1 1946, Réforme, articles (1946–1980). À hauteur d’homme (1er juin 1946)
1 lités fondamentales, si totalement perdues de vue dans la lutte que leur rappel paraîtra subversif. Une politique digne du n
2 e réaliser. Mais la politique des partis se tient dans une espèce de no man’s land à mi-chemin de l’idéal et du pratique. Qu
3 dant qu’elle rate le second parce qu’elle se perd dans des arguties doctrinales. Elle avait pour mission très simple de reli
4 es la justifient.) Cette politique tourne à vide, dans un grand bruit d’ismes entrechoqués, et rien n’en sort. Cette machine
5 l’homme ? Point du tout, on votera sur les ismes, dans un état d’esprit assez voisin de celui du joueur qui mise sur le noir
6 i est au premier plan et qui cache tout le reste, dans les élections de demain, ce sont les chances des partis, j’entends de
7 e et ambiguë, si l’on prend le terme de politique dans son sens fort et véritable. Le malheur serait que les électeurs, ayan
8 rt civique proprement dit trouvera son efficacité dans un travail sur les partis, une fois que ceux-ci se seront remis de le
9 partis ni en sortir, mais il faut, malgré eux et dans leur sein, rapporter nos jugements à une notion totale de l’homme d’u
10 compte des intérêts électoraux, byzantins, perdus dans le détail de polémiques éphémères et d’intrigues puérilement compliqu
11 puérilement compliquées, ridiculement inefficaces dans l’ensemble, qui nourrissent les éditoriaux mais laissent le peuple so
12 ous liens, ou le fonctionnaire entièrement engagé dans une machine d’État qui dicte les pensées. Ou si ce n’est pas plutôt l
13 Par exemple, elle oblige à condamner tout ce qui, dans le régime capitaliste libre, frustre le prolétaire de sa chance d’hom
14 r sa vocation. Elle nous oblige à condamner aussi dans les régimes totalitaires, tout ce qui prétend dicter à l’homme sa voc
15 , de la jeunesse, et du sens de la vie des hommes dans la cité. Or, nous pouvons vraiment vouloir tout cela, parce qu’en pré
16 e par-dessus les têtes ou vise trop bas ; se perd dans des principes grandiloquents et ne se retrouve que dans des intérêts
17 es principes grandiloquents et ne se retrouve que dans des intérêts inavouables. Qui le niera ? Une première réalisation
18 électoral. Et, en effet, ce n’est pas électoral, dans ce sens qu’une telle politique peut être pratiquée au sein de plusieu
19 i se déclare « socialiste-personnaliste », est né dans quelques groupes de résistants inspirés de la manière la plus directe
2 1946, Réforme, articles (1946–1980). Deux lettres sur la fin du monde (29 juin 1946)
20 bien sérieusement. Car ces essais seront faits «  dans un but militaire ». Nous sommes donc dans le domaine du sacré. Glisse
21 faits « dans un but militaire ». Nous sommes donc dans le domaine du sacré. Glissez mortels, mourrez sans résister… En somme
22 ais traduit « en un instant » ? Il dit en atomo — dans un atome ! Et les grandes traditions occultistes, décrivant l’âge mat
23 ait plutôt à un nouveau Déluge. Léonard le figure dans une série de dessins où l’on peut voir un raz-de-marée soulever, dans
24 ssins où l’on peut voir un raz-de-marée soulever, dans ses volutes vertigineuses, des rochers fracassés qui retombent sur le
25 se calcule désormais. Ses données immédiates sont dans tous nos journaux… Entre nous, qu’est-ce que cela nous ferait ? Ce se
26 uer, très bas, très doux, comme une voix du rêve, dans les intervalles effrayants de la cacophonie mondiale ? Je ne vous en
27 est sans doute perdu, et c’est la raison de Noël. Dans cette nuit la plus longue de l’année, parce qu’il n’y avait plus qu’à
28 seront toujours incapables. Ce drôle de petit cri dans la paille m’indique tout autrement que les formules d’Einstein que no
29 ue l’on traite de folies, à l’âge où l’on prépare dans le monde entier, à la demande générale, la prochaine et irrévocableme
30 ’est pas qu’une angoisse diffuse ne soit sensible dans les populations et chez beaucoup de bons esprits, mais une paralysie
31 ation, du biggest in the world. Et de vrai, c’est dans ce pays que la première Bombe vient d’être construite. Exagérée sans
32 à penser comme on pense aujourd’hui, cela finira dans l’explosion totale. Et il est évident que la grande majorité des homm
33 isse me faire perdre ? Je me rappelle cette voix, dans Isaïe, criant de Séir au prophète : « Sentinelle, que dis-tu de la nu
34 e vous irritent. Et vous me direz : que fait Dieu dans tout cela ? Dangereuse question. S’il permet que nous fassions sauter
3 1946, Réforme, articles (1946–1980). Vues générales des Églises de New York (12 octobre 1946)
35 ique » en fin de la liste des services religieux, dans le New York Times du samedi ? Remontant ces colonnes d’annonces qui t
36 ’uniformité des conceptions de la vie chrétienne, dans les diverses dénominations, qui peut frapper l’observateur. Une prome
37 ns, qui peut frapper l’observateur. Une promenade dans Manhattan commencera de nous en convaincre. Du gothique neuf On
38 de style baroque, en marbre blanc ; et vis-à-vis, dans un jardin, une église anglo-catholique, toute encombrée de poutres et
39 précieuses. Sur les pages d’un gros livre, ouvert dans le vestibule, je lis les signatures de visiteurs de toutes confession
40 beaucoup de Roman Catholics). Passons maintenant dans Park Avenue. Des coupoles byzantines sur un porche roman : Saint-Bart
41 ornées de branches de sapin de Noël. Et partout, dans tous ces sanctuaires, le même parfum de chêne ciré, de luxe, de digni
42 ection de maintien presque presbytérienne. Entrez dans une église, au hasard, vers midi. Si vous tombez sur un service chant
43 la crème sur des plateaux d’argent qui circulent dans les bancs, de main en main, et toute l’église apparaît transformée en
44 e ferveur théâtrale qu’il s’attendait à retrouver dans un tel lieu… Plus divisés qu’ailleurs en apparence, plus proches auss
45 -ils et vivent-ils leurs croyances ? J’essaierai, dans un prochain article, de rassembler les éléments d’une réponse qui mén
4 1946, Réforme, articles (1946–1980). Spiritualité américaine (19 octobre 1946)
46 charge de la culture et du maintien de la morale dans la cité, préparait à la mort plus qu’à la vie. La paroisse était la c
47 e demandera : Qu’y a-t-il de proprement religieux dans tout cela ? Tout et rien, répondrai-je, et voilà bien le mystère du c
48 péen frotté d’un peu de théologie va s’écrier que dans cet idéal, il ne voit rien de chrétien que l’étiquette, couvrant d’ai
49 plus généreux que les Européens, plus indulgents dans leurs jugements, moins menteurs et plus accueillants… Mais n’allez pa
50 ettes de velours rouge, et siègent en demi-cercle dans le fond du chœur, séparés de l’autel par des ogives en bois doré : un
51 acle des églises américaines. Ou bien l’église va dans le siècle, l’organise, et tend à se confondre avec la société terrest
52 pur message de la foi mais alors elle n’est plus dans le monde, qui s’organise sans elle et ne l’entend plus. Ou bien vous
53 vous mettez le message à la portée de la masse et dans le style du jour, mais certains mots ne sauraient y passer, comme péc
54 e et du sacrifice, mais ces mots n’ont plus cours dans la presse, à la radio ni dans les magazines, et vous perdez toute inf
55 ts n’ont plus cours dans la presse, à la radio ni dans les magazines, et vous perdez toute influence sur les masses. À quoi
5 1948, Réforme, articles (1946–1980). Roger Breuil qui vient de mourir était un grand romancier protestant (13 mars 1948)
56 s transcende, j’en retrouve des marques sensibles dans tous mes souvenirs de lui, et dans son œuvre : c’était son style, son
57 ques sensibles dans tous mes souvenirs de lui, et dans son œuvre : c’était son style, son art, et sa vraie force. Certains l
58 celui dont l’œuvre est le plus solidement fondée dans la plus sûre théologie : c’est pourquoi il n’en parle jamais, et se g
59 une sorte d’honnêteté très rare, peut-être unique dans la littérature française, tout à la fois curieuse et intrépide, il la
60 ’inspire, et de tout langage pieux). Il est entré dans les grandes marges de cette vie, et son dernier retrait, le plus énig
6 1948, Réforme, articles (1946–1980). L’Europe, aventure du xxe siècle (1er mai 1948)
61 attitudes, entre lesquelles nous aurons à choisir dans un délai que la situation du monde rend très court. L’utopie La
62 changeante, bref : hors du courant de l’Histoire. Dans ce sens, « défendre l’Europe » est aujourd’hui une utopie. Telle qu’e
63 ment à son génie, qui est celui de la liberté, et dans les conditions du xxe siècle, qui sont celles de l’organisation ; ra
64 que et en un vaste espace économique ; la fédérer dans sa diversité, en vue de maintenir et d’illustrer une certaine notion
65 du monde entier, le grand témoin — c’est la tâche dans laquelle nous nous sommes engagés, c’est l’aventure du xxe siècle, e
66 on européenne a fait des progrès étonnants, sinon dans la réalité, du moins dans les déclarations des gouvernants, et dans l
67 rogrès étonnants, sinon dans la réalité, du moins dans les déclarations des gouvernants, et dans la presse. Certains pensent
68 u moins dans les déclarations des gouvernants, et dans la presse. Certains pensent que l’union est en bonne voie, et que not
69 que les gouvernements travaillent encore en fait, dans le sens de l’utopie que je viens de décrire, et que le sort de l’aven
70 sort de l’aventure réelle n’est pas ailleurs que dans nos mains : nous, l’opinion, les citoyens de l’Europe, ceux qui sont
71 gouvernements ont un penchant marqué à persévérer dans leur être, et même à lui survivre aussi longtemps que possible avec l
72 ’appui de la police. Or l’être des gouvernements, dans le monde actuel, c’est la souveraineté absolue. Tous les États-nation
73 leur fonction leur interdit de céder un pouce, et dans l’état présent de l’opinion et des rivalités de partis, ils courraien
74 surdes, mais techniques. Il faut donc les pousser dans le dos, voilà qui est clair. Quelques mois plus tard, parlant au nom
75 Premier ministre belge, Monsieur Spaak, s’écriait dans un discours fameux : « Bousculez-nous ! » Nous sommes d’accord. La pa
76 e, aux citoyens du continent. Ils vont la prendre dans quinze jours, aux états généraux de l’Europe, convoqués à La Haye pou
77 vons aujourd’hui une Europe divisée et cloisonnée dans l’anarchie. Nous voulons une Europe organisée. Une Europe sans barriè
78 nisée. Une Europe sans barrières ni visas, rendue dans toute son étendue à la libre circulation des hommes, des idées, et de
7 1949, Réforme, articles (1946–1980). « Êtes-vous partisan du rapprochement franco-allemand ? » (29 janvier 1949)
79 e que ce qui est. Le seul obstacle sérieux réside dans l’inconscience, où beaucoup vivent, des menaces qui pèsent sur l’Euro
8 1952, Réforme, articles (1946–1980). Après l’Œuvre du xxe siècle (14 juin 1952)
80 s que nous avons discutés, que ce soit l’écrivain dans la cité, l’isolement de l’artiste au temps des « mass médias », l’opp
81 recettes de communion, et des fois synthétiques, dans ce siècle, et nous savons à quoi elles mènent ! Que vaut le bonheur d
82 établie par la police au prix d’un homme sur dix dans les camps sibériens ? Que vaut la communion des neuf qui restent, qui
83 s neuf qui restent, qui osent à peine se regarder dans les yeux, quand ils savent que deux d’entre eux sont probablement des
84 ement des mouchards — et que le dixième homme est dans un camp ? Pitié pour eux, car ils ignorent sans doute l’étendue et la
85 doute l’étendue et la vraie visée de la tyrannie dans laquelle ils sont nés. Mais nous… Nous qui avons parmi nous des témoi
86 te discutable. L’Œuvre du xxe siècle a protesté, dans son ensemble, contre les tyrannies de toute couleur qui nous salissen
87 ois refus et témoignage. Notre concert inaugural, dans une église, était dédié à la mémoire des victimes de toutes les tyran
88 il est gênant de parler de cela quand on y croit, dans un tel lieu, et sous les projecteurs de cinéma… Je répondrai à côté d
89 ’est que la plus vaste communion jamais instituée dans le monde, la plus profonde et la plus libre dans les modes d’adhésion
90 dans le monde, la plus profonde et la plus libre dans les modes d’adhésion qu’elle implique, s’est faite autour non pas d’u
91 autour d’un seul, autour d’un homme qui est mort dans l’isolement total, dans la révolte la plus intransigeante contre le m
92 r d’un homme qui est mort dans l’isolement total, dans la révolte la plus intransigeante contre le mal et l’injustice, aband
93 européen. C’est une phrase de Miguel de Unamuno, dans son commentaire à Don Quichotte : Mets-toi en marche, tout seul. Tou
9 1953, Réforme, articles (1946–1980). « Les écrivains protestants » (11 avril 1953)
94 ux écrivains de toutes les langues et confessions dans le domaine occidental. l. Rougemont Denis de, « [Réponse à une en
10 1968, Réforme, articles (1946–1980). Vers l’Europe des régions ? (30 novembre 1968)
95 européennes qui étaient en train de se constituer dans différentes universités. Nous avons pris contact avec des historiens,
96 i cherche à introduire l’angle de vision européen dans la leçon d’histoire, de géographie, de langues. Je souhaiterais que t
97 les obstacles à toute union. Notre espoir réside dans une politique des régions. Par exemple, l’Italie est déjà divisée en
98 par la culture et quelquefois par l’ethnie comme dans le cas de la Bretagne ou de la Catalogne. Le problème numéro un de l’
11 1976, Réforme, articles (1946–1980). À propos de Concorde (21 février 1976)
99 les premières minutes, je vois que je suis tombé dans un traquenard. Sentimentaux ou technocrates, ils sont tous en train d
100 és — absolument contraire aux fins que je défends dans toute mon œuvre, de liberté et de responsabilité de la personne. b) J
12 1979, Réforme, articles (1946–1980). Écologie, régions, Europe fédérée : même avenir (19 mai 1979)
101 t. 2. Alignements : un mouvement de défense Dans les écoles primaires de Suisse romande, une compagnie productrice d’é
102 ciété coutumière. C’est le moment où s’instituent dans nos pays les écoles primaires obligatoires et universelles ; la consc
103 e les taux de délinquance et le nombre des étages dans les HLM, etc. Aux yeux des politiciens de droite, l’écologie est un c
104 nons un peu de recul pour considérer le phénomène dans son ensemble, nous voyons que tout simplement l’écologie est une réac
105 exigences régionales. Mais l’obstacle est le même dans les deux cas : l’État-nation. Exemple : quand la CEE propose un plan
106 el gouvernement répond : d’accord, mais seulement dans une mesure compatible avec ma souveraineté nationale. Et l’on sait à
107 pe de répartition des pouvoirs naguère concentrés dans la seule capitale nationale est des plus simples : il consiste à situ
108 e, le gouvernement fédéral ne doit pas le faire. Dans le même sens se prononcent aujourd’hui la plupart des sociologues pol
109 geuse, tout marche mieux, sur une petite échelle, dans les autonomies locales. « Coopératives d’habitation, énergie solaire,
110 r a démontré le contraire d’une manière décisive, dans son célèbre ouvrage Small is beautiful. 8. Écologistes, régionalis
111 c les organisations régionalistes et fédéralistes dans tous nos pays et à l’échelle continentale, en vue d’établir un progra
112 ial on the Future of America, septembre 1977. 3. Dans certains pays, il existe un parti écologiste : parti radical italien,
13 1980, Réforme, articles (1946–1980). Les Nations unies des animaux (13 décembre 1980)
113 qu’il s’agisse des bébés phoques, du Labrador ou, dans les campagnes toutes proches d’ici, des petits veaux engraissés dans
114 toutes proches d’ici, des petits veaux engraissés dans leur cuve en ciment, nourris au tube de caoutchouc et à la seringue,
115 se et la brutalité des hommes. On fait grand cas, dans les magazines scientifiques, des animaux qui apprennent à parler et s
116 elle est d’ordre émotif, affectif. Elle se passe dans le regard, qui attend tout de nous ! Car c’est de l’homme, par l’homm
117 ue et religieuse. Et son expression la plus haute dans la tradition biblique très largement commune aux trois grandes religi
118 re VIII de l’Épître aux Romains (que je vais lire dans la traduction de Calvin, pour le premier verset) : La création tout
119 r le premier verset) : La création tout entière, dans une attente ardente, attend la révélation des fils de Dieu. Car la cr
120 jour la création tout entière soupire et souffre dans les douleurs de l’enfantement. Et ce n’est pas elle seulement, mais n
121 nfirme la continuité de la Création tout entière, dans la relation de l’animal à l’homme, j’entends de l’homme à la Nature v
122 us ne serons sauvés que tous ensemble, solidaires dans la même espérance, dont il nous faut témoigner désormais par des acte
123 Denis de Rougemont, dont on connaît l’engagement dans le mouvement écologique, participait à cette réunion. Il a bien voulu