1 1946, Réforme, articles (1946–1980). À hauteur d’homme (1er juin 1946)
1 olitique considérée comme la pratique d’un idéal. Il faut qu’on sente cette distance. Cette différence de niveau. Qu’on la
2 dirait que la politique actuelle l’oublie, et qu’ elle ne se fonde plus, en fait, que sur les conditions de la politique en
3 et du pratique. Quand on lui rappelle le premier, elle s’en moque bien et parle de réalisme, cependant qu’elle rate le secon
4 ’en moque bien et parle de réalisme, cependant qu’ elle rate le second parce qu’elle se perd dans des arguties doctrinales. E
5 alisme, cependant qu’elle rate le second parce qu’ elle se perd dans des arguties doctrinales. Elle avait pour mission très s
6 ce qu’elle se perd dans des arguties doctrinales. Elle avait pour mission très simple de relier le but et ses moyens. En fai
7 s simple de relier le but et ses moyens. En fait, elle les isole l’un de l’autre. (Tel parti réputé libertaire vote des mesu
8 iquent seules la contradiction. Je ne vois pas qu’ elles la justifient.) Cette politique tourne à vide, dans un grand bruit d’
9 ne vit plus que pour elle-même et sur elle-même. Elle coûte cher et n’arrange rien. Au lieu de transformer des idéaux en fa
10 rien. Au lieu de transformer des idéaux en fait, elle transforme des candidats en députés, des programmes en combines, des
11 lections de demain et je demande : de quoi s’agit- il  ? Va-t-on choisir bien consciemment entre trois idéaux de l’homme ? E
12 de celui du joueur qui mise sur le noir parce qu’ il vient de perdre sur le rouge en se disant que peut-être, cette fois-c
13 rouge en se disant que peut-être, cette fois-ci… Il est admis à l’étranger que les Français aiment trop la politique et e
14 nt trop la politique et en font trop. Je pense qu’ ils n’en font pas assez, car le jeu des partis n’est pas de la politique.
15 aires, mais non des conceptions de l’homme total. Il ne s’agit ni d’idéal ni de pratique, et encore moins de les relier. D
16 e électorale. Comment sauver les partis Car il ne s’agit pas de dissoudre les partis, groupements inévitables d’inté
17 e tous ordres, ou familles de tempéraments ; mais il faut malgré eux faire de la politique, c’est-à-dire décider ce qu’est
18 ce qu’est l’homme et bâtir une cité à sa mesure. Il ne faut pas dissoudre les partis ni en sortir, mais il faut, malgré e
19 faut pas dissoudre les partis ni en sortir, mais il faut, malgré eux et dans leur sein, rapporter nos jugements à une not
20 éditoriaux mais laissent le peuple sous-alimenté. Il ne faut pas dissoudre les partis ni en sortir, bien au contraire. Mai
21 les partis ni en sortir, bien au contraire. Mais il faut exiger qu’ils déclarent enfin quel est leur idéal de l’homme, si
22 sortir, bien au contraire. Mais il faut exiger qu’ ils déclarent enfin quel est leur idéal de l’homme, si c’est le requin, o
23 son action traduit son idéal, ou si au contraire elle le trahit. Ils seront à même d’exiger de leur parti la démonstration
24 uit son idéal, ou si au contraire elle le trahit. Ils seront à même d’exiger de leur parti la démonstration convaincante qu
25 la démonstration convaincante que les mesures qu’ il préconise servent vraiment l’idéal qu’il déclare. Toute la vie politi
26 sures qu’il préconise servent vraiment l’idéal qu’ il déclare. Toute la vie politique en sera transformée. Et les partis re
27 rmée. Et les partis redeviendront légitimes quand ils cesseront de se prendre ou d’être pris pour fin, et ne s’offriront pl
28 mme commande des attitudes précises. Par exemple, elle oblige à condamner tout ce qui, dans le régime capitaliste libre, fru
29 ce d’homme, et l’empêche de réaliser sa vocation. Elle nous oblige à condamner aussi dans les régimes totalitaires, tout ce
30 , — ce qui est encore la nier et l’écraser. Enfin elle nous met en mesure de refuser les faux dilemmes entretenus par la lut
31 concurrence libre ou étatisation. Nous disons qu’ il n’y a pas à choisir entre ces deux demi-vérités ou demi-mensonges, de
32 s deux demi-vérités ou demi-mensonges, de même qu’ il n’y a pas à choisir entre la vérité du foie et celle du cœur, ni dava
33 mieux en les étatisant, et quelles sont celles qu’ il faut aider à rester libres. Cela ne doit pas être une querelle de par
34 ut être pratiquée au sein de plusieurs partis, et il est même très souhaitable qu’elle le soit. Ce serait sans doute le se
35 sieurs partis, et il est même très souhaitable qu’ elle le soit. Ce serait sans doute le seul moyen d’amener ces partis à tra
36 te n’est en fait ni vague ni abstraite. Ailleurs, elle en a fait la preuve. Le parti travailliste néerlandais, qui se déclar
37 ecte par les idées que nous venons de développer. Il est sorti des camps pour prendre le pouvoir. Et si les Hollandais vie
38 présentation devant le corps électoral, c’est qu’ il a fait en une année de leur pays, le grand gagnant européen de la cou
2 1946, Réforme, articles (1946–1980). Deux lettres sur la fin du monde (29 juin 1946)
39 aussitôt Washington. D’après ses calculs, disait- il , cet essai provoquerait un tel raz-de-marée que le Déluge, en compara
40 t finir sa vie en même temps que celle du monde ? Il semble qu’il y ait là quelque consolation. L’amertume de mourir est a
41 peut-être pourquoi les tout premiers chrétiens, s’ il est vrai qu’ils croyaient le Jugement imminent, mouraient avec une gr
42 uoi les tout premiers chrétiens, s’il est vrai qu’ ils croyaient le Jugement imminent, mouraient avec une grande facilité so
43 ec, là où le français traduit « en un instant » ? Il dit en atomo — dans un atome ! Et les grandes traditions occultistes,
44 it la fin de la douleur du monde. Certains jours, il me semble que la folie des peuples, des gouvernants, des militaires,
45 s qui nous mènent, obéit secrètement au bon sens. Elle nous mène à la mort, c’est clair. Mais c’est peut-être aussi qu’elle
46 mort, c’est clair. Mais c’est peut-être aussi qu’ elle a compris que la somme des souffrances humaines est devenue si grande
47 finir avec la vie, que de gens qui voudraient qu’ elle dure encore. Comme si l’humanité, au scrutin très secret, avait voté
48 ns cette nuit la plus longue de l’année, parce qu’ il n’y avait plus qu’à désespérer, l’espoir est né. Démonstration d’une
49 it être enregistrée que par le tout de l’homme qu’ elle suscite : voilà pourquoi nos instruments, et nos fonctions mentales e
50 deux : 1° Donner la Bombe aux petits pays pour qu’ ils soient protégés contre les grands. Ces derniers fourniraient ainsi la
51 éputés des peuples. (Je prends le modèle courant. Il faudrait l’ajuster.) Le cabinet que ces chambres éliraient compterait
52 oyez. On trouverait mieux, en s’appliquant.) Mais il n’y a que les idées pratiques et raisonnables que l’on traite de foli
53 dernière guerre civile du genre humain. Que va-t- il se passer ? Ces projets échoueront. On en rira. On n’en rira même pas
54 esure de ce que l’on connaissait avant le 6 août, elle est là, parce que l’homme l’a mise là. Et votre sens de la mesure peu
55 es nations et de leur vertu d’ordre. Admettons qu’ elles arrivent encore à se battre. Admettons que la Bombe soit moins puissa
56 es savants autorisés ne l’affirment. Admettons qu’ il n’y ait pas de raz de marée, ni d’autres accidents d’ampleur continen
57 la guerre militaire y prospère d’autant mieux qu’ elle sera dotée d’une armée de plus. Admettons que l’on invente une parade
58 s si francs et que nos chefs savent à peine ce qu’ ils jouent. Une espèce d’organisation mondiale ouvrira des bureaux confor
59 fortables d’où sortiront quelques vœux incolores. Il est évident que les nations souveraines s’en moqueront. Il est éviden
60 ident que les nations souveraines s’en moqueront. Il est évident que l’une d’entre elles, Bombe en main, essaiera d’impose
61 s’en moqueront. Il est évident que l’une d’entre elles , Bombe en main, essaiera d’imposer sa paix à toutes les autres. (Inut
62 à toutes les autres. (Inutile même de la nommer.) Il est évident que les peuples se révolteront contre cette nation et son
63 t contre cette nation et son régime, tôt ou tard. Il est évident que si l’on continue à penser comme on pense aujourd’hui,
64 ourd’hui, cela finira dans l’explosion totale. Et il est évident que la grande majorité des hommes se refuse à ces évidenc
65 dences. On nous ressasse à longueur de journée qu’ elle « n’est pas prête pour un gouvernement mondial ». Est-ce qu’on lui de
66 uvernement mondial ». Est-ce qu’on lui demande si elle est prête pour la mort ? L’humanité, ce sont des gens comme vous et m
67 es gens comme vous et moi. Quand vous me dites qu’ elle n’est pas prête pour la paix, cela veut dire que vous d’abord, vous r
68 t à chacun de nous. Et nous en sommes au point où il devient difficile de le cacher. Nos alibis ne trompent plus que nous-
69 mêmes. Pour moi, je poursuivrai ma lutte, quoi qu’ il arrive. C’est ma santé. Dès mon premier écrit sur les choses politiqu
70 fait Dieu dans tout cela ? Dangereuse question. S’ il permet que nous fassions sauter la Terre, elle sautera et ce sera trè
71 n. S’il permet que nous fassions sauter la Terre, elle sautera et ce sera très bien. Au-delà de ce « clin d’œil », Il nous a
72 ce sera très bien. Au-delà de ce « clin d’œil », Il nous attend. b. Rougemont Denis de, « Deux lettres sur la fin du
3 1946, Réforme, articles (1946–1980). Vues générales des Églises de New York (12 octobre 1946)
73 irait à Athènes, mais j’ai tout lieu de croire qu’ il existe à New York. Serait-ce cette église du Centre Absolu, dont je v
74 er en Amérique la liberté de célébrer leur culte. Ils y trouvèrent aussi la possibilité de fonder des cités idéales, confor
75 r des ancêtres hollandais, allemands ou suédois s’ il est né luthérien ; anglais s’il est presbytérien ; et s’il est cathol
76 ands ou suédois s’il est né luthérien ; anglais s’ il est presbytérien ; et s’il est catholique, italiens, polonais ou irla
77 luthérien ; anglais s’il est presbytérien ; et s’ il est catholique, italiens, polonais ou irlandais. À ces différences d’
78 ste est largement populaire, la méthodiste aussi ( elles comptent chacune 9 à 10 millions de membres), tandis que l’Église pre
79 le. Quant à la fameuse multiplication des sectes, elle n’a rien à voir avec la diversité des confessions d’origine nationale
80 ons d’origine nationale. C’est au xixe siècle qu’ elle a sévi, pour des raisons politiques ou géographiques au moins autant
81 les étrangers (scandalisés par une diversité dont ils ignorent les origines valables, pour la plupart européennes), voici l
82 s, pour la plupart européennes), voici le fait qu’ il convient de souligner : ces étiquettes ne correspondent nullement à d
83 g, comme une hostie est moins grosse qu’un pain ; ils ne sont pas si enfantins que leurs critiques. On ne m’avait pas dit n
84 es signatures de visiteurs de toutes confessions ( ils les indiquent et je note beaucoup de Roman Catholics). Passons mainte
85 ètement archéologiques. Le peuple américain — est- il puéril ou sain ? — adore plus que tout autre les costumes, et la bell
86 tonnière fleurie d’un œillet blanc, s’empressent. Ils vous dirigent avec une fermeté cordiale vers les sièges libres ou dép
87 ficiant est en surplis, ou chez les luthériens, s’ il est en robe noire. Chez les presbytériens, on distribue la crème sur
88 istraction ou des marques de ferveur théâtrale qu’ il s’attendait à retrouver dans un tel lieu… Plus divisés qu’ailleurs en
89 cors, comment les chrétiens d’Amérique conçoivent- ils et vivent-ils leurs croyances ? J’essaierai, dans un prochain article
90 les chrétiens d’Amérique conçoivent-ils et vivent- ils leurs croyances ? J’essaierai, dans un prochain article, de rassemble
4 1946, Réforme, articles (1946–1980). Spiritualité américaine (19 octobre 1946)
91 rivée sans lesquels nulle société n’est possible. Il ne s’agissait pas de « moralisme » (les ismes n’apparaissaient qu’une
92 e fois le combat rompu) ni « d’évangile social ». Il s’agissait d’une lutte pour l’existence, et les pasteurs y tenaient u
93 les pasteurs y tenaient une fonction directrice. Elle leur est disputée de nos jours par la science vulgarisée, les comment
94 l’école publique, le cinéma et les comités. Mais ils en ont gardé le pli : leur christianisme est avant tout une force soc
95 e aux temps héroïques d’avant le Moyen Âge, quand il assumait lui aussi toute la charge de la culture et du maintien de la
96 rentes, et les paroisses sont devenues des clubs. Elles offrent à leurs membres des relations sociales, des banquets, des jeu
97 onc à la tête d’un organisme assez complexe. Mais il dispose d’aides nombreuses : un suppléant souvent, un chef de chœur,
98 ra donc de parler, et ce n’est pas le dimanche qu’ il parlera le plus, car son sermon ne dépasse pas vingt minutes : une le
99 aisante à tous égards. On me demandera : Qu’y a-t- il de proprement religieux dans tout cela ? Tout et rien, répondrai-je,
100 me est la meilleure manière de vivre, un idéal qu’ il faut mettre en pratique moins pour aller au Paradis que pour jouir du
101 peu de théologie va s’écrier que dans cet idéal, il ne voit rien de chrétien que l’étiquette, couvrant d’ailleurs des mar
102 par M. Smith, en souvenir de ses parents défunts. Ils communient en très grand nombre et fort souvent, avec une visible fer
103 rure ? Cela fait bien, et c’est « traditionnel ». Ils n’ont pas le sens proprement « religieux » des correspondances et des
104 r lui prêcher le pur message de la foi mais alors elle n’est plus dans le monde, qui s’organise sans elle et ne l’entend plu
105 lle n’est plus dans le monde, qui s’organise sans elle et ne l’entend plus. Ou bien vous mettez le message à la portée de la
106 toutes les aides de la morale et de la religion… Il ne me reste plus qu’à noter que Kierkegaard, précisément, est entière
5 1948, Réforme, articles (1946–1980). Roger Breuil qui vient de mourir était un grand romancier protestant (13 mars 1948)
107 un grand romancier protestant (13 mars 1948)f Il était venu passer une soirée chez moi, il y a quelques semaines, car
108 ns, et sans question, pour le reste de notre vie. Il est difficile de comprendre que c’est fini. Je retrouve sa dernière l
109 que c’est fini. Je retrouve sa dernière lettre : il ne m’y parle que de notre projet, et je n’ai pas encore répondu. Il e
110 e de notre projet, et je n’ai pas encore répondu. Il est difficile de comprendre que ce qui était tourné vers l’avenir est
111 evenu tout d’un coup du passé, est fini. Que veut- il signifier, par ce retrait soudain ? Mais non, il ne veut rien, il a s
112 -il signifier, par ce retrait soudain ? Mais non, il ne veut rien, il a subi. Sachant que seule cette autre chose est vrai
113 r ce retrait soudain ? Mais non, il ne veut rien, il a subi. Sachant que seule cette autre chose est vraie, à travers nous
114 et malgré nous, cette autre chose contre laquelle il n’y a rien à faire, et qui nous aime. ⁂ Je relis la dernière page de
115 e. ⁂ Je relis la dernière page de sa Galopine, où il dit cela, et chaque mot porte. Je voudrais que vous preniez ce roman,
116 , son mystère. En termes de psychologie courante, il faudrait parler de pudeur. Mais cette pudeur cachait une étrange libe
117 it plus long que nous. Moins on en parle et mieux elle sait se faire entendre. ⁂ Ce mouvement de retrait constamment renouve
118 re de poser une question, ou plutôt d’indiquer qu’ elle se pose, mais de s’abstenir d’y répondre parce que la réponse n’est p
119 e force. Certains lui demandaient un « message ». Il n’aimait guère ce mot, pour des raisons profondes et non seulement pa
120 en vérité. De tous les romanciers contemporains, il est celui dont l’œuvre est le plus solidement fondée dans la plus sûr
121 ndée dans la plus sûre théologie : c’est pourquoi il n’en parle jamais, et se garde bien d’utiliser ses personnages pour e
122 rsonnages pour exposer des « idées religieuses ». Il nous montre des hommes et des femmes qui vivent comme ils le peuvent
123 montre des hommes et des femmes qui vivent comme ils le peuvent la vie contemporaine, il les suit de très près, d’une allu
124 vivent comme ils le peuvent la vie contemporaine, il les suit de très près, d’une allure naturelle, avec une secrète tendr
125 française, tout à la fois curieuse et intrépide, il laisse en blanc la solution que ses personnages n’ont pas trouvée, il
126 a solution que ses personnages n’ont pas trouvée, il laisse agir en nous l’obscure question dont ils étaient les porteurs
127 e, il laisse agir en nous l’obscure question dont ils étaient les porteurs ou la proie ; et ce respect des âmes donne à cha
128 stalgique, et finalement heureuse, comme exaucée… Il était le meilleur écrivain protestant de nos contemporains (bien que
129 la foi qui l’inspire, et de tout langage pieux). Il est entré dans les grandes marges de cette vie, et son dernier retrai
6 1948, Réforme, articles (1946–1980). L’Europe, aventure du xxe siècle (1er mai 1948)
130 ie La faiblesse générale des utopies, c’est qu’ elles sont en réalité moins riches d’avenir que le présent. Je dirais même,
131 ons sociologiques imaginaires ». Mais l’action qu’ elles proposent n’est rien d’autre que l’arrêt artificiel, à un certain niv
132 e l’Europe » est aujourd’hui une utopie. Telle qu’ elle est, pessimiste et divisée, encombrée de frontières qui l’empêchent d
133 une alliance défensive nos États-nations tels qu’ ils sont, tenter de coaliser leurs souverainetés pour lutter contre les e
134 ; rappeler à cette Europe qui se sent diminuée qu’ elle compte encore 250 millions d’habitants, les plus travailleurs et les
135 n de l’homme dont, malgré toutes ses infidélités, elle reste aux yeux du monde entier, le grand témoin — c’est la tâche dans
136 Si l’Europe doit durer, c’est aux fédéralistes qu’ elle le devra, et à eux seuls. Sur qui d’autre peut-elle compter ? Elle ne
137 le le devra, et à eux seuls. Sur qui d’autre peut- elle compter ? Elle ne doit pas compter sur les gens au pouvoir. J’en conn
138 à eux seuls. Sur qui d’autre peut-elle compter ? Elle ne doit pas compter sur les gens au pouvoir. J’en connais peu qui aie
139 présent de l’opinion et des rivalités de partis, ils courraient le risque d’être accusés de trahison s’ils transigeaient u
140 courraient le risque d’être accusés de trahison s’ ils transigeaient un seul instant avec le dogme de la souveraineté absolu
141 aire, pour des raisons absurdes, mais techniques. Il faut donc les pousser dans le dos, voilà qui est clair. Quelques moi
142 inion qui se réveille, aux citoyens du continent. Ils vont la prendre dans quinze jours, aux états généraux de l’Europe, co
143 ’Europe, convoqués à La Haye pour le 7 mai. Où elle mène Je ne puis anticiper sur les résolutions auxquelles aboutira
144 sera garanti le droit d’opposition, faute duquel il est dérisoire de parler de démocratie. Finalement nous voulons l’Euro
145 Finalement nous voulons l’Europe, parce que sans elle le monde glisse à la guerre, et que l’alternative n’est plus, pour no
146 nous, que d’empêcher cette guerre ou de périr en elle . Séparés, isolés, aucun de nos pays n’empêchera rien. Séparés, isolés
147 monterons au niveau de puissance des deux grands. Ils baisseront le ton, et l’on pourra parler. Chance de l’homme Tel
148 ion directrice de l’aventure que nous courons. Et il est clair que son enjeu n’est pas d’abord notre sécurité, n’est pas d
149 , bien que l’une et l’autre en dépendent, mais qu’ il est avant tout l’enjeu de la personne, la chance de l’homme au xxe s
150 es. Nous vivons aujourd’hui la « drôle de paix ». Il dépend de nous qu’elle se termine demain en paix-éclair, et c’est l’e
151 rd’hui la « drôle de paix ». Il dépend de nous qu’ elle se termine demain en paix-éclair, et c’est l’effet que pourra seule p
152 clamation solennelle de la fédération européenne. Il se passe quelque chose à l’Est. Il est temps qu’il se passe quelque c
153 on européenne. Il se passe quelque chose à l’Est. Il est temps qu’il se passe quelque chose en Europe ! Il est temps de ré
154 l se passe quelque chose à l’Est. Il est temps qu’ il se passe quelque chose en Europe ! Il est temps de réveiller l’espoir
155 st temps qu’il se passe quelque chose en Europe ! Il est temps de réveiller l’espoir d’une moitié séparée du continent. Il
156 iller l’espoir d’une moitié séparée du continent. Il est temps de donner aussi à nos amis américains la certitude que nous
157 ricains la certitude que nous ne sommes pas ce qu’ ils ont parfois presque raison de croire que nous sommes : des démissionn
7 1949, Réforme, articles (1946–1980). « Êtes-vous partisan du rapprochement franco-allemand ? » (29 janvier 1949)
158 h i L’ère des « rapprochements » est dépassée. Il s’agit pour nous, Européens, de construire ensemble une fédération so
159 ns, de construire ensemble une fédération solide. Il existe certes des problèmes franco-allemands, mais pas de solution fr
160 s au désir d’unité des Allemands, aux craintes qu’ il éveille en France, à la tentation autarcique en Grande-Bretagne, aux
161 liste a l’avantage d’être au moins concevable, et il est impossible qu’elle soit pire que ce qui est. Le seul obstacle sér
162 être au moins concevable, et il est impossible qu’ elle soit pire que ce qui est. Le seul obstacle sérieux réside dans l’inco
8 1952, Réforme, articles (1946–1980). Après l’Œuvre du xxe siècle (14 juin 1952)
163 Après l’Œuvre du xxe siècle (14 juin 1952)j k Il ne saurait être question de tirer de nos débats et de nos conférences
164 es masses, et personne n’a déclaré devant nous qu’ il connaissait et assumait les conditions d’une communion nouvelle entre
165 nier thème, sur ce thème capital de la communion. Il est trop clair qu’aucun de nous ne se risquerait à vous en donner la
166 s en donner la recette. Et c’est tant mieux ! Car il existe des recettes de communion, et des fois synthétiques, dans ce s
167 nthétiques, dans ce siècle, et nous savons à quoi elles mènent ! Que vaut le bonheur d’un peuple, que vaut sa communion, quan
168 bonheur d’un peuple, que vaut sa communion, quand elle est établie par la police au prix d’un homme sur dix dans les camps s
169 ui osent à peine se regarder dans les yeux, quand ils savent que deux d’entre eux sont probablement des mouchards — et que
170 ième homme est dans un camp ? Pitié pour eux, car ils ignorent sans doute l’étendue et la vraie visée de la tyrannie dans l
171 ue et la vraie visée de la tyrannie dans laquelle ils sont nés. Mais nous… Nous qui avons parmi nous des témoins, des victi
172 s dictatures et des arguments de leurs complices. Elle a protesté au double sens du mot, qui est à la fois refus et témoigna
173 victimes de toutes les tyrannies du xxe siècle. Il convenait d’ouvrir nos manifestations par cet acte de piété et ce Mag
174 Maintenant, qu’allons-nous conclure ? Je pense qu’ il ne se trouvera pas un seul d’entre tous ceux qui sont ici présents, p
175 r d’en parler — parce que, disons-le franchement, il est gênant de parler de cela quand on y croit, dans un tel lieu, et s
176 nde et la plus libre dans les modes d’adhésion qu’ elle implique, s’est faite autour non pas d’une idée, d’une doctrine, d’un
177 es, et ce serait peu, abandonné de Dieu lui-même, il l’a crié. N’oublions pas que là, le mot de communion a pris son sens,
178 ue là, le mot de communion a pris son sens, et qu’ il le perd en s’éloignant du sacrifice individuel. Et là-dessus, pour te
179 iduel. Et là-dessus, pour terminer, une citation. Elle est d’un Espagnol, et frappe une de ces notes d’éloquence à la fois s
180 côtés sans que tu les voies. Et chacun pensera qu’ il va seul. Mais vous formerez un bataillon sacré, celui de la sainte, d
181 débats d’écrivains, car après les avoir entendus, il nous a semblé qu’ils étaient dirigés plus par la crainte du communism
182 car après les avoir entendus, il nous a semblé qu’ ils étaient dirigés plus par la crainte du communisme que par le souci de
183 nisme que par le souci de la liberté et qu’ainsi, ils passaient à côté des questions essentielles qui leur étaient proposée
184 uestions essentielles qui leur étaient proposées. Il reste que ces conversations, faites en réalité de monologues successi
9 1953, Réforme, articles (1946–1980). « Les écrivains protestants » (11 avril 1953)
185 s que l’on ne peut assumer, et celles-là seules. Il est vrai, par ailleurs, que rien ne facilite une « carrière littérair
10 1968, Réforme, articles (1946–1980). Vers l’Europe des régions ? (30 novembre 1968)
186 nt d’Amérique après la guerre, j’avais compris qu’ il était indispensable d’unir les Européens. Non seulement nous-mêmes ma
187 oblème. L’union mondiale ne sera concevable que s’ il existe une solide fédération européenne. Ce sera le point d’accrochag
188 ction et de la vie intellectuelle et auront entre elles des liens de toutes natures. Elles constitueront de proche en proche
189 auront entre elles des liens de toutes natures. Elles constitueront de proche en proche un tissu plus solide que leurs lien
190 ité universelle : « Désormais, disait saint Paul, il n’y a plus ni Juifs ni Grecs ». Cette responsabilité de l’Europe s’op
191 à la racine, d’ordre philosophique ou religieux. Il s’agit de transposer sur les plans économique et politique les conséq
192 encore, de s’affronter sur notre vieux continent. Il nous a semblé intéressant de considérer avec Denis de Rougemont l’œuv
193 eprise au Centre européen de la culture (CEC), qu’ il dirige depuis près de vingt ans. Voici ce qu’il a développé, pour nou
194 u’il dirige depuis près de vingt ans. Voici ce qu’ il a développé, pour nous, sur ce ‟thème imposé”. » p. L’acronyme du Ce
195 ce ‟thème imposé”. » p. L’acronyme du Cern, dont il est question ici, renvoie à l’organe provisoire institué en 1952 sous
11 1976, Réforme, articles (1946–1980). À propos de Concorde (21 février 1976)
196 s arguments critiques nous intéressent, et puisqu’ il s’agit d’un débat, vous pourrez y aller librement. Soyez aussi violen
197 pourrez y aller librement. Soyez aussi violent qu’ il vous plaira. » Le lendemain soir, dès les premières minutes, je vois
198 dans un traquenard. Sentimentaux ou technocrates, ils sont tous en train de célébrer leur culte des « Ailes françaises ». Q
199 « bénéficieront », si l’on peut dire, que feront- ils de ces heures gagnées ? Est-ce qu’elles vaudront les seize milliards
200 que feront-ils de ces heures gagnées ? Est-ce qu’ elles vaudront les seize milliards déjà dépensés par l’État, donc par les c
201 les contribuables français et anglais ? Est-ce qu’ elles justifieront le risque planétaire que des savants redoutent, l’attein
202 merveilleux châteaux de nuages de l’Atlantique : ils y gagneraient (outre 20 % sur le prix du billet, et x % sur leurs imp
203 éfléchir, ou de lire mes livres par exemple. Et s’ il était vraiment indispensable de « gagner » trois heures sur ce trajet
204 0 ouvriers. Argument proprement scandaleux ! Faut- il , comme le demandait un Premier ministre, supprimer toute limitation d
205 ciété est ainsi faite que la seule alternative qu’ elle offre au gaspillage industriel, à la pollution de l’atmosphère, voire
206 ’atmosphère, voire à la guerre, c’est le chômage, il est temps de changer de cap, de se fixer d’autres buts, et d’inventer
207 lculs et de rêves, de principes et d’ambitions qu’ il nous faut dépasser si nous voulons survivre, qui détruisent à la fois
12 1979, Réforme, articles (1946–1980). Écologie, régions, Europe fédérée : même avenir (19 mai 1979)
208 de l’éclairage à la bougie »). Ou au contraire ; elle serait une « névrose d’Apocalypse ». On dit aussi des écologistes adv
209 aussi des écologistes adversaires du nucléaire qu’ ils ont été « traumatisés par Hiroshima » (les partisans du nucléaire, eu
210 s Sakharov dit au contraire, selon Le Monde , qu’ ils sont payés par le gouvernement russe. En ce point, l’on s’aperçoit qu
211 sur son mérite, mais sur les visées politiques qu’ elle est censée traduire tout en les dissimulant. 2. Alignements : un m
212 : celles-ci, bien entendu, sont « nécessaires » ; elles sont « sûres », elles sont « propres ». Les enseignants ont à présent
213 ndu, sont « nécessaires » ; elles sont « sûres », elles sont « propres ». Les enseignants ont à présenter ces brochures. Mais
214 rection le rappellerait aussitôt à l’ordre, car «  il est interdit de faire de la politique à l’école ». D’où cette nouvell
215 préconisée dès lors par plusieurs gouvernements. Il est normal que ce souci se soit manifesté d’abord en Europe, première
216 i des premiers atteints par le mal industriel, qu’ ils ont d’ailleurs inventé. C’est le souci de ceux qui ont déchaîné la dé
217 d en Europe, au xixe siècle puis aux États-Unis. Elle s’étend désormais à toutes les parties de la Terre où la civilisation
218 e, a voulu se développer sur une tabula rasa — qu’ elle a créée au besoin — d’où ses liens de complicité essen­tielle avec la
219 de l’enfant est une tabula rasa ou maison vide qu’ il s’agit de « meubler » de certitudes simples, abstraites, géométriques
220 t les préparant à devenir des recrues alignables. Il existe une profonde analogie de structure entre l’agression contre la
221 premier lien fondamental entre les deux réalités. Il y en a d’autres. C’est au niveau régional que les mesures d’écologie
222 usées, minimisées par l’État-nation qui a peur qu’ elles le divisent, il y a des exigences écologiques continentales, égalemen
223 ées ou minimisées par l’État-nation qui a peur qu’ elles le dépassent. Le Rhin amène à la mer du Nord 60 millions de tonnes de
224 que les trois autres additionnés… Même jeu quand il s’agit des mers et des océans menacés, des changements de climat, du
225 tant par en haut que par en bas, c’est-à-dire qu’ il s’oppose à presque tout ce qui existe ou voudrait exister indépendamm
226 e siècle par les personnalistes à l’État-nation : il est à la fois trop petit (à l’échelle mondiale) et trop grand (à l’éc
227 e de participation à la mesure du citoyen Mais il convient ici de préciser le sens que nous donnons au mot région. — Il
228 lui répondre. 7. Éloge de la petite échelle Il s’agit donc, si l’on veut arriver à des solutions écologiques capable
229 a seule capitale nationale est des plus simples : il consiste à situer les pouvoirs de décision au niveau communautaire le
230 ormulait naguère à propos des États-Unis, mais qu’ il est facile de transposer en termes européens : Ne confiez jamais à u
231 autonomie, à reprendre en main leurs destins.2 » Il est faux que le plus grand soit le plus efficace. E. F. Schumacher a
232 our la première élection du Parlement européen. S’ il est vrai que la cause européenne, qui semblait endormie, ou qu’on cro
233 prévue des régionalistes et des écologistes ; — S’ il est vrai que ni la région ne se fera sans l’Europe fédérée, ni celle-
234 rée, ni celle-ci sans des régions à sa base ; — S’ il est vrai enfin que les problèmes écologiques ne peuvent être résolus
235 inentale, non pas à l’échelle nationale ; — Alors il devient évident que les organisations écologistes devraient entrer au
236 Encore un mot sur le titre-slogan que je propose. Il ne dit pas : même combat, mais bien même avenir. Un combat peut être
237 est fini. Un avenir adviendra certainement. Ce qu’ il m’importait de souligner, c’est que nous n’aurons ni éco-société, ni
238 réaliser seule ; c’est que l’avenir de chacune d’ elle est celui des deux autres, et qu’en cette trinité réside l’espoir des
239 ec l’aide des États-Unis et de l’Europe ne serait- elle pas un premier phénomène de rejet de la technologie rationaliste et d
240 la technologie rationaliste et du matérialisme qu’ elle favorise, contraire au Coran ? 2. The Ecologist, special on the Fut
241 America, septembre 1977. 3. Dans certains pays, il existe un parti écologiste : parti radical italien, parti radical née
13 1980, Réforme, articles (1946–1980). Les Nations unies des animaux (13 décembre 1980)
242 lent pas comme nous parlons — avec des mots. Mais ils vivent comme nous la douleur et la joie, la peur et l’amour, la curio
243 e du regard devant l’impénétrable et l’indicible… Il nous faut donc parler pour eux. Parler pour eux, et de leur part, aux
244 les méprisent, les torturent, les massacrent, qu’ il s’agisse des bébés phoques, du Labrador ou, dans les campagnes toutes
245 trop souvent nommées des « bêtes brutes », quand elles étaient rendues telles, à vrai dire, par la bêtise et la brutalité de
246 usceptibles de mourir d’émotion tend à prouver qu’ ils sont plus capables que nous d’une certaine civilisation : celle du cœ
247 rs très profonde, qui unisse l’homme et l’animal, elle est d’ordre émotif, affectif. Elle se passe dans le regard, qui atten
248 e et l’animal, elle est d’ordre émotif, affectif. Elle se passe dans le regard, qui attend tout de nous ! Car c’est de l’hom
249 savoir peut-être — mais que savons-nous de ce qu’ ils savent ? Que l’homme soit responsable de la Nature vivante, et de sa
250 e, mais d’autant plus pénétrante : on répétait qu’ il s’agissait seulement d’une mode. Cette erreur a distrait la méfiance
251 trait la méfiance des saccageurs de la Nature, et elle nous a permis d’agir en profondeur. Mais la responsabilité de l’homme
252 es n’est pas seulement métaphorique et poétique : elle est tout à la fois matérielle et morale, tout à la fois scientifique
253 de celui qui l’y a soumise — avec l’espérance qu’ elle aussi sera affranchie de la servitude de la corruption, pour avoir pa
254 ns les douleurs de l’enfantement. Et ce n’est pas elle seulement, mais nous aussi, qui avons les prémices de l’Esprit, nous
255 ensemble, solidaires dans la même espérance, dont il nous faut témoigner désormais par des actes à la fois symboliques et
256 musc, éléphants africains, phoques, lamantins…) ; ils œuvreront pour que cette protection puisse s’appuyer sur des bases ju
257 ouvement écologique, participait à cette réunion. Il a bien voulu nous autoriser à publier le texte de son allocution d’ou