1 1933, Le Semeur, articles (1933–1949). Humanisme et christianisme (mars 1933)
1 sein forcées, et provoquer vos objections, plutôt qu’ une adhésion muette à des constatations prudemment mesurées. Et d’abor
2 un de nous, une question qui se pose dans la vie, que vous vous posiez avant de venir ici, et à laquelle, réellement, vous
3 tiques de notre temps, c’est sans doute le besoin qu’ il a de mettre en question les questions elles-mêmes. Nous nous refuso
4 , sur des oppositions qui n’existent, en réalité, que dans la mesure où l’on est décidé à refuser tous les conflits concret
5 fuser tous les conflits concrets et les décisions qu’ ils comportent. Nous refusons toute problématique dans laquelle nous c
6 ut. Certains humanistes le nieront. Ils me diront que , là où le chrétien parle de salut, eux se bornent à revendiquer le bo
7 s hommes, la justice. Faut-il voir là autre chose qu’ une question de mots ? Dans l’un et l’autre cas, il s’agit bel et bien
8 s’opposent-elles si radicalement ? C’est en ceci que , pour les uns, le salut est transcendant à l’humanité, pour les autre
9 nt : Comment l’homme s’aimerait-il lui-même mieux que Dieu, son créateur, ne l’aime ? Car Dieu seul connaît l’homme dans so
10 oi consiste le péché « originel » — il en résulte qu’ il ne peut plus se connaître entièrement lui-même. Il ne peut plus con
11 au monde, ni pour quoi ; il se demande parfois ce qu’ il a bien pu venir y faire ; il se demande à quoi rime cette horrible
12 , comme une effroyable tragi-comédie. Au fond, ce que l’homme ignore, ce sont les choses les plus importantes du monde : l’
13 3. Humanisme contre christianisme, n’est-ce donc qu’ un conflit d’amour, assez touchant ? Est-ce à celui qui soignera le mi
14  ? Est-ce à celui qui soignera le mieux cet homme que l’on s’accorde à tenir pour malade actuellement ? Aux yeux de certain
15 e d’accepter, dans toute sa violence, la question que lui pose sans cesse la crise perpétuelle du monde. Et l’antagonisme
16 , comme si la vie était le bien absolu. C’est ici que nous entrons dans l’ordre de l’éthique quotidienne. L’humaniste va ch
17 umaine qui lui permettra d’assurer ce bien absolu qu’ est sa vie. Le chrétien va chercher à obéir aux ordres de sa foi, fût-
18 ances. Car l’humanisme n’est, aux yeux de la foi, qu’ une vaste entreprise d’assurance-vie. L’humaniste pourra répondre qu’à
19 rise d’assurance-vie. L’humaniste pourra répondre qu’ à ses yeux, le christianisme n’est qu’une assurance-paradis. Mais le r
20 ra répondre qu’à ses yeux, le christianisme n’est qu’ une assurance-paradis. Mais le reproche est aussi misérable qu’injurie
21 nce-paradis. Mais le reproche est aussi misérable qu’ injurieux, si l’on songe que ce « paradis » doit être payé ici-bas du
22 e est aussi misérable qu’injurieux, si l’on songe que ce « paradis » doit être payé ici-bas du mépris des garanties humaine
23 nce des chrétiens eux-mêmes. Ce n’est pas à dire que l’humanisme n’ait pas ses doctrines, et même une expression politique
24 Fernandez2 et Guéhenno. Si intéressants et précis que soit l’un dans le détail de sa dialectique critique, et si généreux q
25 détail de sa dialectique critique, et si généreux que se veuille le second dans ses attaques contre un christianisme confon
26 s avec une certaine « culture », il ne semble pas que ces deux auteurs aient eu le courage d’aller jusqu’aux dernières cons
27 e seul a poussé jusqu’aux réalisations effectives que semble devoir commander une foi véritable en l’humain. Le communisme
28 éjà la plus formidable entreprise d’assurance-vie que l’humanité ait jamais conçue. C’est à ce titre que le « marxisme-léni
29 ue l’humanité ait jamais conçue. C’est à ce titre que le « marxisme-léninisme » peut être opposé utilement au christianisme
30 ent asservie. Cet homme sera-t-il encore humain ? Que fera-t-il, une fois son triomphe assuré par sa victoire sur les diffi
31 uve sa joie et sa souffrance — peu importe le nom qu’ il leur donne ; — il y trouve sa raison de vivre, c’est-à-dire de lutt
2 1934, Le Semeur, articles (1933–1949). Sur la méthode de M. Goguel (novembre 1934)
32 large public. On se souvient de l’ouvrage décisif que M. Goguel publia contre les thèses de M. Couchoud3. Plus récemment, i
33 et les conclusions vivement discutées. L’ouvrage qu’ il nous donne aujourd’hui est la suite de cette Vie de Jésus, et les q
34 la suite de cette Vie de Jésus, et les questions qu’ il pose n’apparaissent pas moins passionnantes. Quelle fut la genèse p
35 croyance à la résurrection de Jésus ? C’est ainsi que M. Goguel définit l’objet de sa recherche, en insistant sur le fait q
36 l’objet de sa recherche, en insistant sur le fait que la description qu’il va donner ne saurait être prise pour une explica
37 rche, en insistant sur le fait que la description qu’ il va donner ne saurait être prise pour une explication. Je crains bie
38 n peu trop ambitieuse. Car l’hypothèse de travail que M. Goguel adopte au départ revêt bel et bien la forme d’une explicati
39 on de cause à effet. On pense couramment, dit-il, que la foi chrétienne est née parce que le tombeau de Jésus fut trouvé vi
40 eau de Jésus fut trouvé vide. Mais il se pourrait qu’ au contraire, on ait cru le tombeau vide à cause de la foi qu’on avait
41 ire, on ait cru le tombeau vide à cause de la foi qu’ on avait en la vie céleste de Jésus. L’Histoire est-elle cause ou effe
42 : « Jésus est vivant au ciel, et la preuve, c’est que sa tombe s’est trouvée vide ». Et l’on a spontanément imaginé les con
43 osage et la valeur sont très variables. Il semble qu’ un de ses principes soit l’élimination de tout ce qui, dans le texte b
44 Goguel récuse beaucoup de passages pour la raison qu’ ils s’expliquent trop bien. En somme, il adopte à peu près l’attitude
45 mettent alors de réfuter M. Couchoud. Dirons-nous que cette méfiance méthodique suffit à convaincre le lecteur qu’il s’agit
46 éfiance méthodique suffit à convaincre le lecteur qu’ il s’agit bien ici d’une science ? Il y a deux raisons d’en douter. La
47 ances » qui nous paraissent souvent bien pauvres. Qu’ est-ce que la vraisemblance, en psychologie, sinon le triomphe du conv
48 i nous paraissent souvent bien pauvres. Qu’est-ce que la vraisemblance, en psychologie, sinon le triomphe du conventionnel 
49 le texte biblique intégral, on est frappé de voir que le récit se trouve, dans tous les cas, affadi et banalisé. Si l’on vo
50 uait les critères dont il use envers l’Évangile. ( Qu’ on se rappelle la plaisanterie fameuse parmi les étudiants, qui consis
51 e de l’école illustrée par M. Goguel. Il répondra que c’est au bénéfice du vrai. Mais il faudrait alors déclarer ses critèr
52 arer ses critères. La vérité psychologique, telle que la conçoivent les historiens, me paraît particulièrement improbable.
53 urs contradictions ? N’étaient-ils pas, bien plus que nous, capables de voir dans les contradictions mêmes d’un récit, la m
54 au hasard, l’exemple de Marc, chapitre 16. De ce que l’ange qui apparaît au tombeau vide rassure les femmes, au verset 6,
55 antées, au verset 8, M. Goguel déduit incontinent que le premier de ces versets a été ajouté après coup. Il le retranche do
56 -il, « le récit est bien homogène ». Certes. Mais qu’ on imagine un groupe de femmes qui pénètrent dans un tombeau, qui le t
57 ui le trouvent vide, qui voient un ange, et voici que cet ange leur parle ! Les réactions de ces femmes n’auront probableme
58 en d’homogène et seront même plus contradictoires qu’ aucun récit ne peut le faire sentir. Ces réserves faites sur la méthod
59 tir. Ces réserves faites sur la méthode, il reste que les conclusions négatives de M. Goguel sont loin d’être aussi ruineus
60 guel sont loin d’être aussi ruineuses pour la foi que beaucoup de croyants ne le craignent. Pour deux raisons. La première,
61 ne le craignent. Pour deux raisons. La première, qu’ il indique lui-même, c’est que, du point de vue de la foi vivante, les
62 isons. La première, qu’il indique lui-même, c’est que , du point de vue de la foi vivante, les postulats critiques de l’aute
63 x Dominicé à propos de Calvine. La seconde, c’est que M. Goguel, loin d’attaquer les dogmes, ne démolit que les preuves mat
64 M. Goguel, loin d’attaquer les dogmes, ne démolit que les preuves matérielles dont l’esprit humain voudrait toujours les fa
65 ujours les faire dépendre. Il nous rappelle ainsi que la foi véritable est celle qui croit sans avoir vu. Sa position nous
66 ativité des preuves historiques. En nous montrant qu’ elles peuvent être contestées, pour la plupart, il nous délivre d’une
67 r M. Maurice Goguel, la foi a déformé l’Histoire. Que l’on réforme cette histoire, cela ne saurait être au détriment de la
68 e se trahit elle-même quand elle s’y essaie. Dire que « Christ est ressuscité », c’est énoncer une vérité qu’aucune preuve
69 Christ est ressuscité », c’est énoncer une vérité qu’ aucune preuve humaine ne peut réellement appuyer ; car l’œuvre de la c
70 e rend visible. Et ce n’est point parmi les morts qu’ il nous faut chercher le Vivant (Luc 24 : 5). Faire l’économie des fau
71 stification de la critique historique. C’est dire qu’ elle triomphe en général au terme des basses époques théologiques. 3
72 Librairie Ernest Leroux. e. Voir le compte rendu que Rougemont fait de L’Humanité de Jésus d’après Calvin de Max Dominicé.
3 1935, Le Semeur, articles (1933–1949). La cité (avril-mai 1935)
73 te ville, où tout portait les marques des pensées qu’ agitait cet homme ; cette ville habitée et gouvernée par des chrétiens
74 ndaient, où il était normal, salutaire et logique que les choses s’ordonnent à l’homme, et que l’homme s’ordonne à son Dieu
75 logique que les choses s’ordonnent à l’homme, et que l’homme s’ordonne à son Dieu. Tel était donc mon rêve, mon imaginatio
76 m étrange du Kremlin-Bicêtre… Et je pus constater que les données du problème avaient un peu changé, — si vous me permettez
77 de la foi. Je n’étonnerai personne si je constate que dans l’humanité contemporaine, le chrétien n’est plus le type normal.
78 squ’à respecter ses vertus, à condition toutefois qu’ elles se confondent avec celles de la bourgeoisie. Et maintenant nous
79 question ? N’est-il pas évident, à première vue, que le chrétien ne peut plus rien, que personne ne l’écoute plus, qu’on l
80 première vue, que le chrétien ne peut plus rien, que personne ne l’écoute plus, qu’on le laisse parler dans ses temples ju
81 ne peut plus rien, que personne ne l’écoute plus, qu’ on le laisse parler dans ses temples justement parce qu’on ne le crain
82 secret qui lui permettrait de faire plus ou mieux que les autres ? A-t-il des lumières spéciales sur les moyens de résoudre
83 ion objective du monde nous obligerait à conclure qu’ en effet, les conditions sont devenues telles que l’action du chrétien
84 qu’en effet, les conditions sont devenues telles que l’action du chrétien, comme chrétien, ne vaut guère la peine qu’on en
85 chrétien, comme chrétien, ne vaut guère la peine qu’ on en parle. J’irai même plus loin : l’action d’un intellectuel laïque
86 raît tout à fait dérisoire dans la « cité » telle qu’ elle est devenue. Ni les congrégations économiques, ni les forces irra
87 aspérés, n’ont cure de nos avis, de nos révoltes. Que nous soyons chrétiens ou non, nous autres pauvres intellectuels, il n
88  ! Quant à moi, pendant que je réfléchissais à ce que je devais vous dire ce soir, j’ai éprouvé plus que jamais le sentimen
89 ue je devais vous dire ce soir, j’ai éprouvé plus que jamais le sentiment d’une grande absurdité. Sommes-nous bien des Davi
90 question ouverte. S’il est un fait patent, c’est que nous ne pouvons pas grand-chose… Mais il existe un autre fait que je
91 ns pas grand-chose… Mais il existe un autre fait que je poserai en face de cette constatation si pessimiste : voici ce fai
92 voici ce fait : Dieu peut tout ! Et c’est à Dieu que nous disons dans toutes les églises chrétiennes : « Que Ton règne vie
93 us disons dans toutes les églises chrétiennes : «  Que Ton règne vienne ! » Or, une telle prière nous charge d’une responsab
94 ne raison ne prévaudra jamais. Elle est un ordre, que nous avons reçu, et que nous n’avons pas le droit ni le pouvoir de di
95 amais. Elle est un ordre, que nous avons reçu, et que nous n’avons pas le droit ni le pouvoir de discuter. Elle nous adress
96 rer dans la tourmente de la cité. Nous prions : «  Que Ton règne vienne ! » et si nous ne faisons pas l’impossible — justeme
97 r hâter la venue de ce règne, nous ne sommes plus que des menteurs, et notre prière nous condamne. Le chrétien est cet homm
98 e chrétien est cet homme qui, ayant mesuré, mieux que personne peut-être, la vanité de toute action, agit tout de même, non
99 et prochain, mais parce qu’il a reçu un ordre, et que cet ordre vient de Dieu. « Ne vous conformez pas à ce siècle présent,
100 vivants et présents, et si vous n’emportiez d’ici que le seul souvenir de ces mots, je penserais avoir atteint mon but. Ne
101 re vocation. La forme de ce monde : vous savez ce qu’ elle est, et vous savez qu’elle est mauvaise. La forme de ce monde, ce
102 monde : vous savez ce qu’elle est, et vous savez qu’ elle est mauvaise. La forme de ce monde, ce sont toutes les puissances
103 forme de ce monde, ce sont toutes les puissances que j’énumérais tout à l’heure et qui dominent la cité. C’est le désordre
104 ie des dictatures. C’est contre la forme du monde que protestent les socialistes, et avec eux des masses grandissantes de b
105 hrétien, ce sera bien davantage : ce sera tout ce que résume le seul mot de péché — tout ce qui s’oppose à la venue du règn
106 ut ce qui s’oppose à la venue du règne de justice qu’ il appelle. « Nous n’appartenons pas à la forme du monde. » — Est-ce à
107 tenons pas à la forme du monde. » — Est-ce à dire que notre foi nous en libère matériellement et moralement ? Est-ce à dire
108 bère matériellement et moralement ? Est-ce à dire qu’ en tant que chrétiens nous échappons aux lois communes ? Non pas ! Et
109 té à la justice. Mais alors, cette forme du monde que le chrétien découvre pire encore que ne le pensaient les socialistes
110 rme du monde que le chrétien découvre pire encore que ne le pensaient les socialistes par exemple, elle appelle une transfo
111 le, elle appelle une transformation plus radicale que tout ce que nous pouvions imaginer et souhaiter. Et c’est à cette tra
112 elle une transformation plus radicale que tout ce que nous pouvions imaginer et souhaiter. Et c’est à cette transformation
113 ner et souhaiter. Et c’est à cette transformation que nous appartenons de droit, dès l’instant où nous l’annonçons. Mais qu
114 de droit, dès l’instant où nous l’annonçons. Mais qu’ est-ce que cette transformation ? Et de quel droit pouvons-nous l’anno
115 dès l’instant où nous l’annonçons. Mais qu’est-ce que cette transformation ? Et de quel droit pouvons-nous l’annoncer ? Est
116 up d’entre nous y travaillent. Il ne sera pas dit que l’homme chrétien est moins humain que l’homme non chrétien. Il ne ser
117 era pas dit que l’homme chrétien est moins humain que l’homme non chrétien. Il ne sera pas dit que le croyant, parce qu’il
118 main que l’homme non chrétien. Il ne sera pas dit que le croyant, parce qu’il refuse toute solidarité avec la forme du mond
119 , ce n’est pas en vertu des seuls désirs humains, qu’ il a certainement lui aussi, mais qu’il n’aurait aucun droit de prêche
120 irs humains, qu’il a certainement lui aussi, mais qu’ il n’aurait aucun droit de prêcher. S’il annonce, s’il prêche cette tr
121 as comme un désir mais comme une certitude, c’est qu’ elle a déjà été faite ! Ce que nous annonçons au monde, c’est la prome
122 ne certitude, c’est qu’elle a déjà été faite ! Ce que nous annonçons au monde, c’est la promesse de celui qui a dit : « Pre
123 ccent sur ce mot-là, afin que vous ne pensiez pas qu’ il ne s’agit ici que de pathos sentimental. Action, et non pas sentime
124 afin que vous ne pensiez pas qu’il ne s’agit ici que de pathos sentimental. Action, et non pas sentiment, ni piété, ni ext
125 royons à cette justice, nous ne pouvons autrement que de courir vers elle ! Nous ne pouvons autrement que d’espérer de tout
126 e de courir vers elle ! Nous ne pouvons autrement que d’espérer de toutes nos forces son retour ! Nous protestons contre ce
127 e au nom d’une justice triomphante, et c’est elle que nous annonçons : ainsi donc, ces deux temps de notre vocation révèlen
128 dans l’élan de notre action de grâce, prisonniers que nous sommes de la forme terrestre, nous prêchons une victoire acquise
129 le retour promis de cette justice ! ⁂ Il se peut que certains d’entre vous trouvent ces préliminaires terriblement théolog
130 éliminaires terriblement théologiques. Il se peut que ma définition de la vocation du chrétien vous ait paru, dès le princi
131 là bien loin, pensez-vous, des problèmes concrets que pose la cité. Encore un qui s’évade ! Encore un qui décolle et va pla
132 olle et va planer au-dessus des nuages… Peut-être qu’ un ou deux, ou beaucoup d’entre vous, sont en train de penser cela. Av
133 eut-être, cette objection informulée. La question que je viens d’esquisser à grands traits, c’est celle des fins dernières
134 de l’action du chrétien. C’est la triple question que le peintre Gauguin avait choisie pour titre de son fameux triptyque :
135 tion très précaire du chrétien dans la cité telle qu’ elle est devenue. À la question : D’où venons-nous ? j’ai répondu en r
136 on : D’où venons-nous ? j’ai répondu en rappelant que l’origine vivante de notre action, c’est l’incarnation de la justice
137 tions, avant d’y avoir répondu ? Oh, je sais bien que le monde d’aujourd’hui retentit chaque jour d’appels, d’appels à la l
138 ectifs imprécis, ou au contraire tellement précis qu’ on ne veut plus rien voir au-delà. Trop de chefs nous crient : en avan
139 nt : en avant ! sans avoir osé regarder plus loin que le bout des semelles de leurs bottes. Leur en avant ne sait pas où il
140 n avant ne sait pas où il va ! N’est-ce pas ainsi que courent les fuyards ? Comment ne voient-ils pas que chacun de leurs g
141 e courent les fuyards ? Comment ne voient-ils pas que chacun de leurs gestes pose la question des fins dernières de l’homme
142 question des fins dernières de l’homme, et cela, qu’ ils le veuillent ou non ? Et s’ils le voient, comment peuvent-ils enco
143 pas ces questions, n’est-ce pas alors, justement, qu’ il s’évade ? Qu’il sort de sa réalité ? Qu’il doute de la justice de D
144 s, n’est-ce pas alors, justement, qu’il s’évade ? Qu’ il sort de sa réalité ? Qu’il doute de la justice de Dieu ? Et qu’il t
145 ement, qu’il s’évade ? Qu’il sort de sa réalité ? Qu’ il doute de la justice de Dieu ? Et qu’il trahit sa vocation première 
146 réalité ? Qu’il doute de la justice de Dieu ? Et qu’ il trahit sa vocation première ? Je pense que beaucoup d’entre vous on
147 ? Et qu’il trahit sa vocation première ? Je pense que beaucoup d’entre vous ont, dès longtemps, résolu ces questions, dans
148 , dans la mesure où cela se peut. Mais il fallait qu’ elles fussent posées, toutes ces questions, et il faut qu’elles demeur
149 fussent posées, toutes ces questions, et il faut qu’ elles demeurent posées comme un grand signe d’interrogation au-dessus
150 me un grand signe d’interrogation au-dessus de ce que j’ai à vous dire maintenant. Vocation du chrétien dans la cité : nous
151 ssaire, partant de cette vocation, d’aboutir à ce que j’appellerai une politique chrétienne, un parti des chrétiens ? Telle
152 re question, est-il possible alors, ou désirable, qu’ un chrétien entre dans l’un ou l’autre des partis existants, et fasse
153 tique chrétienne, permettez-moi d’être aussi bref que catégorique. Si nous considérons l’histoire, si nous écoutons ses leç
154 stoire, si nous écoutons ses leçons, il me paraît qu’ aucun doute n’est permis. De Constantin, premier empereur chrétien com
155 chrétienne qui réussit n’a plus rien de chrétien que le prétexte. Les Églises se livrent au jugement du monde, dès lors qu
156 ociale adoptée par opportunisme ? À supposer même qu’ une église parvienne à construire une doctrine, sociale, morale, écono
157 sions, sans habiletés politiciennes, — à supposer que cela soit possible, que de questions demeurent menaçantes ! Voici l’É
158 liticiennes, — à supposer que cela soit possible, que de questions demeurent menaçantes ! Voici l’Église liée bon gré mal g
159 . Je ne crois pas plus à une politique chrétienne que je ne crois à une morale chrétienne codifiée, rationalisée, dispensan
160 s unique, et parfois scandaleuse. Je ne crois pas que les chrétiens possèdent, du seul fait de leur foi, des lumières spéci
161 s lumières spéciales sur les problèmes techniques que pose la vie de la cité moderne. Je ne crois pas qu’il soit souhaitabl
162 e pose la vie de la cité moderne. Je ne crois pas qu’ il soit souhaitable que se forme un parti chrétien, opposé aux autres
163 é moderne. Je ne crois pas qu’il soit souhaitable que se forme un parti chrétien, opposé aux autres partis. Je crois que le
164 arti chrétien, opposé aux autres partis. Je crois que les églises ne peuvent accomplir tout leur devoir, toute leur mission
165 out leur devoir, toute leur mission dans la cité, que d’une seule et unique manière, et c’est en devenant et en restant de
166 chrétiens trop bien intentionnés, il faut avouer que la question reste entière : que devons-nous faire, comme chrétiens, d
167 s, il faut avouer que la question reste entière : que devons-nous faire, comme chrétiens, dans la cité ? Si l’Église n’est
168 ’Église n’est pas un parti, comment et où faut-il que nous prenions parti ? Où allons-nous nous engager ? Car vocation sign
169 que du chrétien, beaucoup seront tentés de penser que cela conduit au socialisme. Pour ma part, je confesse volontiers qu’a
170 socialisme. Pour ma part, je confesse volontiers qu’ aucun parti ne m’attire davantage, et qu’aucun ne saurait m’apparaître
171 lontiers qu’aucun parti ne m’attire davantage, et qu’ aucun ne saurait m’apparaître, à première vue, plus conforme à notre e
172 forme à notre espérance de justice. Vous dirai-je que c’est précisément à cause de cette similitude d’espérances, à cause d
173 pparente, à cause de cette tentation très réelle, que je suis amené à me méfier, ou tout au moins à m’approcher avec une pr
174 procher avec une prudence critique extrême, de ce que l’on nomme l’idéal socialiste ? Beaucoup de braves gens condamnent ce
175 condamnent cet idéal en bloc, à cause des erreurs qu’ il comporte, disent-ils, mais aussi je suppose, à cause de certaines v
176 pose, à cause de certaines vérités assez gênantes qu’ il représente. Il existe un proverbe anglais qui me paraît trouver ici
177 éfense des humbles : si nous ne faisons pas mieux que lui à cet égard, gardons-nous de l’attaquer ! Le socialisme proteste
178 la société : si nous ne protestons pas plus fort que lui, si nous ne croyons pas mieux que lui à la justice, gardons-nous
179 s plus fort que lui, si nous ne croyons pas mieux que lui à la justice, gardons-nous de le condamner ! C’est lui qui fait,
180 amner ! C’est lui qui fait, dans l’incroyance, ce que nous aurions dû faire dans la foi. — Mais si l’on refuse d’attaquer l
181 ra-t-il accepter aussitôt le fameux trait d’union qu’ on nous propose, entre socialiste et chrétien ? Prenons bien garde ici
182 pas alors de déclarer ouvertement aux socialistes qu’ entre leur but et notre but, entre nos motifs et les leurs, il y a tou
183 lisme, mais dans sa fausse spiritualité ; dans ce qu’ il a de meilleur, non dans ce qu’il a de pire ; dans la tentation qu’i
184 ualité ; dans ce qu’il a de meilleur, non dans ce qu’ il a de pire ; dans la tentation qu’il nous offre d’un idéal humanitai
185 , non dans ce qu’il a de pire ; dans la tentation qu’ il nous offre d’un idéal humanitaire en lieu et place d’une foi. Si no
186 tiens socialistes. Et ils savent sans doute mieux que nous ce que signifie pour eux le compromis entre leurs motifs de croy
187 istes. Et ils savent sans doute mieux que nous ce que signifie pour eux le compromis entre leurs motifs de croyants et les
188 is n’est possible, comme un douloureux pis-aller, que s’il est par ailleurs dénoncé, ouvertement, et au nom de la foi. J’aj
189 marxisme, et des motifs ouvertement antichrétiens qu’ il donne à toute action dans le cadre du parti. Mais si je refuse ce p
190 les troupes d’assaut hitlériennes. Mais je crois qu’ un chrétien peut adresser une critique encore plus grave à tout parti.
191 ion. Et la réalité pratique et quotidienne montre que cette opposition est effective. L’homme des masses, le partisan, c’es
192 isions. Et dans ce sens précis, il faut bien dire que les partis sont les agents les plus actifs de la démoralisation des h
193 cité reste impérieuse ! Alors quoi ? direz-vous, que reste-t-il pratiquement ? Va-t-on nous renvoyer une fois de plus à ce
194 ous parler ce soir si je n’avais eu à vous offrir que ces négations nécessaires. Car on ne peut refuser ce qui existe qu’au
195 nécessaires. Car on ne peut refuser ce qui existe qu’ au nom d’une volonté de création. Je vous proposerai donc deux exemple
196 n chrétienne dans la cité. Et d’abord, à l’image que je vous donnais en débutant du clerc moyenâgeux dans la cité thomiste
197 ez nous ceux de la grande bourgeoisie. Mais voilà qu’ il se convertit, et c’est ici que l’aventure commence. Soudain frappé
198 isie. Mais voilà qu’il se convertit, et c’est ici que l’aventure commence. Soudain frappé par le contraste odieux entre la
199 ment dans le Japon d’avant la guerre, il comprend qu’ il lui est impossible de se dire vraiment chrétien tant qu’il n’aura p
200 est impossible de se dire vraiment chrétien tant qu’ il n’aura pas fait tout ce qui est en son pouvoir pour réduire le scan
201 à la défense des intérêts de la classe opprimée. Que faire, sinon payer de sa personne ? Kagawa n’hésite pas. Il va vivre
202 va vivre dans les bas-fonds. Avec un peu d’argent que lui donne une mission américaine — très peu d’argent — il loue une es
203 d’humanité dont les bas-fonds eux-mêmes ne savent que faire. Il faut lire l’effarante description de sa vie telle qu’il l’a
204 faut lire l’effarante description de sa vie telle qu’ il l’a racontée dans une espèce d’autobiographie romancée qu’on a trad
205 acontée dans une espèce d’autobiographie romancée qu’ on a traduite en France sous ce titre : Avant l’aube g. Voilà bien le
206 ans vergogne par tous les matamores et souteneurs qu’ il a choisis pour voisins, pour prochains ! Et son action apparemment
207 rt triomphalement escorté par une foule d’enfants qu’ il a secourus, et dès lors le mouvement est lancé, l’opinion publique
208 u nom d’une foi sans cesse proclamée. C’est ainsi qu’ on transforme le monde. Ce n’est pas au nom d’un parti que Jérémie acc
209 ansforme le monde. Ce n’est pas au nom d’un parti que Jérémie accusait publiquement son roi et l’obligeait à réparer ses cr
210 parer ses crimes ; ce n’est pas au nom d’un parti que Paul ébranle l’Empire romain, ce n’est pas au nom d’un parti que Luth
211 e l’Empire romain, ce n’est pas au nom d’un parti que Luther et Calvin déclenchent la plus grande révolution occidentale, —
212 au nom de leur seule vocation. Eux n’ont pas dit que la vocation ne suffisait pas, que c’était vague et peu pratique ! Tou
213 x n’ont pas dit que la vocation ne suffisait pas, que c’était vague et peu pratique ! Toute l’histoire du monde chrétien es
214 elle ? Je n’aurai pas le cynisme de vous répondre que ce serait là peut-être un remède tout trouvé à la crise de surproduct
215 phrase qui condense très bien la substance de ce que je voudrais vous faire comprendre maintenant. La voici : « Dans des é
216 sponsable, impuissante et antisociale. » Je crois que cette phrase exprime la plus grande vérité actuelle, c’est-à-dire la
217 monde économique et financier. Tout le monde sait que la morale des affaires est à peu près le contraire de la morale, et q
218 ires est à peu près le contraire de la morale, et que les nécessités économiques ne tiennent pas compte de nos beaux idéaux
219 ale partielle apparaissent vouées à l’échec, tant qu’ on n’aura pas reconstruit ces bases, et retrouvé la commune mesure. Do
220 ut être cherchée sérieusement nulle part ailleurs que dans la religion. L’histoire des grandes civilisations, c’est l’histo
221 de recréer une mesure et une morale communautaire que se sont assignée les groupes personnalistes, sur l’exemple desquels j
222 a personne. — L’expression paraît bien abstraite. Que faut-il entendre par là ? Qu’est-ce donc que la personne humaine ? Ex
223 aît bien abstraite. Que faut-il entendre par là ? Qu’ est-ce donc que la personne humaine ? Exactement et tout simplement, l
224 ite. Que faut-il entendre par là ? Qu’est-ce donc que la personne humaine ? Exactement et tout simplement, la personne, c’e
225 ctement et tout simplement, la personne, c’est ce que j’appelais l’exercice de la vocation. Ce qu’on nomme à Esprit ou à
226 t ce que j’appelais l’exercice de la vocation. Ce qu’ on nomme à Esprit ou à L’Ordre nouveau  : la personne, c’est cette
227 Ordre nouveau  : la personne, c’est cette réalité que tout chrétien connaît : l’homme qui a reçu une vocation et qui lui ob
228 ocation et qui lui obéit dans ses actes. Voici ce que disent les personnalistes : l’État et les institutions doivent être m
229 sa vocation personnelle. Et c’est dans cet esprit qu’ il s’agit de rebâtir l’économie et les cadres sociaux. Vous voyez que
230 âtir l’économie et les cadres sociaux. Vous voyez que nous retrouvons l’exigence spirituelle du chrétien. Mais vous voyez a
231 ce spirituelle du chrétien. Mais vous voyez aussi qu’ il s’agit là d’une révolution profonde, car rien n’est plus profond qu
232 révolution profonde, car rien n’est plus profond qu’ un changement de l’état d’esprit qui préside aux institutions. Si notr
233 r l’opinion publique, alors qu’elle n’est en fait que l’opinion des maîtres de forges ou des parlementaires exploitant la b
234 utes ces destructions ne seront rendues possibles que par un profond changement de l’état d’esprit général. Elles appellent
235 d’une telle morale, à son tour, ne sera possible, que si l’on peut déduire de cette morale un système cohérent, englobant à
236 nfin à ses adeptes un style de vie communautaire, que travaillent depuis trois ans les groupes de L’Ordre nouveau , et ceu
237 ! Et le principe de cet ordre nouveau n’est autre que celui de la vocation personnelle. Oui, le principe animateur et dynam
238 vement personnaliste, c’est cette formidable idée que tout homme a une vocation, et peut devenir une personne, et doit deve
239 ne personne, et doit devenir une personne, — idée qu’ apporta dans le monde le message de l’apôtre Paul, idée centrale de la
240 s doutes des suiveurs ; 2° vous pouvez tous, tant que vous êtes, aider le mouvement personnaliste à se développer. Lisez la
241 ouvez pas dans le mouvement personnaliste tout ce qu’ exige votre foi, eh bien, raison de plus pour l’apporter ! Le chrétien
242 ngénitaux ne manqueront pas de me faire remarquer que certains… compromis, par exemple, sont plus pratiques, lorsqu’il s’ag
243 us pratiques, lorsqu’il s’agit de politique, — et qu’ on n’arrive à rien quand on vise si haut. Des malins, des parlementair
244 pratique. Mais ce n’est pas d’eux, n’est-ce pas, qu’ il faut attendre beaucoup mieux que ce qu’ils ont fait depuis cent ans
245 n’est-ce pas, qu’il faut attendre beaucoup mieux que ce qu’ils ont fait depuis cent ans déjà. Nous sommes nés dans un mond
246 ce pas, qu’il faut attendre beaucoup mieux que ce qu’ ils ont fait depuis cent ans déjà. Nous sommes nés dans un monde où to
247 un monde où tout est en désordre. Nous savons ce que vaut l’aune de ce « pratique » qu’on nous propose. L’heure est venue
248 Nous savons ce que vaut l’aune de ce « pratique » qu’ on nous propose. L’heure est venue d’essayer autre chose, d’essayer au
249 du monde ! Si le but nous paraît trop haut, c’est que nous comptons encore trop sur nous-mêmes. Mais le chrétien ne compte
250 ompte sur Celui qui peut faire, et bien faire, ce que l’homme fait mal. Telle est sa liberté dans l’action, dans l’échec, d
251 oix, et le lieu d’une action pratique. Il se peut que je me trompe. Il se peut que certains reçoivent l’ordre d’aller là où
252 pratique. Il se peut que je me trompe. Il se peut que certains reçoivent l’ordre d’aller là où je crois ne pas devoir aller
253 ordre d’aller là où je crois ne pas devoir aller. Qu’ ils le fassent, si c’est là leur mission, et la forme de leur témoigna
254 là leur mission, et la forme de leur témoignage. Qu’ ils le fassent comme témoins du Dieu qui les envoie ! — Il se peut que
255 mme témoins du Dieu qui les envoie ! — Il se peut que certains reçoivent l’ordre d’aller payer de leur personne, comme Kaga
256 ne, comme Kagawa dans les bas-fonds ou la prison. Qu’ ils le fassent, si la foi leur permet de rendre grâces du sort qui leu
257 e grâces du sort qui leur est fait ! — Il se peut que d’autres en grand nombre comprennent que leur vocation pourrait s’exe
258 se peut que d’autres en grand nombre comprennent que leur vocation pourrait s’exercer dès maintenant dans leur domaine quo
259 on auquel travaillent les groupes personnalistes. Qu’ ils le fassent, qu’ils saisissent cette chance ; c’est encore une jeun
260 nt les groupes personnalistes. Qu’ils le fassent, qu’ ils saisissent cette chance ; c’est encore une jeune espérance, mais c
261 a donc nous appelle. Ce qui est impossible, c’est qu’ un chrétien n’ait pas la vocation d’agir, de faire acte de présence à
4 1936, Le Semeur, articles (1933–1949). Notre foi, par Emil Brunner (janvier 1936)
262 ectement engagé par les réactions et les réponses qu’ elles exigent de nous. Ces études se succèdent selon un plan qu’il n’e
263 nt de nous. Ces études se succèdent selon un plan qu’ il n’est pas toujours facile d’apercevoir. Les divisions générales par
264 e de Dieu, et nous ne pouvons rien savoir de Dieu que par Sa révélation dans cette Parole. Le Saint-Esprit ouvre nos cœurs
265 ante en nous, en sorte qu’elle produit en nous ce que saint Paul appelle « les fruits de l’Esprit ». On sent dans ces étude
266 r, qui s’est révélé à nous en Jésus-Christ, exige que nous prenions les exigences de Dieu vraiment au sérieux, que nous « l
267 enions les exigences de Dieu vraiment au sérieux, que nous « laissions Dieu être Dieu en nous ». Brunner semble vouloir nou
5 1945, Le Semeur, articles (1933–1949). La responsabilité culturelle de l’Église (mars 1945)
268 es œcuméniques. Mais il est non moins remarquable qu’ aucun de ces documents ne fasse allusion à l’ordre culturel de demain.
269 e culturel de demain. Et il est cependant certain que si les Églises continuent à négliger cette question, la cessation des
270 es, de juger selon des besoins utilitaires plutôt que selon les exigences de la vérité, de penser par masses ou par majorit
271 x disciplines de l’ère bourgeoise. Il se pourrait que cette exigence, surgissant d’un chaos matériel et spirituel, présente
272 s et dynamiques. Il serait romantique de supposer que la guerre actuelle a détruit toutes les éternelles illusions de l’hum
273 Nous avons des raisons de craindre, au contraire, qu’ elles ne trouvent une nouvelle virulence sous de nouveaux noms. Les gé
274 entisme), eudémonisme païen, culte de ces valeurs que l’on dit « appartenir à la vie », création de nouveaux nationalismes
275 es créées par d’autres. Sa parole n’aura de poids que si elle parle au nom de sa propre théologie, et en rattachant ce qu’e
276 u nom de sa propre théologie, et en rattachant ce qu’ elle dit de la façon la plus directe à cette théologie. C’est ainsi qu
277 on la plus directe à cette théologie. C’est ainsi que l’Église catholique romaine fut à la tête du mouvement philosophique
278 la tête du mouvement philosophique du Moyen Âge, que les réformes de Luther et de Calvin combattirent avec succès la Renai
279 offrait à l’instinct créateur aucune charpente et qu’ il ne fixait aucune limite qui soit en même temps un stimulant et un g
280 as seulement d’une façon négative et restrictive. Que peuvent alors faire les Églises pour collaborer à la création d’un or
281 alviniste et luthérien du mot, qui est plus large que celui dans lequel l’entend Rome). L’Évangile nous apprend que chaque
282 ns lequel l’entend Rome). L’Évangile nous apprend que chaque homme est susceptible de recevoir une vocation, un appel spéci
283 ’est le principe fondamental de tout ordre social que l’on peut appeler chrétien. On peut aussi accepter l’idée d’une vocat
284 ue commune : elles nient la vocation personnelle ( que ce soient les collectivismes nationalistes, de race ou de classe, ou
285 ociales et communautaires. La principale critique que l’on puisse adresser à ce point de vue est la suivante : une idéologi
286 nt à établir une homogénéité mécanique et rigide, qu’ elle soit imposée d’en haut (État, tyran), ou d’en bas (égalitarisme p
287 social ne peut être qualifié de chrétien à moins qu’ il ne soit fondé sur le respect de la vocation, et qu’il n’assure à ch
288 l ne soit fondé sur le respect de la vocation, et qu’ il n’assure à chaque homme (et à chaque groupe ou entité collective) l
289 rdre social chrétien sera ainsi œcuménique plutôt qu’ unitarien. Il sera fédéral plutôt que centralisé (dans les domaines cu
290 nique plutôt qu’unitarien. Il sera fédéral plutôt que centralisé (dans les domaines culturels, religieux et sociaux). Il pl
291 us, mettra toujours l’accent sur le devoir plutôt que sur les droits. Prenons l’exemple de l’armée : les règlements militai
292 ent ses devoirs et ses fonctions. Il va sans dire que l’organisation de l’armée est telle qu’un capitaine aura toujours les
293 sans dire que l’organisation de l’armée est telle qu’ un capitaine aura toujours les moyens d’accomplir son devoir : c’est l
294 esia militans ressemble à une armée beaucoup plus qu’ elle ne ressemble à une constitution abstraite fixant les droits de l’
295 e libre à l’abri de la nécessité, ne signifie pas que l’on prend pour but la prospérité, mais que l’on demande la possibili
296 e pas que l’on prend pour but la prospérité, mais que l’on demande la possibilité matérielle pour chacun de réaliser sa voc
297 tion. Il est grandement souhaitable, par exemple, que des établissements d’enseignement (collèges, universités) soient fond
298 blissements laïques, neutres ou non chrétiens, et que tout l’enseignement, dans chaque matière, y soit dominé par la doctri
299 arder le facteur universaliste, il est nécessaire que , dans les écoles confessionnelles, un enseignement suffisamment pouss
300 s soit donné : la partie œcuménique. Car ce n’est qu’ en apprenant à connaître les autres que nous en venons à nous connaîtr
301 r ce n’est qu’en apprenant à connaître les autres que nous en venons à nous connaître nous-mêmes, comme ce n’est qu’en nous
302 enons à nous connaître nous-mêmes, comme ce n’est qu’ en nous comprenant nous-mêmes que nous parvenons à connaître les autre
303 , comme ce n’est qu’en nous comprenant nous-mêmes que nous parvenons à connaître les autres. L’attitude générale serait alo
304 us possible chaque vocation culturelle du groupe ( qu’ il soit religieux ou national), le tout en vue de l’union (fédérale ou
305 elque chose doit être créé si nous voulons éviter que la culture de demain se développe selon des voies qui s’éloignent de
6 1946, Le Semeur, articles (1933–1949). Chances d’action du christianisme (juin-juillet 1946)
306 s religieuses », firent autant de mal aux Églises que les persécutions romaines aux premiers temps leur avaient fait de bie
307 trop menacées par le scepticisme. Pour ne donner que deux exemples : on vit le mouvement mystique s’éteindre au sein du ca
308 udel, pouvait écrire vers la fin de cette période qu’ à la question : « Si le sel perd sa saveur, avec quoi la lui rendra-t-
309 Églises, et qui résume toute une époque. Je pense qu’ avec la guerre, cette époque a pris fin. Et je fonde cette croyance su
310 cette croyance sur quelques faits. C’est un fait que le totalitarisme a rompu la paix fausse qui semblait établie entre le
311 ablie entre les sociétés laïques et les Églises ; qu’ il a brusquement mis à nu l’état minoritaire des chrétiens ; qu’il les
312 ement mis à nu l’état minoritaire des chrétiens ; qu’ il les a attaqués de front au nom des principes non chrétiens (comme l
313 s principes non chrétiens (comme le nationalisme) qu’ ils croyaient pouvoir tolérer ; qu’il a été abattu finalement, dans se
314 nationalisme) qu’ils croyaient pouvoir tolérer ; qu’ il a été abattu finalement, dans ses formes déclarées et spectaculaire
315 es déclarées et spectaculaires tout au moins ; et que son élévation brutale puis sa chute ont été pour toutes les Églises u
316 rification, une occasion de réveil. C’est un fait que la culture laïque, a-chrétienne ou antichrétienne, qui prétendait se
317 fficaces qμe ceux du christianisme. C’est un fait que « les derniers progrès de la Science » autorisent de moins en moins —
318 t bien close, et pour longtemps. Et c’est un fait que les trois grandes confessions chrétiennes ont retrouvé, depuis une ou
319 e et purifiée Église orthodoxe à l’Est. Mais dire que l’époque de la défensive est terminée pour elles, dans notre temps, c
320 ennes un dilemme très net : il ne leur reste plus qu’ à s’endormir, ou bien à passer à l’attaque. Ce lendemain d’une guerre
321 enace, au prix de sacrifices presque aussi grands que ceux qu’elles eussent été contraintes de subir en se rendant. (Dans c
322 prix de sacrifices presque aussi grands que ceux qu’ elles eussent été contraintes de subir en se rendant. (Dans ce « presq
323 fférence entre honneur et honte, vie et mort.) Et que trouvent aujourd’hui les peuples devant eux ? Battus et vainqueurs, é
324 par les catastrophes récentes. Les autres pensent qu’ en déplaçant quelques objets — les richesses par exemple — on arranger
325 ndre ses pouvoirs, à coups de décrets si généraux que chaque vocation personnelle va s’en trouver nécessairement lésée. En
326 ore : les Églises et leurs prédicateurs ont moins que jamais à se soucier, aujourd’hui, de réfuter les arguments de l’incro
327 misère du temps qui appelle, j’attends ceci : I. Que l’Église offre un type de relations humaines viables, comme elle le f
328 it de restaurer le sens de la communauté vivante, que le gigantisme de nos machines administratives, le règne de l’argent,
329 on d’un groupe de frères prenant la communion. 2. Que l’Église offre un type de relations culturelles viables ; qu’elle ose
330 offre un type de relations culturelles viables ; qu’ elle ose de nouveau soutenir et guider une avant-garde intellectuelle,
331 vivante, laissant celle-ci désorientée. Il s’agit que nos théologiens adoptent une politique d’intervention, et non de vert
332 ts. Hélas, elle en est bien sortie ! Il est temps que nous sortions à sa recherche, pour la ramener ! 3. Que l’Église cesse
333 ous sortions à sa recherche, pour la ramener ! 3. Que l’Église cesse de défendre la triste et inefficace moralité bourgeois
334 nt de l’identifier avec la « vie chrétienne », et qu’ elle restaure chez les fidèles le sens de la vocation personnelle, seu
335 isemblable ! »5 dit Kierkegaard. Ce sont ces voix que les meilleurs aujourd’hui, hors des Églises, me paraissent avides d’e
336 t en arrière et en deçà des risques de la vie. 4. Que l’Église affirme avec force, dans le domaine politique, la Transcenda
337 ricains, s’instaure sur notre planète, ce ne sera qu’ au nom de ce qui transcende nos attachements nationaux, politiques et
338 e dans le respect des diversités traditionnelles. Que dis-je, il peut ! Il le doit, et de toute urgence ! S’il y échoue, je
339 une raison d’attendre autre chose, pour le monde, que des tyrans, leurs guerres, et les tyrannies qui en résultent… Un mot
340 ser. Les Églises comme corps organisés ne peuvent que soutenir et encadrer l’action chrétienne. Celle-ci se fera, comme ell
341 uront l’air de rien ; par des hommes dont on dira qu’ ils exagèrent, qu’ils rêvent, qu’ils n’ont pas le sens commun, qu’ils
342 n ; par des hommes dont on dira qu’ils exagèrent, qu’ ils rêvent, qu’ils n’ont pas le sens commun, qu’ils voient trop grand…
343 mes dont on dira qu’ils exagèrent, qu’ils rêvent, qu’ ils n’ont pas le sens commun, qu’ils voient trop grand… Peut-être même
344 , qu’ils rêvent, qu’ils n’ont pas le sens commun, qu’ ils voient trop grand… Peut-être même par des petites revues comme cel
7 1949, Le Semeur, articles (1933–1949). « Les protestants et l’esthétisme » (février-mars 1949)
345 iac, Graham Greene, Evelyn Waugh, Siegrid Undset, que peuvent opposer les protestants ? Gide, Chardonne, Paulhan, Thomas Ma
346 s de milieux protestants, dira-t-on ? Le fait est qu’ ils en sont bien sortis, tandis que les autres sont entrés (ou rentrés
347 ussi peu que celle de romain, surtout au premier. Que nous reste-t-il ? 2° On ne peut déduire de ce fait que le catholicism
348 ous reste-t-il ? 2° On ne peut déduire de ce fait que le catholicisme, en général, offre à la littérature un climat plus fa
349 , offre à la littérature un climat plus favorable que le protestantisme en général. Car, si l’on considère l’ensemble de no
350 ratures occidentales, il est impossible d’établir qu’ à proportion des populations et de leurs confessions, l’Italie ait pro
351 ns, l’Italie ait produit plus de grands écrivains que l’Angleterre, la Pologne que le Danemark, l’Allemagne catholique que
352 de grands écrivains que l’Angleterre, la Pologne que le Danemark, l’Allemagne catholique que la luthérienne, ou la France
353 a Pologne que le Danemark, l’Allemagne catholique que la luthérienne, ou la France catholique que la calviniste. J’ai l’idé
354 lique que la luthérienne, ou la France catholique que la calviniste. J’ai l’idée que le contraire aurait un peu plus de cha
355 France catholique que la calviniste. J’ai l’idée que le contraire aurait un peu plus de chances de se vérifier, en particu
356 tantisme au catholicisme. 3° S’il paraît probable que le nombre des écrivains catholiques, protestants, juifs et athées cor
357 ., dans le monde, depuis quatre siècles, il reste qu’ aujourd’hui beaucoup d’auteurs se proclament catholiques ou athées, cr
358 que nos auteurs protestants ne le sont plus guère que de naissance et non par choix. Quelles sont les causes de ce phénomèn
359 e phénomène particulier au xxe siècle ? Je crois qu’ il convient de les chercher dans un récent passé théologique. Il était
360 stants, de déclarer — comme Gide le fait encore — qu’ orthodoxie et protestantisme s’excluent mutuellement. Libre examen et
361 plet des positions de la Réforme. Or il est clair que le libre examen, conduit dans un climat rationaliste, n’est pas une a
362 que passion fondamentale, injustifiable autrement que par l’œuvre, qui l’avoue et la masque à la fois, et, en tout cas, un
363 la fidélité dogmatique, détruit en même temps ce qu’ un artiste attend (souvent inconsciemment) de son Église : les repères
364 Dernière remarque : la seule influence importante qu’ ait exercée la pensée protestante sur la littérature moderne, c’est ce
365 e de son œuvre. N’est-ce point de cet exemple pur qu’ il conviendrait de partir pour poser le problème qui vous occupe dans
366 6 novembre 1948 : « Chers amis… 1) S’il est exact que les protestants sont davantage moralistes et citoyens qu’esthètes, pe
367 protestants sont davantage moralistes et citoyens qu’ esthètes, pensez-vous que ceci soit dû à une orientation théologique,
368 e moralistes et citoyens qu’esthètes, pensez-vous que ceci soit dû à une orientation théologique, à des circonstances histo
369 e domaine ? 2) Sur un plan beaucoup plus général, que diriez-vous à un étudiant en mal de poésie, de roman, de peinture ou