1 1926, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Avant-propos (décembre 1926)
1 Avant-propos (décembre 1926 )a b Une mauvaise humeur qui flotte dans l’air nous proposerait de
2 ise humeur qui flotte dans l’air nous proposerait de débuter par l’inévitable discours sur les difficultés du temps, en gé
3 celles en particulier qu’implique la publication de notre revue. Mais nous savons, tout comme M. Coué, que ce serait de m
4 is nous savons, tout comme M. Coué, que ce serait de mauvaise méthode. Et, comme M. Coué, nous nous persuadons que tout ir
5 jamais, nous semble-t-il, notre revue a sa raison d’ être. La vie d’aujourd’hui, on le sait, nous oblige à nous affirmer ou
6 mble-t-il, notre revue a sa raison d’être. La vie d’ aujourd’hui, on le sait, nous oblige à nous affirmer ou à refuser de n
7 le sait, nous oblige à nous affirmer ou à refuser de nous affirmer avec une netteté qui a pu paraître parfois quelque peu
8 que nous éprouvons irrésistiblement l’obligation d’ être nous-mêmes. Et, disons-le tout de suite, c’est en cela uniquement
9 s n’est-ce pas la meilleure raison pour nos aînés de chercher plus patiemment encore à nous comprendre et de nous accorder
10 rcher plus patiemment encore à nous comprendre et de nous accorder une confiance sans laquelle nous ne saurions aller, et
11 s, ce sont les jeunes qui passent… » Pas question de les saluer ni d’emboîter le pas, mais seulement de retenir sa place a
12 unes qui passent… » Pas question de les saluer ni d’ emboîter le pas, mais seulement de retenir sa place au spectacle qu’il
13 e les saluer ni d’emboîter le pas, mais seulement de retenir sa place au spectacle qu’ils offrent et de les considérer ave
14 e retenir sa place au spectacle qu’ils offrent et de les considérer avec sympathie. Il est bien facile de s’écrier : « Apr
15 les considérer avec sympathie. Il est bien facile de s’écrier : « Après moi, le déluge ! », et de se détourner de ce qu’on
16 cile de s’écrier : « Après moi, le déluge ! », et de se détourner de ce qu’on a coutume d’appeler notre « désordre ». Mais
17  : « Après moi, le déluge ! », et de se détourner de ce qu’on a coutume d’appeler notre « désordre ». Mais on est toujours
18 uge ! », et de se détourner de ce qu’on a coutume d’ appeler notre « désordre ». Mais on est toujours le fils de quelqu’un…
19 notre « désordre ». Mais on est toujours le fils de quelqu’un… Et, peut-être, la considération du « déluge » peut-elle fa
20 eur bénévole, un exercice mensuel à votre faculté d’ indulgence. Par contre, nous nous empressons de vous laisser le soin d
21 té d’indulgence. Par contre, nous nous empressons de vous laisser le soin de juger si nous avons de quoi faire les modeste
22 tre, nous nous empressons de vous laisser le soin de juger si nous avons de quoi faire les modestes…   Être nous-mêmes, av
23 ns de vous laisser le soin de juger si nous avons de quoi faire les modestes…   Être nous-mêmes, avons-nous dit, c’est à l
24 plus » ; nous ne voulons pas être « l’expression de la jeunesse romande ». Nous sommes autre chose. (Belles-Lettres est t
25 us le saurez un peu mieux quand vous aurez lu nos huit numéros. Il faut que notre revue reste cette chose unique et indéfini
26 indéfinissable, comme toute chose vivante… Gerbe de fleurs disparates, aux tiges divergentes, mais qu’un ruban rouge et v
27 , mais qu’un ruban rouge et vert lie par la grâce d’ une volonté sans doute divine… a. Rougemont Denis de, « Avant-propo
28 volonté sans doute divine… a. Rougemont Denis de , « Avant-propos », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève
29 a. Rougemont Denis de, « Avant-propos », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, décembre 1926, p.
30 res, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, décembre 1926, p. 3-5. b. Signé : Le Comité central.
2 1926, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Paradoxe de la sincérité (décembre 1926)
31 Paradoxe de la sincérité (décembre 1926)c Nous voyons un mythe prendre corps p
32 Paradoxe de la sincérité (décembre 1926 )c Nous voyons un mythe prendre corps parmi les ruines de ce temps.
33 us voyons un mythe prendre corps parmi les ruines de ce temps. Il fallait bien tirer quelque vertu d’une anarchie dont on
34 de ce temps. Il fallait bien tirer quelque vertu d’ une anarchie dont on ne veut pas avouer qu’elle est plus nécessaire —
35 us trompant nous-mêmes, sous le prétexte toujours de probité intellectuelle ou de courage moral, nous avons élevé à la hau
36 le prétexte toujours de probité intellectuelle ou de courage moral, nous avons élevé à la hauteur d’une vertu première — e
37 u de courage moral, nous avons élevé à la hauteur d’ une vertu première — et qui légitime tous les dénis de morale à quoi n
38 e vertu première — et qui légitime tous les dénis de morale à quoi nous obligeaient en réalité on sait quel dégoût, et cer
39 n réalité on sait quel dégoût, et certains désirs de grabuge moins avouables, — la sincérité, masque fier et un peu doulou
40 e originale : tant qu’à la fin la notion concrète de sincérité s’évanouit en mille définitions tendancieuses et contradict
41 fin la notion concrète de sincérité s’évanouit en mille définitions tendancieuses et contradictoires. Êtes-vous sincères en a
42 e ; envers votre idéal ou envers les fluctuations de votre moi ? Votre sincérité est-elle consentement immédiat à toute im
43 me telle qu’elle est » (Rivière), ou encore refus de choisir, volonté de tout conserver en soi ? Ou bien une attitude en q
44  » (Rivière), ou encore refus de choisir, volonté de tout conserver en soi ? Ou bien une attitude en quelque sorte scienti
45 cientifique, à la fois curieuse et désintéressée, de naturaliste de l’âme ? Heureusement que M. Brémond ne s’est pas encor
46 la fois curieuse et désintéressée, de naturaliste de l’âme ? Heureusement que M. Brémond ne s’est pas encore mêlé de l’aff
47 reusement que M. Brémond ne s’est pas encore mêlé de l’affaire. Au reste, on n’a pas attendu les éclaircissements du subti
48 us rien comprendre. ⁂ Qu’on imagine un personnage de tableau se mettre à décrire ce qu’il voit autour de lui — et l’étonne
49 ectateur. Pour parler avec un peu de clairvoyance de ce dont nous avons vécu jusqu’à tel jour de notre jeunesse, il faudra
50 yance de ce dont nous avons vécu jusqu’à tel jour de notre jeunesse, il faudrait pouvoir sauter hors de soi. Seule, une mé
51 it pouvoir sauter hors de soi. Seule, une méthode d’ observation et de déduction passablement sèche pourrait nous donner l’
52 hors de soi. Seule, une méthode d’observation et de déduction passablement sèche pourrait nous donner l’illusion et peut-
53 donner l’illusion et peut-être certains bénéfices de cette opération idéale. En même temps, la froideur d’une telle méthod
54 ette opération idéale. En même temps, la froideur d’ une telle méthode atténuerait dans une certaine mesure — parce que néc
55 aine mesure — parce que nécessaire — ce qu’il y a de déplaisant dans l’effort d’un esprit pour se dégager de confusions au
56 ssaire — ce qu’il y a de déplaisant dans l’effort d’ un esprit pour se dégager de confusions aussi perfides et si profondém
57 laisant dans l’effort d’un esprit pour se dégager de confusions aussi perfides et si profondément mêlées à ses plus chères
58 ères sont aussi les moins calculés », écrit Gide. D’ où l’on peut tirer par une sorte de passage à la limite que les faits
59 », écrit Gide. D’où l’on peut tirer par une sorte de passage à la limite que les faits justifient : sincérité = spontanéit
60 rousseauiste, inspire, explique un vaste domaine de la littérature contemporaine. Cette sorte-là de sincérité, on la nomm
61 e de la littérature contemporaine. Cette sorte-là de sincérité, on la nomme gratuité. Lafcadio poussant Fleurissoire « pou
62 ui aboutit naguère au surréalisme. Tous les héros de roman se sont mis à gesticuler « gratuitement ». Et les critiques d’a
63 iculer « gratuitement ». Et les critiques d’abord de s’indigner. Aujourd’hui, on les voit assez enchantés de l’affaire : «
64 ndigner. Aujourd’hui, on les voit assez enchantés de l’affaire : « Gratuit ! », déclarent-ils chaque fois qu’ils ne compre
65 audrait s’entendre. Et, ici encore, prenons garde de confondre le plan littéraire avec le plan moral. Telle action peut pa
66 e personnage. Mais quant à l’auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste le plus incongru du héros n’est jamais que le résu
67 us incongru du héros n’est jamais que le résultat d’ un mécanisme inconscient, aussi révélateur du personnage que ses actio
68 t gratuit que relativement à un système restreint de références. Il résulte de semblables considérations, dans le domaine
69 à un système restreint de références. Il résulte de semblables considérations, dans le domaine de la morale, que le meill
70 lte de semblables considérations, dans le domaine de la morale, que le meilleur moyen de se livrer à ses déterminants, c’e
71 ns le domaine de la morale, que le meilleur moyen de se livrer à ses déterminants, c’est de mener la vie gratuite que récl
72 leur moyen de se livrer à ses déterminants, c’est de mener la vie gratuite que réclament les surréalistes. Le contraire de
73 uite que réclament les surréalistes. Le contraire de la liberté. D’autre part, on veut donner à l’acte gratuit une valeur
74 s secret dans la personnalité. Ce serait un moyen de connaissance plus intégrale de soi. Mais pour être moins pittoresque
75 Ce serait un moyen de connaissance plus intégrale de soi. Mais pour être moins pittoresque et plus « entachée d’utilitaris
76 is pour être moins pittoresque et plus « entachée d’ utilitarisme », la décision réfléchie, aussi peu gratuite que possible
77 ision réfléchie, aussi peu gratuite que possible, d’ un Julien Sorel, est-elle moins révélatrice du fond de l’âme humaine ?
78 e du fond de l’âme humaine ? Que si l’on s’étonne de me voir donner ici la préférence à l’acte volontaire, ou mieux : inté
79 suffisamment son rôle en se bornant à nous donner de nous-mêmes une connaissance plus intense et plus émouvante ; mais la
80 se et plus émouvante ; mais la morale, plutôt que de nous constater, doit nous construire — selon le mode le plus libre, l
81 scurités, etc.). Supposons que j’éprouve un désir d’ action vive, un élan vers certain but précis. Ou bien j’aurais juste
82 tain but précis. Ou bien j’aurais juste le temps de le noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à l’analyser plus lon
83 ent. Mais alors je le fausse, puisque je le prive de la puissance de se délivrer en gestes, en conséquences matérielles. C
84 je le fausse, puisque je le prive de la puissance de se délivrer en gestes, en conséquences matérielles. Ce n’est plus l’é
85 frein lui-même, bientôt — par un mouvement normal de l’attention — et fatalement c’est à la découverte d’une faiblesse que
86 l’attention — et fatalement c’est à la découverte d’ une faiblesse que j’aboutis : ce quelque chose qui m’a retenu d’accomp
87 e que j’aboutis : ce quelque chose qui m’a retenu d’ accomplir ce que l’élan appelait.   Second exemple. — J’éprouve le be
88 ppelait.   Second exemple. — J’éprouve le besoin de faire le point : à quoi en suis-je, qui suis-je ? Je revois des actes
89 ntiments que je crois avoir éprouvés à tel moment de mon passé. Parfois — rarement —, je parviens à me souvenir de certain
90 . Parfois — rarement —, je parviens à me souvenir de certaines sensations profondes et indéfinies (telle sensation physiqu
91 profondes et indéfinies (telle sensation physique de bonheur, dans une rue au coucher du soleil, des phares d’automobiles
92 ur, dans une rue au coucher du soleil, des phares d’ automobiles étoilent le brouillard, les visages se cachent dans des fo
93 dans des fourrures, personne ne sait la richesse de ta vie…). J’écris ces choses. Puis, dans un ancien carnet de notes, j
94 . J’écris ces choses. Puis, dans un ancien carnet de notes, je retrouve un être si différent. Les gestes et les sentiments
95 oposaient à mon souvenir ont été passés au crible de la minute où je me penchais sur mon passé. Ou, pour user d’une image
96 te où je me penchais sur mon passé. Ou, pour user d’ une image plus précise, cette minute est baignée d’une lueur de triste
97 ’une image plus précise, cette minute est baignée d’ une lueur de tristesse ou de sérénité qui métamorphose le paysage du p
98 lus précise, cette minute est baignée d’une lueur de tristesse ou de sérénité qui métamorphose le paysage du passé. Ainsi
99 te minute est baignée d’une lueur de tristesse ou de sérénité qui métamorphose le paysage du passé. Ainsi de certains déco
100 énité qui métamorphose le paysage du passé. Ainsi de certains décors modernes : vous changez l’éclairage, et la chaumière
101 trospection : ce daltonisme du souvenir. Si l’un de ces deux procédés peut m’apprendre quelque chose, c’est bien le secon
102 tion : ce daltonisme du souvenir. Si l’un de ces deux procédés peut m’apprendre quelque chose, c’est bien le second. La qua
103 ait atteindre « la vérité sur soi » en se servant de la méthode indiquée dans le premier exemple. C’est un cas-limite, j’e
104 , j’en conviens. Pourtant, n’est-ce pas le schéma de tout un genre littéraire moderne, cette espèce de confession romancée
105 de tout un genre littéraire moderne, cette espèce de confession romancée dont les livres de Bopp, d’Arland, de Soupault et
106 tte espèce de confession romancée dont les livres de Bopp, d’Arland, de Soupault et surtout de René Crevel ont donné les e
107 e de confession romancée dont les livres de Bopp, d’ Arland, de Soupault et surtout de René Crevel ont donné les exemples l
108 ssion romancée dont les livres de Bopp, d’Arland, de Soupault et surtout de René Crevel ont donné les exemples les plus ré
109 livres de Bopp, d’Arland, de Soupault et surtout de René Crevel ont donné les exemples les plus récents et significatifs 
110 us ces livres évoquent assez précisément la forme d’ un entonnoir. La vie serait le liquide tourbillonnant à l’intérieur. U
111 se regarder vivre, le personnage à douter du sens de sa vie) et les forces centripètes l’emportent peu à peu, une aspirati
112 t dans un râle, brusquement c’est le vide. Centre de soi, l’aspiration du néant. J’ai revu à l’envers le film de mon passé
113 aspiration du néant. J’ai revu à l’envers le film de mon passé : ce qui était élan devient recul, et l’évocation de mes dé
114 : ce qui était élan devient recul, et l’évocation de mes désirs anciens ne me restitue qu’un dégoût. J’ai cru que je pourr
115 e n’assiste pas à moi-même, mais à la destruction de moi-même. Par les fissures, un instant, j’ai pu soupçonner des profon
116 le chaos. Mon corps et moi, le livre si poignant de René Crevel, est la démonstration la plus cynique que je connaisse de
117 la démonstration la plus cynique que je connaisse de ces ravages du sincérisme. Dans la solitude qu’il s’acharne à approfo
118 ofondir — il était venu y chercher quelque raison de vivre, il voulait se voir le plus purement (« cette curiosité donnée
119 s purement (« cette curiosité donnée comme raison d’ une perpétuelle attente »), — ce que l’auteur découvre c’est ce « merv
120 uteur découvre c’est ce « merveilleux contraire » de l’élan vital qu’il nomme élan mortel — générateur de l’incurable tris
121 l’élan vital qu’il nomme élan mortel — générateur de l’incurable tristesse qui rôde dans certaine littérature d’aujourd’hu
122 able tristesse qui rôde dans certaine littérature d’ aujourd’hui. J’ai dit : ravages du sincérisme. C’est plus exactement f
123 plus exactement faillite qu’il faudrait. Faillite de toute introspection, en littérature et en morale. Impossibilité de fa
124 ction, en littérature et en morale. Impossibilité de faire mon autoportrait moral : je bouge tout le temps. Danger de fair
125 toportrait moral : je bouge tout le temps. Danger de faire mon autoportrait moral : je me compose plus laid que nature. Fa
126 e suis avisé que l’homme éprouve ce qu’il imagine d’ éprouver. » Non. Car à supposer que l’analyse nous crée, elle ne nous
127 est ». Il voyait dans cet effort sur soi le gage d’ un enrichissement, d’une consolidation de l’individu mais avant tout u
128 s cet effort sur soi le gage d’un enrichissement, d’ une consolidation de l’individu mais avant tout un moyen de se connaît
129 le gage d’un enrichissement, d’une consolidation de l’individu mais avant tout un moyen de se connaître. Cependant, n’est
130 solidation de l’individu mais avant tout un moyen de se connaître. Cependant, n’est-ce pas lui-même qui ajoutait que l’hom
131 ncère « en vient à ne plus pouvoir même souhaiter d’ être différent », ce qui est la négation de tout progrès moral. De la
132 haiter d’être différent », ce qui est la négation de tout progrès moral. De la sincérité envisagée comme moyen de connaiss
133  », ce qui est la négation de tout progrès moral. De la sincérité envisagée comme moyen de connaissance, le cas extrême d’
134 grès moral. De la sincérité envisagée comme moyen de connaissance, le cas extrême d’un Crevel nous montre assez ce qu’il f
135 sagée comme moyen de connaissance, le cas extrême d’ un Crevel nous montre assez ce qu’il faut penser2. Il ne s’en suit pas
136 assez étroites empiriquement fournies par le sens de son intérêt propre, une analyse sincère ne puisse faire découvrir que
137 découvrir quelques richesses et ne serve parfois de contrôle efficace. Mais les bénéfices sont maigres en regard des dang
138 r, tant dans le domaine littéraire que dans celui de l’action. En littérature : refus de construire, de composer ; impuiss
139 ue dans celui de l’action. En littérature : refus de construire, de composer ; impuissance à inventer. Car inventer, c’est
140 e l’action. En littérature : refus de construire, de composer ; impuissance à inventer. Car inventer, c’est se porter à l’
141 Car inventer, c’est se porter à l’extrême pointe de soi, et, d’un élan, se dépasser ; c’est créer une différence. Pourquo
142 r, c’est se porter à l’extrême pointe de soi, et, d’ un élan, se dépasser ; c’est créer une différence. Pourquoi les romanc
143 créer des personnages ? C’est parce qu’une sorte de sincérité les retient d’imposer aux héros ce rythme volontaire par le
144 C’est parce qu’une sorte de sincérité les retient d’ imposer aux héros ce rythme volontaire par lequel un Balzac les fait v
145 lairement. En morale : défaitisme quand il s’agit de gestes qui pourraient entraîner des effets imprévisibles, « réalisme 
146  réalisme » décourageant, et, bientôt, incapacité d’ agir efficacement. (Il faut, pour sauter, une confiance dans l’élan qu
147 paraît impossible, absurde.) Enfin, désagrégation de la personnalité, car l’analyse la plus savante, comme l’a fort bien d
148 ments du moi, moins le principe unificateur ». De quelques sophismes libérateurs La fonction de l’homme est aussi bi
149 De quelques sophismes libérateurs La fonction de l’homme est aussi bien de croire que de constater. F. Raub. La sin
150 érateurs La fonction de l’homme est aussi bien de croire que de constater. F. Raub. La sincérité obstinée d’un Riviè
151 fonction de l’homme est aussi bien de croire que de constater. F. Raub. La sincérité obstinée d’un Rivière n’a plus ri
152 e de constater. F. Raub. La sincérité obstinée d’ un Rivière n’a plus rien de spontané. En quoi est-ce encore de la sinc
153 La sincérité obstinée d’un Rivière n’a plus rien de spontané. En quoi est-ce encore de la sincérité ? Trop sincère, pas s
154 n’a plus rien de spontané. En quoi est-ce encore de la sincérité ? Trop sincère, pas sincère. Ou bien si l’on prétend que
155 la sincérité est la recherche, puis l’acceptation de toute tendance du moi, je réponds que le mensonge est sincère aussi,
156 mensonge est sincère aussi, qui révèle mon besoin de mentir. Il devient dès lors impossible de faire rien qui ne soit sinc
157 besoin de mentir. Il devient dès lors impossible de faire rien qui ne soit sincère. Peut-on véritablement se mentir à soi
158 z pour qu’ils vous aident3 — mais jamais au point d’ oublier la vérité qu’on désirait qu’ils cachent pour un moment. « L’ar
159 ire à la vie, n’est-ce pas être sincère aussi que de s’y prêter ? Or, il vous tire aussitôt de l’indétermination violente
160 ssi que de s’y prêter ? Or, il vous tire aussitôt de l’indétermination violente qu’est la sincérité selon Rivière. La sinc
161 ans le vide qu’exige toute foi ; c’est la volonté de sincérité, c’est-à-dire une sincérité tournée au vice, invertie, qui
162 sincérité tournée au vice, invertie, qui retient de l’oser. Petite anthologie ou que le « style » est de l’homme même
163 ser. Petite anthologie ou que le « style » est de l’homme même J’en étais à peu près à ce point de mes notes — à ce
164 l’homme même J’en étais à peu près à ce point de mes notes — à ce point de mon dégoût pour ce que beaucoup continuaien
165 s à peu près à ce point de mes notes — à ce point de mon dégoût pour ce que beaucoup continuaient d’appeler sincérité et q
166 t de mon dégoût pour ce que beaucoup continuaient d’ appeler sincérité et qui me devenait inintelligible en même temps qu’o
167 inintelligible en même temps qu’odieux. Au hasard de quelques lectures, je pris note des passages suivants (les paraphrase
168 ote des passages suivants (les paraphraser serait d’ une ingratitude insigne — ils marquent au reste fort bien les jalons d
169 igne — ils marquent au reste fort bien les jalons de cette recherche) : Puissiez-vous avouer moins de sincérité et montre
170 de cette recherche) : Puissiez-vous avouer moins de sincérité et montrer plus de style. (Georges Duhamel.) … Nous ne somm
171 ez-vous avouer moins de sincérité et montrer plus de style. (Georges Duhamel.) … Nous ne sommes pas, nous nous créons. Cer
172 n qui altérerait leur moi ; ils ne souhaitent que d’ être leur propre témoin, intelligent mais immobile : ce sont les mêmes
173 istant pas ? (François Mauriac.) La valeur morale de M. Godeau serait définie par l’aspect seul qu’il souffrirait de garde
174 erait définie par l’aspect seul qu’il souffrirait de garder lui-même à son propre regard. Ainsi la valeur morale d’un homm
175 -même à son propre regard. Ainsi la valeur morale d’ un homme équivalait-elle à l’illusion qu’il était capable d’entretenir
176 équivalait-elle à l’illusion qu’il était capable d’ entretenir sur lui-même. (Marcel Jouhandeau.) Ce qu’on appelle une œuv
177 appelle une œuvre sincère est celle qui est douée d’ assez de force pour donner de la réalité à l’illusion. (Max Jacob.) Un
178 une œuvre sincère est celle qui est douée d’assez de force pour donner de la réalité à l’illusion. (Max Jacob.) Un rôle ?
179 celle qui est douée d’assez de force pour donner de la réalité à l’illusion. (Max Jacob.) Un rôle ? Oui. Mais si le perso
180 me même. (André Maurois.) (Quel effroi, ce jour de l’adolescence où l’on soupçonne pour la première fois que certains, p
181 paraît plus sinistre à la sincérité presque pure de cet âge. Mais il le faut dépasser.)   Si j’en crois l’intensité d’un
182 il le faut dépasser.)   Si j’en crois l’intensité d’ un sentiment intime, ce moi idéal que j’appelle en chaque minute de ma
183 time, ce moi idéal que j’appelle en chaque minute de ma joie est plus réel que celui qu’une analyse désolée s’imaginait re
184 rs, ce n’est pas lâcher la proie pour l’ombre que de tendre vers ce modèle. Dirais-je que c’est ma sincérité d’y aller par
185 vers ce modèle. Dirais-je que c’est ma sincérité d’ y aller par les moyens les plus efficaces ? Mais on nommera cela de l’
186 moyens les plus efficaces ? Mais on nommera cela de l’hypocrisie. Soit, j’accepte. Et aussitôt j’annonce : Éloge de l’
187 Soit, j’accepte. Et aussitôt j’annonce : Éloge de l’hypocrisie Non, non !… Debout dans l’ère successive ! Brisez, mo
188 ................. Le vent se lève, il faut tenter de vivre. Paul Valéry. Certes, du sein de ma triste lucidité, je t’ava
189 t tenter de vivre. Paul Valéry. Certes, du sein de ma triste lucidité, je t’avais déjà invoquée, hypocrisie consolante e
190 Mais tu m’offrais un visage un peu crispé, signe d’ une ironie secrète et pour moi douloureuse encore. Pitoyable, trop vis
191 ent, tu prêtais bien quelques voiles à mon dégoût d’ un moi que la vie me montrait si désespérément vrai, tyrannique, insuf
192 rément vrai, tyrannique, insuffisant. Mais un pli de ta lèvre, un peu sceptique, quand mon esprit partait dans le rêve d’u
193 sceptique, quand mon esprit partait dans le rêve d’ un idéal de fortune, idole naïve de ma jeune angoisse… Je t’ai mieux a
194 quand mon esprit partait dans le rêve d’un idéal de fortune, idole naïve de ma jeune angoisse… Je t’ai mieux aimée ; d’au
195 t dans le rêve d’un idéal de fortune, idole naïve de ma jeune angoisse… Je t’ai mieux aimée ; d’autres soirs, alors qu’une
196 ux aimée ; d’autres soirs, alors qu’une symphonie de joies émanait de toute la vie : chaque chose proposait une ferveur no
197 es soirs, alors qu’une symphonie de joies émanait de toute la vie : chaque chose proposait une ferveur nouvelle, et chaque
198 tat de grâce, un amour — ne pouvait se satisfaire de telle possession particulière, ne pouvait non plus s’imaginer qu’elle
199 ement à l’invite que je soupçonnais la plus riche d’ inconnu, je m’élançais sur la voie qu’elle m’ouvrait, avec tant de rir
200 is, vers tout ce que momentanément je choisissais de laisser — et des baisers à tous les vents — qu’il eût été loisible d’
201 baisers à tous les vents — qu’il eût été loisible d’ attribuer comme objet à ma jubilation, non pas ce but peut-être dériso
202 vers quoi je me portais, mais bien ces figurants de mon bonheur que je me conciliais pour des retours possibles. C’est ai
203 C’est ainsi que fidèle à soi-même au plus profond de l’être, on entretient comme une arrière-pensée sagace et obstinée l’a
204 une arrière-pensée sagace et obstinée l’assurance d’ une continuité entre ses actions et ses désirs, un quant-à-soi qui ne
205 discrètement les décisions et les rend complices d’ un dessein logique, peut-être lointain, en quoi consiste l’unité la pl
206 lointain, en quoi consiste l’unité la plus réelle de l’individu — en dehors du corps. Et ce ne sont point là jeux d’idées
207 — en dehors du corps. Et ce ne sont point là jeux d’ idées et jongleries verbales. Regards au-dessus de l’amour ! Voir l’he
208 d’idées et jongleries verbales. Regards au-dessus de l’amour ! Voir l’heure à la pendule pendant l’étreinte d’un adieu et
209 ur ! Voir l’heure à la pendule pendant l’étreinte d’ un adieu et calculer rapidement le retour à une fidélité plus profonde
210 une volonté — si profonde qu’elle n’a pas besoin de s’expliciter pour être efficace — qui m’interdit de nommer ce dont je
211 s’expliciter pour être efficace — qui m’interdit de nommer ce dont je ne veux plus souffrir. (Car il n’est peut-être qu’u
212 s souffrir. (Car il n’est peut-être qu’une espèce de souffrance véritablement insupportable, c’est celle qu’on tire de soi
213 ritablement insupportable, c’est celle qu’on tire de soi-même.) Hypocrisie, ce sourire des sphinx ; hypocrisie, masque amb
214 ce sourire des sphinx ; hypocrisie, masque ambigu d’ une liberté plus précieuse que toute certitude… Ô vérité, ma vérité, n
215 é, ma vérité, non pas ce que je suis, mais ce que de toute mon âme je veux être !… 1. La véritable description de l’éla
216 , mais ce que de toute mon âme je veux être !… 1. La véritable description de l’élan supposé dans le premier exemple, c
217 me je veux être !… 1. La véritable description de l’élan supposé dans le premier exemple, ce serait le récit des gestes
218 mettre. Manifester est plus sincère qu’analyser. 2. D’ailleurs toute la psychologie moderne souligne la quasi-impossibili
219 ychologie moderne souligne la quasi-impossibilité de traduire un dynamisme directement dans notre langage statique. 3. « 
220 namisme directement dans notre langage statique. 3. « Et certes quand il s’agit de parole ou d’écriture, l’affirmation pr
221 langage statique. 3. « Et certes quand il s’agit de parole ou d’écriture, l’affirmation prouve moins une certitude qu’un
222 que. 3. « Et certes quand il s’agit de parole ou d’ écriture, l’affirmation prouve moins une certitude qu’un désir de cert
223 ffirmation prouve moins une certitude qu’un désir de certitude né de quelque doute au fond. » (René Crevel) c. Rougemont
224 e moins une certitude qu’un désir de certitude né de quelque doute au fond. » (René Crevel) c. Rougemont Denis de, « Par
225 ute au fond. » (René Crevel) c. Rougemont Denis de , « Paradoxe de la sincérité », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuc
226 (René Crevel) c. Rougemont Denis de, « Paradoxe de la sincérité », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fr
227 ont Denis de, « Paradoxe de la sincérité », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, décembre 1926, p.
228 res, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, décembre 1926, p. 13-25.
3 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Billets aigres-doux (janvier 1927)
229 Billets aigres-doux (janvier 1927 )d e Pour Harriet V. A.-W. Poste aux amours perdues Sur le
230 dues Sur le mont gris pâlissants Des bouquets de vagues brumes. Insulter ta beauté froide ? Oui, mais à qui s’adresser
231 s pleurs, Lors je baise votre main Comme on signe d’ un faux nom. d. Rougemont Denis de, « Billets aigres-doux », Revu
232 e on signe d’un faux nom. d. Rougemont Denis de , « Billets aigres-doux », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel
233 ougemont Denis de, « Billets aigres-doux », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, janvier 1927, p. 
234 tres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, janvier 1927, p. 40. e. Signé : Julien Domingue.
4 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Conte métaphysique : L’individu atteint de strabisme (janvier 1927)
235 Conte métaphysique : L’individu atteint de strabisme (janvier 1927)f g Comme le démiurge venait de peser sur
236 ysique : L’individu atteint de strabisme (janvier 1927 )f g Comme le démiurge venait de peser sur le commutateur des étoil
237 ateur des étoiles… l’une, se décrochant sans plus d’ hésitation, se mit à pérégriner dans les régions de chasse gardée du c
238 ’hésitation, se mit à pérégriner dans les régions de chasse gardée du ci-devant soleil. C’est là qu’Urbain, premier du nom
239 famille, laquelle n’avait compté jusqu’alors que d’ authentiques avocats et un chapelier dont tous s’accordaient à dire qu
240 accordaient à dire qu’il ne péchait que par excès de bonne humeur printanière, Urbain donc, premier mauvais garçon d’une r
241 printanière, Urbain donc, premier mauvais garçon d’ une race entre toutes bénie — par qui ? elle était anticléricale, on n
242 s, tout scintillement pudiquement dissimulé. Vers 1 heure, elle éclaira d’une rose caresse lumineuse la chevelure rouge d
243 pudiquement dissimulé. Vers 1 heure, elle éclaira d’ une rose caresse lumineuse la chevelure rouge d’Urbain, et son nez, le
244 a d’une rose caresse lumineuse la chevelure rouge d’ Urbain, et son nez, lequel, par ses dimensions remarquablement exagéré
245 s remarquablement exagérées, lui valait le surnom de Bin-Bin. Urbain ouvrit les yeux et ne vit rien. On rappelle que les é
246 On rappelle que les étoiles s’étaient décrochées de leur poste dans l’éternité. « Éternité désaffectée, c’est bien dommag
247 s irons chercher dans le souvenir les vent-coulis de la mort. Garçon, un café, un ! » Mais l’étoile chantait dans l’axe de
248 un café, un ! » Mais l’étoile chantait dans l’axe de sa vie normale et s’approchait en faisant la roue — celle à qui souri
249 oue — celle à qui sourit la Fortune. Urbain, fort d’ une hérédité judiciaire et française, dédaigna des avances que la pert
250 e et française, dédaigna des avances que la perte de son sens de l’éternel rendait pourtant considérables, au sens étymolo
251 se, dédaigna des avances que la perte de son sens de l’éternel rendait pourtant considérables, au sens étymologique du ter
252 ile pleurait, sentimentale. f. Rougemont Denis de , « L’individu atteint de strabisme. Conte métaphysique », Revue de Be
253 e. f. Rougemont Denis de, « L’individu atteint de strabisme. Conte métaphysique », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Ne
254 atteint de strabisme. Conte métaphysique », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, janvier 1927, p. 
255 tres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, janvier 1927, p. 54-55. g. Signé : Salomon de Crac.
5 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Dans le Style (janvier 1927)
256 Dans le Style (janvier 1927 )h Nous recevons d’un bellettrien facétieux cet « Hommage à Paul Mo
257 Dans le Style (janvier 1927)h Nous recevons d’ un bellettrien facétieux cet « Hommage à Paul Morand » : Billet circ
258  : Billet circulaire pour Paul Morand, auteur de « Lewis et Irène » L’auteur de maint roman de caractère gras quitte
259 ul Morand, auteur de « Lewis et Irène » L’auteur de maint roman de caractère gras quitte Charing-Cross, songeant aux titr
260 ur de « Lewis et Irène » L’auteur de maint roman de caractère gras quitte Charing-Cross, songeant aux titres, aux tire-l’
261 matique, fait balle au cerveau du poète qui meurt de sommeil naturel. Le tunnel sous la Manche escamoté, le train dépose d
262 tenant des Anglais fragiles. L’aube tire un écran de pluies sur le paysage commercial. Terminus : Morand, s’éveillant en f
263 eillant en français, termine : … Irène. (Grasset, 1924 … … y compris la Suède et la Norvège.) On lit dans les Nouvelles li
264 e.) On lit dans les Nouvelles littéraires , du 8 janvier 1927, l’information suivante : Mardi dernier a été célébré en
265 it dans les Nouvelles littéraires , du 8 janvier 1927, l’information suivante : Mardi dernier a été célébré en l’église grec
266 : Mardi dernier a été célébré en l’église grecque de la rue Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand avec la princesse H
267 église grecque de la rue Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand avec la princesse Hélène-C. Soutzo. Les témoins étaien
268 la mariée : Son Excellence M. Diamanty, ministre de Roumanie à Paris. C’est encore mieux dans le style. h. Rougemont D
269 encore mieux dans le style. h. Rougemont Denis de , « Dans le style », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genèv
270 h. Rougemont Denis de, « Dans le style », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, janvier 1927, p. 
271 tres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, janvier 1927, p. 61-62.
6 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Lettre du survivant (février 1927)
272 Lettre du survivant (février 1927 )i j « Triste, mais vrai. » (Les journaux.) Mademoiselle, Il faut
273 ’abord que je m’excuse : c’est un peu prétentieux de vous écrire au moment où je vais me suicider, d’autant plus que vous
274 de vous écrire au moment où je vais me suicider, d’ autant plus que vous n’y croirez pas — et pourtant… Il faut aussi que
275 ez ne pas voir dans cette phrase quelque allusion de mauvais goût.) Je vous ai rencontrée quatre ou cinq fois dans des lie
276 allusion de mauvais goût.) Je vous ai rencontrée quatre ou cinq fois dans des lieux de plaisir, comme on dit, sans doute parc
277 de mauvais goût.) Je vous ai rencontrée quatre ou cinq fois dans des lieux de plaisir, comme on dit, sans doute parce que c’
278 ai rencontrée quatre ou cinq fois dans des lieux de plaisir, comme on dit, sans doute parce que c’est là que se nouent le
279 existiez en moi, à certain désagrément que j’eus de vous voir si entourée… D’autres fois… je n’ai plus le courage de les
280 entourée… D’autres fois… je n’ai plus le courage de les dire. Enfin, avant-hier, à ce bal. J’avais demandé à un de mes a
281 nfin, avant-hier, à ce bal. J’avais demandé à un de mes amis, qui vous connaît4, de me présenter. Il m’en avait donné la
282 vais demandé à un de mes amis, qui vous connaît4, de me présenter. Il m’en avait donné la promesse. Vos regards rencontrèr
283 romesse. Vos regards rencontrèrent les miens plus d’ une fois pendant une danse qu’il fit avec vous, mais vous les détourni
284 ecrètement attirante ; et je pensais que la force de mon désir était telle que vous en éprouviez vaguement la menace. Je d
285 sais quel démon du malheur me paralysa. Je venais d’ entrevoir l’image d’un couple heureux et banal, votre sourire répondan
286 alheur me paralysa. Je venais d’entrevoir l’image d’ un couple heureux et banal, votre sourire répondant au mien, comme on
287 vexé ; vous disparaissiez au milieu d’un cortège de rires empressés. Une autre danse reprenait. Je sentis une invincible
288 dait, en passant, si j’étais malade. Je désignais d’ un geste incertain quelques bouteilles de champagne vides ; car on par
289 ésignais d’un geste incertain quelques bouteilles de champagne vides ; car on pardonne l’ivresse, mais non certaines doule
290 mais non certaines douleurs. Même, je fus obligé de confier à un ami que j’en avais repris … Les archets jouaient sur mes
291 es œillères géantes aux pensées, le ciel trop bas d’ un rêve sans issue, pesant comme l’envie d’un sommeil sans fin… J’avai
292 op bas d’un rêve sans issue, pesant comme l’envie d’ un sommeil sans fin… J’avais soif, mais la seule vue d’un liquide me s
293 sommeil sans fin… J’avais soif, mais la seule vue d’ un liquide me soulevait le cœur. L’aube parut. On éteignit toutes les
294 a table en désordre où je venais de jeter mon col de smoking et un œillet, pauvre gentillesse d’une autre femme dont le se
295 n col de smoking et un œillet, pauvre gentillesse d’ une autre femme dont le seul défaut fut de m’aimer… (Froid aux genoux,
296 illesse d’une autre femme dont le seul défaut fut de m’aimer… (Froid aux genoux, odeur de vieille fumée, et ce refus au so
297 l défaut fut de m’aimer… (Froid aux genoux, odeur de vieille fumée, et ce refus au sommeil qui meurtrit jusqu’à l’âme.) Co
298 sommeil qui meurtrit jusqu’à l’âme.) Convulsions d’ oriflammes sur l’orchestre pensif. Ton regard est plus grand que le ch
299 une chambre étroite… J’ai dormi quelques heures, d’ un sommeil triste, tout enfiévré par la crainte du réveil. Puis je sui
300 passer trop souvent devant les ascenseurs. « Vers 4 heures, me disais-je elle y entrera, et, me glissant auprès d’elle, j
301 disais-je elle y entrera, et, me glissant auprès d’ elle, je pourrai lui dire très vite quelques mots si bouleversants qu’
302 evais paraître si perdu. Chaque fois qu’un paquet de dix personnes s’engouffrait dans la cage rouge et or et s’élevait, j’
303 is paraître si perdu. Chaque fois qu’un paquet de dix personnes s’engouffrait dans la cage rouge et or et s’élevait, j’épro
304 r descendant… Il aurait fallu monter, mais l’idée de vous trouver peut-être assise en face de votre bel ami laqué, sourian
305 tre bel ami laqué, souriante… Enfin, un peu après 6 heures, je suis sorti. Il y avait beaucoup de monde dans les rues, so
306 oule qui se précipitait, mais je n’avais pas pris de numéro, je ne pouvais pas monter. Je finissais par vous voir partout.
307 Je finissais par vous voir partout. Chaque visage de femme révélait soudain un trait de votre visage. Il aurait fallu cour
308 Chaque visage de femme révélait soudain un trait de votre visage. Il aurait fallu courir après celle-là qui venait de tou
309 ir après celle-là qui venait de tourner à l’angle de cette rue et qui avait votre démarche. Mais, pendant ce temps, vous p
310 éticents, maladroits, contradictoires… Un autobus de luxe s’était arrêté tout près de moi. Je vis un visage à l’intérieur
311 Mais je n’osais presque pas la regarder, à cause d’ une incertitude qui redonnait tout son empire à ma timidité. Peut-être
312 tre était-ce vous. Je ne saurai jamais. À l’arrêt de la Place Saint-Michel, elle sortit, en me frôlant, sans me regarder.
313 s parapluies la dérobèrent à mes yeux. Une bouche de métro m’attira. Les rames s’arrêtaient avec un sifflement particulièr
314 utes les femmes que j’ai fait souffrir cette nuit d’ un long regard de damné. À minuit, tellement épuisé que je mêlais à me
315 ue j’ai fait souffrir cette nuit d’un long regard de damné. À minuit, tellement épuisé que je mêlais à mes pensées des fra
316 épuisé que je mêlais à mes pensées des fragments de rêves et les personnages des affiches, tout en marchant sans fin dans
317 nts, je me pris à parler à haute voix, par bribes de phrases incohérentes. Je voyais avec une sombre joie les employés et
318 les voyageurs s’inquiéter. Bientôt on m’entraîna de force sur un trottoir roulant qui me remonta dans la rue. La fraîcheu
319 roulant qui me remonta dans la rue. La fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis que je me sentais mieux
320 vant de retrouver ma rue. Il doit être maintenant 5 heures du matin. Premiers appels d’autos dans la ville, mais il me se
321 tre maintenant 5 heures du matin. Premiers appels d’ autos dans la ville, mais il me semble que toutes choses s’éloignent d
322 , mais il me semble que toutes choses s’éloignent de moi vertigineusement, par cette aube incolore. Il y a vingt-quatre he
323 vertigineusement, par cette aube incolore. Il y a vingt-quatre heures donc, j’étais encore au bal. Cette constatation machinale ne c
324 du la notion du temps. Je ne me souviens plus que de cette déception insupportable et définitive de mon désir. Je ne vous
325 ue de cette déception insupportable et définitive de mon désir. Je ne vous en accuse pas. À peine si je puis encore évoque
326 -je pas vraiment aimée, mais bien ce goût profond de ma destruction, ce rongement, cette sournoise recherche de tout ce qu
327 truction, ce rongement, cette sournoise recherche de tout ce qui me navre au plus intime de mon être… Le revolver est char
328 recherche de tout ce qui me navre au plus intime de mon être… Le revolver est chargé, sur cette table. (Je le caresse, en
329 st chargé, sur cette table. (Je le caresse, entre deux phrases.) Mais voici que ce geste de ma mort aussi me lasse, l’image
330 sse, entre deux phrases.) Mais voici que ce geste de ma mort aussi me lasse, l’image que je m’en forme… Je ne comprends pl
331 audrait que je dorme : il n’y aurait plus rien. 4. Encore un qui vous aime, je ne vous dirai pas son nom. i. Rougemont
332 e ne vous dirai pas son nom. i. Rougemont Denis de , « Lettre du survivant », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel
333 ougemont Denis de, « Lettre du survivant », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, février 1927, p. 
334 tres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, février 1927, p. 67-72. j. Signé : Arthur.
7 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Orphée sans charme (février 1927)
335 Orphée sans charme (février 1927 )k « Cet âge est sans pitié. » « Le véritable symbole n’est jamai
336 ur », écrivait Cocteau dans la préface des Mariés de la tour Eiffel. Et une note d’Orphée précise : « Inutile de dire qu’i
337 préface des Mariés de la tour Eiffel. Et une note d’ Orphée précise : « Inutile de dire qu’il n’y a pas un seul symbole dan
338 Eiffel. Et une note d’Orphée précise : « Inutile de dire qu’il n’y a pas un seul symbole dans la pièce. » Ce qui me gêne
339 e dans la pièce. » Ce qui me gêne pourtant, c’est d’ y découvrir possibles deux interprétations symboliques au moins ; de n
340 i me gêne pourtant, c’est d’y découvrir possibles deux interprétations symboliques au moins ; de ne pouvoir m’empêcher d’y s
341 ibles deux interprétations symboliques au moins ; de ne pouvoir m’empêcher d’y songer sans cesse en lisant cette « tragédi
342 s symboliques au moins ; de ne pouvoir m’empêcher d’ y songer sans cesse en lisant cette « tragédie » ; de ne pouvoir m’emp
343 songer sans cesse en lisant cette « tragédie » ; de ne pouvoir m’empêcher non plus de soupçonner Cocteau d’en avoir plus
344 « tragédie » ; de ne pouvoir m’empêcher non plus de soupçonner Cocteau d’en avoir plus ou moins consciemment concerté la
345 pouvoir m’empêcher non plus de soupçonner Cocteau d’ en avoir plus ou moins consciemment concerté la possibilité. Orphée, p
346 , dit-il, il faut obtenir un scandale. Il faut un de ces orages qui rafraîchissent l’air. » Il prétend « traquer l’inconnu
347 prétend « traquer l’inconnu ». Sa femme l’accuse de « vouloir faire admettre que la poésie consiste à écrire une phrase »
348 est un poème, un poème du rêve, une fleur du fond de la mort. » Or, on découvre à la fin de la pièce que c’est une anagram
349 ur du fond de la mort. » Or, on découvre à la fin de la pièce que c’est une anagramme un peu ordurière. Ainsi les rêves pu
350 s, donnés à la fois comme poèmes et comme dictées de l’inconscient, au fond desquels on a si vite fait de distinguer les q
351 l’inconscient, au fond desquels on a si vite fait de distinguer les quelques préoccupations assez simples dont l’étude cha
352 ursuivre le jeu. Et puis, il y a aussi des sortes de calembours… Art chrétien, a-t-on dit5. Certes, cette pièce n’est pas
353 -on dit5. Certes, cette pièce n’est pas dépourvue de certaines des qualités qui, selon Max Jacob, permettraient seules de
354 alités qui, selon Max Jacob, permettraient seules de taxer de chrétienne une œuvre d’art. Mais, d’autre part, cette équivo
355 i, selon Max Jacob, permettraient seules de taxer de chrétienne une œuvre d’art. Mais, d’autre part, cette équivoque des s
356 ettraient seules de taxer de chrétienne une œuvre d’ art. Mais, d’autre part, cette équivoque des symboles, cette simplicit
357 dmire sans émoi. ⁂ Certes, les qualités scéniques de cette pièce sont grandes. Je ne saurais même indiquer aucun endroit p
358 cipes chers à l’auteur du Secret professionnel et de la préface des Mariés — principes dont l’énoncé brillant et définitif
359 tif restera l’un des titres les plus authentiques de Cocteau. Précision et relief du dialogue, ingénieuse utilisation des
360 se utilisation des expressions courantes, maximum de « situation » des personnages obtenu avec un minimum de répliques ; e
361 ituation » des personnages obtenu avec un minimum de répliques ; enfin, un style parfaitement pauvre dans le détail, un vr
362 parfaitement pauvre dans le détail, un vrai style de théâtre, d’une netteté qui pourtant n’est pas maigre, d’une familiari
363 pauvre dans le détail, un vrai style de théâtre, d’ une netteté qui pourtant n’est pas maigre, d’une familiarité dramatiqu
364 tre, d’une netteté qui pourtant n’est pas maigre, d’ une familiarité dramatique qui cerne le mystère d’un trait pur. Il sem
365 d’une familiarité dramatique qui cerne le mystère d’ un trait pur. Il semble que Cocteau ait réalisé là exactement ce qu’il
366 es. « Puisque ces mystères me dépassent, feignons d’ en être l’organisateur », disait le photographe des Mariés. Dans Orphé
367 n somme, ce qu’il faut reprocher à Cocteau, c’est d’ avoir réussi complètement une pièce, prouvant une fois de plus que l’a
368 pièce, prouvant une fois de plus que l’atmosphère de l’« art pur » n’est pas respirable. Il ne manque rien à Orphée, sinon
369 rphée, sinon peut-être cette indispensable « part de Dieu » — comme dit Gide — qui serait aussi la part de l’humain, l’imp
370 ieu » — comme dit Gide — qui serait aussi la part de l’humain, l’imperfection secrète qui fait naître l’amour. Parce que l
371 ’une fois de plus, Cocteau a comprimé des pétales de roses dans du cristal taillé, selon toutes les règles de l’art, mais
372 s dans du cristal taillé, selon toutes les règles de l’art, mais que l’essence obtenue, si elle est de rose, est sans parf
373 de l’art, mais que l’essence obtenue, si elle est de rose, est sans parfum.   (Tout de même, Cocteau est un poète : j’en v
374 ur mon compte, dans le fait que je ne sais parler de lui autrement que par métaphores.) 5. M. Zimmer, dans la Gazette d
375 is parler de lui autrement que par métaphores.) 5. M. Zimmer, dans la Gazette de Lausanne . Et même il appelait Orphée
376 par métaphores.) 5. M. Zimmer, dans la Gazette de Lausanne . Et même il appelait Orphée « une tragédie de l’amour conju
377 sanne . Et même il appelait Orphée « une tragédie de l’amour conjugal ». Vraiment, nous n’en demandions pas tant… k. Rou
378 us n’en demandions pas tant… k. Rougemont Denis de , « Orphée sans charme », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-
379 Rougemont Denis de, « Orphée sans charme », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, février 1927, p. 
380 tres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, février 1927, p. 85-87.
8 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). L’autre œil (février 1927)
381 L’autre œil (février 1927 )l m Décembre L’époque s’ouvre où l’on attend un miracle pour
382 que s’ouvre où l’on attend un miracle pour la fin de la semaine. « Messieurs, disait Dardel, y a pas à tortiller, il faut
383 s ne sommes pas des imbéciles, nous ne sommes pas de ces gens qui croient que 2 et 2 font 22, et qui confondent Jérôme et
384 s, nous ne sommes pas de ces gens qui croient que 2 et 2 font 22, et qui confondent Jérôme et Jean Tharaud ! » Il y a des
385 us ne sommes pas de ces gens qui croient que 2 et 2 font 22, et qui confondent Jérôme et Jean Tharaud ! » Il y a des soir
386 ommes pas de ces gens qui croient que 2 et 2 font 22, et qui confondent Jérôme et Jean Tharaud ! » Il y a des soirs où tout
387 out ça semble idiot. Il y a des soirs où une idée de la responsabilité s’empare de nous. Et nous calculons qu’il s’agit de
388 s soirs où une idée de la responsabilité s’empare de nous. Et nous calculons qu’il s’agit de déranger 5000 personnes en hu
389 s’empare de nous. Et nous calculons qu’il s’agit de déranger 5000 personnes en huit soirées, et de les occuper quatre heu
390 nous. Et nous calculons qu’il s’agit de déranger 5000 personnes en huit soirées, et de les occuper quatre heures durant… Ma
391 culons qu’il s’agit de déranger 5000 personnes en huit soirées, et de les occuper quatre heures durant… Mais la vision, rapi
392 it de déranger 5000 personnes en huit soirées, et de les occuper quatre heures durant… Mais la vision, rapidement entrevue
393 5000 personnes en huit soirées, et de les occuper quatre heures durant… Mais la vision, rapidement entrevue par chacun dans so
394 trevue par chacun dans son for le plus intérieur, d’ une fuite en auto, nous rassure provisoirement… Prosopopée, à propo
395 , à propos d’une apparition La vieille Monture 6 un soir nous apparut, lugubrement fardée, l’haleine mauvaise, édentée
396 e, édentée et tâchant à prendre un accent anglais d’ un comique assez macabre. Ses derniers sectateurs, désignant d’un doig
397 assez macabre. Ses derniers sectateurs, désignant d’ un doigt impitoyable son flanc déjà meurtri, la suivaient en hurlant :
398 oi là ! »… Est-il plus atroce spectacle que celui d’ une maîtresse jadis belle et diserte qui tombe au ruisseau en prononça
399 le et diserte qui tombe au ruisseau en prononçant de séniles calembours… Pénétrés d’horreur, les bellettriens avaient fui.
400 eau en prononçant de séniles calembours… Pénétrés d’ horreur, les bellettriens avaient fui. Au détour d’une ivresse, ils re
401 ’horreur, les bellettriens avaient fui. Au détour d’ une ivresse, ils rencontrèrent une créature évadée d’anciens rêves qui
402 ne ivresse, ils rencontrèrent une créature évadée d’ anciens rêves qui hantait les limbes depuis un an déjà. Ils ne tardère
403 dèrent pas à reconnaître Cinématoma. Naissance de Cinématoma Cinq bellettriens furent commis au soin d’engendrer cet
404 nnaître Cinématoma. Naissance de Cinématoma Cinq bellettriens furent commis au soin d’engendrer cet adorable monstre.
405 matoma Cinq bellettriens furent commis au soin d’ engendrer cet adorable monstre. Ils se réunissent parfois autour d’un
406 dorable monstre. Ils se réunissent parfois autour d’ un feu et le contemplent un certain temps en silence. « Well ! », dit
407 . Quelquefois, Mossoul amène un scénario né entre deux cafés-nature, et presque sans qu’il s’en soit rendu compte. Clerc ent
408 en soit rendu compte. Clerc entrevoit un projet à deux faces. Lugin, qui est théologien, et de la Tchaux, n’a pas la foi. To
409 rojet à deux faces. Lugin, qui est théologien, et de la Tchaux, n’a pas la foi. Topin, Mahomet désabusé, constate que jama
410 de ce paludesque et stérile consistoire, une idée de génie vint s’asseoir certaine nuit. Elle parla par la bouche de Lugin
411 s’asseoir certaine nuit. Elle parla par la bouche de Lugin, sa langue dans la langue de Lugin : « Le rideau se lève sur un
412 par la bouche de Lugin, sa langue dans la langue de Lugin : « Le rideau se lève sur un miroir qui occupe toute la largeur
413 se lève sur un miroir qui occupe toute la largeur de la scène. Titre : Socrate et Narcisse, un acte à grande figuration. »
414 uration. » Enfin l’on joua aux petits dés le sort de notre parade — et l’on gagna. Enthousiasmé, « Mimosa » partit pour la
415 partit pour la Riviera afin de négocier la vente de cette martingale avec des surréalistes hétérodoxes. Il revint juste à
416 revint juste à temps pour assister à la cérémonie de la pose du point final de « Cinématoma ou les épanchements de la jeun
417 assister à la cérémonie de la pose du point final de « Cinématoma ou les épanchements de la jeune Synovie », parade « née
418 u point final de « Cinématoma ou les épanchements de la jeune Synovie », parade « née du mariage de nos veilles et de nos
419 ts de la jeune Synovie », parade « née du mariage de nos veilles et de nos rêves », ainsi que le disait si poétiquement le
420 ovie », parade « née du mariage de nos veilles et de nos rêves », ainsi que le disait si poétiquement le programme. Un peu
421 ue le disait si poétiquement le programme. Un peu d’ histoire (erratum de la chronique de Mossoul). Belles-Lettres joua l’I
422 iquement le programme. Un peu d’histoire (erratum de la chronique de Mossoul). Belles-Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à
423 ramme. Un peu d’histoire (erratum de la chronique de Mossoul). Belles-Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à l’époque où le
424 que de Mossoul). Belles-Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à l’époque où le Cuirassé Potemkine était interdit à l’écran. P
425 ran. Pitoëff avait prêté un accent, Mme d’Assilva deux actrices, M. Grosclaude son fils Lucas Loukitch et une mise en scène
426 ise en scène fort ingénieuse qui permit à Mossoul de se perdre dans des jupons autrement que par métaphore. À La Chaux-de-
427 que par métaphore. À La Chaux-de-Fonds, il y eut trente membres et cent doigts dans deux lits. Combien cela fait-il de pieds
428 . À La Chaux-de-Fonds, il y eut trente membres et cent doigts dans deux lits. Combien cela fait-il de pieds et d’oreillles ?
429 onds, il y eut trente membres et cent doigts dans deux lits. Combien cela fait-il de pieds et d’oreillles ? À signaler la fu
430 cent doigts dans deux lits. Combien cela fait-il de pieds et d’oreillles ? À signaler la fuite de Bec-de-Gaz, lequel s’ét
431 dans deux lits. Combien cela fait-il de pieds et d’ oreillles ? À signaler la fuite de Bec-de-Gaz, lequel s’éteignit dans
432 -il de pieds et d’oreillles ? À signaler la fuite de Bec-de-Gaz, lequel s’éteignit dans les neiges. Un jour, on s’aperçut
433 on appelle, sans doute par antiphrase, la vie. 6. Revue ou prologue. l. Rougemont Denis de, « L’autre œil », Revue de
434 ie. 6. Revue ou prologue. l. Rougemont Denis de , « L’autre œil », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-
435 . l. Rougemont Denis de, « L’autre œil », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, février 1927, p. 
436 tres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, février 1927, p. 94-95. m. Signé : Topinet.
9 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Entr’acte de René Clair, ou L’éloge du Miracle (mars 1927)
437 Entr’acte de René Clair, ou L’éloge du Miracle (mars 1927)n Surprendre est peu
438 r’acte de René Clair, ou L’éloge du Miracle (mars 1927 )n Surprendre est peu de chose, il faut transplanter. Max Jacob.
439 b. Ce soir-là, le programme comprenait : un film d’ avant-guerre ; un film japonais ; Entr’acte et le Voyage imaginaire, d
440 ilm japonais ; Entr’acte et le Voyage imaginaire, de René Clair. La Mort de Phèdre (environ 1905) : quelques acteurs d’un
441 et le Voyage imaginaire, de René Clair. La Mort de Phèdre (environ 1905) : quelques acteurs d’une troupe de province s’a
442 naire, de René Clair. La Mort de Phèdre (environ 1905 ) : quelques acteurs d’une troupe de province s’agitent incompréhensib
443 Mort de Phèdre (environ 1905) : quelques acteurs d’ une troupe de province s’agitent incompréhensiblement dans un décor tr
444 re (environ 1905) : quelques acteurs d’une troupe de province s’agitent incompréhensiblement dans un décor très pauvre, lé
445 cipe est simple : « Je vous aime » se traduit par trois ou quatre claques sur la poitrine ; et une crise intérieure par un co
446 simple : « Je vous aime » se traduit par trois ou quatre claques sur la poitrine ; et une crise intérieure par un court accès
447 rine ; et une crise intérieure par un court accès de danse de Saint-Guy. Art classique : la mort d’Hyppolite se passe en c
448 une crise intérieure par un court accès de danse de Saint-Guy. Art classique : la mort d’Hyppolite se passe en coulisse.
449 ès de danse de Saint-Guy. Art classique : la mort d’ Hyppolite se passe en coulisse. Mais Phèdre avoue tout « devant le cad
450 te bande est antérieure à l’époque du long baiser de conclusion. Le film japonais : une historiette un peu plus banale que
451 bien photographiée. C’est le film du type « Jeux de soleil dans les jardins, complets variés, ça fait toujours plaisir de
452 ardins, complets variés, ça fait toujours plaisir de voir des gens bien habillés. » Soudain éclate Entr’acte (1925). « Une
453 s gens bien habillés. » Soudain éclate Entr’acte ( 1925 ). « Une étude sur le Monde des Rêves ». Rondes de cheminées dans le c
454 25). « Une étude sur le Monde des Rêves ». Rondes de cheminées dans le ciel où des pressentiments clignent de l’œil. Des p
455 inées dans le ciel où des pressentiments clignent de l’œil. Des poupées en baudruche gonflent leur tête jusqu’à éclater, t
456 sent au fond à toute vitesse. Rigueur voluptueuse d’ une colonnade, puis un jeu d’échec serré, mais sur la corniche d’un gr
457 Rigueur voluptueuse d’une colonnade, puis un jeu d’ échec serré, mais sur la corniche d’un gratte-ciel, d’où se met à desc
458 , puis un jeu d’échec serré, mais sur la corniche d’ un gratte-ciel, d’où se met à descendre un petit bateau de papier, sur
459 hec serré, mais sur la corniche d’un gratte-ciel, d’ où se met à descendre un petit bateau de papier, sur fond de boulevard
460 tte-ciel, d’où se met à descendre un petit bateau de papier, sur fond de boulevards et parmi les toits flottants, c’est as
461 t à descendre un petit bateau de papier, sur fond de boulevards et parmi les toits flottants, c’est assez tragique. Mitrai
462 its flottants, c’est assez tragique. Mitrailleuse de phares d’auto, les 100 000 yeux de la nuit. Des imprécisions rapides.
463 nts, c’est assez tragique. Mitrailleuse de phares d’ auto, les 100 000 yeux de la nuit. Des imprécisions rapides. Un chasse
464 ssez tragique. Mitrailleuse de phares d’auto, les 100  000 yeux de la nuit. Des imprécisions rapides. Un chasseur, toujours
465 tragique. Mitrailleuse de phares d’auto, les 100  000 yeux de la nuit. Des imprécisions rapides. Un chasseur, toujours sur
466 . Mitrailleuse de phares d’auto, les 100 000 yeux de la nuit. Des imprécisions rapides. Un chasseur, toujours sur son toit
467 asseur, toujours sur son toit ; il tire sur l’œuf d’ où naît une colombe. Chasse. Mais un papillon éclatant qui battait de
468 be. Chasse. Mais un papillon éclatant qui battait de l’aile un dixième de seconde, par intermittences, se pose enfin sur l
469 apillon éclatant qui battait de l’aile un dixième de seconde, par intermittences, se pose enfin sur l’écran : une danseuse
470 e enfin sur l’écran : une danseuse sur une plaque de verre, vue par-dessous. Quelques miracles qui suivent sont embrumés d
471 ont embrumés dans mon souvenir par le rayonnement de la robe, fleur qui s’ouvre pour dégager le mouvement obsédant de deux
472 ur qui s’ouvre pour dégager le mouvement obsédant de deux jambes, l’harmonie de leurs arabesques à trois dimensions mêlées
473 qui s’ouvre pour dégager le mouvement obsédant de deux jambes, l’harmonie de leurs arabesques à trois dimensions mêlées avec
474 le mouvement obsédant de deux jambes, l’harmonie de leurs arabesques à trois dimensions mêlées avec une lenteur et une pe
475 de deux jambes, l’harmonie de leurs arabesques à trois dimensions mêlées avec une lenteur et une perfection dont une brève v
476 . Ils revoient la danseuse, font une ronde autour d’ une tour Eiffel de bois de la taille de l’Obélisque de la Concorde, pu
477 danseuse, font une ronde autour d’une tour Eiffel de bois de la taille de l’Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Ch
478 , font une ronde autour d’une tour Eiffel de bois de la taille de l’Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Champs-Ély
479 nde autour d’une tour Eiffel de bois de la taille de l’Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Champs-Élysées à une al
480 e tour Eiffel de bois de la taille de l’Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Champs-Élysées à une allure grandissan
481 il roule dans les marguerites, il en sort un chef d’ orchestre dont la baguette éteint tous les personnages et lui-même. ⁂
482 es personnages et lui-même. ⁂ Le tout ne dure pas 20 minutes. Et c’est heureux. Nous manquons d’entraînement dans le domai
483 e pas 20 minutes. Et c’est heureux. Nous manquons d’ entraînement dans le domaine du merveilleux moderne. Un peu plus et no
484 eux moderne. Un peu plus et nous demandions grâce de trop de plaisir. Mais je ne suis pas sûr que le plaisir du public fût
485 rne. Un peu plus et nous demandions grâce de trop de plaisir. Mais je ne suis pas sûr que le plaisir du public fût de même
486 ’enterrement au ralenti, à l’éclatement des têtes de poupées, à la conclusion. Ce n’est pas le bon rire de cinéma. Quand l
487 oupées, à la conclusion. Ce n’est pas le bon rire de cinéma. Quand la danseuse paraît, ils n’attendent que le moment où il
488 là par exemple, où nous ne pouvons nous empêcher d’ admirer l’utilisation artistique ingénieuse et précise de certaines th
489 er l’utilisation artistique ingénieuse et précise de certaines théories sur le rêve, le peuple, qui n’a pas vu ces dessous
490 n ça, c’est comme quand on rêve. » Un des défauts d’ Entr’acte, c’est la fantaisie recherchée de certaines scènes (l’enterr
491 éfauts d’Entr’acte, c’est la fantaisie recherchée de certaines scènes (l’enterrement). Cela fait bizarre. Or, dans le mond
492 oit nous « transplanter », un certain naturel est de rigueur ; toute bizarrerie détourne du véritable miracle auquel nous
493 du véritable miracle auquel nous assistons. Mais de pareils défauts sont presque inévitables dans une production de début
494 auts sont presque inévitables dans une production de début, et Entr’acte mérite d’être ainsi qualifié : c’est peut-être le
495 dans une production de début, et Entr’acte mérite d’ être ainsi qualifié : c’est peut-être le premier film où l’on a fait d
496 aphiques. Ici le geste pictural remplace le geste de l’acteur. Un mouvement ne souligne pas, il exprime, et se suffit. Mai
497 il exprime, et se suffit. Mais comme pour le film 1905, on a sans cesse envie de crier : « Trop de gestes ! » C’est une quest
498 is comme pour le film 1905, on a sans cesse envie de crier : « Trop de gestes ! » C’est une question d’épuration des moyen
499 ilm 1905, on a sans cesse envie de crier : « Trop de gestes ! » C’est une question d’épuration des moyens. Rendre le plus
500 e crier : « Trop de gestes ! » C’est une question d’ épuration des moyens. Rendre le plus par le moins, c’est le fait d’un
501 oyens. Rendre le plus par le moins, c’est le fait d’ un art à sa maturité. Mais ce sont là critiques de style. D’ores et dé
502 d’un art à sa maturité. Mais ce sont là critiques de style. D’ores et déjà, il faut admirer dans les films de René Clair u
503 e. D’ores et déjà, il faut admirer dans les films de René Clair un sens du miracle assez bouleversant. Et je ne parle pas
504 ersant. Et je ne parle pas du miracle genre conte de fée, comme le Voyage imaginaire en montre (beaucoup trop à mon gré).
505 cière transforme un homme en chien, cela n’a rien d’ étonnant au cinéma. C’est la photographie d’une chose qui ne serait ét
506 rien d’étonnant au cinéma. C’est la photographie d’ une chose qui ne serait étonnante que dans le réel ; ce n’est pas enco
507 que dans le réel ; ce n’est pas encore un miracle de ciné. Et les fées paraissent vieux jeu avec leur baguette, pour moi q
508 miracle du cinéma, c’est, par exemple, l’éclosion d’ une rose, un homme qui court au ralenti, certaines coïncidences de mou
509 omme qui court au ralenti, certaines coïncidences de mouvements… C’est une réalité quotidienne dans une lumière qui la mét
510 l » nous apparaît alors comme l’une seulement des mille figures que peut revêtir une substantia dont nos sens trop faibles —
511 des nées des nécessités sociales — nous empêchent de découvrir la richesse immédiate. Surréel qui n’est pas synonyme d’inc
512 ichesse immédiate. Surréel qui n’est pas synonyme d’ incompréhensible, non Madame, car alors quoi de plus surréaliste que l
513 e, car alors quoi de plus surréaliste que le film 1905. Ce n’est peut-être qu’une question d’imagination ; il reste qu’un fil
514 le film 1905. Ce n’est peut-être qu’une question d’ imagination ; il reste qu’un film comme Entr’acte est une aide puissan
515 faisons nos premiers pas, étourdis, dans un pays d’ illuminations vertigineuses, et nous en sommes encore à nous frotter l
516 and nos regards plus assurés sauront enfin gagner de vitesse les prodiges que déclenche René Clair, verrons-nous, pris par
517 s-nous, pris par surprise dans l’exploration ivre d’ un projecteur, des signes fatidiques, le visage d’un ange. n. Rouge
518 d’un projecteur, des signes fatidiques, le visage d’ un ange. n. Rougemont Denis de, «  Entr’acte de René Clair, ou L’él
519 iques, le visage d’un ange. n. Rougemont Denis de , «  Entr’acte de René Clair, ou L’éloge du Miracle », Revue de Belles
520 d’un ange. n. Rougemont Denis de, «  Entr’acte de René Clair, ou L’éloge du Miracle », Revue de Belles-Lettres, Lausann
521 cte de René Clair, ou L’éloge du Miracle », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, mars 1927, p. 124
522 Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, mars 1927, p. 124-127.
10 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Louis Aragon, le beau prétexte (avril 1927)
523 Louis Aragon, le beau prétexte (avril 1927 )o Ah ! je sens qu’une puissance étrangère s’est emparée de mon êt
524 je sens qu’une puissance étrangère s’est emparée de mon être et a saisi les cordes les plus secrètes de mon âme, qu’elle
525 mon être et a saisi les cordes les plus secrètes de mon âme, qu’elle peut faire désormais vibrer à sa fantaisie, même si
526 isie, même si cela doit m’anéantir. Hoffmann. I (Notes écrites en décembre 1925, au sortir d’une conférence sur le
527 ir. Hoffmann. I (Notes écrites en décembre 1925, au sortir d’une conférence sur le Salut de l’humanité.)   Ce soir en
528 I (Notes écrites en décembre 1925, au sortir d’ une conférence sur le Salut de l’humanité.)   Ce soir en moi trépigne
529 bre 1925, au sortir d’une conférence sur le Salut de l’humanité.)   Ce soir en moi trépigne une rage. Sur quelles épaules
530 ne une rage. Sur quelles épaules jeter ce manteau de flammes, puis à qui dédier l’ennui de ma révolte ? Aragon sarcastique
531 ce manteau de flammes, puis à qui dédier l’ennui de ma révolte ? Aragon sarcastique se tient là-bas dans un rayon échappé
532 our le pittoresque. — Attrape !   Il n’existe pas de théorie du salut. Il n’existe que des systèmes pour faire taire en no
533 des Dieux, mais c’est pour détourner nos regards de cela qu’il faut bien nommer le Vide. Tant de séductions nous ont en v
534 s nous ont en vain tentés, ô tortures fascinantes de la sainteté, seules vous nous appelez encore hors de cette voix de l’
535 eules vous nous appelez encore hors de cette voix de l’infini où chancellent parmi les éclairs nos premiers pas. Aragon, d
536 lairs nos premiers pas. Aragon, dans ces tempêtes de nuits filantes où s’enfuient, souffles à peine parfumés, les vices en
537 st un ricanement splendide comme un éclat de rire de condamné à mort et à l’éternité. Le diable avait pris des avocats don
538 s palinodies, font encore rêver les anges écœurés d’ azur. Alors un juron mélodramatique, d’une voix torturée, hurle au pap
539 es écœurés d’azur. Alors un juron mélodramatique, d’ une voix torturée, hurle au pape et au diable un anathème sanglant. Lo
540 diable un anathème sanglant. Louis Aragon, avocat de l’infini, annonce l’entrée de l’éternelle anarchiste, la Poésie.   On
541 ouis Aragon, avocat de l’infini, annonce l’entrée de l’éternelle anarchiste, la Poésie.   On dit : « Des mots ! » au lieu
542 ’on est enfin rassuré. C’est incompréhensible !, trois mots dont l’un savant. Je ne connais pas de meilleur remède contre Di
543 !, trois mots dont l’un savant. Je ne connais pas de meilleur remède contre Dieu. Monsieur, vous avez dit : « C’est incomp
544 ! » — avec une indignation où j’admire une pointe d’ ironie vraiment supérieure. Car rien ne pouvait mieux exciter, signe d
545 érieure. Car rien ne pouvait mieux exciter, signe d’ aise extrême, vos glandes salivaires, pourtant si éprouvées par le rep
546 éprouvées par le repas dont vous sortez, que ces trois mots où se résume la défense de la loi sociale, patriotique, religieu
547 protège votre paresse à concevoir en esprit. Ces trois mots vous ont délivré du plus absurde malaise, et vous rallumez votre
548 la porte ferme bien sur l’infini. Rien à craindre de ce côté. Retournez à vos amours. ....................................
549 ou la poésie — et d’autres, à travers les déserts de la sainteté que hantent les fantômes adorables du désir, — quelques h
550 désir, — quelques hommes y pénètrent, et le goût de s’amuser ne renaîtra plus en eux. Ni même celui de souffrir. Le derni
551 e s’amuser ne renaîtra plus en eux. Ni même celui de souffrir. Le dernier rire d’Aragon, c’est l’éclat de sa joie brusque
552 n eux. Ni même celui de souffrir. Le dernier rire d’ Aragon, c’est l’éclat de sa joie brusque d’être seul sur un faux somme
553 souffrir. Le dernier rire d’Aragon, c’est l’éclat de sa joie brusque d’être seul sur un faux sommet vers quoi des faibles
554 r rire d’Aragon, c’est l’éclat de sa joie brusque d’ être seul sur un faux sommet vers quoi des faibles s’efforcent — mais
555 es nargue. Il connaît enfin une solitude défendue de tous côtés par ses rires scandaleux, quelques « goujateries » affecté
556 ux, quelques « goujateries » affectées par mépris de l’honneur, le mot de Cambronne prodigué et des phrases d’un fascinant
557 eries » affectées par mépris de l’honneur, le mot de Cambronne prodigué et des phrases d’un fascinant éclat : « Ô grand Rê
558 neur, le mot de Cambronne prodigué et des phrases d’ un fascinant éclat : « Ô grand Rêve, au matin pâle des édifices, ne qu
559 ne quitte plus, attiré par les premiers sophismes de l’aurore, ces corniches de craie où t’accoudant tu mêles tes traits p
560 les premiers sophismes de l’aurore, ces corniches de craie où t’accoudant tu mêles tes traits purs et labiles à l’immobili
561 bilité miraculeuse des statues7. » Il s’agit bien de critique littéraire ! Nous sommes ici en présence d’une des tentative
562 Nous sommes ici en présence d’une des tentatives de libération les plus violentes et belles — malgré tant de maladresses
563 belles — malgré tant de maladresses dédaigneuses, de bravades et de faciles tricheries8 — qu’ait connue l’esprit humain. S
564 tant de maladresses dédaigneuses, de bravades et de faciles tricheries8 — qu’ait connue l’esprit humain. Sens de l’Absolu
565 tricheries8 — qu’ait connue l’esprit humain. Sens de l’Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de l’esprit. Jusqu’au-boutis
566 it connue l’esprit humain. Sens de l’Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de l’esprit. Jusqu’au-boutisme désespéré. « Il
567 Sens de l’Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de l’esprit. Jusqu’au-boutisme désespéré. « Il s’agit de rendre impratic
568 ’esprit. Jusqu’au-boutisme désespéré. « Il s’agit de rendre impraticables quelques portes de sortie » ou compromis :   « N
569 Il s’agit de rendre impraticables quelques portes de sortie » ou compromis :   « Nous étions dominés par le sens d’une réa
570 u compromis :   « Nous étions dominés par le sens d’ une réalité morale absolue que certains d’entre nous eussent acheté au
571 que certains d’entre nous eussent acheté au prix d’ un martyre… Nos jugements se rendaient sans cesse à l’échelle de l’inf
572 Nos jugements se rendaient sans cesse à l’échelle de l’infini, et cet infini nous écrasait. Comment aurions-nous accepté l
573 aurions-nous accepté le sort communément heureux de nos contemporains qui ont puisé dans Auguste Comte cette tranquillité
574 i ont puisé dans Auguste Comte cette tranquillité de rejeter définitivement les problèmes métaphysiques ? »   Nous naisson
575 à quelque chose qui imite la vie dans une époque d’ inconcevables compromissions où triomphe sous tous les déguisements, d
576 omissions où triomphe sous tous les déguisements, de Ford à Clément Vautel, le matérialisme le plus pauvre auquel se soit
577 pour nous n’est nulle part9 ». Ultime affirmation d’ une foi que plus rien ne peut duper. Depuis certaines paroles sur la C
578 s paroles sur la Croix, il n’y a peut-être pas eu d’ expression plus haute de l’angoisse humaine, et vous aurez beau rire,
579 il n’y a peut-être pas eu d’expression plus haute de l’angoisse humaine, et vous aurez beau rire, pharisiens, et dire qu’e
580 pharisiens, et dire qu’elle est née dans un café de Paris. « Je n’attends rien du monde, je n’attends rien de rien. » Rie
581 . « Je n’attends rien du monde, je n’attends rien de rien. » Riez-en donc, pantins officiels, et vous repus, et vous, dubi
582 vous repus, et vous, dubitatives barbes. Je viens d’ entendre la voix d’un mystique. Que si l’on vient nous empêtrer de dog
583 , dubitatives barbes. Je viens d’entendre la voix d’ un mystique. Que si l’on vient nous empêtrer de dogmes bassement ingén
584 ix d’un mystique. Que si l’on vient nous empêtrer de dogmes bassement ingénieux : « Si j’essaie un instant de m’élever à l
585 es bassement ingénieux : « Si j’essaie un instant de m’élever à la notion de Dieu, répond Aragon, je me révolte qu’elle pu
586 « Si j’essaie un instant de m’élever à la notion de Dieu, répond Aragon, je me révolte qu’elle puisse en aucun cas servir
587 je me révolte qu’elle puisse en aucun cas servir d’ argument à un homme. » Voilà qui nous fait oublier certaines morales d
588 . » Voilà qui nous fait oublier certaines morales d’ extrême moyenne d’où sont exclues toutes grandeurs au profit de fuites
589 fait oublier certaines morales d’extrême moyenne d’ où sont exclues toutes grandeurs au profit de fuites lâches qu’on veut
590 enne d’où sont exclues toutes grandeurs au profit de fuites lâches qu’on veut nommer renoncements ! Jouant tout sur une ré
591 tout sur une révélation possible, ou la naissance d’ un prophète qui rapprenne comment aimer un Dieu. Ce n’est pas à genoux
592 : pour que cela eût un sens, il faudrait être sûr de n’avoir pas la tête en bas par rapport au soleil. Quelques gestes enc
593 s gestes encore, interceptant les messages égarés de l’infini… Un tel homme, — est-ce encore Aragon, sinon qui ? — sa gra
594 atteindre Dieu ou n’espérer plus aucun pardon. II Novembre 1926. Je viens de retrouver quelques pages écrites il y a
595 ou n’espérer plus aucun pardon. II Novembre 1926. Je viens de retrouver quelques pages écrites il y a un an, tel soir d
596 ver quelques pages écrites il y a un an, tel soir de colère où le thermomètre eût indiqué 39° selon toute vraisemblance. E
597 tel soir de colère où le thermomètre eût indiqué 39° selon toute vraisemblance. Et voici Aragon revêtu d’une dignité tragi
598 selon toute vraisemblance. Et voici Aragon revêtu d’ une dignité tragique qu’il trouverait sans doute un peu ridicule. C’es
599 tagieuses. Comment, en effet, ne pas voir la part de littérature que renferme cette œuvre, et qui fait, en dépit des préte
600 qui fait, en dépit des prétentions désobligeantes de l’auteur, son incontestable « séduction ». Pour un peu, je découvrais
601 duction ». Pour un peu, je découvrais une manière de prophète un brin janséniste chez ce poète. Aujourd’hui, je le verrais
602 un Musset triple-sec). Au lieu du cynisme verbeux 1830, une théorie du scandale pour le scandale qui a le mérite de n’être pa
603 orie du scandale pour le scandale qui a le mérite de n’être pas qu’un jeu littéraire. Mais enfin, c’est encore un Musset,
604 osé dans notre siècle et chez qui tout est devenu de quelques degrés plus violent, plus acerbe, plus profond. En somme, et
605 . Et qui sait tirer un admirable parti littéraire de son tempérament vif, insolent et ombrageux. « J’appartiens à la grand
606 on prophétique, ne serait-ce pas plutôt une sorte de donquichottisme assez fréquent dans les cafés littéraires et dont il
607 dont il serait le premier à s’amuser ?   Février 1927. Relu Une vague de rêves et la préface de Libertinage. Sous une certai
608 emier à s’amuser ?   Février 1927. Relu Une vague de rêves et la préface de Libertinage. Sous une certaine rhétorique — ma
609 vrier 1927. Relu Une vague de rêves et la préface de Libertinage. Sous une certaine rhétorique — mais la plus belle, — ce
610 me un désespoir en quoi je ne vais pas m’empêcher de reconnaître la voix secrète de notre mal de vivre. Désespoir métaphys
611 ais pas m’empêcher de reconnaître la voix secrète de notre mal de vivre. Désespoir métaphysique. Je me souviens d’une phra
612 êcher de reconnaître la voix secrète de notre mal de vivre. Désespoir métaphysique. Je me souviens d’une phrase de Vinet —
613 de vivre. Désespoir métaphysique. Je me souviens d’ une phrase de Vinet — laissons s’esclaffer du rapprochement les auteur
614 sespoir métaphysique. Je me souviens d’une phrase de Vinet — laissons s’esclaffer du rapprochement les auteurs de manuels
615 laissons s’esclaffer du rapprochement les auteurs de manuels de littérature — : « Un mysticisme creux et affamé est le con
616 esclaffer du rapprochement les auteurs de manuels de littérature — : « Un mysticisme creux et affamé est le contrecoup du
617 le savons… Mais pour Aragon, ce n’est point façon de parler. Son « nulle part » est sans dérobade possible par sous-entend
618 entendu. Pas plus « ailleurs » que sur ce « globe d’ attente » comme dit Crevel. Pourtant, le plus irrévocable désespoir n’
619 est encore qu’un appel à la foi la plus haute.   1er mai 1927. Mieux vaut pécher par ridicule que par scepticisme ; par ex
620 re qu’un appel à la foi la plus haute.   1er mai 1927. Mieux vaut pécher par ridicule que par scepticisme ; par excès que pa
621 ma plume, comme une mouche qu’on n’a jamais fini de chasser parce qu’elle n’a pas mérité du premier coup qu’on se donne l
622 as mérité du premier coup qu’on se donne la peine de l’écraser, — c’est qu’il symbolise tout cet état d’esprit « bien Pari
623 ise tout cet état d’esprit « bien Parisien » dont de récentes statistiques de librairie montrèrent les ravages bien plus é
624 t « bien Parisien » dont de récentes statistiques de librairie montrèrent les ravages bien plus étendus qu’on n’osait le c
625 enu qu’une introspection immobile ne retient rien de la réalité vivante ; si je dénie à des incrédules le droit à parler d
626 nie à des incrédules le droit à parler des choses de la foi comme étant d’un ordre qui leur échappe ; de même je récuse ic
627 e droit à parler des choses de la foi comme étant d’ un ordre qui leur échappe ; de même je récuse ici certain sens critiqu
628 nt on voudrait que soient justiciables les œuvres d’ un écrivain, les démarches de sa pensée, ses délires, ses visions. Un
629 ticiables les œuvres d’un écrivain, les démarches de sa pensée, ses délires, ses visions. Un critique qui n’épouse pas le
630 s visions. Un critique qui n’épouse pas le rythme d’ une œuvre, mais s’avance à sa rencontre armé de l’appareil à frigorifi
631 me d’une œuvre, mais s’avance à sa rencontre armé de l’appareil à frigorifier de sa raison, est destiné à dire des bêtises
632 e à sa rencontre armé de l’appareil à frigorifier de sa raison, est destiné à dire des bêtises. Cf. certaines remarques —
633 s bêtises. Cf. certaines remarques — pas toutes — de novembre 1926.   2 mai 1927. « Nous avons dressé notre orgueilleuse r
634 f. certaines remarques — pas toutes — de novembre 1926.   2 mai 1927. « Nous avons dressé notre orgueilleuse raison à nous tr
635 ines remarques — pas toutes — de novembre 1926.   2 mai 1927. « Nous avons dressé notre orgueilleuse raison à nous trompe
636 emarques — pas toutes — de novembre 1926.   2 mai 1927. « Nous avons dressé notre orgueilleuse raison à nous tromper sur ce q
637 gueilleuse raison à nous tromper sur ce qu’il y a de profond en nous, et elle ne manque guère à ce devoir sacré. » (Edmond
638 loux.) Entre un monsieur en noir : Permettez-moi de me présenter… d’ailleurs une ancienne connaissance… le Sens Critique.
639 dit que je pourrais, en quelque sorte, vous être de quelque utilité… Moi. — Ah ! oui, oui… c’est cela, utilité,… en effe
640 es jours-ci, beaucoup trop à faire, beaucoup trop d’ êtres et de choses à aimer, et vous savez ce que cela suppose. Compren
641 , beaucoup trop à faire, beaucoup trop d’êtres et de choses à aimer, et vous savez ce que cela suppose. Comprenez-moi : su
642 ntion… Moi. — Que voilà un singulier impertinent de votre part. (Le reconduisant :) Croyez, Monsieur, à mon estime la plu
643 nous sommes débordés, voyez vous-même, pas moyen de causer aujourd’hui… Quoi ?… Bon, bon, c’est entendu, on ne peut rien
644 Mais plus tard, plus tard. Tenez, voici un traité de métaphysique, vous lirez ça en attendant. Très bien fait. Excellente
645 ez, ma vie ? La Muse (mais oui, la Muse, sortant de derrière un rideau). — J’attends votre plaisir… III Il y a des
646 errière un rideau). — J’attends votre plaisir… III Il y a des gens qui croient avoir tout dit quand ils ont montré à
647 t avoir tout dit quand ils ont montré à l’origine de telle doctrine mystique une exaltation nerveuse ou des troubles organ
648 opposent à ces « délires » les thèses rassurantes de la « saine raison », sans se demander jamais si cela ne condamne pas
649 Il s’est trouvé des Maurras et autres « héritiers de la grande tradition gréco-latine » pour assigner à Minerve le bassin
650 gréco-latine » pour assigner à Minerve le bassin de la Méditerranée comme promenoir, avec défense sous peine de mort de s
651 comme promenoir, avec défense sous peine de mort de s’en écarter. Voilà bien leur désinvolture, car enfin, elle est déess
652 tisane assagie, parfois dévote, phraseuse, sèche, d’ humeur acariâtre et réactionnaire. Vous tracez des frontières géograph
653 « À bas le clair génie français. » Alors la voix de Rimbardp à la cantonade : Qu’il vienne, qu’il vienne Le temps dont o
654 s’éprenne ! Les œuvres les plus significatives de ce siècle sont écrites en haine de l’époque12. Le reproche d’obscurit
655 significatives de ce siècle sont écrites en haine de l’époque12. Le reproche d’obscurité que l’on fait à la littérature mo
656 sont écrites en haine de l’époque12. Le reproche d’ obscurité que l’on fait à la littérature moderne n’est qu’une manifest
657 la littérature moderne n’est qu’une manifestation de ce divorce radical entre l’époque et les quelques centaines (?) d’ind
658 ce divorce radical entre l’époque et les quelques centaines (?) d’individus pour qui l’esprit est la seule réalité. C’est pourquo
659 ical entre l’époque et les quelques centaines (?) d’ individus pour qui l’esprit est la seule réalité. C’est pourquoi nous
660 pourquoi nous ne pourrons plus séparer du concept de l’esprit celui de Révolution. Et j’entends ce mot dans son sens le pl
661 ourrons plus séparer du concept de l’esprit celui de Révolution. Et j’entends ce mot dans son sens le plus vaste. Il y a e
662 nds ce mot dans son sens le plus vaste. Il y a eu quatre-vingt-treize , la Réforme, Karl Marx, la préface de Cromwell. Mais il ne s’agit pas
663 e-vingt-treize, la Réforme, Karl Marx, la préface de Cromwell. Mais il ne s’agit pas de refaire notre petite révolution à
664 rx, la préface de Cromwell. Mais il ne s’agit pas de refaire notre petite révolution à nous, dans tel domaine. Et c’est mê
665 tes : qu’ils aient voulu s’allier aux dogmatiques d’ extrême gauche. Je ne dirai pas, comme on a fait, que c’est très joli
666 e dirai pas, comme on a fait, que c’est très joli de crier merde pour Horace, Montaigne, Descartes, Schiller, Voltaire, et
667 , pourquoi se faire marchand des œuvres complètes de Karl Marx ? Si vous ne dites pas aussi merde pour Marx ou Lénine, je
668 as s’acoquiner avec des gens qui ont fait, il y a 10 ans, une révolution en fonction du capitalisme. Est-ce que vraiment v
669 . Est-ce que vraiment vous ne pouvez vous libérer de cette manie française, la politique, et ne voyez-vous pas que c’est f
670 ique, et ne voyez-vous pas que c’est faire le jeu de vos ennemis de discuter avec eux dans leur langue et de crier rouge p
671 ez-vous pas que c’est faire le jeu de vos ennemis de discuter avec eux dans leur langue et de crier rouge pour la simple r
672 ennemis de discuter avec eux dans leur langue et de crier rouge pour la simple raison qu’ils ont dit blanc ? Pensez-vous
673 cet esprit « bien français » qui s’associe à tant d’ objets de votre mépris, en prenant le contre-pied de tout ce qu’il ins
674 t « bien français » qui s’associe à tant d’objets de votre mépris, en prenant le contre-pied de tout ce qu’il inspire ? Al
675 objets de votre mépris, en prenant le contre-pied de tout ce qu’il inspire ? Alors que cette réaction même est ce qu’il y
676 tent Aragon, Breton et leurs amis alternativement de dévoyés, de farceurs, de chacals, de déments. Et puis surtout, l’heur
677 Breton et leurs amis alternativement de dévoyés, de farceurs, de chacals, de déments. Et puis surtout, l’heure est venue
678 urs amis alternativement de dévoyés, de farceurs, de chacals, de déments. Et puis surtout, l’heure est venue de clore des
679 ernativement de dévoyés, de farceurs, de chacals, de déments. Et puis surtout, l’heure est venue de clore des discussions
680 qu’ils ont la passion et l’incommunicable secret de l’invention.   Il nous faut des entrepreneurs de tempêtes. Un grand
681 de l’invention.   Il nous faut des entrepreneurs de tempêtes. Un grand principe de violence commandait à nos mœurs. … et
682 des entrepreneurs de tempêtes. Un grand principe de violence commandait à nos mœurs. … et nous portant dans nos actions à
683 s. … et nous portant dans nos actions à la limite de nos forces, notre joie parmi vous fut une très grande joie. Saint-Joh
684 ction contre tout ce qui prétendait nous empêcher de vivre, de rêver et de souffrir : culte du moi avec ses recettes garan
685 re tout ce qui prétendait nous empêcher de vivre, de rêver et de souffrir : culte du moi avec ses recettes garanties, chap
686 ui prétendait nous empêcher de vivre, de rêver et de souffrir : culte du moi avec ses recettes garanties, chapelets d’opti
687 lte du moi avec ses recettes garanties, chapelets d’ optimisme, tyranniques évidences, ordre et désordre, principes de Desc
688 ranniques évidences, ordre et désordre, principes de Descartes, mathématiques aux pinces de crabe, examens de conscience t
689 principes de Descartes, mathématiques aux pinces de crabe, examens de conscience toujours ratés — on ne m’y prendra plus 
690 artes, mathématiques aux pinces de crabe, examens de conscience toujours ratés — on ne m’y prendra plus ! — morales améric
691 eurs abstractions que nous haïssions. Notre haine de certaine morale ne venait-elle pas de ce qu’en son nom l’on mesurait
692 Notre haine de certaine morale ne venait-elle pas de ce qu’en son nom l’on mesurait odieusement une sympathie humaine pour
693 ine pour nous sans prix ? Mais nous avions besoin de révolution pour vivre, pour nous perdre. Vivre était devenu synonyme
694 re, pour nous perdre. Vivre était devenu synonyme de magnifique perdition dans des choses plus grandes que nous. Nous nous
695 nous connaissions dans les coins et nous mourions d’ ennui avec les aspects irrévocablement prévus de nous-mêmes que faisai
696 s d’ennui avec les aspects irrévocablement prévus de nous-mêmes que faisaient paraître les petits faits de nos longues jou
697 ous-mêmes que faisaient paraître les petits faits de nos longues journées. Nous aimions la révolution comme on aime l’amou
698 esse amoureuse ; nous cherchions cette Révolution de toutes nos forces et séductions, comme on cherche cette femme à trave
699 révolution-vice. Mais on ne vit, on ne meurt que de vices. ⁂ Ici le lecteur se rassure. « Il s’y retrouve. » Il pense qu
700 les brancards, c’est très bellettrien. Un disque de gramo comme par hasard nasille : Nous avons tous fait ça Plus ou moi
701 vague vers des souvenirs, quand nous allions tous deux , ces bonnes farces, et aussi pourtant des histoires de copains qui on
702 es bonnes farces, et aussi pourtant des histoires de copains qui ont mal tourné, on pensait bien, ah ! cette jeunesse, mai
703 omment dites-vous, surréalisme ? — Baptisé il y a cinq ou six ans et mort des suites. Quand cesserez-vous de nous faire la j
704 ites-vous, surréalisme ? — Baptisé il y a cinq ou six ans et mort des suites. Quand cesserez-vous de nous faire la jambe, p
705 u six ans et mort des suites. Quand cesserez-vous de nous faire la jambe, pardon escuses, avec ce thème à condamnations pa
706 mace. Il y a encore des gens pour qui les limites de l’anarchie sont : chanter l’Internationale dans les rues, faire la no
707 ale dans les rues, faire la noce, écrire un livre de tendances très modernes. Et des gens pour se gausser quand nous écriv
708 finalement nous écraser par l’évidence définitive de notre absurdité. Car l’homme « s’est fait une vérité changeante et to
709 fait une vérité changeante et toujours évidente, de laquelle il se demande vainement pourquoi il n’arrive pas à se conten
710 contenter13 ». Acculés à ce choix : inconscience de ruminants ou neurasthénie, est-ce que vraiment vous vous êtes telleme
711 st plus combattre, c’est l’épanouissement violent d’ une immense fleur palpitante au parfum de passions, c’est une atmosphè
712 violent d’une immense fleur palpitante au parfum de passions, c’est une atmosphère toute chargée d’éclairs qui nous attei
713 m de passions, c’est une atmosphère toute chargée d’ éclairs qui nous atteignent sans cesse au cœur et nous revêtent miracu
714 ns cesse au cœur et nous revêtent miraculeusement d’ aigrettes de folies et de joies ; n’allez pas nous toucher, nous somme
715 cœur et nous revêtent miraculeusement d’aigrettes de folies et de joies ; n’allez pas nous toucher, nous sommes dangereux.
716 revêtent miraculeusement d’aigrettes de folies et de joies ; n’allez pas nous toucher, nous sommes dangereux. Un orage de
717 pas nous toucher, nous sommes dangereux. Un orage de tendresse va crever sur le monde. Aigles d’amours, oiseaux doux et cr
718 orage de tendresse va crever sur le monde. Aigles d’ amours, oiseaux doux et cruels, nous parlerons vos langues aériennes.
719 es aériennes. On n’acceptera plus que des valeurs de passion. Balayez ces douanes de l’esprit, proclamez le grand Libre-Éc
720 s que des valeurs de passion. Balayez ces douanes de l’esprit, proclamez le grand Libre-Échange, voici déjà s’avancer des
721 rsuasive : nous sommes prêts à les accueillir. 7. Une vague de rêves (dans Commerce). 8. Et malgré certaines théories
722 us sommes prêts à les accueillir. 7. Une vague de rêves (dans Commerce). 8. Et malgré certaines théories bien superfic
723 illir. 7. Une vague de rêves (dans Commerce). 8. Et malgré certaines théories bien superficielles et hâtives, comme ce
724 surtout pour un homme qui élit Freud « président de la République du Rêve » – c’est presque un non-sens de chercher l’abs
725 République du Rêve » – c’est presque un non-sens de chercher l’absolue liberté dans le rêve. Le rêve, c’est la tyrannie d
726 ie des souvenirs ; et ce n’est pas se libérer que de brasser ces chaînes sonores. 9. Lettre à Paul Claudel. 10. Musset d
727 s se libérer que de brasser ces chaînes sonores. 9. Lettre à Paul Claudel. 10. Musset de La coupe et les lèvres. Mais ou
728 ces chaînes sonores. 9. Lettre à Paul Claudel. 10. Musset de La coupe et les lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les
729 s sonores. 9. Lettre à Paul Claudel. 10. Musset de La coupe et les lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres le
730 coupe et les lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres les plus répandus à Genève sont Ma vie et mon œuvre de For
731 s plus répandus à Genève sont Ma vie et mon œuvre de Ford et Mon curé chez les riches. Très loin derrière viennent des Fra
732 in derrière viennent des France et des Bordeaux. 12. Proust excepté, et dans un domaine plus étroit, quelques esthètes du
733 ne plus étroit, quelques esthètes du machinisme. 13. Le Paysan de Paris. o. Rougemont Denis de, « Louis Aragon, le beau
734 , quelques esthètes du machinisme. 13. Le Paysan de Paris. o. Rougemont Denis de, « Louis Aragon, le beau prétexte », R
735 me. 13. Le Paysan de Paris. o. Rougemont Denis de , « Louis Aragon, le beau prétexte », Revue de Belles-Lettres, Lausann
736 nis de, « Louis Aragon, le beau prétexte », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, avril 1927, p. 13
737 ettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, avril 1927, p. 131-144. p. On a conservé la graphie de l’original, sans doute vo
738 il 1927, p. 131-144. p. On a conservé la graphie de l’original, sans doute voulue par l’auteur.
11 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Quatre incidents (avril 1927)
739 Quatre incidents (avril 1927)q r La maîtresse d’École Au printemps p
740 Quatre incidents (avril 1927 )q r La maîtresse d’École Au printemps pur comme une joue, Éco
741 e femme dans les rues tant soit peu métaphysiques d’ une capitale de mes songes. On exigeait d’une saison de marque de tels
742 s rues tant soit peu métaphysiques d’une capitale de mes songes. On exigeait d’une saison de marque de tels soupirs, d’ail
743 ysiques d’une capitale de mes songes. On exigeait d’ une saison de marque de tels soupirs, d’ailleurs invraisemblables, qu’
744 capitale de mes songes. On exigeait d’une saison de marque de tels soupirs, d’ailleurs invraisemblables, qu’à leurs refle
745 de mes songes. On exigeait d’une saison de marque de tels soupirs, d’ailleurs invraisemblables, qu’à leurs reflets se fuss
746 eurs reflets se fussent évanouis des arcs-en-ciel de névroses dans tous les poèmes où détresse rimait avec maîtresse. Écol
747 e du voyage, et qu’on ne manque pas le train bleu d’ un désir. Elle était donc venue. Il la suivait entre les devantures qu
748 la suivait entre les devantures qui se passaient de l’une à l’autre deux séries de profils jusqu’au soleil toujours de fa
749 s qui se passaient de l’une à l’autre deux séries de profils jusqu’au soleil toujours de face. Il ne vit plus que la foule
750 e deux séries de profils jusqu’au soleil toujours de face. Il ne vit plus que la foule des yeux bleus, son éblouissement.
751 ci, elle descend à sa rencontre parmi les éclairs d’ un luxe mécanique, le visage dans sa fourrure. Elle découvre en passan
752 . Elle découvre en passant près de lui le sourire d’ amitié mortel de tout ce qui n’arrive jamais. Il s’est trompé, ce n’es
753 en passant près de lui le sourire d’amitié mortel de tout ce qui n’arrive jamais. Il s’est trompé, ce n’est pas elle. Il p
754 ce n’est pas elle. Il pensa que c’était un ange, de ceux qui vont à la recherche des âmes. Aussitôt il téléphone à ceux d
755 la boutonnière, le marquis pénétra dans le salon de la duchesse, lui baisa la main et l’abattit d’un coup de revolver. Pu
756 on de la duchesse, lui baisa la main et l’abattit d’ un coup de revolver. Puis s’en fut avec un tact exquis, qui fut très r
757 uchesse, lui baisa la main et l’abattit d’un coup de revolver. Puis s’en fut avec un tact exquis, qui fut très remarqué. L
758 Mais tu es si laid que cela me donne encore plus de plaisir. » Le duc paya et s’enfuit en disant que ce n’était pas lui.
759 Il neigeait dans les rues sourdes comme un songe de son enfance. Aux fenêtres du palais s’étoilèrent des halos. Le jour t
760 des halos. Le jour tendre paraissait sous l’égide de la mort. Il vit des fleurs de son enfance, une églantine, quelques ro
761 issait sous l’égide de la mort. Il vit des fleurs de son enfance, une églantine, quelques roses, un sourire qui perce le c
762 esses des flocons, plus perfides que des murmures d’ adieu. Il tomba parmi les statues, dans l’amitié pensive des jardins.
763 rt. » Il fait assez beau pour que s’ouvre ce cœur de l’après-midi, comme un camélia de tendre orgueil. Il respire déjà l’o
764 s’ouvre ce cœur de l’après-midi, comme un camélia de tendre orgueil. Il respire déjà l’odeur merveilleuse des objets et de
765 t bien sûr, je n’ai pas bougé. C’est une question d’ amitié. Pourtant je suis seul dès cette heure, et mes amis fuiront un
766 que je reviens seul. Mais moi, qui regarde comme de l’autre bord, je songe qu’il est des visites à de certaines grandes d
767 de l’autre bord, je songe qu’il est des visites à de certaines grandes dames où je préférais — et lui aussi — me rendre se
768 s le retenir, Je ne pouvais pas le suivre. On dit de ces phrases. Même, on en pleure. q. Rougemont Denis de, « Quatre
769 rases. Même, on en pleure. q. Rougemont Denis de , « Quatre incidents », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Ge
770 Même, on en pleure. q. Rougemont Denis de, «  Quatre incidents », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribo
771 Rougemont Denis de, « Quatre incidents », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, avril 1927, p. 15
772 ettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, avril 1927, p. 151-153. r. Signé : Salomon de Crac.
12 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Récit du pickpocket (fragment) (mai 1927)
773 Récit du pickpocket (fragment) (mai 1927 )s t … et je jure par Mercure, dieu du commerce, qu’on m’a appris
774 st l’âge où l’on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans, dix ans au plus. Après, c’est un long adieu et le corps se fige
775 ù l’on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans, dix ans au plus. Après, c’est un long adieu et le corps se fige à mesure
776 rit s’établit sur ses positions. Or donc, j’avais vingt ans. Je vivais chez mes parents, comme tant d’autres à cet âge, logé,
777 , Monsieur, normalement bon. L’idée, par exemple, d’ étrangler un chat pour le plaisir me répugnait. Je détestais de peiner
778 n chat pour le plaisir me répugnait. Je détestais de peiner quelque être, même ennemi, — car celui-là je le méprisais trop
779 Mes parents me savaient vierge et c’était la joie de leur vie, car ils aimaient en moi par-dessus tout la vertu que je leu
780 . Pourtant, je ne détournai pas mes yeux des yeux de cette femme, de peur qu’elle ne souffrît à cause de moi. Un soir qu’e
781 e détournai pas mes yeux des yeux de cette femme, de peur qu’elle ne souffrît à cause de moi. Un soir qu’elle pleurait, je
782 te femme, qui m’aimait, et nous étions très jolis de bonheur et d’insouciance dans le bonheur de la saison. — Au soir, mon
783 m’aimait, et nous étions très jolis de bonheur et d’ insouciance dans le bonheur de la saison. — Au soir, mon père savait t
784 jolis de bonheur et d’insouciance dans le bonheur de la saison. — Au soir, mon père savait tout. Il effleura mon front de
785 soir, mon père savait tout. Il effleura mon front de ses lèvres sans une parole quand je vins lui souhaiter le bonsoir. Le
786 lui, sans doute, j’étais perdu. Mais il souffrait d’ autre chose encore : il se savait vieux, maintenant. » Je songeais jus
787 maintenant. » Je songeais justement à un sourire de mon amie quand il voulut m’adresser la parole après un silence vertig
788 it mon sourire et pleura. Alors une rage s’empara de mon corps tout entier, je criai un juron, claquai la porte et courus
789 e plus tard, j’étais à la gare, j’écrivais un mot d’ adieu à ma maîtresse d’une nuit et je partais dans une direction quelc
790 la gare, j’écrivais un mot d’adieu à ma maîtresse d’ une nuit et je partais dans une direction quelconque. Il advint que ce
791 direction quelconque. Il advint que ce fut celle de l’Italie. La lumière, mon pays natal ! — Je vécus d’articles sur la m
792 l’Italie. La lumière, mon pays natal ! — Je vécus d’ articles sur la mode et la politique, que j’envoyais à divers journaux
793 divers journaux. Un jour, parcourant un quotidien de mon pays où je cherchais mon dernier papier, je lus mon nom en grosse
794 m en grosses lettres : c’était l’annonce du décès de mon père. » J’étais assis à la terrasse ensoleillée d’un café ; une b
795 n père. » J’étais assis à la terrasse ensoleillée d’ un café ; une brise passa, et une femme en robe bleue légère qui me re
796 augmenter ma volupté. Bientôt je ne pus me tenir de chantonner. J’entrai dans un établissement luxueux d’où sortaient à c
797 hantonner. J’entrai dans un établissement luxueux d’ où sortaient à chaque tour du tambour des bouffées de musique. » La fe
798 ù sortaient à chaque tour du tambour des bouffées de musique. » La femme en bleu dansait en regardant au plafond. Après de
799 me en bleu dansait en regardant au plafond. Après deux tangos, nous montions ensemble dans une chambre d’hôtel où l’on ne vo
800 x tangos, nous montions ensemble dans une chambre d’ hôtel où l’on ne voyait d’abord qu’un bouquet transfiguré par la lumiè
801 uet transfiguré par la lumière et que reflétaient de nombreuses glaces. Les fenêtres que j’ouvris firent tourner des solei
802 une avenue et ses autos rouges, tout un couchant de grand port de la Méditerranée. Nous nous aimâmes en sifflotant encore
803 ses autos rouges, tout un couchant de grand port de la Méditerranée. Nous nous aimâmes en sifflotant encore par instants
804 s aimâmes en sifflotant encore par instants l’air de la dernière danse, mais nous avions aussi envie de pleurer, à cause d
805 e la dernière danse, mais nous avions aussi envie de pleurer, à cause du soir trop limpide et trop vaste, comme un avenir
806 soir trop limpide et trop vaste, comme un avenir de bonheur fiévreux — celui justement que j’entrevoyais. » Quand elle se
807 fut endormie, je me rhabillai. Je ne trouvai que 100 francs dans son sac à main : c’était assez pour me permettre d’entrep
808 son sac à main : c’était assez pour me permettre d’ entreprendre quelques beaux vols… » Dès lors, je vécus, comme vous me
809 s, comme vous me voyez vivre encore, dans un état de sincérité perpétuelle envers tous mes élans, accueillant avec un enth
810 moral et malicieux. » Je ne sais dans quel rapide de l’Europe centrale — région où l’on est forcé de prendre conscience de
811 e de l’Europe centrale — région où l’on est forcé de prendre conscience de soi-même — je découvris une nuit, au moment de
812 — région où l’on est forcé de prendre conscience de soi-même — je découvris une nuit, au moment de m’endormir, que ma pas
813 ue vengeance. Ne m’avait-on pas dérobé des années de joie au profit d’une vertu que tout en moi reniait obscurément. Je se
814 ’avait-on pas dérobé des années de joie au profit d’ une vertu que tout en moi reniait obscurément. Je sentais bien que le
815 bscurément. Je sentais bien que le ressort secret de la vertu dans laquelle on m’avait emprisonné c’était un bas opportuni
816 unisme social, résultante des paresses accumulées de tous les cerveaux bourgeois incapables de concevoir un monde sans vie
817 umulées de tous les cerveaux bourgeois incapables de concevoir un monde sans vieilles filles, sans capitalistes et sans ge
818 endarmes. Je sais bien ce que vous me direz : Les millions que je pourrais leur soustraire ne compenseront jamais cette escroque
819 escroquerie morale dont je fus la victime, ce vol de quelques joies parfaites de ma jeunesse… Mais il est trop tard, Monsi
820 us la victime, ce vol de quelques joies parfaites de ma jeunesse… Mais il est trop tard, Monsieur, pour critiquer les moda
821 trop tard, Monsieur, pour critiquer les modalités de ma vengeance. Veuillez ne voir dans la confusion où je parais être en
822 omique, qu’une expression nouvelle, et non dénuée d’ ironie, de mon mépris pour ce qu’ils appellent, ridiculement, les fond
823 ’une expression nouvelle, et non dénuée d’ironie, de mon mépris pour ce qu’ils appellent, ridiculement, les fondements mêm
824 ils appellent, ridiculement, les fondements mêmes de la société. » C’est avec le produit du vol d’un tronc de chapelle que
825 mes de la société. » C’est avec le produit du vol d’ un tronc de chapelle que j’édifiai à mes parents un tombeau sur lequel
826 ociété. » C’est avec le produit du vol d’un tronc de chapelle que j’édifiai à mes parents un tombeau sur lequel je fis gra
827 uel je fis graver : Prêté — rendu, pour la gloire de l’Église. (Ici, il but une gorgée et prit un temps.) » Je vous fais g
828 t un temps.) » Je vous fais grâce, poursuivit-il, de la chronique de ma vie de rat d’hôtel et de sleepings ; encore que… B
829 e vous fais grâce, poursuivit-il, de la chronique de ma vie de rat d’hôtel et de sleepings ; encore que… Bref, depuis quel
830 s grâce, poursuivit-il, de la chronique de ma vie de rat d’hôtel et de sleepings ; encore que… Bref, depuis quelques mois,
831 , poursuivit-il, de la chronique de ma vie de rat d’ hôtel et de sleepings ; encore que… Bref, depuis quelques mois, je m’a
832 t-il, de la chronique de ma vie de rat d’hôtel et de sleepings ; encore que… Bref, depuis quelques mois, je m’amuse à joue
833 jouer le pickpocket. Cela permet, avec un minimum d’ adresse, de découvrir certaines personnalités sous un jour assez parti
834 ckpocket. Cela permet, avec un minimum d’adresse, de découvrir certaines personnalités sous un jour assez particulier, trè
835 us un jour assez particulier, très souvent ignoré d’ elles-mêmes auparavant, et pas toujours défavorable, croyez-le bien… L
836 pas toujours défavorable, croyez-le bien… Le goût de la propriété étant à mon sens l’un des plus vulgaires et des plus gén
837 et des plus généralement répandus, j’ai vite fait de classer mon monde d’après les quelques réactions élémentaires qui ne
838 ues réactions élémentaires qui ne manquent jamais de succéder au moindre vol. » J’ajouterai, cher Monsieur, que l’analyse
839 psychologique n’est pas mon fort. Je me contente de quelques observations théoriques que je tiens pour vraies, et j’en vé
840 les manifestations vivantes avec une prodigalité d’ épreuves, contre-épreuves, variantes et enjolivures où je vois le véri
841 es et enjolivures où je vois le véritable intérêt de ma vie. C’est vous dire que seule une certaine caresse de l’événement
842 e. C’est vous dire que seule une certaine caresse de l’événement naissant peut encore m’émouvoir. C’est un plaisir de chaq
843 naissant peut encore m’émouvoir. C’est un plaisir de chaque minute auquel succède immédiatement le sommeil. Je rêve beauco
844 j’ai pour la poésie imprimée. » J’allais oublier de vous dire qu’on me nomme Saint-Julien. Vous n’ignorez point que l’on
845 ron des voyageurs… » Saint-Julien parut satisfait de cette dernière plaisanterie. Il but avec beaucoup de délicatesse quel
846 but avec beaucoup de délicatesse quelques gorgées d’ eau minérale. Isidore sentit alors que la bienséance l’obligeait à éme
847 ur cette vie dont le récit n’avait pas laissé que de l’agacer en maint endroit. « Une chose avant tout me frappe — dit-il,
848 lâchant tout de suite ses compliments, ce qui est de mauvaise politique, — c’est l’extraordinaire netteté de votre vie. El
849 vaise politique, — c’est l’extraordinaire netteté de votre vie. Elle est sans bavures, sans réticences ; elle m’apparaît c
850 paraît comme un divertissement perpétuel et dénué d’ inquiétude. Et cela n’est pas sans me charmer, croyez-moi. Car, enfin,
851 couter, c’est que je cherche ce qu’on est convenu d’ appeler — pardonnez la lourdeur de l’expression — une règle de vie. Ma
852 ’on est convenu d’appeler — pardonnez la lourdeur de l’expression — une règle de vie. Mais, je vous l’avouerai, ce qui me
853 pardonnez la lourdeur de l’expression — une règle de vie. Mais, je vous l’avouerai, ce qui me retient de tirer de votre co
854 vie. Mais, je vous l’avouerai, ce qui me retient de tirer de votre conduite les conclusions morales qu’elle paraît impliq
855 s, je vous l’avouerai, ce qui me retient de tirer de votre conduite les conclusions morales qu’elle paraît impliquer, c’es
856 ales qu’elle paraît impliquer, c’est ce caractère de , comment dirai-je…, de juvénile insouciance, pour ne pas dire inconsc
857 liquer, c’est ce caractère de, comment dirai-je…, de juvénile insouciance, pour ne pas dire inconscience ! qui s’attache à
858 ts et gestes. L’on croirait ouïr parfois le récit de quelqu’une de ces farces d’étudiants qui ne sont que la traduction en
859 L’on croirait ouïr parfois le récit de quelqu’une de ces farces d’étudiants qui ne sont que la traduction en actes de jeux
860 ouïr parfois le récit de quelqu’une de ces farces d’ étudiants qui ne sont que la traduction en actes de jeux de mots plus
861 ’étudiants qui ne sont que la traduction en actes de jeux de mots plus ou moins cruels… » — Je vous entends, interrompit S
862 ts qui ne sont que la traduction en actes de jeux de mots plus ou moins cruels… » — Je vous entends, interrompit Saint-Jul
863 t la sincérité tournait vite à l’agressif — effet d’ une timidité naturelle dont il paraissait lui-même gêné. En deux mots,
864 té naturelle dont il paraissait lui-même gêné. En deux mots, vous ne me trouvez pas sérieux. Le reproche est grave. Je ne sa
865 t raison. Mais justement je n’éprouve aucun désir d’ avoir raison. Je sens aussi bien que vous ce que mes principes peuvent
866 bien que vous ce que mes principes peuvent avoir de « bien jeune », de banal presque, et, pis, d’agréablement paradoxal.
867 ue mes principes peuvent avoir de « bien jeune », de banal presque, et, pis, d’agréablement paradoxal. Seulement, pour qui
868 oir de « bien jeune », de banal presque, et, pis, d’ agréablement paradoxal. Seulement, pour quiconque est aussi profondéme
869 quiconque est aussi profondément persuadé que moi de l’absurdité radicale de notre vie, la moindre farce, le moindre geste
870 ondément persuadé que moi de l’absurdité radicale de notre vie, la moindre farce, le moindre geste convenu dans le genre «
871 onvenu dans le genre « révolté » prend une saveur de raillerie assez amère. Et peut-être apprendrez-vous à découvrir derri
872 re apprendrez-vous à découvrir derrière certaines de mes plaisanteries la dérision secrète qu’elles masquent par caprice.
873 ......................... ⁂ s. Rougemont Denis de , « Récit du pickpocket (fragment) », Revue de Belles-Lettres, Lausann
874 nis de, « Récit du pickpocket (fragment) », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, mai 1927, p. 180-
875 -Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, mai 1927, p. 180-185. t. Une note de bas de page indique : « La rédaction rapp
876 nève-Fribourg, mai 1927, p. 180-185. t. Une note de bas de page indique : « La rédaction rappelle que les idées émises da
877 ction rappelle que les idées émises dans la Revue de Belles-Lettres sont propres à leur auteur et qu’elles n’engagent pas
13 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Conseils à la jeunesse (mai 1927)
878 Conseils à la jeunesse (mai 1927 )u « On a reproché bien des choses aux romantiques : le goût du sui
879 aux romantiques : le goût du suicide, l’habitude de boire et de fumer excessivement, leurs amours, l’égoïsme, le mépris d
880 ques : le goût du suicide, l’habitude de boire et de fumer excessivement, leurs amours, l’égoïsme, le mépris de la réalité
881 excessivement, leurs amours, l’égoïsme, le mépris de la réalité, l’exaltation maladive de l’imagination et de la sensibili
882 e, le mépris de la réalité, l’exaltation maladive de l’imagination et de la sensibilité, l’atrophie du sens critique sous
883 éalité, l’exaltation maladive de l’imagination et de la sensibilité, l’atrophie du sens critique sous toutes ses formes :
884 ens, et l’ignorance systématique, le mépris enfin de tous les principes qui sont à la base de la société même. »   Ceci es
885 is enfin de tous les principes qui sont à la base de la société même. »   Ceci est tiré d’un livre récent sur Aloysius Ber
886 t à la base de la société même. »   Ceci est tiré d’ un livre récent sur Aloysius Bertrand. Est-ce vraiment aux romantiques
887 loysius Bertrand. Est-ce vraiment aux romantiques de 1830 que ces reproches s’adressent, ou bien plutôt — vous alliez le d
888 sius Bertrand. Est-ce vraiment aux romantiques de 1830 que ces reproches s’adressent, ou bien plutôt — vous alliez le dire —
889 M. Y. Z., qui, dans un petit article du Journal de Genève sur « La maladie du siècle », écrit : « Plante des pommes de
890 terre, jeune homme ! Quand tu seras au bout de la 20e ligne de 200 mètres, ce qui représente quatre kilomètres de plantatio
891 ne homme ! Quand tu seras au bout de la 20e ligne de 200 mètres, ce qui représente quatre kilomètres de plantation, le siè
892 homme ! Quand tu seras au bout de la 20e ligne de 200 mètres, ce qui représente quatre kilomètres de plantation, le siècle
893 de la 20e ligne de 200 mètres, ce qui représente quatre kilomètres de plantation, le siècle ne sera plus malade, les temps se
894 e 200 mètres, ce qui représente quatre kilomètres de plantation, le siècle ne sera plus malade, les temps seront guéris de
895 ècle ne sera plus malade, les temps seront guéris de leur crise, les valeurs auront retrouvé leur stabilité, et comme M. A
896 bilité, et comme M. Albert Muret dont le Journal de Genève parlait naguère, tu mangeras avec appétit une poule au riz ar
897 tu mangeras avec appétit une poule au riz arrosée d’ un savoureux “demi” de Lavaux. » Seulement, il y a tout de même un ou
898 it une poule au riz arrosée d’un savoureux “demi” de Lavaux. » Seulement, il y a tout de même un ou deux petits phénomènes
899 de Lavaux. » Seulement, il y a tout de même un ou deux petits phénomènes sociaux de notre temps que cette méthode ne suffira
900 tout de même un ou deux petits phénomènes sociaux de notre temps que cette méthode ne suffirait pas à supprimer. Or, ils n
901 lement chez des jeunes « et qui pensent » ce goût de l’évasion caractéristique de tous les « vices romantiques ». — Citez-
902 ui pensent » ce goût de l’évasion caractéristique de tous les « vices romantiques ». — Citez-m’en de ces phénomènes ! — Mo
903 e de tous les « vices romantiques ». — Citez-m’en de ces phénomènes ! — Mon Dieu, que dire… Il y aurait, par exemple, ce f
904 re… Il y aurait, par exemple, ce fait du triomphe de la Machine ; ce fait de la révolution russe… cet autre fait de la gue
905 mple, ce fait du triomphe de la Machine ; ce fait de la révolution russe… cet autre fait de la guerre… et puis, tenez ! ce
906  ; ce fait de la révolution russe… cet autre fait de la guerre… et puis, tenez ! ce fait surtout de la sacro-sainte Raison
907 it de la guerre… et puis, tenez ! ce fait surtout de la sacro-sainte Raison utilitaire au service des sacro-saints Princip
908 s n’est-ce pas, merci du conseil, Monsieur Y. Z., de ce conseil que vous avouez modestement n’être pas inédit. Mais point
909 tement n’être pas inédit. Mais point n’est besoin de rappeler Candide : nous pensons que bien avant Voltaire il y avait de
910 n, le satisfait artificiel. u. Rougemont Denis de , « Conseils à la jeunesse », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâ
911 emont Denis de, « Conseils à la jeunesse », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, mai 1927, p. 186-
912 -Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, mai 1927, p. 186-187.
14 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature (juillet 1927)
913 La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature (juillet 1927)v I Parler littérature Si je pro
914 Lettres sur le mépris de la littérature (juillet 1927 )v I Parler littérature Si je prononce le nom de tel de vos co
915 le mépris de la littérature (juillet 1927)v I Parler littérature Si je prononce le nom de tel de vos confrères,
916 I Parler littérature Si je prononce le nom de tel de vos confrères, si je dis : « Avez-vous lu… », vous voilà rouge
917 arler littérature Si je prononce le nom de tel de vos confrères, si je dis : « Avez-vous lu… », vous voilà rouge ; et s
918 lu… », vous voilà rouge ; et sur moi les foudres de votre paradis poétique. Si je cite tel auteur dont nous fîmes notre n
919 uteur dont nous fîmes notre nourriture une saison de naguère, voilà le rictus de votre bouche, une injure de pythie. Vous
920 nourriture une saison de naguère, voilà le rictus de votre bouche, une injure de pythie. Vous dites de ce conte : c’est tr
921 uère, voilà le rictus de votre bouche, une injure de pythie. Vous dites de ce conte : c’est trop écrit. Vous dites de ce r
922 de votre bouche, une injure de pythie. Vous dites de ce conte : c’est trop écrit. Vous dites de ce roman : c’est trop agré
923 dites de ce conte : c’est trop écrit. Vous dites de ce roman : c’est trop agréable. Vous dites d’un goût qu’on aurait pou
924 tes de ce roman : c’est trop agréable. Vous dites d’ un goût qu’on aurait pour Nietzsche : que c’est de la littérature. Alo
925 d’un goût qu’on aurait pour Nietzsche : que c’est de la littérature. Alors, quelque paysan du Danube survenant : — Je vous
926 in que leurs sincérités gardent au moins l’excuse d’ une audace qu’ils escomptent scandaleuse. Mais voici un bar où je vous
927 voici un bar où je vous suis. Vous y entrez plein de mépris pour Paul Morand par qui découvrîtes le charme de ces lieux. V
928 is pour Paul Morand par qui découvrîtes le charme de ces lieux. Vous composez un cocktail en guise de métaphore, avec une
929 d Écart… », dit quelqu’un. À ce coup, l’évocation de Cocteau fait fleurir sur vos lèvres le mot de Cambronne : hommage à L
930 ion de Cocteau fait fleurir sur vos lèvres le mot de Cambronne : hommage à Louis Aragon. Ce cristal est une citation de Va
931 mmage à Louis Aragon. Ce cristal est une citation de Valéry, cette œillade se souvient d’un vers d’Éluard14. Et des phrase
932 une citation de Valéry, cette œillade se souvient d’ un vers d’Éluard14. Et des phrases, des cris, des mots. Au défaut de l
933 on de Valéry, cette œillade se souvient d’un vers d’ Éluard14. Et des phrases, des cris, des mots. Au défaut de l’ivresse n
934 14. Et des phrases, des cris, des mots. Au défaut de l’ivresse naissante se glisse un poème où vous aimiez à la folie votr
935 ie votre douleur. Narcisse se contemple au miroir de son monocle. Au petit matin, il se noie dans un verre à liqueur. Pois
936 rop qu’ils trouvent ça pittoresque. Et le plaisir d’ être nu devant un public supposé dévot, et qui n’ose en croire sa pude
937 qui n’ose en croire sa pudeur, et qui doute enfin de l’impossibilité des miracles ! Quelles voluptés plus subtiles et plus
938 les et plus aiguës ? On vaincra jusqu’à sa gueule de bois pour en faire des poèmes. Alors je cherche les raisons de votre
939 en faire des poèmes. Alors je cherche les raisons de votre indignation, quand il m’échappe une citation. Seraient-ce les g
940 », « hallucinant » ou « purement gratuit ». C’est de la littérature. À force d’avoir mérité ces épithètes, pour nous laud
941 ment gratuit ». C’est de la littérature. À force d’ avoir mérité ces épithètes, pour nous laudatives, vous vous étonnez au
942 ur nous laudatives, vous vous étonnez aujourd’hui de la simplicité. Littérateur, va ! qui ne pouvez pas même admettre que
943 implicité est simple simplement. La bouche brûlée d’ alcools, vous découvrez à l’eau un goût étrange. L’eau est incolore, i
944 votre mépris pour le pittoresque, vous témoignez d’ un goût du bizarre qui révèle le littérateur. Nous ne pouvons pas fair
945 pas faire que nous n’ayons rien lu. Vous refusez de compter avec cette réalité de la littérature qui est en nous (dangere
946 en lu. Vous refusez de compter avec cette réalité de la littérature qui est en nous (dangereuse tant que vous voudrez). Ma
947 s ce refus n’est pas seulement comme vous pensez, d’ une ingratitude salutaire, c’est refus de limiter le mal. Je vous vois
948 pensez, d’une ingratitude salutaire, c’est refus de limiter le mal. Je vous vois envahi par des démons que vous prétendez
949 ahi par des démons que vous prétendez m’interdire de nommer. Mais moi je partage avec certains Orientaux cette croyance :
950 ez un peu sur la laisse, que j’éprouve la fermeté de ma main. Je vous tiens. Je sais où vous êtes. Vous n’allez pas me sur
951 du feu. Je dis ces noms, ces opinions, ces titres de livres : tout cela jaillit, s’entrechoque, s’annule. Poussière. Ma vi
952 lleurs. L’addition, s’il vous plaît. Il est temps de sortir de ce café et de ces jeux, simulacres de vie, qui sont à la vr
953 addition, s’il vous plaît. Il est temps de sortir de ce café et de ces jeux, simulacres de vie, qui sont à la vraie vie ce
954 vous plaît. Il est temps de sortir de ce café et de ces jeux, simulacres de vie, qui sont à la vraie vie ce que le flirt
955 s de sortir de ce café et de ces jeux, simulacres de vie, qui sont à la vraie vie ce que le flirt est à l’amour. II Sur
956 à la vraie vie ce que le flirt est à l’amour. II Sur l’insuffisance de la littérature On reconnaît un écrivain, auj
957 le flirt est à l’amour. II Sur l’insuffisance de la littérature On reconnaît un écrivain, aujourd’hui, à ce qu’il n
958 arle littérature. Mais il y a des mépris qui sont de sournoises déclarations d’amour. Tel qui raille l’Église et les curés
959 a des mépris qui sont de sournoises déclarations d’ amour. Tel qui raille l’Église et les curés, c’est qu’il se fait une t
960 es curés, c’est qu’il se fait une très haute idée de la religion. Ainsi, de la littérature : votre mépris pour ses réalisa
961 e fait une très haute idée de la religion. Ainsi, de la littérature : votre mépris pour ses réalisations actuelles donne l
962 s pour ses réalisations actuelles donne la mesure de ce que vous attendez d’elle. Pour dire le fond de ma pensée, je crois
963 actuelles donne la mesure de ce que vous attendez d’ elle. Pour dire le fond de ma pensée, je crois ce mépris et cette atte
964 de ce que vous attendez d’elle. Pour dire le fond de ma pensée, je crois ce mépris et cette attente également exagérés. Vo
965 e. Que la littérature nous est un moyen seulement d’ atteindre et de préparer d’autres choses, d’autres actions, ou des éta
966 rature nous est un moyen seulement d’atteindre et de préparer d’autres choses, d’autres actions, ou des états intérieurs q
967 oses dures, amères comme un destin, comme le goût d’ une pierre rêche sur ta langue et grinçante sous ta dent. Des soupless
968 que tout se fond catastrophiquement dans l’infini de la seconde. Des peurs sans cause, plus vides que la mort. Toutes ces
969 ue nulle poésie même ne peut dire, parce que rien de ce qui nous importe véritablement n’est dicible. (Depuis le temps qu’
970 la poésie, l’état poétique, est notre seul moyen de connaissance concrète du monde. Mais c’est à condition qu’on ne l’écr
971 ble : cela consisterait dans l’expression directe de la réalité individuelle. Elle serait tellement incommunicable qu’il d
972 ellement incommunicable qu’il deviendrait inutile de la publier. Et même, en passant à la limite, on peut imaginer que si
973 s obscurs des allusions furtives à certains états de la réalité. Mais plus les mots se plient à des exigences sémantiques
974 e, — mariant l’utile à l’agréable selon les rites d’ une esthétique ou d’une autre, plus ils perdent leur pouvoir de signif
975 à l’agréable selon les rites d’une esthétique ou d’ une autre, plus ils perdent leur pouvoir de signifier les choses qui n
976 que ou d’une autre, plus ils perdent leur pouvoir de signifier les choses qui nous importent. Vous le savez. Alors vous le
977 avez. Alors vous les lâchez en liberté, par haine de cette esthétique ou de ce sens social, — et voilà qu’ils perdent même
978 chez en liberté, par haine de cette esthétique ou de ce sens social, — et voilà qu’ils perdent même la problématique utili
979 oilà qu’ils perdent même la problématique utilité de liaison qui était leur excuse dernière. Avouons-le : rien de ce qu’on
980 qui était leur excuse dernière. Avouons-le : rien de ce qu’on peut exprimer n’a d’importance véritable. Alors, cessons de
981 . Avouons-le : rien de ce qu’on peut exprimer n’a d’ importance véritable. Alors, cessons de nous battre contre des moulins
982 primer n’a d’importance véritable. Alors, cessons de nous battre contre des moulins à vent. La littérature, considérée du
983 vent. La littérature, considérée du point de vue de la psychologie de l’écrivain, est un besoin organique, un peu anormal
984 ure, considérée du point de vue de la psychologie de l’écrivain, est un besoin organique, un peu anormal, que l’on satisfa
985 u anormal, que l’on satisfait dans certains états de crise afin de retrouver son équilibre — et dont on tire parfois quelq
986 t on tire parfois quelque plaisir, plus rarement, de quoi se payer un petit voyage. C’est l’aveu d’une faiblesse secrète.
987 t, de quoi se payer un petit voyage. C’est l’aveu d’ une faiblesse secrète. Et c’est une réaction de défense. On cherche un
988 eu d’une faiblesse secrète. Et c’est une réaction de défense. On cherche un mot, une phrase, pour tuer une réalité dont la
989 qui est proche du sens biblique. Il ne s’agit pas de la connaissance abstraite et rationnelle dont le monde moderne se con
990 ude que vous la guérirez. Au contraire, il s’agit de l’envisager sans fièvre, pour en circonscrire les effets. J’avoue pre
991 êt bien vif. Et cela fournit un merveilleux sujet de conversation, au café. Dans un salon, par contre, c’est d’un ridicule
992 sation, au café. Dans un salon, par contre, c’est d’ un ridicule écrasant : mais rien n’est plus facile que d’y échapper.
993 dicule écrasant : mais rien n’est plus facile que d’ y échapper. III Sur l’utilité de la littérature Montherlant me p
994 mais rien n’est plus facile que d’y échapper. III Sur l’utilité de la littérature Montherlant me paraît être le moin
995 lus facile que d’y échapper. III Sur l’utilité de la littérature Montherlant me paraît être le moins « littératuré »
996 araît être le moins « littératuré » des écrivains d’ aujourd’hui. Quand il parle littérature, il a toujours l’air de mettre
997 . Quand il parle littérature, il a toujours l’air de mettre un peu les pieds dans le plat, de dire de ces choses qu’entre
998 rs l’air de mettre un peu les pieds dans le plat, de dire de ces choses qu’entre gens du métier l’on a convenu de passer s
999 de mettre un peu les pieds dans le plat, de dire de ces choses qu’entre gens du métier l’on a convenu de passer sous sile
1000 ces choses qu’entre gens du métier l’on a convenu de passer sous silence. C’est assez drôle de voir le malaise des chers c
1001 convenu de passer sous silence. C’est assez drôle de voir le malaise des chers confrères. Ils ne pardonnent pas à ce toréa
1002 miliarités avec une Muse qu’ils n’ont pas coutume d’ aborder sans le mot de passe de la dernière mode ou de savantes séduct
1003 se qu’ils n’ont pas coutume d’aborder sans le mot de passe de la dernière mode ou de savantes séductions. On sait bien, d’
1004 n’ont pas coutume d’aborder sans le mot de passe de la dernière mode ou de savantes séductions. On sait bien, d’ailleurs,
1005 order sans le mot de passe de la dernière mode ou de savantes séductions. On sait bien, d’ailleurs, qu’elle les entretient
1006 t bien, d’ailleurs, qu’elle les entretient. Bande de gigolos de la littérature ! Qu’on puisse vivre de ça, je ne l’ai pas
1007 illeurs, qu’elle les entretient. Bande de gigolos de la littérature ! Qu’on puisse vivre de ça, je ne l’ai pas encore aval
1008 de gigolos de la littérature ! Qu’on puisse vivre de ça, je ne l’ai pas encore avalé. On m’affirme que je n’y échapperai p
1009 ble ; mais, pour sûr, jamais vivre pour écrire16. De tous les prétextes que l’on a pu avancer pour légitimer l’activité li
1010 plus satisfaisant, celui qui rend le mieux compte de la réalité, c’est André Breton qui l’a exprimé : « On publie pour che
1011 es pas tant, n’est-ce pas, à poursuivre une quête de l’esprit. Et vous savez ce qu’elle nous vaut : les mépris, les haines
1012 les mépris, les haines douloureuses ou grossières de tous ceux qui ne peuvent ou ne veulent y voir que révoltes contre leu
1013 s instables certitudes, et qui nous font un péché de notre acceptation des réalités spirituelles parce qu’elles troublent
1014 e reconnaître. Quand bien même elle n’aurait plus d’ autre excuse que celle-là, la littérature mériterait d’exister : qu’el
1015 re excuse que celle-là, la littérature mériterait d’ exister : qu’elle soit le langage chiffré de notre inquiétude et de no
1016 erait d’exister : qu’elle soit le langage chiffré de notre inquiétude et de nos naissantes certitudes, le seul langage peu
1017 le soit le langage chiffré de notre inquiétude et de nos naissantes certitudes, le seul langage peut-être qui nous permett
1018 udes, le seul langage peut-être qui nous permette d’ échanger les signaux de l’angoisse sur quoi se fondent, en ces temps,
1019 eut-être qui nous permette d’échanger les signaux de l’angoisse sur quoi se fondent, en ces temps, nos amitiés miraculeuse
1020   Voici donc les seules révélations que j’attende de la littérature : que celle des autres m’aide à prendre conscience de
1021 que celle des autres m’aide à prendre conscience de moi-même ; que la mienne m’aide à découvrir quelques êtres par le mon
1022 ir quelques êtres par le monde… Il ne s’agit plus de mépris ni d’adoration. J’ai défini une « maladie » dont je parviens à
1023 tres par le monde… Il ne s’agit plus de mépris ni d’ adoration. J’ai défini une « maladie » dont je parviens à tirer quelqu
1024 ue les bienfaits que j’en escompte, il sera temps de songer sérieusement à m’en guérir. Vous me demanderez « alors » ce qu
1025 ir. Vous me demanderez « alors » ce que j’attends de ma vie. Je serais tenté de vous répondre, comme ce sympathique Philip
1026 ors » ce que j’attends de ma vie. Je serais tenté de vous répondre, comme ce sympathique Philippe Soupault, que « ceci, c’
1027 ) Mais non, cher ami, voici qu’une envie me prend de vous conter un peu cette histoire. Seulement, allons ailleurs ; il y
1028 istoire. Seulement, allons ailleurs ; il y a trop de monde ici. 14. Paul Morand, auteur d’Ouvert et de Fermé la nuit, t
1029 t, allons ailleurs ; il y a trop de monde ici. 14. Paul Morand, auteur d’Ouvert et de Fermé la nuit, titres également sc
1030 y a trop de monde ici. 14. Paul Morand, auteur d’ Ouvert et de Fermé la nuit, titres également scandaleux. Le Grand Écar
1031 monde ici. 14. Paul Morand, auteur d’Ouvert et de Fermé la nuit, titres également scandaleux. Le Grand Écart, roman de
1032 itres également scandaleux. Le Grand Écart, roman de M. Cocteau, a donné son nom à un établissement de nuit très en vogue
1033 de M. Cocteau, a donné son nom à un établissement de nuit très en vogue à Paris. Cambronne (général), 1770-1842. Louis Ara
1034 nuit très en vogue à Paris. Cambronne (général), 1770-1842. Louis Aragon et Paul Éluard, hommes de lettres et poètes surréalistes
1035 ), 1770-1842. Louis Aragon et Paul Éluard, hommes de lettres et poètes surréalistes. Paul Valéry, de l’Académie française.
1036 s de lettres et poètes surréalistes. Paul Valéry, de l’Académie française. Narcisse, personnage mythologique. — Là ! [NdE]
1037  ! [NdE] Le texte publié place également un appel de note plus bas dans le paragraphe, après « Narcisse », sans qu’on sach
1038 après « Narcisse », sans qu’on sache s’il s’agit d’ une erreur ou d’une volonté de l’auteur. 15. Variante : des puissance
1039 e », sans qu’on sache s’il s’agit d’une erreur ou d’ une volonté de l’auteur. 15. Variante : des puissances d’action. 16.
1040 n sache s’il s’agit d’une erreur ou d’une volonté de l’auteur. 15. Variante : des puissances d’action. 16. J’en vois cer
1041 ’agit d’une erreur ou d’une volonté de l’auteur. 15. Variante : des puissances d’action. 16. J’en vois certains qui arran
1042 lonté de l’auteur. 15. Variante : des puissances d’ action. 16. J’en vois certains qui arrangent leur vie de telle sorte
1043 auteur. 15. Variante : des puissances d’action. 16. J’en vois certains qui arrangent leur vie de telle sorte que leurs mé
1044 n. 16. J’en vois certains qui arrangent leur vie de telle sorte que leurs mémoires seront des romans « bien modernes ». L
1045  bien modernes ». Leurs amours sont des pastiches de Morand, et ils en sont tout fiers : « Il n’y a plus qu’à les écrire »
1046 ’y a plus qu’à les écrire ». v. Rougemont Denis de , « La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature », Revue d
1047 Denis de, « La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-
1048 Lettres sur le mépris de la littérature », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, juillet 1927, p. 
1049 tres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, juillet 1927, p. 231-238.
15 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Les derniers jours (juillet 1927)
1050 Les derniers jours (juillet 1927 )w Ces « cahiers politiques et littéraires »17, rédigés par Drieu l
1051 927)w Ces « cahiers politiques et littéraires » 17, rédigés par Drieu la Rochelle et Emmanuel Berl, sont — avec la Revue
1052 Rochelle et Emmanuel Berl, sont — avec la Revue de Belles-Lettres — la seule revue de langue française où l’on dise la
1053 vec la Revue de Belles-Lettres — la seule revue de langue française où l’on dise la vérité librement et pour elle-même.
1054 rité librement et pour elle-même. Nous regrettons de n’en pouvoir citer, faute de place, que ces quelques phrases de Drieu
1055 r citer, faute de place, que ces quelques phrases de Drieu : « On voit déjà éclater dans les singuliers mouvements de sym
1056 voit déjà éclater dans les singuliers mouvements de sympathie qu’a provoqués l’infortune de l’Action française la fratern
1057 ouvements de sympathie qu’a provoqués l’infortune de l’Action française la fraternité qui existe, en dépit des protestatio
1058 fraternité qui existe, en dépit des protestations de haine, entre les athées de l’antidémocratisme et les athées du Capita
1059 épit des protestations de haine, entre les athées de l’antidémocratisme et les athées du Capitalisme quand il est conscien
1060 les athées du Capitalisme quand il est conscient de soi-même, et les athées du Socialisme et du Communisme. Tous ceux-là
1061 mmunisme. Tous ceux-là travaillent à l’achèvement d’ un certain monde moderne, merveilleuse mécanique sévère et dénuée de t
1062 moderne, merveilleuse mécanique sévère et dénuée de tout secours de l’Esprit. Mais un jour viendra où les hommes se révol
1063 lleuse mécanique sévère et dénuée de tout secours de l’Esprit. Mais un jour viendra où les hommes se révolteront contre le
1064 Vous réveillerez-vous pour les désaltérer, dieux de l’Orient et de l’Occident ? » Certains cris qui nous échappèrent n’a
1065 ez-vous pour les désaltérer, dieux de l’Orient et de l’Occident ? » Certains cris qui nous échappèrent n’avaient pas d’au
1066 Certains cris qui nous échappèrent n’avaient pas d’ autre sens. 17. 20, rue Chalgrin, Paris 16e. w. Rougemont Denis de
1067 ui nous échappèrent n’avaient pas d’autre sens. 17. 20, rue Chalgrin, Paris 16e. w. Rougemont Denis de, « Les derniers
1068 ous échappèrent n’avaient pas d’autre sens. 17. 20, rue Chalgrin, Paris 16e. w. Rougemont Denis de, « Les derniers jour
1069 t pas d’autre sens. 17. 20, rue Chalgrin, Paris 16e . w. Rougemont Denis de, « Les derniers jours », Revue de Belles-Let
1070 20, rue Chalgrin, Paris 16e. w. Rougemont Denis de , « Les derniers jours », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-
1071 Rougemont Denis de, « Les derniers jours », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, juillet 1927, p. 
1072 tres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, juillet 1927, p. 249-250.
16 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Adieu au lecteur (juillet 1927)
1073 Adieu au lecteur (juillet 1927 )x Nous passons la main au central de Genève, fidèles à la traditio
1074 juillet 1927)x Nous passons la main au central de Genève, fidèles à la tradition — en ceci au moins. Nous nous retirons
1075 gnation provoquée sur tous les bancs par certains de nos articles nous épouvante. Notre retraite est toute « statutaire »
1076 taire » — si l’on ose dire. Elle nous permet donc de considérer la situation sans fièvre, sans lamentations d’adieu.   On
1077 dérer la situation sans fièvre, sans lamentations d’ adieu.   On nous a parfois traités de fous (avec ou sans sourire). Nou
1078 lamentations d’adieu.   On nous a parfois traités de fous (avec ou sans sourire). Nous sommes à l’âge de nous en réjouir.
1079 fous (avec ou sans sourire). Nous sommes à l’âge de nous en réjouir. On s’est beaucoup étonné de nous voir « si différent
1080 ’âge de nous en réjouir. On s’est beaucoup étonné de nous voir « si différents » de nos aînés. Nous avons l’énorme candeur
1081 st beaucoup étonné de nous voir « si différents » de nos aînés. Nous avons l’énorme candeur de trouver ça naturel. On nous
1082 rents » de nos aînés. Nous avons l’énorme candeur de trouver ça naturel. On nous a fait des reproches contradictoires. Nou
1083 es additionnons : ils s’annulent. Il reste à dire deux mots sur la paradoxale situation intellectuelle d’une revue d’étudian
1084 x mots sur la paradoxale situation intellectuelle d’ une revue d’étudiants comme la nôtre. D’un côté, en effet, on s’accord
1085 a paradoxale situation intellectuelle d’une revue d’ étudiants comme la nôtre. D’un côté, en effet, on s’accorde pour trouv
1086 lectuelle d’une revue d’étudiants comme la nôtre. D’ un côté, en effet, on s’accorde pour trouver légèrement ridicule un je
1087 i recherche activement la Sagesse (« Ça n’est pas de votre âge ! ») ; de l’autre, on se scandalise des « énormités » qui p
1088 nt la Sagesse (« Ça n’est pas de votre âge ! ») ; de l’autre, on se scandalise des « énormités » qui peuvent échapper à un
1089 s vous souciez vraiment trop peu des conséquences de ce que vous écrivez ! ») En définitive, il semble que certains n’att
1090 En définitive, il semble que certains n’attendent de nous que d’innocentes farces — ou bien de ces affirmations dont en vé
1091 e, il semble que certains n’attendent de nous que d’ innocentes farces — ou bien de ces affirmations dont en vérité l’on n’
1092 tendent de nous que d’innocentes farces — ou bien de ces affirmations dont en vérité l’on n’a pas à se préoccuper de prévo
1093 tions dont en vérité l’on n’a pas à se préoccuper de prévoir les conséquences, puisqu’il n’en est aucune qui ne soit connu
1094 ces, puisqu’il n’en est aucune qui ne soit connue d’ avance et stérilisée par la loi, les mœurs et l’habitude. Nous n’avons
1095 s mœurs et l’habitude. Nous n’avons aucun remords d’ avoir déçu cette catégorie de lecteurs. Aucun remord non plus d’avoir
1096 ’avons aucun remords d’avoir déçu cette catégorie de lecteurs. Aucun remord non plus d’avoir troublé quelques bonnes petit
1097 ette catégorie de lecteurs. Aucun remord non plus d’ avoir troublé quelques bonnes petites somnolences par des cris intempe
1098 ir et pour en accepter les conséquences. Et puis, de temps à autre, voici que nous parvient un signe d’amitié qui ne tromp
1099 e temps à autre, voici que nous parvient un signe d’ amitié qui ne trompe pas. Deux ou trois mots, on s’est compris. Que po
1100 ous parvient un signe d’amitié qui ne trompe pas. Deux ou trois mots, on s’est compris. Que pouvions-nous espérer d’autre ?
1101 ient un signe d’amitié qui ne trompe pas. Deux ou trois mots, on s’est compris. Que pouvions-nous espérer d’autre ? Il y eut
1102 mots, on s’est compris. Que pouvions-nous espérer d’ autre ? Il y eut quelques découvertes qui nous consolèrent de tout le
1103 l y eut quelques découvertes qui nous consolèrent de tout le reste.   Et maintenant voici Genève et son mystère. Car chaqu
1104 écombres où s’anéantirent l’honneur et la fortune de ses derniers rédacteurs, notre Revue-phénix s’élance avec une ardeur
1105 re Revue-phénix s’élance avec une ardeur rajeunie d’ un an dans une direction absolument imprévisible. Que nous apportera l
1106 ument imprévisible. Que nous apportera le Central de Genève ? Tout est possible : la guerre et la paix, la tradition, l’an
1107 s plus blasés. Lecteur, fais confiance au Central de Genève. Souviens-toi de la grandeur de ses traditions et ne va pas aj
1108 fais confiance au Central de Genève. Souviens-toi de la grandeur de ses traditions et ne va pas ajouter à cette lourde cha
1109 au Central de Genève. Souviens-toi de la grandeur de ses traditions et ne va pas ajouter à cette lourde charge le poids de
1110 ne va pas ajouter à cette lourde charge le poids de nos péchés. Ils sont bien nôtres. Et nous y tenons, ah ! comme nous y
1111 ah ! comme nous y tenons ! x. Rougemont Denis de , « Adieu au lecteur », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Ge
1112 Rougemont Denis de, « Adieu au lecteur », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, juillet 1927, p. 
1113 tres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, juillet 1927, p. 256-258.
17 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). « Belles-Lettres, c’est la clé des champs… » (janvier 1929)
1114 lles-Lettres, c’est la clé des champs… » (janvier 1929 )y 1. Belles-Lettres, c’est la clef des champs. 2. L’essence de Bel
1115 es, c’est la clé des champs… » (janvier 1929)y 1. Belles-Lettres, c’est la clef des champs. 2. L’essence de Belles-Lett
1116 y 1. Belles-Lettres, c’est la clef des champs. 2. L’essence de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à brûler les cervelles
1117 s-Lettres, c’est la clef des champs. 2. L’essence de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à brûler les cervelles et les réput
1118 des champs. 2. L’essence de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à brûler les cervelles et les réputations. 3. Belles-Lettre
1119 lcool à brûler les cervelles et les réputations. 3. Belles-Lettres n’est compréhensible et légitime que dans la mesure où
1120 sure où la poésie est compréhensible et légitime. 4. Je suis de sang-froid, je dis : Belles-Lettres est essentiellement un
1121 poésie est compréhensible et légitime. 4. Je suis de sang-froid, je dis : Belles-Lettres est essentiellement une mystique.
1122 entiellement une mystique. Mais parce que je suis de sang-froid, je ne puis dire grand-chose de plus. On ne se comprend bi
1123 eunes hommes ivres. Mais alors point n’est besoin de formuler cette ivresse ; autrement que par des cris. 5. Avec toutes l
1124 muler cette ivresse ; autrement que par des cris. 5. Avec toutes les erreurs et turpitudes que cela comporte, Belles-Lettr
1125 que pour mourir ou pour entrer en religion : rond de cuir ou poète (au sens le plus large de ces mots.) (Mais je tiens à l
1126 on : rond de cuir ou poète (au sens le plus large de ces mots.) (Mais je tiens à le leur dire ici : les anciens bellettrie
1127 triens qui ont perdu toute foi ne connaîtront pas de pardon. Car ils ont vu, et s’ils n’ont pas cru, c’est qu’ils sont fon
1128 pas cru, c’est qu’ils sont foncièrement mauvais.) 6. Peu de choses dans le monde moderne ont encore une « essence ». Celle
1129 e monde moderne ont encore une « essence ». Celle de Belles-Lettres est en agréable odeur à l’Éternel et à Satan pareillem
1130 t ceux qu’elle enivre entrent en état de grâce ou de blasphème, selon. Mais ce qui importe d’abord, n’est-ce point de se l
1131 elon. Mais ce qui importe d’abord, n’est-ce point de se livrer, purement et simplement. 7. (Secret). y. Rougemont Denis
1132 st-ce point de se livrer, purement et simplement. 7. (Secret). y. Rougemont Denis de, « Belles-Lettres, c’est la clef d
1133 et simplement. 7. (Secret). y. Rougemont Denis de , « Belles-Lettres, c’est la clef des champs… », Revue de Belles-Lettr
1134 elles-Lettres, c’est la clef des champs… », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, janvier 1929, p. 
1135 tres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, janvier 1929, p. 78-79.
18 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Prison. Ailleurs. Étoile de jour (mars 1929)
1136 Prison. Ailleurs. Étoile de jour (mars 1929)z Prison Prisonnier de la nuit mais plus libr
1137 Prison. Ailleurs. Étoile de jour (mars 1929 )z Prison Prisonnier de la nuit mais plus libre qu’un ange pri
1138 le de jour (mars 1929)z Prison Prisonnier de la nuit mais plus libre qu’un ange prisonnier dans ta tête mais libre
1139 s Quand la nuit s’effeuille et se fane prisonnier d’ une saison morte au tombeau des fleurs obscures les mains de l’absence
1140 on morte au tombeau des fleurs obscures les mains de l’absence se ferment sur le vide   Tu pleurerais Mais la grâce est f
1141 leurerais Mais la grâce est facile comme un matin d’ été la grâce tendrement dénouée de ta vie comme de cette nuit le jour
1142 comme un matin d’été la grâce tendrement dénouée de ta vie comme de cette nuit le jour d’un grand été   qui consent…
1143 d’été la grâce tendrement dénouée de ta vie comme de cette nuit le jour d’un grand été   qui consent… Ailleurs Colo
1144 ent dénouée de ta vie comme de cette nuit le jour d’ un grand été   qui consent… Ailleurs Colombes lumineuses des ma
1145 ent… Ailleurs Colombes lumineuses des mains de mon amour écloses voyageuses ah ! que d’aucun retour vous ne laissiez
1146 es mains de mon amour écloses voyageuses ah ! que d’ aucun retour vous ne laissiez le gage aux plaintes de mon cœur il est
1147 ucun retour vous ne laissiez le gage aux plaintes de mon cœur il est d’autres rivages où mieux qu’ici l’on meurt. Étoil
1148 res rivages où mieux qu’ici l’on meurt. Étoile de jour Il naissait à son destin des rayons glissent et rient c’est
1149 rient c’est la caresse des anges parmi les formes de l’ombre C’était l’aube et le sourire adorable de savoir la dansante
1150 e l’ombre C’était l’aube et le sourire adorable de savoir la dansante liberté d’un désir à sa naissance L’étoile qui l
1151 le sourire adorable de savoir la dansante liberté d’ un désir à sa naissance L’étoile qui l’accueille au sommet ravi d’un
1152 issance L’étoile qui l’accueille au sommet ravi d’ un silence c’est le miroir d’une absence mais le signe de sa grâce D
1153 eille au sommet ravi d’un silence c’est le miroir d’ une absence mais le signe de sa grâce Dans l’or vert évanouie au cœu
1154 lence c’est le miroir d’une absence mais le signe de sa grâce Dans l’or vert évanouie au cœur éclatant du jour scintille
1155 œur éclatant du jour scintillera l’invisible gage d’ un amour perdu. z. Rougemont Denis de, « Prison. Ailleurs. Étoil
1156 e gage d’un amour perdu. z. Rougemont Denis de , « Prison. Ailleurs. Étoile de jour », Revue de Belles-Lettres, Lausa
1157 . Rougemont Denis de, « Prison. Ailleurs. Étoile de jour », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg,
1158 s de, « Prison. Ailleurs. Étoile de jour », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, mars 1929, p. 168
1159 Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, mars 1929, p. 168-170.
19 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Souvenirs d’enfance et de jeunesse, par Philippe Godet (avril 1929)
1160 Souvenirs d’ enfance et de jeunesse, par Philippe Godet (avril 1929)aa Quand ave
1161 Souvenirs d’enfance et de jeunesse, par Philippe Godet (avril 1929)aa Quand avec un air fin
1162 enfance et de jeunesse, par Philippe Godet (avril 1929 )aa Quand avec un air fin mais un ton convaincu l’on a répété dans
1163 peut se permettre quelques malices, quelques jeux d’ esprit ou de méchanceté, assuré que l’on est désormais d’être absous a
1164 ettre quelques malices, quelques jeux d’esprit ou de méchanceté, assuré que l’on est désormais d’être absous avec le souri
1165 t ou de méchanceté, assuré que l’on est désormais d’ être absous avec le sourire par la clientèle des librairies romandes,
1166 par la clientèle des librairies romandes, en mal de cadeaux de Noël ou de première communion. Parmi les compatriotes d’Am
1167 entèle des librairies romandes, en mal de cadeaux de Noël ou de première communion. Parmi les compatriotes d’Amiel, Godet
1168 librairies romandes, en mal de cadeaux de Noël ou de première communion. Parmi les compatriotes d’Amiel, Godet restera l’u
1169 ou de première communion. Parmi les compatriotes d’ Amiel, Godet restera l’un des rares qui ont réussi à se connaître et q
1170 rai, s’y prêtait, peu complexe et comme réduite à deux dimensions ; la conscience ne pouvait y tuer un lyrisme quasi inexist
1171 ue fort alerte. Jugez-en à la façon dont il parle de « ses quelques succès, si disproportionnés avec son mérite ». Il ajou
1172 vec son mérite ». Il ajoute : « j’ai eu la chance de discerner très jeune, avec une clairvoyance singulière, mes propres l
1173 lière, mes propres limites, et j’ai eu la sagesse de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de l’économie bourgeoise qu
1174 esse de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de l’économie bourgeoise que cette administration exacte d’un petit capi
1175 onomie bourgeoise que cette administration exacte d’ un petit capital. Le contraire de la poésie, bien sûr. Mais on n’en de
1176 istration exacte d’un petit capital. Le contraire de la poésie, bien sûr. Mais on n’en demande pas tant dans les familles.
1177 souvent à ces récits : ce n’est point un paysage d’ âme qu’on y cherche, mais l’anecdote bien tournée, des noms connus. To
1178 ailleurs est élégant. Mais comme tout cela manque de chair. Et de rêve. Est-ce qu’en ce temps-là on ne se nourrissait vrai
1179 élégant. Mais comme tout cela manque de chair. Et de rêve. Est-ce qu’en ce temps-là on ne se nourrissait vraiment que de p
1180 ’en ce temps-là on ne se nourrissait vraiment que de petits mots d’esprit et de malices ? Noisettes et cornichons ? aa.
1181 on ne se nourrissait vraiment que de petits mots d’ esprit et de malices ? Noisettes et cornichons ? aa. Rougemont Deni
1182 urrissait vraiment que de petits mots d’esprit et de malices ? Noisettes et cornichons ? aa. Rougemont Denis de, « [Com
1183 Noisettes et cornichons ? aa. Rougemont Denis de , « [Compte rendu] Philippe Godet, Souvenirs d’enfance et de jeunesse
1184 is de, « [Compte rendu] Philippe Godet, Souvenirs d’ enfance et de jeunesse  », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel
1185 pte rendu] Philippe Godet, Souvenirs d’enfance et de jeunesse  », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribo
1186 det, Souvenirs d’enfance et de jeunesse  », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, avril 1929, p. 19
1187 ettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, avril 1929, p. 199.
20 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). L’ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)
1188 e social. Le Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929 )ab L’ordre social Il y avait une fois un jeune homme comme le
1189 Soudain il lui pousse des ailes, une grande paire d’ ailes. Allait-on s’émerveiller ? Mais déjà Freud expliquait le monstre
1190 le dénonçaient, et les précieuses trouvaient cela d’ un romantisme ! ma chère, d’un mauvais goût ! Cependant le jeune homme
1191 euses trouvaient cela d’un romantisme ! ma chère, d’ un mauvais goût ! Cependant le jeune homme agitait ses ailes non sans
1192 iles non sans une ingénue fierté. Mais au courant d’ air s’enrhuma le grand-papa. On craignit de le perdre. — « Eh ! quoi,
1193 ourant d’air s’enrhuma le grand-papa. On craignit de le perdre. — « Eh ! quoi, — vinrent lui dire ses amis, — l’orgueil t’
1194 inconsolables, ô sans cœur, ô pervers, ô disciple de Nietzsche ! » — Sous le poids de cette accusation, comment ne point c
1195 vers, ô disciple de Nietzsche ! » — Sous le poids de cette accusation, comment ne point céder : il fit couper ses ailes. O
1196 t céder : il fit couper ses ailes. On le félicita de son retour à l’état normal, qui est pédestre. Mais à partir de ce jou
1197 Dieu, dans sa pitié, leur envoya un ange porteur d’ une solution fort simple qui d’ailleurs était la bonne, car le grand R
1198 le grand Remède, c’est un Simple. Des hurlements de rage ne tardèrent point à s’élever de toutes parts. Les uns défendaie
1199 ie outragée, les autres disaient qu’il n’y a plus de morale, et ces jeunes gens ont une façon de trancher les questions qu
1200 plus de morale, et ces jeunes gens ont une façon de trancher les questions qui vous désarme. Craignant qu’on ne lui fît u
1201 nom d’une secte orientale. Aussitôt la discussion de reprendre, et l’on parla défense de l’Occident. L’ange s’enfuit par l
1202 dent. L’ange s’enfuit par l’un des nombreux trous de leurs raisonnements. L’inspiration Comme le poète terminait sa
1203 Comme le poète terminait sa théorie sur la nature de l’inspiration, un doute lui vint. Il alla au cinéma. On donnait un fi
1204 ïne, mais sans espoir. Il lui écrivit, en sortant de là, dans une crèmerie pleine de couples à la mode. Mais en écrivant i
1205 rivit, en sortant de là, dans une crèmerie pleine de couples à la mode. Mais en écrivant il pensait à une femme blonde ass
1206 Ayant demandé un timbre pour attirer l’attention de la femme blonde — sans résultat —, il écrivit une adresse réelle, et
1207 usable de la part d’un poète en état, sans doute, d’ inspiration. Je trouve dans une enveloppe qu’hier vous m’adressâtes un
1208 veloppe qu’hier vous m’adressâtes une déclaration d’ amour destinée à une femme blonde. Je suis noire. Mais je sais qui c’e
1209 tion est le nom qu’on donne en poésie à une suite de malentendus heureusement enchaînés. » Cette histoire, en effet, lui v
1210 ffet, lui valut une Muse. ab. Rougemont Denis de , « L’ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration », Revue de Belles-L
1211 re social. Le Libéralisme. L’inspiration », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, novembre 1929, p.
1212 res, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, novembre 1929, p. 25-27.
21 1930, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Les soirées du Brambilla-club (mai 1930)
1213 Les soirées du Brambilla-club (mai 1930 )ac Aux Albert Béguin en souvenir de l’ombrelle rouge de Versaille
1214 ub (mai 1930)ac Aux Albert Béguin en souvenir de l’ombrelle rouge de Versailles. Paris la nuit oublie parfois d’être
1215 Aux Albert Béguin en souvenir de l’ombrelle rouge de Versailles. Paris la nuit oublie parfois d’être spirituelle, devient
1216 ouge de Versailles. Paris la nuit oublie parfois d’ être spirituelle, devient tragique ou tout simplement germanique. L’Al
1217 Députés, je n’en veux pas démordre, et la Légion d’ honneur — je vous la laisse, la Légion d’honneur. Quand vous prenez un
1218 a Légion d’honneur — je vous la laisse, la Légion d’ honneur. Quand vous prenez un taxi passé onze heures, c’est double tar
1219 Légion d’honneur. Quand vous prenez un taxi passé onze heures, c’est double tarif, et pourquoi ? Regardez : à côté de vous,
1220  : à côté de vous, si vous êtes seul, un fantôme, d’ office, a pris place. On lie bien vite connaissance, pourvu qu’on sach
1221 bien vite connaissance, pourvu qu’on sache un peu d’ allemand, — et l’allemand littéraire y suffit. Pour moi, je ne me sens
1222 comme j’habite l’Odéon, c’est toujours le fantôme de l’Odéon qui m’accompagne et nous ne disons presque rien, nous savons
1223 l’autre qu’aux traductions ; le reste, les livres de M. Maurois par exemple, publiés par la Revue de Belles-Lettres …………1
1224 de M. Maurois par exemple, publiés par la Revue de Belles-Lettres …………18 La plupart des noctambules préfèrent d’aller à
1225 tres …………18 La plupart des noctambules préfèrent d’ aller à pied ; mais moi je me méfie ; se promener seul la nuit dans un
1226 ille étrangère, n’est-ce point la définition même de la luxure ? Quand je vais à pied, j’oublie en chemin les meilleures p
1227 ns une sentimentalité exquise, navrante. Il reste de s’asseoir à quelque terrasse de café pour y boire à petits coups une
1228 avrante. Il reste de s’asseoir à quelque terrasse de café pour y boire à petits coups une amertume acide et tiède comme l’
1229 acide et tiède comme l’adolescence, un désespoir de nuit d’été sous le tilleul où elle n’est pas venue… (C’est ici le lie
1230 t tiède comme l’adolescence, un désespoir de nuit d’ été sous le tilleul où elle n’est pas venue… (C’est ici le lieu de l’a
1231 lleul où elle n’est pas venue… (C’est ici le lieu de l’avouer : je ne saurais entretenir que mes rapports de politesse dis
1232 vouer : je ne saurais entretenir que mes rapports de politesse distante avec les personnes qui ont dit, ne fût-ce qu’une f
1233 e fût-ce qu’une fois en leur vie : « J’ai horreur de la sentimentalité ».) Nous voici donc en taxi, « nous deux le fantôme
1234 entimentalité ».) Nous voici donc en taxi, « nous deux le fantôme » comme on disait au village où je suis né, qui n’est pas
1235 pas ma patrie. Ce soir-là, le fantôme ayant envie de manger ferme a donné au chauffeur l’adresse d’un ogre. C’est tout prè
1236 ie de manger ferme a donné au chauffeur l’adresse d’ un ogre. C’est tout près parce que j’ai peur. En même temps c’est très
1237 rce que je me réjouis. La Maison des Ogres est au 53 rue de Rennes ; je ne vous le confie pas sans un secret tremblement.
1238 re. Déjà nous traversons la nuit rose et violette de Montparnasse. Là, l’insondable lubie d’un agent nous immobilise une m
1239 violette de Montparnasse. Là, l’insondable lubie d’ un agent nous immobilise une minute aux lisières odorantes d’une terra
1240 nous immobilise une minute aux lisières odorantes d’ une terrasse où nous voyons Charles-Albert Cingria, transfiguré par un
1241 en train de décrire à Blaise Cendrars, son voisin de table, l’arrivée des Mongols dans Paris et leurs établissements Place
1242 Mongols dans Paris et leurs établissements Place de la Concorde. Notre conteur est vêtu de la gloire d’un pourpoint « plu
1243 ents Place de la Concorde. Notre conteur est vêtu de la gloire d’un pourpoint « plus rouge que rouge ». On assure qu’il po
1244 la Concorde. Notre conteur est vêtu de la gloire d’ un pourpoint « plus rouge que rouge ». On assure qu’il possède encore
1245 l est « pittoresque », cas déplorable, s’agissant d’ un poète authentique. Le pittoresque. D’abord je crains que la notion
1246 que la notion n’en soit toute relative aux modes de « vie » bourgeois ; et puis la, comédie n’est pas mon fort, même la t
1247 u jaloux, le travail jusqu’à l’aube, la naissance d’ un visage dans ma mémoire (d’heure en heure ces yeux plus vivants…) De
1248 l’aube, la naissance d’un visage dans ma mémoire ( d’ heure en heure ces yeux plus vivants…) De là, je le suppose, une certa
1249 mémoire (d’heure en heure ces yeux plus vivants…) De là, je le suppose, une certaine misanthropie en germe : les êtres cha
1250 es êtres changent trop vite, je n’ai pas le temps de me laisser envoûter ou de les rendre esclaves, hors de quoi je ne sai
1251 e, je n’ai pas le temps de me laisser envoûter ou de les rendre esclaves, hors de quoi je ne sais pas de commerce humain q
1252 les rendre esclaves, hors de quoi je ne sais pas de commerce humain qui vaille la peine, qui vaille l’amour. Durant cette
1253 orsque l’homme, cédant à l’évidence des choses ou de l’esprit, comprend enfin qu’il est perdu, il découvre la liberté. (Je
1254 e à la boussole autant qu’au sens moral.) Le goût de se perdre est un des plus profonds mystères de notre condition, et je
1255 ût de se perdre est un des plus profonds mystères de notre condition, et je ne crois pas trop absurde d’y chercher l’origi
1256 notre condition, et je ne crois pas trop absurde d’ y chercher l’origine non seulement des passions amoureuses, mais de la
1257 igine non seulement des passions amoureuses, mais de la plupart des entreprises démesurées qu’enregistre l’Histoire, scien
1258 esurées qu’enregistre l’Histoire, science chargée d’ illustrer à ses propres yeux l’Humanité. En passant, relevons un soph
1259 à la mode, qui vient trébucher dans les méandres de notre chemin : « Il faut se perdre pour se retrouver », nous enseigne
1260 le croire M. Gide, — si pareil entre les griffes de son égoïsme à la souris qu’un chat subtil et ironique feint de lâcher
1261 e à la souris qu’un chat subtil et ironique feint de lâcher pour mieux croquer. Pourquoi ne pas se perdre sans arrière-pen
1262 urs les moins préméditées, c’est sans doute celui d’ être trouvé. J’ai toujours méprisé le geste de l’homme qui, le soir da
1263 lui d’être trouvé. J’ai toujours méprisé le geste de l’homme qui, le soir dans sa chambre d’hôtel, ferme sa porte à double
1264 le geste de l’homme qui, le soir dans sa chambre d’ hôtel, ferme sa porte à double tour. Ah ! qu’une nuit enfin, à la fave
1265 double tour. Ah ! qu’une nuit enfin, à la faveur de mon sommeil, on me vole à moi-même ! Que des êtres rêvés m’emportent 
1266 ient là où je ne sais pas que j’ai si grand désir d’ aller… Est-ce ici ? Je regarde autour de moi : des murs sans yeux domi
1267 se produire : des aboiements fous et une effusion de lumière basse, rougeoyante, campagnarde. ⁂ La sauce est au rôti ce qu
1268 Il arrive qu’on parle, en art culinaire, du style d’ un rôti, et en cuisine littéraire, de pensers mis à toutes sauces. Si
1269 re, du style d’un rôti, et en cuisine littéraire, de pensers mis à toutes sauces. Si M. Thibaudet connaissait l’hôte de cé
1270 toutes sauces. Si M. Thibaudet connaissait l’hôte de céans, il proposerait cette formule du plat idéal : Du Bos en sauce M
1271  : Du Bos en sauce Marthaler. Mais ne parlons pas de mangeaille : c’est tout de suite écœurant et prétentieux. Je suis de
1272 st tout de suite écœurant et prétentieux. Je suis de ceux qui mangent sans faire d’histoires. Je remarque simplement qu’on
1273 étentieux. Je suis de ceux qui mangent sans faire d’ histoires. Je remarque simplement qu’on n’est jamais mieux pour parler
1274 us vulgaires, libérant par là cette part gratuite de nous-mêmes qui se plaît à disserter de poésie pure. Edmond Jaloux pré
1275 t gratuite de nous-mêmes qui se plaît à disserter de poésie pure. Edmond Jaloux préside à cette agape dont il m’est imposs
1276 ux préside à cette agape dont il m’est impossible de nommer tous les officiants visibles ou virtuels, et cela pour différe
1277 e Miomandre n’est pas là. Il a téléphoné au début de l’après-midi qu’il commençait un roman. Son absence nous fera-t-elle
1278 puisqu’en ma voisine, je reconnais la Jeune fille de neige. On la sent prête à fondre de tendresse au premier regard. Mais
1279 a Jeune fille de neige. On la sent prête à fondre de tendresse au premier regard. Mais non, trop bien élevée, elle se ress
1280 le se ressaisit, pense à Genève, reprend aussitôt de la consistance, et dans son trouble apparaît toute parcourue d’adorab
1281 nce, et dans son trouble apparaît toute parcourue d’ adorables roseurs boréales. Hoffmann n’est pas là, mais bien Dollonne,
1282 . Enfin, Jean Cassou, représentant Mgr le marquis de Carabas, absent de Paris, est là. Si vous enlevez Georges Petit, égar
1283 u, représentant Mgr le marquis de Carabas, absent de Paris, est là. Si vous enlevez Georges Petit, égaré, en ayant soin d’
1284 vous enlevez Georges Petit, égaré, en ayant soin d’ ajouter ceux que j’oublie, vous obtiendrez le chiffre exact des partic
1285 culez l’âge du capitaine. Au dessert, chacun y va de son petit miracle. Jaloux et Dick conversent en danois. Quatre ancien
1286 tit miracle. Jaloux et Dick conversent en danois. Quatre anciens bellettriens célèbrent les rites du Sapin vert. À ce moment a
1287 t. À ce moment apparaît Charles Du Bos, en kimono de soie « capstan ». Il ouvre une de ces parenthèses dont il a le secret
1288 Bos, en kimono de soie « capstan ». Il ouvre une de ces parenthèses dont il a le secret, et dans laquelle la rédaction s’
1289 secret, et dans laquelle la rédaction s’empresse de faire rentrer la partie la plus incongrue de cette chronique. Enfin,
1290 esse de faire rentrer la partie la plus incongrue de cette chronique. Enfin, un Étranger raconte l’histoire suivante qui e
1291 e, et se mit à errer dans les campagnes, en quête de l’inspiration qui le fuyait. Il buvait, rêvait, dormait sous les trei
1292 a plusieurs semaines, au terme desquelles, épuisé de corps et d’âme, et n’ayant pas écrit une seule note, il se retrouva a
1293 semaines, au terme desquelles, épuisé de corps et d’ âme, et n’ayant pas écrit une seule note, il se retrouva aux portes de
1294 seule note, il se retrouva aux portes de Naples, d’ où il n’eut que la force de regagner son logis. Comme il allait y péné
1295 aux portes de Naples, d’où il n’eut que la force de regagner son logis. Comme il allait y pénétrer, il aperçut auprès du
1296 ter, sa plus belle œuvre, sur le thème des pleurs de la vieille, et mourut comme il l’achevait. ⁂ Partout où il y a de la
1297 mourut comme il l’achevait. ⁂ Partout où il y a de la musique, de l’Italie et une certaine qualité de désespoir, je retr
1298 l l’achevait. ⁂ Partout où il y a de la musique, de l’Italie et une certaine qualité de désespoir, je retrouve les contes
1299 e la musique, de l’Italie et une certaine qualité de désespoir, je retrouve les contes d’Hoffmann. Mais il s’agit de les v
1300 aine qualité de désespoir, je retrouve les contes d’ Hoffmann. Mais il s’agit de les vivre plutôt que d’en parler vous voye
1301 je retrouve les contes d’Hoffmann. Mais il s’agit de les vivre plutôt que d’en parler vous voyez bien que j’ai quitté cett
1302 ’Hoffmann. Mais il s’agit de les vivre plutôt que d’ en parler vous voyez bien que j’ai quitté cette table écroulée, dans l
1303 uillard qui cachait le front des palais, une nuit d’ hiver, je chantonnais la Barcarolle en descendant le Grand Canal, — c’
1304 s, comme tu les aimes — on n’a pas toujours envie de crâner. L’esplanade d’une petite ville de l’Allemagne du Sud, un soir
1305 on n’a pas toujours envie de crâner. L’esplanade d’ une petite ville de l’Allemagne du Sud, un soir de mai. Il y a dans le
1306 s envie de crâner. L’esplanade d’une petite ville de l’Allemagne du Sud, un soir de mai. Il y a dans les marronniers noirs
1307 d’une petite ville de l’Allemagne du Sud, un soir de mai. Il y a dans les marronniers noirs des lampions et des touffes de
1308 les marronniers noirs des lampions et des touffes de gamins qui regardent avec la bouche ce qui se passe à l’intérieur d’u
1309 dent avec la bouche ce qui se passe à l’intérieur d’ une enceinte de toiles tendues au-devant d’un petit théâtre. La rampe
1310 uche ce qui se passe à l’intérieur d’une enceinte de toiles tendues au-devant d’un petit théâtre. La rampe est d’un bleu s
1311 érieur d’une enceinte de toiles tendues au-devant d’ un petit théâtre. La rampe est d’un bleu stellaire, un bleu d’Aldébara
1312 endues au-devant d’un petit théâtre. La rampe est d’ un bleu stellaire, un bleu d’Aldébaran. On joue Rose de Tannenbourg, d
1313 héâtre. La rampe est d’un bleu stellaire, un bleu d’ Aldébaran. On joue Rose de Tannenbourg, drame en 15 tableaux, un prolo
1314 ’Aldébaran. On joue Rose de Tannenbourg, drame en 15 tableaux, un prologue et une conclusion. Le carton des armures sonne
1315 arton des armures sonne sourdement sous les coups d’ un Kühnrich à la basse rugissante, plus traître que nature avec sa lar
1316 e avec sa large face mangée par une barbe en crin de cheval du diable. L’héroïne est belle comme une ballade de Bürger, ta
1317 du diable. L’héroïne est belle comme une ballade de Bürger, tandis qu’elle arrose de ses larmes le seuil de la prison pat
1318 omme une ballade de Bürger, tandis qu’elle arrose de ses larmes le seuil de la prison paternelle, tout en coulant un clin
1319 ger, tandis qu’elle arrose de ses larmes le seuil de la prison paternelle, tout en coulant un clin d’œil assassin vers le
1320 ant un clin d’œil assassin vers le parterre agité de passions contradictoires. Durant les entractes, une fanfare de paysan
1321 ontradictoires. Durant les entractes, une fanfare de paysans bleu de roi joue sur un rythme impeccable, avec toujours les
1322 Durant les entractes, une fanfare de paysans bleu de roi joue sur un rythme impeccable, avec toujours les mêmes notes fêlé
1323 es fêlées et l’accompagnement dans les feuillages de voix fausses mais aériennes, des chansons populaires qui sont ce que
1324 nuit est chaude sur les collines. Un grand verre de bière à l’auberge déserte, ma pipe et mon chien qui bougonne. La peti
1325 défendues par des rosiers sauvages. Laquelle des trois filles est donc la plus jolie ? Sans doute celle qui dort dans la man
1326 dans la mansarde, et qui n’a pas peur… ⁂ Le reste de la vie, c’est toujours entre deux voyages d’Allemagne. Cela se passe
1327 peur… ⁂ Le reste de la vie, c’est toujours entre deux voyages d’Allemagne. Cela se passe actuellement dans un hôtel tragi-c
1328 este de la vie, c’est toujours entre deux voyages d’ Allemagne. Cela se passe actuellement dans un hôtel tragi-comique en c
1329 passe actuellement dans un hôtel tragi-comique en cinq étages et un prologue ou vestibule, plein de bruits de lavabos et de
1330 en cinq étages et un prologue ou vestibule, plein de bruits de lavabos et de coups de cloche débile au corridor, — à Paris
1331 ages et un prologue ou vestibule, plein de bruits de lavabos et de coups de cloche débile au corridor, — à Paris. Bientôt…
1332 logue ou vestibule, plein de bruits de lavabos et de coups de cloche débile au corridor, — à Paris. Bientôt… Mais il est
1333 vestibule, plein de bruits de lavabos et de coups de cloche débile au corridor, — à Paris. Bientôt… Mais il est temps de
1334 corridor, — à Paris. Bientôt… Mais il est temps de mettre à ces fariboles un terme19. J’ai du solide à équarrir. Et aupa
1335 an (xvie siècle) à certains moments.   Paris, le 28 avril. 18. ……………… (N. de la R.) 19. L’auteur nous promet pour le n
1336 ècle) à certains moments.   Paris, le 28 avril. 18. ……………… (N. de la R.) 19. L’auteur nous promet pour le numéro 6 de no
1337   Paris, le 28 avril. 18. ……………… (N. de la R.) 19. L’auteur nous promet pour le numéro 6 de nouveaux détails apocryphes.
1338 e la R.) 19. L’auteur nous promet pour le numéro 6 de nouveaux détails apocryphes. (N. de la R.) ac. Rougemont Denis
1339 la R.) 19. L’auteur nous promet pour le numéro 6 de nouveaux détails apocryphes. (N. de la R.) ac. Rougemont Denis de,
1340 apocryphes. (N. de la R.) ac. Rougemont Denis de , « Les soirées du Brambilla-club », Revue de Belles-Lettres, Lausanne
1341 enis de, « Les soirées du Brambilla-club », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, mai 1930, p. 160-
1342 -Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, mai 1930, p. 160-168.
22 1930, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Le Grand Testament de Villon, illustré par Marcel North (juin 1930)
1343 Le Grand Testament de Villon, illustré par Marcel North (juin 1930)ad Marcel North a tro
1344 tament de Villon, illustré par Marcel North (juin 1930 )ad Marcel North a trouvé un style qui ne ressemble qu’à sa fantais
1345 qui ne ressemble qu’à sa fantaisie : la précision de son trait cerne une poésie ingénue, à la fois drue et délicate comme
1346 aiment « naïf ». La fleur qui croît en plein cœur de celui qui est mort d’amour, une âme qui s’envole par la bouche, des f
1347 eur qui croît en plein cœur de celui qui est mort d’ amour, une âme qui s’envole par la bouche, des formes aériennes qui vo
1348 si naturelle qu’on ne peut s’y tromper : la grâce de l’enfance anime encore cette imagination, guide encore cette main déj
1349 e. Ce que j’aime ici, c’est un ravissant concours d’ ingénuité et d’observation ironique, et cette netteté que les primitif
1350 e ici, c’est un ravissant concours d’ingénuité et d’ observation ironique, et cette netteté que les primitifs savent allier
1351 ns ces compositions parmi les allégories barbares d’ un ciel bon enfant, et dans ce truculent petit monde, Marcel North et
1352 larrons en foire. Certes, l’amertume douloureuse de Villon se mue souvent dans la traduction de North en acidité légère d
1353 reuse de Villon se mue souvent dans la traduction de North en acidité légère de fruit vert, mais on n’ose reprocher à ces
1354 ent dans la traduction de North en acidité légère de fruit vert, mais on n’ose reprocher à ces images ce qu’elles ont d’un
1355 s on n’ose reprocher à ces images ce qu’elles ont d’ un peu grêle : leur jeunesse… Et si la composition s’amuse parfois à b
1356  à côté de parfaites réussites — , voici, partout d’ adorables inventions de détails qui se cachent dans les coins, bonshom
1357 ussites — , voici, partout d’adorables inventions de détails qui se cachent dans les coins, bonshommes, fleurettes drôles,
1358 t ce violoneux qui tire son archet sur des rayons de soleil… Bravo, Marcel, v’là le printemps ! ad. Rougemont Denis de,
1359 arcel, v’là le printemps ! ad. Rougemont Denis de , «  Le Grand Testament de Villon, illustré par Marcel North », Revue
1360 ad. Rougemont Denis de, «  Le Grand Testament de Villon, illustré par Marcel North », Revue de Belles-Lettres, Lausann
1361 ent de Villon, illustré par Marcel North », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, juin 1930, p. 204
1362 Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, juin 1930, p. 204-205.
23 1932, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). La pluie et le beau temps (Dialogue dans une tête) (1932)
1363 pluie et le beau temps (Dialogue dans une tête) ( 1932 )ae af Lord Artur. — Vous êtes terriblement jolie aujourd’hui, Ma
1364 mes soient coquettes à les faire doucement frémir de rage ; ils aiment s’obstiner et c’est pourquoi nous aimons leur échap
1365 tes bien injuste avec moi quand vous me reprochez d’ être méchante : je suis à peine coquette, et vous savez que c’est un p
1366 sont pas pour les oreilles, mais pour les lèvres de ceux qui vous aiment. Car elles sont insensées, mais comme des baiser
1367 ent à peu près à ceci : Êtes-vous un être capable d’ aimer, ou seulement une apparence adorable ? Et voici cette question :
1368 éférez l’un à l’autre ? Sonnette. — Petite leçon de météorologie sentimentale. Comme vous êtes un profond pédant, dans ci
1369 imentale. Comme vous êtes un profond pédant, dans cinq minutes je ne saurai plus même voir s’il fait beau ou s’il fait vilai
1370 vous admettez que « beau » temps est le contraire de « mauvais » temps, et vous n’avez jamais cherché ce que doit être le
1371 de la souffrance, et même qu’il est le contraire de la souffrance. C’est pourquoi vos rêves composent toujours le même pa
1372 quoi vos rêves composent toujours le même paysage de carte postale en couleurs, idéal inévitable de ceux qui n’ont pas de
1373 ge de carte postale en couleurs, idéal inévitable de ceux qui n’ont pas de point de vue sur le beau temps. Écoutez-moi bie
1374 couleurs, idéal inévitable de ceux qui n’ont pas de point de vue sur le beau temps. Écoutez-moi bien, Sonnette : Vos acti
1375 te : Vos actions et vos pensées, votre conception de l’amour se réfèrent en vérité à une carte postale en couleurs. Et non
1376 (Un silence.)   Sans doute, Sonnette, portez-vous de ces courtes bottes vernies, quand il pleut ? Sonnette. — Quand j’éta
1377 s jambes nues sous la pluie. L’herbe était pleine de sales limaces et de petits escargots, et les framboises humides avaie
1378 a pluie. L’herbe était pleine de sales limaces et de petits escargots, et les framboises humides avaient un délicieux goût
1379 t un délicieux goût fade. Je rentrais toute fière de mes genoux griffés comme ceux des garçons, et le soir quand on me fai
1380 ens sont toujours religieux, alors que les femmes de ce temps sont seulement sournoises. Sonnette. — Lord Artur, vous m’a
1381 re jaloux ce soir. Quand vous cédez à votre manie de remuer des métaphysiques à propos de petits riens, c’est toujours par
1382 Je regrette profondément que vous n’ayez pas plus de sens qu’un oiseau. Sonnette, si vous étiez païenne ou si vous étiez c
1383 votre « bonheur » rien de plus que l’un des noms de sa présence. Mais un jour la lumière est morte autour de nous, elle e
1384 e à la surface des choses pour renaître au centre de l’homme. Et, dès lors, de tous les événements qui paraissent autour d
1385 pour renaître au centre de l’homme. Et, dès lors, de tous les événements qui paraissent autour de nous, aucun n’importe, s
1386 lui qui dans le même temps se passe à l’intérieur d’ un être. Ainsi tout est changé, mais peu le savent. Peu savent le chem
1387 e chemin qui va du signe à l’être. Longues pluies de printemps sur la campagne recueillie, tempêtes sur les pentes, — beau
1388 recueillie, tempêtes sur les pentes, — beau temps de la présence. Car tu sais pour quel « bien » désiré tu les aimes ; mai
1389 » désiré tu les aimes ; mais tu sais qu’au soleil de l’aube aussi d’autres fois tu l’as possédé. Tu comprends maintenant q
1390 se situe leur lieu, établis en ce lieu la demeure de tes pensées. Ainsi, nous dit la Fable, fit Myscille, habitant d’Argo
1391 Ainsi, nous dit la Fable, fit Myscille, habitant d’ Argos. N’ayant pu débrouiller le sens de l’Oracle qui lui avait dit d’
1392 habitant d’Argos. N’ayant pu débrouiller le sens de l’Oracle qui lui avait dit d’aller bâtir une ville là où il trouverai
1393 débrouiller le sens de l’Oracle qui lui avait dit d’ aller bâtir une ville là où il trouverait la pluie et le beau temps, i
1394 isane qui pleurait ; et en ce lieu bâtit la ville de Crotone. Sonnette. — J’aime vos histoires, Lord Artur. (Un temps.)
1395 i me réchauffe. Parce qu’elle se tient là « vêtue de son péché », — comme une courtisane. Mais vous n’êtes qu’une petite f
1396 isane. Mais vous n’êtes qu’une petite fille.20 20. [Note à l’achevé d’imprimé :] « Relativement à « La pluie et le beau
1397 es qu’une petite fille.20 20. [Note à l’achevé d’ imprimé :] « Relativement à « La pluie et le beau temps » de Salomon d
1398 :] « Relativement à « La pluie et le beau temps » de Salomon de Crac, tous droits demeurent réservés par Denis de Rougemon
1399 urent réservés par Denis de Rougemont, à la suite d’ une entente formelle avec les héritiers du baron de Crac, représentés
1400 hausen, au bar des Vikings (Paris), fin septembre 1931.  » ae. Rougemont Denis de, « La pluie et le beau temps (Dialogue dan
1401 ris), fin septembre 1931. » ae. Rougemont Denis de , « La pluie et le beau temps (Dialogue dans une tête) », Revue de Bel
1402 t le beau temps (Dialogue dans une tête) », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, 1932, p. 56-59.
1403 lles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, 1932, p. 56-59. af. Signé : Salomon de Crac.
24 1933, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Petites notes sur les vérités éternelles (1932-1933)
1404 Petites notes sur les vérités éternelles ( 1932-1933 )ag La lecture du bel article de M. Arnold Reymond, paru dans votre
1405 nelles (1932-1933)ag La lecture du bel article de M. Arnold Reymond, paru dans votre n° 1, me met la plume à la main. V
1406 article de M. Arnold Reymond, paru dans votre n°  1, me met la plume à la main. Voici quelques notes rapidement rédigées d
1407 M. Reymond, je le crois, ne m’en voudra pas trop de leur vivacité : il connaît bien les Neuchâtelois, qui l’ont beaucoup
1408 beaucoup aimé ; il sait que ces Neuchâtelois sont d’ infatigables ergoteurs. Pour la commodité du lecteur, je recopie les p
1409 ls s’attachent mes gloses. Je m’excuse par avance de l’avantage que je m’accorde en détachant ainsi des phrases du context
1410 s si j’adoptais une autre méthode, les dimensions de la Revue n’y suffiraient plus — ni la patience du lecteur à mon endro
1411 patience du lecteur à mon endroit, je le crains… 1. S’il n’y a pas de vérité absolue, en ce sens que tout jugement tenu p
1412 ur à mon endroit, je le crains… 1. S’il n’y a pas de vérité absolue, en ce sens que tout jugement tenu pour vrai peut être
1413 rai peut être modifié ou complété, les conditions de la vérité sont, elles, immuables et éternelles… (p. 12). Les conditi
1414 immuables et éternelles… (p. 12). Les conditions de la vérité sont donc éternelles (p. 13). Les philosophes, de tout temp
1415 té sont donc éternelles (p. 13). Les philosophes, de tout temps, ont montré du goût pour une certaine continuité, une cert
1416 ies. La critique postkantienne ayant fait justice de certaines prétentions, survivantes chez certains penseurs, à connaîtr
1417 , survivantes chez certains penseurs, à connaître d’ une vérité absolue, on put se demander si la philosophie n’allait pas
1418 la « discipline » ? Et d’ailleurs, une démission de la philosophie eût impliqué, au concret, la démission réelle de tous
1419 hie eût impliqué, au concret, la démission réelle de tous les professeurs de philosophie, à quoi personne ne peut songer s
1420 cret, la démission réelle de tous les professeurs de philosophie, à quoi personne ne peut songer sérieusement. On trouva d
1421 ils ne tardèrent pas à trouver dans la forme même de l’esprit créateur de systèmes. Depuis lors on nous parle du créé et d
1422 à trouver dans la forme même de l’esprit créateur de systèmes. Depuis lors on nous parle du créé et du créant. Mais nous v
1423 nous importe les « conditions » purement logiques d’ une vérité, qui, à nos yeux, demeure constamment jugée par une réalité
1424 a logique même. Ce sont les conditions actuelles de la vérité qui nous posent un problème, et non pas ses conditions « ét
1425 pensons pas qu’il y ait lieu pour un philosophe, d’ être rassuré par la découverte de telles conditions. Elles constituero
1426 r un philosophe, d’être rassuré par la découverte de telles conditions. Elles constitueront peut-être la dogmatique laïque
1427 lles constitueront peut-être la dogmatique laïque de la philosophie des sciences, durant quelques années encore. Mais ce n
1428 e. Mais ce n’est pas, comme certains le répètent, d’ une dogmatique que nous avons besoin. Ce n’est pas d’une systématique,
1429 ne dogmatique que nous avons besoin. Ce n’est pas d’ une systématique, d’ailleurs déduite a posteriori. Ce n’est pas d’une
1430 ue, d’ailleurs déduite a posteriori. Ce n’est pas d’ une méthode de correction, ou d’assurances contre les paradoxes de l’e
1431 déduite a posteriori. Ce n’est pas d’une méthode de correction, ou d’assurances contre les paradoxes de l’existence. Ce q
1432 ori. Ce n’est pas d’une méthode de correction, ou d’ assurances contre les paradoxes de l’existence. Ce que nous demandons
1433 correction, ou d’assurances contre les paradoxes de l’existence. Ce que nous demandons à la philosophie, c’est de mettre
1434 ce. Ce que nous demandons à la philosophie, c’est de mettre en forme une problématique réelle, existentielle, la problémat
1435 lématique réelle, existentielle, la problématique de la vie de l’homme en 1933, assumée dans ses aspects les plus scandale
1436 réelle, existentielle, la problématique de la vie de l’homme en 1933, assumée dans ses aspects les plus scandaleux, les pl
1437 ntielle, la problématique de la vie de l’homme en 1933, assumée dans ses aspects les plus scandaleux, les plus quotidiens, le
1438 ux principe du tiers exclu est nié par l’angoisse de tout homme qui tente d’assumer son moi contradictoire pour le mettre
1439 lu est nié par l’angoisse de tout homme qui tente d’ assumer son moi contradictoire pour le mettre aux ordres de la foi. C’
1440 son moi contradictoire pour le mettre aux ordres de la foi. C’est une colle de scolastiques ; elle alimentera quelque tem
1441 r le mettre aux ordres de la foi. C’est une colle de scolastiques ; elle alimentera quelque temps encore les jeux de socié
1442 s ; elle alimentera quelque temps encore les jeux de société des congrès de mathématiciens et de logisticiens ; et pendant
1443 lque temps encore les jeux de société des congrès de mathématiciens et de logisticiens ; et pendant ce temps, c’est à la t
1444 jeux de société des congrès de mathématiciens et de logisticiens ; et pendant ce temps, c’est à la théologie que nous iro
1445 mps, c’est à la théologie que nous irons demander de la pensée, c’est-à-dire de la pensée créatrice, c’est-à-dire de la pe
1446 ue nous irons demander de la pensée, c’est-à-dire de la pensée créatrice, c’est-à-dire de la pensée obéissante : car il n’
1447 c’est-à-dire de la pensée créatrice, c’est-à-dire de la pensée obéissante : car il n’est d’action véritable que celle de l
1448 est-à-dire de la pensée obéissante : car il n’est d’ action véritable que celle de la foi, lorsque « mettant les pouces »,
1449 sante : car il n’est d’action véritable que celle de la foi, lorsque « mettant les pouces », je me rends à son ordre. 2. O
1450 « mettant les pouces », je me rends à son ordre. 2. On comprend dès lors l’attrait que le thomisme a exercé à un moment d
1451 st-elle suffisamment expliquée par l’insuffisance de la pensée ancienne ? Les historiens le croient volontiers. Mais on ne
1452 Mais on ne saurait dire qu’ils témoignent par là de beaucoup de respect pour la vérité créatrice. Non, notre adhésion à B
1453 ce. Non, notre adhésion à Barth n’est pas le fait de la mauvaise humeur et de la mauvaise conscience que fomentèrent en no
1454 Barth n’est pas le fait de la mauvaise humeur et de la mauvaise conscience que fomentèrent en nous les démissions systéma
1455 fomentèrent en nous les démissions systématiques de l’historicisme et du psychologisme. Le secret de notre adhésion à Bar
1456 de l’historicisme et du psychologisme. Le secret de notre adhésion à Barth est dans la pensée de Barth elle-même, et non
1457 cret de notre adhésion à Barth est dans la pensée de Barth elle-même, et non pas dans je ne sais quelle « réaction ». Et c
1458 Barth, croyons-nous, n’a jamais proposé ni prôné de dogmes « si possible immuables » (p. 14). On pourrait dire qu’il fait
1459 le contraire. Il nous ramène sans cesse à l’état de pauvreté (pauvreté en esprit, absence de toute assurance extérieure,
1460 à l’état de pauvreté (pauvreté en esprit, absence de toute assurance extérieure, dénuement, vision absolument sobre et dés
1461 uement, vision absolument sobre et désillusionnée de la condition humaine) qui est l’état dans lequel la vérité ne peut op
1462 istence que par un choix, une décision, — un acte d’ obéissance à l’ordre « tombé du ciel ». Comment parler de la « restaur
1463 sance à l’ordre « tombé du ciel ». Comment parler de la « restauration intégrale d’une dogmatique appartenant aux siècles
1464  ». Comment parler de la « restauration intégrale d’ une dogmatique appartenant aux siècles passés » (p. 14), à propos d’un
1465 s les « formules », en même temps que la critique de ces rites et de ces formules, toutes les idolâtries, que ce soit la c
1466  », en même temps que la critique de ces rites et de ces formules, toutes les idolâtries, que ce soit la croyance antique
1467 moderne et non moins païenne à la valeur absolue de la logique, de l’histoire et des méthodes critiques de M. Goguel ? 3.
1468 moins païenne à la valeur absolue de la logique, de l’histoire et des méthodes critiques de M. Goguel ? 3. Si notre civil
1469 logique, de l’histoire et des méthodes critiques de M. Goguel ? 3. Si notre civilisation chrétienne n’est pas détruite pa
1470 histoire et des méthodes critiques de M. Goguel ? 3. Si notre civilisation chrétienne n’est pas détruite par le bolchévism
1471 en approfondissant et en élargissant son horizon de pensée. Peut-on dire que notre civilisation soit chrétienne ? Peut-o
1472 Peut-on dire que pour le chrétien la perspective d’ un nouveau progrès, d’une « marche en avant » de la civilisation capit
1473 le chrétien la perspective d’un nouveau progrès, d’ une « marche en avant » de la civilisation capitaliste-bourgeoise-nati
1474 e d’un nouveau progrès, d’une « marche en avant » de la civilisation capitaliste-bourgeoise-nationaliste fournisse une rai
1475 iste-bourgeoise-nationaliste fournisse une raison de se montrer optimiste ? Devant des mots comme « approfondissement » ou
1476 comme « approfondissement » ou « élargissement » de notre horizon de pensée, nous demandons passionnément et lourdement c
1477 dissement » ou « élargissement » de notre horizon de pensée, nous demandons passionnément et lourdement ce que cela peut b
1478 cret. Ce que cela veut dire. C’est une des leçons de la guerre. Notre refus est instinctif devant un avenir, un espoir, un
1479 inis. Car là où la pensée n’a rien osé distinguer de précis, c’est là que l’action des hommes devient folle et meurtrière.
1480 l’action des hommes devient folle et meurtrière. 4. Il me semble que la tâche de la théologie protestante à l’heure actue
1481 folle et meurtrière. 4. Il me semble que la tâche de la théologie protestante à l’heure actuelle est de dégager, dans un e
1482 e la théologie protestante à l’heure actuelle est de dégager, dans un esprit de libre recherche et de respect pour le pass
1483 à l’heure actuelle est de dégager, dans un esprit de libre recherche et de respect pour le passé, les invariants chrétiens
1484 de dégager, dans un esprit de libre recherche et de respect pour le passé, les invariants chrétiens tels que le développe
1485 es invariants chrétiens tels que le développement de la pensée moderne nous aide en toute loyauté à les affirmer (p. 16).
1486 6). Pourquoi ai-je envie, dans une telle phrase, de remplacer « libre recherche » par « obéissance », — « respect pour le
1487 ct pour les données présentes » — « développement de la pensée moderne » par « approfondissement de la pensée paulinienne,
1488 nt de la pensée moderne » par « approfondissement de la pensée paulinienne, calvinienne, luthérienne, kierkegaardienne, di
1489 s pourraient bien apparaître comme les constantes de déformation de l’Évangile au contact des humains. Et puis, que ferion
1490 en apparaître comme les constantes de déformation de l’Évangile au contact des humains. Et puis, que ferions-nous en atten
1491 rriverait-il si le résultat en était par exemple, de démontrer que tel « invariant chrétien » est toute autre chose que l’
1492 faut poser si l’on veut réellement se tirer hors d’ une confusion sans précédent — d’une confusion dont le profit ne sera
1493 nt se tirer hors d’une confusion sans précédent — d’ une confusion dont le profit ne sera jamais pour la foi. Car l’opérati
1494 rofit ne sera jamais pour la foi. Car l’opération de la foi ne relève pas d’un « invariant », connu ou inconnu, passé ou à
1495 r la foi. Car l’opération de la foi ne relève pas d’ un « invariant », connu ou inconnu, passé ou à venir, mais bien d’un o
1496  », connu ou inconnu, passé ou à venir, mais bien d’ un ordre, reçu hic et nunc, et d’une présence, qui juge tout. ag. R
1497 venir, mais bien d’un ordre, reçu hic et nunc, et d’ une présence, qui juge tout. ag. Rougemont Denis de, « Petites note
1498 e présence, qui juge tout. ag. Rougemont Denis de , « Petites notes sur les vérités éternelles », Revue de Belles-Lettre
1499 Petites notes sur les vérités éternelles », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, 1932–1933, p. 55-
1500 lles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, 1932 –1933, p. 55-59.
1501 Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, 1932– 1933, p. 55-59.
25 1935, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). René Guisan : un clerc (1935)
1502 René Guisan : un clerc ( 1935 )ah ai Un clerc, un vrai clerc. Non pas cet être détaché, déraciné,
1503 n vrai clerc. Non pas cet être détaché, déraciné, de pure raison, que l’auteur d’un pamphlet fameux voulait nous donner po
1504 e détaché, déraciné, de pure raison, que l’auteur d’ un pamphlet fameux voulait nous donner pour modèle du clerc qui ne tra
1505 i ne trahit pas. Mais une figure presque parfaite d’ intellectuel en action, d’homme qui pense ce qu’il fait, qui fait ce q
1506 figure presque parfaite d’intellectuel en action, d’ homme qui pense ce qu’il fait, qui fait ce qu’il pense. Nous manquons
1507 i fait ce qu’il pense. Nous manquons terriblement de tels hommes, en Suisse romande. Nous manquons terriblement de ce sens
1508 es, en Suisse romande. Nous manquons terriblement de ce sens de la culture qu’incarnait à mes yeux René Guisan, lorsque je
1509 se romande. Nous manquons terriblement de ce sens de la culture qu’incarnait à mes yeux René Guisan, lorsque je le voyais
1510 bibliothèque immense et qu’il me parlait avec feu d’ actions réelles dont il était l’âme et l’agent, non pas en « homme d’a
1511 ont il était l’âme et l’agent, non pas en « homme d’ action » — cette sotte espèce américaine — mais en homme de pensée agi
1512 » — cette sotte espèce américaine — mais en homme de pensée agissante. Nous méprisons trop facilement la culture au nom de
1513 ns doute parce que nous avons connu quelques rats de bibliothèque qui méprisaient trop facilement l’action au nom de la cu
1514 ien dès l’instant qu’on les sépare et qu’on cesse de les mettre en tension. Il n’est d’action créatrice que soumise à la l
1515 et qu’on cesse de les mettre en tension. Il n’est d’ action créatrice que soumise à la loi d’une pensée rigoureuse ; il n’e
1516 Il n’est d’action créatrice que soumise à la loi d’ une pensée rigoureuse ; il n’est de pensée saine qu’engagée dans une œ
1517 umise à la loi d’une pensée rigoureuse ; il n’est de pensée saine qu’engagée dans une œuvre efficace, au sein de contingen
1518 es évidences fondamentales et sans cesse oubliées de nos jours, je ne les ai vues vraiment vécues chez nous que par cet ho
1519 plus utilement critique si vous alliez lui parler d’ un projet, d’une œuvre en cours, des circonstances d’une humble vie. I
1520 t critique si vous alliez lui parler d’un projet, d’ une œuvre en cours, des circonstances d’une humble vie. Il faut décrir
1521 n projet, d’une œuvre en cours, des circonstances d’ une humble vie. Il faut décrire ces éléments de sa « personne » en ter
1522 es d’une humble vie. Il faut décrire ces éléments de sa « personne » en termes d’apparence paradoxale : le secret de son œ
1523 ne » en termes d’apparence paradoxale : le secret de son œuvre résidait sans doute dans l’union vibrante qu’il incarnait,
1524 sans doute dans l’union vibrante qu’il incarnait, de qualités qui ont coutume, ailleurs, de se gêner mutuellement. Son éru
1525 incarnait, de qualités qui ont coutume, ailleurs, de se gêner mutuellement. Son érudition magnifique ne se limitait pas au
1526 aux livres : elle embrassait aussi les incidents de la moindre paroisse « libriste » du canton de Vaud. Son sens aigu de
1527 nts de la moindre paroisse « libriste » du canton de Vaud. Son sens aigu de la qualité intellectuelle, sa rigueur critique
1528 sse « libriste » du canton de Vaud. Son sens aigu de la qualité intellectuelle, sa rigueur critique ne l’empêchaient nulle
1529 e, sa rigueur critique ne l’empêchaient nullement de se passionner pour les « problèmes » souvent si vagues qui peuplent u
1530 roblèmes » souvent si vagues qui peuplent une âme d’ unioniste romand. Vraiment, le souvenir d’une influence et d’une prése
1531 une âme d’unioniste romand. Vraiment, le souvenir d’ une influence et d’une présence aussi directes et essentielles doit no
1532 romand. Vraiment, le souvenir d’une influence et d’ une présence aussi directes et essentielles doit nous interdire désorm
1533 tes et essentielles doit nous interdire désormais de considérer que l’esprit est une faculté détachée, un refuge hors de l
1534 semble que c’est la leçon que nous devons prendre de sa vie : la leçon toute goethéenne du clerc qui sert sans rien trahir
1535 ute goethéenne du clerc qui sert sans rien trahir de la primauté de l’esprit. Peut-être que le seul chrétien peut comprend
1536 du clerc qui sert sans rien trahir de la primauté de l’esprit. Peut-être que le seul chrétien peut comprendre, existentiel
1537 comprendre, existentiellement, que cette exigence de service, cet abaissement de la pensée aux choses, cet acte de présenc
1538 t, que cette exigence de service, cet abaissement de la pensée aux choses, cet acte de présence au monde est l’achèvement
1539 cet abaissement de la pensée aux choses, cet acte de présence au monde est l’achèvement suprême, et non l’humiliation du s
1540 ’humiliation du spirituel. ah. Rougemont Denis de , « René Guisan : un clerc », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâ
1541 emont Denis de, « René Guisan : un clerc », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, 1935, p. 25-26.
1542 lles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, 1935, p. 25-26. ai. Ce double numéro, appartenant à la série annuelle 1932
1543 Ce double numéro, appartenant à la série annuelle 1932-1933, a de fait paru en 1935.
1544 éro, appartenant à la série annuelle 1932-1933, a de fait paru en 1935.
1545 à la série annuelle 1932-1933, a de fait paru en 1935.
26 1938, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Le Poète et le Vilain (novembre 1938)
1546 Le Poète et le Vilain (novembre 1938 )aj ak Le poète disait d’une belle voix d’amertume : — Nous n’avons
1547 le Vilain (novembre 1938)aj ak Le poète disait d’ une belle voix d’amertume : — Nous n’avons plus guère de mesures pour
1548 re 1938)aj ak Le poète disait d’une belle voix d’ amertume : — Nous n’avons plus guère de mesures pour les choses divine
1549 belle voix d’amertume : — Nous n’avons plus guère de mesures pour les choses divines et humaines, si nous savons peser d’i
1550 choses divines et humaines, si nous savons peser d’ invisibles rayons d’énergie. Nos codes ne prévoient pas que l’assassin
1551 umaines, si nous savons peser d’invisibles rayons d’ énergie. Nos codes ne prévoient pas que l’assassin d’un noble sera pun
1552 nergie. Nos codes ne prévoient pas que l’assassin d’ un noble sera puni plus sévèrement que n’eût été ce noble assassinant
1553 n serf. Même l’indulgence pour les riches a cessé d’ être bien certaine. Tout homme en vaut un autre, dit la loi ; et ce re
1554 a loi ; et ce respect vulgarisé touche au mépris. De là vient que le meurtrier tantôt est acquitté, tantôt décapité. Vous
1555 yez qu’on oscille du tout au rien, selon l’humeur d’ un jury d’ailleurs désigné par le sort. Il n’en fut pas toujours ainsi
1556 en fut pas toujours ainsi. Jusqu’au viiie siècle de notre ère, les bardes celtes étaient honorés chez les rois. Tenez, li
1557 ire le prix qu’on doit payer quand on le tue, est de 126 vaches ; et en cas d’insulte, on lui doit une indemnité de 6 vach
1558 le prix qu’on doit payer quand on le tue, est de 126 vaches ; et en cas d’insulte, on lui doit une indemnité de 6 vaches e
1559 er quand on le tue, est de 126 vaches ; et en cas d’ insulte, on lui doit une indemnité de 6 vaches et 20 pièces d’argent. 
1560  ; et en cas d’insulte, on lui doit une indemnité de 6 vaches et 20 pièces d’argent. » Ailleurs, on voit que si le barde a
1561 et en cas d’insulte, on lui doit une indemnité de 6 vaches et 20 pièces d’argent. » Ailleurs, on voit que si le barde adr
1562 insulte, on lui doit une indemnité de 6 vaches et 20 pièces d’argent. » Ailleurs, on voit que si le barde adresse une requ
1563 n lui doit une indemnité de 6 vaches et 20 pièces d’ argent. » Ailleurs, on voit que si le barde adresse une requête au roi
1564 lui chanter un poème. S’il s’adresse à un noble, trois poèmes. Si c’est à un vilain, il faut que le barde chante jusqu’à ce
1565 ureux ceux qui ont une grande faim, c’est à cause d’ eux qu’il y a de grandes œuvres. Car le vilain qui n’a rien à donner,
1566 nt une grande faim, c’est à cause d’eux qu’il y a de grandes œuvres. Car le vilain qui n’a rien à donner, c’est lui qui vo
1567 nera la joie du chant, plus précieuse que l’objet de vos requêtes au roi. — Oui, dit le poète, mais sans nobles, sans rois
1568 t-il y avoir des vilains ? aj. Rougemont Denis de , « Le Poète et le Vilain », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchât
1569 gemont Denis de, « Le Poète et le Vilain », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, novembre 1938, p.
1570 res, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, novembre 1938, p. 2. ak. Une note introductive précise : « Nous avons le plaisir de
1571 te introductive précise : « Nous avons le plaisir de publier en tête de ce numéro une page inédite de Denis de Rougemont,
1572 cise : « Nous avons le plaisir de publier en tête de ce numéro une page inédite de Denis de Rougemont, qu’il a bien voulu
1573 de publier en tête de ce numéro une page inédite de Denis de Rougemont, qu’il a bien voulu extraire pour nous d’un ouvrag
1574 Rougemont, qu’il a bien voulu extraire pour nous d’ un ouvrage qu’il prépare et qu’il intitulera Doctrine fabuleuse . »
27 1968, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Hölderlin dans le souvenir des noms splendides (1968)
1575 Hölderlin dans le souvenir des noms splendides ( 1968 )al Qu’est-ce qui persiste du poème qu’un jour ou l’autre nuit nous
1576 oublié ? Un « ton fondamental » ? Des mouvements de mots ? ou seulement un désir différent de tout autre désir auparavant
1577 vements de mots ? ou seulement un désir différent de tout autre désir auparavant connu de le revivre, ce poème, de le reli
1578 ir différent de tout autre désir auparavant connu de le revivre, ce poème, de le relire en sa mémoire, de le recomposer co
1579 e désir auparavant connu de le revivre, ce poème, de le relire en sa mémoire, de le recomposer contre l’oubli comme son au
1580 le revivre, ce poème, de le relire en sa mémoire, de le recomposer contre l’oubli comme son auteur l’avait écrit contre l’
1581 ui émeut quand plus rien n’est là ? Je ne gardais de Hölderlin que des souvenirs d’élans ou d’amples chutes, de rythmes br
1582 là ? Je ne gardais de Hölderlin que des souvenirs d’ élans ou d’amples chutes, de rythmes brisés, de noms grecs, d’éclats d
1583 gardais de Hölderlin que des souvenirs d’élans ou d’ amples chutes, de rythmes brisés, de noms grecs, d’éclats de lumière é
1584 lin que des souvenirs d’élans ou d’amples chutes, de rythmes brisés, de noms grecs, d’éclats de lumière élevés dans l’imme
1585 rs d’élans ou d’amples chutes, de rythmes brisés, de noms grecs, d’éclats de lumière élevés dans l’immense paysage intérie
1586 ’amples chutes, de rythmes brisés, de noms grecs, d’ éclats de lumière élevés dans l’immense paysage intérieur. Ou moins en
1587 hutes, de rythmes brisés, de noms grecs, d’éclats de lumière élevés dans l’immense paysage intérieur. Ou moins encore, que
1588 labes et des tirets remplaçant le début ou la fin d’ un verset, appels nostalgiquement privés de sens à cause de tant d’ann
1589 la fin d’un verset, appels nostalgiquement privés de sens à cause de tant d’années d’oubli, pensais-je. Je notais quelquef
1590 ls nostalgiquement privés de sens à cause de tant d’ années d’oubli, pensais-je. Je notais quelquefois ces fragments mémora
1591 giquement privés de sens à cause de tant d’années d’ oubli, pensais-je. Je notais quelquefois ces fragments mémorables pour
1592 quelquefois ces fragments mémorables pour essayer d’ en retrouver le complément, fût-ce par la suggestion de l’arrangement
1593 retrouver le complément, fût-ce par la suggestion de l’arrangement graphique. Ainsi quelques départs : Feiern möcht ich,
1594 r unserer Seele beginnt. Je retrouvais sans trop de lacunes deux quatrains d’une déchirante simplicité, que j’avais tradu
1595 eele beginnt. Je retrouvais sans trop de lacunes deux quatrains d’une déchirante simplicité, que j’avais traduits à vingt a
1596 Je retrouvais sans trop de lacunes deux quatrains d’ une déchirante simplicité, que j’avais traduits à vingt ans : Die Lini
1597 une déchirante simplicité, que j’avais traduits à vingt ans : Die Linien des Lebens sind verschieden et Das Angenehme dieser
1598 rtaines coupes du verset, ces attaques identiques de deux des grands poèmes de la folie : Nah ist Und schwer zu fassen de
1599 ines coupes du verset, ces attaques identiques de deux des grands poèmes de la folie : Nah ist Und schwer zu fassen der Got
1600 ces attaques identiques de deux des grands poèmes de la folie : Nah ist Und schwer zu fassen der Gott21 Reif sind, in Fe
1601 nt absence du son, du sens, mais sourde pulsation d’ un blanc, d’un vide. « Énigme, ce qui naît d’un jaillissement pur ! Et
1602 u son, du sens, mais sourde pulsation d’un blanc, d’ un vide. « Énigme, ce qui naît d’un jaillissement pur ! Et par le chan
1603 tion d’un blanc, d’un vide. « Énigme, ce qui naît d’ un jaillissement pur ! Et par le chant lui-même à peine dévoilé ». Gro
1604 par le chant lui-même à peine dévoilé ». Groupes de mots émergeant de la mémoire comme de l’Égée vineuse ces îles de l’Ar
1605 même à peine dévoilé ». Groupes de mots émergeant de la mémoire comme de l’Égée vineuse ces îles de l’Archipel, témoins de
1606  ». Groupes de mots émergeant de la mémoire comme de l’Égée vineuse ces îles de l’Archipel, témoins de quelque immense Hes
1607 nt de la mémoire comme de l’Égée vineuse ces îles de l’Archipel, témoins de quelque immense Hespérie effondrée mais dont l
1608 de l’Égée vineuse ces îles de l’Archipel, témoins de quelque immense Hespérie effondrée mais dont les noms, par cette voix
1609 coup m’était restitué L’enthousiasme errant, fils de la belle Nuit 24. Nuit blanche, nuit d’un bleu doré lunaire — négatif
1610 itué L’enthousiasme errant, fils de la belle Nuit 24. Nuit blanche, nuit d’un bleu doré lunaire — négatif de cet azur noir
1611 ant, fils de la belle Nuit 24. Nuit blanche, nuit d’ un bleu doré lunaire — négatif de cet azur noir du plein midi sur les
1612 it blanche, nuit d’un bleu doré lunaire — négatif de cet azur noir du plein midi sur les Cyclades. Mais Hölderlin n’a jama
1613 s au-delà des accidents remémorés, qu’en était-il de la substance des grands poèmes ? L’émotion rénovée par ces fragments
1614 ces fragments — départs, invocations, noms sacrés de l’Ionie — était-elle plus pure et plus vraie, plus efficace que le di
1615 dans le texte, émergeant comme des îles du blanc de la page, et parfois prolongés par une suite de tirets signalant des r
1616 nc de la page, et parfois prolongés par une suite de tirets signalant des reliefs sous-marins25. En cherchant à les complé
1617 ne faisais pas autre chose que le poète à partir d’ un signe, d’un nom, d’une lumière de l’Hellade imaginée. Se souvenir a
1618 pas autre chose que le poète à partir d’un signe, d’ un nom, d’une lumière de l’Hellade imaginée. Se souvenir ainsi de Höld
1619 chose que le poète à partir d’un signe, d’un nom, d’ une lumière de l’Hellade imaginée. Se souvenir ainsi de Hölderlin, c’é
1620 oète à partir d’un signe, d’un nom, d’une lumière de l’Hellade imaginée. Se souvenir ainsi de Hölderlin, c’était revenir à
1621 lumière de l’Hellade imaginée. Se souvenir ainsi de Hölderlin, c’était revenir à la genèse du poème dans l’élan de sa nos
1622 c’était revenir à la genèse du poème dans l’élan de sa nostalgie fondamentale. D’une poésie dont le mouvement profond de
1623 u poème dans l’élan de sa nostalgie fondamentale. D’ une poésie dont le mouvement profond de « réflexion » sur le « sentime
1624 damentale. D’une poésie dont le mouvement profond de « réflexion » sur le « sentiment originel » a pour fonction de « rapp
1625 n » sur le « sentiment originel » a pour fonction de « rappeler la vie perdue à une vie magnifiée »26, on peut bien dire q
1626 de « rappeler la vie perdue à une vie magnifiée » 26, on peut bien dire qu’elle naît d’une nostalgie d’elle-même. Hölderlin
1627 vie magnifiée »26, on peut bien dire qu’elle naît d’ une nostalgie d’elle-même. Hölderlin, lui, dira qu’elle se constitue d
1628 6, on peut bien dire qu’elle naît d’une nostalgie d’ elle-même. Hölderlin, lui, dira qu’elle se constitue dans son « aspira
1629 n » à exprimer, c’est-à-dire dans « la transition d’ un infini défini à un infini plus général », du « pur » au « multiple 
1630 i plus général », du « pur » au « multiple » et «  de l’Esprit au signe », transition qui relève ici, comme chez Hegel, et
1631 et bien plus haut, chez Héraclite et les ioniens, de la dialectique essentielle, celle de l’Un et du Divers. Poésie, c’est
1632 les ioniens, de la dialectique essentielle, celle de l’Un et du Divers. Poésie, c’est absence, appel, invocation. Tout bon
1633 revenir dans le mythe. Le Neckar sera beau quand d’ une Grèce dorienne — Cap Sounion, Olympie, temples ruinés d’Athènes, «
1634 e dorienne — Cap Sounion, Olympie, temples ruinés d’ Athènes, « fierté du monde qui n’est plus »27 — le poète se retournera
1635 inés d’Athènes, « fierté du monde qui n’est plus » 27 — le poète se retournera vers sa vallée natale et sa rivière « avec s
1636 aginé comme enfance perdue, mais aussi comme aimé de loin, dans un futur anticipé qui fera de lui un passé. Ionie de rêve,
1637 mme aimé de loin, dans un futur anticipé qui fera de lui un passé. Ionie de rêve, où jamais il n’ira, car elle n’est plus.
1638 un futur anticipé qui fera de lui un passé. Ionie de rêve, où jamais il n’ira, car elle n’est plus. Paysages évoqués — non
1639 ant, verdoyant, lumineux ou en fête —, purs états d’ âmes ! Ces « jardins de Bordeaux, là-bas », cette Palmyre en ruine « a
1640 x ou en fête —, purs états d’âmes ! Ces « jardins de Bordeaux, là-bas », cette Palmyre en ruine « aux plaines du désert »,
1641 en ruine « aux plaines du désert », et ce Gothard d’ où partent les grands fleuves, le Rhin allemand, mais aussi l’Aigle ve
1642 mais aussi l’Aigle vers l’Olympe, vers les antres de Lemnos, et vers les forêts de l’Indus ! Mallarmé fixe tout dans un pr
1643 pe, vers les antres de Lemnos, et vers les forêts de l’Indus ! Mallarmé fixe tout dans un présent glacé, intemporel (« Le
1644 splendides villes »), Apollinaire hante la marge d’ émotion entre le souvenir de naguère et sa restitution dans un présent
1645 inaire hante la marge d’émotion entre le souvenir de naguère et sa restitution dans un présent d’ubiquité. Éluard ne conna
1646 enir de naguère et sa restitution dans un présent d’ ubiquité. Éluard ne connaît que l’instant, le temps ponctuel. Mais Höl
1647 ses grands hymnes décrivent toutes les dimensions de l’absence, de l’éloignement dans le temps, dans l’espace, dans la tra
1648 nes décrivent toutes les dimensions de l’absence, de l’éloignement dans le temps, dans l’espace, dans la transcendance, ma
1649 temps, dans l’espace, dans la transcendance, mais d’ une absence qui est toujours appel, nostalgie qui se mue en prophétie 
1650 du Verbe qui nous meut et nous oriente : le passé de l’invocatif28 qui est un temps de la prophétie, appelant le retour de
1651 ente : le passé de l’invocatif28 qui est un temps de la prophétie, appelant le retour des dieux morts ou dormants ; l’impa
1652 qui est le temps du poète voyant ; et le présent d’ exil, temps du poète souffrant. Car il nous avertit que son langage n’
1653 ndent qu’il nous forme — « car si quelque langage de la nature et de l’art… préexistait pour lui… le poète se placerait en
1654 forme — « car si quelque langage de la nature et de l’art… préexistait pour lui… le poète se placerait en dehors de son c
1655 lui… le poète se placerait en dehors de son champ d’ efficacité, il sortirait de sa création »29. Son langage, il le fait d
1656 en dehors de son champ d’efficacité, il sortirait de sa création »29. Son langage, il le fait de noms sacrés et de signes
1657 champ d’efficacité, il sortirait de sa création » 29. Son langage, il le fait de noms sacrés et de signes élus, qualifiés p
1658 irait de sa création »29. Son langage, il le fait de noms sacrés et de signes élus, qualifiés par un « ton fondamental ».
1659 on »29. Son langage, il le fait de noms sacrés et de signes élus, qualifiés par un « ton fondamental ». C’est une sorte de
1660 ifiés par un « ton fondamental ». C’est une sorte de code initiatique, le chiffre de sa religion. Noms de fleuves et d’île
1661 . C’est une sorte de code initiatique, le chiffre de sa religion. Noms de fleuves et d’îles, de cités, de hauts lieux ; et
1662 code initiatique, le chiffre de sa religion. Noms de fleuves et d’îles, de cités, de hauts lieux ; et leur seul énoncé suf
1663 ue, le chiffre de sa religion. Noms de fleuves et d’ îles, de cités, de hauts lieux ; et leur seul énoncé suffit à qualifie
1664 hiffre de sa religion. Noms de fleuves et d’îles, de cités, de hauts lieux ; et leur seul énoncé suffit à qualifier et act
1665 sa religion. Noms de fleuves et d’îles, de cités, de hauts lieux ; et leur seul énoncé suffit à qualifier et activer la no
1666 mos, et Dodone, et Délos, et Delphes, et le matin de Salamine, et l’Hespérie, « Couchant du temps ». Sous la Rousse et la
1667 . Sous la Rousse et la Flamboyante, hautes parois de roches nues dominant Delphes (et de plus haut encore fonce un milan s
1668 t de plus haut encore fonce un milan sur sa proie d’ ombre) au bord de la fontaine aux eaux « saintes et sobres », écoutons
1669 dès que dans l’ombre des chênes Brillera la lueur de ton flot surgissant, Castalie ! Ah ! je veux Dans la vasque puiser, à
1670 e veux Dans la vasque puiser, à travers le parfum de tes fleurs, et répandre, Sur le sol où renaît la prairie, l’eau sacré
1671 dans le val qui se tait, près des rocs suspendus de Tempé, Près de vous j’élirai ma demeure à jamais, près de vous, noms
1672 eure à jamais, près de vous, noms splendides ! 21. Patmos, 1801-1802. 22. Mnemosyne III, 1803. 23. « Par le fait que
1673 , près de vous, noms splendides ! 21. Patmos, 1801-1802. 22. Mnemosyne III, 1803. 23. « Par le fait que (le poète) me nomme
1674 us, noms splendides ! 21. Patmos, 1801-1802. 22. Mnemosyne III, 1803. 23. « Par le fait que (le poète) me nomme ce s
1675 ! 21. Patmos, 1801-1802. 22. Mnemosyne III, 1803. 23. « Par le fait que (le poète) me nomme ce signe, il emprunte à mo
1676 . Patmos, 1801-1802. 22. Mnemosyne III, 1803. 23. « Par le fait que (le poète) me nomme ce signe, il emprunte à mon mon
1677 rche poétique, au chapitre traitant du langage et de son « efficacité ». 24. André Chénier. 25. Le précieux Hölderlin de
1678 re traitant du langage et de son « efficacité ». 24. André Chénier. 25. Le précieux Hölderlin de la Pléiade, paru en 1967
1679 ge et de son « efficacité ». 24. André Chénier. 25. Le précieux Hölderlin de la Pléiade, paru en 1967, supprime par malhe
1680 25. Le précieux Hölderlin de la Pléiade, paru en 1967, supprime par malheur ces tirets, que donnent toujours les éditions al
1681 s, que donnent toujours les éditions allemandes. 26. Cf. l’essai cité, page 268 éd. de la Pléiade. 27. Le Neckar, Pléiad
1682 éditions allemandes. 26. Cf. l’essai cité, page 268 éd. de la Pléiade. 27. Le Neckar, Pléiade, p. 459. 28. Une sorte d
1683 s allemandes. 26. Cf. l’essai cité, page 268 éd. de la Pléiade. 27. Le Neckar, Pléiade, p. 459. 28. Une sorte de futur
1684 6. Cf. l’essai cité, page 268 éd. de la Pléiade. 27. Le Neckar, Pléiade, p. 459. 28. Une sorte de futur, en réalité, com
1685 de la Pléiade. 27. Le Neckar, Pléiade, p. 459. 28. Une sorte de futur, en réalité, comme le futur antérieur est une sort
1686 27. Le Neckar, Pléiade, p. 459. 28. Une sorte de futur, en réalité, comme le futur antérieur est une sorte de passé.
1687 n réalité, comme le futur antérieur est une sorte de passé. 29. Essai cité, Éd. de la Pléiade, p. 630. 30. Je cite l’Arc
1688 comme le futur antérieur est une sorte de passé. 29. Essai cité, Éd. de la Pléiade, p. 630. 30. Je cite l’Archipel dans l
1689 ieur est une sorte de passé. 29. Essai cité, Éd. de la Pléiade, p. 630. 30. Je cite l’Archipel dans la belle adaptation
1690 ssé. 29. Essai cité, Éd. de la Pléiade, p. 630. 30. Je cite l’Archipel dans la belle adaptation rythmique de Jean Tardieu
1691 ite l’Archipel dans la belle adaptation rythmique de Jean Tardieu. Éd. de la Pléiade, p. 826. al. Rougemont Denis de, « 
1692 a belle adaptation rythmique de Jean Tardieu. Éd. de la Pléiade, p. 826. al. Rougemont Denis de, « Hölderlin dans le sou
1693 Éd. de la Pléiade, p. 826. al. Rougemont Denis de , « Hölderlin dans le souvenir des noms splendides », Revue de Belles-
1694 lin dans le souvenir des noms splendides », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, 1968, p. 15-19.
1695 lles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg, 1968, p. 15-19.