1 1932, Présence, articles (1932–1946). Penser avec les mains (fragments) (janvier 1932)
1 )a Nous voici donc à ce point d’étrangeté où l’ on oppose la pensée et l’action jusque sur le plan de l’éthique. Or, un
2 ance, cependant ils seraient en droit d’agir, car on s’y peut contenter de vraisemblance. La monstrueuse contradiction ! C
3 ettre un acte qui vous laisse dans le doute (et l’ on s’attire pourtant une responsabilité) que de simplement prétendre que
4 e s’enrichir : modeste, il s’y conforme. « … Et l’ on s’attire pourtant une responsabilité. » Il faut bien constater que pl
5 n affirmer de décisif. Admirable invention, que l’ on pourrait baptiser la pensée sans douleur, et qui comblait si doucemen
6 ise sans trop de mauvais goût par une jeunesse qu’ on dit outrecuidante, — qui surtout n’a pas envie de se faire assassiner
7 laisse construire autre chose que des bétonnages. On n’en retiendra qu’un dans ces pages, celui que l’on voudrait nommer l
8 n’en retiendra qu’un dans ces pages, celui que l’ on voudrait nommer l’a priori éthique. Kierkegaard, après avoir formulé
9 — dont l’avènement historique est dans nos mains. On nous a menés à ce point — il n’est question de s’en réjouir ni de le
10 uvoir trancher le débat sans risquer le poteau. L’ on s’en rend compte en écrivant ces lignes, et qu’il y a peu de mérite,
11 sée qui ne menace pas encore à bout portant. ⁂ L’ on résume ici la substance de quelques passages relatifs à différentes a
12 elatifs à différentes acceptions du verbe penser. On a noté d’abord qu’une espèce humaine est en voie de disparaître, en p
13 ient intelligents ; et autrement, du journalisme. On compare ensuite certains types nationaux. On remarque par exemple qu’
14 sme. On compare ensuite certains types nationaux. On remarque par exemple qu’en France, l’admiration pour un philosophe s’
15 n’est guère que dans les feuilles de gauche que l’ on voit encore décerner l’épithète de « puissant » à des « penseurs » co
16  » comme Victor Margueritte ou Barbusse. À droite on parle plutôt de « rigueur », en serrant les dents. Mais partout, l’él
17 lemand serait plutôt du type « tiefsinnig ». Mais on remarque à ce propos qu’une certaine finesse et une certaine profonde
18 au-delà de ces caractéristiques devenues banales, on tente de la ramener à celle des deux interprétations étymologiques du
19 e contre ; l’Allemand pèse sur les choses. D’où l’ on conclut encore que la pensée figure pour le Français une activité ord
20 tivité ordonnatrice ; pour l’Allemand, titanique. On fait alors intervenir une définition de la pensée d’où découleront le
21 s les démarches de l’esprit. Et Dostoïevski, dont on peut dire qu’il pensait par péchés et remords. Ainsi pensèrent tous c
22 e réaction éthique, c’est-à-dire une réalisation. On veut faire voir par ces exemples qu’il ne s’agit nullement d’« applic
23  pris corps » pour qu’il devienne « applicable ». On ne crée rien de vivant avec ce qu’on a, mais seulement avec ce qu’on
24 pplicable ». On ne crée rien de vivant avec ce qu’ on a, mais seulement avec ce qu’on est. C’est pourquoi il n’y a de créat
25 vivant avec ce qu’on a, mais seulement avec ce qu’ on est. C’est pourquoi il n’y a de création possible que par les individ
26 en actes : ce n’est pas descendre au social, si l’ on accepte l’héroïsme. Un siècle bourgeois comme fut le dernier, n’osait
27 « réalisation » que sociale : car il faut bien qu’ on s’y mette à plusieurs, — rassurante perspective, puisqu’on sait qu’il
28 tte à plusieurs, — rassurante perspective, puisqu’ on sait qu’il n’existe pas d’héroïsme collectif. Le héros est toujours s
29 itude. Une pensée et une vie sont aux prises : qu’ on les laisse donc seules à ce débat silencieux et obscur comme les ruse
30 ne de la main — trahisse son immanente puissance. On voudrait dire — mais ce n’est pas si simple que cela — qu’il faut ava
31 ’a pas plus de valeur que ces melons en carton qu’ on voit aux étalages. Il y a plusieurs façons d’avaler. Il y a même l’ou
32 y a même l’oubli. Ainsi de l’idée du bonheur : qu’ on la détruise, qu’on la mange et qu’on l’oublie. Ainsi de tant d’autres
33 insi de l’idée du bonheur : qu’on la détruise, qu’ on la mange et qu’on l’oublie. Ainsi de tant d’autres pensers, d’un dési
34 bonheur : qu’on la détruise, qu’on la mange et qu’ on l’oublie. Ainsi de tant d’autres pensers, d’un désir ou d’un idéal :
35 u’à ce que l’esprit enfin brisé s’abandonne comme on oublie, à tel vouloir qu’il concevait, mais redoutait, et qui devient
36 oute incarnation s’opère au prix d’un héroïsme, l’ on veut dire : d’une souffrance et d’un isolement. Telle est la loi du m
37 autres débats du siècle perdent leur aiguillon si on les y compare ; et se réduisent bien souvent à des questions de présé
2 1932, Présence, articles (1932–1946). Cause commune (avril-juin 1932)
38 nque cette espèce de rhétorique prudente à quoi l’ on reconnaît l’intellectuel qui a pris son temps. Mais ce temps, où le p
39 et à qui ? De toutes parts ce serait trahir. Si l’ on veut agir sur l’époque, il faut d’abord avoir l’époque dans la peau ;
40 disant vite et sans calcul ce qui nous presse qu’ on la dira le moins imparfaitement. Je ne t’envoie qu’une lettre. « Prés
41 i dresserait l’homme contre Dieu, ce qui revient, on l’a bien vu, à dresser, contre la grandeur et l’humilité de la person
42 s. Cela crée le sous-entendu fondamental. Ensuite on confronte les buts et les moyens inséparables de ces fins. Tout cela
43 tombée du ciel ou qu’elle éclate dans les choses, on nous demande seulement l’acte de la saisir dans son impérieuse éviden
44 . c. Précédé de la note suivante : « Le texte qu’ on va lire est une réponse et un écho à l’étude Autour de l’humanisme en
3 1934, Présence, articles (1932–1946). L’œuvre et la mort d’Arnaud Dandieu (1934)
45 tait un homme tranquille, carré, courtois et gai. On veut que ce soient des agités : les vrais sont des ordonnateurs, soli
46 ur le front ; des mains fines à la poignée ferme. On ne saurait trop insister sur la portée d’une observation de cet ordre
47 héories à la mode, avec trop de dédain peut-être… On a fait plus de bruit autour des deux pamphlets que Dandieu publiait q
48 . Ces deux livres sont au début de quelque chose. On serait tenté de dire : d’une action, si le mot n’était mal entendu de
49 y dispersa ses puissances d’évaluation novatrice. On en trouvera des marques dans les notices et dans l’introduction de so
50 de paraître, La Révolution nécessaire.f Certes, on abuse du mot révolution. On le fait synonyme tantôt d’émeute et de ch
51 nécessaire.f Certes, on abuse du mot révolution. On le fait synonyme tantôt d’émeute et de chambardement, tantôt d’anarch
52 ondamental qui pour eux définit la personne. Si l’ on admet, avec Marx et Proudhon, que la révolution consiste à sauver l’h
53 ou le Rhin, s’avance l’antique ennemi de l’homme. On l’appellera État, matérialisme, racisme ou tyrannie ; mais son essenc
54 de plus profond dans l’homme, c’est la peau, a-t- on écrit. On pourrait dire aussi que rien n’est plus visible chez un hom
55 rofond dans l’homme, c’est la peau, a-t-on écrit. On pourrait dire aussi que rien n’est plus visible chez un homme que son
4 1935, Présence, articles (1932–1946). Contre Nietzsche (avril-mai 1935)
56 œuvre, qu’à prendre celle-ci dans sa totalité, l’ on découvre constitutive. D’autres poètes ont paru, qui ne furent pas mo
57 uelle, soit historique, soit même eschatologique. On démontrerait aisément — ou pour mieux dire : avec une cruelle facilit
58 finalement au néant, annule lui-même sa réaction. On pourrait en dire autant de la plupart des autres analyses nietzschéen
59 t cela pour des motifs d’ordre uniquement humain, on doit être certain qu’il ne s’agit encore que d’égoïsme bien compris.
60 on. Quel homme a vécu pareil drame ? Découvrir qu’ on s’est suicidé, et que la seule lucidité subsiste, sans appui. Tous co
5 1935, Présence, articles (1932–1946). Autour de Nietzsche : petite note sur l’injustice (novembre 1935)
61 que lui faire tort. Mais alors il ne s’agit plus, on le voit, de la même injustice. Par exemple, il se peut que l’injustic
62 és cela s’appelle scrupule.) Quand donc cessera-t- on , chez nous, d’opposer à toute prise de parti bien franche le rappel r
63 tialité, responsable à mon sens de tout ce mal qu’ on attribue absurdement au calvinisme ? (Comme si nous étions calviniste
64 rticle sur Nietzsche demeure visible, au point qu’ on la croirait préméditée. Je m’en consolerais mieux si M. Miéville avai
65 « impression » ou même « forte impression » que l’ on est investi d’une « mission », mais bien appel de Dieu, appel que l’o
66 « mission », mais bien appel de Dieu, appel que l’ on accepte ou que l’on refuse ; grâce n’a qu’un sens vaguement métaphori
67 en appel de Dieu, appel que l’on accepte ou que l’ on refuse ; grâce n’a qu’un sens vaguement métaphorique et sentimental e
68 t créateur avec n’importe quelle « doctrine que l’ on s’interdit d’examiner » ! J’avais écrit : « De même que le squelette
6 1946, Présence, articles (1932–1946). Le Nœud gordien renoué (avril 1946)
69 exclus de la compétition par leur science même : on exigeait l’innocence de l’âme. Quant au peuple, il vaquait à ses trav
70 ’il voudrait visiter les curiosités de l’endroit. On lui indique le temple et la mairie. Sans hésiter, il entre au temple
71 uvre brut, par Jupiter ! il n’est pas encore né ! On ne sait rien du règne de Gordius. Mais le nœud qu’il noua devint célè
72 nt. Un mariage se noue, une amitié se noue. Quand on peut dire d’un fruit qu’il a noué, il devient graine. Celui qui sait
73  : — Il n’est de science que des phénomènes que l’ on peut reproduire à volonté. Quel est ce nœud, réel, unique, inimitable
74 prendre, c’est-à-dire de connaître ou d’aimer. ⁂ On ne peut opposer au mythe du Nœud gordien que l’histoire du Nœud-le-pl
75 torité. En cette extrémité, et tout espoir perdu, on sollicitait son conseil. Il prit la corde qui servait de ceinture à s