1 1933, Le Semeur, articles (1933–1949). Humanisme et christianisme (mars 1933)
1 t-elle une vraie question ? Est-elle, pour chacun de nous, une question qui se pose dans la vie, que vous vous posiez avan
2 chacun de nous, une question qui se pose dans la vie , que vous vous posiez avant de venir ici, et à laquelle, réellement,
3 ion existentielle — pour employer un terme favori de la théologie et de la philosophie allemande contemporaines1 ? L’une d
4 pour employer un terme favori de la théologie et de la philosophie allemande contemporaines1 ? L’une des caractéristiques
5 ande contemporaines1 ? L’une des caractéristiques de notre temps, c’est sans doute le besoin qu’il a de mettre en question
6 e notre temps, c’est sans doute le besoin qu’il a de mettre en question les questions elles-mêmes. Nous nous refusons, de
7 se posent et nous sont posés, hic et nunc. Avant d’ aller plus loin, cherchons donc à serrer un peu les deux termes de not
8 n, cherchons donc à serrer un peu les deux termes de notre sujet, cherchons à dégager leur réalité dans nos vies. 1. Il no
9 sujet, cherchons à dégager leur réalité dans nos vies . 1. Il nous faut tout de suite dissiper un malentendu : par le terme
10 ut de suite dissiper un malentendu : par le terme d’ humanisme, on se borne trop souvent encore, en France, à désigner la c
11 moins précis, qui désigne une conception générale de vie — politique, économique, éthique — fondée sur la croyance au salu
12 ns précis, qui désigne une conception générale de vie — politique, économique, éthique — fondée sur la croyance au salut de
13 omique, éthique — fondée sur la croyance au salut de l’homme par les seules forces humaines. Croyance qui s’oppose rigoure
14 ianisme, s’il est avant tout la croyance au salut de l’homme par la seule force de Dieu, — par la foi. Dans les deux cas,
15 a croyance au salut de l’homme par la seule force de Dieu, — par la foi. Dans les deux cas, marquons-le bien, il s’agit de
16 i. Dans les deux cas, marquons-le bien, il s’agit de salut. Certains humanistes le nieront. Ils me diront que, là où le ch
17 eront. Ils me diront que, là où le chrétien parle de salut, eux se bornent à revendiquer le bonheur des hommes, la justice
18 tice. Faut-il voir là autre chose qu’une question de mots ? Dans l’un et l’autre cas, il s’agit bel et bien de savoir quel
19 ? Dans l’un et l’autre cas, il s’agit bel et bien de savoir quel sens l’homme veut donner à sa vie, comment il doit vivre
20 bien de savoir quel sens l’homme veut donner à sa vie , comment il doit vivre pour mieux vivre. Mais alors, en quoi les deu
21 , immanent. Les humanistes accusent les chrétiens d’ une sorte de lâcheté. Ils les accusent d’avoir recours à une réalité s
22 Les humanistes accusent les chrétiens d’une sorte de lâcheté. Ils les accusent d’avoir recours à une réalité surhumaine qu
23 hrétiens d’une sorte de lâcheté. Ils les accusent d’ avoir recours à une réalité surhumaine qui les dispense de mettre en œ
24 recours à une réalité surhumaine qui les dispense de mettre en œuvre toutes leurs forces humaines. Ils les accusent de fai
25 re toutes leurs forces humaines. Ils les accusent de faire appel à une Volonté dont l’opération, à leurs yeux, anéantit ce
26 té dont l’opération, à leurs yeux, anéantit celle de la volonté humaine, ou la rend absolument vaine. En somme, ils les ac
27 rend absolument vaine. En somme, ils les accusent de diminuer l’homme par la promesse débilitante d’un « arrière-monde » q
28 t de diminuer l’homme par la promesse débilitante d’ un « arrière-monde » qui serait comme une revanche contre tout l’impar
29 serait comme une revanche contre tout l’imparfait de « ce bas-monde », mais une revanche à bon marché, permettant, sur cet
30 ettant, sur cette terre, une scandaleuse économie d’ énergie et de courage. Pour eux, le christianisme est contre l’homme.
31 ette terre, une scandaleuse économie d’énergie et de courage. Pour eux, le christianisme est contre l’homme. 2. À cela, le
32 origine et dans sa fin. L’homme étant « séparé » de Dieu sa source, — et c’est en quoi consiste le péché « originel » — i
33 tendus, sans cesse renaissants. Il a l’impression d’ avoir perdu la clef de ce qui lui apparaît, dans ses heures de lucidit
34 aissants. Il a l’impression d’avoir perdu la clef de ce qui lui apparaît, dans ses heures de lucidité, comme une effroyabl
35 u la clef de ce qui lui apparaît, dans ses heures de lucidité, comme une effroyable tragi-comédie. Au fond, ce que l’homme
36 s plus importantes du monde : l’origine et la fin de son existence terrestre. Dès lors, ceux qui croient détenir le pouvoi
37 re. Dès lors, ceux qui croient détenir le pouvoir de sauver l’homme en se fondant sur l’homme sont semblables, aux yeux du
38 meux baron de Crac qui prétendrait se tirer alors d’ un puits en se soulevant par la chevelure. 3. Humanisme contre christi
39 contre christianisme, n’est-ce donc qu’un conflit d’ amour, assez touchant ? Est-ce à celui qui soignera le mieux cet homme
40 en, non ; le conflit est plus grave, car le rejet de l’humanisme constitue pour lui une sorte d’obligation, à priori fonda
41 rejet de l’humanisme constitue pour lui une sorte d’ obligation, à priori fondamentale : l’humanisme c’est le péché même, s
42 nir le péché par la volonté, naturelle à l’homme, d’ agir pour soi, et non pour Dieu. C’est maintenant au tour de l’humanis
43 r soi, et non pour Dieu. C’est maintenant au tour de l’humaniste d’endosser le reproche de lâcheté. Le chrétien le considè
44 our Dieu. C’est maintenant au tour de l’humaniste d’ endosser le reproche de lâcheté. Le chrétien le considère comme un hom
45 ant au tour de l’humaniste d’endosser le reproche de lâcheté. Le chrétien le considère comme un homme qui refuse d’accepte
46 e chrétien le considère comme un homme qui refuse d’ accepter, dans toute sa violence, la question que lui pose sans cesse
47 rme encore plus précise, il devient l’antagonisme de deux volontés qui ne s’opposent pas front à front sur le même plan, m
48 perpendiculairement. Chez les chrétiens, volonté de se soumettre à ce qui juge la vie. Chez les humanistes, volonté de vi
49 rétiens, volonté de se soumettre à ce qui juge la vie . Chez les humanistes, volonté de vivre par eux-mêmes, de vivre à tout
50 ce qui juge la vie. Chez les humanistes, volonté de vivre par eux-mêmes, de vivre à tout prix, le plus possible, comme si
51 z les humanistes, volonté de vivre par eux-mêmes, de vivre à tout prix, le plus possible, comme si la vie était le bien ab
52 vivre à tout prix, le plus possible, comme si la vie était le bien absolu. C’est ici que nous entrons dans l’ordre de l’ét
53 n absolu. C’est ici que nous entrons dans l’ordre de l’éthique quotidienne. L’humaniste va chercher une solution humaine q
54 a chercher une solution humaine qui lui permettra d’ assurer ce bien absolu qu’est sa vie. Le chrétien va chercher à obéir
55 lui permettra d’assurer ce bien absolu qu’est sa vie . Le chrétien va chercher à obéir aux ordres de sa foi, fût-ce même au
56 a vie. Le chrétien va chercher à obéir aux ordres de sa foi, fût-ce même au mépris de sa vie : tel est le fondement de l’a
57 obéir aux ordres de sa foi, fût-ce même au mépris de sa vie : tel est le fondement de l’attitude de service et de sacrific
58 aux ordres de sa foi, fût-ce même au mépris de sa vie  : tel est le fondement de l’attitude de service et de sacrifice qui,
59 e même au mépris de sa vie : tel est le fondement de l’attitude de service et de sacrifice qui, dans tous les domaines, fa
60 is de sa vie : tel est le fondement de l’attitude de service et de sacrifice qui, dans tous les domaines, fait de lui un r
61 tel est le fondement de l’attitude de service et de sacrifice qui, dans tous les domaines, fait de lui un révolutionnaire
62 et de sacrifice qui, dans tous les domaines, fait de lui un révolutionnaire, l’homme du risque opposé à l’homme des assura
63 ’est, aux yeux de la foi, qu’une vaste entreprise d’ assurance-vie. L’humaniste pourra répondre qu’à ses yeux, le christian
64 . Un chrétien qui contracte une assurance sur la vie n’est plus un chrétien à cet instant et dans cet acte ; il agit en hu
65 dans cet acte ; il agit en humaniste. Il témoigne de sa défiance à l’endroit de la Providence. Ce mot peut nous fournir un
66 un « bonheur » imprévu, pousse en réalité le cri d’ un humaniste, c’est-à-dire d’un homme, pour qui la valeur absolue est
67 se en réalité le cri d’un humaniste, c’est-à-dire d’ un homme, pour qui la valeur absolue est la vie, non l’obéissance. Et
68 ire d’un homme, pour qui la valeur absolue est la vie , non l’obéissance. Et de même un chrétien qui dit, parlant des autres
69 l, cela est mauvais, immoral, — porte un jugement d’ humaniste, mange du fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du
70 , — porte un jugement d’humaniste, mange du fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal. Humaniste encore, l’hom
71 n jugement d’humaniste, mange du fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal. Humaniste encore, l’homme pieux qu
72 l les nommer, s’il n’a d’abord cherché la volonté de Dieu, si souvent contraire à la sienne ?) Prier pour qu’il fasse beau
73 ce n’est pas prier, c’est exprimer un vœu, un vœu d’ humaniste. Si je vous donne ces exemples, c’est dans l’espoir de provo
74 i je vous donne ces exemples, c’est dans l’espoir de provoquer quelques réactions. C’est aussi dans l’espoir de vous faire
75 uer quelques réactions. C’est aussi dans l’espoir de vous faire mieux sentir à quel point l’humanisme, loin d’être une sim
76 faire mieux sentir à quel point l’humanisme, loin d’ être une simple conception philosophique, est une attitude devant la «
77 ption philosophique, est une attitude devant la «  vie pratique » — comme on dit, mais y en a-t-il une autre ? —, une attitu
78 é dans les Débats, ces jours derniers, les écrits de MM. Fernandez2 et Guéhenno. Si intéressants et précis que soit l’un d
79 téressants et précis que soit l’un dans le détail de sa dialectique critique, et si généreux que se veuille le second dans
80 mble pas que ces deux auteurs aient eu le courage d’ aller jusqu’aux dernières conséquences de leur refus du transcendant.
81 courage d’aller jusqu’aux dernières conséquences de leur refus du transcendant. Le communisme seul a poussé jusqu’aux réa
82 ’humain. Le communisme est le véritable humanisme de notre temps. La seule tentative pleinement consciente et avouée pour
83 à son créateur, pour rebâtir un monde à la mesure de l’homme considéré comme autonome, et « calculable » humainement. Le P
84 est d’ores et déjà la plus formidable entreprise d’ assurance-vie que l’humanité ait jamais conçue. C’est à ce titre que l
85 se de l’homme, lieu naturel du nécessaire conflit de l’ange et de la bête ? L’homme soviétique se trouve soustrait aux con
86 , lieu naturel du nécessaire conflit de l’ange et de la bête ? L’homme soviétique se trouve soustrait aux conflits naturel
87 aturelles, sur ce conflit qui constitue la raison d’ être de la plupart des hommes ? Sera-t-il ange ou bête ? Sera-t-il enc
88 es, sur ce conflit qui constitue la raison d’être de la plupart des hommes ? Sera-t-il ange ou bête ? Sera-t-il encore un
89 le nom qu’il leur donne ; — il y trouve sa raison de vivre, c’est-à-dire de lutter pour devenir une personne devant Dieu.
90  ; — il y trouve sa raison de vivre, c’est-à-dire de lutter pour devenir une personne devant Dieu. Le succès de l’humanism
91 pour devenir une personne devant Dieu. Le succès de l’humanisme triomphant serait-il tout simplement d’enlever à l’homme
92 l’humanisme triomphant serait-il tout simplement d’ enlever à l’homme toute raison personnelle de vivre ? Le succès de l’h
93 ment d’enlever à l’homme toute raison personnelle de vivre ? Le succès de l’homme abandonné à ses calculs serait-il, en dé
94 mme toute raison personnelle de vivre ? Le succès de l’homme abandonné à ses calculs serait-il, en définitive, un suicide
95 elle, c’est-à-dire : qui concerne « l’existence » de chacun de nous, en tant qu’elle se trouve engagée dans un conflit rée
96 t-à-dire : qui concerne « l’existence » de chacun de nous, en tant qu’elle se trouve engagée dans un conflit réel et concr
97 ne décision. 2. Ch. Westphal rappelait la phrase de Fernandez : « Le chrétien est un embusqué de l’infini. » a. Rougemo
98 rase de Fernandez : « Le chrétien est un embusqué de l’infini. » a. Rougemont Denis de, « Humanisme et christianisme »,
99 t un embusqué de l’infini. » a. Rougemont Denis de , « Humanisme et christianisme », Le Semeur, Paris, mars 1933, p. 286-
2 1934, Le Semeur, articles (1933–1949). Sur la méthode de M. Goguel (novembre 1934)
100 Sur la méthode de M. Goguel (novembre 1934)c d L’œuvre de M. Maurice Goguel, directe
101 éthode de M. Goguel (novembre 1934)c d L’œuvre de M. Maurice Goguel, directeur à l’École des hautes études, est déjà fo
102 s hautes études, est déjà fort importante et fait de son auteur le maître incontesté de nos critiques du Nouveau Testament
103 rtante et fait de son auteur le maître incontesté de nos critiques du Nouveau Testament. C’est l’œuvre d’un savant spécial
104 nos critiques du Nouveau Testament. C’est l’œuvre d’ un savant spécialisé, au premier chef, mais dans un domaine susceptibl
105 au premier chef, mais dans un domaine susceptible d’ intéresser le plus large public. On se souvient de l’ouvrage décisif q
106 d’intéresser le plus large public. On se souvient de l’ouvrage décisif que M. Goguel publia contre les thèses de M. Coucho
107 ge décisif que M. Goguel publia contre les thèses de M. Couchoud3. Plus récemment, il nous donnait une volumineuse Vie de
108 . Plus récemment, il nous donnait une volumineuse Vie de Jésus 4 dont le succès fut grand et les conclusions vivement discu
109 us récemment, il nous donnait une volumineuse Vie de Jésus 4 dont le succès fut grand et les conclusions vivement discutée
110 ouvrage qu’il nous donne aujourd’hui est la suite de cette Vie de Jésus, et les questions qu’il pose n’apparaissent pas mo
111 u’il nous donne aujourd’hui est la suite de cette Vie de Jésus, et les questions qu’il pose n’apparaissent pas moins passio
112 nous donne aujourd’hui est la suite de cette Vie de Jésus, et les questions qu’il pose n’apparaissent pas moins passionna
113 Quelle fut la genèse psychologique et historique de la croyance à la résurrection de Jésus ? C’est ainsi que M. Goguel dé
114 ue et historique de la croyance à la résurrection de Jésus ? C’est ainsi que M. Goguel définit l’objet de sa recherche, en
115 Jésus ? C’est ainsi que M. Goguel définit l’objet de sa recherche, en insistant sur le fait que la description qu’il va do
116 e ne soit un peu trop ambitieuse. Car l’hypothèse de travail que M. Goguel adopte au départ revêt bel et bien la forme d’u
117 oguel adopte au départ revêt bel et bien la forme d’ une explication de cause à effet. On pense couramment, dit-il, que la
118 part revêt bel et bien la forme d’une explication de cause à effet. On pense couramment, dit-il, que la foi chrétienne est
119 ue la foi chrétienne est née parce que le tombeau de Jésus fut trouvé vide. Mais il se pourrait qu’au contraire, on ait cr
120 tombeau vide à cause de la foi qu’on avait en la vie céleste de Jésus. L’Histoire est-elle cause ou effet de la foi ? M. G
121 e à cause de la foi qu’on avait en la vie céleste de Jésus. L’Histoire est-elle cause ou effet de la foi ? M. Goguel incli
122 este de Jésus. L’Histoire est-elle cause ou effet de la foi ? M. Goguel incline vers l’effet. Suivons-le dans sa déduction
123 sa déduction. Dans une première partie qui décrit d’ une façon remarquable les diverses formes de la croyance à la résurrec
124 écrit d’une façon remarquable les diverses formes de la croyance à la résurrection chez Paul et Jean, puis chez les rédact
125 e concrétisation toujours plus rigoureuse du fait de la résurrection. Il lui reste alors, dans une deuxième partie, à défa
126 ire trop bien faite, et à démolir, avec une sorte de minutieuse indifférence, tous les récits bibliques relatifs à la sépu
127 venues au sépulcre, n’avaient pas trouvé le corps de Jésus. Cette création s’est faite sans qu’il soit nécessaire ou légit
128 ’est faite sans qu’il soit nécessaire ou légitime de supposer à son origine une fraude qui, pour être pieuse, n’en serait
129 M. Goguel ne paraît pas s’être beaucoup préoccupé de justifier sa méthode. Il n’est pas trop aisé de la définir. Elle reco
130 é de justifier sa méthode. Il n’est pas trop aisé de la définir. Elle recourt avant tout à la critique interne des textes,
131 et la valeur sont très variables. Il semble qu’un de ses principes soit l’élimination de tout ce qui, dans le texte bibliq
132 semble qu’un de ses principes soit l’élimination de tout ce qui, dans le texte biblique, paraît en soi contradictoire ou
133 p bien. En somme, il adopte à peu près l’attitude d’ un juge d’instruction qui aurait choisi comme prévenus les auteurs ano
134  ; c’est même, si l’on veut, une façon paradoxale de donner tout leur prix aux quelques faits qui résistent à l’érosion cr
135 ent à l’érosion critique, et qui permettent alors de réfuter M. Couchoud. Dirons-nous que cette méfiance méthodique suffit
136 fit à convaincre le lecteur qu’il s’agit bien ici d’ une science ? Il y a deux raisons d’en douter. La première, c’est l’ex
137 agit bien ici d’une science ? Il y a deux raisons d’ en douter. La première, c’est l’extrême diversité des conjectures form
138 iquée aux mêmes endroits du texte. La comparaison de ces conjectures fait soupçonner très vite leur gratuité ; surtout, el
139 gratuité ; surtout, elle fait apparaître le rôle de l’interprétation psychologique, et c’est là le second obstacle. M. Go
140 M. Goguel tire des arguments, pour lui décisifs, de certaines « vraisemblances » qui nous paraissent souvent bien pauvres
141 l, avec le texte biblique intégral, on est frappé de voir que le récit se trouve, dans tous les cas, affadi et banalisé. S
142 décolorer. Et l’on se demande ce qui subsisterait de ses conclusions si on leur appliquait les critères dont il use envers
143 historico-psychologique l’inauthenticité probable d’ un professeur.) M. Goguel ne fait-il pas comme les premiers croyants —
144 s premiers croyants — et avec la même bonne foi — de la rétrohistoire, de l’imagerie psychologique ? Je sens bien la gravi
145  et avec la même bonne foi — de la rétrohistoire, de l’imagerie psychologique ? Je sens bien la gravité de ce reproche. Ma
146 ’imagerie psychologique ? Je sens bien la gravité de ce reproche. Mais M. Goguel semble d’avance l’avoir minimisé, en rédu
147 la gravité de ce reproche. Mais M. Goguel semble d’ avance l’avoir minimisé, en réduisant toute son œuvre aux proportions
148 isé, en réduisant toute son œuvre aux proportions d’ une génétique descriptive, et en se bornant à réfuter des textes sans
149 en se bornant à réfuter des textes sans préjuger de la réalité des faits. Minimiser ! telle pourrait être la devise de l’
150 faits. Minimiser ! telle pourrait être la devise de l’école illustrée par M. Goguel. Il répondra que c’est au bénéfice du
151 dmirant à chaque page l’ingéniosité et la science de M. Goguel, on se sent parfois gêné par l’anachronisme évident de ses
152 n se sent parfois gêné par l’anachronisme évident de ses jugements psychologiques. Il y a là un procédé tout inconscient m
153 onscient mais qui rappelle irrésistiblement celui de certains humoristes. Les rédacteurs des évangiles étaient-ils vraimen
154 aiment si « bourgeois », si prudents, si soucieux de logique, si incapables d’y atteindre, si aveuglés sur leurs contradic
155 i prudents, si soucieux de logique, si incapables d’ y atteindre, si aveuglés sur leurs contradictions ? N’étaient-ils pas,
156 ? N’étaient-ils pas, bien plus que nous, capables de voir dans les contradictions mêmes d’un récit, la marque de la vie et
157 s, capables de voir dans les contradictions mêmes d’ un récit, la marque de la vie et des passions ? Prenons, à peu près au
158 ns les contradictions mêmes d’un récit, la marque de la vie et des passions ? Prenons, à peu près au hasard, l’exemple de
159 contradictions mêmes d’un récit, la marque de la vie et des passions ? Prenons, à peu près au hasard, l’exemple de Marc, c
160 ssions ? Prenons, à peu près au hasard, l’exemple de Marc, chapitre 16. De ce que l’ange qui apparaît au tombeau vide rass
161 u près au hasard, l’exemple de Marc, chapitre 16. De ce que l’ange qui apparaît au tombeau vide rassure les femmes, au ver
162 et 8, M. Goguel déduit incontinent que le premier de ces versets a été ajouté après coup. Il le retranche donc. Cela fait,
163 homogène ». Certes. Mais qu’on imagine un groupe de femmes qui pénètrent dans un tombeau, qui le trouvent vide, qui voien
164 et voici que cet ange leur parle ! Les réactions de ces femmes n’auront probablement rien d’homogène et seront même plus
165 éactions de ces femmes n’auront probablement rien d’ homogène et seront même plus contradictoires qu’aucun récit ne peut le
166 a méthode, il reste que les conclusions négatives de M. Goguel sont loin d’être aussi ruineuses pour la foi que beaucoup d
167 les conclusions négatives de M. Goguel sont loin d’ être aussi ruineuses pour la foi que beaucoup de croyants ne le craign
168 u’il indique lui-même, c’est que, du point de vue de la foi vivante, les postulats critiques de l’auteur n’ont aucune forc
169 de vue de la foi vivante, les postulats critiques de l’auteur n’ont aucune force de contrainte. C’est l’Écriture et le dog
170 ostulats critiques de l’auteur n’ont aucune force de contrainte. C’est l’Écriture et le dogme qui les jugent, et non l’inv
171 de Calvine. La seconde, c’est que M. Goguel, loin d’ attaquer les dogmes, ne démolit que les preuves matérielles dont l’esp
172 art des historiens modernes qui ont voulu déduire de leur critique la relativité des articles de foi, M. Goguel cherche à
173 duire de leur critique la relativité des articles de foi, M. Goguel cherche à débarrasser la foi de la relativité des preu
174 es de foi, M. Goguel cherche à débarrasser la foi de la relativité des preuves historiques. En nous montrant qu’elles peuv
175 être contestées, pour la plupart, il nous délivre d’ une tentation permanente. Du même coup, il ruine d’ailleurs certaines
176 ruine d’ailleurs certaines objections classiques de l’incroyance (l’assimilation de la résurrection de Jésus au mythe du
177 ctions classiques de l’incroyance (l’assimilation de la résurrection de Jésus au mythe du Dieu mort et ressuscité, en part
178 e l’incroyance (l’assimilation de la résurrection de Jésus au mythe du Dieu mort et ressuscité, en particulier). Pour M. M
179 saurait être au détriment de la foi. Car l’office de la foi n’est pas de nous fournir une explication probante du miracle 
180 iment de la foi. Car l’office de la foi n’est pas de nous fournir une explication probante du miracle ; elle se trahit ell
181 humaine ne peut réellement appuyer ; car l’œuvre de la chair, c’est de refuser Dieu, même alors qu’il se rend visible. Et
182 ellement appuyer ; car l’œuvre de la chair, c’est de refuser Dieu, même alors qu’il se rend visible. Et ce n’est point par
183 e paraît être, en fin de compte, la justification de la critique historique. C’est dire qu’elle triomphe en général au ter
184 chez Payot. 4. Chez Payot. c. Rougemont Denis de , « [Compte rendu] Sur la méthode de M. Goguel », Le Semeur, Paris, no
185 ugemont Denis de, « [Compte rendu] Sur la méthode de M. Goguel », Le Semeur, Paris, novembre 1934, p. 29-35. d. Il s’agit
186 ur, Paris, novembre 1934, p. 29-35. d. Il s’agit d’ une note critique de La Foi à la résurrection de Jésus dans le christi
187 1934, p. 29-35. d. Il s’agit d’une note critique de La Foi à la résurrection de Jésus dans le christianisme primitif, de
188 t d’une note critique de La Foi à la résurrection de Jésus dans le christianisme primitif, de Maurice Goguel, publié à la
189 rrection de Jésus dans le christianisme primitif, de Maurice Goguel, publié à la Librairie Ernest Leroux. e. Voir le comp
190 roux. e. Voir le compte rendu que Rougemont fait de L’Humanité de Jésus d’après Calvin de Max Dominicé.
191 le compte rendu que Rougemont fait de L’Humanité de Jésus d’après Calvin de Max Dominicé.
3 1935, Le Semeur, articles (1933–1949). La cité (avril-mai 1935)
192 tout d’abord été frappé par le léger anachronisme de ce petit mot de cité. Une image s’est immédiatement formée devant mes
193 frappé par le léger anachronisme de ce petit mot de cité. Une image s’est immédiatement formée devant mes yeux : l’image
194 st immédiatement formée devant mes yeux : l’image d’ un clerc en vêtements moyenâgeux circulant dans les perspectives d’un
195 ements moyenâgeux circulant dans les perspectives d’ un tableau de maître italien. La somme de saint Thomas sous le bras, m
196 geux circulant dans les perspectives d’un tableau de maître italien. La somme de saint Thomas sous le bras, mon chrétien a
197 pectives d’un tableau de maître italien. La somme de saint Thomas sous le bras, mon chrétien arpentait les portiques d’une
198 ous le bras, mon chrétien arpentait les portiques d’ une de ces villes du Quattrocento, où tout était bâti à la mesure de l
199 bras, mon chrétien arpentait les portiques d’une de ces villes du Quattrocento, où tout était bâti à la mesure de l’homme
200 s du Quattrocento, où tout était bâti à la mesure de l’homme, où tout, — sauf les églises, — semblait avoir été conçu pour
201 — semblait avoir été conçu pour demeurer à portée de la main, dans les limites où le pouvoir d’une vocation peut s’exercer
202 portée de la main, dans les limites où le pouvoir d’ une vocation peut s’exercer. Je voyais cette ville, où tout portait le
203 on Dieu. Tel était donc mon rêve, mon imagination de l’homme chrétien dans la cité chrétienne. Quelques jours plus tard,
204 enne. Quelques jours plus tard, je me vis obligé de traverser à pied la banlieue parisienne. C’était du côté des faubourg
205 e permettez cet euphémisme académique. Les termes de chrétien et de cité, qui, dans l’image moyenâgeuse me paraissaient se
206 euphémisme académique. Les termes de chrétien et de cité, qui, dans l’image moyenâgeuse me paraissaient se correspondre e
207 dain, dans la réalité des villes modernes, privés de toute espèce de commune mesure. L’un devenait tout petit, l’autre éno
208 alité des villes modernes, privés de toute espèce de commune mesure. L’un devenait tout petit, l’autre énorme. En effet, l
209 ait tout petit, l’autre énorme. En effet, la cité d’ aujourd’hui est quelque chose de littéralement démesuré, un ensemble d
210 En effet, la cité d’aujourd’hui est quelque chose de littéralement démesuré, un ensemble de signes abstraits : SDN, BIT, U
211 lque chose de littéralement démesuré, un ensemble de signes abstraits : SDN, BIT, URSS, SFIO, CGT, NSDAP, un monstrueux co
212 T, URSS, SFIO, CGT, NSDAP, un monstrueux complexe de puissances collectives, de masses électorales, de lois économiques. U
213 un monstrueux complexe de puissances collectives, de masses électorales, de lois économiques. Un jeu secret qui se joue su
214 de puissances collectives, de masses électorales, de lois économiques. Un jeu secret qui se joue sur nos têtes et dont la
215 seule qui a changé. En même temps qu’elle cessait d’ être proportionnée à la mesure de l’homme, l’homme cessait d’obéir à l
216 qu’elle cessait d’être proportionnée à la mesure de l’homme, l’homme cessait d’obéir à la mesure de la foi. Je n’étonnera
217 ortionnée à la mesure de l’homme, l’homme cessait d’ obéir à la mesure de la foi. Je n’étonnerai personne si je constate qu
218 e de l’homme, l’homme cessait d’obéir à la mesure de la foi. Je n’étonnerai personne si je constate que dans l’humanité co
219 tion toutefois qu’elles se confondent avec celles de la bourgeoisie. Et maintenant nous comprendrons peut-être mieux le se
220 nous comprendrons peut-être mieux le sens concret de la question, à laquelle je vais limiter mes réflexions, ce soir : — q
221 lexions, ce soir : — quelle peut être la vocation de ce chrétien dans cette cité ? Ce chrétien en minorité dans une masse
222 tte cité ? Ce chrétien en minorité dans une masse d’ hommes qui, elle-même, paraît tellement impuissante sur les conseils d
223 me, paraît tellement impuissante sur les conseils de la cité ? N’est-il pas ridicule de poser la question ? N’est-il pas é
224 r les conseils de la cité ? N’est-il pas ridicule de poser la question ? N’est-il pas évident, à première vue, que le chré
225 ne le craint plus ? Et dès lors, à quoi servirait de méditer sur la manière dont ce chrétien pourrait ou devrait exercer u
226 meurer inefficace ? Le chrétien est-il possesseur d’ un secret qui lui permettrait de faire plus ou mieux que les autres ?
227 est-il possesseur d’un secret qui lui permettrait de faire plus ou mieux que les autres ? A-t-il des lumières spéciales su
228 es ? A-t-il des lumières spéciales sur les moyens de résoudre la crise, d’organiser la production ou de conclure des trait
229 es spéciales sur les moyens de résoudre la crise, d’ organiser la production ou de conclure des traités ? Et si ce n’est pa
230 e résoudre la crise, d’organiser la production ou de conclure des traités ? Et si ce n’est pas le cas, ne ferait-il pas mi
231 Et si ce n’est pas le cas, ne ferait-il pas mieux de se limiter à son domaine, d’ailleurs de plus en plus restreint ? À la
232 illeurs de plus en plus restreint ? À la question de sa vocation dans la cité, ne devra-t-on pas opposer une question préa
233 qu’on en parle. J’irai même plus loin : l’action d’ un intellectuel laïque quelconque apparaît tout à fait dérisoire dans
234 gations économiques, ni les forces irrationnelles de la race, de la classe ou des nationalismes exaspérés, n’ont cure de n
235 omiques, ni les forces irrationnelles de la race, de la classe ou des nationalismes exaspérés, n’ont cure de nos avis, de
236 classe ou des nationalismes exaspérés, n’ont cure de nos avis, de nos révoltes. Que nous soyons chrétiens ou non, nous aut
237 nationalismes exaspérés, n’ont cure de nos avis, de nos révoltes. Que nous soyons chrétiens ou non, nous autres pauvres i
238 res intellectuels, il nous faut perdre l’illusion d’ exercer aucune puissance. À moins de nous faire journalistes ! L’obser
239 re l’illusion d’exercer aucune puissance. À moins de nous faire journalistes ! L’observation objective du monde ramène le
240 ccupation pénible à laquelle Dieu soumet les fils de l’homme. J’ai vu tout ce qui se fait sous les cieux, et voici, tout e
241 ité et poursuite du vent. » Je plaindrais l’homme d’ action qui n’aurait jamais eu ce cri, qui n’aurait jamais éprouvé cett
242 e soir, j’ai éprouvé plus que jamais le sentiment d’ une grande absurdité. Sommes-nous bien des David prêts à marcher contr
243 vid prêts à marcher contre Goliath, ou simplement de tout petits Don Quichotte s’excitant à une lutte impossible ? Je lais
244 règne vienne ! » Or, une telle prière nous charge d’ une responsabilité contre laquelle aucune raison ne prévaudra jamais.
245 u, et que nous n’avons pas le droit ni le pouvoir de discuter. Elle nous adresse une vocation. Et alors, nous voici placés
246 écider librement si oui ou non cela vaut la peine d’ entrer dans la tourmente de la cité. Nous prions : « Que Ton règne vie
247 non cela vaut la peine d’entrer dans la tourmente de la cité. Nous prions : « Que Ton règne vienne ! » et si nous ne faiso
248 t mesuré, mieux que personne peut-être, la vanité de toute action, agit tout de même, non point parce qu’il distingue un s
249 yez transformés », dit saint Paul. Tout le secret de notre vocation est contenu dans ces mots-là, et si je parvenais ce so
250 et si vous n’emportiez d’ici que le seul souvenir de ces mots, je penserais avoir atteint mon but. Ne vous conformez pas,
251 sont là les deux termes qui s’opposent dans notre vie , qui commandent notre vocation. La forme de ce monde : vous savez ce
252 otre vie, qui commandent notre vocation. La forme de ce monde : vous savez ce qu’elle est, et vous savez qu’elle est mauva
253 est, et vous savez qu’elle est mauvaise. La forme de ce monde, ce sont toutes les puissances que j’énumérais tout à l’heur
254 loi du talion. Ici, c’est le capitalisme créateur de chômage, là c’est la tyrannie des dictatures. C’est contre la forme d
255 socialistes, et avec eux des masses grandissantes de bourgeois lentement dépossédés des privilèges acquis par leur travail
256 avantage : ce sera tout ce que résume le seul mot de péché — tout ce qui s’oppose à la venue du règne de justice qu’il app
257 péché — tout ce qui s’oppose à la venue du règne de justice qu’il appelle. « Nous n’appartenons pas à la forme du monde. 
258 aux lois communes ? Non pas ! Et gardons-nous ici de toute illusion optimiste ! Chrétiens, nous restons hommes, entièremen
259 mmes, entièrement hommes, entièrement prisonniers de la forme mauvaise du monde. C’est là le fait. Mais notre foi proteste
260 is non pas comme étant du monde. C’est là le sens de nos prières, de nos angoisses et de l’appel de toute l’humanité à la
261 étant du monde. C’est là le sens de nos prières, de nos angoisses et de l’appel de toute l’humanité à la justice. Mais al
262 st là le sens de nos prières, de nos angoisses et de l’appel de toute l’humanité à la justice. Mais alors, cette forme du
263 ns de nos prières, de nos angoisses et de l’appel de toute l’humanité à la justice. Mais alors, cette forme du monde que l
264 c’est à cette transformation que nous appartenons de droit, dès l’instant où nous l’annonçons. Mais qu’est-ce que cette tr
265 ons. Mais qu’est-ce que cette transformation ? Et de quel droit pouvons-nous l’annoncer ? Est-ce un ensemble de réformes,
266 roit pouvons-nous l’annoncer ? Est-ce un ensemble de réformes, un programme révolutionnaire ? Est-ce l’utopie d’un avenir
267 s, un programme révolutionnaire ? Est-ce l’utopie d’ un avenir meilleur, ce « millenium » dont l’Apocalypse nous donne la v
268 aîné pour mille ans ? Réforme, révolution, utopie d’ un monde meilleur ; — ne faisons pas les dégoûtés : nous y pensons tou
269 sent, refuse aussi toute solidarité avec l’espoir de ceux qui souffrent et qui créent. Mais s’il accepte pratiquement de t
270 ent et qui créent. Mais s’il accepte pratiquement de travailler à la révolution, le chrétien n’a pas le droit de laisser s
271 ler à la révolution, le chrétien n’a pas le droit de laisser subsister la moindre équivoque sur les motifs de cette accept
272 ser subsister la moindre équivoque sur les motifs de cette acceptation. S’il annonce, au sens fort du terme, la transforma
273 annonce, au sens fort du terme, la transformation de ce monde, ce n’est pas en vertu des seuls désirs humains, qu’il a cer
274 nement lui aussi, mais qu’il n’aurait aucun droit de prêcher. S’il annonce, s’il prêche cette transformation, non pas comm
275 Ce que nous annonçons au monde, c’est la promesse de celui qui a dit : « Prenez courage, j’ai vaincu le monde. » — Christ
276 est ressuscité. Il est vivant ! Par lui, la forme de ce monde, et sa puissance dernière, la mort, sont absolument dominées
277 ice a paru, et nous en témoignons par nos actions de grâce — précisément par nos actions ! — et je voudrais mettre l’accen
278 n que vous ne pensiez pas qu’il ne s’agit ici que de pathos sentimental. Action, et non pas sentiment, ni piété, ni extase
279 raisons si bonnes, par exemple, mais si courtes, de l’opportunisme sceptique. Si nous croyons à cette justice, nous ne po
280 ns à cette justice, nous ne pouvons autrement que de courir vers elle ! Nous ne pouvons autrement que d’espérer de toutes
281 courir vers elle ! Nous ne pouvons autrement que d’ espérer de toutes nos forces son retour ! Nous protestons contre ce mo
282 rs elle ! Nous ne pouvons autrement que d’espérer de toutes nos forces son retour ! Nous protestons contre ce monde au nom
283 e que nous annonçons : ainsi donc, ces deux temps de notre vocation révèlent un fait unique, renvoient à un motif unique :
284 nt à un motif unique : la mort et la résurrection de Jésus-Christ. Ni l’attente passive, ni l’ardeur messianique, ne sont
285 i des attitudes chrétiennes ; mais voilà le motif de notre action : nous attestons la justice apparue, et dans l’élan de n
286 nous attestons la justice apparue, et dans l’élan de notre action de grâce, prisonniers que nous sommes de la forme terres
287 a justice apparue, et dans l’élan de notre action de grâce, prisonniers que nous sommes de la forme terrestre, nous prêcho
288 otre action de grâce, prisonniers que nous sommes de la forme terrestre, nous prêchons une victoire acquise et le retour p
289 prêchons une victoire acquise et le retour promis de cette justice ! ⁂ Il se peut que certains d’entre vous trouvent ces p
290 lement théologiques. Il se peut que ma définition de la vocation du chrétien vous ait paru, dès le principe, assez abstrai
291 d’entre vous, sont en train de penser cela. Avant d’ aborder le problème de l’action politique du chrétien, je tiens à dire
292 train de penser cela. Avant d’aborder le problème de l’action politique du chrétien, je tiens à dire deux mots concernant
293 te objection informulée. La question que je viens d’ esquisser à grands traits, c’est celle des fins dernières de l’action
294 r à grands traits, c’est celle des fins dernières de l’action du chrétien. C’est la triple question que le peintre Gauguin
295 n que le peintre Gauguin avait choisie pour titre de son fameux triptyque : D’où venons-nous ? Où en sommes-nous ? Où allo
296 vait choisie pour titre de son fameux triptyque : D’ où venons-nous ? Où en sommes-nous ? Où allons-nous ? À la question :
297 a cité telle qu’elle est devenue. À la question : D’ où venons-nous ? j’ai répondu en rappelant que l’origine vivante de no
298 ? j’ai répondu en rappelant que l’origine vivante de notre action, c’est l’incarnation de la justice en Jésus-Christ ressu
299 gine vivante de notre action, c’est l’incarnation de la justice en Jésus-Christ ressuscité. À la question : Où allons-nous
300 Seigneur vient ! — et nous allons à la rencontre de son règne, vers la transformation radicale de toutes choses. Et je vo
301 tre de son règne, vers la transformation radicale de toutes choses. Et je vous demande, maintenant, si l’on a le droit de
302 t je vous demande, maintenant, si l’on a le droit de se mettre en route avant d’avoir posé ces trois questions, avant d’y
303 t, si l’on a le droit de se mettre en route avant d’ avoir posé ces trois questions, avant d’y avoir répondu ? Oh, je sais
304 ute avant d’avoir posé ces trois questions, avant d’ y avoir répondu ? Oh, je sais bien que le monde d’aujourd’hui retentit
305 d’y avoir répondu ? Oh, je sais bien que le monde d’ aujourd’hui retentit chaque jour d’appels, d’appels à la lutte immédia
306 n que le monde d’aujourd’hui retentit chaque jour d’ appels, d’appels à la lutte immédiate, pour des objectifs imprécis, ou
307 onde d’aujourd’hui retentit chaque jour d’appels, d’ appels à la lutte immédiate, pour des objectifs imprécis, ou au contra
308 précis qu’on ne veut plus rien voir au-delà. Trop de chefs nous crient : en avant ! sans avoir osé regarder plus loin que
309 r osé regarder plus loin que le bout des semelles de leurs bottes. Leur en avant ne sait pas où il va ! N’est-ce pas ainsi
310 es fuyards ? Comment ne voient-ils pas que chacun de leurs gestes pose la question des fins dernières de l’homme, et cela,
311 leurs gestes pose la question des fins dernières de l’homme, et cela, qu’ils le veuillent ou non ? Et s’ils le voient, co
312 ncore éluder si cavalièrement le problème dernier de l’action ? Et je demande encore : qui donc osera poser ces grandes qu
313 cité contemporaine ? Et s’il ne le fait pas, qui d’ autre est en mesure d’assumer cette charge inquiétante ? Si le chrétie
314 Et s’il ne le fait pas, qui d’autre est en mesure d’ assumer cette charge inquiétante ? Si le chrétien ne pose pas ces ques
315 pas alors, justement, qu’il s’évade ? Qu’il sort de sa réalité ? Qu’il doute de la justice de Dieu ? Et qu’il trahit sa v
316 s’évade ? Qu’il sort de sa réalité ? Qu’il doute de la justice de Dieu ? Et qu’il trahit sa vocation première ? Je pense
317 il sort de sa réalité ? Qu’il doute de la justice de Dieu ? Et qu’il trahit sa vocation première ? Je pense que beaucoup d
318 ut qu’elles demeurent posées comme un grand signe d’ interrogation au-dessus de ce que j’ai à vous dire maintenant. Vocatio
319 es comme un grand signe d’interrogation au-dessus de ce que j’ai à vous dire maintenant. Vocation du chrétien dans la cité
320 tation, une annonce. Protestation contre la forme de ce siècle, annonce active de sa transformation. Ici se posent deux gr
321 tion contre la forme de ce siècle, annonce active de sa transformation. Ici se posent deux grands problèmes pratiques : es
322 ratiques : est-il possible et nécessaire, partant de cette vocation, d’aboutir à ce que j’appellerai une politique chrétie
323 ossible et nécessaire, partant de cette vocation, d’ aboutir à ce que j’appellerai une politique chrétienne, un parti des c
324 re des partis existants, et fasse sienne la cause de ce parti ? Ce sera la seconde question. Au sujet de la politique chré
325 u sujet de la politique chrétienne, permettez-moi d’ être aussi bref que catégorique. Si nous considérons l’histoire, si no
326 leçons, il me paraît qu’aucun doute n’est permis. De Constantin, premier empereur chrétien commandant aux chrétiens de fai
327 remier empereur chrétien commandant aux chrétiens de faire la guerre, à Charlemagne baptisant les Saxons pour leur prouver
328 ptisant les Saxons pour leur prouver la puissance de son glaive, et tout accessoirement celle de l’Esprit ; des chevaliers
329 sance de son glaive, et tout accessoirement celle de l’Esprit ; des chevaliers partant pour la Croisade, aux milices de Lo
330 chevaliers partant pour la Croisade, aux milices de Loyola, poussant les princes à une autre croisade non moins sanglante
331 lante, mais sans doute moins féconde pour l’essor de la civilisation ; des anabaptistes de Münster aux puritains capitalis
332 our l’essor de la civilisation ; des anabaptistes de Münster aux puritains capitalistes ; du Roi-Soleil, prince très chrét
333 qu’à ce chancelier Dollfuss faisant tirer à coups de canon contre les ouvriers de Vienne avec l’appui du parti clérical, —
334 aisant tirer à coups de canon contre les ouvriers de Vienne avec l’appui du parti clérical, — l’histoire des politiques ch
335 ne politique chrétienne qui réussit n’a plus rien de chrétien que le prétexte. Les Églises se livrent au jugement du monde
336 t au jugement du monde, dès lors qu’elles cessent d’ être avant tout un jugement porté sur le monde. Toute politique chréti
337 appelle notre protestation. Quel est donc le rôle de l’Église ? Est-il de prêcher l’Évangile, ou bien de faire triompher t
338 ation. Quel est donc le rôle de l’Église ? Est-il de prêcher l’Évangile, ou bien de faire triompher telle ou telle doctrin
339 l’Église ? Est-il de prêcher l’Évangile, ou bien de faire triompher telle ou telle doctrine sociale adoptée par opportuni
340 ciennes, — à supposer que cela soit possible, que de questions demeurent menaçantes ! Voici l’Église liée bon gré mal gré
341 et séduisant par sa puissance ; voici le message de la transformation qui se change en message de la conservation ; et vo
342 age de la transformation qui se change en message de la conservation ; et voici l’ombre du Grand Inquisiteur qui vient bén
343 odifiée, rationalisée, dispensant chaque chrétien de reconnaître et d’accepter les risques d’une vocation toujours unique,
344 sée, dispensant chaque chrétien de reconnaître et d’ accepter les risques d’une vocation toujours unique, et parfois scanda
345 chrétien de reconnaître et d’accepter les risques d’ une vocation toujours unique, et parfois scandaleuse. Je ne crois pas
346 ois pas que les chrétiens possèdent, du seul fait de leur foi, des lumières spéciales sur les problèmes techniques que pos
347 péciales sur les problèmes techniques que pose la vie de la cité moderne. Je ne crois pas qu’il soit souhaitable que se for
348 ales sur les problèmes techniques que pose la vie de la cité moderne. Je ne crois pas qu’il soit souhaitable que se forme
349 leur devoir, toute leur mission dans la cité, que d’ une seule et unique manière, et c’est en devenant et en restant de vra
350 nique manière, et c’est en devenant et en restant de vraies Églises, c’est-à-dire des annonciatrices de la Parole, du juge
351 e vraies Églises, c’est-à-dire des annonciatrices de la Parole, du jugement porté sur la forme du monde, et de la grâce of
352 role, du jugement porté sur la forme du monde, et de la grâce offerte à ceux qui croient. Mais ceci dit, et une fois repo
353 voici donc en face de la seconde question : celle de l’adhésion à l’un ou l’autre des partis politiques existants. Bien en
354 ces politiques et sociales dans la cité française d’ aujourd’hui. Nous entrerions dans un débat terriblement technique et f
355 e et faussement précis, et nous aurions vite fait de perdre de vue la vocation particulière du chrétien. Je me contenterai
356 ement précis, et nous aurions vite fait de perdre de vue la vocation particulière du chrétien. Je me contenterai donc d’ex
357 particulière du chrétien. Je me contenterai donc d’ examiner un seul exemple, le plus riche à mon sens, et peut-être le pl
358 re la forme actuelle du monde, prédication active de sa transformation, — si telle est bien la vocation civique du chrétie
359 ation civique du chrétien, beaucoup seront tentés de penser que cela conduit au socialisme. Pour ma part, je confesse volo
360 , à première vue, plus conforme à notre espérance de justice. Vous dirai-je que c’est précisément à cause de cette similit
361 que c’est précisément à cause de cette similitude d’ espérances, à cause de cette convergence apparente, à cause de cette t
362 à m’approcher avec une prudence critique extrême, de ce que l’on nomme l’idéal socialiste ? Beaucoup de braves gens condam
363 loc le socialisme, nous condamnons aussi une part de vérité d’origine proprement chrétienne. Le socialisme s’est identifié
364 ialisme, nous condamnons aussi une part de vérité d’ origine proprement chrétienne. Le socialisme s’est identifié avec la d
365 isons pas mieux que lui à cet égard, gardons-nous de l’attaquer ! Le socialisme proteste contre les conditions actuelles d
366 yons pas mieux que lui à la justice, gardons-nous de le condamner ! C’est lui qui fait, dans l’incroyance, ce que nous aur
367 rions dû faire dans la foi. — Mais si l’on refuse d’ attaquer le socialisme, faudra-t-il accepter aussitôt le fameux trait
368 me, faudra-t-il accepter aussitôt le fameux trait d’ union qu’on nous propose, entre socialiste et chrétien ? Prenons bien
369 s une justice divine, déjà réalisée. Notre devoir de charité ne serait-il pas alors de déclarer ouvertement aux socialiste
370 e. Notre devoir de charité ne serait-il pas alors de déclarer ouvertement aux socialistes qu’entre leur but et notre but,
371 rs, il y a tout l’abîme qui sépare un idéal moral d’ une foi au Christ vivant ? Car le chrétien n’est pas idéaliste, et c’
372 point une théorie économique passagère. On a tort d’ attaquer uniquement le prétendu matérialisme socialiste, comme si le c
373 e et comme si les chrétiens ne vivaient pas aussi de pain. Le grand danger du socialisme n’est pas dans son matérialisme,
374 ais dans sa fausse spiritualité ; dans ce qu’il a de meilleur, non dans ce qu’il a de pire ; dans la tentation qu’il nous
375 dans ce qu’il a de meilleur, non dans ce qu’il a de pire ; dans la tentation qu’il nous offre d’un idéal humanitaire en l
376 il a de pire ; dans la tentation qu’il nous offre d’ un idéal humanitaire en lieu et place d’une foi. Si nous ne parvenons
377 ous offre d’un idéal humanitaire en lieu et place d’ une foi. Si nous ne parvenons pas à faire comprendre aux socialistes l
378 aire comprendre aux socialistes le sérieux absolu de cette distinction, nous risquons de prêcher contre Dieu en travaillan
379 érieux absolu de cette distinction, nous risquons de prêcher contre Dieu en travaillant à leurs côtés ! Nous connaissons d
380 signifie pour eux le compromis entre leurs motifs de croyants et les motifs des camarades. Pensant à eux, je résumerai tou
381 J’ajouterai cependant une remarque. Si je refuse d’ adhérer pratiquement au socialisme, c’est d’abord à cause du marxisme,
382 tis, pour des raisons assez sérieuses et valables d’ opportunité politique. L’impuissance politique des formations de masse
383 politique. L’impuissance politique des formations de masses s’est avérée depuis la guerre, soit en Russie, où Lénine triom
384 , soit en Russie, où Lénine triompha par le moyen d’ une minorité infime, soit en Allemagne, où les partis de gauche, malgr
385 minorité infime, soit en Allemagne, où les partis de gauche, malgré leur organisation incomparable, se virent balayés en d
386 e, se virent balayés en dix jours par les troupes d’ assaut hitlériennes. Mais je crois qu’un chrétien peut adresser une cr
387 tique encore plus grave à tout parti. L’idée même de parti paraît absolument incompatible avec l’idée de vocation. Et la r
388 parti paraît absolument incompatible avec l’idée de vocation. Et la réalité pratique et quotidienne montre que cette oppo
389 C’est l’homme qui délègue à la majorité le souci de ses décisions. Et dans ce sens précis, il faut bien dire que les part
390 re que les partis sont les agents les plus actifs de la démoralisation des hommes modernes. N’ayant pas même l’excuse d’av
391 on des hommes modernes. N’ayant pas même l’excuse d’ avoir réussi pratiquement, ils ne peuvent se défendre contre le jugeme
392 lus à ce recours au Dieu tout-puissant qui permet de faire de si belles phrases, qui est si vrai, mais si « abstrait » — d
393 recours au Dieu tout-puissant qui permet de faire de si belles phrases, qui est si vrai, mais si « abstrait » — dit-on —, 
394 eut refuser ce qui existe qu’au nom d’une volonté de création. Je vous proposerai donc deux exemples concrets de vocation
395 n. Je vous proposerai donc deux exemples concrets de vocation chrétienne dans la cité. Et d’abord, à l’image que je vous
396 ’opposerai une image moderne, qui est aussi celle d’ un chrétien dans la cité, mais qui n’est pas cette fois une utopie. Ce
397 as cette fois une utopie. Cela se passe au Japon, de nos jours. Certains d’entre vous connaissent probablement la biograph
398 entre vous connaissent probablement la biographie de Kagawa, le chef du jeune Japon chrétien. Fils d’un conseiller de l’em
399 de Kagawa, le chef du jeune Japon chrétien. Fils d’ un conseiller de l’empereur et d’une geisha, Kagawa appartient à une c
400 hef du jeune Japon chrétien. Fils d’un conseiller de l’empereur et d’une geisha, Kagawa appartient à une classe honorable,
401 n chrétien. Fils d’un conseiller de l’empereur et d’ une geisha, Kagawa appartient à une classe honorable, et jouit à vingt
402 ient à une classe honorable, et jouit à vingt ans de tous les avantages qui sont chez nous ceux de la grande bourgeoisie.
403 ans de tous les avantages qui sont chez nous ceux de la grande bourgeoisie. Mais voilà qu’il se convertit, et c’est ici qu
404 e odieux entre la misère des bas-fonds et l’essor de la bourgeoisie capitaliste qui se développe très rapidement dans le J
405 te qui se développe très rapidement dans le Japon d’ avant la guerre, il comprend qu’il lui est impossible de se dire vraim
406 t la guerre, il comprend qu’il lui est impossible de se dire vraiment chrétien tant qu’il n’aura pas fait tout ce qui est
407 n pays, qui se consacre à la défense des intérêts de la classe opprimée. Que faire, sinon payer de sa personne ? Kagawa n’
408 êts de la classe opprimée. Que faire, sinon payer de sa personne ? Kagawa n’hésite pas. Il va vivre dans les bas-fonds. Av
409 pas. Il va vivre dans les bas-fonds. Avec un peu d’ argent que lui donne une mission américaine — très peu d’argent — il l
410 t que lui donne une mission américaine — très peu d’ argent — il loue une espèce de baraque dans le quartier le plus mal fa
411 éricaine — très peu d’argent — il loue une espèce de baraque dans le quartier le plus mal famé de la grande ville de Kobé,
412 pèce de baraque dans le quartier le plus mal famé de la grande ville de Kobé, et se met à prêcher l’Évangile. Mais son act
413 s le quartier le plus mal famé de la grande ville de Kobé, et se met à prêcher l’Évangile. Mais son activité ne se borne p
414 s enfants abandonnés, des ivrognes, tout le rebut d’ humanité dont les bas-fonds eux-mêmes ne savent que faire. Il faut lir
415 t que faire. Il faut lire l’effarante description de sa vie telle qu’il l’a racontée dans une espèce d’autobiographie roma
416 faire. Il faut lire l’effarante description de sa vie telle qu’il l’a racontée dans une espèce d’autobiographie romancée qu
417 e sa vie telle qu’il l’a racontée dans une espèce d’ autobiographie romancée qu’on a traduite en France sous ce titre : Ava
418 espérée s’étend mystérieusement sur ces quartiers d’ enfer. Les crimes diminuent, les enfants s’instruisent, des misères so
419 , en ressort triomphalement escorté par une foule d’ enfants qu’il a secourus, et dès lors le mouvement est lancé, l’opinio
420 à l’assainissement radical des slums ou bas-fonds de Kobé et de plusieurs villes japonaises, à la création d’importantes œ
421 ssement radical des slums ou bas-fonds de Kobé et de plusieurs villes japonaises, à la création d’importantes œuvres socia
422 et de plusieurs villes japonaises, à la création d’ importantes œuvres sociales, enfin à la constitution d’un grand mouvem
423 ortantes œuvres sociales, enfin à la constitution d’ un grand mouvement syndicaliste. Vocation du chrétien dans la cité. To
424 ocation du chrétien dans la cité. Tout le pouvoir de Kagawa se résume en effet dans ce seul mot de vocation. Il n’agit pas
425 oir de Kagawa se résume en effet dans ce seul mot de vocation. Il n’agit pas au bénéfice d’un parti. Il prêche et il prote
426 e seul mot de vocation. Il n’agit pas au bénéfice d’ un parti. Il prêche et il proteste au nom d’une foi sans cesse proclam
427 s revendiquées par le désir des hommes, à l’appui d’ un parti politique. Seules, ces vocations-là ont transformé le monde,
428 t pratiquement. Seules, elles sont apparues comme de fondamentales et créatrices objections de la foi à la forme du monde.
429 s comme de fondamentales et créatrices objections de la foi à la forme du monde. Mais, direz-vous encore, nous ne sommes p
430 gawa, ni même des salutistes, — pour ne rien dire de ces deux amis auxquels nous pensons tous ce soir et qui, du fond de l
431 uxquels nous pensons tous ce soir et qui, du fond de leur prison, tout près d’ici, posent à notre conscience leur silencie
432 s. Notre premier devoir dans la cité n’est-il pas de travailler en tant qu’intellectuels, — de même que le premier devoir
433 qu’intellectuels, — de même que le premier devoir de l’ingénieur reste de faire des plans et des calculs, et non pas de gâ
434 e même que le premier devoir de l’ingénieur reste de faire des plans et des calculs, et non pas de gâcher du ciment ? Si n
435 ste de faire des plans et des calculs, et non pas de gâcher du ciment ? Si nous nous mettions tous à faire de l’action soc
436 er du ciment ? Si nous nous mettions tous à faire de l’action sociale, à jouer les Kagawa, et à vivre dans les quartiers m
437 aine, professionnelle ? Je n’aurai pas le cynisme de vous répondre que ce serait là peut-être un remède tout trouvé à la c
438 ait là peut-être un remède tout trouvé à la crise de surproduction intellectuelle et à l’encombrement des carrières libéra
439 ent des carrières libérales. L’agriculture manque de bras, — dit-on… J’espère avoir une solution moins défaitiste à vous o
440 ce sera mon second exemple. Un écrivain américain de ces dernières années, l’un des porte-paroles de la nouvelle génératio
441 n de ces dernières années, l’un des porte-paroles de la nouvelle génération en pleine révolte contre la tyrannie bancaire
442 it une phrase qui condense très bien la substance de ce que je voudrais vous faire comprendre maintenant. La voici : « Dan
443 prendre maintenant. La voici : « Dans des époques de transition des bases culturelles, la critique qui ne jaillit pas de l
444 bases culturelles, la critique qui ne jaillit pas de la métaphysique et d’une véritable compréhension des expériences reli
445 critique qui ne jaillit pas de la métaphysique et d’ une véritable compréhension des expériences religieuses, est vaine, ir
446 e la plus méconnue par ceux qui font la politique de nos cités. Commentons brièvement cette phrase. La cité moderne est en
447 n’a osé prévoir l’aboutissement matériel et moral de la révolution industrielle, c’est-à-dire du capitalisme. La bourgeois
448 intellectuels, croient encore à certaines notions de justice et de respect de l’homme qui n’ont aucun rapport avec la mora
449 croient encore à certaines notions de justice et de respect de l’homme qui n’ont aucun rapport avec la morale pratique du
450 core à certaines notions de justice et de respect de l’homme qui n’ont aucun rapport avec la morale pratique du monde écon
451 a morale des affaires est à peu près le contraire de la morale, et que les nécessités économiques ne tiennent pas compte d
452 les nécessités économiques ne tiennent pas compte de nos beaux idéaux. Il résulte de ce divorce une crise profonde de la c
453 ennent pas compte de nos beaux idéaux. Il résulte de ce divorce une crise profonde de la culture, au sens le plus large du
454 éaux. Il résulte de ce divorce une crise profonde de la culture, au sens le plus large du terme. Les buts de l’intellectue
455 culture, au sens le plus large du terme. Les buts de l’intellectuel et son langage ne sont plus ceux de l’ouvrier ni du pe
456 e l’intellectuel et son langage ne sont plus ceux de l’ouvrier ni du petit-bourgeois provincial et encore moins ceux du ca
457 dia, et personne ne sait où il va. Il n’y a plus de commune mesure entre la pensée et l’action. La cité n’est plus dominé
458 sont atteintes ! Et c’est pourquoi toute réforme de détail, ou toute œuvre sociale partielle apparaissent vouées à l’éche
459 ces bases, et retrouvé la commune mesure. Donner de la soupe aux chômeurs, c’est très bien, mais cela n’atteint pas les r
460 âche spirituelle : retrouver cette commune mesure de la pensée et de l’action, de la culture et de l’économie ; or, elle n
461  : retrouver cette commune mesure de la pensée et de l’action, de la culture et de l’économie ; or, elle ne peut être cher
462 cette commune mesure de la pensée et de l’action, de la culture et de l’économie ; or, elle ne peut être cherchée sérieuse
463 ure de la pensée et de l’action, de la culture et de l’économie ; or, elle ne peut être cherchée sérieusement nulle part a
464 toire des grandes civilisations, c’est l’histoire de leur mesure commune, de leur règle centrale de pensée et d’action, ou
465 sations, c’est l’histoire de leur mesure commune, de leur règle centrale de pensée et d’action, ou si l’on veut, pour simp
466 re de leur mesure commune, de leur règle centrale de pensée et d’action, ou si l’on veut, pour simplifier, de leur morale.
467 sure commune, de leur règle centrale de pensée et d’ action, ou si l’on veut, pour simplifier, de leur morale. Et toute mor
468 ée et d’action, ou si l’on veut, pour simplifier, de leur morale. Et toute morale se fonde dans une religion, même la mora
469 morale se fonde dans une religion, même la morale de ceux qui se croient incroyants. Or c’est précisément cette tâche écra
470 écrasante mais aussi enthousiasmante, cette tâche de recréer une mesure et une morale communautaire que se sont assignée l
471 e. Le grand principe qui anime ces groupes, celui de la revue Esprit ou celui de L’Ordre nouveau , pour ne rien dire de
472 ces groupes, celui de la revue Esprit ou celui de L’Ordre nouveau , pour ne rien dire de plusieurs autres moins notoir
473 ou celui de L’Ordre nouveau , pour ne rien dire de plusieurs autres moins notoires, — le grand principe qui les anime, c
474 e grand principe qui les anime, c’est la primauté de la personne. — L’expression paraît bien abstraite. Que faut-il entend
475 , la personne, c’est ce que j’appelais l’exercice de la vocation. Ce qu’on nomme à Esprit ou à L’Ordre nouveau  : la pe
476 t et les institutions doivent être mis au service de l’homme ; or, c’est l’inverse qui se passe aujourd’hui ; l’État et le
477 t et les institutions doivent avoir pour seul but d’ assurer à chacun le libre et le plein exercice de sa vocation personne
478 d’assurer à chacun le libre et le plein exercice de sa vocation personnelle. Et c’est dans cet esprit qu’il s’agit de reb
479 ersonnelle. Et c’est dans cet esprit qu’il s’agit de rebâtir l’économie et les cadres sociaux. Vous voyez que nous retrouv
480 u chrétien. Mais vous voyez aussi qu’il s’agit là d’ une révolution profonde, car rien n’est plus profond qu’un changement
481 nde, car rien n’est plus profond qu’un changement de l’état d’esprit qui préside aux institutions. Si notre société est né
482 réside aux institutions. Si notre société est née de la Déclaration des droits de l’homme, il s’agit de donner à la sociét
483 e la Déclaration des droits de l’homme, il s’agit de donner à la société de demain une déclaration des devoirs de l’homme
484 oits de l’homme, il s’agit de donner à la société de demain une déclaration des devoirs de l’homme envers lui-même et son
485 la société de demain une déclaration des devoirs de l’homme envers lui-même et son prochain. Mais d’abord il s’agit, pour
486 abord il s’agit, pour les groupes personnalistes, de dénoncer et de combattre tout ce qui s’oppose au libre jeu des vocati
487 , pour les groupes personnalistes, de dénoncer et de combattre tout ce qui s’oppose au libre jeu des vocations dans la cit
488 dénoncer le capitalisme avec son principe immoral de la spéculation et du commerce de l’argent ; combattre la misère, car
489 principe immoral de la spéculation et du commerce de l’argent ; combattre la misère, car un homme qui n’a pas son pain ne
490 s qu’elle n’est en fait que l’opinion des maîtres de forges ou des parlementaires exploitant la bêtise publique. Mais tout
491 t rendues possibles que par un profond changement de l’état d’esprit général. Elles appellent une morale créatrice, prenan
492 ales trop idéalistes, ou cyniques. Et le triomphe d’ une telle morale, à son tour, ne sera possible, que si l’on peut dédui
493 tour, ne sera possible, que si l’on peut déduire de cette morale un système cohérent, englobant à la fois l’économie et l
494 fois l’économie et la pensée, et toutes les lois de la cité. Or, c’est à bâtir ce système, à développer ses conséquences
495 sociales, à imposer enfin à ses adeptes un style de vie communautaire, que travaillent depuis trois ans les groupes de L
496 ciales, à imposer enfin à ses adeptes un style de vie communautaire, que travaillent depuis trois ans les groupes de L’Ord
497 ire, que travaillent depuis trois ans les groupes de L’Ordre nouveau , et ceux de la revue Esprit . Le jeune mouvement p
498 ois ans les groupes de L’Ordre nouveau , et ceux de la revue Esprit . Le jeune mouvement personnaliste ne se donne pas p
499 mouvement chrétien ; vous y trouverez des hommes de toutes croyances et de toutes incroyances. Mais en fait, c’est le seu
500 ous y trouverez des hommes de toutes croyances et de toutes incroyances. Mais en fait, c’est le seul mouvement qui réponde
501 ment qui réponde, dès son principe, aux exigences de notre vocation. Ce n’est pas une politique chrétienne, ce n’est pas u
502 . C’est un ordre, une chevalerie ! Et le principe de cet ordre nouveau n’est autre que celui de la vocation personnelle. O
503 incipe de cet ordre nouveau n’est autre que celui de la vocation personnelle. Oui, le principe animateur et dynamique qui
504 sonne, — idée qu’apporta dans le monde le message de l’apôtre Paul, idée centrale de la doctrine de Calvin. Ordonner toute
505 monde le message de l’apôtre Paul, idée centrale de la doctrine de Calvin. Ordonner toutes choses, et d’abord la cité, à
506 ge de l’apôtre Paul, idée centrale de la doctrine de Calvin. Ordonner toutes choses, et d’abord la cité, à l’exercice libr
507 idèle des vocations, refaire un monde à la mesure de l’homme concret, de la personne, voilà le mot d’ordre du personnalism
508 refaire un monde à la mesure de l’homme concret, de la personne, voilà le mot d’ordre du personnalisme ; voilà son but, à
509 nt une chance plus concrète, une meilleure raison d’ espérer. Je dis bien, une chance concrète. Certes, le mouvement person
510 es : vous y trouverez toute une tactique nouvelle d’ action sociale, toute une tactique de rupture avec le désordre établi,
511 que nouvelle d’action sociale, toute une tactique de rupture avec le désordre établi, jusque dans le détail de la vie. Et
512 re avec le désordre établi, jusque dans le détail de la vie. Et si, comme chrétiens, vous ne trouvez pas dans le mouvement
513 c le désordre établi, jusque dans le détail de la vie . Et si, comme chrétiens, vous ne trouvez pas dans le mouvement person
514 en n’est-il pas, en quelque sorte, un spécialiste de la vocation ? Des incertains, des douteurs, des craintifs, ou des sce
515 , ou des sceptiques congénitaux ne manqueront pas de me faire remarquer que certains… compromis, par exemple, sont plus pr
516 ar exemple, sont plus pratiques, lorsqu’il s’agit de politique, — et qu’on n’arrive à rien quand on vise si haut. Des mali
517 . Des malins, des parlementaires, des techniciens de toute farine dont les compétences bavardes nous ont valu la crise act
518 t dire : ça n’est pas pratique. Mais ce n’est pas d’ eux, n’est-ce pas, qu’il faut attendre beaucoup mieux que ce qu’ils on
519 t est en désordre. Nous savons ce que vaut l’aune de ce « pratique » qu’on nous propose. L’heure est venue d’essayer autre
520  pratique » qu’on nous propose. L’heure est venue d’ essayer autre chose, d’essayer au moins une fois de partir d’un fondem
521 propose. L’heure est venue d’essayer autre chose, d’ essayer au moins une fois de partir d’un fondement vrai, d’une vision
522 ’essayer autre chose, d’essayer au moins une fois de partir d’un fondement vrai, d’une vision vraie de l’homme et de l’Éta
523 utre chose, d’essayer au moins une fois de partir d’ un fondement vrai, d’une vision vraie de l’homme et de l’État, de repr
524 au moins une fois de partir d’un fondement vrai, d’ une vision vraie de l’homme et de l’État, de reprendre les choses à la
525 de partir d’un fondement vrai, d’une vision vraie de l’homme et de l’État, de reprendre les choses à la base, dans leur ré
526 fondement vrai, d’une vision vraie de l’homme et de l’État, de reprendre les choses à la base, dans leur réalité dernière
527 vrai, d’une vision vraie de l’homme et de l’État, de reprendre les choses à la base, dans leur réalité dernière, métaphysi
528 un chrétien pourrait-il m’opposer les objections d’ un praticisme à courte vue, quand notre vocation chrétienne braque nos
529 tion chrétienne braque nos regards sur le miracle d’ une justice et d’une vérité déjà descendue sur la terre ? Tous les aut
530 raque nos regards sur le miracle d’une justice et d’ une vérité déjà descendue sur la terre ? Tous les autres auraient le d
531 sur la terre ? Tous les autres auraient le droit de m’arrêter en me disant : nous préférons un mensonge applicable à votr
532 les chrétiens. Tous les autres auraient le droit de m’opposer la sagesse de ce siècle en faillite, mais nous appartenons
533 autres auraient le droit de m’opposer la sagesse de ce siècle en faillite, mais nous appartenons à ce qui juge ce siècle,
534 ns l’espérance et la protestation, dans l’annonce d’ un monde nouveau. ⁂ Je n’ai pas cherché ce soir à vous décrire imparti
535 alement la situation : il eût fallu beaucoup plus de nuances. J’ai cherché au contraire à marquer quels peuvent être nos m
536 contraire à marquer quels peuvent être nos motifs de choix, et le lieu d’une action pratique. Il se peut que je me trompe.
537 uels peuvent être nos motifs de choix, et le lieu d’ une action pratique. Il se peut que je me trompe. Il se peut que certa
538 trompe. Il se peut que certains reçoivent l’ordre d’ aller là où je crois ne pas devoir aller. Qu’ils le fassent, si c’est
539 le fassent, si c’est là leur mission, et la forme de leur témoignage. Qu’ils le fassent comme témoins du Dieu qui les envo
540 oie ! — Il se peut que certains reçoivent l’ordre d’ aller payer de leur personne, comme Kagawa dans les bas-fonds ou la pr
541 peut que certains reçoivent l’ordre d’aller payer de leur personne, comme Kagawa dans les bas-fonds ou la prison. Qu’ils l
542 prison. Qu’ils le fassent, si la foi leur permet de rendre grâces du sort qui leur est fait ! — Il se peut que d’autres e
543 dès maintenant dans leur domaine quotidien, celui de la pensée et de l’action auquel travaillent les groupes personnaliste
544 ans leur domaine quotidien, celui de la pensée et de l’action auquel travaillent les groupes personnalistes. Qu’ils le fas
545 érieure. Il y a aussi des voix qui nous appellent de l’extérieur, et qui nous montrent, ici et maintenant, des possibilité
546 ous montrent, ici et maintenant, des possibilités d’ action directe. — Tentation socialiste, tentation prophétique, tentati
547 sible, c’est qu’un chrétien n’ait pas la vocation d’ agir, de faire acte de présence à la misère du siècle, de protester co
548 ’est qu’un chrétien n’ait pas la vocation d’agir, de faire acte de présence à la misère du siècle, de protester contre ell
549 étien n’ait pas la vocation d’agir, de faire acte de présence à la misère du siècle, de protester contre elle, et d’annonc
550 de faire acte de présence à la misère du siècle, de protester contre elle, et d’annoncer sa foi dans la transformation pr
551 la misère du siècle, de protester contre elle, et d’ annoncer sa foi dans la transformation promise de toutes choses. « Ne
552 d’annoncer sa foi dans la transformation promise de toutes choses. « Ne vous conformez pas à ce siècle présent », dit sai
553 ent, mais soyez transformés par le renouvellement de l’intelligence, afin que vous discerniez quelle est la volonté de Die
554 e, afin que vous discerniez quelle est la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable et parfait. » f. Rougemont Denis de
555 bon, agréable et parfait. » f. Rougemont Denis de , « La cité », Le Semeur, Paris, avril–mai 1935, p. 387-416. g. Rouge
556 6. g. Rougemont en rend compte dans la livraison de septembre 1931 de Foi et Vie .
557 n rend compte dans la livraison de septembre 1931 de Foi et Vie .
558 pte dans la livraison de septembre 1931 de Foi et Vie .
4 1936, Le Semeur, articles (1933–1949). Notre foi, par Emil Brunner (janvier 1936)
559 courtes études, des « méditations sur le message de Jésus-Christ ». Dès l’abord, on est frappé par leur simplicité et leu
560 leur clarté, qui réussissent à mettre à la portée de tous, sans l’affaiblir ni la fausser, la « théologie » chrétienne la
561 a plus authentique. Le style est direct, l’emploi de la seconde personne est la règle ; aussi ne peut-on lire ces méditati
562 ar les réactions et les réponses qu’elles exigent de nous. Ces études se succèdent selon un plan qu’il n’est pas toujours
563 ent selon un plan qu’il n’est pas toujours facile d’ apercevoir. Les divisions générales paraissent être : Dieu — L’homme —
564 ant est leur « biblisme ». Bien que pas un verset de l’Écriture ne soit cité, on sent la pensée et la foi de l’auteur info
565 criture ne soit cité, on sent la pensée et la foi de l’auteur informées par la Bible, et dominées par elle. Pour Brunner,
566 e est une foi biblique » ; la Bible est la Parole de Dieu, et nous ne pouvons rien savoir de Dieu que par Sa révélation da
567 la Parole de Dieu, et nous ne pouvons rien savoir de Dieu que par Sa révélation dans cette Parole. Le Saint-Esprit ouvre n
568 it en nous ce que saint Paul appelle « les fruits de l’Esprit ». On sent dans ces études un constant effort de fidélité hu
569 rit ». On sent dans ces études un constant effort de fidélité humble pour ne pas trahir la Révélation de Dieu en taisant —
570 fidélité humble pour ne pas trahir la Révélation de Dieu en taisant — ou en résolvant par quelque ingénieuse synthèse — t
571 uelle qui ne nous engagerait pas ; la foi au Dieu de majesté, de sainteté et d’amour, qui s’est révélé à nous en Jésus-Chr
572 nous engagerait pas ; la foi au Dieu de majesté, de sainteté et d’amour, qui s’est révélé à nous en Jésus-Christ, exige q
573 t pas ; la foi au Dieu de majesté, de sainteté et d’ amour, qui s’est révélé à nous en Jésus-Christ, exige que nous prenion
574 sus-Christ, exige que nous prenions les exigences de Dieu vraiment au sérieux, que nous « laissions Dieu être Dieu en nous
575 nner semble vouloir nous amener à prier la prière de la foi : « Je crois, Seigneur, viens en aide à mon incrédulité. » h
576 n aide à mon incrédulité. » h. Rougemont Denis de , « [Compte rendu] Emil Brunner, Notre foi  », Le Semeur, Paris, janvi
5 1945, Le Semeur, articles (1933–1949). La responsabilité culturelle de l’Église (mars 1945)
577 La responsabilité culturelle de l’Église (mars 1945)i Il y a un accord frappant entre les principe
578 Il y a un accord frappant entre les principes de la Charte de l’Atlantique et les affirmations formulées par les grand
579 accord frappant entre les principes de la Charte de l’Atlantique et les affirmations formulées par les grandes conférence
580 iques. Mais il est non moins remarquable qu’aucun de ces documents ne fasse allusion à l’ordre culturel de demain. Et il e
581 es documents ne fasse allusion à l’ordre culturel de demain. Et il est cependant certain que si les Églises continuent à n
582 a cessation des hostilités introduira une période de la plus grande confusion. Aperçu de la situation d’après-guerre
583 une période de la plus grande confusion. Aperçu de la situation d’après-guerre La jeunesse de presque tous les pays d
584 a plus grande confusion. Aperçu de la situation d’ après-guerre La jeunesse de presque tous les pays du monde aura été
585 rçu de la situation d’après-guerre La jeunesse de presque tous les pays du monde aura été soumise à plusieurs années de
586 pays du monde aura été soumise à plusieurs années de service militaire et à une interruption plus ou moins complète de tou
587 aire et à une interruption plus ou moins complète de toute activité intellectuelle. Il nous faut donc prévoir un abaisseme
588 aut donc prévoir un abaissement général du niveau d’ instruction, une déflation de la culture classique, non seulement dans
589 nt général du niveau d’instruction, une déflation de la culture classique, non seulement dans les pays ruinés par la guerr
590 intellectuel : la propagande, la nécessité vitale de simplifier tous les problèmes, de juger selon des besoins utilitaires
591 écessité vitale de simplifier tous les problèmes, de juger selon des besoins utilitaires plutôt que selon les exigences de
592 esoins utilitaires plutôt que selon les exigences de la vérité, de penser par masses ou par majorités, de placer tout le m
593 ires plutôt que selon les exigences de la vérité, de penser par masses ou par majorités, de placer tout le mal d’un côté e
594 la vérité, de penser par masses ou par majorités, de placer tout le mal d’un côté et tout le bon de l’autre, de soupçonner
595 ar masses ou par majorités, de placer tout le mal d’ un côté et tout le bon de l’autre, de soupçonner de sabotage ceux qui
596 s, de placer tout le mal d’un côté et tout le bon de l’autre, de soupçonner de sabotage ceux qui maintiennent une attitude
597 tout le mal d’un côté et tout le bon de l’autre, de soupçonner de sabotage ceux qui maintiennent une attitude de critique
598 ’un côté et tout le bon de l’autre, de soupçonner de sabotage ceux qui maintiennent une attitude de critique exigeante ou
599 er de sabotage ceux qui maintiennent une attitude de critique exigeante ou un sens normal de la justice. En outre, la guer
600 attitude de critique exigeante ou un sens normal de la justice. En outre, la guerre a toujours pour effet de démoder les
601 ustice. En outre, la guerre a toujours pour effet de démoder les types de culture de la période d’avant-guerre, même dans
602 guerre a toujours pour effet de démoder les types de culture de la période d’avant-guerre, même dans les pays vainqueurs.
603 ujours pour effet de démoder les types de culture de la période d’avant-guerre, même dans les pays vainqueurs. Dans les pa
604 fet de démoder les types de culture de la période d’ avant-guerre, même dans les pays vainqueurs. Dans les pays conquis la
605 les pays conquis la jeunesse accusera la culture de la génération précédente, celle de ses parents d’avoir amené la catas
606 era la culture de la génération précédente, celle de ses parents d’avoir amené la catastrophe. Beaucoup des chefs, même de
607 de la génération précédente, celle de ses parents d’ avoir amené la catastrophe. Beaucoup des chefs, même de la génération
608 ir amené la catastrophe. Beaucoup des chefs, même de la génération présente, auront disparu. Il y aura une impérieuse exig
609 auront disparu. Il y aura une impérieuse exigence de chefs nouveaux, de valeurs nouvelles, d’un idéal nouveau ; un désir p
610 y aura une impérieuse exigence de chefs nouveaux, de valeurs nouvelles, d’un idéal nouveau ; un désir puissant de repartir
611 exigence de chefs nouveaux, de valeurs nouvelles, d’ un idéal nouveau ; un désir puissant de repartir à neuf et de ne pas r
612 nouvelles, d’un idéal nouveau ; un désir puissant de repartir à neuf et de ne pas retomber dans les erreurs traditionnelle
613 nouveau ; un désir puissant de repartir à neuf et de ne pas retomber dans les erreurs traditionnelles ou revenir aux disci
614 rreurs traditionnelles ou revenir aux disciplines de l’ère bourgeoise. Il se pourrait que cette exigence, surgissant d’un
615 se. Il se pourrait que cette exigence, surgissant d’ un chaos matériel et spirituel, présente à nouveau l’apparence d’un fa
616 riel et spirituel, présente à nouveau l’apparence d’ un fascisme culturel : le besoin de chefs, la violence de la guerre tr
617 au l’apparence d’un fascisme culturel : le besoin de chefs, la violence de la guerre transportée dans le domaine de l’espr
618 scisme culturel : le besoin de chefs, la violence de la guerre transportée dans le domaine de l’esprit, un goût d’aventure
619 violence de la guerre transportée dans le domaine de l’esprit, un goût d’aventure, mais aussi une extrême simplification i
620 transportée dans le domaine de l’esprit, un goût d’ aventure, mais aussi une extrême simplification intellectuelle. Nous a
621 lectuelle. Nous avons vu apparaître quelque chose d’ analogue en Europe après la Première Guerre mondiale. Ce sera, cette f
622 us puissantes et dynamiques. Il serait romantique de supposer que la guerre actuelle a détruit toutes les éternelles illus
623 ctuelle a détruit toutes les éternelles illusions de l’humanité. Nous avons des raisons de craindre, au contraire, qu’elle
624 s illusions de l’humanité. Nous avons des raisons de craindre, au contraire, qu’elles ne trouvent une nouvelle virulence s
625 qu’elles ne trouvent une nouvelle virulence sous de nouveaux noms. Les générations d’après-guerre ne seront pas nécessair
626 virulence sous de nouveaux noms. Les générations d’ après-guerre ne seront pas nécessairement plus positives ou plus cyniq
627 cun doute leur faim sera plus grande et leur soif de réponses à leurs questions, de conseils, d’idéaux catholiques — au se
628 rande et leur soif de réponses à leurs questions, de conseils, d’idéaux catholiques — au sens étymologique du mot — de sol
629 soif de réponses à leurs questions, de conseils, d’ idéaux catholiques — au sens étymologique du mot — de solutions « tota
630 déaux catholiques — au sens étymologique du mot — de solutions « totale » dans le domaine de la culture. Car l’époque bour
631 du mot — de solutions « totale » dans le domaine de la culture. Car l’époque bourgeoise a été une ère de division, d’abse
632 la culture. Car l’époque bourgeoise a été une ère de division, d’absence de parenté et de commune mesure entre idéal et pr
633 ar l’époque bourgeoise a été une ère de division, d’ absence de parenté et de commune mesure entre idéal et pratique, entre
634 e bourgeoise a été une ère de division, d’absence de parenté et de commune mesure entre idéal et pratique, entre les diver
635 été une ère de division, d’absence de parenté et de commune mesure entre idéal et pratique, entre les diverses discipline
636 idéal et pratique, entre les diverses disciplines de l’esprit, entre les diverses activités humaines et sociales. Les anné
637 verses activités humaines et sociales. Les années d’ après-guerre seront probablement caractérisées par les traits suivants
638 suivants : des lacunes intellectuelles, une soif d’ aventures spirituelles (chez les meilleurs), un besoin de direction fe
639 ures spirituelles (chez les meilleurs), un besoin de direction ferme et de réalisations expéditives d’allures totalitaires
640 z les meilleurs), un besoin de direction ferme et de réalisations expéditives d’allures totalitaires. Le devoir des Égl
641 de direction ferme et de réalisations expéditives d’ allures totalitaires. Le devoir des Églises Si les Églises chrét
642 vraiment catholique (embrassant tous les aspects de la vie), l’abîme s’élargira entre le monde religieux et la culture. C
643 ent catholique (embrassant tous les aspects de la vie ), l’abîme s’élargira entre le monde religieux et la culture. Cette de
644 : science, (scientisme), eudémonisme païen, culte de ces valeurs que l’on dit « appartenir à la vie », création de nouveau
645 lte de ces valeurs que l’on dit « appartenir à la vie  », création de nouveaux nationalismes religieux et virulents. Mais si
646 rs que l’on dit « appartenir à la vie », création de nouveaux nationalismes religieux et virulents. Mais si une Église veu
647 virulents. Mais si une Église veut être en mesure d’ intervenir dans le développement de la culture, elle doit être fondée
648 être en mesure d’intervenir dans le développement de la culture, elle doit être fondée sur une doctrine ferme, sur une thé
649 ie est vague n’a plus rien à dire dans le domaine de la culture. Une telle Église peut donner un avis sur le plan politiqu
650 ar exemple, approuver un document comme la Charte de l’Atlantique qui n’émane pas d’une théologie, ni même directement du
651 t comme la Charte de l’Atlantique qui n’émane pas d’ une théologie, ni même directement du christianisme. Elle peut se rall
652 pirée par un pur humanisme. Mais, dans le domaine de la culture, il en est tout à fait autrement. Ici une Église ne peut a
653 idéologies créées par d’autres. Sa parole n’aura de poids que si elle parle au nom de sa propre théologie, et en rattacha
654 propre théologie, et en rattachant ce qu’elle dit de la façon la plus directe à cette théologie. C’est ainsi que l’Église
655 ment philosophique du Moyen Âge, que les réformes de Luther et de Calvin combattirent avec succès la Renaissance et inspir
656 hique du Moyen Âge, que les réformes de Luther et de Calvin combattirent avec succès la Renaissance et inspirèrent un vast
657 exemple, pouvait croire aux doctrines officielles de sa confession et en même temps admirer Wagner, Whitman, ou Renoir, sa
658 avec sa foi. Car en fait la théologie avait cessé d’ être vivante, précise et exigeante, et donc source d’inspiration. Le t
659 tre vivante, précise et exigeante, et donc source d’ inspiration. Le thomisme a inspiré Dante, le calvinisme Rembrandt, le
660 lise n’a rien à donner, si elle n’a rien à exiger de la culture, cette dernière s’en trouvera appauvrie et désorientée. El
661 ouvera appauvrie et désorientée. Elle sera coupée de ses racines. Car toute la culture occidentale est née de la théologie
662 racines. Car toute la culture occidentale est née de la théologie et de la liturgie chrétienne ; soit en se soumettant au
663 la culture occidentale est née de la théologie et de la liturgie chrétienne ; soit en se soumettant au code chrétien, soit
664 e lui. (Les grandes philosophies modernes, celles de Descartes et de Hegel, sont nées d’une controverse manifestement théo
665 des philosophies modernes, celles de Descartes et de Hegel, sont nées d’une controverse manifestement théologique à ses or
666 ernes, celles de Descartes et de Hegel, sont nées d’ une controverse manifestement théologique à ses origines.) Et, en seco
667 ulte, l’Église perd ses moyens les plus efficaces d’ agir sur le siècle, de transformer ses croyances en action créatrice.
668 s moyens les plus efficaces d’agir sur le siècle, de transformer ses croyances en action créatrice. Les forces de création
669 mer ses croyances en action créatrice. Les forces de création lui échappent. Tout ce qui est créé est alors créé en dehors
670 nt frappant dans les pays protestants où le souci de rattacher tout travail de culture à une théologie stricte a entièreme
671 protestants où le souci de rattacher tout travail de culture à une théologie stricte a entièrement disparu — en raison du
672 ricte a entièrement disparu — en raison du manque de stricte théologie. L’Église romaine a mieux retenu les forces de créa
673 logie. L’Église romaine a mieux retenu les forces de création intellectuelles parce qu’elle est attentive à préserver les
674 t attentive à préserver les droits et les devoirs de la critique théologique sur tous les plans et pas seulement d’une faç
675 e théologique sur tous les plans et pas seulement d’ une façon négative et restrictive. Que peuvent alors faire les Églises
676 s faire les Églises pour collaborer à la création d’ un ordre culturel dans le chaos de demain ? Nous proposons une réponse
677 r à la création d’un ordre culturel dans le chaos de demain ? Nous proposons une réponse simple. Les Églises pourront agir
678 ontrent exigeantes au lieu de se désintéresser ou de suivre avec retard les tendances du jour. Vocation : le principe f
679 Vocation : le principe fondamental Pour passer de la théologie d’une Église à des applications sociales, culturelles, p
680 incipe fondamental Pour passer de la théologie d’ une Église à des applications sociales, culturelles, politiques ou éco
681 les, politiques ou économiques, il semblerait bon de fixer certains principes ou stades intermédiaires entre la théologie
682 onde dans le domaine culturel et social est celle de Vocation (au sens calviniste et luthérien du mot, qui est plus large
683 ile nous apprend que chaque homme est susceptible de recevoir une vocation, un appel spécial qui le distingue de son genre
684 r une vocation, un appel spécial qui le distingue de son genre et qui lui confère une dignité inaliénable dans la mesure o
685 obéit à cet appel. C’est le principe fondamental de tout ordre social que l’on peut appeler chrétien. On peut aussi accep
686 t appeler chrétien. On peut aussi accepter l’idée d’ une vocation générale ou collective, appliquée à une nation ou même à
687 pour lequel l’Église peut prier, est susceptible de recevoir une vocation. Maintenant les grandes maladies sociales et cu
688 (que ce soient les collectivismes nationalistes, de race ou de classe, ou les matérialismes biologiques, moraux ou bourge
689 ient les collectivismes nationalistes, de race ou de classe, ou les matérialismes biologiques, moraux ou bourgeois). De mê
690 ’individualisme est une déviation morbide du sens de la vocation car elle nie ses conséquences sociales et communautaires.
691 onnelle ou un régime social qui dépouille l’homme de la liberté d’obéir à sa vocation sont incompatibles avec le christian
692 régime social qui dépouille l’homme de la liberté d’ obéir à sa vocation sont incompatibles avec le christianisme. Par exem
693 ologies totalitaires nient par définition le fait de la vocation personnelle. Elles la remplacent par un ersatz : la fonct
694 eur de l’État ou du Parti, conformément au décret de l’État ou du Parti. Elles nient l’existence de toute différenciation
695 et de l’État ou du Parti. Elles nient l’existence de toute différenciation ou la qualifient de morbide, réactionnaire, ind
696 istence de toute différenciation ou la qualifient de morbide, réactionnaire, individualiste, antisociale. Elles sont, par
697 généité mécanique et rigide, qu’elle soit imposée d’ en haut (État, tyran), ou d’en bas (égalitarisme poussé à l’extrême) n
698 qu’elle soit imposée d’en haut (État, tyran), ou d’ en bas (égalitarisme poussé à l’extrême) nient la vocation personnelle
699 me) nient la vocation personnelle, ou la vocation d’ un groupe et la considèrent comme dangereuse et scandaleuse. Ces doctr
700 n même corps, beaucoup de maisons dans le Royaume de Dieu. Un ordre social ne peut être qualifié de chrétien à moins qu’il
701 me de Dieu. Un ordre social ne peut être qualifié de chrétien à moins qu’il ne soit fondé sur le respect de la vocation, e
702 rétien à moins qu’il ne soit fondé sur le respect de la vocation, et qu’il n’assure à chaque homme (et à chaque groupe ou
703 à chaque groupe ou entité collective) la liberté de réaliser cette vocation divine, unique et inaliénable. Un ordre socia
704 et sociaux). Il placera les droits et les devoirs de l’individu (c’est-à-dire de l’individu chargé d’une vocation) avant l
705 droits et les devoirs de l’individu (c’est-à-dire de l’individu chargé d’une vocation) avant les droits et les devoirs de
706 de l’individu (c’est-à-dire de l’individu chargé d’ une vocation) avant les droits et les devoirs de l’État (l’organisme d
707 é d’une vocation) avant les droits et les devoirs de l’État (l’organisme dont le devoir est d’assurer la liberté de l’indi
708 devoirs de l’État (l’organisme dont le devoir est d’ assurer la liberté de l’individu au point de vue matériel). Les con
709 organisme dont le devoir est d’assurer la liberté de l’individu au point de vue matériel). Les conséquences sociales de
710 nt de vue matériel). Les conséquences sociales de la vocation 1) Une doctrine chrétienne, centrée sur l’idée de la v
711 1) Une doctrine chrétienne, centrée sur l’idée de la vocation des individus, mettra toujours l’accent sur le devoir plu
712 voir plutôt que sur les droits. Prenons l’exemple de l’armée : les règlements militaires ne fixent pas les droits d’un cap
713 es règlements militaires ne fixent pas les droits d’ un capitaine mais seulement ses devoirs et ses fonctions. Il va sans d
714 ses fonctions. Il va sans dire que l’organisation de l’armée est telle qu’un capitaine aura toujours les moyens d’accompli
715 st telle qu’un capitaine aura toujours les moyens d’ accomplir son devoir : c’est là sa liberté, il n’en a pas d’autres. Or
716 le à une constitution abstraite fixant les droits de l’individu indépendamment des devoirs de sa charge. 2) Une doctrine c
717 s droits de l’individu indépendamment des devoirs de sa charge. 2) Une doctrine chrétienne qui prend au sérieux le fait de
718 doctrine chrétienne qui prend au sérieux le fait de la vocation divine d’un homme ou d’un organisme collectif condamnera
719 ui prend au sérieux le fait de la vocation divine d’ un homme ou d’un organisme collectif condamnera tout système qui, méca
720 rieux le fait de la vocation divine d’un homme ou d’ un organisme collectif condamnera tout système qui, mécaniquement, emp
721 ystème qui, mécaniquement, empêche la réalisation de cette vocation. Elle condamnera, par conséquent, au nom de la théolog
722 idus sont abstraitement dirigés selon les besoins de la machine et non selon leur vocation réelle. Elle condamnera le syst
723 al privé dans la mesure où le mouvement des biens de la puissance matérielle y est fonction des hasards d’opérations de Bo
724 a puissance matérielle y est fonction des hasards d’ opérations de Bourse, par exemple, et non des droits conférés par l’ex
725 atérielle y est fonction des hasards d’opérations de Bourse, par exemple, et non des droits conférés par l’exercice d’une
726 xemple, et non des droits conférés par l’exercice d’ une vocation. Elle condamnera tout système économique qui fait de l’ho
727 Elle condamnera tout système économique qui fait de l’homme le jouet des intérêts de l’État, d’un trust, de la production
728 nomique qui fait de l’homme le jouet des intérêts de l’État, d’un trust, de la production matérielle, de la volonté de pui
729 fait de l’homme le jouet des intérêts de l’État, d’ un trust, de la production matérielle, de la volonté de puissance indi
730 omme le jouet des intérêts de l’État, d’un trust, de la production matérielle, de la volonté de puissance individuelle ou
731 l’État, d’un trust, de la production matérielle, de la volonté de puissance individuelle ou collective. 3) Les Églises co
732 trust, de la production matérielle, de la volonté de puissance individuelle ou collective. 3) Les Églises combattront pour
733 llectif la liberté légale et les moyens matériels d’ accomplir sa vocation. Elles le feront au nom de leur doctrine, et ave
734 ent neutres comme le progrès, la justice sociale ( de gauche), ou l’ordre social (de droite), l’intérêt national ou la pros
735 a justice sociale (de gauche), ou l’ordre social ( de droite), l’intérêt national ou la prospérité économique. Le devoir de
736 prospérité économique. Le devoir des Églises est de repenser toutes ces catégories et de les critiquer d’un point de vue
737 Églises est de repenser toutes ces catégories et de les critiquer d’un point de vue spécifiquement chrétien. Il doit y av
738 epenser toutes ces catégories et de les critiquer d’ un point de vue spécifiquement chrétien. Il doit y avoir, par exemple,
739 ition des « quatre libertés » dans les conditions de fonctionnement d’une doctrine chrétienne de la vocation. (Être libre
740 libertés » dans les conditions de fonctionnement d’ une doctrine chrétienne de la vocation. (Être libre à l’abri de la néc
741 tions de fonctionnement d’une doctrine chrétienne de la vocation. (Être libre à l’abri de la nécessité, ne signifie pas qu
742 e chrétienne de la vocation. (Être libre à l’abri de la nécessité, ne signifie pas que l’on prend pour but la prospérité,
743 ’on demande la possibilité matérielle pour chacun de réaliser sa vocation, etc.) Alors, et alors seulement, les Églises re
744 rouveront une autorité effective. Elles cesseront de s’identifier aux yeux de l’homme de la rue à une certaine classe soci
745 les cesseront de s’identifier aux yeux de l’homme de la rue à une certaine classe sociale, à un ordre établi, ou à la réfo
746 tabli, ou à la réforme du moment. Elles cesseront d’ être traînées dans le sillage de mouvements entrepris par d’autres, av
747 . Elles cesseront d’être traînées dans le sillage de mouvements entrepris par d’autres, avec des motifs et pour des buts q
748 ngers menacent la culture moderne au point de vue d’ une éthique fondée sur la vocation : a) un faux universalisme fruit d’
749 sur la vocation : a) un faux universalisme fruit d’ une éducation sans couleur confessionnelle, philosophique ni régionale
750 nationalisme, autarchie spirituelle. La vocation d’ un homme ou d’un groupe est à la fois distinction et intégration. Ces
751 autarchie spirituelle. La vocation d’un homme ou d’ un groupe est à la fois distinction et intégration. Ces deux éléments
752 nciliés et sauvegardés avec vigilance — l’élément d’ universalisation et celui de distinction. Il est grandement souhaitabl
753 vigilance — l’élément d’universalisation et celui de distinction. Il est grandement souhaitable, par exemple, que des étab
754 souhaitable, par exemple, que des établissements d’ enseignement (collèges, universités) soient fondés sur une base confes
755 e base confessionnelle clairement établie, à côté d’ établissements laïques, neutres ou non chrétiens, et que tout l’enseig
756 ans chaque matière, y soit dominé par la doctrine de l’Église en question, comme c’est le cas dans les instituts catholiqu
757 nstituts catholiques et à l’Université calviniste de Hollande. Mais, en même temps, pouddr19490200semr sauvegarder le fact
758 ître les autres. L’attitude générale serait alors d’ approfondir et d’intégrer le plus possible chaque vocation culturelle
759 L’attitude générale serait alors d’approfondir et d’ intégrer le plus possible chaque vocation culturelle du groupe (qu’il
760 e tout en vue de l’union (fédérale ou œcuménique) de ces vocations dans un ensemble beaucoup plus large — le corps et ses
761 parer. Le deuxième problème à envisager est celui d’ une collaboration plus étroite entre l’Église et l’Intelligentzia. Dan
762 méniques ont donné l’occasion à un certain nombre de savants, historiens et écrivains de travailler pour les Églises dans
763 ertain nombre de savants, historiens et écrivains de travailler pour les Églises dans leur ensemble. Mais la plupart des c
764 écialement les protestantes) n’ont pas les moyens de mettre en contact organique les créateurs de culture et l’Église comm
765 yens de mettre en contact organique les créateurs de culture et l’Église comme telle — l’Église comme corps de doctrine et
766 re et l’Église comme telle — l’Église comme corps de doctrine et comme communauté. Sur ce plan tout reste à créer. Et quel
767 t être créé si nous voulons éviter que la culture de demain se développe selon des voies qui s’éloignent de plus en plus d
768 e selon des voies qui s’éloignent de plus en plus d’ une conception chrétienne du monde. i. Rougemont Denis de, « La re
769 ption chrétienne du monde. i. Rougemont Denis de , « La responsabilité culturelle de l’Église », Le Semeur, Paris, mars
770 ougemont Denis de, « La responsabilité culturelle de l’Église », Le Semeur, Paris, mars 1945, p. 17-25.
6 1946, Le Semeur, articles (1933–1949). Chances d’action du christianisme (juin-juillet 1946)
771 Chances d’ action du christianisme (juin-juillet 1946)j Depuis des siècles, de
772 aller à les revendiquer injustement. Les docteurs de l’Église se défendaient contre les attaques successives du scepticism
773 contre les attaques successives du scepticisme né de la science cartésienne, de l’historisme, de la philologie, puis des s
774 ives du scepticisme né de la science cartésienne, de l’historisme, de la philologie, puis des systèmes sociologiques et ph
775 me né de la science cartésienne, de l’historisme, de la philologie, puis des systèmes sociologiques et philosophiques qui
776 tidienne, innombrable, et sans cesse accrue, mais d’ une manière imperceptible, d’habitudes de pensée et de vie de moins en
777 s cesse accrue, mais d’une manière imperceptible, d’ habitudes de pensée et de vie de moins en moins conformes aux lois spi
778 ue, mais d’une manière imperceptible, d’habitudes de pensée et de vie de moins en moins conformes aux lois spirituelles :
779 e manière imperceptible, d’habitudes de pensée et de vie de moins en moins conformes aux lois spirituelles : sans le savoi
780 anière imperceptible, d’habitudes de pensée et de vie de moins en moins conformes aux lois spirituelles : sans le savoir, s
781 re imperceptible, d’habitudes de pensée et de vie de moins en moins conformes aux lois spirituelles : sans le savoir, sans
782 é doucement persécutée. Cette persécution à coups d’ épingle, de demi-sourires et d’ironies intellectuelles basées sur « le
783 persécutée. Cette persécution à coups d’épingle, de demi-sourires et d’ironies intellectuelles basées sur « les derniers
784 ersécution à coups d’épingle, de demi-sourires et d’ ironies intellectuelles basées sur « les derniers progrès de la scienc
785 intellectuelles basées sur « les derniers progrès de la science », cette tolérance même qui se manifestait à l’égard des «
786 rd des « survivances religieuses », firent autant de mal aux Églises que les persécutions romaines aux premiers temps leur
787 ons romaines aux premiers temps leur avaient fait de bien. Partout, l’on vit au cours du xviiie et surtout du xixe siècl
788 érentes confessions. On reculait sous la pression de l’incroyance, on faisait la part du feu, on cédait les positions trop
789 mence flambante qui fut toujours signe et symbole de l’Esprit. Un fils soumis de Rome, le grand Paul Claudel, pouvait écri
790 ours signe et symbole de l’Esprit. Un fils soumis de Rome, le grand Paul Claudel, pouvait écrire vers la fin de cette péri
791 le grand Paul Claudel, pouvait écrire vers la fin de cette période qu’à la question : « Si le sel perd sa saveur, avec quo
792 minoritaire des chrétiens ; qu’il les a attaqués de front au nom des principes non chrétiens (comme le nationalisme) qu’i
793 chute ont été pour toutes les Églises une épreuve de forces, un défi, une purification, une occasion de réveil. C’est un f
794 e forces, un défi, une purification, une occasion de réveil. C’est un fait que la culture laïque, a-chrétienne ou antichré
795 a démontré son impuissance réelle devant l’assaut de dictatures barbares : elle s’est reconnue impuissante à nous donner d
796 s’est reconnue impuissante à nous donner des buts de vie, des idéaux et un monde plus efficaces qμe ceux du christianisme.
797 st reconnue impuissante à nous donner des buts de vie , des idéaux et un monde plus efficaces qμe ceux du christianisme. C’e
798 ianisme. C’est un fait que « les derniers progrès de la Science » autorisent de moins en moins — et non de plus en plus, c
799 « les derniers progrès de la Science » autorisent de moins en moins — et non de plus en plus, comme au siècle passé — à me
800 a Création du monde par Dieu, sa Fin, l’existence de l’esprit, etc., paraît bien close, et pour longtemps. Et c’est un fai
801 retrouvé, depuis une ou deux décades, le courage de réaffirmer leurs positions parfois les plus extrêmes, avec une belle
802 ec une belle indépendance vis-à-vis des critiques de l’extérieur. Renaissance du thomisme et des études mystiques chez les
803 des mystiques chez les catholiques ; restauration de la dogmatique réformée grâce au mouvement initié par Karl Barth chez
804 ar Karl Barth chez les protestants ; réapparition d’ une puissante et purifiée Église orthodoxe à l’Est. Mais dire que l’ép
805 Église orthodoxe à l’Est. Mais dire que l’époque de la défensive est terminée pour elles, dans notre temps, c’est poser a
806 ormir, ou bien à passer à l’attaque. Ce lendemain d’ une guerre de Trente Ans ne ressemble guère à une victoire, il faut bi
807 n à passer à l’attaque. Ce lendemain d’une guerre de Trente Ans ne ressemble guère à une victoire, il faut bien le dire. L
808 grands que ceux qu’elles eussent été contraintes de subir en se rendant. (Dans ce « presque » est là différence entre hon
809 esque » est là différence entre honneur et honte, vie et mort.) Et que trouvent aujourd’hui les peuples devant eux ? Battus
810 Les uns s’abandonnent aux vieilleries et tentent de restaurer le nationalisme, condamné par les catastrophes récentes. Le
811 ets — les richesses par exemple — on arrangera la vie … D’autres enfin, faisant la théorie de leur faiblesse, formulent des
812 angera la vie… D’autres enfin, faisant la théorie de leur faiblesse, formulent des doctrines nihilistes. Devant cette démi
813 des doctrines nihilistes. Devant cette démission de la pensée et de la morale, l’État se voit forcé d’étendre ses pouvoir
814 ihilistes. Devant cette démission de la pensée et de la morale, l’État se voit forcé d’étendre ses pouvoirs, à coups de dé
815 e la pensée et de la morale, l’État se voit forcé d’ étendre ses pouvoirs, à coups de décrets si généraux que chaque vocati
816 tat se voit forcé d’étendre ses pouvoirs, à coups de décrets si généraux que chaque vocation personnelle va s’en trouver n
817 s ont moins que jamais à se soucier, aujourd’hui, de réfuter les arguments de l’incroyance ; elles ont, tout simplement à
818 se soucier, aujourd’hui, de réfuter les arguments de l’incroyance ; elles ont, tout simplement à donner leurs croyances, a
819 nt dans l’Église, et voyant au-dehors ses chances d’ action, et la misère du temps qui appelle, j’attends ceci : I. Que l’É
820 e, j’attends ceci : I. Que l’Église offre un type de relations humaines viables, comme elle le fit aux siècles sombres, av
821 raison du Moyen âge, qui fut son œuvre. Il s’agit de restaurer le sens de la communauté vivante, que le gigantisme de nos
822 qui fut son œuvre. Il s’agit de restaurer le sens de la communauté vivante, que le gigantisme de nos machines administrati
823 sens de la communauté vivante, que le gigantisme de nos machines administratives, le règne de l’argent, le nomadisme indu
824 antisme de nos machines administratives, le règne de l’argent, le nomadisme industriel, et les déportations en masse, ont
825 s, souvent utiles, mais qui ne sont jamais règles de vie. Je voudrais une sociologie chrétienne pour le xxe siècle, et je
826 souvent utiles, mais qui ne sont jamais règles de vie . Je voudrais une sociologie chrétienne pour le xxe siècle, et je la
827 siècle, et je la voudrais fondée sur la situation d’ un groupe de frères prenant la communion. 2. Que l’Église offre un typ
828 e la voudrais fondée sur la situation d’un groupe de frères prenant la communion. 2. Que l’Église offre un type de relatio
829 enant la communion. 2. Que l’Église offre un type de relations culturelles viables ; qu’elle ose de nouveau soutenir et gu
830 s’agit que nos théologiens adoptent une politique d’ intervention, et non de vertueuse indignation, à l’égard des écoles no
831 ens adoptent une politique d’intervention, et non de vertueuse indignation, à l’égard des écoles nouvelles, dépourvues de
832 ation, à l’égard des écoles nouvelles, dépourvues de principe d’intégration, de commune mesure, d’ambitions spirituelles,
833 gard des écoles nouvelles, dépourvues de principe d’ intégration, de commune mesure, d’ambitions spirituelles, de « dévotio
834 nouvelles, dépourvues de principe d’intégration, de commune mesure, d’ambitions spirituelles, de « dévotion » à rien d’av
835 ues de principe d’intégration, de commune mesure, d’ ambitions spirituelles, de « dévotion » à rien d’avouable… Toute la cu
836 ion, de commune mesure, d’ambitions spirituelles, de « dévotion » à rien d’avouable… Toute la culture de l’Occident — musi
837 d’ambitions spirituelles, de « dévotion » à rien d’ avouable… Toute la culture de l’Occident — musique, peinture, philosop
838 « dévotion » à rien d’avouable… Toute la culture de l’Occident — musique, peinture, philosophie, littérature — est sortie
839 echerche, pour la ramener ! 3. Que l’Église cesse de défendre la triste et inefficace moralité bourgeoise, avec laquelle t
840 nefficace moralité bourgeoise, avec laquelle trop de chrétiens confondent aujourd’hui la vertu, quand ils ne vont pas jusq
841 ui la vertu, quand ils ne vont pas jusqu’au point de l’identifier avec la « vie chrétienne », et qu’elle restaure chez les
842 vont pas jusqu’au point de l’identifier avec la «  vie chrétienne », et qu’elle restaure chez les fidèles le sens de la voca
843 e », et qu’elle restaure chez les fidèles le sens de la vocation personnelle, seul fondement d’une conduite spécifiquement
844 e sens de la vocation personnelle, seul fondement d’ une conduite spécifiquement chrétienne. « Soyez bien sages », nous dis
845 jourd’hui, hors des Églises, me paraissent avides d’ entendre. La « folie de la Croix », non la sagesse bourgeoise. Quelque
846 ises, me paraissent avides d’entendre. La « folie de la Croix », non la sagesse bourgeoise. Quelque chose qui entraîne en
847 ce qui retient en arrière et en deçà des risques de la vie. 4. Que l’Église affirme avec force, dans le domaine politique
848 i retient en arrière et en deçà des risques de la vie . 4. Que l’Église affirme avec force, dans le domaine politique, la Tr
849 orce, dans le domaine politique, la Transcendance de son chef, contre tous les absolutismes nationaux, étatiques, partisan
850 dans notre siècle : il peut offrir le modèle même d’ une union mondiale dans le respect des diversités traditionnelles. Que
851 itionnelles. Que dis-je, il peut ! Il le doit, et de toute urgence ! S’il y échoue, je ne vois aucune raison d’attendre au
852 urgence ! S’il y échoue, je ne vois aucune raison d’ attendre autre chose, pour le monde, que des tyrans, leurs guerres, et
853 e, qui résume à mes yeux les plus grandes chances d’ action du christianisme au xxe siècle, resterait une pure utopie si l
854 s et par des petits groupes ; par quelques « fous de Dieu » comme saint François d’Assise ; par des gens de peu réunis dan
855 eu » comme saint François d’Assise ; par des gens de peu réunis dans une chambre ; par des mystiques qui n’auront l’air de
856 ne chambre ; par des mystiques qui n’auront l’air de rien ; par des hommes dont on dira qu’ils exagèrent, qu’ils rêvent, q
857 r là : l’Incomparable, l’unique, celui qui a reçu de Dieu une vocation précise, et il ajoute : toute vocation est sans pré
858 la reçoit. Exemple, Abraham. j. Rougemont Denis de , « Chances d’action du christianisme », Le Semeur, Paris, juin–juille
859 mple, Abraham. j. Rougemont Denis de, « Chances d’ action du christianisme », Le Semeur, Paris, juin–juillet 1946, p. 654
7 1949, Le Semeur, articles (1933–1949). « Les protestants et l’esthétisme » (février-mars 1949)
860 e et soutient, aujourd’hui, un assez grand nombre d’ écrivains très connus ; le protestantisme, presque aucun. À Claudel, B
861 amuz, Faulkner, Hemingway, Malaparte, sont sortis de milieux protestants, dira-t-on ? Le fait est qu’ils en sont bien sort
862 tiquants. Quant aux deux meilleurs poètes anglais de l’époque, T. S. Eliot et Wystan Auden, ils sont, certes, des chrétien
863 rétiens déclarés dans leur œuvre, mais l’épithète de protestant leur convient aussi peu que celle de romain, surtout au pr
864 e de protestant leur convient aussi peu que celle de romain, surtout au premier. Que nous reste-t-il ? 2° On ne peut dédui
865 mier. Que nous reste-t-il ? 2° On ne peut déduire de ce fait que le catholicisme, en général, offre à la littérature un cl
866 sme en général. Car, si l’on considère l’ensemble de nos littératures occidentales, il est impossible d’établir qu’à propo
867 nos littératures occidentales, il est impossible d’ établir qu’à proportion des populations et de leurs confessions, l’Ita
868 ible d’établir qu’à proportion des populations et de leurs confessions, l’Italie ait produit plus de grands écrivains que
869 t de leurs confessions, l’Italie ait produit plus de grands écrivains que l’Angleterre, la Pologne que le Danemark, l’Alle
870 . J’ai l’idée que le contraire aurait un peu plus de chances de se vérifier, en particulier pour l’Allemagne, la Suisse et
871 ée que le contraire aurait un peu plus de chances de se vérifier, en particulier pour l’Allemagne, la Suisse et la France.
872 ’Italie, profondément romaines, n’ont pas produit de nos jours de grands écrivains catholiques, et, même, plusieurs de leu
873 ondément romaines, n’ont pas produit de nos jours de grands écrivains catholiques, et, même, plusieurs de leurs auteurs le
874 grands écrivains catholiques, et, même, plusieurs de leurs auteurs les plus connus disent préférer le protestantisme au ca
875 quatre siècles, il reste qu’aujourd’hui beaucoup d’ auteurs se proclament catholiques ou athées, créent leur œuvre en tant
876 nos auteurs protestants ne le sont plus guère que de naissance et non par choix. Quelles sont les causes de ce phénomène p
877 issance et non par choix. Quelles sont les causes de ce phénomène particulier au xxe siècle ? Je crois qu’il convient de
878 ticulier au xxe siècle ? Je crois qu’il convient de les chercher dans un récent passé théologique. Il était de mise, au s
879 ercher dans un récent passé théologique. Il était de mise, au siècle dernier, chez les protestants, de déclarer — comme Gi
880 de mise, au siècle dernier, chez les protestants, de déclarer — comme Gide le fait encore — qu’orthodoxie et protestantism
881 par un renversement presque complet des positions de la Réforme. Or il est clair que le libre examen, conduit dans un clim
882 ns un climat rationaliste, n’est pas une attitude de créateur. L’art suppose une orthodoxie, un parti pris, un fanatisme,
883 la masque à la fois, et, en tout cas, un ensemble de règles, soit héritées, soit inventées : une rhétorique. La théologie
884 ’orthodoxie en soi. C’était tarir une des sources de l’art. Certes, on a vu de « mauvaises » théologies donner naissance à
885 t tarir une des sources de l’art. Certes, on a vu de « mauvaises » théologies donner naissance à un grand art (le puritani
886 à Milton, les doctrines jésuites au baroque), et de « bonnes » théologies condamner l’art (judaïsme biblique, jansénisme)
887 logie qui détruit systématiquement la notion même d’ orthodoxie, qui renonce à toute prétention (fondée ou non) à la rigueu
888 ce qu’un artiste attend (souvent inconsciemment) de son Église : les repères, les obstacles, les interdictions, les certi
889 hèmes traditionnels à renouveler, tout ce système de gênes où l’élan créateur prend son appui. Voilà sans doute pourquoi l
890 ères générations du xxe siècle n’ont pas produit d’ écrivains protestants au sens où Claudel est un écrivain catholique, E
891 otestante sur la littérature moderne, c’est celle de Kierkegaard. (Ibsen, Unamuno, Rilke, Kafka, Kassner, Auden, un très g
892 ilke, Kafka, Kassner, Auden, un très grand nombre de poètes, de romanciers, d’essayistes des jeunes générations, en Europe
893 , Kassner, Auden, un très grand nombre de poètes, de romanciers, d’essayistes des jeunes générations, en Europe et dans le
894 n, un très grand nombre de poètes, de romanciers, d’ essayistes des jeunes générations, en Europe et dans les deux Amérique
895 es, s’en sont déclarés tributaires.) Or la pensée de Kierkegaard, qui représente l’extrémisme protestant dans sa pureté, d
896 , dépasse notoirement l’antinomie du moralisme et de l’esthétique : ce dépassement constitue même l’essence de son œuvre.
897 hétique : ce dépassement constitue même l’essence de son œuvre. N’est-ce point de cet exemple pur qu’il conviendrait de pa
898 titue même l’essence de son œuvre. N’est-ce point de cet exemple pur qu’il conviendrait de partir pour poser le problème q
899 st-ce point de cet exemple pur qu’il conviendrait de partir pour poser le problème qui vous occupe dans ses termes les plu
900 s termes les plus actuels ? k. Rougemont Denis de , « [Réponse à une enquête] Les protestants et l’esthétisme », Le Seme
901 ris, février–mars 1949, p. 342-344. l. Il s’agit d’ une réponse à une enquête introduite par la lettre suivante d’André Du
902 e à une enquête introduite par la lettre suivante d’ André Dumas, datée du 16 novembre 1948 : « Chers amis… 1) S’il est exa
903 lus général, que diriez-vous à un étudiant en mal de poésie, de roman, de peinture ou de musique ? Je veux dire, non pas l
904 , que diriez-vous à un étudiant en mal de poésie, de roman, de peinture ou de musique ? Je veux dire, non pas la question
905 ez-vous à un étudiant en mal de poésie, de roman, de peinture ou de musique ? Je veux dire, non pas la question banale, do
906 udiant en mal de poésie, de roman, de peinture ou de musique ? Je veux dire, non pas la question banale, doit-il ou non éc
907 ’esthétique peut-elle et doit-elle amener dans sa vie  ? Vous voyez notre thème central, assez précis, et notre but : conver
908 t : converser avec les étudiants qui s’inquiètent de la beauté dans l’existence actuelle… »