1 1932, Présence, articles (1932–1946). Penser avec les mains (fragments) (janvier 1932)
1 32)a Nous voici donc à ce point d’étrangeté où l’ on oppose la pensée et l’action jusque sur le plan de l’éthique. Or, u
2 voici donc à ce point d’étrangeté où l’on oppose la pensée et l’action jusque sur le plan de l’éthique. Or, un homme qui
3 ce point d’étrangeté où l’on oppose la pensée et l’ action jusque sur le plan de l’éthique. Or, un homme qui professe cett
4 ppose la pensée et l’action jusque sur le plan de l’ éthique. Or, un homme qui professe cette distinction — essentiellement
5 hologue nominaliste, bavarde impunément à travers les systèmes. La philosophie n’est pas seule responsable d’un divorce que
6 liste, bavarde impunément à travers les systèmes. La philosophie n’est pas seule responsable d’un divorce que la nature hu
7 phie n’est pas seule responsable d’un divorce que la nature humaine désirait de toute sa lâcheté. Mais l’exemple de Descar
8 nature humaine désirait de toute sa lâcheté. Mais l’ exemple de Descartes est l’un des plus mauvais qui aient été donnés au
9 t privés du droit d’affirmer rien de certain dans l’ ordre de la connaissance, cependant ils seraient en droit d’agir, car
10 droit d’affirmer rien de certain dans l’ordre de la connaissance, cependant ils seraient en droit d’agir, car on s’y peut
11 agir, car on s’y peut contenter de vraisemblance. La monstrueuse contradiction ! Comme s’il n’était pas bien pire de comme
12 en pire de commettre un acte qui vous laisse dans le doute (et l’on s’attire pourtant une responsabilité) que de simplemen
13 mmettre un acte qui vous laisse dans le doute (et l’ on s’attire pourtant une responsabilité) que de simplement prétendre q
14 ontradiction » règne au cœur du monde moderne, et la « pensée » bourgeoise a réussi ce tour pendable de la faire passer po
15  pensée » bourgeoise a réussi ce tour pendable de la faire passer pour le bon sens même. L’industriel est-il « en droit d’
16 a réussi ce tour pendable de la faire passer pour le bon sens même. L’industriel est-il « en droit d’affirmer rien de cert
17 endable de la faire passer pour le bon sens même. L’ industriel est-il « en droit d’affirmer rien de certain » touchant les
18 « en droit d’affirmer rien de certain » touchant les fins dernières du progrès mécanique ? Il ne s’est même pas posé la qu
19 écanique ? Il ne s’est même pas posé la question. La coutume du temps est de s’enrichir : modeste, il s’y conforme. « … Et
20 de s’enrichir : modeste, il s’y conforme. « … Et l’ on s’attire pourtant une responsabilité. » Il faut bien constater que
21 s2 cultivèrent ce défaut d’exigence éthique comme la garantie d’une certaine douceur de vivre. Penser devint l’art de ne r
22 ie d’une certaine douceur de vivre. Penser devint l’ art de ne rien affirmer de décisif. Admirable invention, que l’on pour
23 ien affirmer de décisif. Admirable invention, que l’ on pourrait baptiser la pensée sans douleur, et qui comblait si doucem
24 . Admirable invention, que l’on pourrait baptiser la pensée sans douleur, et qui comblait si doucement la débilité morale
25 pensée sans douleur, et qui comblait si doucement la débilité morale du siècle ! Elle en figura tout ensemble le « bon goû
26 é morale du siècle ! Elle en figura tout ensemble le « bon goût », la mesure, et la suprême astuce. Toutefois, le danger d
27 e ! Elle en figura tout ensemble le « bon goût », la mesure, et la suprême astuce. Toutefois, le danger d’un écart, par ai
28 gura tout ensemble le « bon goût », la mesure, et la suprême astuce. Toutefois, le danger d’un écart, par ailleurs confort
29 ût », la mesure, et la suprême astuce. Toutefois, le danger d’un écart, par ailleurs confortable, entre nos idéaux généreu
30 c quelque insistance depuis 1914, il apparaît que la question peut être reprise sans trop de mauvais goût par une jeunesse
31 ncore debout, il serait bon d’examiner rapidement les principes qui lui permirent de durer malgré la qualité médiocre des m
32 t les principes qui lui permirent de durer malgré la qualité médiocre des matériaux. Ces principes constituaient l’instruc
33 diocre des matériaux. Ces principes constituaient l’ instruction réelle, sinon concertée, de la bâtisse, et seront encore b
34 tuaient l’instruction réelle, sinon concertée, de la bâtisse, et seront encore bons pour construire, si demain nous laisse
35 On n’en retiendra qu’un dans ces pages, celui que l’ on voudrait nommer l’a priori éthique. Kierkegaard, après avoir formul
36 un dans ces pages, celui que l’on voudrait nommer l’ a priori éthique. Kierkegaard, après avoir formulé la « monstrueuse co
37 priori éthique. Kierkegaard, après avoir formulé la « monstrueuse contradiction » moderne, conclut par un renversement so
38 nt soudain : « Cela ne viendrait-il pas de ce que l’ Éthique possède en soi une certitude ? Il existerait alors une chose a
39 tude ? Il existerait alors une chose au moins que le doute ne pourrait atteindre. » Mais qu’est-ce que l’Éthique ? — Quest
40 doute ne pourrait atteindre. » Mais qu’est-ce que l’ Éthique ? — Question non éthique, et qui manifeste seulement l’égareme
41  Question non éthique, et qui manifeste seulement l’ égarement du temps. « L’Éthique ne commence pas dans une ignorance qu’
42 t qui manifeste seulement l’égarement du temps. «  L’ Éthique ne commence pas dans une ignorance qu’il faudrait muer en savo
43 qui exige sa réalisation ». Phrase qui n’imposera le silence à personne, mais fera prendre les armes à quelques-uns. Phras
44 imposera le silence à personne, mais fera prendre les armes à quelques-uns. Phrase cardinale, au seuil de l’ère révolutionn
45 mes à quelques-uns. Phrase cardinale, au seuil de l’ ère révolutionnaire — ère spirituelle — dont l’avènement historique es
46 de l’ère révolutionnaire — ère spirituelle — dont l’ avènement historique est dans nos mains. On nous a menés à ce point —
47 e point — il n’est question de s’en réjouir ni de le déplorer — où le choix n’est plus qu’entre marxisme et christianisme3
48 t question de s’en réjouir ni de le déplorer — où le choix n’est plus qu’entre marxisme et christianisme3, entre vérité co
49 llective et vérité personnifiée. Ou encore, entre la réalisation fatale d’une doctrine du fait et la réalisation héroïque
50 e la réalisation fatale d’une doctrine du fait et la réalisation héroïque d’une doctrine de l’être. Deux noms : Hegel et K
51 fait et la réalisation héroïque d’une doctrine de l’ être. Deux noms : Hegel et Kierkegaard4. Désormais, nous les retrouver
52 eux noms : Hegel et Kierkegaard4. Désormais, nous les retrouverons aux prises à tous les degrés de notre activité. Ainsi, l
53 ésormais, nous les retrouverons aux prises à tous les degrés de notre activité. Ainsi, le plus profond antagonisme de la pe
54 rises à tous les degrés de notre activité. Ainsi, le plus profond antagonisme de la pensée du xixe siècle vient s’incarne
55 e activité. Ainsi, le plus profond antagonisme de la pensée du xixe siècle vient s’incarner dans notre génération. Et déj
56 géographique que nous devons de pouvoir trancher le débat sans risquer le poteau. L’on s’en rend compte en écrivant ces l
57 devons de pouvoir trancher le débat sans risquer le poteau. L’on s’en rend compte en écrivant ces lignes, et qu’il y a pe
58 pouvoir trancher le débat sans risquer le poteau. L’ on s’en rend compte en écrivant ces lignes, et qu’il y a peu de mérite
59 vant ces lignes, et qu’il y a peu de mérite, pour l’ heure, à récuser une pensée qui ne menace pas encore à bout portant. ⁂
60 ensée qui ne menace pas encore à bout portant. ⁂ L’ on résume ici la substance de quelques passages relatifs à différentes
61 ace pas encore à bout portant. ⁂ L’on résume ici la substance de quelques passages relatifs à différentes acceptions du v
62 interne, en partie du fait des circonstances qui la molestent durement : l’espèce bourgeois cultivé que sa culture dispen
63 ait des circonstances qui la molestent durement : l’ espèce bourgeois cultivé que sa culture dispense de penser. En vérité,
64 ces gens-là n’ont jamais pensé. N’ont fait que de la classification avec les idées des autres, quand ils étaient intellige
65 s pensé. N’ont fait que de la classification avec les idées des autres, quand ils étaient intelligents ; et autrement, du j
66 nationaux. On remarque par exemple qu’en France, l’ admiration pour un philosophe s’exprime volontiers dans des termes de
67 génieux, esprit subtil ». Ce n’est guère que dans les feuilles de gauche que l’on voit encore décerner l’épithète de « puis
68 e n’est guère que dans les feuilles de gauche que l’ on voit encore décerner l’épithète de « puissant » à des « penseurs »
69 feuilles de gauche que l’on voit encore décerner l’ épithète de « puissant » à des « penseurs » comme Victor Margueritte o
70 droite on parle plutôt de « rigueur », en serrant les dents. Mais partout, l’élégance, même vulgaire, prime l’efficience. L
71 « rigueur », en serrant les dents. Mais partout, l’ élégance, même vulgaire, prime l’efficience. Le penseur allemand serai
72 s. Mais partout, l’élégance, même vulgaire, prime l’ efficience. Le penseur allemand serait plutôt du type « tiefsinnig ».
73 t, l’élégance, même vulgaire, prime l’efficience. Le penseur allemand serait plutôt du type « tiefsinnig ». Mais on remarq
74 profondeur peuvent se situer à égale distance de la réalisation éthique, et se confondre dans la même insignifiance, quoi
75 e de la réalisation éthique, et se confondre dans la même insignifiance, quoique de signes contraires. Poursuivant cette o
76 es caractéristiques devenues banales, on tente de la ramener à celle des deux interprétations étymologiques du mot penser.
77 tions étymologiques du mot penser. Celui-ci ayant la même origine que peser, il est loisible de jouer avec le mot de la fa
78 origine que peser, il est loisible de jouer avec le mot de la façon suivante : le Français pèse le pour et le contre ; l’
79 ue peser, il est loisible de jouer avec le mot de la façon suivante : le Français pèse le pour et le contre ; l’Allemand p
80 sible de jouer avec le mot de la façon suivante : le Français pèse le pour et le contre ; l’Allemand pèse sur les choses.
81 ec le mot de la façon suivante : le Français pèse le pour et le contre ; l’Allemand pèse sur les choses. D’où l’on conclut
82 e la façon suivante : le Français pèse le pour et le contre ; l’Allemand pèse sur les choses. D’où l’on conclut encore que
83 uivante : le Français pèse le pour et le contre ; l’ Allemand pèse sur les choses. D’où l’on conclut encore que la pensée f
84 s pèse le pour et le contre ; l’Allemand pèse sur les choses. D’où l’on conclut encore que la pensée figure pour le Françai
85 le contre ; l’Allemand pèse sur les choses. D’où l’ on conclut encore que la pensée figure pour le Français une activité o
86 pèse sur les choses. D’où l’on conclut encore que la pensée figure pour le Français une activité ordonnatrice ; pour l’All
87 ’où l’on conclut encore que la pensée figure pour le Français une activité ordonnatrice ; pour l’Allemand, titanique. On f
88 pour le Français une activité ordonnatrice ; pour l’ Allemand, titanique. On fait alors intervenir une définition de la pen
89 nique. On fait alors intervenir une définition de la pensée d’où découleront les conclusions de cet essai. Penser serait :
90 enir une définition de la pensée d’où découleront les conclusions de cet essai. Penser serait : créer de tout son être spir
91 èrent un Pascal, un Rimbaud, véritable honneur de la langue française. Ainsi, un Nietzsche, qui le premier substitua délib
92 Nietzsche, qui le premier substitua délibérément la notion de style à celle de correction, dans les démarches de l’esprit
93 nt la notion de style à celle de correction, dans les démarches de l’esprit. Et Dostoïevski, dont on peut dire qu’il pensai
94 tyle à celle de correction, dans les démarches de l’ esprit. Et Dostoïevski, dont on peut dire qu’il pensait par péchés et
95 péchés et remords. Ainsi pensèrent tous ceux dont l’ œuvre détermine en nous une réaction éthique, c’est-à-dire une réalisa
96 ’il ne s’agit nullement d’« applications », comme le voudrait le vocabulaire du xixe , mais d’incarnation de la pensée. Ni
97 t nullement d’« applications », comme le voudrait le vocabulaire du xixe , mais d’incarnation de la pensée. Ni moralisme,
98 it le vocabulaire du xixe , mais d’incarnation de la pensée. Ni moralisme, ni socialisme. ⁂ Moralisme. Il y a des gens q
99 e justice, eh bien ! dès aujourd’hui je m’en vais l’ appliquer. Comment le pourraient-ils ? Car il faut qu’un idéal ait « p
100 dès aujourd’hui je m’en vais l’appliquer. Comment le pourraient-ils ? Car il faut qu’un idéal ait « pris corps » pour qu’i
101 st pourquoi il n’y a de création possible que par les individus. Et de là vient que toute création absolue est héroïque. S
102 r en actes : ce n’est pas descendre au social, si l’ on accepte l’héroïsme. Un siècle bourgeois comme fut le dernier, n’osa
103 ce n’est pas descendre au social, si l’on accepte l’ héroïsme. Un siècle bourgeois comme fut le dernier, n’osait imaginer d
104 ’on sait qu’il n’existe pas d’héroïsme collectif. Le héros est toujours seul. Par définition. Quant au bourgeois seul, cel
105 l, cela ne se peut concevoir, n’a jamais existé5. Le bourgeois n’étant donc jamais un héros, n’entreprendra jamais la « ré
106 étant donc jamais un héros, n’entreprendra jamais la « réalisation » personnelle d’une pensée. Par contre, s’il est actif,
107 en circulation. Jeter une idée « nouvelle » dans la circulation — rêve du sociologue — consiste, en effet, à s’en débarra
108 te, en effet, à s’en débarrasser personnellement. Les meilleures intentions ne sauraient en rien voiler la physiologique év
109 meilleures intentions ne sauraient en rien voiler la physiologique évidence d’une telle remarque. Précisons : réaliser une
110 . Précisons : réaliser une pensée, ce n’est pas «  la mettre à exécution » — la condamner à mort, autant dire, et l’extirpe
111 pensée, ce n’est pas « la mettre à exécution » — la condamner à mort, autant dire, et l’extirper de son être, fût-ce pour
112 xécution » — la condamner à mort, autant dire, et l’ extirper de son être, fût-ce pour l’introduire dans l’Histoire. Mais c
113 tant dire, et l’extirper de son être, fût-ce pour l’ introduire dans l’Histoire. Mais c’est au contraire devenir cette idée
114 tirper de son être, fût-ce pour l’introduire dans l’ Histoire. Mais c’est au contraire devenir cette idée. Et le théâtre de
115 e. Mais c’est au contraire devenir cette idée. Et le théâtre de sa passion. Voilà qui mène plus loin que l’activisme, — et
116 éâtre de sa passion. Voilà qui mène plus loin que l’ activisme, — et avec plus de conséquence6. C’est le drame de l’éthique
117 ’activisme, — et avec plus de conséquence6. C’est le drame de l’éthique individuelle, — une affaire d’amour, une affaire d
118 — et avec plus de conséquence6. C’est le drame de l’ éthique individuelle, — une affaire d’amour, une affaire de la solitud
119 dividuelle, — une affaire d’amour, une affaire de la solitude. Une pensée et une vie sont aux prises : qu’on les laisse do
120 de. Une pensée et une vie sont aux prises : qu’on les laisse donc seules à ce débat silencieux et obscur comme les ruses de
121 donc seules à ce débat silencieux et obscur comme les ruses de la volupté, à ce jeu serré de refus, de tentations, d’oublis
122 ce débat silencieux et obscur comme les ruses de la volupté, à ce jeu serré de refus, de tentations, d’oublis feints et d
123 nts et de brusques retours. Il faut tout cela, et les mille petites souffrances de la souffrance, pour qu’une idée devienne
124 ut tout cela, et les mille petites souffrances de la souffrance, pour qu’une idée devienne ce mythe qui vive en nous et da
125 que chacun de nos gestes — oui, même ce signe de la main — trahisse son immanente puissance. On voudrait dire — mais ce n
126 n’est pas si simple que cela — qu’il faut avaler les idées7, et qu’une idée qui ne peut être mastiquée, puis avalée, n’a p
127 es. Il y a plusieurs façons d’avaler. Il y a même l’ oubli. Ainsi de l’idée du bonheur : qu’on la détruise, qu’on la mange
128 rs façons d’avaler. Il y a même l’oubli. Ainsi de l’ idée du bonheur : qu’on la détruise, qu’on la mange et qu’on l’oublie.
129 même l’oubli. Ainsi de l’idée du bonheur : qu’on la détruise, qu’on la mange et qu’on l’oublie. Ainsi de tant d’autres pe
130 i de l’idée du bonheur : qu’on la détruise, qu’on la mange et qu’on l’oublie. Ainsi de tant d’autres pensers, d’un désir o
131 heur : qu’on la détruise, qu’on la mange et qu’on l’ oublie. Ainsi de tant d’autres pensers, d’un désir ou d’un idéal : ils
132 ts, de retours et de morts encore, jusqu’à ce que l’ esprit enfin brisé s’abandonne comme on oublie, à tel vouloir qu’il co
133 t, et qui devient alors notre sang et nos songes. Le sang, les songes, tour à tour, nous poussent vers les êtres et guiden
134 devient alors notre sang et nos songes. Le sang, les songes, tour à tour, nous poussent vers les êtres et guident notre ma
135 sang, les songes, tour à tour, nous poussent vers les êtres et guident notre main. Par eux s’incarne la pensée, et c’est là
136 es êtres et guident notre main. Par eux s’incarne la pensée, et c’est là l’héroïsme de l’esprit. Car toute incarnation s’o
137 re main. Par eux s’incarne la pensée, et c’est là l’ héroïsme de l’esprit. Car toute incarnation s’opère au prix d’un héroï
138 ux s’incarne la pensée, et c’est là l’héroïsme de l’ esprit. Car toute incarnation s’opère au prix d’un héroïsme, l’on veut
139 toute incarnation s’opère au prix d’un héroïsme, l’ on veut dire : d’une souffrance et d’un isolement. Telle est la loi du
140 e : d’une souffrance et d’un isolement. Telle est la loi du monde, et il est admirable de l’aimer. Et la pensée n’est poin
141 Telle est la loi du monde, et il est admirable de l’ aimer. Et la pensée n’est point soustraite à cette loi, non, la pensée
142 loi du monde, et il est admirable de l’aimer. Et la pensée n’est point soustraite à cette loi, non, la pensée même de Die
143 a pensée n’est point soustraite à cette loi, non, la pensée même de Dieu n’y est point soustraite. Car elle s’incarne dans
144 n’y est point soustraite. Car elle s’incarne dans le Fils pour agoniser sur la Croix, qui est le Signe de la condition hum
145 Car elle s’incarne dans le Fils pour agoniser sur la Croix, qui est le Signe de la condition humaine déchirée entre le Tem
146 dans le Fils pour agoniser sur la Croix, qui est le Signe de la condition humaine déchirée entre le Temps et l’Éternité.
147 s pour agoniser sur la Croix, qui est le Signe de la condition humaine déchirée entre le Temps et l’Éternité. 1. Kierkeg
148 t le Signe de la condition humaine déchirée entre le Temps et l’Éternité. 1. Kierkegaard : « Conclusion peu scientifique
149 e la condition humaine déchirée entre le Temps et l’ Éternité. 1. Kierkegaard : « Conclusion peu scientifique à la Philos
150 1. Kierkegaard : « Conclusion peu scientifique à la Philosophie en miettes. » 2. Contemporaines d’un Nietzsche, d’un Ibs
151 sche, d’un Ibsen, d’un Rimbaud, d’un Sorel ! Mais l’ histoire est faite de telles compensations. 3. Des positions politico
152 ations. 3. Des positions politico-sociales comme le fascisme ou le national-socialisme ne sont encore que des compromis,
153 positions politico-sociales comme le fascisme ou le national-socialisme ne sont encore que des compromis, intelligents et
154 ompromis, intelligents et énergiques certes, avec les valeurs bourgeoises qui nous ont valu la dernière guerre, nationalism
155 u la dernière guerre, nationalisme et doctrine de l’ État souverain, par exemple. Elles préparent la jeunesse au communisme
156 de l’État souverain, par exemple. Elles préparent la jeunesse au communisme, en généralisant le principe de l’action colle
157 parent la jeunesse au communisme, en généralisant le principe de l’action collective. 4. Les attaques de Kierkegaard cont
158 sse au communisme, en généralisant le principe de l’ action collective. 4. Les attaques de Kierkegaard contre la philosoph
159 éralisant le principe de l’action collective. 4. Les attaques de Kierkegaard contre la philosophie dialectique de l’histoi
160 ollective. 4. Les attaques de Kierkegaard contre la philosophie dialectique de l’histoire, d’où Marx, Engels et Feuerbach
161 Kierkegaard contre la philosophie dialectique de l’ histoire, d’où Marx, Engels et Feuerbach devaient tirer le matérialism
162 re, d’où Marx, Engels et Feuerbach devaient tirer le matérialisme historique, manifestent la seule opposition réellement p
163 ent tirer le matérialisme historique, manifestent la seule opposition réellement profonde qui ait divisé le xixe . Tous le
164 ule opposition réellement profonde qui ait divisé le xixe . Tous les autres débats du siècle perdent leur aiguillon si on
165 réellement profonde qui ait divisé le xixe . Tous les autres débats du siècle perdent leur aiguillon si on les y compare ;
166 res débats du siècle perdent leur aiguillon si on les y compare ; et se réduisent bien souvent à des questions de préséance
167 ce, entre philosophes-professeurs qui connaissent les règles du jeu… 5. C’est même peut-être la première fois que les mots
168 eu… 5. C’est même peut-être la première fois que les mots bourgeois et seul se trouvent accolés, donnant cet aspect d’erre
169 aspect d’erreur typographique… Étymologiquement, le bourgeois est le contraire du solitaire. 6. C’est dans ce sens que,
170 typographique… Étymologiquement, le bourgeois est le contraire du solitaire. 6. C’est dans ce sens que, parlant du marxis
171 , parlant du marxisme, Nicolas Berdiaev écrit : «  Le christianisme est plus radical. » (Marxisme et Religion.) 7. « Et l’
172 plus radical. » (Marxisme et Religion.) 7. « Et l’ ange me dit : « Prends le livre et avale-le. » Ainsi Jean reçoit le po
173 e et Religion.) 7. « Et l’ange me dit : « Prends le livre et avale-le. » Ainsi Jean reçoit le pouvoir de prophétiser. (Ap
174 . « Et l’ange me dit : « Prends le livre et avale- le . » Ainsi Jean reçoit le pouvoir de prophétiser. (Apoc. X. 9.) a. Ro
175  Prends le livre et avale-le. » Ainsi Jean reçoit le pouvoir de prophétiser. (Apoc. X. 9.) a. Rougemont Denis de, « Pens
2 1932, Présence, articles (1932–1946). Cause commune (avril-juin 1932)
176 ommune (avril-juin 1932)b c Mon cher Trolliet, Le pauvre diable obligé de rédiger lui-même ses discours-programmes, cel
177 manque cette espèce de rhétorique prudente à quoi l’ on reconnaît l’intellectuel qui a pris son temps. Mais ce temps, où le
178 pèce de rhétorique prudente à quoi l’on reconnaît l’ intellectuel qui a pris son temps. Mais ce temps, où le prendre en con
179 ellectuel qui a pris son temps. Mais ce temps, où le prendre en conscience, et à qui ? De toutes parts ce serait trahir. S
180 , et à qui ? De toutes parts ce serait trahir. Si l’ on veut agir sur l’époque, il faut d’abord avoir l’époque dans la peau
181 tes parts ce serait trahir. Si l’on veut agir sur l’ époque, il faut d’abord avoir l’époque dans la peau ; c’est aujourd’hu
182 ’on veut agir sur l’époque, il faut d’abord avoir l’ époque dans la peau ; c’est aujourd’hui en disant vite et sans calcul
183 sur l’époque, il faut d’abord avoir l’époque dans la peau ; c’est aujourd’hui en disant vite et sans calcul ce qui nous pr
184 sant vite et sans calcul ce qui nous presse qu’on la dira le moins imparfaitement. Je ne t’envoie qu’une lettre. « Présenc
185 e et sans calcul ce qui nous presse qu’on la dira le moins imparfaitement. Je ne t’envoie qu’une lettre. « Présence » et «
186 réalisation », ces deux thèmes de ton enquête sur l’ Humanisme, je les nouerai dans le seul mot d’actualisation. C’est le m
187 es deux thèmes de ton enquête sur l’Humanisme, je les nouerai dans le seul mot d’actualisation. C’est le mot de passe d’une
188 ton enquête sur l’Humanisme, je les nouerai dans le seul mot d’actualisation. C’est le mot de passe d’une génération révo
189 s nouerai dans le seul mot d’actualisation. C’est le mot de passe d’une génération révolutionnaire. Et en même temps la dé
190 ’une génération révolutionnaire. Et en même temps la définition de notre humanisme, s’il est bien cette volonté de vivre «
191 n cette volonté de vivre « humainement » que dans le monde entier nous voyons se dresser contre la stérilisante convention
192 ans le monde entier nous voyons se dresser contre la stérilisante convention capitaliste, contre le malthusianisme des vir
193 re la stérilisante convention capitaliste, contre le malthusianisme des virtuoses de la pensée sans douleur, contre une bo
194 aliste, contre le malthusianisme des virtuoses de la pensée sans douleur, contre une bourgeoisie que la jouissance du télé
195 a pensée sans douleur, contre une bourgeoisie que la jouissance du téléphone et de l’ascenseur console de sa déchéance mor
196 bourgeoisie que la jouissance du téléphone et de l’ ascenseur console de sa déchéance morale, déchéance jalousée d’ailleur
197 i de travail et de cinéma. Car enfin ce n’est pas l’ humanisme du xvie siècle qui nous chaut, et encore moins celui du xix
198 ne s’agit non plus d’un humanisme qui dresserait l’ homme contre Dieu, ce qui revient, on l’a bien vu, à dresser, contre l
199 resserait l’homme contre Dieu, ce qui revient, on l’ a bien vu, à dresser, contre la grandeur et l’humilité de la personne,
200 ce qui revient, on l’a bien vu, à dresser, contre la grandeur et l’humilité de la personne, l’orgueilleuse et épuisante ad
201 on l’a bien vu, à dresser, contre la grandeur et l’ humilité de la personne, l’orgueilleuse et épuisante adresse des ingén
202 u, à dresser, contre la grandeur et l’humilité de la personne, l’orgueilleuse et épuisante adresse des ingénieurs. Notre h
203 contre la grandeur et l’humilité de la personne, l’ orgueilleuse et épuisante adresse des ingénieurs. Notre humanisme ne s
204 çu à la manière des intellectuels bourgeois, dans l’ abstrait, c’est-à-dire comme un système intéressant, abstraction faite
205 abstraction faite de ses moyens d’actualisation. L’ humanisme d’un homme de 1932 et qui veut vivre, au lieu d’amèrement la
206 veut vivre, au lieu d’amèrement languir, — c’est la Révolution. Mais quelle révolution ? Humanisme ou Révolution : défens
207 révolution ? Humanisme ou Révolution : défense de l’ homme total contre tout ce qui tend à le mécaniser, à le disqualifier,
208 éfense de l’homme total contre tout ce qui tend à le mécaniser, à le disqualifier, à le châtrer de toute violence spiritue
209 e total contre tout ce qui tend à le mécaniser, à le disqualifier, à le châtrer de toute violence spirituelle et créatrice
210 ce qui tend à le mécaniser, à le disqualifier, à le châtrer de toute violence spirituelle et créatrice 8. Et comment se d
211 et créatrice 8. Et comment se défendre, sinon par l’ attaque ? Sinon par l’affirmation de l’identité nécessaire de la pensé
212 ment se défendre, sinon par l’attaque ? Sinon par l’ affirmation de l’identité nécessaire de la pensée et de l’action ; sin
213 sinon par l’attaque ? Sinon par l’affirmation de l’ identité nécessaire de la pensée et de l’action ; sinon par l’effort d
214 non par l’affirmation de l’identité nécessaire de la pensée et de l’action ; sinon par l’effort d’instaurer une économie g
215 ation de l’identité nécessaire de la pensée et de l’ action ; sinon par l’effort d’instaurer une économie générale de la vi
216 écessaire de la pensée et de l’action ; sinon par l’ effort d’instaurer une économie générale de la vie impliquant cette id
217 par l’effort d’instaurer une économie générale de la vie impliquant cette identité et fondant sur elle ses valeurs les plu
218 nt cette identité et fondant sur elle ses valeurs les plus hautes et les plus quotidiennes à la fois. Car s’il faut une mor
219 t fondant sur elle ses valeurs les plus hautes et les plus quotidiennes à la fois. Car s’il faut une morale simple, nous ne
220 us pensez, pensez ce que vous faites. » Alors que la formule d’une éthique bourgeoise est au contraire : « Faites comme to
221 ais faire. » Faut-il, pour d’autres, préciser que le manque d’originalité de telles remarques constitue précisément à nos
222 ité, elles suffiront longtemps encore à provoquer l’ indignation révélatrice de tous les amateurs d’inextricable ; d’autre
223 ore à provoquer l’indignation révélatrice de tous les amateurs d’inextricable ; d’autre part, elles définissent suffisammen
224 le ; d’autre part, elles définissent suffisamment la cause commune de la jeunesse européenne. L’humanisme n’est rien s’il
225 lles définissent suffisamment la cause commune de la jeunesse européenne. L’humanisme n’est rien s’il n’est commun comme l
226 mment la cause commune de la jeunesse européenne. L’ humanisme n’est rien s’il n’est commun comme le péril qui nous menace 
227 e. L’humanisme n’est rien s’il n’est commun comme le péril qui nous menace ; s’il ne considère avant tout la commune condi
228 il qui nous menace ; s’il ne considère avant tout la commune condition humaine et sa défense contre un système dont l’acti
229 tion humaine et sa défense contre un système dont l’ action dissolvante s’étend à toute la terre. Mais dès lors qu’il devie
230 système dont l’action dissolvante s’étend à toute la terre. Mais dès lors qu’il devient cette défense de l’homme, il recou
231 rre. Mais dès lors qu’il devient cette défense de l’ homme, il recouvre exactement le concept et les méthodes de la Révolut
232 cette défense de l’homme, il recouvre exactement le concept et les méthodes de la Révolution naissante. Les uns viennent
233 de l’homme, il recouvre exactement le concept et les méthodes de la Révolution naissante. Les uns viennent de Marx, les au
234 recouvre exactement le concept et les méthodes de la Révolution naissante. Les uns viennent de Marx, les autres de Proudho
235 ncept et les méthodes de la Révolution naissante. Les uns viennent de Marx, les autres de Proudhon ; de Hegel ou de Kierkeg
236 a Révolution naissante. Les uns viennent de Marx, les autres de Proudhon ; de Hegel ou de Kierkegaard ; de la Raison sous s
237 res de Proudhon ; de Hegel ou de Kierkegaard ; de la Raison sous ses formes violentes et créatrices, ou de la Foi. Peu de
238 on sous ses formes violentes et créatrices, ou de la Foi. Peu de malentendus pourtant. Car c’est le plus souvent sous le c
239 de la Foi. Peu de malentendus pourtant. Car c’est le plus souvent sous le coup d’indignations pareilles et de sursauts du
240 entendus pourtant. Car c’est le plus souvent sous le coup d’indignations pareilles et de sursauts du sentiment blessé que
241 ssé que ces jeunes gens se sont connus. Cela crée le sous-entendu fondamental. Ensuite on confronte les buts et les moyens
242 le sous-entendu fondamental. Ensuite on confronte les buts et les moyens inséparables de ces fins. Tout cela nous dépasse e
243 ndu fondamental. Ensuite on confronte les buts et les moyens inséparables de ces fins. Tout cela nous dépasse et se meut su
244 Tout cela nous dépasse et se meut sur un plan où la vanité chercherait en vain la moindre nourriture. Le congrès de Franc
245 meut sur un plan où la vanité chercherait en vain la moindre nourriture. Le congrès de Francfort9 organisé par Plans a rév
246 vanité chercherait en vain la moindre nourriture. Le congrès de Francfort9 organisé par Plans a révélé cette unité fondame
247 ent en nous non pas des maîtres ni des noms, mais la consternante misère d’une époque où tout ce qu’un homme peut aimer et
248 igine vivante, flétri, dénaturé, inverti, saboté. La Révolution pour nous n’est pas la haine ; et ce n’est pas détruire. C
249 nverti, saboté. La Révolution pour nous n’est pas la haine ; et ce n’est pas détruire. C’est le salut10 de l’homme en tant
250 st pas la haine ; et ce n’est pas détruire. C’est le salut10 de l’homme en tant qu’homme et qui sent. « Une Actualité insé
251 e ; et ce n’est pas détruire. C’est le salut10 de l’ homme en tant qu’homme et qui sent. « Une Actualité inséparable d’une
252 ur définir nos tâches immédiates. Formule qui, je le sais, éveille un même « accord » profond, appelle une même « résoluti
253 nd, appelle une même « résolution » concrète chez les meilleurs esprits de notre génération, ceux de l’Ordre nouveau (Arnau
254 i chaque jour se découvrent et sont découverts. À l’ extrême droite, le groupe de Réaction (Thierry Maulnier) ; chez les je
255 écouvrent et sont découverts. À l’extrême droite, le groupe de Réaction (Thierry Maulnier) ; chez les jeunes protestants,
256 , le groupe de Réaction (Thierry Maulnier) ; chez les jeunes protestants, le groupe barthien de Hic et Nunc ; chez les poèt
257 (Thierry Maulnier) ; chez les jeunes protestants, le groupe barthien de Hic et Nunc ; chez les poètes philosophes, certain
258 estants, le groupe barthien de Hic et Nunc ; chez les poètes philosophes, certains éléments subsistants de Philosophies, ou
259 t planétaire. Rien ne peut plus nous détourner de la solidarité du péril. Et les problèmes exquis où s’attardent encore ce
260 plus nous détourner de la solidarité du péril. Et les problèmes exquis où s’attardent encore ceux que je décrirai comme les
261 où s’attardent encore ceux que je décrirai comme les Prêtres de l’Insoluble, nous n’avons plus le droit d’y prêter une lib
262 encore ceux que je décrirai comme les Prêtres de l’ Insoluble, nous n’avons plus le droit d’y prêter une libérale complais
263 mme les Prêtres de l’Insoluble, nous n’avons plus le droit d’y prêter une libérale complaisance. Laisse donc tous ces noms
264 sance. Laisse donc tous ces noms dont se meublent les notes de ton enquête, comme de guéridons démodés supportant des bouqu
265 dons démodés supportant des bouquins d’ornement : la cause des intellectuels n’est plus celle de l’esprit11. Laisse-les do
266  : la cause des intellectuels n’est plus celle de l’ esprit11. Laisse-les donc chercher, jusqu’à la fin de leurs loisirs fi
267 ellectuels n’est plus celle de l’esprit11. Laisse- les donc chercher, jusqu’à la fin de leurs loisirs fiévreux, s’il faut fa
268 de l’esprit11. Laisse-les donc chercher, jusqu’à la fin de leurs loisirs fiévreux, s’il faut faire quelque chose, et comm
269 mple, est toujours évident dès que nous possédons le courage de le voir et de l’assumer. Un acte de présence à la misère d
270 ours évident dès que nous possédons le courage de le voir et de l’assumer. Un acte de présence à la misère du siècle, une
271 ès que nous possédons le courage de le voir et de l’ assumer. Un acte de présence à la misère du siècle, une présence enfin
272 de le voir et de l’assumer. Un acte de présence à la misère du siècle, une présence enfin qui soit un acte : car pour nous
273 enfin qui soit un acte : car pour nous désormais la Révolution vit, si nous vivons. Autour de nous tout craque et nous ap
274 . Autour de nous tout craque et nous appelle. Sur les tenants d’un ordre délabré, le Souci tend son aile mortifère, — la « 
275 nous appelle. Sur les tenants d’un ordre délabré, le Souci tend son aile mortifère, — la « Frau Sorge » de notre Goethe. D
276 rdre délabré, le Souci tend son aile mortifère, —  la « Frau Sorge » de notre Goethe. De tout cela nous ne sommes plus, n’a
277 ut cela nous ne sommes plus, n’appartenant plus à la mort, mais au combat de ce qui meurt et de ce qui renaît par cette mo
278 ce qui meurt et de ce qui renaît par cette mort. La neurasthénie broie les villes, où nous sommes peut-être seuls à conna
279 qui renaît par cette mort. La neurasthénie broie les villes, où nous sommes peut-être seuls à connaître la force et la pré
280 illes, où nous sommes peut-être seuls à connaître la force et la présence. Nous connaissons la vérité. Qu’elle soit tombée
281 us sommes peut-être seuls à connaître la force et la présence. Nous connaissons la vérité. Qu’elle soit tombée du ciel ou
282 nnaître la force et la présence. Nous connaissons la vérité. Qu’elle soit tombée du ciel ou qu’elle éclate dans les choses
283 u’elle soit tombée du ciel ou qu’elle éclate dans les choses, on nous demande seulement l’acte de la saisir dans son impéri
284 éclate dans les choses, on nous demande seulement l’ acte de la saisir dans son impérieuse évidence et dans sa violence éte
285 s les choses, on nous demande seulement l’acte de la saisir dans son impérieuse évidence et dans sa violence éternelle. Pr
286 s espoir ? Tâchons d’être joyeux et humbles. 8. Le seul climat qui permette et suscite l’aventure spirituelle. Le seul a
287 bles. 8. Le seul climat qui permette et suscite l’ aventure spirituelle. Le seul aussi qui donne un sens à la douceur de
288 t qui permette et suscite l’aventure spirituelle. Le seul aussi qui donne un sens à la douceur de vivre, à la tendresse.
289 re spirituelle. Le seul aussi qui donne un sens à la douceur de vivre, à la tendresse. 9. Février 1932. Pour la constitut
290 aussi qui donne un sens à la douceur de vivre, à la tendresse. 9. Février 1932. Pour la constitution d’un front unique d
291 de vivre, à la tendresse. 9. Février 1932. Pour la constitution d’un front unique des groupements révolutionnaires allem
292 y assistèrent, ainsi qu’un délégué fasciste. 10. La Révolution ne nous conduira pas au Paradis ; mais elle reste le seul
293 ne nous conduira pas au Paradis ; mais elle reste le seul effort effectif que l’homme d’aujourd’hui peut produire pour se
294 dis ; mais elle reste le seul effort effectif que l’ homme d’aujourd’hui peut produire pour se tirer de l’Enfer, où il s’es
295 omme d’aujourd’hui peut produire pour se tirer de l’ Enfer, où il s’est mis. 11. Entendons par ce terme si vague l’activit
296 l s’est mis. 11. Entendons par ce terme si vague l’ activité créatrice et « actuelle » de la pensée, inséparable d’un ordr
297 si vague l’activité créatrice et « actuelle » de la pensée, inséparable d’un ordre humain total. b. Rougemont Denis de,
298 Genève, avril–juin 1932, p. 12-15. c. Précédé de la note suivante : « Le texte qu’on va lire est une réponse et un écho à
299 32, p. 12-15. c. Précédé de la note suivante : «  Le texte qu’on va lire est une réponse et un écho à l’étude Autour de l’
300 texte qu’on va lire est une réponse et un écho à l’ étude Autour de l’humanisme en marche, de Gilbert Trolliet, que nous a
301 re est une réponse et un écho à l’étude Autour de l’ humanisme en marche, de Gilbert Trolliet, que nous avons publiée en tê
302 liet, que nous avons publiée en tête du numéro 1. Le lecteur voudra bien s’y reporter. »
3 1933, Présence, articles (1932–1946). Paysage de tête : poème (1933)
303 plus, dans cette journée violente et trop vaste, la venue des bien-aimées clairières entre deux pluies, ni d’une femme ni
304 une fièvre pour agrandir et soudain noyer de suie le regard ni d’une lueur muette qui s’approche et nous aime. Car voici l
305 eur muette qui s’approche et nous aime. Car voici l’ heure de la solitude et l’origine d’un mutisme sombre et ce n’est poin
306 qui s’approche et nous aime. Car voici l’heure de la solitude et l’origine d’un mutisme sombre et ce n’est point menace en
307 et nous aime. Car voici l’heure de la solitude et l’ origine d’un mutisme sombre et ce n’est point menace encore ni même fr
308 et ces battements de paupières plus terribles que l’ orage, ces battements d’espace au-dessus des pluies qui se tirent à l’
309 nts d’espace au-dessus des pluies qui se tirent à l’ horizon dans un paysage agité de la grande puissance diluvienne où mai
310 ui se tirent à l’horizon dans un paysage agité de la grande puissance diluvienne où maintenant descend, suspendue dans le
311 diluvienne où maintenant descend, suspendue dans le soir et dans la transparence, l’épouvantable constatation de la mort.
312 aintenant descend, suspendue dans le soir et dans la transparence, l’épouvantable constatation de la mort. d. Rougemont
313 , suspendue dans le soir et dans la transparence, l’ épouvantable constatation de la mort. d. Rougemont Denis de, « Pays
314 s la transparence, l’épouvantable constatation de la mort. d. Rougemont Denis de, « Paysage de tête », Présence, Lausan
4 1934, Présence, articles (1932–1946). L’œuvre et la mort d’Arnaud Dandieu (1934)
315 L’ œuvre et la mort d’Arnaud Dandieu (1934)e La vie d’Arnaud Dandieu s
316 L’œuvre et la mort d’Arnaud Dandieu (1934)e La vie d’Arnaud Dandieu s’exprime to
317 L’œuvre et la mort d’Arnaud Dandieu (1934)e La vie d’Arnaud Dandieu s’exprime tout entière dans une doctrine de l’ac
318 ndieu s’exprime tout entière dans une doctrine de l’ acte créateur. Il a écrit quelques ouvrages d’une audace précise. Ils
319 elle y viendrait. Quelque temps, il a pu éprouver la solidité de sa prise, la qualité du dynamisme qu’il suscitait, et il
320 temps, il a pu éprouver la solidité de sa prise, la qualité du dynamisme qu’il suscitait, et il est mort l’été dernier, d
321 lité du dynamisme qu’il suscitait, et il est mort l’ été dernier, dans cet élan qui va s’épanouir. Ce révolutionnaire était
322 urtois et gai. On veut que ce soient des agités : les vrais sont des ordonnateurs, solidement humains. Sa force était réell
323 Sa force était réelle, et peu démonstrative. Car la tension d’un esprit créateur n’est pas, comme il arrive chez les inad
324 n esprit créateur n’est pas, comme il arrive chez les inadaptés, une tension entre l’individu et le milieu qui lui résiste.
325 e il arrive chez les inadaptés, une tension entre l’ individu et le milieu qui lui résiste. Elle est à l’intérieur de la pe
326 ez les inadaptés, une tension entre l’individu et le milieu qui lui résiste. Elle est à l’intérieur de la personne. Elle e
327 milieu qui lui résiste. Elle est à l’intérieur de la personne. Elle est la personne même. Elle ne se résout pas dans une i
328 . Elle est à l’intérieur de la personne. Elle est la personne même. Elle ne se résout pas dans une indignation ni dans une
329 compréhension résignée, mais dans un acte. C’est la tension qui s’institue entre la finesse, la pénétration de l’esprit d
330 ns un acte. C’est la tension qui s’institue entre la finesse, la pénétration de l’esprit d’une part, et d’autre part la pr
331 C’est la tension qui s’institue entre la finesse, la pénétration de l’esprit d’une part, et d’autre part la prise de la ma
332 ui s’institue entre la finesse, la pénétration de l’ esprit d’une part, et d’autre part la prise de la main, la puissance d
333 nétration de l’esprit d’une part, et d’autre part la prise de la main, la puissance de bouleversement concret. Il semblait
334 l’esprit d’une part, et d’autre part la prise de la main, la puissance de bouleversement concret. Il semblait que Dandieu
335 d’une part, et d’autre part la prise de la main, la puissance de bouleversement concret. Il semblait que Dandieu incarnai
336 incarnait cette image du « spirituel » tel qu’il l’ a défini. Il avait le profil nettement dessiné, mais une rudesse puiss
337 e du « spirituel » tel qu’il l’a défini. Il avait le profil nettement dessiné, mais une rudesse puissante sur le front ; d
338 nettement dessiné, mais une rudesse puissante sur le front ; des mains fines à la poignée ferme. On ne saurait trop insist
339 udesse puissante sur le front ; des mains fines à la poignée ferme. On ne saurait trop insister sur la portée d’une observ
340 la poignée ferme. On ne saurait trop insister sur la portée d’une observation de cet ordre. Qu’est-ce que la personne, la
341 tée d’une observation de cet ordre. Qu’est-ce que la personne, la singularité, la raison d’être d’un homme, sinon cette te
342 ervation de cet ordre. Qu’est-ce que la personne, la singularité, la raison d’être d’un homme, sinon cette tension qu’il i
343 ordre. Qu’est-ce que la personne, la singularité, la raison d’être d’un homme, sinon cette tension qu’il incarne et qui es
344 inon cette tension qu’il incarne et qui est aussi le ressort de sa puissance d’imagination concrète, de son acte ? Je me s
345 , lors de ma première rencontre avec Dandieu, par l’ apparente contradiction entre sa face et son profil, je veux dire par
346 ion entre sa face et son profil, je veux dire par la tension que son visage rendait visible, ou mieux, imposait à la vue,
347 son visage rendait visible, ou mieux, imposait à la vue, comme l’image même de la « personne »12, et comme le symbole imp
348 ndait visible, ou mieux, imposait à la vue, comme l’ image même de la « personne »12, et comme le symbole impérieux de cet
349 u mieux, imposait à la vue, comme l’image même de la « personne »12, et comme le symbole impérieux de cet Ordre nouveau qu
350 comme l’image même de la « personne »12, et comme le symbole impérieux de cet Ordre nouveau qu’il annonçait. « L’intellige
351 impérieux de cet Ordre nouveau qu’il annonçait. «  L’ intelligence est une épée », écrivait-il. Avec ce nom de chevalier !
352 Avec ce nom de chevalier ! Son œuvre déconcerte les catégories de la critique : c’est peut-être qu’elle en institue une n
353 evalier ! Son œuvre déconcerte les catégories de la critique : c’est peut-être qu’elle en institue une nouvelle. Le livre
354 c’est peut-être qu’elle en institue une nouvelle. Le livre qu’il publiait, à Oxford, en 1927, sur Marcel Proust et sa Révé
355 oust et sa Révélation psychologique, en donnerait la meilleure formule. C’est une défense du primat de l’affectif et de la
356 meilleure formule. C’est une défense du primat de l’ affectif et de la créativité dans l’exercice de la connaissance. Une œ
357 . C’est une défense du primat de l’affectif et de la créativité dans l’exercice de la connaissance. Une œuvre « subjective
358 du primat de l’affectif et de la créativité dans l’ exercice de la connaissance. Une œuvre « subjective » alors ? Justemen
359 l’affectif et de la créativité dans l’exercice de la connaissance. Une œuvre « subjective » alors ? Justement non. Rompant
360  subjective » alors ? Justement non. Rompant avec la coutume du temps Dandieu n’y fait intervenir aucun lyrisme personnel.
361 lyrisme personnel. Ce livre aigu, technique, dont la rigueur se fait volontiers agressive sans jamais s’abaisser aux clich
362 livre de recherche et de découvertes précises, et le plus dépourvu qui soit d’enveloppes « littéraires » ou de fraudes rhé
363 té nouvelle et d’une aventure authentique. Ouvrez- le  : vous serez frappé d’y voir cités plus d’hommes de science que de li
364 es d’une critique universitaire. Ce petit livre a l’ aspect d’un chantier, et non point d’un salon littéraire. Il est tout
365 point d’un salon littéraire. Il est tout animé de la joie de construire et d’abattre. Grande allure intellectuelle. — Comm
366 erçu en France ? Il renversait trop de théories à la mode, avec trop de dédain peut-être… On a fait plus de bruit autour d
367 tent en œuvre sur le plan économique et politique les mêmes méthodes de synthèse. En vérité, ces deux ouvrages sont dans le
368 synthèse. En vérité, ces deux ouvrages sont dans le prolongement nécessaire du Proust, et c’est là qu’il faudra chercher
369 a chercher leur origine spirituelle. Décadence de la nation française critique le nationalisme présent au nom de l’instinc
370 tuelle. Décadence de la nation française critique le nationalisme présent au nom de l’instinct qui relie l’homme à son lie
371 nçaise critique le nationalisme présent au nom de l’ instinct qui relie l’homme à son lieu, à sa patrie réelle. Et c’est en
372 tionalisme présent au nom de l’instinct qui relie l’ homme à son lieu, à sa patrie réelle. Et c’est encore au nom de l’homm
373 eu, à sa patrie réelle. Et c’est encore au nom de l’ homme concret que Le Cancer américain apporte une critique du capitali
374 le. Et c’est encore au nom de l’homme concret que Le Cancer américain apporte une critique du capitalisme. Critique plus c
375 pseudo-science, sur une métaphysique idéaliste de la matière, mais sur la révolte de la personne contre l’envahissante pro
376 ne métaphysique idéaliste de la matière, mais sur la révolte de la personne contre l’envahissante prolétarisation. Ces deu
377 e idéaliste de la matière, mais sur la révolte de la personne contre l’envahissante prolétarisation. Ces deux livres sont
378 atière, mais sur la révolte de la personne contre l’ envahissante prolétarisation. Ces deux livres sont au début de quelque
379 chose. On serait tenté de dire : d’une action, si le mot n’était mal entendu de la plupart de nos contemporains. « L’actio
380 mal entendu de la plupart de nos contemporains. «  L’ action », Dandieu ne la concevait pas distincte ou détachée d’une doct
381 rt de nos contemporains. « L’action », Dandieu ne la concevait pas distincte ou détachée d’une doctrine. Cartésien par l’a
382 stincte ou détachée d’une doctrine. Cartésien par l’ audace méthodique de son analyse, il refusait pourtant la distinction
383 e méthodique de son analyse, il refusait pourtant la distinction rationaliste et libérale entre la pensée pure et l’acte q
384 ant la distinction rationaliste et libérale entre la pensée pure et l’acte qui l’atteste. Il professait que « l’écrivain n
385 rationaliste et libérale entre la pensée pure et l’ acte qui l’atteste. Il professait que « l’écrivain ne saurait sans se
386 te et libérale entre la pensée pure et l’acte qui l’ atteste. Il professait que « l’écrivain ne saurait sans se diminuer re
387 pure et l’acte qui l’atteste. Il professait que «  l’ écrivain ne saurait sans se diminuer refuser d’endosser entièrement, j
388 er refuser d’endosser entièrement, jusqu’au bout, les conséquences de ce qu’il écrit ». Voilà pourquoi, parti de recherches
389 ourquoi, parti de recherches d’ordre poétique sur la métaphore chez Proust, Blake et Keats, il devait aboutir à une éthiqu
390 tique. Cette trajectoire très singulière parcourt les domaines les plus variés de la recherche humaine. Jamais Dandieu n’y
391 trajectoire très singulière parcourt les domaines les plus variés de la recherche humaine. Jamais Dandieu n’y dispersa ses
392 ngulière parcourt les domaines les plus variés de la recherche humaine. Jamais Dandieu n’y dispersa ses puissances d’évalu
393 uation novatrice. On en trouvera des marques dans les notices et dans l’introduction de son Anthologie des Philosophes cont
394 en trouvera des marques dans les notices et dans l’ introduction de son Anthologie des Philosophes contemporains, mais aus
395 ie des Philosophes contemporains, mais aussi dans les études qu’il publiait en revue sur la phénoménologie du savant, sur l
396 aussi dans les études qu’il publiait en revue sur la phénoménologie du savant, sur la psychologie morbide et primitive, su
397 ait en revue sur la phénoménologie du savant, sur la psychologie morbide et primitive, sur les nomades, sur Nietzsche ou D
398 ant, sur la psychologie morbide et primitive, sur les nomades, sur Nietzsche ou Diderot, sur des questions de droit, sur le
399 zsche ou Diderot, sur des questions de droit, sur le régime du travail. Toutes ces recherches le conduisaient au grand ouv
400 , sur le régime du travail. Toutes ces recherches le conduisaient au grand ouvrage dont le premier volume vient de paraîtr
401 ouvrage dont le premier volume vient de paraître, La Révolution nécessaire.f Certes, on abuse du mot révolution. On le fa
402 essaire.f Certes, on abuse du mot révolution. On le fait synonyme tantôt d’émeute et de chambardement, tantôt d’anarchie
403 de dictature économique. Pour Dandieu, comme pour les jeunes hommes groupés à L’Ordre nouveau autour de sa doctrine, révo
404 doctrine, révolution signifie d’abord création de l’ ordre. L’action sociale ne saurait être que la résultante irrépressibl
405 révolution signifie d’abord création de l’ordre. L’ action sociale ne saurait être que la résultante irrépressible de cet
406 de l’ordre. L’action sociale ne saurait être que la résultante irrépressible de cet acte fondamental qui pour eux définit
407 ible de cet acte fondamental qui pour eux définit la personne. Si l’on admet, avec Marx et Proudhon, que la révolution con
408 fondamental qui pour eux définit la personne. Si l’ on admet, avec Marx et Proudhon, que la révolution consiste à sauver l
409 rsonne. Si l’on admet, avec Marx et Proudhon, que la révolution consiste à sauver l’homme concret de l’empire grandissant
410 et Proudhon, que la révolution consiste à sauver l’ homme concret de l’empire grandissant des tyrannies abstraites, étatis
411 a révolution consiste à sauver l’homme concret de l’ empire grandissant des tyrannies abstraites, étatistes ou financières,
412 tistes ou financières, il faudra reconnaître dans le personnalisme la seule éthique actuellement libératrice. N’est-ce pas
413 ères, il faudra reconnaître dans le personnalisme la seule éthique actuellement libératrice. N’est-ce pas d’ailleurs l’éth
414 actuellement libératrice. N’est-ce pas d’ailleurs l’ éthique que la jeune France se voit à peu près seule à défendre dans l
415 ibératrice. N’est-ce pas d’ailleurs l’éthique que la jeune France se voit à peu près seule à défendre dans l’Europe d’aujo
416 e France se voit à peu près seule à défendre dans l’ Europe d’aujourd’hui ? Dictature de la liberté g, proclamera la suite
417 fendre dans l’Europe d’aujourd’hui ? Dictature de la liberté g, proclamera la suite de La Révolution nécessaire. Dandieu v
418 jourd’hui ? Dictature de la liberté g, proclamera la suite de La Révolution nécessaire. Dandieu voyait dans cette revendic
419 Dictature de la liberté g, proclamera la suite de La Révolution nécessaire. Dandieu voyait dans cette revendication la mis
420 cessaire. Dandieu voyait dans cette revendication la mission permanente, la raison d’être de la France. Peu de jours avant
421 t dans cette revendication la mission permanente, la raison d’être de la France. Peu de jours avant l’accident chirurgical
422 cation la mission permanente, la raison d’être de la France. Peu de jours avant l’accident chirurgical qui devait entraîne
423 la raison d’être de la France. Peu de jours avant l’ accident chirurgical qui devait entraîner sa mort, à 36 ans, il avait
424 a mort, à 36 ans, il avait ajouté de sa main, sur les épreuves de son dernier ouvrage, une conclusion qui nous apparaît dou
425 nous apparaît doublement prophétique. Rappelant «  les antiques sottises racistes, matérialistes et théocratiques » qui mont
426 s, matérialistes et théocratiques » qui montent à l’ assaut d’une Europe décadente, il ajoutait ces quelques phrases d’une
427 bre grandeur : En dépit d’un préjugé romantique, la décadence n’est pas belle, ni la mort. Ce qui est beau, c’est la lutt
428 jugé romantique, la décadence n’est pas belle, ni la mort. Ce qui est beau, c’est la lutte contre la mort. Ce qui est gran
429 est pas belle, ni la mort. Ce qui est beau, c’est la lutte contre la mort. Ce qui est grandiose, c’est la victoire de l’ho
430 i la mort. Ce qui est beau, c’est la lutte contre la mort. Ce qui est grandiose, c’est la victoire de l’homme. Le long des
431 lutte contre la mort. Ce qui est grandiose, c’est la victoire de l’homme. Le long des côtes de la Méditerranée et de la me
432 mort. Ce qui est grandiose, c’est la victoire de l’ homme. Le long des côtes de la Méditerranée et de la mer du Nord, remo
433 ’est la victoire de l’homme. Le long des côtes de la Méditerranée et de la mer du Nord, remontant le Danube ou le Rhin, s’
434 homme. Le long des côtes de la Méditerranée et de la mer du Nord, remontant le Danube ou le Rhin, s’avance l’antique ennem
435 e la Méditerranée et de la mer du Nord, remontant le Danube ou le Rhin, s’avance l’antique ennemi de l’homme. On l’appelle
436 anée et de la mer du Nord, remontant le Danube ou le Rhin, s’avance l’antique ennemi de l’homme. On l’appellera État, maté
437 du Nord, remontant le Danube ou le Rhin, s’avance l’ antique ennemi de l’homme. On l’appellera État, matérialisme, racisme
438 e Danube ou le Rhin, s’avance l’antique ennemi de l’ homme. On l’appellera État, matérialisme, racisme ou tyrannie ; mais s
439 le Rhin, s’avance l’antique ennemi de l’homme. On l’ appellera État, matérialisme, racisme ou tyrannie ; mais son essence e
440 tout pas en français. Ce n’est pas notre faute si la France est, en effet, aujourd’hui comme hier, la dernière écluse. Ce
441 , la dernière écluse. Ce n’est pas notre faute si le pays des petits rentiers et du traité de Versailles est tout de même
442 libres. Ce n’est pas notre faute si, pour sauver l’ Occident et l’Europe, nous devons d’abord, aujourd’hui, nous appuyer s
443 est pas notre faute si, pour sauver l’Occident et l’ Europe, nous devons d’abord, aujourd’hui, nous appuyer sur la France.
444 ous devons d’abord, aujourd’hui, nous appuyer sur la France. Il ne s’agit pas de défendre une idée ou une cité. Il ne s’ag
445 tion, de création, de Révolution. Nous sommes sur la terre décisive. L’heure est venue. Allons-y. Défi véritablement héro
446 de Révolution. Nous sommes sur la terre décisive. L’ heure est venue. Allons-y. Défi véritablement héroïque, et vocation o
447 ritablement héroïque, et vocation orgueilleuse de l’ homme ! Mais dans la mesure où cet orgueil déborde l’humilité du servi
448 , et vocation orgueilleuse de l’homme ! Mais dans la mesure où cet orgueil déborde l’humilité du serviteur d’une grande ca
449 omme ! Mais dans la mesure où cet orgueil déborde l’ humilité du serviteur d’une grande cause, [ne] semble-t-il pas qu’il s
450 cisive ». 12. Ce qu’il y a de plus profond dans l’ homme, c’est la peau, a-t-on écrit. On pourrait dire aussi que rien n’
451 Ce qu’il y a de plus profond dans l’homme, c’est la peau, a-t-on écrit. On pourrait dire aussi que rien n’est plus visibl
452 eci définit un visage. e. Rougemont Denis de, «  L’ œuvre et la mort d’Arnaud Dandieu », Présence, Lausanne et Genève, 193
453 un visage. e. Rougemont Denis de, « L’œuvre et la mort d’Arnaud Dandieu », Présence, Lausanne et Genève, 1933–1934, p. 
454 Lausanne et Genève, 1933–1934, p. 57-59. f. Voir le compte rendu que Rougemont en fait dans les Cahiers du Sud, et repris
455 . Voir le compte rendu que Rougemont en fait dans les Cahiers du Sud, et repris dans Politique de la personne . g. Titre
456 les Cahiers du Sud, et repris dans Politique de la personne . g. Titre de l’ouvrage que publiera en 1936 Robert Aron, e
457 ris dans Politique de la personne . g. Titre de l’ ouvrage que publiera en 1936 Robert Aron, et dont Rougemont rendra com
458 Robert Aron, et dont Rougemont rendra compte dans la NRF .
5 1935, Présence, articles (1932–1946). Contre Nietzsche (avril-mai 1935)
459 pleine et ferme confiance en soi, qui seule élève le cœur et l’esprit. À celui qui a perdu cette confiance, plus rien ne s
460 erme confiance en soi, qui seule élève le cœur et l’ esprit. À celui qui a perdu cette confiance, plus rien ne saurait appa
461 urait apparaître digne et grand ; son âme a perdu la noble dureté qui donne au sérieux toute sa force. Fr. H. Jacobi Nie
462 toute sa force. Fr. H. Jacobi Nietzsche restera la meilleure description de l’anarchie spirituelle du xixe siècle. Il e
463 i Nietzsche restera la meilleure description de l’ anarchie spirituelle du xixe siècle. Il en a souffert si vivement qu’
464 si vivement qu’il n’est presque pas un aspect de la mentalité du siècle athée auquel sa pensée d’écorché n’ait réagi par
465 gi par une diamétrale opposition. Il coupe toutes les erreurs du temps à 180 degrés, juste. Son œuvre nous apporte un dossi
466 tif des contradictions révoltantes qui figurèrent la bonne conscience d’une élite, et par là même, presque toujours toniqu
467 eignante, elle nous excite à des affirmations qui la condamnent. La forme aphoristique que Nietzsche cultiva de plus en pl
468 nous excite à des affirmations qui la condamnent. La forme aphoristique que Nietzsche cultiva de plus en plus exclusivemen
469 te œuvre, qu’à prendre celle-ci dans sa totalité, l’ on découvre constitutive. D’autres poètes ont paru, qui ne furent pas
470 ictoires : Kierkegaard, dans ce même siècle. Mais les contradictions de Kierkegaard renvoient dans leur ensemble à l’unité
471 ons de Kierkegaard renvoient dans leur ensemble à l’ unité suprême, celle de la foi. Elles appartiennent à sa vision du mon
472 nt dans leur ensemble à l’unité suprême, celle de la foi. Elles appartiennent à sa vision du monde, elles en expriment la
473 tiennent à sa vision du monde, elles en expriment la tension créatrice, — toute création naissant d’une tension établie pa
474 tension établie par quelque unité dominante entre la conception de l’unité d’une part, sa réalisation concrète de l’autre.
475 ar quelque unité dominante entre la conception de l’ unité d’une part, sa réalisation concrète de l’autre. Il est de la nat
476 rt, sa réalisation concrète de l’autre. Il est de la nature même de la foi — telle que la conçoit Kierkegaard — que la vie
477 concrète de l’autre. Il est de la nature même de la foi — telle que la conçoit Kierkegaard — que la vie, la pensée, la so
478 e. Il est de la nature même de la foi — telle que la conçoit Kierkegaard — que la vie, la pensée, la souffrance du chrétie
479 e la foi — telle que la conçoit Kierkegaard — que la vie, la pensée, la souffrance du chrétien soient sous-tendues par des
480 — telle que la conçoit Kierkegaard — que la vie, la pensée, la souffrance du chrétien soient sous-tendues par des contrad
481 e la conçoit Kierkegaard — que la vie, la pensée, la souffrance du chrétien soient sous-tendues par des contradictions des
482 s-tendues par des contradictions destructrices de l’ humain, créatrices du divin, c’est-à-dire de « l’homme nouveau », ou c
483 l’humain, créatrices du divin, c’est-à-dire de «  l’ homme nouveau », ou c’est encore à dire de l’homme qui vit en Christ,
484 de « l’homme nouveau », ou c’est encore à dire de l’ homme qui vit en Christ, et non plus dans la forme du siècle présent.
485 re de l’homme qui vit en Christ, et non plus dans la forme du siècle présent. Mais les contradictions de Nietzsche ne ren
486 t non plus dans la forme du siècle présent. Mais les contradictions de Nietzsche ne renvoient justement qu’à cette forme d
487 me du monde qui provoquait sans répit son dégoût. L’ absence de dogmatique chez Nietzsche est le sinistre négatif du dogmat
488 égoût. L’absence de dogmatique chez Nietzsche est le sinistre négatif du dogmatisme mort de ses contemporains. Il attaque
489 Il attaque à droite et à gauche, utilisant tantôt la droite contre la gauche, tantôt la gauche contre la droite, sans que
490 te et à gauche, utilisant tantôt la droite contre la gauche, tantôt la gauche contre la droite, sans que jamais un centre
491 ilisant tantôt la droite contre la gauche, tantôt la gauche contre la droite, sans que jamais un centre vif ne soit rendu,
492 droite contre la gauche, tantôt la gauche contre la droite, sans que jamais un centre vif ne soit rendu, par ces éclairs
493 rquoi sa pensée, dans son ensemble, évoque plutôt l’ image d’un court-circuit que celle d’un foyer dynamique rayonnant à ga
494 bien d’autres directions nouvelles, inconnues de la gauche et de la droite. Il ne quitte pas le plan des erreurs qu’il at
495 irections nouvelles, inconnues de la gauche et de la droite. Il ne quitte pas le plan des erreurs qu’il attaque. Il ne fai
496 es de la gauche et de la droite. Il ne quitte pas le plan des erreurs qu’il attaque. Il ne fait guère qu’y introduire une
497 sité délirante. C’est là son jeu, délibéré, comme l’ est aussi le coup final : car l’excès même de cette intensité finit pa
498 te. C’est là son jeu, délibéré, comme l’est aussi le coup final : car l’excès même de cette intensité finit par faire écla
499 , délibéré, comme l’est aussi le coup final : car l’ excès même de cette intensité finit par faire éclater tout le jeu. Les
500 e de cette intensité finit par faire éclater tout le jeu. Les réactions accélérées se neutralisent, ou provoquent des expl
501 te intensité finit par faire éclater tout le jeu. Les réactions accélérées se neutralisent, ou provoquent des explosions. T
502 ou provoquent des explosions. Toute explosion de la « forme du monde » renvoie certes l’esprit à ce qui seul peut transfo
503 explosion de la « forme du monde » renvoie certes l’ esprit à ce qui seul peut transformer le monde. Mais Nietzsche n’a pas
504 ie certes l’esprit à ce qui seul peut transformer le monde. Mais Nietzsche n’a pas voulu distinguer et saisir le sens dern
505 Mais Nietzsche n’a pas voulu distinguer et saisir le sens dernier de cette transformation. (Exemples : le chapitre « Femme
506 sens dernier de cette transformation. (Exemples : le chapitre « Femmes » dans les Œuvres posthumes : tantôt il attaque ceu
507 ormation. (Exemples : le chapitre « Femmes » dans les Œuvres posthumes : tantôt il attaque ceux qui idéalisent la femme, ta
508 posthumes : tantôt il attaque ceux qui idéalisent la femme, tantôt ceux qui l’animalisent. Il formule contre le mariage de
509 que ceux qui idéalisent la femme, tantôt ceux qui l’ animalisent. Il formule contre le mariage des revendications antisocia
510 tantôt ceux qui l’animalisent. Il formule contre le mariage des revendications antisociales — « géniales » —, puis il édi
511 contradictoires, d’affirmations qui s’entretuent, la relation de l’homme et de la femme perd tout caractère rationnel — ce
512 , d’affirmations qui s’entretuent, la relation de l’ homme et de la femme perd tout caractère rationnel — ce qui n’est cert
513 ns qui s’entretuent, la relation de l’homme et de la femme perd tout caractère rationnel — ce qui n’est certes pas à prior
514 pour mieux dire : avec une cruelle facilité — que la relation de l’homme et de la femme n’est guère mieux pensable dans le
515  : avec une cruelle facilité — que la relation de l’ homme et de la femme n’est guère mieux pensable dans les catégories ch
516 uelle facilité — que la relation de l’homme et de la femme n’est guère mieux pensable dans les catégories chrétiennes abso
517 me et de la femme n’est guère mieux pensable dans les catégories chrétiennes absolues, telles que les pose par exemple un K
518 s les catégories chrétiennes absolues, telles que les pose par exemple un Kierkegaard. Mais il y a cette différence capital
519 ais il y a cette différence capitale : que toutes les négations (antithèses) de Kierkegaard se fondent dans l’acte de foi o
520 tions (antithèses) de Kierkegaard se fondent dans l’ acte de foi originel (synthèse), et qu’alors même qu’il nie toute poss
521 lité de thèse provisoire (ce que n’avait pas fait l’ apôtre Paul, autorisant en fin de compte le mariage), il renvoie à cet
522 s fait l’apôtre Paul, autorisant en fin de compte le mariage), il renvoie à cette synthèse dont tout chrétien attend, dès
523 nthèse dont tout chrétien attend, dès maintenant, le retour. (Je songe à la réponse du Christ aux sadducéens, Luc 20/33.)
524 en attend, dès maintenant, le retour. (Je songe à la réponse du Christ aux sadducéens, Luc 20/33.) Nietzsche, opposant l’a
525 t aux sadducéens, Luc 20/33.) Nietzsche, opposant l’ antithèse à la thèse par haine de ce qui est, non par amour de ce qui
526 ns, Luc 20/33.) Nietzsche, opposant l’antithèse à la thèse par haine de ce qui est, non par amour de ce qui doit être « cr
527 rt des autres analyses nietzschéennes portant sur les valeurs morales. Il attaque l’altruisme, et démasque dans cette « ver
528 ennes portant sur les valeurs morales. Il attaque l’ altruisme, et démasque dans cette « vertu » les effets du « ressentime
529 que l’altruisme, et démasque dans cette « vertu » les effets du « ressentiment » le plus bassement égoïste. Mais ailleurs,
530 ns cette « vertu » les effets du « ressentiment » le plus bassement égoïste. Mais ailleurs, il exalte l’égoïsme contre la
531 plus bassement égoïste. Mais ailleurs, il exalte l’ égoïsme contre la soi-disant morale du Christ, et au nom d’une espèce
532 goïste. Mais ailleurs, il exalte l’égoïsme contre la soi-disant morale du Christ, et au nom d’une espèce de « virtu » dont
533 laisse entendre souvent qu’elle n’est encore que le désespoir de celui qui ne peut aimer : hommage déguisé de l’angoisse
534 r de celui qui ne peut aimer : hommage déguisé de l’ angoisse à l’« altruisme » véritable. Tout bien compté, — reste la seu
535 i ne peut aimer : hommage déguisé de l’angoisse à l’ « altruisme » véritable. Tout bien compté, — reste la seule angoisse.
536  altruisme » véritable. Tout bien compté, — reste la seule angoisse. Etc., etc.) Nietzsche a horreur de toute dogmatique13
537 e a horreur de toute dogmatique13 : il est par là le type le plus parfait du clerc déraciné, du clerc sans mains, ou aux m
538 eur de toute dogmatique13 : il est par là le type le plus parfait du clerc déraciné, du clerc sans mains, ou aux mains fol
539 es, du désorienté excité. Il apparaît alors comme le héros du monde bourgeois. Il incarne à la puissance infinie le goût d
540 s comme le héros du monde bourgeois. Il incarne à la puissance infinie le goût du néant — le refus de la vocation — qui ca
541 onde bourgeois. Il incarne à la puissance infinie le goût du néant — le refus de la vocation — qui caractérisera le monde
542 incarne à la puissance infinie le goût du néant —  le refus de la vocation — qui caractérisera le monde bourgeois aux yeux
543 puissance infinie le goût du néant — le refus de la vocation — qui caractérisera le monde bourgeois aux yeux de l’histori
544 ant — le refus de la vocation — qui caractérisera le monde bourgeois aux yeux de l’historien personnaliste, encore que trè
545  qui caractérisera le monde bourgeois aux yeux de l’ historien personnaliste, encore que très peu de bourgeois aient eu con
546 voir ce goût. Mais son opposition si frénétique à la bêtise de sa classe, si elle suffit à le rendre complice, en fin de c
547 étique à la bêtise de sa classe, si elle suffit à le rendre complice, en fin de compte, des erreurs qu’il flagelle, ne suf
548 unique agent de contact réel et vital14, et c’est l’ éclair dans notre vie d’une transcendance, l’amour en actes, l’action
549 ’est l’éclair dans notre vie d’une transcendance, l’ amour en actes, l’action directe, réciproque et gratuite, au sens où l
550 notre vie d’une transcendance, l’amour en actes, l’ action directe, réciproque et gratuite, au sens où la grâce est gratui
551 ction directe, réciproque et gratuite, au sens où la grâce est gratuite, — sens absolument différent de celui qu’a prôné A
552 olument différent de celui qu’a prôné André Gide. Le lien concret entre deux êtres, ou bien entre une pensée et les contem
553 ret entre deux êtres, ou bien entre une pensée et les contemporains, ne peut être établi qu’en vertu d’une action obéissant
554 elle obéit ; envers Qui elle est responsable. Si l’ homme vient en aide à son voisin par son action, par sa pensée critiqu
555 u’il ne s’agit encore que d’égoïsme bien compris. L’ homme se sert en servant son voisin, il n’échappe point à la loi, et l
556 sert en servant son voisin, il n’échappe point à la loi, et la loi n’établit jamais ni le contact vital ni l’amour du pro
557 rvant son voisin, il n’échappe point à la loi, et la loi n’établit jamais ni le contact vital ni l’amour du prochain. Le v
558 ppe point à la loi, et la loi n’établit jamais ni le contact vital ni l’amour du prochain. Le voisin, que la loi bien comp
559 et la loi n’établit jamais ni le contact vital ni l’ amour du prochain. Le voisin, que la loi bien comprise nous ordonne d’
560 amais ni le contact vital ni l’amour du prochain. Le voisin, que la loi bien comprise nous ordonne d’aider dans sa peine,
561 tact vital ni l’amour du prochain. Le voisin, que la loi bien comprise nous ordonne d’aider dans sa peine, reste un voisin
562 ne, reste un voisin, ne devient pas prochain. Car le centre du monde reste « moi ». De moi à lui, je ne vois qu’une distan
563 ». De moi à lui, je ne vois qu’une distance. Seul le rapport de responsabilité réciproque devant un Tiers infiniment souve
564 ntact pur, permet une action vraie, et transforme le monde. Mais Nietzsche a beau se colleter avec son temps, il a beau, p
565 colleter avec son temps, il a beau, par dépit de l’ impuissant amour « moral », renverser les données terrestres, tenter l
566 dépit de l’impuissant amour « moral », renverser les données terrestres, tenter le contact par la haine, il n’aboutit jama
567 moral », renverser les données terrestres, tenter le contact par la haine, il n’aboutit jamais à saisir son prochain, à co
568 ser les données terrestres, tenter le contact par la haine, il n’aboutit jamais à saisir son prochain, à concrétiser sa pe
569 à saisir son prochain, à concrétiser sa pensée, à la soumettre à la critique souveraine et parfaitement pénétrante de l’am
570 ochain, à concrétiser sa pensée, à la soumettre à la critique souveraine et parfaitement pénétrante de l’amour. Il ne parv
571 critique souveraine et parfaitement pénétrante de l’ amour. Il ne parvient à rendre responsables du prochain ni son amour,
572 ragique, parfois aussi d’une turbulence maladive, la situation typique de l’éthos du bourgeois : l’isolation. Ses tentativ
573 ’une turbulence maladive, la situation typique de l’ éthos du bourgeois : l’isolation. Ses tentatives d’évaluation s’entre-
574 e, la situation typique de l’éthos du bourgeois : l’ isolation. Ses tentatives d’évaluation s’entre-détruisent et n’aboutis
575 aluation s’entre-détruisent et n’aboutissent qu’à la plus radicale dévaluation de la vie et de la mort que son siècle ait
576 ’aboutissent qu’à la plus radicale dévaluation de la vie et de la mort que son siècle ait pu concevoir, et qu’il fut seul
577 qu’à la plus radicale dévaluation de la vie et de la mort que son siècle ait pu concevoir, et qu’il fut seul sans doute, d
578 rnale panique que ses derniers billets trahissent l’ invasion. Quel homme a vécu pareil drame ? Découvrir qu’on s’est suici
579 eil drame ? Découvrir qu’on s’est suicidé, et que la seule lucidité subsiste, sans appui. Tous comptes faits, toute vie co
580 e consumée, toute position rongée et corrodée par le réactif qu’elle secrète, toutes ces évaluations rageusement neutralis
581 re appartient au monde « bourgeois », au monde de la pensée sans mains, et des mains privées de pensée ? ⁂ Je ne cherche p
582 pas à être juste. Nietzsche non plus. Qu’importe le nom qu’un observateur « impartial » voudra donner à ma justice combat
583 on créatrice implique une dogmatique. De même que le squelette naît de la peau, la dogmatique naît des contacts actifs que
584 une dogmatique. De même que le squelette naît de la peau, la dogmatique naît des contacts actifs que nous entretenons ave
585 atique. De même que le squelette naît de la peau, la dogmatique naît des contacts actifs que nous entretenons avec le mond
586 aît des contacts actifs que nous entretenons avec le monde. Le mot de dogmatique éveille en général l’image d’un squelette
587 ntacts actifs que nous entretenons avec le monde. Le mot de dogmatique éveille en général l’image d’un squelette de musée,
588 le monde. Le mot de dogmatique éveille en général l’ image d’un squelette de musée, dépouillé. Mais tous les vertébrés viva
589 age d’un squelette de musée, dépouillé. Mais tous les vertébrés vivants possèdent un squelette vivant sur lequel s’attachen
590 sèdent un squelette vivant sur lequel s’attachent les muscles. Pas d’effort qui ne suppose l’existence de ce squelette. 14
591 ttachent les muscles. Pas d’effort qui ne suppose l’ existence de ce squelette. 14. Sur l’expression de contact vital, voi
592 ne suppose l’existence de ce squelette. 14. Sur l’ expression de contact vital, voir les travaux importants d’Eugène Mink
593 tte. 14. Sur l’expression de contact vital, voir les travaux importants d’Eugène Minkowski, en particulier La Schizophréni
594 aux importants d’Eugène Minkowski, en particulier La Schizophrénie, p. 82-83 (Payot, 1927). « Le contact vital avec la réa
595 ulier La Schizophrénie, p. 82-83 (Payot, 1927). «  Le contact vital avec la réalité semble bien se rapporter aux facteurs i
596 , p. 82-83 (Payot, 1927). « Le contact vital avec la réalité semble bien se rapporter aux facteurs irrationnels de la vie 
597 le bien se rapporter aux facteurs irrationnels de la vie », etc. Nietzsche l’a chanté, mais comme un bien perdu. h. Roug
598 facteurs irrationnels de la vie », etc. Nietzsche l’ a chanté, mais comme un bien perdu. h. Rougemont Denis de, « Contre
6 1935, Présence, articles (1932–1946). Autour de Nietzsche : petite note sur l’injustice (novembre 1935)
599 Autour de Nietzsche : petite note sur l’ injustice (novembre 1935)i Plus une personne est grande, plus il es
600 — c’est-à-dire une personne qui comble absolument la mesure de l’homme : qui pourra se dire juste devant elle ? La loyauté
601 e une personne qui comble absolument la mesure de l’ homme : qui pourra se dire juste devant elle ? La loyauté prononcera :
602 l’homme : qui pourra se dire juste devant elle ? La loyauté prononcera : Je suis injuste, je me rebelle, je ne puis autre
603 … » Une personne relativement grande, maintenant. La loyauté dira encore : Je me sens injuste en sa présence, et je ne pui
604 me sens injuste en sa présence, et je ne puis, en la jugeant, que lui faire tort. Mais alors il ne s’agit plus, on le voit
605 lui faire tort. Mais alors il ne s’agit plus, on le voit, de la même injustice. Par exemple, il se peut que l’injustice v
606 ort. Mais alors il ne s’agit plus, on le voit, de la même injustice. Par exemple, il se peut que l’injustice vis-à-vis d’u
607 de la même injustice. Par exemple, il se peut que l’ injustice vis-à-vis d’une œuvre humaine, injustice nécessaire, inévita
608 se peut que cette « injustice », qui fait tort à la vérité fragmentaire incarnée par une grande œuvre, rende raison à la
609 ire incarnée par une grande œuvre, rende raison à la vérité finale que cette œuvre a voulu nier. Descendons jusqu’à nous.
610 , dans ce qu’il a refusé d’être, réside justement l’ essentiel au regard de la vérité. Or c’est là qu’il est important de p
611 d’être, réside justement l’essentiel au regard de la vérité. Or c’est là qu’il est important de prendre position, et non a
612 -à-dire une situation qui exige de chacun de nous la confession et la déclaration de ce qu’il tient pour plus vrai que sa
613 tion qui exige de chacun de nous la confession et la déclaration de ce qu’il tient pour plus vrai que sa vie, et à quoi to
614 l tient pour plus vrai que sa vie, et à quoi tout le reste s’ordonne, y compris cette justice dont nous pensions, non sans
615 e dont nous pensions, non sans ingénuité, détenir la mesure ? L’intelligence alors ? L’intelligence est justement ce qui o
616 pensions, non sans ingénuité, détenir la mesure ? L’ intelligence alors ? L’intelligence est justement ce qui ordonne « le
617 nuité, détenir la mesure ? L’intelligence alors ? L’ intelligence est justement ce qui ordonne « le reste » — à peu près to
618 s ? L’intelligence est justement ce qui ordonne «  le reste » — à peu près tout — à cet acte de foi décisif. Il est un temp
619 cer, et un temps pour trancher : pour ou contre. ( L’ intelligence est une épée, disait Dandieu.) Et tout jugement de cette
620 us, d’opposer à toute prise de parti bien franche le rappel revêche et stérilisant à la « complexité » des problèmes, — ce
621 i bien franche le rappel revêche et stérilisant à la « complexité » des problèmes, — cette démagogie du juste milieu et de
622 roblèmes, — cette démagogie du juste milieu et de la scrupuleuse impartialité, responsable à mon sens de tout ce mal qu’on
623  ? (Comme si nous étions calvinistes !) Cela dit, l’ imprudence de mon article sur Nietzsche demeure visible, au point qu’o
624 cle sur Nietzsche demeure visible, au point qu’on la croirait préméditée. Je m’en consolerais mieux si M. Miéville avait p
625 crètement usé, pour me confondre, des malentendus les plus graves auxquels se prêtait mon langage. (Exemples : vocation, au
626 Exemples : vocation, au sens strict où je prenais le mot, ne signifie pas « message », ni « impression » ou même « forte i
627 i « impression » ou même « forte impression » que l’ on est investi d’une « mission », mais bien appel de Dieu, appel que l
628 e « mission », mais bien appel de Dieu, appel que l’ on accepte ou que l’on refuse ; grâce n’a qu’un sens vaguement métapho
629 bien appel de Dieu, appel que l’on accepte ou que l’ on refuse ; grâce n’a qu’un sens vaguement métaphorique et sentimental
630 aguement métaphorique et sentimental en dehors de l’ Évangile, où ce mot signifie pardon, rémission des péchés et de la pei
631 e mot signifie pardon, rémission des péchés et de la peine de mort qu’ils entraînent, c’est-à-dire, en un mot : Jésus-Chri
632 e n’en étais plus à confondre cette discipline de l’ esprit créateur avec n’importe quelle « doctrine que l’on s’interdit d
633 rit créateur avec n’importe quelle « doctrine que l’ on s’interdit d’examiner » ! J’avais écrit : « De même que le squelett
634 rdit d’examiner » ! J’avais écrit : « De même que le squelette naît de la peau, la dogmatique naît des contacts actifs que
635 ’avais écrit : « De même que le squelette naît de la peau, la dogmatique naît des contacts actifs que nous entretenons ave
636 rit : « De même que le squelette naît de la peau, la dogmatique naît des contacts actifs que nous entretenons avec le mond
637 aît des contacts actifs que nous entretenons avec le monde. » Etc.) Quant au paragraphe final sur mes « convoitises célest
638 y voient un trait de cette « volonté de rabaisser l’ adversaire » que M. Miéville me reproche, sans apparence de « justice 
639 re encore celui-ci : que nous ne sommes pas juges les uns des autres, ni de nous-mêmes, mais tout au plus : de nos choix. E
640 che » que nous jugeons ou que nous défendons — ou les deux à la fois — bon gré mal gré. Tout le reste est professorat. 15
641 s — ou les deux à la fois — bon gré mal gré. Tout le reste est professorat. 15. « Cette prétention chrétienne à vouloir
642 Cette prétention chrétienne à vouloir monopoliser la grâce », écrit M. Miéville en une phrase proprement stupéfiante… i.
643 Denis de, « Autour de Nietzsche : petite note sur l’ injustice », Présence, Lausanne et Genève, novembre 1935, p. 30-31.
7 1946, Présence, articles (1932–1946). Le Nœud gordien renoué (avril 1946)
644 Le Nœud gordien renoué (avril 1946)j Un oracle avait annoncé que sera
645 out sur son char, pénétrerait au grand galop dans le temple de Jupiter. Les quelques-uns qui le savaient étaient exclus de
646 trerait au grand galop dans le temple de Jupiter. Les quelques-uns qui le savaient étaient exclus de la compétition par leu
647 p dans le temple de Jupiter. Les quelques-uns qui le savaient étaient exclus de la compétition par leur science même : on
648 es quelques-uns qui le savaient étaient exclus de la compétition par leur science même : on exigeait l’innocence de l’âme.
649 a compétition par leur science même : on exigeait l’ innocence de l’âme. Quant au peuple, il vaquait à ses travaux. Un jour
650 ar leur science même : on exigeait l’innocence de l’ âme. Quant au peuple, il vaquait à ses travaux. Un jour, un paysan nom
651 lle de Phrygie. Il déclare qu’il voudrait visiter les curiosités de l’endroit. On lui indique le temple et la mairie. Sans
652 déclare qu’il voudrait visiter les curiosités de l’ endroit. On lui indique le temple et la mairie. Sans hésiter, il entre
653 siter les curiosités de l’endroit. On lui indique le temple et la mairie. Sans hésiter, il entre au temple sur son char, e
654 iosités de l’endroit. On lui indique le temple et la mairie. Sans hésiter, il entre au temple sur son char, et les prêtres
655 Sans hésiter, il entre au temple sur son char, et les prêtres s’écrient en chœur : C’est lui le Roi ! Voici le Roi que nous
656 ar, et les prêtres s’écrient en chœur : C’est lui le Roi ! Voici le Roi que nous attendions ! Devenu roi par hasard et grâ
657 res s’écrient en chœur : C’est lui le Roi ! Voici le Roi que nous attendions ! Devenu roi par hasard et grâce d’innocence,
658 i par hasard et grâce d’innocence, Gordius voulut le rester par astucieuse appropriation d’artisan. Il saute à terre, bien
659 saute à terre, bien décidé à montrer aux gens de la ville ce qu’il sait faire. Entre les cornes de l’autel et le timon du
660 r aux gens de la ville ce qu’il sait faire. Entre les cornes de l’autel et le timon du char, le voilà qui se met à nouer le
661 la ville ce qu’il sait faire. Entre les cornes de l’ autel et le timon du char, le voilà qui se met à nouer le plus beau nœ
662 qu’il sait faire. Entre les cornes de l’autel et le timon du char, le voilà qui se met à nouer le plus beau nœud qu’il ai
663 Entre les cornes de l’autel et le timon du char, le voilà qui se met à nouer le plus beau nœud qu’il ait jamais rêvé. Il
664 et le timon du char, le voilà qui se met à nouer le plus beau nœud qu’il ait jamais rêvé. Il y passe des heures indicible
665 indicibles d’intensité et de concentration. C’est le temps de sa vie ! Ce nœud l’attestera. L’innocence du prédestiné, et
666 concentration. C’est le temps de sa vie ! Ce nœud l’ attestera. L’innocence du prédestiné, et la malice du paysan s’y mêlen
667 . C’est le temps de sa vie ! Ce nœud l’attestera. L’ innocence du prédestiné, et la malice du paysan s’y mêlent dans un ver
668 e nœud l’attestera. L’innocence du prédestiné, et la malice du paysan s’y mêlent dans un vertige de trouvailles, dans une
669 ige de trouvailles, dans une embrouille de génie. Les tours les plus retors de cette corde nouent à la grâce l’ambition, ma
670 uvailles, dans une embrouille de génie. Les tours les plus retors de cette corde nouent à la grâce l’ambition, marient au l
671 Les tours les plus retors de cette corde nouent à la grâce l’ambition, marient au luxe fou l’avarice ingénieuse, resserren
672 les plus retors de cette corde nouent à la grâce l’ ambition, marient au luxe fou l’avarice ingénieuse, resserrent dans le
673 nouent à la grâce l’ambition, marient au luxe fou l’ avarice ingénieuse, resserrent dans les liens d’un calcul instinctif l
674 au luxe fou l’avarice ingénieuse, resserrent dans les liens d’un calcul instinctif l’enthousiasme de la grandeur, et son an
675 resserrent dans les liens d’un calcul instinctif l’ enthousiasme de la grandeur, et son angoisse. Ah ! le compère assez ma
676 es liens d’un calcul instinctif l’enthousiasme de la grandeur, et son angoisse. Ah ! le compère assez malin pour dénouer c
677 nthousiasme de la grandeur, et son angoisse. Ah ! le compère assez malin pour dénouer ce chef-d’œuvre brut, par Jupiter !
678 re né ! On ne sait rien du règne de Gordius. Mais le nœud qu’il noua devint célèbre. Un oracle nouveau ne tarda pas à le c
679 devint célèbre. Un oracle nouveau ne tarda pas à le consacrer chez les Grecs : quiconque parviendrait à le dénouer régner
680 n oracle nouveau ne tarda pas à le consacrer chez les Grecs : quiconque parviendrait à le dénouer régnerait sur toute l’Asi
681 nsacrer chez les Grecs : quiconque parviendrait à le dénouer régnerait sur toute l’Asie. ⁂ Car un nœud, c’est d’abord un
682 que parviendrait à le dénouer régnerait sur toute l’ Asie. ⁂ Car un nœud, c’est d’abord un anneau : signe d’alliance et de
683 . Qu’une intrigue se noue, elle gouverne aussitôt les personnages qui la vivent. Un mariage se noue, une amitié se noue. Qu
684 noue, elle gouverne aussitôt les personnages qui la vivent. Un mariage se noue, une amitié se noue. Quand on peut dire d’
685 sait comment se fait un nœud, sait aussi comment le défaire, et le refaire : il détient le secret du pouvoir. ⁂ De tous l
686 e fait un nœud, sait aussi comment le défaire, et le refaire : il détient le secret du pouvoir. ⁂ De tous les pays de la G
687 si comment le défaire, et le refaire : il détient le secret du pouvoir. ⁂ De tous les pays de la Grèce, les rêveurs de cou
688 aire : il détient le secret du pouvoir. ⁂ De tous les pays de la Grèce, les rêveurs de couronnes vinrent contempler l’objet
689 tient le secret du pouvoir. ⁂ De tous les pays de la Grèce, les rêveurs de couronnes vinrent contempler l’objet. Ils venai
690 ecret du pouvoir. ⁂ De tous les pays de la Grèce, les rêveurs de couronnes vinrent contempler l’objet. Ils venaient s’asseo
691 rèce, les rêveurs de couronnes vinrent contempler l’ objet. Ils venaient s’asseoir devant lui, pour l’étudier avec passion,
692 l’objet. Ils venaient s’asseoir devant lui, pour l’ étudier avec passion, pendant des heures, des jours, des mois. Combien
693 ssi, apparemment stupides, apprirent à déchiffrer les circonvolutions de cet emblème d’un cerveau né d’une pensée unique et
694 u né d’une pensée unique et vraiment souveraine : la royauté dans son état naissant. Je me souviens. J’allais m’asseoir au
695 Je me souviens. J’allais m’asseoir au temple, par les jours de colère intraitable. Je dardais un regard de flèche vers ce n
696 ssible. Des vengeances profondes se lovaient dans les torsions à peine visibles imaginées à l’intérieur de cet objet monstr
697 contempler ceux qui, à mon instar, contemplaient le Nœud gordien. Celui qui le portait en lui-même et qui se faisait anal
698 instar, contemplaient le Nœud gordien. Celui qui le portait en lui-même et qui se faisait analyser à Delphes : il venait
699 nous, renouant par cette fascination tout ce que le prêtre avait dénoué en lui, refaisant le nœud d’après nature, l’aiman
700 t ce que le prêtre avait dénoué en lui, refaisant le nœud d’après nature, l’aimant parce qu’il était dans sa nature… Celui
701 dénoué en lui, refaisant le nœud d’après nature, l’ aimant parce qu’il était dans sa nature… Celui qui prévoyait la scienc
702 e qu’il était dans sa nature… Celui qui prévoyait la science de nos jours, et me disait : — Il n’est de science que des ph
703 it : — Il n’est de science que des phénomènes que l’ on peut reproduire à volonté. Quel est ce nœud, réel, unique, inimitab
704 mitable, cet objet devant moi indubitable, et que la science ne saura vérifier ni dénouer, faute de pouvoir le répéter sel
705 ce ne saura vérifier ni dénouer, faute de pouvoir le répéter selon la recette ? Il n’existe donc point, à ses yeux. Elle n
706 ier ni dénouer, faute de pouvoir le répéter selon la recette ? Il n’existe donc point, à ses yeux. Elle n’en veut pas. Et
707 pas. Et si personne n’en veut, il est à moi ! Je le prends : il est ma liberté… Celui qui murmurait parfois : — C’est con
708 allusion à ses malheurs d’amour, si simples…) Et la femme de Gordius vint un jour s’acquitter de ses dévotions. Devant le
709 vint un jour s’acquitter de ses dévotions. Devant le nœud, après un long regard, elle dit : — Ce n’est pas si ressemblant
710 ne s’en allait qu’enrichi d’un mystère. Tel était le culte de Gordius, religion de l’inextricable. ⁂ Alexandre impatient e
711 stère. Tel était le culte de Gordius, religion de l’ inextricable. ⁂ Alexandre impatient et tricheur pénétra dans le temple
712 e. ⁂ Alexandre impatient et tricheur pénétra dans le temple au jour dit par ses astres, trancha le nœud d’un coup d’épée,
713 ans le temple au jour dit par ses astres, trancha le nœud d’un coup d’épée, ramassa le prix pour la durée de la saison. (T
714 astres, trancha le nœud d’un coup d’épée, ramassa le prix pour la durée de la saison. (Tous les joueurs perdent.) Ce coup
715 ha le nœud d’un coup d’épée, ramassa le prix pour la durée de la saison. (Tous les joueurs perdent.) Ce coup d’épée a fond
716 ’un coup d’épée, ramassa le prix pour la durée de la saison. (Tous les joueurs perdent.) Ce coup d’épée a fondé le monde m
717 ramassa le prix pour la durée de la saison. (Tous les joueurs perdent.) Ce coup d’épée a fondé le monde moderne. Monde de l
718 Tous les joueurs perdent.) Ce coup d’épée a fondé le monde moderne. Monde de la simplification hâtive ; de l’expérience qu
719 Ce coup d’épée a fondé le monde moderne. Monde de la simplification hâtive ; de l’expérience qui détruit son objet ; de l’
720 e moderne. Monde de la simplification hâtive ; de l’ expérience qui détruit son objet ; de l’action efficace au détriment d
721 tive ; de l’expérience qui détruit son objet ; de l’ action efficace au détriment du sens ; de la tricherie ; de la rupture
722  ; de l’action efficace au détriment du sens ; de la tricherie ; de la rupture des liens. ⁂ Et depuis lors, je vais criant
723 icace au détriment du sens ; de la tricherie ; de la rupture des liens. ⁂ Et depuis lors, je vais criant : Renouez-le ! Re
724 liens. ⁂ Et depuis lors, je vais criant : Renouez- le  ! Renouez-le ! Car il y va de tout, du sens même de nos vies ! Car vo
725 epuis lors, je vais criant : Renouez-le ! Renouez- le  ! Car il y va de tout, du sens même de nos vies ! Car vous mourez, no
726 ne se noue. Car vous mourez, nous mourons tous à la vie spirituelle, la vie précieuse. Elle n’existe que prise au complex
727 s mourez, nous mourons tous à la vie spirituelle, la vie précieuse. Elle n’existe que prise au complexe d’une âme, dans le
728 le n’existe que prise au complexe d’une âme, dans les détours du plus profond secret noué. Et si vous simplifiez, vous gagn
729 secret noué. Et si vous simplifiez, vous gagnerez le monde, mais au prix d’une âme, la vôtre. Car vous mourez, nous mouron
730 , vous gagnerez le monde, mais au prix d’une âme, la vôtre. Car vous mourez, nous mourons tous à l’amour qui ne tranche ri
731 e, la vôtre. Car vous mourez, nous mourons tous à l’ amour qui ne tranche rien, mais qui épouse, qui accepte, qui pénètre,
732 ation sans espoir, ces replis infinis qui défient le calcul. Car une coupe transversale pratiquée dans un nœud n’apprend à
733 près rien sur sa structure, mais détruit à jamais l’ espoir de le refaire, de le comprendre ou de s’y laisser prendre, c’es
734 r sa structure, mais détruit à jamais l’espoir de le refaire, de le comprendre ou de s’y laisser prendre, c’est-à-dire de
735 mais détruit à jamais l’espoir de le refaire, de le comprendre ou de s’y laisser prendre, c’est-à-dire de connaître ou d’
736 ⁂ On ne peut opposer au mythe du Nœud gordien que l’ histoire du Nœud-le-plus-simple-du-monde. La guerre civile était près
737 que l’histoire du Nœud-le-plus-simple-du-monde. La guerre civile était près d’éclater entre les Suisses, au xve siècle.
738 nde. La guerre civile était près d’éclater entre les Suisses, au xve siècle. Un messager fut envoyé à l’Hermite qui vivai
739 Suisses, au xve siècle. Un messager fut envoyé à l’ Hermite qui vivait dans les Alpes et qui détenait, sans nul pouvoir, l
740 n messager fut envoyé à l’Hermite qui vivait dans les Alpes et qui détenait, sans nul pouvoir, l’autorité. En cette extrémi
741 dans les Alpes et qui détenait, sans nul pouvoir, l’ autorité. En cette extrémité, et tout espoir perdu, on sollicitait son
742 espoir perdu, on sollicitait son conseil. Il prit la corde qui servait de ceinture à sa pauvre robe. Il en fit une boucle
743 à sa pauvre robe. Il en fit une boucle simple et la tendit au messager : — Va leur donner ce nœud, dit-il, afin qu’ils le
744 r : — Va leur donner ce nœud, dit-il, afin qu’ils le dénouent. — Un faible enfant pourrait le dénouer ! — L’homme le plus
745 n qu’ils le dénouent. — Un faible enfant pourrait le dénouer ! — L’homme le plus fort ne pourrait pas le dénouer, et il fa
746 ouent. — Un faible enfant pourrait le dénouer ! — L’ homme le plus fort ne pourrait pas le dénouer, et il faudrait alors l’
747 Un faible enfant pourrait le dénouer ! — L’homme le plus fort ne pourrait pas le dénouer, et il faudrait alors l’épée pou
748 dénouer ! — L’homme le plus fort ne pourrait pas le dénouer, et il faudrait alors l’épée pour le trancher, si chacun tire
749 ne pourrait pas le dénouer, et il faudrait alors l’ épée pour le trancher, si chacun tire par un bout, de son côté16. ⁂ —
750 pas le dénouer, et il faudrait alors l’épée pour le trancher, si chacun tire par un bout, de son côté16. ⁂ — Quelle histo
751 . De cette action de Nicolas de Flue est résultée la Suisse moderne, ce nœud gordien de langues, de races, de religions, d
752 s, de races, de religions, d’institutions de tous les temps, qu’aucune épée n’a jamais pu trancher. j. Rougemont Denis de
753 ’a jamais pu trancher. j. Rougemont Denis de, «  Le Nœud gordien renoué », Présence, Lausanne et Genève, avril 1946, p. 4