en soi qui mérite l’amour. Cela n’empêche pas la poésie, les amours poétiques, n
726 dissous.92 — Je veux voir l’autre en sa réalité, qui est unique. J’aime en elle à la fois ce que je vois et ce qui fait qu
727 ue. J’aime en elle à la fois ce que je vois et ce qui fait que je la vois unique : ce vrai moi pressenti par l’amour seul,
728 ique : ce vrai moi pressenti par l’amour seul, et qui est elle-même. Tu dis le Soi, ce n’est personne. — Il n’y a personne.
729 4. Elle ne sait plus d’où lui vient cette passion qui a produit la technique et les sciences, mais aussi nos structures soc
730 fier à la consommation des temps, pas même le Soi qui dormira dans un sommeil sans rêves — leur idée du bonheur — entre deu
731 eront seuls à être là pour le savoir. La doctrine qui peut devenir vraie sera celle que nous choisirons, en vérité vécue de
732 mour, de la connaissance par l’amour, car tout ce qui existe est unique, à voir de près, comme voit l’amour. 60. Cf. Cha
733 it par ne plus l’entendre. Au contraire, d’autres qui étaient débiles et timides se fortifient et s’enhardissent, et finiss
734 emblée, ce sont les éléments physiques et mentaux qui constituent la “personne” ; ce sont nos instincts, nos tendances, nos
735 acun de ceux-ci se trouve être, de par les causes qui l’ont engendré, le descendant et l’héritier de multiples lignes de ca
736 iècle A.D. Milinda est le roi indo-grec Ménandre, qui vivait au iie siècle avant J.-C. Nagasena, un patriarche bouddhiste.
737 à peu près ce que Freud nomme « narcissisme », et qui n’est tel qu’aux yeux de celui qui nie l’âme ; mais alors, d’où viend
738 cissisme », et qui n’est tel qu’aux yeux de celui qui nie l’âme ; mais alors, d’où viendrait cet amour, à qui irait-il ? La
739 e l’âme ; mais alors, d’où viendrait cet amour, à qui irait-il ? La passion de Tristan est la preuve de l’âme, s’il en fut
740 aîcheur poétique ou mieux, l’euphorie spirituelle qui baigne l’œuvre, situe dans la réalité ce que je n’entends ici que for
741 formuler. Je ne connais rien dans la littérature qui confronte avec plus de tendresse et de rigueur l’Est et l’Ouest. Lire
742 illustre sage Yajnavalkya et son épouse Maitreyi, qui l’interroge sur l’immortalité. 92. Phrases empruntées comme plusieur