1
Humanisme
et
christianisme (mars 1933)a b Je ne suis pas venu pour vous apporte
2
à grands traits des antithèses à dessein forcées,
et
provoquer vos objections, plutôt qu’une adhésion muette à des constat
3
n muette à des constatations prudemment mesurées.
Et
d’abord, la question qui nous occupe ici est-elle une vraie question
4
la vie, que vous vous posiez avant de venir ici,
et
à laquelle, réellement, vous cherchez à répondre ? En un mot, est-ce
5
e — pour employer un terme favori de la théologie
et
de la philosophie allemande contemporaines1 ? L’une des caractéristiq
6
n est décidé à refuser tous les conflits concrets
et
les décisions qu’ils comportent. Nous refusons toute problématique da
7
guer une évasion hors des problèmes qui se posent
et
nous sont posés, hic et nunc. Avant d’aller plus loin, cherchons donc
8
à autre chose qu’une question de mots ? Dans l’un
et
l’autre cas, il s’agit bel et bien de savoir quel sens l’homme veut d
9
de mots ? Dans l’un et l’autre cas, il s’agit bel
et
bien de savoir quel sens l’homme veut donner à sa vie, comment il doi
10
r cette terre, une scandaleuse économie d’énergie
et
de courage. Pour eux, le christianisme est contre l’homme. 2. À cela,
11
? Car Dieu seul connaît l’homme dans son origine
et
dans sa fin. L’homme étant « séparé » de Dieu sa source, — et c’est e
12
in. L’homme étant « séparé » de Dieu sa source, —
et
c’est en quoi consiste le péché « originel » — il en résulte qu’il ne
13
son bien. Il pose les questions les plus absurdes
et
les plus insolubles, par exemple : il ne sait même pas pourquoi il es
14
choses les plus importantes du monde : l’origine
et
la fin de son existence terrestre. Dès lors, ceux qui croient détenir
15
la volonté, naturelle à l’homme, d’agir pour soi,
et
non pour Dieu. C’est maintenant au tour de l’humaniste d’endosser le
16
i pose sans cesse la crise perpétuelle du monde.
Et
l’antagonisme des deux attitudes prend une forme encore plus précise,
17
e : tel est le fondement de l’attitude de service
et
de sacrifice qui, dans tous les domaines, fait de lui un révolutionna
18
s des garanties humaines les plus élémentaires, —
et
toute l’histoire des martyrs en témoigne. Un chrétien est un être qui
19
e sur la vie n’est plus un chrétien à cet instant
et
dans cet acte ; il agit en humaniste. Il témoigne de sa défiance à l’
20
i la valeur absolue est la vie, non l’obéissance.
Et
de même un chrétien qui dit, parlant des autres ou parlant en général
21
ge du fruit de l’arbre de la connaissance du bien
et
du mal. Humaniste encore, l’homme pieux qui prie pour demander à Dieu
22
s à dire que l’humanisme n’ait pas ses doctrines,
et
même une expression politique cohérente. On a cité dans les Débats, c
23
ces jours derniers, les écrits de MM. Fernandez2
et
Guéhenno. Si intéressants et précis que soit l’un dans le détail de s
24
ts de MM. Fernandez2 et Guéhenno. Si intéressants
et
précis que soit l’un dans le détail de sa dialectique critique, et si
25
t l’un dans le détail de sa dialectique critique,
et
si généreux que se veuille le second dans ses attaques contre un chri
26
e temps. La seule tentative pleinement consciente
et
avouée pour soustraire l’homme à son créateur, pour rebâtir un monde
27
à la mesure de l’homme considéré comme autonome,
et
« calculable » humainement. Le Plan est d’ores et déjà la plus formid
28
t au christianisme, comme une « question » réelle
et
féconde. Mais en face de ce triomphe humaniste, le chrétien ne pourra
29
mme, lieu naturel du nécessaire conflit de l’ange
et
de la bête ? L’homme soviétique se trouve soustrait aux conflits natu
30
re un homme ? L’homme chrétien est à la fois ange
et
bête. Dans ce conflit perpétuel, il trouve sa joie et sa souffrance —
31
ête. Dans ce conflit perpétuel, il trouve sa joie
et
sa souffrance — peu importe le nom qu’il leur donne ; — il y trouve s
32
nt qu’elle se trouve engagée dans un conflit réel
et
concret, exigeant une décision. 2. Ch. Westphal rappelait la phrase
33
l’infini. » a. Rougemont Denis de, « Humanisme
et
christianisme », Le Semeur, Paris, mars 1933, p. 286-293. b. La prem
34
École des hautes études, est déjà fort importante
et
fait de son auteur le maître incontesté de nos critiques du Nouveau T
35
lumineuse Vie de Jésus 4 dont le succès fut grand
et
les conclusions vivement discutées. L’ouvrage qu’il nous donne aujour
36
e aujourd’hui est la suite de cette Vie de Jésus,
et
les questions qu’il pose n’apparaissent pas moins passionnantes. Quel
37
passionnantes. Quelle fut la genèse psychologique
et
historique de la croyance à la résurrection de Jésus ? C’est ainsi qu
38
travail que M. Goguel adopte au départ revêt bel
et
bien la forme d’une explication de cause à effet. On pense couramment
39
formes de la croyance à la résurrection chez Paul
et
Jean, puis chez les rédacteurs des évangiles, enfin chez les premiers
40
partie, à défaire cette histoire trop bien faite,
et
à démolir, avec une sorte de minutieuse indifférence, tous les récits
41
à la sépulture, au tombeau vide, aux apparitions
et
à l’Ascension. Et voici à quelles conclusions il aboutit : Alors qu’
42
u tombeau vide, aux apparitions et à l’Ascension.
Et
voici à quelles conclusions il aboutit : Alors qu’à l’origine, on av
43
cateurs ont dû dire : « Jésus est vivant au ciel,
et
la preuve, c’est que sa tombe s’est trouvée vide ». Et l’on a spontan
44
preuve, c’est que sa tombe s’est trouvée vide ».
Et
l’on a spontanément imaginé les conditions dans lesquelles les femmes
45
ude. En face d’affirmations aussi déconcertantes
et
aussi graves, le lecteur se sent autorisé à la plus grande exigence c
46
s venons de le voir, à des données psychologiques
et
historiques dont le dosage et la valeur sont très variables. Il sembl
47
nées psychologiques et historiques dont le dosage
et
la valeur sont très variables. Il semble qu’un de ses principes soit
48
comme prévenus les auteurs anonymes des évangiles
et
du livre des Actes. La méfiance règne en permanence dans son esprit :
49
uelques faits qui résistent à l’érosion critique,
et
qui permettent alors de réfuter M. Couchoud. Dirons-nous que cette mé
50
raître le rôle de l’interprétation psychologique,
et
c’est là le second obstacle. M. Goguel tire des arguments, pour lui d
51
que le récit se trouve, dans tous les cas, affadi
et
banalisé. Si l’on voit bien ce qui pouvait pousser les auteurs primit
52
ugé moderne qui pousse M. Goguel à les décolorer.
Et
l’on se demande ce qui subsisterait de ses conclusions si on leur app
53
guel ne fait-il pas comme les premiers croyants —
et
avec la même bonne foi — de la rétrohistoire, de l’imagerie psycholog
54
uvre aux proportions d’une génétique descriptive,
et
en se bornant à réfuter des textes sans préjuger de la réalité des fa
55
ble. Tout en admirant à chaque page l’ingéniosité
et
la science de M. Goguel, on se sent parfois gêné par l’anachronisme é
56
tradictions mêmes d’un récit, la marque de la vie
et
des passions ? Prenons, à peu près au hasard, l’exemple de Marc, chap
57
ombeau, qui le trouvent vide, qui voient un ange,
et
voici que cet ange leur parle ! Les réactions de ces femmes n’auront
58
ces femmes n’auront probablement rien d’homogène
et
seront même plus contradictoires qu’aucun récit ne peut le faire sent
59
’ont aucune force de contrainte. C’est l’Écriture
et
le dogme qui les jugent, et non l’inverse, comme l’a fort bien montré
60
nte. C’est l’Écriture et le dogme qui les jugent,
et
non l’inverse, comme l’a fort bien montré Max Dominicé à propos de Ca
61
on nous paraît sur ce point tout à fait orthodoxe
et
courageuse. Au contraire de la plupart des historiens modernes qui on
62
de la résurrection de Jésus au mythe du Dieu mort
et
ressuscité, en particulier). Pour M. Maurice Goguel, la foi a déformé
63
e refuser Dieu, même alors qu’il se rend visible.
Et
ce n’est point parmi les morts qu’il nous faut chercher le Vivant (Lu
64
ensées qu’agitait cet homme ; cette ville habitée
et
gouvernée par des chrétiens ; cette cité où le clerc, le magistrat et
65
chrétiens ; cette cité où le clerc, le magistrat
et
le marchand adoraient le même Dieu, dans le même langage ; cette unit
66
e unité vivante, cette communauté où toute pensée
et
toute action se répondaient, où il était normal, salutaire et logique
67
ion se répondaient, où il était normal, salutaire
et
logique que les choses s’ordonnent à l’homme, et que l’homme s’ordonn
68
et logique que les choses s’ordonnent à l’homme,
et
que l’homme s’ordonne à son Dieu. Tel était donc mon rêve, mon imagin
69
gs qui portent ce nom étrange du Kremlin-Bicêtre…
Et
je pus constater que les données du problème avaient un peu changé, —
70
cet euphémisme académique. Les termes de chrétien
et
de cité, qui, dans l’image moyenâgeuse me paraissaient se correspondr
71
image moyenâgeuse me paraissaient se correspondre
et
s’ordonner si simplement, me semblèrent soudain, dans la réalité des
72
nomiques. Un jeu secret qui se joue sur nos têtes
et
dont la Presse nous donne l’image conventionnelle. Entre les forces q
73
tionnelle. Entre les forces qui dominent la cité,
et
les hommes qui habitent la cité, il n’y a plus aucune proportion. Mai
74
lles se confondent avec celles de la bourgeoisie.
Et
maintenant nous comprendrons peut-être mieux le sens concret de la qu
75
temples justement parce qu’on ne le craint plus ?
Et
dès lors, à quoi servirait de méditer sur la manière dont ce chrétien
76
aniser la production ou de conclure des traités ?
Et
si ce n’est pas le cas, ne ferait-il pas mieux de se limiter à son do
77
elle un sens concret ? Conduit-elle à des actes ?
Et
ces actes eux-mêmes, auront-ils la moindre portée ? L’observation obj
78
tive du monde ramène le clerc dans sa chambrette,
et
le chrétien dans sa paroisse. Elle conclut au scepticisme, et au pess
79
en dans sa paroisse. Elle conclut au scepticisme,
et
au pessimisme intégral. — « J’ai appliqué mon cœur — dit l’Ecclésiast
80
liqué mon cœur — dit l’Ecclésiaste — à rechercher
et
à sonder par la sagesse tout ce qui se fait sous les cieux : c’est là
81
omme. J’ai vu tout ce qui se fait sous les cieux,
et
voici, tout est vanité et poursuite du vent. » Je plaindrais l’homme
82
se fait sous les cieux, et voici, tout est vanité
et
poursuite du vent. » Je plaindrais l’homme d’action qui n’aurait jama
83
si pessimiste : voici ce fait : Dieu peut tout !
Et
c’est à Dieu que nous disons dans toutes les églises chrétiennes : «
84
a jamais. Elle est un ordre, que nous avons reçu,
et
que nous n’avons pas le droit ni le pouvoir de discuter. Elle nous ad
85
voir de discuter. Elle nous adresse une vocation.
Et
alors, nous voici placés dans une situation toute nouvelle. Nous n’av
86
la cité. Nous prions : « Que Ton règne vienne ! »
et
si nous ne faisons pas l’impossible — justement : l’impossible — pour
87
e ce règne, nous ne sommes plus que des menteurs,
et
notre prière nous condamne. Le chrétien est cet homme qui, ayant mesu
88
on point parce qu’il distingue un succès possible
et
prochain, mais parce qu’il a reçu un ordre, et que cet ordre vient de
89
le et prochain, mais parce qu’il a reçu un ordre,
et
que cet ordre vient de Dieu. « Ne vous conformez pas à ce siècle prés
90
t de notre vocation est contenu dans ces mots-là,
et
si je parvenais ce soir à vous les rendre vivants et présents, et si
91
si je parvenais ce soir à vous les rendre vivants
et
présents, et si vous n’emportiez d’ici que le seul souvenir de ces mo
92
is ce soir à vous les rendre vivants et présents,
et
si vous n’emportiez d’ici que le seul souvenir de ces mots, je penser
93
rme du monde mais bien à sa transformation. Forme
et
transformation, ce sont là les deux termes qui s’opposent dans notre
94
La forme de ce monde : vous savez ce qu’elle est,
et
vous savez qu’elle est mauvaise. La forme de ce monde, ce sont toutes
95
tes les puissances que j’énumérais tout à l’heure
et
qui dominent la cité. C’est le désordre et l’injustice tolérés, deven
96
’heure et qui dominent la cité. C’est le désordre
et
l’injustice tolérés, devenus normaux, c’est la presse, l’exploitation
97
’exploitation des pauvres, la raison du plus fort
et
la loi du talion. Ici, c’est le capitalisme créateur de chômage, là c
98
la forme du monde que protestent les socialistes,
et
avec eux des masses grandissantes de bourgeois lentement dépossédés d
99
nde, ce sera pour l’incroyant l’ensemble des abus
et
des désordres dont il souffre ; — pour le chrétien, ce sera bien dava
100
dire que notre foi nous en libère matériellement
et
moralement ? Est-ce à dire qu’en tant que chrétiens nous échappons au
101
iens nous échappons aux lois communes ? Non pas !
Et
gardons-nous ici de toute illusion optimiste ! Chrétiens, nous reston
102
C’est là le sens de nos prières, de nos angoisses
et
de l’appel de toute l’humanité à la justice. Mais alors, cette forme
103
s radicale que tout ce que nous pouvions imaginer
et
souhaiter. Et c’est à cette transformation que nous appartenons de dr
104
tout ce que nous pouvions imaginer et souhaiter.
Et
c’est à cette transformation que nous appartenons de droit, dès l’ins
105
onçons. Mais qu’est-ce que cette transformation ?
Et
de quel droit pouvons-nous l’annoncer ? Est-ce un ensemble de réforme
106
les dégoûtés : nous y pensons tous plus ou moins,
et
beaucoup d’entre nous y travaillent. Il ne sera pas dit que l’homme c
107
te solidarité avec l’espoir de ceux qui souffrent
et
qui créent. Mais s’il accepte pratiquement de travailler à la révolut
108
é. Il est vivant ! Par lui, la forme de ce monde,
et
sa puissance dernière, la mort, sont absolument dominées. C’en est fa
109
est fait ! depuis 19 siècles. La justice a paru,
et
nous en témoignons par nos actions de grâce — précisément par nos act
110
ctions de grâce — précisément par nos actions ! —
et
je voudrais mettre l’accent sur ce mot-là, afin que vous ne pensiez p
111
ne s’agit ici que de pathos sentimental. Action,
et
non pas sentiment, ni piété, ni extase, ni cloître. Voilà pourquoi no
112
contre ce monde au nom d’une justice triomphante,
et
c’est elle que nous annonçons : ainsi donc, ces deux temps de notre v
113
ait unique, renvoient à un motif unique : la mort
et
la résurrection de Jésus-Christ. Ni l’attente passive, ni l’ardeur me
114
notre action : nous attestons la justice apparue,
et
dans l’élan de notre action de grâce, prisonniers que nous sommes de
115
rme terrestre, nous prêchons une victoire acquise
et
le retour promis de cette justice ! ⁂ Il se peut que certains d’entre
116
té. Encore un qui s’évade ! Encore un qui décolle
et
va planer au-dessus des nuages… Peut-être qu’un ou deux, ou beaucoup
117
llons-nous ? j’ai répondu : le Seigneur vient ! —
et
nous allons à la rencontre de son règne, vers la transformation radic
118
vers la transformation radicale de toutes choses.
Et
je vous demande, maintenant, si l’on a le droit de se mettre en route
119
s pose la question des fins dernières de l’homme,
et
cela, qu’ils le veuillent ou non ? Et s’ils le voient, comment peuven
120
de l’homme, et cela, qu’ils le veuillent ou non ?
Et
s’ils le voient, comment peuvent-ils encore éluder si cavalièrement l
121
i cavalièrement le problème dernier de l’action ?
Et
je demande encore : qui donc osera poser ces grandes questions derniè
122
e n’est le chrétien, dans la cité contemporaine ?
Et
s’il ne le fait pas, qui d’autre est en mesure d’assumer cette charge
123
sa réalité ? Qu’il doute de la justice de Dieu ?
Et
qu’il trahit sa vocation première ? Je pense que beaucoup d’entre vou
124
it qu’elles fussent posées, toutes ces questions,
et
il faut qu’elles demeurent posées comme un grand signe d’interrogatio
125
deux grands problèmes pratiques : est-il possible
et
nécessaire, partant de cette vocation, d’aboutir à ce que j’appellera
126
i des chrétiens ? Telle est la première question.
Et
si l’on répond non à cette première question, est-il possible alors,
127
entre dans l’un ou l’autre des partis existants,
et
fasse sienne la cause de ce parti ? Ce sera la seconde question. Au s
128
ons pour leur prouver la puissance de son glaive,
et
tout accessoirement celle de l’Esprit ; des chevaliers partant pour l
129
Roi-Soleil, prince très chrétien, à Guillaume II
et
à son Gott mit uns ! ; des Espagnols massacrant les Incas au nom d’un
130
étienne, toute politique conduite par une Église,
et
qui vise des buts proprement politiques, appartient à la forme du mon
131
ement politiques, appartient à la forme du monde,
et
par là même, appelle notre protestation. Quel est donc le rôle de l’É
132
é mal gré à son succès ; voici l’Église puissante
et
séduisant par sa puissance ; voici le message de la transformation qu
133
ion qui se change en message de la conservation ;
et
voici l’ombre du Grand Inquisiteur qui vient bénir ce monde moralisé,
134
alisée, dispensant chaque chrétien de reconnaître
et
d’accepter les risques d’une vocation toujours unique, et parfois sca
135
epter les risques d’une vocation toujours unique,
et
parfois scandaleuse. Je ne crois pas que les chrétiens possèdent, du
136
toute leur mission dans la cité, que d’une seule
et
unique manière, et c’est en devenant et en restant de vraies Églises,
137
dans la cité, que d’une seule et unique manière,
et
c’est en devenant et en restant de vraies Églises, c’est-à-dire des a
138
une seule et unique manière, et c’est en devenant
et
en restant de vraies Églises, c’est-à-dire des annonciatrices de la P
139
Parole, du jugement porté sur la forme du monde,
et
de la grâce offerte à ceux qui croient. Mais ceci dit, et une fois r
140
grâce offerte à ceux qui croient. Mais ceci dit,
et
une fois repoussée la tentation théocratique à laquelle je vois succo
141
la cité ? Si l’Église n’est pas un parti, comment
et
où faut-il que nous prenions parti ? Où allons-nous nous engager ? Ca
142
s-nous nous engager ? Car vocation signifie acte,
et
tout acte est un engagement. Nous voici donc en face de la seconde qu
143
paux partis qui constituent des forces politiques
et
sociales dans la cité française d’aujourd’hui. Nous entrerions dans u
144
s entrerions dans un débat terriblement technique
et
faussement précis, et nous aurions vite fait de perdre de vue la voca
145
ébat terriblement technique et faussement précis,
et
nous aurions vite fait de perdre de vue la vocation particulière du c
146
aminer un seul exemple, le plus riche à mon sens,
et
peut-être le plus typique : l’exemple du parti socialiste. Protestati
147
volontiers qu’aucun parti ne m’attire davantage,
et
qu’aucun ne saurait m’apparaître, à première vue, plus conforme à not
148
rait d’union qu’on nous propose, entre socialiste
et
chrétien ? Prenons bien garde ici au sens des mots : protestation et
149
ns bien garde ici au sens des mots : protestation
et
justice. Oui, ces mots d’ordre sont les mêmes pour le chrétien et pou
150
ces mots d’ordre sont les mêmes pour le chrétien
et
pour le socialiste. L’élan sentimental est peut-être le même, les rev
151
s motifs premiers, les buts derniers sont autres.
Et
ce sont ces motifs et ces buts qui doivent donner aux mots leur sens
152
buts derniers sont autres. Et ce sont ces motifs
et
ces buts qui doivent donner aux mots leur sens réel. Nous trahirions
153
rer ouvertement aux socialistes qu’entre leur but
et
notre but, entre nos motifs et les leurs, il y a tout l’abîme qui sép
154
qu’entre leur but et notre but, entre nos motifs
et
les leurs, il y a tout l’abîme qui sépare un idéal moral d’une foi au
155
st vivant ? Car le chrétien n’est pas idéaliste,
et
c’est cela qui le distingue en fin de compte du socialiste. Le christ
156
e. Il annonce le salut pour ceux qui se repentent
et
qui croient, non point une théorie économique passagère. On a tort d’
157
e, comme si le christianisme était moins réaliste
et
comme si les chrétiens ne vivaient pas aussi de pain. Le grand danger
158
n qu’il nous offre d’un idéal humanitaire en lieu
et
place d’une foi. Si nous ne parvenons pas à faire comprendre aux soci
159
tés ! Nous connaissons des chrétiens socialistes.
Et
ils savent sans doute mieux que nous ce que signifie pour eux le comp
160
r eux le compromis entre leurs motifs de croyants
et
les motifs des camarades. Pensant à eux, je résumerai toute ma critiq
161
, que s’il est par ailleurs dénoncé, ouvertement,
et
au nom de la foi. J’ajouterai cependant une remarque. Si je refuse d’
162
au socialisme, c’est d’abord à cause du marxisme,
et
des motifs ouvertement antichrétiens qu’il donne à toute action dans
163
ocès des partis, pour des raisons assez sérieuses
et
valables d’opportunité politique. L’impuissance politique des formati
164
absolument incompatible avec l’idée de vocation.
Et
la réalité pratique et quotidienne montre que cette opposition est ef
165
e avec l’idée de vocation. Et la réalité pratique
et
quotidienne montre que cette opposition est effective. L’homme des ma
166
délègue à la majorité le souci de ses décisions.
Et
dans ce sens précis, il faut bien dire que les partis sont les agents
167
qui est si vrai, mais si « abstrait » — dit-on —,
et
qui vous laisse en fin de compte le bec dans l’eau ? J’aurais renoncé
168
es concrets de vocation chrétienne dans la cité.
Et
d’abord, à l’image que je vous donnais en débutant du clerc moyenâgeu
169
apon chrétien. Fils d’un conseiller de l’empereur
et
d’une geisha, Kagawa appartient à une classe honorable, et jouit à vi
170
geisha, Kagawa appartient à une classe honorable,
et
jouit à vingt ans de tous les avantages qui sont chez nous ceux de la
171
rande bourgeoisie. Mais voilà qu’il se convertit,
et
c’est ici que l’aventure commence. Soudain frappé par le contraste od
172
le contraste odieux entre la misère des bas-fonds
et
l’essor de la bourgeoisie capitaliste qui se développe très rapidemen
173
tier le plus mal famé de la grande ville de Kobé,
et
se met à prêcher l’Évangile. Mais son activité ne se borne pas là : p
174
tu, exploité sans vergogne par tous les matamores
et
souteneurs qu’il a choisis pour voisins, pour prochains ! Et son acti
175
rs qu’il a choisis pour voisins, pour prochains !
Et
son action apparemment désespérée s’étend mystérieusement sur ces qua
176
escorté par une foule d’enfants qu’il a secourus,
et
dès lors le mouvement est lancé, l’opinion publique alertée, et cet e
177
mouvement est lancé, l’opinion publique alertée,
et
cet effort aboutira à l’assainissement radical des slums ou bas-fonds
178
inissement radical des slums ou bas-fonds de Kobé
et
de plusieurs villes japonaises, à la création d’importantes œuvres so
179
. Il n’agit pas au bénéfice d’un parti. Il prêche
et
il proteste au nom d’une foi sans cesse proclamée. C’est ainsi qu’on
180
n parti que Jérémie accusait publiquement son roi
et
l’obligeait à réparer ses crimes ; ce n’est pas au nom d’un parti que
181
romain, ce n’est pas au nom d’un parti que Luther
et
Calvin déclenchent la plus grande révolution occidentale, — c’est au
182
e la vocation ne suffisait pas, que c’était vague
et
peu pratique ! Toute l’histoire du monde chrétien est faite par des v
183
ions précises reçues dans la prière, avec crainte
et
tremblement, et non pas revendiquées par le désir des hommes, à l’app
184
çues dans la prière, avec crainte et tremblement,
et
non pas revendiquées par le désir des hommes, à l’appui d’un parti po
185
vocations-là ont transformé le monde, moralement
et
pratiquement. Seules, elles sont apparues comme de fondamentales et c
186
eules, elles sont apparues comme de fondamentales
et
créatrices objections de la foi à la forme du monde. Mais, direz-vous
187
ces deux amis auxquels nous pensons tous ce soir
et
qui, du fond de leur prison, tout près d’ici, posent à notre conscien
188
d’ici, posent à notre conscience leur silencieuse
et
troublante question. Nous sommes, me direz-vous, des étudiants, c’est
189
er devoir de l’ingénieur reste de faire des plans
et
des calculs, et non pas de gâcher du ciment ? Si nous nous mettions t
190
ngénieur reste de faire des plans et des calculs,
et
non pas de gâcher du ciment ? Si nous nous mettions tous à faire de l
191
à faire de l’action sociale, à jouer les Kagawa,
et
à vivre dans les quartiers miséreux, ne serait-ce pas aussi faillir à
192
trouvé à la crise de surproduction intellectuelle
et
à l’encombrement des carrières libérales. L’agriculture manque de bra
193
ir une solution moins défaitiste à vous offrir. —
Et
ce sera mon second exemple. Un écrivain américain de ces dernières an
194
ion en pleine révolte contre la tyrannie bancaire
et
puritaine, Waldo Franck, a écrit une phrase qui condense très bien la
195
la critique qui ne jaillit pas de la métaphysique
et
d’une véritable compréhension des expériences religieuses, est vaine,
196
eligieuses, est vaine, irresponsable, impuissante
et
antisociale. » Je crois que cette phrase exprime la plus grande vérit
197
’a su ou n’a osé prévoir l’aboutissement matériel
et
moral de la révolution industrielle, c’est-à-dire du capitalisme. La
198
elle, c’est-à-dire du capitalisme. La bourgeoisie
et
le prolétariat, de même que les intellectuels, croient encore à certa
199
ls, croient encore à certaines notions de justice
et
de respect de l’homme qui n’ont aucun rapport avec la morale pratique
200
pport avec la morale pratique du monde économique
et
financier. Tout le monde sait que la morale des affaires est à peu pr
201
ffaires est à peu près le contraire de la morale,
et
que les nécessités économiques ne tiennent pas compte de nos beaux id
202
e plus large du terme. Les buts de l’intellectuel
et
son langage ne sont plus ceux de l’ouvrier ni du petit-bourgeois prov
203
eux de l’ouvrier ni du petit-bourgeois provincial
et
encore moins ceux du capitalisme. Chacun tire à hue et à dia, et pers
204
core moins ceux du capitalisme. Chacun tire à hue
et
à dia, et personne ne sait où il va. Il n’y a plus de commune mesure
205
ceux du capitalisme. Chacun tire à hue et à dia,
et
personne ne sait où il va. Il n’y a plus de commune mesure entre la p
206
. Il n’y a plus de commune mesure entre la pensée
et
l’action. La cité n’est plus dominée par une norme et un but commun.
207
’action. La cité n’est plus dominée par une norme
et
un but commun. Ce sont les bases culturelles qui sont atteintes ! Et
208
e sont les bases culturelles qui sont atteintes !
Et
c’est pourquoi toute réforme de détail, ou toute œuvre sociale partie
209
hec, tant qu’on n’aura pas reconstruit ces bases,
et
retrouvé la commune mesure. Donner de la soupe aux chômeurs, c’est tr
210
lle : retrouver cette commune mesure de la pensée
et
de l’action, de la culture et de l’économie ; or, elle ne peut être c
211
mesure de la pensée et de l’action, de la culture
et
de l’économie ; or, elle ne peut être cherchée sérieusement nulle par
212
mesure commune, de leur règle centrale de pensée
et
d’action, ou si l’on veut, pour simplifier, de leur morale. Et toute
213
ou si l’on veut, pour simplifier, de leur morale.
Et
toute morale se fonde dans une religion, même la morale de ceux qui s
214
nthousiasmante, cette tâche de recréer une mesure
et
une morale communautaire que se sont assignée les groupes personnalis
215
’est-ce donc que la personne humaine ? Exactement
et
tout simplement, la personne, c’est ce que j’appelais l’exercice de l
216
hrétien connaît : l’homme qui a reçu une vocation
et
qui lui obéit dans ses actes. Voici ce que disent les personnalistes
217
. Voici ce que disent les personnalistes : l’État
et
les institutions doivent être mis au service de l’homme ; or, c’est l
218
c’est l’inverse qui se passe aujourd’hui ; l’État
et
les institutions doivent avoir pour seul but d’assurer à chacun le li
219
t avoir pour seul but d’assurer à chacun le libre
et
le plein exercice de sa vocation personnelle. Et c’est dans cet espri
220
et le plein exercice de sa vocation personnelle.
Et
c’est dans cet esprit qu’il s’agit de rebâtir l’économie et les cadre
221
ans cet esprit qu’il s’agit de rebâtir l’économie
et
les cadres sociaux. Vous voyez que nous retrouvons l’exigence spiritu
222
éclaration des devoirs de l’homme envers lui-même
et
son prochain. Mais d’abord il s’agit, pour les groupes personnalistes
223
git, pour les groupes personnalistes, de dénoncer
et
de combattre tout ce qui s’oppose au libre jeu des vocations dans la
224
lisme avec son principe immoral de la spéculation
et
du commerce de l’argent ; combattre la misère, car un homme qui n’a p
225
s partis, cette tyrannie démocratique ; combattre
et
dénoncer cette autre tyrannie qui s’appelle la grande presse, et qui
226
te autre tyrannie qui s’appelle la grande presse,
et
qui voudrait se faire prendre pour l’opinion publique, alors qu’elle
227
pas sur nos morales trop idéalistes, ou cyniques.
Et
le triomphe d’une telle morale, à son tour, ne sera possible, que si
228
système cohérent, englobant à la fois l’économie
et
la pensée, et toutes les lois de la cité. Or, c’est à bâtir ce systèm
229
ent, englobant à la fois l’économie et la pensée,
et
toutes les lois de la cité. Or, c’est à bâtir ce système, à développe
230
epuis trois ans les groupes de L’Ordre nouveau ,
et
ceux de la revue Esprit . Le jeune mouvement personnaliste ne se don
231
; vous y trouverez des hommes de toutes croyances
et
de toutes incroyances. Mais en fait, c’est le seul mouvement qui répo
232
parti politique. C’est un ordre, une chevalerie !
Et
le principe de cet ordre nouveau n’est autre que celui de la vocation
233
vocation personnelle. Oui, le principe animateur
et
dynamique qui fonde tout le mouvement personnaliste, c’est cette form
234
te formidable idée que tout homme a une vocation,
et
peut devenir une personne, et doit devenir une personne, — idée qu’ap
235
mme a une vocation, et peut devenir une personne,
et
doit devenir une personne, — idée qu’apporta dans le monde le message
236
de la doctrine de Calvin. Ordonner toutes choses,
et
d’abord la cité, à l’exercice libre et fidèle des vocations, refaire
237
es choses, et d’abord la cité, à l’exercice libre
et
fidèle des vocations, refaire un monde à la mesure de l’homme concret
238
; voilà son but, à la fois politique, économique
et
culturel. Ici, la vérité est mise au premier rang : le succès même lu
239
tes, le mouvement personnaliste est encore jeune,
et
n’a pas remué les masses jusqu’ici. Mais je ferai deux remarques : 1°
240
désordre établi, jusque dans le détail de la vie.
Et
si, comme chrétiens, vous ne trouvez pas dans le mouvement personnali
241
plus pratiques, lorsqu’il s’agit de politique, —
et
qu’on n’arrive à rien quand on vise si haut. Des malins, des parlemen
242
’un fondement vrai, d’une vision vraie de l’homme
et
de l’État, de reprendre les choses à la base, dans leur réalité derni
243
la base, dans leur réalité dernière, métaphysique
et
religieuse. Qui aura ce courage, si les chrétiens ne l’ont pas ? Où v
244
voulez-vous aller si vous refusez cette chance ?
Et
comment un chrétien pourrait-il m’opposer les objections d’un pratici
245
e braque nos regards sur le miracle d’une justice
et
d’une vérité déjà descendue sur la terre ? Tous les autres auraient l
246
sur lui seul, il compte sur Celui qui peut faire,
et
bien faire, ce que l’homme fait mal. Telle est sa liberté dans l’acti
247
rté dans l’action, dans l’échec, dans l’espérance
et
la protestation, dans l’annonce d’un monde nouveau. ⁂ Je n’ai pas che
248
à marquer quels peuvent être nos motifs de choix,
et
le lieu d’une action pratique. Il se peut que je me trompe. Il se peu
249
ler. Qu’ils le fassent, si c’est là leur mission,
et
la forme de leur témoignage. Qu’ils le fassent comme témoins du Dieu
250
t dans leur domaine quotidien, celui de la pensée
et
de l’action auquel travaillent les groupes personnalistes. Qu’ils le
251
aussi des voix qui nous appellent de l’extérieur,
et
qui nous montrent, ici et maintenant, des possibilités d’action direc
252
pellent de l’extérieur, et qui nous montrent, ici
et
maintenant, des possibilités d’action directe. — Tentation socialiste
253
à la misère du siècle, de protester contre elle,
et
d’annoncer sa foi dans la transformation promise de toutes choses. «
254
formez pas à ce siècle présent », dit saint Paul.
Et
je vous laisserai sur cette mise en demeure : « Ne vous conformez pas
255
est la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable
et
parfait. » f. Rougemont Denis de, « La cité », Le Semeur, Paris, a
256
compte dans la livraison de septembre 1931 de Foi
et
Vie .
257
». Dès l’abord, on est frappé par leur simplicité
et
leur clarté, qui réussissent à mettre à la portée de tous, sans l’aff
258
lire ces méditations sans se sentir pris à partie
et
directement engagé par les réactions et les réponses qu’elles exigent
259
à partie et directement engagé par les réactions
et
les réponses qu’elles exigent de nous. Ces études se succèdent selon
260
mme — Jésus-Christ — La foi chrétienne — L’Église
et
les sacrements — L’espérance eschatologique. Le trait le plus marquan
261
set de l’Écriture ne soit cité, on sent la pensée
et
la foi de l’auteur informées par la Bible, et dominées par elle. Pour
262
sée et la foi de l’auteur informées par la Bible,
et
dominées par elle. Pour Brunner, « la foi chrétienne est une foi bibl
263
foi biblique » ; la Bible est la Parole de Dieu,
et
nous ne pouvons rien savoir de Dieu que par Sa révélation dans cette
264
uvre nos cœurs à cette Parole, Il la rend vivante
et
agissante en nous, en sorte qu’elle produit en nous ce que saint Paul
265
rait pas ; la foi au Dieu de majesté, de sainteté
et
d’amour, qui s’est révélé à nous en Jésus-Christ, exige que nous pren
266
entre les principes de la Charte de l’Atlantique
et
les affirmations formulées par les grandes conférences œcuméniques. M
267
s ne fasse allusion à l’ordre culturel de demain.
Et
il est cependant certain que si les Églises continuent à négliger cet
268
é soumise à plusieurs années de service militaire
et
à une interruption plus ou moins complète de toute activité intellect
269
ou par majorités, de placer tout le mal d’un côté
et
tout le bon de l’autre, de soupçonner de sabotage ceux qui maintienne
270
al nouveau ; un désir puissant de repartir à neuf
et
de ne pas retomber dans les erreurs traditionnelles ou revenir aux di
271
ue cette exigence, surgissant d’un chaos matériel
et
spirituel, présente à nouveau l’apparence d’un fascisme culturel : le
272
is en jeu des idéologies beaucoup plus puissantes
et
dynamiques. Il serait romantique de supposer que la guerre actuelle a
273
Mais sans aucun doute leur faim sera plus grande
et
leur soif de réponses à leurs questions, de conseils, d’idéaux cathol
274
e a été une ère de division, d’absence de parenté
et
de commune mesure entre idéal et pratique, entre les diverses discipl
275
sence de parenté et de commune mesure entre idéal
et
pratique, entre les diverses disciplines de l’esprit, entre les diver
276
e l’esprit, entre les diverses activités humaines
et
sociales. Les années d’après-guerre seront probablement caractérisées
277
chez les meilleurs), un besoin de direction ferme
et
de réalisations expéditives d’allures totalitaires. Le devoir des
278
chrétiennes ne donnent pas cette direction ferme
et
vraiment catholique (embrassant tous les aspects de la vie), l’abîme
279
vie), l’abîme s’élargira entre le monde religieux
et
la culture. Cette dernière s’établira contre le christianisme et prob
280
Cette dernière s’établira contre le christianisme
et
probablement avec les orientations suivantes : science, (scientisme),
281
e », création de nouveaux nationalismes religieux
et
virulents. Mais si une Église veut être en mesure d’intervenir dans l
282
r une théologie qui soit en même temps rigoureuse
et
vitale à l’intérieur de l’Église. Une Église dont la théologie est va
283
que si elle parle au nom de sa propre théologie,
et
en rattachant ce qu’elle dit de la façon la plus directe à cette théo
284
sophique du Moyen Âge, que les réformes de Luther
et
de Calvin combattirent avec succès la Renaissance et inspirèrent un v
285
de Calvin combattirent avec succès la Renaissance
et
inspirèrent un vaste mouvement culturel. Plus tard, lorsque les théol
286
turel. Plus tard, lorsque les théologies romaines
et
réformées s’atrophièrent, elles n’osèrent plus, ni ne purent davantag
287
turel. L’abîme commença à s’ouvrir entre l’Église
et
la culture. Un chrétien du xixe ou du xxe siècle, par exemple, pouv
288
croire aux doctrines officielles de sa confession
et
en même temps admirer Wagner, Whitman, ou Renoir, sans seulement se d
289
la théologie avait cessé d’être vivante, précise
et
exigeante, et donc source d’inspiration. Le thomisme a inspiré Dante,
290
avait cessé d’être vivante, précise et exigeante,
et
donc source d’inspiration. Le thomisme a inspiré Dante, le calvinisme
291
ateur, parce qu’il n’avait aucune exigence claire
et
ferme, parce qu’il n’offrait à l’instinct créateur aucune charpente e
292
n’offrait à l’instinct créateur aucune charpente
et
qu’il ne fixait aucune limite qui soit en même temps un stimulant et
293
aucune limite qui soit en même temps un stimulant
et
un guide. Premièrement, donc, si l’Église n’a rien à donner, si elle
294
a culture, cette dernière s’en trouvera appauvrie
et
désorientée. Elle sera coupée de ses racines. Car toute la culture oc
295
te la culture occidentale est née de la théologie
et
de la liturgie chrétienne ; soit en se soumettant au code chrétien, s
296
randes philosophies modernes, celles de Descartes
et
de Hegel, sont nées d’une controverse manifestement théologique à ses
297
overse manifestement théologique à ses origines.)
Et
, en second, lieu, si la culture perd contact avec l’Église, avec sa d
298
ture perd contact avec l’Église, avec sa doctrine
et
son culte, l’Église perd ses moyens les plus efficaces d’agir sur le
299
réé en dehors de l’Église ou en opposition à elle
et
devient difficile à intégrer dans une conception chrétienne du monde.
300
arce qu’elle est attentive à préserver les droits
et
les devoirs de la critique théologique sur tous les plans et pas seul
301
irs de la critique théologique sur tous les plans
et
pas seulement d’une façon négative et restrictive. Que peuvent alors
302
s les plans et pas seulement d’une façon négative
et
restrictive. Que peuvent alors faire les Églises pour collaborer à la
303
ons une réponse simple. Les Églises pourront agir
et
inspirer si elles sont fondées sur une doctrine ferme et complète. El
304
irer si elles sont fondées sur une doctrine ferme
et
complète. Elles auront autorité dans la mesure où elles interviendron
305
cipes ou stades intermédiaires entre la théologie
et
les éthiques. La catégorie intermédiaire qui paraît la plus féconde d
306
i paraît la plus féconde dans le domaine culturel
et
social est celle de Vocation (au sens calviniste et luthérien du mot,
307
social est celle de Vocation (au sens calviniste
et
luthérien du mot, qui est plus large que celui dans lequel l’entend R
308
n, un appel spécial qui le distingue de son genre
et
qui lui confère une dignité inaliénable dans la mesure où il obéit à
309
ocation. Maintenant les grandes maladies sociales
et
culturelles des temps modernes ont toutes cette caractéristique commu
310
a vocation car elle nie ses conséquences sociales
et
communautaires. La principale critique que l’on puisse adresser à ce
311
es, cherchant à établir une homogénéité mécanique
et
rigide, qu’elle soit imposée d’en haut (État, tyran), ou d’en bas (ég
312
vocation personnelle, ou la vocation d’un groupe
et
la considèrent comme dangereuse et scandaleuse. Ces doctrines sont pa
313
on d’un groupe et la considèrent comme dangereuse
et
scandaleuse. Ces doctrines sont par là incompatibles avec l’ordre chr
314
ibles avec l’ordre chrétien, qui implique l’union
et
non l’uniformité et qui respecte la diversité des dons, la diversité
315
hrétien, qui implique l’union et non l’uniformité
et
qui respecte la diversité des dons, la diversité des membres dans un
316
u’il ne soit fondé sur le respect de la vocation,
et
qu’il n’assure à chaque homme (et à chaque groupe ou entité collectiv
317
de la vocation, et qu’il n’assure à chaque homme (
et
à chaque groupe ou entité collective) la liberté de réaliser cette vo
318
liberté de réaliser cette vocation divine, unique
et
inaliénable. Un ordre social chrétien sera ainsi œcuménique plutôt qu
319
entralisé (dans les domaines culturels, religieux
et
sociaux). Il placera les droits et les devoirs de l’individu (c’est-à
320
els, religieux et sociaux). Il placera les droits
et
les devoirs de l’individu (c’est-à-dire de l’individu chargé d’une vo
321
’individu chargé d’une vocation) avant les droits
et
les devoirs de l’État (l’organisme dont le devoir est d’assurer la li
322
droits d’un capitaine mais seulement ses devoirs
et
ses fonctions. Il va sans dire que l’organisation de l’armée est tell
323
raitement dirigés selon les besoins de la machine
et
non selon leur vocation réelle. Elle condamnera le système du capital
324
des hasards d’opérations de Bourse, par exemple,
et
non des droits conférés par l’exercice d’une vocation. Elle condamner
325
ganisme individuel ou collectif la liberté légale
et
les moyens matériels d’accomplir sa vocation. Elles le feront au nom
326
ocation. Elles le feront au nom de leur doctrine,
et
avec une grande précision. Elles ne le feront pas au nom de conceptio
327
des Églises est de repenser toutes ces catégories
et
de les critiquer d’un point de vue spécifiquement chrétien. Il doit y
328
pour chacun de réaliser sa vocation, etc.) Alors,
et
alors seulement, les Églises retrouveront une autorité effective. Ell
329
ouvements entrepris par d’autres, avec des motifs
et
pour des buts qui ne sont pas nécessairement chrétiens. Les conséq
330
leur confessionnelle, philosophique ni régionale,
et
sans aucun lien défini avec une communauté réelle et b) nationalisme,
331
sans aucun lien défini avec une communauté réelle
et
b) nationalisme, autarchie spirituelle. La vocation d’un homme ou d’u
332
un homme ou d’un groupe est à la fois distinction
et
intégration. Ces deux éléments devraient être conciliés et sauvegardé
333
ation. Ces deux éléments devraient être conciliés
et
sauvegardés avec vigilance — l’élément d’universalisation et celui de
334
dés avec vigilance — l’élément d’universalisation
et
celui de distinction. Il est grandement souhaitable, par exemple, que
335
établissements laïques, neutres ou non chrétiens,
et
que tout l’enseignement, dans chaque matière, y soit dominé par la do
336
comme c’est le cas dans les instituts catholiques
et
à l’Université calviniste de Hollande. Mais, en même temps, pouddr194
337
s. L’attitude générale serait alors d’approfondir
et
d’intégrer le plus possible chaque vocation culturelle du groupe (qu’
338
s dans un ensemble beaucoup plus large — le corps
et
ses membres ; ne jamais chercher l’union en neutralisant les différen
339
chercher l’union en neutralisant les différences
et
les particularités, mais au contraire en cherchant à les comparer. Le
340
i d’une collaboration plus étroite entre l’Église
et
l’Intelligentzia. Dans le présent état des choses, cette collaboratio
341
casion à un certain nombre de savants, historiens
et
écrivains de travailler pour les Églises dans leur ensemble. Mais la
342
tre en contact organique les créateurs de culture
et
l’Église comme telle — l’Église comme corps de doctrine et comme comm
343
se comme telle — l’Église comme corps de doctrine
et
comme communauté. Sur ce plan tout reste à créer. Et quelque chose do
344
comme communauté. Sur ce plan tout reste à créer.
Et
quelque chose doit être créé si nous voulons éviter que la culture de
345
de la philologie, puis des systèmes sociologiques
et
philosophiques qui se mirent à pulluler dès le xixe siècle, et qui s
346
ues qui se mirent à pulluler dès le xixe siècle,
et
qui se posaient en termes intraduisibles dans les catégories théologi
347
fendre contre la menace quotidienne, innombrable,
et
sans cesse accrue, mais d’une manière imperceptible, d’habitudes de p
348
’une manière imperceptible, d’habitudes de pensée
et
de vie de moins en moins conformes aux lois spirituelles : sans le sa
349
e persécution à coups d’épingle, de demi-sourires
et
d’ironies intellectuelles basées sur « les derniers progrès de la sci
350
it de bien. Partout, l’on vit au cours du xviiie
et
surtout du xixe siècle, s’exténuer les formes extrêmes, hardies et c
351
siècle, s’exténuer les formes extrêmes, hardies
et
créatrices des différentes confessions. On reculait sous la pression
352
oralisme centré sur l’homme. Tout tranquillement,
et
pour sauver leur corps, les Églises renonçaient sinon à leur âme même
353
cette véhémence flambante qui fut toujours signe
et
symbole de l’Esprit. Un fils soumis de Rome, le grand Paul Claudel, p
354
emarque hélas valable pour bien d’autres Églises,
et
qui résume toute une époque. Je pense qu’avec la guerre, cette époque
355
pense qu’avec la guerre, cette époque a pris fin.
Et
je fonde cette croyance sur quelques faits. C’est un fait que le tota
356
e qui semblait établie entre les sociétés laïques
et
les Églises ; qu’il a brusquement mis à nu l’état minoritaire des chr
357
été abattu finalement, dans ses formes déclarées
et
spectaculaires tout au moins ; et que son élévation brutale puis sa c
358
ormes déclarées et spectaculaires tout au moins ;
et
que son élévation brutale puis sa chute ont été pour toutes les Églis
359
ienne, qui prétendait se substituer à la religion
et
conduire le monde moderne vers un paradis sans Dieu, a démontré son i
360
issante à nous donner des buts de vie, des idéaux
et
un monde plus efficaces qμe ceux du christianisme. C’est un fait que
361
ès de la Science » autorisent de moins en moins —
et
non de plus en plus, comme au siècle passé — à mettre en doute la vér
362
mme au siècle passé — à mettre en doute la vérité
et
la validité des dogmes chrétiens. L’ère des argumentations « scientif
363
l’existence de l’esprit, etc., paraît bien close,
et
pour longtemps. Et c’est un fait que les trois grandes confessions ch
364
prit, etc., paraît bien close, et pour longtemps.
Et
c’est un fait que les trois grandes confessions chrétiennes ont retro
365
critiques de l’extérieur. Renaissance du thomisme
et
des études mystiques chez les catholiques ; restauration de la dogmat
366
ez les protestants ; réapparition d’une puissante
et
purifiée Église orthodoxe à l’Est. Mais dire que l’époque de la défen
367
ns ce « presque » est là différence entre honneur
et
honte, vie et mort.) Et que trouvent aujourd’hui les peuples devant e
368
e » est là différence entre honneur et honte, vie
et
mort.) Et que trouvent aujourd’hui les peuples devant eux ? Battus et
369
différence entre honneur et honte, vie et mort.)
Et
que trouvent aujourd’hui les peuples devant eux ? Battus et vainqueur
370
uvent aujourd’hui les peuples devant eux ? Battus
et
vainqueurs, épuisés, cherchent en vain une utopie nouvelle. Les uns s
371
e nouvelle. Les uns s’abandonnent aux vieilleries
et
tentent de restaurer le nationalisme, condamné par les catastrophes r
372
s nihilistes. Devant cette démission de la pensée
et
de la morale, l’État se voit forcé d’étendre ses pouvoirs, à coups de
373
inal sans précédent. Ce vide est un appel, urgent
et
dramatique. Un appel à l’attaque, à l’offensive, à l’initiative, à du
374
l’initiative, à du plein. Ou encore : les Églises
et
leurs prédicateurs ont moins que jamais à se soucier, aujourd’hui, de
375
se noient. Comme laïque se tenant dans l’Église,
et
voyant au-dehors ses chances d’action, et la misère du temps qui appe
376
Église, et voyant au-dehors ses chances d’action,
et
la misère du temps qui appelle, j’attends ceci : I. Que l’Église offr
377
s, le règne de l’argent, le nomadisme industriel,
et
les déportations en masse, ont presque tué, laissant le champ libre à
378
ont presque tué, laissant le champ libre à l’État
et
à ses réglementations, souvent utiles, mais qui ne sont jamais règles
379
is une sociologie chrétienne pour le xxe siècle,
et
je la voudrais fondée sur la situation d’un groupe de frères prenant
380
urelles viables ; qu’elle ose de nouveau soutenir
et
guider une avant-garde intellectuelle, au lieu de garder sa position
381
lectuelle, au lieu de garder sa position méfiante
et
arriérée — académique — dans les arts sacrés comme vis-à-vis de la cu
382
héologiens adoptent une politique d’intervention,
et
non de vertueuse indignation, à l’égard des écoles nouvelles, dépourv
383
philosophie, littérature — est sortie des églises
et
des couvents. Hélas, elle en est bien sortie ! Il est temps que nous
384
ner ! 3. Que l’Église cesse de défendre la triste
et
inefficace moralité bourgeoise, avec laquelle trop de chrétiens confo
385
point de l’identifier avec la « vie chrétienne »,
et
qu’elle restaure chez les fidèles le sens de la vocation personnelle,
386
e bourgeoise. Quelque chose qui entraîne en avant
et
au-delà, non pas ce qui retient en arrière et en deçà des risques de
387
ant et au-delà, non pas ce qui retient en arrière
et
en deçà des risques de la vie. 4. Que l’Église affirme avec force, da
388
transcende nos attachements nationaux, politiques
et
raciaux. Et c’est pourquoi ce mouvement œcuménique revêt une importan
389
os attachements nationaux, politiques et raciaux.
Et
c’est pourquoi ce mouvement œcuménique revêt une importance politique
390
raditionnelles. Que dis-je, il peut ! Il le doit,
et
de toute urgence ! S’il y échoue, je ne vois aucune raison d’attendre
391
se, pour le monde, que des tyrans, leurs guerres,
et
les tyrannies qui en résultent… Un mot encore. Ce programme, qui résu
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ses comme corps organisés ne peuvent que soutenir
et
encadrer l’action chrétienne. Celle-ci se fera, comme elle s’est touj
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omme elle s’est toujours faite, par des personnes
et
par des petits groupes ; par quelques « fous de Dieu » comme saint Fr
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e, celui qui a reçu de Dieu une vocation précise,
et
il ajoute : toute vocation est sans précédent, et paraît donc « invra
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et il ajoute : toute vocation est sans précédent,
et
paraît donc « invraisemblable » à celui qui la reçoit. Exemple, Abrah
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« Les protestants
et
l’esthétisme » (février-mars 1949)k l …1° Le catholicisme inspire,
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1949)k l …1° Le catholicisme inspire, encadre
et
soutient, aujourd’hui, un assez grand nombre d’écrivains très connus
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res sont entrés (ou rentrés) dans le catholicisme
et
se donnent, sans la moindre équivoque, pour des croyants et pratiquan
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ent, sans la moindre équivoque, pour des croyants
et
pratiquants. Quant aux deux meilleurs poètes anglais de l’époque, T.
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meilleurs poètes anglais de l’époque, T. S. Eliot
et
Wystan Auden, ils sont, certes, des chrétiens déclarés dans leur œuvr
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ossible d’établir qu’à proportion des populations
et
de leurs confessions, l’Italie ait produit plus de grands écrivains q
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ifier, en particulier pour l’Allemagne, la Suisse
et
la France. L’Espagne et l’Italie, profondément romaines, n’ont pas pr
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ur l’Allemagne, la Suisse et la France. L’Espagne
et
l’Italie, profondément romaines, n’ont pas produit de nos jours de gr
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uit de nos jours de grands écrivains catholiques,
et
, même, plusieurs de leurs auteurs les plus connus disent préférer le
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bre des écrivains catholiques, protestants, juifs
et
athées correspond à peu près au nombre des catholiques, protestants,
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rotestants ne le sont plus guère que de naissance
et
non par choix. Quelles sont les causes de ce phénomène particulier au
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larer — comme Gide le fait encore — qu’orthodoxie
et
protestantisme s’excluent mutuellement. Libre examen et protestantism
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testantisme s’excluent mutuellement. Libre examen
et
protestantisme devinrent synonymes, par un renversement presque compl
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ustifiable autrement que par l’œuvre, qui l’avoue
et
la masque à la fois, et, en tout cas, un ensemble de règles, soit hér
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par l’œuvre, qui l’avoue et la masque à la fois,
et
, en tout cas, un ensemble de règles, soit héritées, soit inventées :
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ait des arguments contre une orthodoxie vieillie,
et
, finalement, contre l’orthodoxie en soi. C’était tarir une des source
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sme à Milton, les doctrines jésuites au baroque),
et
de « bonnes » théologies condamner l’art (judaïsme biblique, jansénis
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e à toute prétention (fondée ou non) à la rigueur
et
à la fidélité dogmatique, détruit en même temps ce qu’un artiste atte
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écrivain catholique, Eliot un écrivain anglican.
Et
, pour les mêmes raisons, l’on peut attendre du grand renouveau théolo
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s, d’essayistes des jeunes générations, en Europe
et
dans les deux Amériques, s’en sont déclarés tributaires.) Or la pensé
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eté, dépasse notoirement l’antinomie du moralisme
et
de l’esthétique : ce dépassement constitue même l’essence de son œuvr
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nis de, « [Réponse à une enquête] Les protestants
et
l’esthétisme », Le Semeur, Paris, février–mars 1949, p. 342-344. l.
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act que les protestants sont davantage moralistes
et
citoyens qu’esthètes, pensez-vous que ceci soit dû à une orientation
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rbation cette poussée vers l’esthétique peut-elle
et
doit-elle amener dans sa vie ? Vous voyez notre thème central, assez
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e ? Vous voyez notre thème central, assez précis,
et
notre but : converser avec les étudiants qui s’inquiètent de la beaut