1 1937, La Revue de Paris, articles (1937–1969). Paysans de l’Ouest (15 juin 1937)
1 le était là. Elle occupait les longs bancs rangés en chevrons derrière le petit appareil de projection, placé à trois ou q
2 ce circuler sur sa nuque grasse. Un des garçons s’ en aperçoit, attrape la puce en pinçant la fille, et les rires redoublen
3 se. Un des garçons s’en aperçoit, attrape la puce en pinçant la fille, et les rires redoublent. L’instituteur réclame le s
4 ique et de visage intelligent, la chevelure noire en bataille qu’il saisit à pleines mains dans les moments pathétiques. I
5 mé, le Petit Poucet, qui remporte un gros succès. En sortant, nous passons devant la salle du curé, qui donne aussi ce soi
6 ndu à mon salut. 12 décembre 1933 Tout à l’heure, en déchirant le journal de l’île pour allumer le feu, j’ai vu l’annonce
7 chètent absolument au hasard ceux qu’ils trouvent en dépôt chez la mère Renaud : l’Ami du Peuple ou la France de Bordeaux,
8 a conférence d’A… me fera modifier ce jugement. J’ en suis bien curieux. 15 décembre 1933 Je relève les notes prises l’autr
9 à A… … Grande salle de la mairie, voûtée, peinte en bleu clair. Une table et trois chaises sur la scène surélevée. Enviro
10 Poussés par leurs voisins, trois hommes se lèvent en haussant les épaules pour s’excuser de se mettre en avant. Ils gravis
11 haussant les épaules pour s’excuser de se mettre en avant. Ils gravissent la scène, enlèvent leur casquette à visière cir
12 Il s’excuse encore de ne pas s’y connaître assez en religion, mais assure qu’il a été bien intéressé. On se lève, et les
13 nt que je lui donne du feu. C’est un petit maigre en casquette, environ 35 ans, l’air intelligent. Je l’approuve et m’éton
14 de la Bible, ou si, au contraire, il pourrait lui en prêter une. Quoi qu’il en soit, le pasteur note le nom du « président
15 traire, il pourrait lui en prêter une. Quoi qu’il en soit, le pasteur note le nom du « président » et promet de lui envoye
16 est un homme simple et solide, on peut lui parler en camarade : — Eh bien ! si vous voulez mon opinion, ou si elle peut vo
17 yez-vous pas qu’on pourrait gagner leur confiance en leur parlant plus familièrement, sans faire d’éloquence ? Cela tranch
18 uant à peine la route asphaltée. Je roulais comme en rêve, le long des dunes qui me cachaient la mer bruyante, à ma gauche
19 lottait sur les marais. « Le peuple, me disais-je en pédalant, ce qu’ils appellent le peuple… » ; je revoyais cette centai
20 urnée de travail. Mais beaucoup ne font plus rien en hiver ? Ils sont venus pour tuer le temps, au lieu d’aller au café. C
21 e, la difficulté de s’exprimer ? Tout est mystère en eux, et pour eux-mêmes sans doute. Et on dit « le peuple », la volont
22 n se sent réfléchir avec une énergie particulière en pédalant contre le vent dans l’obscurité. Mais le lendemain il n’en r
23 le vent dans l’obscurité. Mais le lendemain il n’ en reste rien qu’un peu de courbature dans les jambes. 16 décembre 1933
24 cette espèce, mais ce n’est point pour cela que j’ en parle ici. C’est pour une raison très précise et qui n’a rien à voir
25 de puces. J’exagère à peine : pour mon compte, j’ en ai pris sept sur mon pyjama dans l’espace de deux minutes, ce qui doi
26 ur le couvre-pied. D’autres sur le plancher. Je n’ en menais pas large. Comme la mère Renaud était venue nous voir la veill
27 hypothèse à ce point injurieuse. Pourtant nous n’ en trouvions pas d’autres. Or, peu de jours auparavant, un petit hérisso
28 uparavant, un petit hérisson était venu se mettre en boule dans la plate-bande qui borde la maison, sous ma fenêtre. Il so
29 lement sensationnelle, mais que veulent-ils qu’on en fasse ? Nous avons tout à rapprendre de Goethe. Non seulement des rév
30 ust, mais aussi de ces pages du Journal de voyage en Italie où, par exemple, il rapporte à madame de Stein comment les hab
31 il faut se trouver placé soudain devant les êtres en chair et en os dont elles parlent, pour comprendre à quel point elles
32 rouver placé soudain devant les êtres en chair et en os dont elles parlent, pour comprendre à quel point elles mentent. Ma
33 ne foi. Elles le trahissent d’ailleurs, ce désir, en essayant de le faire passer d’ores et déjà pour une réalité. Deuxième
34 ou le pasteur M. Benda. Il est généralement admis en France qu’un orateur dit un tas de choses qu’on ne comprend pas, et c
35 e constate. Je conclus que les intellectuels sont en mauvaise posture pour agir sur le peuple. Qu’ils disent des vérités o
36 invité à choisir, sommé d’approuver ou de refuser en fait ce que venait de dire le conférencier, alors, alors il y aurait
37 irresponsable. Les clercs s’y résignent et même s’ en vantent : c’est plus commode. Quant au peuple, il y a belle lurette q
38 es d’aristos qui ne vont qu’avec les riches. Il y en a certes qui font progresser la science, et cela c’est bien. On va le
39 r exemple, à quoi cela sert-il ? D’ailleurs, on n’ en a jamais vu. Quant à la politique, c’est tout à fait autre chose. C’e
40 sincère », mais on n’aura jamais l’idée de mettre en pratique ce qu’il dit. Il reste dans son rôle en s’agitant sur l’estr
41 en pratique ce qu’il dit. Il reste dans son rôle en s’agitant sur l’estrade et en lançant des appels éloquents, et moi je
42 reste dans son rôle en s’agitant sur l’estrade et en lançant des appels éloquents, et moi je reste dans mon rôle en me dir
43 s appels éloquents, et moi je reste dans mon rôle en me dirigeant d’après mes intérêts. Cela va de soi. Il est probable qu
44 que les intellectuels professent depuis longtemps en toute conscience une doctrine analogue. Il est normal que les hommes
45 devraient, de combattre activement cette erreur, en tirent au contraire leur confort. Au lieu de faire respecter la vérit
46 ur confort. Au lieu de faire respecter la vérité, en montrant par l’exemple qu’elle implique des actes, ils la disqualifie
47 implique des actes, ils la disqualifient et ils s’ en moquent agréablement, ils la réduisent à un ensemble de phrases corre
48 rs… Pour aider réellement un homme, il faut que j’ en sache davantage que lui, mais il faut avant tout que je sache ce qu’i
49 i, pour parler comme la presse, un « intellectuel en chômage. » (Écrire, aux yeux de ces paysans, ne signifie proprement r
50 — Du haut des dunes, je vois les terres divisées en parcelles minuscules. Sur ces parcelles des hommes et des femmes trav
51 s méritent chacune un commentaire. Elles résument en deux images exactes les conditions morales et économiques des habitan
52 eprises l’extraordinaire complication du cadastre en lisant affichées sur les murs de l’église les annonces de ventes immo
53 aque champ soit partagé à la mort du propriétaire en autant de parcelles qu’il y a d’héritiers. Ceci pour éviter que l’un
54 ens de la communauté. Qui est-ce qui se préoccupe en France de donner au peuple une éducation solidariste ? On cherche à e
55 ne construisent rien, n’animent rien, s’épuisent en excitations verbales. Dictature ou éducation, voilà le dilemme. 2° Ma
56 ici, j’ai hésité longtemps à croire que la raison en était réellement aussi simple. Je connais tout de même assez la terre
57 pour savoir que les mêmes outils ne sont pas bons en tous pays, et je cherchais quelle particularité locale motivait l’usa
58 peut-être d’innombrables petits faits de ce genre en France. Il y aurait peut-être d’innombrables réformes aussi simples à
59 nnombrables réformes aussi simples à opérer. Je n’ en sais rien4. Je me borne à constater qu’ici les paysans travaillent tr
60 n’ai jamais retrouvé ce ton dans le peuple. S’il en paraît parfois, par accident, quelques traces ici ou là, c’est que le
61 , quelques traces ici ou là, c’est que le peuple, en France, lit trop de journaux, ne lit que cela, et finit par se croire
62 ser mes critiques ci-dessus consignées, et mettre en discussion mes projets de réforme. Mais je sais bien ce qui m’arrêter
63 ette terre pauvre, qu’ils grattent lentement pour en tirer tout juste de quoi vivre, j’hésite à reconnaître dans leur exis
64 , depuis cent-cinquante ans. Ils ne songent pas à en tirer le moindre profit positif. Ils se nourrissent mal (légumes, sou
65 t tuer aujourd’hui pour sauver leur pratique ? On en vient à penser que le régime qui convient le mieux à cette vie obscur
66 ommunistes de la colonie de vacances qui défilent en maillots rouges et l’on pousse des « cris séditieux » ; le dimanche s
67 maisons sont vides, et quelques-unes déjà tombent en ruines. Et surtout ce régime d’inertie laisse trop de forces grandir
68 ait demandé d’y aller faire quelques causeries. J’ en rapporte deux séries d’observations nouvelles sur la province, et je
69 es lignes indiquait qu’on allait à Paris ou qu’on en venait. Tout le reste n’était que tortillards cahotants, jamais à l’h
70 us pouviez parcourir vingt fois la France de part en part, sans remarquer que les gens qui l’habitent ne sont pas tous de
71 ée ? La ligne d’autocar fait partie du pays. Elle en épouse la géographie physique, mais aussi humaine. Elle quitte à tout
72 tention d’utiliser ce moyen de transport vous met en contact avec toutes sortes d’habitudes locales. D’abord il faut aller
73 ue et la rapidité d’esprit que les bourgeois, qui en sont dépourvus, attribuent par erreur au « peuple » en général. Sans
74 is loin de moi ces ambitions : ceux qui les ont n’ en parlent pas, dit-on. Et je ne suis qu’un écrivain. Ceci me rappelle u
75 uel était mon métier. Et quand j’eus dit que je n’ en avais aucun, et que je n’étais qu’un écrivain, et chômeur par-dessus
76 . Ils étaient venus par groupes, à bicyclette ou en charrettes, de tous les villages voisins. Du haut de la colline où no
77 ebout au milieu d’eux, de manière à pouvoir, tout en parlant, passer des clichés dans la lanterne à projection. Pour assur
78 siasme du plan de cinq ans. Et je m’étonnais tout en parlant de raconter une épopée contemporaine : tout cela se dégageait
79 grande à nos obscurs et grands désirs informulés. En finissant, je craignis un moment de les avoir trompés, de les avoir r
80 » Pour sa part, il était sceptique. Il pensait qu’ en Vendée les choses ne seraient pas si simples, que la situation matéri
81 gouverner comme on l’entendait. Et je me disais, en l’écoutant : « En voilà un que l’on pourrait sans honte présenter aux
82 n l’entendait. Et je me disais, en l’écoutant : «  En voilà un que l’on pourrait sans honte présenter aux jeunes Russes, au
83 s de cette journée deux impressions (je n’ose pas en dire davantage : tout cela est encore moins clair dans la réalité que
84 inine, président de l’URSS, debout dans un champ, en costume de moujik, il y a eu un profond silence au lieu des rires que
85 es ? — Ce n’est pas ce qu’on cherche. Il faudrait en lire deux au moins pour corriger les mensonges. Ce qu’ils peuvent tou
86 ander que des traductions. La littérature moderne en France n’a guère à donner à ceux qui ont faim de nourriture solide, é
87 que ce mot peut désigner autre chose qu’un « je m’ en fichiste » ? 4. J’avais raison de marquer ce doute. Un agriculteur a
88 ilon. Ils arrivent à se faire de grosses fortunes en très peu de temps, parfois sans dépenser un seul bidon d’essence. Sim
89 la menace d’utiliser le parcours d’une Compagnie en exercice. a. Rougemont Denis de, « Paysans de l’Ouest », La Revue d
90 enu au cours d’un long séjour dans l’île de Ré et en Vendée, ses impressions sur la vie des paysans en général et sur leur
91 à la vérité, sont extrêmement imprécises. Il y a, en France, un divorce angoissant entre les réalités humaines et la termi
92 qu’on va lire, nourries d’observations précises, en apportent des preuves frappantes. Ces pages sont extraites du Journa
93 ages sont extraites du Journal d’un intellectuel en chômage , qui doit paraître prochainement. »
2 1939, La Revue de Paris, articles (1937–1969). L’Âme romantique et le rêve (15 août 1939)
94 plus profondes que nous révèle M. Albert Béguin, en publiant son gros volume sur L’Âme romantique et le rêve. Livre charm
95 rs jamais sévère ; au point que l’on craindrait d’ en détourner certains lecteurs en remarquant que c’est aussi un ouvrage
96 l’on craindrait d’en détourner certains lecteurs en remarquant que c’est aussi un ouvrage d’actualité, au sens le plus pé
97 ent tous, écrit M. Béguin, que la vie obscure est en incessante communication avec une autre réalité, plus vaste, antérieu
98 ofonde ou la divinité ? « Plus nous nous retirons en nous-mêmes, en nous détournant des apparences, et plus nous pénétrons
99 vinité ? « Plus nous nous retirons en nous-mêmes, en nous détournant des apparences, et plus nous pénétrons dans la nature
100 nt hors de nous, ou bien seulement de choses qui, en nous, étaient restées secrètes pour la conscience ? Tieck pose très n
101 s le supraterrestre » ; ou encore : « Ce qui rêve en nous, c’est l’Esprit à l’instant où il descend dans la matière », mai
102 e. Si la plupart des romantiques n’ont pas choisi en toute clarté — ruse vitale pour des poètes —, tous les textes cités p
103 le pour que nous puissions l’esquiver. Essayons d’ en relever quelques points. Au départ, cette même attention prêtée aux s
104 étaphorique et régulier, comme s’il était soumis, en ce domaine, à des lois plus précises et plus constantes que celles qu
105 et après eux les romantiques, passent leur vie à en parler, à en écrire, à tenter de le cerner par des figures qui, n’éta
106 les romantiques, passent leur vie à en parler, à en écrire, à tenter de le cerner par des figures qui, n’étant jamais suf
107 iration — tellement vulgarisée de nos jours qu’on en oublie l’origine mystique : « Le poète et le rêveur sont passifs ; il
108 ué, corps et âme, à la grande nostalgie de l’être en exil. » II. L’Être en exil Ce sentiment d’exil que nous trouvon
109 ande nostalgie de l’être en exil. » II. L’Être en exil Ce sentiment d’exil que nous trouvons à l’origine des expérie
110 euse et perdue ? On aura bientôt fait de répondre en alléguant notre double nature, corporelle et spirituelle. Mais d’une
111 édisposé par l’habitude de l’examen de conscience en profondeur tel que le pratiquaient autour de lui les disciples de mad
112 . Blessure si cruelle et intime que sa conscience en évite le souvenir (ou le refoule comme dira Freud) de telle manière q
113 telle manière que la cause secrète de sa douleur en vient à se confondre avec le fait de vivre en général. D’où l’idée qu
114 ue angle qu’on veuille l’examiner, l’homme trouve en lui une blessure qui déchire tout ce qui vit en lui, et que peut-être
115 e en lui une blessure qui déchire tout ce qui vit en lui, et que peut-être lui fit la Vie même. » Non sans lucidité, Morit
116 emplation sans objet » à laquelle ils parviennent en de très rares instants n’est plus alors qu’un moyen de jouir d’une « 
117 ls éprouvent d’affirmer surabondamment que l’on n’ en peut rien dire que par des allusions, des métaphores, des poèmes « in
118 er certains malentendus courants. La personne est en nous l’être spirituel, responsable d’une vocation, et trouvant là son
119 lgie de les dépasser. Mais seule une vocation lui en donnera la force. Qu’il la reçoive et qu’il l’accepte consciemment, c
120 berté toute nouvelle. Dès ce moment, il accomplit en apparences une évolution fort semblable à celle de ces pseudo ou prém
121 monde actif, au lieu que le romantique voulait s’ en évader. Elle nous rend enfin responsables vis-à-vis de notre prochain
122 telle vocation peut donner le courage de s’avouer en toute lucidité, de s’exprimer sans réticences et d’assumer son moi co
123 st demandé d’agir et d’annoncer leur foi. « C’est en confessant de la bouche qu’on parvient au salut », dit saint Paul.
124 e même que le romantique oubliait son moi détesté en se perdant dans les fêtes du rêve, l’Allemand moyen oubliera ses misè
125 iera ses misères et les humiliations de sa patrie en se perdant dans l’âme collective, dans l’hypnose des fêtes sacrales o
3 1946, La Revue de Paris, articles (1937–1969). Tableaux américains (décembre 1946)
126 les Suisses énumèrent leurs Alpes au visiteur qui en contemple la chaîne. Le vent fou, l’air ozoné et la lumière éclatant
127 de cent étages. Et les blocs erratiques, débités en tranches, polis et luisants comme du marbre, ont été plaqués sur les
128 lecture de mon journal. Il n’y a que deux classes en Amérique : l’une où les fauteuils au dossier très haut sont fixes (de
129 femmes m’ont paru dignes de ce que le cinéma nous en promet — mais il suffit de trois ou quatre beautés saines ou frappant
130 ues, enjambée par les arches de fer d’un pont à n’ en pas croire ses yeux, qui porte l’autostrade pendant des kilomètres au
131 prose un groupe de mots de Mallarmé. Paris, Rome, en comparaison, sont d’immenses parcs semés de monuments. Le site et le
132 , et c’est la ville alors qui s’empare du ciel, s’ en fait un dôme à sa mesure et le referme sur sa nuit de ville. Appart
133 rnant et basculant, qui se transformerait le soir en lit et d’où, sans se lever, l’on atteindrait le téléphone, la poignée
134 ou subir les vitrines et les réclames lumineuses en délire, passer une heure aux Actualités, écouter les conversations de
135 peut-être, me dis-je après coup, mais peut-être, en poussant à l’extrême cette « distraction » de l’âme et de la volonté,
136 miens, dont nul ne peut juger et qui peut-être n’ en sont point. Ce n’était pas le froid, la pluie, la poisse aux pieds mê
137 es, cette rue très courte est l’une des rares — j’ en connais trois dans Manhattan — qui, à la fois, ne portent pas de numé
138 es hauts bâtiments de la Cinquante-et-unième rue, en brique vernie, tout luisants de fenêtres dépourvues d’ornements. Beek
139 s quand je la vois du haut de mon douzième étage, en enfilade, petite tranchée d’asphalte et de brique jaune et rose dans
140 s jardins suspendus où circulent de jeunes femmes en maillot de bain. Elles se penchent sur leurs géraniums, elles ajusten
141 jà comme je me le rappellerai, une fois de retour en Europe. J’en connais par avance la nostalgie. Le soir vient dans un l
142 e le rappellerai, une fois de retour en Europe. J’ en connais par avance la nostalgie. Le soir vient dans un luxe américain
143 grande nuit s’ouvre au travail paisible. D’heure en heure, je me lève et sors. Je me promène sur cette terrasse qui fait
144 dre et rallumer leurs lampes. Une blonde platinée en peignoir rose ouvre son frigidaire, sort de la glace, ôte enfin le pe
145 eux tours babyloniennes, l’une phallique, l’autre en Moïse de Michel-Ange. Et sur une terrasse dormante, deux ou trois éta
146 deux ou trois étages plus bas, quelqu’un sortait en robe de chambre, un vieux monsieur, pour arroser au tuyau ses arbuste
147 uit, un énorme croiseur défilait, tout l’équipage en fête saluant New York d’adieux, filant pavois au vent vers l’Europe…
148 la Cinquième avenue et de Central Park, traverse en direction de l’est de beaux quartiers gris clair d’un gothique sobre
149 Cette rue, comme cent autres pareilles, fait voir en coupe la société américaine. C’est une coupe mégaloscopique — le cont
150 Flammes gaies sur le couchant rose et fuligineux, en rectangle au bout de la rue, légèrement mordu sur les bords par la si
151 scaliers de sauvetage. Ces grands seaux à ordures en métal, rarement ou mal vidés dans ce quartier, débordent sur la neige
152 hanalyste.) Les boîtes à lettres portent des noms en cek, nous sommes dans le quartier slovaque. Je gravis l’escalier jusq
153 ournaux : « Cinq pièces, eau chaude et bain. » Il en existe dans Manhattan des centaines de milliers construits sur ce mêm
154 penche à la fenêtre, au-dessus de la cour. Le sol en est jonché de plâtras, de journaux, de chiffons qui bougent, ou ce so
155 mpilent du linge ; au cinquième, une grosse femme en peignoir qui se farde à gestes menus. Le concierge irlandais hurle da
156 roués de lumières et de scènes du soir, s’étagent en silhouettes sur le ciel rouge. Une radio clame Amapola, plus fort que
157 es pour les directeurs de bureaux. C’est ce qu’on en voit de l’étranger. Cohoes Ayant remarqué qu’on me refusait du
158 l’épicerie du village de Lake George10, et que j’ en paraissais fort ennuyé, nos voisins vinrent un soir nous en offrir, e
159 ais fort ennuyé, nos voisins vinrent un soir nous en offrir, et c’est ainsi que nous avons fait connaissance. Deux femmes
160 ns de mon espèce aiment les maisons trop grandes, en Amérique.) L’un des maris se nomme Robert ; son père était un Canadie
161 all ! de vrais Américains moyens », concluent-ils en souriant. Nous leur avons offert des boissons, et nous nous appelons
162 etits services que vous rendent ici les voisins ! En Europe, le voisin n’est que l’ennemi virtuel.) J’ai cru poli de m’arr
163 t, nous arrivons devant une maison de bois peinte en jaune clair, ornée de géraniums aux fenêtres. C’est là qu’habite la m
164 t digne, dont les ancêtres quittèrent l’Allemagne en 1848, parce qu’ils étaient républicains. Cette vague d’émigration ger
165 lées ou légèrement obliques. Seule, la Banque est en pierres blanches, ornée de colonnes et d’un fronton de temple grec. J
166 bes longues et bouclées. La rue est sale. Suis-je en Russie ? Non, il y a trop d’autos. Robert revient et nous roulons ver
167 ge. Mais, coup sur coup, quatre accidents mortels en une semaine… C’était le moment du grand krach, en 1929. Tout s’écroul
168 en une semaine… C’était le moment du grand krach, en 1929. Tout s’écroulait. Ma faillite a passé inaperçue. J’ai ouvert ce
169 u’elle s’efforce d’imiter. Souvenir d’un orage en Virginie Grands plateaux onduleux et livrés aux chevaux, jusqu’à l
170 s barrières blanches. — Et vous verrez ce qu’elle en a fait ! C’est sa manière de se venger de W…, car c’était la maison d
171 ntre des ifs géants, comme des ailes noires. Je n’ en ai jamais vu d’aussi grands, ils montent jusqu’aux fenêtres du deuxiè
172 sse de maison est sortie à cheval. Promenons-nous en l’attendant. L’odeur des chiens imprègne les corridors. Dans un fumoi
173 imprègne les corridors. Dans un fumoir, à droite, en contrebas, deux hommes en veste de chasse et deux jeunes femmes très
174 ns un fumoir, à droite, en contrebas, deux hommes en veste de chasse et deux jeunes femmes très blondes boivent des whisky
175 a cour sablée des écuries. Celles-ci se déploient en demi-cercle, ornées d’une colonnade et d’un clocheton de brique porta
176 te ici et s’ouvrent les espaces de pâturages nus, en pente douce. Très loin, en silhouette sur la crête d’une colline, nou
177 aces de pâturages nus, en pente douce. Très loin, en silhouette sur la crête d’une colline, nous voyons deux chevaux au ga
178 nant remontent vers nous sans ralentir. Une femme en jaune, suivie d’un homme. Comme ils s’approchent, on voit qu’elle tie
179 l’autre porte à sa bouche une pomme qu’elle mord en galopant. Nouveaux éclairs. Tous les chiens du chenil se sont mis à h
180 ens de toutes les tailles s’élance sur ses traces en aboyant. Au fond d’une pièce vaste et noire, une petite lampe fait un
181 êtres et ferme avec fracas des volets intérieurs, en chêne clair, puis elle tire encore les rideaux. « Les orages me rende
182 remontent… Paraît dans la porte du fond un homme en veste de chasse, qui tient des verres de whisky à la main. Deux femme
183 im était l’intendant, une sorte de géant toujours en bottes qu’elle emmenait partout avec elle. Je pense au regard d’acier
184 ans la voiture qui nous emporte sous la pluie, qu’ en pensez-vous ? — Well… pour la première fois de ma vie, je me sens ten
185 savanes qui firent reculer la frontière de décade en décade, à travers le Far West, jusqu’à ce qu’ils eussent rejoint les
186 oires urbains. Cet effort gigantesque se poursuit en silence à travers tout le continent. Personne n’en parle. On n’a pas
187 n silence à travers tout le continent. Personne n’ en parle. On n’a pas eu besoin de changer de régime pour le réaliser. Le
188 s formes et couleurs. Sans relâche, ils croissent en gros plan et disparaissent en coup de vent, jusqu’à ce que l’œil s’éd
189 âche, ils croissent en gros plan et disparaissent en coup de vent, jusqu’à ce que l’œil s’éduque et se mette à déchiffrer
190 de touristes à cent yards… Ferryboat du Delaware en grève… Faites un détour par Philadelphie… Et arrêtez-vous à l’hôtel F
191 grondement sourd des pneus qui mordent le béton. En cinq heures, nous aurons couvert les quatre-cents kilomètres qui sépa
192 qui séparent le centre de New York de Washington, en traversant deux villes énormes : Philadelphie et Baltimore. La vitess
4 1949, La Revue de Paris, articles (1937–1969). Le Mouvement européen (avril 1949)
193 genre. Qu’il suffise de rappeler les données qui en déterminent exactement l’urgence. La guerre a eu pour conséquences pr
194 e leur amour de la paix, et ils le prouvent, l’un en relevant nos ruines, et l’autre en annexant 700 000 kilomètres carrés
195 prouvent, l’un en relevant nos ruines, et l’autre en annexant 700 000 kilomètres carrés de nos terres. Si bien qu’on ne vo
196 est plus une puissance, parce qu’elle est divisée en vingt nations dont aucune, isolée, n’a plus la taille qu’il faut pour
197 te guerre, dont quel que soit le vainqueur — s’il en est un — c’est l’humanité tout entière qui sortira vaincue. Si nous v
198 pe même unie serait encore trop faible pour tenir en respect les deux Grands, je répondrai par un seul chiffre : la popula
199 rter tout leur poids d’un seul côté, ils seraient en mesure d’agir, de faire réfléchir l’agresseur, et de sauver la paix d
200 et bon, mais que fait-on et que pourra-t-on faire en temps utile ? » La paix, l’Europe unie, d’accord, c’est un beau rêve.
201 aix, l’Europe unie, d’accord, c’est un beau rêve. En attendant, voici le cauchemar. Déjà les maréchaux s’installent et tir
202 ondiale, le mouvement paneuropéen, lancé à Vienne en 1923 par le comte Coudenhove-Kalergi. Ce pionnier réussit à convaincr
203 s la rumeur polyglotte des couloirs de la SDN. On en était aux constructions diplomatiques. Elles s’écroulèrent à la premi
204 fédération européenne. C’est alors qu’apparurent en France les premiers groupes personnalistes. Ils réunirent quelques ce
205 s, dans les journaux secrets qui se multipliaient en France, en Hollande, en Pologne, en Italie et en Yougoslavie, nos idé
206 journaux secrets qui se multipliaient en France, en Hollande, en Pologne, en Italie et en Yougoslavie, nos idées personna
207 rets qui se multipliaient en France, en Hollande, en Pologne, en Italie et en Yougoslavie, nos idées personnalistes se pop
208 multipliaient en France, en Hollande, en Pologne, en Italie et en Yougoslavie, nos idées personnalistes se popularisaient,
209 en France, en Hollande, en Pologne, en Italie et en Yougoslavie, nos idées personnalistes se popularisaient, nos livres e
210 aient, nos livres et nos revues passaient de main en main. Les événements que nous avions prévus parlaient pour nous, en d
211 tait pas terminé que l’idée naissait parmi nous d’ en élargir l’action en convoquant, pour le printemps de l’année suivante
212 l’idée naissait parmi nous d’en élargir l’action en convoquant, pour le printemps de l’année suivante, des états généraux
213 avec les représentants d’autres mouvements venus en qualité d’observateurs. Les envoyés du United Europe Committee nous i
214 il. En réalité, vous êtes, nous sommes, la vérité en marche. » Et finalement, les congressistes furent reçus par le pape P
215 es furent reçus par le pape Pie XII, qui leur dit en français « sa plus vivante sympathie » pour l’œuvre urgente conduite
216 t 1948. C’est ce que la presse nomme aujourd’hui, en simplifiant un peu, la position française. Je la nommerais plutôt la
217 ationales absolues. La position dite britannique ( en fait, celle de M. Bevin) tend, au contraire, à réduire l’Assemblée au
218 consistera à transformer le « Corps consultatif » en Assemblée constituante. Cour des droits de l’homme. — On sait qu’une
219 rt des problèmes économiques resteront insolubles en fait, tant que nos plans politiques n’auront pas abouti. La sagesse d
220 ntre européen de la culture qui s’ouvrira bientôt en Suisse. ⁂ Il n’est point d’ordre économique possible sans une volonté
221 mique possible sans une volonté préalable de mise en ordre politique. Il n’est point d’ordre politique qui serve l’homme,
222 contre tous les experts de son équipe, il se mit en route pour la joindre. Mais nous, quel continent nouveau, tout imprév
5 1949, La Revue de Paris, articles (1937–1969). Découverte de l’Europe (octobre 1949)
223 e nouvelle. » Mais ce jour-là, il est le seul à s’ en douter. Cette histoire n’est pas bien nouvelle, il y a près de deux-m
224 obscur, près de Jérusalem, a fait moins de bruit, en son temps, que la visite de Bartali, coureur cycliste, au Vatican. Il
225 e l’Europe, qui s’ouvrit à Strasbourg le 10 août, en pleines vacances de l’opinion publique. Pourtant les journalistes éta
226 sans la modifier : ce sont eux qui la déterminent en bonne partie. S’il leur faut tant de mots pour expliquer que le sujet
227 ital d’autonomie. Avant d’agir, il fallait mettre en place un dispositif de combat, tout d’abord obtenir que le Comité des
228 ’a pas remarqué qu’un mot d’ordre national — s’il en fut jamais donné — ait été suivi même par les Britanniques. Ces derni
229 niers se sont, au contraire, divisés publiquement en deux groupes à peu près égaux, conservateurs et libéraux d’une part,
230 anière d’éviter le danger « national » risquait d’ en créer un nouveau : le clivage horizontal de l’Assemblée selon les aff
231 paratoires. Step by step reste leur devise. À les en croire, l’opinion n’est pas mûre, les peuples sont encore indifférent
232 rasbourg, il faut éviter à tout prix de se porter en avant sans leur soutien. On serait tenté d’accuser ces prudents de sc
233 enteur, de sagesse, de prudence, etc., prodigués ( en anglais généralement) aux députés européens. Dès sa prochaine session
234 turellement, dans un délai aussi réduit. Ils sont en droit de montrer quelque fierté, lorsqu’ils passent en revue les obje
235 oit de montrer quelque fierté, lorsqu’ils passent en revue les objectifs qu’ils désignaient dans leurs mémorandums, et les
236 uropéen, d’un Centre européen de la culture (déjà en voie de formation à Genève). Ces décisions couronnent le travail obst
237 et Spaak n’ont pas manqué de le souligner, pour s’ en féliciter, bien entendu, M. Hugh Dalton, pour s’en plaindre (et cette
238 n féliciter, bien entendu, M. Hugh Dalton, pour s’ en plaindre (et cette confirmation n’est pas la moins valable). On ne s’
239 confirmation n’est pas la moins valable). On ne s’ en étonnera pas, si l’on sait que les deux tiers des députés qui siégeai
240 t, mais les gouvernements et parlements nationaux en disposeront. Et qui dispose de ces divers pouvoirs, sinon l’opinion g
241 de l’Assemblée consultative pour qu’elle devienne en fait constituante, mais bien d’agir en sorte que ses vœux et avis soi
242 ent acceptés par les gouvernements et parlements, en attendant le verdict populaire. ⁂ Nous sommes en pleine action, et il
243 ’est fait de l’Histoire à Strasbourg, mais nous n’ en connaissons encore que le dynamisme intérieur. Les résultats pourront
244 tats pourront être jugés d’ici deux ans. S’il n’y en a pas à ce moment-là, nous serons Russes ou colonisés, ou simplement
6 1950, La Revue de Paris, articles (1937–1969). L’Europe et sa culture (novembre 1950)
245 leurs qu’elles sont vivantes.) Elles apparaissent en partie problématiques, en partie définies par des caractères permanen
246 es.) Elles apparaissent en partie problématiques, en partie définies par des caractères permanents. Elles apparaissent, su
247 caractère permanent : elle est nettement divisée en compartiments par des chaînes de montagnes et des fleuves, nettement
248 ement perpétuel avec l’Asie, dans l’effort pour s’ en distinguer, pour résister à la réabsorption dans la grande mère, que
249 . Au fait géographique de la division de l’Europe en compartiments relativement isolés, il faut rattacher les diversités n
250 xpliquer que l’homme du ive siècle, par exemple, en qui s’était déjà formée la synthèse hautement instable et créatrice d
251 fois de comprendre, de faire des expériences et d’ en tirer les conclusions. Au cours des temps, mille vérités et mille err
252 ychologiques, me paraissent typiquement d’Europe, en ce sens qu’elles ne pouvaient naître que du complexe que je viens de
253 nt d’orientation fondamental et brusque, traduite en termes romains d’institutions, de droit nouveau. De même, la passion
254 titutions, de droit nouveau. De même, la passion en amour est une transposition de la conversion dans le plan des relatio
255 le suppose la croyance chrétienne, personnaliste, en la valeur infinie d’un individu élu, unique, irremplaçable. Là où cet
256 emplaçable. Là où cette croyance s’atténue, comme en Amérique (où l’on pense réellement qu’un homme en vaut un autre), on
257 en Amérique (où l’on pense réellement qu’un homme en vaut un autre), on voit aussitôt la passion s’atténuer ou disparaître
258 ces, ces trois ressorts de l’âme occidentale — on en pourrait mentionner d’autres — suffiront à titre d’exemples : elles n
259 is un cinquième de la population du globe. Elle n’ en sera dans cinquante ans plus qu’un dixième probablement. Elle ne sait
260 ntérieures ; épuisant sa vieille astuce politique en rivalités locales, l’Europe n’offre plus aux empires américain et rus
261 es neufs, aide qui doit fatalement se transformer en contrôle, si nous ne savons pas en tirer parti d’ici deux ans ; tandi
262 se transformer en contrôle, si nous ne savons pas en tirer parti d’ici deux ans ; tandis que l’autre empire dispose parmi
263 ds de dollars, tandis que le crédit correspondant en France atteint à peine 1/400e de cette somme. L’idée de progrès a émi
264 e part. C’est ainsi qu’un ancien ministre bulgare en exil pouvait affirmer, récemment, que dans un État communiste la cens
265 s les démocraties dites populaires. Cependant, qu’ en est-il chez nous de la liberté et de la censure ? Allons tout de suit
266 , il suggère que si la culture reste encore libre en Occident, c’est peut-être dans la mesure où les pouvoirs ne la prenne
267 e paradoxe suivant : ceux qui laissent la culture en liberté, à l’Ouest, en font peu de cas pratiquement ; et ceux qui, à
268 ux qui laissent la culture en liberté, à l’Ouest, en font peu de cas pratiquement ; et ceux qui, à l’Est, lui reconnaissen
269 eux, ou l’édification méfiante des stakhanovistes en troupeaux. Mais un musée, ce n’est pas de la culture. Je ne vois pas
270 . Elles naissent et meurent du même mouvement. Qu’ en est-il de ce mouvement, au milieu de notre siècle ? Va-t-il vers la r
271 ci d’apprécier tout d’abord l’état de nos forces, en vue d’agir. Entre les deux colosses russe et américain, l’Europe qui
272 ont des noms de l’Europe, et les très rares qui n’ en sont pas ont appris leur métier de nos maîtres, dans nos écoles, aux
273 notre culture, l’une dès ses origines, et l’autre en ce qu’elle a de moderne justement. Calvin et le puritanisme, d’un côt
274 ent, parfois jusqu’à la monstruosité12. Mais s’il en est ainsi, si tels sont nos atouts, d’où vient notre faiblesse et not
275 s-millions à l’ouest du rideau de fer. C’est vrai en fait, mais nous ne le sentons pas. Car je parlais en tant qu’Européen
276 , un Allemand, un Danois, un Grec, et pour qu’ils en tirent quelque orgueil, encore faut-il qu’ils aient conscience d’appa
277 dans ma liste les quelques noms de son pays et n’ en tirera qu’une raison de plus de se sentir minoritaire, ou pauvre. Il
278 n de plus de se sentir minoritaire, ou pauvre. Il en va de même sur tous les plans. Divisés, enfermés dans nos États-natio
279 jour. Je ne dirai pas que la division de l’Europe en vingt nations, chacune trop petite, rend compte de tous les maux dont
280 es personnes et des œuvres, et l’on sait ce qu’il en est aujourd’hui à cet égard. La condition nécessaire, sinon suffisant
281 s le plan Schuman, qui peut être un début de mise en commun de nos ressources matérielles. Et maintenant, dans le domaine
282 oser un autre Plan, qui consisterait dans la mise en commun, au service de l’Europe entière, de nos ressources scientifiqu
283 endrait répondre à trois nécessités urgentes, qui en indiquent tout naturellement les trois chapitres principaux. Première
284 une sorte d’Institut de la conjoncture culturelle en Europe. Deuxièmement, nous avons besoin d’une coordination des effort
285 rois chapitres principaux, ce n’est rien d’autre, en fait, que le programme du Centre européen de la culture, qui s’est ou
286 sert à rien, si l’homme qui la reçoit refuse de s’ en servir, parce qu’il ignore ce qui est en jeu, ce qui vaut d’être défe
287 use de s’en servir, parce qu’il ignore ce qui est en jeu, ce qui vaut d’être défendu. La défense effective de l’Europe doi
288 e but final de la culture occidentale, consistent en une seule et même chose : la liberté de la personne. Et cela veut dir
289 . Entre les Américains et nous, Européens, il y a en commun les principes originels, l’usage présent, et l’idéal sans cess
290 ous, liberté politique. Nous ne sommes donc point en situation de neutralité. Nous savons où sont nos alliances. 13. Tels
7 1951, La Revue de Paris, articles (1937–1969). Inde 1951 (décembre 1951)
291 ons ici. — Pour un congrès. — Quel congrès ? Il y en a beaucoup. — Le Congrès indien pour la liberté de la culture. — Qui
292 ins. Plus qu’un hôtel, c’est un quartier de ville en un seul bâtiment surmonté d’une coupole. À l’intérieur, deux rues de
293 élice à quatre pales, qu’un bouton électrique met en marche : trois vitesses. Sol de dalles grises polies, murs jaunes et
294 e. Mais non, tout simplement, il y a trop de gens en Inde. J’ai sommeillé sous le ronron lent de l’hélice. Je sonne pour d
295 endors. Le thé est là, et de nouveau trois hommes en blanc près de la table. Je leur demande du sucre. Ils sourient et s’i
296 t trafic d’une grande cité de l’Occident comme on en voit en Amérique du Sud : plus uniformément modernes que les nôtres.
297 d’une grande cité de l’Occident comme on en voit en Amérique du Sud : plus uniformément modernes que les nôtres. Notons u
298 s étant tenues pour préjugés) aient trouvé refuge en Orient, en Afrique, en Océanie… Incapables de croire en rien, nous co
299 ues pour préjugés) aient trouvé refuge en Orient, en Afrique, en Océanie… Incapables de croire en rien, nous courons admir
300 jugés) aient trouvé refuge en Orient, en Afrique, en Océanie… Incapables de croire en rien, nous courons admirer ceux qui
301 ent, en Afrique, en Océanie… Incapables de croire en rien, nous courons admirer ceux qui vénèrent les vaches. L’homme qui
302 de partager la foi de ceux dont il admire qu’ils en aient une. Ceci dit, je n’aurai de cesse que je n’aie découvert, à mo
303 ue nous connaissions, avec la seule surprise de n’ en pas avoir d’autres. Dès les premières heures de débats, il devient év
304 urs problèmes s’énoncent dans les mêmes termes qu’ en Europe. Il y a ceux qui pensent que l’URSS c’est la justice, les USA
305 valables ; ceux enfin qui se frappent la poitrine en déclarant qu’il y a de l’indécence à venir parler de culture dans un
306 e quitterai l’Inde sans avoir voulu dire ce que j’ en pense, qui se résume à ceci : si les anciens Hindous, les Égyptiens,
307 ins, si les Occidentaux eux-mêmes avaient déclaré en leur temps : point de culture tant qu’il subsiste de la misère et de
308 ns moyens techniques pour remédier à la famine. J’ en trouve une preuve de plus dans le journal de ce matin. C’est un savan
309 t construit la Route birmane, il vient de rendre, en quelques mois d’essais, cent-mille tonnes de blé aux Indiens. Mais je
310 es et compliqués, entre de hautes façades peintes en jaune. Statuettes vêtues de soie et de fleurs dans des niches, comme
311 y a bien, assises sur les marches, ces fillettes en sari aux narines cloutées d’un diamant, aux chevilles surchargées d’a
312 mauve des cotonnades, que je n’avais encore vu qu’ en Italie et plus rarement au Brésil.) Nous descendons. Les escaliers dé
313 s escaliers débouchent sur une place irrégulière, en terre battue, plantée d’arbres au tronc pelé. Un désordre de maisons
314 rofonde. Tout autour du bassin, et sur l’îlot qui en occupe le centre, s’élèvent des colonnes de pierre noire, hérissées d
315 ne femme debout, sans un geste. Parfois le prêtre en pagne sort d’un coin noir, et vient planter autour d’une fontaine bas
316 noires et plates du bord de mer, des hommes assis en groupe écoutent une lecture à haute voix. Accroupi sur un banc, le le
317 ou un charlatan ? — Comment peut-on savoir. Il y en a tant. Il marchait lentement, à grands pas importants, précédé d’un
318 norme ventre bien bronzé, vêtu d’une barbe rousse en éventail jusqu’aux épaules, d’un cordon autour du cou pendant jusqu’a
319 agne. Il rythmait ses lentes et grandes enjambées en frappant le sol d’un bâton. Derrière lui se pressaient trois hommes p
320 soulignée par des avancements obliques du menton, en liaison stricte avec les mouvements des bras, des doigts et des chevi
321 e l’idée de « mauvais goût » devient inconcevable en Inde, alors qu’un tel excès de richesses combinées n’eût pas manqué d
322 ourtant ce qui a suivi m’a troublé davantage et j’ en parlerai plus longuement. Devant la soie de fond viennent d’apparaîtr
323 s deux géants aux faces placides se relèvent et s’ en vont s’asseoir parmi les musiciens. « Est-ce beau, ou grotesque, ou l
324 parfaite me fascine. (Nous bougeons presque tous en dormant. Mais je ne connais pas d’Indien nerveux, même parmi les inte
325 ’ils s’appliquent sur les cheveux et sur le front en triples traits, non sans l’avoir mêlée d’un colorant jaune d’or ou ve
326 er la mort à chaque instant, cette foule d’hommes en blanc qui marchent en tous sens entre les deux trottoirs, quand il fa
327 stant, cette foule d’hommes en blanc qui marchent en tous sens entre les deux trottoirs, quand il faut encore contourner s
328 e, l’urine des vaches sacrées se répand lentement en larges nappes. À droite, sous un auvent, des zébus attachés au bord d
329 le tronc, des fleurs roses et violettes, piquées en ex-voto. Devant moi, quelques marches conduisent à une terrasse surél
330 ndes. Un homme prie debout, puis se tourne à demi en remuant les lèvres vers l’autre côté de la cour. Je suis son regard e
331 e côté de la cour. Je suis son regard et découvre en retrait, au-delà de l’abreuvoir, un bâtiment peint en bleu-vert, char
332 etrait, au-delà de l’abreuvoir, un bâtiment peint en bleu-vert, chargé de clochetons et de reliefs rococo, qui évoque un p
333 position compliquée de l’ensemble, comme une mise en scène pleine de sous-entendus. J’attends un geste, un cri. Rien ne se
334 paroisses, ni d’organisation ; point de croyance en Dieu, ni de théologie, de credo ni de catéchisme ; point de liturgie
335 dieu, tournant le dos aux passants. Et ces hommes en prière contre un mur. Et ces saints demi-nus, traversant à grands pas
336 on sait par mille complexes, sexuels surtout. Qu’ en est-il en Inde ? Les Indiens échangent un sourire, hésitent un peu, p
337 ar mille complexes, sexuels surtout. Qu’en est-il en Inde ? Les Indiens échangent un sourire, hésitent un peu, par polites
338 et d’une caste. La suppression des castes, admise en droit, si elle devenait jamais effective, entraînerait d’infinies con
339 notre notion de l’individu : isolé, désacralisé, en révolte ouverte ou sournoise contre un ordre de choses par essence di
340 utable, c’est-à-dire affecté dès l’origine, comme en chacun de ses états, par un principe d’injustice, de malheur, d’incom
341 . À ce qui menacerait de le dénaturer, il résiste en collant à son identité, qui est celle d’un ordre et non pas d’un ego,
342 u danger de communier avec lui dans la lutte et d’ en sortir contaminé. ⁂ Nehru. — L’un de ses anciens amis m’a mis en gar
343 mis m’a mis en garde. « Nehru, me disait-il, suit en toute occasion la ligne approuvée par les Russes. Prenez l’affaire de
344 ndiens, fait emprisonner leurs leaders. Staline s’ en moque, pourvu que l’Inde appuie la Chine. Et cinq des grands ambassad
345 is dans ce pays — douze jours seulement — et je n’ en prends aucune à mon compte, mais comment cesserais-je d’y penser, tan
346 je me suis demandé, à ce moment-là, s’il pensait en hindi ou en anglais.) Mais à table, c’est un autre homme. Souriant et
347 demandé, à ce moment-là, s’il pensait en hindi ou en anglais.) Mais à table, c’est un autre homme. Souriant et détendu, cu
348 e, au nom d’un idéal de « propreté morale », sont en fait ressenties comme traduisant sa colère personnelle contre l’oppos
349 ) Sur le visage de Nehru, l’âme affleure et vient en surface. Mais dans son être intime, le regard de l’esprit trouverait-
350 d’une race ? L’individualité n’est jamais née qu’ en rupture de magie. Cette crise profonde de l’Inde se résume en Nehru.
351 e magie. Cette crise profonde de l’Inde se résume en Nehru. J’en suis sûr maintenant : ce grand Indien, qui libéra son peu
352 te crise profonde de l’Inde se résume en Nehru. J’ en suis sûr maintenant : ce grand Indien, qui libéra son peuple des Angl
353 Indien, qui libéra son peuple des Anglais, pense en anglais. ⁂ Délivrée des Moghols par l’Occident, puis de l’Occident pa
354 e peut plus ressembler qu’à ce qu’elle deviendra. En six siècles, le monde a changé ; une Inde indépendante eût changé ell
355 nte les masses organisées. Ce conflit n’intéresse en rien le gros du peuple indien, qui n’a jamais connu le phénomène des
356 réduit à l’impuissance pratique mais qui résiste en profondeur, et un avenir encore épidermique, le présent de l’Inde par
357 ci, n’a rien offert. (Qui, d’ailleurs, l’eût fait en son nom ?) Elle s’est bornée à se retirer politiquement. Elle doit tr
8 1965, La Revue de Paris, articles (1937–1969). Le Suisse moyen et quelques autres (mai 1965)
358 cela fait beaucoup de combinaisons possibles. (J’ en ai dénombré cinquante-deux actuellement existantes.) Que deviennent n
359 e de conflits dramatiques et de la prospérité qui en a pu résulter. Pas de moyenne réelle dans les pays où une faction, un
360 nisme. Ils acceptent leur condition, parce qu’ils en connaissent bien les données de fait et les impératifs concrets, et q
361 d’Europe et aux États-Unis, montre qu’ils sont «  en tête des gens heureux », comme l’écrit un journal français. Alors que
362 contents de leur niveau de vie, tandis que 38 % s’ en plaignent et que 14 % n’en pensent rien, une majorité écrasante de 88
363 vie, tandis que 38 % s’en plaignent et que 14 % n’ en pensent rien, une majorité écrasante de 88 % des Suisses trouvent que
364 , loin de s’accrocher aux recettes du passé (sauf en politique étrangère) ou de se battre pour une utopie. Rien de moins r
365 seul mode de promotion »17, dit-on et sans doute en va-t-il vraiment ainsi pour l’immense majorité. La coutume patricienn
366 ’il a fait beaucoup de métiers est un éloge banal en Amérique (ou versatile veut dire habile, doué de nombreux talents, po
367 ombreux talents, polyvalent) mais n’éveille guère en Suisse que de sérieux soupçons sur la valeur morale du personnage. Le
368 turelles du Suisse, très importantes, participent en une certaine manière du travail », observe encore l’enquête déjà cité
369 il faut se cultiver », comme il faut se maintenir en forme en faisant du ski ou de la gymnastique. Le plaisir pur, la grat
370 e cultiver », comme il faut se maintenir en forme en faisant du ski ou de la gymnastique. Le plaisir pur, la gratuité ne s
371 ne s’avouent guère, se cherchent des prétextes et en trouvent d’excellents, mais il n’y a plus de gratuité. Dans L’Annuair
372 tion, distraction. » C’est « Culture et loisirs » en France, la nuance est significative. Quant au goût de la simplicité,
373 taire, et même bien avant la Réforme, mais il est en symbiose avec elles, et s’en nourrit autant qu’il explique leur succè
374 Réforme, mais il est en symbiose avec elles, et s’ en nourrit autant qu’il explique leur succès dans la majorité de nos can
375 stion qui figure dans l’enquête intitulée Un jour en Suisse : « Estimez-vous qu’on peut être un bon Suisse et se lever à 9
376 se se lève tôt, mais il se réveille tard. Mais qu’ en est-il d’autres domaines critiques de l’existence morale en Occident 
377 d’autres domaines critiques de l’existence morale en Occident : la sexualité, le mariage ? Les anciens Suisses, au temps d
378 ie et l’école ont changé tout cela. Comme partout en Europe, pendant le xixe siècle, la notion de péché s’est vue assimil
379 que les exigences de la chair étaient bien fortes en ce pays pour que la religion dût consacrer tant d’efforts à les réfré
380 s viennent-ils corroborer cette conclusion ? Nous en trouverons sans doute dans les enquêtes en cours sur le régime de la
381 ? Nous en trouverons sans doute dans les enquêtes en cours sur le régime de la censure et l’état du mariage en Suisse. La
382 sur le régime de la censure et l’état du mariage en Suisse. La censure des publications n’est officiellement exercée qu’a
383 re leurs critères du moral et de l’immoral ? Je n’ en ai découvert qu’un seul : « La discipline, un point c’est tout ! », m
384 our, distante d’une vingtaine de kilomètres. Elle en avait le cœur brisé, bien entendu, et m’expliqua en grande confidence
385 avait le cœur brisé, bien entendu, et m’expliqua en grande confidence qu’elle faisait de grands efforts pour traiter sa b
386 bru ‟comme si elle était l’une des nôtres”, tout en sachant fort bien que ‟ces mariages mixtes ne réussissent jamais”. El
387 instruments d’analyse des consciences actuelles n’ en peuvent compter et indexer : il y a des forces et des réalités longue
388 ue l’homme moyen ne peut pas exprimer, bien qu’il en vive, — ou faut-il dire précisément parce qu’il en vit ? Et ce sont d
389 n vive, — ou faut-il dire précisément parce qu’il en vit ? Et ce sont des hommes d’exception qui les révèlent dans leurs œ
390 es ou nostalgies. Condition du « grand homme » en Suisse Dans un film naguère célèbre, Orson Welles assurait que la
391 ne culture générale. Le statut du « grand homme » en Suisse le condamne à demeurer à peu près invisible. Comment veut-on q
392 robot du « grand homme suisse moyen » (expression en elle-même contradictoire) il me paraît intéressant de définir certain
393 lifie d’homériques. Toutes les familles l’ont lu, en Suisse alémanique. Il s’était occupé sa vie durant de l’administratio
394 assez terne pour être acceptée sans histoires. «  En épousant Genève, j’ai épousé la mort — celle de mon talent et de ma j
395 rois que c’est Paul Bourget qui a dit que « Paris en eût fait un dieu ». Mais ce n’eût été qu’un dieu de salons, un dieu c
396 sa turbulence créatrice ou son génie individuel, en démontrant qu’il fait une œuvre utile au bien commun. Et c’est pourqu
397 , soient deux Suisses : Karl Barth et C. G. Jung. En eux la Suisse excelle et se dépasse, mais dans le seul sens qu’elle a
398 car par ailleurs tout les oppose. Jeune pasteur en Argovie, et socialiste combatif, Karl Barth publie un commentaire sur
399 e dans d’autres domaines. Il est nommé professeur en Allemagne. Devant les prétentions nationales-socialistes, il dresse u
400 t sentimental, ne s’était élevée dans les Églises en retraite devant le « monde moderne ». En voulant ramener les protesta
401 Églises en retraite devant le « monde moderne ». En voulant ramener les protestants aux grandes options spirituelles de l
402 e présente, bien au contraire, il a même précédé, en fait, la tentative d’aggiornamento de l’Église initiée par le pape Je
403 ché radical détruisant toute « analogie de Dieu » en l’homme, calviniste par son sens civique et communautaire, mais kierk
404 it influencé l’ensemble des Églises protestantes, en Amérique comme en Europe, et que les docteurs de Rome respectent et c
405 emble des Églises protestantes, en Amérique comme en Europe, et que les docteurs de Rome respectent et commentent. Carl G
406 e. Alors que Barth veut définir ce qui est vrai «  en Dieu » selon la Parole de Dieu, Jung recherche ce qui se passe en l’h
407 la Parole de Dieu, Jung recherche ce qui se passe en l’homme, selon les mythes universels. L’un veut amener l’individu à l
408 roclamation du dogme de l’Assomption de la Vierge en 1950 marque la date la plus importante de l’histoire religieuse depui
409 euse depuis la Réforme, Pie XII n’a pas lieu de s’ en réjouir : car l’hommage de Jung est rendu à la Sophia æterna de la my
410 e de ces maîtres incompatibles.) Nous n’avons pas en Suisse de poètes de génie, ni de peintres qui aient fait époque, ni d
411 e Suisse ; qu’un autre Suisse bâtit des capitales en Inde ; qu’un troisième a donné à l’Amérique les deux ponts les plus l
412 ramiques les grandes dimensions qui leur manquent en Suisse25. Mais ce n’est pas en grimpant sur nos Alpes comme Horace-Bé
413 qui leur manquent en Suisse25. Mais ce n’est pas en grimpant sur nos Alpes comme Horace-Bénédict de Saussure que ces homm
414 s s’illustrèrent et apprirent à voir grand, c’est en s’expatriant pour se réaliser au sein d’une unité beaucoup plus vaste
415 n du pays, ont fait le principal de leur carrière en Suisse, ce n’est pas la Suisse qui a découvert et propagé leur nom da
416 ôt libres pour elle… 17. Cf. l’enquête Un jour en Suisse, 1964. 18. 300 000 Suisses vivent à l’étranger, soit 5 % de l
417 portion est décroissante : 10 % avant 1914, 7,5 % en 1945. 19. Je pense à des ouvrages tels que The Lonely Crowd, de Davi
418 k Jotterand au cours d’une enquête sur la censure en Suisse. 21. « Le canton — ou l’Europe », comme disait Lucien Febvre.
419 Switzerland for beginners, 1962. 23. Cf. Un jour en Suisse. 24. Dogmatik der Kirche, I, i, 6, 3. 25. Synthèse des scie
9 1969, La Revue de Paris, articles (1937–1969). L’avenir du fédéralisme (septembre 1969)
420 L’avenir du fédéralisme (septembre 1969)l En 1863 paraissait le dernier grand ouvrage de Proudhon, Du Principe féd
421 l’empire communiste COMECON, dans le monde arabe, en Afrique et en Amérique latine, cependant qu’une volonté d’union mondi
422 niste COMECON, dans le monde arabe, en Afrique et en Amérique latine, cependant qu’une volonté d’union mondiale anime les
423 ue des Églises et Vatican II. Simultanément, mais en sens inverse, un phénomène tout aussi général d’affirmation des diver
424 partout en plein essor, qu’il s’agisse de Nations en instance de divorce avec l’OTAN ou avec le Pacte de Varsovie, ou de n
425 nations au sens ancien du mot, régions ou ethnies en révolte plus ou moins ouverte contre le contrat étatique (inégal à le
426 contraires se prononcent en même temps, résultent en partie des mêmes causes, et entraînent des effets complémentaires, j’
427 absolue : car nul pays de notre Europe n’est plus en mesure de jouer un rôle mondial, d’assurer seul sa défense, de se nou
428 et surtout les USA, s’ils acceptaient toutefois d’ en payer le prix, lequel serait celui d’une autarcie presque totale ou d
429 ue totale ou d’une sorte d’isolation paranoïaque. En fait, les États-Unis, quoique de loin les plus forts, dépendent autan
430 ce mondiale et de diversification locale ne mette en crise permanente. 855 votes en quelques années à la Chambre italienne
431 on locale ne mette en crise permanente. 855 votes en quelques années à la Chambre italienne sur le règlement du statut des
432 ns autonomes. Risque d’éclatement de la Belgique. En France, floraison de projets officiels ou révolutionnaires tendant à
433 rêve d’autarcie, et cette mise en question, voire en accusation, de la formule stato-nationale élaborée par le xixe siècl
434 et le Brésil pour les trois Amériques, le Nigéria en Afrique, l’Allemagne pour l’Europe de l’Ouest et la Yougoslavie pour
435 ement fédératifs que dans les nations unitaires : en URSS, ce sont les autonomies régionales et les diversités religieuses
436 au contraire une des régions fédérées qui s’érige en État unitaire ; en Suisse, c’est le régime fédératif lui-même qui se
437 s régions fédérées qui s’érige en État unitaire ; en Suisse, c’est le régime fédératif lui-même qui se voit invoqué (non s
438 s trois cas, c’est moins le fédéralisme qu’on est en droit d’incriminer que sa trahison pure et simple, ou son usage mal c
439 sme, mais d’un défaut de fédéralisme. Et l’on est en droit de penser que l’application correcte de la méthode fédéraliste
440 olitique d’États » (mais on a soin de préciser qu’ en vers, cela fait cinq syllabes). Cette définition est assurément moins
441 pre l’unité nationale et de transformer la France en une fédération de petits États. » Pour le Français cultivé, donc, la
442 dialectique, ambigu, et qui autorise — ou incite en tout cas — aux plus invraisemblables pataquès conceptuels. J’en citer
443 aux plus invraisemblables pataquès conceptuels. J’ en citerai trois exemples. Il y a quelques années, je suggérai au comité
444 « Ce n’est pas dans le fédéralisme, ce n’est pas en se repliant sur elle-même que la Wallonie trouvera son salut. » Plus
445 lonie trouvera son salut. » Plus étonnant encore, en Suisse même, il y a quelques années, on put entendre le recteur d’une
446 sme n’étant ni ceci, ni cela, mais la coexistence en tension de ceci et de cela, il semble que le danger d’interprétations
447 sera pas, on sent tous les dangers qu’entraînent en fait les malentendus que j’ai dits, et par suite l’importance pratiqu
448 r règle de respecter les deux termes antinomiques en conflit tout en les composant de telle manière que la résultante de l
449 cter les deux termes antinomiques en conflit tout en les composant de telle manière que la résultante de leur tension soit
450 Morgenstern, qu’il s’agit de déterminer l’optimum en lequel se concilient deux maxima contradictoires, — comme l’offre et
451 entales prennent le parti de supprimer le conflit en réduisant l’un de ses termes — le Divers — au prix d’une longue ascès
452 cque, cherche à maintenir les deux termes non pas en équilibre neutre, mais bien en tension créatrice, et c’est le succès
453 eux termes non pas en équilibre neutre, mais bien en tension créatrice, et c’est le succès de cet effort toujours renouvel
454 re d’Héraclite. L’art et la science de cette mise en tension, de cette composition de réalités contraires mais également v
455 dissement et l’expansion du modèle des contraires en tension créatrice, nous le trouvons dans le christianisme des grands
456 s et de docteurs se mettent d’accord pour définir en grec la nature à la foi triple et une du Dieu Père, Fils et Saint-Esp
457 ésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme… fils unique en deux natures, sans confusion (ni) séparation. L’union n’a pas supprim
458 mie et sa participation à un plus grand ensemble, en association. 4. Enfin, le problème général de l’œcuménisme n’est-il p
459 lème général de l’œcuménisme n’est-il pas le même en sa forme que ceux que nous venons d’évoquer, puisqu’il consiste à con
460 distinctes dans l’unité de l’Église, c’est-à-dire en dernière analyse, des vocations particulières au sein de l’Être même
461 lyse fédéraliste d’une situation part du concret, en ce sens que d’abord elle considère la nature d’une tâche ou d’une fon
462 ima de l’aire d’exécution requise et elle le fait en fonction des trois facteurs suivants : possibilités de participation
463 Aux projets de découpage géométrique de la France en carrés réguliers de dix-huit lieues de côté, comme le proposait Sieyè
464 ion, l’efficacité et l’économie des moyens — sont en interdépendance générale. Prenons l’exemple de l’habitat : le giganti
465  : prenez les conflits actuels dans l’université, en tous pays et tous régimes politico-économiques. Ils ont pour motif pr
466 décuplement des effectifs estudiantins transforme en acrobatie toute participation réelle à la recherche et compromet l’ef
467 siècle) puis une fédération de ces petites unités en départements, et je retrouve ici les solutions préconisées lors du fa
468 ions préconisées lors du fameux colloque de Caen, en 1966, mais aussi les conclusions de mon discours de Goettingen aux re
469 mon discours de Goettingen aux recteurs européens en 1964m. L’université fut une commune libre au Moyen âge. Toute vie civ
470 Comment devenir assez grand pour être fort, tout en restant assez petit pour être libre ? Ce n’est pas le vote d’une cons
471 la dimension des tâches à entreprendre, répartir en conséquence les pouvoirs de décision, opérer les concentrations de fo
472 ète que sont en train de se former sous nos yeux, en Europe, plus d’une centaine de régions à métropole destinées à deveni
473 tés de base de la future fédération continentale, en lieu et place des États-nations constitués au xixe siècle. On s’aper
474 me politique (intra- ou interétatique), seul pris en considération par les auteurs classiques, n’était en réalité qu’un ca
475 ent” dont Bertrand de Jouvenel a si justement mis en vedette l’importance historique.27 » Nous voici loin de la forme poli
476 venir que de passé. 26. Pierre Duclos écrivait, en 1962, dans son excellent ouvrage en collaboration avec Henri Brugmans
477 los écrivait, en 1962, dans son excellent ouvrage en collaboration avec Henri Brugmans Le Fédéralisme contemporain : « Le
478 La Revue de Paris de novembre 1965. Nous donnons en ligne les versions publiées en septembre 1964 dans la Gazette de Laus
479 1965. Nous donnons en ligne les versions publiées en septembre 1964 dans la Gazette de Lausanne (version partielle), et e
480 s la Gazette de Lausanne (version partielle), et en décembre 1964 dans le Bulletin du Centre européen de la culture (ver