1 1931, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Les Éléments de la grandeur humaine, par Rudolf Kassner (octobre 1931)
1 obre 1931)a Si l’existence — le degré d’être — se mesure au pouvoir d’incarner sa vérité, le mal du siècle c’est l’impu
2 gnorera plus longtemps. Quant à l’Allemagne, elle s’ est depuis plusieurs années déjà pénétrée de cette philosophie, ainsi
3 trême conséquence. Dans la mesure même où Kassner se montre disciple de Kierkegaard, sa pensée paraît réfractaire à toute
4 valeurs vitales (problème que notre xviie siècle se devait de ne pas poser). L’homme antique peut atteindre la grandeur p
5 in d’un tout fini : famille, dieux, nature. Il ne se recherche pas soi-même, il vise à la plénitude élémentaire, définie p
6 t lorsqu’il « veut prendre mesure de lui-même, il se sent aussitôt incomplet et coupable. Il est donc possible de dire que
7 l’homme moderne, l’homme sans mesure naturelle : s’ il ne retrouve pas de loi interne et de tension par le péché, il n’est
8 ritaire. Entendons que pour lui, penser n’est pas se débattre dans ses contradictions personnelles, parlementarisme intéri
9 rivée, est tourmentée.) Penser n’est pas non plus s’ ingénier sur des idées et des combinaisons d’idées mais créer de tout
10 pourrait dire aussi que l’indiscret est celui qui se préoccupe de défendre plutôt que d’illustrer. Ainsi selon Kierkegaard
11 er. Ainsi selon Kierkegaard, le premier homme qui s’ avisa de défendre la religion mériterait-il d’être appelé Judas numéro
12 ait-il d’être appelé Judas numéro deux. Car il ne s’ agit pas de professer une chose mais d’être la chose. Le rare, c’est q
13 ez Kassner comme chez Kierkegaard, cette présence s’ accommode d’une ironie qui chez d’autres serait plutôt le fait du déta
14 ils profèrent ; ils les reçoivent des prophètes ; s’ il n’y avait pas de prophètes, les bavards seraient peut-être des créa
2 1931, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Sarah, par Jean Cassou (novembre 1931)
15 s, c’est précisément le sentiment d’absurdité qui se dégage de pareils faits lorsque l’esprit s’y attache et que l’amour o
16 é qui se dégage de pareils faits lorsque l’esprit s’ y attache et que l’amour ou la pitié essaient sur eux leurs forces. Le
17 r des êtres dont le « bonheur » consiste à ne pas se rendre compte de ce qu’ils vivent. Dans quelques-uns des plus signifi
18 atible avec les « conditions » de la vie que mort s’ en suit. Sarah est donc un recueil de contes romantiques, cas tout à
19 ne sorte de consolation un peu forcée que le cœur s’ accorde en dépit de tout, tandis que l’esprit demeure évasif et lucide
3 1932, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Les Signes parmi nous, par C. F. Ramuz (janvier 1932)
20 nce ? Le temps vient cependant où la métaphysique se posera ou sera niée en termes concrets, en termes de nourriture par e
21 ature hostile, de sorte qu’il lui faut sans cesse s’ efforcer, ne connaissant que peu de repos de son adolescence à sa mort
22 re ». Ah ! la grandeur de ce peuple ramuzien, qui se meut dans je ne sais quelle lourdeur « originale » et unanime, en com
23 omique, loué « cet artiste raffiné » d’avoir su «  se ravaler au niveau des simples. » Non, Ramuz ne descend pas au peuple,
24 Ramuz. Voici Caille, le colporteur biblique, qui s’ avance dès le matin à travers le pays, et offre à tous la Parole, « ay
25 verture bleue », où les événements actuels — cela se passe un jour d’été de 1918 — sont expliqués à la lumière des Écritur
26 ne, la révolte, la guerre et la mortalité. Caille s’ avance dans la journée, et l’angoisse autour de lui grandit. De partou
27 ngoisse autour de lui grandit. De partout l’orage s’ amasse. Vers le soir, il éclate tragiquement. Est-ce la fin ? Grande h
28 ère. Puis, « la page du ciel a été tournée », ils se relèvent : « Il paraît bien qu’on n’est pas morts ! » Le monde renaît
29 e la chose pour toute la chose. C’est pourquoi il s’ attarde à décrire le concret d’une façon concrète : ainsi, le maniemen
30 sérieux une intrigue romanesque à la Bourget. On s’ est trop arrêté à l’insolite du style chez Ramuz. Ce qu’il a d’insolit
31 oire sont celles où la forme d’un mythe affleure, s’ incarne et devient visible. Ce sont les périodes de crise. Or toute cr
32 un jugement6, — un « arrêt dans une forme ». Cela se voit par l’étymologie. Aussi, par le passage à la limite : car la plu
33 ommercial, éthique et spirituel. Que les échanges se ralentissent ou cessent : aussitôt perce l’interrogation que la réuss
34 et des Noces. Le ton de la création du monde. 6. S’ il est vrai, comme l’a montré M. Spaïer, que toute pensée est judicato
4 1932, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Le silence de Goethe (mars 1932)
35 contre le Démon révolté et la Magie latente ; et s’ ils ne le voient pas, c’est que précisément cette défense a réussi. Pa
36 que Goethe dans la domination des mystères. Ainsi se réclament-ils de Rimbaud. Peut-être la confrontation du Sage et du Fo
37 s poèmes « magiques » puis renonce à la magie, et se tait. Goethe, initié dans sa jeunesse, commence d’écrire vers ce temp
38 r la chose écrite, par la lettre justement qu’ils s’ opposent le plus. Pourtant Rimbaud ne fut jamais un écrivain, ni ne se
39 Pourtant Rimbaud ne fut jamais un écrivain, ni ne se soucia de l’être. Et Goethe ne fut qu’entre autres choses un écrivain
40 the ne fut qu’entre autres choses un écrivain, et se soucia de l’être dans la mesure seulement où il portait en tous les d
41 Non point qu’il soit un seul instant négligeable, s’ agissant de deux êtres que l’on connaît par leurs écrits d’abord. Mais
42 d’abord. Mais, pour en tenir un juste compte, il s’ agit de le subordonner au problème personnel de ces vies, à leur équat
43 eloppèrent leurs manifestations, — à quoi l’on ne s’ est point privé d’ajouter quelques tomes depuis. Il convient de marque
44 ieux — esthétique, je ne m’en étonnerai point. Il s’ agit simplement, ici, de rendre plus concrète, grâce au recoupement de
45 que, celle du terrible « Meurs et deviens ! », et s’ il l’assume en connaissance de cause, — c’est un événement qui ne peut
46 use, — c’est un événement qui ne peut normalement se traduire que par une qualité nouvelle de silence. Encore faut-il que
47 gie maîtrisée, c’est-à-dire incarnée. La question se pose pour lui, dès l’abord, en termes matériels, urgents et contraign
48 sant par une application matérielle que la magie, se reniant en tant que spéculation extra-terrestre, peut s’intégrer dans
49 ant en tant que spéculation extra-terrestre, peut s’ intégrer dans l’équilibre humain. Incident décisif qui figure en racco
50 e même bruyamment. C’est là le fait d’une âme qui se refuse encore à la souffrance et la crie sur la place. Un peu plus de
51 e tout au long de l’œuvre, prouve que la question se pose sans cesse à nouveau et que sous l’apparence de plus en plus ser
52 s en plus sereine, la tentation revient, l’agonie se poursuit. Seulement l’effort d’équilibre crée des énergies nouvelles.
53 du secret, et dans la profondeur, des conceptions s’ opèrent. C’est ainsi que la magie reniée extérieurement au profit d’un
54 tre dans la réalité mystique. Et cet acte ne peut se produire que dans le plus profond silence de l’esprit, dans la région
55 an de certains actes à Vérité et Poésie. Le drame s’ ouvre sur un réveil : l’exercice sans frein des arts occultes laisse l
56 galer… combien je dois expier tout cela ! » Faust se reprend au seuil de la mort. Mais la vie ne lui sera plus qu’un profo
57 le pour d’autres formes d’existence que la Nature se voit pour ainsi dire contrainte d’assigner à l’homme actif 8, l’on dé
58 ein.9 C’est tout le drame secret de l’œuvre qui s’ avoue dans ce cri : chaque fois que Goethe invoque la catégorie sacrée
59 er est le drame d’une pureté avide, et son destin se joue d’un coup. La grandeur de Goethe est d’avoir su vieillir, celle
60 ethe est d’avoir su vieillir, celle de Rimbaud de s’ y être refusé. Transportez la dialectique faustienne dans la vie d’un
61 iale, culturelle, voire physiologique ; le dessin se simplifiera jusqu’au schème unique, le rythme se précipitera jusqu’à
62 se simplifiera jusqu’au schème unique, le rythme se précipitera jusqu’à l’explosion, l’histoire se purifiera jusqu’au myt
63 me se précipitera jusqu’à l’explosion, l’histoire se purifiera jusqu’au mythe. La donnée initiale est bien la même : c’est
64 ne vision qui transcende la vie médiocre. Rimbaud s’ y lance avec l’emportement d’une révolte qui traduit d’abord un excès
65 tainement angoissé l’enfant : n’est-ce point pour se défendre qu’il parle si fort, qu’il vante ses pouvoirs avec une étran
66 « Il faut être absolument moderne. » Travailler. Se donner à l’instant, à cette heure « au moins très sévère ». Gagner 40
67 et ce dilemme est peut-être le plus important qui se pose à l’esprit occidental, dès qu’il atteint les régions de haute te
68 occidentale. Supprimez l’un des termes, et la vie se détend, le tragique s’évanouit. Que ce mythe dialectique soit profond
69 l’un des termes, et la vie se détend, le tragique s’ évanouit. Que ce mythe dialectique soit profondément constitutif de no
70 soudaine de l’ivresse devant le mortel danger qui se lève à un pas. Tous deux réalisent le renoncement, le deuxième temps
71 instants de son accession au monde spirituel, il s’ est mis en état de défense et de lenteur. Il avance ainsi pas à pas, l
72 circonspection, pendant soixante ans, sans jamais s’ abandonner aux bienheureuses violences de l’orage, au repos de la déme
73 ’autre part le contraste absolu des rythmes, vont se traduire dans la similitude des conclusions éthiques et dans la diver
74 et volupté. Mais le front d’une plénitude royale s’ avance fortement contre la lumière, et les yeux, entre cette bouche et
75 ésespoir. La longue peine de celui « qui toujours s’ est efforcé » a purifié le corps, et l’âme est prête à recevoir « l’am
76 lque chose… Il est bien rare que l’on soit apte à s’ agréger ce qui est supérieur. C’est pourquoi l’on fait bien, dans la v
77 n pour rechercher où tend ce problème, et ensuite se maintenir entre les limites de l’intelligible »12. L’on découvre ici
78 la source de l’étrange refus de Goethe, dès qu’il s’ agit de faire état des causes premières, des fins dernières, en tant q
79 rationalisme agressif qu’il oppose aux dévots : «  S’ occuper d’idées relatives à l’immortalité, poursuivit Goethe, cela con
80 combattre, agir, laisse en paix le monde futur et se contente d’être actif et utile en celui-ci »13. À quoi nous saurons o
81 ce lumière d’un soleil caché14. » Écrire, tout en se taisant. Et ceux-là seuls entendront ce silence, qui auront su percev
82 le rupture. Elles sont le champ même15 où Rimbaud se livre à l’expérience spirituelle, où il se livre tout entier. Et c’es
83 imbaud se livre à l’expérience spirituelle, où il se livre tout entier. Et c’est là sa pureté, mais c’est aussi ce qui l’a
84 n de compte à l’évasion. La rage avec laquelle il se rabat sur le travail « à mains », rage de revanche, par son excès mêm
85 ’être pas Rimbaud ?) Plus que jamais, il faudrait s’ appliquer à distinguer dans ce vertige la réelle puissance d’une voix
5 1932, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Querelles de famille, par Georges Duhamel (mai 1932)
86 ssumés sur le plan commun de la conscience où ils s’ exalteraient en s’opposant franchement, tirent à hue et à dia et engen
87 commun de la conscience où ils s’exalteraient en s’ opposant franchement, tirent à hue et à dia et engendrent une grande c
88 vèle son insuffisance quand c’est un virtuose qui se mêle d’en jouer. Mais sans doute le but serait-il atteint si M. Duham
89 , héritage d’un classicisme nettement pessimiste, s’ accorde mal avec l’impénitente foi dans le genre humain que M. Duhamel
90 e cette qualité, et qui certes veut être honnête, se complaire expressément dans une hargne tempérée de badinage. C’est à
91 térialiste qui permet et favorise tout ce dont il s’ indigne, conception à laquelle, par ailleurs, M. Duhamel semble fort a
92 à MM. les Députés, au chef du gouvernement. L’on s’ étonne que M. Duhamel n’ait joint à son recueil une épître au préfet d
93 uvel ordre, je lui fais encore confiance ». Ainsi se termine ce livre amer, sans qu’à vrai dire l’on distingue sur quoi s’
94 amer, sans qu’à vrai dire l’on distingue sur quoi s’ appuie pareil optimisme — sinon sur la crainte instinctive de choquer
6 1932, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Ce chien, ton serviteur, par Rudyard Kipling (juillet 1932)
95 iens qu’on habite tout par dehors et que personne s’ occupe ». Dès la seconde page, c’est à pousser des cris de joie. Les e
7 1932, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Éloge de l’imprudence, par Marcel Jouhandeau (septembre 1932)
96 ? Quand personne ne déclare un Bien si haut qu’on se fasse tuer pour ce Bien ? Ceci pour indiquer à la fois l’importance e
97 et sa vertu : dépassement. Jouhandeau à son tour se place dans ces marches extrêmes du bien et du mal où l’apologie de l’
98 es contraires. Pour tous ceux qui ont l’audace de se maintenir dans une telle dialectique, il n’existe pas un choix préala
99 n choix universel et abstrait, mais des choix qui s’ imposent avec une violence égale à celle de la tentation — c’est la mê
100 e incarnèrent ailleurs toutes les complexités. Il s’ agit, on le sait, du bien et du mal selon l’Église. Mais l’émouvante e
101 pardon. La vertu comme le vice naît de la loi et s’ y réfère. Mais le péché naît où meurt la foi, et meurt là où vit la fo
102 u bien à la fois. « Mal » ou « péché » — le débat se ramène sur cette page, à une question de vocabulaire. Une simple ques
103 question de vocabulaire comme on dit, — lorsqu’on se soucie peu de savoir ce qu’on dit. g. Rougemont Denis de, « [Compt
8 1932, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Cahier de revendications [Présentation] (décembre 1932)
104 s, la doctrine marxiste, en dehors de laquelle il s’ est constitué, forme l’un de ses points de repère principaux. Il se pe
105 forme l’un de ses points de repère principaux. Il se peut qu’il y trouve quelques appuis occasionnels ; et certains de leu
106 de leurs objectifs respectifs sont communs… Déjà s’ affirme dans l’attitude de tous ces groupes un véritable acte de prése
9 1932, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). À prendre ou à tuer (décembre 1932)
107 e, le paradoxe fondamental de toute « existence » se concrétise dans une « nécessité » révolutionnaire dont l’ampleur est
108 récédent. Ce n’est plus de conflits d’idées qu’il s’ agit, ni même de conflits d’intérêts. Mais pour nous, entrés dans la v
109 p d’une menace de faillite planétaire, il ne peut s’ agir de rien d’autre que de ceci : s’entendre sur le meilleur ou sur l
110 , il ne peut s’agir de rien d’autre que de ceci : s’ entendre sur le meilleur ou sur le seul moyen d’en réchapper, — l’impo
111 sse des braves gens persuadés qu’après tout ça va se remettre, ça va durer, puisque ça dure depuis si longtemps. Masse de
112 muets et d’aveugles, mais pas si sourds qu’ils ne s’ irritent de nos cris. Il est vrai que certains, au lendemain de la gue
113 contre-attaquent. Et alors, toute une jeunesse va se dresser ? Va prendre parti, et agir ?… — Paralysie. — Le salut qu’on
114 ire, et d’ailleurs discutable ? C’est l’homme qui se révolte en nous contre le marxiste. Vous n’y ferez rien. Et nous ne t
115 s l’homme tel qu’il est, sous prétexte qu’il faut se hâter, et qu’en Russie c’est en train de marcher. Nous jouerons tout
116 ne moins coûteuse à risquer et qui consisterait à se laisser convaincre… Tout les y pousse, et l’on se demande en vain que
117 se laisser convaincre… Tout les y pousse, et l’on se demande en vain quelle idéologie les empêcherait encore de répondre a
118 ution personnaliste, l’opposition doctrinale peut se définir simplement. Les uns croient, avec Marx, à la réalité d’une di
119 a réalité humaine, toute révolution est vaine qui se fonde sur des faits mortels pour la personne, même si « ces faits son
120 as dans le vide, mais contre quelque chose : elle se fera contre ces faits. Elle sera « acte ». 2e — Le matérialisme décri
121 rit un monde tel qu’on ne voit pas où l’acte peut s’ y insérer. Comment croire que l’esprit puisse agir sur les faits autre
122 quait récemment T. S. Eliot, dans un article21 où s’ exprimaient des vues parfois proches de celles d’Esprit ou de Combat,
123 llure électorale ? « Toutes les tentatives qui ne se fondent pas sur la classe révolutionnaire ne comportent pas de points
124 il faut le dire, et niée par les faits dont elle se réclame implicitement, Lénine réussit une révolution d’intellectuels
125 1917, les bolchévistes sont 200. En octobre, ils s’ emparent du pouvoir sur toutes les Russies. En 1932 le parti compte de
126 tructions d’un Lénine n’étaient pas songes, elles s’ appuyaient sur le mouvement de l’histoire ». Nous avons affaire ici à
127 e n’est pas dans leur doctrine constructive. Elle se fonde sur des apparences, voire sur des faits actuels, mais insuffisa
128 mes contre le capitalisme : mais cette révolte va se tourner contre eux. On va voir qu’ils font la même chose, c’est-à-dir
129 t pire que ceux qu’ils attaquent. Cela commence à se savoir. Ils promettent du pain, et croient ainsi triompher à la fois
130 leur !), des méthodes policières grâce auxquelles se maintient le désordre établi. Mais nous allons plus loin dans la crit
131 magne, un groupe en croissance rapide, le Gegner, s’ efforce de créer une unité révolutionnaire au-dessus des partis exista
132 force », anticapitaliste et non marxiste surgit, s’ affirme. 19. Toute solution systématique du vrai conflit nécessité-li
133 ues par Marx pour qu’une révolution éclate. Il ne se passe rien. Parce qu’on manque de chefs. Parce qu’il n’y a plus de « 
10 1933, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Pétrarque, par Charles-Albert Cingria (avril 1933)
134 mais ridiculement quand elles ne l’avouent pas — se veut constamment significative. La publication de cet étonnant petit
135 Dante, Nietzsche —, une pétulance idéologique qui s’ exprime en notes, digressions et plaisanteries jamais dépourvues d’ail
136 ume de deux-cents pages qui, délayé en six-cents, se verrait décerner le titre de « monument critique ». Tel qu’il est, un
137 cours de ses démonstrations : c’est dire qu’elle se meut en pleine poésie. D’où sa valeur « actuelle » et multiple, ses i
138 d’aliment à un dogmatisme populaire farouche, et se définit comme désavantageuse ». k. Rougemont Denis de, « [Compte re
11 1933, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Une main, par C. F. Ramuz (juin 1933)
139 nt sa pensée marche, insiste, souffre. Et cela ne se passe plus dans le canton de Vaud, mais dans le domaine propre de Ram
140 u’on découvre, déconcertantes ; puis l’esprit qui se met à douter, parce qu’il n’a plus d’application, l’esprit qui prend
141 n’attendait pas de Ramuz un examen de conscience. S’ il s’interroge, dans Une Main, c’est plutôt un examen de son corps. Ex
142 endait pas de Ramuz un examen de conscience. S’il s’ interroge, dans Une Main, c’est plutôt un examen de son corps. Examen
143 ? Est-ce qu’elle n’a rien de mieux à faire que de se lever avec cent-mille autres, de faire le poing avec cent-mille autre
144 une maison trop grande, un feu de bois vert qu’on s’ ingénie à allumer dans une cheminée qui tire mal. J’aime les choses qu
12 1933, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Saint-Évremond ou L’humaniste impur, par Albert-Marie Schmidt (octobre 1933)
145 oint sans cesse à portée d’un coup de patte qu’il s’ abandonne lui-même à sa fantaisie, la plus joyeusement érudite que je
146 t dont le spectacle n’est pas vain. M. Schmidt ne s’ en laisse point imposer par la « réussite classique ». Il place Saint-
147 croyait tempéré et limpide, mais que l’on voit «  s’ échauffer, se brouiller » aux premières instances d’un choix radical e
148 éré et limpide, mais que l’on voit « s’échauffer, se brouiller » aux premières instances d’un choix radical et véritableme
149 e ses idées sur la société. On y verra comment il se peut faire que les tyrannies sociales, mondaines ou politiques, trahi
13 1933, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Le Deuxième Jour de la Création, par Ilya Ehrenbourg (décembre 1933)
150 dolescence avide de servir une grande cause et de se sacrifier pour le bonheur collectif. Chanson de Roland, fair-play, Ba
151 e, part pour la Construction où il ne tarde pas à se distinguer par diverses actions d’éclat. Il devient brigadier de choc
152 l n’arrive pas, malgré ses plus loyaux efforts, à se passionner pour le problème de la fonte, qui est le problème dominant
153 ire a de ces exigences. On conseille à Volodia de se brûler la cervelle. Il se pend. Ce résumé fait le plus grand tort à l
154 conseille à Volodia de se brûler la cervelle. Il se pend. Ce résumé fait le plus grand tort à l’ouvrage. Il est cependant
14 1934, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Taille de l’homme, par C. F. Ramuz (avril 1934)
155 sai de Ramuz, mais de tous le moins ramuzien : il s’ agit cette fois d’idées, et même d’idées générales, ce qui est assez p
156 ses arguments. On peut aller jusqu’à soutenir que s’ il défendait le marxisme, il n’en resterait pas moins, par le fait de
157 ce insurmontable. Ramuz, mieux que personne, peut se passer d’avoir raison, puisqu’il a pour lui la Nature27. C’est quand
158 la vie, mais avec des quantités mortes. Ceux qui se vantent d’être calculables ont très probablement raison : c’est une c
159 spirituel, à peine anticipée peut-être. Mais ils se trompent tout à fait quand ils se croient matérialistes28. Ils détest
160 -être. Mais ils se trompent tout à fait quand ils se croient matérialistes28. Ils détestent la matière comme seuls les spi
161 es de cette fameuse « matière » sur laquelle tout se fonde, que Staline s’est vu contraint, pour en finir, de fixer la sai
162 matière » sur laquelle tout se fonde, que Staline s’ est vu contraint, pour en finir, de fixer la saine doctrine par un uka
163 État. C’est, à peu près, l’ukase en moins, ce qui s’ est passé chez les bourgeois, au sujet du mot « esprit ».) Le vrai mat
164 hoses. Aussi bien n’éprouve-t-il pas le besoin de s’ affirmer matérialiste. La position de Ramuz paraît assez voisine de ce
165 e-dialectique. Le « dépassement » peut aussi bien se faire dans l’immanence. La foi chrétienne dépasse-t-elle vraiment l’h
15 1934, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Le Procès, par Franz Kafka (mai 1934)
166 u’il prétende percer les apparences du monde pour s’ enfoncer dans un ésotérisme, au contraire : il se borne à décrire ces
167 s’enfoncer dans un ésotérisme, au contraire : il se borne à décrire ces apparences avec une minutie qui suffit à dénoncer
168 noncer leur absurdité réelle, en même temps qu’il se refuse à toute interprétation, c’est-à-dire à toutes les conventions
169 ndale. Josef K… fondé de pouvoir dans une banque, se voit arrêté un beau matin par deux inspecteurs. Ces messieurs lui app
16 1935, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Ni gauche ni droite (août 1935)
170 s au cri de « Vive la Nation ! » nation et peuple se confondaient alors dans la mystique de la révolution. Aujourd’hui l’o
171 ns la mystique de la révolution. Aujourd’hui l’on se voit sommé de choisir entre un front qui se dit « national » et un fr
172 l’on se voit sommé de choisir entre un front qui se dit « national » et un front qui se dit « populaire ». Faudrait-il en
173 un front qui se dit « national » et un front qui se dit « populaire ». Faudrait-il en déduire que le peuple et la nation
174 Faudrait-il en déduire que le peuple et la nation s’ opposent ? Les mots l’indiqueraient, non les faits : voilà bien le dés
175 tentation fasciste, trop faible encore pour oser s’ avouer ; à gauche une peur du fascisme assez forte déjà pour que la ma
176 idée d’une dictature… « antifasciste ». Tout cela se joue sur des mots, et ces mots ne traduisent que des religions vagues
177 as en vertu d’un conseil bolcheviste. La question se ramène à ceci : si tout le monde était mis d’accord par une agression
178 d’accord par une agression hitlérienne, irait-on se battre au nom de la liberté nationale ou au nom de la liberté populai
179 ne seule manière de tirer à la mitrailleuse et de se faire casser la figure. On peut regretter que le Congrès pour la défe
180 énoncé l’équivoque dont vit la droite, quand elle se proclame « nationale » tout en restant capitaliste.) Défendre la cult
181 se, au Palais de la Mutualité. Il me semble qu’on s’ est entendu pour « cultiver » des équivoques verbales assez grossières
182 aboutir à une doctrine constructive tant qu’elles s’ efforceront de dénaturer les grands mots d’ordre populaires, au nom de
17 1935, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Paracelse, par Frédéric Gundolf (septembre 1935)
183 dans un allemand populaire et grossier30. Il faut se méfier de la gloire qu’on lui a faite. On nous rapporte par exemple q
184 ple que « déjà vieux et ne voulant pas mourir, il s’ adressa au diable qui lui conseilla de se faire enterrer pour une anné
185 urir, il s’adressa au diable qui lui conseilla de se faire enterrer pour une année, coupé en petits morceaux, dans du crot
186 r ensuite sous la forme d’un beau jeune homme. Il se fit tailler en morceaux et enterrer par son fidèle serviteur. Mais ce
187 favoris de notre temps. Mais combien, parmi nous, se sont fait déterrer deux jours trop tôt ! L’auteur de l’anecdote était
188 iste, comme le veut le langage confus de ceux qui se croient cartésiens. Aussi a-t-on souvent tendance à le rejeter du côt
189 de concepts à tout faire31. Il faut voir comme il se débat avec son latin de cuisine, son grec allégorique et son allemand
190 invention de métaphores. Mais Paracelse justement se méfie de ce mode — de cette mode — d’expression, qui lui paraît peu s
191 d’expression, qui lui paraît peu scientifique. Il s’ en tire au moyen d’allégories, et transforme sa maladresse en instrume
192 trument de découvertes. Alors que notre étiologie se borne la plupart du temps à mettre un nom abstrait sur chaque symptôm
193 accination, et même de la psychanalyse. Paracelse s’ était formé de l’homme une conception spirituelle et organique (théolo
194 s une sombre époque cérébrale et matérialiste. Il s’ opposait32 aux médecins galénistes qui voyaient l’homme sous l’aspect
195 i voyaient l’homme sous l’aspect d’un concept. Il se fût opposé aussi aux médecins de la Renaissance, à Léonard, à Cardan,
196 i grandes chances. Et c’est une ère favorable qui s’ ouvre, celle où l’esprit se remet à chercher ce qu’est l’homme, et que
197 une ère favorable qui s’ouvre, celle où l’esprit se remet à chercher ce qu’est l’homme, et quelle est sa mesure dans l’un
198 enne », dit Gundolf. 31. Gundolf écrit : « Il ne s’ intéressait pas seulement aux différents minerais. Avec sa vision nouv
199 e ». Voilà qui l’honore en tant qu’homme. Mais on se représente aisément l’embarras qui eût été le sien si l’on eût exigé
18 1935, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Recherches philosophiques (septembre 1935)
200 e de « réaliser » la philosophie. Réaliser, c’est s’ engager dans l’aventure politique ou religieuse. Au grand Hegel qui ph
201 ires, voilà le fait historique capital sur lequel se fonde l’attitude commune des intellectuels révolutionnaires, qu’ils s
202 ion transformatrice, et productrice. L’esprit pur s’ évanouit. L’âge qui s’ouvre sera celui du spirituel décisif. La seule
203 t productrice. L’esprit pur s’évanouit. L’âge qui s’ ouvre sera celui du spirituel décisif. La seule doctrine, ou pour mieu
204 ans l’attaque d’un problème entre tous urgent. Il se pourrait d’ailleurs que l’apparence brutale des thèses personnalistes
19 1935, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Lawrence et Brett par Dorothy Brett ; Matinées mexicaines suivi de Pansies (poèmes), par D. H. Lawrence (octobre 1935)
205 cinq heures nous allons chercher les chevaux qui se cachent tout au bout du champ de pommes de terre, là-bas près de la b
206 nous sommes plus éreintés que jamais. Puis Poppy se cabre au-dessus du dos de Bessie et nous la perdons presque. Enfin no
207 ont une carrière dans le « monde des lettres » et se composent un prestige !) Il invente ses histoires, secrètement animée
208  les battements du cœur sauvage de l’Espace », il s’ amuse, il s’effraie de ses personnages, il les hait furieusement, il l
209 nts du cœur sauvage de l’Espace », il s’amuse, il s’ effraie de ses personnages, il les hait furieusement, il les approche
210 fant maigre au regard narquois et inquiet, et qui s’ est mis une barbe rousse pour avoir l’air d’un faune. 33. Même quest
20 1935, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Les Mystiques allemands du xiiie au xixe siècle, par Jean Chuzeville (octobre 1935)
211 atières, l’alternative que je viens d’indiquer ne se pose plus. Car la foi n’est pas davantage une évasion hors de ce mond
212 sgresser ses limites charnelles et temporelles, à s’ oublier en Dieu, son principe ». La question est alors de savoir s’il
213 , son principe ». La question est alors de savoir s’ il existe une mystique vraiment chrétienne, une mystique qui ne soit p
214 on » et cet oubli de nos limites, contre lesquels s’ élèvent sans cesse les Prophètes et les Apôtres. Il faut reconnaître q
215 hérétiques, celles aussi où l’hybris spirituelle se pare le mieux d’humilité dévote. Ceci marqué, qui est plus qu’une rés
216 t surtout Boehme le gnostique. Pour Paracelse, on s’ étonnera sans doute de le voir figurer dans un choix de « mystiques »,
217 mystiques modernes. Mais sans doute M. Chuzeville s’ est-il laissé guider dans son choix par un préjugé historique que le «
218 ns. M. Chuzeville serait sans doute mieux inspiré s’ il développait certaines indications fécondes de sa préface et nous do
219 nyme. L’alchimiste médecin Paracelse, en réalité, se nommait Theophilus Bombast ». Or Paracelse n’est pas un pseudonyme, m
220 donyme, mais un des trois prénoms du médecin, qui se nommait, « en réalité », Théophraste Paracelse Bombaste de Hohenheim,
221 e de Hohenheim, ce dont il n’eut jamais l’idée de se cacher. – L’érudition considérable de M. Chuzeville me paraît parfois
222 ar Gonzague Truc, du pamphlet de Maritain, lequel s’ appuie sur le P. Denifle… Que de garanties accumulées ! u. Rougemont
21 1935, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). « Le plus beau pays du monde » (octobre 1935)
223 sable du cliché. On blâme cet instituteur. Qui va se plaindre à son député. Lequel interpelle les communes. Qui à leur tou
224 nfligent un blâme à l’inspecteur ; car si l’École se met à « décourager l’orgueil patriotique », où allons-nous ? Quelqu’u
225 tion conquérante de la beauté ?). « Démodé » : on se demande dans quel pays. « Pacifiste » ? Aujourd’hui, il n’y a plus qu
226 que la digestion, si vous voulez. L’idée même de s’ en vanter indique un trouble. — Enfin, voilà les hitlériens qui trouve
227 as de choix délibéré. Par malheur, l’enseignement s’ empare du fait patriotique et tente de le rationaliser : il en fait un
22 1936, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Sur l’esprit incarné (février 1936)
228 terrestres, et le méprise en tant qu’il cherche à s’ affranchir de ce genre de pression pour s’exercer en toute liberté. »
229 erche à s’affranchir de ce genre de pression pour s’ exercer en toute liberté. » Il écrit un peu plus loin qu’il déplore la
230 des études théologiques ou simplement logiques ». S’ il m’est permis de faire ici un peu de théologie et un peu de logique,
231 t fait, ce que j’ignore car je les pratique peu : s’ il y a lieu de reprendre à son compte cette erreur de vocabulaire, ou
232 : Crucifie ! et relâche Barabbas — opposition qui se résout pratiquement en unanimité contre le Christ, contre l’esprit in
233 l’esprit incarné en Personne ; 5° si le clerc qui s’ en lave les mains ne risque pas de faire le jeu des clercs qui crient
234 esprit est d’entrer dans le monde, non point pour s’ y soumettre, mais pour le transformer en vérité. Mission que l’Évangil
235 que sa Trahison des Clercs est apparue, M. Benda s’ y applique pourtant non sans bonheur, curieusement suivi sur ce point
23 1936, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Dictature de la liberté, par Robert Aron (mars 1936)
236 il défend. Dictature et liberté, le monde moderne se débat tragiquement entre ces deux nécessités dont la première exprime
237 rofit de la liberté, et à seule fin de la laisser s’ épanouir. Il faut soumettre la dictature à la liberté, il faut une dic
238 l’admettre — mais c’est admettre la révolution — se posent toutes les questions « pratiques » ; celles qui passionnent le
239 cace et fanatique de libération, ne tardent pas à se retourner contre les hommes, et à brimer nécessairement leurs vocatio
240 ra jamais au terme ; et la rigueur même du calcul s’ opposera à son intrusion. Comme le prouve toute l’histoire moderne, qu
241 rtation des mystiques étrangères. Oui, mais on ne se défend qu’en attaquant. Sachons gré à ce livre de poser enfin les que
242 livre de poser enfin les questions que la France se doit de résoudre pour l’Europe, et de les poser sous la forme concrèt
243 s la forme concrète d’une série de tensions qu’il s’ agit d’orienter et de rendre fécondes : solutions nécessaires et solut
244 individu. Cette dernière « tension », à laquelle se ramènent toutes les autres, est en train de devenir une sorte de pont
24 1936, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Kierkegaard en France (juin 1936)
245 u désespoir considéré comme un des beaux-arts. Or s’ il est vrai que Kierkegaard s’est occupé à décrire les formes déclarée
246 des beaux-arts. Or s’il est vrai que Kierkegaard s’ est occupé à décrire les formes déclarées ou déguisées que revêt le dé
247 s que revêt le désespoir fondamental du pécheur ; s’ il est vrai qu’il a su montrer, avec une effrayante lucidité, l’univer
248 mes qu’ils lui opposent. 3. Parce que Kierkegaard s’ est déchaîné contre les églises établies, les évêques de la cour, et l
249 avec laquelle tant de phraseurs ou de braves gens se réclament de la foi chrétienne — « chose inquiète, inquiétante », dis
250 éparable de la foi ; parce que, « comme un oiseau s’ envole anxieux aux approches de l’orage, ainsi, flairant le danger »,
251 pparaîtraient encore plus fortes de nos jours. Il se peut qu’il se fût réjoui de la maldonne. Que voulait donc Kierkegaard
252 encore plus fortes de nos jours. Il se peut qu’il se fût réjoui de la maldonne. Que voulait donc Kierkegaard ? Peut-être,
253 — la preuve irréfutable de sa foi. (Encore qu’il s’ en défende avec vigueur mais son action même témoigne contre l’humilit
254 ontre l’humilité de son retrait.) La question qui se posait dès lors était celle-ci : « Comment donner à une époque plongé
255 Qu’arrive-t-il ? Tout simplement ceci : l’époque s’ engoue de tes discours et tu deviens son favori. Tu es alors au début
256 favori. Tu es alors au début de ton supplice. Il s’ agit maintenant de changer de direction ; tu restes animé de la même d
257 été attirant ; alors tu verras tes contemporains se passionner et bientôt s’enflammer contre toi.38 Tel fut le sort que
258 verras tes contemporains se passionner et bientôt s’ enflammer contre toi.38 Tel fut le sort que choisit Kierkegaard, lors
259 er de toute son œuvre. Il est juste que ce destin se répète aujourd’hui parmi nous. Et la publication des écrits religieux
260 ’absurde les attitudes de vie ou de pensée qui ne se fondent pas dans cette vision centrale et unitive. Il me semble que l
261 purement humains, en les poussant à la limite où se révèle leur impuissance ; puis à montrer que l’éternelle vérité n’est
262 cet acte de foi, ce renversement du désespoir qui s’ ignore en certitude combattante — et combattue. Le sérieux de l’ironi
263 Cahiers du Sud une étude de Benjamin Fondane qui s’ en prend avec énergie aux interprétations de Kierkegaard proposées en
264 on », je ne vois pour ma part qu’un seul moyen de s’ engager de toute sa personne à la suite de Kierkegaard… Tout le reste
25 1936, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). L’Art poétique ou Qu’il faut penser avec les mains (décembre 1936)
265 étique » dans le titre ; et « connaissance », qui s’ inscrit à chaque page. La rumeur quotidienne tend à faire de « poète »
266 irconstance atténuante, au bénéfice du maladroit, s’ il est aimable. Ou bien c’est l’ornement de nos loisirs. Mais Claudel
267 vos. Mais Claudel : « Vivre, c’est connaître », «  Se connaître, c’est faire naître avec soi »… Il ne s’agit évidemment, ic
268 e connaître, c’est faire naître avec soi »… Il ne s’ agit évidemment, ici et là, ni de la même poésie ni de la même connais
269 un profond calembour. « Il est permis à chacun de se servir de tel son qu’il lui plaît pour exprimer ses idées, pourvu qu’
270 phrase de la Logique de Port-Royal, dont Claudel, s’ il est réaliste, doit récuser la principale40, peut néanmoins servir à
271 Claudel montre partout son parti pris, qui est de s’ en tenir aux origines, et à cette origine, entre plusieurs probables,
272 à de permettre à nos pensées de circuler. Claudel se donne un règlement, et il observe les signaux. Les autres (voyez leur
273 ve les signaux. Les autres (voyez leurs journaux) se sont jetés dans un énorme embouteillage, il n’y a plus qu’à se laisse
274 dans un énorme embouteillage, il n’y a plus qu’à se laisser pousser dans le sens incertain de la masse. Or ce sens, telle
275 il va risque encore d’augmenter l’embarras, et de se faire copieusement houspiller. Et pourtant, c’est lui seul qui détien
276 ns là cette métaphore avant qu’elle n’aille aussi s’ embouteiller41. Ou encore essayons de la traduire. Les modes, l’usage
277 uinent les bases de la communauté. On convient de s’ entendre sur des malentendus42. À ce prix, l’on nourrit une paix sans
278 le peut. Opération inverse de celle du poète : on s’ arrête à l’acception neutre, la moins active, la plus anecdotique — ro
279 exactement l’effet contraire : son succès même va s’ inscrire dans une œuvre incommunicable au très grand nombre. Rendre au
280 é. Mais c’est aussi, dans le monde d’aujourd’hui, se condamner à n’être pas compris. Paradoxe d’un génie catholique, isolé
281 e péché, contre laquelle toute l’œuvre de Claudel se soulève à l’appel de la Joie. Le monde qu’interprète l’Art poétique n
282 C’est un monde en recréation perpétuelle, et tout s’ y tient parce que chaque être y agit pour tout ce qu’il n’est pas. « T
283 s du discours, où les objets qui « veulent dire » s’ assemblent en propositions (à l’homme), seul discours proprement cohér
284 communion avec la fin universelle. Alors l’homme se complaît dans une fin qu’il fait sienne, c’est-à-dire qu’il s’isole e
285 ans une fin qu’il fait sienne, c’est-à-dire qu’il s’ isole et s’abstrait du mouvement de la Création. « Et c’est pourquoi u
286 qu’il fait sienne, c’est-à-dire qu’il s’isole et s’ abstrait du mouvement de la Création. « Et c’est pourquoi une fin lui
287 t dans son cœur, et répète l’ordre qui l’a créée, s’ appelle la parole. » Nous voici donc « chargés du rôle d’origine ». L’
288 e vivante de tout ce qui est. Et maintenant, pour se connaître, il lui suffit d’agir sa vocation. Dans l’acte conscient de
289 istinction du matériel et du spirituel. L’homme «  se connaît donc à son pas et à l’extension de ses mains, à la facilité p
290 a facilité plus ou moindre grande qu’il éprouve à se servir des instruments dont il a la propriété ». Et son corps lui est
291 d’autres suites : faut-il attendre que les flics s’ en mêlent, et viennent « mettre au pas » le langage — ou saurons-nous
292 , sans déclarer ce que le mot sous-entend, et qui se révélerait le plus souvent absurdement contradictoire. 43. Connaîtr
293 ter : prêter assistance, etc. Parce que « rien ne s’ achève sur soi seul » tout porte à conséquence, tout appelle, et d’abo
294 ela clairement, mais : « Tel est le mystère qu’il s’ agit présentement de reporter sur le papier de l’encre la plus noire. 
26 1937, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Une idée de Law (janvier 1937)
295 is et acheter l’armée ennemie, lorsque l’occasion s’ en présenterait. Un Anglais estimait un homme 480 livres sterling. C’e
296 ogue lorsqu’il tenta d’acheter le sol que le Duce se préparait à conquérir : c’était là proprement « couper l’herbe sous l
297 capitalisme. Or, ce système étant de ceux qui ne se peuvent soutenir que si rien d’arbitraire ou d’humain ne vient dérang
27 1937, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). De la propriété capitaliste à la propriété humaine et Manifeste au service du personnalisme, par Emmanuel Mounier (février 1937)
298 . Mais c’est la méthode qui doit retenir ici : il s’ agissait pour Mounier de fonder la théorie personnaliste de l’avoir su
299 ssession — presque trop brillante par endroits —, s’ engage dans un exposé synthétique des doctrines thomistes, et rejoint
300 n)44. En bref, le sens du livre est celui-ci : il s’ agit de passer d’un mode de propriété abstrait et anonyme à un mode pe
301 s provisoires45 — de ce mouvement. Le lecteur qui se souvient encore du Cahier de revendications, publié ici même en 1932,
302 Couturier ! (Je ne sais pourquoi, d’ailleurs, ils s’ obstinent à lui accoler un adjectif pléonastique : « personne humaine 
303 que les problèmes de l’homme, et de l’esprit, ne se poseraient plus durant le prochain demi-siècle. Parler de la primauté
304 ue tout usager de la culture, si apolitique qu’il se veuille, se trouve intéressé dans un pareil débat ? Cela va de soi.
305 t ? Cela va de soi. 44. Je pense que Mounier ne se dissimule pas le caractère « théorique » des justifications qu’il va
306 l’aumône au nécessiteux avec l’argent d’un autre, s’ il ne peut le faire du sien ». (Car cet argent de l’autre devient dans
28 1937, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). N’habitez pas les villes (Extrait d’un Journal) (juillet 1937)
307 Ou alors, l’héritage est cela dont on ne peut pas se délivrer à temps, et devrait être défini franchement comme ce qui est
308 incommode ou impropre, et dont il faut tâcher de se délivrer coûte que coûte.) Mon domaine, c’est ce que j’ai sous la mai
309 ualité de ce que j’écrivais. Il faut avouer qu’il s’ agissait, dans ces articles, de ce que les gens croient être actuel, o
310 ironie sorbonnarde pour les petits événements qui se déroulèrent dans ce coin du pays, et surtout pour les légendes, local
311 lein de verve et de gaillarde érudition, comme il s’ en trouve un peu partout pour sauver « l’esprit » d’un pays. J’ai pass
312 Richelieu. Depuis lors, semble-t-il, les villages se dépeuplent, les traditions se perdent et les champs tombent en friche
313 -t-il, les villages se dépeuplent, les traditions se perdent et les champs tombent en friche. La Révolution seule a ranimé
314 lectionneur. L’esprit fort et l’esprit de clocher se font une guerre acharnée dans ces pages et ils l’emportent tour à tou
315 certes il n’est pas deux France ! Ou plutôt elles se mêlent dans un combat indivisible et nécessaire au cœur de chacun d’e
316 re Premiers contacts avec les gens. — Le village se termine au bout de notre jardin. Passée la porte, on enfile une petit
317 côtés de la place généralement vide, les maisons s’ alignent en ordre modeste, peintes en tons clairs et simples, blanc, j
318 ples, blanc, jaune ou vert. La couleur des volets s’ harmonise avec chaque façade d’une manière subtile et précise qui en d
319 ieu. Son supérieur lui a confirmé qu’un manuscrit s’ affranchit comme une lettre. Il faut donc que je m’exécute, sinon c’es
320 ibération. Il faut qu’il arrive quelque chose. Et s’ il n’arrive rien ? « On ne meurt pas de faim dans nos pays », dit-on,
321 vie. Trouver son rythme naturel, et les moyens de s’ y réduire, voilà le but de toute morale car le « bien penser » en dépe
322 ine de tout l’idéalisme dont les modernes doivent se guérir, s’ils veulent enfin devenir « actuels » ? Est-ce que ce n’est
323 l’idéalisme dont les modernes doivent se guérir, s’ ils veulent enfin devenir « actuels » ? Est-ce que ce n’est pas aussi
324 is l’homme est ainsi fait qu’il désire sans cesse se risquer au-delà de ce qu’il peut, et franchir au moins en pensée les
325 n pensée les bornes de ses possessions pour aller se mêler aux « autres », à l’étranger… Tout ici me ramène à moi seul. J’
326 Quand nous étions devant Tamatave, en 1886. ») Il s’ occupe maintenant à fabriquer un filet de quatre-vingts mètres, bel ou
327 la politique, ou la religion qu’ils suivent, ils se taisent bien vite, ou se remettent à raconter des anecdotes subitemen
328 gion qu’ils suivent, ils se taisent bien vite, ou se remettent à raconter des anecdotes subitement sans intérêt. Je ne sen
329 es subitement sans intérêt. Je ne sens pas qu’ils se méfient de moi. Simplement, ils n’ont jamais formé de phrases, dans l
330 es choses-là. Non seulement je ne sens pas qu’ils se méfient de moi en tant qu’intellectuel ou « spécialiste », mais encor
331 eur sur les sujets que je viens de nommer. Ils ne se doutent pas que c’est de cela précisément qu’un écrivain peut faire s
332 nse à la dire… Peut-être, dans un siècle ou deux, se demandera-t-on comment nous avons pu rester si parfaitement aveugles 
333 souvent l’élément le plus actif de la population s’ expatrient volontiers, ou vont habiter les villes.) En été, la petite
334 vont habiter les villes.) En été, la petite ville se remplit de baigneurs et l’auditoire du temple est décuplé : cela suff
335 Il m’a décrit son existence sans amertume. Il ne se plaint que de son isolement intellectuel. Il trouve normal de vivre u
336 un petit hôtelier breton d’origine catholique, il s’ est converti à l’âge de vingt ans et depuis lors il n’a jamais songé q
337 qu’il n’y ait « à vues humaines » aucun espoir de se faire entendre, si le seul espoir vrai réside dans la foi, qui ordonn
338 cessation du travail pour un repos nécessaire. Il se définit psychologiquement non par rapport au travail, mais par rappor
339 .   23 janvier (écrit sur la dune) Il ne faut pas se mettre en colère au mois de janvier. C’est une saison abstraite, on n
340 bandonner cette partie mal engagée, ma vie, et de se retrouver neuf, enfantin, ou tout simplement jeune devant un présent
341 l’humilité. Si je ne suis pas important, le monde s’ agrandit. Je puis encore aimer des paysages qui ne sont pas mon état d
342   28 février Gens. Il est très impressionnant de se demander en face de ces hommes, à quelques mètres d’eux, quand ils tr
343 le plus familier avec la mort.) Ainsi nos gestes se prolongent, et leur grandeur est dans l’attente qu’ils trahissent. Si
344 ie est absurde et violemment inacceptable, qui ne s’ ouvre pas sur l’attente d’une révélation à venir, et d’une « consolati
345 ouveau. De très gros œufs, me semble-t-il. (Où va se loger la vanité !)   14 avril La culture et les gens. Souvent, quand
346 encore ils ne comprendraient pas même de quoi il s’ agit quand je parle d’eux précisément, et des problèmes qui intéressen
347 au bas de la page. Il me semble vraiment que cela se tient. Il me semble aussi que c’est concret. Je me dis que cette impr
348 s que cette impression et celle de tout à l’heure s’ excluent en fait. Mais je n’arrive plus du tout à retrouver ce sentime
349 nt une fatalité interne dans notre culture : elle s’ enchante, se critique, se légitime elle-même. Elle a ses lois, qui se
350 ité interne dans notre culture : elle s’enchante, se critique, se légitime elle-même. Elle a ses lois, qui se suffisent. L
351 ans notre culture : elle s’enchante, se critique, se légitime elle-même. Elle a ses lois, qui se suffisent. Les concepts a
352 ique, se légitime elle-même. Elle a ses lois, qui se suffisent. Les concepts alors se combinent selon des affinités ou rép
353 a ses lois, qui se suffisent. Les concepts alors se combinent selon des affinités ou répulsions que les faits ou les être
354 e que je défends est vraie !… Il y aurait de quoi s’ arrêter de penser, si l’on pouvait. Le principe de toute culture vérit
355 du moins… d’angoisse, ou de vision finale, qu’il s’ agit de maintenir par un constant effort entre nos belles séries de pe
356 crayeux, très froide encore. On ne peut guère que se tremper quelques instants, et se coucher ensuite sur la dune, au vent
357 e peut guère que se tremper quelques instants, et se coucher ensuite sur la dune, au vent doux. Villages blancs au-dessus
358 enses plateaux rocheux, pourpres, jaunes et noirs se révèlent au-delà de la plage, nouveau pays tout grouillant de merveil
359 qui affleure le tranchant du plateau, la rivière s’ élargit en bassins clairs aux profondeurs rougeâtres et doucement mouv
360 s. C’est là que nous commençons la pêche. Il faut se planter au centre du bassin, et fouiller et racler sous les bords, da
361 ch, un ou deux crabes tout terreux, et parfois en se penchant sur la treille, on voit bondir d’un bord à l’autre quelque c
362 achet que l’on porte attaché à la ceinture et qui se remplit de tressaillements. Nous ne gardons que les plus belles creve
363 une ou deux sautent hors de la casserole —, elles se recroquevillent, rougissent, se durcissent. Je ne puis voir cela sans
364 asserole —, elles se recroquevillent, rougissent, se durcissent. Je ne puis voir cela sans honte et sans révolte. Sensible
365 admiration, répulsion, pitié, etc. En somme, tout se borne à une certaine « sympathie » (souffrir avec) que l’homme éprouv
366 avec les hommes. Mais attention. C’est uniquement s’ il y a dans l’homme une vocation surnaturelle, la mission de restaurer
367 restaurer l’harmonie primitive, que mon scrupule se justifie : il apparaît alors comme le dernier écho, le dernier reproc
368 ux jours l’éclosion des œufs.) Il me semble qu’il se passe des choses au fond du réduit obscur. La poule grogne furieuseme
369 âché hier soir, et que la Providence, évidemment, se payait ma tête. Ensuite j’ai calculé que cela nous permettait de pass
370 e chercher. Notre affaire réglée, il croit devoir s’ excuser de m’avoir fait passer à côté tout à l’heure. « Vous savez, c’
371 une pudeur, ou une honte tout à fait particulière s’ attache au commerce de l’argent.   20 juin Les gens. Je feuillette ce
372 t équilibre indifférent et cordial qui a fini par s’ établir entre nous : et il ne reste que l’ennui de nos conversations t
373 duite et à leur milieu, comme les animaux. Ils ne se posent pas de questions gênantes. Or, c’est mon métier d’en poser… Il
374 s, les salades et les choux sont brûlés, la terre se craquèle, ou devient poussiéreuse. Il n’y a plus que quelques roses a
375 ur l’île, et le bilan de l’année écoulée. Bilan. S’ installer dans la pauvreté comme dans un champ d’activité nouveau, ave
376 ne l’imaginent : ceux qui voudraient « partir », se « libérer » et qui reculent pourtant devant le saut. Peut-être leur s
377 utile de montrer qu’on peut sortir des villes où se font les « carrières » sans sortir de la vie véritable ; et qu’on peu
378 entures dans l’existence d’un homme qui cherche à se posséder plutôt qu’à se fuir dans les hasards. C’est sans doute un ef
379 d’un homme qui cherche à se posséder plutôt qu’à se fuir dans les hasards. C’est sans doute un effet de la trentaine qui
380 st à portée de la main, et n’est que là. Alors il s’ agit seulement d’assurer la prise de cette main. C’est l’affaire d’une
381 française, Paris, juillet 1937, p. 63-87. af. Il s’ agit de Penser avec les mains .
29 1937, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Gösta Berling, par Selma Lagerlöf (novembre 1937)
382 d’un Noël à l’autre sur la province du Warmland, s’ étant juré de ne rien accomplir d’utile ni de raisonnable. Voici l’his
383 errorisés par une sadique « défense d’inventer », s’ épuisent à rechercher le vraisemblable, en même temps que l’exceptionn
384 e. Mais la vie est toujours ailleurs, en train de s’ inventer différente. Elle n’aime que celui qui se moque d’elle et qui
385 s’inventer différente. Elle n’aime que celui qui se moque d’elle et qui n’en fait qu’à ses façons. Elle aime les grands r
386 s rhétoriciens de l’imagination fabulatrice. Elle se précipite avec fougue dans leurs pièges les plus évidents. Elle adore
387 e dans leurs pièges les plus évidents. Elle adore se laisser attraper dans les figures qu’une Lagerlöf s’amuse à rajeunir
388 laisser attraper dans les figures qu’une Lagerlöf s’ amuse à rajeunir tour à tour : une au moins par chapitre48, et à chaqu
389 e, populaire carte postale. Mais voici que la vie s’ y prend, fait sauter le cadre, envahit tout à grands bonds émouvants,
390 nvahit tout à grands bonds émouvants, et l’auteur s’ esquive prestement avec une bonne espièglerie, pour vous laisser à vot
391 tte dans le grand jeu du péché et de la grâce, et se confond avec la Charité. Imaginer, à ce degré, c’est déjà presque par
392 ière fantastique de la Promesse, au point où tout se renverse, où le ciel s’ouvre sur le châtiment, où le démon découvre q
393 romesse, au point où tout se renverse, où le ciel s’ ouvre sur le châtiment, où le démon découvre que son œuvre a libéré le
30 1937, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Au dossier d’une vieille querelle (novembre 1937)
394 1937)ah Un clerc écrivait récemment qu’il faut se garder d’engager la raison dans une aventure — la vie — « où elle ne
395 e manqueront pas d’en conclure qu’ils n’ont pas à se mêler aux luttes sociales et politiques où leur raison a tout à perdr
396 olitiques où leur raison a tout à perdre mais que s’ ils s’y trouvent mêlés, comme il arrive parfois aux plus prudents, ils
397 ues où leur raison a tout à perdre mais que s’ils s’ y trouvent mêlés, comme il arrive parfois aux plus prudents, ils feron
398 ive parfois aux plus prudents, ils feront bien de s’ y comporter selon les usages du forum, et de crier avec les loups. « P
399 par lequel un ancien Philosophe prouvait qu’on ne se devait point mêler des affaires de la République. Si on y agit bien —
400 — disait-il — on offensera les dieux ; donc on ne s’ en doit point mêler. » Mais Aristote témoigne qu’on lui répondit : « S
401 is Aristote témoigne qu’on lui répondit : « Si on s’ y gouverne selon les règles corrompues des hommes, on contentera les h
402 a vraie justice, on contentera les dieux. Donc on s’ en doit mêler. » La Logique observe à propos du premier dilemme — ou s
403 aille pas sans risques, c’est l’évidence. Mais il s’ agit de savoir ce que l’on révère, de la vérité ou de la sécurité. Ce
404 . Ce serait une raison bien débile, qui n’oserait s’ exercer que sur du rationnel tout fait. S’il y a quelque part du ratio
405 oserait s’exercer que sur du rationnel tout fait. S’ il y a quelque part du rationnel (que ce soit dans le monde ou dans l’
406 ns le monde ou dans l’esprit) c’est que la raison s’ est bel et bien risquée et se risque encore dans le chaos, et qu’elle
407 c’est que la raison s’est bel et bien risquée et se risque encore dans le chaos, et qu’elle a su y prévaloir sur quelques
408 points. On ne voit pas bien pourquoi il faudrait s’ arrêter. Et même, à faire le petit rentier du rationnel, on court le r
31 1938, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Le Monastère noir, par Aladár Kuncz (janvier 1938)
409 journant en France, Aladár Kuncz, sujet hongrois, se voit arrêté à Paris dès les premiers jours de la guerre. On l’envoie
410 e bassefosse par le jeu de l’état civil. Qu’il ne s’ y mêle aucune trace de hargne, c’est un miracle qui défie l’époque. M.
411 le, dans sa préface, déclare fort justement qu’il s’ acquitte d’une dette en présentant cette œuvre au public français. Vou
412 aisissable et saisissant : qu’un innocent, ou qui se croit tel, se voie privé de sa liberté pour des « raisons » collectiv
413 saisissant : qu’un innocent, ou qui se croit tel, se voie privé de sa liberté pour des « raisons » collectives et obscures
414 erre. C’est un mot sacré. C’est quelque chose qui se passe très loin, partout, et qui doit être réel puisqu’on en souffre,
415 bscure certitude, angoissante, que cette guerre «  se fait toute seule », que rien ne dépend plus de personnes responsables
416 niale description du mythe de l’arrestationaj. On se rappelle que c’était l’histoire d’un homme qui se voit inculpé, par u
417 se rappelle que c’était l’histoire d’un homme qui se voit inculpé, par une justice inaccessible, d’une faute indéterminée.
418 de l’homme traqué par les tyrannies anonymes qui se multiplient dans notre siècle49, et tendent à faire du moindre d’entr
419 preuve, une fois de plus, que l’homme moderne ne se connaît jamais mieux qu’à la faveur de circonstances brutales, qui le
420 spects, procès de tendance faits à ceux mêmes qui se taisent, etc., etc. ai. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Aladár
32 1938, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Victoire à Waterloo, par Robert Aron (février 1938)
421 cet ouvrage d’une passionnante ambiguïté, et qui se donne l’air d’une « fantaisie ». Prenons ce mot au sens allemand : un
422 ences fausses de faits « prouvés ». La thèse peut se discuter. L’illustration m’en paraît convaincante. « Le grand étonnem
423 trois fois plébiscité !) Devant les Chambres, il s’ écriera : « Prenez conscience, Messieurs, que depuis vingt années nous
424 celui de la patrie perdue que Bonaparte cherche à se recréer, celui du schizophrène qui « perd le sentiment », celui d’une
425 toire, un des meilleurs romans de l’année, et qui se fait lire avec le plus constant plaisir, d’autant que l’on pouvait re
426 itante pour l’esprit. À peine l’a-t-on fini qu’on se jette sur Sorel, sur Madelin et sur Aubry, pour leur arracher des ave
33 1938, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Une révolution refoulée (juillet 1938)
427 foulement » d’où procèdent les « actes manqués ». S’ il y a eu « expérience Blum », elle a consisté à empêcher la révolutio
428 nitial a déterminé la courbe de l’expérience : il s’ agissait d’affirmer une mystique, mais de ne faire que les réformes qu
429 dans la France actuelle. (Au moins dans celle qui se manifeste.) Et les réformes obtenues apparaissent comme les résultant
430 e a d’autres plans, et Ce soir a d’autres vertus. S’ il se fait une révolution, elle sera donc improvisée, donc sanglante,
431 ’autres plans, et Ce soir a d’autres vertus. S’il se fait une révolution, elle sera donc improvisée, donc sanglante, donc
432 donc improvisée, donc sanglante, donc destinée à se figer dans le rictus d’une dictature. Tout le monde le sent, tout le
433 sent, tout le monde le craint — et le désire sans se l’avouer. Voilà pourquoi personne ne bouge. C’est effrayant, cette im
434 exte de lui résister, les voilà qui d’elles-mêmes se mettent en rang, lèvent le poing, acclament des caporaux. Ainsi l’Aut
435 acclament des caporaux. Ainsi l’Autriche fascinée s’ est jetée dans la gueule du dragon, après avoir trompé et désarmé la r
436 nce la révolution de 36. D’où le « complexe » qui s’ est noué. Complexe fasciste, avoué sous le nom d’antifascisme, c’est n
34 1938, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Alice au pays des merveilles, par Lewis Carroll (août 1938)
437 chaque fois un monde nouveau, et chaque fois elle se sent plus forte ou plus faible que les règles sociales admises. Suppo
438 , etc.). Et pourtant, ce n’est que d’un jeu qu’il s’ agit. Alice en garde la conscience secrète — comme dans le rêve — et p
439 conscience secrète — comme dans le rêve — et peut s’ en libérer dès que l’absurdité devient intolérable ou menaçante. D’ail
440 es rendent compte de la plupart des « gags » dont se compose le récit. Et parfois les pièges logiques ont une double déten
441 action, la Laidification et la Dérision. Mais ici se poserait le problème de la version française du conte ; celle de René
35 1938, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Page d’histoire (novembre 1938)
442 tion rigide, confusion de l’État et de la Nation) s’ opposait dans le fait à toute application honnête des deux principes.
443 ntraliste inspiré du modèle français. 2. Sur quoi se basaient les revendications hitlériennes ? — Les dictateurs du Centre
444 ctateurs du Centre européen furent les premiers à s’ apercevoir du paradoxe politique que nous venons de définir. Ils euren
445 t fatal, dans ces conditions, que les démocraties se laissassent convaincre par le « bon droit » des exigences allemandes.
446 ntrevue de Berchtesgaden). 4. Pourquoi le conflit s’ aggrava-t-il subitement ? — Le litige était réglé en principe. Mais al
447 des peuples sur pied d’égalité. Une vague de fond s’ éleva contre la prétention allemande, que l’on sentait, obscurément, r
448 omprit que son heure n’était pas encore venue. Il se vit contraint d’accepter la réunion à Munich d’une « Diète » de gouve
449 alculs qu’on appelait alors « réalistes », et qui se bornaient à faire état des pertes matérielles subies. Le bénéfice mor
36 1939, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Propos sur la religion, par Alain (avril 1939)
450 igion, par Alain (avril 1939)ao Ces « propos » s’ égrènent de 1908 à 1935, mais la position de l’auteur n’a pas varié du
451 n de l’auteur n’a pas varié durant ce temps. Elle se ramène, me semble-t-il, à ceci : la religion, c’est la pratique moyen
452 la pratique moyenne du catholicisme français. Il s’ agit moins de la dénigrer que de la « réaliser » en la débarrassant de
453 été par Alain, serait une sagesse éternelle qu’il s’ agirait de remettre à jour, c’est-à-dire de laïciser. Point d’anticlér
454 vous finirez par penser)… Comme toute sagesse qui se respecte, celle d’Alain ne peut pas tenir compte des données concrète
455 t dont je ne trouve pas trace dans les évangiles, s’ il est vrai qu’il encombre une bonne part de la théologie, surtout cat
456 de révolte active de la créature (même lorsqu’il se déguise en bonne volonté souriante). La foi, au sens biblique, s’oppo
457 nne volonté souriante). La foi, au sens biblique, s’ oppose expressément à la religion en général, avec ses rites et ses cr
37 1939, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Don Juan (juillet 1939)
458 ombrée de règles précises dont elle rêve moins de se délivrer que d’abuser. Dans le vertige de l’anarchie où il se plaît,
459 que d’abuser. Dans le vertige de l’anarchie où il se plaît, ce grand seigneur n’oublie jamais son rang. Son naturel, c’est
460 rien n’est plus loin de la nature. Voyez comme il se sert des femmes : incapable de les posséder, il les viole d’abord mor
461 es posséder, il les viole d’abord moralement pour s’ imposer à l’animal, et aussitôt prises les rejette, comme si c’était l
462 s que Don Juan fuit à peine atteints. Faudra-t-il se résoudre à soumettre le cas aux docteurs indiscrets de l’école vienno
463 n’atteint pas au plan de la personne, où pourrait se manifester ce qu’il y a d’unique dans un être. Pourquoi ne peut-il dé
464 ne l’abandonne pas pour l’incertain, — entendez : s’ il possède vraiment. Don Juan serait l’homme qui ne peut pas aimer, pa
465 déçu par la réalité dès qu’il l’approche, et déjà s’ élançant vers d’autres apparences, de plus en plus angoissé et cruel…
466 es apparences, de plus en plus angoissé et cruel… S’ il le trouvait, ce « type » de femme rêvé ! J’imagine cette métamorpho
467 , changer soudain de contenance, baisser la tête, s’ assombrir, comme saisi d’une timidité, et fasciné pour la première foi
468 pour la première fois par la révélation d’amour, se muer en l’image de Tristan. Mais il ne trouvera pas. Il est Don Juan
469 on sait qu’il ne peut trouver, soit impuissance à se fixer, soit impuissance à se déprendre d’une image à lui-même secrète
470 , soit impuissance à se fixer, soit impuissance à se déprendre d’une image à lui-même secrète. Et de là vient sa puissance
471 n’est pas toujours liée au sexe. Et même il faut se demander si la sensualité, précisément, ne serait pas le domaine où D
472 précisément, ne serait pas le domaine où Don Juan se révèle le moins dangereux. (Appelons ici danger ce qui peut compromet
473 dre neuf par le décret de sa rigueur. ⁂ Nietzsche s’ est dressé face au siècle. Et l’adversaire qu’il s’est choisi, c’est l
474 ’est dressé face au siècle. Et l’adversaire qu’il s’ est choisi, c’est l’esprit de lourdeur, notre poids naturel, notre fac
475 moraliste un ennemi vigilant de l’instinct : car s’ il le glorifie c’est par esprit de polémique, c’est qu’il veut forcer
476 ilence ou les lâchetés de l’adversaire. Les idées se retournent au caprice de l’esprit : il n’y a plus de vérité qui tienn
477  : il n’y a plus de vérité qui tienne. Les hommes se rendent ou tombent dans le doute à la première séduction d’une hypoth
478 i maintienne en vertu de l’absurde. Ah ! comme on se lasse de gagner à tout coup, pour peu qu’on ait l’envie de nier des r
479 e personne n’ose plus dire inviolables ! Qui donc se ferait tuer pour une vertu dont on ne sait plus quelle est la fin ? E
480 voyez comme elles ont vite cédé ! Il faudra donc s’ en prendre à Dieu et à son Fils. Déjà « le Dieu moral est réfuté ». Qu
481 s, l’heure de l’invitation au Commandeur. Or Dieu se tait. Il ne relève pas le défi. Nietzsche attend dans la nuit déserti
482 éprisables après la première possession. Pourquoi s’ attarderait-il ? Elles n’étaient excitantes pour l’esprit que par la f
483 goût ce que l’on désirait de toute sa fougue ; et se rire des suiveurs, des successeurs, de ces disciples enhardis par le
484 ir abuser de ses victimes. Mille et trois vérités se sont rendues, et pas une seule n’a su le retenir. Qu’importent les « 
485 lui-même infiniment secrète, d’une Vérité qui ne se rendrait point, mais qui le posséderait à tout jamais, digne enfin de
486 raque sans relâche tout ce qui bouge, tout ce qui s’ arrête, tout ce qui fait mine de résister. Voluptés brèves — le temps
487 lointain. ⁂ Don Juan, tricheur, aime sans amour. S’ il gagne, c’est en violant la vérité des êtres. Nietzsche pose des val
488 toutes les règles du jeu, il faut qu’une passion se révèle ; ou la mort, ou la vie éternelle. Il faut donc que Don Juan d
489 aisse (car Don Juan ne gagnait qu’en trichant, et s’ il n’y a plus de règles, on ne peut plus tricher). Voici peut-être la
38 1939, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). La Poésie scientifique en France au xvie siècle, par Albert-Marie Schmidt (septembre 1939)
490 monde, et des rapports du monde à l’homme, qu’il s’ agit de concevoir à nouveau, si l’on veut entrer dans ces rythmes, goû
491 n de les parfaire par le Verbe et, finalement, de s’ en rendre maîtres. Tous sont soutenus par une double croyance dans le
39 1940, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Au sujet du Journal d’André Gide (janvier 1940)
492 e a tant répété : Ne jugez pas ! qu’il a fini par se rendre lui-même littéralement « inestimable ». Comment prendrait-on p
493 e défiance d’une symétrie où l’on serait tenté de s’ arrêter…) Faute d’un « jugement » que ces treize cents pages s’appliqu
494 aute d’un « jugement » que ces treize cents pages s’ appliquent à dénoncer d’avance, réduisons-nous à des notes de lecture,
495 toutes ces aquarelles et ces tableaux de genre où s’ amuse et s’attarde la maîtrise, on peut prévoir que la valeur d’un tel
496 aquarelles et ces tableaux de genre où s’amuse et s’ attarde la maîtrise, on peut prévoir que la valeur d’un tel ouvrage re
497 ra d’ordre essentiellement biographique. Mais ici se pose le problème de la vérité du portrait, Gide note lui-même dès 192
498 ter nos retouches. ⁂ Parfois, le secret d’une vie s’ épuise dans l’œuvre ; il ne reste pour le journal que les plus sèches
499 le l’image qu’il nous y livre de lui-même53 —, il se peut qu’elles soient dites dans Les Cahiers d’André Walter, et surtou
500 ussant les proportions de l’autoportrait, si l’on se borne au seul journal. « Les choses les plus importantes à dire sont
501 e paraissaient trop évidentes. » Si sincère qu’on se veuille en relatant ses journées, comment ne serait-on pas tenté de d
502 de répéter chaque fois qu’on l’aime ? Ainsi l’on se peint plus « rosse » que nature. Gide lui-même, à ce jeu, ne s’est pa
503 « rosse » que nature. Gide lui-même, à ce jeu, ne s’ est pas épargné : « Je ne suis qu’un petit garçon qui s’amuse — doublé
504 pas épargné : « Je ne suis qu’un petit garçon qui s’ amuse — doublé d’un pasteur protestant qui l’ennuie. » Type de boutade
505 . » Type de boutade dont certains, contre lui, ne se priveront pas d’abuser. Voici qui va fort loin dans la critique du ge
506 On les inventerait même, pour la satisfaction de se paraître à soi-même plus perspicace, et l’on a grande tendance, par c
507 ande tendance, par contre, à négliger, de peur de se surfaire, tout ce qui peut entrer en jeu de bonté naturelle ou de soc
508 ncore : du désir de paraître aimable. Mais à trop se regarder, on ne vit plus. Le regard, ici, crée ce qu’il cherche… » Or
509 t, c’est-à-dire ce qui frappe ce jour-là, et l’on se fait trop pittoresque. En somme, le journal exigerait une discipline
510 grande encore que celle de l’œuvre : il faudrait s’ imposer un rythme égal et sans lacunes, une relation automatique et mo
511 rfois même négative. C’est moins la vie vécue qui s’ y traduit, que le désir de compenser ou de parfaire ce qui n’a pas été
512 pensations, ratures, reprises d’actes manqués… Il s’ agirait de savoir si la vraie vie est dans ce qu’on fait, ou dans ce q
513 nière goethéenne, et musicien comme Goethe encore se voulait peintre (mais Gide est, je crois, plus doué). On l’y découvre
514 chrétien dans ses déterminations ? Je crois qu’on s’ est trop laissé prendre à sa perpétuelle polémique contre les converti
515 ir que pour lui, le problème proprement religieux s’ est posé, et se pose encore, dans des termes qui échappent, presque né
516 , le problème proprement religieux s’est posé, et se pose encore, dans des termes qui échappent, presque nécessairement, à
517 ut élevé dans un milieu où la religion paraissait se réduire à ces deux éléments que Calvin considère comme hérétiques : l
518 conformistes. Mais toute morale a bientôt fait de se muer à son tour en dogme, et la morale protestante succombe à ce dang
519 e religieux. En somme, tout son effort consiste à se délivrer de cela même que certains chrétiens désireraient lui « révél
520 ractéristique du protestantisme libéral tel qu’il se développa au siècle dernier. « Je l’ai souvent dit à Claudel : Ce qui
521 s qu’il n’est, à affirmer plus qu’il ne croit. Il se décrit « forcé de s’asseoir au culte de famille. Sa gêne. L’horreur d
522 rmer plus qu’il ne croit. Il se décrit « forcé de s’ asseoir au culte de famille. Sa gêne. L’horreur du geste qui puisse dé
523 sauver une conception pure de la foi, dont il ne s’ estimait pas digne, et qu’il confessait par là même. Gide paraît surto
524 et réticente. Or toute nature, irrémédiablement, s’ éprouve complexe et réticente. Et l’acte de foi consistera toujours à
525 ne sauraient confesser. Alors seulement pourrait se poser en termes nets le problème de l’église visible, de l’obéissance
526 l’obéissance à une orthodoxie qui ne prétende pas s’ emparer de l’Évangile, mais au contraire s’y ordonner. « Orthodoxie pr
527 de pas s’emparer de l’Évangile, mais au contraire s’ y ordonner. « Orthodoxie protestante — écrit Gide —, ces mots n’ont po
528 ratrice. ⁂ Si, malgré son génie du scrupule, Gide s’ expose parfois au reproche de prendre position non sans légèreté sur d
529 ar préférence, loin de là. Mais les problèmes qui se posent à nous, nous n’avons pas pu les choisir, et encore moins les c
530 avec lui, ou qu’on écrit à son propos, qu’il faut se forcer pour n’abandonner point les positions auxquelles on tient, et
40 1940, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Hommage à C. F. Ramuz (mai 1940)
531 urckhardt et de Nietzsche… Mais le centre vaudois s’ est distingué par sa méfiance à l’égard des « idées ». Son particulari
532 thentique, si caractéristique du cercle ramuzien, s’ y traduit en mirlitons acidulés et en mélodies savamment bêtifiantes d
533 d’anniversaire. Quant au « message » du poète, il s’ exprime surtout dans deux portraits photographiques de Germaine Martin
534 tout l’art de Ramuz exposé. Ici, tout le mystère se mue en forme et en physionomie lisible. Enfin, l’on est au-delà de la
41 1951, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). Un complot de protestants (novembre 1951)
535 e l’escalier. Je parle en le suivant d’un œil. Il s’ arrête, il paraît attendre. Je pose le récepteur et nous sortons. Nous
536  » Il a l’air étonné, puis amusé. Et, soudain, en se levant : « Eh bien ! si c’est ainsi, allons le voir de ce pas, voulez
537 offre. Au milieu du studio pend un trapèze. Gide s’ y appuie des deux mains, se balance en regardant nos valises. « Tout c
538 pend un trapèze. Gide s’y appuie des deux mains, se balance en regardant nos valises. « Tout cela s’est arrangé si soudai
539 se balance en regardant nos valises. « Tout cela s’ est arrangé si soudainement, dit-il, c’est inquiétant. Cela me ferait
540 es, il viendra entrouvrir la porte capitonnée, en s’ annonçant par un profond « Allô ! Allô ! » et me demandera de passer c
541 ations de Bossuet, avec une vive admiration, mais se refuse à Kierkegaard, qu’il juge « trop long ». Marquant ainsi bien f
542 , et n’a peut-être jamais répété. La conversation s’ engage sur L’Amour et l’Occident , qu’il est en train de lire, et don
543 euses, coupées de silences et de reniflements, il se met à parler sur « le drame de sa vie ». Jeune homme épris et puritai
544  » était d’autant plus pur que rien de charnel ne s’ y mêlait. « C’est ainsi que je me suis complètement blousé », répète-t
545 ppé chez bien des femmes, c’est leur manière « de s’ offusquer du désir de l’homme ». Plusieurs, mariées, lui ont confié « 
546 utant que nous. Hélas, je ne voyais pas clair. On se trompe ainsi, et les conséquences. J’ai été assez bête pour croire ce
547 terrible erreur d’aiguillage ! » Puis il tousse, se plaint de fumer trop, et de n’arriver point à se contraindre. Les jou
548 se plaint de fumer trop, et de n’arriver point à se contraindre. Les jours suivants, il me donne à lire, par paquets, les
549 écolier. Un soir, il vient m’avertir qu’il compte s’ absenter pour huit jours. Mais son studio me restera ouvert ; que j’y
550 es, Littré. Et quelquefois, littérature. (Mais il s’ en détachait visiblement, n’admirant plus, avec quelque ferveur, que l
551 lus, avec quelque ferveur, que les ouvrages qu’il se sentait le plus incapable d’écrire : ceux d’un Marcel Aymé, d’un Sime
552 , d’un Simenon.) À Berne, pendant un déjeuner, il s’ enquit avec insistance de mon opinion sur Strindberg, et je lui fis un
553 ’est ainsi qu’on l’appelait dans ce groupe.) Gide s’ éclaircit la voix pour observer que le jeu devenait bien personnel, et
554 iait, le reliait, au monde du christianisme, même s’ il en refusait les dimensions profondes. J’ai dit qu’il se méfiait d’u
555 refusait les dimensions profondes. J’ai dit qu’il se méfiait d’une certaine « profondeur » qui mesure parfois la distance
556 l tenait pour la vérité. Il lui arrivait ainsi de s’ arrêter à la logique exotérique d’un texte, disons à son seul sens éth
557 son élan pour caramboler des symboles, où Valéry se fût poliment récusé, Gide objectait, déduisait, s’émouvait… Peu d’écr
558 e fût poliment récusé, Gide objectait, déduisait, s’ émouvait… Peu d’écrivains, même chrétiens, nous ont montré pareil amou
559 . C’est pourquoi le problème religieux, tel qu’il se pose au monde christianisé, et à lui seul, libéré de l’empire des myt
42 1957, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). La découverte du temps ou l’aventure occidentale (mars 1957)
560 c’est-à-dire depuis la création de l’homme, il ne s’ est écoulé que six ou huit-mille ans. » Cuvier partage ces vues, que S
561 u temps de notre humanité : chaque Jour de Brahma se divise en mille éons de quatre-millions-trois-cent-vingt-mille ans ch
562 -trois-cent-vingt-mille ans chacun, et chaque éon se subdivise en quatre âges de durées décroissantes. Nous vivons aujourd
563 précise, le 18 février 3102 avant J.-C., et doit se terminer dans 426 941 ans par la destruction du monde et sa reconstru
564 nce55. Toute réflexion sur l’Aventure occidentale se doit d’affronter ce contraste et d’essayer de l’interpréter. Et, en p
565 l’Histoire qui négligerait d’en rendre compte ou s’ en révélerait incapable apparaîtrait inadéquate à son sujet. On verra
566 torique au sens exact qu’en vertu de son unicité. S’ il pouvait se répéter, revenir comme les saisons, il n’appartiendrait
567 ns exact qu’en vertu de son unicité. S’il pouvait se répéter, revenir comme les saisons, il n’appartiendrait pas à l’Histo
568 mpsycose, à l’astrologie et aux castes. Tout cela se tient et se relie, tout cela est « religion » au sens premier du term
569 l’astrologie et aux castes. Tout cela se tient et se relie, tout cela est « religion » au sens premier du terme56 — et ne
570 le prolongement du temps dramatique des Prophètes s’ ouvre alors le temps du salut : temps de l’attente active, de l’espéra
571 ominées par des rythmes et par des archétypes qui s’ accordent à ceux de l’âme. Ainsi le rêve universel du temps cyclique e
572 uvement de la sagesse mythique, quand il dit pour se rassurer que « l’histoire se répète », ou plus familièrement « Plus ç
573 e, quand il dit pour se rassurer que « l’histoire se répète », ou plus familièrement « Plus ça change, plus c’est la même
574 s ces termes que saint Paul la présente. Que Dieu se soit manifesté comme une Personne ; par un geste sans précédent ; au
575 ctions de l’âme contre le temps de l’Histoire. Il s’ agit d’un vrai fait, non plus d’un avatar ni de l’épiphanie d’un arché
576 peu de temps » et le Christ reviendra. Mais Rome s’ écroule, l’Église s’installe, et les Barbares se convertissent. Il va
577 e Christ reviendra. Mais Rome s’écroule, l’Église s’ installe, et les Barbares se convertissent. Il va falloir trouver les
578 e s’écroule, l’Église s’installe, et les Barbares se convertissent. Il va falloir trouver les moyens de penser cette durée
579 ux abords de la Renaissance. Et dès lors elle ira se précisant, mais dans le même cadre indiscuté (d’où les excès qu’on si
580 ci que la chronologie vertigineuse des hindous ne s’ appliquait qu’aux cycles du cosmos : les événements de l’Histoire s’y
581 x cycles du cosmos : les événements de l’Histoire s’ y trouvent tellement noyés que personne n’a le souci de les dater. C’e
582 ater. C’est un mouvement exactement contraire qui s’ est produit dans l’Occident moderne, où, à l’inverse de ce qui s’était
583 ans l’Occident moderne, où, à l’inverse de ce qui s’ était passé durant l’intermède médiéval, l’état civil des hommes et de
584 l des hommes et des actions humaines n’a cessé de se préciser, tandis que la Fin et le Commencement des temps ne cessaient
585 Fin et le Commencement des temps ne cessaient de s’ éloigner dans le vague de l’infini. Or le Credo prend soin de préciser
586 a Passion unique : « sous Ponce Pilate », mais il se tait sur celle du Jugement dernier, « car nous ne savons ni le jour n
587 er le christianisme, comme beaucoup le craignent, s’ y conforme de plus en plus, à mesure qu’il s’éloigne du mythe. Il n’en
588 ent, s’y conforme de plus en plus, à mesure qu’il s’ éloigne du mythe. Il n’en reste pas moins que l’extension soudaine des
589 dimensions de l’Histoire, telle qu’elle vient de se produire au xxe siècle, provoque une crise profonde de la relation i
590 oup (dans l’espace d’une quarantaine d’années) il se révèle que notre humanité n’a pas derrière elle six-mille ans, mais p
591 ement de diastole et de systole de l’Univers, qui se répéterait à l’infini : nous serions dans une phase d’expansion. La c
592 oncevables. L’individu, en revanche, disparaît et s’ annule. La même raison veut que les « lois de l’Histoire », nécessaire
593 tresse de la vie humaine et de la politique ». Il s’ agit de préparer le Dauphin, son élève, à sa future tâche de roi. Cett
594 l’Histoire aujourd’hui n’est plus un conte, elle se distingue absolument de son récit. Elle ne concerne plus le passé, ni
595 lement l’épouser, et l’on ne peut le penser qu’en s’ y abandonnant. Ce qui se place dans le sens de l’Histoire en reçoit l’
596 n ne peut le penser qu’en s’y abandonnant. Ce qui se place dans le sens de l’Histoire en reçoit l’attribut d’exister. Ce q
597 istoire rédigée par les historiens, on voit qu’il s’ agit d’autre chose : non de mémoire mais d’attitude actuelle, et non d
598 Ce faisant, elle nie la personne, car la personne se fonde dans ce qui juge le temps, le détruit et le renouvelle. Et, si
599 nnant si l’homme, dès qu’il croit cette Histoire, se découvre impuissant devant elle et en elle : rien n’est plus répandu
600 aires fondent leur pouvoir. Le droit d’opposition se justifiait, en effet, par la seule conviction que la vocation d’un ho
601 us historique » que toutes les précédentes ? Oui, s’ il s’agit du goût de connaître le passé, plus répandu que jamais dans
602 storique » que toutes les précédentes ? Oui, s’il s’ agit du goût de connaître le passé, plus répandu que jamais dans le gr
603 de Vix, les mémoires font fureur, les biographies s’ arrachent, et beaucoup n’attendent pas la cinquantaine pour se mettre
604 et beaucoup n’attendent pas la cinquantaine pour se mettre au passé dans un livre. Mais la réponse est non s’il s’agit de
605 e au passé dans un livre. Mais la réponse est non s’ il s’agit de cette Histoire dans le « sens » de laquelle on nous dit q
606 passé dans un livre. Mais la réponse est non s’il s’ agit de cette Histoire dans le « sens » de laquelle on nous dit qu’il
607 space ni le temps, et, lorsque au xxe siècle ils se dilatent soudain au-delà de tout ce que notre esprit peut se figurer,
608 soudain au-delà de tout ce que notre esprit peut se figurer, l’idée d’évolution balaie nos repères et nous emporte sans e
609 ige. Sa dernière résistance à l’angoisse du temps se manifeste alors par la manière dont il décide d’identifier au devenir
610 idu trouve le défi trop lourd. Dans un cosmos qui se calcule en centaines de millions d’années-lumière, dans cette durée q
611 , échappent à ses prises et l’enserrent — « il ne se retrouve plus » et démissionne. Que l’Histoire décide à ma place, de
612 ant le temps. Anticiper l’avenir, c’est tenter de se convaincre que le temps ne va pas apporter la négation de ce que je s
613 ez les totalitaires : ce sont les mêmes, mais ils s’ en félicitent. Et les unes comme les autres, redoutées ou voulues, ne
614 s unes comme les autres, redoutées ou voulues, ne se confondent pas seulement dans leur vision précise d’un avenir donné p
615 L’Occident, succombant au Devenir déifié, va-t-il se mettre hors d’état de faire l’Histoire ? Ou, surmontant le vertige co
616 d’affronter le temps au nom d’un sens qui ne peut s’ originer qu’en la personne. Bref, la question n’est pas de deviner l’H
617 la fin du xixe siècle qu’une science historique s’ est constituée en Inde. 56. Religio, de religare, lier ensemble. 57
618 les « Moyen Âge ». Quand elle survient, quand on se voit contraint d’innover pour sauver sa peau ou pour vaincre, on s’em
619 d’innover pour sauver sa peau ou pour vaincre, on s’ empresse d’en appeler à la coutume, et l’on prétend « renouveler la tr
43 1961, La Nouvelle Revue française, articles (1931–1961). La personne, l’ange et l’absolu, ou le dialogue Occident-Orient (avril 1961)
620 ent découvre le zen au moment où les couvents zen se vident au Japon. (Mais il y a beaucoup plus de chrétiens japonais que
621 âmakrishna ; mais déjà l’intelligentsia de l’Inde se préoccupe des problèmes qui lui sont imposés par la technique et par
622 écouvre et publie le Hi-King, tandis que la Chine s’ industrialise, s’impose notre marxisme et oblitère son mandarinat. Enf
623 le Hi-King, tandis que la Chine s’industrialise, s’ impose notre marxisme et oblitère son mandarinat. Enfin, l’Occident n’
624 s masques, la magie, le jazz, que l’Afrique noire se précipite dans le nationalisme, les jeux parlementaires, et l’exploit
625 é qu’il soit, porte sur l’homme et sa définition. S’ il est vrai que l’Orient nie le moi, qui est une valeur centrale pour
626 s quelle mesure est-ce vrai ? Quel est le moi qui s’ affirme d’une part et quel est le moi qu’on nie de l’autre ? Est-ce bi
627 e personne, forgé par la doctrine trinitaire ; il s’ appliquera de mieux en mieux à l’homme nouveau, à l’ens sibi suscité p
628 r Descartes, le vrai moi c’est « l’âme », mais il s’ agit d’une âme tout intellectuelle, dont « la nature n’est que de pens
629 incte du corps. Avec Kant, le vrai moi, nouménal, s’ oppose au moi phénoménal, et reprend le nom de personne. Chez Renouvie
630 tyrannisé par la Loi) et le spirituel libérateur. S’ il est vrai que le langage courant confond sans l’ombre d’un scrupule
631 réalités « bien vues » à l’Ouest, mais que l’Est se devait d’ignorer, voire de condamner, telles que l’originalité, les d
632 faite. » C’est le vrai moi, c’est l’Ange. « Il ne s’ agit plus du simple messager transmettant les ordres, ni de l’idée cou
633 ît, parce qu’elle est la forme sous laquelle Dieu se révèle à soi-même en lui. C’est la “part allotie” à chaque Spirituel,
634 capitale du drame de la personne ainsi constituée se produit à l’aube de la troisième nuit qui suit la mort terrestre : c’
635 st le monde réel des Archétypes), le pont Chinvat s’ élance, reliant un sommet au monde des Lumières infinies. À son entrée
636 met au monde des Lumières infinies. À son entrée, se dresse devant l’âme sa Dâenâ, son moi céleste, jeune femme d’une beau
637 plus entre eux que les peuples de l’Europe, mais s’ il est une croyance qu’ils ont tous en commun c’est la croyance à la m
638 e l’Asie dénoncer sans relâche, comme on pourrait s’ y attendre, les croyances populaires de leurs contrées ; c’est bien pl
639 opposent leur idée du non-moi. Le vrai malentendu se serait-il instauré entre eux et nous ? Entre cela qu’ils pensent que
640 n peu en cherchant à nous représenter contre quoi se dirigeaient leurs négations, aux temps anciens où nos affirmations n’
641 e entre l’âme et la Réalité. On peut penser qu’il s’ agit bien ici de la même « mort au monde et à soi-même » que le Christ
642 » par son union avec le corps. Elle doit tendre à se libérer du phénomène individuel au lieu que l’âme chrétienne doit le
643 de la philosophie bouddhiste », comprenons qu’il s’ agit pour lui d’une expérience rigoureusement spirituelle. En somme, l
644 tte survie, sans purifier d’avance le jiva — sans s’ ordonner d’avance, dirions-nous, aux exigences du vrai moi, qui est no
645  ! Mais vient le second stade, où les spirituels s’ opposent même à l’ego absolu, à la réalité de l’âme distincte. Le soi
646 à la réalité de l’âme distincte. Le soi de chacun se confond avec le Soi de l’Immensité, ou du Brahma. Qu’est-ce que l’âme
647 corps dans un autre ? — Non, il n’y en a point. — S’ il n’y a pas de transmigration, peut-il y avoir une réincarnation ? —
648 lité, mais non un être pur. — Ô Nagasena, dis-moi s’ il existe rien de semblable à l’âme ? — Il n’y a rien de semblable à l
649 Mais on ne donne jamais au peuple cette leçon. On s’ en garde !) Les spirituels hindous cherchent le samadhi, qui est l’abs
650 tase. Quant aux bouddhistes zen, on dirait qu’ils s’ en tiennent à la stase pure et simple : faire face au fait, signe du T
651 vision-en-soi, du Cela qui n’est pas personnel et se joue à travers notre moi. Ainsi tout l’Orient des doctrines, — et en
652 beaucoup ; absolue négation, pour dire qu’il faut se méfier, et immortalité pour dire longévité. Notre hygiène, augmentant
653 non sa question. Et les trois autres distinctions s’ expliquent de la même manière. » Puis il ajoute : « Si le disciple est
654 idharma (le fondateur du zen) l’a déclaré, zen ne se soucie pas de disserter sur des notions abstruses telles que Dieu, la
655 — et certainement le mazdéisme et les soufis : il s’ agit d’une seule quête de l’esprit, dont le Graal, ou l’Ange, est : to
656 st l’amour dominant de sa vie : selon (cet amour) se fait son ciel, s’il est bon, ou son enfer, s’il est mauvais », dit Sw
657 t de sa vie : selon (cet amour) se fait son ciel, s’ il est bon, ou son enfer, s’il est mauvais », dit Swedenborg dans La N
658 ur) se fait son ciel, s’il est bon, ou son enfer, s’ il est mauvais », dit Swedenborg dans La Nouvelle Jérusalem. Et dans D
659 me ni l’amour ne seraient même concevables. Il ne s’ agit ici ni du dualisme trop facilement nommé manichéen, opposant le B
660 l ; mais, préalablement à tout jugement moral, il s’ agit de la reconnaissance d’une bipolarité, d’une tension permanente e
661 ne devient mauvais que dans la seule mesure où il se referme sur soi, c’est-à-dire se refuse à l’amour. Et de même le « vr
662 ule mesure où il se referme sur soi, c’est-à-dire se refuse à l’amour. Et de même le « vrai moi » n’est pas le bien en soi
663 d’amour du prochain. Tous les moralistes du monde s’ accordent avec les spirituels dans leur condamnation de l’égoïsme, qui
664 se évidemment un moi duel, au sein duquel l’amour s’ instaure d’une manière telle que s’aimer et aimer le prochain soit un
665 duquel l’amour s’instaure d’une manière telle que s’ aimer et aimer le prochain soit un même acte : sinon le comme n’aurait
666 n sens. Dans l’amour de soi-même, l’homme naturel s’ ouvre à l’action du vrai moi spirituel et se laisse transformer, réori
667 turel s’ouvre à l’action du vrai moi spirituel et se laisse transformer, réorienter par lui. C’est le vrai moi qui aime, q
668 mour que de donner sa vie pour ceux qu’il aime. » Se sacrifier pour l’autre aimé, c’est d’abord sacrifier son moi à son vr
669 moi, — l’ordonner à sa vocation. Ou c’est encore se sacrifier tel que l’on est, à soi-même tel qu’on va le devenir par l’
670 rtie liée, et qu’elle mourra si elle le tue. Elle se contente alors de le maudire, de le traiter en « corps de mort », et
671 traiter en « corps de mort », et leurs relations s’ empoisonnent. La plupart des névroses dites « sexuelles » ont leur gen
672 temporel à la vocation de l’amour. Mais celui qui se hait de cette manière ne peut pas aimer le prochain : il ne peut voir
673 e son semblable — un corps « vil » et une âme qui se veut ange —, non le vrai moi dans son autonomie. Si le corps lui para
674 it pas sans raison : « Il faut craindre celui qui se hait lui-même, car nous serons les victimes de sa colère et de sa ven
675 e.74 » L’érotisme sensuel est l’autre extrême où se porte l’âme irritée mais non pas convertie par l’esprit — comme l’a s
676 aard. Tout amour véritable procède du vrai moi et se dirige vers le vrai moi de l’autre. Mais il peut arriver qu’il s’arrê
677 e vrai moi de l’autre. Mais il peut arriver qu’il s’ arrête en chemin, que son élan vers la personne singulière retombe au
678 -delà des exigences naturelles, il ira fatalement s’ épuiser dans l’illusoire multiplicité des « aventures sans lendemain »
679 est la puissance impersonnelle par excellence, et s’ épuise à s’en libérer par le changement de l’excitation, par le défi p
680 sance impersonnelle par excellence, et s’épuise à s’ en libérer par le changement de l’excitation, par le défi perpétuel au
681 l n’est pas assez « spirituel » pour aimer. (Mais s’ il l’était assez, il retrouverait aussi la justification de certaines
682 e communauté humaine, d’unité de civilisation qui s’ inspire du mazdéisme de Zarathoustra ; et nulle ne s’inspira jamais de
683 nspire du mazdéisme de Zarathoustra ; et nulle ne s’ inspira jamais de la mystique des soufis, et pour cause. Si je les fai
684 lorification qui lui est propre. » Toute personne s’ origine en Dieu, qui l’a créée afin d’être connu par elle et de « deve
685 réé. « (Dieu) est celui qui dans chaque être aimé se manifeste au regard de chaque amant… car il est impossible d’aimer un
686 amant… car il est impossible d’aimer un être sans se représenter en lui la divinité. Un être n’aime en réalité personne d’
687 dont elle découvre en elle l’Image, ou dont elle se découvre comme étant l’Image » ; enfin l’amour naturel, qui recherche
688 uant à l’amour-passion (ici, non romantique !) il se situe au point où le regard de l’âme reconnaît soudain dans l’Aimé ce
689 e son amour préfigurant. C’est précisément là que s’ origine la plus haute fonction de l’amour humain, celle-là même qui as
690 r : que l’amant tende à contempler l’être aimé, à s’ unir en lui, à en perpétuer la présence, son amour tend toujours à fai
691 éminent, le Prochain ; c’est donc d’après lui que s’ établissent toutes les distinctions relatives au prochain, c’est-à-dir
692 même manière le bien qui procède du Seigneur, il s’ ensuit que l’un n’est pas le prochain de la même manière que l’autre… 
693 it pas pris pour cette vie », mais pour l’autre ? S’ il est une « erreur de Tristan », motivant le malheur essentiel de sa
694 strictement personnaliste, ne peut évidemment que se récuser.) L’école orientale La plupart des doctrines hindoues,
695 Écarte les choses, ô amant, ta voie est fuite ! » s’ écriait saint Jean de la Croix. Écarte le prochain ! ajoutent les spir
696 nt les spirituels du védantisme et du bouddhisme. S’ il est vrai que « la notion de Moi n’a d’accès que dans la pensée des
697 qui n’a pas d’amour n’a pas de douleur. » Si l’on s’ en tient aux textes, la cause est entendue : l’Asie métaphysique ne co
698 sie n’est pas toute spirituelle, et que la vie ne s’ en tient pas aux textes. On ajoutera peut-être qu’on ne voit pas de ra
699 nes, elles proposent aux spirituels les moyens de s’ en évader en dérangeant le moins de choses possible. Les religions abr
700 ques » et les « infâmes », contre tous ceux « qui se sont livrés à l’impureté, selon les convoitises de leur cœur ». Compa
701 ’un vieux fond païen et que notre hygiène moderne se veut « scientifique ». À cause de la nature du christianisme et de la
702 font l’intérêt de sa vie amoureuse. Mais l’Orient se contente de proposer des voies aux Renonçants (ou sannyasins) qui ont
703 t liées au dogme, tandis que leurs divergences ne s’ opposent pas. S’il arrive que certaines de leurs croyances semblent bi
704 , tandis que leurs divergences ne s’opposent pas. S’ il arrive que certaines de leurs croyances semblent bien se confondre
705 ve que certaines de leurs croyances semblent bien se confondre avec les nôtres (semblent bien affirmer, par exemple, la ré
706 ire qu’elles excluent leur contraire, ou que l’on s’ était mépris sur le vrai sens de leurs affirmations répétées du contra
707 ques, aussi valables l’une que l’autre ? Elles ne se contredisent pas plus que les énoncés spirituels correspondant à diff
708 reparaît à plusieurs reprises : En vérité, à quoi se rapporte l’amour d’un mari pour sa femme ? Non point à la femme, mais
709 l’amour est immédiatement reconnue par celui qui s’ est mis en quête d’un savoir de l’amour qu’il vit. N’importe qui m’ave
710 e phrase des upanishads, sur le dialogue qui peut s’ instituer à partir d’expériences re-connues, on pourrait écrire tout u
711 dire, et pas assez. Aimer, c’est aider l’autre à se situer de telle manière que la lumière se voie en lui, mais qu’en mêm
712 autre à se situer de telle manière que la lumière se voie en lui, mais qu’en même temps le vrai moi de l’amant s’y découvr
713 lui, mais qu’en même temps le vrai moi de l’amant s’ y découvre, autrement éclairé, et par là subtilement changé, un peu pl
714 el). Ils en ont fait autant pour les névroses qui s’ attaquent à nos « agrégats » individuels : le cosmos actuel tout entie
715 ie du Soi. (Mais il sera finalement résorbé, tout s’ arrangera.) Ils en ont fait autant pour les personnes, potentialisées
716 ni « cette adoration dont la femme a besoin pour s’ accomplir, et par ce culte que nous lui rendons, nous arrivons à conna
717 riomphe de ces spirituels et de leur eschatologie se confondra ce jour-là avec l’aboutissement d’un processus entièrement
718 ne de mystères, des apparences actuelles, qu’elle s’ évertue en conséquence à scruter et à modifier. Elle parie sur la vie
719 l’espérance ce que l’Occident peut devenir : soit s’ engloutir dans l’Illusion de la matière (et l’Orient aurait eu raison)
720 as seulement à dévoiler ses lois secrètes, mais à se transformer lui-même, en tant qu’il participe au mystère du créé. Il
721 ssion ne cesse jamais. Parfois, un de ses membres se lève, prononce un discours, préconise une action ; ses collègues l’ap
722 . D’autres fois, plusieurs membres de l’assemblée se lèvent ensemble, proposent des choses différentes et chacun d’eux app
723 ions sur des raisons particulières. On en vient à se battre entre collègues. Il advient aussi que certains membres de l’as
724 rs collègues. Pendant ce temps, de nouveaux venus s’ introduisent dans l’assemblée, soit en s’y glissant doucement, soit en
725 ux venus s’introduisent dans l’assemblée, soit en s’ y glissant doucement, soit en enfonçant les portes. On remarque encore
726 ontraire, d’autres qui étaient débiles et timides se fortifient et s’enhardissent, et finissent par s’instituer dictateurs
727 s qui étaient débiles et timides se fortifient et s’ enhardissent, et finissent par s’instituer dictateurs. Les membres de
728 se fortifient et s’enhardissent, et finissent par s’ instituer dictateurs. Les membres de cette assemblée, ce sont les élém
729 s remontant loin dans le passé et dont les traces se perdent dans les profondeurs de l’éternité. » Nous connaissons assez
730 z bien cela en Occident. Bismarck écrit : « Faust se plaignait d’avoir deux âmes en lui. J’ai en moi une foule d’âmes turb
731 J’ai en moi une foule d’âmes turbulentes. Et tout se passe comme dans une république. » À regarder ainsi le moi, on le per
732 l ? La passion de Tristan est la preuve de l’âme, s’ il en fut jamais. 82. Katha upanishad. 83. Alexandra David-Neel, Le