1 1933, Le Semeur, articles (1933–1949). Humanisme et christianisme (mars 1933)
1 umanisme et christianisme (mars 1933)a b Je ne suis pas venu pour vous apporter un exposé systématique ou historique, mai
2 rées. Et d’abord, la question qui nous occupe ici est -elle une vraie question ? Est-elle, pour chacun de nous, une question
3 qui nous occupe ici est-elle une vraie question ? Est -elle, pour chacun de nous, une question qui se pose dans la vie, que
4 réellement, vous cherchez à répondre ? En un mot, est -ce une question existentielle — pour employer un terme favori de la t
5 ’existent, en réalité, que dans la mesure où l’on est décidé à refuser tous les conflits concrets et les décisions qu’ils c
6 évasion hors des problèmes qui se posent et nous sont posés, hic et nunc. Avant d’aller plus loin, cherchons donc à serrer
7 ui s’oppose rigoureusement au christianisme, s’il est avant tout la croyance au salut de l’homme par la seule force de Dieu
8 ement ? C’est en ceci que, pour les uns, le salut est transcendant à l’humanité, pour les autres, immanent. Les humanistes
9 a promesse débilitante d’un « arrière-monde » qui serait comme une revanche contre tout l’imparfait de « ce bas-monde », mais
10 énergie et de courage. Pour eux, le christianisme est contre l’homme. 2. À cela, les chrétiens répondent : Comment l’homme
11 l’homme dans son origine et dans sa fin. L’homme étant « séparé » de Dieu sa source, — et c’est en quoi consiste le péché « 
12 es, par exemple : il ne sait même pas pourquoi il est au monde, ni pour quoi ; il se demande parfois ce qu’il a bien pu ven
13 tragi-comédie. Au fond, ce que l’homme ignore, ce sont les choses les plus importantes du monde : l’origine et la fin de son
14 uvoir de sauver l’homme en se fondant sur l’homme sont semblables, aux yeux du chrétien, à ce fameux baron de Crac qui préte
15 a chevelure. 3. Humanisme contre christianisme, n’ est -ce donc qu’un conflit d’amour, assez touchant ? Est-ce à celui qui so
16 t-ce donc qu’un conflit d’amour, assez touchant ? Est -ce à celui qui soignera le mieux cet homme que l’on s’accorde à tenir
17 peut-être. Aux yeux du chrétien, non ; le conflit est plus grave, car le rejet de l’humanisme constitue pour lui une sorte
18 re à tout prix, le plus possible, comme si la vie était le bien absolu. C’est ici que nous entrons dans l’ordre de l’éthique
19 ine qui lui permettra d’assurer ce bien absolu qu’ est sa vie. Le chrétien va chercher à obéir aux ordres de sa foi, fût-ce
20 hrétien va chercher à obéir aux ordres de sa foi, fût -ce même au mépris de sa vie : tel est le fondement de l’attitude de s
21 de sa foi, fût-ce même au mépris de sa vie : tel est le fondement de l’attitude de service et de sacrifice qui, dans tous
22 pposé à l’homme des assurances. Car l’humanisme n’ est , aux yeux de la foi, qu’une vaste entreprise d’assurance-vie. L’human
23 pourra répondre qu’à ses yeux, le christianisme n’ est qu’une assurance-paradis. Mais le reproche est aussi misérable qu’inj
24 n’est qu’une assurance-paradis. Mais le reproche est aussi misérable qu’injurieux, si l’on songe que ce « paradis » doit ê
25 ’injurieux, si l’on songe que ce « paradis » doit être payé ici-bas du mépris des garanties humaines les plus élémentaires,
26 e l’histoire des martyrs en témoigne. Un chrétien est un être qui joue tout sur la foi, c’est-à-dire sur l’invisible, contr
27 toire des martyrs en témoigne. Un chrétien est un être qui joue tout sur la foi, c’est-à-dire sur l’invisible, contre toute
28 chrétien qui contracte une assurance sur la vie n’ est plus un chrétien à cet instant et dans cet acte ; il agit en humanist
29 est-à-dire d’un homme, pour qui la valeur absolue est la vie, non l’obéissance. Et de même un chrétien qui dit, parlant des
30 , parlant des autres ou parlant en général : ceci est bon, moral, cela est mauvais, immoral, — porte un jugement d’humanist
31 ou parlant en général : ceci est bon, moral, cela est mauvais, immoral, — porte un jugement d’humaniste, mange du fruit de
32 ienne ?) Prier pour qu’il fasse beau demain, ce n’ est pas prier, c’est exprimer un vœu, un vœu d’humaniste. Si je vous donn
33 ire mieux sentir à quel point l’humanisme, loin d’ être une simple conception philosophique, est une attitude devant la « vie
34 loin d’être une simple conception philosophique, est une attitude devant la « vie pratique » — comme on dit, mais y en a-t
35 ment à l’existence des chrétiens eux-mêmes. Ce n’ est pas à dire que l’humanisme n’ait pas ses doctrines, et même une expre
36 andez2 et Guéhenno. Si intéressants et précis que soit l’un dans le détail de sa dialectique critique, et si généreux que se
37 nder une foi véritable en l’humain. Le communisme est le véritable humanisme de notre temps. La seule tentative pleinement
38 autonome, et « calculable » humainement. Le Plan est d’ores et déjà la plus formidable entreprise d’assurance-vie que l’hu
39 est à ce titre que le « marxisme-léninisme » peut être opposé utilement au christianisme, comme une « question » réelle et f
40 ntre la nature définitivement asservie. Cet homme sera-t -il encore humain ? Que fera-t-il, une fois son triomphe assuré par sa
41 urelles, sur ce conflit qui constitue la raison d’ être de la plupart des hommes ? Sera-t-il ange ou bête ? Sera-t-il encore
42 te ? Sera-t-il encore un homme ? L’homme chrétien est à la fois ange et bête. Dans ce conflit perpétuel, il trouve sa joie
43 devant Dieu. Le succès de l’humanisme triomphant serait -il tout simplement d’enlever à l’homme toute raison personnelle de vi
44 re ? Le succès de l’homme abandonné à ses calculs serait -il, en définitive, un suicide supérieurement organisé, du « genre hum
45 rappelait la phrase de Fernandez : « Le chrétien est un embusqué de l’infini. » a. Rougemont Denis de, « Humanisme et ch
2 1934, Le Semeur, articles (1933–1949). Sur la méthode de M. Goguel (novembre 1934)
46 ce Goguel, directeur à l’École des hautes études, est déjà fort importante et fait de son auteur le maître incontesté de no
47 ait une volumineuse Vie de Jésus 4 dont le succès fut grand et les conclusions vivement discutées. L’ouvrage qu’il nous don
48 discutées. L’ouvrage qu’il nous donne aujourd’hui est la suite de cette Vie de Jésus, et les questions qu’il pose n’apparai
49 se n’apparaissent pas moins passionnantes. Quelle fut la genèse psychologique et historique de la croyance à la résurrectio
50 ait que la description qu’il va donner ne saurait être prise pour une explication. Je crains bien que cette modestie ne soit
51 explication. Je crains bien que cette modestie ne soit un peu trop ambitieuse. Car l’hypothèse de travail que M. Goguel adop
52 n pense couramment, dit-il, que la foi chrétienne est née parce que le tombeau de Jésus fut trouvé vide. Mais il se pourrai
53 chrétienne est née parce que le tombeau de Jésus fut trouvé vide. Mais il se pourrait qu’au contraire, on ait cru le tombe
54 u’on avait en la vie céleste de Jésus. L’Histoire est -elle cause ou effet de la foi ? M. Goguel incline vers l’effet. Suivo
55 Alors qu’à l’origine, on avait dit : « Le tombeau est vide parce que Jésus est vivant au ciel », les prédicateurs ont dû di
56 avait dit : « Le tombeau est vide parce que Jésus est vivant au ciel », les prédicateurs ont dû dire : « Jésus est vivant a
57 au ciel », les prédicateurs ont dû dire : « Jésus est vivant au ciel, et la preuve, c’est que sa tombe s’est trouvée vide »
58 ivant au ciel, et la preuve, c’est que sa tombe s’ est trouvée vide ». Et l’on a spontanément imaginé les conditions dans le
59 nt pas trouvé le corps de Jésus. Cette création s’ est faite sans qu’il soit nécessaire ou légitime de supposer à son origin
60 s de Jésus. Cette création s’est faite sans qu’il soit nécessaire ou légitime de supposer à son origine une fraude qui, pour
61 me de supposer à son origine une fraude qui, pour être pieuse, n’en serait pas moins une fraude. En face d’affirmations aus
62 on origine une fraude qui, pour être pieuse, n’en serait pas moins une fraude. En face d’affirmations aussi déconcertantes et
63 critique. À vrai dire, M. Goguel ne paraît pas s’ être beaucoup préoccupé de justifier sa méthode. Il n’est pas trop aisé de
64 beaucoup préoccupé de justifier sa méthode. Il n’ est pas trop aisé de la définir. Elle recourt avant tout à la critique in
65 giques et historiques dont le dosage et la valeur sont très variables. Il semble qu’un de ses principes soit l’élimination d
66 très variables. Il semble qu’un de ses principes soit l’élimination de tout ce qui, dans le texte biblique, paraît en soi c
67 es » qui nous paraissent souvent bien pauvres. Qu’ est -ce que la vraisemblance, en psychologie, sinon le triomphe du convent
68 ar M. Goguel, avec le texte biblique intégral, on est frappé de voir que le récit se trouve, dans tous les cas, affadi et b
69 la réalité des faits. Minimiser ! telle pourrait être la devise de l’école illustrée par M. Goguel. Il répondra que c’est a
70 certains humoristes. Les rédacteurs des évangiles étaient -ils vraiment si « bourgeois », si prudents, si soucieux de logique, s
71 teindre, si aveuglés sur leurs contradictions ? N’ étaient -ils pas, bien plus que nous, capables de voir dans les contradictions
72 éduit incontinent que le premier de ces versets a été ajouté après coup. Il le retranche donc. Cela fait, nous dit-il, « le
73 etranche donc. Cela fait, nous dit-il, « le récit est bien homogène ». Certes. Mais qu’on imagine un groupe de femmes qui p
74 s femmes n’auront probablement rien d’homogène et seront même plus contradictoires qu’aucun récit ne peut le faire sentir. Ces
75 reste que les conclusions négatives de M. Goguel sont loin d’être aussi ruineuses pour la foi que beaucoup de croyants ne l
76 es conclusions négatives de M. Goguel sont loin d’ être aussi ruineuses pour la foi que beaucoup de croyants ne le craignent.
77 ndre. Il nous rappelle ainsi que la foi véritable est celle qui croit sans avoir vu. Sa position nous paraît sur ce point t
78 es historiques. En nous montrant qu’elles peuvent être contestées, pour la plupart, il nous délivre d’une tentation permanen
79 Que l’on réforme cette histoire, cela ne saurait être au détriment de la foi. Car l’office de la foi n’est pas de nous four
80 au détriment de la foi. Car l’office de la foi n’ est pas de nous fournir une explication probante du miracle ; elle se tra
81 lle-même quand elle s’y essaie. Dire que « Christ est ressuscité », c’est énoncer une vérité qu’aucune preuve humaine ne pe
82 r Dieu, même alors qu’il se rend visible. Et ce n’ est point parmi les morts qu’il nous faut chercher le Vivant (Luc 24 : 5)
83 aire l’économie des fausses preuves, telle paraît être , en fin de compte, la justification de la critique historique. C’est
3 1935, Le Semeur, articles (1933–1949). La cité (avril-mai 1935)
84 Quand on m’a proposé ce titre, j’ai tout d’abord été frappé par le léger anachronisme de ce petit mot de cité. Une image s
85 anachronisme de ce petit mot de cité. Une image s’ est immédiatement formée devant mes yeux : l’image d’un clerc en vêtement
86 ques d’une de ces villes du Quattrocento, où tout était bâti à la mesure de l’homme, où tout, — sauf les églises, — semblait
87 me, où tout, — sauf les églises, — semblait avoir été conçu pour demeurer à portée de la main, dans les limites où le pouvo
88 oute pensée et toute action se répondaient, où il était normal, salutaire et logique que les choses s’ordonnent à l’homme, et
89 l’homme, et que l’homme s’ordonne à son Dieu. Tel était donc mon rêve, mon imagination de l’homme chrétien dans la cité chrét
90 , l’autre énorme. En effet, la cité d’aujourd’hui est quelque chose de littéralement démesuré, un ensemble de signes abstra
91 cité, il n’y a plus aucune proportion. Mais ce n’ est pas la cité seule qui a changé. En même temps qu’elle cessait d’être
92 ule qui a changé. En même temps qu’elle cessait d’ être proportionnée à la mesure de l’homme, l’homme cessait d’obéir à la me
93 que dans l’humanité contemporaine, le chrétien n’ est plus le type normal. Il tend à devenir l’exception. C’est tout juste,
94 venir l’exception. C’est tout juste, déjà, s’il n’ est pas un scandale. Quand il se tient tranquille, on le tolère en souria
95 s limiter mes réflexions, ce soir : — quelle peut être la vocation de ce chrétien dans cette cité ? Ce chrétien en minorité
96 ement impuissante sur les conseils de la cité ? N’ est -il pas ridicule de poser la question ? N’est-il pas évident, à premiè
97  ? N’est-il pas ridicule de poser la question ? N’ est -il pas évident, à première vue, que le chrétien ne peut plus rien, qu
98 ée par avance à demeurer inefficace ? Le chrétien est -il possesseur d’un secret qui lui permettrait de faire plus ou mieux
99 roduction ou de conclure des traités ? Et si ce n’ est pas le cas, ne ferait-il pas mieux de se limiter à son domaine, d’ail
100 obligerait à conclure qu’en effet, les conditions sont devenues telles que l’action du chrétien, comme chrétien, ne vaut guè
101 t à fait dérisoire dans la « cité » telle qu’elle est devenue. Ni les congrégations économiques, ni les forces irrationnell
102 n’ont cure de nos avis, de nos révoltes. Que nous soyons chrétiens ou non, nous autres pauvres intellectuels, il nous faut per
103 out ce qui se fait sous les cieux, et voici, tout est vanité et poursuite du vent. » Je plaindrais l’homme d’action qui n’a
104 s que jamais le sentiment d’une grande absurdité. Sommes -nous bien des David prêts à marcher contre Goliath, ou simplement de
105 sible ? Je laisserai cette question ouverte. S’il est un fait patent, c’est que nous ne pouvons pas grand-chose… Mais il e
106 laquelle aucune raison ne prévaudra jamais. Elle est un ordre, que nous avons reçu, et que nous n’avons pas le droit ni le
107 ssible — pour hâter la venue de ce règne, nous ne sommes plus que des menteurs, et notre prière nous condamne. Le chrétien est
108 teurs, et notre prière nous condamne. Le chrétien est cet homme qui, ayant mesuré, mieux que personne peut-être, la vanité
109 « Ne vous conformez pas à ce siècle présent, mais soyez transformés », dit saint Paul. Tout le secret de notre vocation est c
110 dit saint Paul. Tout le secret de notre vocation est contenu dans ces mots-là, et si je parvenais ce soir à vous les rendr
111 r atteint mon but. Ne vous conformez pas, — mais soyez transformés. Nous n’appartenons pas à la forme du monde mais bien à s
112 à sa transformation. Forme et transformation, ce sont là les deux termes qui s’opposent dans notre vie, qui commandent notr
113 ion. La forme de ce monde : vous savez ce qu’elle est , et vous savez qu’elle est mauvaise. La forme de ce monde, ce sont to
114 vous savez ce qu’elle est, et vous savez qu’elle est mauvaise. La forme de ce monde, ce sont toutes les puissances que j’é
115 ez qu’elle est mauvaise. La forme de ce monde, ce sont toutes les puissances que j’énumérais tout à l’heure et qui dominent
116 par leur travail. La forme mauvaise du monde, ce sera pour l’incroyant l’ensemble des abus et des désordres dont il souffre
117 ésordres dont il souffre ; — pour le chrétien, ce sera bien davantage : ce sera tout ce que résume le seul mot de péché — to
118 ; — pour le chrétien, ce sera bien davantage : ce sera tout ce que résume le seul mot de péché — tout ce qui s’oppose à la v
119 « Nous n’appartenons pas à la forme du monde. » — Est -ce à dire que notre foi nous en libère matériellement et moralement ?
120 foi nous en libère matériellement et moralement ? Est -ce à dire qu’en tant que chrétiens nous échappons aux lois communes ?
121 artenance. Elle annonce une nouvelle patrie. Nous sommes au monde, c’est vrai, mais non pas comme étant du monde. C’est là le
122 s sommes au monde, c’est vrai, mais non pas comme étant du monde. C’est là le sens de nos prières, de nos angoisses et de l’a
123 droit, dès l’instant où nous l’annonçons. Mais qu’ est -ce que cette transformation ? Et de quel droit pouvons-nous l’annonce
124 tion ? Et de quel droit pouvons-nous l’annoncer ? Est -ce un ensemble de réformes, un programme révolutionnaire ? Est-ce l’u
125 emble de réformes, un programme révolutionnaire ? Est -ce l’utopie d’un avenir meilleur, ce « millenium » dont l’Apocalypse
126 ns, et beaucoup d’entre nous y travaillent. Il ne sera pas dit que l’homme chrétien est moins humain que l’homme non chrétie
127 vaillent. Il ne sera pas dit que l’homme chrétien est moins humain que l’homme non chrétien. Il ne sera pas dit que le croy
128 est moins humain que l’homme non chrétien. Il ne sera pas dit que le croyant, parce qu’il refuse toute solidarité avec la f
129 ort du terme, la transformation de ce monde, ce n’ est pas en vertu des seuls désirs humains, qu’il a certainement lui aussi
130 ir mais comme une certitude, c’est qu’elle a déjà été faite ! Ce que nous annonçons au monde, c’est la promesse de celui qu
131  Prenez courage, j’ai vaincu le monde. » — Christ est ressuscité. Il est vivant ! Par lui, la forme de ce monde, et sa puis
132 ai vaincu le monde. » — Christ est ressuscité. Il est vivant ! Par lui, la forme de ce monde, et sa puissance dernière, la
133 e de ce monde, et sa puissance dernière, la mort, sont absolument dominées. C’en est fait ! depuis 19 siècles. La justice a
134 dernière, la mort, sont absolument dominées. C’en est fait ! depuis 19 siècles. La justice a paru, et nous en témoignons pa
135 Ni l’attente passive, ni l’ardeur messianique, ne sont plus aujourd’hui des attitudes chrétiennes ; mais voilà le motif de n
136 an de notre action de grâce, prisonniers que nous sommes de la forme terrestre, nous prêchons une victoire acquise et le retou
137 eut-être qu’un ou deux, ou beaucoup d’entre vous, sont en train de penser cela. Avant d’aborder le problème de l’action poli
138 e son fameux triptyque : D’où venons-nous ? Où en sommes -nous ? Où allons-nous ? À la question : Où en sommes-nous ? j’ai répo
139 mes-nous ? Où allons-nous ? À la question : Où en sommes -nous ? j’ai répondu en rappelant la situation très précaire du chréti
140 s précaire du chrétien dans la cité telle qu’elle est devenue. À la question : D’où venons-nous ? j’ai répondu en rappelant
141 rs bottes. Leur en avant ne sait pas où il va ! N’ est -ce pas ainsi que courent les fuyards ? Comment ne voient-ils pas que
142 ra poser ces grandes questions dernières, si ce n’ est le chrétien, dans la cité contemporaine ? Et s’il ne le fait pas, qui
143 ntemporaine ? Et s’il ne le fait pas, qui d’autre est en mesure d’assumer cette charge inquiétante ? Si le chrétien ne pose
144 nte ? Si le chrétien ne pose pas ces questions, n’ est -ce pas alors, justement, qu’il s’évade ? Qu’il sort de sa réalité ? Q
145 mesure où cela se peut. Mais il fallait qu’elles fussent posées, toutes ces questions, et il faut qu’elles demeurent posées co
146 . Ici se posent deux grands problèmes pratiques : est -il possible et nécessaire, partant de cette vocation, d’aboutir à ce
147 itique chrétienne, un parti des chrétiens ? Telle est la première question. Et si l’on répond non à cette première question
148 Et si l’on répond non à cette première question, est -il possible alors, ou désirable, qu’un chrétien entre dans l’un ou l’
149 stants, et fasse sienne la cause de ce parti ? Ce sera la seconde question. Au sujet de la politique chrétienne, permettez-m
150 sujet de la politique chrétienne, permettez-moi d’ être aussi bref que catégorique. Si nous considérons l’histoire, si nous é
151 coutons ses leçons, il me paraît qu’aucun doute n’ est permis. De Constantin, premier empereur chrétien commandant aux chrét
152 au jugement du monde, dès lors qu’elles cessent d’ être avant tout un jugement porté sur le monde. Toute politique chrétienne
153 et par là même, appelle notre protestation. Quel est donc le rôle de l’Église ? Est-il de prêcher l’Évangile, ou bien de f
154 protestation. Quel est donc le rôle de l’Église ? Est -il de prêcher l’Évangile, ou bien de faire triompher telle ou telle d
155 ns habiletés politiciennes, — à supposer que cela soit possible, que de questions demeurent menaçantes ! Voici l’Église liée
156 de moralisé, dont on ne sait plus exactement s’il est encore profane ou déjà sanctifié. Je ne crois pas plus à une politiqu
157 la vie de la cité moderne. Je ne crois pas qu’il soit souhaitable que se forme un parti chrétien, opposé aux autres partis.
158 re, comme chrétiens, dans la cité ? Si l’Église n’ est pas un parti, comment et où faut-il que nous prenions parti ? Où allo
159 ngager ? Car vocation signifie acte, et tout acte est un engagement. Nous voici donc en face de la seconde question : celle
160 édication active de sa transformation, — si telle est bien la vocation civique du chrétien, beaucoup seront tentés de pense
161 st bien la vocation civique du chrétien, beaucoup seront tentés de penser que cela conduit au socialisme. Pour ma part, je con
162 e, à cause de cette tentation très réelle, que je suis amené à me méfier, ou tout au moins à m’approcher avec une prudence c
163 d’origine proprement chrétienne. Le socialisme s’ est identifié avec la défense des humbles : si nous ne faisons pas mieux
164  : protestation et justice. Oui, ces mots d’ordre sont les mêmes pour le chrétien et pour le socialiste. L’élan sentimental
165 hrétien et pour le socialiste. L’élan sentimental est peut-être le même, les revendications pratiques seront peut-être auss
166 t peut-être le même, les revendications pratiques seront peut-être aussi les mêmes, dans bien des cas. Mais les motifs premier
167 cas. Mais les motifs premiers, les buts derniers sont autres. Et ce sont ces motifs et ces buts qui doivent donner aux mots
168 fs premiers, les buts derniers sont autres. Et ce sont ces motifs et ces buts qui doivent donner aux mots leur sens réel. No
169 divine, déjà réalisée. Notre devoir de charité ne serait -il pas alors de déclarer ouvertement aux socialistes qu’entre leur bu
170 l d’une foi au Christ vivant ? Car le chrétien n’ est pas idéaliste, et c’est cela qui le distingue en fin de compte du soc
171 atérialisme socialiste, comme si le christianisme était moins réaliste et comme si les chrétiens ne vivaient pas aussi de pai
172 as aussi de pain. Le grand danger du socialisme n’ est pas dans son matérialisme, mais dans sa fausse spiritualité ; dans ce
173 itique dans une seule phrase : un tel compromis n’ est possible, comme un douloureux pis-aller, que s’il est par ailleurs dé
174 possible, comme un douloureux pis-aller, que s’il est par ailleurs dénoncé, ouvertement, et au nom de la foi. J’ajouterai c
175 is si je refuse ce parti, c’est aussi parce qu’il est un parti, précisément. Tout le monde fait aujourd’hui le procès des p
176 ’impuissance politique des formations de masses s’ est avérée depuis la guerre, soit en Russie, où Lénine triompha par le mo
177 rmations de masses s’est avérée depuis la guerre, soit en Russie, où Lénine triompha par le moyen d’une minorité infime, soi
178 nine triompha par le moyen d’une minorité infime, soit en Allemagne, où les partis de gauche, malgré leur organisation incom
179 atique et quotidienne montre que cette opposition est effective. L’homme des masses, le partisan, c’est l’homme qui fuit de
180 ce sens précis, il faut bien dire que les partis sont les agents les plus actifs de la démoralisation des hommes modernes.
181 ant qui permet de faire de si belles phrases, qui est si vrai, mais si « abstrait » — dit-on —, et qui vous laisse en fin d
182 cité thomiste, j’opposerai une image moderne, qui est aussi celle d’un chrétien dans la cité, mais qui n’est pas cette fois
183 ussi celle d’un chrétien dans la cité, mais qui n’ est pas cette fois une utopie. Cela se passe au Japon, de nos jours. Cert
184 e, et jouit à vingt ans de tous les avantages qui sont chez nous ceux de la grande bourgeoisie. Mais voilà qu’il se converti
185 le Japon d’avant la guerre, il comprend qu’il lui est impossible de se dire vraiment chrétien tant qu’il n’aura pas fait to
186 t chrétien tant qu’il n’aura pas fait tout ce qui est en son pouvoir pour réduire le scandale social. Aucun parti n’existe
187 diminuent, les enfants s’instruisent, des misères sont soulagées. C’est déjà quelque chose. Mais Kagawa veut davantage. Il f
188 nfants qu’il a secourus, et dès lors le mouvement est lancé, l’opinion publique alertée, et cet effort aboutira à l’assaini
189 amée. C’est ainsi qu’on transforme le monde. Ce n’ est pas au nom d’un parti que Jérémie accusait publiquement son roi et l’
190 on roi et l’obligeait à réparer ses crimes ; ce n’ est pas au nom d’un parti que Paul ébranle l’Empire romain, ce n’est pas
191 d’un parti que Paul ébranle l’Empire romain, ce n’ est pas au nom d’un parti que Luther et Calvin déclenchent la plus grande
192 peu pratique ! Toute l’histoire du monde chrétien est faite par des vocations précises reçues dans la prière, avec crainte
193 monde, moralement et pratiquement. Seules, elles sont apparues comme de fondamentales et créatrices objections de la foi à
194 forme du monde. Mais, direz-vous encore, nous ne sommes pas tous des Jérémie, des Paul, des Luther, des Calvin, ni même des K
195 nce leur silencieuse et troublante question. Nous sommes , me direz-vous, des étudiants, c’est-à-dire des intellectuels. Notre
196 ntellectuels. Notre premier devoir dans la cité n’ est -il pas de travailler en tant qu’intellectuels, — de même que le premi
197 agawa, et à vivre dans les quartiers miséreux, ne serait -ce pas aussi faillir à notre vocation tout humblement humaine, profes
198 Je n’aurai pas le cynisme de vous répondre que ce serait là peut-être un remède tout trouvé à la crise de surproduction intell
199 solution moins défaitiste à vous offrir. — Et ce sera mon second exemple. Un écrivain américain de ces dernières années, l’
200 itable compréhension des expériences religieuses, est vaine, irresponsable, impuissante et antisociale. » Je crois que cett
201 mmentons brièvement cette phrase. La cité moderne est en crise, parce que personne n’a su ou n’a osé prévoir l’aboutissemen
202 er. Tout le monde sait que la morale des affaires est à peu près le contraire de la morale, et que les nécessités économiqu
203 rme. Les buts de l’intellectuel et son langage ne sont plus ceux de l’ouvrier ni du petit-bourgeois provincial et encore moi
204 une mesure entre la pensée et l’action. La cité n’ est plus dominée par une norme et un but commun. Ce sont les bases cultur
205 t plus dominée par une norme et un but commun. Ce sont les bases culturelles qui sont atteintes ! Et c’est pourquoi toute ré
206 un but commun. Ce sont les bases culturelles qui sont atteintes ! Et c’est pourquoi toute réforme de détail, ou toute œuvre
207 de la culture et de l’économie ; or, elle ne peut être cherchée sérieusement nulle part ailleurs que dans la religion. L’his
208 éer une mesure et une morale communautaire que se sont assignée les groupes personnalistes, sur l’exemple desquels je vais c
209 bien abstraite. Que faut-il entendre par là ? Qu’ est -ce donc que la personne humaine ? Exactement et tout simplement, la p
210 rsonnalistes : l’État et les institutions doivent être mis au service de l’homme ; or, c’est l’inverse qui se passe aujourd’
211 l s’agit là d’une révolution profonde, car rien n’ est plus profond qu’un changement de l’état d’esprit qui préside aux inst
212 it qui préside aux institutions. Si notre société est née de la Déclaration des droits de l’homme, il s’agit de donner à la
213 re, car un homme qui n’a pas son pain ne peut pas être une personne ni exercer sa vocation ; combattre aussi l’État totalita
214 prendre pour l’opinion publique, alors qu’elle n’ est en fait que l’opinion des maîtres de forges ou des parlementaires exp
215 bêtise publique. Mais toutes ces destructions ne seront rendues possibles que par un profond changement de l’état d’esprit gé
216 Et le triomphe d’une telle morale, à son tour, ne sera possible, que si l’on peut déduire de cette morale un système cohéren
217 n principe, aux exigences de notre vocation. Ce n’ est pas une politique chrétienne, ce n’est pas un parti politique. C’est
218 tion. Ce n’est pas une politique chrétienne, ce n’ est pas un parti politique. C’est un ordre, une chevalerie ! Et le princi
219 hevalerie ! Et le principe de cet ordre nouveau n’ est autre que celui de la vocation personnelle. Oui, le principe animateu
220 politique, économique et culturel. Ici, la vérité est mise au premier rang : le succès même lui est subordonné. Je demande
221 ité est mise au premier rang : le succès même lui est subordonné. Je demande où est le parti qui peut en dire autant. Je de
222 le succès même lui est subordonné. Je demande où est le parti qui peut en dire autant. Je demande où les chrétiens trouver
223 ance concrète. Certes, le mouvement personnaliste est encore jeune, et n’a pas remué les masses jusqu’ici. Mais je ferai de
224 uelqu’un commence. Avoir une vocation, c’est oser être celui qui commence, malgré les doutes des suiveurs ; 2° vous pouvez t
225 des suiveurs ; 2° vous pouvez tous, tant que vous êtes , aider le mouvement personnaliste à se développer. Lisez la revue Es
226 n, raison de plus pour l’apporter ! Le chrétien n’ est -il pas, en quelque sorte, un spécialiste de la vocation ? Des incerta
227 e remarquer que certains… compromis, par exemple, sont plus pratiques, lorsqu’il s’agit de politique, — et qu’on n’arrive à
228 ont valu la crise actuelle viendront dire : ça n’ est pas pratique. Mais ce n’est pas d’eux, n’est-ce pas, qu’il faut atten
229 viendront dire : ça n’est pas pratique. Mais ce n’ est pas d’eux, n’est-ce pas, qu’il faut attendre beaucoup mieux que ce qu
230 ça n’est pas pratique. Mais ce n’est pas d’eux, n’ est -ce pas, qu’il faut attendre beaucoup mieux que ce qu’ils ont fait dep
231 que ce qu’ils ont fait depuis cent ans déjà. Nous sommes nés dans un monde où tout est en désordre. Nous savons ce que vaut l’
232 t ans déjà. Nous sommes nés dans un monde où tout est en désordre. Nous savons ce que vaut l’aune de ce « pratique » qu’on
233 ne de ce « pratique » qu’on nous propose. L’heure est venue d’essayer autre chose, d’essayer au moins une fois de partir d’
234 re, et bien faire, ce que l’homme fait mal. Telle est sa liberté dans l’action, dans l’échec, dans l’espérance et la protes
235 J’ai cherché au contraire à marquer quels peuvent être nos motifs de choix, et le lieu d’une action pratique. Il se peut que
236 foi leur permet de rendre grâces du sort qui leur est fait ! — Il se peut que d’autres en grand nombre comprennent que leur
237 tres pour mon compte. Discerner sa vocation, ce n’ est pas toujours entendre une voix intérieure. Il y a aussi des voix qui
238 prophétique, tentation personnaliste : tout cela est possible, tout cela donc nous appelle. Ce qui est impossible, c’est q
239 est possible, tout cela donc nous appelle. Ce qui est impossible, c’est qu’un chrétien n’ait pas la vocation d’agir, de fai
240 « Ne vous conformez pas à ce siècle présent, mais soyez transformés par le renouvellement de l’intelligence, afin que vous di
241 e l’intelligence, afin que vous discerniez quelle est la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable et parfait. » f. Roug
242 discerniez quelle est la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable et parfait. » f. Rougemont Denis de, « La cité », Le
4 1936, Le Semeur, articles (1933–1949). Notre foi, par Emil Brunner (janvier 1936)
243 sur le message de Jésus-Christ ». Dès l’abord, on est frappé par leur simplicité et leur clarté, qui réussissent à mettre à
244 ologie » chrétienne la plus authentique. Le style est direct, l’emploi de la seconde personne est la règle ; aussi ne peut-
245 style est direct, l’emploi de la seconde personne est la règle ; aussi ne peut-on lire ces méditations sans se sentir pris
246 us. Ces études se succèdent selon un plan qu’il n’ est pas toujours facile d’apercevoir. Les divisions générales paraissent
247 d’apercevoir. Les divisions générales paraissent être  : Dieu — L’homme — Jésus-Christ — La foi chrétienne — L’Église et les
248 pérance eschatologique. Le trait le plus marquant est leur « biblisme ». Bien que pas un verset de l’Écriture ne soit cité,
249 blisme ». Bien que pas un verset de l’Écriture ne soit cité, on sent la pensée et la foi de l’auteur informées par la Bible,
250 inées par elle. Pour Brunner, « la foi chrétienne est une foi biblique » ; la Bible est la Parole de Dieu, et nous ne pouvo
251 foi chrétienne est une foi biblique » ; la Bible est la Parole de Dieu, et nous ne pouvons rien savoir de Dieu que par Sa
252 ênent si fort notre humaine raison. Mais la foi n’ est pas une adhésion intellectuelle qui ne nous engagerait pas ; la foi a
253 au Dieu de majesté, de sainteté et d’amour, qui s’ est révélé à nous en Jésus-Christ, exige que nous prenions les exigences
254 eu vraiment au sérieux, que nous « laissions Dieu être Dieu en nous ». Brunner semble vouloir nous amener à prier la prière
5 1945, Le Semeur, articles (1933–1949). La responsabilité culturelle de l’Église (mars 1945)
255 par les grandes conférences œcuméniques. Mais il est non moins remarquable qu’aucun de ces documents ne fasse allusion à l
256 asse allusion à l’ordre culturel de demain. Et il est cependant certain que si les Églises continuent à négliger cette ques
257 a jeunesse de presque tous les pays du monde aura été soumise à plusieurs années de service militaire et à une interruption
258 e en Europe après la Première Guerre mondiale. Ce sera , cette fois, beaucoup plus violent car la Deuxième Guerre mondiale a
259 logies beaucoup plus puissantes et dynamiques. Il serait romantique de supposer que la guerre actuelle a détruit toutes les ét
260 nouveaux noms. Les générations d’après-guerre ne seront pas nécessairement plus positives ou plus cyniques — tout en prétenda
261 positives ou plus cyniques — tout en prétendant l’ être , à coup sûr. Mais sans aucun doute leur faim sera plus grande et leur
262 être, à coup sûr. Mais sans aucun doute leur faim sera plus grande et leur soif de réponses à leurs questions, de conseils,
263 domaine de la culture. Car l’époque bourgeoise a été une ère de division, d’absence de parenté et de commune mesure entre
264 s humaines et sociales. Les années d’après-guerre seront probablement caractérisées par les traits suivants : des lacunes inte
265 s religieux et virulents. Mais si une Église veut être en mesure d’intervenir dans le développement de la culture, elle doit
266 ir dans le développement de la culture, elle doit être fondée sur une doctrine ferme, sur une théologie qui soit en même tem
267 dée sur une doctrine ferme, sur une théologie qui soit en même temps rigoureuse et vitale à l’intérieur de l’Église. Une Égl
268 térieur de l’Église. Une Église dont la théologie est vague n’a plus rien à dire dans le domaine de la culture. Une telle É
269 nisme. Mais, dans le domaine de la culture, il en est tout à fait autrement. Ici une Église ne peut adopter des idéologies
270 ogie. C’est ainsi que l’Église catholique romaine fut à la tête du mouvement philosophique du Moyen Âge, que les réformes d
271 an, ou Renoir, sans seulement se demander si cela était compatible avec sa foi. Car en fait la théologie avait cessé d’être v
272 ec sa foi. Car en fait la théologie avait cessé d’ être vivante, précise et exigeante, et donc source d’inspiration. Le thomi
273 ne charpente et qu’il ne fixait aucune limite qui soit en même temps un stimulant et un guide. Premièrement, donc, si l’Égli
274 ière s’en trouvera appauvrie et désorientée. Elle sera coupée de ses racines. Car toute la culture occidentale est née de la
275 de ses racines. Car toute la culture occidentale est née de la théologie et de la liturgie chrétienne ; soit en se soumett
276 ée de la théologie et de la liturgie chrétienne ; soit en se soumettant au code chrétien, soit en se révoltant contre lui. (
277 étienne ; soit en se soumettant au code chrétien, soit en se révoltant contre lui. (Les grandes philosophies modernes, celle
278 ophies modernes, celles de Descartes et de Hegel, sont nées d’une controverse manifestement théologique à ses origines.) Et,
279 Les forces de création lui échappent. Tout ce qui est créé est alors créé en dehors de l’Église ou en opposition à elle et
280 s de création lui échappent. Tout ce qui est créé est alors créé en dehors de l’Église ou en opposition à elle et devient d
281 rer dans une conception chrétienne du monde. Ceci est particulièrement frappant dans les pays protestants où le souci de ra
282 forces de création intellectuelles parce qu’elle est attentive à préserver les droits et les devoirs de la critique théolo
283 e. Les Églises pourront agir et inspirer si elles sont fondées sur une doctrine ferme et complète. Elles auront autorité dan
284 a plus féconde dans le domaine culturel et social est celle de Vocation (au sens calviniste et luthérien du mot, qui est pl
285 tion (au sens calviniste et luthérien du mot, qui est plus large que celui dans lequel l’entend Rome). L’Évangile nous appr
286 d Rome). L’Évangile nous apprend que chaque homme est susceptible de recevoir une vocation, un appel spécial qui le disting
287 uée à une nation ou même à une génération. Chaque être individuel ou collectif, pour lequel l’Église peut prier, est suscept
288 el ou collectif, pour lequel l’Église peut prier, est susceptible de recevoir une vocation. Maintenant les grandes maladies
289 une : elles nient la vocation personnelle (que ce soient les collectivismes nationalistes, de race ou de classe, ou les matéri
290 s, moraux ou bourgeois). De même l’individualisme est une déviation morbide du sens de la vocation car elle nie ses conséqu
291 itique que l’on puisse adresser à ce point de vue est la suivante : une idéologie qui nie la vocation personnelle ou un rég
292 uille l’homme de la liberté d’obéir à sa vocation sont incompatibles avec le christianisme. Par exemple, toutes les idéologi
293 réactionnaire, individualiste, antisociale. Elles sont , par conséquent, incompatibles avec l’ordre chrétien qui présuppose l
294 blir une homogénéité mécanique et rigide, qu’elle soit imposée d’en haut (État, tyran), ou d’en bas (égalitarisme poussé à l
295 nt comme dangereuse et scandaleuse. Ces doctrines sont par là incompatibles avec l’ordre chrétien, qui implique l’union et n
296 dans le Royaume de Dieu. Un ordre social ne peut être qualifié de chrétien à moins qu’il ne soit fondé sur le respect de la
297 e peut être qualifié de chrétien à moins qu’il ne soit fondé sur le respect de la vocation, et qu’il n’assure à chaque homme
298 , unique et inaliénable. Un ordre social chrétien sera ainsi œcuménique plutôt qu’unitarien. Il sera fédéral plutôt que cent
299 ien sera ainsi œcuménique plutôt qu’unitarien. Il sera fédéral plutôt que centralisé (dans les domaines culturels, religieux
300 les devoirs de l’État (l’organisme dont le devoir est d’assurer la liberté de l’individu au point de vue matériel). Les
301 ns. Il va sans dire que l’organisation de l’armée est telle qu’un capitaine aura toujours les moyens d’accomplir son devoir
302 nes bureaucratiques dans lesquelles les individus sont abstraitement dirigés selon les besoins de la machine et non selon le
303 mouvement des biens de la puissance matérielle y est fonction des hasards d’opérations de Bourse, par exemple, et non des
304 u la prospérité économique. Le devoir des Églises est de repenser toutes ces catégories et de les critiquer d’un point de v
305 nement d’une doctrine chrétienne de la vocation. ( Être libre à l’abri de la nécessité, ne signifie pas que l’on prend pour b
306 bli, ou à la réforme du moment. Elles cesseront d’ être traînées dans le sillage de mouvements entrepris par d’autres, avec d
307 d’autres, avec des motifs et pour des buts qui ne sont pas nécessairement chrétiens. Les conséquences culturelles Deux
308 pirituelle. La vocation d’un homme ou d’un groupe est à la fois distinction et intégration. Ces deux éléments devraient êtr
309 ction et intégration. Ces deux éléments devraient être conciliés et sauvegardés avec vigilance — l’élément d’universalisatio
310 nt d’universalisation et celui de distinction. Il est grandement souhaitable, par exemple, que des établissements d’enseign
311 lissements d’enseignement (collèges, universités) soient fondés sur une base confessionnelle clairement établie, à côté d’étab
312 t que tout l’enseignement, dans chaque matière, y soit dominé par la doctrine de l’Église en question, comme c’est le cas da
313 0200semr sauvegarder le facteur universaliste, il est nécessaire que, dans les écoles confessionnelles, un enseignement suf
314 nement suffisamment poussé des autres confessions soit donné : la partie œcuménique. Car ce n’est qu’en apprenant à connaîtr
315 sions soit donné : la partie œcuménique. Car ce n’ est qu’en apprenant à connaître les autres que nous en venons à nous conn
316 en venons à nous connaître nous-mêmes, comme ce n’ est qu’en nous comprenant nous-mêmes que nous parvenons à connaître les a
317 enons à connaître les autres. L’attitude générale serait alors d’approfondir et d’intégrer le plus possible chaque vocation cu
318 sible chaque vocation culturelle du groupe (qu’il soit religieux ou national), le tout en vue de l’union (fédérale ou œcumén
319 à les comparer. Le deuxième problème à envisager est celui d’une collaboration plus étroite entre l’Église et l’Intelligen
320 ce plan tout reste à créer. Et quelque chose doit être créé si nous voulons éviter que la culture de demain se développe sel
6 1946, Le Semeur, articles (1933–1949). Chances d’action du christianisme (juin-juillet 1946)
321 endre leurs pouvoirs spirituels, certains États s’ étant laissé aller à les revendiquer injustement. Les docteurs de l’Église
322 me même, du moins à cette véhémence flambante qui fut toujours signe et symbole de l’Esprit. Un fils soumis de Rome, le gra
323 lisme) qu’ils croyaient pouvoir tolérer ; qu’il a été abattu finalement, dans ses formes déclarées et spectaculaires tout a
324  ; et que son élévation brutale puis sa chute ont été pour toutes les Églises une épreuve de forces, un défi, une purificat
325 e devant l’assaut de dictatures barbares : elle s’ est reconnue impuissante à nous donner des buts de vie, des idéaux et un
326 d’une puissante et purifiée Église orthodoxe à l’ Est . Mais dire que l’époque de la défensive est terminée pour elles, dans
327 e à l’Est. Mais dire que l’époque de la défensive est terminée pour elles, dans notre temps, c’est poser aux Églises chréti
328 es presque aussi grands que ceux qu’elles eussent été contraintes de subir en se rendant. (Dans ce « presque » est là diffé
329 ntes de subir en se rendant. (Dans ce « presque » est là différence entre honneur et honte, vie et mort.) Et que trouvent a
330 s, mais un vide doctrinal sans précédent. Ce vide est un appel, urgent et dramatique. Un appel à l’attaque, à l’offensive,
331 les sombres, avant la floraison du Moyen âge, qui fut son œuvre. Il s’agit de restaurer le sens de la communauté vivante, q
332 ses réglementations, souvent utiles, mais qui ne sont jamais règles de vie. Je voudrais une sociologie chrétienne pour le x
333 t — musique, peinture, philosophie, littérature — est sortie des églises et des couvents. Hélas, elle en est bien sortie !
334 ortie des églises et des couvents. Hélas, elle en est bien sortie ! Il est temps que nous sortions à sa recherche, pour la
335 des couvents. Hélas, elle en est bien sortie ! Il est temps que nous sortions à sa recherche, pour la ramener ! 3. Que l’Ég
336 ement d’une conduite spécifiquement chrétienne. «  Soyez bien sages », nous disaient les prédicateurs depuis deux siècles. « S
337 disaient les prédicateurs depuis deux siècles. «  Soyez fous ! », dit saint Paul aux Corinthiens. « Osez être l’Invraisemblab
338 fous ! », dit saint Paul aux Corinthiens. « Osez être l’Invraisemblable ! »5 dit Kierkegaard. Ce sont ces voix que les meil
339 z être l’Invraisemblable ! »5 dit Kierkegaard. Ce sont ces voix que les meilleurs aujourd’hui, hors des Églises, me paraisse
340 s Américains, s’instaure sur notre planète, ce ne sera qu’au nom de ce qui transcende nos attachements nationaux, politiques
341 action chrétienne. Celle-ci se fera, comme elle s’ est toujours faite, par des personnes et par des petits groupes ; par que
342 e vocation précise, et il ajoute : toute vocation est sans précédent, et paraît donc « invraisemblable » à celui qui la reç
7 1949, Le Semeur, articles (1933–1949). « Les protestants et l’esthétisme » (février-mars 1949)
343 y, Hamsun, Ramuz, Faulkner, Hemingway, Malaparte, sont sortis de milieux protestants, dira-t-on ? Le fait est qu’ils en sont
344 ortis de milieux protestants, dira-t-on ? Le fait est qu’ils en sont bien sortis, tandis que les autres sont entrés (ou ren
345 ux protestants, dira-t-on ? Le fait est qu’ils en sont bien sortis, tandis que les autres sont entrés (ou rentrés) dans le c
346 qu’ils en sont bien sortis, tandis que les autres sont entrés (ou rentrés) dans le catholicisme et se donnent, sans la moind
347 ais de l’époque, T. S. Eliot et Wystan Auden, ils sont , certes, des chrétiens déclarés dans leur œuvre, mais l’épithète de p
348 e l’ensemble de nos littératures occidentales, il est impossible d’établir qu’à proportion des populations et de leurs conf
349 me tels, tandis que nos auteurs protestants ne le sont plus guère que de naissance et non par choix. Quelles sont les causes
350 guère que de naissance et non par choix. Quelles sont les causes de ce phénomène particulier au xxe siècle ? Je crois qu’i
351 les chercher dans un récent passé théologique. Il était de mise, au siècle dernier, chez les protestants, de déclarer — comme
352 resque complet des positions de la Réforme. Or il est clair que le libre examen, conduit dans un climat rationaliste, n’est
353 re examen, conduit dans un climat rationaliste, n’ est pas une attitude de créateur. L’art suppose une orthodoxie, un parti
354 la fois, et, en tout cas, un ensemble de règles, soit héritées, soit inventées : une rhétorique. La théologie protestante d
355 n tout cas, un ensemble de règles, soit héritées, soit inventées : une rhétorique. La théologie protestante du xixe siècle
356 roduit d’écrivains protestants au sens où Claudel est un écrivain catholique, Eliot un écrivain anglican. Et, pour les même
357 tions, en Europe et dans les deux Amériques, s’en sont déclarés tributaires.) Or la pensée de Kierkegaard, qui représente l’
358 assement constitue même l’essence de son œuvre. N’ est -ce point de cet exemple pur qu’il conviendrait de partir pour poser l
359 datée du 16 novembre 1948 : « Chers amis… 1) S’il est exact que les protestants sont davantage moralistes et citoyens qu’es
360 Chers amis… 1) S’il est exact que les protestants sont davantage moralistes et citoyens qu’esthètes, pensez-vous que ceci so
361 tes et citoyens qu’esthètes, pensez-vous que ceci soit dû à une orientation théologique, à des circonstances historiques, au