1
e 1926)a b Une mauvaise humeur qui flotte dans
l’
air nous proposerait de débuter par l’inévitable discours sur les diff
2
flotte dans l’air nous proposerait de débuter par
l’
inévitable discours sur les difficultés du temps, en général, et sur c
3
poserait de débuter par l’inévitable discours sur
les
difficultés du temps, en général, et sur celles en particulier qu’imp
4
général, et sur celles en particulier qu’implique
la
publication de notre revue. Mais nous savons, tout comme M. Coué, que
5
oué, nous nous persuadons que tout ira très bien.
Les
circonstances l’exigent, d’ailleurs, plus que jamais, et plus que jam
6
suadons que tout ira très bien. Les circonstances
l’
exigent, d’ailleurs, plus que jamais, et plus que jamais, nous semble-
7
nous semble-t-il, notre revue a sa raison d’être.
La
vie d’aujourd’hui, on le sait, nous oblige à nous affirmer ou à refus
8
evue a sa raison d’être. La vie d’aujourd’hui, on
le
sait, nous oblige à nous affirmer ou à refuser de nous affirmer avec
9
i a pu paraître parfois quelque peu impertinente.
Le
fait est que nous éprouvons irrésistiblement l’obligation d’être nous
10
. Le fait est que nous éprouvons irrésistiblement
l’
obligation d’être nous-mêmes. Et, disons-le tout de suite, c’est en ce
11
lement l’obligation d’être nous-mêmes. Et, disons-
le
tout de suite, c’est en cela uniquement — être nous-mêmes — que consi
12
mes — que consistera notre programme. Sans doute,
les
différences s’accusent : mais n’est-ce pas la meilleure raison pour n
13
e, les différences s’accusent : mais n’est-ce pas
la
meilleure raison pour nos aînés de chercher plus patiemment encore à
14
elle nous ne saurions aller, et qui, nous voulons
l’
espérer, ne sera pas sans leur donner quelque bénéfice en retour. Cert
15
nt d’autres, avant tant d’autres. « Amis, ce sont
les
jeunes qui passent… » Pas question de les saluer ni d’emboîter le pas
16
ce sont les jeunes qui passent… » Pas question de
les
saluer ni d’emboîter le pas, mais seulement de retenir sa place au sp
17
ssent… » Pas question de les saluer ni d’emboîter
le
pas, mais seulement de retenir sa place au spectacle qu’ils offrent e
18
etenir sa place au spectacle qu’ils offrent et de
les
considérer avec sympathie. Il est bien facile de s’écrier : « Après m
19
ie. Il est bien facile de s’écrier : « Après moi,
le
déluge ! », et de se détourner de ce qu’on a coutume d’appeler notre
20
’appeler notre « désordre ». Mais on est toujours
le
fils de quelqu’un… Et, peut-être, la considération du « déluge » peut
21
est toujours le fils de quelqu’un… Et, peut-être,
la
considération du « déluge » peut-elle faire réfléchir utilement sur s
22
Par contre, nous nous empressons de vous laisser
le
soin de juger si nous avons de quoi faire les modestes… Être nous-m
23
sser le soin de juger si nous avons de quoi faire
les
modestes… Être nous-mêmes, avons-nous dit, c’est à la fois notre bu
24
littéraire de plus » ; nous ne voulons pas être «
l’
expression de la jeunesse romande ». Nous sommes autre chose. (Belles-
25
us » ; nous ne voulons pas être « l’expression de
la
jeunesse romande ». Nous sommes autre chose. (Belles-Lettres est touj
26
nemment peu bellettrienne. Que sommes-nous donc ?
Le
plus qu’on puisse dire, c’est que vous le saurez un peu mieux quand v
27
donc ? Le plus qu’on puisse dire, c’est que vous
le
saurez un peu mieux quand vous aurez lu nos huit numéros. Il faut que
28
vergentes, mais qu’un ruban rouge et vert lie par
la
grâce d’une volonté sans doute divine… a. Rougemont Denis de, « Av
29
nève-Fribourg, décembre 1926, p. 3-5. b. Signé :
Le
Comité central.
30
Paradoxe de
la
sincérité (décembre 1926)c Nous voyons un mythe prendre corps parm
31
926)c Nous voyons un mythe prendre corps parmi
les
ruines de ce temps. Il fallait bien tirer quelque vertu d’une anarchi
32
essaire — provisoirement — que satisfaisante pour
l’
esprit. C’est ainsi que nous trompant nous-mêmes, sous le prétexte tou
33
t. C’est ainsi que nous trompant nous-mêmes, sous
le
prétexte toujours de probité intellectuelle ou de courage moral, nous
34
lectuelle ou de courage moral, nous avons élevé à
la
hauteur d’une vertu première — et qui légitime tous les dénis de mora
35
uteur d’une vertu première — et qui légitime tous
les
dénis de morale à quoi nous obligeaient en réalité on sait quel dégoû
36
et certains désirs de grabuge moins avouables, —
la
sincérité, masque fier et un peu douloureux des défaitismes les plus
37
masque fier et un peu douloureux des défaitismes
les
plus subtils comme des plus pures et loyales inquiétudes. Sincérité,
38
des plus pures et loyales inquiétudes. Sincérité,
le
mal du siècle. Tout le monde en parle, et chacun s’en autorise pour e
39
excuser sa petite faiblesse originale : tant qu’à
la
fin la notion concrète de sincérité s’évanouit en mille définitions t
40
sa petite faiblesse originale : tant qu’à la fin
la
notion concrète de sincérité s’évanouit en mille définitions tendanci
41
doctrine acceptée ; envers votre idéal ou envers
les
fluctuations de votre moi ? Votre sincérité est-elle consentement imm
42
fois curieuse et désintéressée, de naturaliste de
l’
âme ? Heureusement que M. Brémond ne s’est pas encore mêlé de l’affair
43
sement que M. Brémond ne s’est pas encore mêlé de
l’
affaire. Au reste, on n’a pas attendu les éclaircissements du subtil a
44
e mêlé de l’affaire. Au reste, on n’a pas attendu
les
éclaircissements du subtil abbé pour n’y plus rien comprendre. ⁂ Qu’o
45
mettre à décrire ce qu’il voit autour de lui — et
l’
étonnement indigné du spectateur. Pour parler avec un peu de clairvoya
46
déduction passablement sèche pourrait nous donner
l’
illusion et peut-être certains bénéfices de cette opération idéale. En
47
néfices de cette opération idéale. En même temps,
la
froideur d’une telle méthode atténuerait dans une certaine mesure — p
48
que nécessaire — ce qu’il y a de déplaisant dans
l’
effort d’un esprit pour se dégager de confusions aussi perfides et si
49
ntures. Sincérité et spontanéité « Nos actes
les
plus sincères sont aussi les moins calculés », écrit Gide. D’où l’on
50
néité « Nos actes les plus sincères sont aussi
les
moins calculés », écrit Gide. D’où l’on peut tirer par une sorte de p
51
sont aussi les moins calculés », écrit Gide. D’où
l’
on peut tirer par une sorte de passage à la limite que les faits justi
52
. D’où l’on peut tirer par une sorte de passage à
la
limite que les faits justifient : sincérité = spontanéité. Mais la mo
53
ut tirer par une sorte de passage à la limite que
les
faits justifient : sincérité = spontanéité. Mais la morale est ce qui
54
faits justifient : sincérité = spontanéité. Mais
la
morale est ce qui s’oppose en premier lieu à la spontanéité. C’est po
55
s la morale est ce qui s’oppose en premier lieu à
la
spontanéité. C’est pourquoi Gide écrit ailleurs : « En chaque être, l
56
pourquoi Gide écrit ailleurs : « En chaque être,
le
pire instinct me paraissait le plus sincère. » La sincérité spontanée
57
« En chaque être, le pire instinct me paraissait
le
plus sincère. » La sincérité spontanée, vertu moderne en qui renaît u
58
le pire instinct me paraissait le plus sincère. »
La
sincérité spontanée, vertu moderne en qui renaît un mythe rousseauist
59
usseauiste, inspire, explique un vaste domaine de
la
littérature contemporaine. Cette sorte-là de sincérité, on la nomme g
60
re contemporaine. Cette sorte-là de sincérité, on
la
nomme gratuité. Lafcadio poussant Fleurissoire « pour rien » ne songe
61
rien » ne songeait pas qu’il allait faire école.
Le
fait est que ce geste symbolique a déclenché tout un mouvement littér
62
-là même qui aboutit naguère au surréalisme. Tous
les
héros de roman se sont mis à gesticuler « gratuitement ». Et les crit
63
man se sont mis à gesticuler « gratuitement ». Et
les
critiques d’abord de s’indigner. Aujourd’hui, on les voit assez encha
64
critiques d’abord de s’indigner. Aujourd’hui, on
les
voit assez enchantés de l’affaire : « Gratuit ! », déclarent-ils chaq
65
gner. Aujourd’hui, on les voit assez enchantés de
l’
affaire : « Gratuit ! », déclarent-ils chaque fois qu’ils ne comprenne
66
endre. Et, ici encore, prenons garde de confondre
le
plan littéraire avec le plan moral. Telle action peut paraître gratui
67
renons garde de confondre le plan littéraire avec
le
plan moral. Telle action peut paraître gratuite au lecteur parce qu’i
68
tuite au lecteur parce qu’il ne sait pas tout sur
le
personnage. Mais quant à l’auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste
69
ne sait pas tout sur le personnage. Mais quant à
l’
auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste le plus incongru du héros n
70
Mais quant à l’auteur, il n’y a pas de gratuité.
Le
geste le plus incongru du héros n’est jamais que le résultat d’un méc
71
nt à l’auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste
le
plus incongru du héros n’est jamais que le résultat d’un mécanisme in
72
geste le plus incongru du héros n’est jamais que
le
résultat d’un mécanisme inconscient, aussi révélateur du personnage q
73
t, aussi révélateur du personnage que ses actions
les
mieux concertées. Rien n’est gratuit que relativement à un système re
74
s. Il résulte de semblables considérations, dans
le
domaine de la morale, que le meilleur moyen de se livrer à ses déterm
75
de semblables considérations, dans le domaine de
la
morale, que le meilleur moyen de se livrer à ses déterminants, c’est
76
considérations, dans le domaine de la morale, que
le
meilleur moyen de se livrer à ses déterminants, c’est de mener la vie
77
n de se livrer à ses déterminants, c’est de mener
la
vie gratuite que réclament les surréalistes. Le contraire de la liber
78
nts, c’est de mener la vie gratuite que réclament
les
surréalistes. Le contraire de la liberté. D’autre part, on veut donne
79
r la vie gratuite que réclament les surréalistes.
Le
contraire de la liberté. D’autre part, on veut donner à l’acte gratui
80
e que réclament les surréalistes. Le contraire de
la
liberté. D’autre part, on veut donner à l’acte gratuit une valeur mor
81
ire de la liberté. D’autre part, on veut donner à
l’
acte gratuit une valeur morale en disant qu’il révèle ce qu’il y a de
82
ant qu’il révèle ce qu’il y a de plus secret dans
la
personnalité. Ce serait un moyen de connaissance plus intégrale de so
83
pittoresque et plus « entachée d’utilitarisme »,
la
décision réfléchie, aussi peu gratuite que possible, d’un Julien Sore
84
ins révélatrice du fond de l’âme humaine ? Que si
l’
on s’étonne de me voir donner ici la préférence à l’acte volontaire, o
85
aine ? Que si l’on s’étonne de me voir donner ici
la
préférence à l’acte volontaire, ou mieux : intéressé, tandis qu’en li
86
on s’étonne de me voir donner ici la préférence à
l’
acte volontaire, ou mieux : intéressé, tandis qu’en littérature je déf
87
: intéressé, tandis qu’en littérature je défends
l’
acte gratuit, je réponds que la littérature remplirait déjà suffisamme
88
érature je défends l’acte gratuit, je réponds que
la
littérature remplirait déjà suffisamment son rôle en se bornant à nou
89
onnaissance plus intense et plus émouvante ; mais
la
morale, plutôt que de nous constater, doit nous construire — selon le
90
e de nous constater, doit nous construire — selon
le
mode le plus libre, le plus conscient à la fois et le plus voluptueux
91
s constater, doit nous construire — selon le mode
le
plus libre, le plus conscient à la fois et le plus voluptueux. Sin
92
it nous construire — selon le mode le plus libre,
le
plus conscient à la fois et le plus voluptueux. Sincérité envers s
93
ode le plus libre, le plus conscient à la fois et
le
plus voluptueux. Sincérité envers soi-même Noli me tangere.
94
vers certain but précis. Ou bien j’aurais juste
le
temps de le noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à l’analyser
95
n but précis. Ou bien j’aurais juste le temps de
le
noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à l’analyser plus longue
96
le noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à
l’
analyser plus longuement. Mais alors je le fausse, puisque je le prive
97
ttrai à l’analyser plus longuement. Mais alors je
le
fausse, puisque je le prive de la puissance de se délivrer en gestes,
98
s longuement. Mais alors je le fausse, puisque je
le
prive de la puissance de se délivrer en gestes, en conséquences matér
99
. Mais alors je le fausse, puisque je le prive de
la
puissance de se délivrer en gestes, en conséquences matérielles. Ce n
100
estes, en conséquences matérielles. Ce n’est plus
l’
élan pur que je décris : c’est un élan freiné dans mon esprit, c’est l
101
ris : c’est un élan freiné dans mon esprit, c’est
le
frein lui-même, bientôt — par un mouvement normal de l’attention — et
102
in lui-même, bientôt — par un mouvement normal de
l’
attention — et fatalement c’est à la découverte d’une faiblesse que j’
103
ent normal de l’attention — et fatalement c’est à
la
découverte d’une faiblesse que j’aboutis : ce quelque chose qui m’a r
104
e quelque chose qui m’a retenu d’accomplir ce que
l’
élan appelait. Second exemple. — J’éprouve le besoin de faire le po
105
e l’élan appelait. Second exemple. — J’éprouve
le
besoin de faire le point : à quoi en suis-je, qui suis-je ? Je revois
106
Second exemple. — J’éprouve le besoin de faire
le
point : à quoi en suis-je, qui suis-je ? Je revois des actes accompli
107
cher du soleil, des phares d’automobiles étoilent
le
brouillard, les visages se cachent dans des fourrures, personne ne sa
108
des phares d’automobiles étoilent le brouillard,
les
visages se cachent dans des fourrures, personne ne sait la richesse d
109
s se cachent dans des fourrures, personne ne sait
la
richesse de ta vie…). J’écris ces choses. Puis, dans un ancien carnet
110
arnet de notes, je retrouve un être si différent.
Les
gestes et les sentiments qui se proposaient à mon souvenir ont été pa
111
, je retrouve un être si différent. Les gestes et
les
sentiments qui se proposaient à mon souvenir ont été passés au crible
112
saient à mon souvenir ont été passés au crible de
la
minute où je me penchais sur mon passé. Ou, pour user d’une image plu
113
ueur de tristesse ou de sérénité qui métamorphose
le
paysage du passé. Ainsi de certains décors modernes : vous changez l’
114
Ainsi de certains décors modernes : vous changez
l’
éclairage, et la chaumière devient palais. C’est l’objection classique
115
ns décors modernes : vous changez l’éclairage, et
la
chaumière devient palais. C’est l’objection classique et irréfutable
116
’éclairage, et la chaumière devient palais. C’est
l’
objection classique et irréfutable à toute introspection : ce daltonis
117
m’apprendre quelque chose, c’est bien le second.
La
qualité des souvenirs qu’il me livre me renseigne assez exactement, n
118
gne assez exactement, non sur mon passé, mais sur
le
moment que je vis1. Il est bien clair qu’on ne saurait atteindre « la
119
1. Il est bien clair qu’on ne saurait atteindre «
la
vérité sur soi » en se servant de la méthode indiquée dans le premier
120
atteindre « la vérité sur soi » en se servant de
la
méthode indiquée dans le premier exemple. C’est un cas-limite, j’en c
121
cas-limite, j’en conviens. Pourtant, n’est-ce pas
le
schéma de tout un genre littéraire moderne, cette espèce de confessio
122
moderne, cette espèce de confession romancée dont
les
livres de Bopp, d’Arland, de Soupault et surtout de René Crevel ont d
123
, de Soupault et surtout de René Crevel ont donné
les
exemples les plus récents et significatifs ? Tous ces livres évoquent
124
et surtout de René Crevel ont donné les exemples
les
plus récents et significatifs ? Tous ces livres évoquent assez précis
125
tifs ? Tous ces livres évoquent assez précisément
la
forme d’un entonnoir. La vie serait le liquide tourbillonnant à l’int
126
oquent assez précisément la forme d’un entonnoir.
La
vie serait le liquide tourbillonnant à l’intérieur. Un arrêt (l’auteu
127
récisément la forme d’un entonnoir. La vie serait
le
liquide tourbillonnant à l’intérieur. Un arrêt (l’auteur se met à se
128
onnoir. La vie serait le liquide tourbillonnant à
l’
intérieur. Un arrêt (l’auteur se met à se regarder vivre, le personnag
129
e liquide tourbillonnant à l’intérieur. Un arrêt (
l’
auteur se met à se regarder vivre, le personnage à douter du sens de s
130
r. Un arrêt (l’auteur se met à se regarder vivre,
le
personnage à douter du sens de sa vie) et les forces centripètes l’em
131
vre, le personnage à douter du sens de sa vie) et
les
forces centripètes l’emportent peu à peu, une aspiration vers le bas
132
uter du sens de sa vie) et les forces centripètes
l’
emportent peu à peu, une aspiration vers le bas produit une agitation
133
ipètes l’emportent peu à peu, une aspiration vers
le
bas produit une agitation accélérée et folle, puis tout finit dans un
134
, puis tout finit dans un râle, brusquement c’est
le
vide. Centre de soi, l’aspiration du néant. J’ai revu à l’envers le f
135
n râle, brusquement c’est le vide. Centre de soi,
l’
aspiration du néant. J’ai revu à l’envers le film de mon passé : ce qu
136
Centre de soi, l’aspiration du néant. J’ai revu à
l’
envers le film de mon passé : ce qui était élan devient recul, et l’év
137
soi, l’aspiration du néant. J’ai revu à l’envers
le
film de mon passé : ce qui était élan devient recul, et l’évocation d
138
e mon passé : ce qui était élan devient recul, et
l’
évocation de mes désirs anciens ne me restitue qu’un dégoût. J’ai cru
139
. En réalité, je n’assiste pas à moi-même, mais à
la
destruction de moi-même. Par les fissures, un instant, j’ai pu soupço
140
moi-même, mais à la destruction de moi-même. Par
les
fissures, un instant, j’ai pu soupçonner des profondeurs ; mais déjà
141
i pu soupçonner des profondeurs ; mais déjà c’est
le
chaos. Mon corps et moi, le livre si poignant de René Crevel, est la
142
rs ; mais déjà c’est le chaos. Mon corps et moi,
le
livre si poignant de René Crevel, est la démonstration la plus cyniqu
143
et moi, le livre si poignant de René Crevel, est
la
démonstration la plus cynique que je connaisse de ces ravages du sinc
144
si poignant de René Crevel, est la démonstration
la
plus cynique que je connaisse de ces ravages du sincérisme. Dans la s
145
e je connaisse de ces ravages du sincérisme. Dans
la
solitude qu’il s’acharne à approfondir — il était venu y chercher que
146
rcher quelque raison de vivre, il voulait se voir
le
plus purement (« cette curiosité donnée comme raison d’une perpétuell
147
mme raison d’une perpétuelle attente »), — ce que
l’
auteur découvre c’est ce « merveilleux contraire » de l’élan vital qu’
148
ur découvre c’est ce « merveilleux contraire » de
l’
élan vital qu’il nomme élan mortel — générateur de l’incurable tristes
149
lan vital qu’il nomme élan mortel — générateur de
l’
incurable tristesse qui rôde dans certaine littérature d’aujourd’hui.
150
é de faire mon autoportrait moral : je bouge tout
le
temps. Danger de faire mon autoportrait moral : je me compose plus la
151
s laid que nature. Faut-il conclure avec Gide : «
L’
analyse psychologique a perdu pour moi tout intérêt du jour où je me s
152
moi tout intérêt du jour où je me suis avisé que
l’
homme éprouve ce qu’il imagine d’éprouver. » Non. Car à supposer que l
153
’il imagine d’éprouver. » Non. Car à supposer que
l’
analyse nous crée, elle ne nous crée pas n’importe comment, mais selon
154
u des remarques précédentes). Rivière définissait
la
sincérité comme « un perpétuel effort pour créer son âme telle qu’ell
155
qu’elle est ». Il voyait dans cet effort sur soi
le
gage d’un enrichissement, d’une consolidation de l’individu mais avan
156
gage d’un enrichissement, d’une consolidation de
l’
individu mais avant tout un moyen de se connaître. Cependant, n’est-ce
157
Cependant, n’est-ce pas lui-même qui ajoutait que
l’
homme sincère « en vient à ne plus pouvoir même souhaiter d’être diffé
158
oir même souhaiter d’être différent », ce qui est
la
négation de tout progrès moral. De la sincérité envisagée comme moyen
159
ce qui est la négation de tout progrès moral. De
la
sincérité envisagée comme moyen de connaissance, le cas extrême d’un
160
sincérité envisagée comme moyen de connaissance,
le
cas extrême d’un Crevel nous montre assez ce qu’il faut penser2. Il n
161
limites assez étroites empiriquement fournies par
le
sens de son intérêt propre, une analyse sincère ne puisse faire décou
162
es et ne serve parfois de contrôle efficace. Mais
les
bénéfices sont maigres en regard des dangers que la sincérité du noli
163
bénéfices sont maigres en regard des dangers que
la
sincérité du noli me tangere fait courir, tant dans le domaine littér
164
ncérité du noli me tangere fait courir, tant dans
le
domaine littéraire que dans celui de l’action. En littérature : refus
165
tant dans le domaine littéraire que dans celui de
l’
action. En littérature : refus de construire, de composer ; impuissanc
166
sance à inventer. Car inventer, c’est se porter à
l’
extrême pointe de soi, et, d’un élan, se dépasser ; c’est créer une di
167
e dépasser ; c’est créer une différence. Pourquoi
les
romanciers modernes ont-ils tant de mal à créer des personnages ? C’e
168
rsonnages ? C’est parce qu’une sorte de sincérité
les
retient d’imposer aux héros ce rythme volontaire par lequel un Balzac
169
x héros ce rythme volontaire par lequel un Balzac
les
fait vivre. Ce serait fausser quelque chose à leurs yeux. Le cas des
170
re. Ce serait fausser quelque chose à leurs yeux.
Le
cas des Faux-Monnayeurs le montre clairement. En morale : défaitisme
171
ue chose à leurs yeux. Le cas des Faux-Monnayeurs
le
montre clairement. En morale : défaitisme quand il s’agit de gestes q
172
cement. (Il faut, pour sauter, une confiance dans
l’
élan qui échappe à toute analyse préalable et sans quoi le saut paraît
173
ui échappe à toute analyse préalable et sans quoi
le
saut paraît impossible, absurde.) Enfin, désagrégation de la personna
174
aît impossible, absurde.) Enfin, désagrégation de
la
personnalité, car l’analyse la plus savante, comme l’a fort bien dit
175
de.) Enfin, désagrégation de la personnalité, car
l’
analyse la plus savante, comme l’a fort bien dit Ramon Fernandez, « re
176
, désagrégation de la personnalité, car l’analyse
la
plus savante, comme l’a fort bien dit Ramon Fernandez, « retient tous
177
ersonnalité, car l’analyse la plus savante, comme
l’
a fort bien dit Ramon Fernandez, « retient tous les éléments du moi, m
178
l’a fort bien dit Ramon Fernandez, « retient tous
les
éléments du moi, moins le principe unificateur ». De quelques soph
179
nandez, « retient tous les éléments du moi, moins
le
principe unificateur ». De quelques sophismes libérateurs La fo
180
cateur ». De quelques sophismes libérateurs
La
fonction de l’homme est aussi bien de croire que de constater. F. Ra
181
quelques sophismes libérateurs La fonction de
l’
homme est aussi bien de croire que de constater. F. Raub. La sincér
182
ussi bien de croire que de constater. F. Raub.
La
sincérité obstinée d’un Rivière n’a plus rien de spontané. En quoi es
183
a plus rien de spontané. En quoi est-ce encore de
la
sincérité ? Trop sincère, pas sincère. Ou bien si l’on prétend que la
184
sincérité ? Trop sincère, pas sincère. Ou bien si
l’
on prétend que la sincérité est la recherche, puis l’acceptation de to
185
sincère, pas sincère. Ou bien si l’on prétend que
la
sincérité est la recherche, puis l’acceptation de toute tendance du m
186
ère. Ou bien si l’on prétend que la sincérité est
la
recherche, puis l’acceptation de toute tendance du moi, je réponds qu
187
n prétend que la sincérité est la recherche, puis
l’
acceptation de toute tendance du moi, je réponds que le mensonge est s
188
eptation de toute tendance du moi, je réponds que
le
mensonge est sincère aussi, qui révèle mon besoin de mentir. Il devie
189
ils vous aident3 — mais jamais au point d’oublier
la
vérité qu’on désirait qu’ils cachent pour un moment. « L’art est un m
190
é qu’on désirait qu’ils cachent pour un moment. «
L’
art est un mensonge, mais un bon artiste n’est pas menteur », dit Max
191
dit Max Jacob. « Être sincère, c’est avoir toutes
les
pensées » (Rivière). Mais on ne peut se maintenir dans cet état. Ce «
192
mensonge », ce choix faux mais bon, nécessaire à
la
vie, n’est-ce pas être sincère aussi que de s’y prêter ? Or, il vous
193
que de s’y prêter ? Or, il vous tire aussitôt de
l’
indétermination violente qu’est la sincérité selon Rivière. La sincéri
194
ire aussitôt de l’indétermination violente qu’est
la
sincérité selon Rivière. La sincérité véritable vous pousse à faire l
195
ation violente qu’est la sincérité selon Rivière.
La
sincérité véritable vous pousse à faire le saut dans le vide qu’exige
196
vière. La sincérité véritable vous pousse à faire
le
saut dans le vide qu’exige toute foi ; c’est la volonté de sincérité,
197
cérité véritable vous pousse à faire le saut dans
le
vide qu’exige toute foi ; c’est la volonté de sincérité, c’est-à-dire
198
e le saut dans le vide qu’exige toute foi ; c’est
la
volonté de sincérité, c’est-à-dire une sincérité tournée au vice, inv
199
ncérité tournée au vice, invertie, qui retient de
l’
oser. Petite anthologie ou que le « style » est de l’homme même
200
ui retient de l’oser. Petite anthologie ou que
le
« style » est de l’homme même J’en étais à peu près à ce point de
201
. Petite anthologie ou que le « style » est de
l’
homme même J’en étais à peu près à ce point de mes notes — à ce poi
202
ues lectures, je pris note des passages suivants (
les
paraphraser serait d’une ingratitude insigne — ils marquent au reste
203
atitude insigne — ils marquent au reste fort bien
les
jalons de cette recherche) : Puissiez-vous avouer moins de sincérité
204
ropre témoin, intelligent mais immobile : ce sont
les
mêmes qui s’ignorent en tant que personnes. Comment se trouveraient-i
205
eraient-ils, n’existant pas ? (François Mauriac.)
La
valeur morale de M. Godeau serait définie par l’aspect seul qu’il sou
206
La valeur morale de M. Godeau serait définie par
l’
aspect seul qu’il souffrirait de garder lui-même à son propre regard.
207
ait de garder lui-même à son propre regard. Ainsi
la
valeur morale d’un homme équivalait-elle à l’illusion qu’il était cap
208
nsi la valeur morale d’un homme équivalait-elle à
l’
illusion qu’il était capable d’entretenir sur lui-même. (Marcel Jouhan
209
lle qui est douée d’assez de force pour donner de
la
réalité à l’illusion. (Max Jacob.) Un rôle ? Oui. Mais si le personna
210
ouée d’assez de force pour donner de la réalité à
l’
illusion. (Max Jacob.) Un rôle ? Oui. Mais si le personnage est mainte
211
à l’illusion. (Max Jacob.) Un rôle ? Oui. Mais si
le
personnage est maintenu jusqu’à la mort, il se confond avec l’homme m
212
? Oui. Mais si le personnage est maintenu jusqu’à
la
mort, il se confond avec l’homme même. (André Maurois.) (Quel effro
213
est maintenu jusqu’à la mort, il se confond avec
l’
homme même. (André Maurois.) (Quel effroi, ce jour de l’adolescence
214
même. (André Maurois.) (Quel effroi, ce jour de
l’
adolescence où l’on soupçonne pour la première fois que certains, peut
215
ois.) (Quel effroi, ce jour de l’adolescence où
l’
on soupçonne pour la première fois que certains, peut-être, jouent leu
216
, jouent leur vie. Rien ne paraît plus sinistre à
la
sincérité presque pure de cet âge. Mais il le faut dépasser.) Si j’
217
e à la sincérité presque pure de cet âge. Mais il
le
faut dépasser.) Si j’en crois l’intensité d’un sentiment intime, ce
218
t âge. Mais il le faut dépasser.) Si j’en crois
l’
intensité d’un sentiment intime, ce moi idéal que j’appelle en chaque
219
’imaginait retenir. Dès lors, ce n’est pas lâcher
la
proie pour l’ombre que de tendre vers ce modèle. Dirais-je que c’est
220
enir. Dès lors, ce n’est pas lâcher la proie pour
l’
ombre que de tendre vers ce modèle. Dirais-je que c’est ma sincérité d
221
e. Dirais-je que c’est ma sincérité d’y aller par
les
moyens les plus efficaces ? Mais on nommera cela de l’hypocrisie. Soi
222
e que c’est ma sincérité d’y aller par les moyens
les
plus efficaces ? Mais on nommera cela de l’hypocrisie. Soit, j’accept
223
yens les plus efficaces ? Mais on nommera cela de
l’
hypocrisie. Soit, j’accepte. Et aussitôt j’annonce : Éloge de l’hyp
224
t, j’accepte. Et aussitôt j’annonce : Éloge de
l’
hypocrisie Non, non !… Debout dans l’ère successive ! Brisez, mon c
225
Éloge de l’hypocrisie Non, non !… Debout dans
l’
ère successive ! Brisez, mon corps, brisez cette forme pensive ! .....
226
.................................................
Le
vent se lève, il faut tenter de vivre. Paul Valéry. Certes, du sein
227
is bien quelques voiles à mon dégoût d’un moi que
la
vie me montrait si désespérément vrai, tyrannique, insuffisant. Mais
228
, un peu sceptique, quand mon esprit partait dans
le
rêve d’un idéal de fortune, idole naïve de ma jeune angoisse… Je t’ai
229
alors qu’une symphonie de joies émanait de toute
la
vie : chaque chose proposait une ferveur nouvelle, et chaque être un
230
en pût être privée. Alors, acquiesçant vivement à
l’
invite que je soupçonnais la plus riche d’inconnu, je m’élançais sur l
231
cquiesçant vivement à l’invite que je soupçonnais
la
plus riche d’inconnu, je m’élançais sur la voie qu’elle m’ouvrait, av
232
onnais la plus riche d’inconnu, je m’élançais sur
la
voie qu’elle m’ouvrait, avec tant de rires amis, vers tout ce que mom
233
je choisissais de laisser — et des baisers à tous
les
vents — qu’il eût été loisible d’attribuer comme objet à ma jubilatio
234
st ainsi que fidèle à soi-même au plus profond de
l’
être, on entretient comme une arrière-pensée sagace et obstinée l’assu
235
tient comme une arrière-pensée sagace et obstinée
l’
assurance d’une continuité entre ses actions et ses désirs, un quant-à
236
ui ne gêne aucun geste, mais incline discrètement
les
décisions et les rend complices d’un dessein logique, peut-être loint
237
geste, mais incline discrètement les décisions et
les
rend complices d’un dessein logique, peut-être lointain, en quoi cons
238
ein logique, peut-être lointain, en quoi consiste
l’
unité la plus réelle de l’individu — en dehors du corps. Et ce ne sont
239
que, peut-être lointain, en quoi consiste l’unité
la
plus réelle de l’individu — en dehors du corps. Et ce ne sont point l
240
ntain, en quoi consiste l’unité la plus réelle de
l’
individu — en dehors du corps. Et ce ne sont point là jeux d’idées et
241
dées et jongleries verbales. Regards au-dessus de
l’
amour ! Voir l’heure à la pendule pendant l’étreinte d’un adieu et cal
242
ies verbales. Regards au-dessus de l’amour ! Voir
l’
heure à la pendule pendant l’étreinte d’un adieu et calculer rapidemen
243
es. Regards au-dessus de l’amour ! Voir l’heure à
la
pendule pendant l’étreinte d’un adieu et calculer rapidement le retou
244
us de l’amour ! Voir l’heure à la pendule pendant
l’
étreinte d’un adieu et calculer rapidement le retour à une fidélité pl
245
dant l’étreinte d’un adieu et calculer rapidement
le
retour à une fidélité plus profonde. Fidélité à sa loi individuelle,
246
e honnêteté peut-être plus réelle que l’autre. Et
l’
on conçoit que ce constant et secret assujettissement au moi idéal exi
247
re que cette agilité offensive qu’on appelle dans
la
vie publique arrivisme, et séduction dans les salons. Constater une
248
dans la vie publique arrivisme, et séduction dans
les
salons. Constater une faiblesse, c’est toujours un peu en prendre so
249
esse, c’est toujours un peu en prendre son parti.
La
sincérité crée en nous un fait accompli. J’appelle hypocrisie envers
250
ais ce que de toute mon âme je veux être !… 1.
La
véritable description de l’élan supposé dans le premier exemple, ce s
251
je veux être !… 1. La véritable description de
l’
élan supposé dans le premier exemple, ce serait le récit des gestes qu
252
l’élan supposé dans le premier exemple, ce serait
le
récit des gestes qu’il m’aurait fait commettre. Manifester est plus s
253
st plus sincère qu’analyser. 2. D’ailleurs toute
la
psychologie moderne souligne la quasi-impossibilité de traduire un dy
254
D’ailleurs toute la psychologie moderne souligne
la
quasi-impossibilité de traduire un dynamisme directement dans notre l
255
t certes quand il s’agit de parole ou d’écriture,
l’
affirmation prouve moins une certitude qu’un désir de certitude né de
256
né Crevel) c. Rougemont Denis de, « Paradoxe de
la
sincérité », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribo
257
riet V. A.-W. Poste aux amours perdues Sur
le
mont gris pâlissants Des bouquets de vagues brumes. Insulter ta beaut
258
sses, ô col roide, En souffrance mes baisers.
L’
amour est un alibi Nos lèvres sitôt que jointes, Ô dernier mensong
259
vers d’autres rêves Où sourient quels anges fous.
L’
horaire dicte un adieu, La mode qu’on rie des pleurs, Lors je baise vo
260
rient quels anges fous. L’horaire dicte un adieu,
La
mode qu’on rie des pleurs, Lors je baise votre main Comme on signe d’
261
Conte métaphysique :
L’
individu atteint de strabisme (janvier 1927)f g Comme le démiurge v
262
u atteint de strabisme (janvier 1927)f g Comme
le
démiurge venait de peser sur le commutateur des étoiles… l’une, se dé
263
1927)f g Comme le démiurge venait de peser sur
le
commutateur des étoiles… l’une, se décrochant sans plus d’hésitation,
264
sans plus d’hésitation, se mit à pérégriner dans
les
régions de chasse gardée du ci-devant soleil. C’est là qu’Urbain, pre
265
par qui ? elle était anticléricale, on ne saurait
le
taire, — Urbain dormait. L’étoile, jeune fille, roulait gentiment sur
266
ricale, on ne saurait le taire, — Urbain dormait.
L’
étoile, jeune fille, roulait gentiment sur ses pointes, tout scintille
267
heure, elle éclaira d’une rose caresse lumineuse
la
chevelure rouge d’Urbain, et son nez, lequel, par ses dimensions rema
268
dimensions remarquablement exagérées, lui valait
le
surnom de Bin-Bin. Urbain ouvrit les yeux et ne vit rien. On rappelle
269
s, lui valait le surnom de Bin-Bin. Urbain ouvrit
les
yeux et ne vit rien. On rappelle que les étoiles s’étaient décrochées
270
n ouvrit les yeux et ne vit rien. On rappelle que
les
étoiles s’étaient décrochées de leur poste dans l’éternité. « Éternit
271
s étoiles s’étaient décrochées de leur poste dans
l’
éternité. « Éternité désaffectée, c’est bien dommage, dit-il en s’étir
272
fectée, c’est bien dommage, dit-il en s’étirant ;
le
printemps désormais rendra le ciel plus pâle, et nous irons chercher
273
t-il en s’étirant ; le printemps désormais rendra
le
ciel plus pâle, et nous irons chercher dans le souvenir les vent-coul
274
ra le ciel plus pâle, et nous irons chercher dans
le
souvenir les vent-coulis de la mort. Garçon, un café, un ! » Mais l’é
275
lus pâle, et nous irons chercher dans le souvenir
les
vent-coulis de la mort. Garçon, un café, un ! » Mais l’étoile chantai
276
rons chercher dans le souvenir les vent-coulis de
la
mort. Garçon, un café, un ! » Mais l’étoile chantait dans l’axe de sa
277
t-coulis de la mort. Garçon, un café, un ! » Mais
l’
étoile chantait dans l’axe de sa vie normale et s’approchait en faisan
278
rçon, un café, un ! » Mais l’étoile chantait dans
l’
axe de sa vie normale et s’approchait en faisant la roue — celle à qui
279
’axe de sa vie normale et s’approchait en faisant
la
roue — celle à qui sourit la Fortune. Urbain, fort d’une hérédité jud
280
pprochait en faisant la roue — celle à qui sourit
la
Fortune. Urbain, fort d’une hérédité judiciaire et française, dédaign
281
judiciaire et française, dédaigna des avances que
la
perte de son sens de l’éternel rendait pourtant considérables, au sen
282
dédaigna des avances que la perte de son sens de
l’
éternel rendait pourtant considérables, au sens étymologique du terme.
283
es, au sens étymologique du terme. Il loucha vers
le
néant, retourna ses poches, ôta ses gants qu’il jeta, puis, après un
284
u’il jeta, puis, après un grand coup de pied dans
le
vide symbolique des systèmes, sortit, c’est-à-dire qu’il fit un pas d
285
e qu’il fit un pas dans une direction quelconque.
L’
étoile pleurait, sentimentale. f. Rougemont Denis de, « L’individu
286
eurait, sentimentale. f. Rougemont Denis de, «
L’
individu atteint de strabisme. Conte métaphysique », Revue de Belles-L
287
Dans
le
Style (janvier 1927)h Nous recevons d’un bellettrien facétieux cet
288
pour Paul Morand, auteur de « Lewis et Irène »
L’
auteur de maint roman de caractère gras quitte Charing-Cross, songeant
289
au cerveau du poète qui meurt de sommeil naturel.
Le
tunnel sous la Manche escamoté, le train dépose des complets rigides
290
oète qui meurt de sommeil naturel. Le tunnel sous
la
Manche escamoté, le train dépose des complets rigides contenant des A
291
mmeil naturel. Le tunnel sous la Manche escamoté,
le
train dépose des complets rigides contenant des Anglais fragiles. L’a
292
complets rigides contenant des Anglais fragiles.
L’
aube tire un écran de pluies sur le paysage commercial. Terminus : Mor
293
lais fragiles. L’aube tire un écran de pluies sur
le
paysage commercial. Terminus : Morand, s’éveillant en français, termi
294
s, termine : … Irène. (Grasset, 1924… … y compris
la
Suède et la Norvège.) On lit dans les Nouvelles littéraires , du 8
295
… Irène. (Grasset, 1924… … y compris la Suède et
la
Norvège.) On lit dans les Nouvelles littéraires , du 8 janvier 192
296
y compris la Suède et la Norvège.) On lit dans
les
Nouvelles littéraires , du 8 janvier 1927, l’information suivante :
297
s les Nouvelles littéraires , du 8 janvier 1927,
l’
information suivante : Mardi dernier a été célébré en l’église grecque
298
rmation suivante : Mardi dernier a été célébré en
l’
église grecque de la rue Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand av
299
ardi dernier a été célébré en l’église grecque de
la
rue Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand avec la princesse Hélè
300
lébré en l’église grecque de la rue Georges Bizet
le
mariage de M. Paul Morand avec la princesse Hélène-C. Soutzo. Les tém
301
e Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand avec
la
princesse Hélène-C. Soutzo. Les témoins étaient pour le marié : M. Ph
302
. Paul Morand avec la princesse Hélène-C. Soutzo.
Les
témoins étaient pour le marié : M. Philippe Berthelot, secrétaire gén
303
ncesse Hélène-C. Soutzo. Les témoins étaient pour
le
marié : M. Philippe Berthelot, secrétaire général du ministre des Aff
304
ral du ministre des Affaires étrangères ; et pour
la
mariée : Son Excellence M. Diamanty, ministre de Roumanie à Paris. C’
305
stre de Roumanie à Paris. C’est encore mieux dans
le
style. h. Rougemont Denis de, « Dans le style », Revue de Belles-L
306
x dans le style. h. Rougemont Denis de, « Dans
le
style », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg,
307
ant (février 1927)i j « Triste, mais vrai. » (
Les
journaux.) Mademoiselle, Il faut d’abord que je m’excuse : c’est un
308
vous dise qu’il fait très froid dans ma chambre :
le
feu n’a pas pris, et d’ailleurs cela n’en vaut plus la peine. (Veuill
309
u n’a pas pris, et d’ailleurs cela n’en vaut plus
la
peine. (Veuillez ne pas voir dans cette phrase quelque allusion de ma
310
dit, sans doute parce que c’est là que se nouent
les
douleurs les plus atrocement inutiles. La première fois, au théâtre.
311
ute parce que c’est là que se nouent les douleurs
les
plus atrocement inutiles. La première fois, au théâtre. Dans l’ombre,
312
ment inutiles. La première fois, au théâtre. Dans
l’
ombre, j’ai suivi le drame sur vos traits seulement ; l’écho n’en fut
313
emière fois, au théâtre. Dans l’ombre, j’ai suivi
le
drame sur vos traits seulement ; l’écho n’en fut que plus douloureux
314
e, j’ai suivi le drame sur vos traits seulement ;
l’
écho n’en fut que plus douloureux dans mon cœur. Puis je vous ai oubli
315
ous voir si entourée… D’autres fois… je n’ai plus
le
courage de les dire. Enfin, avant-hier, à ce bal. J’avais demandé à
316
tourée… D’autres fois… je n’ai plus le courage de
les
dire. Enfin, avant-hier, à ce bal. J’avais demandé à un de mes amis,
317
us connaît4, de me présenter. Il m’en avait donné
la
promesse. Vos regards rencontrèrent les miens plus d’une fois pendant
318
pendant une danse qu’il fit avec vous, mais vous
les
détourniez soudain comme pour vous arracher à une obsession secrèteme
319
session secrètement attirante ; et je pensais que
la
force de mon désir était telle que vous en éprouviez vaguement la men
320
désir était telle que vous en éprouviez vaguement
la
menace. Je dis menace, parce que mes airs sombres vous effrayaient sa
321
seule leur prêtait quelque intention. Quand enfin
l’
orchestre s’arrêta, je me trouvais tout près de vous. Mon ami me fit u
322
mon du malheur me paralysa. Je venais d’entrevoir
l’
image d’un couple heureux et banal, votre sourire répondant au mien, c
323
aires et sur des cartes postales illustrées. Déjà
la
foule des danseurs nous séparait, mon ami se détournait, un peu vexé
324
s une invincible lassitude me saisir et m’assis à
l’
écart. On me demandait, en passant, si j’étais malade. Je désignais d’
325
s bouteilles de champagne vides ; car on pardonne
l’
ivresse, mais non certaines douleurs. Même, je fus obligé de confier à
326
bligé de confier à un ami que j’en avais repris …
Les
archets jouaient sur mes nerfs. Le jazz martelait mon désespoir. Dése
327
vais repris … Les archets jouaient sur mes nerfs.
Le
jazz martelait mon désespoir. Désespoir étroit, ces œillères géantes
328
sespoir étroit, ces œillères géantes aux pensées,
le
ciel trop bas d’un rêve sans issue, pesant comme l’envie d’un sommeil
329
ciel trop bas d’un rêve sans issue, pesant comme
l’
envie d’un sommeil sans fin… J’avais soif, mais la seule vue d’un liqu
330
l’envie d’un sommeil sans fin… J’avais soif, mais
la
seule vue d’un liquide me soulevait le cœur. L’aube parut. On éteigni
331
soif, mais la seule vue d’un liquide me soulevait
le
cœur. L’aube parut. On éteignit toutes les lampes, et les couples cha
332
s la seule vue d’un liquide me soulevait le cœur.
L’
aube parut. On éteignit toutes les lampes, et les couples charlestonna
333
ulevait le cœur. L’aube parut. On éteignit toutes
les
lampes, et les couples charlestonnaient plus furieusement dans l’ombr
334
. L’aube parut. On éteignit toutes les lampes, et
les
couples charlestonnaient plus furieusement dans l’ombre livide, aux c
335
s couples charlestonnaient plus furieusement dans
l’
ombre livide, aux cris fêlés et déchirants des saxophones. Sortie dans
336
s. Sortie dans un matin sourd, frileux, qui avait
la
nausée. Je rentrai seul. Voici quelques mots que j’écrivis à ma table
337
œillet, pauvre gentillesse d’une autre femme dont
le
seul défaut fut de m’aimer… (Froid aux genoux, odeur de vieille fumée
338
umée, et ce refus au sommeil qui meurtrit jusqu’à
l’
âme.) Convulsions d’oriflammes sur l’orchestre pensif. Ton regard est
339
trit jusqu’à l’âme.) Convulsions d’oriflammes sur
l’
orchestre pensif. Ton regard est plus grand que le chant des violons.
340
l’orchestre pensif. Ton regard est plus grand que
le
chant des violons. Aube dure ! En ma tête rôde ton souvenir, comme un
341
es heures, d’un sommeil triste, tout enfiévré par
la
crainte du réveil. Puis je suis revenu dans ces rues où je vous renco
342
n rendez-vous au thé du Printemps. J’ai rôdé dans
la
joie féminine des grands magasins, n’osant pas repasser trop souvent
343
agasins, n’osant pas repasser trop souvent devant
les
ascenseurs. « Vers 4 heures, me disais-je elle y entrera, et, me glis
344
tage… » Je délirais, bien sûr. Je m’imaginais que
les
vendeuses me dévisageaient de plus en plus impudemment : je devais pa
345
qu’un paquet de dix personnes s’engouffrait dans
la
cage rouge et or et s’élevait, j’éprouvais un petit arrachement, comm
346
ais encore : Si je prends cet ascenseur et que je
la
croise en route dans l’ascenseur descendant… Il aurait fallu monter,
347
s cet ascenseur et que je la croise en route dans
l’
ascenseur descendant… Il aurait fallu monter, mais l’idée de vous trou
348
scenseur descendant… Il aurait fallu monter, mais
l’
idée de vous trouver peut-être assise en face de votre bel ami laqué,
349
je suis sorti. Il y avait beaucoup de monde dans
les
rues, sous la pluie. Les autobus passaient par groupes. Plusieurs foi
350
Il y avait beaucoup de monde dans les rues, sous
la
pluie. Les autobus passaient par groupes. Plusieurs fois, j’ai cru vo
351
t beaucoup de monde dans les rues, sous la pluie.
Les
autobus passaient par groupes. Plusieurs fois, j’ai cru vous reconnaî
352
s. Plusieurs fois, j’ai cru vous reconnaître dans
la
foule qui se précipitait, mais je n’avais pas pris de numéro, je ne p
353
llu courir après celle-là qui venait de tourner à
l’
angle de cette rue et qui avait votre démarche. Mais, pendant ce temps
354
désir surmené vous appelait encore, haletant. Et
le
temps passait, à la fois si lent — jusqu’à l’arrivée du prochain métr
355
Et le temps passait, à la fois si lent — jusqu’à
l’
arrivée du prochain métro, du prochain autobus, — si rapide : déjà les
356
in métro, du prochain autobus, — si rapide : déjà
les
lumières des boulevards glissaient des reflets sur l’asphalte mouillé
357
umières des boulevards glissaient des reflets sur
l’
asphalte mouillé. Les pieds dans l’eau, les jambes fatiguées, les paup
358
ds glissaient des reflets sur l’asphalte mouillé.
Les
pieds dans l’eau, les jambes fatiguées, les paupières lourdes, et ce
359
es reflets sur l’asphalte mouillé. Les pieds dans
l’
eau, les jambes fatiguées, les paupières lourdes, et ce chant désespér
360
ets sur l’asphalte mouillé. Les pieds dans l’eau,
les
jambes fatiguées, les paupières lourdes, et ce chant désespéré qui vo
361
illé. Les pieds dans l’eau, les jambes fatiguées,
les
paupières lourdes, et ce chant désespéré qui vous appelait, assourdis
362
était arrêté tout près de moi. Je vis un visage à
l’
intérieur se pencher vers la vitre… Je montai. Il n’y avait que des da
363
i. Je vis un visage à l’intérieur se pencher vers
la
vitre… Je montai. Il n’y avait que des dames. Personne ne parlait. La
364
Il n’y avait que des dames. Personne ne parlait.
La
jeune femme qui s’était penchée vous ressemblait tant. Mais je n’osai
365
ous ressemblait tant. Mais je n’osais presque pas
la
regarder, à cause d’une incertitude qui redonnait tout son empire à m
366
. Peut-être était-ce vous. Je ne saurai jamais. À
l’
arrêt de la Place Saint-Michel, elle sortit, en me frôlant, sans me re
367
était-ce vous. Je ne saurai jamais. À l’arrêt de
la
Place Saint-Michel, elle sortit, en me frôlant, sans me regarder. Je
368
derrière elle. Mais tout de suite des parapluies
la
dérobèrent à mes yeux. Une bouche de métro m’attira. Les rames s’arrê
369
obèrent à mes yeux. Une bouche de métro m’attira.
Les
rames s’arrêtaient avec un sifflement particulièrement doux pour ma f
370
gue, et ces gens pressés et songeurs respectaient
la
folie douloureuse qui devait contracter mon visage. Je promenais sur
371
egards angoissés, avides, implorants. Oh ! toutes
les
femmes que j’ai fait souffrir cette nuit d’un long regard de damné. À
372
je mêlais à mes pensées des fragments de rêves et
les
personnages des affiches, tout en marchant sans fin dans les couloirs
373
ages des affiches, tout en marchant sans fin dans
les
couloirs implacablement brillants, je me pris à parler à haute voix,
374
ases incohérentes. Je voyais avec une sombre joie
les
employés et les voyageurs s’inquiéter. Bientôt on m’entraîna de force
375
s. Je voyais avec une sombre joie les employés et
les
voyageurs s’inquiéter. Bientôt on m’entraîna de force sur un trottoir
376
force sur un trottoir roulant qui me remonta dans
la
rue. La fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis qu
377
r un trottoir roulant qui me remonta dans la rue.
La
fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis que je me
378
ulant qui me remonta dans la rue. La fraîcheur de
la
brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis que je me sentais mieux, o
379
ns la rue. La fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur
la
promesse que je fis que je me sentais mieux, on me laissa rentrer seu
380
t 5 heures du matin. Premiers appels d’autos dans
la
ville, mais il me semble que toutes choses s’éloignent de moi vertigi
381
à rien dans mon esprit. Peut-être que j’ai perdu
la
notion du temps. Je ne me souviens plus que de cette déception insupp
382
tout ce qui me navre au plus intime de mon être…
Le
revolver est chargé, sur cette table. (Je le caresse, entre deux phra
383
tre… Le revolver est chargé, sur cette table. (Je
le
caresse, entre deux phrases.) Mais voici que ce geste de ma mort auss
384
ais voici que ce geste de ma mort aussi me lasse,
l’
image que je m’en forme… Je ne comprends plus pourquoi je devrais me t
385
is me tuer, pourquoi je souffre, ce que c’est que
la
souffrance, ce que c’est que ma vie, ma mort. Mon Dieu, il n’y a plus
386
février 1927)k « Cet âge est sans pitié. » «
Le
véritable symbole n’est jamais prévu par l’auteur », écrivait Cocteau
387
» « Le véritable symbole n’est jamais prévu par
l’
auteur », écrivait Cocteau dans la préface des Mariés de la tour Eiffe
388
amais prévu par l’auteur », écrivait Cocteau dans
la
préface des Mariés de la tour Eiffel. Et une note d’Orphée précise :
389
», écrivait Cocteau dans la préface des Mariés de
la
tour Eiffel. Et une note d’Orphée précise : « Inutile de dire qu’il n
390
tile de dire qu’il n’y a pas un seul symbole dans
la
pièce. » Ce qui me gêne pourtant, c’est d’y découvrir possibles deux
391
au d’en avoir plus ou moins consciemment concerté
la
possibilité. Orphée, par exemple, serait un poète surréaliste. « Il f
392
dale. Il faut un de ces orages qui rafraîchissent
l’
air. » Il prétend « traquer l’inconnu ». Sa femme l’accuse de « vouloi
393
qui rafraîchissent l’air. » Il prétend « traquer
l’
inconnu ». Sa femme l’accuse de « vouloir faire admettre que la poésie
394
air. » Il prétend « traquer l’inconnu ». Sa femme
l’
accuse de « vouloir faire admettre que la poésie consiste à écrire une
395
Sa femme l’accuse de « vouloir faire admettre que
la
poésie consiste à écrire une phrase ». Et cette phrase, c’est un chev
396
se ». Et cette phrase, c’est un cheval savant qui
la
lui a dictée : « Madame Eurydice Reviendra Des Enfers. » — « Ce n’est
397
un poème, un poème du rêve, une fleur du fond de
la
mort. » Or, on découvre à la fin de la pièce que c’est une anagramme
398
une fleur du fond de la mort. » Or, on découvre à
la
fin de la pièce que c’est une anagramme un peu ordurière. Ainsi les r
399
du fond de la mort. » Or, on découvre à la fin de
la
pièce que c’est une anagramme un peu ordurière. Ainsi les rêves publi
400
e que c’est une anagramme un peu ordurière. Ainsi
les
rêves publiés par les surréalistes, donnés à la fois comme poèmes et
401
mme un peu ordurière. Ainsi les rêves publiés par
les
surréalistes, donnés à la fois comme poèmes et comme dictées de l’inc
402
donnés à la fois comme poèmes et comme dictées de
l’
inconscient, au fond desquels on a si vite fait de distinguer les quel
403
au fond desquels on a si vite fait de distinguer
les
quelques préoccupations assez simples dont l’étude charme le psychana
404
er les quelques préoccupations assez simples dont
l’
étude charme le psychanalyste. Je pourrais poursuivre le jeu. Et puis,
405
préoccupations assez simples dont l’étude charme
le
psychanalyste. Je pourrais poursuivre le jeu. Et puis, il y a aussi d
406
e charme le psychanalyste. Je pourrais poursuivre
le
jeu. Et puis, il y a aussi des sortes de calembours… Art chrétien, a
407
crivit certains vers qu’on peut lire plus haut :
Les
anges véritables qui connaissent les signes Sont moins bons acrobates
408
plus haut : Les anges véritables qui connaissent
les
signes Sont moins bons acrobates… (etc.)… Cocteau s’est trop exercé
409
Cocteau s’est trop exercé avant de se lancer sur
la
corde raide. Je suis sûr qu’il ne tombera pas. J’admire sans émoi. ⁂
410
’il ne tombera pas. J’admire sans émoi. ⁂ Certes,
les
qualités scéniques de cette pièce sont grandes. Je ne saurais même in
411
e indiquer aucun endroit par où elle pèche contre
les
principes chers à l’auteur du Secret professionnel et de la préface d
412
it par où elle pèche contre les principes chers à
l’
auteur du Secret professionnel et de la préface des Mariés — principes
413
es chers à l’auteur du Secret professionnel et de
la
préface des Mariés — principes dont l’énoncé brillant et définitif re
414
nnel et de la préface des Mariés — principes dont
l’
énoncé brillant et définitif restera l’un des titres les plus authenti
415
ncé brillant et définitif restera l’un des titres
les
plus authentiques de Cocteau. Précision et relief du dialogue, ingéni
416
liques ; enfin, un style parfaitement pauvre dans
le
détail, un vrai style de théâtre, d’une netteté qui pourtant n’est pa
417
as maigre, d’une familiarité dramatique qui cerne
le
mystère d’un trait pur. Il semble que Cocteau ait réalisé là exacteme
418
ble machine ne m’inquiète guère : je sais qu’elle
le
conduira où il veut, sans surprises. « Puisque ces mystères me dépass
419
que ces mystères me dépassent, feignons d’en être
l’
organisateur », disait le photographe des Mariés. Dans Orphée, le myst
420
sent, feignons d’en être l’organisateur », disait
le
photographe des Mariés. Dans Orphée, le mystère ne peut plus dépasser
421
», disait le photographe des Mariés. Dans Orphée,
le
mystère ne peut plus dépasser l’auteur : il l’a trop bien organisé. E
422
és. Dans Orphée, le mystère ne peut plus dépasser
l’
auteur : il l’a trop bien organisé. En somme, ce qu’il faut reprocher
423
e, le mystère ne peut plus dépasser l’auteur : il
l’
a trop bien organisé. En somme, ce qu’il faut reprocher à Cocteau, c’e
424
lètement une pièce, prouvant une fois de plus que
l’
atmosphère de l’« art pur » n’est pas respirable. Il ne manque rien à
425
ce, prouvant une fois de plus que l’atmosphère de
l’
« art pur » n’est pas respirable. Il ne manque rien à Orphée, sinon pe
426
art de Dieu » — comme dit Gide — qui serait aussi
la
part de l’humain, l’imperfection secrète qui fait naître l’amour. Par
427
» — comme dit Gide — qui serait aussi la part de
l’
humain, l’imperfection secrète qui fait naître l’amour. Parce que la c
428
dit Gide — qui serait aussi la part de l’humain,
l’
imperfection secrète qui fait naître l’amour. Parce que la création es
429
l’humain, l’imperfection secrète qui fait naître
l’
amour. Parce que la création est venue après la théorie. Parce qu’une
430
ection secrète qui fait naître l’amour. Parce que
la
création est venue après la théorie. Parce qu’une fois de plus, Cocte
431
re l’amour. Parce que la création est venue après
la
théorie. Parce qu’une fois de plus, Cocteau a comprimé des pétales de
432
les de roses dans du cristal taillé, selon toutes
les
règles de l’art, mais que l’essence obtenue, si elle est de rose, est
433
ans du cristal taillé, selon toutes les règles de
l’
art, mais que l’essence obtenue, si elle est de rose, est sans parfum.
434
aillé, selon toutes les règles de l’art, mais que
l’
essence obtenue, si elle est de rose, est sans parfum. (Tout de même
435
: j’en verrais une preuve, pour mon compte, dans
le
fait que je ne sais parler de lui autrement que par métaphores.) 5.
436
trement que par métaphores.) 5. M. Zimmer, dans
la
Gazette de Lausanne . Et même il appelait Orphée « une tragédie de l
437
ne . Et même il appelait Orphée « une tragédie de
l’
amour conjugal ». Vraiment, nous n’en demandions pas tant… k. Rougem
438
L’autre œil (février 1927)l m Décembre
L’
époque s’ouvre où l’on attend un miracle pour la fin de la semaine. «
439
ier 1927)l m Décembre L’époque s’ouvre où
l’
on attend un miracle pour la fin de la semaine. « Messieurs, disait Da
440
L’époque s’ouvre où l’on attend un miracle pour
la
fin de la semaine. « Messieurs, disait Dardel, y a pas à tortiller, i
441
s’ouvre où l’on attend un miracle pour la fin de
la
semaine. « Messieurs, disait Dardel, y a pas à tortiller, il faut fai
442
ça semble idiot. Il y a des soirs où une idée de
la
responsabilité s’empare de nous. Et nous calculons qu’il s’agit de dé
443
de déranger 5000 personnes en huit soirées, et de
les
occuper quatre heures durant… Mais la vision, rapidement entrevue par
444
ées, et de les occuper quatre heures durant… Mais
la
vision, rapidement entrevue par chacun dans son for le plus intérieur
445
sion, rapidement entrevue par chacun dans son for
le
plus intérieur, d’une fuite en auto, nous rassure provisoirement…
446
ment… Prosopopée, à propos d’une apparition
La
vieille Monture 6 un soir nous apparut, lugubrement fardée, l’haleine
447
nture 6 un soir nous apparut, lugubrement fardée,
l’
haleine mauvaise, édentée et tâchant à prendre un accent anglais d’un
448
nt d’un doigt impitoyable son flanc déjà meurtri,
la
suivaient en hurlant : « Bas-toi là, bas-toi là ! »… Est-il plus atro
449
onçant de séniles calembours… Pénétrés d’horreur,
les
bellettriens avaient fui. Au détour d’une ivresse, ils rencontrèrent
450
t une créature évadée d’anciens rêves qui hantait
les
limbes depuis un an déjà. Ils ne tardèrent pas à reconnaître Cinémato
451
tre. Ils se réunissent parfois autour d’un feu et
le
contemplent un certain temps en silence. « Well ! », dit enfin Dardel
452
n temps en silence. « Well ! », dit enfin Dardel.
Les
autres n’en pensent pas moins. Quelquefois, Mossoul amène un scénario
453
et à deux faces. Lugin, qui est théologien, et de
la
Tchaux, n’a pas la foi. Topin, Mahomet désabusé, constate que jamais
454
gin, qui est théologien, et de la Tchaux, n’a pas
la
foi. Topin, Mahomet désabusé, constate que jamais « la Montagne » ne
455
i. Topin, Mahomet désabusé, constate que jamais «
la
Montagne » ne saura venir au prophète, même s’il se nomme Mossoul. Po
456
énie vint s’asseoir certaine nuit. Elle parla par
la
bouche de Lugin, sa langue dans la langue de Lugin : « Le rideau se l
457
Elle parla par la bouche de Lugin, sa langue dans
la
langue de Lugin : « Le rideau se lève sur un miroir qui occupe toute
458
e de Lugin, sa langue dans la langue de Lugin : «
Le
rideau se lève sur un miroir qui occupe toute la largeur de la scène.
459
Le rideau se lève sur un miroir qui occupe toute
la
largeur de la scène. Titre : Socrate et Narcisse, un acte à grande fi
460
lève sur un miroir qui occupe toute la largeur de
la
scène. Titre : Socrate et Narcisse, un acte à grande figuration. » En
461
et Narcisse, un acte à grande figuration. » Enfin
l’
on joua aux petits dés le sort de notre parade — et l’on gagna. Enthou
462
ande figuration. » Enfin l’on joua aux petits dés
le
sort de notre parade — et l’on gagna. Enthousiasmé, « Mimosa » partit
463
joua aux petits dés le sort de notre parade — et
l’
on gagna. Enthousiasmé, « Mimosa » partit pour la Riviera afin de négo
464
l’on gagna. Enthousiasmé, « Mimosa » partit pour
la
Riviera afin de négocier la vente de cette martingale avec des surréa
465
Mimosa » partit pour la Riviera afin de négocier
la
vente de cette martingale avec des surréalistes hétérodoxes. Il revin
466
érodoxes. Il revint juste à temps pour assister à
la
cérémonie de la pose du point final de « Cinématoma ou les épanchemen
467
int juste à temps pour assister à la cérémonie de
la
pose du point final de « Cinématoma ou les épanchements de la jeune S
468
onie de la pose du point final de « Cinématoma ou
les
épanchements de la jeune Synovie », parade « née du mariage de nos ve
469
oint final de « Cinématoma ou les épanchements de
la
jeune Synovie », parade « née du mariage de nos veilles et de nos rêv
470
riage de nos veilles et de nos rêves », ainsi que
le
disait si poétiquement le programme. Un peu d’histoire (erratum de la
471
nos rêves », ainsi que le disait si poétiquement
le
programme. Un peu d’histoire (erratum de la chronique de Mossoul). Be
472
ement le programme. Un peu d’histoire (erratum de
la
chronique de Mossoul). Belles-Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à l’
473
de la chronique de Mossoul). Belles-Lettres joua
l’
Inspecteur de Gogol à l’époque où le Cuirassé Potemkine était interdit
474
oul). Belles-Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à
l’
époque où le Cuirassé Potemkine était interdit à l’écran. Pitoëff avai
475
-Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à l’époque où
le
Cuirassé Potemkine était interdit à l’écran. Pitoëff avait prêté un a
476
’époque où le Cuirassé Potemkine était interdit à
l’
écran. Pitoëff avait prêté un accent, Mme d’Assilva deux actrices, M.
477
re dans des jupons autrement que par métaphore. À
La
Chaux-de-Fonds, il y eut trente membres et cent doigts dans deux lits
478
cela fait-il de pieds et d’oreillles ? À signaler
la
fuite de Bec-de-Gaz, lequel s’éteignit dans les neiges. Un jour, on s
479
er la fuite de Bec-de-Gaz, lequel s’éteignit dans
les
neiges. Un jour, on s’aperçut que cette chose avait recommencé, qu’on
480
mmencé, qu’on appelle, sans doute par antiphrase,
la
vie. 6. Revue ou prologue. l. Rougemont Denis de, « L’autre œil
481
Entr’acte de René Clair, ou
L’
éloge du Miracle (mars 1927)n Surprendre est peu de chose, il faut
482
se, il faut transplanter. Max Jacob. Ce soir-là,
le
programme comprenait : un film d’avant-guerre ; un film japonais ; En
483
d’avant-guerre ; un film japonais ; Entr’acte et
le
Voyage imaginaire, de René Clair. La Mort de Phèdre (environ 1905) :
484
ntr’acte et le Voyage imaginaire, de René Clair.
La
Mort de Phèdre (environ 1905) : quelques acteurs d’une troupe de prov
485
ent dans un décor très pauvre, légèrement coloré.
Le
principe est simple : « Je vous aime » se traduit par trois ou quatre
486
aime » se traduit par trois ou quatre claques sur
la
poitrine ; et une crise intérieure par un court accès de danse de Sai
487
ourt accès de danse de Saint-Guy. Art classique :
la
mort d’Hyppolite se passe en coulisse. Mais Phèdre avoue tout « devan
488
asse en coulisse. Mais Phèdre avoue tout « devant
le
cadavre encore tout chaud ». Affreux. Aussi : « Elle mourut. » On voi
489
ourut. » On voit que cette bande est antérieure à
l’
époque du long baiser de conclusion. Le film japonais : une historiett
490
térieure à l’époque du long baiser de conclusion.
Le
film japonais : une historiette un peu plus banale que nature, très b
491
banale que nature, très bien photographiée. C’est
le
film du type « Jeux de soleil dans les jardins, complets variés, ça f
492
hiée. C’est le film du type « Jeux de soleil dans
les
jardins, complets variés, ça fait toujours plaisir de voir des gens b
493
Soudain éclate Entr’acte (1925). « Une étude sur
le
Monde des Rêves ». Rondes de cheminées dans le ciel où des pressentim
494
ur le Monde des Rêves ». Rondes de cheminées dans
le
ciel où des pressentiments clignent de l’œil. Des poupées en baudruch
495
es dans le ciel où des pressentiments clignent de
l’
œil. Des poupées en baudruche gonflent leur tête jusqu’à éclater, tand
496
ne colonnade, puis un jeu d’échec serré, mais sur
la
corniche d’un gratte-ciel, d’où se met à descendre un petit bateau de
497
bateau de papier, sur fond de boulevards et parmi
les
toits flottants, c’est assez tragique. Mitrailleuse de phares d’auto,
498
st assez tragique. Mitrailleuse de phares d’auto,
les
100 000 yeux de la nuit. Des imprécisions rapides. Un chasseur, toujo
499
itrailleuse de phares d’auto, les 100 000 yeux de
la
nuit. Des imprécisions rapides. Un chasseur, toujours sur son toit ;
500
Un chasseur, toujours sur son toit ; il tire sur
l’
œuf d’où naît une colombe. Chasse. Mais un papillon éclatant qui batta
501
Chasse. Mais un papillon éclatant qui battait de
l’
aile un dixième de seconde, par intermittences, se pose enfin sur l’éc
502
de seconde, par intermittences, se pose enfin sur
l’
écran : une danseuse sur une plaque de verre, vue par-dessous. Quelque
503
s qui suivent sont embrumés dans mon souvenir par
le
rayonnement de la robe, fleur qui s’ouvre pour dégager le mouvement o
504
embrumés dans mon souvenir par le rayonnement de
la
robe, fleur qui s’ouvre pour dégager le mouvement obsédant de deux ja
505
nement de la robe, fleur qui s’ouvre pour dégager
le
mouvement obsédant de deux jambes, l’harmonie de leurs arabesques à t
506
our dégager le mouvement obsédant de deux jambes,
l’
harmonie de leurs arabesques à trois dimensions mêlées avec une lenteu
507
une perfection dont une brève vue verticale donne
la
clé… Un enterrement bourgeois, mais le corbillard est traîné par un d
508
cale donne la clé… Un enterrement bourgeois, mais
le
corbillard est traîné par un dromadaire, d’ailleurs dételé. Les amis
509
est traîné par un dromadaire, d’ailleurs dételé.
Les
amis affligés mangent les couronnes et suivent à grands sauts lents,
510
ire, d’ailleurs dételé. Les amis affligés mangent
les
couronnes et suivent à grands sauts lents, solennels. Ils revoient la
511
ent à grands sauts lents, solennels. Ils revoient
la
danseuse, font une ronde autour d’une tour Eiffel de bois de la taill
512
ont une ronde autour d’une tour Eiffel de bois de
la
taille de l’Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Champs-Élysée
513
autour d’une tour Eiffel de bois de la taille de
l’
Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Champs-Élysées à une allur
514
our Eiffel de bois de la taille de l’Obélisque de
la
Concorde, puis enfilent les Champs-Élysées à une allure grandissante,
515
ille de l’Obélisque de la Concorde, puis enfilent
les
Champs-Élysées à une allure grandissante, bientôt vertigineuse, pours
516
e grandissante, bientôt vertigineuse, poursuivant
le
corbillard. Aspects du paysage urbain vu par les poursuivants, arbres
517
t le corbillard. Aspects du paysage urbain vu par
les
poursuivants, arbres au ciel renversé, maisons obliques, montagnes ru
518
. (J’ai regretté que René Clair ne nous donne pas
la
vision du mort.) Enfin le cercueil roule dans les marguerites, il en
519
Clair ne nous donne pas la vision du mort.) Enfin
le
cercueil roule dans les marguerites, il en sort un chef d’orchestre d
520
la vision du mort.) Enfin le cercueil roule dans
les
marguerites, il en sort un chef d’orchestre dont la baguette éteint t
521
marguerites, il en sort un chef d’orchestre dont
la
baguette éteint tous les personnages et lui-même. ⁂ Le tout ne dure p
522
un chef d’orchestre dont la baguette éteint tous
les
personnages et lui-même. ⁂ Le tout ne dure pas 20 minutes. Et c’est h
523
guette éteint tous les personnages et lui-même. ⁂
Le
tout ne dure pas 20 minutes. Et c’est heureux. Nous manquons d’entraî
524
c’est heureux. Nous manquons d’entraînement dans
le
domaine du merveilleux moderne. Un peu plus et nous demandions grâce
525
e de trop de plaisir. Mais je ne suis pas sûr que
le
plaisir du public fût de même essence que le nôtre. Les gens rient à
526
aisir du public fût de même essence que le nôtre.
Les
gens rient à l’enterrement au ralenti, à l’éclatement des têtes de po
527
ût de même essence que le nôtre. Les gens rient à
l’
enterrement au ralenti, à l’éclatement des têtes de poupées, à la conc
528
tre. Les gens rient à l’enterrement au ralenti, à
l’
éclatement des têtes de poupées, à la conclusion. Ce n’est pas le bon
529
u ralenti, à l’éclatement des têtes de poupées, à
la
conclusion. Ce n’est pas le bon rire de cinéma. Quand la danseuse par
530
s têtes de poupées, à la conclusion. Ce n’est pas
le
bon rire de cinéma. Quand la danseuse paraît, ils n’attendent que le
531
lusion. Ce n’est pas le bon rire de cinéma. Quand
la
danseuse paraît, ils n’attendent que le moment où ils pourront se pou
532
ma. Quand la danseuse paraît, ils n’attendent que
le
moment où ils pourront se pousser en disant : « C’que c’est cochon !
533
pousser en disant : « C’que c’est cochon ! » Mais
le
moment ne vient pas, ils sont déçus. Enfin, mon voisin, un agent, mur
534
emple, où nous ne pouvons nous empêcher d’admirer
l’
utilisation artistique ingénieuse et précise de certaines théories sur
535
e ingénieuse et précise de certaines théories sur
le
rêve, le peuple, qui n’a pas vu ces dessous mais accueille le résulta
536
use et précise de certaines théories sur le rêve,
le
peuple, qui n’a pas vu ces dessous mais accueille le résultat avec la
537
peuple, qui n’a pas vu ces dessous mais accueille
le
résultat avec la naïveté qu’il faut, approuve et dit : « C’est bien ç
538
as vu ces dessous mais accueille le résultat avec
la
naïveté qu’il faut, approuve et dit : « C’est bien ça, c’est comme qu
539
uand on rêve. » Un des défauts d’Entr’acte, c’est
la
fantaisie recherchée de certaines scènes (l’enterrement). Cela fait b
540
’est la fantaisie recherchée de certaines scènes (
l’
enterrement). Cela fait bizarre. Or, dans le monde où le cinéma doit n
541
ènes (l’enterrement). Cela fait bizarre. Or, dans
le
monde où le cinéma doit nous « transplanter », un certain naturel est
542
rrement). Cela fait bizarre. Or, dans le monde où
le
cinéma doit nous « transplanter », un certain naturel est de rigueur
543
nsi qualifié : c’est peut-être le premier film où
l’
on a fait du ciné avec des moyens proprement cinégraphiques. Ici le ge
544
né avec des moyens proprement cinégraphiques. Ici
le
geste pictural remplace le geste de l’acteur. Un mouvement ne soulign
545
nt cinégraphiques. Ici le geste pictural remplace
le
geste de l’acteur. Un mouvement ne souligne pas, il exprime, et se su
546
iques. Ici le geste pictural remplace le geste de
l’
acteur. Un mouvement ne souligne pas, il exprime, et se suffit. Mais c
547
ne pas, il exprime, et se suffit. Mais comme pour
le
film 1905, on a sans cesse envie de crier : « Trop de gestes ! » C’es
548
C’est une question d’épuration des moyens. Rendre
le
plus par le moins, c’est le fait d’un art à sa maturité. Mais ce sont
549
estion d’épuration des moyens. Rendre le plus par
le
moins, c’est le fait d’un art à sa maturité. Mais ce sont là critique
550
on des moyens. Rendre le plus par le moins, c’est
le
fait d’un art à sa maturité. Mais ce sont là critiques de style. D’or
551
es de style. D’ores et déjà, il faut admirer dans
les
films de René Clair un sens du miracle assez bouleversant. Et je ne p
552
ne parle pas du miracle genre conte de fée, comme
le
Voyage imaginaire en montre (beaucoup trop à mon gré). Qu’une sorcièr
553
chien, cela n’a rien d’étonnant au cinéma. C’est
la
photographie d’une chose qui ne serait étonnante que dans le réel ; c
554
phie d’une chose qui ne serait étonnante que dans
le
réel ; ce n’est pas encore un miracle de ciné. Et les fées paraissent
555
réel ; ce n’est pas encore un miracle de ciné. Et
les
fées paraissent vieux jeu avec leur baguette, pour moi qui chaque soi
556
soir crée ma chambre en tournant un commutateur.
Le
vrai miracle du cinéma, c’est, par exemple, l’éclosion d’une rose, un
557
r. Le vrai miracle du cinéma, c’est, par exemple,
l’
éclosion d’une rose, un homme qui court au ralenti, certaines coïncide
558
’est une réalité quotidienne dans une lumière qui
la
métamorphose ; c’est un temps nouveau, et l’espace en relation se mod
559
qui la métamorphose ; c’est un temps nouveau, et
l’
espace en relation se modifie pour maintenir je ne sais quelle harmoni
560
elle dont nous avons convenu et que nous pensions
la
seule possible. Le monde « normal » nous apparaît alors comme l’une s
561
s convenu et que nous pensions la seule possible.
Le
monde « normal » nous apparaît alors comme l’une seulement des mille
562
nécessités sociales — nous empêchent de découvrir
la
richesse immédiate. Surréel qui n’est pas synonyme d’incompréhensible
563
on Madame, car alors quoi de plus surréaliste que
le
film 1905. Ce n’est peut-être qu’une question d’imagination ; il rest
564
gineuses, et nous en sommes encore à nous frotter
les
yeux… Peut-être, quand nos regards plus assurés sauront enfin gagner
565
ards plus assurés sauront enfin gagner de vitesse
les
prodiges que déclenche René Clair, verrons-nous, pris par surprise da
566
René Clair, verrons-nous, pris par surprise dans
l’
exploration ivre d’un projecteur, des signes fatidiques, le visage d’u
567
tion ivre d’un projecteur, des signes fatidiques,
le
visage d’un ange. n. Rougemont Denis de, « Entr’acte de René Clai
568
ougemont Denis de, « Entr’acte de René Clair, ou
L’
éloge du Miracle », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève
569
Louis Aragon,
le
beau prétexte (avril 1927)o Ah ! je sens qu’une puissance étrangè
570
ce étrangère s’est emparée de mon être et a saisi
les
cordes les plus secrètes de mon âme, qu’elle peut faire désormais vib
571
e s’est emparée de mon être et a saisi les cordes
les
plus secrètes de mon âme, qu’elle peut faire désormais vibrer à sa fa
572
en décembre 1925, au sortir d’une conférence sur
le
Salut de l’humanité.) Ce soir en moi trépigne une rage. Sur quelles
573
1925, au sortir d’une conférence sur le Salut de
l’
humanité.) Ce soir en moi trépigne une rage. Sur quelles épaules jet
574
es jeter ce manteau de flammes, puis à qui dédier
l’
ennui de ma révolte ? Aragon sarcastique se tient là-bas dans un rayon
575
— auxquels je crois encore, et pas seulement pour
le
pittoresque. — Attrape ! Il n’existe pas de théorie du salut. Il n’
576
’existe que des systèmes pour faire taire en nous
l’
appel vertigineux du Silence. On nous montre des Dieux, mais c’est pou
577
ourner nos regards de cela qu’il faut bien nommer
le
Vide. Tant de séductions nous ont en vain tentés, ô tortures fascinan
578
ous ont en vain tentés, ô tortures fascinantes de
la
sainteté, seules vous nous appelez encore hors de cette voix de l’inf
579
es vous nous appelez encore hors de cette voix de
l’
infini où chancellent parmi les éclairs nos premiers pas. Aragon, dans
580
rs de cette voix de l’infini où chancellent parmi
les
éclairs nos premiers pas. Aragon, dans ces tempêtes de nuits filantes
581
ilantes où s’enfuient, souffles à peine parfumés,
les
vices enlacés aux vertus, c’est un ricanement splendide comme un écla
582
de comme un éclat de rire de condamné à mort et à
l’
éternité. Le diable avait pris des avocats dont les plaidoyers, tissus
583
éclat de rire de condamné à mort et à l’éternité.
Le
diable avait pris des avocats dont les plaidoyers, tissus des mensong
584
l’éternité. Le diable avait pris des avocats dont
les
plaidoyers, tissus des mensonges les plus beaux et des plus mélodieus
585
avocats dont les plaidoyers, tissus des mensonges
les
plus beaux et des plus mélodieuses palinodies, font encore rêver les
586
es plus mélodieuses palinodies, font encore rêver
les
anges écœurés d’azur. Alors un juron mélodramatique, d’une voix tortu
587
ble un anathème sanglant. Louis Aragon, avocat de
l’
infini, annonce l’entrée de l’éternelle anarchiste, la Poésie. On di
588
nglant. Louis Aragon, avocat de l’infini, annonce
l’
entrée de l’éternelle anarchiste, la Poésie. On dit : « Des mots ! »
589
s Aragon, avocat de l’infini, annonce l’entrée de
l’
éternelle anarchiste, la Poésie. On dit : « Des mots ! » au lieu de
590
fini, annonce l’entrée de l’éternelle anarchiste,
la
Poésie. On dit : « Des mots ! » au lieu de « Je ne comprends pas ».
591
rends pas ». On dit : « Je ne comprends pas », et
l’
on pense : « C’est donc incompréhensible ». On dit : « C’est incompréh
592
ble ». On dit : « C’est incompréhensible ! » — et
l’
on est enfin rassuré. C’est incompréhensible !, trois mots dont l’un
593
vos glandes salivaires, pourtant si éprouvées par
le
repas dont vous sortez, que ces trois mots où se résume la défense de
594
dont vous sortez, que ces trois mots où se résume
la
défense de la loi sociale, patriotique, religieuse (?) et ci-devant m
595
ez, que ces trois mots où se résume la défense de
la
loi sociale, patriotique, religieuse (?) et ci-devant morale qui prot
596
rallumez votre cigare. Vous vous êtes assuré que
la
porte ferme bien sur l’infini. Rien à craindre de ce côté. Retournez
597
Vous vous êtes assuré que la porte ferme bien sur
l’
infini. Rien à craindre de ce côté. Retournez à vos amours. ..........
598
........ Solitude, antichambre du ciel. À travers
l’
amour ou la poésie — et d’autres, à travers les déserts de la sainteté
599
litude, antichambre du ciel. À travers l’amour ou
la
poésie — et d’autres, à travers les déserts de la sainteté que hanten
600
ers l’amour ou la poésie — et d’autres, à travers
les
déserts de la sainteté que hantent les fantômes adorables du désir, —
601
la poésie — et d’autres, à travers les déserts de
la
sainteté que hantent les fantômes adorables du désir, — quelques homm
602
à travers les déserts de la sainteté que hantent
les
fantômes adorables du désir, — quelques hommes y pénètrent, et le goû
603
ables du désir, — quelques hommes y pénètrent, et
le
goût de s’amuser ne renaîtra plus en eux. Ni même celui de souffrir.
604
elui de souffrir. Le dernier rire d’Aragon, c’est
l’
éclat de sa joie brusque d’être seul sur un faux sommet vers quoi des
605
s’efforcent — mais déjà c’est de plus loin qu’il
les
nargue. Il connaît enfin une solitude défendue de tous côtés par ses
606
quelques « goujateries » affectées par mépris de
l’
honneur, le mot de Cambronne prodigué et des phrases d’un fascinant éc
607
goujateries » affectées par mépris de l’honneur,
le
mot de Cambronne prodigué et des phrases d’un fascinant éclat : « Ô g
608
quitte plus, attiré par les premiers sophismes de
l’
aurore, ces corniches de craie où t’accoudant tu mêles tes traits purs
609
t’accoudant tu mêles tes traits purs et labiles à
l’
immobilité miraculeuse des statues7. » Il s’agit bien de critique litt
610
ci en présence d’une des tentatives de libération
les
plus violentes et belles — malgré tant de maladresses dédaigneuses, d
611
ravades et de faciles tricheries8 — qu’ait connue
l’
esprit humain. Sens de l’Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de l’e
612
cheries8 — qu’ait connue l’esprit humain. Sens de
l’
Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de l’esprit. Jusqu’au-boutisme
613
connue l’esprit humain. Sens de l’Absolu, sens de
la
pureté ou fanatisme de l’esprit. Jusqu’au-boutisme désespéré. « Il s’
614
ns de l’Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de
l’
esprit. Jusqu’au-boutisme désespéré. « Il s’agit de rendre impraticabl
615
rtie » ou compromis : « Nous étions dominés par
le
sens d’une réalité morale absolue que certains d’entre nous eussent a
616
martyre… Nos jugements se rendaient sans cesse à
l’
échelle de l’infini, et cet infini nous écrasait. Comment aurions-nous
617
jugements se rendaient sans cesse à l’échelle de
l’
infini, et cet infini nous écrasait. Comment aurions-nous accepté le s
618
nfini nous écrasait. Comment aurions-nous accepté
le
sort communément heureux de nos contemporains qui ont puisé dans Augu
619
omte cette tranquillité de rejeter définitivement
les
problèmes métaphysiques ? » Nous naissons à quelque chose qui imite
620
ues ? » Nous naissons à quelque chose qui imite
la
vie dans une époque d’inconcevables compromissions où triomphe sous t
621
nconcevables compromissions où triomphe sous tous
les
déguisements, de Ford à Clément Vautel, le matérialisme le plus pauvr
622
tous les déguisements, de Ford à Clément Vautel,
le
matérialisme le plus pauvre auquel se soit jamais abaissée une civili
623
ements, de Ford à Clément Vautel, le matérialisme
le
plus pauvre auquel se soit jamais abaissée une civilisation. Mais nou
624
rniers atouts sur notre salut. Nous courons enfin
l’
Aventure. « Le salut pour nous n’est nulle part9 ». Ultime affirmation
625
sur notre salut. Nous courons enfin l’Aventure. «
Le
salut pour nous n’est nulle part9 ». Ultime affirmation d’une foi que
626
rien ne peut duper. Depuis certaines paroles sur
la
Croix, il n’y a peut-être pas eu d’expression plus haute de l’angoiss
627
n’y a peut-être pas eu d’expression plus haute de
l’
angoisse humaine, et vous aurez beau rire, pharisiens, et dire qu’elle
628
et vous, dubitatives barbes. Je viens d’entendre
la
voix d’un mystique. Que si l’on vient nous empêtrer de dogmes basseme
629
Je viens d’entendre la voix d’un mystique. Que si
l’
on vient nous empêtrer de dogmes bassement ingénieux : « Si j’essaie u
630
ngénieux : « Si j’essaie un instant de m’élever à
la
notion de Dieu, répond Aragon, je me révolte qu’elle puisse en aucun
631
nts ! Jouant tout sur une révélation possible, ou
la
naissance d’un prophète qui rapprenne comment aimer un Dieu. Ce n’est
632
eût un sens, il faudrait être sûr de n’avoir pas
la
tête en bas par rapport au soleil. Quelques gestes encore, intercepta
633
t au soleil. Quelques gestes encore, interceptant
les
messages égarés de l’infini… Un tel homme, — est-ce encore Aragon, s
634
estes encore, interceptant les messages égarés de
l’
infini… Un tel homme, — est-ce encore Aragon, sinon qui ? — sa grande
635
pages écrites il y a un an, tel soir de colère où
le
thermomètre eût indiqué 39° selon toute vraisemblance. Et voici Arago
636
erait sans doute un peu ridicule. C’est ainsi que
l’
on arrive à croire, pour un autre, que c’est arrivé, ajoutant foi, dan
637
autre, que c’est arrivé, ajoutant foi, dans tous
les
sens qu’admet ce terme, à des exaltations que leur lyrisme rendait se
638
ules contagieuses. Comment, en effet, ne pas voir
la
part de littérature que renferme cette œuvre, et qui fait, en dépit d
639
fait, en dépit des prétentions désobligeantes de
l’
auteur, son incontestable « séduction ». Pour un peu, je découvrais un
640
un brin janséniste chez ce poète. Aujourd’hui, je
le
verrais plutôt comme un Musset10 plus véritablement désespéré. Un Mus
641
ynisme verbeux 1830, une théorie du scandale pour
le
scandale qui a le mérite de n’être pas qu’un jeu littéraire. Mais enf
642
0, une théorie du scandale pour le scandale qui a
le
mérite de n’être pas qu’un jeu littéraire. Mais enfin, c’est encore u
643
ment vif, insolent et ombrageux. « J’appartiens à
la
grande race des torrents. » Une belle phrase, n’est-ce pas ? Je ne sa
644
e pas ? Je ne sais qu’un Montherlant qui pourrait
l’
oser dire comme Aragon sans ridicule. Et ce que je prenais pour le ton
645
e Aragon sans ridicule. Et ce que je prenais pour
le
ton prophétique, ne serait-ce pas plutôt une sorte de donquichottisme
646
une sorte de donquichottisme assez fréquent dans
les
cafés littéraires et dont il serait le premier à s’amuser ? Février
647
user ? Février 1927. Relu Une vague de rêves et
la
préface de Libertinage. Sous une certaine rhétorique — mais la plus b
648
Libertinage. Sous une certaine rhétorique — mais
la
plus belle, — ce qui tressaille et m’atteint au vif, c’est tout de mê
649
en quoi je ne vais pas m’empêcher de reconnaître
la
voix secrète de notre mal de vivre. Désespoir métaphysique. Je me sou
650
de Vinet — laissons s’esclaffer du rapprochement
les
auteurs de manuels de littérature — : « Un mysticisme creux et affamé
651
ttérature — : « Un mysticisme creux et affamé est
le
contrecoup du christianisme dans les âmes profondes ou délicates qui
652
et affamé est le contrecoup du christianisme dans
les
âmes profondes ou délicates qui ne sont pas devenues chrétiennes. » «
653
licates qui ne sont pas devenues chrétiennes. » «
Le
salut pour nous n’est nulle part. » Nulle part, pensais-je : le salut
654
nous n’est nulle part. » Nulle part, pensais-je :
le
salut n’est pas là, ou là, à Rome, à Athènes, à Moscou, dans cette do
655
droite, à gauche, — nulle part sur cette terre où
l’
orgueil des hommes croit pouvoir nous le désigner, veut nous l’imposer
656
terre où l’orgueil des hommes croit pouvoir nous
le
désigner, veut nous l’imposer pour quelles fins assez basses, nous le
657
hommes croit pouvoir nous le désigner, veut nous
l’
imposer pour quelles fins assez basses, nous le savons… Mais pour Arag
658
us l’imposer pour quelles fins assez basses, nous
le
savons… Mais pour Aragon, ce n’est point façon de parler. Son « nulle
659
e « globe d’attente » comme dit Crevel. Pourtant,
le
plus irrévocable désespoir n’est encore qu’un appel à la foi la plus
660
irrévocable désespoir n’est encore qu’un appel à
la
foi la plus haute. 1er mai 1927. Mieux vaut pécher par ridicule qu
661
cable désespoir n’est encore qu’un appel à la foi
la
plus haute. 1er mai 1927. Mieux vaut pécher par ridicule que par s
662
e que par scepticisme ; par excès que par défaut.
L’
enthousiasme trompe moins que le bon sens. Don Quichotte est tout de m
663
s que par défaut. L’enthousiasme trompe moins que
le
bon sens. Don Quichotte est tout de même moins misérable que Clément
664
lle n’a pas mérité du premier coup qu’on se donne
la
peine de l’écraser, — c’est qu’il symbolise tout cet état d’esprit «
665
mérité du premier coup qu’on se donne la peine de
l’
écraser, — c’est qu’il symbolise tout cet état d’esprit « bien Parisie
666
de récentes statistiques de librairie montrèrent
les
ravages bien plus étendus qu’on n’osait le craindre11. Si dans un ess
667
èrent les ravages bien plus étendus qu’on n’osait
le
craindre11. Si dans un essai sur la sincérité j’ai soutenu qu’une int
668
qu’on n’osait le craindre11. Si dans un essai sur
la
sincérité j’ai soutenu qu’une introspection immobile ne retient rien
669
qu’une introspection immobile ne retient rien de
la
réalité vivante ; si je dénie à des incrédules le droit à parler des
670
la réalité vivante ; si je dénie à des incrédules
le
droit à parler des choses de la foi comme étant d’un ordre qui leur é
671
à des incrédules le droit à parler des choses de
la
foi comme étant d’un ordre qui leur échappe ; de même je récuse ici c
672
critique dont on voudrait que soient justiciables
les
œuvres d’un écrivain, les démarches de sa pensée, ses délires, ses vi
673
que soient justiciables les œuvres d’un écrivain,
les
démarches de sa pensée, ses délires, ses visions. Un critique qui n’é
674
élires, ses visions. Un critique qui n’épouse pas
le
rythme d’une œuvre, mais s’avance à sa rencontre armé de l’appareil à
675
d’une œuvre, mais s’avance à sa rencontre armé de
l’
appareil à frigorifier de sa raison, est destiné à dire des bêtises. C
676
présenter… d’ailleurs une ancienne connaissance…
le
Sens Critique. Moi (gêné)… Rougemont. Le Sens Critique. — Il y a un
677
sance… le Sens Critique. Moi (gêné)… Rougemont.
Le
Sens Critique. — Il y a un certain temps déjà que nous ne nous sommes
678
t. Seulement, mon cher Monsieur, nous n’avons pas
le
temps ces jours-ci, beaucoup trop à faire, beaucoup trop d’êtres et d
679
suppose. Comprenez-moi : submergés, absolument…
Le
Sens Critique. — Justement j’aurais en quelque manière la prétention…
680
Critique. — Justement j’aurais en quelque manière
la
prétention… Moi. — Que voilà un singulier impertinent de votre part.
681
ue voilà un singulier impertinent de votre part. (
Le
reconduisant :) Croyez, Monsieur, à mon estime la plus vive. Mais déc
682
Le reconduisant :) Croyez, Monsieur, à mon estime
la
plus vive. Mais décidément nous sommes débordés, voyez vous-même, pas
683
ut rien faire sans vous. Mais n’oubliez pas que «
l’
artiste serait peu de chose s’il ne spéculait sur l’incertain », c’est
684
artiste serait peu de chose s’il ne spéculait sur
l’
incertain », c’est un académicien qui l’a dit. Voulez-vous me faire qu
685
ulait sur l’incertain », c’est un académicien qui
l’
a dit. Voulez-vous me faire quelque chose là-dessus pour la Revue ? Ma
686
Voulez-vous me faire quelque chose là-dessus pour
la
Revue ? Mais plus tard, plus tard. Tenez, voici un traité de métaphys
687
ndant. Très bien fait. Excellente méthode ! (Sort
le
Sens Critique, un peu bousculé.) Moi. — Vous disiez, ma vie ? La Mu
688
un peu bousculé.) Moi. — Vous disiez, ma vie ?
La
Muse (mais oui, la Muse, sortant de derrière un rideau). — J’attends
689
Moi. — Vous disiez, ma vie ? La Muse (mais oui,
la
Muse, sortant de derrière un rideau). — J’attends votre plaisir… I
690
qui croient avoir tout dit quand ils ont montré à
l’
origine de telle doctrine mystique une exaltation nerveuse ou des trou
691
oubles organiques. Ils opposent à ces « délires »
les
thèses rassurantes de la « saine raison », sans se demander jamais si
692
osent à ces « délires » les thèses rassurantes de
la
« saine raison », sans se demander jamais si cela ne condamne pas et
693
ans se demander jamais si cela ne condamne pas et
la
santé et la raison. Il s’est trouvé des Maurras et autres « héritiers
694
der jamais si cela ne condamne pas et la santé et
la
raison. Il s’est trouvé des Maurras et autres « héritiers de la grand
695
s’est trouvé des Maurras et autres « héritiers de
la
grande tradition gréco-latine » pour assigner à Minerve le bassin de
696
tradition gréco-latine » pour assigner à Minerve
le
bassin de la Méditerranée comme promenoir, avec défense sous peine de
697
éco-latine » pour assigner à Minerve le bassin de
la
Méditerranée comme promenoir, avec défense sous peine de mort de s’en
698
naire. Vous tracez des frontières géographiques à
la
raison ? Eh bien, c’est vous qui l’aurez voulu, mais tant pis, nous s
699
ographiques à la raison ? Eh bien, c’est vous qui
l’
aurez voulu, mais tant pis, nous serons du Nord. Nous serons romantiqu
700
rdonnés, brumeux, absurdes, vivants, libres. Avec
la
poésie contre vos principes. Avec l’esprit contre votre raison. Et av
701
libres. Avec la poésie contre vos principes. Avec
l’
esprit contre votre raison. Et avec Aragon lorsqu’il vous crie : « À b
702
son. Et avec Aragon lorsqu’il vous crie : « À bas
le
clair génie français. » Alors la voix de Rimbardp à la cantonade : Q
703
s crie : « À bas le clair génie français. » Alors
la
voix de Rimbardp à la cantonade : Qu’il vienne, qu’il vienne Le temp
704
air génie français. » Alors la voix de Rimbardp à
la
cantonade : Qu’il vienne, qu’il vienne Le temps dont on s’éprenne !
705
ardp à la cantonade : Qu’il vienne, qu’il vienne
Le
temps dont on s’éprenne ! Les œuvres les plus significatives de ce
706
enne, qu’il vienne Le temps dont on s’éprenne !
Les
œuvres les plus significatives de ce siècle sont écrites en haine de
707
vienne Le temps dont on s’éprenne ! Les œuvres
les
plus significatives de ce siècle sont écrites en haine de l’époque12.
708
nificatives de ce siècle sont écrites en haine de
l’
époque12. Le reproche d’obscurité que l’on fait à la littérature moder
709
de ce siècle sont écrites en haine de l’époque12.
Le
reproche d’obscurité que l’on fait à la littérature moderne n’est qu’
710
haine de l’époque12. Le reproche d’obscurité que
l’
on fait à la littérature moderne n’est qu’une manifestation de ce divo
711
époque12. Le reproche d’obscurité que l’on fait à
la
littérature moderne n’est qu’une manifestation de ce divorce radical
712
qu’une manifestation de ce divorce radical entre
l’
époque et les quelques centaines (?) d’individus pour qui l’esprit est
713
festation de ce divorce radical entre l’époque et
les
quelques centaines (?) d’individus pour qui l’esprit est la seule réa
714
t les quelques centaines (?) d’individus pour qui
l’
esprit est la seule réalité. C’est pourquoi nous ne pourrons plus sépa
715
s centaines (?) d’individus pour qui l’esprit est
la
seule réalité. C’est pourquoi nous ne pourrons plus séparer du concep
716
rquoi nous ne pourrons plus séparer du concept de
l’
esprit celui de Révolution. Et j’entends ce mot dans son sens le plus
717
de Révolution. Et j’entends ce mot dans son sens
le
plus vaste. Il y a eu quatre-vingt-treize, la Réforme, Karl Marx, la
718
ens le plus vaste. Il y a eu quatre-vingt-treize,
la
Réforme, Karl Marx, la préface de Cromwell. Mais il ne s’agit pas de
719
a eu quatre-vingt-treize, la Réforme, Karl Marx,
la
préface de Cromwell. Mais il ne s’agit pas de refaire notre petite ré
720
ltaire, etc., et tout ce qui leur correspond dans
l’
ordre politique par exemple. Parce que c’est très beau, ridiculement,
721
ne dites pas aussi merde pour Marx ou Lénine, je
le
dirai pour vous. Quand on a entrepris la Révolution au nom de l’espri
722
nine, je le dirai pour vous. Quand on a entrepris
la
Révolution au nom de l’esprit, on ne va pas s’acoquiner avec des gens
723
ous. Quand on a entrepris la Révolution au nom de
l’
esprit, on ne va pas s’acoquiner avec des gens qui ont fait, il y a 10
724
ne pouvez vous libérer de cette manie française,
la
politique, et ne voyez-vous pas que c’est faire le jeu de vos ennemis
725
a politique, et ne voyez-vous pas que c’est faire
le
jeu de vos ennemis de discuter avec eux dans leur langue et de crier
726
avec eux dans leur langue et de crier rouge pour
la
simple raison qu’ils ont dit blanc ? Pensez-vous combattre cet esprit
727
socie à tant d’objets de votre mépris, en prenant
le
contre-pied de tout ce qu’il inspire ? Alors que cette réaction même
728
leurs… Mais non, il y aurait trop à dire, et puis
l’
on croirait encore que je suis avec ceux qui traitent Aragon, Breton e
729
arceurs, de chacals, de déments. Et puis surtout,
l’
heure est venue de clore des discussions énervantes où s’épuise vainem
730
vantes où s’épuise vainement une dialectique dont
l’
objet fuit sans cesse par la quatrième dimension. Aragon et les surréa
731
sans cesse par la quatrième dimension. Aragon et
les
surréalistes auront raison même encore s’ils ont tort, envers et cont
732
me encore s’ils ont tort, envers et contre toutes
les
critiques qu’on pourrait leur adresser, parce que ces « maudits » ont
733
rait leur adresser, parce que ces « maudits » ont
la
grâce, parce qu’ils sont la vie, même quand ils appellent la mort, pa
734
e ces « maudits » ont la grâce, parce qu’ils sont
la
vie, même quand ils appellent la mort, parce qu’ils ont la passion et
735
arce qu’ils sont la vie, même quand ils appellent
la
mort, parce qu’ils ont la passion et l’incommunicable secret de l’inv
736
ême quand ils appellent la mort, parce qu’ils ont
la
passion et l’incommunicable secret de l’invention. Il nous faut des
737
appellent la mort, parce qu’ils ont la passion et
l’
incommunicable secret de l’invention. Il nous faut des entrepreneurs
738
’ils ont la passion et l’incommunicable secret de
l’
invention. Il nous faut des entrepreneurs de tempêtes. Un grand pri
739
à nos mœurs. … et nous portant dans nos actions à
la
limite de nos forces, notre joie parmi vous fut une très grande joie.
740
ons acquises, sièges faits, autorités fondées sur
la
gloire et la sénilité, etc., etc. Et certes ce n’étaient pas des être
741
sièges faits, autorités fondées sur la gloire et
la
sénilité, etc., etc. Et certes ce n’étaient pas des êtres, mais leurs
742
ine morale ne venait-elle pas de ce qu’en son nom
l’
on mesurait odieusement une sympathie humaine pour nous sans prix ? Ma
743
lus grandes que nous. Nous nous connaissions dans
les
coins et nous mourions d’ennui avec les aspects irrévocablement prévu
744
ions dans les coins et nous mourions d’ennui avec
les
aspects irrévocablement prévus de nous-mêmes que faisaient paraître l
745
ement prévus de nous-mêmes que faisaient paraître
les
petits faits de nos longues journées. Nous aimions la révolution comm
746
etits faits de nos longues journées. Nous aimions
la
révolution comme on aime l’amour. Nous n’aimions pas telle révolution
747
ournées. Nous aimions la révolution comme on aime
l’
amour. Nous n’aimions pas telle révolution — la russe, par exemple — p
748
me l’amour. Nous n’aimions pas telle révolution —
la
russe, par exemple — parce que ce n’est pas encore assez révolution ;
749
asseoir et que son siège était fait. Nous aimions
la
Révolution qui nous perdrait corps et biens dans sa grandeur comme un
750
emme merveilleuse nous perdrait corps et âme dans
l’
ivresse amoureuse ; nous cherchions cette Révolution de toutes nos for
751
ns, comme on cherche cette femme à travers toutes
les
femmes. C’était un vice, la révolution-vice. Mais on ne vit, on ne me
752
mme à travers toutes les femmes. C’était un vice,
la
révolution-vice. Mais on ne vit, on ne meurt que de vices. ⁂ Ici le
753
Mais on ne vit, on ne meurt que de vices. ⁂ Ici
le
lecteur se rassure. « Il s’y retrouve. » Il pense que c’est bien jeun
754
que c’est bien jeune. Et : encore un qui rue dans
les
brancards, c’est très bellettrien. Un disque de gramo comme par hasar
755
us fait ça Plus ou moins, n’est-ce pas ? Et puis
l’
aiguille divague vers des souvenirs, quand nous allions tous deux, ces
756
ort des suites. Quand cesserez-vous de nous faire
la
jambe, pardon escuses, avec ce thème à condamnations par contumace. I
757
ns par contumace. Il y a encore des gens pour qui
les
limites de l’anarchie sont : chanter l’Internationale dans les rues,
758
e. Il y a encore des gens pour qui les limites de
l’
anarchie sont : chanter l’Internationale dans les rues, faire la noce,
759
pour qui les limites de l’anarchie sont : chanter
l’
Internationale dans les rues, faire la noce, écrire un livre de tendan
760
e l’anarchie sont : chanter l’Internationale dans
les
rues, faire la noce, écrire un livre de tendances très modernes. Et d
761
t : chanter l’Internationale dans les rues, faire
la
noce, écrire un livre de tendances très modernes. Et des gens pour se
762
i nous en voulons, et finalement nous écraser par
l’
évidence définitive de notre absurdité. Car l’homme « s’est fait une v
763
par l’évidence définitive de notre absurdité. Car
l’
homme « s’est fait une vérité changeante et toujours évidente, de laqu
764
est plus détruire, ce n’est plus combattre, c’est
l’
épanouissement violent d’une immense fleur palpitante au parfum de pas
765
es dangereux. Un orage de tendresse va crever sur
le
monde. Aigles d’amours, oiseaux doux et cruels, nous parlerons vos la
766
ue des valeurs de passion. Balayez ces douanes de
l’
esprit, proclamez le grand Libre-Échange, voici déjà s’avancer des pro
767
ssion. Balayez ces douanes de l’esprit, proclamez
le
grand Libre-Échange, voici déjà s’avancer des prodiges à cette invite
768
voici déjà s’avancer des prodiges à cette invite
la
plus persuasive : nous sommes prêts à les accueillir. 7. Une vague
769
e invite la plus persuasive : nous sommes prêts à
les
accueillir. 7. Une vague de rêves (dans Commerce). 8. Et malgré c
770
perficielles et hâtives, comme cette prétention à
la
libération par le Rêve. « La liberté commence où naît le merveilleux.
771
tives, comme cette prétention à la libération par
le
Rêve. « La liberté commence où naît le merveilleux. » Au vrai, et sur
772
e cette prétention à la libération par le Rêve. «
La
liberté commence où naît le merveilleux. » Au vrai, et surtout pour u
773
ration par le Rêve. « La liberté commence où naît
le
merveilleux. » Au vrai, et surtout pour un homme qui élit Freud « pré
774
rtout pour un homme qui élit Freud « président de
la
République du Rêve » – c’est presque un non-sens de chercher l’absolu
775
du Rêve » – c’est presque un non-sens de chercher
l’
absolue liberté dans le rêve. Le rêve, c’est la tyrannie des souvenirs
776
ue un non-sens de chercher l’absolue liberté dans
le
rêve. Le rêve, c’est la tyrannie des souvenirs ; et ce n’est pas se l
777
-sens de chercher l’absolue liberté dans le rêve.
Le
rêve, c’est la tyrannie des souvenirs ; et ce n’est pas se libérer qu
778
er l’absolue liberté dans le rêve. Le rêve, c’est
la
tyrannie des souvenirs ; et ce n’est pas se libérer que de brasser ce
779
onores. 9. Lettre à Paul Claudel. 10. Musset de
La
coupe et les lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres les p
780
Lettre à Paul Claudel. 10. Musset de La coupe et
les
lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres les plus répandus
781
pe et les lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11.
Les
livres les plus répandus à Genève sont Ma vie et mon œuvre de Ford et
782
èvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres
les
plus répandus à Genève sont Ma vie et mon œuvre de Ford et Mon curé c
783
sont Ma vie et mon œuvre de Ford et Mon curé chez
les
riches. Très loin derrière viennent des France et des Bordeaux. 12.
784
lus étroit, quelques esthètes du machinisme. 13.
Le
Paysan de Paris. o. Rougemont Denis de, « Louis Aragon, le beau pré
785
e Paris. o. Rougemont Denis de, « Louis Aragon,
le
beau prétexte », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-F
786
ibourg, avril 1927, p. 131-144. p. On a conservé
la
graphie de l’original, sans doute voulue par l’auteur.
787
1927, p. 131-144. p. On a conservé la graphie de
l’
original, sans doute voulue par l’auteur.
788
é la graphie de l’original, sans doute voulue par
l’
auteur.
789
Quatre incidents (avril 1927)q r
La
maîtresse d’École Au printemps pur comme une joue, École errait, É
790
joue, École errait, École suivait une femme dans
les
rues tant soit peu métaphysiques d’une capitale de mes songes. On exi
791
t évanouis des arcs-en-ciel de névroses dans tous
les
poèmes où détresse rimait avec maîtresse. École savait le mythe du vo
792
s où détresse rimait avec maîtresse. École savait
le
mythe du voyage, et qu’on ne manque pas le train bleu d’un désir. Ell
793
savait le mythe du voyage, et qu’on ne manque pas
le
train bleu d’un désir. Elle était donc venue. Il la suivait entre les
794
train bleu d’un désir. Elle était donc venue. Il
la
suivait entre les devantures qui se passaient de l’une à l’autre deux
795
désir. Elle était donc venue. Il la suivait entre
les
devantures qui se passaient de l’une à l’autre deux séries de profils
796
qu’au soleil toujours de face. Il ne vit plus que
la
foule des yeux bleus, son éblouissement. Soudain la voici, elle desce
797
foule des yeux bleus, son éblouissement. Soudain
la
voici, elle descend à sa rencontre parmi les éclairs d’un luxe mécani
798
udain la voici, elle descend à sa rencontre parmi
les
éclairs d’un luxe mécanique, le visage dans sa fourrure. Elle découvr
799
rencontre parmi les éclairs d’un luxe mécanique,
le
visage dans sa fourrure. Elle découvre en passant près de lui le sour
800
sa fourrure. Elle découvre en passant près de lui
le
sourire d’amitié mortel de tout ce qui n’arrive jamais. Il s’est trom
801
Il pensa que c’était un ange, de ceux qui vont à
la
recherche des âmes. Aussitôt il téléphone à ceux du paradis : « Qui v
802
sitôt il téléphone à ceux du paradis : « Qui va à
la
chasse perd sa place, nous nous comprenons. » On lui offrit immédiate
803
À Max-Marc-Jean Jacob Reymond. Une étoile à
la
boutonnière, le marquis pénétra dans le salon de la duchesse, lui bai
804
ean Jacob Reymond. Une étoile à la boutonnière,
le
marquis pénétra dans le salon de la duchesse, lui baisa la main et l’
805
étoile à la boutonnière, le marquis pénétra dans
le
salon de la duchesse, lui baisa la main et l’abattit d’un coup de rev
806
boutonnière, le marquis pénétra dans le salon de
la
duchesse, lui baisa la main et l’abattit d’un coup de revolver. Puis
807
s pénétra dans le salon de la duchesse, lui baisa
la
main et l’abattit d’un coup de revolver. Puis s’en fut avec un tact e
808
ans le salon de la duchesse, lui baisa la main et
l’
abattit d’un coup de revolver. Puis s’en fut avec un tact exquis, qui
809
n fut avec un tact exquis, qui fut très remarqué.
Le
duc riait sous une table, complètement ivre, et Bettina lui disait à
810
table, complètement ivre, et Bettina lui disait à
l’
oreille : « Mon chéri, si j’aime la comtesse ? Mais tu es si laid que
811
a lui disait à l’oreille : « Mon chéri, si j’aime
la
comtesse ? Mais tu es si laid que cela me donne encore plus de plaisi
812
laid que cela me donne encore plus de plaisir. »
Le
duc paya et s’enfuit en disant que ce n’était pas lui. L’enterrement
813
aya et s’enfuit en disant que ce n’était pas lui.
L’
enterrement aura lieu sans suite. Suicide du Marquis Salomon le
814
lieu sans suite. Suicide du Marquis Salomon
le
danseur triste baisa cette main cruelle… et quitta le bal au matin. I
815
anseur triste baisa cette main cruelle… et quitta
le
bal au matin. Il neigeait dans les rues sourdes comme un songe de son
816
elle… et quitta le bal au matin. Il neigeait dans
les
rues sourdes comme un songe de son enfance. Aux fenêtres du palais s’
817
e. Aux fenêtres du palais s’étoilèrent des halos.
Le
jour tendre paraissait sous l’égide de la mort. Il vit des fleurs de
818
ilèrent des halos. Le jour tendre paraissait sous
l’
égide de la mort. Il vit des fleurs de son enfance, une églantine, que
819
halos. Le jour tendre paraissait sous l’égide de
la
mort. Il vit des fleurs de son enfance, une églantine, quelques roses
820
e églantine, quelques roses, un sourire qui perce
le
cœur sur les glaces du passé. Cet abandon aux fuyantes chansons, et d
821
quelques roses, un sourire qui perce le cœur sur
les
glaces du passé. Cet abandon aux fuyantes chansons, et des violons dé
822
ons, et des violons déchirants dans sa tête… Mais
le
sommeil s’évaporait aux caresses des flocons, plus perfides que des m
823
perfides que des murmures d’adieu. Il tomba parmi
les
statues, dans l’amitié pensive des jardins. Une fenêtre s’était ouver
824
urmures d’adieu. Il tomba parmi les statues, dans
l’
amitié pensive des jardins. Une fenêtre s’était ouverte et des accords
825
’était ouverte et des accords échappés tombaient,
les
ailes coupées. Puis le silence se reprit à ses songes désolés. Aut
826
cords échappés tombaient, les ailes coupées. Puis
le
silence se reprit à ses songes désolés. Autre suicide ou la promen
827
reprit à ses songes désolés. Autre suicide ou
la
promenade en bateau À Grego More. Il disait : « Je suis né pour
828
À Grego More. Il disait : « Je suis né pour
la
mort. » Il fait assez beau pour que s’ouvre ce cœur de l’après-midi,
829
» Il fait assez beau pour que s’ouvre ce cœur de
l’
après-midi, comme un camélia de tendre orgueil. Il respire déjà l’odeu
830
mme un camélia de tendre orgueil. Il respire déjà
l’
odeur merveilleuse des objets et des êtres véritables. Un bateau ne gl
831
bles. Un bateau ne glisse pas plus doucement vers
le
soleil du haut-lac. Justement, voici que tout va s’ouvrir, qu’un mond
832
s’ouvrir, qu’un monde s’est ouvert devant lui. Et
l’
eau n’est pas moins somptueuse. Et bien sûr, je n’ai pas bougé. C’est
833
me rendre seul et sans argent. Je ne voulais pas
le
retenir, Je ne pouvais pas le suivre. On dit de ces phrases. Même, on
834
. Je ne voulais pas le retenir, Je ne pouvais pas
le
suivre. On dit de ces phrases. Même, on en pleure. q. Rougemont D
835
mmerce, qu’on m’a appris à voler. Aristophane («
Les
Chevaliers »). Dès qu’on eut déposé devant Isidore un malaga et une
836
inérale devant son étrange convive, celui-ci prit
la
parole sans plus de cérémonie : « La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse
837
elui-ci prit la parole sans plus de cérémonie : «
La
jeunesse, Monsieur…, la jeunesse est l’âge où l’on atteint la vie. On
838
ans plus de cérémonie : « La jeunesse, Monsieur…,
la
jeunesse est l’âge où l’on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans,
839
monie : « La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse est
l’
âge où l’on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans, dix ans au plus
840
La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse est l’âge où
l’
on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans, dix ans au plus. Après,
841
Monsieur…, la jeunesse est l’âge où l’on atteint
la
vie. On s’y maintient cinq ans, dix ans au plus. Après, c’est un long
842
s, dix ans au plus. Après, c’est un long adieu et
le
corps se fige à mesure que l’esprit s’établit sur ses positions. Or d
843
st un long adieu et le corps se fige à mesure que
l’
esprit s’établit sur ses positions. Or donc, j’avais vingt ans. Je viv
844
diverti. J’étais bon, Monsieur, normalement bon.
L’
idée, par exemple, d’étrangler un chat pour le plaisir me répugnait. J
845
on. L’idée, par exemple, d’étrangler un chat pour
le
plaisir me répugnait. Je détestais de peiner quelque être, même ennem
846
iner quelque être, même ennemi, — car celui-là je
le
méprisais trop sincèrement. » Vers cette époque, une femme me regarda
847
ment. » Mes parents me savaient vierge et c’était
la
joie de leur vie, car ils aimaient en moi par-dessus tout la vertu qu
848
leur vie, car ils aimaient en moi par-dessus tout
la
vertu que je leur devais. Pourtant, je ne détournai pas mes yeux des
849
frît à cause de moi. Un soir qu’elle pleurait, je
l’
embrassai si fort… En un quart d’heure, je connaissais l’amour dans ce
850
ssai si fort… En un quart d’heure, je connaissais
l’
amour dans ce qu’il a de plus étrangement prosaïque à la fois et bêtem
851
angement prosaïque à la fois et bêtement heureux.
Le
lendemain était le premier jour du printemps. Les rues riaient. Le ci
852
Le lendemain était le premier jour du printemps.
Les
rues riaient. Le ciel descendait dans la ville, on marchait dans le b
853
t le premier jour du printemps. Les rues riaient.
Le
ciel descendait dans la ville, on marchait dans le bleu. Je sortis av
854
ntemps. Les rues riaient. Le ciel descendait dans
la
ville, on marchait dans le bleu. Je sortis avec cette femme, qui m’ai
855
e ciel descendait dans la ville, on marchait dans
le
bleu. Je sortis avec cette femme, qui m’aimait, et nous étions très j
856
tions très jolis de bonheur et d’insouciance dans
le
bonheur de la saison. — Au soir, mon père savait tout. Il effleura mo
857
is de bonheur et d’insouciance dans le bonheur de
la
saison. — Au soir, mon père savait tout. Il effleura mon front de ses
858
èvres sans une parole quand je vins lui souhaiter
le
bonsoir. Le lendemain, ses cheveux avaient légèrement blanchi. Il me
859
ne parole quand je vins lui souhaiter le bonsoir.
Le
lendemain, ses cheveux avaient légèrement blanchi. Il me regardait av
860
un sourire de mon amie quand il voulut m’adresser
la
parole après un silence vertigineux. Il vit mon sourire et pleura. Al
861
mon corps tout entier, je criai un juron, claquai
la
porte et courus dans ma chambre. Une demi-heure plus tard, j’étais à
862
s ma chambre. Une demi-heure plus tard, j’étais à
la
gare, j’écrivais un mot d’adieu à ma maîtresse d’une nuit et je parta
863
rection quelconque. Il advint que ce fut celle de
l’
Italie. La lumière, mon pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode
864
elconque. Il advint que ce fut celle de l’Italie.
La
lumière, mon pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode et la pol
865
mière, mon pays natal ! — Je vécus d’articles sur
la
mode et la politique, que j’envoyais à divers journaux. Un jour, parc
866
pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode et
la
politique, que j’envoyais à divers journaux. Un jour, parcourant un q
867
pier, je lus mon nom en grosses lettres : c’était
l’
annonce du décès de mon père. » J’étais assis à la terrasse ensoleillé
868
l’annonce du décès de mon père. » J’étais assis à
la
terrasse ensoleillée d’un café ; une brise passa, et une femme en rob
869
doucement… Je me levai sans payer, je partis par
les
rues, une joie violente commençait à m’envahir, contre laquelle je lu
870
chaque tour du tambour des bouffées de musique. »
La
femme en bleu dansait en regardant au plafond. Après deux tangos, nou
871
ous montions ensemble dans une chambre d’hôtel où
l’
on ne voyait d’abord qu’un bouquet transfiguré par la lumière et que r
872
n ne voyait d’abord qu’un bouquet transfiguré par
la
lumière et que reflétaient de nombreuses glaces. Les fenêtres que j’o
873
lumière et que reflétaient de nombreuses glaces.
Les
fenêtres que j’ouvris firent tourner des soleils sur les parois clair
874
êtres que j’ouvris firent tourner des soleils sur
les
parois claires. Du balcon, on voyait la mer, des bateaux, des nuages,
875
eils sur les parois claires. Du balcon, on voyait
la
mer, des bateaux, des nuages, une avenue et ses autos rouges, tout un
876
s autos rouges, tout un couchant de grand port de
la
Méditerranée. Nous nous aimâmes en sifflotant encore par instants l’a
877
us nous aimâmes en sifflotant encore par instants
l’
air de la dernière danse, mais nous avions aussi envie de pleurer, à c
878
thousiasme juvénile, c’est-à-dire cynique, toutes
les
offres du hasard, ce poète immoral et malicieux. » Je ne sais dans qu
879
al et malicieux. » Je ne sais dans quel rapide de
l’
Europe centrale — région où l’on est forcé de prendre conscience de so
880
dans quel rapide de l’Europe centrale — région où
l’
on est forcé de prendre conscience de soi-même — je découvris une nuit
881
t en moi reniait obscurément. Je sentais bien que
le
ressort secret de la vertu dans laquelle on m’avait emprisonné c’étai
882
urément. Je sentais bien que le ressort secret de
la
vertu dans laquelle on m’avait emprisonné c’était un bas opportunisme
883
ocial, résultante des paresses accumulées de tous
les
cerveaux bourgeois incapables de concevoir un monde sans vieilles fil
884
ns gendarmes. Je sais bien ce que vous me direz :
Les
millions que je pourrais leur soustraire ne compenseront jamais cette
885
eront jamais cette escroquerie morale dont je fus
la
victime, ce vol de quelques joies parfaites de ma jeunesse… Mais il e
886
… Mais il est trop tard, Monsieur, pour critiquer
les
modalités de ma vengeance. Veuillez ne voir dans la confusion où je p
887
modalités de ma vengeance. Veuillez ne voir dans
la
confusion où je parais être engagé, du plan moral avec l’économique,
888
sion où je parais être engagé, du plan moral avec
l’
économique, qu’une expression nouvelle, et non dénuée d’ironie, de mon
889
on mépris pour ce qu’ils appellent, ridiculement,
les
fondements mêmes de la société. » C’est avec le produit du vol d’un t
890
appellent, ridiculement, les fondements mêmes de
la
société. » C’est avec le produit du vol d’un tronc de chapelle que j’
891
les fondements mêmes de la société. » C’est avec
le
produit du vol d’un tronc de chapelle que j’édifiai à mes parents un
892
au sur lequel je fis graver : Prêté — rendu, pour
la
gloire de l’Église. (Ici, il but une gorgée et prit un temps.) » Je v
893
je fis graver : Prêté — rendu, pour la gloire de
l’
Église. (Ici, il but une gorgée et prit un temps.) » Je vous fais grâc
894
n temps.) » Je vous fais grâce, poursuivit-il, de
la
chronique de ma vie de rat d’hôtel et de sleepings ; encore que… Bref
895
e… Bref, depuis quelques mois, je m’amuse à jouer
le
pickpocket. Cela permet, avec un minimum d’adresse, de découvrir cert
896
s auparavant, et pas toujours défavorable, croyez-
le
bien… Le goût de la propriété étant à mon sens l’un des plus vulgaire
897
ant, et pas toujours défavorable, croyez-le bien…
Le
goût de la propriété étant à mon sens l’un des plus vulgaires et des
898
toujours défavorable, croyez-le bien… Le goût de
la
propriété étant à mon sens l’un des plus vulgaires et des plus généra
899
ndus, j’ai vite fait de classer mon monde d’après
les
quelques réactions élémentaires qui ne manquent jamais de succéder au
900
au moindre vol. » J’ajouterai, cher Monsieur, que
l’
analyse psychologique n’est pas mon fort. Je me contente de quelques o
901
oriques que je tiens pour vraies, et j’en vérifie
les
manifestations vivantes avec une prodigalité d’épreuves, contre-épreu
902
tre-épreuves, variantes et enjolivures où je vois
le
véritable intérêt de ma vie. C’est vous dire que seule une certaine c
903
C’est vous dire que seule une certaine caresse de
l’
événement naissant peut encore m’émouvoir. C’est un plaisir de chaque
904
sir de chaque minute auquel succède immédiatement
le
sommeil. Je rêve beaucoup. Cela explique, m’a-t-on dit, le peu de goû
905
l. Je rêve beaucoup. Cela explique, m’a-t-on dit,
le
peu de goût que j’ai pour la poésie imprimée. » J’allais oublier de v
906
lique, m’a-t-on dit, le peu de goût que j’ai pour
la
poésie imprimée. » J’allais oublier de vous dire qu’on me nomme Saint
907
n me nomme Saint-Julien. Vous n’ignorez point que
l’
on considère ce saint comme le patron des voyageurs… » Saint-Julien pa
908
n’ignorez point que l’on considère ce saint comme
le
patron des voyageurs… » Saint-Julien parut satisfait de cette dernièr
909
gorgées d’eau minérale. Isidore sentit alors que
la
bienséance l’obligeait à émettre une opinion, même la plus générale e
910
minérale. Isidore sentit alors que la bienséance
l’
obligeait à émettre une opinion, même la plus générale et la moins com
911
ienséance l’obligeait à émettre une opinion, même
la
plus générale et la moins compromettante, sur cette vie dont le récit
912
t à émettre une opinion, même la plus générale et
la
moins compromettante, sur cette vie dont le récit n’avait pas laissé
913
le et la moins compromettante, sur cette vie dont
le
récit n’avait pas laissé que de l’agacer en maint endroit. « Une chos
914
cette vie dont le récit n’avait pas laissé que de
l’
agacer en maint endroit. « Une chose avant tout me frappe — dit-il, lâ
915
iments, ce qui est de mauvaise politique, — c’est
l’
extraordinaire netteté de votre vie. Elle est sans bavures, sans rétic
916
herche ce qu’on est convenu d’appeler — pardonnez
la
lourdeur de l’expression — une règle de vie. Mais, je vous l’avouerai
917
est convenu d’appeler — pardonnez la lourdeur de
l’
expression — une règle de vie. Mais, je vous l’avouerai, ce qui me ret
918
de l’expression — une règle de vie. Mais, je vous
l’
avouerai, ce qui me retient de tirer de votre conduite les conclusions
919
rai, ce qui me retient de tirer de votre conduite
les
conclusions morales qu’elle paraît impliquer, c’est ce caractère de,
920
conscience ! qui s’attache à vos faits et gestes.
L’
on croirait ouïr parfois le récit de quelqu’une de ces farces d’étudia
921
à vos faits et gestes. L’on croirait ouïr parfois
le
récit de quelqu’une de ces farces d’étudiants qui ne sont que la trad
922
lqu’une de ces farces d’étudiants qui ne sont que
la
traduction en actes de jeux de mots plus ou moins cruels… » — Je vous
923
rrompit Saint-Julien, par pitié pour Isidore dont
la
sincérité tournait vite à l’agressif — effet d’une timidité naturelle
924
ié pour Isidore dont la sincérité tournait vite à
l’
agressif — effet d’une timidité naturelle dont il paraissait lui-même
925
né. En deux mots, vous ne me trouvez pas sérieux.
Le
reproche est grave. Je ne saurais y répondre. Je pourrais vous dire q
926
ez un peu potache, il n’est pas prouvé par là que
le
potache n’ait point raison. Mais justement je n’éprouve aucun désir d
927
conque est aussi profondément persuadé que moi de
l’
absurdité radicale de notre vie, la moindre farce, le moindre geste co
928
adé que moi de l’absurdité radicale de notre vie,
la
moindre farce, le moindre geste convenu dans le genre « révolté » pre
929
bsurdité radicale de notre vie, la moindre farce,
le
moindre geste convenu dans le genre « révolté » prend une saveur de r
930
, la moindre farce, le moindre geste convenu dans
le
genre « révolté » prend une saveur de raillerie assez amère. Et peut-
931
découvrir derrière certaines de mes plaisanteries
la
dérision secrète qu’elles masquent par caprice. .....................
932
180-185. t. Une note de bas de page indique : «
La
rédaction rappelle que les idées émises dans la Revue de Belles-Lettr
933
bas de page indique : « La rédaction rappelle que
les
idées émises dans la Revue de Belles-Lettres sont propres à leur aute
934
« La rédaction rappelle que les idées émises dans
la
Revue de Belles-Lettres sont propres à leur auteur et qu’elles n’enga
935
Conseils à
la
jeunesse (mai 1927)u « On a reproché bien des choses aux romantiqu
936
« On a reproché bien des choses aux romantiques :
le
goût du suicide, l’habitude de boire et de fumer excessivement, leurs
937
des choses aux romantiques : le goût du suicide,
l’
habitude de boire et de fumer excessivement, leurs amours, l’égoïsme,
938
de boire et de fumer excessivement, leurs amours,
l’
égoïsme, le mépris de la réalité, l’exaltation maladive de l’imaginati
939
de fumer excessivement, leurs amours, l’égoïsme,
le
mépris de la réalité, l’exaltation maladive de l’imagination et de la
940
essivement, leurs amours, l’égoïsme, le mépris de
la
réalité, l’exaltation maladive de l’imagination et de la sensibilité,
941
leurs amours, l’égoïsme, le mépris de la réalité,
l’
exaltation maladive de l’imagination et de la sensibilité, l’atrophie
942
le mépris de la réalité, l’exaltation maladive de
l’
imagination et de la sensibilité, l’atrophie du sens critique sous tou
943
ité, l’exaltation maladive de l’imagination et de
la
sensibilité, l’atrophie du sens critique sous toutes ses formes : rai
944
n maladive de l’imagination et de la sensibilité,
l’
atrophie du sens critique sous toutes ses formes : raison, jugement, s
945
es formes : raison, jugement, simple bon sens, et
l’
ignorance systématique, le mépris enfin de tous les principes qui sont
946
nt, simple bon sens, et l’ignorance systématique,
le
mépris enfin de tous les principes qui sont à la base de la société m
947
l’ignorance systématique, le mépris enfin de tous
les
principes qui sont à la base de la société même. » Ceci est tiré d’
948
le mépris enfin de tous les principes qui sont à
la
base de la société même. » Ceci est tiré d’un livre récent sur Aloy
949
enfin de tous les principes qui sont à la base de
la
société même. » Ceci est tiré d’un livre récent sur Aloysius Bertra
950
proches s’adressent, ou bien plutôt — vous alliez
le
dire — aux surréalistes ? Si le mal du siècle consistait véritablem
951
t — vous alliez le dire — aux surréalistes ? Si
le
mal du siècle consistait véritablement dans ces quelques effets, nous
952
ans un petit article du Journal de Genève sur «
La
maladie du siècle », écrit : « Plante des pommes de terre, jeune homm
953
de terre, jeune homme ! Quand tu seras au bout de
la
20e ligne de 200 mètres, ce qui représente quatre kilomètres de plant
954
e qui représente quatre kilomètres de plantation,
le
siècle ne sera plus malade, les temps seront guéris de leur crise, le
955
res de plantation, le siècle ne sera plus malade,
les
temps seront guéris de leur crise, les valeurs auront retrouvé leur s
956
us malade, les temps seront guéris de leur crise,
les
valeurs auront retrouvé leur stabilité, et comme M. Albert Muret dont
957
uvé leur stabilité, et comme M. Albert Muret dont
le
Journal de Genève parlait naguère, tu mangeras avec appétit une pou
958
ent chez des jeunes « et qui pensent » ce goût de
l’
évasion caractéristique de tous les « vices romantiques ». — Citez-m’e
959
nt » ce goût de l’évasion caractéristique de tous
les
« vices romantiques ». — Citez-m’en de ces phénomènes ! — Mon Dieu, q
960
Il y aurait, par exemple, ce fait du triomphe de
la
Machine ; ce fait de la révolution russe… cet autre fait de la guerre
961
e, ce fait du triomphe de la Machine ; ce fait de
la
révolution russe… cet autre fait de la guerre… et puis, tenez ! ce fa
962
ce fait de la révolution russe… cet autre fait de
la
guerre… et puis, tenez ! ce fait surtout de la sacro-sainte Raison ut
963
de la guerre… et puis, tenez ! ce fait surtout de
la
sacro-sainte Raison utilitaire au service des sacro-saints Principes
964
desquels tout se ligue aujourd’hui pour anéantir
la
seule chose qui reste à nos yeux sacro-sainte : la liberté. Alors n’e
965
a seule chose qui reste à nos yeux sacro-sainte :
la
liberté. Alors n’est-ce pas, merci du conseil, Monsieur Y. Z., de ce
966
ches pour enseigner cette méthode à leurs petits.
Le
« satisfait » est un être inadmissible aujourd’hui. À plus forte rais
967
re inadmissible aujourd’hui. À plus forte raison,
le
satisfait artificiel. u. Rougemont Denis de, « Conseils à la jeune
968
rtificiel. u. Rougemont Denis de, « Conseils à
la
jeunesse », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribou
969
La
part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature (juillet 1927)v
970
La part du feu. Lettres sur
le
mépris de la littérature (juillet 1927)v I Parler littérature
971
La part du feu. Lettres sur le mépris de
la
littérature (juillet 1927)v I Parler littérature Si je pronon
972
927)v I Parler littérature Si je prononce
le
nom de tel de vos confrères, si je dis : « Avez-vous lu… », vous voil
973
« Avez-vous lu… », vous voilà rouge ; et sur moi
les
foudres de votre paradis poétique. Si je cite tel auteur dont nous fî
974
mes notre nourriture une saison de naguère, voilà
le
rictus de votre bouche, une injure de pythie. Vous dites de ce conte
975
n goût qu’on aurait pour Nietzsche : que c’est de
la
littérature. Alors, quelque paysan du Danube survenant : — Je vous cr
976
écrivain ? — Hélas ! soupirez-vous. Mais j’ai tué
la
littérature en moi, n’en parlez plus, j’en sors, je l’abandonne… Mais
977
ttérature en moi, n’en parlez plus, j’en sors, je
l’
abandonne… Mais notre paysan, rusé : — Vous l’abandonnez ? Pour quoi ?
978
je l’abandonne… Mais notre paysan, rusé : — Vous
l’
abandonnez ? Pour quoi ? — Pour la vie ! Or je pense, à part moi : j’a
979
, rusé : — Vous l’abandonnez ? Pour quoi ? — Pour
la
vie ! Or je pense, à part moi : j’ai lu ça quelque part. Voyez ma fra
980
ennent soin que leurs sincérités gardent au moins
l’
excuse d’une audace qu’ils escomptent scandaleuse. Mais voici un bar o
981
in de mépris pour Paul Morand par qui découvrîtes
le
charme de ces lieux. Vous composez un cocktail en guise de métaphore,
982
jour au Grand Écart… », dit quelqu’un. À ce coup,
l’
évocation de Cocteau fait fleurir sur vos lèvres le mot de Cambronne :
983
’évocation de Cocteau fait fleurir sur vos lèvres
le
mot de Cambronne : hommage à Louis Aragon. Ce cristal est une citatio
984
Et des phrases, des cris, des mots. Au défaut de
l’
ivresse naissante se glisse un poème où vous aimiez à la folie votre d
985
sse naissante se glisse un poème où vous aimiez à
la
folie votre douleur. Narcisse se contemple au miroir de son monocle.
986
il se noie dans un verre à liqueur. Poisson dans
l’
eau, plumes dans le vent, poète au bar, le paradis n’est pas si cher.
987
verre à liqueur. Poisson dans l’eau, plumes dans
le
vent, poète au bar, le paradis n’est pas si cher. Il y en a aussi qui
988
on dans l’eau, plumes dans le vent, poète au bar,
le
paradis n’est pas si cher. Il y en a aussi qui posent pour le diable
989
’est pas si cher. Il y en a aussi qui posent pour
le
diable et ne se baignent que dans des bénitiers : on voit trop qu’ils
990
: on voit trop qu’ils trouvent ça pittoresque. Et
le
plaisir d’être nu devant un public supposé dévot, et qui n’ose en cro
991
n’ose en croire sa pudeur, et qui doute enfin de
l’
impossibilité des miracles ! Quelles voluptés plus subtiles et plus ai
992
e bois pour en faire des poèmes. Alors je cherche
les
raisons de votre indignation, quand il m’échappe une citation. Seraie
993
ion, quand il m’échappe une citation. Seraient-ce
les
guillemets qui vous choquent ? La vie ! — proclamiez-vous… Soit. Ma
994
Seraient-ce les guillemets qui vous choquent ?
La
vie ! — proclamiez-vous… Soit. Mais maintenant je vais me fâcher chaq
995
« hallucinant » ou « purement gratuit ». C’est de
la
littérature. À force d’avoir mérité ces épithètes, pour nous laudati
996
nous laudatives, vous vous étonnez aujourd’hui de
la
simplicité. Littérateur, va ! qui ne pouvez pas même admettre que la
997
érateur, va ! qui ne pouvez pas même admettre que
la
simplicité est simple simplement. La bouche brûlée d’alcools, vous dé
998
admettre que la simplicité est simple simplement.
La
bouche brûlée d’alcools, vous découvrez à l’eau un goût étrange. L’ea
999
ent. La bouche brûlée d’alcools, vous découvrez à
l’
eau un goût étrange. L’eau est incolore, inodore et sans saveur. Mais
1000
’alcools, vous découvrez à l’eau un goût étrange.
L’
eau est incolore, inodore et sans saveur. Mais fraîche. Ainsi, jusque
1001
ais fraîche. Ainsi, jusque dans votre mépris pour
le
pittoresque, vous témoignez d’un goût du bizarre qui révèle le littér
1002
e, vous témoignez d’un goût du bizarre qui révèle
le
littérateur. Nous ne pouvons pas faire que nous n’ayons rien lu. Vous
1003
lu. Vous refusez de compter avec cette réalité de
la
littérature qui est en nous (dangereuse tant que vous voudrez). Mais
1004
une ingratitude salutaire, c’est refus de limiter
le
mal. Je vous vois envahi par des démons que vous prétendez m’interdir
1005
ensées des autres, je vous ai mis un collier avec
le
nom du propriétaire ; tirez un peu sur la laisse, que j’éprouve la fe
1006
er avec le nom du propriétaire ; tirez un peu sur
la
laisse, que j’éprouve la fermeté de ma main. Je vous tiens. Je sais o
1007
taire ; tirez un peu sur la laisse, que j’éprouve
la
fermeté de ma main. Je vous tiens. Je sais où vous êtes. Vous n’allez
1008
n vante, — j’ai tué un amour naissant, à force de
le
crier sur les toits. Ainsi, parler littérature, c’est faire la part d
1009
ai tué un amour naissant, à force de le crier sur
les
toits. Ainsi, parler littérature, c’est faire la part du feu. Je dis
1010
les toits. Ainsi, parler littérature, c’est faire
la
part du feu. Je dis ces noms, ces opinions, ces titres de livres : to
1011
choque, s’annule. Poussière. Ma vie est ailleurs.
L’
addition, s’il vous plaît. Il est temps de sortir de ce café et de ces
1012
afé et de ces jeux, simulacres de vie, qui sont à
la
vraie vie ce que le flirt est à l’amour. II Sur l’insuffisance de
1013
simulacres de vie, qui sont à la vraie vie ce que
le
flirt est à l’amour. II Sur l’insuffisance de la littérature On
1014
ie, qui sont à la vraie vie ce que le flirt est à
l’
amour. II Sur l’insuffisance de la littérature On reconnaît un é
1015
raie vie ce que le flirt est à l’amour. II Sur
l’
insuffisance de la littérature On reconnaît un écrivain, aujourd’hu
1016
flirt est à l’amour. II Sur l’insuffisance de
la
littérature On reconnaît un écrivain, aujourd’hui, à ce qu’il ne t
1017
e sournoises déclarations d’amour. Tel qui raille
l’
Église et les curés, c’est qu’il se fait une très haute idée de la rel
1018
déclarations d’amour. Tel qui raille l’Église et
les
curés, c’est qu’il se fait une très haute idée de la religion. Ainsi,
1019
curés, c’est qu’il se fait une très haute idée de
la
religion. Ainsi, de la littérature : votre mépris pour ses réalisatio
1020
ait une très haute idée de la religion. Ainsi, de
la
littérature : votre mépris pour ses réalisations actuelles donne la m
1021
otre mépris pour ses réalisations actuelles donne
la
mesure de ce que vous attendez d’elle. Pour dire le fond de ma pensée
1022
mesure de ce que vous attendez d’elle. Pour dire
le
fond de ma pensée, je crois ce mépris et cette attente également exag
1023
ous savez bien que nous cherchons autre chose que
la
littérature. Que la littérature nous est un moyen seulement d’atteind
1024
ous cherchons autre chose que la littérature. Que
la
littérature nous est un moyen seulement d’atteindre et de préparer d’
1025
. Des choses dures, amères comme un destin, comme
le
goût d’une pierre rêche sur ta langue et grinçante sous ta dent. Des
1026
intenses que tout se fond catastrophiquement dans
l’
infini de la seconde. Des peurs sans cause, plus vides que la mort. To
1027
la seconde. Des peurs sans cause, plus vides que
la
mort. Toutes ces choses mystiques, c’est-à-dire réelles, c’est-à-dire
1028
nous importe véritablement n’est dicible. (Depuis
le
temps qu’on sait que la lettre tue ce qu’elle prétend exprimer ; depu
1029
nt n’est dicible. (Depuis le temps qu’on sait que
la
lettre tue ce qu’elle prétend exprimer ; depuis le temps qu’on l’oubl
1030
a lettre tue ce qu’elle prétend exprimer ; depuis
le
temps qu’on l’oublie.) Vous me direz que la poésie, l’état poétique,
1031
qu’elle prétend exprimer ; depuis le temps qu’on
l’
oublie.) Vous me direz que la poésie, l’état poétique, est notre seul
1032
epuis le temps qu’on l’oublie.) Vous me direz que
la
poésie, l’état poétique, est notre seul moyen de connaissance concrèt
1033
mps qu’on l’oublie.) Vous me direz que la poésie,
l’
état poétique, est notre seul moyen de connaissance concrète du monde.
1034
oncrète du monde. Mais c’est à condition qu’on ne
l’
écrive pas, même en pensée. La poésie pure écrite est inconcevable : c
1035
condition qu’on ne l’écrive pas, même en pensée.
La
poésie pure écrite est inconcevable : cela consisterait dans l’expres
1036
écrite est inconcevable : cela consisterait dans
l’
expression directe de la réalité individuelle. Elle serait tellement i
1037
: cela consisterait dans l’expression directe de
la
réalité individuelle. Elle serait tellement incommunicable qu’il devi
1038
ement incommunicable qu’il deviendrait inutile de
la
publier. Et même, en passant à la limite, on peut imaginer que si ell
1039
rait inutile de la publier. Et même, en passant à
la
limite, on peut imaginer que si elle était réalisée, on ne s’en aperc
1040
ercevrait pas. Je pressens encore dans vos poèmes
les
plus obscurs des allusions furtives à certains états de la réalité. M
1041
bscurs des allusions furtives à certains états de
la
réalité. Mais plus les mots se plient à des exigences sémantiques — d
1042
urtives à certains états de la réalité. Mais plus
les
mots se plient à des exigences sémantiques — dont on connaît la porté
1043
ent à des exigences sémantiques — dont on connaît
la
portée sociale, — mariant l’utile à l’agréable selon les rites d’une
1044
es — dont on connaît la portée sociale, — mariant
l’
utile à l’agréable selon les rites d’une esthétique ou d’une autre, pl
1045
on connaît la portée sociale, — mariant l’utile à
l’
agréable selon les rites d’une esthétique ou d’une autre, plus ils per
1046
tée sociale, — mariant l’utile à l’agréable selon
les
rites d’une esthétique ou d’une autre, plus ils perdent leur pouvoir
1047
autre, plus ils perdent leur pouvoir de signifier
les
choses qui nous importent. Vous le savez. Alors vous les lâchez en li
1048
de signifier les choses qui nous importent. Vous
le
savez. Alors vous les lâchez en liberté, par haine de cette esthétiqu
1049
ses qui nous importent. Vous le savez. Alors vous
les
lâchez en liberté, par haine de cette esthétique ou de ce sens social
1050
de ce sens social, — et voilà qu’ils perdent même
la
problématique utilité de liaison qui était leur excuse dernière. Avou
1051
e liaison qui était leur excuse dernière. Avouons-
le
: rien de ce qu’on peut exprimer n’a d’importance véritable. Alors, c
1052
cessons de nous battre contre des moulins à vent.
La
littérature, considérée du point de vue de la psychologie de l’écriva
1053
nt. La littérature, considérée du point de vue de
la
psychologie de l’écrivain, est un besoin organique, un peu anormal, q
1054
, considérée du point de vue de la psychologie de
l’
écrivain, est un besoin organique, un peu anormal, que l’on satisfait
1055
ain, est un besoin organique, un peu anormal, que
l’
on satisfait dans certains états de crise afin de retrouver son équili
1056
rarement, de quoi se payer un petit voyage. C’est
l’
aveu d’une faiblesse secrète. Et c’est une réaction de défense. On che
1057
he un mot, une phrase, pour tuer une réalité dont
la
connaissance devient douloureuse et troublante. Ainsi la conscience t
1058
aissance devient douloureuse et troublante. Ainsi
la
conscience tue la connaissance. (« Connaissance » étant pris avec son
1059
ouloureuse et troublante. Ainsi la conscience tue
la
connaissance. (« Connaissance » étant pris avec son sens le plus prof
1060
sance. (« Connaissance » étant pris avec son sens
le
plus profond, qui est proche du sens biblique. Il ne s’agit pas de la
1061
est proche du sens biblique. Il ne s’agit pas de
la
connaissance abstraite et rationnelle dont le monde moderne se conten
1062
de la connaissance abstraite et rationnelle dont
le
monde moderne se contente, et qui tend à remplacer, grâce à la mental
1063
rne se contente, et qui tend à remplacer, grâce à
la
mentalité scolaire et primaire en particulier, toute connaissance vér
1064
ice ? Peut-être. Ou une maladie ? Ce n’est pas en
l’
ignorant par attitude que vous la guérirez. Au contraire, il s’agit de
1065
Ce n’est pas en l’ignorant par attitude que vous
la
guérirez. Au contraire, il s’agit de l’envisager sans fièvre, pour en
1066
que vous la guérirez. Au contraire, il s’agit de
l’
envisager sans fièvre, pour en circonscrire les effets. J’avoue prendr
1067
de l’envisager sans fièvre, pour en circonscrire
les
effets. J’avoue prendre à cette étude un intérêt bien vif. Et cela fo
1068
en n’est plus facile que d’y échapper. III Sur
l’
utilité de la littérature Montherlant me paraît être le moins « lit
1069
facile que d’y échapper. III Sur l’utilité de
la
littérature Montherlant me paraît être le moins « littératuré » de
1070
é de la littérature Montherlant me paraît être
le
moins « littératuré » des écrivains d’aujourd’hui. Quand il parle lit
1071
rd’hui. Quand il parle littérature, il a toujours
l’
air de mettre un peu les pieds dans le plat, de dire de ces choses qu’
1072
littérature, il a toujours l’air de mettre un peu
les
pieds dans le plat, de dire de ces choses qu’entre gens du métier l’o
1073
a toujours l’air de mettre un peu les pieds dans
le
plat, de dire de ces choses qu’entre gens du métier l’on a convenu de
1074
at, de dire de ces choses qu’entre gens du métier
l’
on a convenu de passer sous silence. C’est assez drôle de voir le mala
1075
de passer sous silence. C’est assez drôle de voir
le
malaise des chers confrères. Ils ne pardonnent pas à ce toréador ses
1076
une Muse qu’ils n’ont pas coutume d’aborder sans
le
mot de passe de la dernière mode ou de savantes séductions. On sait b
1077
tes séductions. On sait bien, d’ailleurs, qu’elle
les
entretient. Bande de gigolos de la littérature ! Qu’on puisse vivre d
1078
eurs, qu’elle les entretient. Bande de gigolos de
la
littérature ! Qu’on puisse vivre de ça, je ne l’ai pas encore avalé.
1079
la littérature ! Qu’on puisse vivre de ça, je ne
l’
ai pas encore avalé. On m’affirme que je n’y échapperai pas plus qu’un
1080
is, pour sûr, jamais vivre pour écrire16. De tous
les
prétextes que l’on a pu avancer pour légitimer l’activité littéraire,
1081
is vivre pour écrire16. De tous les prétextes que
l’
on a pu avancer pour légitimer l’activité littéraire, le plus satisfai
1082
es prétextes que l’on a pu avancer pour légitimer
l’
activité littéraire, le plus satisfaisant, celui qui rend le mieux com
1083
pu avancer pour légitimer l’activité littéraire,
le
plus satisfaisant, celui qui rend le mieux compte de la réalité, c’es
1084
littéraire, le plus satisfaisant, celui qui rend
le
mieux compte de la réalité, c’est André Breton qui l’a exprimé : « On
1085
s satisfaisant, celui qui rend le mieux compte de
la
réalité, c’est André Breton qui l’a exprimé : « On publie pour cherch
1086
ieux compte de la réalité, c’est André Breton qui
l’
a exprimé : « On publie pour chercher des hommes, et rien de plus. » C
1087
pas tant, n’est-ce pas, à poursuivre une quête de
l’
esprit. Et vous savez ce qu’elle nous vaut : les mépris, les haines do
1088
de l’esprit. Et vous savez ce qu’elle nous vaut :
les
mépris, les haines douloureuses ou grossières de tous ceux qui ne peu
1089
Et vous savez ce qu’elle nous vaut : les mépris,
les
haines douloureuses ou grossières de tous ceux qui ne peuvent ou ne v
1090
ous voyez bien que votre attitude méprisante pour
la
littérature vous ferait bientôt renier le signe le plus certain par l
1091
te pour la littérature vous ferait bientôt renier
le
signe le plus certain par lequel ces « quelques-uns » peuvent encore
1092
a littérature vous ferait bientôt renier le signe
le
plus certain par lequel ces « quelques-uns » peuvent encore se reconn
1093
e elle n’aurait plus d’autre excuse que celle-là,
la
littérature mériterait d’exister : qu’elle soit le langage chiffré de
1094
a littérature mériterait d’exister : qu’elle soit
le
langage chiffré de notre inquiétude et de nos naissantes certitudes,
1095
notre inquiétude et de nos naissantes certitudes,
le
seul langage peut-être qui nous permette d’échanger les signaux de l’
1096
ul langage peut-être qui nous permette d’échanger
les
signaux de l’angoisse sur quoi se fondent, en ces temps, nos amitiés
1097
-être qui nous permette d’échanger les signaux de
l’
angoisse sur quoi se fondent, en ces temps, nos amitiés miraculeuses.
1098
ces temps, nos amitiés miraculeuses. Voici donc
les
seules révélations que j’attende de la littérature : que celle des au
1099
oici donc les seules révélations que j’attende de
la
littérature : que celle des autres m’aide à prendre conscience de moi
1100
e la mienne m’aide à découvrir quelques êtres par
le
monde… Il ne s’agit plus de mépris ni d’adoration. J’ai défini une «
1101
ont je parviens à tirer quelque bien pour ma vie.
Le
jour où les soins qu’elle exige me coûteront des sacrifices plus gran
1102
iens à tirer quelque bien pour ma vie. Le jour où
les
soins qu’elle exige me coûteront des sacrifices plus grands que les b
1103
exige me coûteront des sacrifices plus grands que
les
bienfaits que j’en escompte, il sera temps de songer sérieusement à m
1104
. 14. Paul Morand, auteur d’Ouvert et de Fermé
la
nuit, titres également scandaleux. Le Grand Écart, roman de M. Coctea
1105
et de Fermé la nuit, titres également scandaleux.
Le
Grand Écart, roman de M. Cocteau, a donné son nom à un établissement
1106
e lettres et poètes surréalistes. Paul Valéry, de
l’
Académie française. Narcisse, personnage mythologique. — Là ! [NdE] Le
1107
. Narcisse, personnage mythologique. — Là ! [NdE]
Le
texte publié place également un appel de note plus bas dans le paragr
1108
ié place également un appel de note plus bas dans
le
paragraphe, après « Narcisse », sans qu’on sache s’il s’agit d’une er
1109
ache s’il s’agit d’une erreur ou d’une volonté de
l’
auteur. 15. Variante : des puissances d’action. 16. J’en vois certai
1110
et ils en sont tout fiers : « Il n’y a plus qu’à
les
écrire ». v. Rougemont Denis de, « La part du feu. Lettres sur le m
1111
lus qu’à les écrire ». v. Rougemont Denis de, «
La
part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature », Revue de Bell
1112
Rougemont Denis de, « La part du feu. Lettres sur
le
mépris de la littérature », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchât
1113
is de, « La part du feu. Lettres sur le mépris de
la
littérature », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fri
1114
Les
derniers jours (juillet 1927)w Ces « cahiers politiques et littéra
1115
r Drieu la Rochelle et Emmanuel Berl, sont — avec
la
Revue de Belles-Lettres — la seule revue de langue française où l’o
1116
Berl, sont — avec la Revue de Belles-Lettres —
la
seule revue de langue française où l’on dise la vérité librement et p
1117
-Lettres — la seule revue de langue française où
l’
on dise la vérité librement et pour elle-même. Nous regrettons de n’en
1118
— la seule revue de langue française où l’on dise
la
vérité librement et pour elle-même. Nous regrettons de n’en pouvoir c
1119
s phrases de Drieu : « On voit déjà éclater dans
les
singuliers mouvements de sympathie qu’a provoqués l’infortune de l’Ac
1120
singuliers mouvements de sympathie qu’a provoqués
l’
infortune de l’Action française la fraternité qui existe, en dépit des
1121
ements de sympathie qu’a provoqués l’infortune de
l’
Action française la fraternité qui existe, en dépit des protestations
1122
qu’a provoqués l’infortune de l’Action française
la
fraternité qui existe, en dépit des protestations de haine, entre les
1123
xiste, en dépit des protestations de haine, entre
les
athées de l’antidémocratisme et les athées du Capitalisme quand il es
1124
t des protestations de haine, entre les athées de
l’
antidémocratisme et les athées du Capitalisme quand il est conscient d
1125
haine, entre les athées de l’antidémocratisme et
les
athées du Capitalisme quand il est conscient de soi-même, et les athé
1126
apitalisme quand il est conscient de soi-même, et
les
athées du Socialisme et du Communisme. Tous ceux-là travaillent à l’a
1127
isme et du Communisme. Tous ceux-là travaillent à
l’
achèvement d’un certain monde moderne, merveilleuse mécanique sévère e
1128
use mécanique sévère et dénuée de tout secours de
l’
Esprit. Mais un jour viendra où les hommes se révolteront contre le jo
1129
tout secours de l’Esprit. Mais un jour viendra où
les
hommes se révolteront contre le joug atrocement positiviste des Maurr
1130
jour viendra où les hommes se révolteront contre
le
joug atrocement positiviste des Maurras et des Mussolini, des Lénine
1131
s et des Mussolini, des Lénine et des Ford. Alors
les
hommes hurleront un affreux besoin mystique. Vous réveillerez-vous po
1132
freux besoin mystique. Vous réveillerez-vous pour
les
désaltérer, dieux de l’Orient et de l’Occident ? » Certains cris qui
1133
us réveillerez-vous pour les désaltérer, dieux de
l’
Orient et de l’Occident ? » Certains cris qui nous échappèrent n’avai
1134
vous pour les désaltérer, dieux de l’Orient et de
l’
Occident ? » Certains cris qui nous échappèrent n’avaient pas d’autre
1135
e Chalgrin, Paris 16e. w. Rougemont Denis de, «
Les
derniers jours », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-
1136
Adieu au lecteur (juillet 1927)x Nous passons
la
main au central de Genève, fidèles à la tradition — en ceci au moins.
1137
s passons la main au central de Genève, fidèles à
la
tradition — en ceci au moins. Nous nous retirons : et ce n’est pas qu
1138
ue nous ayons brûlé toutes nos cartouches. Ni que
l’
indignation provoquée sur tous les bancs par certains de nos articles
1139
rtouches. Ni que l’indignation provoquée sur tous
les
bancs par certains de nos articles nous épouvante. Notre retraite est
1140
nte. Notre retraite est toute « statutaire » — si
l’
on ose dire. Elle nous permet donc de considérer la situation sans fiè
1141
’on ose dire. Elle nous permet donc de considérer
la
situation sans fièvre, sans lamentations d’adieu. On nous a parfois
1142
tés de fous (avec ou sans sourire). Nous sommes à
l’
âge de nous en réjouir. On s’est beaucoup étonné de nous voir « si dif
1143
s voir « si différents » de nos aînés. Nous avons
l’
énorme candeur de trouver ça naturel. On nous a fait des reproches con
1144
n nous a fait des reproches contradictoires. Nous
les
additionnons : ils s’annulent. Il reste à dire deux mots sur la parad
1145
s : ils s’annulent. Il reste à dire deux mots sur
la
paradoxale situation intellectuelle d’une revue d’étudiants comme la
1146
tion intellectuelle d’une revue d’étudiants comme
la
nôtre. D’un côté, en effet, on s’accorde pour trouver légèrement ridi
1147
ridicule un jeune homme qui recherche activement
la
Sagesse (« Ça n’est pas de votre âge ! ») ; de l’autre, on se scandal
1148
rces — ou bien de ces affirmations dont en vérité
l’
on n’a pas à se préoccuper de prévoir les conséquences, puisqu’il n’en
1149
en vérité l’on n’a pas à se préoccuper de prévoir
les
conséquences, puisqu’il n’en est aucune qui ne soit connue d’avance e
1150
une qui ne soit connue d’avance et stérilisée par
la
loi, les mœurs et l’habitude. Nous n’avons aucun remords d’avoir déçu
1151
ne soit connue d’avance et stérilisée par la loi,
les
mœurs et l’habitude. Nous n’avons aucun remords d’avoir déçu cette ca
1152
e d’avance et stérilisée par la loi, les mœurs et
l’
habitude. Nous n’avons aucun remords d’avoir déçu cette catégorie de l
1153
t pas encore admis que jeunesse = révolution Tous
les
malentendus viennent de là. Nous sommes assez sages et assez fous pou
1154
sez fous pour ne pas en gémir et pour en accepter
les
conséquences. Et puis, de temps à autre, voici que nous parvient un s
1155
quelques découvertes qui nous consolèrent de tout
le
reste. Et maintenant voici Genève et son mystère. Car chaque année,
1156
année, renaissant des décombres où s’anéantirent
l’
honneur et la fortune de ses derniers rédacteurs, notre Revue-phénix s
1157
ssant des décombres où s’anéantirent l’honneur et
la
fortune de ses derniers rédacteurs, notre Revue-phénix s’élance avec
1158
ction absolument imprévisible. Que nous apportera
le
Central de Genève ? Tout est possible : la guerre et la paix, la trad
1159
ortera le Central de Genève ? Tout est possible :
la
guerre et la paix, la tradition, l’anarchie, l’ironie, le sentiment,
1160
tral de Genève ? Tout est possible : la guerre et
la
paix, la tradition, l’anarchie, l’ironie, le sentiment, un réveil des
1161
enève ? Tout est possible : la guerre et la paix,
la
tradition, l’anarchie, l’ironie, le sentiment, un réveil des vieux, M
1162
st possible : la guerre et la paix, la tradition,
l’
anarchie, l’ironie, le sentiment, un réveil des vieux, Maurras, Lounat
1163
: la guerre et la paix, la tradition, l’anarchie,
l’
ironie, le sentiment, un réveil des vieux, Maurras, Lounatcharsky, la
1164
e et la paix, la tradition, l’anarchie, l’ironie,
le
sentiment, un réveil des vieux, Maurras, Lounatcharsky, la SDN, et mê
1165
ent, un réveil des vieux, Maurras, Lounatcharsky,
la
SDN, et même Edmond Gillard, et même, et surtout, un miracle. Et puis
1166
eureux Jean… Et puis, en voilà assez pour ranimer
la
curiosité des plus blasés. Lecteur, fais confiance au Central de Genè
1167
s confiance au Central de Genève. Souviens-toi de
la
grandeur de ses traditions et ne va pas ajouter à cette lourde charge
1168
itions et ne va pas ajouter à cette lourde charge
le
poids de nos péchés. Ils sont bien nôtres. Et nous y tenons, ah ! com
1169
« Belles-Lettres, c’est
la
clé des champs… » (janvier 1929)y 1. Belles-Lettres, c’est la clef
1170
ps… » (janvier 1929)y 1. Belles-Lettres, c’est
la
clef des champs. 2. L’essence de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à
1171
1. Belles-Lettres, c’est la clef des champs. 2.
L’
essence de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à brûler les cervelles et
1172
champs. 2. L’essence de Belles-Lettres, c’est de
l’
alcool à brûler les cervelles et les réputations. 3. Belles-Lettres n
1173
nce de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à brûler
les
cervelles et les réputations. 3. Belles-Lettres n’est compréhensible
1174
tres, c’est de l’alcool à brûler les cervelles et
les
réputations. 3. Belles-Lettres n’est compréhensible et légitime que
1175
Lettres n’est compréhensible et légitime que dans
la
mesure où la poésie est compréhensible et légitime. 4. Je suis de san
1176
compréhensible et légitime que dans la mesure où
la
poésie est compréhensible et légitime. 4. Je suis de sang-froid, je d
1177
esse ; autrement que par des cris. 5. Avec toutes
les
erreurs et turpitudes que cela comporte, Belles-Lettres est une liber
1178
trer en religion : rond de cuir ou poète (au sens
le
plus large de ces mots.) (Mais je tiens à le leur dire ici : les anci
1179
sens le plus large de ces mots.) (Mais je tiens à
le
leur dire ici : les anciens bellettriens qui ont perdu toute foi ne c
1180
de ces mots.) (Mais je tiens à le leur dire ici :
les
anciens bellettriens qui ont perdu toute foi ne connaîtront pas de pa
1181
sont foncièrement mauvais.) 6. Peu de choses dans
le
monde moderne ont encore une « essence ». Celle de Belles-Lettres est
1182
. Celle de Belles-Lettres est en agréable odeur à
l’
Éternel et à Satan pareillement. Et ceux qu’elle enivre entrent en éta
1183
y. Rougemont Denis de, « Belles-Lettres, c’est
la
clef des champs… », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genèv
1184
de jour (mars 1929)z Prison Prisonnier de
la
nuit mais plus libre qu’un ange prisonnier dans ta tête mais libre co
1185
me avant cette naissance aux lents vertiges Quand
la
nuit s’effeuille et se fane prisonnier d’une saison morte au tombeau
1186
d’une saison morte au tombeau des fleurs obscures
les
mains de l’absence se ferment sur le vide Tu pleurerais Mais la gr
1187
morte au tombeau des fleurs obscures les mains de
l’
absence se ferment sur le vide Tu pleurerais Mais la grâce est faci
1188
rs obscures les mains de l’absence se ferment sur
le
vide Tu pleurerais Mais la grâce est facile comme un matin d’été l
1189
ence se ferment sur le vide Tu pleurerais Mais
la
grâce est facile comme un matin d’été la grâce tendrement dénouée de
1190
ais Mais la grâce est facile comme un matin d’été
la
grâce tendrement dénouée de ta vie comme de cette nuit le jour d’un g
1191
tendrement dénouée de ta vie comme de cette nuit
le
jour d’un grand été qui consent… Ailleurs Colombes lumineuse
1192
yageuses ah ! que d’aucun retour vous ne laissiez
le
gage aux plaintes de mon cœur il est d’autres rivages où mieux qu’ici
1193
mon cœur il est d’autres rivages où mieux qu’ici
l’
on meurt. Étoile de jour Il naissait à son destin des rayons g
1194
t à son destin des rayons glissent et rient c’est
la
caresse des anges parmi les formes de l’ombre C’était l’aube et le
1195
lissent et rient c’est la caresse des anges parmi
les
formes de l’ombre C’était l’aube et le sourire adorable de savoir l
1196
nt c’est la caresse des anges parmi les formes de
l’
ombre C’était l’aube et le sourire adorable de savoir la dansante li
1197
e des anges parmi les formes de l’ombre C’était
l’
aube et le sourire adorable de savoir la dansante liberté d’un désir à
1198
s parmi les formes de l’ombre C’était l’aube et
le
sourire adorable de savoir la dansante liberté d’un désir à sa naissa
1199
C’était l’aube et le sourire adorable de savoir
la
dansante liberté d’un désir à sa naissance L’étoile qui l’accueille
1200
r la dansante liberté d’un désir à sa naissance
L’
étoile qui l’accueille au sommet ravi d’un silence c’est le miroir d’u
1201
liberté d’un désir à sa naissance L’étoile qui
l’
accueille au sommet ravi d’un silence c’est le miroir d’une absence ma
1202
qui l’accueille au sommet ravi d’un silence c’est
le
miroir d’une absence mais le signe de sa grâce Dans l’or vert évano
1203
i d’un silence c’est le miroir d’une absence mais
le
signe de sa grâce Dans l’or vert évanouie au cœur éclatant du jour
1204
ir d’une absence mais le signe de sa grâce Dans
l’
or vert évanouie au cœur éclatant du jour scintillera l’invisible gage
1205
ert évanouie au cœur éclatant du jour scintillera
l’
invisible gage d’un amour perdu. z. Rougemont Denis de, « Prison
1206
aa Quand avec un air fin mais un ton convaincu
l’
on a répété dans une ballade fameuse « Que voulez-vous, je suis bourge
1207
fameuse « Que voulez-vous, je suis bourgeois ! »,
l’
on peut se permettre quelques malices, quelques jeux d’esprit ou de mé
1208
elques jeux d’esprit ou de méchanceté, assuré que
l’
on est désormais d’être absous avec le sourire par la clientèle des li
1209
assuré que l’on est désormais d’être absous avec
le
sourire par la clientèle des librairies romandes, en mal de cadeaux d
1210
n est désormais d’être absous avec le sourire par
la
clientèle des librairies romandes, en mal de cadeaux de Noël ou de pr
1211
e cadeaux de Noël ou de première communion. Parmi
les
compatriotes d’Amiel, Godet restera l’un des rares qui ont réussi à s
1212
peu complexe et comme réduite à deux dimensions ;
la
conscience ne pouvait y tuer un lyrisme quasi inexistant, mais bien y
1213
xciter un esprit critique fort alerte. Jugez-en à
la
façon dont il parle de « ses quelques succès, si disproportionnés ave
1214
rtionnés avec son mérite ». Il ajoute : « j’ai eu
la
chance de discerner très jeune, avec une clairvoyance singulière, mes
1215
yance singulière, mes propres limites, et j’ai eu
la
sagesse de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de l’économie bo
1216
eu la sagesse de ne rien tenter au-delà ». C’est
le
comble de l’économie bourgeoise que cette administration exacte d’un
1217
e de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de
l’
économie bourgeoise que cette administration exacte d’un petit capital
1218
e cette administration exacte d’un petit capital.
Le
contraire de la poésie, bien sûr. Mais on n’en demande pas tant dans
1219
ration exacte d’un petit capital. Le contraire de
la
poésie, bien sûr. Mais on n’en demande pas tant dans les familles. Et
1220
sie, bien sûr. Mais on n’en demande pas tant dans
les
familles. Et qu’importe si la perspective manque souvent à ces récits
1221
ande pas tant dans les familles. Et qu’importe si
la
perspective manque souvent à ces récits : ce n’est point un paysage d
1222
’est point un paysage d’âme qu’on y cherche, mais
l’
anecdote bien tournée, des noms connus. Tout est sur le même plan ; le
1223
cdote bien tournée, des noms connus. Tout est sur
le
même plan ; le dessin d’ailleurs est élégant. Mais comme tout cela ma
1224
née, des noms connus. Tout est sur le même plan ;
le
dessin d’ailleurs est élégant. Mais comme tout cela manque de chair.
1225
L’
ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)ab L’o
1226
L’ordre social.
Le
Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)ab L’ordre social I
1227
L’ordre social. Le Libéralisme.
L’
inspiration (novembre 1929)ab L’ordre social Il y avait une fo
1228
Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)ab
L’
ordre social Il y avait une fois un jeune homme comme les autres. S
1229
ocial Il y avait une fois un jeune homme comme
les
autres. Soudain il lui pousse des ailes, une grande paire d’ailes. Al
1230
ait-on s’émerveiller ? Mais déjà Freud expliquait
le
monstre, les chaires le dénonçaient, et les précieuses trouvaient cel
1231
rveiller ? Mais déjà Freud expliquait le monstre,
les
chaires le dénonçaient, et les précieuses trouvaient cela d’un romant
1232
ais déjà Freud expliquait le monstre, les chaires
le
dénonçaient, et les précieuses trouvaient cela d’un romantisme ! ma c
1233
iquait le monstre, les chaires le dénonçaient, et
les
précieuses trouvaient cela d’un romantisme ! ma chère, d’un mauvais g
1234
antisme ! ma chère, d’un mauvais goût ! Cependant
le
jeune homme agitait ses ailes non sans une ingénue fierté. Mais au co
1235
e ingénue fierté. Mais au courant d’air s’enrhuma
le
grand-papa. On craignit de le perdre. — « Eh ! quoi, — vinrent lui di
1236
ant d’air s’enrhuma le grand-papa. On craignit de
le
perdre. — « Eh ! quoi, — vinrent lui dire ses amis, — l’orgueil t’ave
1237
re. — « Eh ! quoi, — vinrent lui dire ses amis, —
l’
orgueil t’aveugle-t-il ? Veux-tu conserver, ô cruel, des ailes qui don
1238
ur, ô pervers, ô disciple de Nietzsche ! » — Sous
le
poids de cette accusation, comment ne point céder : il fit couper ses
1239
ment ne point céder : il fit couper ses ailes. On
le
félicita de son retour à l’état normal, qui est pédestre. Mais à part
1240
couper ses ailes. On le félicita de son retour à
l’
état normal, qui est pédestre. Mais à partir de ce jour, on lui fit se
1241
’en a pas sera méprisé parce qu’il n’en a pas.
Le
libéralisme Seigneur ! clamaient-ils, combien complexes sont les p
1242
Seigneur ! clamaient-ils, combien complexes sont
les
problèmes que vous proposez à notre bonne volonté gémissante ! Dieu,
1243
r d’une solution fort simple qui d’ailleurs était
la
bonne, car le grand Remède, c’est un Simple. Des hurlements de rage n
1244
on fort simple qui d’ailleurs était la bonne, car
le
grand Remède, c’est un Simple. Des hurlements de rage ne tardèrent po
1245
ge ne tardèrent point à s’élever de toutes parts.
Les
uns défendaient la Démocratie outragée, les autres disaient qu’il n’y
1246
t à s’élever de toutes parts. Les uns défendaient
la
Démocratie outragée, les autres disaient qu’il n’y a plus de morale,
1247
arts. Les uns défendaient la Démocratie outragée,
les
autres disaient qu’il n’y a plus de morale, et ces jeunes gens ont un
1248
ale, et ces jeunes gens ont une façon de trancher
les
questions qui vous désarme. Craignant qu’on ne lui fît un mauvais par
1249
rme. Craignant qu’on ne lui fît un mauvais parti,
l’
ange trouva son salut dans un subterfuge : il insinua qu’il parlait au
1250
il parlait au nom d’une secte orientale. Aussitôt
la
discussion de reprendre, et l’on parla défense de l’Occident. L’ange
1251
rientale. Aussitôt la discussion de reprendre, et
l’
on parla défense de l’Occident. L’ange s’enfuit par l’un des nombreux
1252
discussion de reprendre, et l’on parla défense de
l’
Occident. L’ange s’enfuit par l’un des nombreux trous de leurs raisonn
1253
e reprendre, et l’on parla défense de l’Occident.
L’
ange s’enfuit par l’un des nombreux trous de leurs raisonnements. L
1254
’un des nombreux trous de leurs raisonnements.
L’
inspiration Comme le poète terminait sa théorie sur la nature de l’
1255
de leurs raisonnements. L’inspiration Comme
le
poète terminait sa théorie sur la nature de l’inspiration, un doute l
1256
ration Comme le poète terminait sa théorie sur
la
nature de l’inspiration, un doute lui vint. Il alla au cinéma. On don
1257
me le poète terminait sa théorie sur la nature de
l’
inspiration, un doute lui vint. Il alla au cinéma. On donnait un film
1258
au cinéma. On donnait un film voluptueux. Il aima
l’
héroïne, mais sans espoir. Il lui écrivit, en sortant de là, dans une
1259
tant de là, dans une crèmerie pleine de couples à
la
mode. Mais en écrivant il pensait à une femme blonde assise près de l
1260
près de lui. Ayant demandé un timbre pour attirer
l’
attention de la femme blonde — sans résultat —, il écrivit une adresse
1261
ant demandé un timbre pour attirer l’attention de
la
femme blonde — sans résultat —, il écrivit une adresse réelle, et mit
1262
résultat —, il écrivit une adresse réelle, et mit
la
lettre dans la première boîte venue. Le lendemain, il reçut une répon
1263
e, et mit la lettre dans la première boîte venue.
Le
lendemain, il reçut une réponse : « Vous avez commis une erreur, cher
1264
ma bénédiction, je suis votre amie Joséphine. » —
Le
poète reprit son manuscrit et conclut : « L’inspiration est le nom qu
1265
» — Le poète reprit son manuscrit et conclut : «
L’
inspiration est le nom qu’on donne en poésie à une suite de malentendu
1266
it son manuscrit et conclut : « L’inspiration est
le
nom qu’on donne en poésie à une suite de malentendus heureusement enc
1267
lui valut une Muse. ab. Rougemont Denis de, «
L’
ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration », Revue de Belles-Lettres
1268
se. ab. Rougemont Denis de, « L’ordre social.
Le
Libéralisme. L’inspiration », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuch
1269
emont Denis de, « L’ordre social. Le Libéralisme.
L’
inspiration », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Frib
1270
Les
soirées du Brambilla-club (mai 1930)ac Aux Albert Béguin en souve
1271
(mai 1930)ac Aux Albert Béguin en souvenir de
l’
ombrelle rouge de Versailles. Paris la nuit oublie parfois d’être spi
1272
ouvenir de l’ombrelle rouge de Versailles. Paris
la
nuit oublie parfois d’être spirituelle, devient tragique ou tout simp
1273
, devient tragique ou tout simplement germanique.
L’
Allemagne, c’est la Poésie, et la France c’est la Chambre des Députés,
1274
ou tout simplement germanique. L’Allemagne, c’est
la
Poésie, et la France c’est la Chambre des Députés, je n’en veux pas d
1275
ment germanique. L’Allemagne, c’est la Poésie, et
la
France c’est la Chambre des Députés, je n’en veux pas démordre, et la
1276
L’Allemagne, c’est la Poésie, et la France c’est
la
Chambre des Députés, je n’en veux pas démordre, et la Légion d’honneu
1277
hambre des Députés, je n’en veux pas démordre, et
la
Légion d’honneur — je vous la laisse, la Légion d’honneur. Quand vous
1278
ux pas démordre, et la Légion d’honneur — je vous
la
laisse, la Légion d’honneur. Quand vous prenez un taxi passé onze heu
1279
rdre, et la Légion d’honneur — je vous la laisse,
la
Légion d’honneur. Quand vous prenez un taxi passé onze heures, c’est
1280
sance, pourvu qu’on sache un peu d’allemand, — et
l’
allemand littéraire y suffit. Pour moi, je ne me sens pas trop embarra
1281
e ne me sens pas trop embarrassé ; comme j’habite
l’
Odéon, c’est toujours le fantôme de l’Odéon qui m’accompagne et nous n
1282
barrassé ; comme j’habite l’Odéon, c’est toujours
le
fantôme de l’Odéon qui m’accompagne et nous ne disons presque rien, n
1283
me j’habite l’Odéon, c’est toujours le fantôme de
l’
Odéon qui m’accompagne et nous ne disons presque rien, nous savons les
1284
pagne et nous ne disons presque rien, nous savons
les
mêmes histoires et nous avons durant la journée bouquiné dans les mêm
1285
s savons les mêmes histoires et nous avons durant
la
journée bouquiné dans les mêmes boîtes sous les arcades. (Nous ne tou
1286
res et nous avons durant la journée bouquiné dans
les
mêmes boîtes sous les arcades. (Nous ne touchons l’un et l’autre qu’a
1287
nt la journée bouquiné dans les mêmes boîtes sous
les
arcades. (Nous ne touchons l’un et l’autre qu’aux traductions ; le re
1288
ne touchons l’un et l’autre qu’aux traductions ;
le
reste, les livres de M. Maurois par exemple, publiés par la Revue de
1289
ns l’un et l’autre qu’aux traductions ; le reste,
les
livres de M. Maurois par exemple, publiés par la Revue de Belles-Let
1290
les livres de M. Maurois par exemple, publiés par
la
Revue de Belles-Lettres …………18 La plupart des noctambules préfèrent
1291
à pied ; mais moi je me méfie ; se promener seul
la
nuit dans une ville étrangère, n’est-ce point la définition même de l
1292
la nuit dans une ville étrangère, n’est-ce point
la
définition même de la luxure ? Quand je vais à pied, j’oublie en chem
1293
e étrangère, n’est-ce point la définition même de
la
luxure ? Quand je vais à pied, j’oublie en chemin les meilleures phra
1294
luxure ? Quand je vais à pied, j’oublie en chemin
les
meilleures phrases que j’avais préparées pour subjuguer mes amies, je
1295
à petits coups une amertume acide et tiède comme
l’
adolescence, un désespoir de nuit d’été sous le tilleul où elle n’est
1296
me l’adolescence, un désespoir de nuit d’été sous
le
tilleul où elle n’est pas venue… (C’est ici le lieu de l’avouer : je
1297
us le tilleul où elle n’est pas venue… (C’est ici
le
lieu de l’avouer : je ne saurais entretenir que mes rapports de polit
1298
ul où elle n’est pas venue… (C’est ici le lieu de
l’
avouer : je ne saurais entretenir que mes rapports de politesse distan
1299
tenir que mes rapports de politesse distante avec
les
personnes qui ont dit, ne fût-ce qu’une fois en leur vie : « J’ai hor
1300
ût-ce qu’une fois en leur vie : « J’ai horreur de
la
sentimentalité ».) Nous voici donc en taxi, « nous deux le fantôme »
1301
entalité ».) Nous voici donc en taxi, « nous deux
le
fantôme » comme on disait au village où je suis né, qui n’est pas ma
1302
je suis né, qui n’est pas ma patrie. Ce soir-là,
le
fantôme ayant envie de manger ferme a donné au chauffeur l’adresse d’
1303
ayant envie de manger ferme a donné au chauffeur
l’
adresse d’un ogre. C’est tout près parce que j’ai peur. En même temps
1304
me temps c’est très loin parce que je me réjouis.
La
Maison des Ogres est au 53 rue de Rennes ; je ne vous le confie pas s
1305
on des Ogres est au 53 rue de Rennes ; je ne vous
le
confie pas sans un secret tremblement. Nous embarquons Jean Cassou, e
1306
cret tremblement. Nous embarquons Jean Cassou, et
le
fantôme se fait aussi négligeable que possible, pratiquement invisibl
1307
ans cette minuscule voiture. Déjà nous traversons
la
nuit rose et violette de Montparnasse. Là, l’insondable lubie d’un ag
1308
ons la nuit rose et violette de Montparnasse. Là,
l’
insondable lubie d’un agent nous immobilise une minute aux lisières od
1309
e décrire à Blaise Cendrars, son voisin de table,
l’
arrivée des Mongols dans Paris et leurs établissements Place de la Con
1310
ngols dans Paris et leurs établissements Place de
la
Concorde. Notre conteur est vêtu de la gloire d’un pourpoint « plus r
1311
s Place de la Concorde. Notre conteur est vêtu de
la
gloire d’un pourpoint « plus rouge que rouge ». On assure qu’il possè
1312
as déplorable, s’agissant d’un poète authentique.
Le
pittoresque. D’abord je crains que la notion n’en soit toute relative
1313
uthentique. Le pittoresque. D’abord je crains que
la
notion n’en soit toute relative aux modes de « vie » bourgeois ; et p
1314
relative aux modes de « vie » bourgeois ; et puis
la
, comédie n’est pas mon fort, même la triste. Je n’aime plus que les c
1315
is ; et puis la, comédie n’est pas mon fort, même
la
triste. Je n’aime plus que les choses lentement émouvantes, monotones
1316
pas mon fort, même la triste. Je n’aime plus que
les
choses lentement émouvantes, monotones et aiguës, comme la pluie dans
1317
lentement émouvantes, monotones et aiguës, comme
la
pluie dans les campagnes au printemps. Ou encore : comme la lecture d
1318
uvantes, monotones et aiguës, comme la pluie dans
les
campagnes au printemps. Ou encore : comme la lecture des romans angla
1319
ans les campagnes au printemps. Ou encore : comme
la
lecture des romans anglais, les loisirs obsédés du jaloux, le travail
1320
Ou encore : comme la lecture des romans anglais,
les
loisirs obsédés du jaloux, le travail jusqu’à l’aube, la naissance d’
1321
es romans anglais, les loisirs obsédés du jaloux,
le
travail jusqu’à l’aube, la naissance d’un visage dans ma mémoire (d’h
1322
les loisirs obsédés du jaloux, le travail jusqu’à
l’
aube, la naissance d’un visage dans ma mémoire (d’heure en heure ces y
1323
irs obsédés du jaloux, le travail jusqu’à l’aube,
la
naissance d’un visage dans ma mémoire (d’heure en heure ces yeux plus
1324
’heure en heure ces yeux plus vivants…) De là, je
le
suppose, une certaine misanthropie en germe : les êtres changent trop
1325
le suppose, une certaine misanthropie en germe :
les
êtres changent trop vite, je n’ai pas le temps de me laisser envoûter
1326
germe : les êtres changent trop vite, je n’ai pas
le
temps de me laisser envoûter ou de les rendre esclaves, hors de quoi
1327
je n’ai pas le temps de me laisser envoûter ou de
les
rendre esclaves, hors de quoi je ne sais pas de commerce humain qui v
1328
quoi je ne sais pas de commerce humain qui vaille
la
peine, qui vaille l’amour. Durant cette méditation, nous avons gagné
1329
e commerce humain qui vaille la peine, qui vaille
l’
amour. Durant cette méditation, nous avons gagné une rue pauvrement éc
1330
, nous avons gagné une rue pauvrement éclairée où
l’
on s’arrête. Le fantôme derrière nous claque la portière. Il fait asse
1331
gné une rue pauvrement éclairée où l’on s’arrête.
Le
fantôme derrière nous claque la portière. Il fait assez froid. ⁂ Lors
1332
où l’on s’arrête. Le fantôme derrière nous claque
la
portière. Il fait assez froid. ⁂ Lorsque l’homme, cédant à l’évidence
1333
laque la portière. Il fait assez froid. ⁂ Lorsque
l’
homme, cédant à l’évidence des choses ou de l’esprit, comprend enfin q
1334
Il fait assez froid. ⁂ Lorsque l’homme, cédant à
l’
évidence des choses ou de l’esprit, comprend enfin qu’il est perdu, il
1335
que l’homme, cédant à l’évidence des choses ou de
l’
esprit, comprend enfin qu’il est perdu, il découvre la liberté. (Je pe
1336
prit, comprend enfin qu’il est perdu, il découvre
la
liberté. (Je pense à la boussole autant qu’au sens moral.) Le goût de
1337
il est perdu, il découvre la liberté. (Je pense à
la
boussole autant qu’au sens moral.) Le goût de se perdre est un des pl
1338
(Je pense à la boussole autant qu’au sens moral.)
Le
goût de se perdre est un des plus profonds mystères de notre conditio
1339
ion, et je ne crois pas trop absurde d’y chercher
l’
origine non seulement des passions amoureuses, mais de la plupart des
1340
plupart des entreprises démesurées qu’enregistre
l’
Histoire, science chargée d’illustrer à ses propres yeux l’Humanité.
1341
e, science chargée d’illustrer à ses propres yeux
l’
Humanité. En passant, relevons un sophisme à la mode, qui vient trébu
1342
x l’Humanité. En passant, relevons un sophisme à
la
mode, qui vient trébucher dans les méandres de notre chemin : « Il fa
1343
s un sophisme à la mode, qui vient trébucher dans
les
méandres de notre chemin : « Il faut se perdre pour se retrouver », n
1344
ne doctrine en vérité moins généreuse que ne veut
le
croire M. Gide, — si pareil entre les griffes de son égoïsme à la sou
1345
que ne veut le croire M. Gide, — si pareil entre
les
griffes de son égoïsme à la souris qu’un chat subtil et ironique fein
1346
e, — si pareil entre les griffes de son égoïsme à
la
souris qu’un chat subtil et ironique feint de lâcher pour mieux croqu
1347
? S’il me reste un espoir au sein de mes erreurs
les
moins préméditées, c’est sans doute celui d’être trouvé. J’ai toujour
1348
doute celui d’être trouvé. J’ai toujours méprisé
le
geste de l’homme qui, le soir dans sa chambre d’hôtel, ferme sa porte
1349
d’être trouvé. J’ai toujours méprisé le geste de
l’
homme qui, le soir dans sa chambre d’hôtel, ferme sa porte à double to
1350
é. J’ai toujours méprisé le geste de l’homme qui,
le
soir dans sa chambre d’hôtel, ferme sa porte à double tour. Ah ! qu’u
1351
sa porte à double tour. Ah ! qu’une nuit enfin, à
la
faveur de mon sommeil, on me vole à moi-même ! Que des êtres rêvés m’
1352
délibérément notre fantôme. Il avance sans bouger
les
jambes. Nous suivons à tâtons. Ce que je pressentais ne tarde pas à s
1353
ion de lumière basse, rougeoyante, campagnarde. ⁂
La
sauce est au rôti ce que le style à la pensée. Il arrive qu’on parle,
1354
yante, campagnarde. ⁂ La sauce est au rôti ce que
le
style à la pensée. Il arrive qu’on parle, en art culinaire, du style
1355
agnarde. ⁂ La sauce est au rôti ce que le style à
la
pensée. Il arrive qu’on parle, en art culinaire, du style d’un rôti,
1356
mis à toutes sauces. Si M. Thibaudet connaissait
l’
hôte de céans, il proposerait cette formule du plat idéal : Du Bos en
1357
ux pour parler qu’en face d’une assiette pleine :
l’
occupation agréable et essentielle qui consiste à divise ; pour mieux
1358
et essentielle qui consiste à divise ; pour mieux
l’
engloutir — ainsi que le conseillait déjà René Descartes — la portion
1359
ste à divise ; pour mieux l’engloutir — ainsi que
le
conseillait déjà René Descartes — la portion que l’on s’est administr
1360
— ainsi que le conseillait déjà René Descartes —
la
portion que l’on s’est administrée accapare nos facultés les plus vul
1361
conseillait déjà René Descartes — la portion que
l’
on s’est administrée accapare nos facultés les plus vulgaires, libéran
1362
que l’on s’est administrée accapare nos facultés
les
plus vulgaires, libérant par là cette part gratuite de nous-mêmes qui
1363
tte agape dont il m’est impossible de nommer tous
les
officiants visibles ou virtuels, et cela pour différentes raisons, la
1364
iomandre n’est pas là. Il a téléphoné au début de
l’
après-midi qu’il commençait un roman. Son absence nous fera-t-elle cro
1365
e croire qu’il apporte un soin tout particulier à
le
parfaire ? — il est bientôt minuit. Mon fantôme est là. Un chien, Dic
1366
bien être là, puisqu’en ma voisine, je reconnais
la
Jeune fille de neige. On la sent prête à fondre de tendresse au premi
1367
voisine, je reconnais la Jeune fille de neige. On
la
sent prête à fondre de tendresse au premier regard. Mais non, trop bi
1368
se ressaisit, pense à Genève, reprend aussitôt de
la
consistance, et dans son trouble apparaît toute parcourue d’adorables
1369
ris sont là. Enfin, Jean Cassou, représentant Mgr
le
marquis de Carabas, absent de Paris, est là. Si vous enlevez Georges
1370
soin d’ajouter ceux que j’oublie, vous obtiendrez
le
chiffre exact des participants ; calculez l’âge du capitaine. Au dess
1371
drez le chiffre exact des participants ; calculez
l’
âge du capitaine. Au dessert, chacun y va de son petit miracle. Jaloux
1372
en danois. Quatre anciens bellettriens célèbrent
les
rites du Sapin vert. À ce moment apparaît Charles Du Bos, en kimono d
1373
stan ». Il ouvre une de ces parenthèses dont il a
le
secret, et dans laquelle la rédaction s’empresse de faire rentrer la
1374
parenthèses dont il a le secret, et dans laquelle
la
rédaction s’empresse de faire rentrer la partie la plus incongrue de
1375
laquelle la rédaction s’empresse de faire rentrer
la
partie la plus incongrue de cette chronique. Enfin, un Étranger racon
1376
a rédaction s’empresse de faire rentrer la partie
la
plus incongrue de cette chronique. Enfin, un Étranger raconte l’histo
1377
ue de cette chronique. Enfin, un Étranger raconte
l’
histoire suivante qui est une des plus belles du monde : Un prince
1378
alien ayant commandé à Pergolèse un Stabat Mater,
le
musicien quitta Naples où il habitait alors, abandonnant sa femme, et
1379
ors, abandonnant sa femme, et se mit à errer dans
les
campagnes, en quête de l’inspiration qui le fuyait. Il buvait, rêvait
1380
et se mit à errer dans les campagnes, en quête de
l’
inspiration qui le fuyait. Il buvait, rêvait, dormait sous les treille
1381
dans les campagnes, en quête de l’inspiration qui
le
fuyait. Il buvait, rêvait, dormait sous les treilles, divaguait sous
1382
on qui le fuyait. Il buvait, rêvait, dormait sous
les
treilles, divaguait sous la lune, hagard et fiévreux, mais comme aban
1383
rêvait, dormait sous les treilles, divaguait sous
la
lune, hagard et fiévreux, mais comme abandonné par la grâce. Ce vagab
1384
une, hagard et fiévreux, mais comme abandonné par
la
grâce. Ce vagabondage désespéré dura plusieurs semaines, au terme des
1385
retrouva aux portes de Naples, d’où il n’eut que
la
force de regagner son logis. Comme il allait y pénétrer, il aperçut a
1386
il s’enferma, écrivit dans une grande fièvre tout
le
Stabat Mater, sa plus belle œuvre, sur le thème des pleurs de la viei
1387
re tout le Stabat Mater, sa plus belle œuvre, sur
le
thème des pleurs de la vieille, et mourut comme il l’achevait. ⁂ Par
1388
, sa plus belle œuvre, sur le thème des pleurs de
la
vieille, et mourut comme il l’achevait. ⁂ Partout où il y a de la mu
1389
hème des pleurs de la vieille, et mourut comme il
l’
achevait. ⁂ Partout où il y a de la musique, de l’Italie et une certa
1390
urut comme il l’achevait. ⁂ Partout où il y a de
la
musique, de l’Italie et une certaine qualité de désespoir, je retrouv
1391
’achevait. ⁂ Partout où il y a de la musique, de
l’
Italie et une certaine qualité de désespoir, je retrouve les contes d’
1392
et une certaine qualité de désespoir, je retrouve
les
contes d’Hoffmann. Mais il s’agit de les vivre plutôt que d’en parler
1393
retrouve les contes d’Hoffmann. Mais il s’agit de
les
vivre plutôt que d’en parler vous voyez bien que j’ai quitté cette ta
1394
z bien que j’ai quitté cette table écroulée, dans
la
fumée et les évocations, sous les bouteilles, — et les lampes meurent
1395
’ai quitté cette table écroulée, dans la fumée et
les
évocations, sous les bouteilles, — et les lampes meurent en jetant un
1396
e écroulée, dans la fumée et les évocations, sous
les
bouteilles, — et les lampes meurent en jetant une longue flamme. À Ve
1397
umée et les évocations, sous les bouteilles, — et
les
lampes meurent en jetant une longue flamme. À Venise, sous le brouill
1398
urent en jetant une longue flamme. À Venise, sous
le
brouillard qui cachait le front des palais, une nuit d’hiver, je chan
1399
flamme. À Venise, sous le brouillard qui cachait
le
front des palais, une nuit d’hiver, je chantonnais la Barcarolle en d
1400
ront des palais, une nuit d’hiver, je chantonnais
la
Barcarolle en descendant le Grand Canal, — c’est une romance assez dé
1401
hiver, je chantonnais la Barcarolle en descendant
le
Grand Canal, — c’est une romance assez déchirante, à mi-voix… .......
1402
te fois, dérive un peu vers ces Allemagnes où, tu
le
sais, la tristesse la plus amère invente encore des mélodies sentimen
1403
dérive un peu vers ces Allemagnes où, tu le sais,
la
tristesse la plus amère invente encore des mélodies sentimentales, un
1404
vers ces Allemagnes où, tu le sais, la tristesse
la
plus amère invente encore des mélodies sentimentales, un peu bêtes, u
1405
tales, un peu bêtes, un peu trop lentes, comme tu
les
aimes — on n’a pas toujours envie de crâner. L’esplanade d’une petite
1406
les aimes — on n’a pas toujours envie de crâner.
L’
esplanade d’une petite ville de l’Allemagne du Sud, un soir de mai. Il
1407
nvie de crâner. L’esplanade d’une petite ville de
l’
Allemagne du Sud, un soir de mai. Il y a dans les marronniers noirs de
1408
e l’Allemagne du Sud, un soir de mai. Il y a dans
les
marronniers noirs des lampions et des touffes de gamins qui regardent
1409
pions et des touffes de gamins qui regardent avec
la
bouche ce qui se passe à l’intérieur d’une enceinte de toiles tendues
1410
ns qui regardent avec la bouche ce qui se passe à
l’
intérieur d’une enceinte de toiles tendues au-devant d’un petit théâtr
1411
e de toiles tendues au-devant d’un petit théâtre.
La
rampe est d’un bleu stellaire, un bleu d’Aldébaran. On joue Rose de T
1412
me en 15 tableaux, un prologue et une conclusion.
Le
carton des armures sonne sourdement sous les coups d’un Kühnrich à la
1413
sion. Le carton des armures sonne sourdement sous
les
coups d’un Kühnrich à la basse rugissante, plus traître que nature av
1414
s sonne sourdement sous les coups d’un Kühnrich à
la
basse rugissante, plus traître que nature avec sa large face mangée p
1415
mangée par une barbe en crin de cheval du diable.
L’
héroïne est belle comme une ballade de Bürger, tandis qu’elle arrose d
1416
de de Bürger, tandis qu’elle arrose de ses larmes
le
seuil de la prison paternelle, tout en coulant un clin d’œil assassin
1417
, tandis qu’elle arrose de ses larmes le seuil de
la
prison paternelle, tout en coulant un clin d’œil assassin vers le par
1418
elle, tout en coulant un clin d’œil assassin vers
le
parterre agité de passions contradictoires. Durant les entractes, une
1419
arterre agité de passions contradictoires. Durant
les
entractes, une fanfare de paysans bleu de roi joue sur un rythme impe
1420
roi joue sur un rythme impeccable, avec toujours
les
mêmes notes fêlées et l’accompagnement dans les feuillages de voix fa
1421
peccable, avec toujours les mêmes notes fêlées et
l’
accompagnement dans les feuillages de voix fausses mais aériennes, des
1422
s les mêmes notes fêlées et l’accompagnement dans
les
feuillages de voix fausses mais aériennes, des chansons populaires qu
1423
ann muss sie am Rheine Geboren sein… Il faudrait
la
mélodie. La fanfare s’éloigne. La nuit est chaude sur les collines. U
1424
am Rheine Geboren sein… Il faudrait la mélodie.
La
fanfare s’éloigne. La nuit est chaude sur les collines. Un grand verr
1425
n… Il faudrait la mélodie. La fanfare s’éloigne.
La
nuit est chaude sur les collines. Un grand verre de bière à l’auberge
1426
die. La fanfare s’éloigne. La nuit est chaude sur
les
collines. Un grand verre de bière à l’auberge déserte, ma pipe et mon
1427
haude sur les collines. Un grand verre de bière à
l’
auberge déserte, ma pipe et mon chien qui bougonne. La petite maison d
1428
berge déserte, ma pipe et mon chien qui bougonne.
La
petite maison du colonel en retraite a des fenêtres basses, mais défe
1429
iers sauvages. Laquelle des trois filles est donc
la
plus jolie ? Sans doute celle qui dort dans la mansarde, et qui n’a p
1430
nc la plus jolie ? Sans doute celle qui dort dans
la
mansarde, et qui n’a pas peur… ⁂ Le reste de la vie, c’est toujours e
1431
qui dort dans la mansarde, et qui n’a pas peur… ⁂
Le
reste de la vie, c’est toujours entre deux voyages d’Allemagne. Cela
1432
s la mansarde, et qui n’a pas peur… ⁂ Le reste de
la
vie, c’est toujours entre deux voyages d’Allemagne. Cela se passe act
1433
ardan (xvie siècle) à certains moments. Paris,
le
28 avril. 18. ……………… (N. de la R.) 19. L’auteur nous promet pour l
1434
ris, le 28 avril. 18. ……………… (N. de la R.) 19.
L’
auteur nous promet pour le numéro 6 de nouveaux détails apocryphes. (N
1435
………… (N. de la R.) 19. L’auteur nous promet pour
le
numéro 6 de nouveaux détails apocryphes. (N. de la R.) ac. Rougemo
1436
yphes. (N. de la R.) ac. Rougemont Denis de, «
Les
soirées du Brambilla-club », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâ
1437
Le
Grand Testament de Villon, illustré par Marcel North (juin 1930)ad
1438
uvé un style qui ne ressemble qu’à sa fantaisie :
la
précision de son trait cerne une poésie ingénue, à la fois drue et dé
1439
délicate comme tout ce qui est vraiment « naïf ».
La
fleur qui croît en plein cœur de celui qui est mort d’amour, une âme
1440
ui qui est mort d’amour, une âme qui s’envole par
la
bouche, des formes aériennes qui volent dans les Limbes, tout cela pr
1441
r la bouche, des formes aériennes qui volent dans
les
Limbes, tout cela prend dans ces gravures une réalité si touchante et
1442
hante et si naturelle qu’on ne peut s’y tromper :
la
grâce de l’enfance anime encore cette imagination, guide encore cette
1443
naturelle qu’on ne peut s’y tromper : la grâce de
l’
enfance anime encore cette imagination, guide encore cette main déjà e
1444
é et d’observation ironique, et cette netteté que
les
primitifs savent allier à la simplification la plus délibérée. Gros é
1445
t cette netteté que les primitifs savent allier à
la
simplification la plus délibérée. Gros évêques et ribaudes, pages far
1446
e les primitifs savent allier à la simplification
la
plus délibérée. Gros évêques et ribaudes, pages farceurs et « mélanco
1447
ncoliques » circulent dans ces compositions parmi
les
allégories barbares d’un ciel bon enfant, et dans ce truculent petit
1448
et dans ce truculent petit monde, Marcel North et
l’
escholier François s’entendent comme larrons en foire. Certes, l’amer
1449
çois s’entendent comme larrons en foire. Certes,
l’
amertume douloureuse de Villon se mue souvent dans la traduction de No
1450
mertume douloureuse de Villon se mue souvent dans
la
traduction de North en acidité légère de fruit vert, mais on n’ose re
1451
u’elles ont d’un peu grêle : leur jeunesse… Et si
la
composition s’amuse parfois à boiter — à côté de parfaites réussites
1452
orables inventions de détails qui se cachent dans
les
coins, bonshommes, fleurettes drôles, et ce violoneux qui tire son ar
1453
het sur des rayons de soleil… Bravo, Marcel, v’là
le
printemps ! ad. Rougemont Denis de, « Le Grand Testament de Villo
1454
v’là le printemps ! ad. Rougemont Denis de, «
Le
Grand Testament de Villon, illustré par Marcel North », Revue de Bell
1455
La
pluie et le beau temps (Dialogue dans une tête) (1932)ae af Lord
1456
La pluie et
le
beau temps (Dialogue dans une tête) (1932)ae af Lord Artur. — Vo
1457
e je ne suis pas plus coquette qu’une autre. Mais
les
hommes comme vous aiment que les femmes soient coquettes à les faire
1458
’une autre. Mais les hommes comme vous aiment que
les
femmes soient coquettes à les faire doucement frémir de rage ; ils ai
1459
mme vous aiment que les femmes soient coquettes à
les
faire doucement frémir de rage ; ils aiment s’obstiner et c’est pourq
1460
; du reste, cela me rend plus jolie, quelqu’un me
l’
a dit hier encore, vous ne saurez pas qui. Lord Artur. — Ravissante S
1461
Ravissante Sonnette, vos paroles ne sont pas pour
les
oreilles, mais pour les lèvres de ceux qui vous aiment. Car elles son
1462
paroles ne sont pas pour les oreilles, mais pour
les
lèvres de ceux qui vous aiment. Car elles sont insensées, mais comme
1463
elles sont insensées, mais comme des baisers dans
l’
air. Je voudrais vous poser une question, Sonnette. Une question très
1464
able ? Et voici cette question : Aimez-vous mieux
la
pluie ou le beau temps ? Sonnette. — Pfi ! comme c’est drôle ! C’est
1465
ici cette question : Aimez-vous mieux la pluie ou
le
beau temps ? Sonnette. — Pfi ! comme c’est drôle ! C’est moi qui fai
1466
e. — Pfi ! comme c’est drôle ! C’est moi qui fais
la
pluie et le beau temps. Lord Artur. — Certes, la réponse serait sage
1467
omme c’est drôle ! C’est moi qui fais la pluie et
le
beau temps. Lord Artur. — Certes, la réponse serait sage, si seuleme
1468
la pluie et le beau temps. Lord Artur. — Certes,
la
réponse serait sage, si seulement vous saviez ce que vous dites. Mais
1469
dites. Mais, en vérité, que signifient pour vous
le
beau temps et la pluie ? Est-ce que c’est rire et pleurer ? Est-ce qu
1470
vérité, que signifient pour vous le beau temps et
la
pluie ? Est-ce que c’est rire et pleurer ? Est-ce que c’est le bonheu
1471
t-ce que c’est rire et pleurer ? Est-ce que c’est
le
bonheur et la tristesse ? Est-ce que vous préférez l’un à l’autre ?
1472
rire et pleurer ? Est-ce que c’est le bonheur et
la
tristesse ? Est-ce que vous préférez l’un à l’autre ? Sonnette. — Pe
1473
Lord Artur. — Je pense sérieusement que vous ne
l’
avez jamais su. Pas plus que vous n’avez jamais su si vous préfériez l
1474
plus que vous n’avez jamais su si vous préfériez
le
bonheur ou la tristesse. Car vous ne savez pas où est votre bien. C’e
1475
n’avez jamais su si vous préfériez le bonheur ou
la
tristesse. Car vous ne savez pas où est votre bien. C’est pourquoi le
1476
us ne savez pas où est votre bien. C’est pourquoi
les
mots vous paraissent simples, évidents et indifférents. C’est pourquo
1477
est pourquoi vous admettez que « beau » temps est
le
contraire de « mauvais » temps, et vous n’avez jamais cherché ce que
1478
s, et vous n’avez jamais cherché ce que doit être
le
« bon » temps, ni si les tempêtes sont « belles ». C’est pourquoi vou
1479
cherché ce que doit être le « bon » temps, ni si
les
tempêtes sont « belles ». C’est pourquoi vous pensez encore que le bo
1480
« belles ». C’est pourquoi vous pensez encore que
le
bonheur peut exister en dehors de la souffrance, et même qu’il est le
1481
z encore que le bonheur peut exister en dehors de
la
souffrance, et même qu’il est le contraire de la souffrance. C’est po
1482
ter en dehors de la souffrance, et même qu’il est
le
contraire de la souffrance. C’est pourquoi vos rêves composent toujou
1483
la souffrance, et même qu’il est le contraire de
la
souffrance. C’est pourquoi vos rêves composent toujours le même paysa
1484
ance. C’est pourquoi vos rêves composent toujours
le
même paysage de carte postale en couleurs, idéal inévitable de ceux q
1485
vitable de ceux qui n’ont pas de point de vue sur
le
beau temps. Écoutez-moi bien, Sonnette : Vos actions et vos pensées,
1486
: Vos actions et vos pensées, votre conception de
l’
amour se réfèrent en vérité à une carte postale en couleurs. Et non pa
1487
ité à une carte postale en couleurs. Et non pas à
la
réalité. Car vous n’aimez pas réfléchir à la souffrance. (Un silenc
1488
as à la réalité. Car vous n’aimez pas réfléchir à
la
souffrance. (Un silence.) Sans doute, Sonnette, portez-vous de ce
1489
uand j’étais petite fille, j’aimais me promener à
la
lisière des forêts, les jambes nues sous la pluie. L’herbe était plei
1490
le, j’aimais me promener à la lisière des forêts,
les
jambes nues sous la pluie. L’herbe était pleine de sales limaces et d
1491
ner à la lisière des forêts, les jambes nues sous
la
pluie. L’herbe était pleine de sales limaces et de petits escargots,
1492
isière des forêts, les jambes nues sous la pluie.
L’
herbe était pleine de sales limaces et de petits escargots, et les fra
1493
leine de sales limaces et de petits escargots, et
les
framboises humides avaient un délicieux goût fade. Je rentrais toute
1494
de mes genoux griffés comme ceux des garçons, et
le
soir quand on me faisait souhaiter dans ma prière « qu’il fasse beau
1495
emain », je pensais en dessous que j’aimais mieux
les
herbes mouillées. Lord Artur. — On dit souvent des femmes qu’elles s
1496
femmes qu’elles sont naturellement païennes. Mais
les
peuples païens sont toujours religieux, alors que les femmes de ce te
1497
peuples païens sont toujours religieux, alors que
les
femmes de ce temps sont seulement sournoises. Sonnette. — Lord Artur
1498
être chrétien pour comprendre quoi que ce soit à
la
pluie et au beau temps. Lord Artur. — J’ai toujours estimé, Sonnette
1499
s étiez chrétienne, vous sauriez ce que c’est que
le
beau temps. Si vous étiez païenne et que vous adoriez la lumière, le
1500
temps. Si vous étiez païenne et que vous adoriez
la
lumière, le beau temps vous serait un Dieu rendu visible ; et votre «
1501
ous étiez païenne et que vous adoriez la lumière,
le
beau temps vous serait un Dieu rendu visible ; et votre « bonheur » r
1502
us que l’un des noms de sa présence. Mais un jour
la
lumière est morte autour de nous, elle est morte à la surface des cho
1503
umière est morte autour de nous, elle est morte à
la
surface des choses pour renaître au centre de l’homme. Et, dès lors,
1504
la surface des choses pour renaître au centre de
l’
homme. Et, dès lors, de tous les événements qui paraissent autour de n
1505
aître au centre de l’homme. Et, dès lors, de tous
les
événements qui paraissent autour de nous, aucun n’importe, sinon celu
1506
ur de nous, aucun n’importe, sinon celui qui dans
le
même temps se passe à l’intérieur d’un être. Ainsi tout est changé, m
1507
te, sinon celui qui dans le même temps se passe à
l’
intérieur d’un être. Ainsi tout est changé, mais peu le savent. Peu sa
1508
érieur d’un être. Ainsi tout est changé, mais peu
le
savent. Peu savent le chemin qui va du signe à l’être. Longues pluies
1509
i tout est changé, mais peu le savent. Peu savent
le
chemin qui va du signe à l’être. Longues pluies de printemps sur la c
1510
le savent. Peu savent le chemin qui va du signe à
l’
être. Longues pluies de printemps sur la campagne recueillie, tempêtes
1511
u signe à l’être. Longues pluies de printemps sur
la
campagne recueillie, tempêtes sur les pentes, — beau temps de la prés
1512
rintemps sur la campagne recueillie, tempêtes sur
les
pentes, — beau temps de la présence. Car tu sais pour quel « bien » d
1513
ueillie, tempêtes sur les pentes, — beau temps de
la
présence. Car tu sais pour quel « bien » désiré tu les aimes ; mais t
1514
résence. Car tu sais pour quel « bien » désiré tu
les
aimes ; mais tu sais qu’au soleil de l’aube aussi d’autres fois tu l’
1515
ésiré tu les aimes ; mais tu sais qu’au soleil de
l’
aube aussi d’autres fois tu l’as possédé. Tu comprends maintenant qu’i
1516
ais qu’au soleil de l’aube aussi d’autres fois tu
l’
as possédé. Tu comprends maintenant qu’il ne faut pas choisir parmi ta
1517
naîtras où se situe leur lieu, établis en ce lieu
la
demeure de tes pensées. Ainsi, nous dit la Fable, fit Myscille, habi
1518
lieu la demeure de tes pensées. Ainsi, nous dit
la
Fable, fit Myscille, habitant d’Argos. N’ayant pu débrouiller le sens
1519
yscille, habitant d’Argos. N’ayant pu débrouiller
le
sens de l’Oracle qui lui avait dit d’aller bâtir une ville là où il t
1520
bitant d’Argos. N’ayant pu débrouiller le sens de
l’
Oracle qui lui avait dit d’aller bâtir une ville là où il trouverait l
1521
t dit d’aller bâtir une ville là où il trouverait
la
pluie et le beau temps, il rencontra en Italie une courtisane qui ple
1522
r bâtir une ville là où il trouverait la pluie et
le
beau temps, il rencontra en Italie une courtisane qui pleurait ; et e
1523
une courtisane qui pleurait ; et en ce lieu bâtit
la
ville de Crotone. Sonnette. — J’aime vos histoires, Lord Artur. (Un
1524
quel temps ferait-il pour vous ? Lord Artur. — …
Le
beau mot : courtisane… Ce n’est pas qu’elle soit belle, peut-être, ma
1525
vous n’êtes qu’une petite fille.20 20. [Note à
l’
achevé d’imprimé :] « Relativement à « La pluie et le beau temps » de
1526
[Note à l’achevé d’imprimé :] « Relativement à «
La
pluie et le beau temps » de Salomon de Crac, tous droits demeurent ré
1527
chevé d’imprimé :] « Relativement à « La pluie et
le
beau temps » de Salomon de Crac, tous droits demeurent réservés par D
1528
oits demeurent réservés par Denis de Rougemont, à
la
suite d’une entente formelle avec les héritiers du baron de Crac, rep
1529
Rougemont, à la suite d’une entente formelle avec
les
héritiers du baron de Crac, représentés par le baron W. de Münchhause
1530
c les héritiers du baron de Crac, représentés par
le
baron W. de Münchhausen, au bar des Vikings (Paris), fin septembre 19
1531
fin septembre 1931. » ae. Rougemont Denis de, «
La
pluie et le beau temps (Dialogue dans une tête) », Revue de Belles-Le
1532
e 1931. » ae. Rougemont Denis de, « La pluie et
le
beau temps (Dialogue dans une tête) », Revue de Belles-Lettres, Lausa
1533
Petites notes sur
les
vérités éternelles (1932-1933)ag La lecture du bel article de M. A
1534
notes sur les vérités éternelles (1932-1933)ag
La
lecture du bel article de M. Arnold Reymond, paru dans votre n° 1, me
1535
e M. Arnold Reymond, paru dans votre n° 1, me met
la
plume à la main. Voici quelques notes rapidement rédigées dans les ma
1536
Reymond, paru dans votre n° 1, me met la plume à
la
main. Voici quelques notes rapidement rédigées dans les marges. M. Re
1537
in. Voici quelques notes rapidement rédigées dans
les
marges. M. Reymond, je le crois, ne m’en voudra pas trop de leur viva
1538
pidement rédigées dans les marges. M. Reymond, je
le
crois, ne m’en voudra pas trop de leur vivacité : il connaît bien les
1539
oudra pas trop de leur vivacité : il connaît bien
les
Neuchâtelois, qui l’ont beaucoup aimé ; il sait que ces Neuchâtelois
1540
vivacité : il connaît bien les Neuchâtelois, qui
l’
ont beaucoup aimé ; il sait que ces Neuchâtelois sont d’infatigables e
1541
Neuchâtelois sont d’infatigables ergoteurs. Pour
la
commodité du lecteur, je recopie les passages phrases auxquels s’atta
1542
goteurs. Pour la commodité du lecteur, je recopie
les
passages phrases auxquels s’attachent mes gloses. Je m’excuse par ava
1543
s’attachent mes gloses. Je m’excuse par avance de
l’
avantage que je m’accorde en détachant ainsi des phrases du contexte.
1544
u contexte. Mais si j’adoptais une autre méthode,
les
dimensions de la Revue n’y suffiraient plus — ni la patience du lecte
1545
i j’adoptais une autre méthode, les dimensions de
la
Revue n’y suffiraient plus — ni la patience du lecteur à mon endroit,
1546
dimensions de la Revue n’y suffiraient plus — ni
la
patience du lecteur à mon endroit, je le crains… 1. S’il n’y a pas de
1547
lus — ni la patience du lecteur à mon endroit, je
le
crains… 1. S’il n’y a pas de vérité absolue, en ce sens que tout juge
1548
ent tenu pour vrai peut être modifié ou complété,
les
conditions de la vérité sont, elles, immuables et éternelles… (p. 12)
1549
peut être modifié ou complété, les conditions de
la
vérité sont, elles, immuables et éternelles… (p. 12). Les conditions
1550
é sont, elles, immuables et éternelles… (p. 12).
Les
conditions de la vérité sont donc éternelles (p. 13). Les philosophes
1551
uables et éternelles… (p. 12). Les conditions de
la
vérité sont donc éternelles (p. 13). Les philosophes, de tout temps,
1552
itions de la vérité sont donc éternelles (p. 13).
Les
philosophes, de tout temps, ont montré du goût pour une certaine cont
1553
ltats hautement contradictoires des philosophies.
La
critique postkantienne ayant fait justice de certaines prétentions, s
1554
aître d’une vérité absolue, on put se demander si
la
philosophie n’allait pas démissionner, purement et simplement. W. Jam
1555
mes ne disait pas non. Mais quoi ? Laisser tomber
la
« discipline » ? Et d’ailleurs, une démission de la philosophie eût i
1556
« discipline » ? Et d’ailleurs, une démission de
la
philosophie eût impliqué, au concret, la démission réelle de tous les
1557
ssion de la philosophie eût impliqué, au concret,
la
démission réelle de tous les professeurs de philosophie, à quoi perso
1558
impliqué, au concret, la démission réelle de tous
les
professeurs de philosophie, à quoi personne ne peut songer sérieuseme
1559
t. On trouva des solutions élégantes. D’une part,
la
philosophie se transforma en histoire comparée des systèmes ; d’autre
1560
en histoire comparée des systèmes ; d’autre part,
les
« chercheurs » invétérés s’appliquèrent à rétablir une permanence abs
1561
abstraite, qu’ils ne tardèrent pas à trouver dans
la
forme même de l’esprit créateur de systèmes. Depuis lors on nous parl
1562
ne tardèrent pas à trouver dans la forme même de
l’
esprit créateur de systèmes. Depuis lors on nous parle du créé et du c
1563
ons des créateurs qui parlent. Peu nous importe
les
« conditions » purement logiques d’une vérité, qui, à nos yeux, demeu
1564
emeure constamment jugée par une réalité qui juge
la
logique même. Ce sont les conditions actuelles de la vérité qui nous
1565
par une réalité qui juge la logique même. Ce sont
les
conditions actuelles de la vérité qui nous posent un problème, et no
1566
ogique même. Ce sont les conditions actuelles de
la
vérité qui nous posent un problème, et non pas ses conditions « étern
1567
y ait lieu pour un philosophe, d’être rassuré par
la
découverte de telles conditions. Elles constitueront peut-être la dog
1568
telles conditions. Elles constitueront peut-être
la
dogmatique laïque de la philosophie des sciences, durant quelques ann
1569
s constitueront peut-être la dogmatique laïque de
la
philosophie des sciences, durant quelques années encore. Mais ce n’es
1570
années encore. Mais ce n’est pas, comme certains
le
répètent, d’une dogmatique que nous avons besoin. Ce n’est pas d’une
1571
une méthode de correction, ou d’assurances contre
les
paradoxes de l’existence. Ce que nous demandons à la philosophie, c’e
1572
rrection, ou d’assurances contre les paradoxes de
l’
existence. Ce que nous demandons à la philosophie, c’est de mettre en
1573
paradoxes de l’existence. Ce que nous demandons à
la
philosophie, c’est de mettre en forme une problématique réelle, exist
1574
en forme une problématique réelle, existentielle,
la
problématique de la vie de l’homme en 1933, assumée dans ses aspects
1575
atique réelle, existentielle, la problématique de
la
vie de l’homme en 1933, assumée dans ses aspects les plus scandaleux,
1576
lle, existentielle, la problématique de la vie de
l’
homme en 1933, assumée dans ses aspects les plus scandaleux, les plus
1577
vie de l’homme en 1933, assumée dans ses aspects
les
plus scandaleux, les plus quotidiens, les plus angoissants. Le fameux
1578
33, assumée dans ses aspects les plus scandaleux,
les
plus quotidiens, les plus angoissants. Le fameux principe du tiers ex
1579
aspects les plus scandaleux, les plus quotidiens,
les
plus angoissants. Le fameux principe du tiers exclu est nié par l’ang
1580
aleux, les plus quotidiens, les plus angoissants.
Le
fameux principe du tiers exclu est nié par l’angoisse de tout homme q
1581
ts. Le fameux principe du tiers exclu est nié par
l’
angoisse de tout homme qui tente d’assumer son moi contradictoire pour
1582
e qui tente d’assumer son moi contradictoire pour
le
mettre aux ordres de la foi. C’est une colle de scolastiques ; elle a
1583
n moi contradictoire pour le mettre aux ordres de
la
foi. C’est une colle de scolastiques ; elle alimentera quelque temps
1584
olastiques ; elle alimentera quelque temps encore
les
jeux de société des congrès de mathématiciens et de logisticiens ; et
1585
et de logisticiens ; et pendant ce temps, c’est à
la
théologie que nous irons demander de la pensée, c’est-à-dire de la pe
1586
, c’est à la théologie que nous irons demander de
la
pensée, c’est-à-dire de la pensée créatrice, c’est-à-dire de la pensé
1587
nous irons demander de la pensée, c’est-à-dire de
la
pensée créatrice, c’est-à-dire de la pensée obéissante : car il n’est
1588
st-à-dire de la pensée créatrice, c’est-à-dire de
la
pensée obéissante : car il n’est d’action véritable que celle de la f
1589
te : car il n’est d’action véritable que celle de
la
foi, lorsque « mettant les pouces », je me rends à son ordre. 2. On c
1590
véritable que celle de la foi, lorsque « mettant
les
pouces », je me rends à son ordre. 2. On comprend dès lors l’attrait
1591
je me rends à son ordre. 2. On comprend dès lors
l’
attrait que le thomisme a exercé à un moment donné sur la pensée prote
1592
son ordre. 2. On comprend dès lors l’attrait que
le
thomisme a exercé à un moment donné sur la pensée protestante. On com
1593
it que le thomisme a exercé à un moment donné sur
la
pensée protestante. On comprend également le retour à Calvin, comme a
1594
sur la pensée protestante. On comprend également
le
retour à Calvin, comme aussi la position prise par Barth et son école
1595
omprend également le retour à Calvin, comme aussi
la
position prise par Barth et son école (p. 14). L’adhésion à une pensé
1596
la position prise par Barth et son école (p. 14).
L’
adhésion à une pensée nouvelle est-elle suffisamment expliquée par l’i
1597
nsée nouvelle est-elle suffisamment expliquée par
l’
insuffisance de la pensée ancienne ? Les historiens le croient volonti
1598
elle suffisamment expliquée par l’insuffisance de
la
pensée ancienne ? Les historiens le croient volontiers. Mais on ne sa
1599
liquée par l’insuffisance de la pensée ancienne ?
Les
historiens le croient volontiers. Mais on ne saurait dire qu’ils témo
1600
suffisance de la pensée ancienne ? Les historiens
le
croient volontiers. Mais on ne saurait dire qu’ils témoignent par là
1601
ils témoignent par là de beaucoup de respect pour
la
vérité créatrice. Non, notre adhésion à Barth n’est pas le fait de la
1602
créatrice. Non, notre adhésion à Barth n’est pas
le
fait de la mauvaise humeur et de la mauvaise conscience que fomentère
1603
Non, notre adhésion à Barth n’est pas le fait de
la
mauvaise humeur et de la mauvaise conscience que fomentèrent en nous
1604
rth n’est pas le fait de la mauvaise humeur et de
la
mauvaise conscience que fomentèrent en nous les démissions systématiq
1605
de la mauvaise conscience que fomentèrent en nous
les
démissions systématiques de l’historicisme et du psychologisme. Le se
1606
mentèrent en nous les démissions systématiques de
l’
historicisme et du psychologisme. Le secret de notre adhésion à Barth
1607
tématiques de l’historicisme et du psychologisme.
Le
secret de notre adhésion à Barth est dans la pensée de Barth elle-mêm
1608
sme. Le secret de notre adhésion à Barth est dans
la
pensée de Barth elle-même, et non pas dans je ne sais quelle « réacti
1609
pourquoi nous ne pouvons pas accepter un instant
le
rapprochement qu’on nous invite à faire entre barthisme, thomisme et
1610
ables » (p. 14). On pourrait dire qu’il fait tout
le
contraire. Il nous ramène sans cesse à l’état de pauvreté (pauvreté e
1611
it tout le contraire. Il nous ramène sans cesse à
l’
état de pauvreté (pauvreté en esprit, absence de toute assurance extér
1612
ent, vision absolument sobre et désillusionnée de
la
condition humaine) qui est l’état dans lequel la vérité ne peut opére
1613
t désillusionnée de la condition humaine) qui est
l’
état dans lequel la vérité ne peut opérer dans notre existence que par
1614
la condition humaine) qui est l’état dans lequel
la
vérité ne peut opérer dans notre existence que par un choix, une déci
1615
un choix, une décision, — un acte d’obéissance à
l’
ordre « tombé du ciel ». Comment parler de la « restauration intégrale
1616
ce à l’ordre « tombé du ciel ». Comment parler de
la
« restauration intégrale d’une dogmatique appartenant aux siècles pas
1617
s passés » (p. 14), à propos d’une théologie dont
le
travail systématique consiste précisément à rejeter toutes les assura
1618
ystématique consiste précisément à rejeter toutes
les
assurances humaines contre Dieu, tous les « rites » et toutes les « f
1619
toutes les assurances humaines contre Dieu, tous
les
« rites » et toutes les « formules », en même temps que la critique d
1620
umaines contre Dieu, tous les « rites » et toutes
les
« formules », en même temps que la critique de ces rites et de ces fo
1621
s » et toutes les « formules », en même temps que
la
critique de ces rites et de ces formules, toutes les idolâtries, que
1622
critique de ces rites et de ces formules, toutes
les
idolâtries, que ce soit la croyance antique et païenne à la « vertu »
1623
ces formules, toutes les idolâtries, que ce soit
la
croyance antique et païenne à la « vertu », à la sagesse et au bonheu
1624
ies, que ce soit la croyance antique et païenne à
la
« vertu », à la sagesse et au bonheur, ou la croyance moderne et non
1625
la croyance antique et païenne à la « vertu », à
la
sagesse et au bonheur, ou la croyance moderne et non moins païenne à
1626
ne à la « vertu », à la sagesse et au bonheur, ou
la
croyance moderne et non moins païenne à la valeur absolue de la logiq
1627
ur, ou la croyance moderne et non moins païenne à
la
valeur absolue de la logique, de l’histoire et des méthodes critiques
1628
derne et non moins païenne à la valeur absolue de
la
logique, de l’histoire et des méthodes critiques de M. Goguel ? 3. Si
1629
ins païenne à la valeur absolue de la logique, de
l’
histoire et des méthodes critiques de M. Goguel ? 3. Si notre civilisa
1630
re civilisation chrétienne n’est pas détruite par
le
bolchévisme, elle reprendra sa marche en avant en approfondissant et
1631
ilisation soit chrétienne ? Peut-on dire que pour
le
chrétien la perspective d’un nouveau progrès, d’une « marche en avant
1632
it chrétienne ? Peut-on dire que pour le chrétien
la
perspective d’un nouveau progrès, d’une « marche en avant » de la civ
1633
’un nouveau progrès, d’une « marche en avant » de
la
civilisation capitaliste-bourgeoise-nationaliste fournisse une raison
1634
t. Ce que cela veut dire. C’est une des leçons de
la
guerre. Notre refus est instinctif devant un avenir, un espoir, une a
1635
ctif devant un avenir, un espoir, une action dont
les
buts sont aussi vaguement définis. Car là où la pensée n’a rien osé d
1636
les buts sont aussi vaguement définis. Car là où
la
pensée n’a rien osé distinguer de précis, c’est là que l’action des h
1637
e n’a rien osé distinguer de précis, c’est là que
l’
action des hommes devient folle et meurtrière. 4. Il me semble que la
1638
devient folle et meurtrière. 4. Il me semble que
la
tâche de la théologie protestante à l’heure actuelle est de dégager,
1639
le et meurtrière. 4. Il me semble que la tâche de
la
théologie protestante à l’heure actuelle est de dégager, dans un espr
1640
semble que la tâche de la théologie protestante à
l’
heure actuelle est de dégager, dans un esprit de libre recherche et de
1641
s un esprit de libre recherche et de respect pour
le
passé, les invariants chrétiens tels que le développement de la pensé
1642
t de libre recherche et de respect pour le passé,
les
invariants chrétiens tels que le développement de la pensée moderne n
1643
pour le passé, les invariants chrétiens tels que
le
développement de la pensée moderne nous aide en toute loyauté à les a
1644
invariants chrétiens tels que le développement de
la
pensée moderne nous aide en toute loyauté à les affirmer (p. 16). Po
1645
de la pensée moderne nous aide en toute loyauté à
les
affirmer (p. 16). Pourquoi ai-je envie, dans une telle phrase, de re
1646
recherche » par « obéissance », — « respect pour
le
passé » par « respect pour les données présentes » — « développement
1647
», — « respect pour le passé » par « respect pour
les
données présentes » — « développement de la pensée moderne » par « ap
1648
pour les données présentes » — « développement de
la
pensée moderne » par « approfondissement de la pensée paulinienne, ca
1649
de la pensée moderne » par « approfondissement de
la
pensée paulinienne, calvinienne, luthérienne, kierkegaardienne, diale
1650
oyauté » par « humilité » ? Il me semble qu’alors
les
invariants chrétiens pourraient bien apparaître comme les constantes
1651
riants chrétiens pourraient bien apparaître comme
les
constantes de déformation de l’Évangile au contact des humains. Et pu
1652
apparaître comme les constantes de déformation de
l’
Évangile au contact des humains. Et puis, que ferions-nous en attendan
1653
mains. Et puis, que ferions-nous en attendant que
les
théologiens aient mené à bien leur travail historique ? Et qu’arriver
1654
leur travail historique ? Et qu’arriverait-il si
le
résultat en était par exemple, de démontrer que tel « invariant chrét
1655
« invariant chrétien » est toute autre chose que
l’
Évangile ? ou bien si, au contraire, ce n’était rien que l’Évangile ?
1656
e ? ou bien si, au contraire, ce n’était rien que
l’
Évangile ? Peine perdue ? — Grosses questions, questions un peu grosse
1657
un peu grosses, dira-t-on. Dans une époque comme
la
nôtre, ce sont celles qu’il faut poser si l’on veut réellement se tir
1658
omme la nôtre, ce sont celles qu’il faut poser si
l’
on veut réellement se tirer hors d’une confusion sans précédent — d’un
1659
e confusion sans précédent — d’une confusion dont
le
profit ne sera jamais pour la foi. Car l’opération de la foi ne relèv
1660
’une confusion dont le profit ne sera jamais pour
la
foi. Car l’opération de la foi ne relève pas d’un « invariant », conn
1661
on dont le profit ne sera jamais pour la foi. Car
l’
opération de la foi ne relève pas d’un « invariant », connu ou inconnu
1662
it ne sera jamais pour la foi. Car l’opération de
la
foi ne relève pas d’un « invariant », connu ou inconnu, passé ou à ve
1663
t. ag. Rougemont Denis de, « Petites notes sur
les
vérités éternelles », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Gen
1664
s cet être détaché, déraciné, de pure raison, que
l’
auteur d’un pamphlet fameux voulait nous donner pour modèle du clerc q
1665
romande. Nous manquons terriblement de ce sens de
la
culture qu’incarnait à mes yeux René Guisan, lorsque je le voyais dan
1666
e qu’incarnait à mes yeux René Guisan, lorsque je
le
voyais dans sa bibliothèque immense et qu’il me parlait avec feu d’ac
1667
parlait avec feu d’actions réelles dont il était
l’
âme et l’agent, non pas en « homme d’action » — cette sotte espèce amé
1668
avec feu d’actions réelles dont il était l’âme et
l’
agent, non pas en « homme d’action » — cette sotte espèce américaine —
1669
pensée agissante. Nous méprisons trop facilement
la
culture au nom de l’action. C’est sans doute parce que nous avons con
1670
us méprisons trop facilement la culture au nom de
l’
action. C’est sans doute parce que nous avons connu quelques rats de b
1671
s de bibliothèque qui méprisaient trop facilement
l’
action au nom de la culture. En vérité, ni l’une ni l’autre ne valent
1672
ui méprisaient trop facilement l’action au nom de
la
culture. En vérité, ni l’une ni l’autre ne valent rien dès l’instant
1673
En vérité, ni l’une ni l’autre ne valent rien dès
l’
instant qu’on les sépare et qu’on cesse de les mettre en tension. Il n
1674
une ni l’autre ne valent rien dès l’instant qu’on
les
sépare et qu’on cesse de les mettre en tension. Il n’est d’action cré
1675
dès l’instant qu’on les sépare et qu’on cesse de
les
mettre en tension. Il n’est d’action créatrice que soumise à la loi d
1676
ension. Il n’est d’action créatrice que soumise à
la
loi d’une pensée rigoureuse ; il n’est de pensée saine qu’engagée dan
1677
ntales et sans cesse oubliées de nos jours, je ne
les
ai vues vraiment vécues chez nous que par cet homme solide et fin, pa
1678
aux abstractions et sachant voir, toujours prêt à
l’
accueil le plus ardent mais aussi le plus utilement critique si vous a
1679
ctions et sachant voir, toujours prêt à l’accueil
le
plus ardent mais aussi le plus utilement critique si vous alliez lui
1680
ujours prêt à l’accueil le plus ardent mais aussi
le
plus utilement critique si vous alliez lui parler d’un projet, d’une
1681
a « personne » en termes d’apparence paradoxale :
le
secret de son œuvre résidait sans doute dans l’union vibrante qu’il i
1682
: le secret de son œuvre résidait sans doute dans
l’
union vibrante qu’il incarnait, de qualités qui ont coutume, ailleurs,
1683
e limitait pas aux livres : elle embrassait aussi
les
incidents de la moindre paroisse « libriste » du canton de Vaud. Son
1684
x livres : elle embrassait aussi les incidents de
la
moindre paroisse « libriste » du canton de Vaud. Son sens aigu de la
1685
« libriste » du canton de Vaud. Son sens aigu de
la
qualité intellectuelle, sa rigueur critique ne l’empêchaient nullemen
1686
la qualité intellectuelle, sa rigueur critique ne
l’
empêchaient nullement de se passionner pour les « problèmes » souvent
1687
ne l’empêchaient nullement de se passionner pour
les
« problèmes » souvent si vagues qui peuplent une âme d’unioniste roma
1688
ui peuplent une âme d’unioniste romand. Vraiment,
le
souvenir d’une influence et d’une présence aussi directes et essentie
1689
s doit nous interdire désormais de considérer que
l’
esprit est une faculté détachée, un refuge hors de la réalité médiocre
1690
sprit est une faculté détachée, un refuge hors de
la
réalité médiocre et basse. Pour Guisan, l’esprit c’était l’acte, l’ai
1691
ors de la réalité médiocre et basse. Pour Guisan,
l’
esprit c’était l’acte, l’aide effective apportée hic et nunc à des hom
1692
médiocre et basse. Pour Guisan, l’esprit c’était
l’
acte, l’aide effective apportée hic et nunc à des hommes bien réels da
1693
e et basse. Pour Guisan, l’esprit c’était l’acte,
l’
aide effective apportée hic et nunc à des hommes bien réels dans leurs
1694
es reconnues et acceptées. Il me semble que c’est
la
leçon que nous devons prendre de sa vie : la leçon toute goethéenne d
1695
’est la leçon que nous devons prendre de sa vie :
la
leçon toute goethéenne du clerc qui sert sans rien trahir de la prima
1696
goethéenne du clerc qui sert sans rien trahir de
la
primauté de l’esprit. Peut-être que le seul chrétien peut comprendre,
1697
clerc qui sert sans rien trahir de la primauté de
l’
esprit. Peut-être que le seul chrétien peut comprendre, existentiellem
1698
trahir de la primauté de l’esprit. Peut-être que
le
seul chrétien peut comprendre, existentiellement, que cette exigence
1699
que cette exigence de service, cet abaissement de
la
pensée aux choses, cet acte de présence au monde est l’achèvement sup
1700
sée aux choses, cet acte de présence au monde est
l’
achèvement suprême, et non l’humiliation du spirituel. ah. Rougemon
1701
résence au monde est l’achèvement suprême, et non
l’
humiliation du spirituel. ah. Rougemont Denis de, « René Guisan : u
1702
5, p. 25-26. ai. Ce double numéro, appartenant à
la
série annuelle 1932-1933, a de fait paru en 1935.
1703
Le
Poète et le Vilain (novembre 1938)aj ak Le poète disait d’une bell
1704
Le Poète et
le
Vilain (novembre 1938)aj ak Le poète disait d’une belle voix d’ame
1705
Le Poète et le Vilain (novembre 1938)aj ak
Le
poète disait d’une belle voix d’amertume : — Nous n’avons plus guère
1706
rtume : — Nous n’avons plus guère de mesures pour
les
choses divines et humaines, si nous savons peser d’invisibles rayons
1707
rayons d’énergie. Nos codes ne prévoient pas que
l’
assassin d’un noble sera puni plus sévèrement que n’eût été ce noble a
1708
que n’eût été ce noble assassinant un serf. Même
l’
indulgence pour les riches a cessé d’être bien certaine. Tout homme en
1709
noble assassinant un serf. Même l’indulgence pour
les
riches a cessé d’être bien certaine. Tout homme en vaut un autre, dit
1710
e bien certaine. Tout homme en vaut un autre, dit
la
loi ; et ce respect vulgarisé touche au mépris. De là vient que le me
1711
spect vulgarisé touche au mépris. De là vient que
le
meurtrier tantôt est acquitté, tantôt décapité. Vous voyez qu’on osci
1712
. Vous voyez qu’on oscille du tout au rien, selon
l’
humeur d’un jury d’ailleurs désigné par le sort. Il n’en fut pas toujo
1713
, selon l’humeur d’un jury d’ailleurs désigné par
le
sort. Il n’en fut pas toujours ainsi. Jusqu’au viiie siècle de notre
1714
jours ainsi. Jusqu’au viiie siècle de notre ère,
les
bardes celtes étaient honorés chez les rois. Tenez, lisez ceci : « La
1715
notre ère, les bardes celtes étaient honorés chez
les
rois. Tenez, lisez ceci : « La valeur du barde du palais, c’est-à-dir
1716
ient honorés chez les rois. Tenez, lisez ceci : «
La
valeur du barde du palais, c’est-à-dire le prix qu’on doit payer quan
1717
ci : « La valeur du barde du palais, c’est-à-dire
le
prix qu’on doit payer quand on le tue, est de 126 vaches ; et en cas
1718
s, c’est-à-dire le prix qu’on doit payer quand on
le
tue, est de 126 vaches ; et en cas d’insulte, on lui doit une indemni
1719
et 20 pièces d’argent. » Ailleurs, on voit que si
le
barde adresse une requête au roi, il doit lui chanter un poème. S’il
1720
, trois poèmes. Si c’est à un vilain, il faut que
le
barde chante jusqu’à ce qu’il n’en puisse plus… Je répondais à mon am
1721
st à cause d’eux qu’il y a de grandes œuvres. Car
le
vilain qui n’a rien à donner, c’est lui qui vous donnera la joie du c
1722
qui n’a rien à donner, c’est lui qui vous donnera
la
joie du chant, plus précieuse que l’objet de vos requêtes au roi. — O
1723
vous donnera la joie du chant, plus précieuse que
l’
objet de vos requêtes au roi. — Oui, dit le poète, mais sans nobles, s
1724
se que l’objet de vos requêtes au roi. — Oui, dit
le
poète, mais sans nobles, sans rois, peut-il y avoir des vilains ? a
1725
avoir des vilains ? aj. Rougemont Denis de, «
Le
Poète et le Vilain », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Gen
1726
ilains ? aj. Rougemont Denis de, « Le Poète et
le
Vilain », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg
1727
ak. Une note introductive précise : « Nous avons
le
plaisir de publier en tête de ce numéro une page inédite de Denis de
1728
Hölderlin dans
le
souvenir des noms splendides (1968)al Qu’est-ce qui persiste du po
1729
différent de tout autre désir auparavant connu de
le
revivre, ce poème, de le relire en sa mémoire, de le recomposer contr
1730
ésir auparavant connu de le revivre, ce poème, de
le
relire en sa mémoire, de le recomposer contre l’oubli comme son auteu
1731
revivre, ce poème, de le relire en sa mémoire, de
le
recomposer contre l’oubli comme son auteur l’avait écrit contre l’abs
1732
le relire en sa mémoire, de le recomposer contre
l’
oubli comme son auteur l’avait écrit contre l’absence, — car elle seul
1733
de le recomposer contre l’oubli comme son auteur
l’
avait écrit contre l’absence, — car elle seule attend l’expression et
1734
tre l’oubli comme son auteur l’avait écrit contre
l’
absence, — car elle seule attend l’expression et la permet. La poésie
1735
t écrit contre l’absence, — car elle seule attend
l’
expression et la permet. La poésie serait-elle ce qui subsiste quand o
1736
’absence, — car elle seule attend l’expression et
la
permet. La poésie serait-elle ce qui subsiste quand on a tout perdu s
1737
car elle seule attend l’expression et la permet.
La
poésie serait-elle ce qui subsiste quand on a tout perdu sauf certain
1738
s, de noms grecs, d’éclats de lumière élevés dans
l’
immense paysage intérieur. Ou moins encore, quelques syllabes et des t
1739
ncore, quelques syllabes et des tirets remplaçant
le
début ou la fin d’un verset, appels nostalgiquement privés de sens à
1740
ues syllabes et des tirets remplaçant le début ou
la
fin d’un verset, appels nostalgiquement privés de sens à cause de tan
1741
fragments mémorables pour essayer d’en retrouver
le
complément, fût-ce par la suggestion de l’arrangement graphique. Ains
1742
essayer d’en retrouver le complément, fût-ce par
la
suggestion de l’arrangement graphique. Ainsi quelques départs : Feie
1743
rouver le complément, fût-ce par la suggestion de
l’
arrangement graphique. Ainsi quelques départs : Feiern möcht ich, abe
1744
attaques identiques de deux des grands poèmes de
la
folie : Nah ist Und schwer zu fassen der Gott21 Reif sind, in Feuer
1745
igme, ce qui naît d’un jaillissement pur ! Et par
le
chant lui-même à peine dévoilé ». Groupes de mots émergeant de la mém
1746
e à peine dévoilé ». Groupes de mots émergeant de
la
mémoire comme de l’Égée vineuse ces îles de l’Archipel, témoins de qu
1747
Groupes de mots émergeant de la mémoire comme de
l’
Égée vineuse ces îles de l’Archipel, témoins de quelque immense Hespér
1748
de la mémoire comme de l’Égée vineuse ces îles de
l’
Archipel, témoins de quelque immense Hespérie effondrée mais dont les
1749
s de quelque immense Hespérie effondrée mais dont
les
noms, par cette voix cités, suffisent à ranimer la gloire heureuse. E
1750
s noms, par cette voix cités, suffisent à ranimer
la
gloire heureuse. Et l’émotion soudaine, submergeante, emplissait tout
1751
cités, suffisent à ranimer la gloire heureuse. Et
l’
émotion soudaine, submergeante, emplissait tout l’espace invoqué. D’un
1752
l’émotion soudaine, submergeante, emplissait tout
l’
espace invoqué. D’un seul coup m’était restitué L’enthousiasme errant,
1753
l’espace invoqué. D’un seul coup m’était restitué
L’
enthousiasme errant, fils de la belle Nuit 24. Nuit blanche, nuit d’un
1754
p m’était restitué L’enthousiasme errant, fils de
la
belle Nuit 24. Nuit blanche, nuit d’un bleu doré lunaire — négatif de
1755
aire — négatif de cet azur noir du plein midi sur
les
Cyclades. Mais Hölderlin n’a jamais vu les Îles ! Ainsi sa poésie dev
1756
di sur les Cyclades. Mais Hölderlin n’a jamais vu
les
Îles ! Ainsi sa poésie devenait-elle pour moi, dans la mémoire, ce qu
1757
es ! Ainsi sa poésie devenait-elle pour moi, dans
la
mémoire, ce que la Grèce avait été pour lui dans la distance et dans
1758
e devenait-elle pour moi, dans la mémoire, ce que
la
Grèce avait été pour lui dans la distance et dans le temps du rêve. M
1759
mémoire, ce que la Grèce avait été pour lui dans
la
distance et dans le temps du rêve. Mais au-delà des accidents remémor
1760
Grèce avait été pour lui dans la distance et dans
le
temps du rêve. Mais au-delà des accidents remémorés, qu’en était-il d
1761
u-delà des accidents remémorés, qu’en était-il de
la
substance des grands poèmes ? L’émotion rénovée par ces fragments — d
1762
u’en était-il de la substance des grands poèmes ?
L’
émotion rénovée par ces fragments — départs, invocations, noms sacrés
1763
fragments — départs, invocations, noms sacrés de
l’
Ionie — était-elle plus pure et plus vraie, plus efficace que le disco
1764
t-elle plus pure et plus vraie, plus efficace que
le
discours lui-même des grands Hymnes ? Il fallait enfin les relire. Je
1765
urs lui-même des grands Hymnes ? Il fallait enfin
les
relire. Je découvris alors que beaucoup des fragments qui subsistaien
1766
nt dans ma mémoire avaient toujours été tels dans
le
texte, émergeant comme des îles du blanc de la page, et parfois prolo
1767
ns le texte, émergeant comme des îles du blanc de
la
page, et parfois prolongés par une suite de tirets signalant des reli
1768
gnalant des reliefs sous-marins25. En cherchant à
les
compléter par ce qu’ils devaient évoquer, je ne faisais pas autre cho
1769
vaient évoquer, je ne faisais pas autre chose que
le
poète à partir d’un signe, d’un nom, d’une lumière de l’Hellade imagi
1770
e à partir d’un signe, d’un nom, d’une lumière de
l’
Hellade imaginée. Se souvenir ainsi de Hölderlin, c’était revenir à la
1771
Se souvenir ainsi de Hölderlin, c’était revenir à
la
genèse du poème dans l’élan de sa nostalgie fondamentale. D’une poési
1772
derlin, c’était revenir à la genèse du poème dans
l’
élan de sa nostalgie fondamentale. D’une poésie dont le mouvement prof
1773
n de sa nostalgie fondamentale. D’une poésie dont
le
mouvement profond de « réflexion » sur le « sentiment originel » a po
1774
ie dont le mouvement profond de « réflexion » sur
le
« sentiment originel » a pour fonction de « rappeler la vie perdue à
1775
entiment originel » a pour fonction de « rappeler
la
vie perdue à une vie magnifiée »26, on peut bien dire qu’elle naît d’
1776
on « aspiration » à exprimer, c’est-à-dire dans «
la
transition d’un infini défini à un infini plus général », du « pur »
1777
lus général », du « pur » au « multiple » et « de
l’
Esprit au signe », transition qui relève ici, comme chez Hegel, et bie
1778
chez Hegel, et bien plus haut, chez Héraclite et
les
ioniens, de la dialectique essentielle, celle de l’Un et du Divers. P
1779
bien plus haut, chez Héraclite et les ioniens, de
la
dialectique essentielle, celle de l’Un et du Divers. Poésie, c’est ab
1780
ritable ne peut être qu’à venir, — à revenir dans
le
mythe. Le Neckar sera beau quand d’une Grèce dorienne — Cap Sounion,
1781
peut être qu’à venir, — à revenir dans le mythe.
Le
Neckar sera beau quand d’une Grèce dorienne — Cap Sounion, Olympie, t
1782
d’Athènes, « fierté du monde qui n’est plus »27 —
le
poète se retournera vers sa vallée natale et sa rivière « avec ses pr
1783
natale et sa rivière « avec ses prés charmants et
les
saules des rives ». Neckar imaginé comme enfance perdue, mais aussi c
1784
x plaines du désert », et ce Gothard d’où partent
les
grands fleuves, le Rhin allemand, mais aussi l’Aigle vers l’Olympe, v
1785
», et ce Gothard d’où partent les grands fleuves,
le
Rhin allemand, mais aussi l’Aigle vers l’Olympe, vers les antres de L
1786
les grands fleuves, le Rhin allemand, mais aussi
l’
Aigle vers l’Olympe, vers les antres de Lemnos, et vers les forêts de
1787
leuves, le Rhin allemand, mais aussi l’Aigle vers
l’
Olympe, vers les antres de Lemnos, et vers les forêts de l’Indus ! Mal
1788
allemand, mais aussi l’Aigle vers l’Olympe, vers
les
antres de Lemnos, et vers les forêts de l’Indus ! Mallarmé fixe tout
1789
vers l’Olympe, vers les antres de Lemnos, et vers
les
forêts de l’Indus ! Mallarmé fixe tout dans un présent glacé, intempo
1790
vers les antres de Lemnos, et vers les forêts de
l’
Indus ! Mallarmé fixe tout dans un présent glacé, intemporel (« Le tra
1791
mé fixe tout dans un présent glacé, intemporel («
Le
transparent glacier des vols qui n’ont pas fui »). Rimbaud, ses momen
1792
ses moments forts sont au futur prochain (« Et à
l’
aurore… nous entrerons aux splendides villes »), Apollinaire hante la
1793
erons aux splendides villes »), Apollinaire hante
la
marge d’émotion entre le souvenir de naguère et sa restitution dans u
1794
es »), Apollinaire hante la marge d’émotion entre
le
souvenir de naguère et sa restitution dans un présent d’ubiquité. Élu
1795
dans un présent d’ubiquité. Éluard ne connaît que
l’
instant, le temps ponctuel. Mais Hölderlin, ses grands hymnes décriven
1796
sent d’ubiquité. Éluard ne connaît que l’instant,
le
temps ponctuel. Mais Hölderlin, ses grands hymnes décrivent toutes le
1797
ais Hölderlin, ses grands hymnes décrivent toutes
les
dimensions de l’absence, de l’éloignement dans le temps, dans l’espac
1798
grands hymnes décrivent toutes les dimensions de
l’
absence, de l’éloignement dans le temps, dans l’espace, dans la transc
1799
décrivent toutes les dimensions de l’absence, de
l’
éloignement dans le temps, dans l’espace, dans la transcendance, mais
1800
es dimensions de l’absence, de l’éloignement dans
le
temps, dans l’espace, dans la transcendance, mais d’une absence qui e
1801
e l’absence, de l’éloignement dans le temps, dans
l’
espace, dans la transcendance, mais d’une absence qui est toujours app
1802
l’éloignement dans le temps, dans l’espace, dans
la
transcendance, mais d’une absence qui est toujours appel, nostalgie q
1803
nouveaux du Verbe qui nous meut et nous oriente :
le
passé de l’invocatif28 qui est un temps de la prophétie, appelant le
1804
Verbe qui nous meut et nous oriente : le passé de
l’
invocatif28 qui est un temps de la prophétie, appelant le retour des d
1805
e : le passé de l’invocatif28 qui est un temps de
la
prophétie, appelant le retour des dieux morts ou dormants ; l’imparfa
1806
atif28 qui est un temps de la prophétie, appelant
le
retour des dieux morts ou dormants ; l’imparfait anticipé, qui est le
1807
appelant le retour des dieux morts ou dormants ;
l’
imparfait anticipé, qui est le temps du poète voyant ; et le présent d
1808
morts ou dormants ; l’imparfait anticipé, qui est
le
temps du poète voyant ; et le présent d’exil, temps du poète souffran
1809
t anticipé, qui est le temps du poète voyant ; et
le
présent d’exil, temps du poète souffrant. Car il nous avertit que son
1810
tit que son langage n’est pas celui que parlent «
la
nature et l’art tels qu’il les a connus autrefois ». Ce n’est pas un
1811
angage n’est pas celui que parlent « la nature et
l’
art tels qu’il les a connus autrefois ». Ce n’est pas un langage impos
1812
celui que parlent « la nature et l’art tels qu’il
les
a connus autrefois ». Ce n’est pas un langage imposé par le social im
1813
s autrefois ». Ce n’est pas un langage imposé par
le
social impersonnel, tel que certains prétendent qu’il nous forme — «
1814
nt qu’il nous forme — « car si quelque langage de
la
nature et de l’art… préexistait pour lui… le poète se placerait en de
1815
rme — « car si quelque langage de la nature et de
l’
art… préexistait pour lui… le poète se placerait en dehors de son cham
1816
e de la nature et de l’art… préexistait pour lui…
le
poète se placerait en dehors de son champ d’efficacité, il sortirait
1817
il sortirait de sa création »29. Son langage, il
le
fait de noms sacrés et de signes élus, qualifiés par un « ton fondame
1818
ndamental ». C’est une sorte de code initiatique,
le
chiffre de sa religion. Noms de fleuves et d’îles, de cités, de hauts
1819
et leur seul énoncé suffit à qualifier et activer
la
nostalgie constitutive du poème : le Gothard et l’Olympe, Pister, l’I
1820
r et activer la nostalgie constitutive du poème :
le
Gothard et l’Olympe, Pister, l’Indus, Patmos, et Dodone, et Délos, et
1821
a nostalgie constitutive du poème : le Gothard et
l’
Olympe, Pister, l’Indus, Patmos, et Dodone, et Délos, et Delphes, et l
1822
tutive du poème : le Gothard et l’Olympe, Pister,
l’
Indus, Patmos, et Dodone, et Délos, et Delphes, et le matin de Salamin
1823
ndus, Patmos, et Dodone, et Délos, et Delphes, et
le
matin de Salamine, et l’Hespérie, « Couchant du temps ». Sous la Rous
1824
et Délos, et Delphes, et le matin de Salamine, et
l’
Hespérie, « Couchant du temps ». Sous la Rousse et la Flamboyante, hau
1825
amine, et l’Hespérie, « Couchant du temps ». Sous
la
Rousse et la Flamboyante, hautes parois de roches nues dominant Delph
1826
espérie, « Couchant du temps ». Sous la Rousse et
la
Flamboyante, hautes parois de roches nues dominant Delphes (et de plu
1827
e fonce un milan sur sa proie d’ombre) au bord de
la
fontaine aux eaux « saintes et sobres », écoutons-le30 : Jusqu’aux p
1828
qu’aux pieds du Parnasse j’irai, et, dès que dans
l’
ombre des chênes Brillera la lueur de ton flot surgissant, Castalie !
1829
rai, et, dès que dans l’ombre des chênes Brillera
la
lueur de ton flot surgissant, Castalie ! Ah ! je veux Dans la vasque
1830
ton flot surgissant, Castalie ! Ah ! je veux Dans
la
vasque puiser, à travers le parfum de tes fleurs, et répandre, Sur le
1831
e ! Ah ! je veux Dans la vasque puiser, à travers
le
parfum de tes fleurs, et répandre, Sur le sol où renaît la prairie, l
1832
travers le parfum de tes fleurs, et répandre, Sur
le
sol où renaît la prairie, l’eau sacrée et mes larmes, afin, Qu’une of
1833
de tes fleurs, et répandre, Sur le sol où renaît
la
prairie, l’eau sacrée et mes larmes, afin, Qu’une offrande pourtant v
1834
rs, et répandre, Sur le sol où renaît la prairie,
l’
eau sacrée et mes larmes, afin, Qu’une offrande pourtant vienne encore
1835
s délaissés, vous atteindre ! Et, plus loin, dans
le
val qui se tait, près des rocs suspendus de Tempé, Près de vous j’éli
1836
1801-1802. 22. Mnemosyne III, 1803. 23. « Par
le
fait que (le poète) me nomme ce signe, il emprunte à mon monde sa mat
1837
22. Mnemosyne III, 1803. 23. « Par le fait que (
le
poète) me nomme ce signe, il emprunte à mon monde sa matière, il me d
1838
, il me détermine à transférer cette matière dans
le
signe », écrit Hölderlin dans son grand essai sur la démarche poétiqu
1839
signe », écrit Hölderlin dans son grand essai sur
la
démarche poétique, au chapitre traitant du langage et de son « effica
1840
t de son « efficacité ». 24. André Chénier. 25.
Le
précieux Hölderlin de la Pléiade, paru en 1967, supprime par malheur
1841
rime par malheur ces tirets, que donnent toujours
les
éditions allemandes. 26. Cf. l’essai cité, page 268 éd. de la Pléiad
1842
onnent toujours les éditions allemandes. 26. Cf.
l’
essai cité, page 268 éd. de la Pléiade. 27. Le Neckar, Pléiade, p. 4
1843
llemandes. 26. Cf. l’essai cité, page 268 éd. de
la
Pléiade. 27. Le Neckar, Pléiade, p. 459. 28. Une sorte de futur, e
1844
. l’essai cité, page 268 éd. de la Pléiade. 27.
Le
Neckar, Pléiade, p. 459. 28. Une sorte de futur, en réalité, comme l
1845
. 459. 28. Une sorte de futur, en réalité, comme
le
futur antérieur est une sorte de passé. 29. Essai cité, Éd. de la Pl
1846
r est une sorte de passé. 29. Essai cité, Éd. de
la
Pléiade, p. 630. 30. Je cite l’Archipel dans la belle adaptation ryt
1847
sai cité, Éd. de la Pléiade, p. 630. 30. Je cite
l’
Archipel dans la belle adaptation rythmique de Jean Tardieu. Éd. de la
1848
la Pléiade, p. 630. 30. Je cite l’Archipel dans
la
belle adaptation rythmique de Jean Tardieu. Éd. de la Pléiade, p. 826
1849
elle adaptation rythmique de Jean Tardieu. Éd. de
la
Pléiade, p. 826. al. Rougemont Denis de, « Hölderlin dans le souven
1850
. 826. al. Rougemont Denis de, « Hölderlin dans
le
souvenir des noms splendides », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neu