1 1926, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Avant-propos (décembre 1926)
1 Avant-propos (décembre 1926) a b Une mauvaise humeur qui flotte dans l’air nous proposerait de dé
2 et plus que jamais, nous semble-t-il, notre revue a sa raison d’être. La vie d’aujourd’hui, on le sait, nous oblige à nou
3 u à refuser de nous affirmer avec une netteté qui a pu paraître parfois quelque peu impertinente. Le fait est que nous ép
4 oi, le déluge ! », et de se détourner de ce qu’on a coutume d’appeler notre « désordre ». Mais on est toujours le fils de
5 pressons de vous laisser le soin de juger si nous avons de quoi faire les modestes…   Être nous-mêmes, avons-nous dit, c’est
6 ns de quoi faire les modestes…   Être nous-mêmes, avons -nous dit, c’est à la fois notre but et notre excuse en publiant cette
7 c’est que vous le saurez un peu mieux quand vous aurez lu nos huit numéros. Il faut que notre revue reste cette chose unique
8 e par la grâce d’une volonté sans doute divine… a . Rougemont Denis de, « Avant-propos », Revue de Belles-Lettres, Laus
2 1926, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Paradoxe de la sincérité (décembre 1926)
9 probité intellectuelle ou de courage moral, nous avons élevé à la hauteur d’une vertu première — et qui légitime tous les dé
10 ’est pas encore mêlé de l’affaire. Au reste, on n’ a pas attendu les éclaircissements du subtil abbé pour n’y plus rien co
11 arler avec un peu de clairvoyance de ce dont nous avons vécu jusqu’à tel jour de notre jeunesse, il faudrait pouvoir sauter h
12 faire école. Le fait est que ce geste symbolique a déclenché tout un mouvement littéraire, celui-là même qui aboutit nag
13 sur le personnage. Mais quant à l’auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste le plus incongru du héros n’est jamais que
14 vive, un élan vers certain but précis. Ou bien j’ aurais juste le temps de le noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à l
15 faiblesse que j’aboutis : ce quelque chose qui m’ a retenu d’accomplir ce que l’élan appelait.   Second exemple. — J’épr
16 us ou moins fortement des sentiments que je crois avoir éprouvés à tel moment de mon passé. Parfois — rarement —, je parviens
17 les sentiments qui se proposaient à mon souvenir ont été passés au crible de la minute où je me penchais sur mon passé. Ou
18 , d’Arland, de Soupault et surtout de René Crevel ont donné les exemples les plus récents et significatifs ? Tous ces livre
19 le vide. Centre de soi, l’aspiration du néant. J’ ai revu à l’envers le film de mon passé : ce qui était élan devient recu
20 mes désirs anciens ne me restitue qu’un dégoût. J’ ai cru que je pourrais me regarder sans rien toucher en moi. En réalité,
21 tion de moi-même. Par les fissures, un instant, j’ ai pu soupçonner des profondeurs ; mais déjà c’est le chaos. Mon corps
22 i rôde dans certaine littérature d’aujourd’hui. J’ ai dit : ravages du sincérisme. C’est plus exactement faillite qu’il fau
23 il conclure avec Gide : « L’analyse psychologique a perdu pour moi tout intérêt du jour où je me suis avisé que l’homme é
24 une différence. Pourquoi les romanciers modernes ont -ils tant de mal à créer des personnages ? C’est parce qu’une sorte de
25 sonnalité, car l’analyse la plus savante, comme l’ a fort bien dit Ramon Fernandez, « retient tous les éléments du moi, mo
26 F. Raub. La sincérité obstinée d’un Rivière n’ a plus rien de spontané. En quoi est-ce encore de la sincérité ? Trop s
27 s menteur », dit Max Jacob. « Être sincère, c’est avoir toutes les pensées » (Rivière). Mais on ne peut se maintenir dans cet
28 ry. Certes, du sein de ma triste lucidité, je t’ avais déjà invoquée, hypocrisie consolante et libératrice. Mais tu m’offrai
29 e fortune, idole naïve de ma jeune angoisse… Je t’ ai mieux aimée ; d’autres soirs, alors qu’une symphonie de joies émanait
30 laisser — et des baisers à tous les vents — qu’il eût été loisible d’attribuer comme objet à ma jubilation, non pas ce but
31 vers soi-même une volonté — si profonde qu’elle n’ a pas besoin de s’expliciter pour être efficace — qui m’interdit de nom
32 er exemple, ce serait le récit des gestes qu’il m’ aurait fait commettre. Manifester est plus sincère qu’analyser. 2. D’ailleu
3 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Conte métaphysique : L’individu atteint de strabisme (janvier 1927)
33 rbain, premier du nom dans sa famille, laquelle n’ avait compté jusqu’alors que d’authentiques avocats et un chapelier dont to
4 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Dans le Style (janvier 1927)
34 vier 1927, l’information suivante : Mardi dernier a été célébré en l’église grecque de la rue Georges Bizet le mariage de
5 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Lettre du survivant (février 1927)
35 qu’il fait très froid dans ma chambre : le feu n’ a pas pris, et d’ailleurs cela n’en vaut plus la peine. (Veuillez ne pa
36 phrase quelque allusion de mauvais goût.) Je vous ai rencontrée quatre ou cinq fois dans des lieux de plaisir, comme on di
37 es. La première fois, au théâtre. Dans l’ombre, j’ ai suivi le drame sur vos traits seulement ; l’écho n’en fut que plus do
38 t que plus douloureux dans mon cœur. Puis je vous ai oubliée. Puis je vous ai revue, aux courses, et c’est là que j’ai déc
39 s mon cœur. Puis je vous ai oubliée. Puis je vous ai revue, aux courses, et c’est là que j’ai découvert que vous existiez
40 je vous ai revue, aux courses, et c’est là que j’ ai découvert que vous existiez en moi, à certain désagrément que j’eus d
41 vous existiez en moi, à certain désagrément que j’ eus de vous voir si entourée… D’autres fois… je n’ai plus le courage de l
42 eus de vous voir si entourée… D’autres fois… je n’ ai plus le courage de les dire. Enfin, avant-hier, à ce bal. J’avais de
43 rage de les dire. Enfin, avant-hier, à ce bal. J’ avais demandé à un de mes amis, qui vous connaît4, de me présenter. Il m’en
44 amis, qui vous connaît4, de me présenter. Il m’en avait donné la promesse. Vos regards rencontrèrent les miens plus d’une foi
45 s, maintenant, je pense que ces regards croisés n’ avaient aucune signification et que mon anxiété seule leur prêtait quelque in
46 Même, je fus obligé de confier à un ami que j’en avais repris … Les archets jouaient sur mes nerfs. Le jazz martelait mon dé
47 ue, pesant comme l’envie d’un sommeil sans fin… J’ avais soif, mais la seule vue d’un liquide me soulevait le cœur. L’aube par
48 ophones. Sortie dans un matin sourd, frileux, qui avait la nausée. Je rentrai seul. Voici quelques mots que j’écrivis à ma ta
49 , comme une femme nue dans une chambre étroite… J’ ai dormi quelques heures, d’un sommeil triste, tout enfiévré par la crai
50 s aimer. En sortant du bal, au vestiaire, je vous avais entendue donner un rendez-vous au thé du Printemps. J’ai rôdé dans la
51 ndue donner un rendez-vous au thé du Printemps. J’ ai rôdé dans la joie féminine des grands magasins, n’osant pas repasser
52 a croise en route dans l’ascenseur descendant… Il aurait fallu monter, mais l’idée de vous trouver peut-être assise en face de
53 autobus passaient par groupes. Plusieurs fois, j’ ai cru vous reconnaître dans la foule qui se précipitait, mais je n’avai
54 aître dans la foule qui se précipitait, mais je n’ avais pas pris de numéro, je ne pouvais pas monter. Je finissais par vous v
55 mme révélait soudain un trait de votre visage. Il aurait fallu courir après celle-là qui venait de tourner à l’angle de cette
56 i venait de tourner à l’angle de cette rue et qui avait votre démarche. Mais, pendant ce temps, vous pouviez paraître enfin o
57 rieur se pencher vers la vitre… Je montai. Il n’y avait que des dames. Personne ne parlait. La jeune femme qui s’était penché
58 avides, implorants. Oh ! toutes les femmes que j’ ai fait souffrir cette nuit d’un long regard de damné. À minuit, telleme
59 l. Je ne sais comment j’y parvins. Je crois que j’ ai marché plusieurs heures avant de retrouver ma rue. Il doit être maint
60 orrespond à rien dans mon esprit. Peut-être que j’ ai perdu la notion du temps. Je ne me souviens plus que de cette décepti
61 is encore évoquer votre visage. Peut-être ne vous ai -je pas vraiment aimée, mais bien ce goût profond de ma destruction, c
62 e que c’est que ma vie, ma mort. Mon Dieu, il n’y a plus qu’un glissement gris, sans fin… Il faudrait que je dorme : il n
63 gris, sans fin… Il faudrait que je dorme : il n’y aurait plus rien. 4. Encore un qui vous aime, je ne vous dirai pas son nom
6 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Orphée sans charme (février 1927)
64 te d’Orphée précise : « Inutile de dire qu’il n’y a pas un seul symbole dans la pièce. » Ce qui me gêne pourtant, c’est d
65 ir m’empêcher non plus de soupçonner Cocteau d’en avoir plus ou moins consciemment concerté la possibilité. Orphée, par exemp
66 t cette phrase, c’est un cheval savant qui la lui a dictée : « Madame Eurydice Reviendra Des Enfers. » — « Ce n’est pas u
67 mme dictées de l’inconscient, au fond desquels on a si vite fait de distinguer les quelques préoccupations assez simples
68 a aussi des sortes de calembours… Art chrétien, a-t -on dit5. Certes, cette pièce n’est pas dépourvue de certaines des qua
69 le mystère d’un trait pur. Il semble que Cocteau ait réalisé là exactement ce qu’il voulait. Et pourtant cette admirable m
70 le mystère ne peut plus dépasser l’auteur : il l’ a trop bien organisé. En somme, ce qu’il faut reprocher à Cocteau, c’es
71 somme, ce qu’il faut reprocher à Cocteau, c’est d’ avoir réussi complètement une pièce, prouvant une fois de plus que l’atmosp
72 ès la théorie. Parce qu’une fois de plus, Cocteau a comprimé des pétales de roses dans du cristal taillé, selon toutes le
7 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). L’autre œil (février 1927)
73 fin de la semaine. « Messieurs, disait Dardel, y a pas à tortiller, il faut faire quelque chose. Nous devons, nous pouvo
74 calembours… Pénétrés d’horreur, les bellettriens avaient fui. Au détour d’une ivresse, ils rencontrèrent une créature évadée d
75 es. Lugin, qui est théologien, et de la Tchaux, n’ a pas la foi. Topin, Mahomet désabusé, constate que jamais « la Montagn
76 rassé Potemkine était interdit à l’écran. Pitoëff avait prêté un accent, Mme d’Assilva deux actrices, M. Grosclaude son fils
77 les neiges. Un jour, on s’aperçut que cette chose avait recommencé, qu’on appelle, sans doute par antiphrase, la vie. 6. R
8 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Entr’acte de René Clair, ou L’éloge du Miracle (mars 1927)
78 renversé, maisons obliques, montagnes russes. (J’ ai regretté que René Clair ne nous donne pas la vision du mort.) Enfin l
79 certaines théories sur le rêve, le peuple, qui n’ a pas vu ces dessous mais accueille le résultat avec la naïveté qu’il f
80 ualifié : c’est peut-être le premier film où l’on a fait du ciné avec des moyens proprement cinégraphiques. Ici le geste
81 e, et se suffit. Mais comme pour le film 1905, on a sans cesse envie de crier : « Trop de gestes ! » C’est une question d
82 une sorcière transforme un homme en chien, cela n’ a rien d’étonnant au cinéma. C’est la photographie d’une chose qui ne s
83 ’est une réalité aussi réelle que celle dont nous avons convenu et que nous pensions la seule possible. Le monde « normal » n
9 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Louis Aragon, le beau prétexte (avril 1927)
84 puissance étrangère s’est emparée de mon être et a saisi les cordes les plus secrètes de mon âme, qu’elle peut faire dés
85 faut bien nommer le Vide. Tant de séductions nous ont en vain tentés, ô tortures fascinantes de la sainteté, seules vous no
86 ire de condamné à mort et à l’éternité. Le diable avait pris des avocats dont les plaidoyers, tissus des mensonges les plus b
87 as de meilleur remède contre Dieu. Monsieur, vous avez dit : « C’est incompréhensible ! » — avec une indignation où j’admire
88 aresse à concevoir en esprit. Ces trois mots vous ont délivré du plus absurde malaise, et vous rallumez votre cigare. Vous
89 euses, de bravades et de faciles tricheries8 — qu’ ait connue l’esprit humain. Sens de l’Absolu, sens de la pureté ou fanati
90 réalité morale absolue que certains d’entre nous eussent acheté au prix d’un martyre… Nos jugements se rendaient sans cesse à
91 de l’infini, et cet infini nous écrasait. Comment aurions -nous accepté le sort communément heureux de nos contemporains qui ont
92 sort communément heureux de nos contemporains qui ont puisé dans Auguste Comte cette tranquillité de rejeter définitivement
93 er. Depuis certaines paroles sur la Croix, il n’y a peut-être pas eu d’expression plus haute de l’angoisse humaine, et vo
94 ines paroles sur la Croix, il n’y a peut-être pas eu d’expression plus haute de l’angoisse humaine, et vous aurez beau rir
95 ression plus haute de l’angoisse humaine, et vous aurez beau rire, pharisiens, et dire qu’elle est née dans un café de Paris.
96 n’est pas à genoux qu’on attendra : pour que cela eût un sens, il faudrait être sûr de n’avoir pas la tête en bas par rappo
97 r que cela eût un sens, il faudrait être sûr de n’ avoir pas la tête en bas par rapport au soleil. Quelques gestes encore, int
98 l y a un an, tel soir de colère où le thermomètre eût indiqué 39° selon toute vraisemblance. Et voici Aragon revêtu d’une d
99 830, une théorie du scandale pour le scandale qui a le mérite de n’être pas qu’un jeu littéraire. Mais enfin, c’est encor
100 m revient sous ma plume, comme une mouche qu’on n’ a jamais fini de chasser parce qu’elle n’a pas mérité du premier coup q
101 qu’on n’a jamais fini de chasser parce qu’elle n’ a pas mérité du premier coup qu’on se donne la peine de l’écraser, — c’
102 e craindre11. Si dans un essai sur la sincérité j’ ai soutenu qu’une introspection immobile ne retient rien de la réalité v
103 s toutes — de novembre 1926.   2 mai 1927. « Nous avons dressé notre orgueilleuse raison à nous tromper sur ce qu’il y a de p
104 s. Mais je suis vos travaux avec intérêt, et il m’ a paru que depuis quelque temps… enfin, comment dirais-je… je me suis d
105 intéressant. Seulement, mon cher Monsieur, nous n’ avons pas le temps ces jours-ci, beaucoup trop à faire, beaucoup trop d’êtr
106 gés, absolument… Le Sens Critique. — Justement j’ aurais en quelque manière la prétention… Moi. — Que voilà un singulier impe
107 ait sur l’incertain », c’est un académicien qui l’ a dit. Voulez-vous me faire quelque chose là-dessus pour la Revue ? Mai
108 re plaisir… III Il y a des gens qui croient avoir tout dit quand ils ont montré à l’origine de telle doctrine mystique
109 y a des gens qui croient avoir tout dit quand ils ont montré à l’origine de telle doctrine mystique une exaltation nerveuse
110 raphiques à la raison ? Eh bien, c’est vous qui l’ aurez voulu, mais tant pis, nous serons du Nord. Nous serons romantiques. N
111 ue je ne puis pardonner aux surréalistes : qu’ils aient voulu s’allier aux dogmatiques d’extrême gauche. Je ne dirai pas, com
112 iques d’extrême gauche. Je ne dirai pas, comme on a fait, que c’est très joli de crier merde pour Horace, Montaigne, Desc
113 r Marx ou Lénine, je le dirai pour vous. Quand on a entrepris la Révolution au nom de l’esprit, on ne va pas s’acoquiner
114 sprit, on ne va pas s’acoquiner avec des gens qui ont fait, il y a 10 ans, une révolution en fonction du capitalisme. Est-c
115 ue et de crier rouge pour la simple raison qu’ils ont dit blanc ? Pensez-vous combattre cet esprit « bien français » qui s’
116 a quatrième dimension. Aragon et les surréalistes auront raison même encore s’ils ont tort, envers et contre toutes les critiq
117 les surréalistes auront raison même encore s’ils ont tort, envers et contre toutes les critiques qu’on pourrait leur adres
118 pourrait leur adresser, parce que ces « maudits » ont la grâce, parce qu’ils sont la vie, même quand ils appellent la mort,
119 e, même quand ils appellent la mort, parce qu’ils ont la passion et l’incommunicable secret de l’invention.   Il nous faut
120 sympathie humaine pour nous sans prix ? Mais nous avions besoin de révolution pour vivre, pour nous perdre. Vivre était devenu
121 disque de gramo comme par hasard nasille : Nous avons tous fait ça Plus ou moins, n’est-ce pas ? Et puis l’aiguille divagu
122 s, et aussi pourtant des histoires de copains qui ont mal tourné, on pensait bien, ah ! cette jeunesse, mais voyons des aff
123 l-Genève-Fribourg, avril 1927, p. 131-144. p. On a conservé la graphie de l’original, sans doute voulue par l’auteur.
10 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Quatre incidents (avril 1927)
124 eau n’est pas moins somptueuse. Et bien sûr, je n’ ai pas bougé. C’est une question d’amitié. Pourtant je suis seul dès cet
11 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Récit du pickpocket (fragment) (mai 1927)
125 et je jure par Mercure, dieu du commerce, qu’on m’ a appris à voler. Aristophane (« Les Chevaliers »). Dès qu’on eut dép
126 er. Aristophane (« Les Chevaliers »). Dès qu’on eut déposé devant Isidore un malaga et une eau minérale devant son étrang
127 l’esprit s’établit sur ses positions. Or donc, j’ avais vingt ans. Je vivais chez mes parents, comme tant d’autres à cet âge,
128 art d’heure, je connaissais l’amour dans ce qu’il a de plus étrangement prosaïque à la fois et bêtement heureux. Le lende
129 i souhaiter le bonsoir. Le lendemain, ses cheveux avaient légèrement blanchi. Il me regardait avec une terreur ou je crus disti
130 ar instants l’air de la dernière danse, mais nous avions aussi envie de pleurer, à cause du soir trop limpide et trop vaste, c
131 sion du vol n’était qu’une longue vengeance. Ne m’ avait -on pas dérobé des années de joie au profit d’une vertu que tout en mo
132 le ressort secret de la vertu dans laquelle on m’ avait emprisonné c’était un bas opportunisme social, résultante des paresse
133 us vulgaires et des plus généralement répandus, j’ ai vite fait de classer mon monde d’après les quelques réactions élément
134 nt le sommeil. Je rêve beaucoup. Cela explique, m’ a-t -on dit, le peu de goût que j’ai pour la poésie imprimée. » J’allais o
135 Cela explique, m’a-t-on dit, le peu de goût que j’ ai pour la poésie imprimée. » J’allais oublier de vous dire qu’on me nom
136 ins compromettante, sur cette vie dont le récit n’ avait pas laissé que de l’agacer en maint endroit. « Une chose avant tout m
137 ache, il n’est pas prouvé par là que le potache n’ ait point raison. Mais justement je n’éprouve aucun désir d’avoir raison.
138 raison. Mais justement je n’éprouve aucun désir d’ avoir raison. Je sens aussi bien que vous ce que mes principes peuvent avoi
139 aussi bien que vous ce que mes principes peuvent avoir de « bien jeune », de banal presque, et, pis, d’agréablement paradoxa
12 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Conseils à la jeunesse (mai 1927)
140 Conseils à la jeunesse (mai 1927)u « On a reproché bien des choses aux romantiques : le goût du suicide, l’habi
141 es temps seront guéris de leur crise, les valeurs auront retrouvé leur stabilité, et comme M. Albert Muret dont le Journal de
13 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature (juillet 1927)
142 nce le nom de tel de vos confrères, si je dis : «  Avez -vous lu… », vous voilà rouge ; et sur moi les foudres de votre paradi
143 : c’est trop agréable. Vous dites d’un goût qu’on aurait pour Nietzsche : que c’est de la littérature. Alors, quelque paysan d
144 royais écrivain ? — Hélas ! soupirez-vous. Mais j’ ai tué la littérature en moi, n’en parlez plus, j’en sors, je l’abandonn
145 uoi ? — Pour la vie ! Or je pense, à part moi : j’ ai lu ça quelque part. Voyez ma franchise. Un peu grosse, n’est-ce pas ?
146 ète au bar, le paradis n’est pas si cher. Il y en a aussi qui posent pour le diable et ne se baignent que dans des béniti
147 nt gratuit ». C’est de la littérature. À force d’ avoir mérité ces épithètes, pour nous laudatives, vous vous étonnez aujourd
148 littérateur. Nous ne pouvons pas faire que nous n’ ayons rien lu. Vous refusez de compter avec cette réalité de la littérature
149 rientaux cette croyance : nommer une chose, c’est avoir puissance sur elle. Images, pensées des autres, je vous ai mis un col
150 nce sur elle. Images, pensées des autres, je vous ai mis un collier avec le nom du propriétaire ; tirez un peu sur la lais
151 Une fois — et ce n’est pas que je m’en vante, — j’ ai tué un amour naissant, à force de le crier sur les toits. Ainsi, parl
152 re. Avouons-le : rien de ce qu’on peut exprimer n’ a d’importance véritable. Alors, cessons de nous battre contre des moul
153 ins d’aujourd’hui. Quand il parle littérature, il a toujours l’air de mettre un peu les pieds dans le plat, de dire de ce
154 e dire de ces choses qu’entre gens du métier l’on a convenu de passer sous silence. C’est assez drôle de voir le malaise
155 toréador ses familiarités avec une Muse qu’ils n’ ont pas coutume d’aborder sans le mot de passe de la dernière mode ou de
156 a littérature ! Qu’on puisse vivre de ça, je ne l’ ai pas encore avalé. On m’affirme que je n’y échapperai pas plus qu’un a
157 vre pour écrire16. De tous les prétextes que l’on a pu avancer pour légitimer l’activité littéraire, le plus satisfaisant
158 ux compte de la réalité, c’est André Breton qui l’ a exprimé : « On publie pour chercher des hommes, et rien de plus. » Ch
159 ent encore se reconnaître. Quand bien même elle n’ aurait plus d’autre excuse que celle-là, la littérature mériterait d’exister
160 de… Il ne s’agit plus de mépris ni d’adoration. J’ ai défini une « maladie » dont je parviens à tirer quelque bien pour ma
161 scandaleux. Le Grand Écart, roman de M. Cocteau, a donné son nom à un établissement de nuit très en vogue à Paris. Cambr
162 s de Morand, et ils en sont tout fiers : « Il n’y a plus qu’à les écrire ». v. Rougemont Denis de, « La part du feu. Le
14 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Les derniers jours (juillet 1927)
163 er dans les singuliers mouvements de sympathie qu’ a provoqués l’infortune de l’Action française la fraternité qui existe,
164 ccident ? » Certains cris qui nous échappèrent n’ avaient pas d’autre sens. 17. 20, rue Chalgrin, Paris 16e. w. Rougemont D
15 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Adieu au lecteur (juillet 1927)
165 ns. Nous nous retirons : et ce n’est pas que nous ayons brûlé toutes nos cartouches. Ni que l’indignation provoquée sur tous
166 sans fièvre, sans lamentations d’adieu.   On nous a parfois traités de fous (avec ou sans sourire). Nous sommes à l’âge d
167 de nous voir « si différents » de nos aînés. Nous avons l’énorme candeur de trouver ça naturel. On nous a fait des reproches
168 s l’énorme candeur de trouver ça naturel. On nous a fait des reproches contradictoires. Nous les additionnons : ils s’ann
169 ou bien de ces affirmations dont en vérité l’on n’ a pas à se préoccuper de prévoir les conséquences, puisqu’il n’en est a
170 lisée par la loi, les mœurs et l’habitude. Nous n’ avons aucun remords d’avoir déçu cette catégorie de lecteurs. Aucun remord
171 mœurs et l’habitude. Nous n’avons aucun remords d’ avoir déçu cette catégorie de lecteurs. Aucun remord non plus d’avoir troub
172 te catégorie de lecteurs. Aucun remord non plus d’ avoir troublé quelques bonnes petites somnolences par des cris intempestifs
173 par des cris intempestifs. Il y a des gens qui n’ ont pas encore admis que jeunesse = révolution Tous les malentendus vienn
174 rd, et même, et surtout, un miracle. Et puis, ils ont des vieux un peu là, du grand Arthur-Alfred-Albert au non moins grand
175 thur-Alfred-Albert au non moins grand Tanner. (On a fait ses preuves, quoi !) Et puis, qui sait, peut-être sauront-ils ra
16 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). « Belles-Lettres, c’est la clé des champs… » (janvier 1929)
176 à le leur dire ici : les anciens bellettriens qui ont perdu toute foi ne connaîtront pas de pardon. Car ils ont vu, et s’il
177 u toute foi ne connaîtront pas de pardon. Car ils ont vu, et s’ils n’ont pas cru, c’est qu’ils sont foncièrement mauvais.)
178 aîtront pas de pardon. Car ils ont vu, et s’ils n’ ont pas cru, c’est qu’ils sont foncièrement mauvais.) 6. Peu de choses da
179 mauvais.) 6. Peu de choses dans le monde moderne ont encore une « essence ». Celle de Belles-Lettres est en agréable odeur
17 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Souvenirs d’enfance et de jeunesse, par Philippe Godet (avril 1929)
180 Quand avec un air fin mais un ton convaincu l’on a répété dans une ballade fameuse « Que voulez-vous, je suis bourgeois 
181 triotes d’Amiel, Godet restera l’un des rares qui ont réussi à se connaître et que cela n’a point stérilisé : sa nature, il
182 rares qui ont réussi à se connaître et que cela n’ a point stérilisé : sa nature, il est vrai, s’y prêtait, peu complexe e
183 sproportionnés avec son mérite ». Il ajoute : « j’ ai eu la chance de discerner très jeune, avec une clairvoyance singulièr
184 oportionnés avec son mérite ». Il ajoute : « j’ai eu la chance de discerner très jeune, avec une clairvoyance singulière,
185 lairvoyance singulière, mes propres limites, et j’ ai eu la sagesse de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de l’écono
186 rvoyance singulière, mes propres limites, et j’ai eu la sagesse de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de l’économie
18 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). L’ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)
187 it devenu beaucoup moins intéressant. ⁂ Celui qui a des ailes sera persécuté à cause de ses ailes, mais celui qui n’en a
188 rsécuté à cause de ses ailes, mais celui qui n’en a pas sera méprisé parce qu’il n’en a pas. Le libéralisme Seigneu
189 elui qui n’en a pas sera méprisé parce qu’il n’en a pas. Le libéralisme Seigneur ! clamaient-ils, combien complexes
190 émocratie outragée, les autres disaient qu’il n’y a plus de morale, et ces jeunes gens ont une façon de trancher les ques
191 nt qu’il n’y a plus de morale, et ces jeunes gens ont une façon de trancher les questions qui vous désarme. Craignant qu’on
192 il pensait à une femme blonde assise près de lui. Ayant demandé un timbre pour attirer l’attention de la femme blonde — sans
193 enue. Le lendemain, il reçut une réponse : « Vous avez commis une erreur, cher ami, mais bien excusable de la part d’un poèt
194 blonde. Je suis noire. Mais je sais qui c’est. J’ ai fait suivre. Alexandrine un jour m’a laissé entendre qu’elle vous aim
195 ui c’est. J’ai fait suivre. Alexandrine un jour m’ a laissé entendre qu’elle vous aime. Elle attend votre lettre depuis de
19 1930, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Les soirées du Brambilla-club (mai 1930)
196 de vous, si vous êtes seul, un fantôme, d’office, a pris place. On lie bien vite connaissance, pourvu qu’on sache un peu
197 que rien, nous savons les mêmes histoires et nous avons durant la journée bouquiné dans les mêmes boîtes sous les arcades. (N
198 , j’oublie en chemin les meilleures phrases que j’ avais préparées pour subjuguer mes amies, je m’intéresse aux cravates, enfi
199 orts de politesse distante avec les personnes qui ont dit, ne fût-ce qu’une fois en leur vie : « J’ai horreur de la sentime
200 ont dit, ne fût-ce qu’une fois en leur vie : « J’ ai horreur de la sentimentalité ».) Nous voici donc en taxi, « nous deux
201 , qui n’est pas ma patrie. Ce soir-là, le fantôme ayant envie de manger ferme a donné au chauffeur l’adresse d’un ogre. C’est
202 e soir-là, le fantôme ayant envie de manger ferme a donné au chauffeur l’adresse d’un ogre. C’est tout près parce que j’a
203 l’adresse d’un ogre. C’est tout près parce que j’ ai peur. En même temps c’est très loin parce que je me réjouis. La Maiso
204 pie en germe : les êtres changent trop vite, je n’ ai pas le temps de me laisser envoûter ou de les rendre esclaves, hors d
205 qui vaille l’amour. Durant cette méditation, nous avons gagné une rue pauvrement éclairée où l’on s’arrête. Le fantôme derriè
206 méditées, c’est sans doute celui d’être trouvé. J’ ai toujours méprisé le geste de l’homme qui, le soir dans sa chambre d’h
207 — Ils me conduiraient là où je ne sais pas que j’ ai si grand désir d’aller… Est-ce ici ? Je regarde autour de moi : des m
208 uffisantes. Francis de Miomandre n’est pas là. Il a téléphoné au début de l’après-midi qu’il commençait un roman. Son abs
209 est là. Si vous enlevez Georges Petit, égaré, en ayant soin d’ajouter ceux que j’oublie, vous obtiendrez le chiffre exact de
210 apstan ». Il ouvre une de ces parenthèses dont il a le secret, et dans laquelle la rédaction s’empresse de faire rentrer
211 e des plus belles du monde :   Un prince italien ayant commandé à Pergolèse un Stabat Mater, le musicien quitta Naples où il
212 terme desquelles, épuisé de corps et d’âme, et n’ ayant pas écrit une seule note, il se retrouva aux portes de Naples, d’où i
213 e, il se retrouva aux portes de Naples, d’où il n’ eut que la force de regagner son logis. Comme il allait y pénétrer, il ap
214 ivre plutôt que d’en parler vous voyez bien que j’ ai quitté cette table écroulée, dans la fumée et les évocations, sous le
215 es, un peu trop lentes, comme tu les aimes — on n’ a pas toujours envie de crâner. L’esplanade d’une petite ville de l’All
216 bougonne. La petite maison du colonel en retraite a des fenêtres basses, mais défendues par des rosiers sauvages. Laquell
217 s doute celle qui dort dans la mansarde, et qui n’ a pas peur… ⁂ Le reste de la vie, c’est toujours entre deux voyages d’A
218 est temps de mettre à ces fariboles un terme19. J’ ai du solide à équarrir. Et auparavant, j’aimerais lire un peu. Mes aute
20 1930, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Le Grand Testament de Villon, illustré par Marcel North (juin 1930)
219 ré par Marcel North (juin 1930)ad Marcel North a trouvé un style qui ne ressemble qu’à sa fantaisie : la précision de
220 mais on n’ose reprocher à ces images ce qu’elles ont d’un peu grêle : leur jeunesse… Et si la composition s’amuse parfois
21 1932, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). La pluie et le beau temps (Dialogue dans une tête) (1932)
221 olie aujourd’hui, Mademoiselle Sonnette, avec qui avez -vous été méchante ? Sonnette. — Lord Artur, je ne suis pas une mauva
222 du reste, cela me rend plus jolie, quelqu’un me l’ a dit hier encore, vous ne saurez pas qui. Lord Artur. — Ravissante So
223 Lord Artur. — Je pense sérieusement que vous ne l’ avez jamais su. Pas plus que vous n’avez jamais su si vous préfériez le bo
224 que vous ne l’avez jamais su. Pas plus que vous n’ avez jamais su si vous préfériez le bonheur ou la tristesse. Car vous ne s
225 est le contraire de « mauvais » temps, et vous n’ avez jamais cherché ce que doit être le « bon » temps, ni si les tempêtes
226 stale en couleurs, idéal inévitable de ceux qui n’ ont pas de point de vue sur le beau temps. Écoutez-moi bien, Sonnette : V
227 et de petits escargots, et les framboises humides avaient un délicieux goût fade. Je rentrais toute fière de mes genoux griffés
228 oit à la pluie et au beau temps. Lord Artur. — J’ ai toujours estimé, Sonnette, que vous extrêmement intelligente. Je regr
229 intelligente. Je regrette profondément que vous n’ ayez pas plus de sens qu’un oiseau. Sonnette, si vous étiez païenne ou si
230 s qu’au soleil de l’aube aussi d’autres fois tu l’ as possédé. Tu comprends maintenant qu’il ne faut pas choisir parmi tant
231 s dit la Fable, fit Myscille, habitant d’Argos. N’ ayant pu débrouiller le sens de l’Oracle qui lui avait dit d’aller bâtir un
232 ’ayant pu débrouiller le sens de l’Oracle qui lui avait dit d’aller bâtir une ville là où il trouverait la pluie et le beau t
22 1933, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Petites notes sur les vérités éternelles (1932-1933)
233 ivacité : il connaît bien les Neuchâtelois, qui l’ ont beaucoup aimé ; il sait que ces Neuchâtelois sont d’infatigables ergo
234 lecteur à mon endroit, je le crains… 1. S’il n’y a pas de vérité absolue, en ce sens que tout jugement tenu pour vrai pe
235 ernelles (p. 13). Les philosophes, de tout temps, ont montré du goût pour une certaine continuité, une certaine permanence
236 oires des philosophies. La critique postkantienne ayant fait justice de certaines prétentions, survivantes chez certains pens
237  ? Et d’ailleurs, une démission de la philosophie eût impliqué, au concret, la démission réelle de tous les professeurs de
238 e certains le répètent, d’une dogmatique que nous avons besoin. Ce n’est pas d’une systématique, d’ailleurs déduite a posteri
239 n’est pas d’une systématique, d’ailleurs déduite a posteriori. Ce n’est pas d’une méthode de correction, ou d’assurances
240 2. On comprend dès lors l’attrait que le thomisme a exercé à un moment donné sur la pensée protestante. On comprend égale
241 sme, thomisme et réaction. Barth, croyons-nous, n’ a jamais proposé ni prôné de dogmes « si possible immuables » (p. 14).
242 nt aussi vaguement définis. Car là où la pensée n’ a rien osé distinguer de précis, c’est là que l’action des hommes devie
243 n toute loyauté à les affirmer (p. 16). Pourquoi ai -je envie, dans une telle phrase, de remplacer « libre recherche » par
244 que ferions-nous en attendant que les théologiens aient mené à bien leur travail historique ? Et qu’arriverait-il si le résul
23 1935, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). René Guisan : un clerc (1935)
245 René Guisan : un clerc (1935)ah ai Un clerc, un vrai clerc. Non pas cet être détaché, déraciné, de pu
246 nom de l’action. C’est sans doute parce que nous avons connu quelques rats de bibliothèque qui méprisaient trop facilement l
247 es et sans cesse oubliées de nos jours, je ne les ai vues vraiment vécues chez nous que par cet homme solide et fin, passi
248 l’union vibrante qu’il incarnait, de qualités qui ont coutume, ailleurs, de se gêner mutuellement. Son érudition magnifique
249 sanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, 1935, p. 25-26. ai . Ce double numéro, appartenant à la série annuelle 1932-1933, a de fa
250 uméro, appartenant à la série annuelle 1932-1933, a de fait paru en 1935.
24 1938, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Le Poète et le Vilain (novembre 1938)
251 ète disait d’une belle voix d’amertume : — Nous n’ avons plus guère de mesures pour les choses divines et humaines, si nous sa
252 sassin d’un noble sera puni plus sévèrement que n’ eût été ce noble assassinant un serf. Même l’indulgence pour les riches a
253 sinant un serf. Même l’indulgence pour les riches a cessé d’être bien certaine. Tout homme en vaut un autre, dit la loi ;
254 ami : — À chacun selon sa faim. Heureux ceux qui ont une grande faim, c’est à cause d’eux qu’il y a de grandes œuvres. Car
255 qu’il y a de grandes œuvres. Car le vilain qui n’ a rien à donner, c’est lui qui vous donnera la joie du chant, plus préc
256 p. 2. ak. Une note introductive précise : « Nous avons le plaisir de publier en tête de ce numéro une page inédite de Denis
257 éro une page inédite de Denis de Rougemont, qu’il a bien voulu extraire pour nous d’un ouvrage qu’il prépare et qu’il int
25 1968, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Hölderlin dans le souvenir des noms splendides (1968)
258 persiste du poème qu’un jour ou l’autre nuit nous avons lu puis oublié ? Un « ton fondamental » ? Des mouvements de mots ? ou
259 e le recomposer contre l’oubli comme son auteur l’ avait écrit contre l’absence, — car elle seule attend l’expression et la pe
260 t. La poésie serait-elle ce qui subsiste quand on a tout perdu sauf certains mots ? Ce qui émeut quand plus rien n’est là
261 deux quatrains d’une déchirante simplicité, que j’ avais traduits à vingt ans : Die Linien des Lebens sind verschieden et Das
262 du plein midi sur les Cyclades. Mais Hölderlin n’ a jamais vu les Îles ! Ainsi sa poésie devenait-elle pour moi, dans la
263 t-elle pour moi, dans la mémoire, ce que la Grèce avait été pour lui dans la distance et dans le temps du rêve. Mais au-delà
264 up des fragments qui subsistaient dans ma mémoire avaient toujours été tels dans le texte, émergeant comme des îles du blanc de
265 nd de « réflexion » sur le « sentiment originel » a pour fonction de « rappeler la vie perdue à une vie magnifiée »26, on
266 temporel (« Le transparent glacier des vols qui n’ ont pas fui »). Rimbaud, ses moments forts sont au futur prochain (« Et à
267 el, nostalgie qui se mue en prophétie ! Hölderlin a créé des temps nouveaux du Verbe qui nous meut et nous oriente : le p
268 i que parlent « la nature et l’art tels qu’il les a connus autrefois ». Ce n’est pas un langage imposé par le social impe